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La lecture en réseau Séminaire Maîtrise de la langue ESEN - POITIERS Mai 2016 Catherine TAUVERON

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La lecture en réseauSéminaire Maîtrise de la langue

ESEN - POITIERS

Mai 2016

Catherine TAUVERON

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La lecture en réseau (LER)

• La LER n’apparaît pas nommément dans les programmes, mais on entrouve l’esprit.

• Introduite en 2002, peu pratiquée au primaire, inconnue au collège,elle est souvent confondue avec le regroupement thématique. Or cedernier n’est pas satisfaisant : Il est parfois insignifiant

Les élèves n’en tirent pas profit

Il donne seulement une apparence de cohérence

Il ne développe aucune compétence de lecteur particulière

(Voir Repères 38, 2008, Pratiques effectives de la lecture)

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La première fonction de la LER est culturelle

• Le lecteur de LER lit en mobilisant :-un horizon d’attente (Jauss),

-une encyclopédie (Eco)

-un répertoire (W. Iser).

• En effet, on lit avec un système de connaissances qui mobilisent des expériences personnelles, culturelles, géographiques, historiques. L’enseignement peut aider à construire ces références = « références expérientielles du lecteur »;

• des connaissances sur le genre, ce qui permet aux élèves de voir si le genre a été transgressé, de prévoir la fin ;

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• Des connaissances des stéréotypes attachés aux personnages ;

• Des connaissance de l’auteur même, de ce qu’il écrit habituellement,de son système de valeur (thématique, style) ; Ex Corentin : si on leconnaît, on se méfie, on attend le piège que le récit va nous tendre ;

• Des connaissances sur les normes et contre normes littéraires :réseau « coups narratifs » : narrateur ironique (ce qui est difficile àappréhender pour le lecteur), menteur (comble de l’horreur !), Lerécit peut se développer aussi en une polyphonie narrative, ou jouerde la construction chronologique pour la modifier (et si je n‘en ai pasrencontré dans mes lectures, je suis perdu)

Le lecteur inscrit l’œuvre dans un réseau de résonances. La cognitionest recognition ; on rattache la chose nouvelle à un contextereconnaissable.

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La culture du lecteur

• L’interprétation et le jugement sont l’écho d’une « chambre sonore deprésupposés où puissent s’entendre et se faire entendre laconversation secrète des textes, mais aussi des œuvresiconographiques, l’ensemble du « domaine artistique ». Il faut doncapprendre à lire en frontalier, en comparatistes, créer les fondementsd’une culture qui va la rendre plus aisée, ce dès le cycle 2.

• Or, si dans l’enseignement on insiste avec raison sur le genre, lesstéréotypes, l’intertextualité, on oublie le réseau auteur, et le coûtnarratif. Ce sont pourtant des réseaux problématiques autour d’unequestion de compréhension qu’on a clairement identifiée.

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Quels textes en réseau ?

• Il importe de rapprocher des textes qui posent le même problème àrésoudre, pour en tirer une leçon de lecture, pour expliciter lastratégie à adopter, pour résoudre le même problème si on lerencontre à nouveau.

• On construit ainsi une culture des stratégies d’auteur et on développedes stratégies de lecteur à la hauteur des stratégies d’auteur.

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Différents réseaux possibles

• Réseaux de textes à leurres, qui obligent à relire. Il y a « leçon delecture » car ce qui est compris au début doit être remis en cause ; letexte peut tromper et on a à jouir du plaisir d’être trompé. C’estimportant pour les lecteurs faibles car ce qui est compris au débutn’est pas toujours ce qui est compris à la fin.

• Réseaux de textes lacunaires : le lecteur doit remplir des blancs ; destextes peuvent avoir plusieurs lectures. Le sens n’est pas seulementdans le texte, mais quelque part entre le texte et moi.

• Réseaux avec point de vue insolite

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Différents réseaux possibles• Réseaux récits symboliques qui réclament un régime de lecture

particulier. Ce qu’il y a à comprendre n’est pas seulement l’histoire(pas seulement référentielle), car l’histoire est une métaphore d’autrechose.

• Réseaux rapport à la vérité : (cf. les programmes « Résister au plusfort : ruses, mensonges et masques »). De nombreux jeunes lecteurscroient à la vérité de ce qui est dit. Comment se distancier de ce quiest dit par les locuteurs ? classement des comportements déviantspar rapport à la vérité ; Il y a une leçon : « il ne faut pas croire tout ceque disent les personnages » et on entre dans l’ère du soupçon…. (cf.Le loup, mon œil de Susan Meddaugh ».

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Créer des corpus de textes où se présente le personnage à décoder :

VantardNaïfFabulateur (se rassurer, se faire plaisir)AffabulateurCarrément menteur et roublard (pour tromper les autres)Manipulateur (pour dominer l’autre, dont le lecteur cf Le Chat assassin d’Anne Fine)Ironique (plus difficiles à détecter)

• Décrypter les intentions, les buts des personnages

• Classer les textes en fonction des rapports

• Introduire occasionnellement un texte piège qui appartient à un genre voisin

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La LER aide à résoudre les problèmes de compréhension

• Construire une lecture en réseau, cela suppose : un corpus adéquat etbeaucoup de textes, pas un seul ni deux sinon on se place devant unexemple. Un corpus doit permettre de dégager des constantesstructurelles, des variantes, sans fossiliser les représentations desélèves.

• Cela suppose d’avoir cerné les difficultés des élèves, et de réunir uncorpus de textes cohérent (problème des listes officielles) donctrouver des œuvres qui posent vraiment le même problème decompréhension

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La LER et la progression

• Souvent on étudie d’abord un texte noyau puis on ajoute un textecomplémentaire.

Il vaut mieux :

• Penser un type de progression dans la création du corpus, pour éviterla juxtaposition d’éléments et la succession de lectures sans lienexplicite établi entre ces lectures. Il faut ensuite retourner au textenoyau, après avoir lu d’autres textes. Il s’agit donc d’organiser des va-et-vient entre les textes pour dégager les constantes, élucider leszones d’ombre. Réfléchir donc à un ordre signifiant, non pas uneprogrammation mais une progression.

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La LER comme un tremplin pour la résolution

• Plusieurs possibilités :• Partir d’un texte simple comme tremplin (façon de faire la plus habituelle)

pour aller vers le complexe

• Ou d’emblée plonger les élèves dans un texte que l’on sait problématique, leslaisser errer, les laisser voir qu’il y a un problème, puis les aider en leurapportant un album qui sera plus facile mais présentant le même problème.

• Exemple :

Papa de Corentin,

Il y a un cauchemar dans mon placard de Mercer Meyer

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• Donner à lire en même temps tous les éléments du corpus, avec un parcours delecture arachnéen.

• Exemple : Rascal, La Route du vent, le voyage d’Oregon, Fanchon, Moon.

• C’est un réseau auteur, voire thématique car il s’agit toujours de voyagessymboliques. Soit on les lit tous le même temps, soit on commence par Fanchon,petite fille malheureuse qui arrache les masques successifs (images collées par lesautres). C’est le plus difficile. Mais les 3 autres vont aider à comprendre ce qui estdifficile ou aider à trouver les points communs. La LER permet de comprendrequ’il s’agit d’un voyage mental. Tous ces voyages vont permettre de grandir(métaphore). Il y a nécessité de grandir mais c’est une épreuve qui peut êtredouloureuse (initiatique, purificatrice, desquamation par le feu, pèlerinage ettraversée du désert). Ces personnages s’auto-enfantent : tous racontent unequête de l’identité.

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• Un tel réseau est conçu pour être une propédeutique à la lecture del’Odyssée (approche symbolique du voyage d’Ulysse) et de tous lesrécits d’aventures.

• Il faut une formation de longue haleine pour promouvoir et soutenirla lecture en réseau : elle peut être traitée en une à deux heures, surun cycle, ou sur toute une année.

• Exemple de réseau au long cours : les programmes invitent àtravailler les personnages stéréotypés pour comparer la mise ensituation des stéréotypes, les types de héros, comprendre les qualitéset les valeurs qui les caractérisent, des valeurs socioculturelles.

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Attention à l’entrée « Monstres »

• le monstre n’est pas un personnage bien identifié : il y a une infinitéde cultures variées, donc de monstres (cf. Le livre des créatures). Si onen tire seulement que les monstres nous font peur, c’est pauvre.

• L’élève doit saisir comment ils évoluent (cas du loup, un archétypeprésent très tôt dans les classes comme monstre, « tarte à lacrème »).

• Dans l’étude des avatars des personnages (la figure de l’ogre), ilmanque un indicateur générique, des valeurs ou des contre-valeurs,un objet d’investissement psychoaffectif parfois ambigu et commetémoin d’une évolution culturelle notable.

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le loup, pivot de mythes fondateurs

• Il s’agit de montrer qu’il est le pivot de mythes fondateurs de contes facétieux,horrifiques et gores, dans des drames domestiques, burlesques (navrants) des histoiresd’amour. Bref, qu’il n’a de cesse de changer de stature, de statut, provoquant effroi,sidération rire, apitoiement, sourde inquiétude.

• La forêt : lieu des possibles, ténèbres et démesure.

• Parmi les créatures, le loup et les loups garous bavant qui nous renvoient à notre peurd’être dévorés. L’imaginaire occidental est nourri de cette peur, entretenueessentiellement par Perrault et Daudet : cf. Le Petit chaperon rouge/La Chèvre de M.Seguin fondent cette image : le loup représente la peur de l’animalité dans l’humanité,mais il n’en a pas été toujours ainsi. Or le loup est une figure positive dans un certainnombre de cultures dans sa forme féminine par exemple : la louve romaine (fertile etnourricière comme pour les Turcs ; le loup masculin, guide vers le paradis (Egypte),incarne le courage militaire (blason des chevaliers) car le loup est symbole de courage etde ténacité (cf. le loup bleu de Gengis Khan). Symbole de la monstruosité dévorante chezles Vikings : le loup grand destructeur du monde d’Odin

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Image diabolisée du loup

• La littérature reprend cette image (cf. Les dix contes de loups chezNathan). Le loup à la fourberie malheureuse (voir les Trois petitscochons et les fables de La Fontaine où le loup est cruel dans Le Loupet l’agneau.

• Mais dans d’autres fables, il est plutôt malheureux (cf. Le Loup devenuberger ; Le Lion, le loup et le renard ; Le renard, le loup et le cheval.Dans le Chaperon rouge de Grimm il y a deux loups (le 1° avale lamère grand puis on lui ouvre le ventre et il meurt ; le 2° est noyé dansun bouillon de saucisses, rituel burlesque avec renversementcarnavalesque.)

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Un réseau sur le loup :

• Des loups inquiétants même s’ils ne dévorent plus : cf. Balthazar, Amiami de Rascal, Féroce de JF Chabas, qui effraie même sa famille : c’estle regard des autres qui change son identité. Heureusement uneamoureuse… Mon loup d’Anne Berthier : dévoration métaphorique dela fillette.

• Tous les loups de Corentin sont de pauvres hères attachants (Plouf),inspiré du roman de Renart. Ma culotte d’Alan Mets : inversionthématique où l’agressée devient agresseur. Le petit loup est terrorisépar les gros cochons. Mademoiselle sauve qui peut : farces qui lui fontpeur.

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Combien de loups déprogrammés involontaires ?

• Gardiens de l’orthodoxie mais ils ont beau faire… (cf. Roald Dahl etson chaperon rouge à qui le loup dit « ce n’est pas le texte ! » : coupde pied dans la fourmilière.

• Dans la Bergère qui mangeait des moutons, le loup amateur desbergères à forte poitrine s’allie aux moutons pour la dévorer. Cf. Lescontes du chat perché où le loup est loup, malgré lui.

• Dans Le Petit chapeau bleu marine de Dumas et Moissard, il fuit lafillette. C’est comme si l’histoire mythique du Chaperon rouge avaittransformé l’image du loup : loup dénaturé/renaturé (cf. mutationgénétique du loup qui devient végétarien. Jean Loup qui s’amuse avecMarie-Lou. Or un vieux loup veut la dévorer : le loup s’attaque alors àses semblables (lycanthropophagie).

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• Dans Sacré sandwich, il se civilise et devient sentimental : il veut sonsandwich, il s’embourgeoise dans Le Loup, la chèvre et les 7chevreaux. Dans C’est moi le plus fort, il se prend pour la marâtre.Plaidoyer contre les 3 petits cochons : il était enrhumé et a justeéternué !

• C’est le syndrome de Stockholm à l’envers : dégénérescence avec LeGrand loup doux et dépression totale dans La Soupe aux cailloux.

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Le loup : une figure inépuisable et en réhabilitation• Le réseau est immense : on peut étudier l’évolution de sa

personnalité et des sentiments sur le lecteur. La vie du loup n’est plusce qu’elle était : héros déchu, mutilé, divorcé…, le gentil animal vit undrame identitaire : doit-il fuir la fiction ? La réinvestir ?

• De nouveaux albums pour le montrer dans sa nature vraieréapparaissent aujourd’hui…

• Le réseau qui doit aboutir à une construction de connaissancesordonnées.

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Expérience menée dans l’académie de Dijon (P-A. Chiffre), intervention de Mme Tauveron et contrat de travail CM1/CM2/6ème , « démarche Tauveron ».

Avant la classe :

• Choisir un corpus de textes en fonction d’une problématique littéraireà partir de laquelle sont définis les objectifs d’apprentissage car ilfaut analyser finement les textes pour identifier les difficultés à lacompréhension (les fausses pistes, le narrateur peu fiable, les silencesdans le récit).

• Programmer un parcours, un chemin de lecture, le réseau etanticiper : quelles leçons de lecture ?

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Pendant la classe :

• Lecture orale magistrale et relectures multiples

• Des écrits de travail articulés

• Débat et discussion/oral

• Leçon pour stabiliser les savoirs et les connaissances : on ne peut pas faire dire n’importe quoi à un texte.

• Construire la posture du lecteur.

• Quel parcours littéraire par la mise en réseau : cycle 1 > cycle 2 > cycle 3> etc.

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Exemples de parcours sur les figures mythologiques par exemple : cf. Académie de Dijon

• Exemples de parcours sur les figures mythologiques par exemple : cf. Académie de Dijon

• CM1 : dragon : (narration //)

• CM2 Travaux d’Hercule et Minotaure, Superman… (relais de narrations)

• 6ème : Odyssée (narrations enchâssées)

• CM1 : L’île du Monstril, Tout est calme de Pommaux

• CM2 : L’enfant Océan Mourlevat, Le Jour où j’ai raté le bus de J-L Luciani

• 6ème : les 1001 nuits