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Département de l’information des Nations Unies Vol. 18 No. 2 Juillet 2004 UE FRI ENOUVEAU Anciennement ‘Afrique Relance’ ‘Afrique Relance’ s’appelle désormais ‘Afrique. Renouveau’ voir page 3 Getty Images / Per-Anders Pettersson

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Page 1: FRI UE ENOUVEAU...JUILLET 2004 FRI UE ENOUVEAU 5 cette seule année et le nombre d’orphelins du sida est passé à 660 000. D’ici à 2005, l’espérance de vie sera tombée à

Département de l’information des Nations Unies Vol. 18 No. 2 Juillet 2004

UEFRI ENOUVEAUAnciennement ‘Afrique Relance’

‘Afrique Relance’s’appelle

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sommaireAfrique du Sud :une décenniede liberté . . . . . . . . . . . . .4

Remède à l’impassesur la polioau Nigéria . . . . . . . . . . . .6

Lutte des entrepriseszambiennes contre le sida . . . . . . . . .8

Campagnes de sensibilisation anti-VIH dans les entreprises . . . . . .9

Les vicissitudes du développementdurable . . . . . . . . . . . . . .19

Alimentation en eau :l’Afrique du Sud donne l’exemple . . . . . . . . . . .21

Abonnez-vous à Afrique RenouveauVous pouvez vous abonner à l’année à titre individuel ($20) ou institutionnel ($35).

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la demande par écrit et l’adresser au Rédacteur.

La revue Afrique Renouveau est publiée en anglais et en français par la Division de la communication stratégique du Département de l’information des Nations Unies, et

bénéficie du soutien du PNUD, de l’UNICEF et de l’UNIFEM. Toutefois son contenu nereflète pas nécessairement les vues des Nations Unies ou des organisations soutenant

la publication. Le contenu de cette publication peut être reproduit librement, en précisantla source. Merci de nous en adresser une copie.

Prière d’adresser toute correspondance auRédacteur, Afrique Renouveau

Bureau S-955, Nations Unies, New York 10017, E.-U.Tél : (212) 963-6857 Fax : (212) 963-4556

e-mail : [email protected]

Consultez notre site Web :www.africarecovery.org

rubriques :• Actualités

• Index thématique • Recherche

Rédactrice en chefJulie I. Thompson

Rédacteur ReportersErnest Harsch Gumisai Mutume

Michael Fleshman

Assistant de rédaction RéalisationGeorge Dille Parvati McPheeters

Assistante administrative DistributionAlice Wairimu Kariuki Atar Markman

Egalement au sommaire

Nations U

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attleberger

Afrique Renouveau est imprimée sur papier recyclé.

Agenda. . . . . . . . . . . . 22Livres . . . . . . . . . . . . . 22

En bref . . . . . . . . . . . . 23Horizon. . . . . . . . . . . . 24

Rubriques

Le premier présidentdémocratiquement élu

de l’Afrique du Sud,Nelson Mandela,

vote en 1994.

Soudan : “La communauté internationale nesaurait rester passive.”

Plus grande prioritéaux droits de l’homme . . . . . . . 10

La déclaration des droits de l’homme de l’Afrique . . . . . . . . . . . . . 12

L’ONU s’efforce d’éviterun “nouveau Rwanda” . . . . . . 14

Massacres et faminedans l’Ouest du Soudan . . . . 17

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3JUILLET 2004 UEFRI ENOUVEAU

“Afrique Renouveau” pour refléter une Afrique en mutation

Désormais, la revue connue depuis longtemps sous le nom d’Afrique Relance s’appellera AfriqueRenouveau et ce, à partir de ce numéro. Cette modification se produit alors que l’Afriqueconnaît de profondes transformations — et que les Nations Unies et le reste de la communautéinternationale ont considérablement modifié leur manière d’appréhender le continent.

Après des décennies de stagnation et de malaise, une nouvelle détermination de faireprogresser l’Afrique se fait jour. La plupart des pays ont maintenant des gouvernementsdémocratiquement élus et une organisation régionale plus forte, l’Union africaine, se met enplace pour doter le continent de moyens plus efficaces pour régler les conflits armés, intégrerles économies africaines et défendre les intérêts de l’Afrique partout dans le monde.

Les dirigeants africains ont mis au point un plan visionnaire, le Nouveau Partenariat pour ledéveloppement de l’Afrique (NEPAD), qui dresse un ambitieux “programme de renouveau.” LeNEPAD reconnaît que les progrès ne viendront pas simplement de l’amélioration des taux de crois-sance du continent — d’une “relance” comme disent les économistes — mais aussi d’une pro-gression du développement humain dans son sens le plus large. Grâce au NEPAD, les dirigeantsafricains comptent exploiter le potentiel et les talents considérables de leurs populations et assu-rer la modernisation du continent. C’est en raison de cette vision que le NEPAD a été adopté parles Nations Unies et les autres acteurs internationaux en tant que cadre de solidarité et d’assis-tance à l’Afrique.

Depuis son lancement en 1987, la revue Afrique Relance, publiée par le Département del’information des Nations Unies, s’est appliquée à suivre de près et à analyser les efforts déployéspar les Africains ainsi que par leurs partenaires externes afin de relancer la croissance économiqueet de favoriser le développement humain. A la différence des médias internationaux qui s’in-téressent essentiellement aux récits de guerre, de famines et d’épidémies, cette revue s’efforce deprésenter un tableau à la fois plus riche et plus complexe de la réalité africaine actuelle et elle rendcompte des problèmes considérables auxquels se heurte le continent. Mais elle met également enévidence les efforts héroïques déployés par les Africains pour surmonter l’adversité ainsi que lesréalisations concrètes auxquels ils sont déjà parvenus.

Dans l’esprit du partenariat que le NEPAD illustre bien, ces éléments du rôle que joue la revuedemeurent plus que jamais d’actualité. En adoptant à présent le nom d’Afrique Renouveau, lapublication vise à devenir un miroir plus fidèle du nouveau contexte africain qui privilégie les ini-tiatives et le renouveau. Sans perdre de vue les problèmes qui continuent de perturber l’Afrique,elle donnera l’image d’un continent en marche où les dirigeants sont désormais plus enclins àdéfinir les besoins prioritaires de leurs peuples et à y répondre avec le soutien de sociétés civilesplus attentives et mieux organisées, résolues à assurer ces transformations. Comme le souligne leNEPAD, les Africains sont de plus en plus résolus à “forger leur propre destinée”, en accueillant àbras ouverts les partenariats avec la communauté internationale. Afrique Renouveau servira detribune à leurs efforts.

Shashi Tharoor Ibrahim GambariSecrétaire général adjoint à Secrétaire général adjoint et

la communication et à l’information Conseiller spécial pour l’Afrique

Message à l’intention denos lecteurs

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Afrique du Sud : une décennie de libertéProgrès dans certains domaines mais les vestiges de l’inégalité demeurent bien ancrés

4 JUILLET 2004UEFRI ENOUVEAU

Par Ernest Harsch

I l y a dix ans, la première électiondémocratique en Afrique du Sudmettait fin à l’un des systèmes

de domination raciale le plus vili-pendé dans le monde. Les représen-tants de la majorité africaineopprimée du pays accédaient pourla première fois au pouvoir. Alorsque de nombreux Blancs crai-gnaient de voir les nouvelles autori-tés se venger, le gouvernement duPrésident Nelson Mandela s’estengagé sur la voie de l’unité et de laréconciliation nationales.

“Nous avons choisi la voie quisemblait impossible à emprunter,” adéclaré le 27 avril 2004, dixièmeanniversaire de l’élection historique,M. Thabo Mbeki, l’actuel Président.“Choisir une autre voie aurait condamnél’ensemble de notre peuple, Blancs et Noirs, àun conflit sanglant et catastrophique. Noussommes fiers que chaque jour maintenant, lesSud-africains noirs et blancs découvrent qu’ilssont, après tout, gardiens les uns des autres.”

Si la démocratie se consolide davantage etles tensions raciales se réduisent dans la viepolitique, l’Afrique du Sud n’a toutefois pasencore réussi à surmonter les profondes dis-parités sociales et économiques. L’écart entreles nantis et les démunis demeure énorme,reconnaît le Président Mbeki ; il existe en faitdeux économies “sans passerelle les reliant”.Surmonter l’héritage politique du système haïde l’apartheid s’est révélé plus facile que trou-ver remède aux injustices économiques etsociales qu’il a léguées.

Avancées politiques et socialesL’Afrique du Sud s’est dotée d’un systèmepolitique très ouvert et inclusif. Le pays dis-pose d’une large presse indépendante et viru-lente, la liberté d’association politique estlargement respectée et on peut librement criti-quer les dirigeants et leur demander descomptes. Pour de nombreux défenseurs desdroits de l’homme, la constitution du pays,rédigée à l’issue de longs débats publics, estl’une des plus progressives au monde.

Malgré une histoire particulièrementviolente, l’Afrique du Sud a traversé sapremière décennie de liberté “sans connaître

de conflit racial violent”, faisait remarquerl’African national Congress (ANC), parti aupouvoir, dans une déclaration à l’occasionde l’anniversaire.

Des efforts conscients ont été égalemententrepris pour promouvoir la participation desfemmes à la prise des décisions. Lors de latroisième élection générale après l’apartheidqui a eu lieu le 14 avril – et que l’ANC a rem-portée avec une majorité de 70 % des suf-frages – la proportion de femmes parlemen-taires a légèrement augmenté, passant de30 % à 33 %. Seulement 10 autres pays dansle monde enregistrent un taux plus élevé. Lenouveau gouvernement compte 21 femmesministres et vice-ministres, soit 41 % du total.L’ANC a également désigné des femmes pouroccuper quatre des neufs postes de premierministre de province.

Lorsque l’ANC accédait au pouvoir en1994, sa plateforme électorale comprenaitl’ambitieux Programme pour la reconstructionet le développement, qui définissait desréformes sociales et économiques profondesen faveur de la majorité noire pauvre. Ce pro-gramme a par la suite perdu la place de choixqu’il occupait dans le cadre d’orientation poli-tique du gouvernement et les promesses sesont révélées plus difficiles à tenir qu’on nel’avait pensé au départ. Il n’empêche que lorsde la présentation annuelle du budget auParlement le 18 février, le Ministre desfinances, M. Trevor Manuel, a pu relever

quelques réalisations obtenues au cours de ladernière décennie:

• 1,6 million d’habitations construites ;• 700 nouveaux dispensaires construits et

212 mis à niveau ; 215 dispensaires mo-biles mis en place ;

• Approvisionnement en eau potable pour9 millions de personnes de plus;

• Le nombre de bénéficiaires de presta-tions sociales est passé de 2,9 millions àplus de 7,4 millions ;

• 56 000 salles de classe ont été construites ;Les effectifs scolaires ont augmenté de

1,5 million (passant à 12 millions), le nombrede filles et de garçons étant sensiblement égal.

“Toutefois,” a poursuivi M. Manuel, “nousreconnaissons que la vulnérabilité reste profon-dément ancrée et qu’elle est exacerbée par lechômage croissant et les sombres vestiges de ladislocation et de l’exclusion sociales du passé.”

Le sida et la faible croissance économiqueDu fait de l’aggravation de l’épidémie duVIH/sida, il est devenu plus difficile de sur-monter ces “sombres vestiges”. Déjà latente ily a dix ans, la crise est depuis devenue undrame national. L’Afrique du Sud enregistrel’un des taux de prévalence du VIH les plusélevés en Afrique et dans le monde. En 2001,un adulte sur cinq était infecté, soit au total4,7 millions de personnes, sans compter250 000 enfants séropositifs. Quelque360 000 Sud-africains sont morts au cours de

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hotos / Eric Miller

Afin de réduire

les pénuries de

logements

pour les Noirs

pauvres,

1,6 million

environ de

nouvelles

habitations

ont été

construites

au cours des

dix dernières

années.

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5JUILLET 2004 UEFRI ENOUVEAU

cette seule année et le nombre d’orphelins dusida est passé à 660 000. D’ici à 2005,l’espérance de vie sera tombée à 47 ans, alorsqu’elle était de 60 ans il y a dix ans.

Dans le budget de 2004, quelque 2,1 mil-liards de rand (300 millions de dollars E-U)ont été alloués aux programmes de lutte con-tre le VIH/sida, y compris l’approvisionne-ment en antirétroviraux. Cela étant, de nom-breux militants en faveur de l’action contre lesida et autres observateurs ont critiqué le gou-vernement, accusé de n’avoir pas agi plus tôtet de manière plus décisive pour trouverremède au problème.

De manière générale, la croissance écono-mique a été plus faible qu’on ne l’escomptait.Au milieu des années 90, le gouvernementprévoyait que, pour réaliser les ambitieuxobjectifs sociaux et économiques, le produitintérieur brut devrait enregistrer une croissanceannuelle moyenne de 3,8 %. Or, M. Manuel aindiqué en février que la moyenne réelle de ladernière décennie n’a été que de 2,8 %.

Le Ministre des finances a faitobserver que l’économie sud-africaine subissait fortement lescontrecoups de l’économie mon-diale, qui se “caractérise par unecroissance singulièrement irrégu-lière.” Force est de constater enparticulier que les économiesd’Europe occidentale – princi-paux partenaires commerciaux del’Afrique du Sud – continuentd’enregistrer un taux de crois-sance annuelle de moins de 1 %.

Le secteur privé national n’apas non plus été aussi dynamiqueque prévu. S’il est vrai que l’in-vestissement privé sud-africains’est accru au cours de ladernière décennie, il demeuretoutefois à un faible niveau –environ 16 % du PIB, contre près de 30 % aumilieu des années 70.

Chômage et pauvretéLa faible croissance et la modicité desinvestissements ont contribué à l’augmenta-tion du chômage. Selon les estimations duCongress of South African Trade Unions(COSATU), le plus grand syndicat du pays,jusqu’en 1999, quelque 330 000 emplois ontété perdus dans le secteur privé, essentielle-ment en raison de fermetures d’usines et decompressions du personnel. Par ailleurs,indique le COSATU, la politique gouver-nementale de privatisation de certaines des

plus grandes entreprises du secteur public aentraîné la suppression de 170 000 emploissupplémentaires.

Avec l’arrivée sur le marché de dizaines demilliers de nouveaux demandeurs d’emploichaque année, le taux de chômage officiel necesse d’augmenter. Entre 1996 et 2002, il estpassé de 33% à 41,8%.

D’importants acquis ont été enregistrés,pour ce qui est de surmonter les inégalitéspassées sur le marché du travail, où les salairesdes travailleurs blancs étaient souvent plu-sieurs fois supérieurs à ceux des travailleursnoirs, peut-on lire dans le Rapport sur ledéveloppement humain 2003 pour l’Afriquedu Sud, publié au début de l’année par leProgramme des Nations Unies pour le déve-loppement (PNUD). Toutefois, poursuit le rap-port, “les possibilités d’emploi demeurent desplus faibles et ne peuvent donc permettre derenverser, voire de ralentir la tendance à unchômage massif.”

Le plus alarmant, indique le rapport du

PNUD, c’est que la pauvreté et les inégalitésde revenu ont augmenté. Environ 21,9 mil-lions de Sud-africains, soit 48,5% de la popu-lation, se retrouvent maintenant au-dessous duseuil de pauvreté national.

Evoquant une enquête sur le revenu desménages effectuée en 2000, le PNUD indiquedans son rapport que la part des ménagesafricains dans le dernier cinquième de la pyra-mide des revenus est passée de 29% à 33%entre 1995 et 2000. Dans le même temps, lapart des ménages blancs dans le premiercinquième est passée de 60% à 66%. En outre,fait observer le PNUD, on assiste à “une pola-risation croissante du revenu dans tous les

groupes raciaux,” en particulier parmi lesAfricains et ceux dénommés métis et indiens.

Reconnaissant le danger que ces disparitéspourraient un jour poser pour l’Afrique du Sud,le gouvernement s’emploie à y porter remède.C’est ainsi qu’il a prévu dans le budget de 2004de nouveaux crédits substantiels pour des pro-grammes de travaux publics, le perfection-nement des compétences, la formation profes-sionnelle et la formation de capital industriel.

La Ministre des travaux publics, StellaScagau, a indiqué vers la fin de mai que leprogramme de travaux publics du gouverne-ment, d’un coût de 15 milliards de rand,visera à mettre en place des infrastructuresessentielles et, ce faisant, à créer un milliond’emplois nouveaux. Le gouvernemententend, à long terme, augmenter les taux decroissance et d’investissement en général desorte à pouvoir réduire de moitié le chômaged’ici à 2014. En outre, le gouvernement s’estengagé à accélérer la distribution des terresaux Africains pauvres des zones rurales et à

procéder plus prudemment à la privatisationdes entreprises publiques.

Le Secrétaire général du COSATU,Zwelinzima Vavi, s’est félicité du “récentchangement d’orientation” opéré dans lapolitique économique générale du gouver-nement, qu’il a jugée comme étant un facteurqui a milité en faveur du soutien de la fédéra-tion syndicale à l’ANC pendant l’électiongénérale d’avril.

“On ne peut résoudre aucun des gravesproblèmes sociaux auxquels nous faisonsface sans créer d’emplois et sans réduire,voire éliminer la pauvreté,” a déclaré lePrésident Mbeki. ■

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hotos / Eric Miller

Ecoliers

dans une

école précé-

demment

réservée

aux Blancs :

le gouver-

nement de

l’ANC a

poursuivi une

politique de

réconciliation

nationale.

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Remède à l’impasse sur la polio au NigériaDe nouvelles infections remettent en cause la campagne mondiale d’élimination du fléau

6 JUILLET 2004UEFRI ENOUVEAU

Par Michael Fleshman

U ne longue controverse entre les autoritéslocales et fédérales du Nigéria au sujetde l’innocuité des vaccins anti-polio

fournis par l’ONU serait sur le point d’êtreréglée, grâce à l’intervention personnelle duSecrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, etde son Représentant spécial pour l’Afrique, leSecrétaire général adjoint, Ibrahim Gambari.

Pour l’Organisation mondiale de la santé(OMS) la propagation de nouvelles infectionsconstitue un “avertissement sérieux” du dan-ger que représente la suspension des cam-pagnes d’immunisations.

La polémique s’est déclenchée en juillet

2003, à la suite d’accusations lancées parcertains chefs religieux islamiques selonlesquelles les vaccins fournis par le Fonds desNations Unies pour l’enfance (UNICEF)avaient été délibérément contaminés avec desproduits chimiques stérilisants dans le cadrede la guerre que mènent les Etats-Unis contrele terrorisme. Ces accusations avaient conduitles autorités de quatre Etats du nord du Nigériaà majorité musulmane à suspendre les cam-pagnes d’immunisation anti-polio, pourtantjugées essentielles, tant que l’innocuité duvaccin n’aurait pas été établie. A présent, lesautorités du seul Etat qui continue à refuser lareprise des vaccinations – le Kano – ontindiqué qu’elles pourraient bientôt suivre l’ex-emple des trois autres Etats et autoriser lareprise des vaccinations.

Malgré les efforts déployés par lesautorités fédérales pour convaincre lesautorités locales de reprendre la vaccinationdes enfants contre cette maladie incurable etdébilitante, ces dernières ont persisté àaffirmer que les vaccins étaient contaminés etpeu sûrs. Le résultat des tests effectués enlaboratoire n’a pas dissipé leurs doutes; eneffet, bien que les autorités fédérales aientannoncé l’an dernier qu’aucun contaminantn’a été dépisté, d’autres tests entrepris par lesautorités de Kano auraient confirmé laprésence d’œstrogènes et d’autres substancesétrangères. Le désaccord entre scientifiqueset les rapports déjà tendus entre la région

musulmane du nord et les autorités fédérales,suite aux violences opposant communautéschrétienne et musulmane et à l’adoption de lacharia par la majorité des Etats du nord dupays ont transformé cette polémique en uneimpasse politique.

Le nord du Nigéria est l’un des six “foyers”de polio encore actifs dans le monde, avecl’Inde, le Pakistan, le Niger, l’Afghanistan etl’Egypte. Mais en raison de la suspension duprogramme d’immunisation au Nigéria, lasouche unique à cette région s’est répandue,provoquant de nouvelles infections dans lesud du Nigéria et dans 10 autres pays dela région au moins – Ghana, Togo, Bénin,Burkina Faso, Tchad, Côte d’Ivoire,République centrafricaine, Cameroun, Soudanet même le Botswana.

Cette propagation devrait coûter 100 mil-lions de dollars en nouvelles campagnes devaccination visant à circonscrire le fléau dansles régions déjà débarrassées de la polio. Pireencore, cette réapparition de la maladie remeten cause les efforts de trois milliards de dollarseffectués par la communauté internationalependant 16 ans – efforts sans précédent qui ontfait dire à l’OMS qu’il s’agit de “la meilleure etpeut-être dernière” chance d’éliminer la polio.

Intervention du Secrétaire généralLes principaux protagonistes de la lutte contrela polio, les autorités américaines, l’OMS,l’UNICEF et l’association caritative Rotary

International ont donc fait appelaux bons off ices du Secrétairegénéral. Il est rare que les hautsfonctionnaires de l’ONU inter-viennent dans les relations entre lesautorités et les ressortissants desEtats membres. Pourtant, depuisson entrée en fonctions, M. Annans’est efforcé d’associer à la fois sapersonne et son cabinet aux effortsvisant à trouver des solutions auxgraves problèmes sanitaires denotre temps, comme le VIH/sida etle paludisme. La campagned’élimination de la polio ayant étéremise en question, le Secrétairegénéral a donc prêté son concours.

Ce concours s’est manifesté enla personne de Ibrahim Gambari,principal médiateur du Secrétaire

général en Afrique, et ancien Ministre desaffaires étrangères du Nigéria qui a étédépêché sur place début mars pour aider lesparties à résoudre le problème. Selon letémoignage de M. Gambari, le message duSecrétaire général était très simple. “D’abord,il affirmait qu’il était possible d’éradiquer lapolio et que des progrès considérables avaientété accomplis à cette fin. Ensuite, que leNigéria était une source d’infection pour lesautres pays qui avaient éliminé la polio chezeux. Troisièmement, que les ressources con-sacrées au problème de la polio pouvaient êtremieux utilisées…aux fins d’autres priorités dedéveloppement. Et enfin, que le Secrétairegénéral et l’ensemble du système onusienétaient déterminés à aider le programme anti-polio du Nigéria.”

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7JUILLET 2004 UEFRI ENOUVEAU

Ce diplomate chevronné précise que laprincipale difficulté a été de séparer les inter-rogations scientifiques liées au vaccin desconsidérations politiques et religieuses. “LeSecrétaire général a souligné à tout le mondequ’il s’agissait d’un problème de santépublique. Qu’il s’agissait d’enfants…. Quellesque soient leurs divergences politiques, [lesresponsables]…devaient ranger leurs prin-cipes pour assurer que tous lesenfants nigérians seraient immuniséset que la maladie ne reviendrait paslà d’où elle avait été extirpée.”

Contacts de haut niveauDans un deuxième temps, a expliquéM. Gambari, il a fallu mobiliser leschefs politiques et religieux les plusinfluents du Nigéria, en particulierles chefs du nord du pays, autour desconclusions d’une commission devérification nationale. Composée de23 membres représentant toutes lestendances, celle-ci avait conclu àl’innocuité du vaccin à la suite d’uneinspection en février des installationsde fabrication du vaccin en Afrique du Sud,en Inde et en Indonésie.

Lors du premier jour de sa visite au Nigéria,M. Gambari s’est entretenu avec deux ancienschefs de l’Etat, le général AbdulsalamiAbubakar et le général Muhammadu Buhari.Au cours de la semaine suivante, il a rencontréou parlé avec cinq des six anciens présidents dupays encore en vie, emportant leur adhésionsur les conclusions du rapport de la commis-sion et sur la reprise des campagnes d’immuni-sation. M. Gambari a également rencontré lePrésident en exercice Olusegun Obasanjo, deschefs traditionnels et religieux, et des hautsresponsables des services de santé publique.

Le fait qu’un Secrétaire général adjointpuisse avoir accès à toutes ces personnalitéspolitiques s’explique par les longs états de ser-vice de M. Gambari dans des cabinets succes-sifs de son pays, y compris une dizaine d’an-nées passées comme Ambassadeur du Nigériaauprès de l’ONU dans les années 90. Des sixanciens présidents qu’il a consultés à cetteoccasion, se souvient-il, “j’ai travaillé aveccinq d’entre eux, y compris comme Ministredes affaires étrangères du temps du [général]Buhari. Au Nigéria, je ne suis pas vu commeun politicien dogmatique.”

Au cours de sa mission, M. Gambari aégalement utilisé ses contacts avec les chefstraditionnels influents du pays. Pour s’assurerle soutien des deux principaux chefs tradition-

nels islamiques, le sultan de Sokoto et l’émirde Kano, “j’ai demandé à mon frère, l’émird’Illorin, de les contacter pour préparer le ter-rain. C’est ce qu’il a fait”, raconte M.Gambari. C’est pourquoi lorsque le PrésidentObasanjo a lancé la campagne d’immunisa-tion dans l’Etat de Zamfara à la fin de mars, ila bénéficié du soutien du sultan de Sokoto etd’autres chefs importants du Nord.

M. Gambari a cherché d’autre part àaméliorer les rapports entre les autoritésfédérales et locales. “J’ai emmené des repré-sentants du gouvernement fédéral lors de mavisite à Kano. J’ai encouragé le ministre(local) de la santé à considérer tous les aspectsdu rapport final du comité (de vérification), àsupprimer les considérations religieuses etpolitiques et à bâtir des ponts entre le pouvoirfédéral et local.”

Dernier obstacleFin juin, les autorités de Kano ont indiquéqu’elles autoriseraient la reprise des immuni-sations. Selon M. Gambari, leur réticence ini-tiale provenait des résultats de tests effectuésen Afrique du Sud, qui avaient révélé laprésence de légères traces d’œstrogène danscertains échantillons de vaccin. En fait, del’avis des experts de l’OMS, il s’agissaitd’impuretés naturelles de l’eau qui entre dansla fabrication du vaccin à des doses bieninférieures à celles utilisées dans les pilulescontraceptives. “Kano (a été) le seul Etat àrechigner devant la poursuite des immunisa-tions au motif qu’on n’avait pas suffisammenttenu compte des positions de la populationlocale dans le processus de vérification destests”, précise M. Gambari.

Pour surmonter ce dernier obstacle, l’ONUa proposé un compromis : “Nous avonsdemandé au gouverneur de Kano s’il y avait

un pays dont on pourrait importer le vaccin etqui lui conviendrait. Il a nommé l’Indonésie.Nous avons donc demandé (à l’UNICEF) deveiller à ce qu’il y ait une quantité suffisantede vaccin importé d’Indonésie pour couvrir lesbesoins d’immunisation de Kano… Il nerestait plus aux autorités locales et fédéralesqu’à s’asseoir autour d’une table et à régler lesdétails”, a ajouté M. Gambari.

Depuis, le Ministre nigérian dela santé, Eyitayo Lambo, a annoncéque les deux parties avaient réglétoutes les questions en suspens etque les immunisations au Kanopourraient reprendre avec lesvaccins importés d’Indonésie. Unlancement rapide de la campagneest essentiel. Après la longue sus-pension des immunisations, lesautorités locales devront mener aumoins six campagnes de vaccina-tion à travers l’Etat de Kano avantla fin de l’année. Cet effort devraêtre suivi, selon l’OMS, d’unecampagne massive et coordonnéevisant à restreindre la propagation

de la polio au Nigéria, qui entraînera la nou-velle la nouvelle vaccination des 74 millionsd’enfants du reste du Nigéria et de 21 autrespays de l’Afrique de l’Ouest et centrale audébut de 2005.

La lutte menée par les Etats-Unis contre leterrorisme et la mort de 11 enfants ayant par-ticipé au test d’un médicament expérimentaleffectué par la société pharmaceutique améri-caine Pfizer en 1996 à Kano ont alimenté laméfiance du public face au vaccin anti-polio.En effet, la guerre anti-terroriste est générale-ment interprétée par les populations de larégion comme une agression contre l’Islam, etla pression internationale en faveur d’unereprise des immunisations comme essentielle-ment exercée par les Etats-Unis.

Mais, note M. Gambari, il importe de fairece qui est juste pour les enfants et ce qui est bonpour l’Afrique. “Nous avons expliqué auxresponsables locaux que cette (crise) n’était pasdans leur intérêt. Le Nigéria est en effet l’un despays animateurs du NEPAD (instance chargéedu développement du continent), il est à l’avant-garde des efforts visant à apporter la paix, lastabilité et le développement à l’Afrique del’Ouest”, ajoute M. Gambari. Tant que Kanon’aura pas mené à bien son programme devaccination, dit-il, “la situation demeure grave.Et tant que tous les enfants nigérians n’aurontpas été immunisés, tous les progrès accomplisrisquent d’avoir été en vain” ■

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Nigéria 355 257

Inde 225 12

Pakistan 103 14

Niger** 40 18

Afghanistan 8 3

Egypte 1 1

* à l’exclusion des nouveaux cas d’infections au Nigéria, estimés à plus de 400** comprend les nouveaux cas d’infections au Nigéria

Source : ONU Afrique Renouveau d’après les données de l’Organisation mondialede la santé.

Cas de poliodans le monde*

Juin2003 2004

Page 8: FRI UE ENOUVEAU...JUILLET 2004 FRI UE ENOUVEAU 5 cette seule année et le nombre d’orphelins du sida est passé à 660 000. D’ici à 2005, l’espérance de vie sera tombée à

Lutte des entreprises zambiennes contre le sidaProgrammes lancés sur le lieu de travail pour protéger la capacité de production

8 JUILLET 2004UEFRI ENOUVEAU

Par Reginald NtombaLusaka

Les entreprises de Zambie commencent àentrevoir la réalité : si elles n’adoptent pasdes mesures efficaces de lutte contre le

VIH/sida, elles courent le risque de voir leurmain d’œuvre décimée. “L’effet dévastateur duVIH/sida sur les ressources humaines del’entreprise est une grande préoccupation”,explique Chileshe Kapwepwe, directrice dela National Airports Corporation Limited(NACL), société publique chargée de la gestiondes aéroports zambiens. En effet, dit-elle, il y ade plus en plus de victimes parmi les employés,y compris parmi les éléments “les plus qualifiés,les plus expérimentés et les plus productifs”.Cette situation a encouragé la NACL à joindre

un nombre croissant d’entreprises zambiennesqui adoptent des mesures et des programmesdestinés à faire face aux conséquences écono-miques et sociales de la maladie.

Dans un pays où une personne sur cinqappartenant au groupe d’âge actif sur le plansexuel et productif sur le plan du travail estséropositive, les ménages, les églises, l’admi-nistration et les autres institutions ne sont passeuls à être affectés par le VIH/sida. Le secteurdes entreprises est également touché par cephénomène. Le taux croissant de mortalitéenregistré chez les employés a de graves réper-cussions économiques, qui se manifestent par

le nombre d’heures de travail perdues, par lesindemnités versées aux travailleurs malades etmourants et à leurs survivants, et par la haussedes coûts de la formation réservée aux nou-veaux employés.

Protéger l’investissementComme l‘épidémie a tendance à emporter leséléments les plus qualifiés et les plus produc-tifs de la population, elle entrave sérieusementles efforts de l’ensemble de l’économiezambienne pour élargir l’assise de sesressources humaines et accroître la produc-tivité globale. Les chefs d’entreprise saventbien qu’ils doivent non seulement faire face àla perte de leurs propres ressources humaines,mais également aux risques que représente le

VIH/sida pour l’investissement et lacroissance en général.

Les taux de mortalité élevés liés à lamaladie risquent par ailleurs d’avoir des effetsnégatifs sur les actionnaires et de les fairehésiter à investir dans les entreprises, craintpour sa part Albert Wood, président du Conseild’administration de la State InsuranceCorporation de Zambie. A son avis, “il devientimpératif d’éviter cette menace imminente àl’investissement et à la croissance économi-que”. Sa société a donc adopté une série demesures contre la pandémie et distribuenotamment des préservatifs masculins et

féminins sur le lieu de travail. Comme d’autresprogrammes similaires, celui-ci garantit laconfidentialité aux employés.

Pour sa part, la Electricity SupplyCorporation de Zambie (ZESCO), société quia le monopole énergétique dans le pays, re-doute que sa position de fournisseur uniqued’énergie hydroélectrique soit remise en ques-tion si l’épidémie poursuit ses ravages dans leseffectifs. Pour y parer, la société a lancé unprogramme qui comprend la distribution d’an-tirétroviraux aux employés infectés et à leursconjoints. La société assume 75 % des fraisencourus et les travailleurs 25 %.

“La direction a examiné la manière dontnous perdions notre personnel expérimenté”, aindiqué un porte-parole de la société, AngelaCifire. A ceux soucieux du coût du pro-gramme, elle réplique que “ce qui est impor-tant ce n’est pas le coût, mais ce qu’il peutnous rapporter”.

Pour consolider et coordonner ces efforts,les sociétés privées ont formé la BusinessCoalition contre le VIH/sida de Zambie(ZBCA). Cette association a été constituéeaprès la visite d’un groupe de chefs d’entre-prise zambiens à la Business Coalition de laThaïlande, qui s’est déroulée en 2000 sous lesauspices de l’ONU. Les objectifs de la ZBCAcomprennent la mobilisation des milieuxd’affaires contre le VIH/sida, l’adoption demesures visant à atténuer l’impact de lamaladie sur les effectifs des entreprises, lerenforcement et le soutien accordé auxcampagnes de prévention et de contrôle duvirus VIH et la facilitation des contacts entreles entreprises et les services techniqueset communautaires.

Sous la direction de l’ancien présidentKenneth Kaunda, devenu un militant farouchecontre le sida, la Coalition regroupe plus d’unequarantaine de sociétés (de nombreuses autresentreprises, dont des PME, ont adopté cer-taines formes de programmes anti-VIH/sida).La Coalition dispense par ailleurs une forma-tion aux éducateurs des filiales des sociétésmembres, qui deviennent des poins de contactpour toutes questions ayant trait à la préven-tion, aux soins et aux antirétroviraux.

Les syndicats zambiens appuient les initia-tives des entreprises. Leurs représentantssiègent dans les commissions mixtes direc-tion-personnel chargées de revoir les pro-

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Les entre-

prises

zambiennes

intensifient

la lutte

anti-sida

parmi leurs

employés.

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9JUILLET 2004 UEFRI ENOUVEAU

grammes de soins. “Si les ouvriers souffrentdu VIH/sida, les employeurs seront tentés deles licencier pour cause de manque de rende-ment”, redoute le chef du Congrès des syndi-cats zambiens, Leonard Hikaumba.

Lutter contre la discriminationL’ostracisme dans lequel la société zambiennemaintient les personnes atteintes du VIH/sidademeure un obstacle de taille. Faute d’aborderce problème, estime le directeur général duZBCA, Chileya Nkandu, la simple introduc-tion de programmes antirétroviraux etd’autres mesures anti-sida risque de ne réglercette question qu’à “moitié”.

Pour encourager les employés infectés às’associer à ces efforts, les programmes mis enplace par les entreprises s’engagent à respecterla confidentialité des informations fourniespar les employés et à éviter la discrimination àleur égard s’ils sont contaminés.

La National Airports Corporation Limited,par exemple, qui distribue des antirétrovirauxaux employés infectés et à leurs conjoints,s’engage par ailleurs à ne soumettre aucunemployé potentiel au test de dépistage du sidaau moment de l’embauche. Tout en encou-rageant son personnel à se soumettre volon-tairement aux séances d’orientation et aux testsmédicaux, l’entreprise s’engage à n’adopteraucune mesure discriminatoire à l’encontre dupersonnel séropositif dans sa politique de pro-motion, de formation, de mutation ou d’attri-bution d’avantages sociaux.

Les autorités reconnaissent par ailleurs quela discrimination peut nuire aux efforts de luttecontre la maladie. “On sait bien que les pro-blèmes d’ostracisme et de discrimination, s’ilsne sont pas abordés, risquent de compromettrenos efforts pour vaincre l’épidémie”, déclarele Vice-Président zambien Nevers Mumba.“C’est parce que l’ostracisme, le silence et ladiscrimination, de même que le manque deconfidentialité, contribuent à affaiblir les pro-grammes de prévention, de soins et de traite-ment anti-VIH”, précise-t-il.

Aucune loi n’interdit à présent la discrimi-nation à l’égard des personnes atteintes duVIH; cependant, dans le droit zambien, unetelle discrimination peut entraîner des sanc-tions pénales. Pour leur part, les autorités sesont engagées à faire respecter les mesuresanti-discriminatoires d’ici à 2005. De leur côté,des associations de défense des victimes duVIH/sida font pression pour l’adoption d’uneloi interdisant expressément la discriminationbasée sur la séropositivité d’une personne.

L’Organisation mondiale de la santé

(OMS) convient qu’il est important de sauve-garder les droits pour rendre les programmesanti-sida plus efficaces. “Le traitement doitêtre fondé sur le respect des droits del’homme”, affirme la représentante de l’OMSpour la Zambie, le Dr Stella Anyangwe.

Réponse multisectorielleLes autorités encouragent les initiatives desmilieux d’affaires et ont elles-mêmes adoptédes mesures anti-sida pour leurs propresemployés. En fait, tous les ministères ont desprogrammes et appliquent des mesures dansce domaine. “Les programmes anti-VIH/sidasont coûteux”, souligne le Ministre de lasanté, Brian Chituwo, “mais seulement enapparence, car les bénéfices tirés sont consi-

dérables”. Tous les ministères importantsreçoivent des antirétroviraux du Ministère dela santé et disposent aussi d’une enveloppebudgétaire pour financer les campagnes desensibilisation de leur personnel à l’épidémie.

Au mois de décembre 2003, 4,5 millionsde dollars avaient été déboursés pour financerles programmes VIH/sida, indique le Ministredes finances et de la planification nationale,Ng’andu Magande. Dans le cadre duProgramme national de réduction de la pau-vreté, six millions de dollars supplémentairesont été affectés l’année dernière à l’achatde médicaments.

Selon l’étude la plus récente menée par leMinistère des finances et de la planificationnationale, le taux de prévalence du VIH enZambie en 2001-2002 était de 18% pour les

femmes et de 16% pour les hommes d’âgeadulte. Par ailleurs, il y a environ 800 000orphelins du sida dans le pays, et la moitié deslits d’hôpital du pays sont occupés par desmalades de l’épidémie.

“Un problème global exige une solutionglobale”, affirme Margaret Mwanakatwe,présidente du Conseil national contre le sida,organisme officiel qui coordonne les activitésanti-sida sur le plan national. En l’absenced’un remède, les efforts portent sur la préven-tion et les soins.

A ce jour, 10 000 Zambiens reçoivent desantirétroviraux, mais les autorités espèrent fairepasser ce nombre à 100 000, en vertu de lacampagne 3 x 5 de l’OMS qui prévoit que troismillions de personnes recevront des antirétro-

viraux d’ici à 2005. Pour que le nombre derécipiendaires puisse augmenter en Zambie,les autorités ont demandé 600 millions de dol-lars de plus au Fonds mondial de lutte contre lesida, la tuberculose et le paludisme.

Si cette demande est acceptée, les organi-sations non gouvernementales qui ont des pro-jets réalisables recevront probablement unepart importante de ce montant, compte tenu durôle important qu’elles jouent dans la luttecontre le fléau, en coopération avec lesautorités. Dans ce cadre, les programmes delutte contre le sida mis en place par les entre-prises sur le lieu de travail permettront dedégager des renseignements précieux à l’éla-boration de projets visant à soigner et pro-longer les vies d’autres Zambiens atteints duVIH/sida. ■

Un sondage conduit auprès de plus de 7000 cadres à travers le monde sur l’impact du VIH/sida surleurs entreprises révèle que les responsables du secteur privé en Afrique sont plus conscients dudanger de ce fléau que leurs collègues d’ailleurs. L’étude réalisée par l‘Initiative mondiale pour lasanté (IMS) du Forum économique mondial qui siège en Suisse indique que 89 % des 1620 entre-prises africaines sondées, dont 59 sociétés zambiennes, sont “gravement” préoccupées par leseffets du sida. Pas moins de 60 % de ces entreprises déclarent prévoir des problèmes “consi-dérables” à l’avenir, et près de la moitié d’entre elles avoir constaté un ralentissement de la produc-tivité et une augmentation des coûts liés à l’embauche et à la formation à mesure que les ouvriersqualifiés tombent malades et meurent.

“Les milieux d’affaires africains sont les plus sensibles du monde au problème du VIH et àl’impact du virus sur la main d’œuvre”, a affirmé le 2 juin la directrice de l’IMS Kate Taylor lors d’unSommet économique africain qui se tenait à Maputo (Mozambique). Bien que 12 % seulement desentreprises africaines aient pris des mesures officielles de lutte contre la maladie sur le lieu de travail,a-t-elle souligné, ce pourcentage représentait néanmoins deux fois plus en moyenne que le nombred’entreprises qui ont appliqué des mesures similaires ailleurs dans le monde. En outre, l’étudeindique que les entreprises africaines qui ont lancé des programmes d’éducation, de prévention etde soins sur le lieu de travail sont parmi les plus efficaces du monde, capables d’atteindre, au-delàdes employés, leurs familles et leurs communautés. De l’avis de Mme Taylor, “si les milieux d’affairesafricains pouvaient faire bénéficier de leurs expériences en matière de lutte contre ce fléau des chefsd’entreprise d’autres pays moins avancés du monde en développement et développé, celareprésenterait un progrès considérable”.

Campagnes de sensibilisation anti-VIH dans les entreprises

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Plus grande priorité aux droits de l’hommeLa nouvelle Cour africaine favorisera la primauté du droit et mettra fin à l’impunité

Par Michael Fleshman

P endant des dizaines d’années, la protec-tion des droits fondamentaux en Afriquesemblait avoir pour principaux défen-

seurs une poignée de courageux militants de lasociété civile. Mais depuis plusieurs années, àmesure que la démocratie gagne du terrain surle continent, il est plus souvent admis que lerespect des droits de l’homme est essentiel à lasécurité et au développement à long terme del’Afrique. Les institutions africaines sont deplus en plus nombreuses à se pencher sur dif-férents aspects des droits de l’homme.

Cette année, l’Afrique a réalisé un progrèsimportant en faveur des droits de l’hommelorsque l’Union africaine (UA) a officielle-ment établi la Cour africaine des droits del’homme et des peuples. Dans un continentplus connu pour l’impunité de ceux qui gou-vernent que pour le respect des droits etlibertés des citoyens, ce tribunal confère unpouvoir d’application aux institutions dedéfense des droits de l’homme déjà en place.

La ratification du protocole portant créa-tion de la Cour a été accueillie avec satisfac-tion par le Haut Commissaire des NationsUnies aux droits de l’homme par intérim,Bertrand Ramcharan, qui y a vu “un nouveauprogrès important vers la primauté interna-tionale du droit et la lutte contre l’impunité encas de violations flagrantes des droits del’homme.” Cette Cour renforcera l’action de laCommission africaine des droits de l’hommeet des peuples, établie en 1987 dans le but de

promouvoir la principale déclaration desdroits de l’homme du continent, la Charteafricaine des droits de l’homme et des peuples(voir encadré, page 12).

Combattre la “culture de l’impunité”L’inauguration de la Cour ne fait que con-firmer que de nombreux gouvernementsafricains s’efforcent désor-mais, dans le cadre de l’UA,de renforcer les mécanismesde défense des droits del’homme et de mettre fin à la“culture de l’impunité.”Même les plus ardentsdétracteurs des gouverne-ments africains – les mili-tants africains des droits del’homme – le reconnaissent.

“L’entrée en vigueur duprotocole de la Cour africaine… ouvre de meilleures possi-bilités de renforcer les droits de l’homme surle continent, observe M. Halidou Ouédraogo,chef de l’Union interafricaine des droits del’homme (UIDH), réseau d’organisations nongouvernementales des droits de l’hommeprovenant de 50 pays africains. Ce dirigeantpolitique et défenseur de longue date desdroits de l’homme a expliqué à AfriqueRenouveau qu’il “existe une volonté derompre avec le passé”, avec l’époque où la viepolitique du continent était dominée par desEtats autocratiques à parti unique et où

l’Organisation de l’unité africaine (OUA),prédécesseur de l’UA, estimait généralementque les droits de l’homme relevaient desaffaires intérieures d’un Etat.

Dans le domaine de la justice, explique-t-il, le principal problème que connaît actuelle-ment l’Afrique a trait “à la question d’unsystème judiciaire indépendant et à la question

de l’impunité.” Bon nombrede juges africains ne peuventou ne veulent prendre posi-tion contre leur gouverne-ment, fait-il remarquer, car ilssont nommés par les partis aupouvoir et ils risquent, danscertains cas, d’être écroués ouagressés s’ils s’opposent àl’action du gouvernement.

“Avec la Cour [africaine],nous pouvons faire pressionsur les États afin qu’ilsrelâchent leur emprise sur les

tribunaux, dont ils se servent pour commettredes violations généralisées des droits del’homme dans l’ensemble de la région. L’UA aété créée en tenant compte de la participationde la société civile”, explique-t-il, et par con-séquent “la Cour africaine peut être saisie degraves violations.”

Nouvelle mentalitéEn Afrique, la situation sur le plan des droitsde l’homme a évolué au gré de l’histoire poli-tique du continent. Le non-respect par les

puissances coloniales des droitsde l’homme et des droits civils apermis aux mouvements anticolo-nialistes des années 50 et 60 demobiliser l’opinion nationale etinternationale en faveur de l’au-todétermination africaine.

A mesure que la guerre froidegagnait l’Afrique, de nombreuxgouvernements issus de l’acces-sion à l’indépendance ont étéremplacés par des régimes dicta-toriaux, souvent militaires et lesviolations des droits de l’hommese sont multipliées. Comme ilsn’avaient plus de comptes à rendreaux électeurs, certains gouverne-ments africains n’ont eu aucunscrupule à bafouer les droits de

La vague de démocratisa-tion qui a balayé l’Afriquedans les années 90, l’émer-gence d’une société civiledynamique et les pressionscroissantes des bailleurs defonds ont concouru à modi-fier considérablement l’atti-tude des milieux officielsface aux droits de l’homme.

10 JUILLET 2004UEFRI ENOUVEAU

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du Kenya.

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leurs citoyens. Le silence délibéré des autresdirigeants africains face aux abus de leurshomologues, qui se justifiait par la doctrine del’OUA de non-ingérence dans les affairesintérieures des Etats membres, a valu à cetteorganisation le surnom de “club des dictateurs.”

La situation a commencé à évoluer dansles années 90. La vague dedémocratisation qui a balayé laplus grande partie de l’Afrique, lafin de l’apartheid en Afrique duSud, l’émergence d’une sociétécivile dynamique et indépendanteet les pressions croissantes desbailleurs de fonds ont, d’aprèsdes défenseurs africains et inter-nationaux des droits de l’homme,concouru à modifier considé-rablement l’attitude des milieuxofficiels face aux droits del’homme. Selon eux, de nom-breux gouvernements africainscomprennent maintenant qu’illeur faut tenir compte des droitsde l’homme s’ils veulent préser-ver leur légitimité à l’échellenationale, ainsi que leurs partenariats interna-tionaux en matière de développement.

Parallèlement à la Cour africaine, de nou-velles institutions comme le Mécanismeafricain d’évaluation par les pairs du NouveauPartenariat pour le développement de l’Afrique(NEPAD) et le Conseil de paix et de sécurité del’UA (voir page 24) témoignent de cette nou-velle mentalité.

“Réalisation historique”Bien que la Cour tire son pouvoir, comme lacommission, de la Charte africaine, elleprésente par rapport à cet organisme d’impor-tantes différences. Contrairement à la commis-sion, dont le rôle est en grande partie consul-tatif et éducatif, les décisions de la Cour ontforce exécutoire, du moins pour les gouverne-ments signataires du protocole. Pour la pre-mière fois, la Charte et d’autres traités dedéfense des droits de l’homme sont ainsi dotésd’un mécanisme d’application. La commis-sion, les gouvernements africains – y comprisles gouvernements agissant au nom de parti-culiers – et les organismes africains intergou-vernementaux sont habilités à saisir la Cour.

Le protocole fondateur de la Cour confèreégalement aux particuliers et aux organisa-tions non gouvernementales de défense desdroits de l’homme un droit restreint de saisie.

“Je félicite l’ensemble de l’Afrique etl’Union africaine de ce progrès historique”, a

déclaré M. Ramcharan en janvier, “et j’incitefortement tous les États africains à ratifier sanstarder le protocole.” Les onze juges de la Courseront élus au prochain sommet de l’UA quiaura lieu en juillet.

Tout en se félicitant de la ratification de laCour, le représentant du Ghana auprès de la

Commission africaine, M. EmmanuelDankwa, a également souligné que cette courétait une institution de l’UA. “Une charte dedroits sans tribunal est incomplète”, a-t-ildéclaré à Afrique Renouveau en mars. Alorsque les gouvernements pouvaient ignorer entoute impunité les conclusions de la commis-sion, a-t-il fait remarquer, les verdicts de laCour africaine peuvent être portés devant leConseil des ministres de l’UA en vue d’êtreappliqués. “La commission considère doncque la Cour est un complément qui sera indé-niablement utile dans le domaine des droits del’homme en Afrique.”

L’établissement de la Cour africaine aégalement été qualifié par Amnesty Interna-tional de “progrès extrêmement positif enfaveur de la défense des droits de l’homme.”La mise en place d’un tribunal indépendant,efficace et adéquatement financé, a noté l’or-ganisation, pourrait enfin mettre un terme àl’impunité officielle et “susciter des change-ments positifs dans l’ensemble de l’Afrique.”

Quelle efficacité ?Amnesty International et d’autres groupes dedéfense des droits de l’homme ont cependantformulé des réserves et se demandent si laCour sera en mesure de préserver les jugesdes pressions politiques.

M. Peter Takirambudde, responsable de ladivision Afrique de Human Rights Watch à

New York, a déclaré à Afrique Renouveau queles “restrictions importantes” auxquelles seheurtent les particuliers et les organisationsnon gouvernementales souhaitant saisir laCour pourraient en atténuer considérablementl’efficacité. Non seulement les gouvernementsdoivent eux-mêmes décider si une affaire de

droit privé relève de la Cour,remarque-t-il, mais “il faut égale-ment établir que le plaignant aépuisé tous les recours locaux.”

Lors de la présentation depreuves à la Cour, il est expressé-ment interdit aux particuliers defaire appel à des informationsprovenant des médias et d’autressources accessibles au public. “Ils’agit d’une restriction très impor-tante”, commente-t-il.

Au vu du passé, fait-il obser-ver, il n’est pas souhaitable dedépendre des gouvernements pourporter les affaires de particuliersdevant la Cour. “Si l’on examineles archives de la Commissionafricaine, on ne trouve aucun

exemple de procès intenté par un État contreun autre. Cela ne s’est jamais produit et ne seproduira vraisemblablement pas. Cela ne faitpas partie actuellement de la culture politiquede l’Afrique.”

Modifier cette culture est l’un des défisque doit relever la Cour africaine, poursuit M.Takirambudde, et il faudra bénéficier à cettefin de l’appui des défenseurs des droits del’homme provenant aussi bien des milieuxgouvernementaux que des organisations nongouvernementales. “Sans la société civile, laCour ne sera qu’une institution étatique deplus, incapable de protéger les droits del’homme comme elle le devrait.”

Malgré ces réserves, M. Takirambuddesalue la création de la Cour et y voit “un pasdans la bonne direction”, ainsi que la preuveque les gouvernements africains accordentdavantage d’importance aux droits del’homme. “La mise en place de l’Unionafricaine et l’adoption du mécanisme d’évalu-ation par les pairs du NEPAD – concept révo-lutionnaire – témoignent de la volonté de fairepasser la protection des droits de l’homme àun niveau supérieur. Cela ne se concrétiserapeut-être jamais entièrement, mais au moinsl’engagement a été pris.”

M. Ouédraogo estime avec confiance quebon nombre des lacunes présumées de la Courpourront être comblées avec le temps et indi-que que l’UIDH a déjà entamé le dialogue avec

11JUILLET 2004 UEFRI ENOUVEAU

Malgré les progrès réalisés au cours des dix dernièresannées, de nombreux Africains sont encore injustement

emprisonnés ou privés de droits fondamentaux.

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Page 12: FRI UE ENOUVEAU...JUILLET 2004 FRI UE ENOUVEAU 5 cette seule année et le nombre d’orphelins du sida est passé à 660 000. D’ici à 2005, l’espérance de vie sera tombée à

les gouvernements africains et les dirigeants del’UA en vue de renforcer la Cour. “Nous avonscollaboré avec la Commission africaine afin deveiller à ce que les particuliers et les entités nongouvernementales y aient accès”, explique-t-il,ajoutant qu’il sera essentiel d’obtenir un accèssimilaire à la Cour africaine.

L’UIDH s’efforce de convaincre unplus grand nombre de gouvernementsde ratifier le protocole, explique-t-il.“Chaque pays doit déclarer publique-ment que les ONG, la société civile etles citoyens ordinaires pourront saisir laCour en cas de graves violations desdroits de l’homme.” L’UIDH organiseraégalement une campagne visant àexpliquer le fonctionnement de l’UA etde la Cour et à sensibiliser la société civile etles milieux gouvernementaux à l’importancedes droits de l’homme pour la gouvernance, ledéveloppement et le règlement de conflits.

Commissions nationales : bilan mitigéDepuis que le mouvement de démocratisationde l’Afrique a commencé au début des années90, le nombre d’institutions gouvernementalesde défense des droits de l’homme a consi-dérablement augmenté, passant d’un seul orga-nisme national en 1989 à 24 dix ans plus tard.

Cette tendance à la création d’organismesnationaux de défense des droits de l’homme aété fortement encouragée par le Haut

Commissaire des Nations Unies aux droits del’homme. En 1993, ce dernier a élaboré à l’in-tention des commissions officielles des droitsde l’homme un ensemble de recommanda-tions – les Principes de Paris – et dispose dansses bureaux de Genève d’un service chargéd’apporter assistance et soutien technique.

Aux yeux de nombreux groupes africainset internationaux de défense des droits del’homme, notamment l’UIDH et HumanRights Watch, la création de commissionsofficielles des droits de l’homme est un signepositif, indiquant que les gouvernementsafricains s’emploient, sous la pression de leursociété civile, de leurs bailleurs de fonds etd’autres partenaires de développement, à insti-tutionnaliser la protection des droits del’homme. Mais le bilan, estiment-ils, est pourl’instant très mitigé.

Dans une étude de 2001 portant sur lescommissions gouvernementales des droits del’homme, intitulée Protection ou illusion ?,

Human Rights Watch indique que certainescommissions sont dotées d’un mandat de vasteenvergure et sont véritablement à l’abri decontrôles gouvernementaux excessifs. Maisdans d’autres cas, les auteurs de l’étude signa-lent que des commissions nationales sontcréées dans le seul but d’atténuer les critiques

de la communauté internationale face àdes violations de droits de l’homme etd’apaiser les bailleurs de fonds.Souvent, la mainmise du gouverne-ment sur les budgets et les nominationsincite les responsables des commis-sions à éviter les sujets sensibles sur leplan politique et à mettre l’accent surdes aspects importants mais moinscontroversés de la promotion des droits

de l’homme, comme l’information du public.“On aurait tort de penser, notent les

auteurs du rapport, que la création d’une com-mission nationale des droits de l’hommetémoigne nécessairement d’un plus grandrespect des droits de l’homme. Mais les acti-vités des commissions les plus prometteusesindiquent que ces organismes d’Etat pour-raient contribuer au renforcement de laculture des droits de l’homme.”

Ouganda : défense de la démocratisationLa Commission des droits de l’homme del’Ouganda s’est avérée être l’un des orga-nismes officiels de défense des droits de

l’homme les plus dynamiques et lesplus efficaces du continent. Inscritedans la constitution de 1995 après desdizaines d’années de violences com-mises par les gouvernements précé-dents, la Commission a, par sonindépendance et les compétences dontla loi l’investit, ainsi que par savolonté de contester l’action du gou-vernement, contribué à améliorerconsidérablement la situation desdroits de l’homme dans ce pays.

Contrairement à de nombreuxautres organismes analogues enAfrique, la Commission a un statutquasi judiciaire et est dotée des pou-voirs suivants :• Assigner à comparaître toute personne

ou réquisitionner tout document• Donner l’ordre de comparaître afin

de témoigner• Ordonner la libération de détenus• Ordonner une restitution financière

ou d’autres indemnisations desvictimes de violations des droits del’homme.

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“Chaque pays doit déclarer publique-ment que les ONG, la société civile etles citoyens ordinaires pourront saisirla Cour en cas de graves violationsdes droits de l’homme.”

— M. Halidou Ouédraogo, chef de l’Union interafricaine

des droits de l’homme

La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples a été adoptée en 1981 par l’organisme qui a précédél’Union africaine, l’Organisation de l’unité africaine. C’est le principal instrument relatif aux droits de l’hommedont dispose le continent. La Charte énonce les mêmes droits individuels que ceux qui sont consacrés dans laDéclaration universelle des droits de l’homme des Nations Unies, y compris l’égalité devant la loi, la libertéd’expression, de religion et d’assemblée, le droit au travail, à la propriété et à un niveau de vie minimum, ainsique l’accès aux soins de santé et à l’éducation et le droit de vivre à l’abri des arrestations et détentions arbi-traires, des traitements dégradants et de la torture. Ces droits sont assortis de devoirs, notamment l’obligationde consolider la famille, de servir l’Etat et de travailler.

La Charte énonce également un groupe de droits et obligations “des peuples” ou collectifs, comme le droità l’autodétermination nationale, qui sont absents de la Déclaration universelle de 1948. Ces droits, ainsi quecertaines dispositions comme par exemple l’obligation faite aux Etats “d’éliminer toutes les formes d’exploita-tion économique étrangère” et le droit des peuples à la solidarité panafricaine dans la lutte anti-coloniale, sontle fruit de l’histoire de l’Afrique et de ce que le préambule de la Charte qualifie de “valeurs de la civilisationafricaine.” Parmi ces droits et devoirs figurent :

• Le droit à l’égalité avec les autres peuples et le droit de ne pas être dominé

• Le droit à la paix et à la sécurité internationales

• Le droit des peuples opprimés de se libérer par “tout moyen reconnu par la communauté internationale”

• Le droit de maîtriser les richesses et ressources nationales “dans l’intérêt exclusif de la population”

• Le droit au développement économique, social et culturel

• Le devoir de promouvoir et de renforcer l’unité nationale et l’Etat

• Le devoir de préserver “des valeurs culturelles africaines positives”

• Le devoir de contribuer à la réalisation de l’unité africaine

La déclaration des droits de l’homme de l’Afrique

12 JUILLET 2004UEFRI ENOUVEAU

Page 13: FRI UE ENOUVEAU...JUILLET 2004 FRI UE ENOUVEAU 5 cette seule année et le nombre d’orphelins du sida est passé à 660 000. D’ici à 2005, l’espérance de vie sera tombée à

Il peut être fait appel des décisions de laCommission, mais seulement auprès de laplus puissante autorité judiciaire du pays, laHaute Cour de l’Ouganda, ce qui confère à laCommission une influence hors du communau sein du système judiciaire national. Leverdict rendu par la Commission dans uneaffaire récente témoigne de sa portée et deson efficacité.

M. Kabasaala Stephen, vendeur de fruits etlégumes de Kampala, a affirmé que troismembres du service de renseignement mili-taire de l’Ouganda avaient ouvert le feu sur luiet l’avaient illégalement détenu sans motifd’inculpation pendant 109 jours en 1999.Dans un verdict détaillé de 29 pages rendupublic le 3 mars 2004, la Commissaire FauzatMarriam Wangadya de la Commission desdroits de l’homme de l’Ougandaa statué que ces gardes avaientindûment détenu et blessé M.Stephen, au mépris de multipleslois ougandaises et traités inter-nationaux, y compris la Charteafricaine et la Déclaration uni-verselle des droits de l’homme.Elle a ordonné au gouvernementde verser à M. Stephen 29 mil-lions de shillings ougandais(15 000 $ E.-U.) en guise deréparations et de sanction, unmontant que Mme Wangadya ajugé “suffisant” pour réparer lepréjudice subi et dissuader lesforces de sécurité de commettrede nouvelles violations.

En allant jusqu’à soumettreses services de sécurité nationaleà l’examen de la Commission eten rendant public ce verdict, legouvernement de l’Ouganda a assumé sesresponsabilités dans le domaine des droitsde l’homme.

La Commission joue également un rôleimportant en matière d’éducation et de sensi-bilisation, en informant les citoyens de leursdroits fondamentaux et civils ainsi que deleurs devoirs et obligations civiques. Ce rôlesera plus marqué à l’avenir car l’Ougandaentame une transition vers une démocratiemultipartite, indique la présidente de laCommission, Margaret Sekaggya. “Il estimportant de donner à la population lesmoyens d’acquérir les compétences et la moti-vation permettant de participer à la résolutionpublique des problèmes”, a déclaré MmeSekaggya en novembre 2003, lors d’une con-férence consacrée à la démocratisation.

L’éducation civique favorise “un sentiment deresponsabilité personnelle vis-à-vis de ladestinée de la société.” Des citoyens informés,actif et dotés d’une conscience politique, a-t-elle conclu, constituent la meilleure garantiede protection des droits de l’homme.

Prévention en NamibieLa sensibilisation de la population est uneactivité centrale du Centre non gouvernemen-tal d’assistance juridique de la Namibie, laprincipale organisation de défense des droitsde l’homme de ce pays. Avant que la Namibieaccède à l’indépendance en 1990, le Centre areprésenté des milliers de victimes de l’arméed’occupation du régime d’apartheid del’Afrique du Sud, y compris des membres dumouvement de libération namibien.

Après l’indépendance, explique à AfriqueRenouveau le Directeur du Centre, ClementDaniels, “Nous avons procédé à un examen deconscience … concernant le rôle d’une orga-nisation indépendante de défense des droits del’homme dans une société sortant de l’apar-theid … Nous sommes arrivés au consensussuivant : passer de procédures judiciaires réac-tives à une campagne préventive de sensibi-lisation aux droits de l’homme, ainsi qu’à desactivités de lobbying et de promotion deréformes législatives dans les domaines del’égalité des sexes, de la justice sociale et de ladiscrimination raciale.”

Bien que la Namibie ne dispose pas decommission officielle de défense des droits del’homme, la constitution adoptée à l’indépen-dance a créé un bureau du médiateur, qui est

habilité à donner suite aux plaintes de viola-tions des droits de l’homme. En pratique,explique M. Daniels, le bureau s’occupe prin-cipalement d’affaires de corruption et de pra-tiques illégales du secteur public.

Aujourd’hui, note-t-il, “l’ignorance desdroits fondamentaux et juridiques et desmoyens de faire véritablement valoir ses droitset de se protéger [contre] des violations est leprincipal défi auquel font face les Namibiens.En raison de contraintes financières, le sys-tème judiciaire est inaccessible à la très grandemajorité de la population.” La plupart desaffaires dont s’occupe le Centre ont actuelle-ment trait aux questions économiques etsociales, comme l’accès à l’éducation et auxsoins de santé, la réforme agraire, la discrimi-nation raciale, la violence à l’égard des

femmes et des enfants, la brutalité policière etl’exclusion des homosexuels et des personnesvivant avec le VIH/sida, ajoute-t-il.

Outre les programmes de sensibilisationaux droits de l’homme et aux droits constitu-tionnels, le Centre a formé 280 volontaireslocaux aux principes de base du droit et a par-ticipé au lancement d’une association nationaled’auxiliaires juridiques visant à accroître l’ac-cès de la population aux tribunaux. M. Danielssalue l’indépendance et le professionnalismedu système judiciaire de la Namibie et estimeque, de ce fait, la Cour africaine n’aura pasd’effets immédiats dans ce pays. Mais “pourl’Afrique en général, c’est un grand progrès.”Dans des pays dotés de systèmes judiciairesinefficaces, indique-t-il, “la Cour africainepourrait être le seul recours des plaignants.” ■

Impact D

igitals / Eric Miller

Des

policiers

face à

des mani-

festants au

Zimbabwe :

les militants

de la société

civile se font

davantage

entendre

dans toute

l’Afrique.

13JUILLET 2004 UEFRI ENOUVEAU

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L’ONU s’efforce d’éviter un “nouveau Rwanda”Il est essentiel de respecter les droits de l’homme afin de faire obstacle aux génocides

14 JUILLET 2004UEFRI ENOUVEAU

Par Ernest Harsch

U n nouveau massacre, sem-blable à celui qui a coûté lavie à des centaines de mil-

liers de Rwandais il y a 10 ans decela, serait-il en train de se pro-duire ? Le 7 avril, alors que partoutdans le monde des réunions mar-quaient le dixième anniversaire dece génocide, un grand nombre desdiscours prononcés ont repris lerefrain de “plus jamais ça.” Maison n’avait guère la certitude qu’unehorreur comparable pourrait d’oreset déjà être prévenue.

“Face à un nouveau Rwanda,les gouvernements auraient-ilsaujourd’hui le pouvoir et la volon-té d’intervenir de manière efficace et oppor-tune ?” a demandé le Secrétaire général del’ONU, Kofi Annan, dans un message qui aété lu en son nom lors de la cérémonie offi-cielle qui s’est déroulée à Kigali (Rwanda).“Nous n’en avons nullement la certitude.”

Les massacres actuellement commis dansla région du Darfour, à l’ouest du Soudan,constituent un défi à relever d’urgence (voirpage 17) et le jour de l’anniversaire du géno-cide rwandais, M. Annan a fait directementallusion devant la Commission des droits del’homme à Genève aux violations graves desdroits de l’homme et à la crise humanitairecroissante qui seraient en train de se produireau Darfour en affirmant que “la communautéinternationale ne saurait rester passive.”

M. Annan a reconnu dans son discours queni le Secrétariat de l’ONU, ni le Conseil desécurité, ni les gouvernements nationaux ni lesmédias internationaux n’avaient été assezvigilants face aux signes avant-coureurs de lacatastrophe qui a frappé le Rwanda. Et alorsmême que les signes se multipliaient, ils sontrestés inactifs.

C’est ainsi que 800 000 hommes, femmes etenfants environ ont été tués au Rwanda en l’es-pace de 100 jours à peine. La plupart des vic-times appartenaient à la minorité tutsie, mais ungrand nombre de Rwandais appartenant à lamajorité hutue et qui s’opposaient aux poli-tiques répressives du gouvernement ont égale-ment été tués. Ce n’est que lorsque les rebellesdu Front patriotique rwandais se sont emparésdu pouvoir à Kigali que le génocide a pris fin.

Les morts ne pouvant être ressuscités, “leseul hommage digne” que l’ONU puisse ren-dre à ceux qui ont péri en 1994, a dit M. Annandans le même discours, est un plan d’actiondestiné à la prévention des génocides. Dans lecadre de ce plan portant sur cinq grandsdomaines il faudrait notamment:

• Prévenir les conflits armés: les génocidesse produisant presque toujours en périodede guerre, les gouvernements et la com-munauté internationale doivent s’attaqueraux causes profondes des conflits. Il s’agitnotamment de la haine, du racisme, dela déshumanisation des minorités, de latyrannie, de la pauvreté, de l’inégalité, duchômage des jeunes et de la pénuriede ressources.

• Assurer la protection des civils dans lesconflits armés: lorsque des conflits écla-tent, l’une des priorités absolues doit êtrede protéger les civils. Tous les combattants,aussi bien les Etats que les acteurs non-étatiques, doivent assumer la responsabilitéqui leur incombe, en vertu du droit interna-tional, de protéger les civils. Il faut donneraux missions de maintien de la paix lesmoyens d’intervenir lorsque des civils sonten danger.

• Mettre fin à l’impunité: il faut renforcer lessystèmes judiciaires, à tous les niveaux,pour veiller à ce que les auteurs de géno-cides ou d’autres actes de violence àgrande échelle ne puissent échapper auxpoursuites.

• Mettre en place un système d’alerte

précoce et claire: nous devons reconnaîtrerapidement les signes avant-coureurs d’ungénocide imminent ou potentiel.

• Agir rapidement et résolument: lesgouvernements nationaux, le Conseil desécurité et les autres instances doivent fairepreuve de la volonté politique nécessairepour agir rapidement en cas de génocide.

Privilégier les droits de l’hommeM. Annan a indiqué que l’une des raisons del’inertie constatée face au Rwanda tient aufait que “nous n’avions pas voulu accepter lefait que le risque de génocide existait bien. Etune fois le génocide enclenché, nous avonstrop tardé à le reconnaître en tant que tel et àl’appeler par son nom.”

Au cours d’une conférence qui s’est tenuele 26 mars à New York à la mémoire du géno-cide, le Conseiller spécial pour l’Afrique del’ONU et Secrétaire général adjoint, IbrahimGambari, est revenu sur sa propre expérienceen tant qu’Ambassadeur du Nigéria en 1994lors des débats sur le Rwanda au Conseil desécurité. “Les représentants du Gouvernementaméricain n’ont pas permis l’emploi du termede “génocide” dans les déclarations publiqueset en particulier durant les délibérations duConseil de sécurité” a-t-il noté. Selon M.Gambari, si l’on hésitait à utiliser ce terme,c’était parce que les principaux membres duConseil craignaient que cela n’obligeât à inter-venir, comme le prévoit la Convention del’ONU de 1948 pour la prévention et la répres-sion du crime de génocide.

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Des mani-

festants

dans le

nord de

l’Ouganda

demandent

à être

protégés

après le

massacre

de 200 vil-

lageois par

des

rebelles.

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Tout en faisant valoir qu’il est important dereconnaître que le génocide est quelque chosede bien réel, M. Annan a également tenu àsouligner que “nous ne devons pas nous lais-ser freiner par des querelles légalistes sur laquestion de savoir si telle ou telle atrocité cor-respond à la définition du genocide. S’il fautattendre d’en être certain avant d’intervenir, ilrisque souvent d’être troptard.” Il faut donc, pourprévenir les génocides, pren-dre des mesures plus rapideset plus importantes afin demettre fin aux violations mas-sives des droits de l’homme.

M. Annan a annoncé lacréation du poste de con-seiller spécial pour la préven-tion des génocides. Ce con-seiller donnera l’alerte enprésentant un compte-renduau Conseil de sécurité et àl’Assemblée générale ainsiqu’à la Commission des droits de l’hommedes Nations Unies. Sa mission, a souligné M.Annan “portera non seulement sur le génocidemais aussi sur les massacres et les autres vio-lations massives des droits de l’homme,comme le nettoyage ethnique.”

M. Annan a ajouté que les groupes de lasociété civile peuvent aussi jouer un rôle cru-cial. “Souvent ils sont les premiers à donnerl’alerte face à une catastrophe imminente.”

La Commission des droits de l’homme, a-t-il noté, a une responsabilité particulière carelle a un mécanisme de rapporteurs spéciaux,d’experts indépendants et de groupes de tra-vail qui peuvent enquêter sur les violationsgraves afin d’attirer l’attention du public surces violations. Plusieurs rapports récents étab-lis par le Haut Commissaire des Nations Uniesaux droits de l’homme ont mis fortement engarde contre des attaques dirigées contre desgroupes ethniques et religieux, notamment auSoudan et en Côte d’Ivoire.

Du Darfour à AbidjanLe rapport consacré au Soudan et publié audébut du mois de mai a noté l’ampleur alar-mante de la crise dans la région du Darfouroù de nombreux civils ont été assassinés et denombreux villages incendiés. Les enquêteursont conclu que “la réponse du Gouvernement

à une rébellion qui semblait d’origineethnique a revêtu un caractère ethnique.” Ilsont également affirmé qu’”on assiste au Dar-four à une évolution inquiétante de la situa-tion caractérisée par un mépris des principesde base des droits de l’homme et du droithumanitaire de la part aussi bien des forcesarmées du Soudan que de leurs milices.”

En mai, le Haut Commis-saire aux droits de l’homme aégalement publié le rapportd’une commission spécialed’enquête dépêchée en Côted’Ivoire pour enquêter sur larépression brutale d’une ma-nifestation antigouvernemen-tale le 25 mars à Abidjan, laplus grande ville du pays.Cette marche avait été décré-tée par les partis d’oppositionafin d’exiger du gouverne-ment qu’il mette pleinementen oeuvre les accords de paix

devant mettre fin à la guerre civile qui a com-mencé en septembre 2002.

Les manifestants n’étaient pas armés maisils ont été presque immédiatement pris à par-tie par la police, par les troupes et les milicesirrégulières loyales au Président LaurentGbagbo. Ce jour-là et le lendemain, ces forcesse sont déployées à travers les quartiers pau-vres d’Abidjan où vivent surtout les membresde groupes ethniques du nord, en majoritémusulmans, ou les immigrés du Burkina Faso,du Mali et d’autres pays voisins. La commis-sion a conclu qu’il y avait eu au moins 120morts et peut-être bien davantage.

“Les 25 et 26 mars, a déclaré la commis-sion, on a systématiquement exécuté des civilsinnocents et commis des violations massivesdes droits de l’homme. La marche a constituéun prétexte pour ce qui s’est révélé être unplan minutieusement préparé et exécuté parles forces de sécurité, les unités spéciales et lesforces dites parallèles sous la direction et laresponsabilité des plus hautes autoritésde l’Etat.”

Notant la fréquence aveclaquelle les tensions

ethniques graves et les violations flagrantesdes droits de l’homme se produisent à traversle continent, de nombreux commentateursafricains ont fait valoir que des massacres àgrande échelle pourraient fort bien se produiredans leurs propres pays. En Ouganda, à l’issued’une réunion consacrée à la prière pour lesvictimes du génocide rwandais, le Ministre dulogement, Francis Babu, a déclaré à desreporters que certains hommes politiquesougandais ayant tendance à diviser la popula-tion “selon des lignes de partage tribales” des“massacres semblables à ceux qui se sont pro-duits au Rwanda” n’étaient pas à exclure. Lequotidien ghanéen Ghanaian Chronicle,notant les massacres ethniques qui avaient étécommis dans le nord du Ghana, a posé dansson titre de manchette la question, “LeRwanda 10 ans après: la même chose pourrait-elle se produire au Ghana?”

Mettre fin à l’impunitéAprès avoir débattu du rapport consacré à laCôte d’Ivoire, le Conseil de sécurité a nonseulement condamné les violations des droitsde l’homme dans le pays, mais égalementappelé à “mettre fin à l’impunité”. Le Conseilde sécurité s’est félicité de la décision de lacommission d’enquêter sur toutes les viola-tions des droits de l’homme en Côte d’Ivoiredepuis le début de la guerre.

Dans le discours qu’il a prononcé àGenève, M. Annan a souligné l’importance del’obligation redditionnelle: “Nous ne pouvonsguère espérer prévenir les génocides ni rassur-er ceux qui vivent dans la crainte d’en être ànouveau victimes si les auteurs de ce crimeparticulièrement odieux sont laissés en libertéet ne sont pas traduits en justice. Il importe

15JUILLET 2004 UEFRI ENOUVEAU

Une Rwandaise monte la garde dans

un site rappelant le génocide de 1994.

Les pays africains doiventrenforcer leurs institutionsnationales ainsi que cellesdu continent afin d’empê-cher le massacre de civils.“Nous devons apprendre ànous protéger les uns lesautres” a déclaré lePrésident du Rwanda, PaulKagame, à l’occasion del’anniversaire du génocide.

AFP

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donc au plus haut point que nous mettions enplace des systèmes judiciaires solides, auniveau national comme au niveau internatio-nal et que nous les préservions, pour que peuà peu les gens s’aperçoivent qu’il n’y a pasd’impunité pour ce genre de crimes.”

Avec la mise en place du Tribunal pénalinternational pour le Rwanda (TPIR) la com-munauté internationale a pris l’une des pre-mières mesures en ce sens en Afrique. Un tri-bunal spécial a ensuite été établi en SierraLeone et, le 3 juin, il a commencé à juger lespersonnes accusées de crimes contre l’huma-

nité commis durant la guerre civile qu’aconnue le pays.

Les procureurs du TPIR ont choisi quelque200 affaires concernant certains des princi-paux organisateurs du génocide rwandais. Cesaffaires seront instruites et déboucheront peut-être sur des poursuites. Depuis 1997, année oùles premiers procès ont commencé à Arusha(Tanzanie), le TPIR a jugé une vingtaine d’ac-cusés et un nombre analogue d’accuséspassent actuellement en jugement. Le Tribunalespère finir d’instruire toutes les affaires dontil est saisi avant la fin de cette année et en finiravec tous les procès en 2008 au plus tard.

Le TPIR a été le premier tribunal aumonde à tenir un ancien chef de gouverne-ment pour responsable de génocide. Il a été lepremier tribunal à établir que le viol constitu-ait un acte de genocide et le premier tribunalà juger que les journalistes qui incitaient lapopulation au génocide étaient eux-mêmescoupables de ce crime.

Le TPIR considère que ses efforts complè-tent ceux des tribunaux rwandais, y comprisceux des tribunaux communautaires novateursconnus sous le nom de gacacas. Depuis les

premiers procès, organisés en 2002, descentaines de gacacas ont été établis. Chacund’entre eux a à sa tête des juges élus par lescollectivités locales là où des massacres ontété commis. En moins de deux ans les gacacasont jugé plus de 7 000 personnes.

Lorsque les appareils judiciaires nationauxne sont pas en mesure de le faire, la Courpénale internationale (CPI), qui vient d’êtrecréée, pourra aussi juger les crimes contrel’humanité, a indiqué M. Annan. La CPIn’étant compétente que pour les crimes per-pétrés après le 1er juillet 2002, elle s’est

jusqu’à présent surtout préoc-cupée de mettre en place sesstructures et aucune affaire n’aencore été plaidée.

Toutefois, à la fin du moisde janvier 2004, le procureur dela CPI, M. Luis Moreno-Ocampo, a annoncé que la Courallait instruire sa premièreaffaire et ce, en Afrique. Elle sepenchera sur les atrocités com-mises par le mouvement rebellede l’Armée de résistance duSeigneur (LRA) dans le nordde l’Ouganda. L’insurrectionmenée par la LRA et les cam-pagnes militaires menées par legouvernement afin de laréprimer ont fait plus de

100 000 victimes depuis la fin des années 80et déplacé 1,6 million de personnes environ.Les combattants de la LRA sont tristementcélèbres pour la manière dont ils persécutentles villageois, pour les viols qu’ils commettentet pour les quelque 20 000 enfants qu’ils ontenlevés. En février, M. Moreno-Ocampo aévoqué le massacre par la LRA de plus de 200personnes déplacées dans un camp au nord del’Ouganda – selon lui, une raison de plus pourenquêter sur les crimes commis par ce groupe.

Selon les partisans de la CPI, du tribunalpour le Rwanda et d’autres institutions judici-aires analogues, ces tribunaux, en punissantles auteurs d’atrocités, pourront peut-être fairechanger d’avis ceux qui envisageraient d’or-ganiser des massacres.

La volonté politique L’amélioration des mécanismes d’alerterapide et la suppression de l’impunité sontdes mesures importantes si l’on veut barrer laroute aux génocides. Toutefois, comme l’arappelé M. Gambari, lors de la conférence quis’est tenue pour commémorer le génociderwandais, “Il faut avant tout une volonté

politique d’agir rapidement et résolument.”Au Rwanda, cette volonté a fait défaut.

Le Général Roméo Dallaire, qui était à latête de la petite mission de maintien de lapaix de l’ONU au Rwanda au moment dugénocide, a indiqué lors de cette mêmeconférence que la communauté interna-tionale avait montré fort peu d’empressementà intervenir en Afrique. La force de l’ONU,a-t-il noté, était une mission sans budget nistructure alors que “dans le même temps descentaines de millions de dollars étaientdéversés en Yougoslavie.” Certains êtreshumains, a-t-il demandé, “le sont-ils plusque d’autres?”

Récemment, les grandes puissances sesont montrées plus disposées à appuyer denouvelles missions de maintien de la paix enAfrique. Sept missions de l’ONU, autoriséespar le Conseil de sécurité, sont actuellementen place – au Burundi, en Côte d’Ivoire, enRépublique démocratique du Congo, enEthiopie-Erythrée, au Libéria, en Sierra Leoneet au Sahara occidental. Une autre mission estprévue dans le sud du Soudan.

Certains gouvernements du Nord ontégalement engagé des initiatives person-nelles. En 2003, une force européenne multi-nationale de 1 200 hommes sous la houlettede la France a été envoyée dans la régiond’Ituri en République démocratique duCongo alors que les massacres se générali-saient entre les groupes ethniques Lendu etHema. Selon MM. Gareth Evans et StephenEllis, qui sont respectivement le président etle directeur du programme africain del’International Crisis Group, un groupe d’ex-perts qui a son siège à Bruxelles, il est pra-tiquement certain que cette intervention,surnommée Opération Artémis, “a permisd’éviter un génocide en Ituri”.

En septembre 2003, l’Opération Artémis aofficiellement cédé son pouvoir en matière demaintien de la paix en Ituri à la mission del’ONU, la MONUC. M. Annan a cité l’œuvrede la mission en Ituri en exemple des mandatsplus robustes qui sous-tendent désormais lesopérations de maintien de la paix, autoriséesnon seulement à se défendre lorsqu’on lesattaque mais aussi à protéger les civils exposésà un risque imminent de violence. L’Ituri, a-t-il indiqué, est une région “où les conflits ethni-ques pourraient manifestement aller jusqu’augénocide, mais à présent les forces de main-tien de la paix des Nations Unies “tiennent lesmilices locales en échec.”

16 JUILLET 2004UEFRI ENOUVEAU

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Massacres et famine au SoudanLes attaques armées contre des villageois déclenchent une énorme crise humanitaire

17JUILLET 2004 UEFRI ENOUVEAU

D epuis la fin de l’année dernière, larégion du Darfour tout entière, à l’ouestdu Soudan, connaît l’une des situations

d’urgence les plus graves auxquelles le mondeest confronté. Plusieurs milliers de villageoisont été tués alors que lesforces armées soudanaiseset une milice bénéficiant del’appui du gouvernements’efforcent de réprimer l’in-surrection locale. L’ONUestime que quelque 2 mil-lions de personnes, dont ungrand nombre ont dû aban-donner leur domicile à causedu conflit, ont un “besoinurgent d’aide.” Par ailleurs,130 000 personnes ont fuivers le Tchad voisin.

Le Darfour, a indiqué finmai au Conseil de sécurité, Jan Egeland, leSecrétaire général adjoint aux affaires human-itaires de l’ONU, risque de devenir “la pirecatastrophe humanitaire de notre époque.”L’ONU a lancé un appel de fonds pour obtenir236 millions de dollars pour les opérations desecours d’urgence destinées au Darfour et plusde la moitié de cette somme a été promise aucours d’une réunion des bailleurs de fonds quis’est tenue le 3 juin.

Attaques ethniquesBien que le Soudan souffre souvent de lasécheresse, la crise actuelle est d’origineessentiellement politique. “Une poli-tique de terre brûlée se pratique partoutdans le Darfour et se traduit notammentpar la destruction systématique desécoles, des puits, des semences et desressources vivrières a déclaré M. Ege-land au début du mois d’avril. J’estimequ’il s’agit là d’un nettoyage ethnique. Iln’y a pas d’autre terme pour qualifierces attaques car elles ont pour ciblesprincipales les Four, les Zaghawa, lesMassalit et certaines autres commu-nautés originaires d’Afrique noire.”

Compte tenu de la gravité de la situa-tion, le Secrétaire général de l’ONU,Kofi Annan, a invité le Président duSoudan, Omar Al Bachir, à désarmer lesmilices et à faciliter l’accès du personneldes organisations humanitaires. Il lui a

également demandé d’assurer un cessez-le-feuhumanitaire pour permettre la distribution devivres et faciliter le déploiement d’observa-teurs de l’Union africaine.

Le Conseil de sécurité a, par ailleurs,déclaré le 25 mai qu’il“condamne fermement”les actes qui compromet-tent le règlement paci-fique de la crise. Il s’estégalement déclaré pro-fondément préoccupé parles informations selonlesquelles des violationsmassives des droits del’homme et du droit inter-national humanitaire sontperpétrées, “en particuli-er des actes de violence àcaractère ethnique.”

Litiges internes C’est depuis la fin des années 80 que desaffrontements armés se produisent au Dar-four. Ils sont dus en partie aux conflits quiopposent les éleveurs de bétail aux agricul-teurs sédentaires en ce qui concerne l’accès àla terre. En 2003, ces affrontements se sontbrusquement intensifiés alors que deux mou-vements rebelles faisaient leur apparition.C’est surtout auprès des communautés ruralesfour et massalit et des éleveurs zaghawa queles rebelles trouvent leurs alliés. Ils accusentle gouvernement central de Khartoum non

seulement de marginaliser le Darfour maisaussi de soutenir les éleveurs nomades arabesdans les différends qui les opposent auxautres groupes.

Face à cette situation, les forces arméesrégulières soudanaises ont entrepris d’impor-tantes opérations militaires. Par ailleurs, unemilice irrégulière arabe, connue sous le nomde Djandjawid, a été constituée. Selon un rap-port publié le 7 mai par le Haut Commissairedes Nations Unies aux droits de l’homme,nombre des attaques contre les civils ont étémenées par des combattants Djandjawid sedéplaçant à cheval et qui souvent, entrent dansles villages afin d’en tuer les résidents.

Bien que les pouvoirs publics aient soutenuque les Djandjawids constituent une forceautonome, le rapport de l’ONU laisse entendrequ’un grand nombre de miliciens ont été payéset armés par le gouvernement. En outre, lesattaques dirigées contre les villageois, se sontassorties d’attaques par des hélicoptères arméset de bombardements aériens. Les missions surle terrain du Haut Commissaire des NationsUnies ont également permis d’établir que lesrebelles ont eux-mêmes commis des violationsdes droits en enlevant notamment des enfantspour les obliger à servir dans leurs forces.

Le rapport de l’ONU a constaté des“signes inquiétants de violations massives desdroits de l’homme” commises aussi bien parles forces armées régulières que par lesDjandjawids. “Il est clair que la terreur règneau Darfour.” Les victimes appartenant surtout

AFP

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ages / Marco Longari

Réfugiés

du Darfour

dans un

camp au

Tchad.

Dans

l’ouest du

Soudan,

2 millions

de person-

nes en

tout ont

besoin de

secours.

“Une politique de terre brûléese pratique partout dans leDarfour et se traduit notammentpar la destruction systématiquedes écoles, des puits, dessemences et des ressourcesvivrières. J’estime qu’il s’agit làd’un nettoyage ethnique.”

— Jan Egeland, Secrétaire généraladjoint aux affaires humanitaires

Page 18: FRI UE ENOUVEAU...JUILLET 2004 FRI UE ENOUVEAU 5 cette seule année et le nombre d’orphelins du sida est passé à 660 000. D’ici à 2005, l’espérance de vie sera tombée à

à certains groupes ethniques, qui s’identifientcomme “noirs” pour se différencier despersonnes d’origine arabe, le rapport a égale-ment noté que le conflit a pris “une dimensionethnique, voire raciale, inquiétante.” Un grandnombre des actions auxquelles l’armée etles milices se sont livrées “pourraient cons-tituer des crimes de guerre et /ou des crimescontre l’humanité”.

La paix dans le sud?Le drame du Darfour survient alors quel’autre grand conflit que connaît le Soudan,dans le sud, semble s’acheminer vers unrèglement global. Le 26 mai, le Gouverne-ment soudanais et les rebelles du Mouve-

ment/Armée de libération du peuplesoudanais ont signé les trois protocoles finalsd’un accord de paix. Ceux-ci prévoient unpartage du pouvoir et des recettes pétrolièrespendant une période provisoire de six ans etdemi à l’issue de laquelle les Soudanais dusud décideront par référendum s’ils souhai-tent continuer à faire partie du Soudan oubien constituer un État autonome.

Cet accord s’engage à mettre fin à uneguerre qui dure depuis plus de 20 ans et a fait1,5 million de victimes en même tempsqu’elle a déplacé quelque 4 millions de per-sonnes dans le sud du Soudan. Les insurgéscontinuent de s’opposer aux efforts déployéspar les pouvoirs publics afin d’imposer la loi

islamique – la charia – dans une région où lechristianisme et l’animisme prédominent.

Bien que le conflit du Darfour ne possèdepas les mêmes dimensions religieuses quecelui du sud (les participants, des deux côtés,étant presque tous musulmans), on continuede craindre qu’il ne compromette le processusde paix dans le sud.

Mais si la paix prend racine au Sud-Soudan, les tensions que connaît le reste dupays pourraient bien s’atténuer. Le jour de lasignature des protocoles, M. Annan, a appelétoutes les parties au Darfour “à saisir l’élan”créé par le processus de paix dans le sud afinde parvenir à un règlement politique dansleur région. ■

18 JUILLET 2004UEFRI ENOUVEAU

“La responsabilité de protéger”Afin de susciter un plus grand intérêt de lapart de la communauté internationale un rap-port intitulé “La responsabilité de protéger” aété établi et un panel organisé au siège del’ONU à l’occasion du dixième anniversairedu génocide rwandais s’en est fait largementl’écho. Ce rapport a été initialement publié en2001 par la Commission internationale del’intervention et de la souveraineté des Etatsmise sur pied par le Canada et co-présidée parM. Gareth Evans, ancien Ministre des affairesétrangères de l’Australie et par M. MohamedSahnoun, ancien diplomate algérien.

Selon les membres de la commission, aexpliqué M. Sahnoun au panel, lorsque lesEtats ne veulent pas ou ne peuvent pas pro-téger leur population, la communauté interna-tionale a “l’obligation morale” de protéger lescivils en danger. “Si l’on intervient pour pro-téger des êtres humains, cela se justifie” a-t-ilindiqué mais il faut avant tout privilégier lesmesures préventives et n’adopter des mesurescoercitives que lorsque les mesures de préven-tion restent sans effet.

Intervenant dans le cadre du même panel,M. Lloyd Axworthy, l’ancien Ministre desaffaires étrangères du Canada qui exerceactuellement les fonctions d’envoyé spécial del’ONU pour le litige frontalier opposantl’Ethiopie à l’Erythrée a noté que certains paysen développement ont manifesté leur inquié-tude face aux notions “d’intervention humani-

taire” ou de “responsabilité de protéger” qu’ilsconsidèrent comme des moyens de justifier lapoursuite des intérêts des pays du Nord. Laguerre en Iraq “a intensifié ces appréhensions”a constaté M. Axworthy.

M. Sahnoun a, pour sa part, fait valoir queseule une “instance universellement recon-nue” devrait cautionner une intervention inter-nationale destinée à protéger les civils. Si leConseil de sécurité veut assumer ce rôle ildevra subir des réformes structurelles etnotamment augmenter le nombre de ses mem-bres afin d’être plus représentatif.

Initiative africainePlusieurs commentateurs africains soutien-nent que l’Afrique dispose elle-même de biendes moyens de prévenir les génocides. “Nous,les Africains, devons prendre des mesuresconcrètes tout en attendant que l’on nousvienne en aide” a déclaré dans le cadre dupanel de New York, le Général Henry KwamiAnyidoho, commandant adjoint de la missionde maintien de la paix de l’ONU au Rwandaen 1994.

Au cours d’une grande cérémonie orga-nisée à Kigali dans le stade Amahoro afin demarquer le dixième anniversaire du génocide,le Président du Rwanda, Paul Kagame, aexhorté les pays d’Afrique à renforcer leurspropres institutions nationales et à unir leursefforts afin d’empêcher des massacres compa-rables à ceux du Rwanda, “pour que nousn’ayons pas à dépendre de forces externes.Nous devons apprendre à nous protéger les

uns les autres car personne ne nous doit rien.” Prenant la parole au siège de l’Union afri-

caine (UA) à Addis-Abeba (Ethiopie) à l’oc-casion d’une réunion à la mémoire des victimesdu génocide, le Président éthiopien, GirmaWolde-Giorgis, a indiqué que les efforts déploy-és par la communauté internationale afin d’évi-ter les conflits en Afrique étant très insuffisants,les Africains devraient renforcer les méca-nismes de prévention des conflits de l’UA.

D’autres ont souligné la nécessité depousser plus loin les réformes politiques ausein même des pays d’Afrique afin d’éviter lesconflits pouvant favoriser les actes de géno-cide. “Si nous n’étions pas affligés dedirigeants avides, corrompus et despotiquesqui choisissent de s’accrocher au pouvoir àtout prix, a fait valoir un chroniqueur dans lejournal zimbabwéen Financial Gazette, la plu-part des conflits qui font rage en Afrique ne seproduiraient même pas”.

M. Emmanuel Dongola, romancier qu’uneguerre civile a forcé à fuir la République duCongo dans les années 90, a recommandéd’ôter aux hommes politiques les moyens demanipuler les identités ethniques. “Il fautreconstruire les Etats en tenant compte des dif-férents groupes ethniques afin qu’aucungroupe ne se sente tenu à l’écart” a-t-il écritdans le New York Times la veille de l’anniver-saire du génocide au Rwanda.

“En changeant l’Etat dans ce sens, a pour-suivi M. Dongola, on renforcera la sécurité detous les citoyens. C’est cette sécurité, plusqu’un musée ou que des discours commé-moratifs qui constituera le plus grand hom-mage que nous puissions rendre aux victimesdu génocide rwandais.” ■

L’ONU s’efforce d’éviter un “nouveau Rwanda”

suite de la page 16

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Les vicissitudes du développement durable L’eau, l’assainissement et le logement figurent parmi les priorités de l’Afrique

19JUILLET 2004 UEFRI ENOUVEAU

Par Gumisai Mutume

P lus d’une décennie après la Conférencedes Nations Unies sur le développementdurable tenue à Rio de Janeiro (Brésil),

le monde s’efforce toujours d’atteindre lesambitieux objectifs qui y ont été fixés. Selonles estimations, 1,5 milliard de personnesn’ont toujours pas accès à l’eau potable etquelque 2,5 milliards n’ont pas accès à desservices d’assainissement. Près d’un milliardde personnes vivent dans des bidonvilles,chiffre qui devrait doubler au cours des 30prochaines années.

C’est le sombre tableau qui a été présenté àla 12ème session de la Commission dudéveloppement durable, tenue à New York du14 au 30 avril. La Commission a pour fonctionde surveiller l’application des accords de Riomais les représentants ont également examinéles progrès accomplis en matière d’adductiond’eau, d’assainissement et d’établissementshumains, comme cela avait été décidé auSommet mondial pour le développementdurable à Johannesburg en 2002.

L’eau : des problèmes gravesSi la situation mondiale est loin d’être encou-rageante, celle de l’Afrique est encore plusgrave. Dans cette région – la plus pauvre dumonde – la plupart des indicateurs montrentque les progrès demeurent des plus lents.

Bien que l’un des objectifs fixés ausommet de Johannesburg consiste à réduire demoitié la proportion des personnes qui n’ontpas accès à l’eau potable et à l’assainissementd’ici à 2015, plus de 300 millions d’Africainsn’ont toujours pas accès à de l’eau salubre et14 pays du continent connaissent des pénuriesd’eau. Trente-cinq des 55 pays au monde où laconsommation quotidienne d’eau par person-ne est inférieure à 50 litres (le minimum fixépar l’Organisation mondiale de la santé) setrouvent en Afrique. Près d’un Africain surdeux souffre d’au moins une des six princi-pales maladies d’origine hydrique.

Selon le Programme des Nations Uniespour le développement, la proportion decitadins ayant accès à l’eau potable en Afriquesubsaharienne n’a baissé que légèrement, pas-sant de 86 % en 1990 à 83 % en 2000.

“Les problèmes d’eau en Afrique sontaigus et complexes”, a déclaré le Ministrenigérian de l’eau, Mukhtari Shehu Shagari, à

la session de la Commission dudéveloppement durable. Les plansd’eau se rétrécissent en Afrique. Lasuperficie du lac Tchad, par exemple,est passée de 25 000 km2 dans lesannées 60 à moins de 3 000 km2aujourd’hui, ce qui a une incidencesur plus de 20 millions de personnes.

Pourtant, l’Afrique disposeraitd’abondantes ressources en eau quine sont pas efficacement utilisées.Dotée de 17 grands fleuves et de plusde 160 lacs majeurs, l’Afrique n’u-tilise que 4 % environ de sa quantitéannuelle totale de ressources renou-velables en eau pour l’agriculture,l’industrie et les besoins ménagers.Le problème, dit M. Shagari, con-siste à amener l’eau là où on en a leplus besoin, à un coût abordable et demanière efficace. A l’heure actuelle,50 % environ des ressources en eauurbaines sont gaspillées, tout comme75 % des eaux d’irrigation.

Investissements nécessairesLors d’une conférence panafricaine sur l’eautenue à Addis-Abeba (Ethiopie) en décembre2003, les ministres africains chargés de l’eauet les planificateurs du développement ontindiqué que le manque de ressources et detechnologies étaient les principaux obstacles àla recherche d’une solution au problème del’eau et de l’assainissement en Afrique.“Entre 1990 et 2000, les investissementsannuels dans le domaine de l’eau et de l’as-sainissement se sont élevés en moyenne à4,6 milliards de dollars, soit 40% du montantnécessaire pour satisfaire les besoins fonda-mentaux,” a déclaré à la réunion M. K.Y.Amoako, Secrétaire exécutif de la Commis-sion économique pour l’Afrique.

Nombreux sont les pays qui ne disposentpas des crédits nécessaires. Au cours des20 dernières années, l’Afrique a enregistré defaibles taux de croissance économique, avecpour conséquence des difficultés financièreset des ressources publiques sans cesse décrois-santes mises à rude épreuve par des besoins

antagoniques. Les allocations budgétaires auxservices sociaux tels que la santé, l’éducation,l’approvisionnement en eau et l’assainisse-ment en ont ainsi pâti. Qui plus est, les apportsdes donateurs dans ce secteur ont aussi baissé.

La réunion d’Addis-Abeba a débouché surl’élaboration d’un cadre pour la gestion del’eau sur le continent dénommé “Africa WaterVision 2025”, qui appelle à allouer davantagede ressources à ce secteur. Selon ce plan, lecontinent doit investir au moins 20 milliardsde dollars par an au cours des 20 prochainesannées pour atteindre ses objectifs. Sur cemontant, au moins 12 milliards de dollarsdevraient être consacrés aux services d’adduc-tion d’eau et d’assainissement de base. “L’eauest la clé de voûte de la réalisation de l’objec-tif consistant à réduire de moitié la pauvreté etla faim d’ici à 2015,” dit M. Shagari, Ministrenigérian de l’eau.

Les participants à la conférence d’Addis-Abeba sont donc convenus de créer deséquipes spéciales nationales pour établir desplans nationaux indiquant les cibles annuelles

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hotos / Eric Miller

Plus de 300 millions d’Africains

n’ont pas accès à de l’eau salubre.

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en matière d’approvisionnement en eau etd’assainissement. Les ministres se sont enga-gés à allouer 5% au moins du budget nationalà l’eau et à l’assainissement dans un délai decinq ans. Ils ont également décidé de créer unfonds, le Fonds africain pour l’eau, en vue demobiliser, d’ici à 2008, plus de 600 millionsde dollars pour des programmes relatifs àl’eau et à l’assainissement.

Toutefois, si la plupart des gouvernementsprennent pour prétexte le manque deressources financières, le problème tient enfait à la façon dont les crédits sont dépensés,dit M. Gourisankar Ghosh, Directeur exécutifdu Conseil de concertation pour l’approvision-nement en eau et l’assainissement, organi-sation non gouvernementale internationale.Selon M. Ghosh, environ 5 milliards de dol-lars d’aide fournie par les donateurs sont con-sacrés chaque année à l’eau et à l’assainisse-ment tandis que les gouvernements des paysen développement y consacrent à peu près lemême montant. “Le problème, c’est quel’assainissement est une questionde caractère très local qui touchechaque ménage et chaque individu ;pourtant, dans la recherche de solu-tions, les gouvernements adoptentune approche du sommet à la basesans y associer les populations,”a déclaré M. Ghosh à AfriqueRenouveau. “Et quand cela ne réus-sit pas, on évoque le manque d’ar-gent comme étant le problème.”

Par ailleurs, poursuit-il, de nom-breux gouvernements traitent laquestion de l’approvisionnement eneau et de l’assainissement commeun phénomène distinct plutôt quecomme un aspect d’un programmeélargi de développement quienglobe l’éducation, l’autonomisa-tion des femmes, la participationcommunautaire, la promotion demarchés viables et la mise en valeurdes ressources humaines. “L’assainissementest une question multiforme. Ça ne consistepas seulement à construire des latrines.”

Multiplication de bidonvillesLa Directrice exécutive de la Conférence desNations Unies sur les établissements humains,Anna Kajumulo Tibaijuka, a abondé dans lemême sens, s’agissant de la participation desgouvernements et des collectivités. “Les pau-vres ne sont pas de simples objets passifs,” a-t-elle déclaré. “Très souvent, ils règlent leursproblèmes eux-mêmes, mais les gouverne-

ments ne reconnaissent pas leurs efforts. Aulieu d’exploiter leur énergie, ils dissuadent lespauvres de participer à l’amélioration de leurspropres conditions de vie.”

Nombreux sont les exemples établis decollectivités qui prennent en charge leursbesoins en matière de logement, avec peu oupas du tout d’aide des pouvoirs publics. EnAfrique du Sud par exemple, un mouvementpopulaire dénommé ‘South African HomelessPeoples Federation’ encourage les popu-lations locales à s’organiser en groupes d’é-pargne informels en vue de construire leurpropre logement. Créée au début des années90, la fédération a permis à d’anciens habi-tants de bidonvilles, dont la majorité defemmes, de construire 14 000 logements àfaible coût à travers tout le pays. Elle appuieactuellement des groupes d’épargne sem-blables au Ghana, au Kenya, à Madagascar,en Namibie, en Ouganda, au Swaziland, enZambie et au Zimbabwe.

Dans certaines zones urbaines en Afrique,

diverses questions de gouvernance compli-quent davantage les problèmes de logement,ce qui entrave une gestion urbaine efficace. Lafaiblesse de l’Etat et des municipalités favoriseune situation où “personne n’assume laresponsabilité, personne n’offre une orienta-tion,” nous a déclaré Mme Rosemary Rop, del’organisation non gouvernementale kényaneMaji Na Ufanisi.

Qui plus est, les gouvernements nedégagent pas suffisamment de ressourcespour trouver des solutions aux problèmes desbidonvilles existants, ce qui en fait encore

plus des terreaux de la surpopulation, de lapauvreté et de l’exclusion sociale. “Lespouvoirs publics se contentent de qualifierces établissements informels d’illégaux et neleur fournissent pas de services,” dit MmeRop. A Nairobi, 60 % de la population vitdans des bidonvilles qui ne représentent que5% du territoire de la ville. Il en est ainsi de laplupart des grandes villes africaines, dont40 % à 70 % des habitants vivent dansdes bidonvilles.

La tâche à accomplir semble insur-montable. Alors que les dirigeants du mondese sont engagés à améliorer les conditions devie de plus 100 millions d’habitants desbidonvilles d’ici à 2020, le nombre de person-nes vivant dans des établissements informelsdevrait doubler au cours des 30 prochainesannées, passant à 2 milliards.

Pour que l’Afrique réalise ses objectifs dedéveloppement durable, elle doit trouver dessolutions faisant intervenir tous les secteurs,dit le Conseiller spécial de l’ONU pour

l’Afrique, M. Ibrahim Gambari. “S’il est unenseignement qu’on a tiré concernant ledéveloppement, c’est le caractère indis-pensable du partenariat entre les secteurspublic et privé et la société civile,” ajoute-t-il.“L’eau, l’assainissement et les établissementshumains se prêtent à diverses formes de parte-nariat.” Toutefois, indique-t-il, “l’actioncommunautaire ne saurait ni ne devrait sesubstituer à une politique d’intérêt généralefficace. Les gouvernements devraient ouvrirla voie en s’acquittant des engagements qu’ilsont pris.” ■

AFP

/ Getty Im

ages / Marco Longari

Nairobi

(Kenya) :

60 % des

habitants

de la

ville vivent

dans des

bidonvilles.

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Par Gumisai Mutume

A lors que l’Afrique du Sud fête 10 annéesde liberté, sa réussite en matière d’ali-mentation en eau des zones rurales est

citée en exemple aux autres pays endéveloppement. D’ici la fin de l’année, 10millions de Sud-Africains, privés d’eau salu-bre il y a 10 ans, y auront désormais accès.

“Nous avons dépassé les objectifs dedéveloppement du Millénaire”, nous affirmaiten avril Ronnie Kasrils, Ministre des eaux etdes forêts de l’époque. “En l’an 2008, tous leshabitants du pays auront accès à l’eau salu-bre.” M. Kasrils, nommé depuis responsabledes services de renseignements généraux deson pays, se trouvait à New York pour par-ticiper à la 12e session de la Commission dudéveloppement durable de l’ONU.

Un droit fondamentalEn 1994, quelque 14 millions sur les 40 mil-lions d’habitants que compte le pays n’avaientpas accès à l’eau potable et 21 millions depersonnes ne disposaient pas de systèmesd’assainissement acceptables. Pour relever cedéfi, l’Afrique du Sud a inscrit dans sa consti-tution des dispositions qui stipulent que l’ac-cès à la nourriture et à l’eau est un droit fon-damental. Le gouvernement a adopté en outrele Programme pour la reconstruction et ledéveloppement, qui regroupe des mesures dedéveloppement social mettant l’accent sur lerôle de l’Etat dans la distribution des servicesde base et dont l’un des objectifs est d’assurerla présence d’un point d’eau dans un rayon de200 mètres de toute habitation rurale.

L’Afrique du Sud a également institué unemesure prévoyant la distribution gratuite àtoutes les familles des 6 000 premiers litresd’eau consommés par mois. Si la consomma-tion dépasse ce plafond, les familles devrontverser une taxe progressive.

Le pays ne disposant d’aucun servicechargé de la distribution de l’eau, il a falluinstituer une nouvelle législation et créer desmunicipalités dans de nombreuses zonesrurales à majorité noire privées d’eau. M.Kasrils reconnaît toutefois qu’il reste encorebeaucoup à faire.

C’est ainsi que certaines municipalitésrécemment créées commencent à peine à êtreopérationnelles. Dans les régions rurales,quelque cinq millions de personnes doivent

encore aller chercher l’eau dansles rivières et sources éloignées.

La réussite de l’Afrique du Suds’explique par la volonté politiquede ses responsables mais, con-trairement à bon nombre de paysen développement, ce pays disposedes ressources nécessaires pourappliquer ses programmes. L’Afri-que du Sud est en effet le pays leplus riche de l’Afrique subsaha-rienne avec un revenu moyen de2800 dollars par habitant, contre300 dollars en moyenne pour lereste du continent.

Contre la privatisationMais l’alimentation durable eneau des zones urbaines demeureun défi. Les critiques du gou-vernement prétendent que les pro-

grammes de récupération des coûts ont rendul’eau inaccessible aux populations pauvresdes zones urbaines. Le Forum non-gouverne-mental contre la privatisation de l’eau areproché aux nouvelles mesures d’avoir privédes millions de Sud-Africains de leurssources d’eau.

Trevor Ngwane, un militant de ce Forum, aaffirmé que la privatisation violait le droitconstitutionnel des citoyens dans la mesure oùl’eau “n’est plus distribuée selon les besoinsmais selon la capacité à payer. Les couchespauvres de la population n’ont pas les moyensde payer pour l’eau”, assure-t-il. Selon leForum, dans les zones urbaines, le coût del’eau est en hausse et des sociétés privéesinstallent des compteurs prépayés qui encoupent la distribution lorsque la consom-mation excède le montant réglé à l’avance.Des millions d’habitants auraient ainsi étéprivés d’eau.

Après l’adoption des mesures économi-ques libérales de 1996, le gouvernement abaissé le niveau du montant des bourses etsubventions accordées aux municipalitésurbaines; certaines ont donc dû se tourner vers

la commercialisation afin d’engendrer desrevenus. M. Kasrils soutient que sur les 284municipalités que compte le pays, cinq seule-ment ont passé des conventions en matière deservice et de gestion avec les sociétés privéesassurant l’alimentation en eau.

Les deux principales villes du pays, Le Capet Johannesburg, comptent le plus grand nom-bre de projets privés en matière d’eau enAfrique australe. La Zambie a deux projets,l’Angola en prévoit deux et la Tanzanie trois.“Le seul moyen d’attirer des fournisseurs deservices durables est de veiller à ce que lesbénéficiaires payent ces services; il faudra enoutre prévoir des aménagements transparentset adaptés pour la subvention de la consom-mation des couches pauvres chaque fois queles autorités le jugent nécessaire”, estime deson côté David Gray, conseiller principal enmatière d’eau à la Banque mondiale. Selon lui,facturer l’approvisionnement en eau et assurerque les factures sont réglées à temps ne cons-titue qu’une première étape pour les gou-vernements de la région. Il faudra désormais,estime-t-il, attirer des fournisseurs de servicesolides sur le plan financier. ■

Alimentation en eau des zones rurales Le gouvernement s’engage à fournir de l’eau à tous d’ici à 2008

21JUILLET 2004 UEFRI ENOUVEAU

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hotos / Eric Miller

Environ 10 millions de

Sud-Africains de plus qu’il y a

10 ans ont accès à l’eau salubre.

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6-8 juillet 2004, Addis-Abeba (Ethiopie) —Troisième Sommet ordinaire de l’Union afri-caine. Contacter Desmond T. Orjiako, tél. (251-1)512005, e-mail <[email protected]>.

8-10 juillet 2004, Auckland (Nouvelle-Zélande) — Conférence internationale sur ladurabilité, l’engineering et les sciences. Con-tacter Vickya Adin, tél. (64-9) 299-7538, e-mail<[email protected]>, site Web <www.icser.auckland.ac.nz>.

11-16 juillet 2004, Bangkok (Thaïlande) —XVe Conférence internationale sur le sida. SiteWeb <www.ias.se/aids2004/>.

18-20 juillet 2004, Accra (Ghana) — Un demi-siècle d’économie ghanéenne. E-mail <[email protected]>.

19-23 juillet 2004, New London, CT (E.-U.) —Conférence internationale des enfants sur l’en-vironnement organisée par le PNUE. ContacterBarbara Morgan, tél. (1-860) 437-0757, e-mail<[email protected]>, site Web <www.icc04.org>.

28-30 juillet 2004,Victoria Falls (Zimbabwe) —Conférence internationale sur la gestion del’eau et de ses déchets dans les pays endéveloppement. Contacter Innocent Nhapi, tél.(263-4) 303-288, e-mail <[email protected]>,

site Web <www.uz.ac.za/engineering/civi>.

1-10 août 2004, Arusha (Tanzanie) — Colloquemondial sur la problématique hommes-femmeset la sylviculture. Contacter Prof. E. Ardayfio-Schandorf, e-mail <[email protected]>.

5-7 août 2004, Arusha (Tanzanie) — Lesfemmes et les TIC: défis et perspectives.Contacter Hamza Kassongo, tél. (255-22)2136354, fax (255-22) 2138340.

30 août - 1 septembre 2004, Lausanne (Suisse) —Conférence internationale sur les vaccins contrele sida 2004. Site Web <www.aidsvaccine04.org>.

5-7 septembre 2004, Kampala (Ouganda) —Universités: Un rôle de premier plan dans ledéveloppement humain favorisé par les TIC.Contacter Makerere University, tél. (041)531437, e-mail <[email protected]>.

7-9 septembre 2004, Port Louis (Maurice) —Sixième sommet annuel africain de l’informa-tique et des télécommunications. ContacterSean Moroney, tél. (44-1480) 495595, e-mail<[email protected]>.

13-17 septembre 2004, Barcelone (Espagne)— Forum urbain mondial. Contacter laFondation des Nations Unies pour l’habitat, e-mail <[email protected]>, site Web<www.unhabitat.org/wef>.

16-18 septembre 2004, Grahamstown(Afrique du Sud) — Huitième Conférenceroutière africaine. Contacter Chris Kabwato,tél. (27-082) 582-9543, fax (27-046) 622-9591,

e-mail <[email protected]>.

8-10 octobre 2004, Madison,Wisconsin (E.-U.)— Deuxième conférence annuelle sur le thème“Vers une Afrique sans frontières”. Tél. (608)262-8462, e-mail <[email protected]> or<[email protected]>.

11-15 octobre 2004, Addis-Abeba (Ethiopie)— Forum pour le développement de l’Afri-que, organisé par la Commission économiquepour l’Afrique. Contacter Robert Okello, tél.(251-1) 443040, fax (251-1) 514416, e-mail<[email protected]>.

11-22 octobre 2004, Gaborone (Botswana) —Le VIH/sida : Stratégie en matière de soins desanté et de financement. Contacter NSJ Trust,tél. (258-1) 493400, fax (258-1) 490880, e-mail<[email protected]>.

13-15 octobre 2004, Le Cap (Afrique du Sud) —Développement africain et réduction de lapauvreté: Le lien macro-micro. E-mail <[email protected]>, site Web <www.commerce.uct.ac.za/dpruconference2004.htm>.

EVENEMENTS PASSES9-10 juin 2004, Windhoek (Namibie) — Desconférences locales aux conférences mondiales.Tél. (061) 264-879, site Web <www.1verkko.net/conference/index.phtml>.

28-30 juin, Tunis (Tunisie) — Conseil interna-tional des ministres africains responsables del’eau. E-mail <[email protected]>, siteWeb <www.nepad.org>.

Designing West Africa: Prelude to a 21stCentury Calamity, Peter Schwab (PalgraveMacmillan, Hampshire, Royaume-Uni, 2004;192 p; 24,95 $)

La démocratie-monde: Pour une autre gouver-nance globale, Pascal Lamy (Seuil, Ballain-villiers, France, 2004; 90 p; 10,50 €)

L’Afrique du Sud dix ans après: Transitionaccomplie?, sous la direction de PhilippeGuillaume, Nicolas Pejout et Aurélia wa Kabwe-Segatti (Karthala, Paris, France, 2004; 368 p; 25 €)

Agricultural Biodiversity in SmallholderFarms of East Africa, Fidelis Kaihura etMichael Stocking (UN University Press, Tokyo,Japon, 2003; 304 p; 32,00 $)

Asia and Africa in the Global Economy, ErnestAryeetey, Julius Court, Machiko Nissanke etBeatrice Weder (UN University Press, Tokyo,Japon, 2003; 400 p; 42,00 $)

International Waters in Southern Africa, sousla direction de Mikiyasu Nakayama (UN Univer-sity Press, Tokyo, Japon, 2003; 240 p; 21,95 $)

Développement durable? doctrines, pratiques,évaluations, sous la direction de Jean-YvesMartin (IRD Editions Diffusion, Bondy, France,2002; 344 p; 25 €)

Reforming Africa’s Institutions: Ownership,

Incentives, and Capabilities, sous la directionde Steve Kayizzi-Mugerwa (UN UniversityPress, Tokyo, Japon, 2003; 440 p. 37,95 $)

Un jour dans la vie de l’Afrique, David ElliotCohen, Lee Liberman et Charles M. Collins(Tides Foundation, San Francisco, Californie, E.-U., 2002; 288 p. relié 50,00 $)

Le district sanitaire urbain en Afrique subsa-harienne: Enjeux, pratiques et politiques,Daniel Grodos (Karthala, Paris, France, 2004;448 p. 28 €)

J’ai serré la main du diable – La faillite del’humanité au Rwanda, Lieutenant-généralRoméo Dallaire (Random House Canada,Toronto, Canada, 2003; 562 p. 25,95$)

Reconsidering Informality: Perspectives fromUrban Africa, sous la direction de Karen TranbergHansen et Mariken Vaa (Nordiska Afrikainstitutet,Uppsala, Suède, 2004; 235 p. 25 €)

L’Afrique de l’Ouest dans la compétitionmondiale: Quels atouts possibles?, JacquelineDamon et John O. Igue (Karthala, Paris, France,2004; 503 p. 32 €)

In Defence of Globalization, Jagdish N.Bhagwati (Oxford Press, Oxford, Royaume-Uni,2004, 310p. 28 $)

Angola: The Anatomy of an Oil State, TonyHodges (Indiana University Press, Bloomington,Indiana, E.-U., 2004; 280 p. 22,95 $)

Global Prescriptions: Gendering Health andHuman Rights, Rosalind Pollack Petchesky(Zed Books, Londres, Royaume-Uni, 2003; 320p. 24,95 $)

The Quest for Peace in Africa: Transforma-tions, Democracy and Public Policy, Alfred G.Nhema (International Books, Utrecht, Pays-Bas,2004; 416 p. 29,95 $)

Once Intrepid Warriors: Gender, Ethnicityand the Cultural Politics of Maasai Develop-ment, Dorothy L. Hodgson (Indiana UniversityPress, Bloomington, E.-U., 2004; 333 p. 19,95 $)

Land, Gender, and the Periphery: Themes inthe History of Eastern and Southern Africa,Bahru Zewde (Ossrea, Addis-Abeba, Ethiopie,2004; 178 p. 15 $)

Rwanda: A Country Torn Apart, KariBodnarchuk (Minneapolis, Minnesota, E.-U, 1999;104 p. 25,26 $)

Fashioning Africa: Power and the Politics ofDress, sous la direction de Jean Allman (IndianaUniversity Press, Bloomington, Indiana, E.-U.,2004; 248 p. 21,95 $)

A Continent for the Taking: The Tragedy andHope of Africa, Howard W. French (Knopf, NewYork, E.-U., 2004; 304 p. 25 $)

Local Economic Development in the ChangingWorld, sous la direction de Etienne Nel et ChristianM. Rogerson (Transaction Publishers, Piscataway,New Jersey, E.-U, 2004; 352 p. 49,95 $)

The Red Sea Terror Triangle, Shaul Shay(Transaction Publishers, Piscataway, New Jersey,E.-U., 2005; 225 p. 39,95 $)

African Entrepreneurship and Private SectorDevelopment, sous la direction de KarlWohlmuth (Transaction Publishers, Piscataway,New Jersey, E.-U, 2004; 696 p. 89,95 $)

AGENDAA F R I Q U E

LIVRESA F R I Q U E

22 JUILLET 2004UEFRI ENOUVEAU

Page 23: FRI UE ENOUVEAU...JUILLET 2004 FRI UE ENOUVEAU 5 cette seule année et le nombre d’orphelins du sida est passé à 660 000. D’ici à 2005, l’espérance de vie sera tombée à

L’OMC se prononce contre les subventions du cotonDénonçant les subventions versées auxcultivateurs de coton des États-Unis, le Brésila obtenu gain de cause auprès de l’Organisa-tion mondiale du commerce (OMC). Si elleest maintenue au terme de la procédure derecours, cette décision pourrait obliger lesÉtats-Unis à modifier leur politique de sub-ventions agricoles et donner lieu à d’autresplaintes de la part des pays en développe-ment, qui estiment que les 300 milliards dedollars de subventions agricoles versésannuellement dans les pays industrialisésfavorisent des excédents de production etavantagent de façon déloyale les agriculteursdes pays riches. En vertu de l’Accord del’OMC de 1995 sur l’agriculture, les pays ontété autorisés à continuer à verser des subven-tions agricoles à condition qu’elles nedépassent pas le niveau atteint en 1992. LeBrésil a fait valoir que les États-Unis avaient

dépassé leur plafond de 1992 et qu’il avaitsubi un manque à gagner de 600 millions dedollars pendant la saison 2001/02.

Les subventions aux producteurs de cotonaméricains ont également été dénoncées lorsd’une réunion ministérielle de l’OMC tenue àCancun (Mexique) en septembre 2003, aucours de laquelle plusieurs pays africainsexportateurs de coton ont exigé qu’il soit misfin à ces subventions. ■

Environnement économique : leBotswana numéro un en AfriqueGrâce notamment à une bonne gouvernance,le Botswana s’est classé en tête cette année del’indice de compétitivité de la croissanceafricaine du Forum économique mondial, cequi signifie qu’il est le pays le plus à mêmede connaître une croissance économiquedurable. Pour parvenir à ce classement,l’indice intègre des évaluations des institu-tions publiques, du bilan macroéconomique etdu degré de sophistication technique d’unpays ainsi qu’un sondage d’opinion réaliséauprès de 2 000 cadres d’entreprise africains.

La Finlande, les Etats-Unis et la Suède

arrivent en tête duclassement mondial, leBotswana se classant au36e rang des 102 paysétudiés. L’économisteen chef du Forum baséen Suisse, M. AugustoLopez-Claros, expliqueque cet indice vise àrecenser les obstacles àla croissance et à aiderles gouvernements, lesecteur privé et lesbailleurs de fonds àfaire de l’Afrique une“adresse commerciale”plus attrayante pour lesinvestisseurs. “Dansl’ensemble, les pays africains n’obtiennent pasde bons résultats dans cette étude”, note-t-il.■

Début des négociations commerciales Sud-SudLors de la Conférence des Nations Uniessur le commerce et le développement(CNUCED) organisée au Brésil en juin, lesdirigeants des pays en développement ontentamé de nouvelles négociations visant àstimuler les échanges commerciaux Sud-Sud.Ces négociations s’inscrivent dans le cadredu Système global de préférences commer-ciales, auquel participent actuellement 44pays en développement, dont 14 paysafricains. Lors de la conférence de Sao Pauloorganisée du 13 au 18 juin, ces 44 pays ontinstamment demandé à d’autres pays endéveloppement de se joindre aux négocia-tions, qui visent à réduire les barrières tari-faires entre participants.

D’après l’Organisation mondiale du com-merce, les échanges commerciaux entre pays endéveloppement ont doublé pendant les années1990, représentant 12 % du commerce mondi-al. Mais en exportant les uns vers les autres, lespays en développement se heurtent encore àd’importantes barrières commerciales.

Le Président de l’Ouganda, YoweriMuseveni, a demandé aux pays en développe-ment les plus grands d’ouvrir leurs marchésaux plus pauvres. Il a noté que si la Chinen’impose aucun droit de douane sur le cafénon torréfié, elle prélève des droits de 53 %sur le même produit transformé. “L’Afrique setient aux côtés de la Chine depuis longtemps,ainsi que la Chine à nos côtés”, a-t-il déclaré.Cependant, “la question du commerce... n’apas été examinée.” ■

23JUILLET 2004 UEFRI ENOUVEAU

EN BREFA F R I Q U E

Dans le prolongement des deux derniers sommets du Groupe des huit pays industrialisés, lesommet du G-8 tenu cette année aux États-Unis a également accordé une place importante àl’Afrique. Six chefs d’État africains – de l’Algérie, du Ghana, du Nigéria, du Sénégal, de l’Afriquedu Sud et de l’Ouganda – ont été invités les 9 et 10 juin aux réunions de Sea Island (Géorgie), oùils ont de nouveau souligné la nécessité d’apporter un appui plus important au Nouveau Parte-nariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD). Les dirigeants du G-8 ont adopté plusieursnouvelles mesures concernant l’Afrique :

• Un plan d’action visant à former dans les cinq ans à venir 75 000 membres supplémen-taires des forces de maintien de la paix. L’accent sera mis sur l’Afrique, renforçant ainsi unengagement pris l’an dernier en vue d’aider l’Union africaine à créer une force de maintiende la paix de réserve.

• Un “projet mondial de vaccin contre le VIH” visant à hâter la mise au point d’un vaccincontre le virus à l’origine du sida.

• Une “initiative” visant à “mettre fin au cycle de la famine dans la corne de l’Afrique”, com-prenant des mesures destinées à assurer la sécurité alimentaire de 5 millions supplémen-taires d’Ethiopiens d’ici à 2009 et à augmenter la productivité agricole dans la région.

• Un engagement visant à garantir le financement intégral de la campagne d’élimination dela polio de l’Organisation mondiale de la santé.

• Un accord visant à prolonger jusqu’en 2006 l’initiative en faveur des Pays pauvres trèsendettés (PPTE), qui devait à l’origine se terminer fin 2004.

Dans une lettre adressée aux dirigeants du G-8, le Secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan,a instamment prié ces derniers d’accorder plus d’importance à la réduction de la pauvreté et àd’autres Objectifs du Millénaire pour le développement dans le cadre de l’assistance qu’ilsapportent aux pays en développement. Il a cité des estimations selon lesquelles, pour atteindreles objectifs du Millénaire d’ici à 2015, le montant mondial de l’aide devrait atteindre au moins100 milliards de dollars, contre 68 milliards en 2003. Pour mobiliser des fonds supplémentairesen faveur de la lutte contre la pauvreté, le Président français Jacques Chirac a proposé d’in-stituer une taxe internationale.

Le Président de l’Afrique du Sud, Thabo Mbeki, a demandé aux pays du G-8 de renoncer àleurs mesures protectionnistes de façon à ce que les pays africains puissent bénéficier d’un“accès équitable aux marchés mondiaux.” Les membres du G-8 se sont déclarés “résolus” àreprendre les négociations commerciales internationales qui ont échoué en septembre 2003.

Initiatives du G-8 pour l’Afrique

Botswana 1 36

Tunisie 2 38

Afrique du Sud 3 42

Maurice 4 46

Namibie 5 52

Gambie 6 55

Egypte 7 58

Maroc 8 61

Tanzanie 9 69

Ghana 10 71

Source: Forum économiquemondial.

Classement de paysafricains selon l’indice

de compétitivité

Afrique Monde

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UNION AFRICAINE

Inauguration du Conseil de paix et de sécuritéL’Union africaine a commémoré cette annéela Journée de l’Afrique en inaugurant sonConseil de paix et de sécurité. Cet organismesera habilité à intervenir aux f ins de laprévention et du règlement de conflits et seradoté à terme d’une force africaine de réservede maintien de la paix. Les dirigeants de l’UAindiquent que l’UA se différencie par ce con-seil de l’organisme qui l’a précédée, l’Orga-nisation de l’unité africaine (OUA). “Notreriposte collective aux conflits en Afrique neconsistera plus à faire comme si de rienn’était”, a déclaré le Président nigérianOlusegun Obasanjo, qui présidait le Conseil àson inauguration le 25 mai. “La communautéinternationale s’attend à ce que le Conseilmodifie considérablement la façon dont nousgérions les conflits par le passé. Leurs espoirset leurs attentes ne sauraient être déçus.”

Le Conseil se compose de quinze paysappartenant aux cinq régions de l’Afrique –centrale, orientale, septentrionale, australeet occidentale. Cinq Etats(Gabon, Ethiopie,Algérie, Afrique du Sud et Nigéria) ont été éluspour trois ans, tandis que 10 autres siégeront auConseil pour deux ans (Cameroun, Congo,Kenya, Soudan, Libye, Lesotho, Mozambique,Ghana, Sénégal et Togo).

Ce nouvel organisme sera en mesured’envoyer des forces de maintien de la paixdans les régions où auront été signés descessez-le-feu et aussi d’intervenir unilatérale-ment en cas de génocide et de crime contrel’humanité. D’ici à 2010, l’UA compte dispos-er de sa propre armée de réserve forte de15 000 soldats, prête à être déployée rapide-ment. “Par le passé, l’OUA a été accusée decomplicité. Nous remplaçons le principe denon-ingérence par le principe de non-indif-férence”, a déclaré le Commissaire de l’UApour la paix et la sécurité, Said Djinnit.

L’UA a récemment envoyé une mission demédiation dans la région du Darfour (Soudan).Elle compte également une mission auxComores. Sa mission au Burundi, où 2 700soldats de l’UA étaient postés depuis 2003, arécemment été transférée à une force de main-tien de la paix de l’ONU. ■

NEPAD

Première ‘Evaluationpar les pairs’ au GhanaUne équipe de dirigeants africains de hautniveau s’est rendue au Ghana le 25 mai pourcommencer l’évaluation du bilan de ce pays enmatière notamment de droits de l’homme,démocratie et transparence économique. Enprésentant cette mission, M. Wiseman Nkuhlu,président du comité directeur du NouveauPartenariat pour le développement de l’Afrique(NEPAD), a déclaré qu’elle constituait uneétape importante du projet panafricain.

Constatant que la bonne gouvernance estessentielle pour le développement à long

terme du continent ainsi que pour attirerinvestissements et aide extérieurs, les paysafricains ont établi dans le cadre du NEPAD leMécanisme d’évaluation par les pairs. Il s’agitd’un système “d’auto-surveillance” volon-taire, par lequel les pays africains examinentmutuellement leur gestion politique et écono-mique. Au cours de chaque examen, uneéquipe d’experts passera plusieurs mois àrassembler des documents et à interviewer desreprésentants du gouvernement, de l’opposi-tion, de la société civile et des médias.

Le Ghana est le premier pays à être évaluéet sera suivi dans le courant de l’annéeprochaine par le Kenya, le Rwanda etMaurice. Quatorze autres pays se sont offi-ciellement associés au Mécanisme : Algérie,Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Républiquedu Congo, Egypte, Ethiopie, Gabon, Mali,Mozambique, Nigéria, Sénégal, Afrique duSud et Ouganda. L’Angola et le Lesotho ontmanifesté leur intention de s’y associer. ■

PAYS LES MOINS AVANCÉS

Forte croissance et pauvretéLes 50 pays les moins avancés (PMA) dumonde – dont 34 se trouvent en Afrique – ontconnu une forte croissance économique de1998 à 2002, indique la Conférence desNations Unies sur le commerce et ledéveloppement (CNUCED). La croissancemoyenne du PIB des PMA a atteint enmoyenne 4,4 % de 1998 à 2000, alors que lamoyenne mondiale était de 3,4 %. Les PMAont obtenu une croissance encore plus élevéede 2000 à 2002 – 4,9 % en moyenne, contreseulement 1,4 % à l’échelle mondiale.

D’après le Rapport 2004 de la CNUCEDsur les pays les moins avancés, les PMA ontbénéficié d’une hausse de près de 45 % desrecettes à l’exportation. En outre, les flux netsde ressources en direction des PMA sontpassés de 12,4 milliards de dollars en 2000 auniveau record de 16,7 milliards de dollars en2002. Sur ce dernier montant, 11,6 milliards,soit près de 70 %, provenaient de l’aidepublique au développement, qui, en termesabsolus, reste inférieure au niveau moyenatteint au début des années 90. Le reste prove-nait de flux privés – en très grande majoritédes investissements étrangers – qui ont pris del’importance au cours des 10 dernières annéeset ont atteint 5,1 milliards de dollars en 2002.

Cependant, la CNUCED signale que, dansles PMA, le nombre d’habitants vivant avec undollar par jour ou moins pourrait passer de 335millions en 2000 à 471 millions en 2015. ■

24 JUILLET 2004UEFRI ENOUVEAU

HORIZONA F R I Q U E

M. Rodrigo de Rato y Figaredo a été nommé Directeur général du Fondsmonétaire international (FMI) par le conseil d’administration du Fonds, àcompter du 7 juin 2004. Il succède à M. Horst Köhler, qui a démissionné deses fonctions pour se présenter à la présidence de l’Allemagne. Avant d’en-trer en fonctions au FMI, M. Rato a été vice-président de l’Espagne pour lesaffaires économiques et Ministre de l’économie. Il a représenté l’Espagne auxconseils de gouverneurs du FMI, de la Banque mondiale, de la Banque inter-américaine de développement, de la Banque européenne d’investissementet de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement.

Le Secrétaire général de l’ONU a nommé Mme Carolyn McAskie au postede représentante spéciale pour le Burundi, à compter du 1er juin 2004. MmeMcAskie a précédemment participé au processus de paix du Burundi dans lesannées 1990, au moment des efforts de médiation du regretté Président de laTanzanie, Julius Nyerere. Elle est entrée en fonctions à l’ONU en 1999, enqualité d’adjointe au Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires,après avoir passé 32 ans au service du gouvernement du Canada. Elle a étécoordinatrice des secours d’urgence de l’ONU de novembre 1999 à janvier2004 et a simultanément, au rang de sous-secrétaire général, occupé les

fonctions d’Envoyée humanitaire du Secrétaire général pour la Côte d’Ivoire.

NOMINATIONS