ei25 p01:ei 1/04/10 12:33 page 1 Étanchéité info€¦ · d’évaluation définitifs, le nouveau...

14
A V R I L 2 0 1 0 INFO numéro 25 Étanchéité LE MAGAZINE DES PROFESSIONNELS DE L’ÉTANCHÉITÉ ET DE L’ISOLATION www.etancheite.com Le toit plat dans la maison individuelle Elle s’affiche dans les magazines, les publicités et au cinéma. Et pourtant, force est de constater que la maison à toit plat n’est pas du goût des Français. Le toit-terrasse reste de loin une solution minoritaire dans l’habitat individuel. Des raisons culturelles, économiques et politiques expliquent cette absence du marché de la maison et, par la même occasion, celle des étancheurs. Page 16 ARCHITECTURE ISSN : 1958-3575 RÉGLEMENTATION PAGE 8 Les exigences connues de la RT 2012 RÉNOVATION PAGE 10 L’Opéra Bastille fait peau neuve PHOTOVOLTAÏQUE PAGE 13 Les nouveaux tarifs changent la donne PRATIQUE PAGE 24 Désenfumage naturel : les règles applicables aux escaliers RÉALISATION PAGE 26 Les colonnes de Buren de nouveau étanches MICHEL PÉTUAUD-LÉTANG, 4A PAGE 33 « Aller plus loin que la simple mise hors d’eau du bâti » CITÉ RADIEUSE PAGE 28 Un symbole en travaux Véritable icône du toit-terrasse, la toiture de la Cité radieuse n’a toutefois pas échappé aux outrages du temps. D’importants travaux visent actuellement à lui redonner une étanchéité durable tout en restaurant ses aménagements, symboles à la sortie de la guerre d’un nouveau mode de vie.

Upload: duongnhi

Post on 12-Sep-2018

215 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

A V R I L 2 0 1 0

INFOnuméro25Étanchéité

L E M A G A Z I N E D E S P R O F E S S I O N N E L S D E L’ É T A N C H É I T É E T D E L’ I S O L AT I O N w w w. e t a n c h e i t e . c o m

Le toit plat dans la maison individuelleElle s’affiche dans les magazines, les publicités et au cinéma. Et pourtant, force est de constater que la maison à toit plat n’estpas du goût des Français. Le toit-terrasse reste de loin une solutionminoritaire dans l’habitat individuel. Des raisons culturelles,économiques et politiques expliquent cette absence du marché de la maison et, par la même occasion, celle des étancheurs.

Page 16

A R C H I T E C T U R E

ISSN : 1958-3575

R É G L E M E N TAT I O N PA G E 8

Les exigences connues de la RT 2012

R É N O VAT I O N PA G E 1 0

L’Opéra Bastille fait peau neuve

P H O T O V O LTA Ï Q U E PA G E 1 3

Les nouveaux tarifs changent la donne

P R AT I Q U E PA G E 2 4

Désenfumage naturel : les règles applicables aux escaliers

R É A L I S AT I O N PA G E 2 6

Les colonnes de Buren de nouveauétanches

MICHEL PÉTUAUD-LÉTANG, 4A PAGE 33

« Aller plus loin que la simple misehors d’eau du bâti »

C I T É R A D I E U S E PA G E 2 8

Un symbole en travauxVéritable icône du toit-terrasse, la toiture de la Citéradieuse n’a toutefois pas échappé aux outrages dutemps. D’importants travaux visent actuellement à luiredonner une étanchéité durable tout en restaurant sesaménagements, symboles à la sortie de la guerre d’unnouveau mode de vie.

EI25_P01:EI_ 1/04/10 12:33 Page 1

est une publi cation trimestrielle de l’Association pour la pro motion des métiers de l’étan chéité APME-PROMETHÉE, éditée sous l’égide de la CSFE.

6-14, rue La Pérouse, 75784 Paris cedex 16

Tél. : 01 56 62 13 20 - Fax : 01 56 62 13 21

www.etancheite.com

Directeur de la publication :

Philippe Driat

Comité de rédaction : Hélène Alonso,

Catherine Bon, Anny Champey-Chambe,

Henri Desgouilles, Philippe Driat, Céline

Martin, Muriel Meynlé, Pierre Pannetier,

Sophie Rousset-Rouvière, Jean-Claude

Zemmour, Julien Buisson.

Étanchéité.info est éditée par Pyc Édition

16-18, place de la Chapelle, 75018 Paris

Tél. : 01 53 26 48 00 - Fax : 01 53 26 48 01

www.pyc.fr

Rédaction :

Bastien Cany (47 85) [email protected]

Julien Meyrat (88 82) [email protected]

Secrétaire de rédaction :

Barbara Vacher (88 83) [email protected]

Rédacteurs graphistes : Régine Carré,

François Bordrez

Publicité :

Jean-François Le Cloirec (48 03)

[email protected]

Régis Legrand (88 86) [email protected]

Ingrid Kaszuba (88 78)

assistante commerciale

Impression :

Edips (Quetigny)

Routage :

GL Routage (Quetigny)

Dépôt légal à parution

Photo de couverture:

© Technal

É T A N C H É I T É . I N F O · N U M É R O 2 5 · AV R I L 2 0 1 0 · 3

É D I T O >

Abonnement gratuit sur simple

demande, tél. : 01 56 62 13 20

Faire le choixdu toit plat

Un seulintervenant et une seuleassurance pourtous cesouvrages, c’est la certitude de ne pas être laissépour compte encas de problème.

Pour la première fois, cette revueaborde à travers son dossier letoit plat dans les maisons indi-

viduelles et les freins culturels à sondéveloppement. Pourtant, avant dese décider à passer à l’action et réali-ser son rêve d’acquérir une maison,chacun devrait faire un bilan objectif.Le concepteur architecte ou pavillon-neur pourra être sensible à certainsarguments permettant de viabiliser leprojet. Tout d’abord, l’atout au niveaudu prospect (rapport entre hauteurdes bâtiments et largeur des rues),qui dans certains cas pourra per-mettre d’augmenter la surface habi-table. La compacité des formes de-vrait contribuer à répondre auxfutures exigences de la RT 2012. Enoutre, le traitement continu à l’aidede membranes soudées permettra derésoudre beaucoup plus facilementles nouvelles exigences de perméabi-lité à l’air des logements.Le particulier verra pour sa part lesavantages qu’il pourra tirer de cenouvel espace : accessibilité de la sur-face, éventuellement associée à despanneaux solaires thermiques ouphotovoltaïques, mise en place d’unevégétalisation pour améliorer le bien-être et l’intégration dans le site.Sans oublier qu’avec une telleconception, les espaces situés en des-sous présenteront des hauteurs nor-males, sans place perdue et pouvantoffrir, avec des fenêtres, une visibilitéaccrue sur le monde extérieur plutôtque limitée par l’intermédiaire de

chiens-assis ou de fenêtres de toit.Mais bien sûr, après avoir imaginé leprojet d’une vie, c’est la réalisationproprement dite qui va contribuer ausuccès. L’étanchéité est un métiercomplexe. Il consiste, en prenant encompte la géométrie d’un bâtiment etla destination envisagée, à marier lesisolants thermiques, le revêtementd’étanchéité et sa protection éven-tuelle en considérant les points singu-liers et toutes les réglementations.L’interaction avec le gros œuvre estindispensable afin que soient traités,en particulier en amont, les pro-blèmes de niveaux.Il faut donc faire appel à un profes-sionnel qualifié, qui devrait toujoursprendre en compte l’intégralité desouvrages du toit-terrasse, y comprisles protections et aménagements sou-vent indissociables. Les petites éco-nomies peuvent conduire à la ca-tastrophe. Un seul intervenantet une seule assurance pourtous ces ouvrages, c’est la certi-tude de ne pas être laissé pourcompte en cas de problème.À travers des réalisations auxmultiples contraintes telles que la Cité radieuse ou les colonnes de Buren présentées dans ce numéro, il est prouvé que la fiabilité des techniquesd’étanchéité est bien réelleet l’adaptation au site possible.

PHILIPPE DRIAT,

DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL DE LA CSFE

EI25_P03:EI10_version 1/04/10 12:39 Page 3

É T A N C H É I T É . I N F O · N U M É R O 2 5 · AV R I L 2 0 1 0 · 5

A C T U A L I T É S >É T U D E

Une étude du cabinet Xerfi publiée le 2 mars2010 estime que le chiffre d’affaires du mar-ché de la rénovation thermique des bureaux

ne devrait progresser « que » de 4 % en 2010 par rap-port à 2009 (il avait crû de 2 % en 2008 et de 6 à 7 % les années précédentes). La réduction du tauxdu crédit d’impôt sur les fenêtres et l’annulation dela majoration pour travaux réalisés dans les loge-ments construits avant 1977 expliqueraient cettemoindre progression. Pour le cabinet d’études, lemarché devrait toutefois décoller avec « la montée enpuissance des chantiers dans les logements sociaux etdans les bâtiments publics ». Il évalue à 200 milliardsd’euros la somme qui devrait être dépensée durantla prochaine décennie pour améliorer l’isolation deslogements et locaux tertiaires français.

«Àchaque métier son assurance », c’est le slogan de cette collec-tion de guides publiés par la SMABTP en partenariat avec lesunions et syndicats de la FFB. Chaque facette du secteur

abordé est analysée en tenant comptedes particularités. L’opus « Étanchéité »est disponible depuis fin février auprèsdes représentants locaux de la SGAM BTPou des unions ou syndicats concernés. Il sera également distribué lors del’assemblée générale ordinaire de laCSFE qui aura lieu les 27 et 28 mai pro-chains à Arcachon (33). À noter qued’autres guides à paraître consacrés à desthèmes transversaux (photovoltaïque, ré-novation énergétique…) seront égalementsusceptibles d’intéresser les étancheurs.

A S S U R A N C E

Le guide SMABTPde l’étanchéité est paru

La rénovation thermique toujours en perte de vitesse

Effinergie :l’heure du bilan

C omposé de collectivités,d’industriels, de centres tech-niques et d’associations, le col-

lectif Effinergie mène depuis 2006 unecampagne pour généraliser les projets«basse consommation». Au début 2010,le bilan s’avère globalement positif : fin décembre, le collec tif annonçait 2 885 maisons, 13 000 logements et 400 000 m2 de tertiaire en cours de certi-fication BBC-Effinergie. Côté existant, ce

sont 123 maisons individuelles et 1 400 logements qui sont concernés par la certification BBC-EffinergieRénovation. Le collectif n’est pas enpanne d’idées, puisqu’il envisage la publi-cation d’un guide d’accompagnementpour réussir une rénovation de logementsindividuels ou collectifs, en une seulephase ou par étape. Quant à l’ObservatoireBBC (www.observatoirebbc.org) mis enplace en partenariat avec l’Ademe et le mi-

nistère de l’Écologie, de l’Énergie, duDéveloppement durable et de la Mer, il am-bitionne de contenir quelque 200 fiches pé-dagogiques d’ici fin juin 2010. Ce site, enligne depuis l’automne dernier, a pour ob-jectif de permettre aux professionnelsd’identifier les projets de bâtiments basseconsommation et de disposer d’une pre-mière description de l’opération, tout enproposant des données techniques et statis-tiques sur le sujet.

B A S S E C O N S O M M A T I O N

© M

iche

l Mon

tagu

t - B

ouyg

ues

Imm

obili

er

6 · É T A N C H É I T É . I N F O · N U M É R O 2 5 · AV R I L 2 0 1 0

A C T U A L I T É S >I S O L A T I O NE M P L O I

Le baromètreManpower à la baisse pourla construction

Obtenu en soustrayant les pour-centages d’employeurs antici-pant une hausse de leurs effec-

tifs et ceux s’attendant à une baisse, lebaromètre Manpower annonce pour lesecteur de la construction un solde de – 6 %, faisant des employeurs du bâti-ment les plus pessimistes vis-à-vis du tri-mestre à venir. Consultable en ligne(www.manpower.fr), l’étude a été menéeauprès de 61 000 employeurs dont 1 001 français. Confirmant l’évolution ac-tuelle (elle était de – 5% pour le 1er tri-mestre 2010 et affiche une baisse de troispoints depuis le 2e trimestre 2009), cetteprévision nette d’emploi est la plus faibledepuis la création de l’indicateur en 2003.

A près avoir testé lemarché pendant troisans avec de l’ouate de

cellulose importée d’Europecentrale, l’entreprise Sopremaa décidé de se rapprocher deses clients. La nouvelle usinede production installée àCestas (33) représente l’unedes plus grosses lignes de production d’Europe, avecune capacité annuelle de15000 tonnes. Isolant naturel,l’ouate de cellulose affiche des performances équivalentes à la laine de verre en hi-ver et supérieures à celle-ci en été. Développement durable oblige, l’entreprise a signé un contrat avec le quotidien régional Sud-Ouest : celui-ci fournira chaque an-née 4000 tonnes d’invendus qui deviendront la matière première de fabrication dumatériau. Le choix de l’Ouest français s’imposait, cette région étant la principaleconsommatrice d’isolants naturels.

Depuis 2003, la plate-forme d’essais du Centre scientifique ettechnique du bâtiment a permis de tester près de soixante pro-cédés de bardage rapporté en conditions sismiques, débouchant

sur des essais d’évaluation dans le cadre d’un Avis technique. Le dispo-sitif est désormais sur le point d’être étendu à d’autres produits. SelonPhilippe Rivillon, ingénieur au CSTB, « des travaux de recherche sont encours pour tester une plus grande variété de procédés de construction à larésistance des bâtiments aux séismes, par exemple les panneaux sandwichset les façades en verre ». Avant de mettre en place les processusd’évaluation définitifs, le nouveau protocole devrait être validé par di-verses expérimentations et par le groupe spécialisé idoine. Cette dé-marche intervient dans le cadre du nouveau zonage dans lequel serontappliquées les normes européennes de construction parasismiqueEurocode 8 (Conception et dimensionnement des structures pour leurrésistance aux séismes).

Les bardages en plein séismeC S T B

Soprema investit dansl’ouate

© S

opre

ma

- Sté

phan

e La

rtig

ue

© C

STB

Avec 4 100 m2

de panneauxphotovoltaïqueset unecogénérationfonctionnant àl’huile de colza,ce bâtiment ne devrait pasconsommer plusd’énergie qu’iln’en produit. >

8 · É T A N C H É I T É . I N F O · N U M É R O 2 5 · AV R I L 2 0 1 0

A C T U A L I T É S >

Si la RT 2005 répondait à la transposition endroit français de la directive européennen°2002/91/CE, la RT 2012 est la déclinaison

de la loi n°2009-967 du 3 août 2009 de programma-tion relative à la mise en œuvre du Grenelle del’environnement.

Des exigences de performancesTrois grandes exigences globales de performances seront à satisfaire.- Une consommation maximale d’énergie Cmax de 50 kWhEP/m2 par an en moyenne comprenant lechauffage, la production d’eau chaude sanitaire, le refroidissement, l’éclairage et des besoins auxiliaires.Il s’agit d’une valeur moyenne à moduler, projet parprojet, en fonction de la localisation géographique, del’altitude, du type d’usage, de la surface (pour les lo-gements) et des émissions de gaz à effet de serre dubâtiment. Cette valeur est à comparer par exempleaux 110kWhEP/m2 par an, limite fixée en zone H2 dela RT 2005 pour un chauffage au gaz. Le Cmax peutpermettre de comparer les bâtiments entre eux.- Une exigence d’efficacité énergétique minimale dubâti Bbiomax, correspondant à une limite simultanéede besoin en énergie pour les composantes liées aubâti (chauffage, refroidissement et éclairage), avecdeux valeurs limites modulées, différentes pour lesbâtiments avec ou sans équipements de climatisation.- Enfin, l’exigence actuelle de confort d’été est mainte-nue, la valeur de calcul de la température intérieure de-vant être inférieure à celle de référence (Tic <Ticref).

Des exigences de moyensToute maison individuelle devra avoir recours à unesource d’énergie renouvelable. Obligation sera égale-ment faite de traiter la perméabilité à l’air des loge-ments à raison de 0,6 m3/h/m2 de parois déperditives

Le 19 février, lors de la sixième et dernière réunion consultative sur la RT 2012, les représentants du ministère de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de la Mer ont largement présenté les futures exigencesde la réglementation thermique. Le point sur les grandes lignes d’un texte attendu pour l’été.

Les exigences connues de la RT 2012

R É G L E M E N TAT I O N T H E R M I Q U E

pour les maisons indivi-duelles sous 4 pascals, va-leur portée à 1,0 pour lesimmeubles collectifs. Desessais de vérification se-ront obligatoires à moinsde respecter une démarchequalité. Aucune valeurn’est pour l’instant arrêtéepour les bâtiments non ré-sidentiels.

Concernant l’isolation thermique, les valeurs garde-fous générales disparaissent, donnant toute latitudeaux concepteurs. En revanche, le ratio de transmis-sion linéique moyen global des ponts thermiques dubâtiment ne devra pas excéder 0,28 W/(m2.K), avec

© M

iche

l Mon

tagu

t/B

ouyg

ues

Imm

obili

er

© P

ragm

a

EI25_P08-15:EI10_version 1/04/10 17:47 Page 8

en complément, une limitation à 0,6W/ml.K pour laliaison périphérique des planchers intermédiairesavec un mur.Afin d’assurer au maximum un éclairage naturel pourles bâtiments à usage d’habitation, la surface totaledes baies mesurée en tableau devra être supérieure ouégale à 1/6 de la surface habitable. Les exigences de moyens relatives au confort d’été(facteur solaire des baies et surface ouvrante mini-male) sont reconduites de la RT 2005.

Les conséquences prévisibles pour les toitures étanchéesEn parties courantes, la RT 2012 entraînera évidem-ment une augmentation de l’épaisseur de l’isolantsans toutefois pouvoir aujourd’hui encore en donnerla proportion. Mais c’est du côté des points singuliersde la toiture que l’attention devra se porter. Parmi lesquestions à traiter : l’isolation des acrotères et les dif-ficultés pouvant en résulter sur la fixation des garde-corps. D’autres éléments devront s’adapter : entréesd’eaux pluviales, traversées, lignes de vie... Dans le domaine des bâtiments en béton, les obliga-tions de perméabilité à l’air modifieront égalementcertaines pratiques. Le calfeutrement des pénétra-tions électriques sera ainsi à réaliser par l’entreprised’électricité. Par ailleurs, de nouvelles gammes de lan-terneaux devraient apparaître sur le marché en vue desatisfaire aux exigences thermiques et de perméabilitéà l’air. On peut aisément imaginer que des spécifica-tions thermiques minimales seront données élémentpar élément dans les pièces des marchés.Avec une étude thermique faite en amont, le temps oùl’étancheur pouvait conseiller son client sur uneépaisseur d’isolant est révolu pour les travaux neufsobjets de la RT 2012. Il lui restera toutefois encore àdéfinir les produits et les dispositions constructivespermettant de répondre aux spécifications. Pour leconcepteur habitué à s’occuper du bâti, son attentiondevra se porter vers tous les points de détails et également sur d’autres origines de consommationd’énergie telles que l’éclairage ou la production d’eauchaude.Les projets de décret et d’arrêté relatifs aux exigencesdevraient être communiqués prochainement ainsi quecelui correspondant au modèle de calcul. Mais l’outilinformatique reste à finaliser. L’objectif d’applicationanticipée au 1er janvier 2011 pour les bâtiments nonrésidentiels et bâtiments publics paraît difficilementatteignable. PHILIPPE DRIAT

EI25_P08-15:EI10_version 1/04/10 13:37 Page 9

10 · É T A N C H É I T É . I N F O · N U M É R O 2 5 · AV R I L 2 0 1 0

A C T U A L I T É S >

entreprises, aux bureaux d’études et au cabinetd’architecte, il fut décidé en 1996 de recouvrirl’ensemble des façades en pierres d’un filet. En dé-cembre 2006, la Cour administrative d’appel de Paris aretenu la responsabilité des constructeurs, entraînant laprise en charge intégrale de la réfection de la façadepar les compagnies d’assurance de ces derniers.

Respecter la couleur et le calepinageTrois solutions avaient alors été envisagées. La pre-mière, très incertaine et difficile à mettre en œuvre, vi-sait à utiliser un endoscope derrière chaque panneaupour vérifier sa tenue et éventuellement son rempla-cement. La seconde consistait à clouter les plaques àtravers l’isolant en laine de roche jusqu’à la paroi enbéton. L’inconvénient était double : ce procédé auraitchangé l’esthétique de la façade tout en augmentantle risque de fissuration. Enfin le dernier scénario pré-

L’ Opéra Bastille est enfin libéré de ses filets !Très vite après son inauguration en juillet1989 lors des célébrations du Bicentenaire de

la Révolution française, cet édifice signé par l’architecteCarlos Ott avait fait beaucoup parler de lui et pas seu-lement en bien. Outre son architecture massive quiavait laissé perplexes plus d’un Parisien, ce sont les dys-fonctionnements techniques bien plus que sa program-mation lyrique qui avaient fait les gros titres de lapresse. Dès 1990, il a fallu constater des désordres, enparticulier sur la façade. Plusieurs éléments du pare-ment constitué de panneaux de pierre calcaire mincede 90x90cm et de 60kg pièce s’étaient détachés,n’engendrant fort heureusement aucun blessé. Les ex-pertises avaient révélé un défaut de pose au niveau desattaches et des imperfections naturelles sur la pierre.Pour d’évidentes raisons de sécurité et pendant toute ladurée du bras de fer judiciaire qui a opposé l’Opéra aux

Après des années de ballets d’experts et de tractations judiciaires, le problème de la façade minérale del’Opéra Bastille est enfin résolu. La pierre mince d’origine, qui avait très vite montré des signes de faiblesse, a été remplacée l’été dernier par une solution de bardage composite.

L’Opéra Bastille fait peau neuveR É N O VAT I O N

Les 28 000 m2 de façades de l’Opéra Bastille sont désormais entièrementrecouverts de panneaux composites en pierre rainurée et posés en bardage.

EI25_P08-15:EI10_version 1/04/10 13:37 Page 10

voyait le changement intégral du parement d’originetout en respectant la couleur et le calepinage vouluspar l’architecte. C’est cette voie qui a été retenue.L’Opéra national de Paris et le maître d’œuvre ontalors lancé un appel d’offres ouvert pour la rénovationdes 28000 m2 de façade. Les matériaux devaient êtresoit des pierres posées conformément au DTU55.2,soit des plaques composites bénéficiant d’un avistechnique et d’un classement au feu de niveau M1. Ilétait aussi nécessaire que le produit présenté disposede la certification reVETIR qui assure une résistanceplus élevée aux chocs, à la thermique et à l’eau.

Un retour d’expériences de trente ansAprès étude des dossiers (et l’autorisation du Servicedépartemental de l’architecture et du patrimoine deParis), c’est le parement composite qui a été retenu.Celui-ci est composé à 95 % de charge minérale (notamment du granite et de l’ardoise) et de 5% deliant organique. Plusieurs arguments plaidaient en fa-veur de cette solution proposée par l’industriel françaisCaréa. D’abord un retour d’expériences de trente anssur ces plaques rainurées qui ont fait leurs preuves.Ensuite, leur poids sensiblement plus faible : 34kg aumètre carré contre 80 pour la pierre naturelle. Enfin,leur surface quasiment exempte de porosités, ce qui lesrend plus faciles à nettoyer. «Nous aurions souhaité unecouleur plus sombre pour les panneaux en partie bassepour limiter la tentation des graffiteurs, mais cela nous aété interdit. C’est un arrêté préfectoral qui nous a obligésde reprendre la même teinte sur toute la surface rempla-cée», note Gérald Helwig, directeur du bâtiment et investissements de l’Opéra. Le bardage a été fixé sur une structure en aluminiumcomprenant une ossature primaire verticale et une os-sature secondaire horizontale grâce à un rainuraged’environ 10 mm réalisé dans l’épaisseur du panneau.Ce dernier étant ensuite glissé sur l’ossature secon-daire. Il a fallu deux ans, dont une longue phase demise au point du calepinage, pour réussir à donner àl’Opéra Bastille le nouvel éclat dont il avait grande-ment besoin. JAN MEYER

L E S C H I F F R E S C L É S● 28 000 m2 de façade minérale à remplacer

● 8 millions d’euros de travaux

● Des panneaux composites de 34 kg/m2 contre 80 pour

la pierre naturelle

● 2 ans de travaux

EI25_P08-15:EI10_version 1/04/10 13:37 Page 11

Les systèmes en surimpositionrelèventactuellement de la primed’intégration« simplifiée » aubâti et du tarif derachat à 0,42 euro.

É T A N C H É I T É . I N F O · N U M É R O 2 5 · AV R I L 2 0 1 0 · 13

A C T U A L I T É S >

général de TCE Solar. Un optimisme loin d’être par-tagé par tous. Le dispositif limite en effet aux loge-ments la prime d’intégration au bâti pour le neuf.Pour Christian Lavedrine, PDG de Smac, « en rame-nant le tarif des projets neufs importants à 0,42€/kWh,soit à peine 10 centimes de plus que les fermes au sol,cette décision risque de tuer l’intégré au bâti. Ce derniern’est tout simplement plus assez rentable. Le gouverne-ment table sur une baisse du prix des panneaux, maisceux-ci ne constituent que 30 à 40% du prix du watt-crête installé. » L’entreprise voit ainsi une trentaine deprojets gelés par la décision, soit un chiffre d’affairesde presque 40 millions d’euros. En outre, dans deux arrêtés datés du 16 mars 2010,l’État exclut du bénéfice des tarifs d’intégration aubâti (0,58 et 0,50€/kWh) les installations de puis-sance supérieure à 250 kWc, soit dans le cas d’uneétanchéité photovoltaïque environ 5000m2 de sur-face utile. Une décision qui devrait limiter encore plus

A près avoir annoncé la baisse des tarifs de ra-chat de l’électricité photovoltaïque, générantainsi une bulle spéculative qui a gonflé du-

rant toute la fin 2009, le ministère de l’Écologie, del’Énergie, du Développement durable et de la Mer a fi-nalement publié le 14 janvier 2010 l’arrêté définissantles conditions d’achat (voir en encadré), légèrementen deçà des prédictions. Une décision qui ne surprendguère : « Cette évolution va dans le sens de l’histoire,rappelle Jean Damian, responsable de Soprasolar.Nous sommes après tout sur un marché fondamentale-ment artificiel et subventionné. » La baisse a même étéaccueillie avec un certain soulagement par de nom-breux acteurs du photovoltaïque, industriels, entre-prises et maîtres d’ouvrage. Elle devrait permettre dedébarrasser la filière d’intermédiaires venus se grefferpar effet d’aubaine. « L’arrêté redonne toute sa respon-sabilité au monde du bâtiment dans l’acte deconstruire », se réjouit Jean-Louis Esteves, directeur

Inquiété par la bulle spéculative de ces derniers mois, l’État a finalement publié les nouveaux tarifs de rachatphotovoltaïque. Si ce dispositif favorise clairement l’existant, les installations de taille importante risquentd’être pénalisées. Au sein de l’étanchéité, les réactions sont mitigées.

P H O T O V O LTA Ï Q U E

Les nouveaux tarifs de rachatchangent la donne

© S

mac

EI25_P08-15:EI10_version 1/04/10 13:37 Page 13

Pour des bâtimentsde plus de deux ans,

les installationsintégrées au bâti

bénéficieront d’untarif de rachat de

0,58 €/kWh sur lesbâtiments destinés

à l’enseignement,la santé

ou l’habitation (y compris pour

le neuf dans ce casprécis) et de

0,50 €/kWh pourles autres.

Les arrêtésdu 16 mars 2010

rabattant le tarif pour les

installationsimportantes

(> 250 kWc) del’intégré au bâti

à 0,42 €/kWh,celui-ci risque

de devenirnettement moins

attractif.

© D

erbi

gum

É T A N C H É I T É . I N F O · N U M É R O 2 5 · AV R I L 2 0 1 0 · 15

N O U V E A U X T A R I F S P O U R L ’ I N T É G R É A U B Â T I

● 0,58 €/kWh : installations bénéficiant de la prime d’intégration au bâti sur un

bâtiment d’habitation (neuf ou existant), d’enseignement ou de santé (existant) ;

● 0,50 €/kWh : installations bénéficiant de la prime d’intégration au bâti sur

un autre type de bâtiment existant ;

● 0,42 €/kWh : installations bénéficiant de la prime d’intégration simplifiée au bâti.

Les autres installations (fermes au sol…) verront leur tarif de rachat modulé

selon la localisation et la puissance (de 0,314 à 0,377 €/kWh).

En outre, les projets de puissance supérieure à 250 kWc sont exclus du tarif

spécifique à l’intégration au bâti.

l’intérêt pour les dispositifs intégrés au bâti pour desopérations de grande ampleur. Face à la spéculation,les pouvoirs publics ont décidé de favoriser la rénova-tion ainsi que les bâtiments sur lesquels ils exercentun certain contrôle (enseignement, santé, habita-tion). « Pour nous, industriels, il est certain que celachange la donne, précise Jean Damian, mais c’est ànous de nous adapter. »

Séparer le bon grain de l’ivraieAfin de limiter les dégâts de la période du 1er novembre2009 au 14 janvier 2010, l’État cherche désormais àséparer le bon grain de l’ivraie parmi les projets dépo-sés (certains relevant du pur montage financier). Lesarrêtés du 16 mars ramènent un certain nombred’entre eux au nouveau tarif, selon des critères com-plexes favorisant surtout les bâtiments agricoles et lespetites centrales. Ils imposent entre autres aux projetsd’avoir reçu leur proposition technique et financière(PTF) avant le 11 janvier 2010. « Quand on sait qu’ilfaut trois mois à ERDF pour renvoyer une PTF après ré-ception du dossier complet, cette décision signifie quetous les projets qui n’étaient pas totalement bouclés entermes de calepinage, de schéma des onduleurs… au dé-but octobre 2009 ne bénéficieront pas des ancienstarifs », précise Jean Damian. Pour éviter une pléthorede recours, la plupart des acteurs avaient proposé deprivilégier les dossiers sur lesquels les demandes deraccordement avaient été effectuées. « Ces maîtresd’ouvrage ont investi du temps et de l’argent en toutebonne foi, sur la base de bâtiments existants », confirmeJean Damian. Le gouvernement a finalement opté pour le critère« PTF », plus sévère, mettant ainsi fin à une longue période d’incertitude. Pour Christian Lavedrine,

« la cacophonie de ces derniers mois a entraîné une pa-ralysie complète de la profession». Une décision claireet définitive devrait permettre aux acteurs de se pro-jeter dans le futur et de conduire, enfin, au dévelop-pement d’une vraie filière photovoltaïque, favorableaux étancheurs. Comme le rappelle Jean Damian,« nous sommes sur un marché complexe et disparate, etl’État a mis le curseur assez haut. Le premier semestre2010 va être une période d’adaptation à ces nouvellescontraintes, remettant en cause un certain nombre deprojets lancés en 2009. On peut le regretter, mais noussavons désormais à quoi nous en tenir pour les deux an-nées à venir. Avec 5 à 8% garantis sur vingt ans parEDF, l’étanchéité photovoltaïque reste tout de même unplacement bien sécurisé. »

JULIEN MEYRAT

A C T U A L I T É S >

© S

opra

sola

r

EI25_P08-15:EI10_version 1/04/10 13:37 Page 15

D O S S I E R >

Plus de 75% des Français veulent habiter unemaison individuelle. Une statistique qui n’a qua-siment pas évolué depuis un demi-siècle. Et rien

ne semble pouvoir infléchir l’engouement de la popula-tion pour ce mode d’habitat. Même la crise actuelle n’apas réussi à entamer l’ambition des Français pour leurlogement. En février 2010, ils étaient encore 32% àenvisager la construction ou l’achat d’une maison àmoyen terme. Ces projets, s’ils se réalisent, devraientalors dans leur grande majorité répondre à un modèleimmuable : un parallélépipède plus ou moins élaboré,d’un style classique ou rustique, affichant une surfacegénéralement comprise entre 90 et 130 m2. Et le toutsurmonté d’une toiture à deux pentes. On le sait, dans

ce stéréotype bien réel de la maison, le toit-terrasse n’apas sa place. Au plan symbolique, il en est même lanégation : une maison sans toit n’est pas une maison.Profondément ancrée dans l’imaginaire des Français, latoiture à versants reste la figure par excellence de l’abriet l’archétype de la maison. Ni les pionniers del’architecture moderne, ni les politiques des années1950 en faveur du logement collectif, ni même lesgrandes crises du bâtiment n’ont réussi à faire tombercette icône. Face à elle, le toit plat est toujours perçucomme une exception, une bizarrerie réservée àquelques initiés, seuls capables d’assumer cet exotisme.Dans les représentations des particuliers, façonnéesentre autres par la publicité et le cinéma, il reste

Même en ville, la maison à toit platreste une exception.Pour le grand public,son image renvoie àcelle de la «maisond’architecte»,comme cettehabitationrécemment conçuepar Pablo Katz pour des particuliersdans le XXe

arrondissementparisien.

>

Elle s’affiche dans les magazines, les publicités et au cinéma. Et pourtant, derrière ces vitrines, force est de constater que la maison à toit plat n’est pas du goût des Français.Face à la couverture traditionnelle, le toit-terrasse reste de loin une solution minoritairedans l’habitat individuel. Des raisons culturelles, économiques et politiques expliquent cette absence du marché de la maison et, par la même occasion, celle des étancheurs.

Le toit plat a-t-il sa placedans la maison individuelle ?

A R C H I T E C T U R E

16 · É T A N C H É I T É . I N F O · N U M É R O 2 5 · AV R I L 2 0 1 0

EI25_P16-23bis:EI10_version 1/04/10 18:03 Page 16

Après le «tout collectif» de l’après-guerre, les années1960 marquent le début d’une nouvelle politique minis-térielle alors que les grands ensembles sont déjà très cri-tiqués. L’heure est toujours à la production de loge-ments en masse mais les principes de la standardisationsont désormais appliqués à la maison. C’est la nais -sance des lotissements et des zones pavillonnaires, enpartie inspirés de l’expérience américaine. À grand ren-fort de publicité, l’État fait désormais la promotion dece nouvel idéal du «chez-soi» : les fameux «villagexpo»lancés en 1966 par le ministère du Logement, sorte de villages vitrines composés de maisons individuellesqui deviennent de véritables lotissements à la fin del’opération. Deux ans plus tard, le ministre AlbinChalandon lance un concours international incitant lespromoteurs privés et sociaux à proposer des modèles demaisons bon marché et produites en grande quantité.Environ 65000 pavillons issus de cette initiative – sur-nommés plus tard les chalandonnettes – serontconstruits selon des logiques industrielles. La maisonindividuelle constitue alors un véritable eldorado pourquelques promoteurs qui vont monter en puissancedans les années 1970 en s’appuyant sur des stratégiesde préfabrication : l’acier pour Maison Phénix, les pan-neaux béton pour Bruno Petit et Balency ou encore le bois pour VB. À l’époque, certaines marques vontcommercialiser jusqu’à 16000 maisons par an. Cette

D O S S I E R >

18 · É T A N C H É I T É . I N F O · N U M É R O 2 5 · AV R I L 2 0 1 0

l’apanage d’une élite qui se paye « une maisond’architecte». Du coup, c’est également l’un des plusgros marchés du bâtiment qui échappe aujourd’hui auxétancheurs. Entre 2000 et 2007, 61% des logementsconstruits sont des maisons individuelles. En 2005,année faste pour le BTP, l’habitat individuel représentait30 millions de mètres carrés construits contre 11 mil-lions dans le collectif.

La guerre des toitsCe désamour entre maisons individuelles et toits platsne date pas d’aujourd’hui. En 1927 à Stuttgart, sous ladirection artistique de l’architecte allemand LudwigMies van der Rohe, des représentants de l’architectured’avant-garde européenne sont invités à construire unecité expérimentale satisfaisant aux exigences tech-niques, hygiéniques et esthétiques de la nouvelleépoque (cité de Weissenhof). Le toit-terrasse apparaîtalors comme l’expression formelle de l’architecturemoderne et fonctionnaliste. Il devient également àl’époque le centre d’une polémique et de débats pas-sionnés entre les traditionalistes, tenants du toit pentu,et les progressistes qui font du toit-terrasse le porte-dra-peau d’une architecture débarrassée des références dupassé. Cet épisode restera dans l’histoire de la cin -quième façade comme le premier et dernier affronte-ment idéologique autour du toit. On connaît l’épiloguede cette controverse : la couverture traditionnelle s’estimposée comme la norme dans la maison populaire. Nil’industrialisation, ni le développement de préfabrica-tion dans la construction individuelle jusque dans lesannées 1980 ne remettront en cause ce modèle. Aucontraire…

Le toit platreste l’apanaged’une élite qui se paye« une maisond’architecte ».

Extension par l'agence Van de Voorde-piffet.architectend'une habitationouvrière située à Affligem enBelgique. Opérationrécompensée lors du concoursd'architectureorganisé en 2009 par le fabricantd'étanchéitéDerbigum.

Aujourd’hui le thème préindustrialation revient en force sur le marché dela maison. Des techniques plutôt favorables au toit plat, comme ici avec ceconcept de construction modulaire réalisé par Augustin Rosenstiehl, lauréatd’un concours organisé par Algeco en 2005.

>

>

© K

oen

Van

Dam

me

EI25_P16-23bis:EI10_version 1/04/10 18:03 Page 18

É T A N C H É I T É . I N F O · N U M É R O 2 5 · AV R I L 2 0 1 0 · 21

euphorie constructive va toutefois retomber avec ledeuxième choc pétrolier. À partir de 1980, le marché serétracte pour atteindre son point bas en 1993 avec 122000 constructions alors qu’en 1979, 281000 mai-sons étaient sorties de terre. Certains majors du secteurne vont pas résister au déclin. Avec le recul de lademande, le marché s’atomise. Et les années 1980 mar-quent le retour à une production plus éclatée et plusartisanale.

Entre traditions et régionalismesComme souvent en temps de crise, les Français se réfu-gient vers des valeurs refuges. À commencer par la«pierre». La fabrication en série ne colle plus avec lesattentes des acheteurs. Désormais les constructeurs fontcampagne, sur le thème de la tradition commeBouygues qui vante alors les vertus de sa «Maison demaçon». La catégorie grandissante des néo-ruraux plé-biscite désormais des maisons aux styles «néobreton»,«néoprovençal», «néoalsacien»… Avec leur couvertureen ardoises, en tuiles vieillies ou en génoise, les toits àversants deviennent le terrain d’expression privilégié de

D O S S I E R >L’engouement

actuel pour la construction bois

ouvre à plus de diversité

architecturale dansl’habitat individuel.

Ci-contre :restructuration

d’une maison enrégion parisienne

primée en 2009 au Palmarès Salon

Maison Bois. >

Le thème de l’habitat «écolo» pourrait participer demain au renouveau de l’architecture dans la maison individuelle, y compris dans l’offre des constructeurs, à l’instar de ces deux projets priméslors la 5e édition du Challenge des maisons innovantes de l’Union des maisons françaises (Maisons Dominique Charles, ci-dessus, et Trecobat, ci-dessous).

ce «néorégionalisme» conforté par les règlementsd’urbanisme censés préserver le caractère des régions etdes villes. «L’achat d’une maison individuelle correspondà un acte de sécurisation sociétale, à une tentative de figerl’avenir dans une image passéiste, à une manifestationd’adhérence à un groupe social, tous les basiques du pro-duit doivent être “traditionnels” : type de construction,plan, etc. La personnalisation vient en plus, sur des détails(…), explique l’économiste Alain Carron dans unouvrage publié en 2005*, le ménage qui fait construire“s’invite” dans une communauté villageoise, il vient de fuir la ville, la modernité, les risques du futur, il se doit demontrer son adhésion aux codes sociaux del’environnement où il va faire sa vie.» On l’aura compris:les valeurs portées par le toit plat, symbole de la«modernité», peuvent difficilement s’intégrer dans cesystème de références.

Des architectes absents du marchéLa quasi-inexistence du toit-terrasse dans l’habitat indi-viduel est à la mesure de l’absence des architectes sur cecréneau. Ces derniers n’interviennent que sur 6 à 8%des maisons construites dans l’Hexagone. Longtempsjugée peu valorisante, difficile d’accès et surtout insuffi-samment rentable, la commande des particuliers esttoujours restée à la marge de cette profession. Face à cemarché, «les architectes affichent le plus souvent igno -rance et mépris», affirmaient déjà en 1996 Pierre Lajuset Gilles Ragot dans un rapport commandé par laDirection de l’architecture et du patrimoine. Historiquement, la maison appartient au domaine desartisans, puis des constructeurs. Et l’évolution du mar-ché n’a fait que renforcer cette mainmise. La rationali-sation de l’offre, symbolisée par la vente sur catalogue,a cantonné les architectes sur quelques niches de luxe.Sans compter que la construction d’une maison, devenue un produit de consommation à part entière,

© F

abie

nne

Bul

le

EI25_P16-23bis:EI10_version 1/04/10 18:03 Page 21

D O S S I E R >

s’accompagne désormais d’un ensemble de services etd’engagements auxquels les architectes ont du mal àrépondre. Dans les années 1980, certains, à l’instar desArchitectes Bâtisseurs ou des Architecteurs, ont tenté dese positionner face à l’offre «clés en main» en proposantaux particuliers des contrats uniques avec les mêmesgaranties. Mais ces initiatives restent rares. Et elles n’onten tout cas pas suffi à combler le décalage entre lepublic et les architectes, ni à réconcilier les aspirationsdes uns avec la vision créatrice des autres.

Casser les mythes de la maison traditionnellePour «monsieur et madame tout le monde», la maisondite contemporaine, qu’elle soit à toit plat ou non,appartient toujours au domaine de l’ «extraordinaire».D’autant plus que l’intervention d’un architecte passetoujours pour être une prestation coûteuse. Malgré lesconcours d’architectes organisés ces dernières annéessur le thème de la maison à bas prix, ces opérations res-tent à leurs yeux des expérimentations en décalage avecla «vie réelle». Il ne suffit donc pas de présenter aupublic des maisons de rêve pour obtenir son adhésion.Encore faut-il lui fournir les codes et la grille de lecturequi lui permettent de donner du sens à ces réalisationsforcément éloignées de ses références familières. «Quine préférerait avoir au-dessus de lui un parapluie, plutôtqu'une cuvette qu'on soupçonne toujours de devoir débor-der ou fuir», notaient ainsi à propos du toit plat PierreLajus et Gilles Ragot. Sans connaissance de cette tech-nique, la toiture-terrasse ne sera jamais pour un parti-culier un choix rationnel. Surtout lorsqu’il s’agit d’yabriter sa famille. De ce point de vue, le travail menépar certains magazines ou émissions de télévision ainsique les campagnes publicitaires réalisées par des indus-triels ou enseignes de bricolage participent progressive-ment à casser les mythes de la maison traditionnelle.

Les constructeurs eux-mêmes ne sont pas fermés àtoute collaboration avec le monde de l’architecture,même si celle-ci se heurte souvent aux contingences des process de fabrication et du marketing. En 2005,Jacques Ferrier a ainsi conçu pour le groupe Geoxia unegamme de maisons résolument contemporaines(Phénix Concept house). Ni portiques, ni chiens-assis,ni frontons : l’architecte a dessiné un bâtiment lisse avecdes ossatures apparentes sans toutefois aller jusqu’àaplatir le toit afin notamment de ne pas modifier le sys-tème constructif du fabricant. Le renouveau dans ce domaine pourrait bien venir dudéveloppement durable. La sensibilité grandissante desconsommateurs pour les questions environnementalescommence aujourd’hui à bousculer le modèle figé de lamaison. En plus d’être confortable et sécurisante, celle-ci devra également être économe en énergie et minimi-ser son impact sur l’environnement. Des valeurs reven-diquées par un nombre croissant de propriétaires, prêtsà accepter une nouvelle esthétique où les panneauxphotovoltaïques et les toitures-terrasses végétalisées ontleur place. En témoigne l’engouement actuel pour laconstruction bois, dont le développement s’est incon-testablement accompagné d’une revalorisation de laqualité et de la diversité architecturale. Enfin, archi-tectes et urbanistes sont également aujourd’hui àl’origine de nouvelles réflexions sur les standards dulogement. Pour répondre aux problématiques soulevéespar l’étalement urbain – mitage des paysages, dépen-dance à la voiture… – ils proposent de nouvelles typo-logies d’habitats individuels denses et généralementregroupés au sein d’écoquartiers. Des pavillons en villequi redécouvrent, 80 ans après les premières expé-riences de l’architecture moderne, les vertus du toit-terrasse accessible. BC

* Yann Nussaume, La maison individuelle, 2005, Editions du Moniteur.

< L’une des déclinaisons de la gamme PhénixConcept Houseconçue en 2005 parl’architecte JacquesFerrier pour le groupe Geoxia.

La végétalisationextensive est

aujourd'hui unatout pour le

développement dela toiture-terrasse

dans l'habitatindividuel. >

É T A N C H É I T É . I N F O · N U M É R O 2 5 · AV R I L 2 0 1 0 · 23

Sansconnaissancede cettetechnique, latoiture-terrassene sera jamaispour unparticulier unchoix rationnel.

© P

.Hab

ourd

in/D

R T

echn

al

EI25_P16-23bis:EI10_version 1/04/10 18:03 Page 23