essais sur l'émerveillement -...

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É C R I T U R E

Cette collection voudrait être un lieu de rencontre des méthodes cri- tiques les plus diverses s'exerçant non seulement dans le champ de la litté- rature, mais aussi pour d'autres for- mes d'expression : musique, peinture, cinéma. Les rapports de la littérature et de la société, de la littérature et de la psychanalyse, l'analyse du récit, comme certains genres littéraires, s'y trouvent définis dans des perspectives neuves. Quels liens unissent — ou op- posent — écriture littéraire et écriture musicale, filmique, picturale ? Com- ment des écrivains, des peintres, des musiciens ont-ils dit ou écrit la pein- ture, la musique ?

Chaque volume se propose de dé- gager les aspects essentiels d'une ques- tion théorique qui se trouve éclairée par l'analyse d'un certain nombre d'oeuvres. La forme de l'essai, tradi- tionnellement la plus libre qui soit, est bien celle qui convient à ces pers- pectives.

Gérald ANTOINE Vis-à-vis ou le double regard critique

Jean BELLEMIN-NOËL Vers l'inconscient du texte Les contes et leurs fantasmes Biographies du désir

Georges BENREKASSA Fables de la personne

Michel BUTOR et Michel LAUNAY Résistances. Conversations aux Antipodes

Roger CAILLOIS Rencontres

Georges-Emmanuel CLANCIER Dans l'aventure du langage

Michel COLLOT La poésie moderne et la structure d'horizon

Jean DECOTTIGNIES L'écriture de la fiction

Béatrice DIDIER L'écriture-femme La musique des Lumières Ecrire la Révolution iy8g-iygg

Claude-Gilbert DUBOIS L'imaginaire de la Renaissance

Marc EIGELDINGER Lumières du mythe

Françoise Es CAL Le compositeur et ses modèles

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ESSAIS SUR

L ' É M E R V E I L L E M E N T

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É C R I T U R E

C O L L E C T I O N D I R I G É E PAR

B É A T R I C E D I D I E R

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ESSAIS

SUR

L 'ÉMERVEILLEMENT

Jean Onimus

Presses Universitaires de France

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ISBN 2 13 0 4 2 4 7 4 0

ISSN 0 2 2 2 - 1 1 7 9

D é p ô t l é g a l - I re é d i t i o n : 1 9 9 0 , f é v r i e r

c g P r e s s e s U n i v e r s i t a i r e s d e F r a n c e , 1 9 9 0

108 , b o u l e v a r d S a i n t - G e r m a i n , 7 5 0 0 6 P a r i s

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Un degré élevé de culture est atteint quand l'homme surmonte ses terreurs, ses idées superstitieuses et reli- gieuses... Une fois parvenu à ce stade de libération, il lui reste à fournir son plus intense effort de réflexion pour triompher encore de la métaphysique. Après quoi, cependant, un mouvement rétrograde est nécessaire : il lui faut, de ces représentations, comprendre la justification historique autant que psychologique, il lui faut reconnaître que les plus grands progrès de l'humanité sont venus de là et que, faute de ce mouve- ment rétrograde, on se priverait du meilleur de ce que l'humanité a réalisé jusqu'à présent.

Nietzsche, Humain trop humain, I, Gallimard, 1968, p. 39.

Une fois que l'on tient solidement le vrai et que l'on ne craint plus de se perdre en de vaines lubies, la sagesse devrait revenir sur ses pas, reprendre et recueillir comme choses humaines tout ce qui fut créé, forgé, pensé, songé et cru... Il n'y a pas de chose au monde qui n'ait été ornée de rêves, tenue pour signe...

Valéry, Dialogue de l'Arbre, t. II, p. 189.

Tout être humain produit une pensée empirique/ rationnelle/pratique et une pensée symbolique/mytho- logique /magique. L'une et l'autre ont un instrument commun, le symbole, qui, dans le premier cas devient principalement signe renvoyant à la chose, dans le second cas devient principalement porteur concret de la présence de la chose... Nous avons un besoin impérieux de la correction empirique/logique/rationnelle sur toutes nos activités mentales, mais nous avons aussi un besoin vital de l'étoffe imaginaire/symbolique qui co-tisse notre réalité et dont sont faits les mythes.

Edgar Morin, Lettre Science-Culture du GRIT, n° 22, février 1987.

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Introduction

« L'être qui s'émerveille est beau comme une fleur »

Il est beau parce qu'il s'ouvre et révèle ainsi les merveilles cachées qu'il porte en soi. Avec quelle intensité une touffe de gentianes se déploie au soleil sur un pâturage de mon- tagne ! Avec quelle hâte un cerisier s'enneige au printemps ! Et ce déploiement des corolles de tulipes au lever du soleil !... En s'ouvrant, les fleurs accomplissent leur être dans une sorte d'exubérance de vie. Or de tous les vivants, l'homme est celui qui peut s'ouvrir le plus, presque à l'infini : depuis les millions d'années que l'espèce existe, elle n'a pas encore atteint ses limites ! L'homme ne cesse de s'ouvrir au monde, à soi-même, aux autres, et c'est dans cette mesure qu'il approfondit sa vie. S'il reste replié, faute de sève, faute de lumière, il s'étiole et cesse de vivre.

Si l'émerveillement est signe d'ouverture, il est donc au cœur de la vie, celle des sens et celle de l'esprit. Et, réciproquement, l'indifférence est signe d'ankylose phy- sique, morale, intellectuelle. La qualité d'une existence peut donc se juger sur ce critère... Curieusement, à une époque où la science nous met en présence d'un monde fabuleusement vaste et complexe, tel qu'aucun de nos

i. Paul Valéry, Dialogue de l'arbre, Œuvres, t. II, éd. Pléiade, p. 185.

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ancêtres n'aurait pu l'imaginer, où la technique met à notre disposition des machines dont les performances dépassent nos rêves les plus fous, il semble que nos facultés d'émerveillement s'affaiblissent. Nos sens, faute d'usage dans un environnement préfabriqué, perdent leur acuité; nos efforts de présence consciente se réduisent à une activité intellectuelle abstraite et fortement mécanisée. Nous avons, pour ainsi dire, cessé de rencontrer nos motifs d'émerveillement. Notre participation (aux choses, à nous-mêmes, aux autres) s'est ternie par l'habitude et la distance.

L'habitude : nous vivons dans une culture répétitive, où la quantité de redites masque le fond réel permanent de la nouveauté.

La distance : nous nous sommes construit un milieu parfaitement prosaïque, hermétique aux voix de la nature, où ne règne qu'une logique froide — jusque dans la planification de nos plaisirs.

La poésie, écrit Yves Bonnefoy, est la mémoire d'une relation d'unité et de totalité avec le monde, qui est contredite par la plupart des conduites que nous avons à tenir dans le quotidien depuis quelque deux siècles... Elle est la nostalgie de cette expérience spirituelle originelle du tout et de l'unité d u m o n d e 2 .

Or cette mémoire, cette nostalgie se sont effacées chez la plupart, et les poètes ne sont plus que des marginaux : personne ne se sent concerné par leur discours !

Cet appauvrissement vital, cette mortelle distance et toutes ces indifférences inspirent l'inquiétude : serions- nous au seuil d'une mutation qui, en hypertrophiant nos structures d'analyse (notre cerveau gauche) donnerait l'al- lure de rémanences en voie de disparition à nos facultés de synthèse, c'est-à-dire de participation aux réalités concrètes qui s'offrent à nous à chaque instant ? Il en

2. Yves Bonnefoy, revue Lire, n° 140, p. 26.

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résulterait un tragique déséquilibre et un tarissement des plus riches sources du bonheur de vivre.

L'objet de ce livre est d'introduire un test : êtes-vous encore en état de vous émerveiller à la façon des poètes et des hommes d'autrefois ? Les fibres où passait la sève sont-elles rompues ? Sentez-vous encore les caresses de la lumière ? Les songes qui hantent les eaux, les avez-vous évacués ? Entendez-vous le langage des arbres ?, etc. Mais, plus que tout, avez-vous conscience de la nourri- ture qu'un accueil ouvert et attentif au monde peut fournir à votre sensibilité, à votre imagination, à votre bonheur de vivre ? Et ne faudrait-il pas, alors, de toutes vos forces, par simple exigence de survie, changer votre manière d'être, votre style de vie et l'éducation que vous imposez aux jeunes ? Ouvrir le monde actuel à la poésie pour le sauver des multiples formes de désenchantement et de robotisation qui le menacent ?

Nous abusons du regard : la vue nous apporte des informations rapides, faciles à analyser, à comparer, à remémorer; c'est le plus intellectuel de nos sens et nous l'avons, naturellement, hypertrophié.

Nous nous environnons de belles images, rutilantes, accrocheuses; nous en sommes même submergés; mais elles se dégradent vite parce que personne ne s'y attarde, et la production s'accélère à la mesure de la consomma- tion. Images sans écho, comme la musique au supermarché ! On ne regarde ni n'écoute, mais cela remplit l'espace, le temps, cela meuble le vide : un écran commode pour ne pas voir, pour ne pas écouter. L'insignifiant sature, parce qu'il reflète une insignifiance globale : à quoi bon ouvrir les yeux, s'attarder à contempler, puisqu'on ne rencontre que des images de choses dont le charme éventé ne dit plus rien ?

Nous avons un peu perdu le goût de sentir, de percevoir le caractère d'une surface, la singularité d'une matière. Ce que nous touchons et manions est répertorié, assimilé

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et n'intéresse qu'en vue de l'action. Mais surtout nous avons cessé d'écotiter : les bruits, nous les avons aussi réduits à des éléments d'information utile et c'est pour ne pas l'écouter que nous assourdissons le silence avec nos musiques d'ambiance. Ecouter suppose une halte dans l'action, une légère concentration, une ouverture aux aguets. Mais nous sommes trop pressés, trop occupés pour prêter l'oreille au retentissement en nous de la nature. Pas plus qu'une odeur, une saveur, la caresse ou la rugosité d'une surface, l'écho intime ne se laisse analyser : c'est une irréductible preuve de présence, une interaction passagère mais profonde entre l'existence exté- rieure et nous-mêmes. Pour bien écouter, il faut parfois fermer les yeux, il faut prendre son temps, il faut se donner à ce qu'on accueille et le saisir tout entier sans trop choisir. On s'aperçoit alors que ce qu'on rencontre à chaque instant, dans la plus banale existence, est loin d'être inerte, n'est pas, en tout cas, cet objet abstrait, arraché au réel qu'on manipule familièrement, qu'on éli- mine de l'existence aussitôt qu'on a prononcé le mot adéquat qui sert à le remplacer. En fin de compte, nous n'écoutons résonner en nous que ce qui n'a pas été immé- diatement identifié et qui, pour un instant, échappe au langage; mais alors on préférera s'en débarrasser en l'ignorant !

En réalité, rien n'est absolument silencieux : « Le monde, dit Mircea Eliade, n'est pas muet ni opaque — le cosmos vit et parle. »3 La réalité la plus ordinaire n'attend que d'être interrogée... « Les arbres sont gonflés de ce langage, affirme Le Clézio, chaque feuille verte brille et vibre sur sa tige parce que le sens approche... et puis rien, cela s'en va. »4 Evidence poétique ! Ce « langage des fleurs et des choses muettes », tous les poètes y sont sensibles, tous ont éprouvé le même émerveillement (le monde n'est pas lourdement et définitivement stupide : il

3. Eliade, Le Sacré et le profane, coll. « Idées », p. 139. 4. Le Clézio, L'Inconnu sur la terre, Gallimard, 1978, p. 35.

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a des secrets à nous communiquer) et la même frustration (à peine entamé, le dialogue s'efface et les choses retom- bent dans leur léthargie).

Ce qui interrompt ces « voix » et l'écoute qu'on veut bien leur porter, c'est le parti pris utilitaire : aussitôt remis à sa place (par le langage prosaïque et l'habitude), la nature se tait, s'éloigne et n'est plus que matière à exploitation. « Le pouvoir de l'homme sur l'univers, dit Mikel Dufrenne, s'accroît à mesure que se détendent les liens que tisse la perception. »5 Dès qu'une chose devient un ustensile (fût-ce une simple pierre mise en place dans un mur), elle tend à se fermer en se réduisant aux services pratiques qu'on en attend; on la ramène à des fonctions simples, on en fait une abstraction. Ce qui demeure d'elle n'est qu'un mode d'emploi. Mais, du même coup la chose qui donnait prise au rêve, mobilisait en nous l'imagination et les archétypes d'un immémorial inconscient, s'opacifie et devient muette : elle se ferme. Il faut un puissant effort d'imagination créatrice pour réveiller un « ustensile » et y réincarner notre imagination. Guillevic, qui a réussi à poétiser les rochers, les meubles, les villes et même les figures géométriques (quel exploit !), avoue un seul échec :

J'ai essayé avec le ciment. Il ne sait rien6.

Pure matière, comme les résines plastiques, les sciures, les pâtes que produit l'industrie : ni les sympathies de l'imagination ni la caresse des mots ne peuvent les arracher à leur néant.

La transformation en objet de consommation, en outil, en moyen enlève aux réalités leur fraîcheur de créatures.

5. Mikel Dufrenne, Le Poétique, pup, 1963, p. 141. 6. Guillevic, Sphère, p. 61.

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On les viole, on les mutile, on les réduit, on les tue : toute exploitation est asservissement. Nous avons totale- ment éliminé ce genre de scrupules, mais les peuples anciens, en offrant des prémices aux dieux, tentaient d'excuser l'insulte qui allait suivre. S'approprier c'est profaner : le dessaisissement est commun à l'approche esthétique, poétique et religieuse. Il fallait, pour com- penser l'appropriation, rendre intensément sacrée (sacri- fier) une partie de ce qu'on allait utiliser : la première pierre d'une maison, la première gerbe de blé, la première grappe de vigne... Sacrifier c'est placer sur un autel, honorer, contempler, célébrer en beauté, mettre en valeur, s'interdire de consommer : donner. Rien ne montre mieux le contraste entre une conduite utilitaire et la participation respectueuse, d'autant plus intime qu'elle met de côté, très loin, dans l'intouchable et l'ineffable. La relation esthétique, religieuse, c'est-à-dire, d'un mot, poétique, rend à la chose envisagée son authenticité de créature unique, irremplaçable. Celle-ci s'irise alors de significa- tions de toutes sortes, et les rêves l'environnent, parce qu'elle est à part, à l'abri de ce qui dégrade : elle réalise ainsi son essence concrète : un rocher sacré est plus rocher qu'un autre, plus totalement rocher avec sa force intacte, sa texture massive, son inquiétant silence. Les Japonais sont passés maîtres dans l'art d'introduire le sacré dans leurs demeures : un arbre miniature, un jardin miniature, une grosse pierre dans une cour sablée deviennent des points d'ancrage pour les besoins humains de partici- pation et de contemplation. Sans eux, quelle atrophie menace les facultés d'imagination qui sont les germes de toute la vie mentale !

Faute de mieux, faute d'avoir disposé des objets « sacrés » dans nos appartements, des œuvres d'art, ou de simples fruits, des fleurs, un caillou, une écorce d'arbre, supports de contemplation (derniers vestiges de poésie dans notre univers fonctionnel), nous pouvons encore essayer d'animer (de rendre à la nature) les ustensiles, même les plus dégradés, de notre ménage. C'est un

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excellent exercice, parce qu'il force à redevenir créatif et qu'il réveille les puissances jeunes qui demeurent en nous. Prenez, par exemple, votre poêle à frire et, au lieu d'y verser des œufs battus, posez-la sur un socle au centre de la pièce. Que va-t-il se passer ? Il faut vous asseoir et attendre. Considérez paisiblement cet objet; oubliez son nom, sa fonction; regardez-le d'un œil neuf, si possible, naïf. Peu à peu la chose insolite qui a élu domicile chez vous va émettre des signes et se charger de toutes sortes de sens. Les reflets de la lampe sur le fond un peu gras s'étalent, flamboient, le long manche se dresse comme un appel dérisoire; devenu étrange, baroque, il va peut-être accrocher votre rêverie. Une interaction intéressante est en train de se développer : vous vous projetez sur l'objet et l'objet vous aide à vous révéler. A ce moment, si vous étiez artiste, vous aimeriez peindre la chose, et, si vous étiez doué, cette poêle pour- rait peut-être s'immortaliser !

Ce qui nous entoure, même les rebuts, les déchets, peut s'animer ainsi sous notre regard pour peu que nous nous en donnions la peine : on dirait même que les choses n'attendent que cela pour devenir vraiment ce qu'elles sont, pour s'accomplir. Le regard contemplateur pénètre jusqu'aux essences et fait mieux exister le monde.

Mais, par un effet de retour, c'est nous-mêmes qui allons en profiter. Quand on cesse de résorber le perçu dans le langage de l'explicite, quand, après avoir nommé, on se donne la peine de regarder et de s'apercevoir que les choses ne se réduisent pas à leur nom, c'est-à-dire à une simple signification conceptuelle, il est évident qu'autour de nous le monde va s'animer et que nous ne serons plus aussi seuls. Au lieu de nous sentir « jetés » — abandonnés dans l'existence (ce que les philosophes témoins de notre temps ne cessent de nous répéter) —, nous nous sentirons, en quelque sorte, chez nous, dans un monde humanisé, capable de nous nourrir, non seulement physiquement mais poétiquement. « Lorsqu'un homme ne se rend pas compte de sa parenté avec le monde il vit dans une prison

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dont les murs lui sont hostiles. »7 Et il est bien vrai que nous nous sommes enfermés en nous fermant au monde ! Nous branchons, autant que possible, notre « pilote automatique » et nous laissons fonctionner nos habitudes, ne tenant en état de marche que notre machine intellec- tuelle. Nous regardons sans voir, nous entendons sans écouter, installés dans notre langage à nous, comme si la nature n'avait rien à nous dire dans le sien.

Ainsi, faute, dans cette vie prosaïque, de mobiliser nos imaginations, nous risquons de nous réduire à un simple faisceau de fonctions. Les contacts vivants dynamisent nos différences, nous font découvrir nos goûts, nos apti- tudes créatrices et développent la joie d'être au monde. Chacun réagit à sa façon et peut défouler sur l'écran qu'il a choisi des tropismes personnels dont il avait à peine conscience. L'inconscient qui se manifeste au contact de la nature est hérité d'un très lointain passé qui dépasse largement l'inconscient familial ou sexuel. Nos ancêtres ont construit leur vie intérieure sur le modèle des fleuves, des lacs, des montagnes, des arbres, etc., mais plus que tout, de la nuit et du jour. Les éléments sont devenus les archétypes de leur imaginaire, véritables organes psychiques ou catégories existentielles, analogues aux membres de notre corps, formés au contact des réalités physiques; nous possédons, avant de naître, engrammés dans notre héritage, ces grandes figures dont la nature nous apporte au cours de nos vies la révélation. Notre émerveillement en présence d'un lac, d'un sommet, d'un oiseau, d'une source, c'est d'abord la joie de reconnaître des choses que nous portions déjà vaguement en nous et qui s'ajustent au réel; cela nous permet de prolonger en profondeur et de déployer de vastes secteurs méconnus de nos sensibilités.

Or, dans la vie actuelle, nous n'avons affaire, en géné- ral, qu'à des objets de série, éléments de cette « méga- machine » qu'est devenue la société. Notre culture rend

7. Rabindranath Tagore, Sadhana, A. Michel, 1971, p. 17.

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le cosmos inerte, muet : plus de signes, plus de messages, rien à déchiffrer : les choses sont claires et tout de suite épuisées. Il en résulte une réalité globalement absurde et, dans le détail, insignifiante. Il n'y a rien au-delà; nul « arrière-pays », pas de place pour la rêverie : nous avons tout démystifié. Et nous voilà seuls, absurdes dans un monde absurde. YJhomo faber tend à se réduire à l'état de fantôme inconsistant. A force de s'extérioriser dans l'action pratique, il vide sa propre existence de son poids de vivante présence; devenu lui-même objet dans un univers d'objets, il vit hors de sa durée concrète, dans un univers de répétition, pareil à celui des automates. C'est ce fantôme, répété à des millions d'exemplaires, que Giacometti a représenté en statuettes filiformes : 1' « homme qui marche », dérisoire produit d'un monde devenu inhumain.

« Nous devons opérer une démystification en sens inverse », nous dit avec force Mircea Eliade8, c'est-à-dire démystifier notre parti pris de prose, notre parti pris idéologique de positivisme plat. Comprendre à quel point nous faussons la réalité et mutilons notre propre nature en nous privant de participations éclairantes et nourri- cières. Il faudrait, ajoute Eliade, se lancer dans une exploration « des productions profanes, des langages de la littérature, des arts plastiques, du cinéma ». Nous y trouverions, dit-il, « bien des éléments propres au sacré, bien qu'il s'agisse évidemment d'un sacré ignoré, masqué ou dégradé » : un « dieu très atténué », comme dit joliment Supervielle. Ce que nous avons paradoxalement tenté en « esthétisant » notre poêle à frire serait à faire, avec plus de sérieux, à l'égard des œuvres souvent terribles, tra- giques, que produit notre culture profane. On y trouve- rait (chez les peintres, cinéastes, sculpteurs, écrivains à succès) une forme, non pas « atténuée » du sacré, mais une forme primitive, sauvage, non élaborée, témoignage de la crise dans laquelle nous vivons.

8. Mircea El iade, The Quest, Univ. o f Chicago Press, I969, p. 64.

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Plus nous nous éloignons du réel, plus il devient massif, écrasant. Les cultures les plus barbares savaient se protéger sous un feutrage de mythes et de symboles ; les modernes sont nus, sans défense, et, si savants soient- ils, ils sont mal préparés à accueillir une réalité devenue rebelle à tout enracinement. Quand nous étions encore capables d'écouter la nature, une connivence s'établissait : nous nous sentions chez nous. Elle nous accueillait dans la mesure où nous acceptions de l'accueillir et de parti- ciper à sa vie. Ce genre d'accueil se situait à un niveau que la raison nous a forcés à dépasser et à mépriser. En nous rendant maîtres et possesseurs de la nature, la pensée abstraite nous a déracinés : les sources de la sève, qui nourrissait nos rêves, ont peu à peu tari et nous avons trouvé devant nous une réalité étrangère, avec laquelle tout contact était impossible, voire ridicule. Cette séparation a eu des effets considérables : nous voici de plus en plus savants, habiles et dominateurs, mais de plus en plus étrangers à nous-mêmes, exilés dans un monde qui nous ignore, privés d'âme dans une réalité sans âme, allégés de ce qui faisait notre profondeur et donnait un sens à nos existences.

De cette aliénation, le roman de Michel Tournier, Vendredi ou les Limbes du Pacifique, procure une intéres- sante illustration : Robinson a d'abord réagi en homo faber : il met son île en exploitation, prétend en « admi- nistrer » les ressources et fait de Vendredi son esclave. Sa puissance, en définitive, se fonde sur son savoir, mais aussi sur une poudrière et des armes à feu. Après la catas- trophe, lorsque ses installations sont détruites par une explosion et qu'il devient l'égal de Vendredi, c'est ce dernier qui prend les choses en main. Tout change! On ne compte plus les jours, on rend la nature à sa sau- vagerie et Robinson plonge, émerveillé, dans les réalités cosmiques de l'instant. Il devient contemplatif, poète; il s'amuse comme un enfant. Son temps n'est plus aspiré en avant par les travaux urgents dont il s'est imposé le devoir : il s'est installé, à l'imitation de Vendredi, dans

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une sorte d' « éternité d'innocence »9, située en deçà et au-delà du temps administré en vue de l'utile. Et voilà qu'une « vigilance émerveillée » s'éveille en lui : rien ne vient plus ternir la magique et toujours renaissante nou- veauté de la nature. Robinson émerge d'une indifférence dont il n'avait pas conscience et peut entrer directement en « communion avec les éléments ». La lyre éolienne que fabrique Vendredi est un parfait symbole de cette participation : la musique qu'elle émet ne se développe pas dans la durée selon ses structures propres; elle ne se détache pas du réel : « elle s'inscrit tout entière dans l'instant »; elle n'est pas humaine mais cosmique.

Robinson s'éloigne ainsi de l'homme à systèmes, à principes, de l'homme efficace et réalisateur que son éducation avait construit. Mais, symétriquement, quand se présentera le bateau sauveur, plein de gens civilisés, c'est Vendredi qui est séduit : il quitte l'île tandis que Robinson, qui s'est approché d'un bonheur intemporel dans la nature, choisit d'y rester et d'y rester (encore un symbole) avec un enfant.

Ce récit simplifie les contrastes et pousse à la caricature, mais il donne à réfléchir. Heureux qui peut garder intacte l'innocence contemplatrice de Vendredi tout en s'effor- çant de jouer son rôle social ! Heureux qui préserve son enfance dans l'âge mûr ! Heureux ceux qui osent et savent rester fidèles à ce qu'il y a de plus profond en eux : la poésie.

Ecouter, être attentif, entrer en contact, se donner la peine de contempler, ne serait-ce qu'un instant, la lumière de ce jour, sentir passer un nuage... Très bien ! Mais n'est-ce pas aussi se divertir, s'immerger dans le multiple, se laisser fasciner par le « voile des illusions » et négliger l'essentiel ? N'est-ce pas, en définitive, s'éloigner de soi et s'étourdir dans l'éphémère ? Est-ce vraiment un bon

9. Michel Tournier, Vendredi ou les Limbes du Pacifique, éd. Folio, p. 219-230.

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moyen d'enrichir et d'approfondir son existence, et ne vaudrait-il pas mieux s'occuper des choses sérieuses ?

Il faut ici prendre garde et réagir contre certains stéréotypes. On nous a trop souvent appris à ramener la conscience à la self-conscience qui est la présence à soi, l'enfermement dans l'analyse intime, l'isolement dans la méditation. De grandes âmes ont suivi cette voie, celle de la rupture avec le monde et de la quête intérieure; elles sont parvenues ainsi à l'expérience plénifiante de l'extrême. Il n'est pas question de douter de la valeur spirituelle de ce genre de renoncement, de cette « kénose », de ce vide que l'on fait en soi : c'est assurément le chemin de la profondeur. En fait, ce renoncement consiste à mettre à l'écart l'activité matérielle, à éviter de se plonger, à corps perdu, dans les intérêts et soucis de la vie active, à se ménager un espace de recueillement. Mais c'est précisément l'objectif que vise la contemplation dont nous venons de parler ! Dans les deux cas on s'efforce d'in- terrompre le cours du « divertissement » quotidien et d'accroître le niveau de conscience. La seule différence c'est que, d'un côté, on commence par fermer les yeux, de l'autre, on s'efforce de les mieux ouvrir ! D'un côté on choisit la nuit des sens, l'introversion, les longs silences intérieurs et les méditations solitaires, afin d'entrer directement en contact avec l'Essentiel. C'est la voie des mystiques, et c'est sans doute la plus directe : quiconque vise l'absolu doit évidemment renoncer au contingent. Mais la participation créatrice aux instants qui s'offrent n'est pas moins approfondissante : poétique, esthétique, désintéressée, elle s'écarte aussi de l'appropriation et du divertissement; elle met en état d'accueil et de don; l'émerveillement qu'elle procure ouvre la conscience à des valeurs transcendantes : l'harmonie, la beauté qui submergent alors le cœur peuvent provoquer une pléni- tude d'extase. Plonger dans les apparences ? Pourquoi pas ? En s'enfonçant en elles suffisamment loin on atteint une incroyable profondeur, car ce sont ces « apparences », sans cesse neuves et renaissantes, qui nous mettent en

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présence du Germe, nous font pénétrer dans l'Instant universel, là où le réel prend sa source. C'est souvent dans la grisaille des banalités qu'on peut cueillir le rameau d'or : vivre au plus près du monde, être avec (comme d'ailleurs la nature nous y invite), ce n'est pas aller se perdre dans les encombrements de l'éphémère : c'est même tout le contraire ! Au lieu de s'environner d'objets (opaques, rassurants, muets), on découvre des présences actives. Les suivre peut mener loin car il y a du lointain en toutes choses : on n'a jamais fini de les interroger, elles n'ont jamais fini de nous interpeller. Avec sa prodigieuse perspicacité, Pascal a, pour ainsi dire, clos le débat en disant : « Attendre de cet extérieur le secours est être superstitieux. Ne vouloir pas le joindre à l'intérieur est être superbe. »10

Il serait bon, ici, de méditer sur les dimensions ontolo- giques de l'instant. En lui se concentre toute la réalité, puisque le reste n'est que souvenirs ou projets. L'uni- versel est présent dans chaque instant du monde; chaque instant est unique et, si bref soit-il, ne se reproduira jamais à l'identique. Plus on plonge en lui plus on se rapproche du concret. Seul l'instant existe : on ne trouve ailleurs que des abstractions. L'instant est donc grave et sacré car il est toujours exceptionnel. C'est en le cou- vrant d'abstractions qu'on le banalise. Comment ne pas se donner de tout son être à ce que jamais on ne verra deux fois ? Et comment ne pas voir que l'exceptionnel participe de l'absolu puisqu'il est unique ? Comment ne pas éprouver l'intense besoin de retenir cette plénitude, d'en pénétrer l'essence passagère, de la célébrer, de l'im- mortaliser en quelque façon ? C'est pourquoi l'indiffé- rence est tellement scandaleuse : une coupable hébétude ! C'est pourquoi aussi une exaltation enivre les artistes dans leur effort pour saisir le mouvement d'un muscle, l'éclat d'un regard, la gloire du soleil sur cette meule de foin, etc. Participer à l'instant, tenter de le fixer : seuls

10. Pascal, éd. Brunschwicg, p. 251. (C'est moi qui souligne.)

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moyens de pénétrer dans la profondeur et le mystère de l'Etre, d'en ressentir l'imperceptible et formidable pré- sence en toutes choses. Un instant, devenu immortel et fascinant, ce fut le soir où un léger nuage, accompagné d'un frisson d'air, est passé sur le port de Delft et a fait battre le cœur de Ver Meer. Et la contemplation d'un tel tableau n'est pas seulement esthétique, historisante, nos- talgique : l'émerveillement du peintre va jusqu'à l'âme; il y a de l'éternel dans cet éphémère; je ne sais quelle immensité y noie les détails; l'émotion qui vous saisit vient d'un autre ordre, d'un ordre religieux pour peu qu'on rende à ce terme sa valeur originelle.

L'Instant est un moyen de pénétration qui ne cesse de s'offrir à nous, mais que nous négligeons faute d'être avertis. Notre naïf étonnement en lisant les Haï Ku japonais est un signe : nous découvrons tout à coup la profondeur des petites choses; qui sait si notre façon de regarder la banalité de notre vie n'en sera pas changée ?

Dans la rivière basse Sur les mains lavant les marmites La lune de printemps.

Infime effet de lumière qui transfigure l'humble occupation !

Regardant en arrière On allume les lanternes de la douane Dans le brouillard du soir...

Toute une atmosphère de froideur et d'opacité triste. Un soir d'automne Elle vient et dit : « Allumerai-je la lampe ? »11

1 I. Haï Ku cités par Philippe Jaccottet dans Une Transaction secrète, Gallimard, 1987, p. I27.

On pourra lire : Les Haï Kaï de Kikaku, éd. Crès, 1927; Bashô, Le Manteau de pluie du Singe, PUF, 1987; Ryôkan, 99 Haï Ku, éd. Ver- dier, 1987; et l'excellent recueil de Haï Ku publié chez Fayard en 1978 avec une préface d'Yves Bonnefoy.

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DU MÊME AUTEUR

L ' A r t et la Vie, Fayard. L a Route de Charles Péguy, Plon. Le Perturbateur, Cerf. Bonheurs, Bonheur, INSEP.

Inséparables, l ' a r t d'exister à deux, Centurion. L a Poursuite de l'Essentiel, Centurion.

Philippe Jaccottet, une poétique de l'Insaisissable, Champ Vallon (PUF).

Jean Tardieu, un sourire inquiet, Champ Val lon (PUF).

Aux Edit ions Desclée de Brouwer :

Y ace au Monde actuel.

Réflexions sur l ' a r t actuel. L a Connaissance poétique. L'Enseignement des Lettres et la Vie. Camus face au mystère. Beckett.

Lettres à mes fils. Un livre pour mes filles. Interrogations autour de l'essentiel. Teilhard de Chardin 011 la Foi au Monde. L a Communication littéraire. Culture et Savoir.

L 'Asphyxie et le Cri. Expérience de la Poésie : Saint- John Perse, Henri Michaux,

René Char, Guillevic, Jean Tardieu, Jean Follain, Pierre Emmanuel.

Mutation de la Culture. L'Ecartèlement.

Les Dimensions dJl Changement.

Aux « Cahiers de l 'Amitié Charles Péguy » (Minard) :

Incarnation. Essai sur la pensée de Péguy. L'Image dans l ' « Eve » de Péguy. Introduction aux « Quatrains » de Péguy.

Péguy et le mystère de l'Histoire. Introduction aux trois « Mystères » de Péguy.