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HISTOIRE DE LONDRES RÉMY BETHMONT

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Londres est la seule ville au monde à avoir deux maires : celui de l’antique Cité, le lord-maire, et le tout nouveau, à la tête du Grand Londres. Ce curieux doublet reflète une caractéristique essentielle de la ville : la capitale du Royaume-Uni s’est consti-tuée au fil des siècles comme un patchwork. Elle ne peut donc se comprendre sans son histoire.

Le caractère multiforme de l’ensemble londonien fait de la capitale britannique une ville aux infinis visages, non seule-ment en termes sociaux, ethniques ou religieux mais aussi sur les plans institutionnel, économique et culturel. Cette rencontre des contraires explique la formidable vitalité de Londres et sa capacité séculaire a se réinventer, qu’elle doive vivre les boule-versements de la Réforme sous Henry VIII et Edouard VI, craindre Jack L’Éventreur, affronter les bombardements de la Luftwaffe ou se déchaîner sur le London Calling des Clash.

Rémy Bethmont revient ainsi sur l’histoire turbulente de Londres du Moyen Âge à nos jours et ressuscite la vie d’une société dans ses occupations et préoccupations les plus diverses. Alors se découvre une ville ou l’ancien et le nouveau cohabitent et s’entrechoquent sans jamais que l’un prenne définitivement le pas sur l’autre. C’est sans doute cela, l’identité londonienne.

Rémy Bethmont est maître de conférences HDR à l’université de Picardie Jules Vernes (Amiens) où il enseigne la civilisation britannique. Spécialiste de l’histoire religieuse anglaise, il est l’auteur de L’Anglicanisme : un modèle pour le christianisme à venir ? (Labor et Fides, 2010).

Histoire de Londres

rémy BetHmont

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www.tallandier.comISBN : 978-2-84734-620-6Imprimé en Italie 01.20119 782847 346206

19,90 €

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HISTOIRE DE LONDRES

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DU MÊME AUTEUR

L’Anglicanisme. Un modèle pour le christianisme à venir ?, Laboret Fides, 2010.

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RÉMY BETHMONT

HISTOIRE DE LONDRES

Aux sources d’une identité contradictoire

TALLANDIER

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© Éditions Tallandier, 20112, rue Rotrou – 75006 Paris

Cartographie : Florence Bonnaud © Éditions Tallandier

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SOMMAIRE

Table des cartes 9

Introduction 13Chapitre premier. LONDRES ET LE ROYAUME :

UNE PRÉÉMINENCE ANCIENNE 21Chapitre II. LA CONSTRUCTION MÉDIÉVALE

D’UNE STABILITÉ SOCIALE 51Chapitre III. LA VILLE DE LA RÉFORME ET DE LARÉVOLUTION 77

Chapitre IV. CAPITALISME ET CULTURE DE CONSOMMATION :LE NOUVEAU VISAGE DE LONDRES 109

Chapitre V. GIGANTISME MÉTROPOLITAIN ET GÉOGRAPHIEDE CLASSES 141

Chapitre VI. LE DIFFICILE AVÈNEMENT D’UNE IDENTITÉMÉTROPOLITAINE 169

Chapitre VII. LA RÉINVENTION DE LONDRES 203Conclusion 233

Notes 239Bibliographie 249Remerciements 259

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TABLE DES CARTES

La Cité au XIVe siècle 20Les quartiers (wards) de la Cité au milieu du XIVe siècle 50L’expansion de Londres de 1600 à 1800 108L’expansion de Londres de 1800 à 1870 140Les divisions administratives de Londres (1888-1964) 168Les bourgs (boroughs) de Londres depuis 1965 202

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À mon père, grand consommateur de livres d’histoire

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INTRODUCTION

Londres est peut-être la seule ville au monde à avoir officielle-ment deux maires : celui de l’antique Cité, le lord-maire, dontl’origine remonte au XIIe siècle, et le tout nouveau maire, à la têtedu Grand Londres, dont la charge a été créée par la dernièreréforme institutionnelle de la capitale britannique en 1999. Cecurieux doublet, phénomène en soi récent, reflète une caractéris-tique ancienne de la ville : depuis le Moyen Âge, le nom de Lon-dres a simultanément incarné plusieurs réalités urbainesdistinctes. Depuis que le pouvoir royal a quitté les murs de laCité, au XIe siècle, pour s’installer plus à l’ouest, à Westminster,Londres désigne à la fois la Cité, seul Londres officiel jusqu’à lacréation du comté de Londres à la fin du XIXe siècle, et unensemble géographique plus vaste, bipolaire d’abord, qui s’orga-nise autour de la Cité et de Westminster, puis multipolaire àpartir du XVIIIe siècle, alors que la ville commence à prendre lesproportions gigantesques d’une «métropole », et où de nouveauxquartiers se développent avec une identité à chaque fois spéci-fique. Londres s’est donc constitué au fil des siècles comme unpatchwork. Possédant une unité métropolitaine que ses habitantsperçoivent de façon plus ou moins confuse selon les périodes,celle-ci ne peut s’appréhender que dans la prise en compte dessingularismes de ses paroisses, quartiers, districts, bourgs et cités.L’histoire de Londres est celle d’une unité qui, autour de la citéde Londres et de sa fausse jumelle de Westminster, rassemblepeu à peu de multiples fragments urbanisés qui refusent d’oublierles particularismes de leur histoire locale. C’est de cette dernière,

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en effet, que leur identité se réclame, autant que de leur inclusiondans l’ensemble métropolitain.Le caractère multiforme de l’ensemble londonien fait de la

capitale britannique une ville aux infinis visages, non seulement,comme dans les autres grandes villes cosmopolites, sur les planssocial, ethnique ou religieux en accueillant les communautés lesplus diverses, mais aussi sur les plans institutionnel, économique,culturel et architectural. L’ancien et le nouveau, la tradition et lamodernité cohabitent et s’entrechoquent sans jamais que l’unprenne définitivement ou complètement le pas sur l’autre.L’érection de gratte-ciel flamboyants dans le cœur historique del’agglomération, parallèlement à la réhabilitation enthousiastedes immeubles anciens, est le corollaire architectural de lacoexistence d’une modernité et d’une tradition municipalesqu’incarnent ensemble les deux maires de Londres.Cette rencontre des contraires n’est sans doute pas étrangère à

la formidable vitalité socio-culturelle de Londres, berceau d’uneculture pop qui conquiert le monde dans les années soixante etqui coexiste avec les clubs masculins aristocratiques hérités duXIXe siècle. Esprit d’aventure tourné vers l’avenir et amour de latradition porteuse de l’épaisseur historique de l’identité londo-nienne s’embrassent dans un présent perpétuellement en mou-vement.

L’extraordinaire diversité de Londres et la richesse de sonhistoire rendraient illusoire toute prétention à l’exhaustivité.Chaque facette de la vie de la capitale britannique, tout commenombre de ses quartiers, pourrait faire l’objet d’un ouvrage. Celivre veut avant tout rendre compte du développement de lapremière grande métropole des temps modernes, avant Pariset New York, dans cette spécificité, bien anglaise sans doute,d’intégration dans une unité urbaine des singularismes héritésde l’histoire, qu’ils soient sociaux, économiques, politiques ouculturels, y compris quand ils engendrent des contradictionsa priori irréductibles. L’histoire de cette unité fragmentéecommence, à mes yeux, avec la décision du roi Édouard leConfesseur (1042-1066) de quitter la Cité pour s’installer àWestminster. C’est le dernier des trois moments fondateurs del’histoire de Londres, qui donne à la ville la configuration géogra-

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phique, économique et politique de base sur laquelle son déve-loppement ultérieur s’est construit.Nous ne dirons que quelques mots des premiers moments fon-

dateurs de l’histoire de la ville, sorte de préhistoire du Londresdont nous sommes familiers. L’origine première de la ville s’estlongtemps perdue dans les brumes de la légende. Ainsi, le MoyenÂge voit dans Londres une nouvelle Troie*, fondée par un certainBrutus, fils légendaire d’Ascagne, fils d’Énée, héros de Troie, lui-même ancêtre mythique de Romulus, fondateur de Rome. Selonla légende, Brutus et sa suite de Troyens auraient été les premiershabitants d’Albion, à laquelle Brutus donna son nom en la rebap-tisant Britannia. Il établit sa capitale en fondant Londres1.

Cette histoire, présentée comme une vérité historique par leschroniqueurs médiévaux, était une façon de donner à la ville etau royaume le même statut mythique que Rome. Très tôt, ledestin de la capitale est étroitement lié à celui du pays, et lalégende de Brutus, régnant depuis Londres sur toute la Bretagne,s’allie à d’autres mythes** qui exaltent la monarchie anglaise. AuXVIe siècle, à la suite de l’insistance d’Henri VIII sur le caractère« impérial » de sa couronne, qui la rend autonome face à l’auto-rité de la Rome des papes, la légende de Brutus est reprise pourmagnifier cet « empire » anglais et pour justifier ses prétentions às’étendre à toute l’île (en particulier à l’Écosse)***. Londres se

* C’est d’ailleurs une origine mythique que Londres partage avec Paris.Jouant sur l’homonymie entre la capitale de Philippe Auguste et Pâris, hérosde Troie, le chroniqueur médiéval Rigord de Saint-Denis, dans sa GestaPhilippi Augusti (§37), souligne lui aussi l’origine illustre de la ville de Paris(H. François Delaborde, Œuvres de Rigord et de Guillaume le Breton,historiens de Philippe-Auguste, Tome premier : Chroniques de Rigord et deGuillaume le Breton, Paris, 1882, p. 54-55).

** Celui du roi Arthur, par exemple, qui aurait conquis Rome, donnant àla couronne britannique autant, voire plus de lustre que celle de l’Empireromain.

*** Dans An Epitome of the Title that the Kynges Majestie of Englandehath to the Sovereigntie of Scotlande (1548), Nicholas Bodrugan justifie par lalégende de Brutus son appel à une unification des deux royaumes de l’île sousla couronne anglaise. S’inspirant de Geoffroy de Monmouth, il raconte qu’à lamort de Brutus, « l’empire de Grande-Bretagne » est partagé entre ses troisfils. L’aîné hérite de l’Angleterre et son droit d’aînesse, dit Bodrugan, confèreà cette partie de l’île une supériorité sur les autres selon le droit troyen. On

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INTRODUCTION

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hisse donc déjà, avant l’heure, au rang de capitale d’un « empirebritannique ». La légende des origines troyennes de Londres alaissé une trace encore existante dans un mur de Cannon Street,dans la Cité : la pierre de Londres (London Stone), monolithemassif dont on ne voit que la pointe, serait l’œuvre de Brutus.En fait, la pierre de Londres est probablement d’origine

romaine. Peut-être marquait-elle le point à partir duquel onmesurait les distances dans la Bretagne conquise2. Ce sont lesRomains, en effet, qui sont les véritables fondateurs de la Cité,peut-être lors d’une première incursion éphémère en Bretagnepar Jules César, plus vraisemblablement lors de la conquête dela plus grande partie de l’île sous Claude, au milieu du premiersiècle de notre ère. Autour d’un premier pont sur la Tamise, lesRomains font de Londres (Londinium) le centre du réseau decommunications de la Bretagne romaine et sa principale inter-face commerciale avec le reste de l’Empire. C’est donc en tantque port marchand, au centre d’un réseau de routes, queLondres est d’abord fondé. Avec environ 30 000 habitants auxheures de son expansion maximale au début du IIe siècle, la villeromaine (la Cité, sur la rive nord, à laquelle il faut ajouter lefaubourg de Southwark, de l’autre côté du pont, sur la rive sud)possède un ensemble de bâtiments publics dont les archéo-logues ont retrouvé traces. En 61, Londres à peine sorti de terreconnaît le premier grand incendie de son histoire quand Bou-dicca, reine de tribus celtes d’East Anglia, conduit une révoltecontre les Romains et dévaste totalement la ville de l’occupant.Aussi, au cours du IIe siècle, est bâti un mur de défense autourde la Cité reconstruite. Avec la position de la ville au centre desvoies romaines, ce mur constitue ce que les Romains lèguent deplus durable à la postérité londonienne.

Avec le déclin de l’Empire romain, la ville tombe dans unepériode obscure, quelques générations après le retrait de l’admi-nistration impériale en Bretagne, au début du Ve siècle. Avec l’arri-vée de plus en plus massive d’envahisseurs germaniques, Saxons,Angles et Jutes, à partir du milieu du Ve siècle, la ville romaine se

rappelle que, si le pays de Galles avait été incorporé à l’Angleterre parHenri VIII quelques années plus tôt, l’Écosse et l’Angleterre, qui partagentle même souverain à partir de 1603, ne deviennent Royaume-Uni qu’en 1707.

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vide de ses habitants. Mais entre le VIIe et le IXe siècle, une intenseactivité commerciale a repris, non pas dans les murs mais à l’ouestde la cité fortifiée, établissant pour la première fois une zone urba-nisée entre la Cité et ce qui sera quelques siècles plus tardWestminster, autour du Strand actuel : Lundenwic. Sa surfacepermet de supposer qu’il a pu compter entre 5 000 et 10 000 habi-tants vers l’an 8003. La Cité intra-muros n’est plus tout à fait vide,néanmoins, car elle est devenue territoire de l’élite politique etreligieuse, abritant, au VIIe siècle, la résidence du roi saxon duKent et la cathédrale Saint-Paul nouvellement établie. Au milieudu IXe siècle, la ville souffre des premières incursions des Vikings,qui la contrôlent même pendant un temps. Quand Alfred, roi deWessex, leur reprend la ville, en 886, il inspire une nouvelle poli-tique défensive. La Cité romaine, à l’abri des fortifications, estréinvestie par la population et la zone du Strand est largementabandonnée. On peut parler d’une certaine refondation de Lon-dres. Au cours du Xe siècle, le territoire de la Cité fortifiée seréorganise, donnant naissance à la ville médiévale, nucleus histo-rique de la métropole actuelle. Par ailleurs, l’unification desroyaumes anglo-saxons, sous l’égide de la maison de Wessex, faitde Londres la capitale de ce qu’on peut désormais appelerl’Angleterre. Quand le pouvoir royal quitte la Cité pour s’installeràWestminster au XIe siècle, le dispositif géographique et politiquesur lequel la capitale anglaise a bâti son expansion est en place.

Même si c’est du IXe siècle qu’il faut dater la quasi-refondationde la Cité, c’est du moment où la cour la quitte qu’on peut vérita-blement commencer à parler de Londres, au sens moderne, aprèsle Londinium romain et le Lundenwic des premiers Saxons. Eneffet, c’est alors que la ville s’installe dans une dynamique, trèsparticulière et complexe, d’alliance méfiante avec un pouvoirroyal qui a fait de la ville sa capitale sans qu’elle soit sa résidence nimême le siège, à proprement parler, de son administration. C’est àWestminster, en effet, que celle-ci se développe et se sédentarise.Sans doute cela explique-t-il un décalage frappant entre Paris

et Londres : alors que la capitale française est sous le contrôleétroit de la monarchie, qui y a établi son administration et qui lafaçonne par divers grands projets urbains*, Londres est dans une

* L’épisode versaillais d’un peu plus d’un siècle compte peu au vu de

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position plus autonome par rapport au pouvoir politique natio-nal ; et alors que Paris concentre en ses murs les rôles de capitaleéconomique et politique, la cité de Londres est fondamentale-ment le pôle économique d’une région multipolaire dont le nomse confond, par commodité, avec celui de la Cité, et qui s’urba-nise progressivement. Le développement de la capitale anglaiseprend par conséquent un caractère beaucoup moins unitaire queParis, et Londres se laisse davantage façonner par les initiativeset les forces économiques éparses des individus et communautésqui composent sa société. C’est ce Londres-là dont ce livreretrace l’histoire, qui fait évoluer la ville d’une cité médiévaled’importance moyenne dans le monde de l’époque, loin derrièreParis, à la première grande métropole des temps modernes.

On peut diviser cette histoire en deux périodes majeures,autour d’une date charnière : celle du Grand Incendie de 1666.Celui-ci, qui détruit l’essentiel de la Cité historique, représenteune césure dans l’histoire de la ville, à un moment où la crois-sance à la fois géographique et démographique de Londress’accélère. À proprement parler, la métropole moderne naît descendres du Grand Incendie. Cependant, il ne faudrait pas sous-estimer le poids des périodes antérieures. C’est parce que Lon-dres, en négociation constante avec le pouvoir royal, construitlaborieusement sa prospérité économique et sa stabilité socialetout au long du Moyen Âge et de la Renaissance, que la ville esten mesure de profiter pleinement de l’ascension de la puissancecoloniale anglaise à partir du XVIIIe siècle.

L’étroite communauté de destin entre la capitale et l’aventureimpériale du royaume est frappante : Londres connaît une crois-sance démographique, géographique et économique qui semblene jamais devoir connaître de bornes jusqu’au jour où l’empirebritannique entre dans son crépuscule. Le XXe siècle est à biendes égards le siècle d’une transition pleine de contrastes pourLondres. Alors que la ville semble assurée de continuer toujourssur sa lancée impériale dans la première moitié du siècle, laSeconde Guerre mondiale, à l’instar du Grand Incendie de

l’influence quasi continue de la présence royale sur le développement de Parisdepuis la fin du XIIe siècle. D’ailleurs, les rois de France versaillais sont parmiceux qui imposent le plus leur marque à l’apparence de la ville.

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1666, vient opérer une nouvelle césure dans l’histoire de la ville.Non seulement Londres doit se reconstruire après des bombar-dements intensifs, mais la ville de l’après-guerre prend aussigraduellement conscience du fait que son nouveau paysagearchitectural doit être le théâtre d’une reconstruction sociale,économique, culturelle et politique. C’est toute la vocation deLondres qui est à réinventer.

En effet, alors que la décolonisation commence à partir de1947, avec l’indépendance de l’Inde, la ville doit bientôt s’adap-ter à un contexte de déclin économique et politique du royaumedans son ensemble. Une nouvelle époque, postcoloniale, a com-mencé pour Londres et sans doute est-il encore malaisé de ladéfinir. Le Royaume-Uni est aujourd’hui toujours en quêted’une identité qui ne sait si elle doit s’affirmer d’abord commeeuropéenne, comme il convient à un pays membre de l’Unioneuropéenne, ou comme anglo-saxonne, comme il convient aupartenaire privilégié des États-Unis et à la mère patrie historiquede pays tels que le Canada, l’Australie ou la Nouvelle-Zélande.De même, Londres s’essaie à construire une nouvelle identité. Laville a certes conservé une stature mondiale pour son capitalismefinancier, qu’on qualifie volontiers d’anglo-saxon, pour son rôleculturel aussi, notamment par sa capacité à lancer des modesassociées à la musique populaire britannique. Mais sur les autresplans, démographique, industriel et portuaire, pour ne citerqu’eux, Londres n’est qu’une ville parmi d’autres, participantd’un grand pôle régional d’Europe du Nord-Ouest dans lequelelle n’a pas de prééminence particulière. Comme le royaume,Londres est partagé entre une identité héritée de son statutimpérial et celle qui s’attache à son nouveau positionnementdans un ensemble européen. Cependant, la capacité d’adapta-tion, autant aux crises épisodiques qu’aux bouleversements defond, que la ville a démontrée pendant toute son histoire, estplutôt de bon augure. Le grand atout de Londres est l’héritagequ’il peut revendiquer d’une audace urbaine qui, nourrie de lasomme conflictuelle d’initiatives multiples et souvent fragmen-tées, faisant feu du bois de la tradition comme de la modernité,est prête à s’engager sans état d’âme sur des chemins nouveauxquand sa prospérité est à ce prix.

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