evolution du cadre institutionnel dans le secteur rural

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EVOLUTION DU CADRE INSTITUTIONNEL DANS LE SECTEUR RURAL ----------------------------------------- ETUDE DE CAS N°1 : LE MALI Emmanuel POUSSE INSTITUTIONS ET DEVELOPPEMENT Mars 2002 Avertissement : cette étude a reçu le soutien financier du Ministère des Affaires Etrangères français. Les analyses et conclusions de ce document sont formulées sous la responsabilité de son auteur et ne reflètent pas nécessairement le point de vue officiel du Ministère des Affaires Etrangères français.

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EVOLUTION DU CADRE INSTITUTIONNEL

DANS LE SECTEUR RURAL

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ETUDE DE CAS N°1 : LE MALI

Emmanuel POUSSE INSTITUTIONS ET DEVELOPPEMENT

Mars 2002

Avertissement : cette étude a reçu le soutien financier du Ministère des Affaires Etrangères français. Les analyses et conclusions de ce document sont formulées sous la responsabilité de son auteur et ne reflètent pas nécessairement le point de vue officiel du Ministère des Affaires Etrangères français.

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali -

PREAMBULE Ce document constitue la première étude de cas de l'étude sur “l'évolution du cadre institutionnel dans le secteur rural”. Ce travail s'inscrit en parallèle avec les travaux sur les aspects "théoriques" menés sur ce thème par le MAE. Les études de cas ont pour objet d'alimenter la réflexion à partir des évolutions institutionnelles des pays de référence (Mali, Ouganda et Vietnam), des modes d'intervention observés, et de dégager des leçons pour étayer les propositions qui seront faites lors de la dernière étape de ce travail. Ce rapport est structuré comme suit :

- Une première partie est consacrée à la présentation générale du contexte malien ;

- Une deuxième partie procède à une analyse de l'évolution institutionnelle des principales filières ;

- Une troisième partie s'attache à une analyse des principales fonctions présentes dans ce secteur ;

- Une quatrième partie tire les leçons du processus de changement en cours au Mali et des apports de l'aide française à ce processus. Cette dernière partie ouvre sur l'ébauche d'une démarche d'appui institutionnel qui sera développée au cours des prochaines étapes.

En annexe sont présentées deux méthodes d'intervention, l'une concerne la conduite participative d'une analyse institutionnelle d'un secteur, l'autre une démarche de conduite des transferts au niveau d'une région, démarche conçue et utilisée par le MDR au Mali. Ce rapport est le fruit d'un travail documentaire sur des études existantes (liste en annexes), des échanges au Mali avec des partenaires impliqués dans le développement rural (notamment l'équipe du SCAC développement rural et le responsable développement rural à l'AFD) ainsi que de l'expérience du rédacteur dans ce pays. Le lecteur doit être attentif au fait que ce rapport constitue une étape de l'étude.

I & D - INSTITUTIONS ET DEVELOPPEMENT Tél. : (33) 1 - 46 600 500 Fax : (33) 1 - 46 603 306 Email : [email protected]

BP 49, 92 293 Châtenay-Malabry - FRANCE

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali -

TABLE DES MATIERES

1. Le contexte général au Mali ____________________________________________________________ 1

1.1. Les grandes orientations économiques et politiques du pays _____________________ 1

1.2. Les principaux acteurs du secteur rural ______________________________________ 6

1.3. Les interventions des principaux bailleurs dans le secteur _______________________ 8 2. Analyses particulières sur des sous-secteurs ou des filières significatives _______________________ 11

2.1. Filières céréalières _______________________________________________________ 11

2.2. Filières d'élevage ________________________________________________________ 16

2.3. Filière coton ____________________________________________________________ 21 3. Analyse fonctionnelle ________________________________________________________________ 25

3.1. La définition des règles du jeu et leur application _____________________________ 25

3.2. Fonctions "structurantes" ________________________________________________ 30

3.3. Fonctions relevant de services à caractère privé. ______________________________ 34 4. Enseignements de la conduite du changement dans le secteur rural au Mali ____________________ 42

4.1. Facteurs à prendre en compte _____________________________________________ 42

4.2. Conduite de la réforme du secteur__________________________________________ 43

4.3. L'apport de l'aide française dans la conduite de ce changement et ses limites ______ 45

4.4. L'ébauche d'une démarche d'appui institutionnel _____________________________ 49 ANNEXES______________________________________________________________________ 51

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali -

GLOSSAIRE AFD Agence française de développement AGETIER Agence d’Exécution de Travaux d’Infrastructures et d’Equipements Ruraux ANICT Agence Nationale d’Investissement des Collectivités Territoriales APCAM Assemblée Permanente des Chambres d’Agriculture AV Association Villageoise CA Chambres agricultures CAMOPA Cellule d’Appui à la Mise en Œuvre du Plan d’Action CARI Cellule d’Appui à la Réforme Institutionnelle CCC Centres de Conseils Communaux CEDEAO Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest CMDT Compagnie Malienne pour le Développement des Textiles CNRA Comité National de la Recherche Agronomique CPS Cellule de Planification et de Statistiques CRA Chambre Régionale d’Agriculture CT ou CTD Collectivités Territoriales Décentralisées DAF Direction Administrative et Financière DGRC Direction Générale de la Réglementation et du Contrôle DNAER Direction Nationale de l’aménagement et de l’équipement rural DNAMR Direction Nationale de l’Appui au Monde Rural DNCN Direction Nationale pour la Conservation de la Nature EPA Etablissement Public Administratif FDI Fonction de Développement Institutionnel GDRN Projet Gestion Durable des Ressources Naturelles GRH Gestion des Ressources Humaines GRN Gestion des Ressources Naturelles GT ou GTV Gestion de Terroirs Villageois IER Institut d’Economie Rurale LCV Laboratoire Central Vétérinaire LEGISCOMA Législation sur les Coopératives Maliennes LPDI Lettre de Politique de Développement Institutionnel MDR Ministère du Développement Rural ME Ministère de l’Environnement MEATEU Ministère de l’Equipement, de l’Aménagement du Territoire, de l’Environnement et de

l’Urbanisme ONG Organisation Non Gouvernementale OMC Organisation Mondiale du Commerce ON Office du Niger OP Organisation Professionnelle OPA Organisation Professionnelle Agricole PARC Pan African Rinderpest Control PASAOP Programme d’Appui aux Services Agricoles et aux Organisations Paysannes PASPE Projet d’Appui au Secteur Privé Elevage PDSF Projet de Développement des Systèmes Financiers PGR Projet Gestion Rurale PNIR Projet National d’Infrastructures Rurales PNVA Programme National de Vulgarisation Agricole RII Relations inter-institutionnelles SADCI Système d'Analyse et de Développement des Capacités Institutionnelles SCAC Service de Coopération et d'Action Culturelle (MAE) SDDR Schéma Directeur du Développement Rural SFD Système(s) Financier(s) Décentralisé(s) SG Secrétariat Général TEC Tarif Extérieur Commun UE Union Européenne UEMOA Union Economique et Monétaire des Etats d’Afrique de l’Ouest

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 1

1. LE CONTEXTE GENERAL AU MALI

1.1. Les grandes orientations économiques et politiques du pays

a) Au niveau général 1. Les années de 1960 à 1968 sont marquées par une économie à caractère socialiste. Une

première remise en cause est née suite à la grave crise alimentaire de 1973. Cette crise a posé comme priorité du gouvernement et de ses partenaires la recherche d'une sécurité alimentaire. Une des conséquences a été une faible ouverture économique débutée dans les années 70, mais l'économie gardait un caractère fortement planifié avec le développement des entreprises publiques. La situation en 1980 était catastrophique, les ressources publiques servant quasi exclusivement à financer un secteur para-étatique inefficient. Cette situation a obligé à un changement de politique économique dont les orientations économiques étaient dictées par la recherche des grands équilibres macroéconomiques. Ces orientations ont conduit à des réformes visant le désengagement de l'Etat du secteur productif, la libéralisation du commerce et la "promotion" du secteur privé.

2. Les programmes engagés en 1982 jusqu'en 1987 ne vont pas aboutir. Le manque de rigueur dans l'assainissement des finances aboutit à un arrêt de ces programmes en 1987 et au recours au FMI et à la Banque mondiale. Les 1er programmes d'ajustements mis en place en 1988 touchèrent les entreprises publiques et le secteur agricoles. Les principales mesures concernaient : - la libéralisation des prix du commerce, - la réforme fiscale et douanière, - la réformes des entreprises publiques, - la simplification du cadre juridique et réglementaire des activités économiques et

commerciales, - le renforcement de la libéralisation des marchés céréaliers, - l'amélioration de l'efficacité du secteur coton.

1. Dans la continuité de ces programmes, le Mali obtenait en 92 une facilité d'ajustement structurel pour mener ces réformes économiques. Malgré des résultats considérés comme encourageants, l'amélioration de la compétitivité des produits maliens n'a pas été atteinte. C'est la dévaluation de 1994 a joué un rôle important dans le rétablissement de cette compétitivité, notamment agricoles, malgré le renchérissement induit des intrants. Les résultats de ces différentes réformes sont néanmoins considérés comme positifs au niveau des indicateurs macro-économiques avec une progression du PIB de 5 %, une réduction du déficit budgétaire… Par contre les indicateurs de "développement humain" ne progressaient pas comme souhaité, tant au niveau de la santé et de l'éducation, plaçant le Mali parmi les pays les plus pauvres.

2. Parallèlement, il faut relever la forte dépendance du Mali par rapport à l'aide publique au développement. "Selon les données disponibles, de 1960 à 1995, le Mali a bénéficié d'une aide extérieure estimée environ à 1 686 milliards de FCFA pour soutenir ses efforts de développement soit en moyenne 48 milliards de FCFA par an. L'aide globale est passée de 9,4 % du PIB sur la période 1960 à 1969 à 31,5 % en 1985 et 36,6 % en 1995."1 La même étude relève une dépendance budgétaire par rapport à cette aide de 44,7% en 96 pour les dépenses courantes de l'Etat. En 1998, le Mali a été déclaré éligible à l'initiative des Pays Pauvres Très Endettés (PPTE).

3. Au niveau politique, les principales dates à retenir sont (i) les évènements de mars 1991 qui amenèrent la chute du régime du Président Moussa TRAORE et l'avènement de la 3ème république, (ii) la mise en place du processus de décentralisation, concrétisé en juin 1999 par les élections communales sur l'ensemble du territoire malien.

1 Etude prospective Mali 2025

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b) Traduction de ces évolutions au niveau du secteur rural

1. Au Mali, pays de près de 10 000 000 d'habitants, 78 % de la population est rurale. Le secteur agricole concoure à environ 45 % du PIB, principalement avec trois grandes productions le coton, le riz et l'élevage qui contribuent pour 75 % aux recettes d'exportation. Le secteur agricole ne reçoit que 13 % du PIB. Malgré de grandes disparités entre les régions, et une forte dépendance aux aléas climatiques, le pays est devenu autosuffisant au niveau alimentaire. De profondes réformes ont été nécessaires pour arriver à cette autosuffisance.

2. La période de 1960 à 1972 était marquée par une collectivisation associée à un fort dirigisme et un embrigadement technique. La crise alimentaire en 1973 due à sécheresse obligea l'importation massive de céréales et le recours à des aides alimentaires. Il s'ensuivit de 1970 à 1981 la mise en œuvre de plans quinquennaux visant à accroître la production agricole et à atteindre l'autosuffisance alimentaire. Les stratégies développées étaient axées sur la mise en place des Opérations de Développement Rural (ODR) dont l'action intégrait les aspects de production et de commercialisation par grande zone géographique en se centrant sur la culture dominante de cette zone. Une trentaine d'ODR couvrait le territoire au début des années 1980. Mais les résultats ne furent pas brillants.

3. Début des années 1980, la persistance de la crise économique conduisait à un plan d'ajustement structurel pour mener une profonde réforme économique. Les orientations principales ont été la libéralisation, la revalorisation des prix, la restructuration des ODR. La restructuration des ODR a aboutit à la fermeture de certaines d'entre elles et à la signature de contrats plans pour l'Office du Niger, la CMDT et l'OPAM. Conçu en 1988, le Projet d'ajustement sectoriel agricole (PASA) était mis en œuvre en 1990. Il visait la réforme de sous secteurs principalement au niveau cotonnier avec un fort volume d'investissement au niveau Mali-sud. Une des mesures ayant eu le plus d'incidence sur la filière cotonnière a été la suppression de la taxe sur l'exportation du coton et l'évolution du mécanisme de stabilisation. C'est ce PASA qui a préparé les restructurations à venir des ODR. Un deuxième PASA vient le compléter en 1992 sur le sous-secteur élevage.

4. Dans la foulée des évènements de mars 1991, les "Etats généraux du Monde rural" se sont tenus. Ils ont conduit au Schéma Directeur du Développement Rural (92), avec un plan d'action (93), et à la réforme du MDR débutée en 95. La rupture de 91 marquait un changement radical de vision sur le rôle de l'Etat et sur la place de la "société civile".

Les principaux axes du SDDR étaient : - La libéralisation de l'économie et privatisation, - Le désengagement de l'Etat des fonctions de production et d'échanges des biens et

des services, la libre administration des collectivités locales, - La modernisation de l'administration. Les principales caractéristiques de cette réforme étaient : - Une rupture avec une vision sectorielle du développement rural; - Un nouveau schéma institutionnel qui prend en compte les collectivités territoriales, le

secteur privé dont les ONG, - Une redéfinition des missions et fonctions, - Une rationalisation de l'utilisation des ressources publiques. Le plan d'action prévoyait 6 axes d'intervention : - Le désengagement de l'Etat avec les transferts de fonctions, - La redéfinition des rôles du MDR et structures associées en les recentrant sur les

missions de service public, - Le développement durable et la GRN, - La promotion du crédit rural, - Le développement des filières avec le renforcement des OP, - L'appui aux groupes vulnérables et fragiles.

1. La réforme du secteur du développement rural a véritablement démarré en 1995 avec la

redéfinition des fonctions du MDR, sa restructuration effective en 96. La mise en place des collectivités décentralisées va conforter cette orientation de réforme, notamment au niveau des

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transferts de compétences. La conduite des transferts de compétences, aujourd'hui en cours, se révèle être une des pierres angulaires pour la réussite de la réforme du secteur. La réforme du secteur rural se résumait dans les trois objectifs suivants (un descriptif plus détaillé est présenté sur la page suivante) :

I - Le dispositif de l'Etat recentré et renforcé contribue avec efficience au développement rural.

II - Les autres acteurs du monde rural, responsabilisés et structurés, disposent des capacités suffisantes pour assurer efficacement les fonctions institutionnelles et économiques de leur ressort.

III - Les relations entre acteurs sont basées sur l’information, la concertation, le partenariat et la prestation de services adaptés.

2. Cette réforme était ambitieuse, mais il faut la resituer dans son contexte. Elle a été conçue en 1992 dans un contexte politique porteur de changements sur le rôle de l'Etat et cette réforme n'a pas été imposée par les bailleurs. Elle était portée par des responsables politiques de premier plan dont son concepteur, feu M. le Ministre Boubacar SY et elle se préparait parallèlement au processus de décentralisation. Nous apprécierons en fin de cette étude l'état d'avancement de cette réforme.

c) Les principaux instruments d'intervention de l'Etat dans le secteur rural

1. L'évolution du mode d'intervention de l'Etat peut être résumée ainsi :

Avant 1985 - L'Etat intervenait dans la production, l'approvisionnement en intrants et la commercialisation avec comme principaux instruments :

- contrôle des flux, - fixation des prix, - subvention des intrants, - taxes à l'exportation, - taxes à l'importation.

La mise en place des ODR permettait d'appliquer par région cette politique de contrôle des fonctions de production, d'approvisionnement et de commercialisation. De 85 à 90 - Cette période par un arrêt progressif de la politique interventionniste de l'Etat avec :

- libéralisation du commerce et liberté des prix sauf pour la filière cotonnière, - arrêt de la subvention des intrants, - suppression des taxes à l'exportation pour le coton (88), - dissolution d'une partie des ODR, - mise en place d'une politique de crédit, - mise en place d'un nouvel instrument : le contrat-plan.

De 91 à 01- Cette période marque la mise en place de programmes par sous-secteur pour accompagner libéralisation avec :

- PASA, - développement des contrats plans avec l'introduction des producteurs, - définition des politiques par sous-secteur, - recentrage de l'Etat sur ces fonctions pérennes, - définition d'une politique de transferts de compétences,

Parallèlement les règles communes à l'UEMOA se mettent en place. Il est prévu (i) une libre circulation des produits d'origine, (ii) des règles communes de concurrence, (iii) un tarif extérieur commun. L'union douanière a été mise en place le 1er janvier 2000, le TEC s'applique depuis cette date.

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Les quatre extraits suivants donnent un aperçu de la situation à la fin des années 90 :

Schéma Directeur (actualisation 01) "Amélioration de la sécurité alimentaire avec augmentation de la production céréalière : la production de paddy est passée de 250 000 t 91/92 à 720 000 t en 98/99 et globalement la production céréalière atteint 2 000 000 t. Cela est du à la rationalisation de la filière riz, à la réorganisation de l'ON et à une nouvelle politique d'aménagement hydro-agricole qui vise à rentabiliser les investissements et à une meilleure implication et responsabilisation des producteurs dans la gestion des périmètres agricoles (zone ON), à travers la signature d'un contrat plan (ON-producteurs) et la privatisation des unités de décorticage." Orientations politiques agricoles UEMOA (IRAM-01) "Tout au long de la dernière décennie, le Mali a été sous ajustements macro-économiques, les taxes à l'exportation sur le coton ont été supprimées en 1988, contraignant le Mali à solliciter un crédit à l'ajustement sectoriel agricole qui a conduit à un PASA en 1990. Le premier volet ne s'attaquait qu'aux productions végétales, ce qui a conduit à la formulation d'un PASA II élevage. Ce programme était un mélange d'ajustement sectoriel et d'investissement concentré dans la région Mali-sud. Les résultats sont considérés comme satisfaisants, puisque les principaux objectifs d'augmentations de la production cotonnière, de libéralisation du secteur céréalier, d'autosuffisance en céréales et de croissance du revenu dans la zone Mali Sud ont été atteints. Un important chantier de reformulation a été alors entrepris dont une étape a été la publication en 1998 d'une note d'orientation politique de développement du secteur rural…" Schéma Directeur (actualisation 01) "depuis 81 le producteur rural malien a été engagé progressivement dans l'ajustement structurel. Celui-ci s'est traduit par la libre circulation des grains, la libéralisation des prix des céréales sèches et du riz, la suppression des subventions aux intrants et à la consommation, la suppression des taxes à l'exportation, l'adoption de principe d'abaissement de la taxe d'importation… Toutes ces mesures impliquent pour les producteurs des coûts d'acquisition des intrants très élevés et les exposent à une compétition déloyale par rapport aux importations. De plus elles contribuent à rendre difficiles le passage vers une prise en charge directe du service d'approvisionnement en intrants et matériel par les OP."

Orientations politiques agricoles UEMOA (IRAM-01) : "Les ajustements structurels et la mondialisation ont fortement déterminé les politiques économiques de la plupart des pays de l'UEMOA. En conséquence les politiques agricoles et de sécurité alimentaire ont du s'adapter à ce nouveau contexte alors que les instruments traditionnels de ces politiques comme les subventions, les restrictions aux importations et la protection du marché intérieur étaient difficilement acceptées dans le cadre de l'ajustement structurel. De plus, face aux contraintes macro-économiques, la politique agricole n'est plus perçue comme une priorité budgétaire. Ceci limite le développement des infrastructures rurales et de nouvelles technologies adaptées aux écosystèmes de la région."

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LES OBJECTIFS DE LA REFORME DU MDR

La réforme du MDR a amélioré les performances du secteur Développement Rural.

I Le dispositif de l'Etat recentré et renforcé contribue avec efficience au

développement rural. o Le MDR assure les fonctions pérennes de l’Etat : – élaboration et suivi des politiques et stratégie – conception, maîtrise d'ouvrage et suivi des projets programmes de l'Etat, – élaboration et contrôle des règles du jeu – prévention et lutte des fléaux et calamités, – appui technique à la tutelle de légalité des CT. o Le MDR restructuré dispose d’une organisation interne efficiente et adaptée à ses

nouvelles fonctions. o Le MDR dispose d’un personnel suffisant, qualifié et motivé. o Les différents organes du dispositif public (ODR, IER, LCV…) ont été rationalisés et

interviennent en cohérence avec les orientations de l'Etat.

II Les autres acteurs du monde rural, responsabilisés et structurés, disposent des capacités suffisantes pour assurer efficacement les fonctions institutionnelles et économiques de leur ressort.

o Les collectivités territoriales décentralisées assurent pleinement les fonctions

dévolues par la loi et sont devenues des moteurs du développement régional et local. o Les communautés de base participent activement à la gestion de leurs terroirs. o Les organismes professionnels (Chambres d'agricultures et OPA) disposent des

capacités suffisantes pour assurer des fonctions économiques et institutionnelles au service de leurs adhérents.

o Le secteur privé, dynamisé et professionnalisé, joue un rôle moteur dans la promotion des filières, notamment l’investissement productif.

o Les capacités des ONG sont développées et contribuent à l’appui des CT, communautés, OP et privés.

III Les relations entre acteurs sont basées sur l’information, la concertation, le partenariat et la prestation de services adaptés.

o Les relations entre le MDR et les autres acteurs sont basées sur un partenariat

équilibré. o Les choix sectoriels sont faits en concertation avec l’ensemble des acteurs. o Des centres de décision et de gestion sont décentralisés et transférés aux autres acteurs. o Le MDR contribue au développement des capacités des autres acteurs en prenant en

compte leurs spécificités.

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1.2. Les principaux acteurs du secteur rural

a) MDR 1. Le Ministère du développement rural était structuré jusqu'en 1996 par sous-secteurs. On

comptait ainsi 6 directions nationales : agriculture, eaux et forêts, élevage, génie rural, action coopérative et protection des végétaux. La volonté de "désectorialiser" les interventions, d'avoir une approche plus globale des besoins des producteurs et de diminuer le nombre d'interlocuteurs pour le producteur a conduit à la dissolution des directions sectorielles et à la création de trois nouvelles directions :

- la direction de l'appui au monde rural (DNAMR), - la direction de l'aménagement et de l'équipement rural (DNAER), - la direction de la réglementation et du contrôle (DGRC).

Par ailleurs le MDR dispose d'une cellule de planification et de statistiques ainsi qu'une direction administrative et financière. Outre le recentrage du MDR sur les fonctions de service public, deux des principes fondamentaux de cette réforme sont (i) la séparation des fonctions d'appuis des fonctions de contrôle, (ii) une approche intégrée de la gestion des ressources naturelles.

1. Le MDR est représenté aux différents niveaux de décentralisation : communes avec des

antennes et des postes de contrôles, local (cercle) avec des services d'appui et des services de contrôle et enfin régional avec des trois directions régionales : l'appui au monde rural, l'aménagement et l'équipement rural, la réglementation et le contrôle. Les effectifs du MDR sont environ 2 200 agents (hors ODR) dont environ 70 % sont déconcentrés. Les effectifs actuels ne couvrent que 40 % des besoins définis dans les cadres organiques. Un gel des effectifs du fait des mesures d'ajustements structurels n'a pas permis le renouvellement des départs, le personnel est vieillissant et aucun sang nouveau n'est venu enrichir le MDR.

2. En 1998 la création du ministère de l'environnement avec une direction de la conservation de la nature reprenant les attributions du MDR en matière de gestion forestière et faunique et cumulant les fonctions de conseil et de contrôle, portait un coup fatal à cette réforme. Les principes fondamentaux de la réforme étaient remis en question.

b) Les structures rattachées au MDR

Les instituts de recherche 1. L'Institut d'Economie Rurale (IER) est chargé de la recherche. Il a été restructuré en 1990 et

son statut a évolué vers un EPA en 93. Il dispose de 6 centres de recherche régionaux. Un laboratoire public (LCV) est en charge de la production de vaccins, et de la recherche au niveau santé animale.

ODR

2. Les Opérations de Développement Rural ont des vocations diverses. Certaines sont en charge

du développement sur une région, d'autres sur un secteur. Leur statut est variable de simples projets rattachés au MDR à celui d'EPIC pour des structures comme l'Office du Niger ou la CMDT. Les missions et les fonctions de ces offices ont évolué parallèlement aux grandes orientations de l'Etat en matière de politique économique.

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c) Chambres d'Agriculture 1. Les chambres d'agricultures sont composées d'un réseau de chambres locales (cercle), de

chambres régionales et d'une organisation "faîtière" : l'assemblée permanente des chambres d'agriculture (APCAM). Les responsables des chambres, aux différents niveaux, sont élus. Les chambres d'agriculture, outre leur rôle de concertation et de représentation des producteurs dans les différentes instances se prononçant sur les orientations du secteur, ont une fonction d'information et de formation, une fonction d'appui aux organisations professionnelles et d'appui au développement des filières. Longtemps marginalisées et peu représentatives, les chambres d'agriculture commencent à se renforcer et à essayer de jouer un rôle actif dans la concertation entre les acteurs du secteur et dans la mise en œuvre de quelques projets, grâce à un appui important des partenaires extérieurs. Disposant de peu de ressources financières et humaines, leurs interventions restent limitées, le maillon le plus faible étant au niveau local.

d) OP

1. Les organisations professionnelles au Mali sont de nature et de taille très variable. En

prenant au sens large le terme d'organisation, il existe sur le terrain :

- Des associations villageoises (AV) dont les fonctions ont souvent dépassé les aspects production / approvisionnement / commercialisation / représentation, pour toucher les fonctions de développement local des villages, palliant en cela l'absence de (i) de collectivités territoriales et (ii) la très faible investissement de l'Etat dans le développement des infrastructures de base. Le niveau de ces associations, surtout concentrées dans les zones CMDT et ON, est très variable. Très anciennes dans ces deux zones, elles sont relativement bien structurées et disposent de responsables généralement mieux formés que dans le reste du pays. La mise en place des communes amène ces AV à se recentrer sur les fonctions de services à leurs adhérents et à délaisser les fonctions de développement locales du ressort des communes.

- Des coopératives et des Tons dont la différence avec les AV est leur reconnaissance juridique et leur contrôle par l'administration,

- Des associations ou groupements ponctuels, souvent liés à des projets, dont la représentativité est très hétérogène,

- Quelques syndicats dont le plus ancien est le SYCOV, syndicat des producteurs de coton et vivriers, fortement implanté et représentatif dans toute la zone Mali-sud. D'autres syndicats sont en train de se développer comme le SEXAGON à l'ON. Ces différents syndicats prennent une part de plus en plus actives dans les concertations avec les pouvoirs publics.

- Des regroupements d'OP voient le jour depuis quelques années, traduisant la volonté de certaines organisations d'échanger entre elles et de regrouper leur force pour mieux se faire entendre. (AOPP au niveau national, CRCR au niveau régional –sud-, …)

Ces différentes OP ont pour points communs une faiblesse en termes ressources financières et ressources humaines, une faiblesse dans leur mode de fonctionnement et de gestion. Ces faiblesses sont un frein à une participation plus active dans les instances de concertations, notamment lors de la négociation des contrats-plans. Néanmoins les OP sont devenues des acteurs incontournables aujourd'hui, leur place est reconnue. Cette évolution était inéluctable avec le développement de leur capacité de mobilisation (cf. zone cotonnière).

e) Opérateurs privés, bureaux d'études (BE) et ONG 1. Le développement des prestataires BE, consultants et des ONG a été, est reste, tributaire

des programmes et des projets extérieurs. C'est généralement à travers la mise en œuvre de ces programmes que des équipes se sont (i) formées, (ii) autonomisées et (iii) ont accès à des marchés. Les principaux domaines d'intervention sont l'appui au développement local avec principalement le montage des dossiers d'investissements, l'appui à la structuration, les études de faisabilités pour des ouvrages hydro-agricoles… Le niveau est très hétérogène. Le

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désengagement de l'Etat ouvre plus de perspectives mais les limites sont liées aux capacités des producteurs et de leurs organisations de payer le service. Cette situation touche particulièrement le domaine d'approvisionnement en intrant. Les prestataires en mesures d'apporter du conseil agricole restent rares, ce conseil ayant été jusque là apporté gratuitement par les services publics. Seuls, les prestataires dans le domaine de la santé animale commencent à émerger.

f) Des organisations de services 1. Deux expériences marquent le paysage, il s'agit des Centres de Gestion Rurale (CGR) dans le

Sud du Mali et des Centres de Prestations de Services (CPS) de Nyono dans une zone de l'ON. Ces centres contrôlés par les AV adhérentes ont pour vocation d'apporter à leurs adhérents des services en matières de gestion, d'organisation ainsi que des conseils juridiques (pour les CPS de Nyono). Ces centres de services utilisent des prestataires indépendants ou des salariés pour assurer les interventions. Un des enjeux est une prise en charge des coûts par les adhérents.

g) Les collectivités territoriales 1. Juin 1999 marquait l'entrée en scène d'un nouvel acteur : les communes (682 nouvelles

communes) dont les fonctions sont ainsi définies (Art. 14 et 17 du code des collectivités territoriales) : "Le conseil communal règle par ses délibérations les affaires de la commune, … notamment celles relatives à… : Plans d’occupation des sols et les opérations d’aménagement de l’espace communal, La politique de création et de gestion des équipements collectifs, Organisation des activités rurales et des productions agro-sylvo-pastorales, de chasse et de pêche, Protection de l’environnement et gestion des ressources naturelles, Gestion domaniale et foncière ". Le domaine d'intervention des communes reste néanmoins encore flou tant que (i) le domaine foncier relevant de la CT ne sera pas précisément établi, et (ii) que le transfert effectif de compétences de l'administration vers les CT n'aura pas été arrêté. Les communes se heurtent, comme les OP et les CA, aux problèmes des ressources humaines et financières.

h) Partenaires au développement 1. Le secteur rural au Mali est fortement dépendant de l'aide publique au développement

apportée par les partenaires extérieurs. Leur rôle est déterminant au niveau (i) du volume financier apporté pour le fonctionnement des projets et des services et pour l'investissement (88 % du budget d'investissement du MDR provient de l'aide extérieure) et (ii) des évolutions du secteur à travers le financement des réformes soit direct (appui institutionnel) soit indirect par les impacts et résultats des projets permettant d'influer sur les choix. Les principaux bailleurs de fonds sont la Banque Mondiale, la France, l'Union européenne, l'Allemagne, la Suisse et les Pays-bas.

1.3. Les interventions des principaux bailleurs dans le secteur Nous présenterons ici succinctement les interventions de l'aide française puis celles des principaux autres partenaires du Mali.

a) Aide française L'aide française est intervenue dans le secteur rural à travers des programmes menés par le Ministère des affaires étrangères (MAE – SCAC) et par l'Agence Française de Développement (AFD). 1. Concernant les interventions du MAE. Très tôt l'aide française a choisi d'accompagner le

processus de réforme en combinant des appuis transversaux (appuis aux OP, foncier, réforme du

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 9

MRD, crédit, développement local et décentralisation) et des appuis spécifiques à des filières clés (coton, riz, élevage). Les principaux programmes mis en œuvre par le MAE-SCAC sont les suivants : l'appui au PRMC (programme céréalier), l'appui à la restructuration de l'Office du Niger, l'appui au secteur privé de l'élevage, l'appui à la décentralisation et à sa mise en œuvre en milieu rural, l'appui au développement institutionnel du secteur rural.

2. L'appui au programme céréalier (PRMC - 1994-1999) est une continuation des contributions antérieures de la France à ce vaste programme multi-bailleurs de restructuration du marché céréalier, restructuration entamée depuis 1981. Les appuis ont comporté une contribution au fonds du PRMC, de l'AT et des opérations pilotes sur des aspects techniques (qualité, commercialisation, appui aux opérateurs privés…).

3. Le programme "Restructuration de l’Office du Niger", initié par le MAE en 94, prenait la relève d'un appui ciblé sur l'entretien des réseaux. Dans un contexte de dévaluation et de restructuration de l'Office du Niger, il avait pour objet d'appuyer la mise en route du "nouvel office", favoriser l'émerge d'une nouvelle coopération entre les producteurs et l'office et contribuer à la redéfinition des règles du jeu entre l'Etat, l'ON et les producteurs (contrat plan, décret de gérance). Ce programme a deux composantes : (i) appui à la mise en route de l'ON avec de l'AT à l'ON et de la formation pour les OP et (ii) études. Ce programme a été prolongé jusqu'à ce jour avec principalement le maintien d'une AT en accompagnement de la restructuration, spécifiquement sur le système d'information.

4. Le projet d'Appui au secteur privé de l'élevage du Mali (1995 – 2001) vise, à travers un appui aux prestataires de services aux éleveurs, à accompagner le transfert de fonctions de l'Etat vers le secteur privé. Débuté par une opération test sur l'aviculture en zone Mali-Sud, il s'est étendu à trois régions. Mettant l'éleveur au centre du dispositif ainsi que la réponse à leurs besoins, principalement l'accès aux soins et la formation, ce projet appuie (i) la concertation professionnelle, (ii) l'installation des opérateurs privés et (iii) les services de l'Etat dans leur mission de contrôle.

5. Le "Projet d’appui à la décentralisation et à sa mise en œuvre en milieu rural au Mali" (1996-2001) ciblait "l'appui à la mise en place, à l'organisation et à la structuration d'institutions décentralisées". Un accompagnement en AT était apporté à la MDRI, mission chargée de la mise en place de la décentralisation, ainsi qu'au MDR au niveau de la CAMOPA, cellule chargée de réforme du MDR, et au niveau de la CPS chargée de la planification et des statistiques du MDR. Deux autres composantes plus "opérationnelles" apportaient un appui à la gestion des communes rurales (projet PAGCR) et un appui au transfert de la gestion de l'eau au niveau villageois.

6. Le Programme de développement institutionnel du secteur rural au Mali (1999-2002), "resserre" l'appui institutionnel sur la restructuration des institutions du secteur rural avec quatre domaines d'intervention. La composante d'appui au MDR se poursuit avec l'appui à la CAMOPA, le développement des capacités en matière de définition des politiques et d'analyses prospectives (CPS) et de construction de capacités en matière de réglementation et de contrôle (AT, subvention, études et formation). La composante "gestion des risques majeurs" constitue une continuité dans l'appui au PRMC (subvention et études). La composante "foncier" vise le développement de capacité dans ce domaine (AT et études). La composante d'appui aux OPA vise à augmenter la capacité d'analyse et d'actions des OPA (AT, subventions aux OPA –études et formation-).

7. Concernant les interventions de l'AFD. L'AFD a contribué au soutien de la filière coton (CMDT), au soutien de la filière riz (ON) et à la filière bois-énergie. Parallèlement elle a contribué au développement du système de financement du crédit rural. L'AFD a mené plusieurs programmes de développement local – gestion de terroirs qui ont été réorientés sur l'appui à la décentralisation.

8. Les interventions de l'AFD dans la filière riz visent le développement des infrastructures de l'ON et l'appui aux OP dans la cadre du désengagement de l'Etat et de la restructuration de l'ON. L'AFD intervient depuis une vingtaine d'années sur l'ON à travers le financement d'importants programmes d'investissement, principalement des réhabilitations de périmètres, tout en accompagnant le transfert de fonctions aux OP et leur renforcement. Les principaux projets financés par l'AFD étaient Retail 1, Retail 2 et Retail 3. Le dernier financement en 1998 concerne la réhabilitation du canal de Molodo, des mesures d'accompagnement ainsi que le financement du

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schéma directeur de l'ON et la mise en place d'un fonds d'appui et de suivi du contrat plan. L'appui aux OP se fait à travers le développement des Centres de prestations de services (CPS, opération débutée en 95) apportant conseil en gestion et en organisation ainsi que le conseil juridique. Conjointement à l'appui aux OP, le conseil rural est pris en compte avec le financement d'une unité de recherche développement (URD-OC) destinée à fournir informations et conseils techniques aux producteurs.

9. Les concours de l'AFD à la filière coton sont de trois ordres. Ils concernent d'une part la réalisation d'usines d'égrenage, d'autre part l'appui à la restructuration / équilibre de la filière et, enfin, l'appui aux producteurs et à leurs organisations. Les programmes de soutien financier à la filière ont été déterminant lors des crises financières qu'a connu la CMDT (92-93 et 01-02), crise ayant une incidence sociale et économique sur l'ensemble du pays. Deux programmes particuliers touchent les producteurs et leurs organisations le PGR et le PASE (en cours de mise en place). Le Projet Gestion Rurale, 92-98 (MAE) repris par l'AFD depuis 98, répond au besoin de consolidation des AV sur les aspects gestion, comptabilité et organisation. Le programme PASE abordera le conseil aux exploitants pour améliorer la performance des exploitations. Ce conseil s'appuiera sur des prestataires privés et sur les résultats d'un volet recherche développement destiné à introduire des innovations techniques dans les itinéraires traditionnels.

10. Concernant l'appui au financement du monde agricole, l'AFD finance d'une part la BNDA, Banque Nationale pour le Développement Agricole, et d'autre par les systèmes financiers décentralisés (SFD). Les concours à la BNDA concernent principalement des lignes de crédit à moyen terme. Les concours aux SFD concernent d'une part des subventions pour accompagner leur croissance et d'autre part des lignes de crédit. A noter que les lignes de crédit pour les SFD sont logées à la BNDA.

11. L'AFD intervenait dans l'appui au développement local à travers des projets mettant en œuvre une démarche gestion de terroir / développement local, adossée à des fonds d'investissement locaux. Les zones d'interventions concernaient la région Mali-Sud (projet FIL du MAE, repris par l'AFD, le projet PGT-DL de Koutiala-San, CAT-GRN à Sikasso), et les régions du Nord (PADL Gao et PADL Tombouctou et PACL Douentza). Ces programmes ont évolué pour prendre en compte la mise en place des collectivités territoriales. Ils contribuent maintenant au dispositif national d'appui aux collectivités territoriales. Dans le Sud, l'AFD les anciens programmes ont été regroupés au sein du PADC qui prend en charge les Centres de Conseils Communaux et finance la dotation d'investissement aux communes via l'ANICT, agence nationale des investissements des Collectivités Territoriales.

12. La gestion des ressources forestière est prise en compte par l'AFD à travers deux programmes : le projet de mise en valeur durable des 3 forêts classées de la région de Bamako (80-00) et le projet de gestion durable des forêts en 3ème région du Mali (97-03). Ces programmes s'inscrivent dans la stratégie d'énergie domestique. Ils visent particulièrement à organiser les marchés ruraux de bois et une gestion concertée des forêts impliquant les populations riveraines. A noter que le MAE finance un AT auprès du ministre chargé de l'environnement, dont les forêts classées.

13. Ce bref survol des programmes du MAE et de l'AFD montrent que les deux institutions de l'aide françaises ont été et restent parties prenantes des principales réformes, elles influent sur les grandes filières. Nous tirerons en fin de ce rapport les principales leçons de ces interventions.

b) Autres intervenants De nombreux bailleurs de fonds interviennent dans le secteur du développement rural. Les domaines d'intervention et les approches sont variés. Nous ne citerons que les principaux. 1. La Banque mondiale intervient sur les aspects vulgarisation et recherche (PNVA et PNRA), sur

la gestion des ressources naturelles (PNGTER), sur les infrastructures rurales (PNIR) ainsi que sur l'appui à la réforme du MDR et aux services agricoles (PASAOP). Le programme PNVA, achevé depuis 98, a porté durant 6 ans sur la vulgarisation agricole. Il a permis de financer un dispositif de conseil rapproché aux producteurs dont les résultats sont controversés. Le PNRA a accompagné la réforme du dispositif de recherche agronomique, principalement la réforme de

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l'IER. Le PNGTER a essentiellement financé des micro-réalisations au niveau des villages suivant une approche de "développement local".

2. Ces programmes sont aujourd'hui relayés par deux nouveaux programmes qui prennent acte des réformes en cours et de l'émergence des nouveaux acteurs. Le PNIR financera les infrastructures rurales alors que le PASAOP financera en grande partie la poursuite de la réforme du secteur. Ce programme se veut fédérateur des différentes interventions d'appui aux services agricoles et prévoit une intervention sur onze ans. Ces quatre composantes touchent (i) le renforcement des Chambres d’Agriculture et des OPA (ii) le renforcement du système national de recherche agricole, (iii) le renforcement du système national de vulgarisation agricole, (iv) la rationalisation des capacités du MDR et le transfert de fonctions aux acteurs privés, OP, CTD. Ce programme, s'il est bien mené, sera décisif pour la conduite de la réforme du secteur rural.

3. L'Union Européenne, après avoir apporté des appuis conséquents au MDR dans le secteur de l'élevage (projet PARC), a arrêter ses appuis au MDR. Néanmoins l'UE continue d'intervenir sur les aspects sécurité alimentaire dans le cadre du PRMC, sur les aspects gestion des ressources naturelles ainsi que sur le financement des micro-réalisations en milieu rural à travers le programme PMR-FED. L'UE soutien le processus de décentralisation, elle est le principal bailleur des dispositifs d'appui technique et financier aux collectivités territoriales qui se mettent en place.

4. La coopération suisse intervient à travers plusieurs programmes principalement des programmes liés à la gestion des ressources naturelles (GDRN) et au développement local ainsi qu'à la décentralisation (ex. PAD). Les démarches se révèlent proches des interventions de l'aide française favorisant une maîtrise d'ouvrage locale et un appui au développement des capacités des acteurs locaux.

5. Pour mémoire nous noterons que l'Allemagne à travers la GTZ intervient sur les aspects gestion des ressources naturelles et élevage principalement dans le Nord, le FIDA finance des programmes liés au développement local (ex. FODESA), le PNUD et la FAO apportent des appuis institutionnels plus limités au MDR et à l'APCAM.

2. ANALYSES PARTICULIERES SUR DES SOUS-SECTEURS OU DES FILIERES SIGNIFICATIVES

Trois groupes de filières ont été plus particulièrement analysés du fait de leur importance dans le secteur : les filières céréalières, les filières élevage et la filière coton. L'objet n'est pas de faire une analyse exhaustive, mais de dégager les principaux enseignements sur les évolutions institutionnelles dans ces filières.

2.1. Filières céréalières L'analyse des filières céréalières au Mali recoupe en grande partie la problématique de la sécurité alimentaire et des instruments dont l'Etat s'est doté pour y faire face. L'Etat est ses partenaires sont intervenus sur trois axes complémentaires :

- la mise en place d'un politique de sécurité alimentaire à travers le PRMC, - le développement des aménagements hydro-agricoles tournés vers la production de riz, - la vulgarisation (ce dernier point sera abordé plus tard dans l'analyse fonctionnelle).

a) Politique de sécurité alimentaire2 2 Cette partie a été réalisée en s'appuyant sur la thèse d'Hubert de Milly, en cours de publication

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IDEES – FORCES Le secteur céréalier a évolué d’une gestion étatique à un système libéralisé, avec comme

résultats de passer de la dépendance alimentaire à une situation excédentaire. Le PRMC a joué un rôle déterminant dans cette restructuration, notamment la mutation du rôle

de l’Etat, même si le MDR s’y est très faiblement impliqué. Le premier facteur de réussite a été une démarche consensuelle, via des mécanismes de

négociation et coordination entre bailleurs et Etat, ainsi qu’entre bailleurs eux-mêmes.

1. Historique. L'Etat intervenait dans les filières céréalières avec un monopole de la commercialisation et des importations. Les prix d'achat et de vente des céréales étaient fixés par l'Etat. Un office, l'OPAM (Office des Produits Agricoles du Mali), était en charge de la mise en œuvre de cette politique. Le résultat a été catastrophique, la production de céréales chutait et le Mali était de plus en plus dépendant de ses importations de céréales et des aides alimentaires. Il achetait d'ailleurs les céréales à un cours supérieur au prix de vente sur le marché intérieur, induisant de fait une subvention au consommateur. Le coût de cette subvention, à laquelle s'est ajoutée une hausse des prix d'achat au producteur pour tenter de relancer la production, aboutit un déficit ingérable par l'Etat et supporté en partie par les bailleurs de fonds. Ces derniers continuaient leurs aides alimentaires massives qui avaient des effets indirects négatifs sur la production nationale. Par ailleurs, les fonds de contrepartie générés par cette aide alimentaire n'étaient pas gérés de manière satisfaisante. Conscients que cette politique menait à une impasse, les bailleurs de fonds négocièrent en 1981 avec le gouvernement un plan de restructuration du marché céréalier, le PRMC.

2. Mode d'intervention. L'objectif de cette restructuration était une libéralisation du secteur céréalier. Les bailleurs accompagnaient l'Etat dans cette libéralisation dont les principales mesures étaient :

- La libéralisation progressive du commerce et des prix avec notamment la suppression du monopole étatique de commercialisation,

- La restructuration des offices publics intervenant dans la commercialisation, - La limitation du rôle de l’Office Céréalier (OPAM) aux fonctions de sécurité alimentaire :

gestion du stock de national de sécurité (SNS), gestion des aides alimentaires, - L'appui aux opérateurs privés et promotion des groupements villageois dans le domaine du

crédit à la commercialisation et au stockage des céréales, - La mise en place de systèmes d’information sur les marchés céréaliers (SIM) et de prévention

des risques de crise alimentaire (système alerte précoce, SAP), - La limitation au minimum indispensable du volume des aides alimentaires extérieures.

1. Pour mener à bien ce programme, les fonds de contrepartie furent fusionnés en un seul fonds cogéré par le gouvernement et un représentant des bailleurs. Le dispositif était composé (i) au niveau bailleurs d'un comité technique (hebdomadaire) et d'un comité de gestion chargé de définir les positions consensuelles des bailleurs face au gouvernement et (ii) au niveau gouvernement et bailleurs d'un comité d'orientation et de coordination auquel revenait la prise de décision. Ce dispositif innovait de par le mode de travail consensuel entre les bailleurs qui, dans les faits, "payaient" les frais de restructuration d'un secteur. Les différentes phases du PRMC adaptèrent son intervention aux différentes étapes de cette libéralisation. Après la restructuration de l'OPAM, puis dans un second temps de l'Office du Niger et de l'Office Riz de Ségou, et parallèlement à la reconstitution du stock national de sécurité, le PRMC a porté son soutien à l'appui aux filières et au fonctionnement du marché. Il a ensuite réduit son rôle aux aspects liés à la prévention des crises alimentaire (principalement : Système d'alerte précoce, Stock National de Sécurité, cellule de veille). Vingt ans après sa mise en place, le PRMC fonctionne toujours avec pour fonction d'assurer "un filet de sécurité alimentaire". L'Etat considère que cette fonction est dans ses prérogatives et il s'est engagé à financer totalement son coût dans les années à venir.

2. Les résultats du PRMC sont indéniables. La libéralisation a eu lieu, les déficits ont été résorbés, les coûts de transaction sont faibles, l'information fiable est disponible… L'Etat a une politique alimentaire, il s'est recentré sur sa fonction essentielle de gestion des risques avec un

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dispositif de sécurité qui fonctionne. Les bailleurs de fonds ont pu agir de manière concertée tout le long du programme et maintenir une position commune. Cette libéralisation et les mesures prise au niveau des marchés n'est pas étrangère à l'amélioration de la production. En 1985 le Mali devient excédentaire en céréales sèches. Si des critiques ont été portées sur le PRMC, elles ne remettent pas en cause son résultat globalement très positif. Les critiques portent surtout sur le coût du programme, principalement du à la restructuration de l'OPAM. Certaines activités n'ont pas abouti aux résultats escomptés, ainsi la fonction de stabilisation des prix à été abandonnée et les actions d'appui au marché se sont révélées peu concluantes.

3. Leçons. De Milly synthétise ainsi les conclusions de l'expérience PRMC : "A partir des années 1990, dans un contexte céréalier revenu à l'équilibre, le PRMC a assuré la mise en place du principal rôle de l'Etat dans un pays sahélien toujours exposé aux aléas écologiques : la prévention et l'atténuation des crises alimentaires. Outre le ciblage, les aspects positifs sont à retenir :

- la spécificité du programme, une réponse fut élaborée localement à un problème local ; - la progressivité : le PRMC fut un processus évolutif, les objectifs ne sont pas restés figés ; - le travail sur le long terme (…) ; - la réalité de l'incitation au changement et son caractère extérieur : ce sont les bailleurs qui ont

provoqué le changement et qui garantissent l'absence de retour en arrière (…) ; - la négociation (…) entre bailleurs et entre bailleurs et gouvernement. (….) (par contre) PRMC n'a conduit à l'émergence : - ni d'acteurs réellement nouveaux ; - ni de réelle compréhension des enjeux chez beaucoup d'acteurs, l'apprentissage de la forme

libérale d'organisation des échanges restant donc imparfait ; - ni d'espace de négociation permettant par la suite d'aborder les questions qui se posent au

marché céréalier libéralisé : définition des normes de qualité, orientation des investissements dans le secteur, orientation de la recherche, formes de la vulgarisation, législation foncière, politique de crédit, rôle des OP (…)

(…) cette réussite aurait été plus complète si cette fonction était également assurée par un comité de filière, réunissant l'ensemble des acteurs3".

1. La défaillance du MDRE ne lui a pas permis de s'inscrire activement dans ce processus et d'être le relais au niveau des filières d'une continuation de l'action, de travailler sur les questions transversales du foncier, du crédit et de l'appui aux OP… Il ne revenait pas au PRMC d'assurer une continuité des interventions sur tous les segments des filières, mais bien au MDRE de prendre la relève.

2. La conduite du PRMC peut servir de référence dans le mode d'accompagnement de l'évolution du rôle de l'Etat. La fonction de coordination et de négociation entre les acteurs qu'ont joué les instances du PRMC a été essentielle à la réussite. Le caractère non formel et très souple du PRMC est aussi à retenir. Il est bien confirmé que ce qui prime c'est l'accord entre les parties, la même compréhension des objectifs et de la démarche ainsi que la volonté de conduire jusqu'au bout l'opération. A la différence des montages lourds des programmes du type Banque Mondiale, les arrangements institutionnels n'ont pas été des préalables. Si ce mode de mise en œuvre est à retenir, il ne faut pas oublier deux facteurs essentiels dans cette réussite : (i) l'Etat et les bailleurs avaient le dos au mur et les enjeux imposaient cette entente, (ii) il y avait localement (nationaux et bailleurs) les bonnes personnes aux bonnes places pour être source de propositions et piloter le processus. Est-on en mesure de "reproduire" la démarche PRMC dans d'autres contextes ?

b) Filière riz et l'Office du Niger (ON) IDEES – FORCES

3 Hubert de Milly – Thèse

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 14

La filière riz a été progressivement libéralisée, accompagné d’un recentrage de l'ON sur la gestion de l'eau et la maintenance des aménagements, avec comme outils-clés le contrat-plan Etat-ON, le contrat de gérance de l'ON, le développement d’une gestion paritaire et le transfert de plusieurs fonctions. Malgré des résultats positifs, les nouvelles règles du jeu tardent à se traduire sur le terrain. Le contrat-plan s’avère un outil intéressant mais non suffisant dans un contexte où les réticences

de l’ON freinent une réelle restructuration et surtout un changement d'approche dans ses rapports avec les producteurs. Les usagers des périmètres n’ont pas encore pris la place qui leur revient et les appuis des

partenaires sont nécessaires pour qu’ils “ entrent dans le jeu ” et faire évoluer les modes opératoires sur la zone.

Historique, place de l'ON et évolutions du rôle de l'Etat et des OP

1. Le développement de la filière riz est étroitement lié à l'Office du Niger en charge de l'aménagement et la gestion des périmètres irrigués sur le fleuve Niger (région de Ségou). Trois grandes périodes marquent les évolutions de cette filière qui recoupent logiquement les grandes évolutions de la politique de sécurité alimentaire développé précédemment.

De 1960 à 1980 : l’Etat est présent à tous les niveaux : - aménagement et entretien des réseaux d’irrigation, - gestion du domaine aménagé (attribution des parcelles et éviction), - approvisionnement des producteurs en intrants subventionnés, - fixation des prix, achat aux producteurs et transformations - monopole de la commercialisation par l’Etat. De 1980 à 1992 : mise en place d'une nouvelle politique. La politique de libéralisation, qui touchait tous les secteurs économiques, s'est traduite sur la filière riz par les mesures suivantes : - libéralisation de la vente de paddy en 1986, - suppression du barème des prix, - la restructuration de l'Office du Niger, - la privatisation des unités de transformations (rizeries) - transferts de certaines fonctions aux producteurs (battage, collecte

primaire). Cette évolution était appuyée par le PRMC (phase 2). Durant cette période les Associations Villageoises se sont développées avec une autonomie dans leur approvisionnement en intrants et en équipements agricoles. Parallèlement, au niveau aménagement, l'Etat et ses partenaires s'engageaient dans un programme de réhabilitation des aménagements de l’ON et la promotion de la riziculture avec maîtrise totale de l’eau. Un travail sur l'intensification de la production permis une amélioration des rendements. Un premier contrat plan Etat-ON a été signé pour 4 ans en 1986 prévoyant l'assainissement financier de l'ON et sa restructuration.

1. De 1993 à nos jours : le désengagement de l'Etat et la redéfinition des missions de l'ON. En

dehors des réalisations techniques, les résultats limités de la période passée et la dégradation de la situation financière de l'ON amenèrent le gouvernement à prendre de nouvelles orientations avec la lettre de politique rizicole et la signature d'un nouveau contrat plan avec le "nouvel" office. "Le désengagement de l’Etat est poursuivi avec la loi 94-004 qui redéfinit les missions, le statut et les relations de l’ON avec les autres acteurs. L’ON devient un EPIC, ses missions sont recentrées sur :

- la gestion des eaux et la maintenance des aménagements, - la mise en œuvre du décret de gérance (cadastrage, conditions d’exploitation des terres,

attribution et éviction, délivrance des permis d’exploitation et des baux), - la maîtrise d’ouvrage déléguée pour les études et le contrôle des travaux et l’entretien de

certaines infrastructures primaires, - l’animation et la vulgarisation agricole. Des mécanismes de gestion paritaire se mettent en place. Depuis 1996, il s’est traduit par de nouveaux contrats-plans permettant de définir les engagements respectifs Etat/ON/producteurs. Le décret de gérance (1996) permet également de formaliser les engagements et sécuriser les

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paysans, notamment sur le foncier, à travers différentes formes juridiques de contrats, permis et baux. Des comités paritaires de gestion des terres et des comités paritaires de gestion des fonds d’entretien du réseau hydraulique ont été mis en place.

1. La Stratégie Nationale de Développement de l’Irrigation (SNDI) a été élaborée en 1999 et

confirme ces évolutions avec comme objectifs :

- redéfinition du rôle de l’Etat qui à terme ne jouerait plus qu’un rôle de coordination des intervenants et de suivi-évaluation des normes,

- responsabilisation et participation des bénéficiaires (avec un transfert des charges ou travaux d’aménagement),

- mise en place d’une gestion entièrement privée pour le développement de l’irrigation (chargée d’aménager puis recouvrer les coûts, via notamment un système de location-vente, cf. AGETIER/PNIR),

- évolution des mécanismes de financement avec le développement de l’investissement privé et le retrait progressif de l’Etat (qui n’assurerait à terme que le développement et l’entretien des infrastructures primaires) parallèlement à un transfert progressif des charges aux usagers.4 "

Situation actuelle et leçons

1. Synthèse de l'évolution. Nous avons une évolution "classique" de la filière avec conjointement à

la libéralisation du marché, la restructuration de l'Office et le recentrage du rôle de l'Etat. Cette libéralisation a été conduite d'une part à grâce aux nouvelles orientations définies dans le cadre du PRMC et, d'autre part, au niveau opérationnel par une mission de restructuration de l'ON dont le travail s'est achevé avec le décret sur le nouvel ON en 94. Dans la même période des financements importants ont été dégagés pour la réhabilitation des périmètres existants, très peu de nouvelles surfaces ont été aménagées. Le rôle de l'Etat s'est donc précisé, tourné vers (i) la production de biens publics (infrastructures/vulgarisation/législation sur les normes, etc.), et (ii) la réglementation de l’activité économique. L'outil privilégié pour mettre en œuvre cette politique avec les principaux acteurs est le mécanisme des contrats plans (Etat-ON-producteurs).

2. Un constat : des avancées mais un ON qui freine les évolutions. Les résultats sont considérés comme positifs dans les périmètres réhabilités avec une augmentation des rendements, le développement de la double culture et une amélioration des techniques culturales. Malgré ces avancées, des questions importantes ne sont pas résolues et bloquent les évolutions en cours. Elles peuvent se résumer sur les points suivants :

- l'ON est restructuré mais force est de constater que l'approche n'a pas changé au sein de l'ON. Pour preuves, l'étude sur le schéma directeur de l'ON débutée en 99 n'a toujours pas abouti, l'ON freine toute évolution, notamment les transferts aux OP, et ne favorise pas la mise en place d'organisation d'usagers. Le gel des effectifs depuis plusieurs années induit au sein de l'ON une hégémonie de "l'ancienne école" hostile aux réformes.

- les questions foncières, déterminantes et complexe, ne sont pas résolues. Cette situation joue contre la sécurisation des producteurs et elle est déterminante si on s'oriente vers des extensions.

- l'accès au crédit est toujours difficile. Comment pousser au développement de périmètres privés quand les producteurs ne peuvent pas avoir accès au crédit pour s'équiper ?

- il n'existe pas de données fiables sur les surfaces et les rendements. Le choix des types d'aménagement, du système de gestion dépend en grande partie d'une analyse économique. Aujourd'hui celle-ci n'est pas possible par absence de données fiables, les rendements annoncés s'avèrent surestimés.

- la représentation des producteurs est insuffisante et ne s'adosse pas à des comités d'usagers. Les comités paritaires mis en place entre 94 et 96 (pour la gestion du foncier et la gestion de la redevance) souffrent de ce manque de représentativité des producteurs. D'un côté nous avons des AV non fonctionnelles et de l'autre un syndicat émergeant, le SEXAGON, qui

4 Travaux sur le bilan de la réforme du MDR (I&D – 2001)

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 16

souhaite contrôler l'ensemble des fonctions. Il manque l'organisation de base : le comité de base des usagers d'un périmètre. Comment dans ces conditions les producteurs peuvent influer sur les contrat-plans, comment avoir une négociation équilibrée entre les acteurs ?

1. La préparation du 3ème contrat plan devrait permettre de redéfinir de nouvelles bases mais

cela suppose au préalable (i) de finaliser le schéma directeur de développement de l'ON, et (ii) de préparer les producteurs à ces négociations. Par ailleurs, un "préalable" est la maîtrise les données économiques pour être en mesure de connaître le niveau de rentabilité des différents types d'aménagements et de faire des analyses prospectives. Peut-on négocier sur des bases erronées ? Aujourd'hui dans le cas de l'ON, la problématique actuelle tourne sur le choix des infrastructures, le système d'exploitation et de financement. Les spécialistes s'accordent sur la faiblesse des données et le peu de fiabilité. Il s'avère que la réhabilitation est une option très coûteuse pour un différentiel de production qui ne serait que d'une tonne. La meilleure option semble être la création de nouveaux périmètres mais cela suppose la résolution des questions foncières (disposer de titres de propriétés), et l'accès au crédit.

2. Leçons. Le rôle de l'Etat est de s'assurer que ce processus de réforme est correctement conduit.

Il doit assurer de manière effective sa tutelle sur l'ON et l'obliger à mettre en œuvre les orientations définies. Jusque là, si l'Etat a fait évoluer les orientations politiques, il n'a pas été capable d'en garantir l'application dans tous les aspects par les différents acteurs, notamment les Offices. Deux constats majeurs, d'une part, les restructurations s'arrêtent à de simple réorganisation (payée au prix fort), d'autre part, on ne se donne pas suffisamment les moyens de préparer et d'appuyer les OP à entrer dans le "jeu".

3. La question est comment faire évoluer une institution (de type office) une fois que les nouvelles règles du jeu sont définies ? De l'intérieur c'est très difficile. De l'extérieur, oui mais avec quelles actions simultanées ? De l'expérience ON, on peut retenir :

- l'outil contrat-plan s'avère intéressant comme base pour mettre sur un "pied d'égalité" les acteurs dans un processus de négociation et de responsabilisation. Il permet à l'Etat de "reprendre la main" face à des institutions publiques qui deviennent trop autonomes et oblige ces dernières à accepter de discuter avec la "partie" producteurs. Le problème c'est qu'il n'y a pas d'égalité au départ. Les OP ne disposent pas des moyens de maîtriser les dossiers et de faire des contre-propositions.

- la convergence de vue et les complémentarités d'interventions des BDF est aussi décisive. Les différents projets tels PCPS, URDOC, travail sur le système d'information, ou des activités plus ponctuelles comme le financement du syndicat de producteurs (SEXAGON), l'étude schéma directeur…, préparent le terrain des futures évolutions. D'une part ils démontrent sur le terrain ce qui est possible et installent les outils adéquats, et, d'autre part, ils préparent les représentants des producteurs à mieux s'insérer dans le processus de négociation.

- la redéfinition des missions et des fonctions doit prendre en compte aussi les modes opératoires. Pour l'Office du Niger on constate que les pratiques n'ont pas évoluées car on n'a pas redéfinit le "comment faire". Disposer d'AT à l'intérieur de l'ON est un moyen pour contribuer à l'élaboration des contrats plans et schémas directeur, faire prendre en compte les résultats des projets "périphériques", et travailler sur des thématiques clés (foncier, mode de transfert et coûts). Ce choix implique un travail d'équipe entre cet AT et les autres projets "périphériques" ainsi qu'avec les cadres de l'ON ouverts au changement, et exige un profil de l'AT qui combine expérience technique (légitimité) et capacité de conduite du changement (savoir-faire).

2.2. Filières d'élevage5

5 Cette partie s'appuie également sur les travaux de H. de Milly et P. Chedanne.

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 17

IDEES – FORCES La santé animale est un facteur limitant au développement des filières de l'élevage. Deux programmes ont focalisé leurs appuis au secteur élevage dans le domaine clé de la

privatisation des services vétérinaires. Le PARC a eu des résultats limités parce qu’on demandait au secteur public, qui le pilotait, d’être

le moteur de ses propres pertes de prérogatives (et de revenus). A l’inverse le PASPE a mieux réussi en misant sur une maîtrise d’ouvrage déléguée aux

bénéficiaires, la négociation inter-acteurs et la création de nouvelles relations clients / prestataires de services. Il montre aussi que la fonction d’animation (médiation, négociation) d’un tel processus de

transfert est critique pour sa réussite. L’Etat, parce que ses services sont "partie prenante" comme les autres acteurs, peut utilement la déléguer.

1. Historique. Le secteur élevage représente 11 % du PIB et 25 % des recettes d'exportation. Dans

le secteur agricole les productions animales représentent 26 % du produit brut agricole. Deux grands systèmes de production existent suivant la région : un système pastoral transhumant (zone nord) ou un système agropastoral semi-transhumants ou sédentaires (zone sud). A noter que le bétail reste la forme la plus répandue de thésaurisation dans le milieu rural. Les spécialistes considèrent que le secteur a de grandes marges de croissance tant au niveau intérieur, où la consommation est faible, qu'à l'exportation vers les pays côtiers. Le développement du secteur n'est donc pas lié à la demande mais à l'offre.

2. Au Mali plusieurs facteurs ont joué sur la production : les sécheresses et le niveau des exportations notamment vers la Côte d'Ivoire. La demande en Côte d'Ivoire a été fortement dépendante de la concurrence en viande de provenance européenne subventionnée. La dévaluation du fcfa en 94 a permis de rétablir des flux en faveur des productions animales africaines, la production du bétail au Mali en a bénéficié. Parmi les différents paramètres liés à la production, la santé est considérée comme le facteur limitant dominant sur lequel il est possible d'agir relativement facilement. Les analyses menées ont montré que cette question était liée à un fort déficit dans la qualité des services vétérinaires et dans les règles du jeu inadaptées, ne permettant pas le développement d'un secteur privé vétérinaire viable.

3. Les principales évolutions sont marquées par :

- L'évolution du rôle de l'Etat en 1986 avec l'ouverture au secteur privé de l'importation et de la distribution des médicaments, ainsi que les soins. Mais les deux activités n'étaient pas compatibles dans la nouvelle réglementation.

- La mise en place en 1991 du PASA II élevage, axé sur l'hydraulique pastorale et les aménagements, l'organisation des populations, l'intensification et la diversification des productions animales ainsi que la relance de la commercialisation.

- Le schéma directeur du développement rural (1992) qui insistait, outre sur les questions de GRN et d'organisation des producteurs, sur le développement des filières, le renforcement de la couverture sanitaire et l'évolution du cadre institutionnel.

- En 1997, ouverture au secteur privé du "mandat sanitaire" traduisant une délégation par l'Etat au vétérinaire privé de la fonction de vaccination certifiée.

- L'adoption des textes sur la pharmacie vétérinaire permettant de distinguer et de séparer les activités de grossistes et de détaillants ne furent pris qu'en 2001.

4. Les différents programmes mis en œuvre reprenaient toujours les mêmes leitmotivs, sur le développement des filières, les aménagements pastoraux… Mais, malgré les évolutions législatives et réglementaires, les résultats sont décevants sur le terrain en terme de couverture sanitaire. On constate un écart entre le discours affiché, les textes et les pratiques. Le désengagement de l'Etat restait fictif. Sur le terrain la majorité des actes et des vaccinations restait assurée par le secteur public.

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 18

5. La privatisation : les approches différentes de 2 projets pour un même objectif. C'est à partir de 1994 que deux programmes ont décidé de focaliser leurs interventions sur l'appui à la privatisation de la santé animale. De Milly compare les deux démarches de ces projets, qui partant d'une analyse similaire de la problématique et des contraintes à résoudre, ont abouti à des résultats opposés. Il s'agit des programmes :

- PARC 3 (Pan African Rinderpest Control) financé par l'UE, - PASPE financé par la coopération française.

1. Le projet PARC 3 est la suite du projet PARC initié en 1988 pour éradiquer la peste bovine. "Le PARC à l'échelle de l'Afrique, s'est prioritairement axé sur la peste bovine et secondairement sur les autres maladies épizootiques. Il s'est pour cela appuyé sur les services publics de vaccination animale et d'épidémio-surveillance. Mais, par ailleurs, la constatation quasi généralisée de la dégradation régulière des services apportés aux éleveurs, de la faible efficacité des services publics et des faibles affectation budgétaires correspondantes, le tout dans un contexte d'ajustement structurel et de libéralisation économique, a conduit à intégrer dans les objectifs du PARC le développement des services privés de médecine vétérinaire. Cet objectif s'est essentiellement traduit par la mise en place de lignes de crédit pour l'installation de professionnels dans le secteur privé. De ce fait, dans de nombreux pays le PARC est devenu à la fois :

- le principal bailleur des services publics de santé,

- un des moteurs de la libéralisation des services et de la redéfinition des rôles du public et du privé.6 "

2. Les résultats de ce programme sont considérés non seulement comme très faibles mais ont eu des effets induits bloquants pour l'évolution du secteur, notamment la privatisation. En effet, partant du besoin de lutter rapidement contre la peste bovine et de la faiblesse du secteur vétérinaire privé, on est arrivé à relancer sur les actions de vaccination les services publics défaillants qui, de ce fait, sont devenus les principaux obstacles au désengagement de l'Etat et au développement du secteur privé. Le volet d'appui à l'installation des membres de la profession n'a pas porté de fruits, il a été réduit à une cellule technique d'appui à la privatisation (CTAP) composée d'agents de l'Etat et qui s'est révélé un frein aux évolutions. Le volet d'appui aux groupements d'éleveurs n'a pas été mis en œuvre. Le seul volet mis réellement en œuvre a été l'appui à la direction nationale de l'élevage pour organiser avec ses agents les campagnes de vaccination.

3. De Milly conclut "tout comme le PNVA, la présence du PARC a alimenté la résistance à la réforme des services et à la redéfinition des rôles respectifs du secteur public et du secteur privé." La mise en œuvre de ce programme par le secteur public a été une des raisons principales de son échec. Comment attendre des agents des services publics qu'ils soient les moteurs d'une réforme les dépossédant une partie de leurs prérogatives et notamment d'une activité par laquelle ils tirent une part substantielle de leur revenu ? Le manque de suivi du bailleur de fonds n'a pas permis de remédier au dérapage de ce programme. Ce n'est qu'en 1999, que l'UE au Mali tira les leçons et décida d'arrêter cette intervention.

4. Le projet PASPE. Le projet PASPE avait pour objectif le développement des services aux éleveurs à travers un appui aux prestataires privés, commerçants et aux Chambres d'agriculture. Conformément aux réformes en cours, le projet se fixait de participer sur des opérations concrètes aux transferts de compétence des services publics vers le privé et au recentrage des services de l'Etat. Ce projet a connu deux périodes :

- une période de test (95-97) avec comme porte d'entrée l'aviculture villageoise dans la région sud,

- une extension (98-01) sur le plan géographique (3 régions de touchées) et à l'ensemble des espèces domestiques.

6 Hubert de Milly – Thèse

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5. Le principe était de fédérer l'action des différents acteurs autour d'une thématique prioritaire (la lutte contre la maladie de Newcastle et la trichomonose des pintades pour la première phase du projet). Chaque acteur intervenait suivant ses prérogatives et ses moyens :

- "les activités de contrôle étaient du ressort de l'Etat, - l'approvisionnement en médicaments du ressort des vétérinaires privés, - la vaccination était effectuée par des relais villageois, relais des vétérinaires privés, - la sensibilisation et la formation de ses relais et des éleveurs étaient partagés entre les

intervenants." Une commission sanitaire volaille au niveau de chaque cercle permettait de regrouper régulièrement ces acteurs, liés entre eux par une convention de partenariat. Par ailleurs le projet appuyait l'installation de quelques vétérinaires privés et la mise en place de chaîne de froid.

1. Les résultats très positifs de cette démarche (nombre de poulets vaccinés, formation des

relais...) conduisirent à une nouvelle phase. La même démarche était reprise, mais ouverte sur toutes les productions animales. La tutelle du projet fut placée à l'assemblée permanente des chambres d'agriculture (APCAM). Au niveau de chacune des trois régions, le choix des priorités d'intervention varia. Les résultats positifs de la première phase furent confirmés dans 2 des trois régions. Les raisons du succès de ce projet tiennent principalement à la complémentarité des appuis apportés à chaque acteur dans son domaine :

- un appui spécifique aux prestataires privés (formation, suivi comptable, accès facilité au crédit),

- un appui spécifique apporté au maître d'ouvrage (CA) pour la conception des formations, l'animation et la concertation,

- un appui aux services de l'Etat dans le domaine du contrôle, - l'établissement d'une négociation entre les acteurs.

1. Autre point particulier de la démarche du projet : s'assurer du recouvrement optimal des coûts afin

que l'action se pérennise sans dépendre d'un projet extérieur. A cet effet, les intrants sont entièrement payants, la formation est partiellement subventionnée. Le projet est limité dans son organisation à une cellule très réduite en effectif mais de bon niveau (3 AT et 5 consultants maliens) ayant en charge principalement une fonction d'animation de ce processus. Il s'agit de faire-faire et non de se substituer aux acteurs en place.

2. De Milly résume le "comment faire" de la méthode PASPE ainsi : "Le projet :

- ne s'est pas identifié aux pouvoirs publics, même s'il a finalement joué un rôle d'animateur pour le compte de l'Etat,

- a mis en pratique la politique de transferts de responsabilités affichée (mais peu appliquée) par les services publics : promotion de la profession vétérinaire privée, mandat sanitaire, transfert des activités de vulgarisation…,

- a apporté aux différents acteurs des filières des appuis ponctuels personnalisés, y compris financiers à des acteurs privés,

- a contribué à modifier les rapports de force entre les acteurs des filières d'élevage. Il faut notamment noter qu'avec la vulgarisation pratiquée par le PASPE, le vulgarisateur n'est plus un "supérieur" omniscient, mais un prestataire de service devant satisfaire le client,

- a provoqué l'émergence de lieux de concertation et de prise de décisions concernant de véritables acteurs des filières concernées, impliquant des enjeux économiques importants, nécessitant de véritables prises de décisions, et donc porteurs d'un véritable apprentissage de l'analyse des situations et de la négociation entre acteurs."

1. Leçons. Les résultats positifs du PASPE, et à contrario ceux négatifs du PARC3, permettent de

tirer les enseignements suivants :

- la mise en place de projets pionniers comme le PASPE a une valeur d'exemple dans le cadre d'un processus de transfert où les acteurs ne maîtrisent pas leur nouveau rôle.

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 20

- l'incitation et des arrangements institutionnels, qui se construisent au cours du projet, sont déterminants pour sa réussite.

- l'apprentissage sur la concertation entre les acteurs est à prendre en compte dans le choix des "arrangements institutionnels".

2. Chedanne7 met en exerce 4 paramètres qui "semblent jouer une importance particulière et induisent un environnement institutionnel favorable à l'accompagnement des processus de transition en cours dans ces filières, à l'apparition de nouveaux comportements et à la mise en place d'incitations :

- la délégation de maîtrise d'ouvrage, (qui induit une rupture des rapports de force),

- la contractualisation des services,

- une approche dynamique et incitative au travers de systèmes ouverts favorisant l'initiative et l'innovation,

- un pas de temps long permettant d'inscrire dans la durée les actions entreprises."

3. Pour de Milly "L'évolution du secteur public repose de façon générale sur un problème de coordination. Le secteur public doit se retirer concrètement, pour laisser le marché au privé, mais le marché n'a de chance de se lancer dans l'aventure que s'il est certain de ce retrait. Or le public est naturellement tenté de rester sur place tant que le privé n'a pas pris la relève. Le privé doit aussi pouvoir compter sur l'appui (respect de la législation notamment) que le secteur public doit lui apporter une fois redéployé sur ses nouvelles fonctions." … Partant de l'exemple de la santé animale au Mali, de Milly conclut "dans la pratique pourtant, la coordination ne se fait pas, ce qui montre que, dans le contexte étudié, l'Etat central n'est pas en mesure d'être l'autorité de coordination".

4. De Milly met aussi en exergue le rôle d'animation qu'à finalement jouer le PASPE pour le compte de l'Etat. "Il est également possible de considérer que l'activité d'animation exercée par cette cellule, et qui inclut la médiation de conflits et l'incitation à la création de cadres de concertation, s'apparente à une fonction de maître d'apprentissage, dirigé vers l'ensemble des acteurs. C'est l'exercice d'une fonction qui peut être légitimement du ressort de l'Etat (Etat animateur). Le PASPE projet de l'aide publique, remplit effectivement cette fonction pour le compte de l'Etat, une fonction que l'Etat doit déléguer pour pouvoir lui-même se placer dans une situation d'apprentissage. Et de ce fait, le cadre d'apprentissage proposé par le projet concerne l'ensemble des acteurs, y compris les services publics. La pérennisation d'une telle fonction d'animation, au coût réduit, peut s'envisager sur financement public, et de plus l'expérience d'un tel projet montre que cette fonction se prête particulièrement bien, à court et moyen terme, à des interventions de l'APD."

7 Philippe Chedanne, Analyse institutionnelle des processus de transition dans deux filières agricoles au Mali- 99

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2.3. Filière coton IDEES – FORCES La filière coton a déjà évolué vers des contrats-plans tri-partites, une ouverture du capital de la

CMDT aux producteurs, et un transfert de plusieurs fonctions de base aux AV. Mais ces avancées ont leurs limites et la “ grève du coton ” de 00/01, suite à la baisse des prix

d’achat producteur, révélait la dégradation des rapports producteurs / CMDT. La crise a montré que l’Etat n’avait pas joué son rôle de tutelle ni celui de concertation et de

négociation inter-acteurs. C’est seulement face à cette crise qu’il a repris en main la filière. La nouvelle orientation prévoit le recentrage de la CMDT sur la filière coton, son retrait des

missions de services publics (développement rural) et son désengagement des fonctions de services (ex. approvisionnement intrants), et à terme sa privatisation. La gestion de cette filière est stratégique du fait de son poids dans l'économie nationale, vu sa

grande sensibilité à la fluctuation des cours mondiaux, l'Etat devrait garder une capacité d'intervention et de défense de cette filière. Le contrat-plan est un outil important mais non suffisant quand les rapports ne sont pas

équilibrés, les producteurs ne disposant pas encore des moyens pour négocier dans ce type de cadre. Face à la baisse des rendements et de la fertilité des sols, le conseil à l'exploitation devient un

enjeu. Qui va l'assurer demain, avec quelle approche et quels moyens ? Des projets ont montré la voie sur d'autres activités en misant une maîtrise d’ouvrage par des instances locales et en ayant recours à des prestataires indépendants.

Les évolutions de la filière

1. Historique. La filière coton est la filière agricole la plus importante au Mali, représentant 50 % des

recettes d'exportations. Suivant la CMDT elle touche près de 200 000 exploitations dans la zone Mali-Sud, essentiellement des petites exploitations familiales d'une dizaine de personnes mais relativement bien équipée en culture attelée, comparativement au reste du pays. Le coton occupe un tiers des surfaces cultivées et assure les revenus monétaires de la famille, ce sont ces revenus monétaires réguliers qui ont permis un accroissement significatif du niveau d'équipement dans la zone et d'une amélioration des conditions de vie. La production du coton s'est développée jusqu'à atteindre 500 000 tonnes en 97-98.

2. Les premières évolutions dans la filière eurent lieu en 1988 avec la suspension de la taxe d'exportation qui pénalisait son développement et l'évolution du système de fixation du prix et du mécanisme de stabilisation. Depuis une dizaine d'année des contrats plans régissent théoriquement les rapports et les responsabilités entre les trois acteurs principaux Etat-CMDT et producteurs à partir de 94, un mécanisme permet de fixer le prix pour chaque campagne en tenant compte des fluctuations des cours mondiaux et des coûts de production de la CMDT. Par ailleurs chaque année une négociation entre les banques et la CMDT porte sur le financement de la campagne, notamment des intrants. Le capital de la CMDT a été ouvert aux producteurs. Les différentes crises dues à la chute des cours mondiaux avaient pu être maîtrisées jusque là du fait (i) du soutien financier des partenaires extérieurs conscient de l'importance de cette filière pour l'économie du pays et (ii) grâce aux effet de la dévaluation de 1994.

3. Le développement intégré de cette filière relève de la CMDT. La CMDT assurait de ce fait des fonctions à caractère industriel et commercial (achat coton, égrenage et vente) et des fonctions de service public que l'Etat lui avait délégué pour le développement rural de la zone. Le premier contrat plan entre l'Etat et la CMDT précisait les missions de services publics confiées à celle-ci, les objectifs et les ressources mises à disposition. Le résultat a été globalement positif, quand on compare le niveau atteint dans cette zone par rapport au reste du Mali. Les producteurs disposent d'un bon niveau technique et sont bien organisés. La CMDT s'est désengagée depuis une dizaine d'année des fonctions de base de collecte et de paiement du coton au niveau des producteurs. Les associations villageoises assurent ces fonctions.

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4. Les producteurs sont regroupés dans des Associations Villageoises (cf. supra) et assurent à travers ces associations les fonctions de base de distribution d'intrants, de collecte primaire du coton, de caution des crédits et de paiement du coton. Ces AV jouaient aussi un rôle important dans le développement local investissant la majorité des ristournes, liées à l'exercice de ces fonctions, dans des équipements sociaux de type école, infirmerie, magasin…. En 1991 les producteurs ont créé un syndicat indépendant, le SYCOV, qui est devenu l'interlocuteur incontournable pour l'Etat et la CMDT dans la zone. Aujourd'hui un deuxième syndicat est né de la dernière crise cotonnière. Pour leur part les AV se sont recentrées sur leurs fonctions économiques avec l'avènement des communes. Elles ont connu de nombreuses divisions suite à une mauvaise gestion interne mais aussi à une volonté de la CMDT d'émietter le mouvement paysan. La zone a bénéficié d'un grand nombre de projets connexes touchant soit le développement local et la gestion de terroir, la lutte anti-érosive, introduction de la culture attelée sans oublier le "gender". Ces projets, pratiquement tous sous contrôle de la CMDT, ont permis une élévation certaine des capacités des producteurs. Les AV se sont dotées de centres de gestion rurale pour améliorer leur comptabilité et gestion ainsi que leur mode de fonctionnement (PGR).

5. Mais ces avancées connaissent leur limite. La production s'est surtout développée dans le cadre d'un accroissement des surfaces, la fertilité des sols baisse… l'encadrement technique CMDT a montré ses limites dans la diffusion de thèmes techniques généralement maîtrisés par les producteurs. Aujourd'hui cet encadrement assure plus un rôle d'interface entre les AV et la CMDT pour l'organisation de la collecte du coton et la distribution des intrants ainsi que le recueil des statistiques. Les principaux acteurs s'accordent aujourd'hui sur la priorité à mettre sur l'évolution des systèmes de production durable, basés sur une gestion patrimoniale des ressources naturelles et favorisant le maintien du potentiel productif.

6. La crise de 00-01 et la restructuration actuelle. La filière cotonnière a connu une grave crise pour la campagne 00/01 avec comme conséquence une baisse de la moitié de la production suite à la "grève du coton". Cette grève des semis est due à l'annonce de la baisse du prix d'achat au producteur suite à la chute des cours mondiaux. Plusieurs facteurs expliquent cette grève, outre la baisse du revenu paysan et le fort endettement sur la zone, les mauvaises relations entre les producteurs et la CMDT ont fortement pesé. Ces mauvaises relations sont dues à la dégradation des rapports entre les producteurs et l'encadrement de plus en plus coupé de ces derniers, la mauvaise gestion de la CMDT, que les producteurs connaissaient, ainsi que l'incapacité de l'Etat à travers le MDR d'assurer un suivi de la filière et la tutelle de la CMDT.

7. Les orientations de la LPDSC. Cette crise a été résolue après la tenue des Etats généraux du coton et de l'annonce du relèvement du prix d'achat au producteur du coton à 200 fcfa/kg. Décision qui entraînait un fort déficit de la filière. Cette situation engendrait une reprise en main de la filière par l'Etat avec l'élaboration d'une lettre de politique sectorielle du coton. La Lettre de Politique de Développement du Secteur Coton (LPDSC) est axée sur un désengagement important mais progressif de l’Etat :

- recentrage de la CMDT sur la filière coton, - désengagement des fonctions d’encadrement, d’approvisionnement en intrants et

équipements de transport, - libéralisation (notamment prix et commercialisation du coton graine), - privatisation à terme de la CMDT (l’Etat n’y conservant que moins de 20% du capital). Une mission de restructuration a été mise en place chargée de conduire ces réformes. Une série d'études vient d'être lancée à cet effet.

1. Cette restructuration avait été souhaitée depuis la crise de 92-93 par les partenaires de la CMDT.

Les grandes orientations, que l'on retrouve aujourd'hui dans le LPDSC, avaient déjà été avancées, notamment par l'aide française. Les effets positifs de la dévaluation ainsi qu'une remontée des cours avaient ensuite occulté les engagements de la CMDT à ce niveau. Il a fallu retomber dans une crise grave pour que de nouveau ces mesures redeviennent d'actualité.

2. Conseil agricole : un enjeu pour améliorer les systèmes d'exploitations. Une des revendications des producteurs est une meilleure adaptation du conseil à leurs besoins. Aujourd'hui ils considèrent que l'appareil d'encadrement CMDT n'est pas adapté, trop coûteux et ne répond pas à leurs attentes. Ils désirent avoir leur mot à dire sur le contenu du conseil agricole

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et le mode de mise en œuvre, sachant qu'in fine se sont eux qui financent ce conseil. De son côté la CMDT a tout intérêt à garder une emprise sur le conseil agricole car les actions conduites en amont de la filière conditionnent ses approvisionnements en quantité et en qualité.

3. Jusque là la CMDT, assurant un développement intégré de la zone, pouvait assurer l'ensemble

des fonctions car l'environnement lui était favorable :

- producteurs en situation de dépendance technique financière,

- administrations d’Etat aux moyens limités,

- faiblesse ou absence d’offre de services privée en matière d’information, de conseil et de formation,

- organisations de producteurs faiblement structurées et dépourvues d’organisations fédératives,

- absence ou faiblesses des structures d’appui au monde rural (chambres d’agriculture).

Cette approche était d'autant plus justifiée que la filière coton était le moteur du développement rural dans la région et, en tant que culture de rente, constituait l'ossature de la production de la grande majorité des exploitations. Aujourd'hui le contexte a changé. L'encadrement renouvelé a perdu de sa légitimité auprès des producteurs, mieux formés, bien structurés et n'acceptant plus n'importe quels messages. D'autre part, les Chambres d'Agriculture prennent progressivement leur place, des bureaux d'études, ONG et prestataires indépendants émergent. Mais, au-delà des acteurs, une autre donnée modifie l'approche traditionnelle du conseil agricole : le conseil ne peut plus se contenter de messages techniques autour de la culture de rente mais doit prendre en compte et s'adapter au système d'exploitation en place en recherchant un équilibre avec l'exploitation des ressources naturelles disponibles.

1. Si l'évolution du rôle de la CMDT passe par une différentiation des fonctions de conseil entre les

fonctions liées au système coton et les fonctions non liées au système coton, la problématique du conseil agricole est délicate à gérer. Un nouveau programme instruit par l'AFD, le Programme d'amélioration des systèmes d'exploitation en zone cotonnière (PASE), tentera d'apporter une réponse en introduisant une nouvelle approche dans le conseil aux exploitations au cours des prochaines années.

Les principaux enjeux et les leçons 2. Les enjeux sur cette filière coton au Mali sont de taille. En effet le poids de la filière dans

l'économie malienne implique pour l'Etat de la gérer avec une prudence particulière. Il lui faut défendre au mieux cette filière qui constitue l'ossature de son économie. Cette défense implique de tenir compte des cours mondiaux, sur lesquels le Mali a peu d'emprise, et des coûts de production, égrenage compris.

3. Aujourd'hui deux conceptions s'affrontent sur le devenir de cette filière. La vision de la Banque mondiale est une fragmentation de la filière et une privatisation de la CMDT réduite à la fonction industrielle d'égreneur. La vision alternative, que défendent les autorités maliennes, est plus prudente et vise à conserver l'aspect intégré de la filière et une capacité d'intervention de l'Etat dans le soutien de cette filière, tout en améliorant sa compétitivité. Cette deuxième option, outre la justification liée au poids de la filière dans l'économie malienne et aussi justifiée par une compétition biaisée au niveau du marché mondial, des pays comme les Etats Unis subventionnant fortement leurs producteurs. Cette vision est largement partagée par la CMDT, les producteurs et l'aide française.

4. Cette analyse nous ramène aux fonctions que l'Etat n'avait pas correctement assurées jusque là, à savoir la fonction de pilotage et la fonction liée de concertation et négociation entre les acteurs qui ont tous un intérêt objectif à "protéger" cette filière. Le contrat-plan reste un outil intéressant, permettant de définir clairement le partage des responsabilités, les moyens dévolus et

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les règles du jeu. Il reste à développer les capacités des organisations de producteurs pour que des négociations équilibrées s'instaurent. A noter l'existence d'un comité de suivi du contrat-plan.

5. Recentré sur le système coton, la CMDT se désengage des autres missions de services que lui avaient confié l'Etat. La CMDT remplaçait les services du MDR au niveau encadrement paysan, vulgarisation, santé animale, gestion des ressources naturelles…. Parallèlement le MDR se désengage de ces fonctions sur l'ensemble du territoire. La problématique du transfert de compétence revient : à qui transférer, comment et à quel rythme et avec quelles mesures d'accompagnement ?

6. Pour mener à bien ces transferts, la région cotonnière dispose de plusieurs atouts. Outre le niveau de formation des responsables paysans, la présence plus importante de bureaux d'études, ONG et prestataires, les projets et expériences pilotes sur la région ont ouvert la voie à ces transferts. Les principaux sont : le PASPE déjà cité, le Projet Gestion Rurale (PGR), le Projet Gestion Durable des Ressources Naturelles (PGDRN), les différentes opérations d'appui aux OP, les projets de développement local et dernièrement l'opération test de transfert de fonction menée par le MDR.

7. Les projets de type développement local mené par l'AFD et la coopération suisse ont montré leur bien-fondé dans une démarche d'appui à la maîtrise d'ouvrage des instances locales et dans la production d'outils. Ces projets ont trouvé leurs limites dans les dispositifs mis en place et pour certains dans la représentativité discutable de leurs organes. La séparation des dispositifs d'appuis techniques et des dispositifs de financement s'est aussi révélée nécessaire pour éviter les biais de substitution des équipes projets au maître d'ouvrage. Ce problème de représentativité est en partie résolu par la mise en place des collectivités territoriales, la majorité des projets se sont réorientés pour tenir compte ce nouvel acteur. Ces projets ont montré la valeur pédagogique de l'exercice en grandeur nature de la maîtrise d'ouvrage, réalisation d'un investissement, exercice possible par la disponibilité d'outils financiers d'une part pour les investissements et, d'autre part, pour financer les études et l'accompagnement nécessaires.

8. Le test sur les transferts de compétences du MDR en 99 sur la région de Sikasso a permis de dégager une méthodologie permettant de conduire ce processus. Cette méthodologie sera détaillée dans un autre chapitre à travers d'un exemple sur la vulgarisation.

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3. ANALYSE FONCTIONNELLE La présente partie aborde l'exercice des principales fonctions nécessaires au développement rural. Trois groupes de fonctions sont abordés :

- Les fonctions liées à la définition des "règles du jeu" et à leur application, à savoir la définition des politiques, la planification des ressources publiques ainsi que la réglementation et le contrôle. Ces fonctions sont considérées comme des fonctions "pérennes" ou "régaliennes" de l'Etat.

- Les fonctions considérées comme "structurantes" pour le secteur, à savoir la structuration des filières, la prévention des risques, l'aménagement et l'équipement rural, la formation et la recherche. Ces fonctions peuvent être exercées par l'Etat ou par d'autres acteurs, d'où leur qualificatif de "partageables".

- Les fonctions liées à l'exercice d'un service au producteur, à savoir principalement commercialisation, vulgarisation et conseil à l'exploitation, crédit, fourniture de services et d'intrants, appui aux OP. Ces fonctions sont considérées comme relevant du secteur privé et devant être transférées des services de l'Etat au privé.

La frontière entre les fonctions dites partageables et les fonctions transférables est certes discutable mais elle permet dans le contexte actuel de bien distinguer les fonctions desquelles l'Etat doit se retirer "impérativement" (transférables) et celles pour lesquelles, en fonction du contexte, l'Etat peut ou doit avoir un rôle à jouer en lien avec les autres acteurs (partageables). Outre les repères déjà donnés dans l'analyse des filières, deux dates sont à conserver en mémoire dans l'évolution des fonctions : 1992 avec le schéma directeur et la conception de la réforme et 1997 avec la restructuration du MDR. Comme pour la partie précédente, il ne s'agit pas de faire une analyse exhaustive, mais de dégager les points essentiels de l'exercice de ces fonctions.

3.1. La définition des règles du jeu et leur application IDEES – FORCES Définition des politiques. Si l’Etat a su définir les lignes directrices en matière de

désengagement et libéralisation des grandes filières, par contre leur traduction concrète s’est faite suite à des crises ou des pressions internes et/ou externes. La capacité à définir et mettre en œuvre de manière consensuelle des politiques par filière reste faible, ainsi que sa capacité d'analyse prospective. Cela révèle l’importance : (i) des mécanismes de négociation et concertation, à commencer par le niveau régional, (ii) de systèmes fiables de recueil et de traitement de l'information comme outil d'aide à la décision, (iii) des outils de suivi-évaluation de l'impact des politiques comme bases du pilotage et de la négociation. Planification et programmation des ressources publiques. Le MDR a peu de prise sur les

budgets alloués au secteur qui sont reconduits d’année en année avec un poids dominant des charges salariales. La négociation des aides extérieures présente des lacunes, répondant dans certains cas plus à la recherche de financement des appareils en place. L'amélioration de la gestion des ressources passe par (i) une redéfinition du mode de financement du secteur et (ii) la mise en place d'outils de gestion intégrée des ressources publiques. Législation, réglementation et contrôle. La séparation des fonctions de contrôle et d’appui a

été l’un des points forts de la réforme du MDR. Les résultats sur le terrain du contrôle montrent le bien-fondé de cette stratégie, même si certains déficits restent à résoudre dont la gestion des ressources humaines.

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a) Définition des politiques (- analyse prospective, intégration régionale, définitions des orientations et des instruments-) 1. La définition des politiques et des orientations stratégiques par secteur a été logiquement assurée

par l'Etat. Nous avons vu que les ruptures de ces politiques étaient principalement liées à :

- échec de la politique du "tout Etat" avec en 80 les premières orientations d'ouverture économique et de désengagements de l'Etat du secteur productif,

- échec de cette ouverture qui abouti en 1988 aux premiers programmes d'ajustements introduisant la libéralisation des prix et les principales réformes,

- la réforme du secteur rural engagée en 1992 qui devait concrétiser au niveau agricole les orientations de désengagement et de recentrage de l'Etat et redéployer en conséquence le dispositif public sur ce secteur.

1. Si une ligne générale de libéralisation de l'économie et de désengagement de l'Etat a été

définie, par contre sa mise en œuvre et sa traduction dans les grandes filières ont été plus le fruit de crises internes et/ou de pressions extérieures. Plusieurs facteurs expliquent cette situation :

- La réticence des administrations à mettre en œuvre les réformes et l'absence d'un pilotage de ces réformes par l'Etat,

- Le manque de pilotage des filières par le MDR qui n'a pas su assurer son rôle de tutelle sur des organismes tel CMDT et ON.

- L'absence d'organisations professionnelles solides et représentatives pour assurer un dialogue équilibré avec l'Etat ou les autres acteurs de la filière

- L'absence d'outils d'analyse prospective (les analyses restant plus orientées sur l'offre) et de développement institutionnel (on s'arrête à des réorganisations au lieu d'introduire des changements d'approches au sein des institutions publiques)

D'autre part, les incidences de l'intégration régionale et de la mondialisation sont encore faiblement prises en compte.

Les analyses précédentes par filière confirment ces conclusions.

Filières Céréalières :

1. Les orientations politiques ont été modifiées lorsque que l'Etat et les bailleurs de fonds ont été au

pied du mur, plus personne ne pouvait supporter le déficit budgétaire lié à la politique de sécurité alimentaire dont la fixation des prix par l'Etat. Le PRMC, programme piloté par les bailleurs, a permis de restructurer par étape le secteur céréalier et d'accompagner la libéralisation. Ne touchant pas les aspects production mais uniquement recentrage de l'Etat et fonctionnement des marchés, le PRMC est le programme qui a permis la restructuration de la filière. Ses points forts ont été la coordination entre les bailleurs, l'organisation d'un dialogue continu et constructif entre les bailleurs et les autorités maliennes, un travail sur le temps avec une approche pragmatique. "L'incitation" des bailleurs a été décisive. Ses limites se résument essentiellement à deux points : (i) le dialogue est resté centré entre les mêmes acteurs habituels : Etat, bailleurs et ponctuellement les grands commerçants et les banques et (ii) le travail sur la structuration des filières et l'analyse des contraintes à leur développement n'a pas suivi. Le PMRC aurait pu déboucher sur une concertation régulière de l'ensemble des acteurs des filières céréalières sur ce dernier point. Cette limite est du (i) à l'absence de capacité de pilotage du MDR qui aurait du se saisir de cette opportunité et organiser ces concertations et (ii) à l'absence d'organisations professionnelles suffisamment structurées pour s'imposer dans cette concertation.

2. De manière plus spécifique sur la filière riz, les orientations politiques ont trouvé leur application au niveau de la restructuration de l'Office du Niger. Mais force est de constater que s'il y a eu désengagement de l'ON du contrôle de la production et de la commercialisation, avec un recentrage sur les fonctions d'aménagement et de gestion de l'eau, la mise en place d'un contrat de gérance, par contre l'approche vis à vis des producteurs n'a pas changé. C'est cette non-évolution de l'approche, du mode de travail avec les producteurs et leur OP qui va freiner la mise en place d'une véritable politique concertée pour le développement de cette filière et montrera les limites du contrat plan Etat-ON-producteurs. L'absence de volonté de mettre en place et de s'appuyer sur une structuration des usagers de base est le principal obstacle à une réelle

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évolution des rapports ON-producteurs, elle sera un handicap aux transferts de fonction. Ce manque de volonté tient d'une part à la direction de l'ON et son encadrement se refusant ou retardant les évolutions et le faible poids de l'Etat qui ne peut pas imposer à l'Office cette évolution. La mission de restructuration de l'ON, rattachée à la primature, a achevé son mandat sur un décret de restructuration, alors qu'aucun problème de fond n'est encore réglé (mode de travail avec les producteurs, foncier, crédit, type d'infrastructures à privilégier…). L'élaboration du schéma directeur de l'ON aurait du répondre à un certain nombre de ces questions, son retard n'est pas fortuit…

Filières élevage 3. Le secteur élevage a connu un scénario similaire en final. Les orientations politiques étaient

reprises au niveau de cette "filière" en terme de désengagement de l'Etat, d'appui le secteur privé et les groupements d'éleveurs… Le transfert de la fonction "médecine vétérinaire" était considéré comme précurseur de cette politique de désengagement. Malheureusement, son application connue des retards et des lacunes, contrairement à la politique céréalière, les bailleurs de fonds agirent en ordre dispersé et la mise en œuvre de programme tel le PARC abouti à l'effet inverse consolidant les services de l'Etat dans une fonction à transférer. Parallèlement, le blocage de la réforme du MDR et l'absence de pilotage de cette réforme ne permirent pas de prendre les mesures adéquates pour mettre en œuvre la politique définie.

4. L'absence d'autres interlocuteurs réellement représentatifs des autres acteurs (notamment vétérinaires et éleveurs) abouti à une réforme contrôlée par les services de l'Etat avec une poignée de grossistes en produits vétérinaires qui faisaient un important travail de lobby et de verrouillage au niveau des différentes instances. Le retard dans la promulgation des textes et leur application en est une des conséquences. Le secteur public de l'élevage (DNE) était le principal perdant de la réforme en cours. Les quelques centaines d'agents mal payés et peu suivis avaient avec la vaccination leur principale source de revenus. Attendre la mise en œuvre d'une réforme sectorielle par une administration "perdante" est illusoire. Pour le transfert de la médecine vétérinaire, le projet PASPE a montré une alternative dans la mise en œuvre sur le terrain de la réforme.

Filière coton

5. Le cas de la filière coton est révélateur des incidences de l'absence d'un réel pilotage par

les pouvoirs publics d'une filière sensible. Délaissant sa fonction de tutelle de la CMDT, devenue un état dans l'état, l'Etat n'a pas été en mesure de prévenir la crise de la filière. Les évolutions de cette filière ont été en grande partie dépendante (i) des crises financières de la CMDT, crises qui permettaient à ces principaux bailleurs de demander des réformes ou (2) des crises issues de revendications des producteurs. Malheureusement dès que les cours mondiaux remontaient les réformes prévues étaient délaissées… Par ailleurs, plusieurs facteurs, son poids financier (principal pourvoyeur des recettes d'exportation de l'Etat), les résultats antérieurs obtenus, "l'encadrement" des producteurs relativement mieux assuré que sur les autres régions du Mali, l'ouverture de la CMDT à certaines innovations (contrôlées) et aux projets pilotes, faisaient de la CMDT un partenaire privilégié de l'Etat et des Bailleurs, partenaire qui était ménagé et qui savait se défendre. Le dialogue avec les producteurs, notamment leur principale représentation le SYCOV, a été souvent conflictuel, traduisant les difficultés à faire vivre une réelle concertation autour de l'application des contrats plans. Aujourd'hui l'Etat semble reprendre en main cette filière et assumer son rôle de tutelle de la CMDT. Mais, dans ce cas de figure, il a fallu attendre une situation de crise (grève du coton avec des incidences graves au niveau économique) et avoir une filière déficitaire mettant en danger les ressources de l'Etat pour qu'il y ait réaction. Aujourd'hui l'Etat se trouve face à un choix délicat sur l'avenir de la filière, soit conserver une filière intégrée et sa capacité à la défendre, soit procéder à son éclatement recentrant la CMDT uniquement la fonction industrielle et commerciale. Les enjeux liés à ce choix montrent l'importance à donner au développement des capacités de pilotage des pouvoirs publics.

La multiplication des concertations et des documents d'orientation

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6. L'élaboration des politiques, le choix des orientations par filière et des instruments à privilégier par l'Etat sont de son ressort. Mais, si les décisions finales reviennent à l'Etat, il est de la responsabilité de celui-ci d'organiser la concertation avec les acteurs non-publics concernés et de rechercher leur adhésion à ces orientations. Le Mali s'est engagé dans cette voie avec l'organisation de concertation soit ponctuelle soit périodique. Les principaux outils d'orientation et de gestion de ces politiques ont été l'élaboration du schéma directeur, des lettres de politiques sectorielles, de documents cadres… , et des contrats plans concrétisant ces orientations pour des secteurs donnés.

7. Un biais observé est la multiplication des documents de politiques ou d'orientation, répondant souvent à des demandes de bailleurs de fonds et aboutissant souvent à des documents généraux, redondants, mélangeant moyens et objectifs et parfois contradictoire. Ces documents gagneraient, chacun à son niveau spécifique, à mieux décliner les orientations générales en termes de responsabilités de chaque acteur, moyens et modes opératoires à mettre en œuvre. Le manque de moyens humains et d'outils de la CPS du MDR est un des facteurs explicatifs de cette faible capacité de conception.

8. Les points suivants sont aussi à prendre en compte pour favoriser la conception des politiques et la concertation :

- la concertation ne peut faire l'économie d'une concertation à un niveau régional tenant compte outre des spécificités de chaque région, de la présence des collectivités territoriales et d'organisation de producteurs proches du terrain.

- La collecte et le traitement des informations et des statistiques est une fonction essentielle, qui mal assurée peut engager l'Etat sur des choix d'investissement erronés et qui peut biaiser les concertations et les négociations entre les acteurs, les bases de la discussion étant fausses (cf. situation à l'ON).

- L'absence d'un système de suivi-évaluation de l'impact des politiques et des mesures mises en œuvre est un obstacle pour le pilotage ainsi que pour des négociations constructives.

b) Planification et programmation des ressources publiques 1. Du bon exercice de cette fonction résulte l'adéquation entre les objectifs fixés et les moyens mis

en œuvre. Cette fonction, du ressort de l'Etat, est partagée entre l'Assemblée Nationale (vote de la loi des finances traduisant les choix politiques), le ministère des finances et le ministère sectoriel concerné. Aujourd'hui, dans un contexte de rareté des ressources, le MDR a peu de prise sur cette fonction qui se résume actuellement à deux aspects :

- la négociation entre le MDR et le ministère des finances des ressources allouées au secteur, - la négociation des aides extérieures.

1. Le premier point se limite à une reconduction de l'enveloppe annuelle du MDR. La méthode "budget-programme" a été introduite, mais elle est mal maîtrisée. De plus les budgets étant essentiellement le paiement des salaires, elle perd une partie de son intérêt. Le deuxième point touche la capacité de négociation de l'Etat avec ses partenaires. Globalement elle est faible. Si on regarde comment sont négociés les programmes, on s'aperçoit que des programmes contradictoires peuvent être mis en place d'une région à une autre. On est plus dans une logique de captage des financements (souvent pour faire fonctionner une partie de l'appareil) et dans une logique au niveau de chaque direction de d'exécution directe de ses programmes. Cette situation s'explique par la rareté des ressources et ces programmes pallient partiellement ce déficit. Cette "nécessité" pour les directions nationales de conserver la main sur les ressources "projets" expliquent aussi le peu d'entrain au changement des modes opératoires et à l'introduction de nouveaux acteurs dans leur mise en œuvre.

2. Pourtant derrière cette fonction, des problèmes de fond se posent. D'une part, ces problèmes se posent au niveau des choix à opérer sur le financement du secteur et des différentes filières. D'autre part, ils se posent lors de la conception des programmes. Quelles incidences de ces programmes sur l'endettement du pays ? Quelles sont les autres ressources intérieures mobilisables ? Quelles charges récurrentes sont induites, quels systèmes de recouvrement des

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coûts peuvent être mis en place ? Développer des outils de gestion intégrée des ressources publiques permettraient de faire un premier pas.

c) Législation, réglementation et contrôle 1. La fonction de définition des législations et des réglementations ainsi que la fonction de contrôle

de leur respect sont des fonctions régaliennes. L'Etat crée les conditions favorables au développement des activités, de la production et de l'organisation tout en préservant l'intérêt public. Disposer de textes adaptés est une condition clé, surtout dans un environnement en pleine évolution et mutation tant au niveau interne (transfert de fonctions) qu'au niveau externe avec la mondialisation.

2. Mal exercée auparavant, avec agents assurant sur le terrain à la fois des missions de conseils et des missions de contrôle, avec des textes multiples et souvent dépassés, voire contradictoires, l'exercice de ces fonctions devait être revu radicalement. C'est un des points fondamentaux de la réforme de 1992 qui a séparé au sein du MDR les fonctions de conseil des fonctions de contrôle. Une direction spécifique était créée, la DGRC, chargée de mettre à jour les textes du secteur, les normes et de mettre en place un dispositif chargé de suivre leur application sur le terrain.

3. Quatre années après sa mise en place, les résultats de la DGRC confirment le bien-fondé du choix de cette séparation des fonctions. Même si on peut regretter la lenteur dans l'adoption des nouveaux textes, la faiblesse de la division phytosanitaire, la DGRC a avancé dans leur élaboration et le dispositif de contrôle est en place. Dans plusieurs régions, avec peu de moyens, les services de réglementation et de contrôle ont obtenu des résultats probants notamment sur le contrôle des produits phytosanitaires frauduleux ou de contrefaçon. Ces actions trouvent un écho favorable auprès des producteurs. Néanmoins la DGRC se heurte aux déficits suivants :

- les agents de terrain ne sont pas formés et une partie des textes n'étant pas révisés, ils ne sont pas applicables,

- cette direction a été reprise en majorité par la direction de l'élevage ce qui explique que (i) sur le terrain une grande partie des agents, agents d'élevage, continue à pratiquer leur ancienne activité : la vaccination au détriment du contrôle et (ii) que les activités phytosanitaires passent au second rang,

- la faiblesse des moyens pour que le niveau régional procède à un suivi rapproché des agents de terrain.

Mais ces problèmes sont solubles car le management de la DGRC peut procéder aux améliorations nécessaires. Le point critique est la gestion des ressources humaines au sein du MDR et l'adéquation profil – poste.

1. Par contre, le principe de séparation des fonctions de conseil et de contrôle a été remis en cause avec la création au sein du ministère de l'environnement de la Direction Nationale de la Conservation de la Nature. Cette direction, dans les faits, reconstituait le corps des Eaux et Forêts dissous avec la réforme de 92. Cette direction se retrouve cumulant les fonctions de conseils et de contrôle. Nous avons un exemple type de contradiction dans les orientations du gouvernement. Des mesures contradictoires sont prises, graves car cette décision a porté un coup fatal à la réforme du MDR, le décrédibilisant, démobilisant les cadres et agents investis dans sa réussite ou du moins acceptant de la suivre.

2. Malgré ce déficit majeur, les leçons de la mise en place de la DGRC confirme :

- le bien-fondé de la séparation des fonctions de conseil et de contrôle, - les possibilités de résultats même avec des faibles moyens mais compensés par un bon

management, - que les principales limites sont soient liées au mode de gestion des ressources humaines

(pilotage interne de la réforme) soit liées au pilotage global de la réforme de l'Etat.

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1. A noter que l'exercice ces fonctions régaliennes ne signifie pas que l'Etat doit systématiquement tout exécuter. Deux exemples illustrent les possibilités d'externalisation :

- la définition des normes où l'Etat va, d'une part, informer les acteurs des filières sur les normes obligatoires (nationales ou internationales) et s'assurer de leur respect et, d'autre part, inciter l'interprofession à définir, là où elles n'existent pas, des normes de qualité répondant aux exigences des marchés.

- La délégation de certains contrôles comme le contrôle des abattoirs qui pourrait être délégué aux vétérinaires privés, ainsi que le contrôle des respects des normes qui, par exemple, peut se traduire par la création de label par la profession.

1. Le développement de ces fonctions reste un vaste chantier avec comme priorités :

- relecture et compléments des textes, - leur diffusion (avec les CA et OP), - le contrôle de leur application, - le développement de normes.

3.2. Fonctions "structurantes" IDEES – FORCES Structuration des marchés et des filières. La DNAMR n’a pas assuré sa fonction d’analyse et

d'appui aux filières du fait d’un manque de volonté, d’une faiblesse des OP, du poids des ODR ou d’une vision limitée à une approche PNVA de vulgarisation technique. L’enjeu est de rétablir cette capacité d’analyse et de suivi des filières au sein du MDR, tout en développant parallèlement la même capacité au sein des OP et CA pour en faire de réelles forces de proposition. Prévention des risques et des végétaux. La DNAMR n’est pas arrivée à prendre en main cette

fonction de service public. Le déficit de pilotage et de management du MDR n'a pas permis de corriger la situation. Cette fonction doit être exercée avec l’implication active des CA et OP. Aménagement et équipement rural. Le désengagement de l’Etat s’est opéré de façon

satisfaisante au niveau des aménagements hydro-agricoles où le secteur privé prend le relais. Par contre la réforme a marqué un coup d'arrêt dans les domaines de l'aménagement et de la GRN. La recréation d’une direction sectorielle “ Eaux et Forêts ” remet en question la réforme du MDR et va à l’encontre d’une gestion intégrée des RN sur le terrain. L'appui aux CTD, notamment au niveau maîtrise d’ouvrage, implique une évolution des relations services techniques / CTD qui reste à faire. Recherche. Des avancées ont été réalisées et le PASAOP devrait remédier aux déficits qui

freinent leur mise en œuvre. Reste à suivre leur application sur le terrain.

a) Structuration des marchés et des filières 1. Cette fonction était assurée de manière éclatée avant la réforme soit par l'ODR concerné (CMDT,

ON, OMBEVI…) soit partiellement pour l'élevage par la direction du MDR concernée. Les politiques menées (cf. parties précédentes) par filière étaient le reflet de la vision de l'organisme d'Etat gérant cette filière et non le fruit d'une concertation inter-acteurs de cette filière. Les seules évolutions marquantes ont été (i) les évolutions sur les filières céréalières dues au PRMC, (ii) la place qu'ont pris progressivement les OP du secteur coton dans cette filière et (iii) la mise en place d'un observatoire des marchés agricoles au niveau de l'assemblée permanente des Chambres d'Agriculture.

2. Si les orientations du gouvernement en matière de réforme du secteur rural place la concertation entre les acteurs comme élément stratégique dans la gestion des filières, leurs applications restent limitées. Outre la faible volonté des administrations concernées de s'ouvrir à cette

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concertation, la faiblesse des OP n'a pas permis au sein de ces filières un dialogue équilibré. Aujourd'hui plusieurs organismes se targuent de s'occuper des filières tant à l'intérieur du MDR (DNAMR – direction nationale de l'appui au monde rural-, CPS – cellule de planification et de statistiques -) qu'à l'extérieur (OMBEVI, ODR, CA), mais il n'existe pas de coordination et de synergie entre leurs actions.

3. Pour cette fonction le MDR se doit, indépendamment des ODR, de disposer d'une capacité d'analyse de chacune des filières, d'être en mesure de collecter traiter et diffuser les informations à caractère technique et économique sur chacune d'elles et de se placer comme un animateur de la concertation entre les différentes professions. Identifiant en concertation avec les professionnels les facteurs limitant des filières et les points sur lesquels l'Etat pouvait intervenir, le MDR devait ainsi disposer des éléments pour orienter ses choix et ses politiques. Cette fonction relevant de la DNAMR du MDR n'a pas été assurée. Seules quelques avancées au niveau de l'analyse ont été faites par la CPS. L'explication se trouve dans l'incapacité de la DNAMR à penser autrement que par une approche PNVA, c'est à dire une approche centrée sur la vulgarisation de techniques de production. Pour cette fonction, on relève le manque de capacité du MDR à suivre et impulser la prises en charge de nouvelles fonctions par ses services. On note depuis un an une inversion de tendance avec une volonté de la nouvelle direction du MDR de revenir sur les orientations de la réforme et de développer la concertation entre les acteurs au niveau des orientations des filières.

4. Les propositions de l'étude en cours sur l'affinement de la stratégie de développement institutionnel du MDR suggèrent : "Dans l'immédiat il s'agit de reconstituer au sein de la division filière une capacité par filière d'analyse et de suivi ainsi qu'une véritable capacité en matière de connaissances techniques. La DNAMR doit (i) avoir une connaissance fine des différents segments des filières, notamment au niveau des marchés pour favoriser l'adéquation de l'offre par rapport à la demande (ex. respect des normes de qualité), savoir appréhender les besoins des différentes professions, (ii) organiser le dialogue entre ces professions et les acteurs publics et (iii) orienter en conséquence les politiques par filière et les thèmes techniques à vulgariser."

5. Cette évolution au sein du MDR ne doit pas occulter le travail à mener au niveau des Chambres d'Agricultures et, là où elles existent, des OP par filières. C'est en développent aussi de manière indépendante leurs propres capacités d'analyse de leur filière que les producteurs deviendront des forces de propositions au sein de celle-ci.

b) Prévention des risques et des végétaux 1. Cette fonction est aujourd'hui très mal assurée. Au niveau santé animale, la DNAMR n'a pas

réussi à mettre en place un réseau d'épidémio-surveillance fonctionnel, de plus en cas de foyer les services publics de terrain ne disposent pas des moyens pour intervenir rapidement et de manière autonome. On retrouve les mêmes déficits que précédemment à savoir une DNAMR qui ne parvient pas à prendre en main ses nouvelles fonctions, le pilotage du MDR et le management de la DNAMR en sont les causes principales.

2. Pourtant cette fonction relève bien d'une mission de service public, mission qui doit s'appuyer pour être mené à bien sur les CA et OP. En effet si l'Etat définit les mesures à prendre par type de risques, leur application ne pourra être effective que par l'implication rapide des producteurs et de leurs organisations, tant pour l'identification des problèmes le plus en amont possible, que pour la mise en œuvre des mesures.

c) Aménagement et équipement rural 1. Ces fonctions peuvent être subdivisées principalement entre les activités relevant du génie

rural (ex. aménagement hydro-agricoles, pistes…) et les activités de gestion des ressources naturelles au sens de gestion de domaines forestiers, fauniques et halieutiques. Avant la réforme, la direction du Génie Rural du MDR exerçait les fonctions liées à la maîtrise d'ouvrage des programmes et ouvrages d'aménagements et ainsi que leur exécution. Avant même la mise en œuvre de la réforme, l'Etat s'est désengagé des fonctions d'exécution des ouvrages, gardant

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ses prérogatives de maître d'ouvrage, délégué à la direction du Génie Rural. La gestion des ressources naturelles était peu développée, restant limité à l'exécution par les services de l'Etat, la direction des Eaux et Forêts, de quelques programmes forestiers sur le domaine de l'Etat. Les rapports entre les populations et les services des Eaux et Forêts étaient exécrables et ne permettaient pas d'aborder la GRN au niveau des producteurs. A noter néanmoins les avancées des projets travaillant sur la gestion des marchés ruraux de bois. Quelques projets pionniers initièrent la mise en place de projet gestion de terroirs et de développement local avec des résultats variables. On peut citer les programmes de l'AFD et un programme financé par la Banque Mondiale, le Programme National de Gestion des Ressources Naturelles (PGRN). Les programmes de l'AFD et MAE –ex.FIL-, plus limités géographiquement, allèrent plus loin dans la démarche gestion de terroirs et développement local que le PGRN surtout axé sur les micro-financements dans les villages. La réforme du MDR, parallèlement à la mise en place de la décentralisation, devait profondément modifier l'exercice de ces fonctions.

Sur les aménagements

2. Le désengagement de l'Etat au niveau des études et de l'exécution des ouvrages n'a pas causé de vide. Au contraire, le secteur privé a relativement bien percé. Il est certes hétérogène, ce qui augmente le besoin de contrôle. Malheureusement il y a un déficit de compétence au niveau de la nouvelle DNAER, les cadres les mieux formés étant à Bamako et beaucoup d'autres ont quitté le secteur public pour rejoindre le secteur privé. Les agents chargés du contrôle sont souvent moins qualifiés que les ingénieurs et techniciens du secteur privé. (A noter l'impact positif d'un petit projet FAC en 92 qui avait travaillé à l'appui à la maîtrise d'œuvre des bureaux d'études d'aménagement sur la région de Sikasso, résultats positifs par la qualité du travail et du suivi des chantiers par ces bureaux).

Sur les schémas directeurs et les plans d'aménagements

3. Le processus de décentralisation, avec la mise en place des communes, des cercles et des

régions en tant que collectivités territoriales, modifie l'approche. L'Etat n'est plus le seul acteur à se prononcer. Les collectivités territoriales ont des compétences dévolues par la loi pour l'aménagement de leur territoire. La question est, d'une part, l'articulation entre les différents niveaux de collectivités et, d'autre part, les articulations entre les politiques d'aménagement et les politiques sectorielles définies par l'Etat et les choix des collectivités territoriales. Ce champ d'intervention est nouveau, la mise en place récente d'un ministère regroupant l'environnement et l'aménagement du territoire devrait apporter des réponses.

L'appui aux collectivités territoriales 4. La mise en place des collectivités territoriales engendre des besoins d'appui, principalement

l'appui à la maîtrise d'ouvrage de leur développement (plan de développement des communes, maîtrise des fonctions transférées) et l'appui plus spécifique à la maîtrise d'ouvrage des insfrastructures et équipemenst réalisés par ces CT. Aujourd'hui la DNAER sur le terrain n'est que faiblement en mesure de répondre à ce type de demande. Certes, le nombre de projets lancés par les CT reste limité du fait de la faiblesse de leurs ressources financières, mais les services de terrain ne sont pas encore placés dans cette position d'assistance à maîtrise d'ouvrage, ils sont dans une logique de prestations de service.

5. Concernant la GRN, la question reste complexe. D'une part le transfert effectif de la GRN n'est pas concrétisé (quel contenu ? sur quel domaine exactement ?), d'autre part la création de la direction nationale de la conservation de la nature (DNCN) au sein du ministère chargé de l'environnement a enlevé la partie forêt et faune des attributions de la DNAER. Un deuxième principe fort de la réforme du secteur rural volait en éclat : celui d'une vision intégrée de la gestion des ressources naturelles. Pourtant le producteur réfléchit l'exploitation des ressources naturelles auxquelles il a accès en fonction des contraintes de son exploitation. Ce déficit, déjà souligné, est à rechercher au niveau des choix du gouvernement prenant la décision de faire fi de la réforme engagée.

6. Les avancées des projets GT-DL, notamment avec la mise en place des conventions locales de GRN, semblent aujourd'hui oubliées. Néanmoins, il faut souligner qu'un travail reprend à différents

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niveaux sur la préparation de ce transfert de GRN, notamment au niveau du MEATEU pour les outils à destination des communes et de quelques projets. A noter le travail du projet GDRN financé par la Suisse (gestion durable des ressources naturelles) qui accompagne les différents acteurs sur la mise en place des règles de GRN impliquant les communes, les producteurs et les services de l'Etat. La démarche est proche de celle du PASPE (élevage) dans la mise en relation et l'accompagnement des différents acteurs sur la base du nouveau partage des fonctions.

7. Un important programme d'investissement financé par la Banque Mondiale, le PNIR, va être mis en place. Si ce programme répond à des besoins de développement d'infrastructures en milieu rural (pistes, irrigation et hydraulique), si ce programme prend en compte le désengagement de l'Etat, la présence des OP, par contre ses modalités de mise en œuvre devront être étudiées de manière critique lors de sa phase test. Bien qu'affichant une volonté de respecter et de responsabiliser les acteurs non étatiques, deux risques pèsent. Le premier risque tient à la fonction d'appui-conseil confiée au départ à des bureaux d'études et des ONG mais fonction qui curieusement bascule en 2ème phase sur la DNAER (on ne peut que faire la parallèle avec les démarches PNVA et PARC où l'on renforce l'Etat sur une fonction dont il doit se désengager). Le deuxième risque est lié à la mise en place d'une structure d'exécution jouant le rôle de maître d'ouvrage délégué, l'AGETIER. Cette structure risque dans les faits de se substituer aux acteurs locaux et d'empêcher leur apprentissage de la maîtrise d'ouvrage, notamment les collectivités territoriales. Un affinement de la responsabilité des acteurs et des modes opératoires est nécessaire sur ce projet afin qu'il reste en cohérence avec les orientations de la réforme.

Leçons 8. Le désengagement de l'Etat s'est opéré de manière satisfaisante, au niveau des

aménagements de types hydro-agricoles, au profit du secteur privé. L'Etat compte développer sa politique d'aménagements des terres agricoles et développer les surfaces irriguées. Les nouvelles orientations privilégient les aménagements à caractère privés dont les coûts pourront être pris en charge par les producteurs.

9. Concernant les schémas d'aménagements des territoires et la GRN, un changement d'approche est nécessaire. La reconstitution des Eaux et Forêts remet en question la démarche d'une approche intégrée de la GRN au niveau des villages et des producteurs. Un travail de fond est mené sur cette approche compte tenu de la nouvelle donne. On constate que les décisions politiques au niveau du gouvernement ont remis en cause une réforme pourtant bien conçue. Outre les problèmes inter-institutionnels liés à une clarification des rôles entre les différents services publics, c'est le mode de rattachement des services qui pose problème. Si les évolutions des ministères –nombre, compétences – sont inéluctables, par contre les services devraient rester stables quelle que soit l'évolution de leur rattachement. Autre question inter-institutionnelle à résoudre : les limites et l'articulation entre un ministère exerçant des fonctions transversales et des ministères sectoriels.

10. Concernant l'appui aux collectivités territoriales, les services du MDR, la DNAER en premier lieu, n'ont pas su s'adapter, se positionnant comme un prestataire de service et ne cherchant pas à construire une relation "privilégiée" de conseil. Ici on revient sur le problème de pilotage du MDR et du management des directions, qui n'a pas été à la hauteur – ou convaincu- pour conduire le changement d'approche et de mentalité.

11. Pour l'avenir, l'analyse menée sur l'affinement de la stratégie de développement institutionnel du MDR, propose que la DNAER se concentre sur les fonctions suivantes :

- "élaboration des éléments de politiques sur la gestion des RN et les aménagements, - suivi de l'état des RN et du potentiel aménageable, - suivi du niveau d'équipement rural et des contraintes liées à son développement, - assurer la conception et la maîtrise d'ouvrage des programmes de l'Etat en matière

d'aménagement et d'équipement rural, - l'élaboration des normes d'aménagement et d'équipement et le contrôle de leur respect, - l'appui aux collectivités territoriales dans la conception de leur plan et schéma

d'aménagement."

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 34

1. La conception et le mode de suivi des programmes du type PNIR, doit requérir une attention particulière. Les risques de substitution par rapport aux acteurs existants et de création de nouveaux acteurs artificiels sont réels. On retrouve les problèmes de déconnexion entre des objectifs affichés et les pratiques car on ne s'est pas assez penché sur les modes de mise en œuvre, les responsabilités entre les acteurs. Ceci est du en partie à la conception de ces programmes en interne par des administrations qui veulent maintenir leur pouvoir et l'accès à des programmes sources de financements de leur fonctionnement.

d) Recherche 1. La réforme de la recherche a débuté au début des années 90 pour aboutir en 93 à une

évolution du principal institut de recherche, l'Institut d'Economie Rurale (IER). L'IER est devenu un EPA avec une autonomie de gestion, une déconcentration au niveau régional de ses services et la mise en place de commission impliquant les utilisateurs de la recherche.

2. Ces évolutions sont en cohérence avec la réforme globale du secteur. Pour l'instant elles n'ont pas porté leurs fruits. Malgré un rapprochement de la recherche aux besoins des producteurs, une volonté de mieux lier la recherche et la vulgarisation, force est de constater en final que le taux de reprise des thèmes vulgarisés reste faible.

3. Les nouvelles mesures prises, qui seront mises en œuvre dans le cadre du PASAOP, devraient pallier ces déficits. Le renforcement des commissions d'utilisateurs, l'introduction des utilisateurs "intermédiaires", la définition au niveau régional des programmes de recherches qui seront soumis à demande de financement sont autant de mesure qui devraient permettre de mieux répondre à la demande des producteurs et impliqués ces derniers dans les choix et le suivi des résultats. La volonté de mettre la recherche aux services des producteurs, de favoriser une concertation des acteurs est indéniable. Reste à suivre son application en souhaitant que le dispositif final soit simple et que la multiplicité des commissions et des organes n'aboutisse pas à une dilution des responsabilités.

e) Formation Non traité.

3.3. Fonctions relevant de services à caractère privé. IDEES – FORCES Les fonctions de production et commercialisation sont déjà transférées au secteur privé (hormis

la production de vaccins) et le débat porte sur les fonctions de services. Vulgarisation. Malgré le discours affiché de désengagement, l’administration est majoritairement

favorable au maintien de cette fonction dans l’appareil d’Etat. Bien que différents à plusieurs titres, les programmes PASE et PASAOP vont apporter plusieurs changements de fond en responsabilisant les producteurs dans la définition et le suivi des programmes de vulgarisation, leur exécution par des prestataires privés, et des mécanismes d’incitations et de concertation. Quelle que soit l’approche, il faut garder à l’esprit qu’un processus de transfert implique un pilotage rigoureux, un renforcement significatif des capacités des OP et CA, et la prise en compte de l’ensemble des facteurs déterminant le développement des exploitations (au-delà de la seule vulgarisation). Crédit. Dans ce domaine l’Etat s’est bien recentré sur ses fonctions régaliennes de conception et

contrôle des règles du jeu, parallèlement au développement de réseaux d’épargne-crédit, notamment mutualistes. La nouvelle législation permet d’appuyer ces évolutions mais il reste à résoudre les problèmes liés aux capacités financières des SFD et…. aux revenus des producteurs. Fourniture d’intrants. Le désengagement de l’Etat est déjà effectif dans la plupart des domaines

mais deux enjeux à court / moyen terme : (i) achever ce désengagement délicat dans la filière coton, (ii) développer la capacité des services publics à contrôler les normes, les contrefaçons et les produits périmés.

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Appui aux OP et CA. Bien qu’il s’agisse d’un objectif important de la politique sectorielle, que la place des OP et des CA soit reconnue, le MDR a peu avancé dans ce domaine. Pour l’avenir on peut tirer les enseignements de différents projets ou tests : (i) importance de l’accompagnement du processus notamment au niveau de la concertation entre les OP, (ii) besoin d’une démarche progressive sans brûler les étapes, (iii) nécessité de cibler l'appui sur des fonctions précises et structurantes à exercer par les OP. Le transfert de compétences implique un accompagnement plus conséquent, adapté à chaque situation spécifique et permettant l'apprentissage en commun par différents acteurs de cette nouvelle répartition des fonctions.

1. Le désengagement de l'Etat des fonctions de production et de commercialisation est

effectif. Les principales entreprises publiques du secteur agricoles ont été privatisées. Le secteur céréalier a été libéralisé au niveau de la commercialisation. Il ne reste d'entreprise publique sur les aspects production que le laboratoire central vétérinaire (LCV) pour la production des vaccins. La raison avancée pour le garder sous contrôle public est son caractère stratégique. Il reste à examiner les services de base offerts aux producteurs et à leurs organisations. Nous allons analyser les points saillants concernant : la vulgarisation et le conseil rural, le crédit, la fourniture d'intrants et l'appui aux OP.

a) La vulgarisation

Le PNVA8

1. La vulgarisation au Mali est synonyme de PNVA, programme national de vulgarisation agricole, mis en œuvre en 92 sur financement de la Banque Mondiale. Ce programme a pris fin avec les financements de la banque en 98. L'ensemble du territoire était couvert, sauf la zone CMDT qui disposait déjà de son propre encadrement et de son système de vulgarisation. La vulgarisation agricole visait principalement l'augmentation de la production agricole traditionnelle, principalement les céréales. Le projet ne prenait pas en compte les aspects commercialisation et marché mais ciblait la vulgarisation de techniques culturales.

2. La méthode utilisée est celle du "Training and Visit", T&V, visant à faire appliquer par les paysans des thèmes ou paquets techniques en alternant des sessions de formation et des visites sur le terrain. Un dispositif important de vulgarisateurs est mis en place, chaque vulgarisateur "encadrant" des groupes de paysans de contact (une trentaine de groupe de contact de 10 paysans par vulgarisateur). L'exemple donné par ces paysans de contact par l'application des recommandations techniques devait avoir un impact sur les autres agriculteurs. Le dispositif est très organisé avec une "chaîne de commandement" unique et n'intervient que sur cette tâche de vulgarisation. Un accent fort est mis sur la formation des agents du dispositif. Au Mali le projet PNVA employait près de 1200 agents.

3. Les résultats. Aucune donnée ne permet aujourd'hui au Mali de mesurer l'impact tant au niveau production qu'au niveau économique de ce programme. Le rapport d'achèvement du programme ne donne pas d'indication sur la reprise des thèmes et souligne le fait que les agents vulgarisateurs ne maîtrisent pas l'outil de diagnostic, diagnostic qui permet d'identifier quels sont les besoins des producteurs pour déterminer les thèmes à vulgariser. Dans la réalité le nombre de thèmes étaient restreint et leur choix était plus le fruit d'une décision du niveau central du PNVA que le résultat de diagnostic. Rares étaient les adaptations et les variations par région. D'autre part, les thèmes n'apportaient pas d'innovations techniques, le lien recherche-développement n'a pas fonctionné, la recherche n'a pas su alimenter le système de vulgarisation.

4. Autre handicap du système, les préconisations ne prennent pas en compte les possibilités d'adoption des techniques par les paysans quand celles-ci impliquent soit une amélioration de l'équipement donc l'accès au financement, soit une disponibilité en intrants. Ces deux facteurs déterminants font défaut dans beaucoup de zones. Autre cause d'échec, la non-prise en compte

8 La partie sur le PNVA s'appuie sur les travaux d'Hubert de Milly – Thèse

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dans la conception de ce programme des déterminants du marché. Même si certaines marges de progression technique existent (notamment dans l'utilisation de semences améliorées, l'utilisation d'intrants phytosanitaires), on ne peut faire l'impasse sur la capacité d'absorption du marché qui influe directement sur les prix.

5. Ces raisons expliquent en partie l'échec du projet, le rapport d'achèvement du PNVA ne pouvait que constater l'absence "adoption en vraie grandeur" des thèmes diffusés. Un des rares aspects positifs du projet a été la remise au travail d'une partie des agents du Ministère du développement rural. Force est de constater aussi que l'arrêt des financements de la Banque mondiale a entraîné l'arrêt des interventions de ces agents montrant ainsi que le système n'a pu développer une dynamique propre entre le ministère et les groupes de paysans "encadrés" depuis 6 ans.

Les évolutions en cours

6. Deux courants contradictoires se développent au Mali, d'une part les tenants de la

vulgarisation système T&V et d'autre part les partisans d'une approche centrée sur une analyse des besoins de l'exploitation familiale, la prise en compte des différents facteurs influant sur les choix de l'exploitant, dans lesquels l'aspect technique n'est qu'un aspect parmi les autres. La première approche s'oriente vers la reconstruction d'un appareil de vulgarisation de type PNVA sous la forme d'une agence de vulgarisation autonome, la deuxième approche sur le recours à des prestataires privés indépendants ou à des services mis en place par les chambres d'agriculture ou les OP. Ces deux tendances se retrouvent dans deux programmes en cours de mise en place : le PASAOP financé principalement par la Banque mondiale et le PASE financé par l'AFD. Parallèlement à ces divergences sur la conception de la vulgarisation, une autre divergence existe sur la responsabilité de cette fonction. Doit-elle rester dans le cadre des services de l'Etat ou a-t-elle pour vocation d'être privatisée ?

7. Ces deux options se retrouvent d'une part entre le PASE et le PASAOP mais aussi au sein du PASAOP où les deux options coexistent. Les différents tests conduits par le PASAOP au cours de sa première phase devraient permettre d'orienter les choix futurs. Cette double approche traduit les évolutions des pensées au sein du MDR et au sein de la Banque. Si une grande majorité reste attachée à un système de type PNVA, une minorité remet en question cette démarche, ce dispositif et propose une approche centrée sur la demande et maîtrisée par les producteurs ainsi qu'une concurrence entre les fournisseurs de services.

Le PASE 8. Dans l'analyse sur la filière coton nous avions signalé un programme financé par l'AFD destiné à

travailler sur les systèmes de production, le PASE. Un des volets est consacré à l'organisation du conseil aux exploitations, destiné à diffuser les acquis et les nouveaux itinéraires techniques définis dans ce même programme. Le conseil sera apporté à la demande par des prestataires privés maîtrisant ces questions, le principe retenu est l'accompagnement des producteurs dans l'analyse de leur exploitation et dans l'introduction des nouveaux itinéraires ou techniques particulières. Ce conseil associe le conseil technique et le conseil de gestion. Ce sont les producteurs et leurs organisations qui définissent leurs besoins et contractent avec ces prestataires. Le PASE assure une part du financement de cette intervention. Ce dispositif est rattaché à la chambre d'agriculture régionale ainsi qu'à la CMDT. Ce système novateur va créer une rupture par rapport au mode de conseil traditionnel actuellement en vigueur dans la zone CMDT, basé sur des messages techniques qui ne répondent plus aux besoins actuels des producteurs bien formés sur le coton et mieux structurés que dans les autres régions.

Le PASAOP 9. La composante PASAOP "appui à la vulgarisation" prévoit un volet de renforcement de l'appareil

de vulgarisation existant mais avec des améliorations concernant l'expression de la demande au niveau local par les producteurs, la conception de programme au niveau régional pour répondre à cette demande. L'appareil de vulgarisation se trouvant déconcentré, le niveau central se limitant aux aspects appuis en termes de méthodes aux régions ainsi que qu'au niveau de la formation (productions d'outils, formations des vulgarisateurs…), suivi-évaluation et programmation

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 37

financière. Une des orientations qui sous-tend cette orientation est la création à moyen terme d'une agence autonome spécialisée sur la vulgarisation.

10. Le PASAOP prévoit un deuxième volet avec un test de transfert des vulgarisateurs au niveau des communes et des OPA qui prendraient en charge progressivement les charges générées par l'exercice de cette fonction. Ce test touchera 160 communes sur 4 régions avec un retrait du dispositif de vulgarisation de l'Etat dans ces zones. Au cours de ce test, financé par le PASAOP avec une contribution de 20% des bénéficiaires, les mécanismes de financement durable seront recherchés.

Leçons 11. Le discours sur le désengagement de l'Etat, adapté à la fonction vulgarisation, reconnaît que

celle-ci est un service à transférer au secteur privé avec une forte implication des chambres d'Agriculture et des OP. Malheureusement entre le discours et les convictions au sein de l'administration il y a un écart important. Le sentiment majoritaire au MDR est que la vulgarisation doit rester contrôlée par l'administration. Certes la forme va évoluer et l'on s'oriente vers la mise en place d'une agence de vulgarisation. Cette agence même si elle intègre au niveau de ses organes des représentants des CA et des OP, risque de mal fonctionner car elle correspondra plus à un nouvel habit pour l'ancien dispositif PNVA qu'à un changement d'approche sur le fond. Au niveau CMDT, il y a les mêmes réticences. Même si l'appareil de vulgarisation CMDT est plus performant, il n'est pas prêt à laisser la place à un dispositif contrôlé par les CA et OP et exécuté par le secteur privé.

12. Les programmes PASAOP (pour sa partie test dans l'appui à la vulgarisation) et PASE (pour la composante conseil) introduisent des ruptures avec les anciennes approches et responsabilisent les CA et les OP dans la définition et le suivi de l'exécution des programmes de vulgarisation, l'exécution étant confié à des prestataires privés de nature différente (prestataire individuel, OP, ONG, BE). On retrouve dans ces programmes une dimension incitation et une dimension concertation entre les acteurs. Il n'est pas sur que les appareils de vulgarisation et d'encadrement en place laissent ces nouveaux dispositifs se mettre en place. Il faut s'attendre à des blocages et des résistances de leur part, résistances qui tireront profit de la faiblesse actuelle des OP, CA et du peu d'expérience des prestataires privés. Néanmoins l'expérience sur l'élevage avec le projet PASPE montre que ce type d'obstacle peut être levé.

13. Quelques points à retenir :

- Le pilotage du processus de transfert de la vulgarisation demande un suivi rigoureux pour que les orientations et les règles du jeu soient respectées. - Ce processus demande que les autres mesures de renforcement des capacités et des moyens des OP et CA soient prises. - Avant de se lancer dans la mise en place d'un système de vulgarisation, il s'agit aussi de prendre en compte quels sont les facteurs limitant de la production et quelles sont les marges de progrès possibles. On revient sur les nécessaires analyses de filières.

Enfin, les réflexions sur le transfert de charges sont au cœur de cette question. Un danger serait de considérer les communes comme la solution. Les communes ont peu de ressources et elles devront les orienter prioritairement sur les services de base de type santé, éducation, hydraulique et assainissement. La prise en charge est plus à rechercher au niveau des producteurs et de leur OP, y compris les CA. Cette question doit être traitée plus globalement dans le financement du secteur, des services, du système de taxation des différents produits agricoles et des choix de subventions.

b) Crédit rural 1. L'accès au crédit est une des contraintes essentielles pour le développement du secteur.

Le financement des producteurs est limité généralement à trois sources :

- la BNDA, principalement pour le financement des crédits de campagne, - les réseaux de caisse de crédit et d'épargne,

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- les lignes de crédits gérés dans le cadre des différents programmes. Les producteurs ont difficilement accès au crédit pour plusieurs raisons qui sont liées : - absence d'un système bancaire développé (faible implantation de la BNDA et nombre limité

des caisses d'épargne crédit), - difficulté pour les producteurs à présenter les garanties suffisantes aux banques, - faiblesse des revenus paysans dans la majorité des régions (hormis zones ON et CMDT), - fort endettement des associations villageoises dans certaines zones.

1. Les principales évolutions sont dues au dynamisme des réseaux d'épargne-crédit (appelé

aussi système financier décentralisé, SFD) dont le principal est Kafo Jiginew dans la région Mali-Sud. Ce réseau mutualiste est autogéré par les producteurs avec un faible appui extérieur. Les taux de remboursement sont très bons et les coûts de fonctionnement sont maîtrisés. L'Etat a fait évoluer sa législation en 94 pour permettre un meilleur développement de ces réseaux et leur intégration dans le système bancaire national. Aujourd'hui les différents partenaires au développement apportent leur soutien aux réseaux et les lignes de crédit ne passent plus par les programmes ou projets mais sont logés dans les SFD. Il y a désengagement aussi des ONG de cette activité au profit d'une professionnalisation des réseaux existants.

2. Sur cette fonction, l'Etat s'est bien recentré dans son rôle de conception des règles du jeu et de contrôle, en concertation avec les différents réseaux regroupés dans une association professionnelle. Les producteurs ont montré leur capacité à gérer de telles mutuelles. Certes le problème de l'encadrement du crédit pour éviter le surendettement des AV est toujours présent mais il est lié à (i) un déficit de l'Etat qui n'a pas réglementé l'ouverture des crédits par les banques commerciales sur des zones cotonnières ou ON, ces banques commerciales profitant que les crédits étaient adossés au paiement du coton ont abusé de cette facilité… et (ii) à l'inexistence de centrales des risques qui est pourtant une mesure "facile" à mettre en place entre les SFD et les autres banques, surtout là où des centres de gestion existent.

3. Si la nouvelle loi sur les coopératives (LEGISCOMA) permet une reconnaissance juridique de nombreuses associations jusque là "informelles" (aux yeux de la loi mais pas au niveau des activités économiques) et facilitera théoriquement l'accès au crédit, les autres problèmes de fond ne sont pas résolus pour autant. Ils sont liés d'une part aux capacités financières limitées des SFD, et d'autre part aux revenus des producteurs. Si les prix à la production ne permettent pas de dégager une marge suffisante pour investir dans l'équipement…alors le niveau de production et les rendements resteront faibles.

c) Fournitures d'intrants

Concernant les intrants phyto-sanitaires et engrais 1. L'Etat veut se désengager complètement de cette fonction. Il l'a fait sur les principales filières

notamment à l'ON. Il reste les intrants de la filière coton, maîtrisés par la CMDT. La CMDT s'est désengagée partiellement des intrants dits non-stratégiques. Une étude va être lancée dans le cadre de cette restructuration de cette filière pour la poursuite de ce désengagement. Mais des questions non résolues se posent : quelle incidence financière de ce désengagement (la CMDT assurait la distributions des intrants lors du ramassage du coton ce qui représente une économie d'échelle très importante), qui peut prendre le relais dans la gestion des commandes et de la distribution, comment va se négocier le financement de ces achats ? Le syndicat des producteurs SYCOV, souhaiterait assurer cette fonction, mais n'est-ce pas prendre un risque, vu les volumes financiers en jeu et le manque d'expérience de ce type d'opération et, par ailleurs, n'est-ce pas mélanger les fonctions pour un syndicat ? Le développement des implantations des sociétés privées d'intrants au niveau des villes intérieur (qui a débuté) qui répondrait à des appels d'offre groupés des AV n'est-il pas une solution plus réaliste ? L'Etat étant présent pour le contrôle de la qualité des produits mis en vente (respect des normes) et la CMDT informant les producteurs sur les produits appropriés conseillés…C'est sur l'établissement de ces nouvelles relations commerciales qu'un accompagnement peut être apporté en vue de garantir la régularité des approvisionnements.

Concernant les produits vétérinaires

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2. Nous avons vu la particularité de cette distribution pour le secteur élevage. Une réglementation pas adaptée permet à des grossistes de tenir le marché et de faire une concurrence déloyale aux vétérinaires privés. C'est la vente de médicaments qui assure aux vétérinaires privés des revenus suffisants, car la vente de soins restent peu développée. Cette réglementation vient de changer, reste à la faire appliquer, notamment par les agents d'élevage des services publics qui font aussi officieusement de la vente de produits phytosanitaires. Les problèmes de contrefaçon sont aigus soulignant l'importance de l'exercice par l'Etat de la fonction de contrôle parallèlement à son retrait des fonctions de distribution.

Concernant la production de semences 3. La production de semences certifiées pour les céréales est très faible. Pour les céréales sèches,

elle ne couvre que moins de 5 % des besoins et pour le riz 30 % des besoins. La production de R1 se fait dans des fermes d'Etat et la production de R2 par des paysans dits "semenciers" suivi par les ODR des zones concernées. Depuis 97 la production de R2 est testée au niveau de villages semenciers (20) facilitant le suivi et le conseil. L'Etat a choisi de se désengager de cette fonction de production et de commercialisation au profit de producteurs semenciers, en ne conservant que la production des prébases via l'IER, l'appui conseil des producteurs semenciers via la DNAMR et la certification des semences via la DGRC. Le PASAOP prévoit de financer l'accompagnement de ce processus.

Leçons 4. Le désengagement de l'Etat sur cette fonction d'approvisionnement des intrants est donc effectif,

sauf au niveau de la filière coton où la CMDT garde le contrôle des intrants stratégiques tout en préparant à moyen terme son retrait de cette fonction. Le problème de disponibilité des intrants est lié au faible réseau des distributeurs, faiblesse due à l'absence d'un réel marché. Ce marché se développera sur les filières "rentables" pour les producteurs et en fonction de leur accès au financement nécessaire pour l'achat des intrants. Ce marché reste fortement marqué par le non-respect des normes, la vente de contrefaçons ou de produits périmés. L'Etat doit renforcer les contrôles initiés dans ce domaine.

d) Fournitures de travaux et de services En dehors de la santé animale, déjà abordée, la disponibilité en fournitures travaux et services est faible. Nous ne développons pas ce point.

e) L'appui aux OP 1. L'un des trois objectifs de la réforme en 92 marquait l'importance accordée au développement des

acteurs non publics du secteur : "Les autres acteurs du monde rural, responsabilisés et structurés, disposent des capacités suffisantes pour assurer efficacement les fonctions institutionnelles et économiques de leur ressort." A cet effet le MDR entendait jouer un rôle important, mais non exclusif, dans l'exercice de la fonction d'appui aux OP. L’objectif de cette fonction est de développer les capacités des OP à assurer leurs fonctions économiques (services aux adhérents) ou institutionnelles (représentation / négociation).

2. Dans la pratique le MDR s'est contenté de jouer un rôle d'appui à l'enregistrement des OP. Il n'a pas mené de réelle action de structuration des OP autour d'une fonction et/ou d'une filière. Néanmoins dans le cadre du processus de transfert de compétence, la CAMOPA (cellule de mise en œuvre du plan d'action du MDR) veut engager une démarche d'accompagnement des OP pour l'exercice des fonctions transférées. L'enjeu de cet appui est de disposer au niveau de chaque filière de représentants les différentes professions en mesure de discuter et de négocier leur place dans la gestion de cette filière. Mettre en place des contrats-plans avec des OP qui n'ont pas les moyens de défendre les points de vue n'est pas suffisant. Les conséquences peuvent en être lourdes quand on aboutit à des situations de crise (cf. coton).

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3. Tous les partenaires au développement déclarent faire de l'appui aux OP, faire du renforcement de capacités. Dans la pratique on assiste à une multitude d'initiatives éclatées, souvent redondantes et dès fois coupées de la réalité du terrain. On lance des programmes de formation dont la finalité est d'avoir eu X sessions avec Y producteurs l'ayant suivi, rares sont les opérations d'appui qui se construisent sur la durée avec un accompagnement sur le terrain. Autre constat, le développement d'OP ou de structures artificielles crées pour répondre aux besoins d'un projet. La majorité de ces structures disparaissent avec le projet. Rares sont celles qui perdurent. Des producteurs ont répondu à une incitation…

4. Quelle forme d'appui ? Nous allons tirer quelques enseignements d'opérations porteuses pour l'avenir, en étudiant une démarche d'accompagnement des OP (AOPP), une opération ciblée sur le renforcement interne des OP (Centres de Gestion), un exemple de définition d'une démarche de transfert de la vulgarisation à une OP (pomme de terre).

AOPP

5. L'association des organisations professionnelles paysannes (AOPP), qui regroupe aujourd'hui 65

OP, est issue d'un lent processus d'appui aux OP initié par des associations françaises AFDI. De simples partenariats entre des AFDI et des groupes de producteurs est ensuite née une cellule d'appui aux OP (mise en place par l'AFDI et cofinancée par le MAE), puis une commission paysanne regroupant les principaux responsables paysans impliqués dans les partenariats AFDI et travaillant avec la cellule. Cette commission s'est formalisée sous forme de l'AOPP, pendant que le MAE avec l'AFDI renforçait leur appui au travers d'un programme d'appui aux OPA. Ce programme est une des composantes du programme de développement institutionnel du secteur rural financé par le MAE.

6. La démarche est un accompagnement des dynamiques paysannes en cours. Accompagnement qui se traduit par la mise à la disposition de moyens d'informations et d'échanges entre les OP existantes. L'objectif est "d'augmenter la capacité d'analyse et d'action des OPA". Les trois activités menées sont : "renforcer le débat entre les paysans, tester une démarche de conseil agricole par la demande, développer des axes de travail spécifiques définis par les OP." A cet effet l'AOPP dispose de trois outils : un fonds d'appui aux initiatives paysannes, une cellule d'animation et de gestion et un comité paritaire de concertation. Ce comité permet d'impliquer l'administration dans un dialogue avec les OP autour des thèmes liés à la professionnalisation, les besoins d'évolution du cadre institutionnel... L'AOPP est aujourd'hui reconnue par le MDR.

7. Si l'AOPP s'est révélé être un bon outil pour le développement des capacités des responsables des OP (multiplication des échanges réguliers, travaux sur des thèmes d'actualité, utilisation du fonds d'appui pour l'organisation de formations et de conseils ciblés sur des demandes locales précises de groupes de producteurs), par contre on n'est pas encore dans une situation où ces responsables sont en mesure d'être une force de proposition face à l'administration, ni dans une situation de négociation. Un long travail de formation est encore à prévoir, d'autant plus que si l'administration "tolère" l'AOPP, elle ne saisit pas cette opportunité pour construire de nouveau rapport et aider ces responsables paysans à construire des propositions. L'AFDI souligne un danger à ne pas respecter le nécessaire rythme d'apprentissage des OP. Si les bailleurs exigent trop des OP par rapport à leur capacité réelle, le risque est de voir se créer un mouvement élitiste, parlant le même langage que les bailleurs, mais qui se coupe de sa base et fonctionne pour lui-même.

Les centres de gestion rurale 8. Le Projet Gestion Rurale a démontré comment, dans le cadre du renforcement des OP, une

fonction de conseil pouvait être assurée par des OP. On retiendra que la démarche de départ a été pragmatique amenant une complète révision de la conception théorique du projet passant d'un objectif de centre de formation subventionné à un dispositif de centres de gestion dirigé par les OP et financé par la filière. Cette refonte et le développement du dispositif ayant été conduit par les OP avec l'équipe projet en accompagnement (fonction d'animation) et apportant l'expertise technique (comptabilité) à transférer aux prestataires. Deux critères d'évaluation servaient d'indicateurs clés : le paiement par les adhérents des cotisations finançant les centres (traduction

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du besoin du service et de son adéquation) et la production régulière, dans les délais, et fiable des différents états comptables (niveau du service). Malgré une progression régulière en terme d'adhésion (près de 1000 AV adhérentes), les difficultés n'ont pas manqué. Les difficultés rencontrées par la suite sont liées (i) à la reprise par la CMDT du projet, au départ fortement autonome, et le paiement par la CMDT des cotisations en substitution aux AV engendrant une "désappropriation" partielle des responsables des OP, (ii) au rythme de croissance "imposé" très rapide, alors que la démarche n'est pas exponentielle mais demande à être reprise complètement pour chaque nouvelle implantation de centre, (iii) aux difficultés de gestion du projet induite par l'introduction d'un nouvel acteur, un bureau d'études national, co-opérateur avec le bureau français, complexifiant de ce fait la structure projet et ne favorisant pas cette appropriation par les responsables paysans. Relations tutelle, "équipe projet" et centre de gestion, respect des rythmes tout en cherchant une démultiplication rapide, couverture des coûts du service, voilà trois facteurs sur lesquels la mise en œuvre de projets de ce type bute. Du type de réponse dépend la pérennité de l'opération. Une démarche similaire a été développée dans la zone de l'Office du Niger avec les Centres de Prestations de Services.

Transfert de vulgarisation aux OP de la filière pomme de terre

9. Dans le cadre des tests menés par la CARI (ex-CAMOPA) sur les transferts de fonction du

MDR, un travail a été effectué sur le thème du transfert de la vulgarisation aux producteurs. L'objet était de définir sur le terrain, région CMDT, une démarche consensuelle entre les différents acteurs impliqués, en premier lieu les producteurs. Un groupe de travail a réuni des représentants des producteurs (leur association régionale qui connaissait des problèmes de fonctionnement), la CMDT (qui assurait jusque là encadrement, fourniture intrants et caution du crédit), l'APROFA (agence de conseil pour le développement des filières, rattachée au MDR) et un représentant du MDR. L’analyse menée par le groupe de travail a ouvert les axes d’évolution suivants pour la filière : Mise en place des groupements spécialisés de producteurs (sortant des AV traditionnelles), Reconstruction de l’association régionale, Prise en main par l’association du recensement des besoins en intrants et des crédits, Prise en main de la vulgarisation par les groupements et leur Association, devant aboutir au recrutement par l'association au bout de 3 ans d'un technicien spécialisé.

10. Deux phases ont été identifiées pour la mise en œuvre de l’évolution de la filière : (i) une phase préalable d’orientation de la filière avec pour objectifs de retravailler avec les différents groupements et leurs partenaires sur ces propositions pour aboutir à une table ronde sur la filière avec un consensus sur les évolutions, le rôle de chaque acteur, les activités à mener, (ii) une phase d’opérationalisation des actions permettant de faire évoluer le rôle des acteurs sur deux activités clés et leur prise en charge progressive par les producteurs : (i) le recensement des besoins en intrants et la gestion des crédits et (ii) la vulgarisation. La gestion des crédits et des intrants impliquait de travailler sur la garantie de ces crédits et la possibilité de mettre en place un fonds de garantie. Des mesures d'accompagnement étaient prévues, les coûts additionnels pour l'accompagnement concernaient principalement : la tournée d’information au sein des AV (pris en charge par la CMDT), la visite dans un autre pays du fonctionnement de la filière pommes de terre, un appui à la mise en place d’un fonds de garantie ainsi que quelques actions de conseils sur la première année à caractère de démonstration et d'incitation. Ce qu'il y a lieu de retenir dans cette opération, c'est la démarche de concertation entre les acteurs, concertation qui abouti à une même vision de l'évolution de la filière, qui abouti au choix des actions à mener et au rythme à respecter. Cette démarche a été retenue par le MDR comme méthode de travail dans les différentes régions pour définir un programme de transfert adapté à chacune. Ce travail est en cours, ces programmes de transferts devraient être financés dans le cadre du PASAOP.

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4. ENSEIGNEMENTS DE LA CONDUITE DU CHANGEMENT DANS LE SECTEUR RURAL AU MALI

Cette dernière partie tire les principaux enseignements des évolutions en cours dans le secteur rural au Mali ainsi que des contributions de l'aide française. Ces enseignements permettent d'ébaucher une démarche d'appui institutionnel. IDEES – FORCES La conduite du changement au sein du secteur du développement secteur s'opère

difficilement. Malgré que la réforme du secteur initiée en 92 soit le fruit d'une réelle volonté politique, la mise en œuvre a été bloquée par la réticence des administrations et l'absence d'un savoir-faire pour conduire ces changements et mettre en place les modes opératoires adaptés. Les évolutions ont été surtout les conséquences de crises au sein des filières. Si les objectifs de la réforme de 92 restent pertinents et d'actualité, le bilan de la réforme

est très limité. Le MDR est recentré mais en rien renforcé, assurant difficilement ses nouvelles missions. Les autres acteurs ne disposent pas encore des capacités suffisantes pour assurer une concertation équilibrée et être force de propositions dans les négociations. Outre l'absence d'un réel pilotage de la réforme tant au sein du MDR que du gouvernement, le mode de fonctionnement du MDR est le principal obstacle ainsi que le mode de gestion des ressources publiques, humaines et financières. Néanmoins cette réforme a lancé une dynamique qui semble irréversible, sa relance et les moyens mis à disposition devraient permettre d'atteindre des résultats significatifs au cours des 5 prochaines années. L'aide française contribue à la conduite du changement. Son approche dans le secteur du

développement rural a évolué d'une approche strictement filière et production à une approche de mise à disposition du producteur des services qui lui sont nécessaires pour développer son exploitation. Si les appuis de l'aide française visent à agir de manière cohérente sur les différents niveaux allant de l'appui à la conduite de la réforme (appui à la CAMOPA, réforme du MDR, transferts de compétences) à sa déclinaison par filière (restructuration des offices, développement des OP et des services, accent sur les systèmes d'information), les résultats sont hétérogènes, notamment limités dans l'évolution des Offices, pour les causes indiquées précédemment. Néanmoins l'intervention dans la durée et la synergie des actions contribuent à préparer les acteurs tels les OP, CA et CT à prendre la place qui leur revient. Les approches, les méthodes et outils préparés au cours des dernières années servent de points d'appuis pour la relance de la réforme. L'ébauche d'une démarche d'appui institutionnel est proposée, elle sera développée dans

les étapes ultérieures de l'étude.

4.1. Facteurs à prendre en compte 1. La libéralisation de l'économie malienne au cours de ces 15 dernières années a abouti à un

désengagement de l'Etat des fonctions de production et de commercialisation, et aujourd'hui à un transfert de certaines fonctions de services aux OP, CA ou à d'autres acteurs privés.

2. Choix économiques, choix politiques, disponibilités de ressources financières, plusieurs facteurs interdépendants influent sur l'évolution du rôle de l'Etat dans les différents secteurs économiques. Toutefois, le secteur agricole est un secteur plus "sensible", du fait qu'il touche 80 % de la population, et que l'économie du pays repose en grande partie sur quelques filières clés (coton, riz et élevage). Cette situation justifie que l'Etat, tout en se désengageant des fonctions dites "transférables" et "partageables", garde une forte capacité à piloter le secteur et à le défendre.

3. Dans ce contexte de mutation, la conduite des changements institutionnels est délicate. Si les orientations générales peuvent être définies, si on peut s'accorder sur le nouveau partage des

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fonctions entre les acteurs, par contre leur mise en application ne peut être linéaire et homogène quel que soit le sous-secteur ou la filière. Plusieurs facteurs entrent en compte, principalement :

- la capacité de l'Etat à orienter le secteur et à faire évoluer la législation et la réglementation en conséquence,

- la situation économique de la filière, la structure des coûts de revient et des marges qui jouera sur la possibilité de prise en charge de certaines fonctions par des acteurs non-publics,

- le poids des règles du jeu internationales, normes, concurrence… qui peuvent modifier l'intervention des acteurs,

- les facteurs limitant au développement de cette filière, qui décideront des priorités d'action, des moyens à privilégier,

- le degré de structuration de la filière et les capacités de chacun des acteurs impliqués.

Il n'existe aucune situation identique et aucune situation idéale où toutes les conditions favorables sont remplies.

1. Le cas d'études malien montre bien ces différences de situation par filière et les conditions qui ont

prévalu aux changements. Ce cas montre aussi les limites d'une approche purement filière et des freins que constituent les questions transversales, notamment le foncier et le crédit, quand elles ne sont pas résolues. On constate au Mali que les changements sont nés :

- d'une pression économique qui a amené les réformes liées aux ajustements structurels,

- de crises alimentaires (céréales) ou financières (coton), - d'évènements politiques (91) avec une volonté de changements et la mise en place

des mesures politiques allant dans ce sens (états généraux, réforme MDR), Puis le cours des changements souhaités a été influé diversement par : - la réaction des administrations voulant conserver leurs prérogatives, - la rigidité des offices puissants ne se remettant pas en cause, - des crises financières accélérant ces changements, - des négociations avec les bailleurs de fonds crédit fonction des rapports de force du

moment, - … des fois, quand on les oubliait trop, de mouvements paysans (coton).

1. En dehors de la conception de la réforme du secteur rural, qui reflète bien le résultat d'une volonté

politique au départ, on constate que les changements dans ce secteur sont plus subis que préparés. Il y a peu d'anticipation. Ce manque d'anticipation conduit à un désarmement pour la mise en œuvre de ces changements :

- on ne sait pas concevoir et mettre en place des modes opératoires adaptés, - chaque acteur a des difficultés à prendre en main sa nouvelle fonction, - les acteurs ne savent pas comment travailler entre eux sur la base de la nouvelle

répartition des fonctions et de responsabilité.

Ces facteurs expliquent en grandes parties le bilan négatif de la conduite de la réforme au Mali. A contrario, l'exemple de la conduite du processus de décentralisation montre les résultats que les autorités maliennes peuvent obtenir quand il y a une forte volonté politique, une continuité et des ressources humaines de qualité.

4.2. Conduite de la réforme du secteur

Bilan de la réforme 1. A ce jour les objectifs de la réforme du secteur rural n'ont pas été atteints. Concernant le 1er

objectif, "Le dispositif de l'Etat recentré et renforcé contribue avec efficience au développement rural". Si le MDR est effectivement recentré, il n'est pas renforcé et les transferts de fonctions prévus ne sont pas encore effectifs en dehors de la médecine vétérinaire. Si le MDR a pris en main la fonction de contrôle et réglementation, par contre il reste faible sur les fonctions de pilotage, de définition des politiques, d'analyses prospectives et il n'est pas en

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mesure d'assurer les missions d'appui tel l'appui aux filières. Le constat quasi général est celle d'un ministère en panne, fonctionnant avec difficulté. Le manque de moyens humains et financiers n'explique pas tout, ce facteur a augmenté la démobilisation des agents suite à une remise en cause de fait des principes de la réforme. Deux déficits majeurs sont à retenir : (i) la décision du gouvernement de créer une direction de la conservation de la nature remettant en causes deux principes clés de la réforme (séparation contrôle et conseil, vision intégrée de la GRN) et (ii) le mode de management du MDR dont la première erreur a été l'affectation non rationnelle des agents après la restructuration du MDR (non prise en compte de l'adéquation profil-poste, maintien d'une gestion des RH clientéliste).

2. Concernant le 2ème objectif, "les autres acteurs du monde rural, responsabilisés et structurés, disposent des capacités suffisantes pour assurer efficacement les fonctions institutionnelles et économiques de leur ressort". Si aujourd'hui la place des OP et CA, ainsi que les collectivités territoriales, est reconnue, par contre elles sont loin de disposer des capacités pour assumer les compétences qui leur sont dévolues ou qui vont leur être transférées. Le principal déficit est avant tout le manque de ressources financières qui leur permettraient de mieux se structurer et de disposer de cadres à plein temps pour leur développement. Cette faiblesse ne doit pas occulter la progression de plusieurs organisations ou regroupements (SYCOV, SEXAGON, AOPP…). Le deuxième déficit est le faible nombre de programme d'accompagnement construit sur la durée et ciblé sur l'exercice de fonction. Cette situation traduit une implication insuffisante des pouvoirs publics dans ce domaine et une mauvaise conception des modes opératoires des programmes existants.

3. Concernant le 3ème objectif, "Les relations entre acteurs sont basées sur l’information, la concertation, le partenariat et la prestation de services adaptés". Sur ce point un pas est franchi. De manière générale la démarche de concertation entre les acteurs est devenue la règle. Le point faible est le déséquilibre entre les acteurs dans ces concertations. Les OP et les CA n'ont pas encore les capacités pour établir une négociation "d'égal à égal" sur les différents dossiers. Autre incidence de cette faiblesse : elle permet au "maître du jeu" de garder la main et de n'utiliser ces concertations que comme faire valoir d'une participation des producteurs et d'éviter des discussions de fond. Les risques de cette pratique sont élevés dès qu'une crise surgit.

4. Si le bilan de la réforme est aujourd'hui limité, la dynamique de changement est bien enclenchée et semble irréversible. Les différents acteurs prennent leur place, les transferts de fonction commencent à s'opérer, les outils de concertation s'améliorent. Le MDR essaie de reprendre sa place comme un véritable pilote du secteur rural en assurant notamment une meilleure tutelle des Offices et une implication des producteurs. Si cette dynamique est lancée, la question est maintenant de bien la conduire. L'échec de la réforme est imputable à son mode de mise en œuvre et non à sa conception ou à ses objectifs. Cette mise en œuvre pour les années à venir peut être aussi bien accélérée que retardée. Si le MDR veut jouer son rôle, une révision en profondeur de son mode de fonctionnement est nécessaire.

Les propositions en cours de discussion

5. Sur la base des problèmes rencontrés pour mettre en œuvre la réforme, des mesures sont en cours de discussion au sein du MDR pour affiner sa stratégie de développement institutionnel. L'analyse des déficits faisant ressortir un important déficit de pilotage et de management au sein du MDR, déficits qui ont une incidence directe sur l'exercice des différentes fonctions, les mesures proposées sont concentrées sur :

- le pilotage interne au MDR, au niveau du secrétariat général avec notamment la mise en place de la fonction de développement institutionnel, et de l'outil SADCI testé avec succès au sein du MDR,

- une évolution de la gestion des ressources humaines et financières avec notamment la négociation avec le ministère de la fonction publique d'une plus grande autonomie dans la gestion du personnel et une déconcentration au niveau régional de la gestion des ressources, la mise en place d'outils stimulants de gestion des RH,

- une rationalisation des directions du MDR en tenant compte d'une relecture des fonctions à exercer, avec une évolution du mode de travail permettant une responsabilisation des cadres sur des objectifs, une meilleure prise en compte des différents niveaux d'intervention (national, régional, local et intercommunal), l'utilisation de

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l'outil SADCI pour identifier les déficits et y remédier, (des mesures spécifiques sont proposées au niveau de chaque direction),

- un plan de rajeunissement et de recrutement des RH du MDR, permettant une revue des besoins effectifs, une redistribution du personnel suivant l'adéquation profil-poste et le recrutement de nouveaux agents et un plan de formation,

- l'amélioration des relations entre le MDR et les autres acteurs en favorisant l'instauration d'un cadre unique de concertation au niveau régional, en accompagnant les transferts de compétences au niveau de chaque région, et faisant évoluer les modes opératoires des différents projets et programmes et en recherchant des sources de financement pérennes pour les OP et CA.

1. Une autre proposition concerne le pilotage de la réforme du secteur, tirant les leçons de

l'expérience de la CAMOPA. Sous la présidence du ministre du développement rural une instance de suivi de la mise en œuvre de la réforme pourrait être instaurée. Cette instance aurait une vision globale du secteur, regrouperait les principaux acteurs publics et non-publics. Elle jugerait de l'avancée cohérente de la réforme dans les différents sous-secteurs, permettrait d'interpeller les organismes ou programmes ayant des pratiques divergentes aux axes de la réforme et elle éviterait que la réforme soit seulement l'affaire de l'administration du MDR. Elle permettrait aussi d'associer les ministères clés comme l'environnement, les finances et la fonction publique ainsi que le commissariat aux réformes institutionnelles, concernés par certains aspects de la réforme. Elle aurait aussi un poids suffisant pour veiller à une cohérence d'ensemble avec les autres décisions gouvernementales.

2. Cette proposition est d'autant plus justifiée que dans sa majorité l'administration n'est pas porteuse des changements. Ces changements viennent avant tout d'une impulsion politique (dont les motifs peuvent être variés). Pour contourner et dépasser les réticences des administrations en place, le pouvoir politique, souvent avec l'appui de ses partenaires extérieurs, a mis en place des cellules chargées de piloter et mettre en œuvre ces réformes. Les résultats ont été très variables suivant le pouvoir effectif dont ces cellules disposaient, leur rattachement et leur champ d'intervention. Le cas de la CAMOPA a montré les limites d'une cellule en charge d'appuyer la mise en œuvre la réforme, (plus exactement le plan d'action de la réforme), positionnée au sein du MDR et rattachée au cabinet du ministre. Naviguant à contre courant du reste du ministère, pas soutenue par les hautes instances du MDR, elle s'est trouvée progressivement marginalisée par le reste de l'administration. Néanmoins elle a permis un maintien des orientations, aboutir à la restructuration, a pu faire avancer des dossiers clés comme les transferts et peser sur les orientations des programmes à venir comme le PASAOP. Par contre elle n'a pu influer sur les pratiques des directions, sur la gestion des ressources humaines, ni sur la décision de créer la DNCN. Aujourd'hui, avec une relance de la réforme, dû à un changement de tête au niveau du MDR, la CAMOPA, rebaptisée CARI, est réintégrée de manière effective au sein du MDR avec deux mandats : l'implantation de la fonction de développement institutionnel et la conduite des transferts de fonctions.

3. A noter que la méthode SADCI (Système d'Analyse et de Développement des Capacités Institutionnelles) a été utilisée par le MDR au moment de sa restructuration. Elle a permis à chaque direction de travailler sur ses objectifs, ses activités et l'affectation des tâches. Des tests ont été réalisés avec succès sur son utilisation pour identifier en interne les déficits, rechercher des solutions. Ces tests ont démontré l'intérêt de cet outil pour mobiliser les équipes autour d'objectifs clairs. Si l'arrêt de la réforme n'a pas permis de diffuser la méthode comme prévu, elle a été néanmoins retenue pour être l'outil de pilotage institutionnel du MDR dans le cadre de la relance de la réforme.

4.3. L'apport de l'aide française dans la conduite de ce changement et ses limites Synthèse

1. L'aide française a connu une évolution au cours de ces dix dernières années. Ciblée auparavant

sur les filières et la production avec comme principal interlocuteur les offices, elle a évolué sur une approche mettant le producteur et son exploitation au centre des préoccupations.

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Les interventions de ces dernières années montrent bien cette évolution, (i) les appuis aux filières englobent le développement des OP et dans une moindre mesure la prise en compte des facteurs limitant à la production autre que ceux liés à la technique et (ii) le travail sur le système d'exploitation amène à dépasser une approche limitée à la filière dominante. On passe d'une approche "production" où la porte d'entrée était les ingrédients nécessaires pour développer cette production, à une approche "services". Quels sont les services qui sont nécessaires pour que les agriculteurs développent leur exploitation ? Le crédit, le conseil agricole, la sécurisation foncière sont mieux pris en compte. Cette approche permet de déterminer les priorités d'appui, même si elles sont souvent le fruit d'opportunités que l'on a su exploiter. Les résultats traduisent les difficultés de travailler avec des acteurs se situant dans des logiques différentes, pour certains hostiles au changement, et ayant des capacités différentes. Les appuis traduisent une volonté de faire évoluer de manière "cohérente" ces acteurs, allant d'un appui global à la réforme à sa déclinaison dans les secteurs de concentration de l'aide (CMDT, ON, élevage), avec des outils une recherche d'optimiser les outils disponibles (AT, fonds d'études, financement des plans de restructuration ou la mise en place de système d'information, projet…). Si les résultats sont hétérogènes, ils ne remettent pas en cause le bien-fondé de cette démarche globale et permettent de tirer des enseignements sur les modes d'intervention à privilégier. Les interventions privilégient l'incitation, à travers la conduite d'apprentissage de l'exercice des fonctions dans le cadre de la nouvelle répartition des rôles. Ces appuis n'auront un réel impact que s'ils s'inscrivent dans la durée et si leur complémentarité permet un effet de levier (exemple action simultané la prise en main du pilotage de la filière coton par le MDR, financement des études conduisant la restructuration de la CMDT, développement des capacités du SYCOV à négocier et des OP de base et des prestataires à assurer leurs fonctions économiques). Les principales limites rencontrées par l'aide française sont dues (i) au manque d'appui politique pour conduire les réformes à leur terme, (ii) à une opposition d'une grande partie de l'administration à accepter le changement et (iii) aux limites des appuis à une fonction publique vieillissante, obsolète, au mode de management dépassé.

Les principales contributions de l'aide française

2. Concernant l'Office Niger. L'intervention de l'aide française pour peser sur l'évolution de l'ON

montre ses limites face à un Office puissant réticent au changement. Malgré l'appui continu et régulier de l'aide française, il a fallu attendre 1994 avec une dégradation financière de l'ON pour que sa restructuration soit envisagée. Aujourd'hui encore, les données permettant une analyse économique des investissements ne sont pas fiables. Malgré le contrat-plan, malgré le nouveau contrat de gérance, l'ON reste hostile au transfert de fonction aux usagers et à leur structuration. L'Etat, à travers le MDR, n'assure pas encore de façon satisfaisante la tutelle. Si les apports de l'aide française et des autres partenaires ont eu une incidence positive sur les aspects techniques (réhabilitation, entretien, amélioration des rendements), les interventions à caractère institutionnel ont jusqu'à ce jour un impact limité malgré leurs apports qualitatifs (CPS, URD-OC, appui système d'information, appui au SEXAGON). Néanmoins ils préparent les OP à prendre leur place dans le dispositif ainsi que les outils.

3. Concernant l'élevage. Alors que les dispositions prises par les autorités dans le domaine de la

santé animale semblaient en avance au niveau des transferts, les pratiques, l'inadéquation de la législation et de la réglementation, bloquèrent ce transfert. L'aide française est intervenue sous deux angles : l'AT (au niveau de la direction de l'élevage jusqu'à la restructuration et via l'AT au sein de la CAMOPA) et la mise en œuvre du projet PASPE. L'AT institutionnelle a été vite bloquée par l'administration en charge de l'élevage, les propositions d'évolution des textes ont été freinées, les questions de fonds occultées… Par contre le projet PASPE a pu mettre en œuvre une opération pilote concrétisant le transfert. La mise en route de cette opération a été possible car la porte d'entrée choisie ne présentait pas pour les acteurs en place un enjeu particulier (vaccination des volailles). Par ailleurs l'AT institutionnel a pu appuyer et relayer l'équipe du projet lorsque des obstacles se sont présentés. Le succès de la première phase a permis de basculer pour une seconde phase sur une échelle plus importante. Les enseignements à retenir de ce projet concerne (i) sa conception, chaque acteur est pris en compte en fonction de ses prérogatives, (ii) sa mise en œuvre avec un mode opératoire permettant une délégation de maîtrise d'ouvrage au CA, une contractualisation de l'exécution des actions par les prestataires privés répondant à des demandes d'éleveurs et un contrôle par les services de l'Etat. Le projet a

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pu mettre les acteurs en situation de concertation régulière autour des fonctions de vaccination et de formation. Le PASPE a joué un rôle d'incitation et a constitué un cadre d'apprentissage pour les acteurs publics et privés de nouvelles modalités de travail. Cette méthode est reproductible pour peu de l'équipe d'animation du projet ait une capacité suffisante de compréhension des enjeux, des rapports de force sur le segment de la filière où elle intervient et qu'elle dispose d'une capacité de flexibilité et d'autonomie pour ajuster son intervention. Le fait de disposer au niveau "institutionnel" de relais ou point d'appui est aussi une garantie double : (i) sécurité en cas de blocage par l'administration et (ii) apport critique d'une personne n'étant pas impliquée au quotidien dans la projet. On retrouve une reprise de cette approche dans d'autres programmes comme le PASE, et les tests dans PASAOP.

4. Concernant la filière coton. Outre les financements pour le développement de l'outil industriel et les pistes, l'aide française a apporté un appui significatif aux acteurs de la filière CMDT, en premier lieu la CMDT qui bénéficié par deux fois lors de crises financières graves de subventions conséquentes. Force est de constater que les différents soutiens à la CMDT n'ont pas abouti à une société ayant une gestion performante. Les recommandations des bailleurs de fonds n'ont été prises en compte que du fait de la crise actuelle. Par contre, le fait que l'aide française travaille parallèlement, sur la durée, à l'appui aux OP (SYCOV et AOPP, au renforcement des OP de base avec le Projet Gestion Rurale) et a apporté des appuis plus globaux à travers des projets de développement local – gestion de terroirs, a fortement contribué au renforcement des capacités de ces OP et de responsables paysans. De même les appuis au secteur bancaire (BNDA, Kaffo Jiginew) ont permis aux producteurs un meilleur accès au crédit. L'appui à la cellule de suivi-évaluation de la CMDT permet, à la différence d'autres filières, de disposer aujourd'hui de données relativement fiables sur le développement de la zone. Malgré les réticences de l'appareil de la CMDT, les évolutions du dispositif d'appui aux producteurs sont inéluctables, les interventions de l'aide française concourent à les accélérer à travers les différents projets pionniers, mais ces évolutions seront d'autant mieux conduites qu'un accent plus important sera mis sur la fonction de pilotage de la filière et que les OP seront en mesure de participer à égalité avec l'Etat et la CMDT à ce pilotage. A noter que l'aide française a contribué à faire évoluer l'approche de la filière, ciblée auparavant sur la CMDT et la production, elle prend en compte maintenant comme "cible privilégiée" le producteur et son exploitation.

5. Concernant l'appui au MDR. Le MAE a accompagné la réforme du MDR à travers une composante spécifique de deux programmes consécutifs : "l'appui à la décentralisation et à sa mise en œuvre en milieu rural" puis "l'appui au développement institutionnel du secteur rural". Cet appui concernait la CAMOPA, la CPS et au cours du deuxième programme la question foncière. Ces appuis étaient organisés avec trois outils : AT, un fonds d'études et de formation et une subvention de fonctionnement. Un comité de pilotage est mis en place pour chaque domaine afin de décider de l'affectation des fonds pour les études.

6. Concernant l'appui à la CAMOPA, au vu du bilan à ce jour de la réforme, de la marginalisation de la CAMOPA, on aurait tendance à douter de sa pertinence. Néanmoins ce sont les travaux et la présence de la CAMOPA qui, après avoir lancé la réforme, ont empêché de l'enterrer complètement, qui ont fait avancer plusieurs dossiers clés et ont maintenu les acquis et un niveau de réflexion et de débats en rapport avec les orientations de la réforme, même si les décisions ne suivaient pas. On peut citer la réorganisation des directions du MDR, les premiers travaux sur les RH, les interventions sur les dossiers élevage, développement institutionnel, transferts de fonction, les contributions critiques à la préparation des différents programmes dont le PASAOP, dernièrement le bilan de la réforme et propositions… Aujourd'hui la relance de la réforme, montre le bien-fondé d'avoir maintenu cette cellule et pour l'aide française d'y avoir investi. Dans ce cas de figure aussi, des outils ont été mis au point et testés au cours de ces dernières années et commencent à être valorisés dans le cadre de la relance de la réforme (outils pour le transfert de compétence, outils de développement institutionnel SADCI). Le travail de la CAMOPA a été freiné, voir bloqué, du fait de l'absence de pilotage de la réforme. Néanmoins le maintien de la présence d'AT et la disponibilité d'un fonds pour financer des études et des opérations tests ont été les outils clés pour le développement et le maintien des acquis la CAMOPA. La reprise aujourd'hui par le PASAOP d'une grande partie des acquis de la CAMOPA et le financement de leur mise en œuvre à l'échelle nationale conforte ce choix.

7. Concernant l'assistance technique à la CPS (politiques et foncier). La pertinence d'appuyer la CPS est bien ressortie de l'analyse fonctionnelle et des déficits en terme de conception des

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orientations et des stratégies, de traitement des données et de l'évaluation des politiques. Les difficultés rencontrées par l'AT pour remplir sa mission sont riches d'enseignement et de questionnement sur cette forme d'appui. D'une part cette assistance technique était plus une volonté de l'aide française, qu'une véritable demande de la CPS, d'autre part les cadres de la CPS avaient une vision différente du rôle de l'AT. Ils le considéraient comme un exécutant devant aussi produire des études. L'AT de son côté conçoit sa mission comme un appui et non comme une substitution. Constat : les cadres n'acceptaient de travailler sur des dossiers "portés" par l'AT que s'ils étaient rémunérés en sus de leur salaire, en plus le manque de qualification de ces cadres ne permettait pas d'avancer suffisamment loin dans les dossiers. A noter une initiative réussie de l'AT par l'organisation de travaux sur l'OMC avec les responsables paysans et les cadres du MDR. Cette action volontaire de l'AT a permis aux cadres du MDR d'apprendre à travailler avec les responsables paysans sur ce type de dossier. Cette action a démontré comment l'apprentissage des nouveaux rapports administration-OP peut s'opérer concrètement. Le cas de figure de l'AT sur le foncier est aussi instructif. Placé dans la CPS, l'AT se trouve dans une situation de totale substitution car elle est considérée comme un cadre à part entière de cette cellule et n'avait pas d'homologue jusqu'à présent. Cette situation n'est que la conséquence du fait que le dossier sur le foncier n'est pas porté par le MDR, qu'il n'existe pas de compétence au sein du MDR sur ce dossier et qu'il y a un refus de la CPS de rentrer dans cette démarche. Résultat pour l'AT, elle doit prendre et mener des initiatives quasiment en "sous-marin", comme les travaux menés avec les responsables des OP pour les préparer à participer au débat national sur ce thème. On voit ici les limites de la fonction d'incitation dans un cadre qui reste, pour l'heure, hostile. Mais ici encore, on revient sur des déficits qui ne trouveront pas leur solution dans le service concerné mais dans (i) le mode de fonctionnement global du MDR (mode de management, modalité de travail, qualification du personnel et gestion des ressources humaines) et (ii) le pilotage de cette réforme (pourquoi un dossier aussi sensible pour le secteur n'est pas pris en charge par le MDR ?).

8. Quelles conditions préalables sont nécessaires pour la mise en place d'un AT ? Quelle est la limite dans sa mission entre l'apport technique et la fonction d'animation ? Question qui pose celle du profil à rechercher et de la formation à donner aux AT qui vont se retrouver dans ces conditions. Le manque de souplesse dans l'ouverture ou la fermeture des postes d'AT est aussi un frein pour une gestion flexible des AT par le SCAC. Un AT seul est "condamné" dans des conditions défavorables. Par contre un AT qui se trouve comme une pièce d'un dispositif cohérent d'intervention de l'aide française, dont l'intervention est en synergie avec d'autres AT (ici par exemple avec la CAMOPA, appui AOPP, travaux sur les filières…), a plus de chance d'obtenir des résultats et de profiter d'un effet de levier. Au niveau du Mali, une des forces de l'aide française a été de jouer cette complémentarité des interventions, tant au sein des opérations du SCAC qu'entre le SCAC et l'AFD. Il est à relever la répartition des interventions entre le SCAC et l'AFD ne se fait pas sur la base des sources de financement mais sur une base thématique.

9. Concernant l'appui aux OP et CA, nous retiendrons la nécessité d'une action à deux niveaux : un niveau général touchant le renforcement des OP existantes et leur concertation, et un niveau plus ciblé d'appui à l'exercice d'une fonction. Sur le 1er niveau, on constate la pertinence d'une démarche d'accompagnement qui s'inscrit sur la durée avec l'AOPP et qui s'appuie sur les organisations existantes. Si l'AOPP peut être considérée comme le fruit d'une incitation du projet, par contre elle regroupe des organisations existantes ayant une réelle assise paysanne. De plus l'AOPP limite son rôle dans le développement de capacités d'analyse, de formation, d'échanges et n'a pas pour vocation de se substituer aux actions de chacune des OP. Sur le 2ème niveau, la nature et la complexité de la fonction concernée appelleront des formes d'appui plus ou moins complexe allant d'un appui spécifique à une OP, un groupe d'OP autour d'une fonction précise (exemple centres de gestion) à un appui plus complexe à plusieurs acteurs (services publics, OP, CA et prestataires privés) car l'exercice de cette fonction nécessite une progression commune de ces acteurs (exemple vulgarisation, vaccination). On retiendra la démarche du PASPE dans ce dernier cas. La détermination du mode opératoire du projet en terme maîtrise d'ouvrage, maîtrise d'œuvre, exécution, est essentielle à sa réussite.

10. Les déficits institutionnels qui freinent les évolutions en cours et les projets de l'aide français sont souvent identiques, on peut rappeler les principaux :

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- capacité de l'Etat à s'affirmer face au MDR et aux offices pour aller au bout de la réforme,

- absence d'un réel pilotage de la réforme aboutissant à une remise en cause de ceratins principes et retardant la prise en compte des dossiers transversaux (foncier et transferts notamment),

- législation et réglementation pas adaptés, - déficits dans les rapports entre les acteurs et limites des cadres de concertation, - manque de savoir-faire dans conduite effective des transferts, - problème de management et de fonctionnement des institutions, - faible structuration et capacités des OP et CA, - problèmes généraux de qualification des différents acteurs. Ces facteurs sont souvent interdépendants et il est souvent malaisé d'identifier le facteur de blocage principal, celui ou ceux sur lesquels il faut agir prioritairement, et trouver les moyens adéquats. Il est normal qu'un AT se trouvant face à cette situation ait du mal à remplir sa mission. C'est pourtant le lot quotidien. Disposer d'un outil d'analyse institutionnelle devient une nécessité pour cette assistance technique et facilitera le ciblage des interventions.

4.4. L'ébauche d'une démarche d'appui institutionnel L'objet de cette étude de cas est d'alimenter la proposition d'une démarche d'appui institutionnel. Notre conclusion ouvre sur une première ébauche d'une démarche d'appui institutionnelle qui sera alimentée par les autres études de cas et les contributions d'autres personnes ressources.

Présentation 1. Un des principes de l'appui institutionnel est de considérer qu'une institution n'est pas une finalité

mais un moyen. La finalité est d'atteindre des objectifs de développement du secteur, objectifs qui sont fixés de manière réaliste tenant compte des capacités des acteurs.

Définir une démarche d'appui institutionnel aux institutions agricoles suppose : - être d'accord sur l'objet de l'appui institutionnel (Pourquoi), - être d'accord sur les modes d'intervention (Comment).

L'appui institutionnel peut se résumer à trois objectifs :

- La séparation des fonctions et des responsabilités est clairement établie entre l'Etat et chacun des autres acteurs du secteur (OP, CA, prestataires, CT, producteurs…),

- Chaque acteur dispose de la capacité suffisante pour assurer les fonctions qui lui sont imparties,

- Les mécanismes de concertation et de décision permettent aux acteurs concernés de définir un solide consensus autour des objectifs du secteur et des moyens à utiliser.

La définition des modes d'intervention suppose :

- être en mesure de procéder à une analyse du secteur pour identifier les points faibles, les priorités et les stratégies à retenir,

- être en mesure de procéder à l'analyse fine des capacités des acteurs à appuyer,

- disposer des moyens (outils, ressources humaines et financières) pour mettre en œuvre ces stratégies et s'adapter à la diversité des situations.

Les outils d'appui institutionnel à développer 1. Les situations de démarrage d'une intervention d'appui institutionnel peuvent être très variables en

fonction d'opportunités que le bailleur ne maîtrise pas toujours. Cette situation peut aller d'une

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 50

véritable volonté politique des autorités nationales de procéder à une "remise à plat" d'un secteur, à un appui ciblé sur un acteur particulier dans un environnement peu favorable. Au cours de la suite de l'étude nous présenterons des modes d'intervention qui peuvent répondre au mieux à cette diversité de situation et qui permettront de choisir les bonnes stratégies et moyens d'actions.

Il paraît utile de proposer : - Une méthode pour une analyse institutionnelle d'un secteur ou d'un sous-secteur ou d'une filière, - Une méthode d'analyse et de développement des capacités d'une institution, - Une méthode pour conduire les transferts de compétence, - Un guide pour définir et mettre en œuvre un projet d'accompagnement institutionnel, - Les modalités de préparation et de formation des AT en charge d'accompagner des changements. Cette liste n'est pas exhaustive mais son évolution sera limitée par le temps imparti à l'étude. D'autres pistes de travail seront ouvertes.

2. Ces méthodes, issues des pratiques de terrain, seront présentées sous forme d'annexes, elles feront l'objet de critiques par les personnes ressources et de proposition alternative ou complémentaire. Il n'y a pas de recettes miracles mais plus des démarches à suivre et à adapter à chaque situation.

Pour cette étape, nous joignons en annexe : - une méthode d'analyse participative d'un secteur (méthode que nous avons

utilisée dans plusieurs cas de figure), - la démarche de conduite des transferts de fonction au niveau d'une région, mise

au point pour le MDR, testée sur Sikasso (Mali Sud).

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 51

ANNEXES

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 52

LISTE DES DOCUMENTS CONSULTES

ANNEE

TITRE ORIGINE - AUTEUR

Evolution des orientations du secteur et MDR 92 Schéma directeur du secteur de développement rural (volume 1, 2 & 3) MDRE 93 Evaluation du plan d’action - Contribution au volet institutionnel - Schéma

d’organisation des services aux niveaux régional et sous régional CAPORAL – DIALLO -SENIA

(93) Document cadre MDR MDR 94-95 Rapports d’étape CAMOPA CAMOPA

95 Plan d’action du MDRE Document de présentation des nouvelles structures du MDRE

MDRE - CAMOPA

96 Etude de réorganisation des services administratifs et financiers du MDRE Rapport définitif après l’atelier de validation

Cabinet DIARRA

96 Recueil des textes législatifs & réglementaires portant organisation des services du MDRE (Tome 1)

MDR

97 Revue des missions et de l’organisation de la CPS CAPORAL – KONATE - COULIBALY

97 Note conjointe MDRE-Banque Mondiale MDR 97 Note position des bailleurs/ MDR 99 Programme triennal d’investissements (PTI) 99/01 MINEFI 00 ABC des directions du MDR

(Décomposition des objectifs des directions du MDR en activités et en tâches) CAMOPA

01 Listes des textes élaborés par la DGRC MDR - DGRC 01 Lettre de politique de développement institutionnel du secteur rural MDR 01 PASAOP – Document principal et annexes MDR Transfert et Fonction développement institutionnel

96 Rapport final sur l’étude diagnostique des capacités d’appropriation des fonctions transférables du MDRE

CAMOPA

97 Stratégie de transfert de compétence MDRI 98 Stratégie et programme de mise en œuvre des transferts du MDRE au secteur

privé MDR-CAMOPA

99 Mission d'évaluation du dispositif de pilotage des réformes institutionnelles du MDRE et des moyens de sa mise en œuvre

99 Guide pour le transfert de compétences MDR-CAMOPA – I&D 99 Manuel de procédures SADCI pour le MDR MDR-CAMOPA – I&D

En cours Affinement de la stratégie de développement institutionnel du secteur rural (documents provisoires)

MDR-CAMOPA – I&D - GEDUR

99 Système d'Analyse et de Développement des Capacités Institutionnelles- SADCI A. TOBELEM Dossiers transversaux

95 Plan stratégique de la recherche agronomique au Mali IER 01 Etude de la définition des grandes orientations de la politique agricole de

l’UEMOA IRAM

97 Stratégie et perspectives de la microfinance au Mali CIDR - FIDES 97 Rapport de synthèse sur la proposition pour une stratégie de croissance et

développement à l’horizon 2010

99 La déconcentration administrative au Mali : Bilan et perspectives MDRI 00 Document de présentation du PNIR MDR CMDT – ON - Filières

01 Présentation de la filière coton CMDT 94 Contrat plan Etat- CMDT - producteurs 97 Etude pour la délégation d’une partie des missions de développement rural du

MDRE aux organismes par publics comme la CMDT et l’Office du Niger SERNES

00 Etude d'une stratégie de désengagement de la CMDT MEF - BDPA 01 Lettre de politique sectorielle du coton Primature 99 Etude d’orientation stratégique des appuis de l’union européenne au Mali dans le

sous-secteur de l’élevage Contexte général du sous-secteur élevage (Tome 1)

RDP – IER

99 Rapport principal de l’étude d’orientation stratégique des appuis communautaires dans la filière riz / volume 1

GFA

99 Fonctionnement institutionnel du PASPE et rapports activités PASPE Appuis aux OP – GRN – décentralisation

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 53

ANNEE

TITRE ORIGINE - AUTEUR

95 Les organisations paysannes et rurales Réseau GAO 92-95 Rapports annuels et Bilan 1ère phase IRAM

01 Guide pour l'application des recommandations de l'atelier sur le crédit aux APC-AV

IRAM

00 Présentation PCPS IRAM 01 Note de synthèse sur le programme d'appui aux OPA du Mali AFDI 00 Situation et perspective de la GDRN Helvétas 00 Présentation du PAD Helvétas 00 Dispositif d'appui technique aux communes MDRI – I&D 01 Stratégie de mise en œuvre de la politique nationale pour l'environnement MEATEU Appuis de l'aide française

92-02 Rapports de présentations des projets du secteur rural au Mali SCAC Bamako 92-02 Présentation des programmes AFD AFD Bamako

Analyses comparée des programmes de l'ADP 99 Analyse institutionnelle des processus de transition économique dans deux

filières agricoles du Mali. Applications pratiques pour l'aide internationale.

P. CHEDANNE

En cours Les déterminants institutionnels de l'impact de l'aide publique au développement sur l'économie rurale des pays à "régime d'aide". Thèse en cours de publication. CIRAD Ecopol Nogent sur Marne, INAPG.

H. DE MILLY

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 54

ANNEXE 1

La conduite d'une démarche participative d'analyse institutionnelle d'un secteur

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 55

Développement institutionnel La conduite d'une démarche participative d'analyse institutionnelle d'un secteur

1- Rappel sur la problématique Depuis plusieurs années, des réformes et des programmes se mettent en place dans un contexte marqué par des mutations importantes touchant au rôle de l'Etat et de son administration. Libéralisation économique et décentralisation sont les deux facteurs moteurs de ces mutations qui impliquent une nouvelle distribution des fonctions entre les différents acteurs (administrations publiques, collectivités territoriales et société civile dont le secteur privé avec notamment les organisations professionnelles). Désengagement de l'Etat, transfert de compétences, décentralisation, déconcentration, cogestion et/ou concertation dans les choix sectoriels et leur mise en œuvre sont des principes qui guident aujourd'hui les réformes. Ils sont aujourd'hui acceptés par la majorité des acteurs, du moins dans les textes et déclarations, mais il en va tout autrement dans leur mise en œuvre –objet des réformes et des programmes- qui bute essentiellement sur les modalités de conception ainsi que sur la définition des modes opératoires. Trop souvent des réformes ou des programmes échouent parce qu’ils sont conçus trop rapidement et sans réelle participation des acteurs concernés. Les conséquences sont directes : soit un ou plusieurs acteurs bloquent le processus de réforme ou la mise en œuvre d'un programme car ils sont en désaccord avec celui-ci ou ne le comprennent pas, soit cette réforme ou ce programme échoue car la capacité des acteurs en charge de celui-ci n'a pas été suffisamment analysée, les objectifs ou les rythmes ont été surestimés, les mesures d'accompagnement se sont avérées insuffisantes ou inadaptées. 2- Une clé : la conduite d'un processus participatif Qu’il s’agisse d'un secteur (réforme sectorielle) que d'un programme (évaluation ex-ante ou ex-post, ou réorientation à mi-parcours par exemple), la conduite du changement implique un processus de dialogue entre les différents groupes d’acteurs concernés afin d’aboutir à une vision claire et partagée des objectifs à atteindre, de la répartition des rôles et des actions à mener, ainsi que des modalités de mise en œuvre. Il est important que la recherche d'un consensus aille le plus loin possible afin que tous les acteurs puissent s’informer, s'exprimer, échanger sur les enjeux, les stratégies…, et que les points de convergence et de divergence soient clairement identifiés. A partir de là, les autorités en charge du dossier pourront trancher en disposant de tous les éléments de décision et ainsi mieux concevoir leur réforme ou programme, leur rythme, leurs priorités et les mesures d'accompagnement indispensables pour renforcer la capacité de chaque acteur qui mènera une partie de cette réforme ou de ce programme. . Les interventions d'I&D sur plusieurs secteurs l'ont amené à développer une méthode pragmatique qui s'appuie sur deux outils : - La conduite d'une démarche participative, - Le système d'analyse et de développement des capacités institutionnelles(SADCI)9. Nous présenterons ici les principales étapes d'un processus participatif, s’appuyant sur la méthode SADCI, sachant que ces étapes sont à affiner et à adapter au cas par cas. Le cas de figure est celui de la définition des axes d'une réforme sectorielle. Une étape préalable de définition des règles du jeu Mettre en place une démarche participative nécessite au préalable d'identifier l'ensemble des acteurs parties prenantes du secteur. Il faut ensuite convaincre ces acteurs d'adhérer au processus de travail proposé10. Pour les convaincre deux conditions : - leur montrer qu’ils ont un intérêt objectif à ne pas être en dehors du processus ; - leur donner une vision claire du déroulement du processus et de leur mode d'implication. 9 SADCI est une méthode conçue par Alain TOBELEM, spécialiste en développement institutionnel. 10 Le secteur privé est souvent méfiant par rapport aux initiatives souvent sans lendemain prises par les administrations.

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 56

Enfin, il s'agit de définir des règles du jeu pour la conduite du processus que tout le monde s'engage à respecter. Le déroulement de l'analyse va s'organiser en deux grandes phases : - Une phase de bilan-diagnostic permettant de tirer les enseignements de la période écoulée. - Une phase de propositions devant déboucher sur les axes de la réforme. Une première réunion de lancement du processus est organisée sur les objectifs de présentation des règles du jeu et recherche l'adhésion de l'ensemble des acteurs. Cette réunion peut être précédée de quelques rencontres bilatérales avec des acteurs clés pour prendre leur avis et désamorcer certains à priori négatifs. Au cours de cette réunion le gouvernement doit montrer sa volonté de mener ce processus de la manière la plus ouverte et de le conduire jusqu'au bout tout en indiquant clairement qu'il garde toute son indépendance pour prendre les décisions finales qui lui incombent.

Une première phase de bilan-diagnostic Il est préconisé de réaliser un bilan-diagnostic du secteur pour tirer les enseignements du passé, tant en termes de contraintes que d'acquis afin de préparer les scénarii de l'avenir. Cette étape revêt toute son importance pour rapprocher les points de vue des acteurs sur la compréhension de la situation actuelle et sur l'origine des problèmes que rencontre le secteur. C'est sur cette compréhension commune que les axes de réforme pourront ensuite être plus facilement dégagés et acceptés. Définir un cadre de référence pour l'analyse La première étape consiste à définir le cadre de référence qui sera la base des analyses. Ce cadre de référence se construit à partir des objectifs fixés au secteur et des résultats attendus au cours de la période à analyser. Les objectifs sont ensuite décomposés en activités en identifiant les responsabilités institutionnelles, ces activités sont ensuite décomposées en tâches. Mesurer les écarts pour disposer d'éléments objectifs A partir de ce cadre une deuxième étape consiste à mesurer les écarts sur la base des éléments disponibles sur la situation actuelle. Cette connaissance permettra de donner plus d'objectivité à l'analyse, d'orienter la recherche des contraintes et de cerner plus rapidement les principales problématiques. Des approfondissements sur des aspects techniques peuvent s'avérer nécessaires pour mieux étayer l'analyse. Ils sont lancés en fonction des besoins avec des spécialistes du domaine.

Analyser et comprendre les résultats La troisième étape est déterminante car ses résultats orienteront les axes de réforme. Il s'agit maintenant d'analyser les résultats, de comprendre les écarts et d'identifier les acquis et les contraintes. Cette analyse est menée de manière participative avec chaque acteur à partir des activités et des tâches qu'il devait mener. Une grille identifiant l’ensemble des contraintes possibles est utilisée pour faciliter leur recherche, le croisement des analyses des différents acteurs et la mise en perspective de ces contraintes. Le but n’est pas de s’arrêter à la description d’un problème mais d’identifier son origine et de préciser son impact sur l’exécution d’une activité ou d’une tâche.

La grille utilisée permet notamment de distinguer et identifier les contraintes liées à la définition des règles du jeu ( aspects législatifs et réglementaires, légitimité des décideurs...), celles liées aux questions inter-institutionnelles (répartition des fonctions entre les acteurs, mode de travail entre elles...), celles liées à l’organisation interne de l’institution concernée (mode de management, moyens humains et financiers, organisation interne...), celles liées au mode de gestion du personnel (système de carrière, de rémunération, ...) et enfin celles liées aux ressources humaines des acteurs en charge des tâches (connaissances, informations, savoir-faire, ...). Cette grille d'analyse SADCI est un "outil de convergence", pour que l’ensemble des acteurs utilise le même langage et la

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 57

même approche. L'expérience montre, outre l'aspect purement méthodologique, que le dialogue est largement facilité entre les partenaires. Outre les acteurs en charge de l'exécution de ces activités, des personnes ressources et les "bénéficiaires" sont aussi enquêtés, les différents points de vue et argumentation sont croisés et viennent enrichir l'analyse. Enfin, c'est parce que les contraintes sur des tâches auront été bien identifiées et reconnues par les acteurs eux-mêmes que l'on pourra poser les problèmes de fond qui en découlent. Croiser les analyses par objectifs et type de contraintes Une quatrième étape de consolidation des différentes interviews réalisées est ensuite menée et permet de dégager une double analyse des acquis et des contraintes : par objectifs puis par type de contraintes. La prise en compte de la stratégie de chaque acteur est aussi intégrée dans cette analyse car elle éclaire son attitude vis à vis des changements tentés ou à venir. Restituer et stimuler le débat entre les acteurs Cette phase de bilan s’achève par un atelier de restitution-débats permettant de présenter un bilan nuancé de la situation avec les points forts et faibles de chaque acteur, les acquis du secteur et les principaux déficits. Une sélection de thèmes de travail est prédéfini pour amener les différents acteurs à pousser le plus loin possible leur réflexion sur les points clés. Un consensus entre les acteurs est recherché sur les grands enseignements et sur les points nécessitant réformes ou réorientations. Ces points serviront de base au travail pour les propositions. Les divergences restantes sont clairement identifiées et argumentées.

Une seconde phase de proposition Sur la base des conclusions du bilan-diagnostic du secteur la deuxième phase du processus va conduire à définir une plate-forme commune d'objectifs et de stratégie qui constitueront l'ossature de la réforme à mettre en place. Dans un premier temps des scénarii de base sont établis par la mission. Ils sont ensuite discutés avec les différents acteurs. Le résultat de ces discussions permet de sélectionner plusieurs scénarii qui sont alors débattus au cours d’un atelier commun.

Elaborer de scénarii "objectifs /stratégies / rôle". La première étape de cette deuxième phase permet de construire des scénarii. On entend par scénario un cadre cohérent : - d’objectifs, généraux au secteur, - d’options stratégiques, - de rôles, de façon très générale sans entrer ici dans le détail des missions précises et activités détaillées. Plusieurs hypothèses sont élaborées, suffisamment concrètes pour faire réagir les acteurs, mais suffisamment variées et ouvertes pour prendre en compte les différents points de vue exprimés précédemment.

Mener une analyse participative et prendre en compte le point de vue des acteurs

Au cours de cette deuxième étape, les hypothèses de travail élaborées ci-avant doivent maintenant être approfondies et débattues avec les acteurs concernés, puis qualifiées en fonction des prises de position de ceux-ci. Un double objectif est donc recherché : - enrichir les scénarii en travaillant avec les acteurs concernés ; - connaître et comprendre le point de vue des différents groupes d’acteurs (en intégrant parallèlement leurs stratégies particulières). A l'issue des travaux avec les différents acteurs les scénarii sont révisés et une synthèse présente ceux qui sont retenus pour être soumis au choix final en présentant les avantages et inconvénients de chacun et la position des différents acteurs.

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 58

Restituer et organiser le débat collectif Le travail précédent fait enfin l’objet d’un atelier de restitution-débats à l’ensemble des acteurs du secteur et sert de base aux échanges sur les choix à faire. Cette étape est décisive car elle doit permettre de déboucher sur une plate-forme commune, amenant l’adhésion la plus large possible tout en étant suffisamment concrète (cf. contenu des scénarii) pour se traduire ensuite en grands axes de programmes et de réformes. Cette restitution prend la forme d'un atelier de travail pouvant s'étaler sur plusieurs jours en fonction de la complexité du dossier et des divergences entre les acteurs. Une séance de clôture permet de présenter et confirmer les points de convergence (et les points de divergence restants). La mission en charge de la conduite du processus et de l'analyse peut alors approfondir le scénario retenu et proposer des axes concrets de réformes et de programmes d'accompagnement ainsi que les modes opératoires adaptés au gouvernement. Celui-ci dispose maintenant de tous les éléments de décision. Une attention particulière sera apportée au renforcement de la capacité des acteurs en fonction de la nouvelle distribution des responsabilités. C'est ici que le développement institutionnel trouve tout son sens. 3- Observations sur la conduite des processus participatifs et le développement institutionnel Aujourd'hui la mise en œuvre de processus participatifs est devenue indispensable pour conduire les changements. Mais elle nécessite d'une part une volonté du gouvernement qui la lance de la mener jusqu'au bout, et d’autre part le recours à des animateurs du processus maîtrisant ce type de démarche. Elle nécessite aussi la mobilisation de professionnels du secteur qui mèneront les analyses techniques nécessaires durant les phases de diagnostic et de propositions. Il est en effet souvent nécessaire de produire parallèlement des analyses économiques bien étayées, ou d'autres analyses particulières, pour disposer des bases objectives et fiables pour mener la discussion. Il ne faut pas non plus se cacher les limites du processus participatif qui sont vite atteintes quand la participation se fait en interne entre divers services de l'administration dont une majorité de cadres n'est pas préparée et/ou ne veut pas le changement. Cela nécessite donc du temps et des moyens financiers qui dépassent celui d'une simple étude sectorielle. Mais, en contre partie, le retour sur investissement est garanti car la base de conception d'une réforme ou d'un programme (ou leur réorientation) sera solide. Tout le profit de ce travail ne pourra en être retiré que si les autorités concernées acceptent de mettre en place un mécanisme de pilotage, de suivi-évaluation et d'identification périodique des facteurs de blocage leur permettant de suivre l'évolution de la mise en œuvre de leur programme ou réforme, notamment d'identifier les déficits de capacité institutionnels pour y pallier à temps. En cela un outil comme le SADCI est adapté, car il est conçu dans le sens d'un suivi et d’un développement permanent des capacités des différents acteurs. Au terme de plusieurs années d’expérience dans différents secteurs et pays, I&D est également convaincu que si des réformes sectorielles sont déjà des amorces de changements, elles ne prendront tout leur sens que si elles s'inscrivent dans une volonté plus générale des gouvernements d'organiser le changement à l'échelle de l'ensemble de leurs institutions. Bien souvent il ne sert à rien de réformer un ministère technique si, par exemple, aucune réforme de la fonction publique n'est opérée. Les gouvernements ont tout intérêt à instaurer au plus haut niveau une "fonction" de développement institutionnel, conçue comme un véritable outil de pilotage du changement. Cette méthode a été notamment utilisée et adaptée à chaque cas pour conduire : - la réforme du secteur des pêches au Maroc (97), - la redéfinition de la politique forestière en Côte d'Ivoire (99), - l'audit du secteur forestier au Cameroun et la réforme de la fiscalité forestière (00).

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ANNEXE 2

Conduite des transferts de fonctions du MDR : L’opération test de Sikasso

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 60

Conduite des transferts de fonction du MDR : L’opération test de Sikasso

Afin de concrétiser la mise en œuvre des transferts, la CAMOPA a choisi de mener une opération test sur la région de Sikasso. Cette opération avait pour but :

- d’analyser la faisabilité des transferts de compétence pour trois des huit fonctions transférables et de proposer un programme en conséquence ;

- de définir une méthodologie pour opérer les transferts. Ce travail a été mené de mai à juillet 99. Les leçons de Sikasso La démarche a) Le démarrage de l’opération L’opération sur la région de Sikasso a débutée par un travail d’information effectué par la CAMOPA auprès des différents services techniques, chambre d’agriculture, CMDT et gouvernorat. Une réunion du comité régional des transferts a marqué le lancement des travaux et le choix des trois fonctions à prendre en compte, la présentation du mode de travail et la mise en place de groupes de travail pour chacune de ces trois fonctions. Les trois fonctions choisies sont :

- médecine vétérinaire, - gestion des ressources naturelles, - vulgarisation pour la filière pomme de terre.

- Le choix de la médecine vétérinaire s’explique car cette fonction est en cours de privatisation depuis plusieurs années et, si des avancées irréversibles sont faites, de nombreux obstacles demeurent. - Le choix de la gestion des ressources naturelles a été fait pour toucher une fonction transférée aux communes. - Le choix de la vulgarisation dans la filière pomme de terre prend en compte le transfert à des organisations professionnelles. b) La conduite du travail par groupe Lorsque chaque groupe a débuté son analyse, un besoin de clarification a été nécessaire sur deux aspects :

- les objectifs liés à l’exercice de la fonction, - les objectifs liés au transfert de cette fonction.

Définir les objectifs liés à une fonction oblige à préciser les activités à mener pour les atteindre. Cela permet de vérifier le partage des responsabilités dans les transferts et de s’assurer que tout le monde à la même compréhension de ce partage. Définir les objectifs du transfert oblige à décrire la situation qui doit découler d’un transfert réussi. C’est sur la base de ces objectifs que le travail du groupe va se poursuivre en recherchant les obstacles se posant. Cette étape franchie, chaque groupe s’est attaqué à une analyse de la situation, des acteurs. Cette analyse a été faite à partir de la connaissance du secteur des membres du groupe, des entretiens complémentaires avec des personnes “ ressources ” ainsi que quelques visites de terrain. Deux personnes pivots ont été désignées pour assurer la liaison au sein de chaque groupe, le suivi des travaux complémentaires entre les rencontres, la circulation des informations et l’organisation des rencontres. Afin de guider cette recherche des supports ont été produits permettant pour chaque objectif de préciser les obstacles à son atteinte et de déterminer les voies et moyens d’y remédier. Ces supports

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 61

permettaient donner les pistes de travail, de préciser les solutions puis les responsabilités de mise en œuvre dans le temps avec les moyens afférents. Ces supports ont été remplis progressivement et amendés au fur et à mesure des travaux. c) La capitalisation des résultats et l’adoption des programmes Une fois ce travail effectué, une consolidation des actions à entreprendre pour chaque objectif a été faite pour aboutir au programme de transferts spécifique à la fonction étudiée. Ce sont principalement les grandes étapes à respecter, associées aux mesures d’accompagnement nécessaires qui sont présentées. Ce programme tient compte de la spécificité de la région, des acteurs en présence et des délais réalistes de mise en œuvre. Il est présenté sous forme d’un graphique facilitant sa visualisation. Cette étape doit recueillir le consensus le plus large de l’ensemble des acteurs concernés par cette fonction afin que sa mise en œuvre ne rencontre pas d’obstacles majeurs de par l’opposition d’un de l’un d’eux. Afin de valider les programmes proposés par les groupes de travail et de consacrer l’adhésion des différents acteurs, une rencontre finale du comité régional des transferts, élargie aux différents membres des groupes non-membres de ce comité, a eu lieu. Des représentants des directions nationales du MDRE et de la CTAP étaient invités. Les programmes ont été adoptés et des engagements pris pour leur mise en œuvre. Le comité régional doit suivre cette mise en œuvre avec l’appui de la CAMOPA. Les leçons, obstacles, facteurs critiques Au stade actuel nous pouvons dire que l’opération test pour sa phase définition d’un programme de transferts sur les trois fonctions choisies a été réussie. Cette phase a montré qu’un processus participatif au niveau d’une région permettait :

- de redonner un contenu très concret à la réforme du MDRE considérée au niveau des régions uniquement que comme des changements organisationnels.

- d’amener un dialogue constructif entre les acteurs sur la place de chacun d’eux et de préciser les responsabilités ;

- d’aboutir à des programmes très ciblés prenant en compte la spécificité de la région et de ses acteurs ;

- de dégager les problèmes qui doivent être résolus au niveau national et de concrétiser le dialogue entre le niveau régional et national.

L’opération test de Sikasso a montré un réel engagement des différents acteurs et a permis aux différentes sensibilités de s’exprimer. Néanmoins le choix des acteurs auraient pu être élargi. A noter l’effet positif d’un animateur externe et indépendant qui est indispensable pour conduire ce processus où souvent des logiques différentes s’affrontent et doivent être dépassées. La suite de cette opération-test est la mise en œuvre des trois programmes définis. Cette suite dépend de la volonté des différents acteurs. Il n’est pas à exclure qu’un acteur principal puisse bloquer le processus. Ce risque peut être minimisé si :

- le comité régional de transfert joue son rôle de suivi et aussi s’élargi aux principaux acteurs de la société civile concernés ;

- les directions régionales et nationales s’engagent réellement dans la mise en œuvre de ces programmes et prennent leurs responsabilités en cas de blocage en leur sein.

Les principales leçons qui sont tirées de cette opération test sont :

- le transfert ne doit pas être envisagé comme un but à atteindre, mais comme une décision irrévocable qui doit prendre corps immédiatement. Il s’agit de définir comment l’accompagner et non pas de discuter de sa pertinence ;

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 62

- il faut s’assurer de la réelle disponibilité des membres des groupes de travail et leur représentativité ;

- un travail préalable d’identification et d’information des acteurs est indispensable ; - il n’est pas nécessaire de réunir en permanence tous les membres, mais un

certain nombre de travaux de préparation et de synthèse doivent être fait par une ou deux personnes. Les discussions et analyses au sein des groupes en seront facilitées ;

- il est recommandé de choisir pour cela un chargé de mission indépendant qui guidera et animera ce processus ;

- les programmes doivent être réalistes en tenant compte des moyens disponibles et des délais d’exécution et se fixer des indicateurs simples de suivi ;

- les acteurs régionaux doivent être convaincus de l’implication du niveau national dans ce processus ;

- les responsabilités dans le suivi de la mise en œuvre des programmes doivent impérativement conclure cette phase.

---------------------

A l'issue de ce test, un guide méthodologique a été produit, des animateurs ont été formés pour conduire la démarche dans les différentes régions. Les résultats sont hétérogènes et sont directement liés au mode d'animation de ce processus. Ici est apparu un premier déficit : le choix des animateurs. Ce sont les services techniques régionaux du MDR qui ont procédé au choix, choix qui s'est révélé dans certains cas peu pertinent. La première traduction a été ensuite dans certains cas une faible représentativité des OP. Par ailleurs les faibles moyens disponibles n'ont pas permis de toucher les différents cercles des régions. La conduite de ce type de démarche est avant tout un travail qualitatif. Faire des économies sur l'animation de ce processus est contre productif, surtout dans une phase de lancement. L'opération test de Sikasso avait réussi car les moyens adaptés avaient été dégagés. Le processus se poursuit, la CAMOPA apportant un appui à la révision des premiers programmes. Ces programmes devraient être financés dans le cadre du PASAOP. Un suivi rapproché de ses programmes est nécessaire pour corriger les dérapages, réorienter les actions et ralentir si besoin les rythmes. Un récapitulatif du guide est présenté ci-après.

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I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 63

EXTRAIT DU GUIDE DES TRANSFERTS DE FONCTION DU MDR

Récapitulatif des étapes de la mise en place sur une région du processus de “ transfert ”

Etapes Activités Observations Produits attendus

PHASE DE PREPARATION

1

Désigner 1 ou 2 chargés de mission non impliqués par les transferts (Suivi /animation de tout le processus)

Repérage des acteurs actuels, potentiels Travail de balisage (première approche de difficultés ou de points d’appui dans l’avancement du travail à venir ...)

2 à 3 semaines par fonction Rencontrer les acteurs au plus près de la réalité du terrain (et pas seulement leurs représentants)

Fiche n°1 sur l’identification des acteurs, de leurs attentes, de leur structuration, etc. ... Fiche n°2 proposition de constitution des groupes de travail

PHASE DE BILAN

2

Réunion du Comité des transferts

Constitution des groupes de travail par fonction suite à la présentation par les chargés de mission du bilan d’identification

1 journée de réunion Tenir compte de l’identification menée : - Veiller à la diversité - Veiller à l’équilibre entre tous les partenaires engagés dans le processus (notamment lors de la désignation des rapporteurs)

Groupes constitués (1 par fonction) Chronogramme du travail des groupes

3

1ère partie du travail de chaque groupe (Utilisation de diverses méthodes d’animation, sous-groupes, etc. ...)

- Précision des objectifs du transfert de la fonction - Etablissement du bilan / de l’état de la situation actuelle

- Repérer - succès (acquis) - difficultés (blocages) - pistes

2 ou 3 jours en un bloc par groupe - Nécessité pour permettre la bonne prise en compte de tous les points de vue - Articuler la réflexion autour des objectifs précisés

) Analyse des ) causes et ) circonstances Premières réflexions pour aller au-delà de la situation présente

- Fiche n°3 : Tableau des objectifs du transfert - Carte des Relations inter-institutionnelles - Fiche n°4 : Tableau des difficultés, acquis et pistes classés par : . objectif repéré, . catégories de traitement (règles du jeu - lois, règlements, relations inter-institutionnelles, organisation interne, gestion personnel, qualifications)

Page 68: EVOLUTION DU CADRE INSTITUTIONNEL DANS LE SECTEUR RURAL

I&D – Rapport d'étape – Etude de cas Mali - 64

4

Réunion du Comité des transferts élargi aux groupes de travail

Validation du travail des groupes présenté par les chargés de mission et les rapporteurs

1 journée de réunion

Chronogramme du travail des groupes et du Comité lui-même (afin que chacun s’engage)

PHASE DE PROGRAMMATION

5

2ème partie du travail de chaque groupe (Utilisation de diverses méthodes d’animation, sous-groupes, etc. ...)

- Repérer pour chaque blocage ou piste : - les solutions - la capacité des acteurs à assumer les solutions - l’accompagnement nécessaire - les financements possibles

4 ou 5 demi-journées réparties sur 4 ou 5 semaines

- Travail des chargés de mission entre les réunions - Travail des membres des groupes entre les réunions (Recherche d’information, documents, etc. ...)

Fiche n°5 : tableau par objectif Fiche n°6 : Proposition de programmation de chaque transfert

Description des structures nouvelles et/ou carte des RII

Base de données constituée à partir des informations recueillies

6

Réunion du Comité des transferts élargi aux groupes de travail

Validation du travail des groupes présenté par les chargés de mission et les rapporteurs

1 journée de réunion

Fin du travail des chargés de mission Programmation approuvée Programmation du suivi : - Définition des groupes (en lien avec Comité) qui suivront la mise en œuvre du programme - Définition des méthodes de suivi par le Comité (échéances, etc. ...) suivant transfert ou programmation ...

PHASE DE REALISATION (En lien étroit avec le Comité national)

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Réunions programmées du Comité des transferts élargi aux groupes de suivi

Validation de l’évolution des étapes et rectifications éventuelles, sur proposition des groupes de suivi

Travailler sur des ordres du jour bien préparés avec envoi des états d’exécution des programmes (Au moins quinze jours de délai)

Etats d’exécution des programmes Tenue et diffusion des P.V., et des décisions du comité régional de transfert