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ANOUILH UNE BIOGRAPHIE JEAN Anca Visdei Éditions de Fallois / Paris

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ANOUILHUNE BIOGRAPHIE

JEAN

AncaVisdei

Éditions de Fallois / Paris

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lundi 26 novembre 2012

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Décembre 2012

Jean Anouilh, une biographie : la fin du purgatoire ?

"Je n'ai pas de biographe et j'en suis très content". Ainsi s'exprimait Jean Anouilh en 1946. Déclaration désormais frappée d'obsolescence. L'essai d'Anca Visdei, paru en octobre dernier, traduit, on peut l'espérer, un regain d'intérêt pour le dramaturge. Même si une hirondelle ne fait pas le printemps. Préfigure-t-il une sortie plus ou moins imminente du purgatoire ? De quoi se réjouir, certes ! L'avenir le dira. Ce qui est certain, c'est que les ouvrages - j'entends les ouvrages de quelque consistance - qui lui ont été jusqu'ici consacrés se comptent sur les doigts de la main. Hormis Un auteur et ses personnages que Pol Vandromme publia à La Table Ronde en 1965 et, plus récente, plus copieuse, peut-être plus originale aussi par l'angle d'observation choisi, l'étude de l'américain Efrin Knight La Vision littéraire de Jean Anouilh à travers ses oeuvres (Paperback, 2011), l'auteur de L'Alouette n'a guère suscité, au fil des années, que des articles de revues. Peu nombreux, de surcroît, et parcellaires. Le plus souvent inspirés par le succès de ses pièces. On fait ici exception, bien entendu, de l'édition en Pléiade de son théâtre - mais la Pléiade est parfois un tombeau. Somptueux, certes, mais tombeau tout de même. Le livre d'Anca Visdei est donc particulièrement bien venu puisqu'il vient rompre un silence aussi pesant que prolongé. Les raisons de ce qui ressemble fort à un ostracisme ? A coup sûr une originalité dérangeante. La lucidité. Des idées non conformes à l'air du temps. Une

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franchise tout aussi intempestive. Toutes choses qui se pardonnent difficilement. Comme le succès. Comme le talent qui lui a longtemps été dénié. Jusqu'à ce qu'on s'aperçoive que ce prétendu amuseur inconsistant était un des auteurs dramatiques les plus profonds et les plus subtils de son siècle. Et un écrivain consommé. Anca Visdei l'a bien connu, a entretenu avec lui des rapports d'amitié et de confiance. Au point de le considérer comme son père spirituel. Non seulement elle conserve la mémoire de leurs nombreux entretiens, mais elle a interrogé ceux qui l'ont fréquenté ou côtoyé, comédiens, gens de théâtre, membres de sa famille. Elle a eu accès aux lettres échangées avec de nombreux correspondants, lettres pour la plupart inédites. C'est assez dire que son entreprise n'est pas dépourvue de fondement. Sans doute est-ce sa modestie qui l'incite à sous-titrer son livre "Une biographie", sous-entendant par là qu'elle propose sa propre vision, qui n'est pas unique. Ainsi procédèrent avant elle Kléber Haedens (Une histoire de la littérature française) ou Lucien Rebatet (Une histoire de la musique). On ne saurait toutefois la taxer de complaisance. L'abondance et la diversité des documents utilisés sont garants de son impartialité. Et si elle ignore, à l'évidence, les derniers travaux d'Efrin Knight, à l'exception de sa contribution au recueil En marge du théâtre (La Table Ronde, 2000), elle connaît ceux de Pol Vandromme (qu'elle orthographie à plusieurs reprises "Vendrome", inadvertance vénielle, on en conviendra). Pour le reste, la démarche d'une historienne utilisant au mieux sa documentation. Scrupuleuse. Circonspecte. Analysant chaque pièce avec la subtilité et la justesse que procure l'appartenance au sérail, car l'auteur est elle-même romancière, auteur de théâtre et metteur en scène. Elle nous convie donc à la découverte de l'homme et de son oeuvre, de l'homme à travers son oeuvre. Depuis sa naissance en 1910 jusqu'à sa mort en 1987. Très tôt dévoré par la passion de la scène. Attachant. A la fois modeste et conscient de sa valeur. Se forgeant un caractère à travers des rencontres plus ou moins heureuses, plus ou moins orageuses - Jouvet, Fresnay, Pitoëff, Barsacq. Essuyant des revers sans se décourager, connaissant des triomphes en gardant la tête froide. Doté d'un solide sens de l'humour et d'un don de satiriste dont témoignent, en particulier, ses dernières pièces et les Fables publiées en 1962. Discret, sinon effacé, et cependant brûlant de passion. Tel fut le Jean Anouilh que restitue Anca Visdei, tel qu'il mérite d'être enfin mis à sa juste place. Sa biographe a, assurément, accompli une oeuvre pie qui devrait faire référence. Un outil de travail auquel manque seulement, pour être tout à fait maniable, un index des noms cités. Nul doute que la prochaine édition comblera cette lacune... Jacques Aboucaya Anca Visdei, Jean Anouilh, une biographie. Editions de Fallois, octobre 2012, 398 pages, 22 €

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Le Figaro Magazine 04/5 janvier 2013

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GUIDE LIVRES Vn<; \ \

Tolkien

Dictionnaire TolkienSous la direction de Vincent Ferré

EN 1945, John Ronald Reuel Tolkien(1892-1973) écrivait à son fils

Christopher : « Ce/ebrimbor t'émeut parcequ'il véhicule immédiatement la sensationqu'existant à l'infini des histoires àraconter : des montagnes vues au loin, quel'on n'escalade jamais. » C'est précisémentcette impossible ascension jusqu'au

sommet de l'œuvre de Tolkienque nous propose cedictionnaire. Outre uninventaire très étendu del'extraordinaire cosmogoniecréée par l'auteur du Seigneurdes anneaux - où l'onapprendra tout sur la genèsede la Terre du Milieu, sur lanature des elfes réputésimmortels ou sur l'origine de laGrande Vague-, l'on goûterale frisson d'une découverte en

continuel progrès. En effet, ces grandscycles d'histoires aux allures de sagasnordiques sont loin d'avoir livré tous leurssecrets, comme en témoigne la parutionrégulière de textes posthumes sous l'égidede Christopher Tolkien. A l'aspect éditorialmême s'ajoute la vigueur d'un champ derecherche en pleine expansion, notammenten France. Line voie qu'a ouverte le mêmeChristopher Tolkien en procédant, à l'instard'un Champollion aux prises avec la pierrede Rosette, à un travail titanesque declassement, de transcription et decommentaire des manuscrits inédits de sonpère. Car le souffle poétique qui traversecette mythologie monumentale doitpresque autant au croisement des languesinventées par Tolkien qu'à celui des armes.Des langues antérieures à l'anglaismoderne, rudes et irréductibles, etcependant si strictement conceptualiséesque le dictionnaire nous en soumet le« plan ». Le diagnostic est troublantd'exactitude : leur mort coïncideraitaujourd'hui avec cette narration anglo-saxonne omniprésente. « Au format ».m Anne-Sophie YooCNRS éditions, 670 pages, 39 €.

Jean Anouilh, une biographie d'Anca visdeiDOSE, NOIR, BRILLANT, grinçant, farceur... Au fond, toutrxAnouilh tient dans les épithètes qu'il avait lui-mêmechoisies pour illustrer la tonalité de ses pièces. Anca Vis-dei, auteur de théâtre et romancière, l'a déchiffrée pournous. Sa connaissance du dramaturge n'est jamais priseen défaut, ni l'admiration qu'elle lui voue. Anouilh était unécorché vif, plein de pudeur. Comme il fut horrifié par l'Epuration, on a fait delui, après-guerre, une sorte de « fasciste » à moustache. C'était en vérité un« anar de droite » qui ne professait aucune idée politique, même si l'on pour-rait tirer un traité de haute politique à partir de son Becket ou l'Honneur deDieu. Son ennemi véritable fut la vulgarité, qui ignore les classes sociales, etl'ignominie, qui les traverse toutes. Quoique né dans le dénuement, la pau-vreté ne constituera jamais pour lui une excuse. Voyez son personnage, Bitos,dans son chef-d'œuvre éponyme, l'un des plus grands textes jamais consa-crés à la Terreur, chez qui elle est devenue un abcès social.

En vérité, seule la scène le combla. Il la concevait à la fois en artisan et enartiste. Les comédiens l'adoraient ll écrivait pour eux du sur-mesure. De tousses maîtres, il citait Shakespeare, Molière et Pirandello, disant du dernier qu'ila étranglé l'anecdote dans le théâtre comme un puritain étranglerait uneprostituée. Lui s'est contenté d'étrangler la vulgarité et d'empoigner la beauté.On ne se lasse pas de le relire. * François-Laurent BaissaEditions de Fallois, 400 pages, 22 €.

Le Nord de la Cornouaillede Loïc-Pierre Garraud

LE MENEZ-HOM, en Cornouaille, n'estpas de ces monts dont l'intérêt réside

seulement dans l'agrément qu'il procureau promeneur et au curieux. En effet, pourreprendre la formule chère àBarrès, c'est un lieu où soufflel'esprit des plus anciennes reli-gions de la Bretagne armori-caine, c'est le centre de gra-vité d'une topographie sacréeà laquelle s'identifierait lemythique royaume de Marc'h,le roi aux oreilles de cheval dela légende de Tristan et Iseut.Telle est l'hypothèse qui setrouve développée dans cefascinant petit livre, fruit d'unepatiente enquête guidée par l'intuitionet l'observation, soutenue par une dé-marche rigoureusement scientifique etservie par une érudition longuementmûrie.

Au carrefour de la géographie et de

Le i\onl

l'histoire, de la toponymie et de l'anthro-ponymie, Loïc-Pierre Garraud met au jourune sorte de monde perdu dont les fon-dations auraient été posées bien avantles Celtes et les Romains, bien avantl'évangélisation de la Bretagne, et dont

les traces auraient été laisséesdans les roches, les sentiers,les noms et, bien entendu,les traditions populaires. Unmonde gouverné par lacourse des astres et par l'ap-titude des anciens à voir plusloin que le bout de leur nez, unmonde où, comme le disaitRené Guenon, l'homme « per-cevait bien des choses qui luiéchappent désormais entiè-rement ». La rigueur à laquelle

s'est tenu l'auteur n'en rend que plus sub-stantielle l'émotion poétique de cespages, qui sont une invitation auvoyage et à la méditation. Elles ferontdate, f, Michel MarminL'Harmattan, 150 pages, 15,50€.

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10/12 PLACE DE LA BOURSE75081 PARIS CEDEX 02 - 01 44 88 34 34

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BIOGRAPHIE

Jean Anouilh.Une biographiepar Anca Visdei, de Fallois, 400 p., 22 euros.

## Beaucoup ne s'y sont pas encore faits maisJean Anouilh (1910-1987), pour avoir écrit« l'Hurluberlu », « Pauvre Bitos », « la Valse destoréadors » et quèlques dizaines d'autreschefs-d'œuvre (excusez du peu), est un des grandsde la littérature théâtrale française, ils ne sont passi nombreux. C'était aussi une personne estimable:vivant en Suisse, il payait ses impôts à Paris. Onn'en faisait déjà pas beaucoup des comme ça.Voici sa première biographie. Elle est pleine devie, ce qui devrait aller sans dire, mais qui ne vapas toujours. DELFEILDETON

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Jean Anouilh,une biographied'Anca Visdei

***«Je n'aipas de biographie et j'ensuis très content», écrit Anouilhen 1946. Il est devenu un célèbreinconnu. Anca Visdei fait surgirson âme de cet ouvrage.L'homme de passion, le théâtre,le destin contrarié des femmesaimées et celui des enfants quiporteront l'héritage. Et les amis,Beckett, Ionesco, Louis Jouvet...Jean Anouilh meurt en 1987à Lausanne. En 2012, Alain Res-nais met en scène au cinémaune Eurydice plus moderneque jamais. Aujourd'hui, AncaVisdei va chercher Jean Anouilhdans les affres du purgatoire.Elle nous le ramène, vivant

au point de sentirle souffle du drama-turge sur notreépaule. S. des H.Éditionsde Fallois,398 pages, 22 €.

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Anouilh, une biographie amoureuseSes pièces sont rentrées au répertoire de la Comédie-Française. Son nom orne

depuis 2007 deux jaquettes de l'illustre collection de la Pléiade. Et, comble de lanotoriété (?), nombre de lycéens planchent chaque année sur son Antigone. JeanAnouilh, auteur de théâtre, est définitivement entré dans Ie domaine de la culture.

Mais alors que les scènes européennes et au-delà se disputaient, il y a peu, le pri-vilège de son affiche, le théâtre d'aujourd'hui a pris ses distances avec l'auteurfétiche de ces générations. Sans le faire disparaître pour autant. Antigone a étéjouée pendant plus d'un mois, fin 2012, à la Comédie-Française, puis aussitôtaprès au Théâtre des Galeries. Et L'Alouette, grand succès d'Anouilh consacré àJeanne d'Arc, qui, pour sa création en 1953, arborait Suzanne Plon dans le rôle-titre, fut également reprise au Théâtre Montparnasse à la fin du printemps der-nier, sous un flot de critiques élogieuses.

La journaliste et critique de théâtre Anca Visdei veut, elle aussi, ne pas oublierce grand contributeur du théâtre français. Mieux, elle veut le remettre à l'hon-neur, à la place qui lui convient en ce début de XXIe siècle, armant pour l'occasionle jeune amateur et Pérudit théâtreux d'une biographie amoureuse publiée auxéditions de Fallois.

C'est vers l'âge de 15 ans que Ie jeuneAnouilh commença à écrire. Et tout de suitedu théatre. Un genre difficile pourtant, quiobéit à des règles et porte une exigence le réser-vant d'ordinaire aux auteurs matures. Mais peuimporte. Les romans ne sont que des « racon-tars » sans puissance — c'est son mot. La scène,elle, en a une. Qui le séduit et le convainc par-faitement. Etudiant, il fréquenta tous les pou-laillers parisiens. Quémanda, implorant, desbillets de première, fit souvent le pied de gruedans l'espoir d'occuper quelque strapontin àl'orchestre.

Et quand il prend à vingt ans une place deconcepteur-rédacteur dans une agence depublicité - ce qui lui réussissait fort bien - c'estpour voler à la place, soudainement libérée parun ami, de « secrétaire personnel » de LouisJouvet, alors directeur de la Comédie desChamps-Elysées. Celui-là même auquel ilenvoie depuis plusieurs années des missivesenflammées et fidèles. Il occupera le poste seu-lement neuf mois. Le temps de se rendrecompte de l'indifférence assumée de sonpatron. Leur inimitié persistera, au sein de cet-te grande famille qu'est le théâtre... Sans queleur correspondance ne cesse. Bravades etréconciliations se succéderont. Jouvet liratoutes ses pièces, mais sans jamais accepter

d'en monter une seule. Et l'appellera pour tou-jours « le miteux ». L'aigreur de l'aîné face aubrillant cadet.

Anouilh traîne donc ses manuscrits dethéâtre en théâtre. Il a commencé par L'Hermi-ne écrite en 1932, à 22 ans. Et continue avecMandarine dont, o espoir, le grand acteur Pier-re Fresnay daigne écouter la lecture de bout enbout dans sa sombre loge... Révélation. L'Her-mine est montée et créée sur la scène du théâtrede l'Œuvre avec Fresnay, le 26 avril 1932. Pourquèlques sous... Anouilh lui sera éternellementreconnaissant. Ce jour-là, il naissait pour kdeuxième fois.

Un théâtre en réflexionTristan Bernard, de retour du Soldes Voleurs,

monté la mame année, décrète à Anouilh qu'ila inventé « une nouvelle façon de distraire leshonnêtes gens »... Depuis vingt ans, le théâtrefrançais tait sa petite révolution. JacquesCopeau a lancé au printemps 1913, dans lescolonnes de la NRJ7, son célèbre Appel duVieux-Colombier qui est un appel « à la jeunes-se, aux gens lettres et à tous pour une rénova-tion dramatique » du genre théâtral. Copeaurachète ce petit théâtre de la rive gauche, dansl'espoir d'y voir naître - ou renaître ? - un art à

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la fois classique et créateur, exigeant et bonmarché, loin du réalisme facile et de la vulgari-té mercantile qui, selon lui, dominent la scènecontemporaine. La tentative était louable etmalgré son succès modéré, un tournant étaitamorcé. Albert Camus a pu ainsi déclarer :« dans l'histoire du théâtre français, il y a deuxpériodes : avant et après Copeau ».

Dans la droite ligne de ses expériences, leCartel se met en place quèlques années plustard. Un groupe de quatre metteurs en scène etdirecteurs de théâtres parisiens qui ont pournom Gaston Baty, Charles Duflin, GeorgesPitoëff et Louis Jouvet. Cette association d'en-traide, comme le rappelle Anca Visdei, avaitdeux ennemis déclarés : la critique dramatiquede l'époque qui s'acharnait sur le théâtred'avant-garde et Ie monopole du théâtre deboulevard qui freinait toute tentative derenouveau. Ils veulent le retour au jeu, leretour au texte. Si leur action ne fut pas déter-minante, le théâtre prenait, par toutes ces ini-tiatives, un nouvel essor qui le ftt s'orientervers, déjà, la décentralisation, le professionna-lisme, et surtout le bannissement du schismeentre théâtre populaire et théâtre novateur.

Anca Visdei cite un article du Figaro :« Quelqu'un dira peut-être un jour l'étonnan-te richesse du mouvement diéâtral françaisd'entre les deux guerres. Cet historien futur rdira, d'abord, l'œuvre de rajeunissement duCartel. Il fera ensuite, j'en suis sûr, ingénieuse-ment remarquer quel bond en avant a été -après un siècle de naturalisme et de « progrès »- cet apparent recul vers l'ancienne conven-tion, la toujours neuve, l'unique source du jeusacré. »

Dans cette histoire changeante, Anouilharrive, son sceau à la main... le sceau Anouilhqui estampillera ses pièces jusqu'à la fin duXXe siècle. Son théâtre n'est que le sien. A lafois nouveau et ancien. Car, Roger Nimier ledisait en 1951 dans Opéra : « Le génied'Anouilh est de se moquer des règles duthéâtre ; il fait ce qu'il veut »...

L'hommeAnca Visdei prend soin de le décrire. Tant il

est vrai que sa réputation le précédait. Les jour-nalistes véhiculaient l'image d'un misanthropeavéré et déterminé, détestant leur profession etplus globalement tout un chacun. Oui,Anouilh n'était pas mondain. Il fuyait « les pre-mières », les diners d'entremetteurs, les récep-tions de ses homonymes. Il avait même inventéle mot « complimentir »... Il ne paraissaitjamais à la télévision - supplié pourtant à deuxgenoux par Bernard Pivot pour son émission« Apostrophes ». Une ou deux interviews à laradio, pas davantage dans la presse.

Ce n'est pas pour rien que Marcel Aymé —

son proche ami et parrain de son fils - l'avaitsurnommé « Anouilh le mystérieux ». Anouilhcommit bien pourtant en 1987, année de samort, un livre de « mémoires » - le mot luiaurait fait horreur - intitulé drôlement Lavicomtesse d'Eristal ria. pas reçu son balai méca-nique ; mais là encore, aucune confession, pasmême le récit de sa propre vie. Il n'y évoqueque ses souvenirs de théâtre, son ressenti desmetteurs en scène ou des comédiens qu'il acroisés tout au long de sa riche carrière.

Précisément, ce sont ces derniers qu'il fautaller interroger. Car Anouilh ne se révélait queparmi eux : on ne se confie qu'à la famille. Sedévoile tout de go un Anouilh chaleureux,aimable, rieur, indulgent autant qu'exigeant.Un homme fragile, de santé délicate, quipourtant ne freinait ni son travail ni ses élans.Anca Visdei parle d'« un mélange de modestie,d'admiration enthousiaste, modérées par unvrai sens du théâtre ». Un être doué d'uneimmense sensibilité à la vie et aux gens qu'unorgueil inquiet accentuait souvent et parfoismême exacerbait - il se fâchera avec dè trèsproches amis et collaborateurs comme AndréBarsacq, sans pour autant cesser de leur rendrehommage.

La ténacité et la persévérance le caractéri-saient. Il donnera route sa vie des gages de fidé-lité. De fidélité dans l'infidélité avec sesfemmes, tout d'abord... La belle et tourmentéecomédienne Monelle Valentin qu'il épouse en1931, sans travail et sans le sou, et qui lui don-nera une fille, Catherine, se montre rapide-ment dépressive et sombre dans l'alcoolisme.Anouilh l'installe dans un petit hôtel particu-lier à Neuilly-sur-Seine et la visite régulière-ment jusqu'à sa mort. Il lui avait préféré entretemps une autre comédienne beaucoup plusjeune, Nicole Lançon qui lui donnera, elle,trois enfants. Une troisième jeune femme luiprendra la place...

C'est surtout à sa fidélité au théâtre qu'il fauts'attarder. A ce domaine d'artistes-auteurs aux

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Le regard d'Anouilh, mis en scène par lui-même.ego parfois « surdimensionnés » comme l'écritAnca Vîsdei, où la recherche du succès peutêtre si déroutante, même pour les plus doués.Rejouant son Pierre Fresnay écoutant avecattention un jeune auteur sans plus de gagesque son enthousiasme, il guette les jeunestalents. Comme Ionesco. Ou vient en aide à deplus anciens que la critique se met à écharpesComme Jean Vilar. Il écrit aux auteurs etpublie des articles de soutien manifeste. Il ferapar exemple de Victor de Vitrac, mort quelquedix ans auparavant sous les tirs d'une critiquesans indulgence, un succès posthume mérité.Reconnaissant, il donne et transmet à son tour.

Filiations et accointancesMais de qui est-il le fils dans cet art où, st on

le prend au sérieux, les aînés ont toujours leurimportance ? Le théâtre d'Anouilh n'est niexpérimental, ni absurde. Il a une intrigue etfleure bon le boulevard. C'est un peu le fils spi-rituel de Molière et de Shakespeare - il adapte-ra en 1961 La Nuit des Rois, Un conte d'hiver elComme il vous plaira. Mais aussi de Pirandelloet de Tchékhov. Sans oublier Giraudoux, son« étoile polaire », l'auteur de Siegfried, la piècedevant laquelle la vocation théâtrale d'Anouilhs'est définitivement déclarée.

Des personnalités avec lesquelles il a travaillé,George Pitoëff est celui auquel il voue le plusde gratitude : « à peu près le seul homme à quije doive quelque chose au théatre », dit-il lui-même. Anca Vîsdei nous fait retrouver l'histoireincroyable de Georges et Ludmilla Pitoëff, cecouple de l'Est (un Arménien et une Cauca-sienne) que le destin emmena en Suisse, puis enFrance où ils développèrent tant l'un que l'autreleur talent et leur amour du théâtre. Yvonne

Printemps, une actrice phare du moment, lessurnommait « les Pitoyables ». Ils ne l'étaientque pour elle. Georges Pitoëff savait remplirtous les rôles, hormis celui de l'auteur, « uneâme costumée en corps » disait Cocteau. Il ins-tallait ses propres meubles de cuisine sur la scè-ne quand il le jugeait bon. C'est avec luiqu'Anouilh connaîtra le vrai démarrage de sacarrière : Le Voyageur sans bagage montée authéâtre des Mathurins, en 1937.

Jean Anouilh possède aussi plusieurs talents.Il y a le scénariste Anouilh que le cinéma sauvaplus d'une fois de la misère dans les premierstemps de sa carrière, sous la houlette de réalisa-teurs français, mais aussi de producteurs russes,Vous n'avez rien à déclarer ? en 1936. Il revien-dra d'ailleurs au scénario à la fin de sa vie - rai-sons pécuniaires oubliées. Il s'essaiera aussi aulivret de ballet, convaincu par l'essai de Coc-teau avec Les Mariés de Ut Tour Eiffel et com-mettra Le Loup avec Georges Neveux en 1953ou Madame de... en 1970. Il y eut enfin, àcôté de l'auteur reconnu, le metteur en scène.Après avoir collaboré avec Roland Piétri,Anouilh signa ses premières prestations en1973. La paternité de la pièce représentéedevenait complète !

Lui qui a travaillé avec les plus grands, dePierre Fresnay à Michel Bouquet, en passantpar Edwige Feuillère et Suzanne Plon, sanscompter Richard Burton ou Vivien Leigh, est àla recherche d'une certaine perfection. De sesdébuts en pleine guerre, quand il fallait venirvoir Le Rendez-vous de Senlis ou Antigone avecde grosses couvertures pour contrer le froid dessalles gelées, aux créations plus confortablesqui les suivirent, son souci demeura le même :le montage de la pièce, la communion réussiedes comédiens et des personnages qu'il voyaitdanser. Robert Hirsch racontait dans Le Mondeque Anouilh commençait par lire la pièce à satroupe : « Cela remplaçait trois semaines derépétition. » II était capable de payer un acteurqu'on avait pressenti et engagé pour un rôle etqui, en réalité, ne faisait pas l'affaire... Etquand un défaut d'interprétation le chiffon-nait, il écrivait au protagoniste en le guidant ; àun Michel Bouquet qui larmoyait trop, il don-ne ce conseil avisé : « pour l'émotion, si tu enas la pudeur, c'est nous qui la ressentirons ».Renouvelant à sa manière le Paradoxe sur lecomédien de Diderot.

Succès et déboires« Cette pauvre chose informe, disloquée, ces

morceaux que seul l'habituel miracle du der-nier jour, et la présence du premier spectateurà l'ultime répétition de travail, pourrontrecoudre, c'est ta pièce. »

Le travail en amont est considérable, l'écritu-re douloureuse. Et même à l'arrivée flotte, pour

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ce perfectionniste, un léger sentiment d'échecet d'insatisfaction chronique. Mais la tentationest la plus forte. Et toujours il se remet à l'ou-vrage. 70 pièces écrites dont 47 montées.Anouilh, pour ne pas manquer à sa réputationd'original, les a classées en pièces roses, piècesnoires, pièces brillantes, pièces grinçantes,pièces costumées, pièces baroques, pièces far-ceuses et pièces secrètes... Ses plus grands suc-cès ont dépassé les 500 représentations lors dek création : Antigone, Beckett, L'Alouette.

fl remplit les salles européennes et mêmejaponaises pendant des dizaines d'années. Maispeut commettre aussi des fours comme LaGrotte en 1961. i

C'est un fait, Anouilh et son théâtre ne lais-sent personne indifférent. La critique peut lesuivre quand le public le délaisse. Et inverse-ment. Sur Pauvre Bitos ou le Dîner de têtes, parexemple, monté en 1956, J.-M. Fonteneauécrit : « jamais la presse ne fut aussi violem-ment contre une pièce d'Anouilh, jamaisAnouilh n'eut autant de succès ». La piècebrossait en un parallèle inquiétant deuxtableaux issus de la Terreur et de l'Epuration.Le déchaînement médiatique fit dire à PierreBoutang : « Ni les assassins, ni les profiteurs oules lâches témoins d'un crime n'en aiment lareconstitution. Tel est le secret de la fureur uni-forme de la presse quotidienne et des Impor-tants du Tout-Paris »...

S'il donne à vitupérer pour certains, lethéâtre d'Anouilh donne en tous les cas à pen-ser. On l'a dit pessimiste et noir. Il est pourtantdrôle. Sarcastique alors ? Non plus. D'abord,Anouilh part toujours d'un sourire, certes unpeu ironique mais sans hypocrisie : « J'écrisune anecdote qui m'amuse », disait-il. Il abeaucoup d'indulgence pour ses personnages.Et Marcel Achard avait vu très juste quand ildisait : « Ce qui fait sa force, c'est que larigueur de son observation est tempérée parune tendresse goguenarde. »

C'est que pour Anouilh, les optimistes sont« des gens superficiels » et des « farceurs ». Lavérité n'est pas là. La désillusion et la compro-mission sont permanentes. Il les monte enépingle, en dévoile de sombres pans, mais lesourire demeure. D'abord parce qu'Anouilhn'explique pas tout : « II ne faut jamais com-prendre personne. Ou on en meurt » dit legénéral dans La Valse des toréadors, on enmourrait de désappointement et de désespé-rance... Ensuite, parce qu'en dépit de ces« hommeries », le désabusé Anouilh parvient àune certaine hauteur de vue qui console.

Michel Bouquet, dans Le Figaro littéraire,disait ainsi d'Anouilh que c'était « un Shakes-peare de la médiocrité, de la mesquinerie, despetites pensées ».

Son insolence a du sens. Elle ne débouche

pas sur une condamnation arbitraire, ou unemoquerie inutile et triste. Son désespoir aquelque chose de brillant qui l'empêche detomber dans l'amertume qui ne divertit pas etfait fuir le public. Or ce dernier lui est fidèle.Philippe Bilger va jusqu'à parler d'une « cruau-té magnifiée ». Et parlant de l'acteur idéal pource théâtre délicat, « il représente dans sesmeilleurs moments un équilibre réussi, poi-gnant et féroce entre le désir d'absolu et la cer-titude du relatif, entre la pureté des idéaux etles compromis inévitables avec le réel. La vul-garité du monde toute prête à bondir sur sesproies privilégiées, la naïveté et l'innocence,n'occupe jamais tout l'espace de la scène. Tou-jours, entre les trois coups et la fin, il y a, uneseconde, une minute, une aurore possible,déchirante peut-être, mais belle, comme la der-nière image de La Dolce Vita. »

Anouilh est à la recherche, à l'instar deTchékhov - ainsi qu'il l'évoque lui-même, - decette « vieille musique désespérée et tendre »qui fait le fond harmonique dè la vie... Et il aprécisément l'impression de l'approcher sur cesplanches éloquentes. Dans Cher Antoine, il fai-sait dire à son personnage : « II ne faudraitjamais sortir des théâtres ! Ce sont les seulslieux au monde oil l'aventure humaine est aupoint. » Ce regard d'enfant qu'Anouilh posesur le monde des hommes et des âmes, pres-sentirait-il l'éclair de l'Autre ?

La dimension spirituelledu théâtre d'Anouilh

Jean Anouilh était d'éducation catholique.Mais les années l'avaient rendu plutôt anticlé-rical... Il utilisait très librement les soutanesdans ses pièces, souvent avec impertinence,parfois avec déférence. Monsieur Vincent, filmréalisé en 1947, dans une adaptation et sur desdialogues de Jean Anouilh, avait fait dire aufutur pape Jean XXIII, alors nonce à Paris,« après ce qu'a fait Monsieur Anouilh, il nepeut plus être damné »... Pierre Fresnay yincarnait magnifiquement l'apôtre des pauvres.Quelque chose s'était passé. Et quand L'Alouet-te se profila en 1953, une nouvelle ère s'ouvraitdéfinitivement dans l'écriture d'Anouilh. C'estun père jésuite qui lui avait suggéré cette piècealors qu'il travaillait sur les dialogues d'un filmaméricain sur Jeanne d'Arc. Quoi de mieuxque cette « Antigone chrétienne » selon sespropres mots !

Le nouvel Anouilh qui liait la contemplationà l'athéisme eut un succès immense. GeorgesLherminier écrivit dans Le Parisien libéré :« Anouilh a parlé de Dieu avec la familiarité dèPéguy (...). Anouilh, pour la première foispeut-être, laisse chanter l'enthousiasme de lajoie »... Un succès qui ne se démentit pas avecBechet ou l'Honneur de Dieu créé en 1959 où

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le duel quasi spirituel d'Henri II Plantagenêtet l'archevêque de Canterbury finit dans lemeurtre.

« Tout ce qu'il y a de plus catholique, sedisait-il, mais athée »... Ainsi Anouilh n'avaitpas tout perdu de ce leitmotiv intérieur qu'onretrouve chez ses personnages, habités d'unequête parfois même inconsciente. Ce n'est pasun théâtre chrétien, et pourtant, Brasillach l'adit le tout premier en commentant la premièrepériode d'Anouilh, « on pourrait aisémentretrouver la transposition des vérités les plusnobles du christianisme et organiser toutes lesoeuvres de Jean Anouilh autour du mythe dubaptême ». Tous les personnages aspirent à une« renaissance ». Ils ont certes une prédilectionpour la mort. Mais il y a le flou d'un espoirmal déterminé... C'est toute l'ambivalence deson théâtre. Que l'on retrouve dans son rac-courci devenu célèbre de L'Hurluberlu —immense succès où Anouilh se peint sanscomplaisance, à la fois tendre et ridicule - :« L'homme est un animal inconsolable et gai ».

De ce paradoxe insoluble, la difficulté de lajoie pleine : Anouilh parlait du « bonheur quiest un acte de courage. Qu'on construit com-me un château»...

« Et puis un besoin dene pas rentrer dans le jeu »Grave et cocasse, acerbe et tendre, réaliste et

contemplatif, son théâtre n'en fait donc qu'à satête. Mais si l'art lui a permis ces licences poé-tiques, le monde lui a moins pardonné seslicences politiques ou prétendues telles. Cer-tains ont même parlé d'« anarchisme réaction-naire ». Cette réputation tient en premier lieuà ses débuts. LorsquAntigone, montée en plei-ne guerre, grand succès populaire, attira autantd'invectives et de dénonciations de la part de lapresse collaborationniste que du Tout-Parisépuratif de l'après-guerre. Anca Visdei citeAndré Breton : « c'est la pièce d'unWaffen SS » ! Armand Salacrou voulait foirefusiller le dramaturge. Et il en est encoreaujourd'hui qui suggèrent qu'Anouilh a écrit sa

Jean Anouilh, André Barsacq : iet le metteur en scène.

'ramaturge

pièce pour flatter les occupants allemands àtravers le personnage de Créon...

Moins d'un an plus tard, Anouilh faisait duporte à porte dans toute la capitale pour qué-mander une signature en bas d'une pétition —la seule fois qu'il prit position. La « listeinutile », ainsi qu'il la nomma par la suite, sefaisait fort de réclamer la grâce dè Robert Bra-sillach. C'est sur les conseils de Maître Isorniqu'il s'était engagé, pour sauver ce jeune poètedont quèlques articles de Je suis partout le rap-prochaient. Somme route rien. Il fera dire àBitos dans la pièce éponyme cette phrase pourlégitimer la mort sur l'échafaud d'André Ché-nier : « Un poète de moins, c'est toujours ça degagné quand on veut mettre le monde enordre. »

« Liste inutile » mais que personne n'aoubliée. D'autant qu'il sera par la suite fidèle àun certain nombre de libertés bien définies,qui sentent parfois trop le dissident. D'ailleurs,il répondait lui-même à ses détracteurs : « Jesuis réactionnaire, bien sûr, parce qu'il fautréagir ! » II fit souvent montre d'une sensibili-té royaliste, détesta De Gaulle et ne s'en cachapas. Il n'a jamais voulu entrer à l'Académiefrancaise, « sauf si vous rendez la vie àLouis XVI et à Robert Brasillach » avait-ilrépondu à l'entreprenant Maurice Genevoix.Et ne se priva pas d'afficher un clair mépris del'égalitarisme, de la démocratie - il refusaitd'être produit dans des théâtres subventionnéspar l'Etat —, du féminisme — revoyez La Culot-te-ct du dieu intangible du Progrès.

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Mais Anouilh ne prône rien dans sonthéâtre. Il se contente de fustiger. Et quandl'évidence tombe tel un couperet, dépourvuede manières et de leçons, elle coupe l'herbesous les pieds de tous les médisants. A l'instardes fables qu'il avait un jour composées, letemps d'un été, et dont il avait dit à PierreGaxotte : c'est « le seul livre dont je sois fier »:»

La biographie d'Anca Visdei est amoureuse.Elle a bien connu Jean Anouilh sur la fin desa vie et a pu pénétrer le cercle de ses intimes.Elle parle même de ses voitures — qui n'étaientpas celles des hussards. Et de ses toiles qu'il

signait modestement de ses deux initiales, dansson chalet de Suisse... Le vieil homme dont lalucidité n'enlevait rien à l'humour, est partiavec les honneurs. Pas tant ceux du monde,quoiqu'ils aient existé pour une part, que ceux-là mêmes qui se dégageaient de son œuvre etqu'ont justement soulignés certains — bons —critiques au lendemain de sa mort. « Lucidedonc irrécupérable (...) Jean Anouilh était decette vieille race des anarchistes de plume quiscandalisent à gauche et déconcertent à droite,hommes en déséquilibre (...) sciant avec délicela branche sur laquelle ils sont assis », a écritPierre Marcabru dans Le Figaro. Mais la palmerevient à François Crouzet dans les mêmescolonnes : « Jamais personne n'a été plus libre,c'est-à-dire plus seul. » Jean Anouflh n'étaitfidèle qu'à lui-même, tout à son théâtre et àl'écho de l'Homme qu'il renvoyait.

M.P.• Anca Visdei, Anouilh: un auteur « inconso-lable et gai » : une biographie affective. LesCygnes, 246 pages.

Marie Piloquet

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« Je n’ai pas de biographie et j’en suis très content », écrivait JeanAnouilh à Hubert Gignoux en 1946.

Pour Pol Vandromme, « le théâtre d’Anouilh, plein d’aveux indi-rects et d’ombres complices, suggère ce qu’il s’est refusé à dire àhaute voix et en pleine lumière ».

C’est cette mise au jour qu’entreprend ici Anca Visdei, à l’aide dela correspondance, parfois inédite, d’Anouilh, de leurs entretiens,des souvenirs recueillis auprès de ses proches et de ceux qui ont tra-vaillé avec lui.

Né à Bordeaux en 1910, très tôt passionné de théâtre – Les Mariésde la tour Eiffel de Jean Cocteau en 1921 et Siegfried de Giraudouxen 1928 seront pour lui des révélations –, Jean Anouilh devient se-crétaire de Louis Jouvet. Celui-ci refusant de monter ses pièces, il ala chance de rencontrer Pierre Fresnay, avec lequel il connaît un pre-mier succès d’estime – L’Hermine en 1932 –, et le metteur en scèneet comédien Georges Pitoëff qui lui offrira son premier véritable suc-cès avec Le Voyageur sans bagage…

C’est aussi en 1937 qu’Anouilh fait la connaissance d’André Bar-sacq, et ce sera le début d’une grande amitié et d’une longue colla-boration au Théâtre de l’Atelier, où sera créée en 1944 Antigone, quin’a jamais cessé depuis cette date de figurer dans les programmesscolaires.

Après la guerre, il travaille entre autres avec Roland Piétri,Denis Malclès, et sera joué par les plus grands comédiens françaiset étrangers. Parmi ses principales pièces : L’Invitation au château,L’Alouette, Pauvre Bitos, Becket.

Il défend Ionesco et Beckett, adapte des pièces de Shakespeare etOscar Wilde, réalise deux films et écrit les dialogues d’une dizained’autres. Il est mort à Lausanne en 1987.

Anca Visdei a travaillé comme journaliste en Suisse, puis à Paris oùelle vit aujourd’hui. Auteur de théâtre, romancière et metteur en scène,elle a écrit une trentaine de pièces, jouées et traduites dans le monde en-tier. Elle fit la connaissance d’Anouilh au début des années 1980.

9 782877 068017

36-0944-312.XPRIX T.T.C. : 22 €ISBN 978-2-87706-801-7 Maquette : Victor Burton

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