la naissance d'un monde (foucault)
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7/24/2019 La Naissance d'Un Monde (Foucault)
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29/02/2016 Texte n°68 « La naissance d'un monde » Michel Foucault Dits Ecrits Tome I
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Les problèmes posés par l'analyse de cette pratique sont les suivants :
‐ quels sont les différents types particuliers de pratique discursive que l'onpeut trouver à une époque donnée ?
‐ quels sont les rapports qu'on peut établir entre ces différentes pratiques ?
‐ quels rapports ont‐elles avec les pratiques non discursives, par exemplepolitiques, sociales, économiques ?
‐ quelles sont les transformations dont ces pratiques sont susceptibles ?
‐ On vous a reproché ‐ je pense à Sartre, en particulier ‐de vouloir substituerl'archéologie à l'histoire, de remplacer «le cinéma par la lanterne magique»(Sartre). Votre vision est‐elle si opposée à une pensée historique etdialectique comme celle de Sartre ? En quoi la contredit‐elle ?
‐ Je suis entièrement opposé à une certaine conception de l'histoire qui prendpour modèle une sorte de grande évolution continue et homogène, une sortede grande vie mythique.
Les historiens savent bien maintenant que la masse des documents historiquespeuvent être combinés selon des séries différentes qui n'ont ni les mêmesrepères ni le même type d'évolution. L'histoire de la civilisation matérielle(techniques agricoles, habitat, instruments domestiques, moyens detransport) ne se déroule pas de la même façon que l'histoire des institutionspolitiques ou que l'histoire des flux monétaires. Ce que Marc Bloch, Febvre etBraudel ont montré pour l'histoire tout court, on peut le montrer, je crois,pour l'histoire des idées, de la connaissance, de la pensée en général. Ainsi, ilest possible de faire l'histoire de la paralysie générale, l'histoire de la penséede Pasteur, mais on peut aussi, à un niveau qui a été assez négligé jusqu'àprésent, entreprendre l'analyse historique du discours médical au XIXe siècle
ou à l'époque moderne. Cette histoire ne sera pas celle des découvertes et deserreurs, ce ne sera pas celle des influences et des originalités, mais l'histoiredes conditions qui ont rendu possibles l'apparition, le fonctionnement et latransformation du discours médical.
Je suis aussi opposé à une forme d'histoire qui pose le changement commedonné et qui se propose comme tâche d'en découvrir.
la cause. Je crois qu'il y a pour l'historien une tâche préliminaire, plusmodeste, si vous voulez, ou plus radicale, qui consiste à poser la question : enquoi précisément a consisté le changement ? Ceci veut dire : n'y a‐t‐il pas
entre plusieurs niveaux de changements certaines modificationsimmédiatement visibles, sautant aux yeux comme des événements bienindividualisés, et certains autres, pourtant très précis, se trouvant enfouis àdes niveaux où ils apparaissent beaucoup moins ? Autrement dit, la premièretâche, c'est de distinguer des types différents d'événements. La secondetâche, c'est de définir les transformations qui se sont effectivementproduites, le système selon lequel certaines variables sont restées constantes,tandis que d'autres ont été modifiées. À la grande mythologie duchangement, de l'évolution, du perpetuum mobile, il faut substituer ladescription sérieuse des types d'événements et des systèmes detransformations, établir des séries et des séries de séries. Or qu'est‐ce qu'un
tableau, sinon une série de séries ? Évidemment, ce n'est pas du cinéma.
‐ On a souvent rapproché vos travaux des recherches de Claude Lévi‐Strausset de Jacques Lacan, amalgamées sous l'étiquette de «structuralisme», Dansquelle mesure acceptez‐vous ce rapprochement ? Y a‐t‐il une réelle
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convergence dans vos recherches ?
‐ C'est à ceux qui utilisent, pour désigner des travaux divers, cette mêmeétiquette de «structuralistes» de dire en quoi nous le sommes. Vousconnaissez la devinette : quelle différence y a‐t‐il entre Bernard Shaw etCharlie Chaplin ? Il n'y en a pas, car ils ont tous les deux une barbe, àl'exception de Chaplin, bien entendu !
‐ Dans Les Mots et les Choses, vous parlez d'une «mort de l'homme». Cela a
suscité une vive émotion et d'innombrables controverses parmi nos bonshumanistes. Qu'en pensez‐vous ?
‐ Il n'y a pas à s'émouvoir particulièrement de la fin de l'homme : elle n'estque le cas particulier, ou si vous voulez une des formes visibles d'un décèsbeaucoup plus général. Je n'entends pas par cela la mort de Dieu, mais celledu sujet, du Sujet majuscule, du sujet comme origine et fondement duSavoir, de la Liberté, du Langage et de l'Histoire.
On peut dire que toute la civilisation occidentale a été assujettie, et lesphilosophes n'ont fait qu'en établir le constat, en référant toute pensée et
toute vérité à la conscience, au Moi, au Sujet. Dans le grondement qui nousébranle aujourd'hui, il faut peut‐être reconnaître la naissance d'un monde oùl'on saura que le sujet n'est pas un, mais scindé, non pas souverain, maisdépendant, non pas origine absolue, mais fonction sans cesse modifiable.