l enseignement du français au secondaire qualifiant : littéraire ou fonctionnel ?

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Universit Mohamed Premier Oujda Facult des lettres et sciences humaines Master didactique des langues et communication

Enseignement du FLE au secondaire qualifiantMmoire de fin dtudes

Prpar par : Amine Moussa

Encadr par : Mr Mohammed Bouderdara

___________________ Anne universitaire 2010 2011 _________________

Je tiens remercier respectivement tous ceux qui mont aid, soutenu et encourag pour la ralisation de ce modeste travail :

Monsieur

Mohamed

Bouderdara

pour

sa

direction, ses orientations et sa comprhension. Monsieur Jaafar khalid pour ses prcieux conseils. Mes parents pour leur aide et leur soutien tout

au long de mon cursus universitaire. Toute personne qui ma aid, de prs ou de loin, la ralisation de ce modeste travail. Tous mes professeurs pour leurs enseignements.

MERCI DE TOUT MON CUR

Je ddie ce modeste travail mes parents, mes grands-parents, mes oncles, mes tantes, mes deux frres et ma sur.

A tous mes amis y compris les tudiants du master didactique des langues et communication - promotion 2010-2011

A toute personne qui trouvera intrt dans ce travail.

SoIntroduction gnrale . 7

I.

Paysage linguistique de lcole marocaine 1. Introduction .. 10 2. Le Maroc, un pays plurilingue .. 11 3. Statut rel de franais a. Dans le milieu socio-conomique . 14 b. dans le systme scolaire marocain .. 15 4. Des enjeux didactiques . 17 5. Conclusion. 22

II.

Enjeux stratgiques pour lenseignement du FLE au secondaire qualifiant : tude des documents officiels

1. Introduction ... 25 2. Orientation et articulation des cycles denseignement 26 3. Le systme dvaluation 29 4. Enseignement du franais / franais denseignement .. 32 5. Gestion du capital humain . 35 6. Rvision et articulation des programmes 37 7. Conclusion . 39

III.

uvres intgrales et enseignement du franais fonctionnel 1. Introduction ... 43

4

2. Quelles mesures pour lintroduction des uvres littraires dans lenseignement du franais au lyce 2.1. Le projet pdagogique : quelques lments de rflexion..... 45 2.2. Lapproche par comptence . 53 2.3. Progression en tronc commun .. 68 2.4. Progression en premire anne baccalaurat ... 78 2.5. Progression en deuxime anne baccalaurat .. 87 2.6. Commentaires ... 94 3. Place et rle de la littrature maghrbine dexpression franaise ... 97 4. Approche contextuelle de lenseignement du franais au lyce ... 101 5. Conclusion ... 108

Conclusion gnrale .. 110 Bibliographie . 114

5

6

o

o

Dsormais, il est unanimement reconnu que le niveau de nos lves est en chute perptuelle et que lcole marocaine souffre dun dficit surtout en matire des langues. Pour en tre convaincu, on a qu jeter un coup dil sur les rsultats de nos lves en matire de franais de tous les niveaux. Cest la catastrophe ! Pourtant, la maitrise du franais, une poque telle que la ntre, o on voit jaillir des concepts comme mondialisation , interculturel , village plantaire , libre change ou internationalisation dentreprises , une poque o les nouvelles technologies de linformation et de la communication ont fait la conqute de tous les foyers, les coles, les administrations, la matrise des langues, en premier lieu le franais, pour son statut privilgi dans la carte des langues prsents dans le march linguistique marocain, puis langlais qui vient faire sa rentre en force en tant que langue des grandes firmes des groupes internationales, langue de la technologie et de la promotion sociale, reste un atout fondamental. Nanmoins, notre systme ducatif, qui est en tat de crise, narrive pas apparemment rpondre aux besoins de notre jeunesse. Mme les efforts consentis pour y remdier semblent inefficaces. Ainsi, il est temps de tirer le signal dalarme pour sauvegarder notre cole publique, victime dun systme ducatif faible et strile, systme qui prne des mthodes traditionnelles quoique les textes officiels prconisent ladoption de mthodes actives et nouvelles. Contrairement ce quannoncent les discours officiels, et faute de moyens didactiques et pdagogiques, la majorit de nos enseignants recourent des mthodes purement traditionnelles, incapables de rpondre aux besoins et7

attentes de nos lves qui vivent dans un monde soumis des changements perptuels sur le plan cognitif et socioculturel 1. Dans cette perspective, le Maroc sest engag dans un projet de rforme, qui sest tal sur dix ans, puis dans un programme durgence qui avait pour but de rattraper le retard accumul durant lexcution de la rforme. Lobjectif majeur, ou plutt le slogan, de cette rforme tant de placer lapprenant au centre de laction pdagogique. Ce qui, naturellement, exigeait des modifications assez profondes dans les dmarches, les contenus et les mthodes denseignement. La rforme, engage par le ministre de lducation nationale, vise le dveloppement dun enseignement de qualit sappuyant sur nos constantes civilisationnelles et culturelles, cet enseignement se veut une prparation efficiente des tudes suprieures russies et/ou un tremplin pour une insertion aise des jeunes dans le march du travail et leur ancrage dans les valeurs humaines universelles 2. Ainsi, depuis la rentre scolaire 2002 2003, en matire de FLE, on a remplac le manuel scolaire par la programmation duvres littraires qui devront tre le support de toutes les activits denseignement / apprentissage. Aussi, on a introduit les outils de lecture du texte littraire. Pourtant lobjectif majeur reste denseigner la langue , et non le contenu littraire. Ce dernier nest quun support, un outil, une passerelle pour faire acqurir aux apprenants la comptence communicative. Mais, ne serait-ce pas une absurdit ? Pour pntrer au sens de luvre, pour que celle-ci serve bon escient, ne faudrait-il pas que la comptence

1 Abdelali Bouha, La crise de lcole publique marocaine: Russir ou Prir ? http://www.aljamaa.net/fr/document/432.shtml interrog le 17/09/2011 2 Ministre de lducation nationale, Orientations pdagogiques pour lenseignement du franais dans le cycle secondaire qualifiant, 2005

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linguistique soit dj acquise ? Aussi, en programmant de la littrature, somme nous toujours inscrit dans une logique de franais langue trangre ? Est-ce que enseigner la littrature est le seul remde quon peut assigner notre enseignement de franais dfaillant ? Est-ce quelle permet un enseignement qui puisse prparer des tudes suprieures russies ? Que devrions-nous faire pour porter remde ce problme denseignement des langues et surtout du franais ? Si le retour du texte littraire dans les programmes du lyce constitue un tournant dcisif dans la dmarche ducative de lenseignement du franais, ses soubassements ne restent-ils pas fortement dbattre ? Autant de questions auxquelles nous allons essayer de rpondre en interrogeant, en premier lieu, le paysage linguistique marocain afin dlucider les rapports de force qui existent entre les diffrentes langues prsente, et la complexit de la tche de lcole quant la gestion de ce multilinguisme, puis le statut de la langue franaise et son inscription dans une logique de FLE ou de FLS, une lecture de quelques documents officiels, et enfin lapanage didactique et pdagogie de la mise en uvre ainsi que ladaptabilit des uvres programmes aux contextes socioculturel et linguistique des lves en question.

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I.

Paysage linguistique marocain

1. Introduction La situation linguistique Marocaine est lune des plus complexes mais aussi des plus originales du monde arabe : prsence de plusieurs langues qui font du paysage linguistique marocain un exemple type de langues en contact, situation qui rsulte de lhistoire caractrise par la domination des peuples aussi nombreux que divers : Phniciens, Romains, Vandale, Arabes, Portugais, Espagnols et les Franais. Mais si plusieurs dentre eux nont pas laiss de traces vritablement importantes dans le comportement linguistique de la population, les Arabes au VIIIme sicle, les Espagnols et les Franais plus rcemment ont marqu et continuent encore de marquer le paysage linguistique du pays. Aujourdhui, plusieurs langues et plusieurs varits de langues constituent le march linguistique : larabe avec toutes ses varits classique et dialectales, le berbre ou amazighe (langue des populations les plus anciennement identifies en Afrique du Nord) avec ses trois dialectes, le tarifite, le tachelhite et le tamazighte, le franais, et dans une moindre mesure lespagnol (ces deux dernier tant des langues conqurantes, implantes par les protectorats), et enfin langlais, langue de la mondialisation de plus en plus prise. Dans ce cocktail linguistique, cette coexistence de langues ne gnre-t-elle pas une guerre de langues pour reprendre les termes de J. Calvet ? Quel est le statut rel de chacune de ces langues ? Et surtout quelle place occupe le franais parmi les autres langues concurrentes tant au niveau scolaire et ducatif quconomique et social ?

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2. Le Maroc, un pays plurilingue : Avant tout, il convient de signaler quune certaine confusion rgne dans lusage aussi bien gnral que spcialis puisque les termes plurilinguisme et multilinguisme sont souvent utiliss comme synonymes mais parfois ils sont distingus. Selon certains crits, le plurilinguisme et le multilinguisme employs de manire synonymique seraient rservs la description de situations de coexistence de langues, de pluralit de communauts linguistiques sur un territoire donn, quel que soit le statut de ces langues. Il rfre galement au rpertoire de varits linguistiques que peuvent utiliser les locuteurs en incluant la langue maternelle / premire et celles acquises ultrieurement, quel que soit leur statut lcole et dans la socit. Lducation plurilingue renvoie lusage rglement et planifi de lenseignement des langues lintrieur dun systme ducatif, visant renforcer les comptences linguistiques des locuteurs tout en respectant le principe de la diversit linguistique et culturelle. Parfois des distinctions sont introduites et le multilinguisme ne qualifiera pas la connaissance multiple de plusieurs langues par un mme locuteur. Rcemment, et suite aux diffrents rapports du Conseil de lEurope au sujet des langues3, la distinction suivante est apporte : Le multilinguisme renvoie la prsence, dans une zone gographique dtermine quelle que soit sa taille plus dune varit de langue , cest--dire de faon de parler dun groupe social, que celles-ci soient officiellement reconnues en tant que langues ou non. A lintrieur dune

3 http://www.coe.int/t/dg4/linguistic/division_fr.asp interrog le 13 mars 2011

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telle zone gographique, chaque individu peut tre monolingue et ne parle que sa propre varit de langue ; Le plurilinguisme se rapporte au rpertoire de langues utilises par un individu ; il est donc, en un sens, le contraire du multilinguisme. Ce rpertoire englobe la varit de langue considr comme langue maternelle ou premire langue , ainsi que toute langue ou varit de langue dont le nombre peut tre illimit. Ainsi certaines zones gographiques multilingues peuvent tre peuples la fois de personnes monolingues et de personnes plurilingues. Une personne plurilingue possde : o un rpertoire de langues et de varits linguistiques o des comptences de nature et de niveau diffrents selon les langues On relvera avec intrt que la Commission Europenne a prsent en 2009 des conclusions relatives aux langues et lducation (Cf. Conclusions du Conseil du 12 mai 2009 concernant un cadre stratgique pour la coopration europenne dans le domaine de lducation et de la formation Education et Formation 2020 et llaboration dun programme stratgique en faveur du multilinguisme 4). On tend de plus en plus spcialiser les termes multilinguisme, multilingue pour rfrer la pluralit des langues prsentes sur un territoire et dans une socit et les termes plurilinguisme, plurilingue pour rfrer aux individus possdant une matrise variable de plusieurs langues. Un territoire multilingue peut comporter des individus monolingues et des individus plurilingues peuvent exister lintrieur dun territoire unilingue.

4 Voir le portail : http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:C:2009:119:0002:01:FR:HTML

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Aussi, il faudrait introduire une distinction entre une situation linguistique de droit et une situation linguistique de fait : le plurilinguisme / le multilinguisme caractrisant le Maroc concerne les usages observs concrtement qui relvent du fait. Cette situation de fait nest point comparable celle de droit ; la Suisse, par exemple, est considre comme un pays plurilingue, au regard de son rgime confdr et au statut juridique de ses langues officielles. Larticle 70 (1990) du texte constitutionnel suisse stipule dans lalina 1 que : les langues de la Confdration sont lallemand, le franais et litalien. Le romanche et aussi langue officielle pour les rapports que la Confdration entretient avec les personnes de langue romanche. Ces langues sont fortement territorialises : ds que lon change de canton (unit territoriale suisse), on change aussi de langue. Ceci sans oublier que trois parmi les langues officielles de la Suisse bnficient dun statut officiel dans dautres pays et constituent ainsi des langues de grande diffusion. Le Maroc nest pas dans cette situation qui du reste, ne lui conviendrait pas au vu de son paysage linguistique. Il est caractris comme plurilingue de fait, en raison de la pluralit des varits maternelles (arabes et amazighes) aux cts des langues officielles (larabe et lamazighe) et les langues trangres (le franais et lespagnol essentiellement, puis langlais), plus au moins bien appropris par les populations mais suffisamment ancrs dans leurs parlers via lemprunt et les mlanges. Le plurilinguisme marocain de fait est donc issu de ces usages varis, manant : Dun ct, des langues maternelles caractre social, reprsentes par les parlers arabes : montagnard (par exemple des Jbala du Rif occidental), les parlers bdouins des plaines (Chouia, Abda, Doukkala, Gharb, Sais,

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etc.), les parlers urbains des villes rcentes (dont le prototype est Casablanca), les parlers citadins caractre andalous de certaines villes anciennes (Rabat, Fes, Ttouan, etc.), les parlers Hassania des provinces du Sud, les parlers Amazighes des trois groupes dialectaux : tachelhit tamazight et tarifit. Dun autre ct, des langues de scolarisation dont la langue majeure est larabe (standard), le franais est la fois langue enseigne (ds la deuxime anne du primaire et tout au long du cursus jusquau baccalaurat) et langue denseignement (pour les matires techniques dans certaines branches du cycle secondaire qualifiant et dans le suprieur ; les autres langues trangres (langlais, lespagnol, lallemand, litalien, etc.) figurent aussi dans les cursus scolaires et universitaires mais des degrs divers.

Ainsi, on peut effleurer la complexit de la situation sociolinguistique de lcole marocaine tant au niveau de la gestion de loffre linguistique et culturelle des langues maternelles, engendre par ce statut de multilinguisme, qu la maitrise de la concurrence entre les diffrentes langues et varits de langues qui circulent au sein de lcole mme. Ce qui nous amne interroger de plus prs le statut de la langue franaise par rapport au reste des langues vhiculaires lintrieur du mcanisme linguistique marocain.

3. Le statut rel de la langue franaisea. Dans le milieu socio-conomique

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Le caractre francophone du Maroc est un fait indiscutable, tant la langue franaise est partout prsente, dans les affiches publicitaires, les restaurants, les mdias, les documents officiels, de mme quautant de secteurs font de la langue franaise la langue privilgie, et si leurs crits ne sont pas exclusivement en franais, ils sont au moins bilingues. Dsormais, avec lavnement du thme de mondialisation, la signature des conventions de libre change avec un nombre de pays, principalement avec les Etats Unis dAmrique et lEurope occidental, et linternationalisation des entreprises, langlais vient faire son entre en force dans les secteurs socioconomique et professionnel marocains, et si le franais faisait la langue choye, dornavant cest la maitrise de langlais, ct de la langue franaise, qui fait lenjeu crucial de linsertion professionnelle des nouveaux laurats. Cela explique bien pourquoi certaines entreprises, par exemple, prvoient des plans de formation pour alphabtiser leurs personnels en franais ou en anglais, alors mme que ces employs ne sont pas alphabtiss dans leur langue maternelle. Ainsi simpose la question denseignement / apprentissage des langues et se prsente comme critre pour assurer un enseignement galitaire et quitable. Dans un march demploi assez exigeant, la maitrise du franais oral et crit en premier lieu, et langlais en second lieu, constitue donc un atout important, sinon dcisif.

b. Dans le systme scolaire marocain

Lenseignement au cycle fondamental, de la premire anne du primaire jusquau baccalaurat, est dispens en arabe classique. Cette situation actuelle15

reste le fruit de la politique darabisation qui a t applique aprs lindpendance pour bannir toute forme de persistance coloniale. Larabisation des mathmatiques dans les dernires classes de lyce stait acheve en 1989. Jusqu cette date, lenseignement des disciplines scientifiques tait assur en langue franaise, ce qui offrait aux lves lopportunit de se mettre dans un bain linguistique qui leur permettait de se confronter, dans des situations relles, lusage effectif de la langue et confrait notre systme denseignement un vrai caractre bilingue. Seulement, le franais nest plus, depuis lors, langue denseignement dans tout le cycle fondamental quoiquil est prserv comme tel dans lenseignement suprieur des disciplines scientifiques et techniques. Depuis la rentre scolaire de 2004, lenseignement du franais, qui ne commenait qu la troisime anne du cycle primaire, a t introduit une anne aprs larabe standard. Enseigner le franais partir de la deuxime anne du primaire ne peut que rvler, dune part, la srieuse intention politique de fortifier et consolider laccs la langue, de lautre part, le statut privilgi de la langue franaise au sein de notre systme ducatif. Ainsi, un lve de baccalaurat aurait accumul onze annes denseignement de franais, ce qui, en thorie, devrait largement suffire pour lui permettre de faire face aux exigences de sa future carrire professionnelle. Pourtant les rsultats escompts tmoignent de linsuffisance de cet effort consenti. La question qui se pose donc est de savoir comment expliquer quun tel cursus, suivi sur onze annes conscutives, ne permette pas aux tudiants daffronter avec srnit des tudes suprieures en franais ? Les rponses sont multiples, et elles ne sont sans doute pas toutes chercher au sein de linstitution scolaire. Pourtant, on ne peut nier que certains lves atteignent un bon niveau de maitrise de la langue franaise, pas ncessairement les enfants des lites16

francophones, frquentant les meilleures coles prives ou encore le rseau des tablissements franais, mais on en trouve de toutes les tranches sociales, nanmoins cette portion de leffectif des lves reste trs limite si on ne tient pas la qualifier de ngligeable . Aussi, le nombre de locuteurs du franais, tous les niveaux confondus, est en nette augmentation consquence immdiate de lallongement de la dure de la scolarisation mais les chiffres cet gard font plutt dfaut puisquil faudrait prciser ce quon voudrait dire par locuteurs de franais . Il sagit, dans la majorit des cas, dun franais mlang larabe (dialectal) ou insr comme tel dans la tradition et les rituels de la communication quotidienne. La qualit ne peut se substituer la quantit et si le nombre de locuteurs augmente, la qualit reste la mme, si on noserait pas dire quelle est en baisse sensible. En effet, la comparaison tablie avec les gnrations ayant suivi des tudes secondaires partiellement en franais, jusquau dbut des annes 1980, ne peut tre que dfavorable. Pour les dnigreurs de larabisation du systme ducatif, cette baisse de niveau en est la consquence immdiate. Nanmoins nous pensons que le faible rendement de lenseignement du franais est tributaire dautres facteurs, rechercher dabord dans les choix didactiques.

4. Des enjeux didactiques Daprs ce quon vient dlucider propos du statut de la langue franaise, on peut constater que la langue franaise: Ne revt pas un caractre officiel ; quoiquon puisse sentir sa forte prsence dans les administrations et ses services annexes, les17

mdias, la ralit quotidienne pourtant, elle est une langue trangre. Est la langue privilgie, plus ou moins approprie par les marocains et la langue de la bourgeoisie sociale. Est la fois langue enseigne (objet denseignement) durant le cycle fondamental et langue denseignement (outil denseignement) des disciplines scientifiques et techniques au suprieur, ainsi que des matires techniques dans certaines sections du secondaire qualifiant. Ainsi, on peut sentir limportance de la langue franaise dans la panoplie des langues qui coexiste dans le cadre gographique marocain. Aucune autre langue ne jouit de ce statut privilgi. Question : est-ce que lenseignement de la langue franaise devrait vraiment sinscrire dans une logique de Franais Langue Etrangre (FLE) ou plutt dans celle de Franais Langue Seconde (FLS) ? Pour rpondre cette question, il est indispensable de revenir sur les distinctions entre les deux notions.

Franais Langue Etrangre (FLE)

Le franais est une langue trangre pour ceux qui ne lont pas, ou qui ne le reconnaissent pas, comme langue maternelle, et pour ceux qui en font lobjet dun enseignement des non-natifs.

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La

langue

trangre

est

caractrise

par

une distance

matrielle/gographique, culturelle, linguistique et mme psychologique par rapport la langue considre comme maternelle 5.

Franais Langue Seconde (FLS)

Ce concept s'applique quand la langue franaise dispose d'un statut particulier dans certains pays francophones, dont les anciennes colonies, et s'accompagne dune pratique plus ou moins importante par toute ou partie de la population. En didactique, le franais langue seconde est la langue trangre qui joue un rle spcifique dans le dveloppement mental de lindividu, travers son comportement langagier, notamment dans les apprentissages scolaires 6. En matire de didactique, on pourrait faire la distinction suivante : FLE : La slection des notions et des actes de paroles sont cibls sur les besoins spcifiques des apprenants. Laccent est mis sur loral, sur la familiarisation avec la culture franaise, ainsi que sur des objectifs communicationnels dordre pratique (se prsenter, demander son chemin etc.). On apprend le FLE souvent de manire facultative. FLS : La culture dorigine des apprenants est prise en compte, ainsi que la langue officielle du pays ou la LM des apprenants, en fonction du statut de celles-ci dans le systme ducatif concern. Laccent est mis davantage sur les pratiques scolaires classiques, comme lcriture et la mmorisation, associes des activits de communication, mais les choix mthodologiques ne sont pas toujours aussi nets quen FLE. Le FLS est le plus souvent obligatoire. 7

5 http://clefle.e2id.com/grains/d311/fle_fls_et_flm__dfinitions_et_caractristiques.html interrog le 17/09/2011 6 Idem 7 Idem

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Ainsi on peut ainsi tracer le tableau suivant : FLE apprenants o Laccent est mis sur loral et sur la familiarisation avec la culture franaise, o On vise des objectifs communicationnels dordre pratique o Lapprentissage souvent facultatif du FLE est FLS dorigine des apprenants, ainsi que la langue officielle du pays ou la LM des apprenants o Laccent est mis davantage sur les pratiques comme scolaires lcriture associes le classiques, et la des plus

o On cible les besoins spcifiques des o prise en compte de la culture

mmorisation, o Le FLS est

activits de communication. souvent obligatoire

En homologuant ces distinctions avec ce quon a pu relever dans la parie prcdente, il est clair que linscription de notre enseignement dans une logique de franais langue trangre reste une aberration. Selon les recommandations pdagogiques, la rforme, engage par le ministre de lducation nationale, vise le dveloppement dun enseignement de qualit sappuyant sur nos constantes civilisationnelles et culturelles, cet enseignement se veut une prparation efficiente des tudes suprieures russies et/ou un tremplin pour une insertion aise des jeunes dans le march du travail et leur ancrage dans les valeurs humaines universelles dans le souci de dispenser un enseignement/apprentissage rpondant de manire efficace, la fois, aux besoins des publics du cycle qualifiant, du march du travail et de lenseignement suprieur, le curriculum se doit de doter les lycens de comptences de communication susceptibles de faciliter leur intgration ;20

portant la seule recette quon offre nos lves en matire de franais reste assez pauvre, et ne rpond plus leurs besoins rels. Dailleurs, ce qui fonde le succs de lcole marocaine des annes 1970 90 est surement linscription de la dmarche ducative de lpoque dans une logique de franais langue seconde. En effet, lors dun sondage quon a relev auprs de quelques enseignants du cycle secondaire qualifiant, et en rponse une question qui porte sur le statut actuel de la langue franaise en tant que LS ou LE, une belle dame nous a fait la remarque suivante : Dans les annes 80 et 90, je vous aurais rpondu que le franais n'est pas du tout une langue trangre. Dans nos classes de franais on se sentait l'aise, cette langue faisait partie de notre quotidien. On travaillait les matires scientifiques en franais, et le prof de franais n'avait pas se tuer pour nous expliquer ce que "or" ou "donc" voulait dire, c'tait dans l'ordre des choses car c'tait un terme utilis en math. Aujourd'hui, et mme dans des classes qu'on considre comme "la crme", il y en a pour qui ce bon franais laisse dsirer. On se demande vraiment si cette langue avait bien accompagn nos lves depuis la maternelle ou mme depuis la 2me anne primaire. On se pose mme parfois la question si nos lves ont une connaissance d'une langue qu'on appelle "franais". De l, je suis maintenant convaincue que le franais est une langue trangre, que j'tais dans l'erreur et que grce mes troncs communs, "que Dieu me les garde", je corrige mon erreur !!! . Un autre facteur viendra appuyer notre point de vue. Est-ce en programmant de la littrature quon prtend enseigner du FLE ? Effectivement non ! On ne peut lenseigner que si on sinscrit dans une logique de langue maternelle, sinon au moins dans celle de langue seconde. Outre le fait que pour enseigner de la littrature, il faut que la langue soit dj l .

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5. Conclusion Le franais en tant que langue parle au Nord dAfrique est peru comme une squelle du pass colonial. Indniablement, larrive des colons dans les pays du Maghreb, notamment le Maroc, lAlgrie et la Tunisie , a eu des effets sur le panorama linguistique dj diversifi par lamalgame ethnique qui marque la carte gographique marocaine depuis les campagnes dislamisation au reflux des musulmans de lAndalousie aprs les guerres de rcupration. De la sorte, les langues vernaculaires et les langues vhiculaires et langues qui ne sont reconnues en tant que telles que pour des raisons des rapports de force. Lengagement dans le contexte de comptitivit socio-conomique achemine ce que rgnent pour se prvaloir les langues perues comme instrument de communication aux chelles dlicates et tellement sensibles pour que la perfection soit ncessairement recommandable, do les sries de rformes et de mises niveau des systmes, comme le rclame linteraction cole / entourage local, la relation du type rgional / universel, jugs dune pertinente performance pour rpondre aux besoins directs en matire des comptences langagires. Au fil du temps, le franais a bascul entre diffrents statuts. En fait, les mnages aiss, seuls eux, pouvaient instruire leurs fils dans des coles franaises. Ainsi le franais au Maroc de lpoque coloniale tait litiste et ntait parl que par des sujets de familles jouissant de privilges aux yeux du colonisateur. Depuis que lenseignement prenait des formes institutionnalises, la langue franaise, commenait sortir de son espace priv pour devenir accessible toutes les classes sociales. Etant enseigne par un corps professoral franais, la langue seconde lcole marocaine tait apprhende, par la suite comprise, puis approprie comme outil de communication tant que les jeunes de

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lpoque voyaient dans son acquisition une forme dascension sociale, et un moyen daccs la culture franaise dominante. La prsence des franais sur le territoire marocain avait remarquablement impact linfrastructure, avant leur arrive drisoire, pour faciliter lpuisement des richesses et pour prtexter leur prsence comme ils faisaient croire quils sont missionns pour donner un coup denvoi aux mcanismes de dveloppement des pays du Tiers-monde afin quils plient la page dune vie misrable et intgrent une re de lumire manigance des europens pour touffer la crise son berceau dans le sens o ils savaient lventuel danger qui pourrait tre conscutif une Probable extension et, ainsi, ils avaient avort la crise qui aurait pu faire ravage sils navaient pas agi par leur intrusion dans cette terre malade par sa doxa, par le handicap des structures administratives qui taient comme une vritable aubaine pour lextnuation du don terrien du pays. Le mythe tait tellement fort que nombreux sont notamment les personnes, qui taient charmes par les prouesses de la manuvre franaise, qui considraient comme humanisme la rvolution structurale quavait connu le pays sous la domination de la France au point quils se sont mobiliss pour laccs la langue qui, seule, permettant aux yeux de certains marocains de lpoque, de comprendre le mode dexistence de ces occidentaux. Depuis lors, la possession de la langue franaise est devenue marque distinctive entre les personnes instruites et ceux qui ne le sont pas. Egalement, et plus quelle tait la langue de lenseignement, elle a t pleinement pratique au sein des espaces administratifs. Le franais a eu une place pertinente dans toutes les rformes qui se sont succd au niveau du systme ducatif. Son statut lui donne une force solennelle. En tant que chercheur intress par les exigences et lenvironnement de lcole marocaine, nous nous posons lune des questions primordiales sur les contraintes de lenseignement du franais comme langue trangre, quelles sont23

les stratgies adquates qui peuvent servir les enseignants russir de manire efficace dans leurs tches au sujet de la matrise de la langue par les lves? Ce sujet pineux, ncessite notre engagement dans une tude qui sefforcera dtre une approche diffrents niveaux dans une perspective essayer de prsenter quelques propositions damlioration pdagogique dans le domaine.

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II.

Enjeux stratgiques pour lenseignement du FLE au secondaire qualifiant : tude des documents officiels

1. Introduction Dans une tentative de rponse aux questions prcdemment releves, et pour avoir une ide claire et nette sur les tenants et les aboutissants du statut et du rle de la langue franaise dans le secteur ducatif marocain, une lecture dune slection de documents officiels simpose. Notre pays, depuis lan 1999, sest lanc dans une nouvelle re de rforme de son systme ducatif. Cette rforme dicte par La Commission Spciale pour l'Education et la Formation (COSEF), et contenue dans la charte nationale de lducation, vient susciter des changements qui sont susceptible de faire avancer le statut de lcole marocaine et vers une cole de lquit et nier toute forme denseignement litiste. La dite charte, qui touche les diffrents aspects et crneaux du systme ducatifs, se compose de deux parties complmentaires. La premire nonce les principes fondamentaux qui comprennent les fondements constants du systme d'ducation et de formation, ses grandes finalits, les droits et devoirs des diffrents partenaires et la mobilisation nationale ncessaire pour la russite de la rforme. La deuxime partie regroupe six espaces de rnovation comprenant dixneuf leviers de changement: lextension de lenseignement et son ouvrage lenvironnement conomique ; lorganisation pdagogique ; lamlioration de la qualit de lducation et de la formation ;25

les ressources humaines ; la gouvernance ; le partenariat et le financement.

2. Orientation et articulation des cycles denseignement

Lorientation et larticulation des cycles denseignement, qui font un des pivots de la rorganisation pdagogique, se dclarent comme un des objectifs damlioration de la qualit et du rendement de lducation et de la formation qui est au cur du processus de rforme. En effet, dans larticle 99 de la Charte, l'orientation est dclare partie intgrante du processus d'ducation et de formation. Elle accompagnera et facilitera la maturation vocationnelle, les choix ducatifs et professionnels des apprenants, ainsi que leur rorientation, chaque fois que de besoin, ds la seconde anne du collge et jusqu'au sein de l'enseignement suprieur . De mme que les articles 73 et 74 dessinent le schma gnral de larticulation du cycle denseignement secondaire. Le baccalaurat, d'une dure de deux annes, est ouvert aux lves issus du tronc commun et comprend deux filires principales : une filire d'enseignement technologique et professionnelle et une filire d'enseignement gnral tant entendu que chaque filire est compose de plusieurs branches et que chaque branche comporte des disciplines obligatoires et des disciplines option . Selon larticle 73 de la Charte, le cycle du tronc commun, ouvert aux lves titulaire du brevet d'tudes collgiales, consiste en un ensemble de modules d'apprentissages requis de tous, ayant pour objectifs gnraux de26

dvelopper, consolider ou mettre niveau les comptences de raisonnement, de communication, d'expression, d'organisation de travail et de recherche mthodique, chez tous les apprenants ; ainsi que de dvelopper les capacits d'auto-apprentissage et d'adaptation aux exigences changeantes de la vie active et aux nouveauts de l'environnement culturel, scientifique, technologique et professionnel. La dure des tudes dans ce cycle est d'une anne au cours de laquelle les apprenants recevront d'abord des modules communs puis, en deuxime partie de l'anne et avec l'appui des conseillers d'orientation, ils effectueront des choix de modules prparant une orientation progressive adquate, avec possibilit de rorientation en cours de cycle. De mme, larticle 76 institue le profil de la filire de l'enseignement gnral selon trois critres : a) En visant, outre les objectifs gnraux du tronc commun faire acqurir aux apprenants avant les prdispositions ncessaires, une formation scientifique, littraire, conomique ou sociale les prparant poursuivre, avec un maximum de chances de succs, des tudes suprieures ; b) En tant ouverte aux apprenants issus du tronc commun ayant satisfait aux conditions d'accs spcifiques chaque grand domaine de spcialisation, tant entendu que des passerelles permettront les rorientations qui s'avreraient ncessaires tout au long de l'enseignement secondaire ;

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c) La dure des tudes est de deux annes, aprs le tronc commun, sanctionnes par un baccalaurat d'enseignement gnral (BEG), permettant l'accs soit aux classes prparatoires des grandes coles, soit aux universits, ou autres institutions suprieures spcialises, sous condition de satisfaire aux critres d'admission exigs par elles, dans chaque domaine d'enseignement suprieur . Ainsi, le nouvel apport de cette rforme se manifeste dans la subdivision de lancien systme de lenseignement secondaire, fond sur lunicit du cycle, en deux cycles dont ladmission chacun se fait par un choix de spcialit ou de filire. Donc deux temps dorientation permettant llve de mieux cerner son parcours pdagogique et dterminer davance litinraire de ses tudes suprieures. Pourquoi cette subdivision ? Cela traduit la volont ministrielle et lobjectif majeur de la rforme, savoir mettre lapprenant au centre de laction pdagogique , ce qui est en soi un atout pour notre systme denseignement. Pourtant, on assiste, de lautre part, une uniformit des contenus et des mthodes pour toutes les filires en matire de FLE. Le franais quon enseigne la filire littraire, les uvres programmes et les mthodologies prconises sont les mmes pour les autres branches technique et scientifique. Aussi, si on prtend sinscrire dans une perspective denseignement dun FLE qui met en avant dans son cadre thorique lapproche communicative, lapproche par comptence et la notion de projet, et qui rpond des besoins langagiers et communicatifs qui ne sont pas toujours prioritaires ou pertinents pour des lves qui, assez vite, seront amens utiliser le franais comme langue des tudes et du travail ; on pourrai donc se poser la question propos de lutilit de cette28

uniformit des contenus au niveau des filires quon a pris le soin de bien les articuler selon les besoins des apprenants. Quelle serait lutilit de ce dispositif dorientation si on na mme pas pris le temps darticuler les contenus selon les objectifs majeurs de chacune des filires ? Sil est vident que le franais utilis dans le dpartement de langue franaise est autre que celui des dpartements scientifiques ou des coles denseignement technique, cest en faisant de la littrature la seule recette que nous propose le menu de notre enseignement quil se prtend tre fonctionnel et rpondant aux exigences changeantes de la vie active et aux nouveauts de l'environnement culturel, scientifique, technologique et professionnel besoin de ses apprenants !

3. Le systme dvaluation

Lvaluation est une procdure complexe qui comporte une phase dobservation et danalyse, une opration mentale de jugement, et enfin lexpression de ce jugement sous forme quantitative (note chiffre) ou qualitative, verbale ou non verbale. Lvaluation implique des critres (principe auquel on se rfre pour porter un jugement ou une apprciation). Cest laction de mesurer, laide de critres objectifs, les acquis dun lve en formation initiale ou continue. Dans ce sens, on peut distinguer entre deux types dvaluation : Lvaluation formative : cest un outil de diagnostic des difficults et des russites. Cest lvaluation intervenant, en principe, au terme de chaque tche dapprentissage. Elle revt un caractre priv (cest un moment privilgi de dialogue entre le professeur et son lve). Elle a pour buts :29

Dinformer lve et professeur du degr de matrise atteint, De dcouvrir o et en quoi un lve prouve des difficults en vue de lui proposer ou de lui faire dcouvrir des stratgies qui lui permettent de progresser, Destimer les progrs individuels par rapport lobjectif cours, De proposer des activits daide aux lves en difficults, des activits plus complexes aux lves trs performants Lvaluation sommative : Cest lvaluation intervenant aprs un ensemble de tches dapprentissage constituant un tout, correspondant par exemple, un chapitre de cours, etc Elle revt le caractre de bilan, de mme quest publique (communication des rsultats aux parents par un bulletin scolaire, attribution dun certificat ou dun diplme). Lvaluation sommative se traduit par une note ou une reconnaissance des acquis et aboutit un classement, une slection ou une certification. En somme, elle permet de vrifier que llve a atteint lobjectif denseignement/apprentissage. Or, selon le Cadre de rfrence de lexamen normalis rgional pour vis, et dintervenir ventuellement pour rectifier les modalits de laction en

lobtention du baccalaurat (2009), lenseignement du franais dans le cycle secondaire qualifiant, qui repose sur les concepts de comptence et de valeurs, vise doter llve dune vraie comptence de communication, loral comme lcrit (Il) a pour objectif de permettre lapprenant de dvelopper des stratgies ncessaires la comprhension duvres littraires et la production de textes varis. En plus dtre une langue douverture sur le monde et un moyen de communication indispensable, le franais, linstar dautres matires, est aussi un moyen pour structurer sa pense .

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Pour atteindre ces objectifs dducation et de formation, les programmes de franais dans le cycle secondaire qualifiant, ciblent le dveloppement du got de la lecture et de la comptence rdactionnelle. Par la lecture, lapprenant a accs une varit duvres et de genres littraires qui lamnent apprcier lexpression franaise dans toute sa diversit, simprgner des imaginaire. Quant la production crite, elle lui offre la possibilit, dans le respect de la consigne dcriture, de sexprimer correctement en franais, de mettre en uvre ses capacits de cration et dimagination et dexercer son esprit critique . Ainsi, aprs tre brivement pass sur la notion de l oral , prsente comme une des deux sous-comptences de la comptence global de communication, qui constitue lobjectif majeur de lenseignement du FLE au cycle secondaire qualifiant, toute mention lvaluation de cette souscomptence semble tre omise. Ni mme la rforme apporte par la Charte nationale, concernant lvaluation sommative (dans les articles 94, 95 et 96), ni les recommandations pdagogiques, paraissent passer sous silence limportance de ce facteur et ne fournissent aucune nouveaut ou indication au sujet dune valuation sommative ou certificative intgrant dans son inventaire dobjectifs lvaluation de loral. Seule une telle tentative dlargissement du champ dopration de lvaluation est susceptible de nous offrir un meilleur reflet du niveau dacquisition de la comptence communicative et de rendre compte de lessence mme de lobjectif gnral de lenseignement du FLE au cycle secondaire qualifiant. valeurs universelles et dvelopper son

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Aussi, un tel manque, qui persiste dans notre systme dvaluation, tend davantage cette fissure qui spare lenseignement fondamental arabis et le systme denseignement suprieur francis dans sa majorit.

4. Enseignement du franais / franais denseignement

Selon le bilan publi par la Commission Spciale ducation - Formation dans le rapport qui contient une valuation dtaille des quatre premires annes de la Rforme, la question des langues est communment reconnue comme un facteur structurel de la crise de lcole en raison de lincohrence des choix qui ont longtemps prvalu aussi bien en matire de langues denseignement quen matire denseignement des langues ; des choix qui se sont traduits le plus souvent par une faible matrise des langues par les lves et les tudiants. Que ce soit la langue arabe, ou les autres langues trangres, le niveau linguistique des apprenants reste globalement faible tant au niveau de lcrit que de lexpression orale . Aujourdhui, le contexte de mondialisation rend dterminante la stratgie linguistique adopter dans lenseignement, que ce soit pour lavenir des apprenants ou celui du pays dans sa globalit. Celle-ci doit ainsi ncessairement prendre en compte la complexit de lquation linguistique du pays, matrialise entre autres par la pluralit des dialectes rgionaux et la dualit de la langue denseignement entre les diffrents cycles. Lexamen de la stratgie linguistique actuelle rvle de nombreux dysfonctionnements, et ce deux niveaux :

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Celui des langues denseignement dune part, avec un dphasage trs net entre le secondaire et le suprieur qui complexifie considrablement la poursuite dtudes suprieures pour bon nombre dapprenants ; Celui de lenseignement des langues dautre part, avec une inadquation vidente par rapport aux comptences linguistiques recherches, susceptible dimpacter ngativement terme lintgration professionnelle des apprenants. Ces difficults transparaissent clairement dans les rsultats des lves marocains aux divers tests nationaux et internationaux. Ainsi, le Maroc a obtenu un score de 323 au PIRLS 2006 (lecture), la moyenne tant de 500. Par ailleurs, un test national ralis en 2006 rvle que seuls 7% des lves de 6me matrisent larabe, et 1% le franais. Ainsi, sans reprendre les termes idologiquement chargs du dbat sur larabisation, il convient de souligner que le principe de lgalit des chances exige une cohrence moyen terme dans les choix des langues denseignement. En effet, malgr larabisation de lenseignement fondamental, le franais continue dtre la langue de la formation professionnelle et des disciplines techniques au niveau post-primaire. Larticle 114 de la Charte de lducation et de formation prvoyait qu il sera procd, progressivement, l'ouverture de sections optionnelles d'enseignement scientifique, technologique et pdagogique, au niveau des universits, en langue arabe, paralllement la disponibilit de rfrentiels pdagogiques de qualit et de formateurs comptents ; pourtant la langue franaise reste la langue de lenseignement suprieur scientifique, des tudes sanitaires et des grandes coles et mme celle de la formation des cadres du MEN. Celles-ci nont pas encore t arabises... et puisquil semble difficile aujourdhui dacqurir un trs bon niveau de franais lcole publique, seuls les33

lves du priv appartenant aux familles les plus aises peuvent vritablement accder aux formations suprieures qui se droulent en franais. Par consquent, la langue denseignement devient un puissant critre de discrimination sociale et met en chec le concept dgalit des chances. Dans cette direction, le mme article site que afin d'instaurer des passerelles valides et congruentes de l'enseignement secondaire vers l'enseignement suprieur, en s'appuyant sur une orientation pdagogique pertinente et efficiente, assurant les meilleures chances de succs acadmique et professionnel des apprenants, les units et modules scientifiques et techniques les plus spcialiss seront enseigns, au cycle du baccalaurat, dans la mme langue que celle utilise dans les branches et sections correspondantes au niveau de l'enseignement suprieur, vers lesquelles devraient s'orienter les lves . Pourtant, rien de cela na t ralis jusqu prsent et lenseignement fondamental reste compltement arabis malgr la conscience des faits. Est-ce faute de temps et de programmation ou ne serait-ce quune simple volont touffe par une indiffrence politique En labsence dune gestion pdagogique cohrente et en labsence denseignants qualifis, ce multilinguisme transforme les ruptures linguistiques existantes en barrires daccs au curriculum. Une premire rupture existe entre la langue maternelle dorigine et lapprentissage de larabe classique. Celle-ci est suivie dune rupture entre lenseignement primaire/secondaire (qui est dispens en arabe) et la formation technique et professionnelle et lenseignement suprieur (formations universitaires scientifiques, grandes coles et instituts spcialiss), qui sont dispenss en franais. Il nest donc pas surprenant que certains enfants se trouvent, ds les premires annes de lcole primaire, en situation dchec scolaire qui se solde par un abandon. Au-del de ce premier obstacle, dautres se voient nier laccs certaines formations ds lentre dans le secondaire, et ceci du fait de leur niveau de franais insuffisant. Finalement, laccs aux emplois des entreprises modernes du secteur priv leur est ni34

galement de par leur matrise insuffisante du franais. Surmonter les tabous lis la politique des langues denseignement et accepter didentifier et dexaminer les goulots dtranglement dans lenseignement des langues sera un pas dcisif pour lutter contre labandon scolaire et pour la remdiation effective du systme denseignement.

5. Gestion du capital humain

La Charte nationale de lducation a permis de mettre en uvre plusieurs initiatives visant la rforme des curricula, au renouvellement des programmes et des manuels scolaires sur la base du Livre Blanc (2002), et loption pdagogique de lApproche par comptences (APC). Ces nouvelles orientations pdagogiques nont cependant pas donn lieu aux changements escompts et nont pas produit damlioration visible sur les processus denseignement et dapprentissage au sein de la classe ni, par consquent, sur les rsultats des apprenants. Ainsi, bien quelles suscitent une certaine adhsion de la part des enseignants, les nouvelles orientations pdagogiques sont rarement appliques, en grande partie cause du dficit de la formation initiale et continue des enseignants. Ce dficit de formation fait que la pratique de lenseignement en classe sest peu adapte aux changements dorientations pdagogiques dcids par les autorits ducatives et pour lesquels les enseignants nont pas reu de formation spcifique. Ceci constitue un frein lamlioration de la qualit de lenseignement et conduit un rel dcalage entre les nouvelles orientations et les pratiques pdagogiques en classe. Il en rsulte un dcalage entre le niveau attendu des lves et leur niveau rel. La massification de lenseignement dans les annes 60, non anticipe, sest naturellement accompagne du recrutement denseignants peu ou mal35

prpars lexercice de cette tche. Cette politique volontariste dont lobjectif premier tait de rattraper le retard perdu est sans aucun doute en partie responsable de la dgradation de lenseignement dispens. La formation initiale des enseignants na pas volu depuis de nombreuses annes, handicapant par-l ladaptation aux mutations pdagogiques, sociales, conomiques et culturelles. Qui plus est, aucun programme de formation continue adapt aux besoins du terrain ne permet de pallier cette faiblesse de la formation initiale (Conseil Suprieure de lEnseignement 2008). Motiver les ressources humaines pdagogiques et administratives, perfectionner leur formation continue, amliorer leurs conditions de travail et rviser les critres de recrutement, d'valuation continue et de promotion . Tel figure lobjectif majeur de la rforme de la charte nationale quant la gestion des ressources humaines, qui constitue lintitul mme du cinquime levier de cette charte. Do limportance majeure de cet lment cl qui reste lune des conditions prpondrantes du succs de la rforme envisage. Pour promouvoir le statut de lenseignement / apprentissage, la grande responsabilit pose sur les paules du corps professoral de lcole publique, puisquil est le seul actant effectif (mise part llve) et lagent de transposition (didactique) dans le processus denseignement. Ainsi, cest, selon larticle 133 de la Charte de lducation et de formation, de l'engagement et de la qualit des enseignants que dpend le renouveau de l'cole. Qualit signifie une bonne formation initiale, une formation continue efficace, des moyens pdagogiques appropris et une valuation adquate des performances ducatives .

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6. Rvision et articulation des programmes

Les programmes et les contenus scolaires ont depuis toujours accus de profondes lacunes notamment du fait de labsence de cohrence et de vision globale dans leur laboration, et du fait quils ne tiennent pas suffisamment compte des spcificits et des besoins des lves et de leur environnement. Les programmes et les contenus ne sont ainsi que rarement actualiss en raison de la rigidit des procdures de rvision, de labsence dun processus dvaluation rgulier des curricula et des limites des programmes de formation continue des enseignants. Sur un autre plan, les programmes et les contenus se caractrisent souvent par la prdominance des savoirs livresques sur les savoirs pratiques et technologiques, limitant dautant le dveloppement des comptences des apprenants dans des champs de savoir exigs par la vie active moderne et dicts par lvolution de lenvironnement national et international. Selon larticle106 de la charte nationale, la refonte des programmes et des mthodes sera dirige vers la ralisation des objectifs suivants : laborer et affiner, en termes de profils de sortie et de comptences correspondantes, les objectifs gnraux fixs chacun des cycles et niveaux d'ducation et de formation ; concrtiser les troncs communs et les passerelles dsormais obligatoires, l'intrieur du systme d'ducation-formation et entre celui-ci et la vie active analyser, identifier et formuler des objectifs complmentaires, rpondant aux besoins des apprenants, aux exigences de notre temps et aux attentes des partenaires de l'ducation-formation ;

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prendre en compte l'impratif de flexibilit et d'adaptabilit des progressions pdagogiques

Le principe de la progression inscrit l'enseignement du franais dans une dynamique, soigneusement mnage, qui ordonne les savoirs enseigner - partir des lments et instruments que fournissent les Instructions et le programme - selon des parcours mthodiquement gradus. Ce sont les squences, hirarchiquement articules entre elles (en fonction des diffrents niveaux viss), qui fondent la progression. Ainsi, cest la rentre scolaire 2002-2003 que le ministre de lducation nationale a mis en place une rforme de lenseignement du franais dans les lyces marocains. Cette rforme, qui est centre sur la rintroduction des uvres littraires dans les programmes scolaires est considre comme un tournant dans la rforme de lcole marocaine, conformment la Charte nationale dducation et de formation. En effet, les manuels scolaires ont t abandonns et les enseignants organisent leurs cours dans le cadre de projets pdagogiques autour des uvres littraires au programme. Ltude des uvres littraires, qui a remplac les manuels scolaires centrs sur les aspects fonctionnels et communicatifs de la langue, participe la formation intellectuelle et culturelle des lves marocains et permet la classe de franais dtre plus active quauparavant grce au retour des aspects humanistes et universels de la littrature, favorisant ainsi le dveloppement des valeurs de tolrance, douverture, et de citoyennet active. De plus, ltude de ces uvres dveloppe les comptences mthodologiques de nos lves et les habitue la rigueur et leffort que ncessite linvestissement intellectuel et moral.

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Seulement, est ce que cette approche constitue la formule magique pour remdier au problme dapprentissage ou plutt de matrise de la langue franaise ? Absolument pas. Pour en tre convaincu, on a qu observer la dtrioration rcurrente du niveau des lycens aprs la mise en uvre de la rforme. L'inefficacit des uvres littraires dans l'apprentissage de la langue rvle le peu d'intrt que revt la littrature chez les adolescents. Un texte d'actualit ne peut-il pas motiver les jeunes? que cherche- t-on au juste? des littrateurs en herbe ou des citoyens qui peuvent profiter des potentialits des langues trangres? apprend-on la langue ou fait- on des tudes littraires qui n'intressent personne, except l'enseignant? diverses questions nies souvent mais qui traduisent le malaise de l'enseignement par une approche de mirage, coupe de tout contexte, le seul facteur qui puisse lui assigner une lueur de crdibilit.

7. Conclusion

En guise de conclusion, on peut retracer notre rflexion en dix points. La Charte nationale de lducation et de lenseignement stipule

1- Les orientations aux branches scientifiques : Les orientations prconises dans la Charte sont claires : les 2/3 des lves seront orients vers les branches scientifiques, et seulement le 1/ 3 vers les branches littraires.

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Lobjectif est noble en lui-mmeIl vise donner la socit un citoyen qui raisonne scientifiquement, un citoyen entrepreneur, un citoyen logique 2- Un profil mal en point : Maintenant, le profil de llve qui parachute dans le lyce qualifiant, surtout dans les branches littraires, laisse dsirer. Les rsultats dans lensemble varient de 6 10 de moyenne dans lexamen final, au niveau des dlgations ! 3- Un examen pour mieux comprendre : Examinons la chose de plus prs : un lve obtient 12/20 au niveau des contrles continus (ngociation exige avec lenseignant), puis il choue avec 06/20 dans lexamen, au niveau de la dlgation. On fait laddition et on obtient 08/20 de moyen gnral. Llve refait lanne scolaire ? Non, car cela sappelle de la dperdition scolaire.. 4- Solution envisage par le ministre, via les dlgations : Que faut-il donc faire ? Llve doit russir ! Et nous nous trouvons devant une arme dlves : une quarantaine (La moyenne nationale) quon qualifie dillettrs . Nous en prfrons lexpression : lves dont les pr-acquis et les prrequis font dfauts. 5- Un contrat fauss davance... Comme tout engagement qui se fonde sur la clart et la transparence, le contrat qui lie lenseignant son ministre de tutelle doit tre limpide, non fausse davance...Chose bien sr qui nest pas le cas dans notre rapport avec ce mme ministre... 6- Voil pourquoi : En lisant les Orientations pdagogiques : Llve qui accde au cycle secondaire qualifiant est dj capable de sexprimer de manire correcte et40

efficace, dans des situations de communication complexes . Il est appel, durant ce cycle, consolider ses acquis, se perfectionner en vue dune appropriation largie et progressive des dimensions culturelles, discursives et linguistiques de la langue franaise. 7- Une ralit cuisante et un dfi lourd soulever : Dans la ralit de la pratique au sein des classes, quel est le vrai profile de llve ? A- Un lve qui ne sait pas joindre deux mots sexprimer de manire correcte et efficace ; B- Un lve qui ne sait pas lire phontiquement et ne comprend pas le sens littral dun paragraphe est amen lire des centaines de paragraphes, et les comprendre, et les interprter... Luvre intgrale apparat donc la fois comme lune des finalits de lenseignement du franais dans le Secondaire Qualifiant (donner le got, les outils et dvelopper les comptences dune pratique autonome de la lecture des uvres littraires) et comme le support principal des diverses activits qui caractrisent cet enseignement.

Question : comment concilier linconciliable ? 8- Un mme programme pour les deux branches : scientifiques et littraires, Que ce soit pour les scientifiques ou les littraires, le mme contenu est offert nos lves. Aucune diffrentiation nest prise en compteCela est une spcificit marocaineavec une seule diffrence : la masse horaire consacre la langue franaise diffre dune heure hebdomadaire entre les deux branches (Cinq heures pour les littraires et Quatre heures pour les scientifiques : 1ier anne du Bac)41

9- Un mme examen... Le mme examen pour les deux branches : mme si la masse horaire diffre, le mme contenu se maintient et le mme examen aussi. Ce qui fausse aussi le contrat avec les lvesEn effet, une quarantaine dheures de plus ou de moins fait la diffrence entre les lves des deux branches Des anomalies inexplicables ! 10- Synthse : A- Lenseignement qui vise seulement satisfaire les chiffres, sans voir la ralit effective de ses clients (les lves) est vou lchec. B- Lenseignement qui prtend chercher la qualit en rpondant aux vrais besoins de llve, mais qui finit par fausser les contrats davance entre : enseignant et institution, entre lve et contenu dapprentissage, entre enseignant, contenu, lve, masse horaire et valuation ne peut quessuyer de lourds checsSurtout que les RP prtend rpondre aux vrais besoins de llve, de chaque lve : la rforme de lducation et de la formation met lapprenant au centre de laction pdagogique...

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III.

uvres intgrales et enseignement du franais fonctionnel

1. Introduction Suite la rforme du systme ducatif marocain, rforme apporte par la charte nationale dducation et de formation, et engage partir de 1999, lenseignement/ apprentissage du franais dans le cycle secondaire qualifiant, comme, dailleurs, les autres disciplines, repose dsormais sur la notion de comptence. La formation dun citoyen autonome qui peut sapproprier des valeurs civiques et humaines universelles et qui est dot de comptences de communication susceptibles de faciliter son intgration dans le monde du travail tant lune de ses premires finalits.

Penser une formation, un enseignement en termes de comptences constitue un choix pdagogique qui repose sur des prsupposs concernant lapprentissage. Ces prsupposs posent comme principe quapprendre cest matriser des situations de plus en plus complexes. Pour dvelopper des comptences, il faudrait travailler par problmes, par projet, donc proposer des tches qui inciteraient lapprenant, mobiliser des acquis et chercher les complter 8. Mais dans tous les textes officiels, les orientations pdagogique gnrales pour lenseignement du franais dans le cycle secondaire qualifiant, en loccurrence, luvre intgrale apparat comme tant le nouvel objet denseignent propos, le support fondamental devraient caractriser cet enseignement.8 Mina Sadiqui, Enseignement du FLE et oeuvre intgrale romanesque ; http://www.weblettres.net/spip/article.php3?id_article=1043

des diverses activits qui

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Un tel engagement va, naturellement, avoir ses retombs sur les programmes ainsi que sur le dispositif didactique et pdagogique de son oprationnalisation. De la sorte, comme on la dj mentionn dans ce qui prcde, partir de la rentre scolaire 2002 2003, les uvres littraires viennent remplacer les manuels dans le programme du lyce, donnant lieu une multitude de controverses concernant leur utilit et pertinence ainsi que la manire de son exploitation. Cest ainsi que la littrature a fait son entre dans lenseignement secondaire (qualifiant) par la grande porte. Du fameux manuel de franais et ses textes parpills, on est pass aux uvres intgrales : nouvelles, pices de thtre, romans, Cest un choix trs audacieux certes, mais qui a concid malheureusement avec une crise de notre enseignement reconnue par tous, notamment au niveau de la matrise des langues. Le fait est quaprs environ une dcennie dapplication des nouveaux programmes, les valuations et les tests effectus aux diffrents niveaux et cycles du systme attestent toujours dune faible matrise de la langue franaise.

2. Quelles mesures pour lintroduction des uvres littraires dans lenseignement fonctionnel du franais au lyce 2.1. Le projet pdagogique : quelques lments de rflexion...

Les orientations pdagogiques traduisent les finalits de chaque systme ducatif. Sa prsence dtermine la politique ducative de chaque pays. Dans cette tude, nous allons essayer d'lucider le rapport entre trois notions cls prsentes dans les recommandations pdagogiques (RP) ; A savoir: Le projet pdagogique / Le Module / la squence didactique...

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Ce sont les lments organisateurs de lenseignement / apprentissage du franais dans le cycle secondaire qualifiant Lenseignement / apprentissage du franais au cycle qualifiant sinscrit dans une dmarche de projet et sorganise autour des lments suivants :

3.1. Le projet pdagogique 3.1.1. Philosophie du projet:

Le projet pdagogique est la traduction en actions du projet ducatif. Sa pertinence rside dans le fait quil permet de placer les lves dans de vritables situations dapprentissage et quil offre lenseignant lopportunit de sintresser au parcours de chacun. Plutt que dintervenir dans des activits rptitives, traditionnelles et dcontextualises, il repose sur la planification, les techniques danimation interactives, le rinvestissement des acquis et le dveloppement de nouvelles comptences.

- Commentaire : " il permet de placer les lves dans de vritables situations dapprentissage." Cela voudrait-il dire que les autres dmarches didactiques ou pdagogiques ne mettent pas lapprenant dans de vritables situations dapprentissage ?

* Le projet pdagogique favorise la prparation de " vritables situations dapprentissage" de la part de l'enseignant.

* Le projet pdagogique " offre lenseignant lopportunit de sintresser au parcours de chacun." On peut donc procder par une pdagogie diffrenci.45

* Le projet pdagogique: " Plutt que dintervenir dans des activits rptitives, traditionnelles et dcontextualises, il repose sur la planification," son articulation se fait selon un schma prtablit doprationnalisation.

* Le projet pdagogique: repose sur "les techniques danimation interactives, le rinvestissement des acquis et le dveloppement de nouvelles comptences." Par consquent, le projet donne du sens aux apprentissages. De ce fait, il participe linstallation des comptences. La comptence est laspect invariant du programme, cest--dire, ce que lenseignant doit faire acqurir llve. Le projet reste li au choix de lenseignant qui a la charge damener les lves sa ralisation en tenant compte des moyens dont il dispose et des besoins de la classe. La pdagogie du projet sinscrit dans une logique socialisante et par consquent favorise les apprentissages en groupes. Le projet se prsente comme une condition dmancipation et de crativit. Il valorise, de faon parfois mythique, lautonomie et la matrise, mais son usage non rflchi peut crer une forme subtile dasservissement. Certains, en effet, reprochent la pdagogie du projet son ambigut et la domination dguise quelle fait peser sur llve. A partir du moment o il aura formul un projet, note Coquelle, llve se verra intimer le devoir dy mettre de lnergie, de prendre ou daccepter les activits de de formation correspondante . Quels sont les effets mancipateurs escompts, mais aussi les dangers ventuels de la pdagogie par projet ? (sciences humaines). Effets mancipateurs

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o Le projet doit tenir compte de donnes contradictoires, ce qui les amne grer lincertitude et la complexit des situations o Le projet incite les personnes concernes dvelopper leurs capacits devenir des acteurs-auteurs. o Le projet se fonde sur une logique de linteraction et de la ngociation ; en ce sens, il sinscrit dans une logique de recomposition du lien social. o Le projet favorise une action plus efficace, grce un temps danticipation et de conception o Le projet permet dexpliquer les intentions, et, donc de clarifier la pense en laidant concrtiser les possibilits quelle recle. o Le projet conduit se poser des problmes de sens au regard de laction entreprendre 9.

Ainsi, en premier lieu, une ncessaire interaction concerne les enseignants qui doivent se concerter pour la mise en place du dispositif pr-pdagogique. Celui-ci permet de sinterroger sur le choix des supports, des situations dapprentissage, des activits et des procds dvaluation. En second lieu, cette interaction concerne lenseignant et les lves en situation de classe. Le travail en projet qui exige une nouvelle organisation de la classe en binmes ou en groupes est trs pertinente parce quelle permet une plus grande communication : entre enseignant/lves, et lves/lves. Cette interaction permet un meilleur suivi des lves en difficult.

La conception dun projet doit reposer sur :9 Michel Minder, Didactique fonctionnelle: Objectifs, stratgies, valuation, 8me dition actualise, de Boeck, 1999, P. 161

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Une dmarche collective plutt quindividuelle ; (collective veut-elle dire collaboration/interaction entre l'enseignant d'un ct et de l'apprenant de l'autre? Ou un travail par groupe-classe : "les techniques danimation interactives"....)

La situation dapprentissage, la rsolution de problme et le vcu des apprenants ; (comment introduire un projet pdagogique rpondant ces trois composantes?)

La ncessit davancer aux rythmes des apprenants pour viter les situations dchec ; (le projet pdagogique doit donc aux vrais besoins de l'apprenant et procder par diffrenciation des apprentissages ?)

La complmentarit entre lapprentissage linguistique et lapprentissage social (la langue mise en action dans des situations relles) ;

Lvaluation et le suivi des diffrentes tapes du projet et de sa finalisation. (Qu'est-ce que cela veut dire au juste?) (- Le projet doit tre bien dfini selon des objectifs bien prcis et des modalits d'valuation connu d'avance.)

3.1.2. Dmarche du projet:

Mettre en place un projet pdagogique suppose que lenseignant procde :

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Une valuation diagnostique (en dbut danne) lui permettant de dgager le profil de la classe ; cette tape est capitale car c'est elle qui doit dterminer les besoins rels des lves. Bien que l'uvre intgrale est choisie comme support d'apprentissage, nombreux sont les enseignants qui considrent qu'ils doivent l'tudier intgralement! Or, ce qui est demand c'est travailler l'uvre mais en la modulant aux propres besoins des lves...En termes encore plus claire, l'uvre intgrale est un long texte: il ne s'agit pas de le traiter en cherchant l'exhaustivit mais la pertinence. L'essentiel est de le rendre le plus accessible aux lves. En tout cas, ce qui prime, c'est de rpondre aux attentes des lves et d'tre source de soutien pour eux...

La ngociation et la formulation en termes contractuels du projet permettant dassocier les lves leur propre production et partant leur propre formation ; (C'est essentiel d'tablir un contrat d'enseignement/apprentissage ds le dbut de l'anne avec ses lves: quils soient des littraires ou des scientifiques, des classes niveau suprieurs ou des classes bas niveau, ce qui importe, c'est d'adapter/moduler les projets pdagogiques en fonction des vrais besoins des lves : deux classes ne devront pas avoir le mme projet ! Il ne doit pas y avoir des projets pdagogiques passe-partout !)

La clarification des comptences que les lves doivent acqurir lissue dun ensemble dactivits programmes pour une priode donne ; ici pour faire la diffrence entre objectifs d'apprentissage / objets d'tude et comptences :

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disons que les premiers privilgient le ct processus d'enseignement et les seconds le processus d'apprentissage...10

Llaboration et la programmation de tches et dactivits diverses favorisant la construction des comptences escomptes ; les activits font partie de situations que l'enseignant doit mettre la disposition des apprenants qui doivent travailler dans le cadre de la pdagogie cooprative au sein des groupesclasses.

La conception ou la prise en compte de procdures dvaluation destines apprcier le degr de matrise de ces comptences ; les valuations ne doivent pas se centrer uniquement et exclusivement sur le ct cognitif ! L'approche mtacognitive doit tre prise en considration : le parcours d'apprentissage des apprenants, leur interaction/collaboration, la faon d'agir et d'accomplir les tches d'apprentissage...

La tenue dun carnet de bord lui permettant de consigner au fur et mesure, les tapes de ralisation du projet, les points forts et les points damlioration du travail effectu, le degr dimplication des lves, les imprvus, etc. C'est le fameux cahier journal nglig par un grand ensemble d'enseignants. Son rle est dterminant dans le suivi des apprentissages des lves. Il permet entre autre de planifier les sances de soutien scolaire pour les apprenants besoins spcifiques et les sances de renforcement pour les lves de haut niveau.10 NB : Les orientations pdagogiques sont dans leur esprit conforme l'approche par comptences mais leur oprationnalisation en termes de programmes et de pratiques fait dfaut. C'est comme s'il y'a un hiatus entre les finalits et les pratiques ! 50

3.1.3. Articulation

Le projet doit sarticuler aux diffrentes donnes du curriculum, notamment :

Les orientations pdagogiques ; (Cest ce que je viens de commenter...) Les champs denseignement / apprentissage : lecture, criture, oral et langue ; (uniquement?)

Les supports : les uvres littraires proposes et les documents authentiques suscitant lintrt des lves, (ces documents sont dans la plupart sacrifis par rapport l'uvre intgrale : la seule qui tombe le jour de l'examen : Pas de textes thoriques ou de documents authentiques par exemple... etc.)

Le projet doit, par ailleurs, souvrir aux activits diverses (artistiques et culturelles) de ltablissement et de son environnement et sadapter aux impratifs de lorganisation de lanne scolaire (vacances, valuations priodiques et examens ). Or les activit diverses sont sacrifies pour un programme aussi long qu'inaccessible pour le niveau moyen des lves...Un projet demande au moins un mois pour aboutir. Temps dont l'enseignant ne dispose pas malheureusement...

3.2. Le module

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Le module est un dispositif de mise en uvre du projet pdagogique. II porte aussi bien sur le dveloppement de comptences transversales que sur lacquisition de comptences disciplinaires relatives lapprentissage de la langue cible. Le module est organis en squences et en activits dapprentissage qui sinterpellent et qui se compltent ; Le module sarticule principalement autour dune uvre littraire pour toutes les filires et toutes les options; la littrature ne concerne pas exclusivement les sections littraires. En effet, les sections techniques et scientifiques doivent galement se doter de la comptence culturelle ncessaire lapprentissage dune langue et la formation gnrale de llve. Le module, dans sa mise en uvre, sinscrit dans la dmarche du projet et prend en compte les besoins spcifiques de lapprenant. (Cest l'essence mme de l'enseignement modulaire : rpondre aux besoins rels des lves...)

3.3. La squence

La squence didactique (ou projet squentiel) est un ensemble dactivits visant le dveloppement de comptences ; celles-ci constituent une rponse aux besoins des lves, pralablement identifis et analyss. Cest loutil le mieux adapt une gestion optimale du temps en fonction du rythme de chacun. La squence est donc une faon pour moduler les apprentissages en fonction des besoins de tout un chacun spcifis partir de tests pronostiques / diagnostiques faits en dbut de chaque anne et en dbut de chaque projet pdagogique...

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2.2. Lapproche par comptence

Le concept de comptence est, selon P. Perrenoud, une capacit dagir efficacement dans un type dfini de situations, capacit qui sappuie sur des connaissances mais ne sy rduit pas . Ainsi, dans le domaine de lapprentissage dune langue, il ne suffit pas de possder des savoirs et des savoir-faire linguistiques pour tre mme de communiquer efficacement dans une situation de communication relle. Dans la perspective de dpasser la trilogie savoir, savoir-faire et savoir tre , la comptence est considrer en termes de savoir combinatoire qui sacquiert dans et par laction comme le souligne Le Boterf. 11 Lintroduction de lenseignement et de lapprentissage fonds sur les comptences est au cur des projets de rforme actuels pour adapter lcole aux besoins de notre temps. Il sagit l dune dmarche dans laquelle sont engags tous les systmes ducatifs. Dfinir les comptences dont chaque lve a besoin pour passer l'tape suivante de son parcours scolaire, pour accder une qualification et pour tre prpar l'apprentissage tout au long de la vie. Un mcanicien d'automobile doit avoir appris des lments de mcanique, de pneumatique et d'lectronique, mais il nest considr comme comptent que sil est capable d'utiliser toutes ces connaissances pour dtecter et rparer la panne de votre voiture. l'cole, on dit galement qu'un lve a acquis une

11 Ministre de lducation nationale ; Recommandations pdagogiques franais 2005.

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comptence lorsqu'il sait quoi faire, comment faire et pourquoi faire dans une situation donne. Lapproche par comptences met donc laccent sur la capacit de llve dutiliser concrtement ce quil a appris lcole dans des tches et situations nouvelles et complexes, lcole tout comme dans la vie. L'approche par comptences est lie l'ide d'tablir des socles de comptences pour certains moments du parcours scolaire. Ces socles regroupent les connaissances et les comptences indispensables que chaque lve devra avoir acquises pour passer dune tape de son parcours la suivante.

Lenseignement ne se rduit pas aux seuls socles de comptences. Lapproche par comptences permet de diffrencier les apprentissages dans le double but : 1. dassurer que tous les lves dveloppent les mmes comptences essentielles, et 2. de dvelopper des niveaux de comptences largis selon les capacits individuelles des lves. Aux lves plus forts sont proposs des apprentissages qui vont au-del des objectifs fixs dans les socles de comptences. Aux lves qui prsentent des retards scolaires, lenseignant ou lquipe pdagogique doit proposer des activits de remdiation. Les comptences ne remplacent pas les connaissances. Bien au contraire : les connaissances constituent les bases des apprentissages et lcole continuera dy accorder une importance capitale. Cependant, lapproche par comptences vise plus loin : llve doit mieux apprendre utiliser et appliquer ses connaissances dans des situations nouvelles.54

Les socles de comptences ne remplacent pas les programmes scolaires. Programmes et socles forment un ensemble indissociable : les premiers dcrivent les objectifs que les lves doivent atteindre, les seconds dterminent les contenus traiter en classe pour tendre vers les objectifs fixs.

Quest-ce quune comptence ?

Une comptence, selon

1- une dfinition adopte par le parlement europen, le 26 septembre 2006 :

Une comptence est une combinaison de connaissances, daptitudes (capacits) et dattitudes appropries une situation donne. Les comptences cls sont celles qui fondent lpanouissement personnel, linclusion sociale, la citoyennet active et lemploi. 12

Voil une premire dfinition qui sajoute dautres. Connaissances, aptitudes, attitudes, situation, panouissement, citoyennet, emploi

Quest-ce que cela veut dire au juste ?...

2- une dfinition donne par lun des porte-parole de lapproche par comptences : Philippe Perrenoud dit qu : une comptence est une capacit daction efficace face une famille de situations, quon arrive matriser parce12 http://www.ac-nancy-metz.fr/cpe/S3C/s3c_cqd.htm interrog le 21/07/2011

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quon dispose la fois des connaissances ncessaires et de la capacit les mobiliser bon escient, en temps opportun, pour identifier et rsoudre de vrais problmes . Il ajoute : une comptence permet de faire face une situation complexe, de construire une rponse adapte sans la puiser dans un rpertoire de rponses prprogrammes 13.

Cela a-t-il retranch les ombres et les ambiguts sur la notion de comptence ?

Examinons ce que dit M. Perrenoud :

Comptence = une capacit daction efficace Comptence = faire face une situation complexe

Pourrions-nous comprendre de quoi il sagit, en fin de compte ?

3- une dfinition donne par Guy Le Boterf, qui dit : Les comptences peuvent tre considres comme une rsultante de trois facteurs : le savoir agir qui suppose de savoir combiner et mobiliser des ressources pertinentes (connaissances, savoir-faire, rseaux, ) ; le vouloir agir qui se rfre la motivation personnelle de lindividu et au contexte plus ou moins incitatif dans lequel il intervient ; le pouvoir agir qui renvoie lexistence dun contexte, dune organisation du travail, de choix de management, de conditions sociales

13 Construire des comptences, tout un programme ! Entrevue avec Philippe Perrenoud Propos recueillis par Luce Brossard pour Vie Pdagogique ; http://www.unige.ch/fapse/SSE/teachers/perrenoud/php_main/php_1999/1999_14.html

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qui rendent possibles et lgitimes la prise de responsabilit et la prise de risque de lindividu. 14

Examinons maintenant la notion dun autre angle dattaque : afin de bien comprendre

Flash au cerveau : Une comptence est acquise lorsque llve russit utiliser un savoir dans dautres contextes ou situations que son acquisition. Cela sappelle un acte de transfert du savoir, cela sappelle la preuve de lintgration du savoir.

LApproche par comptence (APC) : nest-elle mtaphorique ?

pas une expression

Pour rpondre cette question, faisant un peu dHistoire, il sagit bien sr de remonter aux sources de ce concept pour en dgager la substance

Quels sont les fondements pistmologiques de lAPC ?

Comme rien narrive par hasard, lapproche par comptence est le petitfils ou la petite-fille du constructivisme. Son pre fondateur est Jean Piaget, un psychologue suisse, etc.

14 Guy Le Boterf, Construire les comptences individuelles et collectives, Organisation (ditions d'), 2004.

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Ce thoricien de la psychologie cognitive dit : un enfant ne retient rien ou presque, si on lui donne le savoir sur un plateau dor15 !

Le structuralisme : Est une thorie simple. Elle stipule que tout savoir doit tre construit (do la notion de constructivisme). Llve, lenseignant, lhomme, afin dintgrer le savoir, il doit lui donner un SENS. Mais pour donner du SENS un Savoir, on ne doit pas le subir, au contraire, on doit lapprivoiser. Cela ne pourra avoir lieu qu partir de laction. Cest pourquoi, llve est amen tre le moteur de son apprentissage, il doit y participer pleinement pour en tirer profit. Ne dit-on pas que pour digrer le savoir, il faut lavoir avaler avec apptit ? Ne dit-on pas que lenfant nest pas un vase remplir, mais une me former ? Le constructivisme sinscrit exactement dans cette ligne : lapprentissage est fait de ttonnements, est fait dhypothse, derreurs, et de validations dhypothses Lapprenant, que ce soit : un lve, un enseignant, un chercheur, un scientifique, ne peut prtendre intgrer un Savoir que sil participe activement au processus de construction de ce savoirAucune connaissance dcontextualises ne peut rsister lusure du tempsOn ne joue pas cachecache avec notre mmoire Le but du constructivisme, comme philosophie et pistmologie, est damener lapprenant agir, construire, valider les savoirs et les apprentissages Cependant, le constructivisme na jamais t une thorie dogmatique, qui exclut les autres mthodes: elle trouve quil est tout fait normal dutiliser la

15 NB- Lexpression est moi, mais lide est lui !

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mthode dclarative (le cours magistral) ou socratique (le cours par questionrponse) pour acqurir certaines connaissances

Quels sont les principes de lAPC ?

Les principes de lAPC sont simples. Mais ce sont nos pratiques ancestrales qui ont empch de dclore ces principes : cest en fin de compte une question de reprsentation, ou ce que le sociologue Pierre Bourdieu appelle la reproduction

Concrtisation 1

Dans lensemble, malgr les aptitudes pdagogiques acquises dans les centres de formations, chaque enseignant garde un modle dapprentissage quil a observ pendant sa scolarit, et essaie de lappliquer en tant un rfrent dans lacte denseignerCela sappelle leffet de reprsentation Il est difficile de sortir de ce cercle et changer dattitude au niveau de ses propres pratiques et de ses propres conceptions de lacte denseigner

Concrtisation 2

Imaginons que nous travaillons le jour, en se disant quil est normal de travailler pendant le jour et de se reposer la nuitA un moment, on nous dit :

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non ! Le travail le jour, cest termin. Maintenant, il faut travailler la nuit ! Quel sera la raction ? Vous pouvez limaginer Cest a exactement le rapport entre les pratiques bhavioristes et les pratiques constructivistes :

* Le travail le jour = le bhaviorisme * Le travail la nuit = le constructivisme Et je le rappelle : LAPC est issu de cette philosophie de la psychologie cognitive

Voil maintenant pour celui qui veut travailler la nuit. (La nuit, ce nest pas pjoratif : pour la question de reprsentation)

Les principes de lAPC :

Lapproche par comptence, comme son nom lindique est avant tout une approche . Une approche est une manire, une faon daborder quelque chose : ici lacte denseignerCest le fait daborder et davoir accs Rsultat : approcher les comptences, cest aborder le Savoir, pour avoir accs aux comptences.

Principe 1 Au niveau de lapprenant :

A- Il est actif : cela veut dire quil ne va pas venir lcole pour accumuler les60

savoirs. . Dun lve passif, qui attend tout de son matre, il devient curieux, original dans la recherche du savoir : il prend des initiatives quant la recherches de ce Savoir. Il commence travailler avec projet personnel. Il nest pas consommateur, mais acteur de son apprentissage.

B- Il est partenaire dans la construction des apprentissages, dans la mesure o il se prend en charge et sassume compltement. Les initiatives, elles viennent de lui car il est sujet, non objet, de son apprentissage

Principe 2

Au niveau de lapprentissage :

A- llve devient apprenant : Sa relation avec lapprentissage change. Dun simple excutant, llve devenu apprenant (Dans le sens plein du terme), participe activement la construction du Savoir. B- llve dveloppe ses aptitudes apprendre. Il a conscience de ses actes, de ses dmarches : il sait do il est parti et par quel chemin il a pass et o il veut arriver. Ce ne sont pas seulement les connaissances qui le poussent agir, mais aussi sa manire dapprendre et le sens quil donne aux apprentissages : lapprenant agit par motivation.

Principe 3 Au niveau de lenseignant :

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A- Lenseignant abdique un pseudo-droit et retourne lcole : Il doit abdiquer son rle dadministrateur du Savoir, de sacro-saint dtenteur du savoir. Cest une sorte de rupture pistmologique, entre un pass et un prsent. Lenseignant, dans cette vision des choses, doit rapprendre son mtier nouveau ! Il ne vient pas pour donner le cours, mais pour autres choses. B- Lenseignant apprend : devenir une ressource pour ses apprenants. Il devient un intermdiaire entre lapprenant, devenu acteur, et le savoir construireCela veut dire que le savoir nest pas lobjectif final de lapprentissage, que lenseignement nest pas vertical, assum pleinement par lenseignant. Ce qui compte dsormais, cest lacquisition du savoir, aprs un travail actif, construit, fait par lapprenant, avec laccompagnement de lenseignant. Principe 4 Au niveau du contenu :

A- Un contenu prsent sous forme dune situation dapprentissage : cela veut dire quaucun contenu nest donn de manire gratuite. Cela veut dire que la situation prsente par lenseignant, facilitateur, accompagnateur et animateur donne pleinement du sens lapprentissage et au savoir construire

B- Un contenu pour lui-mme, mais pas seulement : au lieu de ne voir dans un contenu quun ensemble de savoirs accumuler, rservs pour les examens, lapprenant trouve en lui une occasion pour dvelopper ses aptitudes apprendre, ses attitudes dvelopper des savoir-faire, et pour entrer en interaction avec les autres apprenants62

Principe 5

Au niveau du Savoir :

A- Une nouvelle conception du savoir : lapprenant change son rapport au savoir. Le but est de rflchir, de scander ce savoir. De ne pas essayer de laccumuler, mais de lintgrer, aprs lavoir construit et investit dans dautres contextes, qui lui donnent plus de sens encore

B- Un savoir acquis, intgr, investi : pour quil soit acquis, le savoir doit tre construit. Pour quil soit intgr, le savoir doit tre reconstruit, pour quil soit investi, le savoir doit tre incorpor dans les automatismes de lapprenant

Principe 6 Au niveau du modle denseignement/apprentissage :

A- Des rles inverss : cest lapprenant qui apprend, ce nest pas lenseignant qui enseigne ! Llve ne vient pas pour se scolariser sous la main dun professeur qui sait tout et qui donne tout de A Z. Cest lapprenant qui vient pour assumer et construire ses propres connaissances.

B- Le modle classique de lcole dispensatrice de connaissance est renvers : lcole devient une ruche bourdonnante, o lon vient pour interagir, non pour subir. Lcole devient un champ dinvestigation, dexprimentation, un champ derreur et de rectifications de ces erreurs, partir des tentatives rptes63

Principe 7

Au niveau des mthodes denseignement :

A- Une mthode qui favorise lapprentissage : un espace trs troit est consacr lenseignement. Lenseignant nest pas l pour parler, expliquer, faire des commentaires sur une notion de cours. Lheure est lapprentissage ! Lapprenant pose des questions, consulte des rfrences, cherche et rflchit

B- Une mthode qui donne la notion dactivit de lapprenant sa vraie signification : cest une mthode qui favorise la dynamique de lquipe (Je prfre le mot quipe au lieu de groupe pour plusieurs raisons), qui favorise le travail par projet, qui favorise le travail par situation-problme, qui favorise le travail avec les mthodes actives

Principe 8

Au niveau du rapport enseignant-apprenant / apprenant-enseignant :

A- lenseignant devient accompagnateur, cest--dire un conseiller et un guide. Lenseignant devient un animateur, cest--dire un catalyseur qui anime lesprit dune quipe active qui travaille avec dynamisme.

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B- Lapprenant devient actif : il est dynamique, travailleur, rflexif, ouvert et participe pleinement la construction de son apprentissage

Principe 9

Au niveau de la relation enseignant-apprenant/ apprenant-enseignant :

A- une relation horizontale : finit le cours magistral. Finit les prises de notes sous un flux de donnes que constitue le cours ! La relation, cest celle entre les apprenants qui collaborent ensemble pour construire le savoir. Lenseignant est l pour consultations, pour claircissement, pour dventuels conseils

B- une relation de personne ressource : lenseignant devient une ressource parmi dautres. Son rle est dtre le moins prsent que possible. Plus, il intervient peu, plus cest bien. Les lves ont commenc construire leur propre autonomie et commencent voler de leur propre ailles

Principe 10

Au niveau du curricula :

A- Pas de contradiction : si on veut travailler par approche par comptence, on doit abdiquer le droit denseigner la quantit. Au lieu de la quantit, il faut reverser la tendance en misant sur la qualit de lapprentissage. Il faut donc changer de stratgie en btissant des manuels qui offrent un ensemble de

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situations significatives pour lapprenant. Ils serve