je déteste ernesto - janvier 2011

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Sylvie Chausse Je déteste Ernesto Librement enrichi par Salima, Ibrahim, Younes, Heaven et Hissam, chacun ayant choisi de donner la parole à un des autres personnages - Janvier 2011 - - Roman - 1

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Travail réalisé par les jeunes du projet CapAdos

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Sylvie Chausse

Je déteste

ErnestoLibrement enrichi par Salima, Ibrahim, Younes, Heaven et Hissam, chacun ayant choisi de donner la parole à un des autres personnages

- Janvier 2011 -

- Roman -

1

Petite, Sylvie Chausse aurait voulu devenir un

personnage de livre. Avec les années, elle a fini

par comprendre que les meilleures places, celles

de Cendrillon et de Blanche-Neige étaient déjà

prises. Pour se venger, elle fait des livres elle-

même et ses personnages ne sont pas sages comme

des images !

Je déteste Ernesto, de Sylvie Chausse © Thierry Magnier, 2003

2

Ernesto

Ernesto, je le déteste parce qu’il parle

mal le français et que son père est réfugié.

3

Mme Lartigue

Mme Lartigue est une bonne maîtresse :

avec elle, personne ne parle dans les rangs.

Malheureusement, comme elle dit, elle n’est

pas récompensée de ses efforts.

Avec moi, ça va parce que je suis un bon

élève, mais ceux du fond, quels idiots ! Elle

les appelle « la queue du peloton », « les

petits cerveaux » ou « les imbéciles » !

Mais nous, on n’a pas le droit à cause de la

camaraderie, et Justin a été puni quand il

les a traités de mongols !

Avec les autres maîtres il n’y a pas de

classement, mais chez Mme Lartigue il y en

a un. Et, si je suis dans les cinq premiers en

4

février, papa donnera la permission à

marraine de m’acheter une Game Boy !

A la récréation, Mme Lartigue va dans le

bureau de la directrice et elles boivent du

café. Quand on remonte, il y a l’odeur dans

tout le couloir. En même temps, elles

surveillent la cour depuis la fenêtre. Enfin,

elles surveillent les autres maîtresses.

C’est normal : elles connaissent mieux le

métier puisqu’elles sont les plus vieilles.

Ce matin, Mme Lartigue revient du bureau

de la directrice toute chamboulée. Elle ne

rouspète même pas quand elle voit qu’on n’a

pas préparé nos cahiers rouges. Elle se

laisse tomber sur sa chaise.

5

- Demain, vous allez avoir un nouveau

camarade. Il arrive d’Amérique du Sud, et

son père est réfugié politique. Le pauvre

petit garçon vient de perdre sa maman et

je compte sur vous tous pour bien

l’accueillir. Surtout, évitez de le regarder

comme une bête curieuse.

Et elle ajoute, un peu moins fort :

- Il faut que ce soit sur moi que ça

tombe !

Je lui demanderais bien ce qu’est un

réfugié politique, mais je ne sais pas si je

peux. Des fois, quand on pose une question,

la maitresse dit que ce n’est pas le moment

ou bien qu’elle nous l’a expliqué cent fois et

qu’on n’a qu’à écouter. D’autres fois elle

6

nous dispute parce qu’on n’a aucune

curiosité. Alors, je préfère me taire.

7

Ma vie, en étant la petite Myrtille

En classe, tout le monde est calme avec Madame Lartigue. C’est normal, elle est stricte et injuste, elle a toujours le droit de tout dire sur les élèves, et pas nous !

Je me suis sentie vraiment mal quand j’ai vu Madame tenir cet Ernesto par l’épaule. Elle ne me l’avait jamais fait à moi. Pourtant je suis blonde aux yeux bleus.

Madame trouve que je suis une mauvaise élève. Donc, quand elle fait le classement des élèves, sa phrase favorite est « Myrtille, te voilà une fois de plus dans la confiture ! » De toute façon, moi je sais que je travaille bien en classe. Pourtant quand je rentre à la maison, papa et maman me disent toujours « alors, qu’est-ce que tu as encore fait comme bêtise à l’école ? », alors que des fois je n’ai rien fait. Moi, je suis sûre que c’est cette

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Madame Lartigue qui dit toujours des méchancetés sur moi, pour que je sois toujours punie. Mais une chose est sûre, c’est qu’elle peut tout faire, je ne baisserai jamais les bras, je travaillerai de plus en plus pour énerver Madame Lartigue.

Et un jour je deviendrai comme cet Ernesto, le chouchou de la classe, même si je sais qu’il ne fait rien pour l’être. Mais bon, soyons honnête, qui ne rêve pas d’être le ou la chouchou d’une vieille prof aux grosses fesses un jour ?

Par Salima Dans le rôle de Myrtille

9

Une bête curieuse

- Je vous présente Ernesto, nous dit la

maîtresse en tenant un garçon par l’épaule.

Je n’ai jamais vu Mme Lartigue tenir

quelqu’un comme ça. On dirait que c’est son

chouchou, le « pauvre petit garçon » !

Moi, je fais comme les copains, je le

regarde en douce, le nouveau.

Lui, il sourit à peu près, mais on dirait qu’il

a envie de pleurer !

Toute la matinée, ça continue les petits

soins. La maîtresse lui fait des jolies piles

avec des livres et des cahiers neufs.

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Et tout ça où ? A côté de moi, au premier

rang, parmi les bons élèves. Comment elle

le sait qu’il est bon, le nouveau ? Il ne dit

pas un mot normal, seulement de temps en

temps des trucs bizarres. Le sud-

américain, c’est pas facile à comprendre !

Yolande, ma voisine de derrière, prétend

qu’il parle espagnol. Elle veut encore se

rendre intéressante !

Moi, j’aimais bien être à côté de Justin.

Quand Mme Lartigue était au fond, il me

laissait voir la grammaire, et moi les maths.

Maintenant, en plus, je dois m’occuper de

l’autre, là, lui ouvrir le bon livre à la bonne

page, et pareil pour le cahier.

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Ça m’énerve mais, chaque fois, il me fait

des grands sourires. C’est dur de détester

quelqu’un qui vous sourit !

Enfin, la récréation ! Personne ne me

croira mais, Mme Lartigue, elle lui attache

son écharpe ! Avec nous, elle crie qu’on

cherche à s’enrhumer exprès pour être

absents, mais pas avec Ernesto !

Dans la cour, avec un ballon, il se sent

plus ! Les règles du foot peut-être bien

qu’il les connaît en sud-américain, mais il

joue rudement bien en français. C’est un

goal de première !

A un moment, je plonge sur un penalty, et

je tombe en déchirant la manche de mon

blouson. Mais je n’ai pas lâché le ballon.

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J’explose de rire. Ernesto aussi.

Du coup, on est copains, lui et moi. On ne

peut pas dire, le foot, c’est génial.

Le soir, quand il part, il me fait au revoir

avec la main en disant des trucs à son père.

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Mes parents

Ma mère, elle a un nez de renard pour

repérer les mensonges.

- Marc-Antoine, ton blouson neuf ?

- Je l’ai laissé au portemanteau de l’école

parce que j’avais trop chaud. Je le

rapporterai demain.

- Tu es sûr ?

Et elle me fait un regard qui dévisse le

crâne pour voir ce qu’il y a dedans. Je suis

obligé d’avouer que j’ai fait un gros trou au

coude...

Alors maman crie qu’un blouson de ce prix,

ce n’est pas croyable de l’avoir massacré

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depuis Noël ! Désormais, j’irai à l’école avec

mon anorak de ski !

Moi, j’en voulais pas de son blouson de

malheur : le cuir, ça fait crâneur. C’est elle

qui a voulu me l’acheter !

Maman continue à crier, mais de toute

façon, elle est toujours fâchée quand mon

père est en retard pour manger. Elle

s’énerve et manque de faire tomber une

casserole.

Il est huit heures et demie et je pense à

Ernesto : ça fait quatre heures qu’il est

avec le sien, de père.

Après le coup du blouson, pour parler

d’autre chose, je raconte à ma mère le

nouveau, comme il est bon en foot sans

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parler français. Je lui dis aussi que ce ne

serait pas juste qu’il devienne le chéri de

Mme Lartigue rien que parce qu’il a perdu

sa mère.

Cette fois maman pique une vraie colère,

me traite de sans-cœur et pleure presque

en disant qu’une maman c’est ce qu’il y a de

plus précieux au monde ! L’affection de la

maîtresse, il en a plus besoin que tous les

autres élèves réunis, et ce n’est pas un

enfant heureux comme moi qui peut le lui

reprocher !

Au moment où mon père arrive, on nage

toujours dans le drame !

- Alors, mon vieux, ça va ? me

demande-t-il.

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Je n’ai pas le temps de lui répondre, que

maman lui déballe l’histoire.

Du coup mon père s’énerve lui aussi pour

le blouson d’abord et pour Ernesto ensuite.

Il dit qu’on est trop bons, nous les

Français, d’accueillir tous ces réfugiés

politiques. On a aussi des veuves et des

orphelins et on n’a pas à nourrir ceux des

autres pays avec nos allocations familiales

qui coûtent les yeux de la tête au

contribuable...

Ce n’est pas le bon moment pour rappeler

à mes parents mon anniversaire dans deux

semaines. Pourtant, on doit décider

ensemble de la liste de mes invités.

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Je me mets à bâiller comme un crocodile,

avant le dessert. Du coup, mes parents

m’envoient me coucher. Je ne lui fais pas

mes compliments à Ernesto. D’abord, il

devient le chouchou de la maîtresse et, en

plus, il me gâche mes soirées !

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Le classement

- Vas-y, Marc-Antoine, crient les copains

quand on joue au foot. Du coup, Ernesto

veut faire comme eux, sauf que, lui, il crie :

« Malcane ! »

Maintenant, quand j’arrive en classe, il

m’accueille en criant : « Malcane !

Malcane ! » Je sais pas pourquoi, mais ça

me fait plaisir.

Aujourd’hui, c’est le classement. J’ai un

peu peur !

Première : Yolande. Avec Mme Lartigue,

elle est toujours première, pour dire une

fois encore que les filles sont les

meilleures. La maîtresse, elle doit

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s’imaginer qu’une fille peut devenir

président de la République !

Deuxième : Justin. Lui, c’est mon copain,

mais ça m’énerve qu’il soit devant moi. Il va

encore dire à tout le monde que j’ai pas pu

copier !

Troisième : Marc-Antoine. Ouf !

Et ça continue comme ça pour les dix

premiers. Ensuite, on rigole, parce que

Mme Lartigue dit toujours des choses

drôles sur les mauvais élèves.

« Myrtille, te voilà une fois de plus dans la

confiture. »

« Hector ne veut jamais avoir tort ! »

Et quand on arrive aux simplets du fond,

c’est l’éclate totale !

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Je me fais de la bile pour Ernesto. Le

malheureux, c’est pas sa faute s’il ne pige

rien à rien. En tant que dernier, il va être

le souffre-douleur de la maîtresse jusqu’au

mois prochain.

Mais Mme Lartigue vient près de lui sans

se moquer ni rien, et elle pose son carnet

de notes ouvert sur la table. Des efforts

remarquables pour s’intégrer. Voilà ce

qu’elle a écrit.

Moi, je suis troisième avec : travail assez

sérieux. Si j’avais « des efforts

remarquables », je suis sûr que j’aurais un

jeu de Game Boy en plus !

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Le soir, Ernesto repart avec son père, ils

se tiennent la main et se regardent souvent

en souriant.

C’est vraiment pas juste : d’abord, c’est

mon père qui paie pour les réfugiés, et

ensuite, ils ont de meilleures remarques

que moi.

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Le gros jaloux

Pourquoi Marc-Antoine ne m’a pas invitée pour son anniversaire ? Je vais faire une petite enquête. Je demande à tous les garçons de ma classe pourquoi Marc-Antoine ne m’a pas invitée pour son anniversaire ? Alors ils me répondent « Il est jaloux de toi parce que tu es la première de classe ».

Mais moi, je ne suis plus une petite fille pour râler, s’il ne veut pas m’inviter, c’est comme ça.

Mais moi, la première de classe, je vais lui montrer que je suis plus intelligente que lui, et je le ferai encore plus souffrir. Lui Marc-Antoine, c’est un très bon élève, mais il veut toujours se montrer plus fort que les autres parce qu’il est gâté par ses parents et sa gentille marraine. Il regarde toujours plus haut que lui, il ne regarde jamais les pauvres petits élèves qui sont derniers de la classe.

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Mais moi, je ne vais pas me casser la tête avec ses petites histoires de bébé. Moi, tout ce que je veux, c’est de réussir mon année scolaire, et c’est tout.

Par Younes Dans le rôle de Yolande

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Bon anniversaire

Enfin, le voilà, mon anniversaire ! C’est

vraiment long, une année !

Je devrais dire « mes » anniversaires

parce que mes parents organisent deux

fêtes. La première, c’est le dimanche avec

mes quatre grands-parents et ma marraine.

Mon parrain n’est jamais là parce qu’il fait

du commerce international.

Pour les cadeaux, c’est une bonne journée,

mais les grands-parents, ils se croient

obligés de me demander si je travaille bien

en classe et me répètent que je dois

prendre exemple sur mon père pour réussir

dans la vie.

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Comme ils me demandent ce que je veux

faire plus tard (un autre dada à eux), j’ai

bien envie de leur répondre que, lorsque je

serai adulte, j’irai chercher mon fils à

l’école. Mais on sonne, c’est marraine.

En cadeau, j’ai une luge, des tas de

vêtements à je-ne-sais-pas-combien

(maman commence déjà à me dire de ne pas

les abîmer), un Meccano (parce que quand

mon père était môme, il adorait jouer au

Meccano, alors, chaque année, j’y ai droit).

Et puis il y a le paquet de marraine, la Game

Boy Color, le rêve de toute ma vie ! Ma

marraine, je l’adore ! Quand je commence à

jouer à table, mon père rouspète, mais elle

dit que c’est elle qui m’a permis.

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La plus géniale des fêtes, c’est quand-

même le mercredi suivant, avec les

copains ! J’ai invité tous les élèves de ma

classe, sauf les filles parce que ça fait des

chichis, et sauf Ernesto, parce que j’avais

peur que mon père lui reproche les

allocations familiales des orphelins

français.

A l’école, quand je parle de la fête avec

mes copains, Ernesto ne dit rien. C’est

normal : il fait des progrès, mais il ne

comprend toujours pas la moitié des

choses. Seulement, le mardi soir, il me dit

en partant : « Bon anniverchaire », ou à peu

près. Je ne sais pas pourquoi ça me donne

envie de pleurer.

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Mais ensuite, avec tous ces ballons à

gonfler, je ne pense plus à Ernesto.

Pendant que ma mère boit le café avec les

mamans des autres, on en profite... Ma

luge, elle grince sur le marbre mais, dans la

moquette de la chambre de mes parents,

elle s’enfonce comme dans la neige. Alors,

on organise une piste noire : on part du lit,

on traverse la chambre, et on se jette dans

un fauteuil, celui que ma mère appelle un

fauteuil crapaud, mais nous, on dit que c’est

un bonhomme de neige.

Quand c’est Justin, il hurle :

« Et pan, dans les grosses fesses de la

mère Lartigue ! »

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Après, c’est le tour de chacun de prendre

son élan et de venir s’écraser dans le

crapaud, en criant sur les fesses de Mme

Lartigue. Quand c’est mon tour, je rentre

tellement fort dans le fauteuil qu’un des

pieds se casse, juste au moment où maman

et les autres dames arrivent.

Comme on n’est pas seuls, elle ne dit rien,

mais je comprends à son regard qu’elle est

furieuse !

Mes copains, eux, continuent à rire, même

en mangeant le gâteau, même en buvant de

l’orangeade avec les pailles. Au bout d’un

moment, je les imite. C’est trop drôle de

rire en mangeant parce qu’on s’étouffe les

uns après les autres.

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La Game Boy

Quand tout le monde est parti, c’est plus

mon anniversaire, c’est ma fête.

- Mon pauvre Marc-Antoine, je n’ai jamais

vu un enfant plus pénible que toi ! Il y en a

partout !

Et ces traces sur ma moquette ! Depuis

quand on joue dans ma chambre ?

Et mon salon tout sali ! Vous ne savez pas

manger proprement ?

Ah, je suis sûre que ce pauvre petit

Ernesto ne ferait pas tant de bêtises !

Au fait pourquoi ne l’as-tu pas invité ?

Pour une fois, papa rentre plus tôt que

d’habitude. Comme ça, ils sont deux à me

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sermonner. Ils me répètent combien je suis

gâté, et même pourri. Eux, à mon âge, ils

n’avaient pas le dixième, ils ne faisaient pas

de cheval ni de ski.

Moi, à la place de cheval, j’aurais préféré

foot...

Et maman recommence avec le pauvre

Ernesto qui mériterait sûrement mes

cadeaux plus que moi !

Et le pire, c’est que papa est de son avis,

malgré les allocations.

A la fin, ils jurent de ne plus jamais fêter

mon anniversaire avec mes copains, surtout

après les horreurs qu’on a dites sur Mme

Lartigue, une maîtresse comme on n’en fait

plus !

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Dans mon lit, j’ai un peu honte, à cause du

fauteuil, à cause de la maîtresse (pourtant,

je n’y avais jamais fait attention, mais c’est

vrai qu’elle a de grosses fesses), et surtout

à cause d’Ernesto. Lui, il me fait des

sourires, et moi, j’essaie même pas de

l’inviter. Et puis, il faut être franc, c’est

tout de même pas sa faute, pour les

allocations.

Peut-être que, si je lui filais mon

Meccano, ça lui ferait plaisir. Mais c’est

vache de donner les cadeaux qu’on n’aime

pas soi-même. En plus, c’est énorme, ce

truc. Alors, je remets la Game Boy dans sa

boîte.

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Le jeudi, en arrivant à l’école, je la donne

à Ernesto.

Au début, il n’y croit pas, et puis après, il

est comme un fou !

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Je les déteste tous

Aujourd’hui, Marc-Antoine a donné sa Game boy à Ernesto. C’est vraiment bizarre, et en plus il ne l’a même pas invité à son anniversaire. Et le pire, c’est qu’il rêvait d’avoir cette Gameboy, et il lui donne, comme ça.

Quand Ernesto est arrivé à l’école, Marc-Antoine le déteste, et maintenant ce sont des amis. Quel lèche-bottes ce Marc-Antoine !

Quand Ernesto a reçu la Gameboy, il a crié comme un fou. Marc-Antoine, je le plains, quand il va rentrer à la maison, il va passer une sale soirée si ses parents savent qu’il a donné la Game boy !

Madame Lartigue m’énerve. Je trouve qu’elle a tort de dire que je ne veux jamais avoir tort. Pfff… les idiots ! Quand je grandirai, je serai le maître du monde, et tout le monde se mettra à genoux devant moi. Parce que Madame Lartigue doute de

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moi, alors je lui montrerai de quoi je me chauffe.

Par Ibrahim Dans le rôle d’Hector

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Donner, c’est donner

Dès que je rentre de l’école, maman me

dit qu’elle a rangé ma chambre et qu’elle n’a

pas trouvé ma Game Boy. Moi, tout fier, je

lui explique que je l’ai donnée à Ernesto.

- Et qu’est-ce qui t’a pris ? Tu nous l’as

réclamée pendant des mois, cette Game

Boy !

C’est pourtant elle qui dit tout le temps

qu’il faut partager !

Mon père est furieux. Il me donne jusqu’à

demain pour récupérer mon jeu, sinon, je

pourrai aller habiter ailleurs.

Je n’ose rien dire, mais quand même...

D’abord, la console, c’est à moi qu’elle l’a

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offerte, marraine. Et puis, donner, c’est

donner, reprendre, c’est voler. J’en fais

donc ce que je veux. Si ça leur plaît pas à

mes parents, j’irai chez papy et mamie, ils

sont super cool.

Le lendemain, quand je pars à l’école, mon

père me dit :

- Tu te rappelles ce que je t’ai dit hier ?

Je lui fais oui de la tête.

Devant le portail, il y a Ernesto avec son

père. Le père, il me rend ma console et il

m’explique en français qu’il ne peut pas

accepter ce cadeau. Il sait que je l’ai donné

gentiment, mais je vais sûrement me faire

gronder. Il ajoute que la chose la plus

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précieuse pour son fils, c’est un ami, et que,

pour ça, il me fait confiance.

En classe, je ne vois rien au tableau à

cause de ces foutues larmes. Ce qui

m’embêterait encore plus ce serait qu’on

les voie, surtout Ernesto.

Mais je ne peux plus les arrêter parce que

je sais bien que je suis le garçon le plus nul

du monde : j’aurais jamais dû obéir à mon

père et à celui d’Ernesto. Il doit m’en

vouloir à mort, lui, maintenant !

La mère Lartigue, elle n’a pas oublié ses

lunettes, aujourd’hui, et elle commence à se

moquer de moi. Elle dit que les hommes, ça

ne pleure pas et gnagnagna et gnagnagna...

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C’est vrai qu’elle est moche, vieille, grosse

et bête, la mère Lartigue, et en plus elle

est moins rapide que moi, surtout dans les

escaliers !

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Mon Ernesto

Ça va faire quelques jours que mon Ernesto se trouve dans sa nouvelle école, j’espère que tout se passe bien pour lui.

Ernesto - Papa, papa !Papa (Je) - Oui, mon fils ?Ernesto - J’ai joué au foot aujourd’hui.Papa (Je) – C’est bien. Et sinon, qu’as-tu

fait en cours ? Ernesto – Presque rien. Je ne comprends

pas encore tout à fait ce que dit Madame. Papa (Je) – C’est pas grave, tu y

arriveras.

Le soir…Je suis content que tout se passe bien,

ça me rassure. Mais il ne m’a toujours rien dit à propos de ses amis. Et s’il n’en avait pas ? Le lendemain, je me rendis en douce près du portail de son école, et il restait seul. J’avais oublié son ami, dont il me

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parlait l’autre soir, Marc-Antoine je pense. Quand je viendrai le chercher, je lui dirai d’inviter son ami.

Après une longue journée, son ami et Ernesto sont venus à la maison. Je lui ai parlé de la maison, de pourquoi j’étais là, etc. Enfin, tout s’est bien passé pour lui et Ernesto, ils ont joué toute la soirée.

Après quelques jours, Ernesto m’a amené un jouet, que je ne me souvenais pas lui avoir offert. Il m’a raconté que c’était à son ami, qui lui a offert. Je me suis dit que c’était un trop beau cadeau pour Ernesto.

Le lendemain matin je partis à l’école avec Ernesto et je rendis le jeu à son ami. Je lui ai dit que c’était un beau cadeau, mais que ce n’était pas nécessaire. Il me répondit d’un hochement de tête, et partit en cours avec Ernesto.

Par Hissam Dans le rôle du père d’Ernesto

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SDF

Tout le monde le sait, pour la petite

porte qui reste toujours ouverte. La

maîtresse est encore en train de souffler

dans la cour que je suis déjà dans la rue.

Désormais, je suis un enfant SDF. Je ne

peux aller ni chez mes parents, ni chez mes

grands-parents. Il est hors de question que

je remette les pieds dans cette école de

malheur. Je vais me trouver une cabane

abandonnée, je l’aménagerai super bien et,

quand il faudra acheter à manger, j’irai

braquer des pâtisseries. Je dirai tout le

temps des gros mots !

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Et si j’essayais maintenant ? Pas génial : la

boulangerie Picard, au bout de la rue, c’est

là que mes parents se servent ! Dommage,

parce que leurs croissants sont délicieux !

Je ne vais pas me faire prendre par la

police dès le premier jour. Heureusement,

j’ai mis la Game Boy dans ma poche. Si je

vais au square, je pourrai jouer

tranquillement.

Je m’assieds sur un banc, mais il est

glacé. Au bout d’un moment, je ne sens plus

mes doigts. Et puis voilà le gardien ! Il va

me poser des questions. Je disparais avant

qu’il ne me voie !

Je ferais mieux d’aller plus loin, mais si je

me perds ? Je passe dans une rue que je ne

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connais pas, j’essaie de bien me repérer. Il

y a des gens qui me regardent. Si ça se

trouve, toutes les polices du monde sont

déjà à mes trousses !

Et pas de cabane en vue !

Je ne sais plus quoi faire, j’ai faim et j’ai

froid. Je trouve enfin une cachette (un

trou dans la haie de la résidence de

personnes âgées), d’où j’entends les bruits

de l’école. On dirait qu’il se passe des

siècles entre deux sonneries !

Il fait de plus en plus froid. La nuit ne va

pas tarder ! Où je vais dormir ? Les vrais

SDF, ils me font peur. Ils sont capables de

me piquer ma Game Boy !

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La fin des cours ne devrait pas tarder. Je

me rapproche de l’école. Le père d’Ernesto

est en avance : il ne veut pas louper son fils

adoré. Je le déteste. Je déteste tout le

monde.

Quand le gros portail en fer s’ouvre, je

vois mon père dans la cour, l’air

malheureux, avec mon anorak à la main.

Pour une fois qu’il est venu me chercher,

je ne peux pas manquer ça. Je cours vers

lui à toute vitesse en criant : « Papa ! »

Il me prend dans ses bras et il me serre à

m’écraser.

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Le meilleur ami deMarc-Antoine

Justin commence à crier « Marc-Antoine… », dans la cour, il ne voit personne.

Justin s’inquiète beaucoup, il se demande comment va Marc-Antoine.

Il s’imagine qu’il va lui arriver quelque chose de grave. Pour lui il a trop peur, il se dit « J’espère qu’il ne sera pas malade, j’espère qu’il reviendra, il a froid, il se sent bien », ensuite il se pose la question en disant « Pourquoi on ne ferme jamais la porte de l’entrée de l’école ». Ensuite Marc-Antoine revient. Il (Justin) le (Marc-Antoine) voit à la grille et là il (Justin) panique un peu moins. Il (Justin) attend qu’il (Marc-Antoine) aille chez son père et tout.

Ensuite il lui demande s’il va bien : « Tu as faim, tu avais sans doute peur, tu es

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malade ? ». Marc-Antoine répondit : « Non ». Il dit : « Alors ça va ».

Ensuite, il (Justin) l’appelle pour ses devoirs.

Par Heaven, dans le rôle de Justin

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Ernesto

Il fallait s’y attendre : j’ai eu tellement

froid que je suis tombé malade, mais, ce qui

est incroyable, c’est que mes parents n’ont

même pas râlé. Pourtant, ça les énerve

quand je ne suis pas capable de m’habiller

pour aller dehors.

Trois jours au lit à roupiller et à jouer à

la Game Boy, ça, c’est cool, sauf que Justin

m’a téléphoné mes devoirs ! Mais le plus

cool des plus cool, c’est que mes parents

m’ont demandé si j’avais envie de quelque

chose.

- J’ai droit à combien de choses ?

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Ils m’ont répondu en riant que, pour un

gros gâté comme moi, une chose suffirait

largement. Mais, exceptionnellement, ils

réaliseraient deux de mes souhaits.

- D’abord, je voudrais que papa vienne me

chercher à l’école.

Il a promis de le faire, une fois par

semaine.

- Et puis je voudrais qu’Ernesto vienne

jouer avec moi mercredi.

Là, c’est les deux qui ont promis.

Quand je dis la bonne nouvelle au

téléphone à Ernesto, il crie : « Ouais ! »

Finalement, il fait des sacrés progrès en

français.

49

EDITIONS

THIERRY

MAGNIER

Marc-Antoine n’aime pas Ernesto. D’abord

Ernesto parle mal le français, ensuite, la

maîtresse, une vraie dure à cuire d’habitude, lui

passe tout. Bref, que de bonnes raisons pour le

détester ! Masi Ernesto a aussi des atouts, il joue

au foot comme un dieu...

PETITE POCHE

des romans comme les grands

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