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Extrait de la publication

Dossier : flam203224_3b2 Document : La paruresDate : 2/10/2006 15h35 Folio 12/96


MAUPASSANT

La Parureet autres scènes

de la vie parisiennePrésentation, notes, chronologie et dossier par

LAURE HUMEAU-SERMAGE,professeur de lettres

Dossier : Document : La paruresDate : 1/8/2008 15h45 Folio 2/96

Du même auteur,dans la même collectionBoule de suifLe Horla et autres contes fantastiquesLe Papa de Simon et autres nouvelles

© Flammarion, Paris, 2001.Édition revue, 2006.ISBN : 978-2-0812-2285-4ISSN : 1269-8822


S O M M A I R E& Présentation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5

Un forcené de la littérature 5

Le genre de la nouvelle 6

De la réalité 7

« Surprendre l’humanité sur le fait » 9

Femmes, amours et mort 10

& Chronologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

La Parureet autres scènesde la vie parisienne

La Parure 23

Un lâche 37

Le Rendez-vous 47

Le Masque 57

Les Tombales 69

& Dossier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81

Êtes-vous un lecteur attentif ? 82

Que deviennent-ils ? 84



Qui parle ? 85

Portraits de femmes 86

L’ironie du sort 88

Masques, mensonges et apparences 88

Paris 89

La vie parisienne 90



PRÉSENTATIONUn forcené

de la littérature

Au cours d’une existence rongée par la maladie et la folie quil’emportent à quarante-trois ans, Guy de Maupassant écrit plusde trois cents nouvelles et contes, six romans et une multitude dechroniques et de récits de voyage. L’énergie de sa plume est d’au-tant plus grande que sa production est concentrée sur dix ans, de1880 à 1890, entre son départ du ministère de l’Instructionpublique et les attaques de plus en plus fréquentes de la maladie.De Boule de suif, parue en 1880, qui consacre Maupassant commeécrivain à succès, à Fort comme la mort, son dernier roman, paruen 1889, l’itinéraire de cet homme originaire de Normandie estremarquable. Pendant une décennie, il travaille au ministère de laMarine et des Colonies, puis auministère de l’Instruction publiquequ’il n’apprécie guère plus : il s’y ennuie mais observe sans com-plaisance ce milieu étriqué qu’il méprise et qui inspirera unegrande partie de son œuvre. Il cherche à échapper à ce morneunivers et, tout en s’adonnant aux excès que lui permettent sajeunesse et sa fougue, il se met à l’écriture, sous le regard bien-veillant de Gustave Flaubert, ami de sa mère.

Présentation | 5


Le genre de la nouvelle

Rien n’est moins original au XIXe siècle que d’écrire des nou-velles : tous les grands auteurs français et étrangers, commeGustave Flaubert, Honoré de Balzac, Émile Zola, Alphonse Daudet,Ivan Tourgueniev, d’origine russe, et l’Américain Edgar Allan Poe,s’y essayent. De plus, le développement de la presse favorise cegenre littéraire, et Jules Lemaître, critique de l’époque, souligne,dans un article consacré à Maupassant tiré des Contemporains,l’étroit rapport entre la nouvelle et la presse : «Dans ces dernièresannées, le conte, assez longtemps négligé, a eu comme unerenaissance. Nous sommes de plus en plus pressés ; notre espritveut des plaisirs rapides ou de l’émotion en brèves secousses :il nous faut du roman condensé, s’il se peut, ou abrégé si l’on arien de mieux à nous offrir. Les journaux, l’ayant senti, se sontavisés de donner des contes en guise de premiers-Paris 1. »Maupassant n’échappe pas à cet engouement et publie ainsidans Le Figaro, Le Gaulois, Gil Blas et L’Écho de Paris bon nombrede nouvelles avant de les recueillir dans des volumes dont il dirigela publication.

La nouvelle est un genre qui se laisse difficilement définir, etses appellations aussi diverses que conte, récit ou chroniquemontrent son aptitude à la diversité. Pourtant se dégagent cer-taines règles : une nouvelle est un récit bref – la brièveté estpeut-être liée aux contraintes propres à la parution dans lesjournaux –, rapide et resserré, qui développe un sujet restreintet met en scène un nombre réduit de personnages. Tout esttendu vers une fin qui doit être frappante, dramatique, tragiqueou comique. Ce court récit s’attache aussi à l’instant, et c’est ce

1. Premiers-Paris : lectures divertissantes dans un journal.

6 | La Parure et autres scènes de la vie parisienneExtrait de la publication


qui fait sa particularité par rapport au roman. Dans une nou-velle, il s’agit moins de raconter une histoire, la vie entière d’unpersonnage par exemple, que d’évoquer un moment particulieret important de l’existence d’un individu, lié en général à unerévélation ou à une prise de conscience. Le nouvelliste veut saisirun instant de vie, un épisode, une aventure, une anecdote. Selonla formule de Jules Janin, écrivain contemporain de Maupassant,« la nouvelle est une course au clocher. On va toujours au galop,on ne connaît pas d’obstacles ». Pour Maupassant, le but decette course est de rendre compte de la réalité.

De la réalité

Dans la multitude des nouvelles que Guy de Maupassant aléguées à la postérité se dégagent deux orientations générales.La place faite aux contes fantastiques est grande, comme entémoigne sa nouvelle la plus célèbre, inspirée de sa propre folie,Le Horla 1. Le monde y apparaît comme infini et échappant à lacompréhension, l’homme comme une créature fragile en proie àtoutes les incertitudes et à toutes les illusions : la réalité y estvacillante.

Mais Maupassant s’attache aussi à décrire la réalité dans sonquotidien, parfois cruel et médiocre : il est avant tout un écrivainproche du mouvement littéraire réaliste qui se développe enFrance dans la deuxième moitié du XIXe siècle. Il a pour maîtresplusieurs grands écrivains réalistes de l’époque : Flaubert d’abord,

1. In Le Horla et autres contes fantastiques, GF-Flammarion, « Étonnants Classiques »,no 11, 2006.

Présentation | 7Extrait de la publication


l’auteur de Madame Bovary et de L’Éducation sentimentale, sonvéritable initiateur à la littérature, qui lui apprend à « regardertout ce qu’on veut exprimer, assez longtemps et avec assezd’attention pour en découvrir un aspect qui n’ait été vu et ditpar personne 1 » ; Émile Zola ensuite, célèbre pour son cycle desRougon-Macquart, et qui, en avril 1880, fait paraître Boule de suifdans le recueil Les Soirées de Médan et introduit Maupassant dansle cercle des grands écrivains ; Honoré de Balzac enfin, l’auteur deLa Comédie humaine, auquel Maupassant voue une grande admi-ration. Balzac et Flaubert sont des écrivains réalistes qui ont lesouci d’observer la réalité et de donner au lecteur l’impression duvrai. Zola est le maître du naturalisme : pour lui, l’écrivain doitobserver avec minutie la réalité, la reproduire le plus fidèlementpossible mais surtout proscrire toute idéalisation du réel en neredoutant pas de peindre les malheurs, les misères et les vices.

Mais si Maupassant est proche dumouvement naturaliste et ades affinités indiscutables avec le réalisme, l’auteur des nouvellesmettra un point d’honneur à prendre de la distance avec tous lesgroupes littéraires friands de doctrine ou de théories figées sur lalittérature. Loin de toute école, il ne veut pas dire toute la véritémais veut en choisir les traits les plus caractéristiques. Pour lui,l’art est seulement une peinture vraie, objective et détachée.

1. Maupassant, « Le Roman », préface de Pierre et Jean, GF-Flammarion, 1992, p. 27.



« Surprendre l’humanitésur le fait »

Tel est le dessein de Maupassant dans ses nouvelles et il s’ins-pire pour cela de sa propre vie : certaines de sesœuvres en sont lereflet à peine déformé. Le Horla laisse ainsi entrevoir les troublespsychologiques de son auteur qui souffre très tôt d’hallucinationset de délires. De même, nombreuses sont les nouvelles qui s’ins-pirent de sa Normandie natale : l’univers paysan 1 et la sociétéprovinciale sont des thèmes chers à l’auteur. Son expérience de laguerre contre la Prusse en 1870-1871 donne aussi lieu à un cer-tain nombre de nouvelles, comme Boule de suif ou MademoiselleFifi.

Maupassant, entre la Normandie où il retourne régulièrementet les bords de Seine où il passe ses fins de semaine pour oublierla monotonie et la médiocrité de son travail, s’inspire aussi deParis où il habite, capitale alors en pleine transformation,saignée par les grands travaux du baron Haussmann. Paris, sapopulation, ses mœurs, ses intrigues sont pour l’écrivain unvaste champ d’observation.

Les cinq nouvelles présentes dans ce recueil se déroulenttoutes à Paris, un Paris esquissé à travers quelques mentions delieux précis, comme le cimetière Montmartre, le Palais-Royal etle quartier de Saint-Lazare, où se jouent des scènes aussidifférentes qu’une rencontre (Le Rendez-vous, Les Tombales), unsuicide (Un lâche), des bals (Le Masque, La Parure), dans un uni-vers bourgeois, aristocratique ou populaire.

1. On pourra notamment se reporter au recueil intitulé Le Papa de Simon et autresnouvelles, GF-Flammarion, « Étonnants Classiques », no 4, 2006.



Ces histoires de citadins et de citadines, dans une grande villepressée comme Paris, ne pouvaient être mieux rendues que par lanouvelle. Maupassant surprend sur le fait ses personnages. Il sai-sit le moment où leur vie change ou bascule : la perte d’un collierruine les rêves bourgeois de Mathilde Loisel ; Jeanne Haggandécouvre son aversion pour un amant trop amoureux ; le vicomtede Signoles, déstabilisé au plus profond de lui à l’idée de se battre,se suicide ; le héros du Masque est rattrapé par une décrépitudequ’il tentait de dissimuler et le narrateur des Tombales conte sesamours éphémères avec une jeune femmemystérieuse. Le regardobservateur de Maupassant s’exerce avec une acuité particulière.Il dévoile les tourments et les pensées de ses héros, leurshésitations et leurs sentiments, et décrit Paris comme un lieud’amour, de mort et de misère.

Femmes, amours et mort

Maupassant dépeint dans ces nouvelles une véritable galeriede femmes. Protagonistes de quatre nouvelles sur cinq, elles sontcitadines, jeunes ou vieilles, bourgeoises ou simples filles,misérables ou aisées, courageuses ou volages, mystérieuses ousincères. L’auteur y apparaît comme un fin psychologue, saisis-sant, malgré la brièveté du récit, l’âme des femmes. Peintre desfemmes, il est aussi analyste de l’amour et du mariage. Cesderniers sont jugés insatisfaisants et décevants, comme dansLa Parure ou dans Le Masque, et même l’adultère évoqué dansLe Rendez-vous n’échappe pas aux platitudes de l’amour. Lacondition humaine est aussi présente à travers le thème du vieil-lissement, auquel on tente d’échapper par une vie de débauche(Le Masque), ou auquel on est condamné prématurément



comme dans La Parure. Un des thèmes récurrents est celui dumasque : c’est l’image métaphorique ou réelle de la dissimula-tion et du mensonge. Et dans ces cinq nouvelles, on ment et onse ment à soi-même, on trompe et on se cache : Paris apparaîtcomme le théâtre des apparences où les personnages jouent unrôle.

Se dégage alors un certain pessimisme : le monde n’est quesolitude, misèremorale oumatérielle, déception, illusions, amourséphémères ou malheureuses… Pourtant, Maupassant se gardebien d’être un moraliste : il laisse au lecteur le soin de juger etpeut-être de réfléchir sur le bonheur et la faculté d’être heureux…



CHRONOLOGIE

1850189318501893

& Repères historiques et culturels

& Vie et œuvre de l’auteur



Repères historiques et culturels

1848 Fin de la monarchie de Juillet. Début de la IIe République.

1851-1852 Coup d’État de Louis Napoléon Bonaparte et débutdu Second Empire. Louis Napoléon Bonaparte devientNapoléon III.

1851 Les Châtiments de Victor Hugo, long pamphletcontre l’Empire et l’empereur.

1856 Publication à Paris des Histoires extraordinaires, recueilde nouvelles fantastiques d’Edgar Allan Poe, traduitespar Charles Baudelaire.

1857 Les Fleurs du mal de Charles Baudelaire.Madame Bovary de Gustave Flaubert.

1862 Les Misérables de Victor Hugo.

1866 Lettres de mon moulin, recueil de nouvelles d’AlphonseDaudet.

1869 L’Éducation sentimentale de Gustave Flaubert.



Vie et œuvre de l’auteur

1850 Naissance de Guy de Maupassant en Normandie,près de Dieppe, dans une famille de la petite noblesseprovinciale.

1856 Naissance d’Hervé de Maupassant, frère de Guy,qui mourra fou en 1880.

1860 Séparation des parents de Maupassant. Guy et Hervésont confiés à leur mère, qui s’installe près d’Étretat.

1863-1868 Maupassant est pensionnaire dans un collège religieuxà Yvetot.

1868-1869 Renvoyé de sa pension, il entre comme internedans un lycée de Rouen, où il obtient son baccalauréat.Chaque dimanche, il retrouve son correspondant,le poète Louis Bouilhet, qui le présente àGustave Flaubert.Les deux hommes sont les premiers maîtresen littérature du jeune homme.

1869-1870 Il commence une licence de droit à Paris, interrompuedès la première année par la guerre contre la Prusse.

Chronologie | 15Extrait de la publication



1870 Le baron Haussmann, préfet de la Seine, voit s’acheverles grands travaux menés à Paris à son initiative.

1871 Guerre contre la Prusse et invasion de la France. L’arméefrançaise capitule rapidement et Napoléon III est faitprisonnier à Sedan. C’est la fin du Second Empireet le début de la IIIe République, marqué par l’épisodede la Commune de Paris.

1874 Première exposition des peintres impressionnistes.

1877 L’Assommoir, roman naturaliste d’Émile Zola.Trois contes de Gustave Flaubert.

1880 Mort de Gustave Flaubert.Publication du recueil de nouvelles Les Soirées de Médansous l’autorité d’Émile Zola.Lois de Jules Ferry sur l’enseignement primaire, gratuit,laïque et obligatoire.



Vie et œuvre de l’auteur

1870-1871 Mobilisé, Maupassant est affecté à l’Intendanceà Rouen, d’où il assiste à la défaite française.

1872-1880 Il entre au ministère de la Marine et des Colonies, puis,en 1879, au ministère de l’Instruction publique.Il apprend le métier d’écrivain avec Gustave Flaubert,se distrait le dimanche dans les guinguettes des bordsde Seine, affectionne les parties joyeuses de canotage,s’exerce au pistolet et à l’épée où il excelle et multiplieles conquêtes féminines malgré l’apparition de troublesde santé (syphilis).

1880 Parution de Boule de suif, sa première nouvelleimportante, dans un recueil intitulé Les Soirées de Médanregroupant autour d’Émile Zola les jeunes romanciersde l’époque.La mort de Gustave Flaubert affecte Maupassant quiquitte le ministère et décide de commencer une nouvelleexistence. Il entre au journal Le Gaulois, voyage dansle Midi et en Corse : il veut désormais vivre uniquementde sa plume.

Chronologie | 17Extrait de la publication



1885 Mort de Victor Hugo.Germinal d’Émile Zola.

1889 Exposition universelle de Paris : inaugurationde la tour Eiffel.

18 | La Parure et autres scènes de la vie parisienne


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Composition : IGS-CP.No d'édition : L.01EHRN000247.N001

Dépôt légal : août 2008


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