faculte de medecine pierre et marie curie · 3 a matthieu, pour toutes ces années où tu m’as...

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1 UNIVERSITE PIERRE ET MARIE CURIE PARIS 6 FACULTE DE MEDECINE PIERRE ET MARIE CURIE ANNEE 2014 THESE N° 2014PA0G076 DOCTORAT EN MEDECINE MEDECINE GENERALE Par Maria LOTFI épouse PELLERIN Née le 04 janvier 1983 à Casablanca MAROC Présentée et soutenue publiquement le 07 octobre 2014 UN ASPECT DE LA RELATION MEDECIN MALADE LES REFUS OPPOSES AUX DEMANDES DES PATIENTS : VECU DE CES SITUATIONS PAR LE MEDECIN GENERALISTE INSTALLE ET PAR LE REMPLACANT Etude qualitative réalisée à partir d’entretiens individuels auprès de médecins généralistes installés depuis plus de 10 ans et de médecins généralistes remplaçants en Ile de France. DIRECTEUR DE THESE : Dr Isabelle DE BECO PRESIDENT DU JURY: Pr Anne-Marie MAGNIER MEMBRES DU JURY : Pr Jean LAFORTUNE Pr Dominique PATERON

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UNIVERSITE PIERRE ET MARIE CURIE

PARIS 6

FACULTE DE MEDECINE PIERRE ET MARIE CURIE

ANNEE 2014 THESE N° 2014PA0G076

DOCTORAT EN MEDECINE

MEDECINE GENERALE

Par Maria LOTFI épouse PELLERIN

Née le 04 janvier 1983 à Casablanca MAROC

Présentée et soutenue publiquement le 07 octobre 2014

UN ASPECT DE LA RELATION MEDECIN – MALADE LES REFUS OPPOSES AUX DEMANDES DES PATIENTS : VECU

DE CES SITUATIONS PAR LE MEDECIN GENERALISTE INSTALLE ET PAR LE REMPLACANT

Etude qualitative réalisée à partir d’entretiens individuels auprès de médecins

généralistes installés depuis plus de 10 ans et de médecins généralistes

remplaçants en Ile de France.

DIRECTEUR DE THESE : Dr Isabelle DE BECO

PRESIDENT DU JURY:

Pr Anne-Marie MAGNIER

MEMBRES DU JURY : Pr Jean LAFORTUNE

Pr Dominique PATERON

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REMERCIEMENTS

A ma Présidente de Jury, Madame le Professeur Anne-Marie MAGNIER

Vous me faites l’honneur de présider ce jury et de juger mon travail. Merci pour le temps

que vous passez au service des étudiants, pour nous apporter une formation de qualité, et

transmettre combien la médecine générale est une discipline noble et passionnante. Je vous

témoigne ma profonde et respectueuse reconnaissance.

A ma Directrice de Thèse, Madame le Docteur Isabelle DEBECO

Vous avez accepté de me soutenir et de m’accompagner tout au long de ce travail. Je vous

remercie pour votre gentillesse, votre patience et vos conseils. Cela a été un plaisir de

travailler avec vous. Recevez ma sincère gratitude.

A Monsieur le Professeur Jean LAFORTUNE

Vous me faites l’honneur d’apporter votre expérience à la critique de ce travail en siégeant

dans mon jury de thèse. Je vous prie de bien vouloir accepter ma respectueuse

considération.

A Monsieur le Professeur Dominique PATERON

Je vous prie de recevoir mes sincères remerciements pour avoir accepter de juger mon

travail. Veuillez croire en l’expression de ma respectueuse considération.

Aux médecins généralistes qui volontairement se sont prêtés à cet exercice

Vous m’avez donné de votre temps et accepté de me faire partager votre vécu. Vous avez

permis la réalisation de ce travail. Un grand merci. Ces moments d’échanges ont été très

enrichissants et j’espère avoir passé les messages que certains voulaient transmettre.

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A Matthieu, Pour toutes ces années où tu m’as soutenue, sans faille. Pour ton amour, ta présence, ton écoute et bien sûr ta patience ! Tu es l’épaule sur laquelle je m’appuie, tu m’es si précieux… Et pour ne rien gâcher tu es un papa formidable. Merci pour tout, je t’aime. A Raphaël, Une des plus belles choses qui me soit arrivée dans la vie. Tu es sans conteste mon rayon de soleil. Tu m’émerveilles un peu plus chaque jour. Je suis si fière de toi, je t’aime tellement !

A mes parents, Pour vos sacrifices et votre soutien inconditionnel tout au long du chemin parcouru, pour être toujours là dans les moments qui comptent pour moi. C’est grâce à vous si j’en suis là aujourd’hui. Merci pour tout. Mon amour pour vous est sans faille. A mon frère, Pour toutes les merveilleuses années passées à tes côtés. Miracle j’y ai survécu ! Je suis peinée de la distance qui nous sépare. Nos fous rires et nos chamailleries me manquent… Je t’adore. A mes beaux-parents, Vous m’avez accueillie, soutenue et choyée comme votre fille. Je vous en remercie. J’ai trouvé en vous des deuxièmes parents. Vous avez une grande place dans mon cœur. A mes chers confrères et amis, Karen, Vincent, Dehbia, Joseline, Lila rencontrés sur les bancs de la fac et Lionel, Deniz mes co-internes, merci ! Merci pour nos francs moments de rigolade (parfois studieux…), nos innombrables « boustifailles », votre soutien. Toutes ces années m’auraient parue bien longues sans vous ! Aux amis non carabins, Qui m’offrent un bol d’air frais ! Merci. A Zineb, Mon amie de toujours... A tous ces bons moments passés ensemble. Je te souhaite de belles années à venir. A mes tatas, Mes chères tatas Amal et Msissy. Pour votre affection et tous ces merveilleux souvenirs. Merci. Vous savez comme vous comptez pour moi. Et à tous ceux que j’ai oubliés, j’espère qu’ils ne m’en tiendront pas rigueur...

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LISTE DES PROFESSEURS DES UNIVERSITES – PRATICIENS

HOSPITALIERS

Année universitaire 2014

PROFESSEURS DES UNIVERSITÉS-PRATICIENS HOSPITALIERS UFR Médicale Pierre et Marie CURIE – Site SAINT-ANTOINE

1. ALAMOWITCH Sonia NEUROLOGIE – Hôpital TENON

2. AMARENCO Gérard NEURO-UROLOGIE – Hôpital TENON

3. AMSELEM Serge GENETIQUE / INSERM U.933 – Hôpital TROUSSEAU

4. ANDRE Thierry SERVICE DU PR DE GRAMONT – Hôpital SAINT-ANTOINE

5. ANTOINE Jean-Marie GYNECOLOGIE-OBSTETRIQUE – Hôpital TENON

6. APARTIS Emmanuelle PHYSIOLOGIE – Hôpital SAINT-ANTOINE

7. ARLET Guillaume BACTERIOLOGIE – Hôpital TENON

8. ARRIVE Lionel RADIOLOGIE – Hôpital SAINT-ANTOINE

9. ASSOUAD Jalal CHIRURGIE THORACIQUE – Hôpital TENON

10. AUCOUTURIER Pierre UMR S 893/INSERM – Hôpital SAINT-ANTOINE

11. AUDRY Georges CHIRURGIE VISCERALE INFANTILE – Hôpital TROUSSEAU

12. BALLADUR Pierre CHIRURGIE GENERALE ET DIGESTIVE – Hôpital SAINT-ANTOINE

13. BAUD Laurent EXPLORATIONS FONCTIONNELLES MULTI – Hôpital TENON

14. BAUJAT Bertrand O.R.L. – Hôpital TENON

15. BAZOT Marc RADIOLOGIE – Hôpital TENON

16. BEAUGERIE Laurent GASTROENTEROLOGIE ET NUTRITION – Hôpital SAINT-ANTOINE

17. BEAUSSIER Marc ANESTHESIE/REANIMATION – Hôpital SAINT-ANTOINE

18. BENIFLA Jean-Louis GYNECOLOGIE OBSTETRIQUE – Hôpital TROUSSEAU

19. BENSMAN Albert NEPHROLOGIE ET DIALYSE – Hôpital TROUSSEAU (Surnombre)

20. BERENBAUM Francis RHUMATOLOGIE – Hôpital SAINT-ANTOINE

21. BERNAUDIN J.F. HISTOLOGIE BIOLOGIE TUMORALE – Hôpital TENON

22. BILLETTE DE VILLEMEUR Thierry NEUROPEDIATRIE – Hôpital TROUSSEAU

23. BOCCARA Franck CARDIOLOGIE – Hôpital SAINT-ANTOINE

24. BOELLE Pierre Yves INSERM U.707 – Faculté de Médecine P. & M. CURIE

25. BOFFA Jean-Jacques NEPHROLOGIE ET DIALYSES – Hôpital TENON

26. BONNET Francis ANESTHESIE/REANIMATION – Hôpital TENON

27. BORDERIE Vincent Hôpital des 15-20

28. BOUDGHENE Franck RADIOLOGIE – Hôpital TENON

29. BREART Gérard GYNECOLOGIE OBSTETRIQUE – Hôpital TENON

30. BROCHERIOU Isabelle ANATOMIE PATHOLOGIQUE – Hôpital TENON

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Année universitaire 2014

31. CABANE Jean MEDECINE INTERNE/HORLOGE 2 – Hôpital SAINT-ANTOINE

32. CADRANEL Jacques PNEUMOLOGIE – Hôpital TENON

33. CALMUS Yvon CENTRE DE TRANSPL. HEPATIQUE – Hôpital SAINT-ANTOINE

34. CAPEAU Jacqueline UMRS 680 – Faculté de Médecine P. & M. CURIE

35. CARBAJAL-SANCHEZ Diomedes URGENCES PEDIATRIQUES – Hôpital TROUSSEAU

36. CARBONNE Bruno GYNECOLOGIE OBSTETRIQUE – Hôpital SAINT-ANTOINE

37. CARETTE Marie-France RADIOLOGIE – Hôpital TENON

38. CARRAT Fabrice INSERM U 707 – Faculté de Médecine P. & M. CURIE

39. CASADEVALL Nicole IMMUNO. ET HEMATO. BIOLOGIQUES – Hôpital SAINT-ANTOINE

40. CHABBERT BUFFET Nathalie GYNECOLOGIE OBSTETRIQUE – Hôpital TENON

41. CHAZOUILLERES Olivier HEPATOLOGIE – Hôpital SAINT-ANTOINE

42. CHRISTIN-MAITRE Sophie ENDOCRINOLOGIE – Hôpital SAINT-ANTOINE

43. CLEMENT Annick PNEUMOLOGIE – Hôpital TROUSSEAU

44. COHEN Aron CARDIOLOGIE – Hôpital SAINT-ANTOINE

45. CONSTANT Isabelle ANESTHESIOLOGIE REANIMATION – Hôpital TROUSSEAU

46. COPPO Paul HEMATOLOGIE CLINIQUE – Hôpital SAINT-ANTOINE

47. COSNES Jacques GASTRO-ENTEROLOGIE ET NUTRITION – Hôpital SAINT-ANTOINE

48. COULOMB Aurore ANATOMIE ET CYTOLOGIE PATHOLOGIQUES – Hôpital TROUSSEAU

49. CUSSENOT Olivier UROLOGIE – Hôpital TENON

50. DAMSIN Jean Paul ORTHOPEDIE – Hôpital TROUSSEAU

51. DE GRAMONT Aimery ONCOLOGIE MEDICALE – Hôpital SAINT-ANTOINE

52. DENOYELLE Françoise ORL ET CHIR. CERVICO-FACIALE – Hôpital TROUSSEAU

53. DEVAUX Jean Yves BIOPHYSIQUE ET MED. NUCLEAIRE – Hôpital SAINT-ANTOINE

54. DOUAY Luc HEMATOLOGIE BIOLOGIQUE – Hôpital SAINT-ANTOINE

55. DOURSOUNIAN Levon CHIRURGIE ORTHOPEDIQUE – Hôpital SAINT-ANTOINE

56. DUCOU LE POINTE Hubert RADIOLOGIE – Hôpital TROUSSEAU

57. DUSSAULE Jean Claude PHYSIOLOGIE – Hôpital SAINT-ANTOINE

58. ELALAMY Ismaïl HEMATOLOGIE BIOLOGIQUE – Hôpital TENON

59. FAUROUX Brigitte UNITE DE PNEUMO. PEDIATRIQUE – Hôpital TROUSSEAU

60. FERON Jean Marc CHIRURGIE ORTHOPEDIQUE ET TRAUMATO. – Hôpital SAINT-ANTOINE

61. FEVE Bruno ENDOCRINOLOGIE – Hôpital SAINT-ANTOINE

62. FLEJOU Jean François ANATOMIE ET CYTOLOGIE PATHO.- Hôpital SAINT-ANTOINE

63. FLORENT Christian HEPATO/GASTROENTEROLOGIE – Hôpital SAINT-ANTOINE

64. FRANCES Camille DERMATOLOGIE/ALLERGOLOGIE – Hôpital TENON

65. GARBARG CHENON Antoine LABO. DE VIROLOGIE – Hôpital TROUSSEAU

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Année universitaire 2014

66. GIRARD Pierre Marie MALADIES INFECTIEUSES – Hôpital SAINT-ANTOINE

67. GIRARDET Jean-Philippe GASTROENTEROLOGIE – Hôpital TROUSSEAU (Surnombre)

68. GOLD Francis NEONATOLOGIE – Hôpital TROUSSEAU (Surnombre)

69. GORIN Norbert HEMATOLOGIE CLINIQUE – Hôpital SAINT-ANTOINE (Surnombre)

70. GRATEAU Gilles MEDECINE INTERNE – Hôpital TENON

71. GRIMPREL Emmanuel PEDIATRIE GENERALE – Hôpital TROUSSEAU

72. GRUNENWALD Dominique CHIRURGIE THORACIQUE – Hôpital TENON

73. GUIDET Bertrand REANIMATION MEDICALE – Hôpital SAINT-ANTOINE

74. HAAB François UROLOGIE – Hôpital TENON

75. HAYMANN Jean Philippe EXPLORATIONS FONCTIONNELLES – Hôpital TENON

76. HENNEQUIN Christophe PARASITOLOGIE/MYCOLOGIE – Hôpital SAINT-ANTOINE

77. HERTIG Alexandre NEPHROLOGIE – Hôpital TENON

78. HOURY Sidney CHIRURGIE DIGESTIVE ET VISCERALE – Hôpital TENON

79. HOUSSET Chantal UMRS 938 et IFR 65 – Faculté de Médecine P. & M. CURIE

80. JOUANNIC Jean-Marie GYNECOLOGIE OBSTETRIQUE – Hôpital TROUSSEAU

81. JUST Jocelyne CTRE D

E

L’ASTHME ET DES ALLERGIES – Hôpital TROUSSEAU

82. LACAINE François CHIR. DIGESTIVE ET VISCERALE – Hôpital TENON (Surnombre)

83. LACAU SAINT GIULY Jean ORL – Hôpital TENON

84. LACAVE Roger HISTOLOGIE BIOLOGIE TUMORALE – Hôpital TENON

85. LANDMAN-PARKER Judith HEMATOLOGIE ET ONCO. PED. – Hôpital TROUSSEAU

86. LAPILLONNE Hélène HEMATOLOGIE BIOLOGIQUE – Hôpital TROUSSEAU

87. LAROCHE Laurent OPHTALMOLOGIE – CHNO des 15/20

88. LE BOUC Yves EXPLORATIONS FONCTIONNELLES – Hôpital TROUSSEAU

89. LEGRAND Ollivier POLE CANCEROLOGIE – HEMATOLOGIE – Hôpital SAINT-ANTOINE

90. LEVERGER Guy HEMATOLOGIE ET ONCOLOGIE PEDIATRIQUES – Hôpital TROUSSEAU

91. LEVY Richard NEUROLOGIE – Hôpital SAINT-ANTOINE

92. LIENHART André ANESTHESIE/REANIMATION – Hôpital SAINT-ANTOINE (Surnombre)

93. LOTZ Jean Pierre ONCOLOGIE MEDICALE – Hôpital TENON

94. MARIE Jean Pierre DPT D

HEMATO. ET D’ONCOLOGIE ME D ICALE – Hôpital SAINT-ANTOINE

95. MARSAULT Claude RADIOLOGIE – Hôpital TENON (Surnombre)

96. MASLIAH Jöelle POLE DE BIOLOGIE/IMAGERIE – Hôpital SAINT-ANTOINE

97. MAURY Eric REANIMATION MEDICALE – Hôpital SAINT-ANTOINE

98. MAYAUD Marie Yves PNEUMOLOGIE – Hôpital TENON (Surnombre)

99. MENU Yves RADIOLOGIE – Hôpital SAINT-ANTOINE

100. MEYER Bernard ORL ET CHRI. CERVICO-FACIALE – Hôpital SAINT-ANTOINE (Surnombre)

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Année universitaire 2014

101. MEYOHAS Marie Caroline MALADIES INFECTIEUSES ET TROP. – Hôpital SAINT-ANTOINE

102. MITANCHEZ Delphine NEONATOLOGIE –Hôpital TROUSSEAU

103. MOHTI Mohamad DPT D

HEMATO. ET D’ONCO. ME D ICALE – Hôpital SAINT-ANTOINE

104. MONTRAVERS Françoise BIOPHYSIQUE ET MED. NUCLEAIRE – Hôpital TENON

105. MURAT Isabelle ANESTHESIE REANIMATION – Hôpital TROUSSEAU

106. NETCHINE Irène EXPLORATIONS FONCTIONNELLES – Hôpital TROUSSEAU

107. OFFENSTADT Georges REANIMATION MEDICALE – Hôpital SAINT-ANTOINE (Surnombre)

108. PAQUES Michel OPHTALMOLOGIE IV – CHNO des 15-20

109. PARC Yann CHIRURGIE DIGESTIVE – Hôpital SAINT-ANTOINE

110. PATERON Dominique ACCUEIL DES URGENCES – H ôpital SAINT-ANTOINE

111. PAYE François CHIRURGIE GENERALE ET DIGESTIVE – Hôpital SAINT-ANTOINE

112. PERETTI Charles Siegfried

P

S YCHIATRIE D’ADULTES – Hôpital SAINT-ANTOINE

113. PERIE Sophie ORL – Hôpital TENON

114. PETIT Jean-Claude BACTERIOLOGIE VIROLOGIE – Hôpital SAINT-ANTOINE (Surnombre)

115. PIALOUX Gilles MALADIES INFECTIEUSES ET TROP. – Hôpital TENON

116. PICARD Arnaud CHIRURGIE. MAXILLO-FACIALE ET STOMATO. – Hôpital TROUSSEAU

117. POIROT Catherine HISTOLOGIE A ORIENTATION BIO. DE LA REPRO. – Hôpital TENON

118. RENOLLEAU Sylvain REANIMATION NEONATALE ET PED. – Hôpital TROUSSEAU

119. ROBAIN Gilberte REEDUCATION FONCTIONNELLE – Hôpital ROTHSCHILD

120. RODRIGUEZ Diana NEUROPEDIATRIE – Hôpital TROUSSEAU

121. RONCO Pierre Marie UNITE INSERM 702 – Hôpital TENON

122. RONDEAU Eric URGENCES NEPHROLOGIQUES – Hôpital TENON

123. ROSMORDUC Olivier HEPATO/GASTROENTEROLOGIE – Hôpital SAINT-ANTOINE

124. ROUGER Philippe Institut National de Transfusion Sanguine

125. SAHEL José Alain OPHTALMOLOGIE IV – CHNO des 15-20

126. SAUTET Alain CHIRURGIE ORTHOPEDIQUE – Hôpital SAINT-ANTOINE

127. SCATTON Olivier CHIR. HEPATO-BILIAIRE ET TRANSPLANTATION – Hôpital SAINT-ANTOINE

128. SEBE Philippe UROLOGIE – Hôpital TENON

129. SEKSIK Philippe GASTRO-ENTEROLOGIE ET NUTRITION – Hôpital SAINT-ANTOINE

130. SIFFROI Jean Pierre GENETIQUE ET EMBRYOLOGIE MEDICALES – Hôpital TROUSSEAU

131. SIMON Tabassome PHARMACOLOGIE CLINIQUE – Faculté de Médecine P. & M. CURIE

132. SOUBRANE Olivier CHIRURGIE HEPATIQUE – Hôpital SAINT-ANTOINE

133. STANKOFF Bruno NEUROLOGIE – Hôpital TENON

134. THOMAS Guy PSYCIATRIE D

ADULTES – Hôpital SAINT-ANTOINE

135. THOUMIE Philippe REEDUCATION NEURO-ORTHOPEDIQUE – Hôpital ROTHSCHILD

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Année universitaire 2014

136. TIRET Emmanuel CHRIRUGIE GENERALE ET DIGESTIVE – Hôpital SAINT-ANTOINE

137. TOUBOUL Emmanuel RADIOTHERAPIE – Hôpital TENON

138. TOUNIAN Patrick GASTROENTEROLOGIE ET NUTRITION – Hôpital TROUSSEAU

139. TRAXER Olivier UROLOGIE – Hôpital TENON

140. TRUGNAN Germain INSERM UMR-S 538 – Faculté de Médecine P. & M. CURIE

141. ULINSKI Tim NEPHROLOGIE/DIALYSES – Hôpital TROUSSEAU

142. VALLERON Alain Jacques UNITE DE SANTE PUBLIQUE – Hôpital SAINT-ANTOINE (Surnombre)

143. VIALLE Raphaël ORTHOPEDIE – Hôpital TROUSSEAU

144. WENDUM Dominique ANATOMIE PATHOLOGIQUE – Hôpital SAINT-ANTOINE

145. WISLEZ Marie PNEUMOLOGIE – Hôpital TENON

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ENSEIGNANTS DU DEPARTEMENT DE MEDECINE GENERALE DE PARIS 6

PR ANNE-MARIE MAGNIER - PROFESSEUR UNIVERSITA PR PHILIPPE CORNET - P ALE PR JEAN LAFORTUNE - P LE DR GLADYS IBANEZ – M PR LUC MARTINEZ - P ALE DR DOMINIQUE TIRMARCHE - M DR GILLES LAZIMI - M T DR NICOLAS HOMMEY - M DR CLAIRE RONDET - CHEF DE CLINIQUE DE DR JULIE CHASTANG - CHEF DE CLINIQUE DE DR SARAH ROBERT - CHEF DE CLINIQUE DE

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’H PP

« Au moment d'être admis(e) à exercer la médecine, je promets et je jure d'être fidèle aux

lois de l'honneur et de la probité. Mon premier souci sera de rétablir, de préserver ou de

promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux.

Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune

discrimination selon leur état ou leurs convictions. J'interviendrai pour les protéger si

elles sont affaiblies, vulnérables ou menacées dans leur intégrité ou leur dignité. Même

sous la contrainte, je ne ferai pas usage de mes connaissances contre les lois de l'humanité.

J'informerai les patients des décisions envisagées, de leurs raisons et de leurs conséquences.

Je ne tromperai jamais leur confiance et n'exploiterai pas le pouvoir hérité des

circonstances pour forcer les consciences. Je donnerai mes soins à l'indigent et à

quiconque me les demandera. Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain ou la

recherche de la gloire.

Admis(e) dans l'intimité des personnes, je tairai les secrets qui me seront confiés. Reçu(e) à

l'intérieur des maisons, je respecterai les secrets des foyers et ma conduite ne servira pas à

corrompre les mœurs.

Je ferai tout pour soulager les souffrances. Je ne prolongerai pas abusivement les agonies.

Je ne provoquerai jamais la mort délibérément.

Je préserverai l'indépendance nécessaire à l'accomplissement de ma mission. Je

n'entreprendrai rien qui dépasse mes compétences.

Je les entretiendrai et les perfectionnerai pour assurer au mieux les services qui me seront

demandés.

J'apporterai mon aide à mes confrères ainsi qu'à leurs familles dans l'adversité.

Que les hommes et mes confrères m'accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses ;

que je sois déshonoré(e) et méprisé(e) si j'y manque ».

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TABLE DES MATIERES

REMERCIEMENTS ...................................................................................................................................... 2

LISTE DES PROFESSEURS DES UNIVERSITES – PRATICIENS HOSPITALIERS ............................ 4

’H PP ..................................................................................................................... 10

TABLE DES MATIERES............................................................................................................................ 11

INTRODUCTION ....................................................................................................................................... 14

METHODE .................................................................................................................................................. 16 1. METHODE DE RECHERCHE ................................................................................................................................. 16 2. LA POPULATION ETUDIEE................................................................................................................................... 17

2.1 La taille de l’échantillon étudié.....................................................................................................................17 2.2 Stratégie de recrutement et de prise de contact ...................................................................................17 2.3 Caractéristiques des médecins interrogés ...............................................................................................18

3. LE RECUEIL DE DONNEES .................................................................................................................................... 19 3.1 Les entretiens individuels semi dirigés ......................................................................................................19

3.1.1 Définition................................................................................................................................................................................. 19 3.1.2 Réalisation .............................................................................................................................................................................. 19

3.2 Le guide d’entretien............................................................................................................................................20 4. METHODE DE RETRANSCRIPTION ET D’ANALYSE ................................................................................ 23

4.1 La retranscription en verbatim ....................................................................................................................23 4.2 Analyse thématique ............................................................................................................................................23

RESULTATS ............................................................................................................................................... 24 1. LES TYPES DE DEMANDES REFUSEES .......................................................................................................... 24

1.1 MEDICAMENTS ....................................................................................................................................................24 1.1.1 Prescriptions initiales ......................................................................................................................................................... 25 1.1.2 Renouvellement .................................................................................................................................................................... 25 1.1.3 Autres ....................................................................................................................................................................................... 26

1.2 ARRETS DE TRAVAIL .........................................................................................................................................27 1.3 CERTIFICATS MEDICAUX ................................................................................................................................28 1.4 EXAMENS COMPLEMENTAIRES...................................................................................................................28

1.4.1 Bilans sanguins ..................................................................................................................................................................... 29 1.4.2 Imagerie ................................................................................................................................................................................... 29

1.5 CONSULTATIONS.................................................................................................................................................29 1.6 DEMANDE POUR UNE TIERCE PERSONNE ............................................................................................30

1.6.1 Prescriptions .......................................................................................................................................................................... 30 1.6.2 Certificats médicaux ............................................................................................................................................................ 30

1.7 SITUATIONS ...........................................................................................................................................................31 2. ELEMENTS EN FAVEUR DU REFUS .................................................................................................................. 34

2.1 LES IMPERATIFS AMENANT AU REFUS ...................................................................................................34 2.1.1 Personnels .............................................................................................................................................................................. 34 2.1.2 Médicaux ................................................................................................................................................................................. 35 2.1.3 Déontologique et médico-légal........................................................................................................................................ 36

2.2 LES INTERETS ......................................................................................................................................................37 2.2.1 Pour le patient ....................................................................................................................................................................... 37 2.2.2 Pour le médecin .................................................................................................................................................................... 38 2.2.3 Pour la société ....................................................................................................................................................................... 39 2.2.4 Absence d’intérêt.................................................................................................................................................................. 40

2.3 VARIABLES FACILITANT LE CHOIX DU «NON » ...................................................................................40 2.3.1 Variables relatives au médecin ....................................................................................................................................... 41

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2.3.2 Variables relatives au patient .......................................................................................................................................... 43 2.3.3 Variables relatives à la situation ..................................................................................................................................... 45

3. LA GESTION DU REFUS .......................................................................................................................................... 48 3.1 LA MISE EN CONDITION ..................................................................................................................................48

3.1.1 Ecouter et comprendre la demande .............................................................................................................................. 48 3.1.2 La formulation du « non » ................................................................................................................................................. 48 3.1.3 Parler calmement ................................................................................................................................................................. 49 3.1.4 La compréhension du refus .............................................................................................................................................. 49 3.1.5 La disponibilité ..................................................................................................................................................................... 49 3.1.6 L’empathie .............................................................................................................................................................................. 49

3.2 LES METHODES UTILISEES POUR REFUSER .........................................................................................50 3.2.1 Les explications..................................................................................................................................................................... 50 3.2.2 L’éducation et la responsabilisation du patient ....................................................................................................... 51 3.2.3 La négociation et le compromis ...................................................................................................................................... 52 3.2.4 Les alternatives ..................................................................................................................................................................... 53 3.2.5 L’absence d’explication ...................................................................................................................................................... 55

4. LES DIFFICULTES RENCONTREES LORS D’UN REFUS........................................................................... 56 4.1 DIFFICULTES RELATIVES AU PATIENT ...................................................................................................56

4.1.1 Patient (trop ?) connu......................................................................................................................................................... 56 4.1.2 Difficultés de compréhension du refus......................................................................................................................... 56 4.1.3 Patients agressifs et toxicomanes .................................................................................................................................. 57 4.1.4 Retentissement financier .................................................................................................................................................. 58

4.2 DIFFICULTES RELATIVES AU MEDECIN ..................................................................................................58 4.2.1 Etre une femme ..................................................................................................................................................................... 58 4.2.2 Conditions d’exercice .......................................................................................................................................................... 59 4.2.3 Empathie pour son patient .............................................................................................................................................. 59 4.2.4 Statut de remplaçant ........................................................................................................................................................... 60 4.2.5 Absence de consensus entre médecin .......................................................................................................................... 61 4.2.6 Crainte de perdre un patient ............................................................................................................................................ 62

4.3 DIFFICULTES RELATIVES A LA SITUATION ...........................................................................................62 4.3.1 Manque de temps ................................................................................................................................................................. 62 4.3.2 Consultation différée........................................................................................................................................................... 62 4.3.3 Fait accompli .......................................................................................................................................................................... 63

4.4 DIFFICULTES RELATIVES A LA SOCIETE .................................................................................................63 4.4.1 L’influence extérieure ......................................................................................................................................................... 63 4.4.2 Le coût ...................................................................................................................................................................................... 64

5. LES CONSEQUENCES DU REFUS........................................................................................................................ 65 5.1 A COURT TERME ..................................................................................................................................................65

5.1.1 Conflit ....................................................................................................................................................................................... 65 5.1.2 Culpabilité ............................................................................................................................................................................... 66 5.1.3 Changement d’avis ............................................................................................................................................................... 66 5.1.4 Non-paiement ........................................................................................................................................................................ 67

5.2 A LONG TERME ....................................................................................................................................................67 5.2.1 Perte du patient .................................................................................................................................................................... 67 5.2.2 Education du patient ........................................................................................................................................................... 68

5.3 L’ABSENCE DE CONSEQUENCE ....................................................................................................................68 6. SOLUTIONS PROPOSEES PAR LES MEDECINS ........................................................................................... 69

6.1 LES GROUPES BALINT ......................................................................................................................................70 6.2 LA FORMATION ....................................................................................................................................................70 6.3 CEDER A LA DEMANDE ....................................................................................................................................71 6.4 INFORMER LE PATIENT ..................................................................................................................................71 6.5 AUTRES SOLUTIONS SPECIFIQUES ............................................................................................................72

6.5.1 Agressivité .............................................................................................................................................................................. 72 6.5.2 Arrêt de travail ...................................................................................................................................................................... 72 6.5.3 Absence de consensus entre médecins ........................................................................................................................ 73 6.5.4 Génériques .............................................................................................................................................................................. 73

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13

DISCUSSION............................................................................................................................................... 74 1. SYNTHESE DES RESULTATS ............................................................................................................................... 74 2. LIMITES DE L’ETUDE .............................................................................................................................................. 75

2.1 Limites liées à l’entretien .................................................................................................................................75 2.2 Limites du guide d’entretien ..........................................................................................................................76 2.3 Limites liées à l’échantillon.............................................................................................................................76 2.4 Limites de l’analyse ............................................................................................................................................77

3. DISCUSSION DES RESULTATS ............................................................................................................................ 77 3.1 La place du « non » en médecine ..................................................................................................................77

3.1.1 Le pouvoir de dire « non » ................................................................................................................................................ 77 3.1.2 La demande « injustifiée »................................................................................................................................................. 79 3.1.3 La décision médicale ........................................................................................................................................................... 79 3.1.4 Quelques exemples concrets ............................................................................................................................................ 80

3.2 Pourquoi dire « non » ? ....................................................................................................................................82 3.2.1 Pour le médecin .................................................................................................................................................................... 83 3.2.2 Pour le patient ....................................................................................................................................................................... 84 3.2.3 Pour la relation médecin malade .................................................................................................................................... 85

3.3 Pourquoi le « non » est si difficile ?..............................................................................................................85 3.3.1 Le patient autonome ........................................................................................................................................................... 86 3.3.2 La relation « médecin-client ».......................................................................................................................................... 87 3.3.3 La judiciarisation de la médecine ................................................................................................................................... 89

3.4 Des conséquences non négligeables aux refus .......................................................................................89 3.4.1 Le conflit .................................................................................................................................................................................. 89 3.4.2 Perte du patient .................................................................................................................................................................... 91 3.4.3 « La médecine défensive »................................................................................................................................................. 91

3.5 Quelle attitude face à une demande injustifiée ? ..................................................................................92 3.5.1 Savoir repérer la demande ............................................................................................................................................... 92 3.5.2 Mise en condition ................................................................................................................................................................. 92 3.5.3 Comment formuler le « non » ? ....................................................................................................................................... 93 3.5.4 A éviter… ................................................................................................................................................................................. 95

3.6 La position du remplaçant ..............................................................................................................................96 3.6.1 Le remplaçant et son patient............................................................................................................................................ 96 3.6.2 Le remplaçant et le remplacé ........................................................................................................................................... 98

3.7 Comment est vécu le refus par le patient ? ..............................................................................................99 3.7.1 Sens de la demande pour le patient ............................................................................................................................... 99 3.7.2 Les attentes des patients ................................................................................................................................................... 99 3.7.3 Un problème de communication ................................................................................................................................. 100

3.8 Comment mieux affronter les situations de refus ? .......................................................................... 102 3.8.1 Savoir s’entourer ............................................................................................................................................................... 102 3.8.2 Savoir rompre ..................................................................................................................................................................... 103 3.8.3 La place de la formation .................................................................................................................................................. 103

CONCLUSION .......................................................................................................................................... 104

BIBLIOGRAPHIE .................................................................................................................................... 107

ANNEXE 1 : ’ SEMI DIRIGE ............................................................................ 112

ANNEXE 2 : LES ETAPES DE LA REDUCTION PHENOMENOLOGIQUE SELON DESCHAMPS 113

ANNEXE 3 : ECHELLE DE MASLACH ................................................................................................. 114

RESUME ................................................................................................................................................... 116

MOTS CLEFS ........................................................................................................................................... 116

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14

INTRODUCTION

« J’en ai marre de ce rhume ! Il me faut des antibiotiques pour me requinquer …»

« Je ne suis pas allé travailler aujourd’hui… Vous me faites mon arrêt ? »

« J’ai mal au dos depuis un mois ! Il me faut une IRM. »

« Je viens vous voir pour que vous me prescriviez un bilan complet ! Ça fait longtemps que

je n’ai pas vérifié tout ça…»

Je suis souvent confrontée à ce genre de propos depuis que j’exerce en ville. Ces phrases

qui paraissent si habituelles après quelques mois de pratique, ne m’ont pourtant pas

laissée indifférente.

Il faut dire que l’ensemble de mon parcours professionnel s’était effectué dans un autre

monde : celui de l’hôpital. Un milieu dans lequel les patients semblaient

particulièrement diminués, voire infantilisés, déchargeant toute responsabilité de

décision sur l’équipe médicale. Se retrouver dans « l’après hôpital », dans cette intimité

avec le patient que je n’ai rencontré que rarement lors de mes stages hospitaliers, m’a

quelque peu déroutée. Je me retrouvais face à des patients qui veulent savoir ce qu'ils

ont, pourquoi ils sont malades, qui exigent des médicaments, une guérison immédiate,

un certificat ...

La relation médecin-malade est très différente lorsqu’on se retrouve dans « l’après

hôpital ». C’est une relation centrée sur l’autonomie du patient (1), où celui-ci s’informe

(2) et apprécie être acteur de ses soins (3).

Le médecin généraliste constitue la première ligne de soins à laquelle le patient peut

avoir recours, que ses demandes soient justifiées ou non. Toute demande appelle une

réponse qui peut être positive ou négative. A l’inverse de l’accord qui est aisé, le refus

n’est pas un acte anodin et peut être une source de divergence entre le médecin et son

patient (4) avec parfois de lourdes conséquences.

L’objectif de ma thèse est d’étudier un aspect particulier de la relation médecin-malade :

le refus opposé à la demande d’un patient.

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Ce n’est pas dans un quelconque esprit d’objection que j’ai voulu faire face à cette

problématique. La compréhension du « non », ses motivations, sa mise en pratique, son

intérêt et ses conséquences, pourraient nous permettre de surmonter certaines

difficultés.

Il ne suffit pas d'apprendre à oser ou à savoir dire « non » devant une demande du

patient qui nous paraît injustifiée, mais il faut surtout savoir y répondre.

J’ai étudié dans un deuxième temps le cas particulier du médecin remplaçant dans ces

situations de refus afin de confronter son vécu à celui du médecin installé. J’ai choisi de

donner la parole aux médecins remplaçants parce que c’est un fait rare dans les études,

alors que c’est actuellement un mode d’exercice à part entière.

J’espère que cette étude apportera les éléments nécessaires aux médecins estimant subir

parfois un climat de revendication. Des éléments qui leur permettront de faire face aux

demandes « non fondées » de certains patients en limitant les conséquences négatives

sur la relation médecin-malade, et de se préserver. (5)

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16

METHODE

1. METHODE DE RECHERCHE

J’ai fait le choix d’une méthode qualitative, fondée sur la réalisation et l’analyse

d’entretiens semi-directifs réalisés auprès de médecins généralistes installés depuis plus

de dix ans et de remplaçants exerçant en Ile de France.

Mon étude a permis de mettre en évidence certaines situations et éventuelles difficultés

auxquelles le médecin généraliste peut être confronté suite à un refus qu’il a opposé à

son patient. Elle a été basée sur les comportements, les réactions et les sentiments qui

permettent d’explorer le vécu du médecin.

La méthode qualitative explicite les motivations et étudie ce qui peut amener à modifier

les comportements (6). Elle m’a semblé la plus appropriée pour examiner et décrire les

interactions sociales, les expériences individuelles, la variabilité des situations et le

ressenti de chacun (7) (8).

Le but de mon analyse n’est pas de mesurer, mais plutôt de comprendre le

comportement et d’aborder l’expérience de chaque médecin interrogé, cherchant ainsi à

extraire l’essence même de sa pensée et les idées qu’il a voulu développer.

Comme l’explique J-C Kaufmann, auteur du livre L'entretien compréhensif , « la méthode

qualitative a davantage vocation à comprendre, à détecter des comportements, des

processus ou des modèles théoriques qu'à décrire systématiquement, à mesurer ou à

comparer » (9).

Les entretiens individuels et les focus groups sont les techniques de recherche

qualitative les plus fréquemment utilisées.

Cependant, le recours aux entretiens individuels m’a semblé plus adapté que la méthode

focus groups vu que l’objet de ma thèse consistait en l’étude d’un aspect particulier de la

relation du médecin à son patient, avec ce que cela implique comme diversité

individuelle, aussi bien en termes de situation que de personnalité. Ces entretiens m’ont

permis d’obtenir des descriptions détaillées des expériences individuelles vécues.

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2. LA POPULATION ETUDIEE

2.1 a taille de l’échantillon étudié

Dans une étude qualitative, une information donnée a un poids équivalent à une

information répétée. Un petit échantillon peut donc suffire à obtenir la diversité

d’opinion recherchée.

Le critère requis pour définir la taille de l’échantillon est le phénomène dit de «

saturation » (10). La saturation des données est atteinte lorsque les dernières données

recueillies n’apportent plus d’idées nouvelles.

J’avais prévu d’effectuer une dizaine d’entretiens. Douze entretiens ont finalement été

menés et la saturation a été atteinte au neuvième entretien.

2.2 Stratégie de recrutement et de prise de contact

Douze entretiens individuels ont été conduits auprès de six médecins généralistes

installés et de six remplaçants.

Les différents critères de sélection étaient :

Etre médecin généraliste

Exercer en cabinet

Exercer en Île de France

Pour les médecins installés : être installés depuis plus de 10ans

Accepter de participer à l’étude

Accepter d’être enregistré via un dictaphone

Afin d’obtenir une variabilité de point de vue, le recrutement des médecins participants

aux entretiens a été fait de façon à avoir des profils diversifiés en âge, sexe, modalité

d’exercice et type de patientèle.

Je n’ai pas cherché à varier les caractéristiques des médecins interrogés dans un souci

de représentativité, mais pour augmenter la probabilité de diversifier les réponses. A

l’inverse des études quantitatives, la représentativité statistique n’était ni une nécessité

ni recherchée dans mon travail.

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Dans un premier temps, j’ai commencé en septembre 2013 par démarcher par téléphone

des médecins généralistes installés en les sélectionnant de façon aléatoire dans les pages

jaunes. Je les avais contactés en me présentant et en leur proposant mon sujet de thèse.

Je leur avais demandé par la suite s’ils étaient d’accord pour me recevoir une trentaine

de minutes pour un entretien enregistré qui serait ensuite anonyme.

Sur vingt-neuf demandes téléphoniques d’entretien de médecins installés, seuls trois ont

accepté de me recevoir. La principale raison de ce refus était le manque de temps en

cette période de rentrée scolaire. Quatre d’entre eux m’ont fait part de leur désintérêt

pour mon sujet.

Les trois autres médecins installés recrutés ont été rencontrés lors de ma pratique

professionnelle. Deux d’entre eux étaient mes maîtres de stage, et j’avais remplacé

quelques semaines le troisième.

Les médecins remplaçants recrutés font pour la plupart partie de mon cercle d’amis. Je

les avais contactés par mail ou par téléphone et ont tous répondu par l’affirmative.

2.3 Caractéristiques des médecins interrogés

Chaque participant a été nommé comme suit : (M) pour les médecins installés et (R)

pour les remplaçants, suivi du numéro de l’entretien correspondant.

La totalité des médecins recrutés exercent exclusivement en secteur 1.

Pour plus de clarté, l’ensemble des caractéristiques sociodémographiques des médecins

interrogés a été regroupé dans les deux tableaux suivants :

MEDECINS GENRE TRANCHE

MODE

’ X

LIEU

’ X

ANNEE

MAITRE DE

STAGE

M2 Femme 45-50 Seule Banlieue 1999 Non

M3 Femme 55-60 Groupe Banlieue 1987 Oui

M6 Homme 60-65 Groupe Banlieue 1977 Oui

M9 Femme 50-55 Seule Paris 1990 Non

M10 Femme 60-65 Seule Paris 1979 Non

M12 Femme 40-45 Seule Banlieue 2003 Non

Tableau 1 : Caractéristiques sociodémographiques des médecins installés

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MEDECINS GENRE TRANCHE

MODE DE

REMPLACEMENT

LIEU

’ X

DEBUT DES

REMPLACEMENTS

THESE

R1 Homme 30-35 Ponctuel Paris et

banlieue

Juin 2011 Non

R4 Femme 25-30 Fixe (groupe) Banlieue Novembre 2011 Oui

R5 Homme 35-40 Fixe

(groupe/seul)

Banlieue Décembre 2005 Oui

R7 Femme 30-35 Ponctuel Banlieue Mars 2011 Non

R8 Femme 30-35 Fixe et ponctuel Paris et

banlieue

Avril 2011 Oui

R11 Femme 30-35 Fixe et ponctuel Paris et

banlieue

Septembre 2011 Oui

Tableau 2 : Caractéristiques sociodémographiques des médecins remplaçants

3. LE RECUEIL DE DONNEES

3.1 Les entretiens individuels semi dirigés

3.1.1 Définition

L’entretien individuel semi dirigé, ou encore appelé semi structuré se déroule dans une

relation de face-à-face entre l’interviewer et l’interviewé et implique l’usage d’un guide

d’entretien (10).

Il est mené sur la base d’une structure souple qui consiste en des questions ouvertes

définissant les domaines à explorer, et desquelles nous pouvons nous écarter pour

approfondir une idée (11). Les hypothèses formulées initialement s’étoffent et se

creusent au cours des entretiens, pouvant ouvrir de nouvelles questions sans mettre en

cause la cohérence de l’étude.

Cette méthode permet de diriger l'entretien sans qu'il ne s'épuise, mais sans le

restreindre (9).

3.1.2 Réalisation

J’ai mené l’ensemble des entretiens d’octobre à décembre 2013. Ils ont duré de 25 à 45

minutes.

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J’ai régulièrement eu recours à des questions de relance afin d’approfondir certains

points, sans pour autant sortir de la thématique de mon sujet (10).

Les relances de type interrogatives :

« C’est à dire ? », « Pouvez vous justifier ? », « Lesquelles ? », « Par exemple ? », « Et que s’est

il passé ? » « D’autres conséquences ? »

Les relances interprétatives :

« Donc vous pensez que… », « Si j’ai bien compris vous avez dit que… »

Les relances réitératives :

« Vous avez évoqué… », « Vous m’aviez dit que … »

La totalité des entretiens des médecins installés ont été réalisés sur rendez-vous dans la

salle de consultation respective de chaque médecin.

Concernant les remplaçants, deux entretiens ont été effectués dans la salle de

consultation du cabinet où ils exerçaient, deux autres se sont déroulés chez moi, et les

deux derniers ont été effectués par téléphone.

L’ensemble des entretiens a été enregistré via un dictaphone numérique après accord

des médecins. Pour les entretiens téléphoniques, le dictaphone était accolé au téléphone

programmé en mode haut-parleur. Avant de débuter l’enregistrement des entretiens,

l’anonymat a été rappelé à chacun des médecins interrogés.

Les entretiens se sont déroulés en 3 étapes :

Recueil des caractéristiques générales de chaque interviewé : âge, année

d’installation, mode d’exercice …

Présentation du sujet de thèse

Début d’entretien en suivant les thèmes abordés par le guide

3.2 e guide d’entretien

L’ensemble des entretiens a été réalisé avec pour support l’usage d’un guide d’entretien.

Il permet de centraliser les sujets de discussion et de ne pas dépasser la thématique de

l’étude. Il est constitué de quelques questions ouvertes, avec une possibilité de relance,

permettant une progression du débat.

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L’élaboration du guide d’entretien initial a découlé de la recherche bibliographique.

Les bases de données interrogées ont été :

Medline

SUDOC

Le catalogue CISMEF

Le moteur de recherche Google France

Les mots clés utilisés ont été les suivants :

FRANÇAIS ANGLAIS

Médecine générale General practice

Recherche qualitative Qualitative research

Relation médecin-malade Physician-Patient relationship

Demande de patient Patients’ inquiries

Refus Refusal

Conflit Conflict

Communication Communication

Négociation Negociation

Médecin remplaçant Substitute physician

Cette recherche bibliographique a permis de définir les grands axes des entretiens.

Quelles sont les demandes que vous refusez ?

Cette question m’a donné la possibilité d’établir un panel des demandes refusées

en consultation.

Pourquoi ?

J’ai voulu connaître les impératifs qui poussent les médecins à refuser une

demande d’un patient, les intérêts recherchés par le refus, ainsi que les éléments

qui ont pu faciliter ce choix.

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Comment ?

Cela m’a permis d’étudier concrètement les comportements des médecins face au

refus, la mise en condition pour refuser et les méthodes qui ont permis d’imposer

le « non ».

Quelles sont les difficultés rencontrées ?

J’ai voulu explorer le ressenti personnel du médecin suite à un refus en mettant

en évidence les difficultés rencontrées et les éléments qui auraient pu, ou leur ont

fait changer d’avis.

Que se passe-t-il après un refus ?

Cette question m’a permis d’étudier les répercussions du refus sur la relation

médecin-malade. J’ai également voulu établir d’éventuelles solutions proposées

par les médecins, qui pourraient leur permettre de mieux gérer les difficultés

rencontrées suite à un refus opposé à un patient à l’avenir.

La trame du guide d’entretien utilisée a été la même pour les médecins installés et pour

les remplaçants, à l’exception près d’une question supplémentaire pour les

remplaçants :

« Lors d’un refus, le statut de remplaçant complique-t-il la situation ou inversement ? ».

Le guide d’entretien n’est pas figé et est susceptible d’évoluer au fil des entretiens, en

respectant les grands thèmes de réflexion cités.

Un « entretien-test » a été effectué avec un premier médecin (R1), ce qui m’a

permis d’affiner le guide d’entretien. J’ai recontacté par la suite le médecin R1 par

téléphone afin de préciser quelques réponses, qui ont également été enregistrées. Ce

qui m’a permis d’inclure l’ensemble des données recueillies dans mon étude.

La version finale du guide d’entretien est présentée dans l’annexe 1.

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4. H P ’ Y

4.1 La retranscription en verbatim

Les enregistrements numériques ont servi de base à mon analyse. Chaque entretien a

été littéralement retranscrit, sans modifier la syntaxe ou la structure grammaticale du

discours. Les silences et les soupirs ont été notés car ils valent parfois bien plus que des

mots.

J’ai retranscrit manuellement l’intégralité des enregistrements dans des fichiers

individuels, au format Microsoft Word pour Mac 2011.

L’ensemble des entretiens retranscrits est le verbatim ; il représente les données brutes

de l’enquête.

Afin de respecter l’anonymat des médecins interrogés, toutes les données identifiables

(nom, adresse, numéro de téléphone) ont été masquées. Chaque participant a été

nommé comme suit : (M) pour les médecins installés et (R) pour les remplaçants, suivi

du numéro de l’entretien correspondant.

4.2 Analyse thématique

La méthode d’analyse consiste en une analyse thématique de contenu (13).

Elle se fait en plusieurs étapes. Dans un premier temps une lecture flottante du verbatim

est effectuée afin de s’approprier le texte. Ce qui m’a permis de dégager les grands les

axes de réflexion qui ont été préalablement définis dans le guide d’entretien. Les

entretiens ont été ensuite étudiés un à un, puis découpés en mots, en groupe de mots et

en phrases décrivant la même idée, appelées les unités de signification. Les unités de

signification ont été ensuite regroupées en sous thèmes et thèmes. C’est la réduction

phénoménologique selon Descamps (14) (15).

Le détail des étapes de réduction phénoménologique selon Descamps figure dans

l’annexe 2.

Le résultat de l’analyse m’a permise de réaliser une grille avec différents thèmes, qui a

servi de trame à la présentation du chapitre résultat. Il est à noter qu’il y a eu lecture et

relecture des entretiens afin de n’omettre aucun élément utile à l’étude.

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RESULTATS

L’analyse thématique des entretiens m’a permis d’aborder dans le chapitre « résultats »

6 axes de réflexion :

1. Les types de demandes refusées

2. Les éléments en faveur du refus : impératifs, intérêts et les facteurs orientant

vers un refus

3. La gestion du refus : la mise en condition et les méthodes utilisées

4. Les difficultés rencontrées

5. Les conséquences du refus

6. Les solutions proposées par les médecins interrogés

1. LES TYPES DE DEMANDES REFUSEES

Les différentes demandes des patients refusées par le médecin ont été classées en sept

catégories :

Médicaments

Examens complémentaires

Arrêts de travail

Certificats médicaux

Consultations

Demandes pour une tierce personne

Situations

1.1 MEDICAMENTS

Le refus de prescription de traitements médicamenteux a été cité par l’ensemble des

médecins. Que ce soit une prescription initiale ou un renouvellement, la majorité des

médecins citent le refus de médicament comme étant le plus fréquent.

M3 « Ca va être surtout des refus de médicaments, de traitements. »

M6 « Après on est dans l’ordre médicamenteux aussi. Quand les gens me demandent une

liste de médicament qu’ils ont en sursis »

M6 « Les demandes de médicament plutôt excessives. »

M9 « Les prescriptions de médicaments que je ne juge pas utiles. »

M10 « des refus de prescriptions de médicaments »

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1.1.1 Prescriptions initiales

Les refus de prescription d’antibiotiques et de psychotropes sont les plus fréquents.

Antibiotiques

M2 « Il m’arrive aussi de refuser des antibiotiques»

R5 « Généralement des antibiotiques »

R7 « Refus de prescription d’antibiotiques. Le plus souvent ça reste quand même la

prescription d’antibiotiques»

R8 « Alors le plus fréquemment ça va être les prescriptions d’antibiotiques »

M9 « Et antibiotiques bien sûr. »

M10 « des refus de prescriptions… d’antibiotiques »

M12 « Alors le plus souvent c’est les antibiotiques »

Psychotropes

R5 « Généralement … des anxiolytiques. »

R7 « Il m’est aussi déjà arrivé de refuser du Champix »

M9 « Anxiolytiques, somnifères essentiellement »

M10 « des refus de prescription … de Subutex »

R11 « J’ai une patiente qui voulait du Lexomil… Donc là j’ai refusé … car je sentais qu’elle

devenait dépendante du Lexomil. »

Pilules oestroprogestatives

R4 « … je refuse pas mal de truc pour les pilules »

Antalgiques

R5 « Généralement… des antalgiques »

Corticoïdes

M10 « des refus de prescription … de corticoïdes »

1.1.2 Renouvellement

Le refus d’un renouvellement de traitement a aussi été largement souligné par les

médecins. Il s’agissait le plus souvent d’un traitement de fond auquel le patient était

habitué. Généralement les causes du refus étaient un effet secondaire ou un risque

d’accoutumance pour les psychotropes. Le médecin M2 a aussi évoqué le refus de

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renouvellement d’un traitement initié par un spécialiste, avec lequel il n’était pas

d’accord.

Psychotropes

R1 « Les demandes de renouvellement de psychotropes »

R11 « c’était un monsieur qui venait pour de la morphine. Et qui voulait que je lui

renouvelle une ordonnance de morphine … Et donc je lui ai dit que je ne pouvais pas lui

prescrire. »

Prescrit par un spécialiste

M2 « …ça arrive que je refuse de renouveler. Je leur demande de retourner voir le

spécialiste qui leur a donné tel médicament. »

édicaments retirés de l’ordonnance du traitement de fond

M2 « … généralement c’est un traitement qu’ils ont eu et qu’ils aimeraient bien ravoir… et

qu’en fait je ne suis plus d’accord. »

M3 « Ce qui peut être aussi difficile c’est aussi le retrait de médicaments dans les

ordonnances qu’ils peuvent avoir. »

Pilules oestroprogestatives

R4 « Je vois pas mal de patientes qui viennent renouveler des oestroprogestatifs alors

qu’elles ont des migraines avec aura, un tabagisme, ou alors elles ont 50 ans. Alors là ou je

refuse, ou sinon je négocie. »

Traitement ayant eu des effets secondaires

R4 « J’ai eu un cas où j’ai refusé de renouveler une statine à un patient parce qu’il avait des

crampes. »

1.1.3 Autres

D’autres situations de refus de prescription médicamenteuse ont été évoquées ; par

exemple des médicaments conseillés par l’entourage. Le médecin M3 a largement

évoqué lors de notre entretien la difficulté à refuser le médicament princeps au profit du

générique.

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Médicaments princeps

M3 « Alors il y a aussi aujourd’hui, le problème des génériques. Alors ça c’est un vrai souci !

… Le plus gros refus que j’ai… Maintenant que j’y réfléchis, c’est le générique ! »

édicaments conseillés par l’entourage

M3 « … un médicament qui aurait été prescrit à des amis ou au voisinage. »

R5 « … des médicaments miracles qui ont été conseillés par la concierge du coin. »

Contre-indication

M2 « Je refuse aussi de donner un médicament qu’ils sont persuadés qu’il leur convient

alors que pour moi il y a des contre-indications »

1.2 ARRETS DE TRAVAIL

Les refus d’arrêt de travail ont été évoqués à l’unanimité par les médecins. La

prolongation et le fait d’antidater l’arrêt de travail sont les points les plus sensibles.

M2 « Les demandes que je refuse le plus c’est peut être les arrêts de travail »

M3 « … c’est l’arrêt de travail »

R4 « Mais bon lui tout ce qu’il voulait c’était son arrêt de travail. Donc je lui dis bah non ! »

R5 « Ça peut être des arrêts de travail »

M9 « les arrêts de travail »

M10 « On va dire les arrêts de travail. C’est ce qui revient le plus souvent. »

R11 « Alors ce que je refuse le plus souvent je dirais que c’est les arrêts de travail. »

M12 « Après bah les arrêts de travail »

Non justifiés

R1 « je refuse aussi les arrêts de travail qui ne sont pas justifiés »

R8 « Ils ont juste un petit rhume ou 3 fois rien, qu’ils sont limite moins malade que toi

quand tu vas travailler. Et donc ils viennent te demander l’arrêt parce que juste le matin ils

n’ont pas eu envie d’aller travailler. »

Prolongés

M6 « Après c’est des refus administratifs. Par exemple des arrêts maladie un peu prolongés

dirons-nous de convenance. ».

R7 « Il m’arrive aussi de refuser… des prolongations d’arrêts de travail. Parce que des fois

c’est franchement abusé. »

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R8 «Par rapport aux arrêts de travail. Surtout sur la durée des arrêts de travail »

Différés

M2 « Ah oui j’ai aussi des demandes … d’arrêts de travail que je n’ai pas vu. Ils m’appellent

trois jours après pour me dire que je n’ai pas été au travail … ce jour-là… Ça je ne peux pas

le faire. »

M6 « Ça se voit dans les demandes d’arrêts maladie en différé »

1.3 CERTIFICATS MEDICAUX

Les certificats refusés sont pour la plupart jugés « excessifs » par les médecins ; soit par

leur motif, soit par la date de la demande.

R4 « ce que je refuse le plus c’est peut être les certificats »

Sport

R4 « les certificats… pour le sport »

R7 « Sinon il m’arrive de refuser aussi des certificats de sport »

Dispense de sport

M12 « Et de plus en plus souvent les dispenses de sport pour les enfants. »

En différé pour une absence scolaire

M2 « Ah oui j’ai aussi des demandes de certificats pour les absences scolaires … que je n’ai

pas vu. Ils m’appellent trois jours après pour me dire que je n’ai pas été … à l’école ce jour-

là… je ne peux pas le faire. »

Virginité

R5 « Ça peut être des certificats abusifs, genre : « oh ! Je veux que vous examiniez ma fille

pour voir si elle est encore vierge et faire un certificat de virginité ». »

Maltraitance ou coups et blessures supposés

M6 « Après ce seront des non, disons de certificats qui sont sans objet, ou qui me paraissent

être excessifs dans le cadre des familles avec maltraitance, coups et blessures supposés. »

1.4 EXAMENS COMPLEMENTAIRES

Parmi les demandes citées on retrouve souvent des bilans sanguins trop fréquents, ou

de l’imagerie. Les médecins ont souligné le caractère non justifié ou abusif de la

demande.

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R7 « Des demandes d’examens complémentaires qui ne sont pas justifiés. »

M10 « Et les demandes d’examens complémentaires trop fréquents non justifiés. »

M12 « Alors après c’est des examens complémentaires… »

1.4.1 Bilans sanguins

M2 « Parfois c’est des demandes qui sont inconsidérées, les gens qui vont demander des

bilans sanguins trop souvent alors que le dernier bilan était parfait, non je refuse. »

M10 « Par exemple faire des numérations tous les 15 jours, non. »

M12 « des bilans sanguins »

1.4.2 Imagerie

R5 « Par exemple le patient qui vient qui me dit : « je veux une IRM cérébrale parce que j’ai

mal à la tête depuis des années »… je lui dis donc l’examen clinique est rassurant et il n’y a

pas besoin pour l’instant de faire d’imagerie cérébrale… »

M12 « … ou de l’imagerie »

1.5 CONSULTATIONS

Le refus de consultation a peu été cité. Les consultations ayant posé le plus de problème

sont les consultations avec des patients toxicomanes. Les refus de consultation avec un

nouveau patient ou sans rendez-vous, sont nettement influencés par le facteur temps.

Toxicomanes

R4 « J’ai quand même deux ou trois patients que j’ai mis à la porte… C’était des toxicos en

fait, qui n’étaient pas réglo dans le suivi. »

M6 « Alors déjà au niveau des toxicomanes, des refus par rapport à leurs demandes.

Consultation sans rendez-vous

R7 «c’était un toxico qui voulait son renouvellement, sauf qu’on ne prenait pas sans

rendez-vous. »

M9 « Ou même ceux qui demandent en fin de consultation « vous pouvez aussi voir son

frère ? », non. »

Nouveaux patients

M2 « Oui… il m’arrive aussi de refuser de nouveaux patients… Parce ce que je suis

vraiment débordée. »

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Avec un spécialiste

R5 «… je veux voir le spécialiste ! … En fait ils nous font du chantage. Et je ne cède pas au

chantage de toute façon. »

Visite à domicile

R4 « Ah si aussi les visites à domicile qui ne sont pas justifiées »

1.6 DEMANDE POUR UNE TIERCE PERSONNE

La demande pour une tierce personne a largement été citée par les médecins. Que ce soit

pour un patient connu ou non, la principale cause du refus est le fait de ne pas pouvoir

voir le patient pour justifier la prescription ou le certificat demandés. Trois des

médecins ont évoqué les demandes récurrentes de médicaments que leurs patients

souhaitent expatrier à l’étranger.

1.6.1 Prescriptions

Médicaments

M9 « … demandes de médicaments pour quelqu’un que je ne connais pas. »

Examens complémentaires

M2 « … des examens pour des gens que je n’ai pas vu si ça me paraît disproportionné »

M9 « Hier on m’a demandé de prescrire un scanner parce que la fille avait des maux tête. Je

lui ai dit bah non il faut quand même que je la vois en consultation »

Pour des patients étrangers non-inscrits à la sécurité sociale

française

M2 « Les demandes pour des patients étrangers qui ne sont pas à la sécu française, ou

pour la famille de certains de mes patients qui est à l’étranger »

R4 « les patients qui arrivent en me demandant des médicaments pour la famille qui est

au pays »

R5 « il y a beaucoup de population étrangère et j’ai beaucoup des patients qui me

demandent très souvent des médicaments pour envoyer au pays. Et là, il en est absolument

hors de question. Moi je soigne celui que je vois.»

1.6.2 Certificats médicaux

Patients non connus

R1 « Les demandes de certificats pour des enfants que je ne connais pas. Par exemple c’est

la mère qui me demande un certificat pour un enfant que je ne vois pas »

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M9 « … certificat médical pour quelqu’un que je ne connais pas. »

Patients non vus en consultation

M2 « certains certificats médicaux aussi… donc pour un enfant que je n’ai pas vu depuis 1

an je refuse de faire le certificat sans le revoir »

1.7 SITUATIONS

La demande en fin de consultation semble être un facteur favorisant du refus.

Plusieurs médecins ont cité les refus aux demandes sous un « faux » nom. La principale

cause de ces demandes est la possibilité de bénéficier de la dispense d’avance de frais ;

pour des traitements médicamenteux ou pour la consultation (utilisation de l’attestation

CMU d’une autre personne, ou dans certains cas pour obtenir plus que la dose autorisée

d’un traitement psychotrope).

Les demandes d’actes gratuits sont peu citées. Ils sont généralement refusés si les

demandes sont trop fréquentes.

Le médecin M2 a évoqué une situation que l’on rencontre de plus en plus : le refus de la

demande de médecin traitant.

Demande en fin de consultation

M9 « Ou même ceux qui demandent en fin de consultation « docteur vous pouvez regarder

mon dos aussi ? », non. »

Certificats médicaux

R1 « Les certificats médicaux qu’on me demande en fin de consultation alors que j’ai déjà

examiné le patient sans avoir orienté l’examen en fonction du certificat demandé. »

Médicament

M3 « … le médicament qu’on nous fait rajouter en fin de consultation »

Demandes sous un autre nom

Ordonnance pour être remboursé

R4 « Les patients qui me demandent des médicaments pour la famille et qu’ils me

demandent de faire une ordonnance qui est faite à leur nom pour être remboursé. Là

généralement je refuse. »

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tilisation de l’attestation de de quelqu’un d’autre

M9 «Par exemple quelqu’un qui vient avec l’attestation de CMU d’un autre et des choses

comme ça toujours très agréables ! »

Pour une délivrance supplémentaire d’un traitement

R11 « elle me disait un moment si je pouvais lui prescrire du Lexomil sur l’ordonnance de

sa fille parce que la pharmacie refusait de lui avancer. Et du coup j’ai refusé bien sûr. »

Actes gratuits

M2 « … j’ai beaucoup de demandes d’actes gratuits aussi. »

R4 « … genre un renouvellement d’ordonnance par téléphone. »

Demande de médecin traitant

M2 « Il m’arrive aussi de refuser… des demandes de médecin traitant. Par ce que je suis

débordée. »

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TABLEAUX RECAPITULATIF DES DEMANDES REFUSEES

MEDICAMENTS

PRESCRIPTIONS INITIALES

- Antibiotiques - Psychotropes : morphiniques, anxiolytiques (lexomil), champix, somnifères, subutex - Pilules - Antalgiques - Corticoïdes

RENOUVELLEMENT

- Psychotropes : subutex - Prescrit par un spécialiste - Déjà retiré de l’ordonnance du traitement de fond - Pilules - Traitement ayant eu des effets secondaires

AUTRES

- Médicaments princeps - Médicaments conseillés par l’entourage - Contre-indication

ARRÊTS DE TRAVAIL - Non justifiés - Prolongés - Différés

CERTIFICATS MEDICAUX

- Sport - Dispense de sport - En différé pour une absence scolaire - Virginité - Maltraitance ou coups et blessures supposés

EXAMENS COMPLEMENTAIRES - Bilans sanguins (fréquents) - Imagerie (IRM)

CONSULTATIONS

- Nouveaux patients - Avec un spécialiste - Visite à domicile - Toxicomanes - Consultation sans RDV

DEMANDES POUR UNE TIERCE PERSONNE

PRESCRIPTIONS

- Médicaments - Examens complémentaires - Patients étrangers non-inscrits à la sécurité sociale française

CERTIFICATS MEDICAUX - Patients non connus - Patients non vus

AUTRES DEMANDES

EN FIN DE CONSULTATION - Médicaments - Certificats médicaux

SOUS UN AUTRE NOM

- Ordonnances : remboursement de médicaments ou dose supplémentaire (lexomil) - Tierpayant (CMU)

ACTE GRATUIT Renouvellement par téléphone

MEDECIN TRAITANT

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2. ELEMENTS EN FAVEUR DU REFUS

Dans ce chapitre, j’aborde les éléments qui ont poussé les médecins à refuser les

demandes citées précédemment, à savoir les impératifs les amenant à refuser, les

intérêts recherchés et les facteurs facilitant ou ayant favorisé le choix du refus.

2.1 LES IMPERATIFS AMENANT AU REFUS

L’analyse des entretiens m’a permis de mettre en évidence plusieurs types d’impératifs

amenant au refus. Les impératifs sont d’ordre personnels, médicaux et déontologiques.

2.1.1 Personnels

Les impératifs du refus découlant de la personnalité du médecin sont les plus

récurrents.

Conviction personnelle

C’est avant tout le caractère injustifié de la demande que l’ensemble des médecins a

évoqué.

R1 « Donc généralement je refuse surtout dans le sens moral. Par exemple si un arrêt de

travail et que ça me semble pas justifié ou abusif »

M2 « Parfois c’est une conviction personnelle, si je trouve que la demande est abusive »

M3 « Donc s’il demande quelque chose qui est injustifiée, en effet il n’y a pas de raison de

dire oui. »

R4 «… je ne trouve pas ça justifié »

R5 « Si je ne juge pas cet examen nécessaire, je ne le prescris pas. »

M6 « Parce que la demande n’est pas fondée ou n’est pas en adéquation avec ce que je

souhaite. »

R7 « Des demandes d’examens complémentaires qui ne sont pas justifiés. Parce que des fois

c’est franchement abusé.»

R8 «Si ça ne me parait pas justifié, ce n’est pas justifié. »

M9 « Parce que ce n’est pas justifié. »

M10 « La demande abusive. La non justification de cette demande. »

R11 « Je ne cède pas facilement. En tout cas quand ce n’est pas justifié. »

M12 «Si je juge que ce n’est pas utile. »

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Affirmer son statut

Affirmer son statut semble parfois nécessaire pour préserver l’image du médecin. Les

médecins refusent quelquefois pour être irréprochables et ainsi éviter tout

débordement par la suite.

R1 « Je ne vais pas me mettre en défaut par rapport au patient »

M6 « Parce que s’il me fait cette demande-là, c’est peut-être qu’il aura tendance à en faire

aussi dans d’autres niveaux ou moments et qu’il faut que je lui dise non tout de suite. Il faut

être franc et dire non. »

R7 « Et là bah non, j’ai dit non. Je ne le prescrirai pas j’ai tenu ma ligne de conduite. »

2.1.2 Médicaux

Les impératifs amenant au refus d’ordre médicaux sont largement cités. La plupart des

médecins basent leurs refus sur les données de l’examen clinique et la prise en charge

thérapeutique.

M2 « C’est souvent un impératif médical »

M12 « Mais bon, généralement c’est des impératifs médicaux. »

Examen clinique

L’examen clinique est souvent la base pour les médecins interrogés. Ils fondent leur

raisonnement et par conséquent la décision du « non » en fonction de cet examen.

M2 « … Par exemple pour les certificats si je trouve une anomalie à l’examen clinique »

R5 « Je me réfère tous simplement à l’examen clinique. Si ce n’est pas justifié, ce n’est pas

justifié et puis c’est tout. »

R7 « Je me base beaucoup sur la clinique. » « Donc je l’ai examiné et il n’y avait rien de

particulier. Il n’avait pas de fièvre, même pas de ganglion. Donc je lui ai dit qu’il n’y avait

pas la nécessité de prendre des antibiotiques, qu’il fallait prescrire un autre traitement

symptomatique et qu’il fallait patienter un peu. »

M9 « ce n’est pas cliniquement justifié. »

Prise en charge thérapeutique

La non ou la contre-indication à un traitement que désire un patient sont des arguments

récurrents du refus.

M2 « Je refuse de donner un traitement alors que pour moi il y a des contre-indications. »

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R4 « Je vois pas mal de patientes qui viennent renouveler des oestroprogestatifs alors

qu’elles ont des migraines avec aura, un tabagisme, ou alors elles ont 55ans »

R7 « Il m’est aussi arrivé de refuser du champix, parce que de tout façon il ne voulait pas

arrêter » « Il n’y avait pas la nécessité de prendre des antibiotiques. »

M9 « Des médicaments que je ne juge pas utiles. »

M12 « Des contres indications. »

Littérature

Le médecin M2 s’appuie sur les avis donnés dans des revues médicales pour juger le

médicament demandé.

M2 « … si je juge que ce médicament n’est pas le bon, ou qu’il n’a pas fait ses preuves, qu’il y

a des revues médicales qui tirent dessus à boulets rouges. »

2.1.3 Déontologique et médico-légal

Les impératifs d’ordre déontologique et médico-légal ont été cités par plusieurs

médecins. Lors du refus de certificats médicaux ou des arrêts de travail, les médecins se

basent sur le code de déontologie. Ils utilisent de façon récurrente des termes comme

« un faux », « falsifier », « je certifie sur l’honneur… », « C’est interdit »… En utilisant ces

termes et expressions, le médecin essaye de faire comprendre au patient les raisons de

son refus et le caractère abusif de la demande.

M2 « Je pense que c’est médico-légal et que je n’ai pas à le faire. …. Pour les certificats je ne

peux pas prendre le risque de le faire car je certifie sur l’honneur qu’ils peuvent le faire… Je

lui dis que moi je certifie sur l’honneur et que je ne peux pas faire un faux. »

R5 « De toute façon je me réfère au conseil de l’ordre et puis voilà je refuse. »

M6 « Puisqu’on me demande de falsifier une date»

R11 « je n’ai pas le droit de vous prescrire des arrêts de travail injustifiés, c’est interdit et

c’est même sanctionné. »

M12 « Ou des fois si on me demande d’antidater un certificat ou un AT c’est plutôt d’un

point de vue légal que je refuse»

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2.2 LES INTERETS

Les médecins interrogés ont évoqués trois intérêts au refus. L’intérêt du patient est

prioritaire ; suivi de l’intérêt personnel et celui de la société.

2.2.1 Pour le patient

Dans la majorité des cas les médecins ont refusé pour l’intérêt de son patient en priorité.

Le médecin refuse pour protéger son patient et, ou bien le soigner.

R1 « le premier intérêt est celui du patient »

M10 « Bah dans l’intérêt du patient forcément ! »

Pour sa santé

Le refus dans l’intérêt de la santé de son patient a largement été cité.

M2 « Pour les certificats quand je demande une visite cardio c’est avant tout pour le

patient… Si c’est pour des traitements qui ne sont pas justifiés et, ou qu’il y a contre-

indication c’est pour le patient que je refuse. »

M3 « Surtout par rapport au patient, pour sa santé… Notre décision du non c’est pas du

tout pour leur faire du mal, c’est au contraire pour être bénéfique pour eux pour qu’ils

puissent être bien soignés »

R4 « Le refus pour le certificat de sport quand je ne suis pas sûre de moi c’est pour le

patient. Je n’ai pas peur d’avoir un procès mais j’ai peur de ce qui pourrait arriver à mes

patients. »

R11 « Donc là j’ai refusé pour elle car je sentais qu’elle devenait dépendante au Lexomil. »

M12 « pour les certificats je refuse pour l’intérêt du patient si je juge que ça le mettra en

danger. »

Pour sa vie socio-professionnelle

Le médecin M3 a évoqué le fait de refuser de prolonger des arrêts de travail afin de

préserver l’emploi de ses patients.

M3 « Et pour les arrêts de travail c’est dire aussi vous avez effectivement une maladie

certes, mais le travail peut aussi vous être utile… D’autant plus qu’aujourd’hui la société

elle est quand même en grande difficulté et que certains arrêts peuvent provoquer des

licenciements, il ne faut pas l’oublier. »

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Pour son éducation

Selon le médecin M6, le refus des demandes des patients toxicomanes rentre dans une

démarche thérapeutique.

M6 « Au niveau des toxicos non. Là je suis irrévocable. Le non est ferme et définitif. C’est

pour justifier une démarche logique et cohérente vis-à-vis des toxicos. Là on sait qu’il faut

les recadrer sans cesse »

2.2.2 Pour le médecin

Son intérêt personnel était au second plan.

Aspect juridique

Le refus par crainte de poursuite judiciaire a été évoqué par plusieurs médecins.

R1 « Le premier intérêt est celui du patient et le second le mien. Je pense notamment au

médico-légal, par exemple dans le cas d’une prescription de psychotrope. »

M2 « Si c’est pour un certificat, si j’ai peur de faire un certificat pour quelqu’un que je n’ai

pas vu. Je pense que c’est médico-légal et que je n’ai pas à le faire. C’est plus pour me

protéger moi. »

R7 « On agit pour le patient et bon on se couvre aussi. »

M12 « pour les certificats je refuse pour l’intérêt du patient … et aussi un peu pour moi.

Parce qu’il lui arrive quelque chose ça sera pour ma pomme ! »

Intérêt pratique

Sélectionner sa patientèle

Pour la plupart, le refus a eu un intérêt pratique : pouvoir sélectionner sa patientèle. En

effet, plusieurs médecins ont expliqué avoir refusé pour ne pas revoir le patient.

Certains même ont avoué refuser plus souvent quand le patient n’est pas agréable ou

trop exigeant afin de le faire partir.

M2 « Ça arrive aussi, que je fasse exprès de refuser parce que je n’ai pas du tout envie de

faire de concession avec des gens qui sont antipathiques ou trop exigeants, et j’attends

qu’une chose c’est qu’ils partent. »

M6 « Donc s’il veut revenir il faudrait qu’il évite ce genre de pratique. »

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M10 « Quand vous refusez c’est de toute façon quelqu’un qui vous ennuie ou qui vous

embête, et vous êtes ravie qu’il ne revienne plus. »

Recadrer sa patientèle

Dans certaines situations, refuser permettrait également de recadrer le patient et limiter

les demandes abusives ou inconsidérées lors des consultations suivantes

M6 « Parce que s’il me fait cette demande-là, c’est peut-être qu’il aura tendance à en faire

aussi dans d’autres niveaux ou moments et qu’il faut que je lui dise non tout de suite. Il faut

être franc et dire non. Dire qu’on ne peut pas tout avoir. »

Pour sa sécurité

Le médecin R4 a déclaré parfois refuser des visites à domicile chez des patients non

connus ou dans une zone à risque, ou encore refuser certains patients agressifs en

consultation. Nous verrons plus loin que la crainte pour sa sécurité est également une

difficulté récurrente du refus et que le médecin cède plus facilement dans ce cas à la

demande du patient.

R4 « Quand je mets les patients agressifs à la porte, ben carrément c’est pour moi et aussi

pour l’ambiance du groupe... Pour les visites si c’est un coin qui craint j’évite, ou j’essaie d’y

aller accompagnée. »

2.2.3 Pour la société

Intérêt financier

Plusieurs médecins ont déclaré avoir refusé des explorations ou une prolongation

d’arrêt de travail pour la sécurité sociale, afin de limiter les dépenses de la société.

Le coût a été souligné à plusieurs reprises. Il apparaît clairement comme étant un

facteur influençant le refus.

M2 «Je refuse pour la sécu aussi. Parfois c’est des demandes qui sont inconsidérées, les gens

qui vont demander des bilans sanguins trop souvent alors que le dernier bilan était

parfait, non je refuse. »

M3 « C'est-à-dire bon on est dans une société, on doit tous partager la même chose et on ne

doit pas abuser. »

R4 « Par exemple le patient qui demande des médicaments pour la famille je refuse plus

pour la société parce que ça fait un coût pour nous. »

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R8 « Au niveau des arrêts de travail c’est par rapport à la sécu et tout ça. On se dit que déjà

il y a un sacré manque à gagner à ce niveau-là. Donc ça ne me parait pas logique de faire

des arrêts de travail qui ne sont pas justifiés. »

R11 « Quand je refuse un arrêt de travail … j’agis plutôt pour celui de la sécu bien sûr. »

M12 « Comme pour les arrêts on sait bien que ça coûte cher quand on est trop arrêté…

Après donc pour l’imagerie c’est parce que ça coûte cher. Oui donc c’est souvent un calcul

financier. En fait j’essaie de faire au mieux sans que ça coûte trop cher à la société en fait. »

Intérêt sanitaire

Beaucoup de médecins déclarent refuser de prescrire des antibiotiques dans l’intérêt

sanitaire de la société. L’émergence de résistances ou encore de bactéries multi

résistantes est un élément récurrent.

R7 « À force de prendre de l’Augmentin il ne marchera plus ! »

R8 « Pour les prescriptions d’antibiotiques c’est plutôt par rapport au risque de résistance

des bactéries. »

M12 « Franchement pour le refus des antibiotiques c’est plus pour la société. Je veux dire

aux dogmes qui nous sont apposés en fait. Les résistances. »

2.2.4 bsence d’intérêt

Le médecin R5 a déclaré n’avoir aucun intérêt à refuser. Il ne se base que sur les

données de l’examen clinique.

R5 « En fait je ne cherche pas trop d’intérêt. Ni dans mon sens ni dans celui du patient. Je

me réfère tout simplement à l’examen clinique. Si ce n’est pas justifié, ce n’est pas justifié et

puis c’est tout. Je ne cherche pas à savoir si c’est dans son intérêt, qu’il le prenne bien ou

pas bien. »

2.3 VARIABLES FACILITANT LE CHOIX DU «NON »

En plus des impératifs qui amènent au refus et les intérêts recherchés ; le choix du non

est nettement influencé par plusieurs variables. Des variables relatives au médecin, au

patient et au type de situation.

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2.3.1 Variables relatives au médecin

’expérience

Selon une grande partie des médecins, l’élément qui peut faciliter un refus est le vécu.

M2 « Je pense que plus on vieillit, plus on est confronté aux difficultés du relationnel et plus

on se sent plus à l’aise pour dire non. Oui je crois qu’il faut un peu de bouteille pour être

plus à l’aise pour dire non. »

R4 « Je pense que c’est vraiment une question d’expérience »

R5 « J’ai appris à gérer ce genre de situation sur le tas. C’est vraiment en vivant ses propres

expériences qu’on apprend. »

R7 « Le fait d’avoir déjà vécu ce genre de situation après si je sais comment j’agirai. »

R 11 « Je pense que ça se base plus sur le vécu ou l’expérience. Tu appréhendes moins avec

le temps. Et tu es plus sûre de toi. »

M12 « Franchement je pense que c’est plutôt en vieillissant, en prenant de la bouteille et en

ayant plus d’expérience, qu’on est plus sûre de soi et donc on est plus convaincue qu’il faut

dire non et donc on le dit plus facilement.

’assurance

Paradoxalement, le manque d’assurance et la confiance en soi facilitent le refus. En cas

de doute, le médecin préfère refuser que de céder à la demande, et la confiance en soi

conforte le choix du refus.

e manque d’assurance

R4 « Je refuse les certificats quand je ne suis pas sûre de moi. Quand j’ai un doute pour un

électrocardiogramme…»

R7 « Sinon il m’arrive de refuser aussi des certificats de sport si j’ai un doute. »

R11 «Je lui ai dit … que moi je ne sais pas. Donc j’ai dit non. »

La confiance en soi

R4 « il faut s’adapter et surtout avoir confiance en soi. »

M12 « … on est plus sûre de soi et donc on est plus convaincue qu’il faut dire non et donc on

le dit plus facilement. »

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Statut de remplaçant

Pour certains, le statut de remplaçant semble faciliter le refus. Généralement dans le

cadre de remplacement ponctuel ; pour diverses raisons :

’absence de responsabilité

L’absence de responsabilité a été principalement citée par les remplaçants. Ils estiment

que leur rôle ne leur permet pas ou ne justifie pas d’accepter la requête. D’autant plus

que le remplaçant a la possibilité de « s’appuyer » sur le médecin qu’il remplace.

R1 « Je trouve que ce n’est pas mon rôle en tant que remplaçant pour les renouvellements

de traitement »

R5 « l’avantage d’être remplaçant, c’est que je leur dis que si vous n’êtes pas content vous

n’avez qu’à demander l’avis du médecin titulaire »

R7 « Comme je remplaçais et que je m’en fichais un peu et que ce n’était pas mon patient à

moi … j’ai dit non. »

oins d’exigence de la part des patients

Il semble que la plupart des patients soient moins exigeants vis à vis du remplaçant que

du médecin titulaire.

R1 « Et pour les arrêts travails c’est plus simple aussi parce que quand les patients ne

connaissent pas bien le médecin ils n’osent pas trop négocier. »

R7 « Ah oui ! C’est largement plus facile de refuser. On subit beaucoup moins de pression

quand on est remplaçant de la part des patients. Surtout quand tu fais des remplacements

ponctuels »

Consensus entre médecins

Le refus paraît plus facile si la prise en charge du patient par les deux médecins est

similaire. Cette notion est très présente dans le cas du binôme remplacé/remplaçant.

R7 « ce qui serait bien c’est que le médecin installé soit aussi d’accord avec moi. Comme ça

le patient comprend que ça ne sert à rien d’insister. »

M12 « Et du coup moi j’ai dit que non. Que déjà un il fallait que je vois l’enfant et que si ma

consœur venait de le voir qu’il y avait peu de chance que je le prescrive. »

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Crainte de tromperie

Pour éviter toute tromperie ou manipulation de la part du patient, de nombreux

médecins n’accèdent pas aux requêtes du patient.

M2 « Par exemple quand quelqu’un vient me voir pour un arrêt suite à un conflit avec son

employeur que je ne le trouve pas spécialement déprimé et qu’il veut juste faire pression

sur son employeur je vais dire non. »

R4 « C’était des toxicos en fait, qui n’étaient pas réglo dans le suivi… Parce qu’ils te

racontent des trucs… Et bah quand je vérifie je vois que c’est des mensonges et donc je leur

explique qu’ils ne viendront plus. »

M6 « Mais bon là, il faut mettre un non quoi, parce qu’on se sent un peu manipulé. »

R11 « Et je sentais vraiment qu’il jouait la comédie donc au bout d’un moment j’ai dit stop

et je ne lui ai pas fait son arrêt la dernière fois. »

bsence d’appréhension de perdre un patient

Certains médecins n’appréhendent pas le fait de pouvoir perdre un patient après un

refus.

R4 « Il y a quelques patients quand on leur refuse, ils ne reviennent plus. Ça c’est clair. Mais

bon en même temps on ne manque pas de patients. Donc ça ce n’est pas très gênant. »

R8 « Enfin moi ça ne me gêne pas de perdre un patient qui n’a pas la même façon de voir

les choses que moi »

Formation initiale

Le médecin R1 a déclaré avoir eu une formation lors de son cursus universitaire qui lui

a permis de mieux gérer ce genre de situations.

R1 « Aussi j’ai eu une formation à la fac qui nous donnait des méthodes sur justement

comment dire non lorsque le patient commence à marchander. »

2.3.2 Variables relatives au patient

Patient non connu ou peu connu

Lorsque la demande vient d’un patient inconnu ou peu connu, les médecins refusent

plus facilement. Certains refusent par crainte de tromperie, notamment pour les

prescriptions de psychotropes. De plus, la perte d’un patient inconnu ne semble pas

impliquer le médecin de la même façon que si c’était un patient connu de longue date.

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Dans le cas de remplacement ponctuel cette situation est fréquente.

R1 « Si je ne connais pas bien le patient ce qui est souvent le cas en tant que remplaçant ; je

ne me sens pas apte à évaluer la situation. » « Par exemple, c’est la mère qui vient et qui me

demande un certificat pour un enfant que je ne vois pas. »

M9 «Il y a aussi tout ce qui est arrêt de travail ou certificat médical ou demande de

médicament pour quelqu’un que je ne connais pas. »

R11 « Et donc je lui ai dit que je ne pouvais pas lui prescrire. Je lui ai dit que votre médecin

traitant, lui vous connait et a votre dossier, que moi je ne sais pas. Donc j’ai dit non. »

Patient non vu en consultation

Ne pas pouvoir examiner ou même voir le patient favorise le refus.

M2 « Donc pour un enfant que je n’ai pas vu depuis un an je refuse de faire le certificat sans

le revoir. »

R5 « Moi je soigne celui que je vois, point »

M9 «Hier on m’a demandé de prescrire un scanner parce que la fille avait des maux tête. Je

lui ai dit bah non il faut quand même que je la vois en consultation pour l’examiner et puis

on verra. »

R12 « il n’a même pas voulu que je vois l’enfant il a juste voulu que je fasse l’antibiotique.

Et du coup moi j’ai dit que non. »

Patients agressifs

Généralement les médecins déclarent « mettre à la porte » les patients agressifs. Mais

dans la plupart des cas, cela se fait dans un second temps. Comme nous le verrons au

paragraphe 4.1.3, l’agressivité d’un patient peut influencer la décision du médecin vers

une acceptation par crainte pour sa sécurité. Beaucoup de médecins déclarent retrouver

ce côté agressif le plus souvent chez les patients toxicomanes.

R4 « C’était des toxicos en fait… Pour une qui avait été agressive à l’accueil avec la

secrétaire donc ça s’est mal passé et donc je ne les reçois plus. Ce n’est pas tellement parce

qu‘ils viennent chercher des médicaments et tout c’est surtout le côté agressif ».

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Patients trop exigeants

Généralement les médecins refusent plus facilement les demandes de patients trop

exigeants ou désagréables. Comme nous l’avons vu précédemment, certains médecins

refusent pour recadrer ce genre de patient ou pour le faire partir.

M2 « Je n’ai pas du tout envie de faire de concession avec des gens qui sont antipathiques

ou trop exigeants, et j’attends qu’une chose c’est qu’ils partent. »

Patients informés

Les campagnes de publicité ont facilité le refus, notamment pour le refus

d’antibiotique. Il semblerait aussi que les patients ayant un haut niveau de

compréhension acceptent mieux le refus car ils comprennent mieux ses raisons.

M2 «Je pense que les gens qui ont un plus haut niveau de compréhension comprennent

plus vite les motifs de refus que ce soit par rapport à moi ou par rapport à eux. »

R4 « Sur le certificat de sport… malheureusement on a été aidé par l’actualité. Moi je leur

dis vous n’avez pas entendu le cas de koh-lanta ? … ça leur parle plus et comprennent que si

je ne le signe pas ce n’est pas pour les embêter. »

M12 « Tu vois par exemple pour les antibiotiques, les campagnes publicitaires, que ce n’est

pas automatique et tout ça. Et bah je trouve que ça aide vachement et que ça finit par

rentrer dans la tête des gens et bon ils finissent par admettre plus facilement que ce n’est

pas nécessaire. »

2.3.3 Variables relatives à la situation

Demandes fréquentes

Les demandes répétées semblent faciliter le refus.

M2 « Les gens qui vont demander des bilans sanguins trop souvent alors que le dernier

bilan était parfait, non je refuse. »

M10 « Et les demandes d’examens complémentaires trop fréquents non justifiés. Par

exemple faire des numérations tous les 15 jours non. »

Demandes en fin de consultation

Les médecins déclarent refuser plus facilement les demandes en fin de consultation.

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R1 « Les certificats médicaux qu’on me demande en fin de consultation en général alors

que j’ai déjà examiné le patient sans avoir orienté l’examen en fonction du certificat

demandé. »

M9 « Ou même ceux qui demandent en fin de consultation « docteur vous pouvez regarder

mon dos aussi ? » ou « vous pouvez aussi voir son frère ? », non. »

Le manque de temps

Le manque de temps et les demandes en fin de consultation sont souvent liés. Le

médecin M2 explique aussi ne plus pouvoir recevoir de nouveaux patients.

M2 « il m’arrive aussi de refuser de nouveaux patients, des demandes de médecin traitant.

Parce ce que je suis vraiment débordée. »

R4 « Le refus … pour les visites généralement c’est … par manque de temps. »

M9 «Ou même ceux qui demandent en fin de consultation…non. Je n’ai pas le temps. »

Etre en cabinet de groupe

Bon nombre de médecins déclarent qu’être en cabinet de groupe ou de ne pas être seul

(secrétaire) facilite le refus. Notamment dans les situations de confit ou d’agressivité.

R4 « ce qui est rassurant … c’est d’être en cabinet de groupe et on s’arrange pour ne jamais

rester seul. »

R7 « Mais après le cabinet de groupe ça peut être intéressant si la réaction de patient est

excessive, voir agressive. Tu te sens plus en sécurité. »

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TABLEAU RECAPITULATIF DES ELEMENTS EN FAVEUR DU REFUS

IMPERATIFS PERSONNELS - Conviction personnelle - Affirmer son statut

MEDICAUX - Examen clinique - Prise en charge thérapeutique (contre-indications, effets secondaires) - Littérature

DEONTOLOGIQUES

INTERETS PATIENT - Pour sa santé - Pour sa vie socioprofessionnelle - Pour son éducation (toxicomanes)

MEDECIN - Aspect juridique

- Intérêts pratiques (sélectionner et recadrer sa patientèle)

- Pour sa sécurité (patients agressifs et visites)

SOCIETE - Intérêt financier - Intérêt sanitaire

ABSENCE D’INTERET

VARIABLES MEDECIN - L’expérience - L’assurance (manque d’assurance et confiance en soi) - Remplaçant (déresponsabilisation, moins d’exigence du patient) - Consensus entre médecins - Crainte de tromperie - Absence d’appréhension de perte d’un patient - Formation initiale

PATIENT - Non connu ou peu connu - Non vu en consultation, ou non examiné - Agressifs - Trop exigeants - Mieux informés

SITUATIONS - Demandes trop fréquentes - Demandes en fin de consultation - Manque de temps

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3. LA GESTION DU REFUS

Le refus peut être une épreuve difficile à surmonter par le médecin et par son patient. Il

est souvent mal perçu et par conséquent mal vécu. Pour la totalité des médecins

interrogés, une bonne gestion du refus est nécessaire pour préserver la relation

médecin-malade.

3.1 LA MISE EN CONDITION

Les conditions de formulation du « non » ont leur importance selon la plupart des

médecins. Afin que le refus soit mieux compris et accepté, il est nécessaire de réunir

plusieurs conditions pour obtenir le climat le plus détendu possible, et d’éviter ainsi le

conflit avec son patient.

M6 « Donc je pense plus qu’on doit instaurer avec son patient un climat de confiance. »

3.1.1 Ecouter et comprendre la demande

L’écoute de la demande de son patient, de ses inquiétudes ; et s’assurer de la

compréhension de la demande est la première étape pour préparer son refus.

R5 « Parce qu’avant ou on répond à une inquiétude du patient. »

R7 « Alors tout de suite j’ai compris qu’il voulait ses antibiotiques. »

R8 « On comprend qu’ils viennent juste en consultation parce qu’ils ne se sont pas levés le

matin pour aller travailler. »

3.1.2 La formulation du « non »

Afin d’éviter toute ambiguïté, le « non » doit être formulé de manière claire et concise.

Comme nous le verrons dans le paragraphe 3.2.1, la majorité estime qu’il est nécessaire

de toujours justifier le « non » afin qu’il soit mieux vécu.

R1 « J’ai rarement de difficulté à dire non. Et souvent les patients à qui je dis non ne

discutent pas… non c’est non. Point. »

M6 « Il faut être franc et dire non. Dire qu’on ne peut pas tout avoir. »

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3.1.3 Parler calmement

L’utilisation d’un ton de voix calme et posé a été citée plusieurs fois.

M3 « Faut dire ça, c’est vraiment important, avec un ton le plus calme possible… Sans

augmenter le ton. »

M6 « J’explique toujours pourquoi en restant calme. » « Voire même du sang froid dans

certains cas ! »

R7 « J’explique calmement … et bon ils le prennent bien. »

3.1.4 La compréhension du refus

S’assurer de la compréhension des raisons du refus par le patient a été évoqué par

plusieurs médecins. Afin que le refus soit accepté, il faut qu’il soit compris. Les médecins

expliquent devoir s’adapter au niveau de compréhension du patient. Nous verrons un

peu plus loin qu’un déficit de la compréhension comme par exemple la barrière de

langue est une difficulté récurrente du refus.

M3 « Mais, souvent en fait les gens qui sortent ont compris. Quand on explique bien ils

comprennent bien… Il y a une certaine adaptation en fonction du personnage.»

M6 « J’explique toujours pourquoi en restant calme et surtout en s’adaptant au patient

qu’on a en face de nous. » « … le non a été finalement bien adapté et surtout bien compris. »

3.1.5 La disponibilité

Refuser exige bien plus de temps qu’un accord. Le refus nécessite des explications et les

explications du temps.

M3 « Donc c’est toute cette discussion, ce temps qu’on passe avec le patient pour discuter.

Ce n’est pas forcément pour un examen clinique mais pour expliquer. Des fois on passe

même plus de temps à argumenter qu’à examiner. »

M6 « … beaucoup de patience »

3.1.6 ’empathie

Selon les médecins interrogés, le fait de montrer à leurs patients qu’ils adhèrent à leurs

propos et qu’ils comprennent leurs inquiétudes fait mieux accepter le refus. L’empathie

permet au patient de ne pas se sentir lésé.

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M3 « Ce qu’il faut c’est le faire avec gentillesse… Donc bien expliquer, bien leur dire qu’on

peut comprendre que vous n’ayez pas cette connaissance. »

R4 « C’est plus dans la réassurance que je base mon refus. »

M6 « Il faut être dans l’empathie. »

3.2 LES METHODES UTILISEES POUR REFUSER

Les méthodes utilisées sont variables. Elles sont fonction de la personnalité du médecin,

du patient et de sa demande.

3.2.1 Les explications

La totalité des médecins considère qu’une bonne explication rend le refus plus

acceptable. Le non est le plus souvent justifié. Les explications sont données de manières

diverses. Certains médecins déclarent avoir recours à des schémas, internet ou même la

littérature médicale. L’ensemble de ces éléments permet de justifier le refus auprès du

patient.

R1 « … il faut discuter, illustrer, avancer des arguments médicaux ou légaux. »

M2 « Je leur explique. »

M3 « En fait j’essaye d’expliquer la raison de mon refus. Eventuellement je fais des petits

dessins. Eventuellement je montre, parce qu’on a la chance d’avoir internet, on peut

montrer des photos, on peut monter des documents, on peut faire lire… Donc là c’est déjà

toute une explication et c’est notre rôle. »

R4 « J’essaie d’expliquer pourquoi je refuse… C’est toujours expliquer pourquoi et ne pas se

limiter à dire non»

R5 « Donc j’explique mon examen, j’explique la maladie, il m’arrive même de faire des

schémas ou proposer de la documentation.»

M6 « Les explications. Le non vient toujours après explication. J’explique toujours pourquoi.

Je ne dis jamais non point barre. »

R7 « Bah oui tu expliques. Tu sors même la bibliographie, les études qui ont été faites sur le

sujet… les campagnes publicitaires aussi ! »

R8 « Alors moi j’essaie de discuter, d’expliquer, de donner les raisons du pourquoi et du

comment. »

M9 « J’essaie quand même de leur expliquer pourquoi avec des arguments médicaux

toujours. »

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M10 « Généralement si je refuse j’explique c’est tout. »

M12 « Alors souvent en fait j’essaie d’expliquer pourquoi je refuse. De justifier. Je donne

souvent des arguments médicaux. »

3.2.2 ’éducation et la responsabilisation du patient

Ce sont des méthodes évoquées fréquemment. Elles découlent souvent de longues

explications, et se font le plus souvent au décours de plusieurs consultations.

L’éducation et la responsabilisation du patient ont également un effet sur le long terme

et permettent aux médecins de limiter les demandes jugées abusives.

’éducation

M2 « Pour les refus de médicaments je leur explique qu’ils ne conviennent pas ou plus à

leur cas. »

M3 « … en expliquant ce qu’est cette pathologie, pour quel traitement est adapté cette

pathologie et pourquoi le médicament ou la situation ne convient pas. » « Et pour les arrêts

de travail c’est dire aussi vous avez effectivement une maladie certes, mais le travail peut

aussi vous être utile. » « Parce que on les voit bien les abus, où ils se font leur propre

diagnostic, où ils se font leurs propres traitements, voir même ceux des voisins ! Donc

souvent il faut déjà leur démonter qu’ils ont tort dans leur diagnostic. »

R4 « je lui avais bien expliqué que c’était un effet secondaire fréquent, que ça risque de

s’aggraver. »

M6 « Pour les toxico… Là on sait qu’il faut les recadrer sans cesse. »

R7 « Je pense que ça serait bien d’informer les patients sur les dangers d’une prise

fréquente d’antibiotique. Genre les bactéries multi résistantes ou les infections

nosocomiales. Des fois il faut leur faire peur pour qu’ils comprennent. »

R8 « Typiquement pour les antibiotiques, j’explique qu’il y a plus de risques à en donner

parce qu’on va créer des résistances et qu’un jour on aura plus de médicament pour traiter

les choses graves et que ça sera très ennuyeux. »

M12 « Dire par exemple le pourcentage de cas où c’est viral et que du coup ça ne justifie

pas les antibiotiques. Que ça ne s’améliorera pas avec les antibiotiques »

La responsabilisation

M2 « Pour les arrêts ou les certificats… Je lui dis que moi je certifie sur l’honneur et que je

ne peux pas faire un faux. Et même s’ils étaient malades ce jour-là fallait au moins qu’ils

m’appellent ce jour-là. »

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M3 « Je leur dis que … la société elle est quand même en grande difficulté, c'est-à-dire bon

on est dans une société, on doit tous partager la même chose et on ne doit pas abuser. Voilà

c’est un peu ça. »

R8 « Je leur dis qu’un rhume ça ne les empêche pas d’aller travailler. »

M10 « Je leur dis que le refus d’aller travailler ne résout jamais les problèmes dans la vie. »

R11 « Genre non vous savez il ne faut pas en prendre trop, ce n’est pas bon pour vous. La je

joue plus sur la corde du risque pour le patient. J’essaie de les responsabiliser en fait. »

M12 « Donc en expliquant. Et en responsabilisant le patient. »

3.2.3 La négociation et le compromis

Comme le déclarent les médecins, la négociation est une étape récurrente du refus:

R1 « Il m’est aussi arrivé quelques rares fois d’expliquer que je n’étais pas un marchand de

tapis ! »

R4 « « Voilà ça m’arrive de négocier. Par exemple dire oui ça je veux bien cinq euros ok,

mais ça cent euros non ce n’est pas possible. Des fois j’ai l’impression que je marchande. »

M6 « Enfin ce n’est jamais un non franc. Mais c’est toujours un non négocié. »

Afin éviter les conflits, la plupart des médecins négocient avec leurs patients et il arrive

qu’ils leur proposent un compromis.

La situation la plus fréquente citée est celle de l’arrêt de travail. Le médecin accepte

l’arrêt, mais fait un compromis sur la durée de l’arrêt.

M3 « Ce n’est pas vraiment un refus mais une négociation qui peut aller jusqu’au refus c’est

l’arrêt de travail… les gens s’arrêtent spontanément et ils nous mettent devant un fait

accompli. Donc là c’est plus compliqué. Donc je fais l’arrêt pour le jour qui a été pris par le

patient mais je n’en rajouterai pas d’avantage.»

R8 « Pour les arrêts de travail je finis toujours par accepter. Mais je ne fais jamais plus

d’un jour. Je fais le jour même, parce qu’en plus généralement ils viennent te voir à 18h et

c’est tout »

M10 « Mais dans ces cas-là pour les arrêts je fais un arrêt d’une journée. »

Les autres cas concernent généralement des prescriptions de médicaments.

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M3 « Bon il y a un générique que bon… celui-là ok vous dites que vous ne le tolérez pas,

bon je vais vous écouter, mais pas les autres. Donc on marchande, celui-là ok mais pas les

autres. »

R4 « ou sinon je négocie. Je leur dis je vous donne pour cette fois un mois mais après je vous

le refuserai. »

R11 « Et donc je lui ai dit que je veux bien lui prescrire son traitement mais juste pour

quelques jours le temps que son médecin revienne. »

3.2.4 Les alternatives

Tout comme le compromis, des alternatives comme la consultation spécialisée ou la

consultation en deux temps peuvent être une façon pour refuser.

La consultation spécialisée

La consultation avec un spécialiste apparaît comme une alternative de choix pour

refuser. Avoir un deuxième avis permet au patient de mieux accepter le refus ; et au

médecin de conforter son choix en cas de doute.

M2 « Et puis si vraiment ils ne comprennent pas j’envoie voir un spécialiste.» « Par exemple

pour les certificats si pense que j’ai besoin de faire un bilan cardio en plus, par exemple si je

trouve une anomalie à l’examen clinique, je demande un avis cardio. »

R4 « Je leur dis je vous laisse le temps de revoir le gynéco. » « Mais bon lui tout ce qu’il

voulait c’était son arrêt de travail. Donc je lui dis bah non. Vous allez aux urgences et vous

l’aurez sur place. »

R11 « Et donc je lui ai dit que je ne pouvais pas lui prescrire. Je lui ai dit qu’il avait besoin

d’un avis spécialisé et que ce n’était pas normal de prendre autant de morphine et tout. Et

qu’il aille à l’hôpital ou dans des centres spécialisés.»

La consultation en deux temps

La consultation en deux temps a le plus souvent été citée par les médecins remplaçants.

Bon nombre considèrent le médecin remplacé comme étant « un rempart » en cas de

conflit ou de désaccord avec un patient. Une consultation en différée est dans la plus

part des cas proposée systématiquement par le remplaçant, ou le patient prend lui-

même l’initiative de contacter son médecin traitant.

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R1 « Et lorsque le patient me dit que d’habitude le médecin que je remplace le fait, je leur

propose donc de revenir le voir lui. »

R5 « L’avantage d’être remplaçant, c’est que je leur dis que si vous n’êtes pas content vous

n’avez qu’à demander l’avis du médecin titulaire et puis je les remets en consulte avec lui. »

R7 « Quand ils ne sont pas contents, je leur dis avec moi c’est comme ça, si vous n’êtes pas

d’accord revenez voir votre médecin traitant. »

Dans certaines situations, le laps de temps entre les deux consultations est considéré

comme une période d’essai. Par exemple pour un médicament générique selon le

médecin M3 ou en cas de refus d’un antibiotique pour le médecin M12.

M3 « Parce que de toute manière quand on a fini ce genre de consultation, je ne leur dis pas

qu’on ne pourrait pas rediscuter de ça bien au contraire ! Je leur dis souvent d’y réfléchir,

qu’on pourrait se recontacter. » « Quand on en reparle et bah effectivement ça s’est bien

passé. C’est comme une période d’essai pour le générique. »

M12 « Et par exemple par rapport aux antibiotiques, je leur dis ne vous inquiétez pas de

toute façon si ça ne va pas, on se revoit. Et que de toute façon si la fièvre ne baisse pas je

reverrai l’enfant. »

Les bilans complémentaires

Ils permettent en cas de normalité de justifier le refus d’un traitement ou d’un autre

examen.

Le bilan sanguin

M2 « les gens qui vont demander des bilans sanguins alors que le dernier bilan était

parfait, non je refuse. Il faut leur expliquer qu’il n’y a pas besoin d’en faire autant! »

R4 « J’ai refusé de renouveler une statine à un patient. Bon il n’était pas content et surtout

pas rassuré… Donc je lui avais fait un bilan qui montrait donc la rhabdomyolyse. »

Le TDR

M12 « Oui aussi, il m’arrive pour les angines de faire un TDR. Même si je sais à quoi

m’attendre. Mais bon ils sont rassurés et après quand on leur dit « ah le test est négatif,

donc c’est viral », et ben ça passe mieux. »

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3.2.5 ’absence d’explication

Comme nous l’avons vu dans le paragraphe 2.2.1, le « non » ferme et définitif, sans

explication ou compromis, est souvent considéré comme un atout permettant de

sélectionner sa patientèle.

Il arrive aussi, dans certaines situations que le médecin soit à court d’argument, ou n’a

pas (ou n’a plus) de temps à consacrer à l’explication du refus. D’autres estiment que le

« non » se suffit à lui-même et qu’il n’y a pas lieu de se justifier.

M2 «Il m’arrive aussi de refuser sans explication mais généralement c’est pour des gens

trop exigeants que je souhaite faire partir. »

M3 « c’est des discussions voire même des négociations à certains moments. Et qu’il y a

plus d’argument… »

R4 « Même une fois j’ai eu une patiente qui ne voulait rien entendre; alors je me suis levée

j’ai ouvert la porte et je lui ai dit madame la consultation est terminée. »

M9 « Mais bon je ne m’attarde pas. Je n’ai pas le temps. Et puis non c’est non. On n’a pas à

se justifier. »

TABLEAU RECAPITULATIF DES MISES EN CONDITIONS ET METHODES

MISE EN CONDITION - Ecouter et comprendre la demande - Formuler le non - Garder un ton calme - S’assurer de la bonne compréhension du refus - Etre disponible - Avoir de l’empathie

METHODES - Explications - Education et responsabilisation - Négociation et compromis - Propositions d’alternatives (consultations

spécialisées ou différée) - Bilans complémentaires (TDR, bilans sanguins) - Absence d’explication

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4. ’

La majorité des médecins interrogés déclare avoir eu des difficultés à refuser, voire

avoir agi contre leur gré. Plusieurs éléments pouvant influencer le choix du « non » et

orienter la décision vers une acceptation ont été mis en évidence. Ils ont été classés en

quatre catégories : les difficultés relatives au patient, au médecin, à la situation et à la

société.

4.1 DIFFICULTES RELATIVES AU PATIENT

4.1.1 Patient (trop ?) connu

A l’inverse du patient non ou peu connu ; un patient connu de longue date avec lequel

une relation affective s’est installée, rend le refus plus difficile. En effet un médecin peut

être amené à accepter plus facilement, par crainte de modification relationnelle, la

demande d’un patient connu.

M6 « Et bon des fois quand on connait bien le patient, sa situation familiale ou au travail

etc. c’est difficile parce que justement il s’en sert… on se sent un peu manipulé. »

R8 « Donc tu cèdes plus... Et bon aussi tu les connais plus, ils te prennent par les sentiments

des fois. »

M9 « Je trouve que c’est quand on est proche des patients que c’est plus difficile.»

M11 « Peut être que je pourrais être plus faible sur des patients que je suis régulièrement.

Et du coup… Ils me prennent un peu par les sentiments… C’est vraiment pour les patients

que je connais bien peut être que je me ferais avoir un peu plus facilement »

4.1.2 Difficultés de compréhension du refus

Les difficultés de compréhension du refus et de ses raisons ont été citées comme étant

un obstacle récurrent.

La barrière de langue

M2 « Les gens qui comprennent pas par rapport à la langue »

M6 «Quand le patient ne comprend pas ou mal notre langue, ça devient tout de suite très

compliqué. »

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R7 « La barrière de langue c’est vraiment un problème. Ils ne comprennent pas pourquoi le

petit n’a que du doliprane alors qu’il a de la fièvre et c’est difficile de leur faire comprendre

que l’examen ne montre qu’une virose et donc que l’antibio ne sert à rien. »

Déficit de la compréhension

M2 « Les gens qui ont des difficultés de compréhension, ou soit qu’ils ont des difficultés

psychologiques et qu’on peut toujours leur expliquer trois fois la même chose, ils ne veulent

toujours pas démordre du médicament qu’ils avaient avant. ».

4.1.3 Patients agressifs et toxicomanes

Comme nous l’avons vu dans le paragraphe 2.2.2, les demandes de patients qualifiés de

« désagréables » par les médecins aboutissent souvent à un refus. Mais des médecins

choisissent de céder à leurs demandes dans un premier temps pour éviter le

conflit généralement par crainte pour sa sécurité. Dans tous les cas, les médecins

s’arrangent pour ne pas revoir ce patient. Les patients agressifs et les toxicomanes sont

considérés par la plupart des médecins comme étant les plus difficiles à gérer.

R4 « Même une fois j’ai eu une patiente agressive qui ne voulait rien entendre et que j’ai eu

du mal à virer. »

R5 « Alors les conflits les plus importants c’est quand même avec les toxicomanes... C’est

mon principal objet de discorde. »

R7 « Donc je lui ai dit qu’il n’y avait pas la nécessité de prendre des antibiotiques… Il a

commencé à s’énerver à s’emporter. Et bon franchement j’ai hésité en fait à changer

d’avis. »

R8 « c’était un toxico qui voulait son renouvellement, sauf qu’on ne prenait pas sans

rendez-vous. Mais il a été hyper pressant et hyper désagréable et ça aurait pu mal tourner

aussi, donc je l’ai finalement reçu. »

M10 « Bah le harcèlement. L’envie de me débarrasser au plus vite de la personne, ça peut

me faire changer d’avis. »

R11 « Il s’est beaucoup énervé, il voulait absolument que je lui prescrive… Je trouve que ça

devient compliqué de refuser quand le patient est menaçant. Parce que vraiment tu as des

patients qui font peur et tu préfères ne pas les contrarier.»

M12 « Et du coup il a été très agressif. Il a tapé sur la porte et tout. Ca s’était très mal

passé. J’ai eu même très peur. »

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4.1.4 Retentissement financier

Situation précaire

Quand les patients sont dans une situation financière précaire, certaines demandes

paraissent difficiles à refuser.

R4 « On me demande beaucoup aussi de faire le tiers payant, même sans CMU ou AME. Là

je ne refuse jamais. Et puis de toute façon il y a des patients qui ne peuvent pas du tout

avancer les frais et ça ne me pose pas de problème. L’acte gratuit je le pratique aussi très

souvent. »

Consultations répétées pour la même demande

Certains médecins déclarent céder aussi plus facilement parce que le patient paye,

généralement dans le cas de demandes répétées pour le même motif.

R7 « Mais il m’a même dit que je voulais le faire revenir demain exprès pour qu’il repaye ! »

R8 « Bah le problème c’est que le patient aux urgences bah il ne paye pas quoi. Alors que

chez le généraliste oui. Donc non je trouve que c’est plus difficile. »

M12 « Un papa qui est venu me voir 4 fois de suite ! … En plus il avait été très agressif en

me disant que je le faisais venir pour gagner de l’argent! Et donc du coup j’avoue j’ai fait

l’ordonnance d’antibiotique même si moi j’étais persuadée que ce n’était pas bon. Mais bon

ça m’a touché qu’il m’ait dit que moi je le faisais revenir volontairement pour l’argent. Ça

m’a même blessée. »

4.2 DIFFICULTES RELATIVES AU MEDECIN

4.2.1 Etre une femme

Bon nombre de médecins femme ont déclaré avoir du mal à refuser et à imposer leur

décision, principalement lors d’un conflit avec un patient masculin.

R3 « À moins d’être un bonhomme d’1m90 ! Moi je ne suis pas rassurée. »

R8 « En plus je pense qu’en étant une femme c’est déjà beaucoup plus compliqué vis à vis

d’un homme. Parce qu’un homme va forcément plus craindre un homme qu’une femme. »

M12 « J’ai l’impression que les patients ont plus tendance à être plus exigeant et agressif

devant une femme médecin. »

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4.2.2 onditions d’exercice

Certaines conditions d’exercice, comme l’exercice en cabinet individuel ou dans des lieux

à risque compliquent le refus. La plupart des médecins explique céder plus facilement

dans ce genre de situation par crainte pour sa sécurité.

Cabinet individuel

R3 « être en cabinet de groupe ça aide pas mal! Mais surtout ça aide quand on se sent

agressé aussi. Parce que quand on est seul on n’est pas très rassuré. »

R8 « Il a commencé à donner des coups sur le bureau et j’ai eu vraiment peur…

Franchement je pense que si j’avais été seule j’aurai peut être cédé… Limite des fois tu te dis

qu’il nous faudrait presque avoir un garde du corps dans ton cabinet ! »

R11 « Je trouve que ça devient compliqué de refuser quand le patient est menaçant.

Surtout que j’étais toute seule »

M12 « Et bon j’aurais préféré ne pas être isolée. Mais bon je n’ai pas eu le choix. »

ieu d’exercice

R3 « Et aussi pour les visites si c’est un coin qui craint j’évite. Je suis nouvelle dans le

quartier et il y a beaucoup de cités dans le coin. Et je t’avoue que des fois je ne suis pas très

rassurée. »

R5 «Je remplace dans un cabinet dans une zone… je sais que quand je travaille dans ce

genre de cabinet, quand tu refuses il faut y aller par un moyen détourné. Parce que tout de

suite c’est le conflit c’est le sitting, les cris parfois les chaises qui volent… »

4.2.3 Empathie pour son patient

La plupart des médecins déclarent avoir plus de difficulté, et même avoir parfois changé

d’avis et accepté la demande quand le patient a été lésé par un refus. Plusieurs déclarent

avoir cédé devant les larmes du patient. L’empathie est par conséquent la principale

difficulté pour refuser. Et cela devient encore plus compliqué lorsque le patient est

connu de longue date, comme vu au paragraphe 4.1.1.

R1 « Quand la personne se met à pleurer, quand elle joue sur le sentimental en essayant

d’invoquer d’autres conséquences au refus, forcément c’est plus difficile. »

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M3 « On voit bien que la personne craque un certain moment, et même qu’elle souffre de

cette non compréhension … et effectivement on va accepter. »

R4 « ça m’est arrivé de le faire quand il m’est arrivé de ressentir une vraie détresse »

R7 « J’ai déjà prolongé un arrêt de travail de quelques jours au dernier moment parce que

la patiente a fondu en larmes devant moi, parce qu’elle était en burn out et elle n’en

pouvait plus. »

4.2.4 Statut de remplaçant

Comme nous l’avons vu dans le paragraphe 2.2.1, le statut de remplaçant peut faciliter le

refus pour certains médecins ou situations. D’autres remplaçants ont également

rencontré des difficultés à refuser spécifiques à leur statut.

R11 « Moi je trouve que c’est plus difficile de refuser pour les remplaçants. ».

Désaccord avec le médecin remplacé

R4 « Ah c’est plus dur de refuser, bien sûr. Parce que des fois on refuse des trucs, et le

patient deux jours après va voir le médecin installé qui lui fait. Et là on perd toute

crédibilité ! »

R7 «Bon après ce qui serait bien c’est que le médecin installé soit aussi d’accord avec moi...

Mais bon ce n’est pas toujours le cas. »

’irrégularité ou l’absence de suivi des patients

L’irrégularité ou l’absence de suivi des patients est une difficulté citée fréquemment

par les médecins remplaçants. Beaucoup d’entre eux se sentent manipulés par leurs

patients.

R4 « Et puis aussi il y a des patients qui sont manipulateurs ! Ils nous sortent : bah ça vous

nous le refusez mais d’habitude Dr machin nous le fait »

R5 « Et puis il alterne d’un médecin à un autre. Et vu que je suis remplaçant c’est difficile

de suivre derrière… Il y en a même qui essayent de me rouler. Genre d’habitude il me donne

ça, il me fait ça etc. »

Plus de pression des patients

La plupart des patients considèrent le remplaçant comme étant un jeune intérimaire

ou encore un « faux médecin » comme le déclare le docteur R7. Les remplaçants

estiment avoir plus de difficulté à imposer leurs décisions à certains patients et

peuvent même être victimes de chantage.

R5 « En plus il y en a beaucoup qui se disent alors c’est le remplaçant donc il va céder. »

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R7 « Il m’a même menacée de se plaindre au vrai médecin, enfin au médecin que je

remplaçais, et lui dire que j’étais incompétente ! »

R11 « Mais aussi par rapport à la situation de remplaçant, ce qu’il y a c’est que

généralement les patients osent plus. Ils se disent que tu vas céder plus facilement parce

que tu n’es que de passage, tu n’as pas assez d’expérience etc.»

Crainte de retentissement pour le médecin remplacé

Les remplaçants déclarent avoir des difficultés à refuser parce que ce n’est pas leur

patientèle. Ils craignent un retentissement sur la relation médecin–malade préexistante

entre le patient et le médecin remplacé ; ou encore un retentissement financier avec un

départ du cabinet.

R8 « Moi je trouve que c’est plus difficile parce que ce n’est pas tes patients. Ce n’est pas

vraiment tes patients, ce sont les patients du médecin que tu remplaces et du coup moi je

ne trouve pas que c’est plus facile au contraire… tu te dis que tu vas peut être faire perdre

un patient à la personne que tu remplaces. »

R11 « Quand tu es remplaçant tu sais que tu refuses quelque chose à un patient qui n’est

pas le tien. Et du coup tu joues aussi sur la patientèle du titulaire… Enfin c’est juste que ta

décision n’a pas juste des conséquences par rapport à ton acte à ce moment-là. Ça peut

aussi jouer sur la patientèle du médecin que tu remplaces. »

4.2.5 Absence de consensus entre médecin

En cas de désaccord entre médecins, le refus devient plus compliqué. Cette notion a été

largement évoquée par les remplaçants en cas de désaccord avec le médecin

remplacé comme cité précédemment. Celle-ci est également présente dans la relation

médecin généraliste et spécialiste. En effet comme nous l’avons vu dans le paragraphe

3.2.4, la consultation spécialisée représente une alternative de choix pour appuyer le

refus, et ce à la condition que les deux médecins soient du même avis.

M2 « Aussi parfois on est en désaccord avec le spécialiste. Ce sont vraiment ces cas là qui

sont les plus difficiles... On envoie le patient chez le spécialiste et bah s’il change le

traitement on accepte sans broncher. Je ne peux pas leur dire non je ne suis pas d’accord…

Ce n’est pas facile parce que mes spécialistes j’en ai besoin…»

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4.2.6 Crainte de perdre un patient

L’acceptation par crainte de perdre un patient a parfois été citée par les médecins.

R7 « Je pense que si ça aurait été mon cabinet. Je crois que j’aurais fait un effort pour

essayer de garder la clientèle. Enfin non ma patientèle… quand tu tiens ton cabinet... Il

faut que ça tourne. Et donc voilà tu as besoin de ces patients et donc tu les chouchoutes. Et

donc tu cèdes plus c’est normal. Bah c’est la vérité. »

R8 « Donc tu cèdes plus pour garder la patientèle.»

M10 « Vous savez très bien qu’il va aller voir un autre docteur dans les 5min qui suivent.

Donc autant lui donner ce qu’il veut. »

4.3 DIFFICULTES RELATIVES A LA SITUATION

4.3.1 Manque de temps

Le manque de temps incite les médecins à accepter ce qui en temps normal aurait été

refusé.

M3 « Ça m’est arrivé par manque … de disponibilité parce que bon on est un peu fatigué

par moment, de pas bien voir ou de pas prendre la bonne décision. »

M9 « Oui j’ai déjà cédé… C’est clairement pour avoir la paix. Mais bon ce n’est jamais

quelque chose d’important. Donc bon je préfère le faire que rester discuter. »

4.3.2 Consultation différée

Ce type de situation a été cité par les médecins dans le cadre de datation d’un certificat

ou d’un arrêt de travail. Généralement, le médecin n’a pas pu se rendre disponible à

cette date-là pour faire ce document. Plusieurs médecins évoquent un sentiment de

culpabilité et déclarent céder à la demande.

M2 « Si je les ai au téléphone et que je ne peux pas les recevoir, que c’est de ma faute vu que

je ne peux pas les recevoir ; je veux bien les voir le lendemain et authentifier qu’ils étaient

malades le jour où je ne les ai pas vus. »

M6 « Ça se voit dans les demandes d’arrêts maladie en différé quoi. Les gens qui me

demandent une régularisation sur un arrêt de travail. Et ça, ça peut me gêner de dire non.

Et donc bon le fait que je n’ai pas été disponible à ce moment-là, que j’ai été débordé ou

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absent me culpabilise. Je me sens responsable d’avoir mis mon patient dans cette position-

là. »

M12 « C’est surtout pour les arrêts les gens font un peu culpabiliser. C'est-à-dire ils vont te

dire « ce n’est pas mon style », « je n’en demande jamais mais là vraiment je ne peux

pas »….Mais oui, ce sont les arrêts où je me sens le plus mal à l’aise et qui peuvent me faire

culpabiliser. »

4.3.3 Fait accompli

C’est souvent le cas des arrêts de travail. Le patient s’arrête spontanément et consulte en

fin de journée en demandant un arrêt. Le médecin se sent donc dans l’obligation de le

faire.

M3 « C’est l’arrêt de travail où effectivement la plus part du temps je trouve que les gens

s’arrêtent spontanément et ils nous mettent devant un fait accompli… Donc je fais l’arrêt

pour le jour qui a été pris.»

R8 « En tout cas pour les arrêts de travail je finis toujours par accepter. Mais bon c’est

surtout parce que je suis devant le fait accompli ! »

4.4 DIFFICULTES RELATIVES A LA SOCIETE

4.4.1 ’influence extérieure

Les influences extérieures venant de personnes le plus souvent sans aucun lien médical

(famille ou voisinage) ou encore les idées reçues et internet représentent des pressions

supplémentaires pour faire accepter la demande aux médecins.

M3 « Mais c’est vrai là où les gens ont de telles idées préconçues que parfois on est coincé !

Parce que le problème c’est les médias, ou encore internet avec tous ces blogs où les gens

disent et lisent pleins de choses sur les produits. Et là on ressent vraiment la nuisance de la

société sur nos prescriptions. »

R5 « Mais bon je ne te cache pas qu’il y a des patients qui sont extrêmement difficiles. Et en

plus généralement ceux-là sont allés vérifier ça sur internet. Alors ils sont là : « ah docteur

j’ai vu sur Doctissimo que… qu’est-ce que vous en pensez ? ».

R7 « Mais bon le plus souvent ça reste quand même la prescription d’antibiotiques. Les

patients ont encore du mal à comprendre que ça ne guérit pas tout. »

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4.4.2 Le coût

Un coût peu élevé peut également compter en faveur du patient.

R4 « ça m’est arrivé de le faire… surtout si c’est des trucs qui ne coutent pas excessivement

chers »

B P ’

RELATIVES AU PATIENT Patient (trop) connu

Difficultés de compréhension - Barrière de langue - Déficit de la compréhension

Patients agressifs et toxicomanes

Retentissement financier - Situation précaire - Consultations répétées pour le même motif

RELATIVES AU MEDECIN Etre une femme

Conditions d’exercice - Cabinet individuel - Lieu d’exercice à risque

Empathie

Remplaçant - Désaccord avec le remplacé - Irrégularité de suivi des patients - Pression des patients - Risque de retentissement pour le remplacé

Absence de consensus

Crainte de perte de patient

RELATIVES A LA SITUATION

Manque de temps

Consultation différée

Fait accompli RELATIVES A LA SOCIETE Influence extérieur - Média (internet, télévision)

- Entourage (famille, voisins, amis)

Coût peu élevé

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5. LES CONSEQUENCES DU REFUS

Refuser une demande que le patient considère comme légitime implique forcément une

réaction de sa part avec plus ou moins de conséquences à court et à long terme. La

notion de la répercussion du refus sur la relation médecin - malade a été présente dans

l’ensemble des entretiens, avec généralement une nette dégradation. Cependant certains

médecins ont évoqué un renforcement de cette relation après un refus, généralement

sur le long terme.

5.1 A COURT TERME

Les conséquences d’un refus à court terme sont le plus souvent, voire toujours

négatives selon les médecins interrogés.

5.1.1 Conflit

Un conflit fait le plus souvent suite au refus. Son importance est variable en fonction du

patient (toxicomane), du type de sa demande (psychotropes) et de la situation (cabinet

individuel dans une zone à risque).

Le conflit peut aller d’un simple « froid » en fin de consultation à de l’agressivité.

M3 «Il est revenu furieux et il a même jeté les médicaments au visage de la secrétaire et de

moi-même ! Parce qu’effectivement il voulait absolument ce traitement et que je lui ai

refusé jusqu’au bout ! Et donc je ne l’ai jamais revu. »

R4 «. Donc je lui dis bah non... Donc il est parti pas content… Et puis de temps en temps une

agressivité qui peut monter. »

R5 « Quand je travaille dans ce genre de cabinet, quand tu refuses… tout de suite c’est le

conflit c’est le sitting, les cris parfois les chaises qui volent, ils te balancent des trucs comme

ça. »

M6 « Alors les conflits … c’est avec les toxicomanes… Des agressions verbales aussi.»

R7 « Ah ça jette un froid. La consultation se termine de façon beaucoup plus tendue et

moins amicale vis-à-vis du patient parce qu’on n’a pas accepté ce qu’il veut. Bon

généralement ils sont froids, mais des fois, comme le patient de tout à l’heure il m’a limite

agressée verbalement. »

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R8 « Et bon moi je ne voyais pas la contre-indication à ce qu’il aille travailler. Et du coup

c’est parti en sucette. Il s’est facilement énervé et le ton est monté très haut. Il a commencé

à donner des coups sur le bureau et j’ai eu vraiment peur. »

M9 «Ça a jeté un froid… Oui bien sûr que ça arrive les conflits… Après bon parfois il y a des

patients qui peuvent être agressifs verbalement. »

R11 « Donc du coup il s’est beaucoup énervé, il voulait absolument que je lui prescrive. »

M12 « Et du coup il a été très agressif. Il a tapé sur la porte et tout. Ça c’était très mal

passé. J’ai eu même très peur. »

5.1.2 Culpabilité

Quelques médecins ont déclaré se sentir coupables de refuser certaines demandes. Ils

s’estiment responsables de mettre leurs patients dans une situation délicate

(notamment vis à vis de leur employeur).

M6 « Les gens qui me demandent une régularisation sur un arrêt de travail… je

culpabilisais parce que lui ou elle va perdre quelque chose en fait. »

M12 «C’est surtout pour les arrêts les gens font un peu culpabiliser. C'est-à-dire ils vont te

dire « ce n’est pas mon style », « je n’en demande jamais mais là vraiment je ne peux

pas »… Ils tirent un peu sur la corde. »

Certains médecins ressentent de la culpabilité pour avoir au contraire cédé à la demande

de leurs patients.

M2 « Je me sens plus coupable d’accepter quand je ne suis pas tout à fait d’accord. »

R8 « Je me suis plutôt sentie coupable une fois, parce que je me rappelle d’un patient qui est

venu et qui m’a en gros forcé la main pour lui prescrire des corticoïdes… et j’étais gênée

d’avoir fait cette prescription alors que ça me semblait vraiment pas justifié. »

5.1.3 hangement d’avis

Comme nous l’avons vu dans le paragraphe 3.2.3, le refus engage la plupart des cas une

négociation. Dans certains cas, il arrive que le médecin change d’avis et qu’il revienne

sur sa décision.

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M3 « Ils sont tellement persuadés que ça va leur faire du mal, qu’on prend plutôt le risque

qu’ils ne prennent pas le médicament. Donc là en fait on va négocier et effectivement on va

accepter le générique. »

R4 « Par exemple pour la pilule, une dame de 40ans qui fume. Donc je voulais absolument

lui mettre un micro progestatif. Donc elle a essayé 2 mois, 3 mois. Ça n’allait pas. Donc elle

est bien au clair sur les risques, mais bon je suis quand même revenue en arrière. »

R7 « J’ai prolongé un arrêt de travail de quelques jours au dernier moment parce la

patiente a fondu en larmes devant moi. »

R8 « Je n’avais pas voulu et puis finalement j’avais fini par céder. »

M12 « Mais bon au bout de la quatrième fois… En plus il avait été très agressif… Et donc du

coup j’avoue j’ai fait l’ordonnance même si moi j’étais persuadée que ce n’était pas bon. »

5.1.4 Non-paiement

Certains médecins ont déclaré avoir eu quelques patients qui n’ayant pas reçu ce qu’ils

désiraient ont choisi de ne pas régler la consultation.

R4 « J’ai eu des patients qui sont partis sans payer. Genre ok tu ne veux pas me donner ce

que je veux bon bah je suis venue pour rien donc ciao ! Et ils partent sans payer. »

R7 « J’ai des confrères qui ont eu plusieurs patients qui sont partis en claquant la porte et

sans passer à la caisse. ».

5.2 A LONG TERME

5.2.1 Perte du patient

Les médecins ont évoqué à l’unanimité la perte d’un patient comme étant une

conséquence du refus. Celle-ci semblerait être une conséquence négative, mais pour la

quasi-totalité des médecins ce n’est pas un souci majeur. Comme nous l’avons vu

précédemment dans le paragraphe 2.1.2, le départ de patients permet au médecin de

« trier leur patientèle ».

R1 « Je sais qu’il y a des patients qui ne sont pas revenus me voir parce que j’ai refusé un

arrêt de travail ou des antibiotiques. »

R4 « Même une fois j’ai eu une patiente agressive que j’ai eu du mal à virer ... Bah je peux te

dire que je ne l’ai plus revue ! Mais bon pour ce type de patient ça ne dérange pas. On ne

peut pas céder à tout, quitte à perdre des patients. » « Il y a quelques patients quand on

leur refuse, ils ne reviennent plus. Ça c’est clair. Mais bon en même temps on ne manque

pas de patient. Donc ça ce n’est pas très gênant. »

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R5 « Bon il y a ceux qui ne reviennent plus me voir. »

R8 « Bah en fait il m’est arrivé de ne plus revoir certains patients. Mais c’est rare. »

M6 « Il y a peut-être 1 ou 2 personnes qui m’ont fait du chantage et qui m’ont dit qu’ils ne

reviendraient pas... Donc voilà quelques départs de cabinet mais vraiment très peu. »

R8 « Enfin moi ça ne me gêne pas de perdre un patient qui n’a pas la même façon de voir

les choses que moi. »

M9 « Peut être qu’il y en a qui ne reviennent plus… s’ils ne reviennent pas tant mieux. »

M10 « Bah le malade ne vous aime plus et il vous quitte pour aller en voir un autre. Et ça

ne me pose pas de problème. »

R11 « Bah en général, ce sont généralement des patients que je n’ai plus revus. »

M12 « Alors… généralement ils partent. Surtout s’il y a eu de l’agressivité. »

5.2.2 Education du patient

Comme nous l’avons vu plus haut, il y a un intérêt thérapeutique au refus. L’éducation et

la responsabilisation sont des méthodes couramment utilisées pour appuyer le refus. Et

leurs effets se font ressentir sur le long terme généralement au cours de plusieurs

consultations.

Le refus permet de recadrer le patient dans ses inquiétudes, de réduire les demandes

jugées injustifiées ou abusives à l’avenir et par conséquent de limiter les conflits.

M3 « Certains ont réfléchi, sont revenus et puis on a pu reprendre la discussion. »

R4 « Donc elle est bien au clair sur les risques... Mais bon donc j’ai cédé mais au moins la

conséquence du refus c’est qu’au moins ça lui a fait prendre conscience qu’elle prenait

quand même des risques avec sa santé, donc voilà. »

R5 « Généralement c’est plus souvent dans le bon sens. En fait parfois le fait de refuser

quelque chose ça les recadre dans leurs inquiétudes en fait. »

M6 « Et aussi ils ont compris qu’ils ne peuvent pas tout avoir, qu’ils ne peuvent pas tout

exiger et que eux si ça les arrangeaient, que moi ça ne m’arrangeait pas au niveau de mes

démarches éthiques. »

5.3 ’ B Q

Bien que le conflit et la perte du patient aient été plus fréquemment cités, la majorité

des médecins considère qu’un refus correctement expliqué et argumenté est le plus

souvent bien accepté.

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M2 « Oh ça peut arriver que la relation s’altère mais c’est rare… Mais bon en général les

patients comprennent. »

M3 « Mais, souvent en fait les gens qui sortent ont compris. Il est très rare, je dirais à

l’exception de ce monsieur ou peut être un ou deux autres qui n’ont pas été satisfait, mais je

revois les patients à qui j’ai dit non. »

R4 « J’ai eu un cas où j’ai refusé de renouveler une statine … Mais bon je lui avais bien

expliqué… Et bon il s’est rendu compte qu’en faisant attention à ce qu’il mangeait son

cholestérol restait bon. Donc finalement il était content. Il a eu confiance en moi et puis il

m’a ramené toute sa famille ! »

R5 « Et puis il y a aussi ceux que j’ai franchement fâchés par le passé et puis qui sont avec

moi depuis des années. »

M6 « Oh ! Les gens reviennent… Je me dis que s’ils sont là c’est que le non a été finalement

bien adapté et surtout bien compris. »

R8 « Il y a des gens… à qui ça n’a pas posé de soucis. »

R11 « Bah il n’était pas très content mais bon voilà. Mais bon, il est quand même revenu me

voir pour d’autre chose. Je pense qu’il avait compris que j’avais compris son manège. »

TABLEAU RECAPITULATIF DES CONSEQUENCES DU REFUS

A COURT TERME

Conflit, agressivité

Culpabilité (après un refus ou une acceptation) Changement d’avis

Absence de paiement

A LONG TERME Perte de patient

Education et responsabilisation

ABSENCE DE CONSEQUENCE Refus bien vécu si bien expliqué et argumenté

6. SOLUTIONS PROPOSEES PAR LES MEDECINS

Comme nous l’avons vu dans le paragraphe 2.2.1, pour l’ensemble des médecins seuls

l’expérience et le vécu leur permettraient de mieux gérer le refus opposé à la demande

d’un patient. En effet la variabilité en termes de personnalité, de patient, de situation et

de demande ; fait que chaque refus se doit d’être adapté au cas par cas.

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A la fin de l’entretien, les médecins ont tout de même exprimé d’éventuelles solutions

qui pourraient faciliter le refus et éviter le conflit afin de préserver au mieux la relation

médecin-malade.

6.1 LES GROUPES BALINT

Pour de nombreux médecins, les groupes Balint sont « comme un défouloir où tu peux

raconter ton expérience et partager » comme l’a déclaré le médecin R11. Les groupes

Balint ont été cités à plusieurs reprises comme pouvant être utiles à la gestion d’un

refus.

Cependant l’ensemble déclare ne pas pouvoir s’y rendre par manque de temps.

M3 « Mais en fait je pense qu’apprendre à dire non c’est comme toujours c’est plutôt les

groupes balint. Des groupes de parole où on va échanger chacun notre tour ces difficultés

dans ce problème du non. »

R4 « Bah déjà être en cabinet de groupe ça aide pas mal. Ça fait comme un mini groupe

balint. Ça nous permet de partager nos expériences et nos problèmes à la pause-café si on a

le temps d’en faire une ! »

R7 « Ce qui pourrait aussi être bien c’est l’échange avec les autres médecins de situations

similaires vécues. Voir comment eux ils auraient fait… Le fait d’échanger, ça permet

d’éviter que ça nous arrive aussi. »

6.2 LA FORMATION

Une minorité de médecins a évoqué une formation comme pouvant être utile,

notamment en début d’exercice.

R5 « Après une formation pourquoi pas... Mais bon quand on débute pourquoi pas, mais

après c’est difficile d’établir des règles pour ça. Donc des cours, bof. C’est vraiment

l’expérience qui sert. »

R8 « Mais oui je pense qu’une formation ça peut servir. Parce que bon, on apprend des

choses sur le tas, après est ce qu’on apprend bien ça j’en suis pas sûre et je pense que ça

peut aider. Des formations sur la gestion du refus au patient je pense que ça pourrait être

bien. Mais bon après il faut trouver le temps d’y aller aussi. »

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M12 «Et puis après, oui peut être qu’il y a des techniques pour dire non, pourquoi pas de la

formation. Mais bon je t’avoue que ce n’est pas ça qui va m’attirer en premier. Mais bon je

reconnais que oui peut être qu’il y a des formules qui font mieux passer les choses. »

Les autres estiment qu’il ne peut pas y avoir de règles prédéfinies. Selon eux, un

enseignement sur la manière de dire « non » ne pourrait pas être extrapolable à toutes

les situations et que par conséquent il serait inutile.

M3 « Non des cours je ne pense pas… C’est tellement aussi affaire de personnalité et de

maturité que vraiment je pense que c’est quelque chose qui vient progressivement. »

M6 «Je ne pense pas qu’une formation soit nécessaire pour ça, mais plutôt de la pédagogie

et beaucoup de patience voir même du sang froid dans certains cas !

R7 « Non je ne pense pas qu‘une formation soit utile. Parce qu’à chaque fois c’est au cas par

cas et à chaque fois c’est vraiment fonction du patient. »

R11 « Non je ne pense pas. Je pense que ça se base plus sur le vécu ou l’expérience. »

6.3 CEDER A LA DEMANDE

Deux médecins ont déclaré que la seule solution qui puisse exister est de céder à la

demande du patient.

R8 « Bah à part céder à sa demande je ne vois pas ce qui pourrait rendre la chose plus

facile ! »

M10 « Sinon je dis oui et ça arrange tout le monde… Je lui donne l’ordonnance qu’il veut

tant pis… Vous savez très bien qu’il va aller voir un autre docteur dans les 5min qui suivent.

Donc autant lui donner ce qu’il veut ça fera gagner du temps au collègue. »

6.4 INFORMER LE PATIENT

Comme nous l’avons vu un peu plus haut, un patient informé est un patient responsable.

Selon la plupart des médecins, informer les patients limiterait les demandes injustifiées

ou abusives, par exemple pour un certificat ou des antibiotiques pour une virose.

R1 « Pour les certificats il faudrait que les patients soient plus réalistes sur la demande,

qu’ils soient peut être mieux informés. »

R7 « Je pense que ça serait bien d’informer les patients sur les dangers d’une prise

fréquente d’antibiotique. Genre les bactéries multi résistantes ou les infections

nosocomiales. »

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M12 « Tu vois par exemple pour les antibiotiques, les campagnes publicitaires, que ce n’est

pas automatique et tout ça. Et bah je trouve que ça aide vachement et que ça finit par

rentrer dans la tête des gens et bon ils finissement pas admettre plus facilement que ce

n’est pas nécessaire. »

6.5 AUTRES SOLUTIONS SPECIFIQUES

Certains médecins ont proposé des solutions en fonction des demandes ou des

situations rencontrées.

6.5.1 Agressivité

Pour la majorité des médecins, il est nécessaire de ne pas se retrouver isolé en cas

d’agressivité. Etre en cabinet de groupe paraît, pour la plupart, être la solution de choix.

R4 « Bah déjà être en cabinet de groupe ça aide pas mal… surtout quand on se sent agressé

aussi. Par ce que quand on est seul on n’est pas très rassuré. »

R5 « Je travaille en cabinet de groupe et bon c’est mieux. Surtout quand on est dans une

zone, on se dit que s’il y a des chaises qui volent je pourrai avoir un coup de main. »

R7 « Mais après le cabinet de groupe ça peut être intéressant si la réaction de patient est

excessive, voir agressive. Tu te sens plus en sécurité. Tu peux appeler tes collègues en

renfort. »

R8 « Limite des fois tu te dis qu’il nous faudrait presque avoir un garde du corps dans ton

cabinet ! Enfin surtout si tu fais des renouvellements de Subutex et des trucs comme ça. Oui

vraiment avoir quelqu’un dans le cabinet, ne pas être tout seul oui je pense que c’est la

seule chose qui pourrait aider. »

R11 « Ce qui peut aider, ne pas être seule. Parce que vraiment tu as des patients qui font

peur et tu préfères ne pas les contrarier. »

M12 « Ne pas être seule déjà. J’ai l’impression que les patients ont plus tendance à être

exigeant et agressif devant une femme médecin. Et bon j’aurais préféré ne pas être isolée. »

6.5.2 Arrêt de travail

Le médecin R1 a évoqué un renforcement des critères d’indemnisation, par exemple en

instaurant des jours de carence aux fonctionnaires également. M12 propose une

sensibilisation par les médias sur les conséquences des arrêts de travail répétés ou

prolongés.

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R1 « Ce qui aurait pu beaucoup aider c’est que les fonctionnaires aient des jours de

carence comme tout le monde. Il est vrai que la situation de fonctionnaire fait qu’ils sont

toujours là à demander des arrêts de travail pour une rhinopharyngite ou des jours enfant

malade. Alors que quelqu’un qui ne sera pas payé pendant deux jours ne voudra pas

s’arrêter pour un rhume. »

M12 « Tu vois par exemple pour les antibiotiques, les campagnes publicitaires… Mais ça

serait bien qu’il fasse quelque chose du même genre pour les arrêts de travail et les

certificats ! »

6.5.3 Absence de consensus entre médecins

En cas d’absence de consensus entre les médecins que ce soit remplaçant/ remplacé ou

généraliste/ spécialiste, il semblerait qu’établir le dialogue afin de trouver un terrain

d’entente soit la solution.

Remplaçant et remplacé

R1 « Sur les histoires de renouvellement de traitement, c’est difficile d’être toujours

d’accord avec toutes les ordonnances des médecins. Donc quand je refuse c’est que je ne

suis pas d’accord avec le médecin. Il faudrait établir un dialogue avec le médecin référent

afin de trouver un terrain d’entente. »

R7 « Bon après ce qui serait bien c’est que le médecin installé soit aussi d’accord avec moi.

Comme ça le patient comprend que ça ne sert à rien d’insister. »

Généraliste et spécialiste

M2 « Surtout que les cas les plus durs c’est plus un conflit entre confrères…! Et ça pour moi

c’est insoluble. Ou alors faudrait peut-être qu’il y ait des réseaux pour que les médecins se

mettent d’accord pour dire la même chose. Pourquoi pas ? Mais il faudrait du temps. Et on

en manque beaucoup. Mais c’est vrai que si on avait du temps on pourrait créer des

réseaux ou organiser des forums, discuter entre nous. »

6.5.4 Génériques

Génériquer systématiquement tous les traitements semble être une solution pour faire

accepter le générique d’emblée.

M3 « Moi je le fais systématiquement, toute molécule nouvelle que j’introduis est

génériquée. Comme ça ils sont habitués. »

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DISCUSSION

1. SYNTHESE DES RESULTATS

L’objectif de ma thèse est d’étudier un aspect particulier de la relation médecin-malade :

le refus opposé par le médecin à la demande d’un patient. Dans un second temps, j’ai

étudié le cas particulier du médecin remplaçant dans ces situations de refus.

J’ai tenté par cette étude, de déterminer les raisons qui peuvent motiver le refus, les

obstacles que peuvent rencontrer les médecins à formuler le « non », ainsi que les

techniques auxquelles ils peuvent avoir recours.

Il ressort de mon étude que les prescriptions médicamenteuses (principalement les

psychotropes et les antibiotiques), les arrêts de travail ainsi que les certificats sont les

demandes les plus couramment refusées en médecine générale.

Il apparaît également que la principale raison du refus est la conviction que la demande

est injustifiée ou abusive. Pour appuyer le choix du refus, le médecin fait le plus souvent

intervenir des arguments médicaux ou déontologiques. Le refus dans l’intérêt du patient

se situe au premier plan.

Plusieurs éléments semblent orienter la décision vers le refus. L’expérience du médecin,

la crainte de tromperie, le désir de ne pas revoir le patient et un patient peu ou pas

connu, semblent orienter nettement la décision vers le refus.

A contrario, l’empathie du médecin pour son patient, les difficultés de compréhension

du « non » et les patients agressifs ou toxicomanes (principalement en un cabinet

individuel) semblent être des obstacles au refus.

Chez les remplaçants, les avis divergent. La moitié d’entre eux estiment qu’il est plus

aisé de refuser lorsqu’on est remplaçant car la responsabilité est moindre et qu’en cas

de conflit, ils peuvent orienter vers le médecin référent.

Les autres trouvent le refus bien plus compliqué par crainte de retentissement pour le

médecin remplacé, ou par rapport à la demande d’une patientèle qui les considère

souvent comme un jeune intérimaire ou encore un « faux médecin ».

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Cependant l’ensemble des remplaçants estime avoir d’importantes difficultés à imposer

la décision du refus en cas de désaccord avec le médecin installé.

Quant à la façon de refuser, la totalité des médecins déclare qu’une bonne explication

rend le refus plus acceptable. La plupart ont recours à un compromis ou une alternative

après une négociation.

Le statut de maître de stage ne semble pas modifier la prise en charge du refus et le vécu

de cette situation est similaire aux autres médecins.

Le conflit et la perte du patient sont les conséquences les plus notables. La répercussion

du refus sur la relation médecin - malade a été citée par l’ensemble des médecins avec

généralement une nette dégradation. Cependant, certains médecins ont évoqué un

renforcement de cette relation après un refus sur le long terme.

2. ’

La méthode qualitative est apparue comme la plus adaptée à la problématique de ma

thèse. Elle se présente comme la méthode de choix pour l’étude de la relation médecin-

malade, qui est une relation complexe et dont l’exploration est difficile. Il y a cependant

des limites inhérentes à ce type d’étude.

2.1 Limites liées à l’entretien

Biais liés à l’enquêteur :

Il s’agissait de ma première expérience de ce type. Un interviewer plus aguerri à

ce type d’entretien aurait possiblement obtenu des résultats plus riches.

Cependant, au fil des entretiens, une certaine confiance s’est installée et les

entretiens m’ont été de plus en plus faciles à réaliser.

Le statut de l’enquêteur a pu aussi représenter un biais même si je cherchais à

rester la plus neutre possible. De part ma position de médecin, il est possible que

certains participants se soient retenus, de manière consciente ou non, d’évoquer

certaines situations délicates. Peut-être de peur d’être jugé ?

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Biais de recueil :

Il s’agissait d’une étude rétrospective, puisque pendant les entretiens, je

demandais aux médecins de se remémorer des faits survenus lors de leur

pratique. Ils n’ont bénéficié que d’un court délai de réflexion pour se rappeler ces

situations ; et ont pu avec le temps, omettre certains faits ou situations

marquants.

D’autre part, l’étude s’est faite à partir d’entretiens semi-dirigés et est donc

déclarative. Il est possible qu’elle ne rende pas tout à fait compte de la réalité des

pratiques des médecins. En effet, certains médecins ont pu répondre en fonction

de ce qu’ils croient être bon de faire, et non de la réalité de ce qu’ils font.

2.2 imites du guide d’entretien

Une fois réalisé, le guide d’entretien doit être mis à l’épreuve afin d’évaluer sa longueur,

la formulation des questions, d’identifier des zones d’incompréhension ou de mettre en

évidence un thème qui aurait pu rester ignoré. Pour cela il est conseillé de réaliser des

entretiens individuels tests. L’entretien avec le médecin R1 a été l’occasion de tester le

guide, ce qui a permis de l’affiner. Il est toutefois à noter que la tenue d’entretiens tests

ne garantit pas en elle-même l’élaboration d’un guide parfait et qu’il faut sans cesse

l’adapter au fur et à mesure des entretiens réalisés, comme cela a été le cas pour mon

étude.

Toutes les questions du guide d’entretien ont été posées à tous les médecins interrogés,

mais certains thèmes traités en profondeur avec certains médecins n’ont été

qu’effleurés avec d’autres, la discussion restant la plus ouverte possible avec chaque

médecin.

2.3 imites liées à l’échantillon

J’ai sélectionné un échantillon raisonné de médecins. Le but était d’interroger des

médecins aux profils les plus divers possibles afin d’obtenir des réponses les plus

variées possibles. Par ailleurs, quatre des médecins interrogés exerçaient dans le même

cabinet de groupe en région parisienne, et deux d’entre eux travaillaient ensemble

depuis près de 20 ans. Par conséquent, leurs réponses lors de l’entretien ont pu être

conditionnées par des similitudes de pratique.

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La totalité des médecins généralistes interviewés exerce en région parisienne. Malgré le

mixage entre médecins exerçant dans Paris intra-muros, en banlieue proche et en

banlieue semi-rurale, ils ne sont pas représentatifs des médecins généralistes français.

Une critique essentielle de la méthode qualitative par opposition à la méthode

quantitative est l’absence de possibilité de généralisation et d’extrapolation des

résultats obtenus. En effet, l’échantillon sélectionné n’est pas représentatif de la

population étudiée mais diversifié. Les individus sont sélectionnés dans l’esprit d’une

certaine représentativité, non pas statistique mais représentationnelle, pour permettre

une variété des points de vue.

2.4 imites de l’analyse

L’analyse des données a été faite par un seul chercheur, moi-même. Or il est souhaitable

que la triangulation du codage des données soit faite par au moins deux chercheurs (6).

J’ai tenté de faire l’analyse la plus objective et rigoureuse possible. Mais comme le dit J-C

Kaufmann « Tout entretien est d’une richesse sans fond et d’une complexité infinie, dont il

est strictement impensable de pouvoir rendre compte totalement. Quelle que soit la

technique, l’analyse de contenu est une réduction et une interprétation du contenu et non

une restitution de son intégralité ou de sa vérité cachée. » (9).

3. DISCUSSION DES RESULTATS

3.1 La place du « non » en médecine

3.1.1 Le pouvoir de dire « non »

Comparable à une relation élève-professeur ou encore parent-enfant, le médecin,

s’appuyant sur sa formation et son expérience, occupe une position dite « haute ».

Le médecin M3 le souligne clairement dans son discours : « Mais c’est quand même

montrer qui a le savoir… on a le droit de dire non… parce que quand même faut dire qu’on

a le pouvoir ! »

Il n’est pas facile de définir la place du « non » dans l’exercice médical. Car cela implique

de faire la part des choses par rapport à des notions ambigües et néanmoins

fondamentales censées guider la pratique de tout médecin: bienveillance, empathie,

compréhension, soutien... Mettre en avant ces valeurs tout en gardant une ligne de

conduite qui est « le soin » est la tâche quotidienne du médecin. Faut-il alors considérer

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que le médecin qui dit « non », et qui s’oppose donc au patient, sort obligatoirement de

son rôle et manque à ses devoirs ?

Le contrat de soins lie juridiquement le professionnel de santé et le patient. Il repose sur

un échange de consentements qui suppose une double liberté : le libre choix de son

médecin pour le malade, le droit de refuser ses soins pour le praticien (16).

D’un point de vue déontologique, le refus peut être exprimé en toute légitimité. Cette

exception au principe de la continuité des soins est régie par le code de santé publique

dans l’article suivant (17) :

Article R.4127-47: « Quelles que soient les circonstances, la continuité des soins aux

malades doit être assurée. Hors le cas d'urgence et celui où il manquerait à ses devoirs

d'humanité, un médecin a le droit de refuser ses soins pour des raisons

professionnelles ou personnelles. S'il se dégage de sa mission, il doit alors en avertir le

patient et transmettre au médecin désigné par celui-ci les informations utiles à la

poursuite des soins. »

Les raisons « personnelles » du refus, sont également évoquées par « la clause de

conscience » (18). Elle est, pour le médecin, le droit de dire « non » dans certaines

circonstances qu’il estimerait contraires à ses propres convictions personnelles,

professionnelles ou éthiques. Ce droit au refus des soins est assorti de devoirs

complémentaires essentiellement centrés sur « une information claire, loyale et

appropriée » (Article R.4127-35) (17). La clause de conscience permet donc au

médecin de soigner tous ses patients en son âme et conscience, et en toute sérénité, dans

l’esprit de l’article R.4127-2 du code de déontologie médicale : « le médecin, au service

de l’individu et de la santé publique, exerce sa mission dans le respect de la vie humaine, de

la personne et de sa dignité. Le respect dû à la personne ne cesse pas de s’imposer après la

mort » (17). Il lui est accordé la possibilité légale de refuser ces soins lorsque, dans le

cadre de ses convictions intimes, il l’estime tout simplement nécessaire.

Le médecin n’est donc pas tenu de satisfaire toutes les attentes de son patient du

moment que cela ne conduise pas à lui nuire, et que la décision soit toujours guidée par

une volonté de bienveillance et d’empathie. Dans ce cas, on peut légitimement penser

que le « non » fait partie du rôle du médecin, non pas un « non répressif » mais un « non

éclaireur et modérateur ». Faire le tri des demandes et servir de médiateur entre le

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patient et les confrères d’autres spécialités fait partie du rôle spécifique du généraliste.

Le refus y est parfois une étape obligée.

3.1.2 La demande « injustifiée »

Selon Eric GALAM : « Enfin, faut-il le rappeler, notre métier consiste à soigner, ce qui

n’implique pas de répondre à toutes les demandes quelles qu’elles soient… Si je veux aider

l’autre et que j’accepte de me centrer sur lui, je dois, avant tout, être capable de juger par

moi-même si la demande qu’il me formule est justifiée, ou non, et si j’estime, ou non,

pouvoir et devoir y répondre. » (5).

Mais qu’est-ce qu’une « demande injustifiée » ?

Le médecin généraliste constitue la première ligne d’accès aux soins à laquelle le patient,

muni de ses plaintes et de ses doutes, peut avoir recours lorsqu’il en éprouve le besoin.

Le médecin généraliste reçoit toutes les demandes des patients, qu’elles soient jugées

justifiées ou non.

Pour appuyer une demande, le patient se justifie. Cette justification est interprétée par le

médecin qui va donc juger du pourquoi de la demande. Il y a plusieurs types de

justifications, raisons ou arguments qui pour certains sont considérés comme

inacceptables par le médecin, et ce pour différentes raisons.

Il est difficile de définir précisément et de manière universelle la notion de « demande

injustifiée », dans la mesure où elle fait appel au jugement personnel de chaque médecin,

basé sur des valeurs variées, allant de l’autorité légale aux propres convictions intimes.

Parfois, le jugement professionnel peut être altéré par certains facteurs, et peut pousser

le médecin à agir contre son gré (19).

3.1.3 La décision médicale

Les facteurs qui régissent la décision du médecin sont multiples (20).

Facteurs liés aux connaissances scientifiques (recommandations)

Facteurs liés au médecin (expérience, personnalité, intuition, sexe, âge, capacité à

ne pas faire d’erreur dans le raisonnement, culpabilité)

Facteurs liés au patient et à son entourage (personnalité, pressions, patient

problématique, niveau intellectuel)

Facteurs liés à l’organisation du système de soin (système de rémunération, coût

des prescriptions)

Facteurs liés à la sécurité sociale (pressions)

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Facteurs liés à l’opinion publique et aux médias

Facteurs liés à la justice (contexte médico-légal)

L’ensemble de ces facteurs ont été évoqués par les médecins lors des entretiens.

Peu de travaux francophones ont exploré la question des demandes injustifiées dans le

cadre de la relation médecin-malade. En 2001, quatorze médecins généralistes français à

qui l’on demandait de rapporter « tout ce qui dans la relation patient médecin déroge au

cadre strictement professionnel » ont permis de mettre en évidence une grande

diversité de demandes jugées « non fondées » auxquelles ils pouvaient être confrontés.

Le caractère « indu » des demandes reposait alors principalement sur des critères

professionnels (notamment juridiques) et personnels. Dans cette étude, on apprendra

également que, bien que reconnaissant le caractère injustifié de la demande, celle-ci sera

satisfaite dans deux cas sur trois (21).

3.1.4 Quelques exemples concrets

Il ressort de mon étude que les prescriptions médicamenteuses (principalement les

antibiotiques et les psychotropes), les arrêts de travail et les certificats sont les

demandes les plus fréquemment refusées et par conséquent les plus problématiques.

Les demandes de prescriptions médicamenteuses

Les médecins Français sont les plus prescripteurs de médicaments en Europe : 78% des

consultations comprennent une prescription de médicament (22). La consommation

médicamenteuse est par conséquent plus importante en France que dans les autres pays

Européens (23).

Il a été observé que la majorité des patients s’attendait à quitter le médecin en

possession d’une prescription car celle-ci symbolise d’une part la connaissance

transmise par le médecin susceptible d’aider le patient, et d’autre part la preuve que

celui-ci a effectivement « fait quelque chose» (24).

Dans les entretiens, certaines prescriptions étaient effectuées contre le gré du médecin.

Cela constituerait 10 % des prescriptions en France (25).

Les prescriptions peuvent jouer un rôle dans le refus (26):

Un rôle éducatif : les refus et limitations de prescriptions suivent une logique de

restriction ; celle-ci se base sur la maîtrise des dépenses, le respect des

recommandations et la responsabilisation du patient.

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L’indépendance du médecin et sa légitimité professionnelle : cela correspond aux

« prescriptions-sanctions » et prescriptions « pour avoir raison ».

La limitation du conflit ou de l’entrevue : les prescriptions sont destinées à ne pas

altérer la relation médecin-patient (22) ou pour ne plus avoir à gérer un conflit.

La validation de la plainte du patient.

Les demandes d’arrêt de travail

Les refus d’arrêts de travail ont été énormément cités par les médecins généralistes lors

des entretiens. Ils ont été cités de façon unanime et pour la plupart en priorité.

Certains médecins ont même exprimé un ressentiment important relatif aux arrêts de

travail, avec un sentiment de manipulation de la part du patient ; par exemple comme l’a

souligné R8 « Ils ont juste un petit rhume ou 3 fois rien, qu’ils sont limite moins malade que

toi quand tu vas travailler. Et donc ils viennent te demander l’arrêt parce que juste le

matin ils n’ont pas eu envie d’aller travailler. »

L’arrêt de travail participe au traitement au même titre que la prescription

médicamenteuse. C’est un acte courant en médecine générale ; environ 8% des

consultations de médecine générale, donnent lieu à la prescription d’un arrêt de travail

et 75% des arrêts de travail sont prescrits par les médecins généralistes (27).

L’arrêt de travail a pour le patient un rôle de gestion sociale pouvant exprimer une

rupture, une demande de reconnaissance par rapport à son entourage professionnel,

voire familial. Ce qui explique la difficulté que représente le refus de ces demandes, et sa

prescription apparaît comme problématique dans plusieurs études (28)(29). Il en

ressort qu’un tiers des médecins trouve qu’il y a au moins un arrêt de travail posant

problème par semaine.

Les principales problématiques décrites dans la littérature sont également retrouvées

dans mon étude : l’évaluation de la durée (initiale ou prolongation) et la médicalisation

de problèmes non médicaux (27)(28).

Les demandes de certificats médicaux

Je me souviens avoir reçu lors de mes remplacements, une patiente qui m’avait été

adressée, avec un courrier en bonne et due forme, par son esthéticienne qui me

demandait de rédiger un certificat pour une cure de beauté ! Elle avait pris soin de me

noter chaque produit (savon, gommage, crème etc.) et je devais « certifier » l’innocuité

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de chacun d’entre eux. J’ai refusé de le faire car je ne connaissais aucun de ces produits,

et de plus cette cure n’avait rien de médical. Ma patiente outragée était partie en

claquant la porte…

Le poids et l’impact des certificats médicaux dans notre société se fait de plus en plus

ressentir. Actuellement, ils semblent être la solution à tout. Par exemple en cas

d’absence au travail, que ce soit pour un motif médical ou non, un certificat médical

évitera les problèmes. Il en va de même pour les certificats d’absence scolaire alors que

le médecin, sauf exception, n’est pas tenu d’effectuer ce genre de certificats (30).

On parle d’une demande « réellement abusive » lorsque le patient demande au médecin

de "faire un faux", c’est à dire d’affirmer des choses fausses dans un certificat. Un

certificat a une valeur de preuve médico-légale. Sa rédaction engage la responsabilité du

médecin qui sous-estime souvent les risques qu’implique un certificat non conforme aux

principes établis. D’autant plus que les structures administratives transforment le

médecin en dernier rempart contre les aberrations du quotidien.

La puissance du "Certificat médical" le fait rechercher comme solution de dernier

recours. Or le médecin doit faciliter l’accès aux droits de son patient, mais doit refuser de

faire des faux. Ce n’est pas aussi simple que cela tant la détresse en face est réelle. La

délivrance ou non d’un certificat médical peut avoir un impact important sur la vie du

patient, si bien qu’il est parfois difficile pour le médecin de le refuser sereinement,

particulièrement lorsqu’il existe des répercussions financières.

Le symbolisme de la prescription médicamenteuse, de l’arrêt de travail et le règne du

certificat « tout-puissant » font que leur refus est une situation délicate pleine

d’appréhension. Pourtant, nous allons voir que le médecin peut tirer de multiples

bénéfices du « non ».

3.2 Pourquoi dire « non » ?

Afin de ne pas avoir à agir contre sa volonté et éviter bien des désagréments, le « non »

constitue une véritable protection, permettant ainsi de se préserver un « espace vital »

autant sur le plan professionnel que personnel.

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3.2.1 Pour le médecin

Il ressort de mon analyse que le premier intérêt recherché par le médecin lors d’un refus

est celui du patient. En effet, bien qu’il prenne le risque de contrarier ou de décevoir

dans l’immédiat, le médecin qui exprime un refus légitime peut se dire que l’intérêt du

patient sera préservé la plupart du temps. Mais qu’en est-il de son propre intérêt ? Quels

bénéfices peut espérer tirer le médecin de savoir dire « non » ?

« En ces périodes de surcharge d'activité et d'insécurité professionnelle, oser dire "non"

avec sérénité est une protection contre l'exaspération, l'agressivité, voire le burn-out.

Ensuite, parce qu’il faut aussi nous préserver, qu’il s’agisse de notre tranquillité ou de notre

plaisir à exercer. » (5).

Pouvoir refuser lorsqu’on le juge nécessaire, permet donc d’exercer dans un climat plus

serein, de rester en accord avec soi-même et c’est aussi se protéger contre la culpabilité,

la dévalorisation de soi et de son statut. En effet lorsqu'on dit oui alors qu'on estimait

devoir dire non donne le sentiment de manquer de courage, de se faire manipuler ou de

se faire avoir. Ce sentiment de dévalorisation a été confirmé par le médecin R8 « Je me

suis plutôt sentie coupable une fois… Je n’avais pas voulu et puis finalement j’avais fini par

céder, et c’est moi après coup qui me suis sentie mal. Et j’étais gênée d’avoir fait cette

prescription alors que ça ne me semblait vraiment pas justifié ». À travers le « non », c’est

donc bien l’estime de soi que l’on cherche à préserver.

L’exaspération et l’épuisement professionnel ne sont jamais loin lorsque l’on se voit en

permanence amené à agir contre son gré, ou que l’on se sent instrumentalisé. Et être

soigné par un médecin fatigué, sous pression et dévalorisé n’est pas une bonne chose…

L’e puisement professionnel se de init par un e puisement e motionnel, une

de personnalisation de la relation a l’autre et une diminution de l’accomplissement

personnel. Ces situations correspondent aux trois composantes du burn out, telles que

décrites dans l’échelle de Maslach (jointe en annexe 3). Il touche plus de 40% des

médecins.

La non reconnaissance et le caractère exigeant des patients seraient les deuxième et

sixième causes à l’origine du burn out selon une enquête sur l’épuisement professionnel

menée auprès de 2243 médecins franciliens (dont 42% de généralistes) en 2007 (31).

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Il y a des conséquences directes du burn out des médecins sur la qualité des soins (32).

Un médecin réticent ou souffrant ne peut être un bon soignant. Les médecins déprimés

sont souvent réticents à l'idée de consulter et reconnaissaient être directement

influencés dans leurs décisions. Certains ont même « des attitudes très négatives avec

leurs patients » et la qualité des soins qu'ils doivent apporter aux patients ne peut que se

dégrader. Il a été montré que le stress pouvait entraîner une baisse de la qualité des

soins, des manifestations d'irritabilité, des erreurs, ainsi que des examens et traitements

inappropriés.

Les conséquences du burn out sont nombreuses tant au niveau professionnel,

qu’individuel (dépression, troubles somatiques, troubles du sommeil, asthénie,

addiction, divorce, suicide...).

Le « non » permet la sauvegarde de la qualité de travail dans la mesure où il permet de

ne pas se laisser envahir par les demandes abusives, et de respecter certaines « règles »

de fonctionnement du cabinet (consultation entre deux, actes gratuits...). Savoir dire

« non » est indispensable pour nous protéger, poser nos propres limites aux autres et

éviter de nous laisser envahir par des demandes abusives. C’est notre droit.

3.2.2 Pour le patient

Savoir dire non c’est donc se protéger, mais c’est aussi rendre réellement service au

patient, comme l’a souligné le médecin M3 « Notre décision du « non » c’est pas du tout

pour leur faire du mal, c’est au contraire pour être bénéfique pour eux pour qu’ils puissent

être bien soignés » ou encore M6 : « Parce que bon quand je dis « non », c’est que vraiment

je pense que c’est salvateur pour moi et pour le patient aussi. »

Ce même médecin M6, pensait que le « non » a également des vertus sur le plan

thérapeutique dans certaines situations : « Au niveau des toxicos non. Là je suis

irrévocable. Le non est ferme et définitif. C’est pour justifier une démarche logique et

cohérente vis-à-vis des toxicos. Là on sait qu’il faut les recadrer sans cesse ». Ou encore que

le refus pourrait permettre de repartir sur de bonnes bases : « Alors dans l’intérêt du

patient, parce que s’il me fait cette demande-là, c’est peut-être qu’il aura tendance à en

faire aussi dans d’autres niveaux ou moments et qu’il faut que je lui dise non tout de suite.

Donc il y a un rapport en fait entre nous de bonnes pratiques. ».

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Savoir dire « non », permet ainsi de sortir de certaines impasses pouvant être sources

d’inconfort pour le médecin, risquant à long terme de dégrader la relation avec le

malade et de menacer l’efficacité thérapeutique.

Comme le dit Eric GALAM « Il n’est pas toujours évident qu’accéder à une demande soit

forcément utile à celui qui la formule» (5). Est-ce que je rends vraiment service à cette

adolescente en surpoids qui me demande une dispense pour la piscine ? Ou encore à

faire un frottis cervico-vaginal tous les 6 mois pour rassurer ma patiente ? Le Dr

Bernard JUNOD, médecin en santé publique, exposait en 2011 les dangers du sur-

dépistage en cancérologie, ainsi que le sur-diagnostic et les sur-traitements « mutilants

et toxiques » qui peuvent en découler (33).

Penser et raisonner dans le bien du patient est la priorité du médecin. Ainsi, nous avons

parfois intérêt à opter pour un « non » bienveillant plutôt qu’un « oui » complaisant.

3.2.3 Pour la relation médecin malade

Il peut être tentant pour le médecin de dire « oui » à tout dans l’optique d’économiser de

l’énergie, du temps, et préserver une certaine relation avec son malade. Mais de quelle

relation parle-t-on?

« Savoir dire « non », c’est aussi redonner de la valeur à nos « oui » (5). C’est reconnaitre à

sa juste valeur la capacité de jugement du médecin, fondée sur son savoir et son

expérience. L’expression d’un refus justifié c’est fuir une relation neutre purement

transactionnelle de type « prestataire de service », et redonner de l’importance à la

notion de confiance. C’est également établir une relation de respect avec son patient, un

compromis, des règles et des limites pour lui- même et le malade.

Au total, être capable d’exprimer le refus peut être bénéfique aussi bien à l’échelle

individuelle que collective. Pourquoi donc éprouvons-nous tant de difficultés à dire

« non » ?

3.3 Pourquoi le « non » est si difficile ?

« Qui ne dit mot consent », c'est-à-dire que là où le « oui » ne réclame aucun effort, le

« non » demande quant à lui d’oser. Dire « non » demande tout un travail d'explication

qui prend du temps et de l'énergie.

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D’un point de vu général, la première difficulté à dire « non » est une anxiété ressentie

basée sur ses peurs. Une anxiété qui peut-être de deux types : l’anxiété de performance «

vais-je être à la hauteur ?» et l’anxiété d’évaluation « que va penser l’autre de moi ? »

(34). Chez le médecin, le refus est susceptible de générer simultanément ces deux types

d’anxiété «En refusant, suis-je toujours un bon médecin ? Vais-je décevoir le patient ? ».

Ce qui explique en partie la difficulté des médecins à refuser une demande de patient. Il

nous est alors d’autant plus difficile de dire « non » à un patient qu’on apprécie de peur

de mettre en péril cette relation que nous tendons naturellement à préserver.

3.3.1 Le patient autonome

L’évolution de la relation médecin-malade

La relation médecin-malade a souvent été vécue autrefois en France sur un mode

paternaliste où le malade était considéré comme un mineur que le médecin soutient,

protège et décharge de toute responsabilité de décision. Dans ce modèle, le médecin

savait et décidait seul pour le bien du malade (35). Le malade affaiblit et souffrant, ne

peut pas prendre une décision adaptée à son mal et le médecin devait s’efforcer

d’imposer l’exécution de sa décision (36).

Dans les années 1970, la remise en cause du paternalisme conduit à définir un nouveau

modèle de relation. La décision médicale se centre davantage sur le patient avec

l’émergence du modèle autonomiste. La relation médecin malade devient une prestation

de service contractuelle : le médecin propose des soins, le patient rémunère ce service.

Le médecin est passé d’un statut paternaliste à celui de consultant (37). Le patient peut

remettre en cause le diagnostic et la prise en charge. Ce modèle peut poser problème à

chaque fois que les préférences du patient vont contre son intérêt ou celui du système

de soins (38).

La médiatisation

Le développement de l’accès à l’information médicale par le grand public via internet

semble constituer une véritable barrière au refus.

De nos jours, de plus en plus de « patients internautes » arrivent en consultation avec

leur propre savoir médical, une idée précise de leur pathologie et de leur prise en

charge, voire avec leurs propres prescriptions (2). Ce bagage médical ne correspondant

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pas toujours au savoir tiré de l’expérience de chaque médecin, le dialogue qui découle de

cette situation peut souvent se révéler délicat, et peu de médecins sont préparés à

trouver les mots justes dans ce contexte (39). Comme l’a souligné le médecin M2 :

« Parce qu’effectivement certains vont sur internet. Mais bon je leur dis bien que

l’interprétation c’est nous qui l’avons pas eux. Parce qu’on les voit bien les abus, où ils se

font leur propre diagnostic, où ils se font leurs propres traitements, voire même ceux des

voisins ! Donc souvent il faut déjà leurs démonter qu’ils ont tort dans leur diagnostic. Donc

là c’est déjà toute une explication et c’est notre rôle. » Ce même médecin avait également

évoqué la pression subie par les médias : « Mais les gens ont de telles idées préconçues

que parfois on est coincé ! Parce que le problème c’est les médias, ou encore internet avec

tous ces blogs où les gens disent et lisent pleins de choses sur les produits. Et là on ressent

vraiment la nuisance de la société sur nos prescriptions. »

De plus en insistant sur les erreurs médicales, les médias pourraient altérer la confiance

des patients (40). Certaines informations diffusées sont approximatives mais prises

pour vérités par les patients et opposées aux médecins (41). Certains patients refusent

alors des traitements, et d’autres peuvent être déçus de n’avoir pas reçu le nouveau

traitement miracle plébiscité dans les revues grand public.

75% des médecins estiment que les patients sont devenus plus exigeants (42) et

craignent de perdre leur autonomie professionnelle. Les attentes des patients sont

grandissantes. Ils exigent une plus grande disponibilité des médecins et l’obligation de

résultats, sans tenir compte des limites des médecins (43).

3.3.2 La relation « médecin-client »

L’évolution de la relation médecin-patient selon le mode autonomiste et la médiatisation

font que le patient, volontairement ou non, essaye d'influencer ou de forcer la main du

prescripteur. Plus qu'un client consommateur, le patient est devenu un donneur d'ordre.

Il ne se contente pas de décider entre plusieurs choix diagnostics ou thérapeutiques

proposés par le médecin traitant, c'est lui qui décide des différents choix. En rentrant

dans le cabinet il sait déjà ce qu'il veut. Le médecin R5 a évoqué une situation que l’on

ne rencontre que trop souvent : « Par exemple le patient qui vient qui me dit : je veux une

IRM cérébrale parce que j’ai mal à la tête depuis des années ».

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Les "requêtes" sont centrales dans le cadre d'un échange commercial : il s'agit pour le

client de se procurer moyennant finance un produit, et pour le vendeur de fournir le

bien requis en encaissant la contrepartie financière (44). Et si la pratique médicale

n’était finalement qu’une forme de commerce, où le patient viendrait « acheter » les

outils nécessaires à sa santé ? (45)

Assimiler l’art médical à une forme de commerce peut sembler inapproprié, voire

choquant. Et entendre un médecin employer par mégarde le terme de « client » au lieu

de « patient » est fréquemment source de plaisanteries. Pourtant l’emploi omniprésent

de termes tels que « demande », « pression » ou « négociation » tout au long des

témoignages des médecins interrogés laisse peu de doute sur la composante

transactionnelle induite par l’acte médical.

Le paiement à l’acte porte aussi la symbolique d’une transaction conclue entre un

médecin et son patient. Ce dernier devenant par cet accord un consommateur en droit

d’attendre les prestations qu’il juge correspondre à la somme investie. De son coté, le

médecin se retrouve dans l’engagement tacite de devoir rendre service au patient, pour

justifier la rémunération perçue. Le médecin pourrait avoir des scrupules à faire payer

ou bien fait un simulacre d'examen clinique pour justifier sa rémunération. Ainsi, « le

paiement à l’acte direct clôt une relation instrumentale de prestation de service» (21).

La relation médecin-malade se voit muer vers une relation prestataire-consommateur.

Le changement du statut de « patient » à « client » pourrait inscrire son comportement

dans une logique de consommation, avec pour objectif d’en « avoir pour son argent ».

Cette approche plutôt caricaturale du « patient-consommateur » pourrait aider à la

compréhension de la forte consommation médicamenteuse en France, comparativement

par exemple à nos voisins européens (46).

La relation « client-médecin » semble constituer un obstacle majeur à l’autonomie

professionnelle. Ce glissement progressif du médecin « soignant » en « prestataire de

service » est source de souffrance professionnelle, et altère sérieusement l’enthousiasme

à exercer de certains médecins. De plus il semble évident que l’exercice libéral et les

problématiques financières qu’il comporte, exercent une influence sur la conduite des

médecins, et pourrait contribuer à développer le clientélisme médical : R7 « Mais bon

quand tu tiens ton cabinet ... Il faut que ça tourne. Et donc voilà tu as besoin de ces patients

et donc tu les chouchoutes. Et donc tu cèdes plus c’est normal. Bah c’est la vérité. ».

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L’aspect mercantile de la relation médecin-malade n’a été tout de même que peu évoqué

par les médecins. Ce qui laisse penser que le « non » reste une option choisie par

beaucoup de médecins lorsqu’ils le jugent légitime. Le refus dans ce contexte s’impose

comme le garant de la sauvegarde de notre statut, et la valorisation de notre profession.

3.3.3 La judiciarisation de la médecine

L’idée qu’il est nécessaire de se « protéger » sur le plan légal a été très présente dans les

propos recueillis. Cette crainte est-elle justifiée ?

On exige des médecins toujours plus de rigueur et d’efficacité dans leur travail. Le Dr

Martin disait déjà en 1923 : « Plus les règles de l’art seront précises et nombreuses, plus

les procès en responsabilité augmenteront » (47). Comme si, avec le perfectionnement

du savoir et des moyens techniques dont il dispose, le médecin devrait être

irréprochable. Le sentiment d’être soumis à une menace judiciaire croissante a été

exacerbé ces dernières années par la médiatisation de scandales sanitaires (affaire du

Médiator) ou par l’influence croissante dans notre société du modèle américain et sa

judiciarisation à outrance. Les menaces de procès sont de plus en plus lourdes pour le

soignant (48) et les procès pour fautes professionnelles se multiplient (37).

Vu des tribunaux, il semblerait que ce soit « extrêmement relatif » et « très marginal » au

regard du volume de l’activité médicale dont l’évolution est contrastée (49).

3.4 Des conséquences non négligeables aux refus

3.4.1 Le conflit

Si la majorité des médecins interrogés n’ont pas de difficultés majeures à dire «non », ses

conséquences ne sont pourtant pas anodines. Le conflit, allant du simple « froid » en fin

de consultation à l’agression, fait le plus souvent suite au refus.

75% des médecins interrogés étaient entrés en conflit après un refus. La majorité avait

été agressée verbalement, et trois d’entre eux avaient subi des actes de vandalisme.

Selon le Conseil de l’Ordre, 925 médecins ont subi des agressions, quelles qu’en soit la

forme, en 2013 (50). Il s’agit du chiffre annuel le plus élevé depuis la mise en place de

l’Observatoire en 2003, malgré le fait que celles-ci ne soient que rarement déclarées.

Les agressions de médecins se multiplient (51).

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Il y a une nette augmentation du nombre de violences passé à 925 en 2013, contre 798

en 2011 et un taux de victimation (nombre d'incidents déclarés sur le nombre de

médecins inscrits au tableau) de 0,46 contre 0,40 en 2012. 58% des agressions

concernaient des généralistes. Dans 69% des cas, il s’agissait de violences verbales

(injures ou menaces).

Il parait e vident tout au long des discours, que les caracte ristiques du me decin (sexe et

a ge) et de son activite (exercice en zone urbaine sensible, organisation en cabinet de

groupe, visites a domicile) ont leur importance. En ce qui concerne les caractéristiques

du médecin, les femmes semblent plus exposées que les hommes, comme l’a souligné le

médecin M12 « J’ai l’impression que les patients ont plus tendance à être plus exigeants et

agressifs devant une femme médecin. »

Les femmes sont plus sensibles aux faits d'insécurité (52,3% contre 39,4% chez les

hommes), tout comme les plus jeunes et les praticiens installés en zones urbaines

sensibles (65,7% contre 35, % a 47,2% ailleurs) (52).

Depuis une trentaine d'années, en France, la féminisation des professions médicales est

en augmentation constante. Cela concerne toutes les disciplines, médecine générale

comprise, où les femmes seront majoritaires dès 2017 (53).

La plus grande vulne rabilite des femmes et la féminisation de la profession annoncent-t-

elles un risque d’augmentation des taux de victimisation dans l’avenir ?

La gestion et le contrôle des situations d’insécurité sont également variables. Les

médecins les plus jeunes éprouvent plus de difficultés. Il semble que l’expérience

constitue un élément majeur de prévention des situations conflictuelles.

Dans les entretiens réalisés, la majorité des relations poursuivies par le médecin étaient

évaluées comme satisfaisantes. Le conflit était considéré comme apaisé ou ayant permis

une amélioration de relation. En dehors des « situations extrêmes » au cours desquelles

le patient quitte son médecin ou inversement, le conflit après un refus peut être positif

(54).

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Les médecins interrogés ont insisté sur l’importance du dialogue afin d’éviter ou

d’apaiser le conflit. La résolution d’un conflit tient à des « capacités au dialogue faites

d’ouverture, d’écoute, et d’affirmation claire de ses positions » (55).

3.4.2 Perte du patient

La perte d’un patient semble être une conséquence négative, mais au final pour la quasi-

totalité des médecins interrogés, cela ne représente pas un souci majeur. Les départs du

cabinet étaient plutôt vécus avec soulagement car ils permettaient de mettre fin à une

relation pesante ou conflictuelle.

Selon le Conseil National de l’Ordre, le médecin peut rompre le contrat médecin traitant

s’il le souhaite, dans la mesure où c’est un contrat à durée indéterminée sans mention

d’échéance (56). Toutefois, il doit en informer le patient et assurer la continuité des

soins. Cela signifie assurer les soins en cas d’urgence et transmettre le dossier médical

au nouveau médecin désigné par le patient. Le médecin peut fournir au patient les

raisons de sa rupture mais n'est pas obligé de le faire.

3.4.3 « La médecine défensive »

La judiciarisation induit des stratégies de médecine « défensive » altérant les relations

médecin-patient (43).

La pratique de la médecine défensive correspond à l’adoption de comportements

systématiques non médicalement justifiés dans l’optique de prévenir le risque de mise

en cause de la responsabilité médicale, parfois au détriment du rapport bénéfice-risque

pour le patient (57).

Très répandue aux Etats-Unis, la médecine défensive trouve également écho en France,

où plusieurs travaux ont mis en évidence des modifications de comportement des

médecins en rapport à une crainte de poursuite, et ce dans des proportions tout aussi

impressionnantes (58).

Les modifications de comportement dont il est question ainsi que les prescriptions dites

« défensives » concernent principalement :

la prescription d’examens complémentaires (notamment d’imagerie) superflus

(58).

le recours plus fréquent aux avis de confrères d’autres spécialités (59).

les comportements d’évitement, en priorité envers les patients supposés

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« procéduriers » et/ou présentant des problèmes médicaux complexes.

Les effets de la pratique défensive systématique en médecine sont néfastes: iatrogénie,

anxiété, perte de l’enthousiasme à exercer, surcoût financer (60).

3.5 Quelle attitude face à une demande injustifiée ?

Il existe des critères plus ou moins généralisables qui permettent de rendre un « non »

réellement efficace, de même qu’il existe d’authentiques techniques de communication

qui lui sont dédiées. Voici présentées les principales étapes nécessaires à la

« préparation du terrain » propice à un refus adapté, cohérent et acceptable.

3.5.1 Savoir repérer la demande

"Savoir écouter et repérer la demande du patient, prendre le temps de bien comprendre et

saisir sa demande." (5)

La demande peut être explicite ou implicite. Il faut savoir la saisir. Une analyse

linguistique peut être intéressante. Elle permet de repérer les demandes implicites, les

non-dits, les sous-entendus (45). Ensuite, il faut être capable de repérer les moments où

le « non » est légitime, car celui-ci ne doit pas devenir systématique. Dans le cadre de la

consultation médicale, on envisage un refus dès lors que l’on estime que la demande

nous impose d’agir en dehors des réglementations, des recommandations, ou de nos

convictions personnelles.

3.5.2 Mise en condition

S’assurer d’avoir bien compris la demande en la reformulant.

Formuler le « non » de la manière la plus concise et la plus claire possible : le mot

« non » doit nécessairement apparaître pour ne pas laisser place à l’ambiguïté.

Etre calme, persistant et rester campé sur ses positions sans être agressif.

Il n’y a pas à se justifier ni à fournir mille et une explications, mais juste le

nécessaire (en tenant compte du contexte, de la psychologie de la personne et de

la proximité avec l’intéressé).

Respecter un espace vital adéquat : distance physique idéale qui permet de se

sentir à l’aise avec son interlocuteur.

Mettre fin à la discussion : « Ma réponse est définitive : c’est NON. Au revoir.»

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3.5.3 Comment formuler le « non » ?

La formulation du non est fonction du type de la demande et de la personnalité du

patient. Principalement lorsqu’interviennent certains éléments perturbateurs :

insistance, intimidation, requête de dernière minute, flatteries, pressions

culpabilisantes, menaces... Néanmoins, c’est bien la satisfaction mutuelle du médecin et

de son patient qui sont en jeu : celui-ci quittera idéalement le cabinet avec le sentiment

d’avoir été écouté, puis soutenu et enfin, aidé, malgré une demande initiale non

satisfaite. Il y a plusieurs méthodes validées, issues de la psychologie comportementale

dédiées à sa formulation (61)(62).

Adopter un comportement assertif

L’assertion est la capacité à respecter ses sentiments et ceux des autres sur un pied

d’égalité. Elle implique fermeté et empathie, pour aboutir à « une affirmation non

agressive ».

Pour le médecin, c’est écouter avec attention les différentes demandes du patient,

prendre en compte et respecter ses propres contraintes, accepter la critique et le

mécontentement éventuel. Face à une demande, une critique ou une plainte, le médecin

exprime d’égal à égal son point de vue de manière honnête et calme, quitte à expliciter

au patient ses sentiments. Le comportement assertif est complémentaire de la technique

dite de « la révélation sur soi » qui consiste à ne pas dissimuler ses émotions, et les

exprimer clairement. Lors d’un refus, il est parfois nécessaire d’exprimer ses émotions

négatives, de faire preuve d’empathie, voire de recadrer la relation.

Certaines formulations pouvant être utilisées dans ce cadre : « Je suis (très) ennuyé que...

», « Je suis (vraiment) désolé que... », « Je regrette (énormément) que... », « Je suis (très)

déçu que... ». Dans la consultation médicale, le médecin pourra, par exemple face à une

demande d’arrêt de travail « de complaisance » exprimer son refus de la manière

suivante : « Ça me gêne beaucoup que vous me demandiez de faire ce papier, et je

comprends votre embarras, mais je ne peux pas vous signer cet arrêt de travail» ; face à

une demande d’antibiotiques, il pourra répondre par exemple: «Ça m’ennuie que le fait

de beaucoup tousser vous empêche de dormir, mais je pense que des antibiotiques ne vous

apporteront rien. »

En paraissant plus « humain » aux yeux de notre patient, nous le rendons plus à même

d’écouter notre message.

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L’entretien en 4 phases

Ce modèle d’entretien permet face à une demande de patient que l’on juge injustifiée,

d’exprimer un refus de manière ordonnée, suivant une progression logique laissant la

place à l’empathie, l’affirmation de soi et à la satisfaction par l’alternative.

1. ’écoute : bien cerner le problème, en passant si besoin par une reformulation.

«Je comprends bien votre problème, donc vous avez besoin de ce certificat»

2. ’adhésion : mettre en avant l’empathie et la bonne volonté. « Je comprends votre

embarras, vous êtes dans une situation difficile... Et si je pouvais satisfaire votre

demande, je le ferais bien volontiers ».

3. ’obstacle : empêchant d’accéder à la demande (la loi, la sécurité sociale, les

publications scientifiques...). «… mais je ne peux pas la satisfaire parce que la loi

me l’interdit »

4. ’alternative : en remplaçant le « non » par un « non, mais... » et ouvrir la voie du

compromis. Proposer une solution de rechange, lorsqu’elle existe, permet de ne

pas laisser le patient dans l’impasse. « Je ne peux pas vous faire de faux certificat

mais je vous conseille de vous adresser à votre délégué syndical.»

La méthode du disque rayé progressif

La technique dite du « disque rayé » permet à la fois de se montrer persistant dans

l’expression de ses idées, sentiments, besoins tout en ignorant les éléments secondaires,

ce qui rend impossible la manipulation. En pratique, elle consiste à répondre par deux

phrases coordonnées par un "mais". Puis, à chaque renouvellement de la demande, les

répéter tel un disque rayé tant que notre interlocuteur continue à insister. Le refus est

de plus en plus ferme (63).

La première phrase est empathique : elle montre que le problème du patient a bien

été compris, qu’on adhère à ses propos. En effet, l’essentiel des efforts du demandeur va

consister à insister sur l’importance de sa demande ou de la gravité de sa situation. En

précédant chaque refus d’un accusé de réception de l’importance de la demande, on

désamorce une éventuelle agressivité.

La deuxième phrase après le "MAIS", exprime le refus : par un refus poli, puis ferme,

puis catégorique, sans bien sûr jamais perdre son calme, et si possible son sourire. Cette

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progressivité dans l’intensité du refus est importante pour ne pas braquer le

demandeur. Il est important de répéter la phrase empathique préalablement à chaque

refus afin que le demandeur ne se sente pas lésée.

Dans l’immense majorité des cas, le patient, après trois à quatre essais successifs va

accepter le refus car il ne saura plus comment formuler sa demande. En effet, comme on

commence par lui accuser réception de sa problématique, il ne lui reste plus qu’à

essayer de nous faire changer d’avis ; et comme notre refus est ferme, il ne le peut pas.

3.5.4 éviter…

Le comportement agressif

Les réactions épidermiques sont peut-être les plus importantes. Elles se font en général

sur le mode de l’agressivité.

La réponse ne prend pas en compte les arguments du patient : elle est globale,

systématique, directive. Le thérapeute se fait entendre sans respecter l’autre. Le dis-

cours « abrupt » peut trahir un doute, une lutte intérieure, un manque de confiance en

soi, ou alors être le fait d’un état de fatigue qui ne peut s’autoriser la moindre ouverture

ou remise en question. Cela peut être le fait d’un thérapeute pressé, stressé, impatient,

vivant « à flux tendu ». (5)

Un médecin ayant un comportement agressif affirme sa position mais n’investit pas la

relation. Il cherche à contrôler la situation, et imposer son pouvoir, par quelque manière

que ce soit. Sur un plan pratique, il altère fortement la relation. Ce type de

comportement expose à un risque important de judiciarisation et de violence. En cas de

plainte du patient, la sanction déontologique n’est pas exclue (64).

Le comportement passif

C’est tout à fait l’opposé du comportement agressif. C’est un comportement d’évitement

relationnel, le but étant d’apaiser rapidement le conflit. Sur un plan relationnel, il

décrédibilise le médecin (64).

C’est le laisser-faire. Je ne me pose pas de questions, c’est comme ça, « ça fait partie de

mon métier ». Le thérapeute ne connaît pas et ne sait pas dire « non ». Il ne peut résister

à la critique. Ce comportement se fond dans le désir de l’autre, parfois au détriment de

soi. Cette « passivité professionnelle » peut entraîner une réaction secondaire

d’agressivité vis-à-vis de l’entourage appelée « déplacement de colère ». Cette attitude

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passive peut générer pour le médecin un mal-être, un refoulement, une baisse de

l’estime de soi, une symptomatologie dépressive, voire des conduites addictives. (5)

Les échappatoires

Il y a aussi ces fameuses échappatoires temporaires que nous utilisons si souvent plutôt

que de refuser proprement. Des « solutions » qui reflètent vraisemblablement une peur

d’affronter l’autre face à face :

La fuite : l’évitement de la personne qui gêne

Le fait de déléguer l’expression du refus à un tiers

Le mensonge qui vise à atténuer le « non », et qui crée d’une part de la culpabilité,

d’autre part représente un coût en stress et en énergie bien plus élevé que

l’expression claire et concise du « non »

On fait comme si on n’entendait pas la demande

Voilà de quoi envenimer inutilement des situations souvent loin d’être inextricables, et

de nourrir des relations de mauvaise qualité, pleines d’appréhension...

3.6 La position du remplaçant

J’ai choisi de donner la parole aux médecins remplaçants parce que c’est un fait rare

dans les études, alors que c’est actuellement un mode d’exercice à part entière. Les

résultats des remplaçants et des installés sont comparables. Cependant, il ressort de

mon étude que le statut de remplaçant comporte à la fois des difficultés et des éléments

pouvant faciliter l’expression du refus, spécifiques.

3.6.1 Le remplaçant et son patient

La relation médecin-malade implique un investissement total du médecin généraliste

qui doit approcher le patient dans sa globalité et sa durée. L’absence d’investissement

dans une relation avec un patient semble contraire à la pratique de la médecine générale

mais correspond souvent à des situations rencontrées par les médecins remplaçants qui

ne s’occupent du patient qu’a un moment donné. Il s’agit le plus souvent de situations

vécues comme un inconvénient majeur du remplacement (65).

Une moindre responsabilité…

Le sentiment de moindre responsabilité est retrouvé chez de nombreux remplaçants. Il

semblerait que le remplaçant ne s’estime pas suffisamment capable d’assurer seul et

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dans la durée le suivi des patients. Les remplaçants considèrent que les patients

« appartiennent » à leur médecin et ne se voit pas assumer cette responsabilité. Il

préfère rester dans la position du remplaçant et mettre de la distance avec le patient

(65).

Le remplaçant estime que son rôle ne leur permet pas ou ne justifie pas d’accepter la

requête, d’autant plus qu’il a la possibilité de « s’appuyer » sur le médecin qu’il

remplace. Le « non » semble alors plus aisé…

R7 « Comme je remplaçais et que je m’en fichais un peu et que ce n’était pas mon patient à

moi … j’ai dit non. »

Cette « distance » peut être perçue comme un manque d’empathie par le patient. Selon

une étude effectuée en 2007 auprès de 167 médecins généralistes, les problèmes

relationnels (dont le manque d’empathie) compte pour 24% des difficultés rencontrées

avec le remplaçant (66).

Selon l’ordre des médecins, la responsabilité du remplaçant est la même que celle du

remplacé (67).

Crainte de manipulation de la part de son patient

R5 « Et puis il alterne d’un médecin à un autre. Et vu que je suis remplaçant c’est difficile

de suivre derrière… Il y en a même qui essayent de me rouler. Genre d’habitude il me donne

ça, il me fait ça etc. »

Comment un médecin nomade peut-il prendre en charge correctement un patient

nomade ? Les remplaçants sont souvent dans cette situation. L’irrégularité et l’absence

de suivi des patients est une difficulté citée fréquemment, particulièrement en cas de

remplacements ponctuels. Beaucoup d’entre eux se sentent manipulés par leurs

patients. On ressent beaucoup de méfiance de la part des remplaçants notamment dans

le cadre de renouvellement de psychotropes.

La relation de confiance médecin-patient ne s’établit qu’au fils du temps et les

rencontres ponctuelles avec les remplaçants la compromettent.

Dans la plupart des cas, en situation de doute, le remplaçant préfère refuser et renvoyer

le patient vers son médecin.

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L’image du remplaçant pour le patient

Au fil des interrogatoires, les remplaçants avaient déclaré avoir eu des difficultés à

imposer leur décision car les patients les considéraient comme un jeune intérimaire ou

encore un « faux médecin ». Les médecins généralistes remplaçants ressentent une

frustration car ils ont l’impression d’un manque de confiance des patients. Or plusieurs

thèses portant sur la perception du médecin remplaçant par le patient montrent que le

ressenti des patients envers les remplaçants est très positif (68)(69)(70).

Néanmoins, la présence ponctuelle du remplaçant et la moins bonne connaissance des

patients expliquent que le remplaçant se voit attribué un rôle minimisé répondant

seulement à une obligation ou une urgence. Les patients privilégient leur médecin

généraliste habituel en cas de situation de gravité, de problème personnel,

psychologique ou intime. Néanmoins, le patient fait confiance au remplaçant : parce qu’il

a été choisi par son médecin traitant, qu’il a des compétences techniques évidentes et

validées par les diplômes. Les qualités relationnelles restent primordiales. L’accueil, le

sourire, la sympathie, l’amabilité, l’écoute sont essentiels pour mieux faire accepter le

refus.

3.6.2 Le remplaçant et le remplacé

Cas de désaccord avec le médecin remplacé

Un obstacle majeur au refus selon les remplaçants est le désaccord avec le médecin

installé. R1 « Donc quand je refuse c’est que je ne suis pas d’accord avec le médecin. Il

faudrait établir un dialogue avec le médecin référant afin de trouver un terrain d’entente. »

Le fait de discuter ouvertement des désaccords semble être la solution. Mais remettre en

cause la prise en charge ou la prescription d’un confère est toujours une situation très

délicate…

Crainte de retentissement pour le remplacé

Selon le médecin R11 « Quand tu es remplaçant tu sais que tu refuses quelque chose à un

patient qui n’est pas le tien. Et du coup tu joues aussi sur la patientèle du titulaire… Enfin

c’est juste que ta décision n’a pas juste des conséquences par rapport à ton acte à ce

moment-là. Ça peut aussi jouer sur la patientèle du médecin que tu remplaces. »

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La crainte de retentissement pour le remplacé semble être un obstacle au refus. Le

remplacé peut avoir envie de faire « plaisir » au patient et céder à ses demandes pour ne

pas le faire fuir ou entacher la réputation du remplacé.

3.7 Comment est vécu le refus par le patient ?

Seul le versant médecin a été étudié, il serait intéressant de connaître aussi le point de

vue des patients sur le refus du médecin.

3.7.1 Sens de la demande pour le patient

Quel travailleur n’a pas, dans un élan parfois rebelle mais plus souvent de transfert

régressif et soumis, demandé à son médecin la permission de ne pas aller au travail ?

Réactualisant ainsi adulte ce qu’il faisait petit lorsqu’il implorait sa maman de ne pas

l’envoyer à l’école en exagérant un petit bobo…

S’il est difficile pour nous de refuser, ça l’est tout autant pour le patient de demander :

Parce qu'on a peur d'une réponse négative.

Parce qu'on a de coupables raisons (ou des raisons cachées) de demander.

Parce qu'on n'aime pas demander et être dépendant de l'autre et de sa réponse.

Parce qu’on est timide.

Parce qu’on ne cesse de nous répéter depuis notre enfance qu’il est impoli de

demander.

Quand une demande est formulée, il faut lui prêter une oreille attentive afin de

l’analyser et de percevoir les attentes de son patient.

3.7.2 Les attentes des patients

Le décalage entre les attentes du patient et ce qu'en perçoit son médecin a fait l'objet de

peu de publications. Dans une étude française de 1994 cherchant à comparer les

attentes des patients et leur perception par les médecins sur 1 200 consultations,

l'attente du malade était méconnue par le médecin dans 12,6 % des cas et perçue à tort

dans 18,6 %. Finalement, près de 20% des patients se retrouvaient avec une ordonnance

de traitement ou d’examen qu’ils n’attendaient pas, conséquence directe de ce

malentendu entre patient et médecin (71).

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L'attente des patients est en fait parfois complexe et mal évaluée. La décision de

prescrire un médicament va découler non seulement d'un savoir médical, mais elle va

également être influencée par la relation médecin-malade. En effet, une étude démontre

que lorsque les patients s'attendent à recevoir un antibiotique pour un banal mal de

gorge, ils ont plus de chance d'en recevoir un, et ce d'autant plus que les médecins

perçoivent cette attente, alors que les médecins interrogés étaient d'accord pour juger

cette prescription inutile (72). Il ressort également de cette étude que peu de médecins

évaluent les attentes de leurs patients et qu'il n'y a pas forcément de congruence entre

ce que les patients attendent et ce que les médecins pensent que leurs patients

attendent. Des études ont cependant montré que les malentendus ou les désaccords

entre patients et thérapeutes sont associés à une mauvaise compliance

médicamenteuse, voire à une absence de compliance (24).

3.7.3 Un problème de communication

Le médecin est-il certain, alors qu’il perçoit une demande comme injustifiée et tente de

la refuser, de comprendre les véritables attentes du patient qui lui fait face ? Il semble

donc que non…

Quelle est la part faite à l’intuition et à l’implicite dans la réponse qu’il lui donnera en

recevant ses plaintes ? Cette part d’incertitude ne risque-t-elle pas d’orienter son

jugement de telle sorte que sa réponse à une demande a priori injustifiée soit tout aussi

inadaptée ?

Des demandes souvent mal comprises

Une étude datant de 2006 cherchant à évaluer la prise en compte des préoccupations du

patient en consultation menée auprès de 21 médecins, montre que les médecins

généralistes tentent de répondre d'abord aux besoins de santé exprimés spontanément

par le patient.

Ils admettent dans leur majorité qu'entendre et comprendre, derrière la demande

explicite du patient, ce qui le préoccupe réellement et le pousse à consulter est l'un des

points cruciaux de la consultation. Ils souhaiteraient mieux prendre en compte ses

préoccupations réelles, mais manquent pour cela de temps et de compétences

spécifiques (73).

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Demande et inquiétude

Les médecins pensent donc ressentir une attente, voire une pression de prescription, et

s’exécutent en conséquence, alors que la véritable attente se situe ailleurs dans la

plupart des cas. Le médecin R5 l’a souligné dans son discours : « Parce qu’avant tout on

répond à une inquiétude du patient ». Les attentes des patients sont rarement explicites

et leur satisfaction n’est pas forcément liée à l’obtention d’une ordonnance ou d’un

document, mais souvent à l'information, la réassurance et le conseil (72).

La compréhension d’une demande, aussi anodine soit-elle, se prête à une quantité

d’interprétation aussi variable qu’il peut exister de contextes et de personnalités

différentes (45).

Il est difficile d’ignorer l’existence d’authentiques « abuseurs de la santé », c’est

pourquoi la capacité à distinguer ceux-là des quelques patients en souffrance semble

primordiale.

« L’agenda caché »

D’autre part, la demande exprimée d'emblée par le patient n'est ni la seule, ni souvent sa

principale préoccupation (74).

Un article suisse souligne deux aspects particuliers de la consultation généraliste (75).

« L'agenda caché » du patient. Alors que les médecins tendent à intervenir sur le

seul problème immédiat, les patients n'ont pas un, mais plusieurs agendas

cachés par consultation. Ces problèmes que le patient souhaiterait soumettre à

son médecin peuvent être de deux ordres : les uns, d'ordre médical, concernent

des craintes de maladies que l'on n'ose pas soumettre à son médecin pour de

multiples raisons ; les autres sont d'ordre existentiel concernant des craintes

plus personnelles. Ainsi, plus de la moitié des demandeurs de check-up ont en

fait des questions sous-jacentes qui sont le vrai motif de la consultation.

« Le syndrome du pas-de-porte » qui se traduit par le classique « au fait,

Docteur... » phénomène si connu et apprécié des généralistes qui tombe

implacablement au moment où le patient va sortir à la fin d'une consultation,

surtout si elle a déjà été très longue.

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C’est de la bonne compréhension globale que dépend la qualité de la réponse apportée.

Poser simplement la question «Quoi d’autre ? » avant la fin de la consultation pourrait

considérablement réduire le nombre d’agendas cachés durant la consultation et limiter

le syndrome du « pas-de-porte » ; à condition de pouvoir y consacrer le temps

nécessaire. Or, cette supposition se heurte à la réalité du terrain. Au décours des

témoignages des médecins, il semble clair que le facteur-temps pose un vrai problème

pratique, et que le travail «contre-la-montre» n’est que peu compatible avec

l’instauration d’un dialogue poussé. Une solution possible serait de consacrer un

créneau de consultation spécifique à cette tâche lorsque l’on sent que tout n’a pas été dit

(la consultation en deux temps) (74).

3.8 Comment mieux affronter les situations de refus ?

Pour l’ensemble des médecins interrogés, seuls l’expérience et le vécu leur

permettraient de mieux gérer le refus opposé à la demande d’un patient. En effet la

variabilité en terme de personnalité, de patient, de situation et de demande fait que

chaque refus se doit d’être adapté au cas par cas.

Certains d’entre eux ont tout de même évoqué d’éventuelles solutions qui pourraient

faciliter le refus, éviter le conflit et se préserver.

3.8.1 avoir s’entourer

Les groupes Balint

Plusieurs médecins interrogés, et tel que cité précédemment, valorisaient les groupes

Balint qu’ils considèrent « comme un défouloir où tu peux raconter ton expérience et

partager » comme l’a déclaré le médecin R11. Ces groupes sont connus pour aider les

médecins à accepter leurs limites, et améliorer leur motivation professionnelle (77).

La majorité des médecins interrogés souhaiteraient verbaliser les situations de refus et,

ou de conflit auprès d’autres généralistes. Cela permettrait de clarifier son point de vue,

de se décharger de l’émotion, se rassurer sur la qualité de sa prise en charge ou solliciter

un avis plus objectif. L’échange en groupe de parole ou avec des paramédicaux a prouvé

son efficacité dans le burn-out. Cependant le manque de temps, ne leur permettait pas

ou peu d’y assister.

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Le cabinet de groupe

Dans mon enquête, l’exercice de groupe a largement été valorisé par les médecins qui le

pratiquaient et a été souhaité par les autres. Celui-ci faciliterait le débriefing avec un

confrère et le relais possible de prise en charge en cas de rupture avec le patient.

Le fait de ne pas être isolé, permettrait également de se sentir en sécurité en cas de

conflit et ainsi bénéficier de l’aide de ses confrères en cas d’agression.

3.8.2 Savoir rompre

Pour la plupart des médecins, le refus a eu un intérêt pratique : pouvoir sélectionner sa

patientèle. Ils considéraient qu’il vaut mieux rompre en cas d’insatisfaction. La rupture

avait lieu en dernier recours, lorsque le patient devenait trop exigeant ou agressif.

Comme nous l’avons vu dans le chapitre 3.4.2., en cas de décision de rupture il est

nécessaire d’en informer le patient et assurer la continuité des soins.

3.8.3 La place de la formation

L’ensemble des médecins interrogés pense que la relation est innée. Ils valorisaient

l’âge, qui les rendrait plus confiants et plus calmes. L’expérience leur avait permis

d’acquérir des techniques pour gérer les conflits.

La majorité des médecins émettaient des réserves sur les formations continues. Ils les

jugeaient d’intérêts variables et peu applicables, et évoquaient le manque de temps pour

y assister.

Mais si l’expérience est irremplaçable (36), la communication ne s’improvise pas, elle

s’apprend (73).

Dans une profession où l’interaction et le dialogue sont fondamentaux, avec des enjeux

aussi importants que le soulagement de la souffrance et le bien-être de chacun, il serait

justifié de donner plus d’importance à l’enseignement de la communication.

La relation médecin-patient est d’ailleurs enseignée dans les facultés de médecine

depuis plusieurs années. Ce type de formation permet d’améliorer la prise en charge des

patients en souffrance psychique (76).

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CONCLUSION

Combien de fois par jour sommes-nous contraints de dire « non » ? Dans notre métier de

médecin, c’est quotidien…

Le médecin généraliste constitue la première ligne de soins à laquelle le patient peut

avoir recours, que ses demandes soient justifiées ou non. Lorsque le médecin juge qu'il

est nécessaire de dire « non », trouver la réponse adéquate qui parviendra à marier ses

propres convictions, les règles d'une médecine rigoureuse et les attentes du patient peut

se révéler difficile… Il ne suffit pas d'apprendre à oser ou à savoir dire « non » devant

une demande du patient qui nous paraît injustifiée, mais l’important est surtout de

savoir y répondre.

L’objectif de ma thèse était d’étudier un aspect particulier de la relation médecin-

malade : le refus opposé à la demande d’un patient. Dans un second temps, j’ai étudié le

cas du médecin remplaçant dans ces situations de refus.

J’ai tenté par cette étude, de déterminer les raisons qui peuvent motiver un refus, les

obstacles que peuvent rencontrer les médecins à formuler le « non », ainsi que les

techniques auxquelles ils peuvent avoir recours.

Il est difficile de définir précisément la notion de « demande injustifiée », dans la mesure

où elle fait appel au jugement personnel de chaque médecin, basé sur des valeurs

variées, allant de l’autorité légale aux propres convictions intimes. Mettre en avant des

valeurs fondamentales (bienveillance, empathie, compréhension, soutien) tout en

gardant une ligne de conduite qui est « le soin » est la tâche quotidienne du médecin.

Parfois, notre jugement peut être altéré par certains facteurs et nous pousser à agir

contre notre gré.

Il ressort de mon étude que les prescriptions médicamenteuses, les arrêts de travail

ainsi que les certificats sont les demandes les plus couramment refusées en médecine

générale. Le caractère « indu » des demandes reposait principalement sur des critères

personnels et professionnels (arguments médicaux, déontologiques ou juridiques). Le

symbolisme de la prescription médicamenteuse, de l’arrêt de travail et le règne du

certificat « tout-puissant » font que leur refus est une situation délicate pleine

d’appréhension. Pourtant, le médecin peut tirer de multiples bénéfices du « non ».

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Le « non » constitue une véritable protection, permettant ainsi de se préserver un

« espace vital » autant sur le plan professionnel que personnel. Il permet d’exercer dans

un climat plus serein, de rester en accord avec soi-même et aussi se protéger contre la

culpabilité, la dévalorisation de soi et de son statut. L’exaspération et l’épuisement

professionnel ne sont jamais loin lorsque l’on se voit en permanence amené à agir contre

son gré.

L’expression d’un refus justifié c’est fuir une relation neutre purement transactionnelle

de type « prestataire de service », et redonner de l’importance à la notion de confiance et

au jugement du médecin. Ainsi, nous avons parfois intérêt à opter pour un « non »

bienveillant plutôt qu’un « oui » complaisant. Penser et raisonner dans le bien du patient

est la priorité du médecin.

Ma réflexion sur le sujet ainsi que les témoignages des médecins m’ont permis

d'identifier plusieurs éléments semblant être un frein au refus : le patient autonome et la

médiatisation qui font que les attentes des patients sont grandissantes, l’appréhension

de judiciarisation, le consumérisme médical, la crainte d'entrer en conflit

(principalement les femmes), de décevoir son patient, ou de manquer à son devoir

d'empathie.

Les résultats des remplaçants et des installés sont comparables. Cependant le statut de

remplaçant comporte à la fois des difficultés et des éléments pouvant faciliter

l’expression du refus. Le désinvestissement dans la relation avec le patient, et

l’irrégularité du suivi semblent orienter vers le refus. A contrario l’absence de consensus

et la crainte de retentissement sur le remplacé seraient un obstacle au refus.

Les médecins généralistes remplaçants ressentent une frustration car ils ont

l’impression d’un manque de confiance des patients. Or le ressenti des patients envers

les remplaçants est très positif.

Refuser sans se fâcher est un art difficile. Il existe des critères plus ou moins

généralisables qui permettent de rendre un « non » efficace et d'aider le médecin qui,

face à une demande abusive, serait dans l'embarras pour la refuser.

Savoir écouter et repérer la demande du patient, prendre le temps de bien comprendre

et saisir sa demande sont un bon début. Adopter un comportement assertif (qui permet

de respecter et de faire entendre les droits et désirs du médecin dans le respect du

patient) et dire « non » clairement sans être agressif sont nécessaires. Si l’interlocuteur

insiste, les techniques de l’entretien en 4 phases ou du « disque rayé » s’avèrent utiles.

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Bien entendu, ce ne sont que des outils, et l'expérience acquise au fil du temps serait

probablement fondamentale pour les manier avec dextérité. En effet la variabilité en

terme de personnalité, de patient, de situation et de demande ; fait que chaque refus se

doit d’être adapté au cas par cas.

Mais si l’expérience est irremplaçable, la communication ne s’improvise pas, elle

s’apprend. Elle constitue la clef de voute pour rendre un refus acceptable.

C’est de la bonne compréhension globale que dépend la qualité de la réponse apportée.

Poser simplement la question «Quoi d’autre ? » avant la fin de la consultation pourrait

considérablement réduire le nombre d’agendas cachés durant la consultation et limiter

le syndrome du « pas-de-porte » ; à condition de pouvoir y consacrer le temps

nécessaire.

Dans une profession où l’interaction et le dialogue sont fondamentaux, avec des enjeux

aussi importants que le soulagement de la souffrance et le bien-être de chacun, il serait

justifié de donner plus d’importance à l’enseignement de la communication.

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(70) BRESSON-BENBRAHIM E. Perception du médecin généraliste remplaçant. Thèse de médecin

générale, faculté Paris 7, 2013.

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Médecine Générale, mai 1994, vol. 8, no. 260, pp. 41-48.

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Bibliomed, mars 2003, no. 299.

(73) LEMASSON A. GAY B. LEMASSON J-L. DUROUX G. Comment le médecin perçoit-il sa prise en

compte des préoccupations du patient ? Médecine, janvier 2006, vol. 2, no. 1, pp. 38-42.

(74) VALLEY J.P, GALLOIS P. La demande exprimée d'emblée par le patient est-elle sa principale,

ou sa réelle, préoccupation ? Revue Médecine, janvier 2006, vol 2, n°1, pp. 25-26.

(75) RODONDI PY, et al. Que cache l'agenda caché ? Revue Médicale Suisse. 2005, vol. 1, no. 5, pp.

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(76) AUGER J, PUICHAUD J. Comment améliorer la relation médecin-malade? Rev Prat Med Gen.

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vérifié le 02/09/2014)

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ANNEXE 1 : ’

Administratif Age, sexe, année d’installation/ début de remplacement, mode d’exercice (cabinet/groupe ou remplacement fixe/ponctuel), lieu d’exercice, maitre de stage/thésé.

Thèmes abordés

1. Quelles sont les demandes que vous refusez lors de la consultation ?

De quel type ? Quelles sont les plus fréquentes ?

2. Pourquoi les refusez-vous ?

Quels sont les impératifs qui vous poussent à refuser ? Dans quel intérêt pensez-vous agir ? le vôtre ? celui du patient ? ou

autre ? Quels sont les éléments qui vous simplifient refus ?

3. Comment gérez-vous le refus face au patient ?

Quelles méthodes utilisez-vous pour faire accepter le refus ? Quels arguments avancez-vous au patient pour justifier votre

choix?

4. Quelles sont les difficultés rencontrées lors d’un refus? Quels sont les paramètres qui vous compliquent le refus ? Etes-vous déjà rentré en conflit avec un patient ? Qu’est ce qui aurait pu vous faire changer d’avis ? Vous est-il déjà arrivé de changer d’avis ? Vous sentez vous coupable de refuser ?

5. Le statut de remplaçant complique-t-il la situation ou inversement ?

Refusez-vous plus facilement ? Pensez-vous que les patients se comportent différemment avec

vous ? Qu’auriez-vous fait dans ce cas si c’était votre cabinet ?

6. Quelles en sont les conséquences sur la relation médecin malade ?

A court terme ? A long terme ? Ressentez-vous un retentissement sur la relation médecin malade ?

7. Qu’est ce qui pourrait vous faciliter la situation ?

Qu’est-ce qui vous aiderait à appréhender au mieux ce genre de situation ?

Pensez-vous qu’une formation pourrait vous être utile ?

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ANNEXE 2 : LES ETAPES DE LA REDUCTION

PHENOMENOLOGIQUE SELON DESCHAMPS

I. irer le sens général de l’ensemble de la description

C’est-à-dire effectuer une ou plusieurs lectures flottantes, de manière à se rapprocher à nouveau du phénomène et à s’en saisir de l’intérieur.

II. Reconnaître les unités de signification qui émergent de la description Le chercheur doit alors découper le contenu du verbatim en autant d’unités que l’on peut déceler à chaque transition thématique observée lors de la lecture, et cela dans la perspective de chaque participant. Les unités de signification dégagées permettent de remonter du vécu (expérience) ver le concept (structure typique du phénomène étudié). Les unités de signification principales représentent la structure du phénomène.

III. Développer le contenu des unités de signification de manière à approfondir le sens qui est contenu dans le matériel.

A cette étape, le chercheur approfondit sa compréhension de l’expérience en traduisant les unités de signification en unités approfondies de signification, c’est-à-dire que le contenu du verbatim correspondant à une unité de signification est alors approfondi par le chercheur grâce à sa connaissance plus générale de la réalité explorée. Il explicite dans ses mots et dans celui du participant ce qu’il en est de cette partie de l’expérience, dans une optique d’analyse qui permet l’appropriation du sens, sa compréhension, son explicitation et son élaboration. Par exemple, il est possible de séparer le texte analysé en deux colonnes : dans la première colonne, on peut lire dans l’ordre chronologique, les unités de signification des mots des participants et, dans la deuxième, les mêmes unités de signification sont reprises en unités approfondies de signification, explicitées et élaborées. Les unités approfondies de signification représentent la rencontre active du chercheur avec l’expérience.

IV. Réaliser la synthèse de tous les développements des unités de signification, dans le respect du phénomène considéré, et décrire la structure typique du phénomène

C’est la dernière phase de la démarche de réduction phénoménologique. Ici, le chercheur doit réunir les unités de signification et les unités de signification approfondies en une description consistante, cohérente, qui prend une forme synthétique. Chaque récit analysé entraîne une description systématique et fidèle des propos de participant, selon la structure qui lui est propre. Le chercheur procède aussi à la synthèse des différents récits par une description générale de la structure typique de l’expérience : on passe alors de la description vers le concept et un niveau de généralité supérieur. Dans sa démarche de réduction phénoménologique, le chercheur peut solliciter le point de vue des répondants, leur communiquer la description de l’expérience typique et obtenir d’eux une appréciation. Cette étape permet d’approfondir l’analyse. KANI KONATE M. SIDIBE A. Guide pour la recherché qualitative (en ligne). Centre d’appui à la recherche et à la formation, Bamako - Mali. http://www.ernwaca.org/panaf/RQ/fr/etape.php (vérifié le 09/05/2014)

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ANNEXE 3 : ECHELLE DE MASLACH

Evaluer votre niveau d’épuisement professionnel

Indiquez la fréquence à laquelle vous ressentez ce

qui est décrit à chaque item.

Entourer le chiffre correspondant à votre réponse

Jam

ais

Qu

elq

uef

ois

par

an

née

au

mo

ins

Un

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is p

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ois

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Qu

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Un

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emai

ne

Qu

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fo

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ar s

emai

ne

Ch

aqu

e jo

ur

1. Je me sens émotionnellement vidé par mon travail 0 1 2 3 4 5 6

2. Je me sens « à bout » à la fin de ma journée de travail 0 1 2 3 4 5 6

3. Je me sens fatigué(e) lorsque je me lève le matin et que j ai à affronter une autre journée de travail

0 1 2 3 4 5 6

4. Je peux comprendre facilement ce que mes malades

ressentent 0 1 2 3 4 5 6

5. Je sens que je m’occupe de certains malades de façon impersonnelle comme s ils étaient des objets

0 1 2 3 4 5 6

6. Travailler avec des gens tout au long de la journée me

demande beaucoup d’effort

0 1 2 3 4 5 6

7. Je m’occupe très efficacement des problèmes de mes

malades 0 1 2 3 4 5 6

8. Je sens que je craque à cause de mon travail 0 1 2 3 4 5 6

9. J’ai l’impression à travers mon travail d’avoir une influence positive sur les gens

0 1 2 3 4 5 6

10. Je suis devenu(e) plus insensible aux gens depuis que j’ai ce

travail 0 1 2 3 4 5 6

11. Je crains que ce travail ne m’endurcisse émotionnellement 0 1 2 3 4 5 6

12. Je me sens plein(e) d’énergie 0 1 2 3 4 5 6

13. Je me sens frustré(e) par mon travail 0 1 2 3 4 5 6

14. Je sens que je travaille trop dur dans mon travail 0 1 2 3 4 5 6

15. Je ne me soucis pas vraiment de ce qui arrive à certains de mes malades

0 1 2 3 4 5 6

16. Travailler au contact direct avec les gens me stresse trop 0 1 2 3 4 5 6

17. J’arrive facilement à créer une atmosphère détendue avec

mes malades 0 1 2 3 4 5 6

18. Je me sens ragaillardi(e) lorsque dans mon travail j’ai été

proche de mes malades 0 1 2 3 4 5 6

19. J’ai accompli beaucoup de choses qui en valent la peine

dans ce travail 0 1 2 3 4 5 6

20. Je me sens au bout du rouleau 0 1 2 3 4 5 6

21. Dans mon travail je traite les problèmes émotionnels très

calmement 0 1 2 3 4 5 6

22. J’ai l’impression que mes malades me rendent responsable de certains de leurs problèmes

0 1 2 3 4 5 6

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Instructions pour le calcul des indices de l échelle de Maslach

EPUISEMENT PROFESSIONNEL

Questions 1.2.3.6.8.13.14.16.20

Degré de burn out

Total inférieur à 17 = bas

Total compris entre 18 et 29 = modéré

Total supérieur à 30 = élevé

DEPERSONNALISATION

Questions 5.10.11.15.22

Degré de burn out

Total inférieur à 5 = bas

Total compris entre 6 à11 = modéré

Total supérieur à 12 = élevé

ACCOMPLISSEMENT PERSONNEL

Questions 4.7.9.12.17.18.19.21

Degré de burn out

Total supérieur à 40 = bas

Total compris entre 34 et 39 = modéré

Total inférieur à 33 = élevé

Des scores modérés, voire élevés, sont le signe d’un épuisement professionnel latent, en

train de s’installer.

Si vous avez obtenu :

Un score élevé aux deux premières échelles et un score faible à la dernière : vous sentez

vous épuisé(e) professionnellement en ce moment

Si vous avez obtenu :

Un score faible aux deux premières échelles et un score élevé à la dernière : vous êtes loin

d’être épuisé(e).

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UN ASPECT DE LA RELATION MEDECIN – MALADE : LES REFUS OPPOSES AUX DEMANDES DES PATIENTS : VECU DE CES SITUATIONS PAR LE

MEDECIN GENERALISTE INSTALLE ET PAR LE REMPLACANT Etude qualitative réalisée à partir d’entretiens individuels en Ile de France.

RESUME

Contexte : Répondre aux demandes des patients constitue le cœur de l'exercice médical. En soi, cela ne poserait pas de problème si ces demandes ne dépassaient pas parfois les limites de l'acceptable. Objectifs : Déterminer la nature de ces demandes, les raisons qui peuvent motiver un refus, les obstacles rencontrés par les médecins installés et remplaçants à formuler le « non », les techniques auxquelles ils peuvent avoir recours ainsi que les conséquences du refus. Méthode : Une étude qualitative par entretiens semi-dirigés a été menée entre octobre et décembre 2013 auprès de 12 médecins généralistes exerçants en Île De France (6 médecins installés depuis plus de 10ans et 6 remplaçants). Une retranscription écrite intégrale et une analyse thématique de contenu ont été réalisées. Résultats : Les prescriptions médicamenteuses (principalement antibiotiques et psychotropes), les arrêts de travail ainsi que les certificats sont les demandes les plus couramment refusées. Leur caractère « indu » reposait principalement sur des critères professionnels (médicaux ou juridiques) et personnels. Le refus dans l’intérêt du patient se situe au premier plan. L’expérience du médecin, la crainte de tromperie, le désir de ne pas revoir le patient et un patient peu ou pas connu, semblent orienter nettement la décision vers le refus. A contrario, l’empathie, les difficultés de compréhension du « non » et les patients agressifs semblent être des obstacles au refus. Chez les remplaçants, désinvestissement et irrégularité du suivi des patients semblent orienter vers le refus, alors que l’absence de consensus et la crainte de retentissement pour le remplacé seraient un obstacle. La totalité des médecins ont déclaré qu’une bonne explication rend le refus acceptable. La plupart ont recours à un compromis après une négociation. Le conflit et la perte du patient sont les conséquences les plus notables. Certains médecins ont évoqué un renforcement de la relation sur le long terme. Conclusion : Le « non » constitue une véritable protection autant sur le plan professionnel que personnel. Mais il ne suffit pas de savoir dire « non » devant une demande jugée injustifiée mais surtout de savoir y répondre. Dans une profession où l’interaction et le dialogue sont fondamentaux, avec des enjeux aussi importants que le soulagement de la souffrance et le bien-être de chacun, il serait justifié de donner plus d’importance à l’enseignement de la communication.

MOTS CLEFS

Médecine générale, Relations médecin-patient, Recherche qualitative, Médecins-remplacement.