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EVALUATION DE LA 2 E CONVENTION D’OBJECTIFS AFDI TOME 1 RAPPORT GENERAL Jacques Berthomé Mamadou Goïta Narcisse Tomety Marc Totté juin 2004 Ciepac Cota

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EVALUATION DE LA 2E CONVENTION D’OBJECTIFS AFDI

TOME 1 RAPPORT GENERAL

Jacques Berthomé Mamadou Goïta

Narcisse Tomety Marc Totté

juin 2004

Ciepac Cota

Evaluation convention d’objectifs II AFDI CIEPAC/COTA

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Sommaire

I.1. Introduction___________________________________________________________ 10

I.2. Méthodologie__________________________________________________________ 11 I.2.1. Rappel de la grille d’analyse ________________________________________________ 11

I.2.2. Rappel des trois dimensions de la convention __________________________________ 12

II. Synthèse Afrique de l'Ouest _____________________________________________ 14 II.1. Introduction ______________________________________________________________ 14

II.2. Pertinence ________________________________________________________________ 15

II.3. Efficience ________________________________________________________________ 18

II.4. Efficacité _________________________________________________________________ 26

II.5. Impact ___________________________________________________________________ 43

II.6. Viabilité__________________________________________________________________ 45

II.7. Perception des Afdi par les divers acteurs et partenaires _________________________ 47

II.8. Synthèse générale Afrique de l'Ouest _________________________________________ 53

III. Synthèse Madagascar ___________________________________________________ 55 III.1. Pertinence _______________________________________________________________ 55

III.1.1. Pertinence du positionnement de l'Afdi vis-à-vis des OP _______________________ 55

III.1.2. Pertinence des niveaux d'intervention_______________________________________ 55

III.1.3. Pertinence des échanges __________________________________________________ 56

III.2. Efficience________________________________________________________________ 57

III.2.1. Efficience du dispositif ___________________________________________________ 57

III.2.2. Efficience des modes d'intervention ________________________________________ 57

III.2.3. Efficience de la programmation et du suivi __________________________________ 57

III.2.4. La gestion de la capitalisation _____________________________________________ 58

III.2.5. Bilan : pouvait-on faire mieux à moindre coût ? ______________________________ 58

III.3. Efficacité ________________________________________________________________ 59

III.4. Impact __________________________________________________________________ 62

III.5. Viabilité _________________________________________________________________ 62

III.6. Perception des Afdi par les divers acteurs _____________________________________ 63

III.7. Madagascar conclusions et recommandations__________________________________ 64

III.7.1. Bilan Madagascar _______________________________________________________ 64

III.7.2. Recommandations Madagascar ____________________________________________ 65

IV. Synthèse générale : Évaluation du système de coopération Afdi _________________ 73 IV.0. Rappels _________________________________________________________________ 73

IV.1. Pertinence _______________________________________________________________ 74

IV.1.1. Un rôle d'accompagnement _______________________________________________ 74

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IV.1.2. Un rôle d'alliés __________________________________________________________ 76

IV.1.3. Un rôle d'interface entre les organisations paysannes du Nord et du Sud__________ 77

IV.2. Une efficience qui s'améliore très sensiblement_________________________________ 79

IV.3. Efficacité ________________________________________________________________ 87

IV.4. Impact __________________________________________________________________ 91

IV.5. Une viabilité qui reste fragile________________________________________________ 92

V. De l’instrument convention d’objectif et de son application aux Afdi ______________ 95 V.1. Rappel des objectifs généraux des CdO________________________________________ 95

V.2. Améliorer la qualité et le volume des interventions ______________________________ 95

V.3. Le renforcement des capacités internes ________________________________________ 97

V.4. L’approfondissement du partenariat avec le MAE ______________________________ 98

V.5. Quelques éléments budgétaires_______________________________________________ 99

V.6. L’instrument convention d’objectifs, vu par Afdi ______________________________ 100

V.7. Quelques éléments de conclusion sur l’instrument convention d’objectifs par rapport à d’autres instruments __________________________________________________________ 101

VI. Conclusions __________________________________________________________ 103 VI.1. D'où vient-on ? __________________________________________________________ 103

VI.2. Où en est-on ? ___________________________________________________________ 104

VI.3. Où veut-on aller ? ________________________________________________________ 105

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Résumé L'évaluation a porté sur trois pays (Sénégal, Burkina Faso, Madagascar) et a été élargie à d'autres pays (Bénin, Mali) sur la base d'études documentaires. Elle a été menée par une équipe de quatre personnes, deux consultants du Nord et deux consultants du Sud, heureusement familiarisés avec la problématique des organisations paysannes dans les pays visités. En effet, elle s'est déroulée dans un laps de temps extrêmement court, compte tenu de l'ampleur et de la complexité du sujet, ce qui peut expliquer certaines approximations ou erreurs de détail. Dans des contextes très différents et avec des formulations qui diffèrent selon les rédacteurs, les constats effectués manifestent cependant une remarquable homogénéité qui prend d'autant plus de relief que l'on peut se référer à la précédente effectuée par la même équipe en 2001. Les résultats présentés dans ce résumé font ressortir les acquis et faiblesses des actions entreprises dans le cadre de la Convention d'objectifs. Résultat attendu n° 1 Maîtrise par les paysans d'innovations techniques et consolidation d'organisations professionnelles locales Axe 1 : acquisition, maîtrise et diffusion de nouvelles techniques Forces La dimension technique est toujours présente dans les partenariats Afdi et c'est une excellente chose. En outre, l'approche de l'appui à l'innovation, basée sur les échanges paysans est particulièrement efficace

Faiblesses Il est généralement difficile de juger de la pertinence des activités retenues au regard des contraintes et des besoins des familles paysannes, faute de diagnostic sur les systèmes de production. En conséquence, on n'est pas en mesure d'analyser les freins à l'innovation qui apparaissent.

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Axe 2 : Création et développement d'outils de gestion Forces Mise au point d'outils de gestion opérationnels notamment au Burkina Faso. Une approche gestion qui intègre des aspects prévision et recherched'alternatives techniques. Mise en place d'un réseau de pratiquants du conseil de gestion au Burkina Faso animé par l'Afdi, pour échanger sur les méthodes, réfléchir aux limites et aux contraintes et rechercher des solutions aux problèmes de financement.

Faiblesses On se heurte dans les partenariats Afdi aux difficultés habituelles du CdG dans les PVD, l'analphabétisme, la difficulté de financement des dispositifs de suivi et de conseil par les bénéficiaires et leurs organisations paysannes, ce qui limite son extension. En outre, la finalité du conseil de gestion n'est pas suffisamment claire, travaille-t-on à améliorer les résultats économiques des paysans suivis ou cherche-t-on à élaborer des références utiles pour l'ensemble de l'organisation paysanne ? En l'absence de clarification, l'activité conseil de gestion demeure relativement marginale au sein des organisations paysannes.

Axe 3 : Mise en place ou consolidation des organisations paysannes nécessaires au développement Forces C'est une dimension qui est toujours présente dans les partenariats Afdi, qu'il s'agisse d'organiser la formation et les échanges sur les questions techniques, de mettre en place un service (conseil de gestion) ou d'organiser l'approvi-sionnement et la commercialisation des produits. L'impact est différent selon que l'Afdi est le partenaire exclusif de l'organisation paysanne ou n'est qu'un partenaire parmi d'autres. Dans ce dernier cas, l'Afdi est souvent cantonnée dans son domaine technique alors que dans le premier cas, elle a plus le loisir d'apporter un appui institutionnel multiforme.

Faiblesses Dans nombre de partenariats, la base économique des organisations paysannes partenaires est trop faible pour générer des surplus agricoles durables pour le marché. L'organisation paysanne reste en deçà de l'organisation économique, et se limite à n'être qu'un groupe de vulgarisation agricole.

Axe 4 : Implication des paysans dans les collectivités locales et dans la gestion du développement local Forces Une expérience est en cours dans un partenariat à Madagascar, développant simultanément un volet d'appui à l'organisation paysanne et un volet communal.

Faiblesses Expérience limitée à un seul partenariat et donc peu significative. En outre, il ne s'agit pas à proprement parler d'une démarche de développement local, faute d'articulation entre les volets.

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Résultat attendu n° 2 : Afdi a contribué au renforcement des capacités institutionnelles, techniques et financières des fédérations paysannes, a appuyé leur mise en réseau au niveau sous-régional et a favorisé leur implication dans les négociations internationales. Axe 1 : Renforcement des services offerts aux organisations paysannes membres Forces Un travail important a été réalisé dans la plupart des pays sur l'organisation desfilières de diversification tournées vers le marché national ou sous-régional. Animation par Afdi d'un système d'information communication entre organisations paysannes au niveau du Burkina Faso durant trois ans qui a permis en particulier de contribuer à la réflexion sur la structuration des filières (haricot vert, pomme de terre…).

Faiblesses On est souvent encore au stade de la réflexion de l'organisation de ces filières plutôt qu'à la mise en place de dispositifs opérationnels pour les gérer. La pérennité du système d'information communication n'est pas assurée car il reposait largement sur les ressources humaines et financières de l'Afdi.

Axe 2 : Elaboration et mise en œuvre d'un projet professionnel Forces L'Afdi apporte un appui global stratégique et technique (formation des dirigeants, conception de systèmes de financement durables, mise en place d'équipes permanentes) à des organisations faîtières de niveau intermédiaire, ou national, spécialisées (filière) ou à vocation générale (Madagascar, Mali).

Faiblesses L'impact de l'appui n'est pas toujours décisif car les organisations paysannes partenaires accusent elles-mêmes des faiblesses dues à des facteurs indépendants de l'Afdi (versatilité des bailleurs de fonds par exemple).

Axe 3 : Participation active à l'élaboration des politiques de développement Forces Des progrès importants ont été réalisés par l'Afdi dans ce domaine durant la CdO dans des pays tels que le Sénégal, le Mali, le Burkina Faso, Madagascar. L'Afdi a contribué à la réflexion des organisations faîtières qui sont appelées à négocier avec l'Etat sur les questions de politique agricole et de représentation de la profession (Chambres d'agriculture en particulier).

Faiblesses Les organisations paysannes ne sont pas toujours en situation de force pour négocier avec l'Etat. Les orientations politiques sont parfois déjà arrêtées par l'Etat et le dialogue avec les organisations paysannes n'est pas une priorité pour lui. L'Afdi ne fait pas toujours preuve d'une capacité d'analyse politique suffisante pour bien maîtriser ce contexte.

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Axe 4 : Accès à l'information sur les enjeux internationaux et implication dans les débats Forces Des progrès importants ont été réalisés par l'Afdi dans ce domaine en mettant en place un dispositif d'information destiné au Réseau et aux responsables d'organisations paysannes et en mettant en relation les leaders paysans français avec les leaders paysans du Sud.

Faiblesses En Afrique de l'Ouest, l'émergence du Roppa qui revendique un leadership dans ce domaine oblige l'Afdi à rechercher avec celui-ci une articulation plus claire entre ses activités et la fonction de représentation du Roppa.

Résultat attendu n° 3 : Les agriculteurs français et les OPA ont consolidé et mis en cohérence un système de coopération efficace Axe 1 : Renforcement de la cohésion et de la coordination des actions de coopération internationale Forces Indéniablement, des progrès importants ont été accomplis par chaque groupe Afdi en matière de programmation, de suivi et de bilan des activités. Les instances de coordination des actions par pays et par thème ont été renforcées, permettant une meilleure visibilité du mouvement dans son ensemble.

Faiblesses La cohérence affichée par la Convention d'objectifs est plus formelle que réelle. Ladispersion des actions, à travers les partenariats, ne facilite pas la cohérence entre les niveaux (local, intermédiaire et national).

Axe 2 : Consolidation des ressources humaines de l'Afdi Forces La Convention d'objectifs, en multipliant les occasions de rencontres contribue à la cohérence du mouvement. De façon plus précise, on assiste à l'émergence de structures d'interface (équipe nationale, cellules pays, animateurs…) qui jouent un rôle essentiel dans l'harmonisation et le cadrage des actions en partenariat.

Faiblesses Si pour l'instant (durant la CdO) on observe un équilibre plutôt harmonieux entre militants et permanents, il y a le risque que le pouvoir évolue en faveur des permanents.

Axe 3 : Mobilisation de compétences professionnelles adaptées aux besoins des partenariats Forces L'Afdi a su constituer un vivier important de personnes ressources issues du milieu professionnel, bénévoles et motivées, ce qui constitue pour elle un atout indéniable.

Faiblesses L'identification de spécialistes presque exclusivement dans le milieu professionnel français conduit l'Afdi à fonctionner en vase clos et à être peu ouverte à d'autres expertises qui existent dans le domaine de l'appui aux organisations paysannes.

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Axe 4 : Création d'un réseau professionnel de coopération au développement au niveau européen Forces Création d'Agricord, outil commun des agriagences (dont Afdi) permettant en particulier de résoudre en partie des problèmes de financement de projets portés par les organisations paysannes partenaires.

Faiblesses Il s'agit plutôt de "réserve", Agricord est un instrument de coopération lié à la FIPA qui contribue à fidéliser la participation des organisations paysannes du Sud à cette organisation internationale concurrente de Via Campesina.

La Convention a donc eu des résultats importants qui correspondent, de façon variable, aux résultats attendus. On assiste globalement à un redéploiement de l'Afdi sur des enjeux plus ambitieux au niveau régional, national et international, cela se traduit par la montée en puissance de structures d'interface constituées de permanents salariés, professionnels du développement. Cette évolution est tout à fait logique pour atteindre les objectifs de développement que l'Afdi s'était assignés dans le cadre de la 2e CdO mais elle a pour effet de réduire l'importance relative des partenariats locaux pour lesquels se mobilisent les groupes Afdi. Avec la fin des CdO, le mouvement Afdi est à la croisée des chemins et devrait réexaminer ses orientations de fond, sur la base des expériences qu'il a menées depuis 7 ans. En effet, il paraît difficile d'être simultanément et durablement une ONG de développement "professionnelle" et une association de solidarité internationale.

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I - Introduction générale

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I.1. Introduction Ce rapport provisoire rend compte de l’ensemble des investigations menées pour évaluer la seconde convention d’objectifs des Afdi. Le travail a été confié au CIEPAC associé avec le COTA, tous deux ayant déjà eu l’occasion d’évaluer en 2001 la première convention d’objectifs, sous l’égide du F3E. Le fait de reproduire l’exercice avec, globalement, les mêmes évaluateurs permettait d’un peu mieux garantir le regard diachronique qui manque souvent aux évaluations. Cette évaluation a été conduite en France dans différentes Afdi régionales et départementales, au Sénégal, au Burkina Faso et à Madagascar. Globalement la mission s’est fort bien déroulée et l’équipe de consultant remercie les différents groupes Afdi, les cellules au Burkina Faso et à Madagascar et leurs partenaires pour l’ouverture et la transparence avec laquelle les informations ont été généralement fournies. S’il apparaît à tous les évaluateurs que le temps a manqué pour rendre compte d’une « nébuleuse » telle que Afdi, il est tout aussi évident que les différentes interventions visitées sont largement suffisantes pour former une image précise et cohérente des forces et des faiblesses de l’association. La forte diversité des contextes nous a toutefois incité à cloisonner les différentes contributions en différents sous-rapports de manière à préserver la diversité - et parfois les nuances – des analyses. Si cela alourdit le rapport, des synthèses sont produites, selon les critères de l’évaluation, de manière à en faciliter la lecture. Le rapport est donc structuré en trois parties :

- un rapport général synthétique qui tire les conclusions des études pour l'Afrique de l'Ouest (Sénégal, Burkina Faso, Mali, Bénin) et Madagascar, évalue les performances du système de coopération Afdi et ce qui lui a apporté l'instrument convention d'objectifs ets'interroge sur les voies qui s'ouvrent à l'Afdi au terme de ces conventions d'objectifs ;

- deux rapports pays détaillés, l'un sur l'Afrique de l'Ouest (Tome 2), l'autre sur Madagascar (Tome 3)

I.2. Méthodologie Les différentes investigations ont été menées à partir d’une grille d’analyse définie lors de la première étape du travail. Cette grille est centrée autour de la notion de partenariat et servira de référence pour questionner les différents niveaux d’objectifs de la convention. Cette grille ainsi que les différents niveaux de la convention sont rappelés ci-dessous.

I.2.1. Rappel de la grille d’analyse

Résultats Impact Viabilité Efficacité*

Contexte ou environnement Partenariat Activités

Pertinence Efficience** Objectifs Evolutions et perspectives

(*) Normalement l’efficacité se mesure par comparaison entre les attendus (objectifs ou résultats attendus) et le réalisé (résultats)). La flèche passe par les activités pour montrer que cette analyse oblige à un relevé des différentes activités menées pour voir dans quelle mesure elles permettent d’obtenir les résultats. (**)L’efficience (rapport coût-efficacité + dispositifs, outils et principes d’intervention) est la « manière de faire » c'est-à-dire dans le cas qui nous occupe ce qui explique – dans la manière de gérer le partenariat ( de mobiliser les ressources, de suivre, d’évaluer,..) - les résultats obtenus. Là également les résultats peuvent différer selon les activités. Dans cette grille le partenariat est posé comme central. Il correspond aux fondements des Afdi et de la convention d’objectifs qui sont de renforcer des partenariats entre OP du local à l’international. Il s’agit (voir offre) d’analyser si :

- Les objectifs du partenariat sont pertinents au regard du contexte et de ses enjeux ?

- La structure du partenariat parvient à mener ses actions avec efficience et efficacité ?

- Les résultats obtenus ont un impact sur le contexte ? Permettent de viabiliser la structure ?

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I.2.2. Rappel des trois dimensions de la convention Il va de soi que la grille d'analyse doit être utilisée aux divers niveaux auxquels on se situe (en réactualisant bien évidemment à chaque fois les paramètres du système) :

⇒ le niveau local : problématiques d'innovations technico-économiques, ⇒ le niveau intermédiaire : problématique de renforcement et de mise en

place de structures permettant d’influer à terme sur les politiques agricoles

⇒ le niveau national et international : problématiques "syndicales". Par rapport aux terrains à investiguer, une question importante à creuser (en rapport avec celle présentée plus haut) consiste à savoir si les liens se font entre les différents niveaux. L’hypothèse à tester à cet égard reposait sur la capacité d’Afdi - offerte à travers la convention – à faire les liens entre les différents niveaux. Il s’agirait, par exemple, de savoir à travers les terrains :

- dans quelle mesure le Conseil de Gestion au niveau local participe à renforcer le niveau national ou régional des OP faîtières ?

- dans quelle mesure il est articulé aux enjeux internationaux (on pourrait penser que le conseil de gestion soit aussi dimensionné pour, progressivement, créer un référentiel technico-économique sur le coton qui fasse référence dans les grands débats ?)

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II - Synthèse Afrique de l'Ouest

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II. Synthèse Afrique de l'Ouest

II.1. Introduction Ce rapport fait la synthèse des différents entretiens réalisés au Sénégal (Mamadou Goïta), au Burkina Faso sur les partenariats locaux (Narcisse Tomety) et les relations institutionnelles (Marc Totté) et des études documentaires réalisées sur Mali et Bénin (Jacques Berthomé). Le lecteur aura recours aux rapports pays pour plus de détail. Il s’agit donc ici notamment de voir comment se concrétisent, à l’échelle nationale et régionale, les différents objectifs de la convention et plus précisément ce qui améliore les interventions permises dans le cadre de la convention d’objectifs - à travers les dispositifs, les outils/méthodes qu’Afdi a mis en place. Le choix du Burkina Faso et du Sénégal s’est révélé fort intéressant par le contraste qu’offrent ces deux pays : diversité des OP faîtières dans le cas du Burkina Faso et unité, ou du moins convergence, dans le cas du Sénégal à travers le CNCR. Le Burkina Faso en particulier, était marqué par des crises majeures au sein des OP, tant au niveau local qu’à celui des faîtières. Pour faire la part des choses par rapport au rôle qu’ont ou n’ont pas joué les différents niveaux de l’Afdi dans ces situations, il nous a semblé nécessaire d’accorder une importance particulière aux facteurs de contexte et de refaire un historique du mouvement paysan et de la façon dont les partenaires extérieurs ont contribué à le façonner. De manière générale, il apparaît que l’AFDI dispose dans ce pays d’une marge de manœuvre extrêmement réduite pour réellement peser sur l’accompagnement du mouvement paysan dans son ensemble par rapport aux deux grands « investisseurs » que sont l’AFD et la coopération suisse. Malgré cela, il apparaît que ce rôle est de mieux en mieux reconnu par les OP autant que l’administration. Ce rôle est toutefois perçu, comme nous le verrons, de façon différente selon que les partenariats sont locaux, nationaux ou régionaux.

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II.2. Pertinence

II.2.1. Pertinence du positionnement général vis-à-vis des OP

Par rapport à cette évolution, il semble que l’instrument convention d’objectifs ait permis à Afdi de progressivement élargir son spectre d’intervention aussi bien en termes de nature (de l’appui technique à l’appui syndical, en passant par différents registres de modalités d’appui aux OP) que par rapport aux différentes tendances d’OP. Le fait de ne pas défendre une tendance particulière, mais de se considérer en appui à l’ensemble des OP par rapport aux différentes fonctions que celles-ci cherchent à jouer du local au national, joue de plus en plus en faveur d’Afdi. La pertinence de ce positionnement fait évidence dans le contexte de division des organisations rappelé plus haut pour le Burkina Faso. Il semble qu’Afdi soit la seule organisation aujourd’hui à vouloir ouvrir son appui à la plupart des principales faîtières dans le respect de leur souveraineté. Un effort important à cet égard a été réalisé dans la façon de concevoir et de gérer le partenariat. La convention d’objectif a fortement contribué à permettre cette évolution à travers les dispositifs mis en place au niveau national et en facilitant l’élaboration d’outils. Cependant cette évolution reste un processus fragile, incomplet, et fort dépendant de l’appui des cellules comme on le verra plus loin. Elle n’est pas sans risques non plus, certaines organisations paysannes percevant mal le fait de voir « l’habit de son ennemi (une autre OP) sur l’épaule de son ami ». Sans doute ce positionnement un peu trop « à la demande » se renforcerait-il de visions stratégiques plus claires et négociées avec l’ensemble des partenaires. Ainsi le soutien à PANISE au Burkina Faso dans une zone cotonnière dominée par l'UNPCB (l'Union Nationale des Producteurs de Coton du Burkina Faso) avec laquelle l'Afdi cherche par ailleurs à se rapprocher, ne peut se faire sans référence à celle-ci. En quoi le travail mené avec PANISE (notamment le conseil de gestion) peut-il apporter un éclairage sur la viabilité à moyen terme des systèmes de production cotonniers, qui puisse conforter les capacités de négociation des producteurs. Au Sénégal, les partenariats locaux sortent peu à peu de leur isolement pour contribuer à une réflexion plus globale sur la problématique des productions animales mais on est au tout début de la démarche. En conséquence, ce processus est encore relativement peu articulé semble-t-il avec les actions menées en direction du CNCR (qui sont plus de l'ordre du soutien politique et du conseil stratégique à une faîtière de nature syndicale, engagée dans des négociations serrées avec l'État et les bailleurs de fonds sur des questions de politique agricole (fonctions transversales telles que le foncier, le crédit, les services agricoles, etc.). Au Mali, l'Afdi en s'appuyant sur les partenariats locaux et en étant maître d'œuvre du programme d'appui aux organisations paysannes de la coopération française a

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fortement contribué à la constitution de l'organisation faîtière au niveau national (AOPP). Mais elle n'a pas anticipé le changement majeur d'orientation de la politique française en la matière qui aurait dû l'amener, depuis longtemps, à aider l'AOPP à se structurer au niveau régional de façon à apparaître comme un acteur de développement incontournable. Au Bénin également, l'Afdi, à la faveur de la 2ème convention d'objectifs, a su s'engager dans des partenariats plus ambitieux, avec des organisations faîtières de niveau départemental mais elle y a été fortement incitée par le programme d'appui à la professionnalisation (le PPAB) qui définit très largement le cadre de ses interventions.

II.2.2. Pertinence des niveaux d’intervention

De manière plus concrète ce positionnement se décline selon les différents axes de la convention :

- au niveau local - au niveau national ou régional - sur les enjeux internationaux

Cette déclinaison est déjà importante à questionner. Chacun des niveaux apparaît important dans l’absolu et il ne serait pas difficile de démontrer qu’ils correspondent sinon à des demandes (les premiers niveaux surtout), en tout cas à des besoins. Il nous apparaît cependant que la pertinence repose surtout sur la capacité à articuler ces différents niveaux. Par rapport à des pratiques antérieures gérées à partir du local, la convention s’inscrivait dans une volonté d’Afdi de mieux faire le lien avec des dynamiques nationales, portées par des faîtières et à montrer les répercussions locales des échanges internationaux. A cet égard il semble toutefois que si chaque niveau est bien traité dans la convention, les liens aient été peu travaillés dès la formulation des objectifs de la convention. Au niveau local, la tendance est à sortir de relations partenariales autrefois fortement polarisées sur des cellules techniques d’OP (FNGN, PANISE) à partir de problématiques purement techniques (formation, conseil de gestion, amélioration des itinéraires techniques) pour des accompagnements plus institutionnels (audit institutionnel dans le cas de PANISE, en particulier). Au niveau national, on observe une recherche de cohérence plus forte des interventions Afdi par rapport aux enjeux du moment :

- une meilleure compréhension des problèmes de gestion de l’exploitation familiale à travers une capitalisation des expériences de conseil de gestion sous forme d’études de capitalisation et de mise en place d’un dispositif de type réseau au niveau national et rassemblant les différentes OP

- un accompagnement institutionnel à certaines faîtières en crise. La consultation de la base de la FENOP ainsi que l’AG ont ainsi été financés par Afdi

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- un appui à la structuration de filières (lait au Sénégal, Porc, ananas au Bénin, fruits et légumes, haricot vert au Burkina) articulée à un renforcement de capacité de faîtières : le programme FEPAB/FNGN, qui s’il est financé par l’UE a pu être monté par les dispositifs mis en place par la convention

- … Sur les enjeux internationaux, le repositionnement se décline en termes de thématique (coton en particulier suite à l’échec de Cancun) et en termes de façon de concevoir les échanges : de plus en plus d’échanges ont lieu entre responsables d’organisationS professionnelles. La visite de responsables de la FNSEA et des JA au Burkina Faso, au Sénégal ou au Bénin est présentée comme particulièrement importante à cet égard pour accroître la visibilité d’Afdi. Ces positionnements apparaissent tous particulièrement importants car répondant autant à des besoins qu’à des demandes de plus en plus explicites. La volonté de faire des liens entre ces niveaux même si elle reste dans la pratique à concrétiser, apparaît particulièrement importante dans un contexte ou beaucoup d’acteurs se positionnent sur l’un ou l’autre des champs (le local dans une perspective technique ; le national ou l’international dans une perspective plus idéologique) sans embrasser l’ensemble des conditions qui gouvernent l’évolution des OP.

II.2.3. Pertinence des échanges

A chacun des niveaux, les échanges restent une modalité d’action importante. Cette modalité qui participe à l’essence même du réseau Afdi nécessite d’autres références que les traditionnels critères d’évaluation. Il apparaît notamment que l’impact des visites de paysans africains en France se traduit plus en termes de comportements vis-à-vis de leur métier, de leur organisation, de leur famille, que d’investissements sur leur exploitation dans la mesure où ces échanges ne sont pas assortis de moyens1. La pertinence de ces échanges est donc difficile à apprécier : importants de part et d’autre pour combattre des mythes - celui de la richesse et de la facilité en Europe, de la fainéantise ou de la corruption généralisée en Afrique – ils peuvent en faciliter d’autres. Considérés comme importants également pour susciter des relations – dans l’esprit de créer des alliances paysannes – ces échanges favorisent aussi en pratique des relations individuelles pouvant porter préjudice à des relations plus institutionnelles. Pertinents dans l’absolu, leur intérêt dépend donc surtout de la façon dont ils sont intégrés dans des interventions concrètes et conduits, exploités ensuite (ces aspects relevant ensuite de l’efficience et de l’efficacité).

1 C’est d’ailleurs une des principales critiques des personnes qui partent en France.

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II.2.4. Cohérence par rapport aux programmes nationaux

Le positionnement des interventions Afdi par rapport aux programmes nationaux apparaît relativement en phase dans les divers pays. Les nouvelles initiatives de structuration de filières qui s’inscrivent dans une perspective de sécurité alimentaire (programme CE) et de diversification des revenus entrent bien dans les préoccupations des ministères de l’agriculture. Au plan technique, l’investissement dans les fruits et légumes en particulier (au Burkina Faso) entre tout à fait dans la nouvelle orientation donnée par le ministre de l’agriculture basée sur la petite irrigation (le plan d’action sur la filière fruits et légumes est en gestation). Le conseil de gestion ne fait pas l’objet de programmes particulier mais les pouvoirs publics semblent commencer à s’y intéresser. La coopération française a particulièrement investi dans ce domaine à travers le CIRAD et divers projets de l'AFD (PADSE au Bénin, PASE au Mali, PAP-OPC au Burkina Faso). La cohérence du positionnement Afdi apparaît surtout dans le fait de chercher à rassembler les différentes expériences en un réseau permettant de capitaliser sur ces questions. Au plan organisationnel l’appui aux chambres d’agriculture est une préoccupation forte des pouvoirs publics à l'exception du Sénégal où le CNCR a réussi à faire avorter le projet. Les Afdi, en plus de leur investissement dans certaines filières et leur appui plus institutionnel aux OP, offrent occasionnellement un accompagnement à la structuration à travers les chambres d’agriculture (sous forme d’échanges en particulier Sud-Sud : voyage au Mali par exemple ou mission d'un professionnel du Nord) même si la perspective est sensiblement différente : les chambres sont considérées par Afdi avant tout comme des outils, l’important étant de faire en sorte que les organisations paysannes puissent réellement investir la structure pour constituer une force de propositions vis-à-vis des pouvoirs publics. De ce point de vue la cohérence du positionnement Afdi relève plus du fait qu’il compense certains excès ou certains manques dans les programmes nationaux tout en apportant une contribution encore limitée mais de plus en plus reconnue à un modèle de co-gestion PP-OP plus équilibré.

II.3. Efficience Au cours de cette CDO, Afdi s’est dotée de dispositifs/outils/méthode qui sortent les partenariats locaux et les groupes Afdi départementaux de leur relation bi-univoque et facilite leur inscription dans des dynamiques plus fédératives à l’échelle nationale voire régionale Au Burkina Faso, le dispositif se fonde sur une cellule pays et une cellule Afrique de l’Ouest. Installées dans les mêmes bureaux, ces deux cellules travaillent étroitement.

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Au Sénégal, aucune représentation Afdi n’est installée. La cellule Afrique de l’Ouest assure un suivi à distance. Ce travail bénéficie ponctuellement de l’appui d’un consultant sénégalais, M. Lamine BA. Au Bénin, l'Afdi n'a pas de dispositif propre, c'est le PPAB qui joue ce rôle de coordination, en concertation permanente avec l'Afdi Nationale. Au Mali, avec la fin du programme d'appui aux organisations paysannes, l'Afdi a perdu le poste d'assistant technique mais elle s'efforce de maintenir un chargé de mission sur place pour aider l'AOPP dans cette difficile transition. Les cellules sont considérées comme un maillon supplémentaire dans le dispositif Afdi qui doit permettre:

- d’apporter un appui conseil tant pour les OP partenaires que pour les AFDI - d’assurer un travail sur des thématiques transversales (gestion, formation,

filière,…) - de favoriser des échanges sud-sud - d’organiser des formations

II.3.1. Identification et modes d’intervention

Traditionnellement l’identification des activités était menée par les Afdi locales avec leur partenaire et la programmation était bien souvent fort réduite. La précédente évaluation avait montré combien cette manière de faire se révélait être facteur de dispersion des activités Afdi et pouvait dans certains cas (la plupart au Sénégal et au Bénin) certains petits partenariats au Burkina Faso) être contre-productive (difficultés de déboucher sur des programmes consistants, logique de petits investissements ponctuels, etc). Les choses ont évolué favorablement depuis un certain temps déjà et notamment grâce à la première convention déjà, surtout au Sénégal où l’on partait d’une situation particulièrement éclatée en une série de petits projets. Aujourd’hui les différents partenariats convergent en termes de thématique (élevage) autant que de zone géographique (Haute Casamance). Un nouveau programme - soumis à la commission européenne mais refusé – a été l’occasion de réunir les différents groupes Afdi travaillant sur le Sénégal et d’ouvrir à d’autres acteurs : VSF et la coopération française à travers le SCAC. Ce travail a fort bénéficié, en plus d’un animateur particulièrement dynamique en Bourgogne Franche-Comté, de l’appui de la cellule Afrique de l’ouest qui a effectué différentes missions au Sénégal. Des professionnels Afdi ont également participé à renforcer les liens avec le CNCR en participant à des missions conjointes en Haute Casamance.

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Au Burkina Faso les partenariats étant déjà bien « installés », cette étape d’identification a été moins développée car il s’agissait plus de poursuivre ce qui avait été entrepris. De nouveaux investissements ont été cependant initiés indirectement grâce à la convention dans la mesure où elle a permis de fournir des ressources pour l’identification et la formulation de demandes de financement à la CE. Un important programme de sécurité alimentaire a ainsi vu le jour avec la FEPAB. Sur les principaux partenariats importants au Burkina Faso – FNGN et PANISE – l’analyse des interventions en conseil de gestion illustre particulièrement bien l’apport essentiel qu’a eu la convention pour tenter de renforcer l’efficience des dispositifs.

Ex 2 : Le conseil de gestion Les activités de conseil de gestion ont été initiées de manière un peu dispersée à partir des problématiques rencontrées dans les divers partenariats. Les solutions proposées l’ont été par des professionnels français dont c‘était le métier en France avec l’appui d’un chargé de mission de l'Afdi nationale. Une récente capitalisation Afdi montre cependant que les démarches préconisées n’étaient pas nécessairement adaptées au contexte africain dans la mesure où elles restaient trop exclusivement économiques et ne permettaient pas suffisamment de rentrer dans des logiques de prévision d’une part et de recherches de solutions techniques aux problèmes rencontrés d’autre part. La question de l’analphabétisme notamment reste un des principaux facteurs limitant. Cette étude a permis aux différents projets-partenaires de revoir leurs dispositifs jugés inefficients2. La création d’un réseau de gestion rassemblant ces diverses expériences ainsi que d’autres extérieurs au réseau Afdi (CG Sofitex) permet d’ouvrir le champ des interrogations. Mieux encore, le réseau devient chambre de résonance des problèmes de financements et de recherches des différentes expériences. Il appuie aujourd’hui les partenariats à la recherche de moyens supplémentaires notamment pour s’attaquer au problème de l’analphabétisme (voir point suivant sur l’efficacité). Certaines OP impliquées cherchent à pérenniser le réseau en le formalisant. Cette démarche n’est pas acceptée par tous, notamment l’UNPCB et la SOFITEX.Elle n’est pas non plus considérée comme opportune pour l’instant par Afdi qui considère qu’il faut d’abord apprendre à travailler ensemble. Par ailleurs cette nouvelle configuration d’OP pourrait être perçue comme concurrente des plateformes qui ont déjà du mal à se construire. Il semble qu’une réflexion plus approfondie soit nécessaire à cet égard notamment sur les avantages/inconvénients à ne pas être dans la CPF sous forme d’une commission par exemple.

Commentaire : cet exemple montre l’importance d’une coordination au niveau national ou régional des actions. Le réseau est typiquement un « produit » de la convention d’objectif qui permet de sortir les Afdi des relations partenariales et dans une certaine mesure de « sortir le nez du guidon » des problèmes internes au partenariat et aux activités concrètes menées sur le terrain (qui sont du reste le lot de tous les projets de développement et auxquels Afdi n’échappe pas)3.

2 Le rapport de Narcisse Tomety montre surtout dans le cas de la FNGN l’inefficience d’un dispositif portant sur des zones géographiques à la fois étendues et dispersées dans le pays où un conseiller peut faire 100 Km pour suivre 2-3 adhérents. 3 Le rapport de capitalisation (Peneau 2003) fait bien ressortir le fait que « L’énergie principale des services (de conseil en gestion) aussi bien le suivi mensuel des conseillers que l’appui à l’encadrement, sont centrés sur la qualité des enregistrements »

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La démarche se révèle donc ici plutôt efficiente, parce qu’elle innove par rapport à la gestion locale, entre partenaires. Mais elle pose la question de la réplication et de la viabilité de ce type de dispositifs.

II.3.2. La gestion du partenariat du local au régional

Un outil important a été élaboré durant la présente convention et avec l’appui d’un consultant extérieur, Daniel Neu. Il s’agit d’une grille de questionnement pour l’évaluation des partenariats. Cette grille pose des questions essentielles sur :

- la façon dont les objectifs ont été élaborés en commun ; - la façon dont le budget est discuté et géré - …

Les cellules et les chargés de mission dans certains partenariats ont eu un rôle essentiel dans l’utilisation de cette grille. Un travail important a en effet été mené pour analyser un certain nombre de partenariats dans les différents pays de la sous-région. Là où n’existait pas de chargés de mission en poste ou de coordinateur de l’Afdi (Bénin, Sénégal), ce travail a été effectué par la cellule Afrique de l’Ouest. La forte diversité du mouvement Afdi rend cependant la gestion du partenariat toujours complexe et particulière d’un partenariat à l’autre. Selon que l’on est professionnel dans la structure, proche de la FNSEA ou pas, salarié ou retraité-« bénévole », coopérant ou pas, les regards sur un même partenariat peuvent être fort différents. Le rôle des animateurs au Nord et des cellules au Sud pour objectiver ces relations, les inscrire dans une « histoire » est fondamental à cet égard. Au plan plus politique de la création d’alliances paysannes au niveau international, se pose une question majeure qui est celle de la relation d’Afdi avec les principales organisations professionnelles qui en sont à l’origine, en particulier la FNSEA. Une organisation comme le ROPPA pose le problème de façon lucide : « A priori, les organisations issues du milieu professionnel agricole sont mieux à même d’être des partenaires du ROPPA que les ONG. Mais dès lors que l’on discute des enjeux internationaux on voit vite les limites. Certains intérêts ne sont pas convergents précisément par ce que nous sommes tous des agriculteurs : on est d’accord sur l’importance de prix rémunérateurs, sur les mécanismes de régulation, sur des protections douanières mais moins sur les subventions, la PAC ne nous satisfait pas. Par contre nous n’avons pas ces problèmes avec nos ONG partenaires, elles ont une position plus neutre ».

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II.3.3. Est-il possible de faire mieux à moindre coût ?

Il semble que la question doive être posée autrement : comment faire mieux en mobilisant un peu plus de moyens ? Il apparaît, en effet, que pour que les actions Afdi aient un réel poids et atteignent une masse critique suffisante, à l’échelle locale comme nationale, les moyens ne suffisent pas. En d’autres termes il apparaît difficile de faire mieux à moindre coûts étant donné, sauf exceptions, que :

- la plupart des opérations se font pratiquement à coûts réels - les organisations partenaires ne sont pas financées plus que le strict

nécessaire dans bien des cas. Pour beaucoup de personnes consultées, il apparaît nécessaire de faire la même chose voire plus, mais avec plus de moyens. C’est une revendication forte et systématique des partenaires : « Afdi n’a pas les moyens de sa politique » ; développer des organisations paysannes suppose de leur accorder un peu plus de moyens au plan institutionnel notamment

- la charge des cellules en termes de suivi est excessive Les conventions ont permis le rapprochement autour de thèmes transversaux – conseil de gestion, structuration de filière – ainsi que vis-à-vis des faîtières. Cette évolution doit beaucoup aux cellules nationales et à la cellule régionale, aux représentants pays (quand ils existent) et à l’Afdi nationale. Or ce dispositif apparaît sous dimensionné et fonctionne bien au-delà de sa capacité normale.. La charge des cellules peut être appréciée sachant qu’elles ont à suivre, ensemble entre 60 et 80 dossiers (même si des recoupements existent entre thème et organisations paysannes, chacun devrait faire l’objet en toute logique d’un traitement particulier, avec des compétences différentes) avec 4 personnes permanentes. Cela donne la possibilité de consacrer au maximum 3 à 4 jours par dossiers par trimestre. En comptant les temps de déplacements qui sont souvent très importants, la rédaction de rapports et la gestion-intendance des cellules, ce chiffre se ramène au mieux à 2 jours consacrés à chaque dossier par trimestre. Dans ce contexte l’efficience se rapporte surtout à la capacité de sélectionner et de prioriser les interventions sur des dossiers stratégiques. De ce point de vue les cellules ont sensiblement amélioré durant cette dernière convention, leurs interventions sur des dossiers qui renforcent à la fois certaines thématiques (conseil de gestion ; structuration de filières) et des partenariats stratégiques (FENOP et CPF à travers FEPAB, ANPHV,…). Elles ont également contribué à orienter certains partenariats vers ces faîtières (Afdi-Picardie et FENOP ; Afdi Pays de la Loire et FEPA-B). Ceci tout en trouvant (préparant, négociant) de nouveaux financements. Se pose donc, de façon particulièrement aiguë compte tenu de la fin de l’instrument convention, la question de la survie de ces dispositifs « interface » pour maintenir une efficience au dispositif dans son ensemble. Cette question se pose tant en France qu’aux suds. Le besoin de facilitateur-médiateur-animateur entre groupes

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Afdi, entre OP, vis-à-vis des pouvoirs publics, vis-à-vis des organisations professionnelles, apparaît essentiel pour réellement valoriser (c'est-à-dire, sélectionner, gérer, accompagner) les ressources qui se trouvent dans le réseau Afdi. Ces ressources paysannes restant le substrat du dispositif Afdi. Les options apparaissent cependant limitées à deux scénarii :

- l’Afdi parvient à trouver des ressources pour augmenter son dispositif. Ce scénario apparaît déjà compromis par l’arrivée à termes de divers emploi jeunes en France, la nécessité de prendre plus en charge les chargés de mission AFVP au Sud, …

- l’Afdi parvient à ouvrir son réseau et à travailler avec d’autres acteurs – ONG, organismes de recherche, bureaux – qui peuvent participer à mieux valoriser et canaliser les compétences Afdi en complémentarités d’autres compétences.

Le premier scénario nécessite surtout d’ouvrir le réseau des partenaires financiers, ce que Afdi a déjà commencé à faire avec un certain succès (Agricord, CE,…). Une des solutions encore insuffisamment exploitée consiste à utiliser plus systématiquement des personnes ressources locales plutôt que des expatriés. Les critères de choix devraient combiner la compétence et la disposition à rester longtemps en poste. La rotation dans les postes est en effet préjudiciable à une capitalisation (le départ prochain du coordonnateur du réseau gestion par exemple est contrariante). Le cas de la cellule AO peut par contre être considéré comme un idéal : un binôme africain-européen avec semble t-il dans les deux cas une disposition à rester en poste pendant longtemps. Le second scénario d’une ouverture des Afdi à d’autres acteurs (ONG, recherche, etc…) serait facilité si la coopération française réinvestissait dans des programmes de professionnalisation du monde rural. C’est, en effet, au dire même de certains permanents Afdi, lorsque ces programmes avaient bien défini le rôle et les tâches d’Afdi en complémentarité d’autres acteurs, comme au Mali ou au Bénin, que les résultats ont été les plus probants. Constats généraux : Globalement il semble que l’efficience se soit bien améliorée par rapport à la précédente convention d’objectifs. Une série d’outils importants ont été produits et partiellement intégrés. Les outils de programmation renforcent de manière évidente la préparation des actions et leur suivi. Ceux d’évaluation du partenariat inscrivent les partenariats Afdi dans une réflexion plus fine sur leurs connaissances réciproques et une perception plus objective des intérêts de chacun dans ces « échanges ». Certains de ces outils reposent cependant surtout sur les postes « interfaces » : animateurs en France, VP-JAC, certains professionnels du Nord et surtout les chargés de mission des cellules au Sud. La contrainte majeure pour renforcer cette efficience est donc essentiellement de nature financière pour maintenir ces interfaces. Pour permettre de

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réellement valoriser les expériences-partenariats locales, autant que les savoirs-paysans du réseau, il faut des dispositifs transversaux en France et dans les pays au Sud permettant d’inscrire ces dynamiques locales dans des stratégies plus générales à l’échelle locale comme nationale et régionale. A défaut de pouvoir trouver les financements pour ces dispositifs, l’alternative sera d’articuler beaucoup plus et mieux les interventions avec les autres acteurs issus du monde des ONG, des pouvoirs publics au Sud et/ou de la recherche, sur base de stratégies plus précises et mieux définies. La convention a vu un certain nombre d’évolutions positives à cet égard, notamment au Sénégal, dont l'Afdi devrait pouvoir s’inspirer aujourd’hui. Il s'agit en particulier d'améliorer la continuité et la cohérence des interventions du local au national. Il ne s’agit donc pas d’opposer l’un à l’autre et de ce point de vue ces recommandations restent cohérentes avec celles réalisées lors de la précédente évaluation. Il s’agit d’articuler une ambition plus politique à terme au niveau national (la création de référentiels qui pèsent dans les décisions), à une assise plus régionale, permettant de maîtriser un domaine d’activité, avec différents partenaires, sur un territoire (la région agro-économique) suffisamment homogène. Les avancées en Haute Casamance en relation avec le CNCR sont illustratives de ce qu’il serait possible de faire. Interrogations supplémentaires La précédente évaluation avait montré à la fois le besoin de mieux prendre en compte le contexte des interventions – notamment culturel – et le besoin de renforcer le suivi-évaluation-prévision (ou programmation) par des outils adéquats. Si le second objectif apparaît atteint, le premier ne l’est que très peu. En particulier, il est rare de trouver dans les documents reçus (rapports d’activité, rapports de projets, documents de capitalisation, etc.) des analyses à caractère plus social et culturel permettant de comprendre dans quels « jeux » d’acteurs et rapports de force l’intervention prend place. Les quelques analyses sur le statut social des personnes impliquées dans une action, sur la structuration traditionnelle du pouvoir dans les différentes localités, proviennent de consultance extérieure (en particulier la première évaluation sur le Sénégal qui a eu une influence importante sur l’évolution des modes d’intervention dans ce pays et du travail du consultant sénégalais). Or, ce déséquilibre peut produire des effets négatifs. En l’absence d’une réflexion plus sociale, l’emphase portée sur la programmation et le suivi en termes de décaissement et de résultats directs (sans mesure d'impact ni même d'effets) peut renforcer l’impression qu’il suffit de bien programmer a priori une action pour que cela fasse « développement ». Le développement risque de n’être que très peu vu comme le résultat d’interactions entre acteurs avec leurs propres logiques, leurs intérêts, leurs rapports de force. Ces « dimensions » ne sont traitées comme des freins, des obstacles au bon fonctionnement de l’intervention. Ce déséquilibre risque de renforcer une tendance à percevoir le développement de manière réductrice

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comme le résultat avant tout de l’intervention extérieure, et en particulier les « échanges paysans », (ceux-ci étant eux-mêmes encore souvent appréhendés par les groupes locaux comme des transferts de savoirs du Nord vers le Sud). Encore une fois le pari, suffisamment étayé par le travail accompli lors des différentes conventions d’objectifs, est que les permanents de la structure au Nord et au sud peuvent permettre de compenser ces faiblesses.

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II.4. Efficacité Ce point analyse l’efficacité au plan général. Le détail des activités menées est à rechercher dans les parties précédentes relatives aux rapports pays.

II.4.1. Rappel des attendus de départ

Objectif spécifique : Les échanges paysans, soutien aux agricultures paysannes et multifonctionnelles par : • le renforcement des agriculteurs dans l’exercice de leur métier, • le développement des capacités des Organisations Professionnelles Paysannes. Résultat attendu n°1 : Afdi a facilité l’acquisition et la maîtrise par les paysansd’innovations techniques, et la consolidation d’organisations professionnelles locales. Axe 1 : Acquisition, maîtrise et diffusion de nouvelles techniques Axe 2 : Création et développement d’outils de gestion Axe 3 : Mise en place et/ou consolidation des OP nécessaires au développement Axe 4 : Implication des paysans dans les collectivités locales et dans la gestion des projets de développement local Résultat attendu n°2 : Afdi a contribué au renforcement des capacités institutionnelles techniques et financières des fédérations paysannes, a appuyé la mise en réseau de ces OP au niveau sous-régional et a favorisé leur implication dans les négociations internationales. Axe 1 : Renforcement des services offerts aux OP membres (structuration des activités économiques, gestion des dispositifs de formation, mise en œuvre d’outils d’information et de communication) Axe 2 : Elaboration et mise en œuvre d’un projet professionnel Axe 3 : Participation active à la définition et l’élaboration des politiques de développement et des politiques agricoles nationales Axe 4 : Accès à l’information sur les enjeux internationaux et implication dans les débats

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Résultat attendu n°3 : Les agriculteurs français et les OPA ont consolidé et mis en cohérence un système de coopération efficace et ont établi des liens avec les autres coopérations européennes de même type (Agriterra, IVA). Axe 1 : Renforcement de la cohésion et de la coordination des actions de coopération internationale Axe 2 : Consolidation des ressources humaines de l’Afdi pour animer et coordonner les actions de coopération internationale Axe 3 : Mobilisation de compétences professionnelles en quantité et qualité adaptées aux besoins des actions dans les PED Axe 4 : Création d’un réseau « coopération au développement » des organisations agricoles au niveau européen

Résultat attendu n°1 : Afdi a facilité l’acquisition et la maîtrise par les paysans d’innovations techniques, et la consolidation d’organisations professionnelles locales.

R1. Axe 1 : Acquisition, maîtrise et diffusion de nouvelles techniques Rappel des attendus : Ce premier axe est celui de l’appui auprès des paysans dans l’exercice de leur métier. Présent dans la quasi-totalité des partenariats Afdi, et malgré des contextes très différents selon les pays, il répond aux objectifs de la grande majorité des paysans des PED : le maintien du revenu par une sécurisation ou une amélioration des prix des produits agricoles, l’intensification de la production et sa diversification, le maintien de la fertilité des sols, l’amélioration des techniques d’élevage (santé animale et alimentation), la commercialisation et l’accès aux intrants, etc.…Du point de vue de l’acquisition, la maîtrise et la diffusion de nouvelles techniques, le travail s’est poursuivi au Burkina Faso par des formation-échanges autour de techniques de maraîchage, de gestion de matériel agricole (tracteur dans CUMA), d’élevage de poulet, d’organisation d’une filière lait,… Globalement les activités apparaissent plus efficaces aujourd’hui en termes quantitatifs autant que qualitatifs. Il y a en effet plus de formation globalement dans les divers partenariats et ces formations sont de plus en plus des formations de formateurs (sous forme de chantiers-écoles). Bien qu’une évaluation spécifique serait nécessaire pour vérifier l’efficacité de ces formateurs-relais dans le transfert de savoir, les rapports tendent à indiquer une amélioration de ce point de vue. Au plan qualitatifs les formations apparaissent plus variées et les activités d’expérimentation (essais variétaux, démonstration, études d’impact …) se sont systématisés particulièrement avec la FNGN au Burkina Faso, avec l'Anapes et l'UGAN au Sénégal... La qualité autant que la quantité dépendent cependant de la vie institutionnelle des OP partenaires et de ce point de vue les crises rencontrées (FNGN et PANISE) ont eu une incidence sur le rythme espéré des formations. Dans les deux cas, mais pour des raisons différentes, on observe une diminution de l’ancrage des OP vis-à-vis de leur base. Or, le couplage entre ces formations techniques et la vie associative ne se fait pas suffisamment. Dans le cas de ces OP, l’ouverture des actions de

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renforcement de capacités à d’autres dimensions que le technique ou que l’économique (à travers le conseil de gestion, cf. ci-après) et à d’autres public cibles que les membres ou les adhérents actuels apparaît névralgique. Le constat est particulièrement fort dans certains partenariats au Sénégal, par exemple à l’UGAN où la dimension technique de la production de miel domine l’intervention au détriment de la vie associative. L’efficacité forte sur le plan de la maîtrise technique du procédé apparaît dès lors nettement moindre en termes de nombre de personnes touchées. Recommandation : Chaque formation devrait être assortie de réflexions sur les implications organisationnelles des techniques proposées (répercussion sur la gestion de la force de travail à l’intérieur de l’exploitation familiale, de l’organisation paysanne, …). Les rapports de missions ainsi que les entretiens montrent que les thèmes restent fort techniques et en même temps que les demandes sont fortes pour des formations sur les aspects organisationnels de la production et de la commercialisation. Si Afdi réalise aussi par ailleurs ces formations (cela fait l’objet d’un autre axe de la convention), il semble qu’elles soient peu couplées avec le technique.

R1. Axe 2 : Création et développement d’outils de gestion Rappel des attendus : Les innovations techniques et la mise en place de nouvelles productions rencontrent souvent des difficultés dans leur mise en œuvre par manque d’information sur le revenu que peut dégager le producteur en « changeant ses habitudes » C’est pourquoi la poursuite et le démarrage d’actions de gestion au niveau de l’exploitation agricole apporte ce complément d’information nécessaire pour convaincre et conforter les paysans dans certains choix techniques. La présente convention a permis d’investir un peu plus sur les outils de conseil de gestion, notamment à travers le poste au Burkina Faso d’un chargé de mission, chargé d’animer un réseau d’OP (partenaires ou non) intéressées par le conseil de gestion. Le travail de capitalisation réalisé sur la question a également conduit à mieux cerner les limites des diverses interventions. En termes de création et de développement d’outils de gestion, divers outils existants aujourd'hui, mais l’on en est encore au stade expérimental dans la mesure où l’appropriation technique et financière des dispositifs reste très faible et devrait, en toute logique, conduire à revoir autant les outils que les dispositifs actuels. L’efficacité n’a donc pas sensiblement évolué si l’on prend comme indicateur le nombre d’adhérents aux conseils de gestion au sein des différents partenariats. Les résultats diffèrent cependant selon les partenariats visités (voir encadré) :

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Pour la FNGN, au cours de la deuxième convention d’objectifs, l’effectif des adhérents a augmenté de 51% environ passant de 153 à 231. Celui des conseillers diminuant de 9 à 74. Les activités du conseil de gestion se sont diversifiées et une participation financière est exigée aux adhérents. Le tableau des résultats (voir rapport Tomety en page 12) met en évidence les efforts en matière de recherche action, de formation et de vulgarisation, tant en cultures maraîchères, cultures hivernales qu’en production animale (embouche bovine et aviculture). Les outils créés ou formalisés durant la présente convention sont essentiellement l’outil de collecte de données sur l’élevage (évaluation de l’outil) et un outil de prévision de campagne. Des partenariats sont développés avec des instituts de recherche ainsi que les services de l’élevage. Des réflexions sont amorcées également sur les stratégies d’accès au crédit auprès d’établissements spécialisés… Cependant, seulement 20 % des adhérents tiennent eux-mêmes le cahier de collecte des données du fait de l’analphabétisme. C’est dire que la proportion de personnes non alphabétisés parmi des adhérents est élevée ou que les personnes instruites plus ou moins ont perdu l’habitude de l’écriture ou ne veulent pas faire d’effort d’être autonome vis-à-vis du conseiller en gestion. Dans tous les cas, les dépenses du conseiller demeurent encore trop importantes pour l’enregistrement des données. La couverture géographique de leurs interventions ne facilite pas non plus un travail rigoureux et se pose sérieusement un problème de fiabilité des données enregistrées. La participation de l’adhérent aux charges de l’accompagnement est fixée à 2000 FCFA/an contre un coût total évalué à 80.000 FCFA, soit une subvention de 97,5% et pourtant en neuf (9) ans de promotion de cet outil conseil de gestion, on ne sent pas encore un engouement pour sa demande au niveau des producteurs Pour PANISE, le Conseil de Gestion à l’exploitation est mis en œuvre par 3 conseillers de gestion, appuyés dans leur démarche par un Chargé de Mission AFDI (volontaire) et l’Animateur du Réseau Gestion (basé à Ouagadougou). L’adhésion à ce conseil est une démarche volontaire. Y sont acceptés des agriculteurs alphabétisés et non alphabétisés. Pour le second cas, l’adhérent se fait aider d’un proche ou du conseiller pour le remplissage des outils mis à sa disposition. La cellule accompagne 113 adhérents actuellement : chaque zone comprend 4 à 11 villages pour 1 à 17 adhérents par village. La distance la plus courte parcourue est de 5 km et la plus longue est autour de 50 km. La boîte à outils qui structure le conseil en gestion comprend (i) un cahier de suivi des activités par production, (ii) une fiche de suivi des greniers, (iii) une fiche de suivi du budget familial et des fiches sur les itinéraires techniques. En contrepartie de cet accompagnement, la cotisation annuelle est de 5000 FCFA et monte à 7500 FCFA à partir de la 3ème année soit une subvention de 75.000 FCFA à 72.500 FCFA par adhérent suivi et par an. On note une diminution du nombre d’adhérents au cours de cette convention d’objectifs passant de 176 à 113 adhérents. Le taux de recouvrement des cotisations plafonne à 63% (2003). Cette année le partenariat investit dans certaines démarches test : le conseil de gestion pour des groupements féminins et à des groupes d’analphabètes à partir d’outils imagés.

Deux « activités », conduites lors de la présente convention, doivent cependant permettre d’offrir de nouvelles perspectives et à terme de renforcer sensiblement l’efficacité du conseil de gestion : - le travail de capitalisation - la mise sur pied d’un réseau conseil de gestion La capitalisation a montré l’importance d’un conseil à l’exploitation familiale qui ne se limite pas à des aspects exclusivement économiques (marges brutes notamment) mais intègre les aspects de prévision et de recherches d’alternatives techniques. Ces nouvelles orientations doivent cependant encore se traduire dans les outils. Dans tous les cas, (y compris ceux non visités de FEPASI) se pose la question de

4 Recentrage sur les conseillers les plus performants et difficultés liées à la fin du Plan Quinquennal de la FNGN en sont la cause.

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l’adéquation des outils aux moyens locaux pour les gérer. Les Afdi ont fait le constat depuis un certain temps du fait qu’aucun des dispositifs n’est actuellement en mesure de s’autofinancer à court terme et a fortiori de s’étendre (ce qui est le cas de la plupart des dispositifs de conseil de gestion au Sud). Une des principales contraintes est l’analphabétisme. La FNGN insiste beaucoup pour qu’un programme d’alphabétisation soit mis en place en parallèle, mais l’Afdi Pays de la Loire a raison de dire qu’elle ne peut tout faire. L’impasse est cependant flagrante et peut-être préjudiciable à la fois au partenariat est à l’efficacité de l’action. Les enjeux dépassent cependant le cadre du partenariat : la possibilité d’appliquer en milieu rural les acquis des alphabétisations fonctionnelles à travers des activités aussi importantes et reconnues par les paysans que le calcul d’un minimum d’indicateurs économiques, permettrait de résoudre un problème important de l’alphabétisation qui est depuis toujours l’application et l’utilisation post-formation. Il conviendrait aussi de clarifier les finalités du conseil de gestion, s'agit-il d'améliorer les résultats économiques d'un nombre limité d'exploitants ou s'agit-il d'élaborer des références qui permettent d'orienter le travail de vulgarisation agricole pour tous les membres de l'organisation paysanne ? Dans la première hypothèse, l'investissement est disproportionné par rapport aux résultats, c'est seulement dans la seconde hypothèse que le conseil de gestion peut valablement prendre sa place dans une démarche d'appui aux organisations paysannes. Face à ces « impasses »5 rencontrées dans les « projets-partenaires », la réponse a été de s’organiser en réseau de « pratiquants » du Conseil de Gestion (CG) ou du conseil à l’Exploitation Familiale (CE) pour discuter de ces problèmes et visiter d’autres expériences (visite du CG de l’Office du Niger au Mali notamment). Cette démarche paraît particulièrement pertinente. Le réseau ne se contente en effet pas de discuter de questions technico-organisationnelles, mais joue le rôle de chambre de résonance des demandes des différentes expériences, en termes de recherche autant que de financement. En terme de recherches des rapprochements sont en cours avec le CIRAD qui capitalise depuis longtemps dans le domaine et en termes de financement le réseau a élaboré une demande de financement pour un programme d’alphabétisation fonctionnelle qu’il a ensuite négocié avec la coopération danoise. Il faut insister sur deux points ici :

- cette démarche est efficiente car elle permet de répondre à des facteurs limitants (recherche, financements) qui ne peuvent être pas pris en compte par les « projets-partenaires »

- elle ne peut être animée que par des dispositifs hors partenariats telles que les cellules nationales ou régionales. (même si cette animation est financée pour partie par certaines Afdi régionales)

5 Le terme est un peu fort dans la mesure ou même si des solutions ne sont pas toujours trouvées cela n’empêche pas l’action de se poursuivre, mais il montre surtout une difficulté à surmonter certains « murs ».

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Le réseau conseil de gestion apparaît intéressant surtout dans la mesure où il permet de sortir des « objectifs-cadre » liés aux partenariats. L’analphabétisme est un facteur limitant important du conseil de gestion, mais, n’étant pas retenu comme un objectif des partenaires, il ne peut être financé que dans un cadre qui dépasse ces partenariats. Le réseau est donc important non pas tant parce qu’il porte sur le conseil de gestion, que parce qu’il le dépasse et permet d’être chambre de résonance d’autres préoccupations des OP (préoccupations en lien indirect avec le conseil de gestion). Ces préoccupations peuvent être celles de la commercialisation, de la fourniture d’intrants, des techniques,… de toute une série de questions qui ressortent en définitive des bilans des conseils de gestion. De notre point de vue, l’efficacité du réseau porte plus sur cette capacité à répondre concrètement (par la recherche d’informations et de financements) à des préoccupations plus générales des OP notamment en leur permettant de trouver des ressources qu’elle n’auraient probablement pas obtenu uniquement dans le cadre de leurs « projets-partenaires » (qu’ils soient avec Afdi ou avec d’autres). Recommandation : Le réseau conseil de gestion apparaît stratégiquement important pour les OP, mais il paraît nécessaire de questionner ses finalités et de voir s’il ne serait pas utile d’en faire une chambre de résonance plus large que l’aspect purement conseil de gestion. Ce réseau est un exemple réussi d’intégration de différentes OP autour d’une thématique. Cet objectif de rapprochement (même non formalisé, même partiel) est sûrement plus important que l’objet même sur lequel il repose pour l’instant. Il ne faudrait pas perdre de vue cela dans le futur, face aux problèmes de financement qui vont immanquablement surgir suite à la fin de la CdO et qui obligeront sans doute les OP à préciser l’intérêt qu’elles ont réellement dans ce réseau. R1 Axe 3 : Mise en place et/ou consolidation des OP nécessaires au développement Rappel des attendus : Les OP partenaires Afdi sont confrontées à des difficultés souvent similaires d’un pays à l’autre qui sont un frein récurrent au développement de l’agriculture et de son organisation : Comment trouver le crédit pour faire face à l’achat des intrants ? Comment assurer les fonds de roulement nécessaires à la mise en marché collective des produits ? Où trouver l’information technique nécessaire pour la conservation, la transformation de produits agricoles ? Comment assurer le bon fonctionnement de leur organisation professionnelle, sa légitimité, son assise financière ?

La mise en place ou la consolidation des OP ne peut s’affranchir d’une réalité qui est que les Afdi ne sont, dans la plupart des cas, pas les seuls partenaires des OP. L’efficacité s’en ressent (de même que l’impact des actions en termes plus généraux). Au niveau local, il faut donc distinguer les partenariats « multiples » comme la FNGN des partenariats « simples » comme PANISE. Ces deux cas sont

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intéressants car ils posent tous deux la question de l’appui aux OP à travers l’activité particulière que représente le conseil de gestion. Dans les deux cas, le conseil de gestion est resté longtemps un service technique relativement dissocié de l’institution. Dans les deux cas il s’en rapproche fort, depuis cette dernière convention, en partie porté par les déboires rencontrés par les OP partenaires, en partie par les acquis réels des activités. Mais si les trajectoires sont ressemblantes, les origines et contextes sont différents. A l’origine il y a à PANISE (UPPM à l’époque) la volonté de disposer d’éléments économiques pour alimenter un débat et même un combat « contre » la SOFITEX et ses dérives. Dans le contexte fort chargé de l’époque, l’option « technique » prise par le conseil de gestion peut paraître pertinente pour calmer les esprits. Elle va cependant se « formaliser » au point d’en faire une institution dans l’institution : le service conseil de gestion enverra des cartes de vœux à l’UPPM ! A la FNGN, la cellule CAE mise en place par Afdi apparaît alors qu’existent déjà d’autres cellules-partenaires (la cellule hydraulique est en place depuis bien longtemps, la cellule agro-foresterie également de même que la cellule gestion, notamment). Le principal bailleur de fonds, la coopération suisse, imprime dans une certaine mesure les règles du jeu : le Plan quadriennal a été réalisé sur financement suisse et sa poursuite ou non dépend fortement de l’avis de la coopération suisse. L’arrêt de ce plan a eu des répercussions fortes sur l’efficacité des activités du conseil de gestion dans la mesure où une bonne part des conseillers est payée à travers ce plan. Si dans les deux cas on retrouve une tendance à construire la consolidation des OP à travers des activités techniques, il faut reconnaître que dans le cas de la FNGN il s’agit plus d’une stratégie de celle-ci pour isoler les partenariats dans des cellules relativement étanches.

Dans ce contexte les activités concrètes de « consolidation » des OP ont été : - pour PANISE un appui institutionnel lors de la crise de l’UPPM qui s’est

traduit par le financement d’une consultance et bientôt par celui d’un audit organisationnel effectué par un stagiaire.

- pour la FNGN des formations aux méthodes de programmation et la mise en place et l’accompagnement du conseil d'orientation du conseil de gestion (COCDG). Cette activité est particulièrement intéressante car elle s’inscrit dans la démarche d’Afdi de renforcer la structure partenaire en créant des espaces de concertation entre la base – les Unions ici – et le sommet6.

Les activités se sont bien déroulées et participent mieux à consolider la structure dans son ensemble que précédemment.

6 La tendance forte, depuis toujours, ayant été à la verticalité des relations selon un modèle « gravitaire » de décisions et de captation des ressources extérieures.

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Au Sénégal, un projet « pilote » de renforcement des DIRFEL (Directoire des femmes pour l’élevage) est en train d’être mis en œuvre. L’objectif de ce projet est de « renforcer les capacités des organisations professionnelles d'éleveurs de Haute Casamance en matière de connaissance de la filière et gestion de projets de commercialisation, de services rendus à leurs membres et leur implication dans les politiques et programmes nationaux ». Malgré le fait que le projet n’a pas pu être financé, son processus d’élaboration a constitué une dynamique importante d’échanges et de connaissances mutuelles entre les différents acteurs impliqués. Un comité de pilotage a été mis en place qui, malgré l’échec du financement tente de se maintenir pour consolider les liens entre les MDE, DIRFEL, le CNCR, VSF et AFDI, et associer les efforts de réflexion sur la filière.

Dans les différents cas cependant les rapports relèvent certaines faiblesses : - difficultés (ou refus dans certains cas ?) de participer à animer la vie

associative en dehors des activités techniques - difficultés à faire en sorte, à travers les activités, de rapprocher l’OP des

autres acteurs locaux et en particulier les pouvoirs publics - dans le cas de PANISE la consultance d’un juriste burkinabé pour étudier

les conditions de relance de l’UPPM a été très courte et les enjeux et cahier des charges dépassaient nettement les moyens accordés

Tout se passe donc un peu comme si les principales composantes de la vie d’une OP – l’associatif et le politique – n’étaient prises en compte qu’indirectement, « par défaut », à partir des activités techniques et quand les circonstances s’y prêtent (FNGN) ou l’exigent (PANISE car crise, DIRFEL vis-à-vis du CNCR). Les résultats sont cependant à la hauteur des attendus si l’on convient que ces derniers portaient plus, dès le départ, sur des dimensions techniques de consolidation que des aspects réellement institutionnels.

Le constat est sensiblement différent pour l’appui aux OP nationales et régionales. La mission perçoit à ce niveau des stratégies différentes au niveau national dans la mesure où l’entrée n’est plus technique mais cette fois bien institutionnelle avant tout (voir point R2 Axe 1).

R1 Axe 4 : Paysan et développement local Cet axe a été peu développé au Burkina Faso et au Sénégal pas plus qu'au Bénin ou au Mali. Les conditions au Burkina Faso ne s’y prêtent guère :

- la décentralisation n’a pas encore atteint le milieu rural et l’hésitation des politiques à cet égard témoigne des enjeux notamment fonciers

- beaucoup de coopérations bilatérales et multilatérales investissent cette dimension à la suite de la Banque Mondiale qui a imprimé la marche à suivre à cet égard avec son programme national de gestion des terroirs (PNGT)

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- autant d’interrogations subsistent sur l’adéquation entre les dispositifs mis en place par ces programmes (de type CVGT) et les futures communes rurales

Au Sénégal, la décentralisation est ancienne et la question a été résolue de fait par l'élection de nombreux leaders paysans dans les conseils communaux, ce n'est pas pour autant qu'il s'y développe des dynamiques de développement local significatives. Si le contexte ne facilite pas un engagement des Afdi dans ce type de problématique, il apparaît aussi que la priorité pour les Afdi dans les pays d’Afrique de l’Ouest, est plus dans l’accompagnement des organisations paysannes à être représentées dans les instances de développement local plutôt qu’à tenter d’en construire soi-même et de s’investir dans la planification du développement territorial. Cela semble logique puisque le développement local fait appel à une expertise qui n'est pas jusqu'à présent celle de l'Afdi. Ceci étant, la prise en compte de cette dimension dans les partenariats devra être amplifiée car elle met en scène de nouveaux acteurs en milieu rural et offre de nombreuses opportunités en matière de financement des équipements collectifs (notamment).

Résultat attendu n°2 : Afdi a contribué au renforcement des capacités institutionnelles techniques et financières des fédérations paysannes, a appuyé la mise en réseau de ces OP au niveau sous-régional et a favorisé leur implication dans les négociations internationales.

R2 Axe 1 : Renforcement des services offerts aux OP membres (structuration des activités économiques, gestion des dispositifs de formation, mise en œuvre d’outils d’information et de communication) Structuration des activités économiques et gestion des dispositifs de formation Rappel des attendus : Ce volet correspond surtout à un travail sur les filières : il s’agira de mettre les OP en situation de se positionner au sein des filières ; pour cela les activités à développer sont :

le recensement et l’analyse du potentiel de production géré par les groupes locaux, la maîtrise de l’information sur les coûts de production, l’analyse des marchés : volumes, prix et opérateurs, l’évaluation des besoins en financement pour la collecte et la commercialisation, la mise en place au sein des OP des commissions ou groupes de travail spécifiques sur ce

thème tout en assurant la formation des responsables et animateurs de ces groupes, le renforcement des capacités de négociation de responsables avec les différents acteurs

de la filière.

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Travail sur la filière sésame :

Le travail a consisté dans la collecte d’information sur la filière sésame et sur les processus de certification biologique à destination des Unions du Nayala et du Sourou. Un premier diagnostic a permis de voir avec les unions ce qu'elles-mêmes peuvent prendre en charge avec leurs compétences actuelles, quels sont les besoins en formation pour un transfert progressif des responsabilités au niveau des producteurs etc... Le travail a permis d’identifier des pistes, des contraintes et à les discuter : - formalisation des rôles et responsabilités de chacun des partenaires (comme l'a proposé Afdi

Rhône-Alpes) avec contractualisation écrite - appui à la recherche de partenaires et à la planification : l'UGPN et l'UPS avaient recensé des

intentions de culture de sésame bio à hauteur de 2000 ha, ce qui supposait la recherche de nouveaux partenaires commerciaux ; finalement, ils risquent de ne pas atteindre ce niveau de production du fait d'un problème d'approvisionnement en semences. Les contraintes de la certification supposent une planification précise des surfaces qui seront semées en sésame. Si ils veulent rester crédibles auprès de Provence Régime et d'autres opérateurs, ils devront pouvoir tenir leurs engagements;

- formation à la production de semences et à la production proprement dite, formation en gestion...

- organisation de la collecte avec mise en place d'un système de traçabilité fiable (codification des sacs, pesée...) : l'expérience de l'UGVBM matière de commercialisation des céréales peut être une piste pour un échange sud-sud. L’UGVBM commercialise en outre du bissap biologique, certifié par Lacon. Elle a donc également une expérience pour le montage de dossier demandé pour la certification, codification, contrôle de la qualité etc…

- formation des animateurs pour la constitution des dossiers de certification … Travail sur l’installation des jeunes

Les zones d’intervention des trois premières se recoupent. Le stage sur les jeunes installés par le CPR de Kodougou devrait permettre d’avoir un certain nombre d’informations précieuses qui pourront être valorisées pour approfondir la réflexion sur ces différents programmes : En effet, il doit établir à la fois un diagnostic assez complet du processus d’installation : - conditions économiques et sociales (accès au foncier, soutien de la grande famille, main

d'oeuvre...) qui permettent sa réussite ou son échec, - systèmes de production mis en place et générateurs ou non de revenus permettant de

rembourser un crédit - identifier les différents partenaires techniques et financiers susceptibles d'être associés à un

programme d'installation des jeunes Travail sur la filière pomme de terre

Suite à la réunion du 23/07 à Afdi Nationale avec Agriterra et IVA, les 3 organisations ont décidé d’un appui conjoint à cette filière : les demandes d’appui du Réseau National des producteurs de PdT et/ou du Comité de travail issu de l’atelier feront l’objet d’une concertation entre les 3 partenaires afin de mobiliser les compétences les plus adéquates. En effet, les différences d’organisation des producteurs, les spécificités de ces trois pays constituent autant d’expériences à partager et à valoriser par les partenaires du sud. Rédaction de TdR pour une étude sous-régionale sous la pomme de terre (financement : INSAH)

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Information-communication Rappel des attendus : Les attentes des paysans en matière d’information sont aujourd’hui clairement et fortement exprimées par les paysans à la base et à tous les niveaux de responsabilité. A partir du recensement de ces attentes et des outils et opérateurs existants (radios rurales, journaux, observatoires, etc…), il s’agit d’accompagner les OP dans :

la définition d’une stratégie en matière de gestion de l’information et d’en évaluer les moyens et les coûts,

la mise en œuvre de ces stratégies par la recherche et la négociation des financements et si besoin la contractualisation avec des opérateurs,

la mise en place au sein des OP de cellules d’information, communication et la formation des responsables et animateurs de ces cellules.

Le poste d’information-communication rentrait dans cet objectif de renforcement des OP. Il date de décembre 2000 et s’est prolongé jusqu’en fin 2003. Les activités menées dans ce cadre sont rappelées dans le tableau suivant avec en regard un certain nombre de leurs « résultats » :

Activités Résultats directs ou indirects Moundasso février 2001 Échanges entre OP et entre partenaires.

Meilleure connaissance des Afdi. Rencontres sur la Filière haricot avec l’ANPHV.

Plan d’action ANPHV Travail sur l’information du prix du Haricot vert à Rungis et sur les importateurs

Rencontre sur la Filière pomme de terre FPAB Nomgana octobre 2001

Création du réseau de producteurs de PdT.

Installation des jeunes producteurs agricoles, Toma janvier 2002

Clarification des enjeux et des problèmes rencontrés.

Bilan fin de campagne conseil en gestion Ces réunions préfigurent ce que sera le réseau conseil de gestion qui en est un résultat important

Appui à l’ANPHV et l’APEFEL-B Montage diapositive sur la filière haricot Appui à la filière oléagineux de la FENOP Informations sur les variétés les itinéraires

techniques, les techniques de conservation, de séchage, de conservation

Participation aux ateliers de réflexion sur les politiques internationales

En cours

Travail sur les textes législatifs En cours

Conception d’une base de données sur des OP et des initiatives locales

En cours

Voyage de la FENOP au Mali sur les chambres d’agriculture, avril 2003

Rencontre sur la législation foncière Travail sur la loi pastorale Document de vulgarisation Rencontre de Louvain sur les enjeux internationaux

Rencontre-formation sur la gestion des activités et des dossiers

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Les attentes en termes d’information apparaissent très importantes. Mais il semble à cet égard que la multiplicité et l’antagonisme des objectifs (et des décideurs) – information sur les partenariats à l’usage des groupes Afdi, information « externe » stratégique aux OP, enfin information-communication « interne » au sein des OP entre la tête et la base – aient limité l’efficacité des activités en terme de définition des stratégies à mettre en œuvre en la matière et d’estimation des coûts et moyens. La chargée de mission, écartelée entre ces diverses attentes, à dû parer au plus pressé et dans beaucoup de cas, à dû répondre à des situations contingentes. Les attendus concernaient cependant de manière plus explicite (cf. document de convention d’objectifs) la structuration de filières. De ce point de vue il semble, compte tenu de l’ampleur du processus, que les résultats peuvent être considérés à la hauteur des espérances. Axe 2 : Elaboration et mise en œuvre d’un projet professionnel

Rappel des attendus : A partir d’un travail préliminaire de clarification et de communication des objectifs de l’OP, avec parfois également la nécessité d’établir ou de revisiter les statuts et règlements intérieurs, le besoin d’accompagnement concerne :

la formation des responsables élus et administratifs à élaborer et définir un plan d’action, le financer, le mettre en œuvre, et le gérer,

la pérennisation de l’OP par la mise en place d’un système durable de financement (cotisations, taxes sur produits, contractualisation avec des financeurs extérieurs, etc…),

la maîtrise et la consolidation des budgets, la mise en place d’une équipe permanente par le recrutement d’animateurs et cadres

salariés, et des équipements minimum pour leur permettre de travailler, la capacité des responsables à préparer la relève (l’école de responsables).

Au Burkina Faso, ce travail semble avoir surtout concerné l’ANPHV, la FEPAB et dans une certaine mesure la FENOP, ces deux OP étant dans des relations partenariales avec l’Afdi dans son ensemble, à travers les cellules Burkina et Afrique de l’Ouest plutôt qu’avec une Afdi particulière. En ce qui concerne la FENOP l’accompagnement plus formel est relativement récent.

Elaboration et mise en œuvre d’un projet professionnel pour et avec l’ANPHV Cet appui s’inscrit dans la continuité des activités impulsées lors de la précédente convention d’appui aux filières haricot vers et sésame. Lors de la présente convention, l’appui s’est concentré sur l’élaboration avec l’ANPHV d’un Plan d’Actions et l’initiation d’un certain nombre d’actions pour le renforcement de la filière et la circulation de l’information (tournée de sensibilisation aux contrats écrits, préparation d’un bilan de fin de campagne, formation à la gestion de groupements, accès auccès au prix du haricot vert du Burkina à Rungis, voyage d’études des responables de l’ANPHV en France, mise en place d’animateurs régionaux). Activités menées par l’ANPHV avec l’appui d’AFDI : - tournée de sensibilisation aux contrats auprès de ses différents groupements. - appui à la négociation avec l’APEFEL-B des termes d’un contrat-type qui assure mieux les

producteurs en terme de délais de livraison des intrants et de paiement

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- appui à la négociation de contrats avec GEPREST - réflexion sur une démarche qualité de la filière - accompagnement de négociations avec les pouvoirs publics sur la question du fret - participation au rapprochement entre ANPHV et FENOP pour un meilleur accompagnement

de cette dernière - négociation de financements auprès de l’AFD - un accompagnement pour discuter et rechercher des solutions aux nombreuses insuffisances

de l’ANPHV dans le suivi de leurs périmètres et le respect des charges avec leurs partenaires Au terme de ces appuis on observe une nette amélioration des relations entre les producteurs et les exportateurs et une ouverture à d’autres partenariats.

L’appui d’une organisation comme Afdi dans l’élaboration de projets professionnels - par rapport à d’autres types de structure – apparaît surtout, potentiellement, dans sa capacité à faire des liens entre des activités concrètes, techniques et des enjeux plus stratégiques à l’échelle nationale. Cette capacité peut-être notamment appréciée à travers les activités d’accompagnement de la FENOP :

- l’accompagnement d’Afdi par rapport au programme d’actions ; - un accompagnement d’AFDI Burkina à la filière élevage de la FENOP au

sujet de l'élaboration du Code Pastoral - le financement d’une visite de responsables de la FENOP au Mali sur les

chambres d’agriculture - un récent investissement dans une mission en France auprès de la FNSEA

sur le syndicalisme - un appui en cours sous forme de formations au syndicalisme.

L’apport ici est stratégique. Il s’agit beaucoup plus d’accompagner la FENOP à trouver elle-même des solutions aux problèmes consubstantiels à son rôle : comment mobiliser une base sur des actions de défense des producteurs sachant que ces actions n’apportent pas nécessairement de solutions à court terme ? Jusqu’à quel point initier d’autres types d’actions pour mobiliser cette base et quelles sont-elles ? comment développer la capacité à répondre rapidement aux sollicitations d’information sur des enjeux stratégiques ? Comment renforcer les capacités de négociation stratégique avec les pouvoirs publics ? L’extrait du rapport de la cellule AO suite à la visite des chambres d’agriculture maliennes est illustrative des effets que peut avoir ce type d’accompagnement sur les orientations de la FENOP, les relations avec sa base et plus largement dans les rapprochements entre OP de différents pays et vis-à-vis des pouvoirs publics.

Conclusions de la FENOP suite à la visite des Chambres d’agriculture au Mali • Il est nécessaire que la FENOP s’implique dans le processus des chambres : l’AOPP a

compris que la meilleure façon de s’approprier les chambres, c’est d’être dedans. Il faut que la FENOP revoie son positionnement, pour qu’elle ne soit pas mise de côté dans le processus.

• Il y a nécessité pour la FENOP de porter l’information à la base, pour qu’une majorité d’adhérents soient conscients des enjeux que les chambres représentent, et choisissent des paysans qui puissent valablement les représenter.

• Il y a complémentarité entre les chambres et les OP. Les OP ont un grand rôle à jouer dans l’information de la base. C’est une fonction que les chambres ne peuvent pas assumer, car elles n’ont pas le dispositif nécessaire. On a vu à Niono et Ségou une bonne collaboration

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entre la chambre et les OP. On peut bien collaborer avec les chambres. La chambre est complémentaire du Syndicat. Le syndicat utilise la chambre quand cela l’arrange. De plus, les chambres ont peu de moyens, par conséquent elles sont obligées de collaborer avec les OP.

Suite à ce voyage d’étude, les bénéficiaires ont restitué leurs conclusions au bureau exécutif de la FENOP. Celle-ci avait programmé dans ses activités des ateliers de restitution dans chaque province, mais des difficultés dans leur relation avec leurs partenaires ne leur ont pas permis de les effectuer. AFDI (cellule info-com) leur a donné les moyens de faire cette restitution dans 3 provinces à titre d’opération pilote. Il semble que ces rencontres provinciales aient suscité un grand intérêt de la part des OP.

On perçoit, à travers cet exemple, les potentialités d’un appui Afdi si les marges de manœuvre n’étaient si étroites dans ce partenariat. Les conseils d’Afdi n’ont en effet pas permis de faire évoluer la situation qui a conduit la structure dans l’impasse que l’on sait. En ce qui concerne les OP partenaires d’Afdi spécifiques (FNGN, PANISE, …), l’accompagnement à la mise en œuvre d’un projet professionnel est plus diffus, intégré dans un ensemble d’activités, mais ne présente pas autant pour Afdi une finalité. L’accompagnement est réalisé sous forme d’échanges sud-nord ou sud-sud. La crise rencontrée à l’UPPM-PANISE a cependant conduit Afdi Picardie a renforcer cet appui institutionnel à travers tout d’abord le financement d’un juriste, puis un audit institutionnel qui prendra cours bientôt. Pour ce qui est de la FNGN, Afdi Pays de la Loire participe comme les autres partenaires de cette OP au Plan quadriennal mais n’est pas moteur dans l’identification de ce programme ni dans l’accompagnement des responsables de la structure, celle-ci étant surtout appuyée financièrement par la coopération suisse. Au Sénégal, le partenariat Afdi avec le réseau DIRFEL (Directoire des femmes pour l'Elevage) relève bien de l'appui à la construction d'un projet professionnel. Le processus n'en est qu'à ses débuts et a été amorcé par l'élaboration d'un projet en collaboration avec d'autres institutions, notamment VSF, et les MDE (Maisons Départementales de l'Elevage) de Haute Casamance. Malgré l'échec de la requête de financement à l'Union Européenne, la dynamique d'échange et de collaboration qui s'est créée subsiste (dans le cadre d'un comité de pilotage). Grâce à un appui d'AGRICORD, un programme pilote de renforcement des DIRFEL va pouvoir démarrer en Haute Casamance. Il s'agit de "renforcer les capacités des organisations professionnelles d'éleveurs de Haute Casamance en matière de connaissance de la filière, de gestion de projets de commercialisation, de services rendus à leurs membres et de leur implication dans les politiques et les programmes nationaux". Pour ce faire, il s'agit à la fois d'apporter des réponses concrètes aux problèmes des éleveurs dans les domaines zootechniques et économiques (transformation, commercialisation) grâce à des dispositifs d'appui efficaces (capacité des OPE à

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rendre des services à leurs membres) et d'apparaître comme un interlocuteur crédible des pouvoirs publics en matière de politiques de développement du secteur. Au Bénin également, le partenariat AFDI / PPAB avec des organisations paysannes telles que l'ANEP (Eleveurs du Borgou) relève sans conteste de l'appui à la construction d'un projet professionnel. Axe 3 : Participation active à la définition et l’élaboration des politiques de développement et des politiques agricoles nationales

Rappel des attendus : Comme pour les axes précédents, il s’agit bien de partir de l’analyse des pratiques des paysans, de leur initiatives et des problèmes qu’ils rencontrent afin de faire le lien avec les politiques agricoles qui les concernent. L’implication des OP à la définition, l’élaboration de ces politiques passe par :

le traitement de l’information sur les politiques agricoles et de développement afin de les rendre accessibles (foncier, crédit, vulgarisation, etc ;..),

l’identification des axes prioritaires de défense des intérêts des paysans, les négociations avec les interlocuteurs institutionnels pour modifier ou améliorer les

politiques, l’utilisation ou la création et l’appropriation de leviers juridiques afin de pouvoir intervenir

(cadres de concertation, de cogestion). Différents chantiers ont été suivis au Burkina Faso durant cette convention en vue de peser directement ou indirectement sur la définition et l’élaboration de politiques de développement et de politiques nationales :

- l’installation de jeunes agriculteurs - les chambres d’agriculture - la loi 14 - le code pastoral - la sécurisation foncière

En ce qui concerne l’installation de jeunes agriculteurs, des visites conjointes avec des membres du ministère, des représentants d’OP et d’Afdi ont été organisées au Burkina Faso et en France en vue de proposer de nouvelles orientations au ministère de l’Agriculture. Le travail réalisé avec Etienne Kaboré de la SP/AJPA n’a pas eu de suites en raison de la disparition de la structure dans l’organigramme du ministère. En revanche M. Kabore étant devenu Directeur à la Direction de l’Organisation des Producteurs et de l’Appui des Institutions Rurales (DOPAIR), des liens importants ont pu être poursuivis avec le Ministère et renforcent la position des Afdi en général. Des investissements ont également été réalisés pour mieux faire comprendre aux OP les enjeux des chambres d’agriculture ; ces travaux ont été marqué par deux moments forts :

- la visite de la FENOP aux chambres d’agriculture malienne et à l’AOPP (dont il est question plus haut)

- la mission récente de professionnels français du réseau Afdi (avril 2004)

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La mission des professionnels français a permis de capitaliser sur les enjeux de l’accompagnement à la création des Chambres. Trois types d’action ont été identifiés pour les Afdi :

- une contribution à la clarification des missions respectives des chambres d’agriculture, des OP et à l’appui à leur fonctionnement efficace

- une contribution à la clarification des projets de territoire et des OP avec la perspective d’un projet de formation

- un appui au montage de dossiers Au Sénégal, l'Afdi a opéré un rapprochement important avec le CNCR en apportant son soutien à ses initiatives publiques, en partageant ses réflexions sur les politiques agricoles (préparation en cours d'une loi d'orientation), en facilitant les contacts et les échanges avec les principaux responsables des OPA françaises. Ces échanges sont riches et multiples, même s'il faut bien être conscient que le partenariat Afdi prend place dans un vaste réseau d'alliances que le CNCR a su constituer depuis une dizaine d'années. Le rôle très spécifique que l'Afdi a pu jouer de mise en contact du CNCR avec les OPA du Nord est appelé à s'estomper (avec le développement des relations directes entre responsables d'organisations paysannes) et donc le défi est bien pour l'Afdi de contribuer à apporter des références au CNCR (dans le secteur de l'élevage par exemple) pour l'aider dans ses négociations avec les pouvoirs publics. C'est à cette condition que l'Afdi contribuera activement à l'avenir à la définition des politiques publiques de développement rural. Axe 4 : Accès à l’information sur les enjeux internationaux et implication dans les débats

Il s’agissait, à partir d’analyses précises sur l’impact du marché international sur le développement des filières de production et l’impact des politiques de coopération internationale sur le développement rural, de (convention d’objectifs) :

développer un système d’information et de formation permanent des responsables et cadres des OP sur les enjeux internationaux, mettre en place un système d’échanges permanents entre OP (appui aux dynamiques de réseaux d’OP sous-régionaux), mettre en place un système d’échanges d’information permanents entre OP des PED et les OPA européennes, organiser le plus possible des séminaires en commun réunissant les deux publics, favoriser les participations croisées des responsables du Nord et du Sud à des congrès professionnels.

En ce qui concerne la mise en place de dispositifs, deux postes ont été ouverts, l’un à Afdi Pays de la Loire et l’autre à Afdi nationale pour constituer un système d’information-formation sur les enjeux internationaux. Pour le reste, si des liens ont été établis entre OP on ne peut pas encore parler de dispositifs mis en place en terme de :

- système d’échanges permanents entre OP

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- système entre OP des PED et OPA européennes L’émergence du ROPPA sur la scène sous-régionale a changé la donne et Afdi semble vouloir réorienter son action vers un appui au ROPPA (qui doit encore se préciser). Il s’agit en effet surtout d’étudier la façon de renforcer le ROPPA sur ces problématiques dans une logique d'aider à faire plutôt que de faire soi-même. La mise en place de réseaux permanents d’échanges entre organisations paysannes (sur divers thèmes) est typiquement du ressort du ROPPA à l’échelle de l’Afrique de l’Ouest. C’est surtout sur les liens entre ce type de réseau et les réseaux européens que l’appui d’Afdi se révélerait important, compte tenu de son insertion dans Agricord notamment. Les activités menées dans ce cadre ont également été :

- L’élaboration d’une base de données sur les OP d’Afrique de l’Ouest (en cours)

- Les visites Nord-Sud de professionnels au Sénégal, au Bénin, à Madagascar, au Burkina Faso ;

- Les visites Sud-Nord.

Résultat attendu n°3 : Les agriculteurs français et les OPA ont consolidé et mis en cohérence un système de coopération efficace et ont établi des liens avec les autres coopérations européennes de même type (Agriterra, IVA).

Ce résultat fait l'objet d’un traitement spécifique dans la troisième partir du rapport, relative à la synthèse.

Constats généraux : L’efficacité est particulièrement difficile à renseigner de manière synthétique en raison de la multiplicité des objectifs. Si des avancées sensibles sont notées en terme de maîtrise technique (formations, recherches-action,…), si l’on trouve également une prise en compte plus importante de l’appui à des faîtières et à la consolidation de projets d’OP, en revanche chacun des objectifs semble avoir été défini pour des partenariats différents, voire parfois des pays différents. Les synergies que l’on s’attendait à trouver entre un appui technique, un appui institutionnel, et des préoccupations plus politiques à l’échelle nationale voire régionale ne sont pas inexistantes, mais bien moins importantes que ce que suggère le document de convention d’objectifs. Ces résultats ne sont toutefois pas étonnants. Ils résultent de la façon dont la convention a été conçue. Etant donné la structuration d’Afdi et son histoire, la convention a plus été le moyen de poursuivre - tout en renforçant au plan des outils et des méthodes, les différents partenariats locaux - pourvus chacun de leurs objectifs spécifiques, que de construire de nouvelles façons d’intervenir auprès des partenaires articulant mieux les différents objectifs annoncés en un ou plusieurs « programmes ».

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II.5. Impact

II.5.1. Impact au niveau local

L'appréhension diffère sensiblement selon les partenariats et l'importance des autres acteurs dans la région. Certains partenaires existent depuis bien avant l'appui des Afdi et la part des actions sur la zone est difficile à établir. Dans d'autres cas le partenariat est récent et l'impact n'est pas encore mesurable. Dans un troisième type de cas enfin, la présence d'autres programmes ou projets importants dans la zone limite la possibilité d'apprécier les actions Afdi. Impact économique à partir du conseil de gestion. Si un certain nombre d’effets semblent diffuser (prise de conscience de l’importance de calculer, meilleure capacité de négociation des producteurs lors de la définition des prix avec les acheteurs, …), effets qui pourraient avoir une certaine importance sur l’économie locale, on ne peut parler encore d’impact notamment parce que les choses ne sont pas encore suffisamment institutionnalisées dans les organisations paysannes. La remarque du consultant à propos de la FNGN prend ici tout son sens : comment un leader paysan peut-il promouvoir un modèle de fonctionnement pour ses adhérents sans incarner lui-même ce type de modèle ? Dans la mesure où de nombreux responsables d’unions qui abritent les expériences de la CAE n’adhèrent pas eux-mêmes au conseil, les effets resteront toujours limités à quelques personnes et leur entourage immédiat. De ce point de vue là les effets sur l’économie du budget familial sont certainement appréciables (nombreux sont les exemples de personne ayant abandonnés certaine dépenses – cigarettes, alcool) mais l’on ne peut encore parler d’impact. D’une manière générale, les témoignages vont plutôt dans le sens de dire que les Afdi – parce qu’ils ne veulent pas être bailleurs et donc limitent leur financement – ont plutôt un rôle dans l’éducation à d’autres comportements mais que cela ne se traduit pas assez matériellement. De ce point de vue il y a un enjeu important à ce qu’Afdi raisonne un peu plus sur leur impact réel au-delà des quelques résultats que les actions locales obtiennent. Impact social Les voyages ainsi que les activités concrètes telles que le conseil de gestion participent à modifier les rapports sociaux au sein des familles élargies et des familles nucléaires. Il s’agit cependant plus d’effets à ce stade et il serait important d’en faire une analyse spécifique car certains peuvent se révéler « pervers » ou à tout le moins « contre-intuitif ». La nécessité de mieux estimer les ressources du ménage dans les comptes d’exploitation peut créer des tensions entre hommes et femmes, anciens et jeunes... Ces aspects sont très peu analysés et si l’on ne peut dire qu’il n’y a aucun impact social, rien ne permet de dire non plus qu’il soit globalement positif.

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Impact culturel C’est sans doute à ce niveau que les impacts sont les plus significatifs, mais à l’instar du social, également les plus difficiles à apprécier. L’impact des interventions dans le domaine de l’élevage par exemple, sur une prise de conscience de l’importance de passer d’une logique de cueillette à une logique plus intensive (du statut de berger à celui d’agro-éleveur, cf. rapport Burkina Faso sur l'Union Dawla) est sensible. Elle va bien largement, potentiellement en tout cas, au-delà des effets du projet. Mais il manque un accompagnement et il semble trop souvent dans les esprits, que la réussite des opérations techniques suffise, pour « percoler » dans les consciences et au niveau des valeurs. Si le temps y fait beaucoup, il semble aussi qu’un accompagnement à la réflexion soit nécessaire.

II.5.2. Impact au niveau national

Les conditions apparaissent plus réunies à cette échelle pour que se dessine progressivement un impact sur la structuration de nouvelles filières au Burkina Faso. Le travail au niveau de l’ANPHV, par exemple, est en cours mais a déjà permis d’obtenir des effets sensibles sur les relations entre producteurs et exportateurs à travers les informations sur les prix et les formations à la contractualisation. L’amorce sur les chambres d’agriculture pourrait également conduire à des impacts significatifs sur les relations entre OP et pouvoirs publics. De manière générale le fait de vouloir travailler avec toutes les faîtières ne peut que renforcer le mouvement paysan dans son ensemble. L’impact sur la structuration d’un tel mouvement, dans le contexte fort chargé en interventions extérieures du Burkina Faso, n’est cependant pas à attendre seulement des Afdi. Au Sénégal, la convergence des différentes actions en termes de thématiques autant que d’appui à des faîtières, en l’occurrence ici le CNCR, augure également du meilleur. Mais il n’est pas possible de parler déjà d’impact sauf à parler des conditions générées en termes de relations entre les groupes locaux et les faîtières entre Afdi et le CNCR. Ce sont là des effets importants. Au Bénin, il est manifeste que le dynamisme de l'organisation des éleveurs du Borgou est en train de révolutionner le secteur de l'élevage dans la zone (dans les relations avec les acteurs de ces filières et avec les organisations paysannes) et que cette expérience commence à faire référence au niveau national, pour les pouvoirs publics. Ce qui est surtout à retenir ici c’est que les impacts potentiels les plus significatifs apparaissent assez logiquement surtout à l’échelle nationale et peu encore au niveau local ni au niveau régional.

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II.5.3. Impact au niveau régional

L’impact au niveau régional prendra plus de temps. L’arrivée du ROPPA crée de nouvelles opportunités mais qui actuellement n’ont pas encore été bien exploitées. L’enjeu des Afdi sera de démontrer qu’il peut être un partenaire important du ROPPA là où aujourd’hui il est en partie vu comme un concurrent potentiel. Les conditions sont toutefois loin d’être réunies pour générer un impact significatif au niveau régional. Les échanges sud-sud entre OP non seulement n’y suffisent pas mais sont aussi le fait d’autres acteurs en appui aux OP.

II.6. Viabilité Les différents terrains montrent que la viabilité est très variable selon les pays, les institutions concernées, les activités. Au plan économique, la tendance est plutôt à limiter les financements au minimum (par principe autant que par contrainte) ce qui n’est pas toujours gage de viabilité, ni pour les activités, ni pour les organisations partenaires, ni pour les dispositifs mis en place par le réseau qui ont peine à dégager du temps et des moyens pour rechercher des financements pour leur propre survie. A l’opposé on trouve dans certains cas (ex UGAN, Sénégal) une tendance à accorder des subventions excessives à certains producteurs pour mener des activités génératrices de revenus. Cette situation porte préjudice à la capacité de mobilisation des ressources locales. Le conseil de gestion (dans les cas étudiés) est subventionné à des niveaux tels que sa viabilité financière à moyen et long terme est totalement irréaliste, si on s'en tient aux seuls bénéficiaires directs. Tout ceci laisse à penser qu’il manque encore des principes clairs sur les façons d’accompagner techniquement, financièrement et « socialement » les partenaires afin d’assurer la viabilité de leurs activités. Une capitalisation sur ce sujet permettrait de sortir des simplifications notamment par rapport à l’important enjeu des cotisations des organisations paysannes. Au plan institutionnel, plusieurs organisations paysannes partenaires connaissent (au Burkina Faso notamment) une crise institutionnelle grave. Si la responsabilité de l'Afdi est généralement faible, la question mérite cependant d'être posée en général pour certains partenariats trop exclusivement "techniques" dans la mesure où les Afdi participent très peu à la vie associative de leurs partenaires. Ainsi le transfert à l'UGAN (au Sénégal) de la gestion de l'appui aux apiculteurs constitue un progrès mais ne résout pas les contradictions (voire les accroîts) entre cette organisation et la section des apiculteurs (autour du partage des bénéfices de l'activité).

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De même, la mise en œuvre du projet d'appui au Dirfel (Sénégal) suscite des tensions entre le niveau national et régional de l'organisation, autour du partage des ressources. De façon générale, la viabilité institutionnelle des actions entreprises par l'Afdi dans le cadre de ses partenariats dépend de deux facteurs :

la reconnaissance par l'organisation partenaire du caractère prioritaire de l'activité, l'acquisition par l'organisation paysanne d'une véritable capacité de maîtrise d’ouvrage lui permettant d'assurer la pérennisation de ses activités prioritaires par une excellente capacité de négociation avec les partenaires.

Les inquiétudes que l'on peut avoir sur la pérennité des actions entreprises dans le cadre de certains partenariats renvoient aux conditions qui ont présidé au choix de l'activité et au renforcement institutionnel du partenaire.

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II.7. Perception des Afdi par les divers acteurs et partenaires Dans cette partie les principaux commentaires des personnes interviewés sont suivis d’une petite analyse. Cependant l’essentiel est surtout pour nous de renvoyer en miroir l’image que certains ont de l’Afdi, quel que soit leur véracité. Il n’apparaît pas toujours facile de percevoir cette image quand on est du réseau.

II.7.1. Les OP

La FENOP La FENOP défend une agriculture familiale. Elle souhaite surtout être au service des OP et en appui sur des questions économiques – épargne-crédit, banques de céréales, CUMA, structures de commercialisation,…- autant que politiques. Notre rôle, nous le concevons surtout dans l’accompagnement des OP et la médiation vis-à-vis des pouvoirs publics. C’est la DDC qui nous a conduit à opposer les deux : « ce n’est pas à vous de faire de l’économique ». Leur consultant n’a jamais été capable de nous dire comment articuler les deux. Le résultat c’est que certains partenaires ont peur aujourd’hui de la FENOP. Le positionnement de la FENOP par rapport à la loi 14 est probablement la chose qui a été la plus mal acceptée. On nous a en partie poussés dans cette position, mais elle n’est pas le reflet des premières études que nous avions menées par un cabinet juridique ni de l’opinion de notre base. L’audit qui vient d’être effectué relève ces ambiguïtés, mais certains partenaires ont du mal à l’accepter parce que leur propre responsabilité est aussi mise en cause.

- Au début nous n’avions pas la même perception entre Afdi et nous. On pensait qu’Afdi allait apporter des ressources mais Afdi disait : « on n’est pas des bailleurs de fonds ». Pourtant on savait qu’ils finançaient des projets à la FNGN et à l’UPPM notamment. C’est petit à petit, quand on s’est mieux connu, qu’on a commencé à proposer de pouvoir participer à des échanges Sud-Nord

- Dès le début de la FENOP, Afdi a beaucoup contribué à la réflexion. Par la suite ils ont financé des échanges. Ensuite un appui de la coopération française grâce aux Afdi pour un volet communication (réalisation d’un film notamment). Les Afdi ont également financé le Plan d’Actions de l’ANPHV

- Par rapport à la crise de la FENOP, on reconnaît le rôle salutaire des Afdi. Parmi les partenaires c’est une des organisations qui nous soutient en disant : « prenez vos décisions en toute souveraineté, ne soyez pas influencés par vos partenaires ». Et Afdi a financé le processus de diagnostic pendant la crise alors que la DDC refusait. Aujourd’hui Afdi Picardie appuie FENOP dans le cadre de cette crise.

- Le conseil de gestion est une activité qui nous intéresse beaucoup. Cela permet aux producteurs de mieux savoir ce qu’il gagne et ce qui coûte trop par rapport aux résultats.

- Éléments forts : une coopération entre agriculteurs !

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Cherchent à faire des activités concrètes Leur appui est aussi stratégique

- Éléments faibles : contradiction avec le discours « pas bailleur de fonds » ! Certains ont des visions et des constats trop rapides (OPF sans base ; pas légitimes ; voitures climatisées,…)

- Nos attentes vis-à-vis de Afdi : que Afdi aide à mobiliser des financements vis-à-vis d’autres

acteurs qu’elle nous aide à trouver des ressources humaines et

financières qu’elle ait un rôle de conseil politique notamment pour nous

informer de ce que les partenaires pensent de la FENOP et que l’on formalise cela en créant des espaces et des mécanismes de communication

qu’elle nous aide sur les enjeux politiques (enjeux internationaux, relations entre Unions et faîtière,..) autant qu’économiques par des initiatives concrètes (approvisionnement en intrants des OP, par exemple)

- Il nous faudrait une charte pour préciser nos visions et nos attentes en termes de partenariats.

Analyse : L’entretien est dominé par la crise qui secoue la FENOP. Les attentes autant que les positions présentées sont à analyser dans ce contexte. La FENOP semble encore avoir du mal à faire son auto-critique et rejette un peu trop les responsabilités sur son principal financeur.

Le ROPPA

Le réseau des Organisations Paysannes et de Producteurs de l’Afrique de l’Ouest

- Il y a eu beaucoup d’incompréhensions, même s’il y a eu tentatives de part et d’autres pour améliorer les relations. Cette incompréhension est née surtout d’une déclaration écrite des Afdi reprochant au ROPPA de ne pas avoir bien préparé Cancun et de ne pas s’intéresser aux enjeux du coton. Cela a beaucoup choqué. Or, c’est le ROPPA qui est à l’origine de toute la sensibilisation vis-à-vis des ministres du commerce français, belge, etc…et avec Afdi on a fait un communiqué de presse. Depuis bien avant Cancun, le ROPPA souhaitait organiser une rencontre sur le coton. Le ROPPA avait soumis une requête à la coopération française pour organiser une réunion là-dessus et même si on n’a pas pu mobiliser des ressources, on a pu faire quelque chose. Au même moment Afdi organisait une rencontre sur le coton au Bénin pour relancer l’observatoire coton. On a refusé en disant que ce n’est pas à l’Afdi de le faire. On ne comprend pas les motivations réelles et c’est pris comme une tentative de récupération de l’observatoire. En ce qui nous concerne ce n’est pas tant l’observatoire coton qu’une

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réflexion plus générale : on a été sollicités pour faire ce type d‘observatoire, mais de manière plus organisée et pas sur une seule filière. Le ROPPA est intéressé à l’agriculture familiale dans sa globalité.

- Il faut savoir qu’un certain nombre de leaders d’organisation paysanne sont parfois inquiets de l’action des Afdi à l’échelle nationale ou régionale. Certains disent que Afdi peut freiner la construction du mouvement. C’est une réalité à laquelle il nous faut composer.

- En théorie Afdi est plus à même d’être un de nos partenaires attitrés. Les organisations de producteurs et les professionnels agricoles d’Europe devraient être nos premiers partenaires. Mais il y a beaucoup de travail à faire pour nous mettre d’accord sur une politique commune et cela de part et d’autre ! Il y a des convergences sur l’importance d’avoir des prix rémunérateurs, sur l’importance de mécanismes de régulation, sur certaines protections douanières, mais pas sur les subventions : la PAC ne nous satisfait pas et là on voit vite les limites de ces partenaires comparées aux ONG européennes qui sont plus neutres

- Sur ces questions nos relations sont surtout avec les politiques. Nous n’avons pas besoin de collaborations techniques : nous sommes autonomes dans nos décisions. Les bulletins d’information sur les enjeux internationaux que nous envoie Afdi sont intéressants, simplement ce serait à nous de produire ces analyses sur l’Afrique de l’Ouest.

- Les attentes du ROPPA sont avant tout une indépendance d’afdi vis-à-vis de la politique de la FNSEA, des relations plus franches et ouvertes, pas de substitution : Afdi ne peut se positionner pour le ROPPA et l’on refuse ces formes de paternalismes dans les appuis. Les leaders d’OP sont très attentifs là-dessus.

Analyse L’appréciation du ROPPA - même si elle est partielle, et en partie erronée du point de vue d’Afdi sur ses « intentions » - révèle la difficulté et l’ambiguïté de tout le positionnement d’un réseau comme Afdi. Malgré la recherche d’une proximité avec les OP basée sur une identité commune, malgré une volonté de construire des partenariats qui dépassent l’approche projet, dès qu’il s’agit des questions de politiques les intérêts entre agriculteurs du Nord et du Sud en viennent à être concurrentiels et la référence à la politique de la FNSEA domine les perceptions. Cette appréciation, révèle surtout la difficulté d’être « dedans » (la FNSEA) tout en voulant faire évoluer les positions, ceci dans la mesure où ce ne sont pas nécessairement les mêmes personnes du réseau qui oeuvrent concrètement au Sud et qui vont débattre des enjeux internationaux. Le ROPPA met aussi le doigt sur un aspect important qui est le risque, quand on pense défendre une identité commune, de parler « au nom » de son partenaire du Sud. Ce risque de confiscation est récurrent dans les propos relevés lors des divers entretiens avec des responsables du ROPPA. Il faut remarquer, il est vrai, la rigueur avec laquelle ces responsables du ROPPA s’efforcent de parler au nom des organisations qu’ils représentent et font la différence avec leur point de vue personnel.

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II.7.2. La coopération française

SCAC

La perception des Afdi par les SCAC semble avoir sensiblement évolué en positif dans les différents pays. Les Afdi sont mieux connus, et globalement mieux appréciés semble t-il bien que certains nouveaux fonctionnaires soient encore en phase de découverte comme le montre ce témoignage au Burkina Faso.

- Le nouveau conseiller en développement rural a pris fonction récemment.

Il était au Comité qui a fait passer la convention d’objectifs des Afdi mais n’a pas de connaissance précise et locale des actions-partenaires.

- Globalement sa perception des Afdi est qu’elles sont bien impliquées sur le local : « savent le faire et le font bien », mais sur les enjeux internationaux sont moins présents : « ne sont pas sur le coton » ; la spécificité d’Afdi étant avant tout de développer une coopération de professionnels à professionnels.

- Le constat depuis son arrivée en fonction est que l’on ne se rend pas compte, quand on est dans les bureaux à Paris, que l’on va de plus en plus vers de l’institutionnel : l’harmonisation de l’aide va dans le sens de plus de conceptuel et de stratégique sous forme d’appui à des ministères. La tendance lourde est celle-là. On s’éloigne de plus en plus du terrain et des actions locales. Avec comme conséquence plus de difficultés pour les ONG et les OP d’émarger directement à l’aide.

- Reste des perspectives à la Banque mondiale notamment, sachant que des personnes du MAE y sont actuellement et tentent de plaider pour l’appui aux OP

II.7.4. Analyse générale (de l’image et de la stratégie de communication).

L’image d’Afdi apparaît fort variable selon les partenaires mais il ressort certaines tendances :

- l’identité « professionnelle », est bien évidemment mise en avant, généralement comme une opportunité mais parfois aussi comme une menace aux OP du Sud (notamment lorsque les intérêts des producteurs français sont en cause). A cette image est très fréquemment associée celle de la FNSEA dans les témoignages de beaucoup d’acteurs, avec cependant deux sentiments :

o Afdi comme bras armé de la FNSEA o Afdi comme force de contestation de la politique de la

FNSEA Cette image apparaît bien illustrer à la fois l’ambiguïté et la complexité d’un réseau constitué de différents types d’acteurs : agriculteurs retraités ou non, salariés, responsables d’organisations professionnelles.

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- l’identité « technique » apparaît généralement bien reconnue mais n’est pas fort explicitée quand on creuse. Il semble plus qu’elle soit une espèce d’évidence, sans que l’on cherche à savoir réellement ce qu’il en est. Les analyses de partenariat montrent à cet égard que si le savoir technique est évident dans le réseau Afdi – et certainement plus qu’ailleurs, on est bien convaincu qu’il s’agit là d’une force – ce n’est pas pour autant qu’il est :

o automatiquement adapté aux réalités locales o partagé par l’ensemble du réseau (certaines démarches

conseil de gestion ont été critiquées par d’autres compétences au sein du même réseau)

o facilement traduisible et explicable (il s’est avéré difficile pour certains professionnels de reconstituer la genèse de leur filière et d’analyser les facteurs qui étaient responsables de son succès)

o automatiquement facteur de renforcement global des OP (certaines activités (miel au Sénégal), (conseil de gestion au Burkina) sont restées pendant longtemps isolées du cadre global des enjeux de l’OP « hôte »

En conséquence la valorisation de ces savoirs incombe beaucoup aux « interfaces » c'est-à-dire aux permanents qui peuvent capitaliser et sont chargés de remettre en contexte les interventions avec l’environnement local, national et international et aux plans économiques, culturels, politiques. Or ces rouages importants sont peu valorisés dans l’imaginaire extérieur de l’Afdi autant qu’en interne, alors qu’il font partie intégrante et participent pour beaucoup à forger l’efficience des activités et à créer les conditions d’un impact plus global7. Les témoignages font aussi ressortir un certain nombre de clichés sur Afdi, par rapport à son rôle politique, par rapport à l’efficacité des échanges. A divers moments il est apparu qu’un certain nombre de témoignages restaient figés sur une situation qui a sensiblement évolué, notamment depuis les conventions d’objectifs. Si ces critiques ne ressortent que rarement dans les productions d’Afdi, il faut reconnaître aussi qu’un certain nombre d’entre elles relèvent aujourd’hui du cliché : les échanges paysans, par exemple, fort critiqués (en aparté !) il y a quelques années par les OP ont évolués de manière positive. Recommandation : L’image d’Afdi gagnerait à une « mise au point » en partant des critiques les plus fréquentes de ces partenaires pour faire la part des choses entre les clichés et la réalité de ce qu’est Afdi aujourd’hui. Ces critiques ne semblent

7 Commentaires Afdi : Les JAC et chargés de missions ont un rôle précis, reconnu et apprécié dans l’opérationnel et la compréhension du contexte. Afdi leur demande d’être « courroie de transmission » sur les choix stratégiques liés au partenariat, et de permettre, sur ce sujet, un dialogue entre paysans du Nord et du Sud.

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généralement pas exprimées directement et il faut donc des personnes extérieures pour les recueillir. Mais ce travail serait important à faire pour prendre la bonne mesure de ce que ses partenaires pensent d’Afdi.

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II.8. Synthèse générale Afrique de l'Ouest En dépit de la forte différence des interventions Afdi selon les pays au moins deux points communs transparaissent de manière évidente dans les rapports pays :

- la nécessité d’une cellule permanente dans les pays, qu’elle relève de l’Afdi ou pas, capable de cadrer les interventions des groupes Afdi avant (stade de l’identification des projets), pendant (pour le suivi permanent du terrain) et après une étape (capitalisation, évaluation) pour tirer les leçons de l’expérience et se repositionner pour la suite

- les échanges paysans sont généralement considérés comme marginaux dans les quatre études pays par rapport à ce qu’ils apportent concrètement à l’amélioration des conditions de vie des paysans (c'est-à-dire en termes d’impact réel au niveau local).

En d’autres termes, ce que ces études semblent montrer c’est que les deux supports des interventions Afdi – le professionnalisme paysan et les échanges – ne peuvent à eux seuls permettre un développement. L’encadrement de professionnels du développement leur donne en revanche leur force. La pertinence des Afdi en développement repose donc sur une dualité forte dont il faut pouvoir tirer parti. A cet égard les différents rapports montrent à quel point la convention d’objectif à été d’un apport important pour montrer comment gérer cette dualité à travers des dispositifs (cellules, groupes pays, réseaux thématiques) à travers des outils et des méthodes. Mais si l’efficience des actions a augmenté (on intervient mieux) ce n’est pas pour autant que l’efficacité a suivi (les résultats obtenus ne sont encore que rarement à la hauteur des attentes). Au-delà, les questions d’impact et de viabilité apparaissent encore très faibles et très peu analysées dans le réseau. Sans doute faut-il resituer tout ceci par rapport à un contexte général – celui de l’appui aux agricultures paysannes particulièrement difficile. Peu d’intervenants peuvent se targuer d’avoir réellement obtenu un impact sensible au niveau local ou national. Ce constat devrait inciter à la modestie : le développement des agricultures n’est pas chose aisée. Il devrait inciter aussi à des recherches de nouvelles alliances : c’est dans l’articulation avec différents types de savoirs (paysans, académiques, des organismes de développement) que l’on peut espérer obtenir un jour, un certain impact. Les meilleurs résultats en Afrique de l’Ouest ont été obtenu dans le cadre d’une participation à des programmes de professionnalisation, ou la démarche « projet » encore fort prégnante dans la présente convention, était dépassée pour des visions et des stratégies plus construites.

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III - Synthèse Madagascar

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III. Synthèse Madagascar Pour récapituler l'ensemble des observations et commentaires du rapport pays (voir tome 3) nous reprendrons la grille d'évaluation.

III.1. Pertinence

III.1.1. Pertinence du positionnement de l'Afdi vis-à-vis des OP Madagascar présente cette particularité, par rapport aux autres pays visités lors de l'évaluation, d'être un pays où le mouvement paysan ne préexistait pas avant la mise en œuvre d'une politique d'appui aux OP. Le pays était vaste et les moyens modestes, chaque intervenant a pu, dans les zones où il est intervenu, façonner des organisations paysannes à son image. C'est ainsi par exemple que l'Afdi joue le rôle de chef de file d'un courant particulier animé de principes et de valeurs qui le distingueraient des autres courants professionnels. Il est vrai que les modes d'appui sont différents, l'Afdi misant plus sur les hommes (conscientisation et formation générale) et Fert par exemple misant plus sur la structure (forts appuis extérieurs et formation fonctionnelle des responsables), mais ces différences d'approches entre intervenants freinent les rapprochements entre organisations paysannes, les amènent à se concentrer sur les différences plutôt que de considérer ensemble l'avenir de l'agriculture.

III.1.2. Pertinence des niveaux d'intervention

Les partenariats locaux La précédente évaluation avait conclu que le projet d'organisation syndicale nationale (CAM) était condamné et qu'il importait de se réinvestir à la base. Cette réorientation a été largement opérée durant la 2e convention d'objectifs et on peut dire que l'on dispose dans les partenariats visités de résultats significatifs (même si ce ne sont pas toujours des réussites) sur le plan technique et organisationnel.

Les interventions au niveau national Sans revenir sur la question syndicale ou sur l'attitude "neutre" de l'Afdi face à l'initiative Chambre, il nous semble que le réseau Afdi ne développe pas une capacité d’analyse politique suffisante pour interpréter l'évolution de la position des

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acteurs et des rapports de force, et identifier les alliés, les partenaires et les adversaires. A des degrés divers, le groupe pays, l’Afdi nationale, la cellule pays participent à des prises de position mais qui peuvent ne pas coïncider exactement entre elles (attitudes par rapport aux chambres, au réseau Soa, à Fert, requêtes de financement à l'UE…). De façon générale, après bientôt deux décennies d'ajustement structurel et d'affaiblissement de l'Etat, on assiste à une restauration de son autorité et à l'affirmation de la nécessité d'une politique agricole. Désormais, l'aide budgétaire prend le pas sur l'aide projet, et l'appui institutionnel aux organisations paysannes entre pleinement dans le champ des politiques publiques. Le temps où les ONG pouvaient sans contrôle intervenir auprès des organisations paysannes est révolu. Ces actions ne peuvent bénéficier d'aides publiques que si elles concourent à mettre en œuvre la politique définie. A l'inverse, les organisations paysannes peuvent, en s'inscrivant dans ce cadre, influer sur les politiques publiques en défendant des projets conformes à leurs convictions.

Donc, soit les organisations paysannes et leurs partenaires restent en dehors du débat public (ou tout au moins y participent pour la forme tout en continuant à faire ce qu'ils veulent sur le terrain sans en rendre compte) et il ne faut pas s'étonner que la politique agricole soit défavorable à leurs intérêts et à l'agriculture qu'ils défendent, soit les organisations paysannes s'inscrivent dans le débat public et s'efforcent de prouver à travers les programmes et projets qu'ils mettent en œuvre, que l'agriculture paysanne est une voie d'avenir pour le développement du pays.

III.1.3. Pertinence des échanges La dimension personnelle, affective, est à la base de l'engagement militant et c'est une dimension qui ne peut pas être remise en question dans le cas de l'Afdi puisqu'elle est constitutive du mouvement. Ceci place les groupes Afdi en position d'alliés plus que de partenaires8. C'est une position délicate. Pour éviter les dérives, il faut d'une part s'assurer qu'on est bien sur la même ligne politique (quelle évolution de l’agriculture défend-on ?), et d'autre part développer une capacité d'échanges critiques ; mais on tombe alors dans un autre risque qui est de se mettre trop à la place du partenaire et d'être accusé (par lui) à la limite d'ingérence. Le risque ne s’est pas présenté jusque là puisqu’on est plutôt sur une posture de respect absolu du libre choix du partenaire, ce qui peut induire parfois un manque d'esprit critique.

8 Ces positions sont compatibles, être allié marquant un degré supérieur d’engagement, mais peuvent induire parfois un manque d’esprit critique.

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III.2. Efficience

III.2.1. Efficience du dispositif A l'évidence, à la faveur de la 2e convention d'objectifs, on assiste à une plus grande socialisation des réflexions entre JAC, entre animateurs, entre organisations paysannes partenaires au sein du groupe pays et entre ces divers acteurs. Au centre du dispositif, la cellule Afdi joue un rôle essentiel dans l'animation du Réseau. Elle a su également désamorcer les tensions avec divers acteurs et diversifier les partenariats Afdi. Globalement, on observe une excellente articulation entre les partenariats locaux (JAC) et le niveau national (cellule pays). La cellule pays n’entreprend rien qui ne soit étroitement lié avec une démarche ou une dynamique de la base. L’ensemble du personnel constitue une équipe particulièrement soudée.

Toutefois, le rôle des volontaires (JAC) est quelque peu minimisé par les Afdi. Ils sont souvent définis comme « courroie de transmission » des décisions des paysans, et ils ont eux-mêmes intériorisé cette idée qui est le discours admis dans les OPA françaises. On ne peut pas raisonnablement piloter un programme à partir de la France. S’il est normal qu’ils se concertent avec l’Afdi, ils ont de fait, ou ils devraient avoir, une responsabilité majeure dans le déroulement des opérations courantes, ce qui amènerait les groupes Afdi à s’intéresser plutôt aux questions stratégiques.

III.2.2. Efficience des modes d'intervention Avec l'émergence d'organisations paysannes dans tous les terrains, l'identification des activités peut se faire de façon concertée. Ces activités se concentrent sur la mise au point et la maîtrise par les paysans d'innovations techniques et la consolidation d'organisations paysannes locales. En choisissant ce positionnement, c’est-à-dire la promotion de "groupes de développement" (de type GVA ou CETA en France), l'Afdi joue un rôle particulièrement utile, mais il existe d'autres domaines (la commercialisation, le financement, la formation…) où il n'est pas forcément opportun de s'investir seul si d’autres opérateurs ont des références confirmées.

III.2.3. Efficience de la programmation et du suivi L'Afdi dispose d'un outil de programmation dérivé du cadre logique. Il est mis en œuvre avec application dans tous les partenariats et permet de rendre compte des objectifs poursuivis, des actions à mettre en œuvre et des moyens humains et financiers à engager. A l'heure du bilan, on peut mesurer les écarts entre ce qui était

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prévu et ce qui a été réalisé. Ceci oblige tous les partenariats à expliciter leurs programmes en référence aux objectifs généraux de la convention d'objectifs. Ceci donne une facilité de lecture et d'appréhension de l'ensemble des actions engagées et permet de suivre leur déroulement. Ceci étant, cet outil de programmation n'est pas adapté pour rendre compte de l'impact. Vulgairement parlant, "on voit que la machine tourne mais on ne sait pas ce qui en sort".

III.2.4. La gestion de la capitalisation La capitalisation devrait permettre d'analyser les résultats et de réorienter les programmes à venir, manifestement cette capitalisation est insuffisante et/ou insuffisamment mise en valeur.

Par exemple à Morondava, rien ne laisse supposer que l'Afdi a été un temps partie prenante de la gestion globale du périmètre de Dabara. Il apparaît que l'Afdi accompagne un nombre restreint d'AUE et fait comme si elle ignorait que les difficultés rencontrées au niveau des AUE de base sont largement déterminées par les dysfonctionnements de la gestion d'ensemble. Il serait intéressant d'analyser les raisons pour lesquelles on a échoué dans la moralisation de la gestion globale du périmètre, et comment le travail entrepris au niveau de quelques AUE n'est qu'un repli tactique pour mieux relever le défi. Dans une zone à haut potentiel comme celle-ci, on peut voir comment se forment les clivages sociaux et quelles positions prennent les leaders des organisations paysannes partenaires.

Une telle capitalisation serait extrêmement instructive. Celle-ci devrait être réalisée par les membres des Afdi responsables du suivi, appuyés par la cellule pays qui doit accumuler des références sur les dynamiques qui sont à l'œuvre sur le terrain pour alimenter la réflexion des organisations paysannes au niveau national.

III.2.5. Bilan : pouvait-on faire mieux à moindre coût ? Plus encore qu'en Afrique, la question serait plutôt de se demander comment faire mieux avec un peu plus de moyens ? En effet, la jeunesse des organisations paysannes oblige à un effort particulier en matière d'appui institutionnel. Si on peut se dire que l'essentiel des projets productifs des organisations paysannes sont éligibles à des programmes de financement de type PSDR (moyennant le développement de capacités au sein des organisations paysannes pour la formulation de projets qui soient conformes aux normes des financeurs), les moyens de l'Afdi doivent se concentrer sur l'appui institutionnel (ce qui est déjà le cas) mais à des niveaux d'engagement sensiblement plus élevés. En effet, on est dans des "partenariats de très basse intensité" et les ressources financières sont gérées, par nécessité mais aussi par choix, avec une extrême parcimonie, en faisant appel à

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l'engagement personnel des militants (au risque de mettre en péril leur exploitation et leur ménage) et en insistant sur la nécessaire prise en charge de l'organisation par ses membres (développement d'activités économiques). La référence forte au militantisme paysan des années 50/60 en France est sans doute erronée. Il faudrait se référer plutôt aux premières organisations paysannes initiées fin XIXe et début XXe siècle par des notables, les curés, des instituteurs qui avaient des garanties de revenus par ailleurs. Croit-on que des organisations comme le CNCR et le ROPPA qui interviennent valablement sur la scène nationale et internationale se sont fondées sur les ressources propres des militants ? Il faut admettre raisonnablement que la construction de l'acteur paysan exige des subventions importantes, non sans conditions, mais sans espoir de retour, jusqu'à ce qu'il soit reconnu comme partenaire institutionnel et bénéficie de systèmes de financement durables.

III.3. Efficacité Objectif 1 : l'Afdi a-t-elle facilité l'acquisition et la maîtrise d'innovations techniques et la consolidation d'organisations professionnelles locales ?

Axe 1 : maîtrise et diffusion de nouvelles techniques Il s'agit d'un axe essentiel et commun à tous les partenariats Afdi qui nous amène à qualifier les organisations paysannes partenaires de groupes de développement agricole.

Les innovations portent sur l'intensification des systèmes rizicoles, sur la diversification des activités (maraîchage, petits élevages). Ces nouvelles techniques qui permettent d'obtenir des résultats convaincants au niveau des parcelles, des ateliers et de certaines exploitations, n'atteignent pas un niveau de production et de surplus tel que la question de la commercialisation groupée des produits soit à l'ordre du jour. Les freins à la diffusion des innovations peuvent s'expliquer à deux types de phénomènes : soit la demande ne peut s'exprimer en raison de contraintes psychologiques, sociales, financières, etc., soit l'offre est brimée parce que les groupes de paysans novateurs ne veulent pas s'ouvrir aux autres (pour des raisons d'intérêt personnel ou pour des contraintes organisationnelles).

Axe 2 : création et développement d'outils de gestion Une sensibilisation à la gestion a été entreprise et a suscité un certain intérêt chez certaines organisations paysannes, mais le processus n'a pas été plus loin. Pratiquement, aucune exploitation n'est suivie en gestion dans les partenariats visités. Cela traduit une indécision au niveau des équipes quant aux objectifs poursuivis et aux résultats attendus. Les animateurs en particulier ne voient pas le lien entre les actions techniques qu'ils mènent et les approches de gestion qu'on leur propose.

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Le processus de modernisation d'une exploitation agricole est une suite continue d'améliorations partielles du système de production et des itinéraires techniques. Il n'y a de notre point de vue, aucune difficulté pour un paysan à comprendre l'intérêt de mesurer l'effet économique d'une innovation partielle, par exemple le résultat économique de l'introduction d'une légumineuse dans la rotation avec le riz. Par contre, il est beaucoup plus difficile d'engager le paysan une approche globale de gestion avec définition d'une stratégie, prévision d'activités, enregistrement de toutes les données comptables… dans un environnement climatique et économique aussi aléatoire.

Axe 3 : consolidation des organisations paysannes nécessaires au développement On observe à la faveur de la deuxième convention d'objectifs une très nette évolution dans ce domaine. Partout, les OP existent et ont acquis une certaine autonomie en matière de programmation. Elle se sont structurées à la fois horizontalement en groupements villageois et de plus en groupes spécialisés par "filière". Ces deux types de structures demandent des méthodes d'animation spécifiques. Les groupements villageois s'accrochent à une problématique de terrain (aménagement d'un espace agricole) et de voisinage (entraide, matériel en commun), faute d'approche bien définie en la matière, ils risquent de péricliter au profit d'organisations spécialisées par filière. Celles-ci font appel à des services plus "classiques" : vulgarisation – conseil, approvisionnements en commun, crédit, stockage, commercialisation, transport. Hormis la "vulgarisation", peu de ces services sont véritablement opérationnels. Une autre question qui se posera à l'avenir est de savoir à quel niveau est-il plus efficient de localiser tel ou tel service et s'il est bien nécessaire que l'organisation paysanne mette en place tous les services dont elle a besoin plutôt que de contracter avec des prestataires. Pour résumer, le cadre institutionnel existe, mais les structures et les compétences sont à créer ou à renforcer.

Axe 4 : développement local Seul le partenariat de Tsiramandidy a opté pour une telle approche. Celle-ci peut être plus fructueuse, mais est plus difficile à conduire qu'un programme d'appui à une organisation professionnelle. Diverses faiblesses méthodologiques compromettent de notre point de vue la viabilité de cette expérience. Il faut avoir en tête que la décentralisation ne s'identifie pas spontanément au développement local. Qui plus est, on peut se demander si le développement local est bien d'actualité à Madagascar. Ce n'est que deux siècles après la mise en place des communes en France que les démarches de développement local ont eu droit de cité et on peut observer que les dynamiques de développement local ne caractérisent aujourd'hui encore qu'une infime minorité de territoires.

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Objectif 2 : l'Afdi a-t-elle contribué au renforcement des capacités institutionnelles, techniques et financières des Fédérations paysannes et a-t-elle appuyé la mise en réseau de ces OP ?

Effectivement, le dispositif Afdi a contribué de façon décisive, par des appuis méthodologiques et techniques, à l'émergence du Réseau SOA au niveau national. Nous ne reviendrons pas sur les réserves que nous avons émises sur l'institutionnalisation d'un tel réseau.

Axe 1 : renforcement des services offerts aux organisations paysannes membres Le réseau SOA est trop jeune pour avoir mis en place de tels services. La cellule Afdi a initié de nombreuses actions telles que les ateliers sur les questions de commercialisation ou les travaux sur la filière apicole qui améliorent la maîtrise de ces problématiques par les responsables. A l'avenir, l'animateur recruté par le réseau SOA pourra préparer les dossiers qui faciliteront la réflexion des groupes de travail. La cellule Afdi devrait renforcer les capacités de cet embryon de cellule technique. Pour renforcer la cohésion de mouvement par exemple, il conviendrait de constituer une équipe d'intervention composée du Président, de l'animateur et d'un membre de la cellule Afdi qui effectuerait des missions d'appui dans chaque organisation paysanne membre et prodiguerait des conseils stratégiques ; par exemple, comment le CRAM de Manakara peut-il à la fois renforcer ses membres et devenir quelque peu chef de file des organisations paysannes de la Région Sud-Est ?

Axe 2 : élaboration d'un projet professionnel On ne peut bien évidemment pas parler de projet professionnel du Réseau SOA, mais la cellule Afdi a apporté au Réseau un appui efficace pour définir la structure et le programme d'action.

Axe 3 : participation active à la définition et à l'élaboration des politiques de développement

Le réseau Afdi comme on l'a vu s'est mobilisé pour sensibiliser, informer et animer une réflexion sur les Chambres d'agriculture au sein des organisations paysannes. On a noté que cet engagement était relativement neutre, c’est-à-dire déconnecté d'une vision politique (les Chambres d'agriculture se créent, à quels objectifs répondent-elles pour ceux qui les initient, pourquoi est-il important pour les organisations paysannes d'en être et pour y faire quoi ?).

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Axe 4 : accès à l'information sur les enjeux internationaux Peu d'actions ont porté sur cette dimension relativement peu présente à Madagascar. Divers facteurs l'expliquent : l'insularité, l'éloignement des grands centres où se concentre la réflexion (Amérique Latine, Afrique de l'Ouest, Union Européenne), l'importance de la production non marchande, la multiplicité de petites filières agro exportatrices confrontées pourtant à des difficultés croissantes (vanille, litchee, épices). Il existe pourtant une filière majeure menacée par la concurrence internationale, il s'agit de la filière riz sur laquelle devrait se concentrer les investigations de tous les acteurs, pour tendre vers la définition d'une politique nationale dans ce secteur stratégique.

III.4. Impact L'impact des actions de l'Afdi est encore difficilement mesurable en raison de la taille des actions, au regard de l'immensité du monde rural. Seule la Maison des Paysans de Tuléar est une expérience significative à l'échelle nationale, mais cette expérience n'a pas été capitalisée et suffisamment valorisée, y compris lors de la réflexion sur les Chambres d'agriculture. Ceci s'explique du côté de l'Afdi par le fait que cette action est tout à fait atypique et suscite bien des réserves, y compris dans ses rangs. Par ailleurs, l'organisation paysanne partenaire semble vouloir sauvegarder avant tout son autonomie et ne veut surtout pas être sous les feux des projecteurs. La reconnaissance politique des organisations paysannes progresse tant au niveau local que national grâce au soutien de la coopération française, de la coopération suisse, de l'Union Européenne, etc. Elles sont appelées à siéger dans les comités de pilotage de nombreux programmes, elles sont parfois choisies comme partenaires stratégiques pour l'affectation des aides au milieu rural (dans le cadre du PSDR ou de Saha notamment). L'Afdi, par ses actions directes sur le terrain et les relations publiques qu'elle développe en direction des pouvoirs publics malgaches (rencontre avec les Ministres de hauts responsables professionnels français, Luc Guyau, Dominique Chardon, etc.) contribue à crédibiliser les organisations paysannes comme partenaire de l'Etat.

III.5. Viabilité Les dispositifs mis en place à la faveur de la convention d'objectifs sont-ils viables ? A l'évidence non, mais ce n'est pas à proprement parler la question. Les organisations paysannes ont une mission d'intérêt général, celle de plaider la cause d'une paysannerie particulièrement pauvre et marginalisée. Les dispositifs d'appui qui les aident à jouer ce rôle n'ont pas vocation à être viables. Ils doivent être supportés en partie du moins par des subventions publiques. La fin de la convention d'objectifs peut mettre à mal les structures et obliger à des recompositions, mais la fonction devra continuer à être assumée.

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Les acquis permis par ces dispositifs sont-ils durables ? Au fil du partenariat, les responsables paysans acquièrent une maîtrise de leur environnement économique, politique et institutionnel de plus en plus forte. L’investissement dans la formation des hommes n’est pas jamais vain et ces personnes continueront à être actives dans l’organisation des paysans même si les appuis venaient à disparaître.

III.6. Perception des Afdi par les divers acteurs Du côté des acteurs institutionnels, Ministère de l'Agriculture (MAEP), Coopération Française, Chambre d'agriculture malgache les attentes envers l'Afdi sont réaffirmées, mais il subsiste toujours un certain agacement envers le mode d'intervention de l'Afdi qui ne contribue pas clairement à la volonté politique affichée de coordination des appuis au monde rural. Il est reproché également à l'Afdi de continuer à faire cavalier seul, c’est-à-dire de ne pas développer suffisamment de synergies avec les autres intervenants et de se complaire dans des microprojets dont la visibilité est faible ("on ne voit pas ce qu'ils font exactement"). Du côté des partenaires éventuels, la plupart des organismes rencontrés (Agricoop, Fert, PSDR…) sont convaincus que des convergences de vue existent bel et bien et souhaitent que les partenariats soient intensifiés.

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III.7. Madagascar conclusions et recommandations

III.7.1. Bilan Madagascar La présente évaluation préconisait un engagement plus déterminé dans le développement rural et local. En effet, l'accompagnement non directif des partenaires à base d'échanges était peu productif. Il y avait urgence disait-on à être efficace et visible pour crédibiliser les organisations paysannes comme acteur incontournable du développement. Au terme de la présente évaluation, il apparaît que les résultats sont positifs en termes d'organisation des producteurs mais ne sont pas à la hauteur des enjeux. Les OP sont émergentes et de taille encore modeste, à l'exception de la MdP qui compte plusieurs milliers d'adhérents. On observe des actions prometteuses dans le domaine productif (améliorations des systèmes techniques de production dans de nombreux cas) mais qui ne peuvent afficher des résultats économiques durables qui permettraient d'affirmer la viabilité de certaines filières. Les nouvelles approches méthodologiques sont encore à un stade expérimental. La réflexion sur la gestion de l'exploitation familiale a fait l'objet de nouvelles recherches mais on ne peut pas dire que l'on dispose aujourd'hui d'une démarche qui soit fiable. L'approche développement local à Tsiromandidy combinant à la fois un appui aux organisations paysannes et un appui aux communes a été amplifiée avec l'entrée en lice de collectivités locales françaises. Cependant, on n'observe pas de synergies entre ces deux approches qui fassent ressortir une vision commune du développement local entre les acteurs. La modestie des résultats s'explique sans doute par le fait que les opérateurs sur le terrain (volontaires), accusent des faiblesses méthodologiques dont on ne peut leur tenir rigueur, mais plus fondamentalement par le fait que pour les groupes Afdi, le compagnonnage avec des militants paysans du Sud prime sur l'efficacité de l’entreprise. De même, la taille limitée des actions ne s'explique pas seulement par la modestie des moyens disponibles mais aussi par une préférence pour des partenariats à taille humaine qui n'obligent pas à une confrontation et à des compromis avec les autres acteurs.

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Le peu d'enthousiasme d'une majorité des membres de l'Afdi à l'égard de la MdP est à cet égard significatif. Pendant ce temps, le contexte ne cesse d'évoluer, le débat sur la politique agricole s'intensifie et l'Etat attend les contributions de la société civile, mais l'Afdi et ses partenaires ne peuvent avoir une parole forte quels que soient les efforts déployés par la cellule Afdi, parce que leur base de références est trop modeste. Ceci est préjudiciable non seulement aux intérêts de l'Afdi, mais aussi à ceux du mouvement paysan malgache. On ne peut donc se contenter d'améliorer l'existant, il faut radicalement changer de perspective et de mode d'intervention.

III.7.2. Recommandations Madagascar

Nécessité de rechercher des alliances avec les acteurs qui interviennent dans le champ de l'appui aux organisations paysannes Même si les choses ne sont pas dites de façon abrupte, il apparaît que les organisations paysannes ne sont pas considérées par le gouvernement comme un interlocuteur très crédible. Cela tient à la fois à son option libérale en matière de développement, mais aussi au constat que les organisations paysannes sont faibles et peu représentatives. C'est pourquoi la promotion des Chambres d'agriculture lui semble un meilleur choix. Il revient donc au mouvement paysan de redevenir crédible en montrant qu'il est en mesure dans certains sites d'être l'artisan d'un véritable processus de développement qui contribue à relever les défis auxquels le pays est confronté. C'est pourquoi, il convient pour l'Afdi de mieux capitaliser et valoriser ses succès, mais aussi de changer d'échelle pour que ses actions soient plus significatives. Ce changement d'échelle, elle ne peut l'envisager seule – les moyens ne le permettent pas – mais grâce à des alliances avec d'autres organismes qui sont engagés dans l'appui aux organisations paysannes. Si on fait un état des lieux, on constate une assez grande dispersion des efforts. L'Afdi, Fert, Intercoop – Saha, Banque Mondiale – PSDR contribuent tous à leur façon à susciter des organisations paysannes. Afdi et Fert, de par leur culture, raisonnent en termes de professionnalisation et poursuivent, par des voies différentes, un même objectif : un mouvement professionnel structuré de la base au sommet capable par le biais du syndicalisme de dialoguer avec l'Etat ; Saha et PSDR raisonnent en termes de lutte contre la pauvreté et de renforcement du pouvoir des catégories les plus modestes grâce notamment au financement direct de leurs projets productifs. Ce mode d'intervention qui contribue à faire naître de nombreux groupements opportunistes, contribue à sa façon à affaiblir le processus d'organisation professionnelle (à commencer par les systèmes d'épargne et de crédits mutuels). Néanmoins, des complémentarités existent et des synergies peuvent se construire.

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Cette dispersion des appuis est aggravée par des rivalités entre Fert et Afdi qui empêchent tout partenariat stratégique. Les leaders paysans partenaires épousent en partie ces querelles, soit par conviction (le réseau SOA se réclame de valeurs différentes), soit par opportunisme (avantage d’un partenariat exclusif), et sont plus soucieux d'autonomie que d'unité d'action. En ces temps difficiles pour les organisations paysannes, ces comportements relèvent nous semble-t-il de l'inconscience. Mais, si des rapprochements doivent être envisagés, ils doivent s'opérer moins "par le haut", que sur le terrain, autour de problématiques concrètes.

Construction d'alliances autour de stratégies régionales de développement La région est appelée à jouer un rôle essentiel dans la politique de développement rural décentralisé. Les régions sont d'ailleurs souvent des espaces cohérents au plan écologique, économique et humain. La plupart des partenariats Afdi n'ont pas la masse critique suffisante pour peser sur les orientations du développement régional. Seule la Maison des Paysans de Tuléar, par son poids (4 500 membres), est un acteur incontournable dans sa région. Des alliances sont donc nécessaires et doivent se construire autour de problématiques concrètes. Les organisations paysannes d'une même région devraient entreprendre une

réflexion collective pour définir une stratégie de développement rural autour de quelques grands thèmes :

sur la base de quelles productions peut se faire le développement agricole de la région (compte tenu des potentialités, du territoire et des besoins alimentaires des populations ?)

quels sont les circuits et les opérateurs économiques majeurs dans le secteur agricole. Faut-il avoir plutôt une politique de négociation / contractualisation avec eux ou faut-il chercher à les contourner et à les écarter du secteur ?

quelles sont les institutions (de concertation, de planification, de gestion…) où les paysans peuvent faire entendre leurs voix, et comment les organisations paysannes peuvent-elles les investir pour y défendre leur vision du développement ?

Là on est au cœur de la réflexion syndicale qui ne s’identifie pas en effet aux actions menées par telle ou telle organisation paysanne dans les domaines techniques, économiques ou financiers. C’est dans la capacité à identifier et à affronter les enjeux ensemble, pour la défense de l’agriculture paysanne, que se forge une culture syndicale.

Ces objectifs étant clarifiés, on en vient aux priorités d'actions. Le principe est de raisonner le développement de telle ou telle activité (intensification riz, maraîchage…) Quelles sont les fonctions nécessaires au développement de l'activité ? En quels termes se posent concrètement les questions relatives à ces diverses fonctions ?

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Quelles sont les références disponibles ? Quelles seraient en conséquence les priorités d'actions et qui peut les assumer ? C'est là qu'on en arrive à considérer les organisations paysannes et leurs domaines de compétences, en raisonnant à partir des besoins en appuis de l'exploitation agricole :

Innovation technique

Approvisionnements Equipements Exploitation

agricole Commercialisation

Disponibilité sécurité foncière

Financement Financement

Le partage des rôles entre organisations paysannes

Les organisations partenaires de l'Afdi sont positionnées sur l'animation (de groupes constitués sur une base villageoise, sur l'expérimentation et la vulgarisation d'innovations techniques. Les organisations partenaires de Fert sont spécialisées dans les domaines économique (commercialisation, stockage, approvisionnement) et financier (épargne et crédit). Les autres organisations paysannes sont des groupements de producteurs qui ont peu de choses en commun et qui n'ont pas l'ambition de créer des systèmes durables de services aux producteurs. Chaque mouvance (Afdi ou Fert) va-t-elle créer toutes les structures qui lui sont nécessaires pour le développement de ses activités : ses propres dispositifs d'information, de formation, de recherche, de vulgarisation, ses coopératives, ses caisses d'épargne et de crédit, ses systèmes d'assurance, etc. ou bien s'appuyer sur les structures spécialisées qui préexistent ? Par exemple, si les groupements maraîchers de Fitame ont besoin de créer une coopérative, ils pourraient le faire avec l'appui de l'Union régionale des Coopératives. Les producteurs seraient toujours membres de Fitame pour les services que leur rend la fédération, mais leur coopérative sera affiliée à l'union régionale des coopératives. Ainsi, chaque paysan pourrait, sans que cela lui pose de problème existentiel, être adhérent de plusieurs organisations paysannes spécialisées. C'est le tournant qui s'est opéré en France au sortir de la 2ème guerre mondiale après un demi-siècle de lutte et de concurrences entre la droite et la gauche dans

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les campagnes qui avaient constitué leurs organisations paysannes concurrentes dans tous les domaines, et personne ne conteste que ce fut un grand pas en avant.

Le montage des programmes d'activités des organisations paysannes Chaque organisation paysanne en fonction des besoins exprimés dans son domaine de compétences définit son programme d'actions. Ces programmes seront conduits de façon parfaitement indépendante mais ils sont aussi articulés entre eux en raison de la stratégie générale et des priorités d'actions définies en commun. Cette stratégie d'ensemble et la cohérence des programmes d'actions portés par les diverses organisations paysannes d'une même région peuvent être explicités et valorisés (à des degrés divers) auprès des partenaires financiers. Le programme Saha ou le FSP Développement rural en particulier peuvent être intéressés à soutenir de tels programmes portés par des acteurs locaux qui manifestent une ambition régionale.

Une instance de concertation entre organisations paysannes Pour concevoir et mettre en œuvre une telle stratégie, les organisations paysannes ont besoin de disposer d'une instance de concertation qui assure les fonctions d'orientation et de suivi. Il existe dans bon nombre de régions des plates-formes d'organisations paysannes (Fitama à Fianarantsoa, Voumbo à Tsiromandidy, VFTM à Morondava ; elle n'existe pas à Manakara et le besoin s'en fait sentir) suscitées par d'autres intervenants que l'Afdi. Le réflexe des organisations paysannes partenaires de l'Afdi est de rester en dehors, ce qui est tout à fait significatif. Dans le scénario que nous proposons, c'est l'inverse qu'il faudrait faire. La grande intelligence des leaders paysans sénégalais a été de créer le CNCR (Conseil National de "Concertation" des Ruraux) qui a fait la force des organisations paysannes de ce pays. Est-il besoin de dire que l’adhésion à une telle coordination ne signifie pas pour autant la disparition de l’organisation.

L'apprentissage d'un travail en commun entre les organisations paysannes au niveau des régions ouvrirait la voie à la constitution d'une plate-forme nationale des organisations paysannes. Il ne s'agit pas d'un syndicat au sens classique du terme, mais elle en jouerait le rôle. Il faut noter que la place du syndicalisme agricole en France est là encore très spécifique, c'est son dynamisme même et le contexte favorable à la syndicalisation dans l'immédiate après-guerre qui lui ont permis d'assurer le leadership de l'organisation professionnelle en France, et il y a peu de chances pour que cela se reproduise ailleurs. Le réseau SOA lui-même, qui affiche un caractère syndical, est une association d'organisations paysannes de base qui n'ont rien de syndical. On ne voit pas comment leur rassemblement au niveau national leur permettrait d’opérer cette mutation alors qu’elles ne posent pas les problèmes en termes syndicaux au niveau local où elles opèrent. Un des moyens les plus appropriés pour dépasser les préjugés partisans est la formation des dirigeants, l'Université paysanne a le mérite d'exister, il serait souhaitable que SOA et l'Afdi s'y impliquent plus formellement et plus fermement.

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Il ne s’agit pas, répétons-le, de se faire le chantre de l’unité d’action pour le plaisir, il s’agit de renforcer la place des organisations paysannes dans le débat actuel avec l’Etat et les bailleurs de fonds sur les politiques agricoles, en se basant sur des réalisations concrètes et significatives au niveau régional et local.

Incidences de ces orientations sur le dispositif Afdi L’Afdi n’est pas seule responsable de la dispersion des forces. Cela met en cause plus globalement la politique de la coopération française (en particulier) en matière d’appui aux organisations paysannes. Ceci étant, le réseau Afdi à Madagascar doit en premier lieu capitaliser les acquis de ses partenariats de façon à apporter quelque chose dans le panier commun du mouvement paysan.

Le réseau Afdi, s'il fait siennes les recommandations ci-dessus, doit débattre avec ses partenaires de ses hypothèses stratégiques et les encourager ensuite (si ces hypothèses sont validées) à une politique d'ouverture en direction des autres organisations paysannes de leur région. Il n’y a pas plus de « manipulation » à les encourager dans ce sens qu’il n’y en a à les conforter dans une voie de développement séparé.

C'est là que le Réseau SOA et la cellule Afdi doivent apporter aux organisations paysannes membres un conseil stratégique pour savoir comment opérer concrètement cette ouverture dans chaque région. Ce changement fondamental d'approche doit être compris, accepté et porté par les organisations paysannes partenaires. Il faut donc renforcer considérablement les capacités des organisations à faire des choix stratégiques et tactiques judicieux, tout en renforçant leur expertise et leur capacité d'action dans leurs domaines de compétence reconnus. C'est pour cette raison, entre autres, qu'il convient d'envisager le bascul plus ou moins important du dispositif technique (animateurs nationaux à court terme, expatriés à l’avenir) au sein des organisations paysannes partenaires. Ces ressources humaines seraient au service des organisations paysannes au niveau régional et national et travailleraient principalement sur des programmes qui seraient ceux de l'organisation. Le dispositif observé dans le partenariat à Manakara nous semble à cet égard particulièrement satisfaisant à court terme. A l’avenir, la question du maintien des volontaires français dans les partenariats locaux devra être réexaminée. Même si on connaît la portée éducative de l’expérience pour le volontaire, on peut accorder la priorité au renforcement interne de l’OP partenaire. C'est pourquoi l'effort devrait être porté sur la sélection et la formation des animateurs nationaux dans cette phase de transition (peut-être, concevoir un cycle spécifique de l’université paysanne). Par contre, il semble probable qu’il faudra renforcer les capacités et ouvrir l'éventail des compétences de la cellule pays en fonction de l’évolution des besoins des organisations paysannes et sur des thématiques communes (conseil de gestion, approche régionale, montage de dossiers projets par ex.).

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Dans le cadre de l'appui institutionnel aux organisations paysannes malgaches, l'Afdi financerait (à la mesure des moyens qu'elle saura mobiliser) les équipes techniques des organisations paysannes partenaires, mais elle n'en aurait plus la responsabilité directe (ce qui n'exclut évidemment pas des appuis en formation méthodologique et technique).

Cette plus grande autonomie des organisations paysannes partenaires les pousserait logiquement à plus d’ouverture et plus d’initiative. Les groupes Afdi en France n'auraient plus la responsabilité de gérer le quotidien des projets, mais auraient davantage un rôle d’accompagnement des partenaires en tant que conseiller et témoin : suivi des réalisations concrètes de ces organisations paysannes pour conserver la dimension humaine du partenariat et débat avec les responsables à la faveur de voyages et d’échanges, de leurs choix stratégiques et tactiques en lien avec le but poursuivi, un développement rural fondé sur la promotion de l'agriculture paysanne. L'Afdi conserverait enfin sa capacité de mobiliser des personnes ressources dans son réseau de partenaires à travers le monde et dans le milieu agricole français pour apporter les appuis dont les partenaires auraient besoin.

Mobilisation des organisations paysannes autour d'enjeux nationaux

Développer un dialogue et envisager des rapprochements entre organisations paysannes au niveau régional et national demandera des efforts de la part de tous. Pour donner un sens à ces efforts qui soit mobilisateur pour les organisations paysannes et leurs partenaires et obtenir la reconnaissance des partenaires institutionnels (Etat et bailleurs de fonds), le mouvement paysan se doit probablement d'avoir une grande ambition qui pourrait être d'assurer l'autosuffisance alimentaire du pays. Ce qui signifie, dans le cas de Madagascar, la participation des organisations paysannes à la conception et la mise en œuvre d'une politique rizicole nationale. Rappelons que :

- l'autosuffisance alimentaire fait sens pour les paysans, l'Etat, les consommateurs ;

- le riz est cultivé par la quasi-totalité des exploitations paysannes des pays et peut donc être un puissant levier de modernisation ;

- on dispose justement de références techniques testées en vrai grandeur par les organisations paysannes qui ont fait leurs preuves (SRI) et donc on connaît également les contraintes (en partie du moins) ;

Une telle politique aurait un caractère fédérateur, car

la structuration de la filière riz implique des choix, des programmes, des dispositifs organisationnels à tous les niveaux (local, régional et national) et dans tous les domaines (technique, économique et financier). Les organisations paysannes peuvent y faire reconnaître leurs expériences et leurs savoir-faire ;

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cette construction d'une filière riz devrait se faire à partir de la base, mais revêt des dimensions qui vont du local au mondial. Elle devrait coordonner les actions d'un grand nombre d'acteurs, et mobiliser les appuis des partenaires techniques et financiers.

La fin du système convention d'objectifs doit être mise à profit pour engager de réformes profondes même s'il faut ménager des transitions. A l'horizon de trois ans, les organisations paysannes partenaires devraient être autonomes et avoir opéré des rapprochements significatifs avec les autres organisations paysannes du pays, permettant au mouvement professionnel d'être reconnu comme interlocuteur valable pour les pouvoirs publics. A cette condition, l'Afdi aura fait œuvre utile et aura des chances de développer ses engagements dans le pays.

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IV - Evaluation du système de coopération Afdi

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IV. Synthèse générale : Évaluation du système de coopération Afdi

IV.0. Rappels Le réseau Afdi est devenu progressivement un acteur majeur de l'appui aux organisations paysannes dans les pays du Sud (en Afrique francophone principalement). Au départ, l'Afdi était constituée de groupes départementaux relativement autonomes, qui tenaient à manifester leur solidarité avec leurs homologues du Sud, en apportant un appui à de petits projets. Le tournant est intervenu en 1992, lorsque la coopération française a lancé les programmes d'appui à la professionnalisation agricole et a choisi logiquement le réseau Afdi comme partenaire privilégié. L'Afdi a participé à leur conception, elle a été responsable de leur mise en œuvre au Mali et a siégé dans les CPC (Comité Paritaire de Concertation) où elle représentait la profession agricole française. Les partenariats locaux et les programmes professionnalisation se sont mutuellement confortés, notamment au Mali, à Madagascar et au Bénin. A partir de là, les Afdi locales ont commencé à être orientées dans leurs partenariats, en fonction d'une stratégie plus vaste, à l'échelle des pays. Les programmes professionnalisation et la convention d’objectifs Afdi devraient s’épauler mutuellement. Dans la pratique, les programmes de professionnalisation ont connu des trajectoires diverses qui les ont amené à prendre plus ou moins de distance vis-à-vis des interventions Afdi. Qui qu’il en soit, les conventions d'objectifs ont permis au réseau Afdi de continuer à se développer et même de regagner en autonomie. La convention d'objectifs permet de renforcer à la fois la structure et donc le côté "professionnel" de l'Afdi et aussi les partenariats locaux (qui disposent de plus de moyens financiers et techniques). En contrepartie, les bénéficiaires de la convention d'objectifs s'engagent à contribuer à l'atteinte des objectifs communs, ce qui exige plus de rigueur (dans la programmation et le suivi des actions) et plus de temps passé dans les échanges et la coordination avec les autres Afdi et la cellule nationale. Un certain nombre d'Afdi, que rebute ce cadre contraignant, préfèrent rester en dehors de la convention. D'autres, bénéficiant de la convention acceptent mal les critiques de leurs pairs. Grâce à la convention d'objectifs, l'Afdi a pu à la fois renforcer les partenariats locaux et développer une stratégie en direction des organisations paysannes faîtières.

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Cette réflexion stratégique associe les groupes pays et la Direction de l'Afdi. Mais là encore, certaines Afdi peuvent être plus ou moins en désaccord avec l'orientation majoritaire imputée à "l'Afdi nationale". Enfin, grâce à sa proximité avec les grandes OPA françaises d'une part, avec les organisations paysannes faîtières d'Afrique de l'autre, l'Afdi est amenée à jouer un rôle de médiateur, en organisant le dialogue entre leaders paysans et en essayant de favoriser des convergences sur les enjeux internationaux. Ce rappel de l'évolution historique permet de situer les principaux axes du Plan d'action (2001-2004) de l'Afdi dont la CdO est l'outil principal :

- une finalité clairement affichée : un développement rural fondé sur l'agriculture paysanne multifonctionnelle et durable ;

- la condition pour que cette agriculture s'épanouisse est : la régulation des échanges dans le cadre d'espaces économiques protégés ;

- ce qui conduit l'Afdi à intervenir dans trois champs d'action : l'appui à la modernisation des exploitations agricoles et la participation des paysans au développement local, l'accompagnement des organisations fédératives et le renforcement de leurs capacités institutionnelles au niveau régional, national et international, un travail au sein des OPA françaises pour qu'elles intègrent, dans leurs stratégies, les intérêts des paysanneries du Sud.

Les résultats de l'évaluation dans les pays du Sud et les entretiens menés en France avec les responsables nationaux, dans les Afdi régionales et avec les partenaires institutionnels (OPA, Ministères) nous permettent d'appliquer la grille d'analyse au Réseau Afdi lui-même.

IV.1. Pertinence Quel est le bien-fondé du partenariat de l'Afdi avec les organisations paysannes du Sud et aux divers niveaux que nous avons rappelés ? On peut voir l'Afdi dans plusieurs rôles complémentaires.

IV.1.1. Un rôle d'accompagnement

Le partenariat local se définit par un projet ou un programme qui sert de support à des relations directes entre agriculteurs du Nord et du Sud. Le champ d'action dans lequel on se situe principalement est celui de la modernisation des exploitations agricoles.

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Nul ne contestera le bien-fondé de la présence des agriculteurs français dans ce rôle. L'agriculteur a mieux que tout autre la capacité de recueillir les observations pertinentes et de faire un diagnostic rapide sur les systèmes techniques de production (conduite des cultures, conduite d'un élevage). Il a également des atouts pour comprendre la situation globale de l'exploitation familiale car, en dépit d'écarts économiques et sociaux considérables, il a instinctivement cette vision systémique qui lui permet de se mettre à la "place de l'autre". Ceci constitue une base de dialogue avec le partenaire.

Il est important que l'Afdi demeure ancrée dans la problématique de la modernisation de l'exploitation agricole, car ce terrain a été largement abandonné par les autres intervenants en raison du désengagement de l'Etat (et de la faillite des systèmes de vulgarisation), de la polarisation des développeurs sur les aspects économiques des filières. Les rares intervenants (ONG…) qui demeurent dans le champ du technique sont bien souvent les promoteurs d'une technique particulière : plante miracle, culture associée, semis directs, lutte anti-érosive, petits barrages, etc. Les organisations paysannes elles-mêmes sont plus portées à des actions de lobbying que sur le changement des pratiques paysannes pour lesquelles elles ont moins de compétences ; tout ce qui peut contribuer à ancrer les partenaires dans les réalités est donc une bonne chose.

Ceci étant, la bonne appréhension par les militants Afdi des questions agronomiques et techniques ne suffit pas pour faire du développement. Le réseau des contraintes (économiques, sociales, politiques, culturelles, etc.) dans lequel se débat l'agriculteur est largement méconnu (non identifié ou non apprécié à sa juste valeur). Au-delà des contraintes "objectives", il existe aussi des différences de logiques et de normes qui se révèlent avec le temps et qui sont souvent dures à admettre.

Devant les difficultés "à faire avancer les choses", les agriculteurs français en coopération hésitent entre deux attitudes, soit prendre du recul ("on n'est pas là pour imposer quoi que ce soit, on essaye de comprendre et d'être utile si on nous demande quelque chose…"), soit prendre en main la direction des opérations et piloter à distance le déroulement du projet (attitude paternaliste du donneur d'ordre). Entre ces deux extrêmes, il existe de plus en plus de cas où l’Afdi développe un dialogue avec le partenaire pour maîtriser les dysfonctionnements et clarifier les responsabilités.

Pour pallier cette faiblesse structurelle, deux voies sont possibles :

- soit renforcer les structures techniques d'interface (chargés de mission Afdi) qui, par leur formation et leur présence permanente sur le terrain, sont en mesure de préparer et mettre en valeur les interventions des agriculteurs,

- soit renforcer les collaborations avec des personnes ou des organismes dont c'est le métier et qui ont une expertise reconnue (ex. le partenariat qui se renforce avec VSF en Casamance au Sénégal ; les apports de consultants dans ce pays mais également au Burkina Faso).

C’est la 1ère voie qui a été privilégiée si bien que la reconnaissance de l’Afdi en matière de développement tient de plus en plus à la présence en son sein de

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spécialistes du développement, ce qui peut amener certains acteurs (bailleurs de fonds, Etats) à minimiser l'importance des échanges paysans.

IV.1.2. Un rôle d'alliés

Le mouvement Afdi a fait le choix de défendre l'agriculture paysanne. Par delà les différences, l'agriculteur Afdi se sent solidaire des agriculteurs du Sud qui luttent pour leur survie, lui-même se sentant menacé dans sa survie par la remise en cause des politiques agricoles (PAC) et la libéralisation du commerce mondial.

Comme il s'agit d'un choix idéologique et politique, les Afdi sont plus que des partenaires des organisations paysannes du Sud, ils se considèrent comme des alliés qui défendent la même cause. Cette position est renforcée parfois par des liens affectifs forts avec les leaders de ces organisations.

Cette solidarité va s'exercer dans le champ de l'appui aux organisations faîtières pour les aider à devenir un acteur à part entière des politiques de développement au niveau régional, national et international. Les paysans de l'Afdi puisent dans l'expérience du mouvement paysan français des années 60, des arguments pour encourager les partenaires. [A l'époque, la fraction jeune, dynamique et relativement pauvre de la paysannerie a réussi à trouver un terrain d'entente avec l'Etat sur un projet de modernisation agricole, permettant de lever les principales contraintes au développement de l'agriculture (on a parlé à juste titre de "révolution dans les campagnes françaises")]. L'Afdi insiste plus sur la faisabilité de la cogestion avec l'Etat que sur les contradictions d'alors au sein de la paysannerie entre "modernistes" et conservateurs"…

C'est sur ce scénario (de cogestion) qu'ont été bâtis les projets d'appui à la professionnalisation qui ont évolué lorsqu'il s'est avéré que la conjoncture dans ces pays était bien différente de celle que nous avions connue. A notre sens d’ailleurs, une distance s’est creusée entre les programmes professionnalisation et l’Afdi parce qu’elle n’a pas su prendre assez vite la mesure de la spécificité de la situation. La position d'allié oblige donc l'Afdi à s'affranchir de ses modèles et à développer, avec les autres partenaires des organisations paysannes, une analyse spécifique de la situation dans ces pays, pour éviter aux organisations paysannes partenaires de camper sur des positions irréalistes ou obsolètes.

Les organisations paysannes faîtières du Sud reconnaissent l'Afdi comme un allié naturel et sont donc réceptives aux propositions qu'elle peut leur faire. L'Afdi a fait le choix stratégique d'aider les organisations paysannes partenaires dans la structuration de nouvelles filières marchandes. C'est un choix pertinent car le mouvement paysan en Afrique a longtemps été difforme avec un sommet relativement puissant (CNCR, FENOP, FUPRO…), des groupements ou associations de base pratiquement livrés à eux-mêmes, et des échelons intermédiaires faibles ou inexistants. Le renforcement de ces échelons intermédiaires peut se faire autour de la structuration de nouvelles filières marchandes et l'Afdi s'y emploie (l'ananas, les

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bovins-viande au Bénin, la pomme de terre en Guinée, le haricot vert au Burkina, le miel à Madagascar, etc.).

Ce travail autour des filières met généralement à jour les intérêts opposés d'autres acteurs et l'Afdi peut être impliquée dans des confrontations plus ou moins rudes de caractère syndical. Ceci est particulièrement vrai dans les grandes filières (telles que coton ou cacao) ou toute initiative où l'Afdi paraîtrait engagée risquerait d'être taxée d'ingérence. Cette position d'alliés que revendique l'Afdi, l'oblige logiquement à assumer ces risques.

IV.1.3. Un rôle d'interface entre les organisations paysannes du Nord et du Sud

L'Afdi par son enracinement dans les OPA françaises d'une part, par son engagement auprès des organisations paysannes du Sud de l'autre, est mieux placée que quiconque pour faciliter le dialogue entre les unes et les autres.

L'Afdi essaye de sensibiliser les OPA aux questions de développement et tente de les impliquer dans ses partenariats. Les militants et animateurs de l'Afdi, à tous niveaux, font un énorme travail de sensibilisation et d'information au sein des OPA (dont ils sont souvent membres) et des établissements d'enseignement agricole, pour les inciter à s'impliquer dans les partenariats qu'elle mène, en apportant des moyens financiers et des compétences techniques. Certaines Afdi comme l'Afdi Bretagne ont leurs propres publications (Paysans du Monde, Les brèves d'Afdi…).

L'Afdi dans ce cas a donc l'initiative et conserve un rôle de médiateur dans ces relations éventuelles, ce qui semble une bonne chose parce que les relations de coopération directe entre une OPA et une organisation paysanne sont généralement délicates, faute d'une culture commune. Il arrive de plus en plus cependant que les OPA (coopératives, Chambres d'agriculture, organismes de formation…) tentent de développer des activités dans les pays du Sud sans l’intermédiaire de l’Afdi. Certaines de ces OPA sont probablement surdimensionnées par rapport aux besoins du milieu agricole français et sont tentées d’exporter de l'expertise ou de la technologie. Là, manifestement, on sort de la sphère du développement pour entrer dans celle des affaires. Ces actions peuvent être compatibles avec celles de l'Afdi ou semer la confusion sur le terrain. L'Afdi cependant pourra de moins en moins les ignorer et devra engager le débat avec elles, ce qui l'amènera peut-être à reconsidérer le cloisonnement absolu qu'elle établit entre les actions qu'elle mène et le business. Elle devra envisager d'inclure de plus en plus une dimension commerciale dans ses partenariats, redécouvrant ainsi le "commerce équitable".

L'Afdi met en relation les OPA du Nord et les organisations paysannes du Sud de façon à ce que les OPA du Nord en particulier intègrent les intérêts des paysanneries du Sud dans leurs stratégies.

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Les OPA du Nord ont longtemps considéré que le développement dans les "pays sous-développés" était une bonne œuvre mais sans enjeu politique. Il a fallu la première réforme de la PAC (1992) pour que la profession réalise que son mode de production et de vie était menacé. La défense de "l'agriculture paysanne" est alors devenue un concept mobilisateur ("pas de pays sans paysans") puisqu'il permet de réunir sous une même bannière les paysanneries des pays riches et des pays pauvres.

Avec la création de l'OMC (1995), l'action de lobbying change d'échelle et il devient nécessaire de constituer des alliances beaucoup plus larges. Les fédérations paysannes internationales, Fipa et Via Campesina vont alors mener une offensive de charme en direction des leaders paysans du Sud. L'Afdi et autres agriagences sont mises à contribution par la Fipa pour mobiliser leurs réseaux de partenaires. Il est entendu ensuite que le dialogue s'établit directement entre leaders d'organisations paysannes et que l'Afdi retourne dans son champ d'action habituel qui est celui du développement. Dans ces grandes manœuvres, l'Afdi qui se garde de toute position partisane à la base (dans les groupes Afdi et avec les partenaires) peut être accusée à juste titre par les partisans de la confédération paysanne d'être instrumentalisée par les OPA du courant majoritaire.

Cependant, la question principale ne se situe sans doute pas là. Les leaders paysans du Sud ne sont pas naïfs et ne sont pas les jouets de ceux qui les invitent. L'intérêt de ces rencontres est d'établir un dialogue, absolument nécessaire entre les uns et les autres, pour comprendre les logiques et les intérêts de l'autre partie et essayer de tendre vers une solution de compromis permettant aux uns et aux autres de vivre, en répondant aux attentes de leurs sociétés respectives.

Des progrès ont sans doute été enregistrés avec la reprise, notamment par la majorité des OPA, des thèmes de Mazoyer sur les espaces économiques protégés et la régulation de l'offre. Il y a un consensus général au niveau du discours mais pas de suite au plan opérationnel. Les JA sont sur des positions plus ouvertes que la FNSEA 9, mais la position commune est définie par le CAF (Conseil de l'Agriculture Française) qui réunit FNSEA, JA, APCA, CNMCCA et celle-ci est relativement défensive et s'en tient à l'accord USA/UE établi à la veille de la conférence de Cancun.

En attendant, les inégalités de traitement entre paysanneries sont toujours aussi criantes et les paysans du Sud continuent à être victimes d'une concurrence déloyale. Au dernier sommet de l'OMC à Cancun, on a assisté à une fronde des pays du Sud (groupe des 90) qui s'est cristallisée en particulier sur la question du coton, production vitale pour de nombreux pays d'Afrique. Les leaders paysans du Sud et parmi eux bon nombre de partenaires de l'Afdi dénoncent l’attitude des USA et de l'Europe (qui refusent la moindre concession sur 9 Cf. la déclaration commune au sortir du Congrès Mondial des Jeunes Agriculteurs en juin 2003.

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les aides à leurs producteurs), et n'ont pas manqué de le faire savoir à leurs homologues européens. Ceci prouve s'il en était besoin que les leaders paysans du Sud ne sont pas les otages des OPA françaises ou de la Fipa.

Ceci étant, la position de l'Afdi sur ces questions demeure inconfortable, accusée selon les cas par ses partenaires du Sud d'en faire trop (participation à la relance de l'observatoire coton en Afrique par exemple) ou pas assez (dans la critique des positions prises par les OPA françaises). L'Afdi nationale assure fort justement une fonction d'information sur ces questions internationales (lettre hebdo, Courrier de l'Afdi), principalement en direction du réseau Afdi et s'efforce de relayer la réflexion qui se mène sur le sujet au niveau européen (associant chercheurs, membres d'ONG en particulier…). Elle est en mesure d'assurer des formations sur les questions internationales auprès des OPA (dans les départements) qui le demandent. Convaincue de la nécessité de prises de position communes entre organisations qui défendent la même vision de l'agriculture, l'Afdi multiplie les occasions d'échanges entre leaders paysans du Nord et du Sud (diverses missions en Afrique et à Madagascar de responsables de la Fnsea et des JA, invitation de nombreux leaders du Sud aux Journées Nationales Afdi, aux congrès des organisations syndicales, à divers ateliers de rencontres au niveau européen et mondial).

IV.2. Une efficience qui s'améliore très sensiblement

L’efficience est probablement le critère qui a le plus évolué avec la convention. Elle est essentiellement relative à la manière avec laquelle on mobilise au mieux des ressources humaines et financières – à travers des stratégies, des méthodes, des outils, des dispositifs. Certains niveaux d’Afdi on cependant beaucoup plus porté cette évolution que d’autres, ce qui pose la question de la durabilité de ces changements. Il est nécessaire pour apprécier cette évolution et ses enjeux de refaire un survol rapide des différents niveaux qui composent Afdi avant de tenter une analyse de leurs interrelations. Les questions à discuter dans cette partie relèvent du pouvoir au sein de l’organisation, de la capacité à mobiliser des ressources, mais aussi des valeurs qui souvent influencent ces capacités.

- La gestion de la programmation La programmation a également été sensiblement améliorée par l’élaboration et l’utilisation d’un outil de type cadre logique, adapté et simplifié. L’élaboration de l’outil a bénéficié des services d’un consultant (Daniel Neu) et s’est faite en plusieurs étapes :

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- Un groupe de travail constitué d’élus, de permanents et de personnes-ressources (Daniel NEU) a été mis en place et a fonctionné pendant un an pour mettre au point un outil

- Des Animations dans les groupes locaux ont ensuite été effectuées par des permanentes de l’Afdi nationale pour affiner les outils proposés

- Un travail important a ensuite été mené pour intégrer cet outil dans la pratique des groupes Afdi régionaux et départementaux.

De l’avis d’un certain nombre de personnes rencontrées au Nord, cet outil a d’abord été considéré de façon négative comme une charge supplémentaire, mais après plus d’un an d’utilisation il semble de mieux en mieux intégré. La préparation de cet arbre logique est généralement réalisée en groupe, avec l’aide des animateurs, mais la formulation et la rédaction en tant que telle sont généralement assurées par ces derniers. La formulation n’est pas encore systématiquement réalisée avec les partenaires du Sud, mais globalement la préparation des activités et leur programmation apparaissent de plus en plus concertée avec les partenaires. Lors des premières étapes la question s’est très vite posée de définir la nature des critères et des indicateurs utilisés dans cet arbre logique. Le choix s’est porté sur des éléments budgétaires et de ressources mobilisées (ho.jour) selon les différentes activités et résultats attendus. Ce choix a été justifié par le fait qu’il était dans un premier temps important de rentrer dans une logique de gestion par les dépenses et les activités plutôt que par les effets ou l’impact. Il n’apparaît en effet pas encore possible pour les groupes locaux de suivre et de renseigner en termes d’effets ou d’impact, les opérations qu’ils conduisent. Par contre le consultant a simultanément proposé qu’un travail soit fait sur le partenariat et la façon de le gérer. La mission convient que c’était probablement la manière la plus pragmatique de rentrer dans une logique d’effets et d’impact.

- La gestion du suivi-capitalisation Le suivi des actions partenaires varie, mais s’est sensiblement amélioré durant la présente convention grâce aux outils de programmation qui forcent à décrire les acquis et difficultés selon une grille d’attendus plus formelle. Il apparaît cependant que ce suivi dépend fort de la présence de permanents au Nord (animateurs) comme au Sud (VP, JAC, chargés de mission des cellules). Le suivi des cellules Burkina et AO se fait sous forme de rapports trimestriels. Ces rapports sont assez succincts. Ils sont structurés à la fois thématiquement (info-com ; conseil de gestion ; filières) puis selon les partenaires (FENOP, ANPHV,…) ce qui rend le suivi de la convention plus difficile. Une programmation indicative est réalisée en fin de rapport avec une estimation budgétaire pour la période suivante. Ces rapports s’adressent surtout à l’interne (la première personne du singulier est utilisée pour présenter ce que l’on a fait ou que l’on compte faire) rendant une exploitation

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plus large moins immédiate. Ils sont généralement fort centrés sur les situations plus que sur l’apport de l’Afdi par rapport à ces contextes. Une structuration selon les objectifs de la convention permettrait sans doute une meilleure capitalisation des différentes activités et de la façon dont elles répondent ou non aux attendus initiaux (quitte, en cas d’écarts, à argumenter une réorientation des objectifs). Il apparaît notamment que dans certains cas, la nécessité de parer au plus pressé – les crises internes des OP – oblige à d’autres types d’appuis et limite l’obtention des résultats escomptés ou s’en écarte. Les rapports étant généralement d’abord fixés sur ces réalités ne questionnent plus les attendus de départ et ne permettent pas d’avoir un recul suffisant dans l’analyse de l’appui Afdi. Il y a cependant un risque que l’on sache un peu mieux comment faire mais pas beaucoup mieux pourquoi ? en fonction de quels choix politiques ? Suite aux travaux précédents, et notamment aux difficultés rencontrées pour faire passer les outils de programmation, il a semblé difficile durant cette convention de proposer d’autres dispositifs ou outils dépassant le suivi de résultats pour un suivi d’impact plus stratégique. La question mérite cependant réflexion. Cependant, l’inflation d’outils et de procédures risque vite de décourager une association qui repose fortement sur le bénévolat de professionnels agricoles. La prudence manifestée à cet égard durant la convention est d’autant plus nécessaire que celle-ci se termine et que rien au-delà n’est prévu pour assurer que des nouveaux outils ne soient réellement appropriés par la base du mouvement. En revanche un effort particulier a été effectué pour capitaliser à partir des opérations concrètes menées sur le terrain. C’est ainsi que 5 capitalisations ont été réalisées :

- sur les filières - sur l’appui à la structuration des OP - sur le coton - sur les CUMA - sur le conseil de gestion de l’exploitation

Ces capitalisations ont été indirectement l’occasion d’un suivi et d’une analyse des effets d’un certain nombre de projets-partenaires. Réalisées soit par les cellules Burkina ou Afrique de l’Ouest soit par des chargés de mission Afdi nationale (filières, conseil de gestion) elles ont permis de porter un regard extérieur sur les partenariats locaux. En revanche elles n’ont pas permis aux membres des groupes locaux Afdi de s’approprier la méthode de capitalisation ou de nouveaux outils de suivi-évaluation. Ici encore, la stratégie apparaît toutefois adaptée à un mouvement comme Afdi. Il apparaît en effet impossible de mobiliser les membres de base déjà fort pris par leur occupation, à remplir des fiches, élaborer des dossiers, analyser en profondeur, pour un suivi-capitalisation. L’option choisie de mobiliser des permanents ou des spécialistes proche du réseau Afdi (consultants ou professionnels agricoles) apparaît être une réponse pragmatique aux contraintes spécifiques du réseau.

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En France le dispositif est résumé au tableau suivant (CdO Afdi) :

Suivi des activités Suivi des résultats - Semestriel; - rôle prépondérant des acteurs:

Afdi locales et leurs partenaires; - avis des cellules sud, en

concertation avec les OP faîtières concernées ;

- grille de suivi très synthétique, permettant des comptes-rendus homogènes et ainsi plus facile à compiler ;

- élaboration d’une grille pays pour discussion en groupe pays puis au comité projet,

- suivi budgétaire en parallèle.

- Annuel ; - rôle majeur des cellules sud, en

collaboration avec les OP faîtières ; - discussion en groupe pays puis au

comité projet ; - grille de suivi à adapter selon les

pays.

- Echelle pertinente : le pays

- Les dispositifs, les individus, leur rôle dans l’efficience et leur évolution

- Les groupes locaux et régionaux

Le mouvement Afdi a ceci de particulier de reposer au départ essentiellement sur des groupes dispersés et jaloux de leur indépendance, mais partageant globalement certaines valeurs communes centrées autour de l'importance du « métier » de paysan et de la profession. La convention d'objectifs participait dès le début - dans la foulée des premières journées nationales de Loctudy qui avaient conduit à l'élaboration d'une charte - à une dynamique visant à préciser ces valeurs et à rassembler autour de principes mieux définis.

Les deux conventions ont, à travers les dispositifs mis en place et les outils, participé à limiter la dispersion et à tendre vers une certaine homogénéisation des modes d'interventions. Il est plus rare aujourd'hui de trouver des groupes Afdi qui font dans le caritatif et s'il en existe encore, ils n'ont pas bénéficié des appuis de la convention d'objectifs. Les groupes locaux ont cependant encore énormément d'importance dans les décisions et leur poids dans le pilotage des partenariats est encore

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déterminant. La CdO a permis à nombre d’Afdi de devenir plus dynamiques et d’attirer davantage de militants, surtout dans les classes d’âge intermédiaire (35-50 ans) qui ont des systèmes d’exploitation bien rôdés. Dès lors les échanges paysans ont pu être amplifiés, impliquant plus de personnes au Nord et au Sud, sur des sujets diversifiés. La base de l’Afdi s’en trouve revigorée et les paysans français ont le sentiment d’être utiles et de s’inscrire dans un processus, grâce à une meilleure préparation et valorisation de ces échanges. Le réseau des solidarités interpersonnelles se diversifie. Chaque équipe rend compte des résultats de sa mission au groupe et ainsi chacun se sent impliqué dans le partenariat, même s’il n’y retourne que de façon épisodique. Ces échanges sont une manifestation concrète de la solidarité active des paysans français. Ils permettent de conforter les partenaires du Sud dans leurs engagements professionnels. Ils permettent également de réduire les distances sociales et culturelles (grâce aux échanges Sud-Nord en particulier) et d’établir une véritable communication. Par l’ampleur et la diversité de ces échanges, l’Afdi occupe une position singulière (dans le domaine agricole tout au moins). En outre, les échanges sont un moyen d’autopromotion (« voir – juger – agir »). Les échanges Sud-Sud en particulier que l’Afdi favorise sont un puissant levier de changement dans les domaines technique et organisationnel. Ils mettent en valeur deux principes pertinents : la valorisation des savoirs paysans (le milieu agricole détient une bonne partie des réponses aux questions qu’il se pose, on peut toujours apprendre du voisin) et la solidarité interpaysanne (la promotion ne peut être que collective, il convient de partager les expériences). Ces principes ont d’ailleurs été redécouverts par d’autres acteurs (la recherche en partenariat avec les organisations paysannes) dans d’autres contextes (programme « campesino a campesino » au Nicaragua par exemple à la fin des années 80).

- Les personnes ressources

Sont visés ici des professionnels qui ne sont pas nécessairement impliqués formellement dans un partenariat particulier, mais sont sollicités pour un appui bien précis (soit un témoignage, soit une expertise). Ici aussi la convention a permis de montrer que les compétences mobilisables dans le milieu agricole français sont très importantes, mais pas toujours adaptées à une intervention en milieu « interculturel ». Le rôle en appui technique de ces professionnels peut être important. La question a plus été de savoir comment valoriser ce potentiel de ressources. Une base de donnée est en constitution notamment pour cela mais surtout des démarches ont été développées pour améliorer la sélection et la préparation de leurs missions : négociation des termes de références avec le partenaire, définition de la période la plus favorable, etc.

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- Le Conseil d’administration

Le conseil d'administration a bien entendu une importance déterminante dans l'orientation générale du mouvement et la définition des « politiques ». Il faut souligner un paradoxe à cet égard : le poids des OPA fondatrices reste très important, les représentants Afdi étant minoritaires. Or, ces professionnels, généralement moins impliqués dans des interventions en développement, sont moins forces de propositions et peuvent au contraire se révéler forces de résistance aux changements.

Ce paradoxe s'est amplifié ces dernières années étant donné que les changements impulsés par les conventions d'objectifs ont été dans le sens d'un renforcement – globalement- des compétences des membres (groupes Afdi), mais sans qu'il y ait d'impact sur ces niveaux de pouvoir.

- Afdi nationale

Afdi nationale avec son équipe d’animation a essentiellement pour fonction de coordonner les différentes forces qui composent le mouvement et de mettre de la cohérence à travers les entrées pays et les entrées thématiques (conseil de gestion, structuration par filière). Elle apporte de la cohérence, du sens commun, de la plus-value. Les personnes qui composent l'équipe se distinguent essentiellement des groupes locaux par le fait d'être surtout des professionnels du développement qui ont une expérience en coopération. Leur rôle lors de ces deux conventions - pour transmettre les propositions de changements, les outils, les idées, les méthodes - a été important au Nord et comme au Sud (en matière de positionnement stratégique notamment là où aucun dispositif n'existait). Le Président et la Directrice font un travail permanent de représentation et de promotion de l’Afdi auprès des partenaires institutionnels (MAE, Ministère de l’Agriculture, grandes OPA françaises, organisations paysannes faîtières du Sud…).

- Le Comité projet Le Comité de projets assure une fonction d‘arbitrage lors de la sélection des projets à financer par les instruments communs qu'ont été les deux conventions d'objectifs. Des critères de sélection ont été élaborés ainsi que des procédures d'attribution. Ce « filtrage » portait également sur les financements en provenance d’autres sources.

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- Les chargés de mission volontaires JAC au Sud et animateurs au Nord Si tout le monde semble convenir de l’importance de ces « chevilles » du réseau il reste encore une ambiguïté, dans la mesure où le discours sur les valeurs « paysannes » reste dominant. Or, ces personnes au Nord comme au Sud contribuent tout autant que les groupes paysans à faire Afdi. Ce sont elles – avec Afdi nationale et les cellules - qui portent les principes et les objectifs communs d‘intervention sans oublier ce qui fait la spécificité Afdi, la dimension échanges paysans. Ce sont elles qui sont censées mettre de la cohérence dans l’intervention et assurer la pertinence par rapport aux contextes locaux. Sans elles, un certain nombre de groupes continueraient à œuvrer dans des domaines qui n’ont plus rien de spécifique à Afdi (humanitaire en particulier).

- Les Cellules

Les cellules doivent beaucoup aux conventions qui ont permis de financer une grande partie de leur fonctionnement. Elles jouent un rôle important « d'interface » Sud : - interface vis-à-vis des pouvoirs publics du sud - interface vis-à-vis des partenaires Les conventions ont permis de faire prendre conscience de la nécessité de ce type de dispositifs pour mieux s'inscrire dans les contextes locaux et nationaux. Leur efficience sur les partenariats locaux est cependant relativisée par le poids du partenariat et son histoire : les partenariats anciens et déjà forts construits en termes de programme, présentent plus d'inertie au changement que les programmes plus « petits » ou qui se sont construits durant la convention.

Avec la convention d’objectifs, le nombre de personnes impliquées dans la réflexion stratégique et la mise en œuvre des actions s’est considérablement accru. De nombreux professionnels agricoles ont intensifié leurs engagements et assument des responsabilités dans ces instances. Indiscutablement, les agriculteurs maîtrisent toujours les orientations politiques du mouvement Afdi (à travers le CA, les comités projets, les groupes pays, etc.). Cependant, on assiste à une montée en puissance des salariés, animateurs des Afdi régionales, chargés de mission de l’Afdi Nationale et des cellules pays qui sont pour beaucoup dans l’amélioration générale de l’efficience du Réseau. Avec la fin de la convention, ces dispositifs interface (notamment les chargés de mission) sont les plus directement menacés. Les six ans de convention d’objectifs ne permettaient pas de garantir la pérennité de ces dispositifs.

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Les succès rencontrés dans la recherche de nouveaux financements (Union Européenne, Agricord) permettent le renforcement de divers projets mais ne sont pas une réponse adaptée aux besoins de financement de la structure.

Les opportunités de financement global apparaissent donc de moins en moins réalistes, mais les programmes pays ou régionaux risquent d'être plus fréquents si l'on en juge par les tendances à l'harmonisation de l'aide. Ces tendances vont, en effet, massivement, dans le sens de l'aide budgétaire aux Etats et de l'aide programme. Elles incitent les ONG et Afdi en particulier à être beaucoup plus professionnelles dans l'accompagnement à la définition de politiques sectorielles et à leur mise en oeuvre. Ces ressources seront cependant à trouver à partir du sud et donc grâce à des relations de confiance établies avec les Ministères, les partenaires au développement, les organisations paysannes et les autres organismes d'appui. Sur cette base, les cellules pays ont des chances de se maintenir grâce à la reconnaissance de leurs compétences et à la rémunération de leurs prestations. L’autre opportunité réside dans la capacité de mobiliser des financements des OPA (Chambres, coopératives, Crédit Agricole…) au niveau départemental et régional, et plus largement de tous les nouveaux acteurs du développement en particulier les collectivités locales. Une majorité d’Afdi, grâce à la CdO, a renforcé ses capacités en la matière et on peut penser (au vu du dynamisme de certaines équipes) qu’elles continueront à améliorer leurs performances.Dans ce cas, ces financements locaux pourraient se substituer sans trop de dommages aux subventions de la CdO. Les Afdi régionales gagneraient en autonomie financière pour le fonctionnement de leurs structures (animateur, locaux…), la vie associative et le financement des partenariats (appui institutionnel aux organisations paysannes et échanges paysans plus que des actions de développement qui devraient trouver des financements sur place). Il resterait à répondre aux besoins de financement de l’Afdi Nationale (structure, vie associative, relations avec les partenaires). Avec la fin de la CdO, le financement de l’ADAR est d’une importance stratégique ; suspendu actuellement, il est en négociation mais son obtention dépend principalement du soutien sans faille des grandes OPA (FNSEA, JA, APCA, CNMCCA) et il n’y a pas de raison pour qu’il ne soit pas obtenu. Du côté de l’Etat, le soutien du Ministère de l’agriculture (mise à la disposition d’un fonctionnaire, subvention annuelle) semble pouvoir se pérenniser si l’Afdi est capable de convaincre qu’elle joue toujours un rôle fédérateur au sein des OPA, sur les questions internationales. Du côté du MAE, la balle est dans le camp du Ministère, puisque tout le monde s’accorde à dire que la formule CdO était particulièrement appropriée dans le cas de l’Afdi mais qu’elle ne peut être reconduite. Pourtant, on considère toujours que l’Afdi peut et doit avoir un rôle essentiel de média entre les OPA françaises et organisations paysannes du Sud ; il faut donc pour ce faire lui en donner les moyens.

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IV.3. Efficacité L'efficacité par rapport aux résultats attendus n° 1 (innovations techniques et organisations paysannes leaders) et n° 2 (capacité des Fédérations paysannes) ayant été très largement traitée dans les études pays et région, nous ne traiterons ici que du résultat attendu n° 3. Les agriculteurs français ont consolidé et mis en cohérence un système de coopération efficace et ont établi des liens avec les autres coopérations. Axe 1 : Renforcement de la cohésion et de la coordination des actions de coopération internationale. La deuxième convention d'objectifs a permis en effet de renforcer ces qualités. Les groupes pays Le groupe pays rassemble des représentants des Afdi engagées dans des actions de partenariat avec ce pays dirigé par un Président (responsable professionnel) et un animateur (qui peut être de l'Afdi nationale ou d'une Afdi régionale impliquée). Il existe des groupes pays pour tous les pays à partenariats multiples mais ils sont plus ou moins dynamiques selon la diversité et la cohésion du groupe. Certaines Afdi régionales (la Bretagne par exemple) on constitué également des groupes pays à leur niveau. Le groupe pays se réunit de 2 à 4 fois par an, il permet de faire le point sur l'état d'avancement des activités et réfléchir sur les positions à prendre sur des enjeux nationaux (Chambres d'agriculture, projet de loi d'orientation agricole, dissensions au sein du mouvement paysan, etc.). Il joue un rôle indispensable et il répond à une réelle demande des membres. Ceci dit, il n'a pas de correspondant du côté des partenaires. Ce sont plutôt les volontaires et chargés de mission Afdi qui jouent ce rôle, ce qui fait que seule la stratégie Nord est consolidée sans qu'elle s'appuie sur une stratégie Sud. A Madagascar cependant, le réseau SOA, créé dans un autre but, pourrait jouer ce rôle. Il conviendrait de corriger cette approche "interventionniste" du partenariat en instituant un groupe des partenaires qui ferait le pendant avec le groupe pays. Les groupes thématiques Ils correspondent aux thèmes sur lesquels le Réseau Afdi a décidé de capitaliser à partir de ses partenariats multilocaux. Ce sont en général des

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chargés de mission de l'Afdi nationale qui s'occupent d'animer ces groupes thématiques. Le groupe gestion est le plus étoffé. Les autres groupes (coopération décentralisée, appui institutionnel aux organisations paysannes, filière…) ont moins de consistance. De façon générale, ces groupes peinent à devenir opérationnels. La réflexion sur le développement local par exemple ne s'appuie que sur un seul terrain, Tsiroamandidy à Madagascar, l'Afdi a donc demandé à la dernière volontaire en poste sur ce volet, de capitaliser son expérience, dans le but d'inciter d'autres Afdi à développer des programmes de coopération décentralisée impliquant des collectivités territoriales et ouvrant la voie à de nouvelles sources de financement. Indépendamment de ce dernier aspect, il apparaît que ces débats intéressent peu la plupart des militants. La dimension méthodologique qui est au centre des réunions thématiques mobilise d'une part les spécialistes, d'autre part les équipes de terrain. L’aspect qui intéresse les groupes Afdi est la dimension politique : pourquoi s'investir sur ces chantiers thématiques, quels sont les résultats de nos expérimentations, en quoi nous aident-ils à reformuler notre stratégie, et peut-on valablement constituer un pôle d'expertise dans ce domaine ? Si certains thèmes (qui ne sont pas forcément d'ailleurs l'objet d'un groupe) tels que l'innovation technique dans le cadre de groupes de développement ou l'organisation de nouvelles filières marchandes, l'appui institutionnel aux organisations paysannes… cadrent bien avec la logique d'intervention de l'Afdi, d'autres sont d'une pertinence moins évidente. Un réexamen de la validité de ces thèmes serait sans doute à faire. Sur les thèmes retenus, il convient de tenir compte des travaux d'autres organismes ou groupes qui travaillent sur ces mêmes projets. La capitalisation réalisée par ces groupes devrait servir en premier lieu à la formation des chargés de mission et des volontaires qui partent sur le terrain. Axe 2 : Coordination des ressources humaines de l'Afdi pour animer et coordonner les actions de coopération internationale. L'Afdi nationale ne pouvant tout faire, il convient de déconcentrer des responsabilités au niveau régional. Dans un réseau aussi vaste et foisonnant que l'Afdi, il y a toujours le risque d'une coupure entre le sommet et la base ; telle que certaines Afdi pourraient avoir le sentiment d'être les obscurs artisans d'une construction dont les sommets lui sont étrangers. La structuration des Afdi sur une base régionale permettant l'embauche d'animateurs a déjà renforcé sensiblement l'autonomie et les capacités institutionnelles. On peut affirmer que la présence d'animateurs au niveau régional est la condition indispensable pour "décoller" car les militants n'ont, malgré leur bonne volonté, ni le temps ni la compétence pour faire le travail de

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lobbying. Tous les animateurs ont participé à des missions de suivi des partenariats et sont familiarisés avec la problématique du terrain. Des réunions d'animateurs régionaux ont été instituées, elles permettent de créer une dynamique de groupe (entre animateurs qui ne se voyaient que rarement) et de renforcer l'ambition des Afdi régionales au sein du Réseau. Un certain nombre d'animateurs régionaux se voient confier des responsabilités dans l'animation d'un groupe pays (le groupe Sénégal par exemple est animé par l'animateur de l'Afdi Bourgogne Franche-Comté), ou l'animation d'un groupe thématique (un animateur d'Afdi Pays de Loire co-anime à mi-temps le groupe sur les enjeux internationaux et l'éducation au développement). De nombreux responsables des Afdi (administrateurs, présidents, animateurs) sont très impliqués dans la préparation des Journées Nationales de l'Afdi et l'animation des ateliers. A l'évidence, le groupe des animateurs souvent jeunes et motivés émerge comme une nouvelle composante (militante même si elle n'est pas paysanne) et une nouvelle force de l'Afdi. La convention d'objectifs aura permis d'élargir la base du réseau et de démultiplier les compétences. La convention d'objectifs aura donné aux Afdi la chance de pouvoir se renforcer et d'améliorer leur implantation dans le milieu régional. Celles qui ne l'ont pas saisi risquent de se retrouver en position très difficile avec la crise financière qui s'annonce au niveau national. Axe 3 : Mobilisation de compétences professionnelles en quantité et qualité, adaptées aux besoins des actions au Sud. L'Afdi est en train de constituer un annuaire des personnes ressources (principalement des professionnels agricoles) mobilisables dans le cadre des partenariats. Il s'agit d'un outil utile mais sans doute insuffisant. Il convient de préparer les missions en fonction d'une demande un peu construite. S'il s'agit d'apporter un témoignage, le choix de la personne et sa préparation peuvent être gérés par le Nord (Afdi nationale ou régionale), s'il s'agit d'apporter une expertise, c'est le terrain (chargé de mission Afdi et partenaire) qui doit avoir le leadership. Grâce à cette réserve d’experts confirmés, motivés et bénévoles, l’Afdi dispose d’un atout important. Axe 4 : Création d'un réseau "coopération au développement" des organisations agricoles au niveau européen. Il existe d'autres agences en Europe issues, comme l'Afdi, des milieux professionnels agricoles : il s'agit d'Agriterra en Hollande et d'IVA en Belgique. Celles-ci se retrouvent (avec les Canadiens, Japonais, etc.) au sein d'Agricord (né en 2002), qui est à la fois une plateforme de concertation et surtout un instrument de collecte de fonds auprès des Etats.

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Agricord a opté pour une articulation forte avec la FIPA. Celle-ci dispose d'un comité de coordination pour le développement (DCC) constitué de représentants paysans du Nord et du Sud. La DDC fixe des priorités d'action et Agricord en est l'opérateur. Agricord négocie avec les gouvernements des financements globaux pour ces programmes. C'est ainsi que l'appui à la commercialisation a été financé par les Néerlandais et l'appui à la négociation par les Canadiens Sont éligibles à ces financements les organisations paysannes porteuses de projets, membres de la Fipa, et les agriagences qui les accompagnent. A l'évidence, Agricord apporte une solution au financement de nouveaux projets (les cinq projets présentés par l'Afdi cette année ont été acceptés) mais on n’a aucune assurance sur la possibilité de prise en charge des frais de structure par ce type de financement. Agricord est censée aussi renforcer la cohérence entre agriagences sur les méthodes d'intervention et mobiliser des compétences plus larges. Les avancées dans ce domaine sont encore limitées parce que les agriagences ont des traditions et des trajectoires bien différentes : Afdi par exemple est seule à avoir un réseau de groupes militants, engagés dans des partenariats directs au Sud. Pour conclure, Agricord est un instrument approprié pour mobiliser des ressources financières auxquelles les organisations paysannes et leurs partenaires n'auraient jamais eu accès. Agricord est aussi un instrument qui permet sans doute à la Fipa de fidéliser des organisations paysannes du Sud, mais ceci renforce son rôle de cadre où se confrontent les points de vue des organisations paysannes du Nord et des organisations paysannes du Sud, ce qui est essentiel. Il serait de la responsabilité de l'Afdi de clarifier avec ses partenaires (organisations faîtières du Sud) ce que signifie l'adhésion à la Fipa et aussi de les aider à formuler les positions qu'ils veulent y défendre à l'occasion des congrès de la Fipa.

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IV.4. Impact

L'Afdi contribue à changer la perception qu'ont les paysans et leurs OPA des agriculteurs du Sud. Cet impact est difficile à mesurer lors de passages aussi brefs sur le terrain auprès des Afdi mais il est manifeste.

- L'impact au niveau des paysans Les agricultrices et agriculteurs qui participent activement aux activités de l'Afdi y consacrent beaucoup de temps et d'énergie en renonçant parfois à d'autres responsabilités professionnelles. Ceci ne s'explique pas seulement par un élan généreux en direction des paysans du Sud, mais s'explique aussi par ce qu'ils en retirent personnellement. Cette implication dans l'Afdi est une occasion exceptionnelle de se confronter à d'autres cultures et d'autres façons de vivre, ce qui est déjà un apprentissage de la tolérance, et de prendre du recul pour se réinterroger sur ses propres valeurs et ses propres pratiques.

Les militants Afdi parlent de redécouverte des valeurs fondamentales, de remise en cause de l'individualisme, de relativité de leurs préoccupations courantes, de l'interrogation sur l'éducation des enfants (surprotégés…), de réflexion sur la gestion du temps qui amène à remettre en cause la conduite de l'exploitation, etc. Bref, l'impact de ces partenariats se mesure en termes d'épanouissement personnel. Ceci les conduit en particulier à entreprendre des changements au sein de leurs exploitations pour mettre leurs pratiques en conformité avec leurs discours et leurs principes. C'est ainsi que s'invente le nouveau modèle d'agriculture multifonctionnelle et durable.

Dans une période où les agriculteurs sont en quête d'identité et de reconnaissance, les militants de l'Afdi contribuent à renouveler les approches au sein des OPA où ils exercent des responsabilités. De façon plus large, le partenariat au Sud les amène à s'interroger sur le chemin emprunté par l'agriculture française, sur les erreurs d'orientation qui ont pu être commises. En effet, si l'Afdi jusqu'à la fin des années 80 était porteuse d'un modèle qui avait fait preuve de son efficacité et sur lequel elle n'avait pas l'ombre d'un doute, il n'en est plus de même aujourd'hui. Elle est porteuse de contradictions entre des références qui sont toujours les siennes car elles sont porteuses d'une certaine efficacité (en termes d'autosuffisance alimentaire et de création de richesses) et des effets à l'arrivée qui sont catastrophiques (extinction des paysans, dévalorisation du métier qui ne subsiste que grâce aux aides de la Pac, problèmes de pollution et d'insécurité alimentaire, perturbation des marchés, y compris dans les PVD que l'on prétend aider, etc.). Ces

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contradictions ne sont pas simples à résoudre, mais sont fécondes surtout lorsqu'on est obligé de les admettre et d'en débattre avec les partenaires paysans du Sud qui vous interpellent à ce sujet.

- L'impact au niveau des OPA françaises

L'Afdi joue un rôle irremplaçable pour amener les OPA françaises puis européennes à prendre en compte les intérêts des paysanneries du Sud dans leurs stratégies. Elle s'y emploie comme nous l'avons vu précédemment avec une certaine efficacité dans l'univers qui et le sien, c'est-à-dire celui constitué par les grandes OPA françaises qui l'ont créée. Maintenant, tout le monde est convaincu de la nécessité d'une cohérence (au niveau de l'Europe) entre la politique de coopération internationale et la politique agricole, et sait bien que c'est cette dernière qui sera la plus fondamentalement réformée. On peut espérer que cette réforme prendra en compte les expériences des groupes de paysans novateurs parmi lesquels se trouvent nombre de paysans de l'Afdi.

IV.5. Une viabilité qui reste fragile La convention d’objectifs visait surtout à créer ou renforcer les dispositifs dans le but d’améliorer la qualité des interventions de l’Afdi, c'est-à-dire essentiellement la qualité du partenariat entre organisations paysannes. Deux niveaux d’appréhension sont donc à considérer :

- les dispositifs permis par la convention sont-ils viables ? - les acquis atteints grâce à ces dispositifs sont-ils viables ?

En termes de dispositifs la fin de la convention peut fortement fragiliser, selon les niveaux, les « dispositifs-interfaces », c’est-à-dire, les chargés de mission en partenariat ou dans les cellules, les animateurs en France, les permanents de l’Afdi nationale. Par contre, les groupes locaux ne devraient pas en souffrir. En d’autres termes, les dispositifs qui, selon notre analyse, garantissent surtout la cohérence de l’association et valorisent les interventions locales, sront paradoxalement les plus menacés. Au plan des acquis, on enregistre un certain nombre d’avancées significatives notamment : - pour toutes les Afdi qui ont été partie prenante de la convention d’objectifs, la

nécessité de se doter d’outils de programmation et de suivi ne fait plus l’ombre d’un doute. Ces outils ont toutes les chances de perdurer quels que soient les aléas des financements ;

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- la plupart des groupes ont la volonté d’établir des rapports plus construits et plus équilibrés et admettent que les partenaires sont en droit de porter des jugements sur la qualité du partenariat ;

- ils sont convaincus de la nécessité de s’engager dans des processus techniques et économiques de développement qui améliorent le sort des paysans partenaires. Ils sont de plus en plus conscients de la nécessité d’apporter des réponses pratiques aux besoins de financement des organisations paysannes partenaires, soit directement, soit en renforçant leurs capacités de négociation ;

- les Afdi sont conscients de l’intérêt de faire partie d’un mouvement qui se construit autour de valeurs, de principes et d’objectifs communs plutôt que de faire cavalier seul ;

- les Afdi sont plus que par le passé convaincus que le travail en France au sein des OPA est tout aussi important que celui qui se mène au Sud dans le cadre des partenariats. Mais la concrétisation de ces orientations exige le maintien d’une structuration du réseau et d’un dispositif d’appui sinon identique du moins aussi important que maintenant.

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V - La convention d’objectifs et l’Afdi

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V. De l’instrument convention d’objectif et de son application aux Afdi

V.1. Rappel des objectifs généraux des CdO Les conventions d’objectifs répondaient à trois préoccupations majeures (Neu/Morel 2001) :

- Améliorer la qualité et le volume des interventions des ASI10 bénéficiaires : l’outil était destiné à des ASI déjà appréciées par la qualité et le volume de leurs interventions. Il visait à donner plus de cohérence à l’ensemble de leurs activités. En termes de qualité, les attentes – plus ou moins partagées et explicites – étaient de :

o Accompagner le passage du « projet » au « programme » et permettre aux ASI d’inscrire leur activité dans la durée, d’intervenir de façon plus cohérente sur des espaces géographiques plus vastes, parfois de changer d’échelle d’intervention, souvent de mieux tenir compte de leurs contextes politiques ou macro économiques

o Favoriser un effort de rigueur et de formalisation méthodologique, valorisé par des processus de partage, de diffusion, de mise en débat

o Faciliter l’accès de ces ASI aux autres sources de cofinancement possibles et notamment celles de la commission européenne, en optimisant l’effet de levier que pouvait jouer les fonds du ministère.

- Renforcer les capacités internes de ces ASI - Contribuer à l’approfondissement du partenariat entre le ministère et des ASI

V.2. Améliorer la qualité et le volume des interventions La Convention d’objectifs Afdi affiche au départ des résultats attendus et un cadre logique qui traduisent une vision stratégique claire et formalisée du positionnement de l'Afdi vis-à-vis de ses partenaires et des contextes où elle intervient. On peut donc comprendre que les divers objectifs annoncés correspondent aux diverses entrées et niveaux considérés comme nécessaires pour constituer un ensemble cohérent et efficace en matière d'appui aux organisations paysannes. Mais la Convention d'objectifs repose dans la plupart des cas sur des "groupes partenaires" historiques répartis dans un grand nombre de pays. Si cette situation apparaît logique (il n'y a probablement pas d'autre approche possible), on peut se demander si l'instrument Convention d'objectif remplit bien son rôle de mise en cohérence.

10 Association de Solidarité Internationale

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La présente CdO apparaît en effet plus comme une somme d'objectifs dont les complémentarités dans l'espace et par rapport aux divers partenaires n'est pas effective mais plutôt d'ordre intellectuel. Chaque type d'action (les partenariats locaux, les relations avec les faîtières, les rencontres internationales…) relève d'un objectif, sert bien un résultat attendu et donc nourrit a posteriori la grille de classement des activités, conformément aux objectifs annoncés au départ. La logique est donc beaucoup plus évidente du côté de l'Afdi, au niveau global, qu'elle ne l'est du côté des partenaires au niveau local (en particulier dans les pays où il n'existe qu'un nombre restreint de partenariats). Autrement dit, le saupoudrage des activités ne peut pas être évité, même si les efforts pour rompre avec les pratiques « dispersées » d’auparavant ont été importants sous les différentes conventions d’objectifs. Différentes actions (groupes pays, groupes thématiques…) cherchent en effet à faire le liant entre ces différentes opérations. Cependant ce n’est pas tant dans le cadre des conventions, que dans celui des programmes de professionnalisation que l’AFDI a pu faire la démonstration de ce qu’elle pouvait faire. Les aperçus sur le Bénin et Mali montrent en effet combien le résultat dépendait de la présence d’une cellule permanente, qu’elle soit Afdi (Mali) ou MAE (Bénin), pour positionner les interventions des groupes locaux dans des enjeux stratégiques forts. Les rapports Sénégal et Burkina Faso montrent aussi des perspectives intéressantes, sous forme d’une série d’essais (programme Haute Casamance au Sénégal, « programme » sécurité alimentaire au Burkina Faso, …) mais qui sont encore à « transformer », c'est-à-dire qu'ils n'ont été que "permis" et que leur réalisation n’a pu se faire durant la. On peut les considérer toutefois comme un effet important de la convention. Dans ce contexte qui reste encore fort lié à une « logique projet », la rigueur et la formalisation méthodologique des interventions se sont sensiblement améliorées. La programmation se fait mieux, de même que le suivi de chacune des interventions. Les outils de suivi du partenariat permettent de mieux « socialiser » les discussions sur les objectifs et les ressources. On observe même de nouveaux montages « institutionnels » (autour du conseil de gestion au Burkina Faso par exemple) qui ont déjà démontré leur utilité. La qualité s’est également améliorée en termes de capacité à émarger à d’autres lignes budgétaires à l'Union Européenne : quatre projets (sur 6) présentés à l'Union Européenne ont été retenus. Tous les projets (5) introduits à Agricord ont été acceptés. Ce sont donc là des résultats importants.

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V.3. Le renforcement des capacités internes Cet objectif peut se décliner en 4 axes :

- des actions de capitalisation - la définition d’orientations stratégiques plus élaborées - l’évolution de l’organisation elle-même - le renforcement des compétences collectives des réseaux (non seulement de

ses propres équipes mais aussi celles des proches partenaires)

Au titre des capitalisations, Afdi semble avoir bien valorisé les possibilités offertes par la convention pour réaliser, en interne, des travaux de capitalisation. Ce sont en effet surtout des ressources du réseau qui ont été mobilisées pour ce travail. Or, les effets de l’exercice apparaissent limités. Les enseignements et les répercussions des capitalisations sur les pratiques et les stratégies apparaissent encore relativement faibles11. Des difficultés ont aussi été observées à réaliser l’exercice de capitalisation. Formaliser, pour un professionnel français, la façon dont sa propre filière s’est petit à petit organisée, pour en tirer enseignement sur la façon d'aborder la structuration des filières au Sud, est apparu beaucoup moins évident que prévu. Mais ce constat présente déjà en soi beaucoup d’intérêt pour l’organisation car il montre l’importance de bien sélectionner les ressources existantes dans le réseau et de les accompagner sur le plan pédagogique. Ceci corrobore d’autres bilans d’expériences (Neu/Morel 2001) plus généraux sur la difficulté qu’ont de manière générale les ONG à capitaliser sur leurs pratiques. L’exercice est difficile et demande des compétences spécifiques.

La définition d’orientations stratégiques plus élaborées reste discutable. Des avancées importantes ont été permises par la convention au niveau de la prise en compte des enjeux internationaux, mais les effets sur les interventions ne sont pas perceptibles pour l’instant. L'Afdi a tissé un réseau de relations avec les principaux leaders paysans d'Afrique (notamment à la faveur de la 2ème CdO) mais là encore, il n'y a pas de corrélation forte entre ce type d'investissement et les actions menées dans le cadre des partenariats.

Sur l’évolution de l’organisation elle-même, il subsiste des doutes. Les deux conventions d'objectifs se sont traduites par la montée en puissance des dispositifs d'appui et d'interface entre les groupes Afdi et leurs partenaires au Sud (équipe permanente de l'Afdi Nationale, animateurs régionaux, cellules pays…). La façon dont les premiers résultats de l'évaluation ont été reçus tend à montrer que les constats que nous posons – sur l'importance de mieux considérer le caractère hybride d'Afdi entre "professionnels agricoles" et "professionnels du développement" qui devrait faire sa force – ne sont pas forcément assumés.

11 Parfois même elles sont remises en cause (certains de nos entretiens montrent que certaines recommandations des capitalisations n’étaient pas forcément acceptées) et ne débouchent pas nécessairement sur des nouvelles méthodes ou outils, notamment dans le cas du conseil de gestion.

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Par ailleurs, la Convention n'a pas permis de renforcer systématiquement la participation des organisations professionnelles agricoles au financement de l'Afdi. Ceci est bien sûr très variable d'une région à l'autre mais ces résultats différenciés incitent justement à renforcer les actions d'information et de communication, sous des formes qui sont peut-être à renouveler.

Sur l’évolution des compétences collectives il semble que les conditions soient mieux réunies, en interne, grâce aux efforts importants menés en terme d’animation de l’équipe permanente, et aux dispositifs mis en place (comités pays, commissions thématiques) pour qu’une apprentissage collectif se fasse mieux et plus systématiquement. Mais les contraintes restent lourdes. Elles sont liées au fait que la plupart des bénévoles sont des paysans fort occupés par leur exploitation. En conséquence, l’organisation et la gestion des outils et des méthodes resteront encore pour longtemps le fait surtout des permanents salariés de l'association. Dans le domaine des compétences socio-politiques et culturelles, relatives à l’appréhension des contextes de ces pays, on ne voit pas d’avancées très significatives. Certes, la montée en puissance des partenaires réduit en principe les risques d'erreur, mais il n'en demeure pas moins vrai que dans bien des cas, les groupes d'agriculteurs français sont encore, qu'ils le veulent ou non, en position dominante sur le plan des moyens et donc sur le plan idéologique, ce qui amène les partenaires à "taire" une partie des réalités, ce qui conduit souvent à des échecs ou à des résultats qui ne sont pas ceux que l'on attend (par exemple l'enrichissement d'une minorité d'agriculteurs)… Enfin, le partage de compétences avec d'autres catégories d'acteurs reste timide. Des avancées en matière de partenariat sont observées dans quelques cas (Sénégal), on note une moindre défiance envers les autres acteurs (ONG, chercheurs, divers représentants de bailleurs…) qui peuvent être tout aussi "engagés" auprès des organisations paysannes du Sud que ne le sont les agriculteurs français, mais de façon générale et notamment dans les groupes locaux, on préfère rester entre soi, considérant que la profession agricole recèle toutes les compétences requises pour faire du développement organisationnel. On peut d'ailleurs remarquer que la 2ème Convention d'objectifs avec le résultat attendu n° 3 (les agriculteurs français et les OPA ont consolidé et mis en cohérence un système de coopération efficace) conforte cette tendance naturelle.

V.4. L’approfondissement du partenariat avec le MAE Le partenariat semble s’être surtout renforcé ces dernières années vis-à-vis des cellules SCAC dans les différents pays. Mais, le changement rapide de responsables dans l’administration tant à Paris que dans les pays ne permet pas de construire des relations dans la durée en dépit d’efforts soutenus de l’Afdi nationale pour les tenir au courant des avancées. C'est pourquoi l'Afdi et ses partenaires ont été parfois confrontés à des revirements brusques de politique (à Madagascar dans le passé, au

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Mali plus récemment). Globalement il semble également, mais c’est un constat plutôt général, que le partenariat « fonctionne » surtout au moment de la préparation du document de convention, un peu lors des évaluations, mais très peu pendant la mise en œuvre. A cet égard le fait de programmer des évaluations en fin de programme, ne facilite pas les liens car le processus est inscrit plus dans la perspective du renouvellement des fonds que de réflexion sur ce qui se fait et comment mieux le faire. Cette question du positionnement de l’évaluation dans le cycle de projet est cruciale. Au-delà, il ne nous a pas été fait cas de débats ou de tensions sur les questions de fonds portant sur la définition des objectifs de la convention et les modalités de sa réalisation. Des déficiences dans les attentes vis-à-vis de l'Afdi sont par contre perceptibles entre le MAE (plus attentif à la dimension développement) et le Ministère de l'agriculture (plus soucieux de promotion des produits et des savoir-faire de l'agriculture française) Les représentants du MAE considèrent enfin que Afdi n’a pas suffisamment mobilisé les ressources des OPA locales. Si cette remarque est importante dans l’absolu il convient de remarquer qu’elle n’a pas fait l’objet d’un objectif explicite de la convention. Cela témoigne, du point de vue des évaluateurs, de carences dans le dialogue.

V.5. Quelques éléments budgétaires La convention d’objectif représente environ 38% des frais encourus par toutes les interventions et le fonctionnement de Afdi. Cette somme est donc très importante. Mais le « poids » de la convention diffère selon les activités/dispositifs appuyés. Il est surtout important pour les cellules pays comme on peut le constater aux éléments suivants relatifs à l’année 2003 : - Part de la CdO dans le budget de la Cellule Afrique de l’Ouest : 78% - Part de la CdO dans le budget de la Cellule Burkina Faso : 44% (Cette part a eu tendance à augmenter entre 2002 et 2003). Le budget annuel des Afdi est à peut près structuré comme suit : - 1/3 public - 1/3 cotisation OPA - 1/3 fonds valorisés De manière plus précise les autres fonds, hors Convention d’objectifs, proviennent de :

- Ministère de l’agriculture - Ministère des Affaires Etrangères - BCTEPS (ex. Tuléar) - SCAC : (ex. Bénin- Aquitaine ; petites missions) - Subventions de la coopération décentralisée (ex. Bretagne à Madagascar)

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- ADAR (interrompu) - Fonds « pacte vert » (avec un guichet national et des guichets pour les Afdi

régionales) - Fonds de formation (pour la formation des salariés des AFDI) - Réseau Agricord

V.6. L’instrument convention d’objectifs, vu par Afdi

La convention a été un outil formidable de constitution d’un réseau. Avant il n’y avait que de simples échanges d’information. Aujourd’hui il y a une véritable gestion commune et un partage des enjeux et des moyens. Le croisement d’expériences a permis de créer des cadres et des sujets d’échanges entre Afdi, de développer des synergies et a conduit aux stratégies pays (ex. groupe Madagascar ; ex. Mali et la commission formation en appui à l’AOPP). La CdO n’a pas limité les Afdi dans leur stratégie de diversification des fonds. Elle a au contraire permis de faire plus de choses et notamment d’accéder aux fonds européens, et aux fonds Agricord. Il s’agit d’effets de la CdO. Ces dossiers ont été écrits par des assistants techniques, des responsables de cellules, avec l’appui d’Afdi Nationale. La CdO a également permis de recruter des bonnes compétences. En termes de processus de suivi-évaluation, après l’élaboration des outils en petit comité (Afdi nationale + professionnels + 1 expert), leur mise en pratique a permis d’apprendre aux membres de mieux faire des budgets et une programmation des activités. Si la maîtrise dépend encore surtout des animateurs, ce processus a généré des discussions de stratégie sur les priorités de l’intervention, sur la sélection de personnes. Ce sont là des effets non négligeables. Mais le temps a manqué pour faire les liens avec le troisième objectif sur les enjeux internationaux. Il faut en effet suivre 50 arbres logiques plus leurs compte-rendus financiers. Il est difficile d’aller plus loin dans ces conditions sans ressources humaines supplémentaires.

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V.7. Quelques éléments de conclusion sur l’instrument convention d’objectifs par rapport à d’autres instruments Afin de mieux renforcer les « échanges paysans » il nous apparaît qu’Afdi avait plusieurs types de besoin :

- un besoin de mise en contexte socio-politique et culturel des actions au Sud. Ce besoin pouvait faire partie des objectifs d’une convention mais ne l’a pas été directement. Il l’a été indirectement mais insuffisamment à travers les dispositifs de permanents qui ont pu être maintenus en France et dans quelques pays d’intervention de l’Afdi ;

- un renforcement des capacités internes en gestion du cycle de projet (suivi-évaluation-prévision). Ce besoin pouvait être couvert par un instrument tel que la CdO et l’a suffisamment été;

- un besoin de renforcement de la mobilisation des ressources au Nord. Ce besoin rentre typiquement dans le cadre de ce qu’une convention d’objectifs à pour vocation de financer (accroître les capacités à mobiliser d’autres ressources). Il a partiellement été pris en charge par dans la présente convention pour les « guichets » extérieurs (CE – Agricord), mais n’a pas fait l’objet d’un objectif explicite pour ce qui concerne la mobilisation des ressources des OPA française. Ce qui ne veut pas dire que rien n’ait été fait à cet égard ! Cependant on ne peut aujourd’hui apprécier la convention aujourd’hui à travers ce critère, dans la mesure où il n’avait pas été prévu et négocié avec le MAE ;

- un besoin de renforcement des synergies avec d’autres acteurs du développement. A cet égard il apparaît que les programmes concertés multi-acteurs, permettraient de mieux renforcer Afdi dans la recherche de synergies avec d’autres ONG françaises. Ce besoin a cependant été dans certains cas (Sénégal, Haute Casamance)) partiellement traité dans le cadre de la présente convention.

- un besoin de moyens pour accompagner plus institutionnellement des partenaires au-delà des interventions de type « petits projets ». A cet égard, la « dotation en partenariat » (instrument disparu aujourd’hui de la panoplie de la MCNG) aurait sans doute été une meilleure modalité dans la mesure où elle pouvait permettre une plus grande responsabilisation des partenaires à la gestion et l’utilisation des moyens. Aujourd’hui ces moyens restent encore fort pilotés par des objectifs plus techniques qu’institutionnels et maîtrisés par Afdi.

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VI - Conclusions

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VI. Conclusions

VI.1. D'où vient-on ? Depuis le début des années 90, l'Afdi jouit d'une reconnaissance officielle de la part des pouvoirs publics français (MAE et Ministère de l'Agriculture) pour promouvoir dans les pays en développement un modèle de développement fortement inspiré de l'expérience française. Le but avoué est aussi d'impliquer les OPA françaises, fraction dynamique de la société civile, dans cette coopération Nord-Sud, afin de tisser des réseaux d'alliés qui sont le substrat des accords politiques et commerciaux de demain. Les programmes de professionnalisation de la Coopération française ont été conçus dans ce sens et qu'ils aient été piloté par l'Afdi elle-même ou des assistants techniques, ils avaient pour mandat de s'appuyer sur et de conforter les partenariats locaux des groupes Afdi. Les réalités du terrain et notamment les dynamiques d'organisation paysanne ont amené à une remise en cause des schémas initiaux (notamment la co-gestion qui devrait s'expérimenter dans le cadre des comités paritaires de concertation) et ont conduit le MAE à prendre ses distances vis-à-vis de l'Afdi pour construire sa propre philosophie en s'inspirant de l'expérience de bien d'autres acteurs (ONG, recherche, bailleurs de fonds…) en matière d'appui aux organisations paysannes. A la faveur de cette inflexion, l'Afdi a regagné en autonomie mais avec le risque d'être cantonnée dans le domaine spécifique des échanges paysans à la base, que personne ne lui conteste. Fort opportunément, l'Afdi a bénéficié de deux Conventions d'objectifs qui lui ont permis de se construire une légitimité dans le domaine de l'appui aux organisations paysannes. Pour cela, il lui fallait changer l'image qui lui était accolée de partenariats relativement routiniers, caractérisés par des relations interpersonnelles fortes entre quelques individus, une durée sans fin du compagnonnage, l'absence d'objectifs bien définis, une propension à "materner" les partenaires et à les isoler de leur environnement, etc. Les Conventions d'objectifs ont permis à l'Afdi de prendre certaines orientations de fonds :

- construire un véritable mouvement dont la cohésion est fondée sur une charte à laquelle souscrivent tous les membres. Pour cela, il convient de décloisonner les partenariats et de mutualiser les expériences et les savoir-faire.

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Un certain nombre d'instances, suscitées par la CdO, notamment les groupes pays mais aussi les groupes thématiques, le comité projet, les journées nationales, etc. sont le moyen de renforcer cette identité commune. Les CdO vont aider les Afdi (départementales, régionales) à renforcer leur capacité d'initiative dans le milieu professionnel : les moyens (humains et matériels) et les outils de programmation et de suivi mis à leur disposition leur permettront de mettre au point de meilleures politiques de communication, d'améliorer leur reconnaissance et de mobiliser des soutiens. Progressivement, le mouvement est en ordre de marche pour servir une ambition plus vaste ;

- pour sortir d'actions micro locales, l'Afdi va entreprendre de redéployer ses activités du local à l'international. En effet, à la fin des années 90, l'Afdi accuse un certain retard dans l’établissement de relations de confiance avec les principales organisations faîtières qui se sont constituées ou qui voient le jour (Fupro, CNCR et ROPPA). L'Afdi va donc développer à partir de 2000 une stratégie délibérée de rapprochement avec les leaders de ces organisations. Elle a pour elle l'avantage de pouvoir jouer un rôle d'intermédiaire entre leaders paysans du Sud et leaders paysans français, vu les liens organiques qu'elle entretient avec les OPA (qui l'ont créée et qui l'administrent). Dès lors, l'Afdi peut espérer contribuer à faire avancer le débat sur l'avenir des agricultures paysannes (du Nord et du Sud) dans un contexte de mondialisation.

VI.2. Où en est-on ? Ce changement de politique entrepris par la nouvelle équipe dirigeante à la faveur de la 2ème CdO a profondément marqué la nature de l'organisation. L'Afdi n'est plus ce qu'elle était il y a sept ans, c'est aujourd'hui une ONG hybride en partie professionnelle agricole par sa composition sociale, et ses liens avec les OPA, en partie professionnelle du développement avec des spécialistes qui au niveau national et sur le terrain, jouent un rôle essentiel dans la conception et la mise en œuvre d'orientations stratégiques. Il s'ensuit bien naturellement des tensions entre l'Afdi Nationale et certains Afdi locales, entre élus et salariés, etc. qui sont inévitables dans ce type de mutation. Cependant, cette ambition professionnelle se heurte à un certain nombre de faiblesses méthodologiques et techniques que nous avons relevé tout au long de l'évaluation. En effet, la CdO se fixait des objectifs de "développement", très ambitieux au demeurant, et il est bien normal que le travail de l'Afdi soit apprécié selon les critères qui sont ceux de la profession. Parmi les principales faiblesses, nous avons noté plus particulièrement :

la faible continuité ou cohérence entre les actions menées dans le cadre des partenariats au niveau local et celles menées au niveau national ;

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la modestie des partenariats locaux (en termes de moyens humains et financiers) telle qu'on est en deçà le plus souvent du seuil minimum requis pour que des dynamiques significatives puissent voir le jour ; la dispersion des actions sur des thèmes de recherche action (conseil de gestion, développement local, formation professionnelle…) dont l'intérêt en soi n'est pas en cause mais dont la pertinence n'est pas toujours avérée dans le cadre des partenariats.

Ces faiblesses sont tout à fait réductibles si l'Afdi persévère dans la voie qu'elle explore depuis quelques années.

VI.3. Où veut-on aller ? A ce stade, l'Afdi a le choix entre deux voies : soit accentuer son caractère professionnel d'ONG de développement qui

cherche à s'imposer dans le domaine de l'appui aux organisations paysannes, concurremment avec les autres acteurs. Dans ce cas, il lui faut renforcer ses compétences internes et constituer un pool de personnes ressources en milieu professionnel pour offrir une expertise reconnue en matière d'ingénierie de l'organisation. Elle a sans doute intérêt dans un premier temps à resserrer ses interventions sur un nombre restreint de pays. Il lui faut également mobiliser davantage de ressources, c’est-à-dire monter des projets avec ses partenaires, profiter d'appels à proposition, voire concourir pour des appels d'offres. C'est une option qui se dessine déjà depuis ces dernières années et qui risque de s'accentuer fortement avec la fin de la Convention d'objectifs qui apportait un appui institutionnel et une aide programme. Il est évident que cette orientation conforte le caractère professionnel de l'Afdi, le rôle des permanents sur celui des bénévoles, la recherche de marchés sur les échanges paysans, la logique de l'offre sur la logique de la demande. L'Afdi tendrait à devenir un bureau d'études qui bénéficierait d'une caution professionnelle, à l'image de Fert par exemple dont l'Afdi a toujours voulu se démarquer ;

soit réaffirmer son caractère d'association paysanne de solidarité internationale et repenser son dispositif et ses modes d'intervention sur cette base, en tenant compte du contexte actuel. La montée en puissance des organisations paysannes à travers le monde fait que celles-ci disposent de capacités endogènes qui dispensent l'Afdi de s'investir autant que par le passé dans les actions de développement. On peut penser qu'avec des appuis appropriés (formation, recrutement de personnel local), l'organisation paysanne est en mesure d'élaborer son propre projet stratégique et ses programmes d'actions. Ayant renforcé l'autonomie du partenaire, l'Afdi se positionne alors sur le conseil stratégique à l'organisation paysanne. Celle-ci accepte un regard

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critique de son allié sur ses choix mais demeure souveraine et responsable de ses actions. L'Afdi serait amenée à ne plus s'engager sur le plan opérationnel dans les actions de développement (ne pas être maître d'œuvre de projets). Son rôle serait de faciliter l'accès à des références extérieures par les échanges (Sud-Nord et Sud-Sud) et d'aider l'organisation paysanne à maîtriser son environnement en facilitant l’établissement des relations avec des partenaires techniques et financiers proches ou lointains. Il s'agirait d'encourager les organisations paysannes partenaires à s'ouvrir à l'extérieur (à commencer aux autres organisations paysannes) et à avoir accès à d'autres expertises et d'autres financements et de renforcer leurs capacités de maîtrise d’ouvrage.

En sa qualité de témoin des luttes paysannes à travers le monde, l'Afdi a une responsabilité particulière en matière de communication en direction du milieu professionnel et des OPA françaises pour sensibiliser aux problématiques des paysanneries du Sud et alimenter le débat de société sur l'avenir de l'agriculture en France, à la lumière des expériences de coopération. L'Afdi est irremplaçable dans ce rôle qui justifierait une mobilisation accrue. Dans cette perspective, l'Afdi aurait intérêt à ouvrir son champ d'observation à des situations plus diversifiées : Amérique centrale (Mexique intégré à l'ALENA), Pays du Mercosur (en raison des accords UE / Mercosur en matière agricole), Pays de l'Est (nouveaux membres de l'UE) et Asie du Sud-Est (en proie à des mutations socio-économiques majeures) pour avoir une meilleure appréhension des dynamiques des agricultures paysannes à travers le monde. On attendrait enfin de l'Afdi des prises de position plus claires sur l'international, car on peut regretter que la parole en ce domaine soit monopolisée par José Bové.

La fin de la Convention d'objectifs rend possible et souhaitable une réflexion de fond sur les orientations fondamentales de l'Afdi car à notre sens, les options que nous venons d'évoquer, sans être incompatibles (comme on a pu le voir durant la convention d'objectifs), méritent d'être clairement hiérarchisées, avant de se lancer dans la quête de nouveaux systèmes de financement.