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GERARD CONAC

Extrait de la publication

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CAHIERS DE LA FONDATION NATIONALEDES SCIENCES POLITIQQES

- 97-

GERARD CONAC

LA FONCTION PUBLIQUEAUX ETATS.UNIS

Essai sur Ie regime du Civil Service federal

LIBRAIRIE ARMAND COLIN

Extrait de la publication

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La Fondatiqn Nationale des Sciences Politiques a été créée par uneOrdonnance du I octobre 1945. Elle a pour objet de favoriser le progrèset la dilfusion des Scicnces Politiques, Economiques et Sociales.

Son administration et sa direction sont âssurées de la manièresuivante :

Conseil d'Administration :Président .' tr{. André Srrcrntno, de I'Académie Française, Professeur

honoraile au Collège de France.Vice-Présidenfs,'ÀIl\1. Gabriel Lr Bnes, Professeur à la Faculté de

Droit de Paris ;Roger Lr'loxrnl, Premier Président à la Cout' des

Conrptes.Itfembres .' NI]\{. André Ar,r,rx, Recteut de I'Université de Lyon I

llarcel Blnru, Membre du Conseil Economique, Secré-taire sénéral de l'Union départementnle desSyndica"ts Force Ouvrière des Bbuches-du-Iihône ;

Louis Bruorx. Professeur à la Faculté de Droit deParis :

Wilfrid Bluuo,r.nrwtn, Gouverneur de la Banque deFrance ;

H. Bounoplu oe Foxretav, Directeur de I'Ecole Na-tionale d'Administration ;

Jacques CHÀpsAL, Directeur de I'Institut d'EtudesPolitiques de I'Université de Paris ;

Ilernard i:rrror, Secrétaire général du Conseil Econo-nrique ;

Jean-Jaôques Cxnvlr-r,rnn, Professeur à la Faculté deDroit de Paris ;

René Counrrr, Professeur à Ia Faculté de Droit deParis ;

Henry Dlvezec, Vice-Président délégué général duSyndicat général de la Construction Electrique ;

Paul Dunero, Professeur à la Faculté de Droit deParis;

Pierre Founntnn, Gouverneur honoraire de la Banquede France ;

Pierre Fnolroxt, Professeur à la Faculté de Droitde Paris :

F'rançois Gocuer., Secrétaire général du Conseil de laRépublique ;

Ernest Llsnousse, Professeur à la Faculté des Lettresde Paris ;

Edmond LzaÉt, Président du Crédit Industriel etCommercial ;

Charles MouzÉ, Ditecteur d'Etudes à I'Ecole Pratiquodes Hautes Etudes ;

Léon Nou, de I'Institut, Ambassadeur de France ;Louis Pepv, Professeur à Ia Faculté des Lettres de

Bordeaux ;Alexandre Penoor, Ambassadeur de F'rance ;l\lario Roquos, de I'Institut, Professeur honoraire au

Collège de France, Directeur d'Etudes à I'EcolePratique des Hautes Etudes ;

.André SÉc.lr-,rr, Secrétaire général du Gouvernement;lloger Snvooux, Directeur général des Affaires Cultu-

relles et Techniques au llinistère des AffairesDl ra nga'res ;

Louis Tnorlnls. Professeur à la Faculté de Droitd'A i x -en-P roven ce.

Administraleur .' M, Jacques Cnapslr,.Secrétaire général .' l{. Jean Toucnano.

La Fondation assure notamment la publication :7" du Bulletin Analytique de Documenlalion Politique, Economique

et Sociale Contemporaine, répertoire méthodique mensuel des princi-paux articles publiés dans les revues françaises et étrangères et seiéférant à Ia vie politique, économique et sociale des Etats contem-porains. (Abonnement : France : 1.50Ù fr. par an ; Etranger : 1.800 fr.par an. -

p1s55g5 Universitaires de France,108, boulevard Saint-Germain, Paris 6". C.C.P. Paris 392.33) ;

2' de la Reuue Fntnçaise d.e Science Politique, revue trimestriellepubliée par la F'ondation Nationale des Sciences Politiques et I'Asso-ôiation Érançaise de Science Politique. (Abonnement : Fra-nce : 2.300 fr.Dar an : Etranqer : 2.5'00 fr. par an, - Presses Universitaires deirrance, i08, bou"levard Saint-Gerinain, Paris 6'. C.C.P. Paris 392.33) ;

3' de Cahiers publiés plusieurs fois par an, par la Librairie ArmandColin, et destinés à faire progresser la recherche dans le domaine derSciences Politiques, Economiques et Sociales.

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LA FONCTION PUBLIQUE

AUX ErRrs- UNIs

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ISBN de la version numérique : 9782724684247
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CAHIERS DE LA FONDATION NAÏIONALEDES SCIENCES POLITIQUES

-97-

GERARD CONAC

LA FONCTION PUBLIQUE

AUX ÉTNTS.UNIS

Essai sur le régime du Civil Service fédéral

PREFACE D'ANDRE DE LAUBADËRE

Profosseur de la Faculté do Droitet des Sciences économiques de Paris

n oa?âtl

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LIBRAIRIE

103, boulevard

1958

ARMAND COLIN

Saint Michel, Paris V"

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TOUS DROITS DE REPRODUCTION, DE TRADUCTIONET" D'ADAprATroN RÊsERvÉs poun rous pays

@ 1958 llAX LECLERC et Cr"

PROPRIETORS OF LIBRAIRIE ARMAND COLIN

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PREFACE

C'est une lecture vrairnent captivante - ie n'hésite pas à employercette épitluète - que celle que [nocure l'outtrage d.e M. Gérard' Conac.

Capti.vante f,erce que I'on y troure beaucoup plus qu'une descti'ption

dw régfune de la fonetion publi.que aux Etats-Unis.Certes, on y troLtne d'abord. cel.a. Et préci'sé, enrichi' par les norubrewses

explications, citati'ons, références qwe l'auteur a accwrnwlées aw corns du

fructueux séjou.r d'étwde qw'il a ancompli. en Arnérique d.u Nord' et d.'où

il a ramené la rnatière de son hrre. Il suffira de feuilleter celui-ci pours'aperceuoi.r sans pei.ne d.e I'abondance d.e cette documentati:on et conce'voi.r imtnéd.iaternent le désir d.e le li.re ligne par litgne. Lecture - faut-ill'ajouter ?

- qui. ne déceora pas et qwi. owre au lecteui tous les angles

cle uu.e plongeant suî son sujet : Les < approch.es > historique, sociale,

politiqu.e, les âtolutions, le point actuel ju,squ'aux plus récents éléments

jurisprudentiels et réglementaires,Mais on décowvre, dans l'outrage de M, Conac, plus qu'une

minwtieuse analyse. A trarters cette analyse' ce que l'on y trowle, tantôtexplbi.té par l'auteur, tantôt aussi. si.mplement s?.t'ggéré par la d.escripti'on

nrêwe iles faits, des institutions et de lewrs éuoluti.ons, c'est I'histoire -'encore en couLrs - d.e tout un clterninement laborieux, I'histoire d'e cet

eftort di.ffici.le par leqwel les Am;éricalns construisent progresshtement un< Civil Service > dont Ia conception rnême se lcetnte chez ewc à des

obstacles que M. Conac a le méri.te de nous fai're rernarqwablernent

sai.sir.Car c'est I'kistoire de ces d,i.fficultés, d.e lewrs ratsons profondes et de

leur natwre exacte qui. est en qwelque sofie le th'èrne de son li.we, qui en

fatt I'uni.té et I'wn d.es grand.s inté'rêts.L'apparition et la croi.ssance de la bureawcratie féd.érale a été, auac

Etats-IJnis, d.epuis la fi.n d.u XIX" si.ècle, un plcénornène rapide, brutal,wn clcangernent consid.érable par rapport à l'époque -

celle encote du,

l)oyage d.e Tocquevi.Lle - où le rôle de I'Etat fédéral se lirnitar.t à

I'arbitrage des grands problèmes.Cette administration, powssée très tite, dettai.t finit par s'eftorcer

d'accuei.lli.r la conception d.e la foncti'on publi.que du type européen,

celle d.u Cwi.l Seruice neutre, professi'onnalisé, doté de certai.nes garanties,

rnais a éprou.vé - et éproulte encore - le plws grand. rnal à I'assi.rniler.

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I-,a dérnocrnie foncièrement libhale amhicaine ne voyait guère d'abordconnrne forrne possible de la fonction publique que celle qui exisni.tdans les Etats, celle des fonctionnaires élus, émanation d.i.recte du peuple,fonnule inadapuble telle quelle à l'échelon féd.éral. En mêrne ternpsjouar.ent des réactions instinctintes d.u tempérament arnéricain et plusgénéralement anglo-saecon, Ltne certaine méfiance traditionnelle à l'égard.des fonctionnai.res, Ie souci de protéger le ci.toyen contre les fonction-naires beaucoup plus qwe le fonctionnaire contre I'ad.rninistration.

Comment ces ilonnées se sont conjugwées pour susci.ter cette concep-tion awtoritaire de la foncti.on publique qui deoait s'épanouir tous 1apr&idence de Jacl<son et engend.rer le fameux < Spoi.li System , (uncivil sertice isolé d.e. la politique,étant de nature à paraîtie aux Améri-cains peu,d.émocratique), c'est ce que I'on uoi,t parfaitement apparaîtreà tral)ers les,pages d.u lfure de M, conac. < Ainsi, écrit-il, la conceptionarnéricaine la

-plus spontanée et la plus typique s'est exprimée ei faltdans la formule du Spoi.ls System >.

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- Et cela explique cornrnent < après l'éclcec reconnu d.w Spoils System,ln concepti.on américaine de la fonction publiqwe est d.éckirée pâr destenilances contra;lictoires. L'i.dée d'un civil sentice nentre, â" typ"anglais, n.'est acceptée qw'à contre-cæ1,!t, cornrne un expéd.ient auquel ilfaut se résigner pour des raisons pratiques, c'est une iivention étrangèredont on s'accornmoiLe par pragmati.sme rnais non sans méfiance >,

De là les cri.ses, lei difficultés qu'a connues et que connaît encore larni'se au poi.nt du régirne dw < Federal service ,, âont ra réforme resteun su\et

-constant d.e préoccupation powr les dirigeants arnéricains, Legrand,pwblic lui.-rnême n'ignore pas certaines de cei crises ; mai.s celle, àlaquelle iI est surtout porté à songer, qui. a récemment aftecté l.a rni.seefl. @uote clw < depoir de loyauté > et que le u *o""iirt-lrys(ne > aenoenimée- au point que l'on sait, n'est pas la seule mani.féstati.on deces-difficultés., c'est à tra,ers des obstaclei il'orilres di.uers qwe progresseI'adapntion d.u Fed.eral sentice, que s'eftectwe la professioinati.iati.in d.ela fonction pwbliqwe, l'octroi de garanties qr" lo tradition américainerépugnait à reconnaître awx foncti.onnai.res et de nature à concilier lesexigences de la sécuri.té na-ti.onale a:vec la pki.losoph,ie libérale du régrr,w.

C'est la d.escripti.on, d.epuis leur origine, à" tous ces eftorts d.econstruc.tion,- d,Tdapnùon, d.e ces crises et ile ces progrès, qui'àonstituela matière de I'ouvrage qre j'ai. I'honneur et te vif ltour"d" préfacer.Et c'est une matière vi,ante, colorée, trattée par I'aîûewr, on i" ,urro,avec autqnt de finesse que de rnaîtrise.

ANDRE DE LAUBADEREProfesseur à la Faculté de Droit de paris

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AVERTISSEM ENT

Cette étude sur la fonction publique américaine ne prétend pas êtreexhaustive. Elle voudrait seulement ouvrir la voie à des travaux ultérieurssur certains problèmes précis, en facilitant une compréhension d'ensembledu régime du Civil Service fédéral.

Des questions restées inexplorées ou à peine ébauchées dans cetouvrage, celle par exemple de la sociologie des fonctionnaires américains,leur origine sociale, leur mode de vie, leurs conditions de travail, leurinfluence politique pourraient servir, si elles faisaient l'objet d'autresrecherches, à dégager une image plus vivante et plus concrète de lavie administrative américaine. L'importante documentation qui existeaux Etats-Unis sur cet aspect sociologique pourrait être exploitée avecprofit.

Si nous avons cru bon de prendre comme référence constante Ie droitde la fonction publique, contrairement à la plupart des ouvragesaméricains concernant le personnel fédéral et au risque de surprendrepeut-être les lecteurs de cette collection consacrée à la science politique,c'est qu'il est de tradition en France de bien défrnir les bases juridiquessur lesquelles reposent les rapports de l'Etat avec ses agents. Assurémentil n'est pas sans intérêt, pour la science politique elle-même, de se

demander pourquoi il n'en est pas de même aux Etats-Unis. Cettedivergence profonde de points de vue a guidé notre analyse. Inversement,dans le domaine de la fonction publique américaine, il nous a paru quele droit était l'auxiliaire de la science politique et que, sur de nombreuxpoints, comme celui des libertés publiques des fonctionnaires, il étaitindispensable de recourir largement à la jurisprudence dans un pays oùl'expression < gouvernement des juges > n'a pas encore épuisé toutson sens,

En adoptant ce point de vue, nous devons avouer que nous avonsrendu notre tâche difficile, faute d'une étude américaine comparable.De plus, il est toujours hasardeux de vouloir transposer une réalitéétrangère à l'aide d'un langage qui est loin de l'exprimer exactement.Il est donc possible que nous ayons parfois, involontairement, trahi lesystème américain. Quoi qu'il en soit, nous aimerions cependant enavoir fait saisir I'originalité par rapport au nôtre, dans cet ouvrage quiest avant tout un essai.

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INTRODUCTION GENERALE

<< J'aime cette allure naturelle du gou-vernement de la démocratie ; dans cetteforce intérieure qui s'attache à la fonctionplus qu'au fouctionnaire, à l'homme plusqu'aux signes extérieurs de la puissance,j'aperçois quelque chose de viril quej'admire >.

Alexis de Tocauevrr-r.r, De la Démo'cratie en Antêrique l.

TLo cnorssANcE de la bureaucratie fédérale est

Ies plus frappants de l'évolution de la démocratie etaméricaines depuis une centaine d'années. Au cours damerlcarnes centaine d'années. Au cours de son séiour en

I'un des traitsdes insdrufions

Amérique, Tocqueville s'était étonné de l'absence presque complète de

traditions et de mæurs administratives aussi bien dans le gouvemementde l'Union que dans celui des différents Etats. Le nombre infrme des

fonctionnaires de I'Exécutif féd&al (12.000) ne manqua pas non plusCe suqprendre le voyageur français habitué aux administrations plusmÉNsives et centmlisées dont la France de 1830 lui donnait I'exemple.Avec sa pénétration coutumière il ne put s'empêcher d'opposer ce

chiffre insigniÊant à celui qui < avait dépassé chez nous, toutes les

bornes connues > et qui s'élevait alors à 138.0002,Or, que penserait le même Tocqueville plus d'un siècle plus tard

devant l'énorme accroissement du personnel fédéral américain ? En1929, on compte 570.000 personnes au service de I'Exécutif ; pendantla deuxième guerre mondiale, on atteint l'effectif < record > de3.500.000. Le nombre des agents publics fédéraux semble se stabiliserà I'heure actuelle autour de 2.500.000 (entreprises nationales et forcesarmées exclues). De leur côté, les Etats membres emploient environ1.100.000 fonctionnaires et les collectivités locales plus de 3.400.0003.

l. Toc9urvrr.r.n, De Ia Démocratie en Arnêriqwe, Gallimard, 10" éd., tome I, chap. V,p. 210.

2. Tôcquovrr,r,x,, of. cit., p. 127. As milieu du XIX-" siècle il y avait aux Etats-Unis 23.000.000 d'habitants tandis qu'ea France le chiffre de Ia population s'élevaità 35.000.000.

3. Il y a des fonctionnaires de I'Etat fédéral dans tous les comtés des Etats-Unis'à l'exception d'un seul, Armstrong County-South Dal<ota. Cf. Harry Fr,ooo Bvno,<< The Size and Cost of our Government > Annals of tke American Academg of Poli'-tical, Sci,ence, 1954-

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Ces chiffres sont signifrcatifs : ils traduisent une progression rapidemais singulièrement discontinue et désordonnée. Cette bureaucratieimprovisée sous la pression des circonstances éprouve d'immenses diffi-cultés à s'intégrer dans un système constitutionnel plein de souplessemais conçn néanmoins pour un Etat isolationniste et strictement libéral.A fépoque de Tocqueville, l'Etat fédéral se bomait à arbitrer les grandsproblème. Il doit, depuis les demières années du xrxê siècle, quimarquent la tn de < l'ère des pionniers >, accepter d'une part, àI'intérieur du pays, des besognes de nature administrative, participer,d'autre part, activement, à la 'vie politique internationale.

Pour faire face à ces nouvelles tâches, il a besoin de trouver dans unpersonnel compétent un outil à la fois souple et puissant. Or, tradition-nellement, l'Administration fédérale se caractérise par son manque destabilité a. Un effort d'adaptation et d'organisation s'impose donc. Il estloin d'être facile.

La réforme de la fonction publique fédérale est d'ailleurs l'un desproblèmes permanents que doit r&oudre la démocratie américaine. Maisc'est seulement depuis une vingtaine d'années, après les transformationsdu New Deal, que cette question se pose avec une indéniable acuité.Nous n'en voulons pour preuve que I'effort mqné en ce sens pardifférentes commissions de réorganisation de l'Exécutif mises sur piedpar les trois derniers présidents u. Il y a là non seulement un des aspectsessentiels de la < crise de I'Etat aux Etats-Unis >, mais aussi de la crisede la < conscience démocratique du peuple américain >.

La méfrance du peuple à l'égard de la bureaucratie est traditionnelleaux Etats-Unis. Elle est liée à la crainte d'un pouvoir fort et d'un gouver-nement de fonctionnaires. En dépit du déclin des doctrines libérales,elle reste encore profondément enracinée dans I'opinion américaine. Demanière plus générale, d'ailleurs, le développement des administrationscentrales éveille l'inquiétude des Anglo-Saxons. Les libertés individuellesne sont-elles pas menacées par une nouvelle forme du < despotisme b ?

Le triomphe de la bureaucratie ne va-t-il pas sonner le glas du self-gollerwnent 6 ? Comme les sujets britanniques, les citoyens américainsse posent ces deux questions, et ce n'est pas sans un profond malaiseque beaucoùp d'entre eux se rendent compte de la nouveauté et du

4. Cf. surtout à ce sujet H. Lasrr, Encgcloped,ia of the Social Science, 1930, vol. 3,pp. 70-73 au mot < Bureaucracy >>. John ConsoN, Erecutioes for the Fed,eral Seraicel,Columbia University Press, 1952, p. 91.

- Robert A. Wer-ren, America's Manpouer

Crisis, Cbicago, 1952. -

Seal Cenprrrnn, The Unfi,nished, Bwsiness of Ciztil SeraiceReform, Princeton, 1952. Yoir aussi < Personnel rurnover in tle Federal Service >in Public Persowtel Review,, sept. 1949.

5. Cf. Roger Prmo, Zo Crise ile NEtat au* Etats-IJnis, Paris, 1951, p. 84 et suiv. -Georges Lexcnoo, Science et ettseignement de !'admini,stratiott, ou,r Etats-Uni,s, pans,1954, p. 96 et suiv.

6. Cf. deux inportants ouvrages anglais : Lord HswAnr, The Neu Despoti,snt,7929.

- C.K. Ar-r-rrv, Bureaucracy Triwaphant, 2â éd., 1930.

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caractère spéciÊque du problème de la fonction publique dans l'Etatmoderne 7.

Ce problème est, avouons-le, d'autant plus difficile à envisager pourun Français que la notion française reste tout à fait étrangère à lamentalité comme au droit américain 8. La fonction publique est consi-

dérée, en France, comme un métier spécial devant être régi par un droitpropre e. Son statut repose traditionnellement sur l'idée hiérarchique.Les grands traits de son organisation furent déÊnis sous un régimeautoritaire. Sans vouloir imposer à tous les agents civils une obéissance

aveugle, Napoléon donna à la fonction publique une allure militairecar il était soucieux de voir partout respecter cette discipline rigoureuse

qui fait < la force des armées >. < Les fonctionnaires étaient semblables

à des soldats, à I'instar des militaires ils avaient leur rang dans lahiérarchie > 10. La fonction publique devrait être un colps homogène et

stable, de structure pyramidale comme l'administration centralisée et

hiérarchisée qu'elle était appelée à servir.Dans une telle conception, la personnalité des agents tend à dispa-

raître derrière celle de leurs chefs. Le ministre possède l'autorité hiérar-chique sur ses subordonnés. C'est lui qui commande, c'est lui quiendosse la responsabilité politique de leurs actes. Les fonctionnairespublics sont les agents de I'Etat. Ils sont à un point tel voués à son

service qu'ils tendent même à s'identiter quelque peu avec lui. Incor-porés dans l'Administration, ils sont protégés, dans une large mqsure,contre les poursuites des particuliers. Jusqu'au décret-loi du 19 septembre1871, ils bénéfrciaient à cet égard d'une solide garantie administrativell.Depuis lors, l'évolution jurisprudentielle, en particulier celle relative au

régime de la responsabilité de l'Etat, leur a été très favorable. Jamaisd'ailleurs ils n'ont eu à répondre devant les tribunaux, de < leurs fautesde service >. Le prestige de la puissance publique rejaillit sur ses

serviteurs. Une certaine considération sociale s'attache à la qualité de

fonctionnaire. Les avantages de carrière et de I'esprit de corps compen-sent enfrn l'anon)rmat de l'action individuelle.

7. La littérature américaine qui reflète cette inquiétude est très abondante. On citeraici : J.M. Bncx, Owr lVonderland, of Bureau.craca. - W. Mtrttr,twcnn, l4/askingtoni"s lihe that, N.Y., 1942.

- H.W. Suuunns, < American Capacitlr for Self Government

is being Destroyerl by Bureaucracy >, Ameri,can Bar Association lournatr, janv. 7941. -Merlo A. Pursry, Big Gooernment : can we Control it t N.Y. 1945.

8. Roger Prxto, op. cit., p. 204. -

Bernard Scnwe,ntz, Le Droi't arlntinistratifaméricai,n, préface de Henry Puget, Paris, 1952, p. 9,

- Roger GrÉcortn, La

Foncti,on pttblique, Paris, 1954, p. 304. - Roger GnÉcornr, << La Conception de lafonction publique aux U.S.A. >, Reztue Ad,ministratiae, 1950, p. 544.

9. Jean Rrvrno, < Vers la ûn du droit de la fonction publique > Dalloz, 7947,Chronique XXVIII. -

Paul G.tuoBurt < Le Déclin de l'autorité hiérarchique >, Datrloz,1947, Chronique XXXV.

- Emile Grneuo <Le Déclin de la fonction publique>>

Etwdes Mestre, Paris, 1956, pp. 252-266.10. P. Geuonunr, chronique précitée.11. Cf. Marcel Wer.rxo, Trai.té d,e Droit admi,ni,strati,f, Paris,7" éd., p. 615. -André de LeuneoÈnn, Trai,tê de Droi,t admi,nistratif, Paris, 2' éd., p. 456.

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Le succès des idées libérales, les progrès du syndicalisme, l'augmen-tation et la diversification des agents publics ont beaucoup contri6ué àassouplir ce schéma classique. Non sans raison, plusieurs auteurs ont puparler d'un déclin du droit de la fonction publique 12. Il semble toutefiisque les traditions bureaucratiques et juridiques, la force même despréjugés sociaux aient réussi à triompher d'innovations, en apparencerévolutionnails5. I.'Administration française s'est démocratisée ; elle n,ap_as renié ses origines monarchiques et impériales. La jurisprudence duConseil d'Etat s'est efforcée avec, dans certains cas, de grandes diffrcultés,de concilier I'héritage napoléonien avec les principès nouyeaux, Iesexigences du service public avec les intérêts proprcs des agents.

Ainsi la conception française, en dépit d'une évolution indéniable,a-t-elle pu rester cohérente et relativement bien élùorée, si on lacompare, par exemple, à la conception américaine. Cette demière n'aété typique et rigoureuse que dans la doctrine du Président Jackson.Après l'échec reconnu du Spoils System, la conception américaine de lafonction publique est déchirée en tendances contradictoires. L'idée d'un< Civil Service >, d'une fonction publique neutre du type anglais, n'estacceptée qu'à contre-cæLlr, comme un expédient auquel il faut serésigner pour des raisons pratiques. C'est une invention étrangère donton s'accommode par pragmatisme mais non sans méfrance. La conceptionactuelle de la fonction publique aux Etats-Unis porte encore la marquede ce conflit. Si l'on ne craignait le paradoxe, on pounait dire trèsjustement qu'elle est d'essence libérale et démocratique, mais de caractèreautoritaire et largement empirique.

La fonction publique fédérale esr, er a toujours été, au service d'unrégime libéral. C'est sur le principe de légalité, et surrout de légalitéconstitutionnelle, que les Américains ont entendu bâtir leur administrationfédérale. Ils -n'ont

jamais admis la nécessité d'une hiérarchie de typemilitaire. L'obéissance aux lois est jugée aux Etats-Unis plus importanteque l'obéissance aux supérieurs. L'idée hiérarchique s'est néânmoinsdégagée progressivement mais comme une simple conséquence duprincipe- de légalité ; elle n'a pas servi de fondement à I'organisationde la fonction publique. Pendant longtemps elle n'a pas été perçuealors qu'au contraire dès l'origine le principe de légalité était nettementaffirmé. Conformément à f interprétation anglo-saxonne, on s'est souciéde proréger les citoyens contre les fonctionnaires, beaucoup plus queles fonctionnaires contre l'Administration. L'autonomie d'un droit de- lafonction publique, coûlme celle d'un droit de < puissance publique >,serait, de nos jours encore, considérée comme un privilège injustifiable etdangereux pour les droits individuels.

Aux Etats-Unis cette conception est encore renforcée par les aspirationségalitaires de la société américaine. Dans le fonctionnaire c'est la fonction

12. Cf.. J. Rrv.Eno et P. Gauonum E. Grnluo, articles précités.

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et non I'homme que l'administré respecte. La noblesse de I'emploi nedéteint pas sur la personne de son titulaire. Le fonctionnrire est traitédans la vie courante comme un citoyen ordinaire à l'égard duquel lesautres citoyens, ses égaux, ne témoignent pas d'une déférence particu-lière. Il faut noter d'ailleurs que la profession de fonctionnaire est plussoLrvent aux Etats-Unis entachée d'un préjugé défavorable que béné-ficiaire d'un prestige spécial. La fonction publique est I'instrument dupouvoir que le citoyen redoute, elle n'est pas le symbole du gouver-nement démocratique que le citoyen r,énère. L'Etat, pour employer unterme dont les Américains, de manière très significative, évitent l'usage,est I'affaire de tous. Les fonctionnaires n'ont pas mission, comme end'autres pays, d'en assurer la permanence ou la continuité. Tout, aucontraire, doit être mis en æuvre pour empêcher que les agents nomméspuissent dire ou penser : < L'Etat, c'est nous >^ Aujourd'hui encore, laprotection juridique .des agents publics en tant que tels reste'extrêmementfrêle 13. L'idée que les fonctionnaires puissent être titulaires de droitsparticuliers opposables à un employeur qui n'est autre que le peuplesouverain apparaît choquante à beaucoup d'Américains. On voit doncque la conception américaine du libéralisme condamne non ,seulement

l'idée d'un droit propre et privilégié de la fonction publique, maisrejette également I'idée plus concrète de droits particuliers des fonction-npires et d'une protection juridique des agents publics en tant que tels.

Cette conception libérale de I'Administration n'est donc pas inconci-liable avec la conception autoritaire de la fonction publique qui s'estépanouie sous la présidence de Jackson et persiste aujourd'hui encore,après la répudiation du Spoils System. Pour les Américains, I'idéaldémocratique exige que les fonctionnaires soient non seulement respec-tueux des lois mais encore soumis le plus possible au contrôle populaire.Bien que les institutions. fédérales relèvent du régime représentatif,l'esprit de la démocratie directe imprègne très fortement I'opinionpublique. Les fonctionnaires doivent être en < synpathie > avec lanation, posséder sa confrance, répondre à ses aspirations. C'est en dernierressort le peuple qui doit pouvoir les commander. Les agents publics luidoivent, ainsi qu'au régime établi, une fidélité totale. Comme aùx yeuxd'Alain, aux yeux des Américains cette institurion puissante et anonvmeque l'on appelle en France l'Administration est, a priori, suspecte. UnCivil Service isolé de la politique, neutre depuis la base jusqu'ausommet, leur apparaît peu démocratique. La foncrion publique doitêtre souple, flexible, sensible à la volonté populaire (responsive). Le sortde ses cadres, la nature de ses tâches et son style même doivent, dansune certaine mesure, dépendre du jeu électoral. C'est au Président élu etaux agents politiquement responsables devant le chef de l'Exécutif qu'ilappartient de transmettre l'impulsion iniriale. Ce serait une infraction à

13. Snr la protection juridique des fonctionnaires, cf. i,nfra, chap. VII et VIII.

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la règle de la souveraineté nationale, si les fonctionnaires étaient enmesure d'opposer à leur encontre de prétendus droits acquis ou unesorte de résistance passive.

Pour les Américains, la démocratie est < le gouvernement par lepeuple >. Il s'agit donc de permettre à ce dernier de diriger et surveilleraussi étroitement qu'il est possible l'Administration publique. On com-prend alors l'inquiétude de l'opinion devant I'expansion et la diversi-fication du Federal Service, car ce mouvement rend de plus en plusdifficile I'exercice d'un tel contrôle. Ourtre-Atlantique on a tendance,en effet, à n'envisager en ce domaine le problème de la démocratie quesous l'angle d'un contrôle externe de la fonction publique. On se

préoccupe beaucoup moins d'aménager un contrôle interne de la bureau-cratie par des moyens démocratiques qui feraient appel aux fonction-naires eux-mêmes. Ni les organismes du type des Whitley Councilsanglais, ni les commissions paritaires du type français n'ont rencontréun grand succès au sein de l'Administration fédérale. Il est importantde constater que les idées démocratiques n'ont pas agi sur l'évolutiondu régime de fonction publique dans le même sens, en France et auxEtats-Unis. Elles ont abouti, chez nous, à renforcer les garanties juridic-tionnelles contre I'arbitraire, à faciliter la démocratisation interne del'Administration. Outre-Atlantique elles ont souvent servi à justifrer lerenforcement des obligations personnelles et à légitimer un contrôlesévère des organes élus sur la fonction publique. Les expériences departicipation des fonctionnaires à la gestion des services continuent à

répugner au dogmatisme démocratique des Américains.L'imprécision de la conception actuelle de la fonction publique aux

Etats-Unis provient du heurt d'un tel dogmatisme avec le sens pragma-tique et l'empirisme anglo-saxon : les mêmes garanties statutaires,refusées au nom de la démocratie et de l'égalité, seront souvent accordéesau nom de I'efficacité, comme le montre bien le développement duMerit System. Aux Etats-Unis, la rentabilité d'une gestion est le critèred'une bonne administration quelle que soit son étiquette. L'organisationde la fonction publique fédérale a subi l'influence profonde du capita-lisme américain. Elle lui a souvent emprunté sa terminologie, sesméthodes et jusqu'à son personnel. De même qu'il n'y a pas îans lapratique de séparation rigide entre le secteur étatique et le secteurcapitaliste, de même, sur le plan de l'étude et de la recherche, l'adminis-tration publique et l'administration privée font l'objet de doctrinesidentiques et de sciences communes.

En France, au contraire, la dissociation a toujours été plus tranchée.Notre conception de I'Administration et de la fonction publique a héritéd'une tradition juridique inspirée du droit romain et marquée par lecoqporatisme médiéval. A quoi il ne faut pas manquer d'ajouter notretendance cartésienne qui nous porte à une rigoureuse logique : cheznous une théorie juridique de la fonction publique s'insère naturelle-

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ment dans le droit administratif et se détnit autour d'idées maîtresses

comme celles de < Puissance publique > et de < Service public >.

Il serait, par contre, difficile de trouver aux Etats-Unis une conceptionjurifique d'ensemble de la fonction publique. Comme l'écrit M. RogerGrégoire : < L'Américain ne considère pas l'Administration comme uneinstitution détentrice de prérogatives exorbitantes du droit commun > 14.

C'est dire par là même qu'elle ne saurait constituer, à côté du Législatif,de I'Exécutif et du Judiciaire, pour ainsi dire, une sorte de < quatrièmepouvoir > doté d'une mission autonome et d'une compétence générale.L'éminent publiciste américain White déclare : < DéÊnie d'une manièrelarge, I'administration publique est l'ensemble des opérations qui tendentà I'exécution des décisions prises pour la conduite des affaires publiques.Cette défrnition couwe une multitude d'opérations particulières dans denombreux domaines : la délivrance d'une lettre, la négociation d'unaccord, la vente d'un domaine, l'attribution d'une indemnité à la victimed'un accident du travail, la mise en quarantaine d'un enfantmalade... 15 >. Dans de telles conditions, les buts et les techniques del'administration publique ne se distinguent pas nettement de ceux desadministrations privées. Dans les deux cas, il s'agit d'aboutir à unegestion effrcace. Plus que nous, Ies Américains ont conscience que lâtâche de la majorité des agents publics ne diffère pas de celle d'un grandnombre d'employés des entreprises privées. Au lieu de souligner lesdifférences entre service public et secteur privé, ils mettent I'accent surla similitude des conditions de travail et des méthodes de gestion.

Insistant essentiellement sur les problèmes de rationalisation desméthodes de recrutement et de travail, les spécialistes de la < science deI'administration > se refusent à centrer leurs recherches sur le droitadministratif. Le point de vue juridique qui pourrait leur foumir descadres logiques d'exposition est considéré par eux comme inadéquat à

l'étude de toutes les questions d'organisation. D'orI chez eux une ten-dance très nette à limiter à son seul aspect technique l'étude de lafonction publique : dans une perspective commune qui englobe lesentreprises privées et l'Administration publique, ils s'attachent à trouverdes solutions concrètes aux multiples problèmes pratiques, relatifs àl'organisation et à la gestion du personnel, sans oublier les rapportshumains et leur incidence psychologique sur la bonne marche desservices.

Quant aux juristes, ils ne se sont pas souciés de détnir de manière

15. Leonard D. Wsrtn, Introducti,on to the Stud! of Public Admi,nistratian, N.Y.,4" éd., 1955. On voit que c'est la notion de gestion qui est le critère de l'administratifaux U.S.A. Il faut noter toutefois que dans la langue courante < Administration >désigne souvent l'équipe politique qui dirige l'Exécutif et qui comprend le personnelgouvernemental et celui qui correspond en France à la haute Administration. Le mot< gouvernement > est fréquemment employé pour désigrrer le régime politique et l'Etatlui-même.

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précise la notion de fonctionnaire et la nature juridique du lien defonction publique. On pourrait dire qu'en la matière, faute de conceptiond'ensemble, leur position reste ambiguë et paradoxalement pénétréeelle aussi d'empirisme et de dogmatisme. D'une part les grands principesde la < Rule of Law > et du droit constitutionnel se mêlent en s'oppo-sant : au nom des premiers, les juristes refusent de reconnaître un droitpropre aux agents de l'Administration, mais I'interprétation de certainesdispositions constitutionnelles les incite à dégager un ensemble de règlesrelatives à la fonction publique, un droit spécial que I'on pourraitdénommer droit des foncti.ons pwbli.qwes, car il s'attache à l'emploi beau-coup plus qu'au fonctionnaire. D'autre part, la vieille tradition juris-prudentielle anglo-saxonne de la < Common Law > continue à leurfournir des formules qui ne semblent plus correspondre à la réalitéactuelle. Une foule d'employés anonymes submerge aujourd'hui lesanciens publics officers auxquels les textes et les arrêts des cours conti-nuent à faire allusion. EnÊn si la tradition américaine du Merit Systema donné naissance à une réglementation abondante et touffue, il n'existepas de texte pouvant être considéré comme un statut d'ensemble déÊnis-sant l'organisation de la fonction publique et établissant une sorte decharte du fonctionnaire.

D'ailleurs les garanties juridiques reconnues aux agenrs publicsrestent sommaires : cette carence s'explique peut-être par la jeunesse dudroit administratif américain qui, dans l'état actuel de son évolution, estun système réglant, selon l'expression de M. Schwartz, < les seulsmpports entre l'Administration et le simple citoyen 16. >

Les problèmes juridiques sont donc abordés par les juristes de façontrès dispersée. En tant qu'ils se rattachent à la description et à I'aména-gement des pouvoirs, ils sont étudiés dans le droit constitutionnel aumême titre que I'organisation des partis. En tant qu'ils sont l'objet d'uneréglementation propre, ils relèvent d'une étude très spécialisée que lespublicistes américains ont coutume de nommer < Civil Service Law > 1?.

Il ne faut pas s'étonner de cette absence de vue synthétique. Elle estconforme aux méthodes juridiques américaines, mais elle renferme unesignificatron plus profonde dans l'ordre même des faits. Il serait hasardeuxde parler à l'heure actuelle d'une fonction publique fédérale commed'un ensemble cohérent, juridiquement et sociologiquement très délimité.Le Civil Service américain est en perpétuelle évolution, ses incessantestransformations ne permettent guère d'en prévoir les développementsultérieurs. Son régime n'est pas une construction logique charpentée pardes légistes, mais bien plutôt l'ceuvre empirique de réformateurs poli-tiques et d'organisateurs soucieux, les uns, de garantir l'intégrité c-t Ia

16. Scnwenrz, op. cit., p. 9. Cf. aussi K.C. Dtvrs, Ad,mùtistathte Law, 1951, p. 3.

17. < Droit de la fonction publique >, bien qu'il ne concerne en fait que les disposi-tious législatives relatives au statut du person:rel fédéral.

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pureté de la démocratie, les autres, de promouvoir l'eftcacité dessgrv-ices publics. Sa complexité traduit sa croissance rapide et la jeunessede la nation américaine. son originalité est le reflet

-de son hiitoire et

du milieu social où elle a pris naissance.une analyse descriptive du système actuel serait donc, ici, insuftsante

et vaine. Elle doit être replacée et située dans son contexte historique etsocial, politique et constitutionnel. Tel est le but des deux premierschapitres qui voudraient servir à éclairer cette difficile question, et sans

ttqy"\ il serait impossible de saisir la narure exacte du regime duCivil Service fédéral.

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I LUCIEN FEBVREMembre de I'Institut

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ALFRED GROSSER

tA DEMOCRATIE DE BONN(1ele - 1e57)

Depuis longtemps, le problème allemand est au centre des préoccupa-tions françaises. Mais, aujourd'hui, notre curiosité à l'égard de I'Allemagnes'interroge sur les causes d'une stabilité politique et d'une santé écono-mique que nous regardons avec étonnernent, parfois avec envie. Parailleurs, les perspectives neuves du Marché Commun nous font uneimpérieuse nécessité d'établir une connaissance vraie de notre partenaire.Au fait, I'Histoire allemande n'est pas plus figée dans le succès en 1958qu'elle ne l'était dans le marasme en 1945.

Ce tableau politique, économique et social que nous donne AlfredGrosser de I'Allemagne de l'Ouest d'aujourd'hui n'est pas statique : lescontinuités et les discontinuités d'une évolution, les chances et les risquesy sont rigoureusement indiqués.

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Iarmand I aCOTIN

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