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La Turquie aux portes de l’ Europe pages 8 à 13 france-catholique.fr 85 e année - Hebdomadaire n° 3179 - 18 septembre 2009 3 FRANCE Catholique ISSN 0015-9506 Charles I er , le dernier empereur pages 18 à 21 La Théologie politique est à la mode pages 22 à 23

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La Turquie aux portes de l’Europe pages 8 à 13

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85e année - Hebdomadaire n° 3179 - 18 septembre 2009 3 €

FRANCECatholiqueIS

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9506

Charles Ier,le dernier empereur pages 18 à 21

La Théologie politique est à la mode pages 22 à 23

FrancePOLITIQUe : En Île-de-France, J.-P. Huchon (PS), président de la région depuis 1998, condui-ra la liste opposée à celles de Valérie Pécresse (UMP) et de Cécile Duflot (Verts).Publié le 9 septembre, un ouvrage de deux journalistes d’Europe 1 intitulé : Hold-ups, arnaques et trahisons, soutient que des bourrages d’urnes ont

eu lieu en faveur de la maire de Lille pour le poste de pre-mier secrétaire du PS. Ségolène Royal envisage de porter l'af-faire devant la Justice.FIscaLITé : Le chef de l’État a inauguré la « fiscalité verte » le 10 septembre dans l’Ain ; la taxe carbone sera intro-duite d’une manière progres-sive avec un prix de départ de 17 euros la tonne de CO2 ; elle sera compensée par une réduction de l’impôt sur le revenu ou un chèque vert pour les non imposables.enTrePrIses : Tous les sites tertiaires de Renault ont été fermés le 11 septembre dans le cadre des décisions de chô-mage partiel ; il en sera ainsi tous les vendredis jusqu’à la fin de l’année.Après 28 suicides de salariés en 18 mois, France Telecom a pris le 10 septembre des me sures contre le stress au travail et suspendu les res-tructurations.

POLIce : Des centaines de policiers et gendarmes pour-suivaient le 10 septembre leurs recherches près de la forêt d’Othe dans l’Yonne pour retrouver J.-P. Treiber, prin-cipal suspect dans l’affaire Giraud et évadé de la prison d’Auxerre en se cachant dans un simple carton emporté par un camion.MaLTraITance : Les parents de la petite Marina (8 ans) ont reconnu les mauvais traite-

ments infligés à leur fille por-tée disparue le 9 septembre et dont le corps a été retrouvé dans un entrepôt.PLaceMenTs : La Bourse étant rassurée sur les pers-pectives de reprise, le CAC 40 a franchi pour la pre-mière fois cette année le 9 septembre le seuil des 3 700 points. Selon la Chambre des notaires, la baisse s’accentue partout dans l’immobilier en Île-de-France. IMMIGraTIOn : Le ministre de l'Immigration Éric Besson a annoncé le 13 septembre qu'il ne signerait pas le décret d'application des tests ADN destinés à vérifier la filiation de candidats à l'immigration au titre du regroupement fa milial. Cette législation lui semble inapplicable. Il a reçu, le soutien du Premier ministre, mais les députés de l'UMP protestent contre la non application de la loi qu'ils ont votée.

MOndeBrésIL : Lors de son voyage au Brésil, le 7 septembre der-nier, on disait que le président français avait convaincu les Brésiliens d'acheter l'avion de combat Rafale construit par Dassault. Mais les négocia-tions continuent.eUrOPe : Le Premier ministre François Fillon se serait posé en recours pour diriger la Commission européenne en cas d’échec de J.-M. Barroso.La Cour de justice européenne a jugé légitime le 8 sep-tembre la volonté d’un État de conserver le monopole des jeux d’argent.éLevaGe : Face à la chute des cours du lait, les organismes européens de défense des éle-veurs menaçaient le 10 sep-tembre de lancer une « grève du lait » ; le mouvement a dé marré ce jour-là dans le nord et l’ouest de la France, mais ne touchait que 25% des producteurs.OTan : Ancien patron de l’ar-mée de l’air française, le géné-ral Stéphane Abrial est le pre-mier militaire non américain à prendre la tête d’un des deux commandements suprêmes de l’Alliance atlantique.esPace : Le télescope spatial Hubble, réparé et amélioré, transmet des images specta-culaires de galaxies lointaines.chIne : Face aux ravages pro-voqués par la pollution indus-trielle, « les émeutes vertes » se multiplient.

aFGhanIsTan : Alors que le dépouillement des bulletins de vote paraissait conduire à la réélection d’Hamid Karzaï dès le premier tour de la pré-sidentielle, la Commission des plaintes, organisme indépen-dant présidé par un Canadien, a ordonné le 8 septembre le recomptage des bulletins en raison de fraudes massives.GaBOn : Les chefs de l’oppo-sition ont appelé le 11 sep-tembre à trois jours de « ville morte » pour protester contre « le coup d’État électoral » d’Ali Bongo à la présidentielle du 30 août.sOUdan : La journaliste Loub na Ahmed al-Hussein, incarcérée pour avoir porté un pantalon, a été libérée le 8 septembre ; elle risquait 40 coups de fouet et avait refusé de payer une amende de 200 €.IsraËL : L’Israélien Samuel Maoz a rem porté le 12 sep-tembre le Lion d’or du festi-val de Venise pour son film Lebanon qui montre les hor-reurs de la guerre au Liban en 1982.TUrQUIe : Après les pluies les plus violentes qu’Istanbul ait connues depuis 80 ans, on déplore 33 victimes et des dégâts considérables.BeLGIQUe : Les directions de 700 établissements scolaires publics de langue flamande ont opté le 11 septembre pour une interdiction générale du port du voile à l’école.

J.L.

BrÈves

2 FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009

sOMMaIre

acTUaLITé 4 POLITIQUe Bazar à gauche Alice Tulle 5 POLITIQUe Buzz destructeur Serge Plenier 6 sOcIéTé avortement : fuite en avant Tugdual Derville 7 PrOche-OrIenT L'impasse libanaise Jean Étèvenaux

cheMIns

10 TUrQUIe aux portes de l'europe Corine Lacrampe / Noak - Le Bar Floréal

esPrIT 14 eccLésIa Philippines

15 MéMOIre des JOUrs chemin d'éternité Robert Masson 16 POInTs sPI 25e semaine ordinaire Père Michel Gitton

MaGaZIne 18 hIsTOIre L'empereur de la dernière chance Philippe Delorme 20 Zita sera-t-elle béatifiée ? Jean Sévillia / Ph.D. 22 Idées La médiation chrétienne en question Bernard Bourdin / Alexandre Da Silva 25 Idées chroniques à rnd Gérard Leclerc 27 drOIT de réPOnse Maritain et La salette Jean Stern 28 FeUILLeT0n B.d. Les indices pensables Brunor 30 exPOsITIOns renaissance du Musée Gadagne Alain Solari 32 LIvres sélection de romans Brigitte Clavel 33 cInéMa "L'armée du crime", "Julie et Julia" "The september issue", "district 9" Marie-Christine d'André 34 ThéâTre "La trilogie de la villégiature" Pierre François 35 TéLévIsIOn "La chute", "Le petit vieux des Batignolles", "aurélien" "valse avec Bachir" M.-C. d'A. 36 TéLévIsIOn sélection début de soirée M.-C. d'A. 38 BLOc-nOTes vie associative et d’église Brigitte Pondaven

Couverture : © Noak / Le Bar Floréal

On me permet tra de reprendre la thématique du petit livre que je viens de publier à propos de l'initiative de notre pape Benoît XVI pour renouer le dialogue avec la Fraternité Saint-Pie X. Le Saint-Père vient de nommer trois théologiens très compétents à cet effet et le car-

dinal Christoph Schönborn, archevêque de Vienne, a prévenu de l'imminence des premières rencontres. Tout n'est pas négociable, a rappelé le cardinal, car il n'est pas concevable que l'Église catholique renonce à la conception de la liberté religieuse rati-fiée par Vatican II. Il n'est pas non plus envisageable d'abandon-ner les relations nouvelles que l'Église a nouées avec les autres religions, singulièrement le judaïsme.

Est-ce à dire que le dialogue serait compromis dès le départ ? Ce n'est pas parce qu'un dialogue s'avère difficile qu'il ne doit pas être tenté. Cette ouverture dont nous nous targuons avantageusement dès lors qu'elle concerne jusqu'aux plus lointains de nos partenaires religieux, connaîtrait-elle cette seule exception d'un intégrisme catholique insupportable et inadmissible ? Benoît XVI a eu le courage de montrer à propos de la liturgie que c'est l'ensemble de l'Église qui trouvait un intérêt supérieur à la coexistence des rites. L'attachement à la liturgie tridentine pouvait donc être autre chose qu'une crispation anachronique et une fermeture à la réforme. Les deux rites pou-vaient mutuellement s'enrichir et les catho-liques, fidèles de la messe de Paul VI, approfondir leur médita-tion et leur pratique pour mieux entrer dans l'action liturgique.

De même, il est possible d'envisager autrement les questions de la liberté religieuse et du dialogue interreligieux. Les pré-ventions et la colère de Mgr Marcel Lefebvre à l'encontre du rassemblement d'Assise avaient quelque chose de blessant pour Jean-Paul II, dont la foi même était ainsi mise en cause, ce qui relevait d'un inadmissible procès d'intention. Mais les griefs traditionalistes à l'encontre d'un possible syncrétisme et d'un relativisme croissant n'étaient pas tous dénués de fondement, eu égard à bien des dérapages et à un étrange déni de la notion de vérité jusque dans des milieux théologiques allergiques à ce qu'on appelait « le retour des certitudes ». Le cardinal Ratzinger, avec l'appui de Jean-Paul II, fut contraint de remettre les pendules à l'heure avec l'instruction Dominus Jesus, qui rappelait que le Christ est l'unique sauveur du monde.

C'est pourquoi il convient d'accueillir les rencontres annon-cées comme une chance pour toute l'Église. La tâche n'est pas facile, mais le dialogue œcuménique nous a appris à affronter en commun les débats les plus délicats. Au demeurant, les lefeb-vristes se veulent défenseurs de toute la tradition de l'Église et de tous ses dogmes sans exception. C'est tout de même un acquis précieux, même si la compréhension de Vatican II devrait les ouvrir à une autre conception de la Tradition, plus dégagée des polémiques exclusives du XXe siècle. En tout état de cause, il faut prier pour que l'unité de la grande Église sorte renforcée de l'initiative du Saint-Père. n

difficile dialogueédITOrIaL

par Gérard LECLERC

FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009 3

Écoutez aussi la chronique de Gérard Leclerc,

chaque semaine sur :

Du lundi au jeudi, Gérard Leclerc intervient en direct sur

Radio Notre-Dame à 8 h 05

ACTUALITÉ

Fin août à Marseille, l’appel à une « al liance démocrate, sociale et écologique » lancé par Marielle de Sarnez

(Modem), Daniel Cohn-Bendit (Verts) et Vincent Peillon (Parti socialiste) avait fait grand bruit. Martine Aubry avait calmé le jeu à La Rochelle mais François Bayrou a relancé la partie le 6 septembre lors de l’université d’été de son parti : il fait une « offre publique de dialogue sans aucune condi-tion et sans exclusive » à toutes les formations de l’op-position.

Cette déclaration solen-nelle a eu un grand retentis-sement mais, pour l’heure, elle sonne creux. En réponse aux questions posées par Martine Aubry sur la stratégie pour les régionales et sur le programme du Modem, François Bayrou a répondu qu’il excluait « toute initiative locale pour impo-ser une stratégie unique et coordonnée » face à l’UMP pour ces élections. Quant aux éclaircissements demandés sur le programme du Modem, la réplique de François Bayrou a été d’une grande séche-resse : « Je n’ai aucune preuve à faire, vous n'êtes pas char-gée de contrôler les papiers, de faire rentrer tout le monde dans le rang. Il n'y a pas de surveillante générale. »

Pour l’élection présiden-tielle, l’accord sur un candi-

dat unique au premier tour est hors de question : Martine Aubry espère que le candidat socialiste arrivera en tête et que le chat socialiste ne fera qu’une bouchée de la souris centriste ; François Bayrou espère quant à lui devenir le premier des opposants à Nicolas Sarkozy et avaler les débris du principal parti de gauche. De fait, François Bayrou ne peut vaincre que

si le Parti socialiste, miné par la guerre des courants, se décompose à la suite d’une nouvelle défaite à la présiden-tielle.

Le pari de la souris assez grosse pour manger des morceaux de chat est osé car une partie de l’électo-rat centriste ne suivra pas François Bayrou dans sa tactique de dialogue avec la

gauche. D’ailleurs, l’UMP s’est déclarée prête à accueillir les militants et les électeurs du Modem qui seraient débous-solés. Quant aux socialistes, ils sont divisés sur la question des alliances et le font savoir tant et si bien que la « reprise en main » de l’appareil par Martine Aubry n’a pas duré plus d’une semaine. De fait, Patrick Devedjian (LUMP) n’a pas tort de dire que François

Bayrou « met le bazar » chez les socialistes.

Dans le camp des socia-listes sceptiques ou hostiles à une alliance, on compte Benoît Hamon, porte-parole du Parti socialiste et Jean-Christophe Cambadélis, qui est actuelle-ment proche de Martine Aubry et qui dénonce ironiquement un « mirage à gauche ». Au contraire, Manuels Valls, à la

droite du Parti socialiste, est d’accord pour discuter d’un « contrat présidentiel » avec François Bayrou et Ségolène Royal s’est déclarée « dispo-nible » pour une discussion avec le président du Modem. L’ancienne candidate à la présidence de la République a rappelé qu’elle avait toujours dit que l’alternance se ferait avec les centristes et plaidé pour une « convergence des forces progressistes ».

Le Parti socialiste est donc nettement divisé entre une aile droite, qui souhaite une alliance avec les centristes et une aile gauche tradition-nelle : cette dernière veut maintenir l’alliance avec les communistes et s’inquiète de l’attraction exercée par les dissidents du Parti de Gauche animé par Jean-Luc Mélenchon. Les primaires vont durcir le conflit entre les deux tendances, ce qui fera l’affaire de François Bayrou.

Dans cette partie qui s’en gage, les socialistes de gauche ont souligné le flou du programme du Modem en omettant de dire que le Parti socialiste était depuis des années en panne de projet. La tactique va l’em-porter une fois de plus sur les principes, ce qui ne sera pas du goût de maints élec-teurs. Mais les stratèges centristes et ceux de la droite socialiste pensent sans doute que l’anti-sarkozysme suffira à fédérer une majo-rité de mécontents. Comme si le mythique « Programme commun » avait compté pour rien dans la victoire du candi-dat de l’Union de la gauche en 1981. n

PS-ModeM

La tactique va l'emporter une fois de plus sur les principes

par Alice TULLE

(

Le projet d’alliance entre les socialistes et François Bayrou, c’est le jeu du chat et de la souris. Mais personne ne peut encore dire qui sera le chat et qui, la souris.

Bazar à gauche

4 FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009

ACTUALITÉ

FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009 5

Brice hortefeux est aujourd’hui sur le banc des accusés du grand tribunal médiatique.

Son crime ? Quelques mots extraits d’une conversation, plus ou moins audible, enre-gistrés au cours de l’université d’été de l’UMP à Seignosse : « Il en faut toujours un. Quand il y en a un, ça va. C'est quand il y en a beaucoup qu'il y a des problèmes. » La phrase semble concerner les personnes d’origine maghré-bine, sans que cela soit d’ailleurs bien net (d’origine maghrébine ? musulmans ? immigrés ?). Le contexte de la phrase litigieuse paraît celui d’un moment décontracté et convivial à l’issue des travaux et des discours. Un jeune mili-tant UMP maghrébin en est la vedette. On se congratule de sa présence, on plaisante sur sa grande taille, et les choses dérapent plus ou moins sans que le militant en question ne s'en offusque.

Sur internet et à la radio, il prendra même la défense du ministre de l'Intérieur en affirmant que, dans son contexte, la phrase incriminée voulait dire autre chose que ce que des esprits mal inten-tionnés ont voulu entendre, la discussion plaisante étant partie du fait que quelqu'un aurait mis Brice Hortefeux en boîte « parce qu'il parle auvergnat… »

Ce qu'on entend sur le fi lm ressemble pourtant

bien à des plaisanteries douteuses et les phrases du même acabit, prononcées par les autres membres du petit groupe ainsi filmé, dont Jean-François Copé, sont d'un niveau médiocre, peu respec-tueux des militants, aurait fait remarquer le Président Sarkozy lui-même quelques jours plus tard. En ce qui concerne l'humour politique, n'est pas André Santini ou Jean-Claude Gaudin qui veut.

Le malheur a voulu qu’une caméra soit passée par là et que ces images, refusées, a-t-on dit, par la chaîne parlementaire à laquelle elles étaient destinées, aient circulé sur Internet, provo-quant ce que l’on appelle un « buzz » (en anglais « bour-donnement »), c’est-à-dire

une sorte de rumeur provo-quant des réactions courrou-cées.

On ne cherche pas à approfondir l’information, ni à connaître les circonstances du propos : l’indignation est obli-gatoire et l’anathème auto-matique. La condamnation est immédiate, d’autant plus immédiate qu’il s’agit d’un ministre considéré comme emblématique de la politique du gouvernement en matière

d’immigration. C’est ainsi qu’à partir d’une simple « vanne », certains veulent aujourd’hui faire traduire Brice Hortefeux devant la Cour de justice de la République, tandis que d’autres lancent une pétition pour sa démission. Nous en sommes arrivés au degré zéro de la polémique politicienne.

On peut ne pas approuver, et même contester la poli-tique du ministre de l’Inté-rieur. L’accuser de racisme est tout simplement indigne. Que celui qui n’a jamais entendu, ou formulé, une plaisanterie de ce genre, lui jette la première pierre. De tels propos fourmillent, aussi bien à gauche qu’à droite, en Europe que de l'autre côté de la Méditerranée, et on n'en fait pas d'habitude un tel plat.

F ranço i s Mi t te r rand ne plaisantait pas lorsqu’il parlait, en décembre 1989, de « seuil de tolérance », pas plus que Michel Rocard qui, en 1996, rappelait que la France « ne peut accueillir toute la misère du monde » (en ajoutant cependant : « Mais elle doit savoir en prendre fidèlement sa part »). Plus récemment, les bonnes consciences s’en sont prises à Manuel Valls. *

Tous ces hommes de gauche sont-ils, ou ont-ils été, des suppôts du fascisme ? Les bien-pensants restent vigilants, mais aujourd’hui leur vigilance ressemble furieusement à de la para-noïa, à moins, et ce serait pire, qu’elle ne manifeste que l’avilissement du débat démocratique. n

* ...qui, lundi dernier, expliquait aux auditeurs de Radio Notre-Dame, qu'à l'heure des téléphones portables qui filment, d'Internet et de Facebook… un homme politique devait toujours être irréprochable en paroles et en images, même dans son quartier, même devant ses enfants. Certes !

dRoITe

Nous en sommes arrivés au niveau zérode la polémique politicienne )

Le préfet soupçonné d'avoir tenu, dans un aéroport, des propos à la limite du racisme a été mis à la retraite par sonministre. Mais celui-ci s'est laissé piéger à son tour.

par Serge PLENIER

Buzz destructeur

ACTUALITÉ

Il y avait la pilule du lendemain, ou NorLevo. Voilà qu’est annoncée celle du surlendemain, nommée EllaOne. Le

feu vert doit venir d’une agence européenne le 24 septembre.

L’EllaOne est précisément une pilule des cinq jours qui suivent une relation sexuelle.

Son fabricant le labora-toire HRA pharma vante son rôle contraceptif, c'est-à-dire empêchant la concep-tion. La durée de vie des spermatozoïdes étant de cinq jours, un produit anti-conceptionnel peut effecti-vement intervenir après la relation sexuelle, tant que l’ovulation n’a pas eu lieu, pour la bloquer.

HRA pharma se fait plus évasif sur un autre effet de son nouveau produit : son impact abortif. Dans le cas où un embryon aurait déjà été conçu au moment de sa prise, l’EllaOne empêcherait sa gestation (ou implanta-tion dans la paroi utérine) et provoquerait donc la suppression d’une vie.

Pet i t rappe l : cet te implantation intervient naturellement après les 6 premiers jours de notre vie, au cours desquels l'embryon migre du lieu de sa concep-tion (les trompes) vers la paroi utérine.

Les spécialistes notent

que les principes actifs de l’EllaOne sont proches du RU486, la pilule abortive. Mais pourquoi l’effet abortif de la pilule du surlendemain est-il passé sous silence ?

L’avortement est bien la suppression délibérée d’une vie humaine à n’importe quel moment précédant la nais-sance. Mais en France, tout est fait pour dissimuler que l’usage des produits « contra-gestifs » (comme le stérilet) peut entraîner la suppression de vies. Par un tour de passe-passe, le législateur a même choisi d’intégrer les produits qui empêchent la nidation de l’embryon à la législation sur la contraception.

Tout cela arrange HRA pharma. Taxer son nouveau produit d’abortif le mettrait en difficulté puisque ses pilules du lendemain et maintenant du surlendemain sont présentées comme une façon d’éviter l’avortement, qu’il soit médicamenteux (par RU 486) ou chirurgical. On insiste donc sur le carac-tère inhibiteur de l’ovulation de l’EllaOne.

Le docteur Marc-Alain Rozan, président du syndicat national des gynécologues et obstétriciens se borne à affirmer pour La Croix que la nouvelle pilule « peut induire des modifications au niveau de la muqueuse utérine ». Le Figaro rapporte même

que le directeur des opéra-tions d’HRA pharma laisse entendre qu’EllaOne pour-rait soigner des maladies utérines. Lorsqu'on vante d'hypothétiques bénéfices sanitaires de son produit c'est souvent qu'on veut en dissimuler les inconvénients.

Bref, voilà qu’un nouvel avortement précoce et préci-pité se prépare à faire son entrée sur le marché, dans le déni et la confusion. Son fabricant utilise les voix du prétendu féminisme pour réclamer sa diffusion libre et son remboursement total. Cette collusion désormais classique du libéral et du libertaire va-t-elle faire fléchir les pouvoirs publics ?

Ils devraient plutôt tirer les leçons du NorLevo. La pilule du lendemain présen-tée à son lancement en 1999 comme « miracle » n’a aucunement fait baisser le nombre des avortements off iciel lement recensés (environ 220 000 IVG par an). Pendant qu’un million de boîtes de NorLevo étaient vendues chaque année et qu’un tiers des 15-24 ans affirmaient l’avoir utilisé, l’avortement officiel a crû de 9 % chez les mineures en 2006 (dernières données connues). Comme on l’a constaté pour le préservatif, la surenchère des méthodes de protection se traduit,

du fait de l’irresponsabilité qu’elle encourage, par des prises de risques croissantes et un résultat inverse de celui annoncé.

Avec l’usage de la pilule du lendemain NorLevo sont même apparues de nouvelles angoisses pour les femmes, à cause de l’incertitude sur son fonctionnement réel.

Le titre que le magazine Elle réserve à la pilule du surlendemain confirme une autre dérive : « Plus d’excuse pour les étourdies ». Voilà les femmes infantilisées, de plus en plus soumises à l’injonc-tion culturelle de maîtriser leur fécondité, de ne pas lais-ser naître celui qui n’est pas programmé.

C'est à tort que les statis-ticiens officiels classent les grossesses en « désirées » et « non désirées ». Ceux qui accompagnent des femmes qui connaissent une gros-sesse imprévue ou difficile constatent qu'elles balan-cent souvent entre le désir et la peur, deux sentiments qui coexistent ou alternent. Un enfant peut être succes-sivement souhaité, craint puis accueilli... Tout dépend largement de l'environne-ment qui peut protéger ou menacer. Les produits d'avor-tement précoce tendent à figer la situation en tradui-sant la peur par l'absence de désir, au lieu de proposer un accompagnement qui aide les femmes à s'autoriser à aimer et accueillir.

Combien de Français doivent pourtant la vie à une surprise ? Surprise plus ou moins bonne mais accueillie dans l'amour. n

AVORTEMENT

Des prises de risques croissantes etun résultat inverse de celui annoncé

par Tugdual DERVILLE

(

Délivré sur ordonnance au prix d'environ 50 euros, un petit cachet blanc à prise unique arrive dans les pharmacies européennes, sous le surnom de « pilule du surlendemain ».

Fuite en avant

6 FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009

FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009 7

Le 10 septembre , le Pre mier minist re pressenti, Saad Hariri, a solennel lement annoncé qu'il renon-

çait à former le gouvernement d'union nationale qu'il avait concocté pendant deux mois et demi. En effet, sa dernière proposition a été rejetée par le Hezbollah, le mouvement Amal et le Courant patrio-tique libre de Michel Aoun qui sont pour-tant demandeurs d'un tel gouverne-ment, mais à leurs conditions. La majo-rité, qui a emporté les élections légis-latives de juin, avec 71 des 128 sièges du Parlement contre 57 pour le camp mené par le Hezbollah, estimait avoir fait une concession de taille en acceptant à nouveau un droit de veto pour la mino-rité. Mais, manifeste-ment, trop d'intérêts se satisfont de la situation actuelle.

La plupart des observa-teurs parient que le président Michel Sleimane devra tôt ou tard à nouveau demander à Saad Hariri de tenter de se remettre à l'ouvrage. La situa-tion au Liban fait intervenir des acteurs à la fois locaux, régionaux et internationaux. Autrement dit, il faut prendre en compte les rapports inter-

libanais, toujours complexes, mais où la pratique du compromis relève d'une tradition vieille de soixante ans, ce qui se passe dans les pays voisins - en Israël comme dans les États arabes - et la conjoncture internationale.

Les deux camps étaient pourtant d'accord sur la

répartition des ministères : 15 à la majorité, 5 au prési-dent et 10 à la minorité. Mais il y a la nouvelle attitude du dirigeant druze, Walid Joumblatt, qui semble tenté par une sorte de cavalier seul qui lui permettrait de rejouer un rôle charnière dans l'in-

térêt de sa minorité confes-sionnelle. Quant au général Michel Aoun, passé du front commun des chrétiens à une subtile alliance avec le Hezbollah et la Syrie, il multi-plierait certainement moins les oppositions s'il était enfin reconnu comme un interlocu-teur va lable.

Toutefois, l'essentiel du problème se situe toujours du côté du Hezbollah : Hassan Nasrallah, toujours auréolé d'avoir contré Israël en 2006, continue à vivre dans une semi-clandestinité et à diri-ger une armée disposant de quelque 40 000 roquettes.

Comme par hasard, plusieurs ont été tirées le vendredi 11 dans l'après-midi à partir du sud du Liban, à 15 kilomètres d'Israël.

Pa r a i l l eurs , depu i s quelques mois, s'est ébau-ché un rapprochement entre l'Arabie saoudite et la Syrie, tandis que l'Égypte poursuit avec opiniâtreté sa médiation entre l'Autorité palestinienne censée diriger la Cisjordanie - tout du moins là où ne se sont pas développées les colonies

israéliennes - et le Hamas régnant sans partage à Gaza. Il ne faut enfin pas oublier u n c o n t e x t e régional marqué par deux grandes i n c e r t i t u d e s : d'abord, la poli-tique iranienne en matière nucléaire - où Israël voit un danger immé-diat - ainsi que son évo lut ion interne - durcis-sement, ouver-ture ou statu quo -, ensuite, l ' incapacité de Barack Obama (malgré les pro -pos apaisants du

président Shimon Peres le 14 septembre) à modérer les ardeurs colonisatrices d'Israël. Ce qui renforce les islamistes et extrémistes arabo-musul-mans. Sans oublier, il y a quelques jours, un voyage secret du Premier ministre Netanyahu en Russie. n

PROCHE-ORIENT

L'essentiel du problème se situetoujours du côté du Hezbollah

par Jean ÉTèVENAUX

)

Le Liban ne parvient pas à se doter d'un gouvernement, situation décourageante à l'image d'une région qui parle de paix tout en préparant le prochain embrasement.

L'impasse libanaise

ACTUALITÉ

Lors de sa visite en 2006, Benoît XVI qualifia la Turquie de pont entre les religions prenant plaisir à citer Ata-türk, père de la nation et de la laïcité, qui était fier de « cette terre, point de rencontre et carrefour de diverses re-ligions et cultures, charnière de l’Asie

et de l’Europe ». Le Saint-Père devait rencontrer, comme le fit Jean-Paul II en 1979, le patriarche orthodoxe Bartholoméos Ier de Constantinople. Un pas de plus vers l’unité des Chrétiens. Mais la ve-nue du Saint-Père dans un pays où idéologie mu-sulmane et idéologie laïque tentent de cohabiter,

qui plus est postulant à l’Union européenne, fut chargée d’autres significations. Le premier mi-nistre Recep Tayyip Erdogan, islamiste démocrate, ne manqua pas d’accueillir le souverain pontife à son arrivée à Ankara comme une preuve vivante d’un soutien du Vatican à l’entrée de la Turquie dans l’Europe, même si le Pape ne formula pas la chose aussi directement. Toutefois, durant son sé-jour Benoît XVI, souligna à plusieurs reprises le fait que la Turquie est un pays islamique démocratique donc une passerelle précieuse entre l’Europe et l’Asie, entre le monde chrétien et le monde mu-sulman. Voici bien toute la richesse et l’ambiguïté de ce pays, que l’Europe fait languir, avec sa po-sition si particulière : carrefour, charnière, creuset de rites chrétiens et de religions, lieu privilégié du dialogue islamo-chrétien malgré tant de souvenirs douloureux et de pressions et même persécutions encore actuelles, et pas seulement de la part de fanatiques plus ou moins manipulés.

En Turquie, des hommes et des femmes, chré-tiens ou musulmans, travaillent à la réconciliation, à la connaissance et la compréhension mutuelles. Les chrétiens de Turquie sont aujourd’hui parmi les acteurs principaux du dialogue islamo-chrétien, engagés dans des échanges fondamentaux. Et se rencontrent universitaires et religieux, étudiants et simples fidèles, musulmans curieux de théolo-gie chrétienne, chrétiens soucieux de comprendre l’islam. Le frère franciscain Gwénolé Jeusset, curé de Saint-Louis des Français, à Istanbul, depuis 2003, a amorcé ce dialogue en Côte d’Ivoire voici déjà 40 ans : « Il reste encore à sortir de l’esprit de croisade et à entrer vraiment dans celui d’Assise, c’est-à-dire surmonter nos peurs, nos méfiances et nos intégrismes, écouter l’autre, le recevoir et ne jamais parler de lui sans avoir d’abord cheminé avec lui. » Et d’évoquer la rencontre de Damiette, sur les bords du Nil, en 1219, en pleine croisade, entre saint François d’Assise et un Sultan d’Égypte. Un événement source. En 1983, le frère Gwénolé fut nommé à la commission internationale fran-ciscaine pour les relations avec l’islam. Membre de la commission du Vatican pour l’islam, de 1988 à 1993, il fut responsable des relations avec l’is-lam pour les évêques de France, de 1997 à 2000.

CHEMINS

Comme la Russie, que nous visitions il y a 15 jours avec le Père de Laubier, la Turquie est à cheval sur l'Asie et l'Europe, mais avec l'ambition de faire partie de l'Union européenne. Ce qui réjouit les chrétiens de Turquie, mais peut poser question à ceux du reste de l'Europe. Alors qu'Istanbul a été choisie comme « capitale culturelle de l'Europe » pour l'année 2010 et qu'a commencé en France une « Année de la Turquie » (juillet 2009-mars 2010) répondant à « l'Année de la France » qui eut lieu en Turquie en 2006…

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VOYAGES La Turquie aux portes de l’Europe

Cheminer avec

l’autrepour

comprendre

Textes : Corine LaCrampephotos : Noak/Le bar FLoréaL

Place et rue Taksim, à Istambul.

Aujourd’hui, il poursuit sa quête, s’occupe de pastorale et de rencontres œcuméniques : « J’ai été initié après un coup de foudre pour un sage musulman du quartier populaire de Treichveille, à Abidjan. Nous avons cheminé, la bure et le bou-bou côte à côte, à la réconciliation. Je trouve choquant que des chrétiens viennent en Turquie en simple pèlerinage sur les traces de Saint Paul tout en pestant contre les musulmans, sans s’in-téresser à l’actualité du pays et à sa formidable évolution positive. Il faut sortir de nos murailles, dire la foi dans l’amour et le respect de l’autre. » Avec son gentil sourire et cette écoute profonde nourrie d’intelligence du cœur, Gwénolé chemine inlassablement, aussi proche du grand mufti que du patriarche des Arméniens, d’un derviche que du grand rabbin d’Istanbul.

Les frères dominicains sont arrivés à Galata, quartier gé-nois d’Istanbul, au XIIIe siècle. Lorenzo Piretto, frère d’origine italienne, réside dans leur mo-nastère depuis 25 ans. C’est un expert du dialogue isla-mo-chrétien reconnu jusqu’au Saint-Siège. Le monastère abrite le Centre de documen-tation dominicain d’Istanbul riche de dizaines de milliers d’ouvrages, sur l’empire otto-man, la République turque, le

dialogue islamo-chrétien, l’histoire de l’islam, les nouveaux penseurs de l’islam, sans compter la Bible dans toutes les langues. Mais c’est surtout pour son fonds ancien d’ouvrage sur le christia-nisme que la bibliothèque est consultée par de nombreux chercheurs. Fondateur de la revue pré-sence, bulletin de liaison de l’Église catholique de Turquie, le frère Lorenzo dit la messe en turc. Ce professeur de philosophie enseigne à la faculté de théologie islamique et anime un groupe de dia-logue sur l’œcuménisme : « Le bon Dieu travaille dans les cœurs. Nous sommes de simples passeurs pour aider les musulmans à connaître le christia-nisme à sa source. C’est important pour ne pas le diaboliser. Car il faut bien avouer que, si en Occi-dent, l’islam est parfois diabolisé, la réciproque est

vraie. On ne devrait pas parler de l’autre sans le connaître. Il y a de nombreuses similitudes entre nos deux religions : la charité, la sa-cralité de la vie, la spiritualité… »

Après 20 ans passés au Tchad, le très érudit père jésuite Patrice Jullien de Pommerol est arrivé à Ankara, en 2000, pour prendre en charge la paroisse Sainte-Thérèse. Depuis, il s’est attaché à apprendre le turc et à participer au dialogue interreligieux. Le père Patrice et les jésuites doctorants en islamologie qu’il accueille tis-

CHEMINS VOYAGES La Turquie aux portes de l’Europe

Desuniversitaires

pour ledialogue

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Père Patrice Jullien de Pommerolavec deux doctorants en théologie.

église troglodyte, Cappadoce.

sent des liens au niveau universitaire, particuliè-rement au sein de la faculté de théologie d’An-kara. Dès 1985, cette université avait demandé au Vatican de former des universitaires musulmans en théologie chrétienne. Les Jésuites reçoivent à Sainte-Thérèse de nombreux visiteurs : « Nous accueillons des curieux du christianisme et, par-fois… des musulmans souhaitant être délivrés d’un mauvais sort. Certains ensorceleurs se serviraient de matériel chrétien. Bien entendu, nous ne pou-vons entrer dans ces pratiques superstitieuses. On peut imaginer que celles-ci sont nées en Anatolie au cours des siècles de connivence entre islam et chrétienté. »

En marge de cette amitié précieuse avec les musulmans, la cohabitation des rites chrétiens est une richesse de la Turquie, berceau des pre-miers chrétiens. Il n’y a guère d’autres endroits au monde où les chrétiens se répartissent en une telle diversité de rites et ceci en dépit d’un effectif devenu symbolique. Certains voudraient rassem-bler des forces faiblissantes, d’autres s’attachent à sauvegarder jalousement des particularismes et des racines : orthodoxes grecs ou roumains, protestants, catholiques de rites latin, arménien, chaldéen, syrien ou grec… Le père François Yakan, vicaire général des Chaldéens de Turquie, célèbre la messe en araméen, dans la crypte de l’église St-Georges, à Istanbul. Les fidèles sont essentiel-lement des réfugiés irakiens, en attente d’un visa pour l’étranger. Après l’office, le père François re-joint l’église de la Ste-Trinité, à quelques centaines de mètres, où l’attendent d’autres fidèles. La Ste-Trinité se situe dans l’évêché de la communauté assyro-chaldéenne. L’église est grecque, le missel araméen, l’architecture byzantine. Le portrait de Sa béatitude Emmanuel Karim Delly, patriarche de Babylone des Chaldéens, chef de la communauté (un million de fidèles dans le monde dont 600 000 en Irak) qui réside à Bagdad, trône sur les murs de l’évêché. Prêtre diocésain, le père François, formé à l’institut catholique de Paris, se bat griffes et ongles pour ses ouailles. À la Préfecture, on l’ap-pelle gentiment « l’aumônier des oubliés ». Car il semble bien qu’il soit le seul, en dehors d’une poi-gnée de fidèles de bonne volonté, à s’intéresser au sort des Chaldéens de Turquie et à se battre pour obtenir autorisations et documents, faire va-loir des droits, retrouver une filiation. Il s’agit aussi d’animer deux écoles pour 260 enfants de réfu-giés, avec l’aide des salésiens de Don Bosco et de la Caritas turque, d’assurer les soins médicaux, un soutien psychologique, de trouver un logement : « C’est l’usine ! plaisante le père François. En Tur-quie il y a aura toujours des réfugiés, parce que la zone est stratégique. Il faudrait créer des struc-tures d’accueil et surtout trouver les moyens d’in-tégrer les réfugiés en Turquie afin qu’ils ne partent pas encore dans un troisième pays avec tout ce que cela comporte de traumatismes. Mais plus

CHEMINS

Mosaïque chrétienne

en terre d’islam

Père François Yakan, vicaire général des Chaldéens de Turquie.

Sanctuairemariald'éphèse.

Istanbul.

encore que l’État, c’est l’Église que j’incrimine… Les Chaldéens étaient tout de même les premiers chrétiens et on les oublie. C’est inadmissible ! » La mosaïque s'émiette-elle ? La visite du Pape est ve-nue à point nommé pour resserrer les rangs…

Seul le Bosphore sépare l’Europe de l’Asie. Et pourtant ! Quel chemin pour la Turquie jusqu’à l’intégration européenne… La Turquie a déposé sa première demande d’adhésion en 1987. Depuis, le pays a bouleversé ses traditions politiques, so-ciales, judiciaires, culturelles, et réformé son éco-nomie. Au cours des quinze dernières années, la Turquie s’est métamorphosée. Une armée plus discrète, une laïcité moins rigide, et trois fers de lance : modernisation, libéralisation, construction. À l’orée des villes, des centaines d’immeubles sor-tent de terre, et dans chaque nouveau quartier une mosquée. Le long des côtes s’alignent des ki-lomètres de lotissements de maisons individuelles de luxe. À travers tout le pays, des bulldozers tra-cent des routes et des autoroutes. En pleine steppe anatolienne poussent d’immenses usines textiles.

Toutefois hors de ces axes et de ces zones de développement, les villages vivent comme au Moyen Âge. Les femmes cuisent les galettes, les paysans travaillent la terre et les bergers condui-sent leurs troupeaux de moutons à travers les montagnes.

En Turquie même, l’Europe a deux ennemis, opposés et minoritaires : les nationalistes purs et durs et les islamistes purs et durs. La population, quant à elle, s’affiche à 75 % favorable à l’inté-gration dans l’Europe. Toutefois, les Turcs restent méfiants. La majorité est persuadée que même si la Turquie remplissait toutes les conditions re-quises, elle ne serait finalement pas admise dans l’Union. Quoi qu’il en soit, le désir d’Europe a bou-leversé irrémédiablement le pays, dans le sens de la démocratie et de la justice sociale. Et les Turcs ne voudraient pas faire marche arrière. Déjà en préambule aux négociations, la Turquie a concédé trois grandes réformes : abolition de la peine de mort, reconnaissance du fait kurde, aménagement du code civil.

Et, vu de Bruxelles, de quoi a-t-on peur ? Du déséquilibre engendré par l’arrivée d’un pays qui comptera 78 millions d’habitants en 2020, et se retrouverait le plus peuplé de l’Union. D’une éco-nomie locale encore dominée par les bas salaires, la persistance du travail au noir, la contrefaçon et la corruption. Avec la Turquie, l’Europe hérite-rait d’une frontière ouverte aux trafics et flux mi-gratoires illégaux. Il semble surtout que l’Europe a peur d’intégrer un pays de fidèles musulmans travaillés par des tentations totalitaires. Pourtant, l’Europe aurait géopolitiquement à gagner à in-

CHEMINS

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Turquie :unerichesse pourl’Europe ?

Istanbul.

Karaborum. Karaborum.

Istanbul. Istanbul.

tégrer la Turquie. L’intégration de la Turquie dans l’Union serait le garant de la stabilité d’une ré-gion stratégique, à la charnière du Proche-Orient et du Caucase par où transitent de nombreux ré-seaux d’alimentation en énergie (pétrole, gaz). La Turquie apporte dans la corbeille la jeunesse de la population. Est-ce un atout pour une Europe vieillissante ? Et un marché de consommateurs potentiels ? Quant à l’argument de l’islam, il ne tient pas beaucoup si l’on considère d’une part que le christianisme s’est propagé dans le monde de-puis cette terre, d’autre part que l’Europe compte déjà 12 millions de musulmans. Un des enjeux est de savoir si l’islam turc, à l’instar des autres re-ligions aujourd’hui en Europe, est en voie de dé-confessionnalisation et de sécularisation… Si la laïcité ombrageuse imposée par Atatürk n’a pas

eu raison de la religiosité des Turcs, en revanche, un nouvel ennemi d’Allah, plus pernicieux, fissure l’édifice : le matérialisme. En route vers l’Europe et entrant dans la société de consommation, la Tur-quie se prépare, sauf accident, des lendemains où les mosquées seront aussi désaffectées que nos églises. Faut-il y voir un élément favorable à l'in-tégration à notre système politique ? Et jusqu'où faudrait-il s'en féliciter ? n

CHEMINS

LA TurquIECarte d’identitéSuperficie : 776 000 km2, dont 3 % en Europe (une partie de la Thrace et Istanbul) qui abritent 20 % de la population.Population : 76 millions d’habitants.Nature du régime : république parlementaire.Chef de l’État : Ahmed Necdet Sezer.Premier ministre : Recep Tayyip Erdogan (AKP).Parti politique dominant : AKP, parti de la justice et du développement, formation islamiste modérée et proeuropéenne.Fécondité : 2,5. Espérance de vie : 72 ans. Âge moyen : 27 ans (un quart de la population a moins de 15 ans).Religions : 99 % de musulmans. Le patriarche des orthodoxes (Bartholomée Ier) a son siège à Istanbul (Constantinople) et est turc - c'est une obligation légale turque - mais il n'a même plus le droit d'avoir un institut de formation théologique universitaire depuis 1971.Taux de chômage officiel : 10 % (c'était avant la crise économique actuelle…)Urbanisation accélérée : 82 % de population rurale en 1950, 49 % en 1990, 35 % aujourd’hui.Langue : turc (officiel), kurde, arabe, arménien, grec.Illettrisme : une moyenne de 13,4 % (contre 5,4 % dans la zone de l’OCDE). Si l’illettrisme est en baisse constante, la proportion de femmes illettrées reste très supérieure à celle des hommes (22 % contre 6 % chez les hommes).Capitale : Ankara. Principales villes : Istanbul (14 millions d’habitants), Ankara (4 millions), Izmir (3 millions), Adana (2 millions).Diaspora turque : elle constitue la plus forte communauté étrangère en Europe avec plus de 3 millions de personnes dont plus de 2 millions en Allemagne (350 000 en France).Activités économiques : agriculture (olives, raisin, tabac, thé, céréales, tournesol, betteraves, citrons, ovins), industrie (coton, lignite, ciment, textiles synthétiques, sous-traitances industrielles diverses), tourisme, bâtiment.GéographieBaignée par la mer Noire, la Méditerranée et la mer de Marmara, la Turquie est essentiellement un pays montagneux dont l’altitude moyenne dépasse 1 100 m. Deux massifs le structurent, la chaîne pontique au nord et le Taurus au sud, entre lesquels s’étire l’immense plateau anatolien. Le pays se caractérise par un climat souvent rude, une végétation variée allant de la steppe désertique aux forêts denses. Ce pays arrosé compte de nombreux lacs, parfois grands comme des mers, rivières et fleuves. La Turquie est fertile et riche d’une faune et d’une flore très diversifiées.HistoireL’Anatolie est l’un des berceaux de notre civilisation. Occupée depuis 10 000 av. J.-C., elle vit se succéder les Assyriens, les Sumériens, les Hittites, puis plusieurs conquérants : Grecs, Perses, Romains. Sous l'empire romain s’implanta le christianisme qui fleurit durant un millénaire. Puis, les sultans seldjoukides et ottomans se convertirent à l’islam, qui détrôna toutes les autres religions, et développèrent des civilisations dont nous pouvons toujours apprécier les trésors. Palais, mosquées, caravansérails, bazars et autres hammams rivalisent de somptuosité particulièrement à Istanbul, Bursa, Izmir ou Konya, sainte ville des musulmans, fief des derviches tourneurs et d’un islam rigoriste. La grande révolution sociale vint avec Atatürk, père de la République (1923) qui instaura une laïcité centralisatrice soutenue par une armée toute-puissante. Ce régime autoritaire permit toutefois de sortir les femmes et les paysans de leur quasi esclavage, même si beaucoup de chemin reste à faire pour une véritable égalité.Pour approfondir« Sur les routes de l’apôtre Paul en Turquie » d’Étienne de Mesmay, prêtre du diocèse de Paris, aux éditions Parole et silence (2005),« Itinérance en terres d'Islam » de Gwenolé Jeusset, aux éditions de Mailletard (2004),« L’Europe, où en est la liberté religieuse ? » d’Otmar Oehring, publication de Missio (2004).

église troglodyte, Cappadoce.

Istanbul.

Un nouvel ennemi d'Allah, plus pernicieux, menace l'édifice

CHEMINS

FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009 13

n Vous êtes bien placé pour juger des changements en Turquie, depuis que le pays est gouverné par un parti islamiste.

Les Européens ont été impressionnés par l’élection d’un parti islamiste. Mais, pour nous hommes d’Église ce n’est pas la pire période. Jamais les autorités n’ont été aussi courtoises avec nous. Et j’ai l’impression que c’est sincère. D’ailleurs, de manière générale, les musulmans respectent les hommes de Dieu. Nous sommes invités à toutes les manifestations officielles et aux fêtes de rupture de jeûne. Chaque année, un prêtre syrien catholique turc y prend la parole au nom de tous les catholiques. Rappelons, tout de même, qu’il a fallu attendre 1960 pour que les relations diplomatiques soient rétablies entre la Turquie et le Vatican.

n La laïcité est-elle une bonne chose pour la religion ?

À l’échelle du monde, personne n’a encore pu définir la juste place de la religion dans la société. La laïcité reste un pis-aller, mais elle doit sauvegarder la liberté de tous. Les musulmans turcs ont été humiliés par Atatürk et une laïcité rigide qui méprisait les croyants. Ici, les musulmans ne sont ni fana-tiques ni intégristes. Pour autant, il n’y a pas de raison de se cacher, ni d’avoir honte d’être croyant. La laïcité reste trop rigide en Turquie. Personnellement, je ne suis pas opposé au port du voile à l’école, ni à la prière en public. Mais ceci est délicat. En Turquie, l’État a trop de pouvoir sur la religion. Depuis Atatürk et l’abolition du cali-fat, le commandeur des croyants est nommé par la direction des

Affaires religieuses qui dépen-dent du Premier ministre. Les imams sont des fonctionnaires et l’État paye la construction des mosquées selon un quota strict. La religion représente un très gros budget pour l’État. On vient d’ailleurs de créer de nouveaux postes d’enseignants en théologie pour réagir au succès des sectes pentecô-tistes américaines.

n Les Turcs sont-ils moins cro-yants ?

En Turquie, la religion est presque innée. Mais il ne faut pas se leurrer, ici comme ailleurs, les édifices religieux sont de moins en moins fré-quentés. À Istanbul, où il y a un apport de paysans venus d’Anatolie, la tradition religieuse perdure. Mais de nombreux Turcs ne pratiquent plus leur religion, surtout parmi les jeunes citadins.

n Si les Islamistes sont ouverts au dialogue interreli-gieux, concrètement cela change-t-il quelque chose pour l’Église ?

Pas vraiment… En Turquie, les églises n’ont pas d’existence officielle et ne peuvent être pro-priétaires des terrains et monuments qu’elles ont pourtant édifiés et dont elles jouissent depuis des siècles. Nos prêtres ne sont acceptés sur le territoire qu’en vertu d’un statut consulaire, porte ouverte aux tracasseries administratives. Nos écoles catholiques ont été nationalisées et

nous n’avons plus de séminaire. Nous ne pouvons construire de nouvelles églises ou créer des communautés catholiques.

Nous vivons, en fait, sur les acquis d’avant Atatürk, selon les accords de Lausanne de 1923 selon lesquels seules les institutions qui existaient avant l’instauration de la République peuvent poursuivre leur travail. Ce n’est pas facile avec nos congrégations vieillissantes, sans relève, qui peuvent se voir spoliées de leurs biens sur le sol turc. n

Originaire de France,Mgr Louis-Armel Pelâtre, représentant de l’Église catholique latine, réside en Turquie depuis 1970. C’est un observateur etun praticien au quotidien dela réalité religieuse turque.

Mgr Louis Pelâtre,vicaire apostolique d’Istanbul

rENCONTrE

Nousvivons en fait sur les

acquis d'avant Atatürk

Mgr Louis-Armel Pelâtre

PHILIPPINES Le 6 septembre, le Père Cecilio Lucero, 48 ans, a été assassiné par balles dans la province de Samar-Nord (Région des Visayas Orientales) alors qu'il était au volant de sa camionnette. L'embuscade avait été tendue par un groupe d'une trentaine de personnes. Son frère Wilmar Lucero est candidat pour les présidentielles de 2010 et son autre frère, Antonio Lucero, est gouverneur adjoint de la province de Samar-Nord. Le Père Lucero avait été publiquement dénoncé par la présidente Gloria Macapagal-Arroyo comme un « prêtre communiste ». Du coup la responsabilité, au moins indirecte, de la présidence est mise en cause.

RUSSIE Le 2 septembre, le patriarche Cyrille a reçu l'ambassadeur de France M. Jean de Gliniasty. Ils ont notamment parlé de la récente fondation d'un séminaire orthodoxe russe à Épinay-sous-Sénart (diocèse d'Évry) et du projet d'une nouvelle église russe à Paris.

RUSSIE Le 7 septembre, une partie (deux humérus) des reliques de sainte Élisabeth Feodorovna (dont le corps repose à Jérusalem depuis 1921) a été transférée au couvent orthodoxe Saintes Marthe et Marie qu'elle avait fondé en 1909 à Moscou après l'assassinat de son mari, le grand-duc Sergueï Alexandrovitch, par un socialiste révolutionnaire. Sœur de l'impératrice Alexandra, Élisabeth a été assassinée en 1918 par les bolcheviques.

POLOGNE L'évêque polonais Zygmunt Szczesny Felinski (1822-1895), qui a

été béatifié par Jean-Paul II le 12 août 2002, sera canonisé par Benoît XVI le 11 octobre 2009.

URUGUAY La chambre des députés et le sénat d'Uruguay ont définitivement approuvé, les 3 et 8 septembre dernier, une loi autorisant l'adop-tion d'enfants par les couples homosexuels. C'est le seul pays d'Amérique latine à se doter d'une telle législation. Très progressiste en matière de mœurs (et notamment à l'égard des homosexuels et des transsexuels), l'actuel président Tabaré Vazquez, ancien médecin, a cependant mis son véto, au nom de ses principes éthiques, à un projet de loi libéralisant l'avortement dans son pays.

ITALIE Dino Boffo, directeur du quoti-dien Avvenire, appartenant à la conférence épiscopale italienne, qui avait fini par critiquer, à la suite de la plupart des médias italiens, le penchant de Silvio Berlusconi pour les jeunes filles et les prostituées, a dû démissionner le 3 septembre après qu’Il Gior nale, quotidien dirigé par Paolo Ber lusconi, frère du Président du Conseil, l'avait accusé de ne pas avoir lui non plus une vie sentimentale irréprochable. Il Giornale a affirmé que Dino Boffo a eu des démêlés avec la justice en 2001 pour avoir « harcelé » l'épouse d'un homme avec lequel il aurait eu des relations homo sexuelles !

ÉTATS-UNIS Le 3 septembre, Mgr Edwin F. O'Brien, archevêque de Baltimore, a reçu dans l'Église catholique 10 religieuses anglicanes sur 12 du couvent de la "Society of All Saints' Sisters of the Poor" de Catonsville (Maryland). Les deux sœurs qui

resteront anglicanes continueront à résider avec les autres sœurs.

ÉTATS-UNIS Une v ing t a ine d'évêques ca tholiques américains (dont le cardinal Justin Rigali de Philadephie, l'archevêque Timothy Dolan de New York, l'archevêque Charles Chaput de Denver-Colorado…) ont pris position contre le projet de réforme du système de santé prôné par le président Obama. Ils estiment qu'il risque de favoriser les atteintes à la dignité de la vie humaine (avortement, euthanasie), ce dont le président Obama s'est vigoureusement défendu dans son grand discours du 9 septembre aux représentants de la nation. Le Président a par ailleurs multiplié les concessions aux Républicains pour tenter de faire passer au moins une partie de ce fameux projet.

IRLANDE L'un des principaux groupes paramilitaires protestants nord-irlandais, l'UDA (Ulster Defense Associat ion) a of f iciellement annoncé le 8 septembre, qu'il allait déposer toutes ses armes dans le cadre de la loi d'amnistie qui prendra fin en février 2010.

POLOGNE Le 8 septembre, à l'invitation de la communauté Sant'Egidio - qui tenait ses assises annuelles à Cracovie du 6 au 8 septembre - des dignitaires religieux de toutes confessions ont rendu hommage aux victimes de la Shoah devant l'ancien camp de concentration nazi d'Auschwitz.

BULGARIE Le Congrès juif mondial réuni à Sofia (qui possède une des trois

14 FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009

plus grandes synagogues d'Europe) a rendu hommage, le 9 septembre à la Bulgarie qui, bien qu'alliée de l'Allemagne nazie durant la dernière Guerre Mondiale, avait su protéger une grande partie de sa communauté juive (environ 50 000 personnes) et, bien que soumise ensuite au régime communiste, avait permis à de nombreux juifs bulgares de s'exiler en Israël. Il y aurait actuellement 4 000 Bulgares de confession israélite.

UNESCO Candidat à la présidence de l'Unesco (l'élection devait intervenir à partir du 17 septembre), l'ancien ministre de la culture égyptien Farouk Hosni, s'est vu rappeler ses propos antisémites devant le Parlement égyptien en 2008. Après avoir écrit un article dans lequel il reconnaît la Shoah et se démarque de tout négationnisme, il a cependant reçu le soutien public de Serge Klarsfeld, le fameux chasseur de nazis.

LYON Le 11 septembre le diocèse de Lyon a donné le coup d'envoi d'une série de réflexions, de célébrations et d'invitations à l'action consacrées au « corps ». Première étape d'un parcours en trois volets pour souligner la mission de l'Église au service de l'homme tout entier, dans toutes ses dimensions : après "l'année du corps" en 2009-2010, ce sera celle de l'âme en 2010-2011, puis celle de l'esprit…

LYON Le 15 septembre, les salons d'honneur de la mairie de Lyon ont accueilli, comme cela avait déjà été fait une fois en 2001, de nombreux musulmans pour un repas de rupture de jeûne du ramadan.

BÉATITUDES 8 diacres de la communauté des Béatitudes ont été ordonnés

prêtres le samedi 12 septembre par Mgr Robert Le Gall, archevêque de Toulouse, en la Basilique Sainte-Germaine de Pibrac (Haute -Garonne) tout près de Toulouse. Venant de France, du Canada, d'Afrique et de Belgique, ils ont reçu leur formation au sein du séminaire de la communauté des Béatitudes ainsi qu'à l'Institut catholique de Toulouse, le séminaire diocésain de Namur en Belgique, l'Institut pontifical d'Heiligenkreuz en Autriche et dans les Instituts pontificaux de Rome.

PAIX Le Conseil Œcuménique des Églises (COE, qui regroupe 349 dénominations chrétiennes non catholiques) organise, en lien avec le secrétariat général de l'Onu, une journée mondiale de prière pour la paix le 21 septembre. Le thème de cette année est : « Un seul amour : édifier la paix dans les Caraïbes ».

B.P.

En mémoire des jours

Jour de deuil et de peine dans nos proximités. Une femme, l'une de nous,

s'en est allée, au terme d'un rude combat contre le can-cer. Ce mal auquel on ne donnait naguère pas de nom. Aujourd'hui on le désigne par son nom. C'était un cancer

et cela depuis 17 ans. Une éternité à l'échelle de nos mesures. Cel le qui s 'en a l la i t comme on se dérobe était une chrétienne, une femme de l'Évangile dont l'âme était à la mesure de l'épreuve. Ce n'était pas pour peu dans la ferveur qui l'entourait et la portait à l'instant où elle gagnait les rives de l'ultime. L'église de l'endroit suffisait à peine à contenir la foule qui était là, présence intérieure à la hauteur de ce qui se pas-sait dans cet incomparable moment où les plus proches et leurs amis innombrables se retrouvaient à l'image d'un si long parcours. Le temps était suspendu, preuve d'une communion intense qui ne voyait plus le temps passé.

Celle qui nous quittait à cette heure nous devançait comme elle l'avait fait depuis toujours. Tout concordait, la parole, les chants et jusqu'au silence, ce qui n'était pas le moindre. Rimbaud le poète a parlé de ces morts qui nous disent la vie. Bernanos l'ins-piré nous redit pour sa part : « L'espérance qui est le déses-poir surmonté .» Dans la dou-leur et les larmes, nous étions bien sûr un chemin d'éternité.

Triste mémoire

Il y a 70 ans, qui ne s'en souvient , éclatait une guerre dont on ne devinait

pas tout, et de loin. Et surtout pas les conséquences drama-tiques.

La France se croyait à l'abri de sa puissance mili-taire qu'on disait la meilleure du monde. Au lieu de quoi c'est un pays tout entier qui allait tomber en ruine dans un exode qui précipiterait les foules sur un itinéraire sans objet. L'humiliation de la défaite s'ajouterait au désastre. On toucherait les profondeurs de l'abîme. Il est peu probable qu'on aura à cœur de célébrer ces événe-ments, parmi les plus dou-loureux de notre histoire, sans parler de la honte. Ce lugubre moment de l'été 40 où un pays anéanti ne voyait pas comment se relever. De Londres, par bonheur, nous viendrait une voix qui allait nous rendre l'espé-rance. n

Chemind'éternité

ParRobert Masson

ESPRIT

FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009 15

lectures

16 FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009

C’est la question que nous pose saint Jacques, mais c’est aussi celle que nous posent les enfants quand ils ont vu les ravages que la barbarie

humaine peut causer dans le monde apparemment civilisé qui est le nôtre. Il y a si peu de rapport, à première vue, entre nous et ces forces aveugles qui broient soudain le destin de milliers d’êtres humains. Sommes-nous le jouet d’une fatalité aveugle, ou bien y a-t-il quelque part des coupables qu’il faut trouver et châtier pour que le mal s’arrête ? Pendant des siècles, les hommes ont pensé que la guerre était un malheur comme un autre, infligé par Dieu à l’égal des tempêtes et des raz de marée. Depuis qu’ils se sont avisés de leur responsabilité, les choses ne vont pas vraiment mieux. À vouloir trouver les coupables, à faire la guerre à la guerre, à rêver de la « der des der » qui mettra hors la loi les fauteurs de maux, les conflits sont devenus plus inexpiables, plus généralisés, plus sournois… Alors ?

Alors écoutons ce que nous dit saint Jacques : « D'où viennent les

guerres, d'où viennent les conflits entre vous ? N'est-ce pas justement de tous ces instincts qui mènent leur combat en vous-mêmes ? Vous êtes pleins de convoitises et vous n'obtenez rien, alors vous tuez ; vous êtes jaloux et vous n'arrivez pas à vos fins, alors vous entrez en conflit et vous faites la guerre. Vous n'obtenez rien parce que vous ne priez pas ; vous priez, mais vous ne recevez rien parce que votre prière est mauvaise : vous demandez des richesses pour satisfaire vos instincts. Créatures adultères ! Vous savez bien que l'amour pour les choses du monde est hostilité contre Dieu ; donc celui qui veut aimer les choses du monde se pose en ennemi de Dieu. »

La guerre, toutes les guerres, viennent du désordre de notre cœur. Eh oui ! Il s’agit non pas de se croire coupable de tout le mal qui arrive sur terre, mais de reconnaître au fond de nous la matrice de toutes les passions qui jettent les hommes les uns contre les autres. La convoitise dont parle l’Apôtre consiste dans cet attachement désordonné à un bien limité et partiel, que certes Dieu peut nous donner

comme signe de son amour, mais qui, devenu l’objet unique de notre désir, nous coupe de la source vivante de tout bien et d’ailleurs, la plupart du temps, nous échappe et nous laisse amers et déçus. Mais, en attendant, cette idolâtrie, car c’en est bien une, a entraîné mille désordres dans nos relations avec les autres. Nous nous sommes trouvés en rivalité pour la conquête d’un même bien, nous avons envié ceux qui paraissaient mieux pourvus que nous (alors qu’un peu de lucidité nous aurait montré que nous étions bien nous aussi favorisés de Dieu), nous avons cherché à éliminer en douce ceux qui risquaient de passer devant nous, nous avons nourri du ressentiment, de la haine, etc. Surtout, notre intelligence a été entraînée dans le mouvement, nous avons perdu le sens des proportions, une minime blessure d’amour-propre nous a paru un mal insupportable et nous avons été prêts aux plus sévères représailles, nous avons été aveugles aux raisons des autres et leur avons prêté des intentions qui n’étaient pas les leurs, nous avons confondu coupables et comparses dans une même riposte méchante, et ainsi de suite. Enfin, nous avons désespéré du bon sens et de la modération, nous nous sommes jetés dans l’affrontement que nous savions vain, par bravade, par découragement, par désir d’en finir et de tout casser.

Saint Jacques a bien raison de nous dire que ce qui nous a manqué, c’est la prière, la prière vraie, comme remise à Dieu de notre vie. Tous ces biens que nous convoitons, s’ils ne sont pas un cadeau de l’amour de Dieu, sont bien peu de chose. Ce qui fait leur prix, leur densité, le bonheur qui s’y attache, c’est la grâce inespérée d’un sourire : l’amour d’une femme, la possibilité d’exercer des responsabilités, la recon-naissance de mes efforts, la détente physique et morale, tout cela a de la valeur, certes, mais la perdrait aussi bien, si je cherchais à le conquérir contre les autres, si, enfant gâté, je veux ravir le fruit au lieu de le recevoir au moment voulu de la main du Père. n

Dimanche 20 septembrePremière Lecture : Sagesse 2.12-20Psaume 54.3-6, 8Deuxième Lecture : Jacques 3.16-4.3Évangile : Marc 9.30-37.

25e dimanche ordinaire (année B)

commentaires du père Michel GITTON

d’où viennentles guerres ?

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Une nouvelle fois Jésus annonce sa Passion.30 Ils quittèrent cet endroit, et ils allaient de place en place à travers la Galilée. Jésus ne voulait pas qu’on le sache, 31 car il était occupé à instruire ses disciples. Alors il leur dit : « Le Fils de l’Homme sera livré aux mains des hommes. Ils le tueront et, trois jours après sa mort, il ressuscitera. »32 Eux ne comprenaient pas cet avertissement, et ils avaient peur de lui en demander davantage.

Si quelqu’un veut être le premier…33 Ils arrivèrent à Capharnaüm. Une fois à la maison, Jésus les interrogea : « De quoi discutiez-vous en chemin ? » 34 Ils se turent, car en chemin ils s’étaient disputés à propos de qui était le plus grand.35 Alors Jésus s’assoit, il appelle les Douze et leur dit : « Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier de tous, qu’il soit le serviteur de tous. » 36 Puis il place au milieu d’eux un enfant, il l’embrasse et leur dit : 37 « Si quelqu’un reçoit en mon nom l’un de ces enfants, c’est moi qu’il reçoit ; et celui qui me reçoit, reçoit celui qui m’a envoyé. »

Dimanche : XXVe sur l’année (B)1. Jésus qui ne s’est pas opposé à ses adversaires, qui a compté sur son Père pour lui rendre justice (lecture du livre de la Sagesse).➤ Adorons le Serviteur souffrant tout remis à son Père.Point spi. : Ne nous laissons pas troubler par les menaces et les calomnies, offrons.2. Jésus qui reste profondément pai-sible au milieu de ce monde en feu (lecture de la lettre de saint Jacques).➤ Adorons celui qui est notre Paix.Point spi. : Combattons les pensées amères qui nous poussent à mépriser les autres.3. Jésus qui nous montre la vraie grandeur dans le service (lecture de l’évangile).➤ Adorons notre roi bafoué et triomphant.Point spi. : Acceptons sans tristesse que d’autres passent devant nous.

Lundi : Saint Matthieu (Mt 9, 9-13) Octave de la Croix Glorieuse1. Jésus qui a enlevé Lévi à ses comptes et à ses écritures, qui l’a arraché à une vie médiocre pour le mettre à sa suite.➤ Adorons le Maître qui vient tout bousculer dans nos vies, et n’y laisse rien d’intact.Point spi : Cessons de chercher toujours des sécurités.2. Jésus qui se donne un apôtre en la personne d’un publicain honni, qui va faire cohabiter Lévi le collaborateur et Simon le Zélote.➤ Adorons le Maître qui fait notre unité au-delà de nos différences et de nos oppositions.Point spi : Croyons que le Seigneur peut embaucher ceux que nous ne penserions pas à inviter.3. Jésus qui donne un avenir à Lévi, qui lui permet de mettre ses talents au service de l’évangile.➤ Adorons le Maître qui nous fait confiance.Point spi : Mettons toutes nos capacités, mêmes les plus profanes, au service du Christ.

Mardi : « Ma mère et mes frères », l’appel à garder la parole(Lc 8, 19-21)1. Liberté de Jésus : sa famille n’a pas de droit sur lui, même s’il ne répudie pas ses attaches familiales. « L’homme quittera son père et sa mère … ».➤ Adorons Celui qui vient d’ailleurs, qui ne se laisse limiter par aucune de nos appartenances.Point spi : Nous n’avons qu’un Père, et il est au ciel.

2. Engagement de Jésus : donné aux foules, donné à ses disciples.➤ Adorons Celui qui a voulu se lier par amour à Son église.Point spi : Retrouvons la joie d’avoir pu dire « oui » à notre grand ami du Ciel.3. Exigence de Jésus : il s’agit d’ « écou-ter » et de « garder », et ce n’est pas rien.➤ Adorons Celui qui a une grande ambition pour nous.Point spi : Ne perdons pas ce que nous avons commencé à entrevoir.

Mercredi : L’envoi des douze,un départ pour l’aventure(Lc 9, 1-6)1. Autorité : Jésus qui investit ses amis de son autorité : eux, si hésitants, si peu sûrs, auront à chasser les démons !➤ Adorons le Maître qui peut tout, et qui veut néanmoins faire appel aux hommes.Point spi : ne nous dérobons pas devant la responsabilité que le Christ nous confie.2. Dépouillement : Jésus qui leur demande de partir démunis de toute garantie, sans réserve pour l’avenir.➤ Adorons Celui qui n’a pas eu de pierre pour y poser sa tête.Point spi : Ne nous laissons pas arrêter par la peur du lendemain.3. Persévérance : Jésus qui les prépare aux refus qu’ils rencontreront, et qui leur apprend à ne pas se laisser détourner pour autant de leur objectif.➤ Adorons Celui qui, venu chez les siens, n’a pas été reçu, mais qui a poursuivi son œuvre auprès du petit reste qui l’a accueilli.Point spi : Ne cherchons pas dans l’apostolat la faveur ou l’estime de ceux que nous rencontrons.Jeudi : Hérode perplexe,antithèse d’un cœur qui « garde » (Lc 9, 7-9)1. Jésus que les puissants de ce monde cherchent à voir et ne voient pas, trop occupés d’eux-mêmes, de leurs plaisirs et de leur avenir.➤ Adorons Celui à côté de qui on peut passer, Celui qui ne s’impose pas.Point spi : Gardons un cœur avide de lui.2. Jésus qu’on cherche toujours à ra-mener à une mesure commune, à faire entrer dans la norme, alors que … ➤ Adorons Celui qui est unique, qui ne ressemble à aucun autre.Point spi : Soyons capables de nous étonner, de nous émerveiller.

XXVe semaine : « garde des commandements »

lectures

FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009 17

Semaine préparatoire à la fête des Saints Archanges. par le Père Michel GITTON

3. Jésus qu’on ne peut arrêter dans sa course, lui si libre devant les pièges de l’avoir et du pouvoir.➤ Adorons Celui qui « va son chemin », échappant à la méchanceté et à la bêtise des hommes.Point spi : Sachons conquérir notre liberté, en étant prêt à en payer le prix.

Vendredi : La Confession de Césarée, Jésus qui interrogesur le dépôt (Lc 9, 18-22)1. Jésus qui, en nous interrogeant sur les idées reçues, nous aide à mesurer la distance déjà franchie, la lumière qui a commencé à pénétrer.➤ Adorons le Dieu qui scrute les reins et les cœurs, dissipe les ombres de la nuit.Point spi : Restons libres face aux idées reçues.2. Jésus qui, en nous posant la question de confiance, nous amène à prendre partie, à oser exprimer notre foi.➤ Adorons le Dieu qui interroge, qui laisse de la place à notre réponse.Point spi : Mettons toute notre joie à professer la vraie foi.3. Jésus qui, en nous parlant de sa Passion, nous oblige à accepter d’aller beaucoup plus loin que nous ne l’imaginions.➤ Adorons le Dieu qui nous entraîne, le Maître et le Guide qui marche devant nous.Point spi : Disons à Jésus « oui » pour toute la suite et sur toute la ligne.

Samedi : La deuxième annonce de la Passion, ou celui qui n’a rien gardé pour lui (Lc 9, 43b-45)1. Jésus qu’on admire en partie pour de mauvaises raisons, en qui on voit un faiseur de miracles.➤ Adorons le Seigneur défiguré par nos idolâtries.Point spi : Ne nous révoltons pas quand il ne fait pas ce que nous voulons.2. Jésus qui veut que ses disciples s’attachent à lui en connaissance de cause, qui ne cache aucun point de son programme.➤ Adorons le Dieu de vérité, si loin des mensonges et des compromis des hommes.Point spi : Aimons la vérité, même quand elle ne nous est pas favorable.3. Jésus qui supporte leur mutisme, leur lenteur, leurs réticences.➤ Adorons le Dieu patient qui sait attendre le moment favorable.Point spi : Acceptons de ne pas pouvoir toujours nous faire comprendre des autres. n

Aurait-il pu sauver l’Empire austro-hongrois ? Charles Ier, dernier sou-verain de la dynastie de Habsbourg-Lorraine, n’a-t-il été qu’un figurant de l’Histoire, impuissant à endiguer le flot inexorable des événements ? Dans l’excellente biographie qu’il

vient de publier, Jean Sévillia conjugue ses ta-lents de journaliste et d’historien pour rendre à ce prince méconnu et presque oublié, ses véritables dimensions humaines. Douze ans après Zita, im-pératrice courage, il a enrichi son sujet des 2700 pages du procès de béatification du dernier em-pereur d’Autriche, publié en 2003, et des travaux scientifiques d’une chercheuse autrichienne, Elisa-beth Kovacs. Adversaire résolu de l’ « historique-ment correct », Jean Sévillia balaie ici les derniers débris de ce que les marxistes nommaient « le sens de l’Histoire », pour constater : « Ni l’effondrement de la Double Monarchie, ni le destin personnel de Charles d’Autriche n’étaient écrits. » Ce Dernier empereur n’a nullement été un fantoche, indécis et maladroit, mais un souverain volontaire qui, dans la tourmente, s’est efforcé, sans succès hélas, de redresser le cap. Aussi éloigné de l’hagiographie que du déterminisme historique, l’ouvrage appa-raît d’abord comme le récit d’une destinée flam-boyante, « une courte vie aux accents tragiques », celle d’un homme animé par une foi profonde et le souci constant de suivre l’enseignement du Christ, là où la Providence avait voulu le placer…

Né le 17 août 1887 à Persenbeug, sur le Danube, à 80 km de Vienne, Charles est le fils de l’archiduc Otto d’Autriche et de la princesse Marie-Josèphe de Saxe. Petit-neveu de l’empereur François-Jo-seph Ier, jamais il n’aurait dû régner, sans le suicide mystérieux du prince héritier Rodolphe, puis l’as-sassinat de son oncle François-Ferdinand à Sara-jevo, en 1914. Son père étant déjà mort, Charles devient dès lors le nouvel héritier présomptif, tan-dis qu’éclate la Première Guerre mondiale. D’abord promis à une carrière militaire, il a reçu une for-mation politique afin de se préparer à ses futures fonctions. Outre l’allemand et le français, Charles parle presque toutes les langues d’un immense Em-pire qui s’étend de la Suisse à l’Ukraine : hongrois,

HISTOIRE

C’est en 1916, au cœur de la Première Guerre mondiale, que Charles de Habsbourg ceint la double couronne d’Autriche-Hongrie, l’une des plus prestigieuses d’Europe. Il mourra moins de six ans plus tard à Madère, détrôné, emporté par une pneumonie, dans un dénuement accepté avec patience et humilité. Jean Sévillia, à qui l’on devait déjà une biographie de l’impératrice Zita, peint dans son nouveau livre, avec justesse et émotion ce grand prince du XXe siècle, béatifié en 2004 par Jean-Paul II. Et l'impératrice Zita ? Sera-t-elle un jour béatifiée ? Il en est question et Jean Sévillia nous en dit plus à ce sujet.

18 FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009

AUTRICHE-HONGRIEL'empereur de la dernière chance

Jean Sévillia, Le dernier empereur, Charles d’Autriche 1887-1922, Perrin, 360 pages, 21,80 €.

tchèque, croate, roumain, polonais… En 1911, il a épousé la princesse Zita de Bourbon-Parme, fille du duc Robert Ier et descendante, en ligne maternelle, de Charles X. Le couple partage les mêmes convic-tions religieuses. Le jour de leur union, Charles n’a-t-il pas déclaré à sa femme : « Maintenant, nous devons nous conduire l’un l’autre au ciel » ?

La mort du vieux François-Joseph, le 21 no-vembre 1916, à l’issue d’un règne interminable de 68 ans, fait de Charles l’une des figures les plus puissantes du monde. À 29 ans, le voilà qui règne sur près de 53 millions de sujets. Et Jean Sévillia égrène, sur une page entière, la litanie des titres de ce monarque aux cent couronnes : « Empereur d’Autriche, roi apostolique de Hongrie, roi de Bo-hême, de Dalmatie, de Croatie, de Slavonie, de Galicie, de Lodomérie et d’Illyrie, roi de Jérusalem, archiduc d’Autriche, grand-duc de Toscane et de Cracovie, duc de Lorraine et de Bar… »

Cependant, la guerre réduit considérablement sa marge de manœuvre. Empêtré dans une alliance désastreuse avec l’Empire allemand, Charles Ier entreprend, d’emblée, d’entamer des pourpar-lers secrets avec les Alliés, en vue de conclure une paix séparée. Soutenu par le pape Benoît XV – épouvanté par le bain de sang dans lequel est plongée la Chrétienté -, il entre en contact avec le gouvernement français, par le truchement de ses beaux-frères Sixte et Xavier de Bourbon-Parme, alors officiers dans l’armée belge. Paral-lèlement, en conformité avec les préceptes de la doctrine sociale de l’Église, il réduit le train de vie de la cour et lance un ambitieux programme de réformes. L’Autriche sera ainsi le premier pays à créer un ministère des Affaires sociales. Droit au travail, assurances maladie et chômage, protection de la jeunesse sont des préoccupations majeures de celui qu’un journal socialiste, l’Arbeiter Zeitung, surnomme « l’Empereur du peuple ».

Un peu témérairement, Charles Ier se fait fort d’obtenir de l’Allemagne la rétrocession de l’Al-sace-Lorraine et la garantie de l’intégrité territo-riale de la Belgique. Néanmoins, les discussions avec la France tournent court, face aux exigences de l’Italie, et à la mauvaise volonté de certains res-ponsables républicains français, dont Clemenceau,

hostiles par principe à cette monarchie d’un autre âge, bafouant les droits des nationalités, « cita-delle du catholicisme » plantée au cœur de l’Eu-rope. L’absurde boucherie durera encore plus d’un an. À l’automne de 1918, les Empires centraux sont contraints de déposer les armes. Charles tente de sauver ce qui peut encore l’être, en proposant la fédéralisation de l’Empire. Mais les Hongrois, jaloux de la position dominante dont ils jouissent depuis le compromis de 1867, proclament aussitôt leur in-dépendance. Le 12 novembre, le parlement viennois - grâce à la défection des chrétiens-sociaux – ins-taure la république en Autriche. Charles Ier refuse d’abdiquer et signe simplement une déclaration de « retrait des affaires ». Exilé en Suisse, au château d’Ekartsau, il tentera par deux fois, au cours de l’année 1921, de reprendre le pouvoir en Hongrie. Trahi par le régent Horthy, il est capturé par les Alliés et relégué sur l’île de Madère.

Durant plusieurs mois, la famille impériale sur-vit dans une gêne proche de la misère. Victime des privations, Charles s’éteindra prématurément, ter-rassé par une pneumonie foudroyante, le 1er avril 1922, à l’âge de 34 ans, en prononçant le nom de Jésus. Sa veuve, l’impératrice Zita, attend alors leur huitième enfant. Elle lui survivra plus de six dé-cennies. Quant au dernier empereur, son corps re-pose toujours dans une chapelle de la petite église de Nossa Senhora do Monte, sur les hauteurs de Funchal. Peut-être rejoindra-t-il un jour ceux de Zita et de leur fils l’archiduc Carl Ludwig, mort en 2007, dans la crypte des Capucins, la nécropole im-périale, près de la Hofburg de Vienne… n

AUTRICHE-HONGRIEL'empereur de la dernière chance

par Philippe DELORME

"Maintenant, nous

devons nous conduire

l'un l'autre au ciel"

FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009 19

Lire l'interview de Jean Sévillia en pages suivantes.

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n Le 8 septembre 2009, l’Association pour la béati-fication de l’impératrice Zita, que vous présidez, a annoncé sa création. Pouvez-vous nous rappeler les grandes étapes de sa vie ?

Née en 1892, fille du dernier duc régnant de Parme, Zita est une princesse de Bourbon : elle a été élevée dans une famille de culture française, famille qui vivait alternativement en Autriche et en Toscane tout en gardant un lien avec la France, puisqu’elle possédait le château de Chambord. En 1911, Zita épouse l’archiduc Charles d’Autriche, petit-neveu de l’empereur François-Joseph.

Pendant ses deux années de règne, Zita se tient au côté de son mari et, quoique la Constitution austro-hongroise ne lui reconnaisse aucun rôle, l’assiste dans sa double volonté de sortir son pays de la guerre et de réformer l’empire. C’est par le canal de ses frères, les princes Sixte et Xavier de Bourbon-Parme, que Charles négocie en secret avec les Alliés en 1917. En 1918, ayant perdu la guerre, l’Autriche-Hongrie est démantelée et l’empereur se retrouve condamné

par les Alliés à la relégation sur l’île de Madère où il va mourir de maladie à 34 ans.

Zita est alors enceinte de son huitième enfant. Commence pour elle une vie d’errance, au cours de

laquelle elle se consacre à sa famille et à des œuvres caritatives : Espagne, Belgique puis, après 1940, Québec et États-Unis. En 1930, quand son fils aîné, l’archiduc Otto, devient majeur, l’impératrice lui laisse la direction poli-tique de la Maison de Habsbourg. Dans les années 1950, Zita revient en Europe, mais elle n’ob-tiendra le droit de rentrer en Autriche qu’en 1982, après soixante-trois ans d’exil. Elle meurt en 1989, à Zizers, en Suisse. Le 1er

avril 1989, ses obsèques solennelles sont célébrées selon le grand cérémonial funèbre des Habsbourg, et elle est enterrée dans la Crypte des Capucins, à Vienne, alors que la

dépouille de Charles repose toujours à Madère.

n En 2004, l’empereur Charles d’Autriche a été béatifié par Jean-Paul II. Quels sont les éléments qui, selon vous, militent pour que l’Église applique la même procédure à son épouse ?

L’impératrice a traversé d’innombrables épreuves. Elle les a acceptées et surmontées avec une force morale exceptionnelle, qui provenait de sa profonde confiance en Dieu. Épouse, mère de famille et grand-mère, elle s’est vouée aux siens, sans cesser de s’intéresser aux autres. Toute sa vie, marquée par une piété intense, s’est déroulée sous le triple signe de la foi, de l’espérance et de la charité. Il ne nous appartient pas de nous substituer au jugement de l’Église : c’est elle qui tranchera un jour si Zita mérite ou non d’être béatifiée. Mais tous les éléments sont réunis pour soumettre la Servante de Dieu l’impératrice Zita à son jugement.

HISTOIRE

Quoique laConstitution austro-hongroise ne luireconnaisse aucun rôle...

AUTRICHE-HONGRIEZita sera-t-elle béatifiée ?

20 FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009

La mise en lumière de saints couples est une préoccupation actuelle de l'Église. Le couple impérial de Charles et Zita semble à beaucoup un modèle du genre. Pourquoi pas ?

Une association toute nouvelleL’Association pour la Béatification et la Canonisation de l’Impératrice et Reine Zita, épouse et mère de famille, vient d’être constituée. Agréée par l’évêque du Mans, Mgr Yves Le Saux, elle compte comme membre de droit, dans son conseil d’administration, le Révérend Père Abbé de Solesmes, Dom Philippe Dupont. Les autres membres du conseil sont tous des laïcs : Jean Sévillia (président de l’association), la princesse Françoise de Bourbon Lobkowicz, nièce de l’impératrice Zita, Élizabeth Montfort (secrétaire générale), Jean Peynichou, François de Rambuteau, Jean-Marie Tissot (trésorier).

Association pour la béatification de l’impératrice Zita, Abbaye Saint-Pierre, 1 place Dom Guéranger, 72300 Solesmes. Cotisation annuelle : 20 € pour les membres ordinaires, à partir de 50 € pour les membres bienfaiteurs. Site : www.beatification-imperatrice-zita-org

n Comment s’organise la cause de béatification de l’im-pératrice Zita, et quel est le rôle de votre association ?

En 2008, la Congrégation des Causes des Saints a donné son aval pour l’ouverture du procès de béati-fication de l’impératrice Zita dans le diocèse du Mans. Selon les normes en vigueur dans l’Église, les premiers initiateurs de la cause ont décidé de constituer une association, l’Association pour la béatification de l’im-pératrice Zita, qui en sera l’acteur. Cette association, agréée par l’évêque du Mans, qui est actuellement Mgr Yves Le Saux, a nommé un postulateur, l’abbé Cyrille Debris, prêtre du diocèse du Mans. C’est à lui qu’in-combe l’instruction proprement dite, dans un premier temps dans la phase diocésaine, avant le transfert du dossier à Rome. Notre association a pour rôle d’assister cette cause, à la fois matériellement, en donnant au postulateur les moyens d’accomplir son enquête, et spirituellement, en encourageant une chaîne de prière, à la fois pour et par la Servante de Dieu l’impératrice Zita.

n Pourquoi cette cause est-elle instruite dans le diocèse du Mans ?

L’impératrice était liée à Solesmes, qui se trouve dans le diocèse du Mans. Trois de ses sœurs étaient religieuses à l’abbaye Sainte-Cécile, et elle-même était oblate de l’abbaye Saint-Pierre. Le Père Abbé de Solesmes, Dom Philippe Dupont, est membre de droit du bureau de notre association. Sa grande autorité et son expérience sont un atout décisif pour la cause.

n Vous publiez aujourd’hui une biographie de l’empereur Charles, après avoir été, en 1997, le biographe de Zita. En quoi ce couple vous paraît-il exemplaire ?

Sur un plan purement humain, ce couple si uni en un temps où la famille se délite forme un modèle à suivre. Dans une époque où l’individualisme et l’hé-donisme triomphent, ce couple qui a

toujours préféré son devoir à son plaisir est aussi un exemple. Mais ces vertus sont surtout sublimées par la foi qui unissait Charles et Zita. S’ils étaient tous les deux portés sur les autels, ils formeraient un couple que les chrétiens pourraient vénérer, à l’instar de Luigi et Maria Beltrame-Quattrocchi ou de Louis et Zélie Martin.

n Si l’impératrice était déclarée bienheureuse comme son mari, est-ce que l’Église béatifierait un couple chrétien ou un couple souverain ?

Tout chrétien est appelé à la sainteté. Charles et Zita ont cherché à répondre à cet appel à travers leur vocation particulière, qui était celle d’un couple souverain. Quand l’Église béatifie un membre d’une famille royale, ou impériale, son jugement n’est pas d’ordre politique. Néanmoins, une telle consécration prouve qu’il est possible de configurer sa vie à Dieu tout en exerçant une mission politique. n

D.R.

FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009 21

Une force moraleexceptionnelle,qui provenait de sa profonde confiance en Dieu

AUTRICHE-HONGRIEZita sera-t-elle béatifiée ?

Entretien avec Jean SÉVILLIA

Lors de la béatification, le 30 octobre 2004 à Rome.

L'Impératrice et ses 8 enfants.

D.R.

n Beaucoup d’articles et de colloques en témoignent : la théologie politique est à la mode. Pourquoi ?

Les raisons sont nombreuses. La poussée intégriste dans l’islam me paraît être la principale cause de ce regain. L'essoufflement des démocraties libérales y est aussi pour beaucoup. Cela dit, j’ai voulu réfléchir sur une problématique interne au christianisme. Ma conviction est que la médiation est ce qui spécifie la foi chrétienne : il n’y a pas de rencontre avec Dieu sans ce médiateur qu’est le Christ. C'est cette médiation qui vient subvertir la médiation juive, qui existait avant Sa venue. J’ai voulu montrer que la médiation chrétienne est un défi, que je situe sur le terrain de la théologie politique.

Il faut bien comprendre que le théo-logico-politique ne se déploie pas dans l’abstraction : il est toujours lié à une reli-gion spécifique. J’ai donc voulu mettre en place des concepts qui permettent de comprendre ce qu’il faut entendre par « théologie politique » dans le chris-tianisme. C’est ainsi que nous pouvons clarifier la relation qui existe, selon moi, entre le christianisme et la sécularisation.

n À quoi bon cette réflexion, puisque la sécularisation est un fait établi ? Une théologie politique chrétienne est-elle encore pertinente pour penser le monde d’aujourd’hui ?

Ma réponse est positive, ce qui ne signifie pas qu’il faille en revenir à des

réponses datées. La prédication chré-tienne est de part en part marquée par du paradoxe – et c’est encore le cas aujourd’hui.

Le premier paradoxe, c’est que Jésus est mort et qu’il est vivant. Cet homme n’est pas seulement un homme – il est Dieu. Telle est la révélation chrétienne qui n’est pas donnée tout d’un coup : on passe d’un phénomène judéo-chrétien à un événement spécifiquement chrétien.

Autre paradoxe : le Dieu unique est un dieu trinitaire. C’est même apparemment une contradiction !

Chez Paul, tout est paradoxe : c’est une subversion du statut de la raison. Ce qui est contradictoire avec la raison ne l’est pas - mais repose sur une cohérence qui est paradoxale. La rationalité grecque s’en trouve complètement transformée. C'est l'ensemble des paradoxes chrétiens qui a créé les conditions du fondement séculier de la politique moderne.

n Compte tenu de ces paradoxes, comment se pose la question de la médiation ?

La médiation ne fait qu’amplifier les difficultés : ce n’est pas un concept statique, c’est un concept polysémique, qui joue un rôle clé. Pour défendre le statut de la vraie Église, il faut être clair sur le statut de la médiation. Or ce statut a évolué dans le temps.

Les apôtres étaient persuadés que le temps du royaume de Dieu était proche. Il y a donc dans les Évangiles une sorte de « service minimum de la médiation ».

Les professions de foi du Christ sont affirmées mais elles ne provoquent pas beaucoup de spéculations intellectuelles. L’Église est très organisée mais elle n’a pas de hiérarchie.

Puis les siècles passent, le Règne tarde, on s’installe dans l’histoire, la doctrine s’affine... On en arrive au quatrième siècle, un concile se tient sur la Trinité et, surtout, il y a le tournant historique constantinien dans le même contexte. Pour les Romains, la religio était un concept juridique et la tolé-rance à l’égard des croyances était large. Mais le christianisme était selon eux une superstitio : les chrétiens, n’ayant pas une religio, se trouvaient hors de la légalité.

Lorsque le christianisme devient religio tout change : pour Rome, qui bascule dans le christianisme, et pour le christianisme qui était une simple foi et qui devient une religion. Le statut de la médiation monte en puissance, l’institu-tion ecclésiale s’en trouve transformée ! Le lien entre l’imperium romanum et l’ecclesia oblige les chrétiens à préciser leur doctrine : la notion d’orthodoxie apparaît. L’Église a plus que jamais besoin de la théologie qui va devenir la reine des sciences, qui organise tous les savoirs au Moyen Âge.

n Elle va aussi bouleverser le politique...

Au plan politique, le statut de la médiation subvertit la divinisation de l'empereur: il n’est plus une divinité mais rien qu’un homme : c’est le Christ qui est Dieu, engendré par le Père et égal au Père.

Apparaît alors la dynamique des pouvoirs temporel et spirituel qui est une invention chrétienne et qui marque encore notre époque. Il y a scission dans l’ordre même du pouvoir souverain puisqu’il y a désormais une médiation seconde assurée par l’Église : sa mission

IDÉESPHILOSOPHIE POLITIQUE ET RELIGION

22 FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009

Propos recueillis par Alexandre DA SILVA

Dominicain, le Père Bernard Bourdin est professeur à l'Université Paul Verlaine-Metz où il est responsable du master « Théologie, anthropologie et philosophie ». Il est connu et apprécié de ses pairs pour ses analyses sur les enjeux anthropologiques et philosophiques de la présence du christianisme en régime de démocratie libérale.

La médiation chrétienne en question

Propos recueillis par Alexandre DA SILVA

FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009 23

)

spirituelle est d'annoncer le règne escha-tologique du Christ tandis que le pouvoir politique se trouve assigné à une finalité exclusivement temporelle.

Il en résulte un imaginaire nouveau, les chrétiens prenant le relai du mythe de l’Empire. Surtout, l’Église devient une religio, alors qu'elle ne l’est pas conatu-rellement : il n’y a de religion que ce qui est informé par la foi. L’idée de sacralité est également touchée profondément, même si l’Église établit un statut sacral. Le roi "sacré", par exemple, n’est plus un homme comme les autres : ce n’est pas un clerc mais l’onction le protège, sa mise à mort est un sacrilège. Mais dans le même temps, le roi de France ou d’Angleterre n’est qu’un homme: la réception chrétienne du sacré fait que ce roi n’est pas divinisé. Mais c’est une personne publique qui a fait le serment de promouvoir la justice et de protéger l’Église.

Certains en concluront que celui qui est infidèle à son serment peut être mis à mort... Vous savez que c’est un frère coopérateur dominicain qui assassine Henri III : pour ce religieux, ce n’est pas scandaleux de mettre à mort un héré-tique, un homme qui transige avec les protestants alors qu’il a fait serment de protéger l’Église catholique.

Au XVIe siècle, la médiation chré-tienne devient une question brûlante. La dynamique constantinienne d’une Église se concevant comme un vaste empire ne fonctionne plus depuis longtemps. Déjà au Moyen Âge, la médiation chrétienne est mise en question : entre chrétiens, on n’est pas nécessairement d’accord sur le rôle du pape. La médiation ne cesse d’être retravaillée jusqu’au moment où cela ne suffit plus : d’où le protestan-tisme et son retour à l’Écriture. Dès lors, il n’y a plus de chrétienté unifiée en Occident. Donc il n’y a plus d’accord sur la manière de comprendre la foi dans le Christ médiateur. On n’est plus d’accord sur la manière d’en assurer la pérennité :

autrement dit, on n’est plus d’accord sur le rôle de l’Église. Conséquence poli-tique : on vivait sur un rêve unitaire multiséculaire et on se retrouve à deux (au minimum, car il y a le catholicisme et plusieurs formes de protestantisme) sur le même territoire. La question de la médiation devient alors très problé-matique.

n Ce qui a des conséquences dans le domaine temporel...

On voit en effet se mettre en place deux logiques : celle de la raison d’Église et celle de la raison d’État. Il y a Machiavel bien sûr. Mais je pense aussi au cardinal de Richelieu, qui incarne au plus haut point le théologico-politique puisqu’il est à la fois évêque et ministre. Pour Richelieu, son salut personnel passe par le salut de l’État. C’est un point de vue qui est récusé par d’autres catho-liques : les dévots, qui sont les héritiers de la Ligue et qui sont pour la raison de l’Église.

Par rapport à ce divorce entre catho-liques, les rois garantissent la médiation au service de l'unité du corps politique: les divisions entre catholiques et avec les protestants sont ainsi surmontées : c’est l’apothéose de la théorie du droit divin, qui accompagne le principe de catholicité érigé au XVIe siècle. En d’autres termes, l’État apparaît comme manifestation juridico-politique de rassemblement : puisque les chrétiens ne sont plus capables de se rassembler dans l’unicité de foi, c’est le Politique qui va devenir le lien principal qui réunit protestants et catholiques. C’est le « parti des politiques » qui va triom-pher. Mais c’est au prix d’un sacrifice : le beau rêve médiéval s’effondre car

la médiation étatique rivalise avec la médiation de l’Église.

Au XVIe siècle, les procédures théo-logico-politiques de légitimation, qui prennent leurs sources dans les textes bibliques, seront utiles sur le moment pour réaffirmer la légitimité royale et sortir des guerres de religion. Mais on reste dans un monde religieux, avec deux christianismes transversaux : chez les catholiques comme chez les protestants, on trouve des partisans de l’État et des partisans de l’Église qui sont quant à eux des esprits beaucoup plus cléricaux. Les outils conceptuels des juristes ne suffisent plus et ce sont les philosophes qui vont s’efforcer de fonder la société et l’État sur d’autres bases – non sans prendre en considération les questions religieuses.

n D’où l’importance de Hobbes...

Hobbes appartient à un pays qui a fait un schisme et où l’Église est très contestée. Il connaît bien la situation de l'absolutisme français, il y a vécu en exil dans le contexte de la Fronde. D’ailleurs, la France est beaucoup plus hobbesienne que l’Angleterre, pays naturellement libéral, qui se reconnaît dans la philosophie de John Locke. On a fait de Hobbes un monarchiste, mais ce n’est pas son problème : après Bodin, Hobbes pense la souveraineté, qui peut valoir dans une monarchie comme dans une république. Dans les années 1650, Hobbes pense que Cromwell incarne le mieux la souveraineté au sens où il l’entend dans Le Léviathan.

Pour Hobbes, la souveraineté doit être pensée sur des bases ration-nelles, séculières, selon des lois natu-relles formulées par les individus. On

Deux logiques, celle de la raison d'État et celle de la raison d'Église

Bernard Bourdin

La médiation chrétienne en question

24 FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009

IDÉESn’ira jamais plus loin que Le Léviathan quant à la définition d’un État média-teur. Ce faisant, Hobbes a clairement conscience qu’on ne peut pas fonder un État souverain sur les seules bases rationnelles. Il faut penser un rôle positif pour la religion. Les autres philosophes partagent la même conviction : Locke, Spinoza et Rousseau ne sont pas des athées (sauf au sens du XVIIe siècle pour désigner en particulier les liber-tins) et sont convaincus de la nécessité de la religion. Or la religion a une face négative (les conflits entre chrétiens) qu’il faut effacer pour faire apparaître la face positive. Hobbes affirme que les maximes chrétiennes qui concer-nent la justice et la charité favorisent la concorde entre tous et permettent d’avoir des citoyens obéissants. Mieux : contrairement aux déviations papistes et calvinistes fustigées par Hobbes, l’exégèse du texte biblique montre que le christianisme bien compris peut très bien s’accorder avec l’État. Toute auto-rité vient de Dieu, comme l’enseigne Paul, et le christianisme peut apporter un soutien fondamental au souverain, qui est un « petit dieu en terre ». Le

souverain est un pasteur qui édicte la vérité chrétienne car c’est le meilleur moyen de conjurer la division entre les citoyens. Ce qui justifie pour Hobbes que l’Église soit une communauté politique, et que la communauté politique soit une Église.

Le moment hobbesien est pour cette raison celui d’un changement de paradigme : il marque l’avènement des sociétés séculières qui se sont consti-tuées au XVIIe siècle pour résoudre le problème des guerres de religion. Les sociétés se sont structurées sur leurs propres bases parce que la religion ne permettait plus un accord entre les croyants puisque chacun était convaincu d’avoir la vérité sur la vraie foi. En même temps, les philosophes pensent qu’on a besoin d’une religion unificatrice dans la sphère publique. Mais la pensée de Hobbes ne permet pas de résoudre tous les problèmes : la doctrine trinitaire est incompatible avec une philosophie de la souveraineté. Il lui faut donc neutraliser ce qu’il y a de subversif dans le christia-nisme. D’où son philosémitisme : il serait tellement plus simple de revenir à un pur monothéisme, qui permettrait que la

médiation fonctionne complètement du côté de l’État et que la foi soit complè-tement rattachée à la sphère publique !

n Et Locke ?

Locke résout la question en pensant, le premier, la séparation entre l’Église et l’État – mais à condition qu’on soit d’accord sur le fait que nos obligations morales viennent de Dieu, déclarateur de la loi naturelle. Telle est la position libérale de Locke qui est à la naissance du libéralisme, mais sa philosophie est très différente des discours libéraux contemporains: chez Locke, l’individu libéral est complètement lié à des obli-gations divines : pour être un sujet moral, il faut un fondement théologique. Pour être libre, autonome, il faut qu’il y ait Dieu. Mais le "Dieu" de Locke se rattache au déisme, même s'il est d'inspiration chrétienne.

Le libéralisme philosophique pose dès lors en termes modernes les rela-tions complexes entre le politique et la religion chrétienne, qui n’a eu de cesse de promouvoir sa médiation sous des formes très diverses mais qui ne peut pas être une religion de plein exercice comme l’était la religion romaine parce que le christianisme est d’abord une foi. Il ne peut pas englober la société comme n’importe quelle autre religion. Ainsi, le christianisme est en pleine convergence avec le monde moderne, laïc, sécu-lier, par la logique de séparation qu'il promeut. Mais c'est aussi ce qui lui pose un problème car la modernité politique a du mal à admettre le christianisme qui se trouve dans une situation compli-quée : il peut aider la sphère publique à exister car, comme toute religion (de ce point de vue) il ne peut être cantonné dans la sphère privée ; mais les Églises ne doivent pas imposer leurs conceptions morales dans la sphère publique. Tel est le problème auquel nous sommes aujourd’hui confrontés. Vaste défi pour la médiation chrétienne et l'avenir des sociétés séculières! n

Bernard Bourdin, La médiation chrétienne en question, les jeux de Léviathan, Le Cerf, 256 pages, 29 e

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IDéESRADIO NOTRE-DAmE

lundi 7 septembre

Au moment où Benoît XVI se rendait à Viterbe et, non loin de là, sur le tombeau de saint Bonaventure, les militants de l'UMP et du Parti démocrate achevaient leurs universités d'été, comme il est coutume de le faire dans cette période de rentrée. Est-il permis d'aller au-delà de la simultanéité pour trouver un objet commun à ces deux événements ?

Après tout, nos politiques avaient pour but de réfléchir sur les grands problèmes du moment. Le mot d'université renvoie bien à l'étude, à la recherche, avec l'ambition de faire les choses sérieusement en se met-tant éventuelle ment à l'école des meilleurs des maîtres. Alors là, oui, un rapproche-ment est possible avec le Pape puisque ce dernier voulait rendre hommage à un grand docteur du Moyen Âge, un de ces penseurs qui, avec Thomas d'Aquin, firent la gloire de l'université du XIIIe siècle.

L'étudiant Joseph Ratzinger s'était, dans sa jeunesse, beaucoup intéressé à Bo-naventure, disciple de saint François d'As-sise, plus sensible que Thomas à la dimen-sion historique et, pour cela, précurseur des courants modernes. Benoît XVI a in-sisté sur la nécessité du travail intellectuel dans l'Église à la suite d'un tel précurseur. C'est une conviction profondément ancrée chez lui qu'il a déjà longuement explicitée dans ses interventions fameuses de Ratis-bonne, en 2006, et des Bernardins il y a un an. Nous nous en souvenons tous. Même pour le christianisme fidèle d'abord à la règle de la foi, la raison est capitale. Elle l'est sous un autre mode pour la politique et pour les jeunes qui veulent se consacrer au bien de la Cité. N'a-t-on pas répété à satiété que les idées menaient le monde ? Alors il faut souhaiter aux universités d'été d'accomplir pleinement leur tâche même si on a souvent l'impression qu'elles n'échap-pent pas à la mise en scène politique et à un spectacle où les dirigeants hâlés, bron-zés sont surtout là pour briller devant les caméras de télévision.

Dernièrement, notre collègue Alain Du-hamel, a formulé un diagnostic très sombre sur le déclin intellectuel de la politique. Les Jean-Paul Sartre, Raymond Aron, François Furet auraient disparu sans être remplacés

par des autorités équivalentes. Et les poli-tiques s'intéresseraient de moins en moins aux grands débats de fond, préférant le pragmatisme aux idéologies. Je ne suis pas aussi pessimiste qu'Alain Duhamel, au moins en ce qui concerne nos intellectuels. Nous avons des chercheurs de grande va-leur en différents domaines même s'ils ne disposent pas de l'aura des siècles passés. Le malheur c'est que les politiques ne leur prêtent pas suffisamment d'attention. Or la gravité des questions posées aujourd'hui, notamment par toutes les dimensions de la crise profonde que nous vivons, exige un examen fondamental des choix qu'il faudra opérer.

Est-il nécessaire d'ajouter que les chré-tiens participent à cette recherche com-mune et que Benoît XVI les y encourage vigoureusement ? Alain Du ha mel laissait croire dans son diagnostic que la pensée sociale de l'Église avait connu ses beaux jours dans les années 50. Aurait-il oublié les grands textes de Paul VI avec l'inter-vention de ce géant de la pensée mo-derne qu'était l'économiste chrétien Fran-çois Perroux ? A-t-il oublié Jean-Paul II à l'heure de Solidarnösc en Pologne ? A-t-il entendu parler de la dernière encyclique de Benoît XVI sur la question sociale. Non, les chrétiens ne sont pas intellectuellement et physiquement démobilisés et, pour tous, devrait sonner le réveil de la pensée.

mArdi 8 septembre

Le samedi 12 septembre, le collège des Bernardins accueille un colloque, organisé entre autres par le psychologue et psy-chanalyste Jacques Arènes, sur le thème « réinventer la culpabilité ». Cela me rap-pelle un journaliste danois, que j'ai connu autrefois quand il était correspondant à Paris d'un quotidien de Copenhague. Il s'appelait Henrik Stangerup. Et il était aussi excellent romancier. Je fus vivement inté-ressé par son livre qui avait été traduit en français sous le titre L'homme qui voulait être coupable. Étrange non ?

La matière du roman l'était encore beaucoup plus. Il s'agissait en effet de

l'histoire d'un homme qui avait eu l'insigne malheur d'assassiner sa propre femme. Peut-on concevoir pire tragédie person-nelle que celle-là ? Mais ce n'était pas de cette tragédie du meurtre de l'épouse qu'Henrik Stangerup avait tiré la trame de son roman mais d'une autre tragédie proprement moderne, contemporaine. La tragédie d'un homme auquel on refuse sa responsabilité de criminel. Lui veut confes-ser son crime devant la justice mais la so-ciété le lui interdit : « Non Monsieur vous n'êtes pas coupable de ce meurtre. Vous avez été le jouet des circonstances, de vos propres pulsions dont vous ne pouviez as-sumer la maîtrise. À la vérité, vous n'avez pas commis de crime, vous avez été l'objet d'un processus mental qui a enchaîné votre volonté et vous êtes innocent. »

Le pauvre homme se défend. Il n'a aucune fierté à avoir accompli cet acte abominable. Mais à vouloir abolir sa res-ponsabilité on le prive de sa liberté la plus profonde et donc de son humanité même. Une armée de psy s'acharne sur lui : « Ad-mettez que vous n'êtes pas coupable. » Lui se défend mordicus car il sait, au fond de sa conscience, qu'être coupable, si insup-portable que ce soit moralement, confère à la personne une terrible dignité. Être coupable cela signifie être cause de. Être cause d'un crime en l'espèce. S'il n'est plus la cause ou le sujet de l'acte qu'il a commis il n'est plus rien. On a détruit son âme alors même qu'on voulait prétendument le tirer d'affaire, au nom d'une théorie qui est la négation même de la nature humaine.

Cette parabole à mon sens n’a pas vieilli. Un quart de siècle après la parution de L'homme qui voulait être coupable. Car nous sommes toujours aux prises avec la menace de l'abolition de la liberté, sous le poids de tous les déterminismes so-ciaux, culturels, psychologiques qui pèsent comme une dalle de plomb sur l'affirma-tion souveraine de notre libre arbitre.

Je ne ferai pas ici le bilan de tous les systèmes intellectuels qui se sont coalisés contre la dignité humaine en se présentant souvent sous les couleurs de l'émancipa-tion et de la libération. Mais tout de même,

N'a-t-on pas répété à satiété queles idées menaient le monde ?

Chroniques de Gérard Leclerc

(FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009 25

je constate ce que Bernanos appelait « une conspiration généralisée contre les âmes » qui s'est bel et bien renforcée sous l'effet de pensées prétendument critiques qui veulent anéantir ce qui fait le propre de notre humanité : la relation aux lois non-écrites d'Antigone, à celles du Décalogue et même celles des Béatitudes.

Peut-être qu'un certain concept d'amour-propre paradoxalement né au XVIIe siècle a abouti sous les coups d'un utilitarisme souvent hédoniste à l'extinc-tion du sujet moral.

merCredi 9 septembre

La dernière fois que j'eus l'occasion d'interviewer le cardinal Jean-Marie Lusti-ger - c'était pour son quatre-vingtième an-niversaire - je lui demandais quel souvenir il avait gardé de son premier entretien avec le pape Jean-Paul II. Je ne pus m'empêcher de lui faire remarquer qu'il y avait quelque chose de fascinant dans la rencontre entre le pape venu de Cracovie et l'archevêque de Paris dont la mémoire était indéfecti-blement marquée par la tragédie qui s’était accomplie en Pologne sur les terres même de l'ancien métropolite de Wavel.

Je ne le formulais pas évidemment dans ces termes, me contentant de dési-gner le cœur névralgique de l'Europe. Or ce cœur, partie intégrante de l'empire des Habsbourg. Le propre père du pape polo-nais avait servi dans l'armée de l'empereur Charles d'Autriche. Lorsqu'il reçut l'impé-ratrice Zita au Vatican, Jean-Paul II ne manqua pas de rappeler ce fait : le destin de l'Europe s'est noué dans cette Europe centrale, cette Mitteleuropa où avait été déclenchée avec l'attentat de Sarajevo, la Première Guerre mondiale. Faut-il rappeler que l'assassinat de l'archiduc François-Fer-dinand devait décider de l'avènement du petit neveu de François-Joseph qui deve-nait ainsi le successeur de l'empereur ?

Le court règne de l'empereur Charles déboucha sur la fin de l'Empire des Habs-bourg, on l'a rappelé ce matin, mais de cette fin malheureuse résulta la grande tragédie de la Seconde Guerre mondiale. Comme le dit Jean Sévillia, on ne voulait plus des Habsbourg mais les peuples d'Eu-rope centrale ont subi Hitler et Staline. De la déflagration du grand empire central résulta la ruée totalitaire. Faut-il rappeler

qu'Hitler et Staline se mirent bel et bien d'accord pour se jeter sur la Pologne et y déployer l'un et l'autre leurs desseins cri-minels ?

Lors des obsèques de l'impératrice Zita à Vienne, le 1er avril 1989, fut réitérée la cérémonie si émouvante qui marquait l'en-trée de la défunte dans la chapelle des Ca-pucins, là où reposent les membres de la dynastie. Joseph Roth, le grand romancier autrichien, a mis en valeur dans son livre célèbre intitulé précisément La chapelle des Capucins, ce rite où l'impératrice, après avoir décliné tous ses titres - et Dieu sait s'ils sont nombreux - demande l'accès à sa sépulture au titre d'humble pécheresse. Mais parmi les titres de l'impératrice il en est un qui apparaissait saisissant au regard de l'histoire. C'est celui, me semble-t-il, de duchesse d'Auschwitz. Les téléspectateurs français avaient pu à l'époque suivre la cé-rémonie commentée par notre actuel mi-nistre de la Culture, lequel avait d'ailleurs su rendre parfaitement le sens de cette entrée de Zita dans la nécropole des Habs-bourg.

Je me suis fixé sur cette image mais elle me semble hautement symbolique. Charles et Zita d'Autriche-Hongrie, si inti-mement liés à notre destin européen nous renvoient aussi à la signification du prince chrétien. Ce couple si uni, si évangélique dans son comportement et sa mission politique, nous indique en quoi il y a une modification chrétienne du politique qu'un philosophe a pu traduire comme une ké-nose christique. Ce mot de kénose, qui est paulinien et qui signifie l'abandon total de soi au service du prochain, peut conduire en certaines circonstances à l'héroïsme de la sainteté.

Je fais des vœux fervents, dans une to-tale confiance au discernement de l'Église, pour que ce couple admirable soit recon-nu à l'exemple de Louis et Zélie Martin, comme des modèles et des intercesseurs pour le service d'une Europe qui oserait as-sumer son identité réelle.

Jeudi 10 septembre

Ce jeudi matin, Louis Daufresne a in-vité Guy Baret (Georges Daix l'interviewera la semaine prochaine dans France Ca-tholique) à propos de son Plaidoyer pour Benoît XVI (éd. Alphée-Jean-Paul Ber-

trand) et Isabelle de Gaulmyn, chef du service religion au quotidien La Croix et auteur d'un Benoît XVI, le pape incompris (éd. Bayard). C'est l'occasion de rappeler la violente campagne anti-papale du début de cette année 2009 [...] qui manifesta une sorte d'unanimité dans la réprobation et l'indignation y compris de la part de ceux qui auraient dû être les mieux avertis du fait de leur culture contre ce type de folie collective. Le slogan « J'ai honte d'être ca-tholique ! » a alors fait fortune même chez les intellectuels avisés qui s'y sont ralliés. Il était presque impossible de modérer par quelques raisons ce qui s'apparentait à une sorte de contagion collective incontrôlable.

Que devenait notre pape Benoît XVI dans cette affaire ? Un pape réactionnaire qui voulait revenir en arrière, complaisant à l'égard d'un groupe extrémiste et même antisémite. On est allé jusqu'à mettre en cause son passage dans les jeunesses hit-lériennes et à l'accuser de complaisance pour le négationnisme. Je n'invente rien. Il faut signaler à ce propos le rôle pervers de l'hebdomadaire de Hambourg, Der Spiegel, qui n'a cessé de toutes les façons d'alimen-ter cette campagne en intoxicant l'opinion allemande, particulièrement sensible à sa démagogie.

Je dois redire que l'intoxication était encore plus sévère dans les milieux qui se piquaient de culture. J'ai lu sur le site du journal Le Monde toute une discussion où on expliquait gravement que Joseph Rat-zinger était en philosophie politique le dis-ciple de Carl Schmitt, ce juriste catholique qui s'était rallié à Hitler dans la première phase de la prise de pouvoir par les na-zis. Tout cela était extravagant, de la folie pure, mais se comprenait dans le processus violent d'une vague médiatique qui sup-prime toutes les censures et coalise toutes les vindictes contre la victime émissaire.

Évidemment ce genre de vague retombe brusquement, encore plus vite qu'elle ne s'est emballée. En conclura-t-on à plus de sagesse ? J'ai pu constater à quel point les médias ignoraient la vraie personnalité de Benoît XVI, avaient des idées toutes faites sur son passé, son rôle de théologien, ce qu'il avait fait à Vatican II, sa mission au-près de Jean-Paul II, enfin sur les orienta-tions précises de son pontificat. N'est ce pas du point de vue de notre profession, un problème de déontologie élémentaire qui se pose ?

26 FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009

J'ai pu constater à quel point les médiasignoraient la vraie personnalité de Benoît XVI

IDéES

((à suivre)

Étant donné que cet article me met nommément en cause, je me permets de vous envoyer quelques observations.

1) On y lit que « le secret de 1851 ne figure pas dans les travaux du Père de la Salette Jean Stern : la Salette, Documents authentiques en trois volumes », dont le dernier est paru « en 1991 ». Appartenant au commun des mortels, je n’avais pas accès, en 1991, aux archives du Saint-Office, où sont conservées les deux lettres de 1851, supposées contenir des secrets confiés par la sainte Vierge aux deux enfants de la Salette, Maximin et Mélanie. Ces archives n’ont été ouvertes aux chercheurs que cinq ou six années plus tard.

Les deux prêtres qui, le 18 juillet 1851, avaient remis au bienheureux Pie IX ces deux lettres, rapportèrent à Mgr de Bruillard, évêque de Grenoble, qu’elles l’avaient impressionné favorablement. C’étaient de saints prêtres, mais, dans leur émotion face au Souverain Pontife, ils s’étaient trompés sur la véritable pensée de ce dernier. Son jugement fut négatif. La documentation conservée est très nette sur ce point.

Les deux lettres en question sont deve-nues accessibles maintenant. Le lecteur peut constater que le message proprement dit de la Salette, au cœur duquel se trouve le Christ Sauveur, est absent. On se trouve face à toutes sortes de prédictions, à propos desquelles le lecteur se demande : mais pour-quoi les tenir secrètes ? Rien d’étonnant que Pie IX ait été mal impressionné.

2) Pour ce qui concerne Jacques Maritain : voici une soixantaine d’années, il m’a ouvert à saint Thomas. J’ai donc une dette de reconnaissance envers lui. Malheureusement il pose mal le problème « Mélanie ». Déjà l’historien H.I. Marrou le pensait. « Massignon et Maritain ont été mes maîtres avant d’être mes amis, j’ai pour eux autant d’affection que de respect, mais réel-lement sur ce point », il s’agit de Mélanie, « je ne puis absolument pas les suivre ». Voilà ce qu’on lit dans une lettre de Marrou, datée du 17 novembre 1951 et adressée au Père Jean

Jaouen, auquel on doit la première étude critique publiée sur La Salette.

D’après Jacques Maritain, mettre en doute le témoignage de Mélanie au sujet du secret, c’est rendre très douteux son témoi-gnage au sujet de l’apparition et du message public. Aux yeux de beaucoup de gens d’Église, chargés du discernement, les choses sont plus complexes. Une réflexion de Pie IX au sujet de dangers que peuvent présenter pour de jeunes bénéficiaires d’une apparition certains contacts, nous est connue grâce à une note de sa main, de 1853, concernant les témoins d’une apparition : « Pensez à ceux qui tiennent en main l’éducation des adolescents, et auxquels vous confiez leurs esprits fragiles .»

3) Pie IX suggéra explicitement à Mgr Ginoulhiac, évêque de Grenoble depuis 1853, de soumettre l’apparition à un nouvel examen. Mgr de Bruillard, démissionnaire pour raison d’âge, l’avait expressément demandé comme successeur. C’était une intelligence brillante. Il fit rassembler systé-matiquement la documentation. Son examen porta également sur les enfants, dont la conduite faisait problème. Sa conclusion sur Mélanie se situe dans l’axe de l’avertis-sement formulé par Pie IX : certains contacts qu’elle a eus lui ont fait du mal (Instruction pastorale du 4 novembre 1854). Cependant durant l’apparition du 19 septembre 1846, les deux voyants avaient effectivement reçu des secrets. D’après le curé de La Salette, Louis Perrin, il s’agissait tout simplement de conseils donnés par la Vierge à chaque enfant personnellement. Son opinion me paraît parfaitement raisonnable.

4) L’article paru dans France Catholique cite un rapport de Jacques Maritain sur la Salette et Mélanie, remis au Saint-Siège en 1947. Ce rapport, qui met en cause les Pères de La Salette, est cité d’après une thèse de doctorat soutenue devant l’Université Saint Thomas d’Aquin, de Rome. En avril 1985, j’ai eu la faveur de pouvoir consulter les archives Maritain à Kolbsheim. Le responsable de ces archives, Mr Mougel, m’a alors montré la réponse du Saint-Office à JM, transmise par la Secrétairerie d’État en 1951. Elle n’était pas favorable à la position de JM. L’auteur de la thèse semble ignorer cette réponse.

Beaucoup plus étonnant encore, dans cette thèse, est une autre absence : celle du

rapport qui prépara le décret porté par le Saint-Office, en décembre 1915, sur le secret de La Salette. Le rapport figure en effet dans le dossier auquel l’auteur de la thèse a eu accès. Il aurait certainement intéressé le jury d’une université dirigé par les Dominicains. Ce rapport avait en effet été préparé par une gloire de l’Ordre dominicain, le bienheureux Cormier, agissant en qualité de consulteur. Cormier se montre extrêmement sévère pour les partisans du secret.

5) Mais revenons à Jacques Maritain et aussi à son épouse Raïssa. Leurs œuvres (Carnet de notes, Grandes amitiés) montrent qu’ils prenaient le message de La Salette très au sérieux, indépendamment des secrets ou plutôt pseudo-secrets. Au cœur de ce message se trouve le Christ Sauveur. Il y a par conséquent lieu de penser qu’ils n’au-raient guère apprécié le résumé suivant, qu’on lit dans une récente notice sur La Salette : « Vous, les paysans, vous travaillez le dimanche ; vous les charretiers, vous jurez par le nom de Dieu », etc. Le message public de La Salette ainsi aplati n’est plus qu’un épouvantail, utile pour susciter par contraste de l’intérêt pour le trop fameux secret. C’est la dynamique qui joue dans les religions à mystères ou le gnosticisme, avec marginali-sation du Christ.

Lors d’un colloque tenu à l’École française de Rome en novembre 2002, on a soutenu que Maritain s’est approché de la Salette à travers l’ésotérisme. C’est là une voie apparentée aux religions à mystères. Chez beaucoup de partisans de notre pseudo-secret, l’intérêt pour ce dernier tient, effecti-vement, à une mentalité ésotérique, curieuse de pénétrer l’avenir. Mais il en va autrement pour Maritain. Mme Grunelius m’a confié que JM lui avait demandé de détruire le commen-taire du secret qu’il avait composé, estimant que ce commentaire n’était pas mûr. Est-il téméraire de supposer que cette démarche lui ait été inspirée par son sens chrétien, qui lui faisait saisir qu’il y avait là quelque chose qui n’allait pas ? Quoi qu’il en soit de Jacques Maritain, en cette année jubilaire du saint curé d’Ars, il convient de rappeler que celui-ci fut le premier à prendre conscience, à l’occasion de sa rencontre avec Maximin en 1850, que, dans ce que pouvaient dire les témoins de notre apparition, il y avait un sérieux discernement à opérer. n

DROIT DE RÉPONSE

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Quelques remarques à propos de « Maritain et La Salette », par Don Patrick de Laubier, paru dans France Catholique n°3175 (24 juillet 2009), p.13.

Maritain et La Salettepar Jean STERN, m.s.

28 FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009

FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009 29

Dans les ruelles du Vieux-lyon, les pro-meneurs et les touristes lèvent le nez pour admirer les vieilles bâtisses. Mais rares sont ceux qui peuvent y pénétrer pour détailler cour, traboule,

escalier à vis, fenêtres à meneaux, décors ou plafonds des XVIe et XVIIe siècles. Dans le quar-

tier Saint-Jean, l’ensemble Gadagne leur offre cette possibilité. Il abrite à la fois le musée d’histoire de Lyon et celui des marionnettes du Monde. Après dix années de profonde restaura-tion – que certains jugeront drastique, mais qui permet aux personnes handicapées de circuler partout – cet ensemble Renaissance rouvre ses portes. Il est constitué de trois bâtiments, étagés sur cinq niveaux, autour de deux cours intérieures. La surface du musée passe de 3

500 à 6 300 m². 31 salles sont consacrées à l’histoire de la ville, 9 aux marionnettes.

De 1489 à 1492, les Pierrevive, de riches mar-chands ital iens, édif ient un luxueux hôtel – nommé Belregard – ainsi que des locaux nécessaires à leurs activités bancaires et com-merciales. C’est cependant les Gadagni, puissants banquiers florentins, qui laissent leur nom au lieu qu’ils habitent de 1538 à 1581. En 1654, André

Falconnet construit un nouveau corps de logis. L’ensemble est classé monument historique en 1920. De 1902 à 1941, la Ville de Lyon rachète progressivement le site. Le musée d’histoire ouvre ses trois premières salles en 1921. En 1950, c’est au tour du musée de la marionnette de s’installer sous le même toit.

Dans le dédale des salles du musée d’his-toire de Lyon, le parcours invite le visiteur à découvrir la ville aux différentes périodes, depuis la capitale des Gaules jusqu’à l’invention du cinéma. L’espace ne manque pas, au point que l’on a parfois l’impression qu’il a pris le pas sur le propos historique. Seules 1 500 pièces sont présentées sur les 80 000 qui constituent les collections du musée. Les plans, cartes, gra-vures et documents sont nombreux. Le mobilier et les tableaux, plus rares. On relèvera la pré-sence, ville de la soie oblige, d’un impression-nant métier à tisser « à la grande tire » (avant Jacquard), d’une Vierge à l’Enfant du sculpteur Coysevox, des trois clefs de la ville (1805) exé-cutées par l’orfèvre Saulnier, ou du cinéma-

expositionsMusée GaDaGne

Renaissance

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Le musée d’histoirede Lyon et celui des marionnettes du Monde

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Portrait d'Antoine Michel Perrache (18e siècle)

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à l’issue d’une restauration profonde,le Musée Gadagne rouvre ses portes pournous conter l’histoire de Lyon… et celledes marionnettes. Levons le rideau…

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Musée Gadagne

tographe (1896) des frères Lumière. Dans la foulée, la visite du musée des marionnettes du Monde se révèle moins austère. L’institution, voulue en 1950 par Henri Rivière (cinq ans plus tard le musée national des arts et traditions populaires y déposera une importante collec-tion) conserve plus de 2 000 marionnettes et autant de décors et accessoires. À tout sei-gneur tout honneur, Guignol tient une place de choix. Bientôt entouré de sa fenotte* Madelon et de son compère Gnafon, ce porte-parole de la « vox populi » a été créé en 1808 par Laurent Mourguet, canut au chômage : les pro-blèmes de « reconversion » ne datent pas d’au-jourd’hui. La sympathique marionnette, emblé-matique de Lyon, ne monopolise pas l’espace pour autant. Son confrère Pulcinella est présent pour l’Italie. une véritable invitation au voyage vous fera découvrir les marionnettes de nom-breuses contrées d’Europe, d’Asie, ou le théâtre d’ombres du « Chat noir » créé en 1885 à Paris par Rodolphe Salis. Au Musée Gadagne, Guignol entre dans l’histoire et s’ouvre au monde. ■

expositions

Renaissancepar Alain SolAri

* femme

Musée Gadagne, 1 place du Petit Collège, 69005 Lyon. Accès handica-pés au 14 rue Gadagne. Ouverture du mercredi au dimanche (11h-18h30). Tél. : 04.78.42.03.61. www.gadagne.musees.lyon.fr

« Les bords du Rhône », 1804, Charles François Nivard

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Le blasonde la ville

de Lyon

Danseur russe, XVIIe siècle, France. Polichinelle, XIXe siècle, émile Labelle, France. Guignol, 1808, Laurent Mourguet, Lyon.

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32 FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009

livres■ Un été à la mer

Giuseppe CulicchiaAlbin Michel, 222 pages, 15 e.Caricature tout ironique d’un couple qui part en

voyage de noces, Un été à la mer ne plaira pas au lecteur sans humour. la crudité de certaines descriptions montre à quel point les couples actuels s’éloignent malgré eux du sentiment de l’amour. la jeune Benedetta veut à tout prix un enfant mais ses centres d’intérêt sont aussi futiles que ceux de luca, quadragénaire particulièrement stressé, sont absorbés par les problèmes actuels de société montés en épingle par les médias qu’il lit assidûment. Il s’ensuit des aventures où quiproquos et hasards vont éloigner les deux époux qui auront bien du mal à concevoir le fruit tant dé-siré de leur union. Dommage que G. Culicchia se complaise à décrire des scènes où la pornographie atteint le sum-mum de l’insupportable. en fait son but est de montrer le néant de la vie quand l’homme est incapable de bâtir sur le long terme, de surmonter ses instincts, d’aimer tout simplement.

■ DeS SaISOnS aU BOrD De la merFrançois MasperoLe Seuil, 170 pages, 15 e.Un petit garçon ébaubi par un aïeul grand bourgeois,

un frère aîné protecteur, une maison en bord de mer bon-dée de monde où il se sent seul, telle est la situation initiale de ce roman plein de poésie où les moments heureux sont comptés pour le protagoniste qui perd à la résistance les êtres qui lui sont les plus chers. Comme les galets sont polis par la mer, le cœur du héros est fouetté par les rémi-niscences d’un passé toujours tourmenté. lui-même jour-naliste, il va s’absenter à son tour, voir de près la guerre d’algérie et, comme ceux qui l’ont précédé, ne répondre que par des silences à sa fille. Comme lui, elle aime la vie et surtout elle veut comprendre. elle connaît les mêmes désillusions mais aussi le même amour de la mer, toujours recommencée qui n’en finit pas de mourir. « moi, il me suffit de regarder la mer, et je ne m’ennuie pas » disait la grand-mère insulaire, sans dire que sa passion était la connaissance des oiseaux marins. Un amour sensuel de l’existence d’où sont exclues toutes recettes de bonheur, toutes réflexions et moyens d’espérer. toujours le même silence de la part des aînés, comme s’ils voulaient cacher les horreurs de la guerre, des amours achevés, de la mort qui rôde. C’est pourquoi mieux que quiconque le critique littéraire Frédéric Ferney définit l’auteur : « François mas-pero ou bonjour tristesse ! » Une sensibilité à fleur de peau qui n’engendre qu’émotions mais un bien beau livre !

■ en BaS, leS nUaGeSMarc Dugainéditions Flammarion, 317 pages, 20 e.Ce titre « en bas, les nuages » résume la pensée de

marc Dugain. la société n’a plus de repère. le monde est sens dessus dessous et l’homme en souffre. Sept histoires nous le démontrent. la stupidité des uns va entraîner un désir d’isolement des autres, l’insatisfaction amoureuse provoquer des situations aussi cocasses que tragiques, le snobisme révéler la bêtise humaine ; le besoin d’épater ira jusqu’à se tromper sur soi-même. Sept nouvelles qui se passent sous des cieux divers mais où la nature hu-maine reste égale à elle-même, si utopique dans tous les domaines, qu’ils soient politiques, économiques ou fami-liaux, qu’elle se désagrège. nouvelles très plaisantes où le narrateur laisse s’épancher les divers personnages avec authenticité. mais l’ironie est sous-jacente : à force de rechercher le paradis sur terre ceux-ci passent sans voir

l’essentiel, sans vivre à la mesure de ce qu’ils sont vrai-ment. rappel urgent à la réflexion, afin que les hommes regardent vers le haut et non vers le bas, car, selon marc Dugain, personne n’échappe à l’ambition, à la solitude et à la mort, même Dieu !

■ COmPOSItIOn FranÇaISeRetouR suR une enfance bRetonneMona Ozouféditions Gallimard, 259 pages, 17,50 e.les titre et sous-titre du livre de mona Ozouf contien-

nent à eux seuls le cheminement de la pensée de l’auteur. en quête de l’identité de notre pays à une époque où ré-gionalisme et mondialisme se confrontent avec trop de simplisme, mona Ozouf se replonge dans l’enseignement diversifié de son enfance pour y trouver, avec le plus de probité possible, une réponse qui nous mène à notre propre identité, à savoir « la composition » de notre histoire contemporaine. Originaire d’une famille « superlativement » bretonne, son père a besoin de se démarquer, adhère tout à la fois au parti communiste et à celui de la Bretagne indé-pendante. Sa mère, institutrice, est soucieuse de faire ré-gner la culture républicaine. mona Ozouf est fière de cette famille où elle puise assurément la liberté de pensée. mais elle souffre pour sa Bretagne empreinte à la fois d’un dé-sir de tradition et de progrès. elle se souvient que c’est à l’école de Ferry qu’elle doit ce sentiment d’égalité dû aux seuls mérites personnels et non à l’héritage. elle aime cette grand-mère maternelle pleine de fierté féminine et d’amour pour le genre humain. au-delà de la pratique religieuse trop rigoriste de son autre grand-mère, elle cherche à s’infor-mer. ainsi par son enracinement et par son ouverture sur le monde, mona Ozouf se méfie des pensées niveleuses et uniformes. elle défend ses racines et ses particularités pour mieux atteindre l’universel. Harmonie du local et du national, désir d’appartenance et d’indépendance, l’histoire des provinces est comme celle du cœur humain : besoin de reconnaissance, de créativité, d’identité. C’est ainsi que la France se compose peu à peu. Sans l’énoncer, mona Ozouf se réfère au principe de subsidiarité qui veut que le travail d’unification se réalise, « non pas despotiquement du haut vers le bas, mais librement du bas vers le haut ».

■ HOrS CHamPSylvie GermainAlbin Michel,196 pages, 15 e.le jeu de Sylvie Germain entre réalisme et idéalisme

est bien connu. Dans son dernier livre celle-ci ajoute à ses talents de poète ceux d’un fin psychologue. Son héros, dénommé aurélien, est plus précisément le prototype de l’anti-héros. le livre commence par une image Kafkaïenne : aurélien se réveille avec le sentiment d’ « un gros insecte, un crabe, une tortue » sur l’abdomen. Dans son apparte-ment tout part en désuétude. Seules lui importent la ré-paration d’une vieille visionneuse pour soulager d’images un frère paralysé et l’impression du journal intime de ce dernier avant qu’il n’ait été réduit à perpétuité à un esprit inerte. aurélien fait partie de ces êtres contemplatifs et aimants à tel point qu’il se dénigre lui-même et se fait ou-blier de tous. C’est alors qu’une métaphore filée transcrit petit à petit son départ progressif de la terre où il souffre trop de la « goujaterie générale » et ne trouve plus sa place. a l’opacité d’un monde certes joyeux d’apparence mais où rôdent ennui et mélancolie s’opposent la lumière des yeux du paralysé, des images d’enfance enneigée, « un chant du monde » prometteur qu’aurélien aurait voulu perpétuer. livre conseillé pour ceux qui ignorent comme aurélien que « l’éternel est un combat ». ■

SELECTION

Romanspar Brigitte CLavEL

CINéMA

Ils sont tous d’origine étrangère (polo-naise, hongroise, espagnole, etc.) et ont fui la dictature de leurs pays pour

se réfugier dans la patrie des droits de l’homme. Juifs, pour la plupart, ils sont tous communistes. Sous la houlette du poète arménien Missak Manouchian, ils vont harceler les Allemands et tuer, au hasard, des soldats et des officiers. Délaissant ses comédies légères (« Marius et Jeannette »), Robert Guédi-guian s’est attaqué à l'histoire du réseau des FTP-MOI. Parce qu’il est d’origine arménienne et communiste, on com-prend ce qui l’a intéressé dans cette his-toire d’étrangers qui défendent le pays les ayant accueillis. Cette histoire drama-tique est mise en images avec sobriété et force, et elle est servie par des comédiens

sensationnels. Simon Abkarian trouve, enfin, un rôle de premier plan et, outre son extraordinaire ressemblance avec Manouchian, il confère à cette œuvre la puissance de celui qui est prêt à tous les sacrifices (y compris celui de violer son tempérament pacifiste) pour la liberté. Cette œuvre belle, poignante et d’une grande puissance dramatique est, sans doute, la meilleure de Robert Guédiguian. Le courage et l’abnégation de ces jeunes résistants forcent le respect. Mais il est dommage que le réalisateur ne re met te jamais en cause leur mode d’opération. Car ces crimes gratuits n’ont pas changé le cours de la guerre et eurent des conséquences dramatiques pour la

population. Signalons le bel amour du héros pour sa femme, illustré par la lec-ture de sa magnifique lettre d’adieu, avant son exécution, lettre dans laquelle il écrit n’avoir nulle haine pour le peuple allemand. ■L’armée du crime. Drame français (2009) de Robert Guédiguian, avec Simon Abkarian (Missak Manouchian), Virginie Ledoyen (Mélinée Manouchian), Robinson Stévenin (Marcel Rayman), Grégoire Leprince-Ringuet (Thomas Elek), Lola Naymark (Monique Stern), Yann Tregouët (le commis-saire David), Ariane Ascaride, Jean-Pierre Darroussin (2h19). (Grands adolescents.) Sortie le 16 septembre 2009.

The september issueGrande prêtresse de la mode, Anna Wintour, rédactrice en chef du « Vogue » américain depuis 1988, fait et défait des réputations dans ce milieu. Pendant huit mois, le documenta-riste R. J. Cutler l’a suivie, tout au long de la préparation du numéro de septembre. Même s’il n’y est jamais fait allusion, on ne peut s’empêcher de penser au « Diable s’habille en Prada », où, sous un autre nom, Anna Wintour était présentée comme un tyran. Sans doute a-t-elle autorisé ce tournage pour rétablir un peu la vérité. Il reste que cette plongée au cœur de cet empire journalistique est fascinante et montre bien l’opposition qu’il y a, comme partout, entre art et commerce. Il y a quelques éléments émouvants dans ces témoignages, en particulier celui de Grace Coddington, la principale collaboratrice d’Anna Wintour. M.-C. R. A.

Documentaire américain (2008) de R. J. Cutler, avec Anna Wintour, Grace Cod-dington, Thakoon Pa nichgul, Andre Leon Tal-ley, Jean-Paul Gaultier, Karl Lagerfeld, Sienna Miller (1h28). (Adolescents.) Sor-tie le 16 septembre 2009.

District 9Une armée en déroute, venue d’une autre pla-nète, est arrivée, dans un vaisseau spatial, au-dessus de Johannesburg. Ses occupants sont parqués dans un camp, le district 9. Aujourd’hui, alors que l’on tente de trouver le moyen de faire marcher l’arsenal se trouvant dans le vaisseau, les extraterres tres doivent être déplacés dans un autre camp. Premier film d’un réalisateur d’Afrique du Sud et produit par Peter Jackson, ce film a l’ambition de révolutionner la science-fiction. Il y réussit en partie, grâce à une mise en scène inventive, avec des effets spéciaux bien maîtri-sés. Surtout, la première partie, quasi docu-mentaire, rappelle le régime de l’apartheid et sa peur de l’autre et de sa différence. Il y a quelques violences inévitables, mais ce film de "SF" respecte les règles du genre, avec les bons et les méchants.

M.-C. R. A.Science-fiction américaine (2009) de Neill Blomkamp, avec Sharlto Copley (Wikus van der Merwe), David James (Koobus), Jason Cope, Vanessa Haywood (1h50). (Adoles cents.) Sortie le 16 septembre 2009.

Julie et JuliaJulia Child, qui a découvert la cuisine française à Paris en 1948, est devenue une star aux USA, grâce à ses livres et à une émission de télévision. Elle a appris aux Américaines les subtilités de la cuisine française. En 2002, Julie Powell ouvre un blog, dans lequel elle raconte, au jour le jour, comment elle réalise les 524 recettes du livre de Julia en 365 jours. Ces deux histoires authentiques se mêlent en un

va-et-vient permanent entre passé et présent. Si Meryl Steep est surprenante avec ses grands gestes et sa voix haut perchée, elle incarne à merveille ce personnage étonnant et sympathique de Julia Child. La comédie est cocasse, sympathique et appétissante. Ces deux femmes, qui se sont réalisées à travers leurs activités culinaires, vivent une belle relation conjugale avec leur mari. C’est ce qui fait la force de leur histoire et de cette comédie.

M.-C. R. A.Comédie américaine (2009) de Nora Ephron, avec Meryl Streep (Julia Child), Amy Adams (Julie Powell), Stanley Tucci (Paul Child), Chris Messina (Eric Powell), Linda Emond (Somone Beck), Jane Lynch (2h03). (Adolescents) Sortie le 16 septembre 2009.

Robert Guédiguian filme, avec force et sobriété, l’histoire de cesrésistants immigrés, communisteset juifs, qui furent baptisés« l’armée du crime » par les Allemands.

Résistants venus d’ailleursL’ARMée Du CRIMe par Marie-Christine RENAUD d’ANDRé

Le bel amour du hérospour sa femme est illustrépar la lecture de samagnifique lettre d'adieu

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«La Trilogie de la villégiaTure », qui se joue au théâtre du Nord-Ouest, est une pièce qui frappe par son actua-lité. Elle est écrite par Goldoni qui, comme Molière, est passé de la farce à

la comédie de caractère, voire so ciale. Et Carlotta Clerici, metteur en scène et traductrice, si elle avoue des coupes et quelques adaptations (la voiture à cheval qui devient voiture tout court, le regroupement des rôles de trois serviteurs autour d’un seul, le fait de situer la pièce dans le contexte des années trente), insiste sur sa fidélité par rapport au texte de l’auteur. Comment donc expliquer le fait qu’on croirait cette pièce écrite hier ? C’est tout simplement qu’il n’y est question que de la superficialité de l’espèce humaine, de la lâcheté des hommes et de la frivolité des femmes. Cette trilogie, comme son nom l’indique, se divise en trois pièces d’environ une heure chacune. Leur titre est révélateur du thème qui les unit : « La Folie des vacances », « Les Amours de vacances » et « Retour de vacances ».

Deux familles sont en scène. L’une est compo- sée du père (Filippo) et de sa fille (Giacinta), l’autre du frère (Leonardo) et de sa sœur (Vittoria). Rapidement, le jaloux Leonardo devient fiancé de Giacinta, qui est par ailleurs courtisée par un bellâtre (Guglielmo) aimé de Vittoria. Autour d’eux, deux hommes jouent le rôle d’en-tremetteur (Fulgenzio) et de pique-assiette patenté (Ferdinando). Ils sont complétés par un trio de serviteurs (Brigida et Paolo, qui s’appré-cient, ainsi que Tita) insolents et lucides comme seuls savent l’être les domestiques. Enfin, à la campagne, tout ce monde va retrouver une tante (Costanza) et sa nièce (Rosina) qui aime et est aimée d’un étudiant local en médecine (Tognino), tandis que Ferdinando va jeter son dévolu sur la sentimentale sœur de Filippo, Sabina.

Les ressorts principaux de ces pièces, outre les caricatures des caractères masculins et féminins, tiennent aux notions d’honneur, de convenance et de réputation, souvent prises les unes pour les autres. On croit immédiatement, et c’est un vrai confort, à chacun des personnages. Le rythme est régulier et alerte. Le comique est sans excès, qui conduit plus à une complicité avec les comédiens qu’à un rire facile. Il repose très souvent sur un double discours : au lieu de faire un reproche direct, on parle devant la personne visée de quelqu’un d’autre à un tiers, ce qui interdit au véritable destinataire de réagir. Les mots d’esprit sont aussi souvent à double détente. Le dialo-gue « - Tu veux savoir un excellent moyen pour qu’il se dépêche (le couturier, n.d.l.r.) ? – Oui – Paye-le tout de suite ! » est à la fois un conseil terre à terre et une leçon de vie. Et ne peut-on pas en dire autant de « Dépenser, cela reste tou-jours à la mode », « Marie-toi pour te ranger et non pour te ruiner » ou de cet échange : « Elle est jeune – Elle est sage – Elle est femme ».

Il y a aussi tout un registre de comique de mimiques, spécialement chez les personnages des domestiques. La réponse du domestique Paolo à la question « Mais qu’est-ce qu’il a ? » sous forme de soupir sonore et d’yeux exorbités est un modèle du genre. Enfin, les scènes de jalousie sont en cascade. Bref, on rit sans cesse du fait d’une véri-table complicité avec les comédiens autour d’un texte parfaitement ciselé et servi. n

théâtre

34 FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009

« La Trilogiede la villégiature »,

avec Rebecca Aïchouba, Laurent Benoit,

Isabel de Francesco,Benoît Dugas,Yvan Garouel...

jusqu’au 2 octobreen alternance

au théâtre du Nord-Ouest,13, rue du fbg Montmartre,

75009 Paris, tél. : 01.47.70.32.75.

Une trilogie qu’on croirait écrite hier, trois pièces à la file qu’onvoit sans avoir l’impression quele temps passe, des mots d’espritqui sont parfois des leçons de vie,« La Trilogie de la villégiature » est tout cela à la fois, et plus encore.

Une véritable complicité avec lescomédiens autourd’un texteparfaitement ciselé et servi

« La triLogie de La viLLégiature »

par Pierre François

triple plaisir

D.R.

Curieusement, Adolf Hitler a rare-ment été le personnage principal d'un film, si l'on excepte Le dic ta­

teur, de Chaplin. En adaptant les livres de Traudl Junge, l'an cienne se cré taire de Hitler, et de l'historien Joa chim Fest, qui retraçait les derniers jours du dicta-teur, Oliver Hirschbiegel a fait œuvre d'historien et de moraliste. Il montre, en effet, que le plus sanguinaire des dictateurs était un homme comme les autres (enfin, presque), dans l'intimité, ce qui a, d'ailleurs, suscité une vive polémique en Allemagne.

En avril 1945, alors que les So vié- ti ques progressent vers Berlin, Hitler, qui s'est réfugié dans son bunker, fête son anniversaire avec ses proches. Traudl Junge, sa jeune secrétaire bava-

roise, re fuse de le quitter, comme ses collègues le lui conseillent, car elle veut demeurer auprès de son Führer bien-aimé. Il faut s'accrocher à son fau teuil pour accepter de vivre avec Adolf Hitler pendant les derniers jours de la vie de celui-ci. Mais le cinéaste en fait un tel portrait, saisissant de réa lisme (magnifique Bruno Ganz !), le mon trant à la fois ordinaire, voire gentil, et, la seconde d'après, éructant des ordres absurdes à ses généraux, que l'on suit avec beaucoup d'intérêt ce film passionnant. Car, outre les

derniers jours du dictateur, ce sont les d e r n i e r s j o u r s d ' u n s y s t è m e san guinaire tournant à vide (personne ne songeant à arrêter cette folie meurtrière) qui sont montrés dans ce film poignant et magistral. ■

La chute. Drame allemand (2003) de Oliver Hirschbiegel, avec Bruno Ganz (Hitler), Juliane Kohler (Eva Braun), Alexandra Maria Lara (Traudl Junge), Corinna Harfouch (Magda Goebbels), Ulrich Matthes (Joseph Goebbels), Heino Ferch (Albert Speer) (2h43). Diffusion le mardi 22 septembre, sur France 2, à 22h35.

Au siècle de Maupassant« Le petit vieuxdes Batignolles »

À Paris, en 1876, Godeuil, étudiant en méde-cine, fait la connaissance de son voisin, le policier Méchinet. Très vite, il le suit dans son enquête sur la mort d’un riche vieil homme, assassiné aux Batignolles. On comprend ce qui a pu séduire Claude Chabrol dans cette histoire sympa-thique et cocasse, avec des dialogues réjouissants. Pierre Arditi est un policier plein de malice et l’ensemble de la distri-bution est convaincant. Un régal ! Il n’y a rien de bien méchant dans cette fantaisie.Téléfilm français (2009) de Claude Chabrol, d'après Émile Gaboriau, avec Pierre Arditi (Méchinet), Manuel Le Lièvre (Godeuil), Bernard Blancan (Monistrol), Isabelle Renauld (Madame Monistrol), Sophie Artur (0h55). Diffusion le vendredi 25 septembre, sur France 2, à 20h35.

AurélienAurélien rentre de la guerre de 14, trau-matisé, comme tous ses camarades, par tout ce qu'il a vécu. Il fait la connaissance de Bérénice. Éric-Emmanuel Schmitt signe le scénario de cette adaptation du roman de Louis Aragon. Roman d'une génération marquée à jamais par la Première Guerre mondiale, roman d'un échec, mais, sur tout, roman d'un amour absolu. La reconstitution de l'époque des Années folles est très réus-sie et la mise en scène ne manque pas de qualités. La voix off permet d'apprécier la poésie du texte d'Aragon. Quant à l'inter-prétation, dominée par Romane Bohringer et Olivier Sitruk, elle est brillante. Pourtant, on est déçu, surtout dans la première partie, par une certaine froideur. Com me si l'absolu de l'amour n'était pas télégénique. L'amour des deux héros tranche avec le cynisme de leur entourage. Mais si Bérénice se refuse à Aurélien, ce n'est pas par fidélité à son mari. Des scènes très suggestives.Téléfilm français de Arnaud Sélignac, d’après Aragon, avec Olivier Sitruk (Aurélien), Romane Bohringer (Bérénice), Thomas Jouannet (Edmond), Natalia Dontcheva, Ute Lemper, Clément Sibony (3h14). Diffusion le mardi 22 septembre, sur Arte, à 23h00.

TÉLÉVISION

Valse avec BachirUne meute de chiens traverse les rues d'une ville, à la poursuite d'un homme qui court à toute allure. C'est l'illustration d'un rêve récurrent que vient raconter, un soir, dans un bar, un ami au réalisa-teur Ari Folman. Ce film documentaire autobiographique en forme d'enquête réunit neuf témoignages de

personnes réelles. Il restitue en animation des faits dramatiques qui ont marqué de façon décisive les événements du Proche-Orient. Il est intéressant que ce soit un Israélien qui évoque ces faits. Certes, les massacres sont attribués aux milices chrétiennes, comme réponse à l'assassinat de Bachir Gemayel, mais Ari Folman laisse ouverte la question de la responsabilité du gouvernement israélien de l'époque. Le traitement de ce sujet par l'ani-mation évite la série monotone d'entretiens et sort le documentaire du simple réalisme pour introduire des éléments poétiques, fruits de l’imagination du cinéaste. Remarquable ! Le film est un plaidoyer pour la paix qui met l'accent sur les drames des jeunes qui participent aux guerres. Il invite toutes les parties du conflit à assumer leurs responsabilités.Film d'animation franco-germano-israélien (2007) de Ari Folman, avec les voix de Ari Folman, Ori Sivan, Ronny Dayag (1h27).Diffusion le lundi 21 septembre, sur Canal +, à 20h45.

Ce très grand film historique,fait revivre, avec réalisme,les derniers joursde Hitler et du nazisme.

La chute par Marie­Christine RENAUD d’ANDRÉ

Les derniers jours d'un système sanguinaire tournant à vide(

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TF120.45 Les 30 histoires les plus spectaculaires. Divertissement présenté par Carole Rousseau et Jacques Legros.23.10 New York unité spéciale. Série avec Christopher Meloni 3.France 220.35 Le plus grand cabaret du monde. Divertissement présenté par Patrick Sébastien, avec Richard Berry, Sylvie Vartan, Daniel Russo, Adeline Blon-diau, Paul Belmondo, Laurent Chandemerle, Helmut Fritz, Michael Jones, Cyrielle Claire, Jacques Pessis, etc.22.55 On n’est pas couché. Magazine présenté par Lau-rent Ruquier.France 320.35 Vengeance «Un petit men-songe» A/Ø. Téléfilm avec Frédéric Van Den Driessche, Julie Judd, Gaëla Le Devehat, Micky Sebas-tian 2. Un excellent suspense, montrant bien les ravages du mensonge. Mais il y a deux scènes érotiques.22.10 Affaires classées «Les dia-boliques d’Urcel» 2.23.40 Parrains pour une seconde chance. Documentaire.Arte20.45 Les Tudors (3 et 4/10) A/Ø. Série avec Jonathan Rhys Meyers, Sam Neill, Nathalie Dormer (1h44) 3. Remarquable, mais truffé d'images peu discrètes.22.35 Metropolis.23.20 Grand format «Poussière». Documentaire.M620.40 Prison break : «En terrain miné», «L’armée du silence», «Self contrôle». Série avec Wentworth Miller, Dominic Purcell 2.23.05 Wanted. Série avec Joa-quim De Almeida 3.Canal +

20.50 Las Vegas 21 GA. Comédie dramatique (2008) de Robert Luketic, avec Jim Sturgess, Kate Bosworth (1h58). Une his-toire originale et bien menée, mais des images sensuelles.KTO20.40 VIP «Antoine de Maximy». Portrait d’un journaliste qui s’invite chez les gens.21.45 Mille questions à la foi «Comment sauver la planète ?».22.15 Le Requiem de Mozart, dirigé par Karl Böhm.

télévision

36 FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009

TF120.45 Le journal de Bridget Jones A. Comédie Comédie (2001) de Sharon Maguire, avec Renée Zellweger, Hugh Grant, Colin Firth (1h30). Un film de «nanas» assez amusant, mais avec un bref flash complaisant.22.35 Les experts. Série avec Marg Helgenberger 3.France 2

20.35 Le serpent A. Thriller (2006) de Éric Barbier, avec Yvan Attal, Clovis Cornillac, Pierre Richard, Simon Abkarian, Olga Kurylenko (1h57) 3. Très prenant, mais violent et morbide.22.40 Faites entrer l’accusé «Christian Marletta, l’aveu». Maga-zine de Christophe Hondelatte 3.France 320.35 Inspecteur Barnaby «La guerre des espions». Série avec John Nettles, Jason Hughes 2.22.50 7 à voir. Magazine présenté par Samuel Étienne.00.30 Arch of Triumph. Drame en NB (1948) de Lewis Milestone, avec Ingrid Bergman, Charles Boyer, Charles Laughton (2h).ArteLa nuit des vampires20.45 Entretien avec un vampire A/Ø. Fantastique (1994) de Neil Jordan, avec Brad Pitt, Tom Cruise, Kirsten Dunst (1h57) 3. Original et bien fait, mais compli-qué, pénible et très sensuel.22.40 La princesse vampire. Documentaire.23.35 Nosferatu GA. Fantastique muet et en NB (1922) de F. W. Murnau, avec Max Schreck (1h34). Un grand chef-d’œuvre.01.10 Le vampire déchu. Docu-mentaire.M620.40 Capital «Crise, un an après : Ce qui a changé pour vous». Magazine présenté par G. Lagache.22.45 Enquête exclusive «Espagne : Les gagnants et les perdants de la folie immobilière». Magazine.Canal +20.50 Football «PSG/OL».KTO20.40 La foi prise au mot «Exor-cisme», avec le père Maxime d’Ar-baumont et Catherine Métral.21.45 Au-delà de la vengeance. Une histoire étonnante de pardon.22.40 Angélus à Rome.

TF120.45 Sœur Thérèse.com J. Télé-film avec Dominique Lavanant, Martin Lamotte, Édith Scob, Gérard Caillaud, Francine Bergé, Lizzie Brocheré, Fiona Gelin. Sympathique et bien mené, mais assez lourd.22.30 Dr. House : «Rencontre sportive», «Le mauvais œil» GA. Série avec Hugh Laurie. Excellent.

01.05 Au Field de la nuit. Magazine de M. Field, avec Justine Lévy, S. Benchetrit, Yannick Haenel, Iegor Gran, Sandrine Kiberlain, Barbara Schultz.France 220.35 Cold case, affaires classées : «Le monde exté-

rieur», «L’héritier». Série avec Kathryn Morris, Danny Pino.22.15 Mots croisés. Magazine présenté par Yves Calvi.France 320.35 Sauvez des vies «Vos ques-tions, nos réponses». Magazine présenté en direct par Marina Car-rère d’Encausse et Michel Cymes.23.00 Ce soir (ou jamais). 00.10 La case de l’oncle Doc «Le garçon aux chiffres». Arte

20.45 Le grand sommeil GA. Policier en NB (1946) de Howard Hawks, avec Humphrey Bogart, Lauren Bacall (1h50). Un très grand film, avec un couple mythique.22.35 Une saison d’opéra.00.10 Free mobile concert «Charlie Winston et les Naïve New Beaters».M620.40 Un dîner presque parfait «Le combat des régions». 22.35 Un dîner vraiment parfait «Le combat des régions».00.00 Shérifs à Los Angeles. Série avec Danny Nucci.Canal +Un jour pour la paix20.45 Valse avec Bachir GA. Film d’animation (2007) de Ari Folman (1h27) 3. (voir notre analyse page 35)KTO20.40 Les frères de Marcassu. Enquête sur le prieuré du Saint-Esprit, en Corse.21.45 Un cœur qui écoute «Louange».22.20 Hors les murs «Le Saint-Cor-don de Valenciennes».

TF120.45 Les experts, Miami : «Copies non conformes», «Pris pour cible», «L’un des nôtres». Série avec David Caruso, Emily Procter 2.23.15 Appels d’urgence «Agres-sions, braquages, drogue : Six mois avec les flics de choc du GIPN». Magazine présenté par Carole Rousseau 2.France 220.35 Apocalypse (5 et 6/6) : «L’étau (1942-1943)», «L’enfer (1944-1945)» J. Documentaire. Commentaire dit par Mathieu Kassovitz. Ainsi se termine une remarquable série.22.35 La chute GA. Drame (2004) de Oliver Hirschbiegel, avec Bruno Ganz, Alexandra Maria Lara, Corinna Harfouch (2h25) 2. (voir notre analyse page 35)

01.25 La règle du jeu GA. Drame en NB (1939) de et avec Jean Renoir, et avec Marcel Dalio, Nora Gregor, Roland Toutain (1h42). (voir notre analyse ci-contre)France 320.35 Ripoux 3 J. Comédie (2003) de Claude Zidi, avec Thierry Lher-mitte, Philippe Noiret (1h44). Lourd et sans intérêt.22.20 Ce soir (ou jamais). ArtePlanète verte ?20.45 Quand Obama se met au vert J. Très intéressant.21.30 Nucléaire «La fin d’un tabou ?». Documentaire.22.45 Le dessous des cartes «Une histoire de charbon».23.00 Aurélien A/Ø. Téléfilm d’après Aragon, avec Olivier Sitruk, Romane Bohringer (3h14). (voir notre analyse page 35)M620.40 Desperate housewives (7 et 8/24). Série avec Eva Longoria 2. Très bien fait, mal-gré quelques fausses notes.22.25 Medium. Série 2.Canal +20.45 Bataille à Seattle GA. Drame (2007) de Stuart Townsend, avec Andre Benjamin, Woody Har-relson (1h36) 3. Prenant et bien fait, mais assez superficiel.KTO20.40 Les mardis des Bernar dins «L’installation comme œuvre d’art», avec Nathalie Brevet, Hughes Rochette, Éric Degoutte.21.45 Églises du monde «Répu-blique tchèque». 22.20 VIP «Antoine de Maximy».

samedi 19 septembre Dimanche 20 septembre lundi 21 septembre Mardi 22 septembre

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émissions religieuses : 08h30 Émissions religieuses : «Sagesses bouddhistes», «Islam», «Judaïca», «Chrétiens orientaux», «Présence protestante» - 10h30 Le jour du Seigneur «L'embryon dans tous ses états : Enquête chez les chercheurs» - 11h00 Mes se, en la chapelle du Saint-Esprit, à Paris. Prédicateur : Mgr Louis Portella.

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télévision

FRANCECatholique n°3179 18 septembre 2009 37

sur France 2Mardi 22 septembre à 01h25La règle du jeu GALe marquis et la marquise de La Chesnays organisent une chasse, suivie d'une fête. Les amours des valets vont interférer avec celles des maîtres. Ce marivaudage tra-gique se déroule dans un monde élégant et frelaté. Cette percu-tante satire sociale a été très mal accueillie à sa sortie. C'est pour-tant l'un des plus grands chefs-d'œuvre de Renoir (fait d'esprit, de légèreté et de causticité), mais dont l'échec commercial l'a éloi-gné des studios longtemps. Le climat est à la licence des mœurs.

TF120.45 Grey’s anatomy : «Terri-toires inexplorés», «L’effet domi-no», «Les quatre petits cochons» GA. Série avec Ellen Pompeo, Patrick Dempsey 2. Les épisodes sont bien menés, mais ils banalisent l’homosexualité.23.10 Lost, les disparus. Série avec Matthew Fox 2.France 220.35 Un flic «Ligne de fuite» A/Ø. Téléfilm avec Alex Descas, Marie-Gaëlle Cals, François Caron, Bernard Verley (1h25) 3. C’est très prenant, mais peu crédible, et il y a des scènes très suggestives.22.10 Panique dans l’oreillette. Magazine présenté par Frédéric Lopez.France 320.35 Coupe de la Ligue «16es de finale : À chaque région son match».23.55 36, quai des Orfèvres «La brigade de répression du proxéné-tisme» A 3. Très moyen et racoleur.00.50 Faits divers, le mag. Ma gazine présenté par Éric Pierrot.Arte20.45 Le Japon, l’empereur et l’armée GA. Très intéres-sant.22.15 Zoom Europa «Quand la politique ne fait plus rêver». 23.00 Temporada de patos GA. Comédie dramatique en NB et VO (2004) de Fernando Eimbcke, avec Enrique Arreola, Diego Catano (1h23). Un petit film inégal.M620.40 Bones : «Le passager 3-B», «Lorsque l’enfant paraît…», «La raison et le cœur», «Beauté fatale». Série avec Emily Deschanel 2.Canal +

20.45 Le premier jour du reste de ta vie A. Comédie dramatique (2007) de Rémi Bezançon, avec Jacques Gamblin, Zabou Breit-man, Déborah François (1h49). Un jolie chronique fami-liale portée par une interprétation sans faille. Mais il y a des scènes d’un goût douteux ou suggestives et un avortement.KTO20.40 Saint Pio de Pietrelcina. La vie du saint stigmatisé.21.45 La famille en questions «Enfant unique, enfant à part ?».22.20 La foi prise au mot «Exor-cisme».23.15 Audience générale, à Rome.

TF120.45 Koh-Lanta. Divertissement présenté par Denis Brogniart.21.55 Secret story. Divertisse-ment 2.France 220.35 Au siècle de Maupassant - Contes et nouvelles du XIXe siècle «Le petit vieux des Bati-gnolles» J. Téléfilm de C. Chabrol, avec Pierre Arditi, Manuel Le Lièvre (0h55). (Voir notre analyse page 35)21.30 Chez Maupassant «His-toire d’une fille de ferme» A/Ø. Téléfilm avec Olivier Marchal, Marie Kremer (1h05). C’est très prenant, mais la scène de viol est pénible.22.35 Vous aurez le dernier mot ! Magazine présenté par Franz-Olivier Giesbert.France 320.35 Thalassa «L’expédition : Alger (Algérie)». Magazine pré-senté par Georges Pernoud.23.05 Vie privée, vie publique, l’hebdo «Tête-à-tête avec Marc-Olivier Fogiel et Julien Dray». Ma gazine présenté par M. Dumas.00.10 L’heure de… «Luciano Pavarotti».Arte20.45 Le sang du glacier J. Télé-film avec Thomas Unger, Tim Bergmann, Lisa Martinek (1h28). Une histoire prenante et des paysages magnifiques.

22.15 Justice à Vegas «Le choix de Gladys» GA. Série documen-taire. Une plongée pas-sionnante, mais affreuse, dans le système judiciaire américain.00.00 Tracks.M620.40 NCIS, enquêtes spéciales : «Retrouvailles», «Requiem», «Pro-téger et honorer», «Aux frontières du réel». Série 3.23.55 Scrubs. Série.Canal +20.45 Phénomènes GA. Fantas-tique (2007) de M. Night Shya-malan, avec Mark Wahlberg (1h27) 3. C’est très brillant, mais la fin est bâclée et les suicides sont très pénibles.KTO20.40 Caritas «L’OCH». Comment réagir face au handicap ?21.45 La vie des diocèses «Dio-cèse de Dijon».22.20 Les mardis des Bernar dins «L’installation comme œuvre d’art», avec Nathalie Brevet, Hughes Rochette, Éric Degoutte.

TF120.45 Section de recherche : «L’enfance de l’art», «Les liens du sang», «Corps à corps» GA. Série avec Xavier Deluc, Linda Hardy 2. Des épisodes prenants, mais de qualité inégale.23.35 Gazon maudit Ø. Comédie (1994) de Josiane Balasko, avec Josiane Balasko, Victoria Abril, Alain Chabat (1h45) 2. C'est amusant, mais le film hésite trop entre comédie et drame. Thème, situations, images et dialogues sont inadmissibles.France 220.35 Envoyé spécial : «Après Guantanamo…», «Portrait d’Anne Roumanoff». Magazine.22.55 Infrarouge : «Voile sur la République», «À cœur battant». .France 320.35 Louis la brocante «Louis voit double» J. Téléfilm avec Victor Lanoux, Sim, Évelyne Buyle, Ber-nard Dhéran, Guillaume de Tonque-dec. Le sujet est intéressant (les biens saisis pendant la révolution), mais il est traité de manière outrancière. On retrouve avec émo-tion Sim dans son dernier rôle.22.15 Ce soir (ou jamais). .ArteOn a marché sur le Mur20.45 Sonnenallee «L’allée du soleil» GA. Comédie (1998) de Leander Haussmann, avec Alexander Scheer (1h32). Cette plongée dans la vie à Berlin Est, près du Mur, est cocasse, au début, puis lourde et lassante.

22.15 Le miracle de Leipzig J. Ce rappel historique est passion-nant, avec des témoignages, au jour le jour, du déroulement des événements.23.50 Paris-Berlin «Bioéthique : L’homme sur mesure ?». Débat.M620.40 Juste pour rire «Avec Franck Dubosc et Stéphane Rous-seau». Spectacle, en direct du Zénith de Paris.22.55 Florence Foresti fait des sketches à la Cigale.Canal +20.45 24 heures chrono (5 et 6). Série avec Kiefer Sutherland 3.KTO20.40 L’esprit des lettres». Maga-zine littéraire avec Guy Coq, Pierre Boz, Gilbert Dahan.22.15 Questions ouvertes.22.45 Le Requiem de Mozart, diri-gé par Karl Böhm.

Mercredi 23 septembre Jeudi 24 septembre vendredi 25 septembre

T : Tout publicJ : AdolescentsGA : Grands adolescentsA : AdultesØ : Œuvre (ou scène) nocive : Élément positif : Élément négatif

Repères

RaDiosRadio Notre-DameLundi 21 au jeudi 24 septembre8h Les matinales, "L'éditorial" avec Gérard Leclerc (à 8h07)Lundi 21 septembre9h Le Bistrot de la Vie, avec Christel Danton (présidente et co-fondatrice d'envol78, association créée par des femmes conscientes des difficultés spéci-fiques rencontrées dans leur retour à l’emploi) et Nolwenn de la Brosse (mère de 4 enfants qui a arrêté de tra-vailler pendant 6 ans pour être auprès de vos enfants...)11h Aujourd’hui l’Église "Journée internationale de prière pour la paix"Jeudi 24 septembre7h30 Le grand témoin, Jean-Yves Naudet (professeur de Sciences Écono-miques à la Faculté de Droit de l’Univer-sité Paul Cézanne [Aix-Marseille III]...).11h Aujourd’hui l’Église. Les 20 ans de "Lève toi et Marche" en direct de Versailles.Vendredi 25 septembre7h30 Le grand témoin, débat de la semaine avec Jean-Luc Mouton et Jean François Colosimo.11h Aujourd’hui l’Église. Mgr Vingt-Trois annonce ses orientations diocé-saines. A noter : le voyage du Pape en République tchèque le 26 septembre, lancement de l'opération Sainte Thé-rèse à la Fondation d'Auteuil.

RCFSamedi 19 septembre16h30 Équateur "Quelle est la posi-tion des chrétiens, et notamment des catholiques, vis à vis de l'Écologie et du Développement durable ?" avec Le Cardinal Philippe Barbarin, (Archevêque de Lyon)Mercredi 23 septembre16h La Saga de la Bible "Les premiers chrétiens. Aujourd'hui : Assidus à l'enseignement des apôtres", avec le Pasteur Jean-Frédéric Patrzynski, de l'Église luthérienne (1/2)

Marie BizieN

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Paris✔ Vénération des reliques de sainte Thérèse (Paris 16e) à l'occasion de la semaine thé-résienne qui aura lieu du 26 septembre au 1er octobre : "Ma folie à moi, c'est d'espérer", célébrations, soirées de prière, conférences, concerts, nom-breux invités, à la Chapelle

Sainte-Thérèse, 40 rue Jean de la Fontaine, 75016 Paris, ✆ 01.44.14.75.75, programme sur le site : www.semainetheresienne.org

✔ Soyez très nombreux à la braderie d'automne de la Paroisse Notre-Dame du Bon Conseil, 140 rue de Clignancourt, 75018 Paris, les 10 (10h-19h45) et 11 octobre prochains (10h-16h). Vous y trouverez : des vêtements hommes, femmes et enfants, toutes tailles, à de tout petits prix, des chaussures pour toutes les élégances ; du linge de maison, des vins de qualité à prix attractifs ; de la pâtisserie «maison» en sucré (tartes, flans pâtissiers,) et en salé (tartes, piz-zas, quiches,), un mini-salon de thé ; une restauration rapide (viandes froides, plat chaud, sau-cisses, merguez, frites, salades...),

le midi des samedi et dimanche. Et surtout de la joie, de la bonne humeur et de l'amitié ! http://paroisse.ndbc.free.fr/✔ Une présentation de la pre-mière encyclique sociale de Benoît XVI, "Caritas in veritate", est prévue le 23 septembre (19h-20h30). Débat et analyse avec la Fondation de Service politique et l'Association des économistes catholiques, à l'Auditorium de l’Espace Georges-Bernanos, Paroisse catholique Saint-Louis d’Antin, 4 rue du Havre, 75009 Paris. Avec la participation de Jean-Yves Naudet (professeur à l'Université Paul-Cézanne d'Aix-Mar-seille III, président de l'Association des économistes catholiques), et Thierry Boutet (auteur de "l'Enga-gement des chrétiens en politique" [Privat, 2007]).✔ Les Semeurs d'Espérance or-ganisent une Veillée d'Adora-tion, "L’économie à l’épreuve de l’amour !", avec Philippe Chalmin (Professeur d’économie, agrégé d’his-toire, chroniqueur économique sur plusieurs chaines de télévision...). Rendez-vous le 25 septembre (20h15) à l'église St-Gervais, 75004 Paris (entrée par le 13 rue des Barres), avec sac de couchage

et tapis de sol. Au programme : enseignement… messe animée… adoration guidée… relais devant Jésus… sacrement de réconcilia-tion. Rens. ✆ 06.13.16.29.08 / www.semeurs.org✔ La Société de Saint Jean (pour le développement de l'art chrétien) propose une exposition "La Vie", dans la salle du Beffroi, (à côté de Saint-Germain-l'Auxerrois), 2 place du Louvre, 75001 Paris, du 19 au 26 septembre (same-dis 9h30-12h30, et lundi au vendredi 11h-18h). Rens. ✆ 01.43.76.83.32 ou 06.60.65.57.18.Calvados✔ Les Fêtes Thérésiennes se dérouleront, au sanctuaire de Lisieux, du 26 septembre au 4 octobre. Avec notamment : le 26 (15h30) à la crypte de la Basilique Sainte Thérèse, heures d'Orgue avec Édouard Leysen, (20h30) procession aux flam-beaux des Reliques de sainte Thérèse, du Carmel à la Basilique et veillée. Le 27 (10h30) messe à la Basilique, sous la présidence de Mgr Fernando Guimaraes (évêque de Garanhuns au Brésil). Commémoration des 80 ans de la pose de la première pierre de la Basilique. (15h30) procession

des Reliques de la Basilique à la Cathédrale Saint-Pierre et Vêpres. Des conférences (à 15h) qui ont lieu au Centre d’accueil pastoral international en face la Basilique, entrée libre : le 28 "Les Lettres de Thérèse", le 29 "Les Manuscrits de Thérèse", le 30 "La construc-tion de la Basilique", le 1er octobre «Fête de sainte Thérèse», "Les Poésies de Thérèse", le 2 "Les Derniers entretiens". Le 3 «Journée des personnes malades ou han-dicapées», (10h) célébration du sacrement des malades, (15h) messe à la Basilique présidée par Mgr Pierre Pican. Le 4, «Clôture des Fêtes de sainte Thérèse». Rens. ✆ 02.31.48.55.08/[email protected]✔ Des "Chemins de prière" se-ront présentés par le père Jean Fournier (jésuite) et une équipe, du 23 (17h) au 31 octobre (8h), à Notre-Dame du Fort, 28 rue du Fort, 44000 Nantes. Rens. auprès de Bernadette Guet, 37

BLOC-NOTES

(*) France métropolitaine et DOM uniquement - (**) Pour les personnes n’ayant jamais été abonnées. (***) Dans la limite des stocks disponibles. (****) Le pré-ciser dans un courrier séparé. (*****) France métropolitaine uniquement. CNIL N° 678405 - Loi informatique & liberté du 6/01/78 : vous disposez d’un droit d’accès et de rectification aux informations vous concernant. Par notre intermédiaire, vous pouvez être amenés à recevoir des propositions d’autres entre-prises. Si vous ne le souhaitez pas, il suffit de nous écrire ou de nous téléphoner et il en sera tenu compte immédiatement.

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quai Magellan, 44000 Nantes, tél. 02.40.47.42.10,[email protected] Spi dans le désert du Sinai✔ Le Père René-Luc invite les 18-35 ans à partir au désert pour bien préparer l'année 2010. Départ de Paris le 26 décembre, retour à Paris le 2 janvier 2010. (1096 € environ). Une fois arri-vés à Charm-el-Cheik en Égypte, départ en 4x4 pour le désert du Sinaï, pour rejoindre une cara-vane de Bédouins, "les rois du désert". Les temps forts : 5 jours de marches dans le désert le plus spirituel de l'histoire du Salut, la veillée du Jour de l'An, "Un jour de l'an exceptionnel avec Jésus en plein désert !", l'ascension du mont Barca face au Sinaï, l'as-cension du Mont Sinaï lui-même. Pour recevoir un dossier d'ins-cription, contactez Ictus Voyages, ✆ 01.41.12.04.80 / [email protected]. Parrainage spirituel d’un prêtre✔ À l’occasion de l’année sacer-dotale, l’AED (Aide à l’église en Détresse) vous propose de par-rainer un prêtre par la prière. « Soutenir les prêtres est une des priorités de l’AED, particulière-ment dans les pays où l’église est menacée ou persécutée. Là, ils attendent vraiment notre sou-tien, à la fois matériel et spiri-tuel. "Dans les pays où l’Eglise souffre, on peut même dire que le soutien spirituel est ce que les prêtres attendent avant tout", constate Marc Fromager, (Directeur de l’AED). Nous recevons tous les jours des lettres de prêtres et d’évêques qui nous demandent de ne pas les oublier dans nos prières. Nous voulons les assu-rer non seulement de notre prière mais de celle du plus grand nombre. C’est la raison pour laquelle nous lançons cette opé-ration spéciale de parrainage spi-rituel. Concrètement, cela signifie s’engager à prier tous les jours jusqu’au 19 juin prochain pour un prêtre en particulier. Pour cela, merci de contacter l’AED. Vous recevrez alors gratuitement une image-prière avec le prénom du prêtre et son pays. Ils attendent votre prière, qui est votre don le plus précieux ! Merci pour eux ! ».AED, 29 rue du Louvre, 78750 Mareil-Marly, ✆ 01.39.17.30.10, [email protected]

Office Chrétien des Personnes Handicapées✔ À l'occasion du 40e anniver-saire de sa revue "Ombres et Lumière", l'OCH (Office chrétien des personnes handicapées) vous propose 3 jours "pour construire des liens solides avec les plus fra-giles" les 16, 17 et 18 octobre. 3 lieux d'exception : Le Collège des Bernardins, la Maison de la Mutualité, Notre-Dame de Paris, avec plus de 60 intervenants, dont Jean Vanier (Fondateur de l'"Arche", et co-fondateur de "Foi et Lumière" avec Marie-Hélène Mathieu), Marie-Hélène Mathieu (Fondatrice de l'"Office chrétien des personnes handicapées" ; Fondatrice, avec Jean Vanier, des communautés "Foi et Lu-mière") ; Sophie Lutz (Auteur de "Philippine, la force d'une vie fragile", chroniqueur à la revue Ombres et Lu- mière) ; Tugdual Derville (Fondateur d’"À Bras Ouverts", Délégué général de l'Alliance pour les Droits de la Vie) ; Xavier Mirabel (Cancérologue, Pré-sident de l'Alliance pour les Droits de la Vie). Inscription obligatoire. Rens. "3 Jours OCH", 90 av. de Suffren, 75015 Paris, ✆ 01.53.69. 44.30 / [email protected]éthode Billings✔ Connaître et maîtriser sa fécondi té par la Méthode Billings. Une méthode moderne, simple, naturelle et fiable, pour différer ou favoriser la venue d'un enfant, selon une pater-nité et une maternité respon-sables. Une session de formation aura lieu les 10 et 11 octobre, chez les Orphelins Apprentis d’Auteuil, 40 rue Jean de La Fontaine, 75016 Paris. Avec des conférences par Dr Xavier Mirabel (président de l'ADV) "état des lieux et impact des lois de bioéthique", Drs René (épidémio-logiste) et Isabelle Écochard (CLER) "évangélisation de l' intimité conjugale et progrès de la régu-lation naturelle des naissances en Afrique et en Europe de l'Est", Dr Florence Allard (gynécologue) "Les enjeux de la méthode Billings", et l'Abbé Guimon "Témoignage d'un prêtre dans l'annonce de la régulation des naissances". Inscriptions au Centre Billings France, allée du Bois-Périneau, 78120 Rambouillet, et sur www.methode-billings.com

Pour passer un communiqué, contactez : [email protected]

fax 01.46.30.04.64 ou inscrivez-le sur : www.france-catholique.fr

AbONNEMENTS à FRANCE CAThOLIqUEFrance, 6 mois : 58 / 1 an (47 numéros) : 110 / Étranger, 1-an- : 122 . Abon nement sou tien : 250 . Pour la Bel gique, virements à l'ordre de E. Ker khove, chaus sée de Dottignies 50 7730 Es taimpuis, tél. 056.330585, compte ban caire- : 275.0512. 029.11.Pour les autres pays, procédez par virements postaux internationaux sur notre compte chèques postal SCE 43 553 55 X La Source, ou bien par mandats in ternationaux à l'ordre de la SPFC ou par chèques bancaires libellés en euros et pa yables en France ou par chèques ban-caires domiciliés à l'étranger mo yen nant une surtaxe de 18 , ou par carte bancaire via le site internet www.france-catholique.fr ou par téléphone : 01 46 30 37 38. Le journal ne rem bourse pas les abonne-ments interrompus du fait de l'abonné / Ne paraît pas en août.

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Sudokufacile

Le but du jeu est de remplir la grille avec une série de chiffres

tous différents, qui ne sont jamais plus d'une fois sur une

même ligne, une même colonne ou une même sous-grille.

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