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Georges CAZORLA Faculté des Sciences du Sport et de l’Education Physique. Université Victor Segalen Bordeaux 2. E-mail : georges.cazorla@sportsanté.u-bordeaux2.fr 1 EVALUATION DES CAPACITES PHYSIOLOGIQUES ET PHYSIQUES I Evaluation des capacités dites « Anaérobies » Cours Masters « Ingénierie de l’entraînement sportif » 2003-2004 Georges CAZORLA

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Georges CAZORLA Faculté des Sciences du Sport et de l’Education Physique. Université Victor Segalen Bordeaux 2. E-mail : georges.cazorla@sportsanté.u-bordeaux2.fr

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EVALUATION DES CAPACITES

PHYSIOLOGIQUES ET PHYSIQUES

I Evaluation des capacités dites « Anaérobies »

Cours Masters « Ingénierie de l’entraînement sportif »

2003-2004

Georges CAZORLA

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Georges CAZORLA Faculté des Sciences du Sport et de l’Education Physique. Université Victor Segalen Bordeaux 2. E-mail : georges.cazorla@sportsanté.u-bordeaux2.fr

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Considérations générales

Les qualités liées au métabolisme anaérobie ou aérobie peuvent être évaluées :

- soit par méthodes directes grâce aux techniques d’analyses biochimiques et des échanges

gazeux, de biopsie musculaire, de résonance magnétique nucléaire ou de spectrométrie à

infrarouge. Ces techniques permettent de quantifier de nombreuses molécules témoins des

modifications métaboliques induites par l’exercice physique, comme le glycogène, le lactate,

le pyruvate, l’alanine, l’ATP, l’ADP et la PCr,

- soit indirectement par des tests de laboratoire et de terrain. Ceux-ci n’évaluent pas les

métabolismes eux-mêmes mais les qualités biomécaniques, neuro-musculaires et

physiologiques qui leur sont associées comme par exemple : la puissance musculaire de

crête encore définie « force explosive », la force maximale, la vitesse, l’endurance

musculaire, la puissance et l’endurance anaérobies ou aérobies habituellement définies en

langage de terrain comme « qualités physiques ».

Alors que les méthodes directes sont susceptibles de mesurer la production et l’utilisation de

nombreuses molécules comme l’ATP, les tests de laboratoire ou de terrain évaluent

globalement les nombreuses interactions qui interviennent dans la performance motrice :

qualité de la commande motrice, aptitude du muscle à utiliser l’ATP (liée notamment aux

qualités des fibres musculaires et à leur niveau d’entraînement), élasticité musculaire,

conformation des rapports osseux sur lesquels s’exercent les tensions musculaires,

motivation pour obtenir le maximum…. En outre, plus un test est complexe et engage la

coordination, plus le niveau d’apprentissage est aussi pris en compte dans le résultat obtenu.

Enfin, avant d’arrêter un choix, il convient de toujours définir le ou les objectif(s) de son

évaluation, en arrêter les dates en fonction des moments de l’année scolaire ou de la saison

sportive et vérifier préalablement la qualité des tests retenus. Cette qualité dépend de leur

niveau de pertinence, de non redondance (dans le cas où le test fait partie d’une batterie),

d’accessibilité, de validité, de reproductibilité et de fonctionnalité.

1.- LA PERTINENCE ou congruence du choix d’un test dépend de l’analyse préalable des

exigences de la pratique sportive considérée en fonction des résultats attendus (analyse de

la tâche étudiée dans le paragraphe précédent).

2.- LA NON REDONDANCE est l’opération qui permet de vérifier que deux ou plusieurs tests

ne mesurent pas un même facteur au sein d’une batterie. Si c’est le cas, ne retenir que le

test le plus accessible, valide et reproductible.

3.- L’ACCESSIBILITE d’un test dépend du matériel disponible (laboratoire bien équipé...

terrain), du nombre d’évaluateurs par évalué, du niveau de qualification des évaluateurs, de

la durée du test, du niveau de complexité du protocole et du passage individuel ou collectif

des évalués.

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Le test le plus accessible est celui qui est adapté au matériel existant, dont le protocole très

facile permet un passage collectif de courte durée et ne nécessite qu’un évaluateur.

4.- LA VALIDITE. Un test est dit valide lorsqu’il a été prouvé qu’il mesure effectivement le

facteur à prendre en compte.

5 LA REPRODUCTIBILITE. un test est dit reproductible (ou fidèle) lorsque, quels que soient

le lieu et l’évaluateur, les résultats obtenus demeurent stables..

6 LA FONCTIONNALITE : Un test est dit fonctionnel lorsque son ou ses résultats entrent

dans le processus d ’apprentissage ou d’entraînement pour orienter, contrôler les

contenus et en suivre les modifications.

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1 - EVALUATION DE L’APTITUDE DITE « ANAEROBIE ALACTIQUE »

Le processus anaérobie alactique permet de fournir l’énergie nécessaire aux exercices

courts et intenses. L’ATP et la PCr constituent les sources énergétiques principales de ce

type d’exercices.

L’aptitude anaérobie alactique peut être évaluée à partir de tests réalisés toujours à intensité

maximale et de durées inférieures à 6 ou 7s pour la composante puissance mécanique

développée et entre 8 et 20s pour la composante endurance. Cette durée est d’autant plus

courte que l’intensité de l’épreuve est plus élevée. Plus la durée de ces épreuves se

prolonge au delà de 7 ou 8s, plus la contribution de la glycolyse lactique devient importante.

Au delà de 15s, la contribution de la glycolyse aérobie ne doit pas être négligée non-plus.

On peut donc distinguer deux types de tests :

les premiers d’une durée inférieure ou égale à 5s, permettent d’évaluer la puissance

mécanique des membres inférieurs. Il s’agit :

- du saut vertical à partir d’une position fléchie à l’arrêt (demi-squat) sur une plate-forme de

force à jauges de contrainte, sur un tapis électronique dit de Bosco ou ergo-jump, ou depuis

une surface plane : test de Sargent,

- du coup de pédale sur un cyclo-ergomètre adapté ou test d’Ayalon, Inbar et Bar-Or,

- du nombre maximum de rotations des manivelles d’un pédalier d’un cycloergomètre en 5s,

- de l’épreuve de l’escalier de Margaria-Kalamen,

- du sprint lancé de 10 et 20m,

- de l’épreuve sur tapis de sprint autotracté ;

les seconds, de durées plus longues, permettent d’évaluer l’endurance du système

alactique tant au niveau des membres inférieurs :

- épreuve des sauts verticaux répétés de Bosco,

- épreuve du nombre maximal de squats avec haltères pendant 15s,

qu’au niveau des membres supérieurs :

- épreuve du nombre maximum de traction à la barre en 15s,

- épreuve du nombre maximum de pompes avec une charge de 20kg en 15s,

- sprint lancé 100m.

Certaines de ces épreuves comme le saut vertical sur platefome de force ou sur tapis de

Bosco, le sprint sur tapis autotracté, le coup de pédale sur un cycloergomètre aménagé, et la

montée de l’escalier de Margaria-Kalamen qui requièrent un matériel sophistiqué et coûteux

peuvent être considérées comme des épreuves de laboratoire alors que les autres sont des

tests de terrain facilement accessibles aux éducateurs sportifs.

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Evaluation de la puissance mécanique anaérobie alactique.

a) Tests de terrain.

D’une façon générale, toutes les épreuves faisant intervenir une intensité maximale d’une

durée inférieure à 5s peuvent être imaginées. Nous ne proposerons dans ce document que

deux tests standardisés :

Test de détente verticale de Sargent modifié par Lewis (figure 1).

Ce test consiste à mesurer la détente verticale d’un

sujet. Placé debout de profil par rapport à une

planche verticale graduée tous les centimètres, le

sujet étire verticalement le plus haut possible le bras

sur la planche. On note la hauteur de l’extrémité de

son majeur (mesure a). Depuis une position

accroupie et arrêtée, le bras opposé à la planche

maintenu derrière son dos, il saute verticalement et

touche le plus haut possible cette dernière avec sa

main libre (mesure b). La détente verticale est la

distance calculée entre les deux mesures

extrêmes : Dv (m) = b – a.

Figure 1 : Sargent test

Compte tenu de la nécessité d’élever sa masse à une certaine hauteur (h), il a été élaboré

un nomogramme (nomogramme de Lewis) pour estimer la puissance développée . Il se

formule de la façon suivante :

P (en Watt) = 21.7 . p (kg) Dv (m)

où p est le poids en kg et Dv la détente verticale en mètre. Le résultat représente la

puissance moyenne développée au cours du test. Par exemple un sportif dont la masse

corporelle est 80kg et dont la détente verticale est 65cm aurait développé au cours du

Sargent-test : 21.7 x 80 0.65m = 1399.6 W ou 17.5 W/kg

Le même test peut être réalisé depuis la position debout avec une flexion-extension

préalable des membres inférieurs. Dans ce cas, outre la puissance mécanique, l’élasticité

musculaire est aussi évaluée. La différence entre les deux protocoles rend compte de l’effet

élastique ou pliométrique.

Un troisième protocole consiste à sauter depuis une hauteur inférieure ou égale à 40cm pour

réaliser le même type de flexion-extension-saut. Dans ce cas les effets pliométriques et de

coordination motrice sont aussi pris en compte.

D’autres épreuves du même type utilisent des appareils différents comme ceux

respectivement mis au point par Sébert et coll (figure 7.2 A) ou Vandevale et coll (figure 7.2

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B) ou encore le test d’Abalakov (figure 7.3) dans lequel la détente verticale est mesurée à

partir d’un cordon étalonné qui, lors du saut, se déroule entre le sol et une ceinture portée

par le sujet. Signalons que les erreurs aléatoires obtenues avec ce dernier sont trop

importantes pour en conseiller sans réserves son utilisation. Concernant les autres épreuves

de détente verticale, on observe une surestimation systématique de près de 16% des

résultats par rapport à la mesure référence obtenue sur une plate-forme de force. De même,

la puissance obtenue à partir de l’équation de Lewis est une valeur moyenne qui admet

beaucoup d’approximations et qui est calculée en prenant en compte l’élévation du centre de

gravité alors que celle mesurée directement au moment de l’impulsion sur la plate-forme de

force est une puissance de crête dont les valeurs sont nettement supérieures.

Figure 2 : Appareils de mesure de la détente

Verticale. Sebert et al. (a) ; Vandewalle et al. (b)

Test du sprint court lancé.

La course brève sur terrain plat est une épreuve classiquement employée. Cependant la

performance chronométrique ne constitue pas une mesure de puissance. Elle en est

uniquement un indice. En négligeant les déplacements latéraux et verticaux du centre de

gravité qu’il faudrait filmer et mesurer pendant la course et en ne conservant que le seul

déplacement horizontal dont on connaît la performance chronométrique sur une distance

donnée (d), il est possible d’estimer l’accélération horizontale moyenne (a) d’après la formule

suivante :

d = ½ a t2 (1)

donc a = 2d / t2 (2)

Connaissant l’accélération, la force moyenne de propulsion horizontale (Fh ) peut alors être

calculée en utilisant la deuxième loi du mouvement de Newton :

Fh = m . a (3)

Comme la puissance (P) est égale au produit de la force par la vitesse :

Figure 3 : Test d’Abalakov. La hauteur du saut est mesurée avec un mètre ruban

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P = F . v (4)

La puissance développée est alors déduite.

Prenons l’exemple d’un sportif qui pèse 80kg et qui parcourt 20m lancé en 3s. En utilisant

l’équation (2), son accélération moyenne horizontale est : (2 x 20m) ÷ (3s)2 = 4.44 m/s2 . La

force horizontale moyenne qu’il utilise est donc (équation 3) : 80kg x 4.44m/s2 = 355.2N. Le

travail moyen qu’il réalise est : 355.2N x 20m = 7104 J ce qui permet de calculer la

puissance mécanique moyenne développée : 7104 N ÷ 3s = 2368 W ou par kg de masse

corporelle : 2368 W ÷ 80kg = 29.6 W/kg. Connaissant le nombre de foulées sur 20m, il est

même possible de calculer la puissance moyenne développée par foulée.

Dans cet exemple nous avons fait

l’hypothèse que l’accélération était constante

du départ à l’arrivée. Des travaux ont montré

que la distance de 30m est la distance

maximale sur laquelle un individu peut

accélérer. Certains sujets atteignent même

le maximum de leur accélération aux

environs de 10m. En conséquence nous

suggérons d’enregistrer les temps de

passage à chaque 10m d’un distance qui ne

devrait pas dépasser 50m (photo 1).

Photo 1 : Prise de performances sur des distances

courtes de sprint lancé: 20, 30 ou 40m

b) Tests de laboratoire.

Détente verticale à partir du tapis électronique de Bosco ou ergo-jump.

L’élévation du centre de gravité est mesurée ici à partir du temps d’envol. Le sujet effectue

un saut vertical à partir d’un tapis équipé de contacts électroniques. La position de départ

dite Squat-Jump doit être rigoureusement respectée : position demi-squat, genoux fléchis à

90°, mains sur les hanches Figure 4a). Le dispositif de contacteurs électroniques est couplé

à un jeu de cellules photoélectriques ce qui permet de mesurer au millième près, la durée du

saut. La puissance est calculée par la formule :

P (watt) = 9.81 . Tv . Tc/4Tc

Tv = temps de vol, Tc = temps de contact.

Ce test peut aussi être réalisé de deux autres façons (figure 4b et c) : après une flexion-

extension des membres inférieurs, ou après un saut en contre bas d’une hauteur maximum

de 40cm. Ces deux protocoles respectivement définis par l’auteur : counter movement jump

(CMJ) et drop jump (DJ) évaluent aussi l’effet pliométrique et la coordination.

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Test du coup de pédale d’Ayalon, Inbar et Bar-Or.

A partir d’un cyclo-ergomètre à freinage mécanique,

équipé d’un chronométrage intégré au pédalier(Photo 2)

et précis à 0.01s, il est demandé au sujet d’exécuter le

plus rapidement possible un coup de pédale unique

contre une résistance standard correspondant soit à une

charge unique pour tous de 2.90 kg (mode absolu) soit à

une charge relative de 40g par kg de masse corporelle.

Connaissant la charge et la vitesse (rapport de la

distance de rotation entraînée par un coup de pédale :

6m par révolution sur la durée du coup de pédale) il est

alors possible de calculer la puissance développée. Cette

même épreuve peut être réalisée avec ergomètre à bras

pour évaluer la puissance de crête des membres

supérieurs.

Nombre maximum de coups de pédale en 5s de Nadeau et coll.

Le matériel requis est identique à celui du test précédent. On demande au sujet de pédaler

le plus rapidement possible contre une charge correspondant à 10% de la masse corporelle

pendant 5s. Le nombre de révolutions complétées pendant cette durée permet selon le

même principe précédemment décrit, de calculer la puissance mécanique développée.

Exemple de calcul pour un sujet de 80kg qui réussit à compléter 9 révolution de pédalier en

5s contre une charge de 8kg c’est à dire à 78.5 N. Le travail accompli est de : 78.5 N x 9 rév.

Figure 4 : Trois types de sauts verticaux réalisés sur ergo-jump : a) : squat jump (SJ), b) : counter movement jump (CMJ) et c) : drop jump (DJ).

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X 6m = 4239 J. La puissance mécanique moyenne développée est donc : 4239 J ÷ 5s = 848

W soit : 848 W ÷ 80kg = 10.6 W/kg de masse corporelle.

Epreuve de l’escalier de Margaria-Kalamen.

Matériel et personnel nécessaires

Un escalier avec des marches dont la hauteur est préalablement mesurée (175 mm dans

notre cas) et des cellules photoélectriques couplées à un chronomètre électronique (figure

5). Un chronométreur très expérimenté peut cependant pallier l’absence de cellules.

Protocole

Le sujet évalué part du point A et après un élan de 6 m, grimpe trois par trois les marches de

l’escalier aussi rapidement que possible. La durée mise pour aller de la marche n° 3 à la

marche n° 9 est enregistrée au centième près.

Résultat

La puissance (P) développée est le rapport entre le produit de la masse corporelle du sujet

(p) par la distance verticale franchie et la durée chronométrée :

Exemple : pour un sujet qui pèse 70 kg et grimpe 1.05 m eu 0.50 s, la puissance développée

sera :

Figure 5 : Test de l’escalier de Margaria-Kalamen permettant d’évaluer la puissance des membres inférieurs

P (kg.m-1.s-1) = p (poids en kg) x h (hauteur en m) t ( temps en s)

P (kg.m-1.s-1) = p (poids en kg) x h (hauteur en m) t ( temps en s)

70 kg x 1.05 m 0.50 s P = = 147 kg.m-1.s-1

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Sprint sur tapis autotracté de Belli et coll (1989) : Chatard (1990)

Sur ce tapis encore défini : tapis libre, le coureur entraîne lui-même la bande roulante du

tapis. Pour cela, il est maintenu en position fixe par une ceinture entourant sa taille et reliée à

une barre de maintien, articulée à ses extrémités de façon à permettre les déplacements

verticaux et latéraux (figure 6). Des capteurs montés sur le tapis roulant permettent d'obtenir

la vitesse instantanée du tapis, la force de traction horizontale et le déplacement vertical du

coureur. L'acquisition et le traitement des données s'effectuent à l'aide d'un ordinateur qui

calcule et visualise la puissance mécanique fournie à chaque foulée par le coureur. La

puissance musculaire fournie par un membre peut être ainsi comparée à l'autre membre. Le

temps mis par un sujet pour atteindre une valeur maximale de puissance ou de vitesse est

mesuré. Cette valeur est atteinte soit rapidement, en moins de 2 s, soit plus lentement en 4

ou 5 s.

Evaluation de l’endurance anaérobie alactique.

a) Tests de terrain

Décroissance de la vitesse de locomotion

Par les épreuves précédentes, l'entraîneur peut être rapidement renseigné non seulement

sur la puissance anaérobie alactique de ses athlètes, mais aussi sur la vitesse gestuelle

spécifique exhaustive définie comme vitesse étalon. Grâce à l'étude de sa décroissance en

Figure 6 : Vue schématique de l’appareillage permettant de mesurer la puissance directement à partir de la course sur le tapis roulant à bande roulante auto tractée de Belli et al. 1989 (D’après Chatard 1990)

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fonction de l'allongement de la durée, il est possible d'évaluer les limites des autres

métabolismes. C'est ce principe qui peut être utilisé pour déterminer notamment

l'endurance du processus anaérobie alactique.

Pour notre part, après avoir déterminé la vitesse étalon de chaque sportif (20m lancé en

course et 10m en natation), nous suggérons l'étude de la décroissance de la vitesse de

course ou nage jusqu'à 20 s. Généralement, on observe chez les sujets non entraînés une

première décroissance entre la 6ème et la 9ème seconde. Le rapport =

Vitesse d'une course 10 s x < 20 s

vitesse étalon

donne d'utiles renseignements sur l'endurance du système. Plus ce rapport tend vers 1 plus

l'endurance est importante.

Exemple Si un nageur parcourt un 25 m en 12.81 s, (vitesse = 1.95 m/s) alors que sa

vitesse étalon chronométrée sur 10 m de nage est de 2 m/s (5 s pour parcourir 10 m) son

rapport

Endurance est de = 1.95 = 0.975

Puissance 2.00

ce qui exprime que son endurance alactique est très bonne. L'évolution de ce rapport au

décours d'une saison d'entraînement permet d'apprécier l'impact de l'entraînement sur

l'endurance alactique. Cette même démarche peut être utilisée pour apprécier l'évolution de

l'endurance des autres sources énergétiques (Figure 7).

Epreuve de squats avec haltères (Montpetit, 1990)

Cette épreuve consiste à mesurer le plus grand nombre de flexions-extensions des membres

inférieurs qu’un sportif peut exécuter avec une charge correspondant à 80% de sa charge

maximale, en 15s. Il faut préalablement mesurer la distance verticale sur laquelle la charge

est déplacée. La puissance moyenne développée est calculée à partir de la formule :

Figure 7 : Exemple théorique permettant d’estimer la puissance et de l’endurance spécifique du système ATP-PCr d’un sujet.

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P (W) = Ch(kg) x 9.81 x n x d (m)

t(15s)

Dans laquelle Ch est la charge, n le nombre de flexions-extensions complétées, d la distance

du déplacement de la charge et t la durée, ici 15s.

Par exemple un sportif qui exécute 25 squats en 15s avec une charge de 120kg déplacée

sur une distance de 35cm développerait une puissance mécanique moyenne de :

P = 120kg x 9.81 x 25 x 0.35 m = 686.7 W

15s

Epreuve de tractions à la barre fixe (Montpetit, 1990).

On procède comme pour l’épreuve précédente mais ici la charge correspond à la masse du

sujet et la distance est celle sur laquelle cette masse est soulevée. Il est aisé de mesurer

cette distance au moyen d’un mètre de couturière. La durée est aussi fixée à 15s.

Par exemple un sportif dont la masse est 80kg et qui est capable d’exécuter 14 tractions

(distance 60cm) en 15s développerait une puissance mécanique moyenne de :

P = 80kg x 9.81 x 14 x 0.60m = 439.5 W

15s

Epreuve des « pompes » avec charge (Montpetit, 1990).

On procède comme pour les deux épreuves précédentes. En position de « pompe » les deux

mains sur un pèse-personne, le sportif enregistre la masse que représente la partie haute de

son corps à laquelle est ajoutée un sac de 20kg. On mesure la distance d’une flexion-

extension complète par rapport au sol et en enregistre le nombre maximum de pompes

complétées en 15s.

Par exemple, le poids du sujet sur le pèse-personne est 55kg (45kg + sac de 10kg). Le

nombre de pompes exécutées en 15s est de 12. La distance de mouvement est de 40cm. La

puissance mécanique moyenne développée serait :

P = 55kg x 9.81 x 12 x 0.40m = 172.7 W

Epreuves de vitesse gestuelle spécifique

Leur principe est simple. Il s'agit de mesurer soit le nombre de gestes spécifiques réalisés,

soit la distance parcourue pendant une durée très courte jamais supérieure à 10 secondes.

On peut aussi tout simplement chronométrer des sprints sur courtes distances :Sprints de 20

30, 40 ou 45 m départ lancé.

De bonnes corrélations ont été établies entre les résultats de l'épreuve de Margaria-Kalamen

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et ces distances de courses, ce qui semble indiquer que l'ensemble de ces épreuves mesure

la même dimension métabolique (et/ou la même qualité musculaire).

Le «push-up» ou «pompe», le «sit-up» ou redressement assis.

Pour pouvoir apprécier la puissance alactique des trois parties principales du corps,

membres supérieurs, tronc et membres inférieurs, dans ces tests on mesure aussi, soit le

nombre de mouvements réalisés en 10 s, soit la durée nécessaire pour effectuer cor-

rectement 10 de ces mouvements. Quels que soient ces tests ils ne donne qu’un indice de

l’endurance alactique de ces parties du corps.

b) Epreuves de laboratoire

Épreuve des 10 bonds verticaux de Georgesco et coll (1977)

Dans ce test, il s'agit d'exécuter, pieds joints, 10 bonds verticaux successifs aussi haut que

possible en réduisant au minimum le contact avec le sol entre deux bonds. La capacité

maximale alactique se calcule à partir de la formule

p x h x 1.5

t

dans laquelle p = le poids du corps (kg), h = la hauteur moyenne des 10 bonds (en m), t = la

valeur moyenne du temps de contact avec le sol entre les 10 bonds, 1.5 = un coefficient,

introduisant dans le calcul l'effort de freinage requis pendant la première partie de la reprise

de contact avec le sol pour ralentir la chute suivant le bond précédent.

Des normes ont été établies par les auteurs pour des populations non entraînées de garçons

et de filles âgés de 7 à 21 ans.

Mesure de la puissance mécanique à partir d'une série de sauts verticaux (Bosco et coll.,

1983)

Bien que la classification de cette épreuve s'avère difficile (utilisation d'un matériel réservé

aux laboratoires bien équipés, mesure à la fois de la capacité alactique et de la puissance

anaérobie lactique), comme elle procède du même principe que l'épreuve de Georgesco et

coll. (1977), il semble opportun de présenter les deux épreuves à la suite l'une de l'autre.

A partir de l'équation

W = g2. Tf.60

4n (60- Tf)

les auteurs mesurent la puissance mécanique totale : contraction + élasticité musculaire des

membres inférieurs (W = watt/kg de poids corporel), au cours d'une épreuve consistant à

réaliser le plus grand nombre possible de bonds verticaux (n) sur le tapis dit de Bosco ou

Ergo-jump précédemment décrit. Au moyen d’un logiciel spécifiquement créé sont

enregistrées les durées cumulées pendant lesquelles les pieds du sujet évalué quittent le sol

(Tf). g2 représente la constante gravitationnelle des sauts verticaux, estimée à 9.81 m.s-2.

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Comparés aux résultats obtenus par Ayalon, Inbar et Bar-Or (1974) et Margaria et coll.

(1966), ceux de cette épreuve sont significativement plus élevés, traduisant, selon les

auteurs, la prise en compte de la composante élastique qui entre en jeu dans les sauts

successifs.

LIMITES DE SIGNIFICATION DES EPREUVES «ALACTIQUES»

L'ensemble des tests précédents sont censés donner des indications fondées sur la

connaissance de la rapidité de l'utilisation voire de l'épuisement des réserves en

phosphagènes (ATP-PCr). En effet, on a longtemps pensé que seules les réserves d'ATP-

PCr immédiatement disponibles fournissaient l'énergie utilisée par les contractions

musculaires intenses de courte durée mais des données récentes montrent bien que la

glycolyse est aussi fortement impliquée dans l’apport énergétique même lors de ce type

d’exercices (40 à 50 % pour des exercices de 6 secondes !). Dès lors non seulement

l’appellation « alactique » s’avère inexacte mais les résultats de ce type de test intègrent ces

deux composantes dont il est difficile de connaître la part respective exacte.

Notons en outre que seule la puissance mécanique résultant de l’utilisation des systèmes

ATP-PCr-glycolyse lactique est appréciée par les différentes épreuves standardisées

intenses et de très courte durée, mais aucun renseignement n'est fourni sur la quantité totale

des réserves disponibles. Si ces épreuves se prolongent au delà de 10s, il devient très

difficile de connaître avec précision la part de l'énergie assurée respectivement par les

phosphagènes et la glycolyse anaérobie.

Il faut noter enfin que, les facteurs morphologiques peuvent ajouter à l'efficacité mécanique

de la réponse à une épreuve, de même que l'efficacité du système neuromusculaire et

l'élasticité du muscle peuvent influer sur les résultats.

C'est pourquoi l'évaluation de l’endurance du système dit « anaérobie alactique » est

toujours matière à controverses.

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EVALUATION DES CAPACITES

PHYSIOLOGIQUES ET PHYSIQUES

I Evaluation des capacités dites

« Anaérobies lactiques »

Cours Masters « Ingénierie de l’entraînement sportif »

2003-2004

Georges CAZORLA

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2 - EVALUATION DE L’APTITUDE « ANAEROBIE LACTIQUE »

Dès lors qu'une partie des réserves en phosphagène (environ 50 %) est utilisée, et que

l'apport d'oxygène aux fibres actives est insuffisant (début d'exercice et exercices supra-

maximaux), la contraction musculaire est alimentée en énergie par la dégradation (ou

catabolisme) du glycogène sans utilisation d’oxygène ce qui induit une formation de

molécules d’acide lactique immédiatement dissociées en lactate et en protons H+.

Le catabolisme d'une molécule de glycogène libère trois molécules d'ATP et s'accompagne

d'une production de deux molécules de lactate. Dans certaines disciplines de durées

comprises entre 20s et 2min, les meilleures performances sont réalisées par les sportifs

capables à la fois de produire plus d’ATP, donc plus de lactate, par unité de temps et de

supporter de fortes concentrations de protons H+, donc des acidoses élevées. Ces deux

critères définissent l’aptitude anaérobie lactique. Ils nécessitent que les épreuves

susceptibles de l’évaluer soient supramaximales, qu’elles conduisent le sportif évalué à

l’épuisement et s’inscrivent dans des durées comprises entre 30s et 2min.

L'évaluation par méthodes directes de l’aptitude anaérobie lactique (méthodes

enzymatiques, mesure du lactate musculaire, spectrométrie…) s'avère très complexe tant au

plan méthodologique que théorique. Nous nous limiterons dans ce document aux méthodes

indirectes utilisées soit en laboratoire, soit sur le terrain.

a) En laboratoire,

la mesure de la concentration maximale du lactate sanguin (ou lactatémie) et la mesure du

déficit maximal en oxygène ou DO2max sont les deux approches les plus utilisées pour

évaluer l’aptitude du métabolisme anaérobie lactique. Plusieurs autres épreuves utilisant le

temps limite d’une épreuve supramaximale réalisée sur cyclo-ergomètre ou en course sur

tapis roulant, permettent d’estimer la puissance ou l’endurance mécanique anaérobie

lactique.

Mesure du « pic » lactique post épreuves supramaximales.

Afin de pouvoir mesurer les concentrations sanguine en lactate, à l’issue d’une épreuve

supramaximale de courte durée (30s à 2min), il est indispensable d’attendre 5 à 10min après

l’arrêt de l’exercice pour réaliser le microprélèvement sanguin nécessaire. Cette durée

permet au lactate produit par le muscle de diffuser dans le sang. On obtient ainsi la

concentration sanguine la plus élevée définie : « pic lactique (figure 8).

Comme les concentrations sanguines en lactate sont toujours le résultat d'une production

cellulaire et d'une utilisation organique, elles ne permettent pas de savoir avec précision ce

qui, en fait, est mesuré.

L’évaluation de l’aptitude anaérobie lactique à partir de la seule lactatémie doit donc toujours

être relativisée. Couplée à d'autres paramètres soit physiologiques comme la fréquence

cardiaque, la consommation d'oxygène, soit physiques comme la vitesse de course, de

nage, de pédalage, le pourcentage de pente d'un tapis roulant et la durée d'un exercice, la

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lactatémie peut donner un reflet de la participation de la glycolyse anaérobie au cours ou à

l'issue d'un exercice.

Elle permettrait notamment de déterminer :

- une zone de transition (ou seuil) à partir

de laquelle le lactate commence à

s'accumuler dans l'organisme ce qui mar-

querait ainsi la limite entre le métabolisme

anaérobie et aérobie. Actuellement, cette

notion de seuil est très controversée. Elle ne

s’appuie en effet ni sur des données

expérimentales incontestables, ni sur une

explication biologique convenable. Par

ailleurs, le nombre important de techniques

qui permettraient de déterminer le « seuil »

et le nombre de « seuils » différents obtenus

chez les mêmes sujets à partir de ces

techniques, ne plaident pas en faveur de

leur reconnaissance.

- le plafond lactique ou quantité maximale pouvant s'accumuler dans l'organisme et indiquant

la limite anaérobie supportable par le sujet. Selon l’intensité de l’épreuve, on peut obtenir ce

résultat, soit à l'issue d'un exercice épuisant de 1 à 3 min, soit par la répétition toutes les 4

ou 5 min, d'un exercice épuisant d'une durée de 1min. Les valeurs extrêmes quelquefois

enregistrées avoisinent 30 mmol.kg - I et 25 mmol.I - I respectivement pour le muscle et le

sang.

En incluant dans une série comprenant trois ou quatre exercices épuisants de 1min, des

périodes de repos de 4 à 5min entre chaque, il est possible d’obtenir des concentrations

sanguines de lactate qui se rapprochent le plus de celles produites par le muscle (figure 9) et

donc de mieux apprécier l’aptitude anaérobie lactique.

Les concentrations sanguines ne

donnent donc qu'un reflet incomplet

de la production réelle du lactate

cellulaire. Cependant, pour un même

sujet participant à la même épreuve à

plusieurs moments d'une saison

sportive, la lactatémie peut correcte-

ment renseigner sur l'impact de

l'entraînement sur le métabolisme

sollicité. Bien maîtrisée, elle peut

constituer un moyen tout à fait

acceptable de contrôle et de suivi de

l’entraînement.

Figure 8 : Evolution des concentrations du lactate sanguin après un exercice d’intensité supramaximale. Selon la durée et l’intensité de l’exercice, ce pic apparaît à des durées différentes : 1 à é min après un 3000m et 6 à 10 min après un 400 m

Figue 9 : Le lactate musculaire atteint chaque fois des concentrations maximales qui semblent définir une limite physiologique, alors que les concentrations du lactate sanguin continue de diffuser hors du muscle.

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Mesure du déficit maximal en oxygène (DO2max).

Dès le début et lors d’exercices supramaximaux épuisants, l’énergie est fournie : par

l’hydrolyse des phosphagènes, par l’utilisation des réserves d’oxygène (myoglobine et

hémoglobine) et par la glycolyse lactique, ce qui induit un déficit en oxygène qu’il faudra

rembourser à l’arrêt de l’exercice. Le déficit maximal en oxygène (ou DO2max) est souvent

utilisé pour évaluer l’aptitude anaérobie lors d’exercices supramaximaux réalisés sur

cycloergomètre ou sur tapis roulant.

Connaissant la consommation maximale d’oxygène (VO2max) d’un sujet et la relation puissance

ou vitesse de course – VO2,

on lui fait faire un exercice

épuisant de 2min corres-

pondant à 120% de sa puis-

sance ou de sa vitesse

obtenue à VO2max (PAM ou

VAM). Pendant toute la

durée de cet exercice, la

consommation d’O2 est me-

surée. Le DO2max correspon-

drait à la différence entre la

consommation d’oxygène

théorique extrapolée pour

une intensité de 120% de

PAM ou de VAM et la

consommation mesurée

(figure 10).

Mesure du temps limite.

Evaluation de la puissance anaérobie lactique

La puissance de la glycolyse anaérobie est mise en jeu par des exercices supra-maximaux

amenant le sujet à l'épuisement au bout de 30 à 50s. La puissance maximale est

généralement obtenue entre 30 et 40 s. Ce sont ces principes qui ont présidé à l'élaboration

d'épreuves de laboratoire nécessitant un matériel spécial, et d'épreuves de terrain. Les deux

ayant pour point commun la faiblesse de leur validité.

Épreuves de «laboratoire»

Épreuve pour les membres inférieurs d'Ayalon et coll. (1974).

Cette épreuve consiste à accomplir sur un cycloergomètre le plus grand nombre de

révolutions en 30 s contre une résistance supra-maximale standard établie en fonction du

poids corporel (40 g/kg de poids). On admet que le type d'effort requis soit limité

Figure 10 : Détermination du DO2max. a) Evolution de la relation VO2max-vitesse. b) Représentation schématique de l’accumulation du

déficit en oxygène lors d’un exercice de course à vitesse supramaximale (Medbo et al. 1988)

a b

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principalement par la glycolyse anaérobie. La puissance obtenue exprimée en kgm/min

correspond à la puissance moyenne mesurée pour 30 s.

L'endurance lactique et la puissance alactique peuvent aussi être évaluées. La première

correspond au nombre maximal de révolutions en 30 s, ou travail total (exprimé en kgm),

réalisé en 30 s. La seconde, à la puissance maximale enregistrée pendant la fraction de 5 s

la plus rapide des 30 s. Elle s'exprime en kgm/min.

Lors de travaux complémentaires, Bar-Or et Inbar (1978) ont établi d'intéressantes

corrélations entre trois courses (40, 300 et 600 m) et, respectivement, la puissance maxi-

male et l'endurance anaérobie lactique

Épreuve lactique d'évaluation de la puissance des membres supérieurs d 'Ayalon et coll.

(1974)

Le protocole et le principe de cette épreuve sont identiques au précédent, à l'exception

toutefois

- de la technique du pédalage qui est effectué avec les membres supérieurs, le sujet étant

assis en position stable, sur une selle dont la hauteur a été fixée de façon à ce que l'axe du

pédalier se situe au niveau des épaules de l'évalué,

- et de la puissance du pédalage, fixée à 30 g par kg de poids corporel pour un

cycloergométre de Fleish, et à 50 g pour la bicyclette ergométrique Monark.

Épreuves de «terrain»

La glycolyse anaérobie permet de fournir un travail supramaximal qui, selon son intensité,

peut être poursuivi entre 30 s (puissance) et 3 min (endurance). Dans les deux cas, on

postule que c'est la trop forte acidose musculaire qui induirait une incapacité fonctionnelle

musculaire et donc une baisse de la performance. L'évaluation de la puissance suggère

d'utiliser des épreuves supramaximales de durées incluses entre 30 et 50 s. Celle de

l’endurance utilise de préférence des épreuves de durées comprises entre 2 et 3 min. Le

travail fourni ne doit pas être limité par des problèmes d'apprentissage, d'où le choix d'exer-

cices de réalisation simple ou faisant partie de la technique habituelle des sujets considérés.

La même épreuve, assortie de durées variables, peut donc être retenue. La totalité du travail

réalisé, l'intensité maximale et la décroissance de cette intensité peuvent respectivement

renseigner sur la capacité, la puissance et l'endurance du système; c'est pourquoi, bien que

n'entrant pas dans la logique de la chronologie de cette étude, nous les envisageons

ensemble dans le chapitre ci-dessous.

Épreuves de course à pied

Course en navettes de 6 x 30s avec 25s de récupération (figure 11)

Dans cette épreuves il s’agit de courir en navettes de 5 puis de 10 puis de 15 puis de 20m et

ainsi de suite… en couvrant la plus grande distance en 30s. Après un arrêt de 25s reprendre

une deuxième course navette et ainsi de suite jusqu’à six répétitions. Enregistrer la distance

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parcourue à chaque répétition et établir le pourcentage entre le moins bon essai et l’essai

référence relevé à part et qui sert lui-même de performance. Trois performances permettent

d’évaluer l’aptitude anaérobie des sujets : la meilleure performance sur un essai unique hors

protocole enchaîné, la distance totale parcourue et le pourcentage obtenu.

Course de 500m de Lemon

Sur une piste étalonnée de 50 en 50 m, il s’agit de courir un 500 m à la vitesse la plus élevée

possible. Chronométrer le deuxième et le dernier 50 m.

On calcule alors la différence entre les deux performances chronométriques enregistrées et

on multiplie le score obtenu par 10. L'objectif est d'obtenir le résultat le plus faible possible.

On admet qu'une forte décroissance de la vitesse entre les deux 50 m est liée à une

importante accumulation lactique, ce qui constituerait la limite anaérobie lactique du sujet.

Exemple : Si un sujet court le deuxième 50 m en 6.9 s et le dernier en 7.8 s son score serait

7.8 - 6.9 = 0.9 x 10 = 9 points.

Prises de performances chronométrées sur différentes distances.

Les performances réalisées sur les distances suivantes peuvent utilement renseigner sur les

caractéristiques du processus anaérobie lactique.

Selon l'âge, le sexe et le niveau d'entraînement des sujets

- la puissance peut être évaluée par des sprints de 200 ou 300 m

- l’endurance par des courses de 600 ou 800 m

Figure 11

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Épreuves de nage

Elles dépendent de l'âge, du sexe, du niveau technique et d'entraînement du sujet et bien

sûr de la technique de nage retenu.

Épreuve sur bicyclette

Les mêmes conditions évoquées pour les épreuves précédentes sont aussi valables ici. La

capacité lactique peut s'apprécier par la distance de 2 km parcourue à vitesse maximale et la

puissance par un 800 m.

Remarque : comme pour les résultats obtenus par l'évaluation du potentiel anaérobie

alactique, nous suggérons d'étudier l'évolution du rapport : vitesse de l'épreuve

vitesse étalon

pour mieux apprécier puissance et endurance du système lactique au cours d'une saison

sportive.

Evaluation de l’endurance anaérobie lactique.

En ce qui concerne le potentiel anaérobie lactique, il est difficile de dissocier clairement

l'endurance de la capacité du processus. En effet, dans les deux cas, les intensités requises

sont très voisines. Le débit maximum de production d’ATP à partir de la glycolyse anaérobie

se situe cependant entre 30 et 50s, alors que, à intensité supramaximale très sensiblement

moindre, la glycolyse lactique continue de contribuer à un important apport énergétique

jusqu’à environ 2 à 3min. Soulignons encore que dans ces durées, la glycolyse aérobie

devient alors une source énergétique d’autant plus associée à la réalisation de ce type

d’activité musculaire que le potentiel aérobie du sujet est développé. L’évaluation de

l’endurance anaérobie lactique est donc toujours liée à celle de la puissance aérobie

maximale.

Épreuve de De Bruyn-Prévost (1975)

L'objectif de cette épreuve est de mesurer le travail lactique total. Elle consiste à

chronométrer la durée maximale pendant laquelle un sujet est capable de pédaler sur un

cycloergomètre à une puissance standard (rythme + freinage) établie en fonction du sexe, et

prendre la fréquence cardiaque en fin d'épreuve pendant 3 minutes.

Le matériel nécessaire pour réaliser cette épreuve, comprend un cyloergomètre à freinage

mécanique ou électromagnétique, un métronome et un indicateur de vitesse, un compte-

tours cumulatif solidaire du pédalier et un chronomètre. Après échauffement, l'intensité de

l'exercice est fixée à 400 W pour les hommes et à 350W pour les femmes, pour un rythme

de pédalage fixé respectivement entre 124 et 128 et entre 104 et 108 rotations par minute

(figure 12)

Au cours de l'épreuve, il faut enregistrer :

- la durée nécessaire (en secondes) pour atteindre le rythme cible.

- la durée totale pendant laquelle le sujet a maintenu le rythme cible.

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Après l'arrêt de l'épreuve, pendant la récupération, le nombre de pulsations est enregistré

par séquences de 15 s chacune située à 1, 2 et 3 min.

Après avoir enregistré les données de l'épreuve : puissance cible (watts), rotations/min cible,

rotations/min réelles moyennes, nombre total de rotations, le travail total (J), les fréquences

cardiaques à 1, 2 et 3 min (b/min), on calcule l'indice I (1 = Durée totale de l'épreuve / délai

initial x (FC1 + FC2 + FC3) et l'indice Il (Il = Durée totale de l'épreuve / délai initial).

Limites de signification des mesures et épreuves anaérobies lactiques

Nous avons déjà indiqué les limites de la lactatémie. La molécule de lactate diffuse inéga-

lement dans les différents compartiments liquidiens de l'organisme à partir desquels son

devenir est multiple on sait que, même au cours de l'exercice, une certaine quantité peut

être retransformée en glycogène (cellules hépatiques et musculaires), une autre totalement

oxydée (cellules myocardiques et musculaires) ou/et encore transaminée en alanine, enfin

une petite quantité serait éliminée par la sueur.

La quantité qui demeure dans le sang n'est donc que le reflet indirect et imparfait de la

production cellulaire réelle. Elle-même dépend des caractéristiques musculaires et du niveau

d'entraînement du sujet. Autrement dit, la lactatémie n'est qu'un moyen peu précis

d'évaluation de la capacité anaérobie lactique .

D’autre facteurs sont aussi susceptibles de fausser les épreuves d’évaluation de l’aptitude

anaérobie lactique. Ils sont d’ordre :

- psychologique car les sujets non motivés ne vont pas jusqu'au bout de leurs possibilités;

- physiologique, la consommation maximale d'oxygène jouant un rôle d'autant plus important

que la durée de l'exercice se situe au-delà de 30 s (à des intensités supramaximales, 90 à

Figure 12 : Caractéristiques des résultats moyens obtenus respectivement par les homme et les femmes au test sur ergocycle de De Bruyn-Prévost.

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95 % de la consommation maximale d'oxygène peuvent être sollicités dès la première

minute). Inversement, plus la durée de l'épreuve est courte, plus intervient l’hydrolyse des

phosphagènes.

- et enfin biomécanique, car les rapports segmentaires, la taille et le poids du sujet, de même

que l'apprentissage technique de certaines tâches complexes, peuvent infléchir les résultats

et les rendent difficilement comparables d'un individu à l'autre.

Bien que les résultats de ces épreuves soient entachés d'une certaine imprécision, ils

permettent néanmoins de donner d'assez bonnes indications individuelles. Répétés à

intervalles réguliers, ils peuvent permettre d’apprécier l'impact d'un programme d'entraîne-

ment sur le métabolisme dit « anaérobie lactique », principalement sollicité dans toutes les

activités physiques et sportives d'une durée comprise entre 10 s et 3 min.

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3 - EVALUATION DE L’APTITUDE AEROBIE

Comme chacun des métabolismes, l’aptitude aérobie se caractérise par une capacité, une

puissance maximale et une endurance. Ces trois composantes dépendent des réserves en

substrats oxydables de l’organisme (essentiellement glucides et lipides) et de l’efficacité du

la chaîne qui extrait l’oxygène de l’environnement diffusion (alvéolo-capillaire), le transporte

jusqu’aux fibres actives (concentration en hémoglobine, hématocrite débit cardiaque) et

l’utilise (diffusion périphérique, nombre de capillaires fonctionnels, pouvoir oxydatif :

mitochondrie et équipement enzymatique des fibres musculaires) pour répondre à des

activités de longue durée.

3.1- Quelques définitions préalables.

Nous venons d’utiliser trois concepts qui seront ensuite largement repris dans ce chapitre,

aussi convient-il d’en proposer les définitions que nous leur attribuons.

La capacité aérobie représente la quantité totale d’énergie potentielle susceptible d’être

fournie par voie oxydative .Comme elle dépend des réserves totales de substrats utilisables

(ou «carburant » de l’organisme) : glycogène, glucose circulant, acides gras libres, voire

même dans certaines circonstances, acides aminés... et bien sûr, de la totalité de l’oxygène

(ou «comburant ») utilisé pour leur combustion, son évaluation directe est impossible. Par

contre on peut indirectement en apprécier l’importance par l’évaluation de ses deux

composantes que sont : la puissance maximale et l’endurance.

La puissance aérobie maximale (P.A.M.) est la quantité maximale d’oxygène qu’un

organisme peut utiliser par unité de temps (généralement par minute) au cours d’un

exercice musculaire intense et d’une durée égale ou supérieure à trois minutes. Elle

correspond au VO2 max (V = débit ; O2 = oxygène ; max = maximal) ou consommation

maximale d’oxygène.

L’endurance aérobie (E.A.) est la fraction ou le pourcentage de VO2 max ou de la P.A .M.

ou encore de la vitesse aérobie maximale (V.A.M.) susceptible d’être maintenu au cours

d’une épreuve d’une durée donnée. Par exemple courir pendant 12 min (test de Cooper) ou

un 5000, un 10000, un 20000 m, un semi-marathon ou un marathon et calculer ensuite à

quel pourcentage moyen de la V.A.M. correspond la performance réalisée.

L’E.A. est aussi la durée d’une activité susceptible d’être maintenue à un pourcentage

donné de VO2 max, de la P.A.M.ou de la V.A.M. Par exemple fixer un pourcentage de la

V.A.M. (85, 90, 95 ou 100 %) et chronométrer la durée maintenue à cette vitesse.

Dans les deux cas, l’évaluation de l’endurance aérobie nécessite de connaître

préalablement la vitesse aérobie maximale.

La vitesse aérobie maximale (V.A.M.) ou puissance aérobie maximale fonctionnelle

(P.A.M.F.) est la vitesse limite atteinte à VO2 max. Elle résulte de l’interaction de trois

facteurs :1- de VO2 max, 2- du rendement de la locomotion (course, cyclisme, natation...)

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encore défini comme efficacité ou économie de locomotion utilisé et 3- de la motivation pour

pouvoir atteindre VO2 max au cours d’une épreuve intense et prolongée (Figure 13).

L’économie de locomotion (de course, de nage, de pédalage...) représente le plus faible

coût énergétique pour se déplacer à une vitesse donnée ou mieux, à un pourcentage donné

de VO2 max ou de la V.A.M.

Figure 13 : Les facteurs de la performance de longue durée. Endurance, puissance aérobie maximale

(ou VO2 max), vitesse aérobie maximale (ou VAM) et économie de gestes ou de locomotion,

constituent aussi les facteurs de la capacité aérobie. C’est de leurs interactions que dépend la

performance de longue durée.

3.2 - Evaluation de VO2max.

L’évaluation de VO2max peut être réalisée de façon directe par la mesure des gaz expirés au

cours d’épreuves intenses, de longue durée et engageant au moins les deux tiers de la

masse musculaire totale ou indirecte en extrapolant VO2max à partir de la connaissance

d’autres variables avec lesquelles il est associé ; relation : fréquence cardiaque-vitesse de

course ou puissance mécanique.VO2max peut être obtenu à partir d’épreuves maximale ou

extrapolé à partir d’épreuves inframaximales. Les protocoles de ces épreuves peuvent être à

intensité constante, ils sont dits alors rectangulaires (figure 14), ou à intensité progressive et

sont définis comme triangulaire. Les protocoles triangulaires peuvent eux-mêmes se

subdivisés:

PERFORMANCE OBTENUE DANS UNE COURSE DE LONGUE DUREE

FACTEURS

PHYSIOLOGIQUES

FACTEURS

PSYCHOLOGIQUES

ENDURANCE

AEROBIE

ECONOMIE

DE COURSE

MORPHOLOGIE, TECHNIQUE, SPECIALITE

ENDURANCE AU STRESS, MOTIVATION

ENTRAINEMENT VITESSE AEROBIE MAXIMALE

FACTEURS

BIOMECANIQUES

CAPACITE DE MAINTENIR LA VITESSE

MOYENNE DE COURSE LA PLUS ELEVEE

VO2 max

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- en épreuves continues à accélération constante dites en rampe ou à accélération par

paliers plus ou moins longs et sont définis comme épreuves triangulaires continues en

escalier (figure16) :.

- ou en épreuves discontinues avec arrêts de durées variables entre chaque palier pour

permettre par exemple, des prélèvements à des fins de dosages biologiques (figure 15 ) :

Devant cette abondance, nombreux sont les praticiens qui, aujourd’hui, s’interrogent avant

de choisir le test correspondant le mieux à leur(s) besoin(s) et à leur(s) moyen(s) aussi

convient-il de définir leur critères de validité.

Figure 14 : Exemples d’ épreuves rectangulaires accompagnées de leurs intensités relatives.

Figure 15 : Exemples d’épreuves triangulaires accompagnées du nom de leurs concepteurs

Critères de validité

En laboratoire : VO2 mesuré

Afin d’avoir l’assurance que le sportif évalué a bien atteint son maximum, la consommation

maximale d’oxygène obtenue par mesures directes doit répondre à plusieurs critères :

- le sujet s’arrête parce qu’il est réellement épuisé,

- l’augmentation de sa fréquence cardiaque et de son VO2 s’infléchissent et plafonnent,

-son quotient respiratoire (VCO2/VO2) atteint des valeurs supérieures à 1.10,

-sa concentration sanguine en lactate est supérieure à 9 mmol.l-1

TESTS TRIANGULAIRES DISCONTINUS

2. Mercier

3 min / 3 min

3 min / 1 min

1. TUB II Cazorla

TESTS RECTANGULAIRES

12 min de course

1 – Test de Cooper :

90 à 95 % de VO2max

5 min

2 - Test de Brikci :

~ 100 VO2max

3 – Test d’Astrand :

~ 130 % VO2max

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Figure 16 : Exemple d’épreuves triangulaires et continues

Protocole utilisé

Les épreuves triangulaires sont actuellement préférées aux épreuves rectangulaires mais

toutes ne répondent pas aux critères de validité pour amener le sujet à son VO2max et

éventuellement obtenir sa PAM ou sa VAM. Ces critères doivent tendre à obtenir un état

métabolique stable à chaque palier. Pour ce faire :

- les paliers ne doivent être ni trop courts (intervention des capacités anaérobies, état stable

non atteint entraînant une sous estimation de l’économie de locomotion et une sur estimation

de la PAM ou de la VAM), ni trop longs (état de fatigue entraînant une PAM ou une VAM

sous estimée) figure 17. Les durées des paliers dépendent de l’augmentation de l’intensité :

vitesse ou puissance) à chaque nouveau palier. En général, lorsque le protocole est continu,

des paliers de 2min ont été validés pour des augmentations de vitesse de course de 1km/h.

- l’augmentation de l’intensité ne doit pas être trop brutale. Les augmentations de vitesses

les plus valides sont :

. pour les protocoles continus : ½ km/h pour des paliers de 1min, 1km/h pour des paliers de

2min, la limite étant de 2km/h pour des paliers de 3min.

. pour les protocoles discontinus avec des arrêts de 1min l’augmentation de la vitesse doit

être de 1km/h pour des durées de palier de 3min.

- enfin, la durée totale de l’épreuve continue ne doit pas excéder 20min.

TESTS TRIANGULAIRES CONTINUS

1. Léger et Boucher

1 km/h par

2 min

0.5 km/h par

1 min

3. VAM-EVAL:

Cazorla et Léger

5. Accélération

rapide

1 km/h par

1 min

4. Accélération

lente

1 km/h par

3 min

6. Rampe :

Brue

1/2 km/h

par 30s

0.5 km/h par 1 min

2. Navette

Léger et coll.

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Figure 17 : Différentes conditions expérimentales susceptibles de surestimer ou de sous-estimer la

vitesse aérobie maximale à l’issue d’épreuves triangulaires.

Ergomètres utilisés

Selon l’ergomètre utilisé les valeurs de VO2max du même sportif peuvent être très différentes.

D’une façon générale les valeurs obtenues en course sur tapis roulant sont supérieures à

celles obtenues sur un cycloergomètre standard de laboratoire. Dans certaines disciplines

comme la natation et le cyclisme les valeurs obtenues au cours de la nage sont en moyenne

de 10% inférieures à celles de la course. Par contre les cyclistes peuvent obtenir des valeurs

équivalentes sur cyclo-ergomètre spécifiquement adapté.

Actuellement de plus en plus les mesures métaboliques sont réalisées directement dans la

discipline du sportif : natation, ou au moyen d’ergomètres spécifiquement conçus : Cyclisme,

ski, patinage, aviron… ou encore directement au cours de l’activité elle-même grâce à des

analyseurs miniaturisée de gaz directement portés par le sujet. Les valeurs spécifiques

obtenues sont plus riches de renseignements mais perdent en fidélité.

Sur le terrain : VO2max estimé et mesure directe de la VAM

Les mêmes critères de validité sont à appliquer aux protocoles utilisés sur le terrain (figures :

14, 15, 16 et 17).

Ces protocoles se répartissent aussi en épreuves :

rectangulaires : la plus grande distance parcourue en 12 min de Cooper,1968

progressive de course navette de Léger et Lambert (1982),

progressive de course sur grand terrain de Léger et Boucher (1980),

progressive Vam-éval de Cazorla et Léger (1993),

La vitesse aérobie maximale résulte de l’interaction de VO2max, de

l’économie de course, de nage ou de locomotion…mais aussi :

Du protocole de l’épreuve d’où elle est issue

PROTOCOLE COURT Intervention de la

capacité anaérobie :

VAM surestimée

PROTOCOLE DE 15 à 20 min AVEC OU SANS ARRETS…

Des arrêts trop longs peuvent aussi surestimer la VAM.

Arrêts d’une min maximum

PROTOCOLES LONGS ( > 20-30 min)

Fatigue = VAM sous-

estimée

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progressive de course derrière cycliste de Brue (1985),

progressive de course à paliers de 3 min, ou test de l’Université de Bordeaux 2 (TUB2,

Cazorla 1990).

Leur niveau de pertinence

Le niveau de pertinence est dicté par l’objectif ou les objectifs que se fixe l’utilisateur d’un

test donné. C’est d’ailleurs à cet endroit que l’on observe les plus grandes confusions, aussi

faut-il se poser les bonnes questions relatives aux utilisations possibles.

S’agit-il d’établir un simple diagnostic initial sur le niveau de développement de la

capacité aérobie ? Dans ce cas seul un indice de l’aptitude aérobie suffit et n’importe

lequel des six tests précédents peut être retenu.

Veut-on évaluer la puissance aérobie maximale d’un ou de plusieurs sujets ? Hormis le

test de Cooper, tous les autres le permettent avec cependant une meilleure validité

obtenue avec les tests navette de 20 m de Léger et Coll. (1985).

S’agit-il encore d’obtenir une vitesse limite référence ou vitesse aérobie maximale (VAM)

afin de mieux orienter et contrôler les intensités d’entraînement ? Dans ce cas un simple

indice aérobie ne suffit plus. Ne disposant que d’un chronomètre et de distances,

l’enseignant d’EPS, l’entraîneur et le sportif ont surtout besoin de références

chronométriques pour élaborer les contenus de leurs entraînements. Plus que la

connaissance de VO2max, c’est celle de la vitesse limite de course atteinte à VO2max ou

vitesse aérobie maximale (VAM) qui leur est indispensable. A partir de cette vitesse,

peuvent facilement être programmées les intensités et les durées optimales utiles de

course et être connues leurs répercussions physiologiques. Dans cette perspective, nous

avons développé un logiciel (biologiciel) qui permet de traduire ces intensités et leurs

pourcentages par rapport à la VAM, en temps de passage à des intervalles de distances

choisies ou en distances à parcourir pour des intervalles de durées connues.

Les tests progressifs de course sur piste : VAMEVAL, Léger et Boucher, Brue et TUB2

peuvent parfaitement répondre à ce type d’utilisation.

S’agit-il enfin d’obtenir non seulement la VAM mais aussi d’explorer les vitesses

intermédiaires correspondant aux limites des mises en jeu métaboliques aérobie,

anaérobie et mixte ainsi que les réponses cardiaques en état stable et au cours

d’intervalles de récupération ?

Dans ce cas le test de l’Université de Bordeaux 2 (TUB2) permet de répondre à ces

différents objectifs.

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Le tableau 5 ci-dessous récapitule la pertinence du choix éventuel des six différents tests les

plus connus.

TESTS RÉSULTATS OBJECTIFS (*)

ICA PAM VO2 max

VAM PMT

.12min de course

:

.2400 m : Cooper

.course navette

20m Leger et al.

.course sur piste

Léger et Boucher

vaméval

Cazorla et Léger

.Course-derrière

cycliste, Brue

.TUB2 : paliers

3 min, Cazorla,

Plus grande distance

parcourue

Plus petite durée

Dernier palier complété

Dernier palier complété

Durée dans le dernier

palier

Durée dans le dernier

palier

Durée dans le dernier

palier

oui

oui

oui

oui

oui

oui

oui

non

non

oui

oui

oui

oui

oui

non

non

oui

oui

oui

non

oui

non

non

non

oui

oui

oui

oui

non

non

non

non

non

non

Oui

Tableau 5 :Pertinence du choix d’un test. Aide à l’orientation de ce choix en fonction des objectifs de

l’utilisateur.(*) ICA : indice de capacité aérobie ; PAM : puissance aérobie maximale ; VO2 max :

consommation maximale d’oxygène ; VAMS : Vitesse aérobie maximale spécifique ; PMT : plages

métaboliques transitionnelles.

Niveau de validité

Il s’agit ici d’avoir la preuve expérimentale que chacun des tests sélectionnés mesure

effectivement ce qu’il est censé évaluer. Le niveau de corrélation calculé entre le facteur

directement mesuré et le résultat du test permet de vérifier sa validité. Si la corrélation est

élevée, connaissant le résultat du test il est permis d’extrapoler le facteur à évaluer. L’inverse

est aussi possible.

Selon les deux objectifs principaux assignés aux tests précédents, peut-on affirmer qu’ils

mesurent effectivement VO2 max et la vitesse aérobie maximale ?

Validité et VO2 max

Bien que la connaissance de VO2 max ne s’avère pas indispensable aux entraîneurs, aux

éducateurs et aux sportifs, certaines épreuves sont très fortement corrélées à VO2max. Elles

permettent d’extrapoler la consommation maximale d’oxygène avec un risque inférieur à la

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plupart des tests indirects de laboratoire. En fonction de l’âge des sujets, la course navette

de Léger et al. (1985) présente un niveau de corrélation compris entre 0,70 (n = 188 enfants)

et 0,90 (n = 77 adultes).

L’épreuve de course sur grand terrain (Léger et Boucher, 1980) n’est par contre validée que

pour prédire le VO2max de sujets adultes (r = 0,96 ; n = 25 adultes). Par contre le résultat de

ce test permet aussi une très bonne prédiction des performances de demi-fond (r = 0,96 ; n =

23 adultes) et de fond (r = 0,96 ; n = 24 adultes). Il en est de même du test de Brue (1985) : r

(1500m) = 0,96 ; n = 12 et r (3000m) = 0,91 ; n = 11. Ces trois tests sont donc

respectivement validés pour prédire VO2 max (navette et course sur piste) et la performance

de longue durée (course sur piste et Brue), ce qui n’est pas le cas du test de Cooper qui,

selon les populations étudiées et selon les auteurs, présente des niveaux de corrélation non

significatif ( r : 0.24) à très significatif (r: 0.94). Cette grande variabilité interdit d’adopter sans

réserve cette épreuve pour prédire le VO2 max.

Niveau de validité et VAM

Le concept de vitesse aérobie maximale (VAM) ou vitesse limite atteinte à VO2 max (V max)

suscite actuellement un grand intérêt chez les entraîneurs, les enseignants d’EPS et les

sportifs. A partir de la lecture du tableau 5 il est aisé d’en percevoir les raisons. La

connaissance de cette vitesse chez un individu donné n’est cependant pas aussi simple

qu’elle en a l’air. En effet, la VAM dépend non seulement de multiples interactions

biomécaniques et physiologiques (figures 13 à 17) mais aussi du protocole du test censé

l’obtenir.

Au nombre des interactions, le VO2 max, le rendement énergétique encore défini comme

l’économie de course et ...la motivation en sont les principales.

Ainsi la VAM résulte à la fois de l’économie de course et du VO2 max. Connaissant la VAM,

VO2 max ne peut être extrapolé qu’en tenant compte de l’économie de course qui, selon les

individus peut varier entre + 5%.

Un autre point et non des moindres est que la VAM peut aussi varier en fonction du

protocole du test. D’une manière générale, plus l’augmentation de la vitesse des paliers est

brutale et de courte durée, plus la VAM a des chances d’être surestimée. Dans ce cas, une

part importante de la VAM est liée à la production anaérobie de l’énergie (Figure 17)..

A l’inverse, plus la durée du protocole est importante, plus la VAM risque d’être sous estimée

probablement à cause des effets de la fatigue qui limitent la poursuite de l’exercice

Autrement dit, il existe autant de VAM qu’il existe de protocoles, ce qui peut expliquer

pourquoi des différences souvent importantes sont obtenues au niveau des durées pendant

lesquelles les sujets évalués sont capables de courir à 100% de leur VAM. Rappelons que

l’endurance aérobie étant définie comme «le pourcentage de la puissance aérobie

maximale (ici représentée par la VAM) susceptible d’être maintenu le plus longtemps

possible » de nombreux auteurs utilisent la durée de course à 100% de VAM pour l’évaluer.

La durée de course à 100% de VAM serait de 7 min avec des sujets moyennement

endurants. Il est évident que cette durée devrait être inférieure en utilisant les autres tests et

plus particulièrement les tests de course à accélération rapide.

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Aussi, afin d’éviter les actuelles confusions, nous suggérons d’utiliser le concept de VAM

spécifique en précisant le test avec lequel elle a été obtenue (ex : VAM Léger-Boucher, VAM

TUB2, VAMEVAL, VAM Brue) plutôt que le concept unique de VAM.

Figure 18 : Différentes interactions physiologiques et biomécaniques à l’origine de la performance de

longue durée.

Remarques :

1· Le test VAMEVAL a été élaboré pour rendre le test Léger et Boucher plus accessible et

plus précis. La pente d’augmentation de l’intensité étant rigoureusement la même : ½ km.h -1

par palier de 1 min à la place de 1 km.h-1 par palier de 2 min, le test VAMEVAL bénéficie

indirectement du niveau de validité du test de Léger et Boucher. Par contre les VAM

obtenues s’avèrent plus précises au ½ km.h-1 près avec le test VAMEVAL.

2· Une étude très récente n’a montré aucune différence significative entre les VAM obtenues

au VAMEVAL et celles obtenues au TUB2 . On peut donc indifféremment utiliser ces deux

tests pour obtenir la VAM.

FREQUENCE CARDIAQUE MAX

FC max

VOLUME D’EJECTION SYSTOLIQUE MAX

VS max

DEBIT CARDIAQUE MAXIMAL : VES x FC

DIFFERENCE ARTERIO- VEINEUSE EN O2 max :

( Ca O2 - Cv O2 ) max

CONSOMMATION MAX D’OXYGENE: VO2 max

[Hb]; % Sa O2

DENSITE

CAPILLAIRE

MITOCHONDRIES ENZYMES

OXYDATIVES

ENDURANCE AEROBIE:

MASSE

CORPORELLE

SPECIALISATION

VITESSE MOYENNE LA PLUS ELEVEE POSSIBLE

PERFORMANCE DE LONGUE DUREE

ECONOMMIE DE LOCOMOTION D’OXYGENE: VO2 max

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Niveau de fidélité

Le niveau de fidélité d’un test est défini par les résultats obtenus par les mêmes sujets

passant deux fois le même test à peu de jours d’intervalle. Le test est dit fidèle lorsque les

résultats entre test et re-test demeurent stables : pas de différence significative et corrélation

proche de 1. Hormis le test de Cooper, la standardisation rigoureuse et enregistrée sur

bande sonore des tests progressifs de course navette de 20 m, de course sur piste (Léger-

Boucher, VAMEVAL, TUB2) et de course derrière cycliste, leur confère une grande fidélité

externe (liée aux conditions extérieures au sujet) à la condition de vérifier la vitesse de

défilement du magnétophone utilisé et de les faire passer dans les mêmes conditions

environnementales (piste, climat, heure de la journée...).

Remarquons cependant que le niveau de fidélité interne (propre au sujet) peut varier entre

deux tests lorsque l’évalué découvre le test pour la première fois. Chez des enfants et des

adolescents nous avons trouvé une étendue de différences en plus lors du re-test allant de 5

à 10 % liée uniquement à «l’effet découverte » voire à l’apprentissage. Ensuite les résultats

demeurent très stables. En conséquence, il est donc recommandé de n’enregistrer que les

résultats obtenus au deuxième test.

Niveau d’accessibilité.

L’accessibilité est entre autres, liée aux caractéristiques habituelles de la pratique de

l’activité physique sur les lieux où elle se déroule : stade, salle de sport et des matériels qui

s’y trouvent déjà. En fonction de ces critères nous avons établi une hiérarchie de niveaux

d’accessibilité des différents tests expertisés : Tableau 6.

Ainsi, le test de Cooper présente un excellent niveau d’accessibilité, la course navette, et le

Vam-éval un très bon, sensiblement meilleur que l’épreuve de course sur piste de Léger-

Boucher et le TUB2 mais nettement meilleur que le test progressif de course derrière cycliste

qui nécessite une bicyclette adaptée et un cycliste habitué à pédaler à des cadences

imposées.

Afin d’en améliorer le niveau d’accessibilité ainsi que la précision de ses résultats, c’est à la

demande d’une part : des enseignants d’EPS et d’autre part de la Fédération Française

d’Athlétisme que nous avons modifié le protocole du test de Léger et Boucher sans rien

changer à son niveau de validité. Pour mieux ajuster la vitesse de course, nous avons placé

les bornes-repères à 20 m les unes des autres autour d’une piste au lieu de 50 m comme

prévu dans le protocole initial ; Cette distance est aussi plus facile à mesurer au moyen du

double décamètre que possèdent généralement enseignants et entraîneurs et permet

facilement de tracer une piste multiple de 20 m (200, 220, 240 m) sur n’importe quel terrain

de football ou de rugby.

De plus, l’augmentation de la vitesse de un demi km.h -1 à chaque minute à la place de 1

km.h-1 toutes les deux minutes, permet non seulement d’obtenir une VAM plus précise mais

aussi d’augmenter la vitesse de chaque palier de façon plus discrète et mieux adaptée aux

possibilités des enfants et des adolescents.

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test :

1= le plus

accessible

6 = le moins

accessible

Matériel nécessaire

compréhension

et réalisation du

protocole

Durée

nombre d’évalués à

la fois

nombre

d’évalua-

teurs

1· Cooper

2· Course

navette 20 m

3· Vam-éval

4· Course

sur piste de

Léger-

Boucher

5· TUB2

6· Course

derrière

cycliste

1 piste +

1 chronomètre

1 surface plane

15 X 22 m

1 cassette enregistrée

1 magnétophone

1 piste multiple de 20 m

1 cassette enregistrée

1 magnétophone

+ amphi

1 piste multiple

de 20 m

1 cassette enregistrée

1 magnétophone

+ amphi

+ cardio

+ prélèvements

1 parcours plat

1 bicyclette adaptée

1 enregistrement

Très facile

Facile et bien

expliqué

Facile et bien

expliqué

Facile et bien

expliqué, vitesse

parfois difficile à

ajuster

Facile et bien

expliqué

Facile mais

évaluateur

habitué à la

fréquence de

pédalage

12 min

15 à 20 min

10 à 20 min

10 à 30 min

10 à 30 min

10 à 25 min

10 à 20 max

dépend de la

longueur des lignes

parallèles

possibilité d’évaluer

jusqu’à 100

personnes

Possibilité d’évaluer

jusqu’à 50

personnes

Fonction du nombre

de cardio et du

nombre de

préleveurs habilités :

Possibilité d’évaluer

4 à 6 personnes

1

1

1 ou +

suivant le

nombre

d’évalués

1 ou +

suivant le

nombre

d’évalués

Minimum 1

Minimum 2

Tableau 7.6 : Hiérarchie argumentée du niveau d’accessibilité

3- QUE PERMET LA CONNAISSANCE DE LA VAM ?

Outre la possibilité d’évaluer l’endurance aérobie, la connaissance de la VAM s’avère aussi

très utile pour au moins quatre raisons :

elle autorise l’extrapolation de VO2 max

elle permet de prédire les performances potentielles de course, à la condition bien sûr de

s’entraîner correctement.

elle donne des indications sur les intensités à envisager dans les séances

d’entraînement.

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elle permet aussi de mieux gérer les vitesses utiles d’entraînement.

Envisageons ces différents cas de figure :

a- VAM et évaluation de l’endurance aérobie.

Parmi les nombreuses techniques susceptibles d’évaluer l’endurance aérobie nous ne

retiendrons que celles utilisant la durée limite maintenue à un pourcentage de VO2 max ou

de VAM , l’Index d’endurance aérobie de Péronnet et Thibeau (1984) et l’Indice d’endurance

aérobie que nous utilisons nous-mêmes (Cazorla,1990).

Durée limite maintenue à un pourcentage de VAM

Une des façons d’évaluer l’endurance aérobie est de chronométrer la durée de maintien

d’un pourcentage donné de la V.A.M. Nombreuses sont les études qui ont envisagé de

mesurer directement cette durée au cours d’un protocole rectangulaire de course sur tapis

roulant ou sur piste à des pourcentages de V.A.M. différents ou bien de la calculer (Tableau

7).

La disparité des résultats obtenus témoigne probablement du niveau différent d’endurance

aérobie des populations évaluées mais peut être due aussi au choix de l’épreuve utilisée

pour obtenir la vitesse aérobie maximale. Cet aspect n’est jamais discuté alors que, selon

l’épreuve, cette dernière peut être sous ou surestimée entraînant de ce fait une plus ou

moins longue durée limite maintenue à un pourcentage donné de la V.A.M.

Références Course Protocole % de V.A.M. E.A.(min)

Costill (1970) Tapis roulant Mesure 95 + 3 30 + 1

Costill et al . (1973) Tapis roulant Mesure 86.1 + 3.9 56.3 + 6.3

Higgs (1973) Tapis roulant Mesure 100 4.63

Volkov et al. (1975) Tapis roulant Mesure 100 5.4 + 3.25

Briggs (1977) Tapis roulant Mesure 95 8.6 + 1.4

Reybrouck et al. (1986) Tapis roulant Mesure 91.3 22.9 + 20.9

Péronnet et al. (1987) Piste Calcul 100 7

Montmayeur et Villaret

(1989)

Piste Calcul 100 4.5

Lacour et al. (1990) Piste V 3000m 100 8.7

Padilla et al. (1992) Piste Calcul 100 Homme

et Femme

8.4 + 2.1

7 + 2.2

Ramsbottom (1992) Piste Mesure Homme : 90

Femme : 82

18.7 + 1.27

21.8 + 1 .98

Pepper et al. (1992) Tapis roulant Mesure 98

111

7.2 + 2.8

3.4 + 1.4

Billat et al.(1994-1995) Tapis roulant Mesure 90

100

100

100

17.6 + 4.5

6.7 + 1.88

5.5 + 1.5

2.9 + 0.7

TABLEAU 7 : Synthèse des résultats des principales études portant la durée limite de maintien d’un pourcentage de la vitesse aérobie maximale. On remarquera la disparité de ces durées.

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Pour notre part, avec une population constituée de 319 jeunes garçons et filles âgés de 8 à

15 ans et en utilisant 100 % de leur V.A.M. obtenue au test VAMEVAL nous avons mesuré

sur piste une durée limite moyenne de 5.48 + 1.56 min (données non publiées).

A des fins de comparaison il est donc indispensable de mieux standardiser l’épreuve

amenant les sujets à leur V.A.M. (nous suggérons les tests VAMEVAL ou TUB II) et de

conserver ensuite toujours ces mêmes épreuves et les mêmes pourcentages de la V.A.M.

obtenue dans un délai maximum d’une semaine avant le test d’endurance.

Bien que ces modèles constituent des points de repère intéressants pour juger de

l’endurance aérobie d’un sujet par rapport à une norme, leur aspect le plus contestable est

de ne pas considérer l’endurance aérobie comme une capacité physiologique spécifique

susceptible d’être très fortement améliorée par l’entraînement et donc très différente d’un

sujet à l’autre. En outre dans le cas du suivi des effets de l’entraînement sur l’endurance

aérobie, plutôt qu’une norme, ce sont aussi les résultats du sportif comparé à lui-même qu’il

convient de prendre en compte pour en analyser les différences. En effet après six semaines

d’entraînement, la durée limite de course à 80 % de VO2max peut être améliorée de plus de

250% chez des sujets qui présentaient une activité normale avant cette période

d’entraînement.

L’Index d’Endurance : I.E. ( Péronnet et Thibault, 1984 ; 1987).

Partant de ces critiques, Péronnet et Thibault (1984,1987) ont développé un nouveau

concept dans lequel l’endurance est considérée comme une entité propre à chaque individu.

L’originalité de leur modèle est d’exprimer la durée limite du maintien de course à des

pourcentages différents de la P.A.M.(ou de la V.A.M.) en abscisse sur une échelle

logarithmique. Dans ces conditions la relation % de V.A.M.- durée limite qui normalement

est curvilinéaire devient totalement linéaire (Figure 19).

%

de

P

A

M

ou

de

V

A

M LLoogg..dduu tteemmppss

7 8 9 10 15 20 30 60 120 180

FFiigguurree 1199 ::LLee %% ddee PPAAMM oouu ddee VVAAMM qquuii eesstt mmaaiinntteennuu ppaarr uunn ccoouurreeuurr ddiimmiinnuuee aavveecc llee tteemmppss

ddee ccoouurrssee ddee ffaaççoonn lliinnééaaiirree ssii llee tteemmppss eesstt ppoorrttéé eenn aabbsscciissssee ssuurr uunnee éécchheellllee llooggaarriitthhmmiiqquuee

I

(min)

I I I I I I I I I I I

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L’endurance peut alors être calculée à partir de la pente de la droite (angle de la figure 19)

de décroissance de la relation ainsi obtenue, selon l’équation proposée par les auteurs :

I.E.= (100 - % V.A.M.) / (In 7 - In t)

Dans laquelle In 7 est le logarithme naturel de 7min, durée limite théorique de maintien de la

V.A.M. et In t est celui d’une performance quelconque de longue durée exprimée en minute.

Prenons l’exemple de deux coureurs possédant la même VAM : 21 km/h mais dont l’un court

le marathon en 2h 25min (ou 145min) et l’autre en 2h 35min (ou 155min) ce qui représente

des vitesses moyennes de : 42195 m /145 = 291 m/min (ou 17.46 km/h) et de 272.2 m/min

(ou 16.33 km/h). Ces vitesses représentent respectivement elles-mêmes 83.1% et 77.8% de

leur V.A.M.. Leur I.E. respectif est donc :

(100 - 83.1) / (1.946 - 4.977) = - 5.58 pour le premier

et (100 - 77.8) / (1.946 - 5.040) = - 7.17 pour le second

Ainsi, plus la pente décroissante (exprimée en conséquence par un chiffre négatif) est faible,

meilleure est l’endurance. De cette façon l’endurance est découplée de la P.A.M. de la

V.A.M. ou de VO2 max et constitue une capacité en elle-même dont Péronnet et al.(1991)

proposent une échelle d’appréciation, elle-même issue de l’évaluation de populations aux

niveaux d’endurance très hétérogènes (Tableau 8)

Endurance Endurance Endurance Endurance Endurance

très élevée élevée moyenne faible très faible

Indice

d’endurance - 4 - 6 - 8 - 10 - 12

Tableau 8 : Echelle d’appréciation du niveau d’endurance à partir du calcul de l’index

d’endurance (IE) de Péronnet et Thibault (1984,1987). D’aprèe Péronnet et al. (1991).

Même si ce modèle permet de façon concrète de calculer l’endurance, le choix d’une durée

de maintien de la VAM pendant 7min constitue son maillon faible. Sept minute est une valeur

moyenne correspondant au maintien à la VAM obtenue au test de Léger et Boucher. Il suffit

qu’une autre valeur de VAM même très discrètement inférieure ou supérieure soit obtenue à

un autre test, ou encore que deux coureurs maintiennent respectivement une durée soit

sensiblement supérieure soit inférieure à 7min pour que leur pente individuelle de

décroissance soit modifiée et donc que soit modifié leur index d’endurance.

L’Indice d’endurance aérobie : I.EA

A des fins pédagogiques, pour notre part, nous utilisons un indice au calcul plus accessible

aux jeunes scolaires. Pour obtenir cet indice nous proposons d’abord de mesurer la VAM et

ensuite d’enregistrer une performance de longue durée comme la plus grande distance

courue pendant 12,15,20 ou 30 min. Nous calculons alors le rapport : (vitesse moyenne

tenue pendant la durée choisie / VAM) . 100 ce qui constitue L’I.EA de chaque jeune évalué.

Plus le pourcentage obtenu tend vers 100 meilleure et l’endurance spécifique du sujet. En

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supposant qu’au delà d’une période de 10 semaines d’entraînement la V.A.M. demeure

stable, il est ainsi possible d’objectiver l’amélioration subséquente de la seule endurance

aérobie pour apprécier ses effets sur la performance.

Prenons l’exemple d’un jeune dont la V.A.M. a été mesurée à 15 km.h-1 et qui réussi à

parcourir 2750m au test de 12min de Cooper. Son I.E.A. est :

2750m / 12min = 229.17m.min-1 ou (13.75 km.h-1 . 100) / 15 = 91.67%

Ou encore : 2750m .100 / 3000m (distance théorique qu’il aurait parcourue en 12min à sa

V.A.M.) = 91.67%

b- VAM et extrapolation de VO2 max

Nombreux sont les auteurs qui ont proposé des équations de prédictions de VO2 max

(ml·min -1· kg-1) à partir de la connaissance de la VAM.

Celle de Léger et Mercier (1983) qui résume l’ensemble des équations publiées pour calculer

une équation moyenne VO2 max (ml-min -1. kg-1) = 3,5 X VAM (km.h-1) s’avère la plus

simple. Les résultats admettent cependant une marge d’erreur liée à l’économie de course,

dont nous rappelons que la différence interindividuelle peut s’inscrire dans une limite de + 5

%.

c- Performances et % de vam sollicités

Plusieurs études : Thibaut et Mercier, 1981 ; Léger et al., 1985 ; Villaret, 1988 ; Montmayeur

et Villaret, 1990 ; ont permis de préciser à quels pourcentages de VAM se couraient les

différentes distances de compétitions. Ces indications constituent d’excellentes orientations

pour l’entraînement spécifique en fonction des performances visées. (Tableau 7.9).

Distances de compétition % VAM Course sur piste Corrélation VAM – Perf.

400 m

800 m

1000 m

1500 m

2000 m

3000 m

5000 m

10 000 m

20 000 m

marathon

145 à 155

120 à 125

105 à 115

101 à 111

98 à 102

95 à 100

90 à 95

85 à 90

80 à 88

75 à 84

r = . 72 (n = 40)

r = . 92 (n = 105)

r = . 92 (n = 105)

r = . 95 (n = 71)

r = . 98 (n = 69)

r = . 98 (n = 69)

r = . 88 (n = 108)

r = . 88 (n = 108)

r = . 85 (n = 108)

Tableau 9 : Pourcentages de la VAM susceptibles d’être maintenus pendant les différentes

distances de compétition et corrélation entre VAM et vitesses auxquelles ont été réalisées

ces performances

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L’étude de ce tableau met en évidence une corrélation qui augmente jusqu’à la distance de 3

000 m courue entre 95 et 100 % de VAM et qui diminue ensuite. Ceci peut traduire

respectivement la complémentarité plus ou moins importante du métabolisme anaérobie

entre le 800 et le 2000 m et celle de l’endurance aérobie à mesure que la distance augmente

au-delà de 3000 m. D’une façon générale, cette dernière distance semble la plus proche de

la VAM chez les coureurs de demi-fond bien entraînés et peut éventuellement servir de

critère de VAM uniquement pour cette population. Pour les autres sportifs, la VAM peut être

atteinte entre 2000 et 3000 m ce qui ne confère pas une précision suffisante aux résultats

souvent aléatoires ainsi obtenus.

2·4 VAM et prédiction de performances

Outre l’extrapolation de VO2max, la connaissance de la VAM peut aussi permettre de

« prédire » avec une assez bonne précision les performances susceptibles d’être atteintes

en course si, bien sûr, le sportif s’entraîne correctement pour développer spécifiquement les

capacités physiologiques et techniques requises par la performance visée et si son efficacité

de course n’est pas trop défaillante.

A partir du tableau 10, si le sportif est âgé de 18 ans ou plus et s’il connaît sa VAM ou son

VO2max, il peut prédire les performances potentielles depuis le 800 m jusqu’au marathon.

Par exemple, si sa VAM est 18 km/h, ce qui correspond à un VO2max extrapolé ou mesuré en

laboratoire de 63 ml·kg-1·min-1, à la condition de s’entraîner spécifiquement, il peut espérer

atteindre (avec une marge d’erreur possible de 5 à 7% en plus ou en moins) les

performances suivantes : 2 min 17 s au 800 m ; 2 min 59 s au kilomètre ; 4 min 50 s au 1

500 m ; 6 min 42 s au 2 000 m ; 10 min 38 s au 3 km ; 18 min 30 s au 5 km ; 39 min 18 s au

10 km ; 1 h 47 s au 15 km ; 1 h 22 min 46 s au 20 km ; 1 h 26 min 50 s au 21 km et 3 h 8 min

6 s au marathon.

Si le sportif n’atteint pas ces performances c’est probablement que sa capacité anaérobie

lactique (ou capacité de produire de l’acide lactique et de supporter une forte acidose

musculaire) n’est pas suffisamment développée pour les distances courtes inférieures au

3000 m, ou bien que son endurance aérobie n’a pas été assez bien développée pour

maintenir une vitesse élevée sur des distances longues, ou/et qu’il présente une médiocre

économie de course. Ainsi, la prédiction de la performance à partir de la connaissance de la

VAM peut renforcer la motivation pour atteindre ou dépasser la performance cible et

indirectement mettre en évidence certaines carences au niveau des différents facteurs dont

dépend la performance.

Il ne reste plus au sportif qu’à s’entraîner rationnellement ce que permettent non seulement

l’ensemble des résultats obtenus aux différentes épreuves proposées dans ce chapitre, mais

aussi la connaissance de la VAM, comme nous l’étudierons dans un prochain chapitre.

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VAM

km ·h-1

VO2

max

PERFORMANCES POTENTIELLES (h : min : s)

selon différentes distances de course (m)

800 1000 1500 2000 3000 5000 10000 15000 20000 30000 42195

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

49.0

52.5

56.0

59.5

63.0

66.5

70.0

73.5

77.0

80.5

84.0

87.5

2:59

2:46

2:35

2:26

2:17

2:10

2:03

1:57

1:51

1:46

1:42

1:37

3:56

3:38

3:24

3:11

2:59

2:49

2:40

2:32

2:25

2:18

2:12

2:06

6:30

5:59

5:32

5:09

4:50

4:32

4:17

4:03

3:50

3:39

3:29

3:20

9:05

8:20

7:43

7:10

6:42

6:17

5:56

5:36

5:19

5:07

4:49

4:36

14:28

13:16

12:15

11:23

12:38

9:58

9:23

8:52

8:24

7:59

7:36

7:15

25:20

23:11

21:23

19:50

18:30

17:20

16:18

15:23

14:34

13:50

13:10

12:34

56:15

50:47

46:17

42:30

39:18

36:33

34:10

32:04

30:12

28:33

27:04

25:44

1:27:23

1:18:46

1:11:42

1:05:47

1:00:47

56:29

52:45

49:29

46:36

44:01

41:43

39:39

1:59:22

1:47:29

1:37:45

1:29:38

1:22:46

1:16:52

1:11:45

1:07:17

1:03:20

59:30

56:41

53:51

3:15:43

2:53:20

2:35:33

2:21:05

2:09:06

1:59:57

1:50:18

1:42:49

1:36:17

1:30:32

1:25:26

1:20:53

4:54:07

4:17:48

3:49:28

3:26:44

3:08:06

2:52:34

2:39:23

2:28:05

2:18:16

2:09:41

2:02:06

1:55:21

Tableau 10 : A partir de la connaissance de la VAM ( km/h) il est possible d’extrapoler VO2max

(ml.min-1.kg-1) et de prédire les performances de course susceptibles d’être atteintes (d’après

Mercier et Léger, 1982)

Renseignements :

Les enregistrements de l’ensemble des tests validés pour obtenir la VAM ainsi que les

différents logiciels en permettant l’exploitation pour l’orientation, le contrôle et le suivi de

l’entraînement sont exclusivement distribués en France par:

1- L’AREAPS, BP 40 ; 33 611 Cestas Cedex 00 33 5 56 84 52 27 ou 28

E-mail : [email protected]

2- Le CRESS, 250 Cours de l’Argonne 33 000 Bordeaux