journal du tns

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OURNAL J Théâtre National de Strasbourg Mai - Juin 2011 / n°9 L'École du TNS • Festival Théâtre en mai − Dijon • Atelier spectacle de sortie : B+B dirigé par J.-P. Vincent et B. Chartreux > page 2 Le nouveau parvis du TNS par IXO Architecture > page 2 Graal Théâtre 1 Joseph d'Arimathie de Florence Delay et Jacques Roubaud > page 3 Entretien avec Krystian Lupa (suite) metteur en scène de Fin de partida > Stammtisch Report de la 7 e édition du Festival Premières > page 3 « L'homme est mis au monde pour faire l'impossible. » Fin de partida © Teatro Abadia - Ros Ribas Entretien avec Krystian Lupa, metteur en scène de Fin de partida Olivier Ortolani – Qu’est-ce qui vous a poussé à mettre en scène la pièce de Samuel Beckett Fin de partie ? Krystian Lupa – La mise en scène de Fin de partie est à l’origine une proposition du comédien et directeur du Teatro de La Aba- dia, José Luis Gomez. Avant cela, il m’est arrivé de me frotter à Beckett et je me suis demandé à plusieurs reprises si j’étais ca- pable de le mettre en scène. Travailler sur une pièce de Beckett est toujours quelque chose de terrifiant, parce qu’il a tout pré- vu dans les moindres détails, parce que ses consignes pour la mise en scène sont particulièrement strictes. Je trouvais cela dérangeant de ne devoir faire que ce qu’il voulait sans pouvoir finalement proposer quelque chose de nouveau. Et lors des premières répétitions, nous avons plaisanté à ce sujet : Beckett donne des indications de mise en scène avec au- tant de précision peut-être parce qu’il n’a pas confiance dans les metteurs en scène et dans les acteurs. Si ces derniers ne com- prennent rien du tout, il faut au moins qu’ils fassent ce qui est indiqué dans les didas- calies (rires). Lorsque nous avons commencé à décorti- quer le texte, il nous est bien vite apparu qu’il recelait une quantité monstrueuse de secrets. Pour moi, c’était fascinant. En effet pour Beckett, l’essentiel dans le texte, c’est le non-dit, ce qu’il y a entre les lignes. Dans Fin de partie, Hamm et Clov, les deux per- sonnages principaux, ne disent pas la vé- rité, ils se cachent et sont dans un rapport de force au sein d’un jeu de mensonges. Ils expriment des banalités quotidiennes et l’essentiel est tu. Dans votre mise en scène, vous avez pris des libertés en ce qui concerne la scéno- graphie. Au plafond, il y a un lustre qui ne figure pas chez Beckett, l'espace est assez petit… C’est le monde intérieur. On est dans un bunker. Après la guerre, il restait en Eu- rope centrale beaucoup de ces bunkers abandonnés et c’était mystérieux et attirant pour un enfant comme moi. Le mythe et la fascination sont liés à un tel espace. Un tel lieu est aussi recouvert de graffiti : des gens viennent et utilisent la puissance de ce mythe pour en faire quelque chose. Pour moi, cet espace correspond à la représen- tation de la catastrophe chez Beckett. Habituellement, Nagg et Nell sont dans des poubelles posées sur scène. Dans votre mise en scène, on les tire du mur alors qu’ils sont allongés dans leurs cages de verre. On voit aussi intégralement leur corps : ils sont en partie nus et rachitiques, comme démunis… C’était génial en fait que Beckett ait le pre- mier cette idée des poubelles. Dans chaque représentation de Fin de partie, il y a ces poubelles – aujourd’hui c’est incontour- nable. Pour moi, c’était particulièrement difficile de faire la même chose. Je me po- sais aussi la question suivante : que peut- il y avoir dans ce bunker ? Il y a plusieurs possibilités. Lorsque j’étais à Pompéi, j'ai vu des hommes, ceux qui autrefois ont été soudai- nement surpris par la catastrophe, fossili- sés dans des aquariums, où il y a eu peut- être un jour, bien avant, des poissons. Dans ces bunkers de la Seconde Guerre Mondiale, il y a eu peut-être aussi des ex- périences avec des humains qui y étaient enfermés. Pour moi, c’était essentiel d’imaginer Hamm faisant une expérience sadique et métaphysique avec son père et sa mère. Peut-être souhaite-t-il forcer ses pieux parents à expier leur faute. Eux, au contraire, veulent toujours parler de son bonheur. C’est alors qu’il y a un combat entre le père et le fils. La mise en scène de ce sentiment qu’a le fils d’être une victime, est un motif récurrent. Il est victime de la bêtise et des péchés de ses parents. > Suite Stammtisch HAMM – J'ai connu un fou qui croyait que la fin du monde était arrivée. Il faisait de la peinture. Je l'aimais bien. J'allais le voir, à l'asile. Je le prenais par la main et le traînais devant la fenêtre. Mais regarde ! Là ! Tout ce blé qui lève ! Et là ! Regarde ! Les voiles des sardiniers ! Toute cette beauté ! (Un temps.) Il m'arrachait sa main et retournait dans son coin. Épouvanté. Il n'avait vu que des cendres. (Un temps.) Lui seul avait été épargné. (Un temps.) Oublié. (Un temps.) Il paraît que le cas n'est... n'était pas si... si rare. CLOV – Un fou ? Quand cela ? HAMM – Oh c'est loin, loin. Tu n'étais pas encore de ce monde. CLOV – La belle époque ! Un temps. Hamm soulève sa calotte. HAMM – Je l'aimais bien. (Un temps. Il remet sa calotte. Un temps.) Il faisait de la peinture. CLOV – Il y a tant de choses terribles. Extrait de Fin de partie de Samuel Beckett, Les Éditions de Minuit, 1957, p. 63 Le journal de... Gilles Kammerer > Stammtisch

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Mai-Juin 2011

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Page 1: Journal du TNS

OURNALJ Théâtre National de StrasbourgMai - Juin 2011 / n°9

L'École du TNS• Festival Théâtre en mai − Dijon

• Atelier spectacle de sortie : B+Bdirigé par J.-P. Vincent et B. Chartreux

> page 2

Le nouveauparvis du TNS

par IXO Architecture> page 2

Graal Théâtre 1Joseph d'Arimathie

de Florence Delayet Jacques Roubaud

> page 3

Entretien avec Krystian Lupa (suite)

metteur en scène de Fin de partida> Stammtisch

Report dela 7e édition du

FestivalPremières

> page 3

« L'homme est mis au mondepour faire l'impossible. »

Fin de partida

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Entretien avec Krystian Lupa,metteur en scène de Fin de partida

Olivier Ortolani – Qu’est-ce qui vous a poussé à mettre en scène la pièce deSamuel Beckett Fin de partie ?Krystian Lupa – La mise en scène de Fin de partie est à l’origine une proposition du comédien et directeur du Teatro de La Aba-dia, José Luis Gomez. Avant cela, il m’est arrivé de me frotter à Beckett et je me suis demandé à plusieurs reprises si j’étais ca-pable de le mettre en scène. Travailler sur une pièce de Beckett est toujours quelque chose de terrifiant, parce qu’il a tout pré-vu dans les moindres détails, parce que ses consignes pour la mise en scène sont particulièrement strictes. Je trouvais cela dérangeant de ne devoir faire que ce qu’il voulait sans pouvoir finalement proposer quelque chose de nouveau. Et lors des premières répétitions, nous avons plaisanté à ce sujet : Beckett donne des indications de mise en scène avec au-tant de précision peut-être parce qu’il n’a pas confiance dans les metteurs en scène et dans les acteurs. Si ces derniers ne com-prennent rien du tout, il faut au moins qu’ils fassent ce qui est indiqué dans les didas-calies (rires).Lorsque nous avons commencé à décorti-quer le texte, il nous est bien vite apparu qu’il recelait une quantité monstrueuse de

secrets. Pour moi, c’était fascinant. En effet pour Beckett, l’essentiel dans le texte, c’est le non-dit, ce qu’il y a entre les lignes. Dans Fin de partie, Hamm et Clov, les deux per-sonnages principaux, ne disent pas la vé-rité, ils se cachent et sont dans un rapport de force au sein d’un jeu de mensonges. Ils expriment des banalités quotidiennes et l’essentiel est tu.

Dans votre mise en scène, vous avez pris des libertés en ce qui concerne la scéno-graphie. Au plafond, il y a un lustre qui ne figure pas chez Beckett, l'espace est assez petit…C’est le monde intérieur. On est dans un bunker. Après la guerre, il restait en Eu-rope centrale beaucoup de ces bunkers abandonnés et c’était mystérieux et attirant pour un enfant comme moi. Le mythe et la fascination sont liés à un tel espace. Un tel lieu est aussi recouvert de graffiti : des gens viennent et utilisent la puissance de ce mythe pour en faire quelque chose. Pour moi, cet espace correspond à la représen-tation de la catastrophe chez Beckett.

Habituellement, Nagg et Nell sont dans des poubelles posées sur scène. Dans votre mise en scène, on les tire du mur alors qu’ils sont allongés dans leurs cages de verre. On voit aussi intégralement leur

corps : ils sont en partie nus et rachitiques, comme démunis…C’était génial en fait que Beckett ait le pre-mier cette idée des poubelles. Dans chaque représentation de Fin de partie, il y a ces poubelles – aujourd’hui c’est incontour-nable. Pour moi, c’était particulièrement difficile de faire la même chose. Je me po-sais aussi la question suivante : que peut-il y avoir dans ce bunker ? Il y a plusieurs possibilités.Lorsque j’étais à Pompéi, j'ai vu des hommes, ceux qui autrefois ont été soudai-nement surpris par la catastrophe, fossili-sés dans des aquariums, où il y a eu peut-être un jour, bien avant, des poissons.Dans ces bunkers de la Seconde Guerre Mondiale, il y a eu peut-être aussi des ex-périences avec des humains qui y étaient enfermés. Pour moi, c’était essentiel d’imaginer Hamm faisant une expérience sadique et métaphysique avec son père et sa mère. Peut-être souhaite-t-il forcer ses pieux parents à expier leur faute. Eux, au contraire, veulent toujours parler de son bonheur. C’est alors qu’il y a un combat entre le père et le fils. La mise en scène de ce sentiment qu’a le fils d’être une victime, est un motif récurrent. Il est victime de la bêtise et des péchés de ses parents.

> Suite Stammtisch

HAMM – J'ai connu un fou qui croyait que la fin du monde était arrivée. Il faisait de la peinture. Je l'aimais bien. J'allais le voir, à l'asile. Je le prenais par la main et le traînais devant la fenêtre. Mais regarde ! Là ! Tout ce blé qui lève ! Et là ! Regarde ! Les voiles des sardiniers ! Toute cette beauté  ! (Un temps.) Il m'arrachait sa main et retournait dans son coin. Épouvanté. Il n'avait vu que des cendres. (Un temps.) Lui seul avait été épargné. (Un temps.) Oublié. (Un temps.) Il paraît que le cas n'est... n'était pas si... si rare.

CLOV – Un fou ? Quand cela ?

HAMM – Oh c'est loin, loin. Tu n'étais pas encore de ce monde.

CLOV – La belle époque !

Un temps. Hamm soulève sa calotte.

HAMM – Je l'aimais bien. (Un temps. Il remet sa calotte. Un temps.) Il faisait de la peinture.

CLOV – Il y a tant de choses terribles.

Extrait de Fin de partie de Samuel Beckett, Les Éditions de Minuit, 1957, p. 63

Le journal de...Gilles

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Qu’est-ce que le Graal ? Un mystère scin-tillant à l’horizon de notre imaginaire. Un mythe d’exception, à l’incarnation singulière – ni ailleurs utopique (Eden, Atlantide, Eldo-rado), ni héros archétypal, qu’il fût biblique (Lilith), antique (Œdipe, Médée) ou moderne (Faust, Don Juan, Don Quichotte) –, mais un objet sacré, où se cristallise une insaisis-sable essence divine. L’objet fascinant d’une quête initiatique infinie, déployée au cœur du Moyen Âge, toujours reprise d’âge en âge, plongeant ses racines à la croisée de nos origines. Une série d’aventures contant la saga arthurienne, jadis composée en romans (Chrétien de Troyes, parmi tant d’autres trouvères parfois sans visage), puis transpo-sée en opéras (Purcell, Wagner) ou en films (Bresson, Rohmer, Boorman), et enfin – par la grâce contemporaine d’un scribe bicéphale (Delay-Roubaud) – recomposée en somme théâtrale : Graal Théâtre (Éditions Gallimard, 2005).Au total, trente ans d’écriture qui, par quin-tessence, se sont subsumées en vingt-quatre heures de lecture. Des dix pièces qui scandent ce cycle, les deux premières fondent la double origine : naissance de la chevalerie céleste avec Joseph d’Arimathie, naissance de la chevalerie terrienne avec Merlin l’Enchanteur – créateur de la Table Ronde. Du croisement de ces deux chevale-ries pourront jaillir les temps aventureux, s’iriser l’histoire du royaume arthurien, et se

confronter les lignées de Joseph (Lancelot, Perceval) et de Merlin (Arthur, Gauvain).De cette légende, Joseph d’Arimathie consti-tue la préhistoire, le noyau originel où se nouent toutes les contradictions. Car en transportant en Bretagne le vase sacré qui recueillit le sang du Christ, Joseph fait se percuter mythologie chrétienne et mytholo-gie celtique. Dès lors, le familier le dispute à l’étrange, l’ordre au chaos, le jour à la nuit, le salut à la damnation. Pièce inaugurale du Graal Théâtre, Joseph rayonne tel un mys-tère médiéval teinté d’abstraction, un acte sacramentel où sont posées les données de l’insoluble équation (péché originel, faute, inceste…), où sont implantés les objets magiques qui déchaîneront toutes les aspi-rations, où s’enclenche la vertigineuse poly-sémie d’un mythe qui prête aux mots et aux choses – sortilèges et reliques – toutes les interprétations possibles – de quoi ce vase et cette lance sont-ils le signe ?Par contraste avec de tels enjeux symbo-liques et paraboliques, Merlin marquera la chute dans la fable concrète, voire triviale, pétrie d’humaines péripéties. Le Graal ? Un puits sans fond où brille encore l’énigme du sacré. De cet abîme, Joseph d’Arimathie soulève la dalle pour y laisser tomber la pre-mière pierre.

En imaginant la création de l’intégralité du Graal Théâtre, nous faisons le pari de cette

aventure théâtrale extraordinaire, menée de concert par le Théâtre National Populaire et le Théâtre National de Strasbourg. Le Graal Théâtre ou l’histoire d’un défi un peu aventu-reux, courageux et irréaliste. L’histoire d’un secret partagé, d’une grande perspective en commun. Une aventure de troupe déployée sur plusieurs années où s’égrèneront les pièces – en quête du mythe fondamental de la quête. Il s’agira de retrouver l’appétit et la fougue des grandes épopées. Il s’agira de retrou-ver le souffle – pas le second, mais le tout premier. Il s’agira aussi de retrouver la peur et les pal-pitations du cœur qui l’accompagnent. C’est ensemble que nous nous engageons dans cette traversée ; sans doute au risque de nous perdre dedans ou de ne pouvoir à nous deux jamais la terminer.La tâche est immense, elle est enivrante et va nous tenir en équilibre et transformer le sursis en grande joie. Elle va nous accorder la force et le temps dont nous avons besoin.

Christian Schiaretti,directeur du TNP de VilleurbanneJulie Brochen, directrice du TNS

Spectacles

• FIN DE PARTIDA > du mercredi 4 au dimanche 8 maiSpectacle en espagnol surtitré

Atelier-spectacle de sortiedes élèves du groupe 39 de l’École du TNS• B+BFragments Woyzeck de Büchner +Grand-Peur et Misère du IIIe Reich de Brechtdirigé par J.-P. Vincent et B. Chartreux

AU TNS> du jeudi 9 au jeudi 16 juinEspace Klaus Michael GrüberEntrée libre. Réservation obligatoire :+ 33 (0)3 88 24 88 24

AU THÉÂTRE DE LA COMMUNE D’AUBERVILLIERS > du jeudi 23 au mercredi 29 juinEntrée libre. Réservation obligatoire :+ 33 (0)1 48 33 16 16

L’École du TNS et…… France Culture

Diffusion de Gênes 01 de Fausto Paravidino interprétée par les élèves des groupes 39 et 40Réalisation : Cédric Aussir > Dimanche 1er mai à 20hdans l’émission Théâtre et compagnieEnregistrement réalisé en public et dans les conditions du direct le 9 avril au TNS.

… La Nuit des Musées

Des élèves comédiens du groupe 40 (1ère année) participeront à deux lectures dans le cadre de cette manifestation> Samedi 14 mai• Promenades littéraires (textes de F. Ponge)> Au MAMCS à 20h30, 21h30 et 22h30 • Accueil 1928> À l’Aubette de 20h à 23hwww.nuitdesmusees.culture.fr

Lecture publique

• À LA PÉRIPHÉRIE de Sedef EcerDirigée par Fred Cacheux,avec les comédiens de la troupe du TNS> Samedi 21 mai à 17h salle GignouxEn présence de l'auteureRéservation obligatoire

Le TNS accueille… Le Festival Nouvelles Danse-Performance

> Vendredi 27 mai

• TouT va Bien de Alain Buffard8 interprètes – Franceà 20h30 salle Koltès

• TwenTy looks or Paris is Burning aT THE JUDSON CHURCH(S) de Trajal harrell Solo – États-Unis à 22h salle Gignoux

Le Festival se déroule du 18 au 28 mai+ 33 (0)3 88 39 23 40 • www.pole-sud.fr

Projections

• Ils étaient comme à la recherche de rêves perdus : une autre histoire du TNS Documentaire de Michel DeutschSeppia, 2011, 52’> Samedi 14 mai à 18h salle GignouxRéservation obligatoire

Suivie d’une rencontre avec MichelDeutsch, Jean-Louis Hourdin, Jean-Pierre Vincent et Julie Brochen

• La Cerisaie de Anton TchekhovD'après la mise en scène de Julie BrochenRéalisation Alexandre GavrasUnlimited production, 2011, 120'> Mardi 31 mai à 20h salle KoltèsRéservation obligatoire

Dernier atelier de théâtreamateur de la saison

> Du 5 au 8 maiCe dernier atelier est assuré par les trois comédiens de la troupe du TNS  : Muriel Inès Amat, Fred Cacheux et Cécile Péricone. Durant les quatre jours, une trentaine de personnes travailleront sur un texte contemporain. Contact Anne-Claire Duperrier :+ 33 (0)3 88 24 88 03 • [email protected]

Présentations de saison

> Vendredi 2 septembre à 20h> Samedi 3 septembre à 18h

Ouverture des abonnements

> Mardi 30 août à 10h

Graal Théâtre 1L’École du TNS

Groupe 38SORTI eN 2010

Deux spectacles créés au cours de leur formation :

• Le Conte d’hiverd’après William ShakespeareTexte français Bernard-Marie KoltèsCréation collective dirigée par Pauline Ringeadeassistée de Catherine Umbdenstock> vendredi 20 à 19h, samedi 21 à 17h30, dimanche 22 à 14h30Au Théâtre Mansart

• Funérailles d’hiverde Hanokh LevinTexte français Laurence SendrowiczMise en scène et adaptation :Maëlle Poésy - Compagnie Drôle de Bizarre> vendredi 27 à 19h, samedi 28 à 14h30, dimanche 29 à 17hAu Théâtre Mansart

Groupe 40ACTueLLeMeNT eN 1èRe ANNÉe

• Ateliers Brecht dirigé par Jean-Louis Hourdinen collaboration avec Karine QuintanaAtelier Brecht 1, Jean la Chance > vendredi 20 mai à 21hAtelier Brecht 2, Cabaret de la pensée > samedi 21 mai à 17hÀ la Bourse du travail

Il s’agit de construire deux veillées autour de la pensée de Brecht. Brecht est un grand poète allemand, pas uniquement théâtral, puisqu'il existe neuf volumes de ses poèmes, de ses histoires, de ses chansons. Donc il y a, d'une part, le désir de prendre tout ce qui n'est pas théâtral chez Brecht pour en faire un spectacle et d’autre part, de proposer quelque chose autour de Jean la Chance. Je trouve cette pièce magnifique, complètement enluminée et marquée par la littérature allemande. Brecht n'a que vingt, vingt-et-un ans lorsqu'il l'écrit, soit l'âge des élèves du TNS, et travailler ce texte fascinant avec eux m'intéresse.

Jean-Louis Hourdin

Joseph d’Arimathie

Festival Premières

Lorsqu'en 2005 le Festival Premières est créé, porté par les énergies conjointes de Bernard Fleury, Stéphane Braunschweig et Didier Juillard, des équipes du Maillon et du TNS, il s'agissait de rendre compte de l'énergie, de la force et de la pertinence de la jeune création théâtrale européenne.Comme de nombreux autres acteurs de la ville qui œuvrent en permanence pour le dynamisme et le rayonnement culturel de Strasbourg, nos deux théâtres ont de-puis lors joint leurs forces, chaque année, pour explorer, soutenir, programmer et diffuser quelques 58 metteurs en scènes, compagnies et projets, venus de la plupart des pays européens. En confrontant leurs cultures spécifiques, ces jeunes artistes ont su témoigner d’un regard neuf, jeune, souvent politique, à la fois sur l’art de la mise en scène et notre société. Aujourd’hui, si la manifestation bénéfi-cie du soutien indispensable et fidèle des collectivités territoriales, le festival reste principalement adossé aux moyens dont dispose chacune de nos deux structures et de leur subvention de fonctionnement respective. Dans une période de contrac-tions budgétaires que toutes les structures culturelles connaissent, qui peuvent frap-per l'un ou l'autre de nos deux théâtres et qui cette fois-ci atteignent le TNS dans la bonne réalisation de ses missions à l'égard de la création et du public pour la saison 2011-2012, nous avons donc décidé, dou-

loureusement, de reporter l'édition 2011.Au-delà de l’engagement du TNS et du Maillon à porter ensemble l’édition 2012 de Premières, il est vital que le festival puisse bénéficier de moyens nouveaux, pour permettre non seulement d’en assu-rer la prochaine édition mais également d'en garantir la pérennisation.Il est donc vital que ce festival puisse être « sanctuarisé » : il s’agit de le rendre plus autonome financièrement en le dotant notamment d'une économie qui soit moins dépendante des éventuelles fluctuations de nos moyens d’actions respectifs.Le TNS et le Maillon y travaillent ensemble, comme cela a toujours été depuis la pre-mière édition du festival. Si de nombreuses pistes de réflexion se font déjà jour, nous voulons y associer les partenaires de Pre-mières tels que la Ville de Strasbourg, le Conseil Régional d’Alsace, le Conseil Géné-ral du Bas-Rhin, la DRAC Alsace… Et nous sommes convaincus que c'est en mutua-lisant toutes les forces autour du festival que nous parviendrons à le rendre plus solide.Faire de Premières un moment culturel et artistique fort en nous associant de façon durable à nos voisins allemands ; explo-rer ainsi les possibilités et la pertinence qu'offre l'échelle transfrontalière pour aborder concrètement l’espace européen ; consolider les liens avec les collectivi-tés territoriales de part et d’autre du Rhin pour donner corps à l'identité européenne et culturelle de Strasbourg et de l'Alsace, mais aussi de l’Ortenau et du Bade-Wür-temberg ; s'associer à des acteurs privés convaincus de l'impact et de l'importance de ce rayonnement culturel européen, en s'appuyant sur une mobilisation poli-tique forte et engagée, tant nationale que locale…C'est notre souhait d’inscrire Premières dans ces nouveaux enjeux sociaux, parce que c'est notre désir commun de redé-ployer le Festival dans sa pleine dimension artistique, publique, et européenne. C'est également et surtout notre responsabilité à l'égard de la jeune mise en scène euro-péenne comme des spectateurs, français et étrangers, nombreux, curieux et fidèles du festival.

Julie Brochen, directrice du TNSBernard Fleury, directeur du Théâtre du Maillon

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Report de la 7e édition du festival

Atelier-spectacle de sortie du Groupe 39Conçu et animé par Jean-Pierre Vincent et Bernard Chartreux, pour et avec le Groupe 39 de l’École du TNS.

B + B Fragments Woyzeck de Georg Büchner + Grand-Peur et Misère du IIIe Reich de Bertolt Brecht

Au festival Théâtre en Mai du Théâtre Dijon-BourgogneLa 22e édition de ce festival européen aura lieu du 18 au 29 mai 2011.Cette année, plusieurs anciens et actuels élèves de l’École y sont invités.Renseignements et billetterie : + 33 (0)3 80 30 12 12 - www.tdb-cdn.com

Les travaux débuteront à la fin du mois de juin 2011 et se termineront fin octobre 2011. Jusqu’à fin sep-tembre l’entrée des spectateurs se fera par la place de la République. Le bar du TNS, quant à lui, sera fermé durant les premières phases des travaux et devrait ouvrir à nouveau fin septembre. Toutefois, durant la période d’abonnement un bar sera installé dans le hall Koltès.

Usé avant l’heure, dégradé et tagué, fragmenté en petites entités auto-nomes et ceint d’aménagements anarchiques, le parvis de l'entrée principale du TNS et de l’École supé-rieure d’Art dramatique n’est pas à la hauteur du seul théâtre national en région.Cet espace de vie pour le personnel et les utilisateurs, d'accès aux représen-tations et d’accueil des spectateurs, doit aujourd’hui profiter pour son réa-ménagement des évolutions récentes de l’espace urbain entre le TNS et le musée Tomi Ungerer, espace trans-formé par l’arrivée du tramway et l’engazonnement de ses voies, la création d’une grille le séparant du

reste de l’avenue ainsi que la planta-tion de trois alignements de marron-niers qui donnent à ce lieu un air de square ou de mail*, précieux dans la ville.Étendu aux limites de la parcelle, le parvis rénové présentera trois séquences spatiales unifiées par un premier emmarchement continu et un même matériau naturel : le calcaire de Comblanchien. Au centre, un vaste plan incliné, rappel des plateaux de scène et invitation au spectacle, mène naturellement aux trois portes du hall principal.À l’Est, la terrasse haute du café, à l’origine réfugiée contre la façade pour échapper au trafic de l’avenue, double de surface et s’étend sur un tapis de bois jusque sous le hêtre et le marronnier vénérables. Un pavillon destiné à abriter toutes les contin-gences matérielles (mobilier, bennes à ordures…) achève de protéger la terrasse des nuisances de la rue Malraux et l’oriente vers le « square » central.À l’opposé, le parvis minéral se dis-sout progressivement dans une vaste pelouse, espace d’agrément

et de détente du personnel et des étudiants qui profiteront de leurs pauses entre arbres d’ornements et bancs en blocs de calcaire, au pied de la façade historique ainsi mise en valeur.Grâce aux échanges constructifs avec la ville de Strasbourg, l’es-pace public mitoyen bénéficiera en parallèle de la suppression de la plupart des surfaces résiduelles en enrobé et de l’aménagement de 60 arceaux pour vélos le long du quai de la station de tramway, ac-centuant ainsi la dimension végé-tale du site et libérant le parvis de tout stationnement parasite.Un vaste auvent lumineux, le re-nouvellement de la signalétique et une nouvelle mise en lumière du parvis et de la façade achèveront la renaissance de cet espace ur-bain, pour le bénéfice commun du TNS et des strasbourgeois.

Christophe Touet est architecte et co-gérant de IXO Architecture,

cabinet qui vient de réaliserla restructuration des ateliers

de construction de décors du TNS.* Mail : Allée arborée

Le nouveau parvis du TNS > Avenue de la Marseillaise

En juin, la grande aventure du Graal Théâtre débutera. Christian Schiaretti et Julie Brochen, metteurs en scène et directeurs respectifs du Théâtre National Populaire à Villeurbanne et du Théâtre National de Strasbourg, se lancent dans ce projet audacieux qui réunit non seulement leurs deux imaginaires, mais également les équipes artistiques, techniques et administratives des deux théâtres. Au fil des saisons, cette aventure se construira entre Villeurbanne et Strasbourg avec ce désir commun de créer pour la première fois l'intégralité du Graal Théâtre avec la précieuse collaboration de ses deux scribes : Florence Delay et Jacques Roubaud. Julie Brochen et Ivan Hérisson (élève du groupe 39 de l’École et interprète récent de Sganarelle dans le Dom Juan de cette fin de saison au TNS) joueront dans la première partie, Joseph d’Arimathie, mise en scène par Christian Schiaretti et créée le 8 juin au TNP ; la saison prochaine, ce sera au tour du TNP d’être accueilli au TNS, puisque la deuxième partie, Merlin, co-mise en scène par Christian Schiaretti et Julie Brochen, sera présentée en mai 2012. Avant chaque nouvelle partie, un résumé des « épisodes » précédents sera interprété par les acteurs.

Ils étaient comme à la

recherche de rêves perdus :

une autre histoire du TNS

Documentaire de Michel Deutsch

La décentralisation théâtrale est d’une certaine manière à la fois achevée et réussie si

on considère l’impressionnant réseau d’établissements culturels

qui couvre le territoire. Mais paradoxalement le théâtre n’est

plus au cœur de la cité depuis les années soixante-dix. Pour le dire vite – depuis quelques décennies

nous vivons une véritable révolution anthropologique. Il est

désormais urgent de raconter l’histoire de la décentralisation

théâtrale à travers l’expérience, à tout point exemplaire, du Théâtre National de Strasbourg, à l’heure

où la deuxième génération des acteurs de son aventure est en

passe de sortir de scène.

Michel Deutsch

GRAAL ThÉâTRe 1 : Joseph d’Arimathiede Florence Delay et Jacques Roubaud

Au TNP de Villeurbannewww.tnp-villeurbanne.com

Du mercredi 8 au dimanche 19 juin 2011

> Création du TNP en coproduction avec le TNS

Mise en scène Christian Schiaretti

Du mardi au samedi à 20h,dimanche 19 à 16h

Relâche dimanche 12 et lundi 13 juin

Avec Stéphane Bernard, Julie Brochen, Arnaud Décarsin, Philippe Dusigne, Ivan Hérisson, Daniel Pouthier et la troupe du TNP : Laurence Besson, Olivier Borle, Julien Gauthier, Nicolas Gonzales, Damien Gouy, Clément Morinière, Jérôme Quintard, yasmina remil, Juliette rizoud, Julien Tiphaine, Clémentine Verdier

Un voyage TNS – TNP est en cours d'élaboration pour assister à la représentation du dimanche 19 juin.Renseignements : Chrystèle Guillembert+33 (0)3 88 24 88 34 • [email protected]

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À PARIS, ThÉâTRe De LA COMMuNe – CDN D’AuBeRVILLIeRS2 rue Édouard Poisson − 93304 Aubervilliers

Du jeudi 23 au mercredi 29 juin 2011

Grand-Peur et Misère du IIIe Reich jeudi 23, lundi 27 et mercredi 29 à 20h

Fragments Woyzeckvendredi 24 et mardi 28 à 20h

Intégrale Samedi 25 : Fragments Woyzeck à 16h,Grand-Peur et Misère du IIIe Reich à 20h

Relâche dimanche 26

Entrée libre - Réservation obligatoire au + 33 (0)1 48 33 16 16

À STRASBOuRG

Du jeudi 9 au jeudi 16 juin 2011

Fragments Woyzeckjeudi 9, mardi 14 et jeudi 16 à 20h

Grand-Peur et Misère du IIIe Reich vendredi 10 et mercredi 15 à 20h

Intégrale Samedi 11 : Fragments Woyzeck à 16h,Grand-Peur et Misère du IIIe Reich à 20h

Relâche dimanche 12 et lundi 13

Espace Klaus Michael Grüber (18 rue Jacques Kablé)

Entrée libre - Réservation obligatoire au + 33 (0)3 88 24 88 24

Christophe Touet - IXO Architecture

Vue 3D du projet (non définitif)

Voici le spectacle de sortie du Groupe 39 (comme le temps passe…) de l’École du TNS. C’est un spectacle en deux volets, deux textes de la grande dramaturgie allemande, qui se répondent sans se confondre. Ils se répondent à un siècle de distance : de 1836 à 1938. D’abord, le sous-soldat Woyzeck tue la femme qu’il aime au lieu de s’en prendre aux vrais responsables de son malheur. Un siècle plus tard, de jeunes sous-soldats semblent contents de porter l’uniforme et de prendre fait et cause pour les responsables de leur malheur. Deux formes d’aliénation, d’aveuglement et de paralysie populaires, même si par éclairs la révolte se fait jour.Ces deux textes se répondent aussi dans la culture du fragment, si prolifique dans tous les secteurs de l’art moderne. Dans Woyzeck, Georg Büchner dynamite la majesté

des formes classiques pour chercher à comprendre les vies éclatées, les gestes avortés, le mutisme éloquent du bas peuple, du petit homme perdu dans la grande ville naissante. Dans son théâtre de combat, avec Grand-Peur et Misère du IIIe Reich, Brecht ne monte pas ici une grande machine fictionnelle comme sa Résistible ascension d’Arturo Ui. Il multiplie et décompose les facettes, les témoignages rapides  ; il nous fait parcourir l’Allemagne du Nord au Sud, entre 1933 et 1938, analysant par bribes les souffrances, les cruautés, les mensonges, les silences du peuple allemand piégé dans l’omniprésente tyrannie.Avec le Groupe 39, nous nous réattelons à ces fables vivaces. Les jeunes acteurs, régisseurs, scénographes, metteurs en scène et dramaturge d’aujourd’hui ne les trouvent pas

mortes, loin de là. En plusieurs sessions réparties sur trois années, nous avons pris à cœur de les aider à donner leur version, leur sentiment sur ces vieilles histoires qui ne vieillissent pas.C’est ma quatrième traversée de Woyzeck (après le Théâtre de l’Espérance en 1973, le Conservatoire de Paris en 1988 et Nanterre en 1993) ; et ma seconde pour Grand-Peur… (à l'École du TNS déjà, en 1977). Non seulement je ne m’en lasse pas, mais revenir ainsi sur le cœur brûlant de la naissance du théâtre moderne relance à chaque fois ma confiance dans notre art. Je sais aussi d’expérience que travailler Büchner au temps de l’école, c’est enclencher un moteur, une vigilance, qui restent en alerte pour toute une vie de théâtre.

Jean-Pierre Vincent, mars 2011

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Page 3: Journal du TNS

1er juillet 2010. Fin de soirée. TNS.

« Fini. C’est fini. Ça va finir... » Je me souviens m’être répété ces mots de Beckett ce soir-là. Nous mettions, ma classe et moi, fin à nos années de lycée : nos trois années en option théâtre aux Pontonniers s’achevaient avec beaucoup d’émotion par une présentation au TNS de différentes scènes de Lagarce, Eschyle et Corneille travaillées durant toute l’année avec des comédiens professionnels dans ce que nous appelions « notre petite Cerisaie », la salle de pratique théâtrale du lycée.

Il s’est passé tant de choses au cours de ces trois – trop courtes – années. Nous étions une vingtaine de jeunes venus de Strasbourg, de sa campagne et même des Vosges ; tous attirés par le théâtre et pleins d’une envie d’apprendre et d’évoluer dans notre démarche artistique. Le tout sous le regard d’un professeur et de comédiens extraordinaires d’humanité et de talent. Avec eux, et sans doute grâce à eux, nous avons su former un groupe, où chacun a pu trouver sa place.

Nous nous sommes découverts en Seconde, apprivoisés en Première, aimés en Terminale. Nous avons grandi aux Pontonniers. Nous avons ri pendant les cours de théâtre : les pitreries de Jean-Malo jouant Matamore, les bons mots d’Hélène Schwaller* nous dirigeant sur Agamemnon... Nous y avons pleuré aussi :

d’émotion devant certaines scènes de Lagarce, ou en jouant – comme ce fut mon cas – une scène de Corneille. Ces cours ont été une source infinie d’émotions fortes. Une source de travail également. Un travail de jeu tout d’abord. Nous répétions en autonomie au moins une fois par semaine, pendant deux à trois heures. Nous incorporions les écritures de Corneille, Lagarce et Eschyle. Le travail devenait alors plus théorique, encadré par notre professeur. Nous devions maîtriser les formes des œuvres, leur histoire, et connaître diverses mises en scène de référence. Arrivait alors la troisième phase du travail : celle du spectateur. Nous avons vu environ une cinquantaine de spectacles, partagés entre le TNS, le Maillon et la Comédie-Française, que nous analysions ensuite. Au-delà du jeu et du plaisir qu’il nous apportait, nous avons appris à penser le théâtre, ce qui me semble être un des points culminants et fondamentaux de cette formation.

Ce soir de juillet, je ne n’ai pas pu m’empêcher de repenser à notre arrivée en Seconde. Nos premiers pas, tendus et hésitants, sur le plateau, sous le regard de Claire Aveline* au cours d’un travail sur Beckett. Hésitants car nous nous connaissions à peine à cette époque et nous devions former un groupe. Trois ans, c’est peu pour se découvrir. Les comédiens que nous avons rencontrés nous ont aidés à le faire. Cela a pris du temps. Trois ans. Ce soir de juillet nous l’a prouvé. Et pourtant, cette soirée n’a pas sonné

comme la fin de notre aventure, car depuis nous avons formé notre compagnie, dont j’assure la direction artistique. Un premier spectacle à été créé en juillet, Croisades de Michel Azama. Notre démarche est la même que celle que nous avons apprise au lycée : évoluer et nous professionnaliser un maximum. Pour cela, le retour et l’aide des comédiens du TNS nous ont toujours été précieux. Ainsi, Cécile Péricone* a généreusement accepté de devenir la voix off de notre prochaine création. L’histoire continue...

Maintenant que nous avons quitté le lycée, je me rends compte de tout ce que ces trois années représentent dans notre formation. Je me sens lié aux Pontonniers, tout comme je me sens lié au TNS. Et quand je repense à ce 1er juillet, je suis fier et ému du parcours que nous avons tous fait. Cette section théâtre a été une aventure humaine extraordinaire pour moi. Une aventure humaine hors du commun. J’ai eu la chance incroyable de pouvoir suivre la formation qu’il me fallait. Et je souhaite à tous ceux qui le désirent de pouvoir eux aussi avoir cette chance.

*Hélène Schwaller a été comédienne de la troupe du TNS de 2003 à 2007 et a joué dans de nombreux spectacles de Stéphane Braunschweig et Julie Brochen*Claire Aveline a été comédienne de la troupe du TNS de 2001 à 2004*Cécile Péricone est comédienne de la troupe du TNS depuis 2009

Stammtisch

Le journal de... Gilles Kammerer,

Entretien avec Krystian Lupa (suite)

Édité par le Théâtre National de Strasbourg • Directrice de la publication Julie Brochen • Responsables de la publication Olivier Chabrillange, Fanny Mentré, Chantal Regairaz • En collaboration avec Lorédane Besnier, Éric de La Cruz, Anne-Claire Duperrier, Chrystèle Guillembert, Fabienne Meyer, Olivier Ortolani • Graphisme Tania Giemza • Remerciements à Agnès Biot, Laure Charvin, Bernard Fleury, Gérald Garutti, Gilles Kammerer, Krystian Lupa, Christian Schiaretti, Christophe Touet • Impression Roto Offset - Rixheim

Renseignements/Location :+33 (0)3 88 24 88 24

Tarifs saison 2010-2011 :de 5,50 € à 25 €

Où et comment acheter vos billets (hors abonnement) ?La location est ouverte un mois avant la première de chaque sériede représentations.

• Au guichet du TNS : 1 avenue de la Marseillaise. Horaires d’ouverture : le lundi de 14h à 18h, du mardi au samedi de 10h à 18h.

• Par téléphone : +33 (0)3 88 24 88 24et par Internet http://billetterie.tns.fr(à moins de 2 jours avant la date choisie, les réservations ne peuvent plus être acceptées).

• À la caisse du soir (uniquement le spectacle du jour) : ouverte 45 min. avant le début de la représentation.

• Autres points de vente : Boutique Culture (place de la Cathédrale), au Kiosque Culture - réservé aux détenteurs de la carte Culture et dans le réseau FNAC(www.fnac.com - www.carrefour.fr - www.francebillet.comTél. +33 (0) 892 68 36 22 : 0.34€/mn)

Toutes les salles sont accessibles aux personnes à mobilité réduite.

Informationspratiques

> Suite de la UneLa phrase la plus importante pour Beckett lui-même était celle-ci : « Rien n’est plus drôle que le malheur ».Oui, bien sûr, il s'agit là aussi d'une provocation. On peut dire qu'autrefois le rire et les pleurs étaient complètement opposés – et qu'au-jourd'hui c'est par le rire que la tragédie nous touche. Autrefois, dans la tragédie antique et dans la tragédie française classique, le senti-ment tragique était lié au pathos. Ce qui signifie que notre tragédie humaine se situait toujours dans de hautes sphères. Le pathos provoquait ainsi la distance de la tragédie. Chez Beckett, la tragédie est vue d'en-dessous, cette trouvaille fait toute l'actualité et la jeunesse de Beckett. Son œuvre ne porte pas les traces du temps.

Quelle est l'actualité de Beckett selon vous ? Le sentiment ou la dimension du mal est chez lui particulièrement actuel : il faut composer avec le mal inhérent à notre nature. Le mal est visible dans notre société, surtout quand on veut faire d'un enfant un homme nouveau. Cette éducation au bien, voulue par les parents et l'école pour faire à tout prix de chaque enfant un homme honnête, n'est qu'une maladie qui mène à une moralité vide de sens. Notre mora-lité occidentale est quelque chose de profondé-ment artificiel. L'homme ne se situe pas dans la moralité de son propre chef – cette dernière est imposée de l'extérieur à chaque individu. On l'a vu par exemple pendant la Seconde Guerre Mondiale, où des millions de gens honnêtes qui allaient à l'Église par exemple, sont devenus subitement de sadiques assassins. Cette ten-sion vers le mal a été d'un coup mise à jour. Et le mal est empreint de liberté. La liberté et le

mal, voilà bien un thème récurrent dans Fin de partie.

Dans Le Réformateur, Thomas Bernhard, un auteur qui vous est proche, écrit : « Précisé-ment l'être humain est inhumain ».Ça pourrait être aussi l'être humain qui veut être inhumain. L'humanité pour un homme est quelque chose de terrible et d'impossible. L'homme ne supporte pas d'être humain.

Et le théâtre est le lieu où l'on peut essayer de vivre pleinement cet « être-humain » ? Bien sûr ! La scène est pour ainsi dire un es-pace d'expérimentation pour cette expérience. Ainsi Hamm n'est pas seulement mauvais. Tous croient qu'il n'est qu'un monstre. On est tou-jours un monstre quand on veut volontairement faire une expérience avec soi-même, quand on tente quelque chose, quand on refuse de n'être qu'un produit de l'éducation humaine – et qu'on prend en main sa propre personnalité, sa propre moralité. Il faut franchir cette frontière entre le bien et le mal plusieurs fois, et soudain on se perd dans cette expérience. C'est bien plus simple d'être mauvais que d'être bon. Les monstres fascinent plus que les saints...

La spiritualité joue un grand rôle dans vos spectacles. J'ai l'impression que vous cher-chez à réaliser ce à quoi Paul Klee aspirait au travers de sa peinture, à savoir « rendre visible l’invisible ».Oui, rendre l'invisible un peu plus visible – mais pas complètement. Il ne s'agit que d'appari-tions qui restent discrètes et floues comme des ombres.

La pièce Fin de partie n'est-elle pas une sorte de parcours initiatique inaccompli ? Les per-sonnages n'en ressortent pas transformés en hommes neufs. La fin est inéluctable, mais la possibilité d'une transformation, même si elle n'est pas perçue, est présente tout au long de la pièce. Oui, c’est cela. Ce motif de l’enfant occupe une place particulièrement mystérieuse dans Fin de partie. Clov était peut-être cet enfant que Hamm a pris à des inconnus pour l'emmener avec lui. Il y a une seconde possibilité : j'étais un enfant et plus tard, tout est parti de travers. Ma vie est ratée et je veux en commencer une nou-velle. Cette idée de résurrection au travers de l'enfant, cette chaîne de l'humanité transmise de génération en génération... Ce que je n'ai pas fait, mon enfant doit le faire. Bien que ce soit impossible, on fait quelque chose de cette impossibilité. L'homme est mis au monde pour faire l'impossible. Tout ce qui est possible est en effet banal. C'est aussi pourquoi il est plus simple d'être mauvais. Il est plus facile d'ouvrir la porte du mal que celle du bien qui est fermée à double tour.

Comme dans beaucoup de vos mises en scène, l’espace a quelque chose d’étouffant qui rend claustrophobe.L’espace correspond aussi à la représentation qu’en a Hamm. Nous ne savons pas finalement ce qu'a été cette catastrophe mondiale qui s'est produite auparavant. Peut-être pourrait-on affirmer : cette catastrophe totale est une projection de ma catastrophe intérieure. C’est pourquoi cette pièce, ma chambre, devient une sorte de double de moi. Si je me sens oppressé, alors chaque pièce, aussi grande soit-elle, me rend claustrophobe et j’ai envie de tout faire exploser.

Ainsi la crise intérieure est transférée vers l’extérieur. Le motif de la crise est une constante de vos mises en scène.La crise est quelque chose de mauvais pour nous et nous redoutons d’être en crise, car celle-ci est liée à la souffrance. Ce faisant, nous ignorons que la crise est un processus de dé-veloppement très important. Sans crise, nous ne saurions nous développer davantage. La crise nous inflige une souffrance que nous ne sommes pas à même de nous infliger seul et que nous craignons – et cette souffrance nous travaille. C’est la souffrance qui nous travaille le plus, nous les hommes. Sans souffrance, nous ne ferions rien.

Qui considériez-vous comme maître à penser à vos débuts dans le théâtre ? Qui furent vos modèles ? De qui avez-vous le plus appris ?Lorsque j’étais jeune, Tadeusz Kantor était mon idole. Sa façon radicale de faire du théâtre en fit un modèle à mes yeux. Auprès de lui, on appre-nait qu’une énergie devait forcément traverser l’acteur. À l'époque, Kantor était comme une bible pour moi. Maintenant, je suis très éloigné de lui, je n’ai plus de maître. Un jeune artiste ne peut pas transformer directement sa propre vie en œuvre d’art, il a d’abord besoin d’un autre artiste, d’une autre œuvre d’art comme modèle. Ce n’est qu’au travers du maître que l’on vient à la vie. Et lorsque, au travers du maître, on est enfin venu à la vie, alors il faut vivre pleinement et ce sera notre époque qui sera notre maître.

Quelle est pour vous la caractéristique la plus importante chez un metteur en scène ?Je pense qu’il doit savoir convaincre ou fas-ciner ses partenaires, ses acteurs. Un acteur doit aller quelque part, sans se poser de ques-tion, sans hésiter – mais pas parce qu’il obéit à un ordre. Il doit succomber à sa propre fas-cination, mais dans le même temps, il doit s’épanouir au sein du groupe. Il convient de conserver ce mécanisme de la fascination.

Mais il ne s’agit pas de lui être totalement soumis. En effet, ce qui peut potentiellement naître est mieux que ce que nous recherchons.

De quelles qualités doit disposer un acteur pour susciter votre intérêt ? Y en a-t-il qui sont essentielles à vos yeux ? Un acteur doit bien sûr savoir faire son travail. Cependant, un acteur intéressant ne cesse ja-mais d'être un homme, d'être lui-même. Pour un acteur, l'humain prime sur le professionnel. Au début d'un travail, il faut tout recommencer à zéro et se sentir totalement démuni. Beau-coup d'acteurs, particulièrement les grands, refusent de se prêter à ce jeu. Ils ont honte de se sentir démunis.

Lorsque vous jetez un regard sur votre car-rière artistique, n'avez-vous pas l'impression que certains moments furent cruciaux, déci-sifs, qu'il y eut donc des ruptures ? Ou pensez-vous qu'il y a plutôt une continuité dans votre parcours artistique ? Je pense que l'artiste qui existe dans chaque individu vit moins longtemps que l'individu lui-même. Je plaisante, bien sûr ! L'artiste en nous vit aussi longtemps qu'un chien, un cheval ou bien un chat. La gloire permet à l'artiste mort de continuer d'exister, de poursuivre un travail, ou bien de s'offrir un nouvel animal artistique. Ces ruptures, ces crises sont essentielles. Il m'est arrivé quelquefois de vivre ce genre de crises. Lorsque Kantor est mort subitement, je ne savais plus comment continuer. Un jeune ar-tiste se sent toujours un peu comme un usurpa-teur. Il veut montrer au monde entier qu'il sait faire quelque chose de très remarquable, bref il veut montrer qu'il est génial. Mais il y a tou-jours une angoisse sous-jacente. À la mort de Kantor, je me suis véritablement retrouvé nu et démuni du jour au lendemain. En fait, dans les situations de crise, il faut savoir s'avouer cela. C'est ce qui nous redonne la santé, nous octroie plus d'authenticité, plus de bonheur, ce qui nous rapproche de la vraie vie. Et soudain, cette an-goisse resurgit et il nous faut mourir encore : alors il en sort encore quelque chose de neuf.

Extraits d'un entretien réalisé parOlivier Ortolani à Strasbourg, le 24 octobre 2010.

Traduction de l'allemand Christophe Piquet.

Fin de partida de Samuel Beckett

Du mercredi 4 au dimanche 8 mai 2011

> Spectacle en espagnol surtitré

Mise en scène Krystian Lupa

Du mercredi au samedi à 20h,dimanche 8 à 16h

Salle Bernard-Marie Koltès

Avec José Luis Gómez, Susi Sánchez, Ramón Pons, Lola Cordón

C'est bien plus simple d'être mauvais que d'être bon. Les monstres fascinent plus queles saints.

Et lorsque, au travers du maître, on est enfin venu à la vie, alors il faut vivre pleinement et ce sera notre époque qui sera notre maître.

L'Alsace compte actuellement deux options de spécialité théâtre (cœfficient 6 au baccalauréat littéraire) et neuf options facultatives théâtre (cœfficient 1 ou 2 en toutes sections). Au lycée des Pontonniers, l'option de spécialité théâtre a été créée en 1989 par Annette Tuefferd, en partenariat avec le TNS, et est assurée depuis 2009 par Agnès Heyer. 120 élèves suivent aujourd'hui un enseignement de théâtre au lycée des Pontonniers de la seconde à la terminale, dont 41 en option de spécialité en section littéraire. Le TNS est un des partenaires privilégiés de cette option depuis sa création.Gilles Kammerer, ancien élève, revient sur ses trois ans d’enseignement et de pratique théâtrale au lycée.

étudiant en Lettres moderneset metteur en scène amateur

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