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  • LA FINANCE ISLAMIQUE : IMPACT FISCAL

    Par Yahia AMNACHE- Socit dAvocats BOZETINE AMNACHE-HALLAL Economie du 19 au 25 mai 2008.

    La finance islamique a t considre pendant des annes comme un piphnomne intressant quelques tablissements financiers spcialiss des pays du Golfe, Pakistan et Malaisie. Il savre quelle recle un potentiel important suscitant un engouement de la part des banques occidentales.

    En effet, selon lagence de notation financire Moodys, la part de la finance islamique serait de 700 milliards de Dollars.

    Certains Etats ont adopt les techniques y affrentes en proposant des produits financiers compatibles avec les prceptes de la loi coranique (Chariaa).

    Celle-ci ne considre pas largent comme un bien pouvant gnrer par lui-mme des revenus du fait de lcoulement du temps comme dans la finance conventionnelle.

    En dautres termes, les prts dargent ne peuvent pas tre rmunrs par application dun taux dintrt, lusure tant prohibe en Islam.

    Cependant, le prteur, peut tre rmunr indirectement par les revenus gnrs par les biens ou lactivit financs.

    La structure des montages financiers islamiques fait que plusieurs transferts de proprit sont ncessaires pour financer une opration do des doubles taxations en matire de droits denregistrement, taxes notariales et droit de mutation titre onreux.

    Une mme opration finance dans la cadre de la finance conventionnelle subirait une seule imposition do un prix de revient infrieur, factur au client.

    De plus, compte tenu de la particularit des financements islamiques, le prteur ou la banque, peut tre impos en matire dimpt sur le revenu. Quant aux paiements effectus par lemprunteur ; ils sont susceptibles dtre soumis la taxe sur la valeur ajoute, (TVA).

    Quen est-il par ailleurs de lincidence des conventions fiscales sur les oprations finances selon les techniques islamiques ?

    Le problme, peut, en effet se poser ds lors que lemprunteur et linstitution qui finance lopration rside ou se situe dans des pays lis par une convention fiscale tendant liminer les doubles impositions et lutter contre la fraude et lvasion fiscales.

    1- Produits financiers islamiques et fiscalit interne

  • a- Les crdits immobiliers islamiques (MOURABAHA)

    La formule de la MOURABAHA, permet aux particuliers daccder la proprit dun bien immobilier. Elle suppose lachat par la Banque du bien avant de le revendre son client.

    Le bien immobilier fait donc lobjet dune double transaction do des frais supplmentaires supports par le client.

    En effet, les honoraires du notaire, la taxe notariale et les droits denregistrement sont exigibles une premire fois lors de lacquisition du bien par la Banque et une deuxime fois lors de sa revente au client. En plus, de ces frais et taxes, le client supporte la marge bnficiaire de la banque.

    Pour viter le renchrissement du prix du bien, la solution la plus simple serait dexonrer le 1er transfert de proprit des droits denregistrement et taxes notariales.

    Ainsi, la banque acquiert le bien destin la revente en exonration des droits et taxes. Le bien financ sera soumis limpt lors de sa revente au client.

    Cette solution est adopte dailleurs par certains pays dont lAngleterre qui a supprim le double droit de timbre. Ce pays, pionnier en la matire, compte devenir un centre mondial de la finance islamique

    b- La location - vente, (IJARA WA IKTINA).

    La banque finance dans ce cas pour le client un bien meuble ou immeuble. Le client sengage, en vertu du contrat, payer des mensualits sur un compte dinvestissement qui lui permettra dacqurir le bien.

    Il y a galement en la matire, une double transaction donc potentiellement une double perception des droits de mutation et de taxe sur la valeur ajoute.

    Les mensualits calcules en tenant compte du prix dacquisition et de la marge bnficiaire de la banque supportent la taxe sur la valeur ajoute.

    Lapplication de la TVA aux mensualits exigibles dans ce cas, alourdit considrablement le prix ds lors que cette taxe ne sapplique pas seulement la marge bnficiaire.

    Les administrations fiscales des Etats dont les lgislations ne sont pas adaptes la finance islamique, considrent une telle opration comme une transaction commerciale do lapplication dun taux suprieur celui applicable aux oprations bancaires.

    Ainsi, elles appliqueraient le taux normal de la TVA aux mensualits de financement sur le principe de lIJARA WA IKTINA, au lieu du taux rduit applicable aux oprations bancaires.

    Or, ce sont toujours les banques centrales qui en sont les rgisseurs puisque ces produits sont proposs par des tablissements bancaires. Dans le cadre de cette opration, il y a galement un double transfert de droit de proprit puisquil sagit dune location avec option dachat. La banque achte le bien et le revend au

  • client.

    Sagissant des droits denregistrement et timbre, il convient dadopter la premire solution qui consiste exonrer lachat du bien par la banque des droits et taxes.

    En effet, lopration ne devrait subir quune seule imposition. Celle-ci doit tre exigible lors de la revente du bien par la banque.

    Par ailleurs, la qualification juridique donne cette opration induit lapplication du taux normal de TVA. En effet, elle est assimile une opration commerciale.

    Sagissant dune opration finance par un tablissement de crdit, il serait judicieux de la qualifier juridiquement dopration bancaire. Dans ce cas, il serait fait application du taux rduit de la taxe prcite, videmment infrieur au taux normal.

    Lautre solution qui pourrait viter le surcot ou du moins lattnuer, consisterait appliquer la TVA sur la marge bnficiaire seulement.

    En somme, loptimisation fiscale dun financement islamique ncessite une approche adapte de ladministration fiscale du pays o le projet est ralis pour qualifier un tel montage dopration de banque ou de prt. Dans ce cas, le montant des impts payer serait proche de celui exigible loccasion dun montage de crdit classique.

    c- LES SUKUK ou obligations islamiques.

    Les SUKUK sont des produits obligataires islamiques (emprunts obligataires). Il sagit doprations financires par lesquelles lEtat ou un organisme public ou priv met des obligations en contrepartie des sommes empruntes.

    En dautres termes, lobligation est un titre ngociable qui matrialise lengagement dun emprunteur envers un prteur qui, en contrepartie, met les fonds sa disposition.

    Cet engagement est consacr par un contrat dmission qui dfinit les caractristiques de lemprunt, les modalits de remboursement des fonds et le mode de rmunration du prteur.

    A la diffrence des obligations classiques, les SUKUKS nont pas de taux dintrts mais rapportent celui qui y souscrit une part de bnfices gnrs par les actifs financs.

    Les obligations islamiques ne sont donc pas des titres de dette, mais des titres de proprit de lactif financ. Ces titres permettent de percevoir des paiements rguliers et de recouvrer le capital investi.

    A titre dexemple, le Pakistan a mis un emprunt sous la forme dun SUKUK afin de financer la construction dune autoroute. Les droits de page ont servi garantir les remboursements des emprunts.

    Le dveloppement des produits islamiques obligataires est conditionn par la fiscalit applicable en la matire.

  • LAngleterre soucieuse de devenir un centre mondial de la finance islamique a align les rgles dmission des SUKUKS sur celles des obligations conventionnelles.

    Cest ainsi que les exemptions fiscales dont bnficient les socits mettant des bons de trsor ont t largies aux obligations islamiques.

    d- LA MOUCHARAKA, (ASSOCIATION)

    Il sagit dune opration de capital investissement qui permet un tablissement bancaire de prendre une participation dans le capital dune socit en vue de raliser un profit.

    Les pertes et les bnfices ventuels sont rpartis entre la Banque et le client sur la base de la mise de chacun ou selon les modalits prvues par la convention.

    La fiscalit ne devrait pas poser de problmes ce montage financier. En effet, la socit et ses associs seront soumis limpt sur le revenu ( impt sur les socits ou impt sur le revenu des personnes physiques selon le cas).

    e- LA MOUDARABA

    Cette technique permet dassocier un capital avec un apport industriel. Dans ce cas, ltablissement bancaire finance le projet et le client apporte son expertise et ses comptences en matire de gestion.

    La banque est rmunre par lapport en capital. Quant au client, il peroit un revenu en contrepartie de son travail ou expertise.

    La structure de ce montage et les revenus gnrs ne devraient pas galement se heurter la fiscalit, la banque et le client tant imposs en matire dimpt sur le revenu dans les conditions de droit commun.

    2- Finance islamique et conventions fiscales internationales.

    Les conventions fiscales sont des accords internationaux conclus entre deux ou plusieurs pays. Elles visent viter la double imposition et lutter contre la fraude et lvasion fiscales.

    Ainsi, elles dterminent leurs champs dapplication en visant les impts et revenus prvus par les lgislations fiscales internes des pays signataires.

    La qualification des oprations ralises par le contribuable revt un caractre important dans la mesure o elle dtermine la nature des impts appliquer.

    Du point de vue du droit fiscal franais et de ceux des Etats du Maghreb qui sen inspirent largement, le prteur islamique peut tre assimil un vendeur ou un bailleur selon le cas.

    En effet, dans la MOURABAHA par exemple, il est mis en place un contrat dachat et de revente dans lequel la Banque achte un fournisseur un bien la demande de son client.

  • Le prix de revente est constitu du prix dachat augment dune marge bnficiaire. Dans ce cas, au regard du droit fiscal franais et du Maghreb, le prteur peut tre assimil un vendeur.

    Il sensuit que lopration reoit la qualification de simple opration commerciale (achat/revente), non celle dopration bancaire.

    Dans le cadre de LIJARA (crdit bail) qui permet la Banque dacheter un bien afin de le louer son client avec option dachat, la banque peut tre considre comme un bailleur. Les paiements raliss dans ce cadre seront traits fiscalement en fonction de la qualification juridique retenue.

    A titre dexemple, les paiements verss dans le cadre dun financement en France dune opration selon les techniques islamiques, par un organisme bancaire situ dans un Etat li par une convention fiscale la France peuvent tre soumis la TVA.

    En effet, ladministration fiscale franaise peut assimiler ces paiements des loyers verss dans le cadre dun crdit bail. Pour le pays o se trouve linstitution bancaire, les paiements perus par cette dernire peuvent tre considrs comme des revenus imposables.

    En prsence dun financement conventionnel, de tels paiements verss une socit trangre, en loccurrence linstitution bancaire feraient lobjet dune retenue la source.

    Le montant de cette retenue la source viendrait en dduction de limpt payer dans lautre Etat contractant en appliquant la technique du crdit dimpt. Ainsi, dans ce cas, la double imposition est limine. Il sensuit que les mthodes dlimination de la double imposition (crdit dimpt ou exemption), prvues par les conventions fiscales ne peuvent trouver application quen cas dadaptation de la fiscalit interne la finance islamique.

    En effet, dans lexemple prcdent, si lopration navait pas t qualifie de crdit-bail par ladministration fiscale franaise, les paiements nauraient pas t grevs de taxe sur la valeur ajoute. Ils auraient subi une retenue la source au titre des revenus verss une socit trangre ou une personne fiscalement non domicilie en France.

    La retenue la source viendrait en dduction de limpt payer par linstitution financire situe dans lEtat contractant, en vertu de la technique du crdit dimpt prvue par la convention fiscale pour liminer la double imposition. ---------------La finance islamique, dope par la manne ptrolire, prsente dexcellentes perspectives. Il nest donc pas douter que les banques sattelleront adapter leurs produits pour attirer les liquidits prsentes dans les pays ptroliers musulmans. Sagissant de la fiscalit, les pouvoirs publics devraient y apporter les amnagements ncessaires en vue de ladapter aux montages de la finance islamique et dviter les doubles taxations.

    En effet, dautres pays devraient marcher sur les traces de la City (Angleterre) pour esprer une part dun march, considr dsormais comme prometteur.

    LA FINANCE ISLAMIQUE: IMPACT FISCAL