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Caroline Giovannuzzi Master 2 PIF - Axe 2 Des classes spécialisées à la classe ordinaire : innovations de la pratique des sciences mots-clés : sciences - démarche d’investigation - difficulté scolaire ULIS - pratiques d’enseignement - adaptation

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Page 1: Introduction · Web viewAnalyse et retour sur l’adaptation : Nous avons constaté le rapport de force que certains élèves ayant des problèmes de comportement (comme Chloé) essayent

Caroline Giovannuzzi Master 2 PIF - Axe 2

Des classes spécialisées à la classe ordinaire :

innovations de la pratique des sciences

mots-clés :

sciences - démarche d’investigation - difficulté scolaireULIS - pratiques d’enseignement - adaptation

Mme Elisabeth Plé 2016-2018Sommaire

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Introduction 2

I. Contexte 3

II. Cadre théorique 81° L’élève en difficultés scolaires 82° L’enseignement des sciences fondé sur l’investigation 103° L’apport des sciences 12

III. Perspectives méthodologiques 181° Etude de cas : observation filmée 18

Population d’étude 18Temporalité 19Protocole de recueil de données 20Liste des adaptations 21Grille d’observation 22

2°Traitement et analyse des données 23

IV. Résultats et analyse des données 231° Place des adaptations dans la séquence 232° Observation et analyse de l’impact des adaptations 243° Questionnaire complémentaire 39

V. Discussion 43

Bibliographie 45

Annexe 1 : synopsis des séances filmées 46

Annexe 2 : questionnaire et résultats 48

Annexe 3 : exemple de manège construit par un groupe 49

Résumé 50

Note : Pour les besoins universitaires de la rédaction de ce mémoire, l’enseignante s’étant portée volontaire devait rester anonyme. N’étant plus proposé dans ce contexte, l’anonymat n’est plus de rigueur : je remercie donc Anaïs Ricordeau, l’enseignante A en question, de m’avoir ouvert sa classe et accordé sa confiance.

1

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Introduction

L’enseignement des sciences dans le premier degré a évolué au fil de

l’Histoire. D’un enseignement réservé aux élites aux “leçons de choses” au XIXème

siècle, reposant sur l’observation et l’acquisition de données purement utilitaires, en

passant par le rejet de la démarche d’investigation au XXème siècle, les sciences

ont retrouvé récemment leurs lettres de noblesse et constituent une part importante

des programmes officiels1. C’est un fait reconnu à présent : les savoirs en jeu

permettent aux élèves de développer des compétences, en particulier selon

certaines démarches et pratiques d’enseignement. Des élèves à besoins particuliers,

en classe ULIS (unités localisées pour l'inclusion scolaire) ont profité du projet

HandiSciences, lancé par la fondation La main à la pâte. Les conséquences sur

l’apprentissage des élèves sont étonnantes. Nous pourrions mettre en relation les

pratiques enseignantes de ce projet et celles réalisables en classe ordinaire, en

particulier vis-à-vis des élèves en difficultés scolaires.

J’ai choisi cette thématique pour plusieurs raisons : j’ai pu observer au cours

d’un stage (en CM1-CM2, lors de séances de sciences portant sur l’énergie) un

engagement et un raisonnement bien construit manifestés par les élèves, en

particulier de la part de quelques élèves en difficulté dans les matières principales

(français, mathématiques). J’ai été positivement étonnée de cette situation, et cela

m’a donné envie d’en savoir plus. Ce qui a également orienté mon choix de

thématique fut ma méconnaissance des classes ULIS et des élèves à besoins

particuliers, et enfin un attrait tout spécial pour la discipline scientifique, qui permet

une réelle ouverture au monde.

Nous commencerons par examiner les enjeux de cette thématique et son

contexte, puis ses éléments théoriques (et définition des concepts clés) au regard de

plusieurs chercheurs spécialistes des domaines concernés, une partie méthodologie

et enfin une analyse des données recueillies.

1 Jean Hébrard (1997) L'histoire de l'enseignement des sciences en France

2

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I. Contexte

D’après l’enquête PISA (program for international student assessment)

réalisée par l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement

Économiques)2, l’école française se situe juste au dessus de la moyenne en

mathématiques, sciences et compréhension de l’écrit. Parmis les 540 000 élèves3

ayant passé les épreuves PISA en 2015, 29 % des élèves français se situent à un

niveau jugé “performant” voir “très performant” en sciences lorsque 22 % des élèves

sont en grande difficulté. On peut remarquer une réelle disparité entre les élèves,

expliquée en partie selon l’enquête par le milieu socio-économique de la famille de

l’enfant.

Les difficultés scolaires, ou la difficulté pour un élève d’acquérir les savoirs et

compétences nécessaires préconisés par le programme officiel, sont un axe de

travail pour le gouvernement. Ainsi, la lutte contre l'illettrisme (situation d'une

personne qui, ayant appris à lire et à écrire, en a complètement perdu la pratique)

est une priorité nationale, car touchant encore récemment 7 % des adultes ayant

été scolarisés en France4. Lire, écrire et compter font partie des compétences

fondamentales que chaque élève doit posséder, et l’on comprend donc l’accent mis

par le ministère de l'éducation sur les disciplines du français et des mathématiques,

qui représentent respectivement 288 heures et 180 heures annuelles en cycle 3, soit

la majorité de l’emploi du temps des élèves, contre 72 heures en sciences et

technologie. Lutter contre les difficultés scolaires permettrait de prévenir l’échec

scolaire et la situation qui peut en découler, le décrochage scolaire. Ce phénomène

de décrochage, d’abandon des études sans aucun diplôme entraîne de nombreuses

conséquences négatives : tout d’abord un risque plus élevé de chômage, d’emplois

précaires, peut être pour certains une baisse de l’estime de soi, voire une souffrance

psychique… et un coût pour la société en terme financier, mais aussi en terme de

cohésion sociale et de vivre ensemble.

2 publiée fin 20163 représentatifs des quelque 29 millions d’élèves âgés de 15 ans scolarisés dans les 72 pays et économies participants4 Insee, enquête 2012 Information et vie quotidienne

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Bien que ce problème soit multifactoriel, agir sur les difficultés scolaires

rencontrées permettraient de réduire le décrochage scolaire. Selon le ministère de

l’éducation nationale, une amélioration est en cours : “si 140000 jeunes sortaient du

système scolaire sans qualification en 2011, ce chiffre a été ramené à 98000 en

2016 et sera proche de 80000 avant fin 2017”. L’objectif principal de la réussite

scolaire pour tous n’a pas un seul et unique impact sur le contenu ou les pratiques

d’enseignement des mathématiques et du français, mais sur chacune des pratiques

pédagogiques de l’enseignant, et ce pour toutes les disciplines, notamment les

sciences.

La dernière enquête PISA s’est concentrée sur cette discipline. Afin

d'accroître les compétences scientifiques des élèves il est important de favoriser un

engagement volontaire et une motivation pour les sciences. Comme l’indique le

rapport de l’OCDE (2015) : “Le moyen le plus immédiat de susciter l’intérêt pour les

sciences chez les élèves dont l’environnement familial est moins propice pourrait

consister à augmenter, dans le cadre scolaire, l’offre dès le plus jeune âge d’un

enseignement de qualité en sciences”. Remarque surprenante : “La performance en

sciences des élèves et leur aspiration à exercer une profession scientifique sont

davantage corrélées au temps consacré à l’apprentissage des sciences et à la

manière dont ces disciplines sont enseignées” plutôt qu’à “des facteurs comme le

matériel et le personnel [...], la nature des activités scientifiques extrascolaires

proposées dans les établissements, ou encore les qualifications des professeurs de

sciences”. Ainsi, même si 70% des professeurs des écoles ont suivi un cursus

littéraire5, ce qui importerait le plus par rapport aux aptitudes des élèves en sciences

serait la façon dont les sciences sont enseignées et le temps consacré (sachant que

certains élèves interrogés lors de l’enquête déclaraient ne pas avoir eu de sciences

en école primaire). Cette enquête nous mène sur une piste en vue de l’objectif de la

réussite pour tous, le type de pratiques enseignantes ayant bel et bien un impact sur

la performance des élèves.

L'enquête fournit d’autres précisions : “dans la quasi-totalité des systèmes

d’éducation, les élèves obtiennent un score plus élevé en sciences lorsqu’ils

indiquent que leurs professeurs de sciences «expliquent des concepts scientifiques

5 d’après le magazine Science et vie hors-série n°278

4

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», « discutent de leurs questions » ou « démontrent un concept » plus fréquemment.

Dans la quasi-totalité des systèmes d’éducation, la performance des élèves en

sciences est également meilleure lorsqu’ils indiquent que leurs professeurs de

sciences « adaptent leurs cours aux besoins et aux connaissances de la classe » ou

« apportent une aide personnalisée quand un élève a des difficultés à comprendre

un sujet ou un exercice »”. Ces pratiques d’enseignement sont bien éloignées des

cours de sciences du siècle dernier où la transmission du savoir dépassait rarement

le mode transmissif (l’enseignant fournit les savoirs, l’élève écoute et réceptionne

ces derniers), et semblent bien plus vivantes, du point de vue de l’élève comme de

l’enseignant. Nous approfondirons ce point dans la partie suivante.

Mais les compétences acquises en sciences se limitent-elles à la discipline

uniquement et au cadre strictement scolaire ? Nous pouvons affirmer le contraire.

Tout d’abord, les compétences des sciences citées dans le programme de 2015 (en

cycle 3, mais cela vaut aussi pour le cycle 2) telles que pratiquer des démarches

scientifiques et technologiques (formuler une question ou une problématique

scientifique ou technologique simple ; proposer une ou des hypothèses pour

répondre à une question ou un problème…) ou pratiquer des langages (rendre

compte des observations, expériences, hypothèses, conclusions en utilisant un

vocabulaire précis ; exploiter un document constitué de divers supports…) font partie

intégrante des cinq domaines du socle commun de connaissances, de compétences

et de culture. Ces deux exemples de compétences s’inscrivent respectivement dans

le domaine 4 “les systèmes naturels et les systèmes techniques” et 1 “les langages

pour penser et communiquer”. Au-delà de la possibilité d’exercer à l’avenir pour les

élèves un métier scientifique, les compétences scientifiques et la compréhension de

ses démarches sont, comme l’affirme l’enquête PISA, “indispensables pour

participer pleinement à la vie d’un monde de plus en plus façonné par la science et

la technologie. Dans cette perspective, il faudrait promouvoir les cours de sciences

de façon plus positive – peut-être comme un « tremplin » vers de nouveaux centres

d’intérêt et de divertissement”, et comme le façonnement d’un esprit critique.

Nous avons abordé plus haut le principe de la réussite pour tous, en lien avec

le socle commun. Mais que signifie-t-elle réellement ? C’est un fait, tous les élèves

ne sont pas égaux face aux apprentissages. La réussite pour tous signifie en fait

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amener chaque élève au maximum de ses possibilités, en fonction de ses capacités,

qu’il ait un handicap ou non. Pour ce faire, et face à l’hétérogénéité des classes, la

pédagogie différenciée devient nécessaire. Elle doit être bénéfique aux élèves plus à

l’aise comme à ceux qui le sont moins. Les sciences sont une discipline favorable à

cet objectif pédagogique, comme nous le détaillerons plus loin.

Le terme “élève à besoins éducatifs particuliers” inclut les élèves souffrant de

troubles de l’apprentissage (dyslexie, dyscalculie, dyspraxie, T.D.A.H (trouble de

l'attention avec ou sans hyperactivité), ou à des troubles des fonctions exécutives

(trouble de la planification, du traitement séquentiel, et de la mémoire de travail), de

handicaps tels que des retards intellectuels, des handicaps moteurs, des maladies

rares… Il inclut aussi les élèves allophones et les élèves intellectuellement précoces.

Ces élèves peuvent bénéficier d’un plan d’accompagnement personnalisé, qui leur

permettra d'accroître leurs chances de réussite. Les élèves souffrant de handicap

peuvent intégrer des classes ULIS6 (unités localisées pour l'inclusion scolaire)

lorsque l’inclusion totale en classe ordinaire n’est pas idéale, qui vont leur permettre

de développer au mieux leur potentiel et d’acquérir des apprentissages adaptés à la

nature de leur handicap. Les élèves en situation de handicap représentent 2% de la

population scolaire et un tiers de ces élèves étudie en ULIS. Ce dispositif collectif de

scolarisation a accueilli durant l’année 2015/2016 plus de 48 000 élèves7. Afin de

permettre à ces élèves d’exploiter pleinement leurs capacités, la fondation LAMAP

(La main à la pâte) a lancé en partenariat avec l’INS HEA (l’institut national supérieur

de formation et de recherche pour l'éducation des jeunes handicapés et les

enseignements adaptés) l’action HandiSciences. Durant 5 ans, 400 élèves ont

bénéficié de ce programme. Cette action a eu un impact fort : elle a démontré la

possibilité et également l'intérêt tout spécial que revêtent les sciences en ULIS.

En résumé, la réussite pour tous et la lutte contre les difficultés scolaires est

un objectif crucial. Les sciences, enseignées de façon vivante et participative

peuvent avoir un fort impact sur les performances des élèves, et ce, qu’elle que soit

le cursus de l’enseignant. Elles ont fait leurs preuves auprès d’élèves à besoins

6 anciennement CLIS (classe pour l’inclusion scolaire)7 selon le MENESR-DEPP, Enquête dans les écoles publiques et privées del’enseignement préélémentaire et élémentaire

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particuliers. Nous pouvons nous demander : l’enseignement des sciences (d’après

La Main à la pâte) aux élèves d’ULIS est-il un exemple à suivre et adaptable pour les

élèves en difficulté au sein des classes ordinaires ? Si oui, comment ces pratiques

d’enseignement pourraient être mises en place ? Quel est leur intérêt ?

Nous proposerons une réponse à ces questions à partir de l’apport de

plusieurs articles de recherche : le livret Vivre et partager la science, une ressource

pour tous les élèves de Marie-Hélène Ferrand-Heitz, Clotilde Marin-Micewicz et

Edith Saltiel (2015) ; l’article Enseigner des sciences à des élèves à besoins

particuliers des mêmes auteurs Marie-Hélène Ferrand-Heitz et Edith Saltiel (2015) ;

l’article Élèves en difficulté à l’entrée au collège : quelques repères pour penser

l’enseignement des mathématiques d’Isabelle Bloch (2013) se basant elle-même

sur les travaux de Stéphane Bonnéry ; et enfin l’article d’Anne-Marie Bardi (2008) à

propos des travaux de ce dernier chercheur, Comprendre l’échec scolaire. Élèves en

difficulté et dispositifs pédagogiques.

7

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II. Cadre théorique

1° L’élève en difficultés scolaires

Un élève en difficultés scolaires a, selon Isabelle Bloch (2013), une grande

instabilité des connaissances, des savoirs essentiels non acquis, ne saisit pas le

sens final des activités. D’après Anne-Marie Bardi (2008), à la différence des élèves

en réussite, les élèves en difficultés scolaires adoptent face aux activités scolaires

une posture de conformité, c’est-à-dire qu’il “obéiraient, essaieraient « d’avoir juste

», sans conscience des savoirs mis en jeu”. Les autres élèves “plus familiers des

logiques scolaires savent que l’application des consignes données, la réalisation des

tâches demandées, l’obtention des résultats attendus ne sont importants que dans la

mesure où cela leur permet de construire un savoir, de consolider leurs acquis,

d’être évalués.” Ils adoptent ainsi une posture d’appropriation des savoirs,

conscients du sens et de l’objectif final de l’activité. Ces différences de posture

s’expliquent en partie, selon le même auteur, par la différence culturelle existant

entre celle de la famille de l’élève et l’école. Certaines familles, par leur milieu socio-

culturel, sont plus initiées que d’autres à la “culture scolaire”. Une incompréhension

peut alors se créer entre l’élève et les attendus de l’école, qui sont parfois implicites.

Il est question ici du contrat didactique8, soit les attendus qui ne sont pas clairement

énoncés des rôles de l’enseignant et de l’élève face aux apprentissages. Selon M.-

H. Heitz, C. Marin-Micewicz et E. Saltiel (2015), l’écart entre les élèves se creuse sur

des tâches complexes et la difficulté éprouvé ressort particulièrement au niveau du

langage “qui est la médiation privilégiée dans l’univers scolaire et dont l’usage est

souvent limité, dans les milieux populaires, à une communication à visé

instrumentale”9.

Du côté de l’enseignant, l’engagement des élèves peut sembler identique de

la part d’un élève en posture d’appropriation et d’un élève en posture de conformité,

8 Guy Brousseau (1998), Théorie des situations didactiques, La Pensée Sauvage, Grenoble

9 INRP (2007), dossier XYZ n°27, publication du centre Alain Savary

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et être trompeur quant à la prise de conscience du sens de l'activité en question.

L’élève pour sa part, n’est pas forcément conscient non plus qu’il ne répond pas aux

attentes, il suit les consignes. En effet, l’enseignant n’appuie pas toujours

l’explicitation de la tâche, celle-ci semblant évidente dans la “culture scolaire”.

D’après A-M Bardi, le professeur qui finit par réaliser les difficultés scolaires de

l’élève (lors d’évaluations par exemple) peut tomber involontairement et

inconsciemment dans “l’Effet Pygmalion”, une théorie expliquant que l’attente d’un

certain comportement (des a priori négatifs) vis-à-vis d’un élève en difficulté conduit

ce dernier à réaliser ce comportement, comme l’attente d’un échec…Il risque de

demander excessivement des justifications de connaissance déstabilisantes face à

une réponse exacte et inattendue. L’enseignant peut également, à l’inverse, pencher

du côté de “l’Effet Topaze” qui amène à simplifier la tâche et à faire à la place de

l’élève, au point que l’apprentissage en question disparaît. On comprend que ces

deux effets inconscients n’apportent pas de réelles solutions aux difficultés scolaires.

Les grosses difficultés que rencontrent les élèves à l’école ont aussi un

impact affectif : ils se sentent parfois “méprisés par l’institution” pour reprendre les

termes de I. Bloch, et leurs résultats ne renforcent pas leur estime de soi bien

souvent très défaillante. Les élèves investissent le rapport à leur enseignant “avec

une forte affectivité” et, comme pour compenser les attentes de leur professeur

auxquelles ils ne répondent pas complètement, la “personnalisation de la relation

pédagogique [devient] exacerbée”10. Le contrat didactique et ses malentendus

devient pesant. D’où l'intérêt de ce pas de côté vers l’enseignement aux élèves à

besoins éducatifs particuliers : les enseignants savent quelles difficultés rencontrent

leurs élèves, qui sont plus visibles par les troubles qu’ils manifestent. Il y a donc

moins de malentendus entre rôle de l’élève et attentes de l’enseignant : l’explicitation

et l’adaptation aux besoins et aux difficultés des élèves sont au coeur des

apprentissages. Par conséquent, connaître leurs pratiques d’enseignement semble

utile pour développer le potentiel des élèves en difficulté des classes ordinaires et

pourrait leur apporter l’aide dont ils ont besoin.

10 INRP (2007), dossier XYZ n°27, publication du centre Alain Savary

9

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2° L’enseignement des sciences fondé sur l’investigation

Cet enseignement entraîne l’élève à construire son savoir et à acquérir de

nouvelles compétences, et non pas à attendre de la part du professeur les savoirs à

assimiler et les apprendre par coeur, selon la méthode traditionnelle. Elle s’inspire

des démarches que suivent les groupes de scientifiques et est au centre de l’action

HandiSciences. Une de ses particularités est qu’elle comporte moins d’enjeux

scolaires que le français et les mathématiques (ce qui pèse moins sur l’élève). Elle

se décompose habituellement en plusieurs étapes (mais reste adaptable aux

besoins des élèves) et part des représentations initiales de l’élève face à un élément

déclencheur de questionnement. Ce type de démarche part du postulat selon lequel

les élèves ont forcément quelques connaissances et qu’il est valorisant et utile de les

connaître, pour mieux bâtir sur cette base un apprentissage solide. Les six étapes

sont :

- une phase de situation de départ, ou situation déclenchante. L’objectif est de

créer une perturbation, un conflit entre la représentation mentale et la réalité.

Elle peut se traduire par une expérience déclenchante qui fait questionner les

évidences (par exemple un glaçon conservé dans un pull en laine qui fond

moins vite qu’un glaçon laissé à l’air libre), un événement, un documentaire,

des productions d’élèves divergentes, un projet... C’est ici que le problème

présenté devient le problème des élèves (dévolution).

- une phase de questionnement. L’objet de la recherche est définie. Selon M-H

Heitz, C. Marin-Micewicz et E. Saltiel (2015), le rôle de l’enseignant est

“crucial [à cette étape] pour encourager les élèves à réfléchir et à formuler

des interrogations fécondes”.

- une phase de définition du projet. Les élèves émettent des suppositions, voire

des hypothèses, et choisissent le mode d’investigation. Les élèves doivent

planifier, prévoir les moyens à utiliser…

10

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- une phase d’investigation, de mise en oeuvre du projet. Elle se traduit par des

observations, des expérimentation, de la recherche documentaire, une

modélisation (par exemple dans le cas de l’étude des saisons, la position de

la Terre par rapport au Soleil)... Ici le rôle de l’enseignant est d’inciter les

élèves à prendre du recul sur leurs actions, à dépasser la posture première

ou ludique-créative pour atteindre une posture réflexive. Il les incite

également à faire part de leurs observations avec les autres, mettre par écrit

ce qu’ils constatent.

- une phase confrontation. Elle permet aux élèves de réaliser la cohérence ou

non de leurs propositions de départ au vue de l’investigation réalisée.

- Enfin, une phase de structuration, d'institutionnalisation clarifie les savoirs

découverts et est complété si nécessaire par l’enseignant.

Des débats scientifiques argumentés viennent au cours de plusieurs phases

(la phase de définition du projet par exemple) éveiller la curiosité des élèves, leur

faire travailler l’argumentation logique à l’oral et augmenter leur implication.

Cependant, il ressort de l’article de I.Bloch (2013) que les situations où l’élève

doit construire ses propres apprentissages peuvent prêter à confusion pour certains

élèves : une phase d'expérimentation “prise pour un but”, des “difficultés de

verbalisation et d’écriture”, des “difficultés dans la compréhension et le respect des

consignes”... Face à ces problèmes, des solutions existent. Elles permettraient

également de répondre aux difficultés rencontrées par les élèves mentionnées

préalablement. Voyons donc à présent quels bénéfices cet enseignement fondé

l’investigation pourrait apporter aux élèves en difficulté scolaire, en parallèle des

élèves de classe ULIS.

3° L’apport des sciences

11

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Tout au long de cette partie, les similitudes et les parallèles entre les besoins

des élèves en difficulté de classe ordinaire et les élèves de classe spécialisée seront

précisés.

Les témoignages rapportés par M-H Heitz, C. Marin-Micewicz et E. Saltiel

(2015) montrent l’impact des sciences sur l’état d’esprit de leurs élèves. Un

professeur témoigne : ”Ils sont curieux [...] enthousiastes, n’ayant pas peur de se

lancer, de toucher, de regarder, ils n’étaient pas dans la retenue ou la peur de mal

faire”. En effet, la pratique des sciences provoque chez les élèves une multitude

d’émotions positives : elle stimule la curiosité et donc le plaisir de découvrir, elle

renforce leur confiance en soi, ce dont manque bien souvent les élèves en difficulté,

car elle ne nécessite pas uniquement l’écrit (source de difficulté) mais relève des

points forts qui ne sont pas forcément visible au quotidien dans le contexte scolaire,

comme une aptitude à faire des propositions, une aptitude manuelle, une aptitude à

la planification… Elle renforce également leur estime de soi, rendant les élèves

aptes à raconter et expliquer aux personnes extérieures de la classe et de l’école.

Mais pour que ces émotions rendant favorable l’assimilation des connaissances

puissent apparaître et se maintenir, il est nécessaire de revoir le rôle de l’erreur.

L’erreur doit être dédramatisée, les élèves doivent la considérer pour ce qu’elle est :

non pas une faute, mais “un élément constitutif de l’apprentissage” (M-H Heitz, C.

Marin-Micewicz et E. Saltiel, 2015). Bien sûr, dans les autres domaines disciplinaires

aussi les professeurs luttent contre la peur de l’erreur, mais il y a toujours, pour

reprendre les paroles d’un professeur interrogé du livret HandiSciences, “ce côté où

il faut faire juste, ne pas se tromper [comme ça] le maître sera content”. En sciences,

c’est différent. Déjà parce qu’elles représentent un champs tellement vaste de

connaissances et de découvertes qu’il est impossible de tout savoir, même pour le

scientifique le plus instruit. Ensuite, le principe même des hypothèses de départ est

qu’elles doivent être validées ou invalidées par les faits. Et une invalidation a

beaucoup de valeur pour le chercheur. Si un élève en difficulté fait une erreur en

sciences, elle est l’occasion d’engagements et de recherches pour en savoir plus.

Elle fait avancer le groupe-classe. Par rapport à l’erreur, les écrits intermédiaires du

cahier d’expériences contribue à l’appropriation progressive des concepts. Elle se

traduit notamment par des dessins de plus en plus précis et clairs. Finalement, les

12

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sciences peuvent participer au plaisir d’apprendre, et de partager ce savoir avec les

autres.

Nous avons vu le rapport particulier liant élève en difficultés scolaires et

professeur. Ici aussi, M-H Heitz, C. Marin-Micewicz et E. Saltiel (2015) démontrent

l'intérêt de l’enseignement fondé sur l’investigation. En effet, l’existence d’un tiers

objet, le sujet de la séquence (un élevage d’insectes, l’ombre des enfants dans la

cour de récréation, un circuit électrique) qui provoque des interrogations, aident les

élèves handicapés à s’extraire momentanément de leur handicap pour se pencher

vers la réalité de ce tiers objet, si curieux. Ce n’est plus l’élève handicapé face au

professeur, mais l’élève, le groupe-classe et le professeur face à ce tiers objet

étonnant. Ce dernier permet “d’aborder l’universel. Les faits scientifiques existent et

peuvent être observés indépendamment des conditions de vie des habitants de la

Terre. Les règles, lois, propriétés servant à décrire notre environnement se

construisent en dehors de la vie sociale et affective de chacun”. Ainsi, cet objet

concerne chacun et dépasse les milieux socio-professionnels, le handicap, et même

l’école…

La découverte du tiers objet, et la phase d’investigation par la suite permet

d’entrer dans l’apprentissage par le concret, et de mobiliser ses 5 sens. Toucher,

observer, écouter, brancher, actionner, manipuler… Ces actions permettent de

valoriser des aptitudes manuelles, de donner envie de progresser voire même de

susciter des vocations. Pour les élèves souffrant de handicaps mentaux ou

physiques, cette entrée par le concret est une découverte spéciale pour eux. De part

leur santé, certains ont peu l’occasion de faire des expériences sensorielles, par

peur du danger bien souvent, peut être par surprotection...Toutefois, elles

permettent pour tous les élèves une meilleure compréhension des phénomènes et

par des essais/erreurs, de déconstruire leurs représentations. Néanmoins, l’action

n’est pas une fin en soi : l’enseignant doit étayer les phases de manipulation pour

faire prendre du recul à l’élève, avec des questions telles que “que vas-tu faire ? De

quoi as-tu besoin ? Que penses-tu qu’il faudrait modifier ?” Le professeur aide à

reformuler les idées, à exprimer questions et incompréhensions. Finalement le

concret est un support à la conceptualisation, à la formulation d'hypothèses de façon

naturelle et sans sentir de “contrainte scolaire”. C’est l'acquisition d’une nouvelle

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attitude : l’esprit critique. Un professeur de classe spécialisée ayant participé au

projet Handisciences racontait comment ses élèves avaient réinvesti deux années

après une séquence sur l’électricité, bien plus qu’en Histoire et en français. Peut être

est-ce due en partie au type de mémoire mobilisée : la mémoire épisodique permet

de retrouver un savoir (de la mémoire sémantique) étayé de plusieurs expériences

sensorielles variées.

Un autre intérêt de l'enseignement des sciences fondé sur l’investigation

selon Marie-Hélène Ferrand-Heitz et Edith Saltiel (2015) est la formation de groupes

de travail. Si les classes ordinaires sont hétérogènes, en classes ULIS, les groupes

le sont d’autant plus par la différence d’âges, de handicaps, de troubles. Les cours

doivent être individualisés pour ces raisons, et l’élève de classe spécialisée risquent

de penser que la vie sociale se limite à une relation avec l’adulte, et donc risque

“d’avoir plus de mal que les élèves de classes ordinaires à écouter les autres, en

accepter la parole et le point de vue, surtout si ce dernier diffère du leur” 11. Et

pourtant avec la pratique, les travaux de l’équipe HandiSciences démontrent que le

travail par binôme fut bénéfique pour ces élèves. Ils sont parvenu, avec l’aide des

adultes présents, à s’entraider, confronter leurs idées, reformuler les critères de

l’expérience et surtout à coopérer. Comme le dit J-P Astolfi, “l’Homme est un être

fondamentalement social et toutes sortes d'interactions stimulent ses capacités

d’abstraction et de conceptualisation”12. Le groupe permet à ceux qui ne parviennent

pas à avoir une nouvelle idée de reproduire ce que leur camarade fait, et ne pas

rester “bloqué”. A la différence des élèves de classe ordinaire, les élèves de classe

spécialisée s’entraident davantage, car ils ne craignent pas la copie. Dans tous les

cas, au sein de ces groupes réduits (on pourrait aller jusqu’à 3-4 élèves en classe

ordinaire) la situation d’échange est favorable à l’autonomie, même pour les plus

timides ; à l’image d’un petit groupe de chercheurs, les sciences requièrent travail de

collaboration et d’investigation, de débat, de réflexion partagée. D’après M-H Heitz,

C. Marin-Micewicz et E. Saltiel (2015), “même si la construction de connaissances et

de compétences diffère d’un individu à l’autre, le travail en groupe semble être un

dispositif qui favorise les apprentissages”.

11 M-H Heitz, C. Marin-Micewicz et E. Saltiel (2015)12 J-P Astolfi (2001), comment les enfants apprennent les sciences, Retz 2006 p 253

14

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Les groupes développent les compétences langagières, comme l’ensemble

de l’enseignement des sciences basé sur la démarche d’investigation. En effet

sciences et langage ne vont pas l’une sans l’autre. Par exemple, le bon vocabulaire

devient nécessaire : les noms pour les objets, les phénomènes, les verbes d’action

spécifiques (dissoudre, rebondir, pousser, brancher…)... Nous avons vu

précédemment que les professeurs face aux difficultés de leurs élèves, tendent à

baisser leurs exigences, pourtant nécessaires13 . Mais les exigences de vocabulaire

exact pour expliquer des phénomènes, même si elles déstabilisent les élèves au

début, finissent par être acquises au bout d’un temps d'assimilation, et c’est la

pensée de l’élève qui se précise en même temps (un aide-mémoire du nouveau

lexique pourra être affiché). A l’oral toujours, les phases de mise en commun offrent

aux élèves l’occasion d’argumenter, de justifier de leurs désaccords avec leurs pairs.

Les expérimentations sont aussi une bonne occasion de parole et de description. A

l’écrit, un cahier d’expérience permet de conserver une trace du

raisonnement :représentations initiales, questionnement, protocole, hypothèses,

résultats obtenus, débats, trace écrite…), toujours en lien avec le rôle de l’erreur.

Ce cahier est un outil pour “mettre au clair” ses idées et constater le cheminement

de la pensée. L’écriture externalise la pensée pour libérer de l’espace à la réflexion,

et fait découvrir ses différentes fonctions...différentes de celles étudiées en littérature

par exemple. En classe spécialisée où l’écrit est difficile, les écrits communs sont

favorisés, pour libérer la parole et souder le groupe. Quelques dessins sont créés

avec plus ou moins de légende selon le handicap et l’avancée de la démarche

d’investigation. Les supports pour la trace écrite sont aussi adaptés aux élèves à

besoins éducatifs particuliers. Le schéma est une réalisation difficile pour tous les

élèves car il demande l’abstraction du réel mais il permet la différenciation des

objets...Donc petit à petit le professeur peut guider les élèves vers un dessin de plus

en plus symbolique. Pour les élèves ayant des difficultés ou des troubles de la

motricité, les logiciels de dessin sur ordinateur ou tablette peuvent compenser ces

difficultés et par la même occasion intégrer des compétences liées au numérique.

Le raisonnement est l’activité cognitive qui consiste à réaliser une “suite

d'arguments, de propositions liés les uns aux autres, en particulier selon des

13 Selon Isabelle Bloch (2013)

15

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principes logiques, et organisés de manière à aboutir à une conclusion14”. A l’école

primaire les sciences ne requièrent pas de formules mathématiques, elle sont

qualitatives. Elles sont pour autant un support idéal de construction de raisonnement

chez tous les élèves. Ils ont besoin de mettre du sens dans leurs actions, planifier,

développer des arguments, se baser sur des preuves pour valider ou invalider une

hypothèse… Observer et faire des liens n’est pas évident pour les enfants, en

particulier pour ceux qui ont des troubles de la concentration, mais c’est possible

d’après les témoignages de l’étude HandiSciences, si les élèves savent quoi

observer exactement (par exemple le rôle des fourmis dans une fourmilière). Ces

séances sont propices à une ouverture sur le monde, et encouragent les élèves à

faire part de leurs expériences personnelles dans l’objectif de raisonner, faire des

liens entre les découvertes à l’école et les connaissances personnelles. La

démarche inspirée de l’investigation fait acquérir aux élèves une méthode stable

avec des étapes à peu près similaires à chaque séquence pour aider en particulier

les élèves qui ont plus de difficulté voire des troubles de l’organisation à se repérer.

Des pictogrammes, symboles des différentes étapes peuvent également aider les

élèves15, tout comme un affichage de la séance précédente (afin de faire du tissage

entre les différentes étapes). Ces dispositifs permettent de clarifier les attendus de

l’élève (souvent flous pour les élèves en difficulté) et d’avoir une vision globale de la

démarche. Les séances débutent généralement par un rituel et une phase de rappel

collectif pour entrer dans l’apprentissage et favoriser la mémorisation. Une phase

d’évaluation formative individuelle (à l’aide d’ardoises par exemple) vient compléter

ce début de séance, de manière interactive et non pesante. Les activités cognitives

de l’élève peuvent alors se construire sur la durée. Enfin, le travail sur le protocole

expérimental (par exemple sur l’étude des plantes) encourage la rigueur dans le

raisonnement.

Les professeurs des classes spécialisées ayant participé au projet de

sciences ont rapporté leurs façons d’adapter les séquences à leurs élèves. Parmis

leurs nombreux retours d’expériences, plusieurs semblent tout à fait adaptées à des

élèves en difficulté de classe ordinaire. Par exemple, les séquences peuvent être

14 Selon le dictionnaire Larousse 15 Cependant, certains élèves peuvent être perturbés par trop d’informations visuelles

16

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adaptables aux besoins et à la curiosité des élèves, des séances décrochées (de

français par exemple) viennent compléter les séquences de façon naturelle, les

ordinateurs permettent d’écrire sans épuisement et se concentrer sur l’activité

intellectuelle, plusieurs supports (photos,dessins, tableaux) peuvent être utilisés, des

documents écrits peuvent être agrandis pour des élèves en difficulté de

lecture….Enfin une idée originale serait de faire participer la classe à une exposition

scientifique (ne serait-ce qu’avec la classe voisine), afin de les motiver, les valoriser

leur donner le rôle de “ceux qui savent” dans un esprit de partage.

17

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III. Perspectives méthodologiques

Afin de déterminer si les pratiques d’enseignement des sciences aux élèves à

besoins particuliers seraient applicables et bénéfiques aux élèves en difficulté, il

serait intéressant de réaliser une observation d’une séquence de la main à la pâte

au sein d’une classe à majorité en difficulté, enrichie d’adaptations utilisées en ULIS

recommandées notamment par M-H Heitz, C. Marin-Micewicz et E. Saltiel.

1° Etude de cas : observation filmée

● Population d’étude

L’étude portera sur une classe de CM2, composée de 27 élèves, située en

zone REP. Le choix s’est porté sur cette classe car elle se trouve en majorité en

difficulté, et sa situation géographique la rend idéale pour une étude de cas, sur la

durée. L’accord m’a été donné par l’inspecteur de l’éducation nationale de la

circonscription, le directeur de l’école, l’enseignante de la classe concernée (que

nous appellerons “enseignante A” par souci d’anonymat) et enfin les parents

d’élèves par écrit en début d'année scolaire (droit à l’image).

Afin de mieux comprendre la population des élèves, de repérer les types de

difficultés qu’ils rencontrent et choisir les adaptations qui pallieraient celles-ci, j’ai

réalisé ce que Martineau (2005) appelle, ”l’entrée sur le terrain”, soit la prise de

contact avec les sujets et la recherche d’informations. Je suis donc allée passer une

demi-journée d’observation, le mardi 19 décembre au matin. J’ai repéré diverses

caractéristiques : La classe a globalement des problèmes de comportements : peu

d’inhibition, beaucoup de bruit, réponses et bavardages intempestifs malgré la

discipline, difficulté de concentration. Parmis les problèmes de comportement on

distingue de nombreuses tensions entre élèves : il y a des difficultés dans les

relations sociales, à communiquer respectueusement avec ses pairs.

J’ai repéré des difficultés de langage : au niveau écrit, 5 élèves ont des

grosses difficultés de reconnaissance phonologique (présomption de dyslexie),

orthographiques (dont un élève dont la langue maternelle n’est pas le français). Ils

18

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mettent beaucoup de temps à écrire. Il en résulte des difficultés de compréhension

du langage écrit et oral : incompréhension de la syntaxe, du vocabulaire. J’ai noté

également des difficultés au niveau du raisonnement et du conceptuel : plusieurs

élèves sont concernés. Également, la planification pose problème pour quelques

élèves. Après m’être entretenue avec l’enseignante, il en est ressorti qu’onze élèves

sont en grosses difficultés scolaires, deux élèves d’ULIS sont en inclusion totale et

partielle, et un élève, bien que n’ayant pas de difficultés scolaires, a des difficultés à

maîtriser ses émotions face à des exercices qui lui semblent trop compliqués. Il

n’accepte pas l’erreur.

Les élèves de la classe de 27 élèves peuvent donc être catégorisés selon

leur(s) difficulté(s) majeure(s), après observation et entretien avec l’enseignante. Ce

sont ces élèves-là qui sont particulièrement observés (certains font partie de

plusieurs groupes) :

groupe Type de difficulté Elèves

IC Inhibition et concentration Cassandra, Maxence, Chloé, Ulysse, Bilel, Miliena, Aya, Lofti

R Raisonnement Frédéric, Myriam, Nessim, Devid

VE Vivre ensemble Jeanne, Miliena, Myriam, Salomé, Mathilda, Chloé, Matthieu, Maxence, Bilel, Bryan, Ryan, Nessim

C Comportement Bryan, Ryan, Cassandra, Chloé, Bilel

L Langage Devid - Lana, Bryan, Ryan, Nessim (écrit)

S Gestion du stress Matthieu, Lana

● Temporalité

“Un terrain se découvre petit à petit et la compréhension du phénomène

observé se construit par touches successives. En outre, des séjours répétés ou

prolongés permettent de diminuer l’effet perturbateur de la présence du chercheur.”

En effet, dans l’esprit de cette recommandation de Martineau (2005), l’observation

portera sur une séquence entière (objet technique, le manège) issue de La Main à la

pâte (cf bibliographie pour la consulter) et utilisée lors des Handisciences citées plus

19

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haut. Elle se déroulera sur la période de Janvier-Février, chaque mardi après-midi.

Cette temporalité permettra de mesurer s’il y a évolution du rapport aux savoirs des

élèves en difficulté. Elle est cependant susceptible d’être source d’accoutumance et

de baisse de vigilance. Pour éviter ce phénomène je garderai à l’esprit “que des

éléments inédits peuvent toujours se produire et venir enrichir notre compréhension

du phénomène étudié”, comme le rappelle Martineau (2005).

● Protocole de recueil de données

L’observation est selon Martineau, en mesure de “fournir une vision fine et

précise d’une pratique sociale”. En effet, à l’aide d’une grille d’observation, l’objectif

sera de déterminer si des pratiques innovantes et adaptées (issues de

l’enseignement spécialisé) peuvent influer sur la réussite de la classe, malgré les

difficultés. Afin de revoir et analyser les éléments qui pourraient avoir échappé à

mon observation in situ, la vidéo sera très utile. J’installerai donc un dispositif à l’aide

d’une petite caméra, dans un angle de la pièce, de manière discrète pour moins

perturber les élèves et donc éviter de fausser les observations par des attitudes

modifiées. Mais le piège serait de se reposer sur la vidéo, et les réactions des élèves

se déroulant in situ pourrait, du fait du choix d’un angle de prise de vue, pourraient

m’échapper. Je devrai donc rester vigilante. Dans le but de compléter la mesure de

l’impact des adaptations prévues, j’interrogerai les principaux intéressés, donc je

proposerai aux élèves un court questionnaire, à l’image d’un questionnaire de

satisfaction, qui permettra d’évaluer l’attrait qu’ils ont porté à la séquence. Ce

questionnaire sera construit à l’aide de “smileys”, au cours de la séquence. Il s’agit

d’un complément de l’observation, qui reste le principal moyen de recueil de

données. Une autre caractéristique de l’observation est, toujours selon Martineau

(2005), “le foisonnement de données qui peuvent être difficiles à traiter”… Pour

limiter ce phénomène, je disposerai d’une grille d’observation. La grille d’observation

est construite à partir d’une liste des adaptations applicables dans la classe

observée.

20

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● Liste des adaptations

Les adaptations sont issues de l’ouvrage Vivre et partager la science, une

ressource pour tous les élèves et du film Sciences et handicaps, publié et réalisé par

la fondation La Main à la pâte :

➢ Objectif final motivant : construire un manège

➢ Objet d’étude concret : construire un objet technique, un manège

➢ Grande place des groupes de 2 et de la recherche individuelle

➢ Étayage lors de la phase de manipulation : « Que vas-tu faire? Que veux-tu

faire et avec quoi ? Qu’est ce qui se passe dans ton montage? Que penses-tu

qu’il faudrait modifier ? »

➢ Ecriture commune par l’enseignant des hypothèses, idées avec nom de la

personne (pour pallier la difficulté de langage écrit)

➢ Exigence d’un langage précis (fils, brancher, moteur, borne, axe, support... etc)

➢ Travail préparatoire : photo des objets utiles en électricité en aide-mémoire

dans le cahier

➢ Planification des séances : des séances qui suivent un même déroulement,

ritualisé

➢ Espace de travail aménagé (tables et chaises organisés et espace libéré)

➢ Utilisation de textes à trous pour alléger la tâche matérielle, de textes à

surligner, espacés pour les dyslexiques

➢ Rituel de début de séance : récapitulatif de la séance dernière (cahier

d’expérience à l’appui si nécessaire, objets montrés)

➢ Présence des adultes pour étayer (par la parole) les manipulations, aider les

élèves à communiquer ensemble, à s’écouter et à prendre en compte les avis

des autres, répartir les rôles dans le groupe (demander à des parents de venir,

une semaine avant)

➢ Flexibilité de la découpe de la séquence : adaptation aux besoins des élèves

➢ Séances ponctuelles de méditation de pleine conscience avant de

commencer la séance de sciences (les neurosciences le recommandent mais

ce n’est pas spécifique à cette discipline)

21

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● Grille d’observation

Les concepts mobilisés lors de l’observation sont l’attention, la réussite,

l’implication en lien avec la démarche d’investigation et les adaptations. Je me

baserai sur les caractéristiques visibles du jeu des postures élèves (Soulé et

Bucheton, 2009), qui seront mes indicateurs, soit par exemple : la participation orale

et écrite, l’implication, la direction du regard, l’argumentation, la concentration, la

manipulation, le bavardage ou non, l’émission d’hypothèse, la remémoration,

l’acceptation de l’erreur pour progresser... Les notes seront de trois types, comme le

conseille Martineau : des notes structurelles (indiquant l’objectif de la séquence, les

étapes), des notes descriptives, des notes plus théoriques pour amorcer une

analyse sur le terrain. La grille sera sous forme de tableau, avec d’une part les

étapes de la séance, le type d’adaptation, et d’autres part les réactions des élèves,

en particulier des onze élèves en grosses difficultés, comme le montre l’exemple de

grille ci-dessous. Elles seront codées avec un “+” ou un “-” en fonction des postures

adoptées, le “+” étant une posture adaptée à l’étape de la démarche d’investigation,

et décrites brièvement. Il y a une partie “notes théoriques” plus libre, car Martineau

(2005) nous met en garde d’un “usage trop servile [de la grille d’observation] peut

conduire le chercheur à la stérilité intellectuelle”.

Etape Adaptation Réactions élèvesDescription

Notes théoriques

2°Traitement et analyse des données

La grille d’analyse servira de base pour le traitement et l’analyse des

données, au travers des travaux de D. Bucheton et Y. Soulé (2009), de N. Bardi

(2008) et des travaux du neuroscientifique Stanislas Dehaene, qui expliquent les

quatre piliers, ou facteurs, de l’apprentissage. Les moments-clés des observations

seront ensuite mis en relation pour déterminer s’il y a eu une évolution des postures

des élèves, si tous sont sensibles à une adaptation. Ces moments seront analysés,

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puis discutés au regard des résultats de l’évaluation finale, du petit questionnaire et

du cadre théorique de départ.

IV. Résultats et analyse des données

1° Place des adaptations dans la séquence

Les adaptations en orange ne sont pas ponctuelles, elles sont présentes tout au long de la séquence.

Adaptation séance 1 séance 2 séance 3 séance 4 séance 5

objectif motivant et concret

x x x x x

flexibilité de la découpe de la séquence

x x x x x

la structure de la séquence handiscience (avec problème et objectif clair à chaque séance)

x x x x x

organisation en groupe réduit + recherche individuelle

x x x x : travail individuel

groupes importants : 3-4 élèves/groupe

hypothèses écrites au tableau

x x x x : idées pour faire tenir le moteur

langage précis x introduit x x x x

travail préparatoire du vocabulaire

x séance bis

espace de travail aménagé

x moins de choses dans les mains ++

traces écrites allégées (dys)

x

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rituel de rappel de début de séance

x x x

présence d’adultes médiateurs

x x x aesh + 2 accompagnateurs

séances de méditation

x x x

2° Observation et analyse de l’impact des adaptations

Les synopsis des séances filmées sont disponibles en annexe 1.

Adaptation : Objectif motivant et concret

● Analyse a priori : L’objectif de la séquence pour les élèves est de construire

en groupe son manège. La motivation mobilisant l’attention issue du contrôle

exécutif, et donc favorisant l’apprentissage, est à prendre en compte dans les

choix didactiques et pédagogiques, d’autant plus pour des élèves ayant des

difficultés à canaliser leur attention. On va chercher à développer chez l’élève

sa curiosité et son plaisir de la découverte. De plus, entrer dans le

raisonnement, la conceptualisation par le concret de la construction d’un objet

technique rend plus facile ces activités cognitives chez les élèves à besoin

particulier selon E. Saltiel et M.-H. Ferrand-Heitz (2015).

● Observation : La première réaction des élèves face à l’annonce de l’objectif et

du thème est parlante. Ainsi l’enseignante A passe une courte vidéo d’un

carrousel à l’aide du vidéoprojecteur. Lofti (groupe IC) : “bôf c’est juste un

manège…”. Enseignante A : “ oui c’est juste un manège….et c’est justement

sur ça qu’on va travailler.” A sort une maquette de manège fonctionnelle.

réaction des élèves du groupe IC : “Hein ?! Quoi ! Un manège ? Ooh”.

L’enseignante tente d’actionner le moteur. Cassandra (groupe IC-C) : “on va

en faire un ?” “Ce sera votre objectif.” Grande inspiration d'enthousiasme

dans la salle. Lorsque le manège tourne, les élèves à l’unanimité rient et

poussent des “aah” d’admiration.

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Quand les élèves sont amenés à terminer la construction du manège lors de

la cinquième séance, un groupe de 3 élèves termina en premier avec l’aide

d’un adulte (AESH). L’enseignante A attire l’attention des autres sur leur

réussite. Les élèves repartent de plus bel. Par exemple Milienia (groupe VE-

IC) : “Les filles j’ai compris ce qu’il fallait faire, j’ai le tournevis pour le

domino !”.

● Analyse et retour sur l’adaptation : Dans le cas de la séquence observée, la

motivation est externe : elle est suscitée immédiatement lors de l’annonce de

l’objectif. Si l’inhibition est difficile pour une certaine partie de la classe, elle

rend largement visible et audible l’enthousiasme de celle-ci. Le risque est que

cela favorise une posture ludique-créative et première au détriment de la

posture réflexive. Mais comme l’observation de la cinquième séance le

montre, cet objectif a permis de faire redoubler d’efforts la construction et les

problèmes qu’elle pose, comme un défi à relever. Cette manipulation était un

support d’étayage de l’enseignant ou de l’adulte aidant, pour faire prendre du

recul à l’élève, et qu’il ne soit plus uniquement dans le faire (cf. adaptation

étayage de l’adulte et du professeur). Chaque séance contribuait à mieux

comprendre comment réaliser un manège et créer son cahier des charges.

Elles commençaient donc avec un problème de type Dewey, c’est-à-dire qui a

un intérêt immédiat pour l’élève. En revanche, lors d’autres séances, les

élèves n’étaient pas toujours actifs, en particulier les groupes IC (inhibition et

concentration), VE (vivre ensemble) et C (comportement). On ne peut

considérer cette adaptation comme une “formule magique” bien sûr, mais elle

reste impactante au niveau de l’engagement et du plaisir de construire un

objet qui symbolise les joies de l’enfance, traversant les générations.

Adaptation : flexibilité de la découpe de la séquence

● Analyse a priori : Les professeurs ayant participé au projet Handisciences

n’hésitaient pas adapter la découpe de la séquence à la vitesse

d’apprentissage de leurs élèves à besoin particulier. Dans le cadre de cette

classe de milieu ordinaire, de nombreux facteurs influent également sur la

réceptivité aux apprentissages des élèves, comme la fatigue, les activités

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prévues ensuite, les conflits de cours de récréation, mais aussi la motivation

liée à l'intérêt pour le sujet etc.

● Observation : Une séance de la séquence handisciences initiale prévoyait de

réaliser un montage avec des fils, une pile et un moteur. Or les élèves

maîtrisaient déjà cette compétence, acquise lors d’une séquence sur

l'électricité. Nous avons donc fait le choix avec l’enseignante A de passer à la

suivante directement (portant sur la caractéristique isolante et conductrice de

la matière). Lors de cette dernière, les élèves avaient pris du retard par

rapport à la durée prévue, alors l’enseignante choisit de découper la séance

pour la réaliser la fois suivante. Des séances “bis” de 30 min,

d’approfondissement du thème des manèges, de l'électricité, de sécurité et de

vocabulaire furent également ajoutées (notamment pour construire la

compétence scientifique du B.O. de 2015 “ Se situer dans l’espace et dans le

temps”).

● Analyse et retour sur l’adaptation : Quelquefois, quand les élèves ne sont pas

prêts à apprendre malgré la discipline existante, insister pour poursuivre une

feuille de préparation ne semble pas être la meilleur option. De plus, morceler

l’apprentissage incluant des périodes de sommeil permet de mieux mémoriser

et consolider les apprentissages d’après les neurosciences cognitives, le

cerveau rejouant les décharges vécues la journée. Les élèves de la classe

étaient motivés par l’objectif de la séquence (construire un manège), donc

prêts à développer d’autres compétences liées à celui-ci. En effet, l’adaptation

des professeurs spécialisés est un savoir-être crucial pour maintenir les

élèves engagés dans l’apprentissage, et cela vaut aussi pour une classe plus

nombreuse : cela demande une bonne connaissance des élèves pour ne pas

dépasser leurs capacités d’attention et en même temps exploiter leur

motivation.

Adaptation : espace de travail aménagé

● Analyse a priori : L’espace de travail, libéré des instruments, cahiers et autres

objets encombrant la table de l’élève, aurait une influence sur la capacité de

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concentration de ce dernier, l’environnement de travail ayant une influence

sur celui-ci. En effet, en Ulis, certains élèves disposent de pupitres aménagés

et spacieux. On suppose donc, que disposer du strict minimum (stylo, cahier

de science) pour réfléchir à un problème pourrait empêcher les élèves d’être

distraits par le matériel.

● Observation : Lors de la séance 1, l’enseignante A a demandé aux élèves

d’assembler les tables pour former des îlots en vue d’une étape de

manipulation. A la suite d’un grand brouhaha, on peut observer que les élèves

communiquent entre eux par groupe, mais pas à propos du problème : faire

fonctionner le moteur avec une pile. Nessim par exemple :”mais ferme-la !

Passe moi la pile !”. Des comportements irrespectueux s’observent parmis les

élèves. En revanche toujours en lien avec l’aménagement de l’espace de

travail, mais sous un autre aspect, lors de la séance 2, l’enseignante A a

demandé aux élèves, avant de réaliser une séance de méditation, de retirer

toutes leurs affaires de la table (en disposition classique) pour ne laisser que

la trousse et le cahier de science. Les élèves étaient beaucoup plus calmes et

suivaient davantage la séance de méditation de pleine conscience (à part une

élève). Enfin, lorsque l’enseignante annonce le problème de la séance,

notamment: “on a vu qu’on pouvait faire fonctionner un moteur avec des piles,

et utiliser des fils pour faire fonctionner plus loin...le problème capital

aujourd’hui c’est que je n’ai plus de fils [etc.]”, les 27 élèves écoutent, les bras

posés sur la table.

● Analyse et retour sur l’adaptation : Durant le commencement de la séance 1,

les élèves se sont lancés dans l’activité en posture première : ils ne

s'interrogeaient pas mais étaient dans l’agir et dans la réussite de la tâche,

puis sont passés en posture réflexive brièvement après avoir réalisé que la

disposition du moteur sur les bornes de la pile devait être précise pour former

un circuit fermé. Les élèves ne communiquaient pas entre eux pour y

parvenir, mais voulaient plutôt y arriver seul. On pourrait émettre l’idée que

certes, les élèves en difficultés scolaires comme nous le rappelle Bucheton

(2009) agissent en priorité avec les postures scolaires et premières, du fait de

leur difficulté à cerner l’objet de l’apprentissage, mais ici les élèves

disposaient déjà de notions en électricité, et le problème concret fut résolu en

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peu de temps, sans grosse difficulté. L’aménagement d’espaces de travail de

groupe ne porte donc pas ses fruits si les élèves n’y voient pas un intérêt

immédiat, et ne maîtrisent pas les règles de la communication en coopération.

Cependant, à la séance 2, les élèves étaient concernés par les propos de

l’enseignante, alors que les moments d’oral collectif sont souvent sources de

distraction et de perturbation. Les élèves ont eu une attitude posée

(relativement longue pour cette classe), sans dessiner, ni écrire des mots,

manipuler une règle, se lever (attitudes observées lors de chaque séance

chez plusieurs élèves). Ils ne pouvaient en effet avoir accès à ces sources de

distraction (mais cette posture d’écoute est aussi à mettre en relation avec la

séance de méditation). On peut donc conclure que, oui, agir sur

l’environnement de travail à l’image des classes spécialisées peut avoir un

réel impact sur l’ensemble des élèves, même les élèves ayant des problèmes

de comportement et d’attention. Quant à la disposition des tables, elle ne

semble efficace que si les élèves ont travaillé et acquis les règles de

coopération de groupe, ce qui n’était pas le cas ici pour la majorité des

élèves. Cette brève analyse nous incite à porter peut-être plus d’attention au

cadre de travail des élèves (au niveau ergonomique, au niveau du choix des

couleurs des locaux, du type de siège etc.16)

Adaptations : exigence d’un vocabulaire précis et séance de vocabulaire

● Analyse a priori : Les professeurs se sentent parfois démunis face aux

difficultés de leurs élèves, et tendent à baisser leur niveau d’exigence comme

le souligne I.Bloch (2013). Or un vocabulaire précis et technique est

indispensable en sciences et peut être rendu nécessaire par les situations

d’apprentissage favorisant une prise de recul par rapport à la manipulation

pure. Couplées à une institutionnalisation de ce vocabulaire (qui prend du

sens du fait de son emploi régulier) lors d’un temps réservé (une courte

séance de vocabulaire technique), la mémorisation serait favorisée pour les

élèves en difficulté, et c’est la pensée elle-même qui se précise en même

temps que le langage.

16 d’après la pédagogue Canadienne N. L. Lepagehttps://ecolebranchee.com/2017/05/16/lamenagement-flexible-flexible-seating-une-tendance-favorisant-lattention/

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● Observation : Lors de la séance 1, après avoir présenter un manège,

l’enseignante s’adresse au groupe-classe :“Je vais vous demander de lister

tout ce qu’il y a dans le manège pour pouvoir le décrire.” Tous les élèves

lèvent le doigt, même Devid (groupe L, introverti) lève timidement la main.

L’enseignante A demande : “Comment on pourrait appeler la tige qui fait

tourner le moteur ?” Marius, élève d’un bon niveau : “une tige pour relier, un

relieur ?” “Un axe”. Ainsi, les mots “plateau, axe, support, fils électriques,

moteur, pile plate” sont introduits. Une séance complémentaire de vocabulaire

institutionnalise ces termes. L’exigence de la professeur se discerne durant

toutes les séances suivantes : elle laisse le temps aux élèves de chercher le

mot juste pour expliquer quelque chose à l’oral et reformule si besoin. Quelles

conséquences sur les élèves ? Pendant la phase de rappel de la séance 4,

Maxence (groupe IC-VE) explique pourquoi un schéma de montage ne

fonctionne pas : “les deux fils y sont reliés à….à…( 4-5 élèves tentent de

répondre à la Devid lui souffle “à la pile”)..” Enseignante A : “Maxence peut

s’expliquer tout seul”. Maxence :”à la pile. Et là...ah j’sais plus le nom !” “La

borne” “voilà la borne..parce que là ça devrait être fixé”. Plus tard dans la

séance, les élèves sont amenés à faire la liste des éléments nécessaires au

montage de leur manège. Les termes “plateau” (dit par Myriam et Nessim,

groupe R-VE), “support”, “axe”, “moteur” (Maxence groupe IC-VE),

“pile”(Devid groupe L) sont apportés par les élèves, ainsi que la matière des

éléments.

● Analyse et retour sur l’adaptation : Comme décrit ci-dessus, l’acquisition du

vocabulaire s’est faite petit à petit, par la posture de l’enseignante et le retour

régulier sur le vocabulaire accompagné d’une séance dédiée au nom des

composants du manège électrique. Lorsque l’élève (Maxence) cherche ses

mots, il passe en posture réflexive brièvement. Il ne veut pas dire “le machin”,

le “truc” pour décrire des objets qu’il a manipulé lui-même, même s’il ne

maîtrisent pas encore parfaitement à ce stade le vocabulaire. Il s’agit d’une

période de déstabilisation avant acquisition. Les élèves souhaitaient mobiliser

ce lexique par la suite, comme lors de l’oral collectif décrit. On peut dire que

29

Page 31: Introduction · Web viewAnalyse et retour sur l’adaptation : Nous avons constaté le rapport de force que certains élèves ayant des problèmes de comportement (comme Chloé) essayent

cet adaptation, couplée à la séance spécifique, semble avoir atteint son

objectif.

Adaptation : rituel de rappel de début de séance

● Analyse a priori : D’après les neurosciences cognitives, la consolidation est

un des piliers de l’apprentissage. Effectivement une répétition des savoirs

abordés précédemment permet une meilleure mémorisation, en particulier à

l’âge des élèves de primaire, mais pas seulement : ces temps auraient une

fonction symbolique également selon Garcier-Vauton (2003). Ils permettraient

de délimiter le temps et de faire comprendre à l’élève son appartenance à une

communauté ayant ses rituels propres et connus de chacun. Les rituels ayant

un but de rappel des apprentissages précédents permettraient d’inscrire la

séance qui suit dans une progressivité, donnant ainsi plus de sens aux

apprentissages du jour, et favorisant l’adoption par l’élève d’une posture

attentive.

● Observation : Au commencement de la séance 2, l’enseignante présente 3

schémas de montage d’un moteur et d’une pile plate dont deux sont

fonctionnels (ils sont reliés aux bornes, mais représentés de façon différente).

Les élèves sont attentifs et regardent l’image vidéo projetée. L’enseignante A

donne la consigne : “en levant la main dites-moi si…” 5 élèves lèvent

immédiatement la main (Nessim (groupe R-VE), Younes, Chloé (groupe IC-

VE), Jeanne (groupe VE), Soline. A poursuit : “...si avec ça je peux faire

fonctionner le moteur”. Beaucoup lèvent la main. Lana (groupe S) est

interrogée et explique pourquoi ça ne fonctionnera pas, et ainsi de suite pour

les deux autres schémas, Bryan (groupe VE-C-L) et Youness sont interrogés.

Aucun ne bavarde. Lors de la phase de tissage de la séance 4, après un

rappel à l’ordre de l’enseignante, on constate une attitude un peu différente

chez les élèves, qui sont plus agités, en particuliers les élèves du groupe IC.

moins d’élèves participent. Et lors de la séance 5, de montage du moteur et

de l’axe, l’enseignante A choisi de ne pas faire de phase de rappel interactive

mais d’amener le sujet directement, par manque de temps (du fait d’un goûter

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Page 32: Introduction · Web viewAnalyse et retour sur l’adaptation : Nous avons constaté le rapport de force que certains élèves ayant des problèmes de comportement (comme Chloé) essayent

de carnaval prévu peu après). La plupart des élèves regardent ailleurs qu’au

tableau, où la professeur dessine un schéma. Certains sont debout.

● Analyse et retour sur l’adaptation : Lors de la première situation décrite, on

peut noter une posture scolaire et première de la part des élèves. La

professeur n’a pas fini de donner la consigne qu’ils anticipent la question et

souhaitent répondre, sans que cela leur demande davantage de réflexion.

Leurs regards tournés vers l’image projetée montrent leur implication et leur

écoute. La phase de rappel en question abordait des notions de circuit

électrique déjà étudiées plusieurs mois de cela, et les élèves en difficultés

globale comme Bryan (groupe VE-C-L) étaient fiers de répondre et d’être

approuvés par leur enseignante. Même les élèves réservés, tel Devid,

voulaient participer, et étaient donc rassurés d’expliquer une notion maîtrisée.

Le fait qu’il y ai un support visuel et une participation attendue a pu également

encourager les élèves à être davantage réceptifs, contrairement à leur

attitude moins concentrée de la dernière séance (qui comporte aussi le

facteur externe de participer à un carnaval de l’école, ce qui entraîne de

l’excitation chez les élèves et une plus forte propension à la posture ludique-

créative). Donc, les phases de tissage de début de séance peuvent aider

l’enfant à rentrer dans son rôle d’élève et à travailler sa mémorisation, mais

certains facteurs externes influent sur leur impact.

Adaptation : séance de méditation

● Analyse a priori : Jeanne Siaud-Facchin, psychologue clinicienne, déclare :

“dans [notre] contexte d’accélération et de pression constante, l’attention et la

concentration sont altérées. Les troubles de l’attention constituent aujourd’hui

l’un des premiers motifs de consultation en psychologie de l’enfant et de

l’adolescent”. La méditation de pleine conscience consiste à se concentrer sur

l’instant présent, sans être excessivement stimulé, à se recentrer sur ses

sensations et ses émotions, peut permettre à l’enfant de développer ses aires

préfrontales, les aires responsables des fonctions exécutives (planification,

inhibition, contrôle)17 et de diminuer le stress, et donc d’apaiser ses relations

17 d’après S. Dehaene

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Page 33: Introduction · Web viewAnalyse et retour sur l’adaptation : Nous avons constaté le rapport de force que certains élèves ayant des problèmes de comportement (comme Chloé) essayent

avec ses pairs. Les élèves du groupe IC (inhibition et concentration), et VE

(vivre ensemble) sont donc particulièrement concernés par cette adaptation,

et n’ont jamais expérimenté cette méthode. Ces courtes séances de 5

minutes commenceront donc les séances de sciences.

● Observation : Lors de la première séance, les élèves ont participé à une

courte séance basée sur des étirements de bras et des exercices de

respiration18. On observe que les élèves concernés particulièrement adoptent

une posture ludique-créative : Ulysse est temporairement mis à l’écart car il

s’agitait sans prendre en compte aucune consigne, Bilel se lève, Maxence

minimise les mouvements et Chloé exagère les mouvements pour faire rire le

groupe-classe. Certains élèves réagissent différemment, comme Myriam, qui

suit scrupuleusement les consignes et reste silencieuse, posée à la fin de ces

5 minutes. La plupart des élèves sont silencieux à la fin, mais se mettent à

applaudir (élèves du groupe IC) pour conclure et se remettent à rire et à

discuter avec le voisin dès la reprise de la séance de sciences. Les séances

suivantes se sont passées différemment : les consignes de méditation

portaient uniquement sur la respiration et étaient sur un enregistrement audio.

Les élèves du groupe IC et VE ont mieux écouté au fil des séances. Par

exemple, à la fin de la séance de méditation de la séance 4, les élèves

appliquaient les conseils, fermaient les yeux et ne bougeaient plus (sauf

Chloé). Ils étaient calmes et l’enseignante a ajouté : “profitons de ce rare

moment de silence avant de continuer". Myriam, déjà citée, avait failli

s’endormir.

● Analyse et retour sur l’adaptation : La première séance n’a pas eu d’influence

sur la posture des élèves, ils étaient surpris et avaient envie de détourner le

but de la séance, et il a fallu recadrer plusieurs élèves. Une fois la surprise

passée et un changement au niveau du contenu de la séance de méditation,

les élèves étaient bien plus détendus et impliqués. Cet effet a une durée

variable selon l’élève. Certains élèves mettront plus de temps à comprendre

les règles et les bienfaits d’une telle pratique, peut être en raison d’un

manque d’habitude de temps sans écrans en contexte familial, ou d’un trouble

18 issus du livre 140 jeux de relaxation pour l’école et la maison, de C. Alix, éditions Retz

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Page 34: Introduction · Web viewAnalyse et retour sur l’adaptation : Nous avons constaté le rapport de force que certains élèves ayant des problèmes de comportement (comme Chloé) essayent

de l’attention. Cette adaptation semble intéressante, car si son contenu est

adapté à l’âge des élèves et à leur capacité d’attention, et répétée plusieurs

fois (comme tout apprentissage le nécessite), les élèves pourront développer

leurs facultés de concentration, de planification et d’entente avec les autres,

savoirs-être nécessaires lors d’une démarche d’investigation.

Adaptation : écriture commune des hypothèses

● Analyse a priori : Écrire au tableau les hypothèses de chacun permettrait

d’alléger la charge de l’écrit pour ceux qui y rencontrent des difficultés et de

souder le groupe selon les témoignages recueillis par M-H Heitz, C. Marin-

Micewicz et E. Saltiel (2015). De plus, inscrire le nom de l’auteur de l’idée à

côté montre le poids accordé à sa parole, et cela le valorise. Une valorisation

appréciée en particulier chez les élèves en difficulté dans les disciplines

scolaires, qui manquent souvent de confiance en eux comme le rappelle

I.Bloch (2013).

● Observation : Chaque séance a bénéficié de cette adaptation mais arrêtons

nous sur la séance 3. Le problème présenté était : Comment faire fonctionner

le moteur avec un fil de laine ? Le but étant de mobiliser les connaissances

acquises lors de la séance précédente (matériaux isolants et conducteurs)

pour résoudre un problème et découvrir finalement également les risques

domestiques de l'électricité. Après un temps de réflexion individuelle (les

élèves pouvaient écrire leur idée dans leur cahier de sciences), les

volontaires faisaient part en oral collectif de leur idée et la justifiait. Si des

élèves n’étaient pas d’accord, ils pouvaient argumenter. Par exemple, Ryan

(groupe L-VE, en inclusion) a proposé de tremper “le fil de laine dans de

l’encre” si jamais l’encre était conductrice. Plusieurs ont proposé d’entourer le

fil de laine d’un fil de métal, comme le métal est conducteur. Ulysse (groupe

IC) a proposé de tremper le fil de laine. Chaque hypothèse a été testée par la

personne l’ayant émise, si les débats avec les autres élèves ne permettaient

pas de juger de la viabilité de l'hypothèse. Kassandra (groupe IC-C) observe

33

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les expériences et s’investit dans les débats. Ulysse vient tester pour finir son

idée, avec un ajout de sel. Le courant passe.

● Analyse et retour sur l’adaptation : Les élèves se sont investis lors de cette

étape en donnant leur idée sans trop craindre le jugement des autres par la

prise en compte et le droit à l’erreur que l’enseignante A leur accordait. Le fait

que le problème s'épaississe par les conflits socio-cognitifs issus des petits

débats et de l’argumentation des élèves a certainement influé la posture des

élèves. Les élèves du groupe IC étaient investis, tout comme ceux du groupe

Langage, ils ont adopté une posture réflexive en constatant visuellement les

multiples hypothèses. Cependant, quelques élèves du fond de la classe

(groupe VE) dessinaient pendant cette phase, peut être en raison d’un temps

de mise en commun un peu trop long pour ces derniers.

Adaptation : présence d’adultes médiateurs et travail en groupe

● Analyse a priori : Les élèves ayant des difficultés de socialisation et de prise

en compte de leurs pairs ont tendance à ne pas collaborer ou même coopérer

lors de travail en groupe. Ils ont tendance aussi à être dans l’agir sans avoir

de recul et sans partager son intention. Or, communiquer avec ses pairs en

groupe restreint permet à tous, même aux plus réservés, de partager leur

idée et d’argumenter, pour créer ainsi des conflits socio-cognitifs et affiner sa

pensée. Ces deux faits pris en compte, et à l’image des ulis qui disposent de

plusieurs adultes pour 12 élèves, nous avons demandé avec l’enseignante A

si des parents pouvaient se porter volontaires pour accompagner ses travaux

de groupes lors de la séquence.

● Observation : Plusieurs parents se sont portés volontaires à 3 reprises. A

chaque fois, ils étaient informés de leur rôle lors de la séance ( veiller à ce

que chaque élève du groupe respecte ses partenaires et communique son

idée, poser des questions aux groupes pour les faire avancer comme : “quel

est l’objectif ? Qu’est ce qui pose problème ? Comment feriez-vous ? Avec

quoi ?” Dans le but d’inciter les élèves à se détacher de la posture première

lors des manipulations, comme l’enseignante A le fait par son étayage). Les

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séances 2, 3 et 5 sont concernées par cette adaptation. A chaque séance, les

travaux de groupe étaient mis en place, en groupe de 2, de 3 voire de 4 en

cas de limite matérielle. Une place importante était aussi donnée au travail de

réflexion individuelle.

Lors de la séance 2, il y avait par exemple 2 parents et l’AESH d’un élève

(Ryan), en plus de l’enseignante A. Les groupes hétérogènes de 2 à 3 élèves

recevaient 3 objets de même type mais de matières différentes (pour faire

ressortir la caractéristique isolante ou conductrice d’une matière), comme des

tasses, des pinces à linge, des fils, des boîtes etc. Ils inscrivaient dans leur

cahier d’hypothèse individuellement ce qu’ils pensaient être conducteur ou

non. Les parents étaient avec des groupes à majorité en difficulté et ayant

des difficultés à communiquer posément. Le groupe avec l’AESH, était

composé de Bryan (groupe VE-C-L), Ryan (groupe VE-C-L), Maxence

(groupe IC-VE). L’AESH, Mr B., demanda aux élèves : “à votre avis lequel

des trois objets va fonctionner ? Pourquoi ? Tu en penses quoi toi ?” Les trois

élèves parlaient l’un après l’autre. Ils avaient leur regard tourné vers l’adulte

médiateur puis vers la manipulation qu’ils testaient à tour de rôle, pour vérifier

leur idée de départ. Un autre groupe accompagné, pendant ce temps, avaient

reçu un récipient en bois avec des clous en fer. Ulysse (groupe IC)

déclaraient à ses camarades, le visage sérieux, que si le récipient pouvait

faire fonctionner le moteur, “c’est parce qu’il a des clous en métal !”. Il y avait

aussi également un autre groupe composé de Devid (groupe L-R) et de

Marius, élève d’un bon niveau. Devid discutait avec Marius calmement du

problème posé par l’enseignante. Quand cette dernière a demandé lors de la

mise en commun pourquoi une pince à linge qui semblait être en métal ne

faisait pas fonctionner le moteur dans le circuit, il a levé la main et a dit “il y a

quelque chose qui gène”, le revêtement de l’objet en question.

Néanmoins, il y a eu des difficultés de travail collectif dans quelques groupes.

Par exemple, durant la cinquième séance, on pouvait observer de gros

désaccords entre les élèves du groupe de Maelys, Chloé, Myriam et Ulysse,

dès que la maman accompagnante s’absentait pour voir un autre groupe et

les aider au niveau technique. Chloé (groupe IC-VE-C) s’adressant à sa

camarade : “Mais donne ! Arrête ! Lâche-ça toi ! ” Elle s’accaparait le matériel

au détriment de Maelys, qui observait.

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● Analyse et retour sur l’adaptation : Nous avons constaté le rapport de force

que certains élèves ayant des problèmes de comportement (comme Chloé)

essayent d’instaurer dès que le professeur ou l’adulte était occupé avec

d’autres. De plus la situation décrite en séance 5 concerne un groupe de

quatres élèves pour un manège, par limite du nombre de moteurs. Un nombre

plus restreint dans le cadre de manipulation et de construction de groupe,

accompagné par un médiateur (qui peut être un rôle accordé à un élève, un

“distributeur de parole” comme on retrouve dans certaines pratiques de

classe), a davantage de chance de créer une réelle dynamique de groupe.

L’objectif étant de développer les capacités de raisonnement, langagière mais

aussi sociales, et aller vers une plus grande autonomie (à terme, sans adulte

à part pour une aide technique ou ponctuelle d’étayage). On peut constater

en ce sens ce que l’étayage par groupe a apporté : les groupes avec Mr B et

le parent ont adopté une posture réflexive, malgré les difficultés diverses

(voire les troubles) que connaissent ces élèves. Même un des groupes

réduits, composé uniquement d’élèves, a favorisé l’investissement de Devid,

malgré ses difficultés langagières et de raisonnement. On observe chez lui

une volonté de comprendre la notion abordée, la manipulation aidant aussi

certainement.

Finalement, inviter quelques parents à prendre part à des groupes de travail

est intéressant, car les élèves en difficulté ont besoin d’aide pour canaliser

leur attention et apprendre à s’écouter. En effet la coopération (et d’autant

plus la collaboration) sont des apprentissages à part entière, qui nécessite de

l'entraînement et l’acquisition d’un certain savoir-être (écoute, respect du point

du vue de l’autre et de la différence, partage). En sciences, ce sont des

moments privilégiés pour développer le raisonnement et fonctionner comme

une petite communauté de chercheurs, à condition que les groupes ne soient

pas trop nombreux. Ils complètent bien les moments de réflexion individuelle.

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Adaptation : Trace écrites allégées

● Analyse a priori : Pour les élèves souffrant de troubles de langage comme

une dyslexie, ou qui font face à de grosses difficultés à l’écrit, écrire la leçon,

ou des hypothèses, ou encore un compte-rendu d’expérience représente une

charge cognitive très importante qui peut détourner l’attention du but premier

de l’écrit en question en sciences. Pour alléger cette charge et mobiliser les

efforts vers le sens de la phase d’institutionnalisation, il est possible, à l’image

des enseignants spécialisés, de fournir des textes à trous, jouer sur le type de

police (sans empattement), favoriser les formes visuelles pour transmettre les

idées-clé.

● Observation :

Ci-dessus, un exemple de trace écrite de fin de séance 3. Tous les élèves ont

eu la même et mettaient assez peu de temps pour remplir cette fiche en oral

collectif.

● Analyse et retour sur l’adaptation : Cette adaptation concerne en particulier

les cinq élèves du groupe L (langage). On peut difficilement évaluer finement

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Page 39: Introduction · Web viewAnalyse et retour sur l’adaptation : Nous avons constaté le rapport de force que certains élèves ayant des problèmes de comportement (comme Chloé) essayent

cette adaptation par observation, mais elle peut être mise en relation avec les

résultats de l’évaluation de ces élèves : quatre élèves du groupe ont été

évalués par leur professeur comme ayant atteint les objectifs de la séquence

(développer les compétences pratiquer des langages, pratiquer des

démarches scientifiques et technologiques et coopérer au sein d’un groupe).

Un élève du groupe a partiellement atteint les objectifs (dû à un manque

d’apprentissage des leçons d’après son enseignante, bien qu’elle ai relevé

néanmoins des progrès dans son investissement dans les activités

scientifiques19).

3° Questionnaire complémentaire

Afin de mieux appréhender les observations filmées des élèves, je leur ai fait

parvenir, deux mois plus tard, un bref questionnaire par l’intermédiaire de

l’enseignante A. L’objectif de ce questionnaire est de recueillir ce que les élèves ont

retenu de cette séquence sur le long terme, et s’ils ont apprécié y participer (la

motivation étant, comme rappelé précédemment, un facteur de réussite). Cette

méthode permet d’avoir un aperçu global du sentiment des élèves. Le questionnaire

est disponible en annexe 2 et concerne 24 élèves de la classe.

La première question, globale et visuelle, permet de connaître leur

appréciation globale des séances.

Graphique présentant l'intérêt des élèves pour la séquence de sciences

19 D’après entretiens avec l’enseignante A et le livret scolaire unique de la classe.

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On peut noter l'intérêt des élève pour cet enseignement : 88 % de ceux-ci ont

aimé voire beaucoup aimé y participer. On note cependant que deux élèves des

groupes inhibition et concentration - vivre ensemble - comportement ont entouré un

visage mécontent, alors que leurs postures indiquaient une certaine implication tout

au long du projet. Leurs réponses surprenantes, sans plus de justification, sont à

prendre en compte avec du recul.

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La seconde question, à choix unique également, porte sur le sentiment de

l’élève sur ses apprentissages. Si l’élève considère ne rien avoir appris alors

l’objectif des séquences n’a pas été atteint dans son cas.

Graphique présentant la répartition du sentiment d’apprentissage a propos de

la création d’un objet technique et de l’électricité.

On

remarque que la majorité (plus de 60% de la classe) considèrent avoir acquis de

nouvelles connaissances, et 30% considèrent en avoir acquis un peu. En revanche,

2 élèves représentant 9 % de la population interrogée considèrent ne rien avoir

appris. Un de ces élèves est un élève en inclusion, qui a des difficultés au niveau du

domaine du vivre ensemble et du comportement. Il a indiqué à la première question,

visuelle, avoir beaucoup apprécié la séance, mais ne rien avoir appris à la question

2, sans apporter de réponses aux question suivantes. Peut être qu’il n’a pas réalisé

l’évolution de sa pensée. Il participait en effet beaucoup lors des mises en commun

et du travail de groupe, mais comme dit Bardi (2008), les élèves qui réussissent “ont

conscience du lien existant entre les tâches proposées et leurs finalités [alors que

les élèves en difficultés scolaires] croient, au contraire, que l’on attend d’eux de se

conformer aux consignes données, d’effectuer les tâches demandées et d’obtenir les

résultats voulus”. Ils ne saisiraient donc pas pleinement, comme cet élève peut être,

l’objectif de développer de nouvelles compétences et d’acquérir de nouveaux

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Page 42: Introduction · Web viewAnalyse et retour sur l’adaptation : Nous avons constaté le rapport de force que certains élèves ayant des problèmes de comportement (comme Chloé) essayent

savoirs. Il est possible que ce soit dû également à une mésentente forte avec un

autre élève de la classe, inclus pour quelques disciplines, selon l’enseignante A.

La troisième question, ouverte, demande plus de précision quant à l’objet

d’apprentissage qu’ont retenu les élèves. D’après le tableau de l’annexe 2, la

construction en elle-même du manège, suivi de son fonctionnement et de notions en

électricité serait ce qu’ils retiennent en particulier (par ordre d’importance). On note

deux approches distinctes de l’objectif “construire un objet technique : le manège” :

l’approche plus manuelle et technique de sa construction, et d’autre part l’approche

axée plutôt compréhension d’un phénomène technique. Les deux aspects sont

importants et concernent des compétences20 différentes mais liées (la compétence

Concevoir et produire tout ou partie d'un objet technique en équipe pour traduire une

solution technologique répondant à un besoin d’une part, et la compétence Décrire

le fonctionnement d'objets techniques, leurs fonctions et leurs constitutions d’autre

part).

La quatrième question interroge le moment préféré (soit la phase de la

séquence) de l’élève, ce qui a suscité chez lui le plus d’enthousiasme. On retrouve

largement la manipulation (notamment avec les moteurs) en tête de liste, sans

grande surprise pour des enfants de cycle 3. Le passage par le concret, le toucher,

la démarche essai-erreur plaît aux élèves, et sollicitant plusieurs sens se mémorise

plus facilement. Cependant, un bon nombre d’élève a “tout” apprécié dans la

séquence, donc toutes les adaptations y compris, ce qui est positif. Il ressort aussi

quelques retours différents comme : la phase de méditation pour une élève pourtant

sujette à des difficultés de concentration et de comportement (Chloé), pourtant

disciplinée à plusieurs reprises lors de ce type de phase, mais peut être marquée

par le côté inhabituel de l’activité. Enfin, le moment d’aboutissement a marqué

l’esprit des élèves : ils ont aimé tester leur propre manège en séance 5 (voir annexe

3 pour un exemple de manège).

Enfin, la cinquième question est un espace libre, de remarques. On y retrouve

de nombreux commentaires positifs “c’était trop bien” de la part notamment d’élèves

comme Mathilda et Jeanne, qui semblaient pourtant avoir des difficultés de

comportement vis-à-vis de l’enseignante A durant quelques séances (la tête dans

20 issues du B.O. de 2015

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les bras, les discussions voire les pleurs pour Jeanne). Il semble qu’elles aient tout

de même gardé un bon souvenir des moments de réflexion et d’expérimentations.

Nous venons d’analyser quelques adaptations et leur influence sur cette

classe ordinaire. Mettons-les à présent en relation avec les résultats du

questionnaire.

V. Discussion

J’ai fait le choix d’observer plusieurs adaptations possibles en sciences, mais

celles-ci pourraient être complétées : On peut songer à une exposition des manèges

pour valoriser les élèves et mobiliser leurs compétences langagières, utiliser des

pictogrammes pour signifier l’étape de la démarche en cours, user d’affiches

récapitulatives, encourager davantage les élèves à modifier leurs écrits dans la

durée, à mesure que leur pensée évolue (ce qui porte sur le statut de l’erreur).... Le

choix est vaste pour sortir des sentiers battus.

Revenons à nos adaptations étudiées. Nous avons pu constater la réceptivité

différente de l’élève face à celles-ci, reflet de l’hétérogénéité du groupe-classe

observé. Ainsi, si des adultes médiateurs apportent une certaine stabilité à certains,

d’autres peuvent s’en passer. L’effectif de la classe, bien supérieur à une ULIS,

ajoute aussi des obstacles, l’enseignant ne pouvant se rendre autant disponible qu’il

le souhaiterait. Il en va de même pour chaque adaptation, néanmoins les

adaptations inscrites dans la séquence Handisciences elle-même, comme l’objectif

final concret et motivant et la structure basée sur la démarche d’investigation (avec

un problème bien défini à chaque séance) sont plus largement plébiscitées par les

élèves. En effet, le questionnaire fait ressortir un grand intérêt de leur part pour cet

enseignement et ses choix didactiques (comme passer par l'expérimentation et le

tiers objet présenté par M-H Heitz, C. Marin-Micewicz et E. Saltiel (2015)), et qui sait

si cela ne conduira pas les élèves en difficulté à trouver leur vocation, ce qui les

valorise et les motive ? De plus, la grande majorité des élèves de la classe, y

compris les élèves observés en particulier, ont atteint les objectifs fixés par leur

professeur et développé leurs compétences scientifiques (réaliser un schéma, créer

un objet technique, travailler en groupe, émettre des hypothèses et les justifier, )

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sauf deux élèves qui les ont partiellement atteint, par manque d’apprentissage des

leçons selon l’enseignante.

En résumé, nous avons rappelé l’objectif global de l’école : assurer la réussite

pour tous, sans tenir compte de l’origine sociale ou du handicap. Nous avons

constaté par l'enquête de l’OCDE l’importance que revêtent les pratiques

enseignantes par rapport à la performance des élèves en sciences. Nous nous

sommes alors attardés sur ce que cachait le terme “élève en difficultés scolaires” et

la particularité de l’enseignement des sciences fondées sur l’investigation

(innovateur en comparaison de l’enseignement traditionnel) au regard de divers

travaux de chercheurs. Nous avons également exploré le recueil de données prévu

pour savoir si les adaptations des ULIS sont bénéfiques à une classe à majorité en

difficulté, à l’aide d’une grille d’observation. L’étude réalisée est bien sûr limitée par

la taille de sa population et ne représente pas une vérité absolue, mais nous avons

pu constater qu’à l’échelle de cette classe en tout cas, ce type d’enseignement a des

répercussions positives, non seulement sur les savoirs purs et compétences

attendus dans le domaine des sciences, mais sur tout un savoir-être et un esprit

logique, curieux et critique qui serviront à l’élève dans son rapport au savoir, à

l’école et même au monde qui l’entoure. Malgré tout, cet impact est à nuancer : les

troubles et les difficultés ne disparaissent pas pour autant (beaucoup de discipline

de la part de l’enseignante fut nécessaire pour avancer)... Mais ils sont pris en

compte et les attentes scientifiques n’en sont pas moins rigoureuses.

Et c’est sans doute cela, la force de cette didactique innovante.

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Bibliographie

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Annexe 1 : synopsis des séances filmées

La séquence Handisciences est disponible sur le site de La main à la pâte à l’adresse :

https://www.fondation-lamap.org/fr/page/16265/le-manege-electrique

Les séances “bis” sont courtes (pas plus de 25-30 min) et non filmées. Elles complètent les

séances-clé.

Séance 1 : La séance commence avec une brève phase de relaxation et d’étirement des

bras. L’enseignante A montre ensuite une vidéo de carrousel et une maquette de manège,

amenant ainsi l’objectif de la séquence qui commence tout juste, sous l’enthousiasme

débordant des élèves : construire un manège. Pour cela, divers problèmes devront être

résolus. Le premier est de faire fonctionner un moteur avec une pile. Par groupe de 4, les

élèves essayent par essai-erreur d’atteindre l’objectif. Ensuite, les élèves dessinent le

montage pour qu’un “martien” le refasse à l’identique. S’ensuit une mise en commun durant

laquelle plusieurs élèves dessinent au tableau le montage dans leur cahier de sciences.

L’enseignante A fait ressortir les différences entre ceux-ci, et interroge les élèves sur ce qu‘il

est nécessaire de dessiner dans un schéma. L’enseignante termine la séance par la

correction du schéma du montage, en introduisant le nom des éléments de la pile.

[Séance 1 bis : séance de vocabulaire (borne, pile, support, axe, plateau, fils, moteur]

Séance 2 : La séance commence par une phase de méditation portant sur la respiration

issue d’un enregistrement audio. L’enseignante A dirige ensuite une phase de rappel (sur

les circuits ouverts et fermés) à partir de schémas vidéoprojetés. Le problème du jour est

que par manque de fils, les élèves doivent trouver d’autres éléments pour faire tourner le

moteur dans un circuit. Les élèves testent donc les affaires de leur trousse et notent leur

classement dans leur cahier. Puis, par groupe de deux à trois, les élèves reçoivent trois

objets de même type (des cuillères, des récipients, des fils etc.) mais de matière différente,

afin de faire comprendre aux élèves la distinction entre matériau conducteur et isolant. Ils les

trient en émettant des hypothèses, puis les testent, accompagné par des adultes (parents

volontaires). Ils en ressort deux catégories, qui seront institutionnalisées lors de la prochaine

séance par manque de temps.

[Séance 2 bis : contexte historique des manèges]

Séance 3 : L’enseignante A commence par une phase de rappel interactive portant sur la

séance précédente. Les élèves reprennent leur tri inscrit dans leur cahier. L’enseignante

amène les élèves à expliquer pourquoi tel ou tel objet fait fonctionner le moteur dans un

circuit. Les deux termes “isolant” et “conducteur” sont introduits. L’enseignante poursuit par

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une évaluation formative, en demandant au groupe-classe si pour d’autres objets

(métalliques et non métalliques) le courant va passer. Ensuite, un problème (prévu) surgit :

comment faire fonctionner le moteur avec un fil de laine ? Les élèves réfléchissent

individuellement avant de faire part de leurs hypothèses, inscrites au tableau. Ils

argumentent, puis quelques élèves viennent tester leur idée, jusqu’à ce que le fil soit mouillé

par de l’eau salé. Les élèves sont surpris, puis ils remplissent la fiche prévue comme trace

écrite résumant les idées essentielles.

[Séance 3 bis : découverte des risques ménagers liés à l’électricité ]

Séance 4 : Lors de cette séance qui commence par une séance de méditation et de rappel

de la séance passée, les élèves vont commencer à créer le cahier des charges de leur

manège. Leur professeur leur demande de schématiser leur manège, mais avant, de lister

les éléments constitutifs du manège. L’enseignante liste avec les élèves ce qui sera

nécessaire, en aidant les élèves à mobiliser un lexique précis. Les élèves dessinent des

schémas différents dans leur cahier, ce que l’enseignante A fait ressortir lors de la mise en

commun. Elle invite deux élèves dessiner le leur au tableau, puis formalise elle-même un

schéma. Elle fait de la discipline face à l’agitation d’une grande partie de la classe. Les

élèves modifient leur schéma. La séance se termine par l’annonce de la construction du

manège la fois prochaine.

[Séance 4 bis : montage des supports des manèges]

Séance 5 : Des adultes sont présents pour aider les élèves à construire par groupe de trois

à quatre leur manège. Les élèves disposent de leur support (un goulot de bouteille collé à

une assiette en carton rigide). Deux problèmes apparaissent : comment faire tenir le moteur

dans le goulot de la bouteille et comment faire tenir l’axe au moteur ? Les élèves font des

propositions (colle, ruban adhésif etc.) et l’enseignante A leur explique ce qu’est un domino.

Chaque groupe construit donc son manège avec plus ou moins de facilité. la réussite d’un

premier groupe relance l’ardeur au travail.

[Séance 5 bis : décoration des manèges]

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Annexe 2 : questionnaire et résultats

(x) : indique le nombre d’élèves partageant cette idée.

Question 1 :appréciation

globale

Question 2 : apprentissage

Question 3 :quel

apprentissage ?

Question 4 :moment préféré

Remarques

42 % OUI - 61% Construire manège (5) - fonctionnement manège (3) - utiliser l'électricité (2) - utilisation des moteurs (1) - comment fonctionne dominos (1) - “plein de choses” (1)

La pratique (5) - La manipulation des moteurs (5) - tout (4)- test final des manèges (4) - méditation de pleine conscience (“yoga”) (1) - travailler avec telle personne adulte (1)

“j’ai adoré” (2), “c’était trop bien”, “c’était trés bien”, “j’ai bien aimé manipuler”...“il y en a qui faisait tout et nous on faisait rien”

46 % UN PEU - 30 %

4 % NON - 9 %

8 %

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Annexe 3 : exemple de manège construit par un groupe

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Résumé

La réussite scolaire est un enjeu national, or les sciences

contribuent à la construction de compétences du socle

commun. Une étude réalisée par la fondation La main à la

pâte démontre que les sciences enseignées selon la

démarche d’investigation et enrichie de pratiques spécifiques

apporte de grands bénéfices aux élèves à besoin particulier

issus d’ULIS. Peut-on appliquer ces pratiques innovantes à

une classe majoritairement en difficulté ? Si oui, ont-elles un

impact intéressant ? Ce mémoire apporte un éclairage dans le

cadre d’une observation filmée d’une classe durant tout une

séquence (portant sur la construction d’un manège).

Mots-clés

sciences - démarche d’investigation - difficulté scolaire - ULIS - pratiques d’enseignement - adaptation

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