hebreos católicos: paul drach - la armonía entre la iglesia y la sinagoga (volumen 2)

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  NTR L ÉGLISE  ET LA SYNAGOGUE, ou JJJerpetuité et  < at\)olmté  îre la Heltgfan eljrettenne; PAU lie Chevalier P.  T A .  B .  I>K4CIf. Docteur en philosophie et es lettres, De l Académie pontificale de Religion catholique, de celle des Arcadiens , de la Société asiatique de Paris, de la Société Foi et Lumière de Nancy, etc . ; Membre de la Légion d honneur, de Saint-Grégoire le Grand, de  Saint-L ouis, Mérite civil de Lucques, se classe, de Saint-Sylvestre, etc.; Bibliothécaire hon™ de la S. Congrégation d elà Propagande. In hac enim Jîde) tesiimonium consecutt snnt senes. C est  par la foi que les anciens patriarches ont obtenu un bon témoignage.  HEBR.,  X I, 2. TOME SECOND, CONTENANT I, L EXPLICATION DE LA PROPHETIE D iSAIE (vil, 14) CONCERNANT LA MATER NITE MIRACULEUSE DE LA TRES-SAINTE VIERGE MARIE. 2 ,  LES PREUVES DE LA DIVINITE DU MESSIE TIREES DES TRADITIONS ANCIENNES. Paul Mellier. Libraire-Éditeur, PLACE SAINT-ANDRÉ DES  ARTS 11 ; ADRIEN LE CLERE, ET  G , Imprimeurs de N. S. P. le Pape et de Mgr l Archevêque de Paris, RUE CASSETTE,  2 9 ,  PRÈS SAINT-SULPICE, 1 4 1.

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David Paul Drach fue un rabino talmúdico francés converso al cristianismo católico en 1824. Su trabajo inauguró la era moderna de los Hebreos Católicos.

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ENTRE

L'GLISE ET LA SYNAGOGUE,ou

JJJerpetuit et K4CIf.

Docteur en philosophie et es lettres, De l'Acadmie pontificale de Religion catholique, de celle des Arcadiens , de la Socit asiatique de Paris, de la Socit Foi et Lumire de Nancy, etc. ; Membre de la Lgion d'honneur, de Saint-Grgoire le Grand, de Saint-Louis, Mrite civil de Lucques, se classe, de Saint-Sylvestre, etc.; Bibliothcaire hon de la S. Congrgation del Propagande.In hac enim (Jde) tesiimonium consecutt snnt senes.C'est par la foi que les anciens patriarches ont obtenu un bon tmoignage. H E B R . , X I , 2.

TOME SECOND,CONTENANT I, L'EXPLICATION DE LA PROPHETIE D'iSAIE ( v i l , 14) CONCERNANT L A MATERNITE MIRACULEUSE DE LA TRES-SAINTE VIERGE MARIE. 2, LES PREUVES DE LA DIVINITE DU MESSIE TIREES DES TRADITIONS A N C I E N N E S .

Paul Mellier. Libraire-diteur,PLACE SAINT-ANDR DES ARTS, 11 ;

ADRIEN

LE C L E R E ,

ET G,

Imprimeurs de N. S. P. le Pape et de Mgr l'Archevque de P a r i s ,RUE CASSETTE, 2 9 , PRS SAINT-SULPICE,

1*41.

Biblio

que Saint Librehttp://www.liberius.net

Bibliothque Saint Libre 2007. Toute reproduction but non lucratif est autorise.

DE L'HARMONIEENTRE

L'GLISE ET LA SYNAGOGUE.

SAJNT-CLOUD. IMPRIMERIE DE BELIN-MANCAR.

ENTRE

L'GLISE ET LA SYNAGOGUE,ou

JJJerpetuit et K4CIf.

Docteur en philosophie et es lettres, De l'Acadmie pontificale de Religion catholique, de celle des Arcadiens , de la Socit asiatique de Paris, de la Socit Foi et Lumire de Nancy, etc. ; Membre de la Lgion d'honneur, de Saint-Grgoire le Grand, de Saint-Louis, Mrite civil de Lucques, se classe, de Saint-Sylvestre, etc.; Bibliothcaire hon de la S. Congrgation del Propagande.In hac enim (Jde) tesiimonium consecutt snnt senes.C'est par la foi que les anciens patriarches ont obtenu un bon tmoignage. H E B R . , X I , 2.

TOME SECOND,CONTENANT I, L'EXPLICATION DE LA PROPHETIE D'iSAIE ( v i l , 14) CONCERNANT L A MATERNITE MIRACULEUSE DE LA TRES-SAINTE VIERGE MARIE. 2, LES PREUVES DE LA DIVINITE DU MESSIE TIREES DES TRADITIONS A N C I E N N E S .

Paul Mellier. Libraire-diteur,PLACE SAINT-ANDR DES ARTS, 11 ;

ADRIEN

LE C L E R E ,

ET G,

Imprimeurs de N. S. P. le Pape et de Mgr l'Archevque de P a r i s ,RUE CASSETTE, 2 9 , PRS SAINT-SULPICE,

1*41.

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nvr TOUTES LETTRES. INTERPRETATION.

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D"NN 4"K Y'rna ifrm

Mon seigneur pre (M. m o n pre). Pas possible. Si ce n'est q u e , moins que. Evangile. Adam, le premier homme. Lesnationsdumonde,c.--d., les infidles.

(*) On a plusieurs dictionnaires des abrviations hbraques, c'est--dire, des sigles dont les rabbins font un si frquent usage. Ils les appellent iy)m n*QT\> initiales des mots. Depuis le Liber novus et copiosas de Jbbrevia** hiris hebraicis de Buxtorf, d'rudits lexicographes ont ajout un grand nombre de mots aux listes qui avaient t formes avant eux. Le clbre Philippe d'Aquin, rabbin converti et professeur d'hbreu au collge de France, est l'un des principaux qui ont enrichi cette matire. Mais ce que nous possdons maintenant de plus complet en ce genre, c'est le Lexicon abbreviaturarum qn in Hebrorum scriptis passim occurrunt, du savant et estimable Abb J. T. Beelen, professeur des langues orientales l'universit catholique de Louvain. Ce travail couronne dignement son intressante Chrestomathia rabbinica et chaldaica, dont nous avons dj parl dans la prface du tome i e r , et que nous ne saurions trop recommander ceux qui veulent se familiariser avec la langue rabbinique. Le profond orientaliste de Louvain a trouv ajouter des centaines de ces mots au travail dj si consciencieux de G. Selig, Compendia vocum, etc., Lipsiae, 1780, in-S. Toutefois le lexicon mme de M. l'Abb Beelen laisse encore quelque chose dsirer. Nous avons remarqu qu'il y manque plusieurs des abrviations dont nous donnons ici la liste, qui est pourtant bien courte. Nous ne passerons pas sous silence une circonstance qui fait Tloge du zle de l'auteur et son dvouement pour la science, c'est qu'aprsavoir fait imprimer son lexicon, il y a ajout un spicileghim trs-copieux.

VIIISIGLE. EN

EXPLICATIONTOUTES LETTRES. INTERPRETATION.

i'nx:>"rm3"N

V'N X'WS"jW VKV'IN W"H

Le mme que i"mK p inw Aprs cela, ensuite. p DK Si c'est ainsi. ib TON Il lui dit. /Bien que, malgr que. (A la M Sv *]N \ lettre, Le nez sur le dos, le>3D h y *]N j

nez sur la bouche; c a s i m -

W TON , ai TON

possibles.) Rab, ou Rabbi, a dit. m w m TON Rabbi Juda a dit. bxVX TON Samuel a dit.LETTRE i.

\

N"2

DTK p OU DTN m

3"3 'D3

P" 313

Homme ou hommes. (A la lettre, Enfant ou enfants d'Adam.) I ^ D U m n m Bientt de nos jours. 12D3 Dans le livre. NIJDp 13 Le fils de Kappara (docteur talmudique). rWNia Gense.LETTl * J.

3J

'c;

p DJ NTOJ

D1D2S TOV!

1? V

Aussi. Ghemara, partie du texte talmudique. Paradis. Trois fois.

LETTRE 7.

N'T

V 1 K T1"7>NTOtf TON1^NTT

L'usage ordinaire ( littr. lavoie de la terre). Car Samuel a dit. C'est--dire.

DES ABRVIATIONS HEBRAQUES. LETTRE H.SIGLE. EN TOUTES LETTRES. INTERPRETATION.

IX

|vnn rrapn V'tpn

C'est ce qui est crit (dans la . Bible). ain -pin npn Le Saint, bni soit-il (Dieu). T * 3 ^ D ^ n Le Nom, qu'il soit bni (Dieu).LETTRE 1.

a w r *on mn

"lin

irnai'1DT

Y'jn "W

Et caetera (JVbfa.Cette formule n'esi usite que pour le texte de la Bible). 1Q1K Kin p i Et c'est ainsi qu'il dit. bm Et caetera {Nota.Cette formule s'emploie pour tout texte qui n'est pas de la Bible). NI Ssn Et pour cela. mis Et le sens en est.1DWLETTRE 7.

S"7

nrnab l a W

Sa mmoire soit en bndiction.

LETTRE n

K"an

D n o i a D^DZin Les Sages (Docteurs du Talmud) disent.LETTRE \

H"i l"rp

vi Tsw K"3 J"3

DnoiK W Quelques-uns disent. Vin iar^ Le dmon qui tente les hommes, cherchant les porter au mal. Voyez t. n, p. 342. mm Jhova. Le mme que 'niLETTRE 3.

DK io Mais. S Y U p a Souverain Pontife.

XSIGLE. EN

EXPLICATIONTOUTES LETTRES. NTERrRETTION.

"iSa D"3 tf'D3

"iDlS:> rra ho n i n w 1D IBMtD 1QD

Ce qui est dire. Tout ce que. Ainsi qu'il est crit. Ainsi qu'il est dit.

LETTRE S

p"nS 3"V S'y1? "sb

ttnpn i w S La langue sainte (l'hbreu). p >*b Pas ainsi. Job Tnvb Au temps avenir. Vovez t. i er , p. 554. ttnTsb Selon l'explication.LETTRE D

T'a rrrirr ^Nn o"no nn&on "jba tf'fflD n w n ^NSD n"nn D ^ n i ^ O T n T O

Que veut dire ce qui est crit? Le Roi-Messie. Les Anges du service. Mose notre matre, que la paix soit sur lui.il me semble.

LETTRE 3.

Va

*b nma

LETTRE D.

TDD

b i n rrtD 1DD

Le grand livre des prceptes.

LETTRE V,

n"yn"ny

iy

rny vy3"3T

n4 by Db^n vby *on aSnv mn obiy IV by p byUX ^ y

Sur. La paix soit sur lui. Le sicle venir, } Voy. t. Ier, Le sicle prsent. ) p. 554. Par. C'est pourquoi,Voyez-y.

tzfy'9H"S)

LETTRE 2

pis *]ba p i s

Chapitre. Chapitre premier.

DES

ABRVIATIONSH ~ B R A ~ Q U E S .LETTRE

XI

P.IX~~ERPR~TATION.

SIGLE.

E N TOCTES LETTRES.

N l q l l a "lUr71p

Le Saint bni soit-il.

LETTRE 1 ,

Rab ou Rabbi., Rabbi Eliser. w'lpn nl1 L'Esprit-Saint. n'lin? r a i Rabbi Juda. ?.Dlr Rabbi Jos. p n ~r ? i Rabbi Isaac. a ~ N Y C V r a i Rabbi bm:iel. ? 9 5 ?n Rabbi L6vi. 1 wip5 la? Rabbi Lakisch. ~ 7 7 U r i Kescli Lakisch. 5 l n 1 rJlY1 Je veux dire. 7215 nui? Cela veut dire. iljija 13 n?ainj?n Rabbi Nelihunia ben-IIaliIin. l i y n r r a i Rabbi Simon. niarn ?UNY Initiales des mots. Nninan ? a l Rabbi Thanhhuma.731 ou 31 I I S Y ~ Nl a i

4

-

LETTRE W.

Car s'il n'en tait pas ainsi. No111 bfni (Dieu). Car il est dit. in15 nnw Ii veut dire.13 N/ DNV

3ianr

DW inN>w

n"n 5"n i'n

?SR Nn

Viens (et) considbre.

in15

'lin/n L'Ecriturc noiis enseigne. ijn Lcs Docieurs ont enseign.

AVANT-PROPOS.

Des deux parties dont se compose le prsent volume, la premire, qui traite de la maternit miraculeuse de la plus pure des vierges, a t imprime Rome en 1833, par ordre de SA SAINTET, Timprimerie de la Sacre Congrgation de la Propagande, sous le titre : Troisime Lettre d'un rabbin converti aux Isralites ses frres. Elle avait t examine par un des plus grands thologiens de la capitale du inonde chrtien, S. Em. Mgr le cardinal Orioli, alors Rgent du collge de St-Bonaventure, d'o sont sortis tant de savants qui font la gloire de nilustre Ordre des Mineurs Conventuels. Dans la prsente dition nous y avons fait des changements notables, et nous l'avons augmente d'un grand nombre de chapitres nouveaux. Nous soumettons les uns et les autres, avec toute la dfrence d'un enfant fidle, l'infaillible jugement du Saint-Sige. La seconde partie, qui traite de la divinit du Messie, NotreSeigneur Jsus-Christ, prouve par la tradition de la Synagogue, avait dj paru dans notre Deuxime Lettre aux Isralites publie Paris en 1828. Nous la donnons ici entirement refondue ; mais nous avons cru n'y devoir rien changer quant au fond, parce que, conjointement avec la Premire Lettre, qui l'avait prcde de trois ans, elle a t revtue Rome du nihil obstat du mme thologien, Mgr Orioli, et du publicetur du Rvrendissime Matre de sacr Palais, le P.Velzi, de pieuse mmoire, qui a t depuis Cardinal et Archevque de Montefiascone. La mme deuxime lettre renfermait le Trait de la doctrine de la Trs-Sainte Trinit, auquel nous venons de donner plus d'extension dans le tome ier de notre Harmonie entre l'Eglise et la Synagogue. Ce tome ier de Y Harmonie a t honor d'augustes encou-

XL V

AVANT-PROPOS.

ragements, ainsi que cles suffrages les plus flatteurs de la part de plusieurs personnages cminents en doctrine et haut placs dans l'ordre Iiirarcliiqiie de 1'Eglise , dont des membres du SacrCollge; et In Propagaiiclea daign en autoriser un dp6t dans sa propre librairie. Il a dj t cit avec loge par des crivains ecclsiastiques de qui le nom est cher la religion (4).. . L'Ami de la religion et d'autres jouiwaux religieux, tant en France qu'en Italie, en ont rendu un compte trs-favoral~le. Les lettres si bienveillantes qui nous ont t adresses de Rome l'occasion de cette publication, exprimaient le dsir d'en voir bientbt paratre la suite, et nous engageaient persvrer dans nos iravaux pour la plus grande gloire de Dieu. Rfalheureuseinent des circonstances imprvues en ont retard la publication.(1) Nous nommerons particuliremeiit M. l'abb J. Caume, grand vicaire du diocse de Nevers, qui a bien voulu mentionner lionorablement notre Harmonie dans son rcent ouvrage : Influence d u Christianisme sur la famille. Nous nous faisons un devoir d e rendre hommage publiquement a u x qualits wtimables do M. l'abb Claire, Doyen de la facult de thologie de l'Acadmie de Paris, e t de reconnatre que, par la publication de son excellent dietionnnire hbreu, de sa grammaire hbraique et de sa savante introduction I'Ecriture aaiute, il s r e n d u des services minents aux tudes bibliques et a u x lettres hbraques. A l'article de son dictionnaire, le respectable e t dncte professeur dit : i< Digne sunt ut legantur q u a d e his fuse et erudite disputavit Dii. Drach iii Troisime Lettre d'un rabbin conuerti, etc. Rome, 1833, in-80. 1) Dans un billet qu'il nous fit l'honneur d e nous adresier le a dcembre pass, il voulut bien terminer par ces mots : u En mme temps que je lui tPmoigw m a reconnaissance pour le plaisir que j'prouve la lecture de son Harmonie. n Nous sommes reconnaissant notre tour de ce suffrage flatteur que noua simons P joindre 3 ceux du plus grand poids dont notre livre a t honore en Italie.

iln5~

NOTICESUR LA

CABALE DES HBREUX.Judi quorum nos succcssores ac posteri sumus. Lactant. de Just., 1. v.

I. Cabale, nom hbreu, lblp, signifie enseignement, doctrine qu'on reoit, c'est--dire, admet, sans examen, avec une foi entire, d'une autorit digne de toute notre confiance. Ce terme rpond exactement acceptio en latin, et ixoScyi en grec (1). Il vient du verbe bip la deuxime forme de conjugaison, appele piely qui signifie recevoir, et s'applique celui qui Dieu rvle une vrit, ou bien au disciple qui reoit de son maitre une doctrine quelconque. Son verbe corrlatif, qui s'applique au matre, est "1DD, livrer, d'o a t form le substantif e s s o r e ou Massorah. Ainsi la premire mischna du trait bot du Talmud dit : a Mose reut, b i p , la loi sur le Sina, et la livra, mDDI, Josu. Itaque cabalam, dit Cunaeus, non cum vulgo eam dico quam alii aliis tradidere, sed quam clitus acceperunt viri sancti, est enim nSap acceptio. De Rep. Hebr. 1. i n , c. vin. II. Il importe d'avertir que dans les livres des rabbins letevmeCabale est employ dans trois significations diffrentes. Faute d'avoir su distinguer ces sens divers, plusieurs savants sont tombs dans des mprises singulires. 1. Le Talmud appelle souvent Cabale tous les livres du Vieux Testament autres que le Pentaleuque. Il rpte en plusieurs endroits ce principe : On ne doit pas expliquer un texte du Pentaleuque par un texte de la Cabale pour en tirer une obligation lgale : m*in "HX J^Si N S nSap m i D . Dans le trait de Baba kamma, fol. 2 verso, {. Sal. Yarhhi fait cette glose; Texte de la Cabale, c'est--dire les

(l) Voyez notre prface, page xi.

XVI

NOTICE SUR LA CABALE

prophtesetleslivreshagiographes. DO)PD) 0*f3} p3^p >"?J7. C'est dans ce sens que Mamonides dit dans son trait de l'tude de la loi, chap. T, 12 : Et le texte de la Cabale fait partie de la loi crite, mais son interprtation appartient la loi orale, la tradition. )*)}"])

w> ij?^D wp }}:>:> \CWSJ JJJWD pwii:>j pjjp.2. Les rabbins appellent aussi Cabale cette partie de la tradition que dans notre prface, p. x , nous avons qualifie de lgale ou talmudique. Les matres de la Cabale, rnupn IJWD.* veut dire, les doc* leurs talmud iques.Y oyez Carpzovius, Introd. in theol. judaic, c. ni, 7. Mamonides, dans son commentaire sur le trait Abot, chap. i,dit que les chefs de chacune des sectes que les docteurs de la Synagogue ont dsigns sous le nom de Sadducens et de Balusens, et que dans nos contres de l'Egypte, dit-il, on appelle Carales, que ces chefs , disons-nous, dclaraient qu'ils admettaient lePentateuque et rejetaient la Cabale comme une loi fausse, ta pi)P) WP2 \'Pf>P frPD P^ppf* P ^ f a p3jJpP- Or, l'hrsie caratique, vritable protestantisme de la Synagogue, consiste rejeter le Talmud et n'admettre que la lettre nue du texte mosaque, texte que chaque carate peut interprtera sa guise, comme bon lui semble; Luther n'avait qu' prendre l son libre examen (1). 5. Communment on entend par ce terme la Cabale par excellence, c'est--dire la partie mystrieuse, sotrique, acroamatique de la. tradition orale (2). Joseph de Voisin en traitant de cette Cabale dit trsbien : Et si vero totum Talmud Kabala dicatur, hc tamen pars xa-c' ifyyrw vocatur Kabala. Observ. inprom. Pugionis fidei. La Cabale, prise en ce sens, est aussi appele : science divine, philosophie divine, thologie spculative. Sa partie thurgiqueetgotique, connue sous le nom de Cabale pratique, est souvent qualifie de mdecine. Nous citerons un exemple des mprises auxquelles a donn lieu la confusion de ces trois acceptions du mme terme. Buxtorf, l'article roap de son Lexicon rabbinique, dit que David Kimhhi exalte la Cabale mystrieuse dans l'introduction de son commentaire sur le psaume cxix(sel. l'hb.), et que le Talmud, trait Rosch-Hasschana, fol. 19 recto, accorde la Cabale la mme autorit qu'au texte des(1) Bien longtemps avant la soi-disant rforme, les rabbins ont dmontr, comme plus tard Bossuet, que le libre examen est un dissolvant de la religion rvle , et qu'il introduit non-seulement autant de croyances presque qu'il y a d'individus dans la secte qui admet ce principe, mais que les individus mmes doivent continuellement modifier leur foi, qui ne reaemble pat le lendemain ce qu'elle tait la veille. Voyea notre trait du Divorce dans la Synagogue, pages 197, 198. (1) Voyez notre prface, pages x, xi.

DES HBREUX.

XVH

livres de Mose. Voil ce que Buxtorf affirme; mais rien de plus inexact. En cet endroit du Talmud il n'est pas le moins du monde question de la Cabale proprement dite, mais du pouvoir spirituel de la Synagogue, puisque toute la discussion roule sur le plus ou le moins de solennit d'une fte , celle du trois de Thischri, institue par ce pouvoir. Le Talmud dcide la question en rappelant que les institutions de l'autorit spirituelle de la Synagogue, institutions, qu'il appelle ici CABALE, galent celles de la loi crite de Mose. nS^p "HT? 1OT m i n m ^ nblp n m Mil. Quant l'introduction de Kimhhi, il suffit de prendre lecture de ce morceau pour s'assurer que le rabbin n'entend parler que de la tradition talmudique , et qu'il emploie le terme Cabale dans le second sens que nous avons indiqu plus haut. Il est une connaissance, dit-il, qui ne dpend pas de la science humaine, et qui n'attend pas les preuves du raisonnement logique, mais elle est de sa nature une colonne grande et solide pour tout fidle. Telle est la tradition (Cv,2pP , la Cabale), en laquelle nous devons avoir une foi absolue. Par elle nous croyons fermement, nous sommes intimement persuades que Mose notre matre, que la paix soit sur lui, a crit le Pentateuque sous la dicle de Dieu, bni soit-il; que Dieu a tir l'univers du nant, qu'il l'a cr en six jours, etc. Les faits annoncs par cette Cabale (qui ne voit qu'il no s'agit pas ici de la science cabalistique?) sont constants pour nous, enracins dans nos curs, comme si nos yeux et nos oreilles en avaient t tmoins, comme si notre raison les prouvait matriellement, et mieux encore; car souvent nos sens nous trompent, notre raisonnement s'gare ou porte sur des principes errons (1).

J.3DP ]>f VP2PV WP tt'D 7P ipi 7|ScO) (i) 'IV loi pfP ~>PP) i)7J DP2 frPD tkf> VbS WP WD Jo ta P J jntfpj nf> p P D ptapp f>w VWP 2P2 P"jnp \? ws>teh pws) >.P)&M:> ppf>s PJ> PP vhp?) olw? i>)VP) y)*5 ii^p >J>P wp?

)$P\j) );>;u? if>i ibfo wpizh vvpp w P;O: DWP .PJSJDPP o V)) >: : & p'ta P7)P) nwf> }> 077 yfos o>p$sb oib vw itaw oj) o'jwpJ .}f> onw &P21P?Nous ajouterions ici, s'il n'tait pas trop long , le beau chapitre xnv* de la section ve du livre ikkarim de Joseph Albo. Ce rabbin y traite avec un talent remarquable de l'authenticit de la tradition que dans tout le cours du chapitre il appelle Cabale. Dieu, dit-il, ne saurait se tromper ni vouloir tromper quelqu'un. Il a rvl la vrit des hommes de choix, sans doute capables de comprendre ses paroles selon le sens qu'il y attachait ; et les pres qui ont transm" s cette Cabale (tradition) leurs enfants n'ont pas pu avoir l'intention de leur enseigner l'erreur.

XVIII

NOTICE

SUR L A

CABALE

Il va sans dire que la faute de Buxtorf a t rpte jusqu' satit par cette foule de savants qui se copient aveuglment les uns les autres. La plupart se gardent bien de nommer le clbre professeur de Ble, afin de laisser croire au lecteur que ces deux citations appartiennent au fonds de leur propre rudition hbraque. Dans ce larcin, ils sont aussi avancs que le lilou qui, ayant russi tirer la montre un Gascon, se trouva l'heureux possesseur d'une balle aplatie. Le passage de Mamonides du trait de l'tude de la loi, que nous avons cit plus haut, a t galement mal entendu, et, contre la suite du texte de l'auteur, on l'a appliqu la Cabale mystique. 1 er . Une contradiction frappante arrte ds les premiers pas celui qui se livre des tudes sur la Cabale hbraque. Des Pres de l'Eglise, des thologiens et des savants, tant parmi les catholiques que parmi les protestants, parlent de cette science avec honneur, et en retrouvent des traces dans le texte sacr du Nouveau Testament, particulirement dans l'Apocalypse, dans les livres apocryphes qui sont recommands comme une leclure pieuse et utile, dans les plus anciens crivains ecclsiastiques. D'un autre ct, le seul nom de la Cabale inspire, mme des hommes d'esprit et de savoir, nous ne savons quel sentiment d'effroi ml d'horreur. Plus d'une fois nous-muie en avons t tmoin , et Pic de la Mirandole atteste qu'il en tait ainsi dj de son temps (I). Des thologiens, des commentateurs de l'Ecriture et d'autres savants prtendent qu'en certains endroits de ses Eptres, saint Paul rprouve la Cabale des juifs. La S. Congrgation du SaintOffice de Rome l'a formellement condamne. Enfin, un auteur protestant, l'exemple de l'amnit du chef de sa secte, va jusqu' l'envoyer au diable avec ses inventeurs (2). Pour expliquer cette antilogie, il faut faire deux parts bien tranches del science cabalistique. 1. La Cabale vraie et sans mlange, qui s'enseignait dans l'ancienne Synagogue et dont le caractre est franchement chrtien, ainsi qu'on le verra plus loin. 2. La Cabale fausse, pleine de superstitions ridicules et en outre s'occupant de magie, de thurgie, de gotie : en un mot, telle qu'elle est(i) Dans son Apologie, Pic s'exprime en ces termes : Horrendum istis patribus (il parle des adversaires de ses fameuses thses) vdetur hoc nomen, et ex ipso pne sono timendum, ita ut forte sint ex ipsis qui kabalistas non hommes, sed hircocervos potius , vel centaurum, vel omnino roonstruosum aliquid esse suspicentur. Quin imo, audi rem ridiculam, cum quidam semel ex eis interrogaretur, quid esset ista Kabala ? Respondit ille, fuisse perftdum quemdam hominem, et diabolicum qui dictus Kabala, et hune multa contra Christum scripsisse : inde sequaces dictos kabalistas. (2) Ad Orcum cum auctoribus suis relegauda. Pfeiffer, Critica sacra, cap. vu, sect. H, Q. ii.

DES HBREUX.

XIX

devenue entre les mains des docteurs cabalistes de la Synagogue infidle qui a fait divorce avec ses propres principes. Bonfrerius et Sixte de Sienne, comme aussi un grand nombre d'autres crivains d'un haut mrit, tablissent cette distinction de la bonne et de la mauvaise Cabale : Carpzovius, Pfeiffer, Wolfius, Glassius, Walther, Cunaeus , Buddeus, etc. Christiani, dit Holtinger, ut plurimum, inter Kabbalam vcram i-l falsam distinguunt. Ths, philol., sect. V, p. 445. C'est donc avec raison que le P. Bonfrerius dit : PassimCabala et cabalist apud catholicos maie audiunt; quam recte, oslendent qu dicturi sumus scquentia : saepe enim fit ut quod bonum et probum est, ob affine maie repudietur, utque virtus-, si nomen commune cum vitio sortiatur, ipsa hujus fditate adspersa censcatur ; quod in hac materia plane accidit, ut, ob impiam infamenique Cabalam, honesta puraque dabala infamiam pateretur. Res igitur tota hc ex bona distinctione pendet. Sixte de Sienne, isralite converti et dominicain fort savant et estim du pape Pie V, son protecteur, crivait prcisment l'poque o fut rendu le dcret de la sacre Congrgation du Saint-Office, dont nous avons parl. Il tait parfaitement en position de connatre l'intention del sacre Congrgation. Voici comment il s'explique : Caeterum, quia ex decrelo S. Roman Inquisitionis omnes libri, ad Kabalam pertinentes, nuper damnati sunt, sciendum est, duplicem esse Kabalam, alteram. veram, alteram falsam. Vera et yia est, qu, ut jam diximus, arcana sacrae legis mysteria juxta anagogen lucidt. Hanc ergo nunquam damiiavit Ecclcsia. Fasa atque inipia Kabala estementitum quoddam judaica? tradilionis genus, innumeris vanitatibus ac falsitatibus refcrlum, nihilaut parum a necromantia distans. Hoc igitur superslitionis genus, Kabalam improprie appcllatnm, Ecclesia proximis annis merito damnavit. H. I. Tout concourt prouver, ainsi que nous l'avons dit dans la prface, pages xi et suivantes, qu'une notable partie de la tradition dont le dpt tait confi la Synagogue ancienne, consistait dans les explications mystiques, allgoriques et anagogiques du texte de l'Ecriture; en d'autres termes, tout ce que la tradition enseignait touchant la mtaphysique sacre, le monde spirituel, le rapport de celui-ci avec le monde matriel; elle l'enseignait d'autorit ou le rattachait au texte inspir. Cette doctrine orale, qui est la Cabale, avait pour objet les plus sublimes vrits de la foi, quelle ramenait sans cesse au Rdempteur promis, fondement de toute l'conomie de la religion ancienne. La nature de Dieu et des esprits crs, l'origine et la destination du monde infrieur, c'est--dire ma-

XX

NOTICE SUR LA CABALE

lriel, la signification mystique de tous les faits, de toutes les observances religieuses et de toutes les prophties du Vieux Testament. Si saint Pierre, le premier chef de l'Eglise, comme vicaire de JsusChrist, dit au ccntenier Corneille que tous les prophtes rendent tmoignage Notre-Seigneur, huic omtes prophel lestimonium perhibeni (Act., x, 45), les docteurs hbreux leur tour n'ont cess de proclamer que le Messie tait l'objet final de toutes les prdictions des voyants d'Isral. Voyez dans ce tome il, p. 18. Leges mosaicas ceremoniales, dit Budd, reconditos habuisse sensus non puto quisquam negabit, nisi forte Spenceri aut Marshami (ajoutez aussi Salvador) politicas rationes subslitucntium, fabulis, adhibere fidem velit. II. Il y a cette diffrence entre le Talmud et la Cabale, bien qu'ils se touchent sans qu'il soit facile d'assigner entre eux des limites prcises, et que souvent ils se confondent; le premier se borne gnralement ce qui concerne la pratique extrieure, l'excution matrielle de la loi mosaque ; la seconde, comme thologie spculative, mystique, s'empare de la partie spirituelle de la religion, et rsout les problmes les plus redoutables de la mtaphysique sacre. Manass-ben-Isral cite un exemple de cette diffrence. Le texte du Deulronome, vi, 8, prescrit de porter des Tolaphot, nSOta, entre les yeux. Le Talmud explique que ces Tolaphot sont les phylactres; il enseigne en dtail de quoi se doivent composer les phylactres, la manire de les confectionner, enfin l'endroit prcis de la tte o il faut les appliquer. Si la moindre de ces choses n'est pas observe, on n'a pas satisfait l'obligation de la loi. Ici se borne la mission du Talmud, appel l'me de la loi, et il cde la place la Cabale, qui est comme lame de l'me de la loi. Celle-ci se charge d'expliquer l'intention mystique du phylactre et de chacune de ses parties. Nous citerons particulirement la lettre schn que cet ornement porte en relief sous deux figures, savoir, trois ttes, W et quatre ttes. Nous avons dj vu au tome Ier, page 405, que d'aprs la Cabale la premire forme indiquait le mystre de la Trs-Sainte Trinit, et la seconde forme, le mme mystre avec l'Incarnation de la deuxime hypostase divine. A ce compte les phylactres taient vritablement l'abrg de toute la religion : Dieu et la Rdemption. C'est pourquoi le texte dit dans le mme verset : Et ligabiseagua*i"^numinmanutua(l). III. La Cabale, qu'on peut appeler l philosophie des Hbreux, lorsqu'elle tait encore dans toute sa puret, avait cela de particulier, qu'elle donnait ces notions sublimes auxquelles n'ont jamais pu arriver les plus profonds gnies parmi les philosophes paens privs du(1) Prtende (la Kabala) investigar la causa del, y saber que es lo que reprsentai! y significan todas aqnellas cosas, que mysterio encierran aquellas, dos letras ifl sein, una de trs puntas y otra de 4 ?... Y para esto sirve la Kabal que d la razon a todo, y aqsi sellama, Aima del Aima. Conciliador., Q. cxxv, p. 251 de Td. espagnole.

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secours de la rvlation. La raison humaine parlant des faits sensibles trouvera toujours hors de sa sphre la connaissance qui est pour l'homme Tunique ncessaire, unum necessarium (Marc, x , 42); savoir : 1 la nature de Dieu ; 2 les rapports de Dieu avec la crature ; 3 les obligations de l'homme envers Dieu. A ce point de vue les Hbreux avaient un avantage immense sur les sages de toutes les autres nations. Dans le Zohar, m e partie, fol. 72, col. 288, Rabbi Simon-benYohha dclare que la supriorit de la loi sainte n'est due qu' son sens cabalistique ; car, ajoute-t-il, s'il fallait s'en tenir l'corce de la lettre, encore maintenant nous pourrions crire un livre pareil, et mme un meilleur (1). Si le rabbin a raison de faire grand cas du sens spirituel, il va trop loin en dprciant le mrite intrinsque de la simple lettre des livres de Mose. IH. I. Les Docteurs de la Synagogue enseignent d'une commune voix que le sens cach de l'Ecriture fut rvl sur le Sina Mose, qui initia cette connaissance Josu et ses autres disciples intimes; que cet enseignement occulte se transmettait ensuite oralement de gnration en gnration, sans qu'il fut permis de le mettre par crit. On sait que mme les autres nations anciennes de l'Orient avaient l'usage de n'enseigner que de vive voix les doctrines secrtes ou d'un ordre relev, et de ne pas les confier lgrement l'criture (2). Dans les premiers sicles de l'Eglise r les Pres usaient aussi d'une sage rserve quand ils parlaient ceux qui n'taient pas initis nos saints mystres. Au retour de la captivit de Babylone, Esdras voyant que les calamits de la nation pouvaient amener un jour l'oubli entier de la tradition cabalistique, parce qu'on ne devait la confier qu' des adeptes remplissant certaines conditions par leurs qualits personnelles et par leur ge, consigna cette tradition, par l'ordre de Dieu, dans soixante-dix volumes. Mais ces livres n'taient pas rendus publics. Le prophte eut ordre de les mettre entre les mains des sages

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(i) Platon crivit Deuys, roi de Syracuse : Tu dis que je ne t'ai pas expliqu assez clairement la nature du premier principe. Il fallait bien te parler d'une manire nigmatique, afin que si quelque accident tait arriv ma lettre, sur terre ou sur mer, celui qui en aurait pris lecture ne pt pas la comprendre. yj$ yp Ttpcrou f7Sco. 4>paor? TTO'VTOU YJ '/?)? y va. Epist. n, t. >in, p. 118, des classiques grecs de Leipzig.

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du peuple en qui tait une source d'intelligence, une fontaine de sagesse et un fleuve de science (1). II. Ce dernier fait se lit dans un livre qui est la vrit apocryphe. Mais de ce qu'un livre est limin du canon de l'Eglise, il ne s'ensuit pas que tout ce qu'il contient soit condamn. Plusieurs Pres grecs et latins, particulirement saint Ambroise (2), ont cit avec loge le quatrime livre d'Esdras, et il en a t insr des textes dans l'office romain (3). 11 est reconnu que l'auteur, juif devenu zl chrtien, a insr dans son livre beaucoup de traditions vraies de sa nation. Or, celle des volumes secrets d'Esdras se trouve effectivement dans la chronique juive appele Sder-Olam-Rabba. Le IVe livred'sdras ne doit pas tre plus rcent que le commencement du second sicle, puisqu'il parat qu'il avait dj acquis quelque autorit ds le temps de saint Irne, du mme sicle, de Tertullien, de Clment d'Alexandrie et de saint Irne, morts les deux premiers au commencement et le troisime vers le milieu du troisime sicle. Nous avons dj cit dans le tome , page 150, saint Hilaire qui confirme que Mose, outre la loi qu'il avait donne au peuple, confia secrtement aux soixante-dix anciens, des mystres d'un ordre plus relev. Separatim qudam ex occuUis legis secretiora mysteria septuaginta senioribus, qui doclores deinceps manerent, intimaverat. A la demande : Quelle est la prrogative des Juifs? Quid ergo amplius Judo ? saint Paul rpond : Elle est grande de toutes faons. Et d'abord, parce que c'est eux qu'ont t confis les oracles de Dieu. Multum per omnem modum : primum quidem quia crdita sunt illis eloquia Dei (Rom., ni, 1, 2). Origne expose de la manire suivante ces parole de l'Aptre (4) : Quamvis enim et Gentibus nunc credantur eloquia Dei, sed illis, ait, primo sunt crdita. Requiro tamen quid est hoc quod dicitur primis eis crdita esse eloquia Dei : utrumne de litteris hoc dicat et libris, an de sensu et intelligentia legis ? De Moyse et prophetis, caeterisque horum similibus haec intelligenda sunt dici, quibus crdita sunt eloquia Dei, et si quis apud eos sapiens et intelligens audilor et mirabilis consiliarius fuit, quos auferre dicitur Dominus a Jrusalem, offensus impietatibus populi (5). &(l) In his enim est ven* intellectus, et sapientiae fons, etscientiae flumeo. IV, Esdras,x i v , 47.

() De bono mortis, cap. x , n. 45 ; cap. xi, n. 50. De Sp. S., 1. H, n. 49. De excessn il. Sat., 1. , n. 66, 69. (3) Voyez les remarques de D. Calmet sur le IVe livre d'Esdras, pages 181, 138, de notre dition de la Bible de Vence. (4) In Epit, ad Rom., H , p. 497, col. , de redit, des Bnd., o l'on peut voir les preuves que ce commentaire appartient vritablement Origne, bien que l'original grec de l'auteur ne se retrouve plus. (5) Isae, m, 1-3.D'aprs le texte des Septante, diffrent ici de laVulgate, maisplm que celle-ci conforme l'hbreu.

DES HBREUX. XXIII Nous sommes tonn que personne n'ait encore remarqu qu'Adamantius, ce prodige de science et de gnie, en appliquant aux cabalistes les qualits exprimes dans le verset d'Isae qu'il cite, est parfaitement d'accord avec le Talmud, d'aprs lequel ou ne livrait les arcanes de la loi, m i n ^IHD, qu' celui qui runissait les qualits prcises par le prophte (trait Hhaghiga, fol. 15 recto). C'est donc une tradition judaque qu'Origne rpte ici. Ailleurs le mme Docteur dit : Puisque c'est une chose manifeste et vritablement admise que les prophtes taient des sages, il faut convenir qu'ils avaient une'parfaite intelligence de ce que leur bouche prononait; et il est vident que Mose pntrait le vrai sens de la loi, et les allgories anagogiques des faits qu'il rapporte lui-mme.... Sous ce rapport, les Aptres n'taient pas plus savants que les patriarches, que Mose, que les prophtes (1). Nous ajouterons saint Grgoire de Nazianzc qui, sur le tmoignage des Docteurs hbreux (cEopatwv v et ao^wrEpet Xs-ycuatv), rpte que les U Juifs ne livraient pas les profondeurs de l'Ecriture (paGurepav) et sa beaut (valeur) mystique (TO u/jariabv xaXXc;) ceux qui n'avaient pas au moins vingt-cinq ans, et qui n'taient pas purifis spirituellement(w.o'vot; TO"; xexa6ap|u.svci; TV vciv) ( 2 ) .

III. Dans saint Luc, xi, Notrc-Scigneur reprend les Docteurs de la loi de ce qu'ils drobaient (3) au peuple la clef de la science. Un grand nombre de Pres et de commentateurs expliquent, conformment au sens le plus obvie de ce passage, que la culpabilit de ces Docteurs perfides consistait en ce qu'ils cachaient au peuple l'exposition traditionnelle des livres saints, exposition au moyen de laquelle il aurait pu reconnatre le Messie dans la personne adorable de JsusChrist. Car, ainsi que nous le dirons tout l'heure, du moment que l'Evangile tait prch, l'interprtation mystrieuse et prophtique des Ecritures, laquelle avait pour unique objet l'uvre de la Rdemption, au lieu de rester comme sous l'ancienne loi, concentre dans un petit cercle d'initis, devait tre porte la connaissance de tous les ges et de toutes les conditions. Le prophte Jol l'avait prdit expressment, i , 28 : Et erit posl haec, effundam spiritum meum super omnern carnem, et prophetabunt filii vestri et filiae vestr; senes(i) *II TO eyjpvj/j-ov xat oU>j0.7ra/&ao*a/'vo>j$, Irtfaav ci TVpcp/JTi vofti IpoXo'/itv vevorj/.w.t KTOV v.Ttb iov GT/XXTO xat ni ro$ xeezt Ttzfpiqxjut rrv 7r : mr P7JJJJ7 ")jp >c"fa . M DWP O>PP D>J!O yvfaMon Dieu, ayez piti de ceux qui dtestent ce point le nom sacr qui doit faire flchir tout genou dans le ciel, sur la terre et dans les enfers ! Nous soutenons aussi que le fond du Zohar est fort ancien. Hais que de choses les rabbins n'y ont-ils pas fourres? Le passage que nous venons de transcrire est relativement trs-moderne.

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NOTICE SUR LA CABALE

comme nous l'avons dit, au panthisme ou tout autre systme s'cartant de la rvlation divine, cela est incontestable, parce que les auteurs de ces livres ne pesaient pas les expressions qu'ils empruntrent aux livres paens ; mais il faut tre d'une insigne mauvaise foi pour en attribuer l'intention des hommes fanatiques qui jour et nuit se livraient aux pratiques les plus minutieuses, les plus gnantes du pharisasme, dans la persuasion qu'ils se rendaient ainsi agrables la Divinit. Veut-on faire remonter ces phrases, avec le sens impiequ'on y attache, jusqu' la Cabale ancienne? Alors il faudrait en conclure que le peuple de Dieu ne croyait pas Dieu : ce qui est le comble de l'absurdit. Et cependant cette thse, tout absurde qu'elle est, a t soutenue srieusement! M. Salvador, calomniant le texte mme du Deutronome,' n'a-t-il pas os avancer que lorsque Mose ordonne de croire que Jhova est un, inK nT, il faut entendre que Jhova se compose de l'ensemble de l'univers (l)? Et les plus grands mystres du christianisme, la S. Trinit et le Verbe fait chair, n'a-t-on pas prsum les rduire une proposition panthistique? C'est ainsi que dans un livre rcent on gratifie les cabalistesde la supercherie de cacher sous des termes sacramentels de la loi mosaque les principes les plus rvoltants de l'athisme. Spinoza appelle en garantie de son systme non-seulement la Cabale des Hbreux (2), mais aussi le grand Aptre des Gentils, a Omnia, dt-il, in Deo esse et in Deo moveri cum Paulo affirmo, et auderem etiam dicere cum antiquis omnibus Hebraeis, quantum ex quibusdam traditionibus, tametsi multis modis adulteratis, conjicere licet. Epist. 21. J. Tolland ne craignit pas de transformer toute l'Ecriture sainte en un code de spinozisme. Henri Morus, dans ses Fundamenta philosophie seu Cabbala? ato-pdo-melissaea?, a rduit toute la Cabale seize propositions panthistiques. Celui-ci avait prpar la voie au fameux livre, le Spinosisme dans le judasme (der Spinosismus im Judenthum) par lequel Wachter rpondit aux provocations de Jean-Pierre Speeth, espce de fou qui, lev dans la reli(1) Voyez notre prface, pages xvm, xxx. (2) quoi ne tiennent pas quelquefois les vnements qui dcident de la vie d'un homme ! Une anecdote risible a fait de Spinoza l'auteur d'une philosophie qui a caus tant de bruit dans le monde, et a engendr les Kant, les Hegel et autres philosophes de la mme trempe. Langius rapporte cette anecdote dans sa dissertation De genealogiis, comme la tenant de son matre le savant Sturmius, qui ipse, dit-il, cum homine verba quondam miscuit. Nous la rapporterons dans les termes de l'auteur : Erat Spinosse pater, Judus, cui fuerat libellus scriptus quem summi fecerat, utpote turgid-um aliquot magicis, et ad Cabbalam practicam pertinentibus processibus. Hos inter erat quoque ostensus modus resuscitandi mortuos. Spinosa post patris fata, maxime inhiabat libello quem tanti fecisse patrem sciverat. Cumque didicisset modum resuscitandi mortuos, fecit homo rei periculum, sed nullo successu. Corn motus hoc casu, a judaismo defecit, atque nulli religioni addictus, omnem deinde religionem pedibus conculcare ccepit. Hc est causa Hla ridicula ob quam de religione avita dubius primum, deinde e synagoga transfuga factus est, quam tacite indicat laudatus Dn. Sturmiu* in philosoph. eclectica disput. de Cartesianis et Cartesianismo, n. 12, p. 164.

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gion catholique Vienne, sa patrie, passa dans un ge dj mr, au luthranisme Stuttgard, et aprs tre retourn au catholicisme dans la ville de Francfort sur le Mein, il reut Amsterdam la circoncision sous le nom de Mose VAllemand, tj^^N WB. Un juif allemand d'une robuste incrdulit, Peter Ber, a profit de ces donnes avec beaucoup de talent. M. Franck n'a eu presque d'autre peine que de copier ce dernier. Si dans sa Kabbale (1} celui-ci ne reste pas au-dessus de son modle,comme crivain et comme philosophe capable de prouver le blanc et le noir, il dcle presque chaque page son impritie dans la langue et la science cabalistique qui demandent des tudes spciales auxquelles il n'a jamais eu le temps de se livrer. En outre, plusieurs passages qu'il cite, sont ou tronqus ou dtourns de leur vritable sens. Nous ne manquerons pas^il plat Dieu,dejustifier,dans notre ouvrage sur la Cabale, toutes ces assertions par des exemples tirs de son livre. IV. Il parat que la saine Cabale dont Mamonides dplore la perte tait fort considrable, et pouvait bien fournir la matire des soixantedix volumes d'Esdras, puisque les dbris qui nous en ont t conservs sont encore assez nombreux, et fournissent abondamment des preuves en faveur de tous les principaux articles de la foi catholique, de sorte que l'on peut combattre avantageusement les juifs par leurs propres livres, comme dit si bien Pic de la Mirandole dont nous avons cit le tmoignage dans la prface, pagexu. Carpzovius, en parlant des vicissitudes de la Cabale, dit : Posterior Iransiit in nugas kabbalisticas, quibus salutarem illam doctrinam de mysteriis, quae sub tt legalium ceremoniarum involucris latebant, obnubilarunt (rabbini), sed ita tamen, ut in istis veteris opoSoia; (de la bonne doctrine) reliqui subinde se prodant, atque adeo negandum non sit, multa e kabbalistarum monumentis ad asserendam chrislianam veritatem depromiposse.Introd. intheol. jud., c. vi, 9. VI. Ici se prsente une question. Comment peut-on reconnatre les restes de l'ancienne Cabale au milieu du fatras rabbinique o ils sont comme perdus? Sans entrer ici dans des apprciations critiques, et dans l'examen du langage et du style, nous rpterons la rgle que nous avons pose dans l'Invocation des saints dans la Synagogue. Toutes les fois qu'un passage exprime un article de la croyance catholique, ni pas les Juifs, en termes dont on n'a pas besoin de forcer le sens, vous pouvez tre certain que ce passage n'a pas t fabriqu par les rabbins. Nous ajouterons que si ce passage est seulement susceptible d'une interprtation chrtienne, on peut encore l'accepter comme authentique; car si les rabbins ne connaissaient pas toujours la porte philosophique d'une expression, ils savaient parfaitement ce qui les divisait(1) Voyez le compte rendu de cet ouvrage par le savant M. Dubeux, dans le Correspondant, ire livraison de janvier 1844.

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NOTICE SUR LA CABALE

du christianisme, et ils auraient vit soigneusement toute quivoque, tandis qu'ils ne pouvaient pas toujours porter une main tmraire sur des traditions consacres par le temps et devenues populaires. VII. I. Dans le seizime sicle, poque del renaissance, les livres taient chers. On vendait une terre pour se procurer un manuscrit (!). Pic de la Mirandole paya un juif sept mille ducats les livres de Cabale manuscrits dont plus tard il tira ses thses cabalistiques. Elles sont au nombre de soixante-douze. Comme ces thses sont peu rpandues, nous en transcrirons ici les principales, avec leurs numros d'ordre, afin de faire voir tout ce que la science secrte des Hbreux renferme de principes chrtiens. 5. Quilibet ebraeus kabbalista, secundum principia et dicta scienti Kabbalae cogitur inevitabiliter concedere de Trinitate et qualibet Persona divina, Ptre, Filio et Spiritu S.; iilud prcise, sine addilione, sine diminutione aut variatione, quod ponit fides catholica christianorum. Corollarium. Non solum qui negant Trinitatem, sed quialio modo em ponunt quam ponit catholica Ecclesia, sicut Ariani, Sabelliani et similes, redargui possunt manifeste, si admittantur principia Kabbalae (2). 15. Per nomen od, He, Vav, He (ilT), quod est nomen ineffabile, quod dicunt kabbalist futurum esse nomen Messi, evidenter cognoscitur futurum eum Deum Dei Filium, per Spiritum S. hominem factum, et post eum ad perfectionem humani generis super hommes Paracletum descensurum (voyez dans ce tome, pages 392 et suivantes). 21. Qui conjunxeritdictum kabbalisticum, dicentium (sic)quod illa numeratio quae dicitur Justus et Redemptor, dicitur etiam rtt, *e9 eum dicto talmudistarum dicentium quod Isaac ibat sicut ze> nTD, portans crucem suam, videbit quod illud quod fuit in Isaac praefiguratum, fuit adimpletum in Christo, qui fuit verus Deus venditus argento (voy. dans notre dition de la Bible de Vence, Rapports entre le saint Patriarche Isaac et Notre-Seigneur Jsus-Christ. T. vil, note au bas de la page 553). 24. Per responsionem kabbalistarum ad quaestionem, quare in libro Numerorum conjuncta est particula (le chapitre) mortisMariae particule vitul rufa?, et per expositionemeorum super eo passu, ubi Moses in peccato vituli dixit, dele me, et per dicta in libro Zoar super eo textu : Et ejus livore sanati sumus, redarguuntur inevitabiliter Ebraei dicen(1) Histoire de Lon X, par M. Audin, t. n, p. 87. (2) Pierre Allix a crit sur cette matire un livre fort remarquable, qu'il a intitul :

Judiciun Ecclesi Judaic contra Arianot.

DES HBREUX. XXXI tes, non fuisse conveniens, ut mors Cbristi satisfaceret pro peccato humani generis. 25. Quilibet kabbalista habet concedere quod Messias eos a captivitate diabolica, et non temporali, erat liberalurus. 26. Quilibet kabbalista habet concedere ex dictis doctorum hujus scientiae hoc manifeste dicentium,quod peccatum originale in adventu Messi expiabitur. 27. Ex principiis kabbalistarum evidenter elicitur quod per adventum Messiae tolletur circumeisionis ncessitas. 50. Necessariohabent concedere kabbalistae, secundum sua principia, quod verusMessias futurusest talis, ut de eovere dicatur quod est Deus et Dei Filius. 55. Per hanc dictionem flJW, virum, quae Deo attribuilur, cum dicitur vir belli (l), de Trinitatis mysterio perviam kabbalae perfectissime admonemur (voy. dans ce tome pages 405,406). 34. Per nomen N*in quod nomen Deo propriissime attribuitur, et maximeconvenienter, non solum ad kabbalistas qui hoc expresse spius dicunt, sed etiam ad theologiam Dionysii Areopagitae, per viam Kabbal Trinitatis mysterium, cum possibililate incarnationis, nobis declaratur (voy. 1.i, p. 557). 59. Quilibet kabbalista habet concedere quod interrogatus Jsus, quis is esset, rectissime respondit dicens : Ego sum PRINCIPIUM qui oquor vobis (Joa., v i n , 25. Voy. 1.1, p. 286 suiv.). 40. Hoc habent inevitabiliter concedere kabbalistae, quod verusMessias per aquam homines purgabit (voyez dans ce tome p. 54 et note 15, p. 555). 42. Scitur per fundamenta Kabbalae quam rectedixerit Jsus : Antequam nasceretur Abraham ego sum (Joa., v i n , 75). 45. Per mysterium duarum literarum * et * scitur quomodo Mesj sias ut Deus fuit principium sui ipsius ut homo. 54. Quod dicunt kabbalistae beatificandos nos in speculo lucente reposito sanctis in futuro seculo, idem est prcise, sequendo fundamenta eorum, cum eo quod nos dicimus beatificandos Sanctos in Filio. Rappelons ici que les thses de Pic, de omni re scibili, au nombre de neuf cents, ayant t attaques comme renfermant des propositions contraires la foi, car quoi l'envie et la malice ne s'attaquent-elles pas? le Saint-Sige les fit examiner par une commission de thologiens. Cette preuve fut favorable Pic, et S.S. Alexandre VI, victime lui-mme de la calomnie (2), lui adressa un bref adoptant la conclusion(1) Exode, xv, 3. Le Talmud, se fondant sur ce texte, compte XtPN u nombre des noms de la Divinit. Trait Sola, fol. 42 verso et fol. 48 recto. Trait Sanhdrin, fol. 93 recto et fol. 96 verso. (2) M. Audin, dans sa vie de Lon X, a veng la mmoire de ce grand Pape contre les calomnies absurdes que Burchard a entasses dans son Diarium, arsenal des dtracteurs du Pontife.

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des examinateurs. Te nullum hresis spcimen tel suspicionem aut noiam sinislram incurrisse. Ce bref est dat du 17 juin 1495. II. Gaffarel, le savant bibliothcaire du cardinal de Richelieu, a eu entre les mains les trois manuscrits cabalistiques qui avaient t traduits en latin par ordre du Pape Sixte IV (1). Le compte qu'il en rend ne peut que confirmer le thses de Pic. In illis, dit-il, decem pra> cipuos Hebraci docent articulos fidei, in quibus eos nobiscum divinitus concordare mirantur qui legunt. Il numre ensuite ces dix articles : 1. de adorando Trinitatis mysterio ; 2. de Verbi incarnatione ; 5. de Mcssiae divinitate; 4. de pcccato originali; 5. de ejtisdem per Chrislum expiatione; 6. de Hierusalem clesti; 7. de casu dmonum; S.deordinibusangelorum; 9. de purgatoriis ; lO.deinferorum pnis. VIII. I. Telle est la Cabale dont au XVe sicle Pic et Paul Ricci ont les premiers rvl l'existence au monde chrtien. Il ne faut donc pas s'tonner si l'tude de cette science a amen un grand nombre de juifs embrasser le christianisme. En effet, moins de faire violence au texte des prcieux morceaux qui nous restent de la Cabale ancienne, il faut convenir que le dogme chrtien y est profess aussi nettement que dans les livres des Pres de l'Eglise. Les rabbins s'en sont si bien aperus qu'ils ont pris des mesures pour loigner les juifs del lecture de la Cabale parce qu'elle pourrait, disaient-ils, branler la foi de ceux qui n'y sont pas assez solidement affermis. Le clbre auteur du livre iHoria de' Riti ebraici, Lon deModne, violent adversaire du christianisme (2), doute que Dieu pardonne jamais ceux qui ont livr la presse les ouvrages cabalistiques. II. De ces juifs convertis nous citerons principalement : 1. Paul Ricci, d'abord professeur de philosophie Pavie, ensuite premier mdecin, archiater, de l'empereur Maximilien Ier. Il est auteur de l'ouvrag bien connu De agricultura clesti, o il traite de la Cabale et du parti qu'on en peut tirer pour la conversion des juifs. 11 n'est pas exact, comme l'affirme M. Franck, que Ricci se soit content de suivre de loin les traces de Reuchlin. Celui-ci dit lui-mme vers le commencement du chap. ni de son livre, en parlant de la Cabale : Nondum extraneis cognita praesertim romane doctis, prter admodum pauca qu annis sxtperioribus Joannes Pieu, Mirandulsc cornes, et Paulus Riccius, quondam noster (3), ediderunt. 2. Juda Abarbanel,du xvi e sicle, communment appel Lon VHbreu et Messer Leone, lefilsan du clbre rabbin Isaac Abarbanelqui,(1) Voyez notre prface, page xix. (2) Voyez son article dins De-Rossi, Dizionario degli autori ebrei. (3) Reuchlin met ces paroles dans la bouche de l'interlocuteur juif Simon.

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dans ses commentaires sur les prophtes, ne mnage ni les chrtiens, ni leur religion. Si ce rabbin avait connu l'avenir de son fils, il n'aurait pas manqu de l'touffer sa naissance. Il est auteur du livre clbre I Dialoghi d'amore, ouvrage philosophico-cabalistique, dont il existe une lgante traduction latine et plusieurs traduction franaises et espagnoles qu'on peut voir dans De-Rossi. 5. Paul Elhhanan, du mme sicle, auteur du Myslerium noviim, o i! appelle son secours la Cabale pour prouver que Jsus de Nazareth est le vrai Messie. 4. Petrus Galatinus, auteur du livre De arcanis calholic verilalis. Nous en avons dj parl dans le tome Ier, p. 190, 191. 5. Jean Fortius, auteur d'un livre hbreu sur la signification mystique des lettres de l'alphabet hbraque. J^e savant P. Kircher le cite honorablement dans con OEdipus ^Egyptiacus. T. il, partie i, p. 11-4. 6. Louis Carret, Franais, du xvi e sicle. Il adressa ses fils et tous ses anciens coreligionnaires une lettre en hbreu, sous le titre DTISN n*lN1D, Visions de Dieu, dans laquelle il prouve la vrit de la religion catholique tant par les textes du Vieux Testament que par des tmoignages de la Cabale. Bartolocci en copie la curieuse explication de la clef cabalistique, dans le tome IV, p. 420 de sa Bibliolheca rabbinica. 7. Paul de Heredia, Espagnol, du xv e sicle. Il a crit sur tous les mystres de la religion un livre latin dans lequel il donne des passages fort remarquables des cabalistes hbreux. 8. Frdric Chrtien Meyer, Allemand,du commencement du xvni e sicle. Il a trouv dans le psaume xci, selon l'hbreu, par des procds cabalistiques, tous les caractres du Messie qui se sont raliss dans la Personne divine de Notre-Seigneur Jsus-Christ. 11 a publi ses observations en langue allemande. 9. Aron Margalita, du x v n e et du xvin e sicle, a publi aprs son baptme plusieurs ouvrages sur la Cabale au point de vue chrtien. Il a laiss plusieurs manuscrits dont les savants, d'aprs Wolfius, dsiraient vivement l'impression. De ce nombre taient, 1. un Commentaire cabalistique sur le Paler; 2. les trente-deux vous de la Cabale, avec des notes; 3. un Trait sur la sainte Trinit, contenant les parties suivantes, De Deo uno, De pluraliate Personarum, De Trinitale et Unitate. 10. Jean-Etienne Rittangeldont nous avons parl dans le tome Ier, page 565. i l . Prosper Ruggeri de Casai en Pimont, avant son baptme Rabbi Salomon Mir(i), fils de Mose Novare, personnage distingu(i) Basnage rapporte, d'aprs Bartolocci qu'il cite, l'histoire de cette conversion, Hist. de* Juifs, 1. m , ch. 12, vi. Il dit que le nom de Mir, qui signifie l'Illuminant, fut

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NOTICE SUR LA. CABALE

dans sa nation. Il s'tait fait une grande rputation comme cabaliste, non-seulement Venise o les juifs ne pouvaient assez admirer ses sermons, Jrusalem o il fut nomm rabbin, mais dans toutes les parties du monde. Avant de quitter sa patrie, la prise de Casai par les Espagnols qui pillrent la ville, fut pour lui la source d'une grande fortune. Ne pouvant pas plus longtemps rsister tant de preuves de la vrit du christianisme qu'il trouvait continuellement dans la Cabale, il reut le baptme le 25 juin 1664. Il convertit en mme temps plusieurs familles juives. Sa femme, d'abord obstine dans le judasme, reut le baptme le 6 aot suivant. La relation de cette remarquable conversion existe la bibliothque de la Propagande de Rome, parmi les manuscrits laisss par le savant P. Pastritius, professeur de thologie polmique au collge du mme tablissement. Bartolocci en a insr une partie dans le tome iv de sa Bibl. rabb., pages 256 et suivantes. 12. La conversion de Prosper, comme on le pense bien, excita contre lui une grande animosit parmi les juifs, d'autant plus qu'il dployait beaucoup de zle pour la conversion de ses frres selon la chair. 11 y avait alors en Italie un joaillier juif, David Tinlore, opulent, fort estim et bien reu aux cours de tous les princes. C'tait un grand seigneur, un Rothschild de ce temps-l. On l'appelait le Duc des Juifs (il Duca degli Ebrei). Il hassait d'autant plus le nophyte qu'ils avaient t lis d'amiti. Il rptait : Mon bonheur srail de faire griller le cur de Prosper et de le donner ensuite manger aux chiens. Celui-ci, instruit de ce propos, va le trouver courageusement et lui fait voir dans le premier verset de la Gense expliqu selon les principes de la Cabale (1), la trinit de Dieu et l'incarnation du Verbe divin. Il continua de prouver de la mme manire les autres articles de la foi catholique. David Tintore se jeta au cou de son ancien ami, lui dclarant que dornavant ils taient frres en Jsus-Christ. 13. Vers le milieu du sicle dernier, un juif polonais revenu dans sa patrie, aprs un assez long sjour en Turquie, avec une haute rputation de cabaliste, forma la secte connue sous le nom de sohariles, dans laquelle il attira quelques-uns des rabbins les plus

donn ce rabbin, parce que le jour de sa naissance la maison de son pre fut remplie d'une lumire clatante et cleste. On lit dans Bartolocci : Et quia nativitatis die legebatur in synagogis historia nativitatis Mosis prophetae , in qua a rabbinis refertur, quod tune paterna domus (la maison d'Amram, bien entendu) tota rfutait lumine, hine J/ctrnomen, hoc est Illuminantit, junxit. Plus loin il dit que le joaillier David x voulait manger le cur de Prosper. Au lieu que l'original qu'il suivait porte : Canibusqua edendum objiceret. L'anthropophagie est comprise dans les prohibitions de la loi mosaque. Ces observations sont futiles si l'on veut, mais il est bon de signaler la lgret de cet crivain renomm qui ne cesse de harceler l'Eglise catholique. (1) Voyex notre tome i", pages 186 suiv.

DES HBREUX.

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renomms et des milliers d'autres juifs, des communes entires. Les zoharites rejetaient le Talmud et ses pratiques vtilleuses, et s'en tenaient l'interprtalion spirituelle de la Bible selon les principes de la Cabale. Somme de faire publiquement sa profession de foi religieuse, la secte dclara que, conformment la parole de Dieu crite et des textes formels du Zohar , elle croyait l'unit d'un Dieu en trois Personnes ; que Dieu peut apparatre sur la terre uni un corps humain, soumis tous les besoins, toutes les faiblesses de l'homme, except le pch ; que les juifs attendent en vain un Messie purement homme ; que Jrusalem ne sera jamais rtablie matriellement, moins encore que Sodomc, parce que le prophte l'a dclare plus coupable, etc. (Lamcnt., i v , 6). Nous croyons, dirent encore les zoharites, que Mose, les prophtes et tous les autres docteurs anciens s'exprimaient dans leurs crits d'une manire figure, et qu'ils cachaient sous la lettre un sens mystrieux. Ces crits ressemblent une matrone voile, qui ne laisse pas briller sa beaut tous les regards, mais qui exige que ses adorateurs se donnent un peu de peine pour soulever son voile. Entre autres preuves de la sainte Trinit, qu'on rencontre dans cette profession de foi, nous signalerons la suivante. La premire lettre du Pentateuque est un X Or, ce caractre se compose de deux traits horizontaux unis par un trait vertical. Ceci est un symbole des trois hypostases divines (drei obern Wesen) dans une essence unique. De l au baptme il n'y eut qu'un pas, et il fut bientt franchi (l). IX. Ce que nous avons dit jusqu'ici de la Cabale suffit pour justifier l'emploi que nous en faisons dans le prsent crit. Pour traiter de cette science avec l'tendue convenable, et la dfendre contre la perfide imputation de panthisme, il faudra y consacrer un volume(1) Voyez Peter Ber, Histoire des sectes religieuses des Juifs, tome second : Sohariten oder Sabbathianer, pages 259 suiv. Nous ne comprenons pas dans cette liste Benot Spinoza. On a vu plus haut de quelle manire il a t couvert! parla Cabale. Nous nous gardons bien aussi d'y comprendre Conrad Otton. Sa conversion tait plus que problmatique, et dans son Gal-Razaa il a vritablement mystifi les chrtiens, en donnant des textes du Talmud qui n'ont jamais exist, et en altrant d'autres textes. Quand les chrtiens hbralsants de l'Allemagne s'en aperurent , il n'y a pas d'injures dont ils ne l'accablassent. Le premier qui donna l'veil fut Hackspan, dans une lettre adresse Frischmuth, et que celui-ci a publie dans sa dissertation De prosopographia Messi, ch. H, 2. Il faut voir comment le traite Wageneil, Infamis nebulo, et propudium academiae nostrae. Tela ignea, page 119. Julius Conradus Otto, pseudo-judaeus, pseudo-rabbinus et pseudo-christianus, atque sic (cogit enim mutare consuetam sermonis modestiam , animo et pectore erumpens indignatio) verus fur, trifur, trifurcifer. Sola, page 704.

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NOTICE SUR LA. CABALE DES HEBREUX.

entier. Nos matriaux, fruits de longues tudes, sont prts, et si Dieu daigne nous en donner la force, nous nous acquitterons de cette tche. En attendant nous recommandons ceux qui s'occupent de cette matire le savant livre de Budd : Inlroduclio ad hisloriam philosophiez hebrorum, dition de Halle, 1720.

PARTIE PREMIRE.LA

TRS-SAINTE ET IMMACULE VIERGE,M E R E D E DIEU.

Le premier homme et la compagne que le Crateur lui avait donne, vivaient heureux dans le paradis terrestre, parce qu'ils ignoraient encore le pch. Leur condition galait presque celle des Sraphins, fortuns habitants du sige de la gloire divine (a). Mais l'Ange rebelle, qu'un regard de son matre avait prcipit comme l'clair (b) des hauteurs du ciel dans les profondeurs de l'abme infernal, ne put voir sans chagrin la flicit du couple humain. Sur son trne clatant il l'emportait nagure en dignit et en beaut sur des millions de clestes Intelligences, et maintenant dchu de ces privilges, enchan aux tourments ternels, il se sent rong d'envie la vue de ces cratures, enfants du limon de la terre ! (a) Minuisti eum pauo minus ab Angelis (hebr. divis). Ps. vin, 6. (h) Yidebam Satanam sicut fulgur de clo cadenlem. Luc, x, 18.H.

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Premier pch, voil ce que tu produisis! Un supplice cruel poursuivra sans relche, dans les sicles des sicles, les Esprits qui dans leur fol orgueil sont devenus ton partage; car pour eux, seuls ouvriers de leur iniquit, il ne s'est point trouv de Rdempteur C'est le jprqpre du mauvais gnie de souffrir du hien-ire d'autrui, mon-seulement parce que ce bientre lui manque, mais aussi parce qu'il souffre de voir des heureux. Satan rsolut donc de faire p a r tager sa disgrce aux premiers parents du genre humain, en les entranant dans sa dsobissance envers le souverain Matre qui seul a droit de commander, et au seul nom de qui les suprieurs peuvent commander leurs subordonns. Son plan est form. Pre de l'astuce, il agira par la femme ; car la femme cde avec faiblesse et comjnande avec force. Il souffle sur Eve l'esprit d'orgueil, et flatte sa vanit. A chaque parole du tentateur, recueillie avec avidit, le poison se rpand plus violent dans l'me qui avait ouvert la parte la malice ; et bientt le prcepte divin est viol. Le prcepte tait ais garder, sa violation est une faute incommensurable comme la dignit de celui qu'elle offense. 0 femme coupable plus qu'on ne saurait le dire, maintenant que tu es devenue ennemie de Dieu, mine par un secret ennui, ton dplaisir trouve dj du soulagement donner des ennemis ton Dieu ! Adam est encore dans toute son innocence, tu -en es importune. La vue de l'innocence t'est odieuse : il faut qu'elle se fltrisse, qu'elle tombe, cette fleur dlicate dont le charme cleste t'est en horreur. Entirement possde de l'esprit de sonper-

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fide sducteur, Eve concentre toutes ses penses dans le seul objet de se procurer cette triste satisfaction. Tel le hideux oiseau de la nuit dteste la splendeur du soleil d'un ciel pur, et voudrait couvrir toute la nature des ombres affreuses dans lesquelles il se complat. La mre du genre humain, docile la voix pernicieuse de Satan autant qu'elle foule aux pieds la sainte loi de son Crateur, va et commande imprieusement l'poux qu'elle avait accept pour son matre, pour son guide. Elle le flatte, le caresse, et exige le mal. Eh ! que peut contre les caresses imprieuses et les prires exigeantes un poux tendre et sans dfiance? Tout fut consomm. Le premier homme tablit sur la terre l'empire da pch. A l'instant, la mort et les misres, stimules par une vigueur ignore jusqu'alors, brisent leurs liens, renversent toutes les barrires et fondent avec imptuosit sur ce monde (a). La sombre mlancolie tend dans les airs son voile lugubre. La dent acre du remords dchire sans piti ces curs qui ne devaient jamais battre que pour les pures dlectations des enfants de Dieu, et le doux sourire fuit loin des lvres des nouveaux pcheurs. L'enfer pousse un hurlement de joie atroce, le ciel est contrist. Les Anges de la batitude prouvent pour la premire fois l'amertume des pleurs (6).(a) Per unum hominem peccatum in liunc mundum iniravit, et per peccatum mors. Rom., v, 42. (b) Angeli pacis amare flebunt. Is., xxxm, 7. Voyez pour le terme pax, tome ier, note 33, page 547.

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DE I/HRMOJNIE

Qu'est-ce qui hte de la sorte le pas de ce couple infortun? Pourquoi court-il se cacher? Ah! il fuit parce qu'il entend la voix de l'Eternel, de son pre dont l'entretien amoureux l'inondait nagure d'un torrent de lumire et de dlices. Hlas! voil un nouvel effet de la chute fatale : l'intelligence humaine s'est obscurcie. Comment ! fuir le Tout-Puissant dont les eieux des cieux ne peuvent contenir la majest (a), et dont la prsence ne se retire pas du fond des entrailles de la terre (b)l Restez, restez plutt poux coupables : recevez votre sentence, qui frappera aussi votre race malheureuse, et, pour ne pas achever votre ruine, esprez avec la fidlit de la foi dans la misricorde de votre Juge. Dj l'anathme a frapp les premiers parents de l'espce humaine. Mais mme dans sa juste svrit le Souverain Juge apparat en Dieu de bont. Ainsi, quand le superbe roi des oiseaux marche sur la terre, ses pas font voir encore que l'air des nuages levs est son lment. Eve a cd, Adam n'a pas rsist; mais c'est l'Ange prvaricateur qui est le premier auteur de l'immense transgression. Victimes de la sduction, bien que coupables, Adam et Eve peuvent encore esprer un remde leur dchance, et, s'ils le mettent profit, leur condition surpassera en gloire celle de leur tat pri(a) Si clum, et cli clorum capere eum nequeunt. II. Parai., H, 6; cf. \i, 18. III. Rois, vm, 27. (b) Si ascendero in clum, tu iliic es : si desccndero in infcrnum, ades. Ps. cxxxvni, 8.

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mitif, et les sicles venir appelleront leur dsobissance une faute heureuse (a). Ainsi l'a voulu votre sagesse inscrutable, mon Dieu! Eve encore vierge a dtach la mort du hoisj et, l'unissant son sang, elle a transmis, aussi bien que son poux, le principe mortel toute sa postrit '. Une autre Eve viendra, galement vierge, qui, tirant de son propre sang le salut des hommes^ l'attachera au bois, et toute sa race adoptive y puisera la vie. La femme a commenc le pch, et son sexe dut se courber sous un double analhme : au bannissement du paradis terrestre se joignit pour elle une continuelle humiliation dans l'ordre de la socit 2 . Mais lorsque, dans la plnitude des temps, la nouvelle Eve aura donn la terre Y Agneau sans tache qui efface les pchs du monde (b)7 la femme, runie la communion des saints, sera rtablie dans la plnitude de ses droits comme compagne de l'homme. Les enfants de l'Eglise du Rdempteur, tous membres de JsusChrist au mme titre, ne seront plus distingus en hommes matres et en femmes esclaves. L'galit de l'Evangile ne reconnatra plus que des chrtiens dans les uns et dans les autres (c). Quand j'entends ces paroles que le Seigneur adresse l'antique serpent : Le fruit de la femme t'cra(a) Flix culpa. S. ug. (b) Ecce Agnus Dei, ecce qui tollit peccata mundi. Joa., i, 29. (c) Non est masculus neque fmina : omnes enim unum estis in Christo Jesu. Gai., m, 28.

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DE L'HARMONIE

sera la tte (a), je contemple dans toute sa gloire l'auguste Vierge, fille des Princes de Juda, la royale race de David et de Salomon (b). Revtue de la splendeur du soleil, ses pieds posent sur la lune, une couronne d'toiles brillantes clate sur sa tte (c). Conduisant le Sauveur par la main, prcde par les voix harmonies du chur allong des prophtes, elle descencj l'chelle des sicles qui touche par la tte aux premiers jours de la cration, et se termine au temps o la gracieuse fille de la sainte femme Anne parut Bethlem, la ville royale, comme Y toile du matin (d) qui amenait le beau jour du soleil de justice et de gurison (e). Exempte de la tache originelle ds sa conception, elle n'a pas t un instant sous l'empire du dmon. Fille du Pre, mre du Fils, pouse de Y Esprit-Saint, que manque-t-il la gloire de celle qui est bnie entre les femmes? Avant de crer l'homme, le Seigneur se recueillant en sa divine essence, dit aux augustes Personnes consubstantielles de sa nature : Faisons l'homme. On dirait qu'avant de former

(a) Il (le semen mulieris) Ycraseraia tte, selon le texte hbreu. Gen., m, 15. (b) Voyez pour la gnalogie de la trs-sainte Vierge, tome Ier, noie 44, page 244. (c) micta sole, et luna sub pedibus ejus, el in capite ejus corona stellarum. Apec, XII, 1. (d) Stella matutina. (e) Et orietur vobis timentibus nomen meumsol justitiae, et sanitas in penns ejus. Malach., iv, 2:

ENTRE L'GLISE ET LA SYNAGOGUE.

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la Vierge par excellence, il leur ait adress ces paroles sorties de la bouche d'un monarque puissant : Comment convient-il de traiter la personne que le Roi dsire honorer (a) ? Marie interpose entre le bras du Seigneur et nos iniquits l'hostie seule pure, l'Emmanuel, Dieu-avecnouSy qui pour se charger de nos douleurs, et prendre sur lui nos langueurs (b), a puis notre nature, pour se l'unir, dans ses flancs immaculs. Par un privilge spcial elle runit les deux plus excellentes conditions de la femme : celle de vierge, et celle de mre. Toujours vierge, mre jamais. Mre non-seulement de Jsus-Christ, qu'elle adore avec nous comme son Dieu, mais aussi de nous tous; car elle est notre nouvelle Eve. Et bien loin de lguer la mort du pch ses enfants d'adoption, elle nous rend cohritiers de sa divine progniture qui est la vie mme et la rsurrection (c). Quand Jhova Sabaoth s'abaisse vers son peuple jusqu' la montagne d'HQreb, Isral saisi de crainte et de respect, s'adresse Mose, Y homme de Dieu (d), et lui dit : Parlez-nous, vous, et non le Seigneur, de petir que nous ne mourions (e). Et quand le

(a) Eolher, vi, 6. (b) Vere languores nostros ipse tulit, et dolores nostros ipse portavit. Is., LUI, 4. (c) Ego sum resurrectio et vita* Joa., xi, 25. (d) Moyses liomo Dei. Deut., xxxm, 1; cf. Jos., xiv, 6. (e) Loquere lu nobis, et audiemus : non loquatur nobis Dominus, ne forte moriamur. Ex., xx, 49,

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DE L'HARMONIE

Verbe se fait chair et habite parmi nous (a), pour tre le Mdiateur entre le ciel et la terre, il semble que nous ayons encore besoin d'un Mdiateur entre la Majest divine de Jsus-Christ et nous, faibles mortels esclaves du pch. Alors qui recourrions-nous si ce n'est Marie qui est le refuge des pcheurs (b), la consolation des affligs (c) et le soutien des faibles ? C'est elle qui nous conduit aux pieds du Grand Pontife ternel (d), Jsus-Christ ; et le Dieu fait homme, condescendant notre faiblesse, se rduit notre condition dans toutes ses faces, except le p ch, pour nous lever jusqu' lui (e). 0 Marie, ma bonne mre, vous tes vritablement Importe du ciel! Porta cli. A peinerTpouse chrtienne st-elle devenue mre, qu'elle vient se prosterner devant Marie, priant celle qui est le secours des chrtiens (f) de protger le tendre nourrisson qu'elle serre dans ses bras. L'onde

(a) Et Verbum caro facium est, et habitavit in nobis. Joa., 1, 14. (b) Refugium peccalorum. Lit. lauret. (c) Consolatrix afflictorum. Ibid. (d) Habentes ergo ponlificem magnum, Jesum Filium Dei. Hebr., iv, 14. Pontifex factus in aeternum. Ibid., V, 20. (e) Non enim habemus pontiticem qui non possit compati infirmitatibus nostris : tenta tu m autem per omnia pro simtlitudine, absque peccato. Hebr., iv, 15. Qui condolere possit iis, qui ignorant et errant : quoniam et ipse circumdatus est iniirmitate. Ibid., v, 2. (f) uxilium cbristianorum. Lit. lauret.

ENTRE L'GLISE ET LA SYNAGOGUE.

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sacre vient de laver l'enfant. Il est plus pur que les agneaux qui, sortant du lavoir de Jazer, s'lancent comme des papillons blancs sur les montagnes de Galaad. On dirait que la Vierge cleste, pare, s'il est permis de s'exprimer ainsi, de son divin Fils, arrte un regard de complaisance sur la mre et sur l'enfant. Tandis que la mre prie la mre, l'enfant sourit l'enfant; et le doux Jsus, qui a de la prdilection pour l'ge innocent, lui dpartit avec amour la bndiction du Trs-Haut. Une correspondance d'affection, de sympathie, s'tablit entre leurs jeunes curs, et pour un instant semble disparatre l'intervalle immense qui s'interpose entre le Fils ternel de Vantique des jours (a), et cet enfant (ils de la corruption, qui n'tait pas .hier et ne sera pas demain. Telle est l'admirable Vierge annonce ds les premiers jours du monde, prdite par les prophtes, figure tant de fois dans l'Ancien Testament. Elle est le buisson ardent o Dieu se cache au milieu des flammes, et l'humble arbrisseau n'est point atteint du feu, conserve son intgrit (b). Elle est la verge d'amandier qui sans racine, sans sve de la terre, fleurit et produit un fruit miraculeux (c). Elle est l'arche sainte qui renferme le gage prcieux de l'alliance de Dieu avec les hommes (d). Elle est le sanctuaire vnrable dans lequel Dieu est venu habiter (a) Daniel, vu, 43. (b) Exode, ni, 2. (c) Nombres, xvn, 8. (d) Arca fderis Domini. Ibid., x, 33, et alibi passim.

10 DE L'HARMONIE, ETC. parnii nous ( a ) . Elle est le vase sacr renfermant la inaiine cleste, mis en rserve dans le tabernacle devant Jhova ( b ) . Elle est la nue fconde qui fait descendre sur la terre le juste et la just$cation (c). Elle est la moritagne sainte de laquelle se ciluche sans ln iizaiiz d'aucun holnme la P I E R R E qui renverse, en le touchant, le colosse des quatre grands empires d u monde, pour tablir sa propre domination jusqu'aux extrniits de la terre (d). Enfin, le propliete Isae la dsigne clairement, et nous allons la faire reconnatre dans la prdiction d u fils d'Amos.(a) Facientque mihi tabernaculum, et habitnbo in inedio eorum. EX., XXY, 8. ( b ) Exode, xvr, 33, 34. (c) Is., XLY, 8. Voyez tome le', note 7, page 8?. id)Daniel, 11,3445. Petra nutem erat Christus. 1. Cor., x, 4.

SECTION PREMIRE.

Le pcheur insens : dit en son cur : Il n'est point de Dieu (a). Celui qui possde un cur pur reste fidle la rvlation divine que l'Ecriture appelle si bien, la Vrit du Seigneur (b). Mais un cur corrompu par le vice incite l'esprit faire alliance avec le mensonge. Le contentement intrieur de la vertu, cette joie des justes (c), a cd la place dans ce cur des inquitudes qui l'agitent incessamment. Le cri de la conscience, ce dernier avertissement du Dieu de misricorde, que nous appelons le remords > poursuit le pcheur et l'impatiente. L'homme pervers donne alors mission son esprit d'imposer silence cette voix importune. Comme certain oiseau qui s'imagine carter le danger en se cachant la tte de manire ne pas le voir, il s'efforce de nier une une toutes les vrits ternelles qui condamnent ses vices. C'est ainsi que toute impit provient de la dpravation du cur. Tel nous parat le sens de ces paroles du royal prophte : Le pcheur insens dit en son cur : Il n'est point de Dieu.

(a) Dixit insipiens in corde suo : Non est Deus. Ps. xm, 1. (b) Ps. cxvi, 2; LXXXII, 2; cxvni,86, et alibi passim. (c) Et redis corde Isetitia. Ps. xcxvi, 11.

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DE L'HARMONIE

Ce cur qui commande l'esprit, au lieu qu'il devrait lui obir, ne veut ni d'une religion qui le gne, ni d'un Dieu qui punit ses dsordres. Misrable esclave de viles passions, il sacrifie le Crateur la crature, et l'immole devant l'idole de ses penchants. Le voil, cet audacieux fils de la terre; s'tourdissant lui-mme, et content comme l'imprudent enfant qui se soustrait pour son malheur la sollicitude du guide sage qui tenait son inexprience loin des prils. Il suit librement sa propre voie sous un ciel qui pour lui est vide de Dieu. Mais que sa destine est plaindre! Semblable au faible roseau priv d'appui, il est bientt le jouet de tous les vents. Les plaisirs l'emportent, la douleur l'accable, la prosprit l'enivre, l'adversit l'abat. Tel fut Achaz, ce roi de Juda clbre par son impit, et plus encore par la prophtie laquelle son opinitre incrdulit a donn lieu. Successeur au trne de son pre, sans hriter de ses vertus (a), Achaz eut, comme lui, beaucoup souffrir des armes de Rasin et de Phacequi s'avanaient victorieux dans ses provinces, et dj touchaient aux remparts de sa capitale. Cette fois les deux rois, celui de Syrie et celui d'Isral, runissaient leurs forces, non plus pour dvaster le pays de leur ennemi commun, mais pour anantir la royale race de David, pour lui substituer une nouvelle dynastie. Allons,

(a) IV. Rois, xv, 34; IF. Paralip., xxvn, 2; cf. IV. Rois, xvi, 2; II. Paralip., xxviu, 1 seqq.

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disaient-ils, marchons contre Juda; portons-y la guerre, emparons-nous du pays,, et y tablissons pour roi le fils de Tabel (a). Ce fut l le plan concert par les deux princes allis. Mais celui dont le trne est dans les deux rit des projets des rois, se moque des penses de leur ambition (b), lorsque leurs desseins sont en opposition avec les dcrets de son immuable sagesse. Le Seigneur avait dit David : Votre maison et votre rgne seront stables ternellement devant vous, et votre trne s'affermira pour toujours (c). Or, le ciel et la terre passeront plus tt que la parole du Seigneur (d). Achaz ne croyait point un secours d'en haut, Mettant son esprance dans un bras de chair, il attendait son salut du roi d'Assyrie. Mais le sort des combats est journalier, et le cur d'Achaz, saisi de crainte, commena trembler comme les feuilles des arbres de la foret violemment agits par la tempte (). Alors le Seigneur, pour tenter un nouvel effort sur (a) Ascendamus ad Judam, et suscitemus eum, et avellanius eum ad nos et ponamus regem in medio ejus, tilium Tabeel. Is., vu, 6. (b) Qui habitat in clis irridebit eos; et Dominus subsannabil eos. Ps. H, 4. (c) Et fidelis erit domus tua, et regnum luum, usque in ternum ante faciem tuam, et thronus tuus erit tirmus jugiler. II. Rois, vu, 16; cf. I. taralip., XVII, 14. (d) Mattli., xxiv, 35; Marc, xuvxxi. (e) Et commotum est cor ejus, sicut moventur ligna silvarum a facie venli. Is., vu, 2.

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le cur indompt de l'impie roi, et rassurer en mme temps la confiance branle de la maison de David, mit sa parole dans la bouche du prophte, et lui ordonna d'aller la rencontre d'chaz, hors des murs de la capitale, et de mener avec lui son propre fils, le jeune Scher-Yaschub (a). Tranquillisez-vous (b), dit le prophte Isae, et dposez toute inquitude (c). Ne craignez point. Ne vous dcouragez pas en prsence de ces deux bouts de tison qui achvent de se consumer ; devant l'acharnement (d) de Rasin, roi de la Syrie, et du fils de Romiie. Leur pense n'aura pas son effet (e). Cette annonce rassurante fut accueillie avec une froide indiffrence. Le silence de l'incrdulit fut, pour ainsi dire, la seule rponse du roi. Le prophte, reprenant la parole, lui dit, pour vaincre son obstination : Demandez un signe J -

(a) Et dixit Dominus ad Isaam : Egredere in occursum Aehaz tu et qui derelicius est (traduction du nom Scher Jaschub), filius tuus, ad extremum aquaeductus piscin superioris, in via agri fuilonis. Is., vu, 3. (b) Sens de l'impratif hbreu "Otfn, en cet endroit, selon les plus habiles interprtes hbrasants. Voyez plus loin la note 4. (c) Sens de l'impratif hbreu TDptzrrn. (d) C'est ainsi que nous expliquons le *|*mra du texte original. (e) Vide ut sileas (heb. rside et quiesce); noli limere, et cor tuum ne formidet a duabus caudis tilionum fumiganlium islorum in ira furoris Rasin rgis Syrisc, et filii Romeisc. Is., vu, 4.

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hova votre Dieu. Ne craignez point que votre demande excde sa puissance; car sa puissance n'a point de bornes. Que vos souhaits pntrent jusqu'au fond de l'abme de la terre, et un prodige en jaillira ; ou si vous voulez, levez vos prtentions jusqu'aux rgions thres que parcourent les ailes brlantes des Sraphins, et les votes du ciel s'branleront sur leurs colonnes ternelles (a). Je ne demanderai point de signe, rpondit Achaz; et, ajouta-t-il avec un sacrilge mpris, je ne veux pas tenter Jhova (b). A ces mots, l'homme de Dieu, prouvant une sainte indignation, se dtourne du roi incrdule; il ne mritait pas que la grande annonce lui ft adresse : Puisqu'il en est ainsi, (c) dit Isae, coutez donc, vous, maison de David : Le Seigneur vous donnera de lui-mme un signe qui vous sera (d) un gage certain de la conservation de votre royale ligne. Voici que la Vierge se trouvera tre enceinte, et elle enfantera

(a) Pete tibi signum a Domino Deo tuo in profundum infcrni, sive in excel&um supra (heb. demitte teipsum petendo, vel leva teipsum desuper). Ibid., vu, IL (b) Non pelam, et non tenlabo Dominum. Ibid., vu, 12. (c) Tel est le vritable sens du mot pS du texte, compos de p , que nous regardons ici comme un substantif, et de la prposition S. A la lettre : sur ce pied, dans ce cas. Voyez au reste notre note 5. (d) aoh9 vobis. Ce miracle ne devant s'accomplir que plusieurs sicles aprs qu'Achaz aura cess d'exister, il fallait en confier la prdiction traditionnelle toute la maison de David.

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u n fils (a), et elle lui donnera le nom de Dieu-avecnous : EMMANUEL. Cette Vierge, u n e tradition constante, lgue par les patriarches de notre nation (Z>), nous l'annonce comme la femme dont la progniture 6 crasera la tte de l'antique s e r p e n t , et dissipera le venin d'Eve, venin qui circulant avec le sang passe des veines des parents dans celles des enfants 7 . Ce Diea-avec-nous sera en mme temps vrai homme (