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GUIDE D’AIDE AU POSITIONNEMENT ET A L’ACTION DES ASSOCIATIONS France Nature Environnement Franche-Comté Plateau Débat public 7, rue Voirin - 25000 Besançon 03 81 80 92 98 www.fne-franche-comte.fr et www.debatpublic-mefc.org LE BOIS-ENERGIE EN FRANCHE-COMTE

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GUIDE D’AIDE AU POSITIONNEMENT

ET A L’ACTIONDES ASSOCIATIONS

France Nature Environnement Franche-ComtéPlateau Débat public

7, rue Voirin - 25000 Besançon03 81 80 92 98

www.fne-franche-comte.fr et www.debatpublic-mefc.org

LE BOIS-ENERGIE EN

FRANCHE-COMTE

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Source: Plaquette «Forêt, biodiversité et changement climatique» France nature Environnement (www.fne.asso.fr)

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SOMMAIRE

PREAMBULE

1. PROBLEMATIQUE ET LIGNE DIRECTRICE DE NOTRE POSITION

2. LE PRELEVEMENT DU BOIS EN FORET

3. LA PRESERVATION DE LA BIODIVERSITE LIEE AU SOL

4. LES BONNES PRATIQUES SYLVICOLES

5. L’UTILISATION DU BOIS-ENERGIE

6. SYNTHESE EN GUISE DE CONCLUSION

Remerciements

Ce guide est destinée à tous les bénévoles. Il a été réalisé par le Plateau Débat public avec l’appui des bénévoles, notamment Rémi Berviller référent agricul-ture et forêt à FNE FC, Julien Tomasini, administrateur de Pro Silva France, et des associations du réseau dont l’AJENA qui ont enrichi ce guide. Nous tenons

à les remercier.

Copyright crédits photographiques: Cathy Poimboeuf, Catherine Bahl, Jacques Kryzyk.

Mise en page: Florian Delole, Marion Fury (Dole Environnement).

- Juin 2014 -

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Dansuncontextededéveloppementdel’utilisationdubois-énergieenFranche-Comté,ilnousaparuimportantdeproduireundocument,destinéauréseauassociatiffranc-comtoisinvestidanslaprotectiondel’environnement,permettantdesituerlesenjeuxliésàl’utilisationdubois-énergieetdemettreenavantdespropositionsconcrètesafinquelaressourceenboisetlabiodiversitéforestièresoientpréservéessurnotre

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positionetledéveloppementd’argumentairespertinents.

PREAMBULE

Avec le soutien financier de:

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80% du bois-énergie est issu de la forêt. Il constitue à coup sûr une énergie d’excellence issue d’une ressource forestière patrimoniale et renouvelable permettant de relayer, en partie, les énergies fossiles telles que le pétrole, le gaz, le charbon, les possibles gaz de schiste et l’énergie nucléaire, énergies de plus en plus chères car en voie d’épuisement, et aux effets négatifs avérés sur l’envi-ronnement, le climat et la santé.

Le bois-énergie au contraire est une ressource renou-velable, mais aussi une énergie au bilan carbone en prin-cipe neutre, puisque le CO2 rejeté par sa combustion est réabsorbé par la photosynthèse liée au renouvellement de la forêt, donc sans effet sur le changement climatique.

Enfin la filière bois-énergie doit participer au dévelop-pement local en créant des emplois non-délocalisables.

Dans notre positionnement sur le bois-énergie, nous sommes amenés à développer notre point de vue sur la préservation des sols forestiers et les bonnes pratiques sylvicoles, des développements qui pourraient être taxés de « hors-sujet ». De notre point de vue on ne peut et ne doit pas compartimenter et séparer les fonctionnali-tés car dans la réalité elles sont liées dans l’ensemble en interrelation qu’est l’écosystème forestier. Le prélè-vement de bois-énergie est en lien direct avec le fonction-nement du sol et ces 2 fonctionnalités sont impliquées dans le bilan énergétique et le bilan carbone auxquels participent aussi les pratiques sylvicoles.

1. PROBLEMATIQUE ET LIGNE DIRECTRICE DE NOTRE POSITION

En Franche-Comté, la forêt couvre 45% de la surface totale de la région, ce qui en fait une des régions les plus boisées de France. La forêt privée, très morcelée, repré-sente 43% de la surface boisée et apparaît la plus faible-ment exploitée d’après les mesures de l’IFN (Inventaire Forestier National) réalisées sur la période « début des années 1990 à 2007 1» et l’on pourrait y récolter davan-tage de bois au vu de l’accroissement naturel de volume de bois à l’hectare qui est bien supérieur aux prélève-ments, en particulier dans les départements 39 et 90. C’est beaucoup moins le cas des forêts publiques c’est-à-dire les forêts communales en partie et surtout les

forêts domaniales dont certaines (dans le département 70) sont en phase de décapitalisation et d’autres où le capital sur pied est stable (département 25) ou en légère augmentation (départements 39 et 90). Mais ces mesures passées présentent une marge d’erreur significative. L’ac-croissement naturel de bois, mesuré par l’IFN, s’est avéré surestimé et la récolte de bois évaluée par une autre ins-tance (Enquête Annuelle de Branche), a été sous-estimée, ce qui signifie que les volumes de bois disponibles pour les récoltes à venir (= accroissement naturel de l’année – volume de bois récolté de l’année) estimés à 700 000 tonnes sont inférieurs à ce chiffre.

1 Ces mesures et commentaires sont issues du document suivant : Les accroissements forestiers non récoltés en Franche-Comté. JM Valdenaire, DRAAF Franche-Comté. 2012

Dans quelles conditions l’exploitation du bois-énergie est-elle respectueuse: de l’écosystème-forêt qui permet son renouvellement;

de l’environnement ; et s’accompagne-t-elle d’un bilan carbone réelle-

ment neutre ?

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Pour résumer les disponibilités en bois-énergie sont moins importantes que prévues. C’est pourquoi depuis 2010 a été mis en place un nouveau mode de calcul plus rigoureux et plus affiné réalisé entière-ment par l’IFN, basé sur le suivi régulier de placettes qui permettra de comparer par des mesures à la fois l’accroissement et la récolte de bois sur des périodes

de 5 ans. On peut donc espérer avoir des résultats précis et fiables pour la Franche-Comté pour 2015.

Nous pouvons toutefois remarquer que ces données sont globales et quantitatives et qu’il faut prendre en compte les spécificités de chaque massif et même de chaque station.

Notre recommandation est que l’exploitation du bois-énergie de nos forêts soit replacée dans un contexte global pour éviter d’induire des externalités (retombées) négatives évoquées plus haut («quelles conditions») :

Le contexte de la gestion de l’écosystème forestier dans sa complexité qui en fait sa richesse ; la forêt s’autoentretient et l’homme doit accompagner ce fonctionnement non le contrecarrer.

Le contexte plus large encore de la place de la forêt dans la biosphère en particulier dans l’évolution climatique : par le stockage du CO2 dans le bois et l’humus du sol, la forêt participe à la réduction de l’effet de serre.

Le bois-énergie est à replacer dans le contexte de la filière globale du bois : la durabilité d’une filière bois-énergie dans le contexte d’aujourd’hui est indissociable de la filière du bois d’œuvre

Ces axes essentiels, la préservation des richesses et des fonctionnalités de la forêt ainsi que le stockage du carbone constituent le fil conducteur, la trame des mesures exposées plus loin pour mener judicieusement le développement de cette filière énergétique durable.

2. LE PRELEVEMENT DU BOIS EN FORETDans le cadre du PPRDF2 2012-2016 ont été mis en

place des outils d’animations locales tels que les Plans de Développement de Massif (PDM), les Plans d’Ap-provisionnement Territoriaux (PAT), dans le cadre des Chartes Forestières de Territoire (CFT). Leur objectif est, au vu des diagnostics et après concertation, d’in-tensifier l’exploitation des forêts privées et commu-nales. Bien que la prise en compte des enjeux envi-ronnementaux et de gestion durable y ait été affirmée dans les principes, leur traduction dans les réalisa-tions concrètes reste pour le moment confidentielle : c’est ce que FNE FC a clairement fait remarquer et a regretté lors de la réunion de validation de juillet 2012 tout en relevant l’aspect positif de ces actions : les acteurs locaux sont mobilisés et incités à la concer-tation et au regroupement des petites parcelles.

De plus les filières locales du bois sont dynamisées et des actions de formation mises sur pied, tel est du moins l’objectif déclaré. Une expression récurrente apparaît dans ces textes : « massifs insuffisamment exploités ». A remarquer que dans le cas de certaines propriétés forestières privées ou communales, l’ab-sence d’exploitation n’est pas synonyme de « non ges-tion » mais un choix assumé de forêt en libre évolution.

Sur certaines parcelles forestières, appauvries en biodiversité dans un milieu fermé suite à une exploitation passée en taillis, puis laissées à l’aban-don, l’exploitation de bois de chauffage doit être l’occasion d’un engagement vers une sylviculture plus proche de la nature par ouverture du milieu.

2 Plan Pluriannuel Régional de Développement Forestier-de Franche-Comté

Nos recommandations

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En effet le compactage du sol forestier est désastreux pour le fonctionnement de l’écosystème :

baisse de l’activité biologique du sol dommages aux racines diminution de la production biologique de bois

baisse de l’activité filtrante vis-à-vis de l’eau et donc érosion

La mobilisation du bois, dans les forêts pour le moment non exploitées, nécessite la création de voies de desserte dans le cadre de regroupement des petites propriétés forestières au sein de coo-pératives ou d’ASA (associations syndicales autorisées) c’est-à-dire des associations de regroupements de gestion ; ces voies doivent être dimensionnées au plus juste pour leur usage, avec une emprise minimale sur la forêt, pour des raisons environnementales et paysa-gères et avec une prise en compte et un respect du chevelu hydro-graphique intra-forestier, bien souvent méconnu et non cartographié d’un point de vue réglementaire. Ces voies sont réservées aux seuls véhicules dédiés aux travaux forestiers et interdites aux véhicules de loisir, type quad et 4x4.

Par ailleurs l’espacement des cloisonnements d’exploitation3 doit être maximal.

Pour le débardage privilégier les engins de taille modeste comme les tracteurs munis de treuil et câble (skidder, voir photo ci-contre) au rayon d’action important, de préférence aux porteurs bien plus lourds munis de bras télescopiques et au rayon d’action plus court ; les engins légers sont moins destructeurs du sol à condition de tenir compte de la largeur des pneus et des équipements particuliers. A poids d’engin égal, des pneus larges exercent une moindre pression au sol que les pneus étroits.

Dans les forêts en forte pente et les forêts alluviales au sol très humide, privilégier la traction animale ou le débar-dage par câble. Evidemment il faut éviter les coupes en plein été de même que les débardages par temps très humide. Cependant la réalité du terrain et des caprices climatiques laissent parfois peu de « fenêtres » pour une exploitation sans impact aucun pour le milieu, avec la prise en compte du repos végétatif, du respect de la faune surtout en période de reproduction, d’un sol sec ou dur. Un compromis est à trouver dans ces situations difficiles entre exploitation du bois de la forêt et prise en compte de la préservation de l’écosystème forestier. Mais à condition que le propriétaire et l’exploitant forestier aient un réel souci de la préservation de la richesse naturelle de la forêt et de l’environnement et que l’effica-cité économique ne soit pas son seul objectif ce dont on peut douter dans un certain nombre de cas au dire de certains témoignages de nos lanceurs d’alerte !

Ces mesures ont toutes pour objectif un fonctionnement optimum donc un rendement énergétique optimal de l’éco-système-forêt.

3 Les cloisonnements d’exploitation sont des passages, sans végétaux ligneux, dédiés aux engins d’abattage et de débardage, qui leur évitent de pénétrer dans les bandes ou espaces forestiers (entre 2 cloisons parallèles) et donc de limiter les dégâts liés au tassement du sol ; seul le sol des cloisons sera impacté. D’où l’intérêt d’un espacement maximal, compatible avec le rayon d’action des engins et le type de forêt (par exemple : espacement plus court dans les plantations résineuses).

Nos recommandations

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Les bois à utilisation énergétique doivent provenir des coupes d’éclaircie et d’amélioration ainsi que des houppiers des arbres abattus lors de coupes définitives.

Les gros arbres de qualité doivent constituer l’ob-jectif principal de la gestion forestière ; ils fournissent les bois d’œuvre, bois noble par excellence, pour ses utilisa-tions : meubles, ébénisterie, charpente, maison à ossa-ture bois, mais aussi comme piège à carbone de longue durée et bien sûr pour sa valeur économique.

La 2° utilisation du bois est représentée par les bois d’industrie (BI) comme les panneaux de bois trituré, les

palettes, les bois de coffrage, la laine de bois pour l’iso-lation : son rôle isolant constitue une énergie, celle qui n’est pas consommée (négawatt), c’est-à-dire la meil-leure ; tous ces BI sont de plus des pièges à carbone pour une durée plus ou moins longue. Citons aussi le papier dont la production est en baisse mais qui est de plus en plus recyclé (jusqu’à 7 fois) et constitue donc aussi un stockage de CO2 mais de durée limitée.

Le bois pour le chauffage vient en 3° position, comme sous-produit des utilisations précédentes, le CO2 qui le constitue retournant à l’atmosphère lors de sa combustion.

3. LA PRESERVATION DE LA BIODIVERSITE LIEE AU SOL« En forêt la propreté est un vilain défaut » (Pro Silva). Les petits bois : branchages, rameaux, feuilles ainsi que les

bois morts qui couvrent le sol forestier en ambiance de mi-ombre sont transformés, grâce à des réseaux trophiques d’insectes saproxylophages, de champignons et autres microorganismes, en minéraux fertilisants et pour une bonne partie en matière carbonée stable du sol appelée humus.

L’humus est une éponge à eau et à minéraux ; il constitue aussi un réservoir de carbone stable. On estime le réser-voir de carbone du sol forestier équivalent au carbone stocké dans les parties aériennes de la forêt et même supé-rieur dans les forêts âgées. Un sol forestier couvert de petits bois est donc actif et offre aux végétaux des conditions optimales de croissance tout en contribuant à la réduction de l’effet de serre. Le prélèvement des petits bois comme bois-énergie ou bois-industrie risque donc de fragiliser le rendement de la forêt dans diverses fonctionnalités.

Une expérience intéressante d’Economie So-ciale, Solidaire et Ecologique

Jacques KRYZYK, bénévole du réseau FNE FC, en-

cadre depuis 2012 en forêt domaniale de Chaux, une expé-

rience très intéressante et exemplaire d’ESSE avec l’accord du

garde forestier local. Ce dernier confie à l’équipe de Jacques –

4 demandeurs d’emploi dont 3 hommes et une femme – une

coupe d’éclaircie de chênes. Pour ce faire, l’équipe n’utilise

que des engins de petite taille : tracteur de 20 CV, remorque

portant 3 stères de bois, tronçonneuses,… à des périodes de

débardage favorables.

Bilan

1) Aucun impact négatif sur le sol forestier qui reste souple et perméable, une gestion douce de la forêt.

2) Une réinsertion dans le tissu social, une dignité retrouvée et un complément de revenu, pour des personnes laissées

pour compte dans notre société grâce à cette activité en lien avec la nature.

3) Un petit coup de pouce à l’économie locale lié à cette activité : marchands de matériels (tronçonneuses, tracteur etc, et

leur entretien).

Lien vers le blog de Jacques Kryzyk «Forêts Libres» http://foretslibres.wordpress.com/

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Nous préconisons donc:

de ne pas récolter les rémanents de faible diamètre (<7cm réglementairement avec tolérance jusqu’à 4-5 cm dans certaines forêts privées utilisés comme charbonnette) surtout dans les sta-tions pauvres car les rémanents sont riches en éléments minéraux au même titre que les feuilles et en éléments organiques (=carbo-nés) intéressants pour le sol. Ils abritent aussi une faune et une flore spécifiques.

de ne pas exploiter les souches et racines car elles sont utiles à la qualité du sol comme supports d’insectes xylophages fourmis etc, au même titre que les bois morts en général.

A ce propos on estime qu’il faudrait entre 20-40 m3/ha de bois morts pour garantir un bon état écologique des forêts 4 alors que la quantité de bois mort dans les forêts françaises est estimée à 6 à 10 m3/ha5 . Ces données figurent aussi dans un document publié par « Les Amis de la Terre » en mai 2009 « Construire une société soutenable : quelle production pour quels usages du bois des forêts françaises ? ». Il faudrait pour rétablir un équilibre entre exportation du bois et conservation de l’équilibre de l’écosystème forestier, laisser environ 25% de l’accroissement dans la forêt sous forme de bois morts, sous forme de rameaux et de feuilles bien sûr, mais aussi de vieux arbres et d’une partie des houppiers. Dans les forêts « productives » en particulier nous sommes loin du compte !

Tous ces bois laissés au sol en tas sont des refuges à batraciens, reptiles, petits mammifères.

Il nous nous semble enfin que les pratiques dédiées telles les TCR (taillis à courte rotation) ou surtout TTCR (tail-lis à très courte rotation) sont à éviter car elles épuisent le sol et la biodiversité : il s’agit davantage d’une ligniculture intensive, comme c’est le cas de la populiculture (peupliers), que d’une exploitation forestière.

4. LES BONNES PRATIQUES SYLVICOLESSi nous abordons ce thème-ci dans un débat consacré

au bois-énergie donc aux énergies renouvelables, c’est qu’en terme de bilan énergétique, toutes les sylvicul-tures ne sont pas équivalentes.

La sylviculture irrégulière ou « sylviculture proche de la nature » a notre préférence. Explication. Son principe : la conservation en continu du couvert forestier dans le temps et dans l’espace, toute coupe à blanc est donc proscrite. Elle maintient les divers étages de végéta-tion dans la durée, et donc « l’ambiance forestière ».

Les arbres d’avenir appelés à devenir de grands et gros fûts de bois d’œuvre sont sélectionnés après des interven-tions légères et fréquentes au niveau d’un groupe ou de

bouquets d’arbres. La récolte de ces gros arbres se fait en fonction de leur diamètre, de leur qualité et non selon un âge prédéterminé ; ces coupes sont fréquentes, progres-sives, de telle sorte que le capital sur pied reste globale-ment constant donc pas de coupe rase. La régénération est naturelle à partie d’arbres « semenciers » dans un espace d’éclaircie favorable : elle est garante de durabi-lité et d’adaptabilité des essences forestières locales aux perturbations climatiques. La régénération naturelle est plus économique que les plantations, en main d’œuvre et en investissement financier. Cette sylviculture respecte les évolutions naturelles de la végétation et permet la meil-leure expression des potentialités de la forêt.

4 « Le bois dit mort, une lacune des forêts en France et en Europe ». Vallauri. 2005.

5 Evaluation du bois mort par l’IFN : situation et perspectives d’amélioration. Hamza, Cluzeau. 2005

Nos recommandations

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Les gros bois d’œuvre fournissent l’essentiel des res-sources financières pour le propriétaire, mais la récolte de bois énergie consécutive aux interventions sylvi-coles, tous les 5-7 ans en moyenne, peut fournir un com-plément de revenus pour le forestier.

Les coupes définitives de gros arbres ne concernent qu’une partie d’entre eux sans compromettre l’ambiance forestière et la permanence de tous les étages de végé-tation. En sylviculture irrégulière, écologie rime avec économie.

La sylviculture régulière, la plus pratiquée aujourd’hui, a tendance à produire une simplification de l’architecture forestière sous la futaie et une réduction de la biodiversité, si elle est menée de manière inten-sive et productiviste, sans parler des monocultures d’es-sences.

Cette sylviculture aboutit au terme d’un cycle à :

La coupe à blanc qui entraîne dégagement du CO2 et appauvrissement du sol puisque le sol dénudé de sa litière augmente son activité respiratoire, donc le déga-gement de CO2, les réserves en carbone du sol s’épuisent et les nutriments minéraux sont en partie lessivés ; la vie du sol, les mycorhizes en particulier, s’appauvrit.

La coupe rase fragilise la forêt alentour vis-à-vis des tornades et autres coups de vent.

Enfin il faut procéder à une replantation coûteuse en travail et en financement.

La coupe à blanc est donc à proscrire dans le cadre d’un processus normal de gestion forestière.

A contrario il existe aussi une gestion vertueuse de la futaie régulière qui est constituée d’espèces autoch-tones et mélangées et qui est régénérée par des coupes progressives.

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ZOOM SUR L’AFFOUAGELa question de l’affouage est importante car bien ancrée sur le territoire franc-comtois. En Franche-Comté, 90% du bois énergie concerne le bois-bûche pour les particuliers. L’affouage soulève de

nombreuses questions pour lesquelles nous apportons des propositions : ▪ La vente informelle liée à l’affouage : limiter la vente de lots de grand volume en revisitant par exemple

les pratiques des petites coupes en forêt6. ▪ Sensibiliser les affouagistes aux bonnes pratiques : ▫ mette en place des modules de formation à destination des particuliers-affouagistes pour les

sensibiliser à la préservation de la richesse forestière autre que le bois de production lors des coupes tels que les arbres et arbustes à baies, les arbres sénescents et à cavités, les chablis, les rémanents, …

▫ donner aux communes les outils permettant de communiquer auprès des affouagistes sur les bonnes pratiques forestières (outils ONF ou autres). Il serait également intéressant de créer des documents d’échanges à ce sujet entre les différentes structures concernées

▪ Former les affouagistes débutants (formations courtes dans les centres de formations régionaux par exemple : « utiliser une tronçonneuse en toute sécurité pour différentes interventions » au CFA Châteaufa-rine).

5. L’UTILISATION DU BOIS-ENERGIE

Rappel : la meilleure énergie étant celle qui n’est pas consommée (négawatt), il faut en priorité promouvoir la sobriété et l’efficacité énergétiques

Le bois-énergie doit être utilisé avant tout pour la production de chaleur.

La cogénération est d’abord une production de chaleur et accessoirement d’électricité. Elle doit être dimensionnée sur les besoins de chaleur du site afin d’obtenir le meilleur rendement possible

(au-delà de 70%).La cogénération, c’est-à-dire la production combinée de chaleur et d’électricité, est intéressante dans le cas

de petites voir moyennes unités (voir exemple de la SCIC ERE 43 en annexe).La réflexion doit ensuite s’axer sur le local, en cohérence avec le massif forestier et ses activités, et émerger

de la concertation des acteurs locaux de la filière. Des sites comme des scieries, peuvent offrir un potentiel inté-ressant pour la cogénération, en alliant un besoin en énergie constant (séchage) et une matière disponible sur site, donc sans induire de transports supplémentaires.

Une évolution réglementaire doit également s’opérer pour permettre une meilleure valorisation des cogéné-rations plus mesurées. Aujourd’hui le tarif d’achat de l’électricité est à partir de 4MW de puissance, il faudrait abaisser ce seuil à 1MW.

La ressource utilisée doit également être locale et ne pas déstructurer l’ensemble de la filière mise en place. Ceci est également en accord avec le scénario négawatt qui s’appuie sur un développement des solutions de cogénération et de récupération de chaleur sur les sites industriels.

Par contre les grandes centrales biomasse sont incompatibles avec la préservation de la ressource forestière et sont à proscrire en raison de la nécessité de transports longue distance et la production presqu’exclusive d’électricité au rendement plus faible que celui pour produire de la chaleur.

Concernant les particuliers : encourager l’utilisation personnelle du bois-bûche par les propriétaires et par les affouagistes dans le cadre des communes forestières.

ZOOM SUR LA COGENERATION

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Soutenir financièrement le remplacement des anciens appareils de chauffage à forte déperdition de chaleur, comme les foyers ouverts, par des appareils de chauffage plus efficaces et moins polluants. Encourager la mise en place de filtres à particules, très nocives, sur les cheminées comme cela se pratique en Suisse.

Priorité doit être donnée aux installations collectives de petite et moyenne puissance à proximité des ressources locales en bois et des lieux de consommation. La proximité limite le recours au transport qui annulerait en partie le bénéfice de l’utilisation du bois comme source d’énergie et de son bilan carbone. La distance ne devrait pas dépasser les 50 kms. L’efficacité énergétique et l’émission de polluants par ces chaufferies collectives sont encadrées par des dispositifs réglementaires. Inciter la mise en place de chaufferies bois déchiquetés/granulés lors d’installations de coo-pératives (fruitières etc).

Nous recommandons aussi de privilégier le broyage sur le lieu de production pour limiter les déplacements grâce à des chargements plus compacts.

En résumé, pourquoi ne pas réaliser un bilan carbone local – au sens large du terme « local », échelle de la com-mune, du pays, du massif selon les cas) – qui prenne en compte l’exploitation, le transport, le carbone libéré dans l’atmosphère lors de la combustion ?

L’utilisation du bois en complément des autres ressources renouvelables favorise l’équilibre énergétique global des territoires ruraux et participe à leur redynamisation.

L’utilisation locale du bois doit être privilégiée.

L’interaction entre les territoires doit être également réfléchie : à l’échelle franc-comtoise comme plus largement. Il est connu que des transferts de bois-bûche s’opèrent entre le Jura et la Savoie, même entre le Haut-Jura qui revend son bois-bûche en Savoie et qui va en chercher ensuite dans le bas-Jura… Les PAT (plans d’approvisionnement territoriaux) doivent permettre d’identifier cela, cette vision du transport de bois sur un territoire. Il est nécessaire que l’ensemble du territoire franc-comtois soit couvert par ces PAT pour faire apparaître les synergies possibles entre les territoires sur la mobilisation et l’utilisation de la ressource afin de l’optimiser d’un point de vue économique et écologique.

Cette réflexion doit être menée plus largement également afin d’éviter les « croisements » de transport, comme dans l’alimentaire. Cela se produit chez les gros fournisseurs de bois qui livrent les chaufferies collec-tives, dont les contrats sont attribués par appels d’offre. Par exemple avec la mise en place d’un réseau d’infor-mation et d’échanges entre les gros transporteurs et fournisseurs de bois, l’économie de transports pourrait être conséquente sur le plan économique et environnemental.

6 Selon une étude de l’ADEME (avril 2007), 60% du bois bûche vendu en France serait produit de manière informelle (autoconsom-mation, échange, vente non déclarée. La filière forêt-bois en Franche-Comté 2013

7 Environ 6% du bois-énergie consommé par an en Franche-Comté provient des connexes des industries du bois (Source : La filière forêt-bois en Franche-Comté - Édition 2013 - INSEE / DRAAF / ADIB.

Remarques

N’oublions pas les sources de bois-énergie hors de la forêt que constituent les haies bocagères qu’il serait urgent de reconstituer en haies hautes avec grands arbres de préférence (plus rentables économiquement et plus riches en espèces) ou d’entretenir (leur abandon est souvent la dernière étape avant leur arasement) avec des espèces feuil-lues indigènes.

Certains bois d’industrie en fin de vie comme les palettes ou les bois de coffrage ainsi que les déchets de scierie (conflit potentiel avec bois d’industrie) offrent des ressources non négligeables7 à condition qu’ils n’aient pas été l’objet de traitements chimiques.

ZOOM SUR LA SYNERGIE ENTRE TERRITOIRES

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6. SYNTHESE EN GUISE DE CONCLUSIONNous sommes persuadés que l’exploitation « intel-

ligente » – on parle de l’intelligence de la naturalité de la forêt – de la ressource bois peut être tout à fait com-patible avec la restauration de la biodiversité et rentable économiquement.

La politique de séparation des fonctions dans l’es-pace, avec des forêts dédiées à la production intensive, d’autres à la fonction écologique est en contradiction avec le Code forestier et le Code de l’Environnement qui fondent la gestion forestière sur une gestion multifonc-tionnelle en vue d’optimiser l’ensemble des biens et ser-vices rendus par la forêt. Il serait souhaitable, dans cette optique, de laisser dans tous les massifs des parcelles en libre évolution. La forêt publique française à laquelle on peut associer la forêt privée et les forêts linéaires (ripisyl-ves, rangée d’arbres, haies) doit devenir un réseau éco-logique forestier continu intégré dans la trame verte et bleue. Dans la même logique le réseau des forêts non exploitées doit être renforcé qui s’intègre aux forêts en libre évolution ou protégées déjà existantes : ce réseau irriguera l’ensemble des massifs leur offrant sa biodiver-sité et ses innovations, qui font défaut aux forêts actuel-lement trop exclusivement dédiées à la seule production de bois et donc appauvries.

Le développement de la filière bois-énergie en Franche-Comté doit être encouragé, dans le respect de l’écosystème forestier. Cette filière a un intérêt écolo-gique global et un intérêt éco-nomique et social local par la création de richesses et d’em-plois non délocalisables, dans la mesure où les sous-trai-tances des filières de valorisation du bois ne soient délo-calisées ailleurs en Europe et dans le monde, la Chine par exemple. Ajoutons qu’on ne peut ré-envisager l’ensemble du mode d’exploitation de nos forêts sans en changer le

mode commercial. Il faut donc revaloriser la filière bois8

dans son ensemble pour revaloriser la filière bois-éner-gie, mais en posant une réflexion locale sur les territoires et leurs spécificités et en tenant en compte des modes de gestions de la forêt explicités dans le présent document. Des leviers d’actions pourraient alors être :

encourager fortement une filière bois d’œuvre locale,

de mieux rémunérer les exploitants et des profes-sionnels du secteur forestier,

revaloriser ou recréer des filières de bois nobles (érable, alisier, etc) qui ont une valeur ajoutée en mar-queterie, ébénisterie. Pour favoriser leur commerciali-sation il est nécessaire de les regrouper en lot pour les ventes. D’où la nécessité de disposer de plateformes pour grouper et trier les lots. L’impact en biodiversité serait positif puisque cela inciterait les forestiers à favoriser ces espèces.

Pour que les propriétaires et les forestiers, privés et publics, s’engagent avec conviction dans cette gestion vertueuse de notre beau patrimoine forestier, il est indis-pensable qu’ils bénéficient d’une information et d’une formation renforcées9 sur les réalités complexes de la naturalité, de la biodiversité, les interactions positives des espèces avec la productivité des écosystèmes, et leur prise en compte dans la gestion forestière. Des connais-

sances et expérimentations sont disponibles mais insuf-fisamment connues et diffu-

sées. Les acteurs de la forêt formés et informés ne per-cevront plus toutes les précautions à prendre en compte comme des contraintes mais comme une libération des richesses potentielles naturelles de leur forêt.

« Un trésor est caché dedans »10

8 La filière bois est une filière sinistrée, les produits bois (construction, papier) représentent le second poste déficitaire du commerce extérieur de la France après les énergies fossiles. 9Le CFPPA de Digne-Carmejane propose une formation d’éco-gestionnaires récoltants forestiers à destination des entrepreneurs, salariés et porteurs de projet désireux de s’orienter vers l’éco-gestion. http://www.digne-carmejane.educagri.fr/spip.php?article3710 Le laboureur et ses enfants. Jean de La Fontaine

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Page 13: GUIDE D’AIDE AU POSITIONNEMENT ET A L’ACTION DES …debatpublic-mefc.org/pdf/Dossier-Bois-Energie_FNE...C’est beaucoup moins le cas des forêts publiques c’est-à-dire les

ANNEXES

La SCIC (société coopérative d’intérêt collectif) ERE 43 est partie du constat qu’il existe un important poten-tiel sylvicole inexploité sur son territoire, en Haute-Loire, et s’est ainsi créée en 2006 avec l’objectif de développer des micro-chaufferies collectives au bois déchiqueté et de contribuer à l’émergence d’une filière bois locale (abattage, débardage, déchiquetage, transport). Il s’agit en résumé d’un projet de constructions groupées de micro-chaufferies bois en milieu de moyenne montagne en filière courte.

Le concept se résume donc à proposer et installer des chaufferies clef en main et vendre la chaleur avec une tari-fication progressive permettant d’inciter les usagers aux économies. Ceci dans La logique d’un circuit économique et géographique court, pour permettre un bénéfice local et une très faible empreinte énergétique et écologique.

La gouvernance de cette opération est celle d’une Société Coopérative d’Intérêt Collectif, représentée par 3 collèges : les salariés, les bénéficiaires et les bénévoles. L’assemblée générale élit un comité des sages qui accompagne la gérance. Six micro-chaufferies sont à ce jour en fonctionnement. Cependant, tous ces efforts ne suffisent pas à favoriser la multiplication des projets. Le point de blocage est leur finance-ment. L’épargne citoyenne est donc mise à contribution par le biais d’Énergie Partagée. L’investissement pour cofinancer les 12 projets à venir, totalisant une puissance prévisionnelle de 1 200 kW, est de 1 500 000 €. Pour ses 12 projets en perspective la SCIC ERE 43 sollicite la participation d’Energie Partagée.

Concernant les circuits courts et l’exploitation en forêt, ERE 43 travaille avec des propriétaires forestiers qui souhai-taient revaloriser leur(s) forêt(s) et redonner une valeur noble aux arbres.

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INITIATIVE DE LA SCIC ERE 43

" Franche-Comté, peut-on faire feu de

Durant le premier semestre 2013, l’ensemble des acteurs régio-naux a été invité à participer au Débat national sur la Transition éner-gétique.

Le Plateau Débat public, animé par FNE Franche-Comté, a répondu à cette sollicitation en organisant le débat « Franche-Comté, peut-on faire feu de tout bois ? » qui a eu lieu le 27 mai 2013.

La synthèse de ce débat a été transmise en contribution à l’élabo-ration du projet de loi sur la Transition énergétique.

Pour écouter l'enregistrement et consulter la synthèse du débat rendez-vous sur: http://debatpublic-mefc.org/franche-comte-peut-on-faire-feu-de-tout-bois/

tout bois ? "