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ARTICLE ORIGINAL / ORIGINAL ARTICLE DOSSIER Généralités médicales et spécificités thérapeutiques des cancers du nouveau-né et du nourrisson Cancer in Newborns and Infants Generalities and Therapeutic Specificities V. Minard-Colin Reçu le 5 août 2015 ; accepté le 23 août 2015 © Lavoisier SAS 2015 Résumé Les tumeurs malignes du petit enfant sont rares. En France, 190 cancers affectent chaque année un enfant de moins dun an. Les plus fréquents à cet âge sont les leucé- mies, les tumeurs cérébrales et les neuroblastomes. La pré- sentation clinique, les types histologiques, le profil biolo- gique, la sensibilité au traitement et le pronostic de ces cancers du petit enfant sont souvent différents de ceux de lenfant plus grand. Une prédisposition génétique est fré- quente et devra systématiquement être recherchée afin notamment de permettre un conseil génétique. La prise en charge devra être multidisciplinaire, réalisée dans un centre de référence et tenir compte des besoins physiologiques et psychologiques de lenfant. Dans les formes de bon pronos- tic, les plus fréquentes, le traitement est fondé sur la chirur- gie conservatrice associée éventuellement à une chimiothé- rapie préalable adaptée à lâge de lenfant. Une surveillance seule permet parfois dobserver la régression spontanée des lésions. Dans les formes de pronostic plus sévère, comme les tumeurs rhabdoïdes et les leucémies néonatales, de nou- veaux médicaments sont nécessaires. Mots clés Cancer · Nouveau-né · Nourrisson · Tumeur néonatale Abstract Malignant tumors in newborns and infants are rare. In France, 190 new cases are diagnosed each year in children less than 1 year. The most frequents are leukemia, brain tumors, and neuroblastoma. Clinical presentation, histologic types, biological behavior, response to therapy, and progno- sis are different from that of older children. Genetic suscep- tibility is frequent and need to be investigated for genetic counseling. Multidisciplinary treatment is required in expert centers and will include the physiologic and psychological needs of young children. The majority of these cancers are of good prognosis, and treatment is based on conservative sur- gery eventually in addition with age-adapted chemotherapy. Spontaneous regressions have also been observed. In poor- prognosis cancers, such as rhabdoïd tumor and neonatal leu- kemia, new therapies are urgently needed. Keywords Cancer · Neonate · Infants · Neonatal tumor Introduction Les tumeurs malignes du petit enfant sont rares. En période néonatale (1 er mois de vie), elles représentent environ 2 % des tumeurs malignes de lenfant [15]. Beaucoup moins rares à cet âge sont les tumeurs bénignes, bien souvent dépistées en période anténatale et dont la plus fréquente est le tératome sacrococcygien. Les cancers du nourrisson de moins dun an représentent quant à eux près de 10 % des cancers de lenfant. Au total, en France, parmi les 1 700 hémopathies et tumeurs malignes solides diagnostiquées chaque année chez lenfant de moins de 15 ans, environ 190 affectent un enfant de moins dun an [6]. Les données américaines du SEER (Surveillance, Epidemiology, and End Results Program) [7] rapportent les taux dincidence suivants pour 1 000 000 denfants de moins dun an sur la période 20082012 : toutes tumeurs malignes : 237, dont leucémies : 50,4 ; neuroblastomes (NBL) : 49,2 ; tumeurs cérébrales : 46,6 ; rétinoblastomes : 29,2 ; sarcomes des tissus mous : 19 ; tumeurs germinales : 18,6 ; tumeurs rénales : 14,8 ; tumeurs hépatiques : 11,1 et autres tumeurs < 5. Enfin, la mortalité par cancer ne représente que moins de 1 % des causes de mortalité de lenfant de moins dun an, la majorité de ces tumeurs étant de bon pronostic. Le diagnostic des tumeurs du nouveau-né est souvent réa- lisé en période anténatale grâce aux examens dimagerie modernes tels que léchographie souvent associée à une V. Minard-Colin (*) Département de cancérologie de lenfant et de ladolescent, Gustave-Roussy, 114, rue Édouard-Vaillant, F-94805 Villejuif cedex, France e-mail : [email protected] Psycho-Oncol. (2015) 9:141-147 DOI 10.1007/s11839-015-0535-1 Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur archives-pson.revuesonline.com

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ARTICLE ORIGINAL / ORIGINAL ARTICLE DOSSIER

Généralités médicales et spécificités thérapeutiques des cancersdu nouveau-né et du nourrisson

Cancer in Newborns and Infants — Generalities and Therapeutic Specificities

V. Minard-Colin

Reçu le 5 août 2015 ; accepté le 23 août 2015© Lavoisier SAS 2015

Résumé Les tumeurs malignes du petit enfant sont rares. EnFrance, 190 cancers affectent chaque année un enfant demoins d’un an. Les plus fréquents à cet âge sont les leucé-mies, les tumeurs cérébrales et les neuroblastomes. La pré-sentation clinique, les types histologiques, le profil biolo-gique, la sensibilité au traitement et le pronostic de cescancers du petit enfant sont souvent différents de ceux del’enfant plus grand. Une prédisposition génétique est fré-quente et devra systématiquement être recherchée afinnotamment de permettre un conseil génétique. La prise encharge devra être multidisciplinaire, réalisée dans un centrede référence et tenir compte des besoins physiologiques etpsychologiques de l’enfant. Dans les formes de bon pronos-tic, les plus fréquentes, le traitement est fondé sur la chirur-gie conservatrice associée éventuellement à une chimiothé-rapie préalable adaptée à l’âge de l’enfant. Une surveillanceseule permet parfois d’observer la régression spontanée deslésions. Dans les formes de pronostic plus sévère, comme lestumeurs rhabdoïdes et les leucémies néonatales, de nou-veaux médicaments sont nécessaires.

Mots clés Cancer · Nouveau-né · Nourrisson · Tumeurnéonatale

AbstractMalignant tumors in newborns and infants are rare.In France, 190 new cases are diagnosed each year in childrenless than 1 year. The most frequents are leukemia, braintumors, and neuroblastoma. Clinical presentation, histologictypes, biological behavior, response to therapy, and progno-sis are different from that of older children. Genetic suscep-tibility is frequent and need to be investigated for genetic

counseling. Multidisciplinary treatment is required in expertcenters and will include the physiologic and psychologicalneeds of young children. The majority of these cancers are ofgood prognosis, and treatment is based on conservative sur-gery eventually in addition with age-adapted chemotherapy.Spontaneous regressions have also been observed. In poor-prognosis cancers, such as rhabdoïd tumor and neonatal leu-kemia, new therapies are urgently needed.

Keywords Cancer · Neonate · Infants · Neonatal tumor

Introduction

Les tumeurs malignes du petit enfant sont rares. En périodenéonatale (1er mois de vie), elles représentent environ 2 % destumeurs malignes de l’enfant [1–5]. Beaucoup moins rares àcet âge sont les tumeurs bénignes, bien souvent dépistées enpériode anténatale et dont la plus fréquente est le tératomesacrococcygien. Les cancers du nourrisson de moins d’un anreprésentent quant à eux près de 10 % des cancers de l’enfant.Au total, en France, parmi les 1 700 hémopathies et tumeursmalignes solides diagnostiquées chaque année chez l’enfantde moins de 15 ans, environ 190 affectent un enfant de moinsd’un an [6]. Les données américaines du SEER (Surveillance,Epidemiology, and End Results Program) [7] rapportent lestaux d’incidence suivants pour 1 000 000 d’enfants de moinsd’un an sur la période 2008–2012 : toutes tumeurs malignes :237, dont leucémies : 50,4 ; neuroblastomes (NBL) : 49,2 ;tumeurs cérébrales : 46,6 ; rétinoblastomes : 29,2 ; sarcomesdes tissus mous : 19 ; tumeurs germinales : 18,6 ; tumeursrénales : 14,8 ; tumeurs hépatiques : 11,1 et autres tumeurs< 5. Enfin, la mortalité par cancer ne représente que moins de1 % des causes de mortalité de l’enfant de moins d’un an, lamajorité de ces tumeurs étant de bon pronostic.

Le diagnostic des tumeurs du nouveau-né est souvent réa-lisé en période anténatale grâce aux examens d’imageriemodernes tels que l’échographie souvent associée à une

V. Minard-Colin (*)Département de cancérologie de l’enfant et de l’adolescent,Gustave-Roussy, 114, rue Édouard-Vaillant,F-94805 Villejuif cedex, Francee-mail : [email protected]

Psycho-Oncol. (2015) 9:141-147DOI 10.1007/s11839-015-0535-1

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imagerie par résonance magnétique (IRM) fœtale. Une réu-nion de concertation pluridisciplinaire est alors nécessaireimpliquant obstétriciens, néonatologistes, chirurgiens, biolo-gistes, radiologues, psychologues/psychiatres et oncologuespédiatres pour proposer une stratégie médicale et informerau mieux la famille. Les questions de l’interruption théra-peutique de la grossesse, du déclenchement prématuré del’accouchement et de la prise en charge obstétricale et néo-natale devront notamment être abordées. Malgré tout, il estsouvent difficile de donner un diagnostic précis sur l’image-rie anténatale et surtout d’évaluer le pronostic de cestumeurs. Plus que les enjeux oncologiques, c’est le retentis-sement de ces masses sur les organes en croissance ainsi quela position familiale qui seront décisionnels.

La présentation clinique, les caractéristiques biologiqueset le pronostic des tumeurs malignes du petit enfant sontdifférents de ceux de l’enfant plus grand. À cet âge, certainstissus embryonnaires, ayant pourtant à l’examen anatomo-pathologique des critères de haute malignité, gardent unecapacité de différenciation, voire de régression spontanéerendant le pronostic de certaines de ces tumeurs très favo-rable. La prise en charge est complexe du fait de la raretédes cas et du jeune âge de l’enfant qui rend la chirurgie dif-ficile, la chimiothérapie délicate à manier et la radiothérapiesouvent impossible à utiliser eu égard aux séquelles qu’ellerisque d’engendrer.

Nous aborderons dans cette revue les caractéristiquesgénérales des tumeurs malignes du nouveau-né et du nour-risson, en abordant en particulier certaines tumeurs les plusfréquentes et particulières à ce jeune âge, ainsi que les enjeuxthérapeutiques spécifiques.

Caractéristiques générales des tumeursmalignes du petit enfant

Facteurs de risque–Étiologies

Peu de facteurs de risque environnementaux ont été identi-fiés dans les cancers de l’enfant en général et dans ceux dutout-petit en particulier. L’exposition durant la grossesse auxradiations ionisantes, à certains pesticides ainsi que l’alcoo-lisme et le tabagisme maternel semblent augmenter le risquede cancer mais de façon limitée [8,9]. Certains traitementsantirétroviraux, donnés aux femmes VIH positives durantleur grossesse pour éviter la transmission du virus à leurenfant, sont potentiellement génotoxiques, et leur associa-tion à un risque accru de cancer chez l’enfant doit êtreencore analysée avec un suivi suffisant [10]. Un excès derisque de développer des tumeurs a enfin été suspecté chezles enfants nés suite à une procréation médicalement assistée(PMA), mais une étude récente anglaise portant sur plus de100 000 enfants nés entre 1992 et 2008 suite à une PMA n’a

pas montré de risque accru chez ces enfants, excepté et defaçon très limitée de développer un hépatoblastome ou unrhabdomyosarcome (RMS) [11].

La découverte d’une tumeur maligne chez un tout-petit, afortiori si elle est associée à des antécédents familiaux decancer (exemple : syndrome de Li-Fraumeni, mutation p53,sarcomes et leucémies), à une dysmorphie (exemple : syn-drome de Noonan, mutation PTPN11, leucémies et NBL), àdes tâches cutanées (exemple : neurofibromatose type 1,mutation/délétion NF1, leucémies et tumeurs solides), àdes malformations (exemple : syndrome de WAGR, micro-délétion 11p13, néphroblastomes) ou si la tumeur se présentede façon multifocale (exemple : néphroblastomes bilatéraux,mutation WT1), doit faire suspecter une susceptibilité géné-tique à développer des tumeurs. De même, la découverte decertaines tumeurs doit faire proposer systématiquement à lafamille une consultation génétique (exemple : tumeurs rhab-doïdes intra- et extracérébrales et mutation SMARCB1/INI1,pleuropneumoblastome et mutationDICER1). Environ 10 %des tumeurs de l’enfant sont aujourd’hui associées à uneanomalie génétique connue, mais ce pourcentage est enhausse constante du fait du développement de nouveauxoutils de biologie moléculaire [12]. L’intérêt du conseil etde l’analyse génétique est multiple : d’une part, il permetau médecin de répondre, au moins en partie, à une questionfréquente et légitime des parents : pourquoi mon enfant a-t-ildéveloppé un cancer ? D’autre part, l’identification d’unesusceptibilité génétique nécessite dans certains cas l’adapta-tion des traitements qui peuvent s’avérer plus toxiques oumoins efficaces et permet une surveillance adaptée. Enfin,et cela concerne en particulier ces parents le plus souventjeunes dont le tout-petit a déjà un cancer, en cas de nouvellegrossesse, l’identification préalable d’une anomalie géné-tique permet de proposer aux parents un diagnostic anténa-tal, voire un diagnostic préimplantatoire.

Diagnostic clinique–Imagerie

En dehors du diagnostic anténatal que nous avons abordé ci-dessus, le diagnostic est porté devant des symptômes etsignes cliniques très variables et qui sont fonction du siteprimitif de la maladie et de son extension. Les particularitéscliniques de ces tumeurs du jeune enfant sont : 1) une crois-sance parfois très rapide, notamment pour les tumeursembryonnaires, contrastant avec ; 2) un état général long-temps conservé et la pauvreté des symptômes ; 3) un retarddiagnostique fréquent pour les tumeurs cérébrales du fait dela plasticité de la boîte crânienne à cet âge et des signescliniques souvent tardifs en dehors de la macrocéphalie ;4) des formes cliniques uniques à cet âge et parfois diffici-les de diagnostic pour le pédiatre non spécialiste telles quele syndrome de Pepper (NBL métastatique associant unetumeur souvent surrénalienne, des métastases hépatiques

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volumineuses, des nodules sous-cutanés souvent bleutés etune atteinte médullaire) (Fig. 1) ou le blueberry muffin baby,papulonodules disséminés inflammatoires plus ou moinsbleutés pouvant révéler chez le nouveau-né des métastasesde RMS alvéolaire ou des localisations de leucémie aiguëmyéloblastique (LAM) et surtout ; 5) la nécessité d’évaluerde façon attentive et répétée le retentissement clinique liénotamment au volume tumoral chez ces enfants encore trèsjeunes et fragiles (difficultés alimentaires, respiratoires, uri-naires, etc.).

Une imagerie devra être réalisée afin d’orienter le diag-nostic et de préciser l’extension locale et locorégionale, etcela au mieux avant la biopsie. Les techniques d’imagerienon irradiantes devront être privilégiées à cet âge, tellesque l’échographie et l’IRM, cette dernière pouvant être réa-lisée en général avant l’âge d’un an sans sédation ni anes-thésie générale. À l’imagerie, les diagnostics différentielsdes tumeurs malignes à cet âge sont les tumeurs bénignesqui sont beaucoup plus fréquentes (notamment les héman-giomes dans les parties molles) et les malformations congé-nitales qui peuvent se présenter sous des formes pseudotu-morales très trompeuses.

Histologie–Biologie

Une cytoponction pour les masses superficielles, souventréalisée lors de l’imagerie, peut être d’un apport diagnos-tique essentiel pour orienter le diagnostic et les examensultérieurs. La biopsie sous anesthésie générale, au mieux àl’aiguille de taille adaptée, guidée par l’imagerie et réaliséepar un radiologue expérimenté, reste cependant le plus sou-vent indispensable. Dans certains cas (NBL métastatiques enparticulier), l’évolution rapide de la tumeur et la fragilitérelative de l’enfant contre-indiquent l’anesthésie généraleet nécessitent de débuter un traitement en urgence devantun faisceau d’arguments cliniques, biologiques et radiolo-giques et sans biopsie préalable.

Principales tumeurs malignes du petit enfant

Leucémies

Les leucémies, en particulier néonatales, sont la premièrecause de mortalité par cancer à cet âge [1,13]. Le tableauclinique comporte souvent une altération rapide de l’étatgénéral et une hépatomégalie associées dans plus de 60 %des cas à des nodules sous-cutanés, notamment dansles leucémies aiguës myéloblastiques. L’hyperleucocytoseest fréquente. Le diagnostic, porté sur un examen du sanget de la moelle avec analyse cytologique, immunophéno-typique et moléculaire, devra toujours être confirmé dansun centre spécialisé, certaines réactions « pseudoleucémi-ques » post-infectieuses pouvant être trompeuses à cet âge[2,14]. Ces leucémies posent des difficultés tant cliniquesqu’éthiques du fait de la gravité du pronostic et de la lour-deur et des séquelles potentielles induites par les traite-ments. Leur prise en charge n’est pas consensuelle et faitdébat, en particulier pour les leucémies néonatales. La sur-vie des enfants de moins d’un an atteints de leucémie estde 60 % ; celle des formes néonatales est inférieure à 30 %[2,15].

À la naissance, les LAM prédominent, et dans la premièreannée de vie, leur incidence est équivalente aux leucémiesaiguës lymphoblastiques (LAL). Les LAM, souvent associéesà un réarrangement du gèneMLL [15], sont le plus souvent detype M4, M5 et M7 selon la classification FAB (French-American-British) et sont de meilleur pronostic que les LALen particulier chez le nouveau-né [16]. De façon remarquable,des rémissions spontanées ont été observées, surtout chez lesenfants présentant une trisomie 21 et notamment dans les for-mes cutanées isolées [17]. Les LAL, également associées fré-quemment à un réarrangement de MLL, sont de pronosticredoutable en particulier chez le nouveau-né avec des surviesrapportées inférieures à 20 %, et ce, malgré des traitementsintenses [18].

Fig. 1 Neuroblastome Ms ou syndrome de Pepper néonatal — Tumeur surrénalienne avec métastases hépatiques (A) et nodules sous-

cutanés bleutés (B)

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Tumeurs du système nerveux central (SNC)

Les tumeurs du SNC forment un groupe très hétérogène detumeurs qui siègent surtout à l’étage sus-tentoriel (désigna-tion anatomique de la partie du SNC située au-dessus de latente du cervelet) chez le nouveau-né et le nourrisson[19,20]. La prise en charge de ces tumeurs est complexe dufait notamment des séquelles neurologiques induites par lamaladie et la chirurgie et de l’impossibilité d’utiliser la radio-thérapie, arme thérapeutique pourtant centrale dans de nom-breuses tumeurs cérébrales, eu égard aux séquelles qu’ellerisque d’engendrer. Le principal signe clinique est la macro-céphalie, associée plus ou moins rapidement à des troublesdu développement psychomoteur. Le diagnostic est souventtardif, quand la tumeur est volumineuse, du fait de la plasti-cité de la boîte crânienne à cet âge et des signes tardifs d’hy-pertension intracrânienne.

Les tumeurs du nouveau-né sont quant à elles souventdiagnostiquées en anténatal, grâce aux échographies com-plétées par des IRM fœtales [21]. Malgré tout, il est souventtrès difficile sur ces examens d’imagerie de prédire le type detumeur, et c’est surtout le retentissement de la masse sur lecerveau en croissance qui guidera la prise en charge médi-cale (hydrocéphalie, macrocéphalie, désorganisation plus oumoins agénésie des structures cérébrales). Dans une série de250 tumeurs néonatales, Isaacs rapporte une survie de seu-lement 28 % [19,20]. Les principaux facteurs pronostiquessont la taille et le site de la tumeur, le type histologique (lestératomes, tumeur la plus fréquente à cet âge, et les tumeursneuroectodermiques primitives ayant le plus mauvais pro-nostic), l’opérabilité et l’état clinique de l’enfant.

Les tumeurs rhabdoïdes tératoïdes atypiques (Fig. 2) sontdes tumeurs rares et particulièrement agressives du jeuneenfant. Elles se développent suite à l’inactivation bialléliquedu gène suppresseur de tumeur SMARCB1/INI1 et peuventsiéger dans ou en dehors du système nerveux central etnotamment alors au niveau du rein [22]. Un syndrome deprédisposition associé à une mutation germinale du gènesuppresseur de tumeur SMARCB1/INI1 (le plus souvent denovo mais parfois liée à un mosaïsme germinal parental,d’où la nécessité d’un conseil génétique) est présent dansprès de 50 % des cas lorsque la tumeur rhabdoïde est diag-nostiquée avant l’âge d’un an [23]. Les tumeurs peuvent sié-ger en sus- ou sous-tentoriel ou dans la moelle épinière. Enimmunohistochimie, la perte d’expression d’INI1 permet lediagnostic. Malgré des traitements lourds associant chimio-thérapie intense, chirurgie et radiothérapie chez les plusgrands enfants, la survie est inférieure à 30 % [24].

Nous n’aborderons pas enfin les autres tumeurs telles queles papillomes ou les carcinomes des plexus choroïdes, lesgliomes malins, les médulloblastomes et les tumeurs neu-roectodermiques primitives qui à ce jeune âge ont souventun profil biologique et une sensibilité aux traitements diffé-rents de ceux des enfants plus grands.

Neuroblastomes

Le NBL est une tumeur fréquente du très jeune enfant, etc’est la tumeur solide la plus fréquente à la période néonatale[7]. Il siège surtout au niveau de la glande surrénalienne,mais peut se développer à tout niveau du système nerveuxsympathique. Le diagnostic peut être anténatal ou chez le

Fig. 2 Tumeur rhabdoïde et tératoïde atypique au diagnostic (A) et à la récidive en cours de traitement dans le lit opératoire et sous

forme de métastases leptoméningées (B)

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nourrisson fortuit sur une échographie demandée pour uneautre raison ou porté suite à des symptômes liés à la tumeuret/ou son extension [25]. Le spectre de la maladie est large,allant d’une petite tumeur surrénalienne à une tumeur plusétendue ou métastatique. Cette dernière, appelée syndromede Pepper ou Ms, associe une tumeur le plus souvent surré-nalienne à des métastases hépatiques, médullaires et/ousous-cutanées plus ou moins bleutées (Fig. 1). Le NBL dujeune enfant peut régresser spontanément et éventuellementaprès une croissance initiale. En l’absence de symptôme oude biologie défavorable, le standard est la surveillance seule[26]. Un traitement par chimiothérapie adaptée aux jeunesenfants peut être nécessaire soit du fait d’un profil molécu-laire moins favorable (anomalies segmentaires chromoso-miques), soit du fait du retentissement clinique de la masseprimitive et/ou des métastases en particulier hépatiques(hypertension artérielle, douleurs, troubles respiratoires, ali-mentaires, etc.). Le pronostic est très bon avec des surviessupérieures à 90 % [27]. Certains NBL, exceptionnels chezle nouveau-né et rares chez le nourrisson (< 10 %), sontassociés à une amplification somatique de l’oncogène NMycet sont plus agressifs, nécessitant un traitement adapté.

Sarcomes des tissus mous

Nous abordons ici les sarcomes des tissus car, même s’ilssont moins fréquents que les rétinoblastomes dans la pre-mière année de vie, ils posent des difficultés diagnostiqueset thérapeutiques particulières à cet âge. D’une part, le diag-nostic peut être difficile, et le risque de confusion avec unetumeur bénigne est important du fait notamment de l’intenseactivité mitotique tissulaire. Dans certains cas difficiles, lamise en évidence d’anomalies moléculaires spécifiques àcertains groupes tumoraux peut être très utile au diagnostic,et il sera également nécessaire de conforter le diagnostic parune relecture systématique. D’autre part, ces tumeurs, etnotamment les RMS (les plus fréquentes dans la premièreannée de vie avec les fibrosarcomes infantiles [FI]), nécessi-

tent un traitement multidisciplinaire qui devra prendre encompte les séquelles induites à cet âge par les traitements,et notamment par la chirurgie et la radiothérapie [28]. Enfin,à cet âge, une « même » maladie peut présenter un profilbiologique et un pronostic très différent et souvent bien meil-leur que pour le plus grand enfant ou l’adulte (exemple : FI).

Le FI (Fig. 3) peut être présent dès la naissance et survienttoujours avant quatre ans. La tumeur siège alors sur les mem-bres et particulièrement au niveau des extrémités. Une trans-location chromosomique aboutissant au gène de fusionETV6-NTRK3 a été identifiée. Le traitement de référenceest la résection chirurgicale qui doit être conservatrice. Lachimiothérapie, le plus souvent efficace, est indiquée aupréalable en cas de tumeur inopérable. Le pronostic des FIest excellent avec une survie globale de 80 à 100 % selon lesséries [29]. Le RMS néonatal est une tumeur rare à cet âge(0,5 à 1 % des RMS). La tumeur siège principalement auniveau des membres ou du tractus génito-urinaire (Fig. 4).Le traitement est fondé sur une chimiothérapie adaptée et surune chirurgie aussi conservatrice que possible. Le pronosticdes RMS des enfants de moins d’un an est le plus souventcomparable à celui des enfants plus âgés [30].

Fig. 3 Fibrosarcome congénital de l’avant-bras

Fig. 4 Rhabdomyosarcome paratesticulaire chez un nourrisson de six mois, présentation clinique (A) et pièce opératoire (B)

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Spécificités thérapeutiques

La prise en charge des tumeurs malignes du nouveau-né etdu nourrisson est délicate, fondée sur une multidisciplinaritéet doit se déployer dans des centres de référence. Elle doitbien sûr tenir compte des besoins physiologiques (sommeil,allaitement, etc.) et psychologiques (possibilité de présenceparentale continue) spécifiques du tout-petit et les respecterau maximum. Les soins de puériculture sont égalementadaptés : par exemple, les soins potentiellement douloureuxdoivent être réalisés durant l’allaitement ou après solutionorale sucrée et avec tétine (nourrisson < 4–6 mois), les échel-les d’évaluation de la douleur sont adaptées à l’âge, les son-des gastriques doivent être posées par voie buccale et nonnasale, etc.

Ces tumeurs sont heureusement le plus souvent de bon,voire d’excellent pronostic et de façon très intéressante peu-vent même régresser spontanément ou après quelques curesadaptées de chimiothérapie. Le premier principe est celui deprimum non nocere, c’est-à-dire d’abord de ne pas nuire.C’est le cas par exemple de petites tumeurs surrénaliennesdifficiles, voire dangereuses à biopsier (risque d’hémorragieou de rupture tumorale si la biopsie est réalisée par un radio-logue non expérimenté et/ou avec une aiguille de trop grandetaille). C’est le cas aussi des NBL métastatiques associés àde volumineuses métastases hépatiques responsables parfoisd’une instabilité respiratoire et hémodynamique. L’inductiond’une anesthésie générale peut être dangereuse ou l’extuba-tion impossible après l’anesthésie. Dans ce cas, il faut savoirsurseoir à la biopsie initiale et débuter en urgence un traite-ment par chimiothérapie devant un faisceau d’arguments etréaliser la biopsie dans un deuxième temps après réductiondu volume tumoral.

À l’inverse, devant des tumeurs agressives et de pronosticréservé, il faut savoir intensifier progressivement les traite-ments s’ils sont bien tolérés. C’est le cas par exemple decertains RMS alvéolaires du nourrisson qui nécessitent unechimiothérapie intense comportant l’introduction progres-sive des alkylants puis éventuellement des anthracyclines.

Les modalités thérapeutiques doivent enfin tenir comptedu très jeune âge des enfants. La chirurgie est difficile du faitbien sûr de la petite taille des organes, mais aussi pour lestumeurs qui se situent à proximité des vaisseaux du risqueélevé de spasme artériel. La radiothérapie n’est quasimentpas possible avant l’âge d’un an, eu égard aux séquellesqu’elle engendrait, sauf éventuellement sur des zones trèslimitées ou avec des techniques adaptées. L’adaptation dela chimiothérapie à l’âge et au poids est essentielle en parti-culier chez le nouveau-né mais aussi chez le nourrisson demoins d’un an. D’une part du fait de l’immaturité enzyma-tique et d’autre part, et surtout, du fait de la formulation cor-porelle des tout-petits rendant les calculs de chimiothérapie

par rapport à la surface corporelle et non le poids dangereux.Les adaptations de dose ne sont donc pas des réductionsaboutissant à un sous-traitement, mais des calculs intégrantla biométrie du nourrisson. Cette adaptation sera de toutefaçon dynamique, tenant compte pour les cures suivantesde la gravité de la maladie, de la tolérance et de l’efficacitéde la chimiothérapie.

Conclusion

Les tumeurs malignes du nouveau-né et du nourrisson sontrares, et leur prise en charge est complexe et pose des ques-tions médicales et éthiques. Dans les formes de bon pronostic,les plus fréquentes, le traitement est fondé sur la chirurgieconservatrice associée éventuellement à une chimiothérapieadaptée à l’âge de l’enfant. Parfois, une surveillance seulepermet d’observer la régression spontanée des lésions. Dansles formes de pronostic plus sévère, comme les tumeurs rhab-doïdes et les leucémies néonatales, de nouveaux médicamentssont nécessaires, dirigés contre les anomalies moléculairesdriver ou conductrices de ces tumeurs. La meilleure compré-hension des mécanismes d’oncogenèse, et notamment de lapermissivité dumicroenvironnement tumoral laissant se déve-lopper parfois in utero ces cancers, permettra à l’avenir demieux traiter voire de prévenir ces tumeurs.

Liens d’intérêts : l’auteur déclare ne pas avoir de liensd’intérêts.

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