ix guadeloupe un marché frileux
TRANSCRIPT
IX
Le Nouvel Observateur
GUADELOUPE SPÉCIAL IMMOBILIER
Il est manutentionnaire dans la
grande distribution. Elle est
secrétaire. Avec leur enfant de
5 ans, ils habitent au Gosier. Et
ils sont heureux car ils s’apprêtent à
troquer leur 3-pièces en location
pour une maison aux Abymes. En
tout, 90 m2 et 4 pièces à 202 000
euros. « A force d’attendre l’accord de
la banque, on finissait par ne plus y
croire », lance Alex. Une lenteur
administrative qui nuit à la fluidité
du marché immobilier et que les
agents immobiliers déplorent : « Les
banques ne jouent pas le jeu et sont
très frileuses », considère Catherine
Guissard, la présidente de la Fnaim
Guadeloupe. Un avis que ne partage
pas totalement Jean-Pierre Léoncé-
dis, le patron d’une enseigne Cen-
tury 21 à Baie-Mahaut : « Les
banques ne sont pas frileuses, elles
décortiquent les dossiers et réclament
très souvent un apport personnel. »
Une chose est sûre, notre couple,
Alex et Michèle, n’avait pas beau-
coup d’apport. En tout et pour tout
16 000 euros, mais l’Etat est venu à
la rescousse ; grâce au PTZ+, ils ont
pu emprunter 31 600 euros sans
intérêts. Comme Alex et Michèle,
beaucoup de ménages guadelou-
péens se mettent sur les rangs de
l’accession : « 88% des dossiers trai-
tés émanent de primo-accédants, et
71% d’entre eux ont recours à un
PTZ+ », note Danielle Ramlall, res-
ponsable d’une agence Meilleur -
taux.com à l’échelon local. Pour
Catherine Guissard, « depuis son
entrée en vigueur, le PTZ+ dope la
demande des ménages et contribue
au réveil du marché ». Mais atten-
tion : ce n’est pas non plus l’eupho-
rie. La raison ? Le PTZ+ est désor-
mais distribué à tous les acquéreurs,
quels que soient leurs revenus. Un
élément qui semble modifier l’atti-
tude des banques vis-à-vis du prêt à
taux zéro, à l’origine réservé aux
acquéreurs modestes, clientèle
qu’elles n’ont jamais cherché à cap-
ter. Avec l’ouverture du PTZ+ à tous
les primo-accédants, sans doute
espèrent-elles attirer de bons profils.
Si timide embellie il y a, celle-ci ne
tient pas qu’à l’aide de l’Etat. La
baisse des prix y est aussi pour beau-
coup. Depuis 2008, elle serait de
l’ordre de 30%, avance la présidente
de la Fnaim locale, « mais les prix
sont désormais en phase de stabilisa-
tion ». Raison pour laquelle certains
propriétaires, anticipant un mouve-
ment de hausse, proposent des biens
à des prix hors marché. Ce qui ne
contribue pas à la fluidité de ce der-
nier, surtout dans des secteurs où la
demande est faible, comme à
Morne-à-l’Eau ou à Petit-Canal. En
revanche, dans l’environnement de
Pointe-à-Pitre, des communes
comme Baie-Mahaut, Le Lamentin,
Petit-Bourg, Les Abymes, Le Gosier,
Sainte-Anne ou Saint-François se
portent mieux. L’offre est abon-
dante, et les acquéreurs ont le choix ;
ils n’hésitent donc plus à négocier.
C’est eux qui ont désormais les
cartes en main. Mais leur budget est
souvent réduit. « Sur 10 demandes,
8 ne dépassent pas 150 000 euros »,
précise Franck Merla, négociateur
chez Contact Immobilier à Basse-
Terre. Trop faible pour acquérir une
maison (70% du marché), dont
l’offre démarre entre 200 000 et
250 000 euros. Côté logements
neufs, si les promoteurs construi-
sent moins, l’offre existe, et les inves-
tisseurs, un temps échaudés par les
événements de début 2009, sont de
retour. Essentiellement des métro-
politains. « L’offre se concentre sur
des secteurs comme Baie-Mahaut,
Le Gosier, Petit-Bourg et Saint-
Martin, à des prix oscillant entre
4 000 et 6 000 euros/m2 », note
Jean-Charles Taquet, responsable
d’expertise au Crédit Foncier Immo-
bilier. Des prix très élevés qui
conduisent certains investisseurs à
se tourner vers la Guyane, où l’im-
mobilier est deux fois moins cher.
POINTE-À-PITRE, BAIE-MAHAUT, LE GOSIERAncien : 1 200-3 000 €/m2
Neuf : 4 000-5 000 €/m2
Pointe-à-Pitre a beau être la capitale de
l’île, elle n’attire pas foule d’acquéreurs,
sinon les plus modestes. « Il y a quinze
ou vingt ans, Pointe-à-Pitre était vrai-
ment le cœur de l’agglomération, mais
aujourd’hui la ville a beaucoup perdu
de son attractivité en raison des pro-
blèmes d’insécurité, de stationnement,
d’urbanisme et d’indivisions qui ne sont
pas réglées depuis des décennies et qui
rendent les ventes impossibles »,
GUADELOUPE
Un marché frileux
APRÈS DEUX ANNÉES DE LÉTHARGIE ET UNE BAISSE DES PRIX DE L’ORDRE DE 30%, LES PROFESSIONNELS NOTENT UNE TIMIDE REPRISE DES TRANSACTIONS
A Basse-Terre,
l’essentiel de
la demande
se concentre sur
des appartements
autour de
150 000 euros
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R/L
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Basse-Terre
Saint-Claude
Pointe-à-Pitre
Baie-Mahault
Le Gosier
Sainte-Anne
Saint-François
Le Moule
Trois-Rivières
OcéanAtlantique
Merdes
Caraïbes0 10 20 km
N2
N2
N2
N1
N1
N1
N2
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N8
N6
N6
N5
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Les Saintes
Marie-Galante
La Désirade
GRANDE-TERRE
BASSE-TERRE
Guadeloupe
Basse-Terre
Saint-Claude
Pointe-à-Pitre
Baie-Mahault
Le Gosier
Sainte-Anne
Saint-François
Le Moule
Trois-Rivières
Sainte-RoseSainte-Rose
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Le Nouvel Observateur
SPÉCIAL IMMOBILIER GUADELOUPE
MARTINE POUGEOL-LÉON
Directrice de l’Adil de la Guadeloupe
Le Nouvel Observateur Comment fonctionne le marché de la primo-accession ?
Martine Pougeol-Léon L’accession à la propriété est, pour les ménages
modestes, un véritable parcours du combattant. Cela tient à des fac-
teurs structurels et conjoncturels. Au plan structurel, compte tenu de
l’exiguïté du territoire, le foncier est rare, et donc cher. A cela il faut
ajouter les aléas climatiques : cyclones, séismes, inondations, tsuna-
mis… Construire est donc un acte plus complexe et plus coûteux
qu’ailleurs. Au plan conjoncturel, il existe des situations d’indivision
remontant à plusieurs générations, de successions non réglées, qui ne
favorisent pas la fluidité du marché. Nous avons également un taux de
chômage élevé et des ménages à revenus très modestes, voire non
déclarés. Autant d’éléments qui constituent pour les établissements
financiers un risque important, aboutissant à écarter un certain
nombre de familles.
Le PTZ+ peut-il améliorer la solvabilité des primo-accédants ?
Jusqu’à maintenant, les banques ne distribuaient le prêt à taux zéro qu’à
dose homéopathique et se souciaient peu des acquéreurs modestes. Il faut
espérer que le PTZ+ modifiera la donne, mais il est trop tôt pour tirer le
bilan de la première année. C’est la seule aide dont disposent les ménages
modestes, hormis l’allocation logement, peu efficace pour alléger l’endet-
tement. Ici, l’aide personnalisée au logement (APL) n’existe pas comme
en métropole. De surcroît, les communes, plombées par d’importantes
difficultés financières, n’ont pas mis en place de prêts ou de subventions
complémentaire au PTZ+, à l’image de ce qui se fait en métropole.
Quels sont les acquéreurs qui viennent vous voir ?
En 2010, les ménages ayant un projet immobilier étaient à 95,5% des primo-
accédants et disposaient d’un revenu mensuel moyen de 2 430 euros. Ils
sont âgés en moyenne de 40 ans (contre 36 à 37 ans en métropole) et ont
un budget moyen de 136 966 euros, budget en hausse par rapport à l’année
précédente, mais encore trop éloigné de la réalité du marché.
PROPOS RECUEILLIS PAR C. S.
explique Jean-Pierre Léoncédis,
patron de Century 21-AGCO Plus
Immo (Baie-Mahaut). De fait, les
communes résidentielles proches de
la zone d’activité de Jarry, de son port
autonome, captent l’essentiel du
marché, comme à Baie-Mahaut ou au
Gosier. « A Pointe-à-Pitre, les valeurs
sont aujourd’hui 60% moins élevées que
dans ces communes », précise ce même
agent immobilier. Il faut compter
autour de 1 200 euros/m2 en collectif à
Pointe-à-Pitre contre 2 000 euros/m2 à
Baie-Mahaut. La maison reste le
produit phare, mais les prix oscillent
entre 250 000 et 600 000 euros pour
des biens de qualité. Une villa de
4 pièces en lotissement, sur un terrain
de 604 m2 avec piscine, vient de s’y
vendre 285 000 euros. Même ordre de
prix au Gosier, où une villa de 6 pièces
bâtie le long de la marina avec vue sur
mer et un jardin de 510 m2, mais néces-
sitant des travaux, est partie à 315 000
euros. Côté petites surfaces, un studio
de 30 m2 situé pointe de la Verdure, en
bord de mer, s’est vendu 90 000 euros,
soit 3 000 euros/m2.
BASSE-TERRE, SAINT-CLAUDE, TROIS-RIVIÈRESAncien : 1 100-2 000 €/m2
Neuf : 3 500-4 000 €/m2
Siège de toutes les administrations,
Basse-Terre accueille la plupart des
fonctionnaires métropolitains mutés
en Guadeloupe. « Ils s’installent pour
quatre ans en profitant du dispositif
Girardin, puis revendent lorsqu’ils rentrent en métropole », indique
Franck Merla, négociateur chez
Contact Immobilier. Ici, on trouve de
grands appartements autour de
150 000 euros. Comme ce 4-pièces de
80 m2 en duplex vendu tout récem-
ment 149 000 euros. Un prix qui cor-
respond à l’essentiel de la demande.
Mais, à ce niveau de prix, difficile de
trouver une maison, le bien fétiche
des prétendants à l’acquisition.
Récemment, une villa de 120 m2 avec
430 m2 de terrain est partie à
172 000 euros, mais elle nécessitait
des travaux. Un peu plus haut, Saint-
Claude est très prisé. C’est ici que pré-
fèrent s’installer ceux qui travaillent
à Basse-Terre. On peut y dénicher des
maisons entre 200 000 et 600 000
euros, mais l’offre est très rare. Une
villa de haut standing avec 130 m2
habitables et 1 200 m2 de jardin vient
de trouver preneur à 350 000 euros.
Plus au sud, Trois-Rivières affiche des
prix quasi équivalents. Ici, c’est la vue
sur mer et sur les Saintes qui fait la
différence. Une belle villa de 166 m2
sur 1 400 m2 de terrain, avec vue sur la
mer et piscine, vient de trouver
preneur à 350 000 euros.
SAINT-FRANÇOIS, SAINTE-ANNEAncien : 2 000-2 500 €/m2
Neuf : de 3 500-6 000 €/m2
« Saint-François est le marché que pri-
vilégient les métropolitains, mais aussi
les Indiens et, bien sûr, les Guadelou-
péens », note Jocelyne Tiba, de l’agence
Caraïbes Immobilier. Avec son golf, ses
plages, sa marina entièrement refaite,
la commune a des allures de station
balnéaire animée toute l’année. Le
marché locatif est très actif, mais il faut
tout de même débourser 1 500 à 2 000
euros/mois pour une maison.
Foncier rare, aléas climatiques : construire ici est un acte plus complexe et plus coûteux qu’ailleurs.
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XII
Le Nouvel Observateur
SPÉCIAL IMMOBILIER GUADELOUPE
Du nouveau en matière
de diagnostic énergétiqueEn Guadeloupe, pour les logements neufs, le label BBC ne fait pas partie
des conditions pour bénéficier des avantages fiscaux majorés du dispositif
Scellier-DOM ou encore du PTZ+. « Tous les logements neufs sont d’emblée
réputés basse consommation », confirme Martine Pougeol-Léon. Dans
l’ancien, le diagnostic de performance énergétique (DPE) n’est pas
nécessaire non plus, les logements bénéficiant systématiquement d’une
étiquette A. Pour autant, si les dépenses de chauffage sont quasi
inexistantes, il ne faut pas oublier que la fourniture d’énergie se paie le prix
fort dans les îles. Et les choses ne devraient pas s’arranger avec
le renchérissement inévitable des énergies. Une problématique qui
préoccupe les élus guadeloupéens, d’autant que ces coûts pèsent
fortement sur les ménages à faibles revenus. C’est la raison pour laquelle
le conseil régional de Guadeloupe s’implique fortement dans la réduction
des dépenses d’énergie. L’Etat vient de lui accorder, pour deux ans, une
habilitation à « fixer des règles spécifiques en matière de maîtrise de
la demande d’énergie, de réglementation thermique pour la construction
de bâtiments et de développement des énergies renouvelables ».
Les objectifs du plan régional des énergies renouvelables et de
l’utilisation rationnelle de l’énergie (Prerure) et ceux du Grenelle de
l’environnement, fixant la barre de l’autonomie énergétique à 50% d’ici
à 2020, ne peuvent, en Guadeloupe, être atteints sans une modification
du cadre réglementaire. Une initiative qui place le département au rang
de site pilote en matière de développement durable et d’économies
d’énergie, d’autant qu’il fera une large place à la concertation, tant avec
les services de l’Etat, les acteurs socio-économiques qu’avec la
population. Cela se traduit notamment par la création d’un diagnostic
de performance énergétique spécifique à la Guadeloupe (DPE-G), qui
s’imposera non seulement à tous les logements neufs ou anciens équipés
d’un système de climatisation dans au moins une chambre, mais aussi aux
bureaux et commerces dont plus de 50 m2 sont climatisés et aux
bâtiments publics dont plus de 500 m2 sont climatisés. Le certificat relatif
aux logements neufs doit intervenir au plus tard à l’achèvement des
travaux ; celui des logements anciens doit être produit lors de toute
transaction immobilière (vente ou location). Le point de départ de cette
obligation n’est pas encore fixé, même si une délibération du conseil
régional en mai 2011 officialise le dispositif. Il faut en effet que les
organismes certificateurs se mettent en ordre de marche et qu’ils forment
des diagnostiqueurs, ce qui risque de prendre un certain temps. Malgré
tout, l’initiative du conseil régional de Guadeloupe devrait permettre
d’améliorer, peu à peu, le parc existant, dont une grande partie, on le sait,
est de piètre qualité. C. S.
En matière de revente, si l’acti-
vité avait beaucoup souffert durant la
crise, la situation s’améliore, la fré-
quentation de la ville ayant, notam-
ment sur le plan touristique, bien évo-
lué depuis quelques mois, avec les
événements qui se sont produits en
Tunisie et en Egypte. « Les gens mutés
pour quatre ans privilégient souvent
l’achat car l’endroit est magnifique et
suscite des coups de cœur, explique
Jocelyne Tiba. Il y a aussi beaucoup de
transactions pour des petits pied-à-
terre entre 70 000 et 130 000 euros
(studios et 2-pièces). » Quant aux inves-
tisseurs, ils ont déserté le marché car
les prix sont trop élevés. Certains pro-
grammes, en vente depuis déjà long-
temps, s’affichent à 5 000 ou 6 000
euros/m2. Des prix qui se justifient
davantage à Saint-Martin…
SAINTE-ROSE, LE MOULEAncien : 1 000-2 000 €/m2
Ces deux villes sont un peu excentrées
des zones d’activité. Au Moule, « la
clientèle est beaucoup plus locale parce
qu’on n’y trouve pas la vie nocturne, les
activités culturelles et sportives de
Saint-François », note Jocelyne Tiba.
Les prix sont à l’avenant. Une villa de
4 pièces avec un 2-pièces indépendant
sur 315 m2 de jardin vient de s’y négo-
cier 185 000 euros. A l’opposé du
Moule, à Basse-Terre, Sainte-Rose est
également un marché de report. A
condition de ne pas travailler sur la
zone de Jarry car, dans ce cas, il faut
compter une heure de route, avec les
embouteillages. Ici, il n’y a quasi que
des maisons à vendre. « Une villa s’y
vend à partir de 130 000 euros, mais
pour un bien de standing sur les hau-
teurs de la ville il faut compter
250 000 euros », précise Pascal Meu-
rot, de l’agence Contact Immobilier.
COLETTE SABARLY
Au Moule,
la clientèle locale est
bien représentée
A Pointe-à-Pitre,
comme dans
l’ensemble des
DOM, les dépenses
de chau�age
sont presque
inexistantes, mais
la fourniture
d’énergie se paie
au prix fort
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