ethnographie de l'oeuvre du peintre bh desrousseaux par v. bauwens, ethnographe

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Bernard Henri Desrousseaux, un peintre amnésique Décodage de l’oeuvre par Valérie Bauwens, ethnographe, Human-Centricity

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Page 1: Ethnographie de l'oeuvre du peintre bh desrousseaux par v. bauwens, ethnographe

Bernard Henri Desrousseaux, un peintre amnésique Décodage de l’oeuvre par Valérie Bauwens, ethnographe, Human-Centricity

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La démarche ethnographique

Valérie Bauwens est une passionnée de l’humain. Elle l’étudie en tant qu’ethnographe, l’interroge en tant que coach et le capture à travers la photographie. Son travail ethnographique sur le peintre Bernard Henri Desrousseaux s’inscrit dans le cadre d’un projet qu’elle réalise avec sa partenaire Laure Kloetzer pour leur entreprise Human-Centricity. En observant des artistes dans leur quotidien, Valérie et Laure ont pour ambition de déchiffrer leurs comportements pour faire émerger les mécanismes qui sous-tendent le processus créatif. Pour cela, Valérie et Laure passent des journées entières à accompagner les artistes dans leurs ateliers, à leurs expositions, lors de rencontres avec d’autres artistes. Elles récoltent témoignages, photos d’objets, de lieux. Elles observent les habitudes, les gestes, les inventions comme par exemple un trépied pour appareil photo accroché au plafond pour prendre des clichés depuis en haut, repeindre le casque de vélo, une composition de bois et les feuilles d’olivier ramassés au cours d’une ballade. Grâce à sa profondeur et étendue, le terrain ethnographique permet de cerner les gens au plus près de leur réalité. De ce fait, nous espérons que cette brochure vous apportera quelques clés de lecture nouvelles quant au travail de Bernard Henri Desrousseaux, sans toutefois trop dévoiler des secrets de l’artiste. Pour plus de renseignements, contactez : [email protected] Articles déjà publiés sur les résultats de notre étude : - Genoud, P. (2013) « Qu’est-ce qui rend votre journée de travail ludique et créative ? », La Muse, Observatoire Technologique Genève - Guillaume Parodi (2013) « Le processus de création est le même chez les artistes et les entrepreneurs », L'Atelier.net

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Biographie de l’artiste inspirée du texte de Françoise-Hélène Brou

Bernard Henri Desrousseaux, né à Menin en Belgique, le 5 juin 1953 arrive en France à l'adolescence. Il étudie à l'Ecole Nationale Supérieure d'Arts et d'Industrie Textiles de Roubaix. Sa peinture demeure ancrée dans cette région frontalière, entre deux, lieu « au ciel si bas, … si gris » que les silhouettes et formes deviennent ténues. Mais comment peindre son enfance quand sa maison a été détruite pour faire place au parking d’autoroute de la frontière franco-belge, aujourd’hui fantôme. Beaucoup d’ombres, de blanc sur blanc, de chemins qui se cherchent. Comment peindre son école rue du paradis à Rekkem, ou la commune frontalière de « Risquons-tout » sans utiliser une bonne dose d’humour et dérision. Alors chimiste coloriste, il s'installe à Paris. Rencontre et hasard, il approche le milieu artistique pour s'y inscrire progressivement et met un terme à sa carrière initiale, la chimie. Il en garde dextérité, ordre, précision, une connaissance technique certaine des matières. Il intègre, l'Université Paris VIII en Arts Visuels et L'Ecole d'Arts de Saint Denis et travaille sous la direction des artistes, Quentin Van Offel Jean René Joly et Michel Aksent. Il ouvre son premier atelier et coproduit une commande publique, un ensemble sculptural monumental "Les Gardes". Il contribue aux actions associatives d'artistes internationaux et organise expositions urbaines et échanges culturels. Ces activités et expositions l'amène en Suisse pour finalement s'y établir. Simultanément, il crée "trace" Ecole d'Arts Visuels et se consacre à la sensibilisation visuelle et démarche artistique. Il installe son atelier à Lutry. Ses sites : http://bhdesrousseaux.com http://bhdesrousseaux.over-blog.com/ http://artsvisuelstrace.over-blog.com/

« Avoir une démarche artistique, c’est dire

ce que tu as dans le bide. C’est pas une

histoire d’esthétisme. C’est avoir de la patience. C’est

quelque chose qui s’établit à long terme. Un truc dans lequel tu te projettes. Quand tu

peins, tu te racontes. Tu racontes et te

racontes »

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Quelques mots de l’ethnographe à l’artiste Quelques mots pour résumer Bernard

INVENTEUR « Ca ne vous arrive jamais de vous lever le matin de regarder votre grille pain et de le reconstruire ?». Designer en herbe, Bernard remet tout en question, déconstruit pour reconstruire, mieux, plus simple. Grille-pain, politique, finance, ses systèmes d’accrochages pour ses expositions, tout y passe.  

SENSIBILITÉ Sensibilité, il en déborde. « Petit, j’étais sensible à certaines choses qui m’ont d’ailleurs un peu, voilà,… comme ça… » « Il y a une chose qui m’a rendu très réceptif en tous cas à toutes les personnes autour de moi. Ca c’est sur »  

SIMPLICITÉ De retour d’une ballade, un bout de bois, quelques feuilles, voilà, l’œuvre d’art du jour. Les citrons seront alignés sur l’étagère. Pas de condiments compliqués dans l’armoire, juste du sel, du poivre, de l’huile d’olive. Allez à l’essentiel. Valérie : « C’est quoi alors ton but dans la peinture ? » Bernard «Difficile à dire, peut-être la simplicité. Comme dans la cuisine. Voilà, je peins comme je fais la cuisine». C’est beau, c’est bon. Ca fait du bien.  

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GENEROSITÉ

.

Tout d’abord, Bernard ne compte pas. Il a besoin de partager. Après une exposition « J’ai l’impression d’avoir partagé un peu de moi avec les gens » « J’espère toujours que la personne va s’approcher de moi, qu’il va y avoir une complicité… Quand je sens une complicité, je suis affolé... Elle m’a débusqué » « Peindre c’est forcément pour communiquer avec les gens »

RIRE Quand je lui demande, et là, c’est quoi les petites croix sur ce dessin, il invente une réponse et éclate de rire « Alors, là, c’est le cimetière des milles pattes ». Le voyage n’est jamais ennuyant avec lui.

TECHNIQUE Il a le geste léger, mais intentionné. Sa technique, il n’arrête pas de la peaufiner « C’est pas de la musique, c’est une suite de sons, de vides. Enfin, tu peux appeler cela de la musique. C’est comme quand je dessine. Je fais des traits, des espaces. C’est ça qui m’intéresse dans la musique »

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Sa série de peintures: Rhizome

« Un rhizome*, c’est un lieu de nourriture. On est tous quelque part un rhizome quand on est enfant. On a tout ce qu’il faut à l’origine pour grandir. C’est une matrice nourricière. C’est bourré de réseaux. Il n’y a pas de début ni de fin. On est dans la naissance de quelque chose. Il faut naitre sans arrêt. Artistiquement et même dans la vie, si les gens pouvaient fonctionner comme un rhizome, ce serait pas mal. C’est l’idée la plus proche de mon mode de fonctionnement. » *Définition « Rhizome » : Tige souterraine vivace, généralement à peu près horizontale, émettant chaque année des racines et des tiges aériennes - Larousse

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Sa série de peintures: Rekkem -Fonds de jardin -Plans d’évasion -Paradijsstraat (rue du paradis) -Hemel (ciel)

« Tu vois ma maison c’est devenu ça »

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« Tu marches comme un fantôme. Tu ne poses pas les pieds au sol. Tu lévites, tu « l’évites »… c’est marrant la coïncidence des mots. » « Je prends le chemin pour aller chez mon grand-père, mais je me perds en chemin »

Fonds de jardin  

« Je fais un plan large, un gros plan. Ca distord. Par exemple les poireaux au fond du champ sont immenses. Il y a une inversion des grandeurs, c’est intrigant. C’est le monde de l’enfance. »

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Paradijsstraat « Mon école » « Quand j’étais petit, j’allais écouter beaucoup d’histoires bibliques. Mon grand-père était très croyant. Il y avait l’histoire du paradis… Et bien moi j’en suis resté là… quand je peins, je me dis, putain c’est con, comme ça aurait été bien… J’aimerais ne pas croire en la méchanceté »

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« L’artiste a dans sa vie personnelle les mêmes exigences… que ce soit sur le

plan affectif… des exigences d’absolu… » « L’absolu, c’est peut-être quelque chose que j’ai rêvé quand j’étais petit. C’est quelque chose que l’on ne va

jamais atteindre »

Hemel

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Autres

« De voir où je suis né, ça n’a aucun effet sur moi. Ce qui reste, c’est ce qu’il y a sur mes toiles. Ce

sont les émotions, pas les images réelles. Les émotions qui restent, créent la 2e émotion, les

images sur mes peintures. J’enchaîne sur la première émotion, pas une image précise. Je peins comme un amnésique. C’est cette zone

subtile… Tu lis entre les lignes tout ce que tu imagines autour du texte. Ce que tu racontes,

c’est ce qui est autour des choses. Ce n’est pas ce que les autres voient, mais ce qu’il y a autour. Pour

les observateurs, ce n’est pas simple. Ils se retrouvent avec une énigme. Eux ils voient autre

chose. Pour moi, c’est une base différente. C’est le vécu sublimé… Tu peins des émotions d’émotions.

C’est pour ça que les gens ont des difficultés à rentrer dedans. C’est un peu ça»

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« Il y a un truc que j’aimerais raconter, c’est le balancement. Je remonte un peu à la

source. C’est pas ma vie de gamin qui est intéressante, c’est la sensation. Le

balancement, cette espèce de flottement. Tu flottes dans l’air. J’ai toujours voulu faire

flotter les gens. T’es parti, t’es dans ton rêve. Tu songes. Tu es bien quand tu songes. Je pourrais rester une heure comme ça. Alors

des mots m’échappent et je suis capable de dire je t’aime »

 

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Merci Bernard pour ces moments de partage.