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MESURES 814 - AVRIL 2009 - www.mesures.com 16 F orum MESURES 814 - AVRIL 2009 - www.mesures.com 17 FRANCIS COTTET, DIRECTEUR DE L’ENSMA « LabView et Matlab sont devenus la règle à calculs sophistiquée de l’époque actuelle » Après une longue carrière d’enseignant-chercheur, Francis Cottet a occupé le poste de délégué régional à la recherche et à la technologie du Poitou-Charentes pendant trois ans. En octobre dernier, il a pris la direction de l’Ecole nationale supérieure de mécanique et d’aérotechnique de Poitiers-Futuroscope. Dans cet entretien, il nous livre son expérience sur LabView, qu’il connaît bien. Il en a fait, très tôt, un outil pédagogique et a étudié les capacités temps réel de ce logiciel de programmation graphique. Il évoque également l’évolution des capteurs et la façon dont ils sont appréhendés dans le cadre de l’enseignement et de la recherche au sein de l’Ensma et de ses laboratoires. Mesures. L’Ensma est une école qui forme des ingénieurs en mécanique et aérotech- nique. Quelle est la place de la mesure dans leur formation ? Francis Cottet. Dans le cadre de mon ensei- gnement, je devais faire comprendre aux élèves l’importance de la mesure au sens large du terme. Cette école forme des élèves spécialisés en mécanique des fluides et des solides, en énergétique, etc. L’instrumentation est pour eux un sujet secondaire. Nos ingé- nieurs ont toutefois besoin de connaissance en la matière car ils vont devoir exploiter des bancs d’essai de turboréacteurs ou encore de machines thermiques. Ils auront donc à réa- liser des mesures de température, de vitesse, etc. Pour ce faire, on leur met à disposition une centrale d’acquisition afin qu’ils collec- tent des mesures. Il leur faut donc compren- dre toute la chaîne de mesure qui part du capteur jusqu’à l’ordinateur qui traitera le signal. Ainsi ils ne feront pas d’erreurs dans leur interprétation. Il y a une vingtaine d’an- nées, on mettait encore en œuvre des appli- cations d’acquisition de signaux à partir de codes écrits en assembleur. On s’est vite rendu compte que l’on perdait plus de temps à écrire des lignes de codes en C ou en assem- bleur qu’à interpréter la mesure qui était l’objectif du cours ou des travaux pratiques. Au début des années 90, j’ai découvert le logiciel de programmation graphique LabView de National Instruments. C’était pour moi le moyen de récupérer une mesure en trois minutes après avoir branché le bon capteur à la carte d’acquisition insérée dans l’ordinateur. Et cela presque sans program- mation. Les travaux pratiques pouvaient ainsi être consacrés complètement à la compré- hension des problèmes physiques et du dispositif expérimental à étudier tout en apprenant à choisir le bon capteur, la bonne amplification, le bon filtre éventuellement et le traitement de signal approprié. Lors d’un cours de traitement de signal, par exemple, la programmation d’une fenêtre temporelle, en C ou en Ada, pour réaliser une acquisition correcte, exige le recours à des bibliothèques qu’il n’est pas question de programmer.Avec LabView, on dispose de nombreuses fenêtres classiques qui peuvent être testées afin de comprendre l’intérêt des unes et des autres. Ainsi, on explique aux élèves les bases théo- riques de l’acquisition et ils les mettent en pratique rapidement. Mesures. L’approche de programmation graphique de LabView vous a donc séduit. Mais, selon vous, qui avez utilisé et écrit un livre sur ce logiciel, quels sont ses points forts qui expliquent son succès ? Francis Cottet. LabView a trois forces. Premièrement c’est un langage de program- mation au sens informatique du terme. C’est-à-dire qu’il a la puissance des langa- ges C,Ada, etc. On peut faire les mêmes pro- grammes. Même s’il est sans doute moins facile de faire une inversion de matrice avec LabView qu’avec Ada. Deuxièmement, il propose une interface de programmation extrêmement simple d’utilisation.Troisième point important : il est associé à cet outil logiciel toute une batterie de cartes électro- niques qui facilitent la mise en place d’une application d’acquisition de mesures. Quand LabView est arrivé en France, il était déjà bien déployé aux USA. Mais il présentait un handicap pour l’industrie puisqu’il tournait sur des ordinateurs d’Apple qui étaient peu utilisés dans le domaine du test et de la mesure. Quand il a été adapté aux PC, son utilisation s’est fortement accélérée. Mesures. Considérez-vous aujourd’hui que LabView est devenu un outil incon- tournable dans le domaine du test et de la mesure ? Francis Cottet.Tout à fait.Au même titre que Matlab, édité par The Mathworks, la connais- sance LabView est quasiment indispensable sur le CV des ingénieurs que nous formons. Tous les stages “tests, essais et mesures” en exigent la maîtrise. Très peu d’ingénieurs réalisent aujourd’hui de la programmation en C pour une application d’acquisition de données sauf s’ils disposent d’une biblio- thèque toute faite ou qu’il existe déjà un programme. Dans le domaine du test et mesure, LabView est devenu tout aussi in- dispensable que peut l’être le Pack Office de Microsoft dans le domaine bureautique. Le couple LabView et Matlab est devenu la règle à calculs sophistiquée de l’époque actuelle. Sur 150 étudiants qui sortent chaque année de l’école, certains auront une maîtrise mi- nimale de ces outils pour réaliser une appli- cation d’acquisition en quelques minutes, d’autres les utiliseront pour des applications plus pointues qui exigent des journées en- tières de programmation. Mesures. Quelles sont, à votre avis, les li- mites de LabView ? Francis Cottet. On peut réaliser avec LabView des programmes extrêmement complexes. Mais c’est peut-être là qu’il atteint ses limites. Comme il laisse libre cours à l’imagination, il est possible de développer des choses ex- traordinaires que l’on ne sait plus maintenir ensuite parce que l’on ne sait plus les com- prendre. Si le programme comporte LabView est taillé à la base pour faire du multicœur ce qui a été une chance inouïe. Durant sa carrière d’enseignant-chercheur, Francis Cottet s’est d’abord intéressé à l’élaboration de codes de calcul pour l’acquisition de données très rapide avant de créer une équipe de recherche autour de l’informatique embarquée. Francis Cottet est directeur de l’Ensma de Poitiers depuis le 17 octobre 2008. Avant d’être nommé à ce poste, il a été trois années durant délégué régional à la recherche et à la techno- logie du Poitou-Charentes. Grâce à cette expérience, il a appris à mieux connaître les relations avec le ministère de la Recherche, son fonctionnement, ses modes de financement, etc. et ainsi élargi son champ de connaissances. Après cette escapade, hors des amphis et des paillasses des laboratoires, cet ingénieur de l’INPG de Grenoble, spécialisé dans la micro-informatique et l’électronique, prend les commandes de l’école où il a effectué toute sa carrière comme enseignant-chercheur. Fraîchement diplômé, il a toutefois fait ses armes dans l’industrie. Deux années passées chez Télémécanique : « une expérience enrichis- sante pour un futur enseignant-chercheur », précise-t-il. Entré à l’Ensma, il enseigne dans le domaine de l’électronique auto- matique informatique, thématique d’un département de l’école qu’il a dirigé pendant une quinzaine d’années. Côté recherche, pendant une première période, il s’intéresse à l’acquisition de données très rapides et à l’élaboration de codes de calcul dans le domaine de la physique de l’interaction laser-matière. Revenant sur le terrain de sa formation initiale, il a créé, il y a environ quinze ans, une équipe de recherche autour de l’infor- matique embarquée à l’Ensma, et en particulier pour la valida- tion des applications embarquées, afin de prouver la fiabilité des applications multitâches. Il a, par ailleurs, publié chez Dunod un livre d’initiation au langage de programmation gra- phique LabView et d’autres ouvrages présentant les principes du traitement du signal. Une carrière, des expériences Dans le cadre de son doctorat, Emmanuel Geveaux, encadré par Francis Cottet, a créé dans LabView une palette d’outils pour effectuer de la programmation temps réel qui n’existait pas jusqu’alors dans cet environnement.

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F orum

MESURES 814 - AVRIL 2009 - www.mesures.com 17

F orumFRANCIS COTTET, DIRECTEUR DE L’ENSMA

« LabView et Matlab sont devenus la règle à calculs sophistiquée de l’époque actuelle »Après une longue carrière d’enseignant-chercheur, Francis Cottet a occupé le poste de délégué régional à la recherche et à la technologie du Poitou-Charentes pendant trois ans. En octobre dernier, il a pris la direction de l’Ecole nationale supérieure de mécanique et d’aérotechnique de Poitiers-Futuroscope. Dans cet entretien, il nous livre son expérience sur LabView, qu’il connaît bien. Il en a fait, très tôt, un outil pédagogique et a étudié les capacités temps réel de ce logiciel de programmation graphique. Il évoque également l’évolution des capteurs et la façon dont ils sont appréhendés dans le cadre de l’enseignement et de la recherche au sein de l’Ensma et de ses laboratoires.

Mesures. L’Ensma est une école qui forme des ingénieurs en mécanique et aérotech-nique. Quelle est la place de la mesure dans leur formation ?Francis Cottet. Dans le cadre de mon ensei-gnement, je devais faire comprendre aux élèves l’importance de la mesure au sens large du terme. Cette école forme des élèves spécialisés en mécanique des fluides et des solides, en énergétique, etc. L’instrumentation est pour eux un sujet secondaire. Nos ingé-nieurs ont toutefois besoin de connaissance

en la matière car ils vont devoir exploiter des bancs d’essai de turboréacteurs ou encore de machines thermiques. Ils auront donc à réa-liser des mesures de température, de vitesse, etc. Pour ce faire, on leur met à disposition une centrale d’acquisition afin qu’ils collec-tent des mesures. Il leur faut donc compren-dre toute la chaîne de mesure qui part du capteur jusqu’à l’ordinateur qui traitera le signal. Ainsi ils ne feront pas d’erreurs dans leur interprétation. Il y a une vingtaine d’an-nées, on mettait encore en œuvre des appli-cations d’acquisition de signaux à partir de codes écrits en assembleur. On s’est vite rendu compte que l’on perdait plus de temps à écrire des lignes de codes en C ou en assem-bleur qu’à interpréter la mesure qui était l’objectif du cours ou des travaux pratiques. Au début des années 90, j’ai découvert le logiciel de programmation graphique LabView de National Instruments. C’était pour moi le moyen de récupérer une mesure en trois minutes après avoir branché le bon capteur à la carte d’acquisition insérée dans l’ordinateur. Et cela presque sans program-mation. Les travaux pratiques pouvaient ainsi être consacrés complètement à la compré-hension des problèmes physiques et du

dispositif expérimental à étudier tout en apprenant à choisir le bon capteur, la bonne amplification, le bon filtre éventuellement et le traitement de signal approprié. Lors d’un cours de traitement de signal, par exemple, la programmation d’une fenêtre temporelle, en C ou en Ada, pour réaliser une acquisition correcte, exige le recours à des bibliothèques qu’il n’est pas question de programmer. Avec LabView, on dispose de nombreuses fenêtres classiques qui peuvent être testées afin de comprendre l’intérêt des unes et des autres. Ainsi, on explique aux élèves les bases théo-riques de l’acquisition et ils les mettent en pratique rapidement.

Mesures. L’approche de programmation graphique de LabView vous a donc séduit. Mais, selon vous, qui avez utilisé et écrit un livre sur ce logiciel, quels sont ses points forts qui expliquent son succès ?Francis Cottet. LabView a trois forces. Premièrement c’est un langage de program-mation au sens informatique du terme. C’est-à-dire qu’il a la puissance des langa-ges C, Ada, etc. On peut faire les mêmes pro-grammes. Même s’il est sans doute moins facile de faire une inversion de matrice avec LabView qu’avec Ada. Deuxièmement, il propose une interface de programmation extrêmement simple d’utilisation. Troisième point important : il est associé à cet outil logiciel toute une batterie de cartes électro-niques qui facilitent la mise en place d’une application d’acquisition de mesures. Quand LabView est arrivé en France, il était déjà bien déployé aux USA. Mais il présentait un handicap pour l’industrie puisqu’il tournait sur des ordinateurs d’Apple qui étaient peu utilisés dans le domaine du test et de la

mesure. Quand il a été adapté aux PC, son utilisation s’est fortement accélérée.

Mesures. Considérez-vous aujourd’hui que LabView est devenu un outil incon-tournable dans le domaine du test et de la mesure ?Francis Cottet. Tout à fait. Au même titre que Matlab, édité par The Mathworks, la connais-sance LabView est quasiment indispensable sur le CV des ingénieurs que nous formons.

Tous les stages “tests, essais et mesures” en exigent la maîtrise. Très peu d’ingénieurs réalisent aujourd’hui de la programmation en C pour une application d’acquisition de données sauf s’ils disposent d’une biblio-thèque toute faite ou qu’il existe déjà un programme. Dans le domaine du test et mesure, LabView est devenu tout aussi in-dispensable que peut l’être le Pack Office de Microsoft dans le domaine bureautique. Le couple LabView et Matlab est devenu la règle à calculs sophistiquée de l’époque actuelle. Sur 150 étudiants qui sortent chaque année de l’école, certains auront une maîtrise mi-nimale de ces outils pour réaliser une appli-cation d’acquisition en quelques minutes, d’autres les utiliseront pour des applications plus pointues qui exigent des journées en-tières de programmation.

Mesures. Quelles sont, à votre avis, les li-mites de LabView ?Francis Cottet. On peut réaliser avec LabView des programmes extrêmement complexes. Mais c’est peut-être là qu’il atteint ses limites. Comme il laisse libre cours à l’imagination, il est possible de développer des choses ex-traordinaires que l’on ne sait plus maintenir ensuite parce que l’on ne sait plus les com-prendre. Si le programme comporte ➜

“LabView est tailléà la base pour faire du multicœur ce qui a été une chance inouïe.”

Durant sa carrière d’enseignant-chercheur, Francis Cottet s’est d’abord intéressé à l’élaboration de codes de calcul pour l’acquisition de données très rapide avant de créer une équipe de recherche autour de l’informatique embarquée.

■ Francis Cottet est directeur de l’Ensma de Poitiers depuis le 17 octobre 2008. Avant d’être nommé à ce poste, il a été trois années durant délégué régional à la recherche et à la techno-logie du Poitou-Charentes. Grâce à cette expérience, il a appris à mieux connaître les relations avec le ministère de la Recherche, son fonctionnement, ses modes de financement, etc. et ainsi élargi son champ de connaissances. Après cette escapade, hors des amphis et des paillasses des laboratoires, cet ingénieur de l’INPG de Grenoble, spécialisé dans la micro-informatique et l’électronique, prend les commandes de l’école où il a effectué toute sa carrière comme enseignant-chercheur. Fraîchement diplômé, il a toutefois fait ses armes dans l’industrie. Deux années passées chez Télémécanique : « une expérience enrichis-sante pour un futur enseignant-chercheur », précise-t-il. Entré à l’Ensma, il enseigne dans le domaine de l’électronique auto-matique informatique, thématique d’un département de l’école qu’il a dirigé pendant une quinzaine d’années. Côté recherche, pendant une première période, il s’intéresse à l’acquisition de données très rapides et à l’élaboration de codes de calcul dans le domaine de la physique de l’interaction laser-matière. Revenant sur le terrain de sa formation initiale, il a créé, il y a environ quinze ans, une équipe de recherche autour de l’infor-matique embarquée à l’Ensma, et en particulier pour la valida-tion des applications embarquées, afin de prouver la fiabilité des applications multitâches. Il a, par ailleurs, publié chez Dunod un livre d’initiation au langage de programmation gra-phique LabView et d’autres ouvrages présentant les principes du traitement du signal.

Une carrière, des expériences

Dans le cadre de son doctorat, Emmanuel

Geveaux, encadrépar Francis Cottet, a

créé dans LabView une palette d’outils

pour effectuer dela programmation

temps réel qui n’existait pas

jusqu’alors dans cet environnement.

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d’innombrables nœuds, et si vous le laissez de côté pendant quinze jours, lorsque vous revenez, vous avez perdu le fil de votre déve-loppement… Cela peut devenir difficile de le faire évoluer si vous n’avez pas suivi cer-taines règles. Dans un des livres que j’ai écrit sur LabView, j’ai indiqué, dans un chapitre quelques règles, à suivre pour que le pro-gramme soit réutilisable. Et au pire lors-qu’une entreprise veut développer un pro-gramme un peu compliqué avec des interfaces spécifiques, le mieux est de faire appel à une SSII qui maîtrise le sujet.

Mesures. Quelles sont les principales règles à respecter pour programmer en LabView ?Francis Cottet. Dans le domaine de la pro-grammation, il y a deux types de règles. Soit celles imposées par le langage, c’est le cas de l’Ada qui est extrêmement réglementé en termes de réalisation, et est donc très con-traignant. Soit celles que l’on s’oblige à res-pecter en tant que programmeur. Avec LabView, la première règle est de faire en sorte de toujours visualiser l’ensemble du diagramme de programmation dans une seule fenêtre sans avoir à déplacer le curseur. Mais depuis, des macros de codes LabView ont été créées. Elles servent à réaliser certaines fonctionnalités sans avoir à les programmer. L’application est ainsi simplifiée.

Mesures. Vous avez été bien plus qu’un simple utilisateur de LabView. Vous avez participé à son évolution. Pourquoi vous êtes-vous intéressé d’aussi près à ce logi-ciel ?Francis Cottet. LabView me plaisait d’un point de vue personnel, je trouvais que

c’était un outil exceptionnel. Lors de la créa-tion de mon équipe de recherche en infor-matique embarquée en 1992, je me suis intéressé de près à la programmation multi-tâche qui s’impose dans ce domaine. Ada sait faire du multitâche mais cela est assez lourd à réaliser. LabView est, quant à lui, fonda-mentalement multitâche de part sa concep-tion puisque des icônes placées dans une fenêtre sont censées s’exécuter en même temps. En fait, comme on utilisait à l’époque qu’un seul processeur, elles s’exécutaient les unes après les autres. On s’est alors intéressé au fonctionnement multitâche avec un lan-gage graphique. Mais on s’est vite rendu compte que LabView ne disposait pas, comme Ada, de tous les outils nécessaires tels que le sémaphore ou encore la boîte aux lettres partagée. Et on a pris la décision en 1994, avec Louis-Paul Doco, alors directeur général de National Instrument France et Jean-Michel Châlons, directeur de Saphir, de pro-poser une thèse de doctorat à Emmanuel Geveaux dans le cadre d’une convention Cifre. Il avait pour objectif d’étudier la pos-sibilité de développer dans LabView une palette d’outils pour effectuer de la pro-grammation temps réel. Il a ainsi créé des sémaphores, des boîtes aux lettres, des outils

de synchronisation et de création de tâ-ches… Il s’agit d’outils temps réel tout à fait classiques mais qui n’existaient pas dans cet environnement. Cet étudiant chercheur avait programmé tout cela au plus bas niveau que les outils de base de LabView l’autorisaient. On a donc conçu, sous cet environnement, une palette d’outils de programmation temps réel pour réaliser du multitâche contrôlé.

Mesures. Les travaux de cette thèse de doc-torat sont donc à l’origine de LabView Real Time ?Francis Cottet. En effet, les résultats de cette thèse ont été présentés à Louis-Paul Doco et Jean-Michel Châlons qui ont trouvé cela très intéressant. Mon doctorant a présenté ses travaux lors de NIWeek, manifestation qu’or-ganise chaque année National Instruments à Austin (Texas). Les équipes de développe-ment de la firme texane ont analysé tout cela de très près et la version suivante de LabView disposait de sa palette temps réel avec des icônes quasiment identiques à ceux que l’on avait conçus mais la palette était, là, non plus programmée en LabView, mais en code natif. Emmanuel Geveaux a été ensuite soutenu par la filiale française de l’éditeur. Il a créé la société Tecatlant hébergée à l’Ensma pendant quelques années et aujourd’hui basée en Bretagne. Il a été à l’origine de la palette temps réel de LabView que National Instruments a depuis considérablement enrichi. On a même appliqué ces fonctionnalités pour programmer, en langage Grafcet qui exige des outils temps réel pour coordonner l’exé-cution des différents éléments. Ce qui a donné naissance à Grafcetview. Il s’agit d’une surcouche à LabView qui est d’ailleurs tou-jours commercialisé par Tecatlant. Elle n’a jamais été intégrée à LabView car le Grafcet est un très bel outil propre aux automaticiens mais qui est tombé un peu en désuétude.

Mesures. LabView a réussi à s’imposer dans de nombreux domaines. Comment expliquez-vous ce succès. Et pourquoi, selon vous, n’a-t-il pas véritablement de concurrent ?Francis Cottet. Ce succès repose sur les trois qualités que j’ai évoquées ci-avant, notam-ment qu’il s’agit d’un langage de program-mation à part entière. L’aspect graphique est une idée originale qui a séduit. Et cet envi-ronnement est de plus complété par une large palette de cartes et de modules d’ac-quisition. Par exemple, HP Vee d’Agilent Technologies n’est pas un langage de program-mation. C’est une sorte de programmation

via des boîtes qui offrent toutes les fonctions d’acquisition de données et de pilotage de cartes mais avec lequel on ne peut pas pro-grammer. En revanche, avec LabView, c’est possible et c’est ce qui fait sa force. Pourquoi une telle réussite ? Je ne touche pas de royal-ties de la part de l’éditeur mais je peux dire honnêtement que LabView est un bon pro-duit. Par ailleurs, il a bénéficié d’une très bonne opération marketing.

Mesures. National Instruments vante aujourd’hui les mérites de LabView pour les applications tournant sur des proces-seurs multicœur. Cette qualité est-elle selon vous justifiée ?Francis Cottet. Lorsque j’enseignais, je disais à mes élèves que si on avait eu autant de processeurs que de tâches, on n’aurait jamais parlé de programmations multitâches. Malheureusement, on dispose souvent de bien moins de processeurs que de tâches. Mon cours consistait à leur montrer com-ment les répartir finement pour que l’appli-cation fonctionne correctement. L’aspect graphique est éminemment multitâche. Si l’on met deux icônes l’une à côté de l’autre, si on travaille avec deux processeurs, elles vont s’exécuter en parallèle. LabView est taillé à la base pour faire du multicœur, ce qui a été une chance inouïe. Ce qui ne veut pas dire que tous les problèmes sont pour autant simplifiés. Car si vous avez huit tâches pour huit processeurs, il n’y aura pas de pro-blèmes. Mais ce n’est jamais le cas, donc il faut résoudre les problèmes de répartition, de passage et sauvegarde des données, etc. On rentre donc dans les problèmes de pro-grammation multiprocesseur qui sont extrê-mement complexes. Il y aura peut-être plus tard une palette d’outils LabView pour l’uti-lisation des multiprocesseurs car il existe des moyens informatiques pour répartir les exé-cutions. Il y a peut-être des nouveaux sujets de thèses possibles afin d’assurer l’optimisa-tion de LabView dans le cadre d’application multiprocesseur.

Mesures. LabView est donc devenu pour les ingénieurs une des briques facilitant la mise en œuvre d’une chaîne d’acquisition de mesure. Mais qu’en est-il du capteur, le premier élément de cette chaîne ? Comment est-il appréhendé à l’Ensma ?Francis Cottet. C’est effectivement un élé-ment très important car une mesure est bonne que si l’on a choisi le bon capteur. On y a beaucoup réfléchi à l’école. En voyant le livre de M. G. Ash qui, sur 800 à 900 pages, décrit toute une collection de capteurs, on

s’est demandé s’il ne fallait pas faire un cours sur les capteurs. Mais il ne nous a pas paru pertinent de pro-poser un cours qui listerait les caractéristiques de tous ces capteurs. On a donc pris le parti de ne pas faire de cours sur ce sujet. En revanche, lors des tra-vaux pratiques ou dirigés de chaque domaine étu-dié, les élèves ont un cours sur tous les capteurs mais par les spécialistes de la phy-sique concernée dans les qua-tre grands domaines enseignés à l’école : énergétique, thermi-que, mécanique des solides et mécanique des fluides. Ils ont l’opportunité d’utiliser ces cap-teurs. Car si on observe une barre qui se déforme, sans capteur cela ne sert à rien. Ainsi à leur sortie de l’école, ils auront eu non seule-ment un aperçu de tous les capteurs qui exis-tent (des plus sophistiqués au plus simples) mais ils les auront aussi mis en œuvre. Le capteur est donc un enseignement diffus à l’intérieur de l’école. On les forme à l’utili-sation des capteurs mais lorsqu’ils seront en poste dans l’industrie, ce ne sera pas à eux d’instrumenter un moteur ou un turboréac-teur. Ce sera le rôle de l’ingénieur électroni-cien. Mais ils devront pouvoir donner des indications en connaissant la physique du problème étudié et échanger sur le sujet. Car un ingénieur est avant tout quelqu’un qui travaille en équipe. Il doit pouvoir choisir un capteur selon différents paramètres répon-dant aux exigences de son application mais il n’a pas à connaître tous les capteurs.

Mesures. Y a-t-il au sein de l’Ensma des recherches ou des cours spécifiques sur l’électronique embarqué propre à l’aéro-nautique ?Francis Cottet. Non. Nos étudiants ne vont pas jusque-là. L’équipe temps réel que j’ai dirigée fait uniquement de la validation d’application temps réel. On modélise les programmes multitâches et on essaie de prouver dans tous les cas d’exécution que ce programme respectera les échéances qu’on

“Il n’y a pas de recherche concrète ou théorique. La plupart des recherches qui sont menées ici ont des finalités applicatives.”

lui a données quelle que soit la cible. Il s’agit de processeurs du commerce dont on dispose des

durées d’exécution. On ne réalise aucun développement matériel et on

opère sur des cibles qui existent. On valide les programmes sans exécution réelle sur une application finale.

Mesures. Quels sont les domaines de recherche des laboratoires de l’école ?Francis Cottet. L’Ensma dispose de 5 labo-

ratoires dont 4 associés CNRS de niveau A qui regroupent 250 personnes : un labora-toire dans le domaine de la mécanique des solides et matériaux, un laboratoire d’aéro-dynamique et de mécanique des fluides, un laboratoire d’énergétique, un laboratoire de thermique et un laboratoire d’informati-que.

Mesures. Ces laboratoires entretiennent-ils des liens étroits avec l’industrie ?Francis Cottet. Tous les laboratoires de l’école tirent à peu près 75 % de leurs revenus de contrats industriels ou publics. Ces derniers sont des réponses à des appels d’offres euro-péens ou régionaux. Nous collaborons avec tous les grands groupes industriels : Thalès, Airbus, Eurocopter, Snecma, etc.

Mesures. S’agit-il de recherches appliquées ou théoriques ?Francis Cottet. Il n’y a pas de recherche con-crète ou théorique. La plupart des recherches qui sont menées ici ont des finalités applica-tives. L’idée initiale vient d’un besoin indus-triel qui est parfois mal exprimé. Le cher-cheur doit concrétiser ce besoin en projet de recherche. Ce sont des recherches évidem-ment en amont. Par exemple, si Snecma nous contacte pour développer une aube de tur-bine de moteur qui résisterait à des tempéra-tures supérieures afin de détruire des nuisan-ces de type NOx. Là, bien sûr, entre le début des travaux de recherche et la mise en appli-cation réelle dans le moteur, il pourra s’écou-ler dix à quinze ans. Nous menons aussi

Installé aux portes du Futuroscope de Poitiers, l’Ensma est une école d’ingénieurs généraliste orientée vers l’aéronautique et l’énergie. Elle forme 150 ingénieurs par an qui seront à même de travailler dans des bureaux d’études, des centres R&D et d’essais. 50 % d’entre eux sont recrutés dans le domaine de l’aéronautique et du spatiale. Ils font notamment partie des équipes de conception des moteurs ou des structures des avions. 25 % des débouchés concernent l’énergie et les transports terrestres avec une tendance forte vers le secteur de l’énergie étant donné la situation économique actuelle.

L’Ensma en bref “Le développement durable est devenu un problème d’affichage.”

Francis Cottet souligne que les chercheurs exploitent les capteurs aux extrêmes limites de l’existant : « ils cherchent donc toujours la perle rare. Par ailleurs, ils s’intéressent de plus en plus aux mesures non intrusives. Ils s’orientent donc vers des méthodes optiques. »

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des recherches qui donnent des résultats sur deux ou trois ans. Il y a vraiment très peu de recherche qui démarre à l’école sans besoin industriel exprimé ni but applicatif.

Mesures. Vous ne menez donc pas de recherches fondamentales dans les labo-ratoires de l’Ensma ?Francis Cottet. Il en existe quelques-unes toutefois. Dans le laboratoire énergétique, un de nos chercheurs, qui a obtenu la médaille d’argent du CNRS, travaille sur la théorie des flammes. Cela peut paraître éloigné de la pratique mais ses travaux servent à modéliser la propagation des incendies dans un im-meuble, dans un avion, une voiture ou tout volume spécifique. Ses travaux ne reposent pas sur des besoins industriels immédiats mais ils sont tout de suite utilisés par les autres pour faire de la modélisation de pro-pagation de flammes selon leurs besoins. Ces chercheurs sont peu nombreux mais leurs travaux sont extrêmement importants car ils nourrissent ceux qui sont un peu plus près de l’applicatif.

Mesures. Quelles sont aujourd’hui les thé-matiques de recherche les plus en vogue ?Francis Cottet. C’est évidemment le déve-loppement durable. Le conseil régional de Poitou-Charentes a mis en avant cette thé-matique. Jusqu’alors, il avait tendance à se diriger vers des laboratoires qui traitaient directement d’énergie et des économies d’énergie. Mais nous avons réussi à faire comprendre que les travaux de laboratoire de l’école concernent tout autant le dévelop-pement durable. Ils visent à réduire la con-sommation d’énergie, le bruit et la pollution dans le domaine de l’aéronautique. Car

aucun industriel ne développe une nouvelle génération d’équipement qui soit plus lourd, qui consomme plus et qui pollue plus que la précédente. Nos recherches vont donc ici dans le sens du développement durable. Ce n’est pas immédiatement perceptible car on travaille sur des machines qui sont intrinsè-quement polluantes, lourdes et qui font du bruit. Mais nous faisons tout pour réduire toutes ces nuisances.

Mesures. Les recherches de l’école s’inté-ressent-elles au secteur automobile ?Francis Cottet. Bien entendu, elles concer-nent l’automobile, le ferroviaire et les trans-ports terrestres en général. On dispose ici d’une très grande soufflerie avec des vents apparents jusqu’à 300 km/h. Elle autorise le test de l’aérodynamisme des voitures ainsi que leur niveau de bruit. On y a même testé l’aérodynamisme de voiles de bateaux de course et de skieurs de l’Equipe de France !

Mesures. Vous soulignez que les recherches menées par les laboratoires de l’Ensma concernent, depuis longtemps et par bien des aspects, le développement durable mais, jusqu’à présent, vous ne leur colliez pas cette étiquette ?Francis Cottet. Effectivement. C’est devenu un problème d’affichage. Vaut mieux dire que l’on travaille dans le sens du développe-

ment durable que pour la réduction de consommation d’énergie. Les industriels communiquent sur cette thématique pour vanter leur produit alors qu’ils travaillent depuis toujours à l’allégement des véhicules et à la diminution de leur consommation. Dans les laboratoires de recherche, on doit faire aujourd’hui de même pour accéder à des financements comme ceux du conseil régional ou de l’Etat notamment. Cependant, on n’a pas eu de difficultés à être crédible puisque l’on s’intéressait déjà à cette théma-tique.

Mesures. Comment se fait l’interface entre les laboratoires de votre école et le monde industriel ?Francis Cottet. C’est une des premières dé-cisions que nous avons prise lorsque j’ai été nommé directeur de l’Ensma, en octobre 2008 : créer un service innovation et com-munication. Ce dernier est chargé de la com-munication pour la recherche mais égale-ment de mettre en place une interface entre les laboratoires et les industriels. C’est une demande forte de la part de nos laboratoires qui sont extrêmement sollicités. Sur des gros contrats, ils auront besoin pendant deux ou trois ans de ressources humaines importantes et surtout très qualifiées (niveau doctorat). L’idée est de créer une structure de mutua-lisation de ressources humaines et matérielles pour que les laboratoires répondent mieux aux sollicitations. Elle sera mise en place à la fin de l’année. Cette structure de type asso-ciative, qui existe déjà ailleurs, sera au service des laboratoires de l’école mais aussi des autres laboratoires universitaires qui tra-vaillent dans les mêmes domaines que les nôtres, soit une dizaine de laboratoires. Elle

s’intéressera aux groupes industriels d’en-vergure nationale mais s’adressera aussi aux PME/PMI de la région qui jusque-là n’avaient pas de point d’entrée aux laboratoires de recherche.

Mesures. L’offre de capteurs disponible sur le marché est-elle en adéquation avec vos besoins de recherche ?Francis Cottet. Au niveau de la recherche, on exploite forcément les capteurs aux extrêmes limites de l’existant en termes de conditions d’utilisation. On cherche donc toujours la perle rare qui va monter plus haut en température, qui sera plus rapide ou encore plus légère, que l’on peut introduire dans un endroit spécifique… Un capteur qui répond exactement aux besoins du cher-cheur n’existe pas. Ce dernier va opter pour le capteur le plus proche de ses exigences et il va l’adapter. Mais comme les chercheurs connaissent très bien la physique, ils sont souvent capables d’employer les capteurs en dehors de leur plage de fonctionnement.

Mesures. Quelles sont, pour vous, les évo-lutions les plus marquantes concernant l’instrumentation employée dans vos laboratoires ?Francis Cottet. Les chercheurs souhaitent de plus en plus réaliser des mesures non intru-sives. Ils s’orientent donc vers des méthodes optiques. Ces dernières ont fait un bond énorme depuis dix à quinze ans. On préfère filmer, regarder… plutôt que d’installer un capteur sur l’équipement. Des systèmes laser pour mesurer des températures ou encore des vitesses, les laboratoires en possèdent tous en nombre. Auparavant, on assemblait des systèmes de mesure optiques à partir de différents composants (laser, lentille, etc.). Il pouvait se passer six mois avant que l’outil soit réellement efficient. Désormais, ces solu-tions se trouvent dans le commerce de ma-nière intégrée. Pour le chercheur, c’est un rêve. Il se fait livrer un vélocimètre laser et quinze jours après il collecte ses premières mesures. L’intégration de capteur non intru-sif de type optique est une petite révolution. On a fortement facilité l’utilisation des cap-teurs tout en améliorant leurs qualités et leur emploi immédiat.

Mesures. L’instrumentation optique a beaucoup progressé mais est-elle à la por-tée de toutes les bourses ?Francis Cottet. Le prix n’a pas réellement pour nous la plus grande importance. Je dirai entre guillemets que la préoccupation prin-cipale de la recherche n’est pas l’aspect fi-

nancier, mais plutôt les moyens humains. On ne dispose évidemment pas de crédits infinis mais lorsque l’on doit mener une expéri-mentation, ce n’est pas sur le capteur que l’on va chercher à réaliser des économies car on veut vraiment collecter la mesure que personne n’est parvenue à obtenir pour comprendre un phénomène physique par-ticulier. On mettra donc les moyens néces-saires pour cela. Chaque année, des millions d’euros sont investis pour l’instrumentation des laboratoires. Ce sont, au sein des labora-toires, que l’on trouve le matériel de mesures dernier cri.

Mesures. Sur quels autres aspects les cap-teurs ont-ils également progressé ?Francis Cottet. Les temps de réponse de tous les capteurs ont bien évolué. Aussi bien dans l’industrie que dans la recherche, on sou-haite réaliser des mesures instantanées car on surveille des phénomènes évolutifs et transitoires, sauf peut-être en thermique où les évolutions sont plus lentes. Le capteur et son électronique ont fait des progrès de ce point de vue. Leur miniaturisation est égale-ment remarquable.

Mesures. L’interchangeabilité des capteurs est-elle, pour vous, une caractéristique importante ?Francis Cottet. En recherche et en enseigne-ment, ce n’est pas l’aspect qui nous intéresse le plus. Mais dans l’industrie, c’est important car il faut pouvoir changer un capteur dans une boucle de contrôle-commande sans avoir à la reparamétrer afin de ne pas perdre de temps.

Mesures. Les solutions de mesures s’ap-puyant sur des moyens de communication sans fil présentent-elles un intérêt dans vos laboratoires ?Francis Cottet. Dans les laboratoires de recherche, on est souvent dans un environ-nement extrêmement bruité électromagné-tiquement. Ce qui peut présenter une con-trainte pour la communication sans fil. Les techniques d’aujourd’hui s’en accommo-dent sans doute mais ce ne sont pas chez nous des techniques très développées. En général, on doit faire face à des contraintes mécaniques et thermiques et des ambiances agressives fortes. Dans ces conditions, le cap-teur est très sollicité, donc pour l’instant nous sommes restés sur des technologies filaires exploitant un câble suffisamment blindé.

Propos recueillis par Youssef Belgnaoui

KEYENCE

“Un capteur qui répond exactement aux besoins du chercheur n’existe pas.”

Francis Cottet constate que les méthodes optiques ont fait un bond énorme depuis dix à quinze ans : « des systèmes laser pour mesurer des températures ou encore des vitesses, les laboratoires en possèdent tous en nombre ».

Poly

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