editorial · 1.1. ecoles de pensées de l’innovation tzeng (2009) résume les écoles de pensée...

83

Upload: others

Post on 17-Jul-2020

4 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école
Page 2: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

EDITORIAL

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 1

Aucune économie ne peutaujourd’hui résister à la tenta-tion de la finance islamique. Lasanté financière hors normed’organismes opérant dans ledomaine, l’engouement pources produits surtout dans lespays musulmans ainsi que larésilience de banques islami-ques face à la crise viennentconfirmer ce constat. Au Maroc,la publication du projet de loi deBank Al Maghrib en date du 4septembre 2012 préfigure lanaissance des futures banquesislamiques marocaines, appe-lées banques participatives.La Revue Marocaines desSciences de Managementconsacre dans ce numéro deuxarticles au sujet. La premièrecontribution analyse les instru-ments financiers islamiques etleur mode de fonctionnementen comparaison avec les ins-truments financiers conven-tionnels. Elle met en lumièreles quatre catégories : les ins-truments participatifs, les ins-truments de financement assi-milables à de la dette, les ins-truments à sous-jacents parti-

cipatifs et assimilables à de ladette, et les contrats de l’assu-rance islamique. Un deuxièmearticle s’intéresse à ce dernieraxe d’assurance islamique autravers de l’analyse du modèleconventionnel ainsi que les ris-ques qu’il comporte. Cet articlemobilise la théorie des incita-tions et propose une démarchequi vise à déterminer les condi-tions de développement d’unsystème d’assurance islamique.La micro-finance est présentedans ce numéro au travers d’unarticle qui évalue les fondationsde cette finance dans uncontexte d’entrepreneuriatsocial. L’article s’appuie sur unedémarche empirique pour pro-poser un modèle conceptueld’analyse de la micro-finance.Dans le domaine de la logisti-que, ce numéro propose un arti-cle qui traite de l’impact de laflexibilité et des préférences desemployés sur l’ordonnancementdu personnel. L’article s’appuiesur une approche par simula-tion multi-agents dans le cadred’une démarche de gestion desressources humaines.

P r . A b d e l m o u n i m B E L A L I AResponsable du Centre d’Etudes

et de Recherches en Gestion de l’ISCAE (CERGI)

Page 3: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école
Page 4: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

SOMMAIRE

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 3

FOCUSLe rôle du dirigean dans l’innovation....................................................... 5Mourad OUBRICH, Redouane BARZI

DOSSIERInstruments financiers islamiques et conventionnels :utilités, consistances et correspondances .............................................. 20Inass EL FARISSI, Mohamed EL MOUEFFAK, Siham MEKNASSI

L’assurance islamique et l’assurance conventionnelle ........................... 41Mohamed EL MOUEFFAK, Karim CHARAF,Inass EL FARISSI

Impact de la flexibilité et des préférences des employés sur l’ordonnancement du personnel : une approche par simulation multi-agent.............................................. 51Mohamed SABAR, Mohamed EL MOUEFFAK

Microfinance as social entrepreuneurshipin Southern Morocco .............................................................................. 67Héger GABTENI, Adil BAMI, Gjasem SHIRI

Directeur de la publication : Mohamed EL MOUEFFAK - Rédacteur en Chef : Mohamed SABARComité de lecture : Adil BAMI, Abdelmounim BELALIA, Abdelhaye BENABDELHADI, Fouad BENSEDDIK, Mohamed BOUMESMAR, Fawzi BRITEL, Karim CHARAF, Dounia DAHAB,Fadel DRISSI, Bachir EL BOUHALI, Inass EL FARISSI, Younes LAHRICHI, Fouad MACHROUH,Tarik EL MALKI, Siham MEKNASSI, Mohamed SABAR, Jaâfar SKALLI, Ouafaa ZAIM. Responsable Communication : Samira ALAOUISecretaire de la rédaction : Leïla EL MOUALIJDiffusion auprès des partenaires : Lamia MAKROUMRéalisation : Ouragan CommunicationDistribution : SOCHEPRESSDépôt légal 2012/PE0088 / ISSN 2028/8840

GROUPE ISCAE : Km 9,500, Route de Nouasseur - B.P. 8114 Oasis- Casablanca - MarocTél. : (+212) 05 22 33 54 82 à 87 - Fax : (+212) 05 22 33 54 96Site web : www.groupeiscae.ma

Page 5: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école
Page 6: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

FOCUS

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 5

Le rôle du dirigeant dans l’innovation

Résumé. Cet article a pour objectif de caractériser, sous un angle managérial,le phénomène de l’innovation, tant son importance pour la compétitivité de l’en-treprise est avérée. Il propose un modèle de recherche liant l’innovation, lacapacité d’absorption et le profil du dirigeant.A travers la revue de la littérature, nous avons montré que le profil du dirigeantpeut être un facteur influençant la capacité d’absorption de l’entreprise et quecette dernière influence à son tour le degré d’innovation.

Mots-clés. Innovation, capacités dynamiques, capacité d’absorption, profil dudirigeantClassification JEL : M10

Abstract. This paper seeks to characterize, from a managerial perspective, thephenomenon of the innovation within the company. Indeed, we deem that inno-vation is one of the most important attribute of competitiveness of the com-pany, hence, this paper puts forward a research model that encompasses inno-vation, absorption capacity and manager style.Based on the state of art, we have showed that the manager style can be a fac-tor impacting the absorption capacity of the company which influences thedegree of innovation.

Key words. Innovation, dynamic capabilities, absorption capacity, manager styleClassification JEL : M10

Mourad OUBRICHEnseignant-chercheur,INPTPrésident, CIEMS

RedouaneBARZIEnseignant-chercheur,ENCGKVice-Président, [email protected]

Introduction

L’innovation est devenue une néces-sité pour les entreprises qui souhai-tent assurer leur pérennité et leurdéveloppement (Cassimon, Vengeers,2002). Elle est une source importantede compétitivité dans un environne-ment marqué par une forte concur-rence. L’innovation peut être définiepar « […] la mise en œuvre d’un produit(bien ou service) ou d’un procédé nou-

veau ou sensiblement amélioré, d’unenouvelle méthode de commercialisationdans les pratiques d’organisation du lieude travail ou des relations extérieures »(OCDE, 2005 : 46).Toutes les entreprises cherchent àfavoriser leur innovation. Elles doi-vent souvent se montrer plus inno-vantes que leurs concurrentes(OCDE, 2004), d’où l’importanced’étudier les déterminants de l’inno-vation au sein de l’entreprise, notam-ment le rôle du dirigeant.

Page 7: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

FOCUS

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT6

La littérature propose plusieurs défi-nitions du « dirigeant ». Certaines leconsidèrent comme un patron, pro-tecteur et avocat, quand d’autres levoient comme un entrepreneur, négo-ciant et proactif (Regards sur lesPME, 20051). Ces différences sont leplus souvent imputées aux divergen-ces d’appréciation sur les performan-ces des dirigeants (Marchesnay,2004). La définition qui en sera rete-nue dans le cadre de ce travail consi-dère le dirigeant comme un entrepre-neur qui prend des décisions straté-giques dans le but d’organiser la pro-duction, créer une valeur marchande,innover sur le marché et faire fructi-fier le capital (Marchesnay, 2004).Le dirigeant joue un rôle central dansl’innovation de l’entreprise. La théo-rie « upper echelons » (Hambrick,Mason, 1984) soutient que le diri-geant peut exercer une influencedans la création de valeur de l’entre-prise grâce à ses caractéristiques per-sonnelles et ses aptitudes spécifi-ques. Ces innovations sont davantageintéressantes lorsque l’équipe diri-geante est bien formée (Bantel,Jackson, 1989). Pigé (2002) a montréque la formation initiale et l’expé-rience professionnelle peuvent stimu-ler l’innovation.D’autres facteurs peuvent égalementinfluencer les décisions du dirigeanten matière d’innovation comme l’ou-verture aux investisseurs (Rubinstein,2001), la propriété du capital (Nekhili,Poincelot, 2000) avec la présence d’ac-tionnaires majoritaires qui peuventguider le choix du dirigeant, la lati-tude du dirigeant (Donaldson, Davis,1991) et le style de management(Julien, Marchesnay, 1987).

Ainsi, le dirigeant est présent à tousles niveaux, que ce soit du côté del’organisation ou de la structure del’entreprise. Il a une vision, qui peutêtre impactée par d’autres partiesprenantes, mais c’est lui qui en assurela communication, la diffusion et lamise en œuvre au sein de l’entreprise. Dès lors, cet article s’intéressera à lafaçon dont le dirigeant déterminel’innovation. Il se focalisera davan-tage sur le style de management etsur la capacité d’absorption pourexpliquer la diversité des choix enmatière d’innovation. Le but est deproposer une première conceptuali-sation de la relation entre le diri-geant et l’innovation à travers lacapacité d’absorption. Cette réflexionplace le dirigeant au cœur de l’actionde l’entreprise, épousant les idées del’école entrepreneuriale (Lampel,Mintzberg, Ahlstrand, 1999).Pour y parvenir, nous aborderons enpremier lieu le concept de l’innova-tion avant d’analyser l’influence duprofil du dirigeant sur l’innovation.Par la suite, le modèle de recherchesera présenté.

1. Concepts de l’innovation

L’innovation est un champ de recher-che qui a fait et continue de faire l’ob-jet de travaux nombreux. L’objet de ceparagraphe est de proposer uneréflexion sur le concept de l’innova-tion. En effet, un constat de départest que la majeure partie de laréflexion sur l’innovation porte enréalité sur des questionnements rela-tifs au processus de l’innovation.Cette approche n’est pas sans intérêt,

1. Regards sur les PME n° 8, Observatoire des PME, GIE OSEO services.

Page 8: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

FOCUS

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 7

mais insuffisante pour appréhenderdans leur globalité les phénomènesde l’innovation dans les organisa-tions. A cet effet, cet article intégreradeux autres éléments de l’innovationà savoir l’objet de l’innovation et lesdéterminants de l’innovation. Dés lors, une présentation des princi-pales écoles de pensée de l’innovationnous permettra de clarifier notrepositionnement de recherche quant àla question de l’innovation au seindes organisations.

1.1. Ecoles de pensées de l’innovationTzeng (2009) résume les écoles depensée de l’innovation en trois typesd’écoles : l’école des capacités, l’écolede l’entrepreneuriat et l’école de laculture. L’école des capacités s’appuie sur uneperspective économique de l’innova-tion. L’innovation, comme une capa-cité institutionnalisée, se caractérisepar un changement technologique.Cette idée a été développée parChandler dans le cadre de ses recher-ches sur le système économique amé-ricain entre 1850 et 1920, et lesrecherche de Mowery et Rosenberg(1998) sur l’innovation aux EtatsUnis entre 1900 et 1990. Selon cette école, l’innovation estbasée sur les capacités dynamiquesde l’entreprise (Wang, Ahmed, 2007).Elle se définie par la capacité de l’en-treprise à intégrer, à développer et àreconfigurer les compétences inter-nes et externes (Tzeng, 2009). Par ailleurs, l’école des capacités s’ap-puie sur la notion de capacités insti-tutionnalisées, qui se cristallisent

dans des routines (Nelson, Winter,1982). Tzeng (2009) distingue entretrois types de classes de routinesrelatives à l’innovation : les routinesopérationnelles, les routines d’inves-tissement et les routines de recher-che. Les routines de recherche sontles plus importantes, dans la mesurequ’elles créent de l’innovation et rési-dent dans le département de recher-che et développement. Les partisans de cette école s’intéres-sent notamment à la façon d’institu-tionnaliser l’innovation et de l’ins-crire dans des routines.L’institutionnalisation de l’innovationse définie comme la codification duprogramme d’innovation (Jelinek,1979), et se décrit par deux mécanis-mes : (1) système ou routine qui cap-ture la connaissance (2) système ouroutine qui génère l’innovation(Tzeng, 2009).L’école de l’entrepreneuriat, quant àelle, s’appuie sur une perspectivesociale de l’innovation. Elle met enavant le concept angliciste « grass-roots impetuses », qui émerge à par-tir d’un sentiment d’identité. Dans cesens, l’entreprise est considérée pluscomme une communauté qu’une cor-poration, dans la mesure où elle créele sens à la communauté. Plusieurs auteurs s’inscrivent danscette perspective de l’innovation.Peters et Waterman (1982), qui ontmené une étude sur les 62 excellentesentreprises aux Etats-Unis, ontconclu que l’autonomie et l’entrepre-neuriat sont cruciaux à l’innovation.De son côté, Kanter (1983)2 a mis enexergue le fait que l’innovation étaitauto-initiée, c’est-à-dire que l’innova-

2. 234 interviews dans 47 entreprises innovantes aux Etats-Unis.

Page 9: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

FOCUS

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT8

tion n’était pas dirigée par le top mana-gement, mais elle est initiée par desrebelles qui utilisent de façon illégaleles ressources organisationnelles3.L’innovation selon l’école de l’entre-preneuriat suppose que les personnessoient loyales, car elle véhicule unsens de responsabilité et pousse lespersonnes à une créativité alterna-tive. Autrement dit, l’innovation n’estpas considérée comme un bien écono-mique. Elle n’est pas calculée, maiselle est perçue comme une surprise,qui se produit à partir des relationshumaines. L’innovation comme grass-roots impetuses, s’appuie sur l’impro-visation dans l’action. Eisenhardt etTabrizi (1995) avaient montré dansune recherche portant sur l’industrieinformatique que cette improvisationétait critique dans l’innovationproduit. Concernant l’école de la culture, elles’appuie sur une perspective cultu-relle de l’innovation, qui considèrel’innovation comme un art enraciné(Tzeng, 2009). Cet art enraciné secaractérise par trois éléments : pre-mièrement, il est lié à une culture decroyances et de pratiques partagées ;deuxièmement, il est considérécomme un héritage intergénération-nel car il est partagé dans le tempsentre génération ; troisièmement, ilest piloté par une vision et guidé pardes objectifs. Les études de Tripsas et Gavetti(2000) et Kaplan et Tripsas (2008)ont montré que le développementtechnologique ne suit pas des sen-tiers de dépendance4, mais plutôt unesolide croyance en la primauté de la

technologie. Henderson (1995) expli-que que l’évolution technologique estplutôt fondée sur l’imaginaire quesur le réel. Selon Tzeng (2009), l’art enraciné sedéveloppe dans des relations intergé-nérationnelles. Graham et Shuldiner(2001) évoquent trois façons pourencourager le développement de cesrelations intergénérationnelles : (1)apprentissage à travers lequel laconnaissance tacite est transmise, (2)films documentaires permettant lasauvegarde de l’expérience, (3)conférences d’innovation dans les-quelles la mémoire collective est par-tagée et les innovateurs de différen-tes générations se rencontrent.Après avoir exposé les différentesécoles de pensées de l’innovation,nous analyserons dans le paragraphequi suit le processus et l’objet de l’in-novation.

1.2. Processus et objet de l’innovationLe domaine de l’innovation est trèslarge. Les auteurs traitant la ques-tion de l’innovation dans les organi-sations distinguent entre la notion dediffusion et de l’adoption de l’innova-tion (Damanpour, Fariborz, 1991).D’après Desouza, Dombrowski,Awazu, Baloh, Papagari, Jha et Kim(2009), la réussite de l’innovationdépend de l’existence d’un processusformalisé de l’innovation composé decinq phases : génération d’idée etmobilisation, examination et support,experimentation, commercialisation,diffusion et implémentation. PourDamanpour (1991), l’adoption de l’in-

3. Innovation was self initiated, which means that innovation was not directed from the top but was initiated bythe rebels’ who bootlegged organizational resources.4. path-dependencies.

Page 10: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

FOCUS

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 9

novation est conçue pour englober lagénération, le développement et lamise en œuvre de nouvelles idées oude comportements. Les résultats dece processus d’innovation peuventprendre plusieurs formes selonDamanpour (1991), et cela peutconcerner le développement d’unnouveau produit, un nouveau ser-vice, un nouveau processus de pro-duction ou un nouveau systèmeadministratif. Francis et Bessant (2005) présententun cadre d’analyse de l’objet de l’in-novation, baptisée « the four P’s ofinnovation targeting », qui donneune vue d’ensemble de différentsobjets de l’innovation. L’innovationportée sur le produit ou sur le serviceconsiste à offrir par exemple un pro-duit avec des fonctionnalités supé-rieures, alors que l’innovation portéesur le processus concerne l’améliora-tion du processus existant par l’inté-gration à titre d’exemple d’une nou-velle technologie. Le troisième objetde l’innovation concerne le position-nement du produit ou du servicefourni par l’entreprise sur un mar-ché. Il dépend essentiellement de lacapacité de l’entreprise à innoverdans l’amélioration du positionne-ment de son produit ou de l’améliora-tion de son image. L’élément centrald’une stratégie du positionnement duproduit se matérialise dans le mana-gement de l’identité qui dépend de lapublicité, du marketing, des medias,du packaging et de la manipulationd’un ensemble de signaux. Le qua-trième objet de l’innovation concerneun changement paradigmatique oude modèle de pensée de l’organisa-tion. Ce type d’innovation peut êtretraité à partir deux angles :

1. Un angle interne qui concerneles valeurs organisationnelles.L’adoption d’un nouveau para-digme requière un changement devaleurs organisationnelles. 2. Un angle externe qui concerneun changement de modèle écono-mique. Il peut avoir un impact surl’innovation dans les produits, lesprocessus et aussi dans le posi-tionnement.

Il est à noter ici que toutes ces inno-vations ne peuvent avoir lieu quelorsqu’il y a une bonne communica-tion interne, une structure décentra-lisée favorisant l’innovation, des res-sources organisationnelles, une fortecroyance dans l’innovation se maté-rialisant par la prise risque à traversle financement des idées innovanteset le partage des idées entre les diffé-rents acteurs de l’entreprise (Wan,Ong, Lee, 2005).Cette analyse centrée autour du pro-cessus et de l’objet de l’innovation nepeut être complète sans la prise encompte des déterminants de l’innova-tion. Ces derniers sont nombreux etvariés, d’où la pertinence de retenir,dans ce qui suit, un des principauxdéterminants à savoir le profildirigeant.

1.3. L’influence du profil du dirigeantDe nombreux auteurs ont exploré lesstyles de dirigeants (Marchesnay,1998 ; Filion, 1997 ; Miner, 1997 ;Julien et Marchesnay, 1996 ; Chell etHaworth, 1993; Woo, Cooper etDunkelberg, 1991 ; Gartner, 1989 ;Davidson, 1988 ; Miles et Snow, 1978 ;Laufer, 1975). Nous présentons ci-dessus les travaux les plus mar-quants.Laufer (1975) distingue quatre typesd’entrepreneurs. Le manager (ou l’in-novateur) qui cherche la croissance,

Page 11: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

FOCUS

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT10

l’entrepreneur propriétaire qui estorienté vers la croissance et l’autono-mie financière de son entreprise, l’en-trepreneur refusant la croissancemais cherchant l’efficacité et enfinl’entrepreneur artisan qui s’attacheprincipalement à l’autonomie.Miles et Snow (1978) ont réalisé unetypologie comprenant quatre typesstratégiques « Strategic types » àsavoir les prospecteurs, les analystes,les défenseurs et les réacteurs. Lesauteurs présentent les trois premierscomportements comme conduisantvers le succès alors que le derniercomportement conduit à l’échec. Les prospecteurs créent le change-ment dans une industrie avec le déve-loppement de produits, l’introductionde nouvelles technologies, etc. Cesorganisations semblent être décen-tralisées et moins formalisées. Lesanalystes sont attirés par le dévelop-pement d’activités grâce à l’exploita-tion de nouveaux produits et auxopportunités qu’offre le marché. Leursource d’innovation est souvent l’imi-tation. Ces deux comportements peu-vent être assimilés à un comporte-ment entrepreneurial. Les défen-seurs, quant à eux, tentent de créerun domaine d’activité stable en ayantrecours à une stratégie de niche oude domination par les coûts. Lesdéfenseurs essaient très peu de déce-ler des opportunités sur le marché.Ils préfèrent se protéger de la concur-rence en choisissant une niche demarché ou en régulant l’environne-ment avec des réponses inter-organi-sationnelles. Segev (1989) pense queles analystes et les réacteurs pour-raient se situer sur un continuumquelque part entre les prospecteurset les défenseurs. Ils seront distin-gués par le degré de proximité versles extrémités. Les analystes seront

ainsi plus proches des prospecteurset les réacteurs plus proches desdéfenseurs.Davidson (1988) parvient à troistypes de styles de dirigeants.L’entrepreneur qui reconnaît uneopportunité et l’exploite activement,le manager et le dirigeant proprié-taire. De même, Gartner (1989) faitune distinction entre l’entrepreneuret le propriétaire de la petite entre-prise. Chell et Haworth (1993), quantà eux, distinguent entre l’entrepre-neur, le quasi-entrepreneur qui estun aventurier créatif, l’administra-teur qui est un réactif modérémentinnovateur et enfin l’attentionné.Julien et Marchesnay (1996) distin-guent deux types d’entrepreneurs :L’entrepreneur PIC (Pérennité,Indépendance, Croissance réactive) suitune logique patrimoniale selon laquelle,il cherche à pérenniser son affaire,garantir une stabilité et assurer le patri-moine de la famille. Le CAP (Croissance,Autonomie, Pérennité) suit une logiqueentrepreneuriale. Il est peu préoccupépar la pérennité de son activité maisattache une grande importance auxactivités à forte croissance et à l’autono-mie de ses décisions. Il n’hésitera pas àfaire appel à des bailleurs de fonds pourfinancer ses projets.Par ailleurs, Filion (1997) distingue sixtypes de propriétaires-dirigeants dePME : le bûcheron (lumberjack) qui secaractérise par son indépendance etson ouverture sur l’extérieur, le séduc-teur (seducer) ou le vacancier (hob-byist) en fonction de son implicationdans l’entreprise, le sportif (player)qui porte un intérêt à la représentationet au rôle de l’entreprise et enfin leconverti (convert) ou le missionnaire(missionary) en fonction de sa capacitéà déléguer ses pouvoirs et à travailleren équipe.

Page 12: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

FOCUS

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 11

Marchesnay (1998) propose uneautre typologie où il distingue entrel’entrepreneur isolé préoccupé par sasurvie, le nomade qui s’attache aupouvoir, à l’efficacité et à l’efficience,le notable qui est proche du PIC etenfin l’entreprenant qui opte pourune direction coopérative, intégrantles risques stratégiques et les risquesde gestion. Les différents styles de dirigeantsévoqués ici exercent une influencedirecte sur leurs stratégies et surleur degré d’innovation. En effet, undirigeant aura tendance à avoir uneorientation volontariste vis-à-vis dudéveloppement de l’entreprise et deses capacités s’il poursuit davantageun comportement entrepreneurialque patrimonial. Un comportemententrepreneurial comporte unevolonté d’action qui vise le change-ment et la modification du contexteenvironnemental actuel. Ainsi, lesdirigeants qui attachent une grandeattention à l’autonomie et au pouvoirseront amenés à se focaliser sur leursactivités de base et par conséquent,adopteront des stratégies de concen-tration tout en rejetant des stratégiessymbiotiques. En revanche, les stra-tégies de différenciation, voire d’in-novation seront poursuivies par lesdirigeants –entrepreneurs-, orientésvers le future et jouissant d’un profilopportuniste. A ce titre, Porter (1980)lie la dimension entrepreneurialed’une entreprise à la stratégie de dif-férenciation.Par ailleurs, Leibenstein (1987) pré-cise que les entrepreneurs possèdentdes rôles d’innovation et de transfor-mation. En effet, ils peuvent identi-fier et répondre à des besoins inexpri-més des consommateurs, grâce à une

offre originale, à condition de détenirdes compétences spécifiques enmatière d’organisation, de directionet de motivation des individus. A cetitre, les compétences managériales(Arthur, Inkson, Pringle, 1999 ;Spencer et Spencer, 1993) sont desoutils stratégiques indispensablespour un processus de décision viable,dont les atouts peuvent refléter uneperformance élevée et une compétiti-vité améliorée. Par conséquent, un niveau de perfor-mance et de compétitivité élevénécessite un mix de connaissances etde qualités chez l’entrepreneur.L’attitude et le comportement du diri-geant sont des éléments clé dans ledéveloppement de produits compéti-tifs ainsi que dans la croissanceet la pérennité de l’entreprise(Argenti, 1976 ; Carneiro, 2000 ;McDounough et Griffith, 2000). Unentrepreneur qui autorise son équipeà contribuer au processus de formu-lation des plans d’action et des straté-gies opérationnelles de l’entrepriseva inévitablement assister à unecroissance de la culture organisation-nelle et au développement d’unesynergie entre les membres (Kazem,Van der Heijden, 2006). Ceci étant, ces typologies sont inté-ressantes pour mieux comprendre ledirigeant et mieux l’accompagner.Cependant, il est utile d’appréhenderles mécanismes à travers lesquels ledirigeant prenne sa décision(Beaucourt, Louart, 1995), notam-ment en matière d’innovation. Pourcela, nous nous intéresserons ci-après aux capacités du dirigeant etplus particulièrement à la capacitéd’absorption de l’entreprise.

Page 13: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

FOCUS

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT12

2. Lien entre innovationet capacité d’absorption

Dans cette partie, nous chercherons àidentifier les éléments qui contri-buent au développement de la capa-cité d’absorption de l’entreprise, et ceafin de favoriser l’innovation. Nousmontrerons en quoi le profile du diri-geant impacte la capacité d’absorp-tion et conduit l’entreprise à innover.

2.1. Apport de la théorie fondée surles ressourcesLa théorie fondée sur les ressourcesest issue d’un processus d’évolutiondes théories et des recherches dansdiverses disciplines, alliant à la foisles sciences économiques et les scien-ces sociales.C’est grâce à la réflexion des cher-cheurs sur la cohérence du dévelop-pement de l’entreprise qu’ils se sontintéressés à la notion de ressource.Penrose (1959) puis Rubin (1973) ontessayé d’expliquer la déterminationdes choix des entreprises en fonctiondes ressources dont elles disposentafin de comprendre leur développe-ment. Selon Rubin (1973, p.937),«une ressource est un input spécifique quipermet à l’entreprise d’accomplir unetâche particulière». Cette ressource estconstituée d’individus et des actifsqu’ils utilisent. Cependant, les deuxauteurs (Penrose et Rubin) ont centréleurs travaux davantage sur le ser-vice rendu par la ressource qu’à laressource elle-même. Rubin (1973)affirme que les ressources permet-tent de réaliser une activité bien pré-cise, incluant les employés et lesmachines, rattachant ainsi les res-sources à l’entreprise à laquelle ellesappartiennent. Cette spécificité desressources fait que la valeur d’uneressource dépasse celle de marché.

La raison tient à la plus-value appor-tée par l’entreprise en termes decohésion et d’expérience. Par ailleurs, d’autres domaines dessciences humaines et sociales ontcontribué à l’essor de l’approche fon-dée sur les ressources. A ce titre, lasociologie s’est intéressée à la dimen-sion humaine des organisations.Plusieurs travaux de recherche,notamment ceux de Argyris et Schön(1979), expliquent le développementdes aptitudes d’une organisation àtravers les actions de chacun de sesmembres.Ces approches avaient mis l’accentsur la compréhension des phénomè-nes organisationnels et ont favoriséle développement d’une théorie dumanagement axée sur les ressourcesde l’entreprise. C’est ainsi qu’audébut des années quatre-vingt,Wernerfelt (1984) et Rumelt (1987)ont soulevé l’importance des ressour-ces dans le management. Le premiers’est intéressé aux diversificationsconduites sur la base d’un porte-feuille de ressources, le second auxchoix des produits-marchés en fonc-tion des ressources de l’entreprise. Wernerfelt (1984 ; 1995) estime quel’entreprise peut choisir les ressour-ces qui lui procurent un profit élevé.De ce fait, selon Lengnick-Hall etWolff (1999), une entreprise sera plusperformante qu’une autre, si elledémontre une capacité supérieure àdévelopper, utiliser et protéger unensemble de compétences et de res-sources. L’avantage concurrentielrésulte donc d’un accaparement de lafirme de la valeur d’un actif temporai-rement supérieur à sa valeur estiméepar le marché. Cet écart est expliquépar l’asymétrie d’informations quicaractérise un marché. Cette théorieinsiste sur le fait que ces capacités

Page 14: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

FOCUS

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 13

s’inscrivent dans l’évolution de l’en-treprise. Les compétences et les res-sources que l’entreprise cherche àdévelopper lui permettront un avan-tage durable. Au même titre, Barney(1986) précise que certaines entrepri-ses au sein d’une industrie peuventposséder des aptitudes afin de devenirune source de changements révolu-tionnaires dans cette industrie, tandisque d’autres ont la capacité de s’adap-ter rapidement aux bouleversementsde l’environnement. L’auteur conclutque ces deux types d’entreprises ontune plus grande probabilité de surviedans des industries menacées deprofonds bouleversements. Il est à noter, cependant, que cescapacités ne sont pas figées. Ellesdevront être développées, amélioréeset mises à jour de façon régulière parl’entreprise (Teece, Pisano et Shuen,1997 ; Wernerfelt, 1984). La théoriedes capacités dynamiques, expliquéeci-après, apporte un éclairage sur ledéveloppement des ressources et descapacités des entreprises.

2.2. Apport de la théorie des capacités dynamiquesPrahalad et Hamel (1994) ont étudié lesaptitudes et les actions volontaristesdes grandes firmes. Ils ont conclu queces firmes peuvent transformer leurenvironnement concurrentiel grâce àdes stratégies délibérées. Leur théoriedes capacités dynamiques indique quel’environnement exerce une influencesur l’entreprise, mais cette dernièrepeut aussi l’influencer en développantses compétences organisationnellesgrâce à l’apprentissage. En effet,l’entreprise peut entretenir et dévelop-per ses capacités internes dans unprocessus d’apprentissage stratégique.Teece, Pisano et Shuen (1997) défi-nissent les capacités dynamiques

comme l’aptitude d’une entreprise àintégrer, construire et reconfigurerdes compétences internes et externespour contrer les changements rapi-des de l’environnement. Ces auteursinsistent sur la nécessité d’un ajuste-ment constant des compétences ausein d’un environnement dynamique.Selon eux, les capacités dynamiquesreposent sur deux processus : le pro-cessus de configuration et le proces-sus d’apprentissage. Le premier pro-cessus a trait à la capacité des orga-nisations à combiner et à transformerl’ensemble des ressources internes etexternes dont elles disposent au seind’un environnement turbulent. Ledeuxième processus concerne lesroutines nouvelles et les dotations enactifs que les organisations acquiè-rent à travers l’utilisation et l’interac-tion des ressources internes et exter-nes auxquelles elles ont accès. De cefait, les capacités dynamiques exi-gent une maîtrise informationnelle(Kogut, 2000) et un tissu relationnelpermettant de faire appel à des res-sources en constante évolution(Biemans, 1990), d’où l’importance dela constitution de réseaux. Forgues,Fréchet et Josserand (2006) évoquentici le déplacement des préoccupationsstratégiques de l’intra-organisation-nel vers l’extra-organisationnel. Bien que mise en évidence dans lesgrandes entreprises, la théorie descapacités dynamiques convient par-faitement aux petites et moyennesentreprises qui détiennent au départdes ressources limitées mais quipourront les développer dans unedynamique apprenante. Cette der-nière oriente la combinaison et lerenouvellement des ressources afind’acquérir un avantage compétitifdurable. Le management stratégiqueest alors considéré comme un proces-

Page 15: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

FOCUS

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT14

sus d’« apprentissage collectif »visant à développer, puis exploiter,des compétences clés difficiles à imi-ter. L’avantage qui en résulte découledes capacités profondément enraci-nées et cachées permettant à l’entre-prise de proposer des produits inno-vants et de bonne qualité.Cette théorie a l’avantage d’accepterle choix stratégique du dirigeantdans le sens où ce dernier sélectionneles ressources qui lui permettrontd’atteindre ses objectifs et de déve-lopper et maintenir les avantages del’entreprise.Dans ce qui suit, nous aborderonsune composante essentielle des capa-cités dynamiques, à savoir la capacitéd’absorption et nous expliqueronsson lien à la fois avec le dirigeant etavec l’innovation.

2.3. Rôle de la capacité d’absorptionDans un premier temps, nous défini-rons la capacité d’absorption, pourensuite nous focaliser sur ses compo-santes. Les recherches relatives à la capacitéd’absorption peuvent être classées entrois catégories : les recherches cen-trées sur la reconceptualisation de lacapacité d’absorption, les recherchesqui s’intéressent au développementde la capacité d’absorption, et enfincelles qui visent à étudier la relationentre la capacité d’absorption et lesautres domaines de recherche (Liao,Fei, Chen, 2007). La littérature sur les capacités dyna-miques (Zahra, George, 2002) fournitune compréhension permettantl’étude de la capacité d’absorption.Dans ce sens, les chercheurs considè-rent que les capacités dynamiquessont enracinées dans les processusorganisationnels, et qu’elles aidentl’entreprise à reconfigurer ces res-

sources et de les adapter aux change-ments du marché afin d’atteindre unavantage concurrentiel.Cohen et Levinthal (1990) considè-rent que la capacité d’absorptionexige à l’entreprise de développerune capacité de reconnaitre la valeurde la nouvelle connaissance, de l’assi-miler et puis de l’appliquer. Cettecapacité d’absorption est cumulative,c’est-à-dire qu’elle se développe à par-tir de connaissances antérieures etelle suit un sentier de dépendance.Les théories de la capacité d’absorp-tion ont conclu que les connaissancesobtenues à partir des expériencespassées facilitent l’identification, lasélection et l’implémentation des pra-tiques profitables (Lenox, King,2004). Pour faciliter l’étude du concept, lacapacité d’absorption se divise encapacité d’absorption potentielle, quise matérialise dans l’acquisition etl’assimilation de la connaissance, etla capacité d’absorption réalisée quise focalise essentiellement sur latransformation et l’exploitation de laconnaissance pour un objectif com-mercial (Zahra, George, 2002;Gebauer, Worch, Truffer, 2012).De ce fait, le concept de la capacitéd’absorption est multidimensionnel.Il peut être présenté sous forme d’unprocessus linéaire en quatre étapes :acquisition de la connaissance, assi-milation de la connaissance, transfor-mation de la connaissance et exploi-tation de la connaissance; ou encoresous forme d’un processus nonlinéaire dans lequel assimilation ettransformation de la connaissancepeuvent s’effectuer en parallèle(Zahara, George, 2002). Fllaten,Engelen, Zahra et Brettel (2011), quiont étudié l’échelle de mesure de lacapacité d’absorption, ont conclu que

Page 16: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

FOCUS

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 15

le concept se résume en un processuslinéaire. Pour Zahra et George(2002), une entreprise peut acquériret assimiler les connaissances, maiséventuellement elle ne dispose pas dela capacité de les transformer et lesexploiter afin de générer des profits.A ce titre, Minbaeva, Pedersen etBjorkman (2003) estiment que l’habi-lité de l’entreprise à transformer et àexploiter la connaissance, dépend desconnaissances antérieures et de l’in-tensité de l’effort, c’est-à-dire de lamotivation des employées. D’après King et Lenox (2004), recon-naitre et implémenter de nouvellespratiques nécessite des informationssur les pratiques existantes et dispo-nibles. C’est dans ce sens qu’ils pro-posent d’étudier l’influence du diri-geant sur la capacité d’absorption àtravers la provision de l’entreprise eninformation interne. Les auteurs défi-nissent la provision de l’entreprise eninformation interne comme letransfert d’information d’une base dedonnées centrale aux agents dansl’entreprise.Nous nous appuyions sur la typologiede style de dirigeant déjà citée et surles études antérieures sur la capacitéd’absorption pour en déduire unerelation entre le profil du dirigeant etson impact sur la capacité d’absorp-tion. A ce niveau, nous supposonsque le dirigeant entrepreneur etprospecteur, qui met en place desprogrammes de formation, de stages,des séances d’échange et de partaged’expériences et de connaissance, etqui instaure la confiance entre l’en-treprise et ses employés, influencepositivement la capacité d’absorp-tion. En revanche, un dirigeant pro-tectionniste et défenseur qui n’incul-que pas une culture de partage d’in-formation, de connaissance et des

idées, influence négativement lacapacité d’absorption, et passe à côtéd’opportunités d’affaires. Van den Bosch, Volberda et De Boer(1999) considèrent que la forme orga-nisationnelle (fonctionnelle, division-nelle, matricielle), et les capacitéscombinatoire (capacité de système,capacité de coordination, capacité desocialisation) influencent la capacitéd’absorption. Donc le dirigeant quimet en place une structure organisa-tionnelle, des processus et des procé-dures de coordination qui favorisentl’acquisition et l’assimilation desconnaissances externes, serait enmesure de faire profiter son entre-prise d’une ressource nécessaire à lacréation des connaissances nouvellespuis à l’innovation. Selon Cohen et Levinthal (1990),l’utilisation de la connaissanceexterne est un déterminant de l’inno-vation. Zahra et George (2002) ontpassé en revue les études antérieuresportant sur la capacité d’absorption.Leur recherche conclut à l’existenced’une relation positive entre la capa-cité d’absorption et l’innovation.D’après Gebauer, Worch et Truffer(2012), les conceptualisations exis-tantes décrivent la capacité d’absorp-tion comme une variable indépen-dante et l’innovation comme variabledépendante, alors que la stratégied’affaire est considérée comme unevariable modératrice. Nous pouvons conclure sur l’exis-tence d’une relation entre le profil dudirigeant, la capacité d’absorption etl’innovation. Notre étude empiriquedevra vérifier, d’une part si le diri-geant entrepreneur et prospecteurinfluence positivement la capacitéd’absorption de l’entreprise et favo-rise l’innovation. En d’autres termes,nous chercherons à tester l’hypo-

Page 17: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

Conclusion

Au terme de ce présent travail derecherche, l’objectif était de compren-dre l’innovation dans l’entreprise.Pour cela, nous avons proposé unmodèle reliant à la fois le profil dudirigeant, la capacité d’absorption del’entreprise et l’innovation. Une première partie s’est attachée àconduire une réflexion autour duconcept de l’innovation, intégrant àla fois le processus, l’objet et lesdéterminants de l’innovation. Unedeuxième partie s’est focalisée sur lacapacité d’absorption comme unecomposante qui trouve son originedans la théorie fondée sur les res-sources et la théorie des capacitésdynamiques. Le rôle joué par le dirigeant au seinde l’entreprise est centrale. A ce titre,Donaldson et Davis (1991) avaientremarqué que la réussite de l’entre-prise devient ainsi le reflet de la com-

pétence du dirigeant. De ce fait, uneattention particulière doit être accor-dée au dirigeant et à son profil pourmieux appréhender son impact surles capacités de l’entreprise et pluslargement sur l’innovation. Ainsi,nous avons retenu le profil du diri-geant comme principal déterminantde l’innovation.A travers cette recherche, deux hypo-thèses ressortent : la première consi-dère que le profil du dirigeant de typeentrepreneur et prospecteurinfluence positivement la capacitéd’absorption de l’entreprise. Ladeuxième suppose que l’améliorationde la capacité d’absorption de l’entre-prise influence positivement l’innova-tion. Les prochains articles de rechercheauront pour but de tester empirique-ment ces hypothèses en proposantune opérationnalisation des variablesdu modèle et une méthodologie empi-rique ■

FOCUS

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT16

thèse selon laquelle un dirigeantentrepreneur est à la recherche denouvelles opportunités d’affaires. Dece fait, il serait en clin à inculquerune attitude d’attention et d’identifi-

cation des connaissances externes àforte valeur ajoutée.Pour résumer, nous souhaiterons àtravers cette recherche tester lemodèle suivant :

Page 18: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

FOCUS

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 17

Bibliographie

• Argenti J. (1976), Corporate Collapse:The Cause and the Symptoms, London,McGraw-Hill.• Argyris C. et D. Schön (1979),Organizational learning: a theory inaction perspective, Reading, Addison-Wesley.• Arthur M. B., Inkson K. et J.K. Pringle(1999), The New Careers. IndividualAction and Economic Change, London :SAGE.• Bantel K.A. et S.E. Jackson (1989), «Top Management and Innovations inBanking: Does the Composition of theTop Team Make a Difference ? », StrategicManagement Journal, Vol.10, p. 107-125.• Barney J.B. (1986), « Types of competi-tion and the theory of strategy: toward anintegrative framework », Academy ofManagement Review, Vol. 11, No. 4, p.791-800.• Biemans W.G. (1990), « The managerialimplications of networking », EuropeanManagement Journal, Vol. 8, No. 4, p.529-40.• Carneiro A. (2000), « How does know-ledge management influence innovationand competitiveness ? », Journal ofKnowledge Management, Vol. 4, No. 2, p.87-98.• Cassiman B. et R. Veugelers (2002),«Complementarity in the InnovationStrategy : Internal R&D, ExternalTechnology Acquisition, and Cooperation inR&D», Research paper No 457, Barcelona,Spain : University of Navarra, IESE.• Chell E. et J.M. Haworth (1993),«Profiling entrepreneurs: multiple pers-pectives and consequent methodologicalconsiderations», in Klant H. (Ed).Entrepreneurship and business develop-ment, 259-60, London, Antony Rowe Lt.• Cohen W. et D. Levinthal (1990),«Absorptive Capacity: a new perspectiveon learning and innovation»,Administrative Science Quarterly, Vol. 35,No. 1, p. 128-152.

• D a m a n p o u r, Fa r i b o r z ( 1 9 9 1 ) ,«Organizational Innovation: A Meta-Analysis of Effects of Determinants andModerators », Academy of ManagementJournal, Vol. 34, No. 3, p.555-590.• Davidson P. (1988), « Type of man andtype of company revisited: a confirmatorycluster analysis approach », Frontiers ofentrepreneurship research, p. 88-105.• Desouza K.C., Dombrowski C., AwazuY., Baloh P., Papagari S., Jha S. et J.Y. Kim(2009), « Crafting organizational innova-tion processes », Innovation : manage-ment, Policy and Pratice, Vol. 11, p. 6-33.• Donaldson L. et J. Davis (1991),«Stewardship Theory or Agency Theory :CEO Governance and ShareholderReturns», Academy Of ManagementReview, Vol. 20, No. 1, p. 65• Eisenhardt K.M. et B.N. Tabrizi (1995),« Accelerating adaptive processes:Product innovation in the global compu-ter industry », Administrative ScienceQuarterly, Vol. 40, No. 1, p. 84-110.• Filion L.J. (1997), « Le champ de l’en-trepreneuriat: historique, évolution, ten-dances », Revue Internationale de laPME, Vol. 10, No. 2, p. 129-72.• Flatten T.C., Engelen A., Zahra S. et M.Brettel (2011), «A measure of absorptivecapacity: Scale development and valida-tion», European Management Journal,Vol. 29, p. 98-116. • Forgues B., Fréchet M. et E. Josserand(2006), « Relations interorganisationnel-les, conceptualisations, résultats et voiesde recherche », Revue Française deGestion, Vol. 32, No. 164, p. 17-31.• Francis D. et J. Bessant (2005),«Trageting innovation and implicationsfor capability development»,Technovation, Vol. 25, p. 171-183.• Gartner W.B. (1989), « Some suggestionsfor research on entrepreneurial traits andcharacteristics », EntrepreneurshipTheory and Practice, Vol. 14, No. 1,p. 27-37.• Gebauer H., Worch H. et B. Truffer(2012), « Absorptive capacity, learning

Page 19: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

FOCUS

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT18

processes and combinative capabilities asdeterminants of strategic innovation»,European Management Journal, Vol. 30,No. 1, p. 57-73. • Graham M.B.W. et A.T. Shuldiner(2001), Corining and the craft of innova-tion, Oxford University Press, New York.• Hambrick D.C. et P. Mason (1984),«Upper echelons: the organization as areflection of its top managers», Academyof Management Review, Vol. 9, No. 2, p.193-206.• Jelinek M. (1979), Institutionalizinginnovation: A study of organizationallearning systems, Praeger, New York.• Julien P.A. et M. Marchesnay (1996),L’Entrepreneuriat, Economica, 112 p.• Julien P.A. et M. Marchesnay (1987), LaPetite Entreprise, Ed. Vuibert, Paris.• Kanter R.M. (1983), The change mas-ters: innovations for productivity in theAmerican corporation, Simon & Schuster,New York.• Kaplan S. et M. Tripsas (2008),«Thinking about technology: applying acognitive lens to technical change»,Research Policy, Vol. 37, No. 5, p. 790-805.• Kazem A. et B. Van der Heijden (2006),« Exporting firms strategic choices: Thecase of Egyptian SME in the food indus-try », SAM Advanced ManagementJournal, Vol. 71, No. 3, p. 21-33.• Kogut B. (2000), « The Network asknowledge: generative rules and theemergence of structure », StrategicManagement Journal, Vol. 21, p. 405-25.• Lampel J., Mintzberg H. et Ahlstrand B.(1999), Safari en pays stratégie, l’explora-tion des grands courants de la penséestratégique, Village Mondial• Laufer J. (1975), « Comment on deviententrepreneur ? », Revue Française deGestion, novembre, p. 11-26.• Leibenstein H (1987), «Entrepreneur-ship, entrepreneurial training and X-effi-ciency theory», Journal of EconomicBehavior and Organization, Vol. 8, No. 1,p. 191-205.

• Lengnick-Hall C.A. et J.A. Wolff (1999),« Similarities and contradictions in thecore logic of three strategy researchstreams », Strategic ManagementJournal, Vol. 20, p. 1109-32.• Lenox M. et A. King (2004), «Prospectsfor developing absorptive capacitythrough internal information provision»,Strategic Management Journal, Vol. 25,No. 4, p. 331-345.• Liao S-H., Fei W-C. et C-C. Chen (2007),« Knowledge sharing, absorptive capacity,and innovation capability: an empiricalstudy of Taiwan’s knowledge-intensiveindustries », Journal of InformationScience, Vol. 33, No. 3, p. 340-359. • Marchesnay M. (2004), Managementstratégique, Les Editions de l’ADREG• Marchesnay M. (1998), « Une visionrenouvelée du risque entrepreneurial »,in Colloque AIREPME. Nancy-Metz, 22-24octobre, Cédérom.• McDonough E. et A. Griffin (2000),«Creating systemic capability for consis-tent high performance new product deve-lopement», in U. Jurgens (Ed). NewProduct Development and ProductionNetworks: Learning from experience indifferent industries and countries, 441-58, New York, Springer Verlag.• Miles R.E et C.C Snow (1978),Organizational Strategy, Structure andProcess, McGraw-Hill (ed.).• Miner J.B. (1997), « A psychologicaltypology and its relationship to entrepre-neurial success », Entrepreneurship andRegional Development, Vol. 4, No. 9, p.319-334.• Mowery DC. et N. Rosenberg (1998),Paths of innovation: Technologicalchange in 20th Century America,Cambridge University Press, Cambridge.• Nekhili M. et E. Poincelot (2000), «Lafonction R&D et la latitude managériale :une analyse théorique», Finance ContrôleStratégie, Vol. 3, No. 1, mars, p. 5-28.• Nelson R.R. et S.G. Winter (1982), An evo-lutionary theory of economic change,Harvard University Press, Cambridge MA.

Page 20: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

FOCUS

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 19

OCDE (2005), Oslo Manual, Guidelinesfor Collecting and InterpretingInnovation Data, Paris, OCDE andEurostat.• OCDE (2004), « Promouvoir l’entrepre-neuriat et les PME innovantes dans uneéconomie mondialisée », 2ème Conférencede l’OCDE des ministres en charge desPME, 3-5 juin, Istanbul.• Penrose E. (1959), The theory of thegrowth of the firm, New York, John Wiley& Sons, (ed.).• Peters T-J. et R.H. Waterman (1982), Insearch of excellence: Lessons fromAmerica’s Best- Run companies, Harper &Row, New York.• Pigé B. (2002), «La Gouvernanced’Entreprise dans les PME : l’Adaptationdu Profil du Dirigeant aux Besoins del’Entreprise», Revue InternationaleP.M.E, Vol.15, No. 2, p.119-142.• Porter M.E (1980), Competitive stra-tegy: Techniques for analyzing industriesand competitors, Glencoe, IL: Free Press(ed.).• Prahalad C.K. et G. Hamel (1990), «Thecore competence of the corporation»,Harvard Business Review, Vol. 68, No. 3,p. 79-91.• Rubin P.H. (1973), « The expansion offirms », Journal of Political Economy,Vol. 81, No. 4, p. 936-49.• Rubinstein M. (2001), « Gouvernementd’Entreprise et Innovation », Revued’Economie Financière, p. 211-229.• Rumelt R.P. (1987), « Theory, strategyand entrepreneurship », in D.J. Teece(Ed), The competitive challenge,Cambridge, MA, Ballinger.• Segev E. (1989), «A SystematicComparative Analysis and Synthesis ofTwo Business-Level StrategicTypologies», Strategic ManagementJournal, Vol.10, No. 5, p. 487-505.• Spencer L.M. Jr. et S.M. Spencer(1993), Competence at Work: Models forSuperior Performance, New York: JohnWiley & Sons.

• Teece D.J., G. Pisano et A. Shuen(1997), « Dynamic capabilities and stra-tegic management », StrategicManagement Journal, Vol. 18, No. 7, p.509-33.• Tripsas M. et G. Gavetti (2000),«Capabilities, cognition and inertia : evi-dence from digital imaging», StrategicManagement Journal, Vol. 21, No. 10-11,p. 1147-1161.• Tzeng C-H. (2009), « A review of comp-temporary innovation literature : ASchumpeterian perspective », Innovation:management, policy and practice, Vol. 11,p. 373-394.• Van Den Bosch F.A.J., Volberda H.W etM. De Boer (1999), « Coevolution of firmAbsorptive capacity and Knowledge envi-ronment: organizational forms and com-binative capabilities », OrganizationScience, Vol. 10, No. 5, p. 551-568.• Wan D., Ong C.H. et F. Lee (2005),«Determinants of firm innovation inSingapore», Technovation, Vol. 25, p. 261-268.• Wang CL. et P.K. Ahmed (2007),«Dynamic capabilities: a review andresearch agenda », International Journalof Management Review, Vol. 9, No. 1, p.31-51.• Wernerfelt B. (1995), «The Resource-Based view of the firm: ten years after»,Strategic Management Journal, Vol. 16,p. 171-74.Wernerfelt B. (1984), « A Resource-Basedview of the firm », Strategic ManagementJournal, Vol. 5, No. 2, p. 171-80.• Woo C.Y., A.C. Cooper et W.C. Dunkelberg(1991), « The development and interpreta-tion of entrepreneurial typologies »,Journal of Business Venturing, Vol. 6, No.2, march, p. 93-114.• Zahra S.A. et G. George (2002),«Absorptive capacity: a Review, reconcep-tualization and extension », Academy ofManagement, Vol. 27, No. 2, p. 185-203.

Page 21: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT20

Instruments financiers islamiqueset conventionnels :Utilités, consistances et correspondances

Résumé. À la veille de la création des banques islamiques au Maroc, la compré-hension des spécificités et enjeux liés aux instruments financiers islamiques estdevenue une nécessité. Nous présentons dans cet article les principaux instru-ments financiers islamiques, répartis en quatre catégories : les instrumentsparticipatifs (Mudharaba et Musharaka), les instruments de financement assi-milables à de la dette (Murabaha, Ijara, Salam, Istisna), les instruments à sous-jacents participatifs et assimilables à de la dette (Sukuk), et les contrats de l’as-surance islamique (Takaful). Nous analysons le fonctionnement et l’utilité dechaque instrument, tout en établissant un parallèle avec les instruments finan-ciers conventionnels.

Abstract. On the eve of implementing islamic banking in Morocco, understan-ding the features and issues related to islamic financial instruments hasbecome a necessity. In this paper, we present the main islamic financial instru-ments, classified into four categories: Profit-and-loss sharing instruments(Mudharaba and Musharaka), debt and quasi-debt instruments (Murabaha,Ijara, Salam, Istisna), debt and sharing instruments (Sukuk), and finally isla-mic insurance contracts (Takaful). We analyse the mechanisms and uses of eachinstrument, while establishing a parallel with conventional financial instru-ments.

Inass EL FARISSIEnseignant-chercheur au Groupe ISCAE

Mohamed EL MOUEFFAKEnseignant-chercheur au Groupe ISCAE

SihamMEKNASSIEnseignant-chercheur au Groupe ISCAE

Introduction

Pour répondre aux besoins decontrats de financement en accordavec la religion musulmane, les ins-truments financiers islamiques ontfait leur apparition depuis plusieursdizaines d’années, marquant unecoexistence avec les instruments de

financement conventionnels1. Si cesderniers sont guidés par un objectifde maximisation des rendements etde minimisation des risques, les ins-truments financiers islamiques doi-vent appliquer les règles de laCharia2, inspirées du Coran, de laSunna et de l’effort des Ulémas(«Ijtihad »). Tout en respectant les

1. Pour plus de détail sur le développement de la finance islamique, voir par exemple Samdani (2006).2. La Charia est l’ensemble des règles morales et « pénales » qui régissent les aspects publics et privés de la vied’un musulman.

Page 22: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 21

préoccupations de la somme des ren-dements3, un système financier isla-mique se voudrait tentant d’assurerla conformité entre les solutionsfinancières proposées et les exigen-ces morales et religieuses prescritespar l’Islam4.Le montage des instruments finan-ciers islamiques repose sur le prin-cipe du partage « juste » des gains etdes pertes entre les cocontractants5.Alors que les prêts avec intérêt soientd’usage courant dans les économiesactuelles, l’usage du « Riba » (inté-rêt/usure) pour rémunérer le capitalest prohibé en islam6. Juridiquement,les contrats islamiques doivent défi-

nir de manière détaillée et précise lesdroits et les obligations de chacunedes parties ainsi que les conditionsgénérales régissant leurs relationsafin de respecter le principe de prohi-bition du « Gharar » (aléa, incerti-tude). Ce dernier se manifeste lors-que l’objet d’un contrat est ambigu,manque de précision ou dépendd’événements futurs dont l’issue estincertaine. Par exemple, un contratd’assurance commerciale sera consi-déré illicite selon les préceptes isla-miques. Aussi, l’exercice des optionsVanille (américaines et européennes)est tributaire du cours futur du sous-jacent, variable incertaine au

3. Al Abji (1985) et Al Masri (1986) prouvent la légitimité en Islam de la valeur temps de l’argent. Le facteur tempsinfluence à l’évidence les revenus actualisés. Selon Kahf et Khan (1992), en finance islamique, à la propriété d’unactif est attachée le droit au revenu, gain ou accroissement généré par cet actif, mais également la responsabilitédes risques afférents à ce dernier. Al Qaffal (417 H) argumente que le rendement du capital est conditionné par ladétention d’actifs réels qui ne peut être séparée de l’incertitude.4. Guermas-Sayegh (2011), par exemple, compte la finance islamique comme «une branche de la finance éthique».5. Pour une réflexion sur quelques éléments de convergence et de divergence des finances islamique et moderne,le lecteur est invité à consulter El Farissi et Ibn Abdeljalil (2013). Les auteurs concluent une forte convergence dontl’élément inquiétant reste la frontière opérationnelle entre les deux systèmes en cas de cohabitation.6. Maududi (1950) examine la différence entre la vente et l’intérêt sous la condition nécessaire d’une distributionéquitable et une gestion efficiente du risque (exactement dans le même exprit de l’hypothèse du MEDAF, bienavant la genèse de celui-ci, selon laquelle le risque spécifique ne mérite pas de rémunération de par son caractèrediversifiable). Dans les transactions basées sur l’intérêt (Interest Based Transactions, IBT), un risque supérieur estencouru par l’emprunteur et l’intérêt ne se retrouve pas justifié par une prise de risque ; Maududi insiste alors surl’iniquité des transactions IBT. Quatre versets de Sourate Al-Baqarah tranchent très clairement sur une telle diffé-rence : « 275. Ceux qui mangent (pratiquent) de l’intérêt usuraire ne se tiennent (au jour du Jugement dernier) quecomme se tient celui que le toucher de Satan a bouleversé. Cela, parce qu’ils disent : “le commerce est tout à faitcomme l’intérêt” alors qu’Allah a rendu licite le commerce, et illicite l’intérêt. Celui, donc, qui cesse dès que luiest venue une exhortation de son Seigneur, peut conserver ce qu’il a acquis auparavant; et son affaire dépendd’Allah. Mais quiconque récidive... alors les voilà, les gens du Feu ! Ils y demeureront éternellement. 276. Allahanéantit l’intérêt usuraire et fait fructifier les aumônes. Et Allah n’aime pas le mécréant pécheur. 278. Ô lescroyants! Craignez Allah; et renoncez au reliquat de l’intérêt usuraire, si vous êtes croyants. 279. Et si vous ne lefaites pas, alors recevez l’annonce d’une guerre de la part d’Allah et de Son Messager. Et si vous vous repentez,vous aurez vos capitaux. Vous ne léserez personne, et vous ne serez point lésés. ». Kahf et Khan (1992) défendentle partage des pertes et des profits. Aussi, Khan (1984, 1985) prônent une économie sans dette. Le Conseil del’Idéologie Islamique Pakistan, dans son rapport de 1981, considère comme objectif primaire l’élimination de l’in-térêt. De manière très surprenante, Irshad (1963), suivi par la pratique des banques islamiques, défend l’utilisationdu crédit à la consommation si l’intention est la promotion des ventes et des bénéfices.

Page 23: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT22

moment de la conclusion du contrat.Ce qui démontre de la non légitimitéde ce type de contrat dans un sys-tème financier islamique.La finance islamique se base sur desprincipes dictés par la Charia. Afin degarantir le respect de telles règles,les établissements financiers islami-ques disposent d’un Conseil deConformité, appelé communément le«Charia Board»7. Ce dernier est unorgane collégial composé de spécia-listes de la Charia qui se réunissentpour interpréter la jurisprudenceislamique dans le but de superviser lavalidité des contrats financiers, etd’assurer leur conformité aux princi-pes de la Charia. Bien que les ChariaBoards s’accordent sur les principesfondamentaux de la finance islami-que, il existe des points de diver-gence dans l’interprétation et l’opi-nion portée sur des questions avan-cées de la finance islamique. CertainsCharia Boards prônent une adhésionstricte aux principes religieux, d’au-tres affichent une flexibilité supé-rieure en s’adaptant aux exigencesdu marché. Cette diversité d’opinionsparmi les Charia Boards semble frei-ner le développement et l’harmonisa-tion des instruments financiers isla-miques.

Notre répartition des instrumentsfinanciers islamiques compte quatregrandes catégories : les instrumentsparticipatifs, les instruments definancement assimilables à de ladette, les instruments à sous-jacentsparticipatifs et assimilables à de ladette, et les contracts de l’assuranceislamique. Nous présentons dans cequi suit les principaux instrumentsde chaque catégorie. Nous raison-nons toujours sous l’angle d’un paral-lèle avec les instruments financiersconventionnels.

1. Les instruments participatifs

En finance islamique, le financementà long terme peut être assuré par lepartage des bénéfices « Mudharaba» et/ou la prise de participation «Musharaka »8. Ces deux types decontrats impliquent un partage desbénéfices et des pertes. Ils devraientidéalement coexister dans le cadred’une stratégie de diversification desfinancements et des risques. Il s’agitd’une participation au financementd’un projet par un prêteur au moyend’un apport en fonds propres et nonpas d’un prêt à intérêt.

7. Comme précisé par Ismail (1989), les Conseils des Ulemas légitiment, comme ventes différées qui suscitent desobligations différées, Mourabaha, Istisna, Ijara, Salam et Mu’ajjal.8. Kahf (1991) établit une distinction entre trois types de financement. Le financement commercial est représentépar Musharaka, Murabaha, Salam et Mu’ajjal. Le propriétaire détient le pouvoir managérial lié à l’actif. Le droitau revenu résultant du financement est justifié par la propriété et le risque qui s’y attache. Le financement pur estMudharaba où la propriété des fonds est toujours détenue par propriétaire et la gestion est déléguée à un entrepre-neur. Le financement locatif dissocie deux types de décisions managériales. Les décisions liées à l’actif lui-mêmetelles que la détention, la maintenance, la vente et la vente d’usufruits appartiennent au propriétaire. Les décisionsrelatives à la gestion des droits d’usufruit reviennent au bénéficiaire du financement.

Page 24: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 23

1.1. MudharabaMudharaba, un contrat de partenariat àrevenus partagés, est un mode definancement des projets d’investisse-ments dont l’assise est un accord entreun propriétaire qui apporte les fonds«Rabb al-mal» et un entrepreneur«Mudarib» qui contribue par son savoir-faire et son travail9. En finançant à100% les projets, Rabb al-mal joue lerôle d’investisseur. Le gestionnairecourt le risque de ne rien percevoir,perdant ainsi la rémunération de sesefforts. La clé de répartition des bénéfi-ces est fixée à la conclusion du contrat.En cas de perte, Rabb al-mal assume lesconséquences financières et leMudarib-entrepreneur perd sa rému-nération. Aucune partie ne garantitune rémunération à l’autre, respectantainsi le principe du partage des perteset des gains. Mudharaba fonctionneégalement en sens opposé, auquel cas

le client, propriétaire du capital, déposeson argent dans des bons émis par uneinstitution financière islamique pourune période déterminée. La banqueinvestit cet argent dans des projets etpartage les gains avec ses déposants.Mudharaba correspond en financemoderne aux sociétés en comman-dite, où l’apporteur de capital (le com-mandité) apparait généralementcomme un partenaire neutre. La ban-que joue le rôle de commanditaire etl’entrepreneur celui de commandité.Mudharaba peut être vue égalementcomme un contrat de capital-investis-sement. On distingue Mudharabarestreinte «Mudharaba al-muqayyada» lorsque le contrat portesur un projet défini et «Mudharaba»libre «Mudharaba al-mutlaqa» lors-que, à contrario, le banquier financela totalité de l’activité de développe-ment de l’entreprise.

9. Kahf et Khan (1992) distinguent trois formes d’investissement. Mudharaba, instrument de financement respec-tant le partage des bénéfices, se résume en un investissement lorsque le bénéfice revient intégralement au proprié-taire du capital qui peut se charger de la gestion ou recruter un manager. L’investissement est équivalent à uncontrat de Musharaka lorsque la propriété et la prise de décision sont collectives. Mudharaba peut prendre la formede prêt (Quard) lorsque le bénéfice revient totalement à l’entrepreneur. En ce cas, le prêteur récupère le principalde la dette sans surplus.

Schéma 1. La relation banque-projet-entrepreneurdans un contrat Mudharaba

Page 25: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT24

Ce type de contrat devrait en principeinciter les banques, en tant qu’inves-tisseurs, à s’impliquer davantagedans le suivi de la mise en œuvre desprojets financés, mettant l’accent surla qualité et la rentabilité du projetplutôt que sur la solvabilité de l’em-prunteur. Se pose alors le problèmede l’asymétrie de l’information entrela banque et l’entrepreneur. Ce pro-blème est accentué au sein des petitesentreprises, qui de par leur opacitérelativement élevée, ont un accèsgénéralement limité à ce type definancement. Afin d’éviter la fraude etla négligence, les banques exigentsouvent des garanties en protectioncontre la mauvaise utilisation desfonds.

1.2. Musharaka (joint-venture)Musharaka est un contrat de partena-riat où l’entrepreneur et l’investis-seur contribuent tous les deux aucapital. Le partage des bénéfices etdes pertes est effectué selon un ratioprédéfini contractuellement et quipeut différer de la proportion du capi-tal investi par chaque partie, en fonc-tion du pouvoir de négociation desparties prenantes. Musharaka peutêtre assimilée à la joint-venture enfinance moderne : les partenairess’associent en partageant les perteset les profits. Les banques islamiques

accomplissent la mission de sociétésde capital-risque. Devant le problèmede l’incitation à la performance, dansles sociétés capitalistes, les diri-geants détiennent le plus souventune portion des fonds propres. Cecigarantit aux actionnaires une moti-vation justifiée des dirigeants pouragir dans l’intérêt de l’entreprise,réduisant ainsi cette catégorie decoûts d’agence. Les contrats de Musharaka sont à lafois les plus rémunérateurs et lesplus risqués pour les banques islami-ques. En pratique, cet instrument estutilisé notamment pour financer lespetits projets (actifs économiques :immobilisations indispensables etBFR) afin de limiter l’exposition aurisque de la banque. Musharaka sedécline en plusieurs variantes.«Mufawada » consiste à effectuer lemême apport initial. « Inan » seconcrétise par des apports initiauxinégaux. La Musharaka peut êtredéfinitive ou dégressive. Elle est défi-nitive lorsque la banque participedurablement au financement de pro-jets. Elle est dégressive lorsque labanque se retire petit à petit du pro-jet. Ce retrait est réalisé par les verse-ments de l’entrepreneur au profit dela banque en contrepartie des titresd’apport de celle-ci.

Page 26: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 25

2. Les instruments definancement assimilablesà de la dette

L’interdiction de l’intérêt par l’Islampourrait laisser croire à un rejet detoute forme de contrat de dette selon sadéfinition conventionnelle. La financeislamique propose des instrumentséquivalents aux crédits classiques. Onretrouve principalement Mourabaha,Ijara, Salam et Istisna, qui s’assimilentà des contrats de dettes.

2.1. La Mourabaha (vente à crédit)La Mourabaha, appelée égalementvente à crédit ou « cost plus », est unmode de financement des actifs (lesbiens d’équipement et les stocks desentreprises). C’est un contrat devente avec marge en vertu duquel labanque islamique achète un actifsous-jacent et le met à la dispositionde son client acheteur. Par rapport àune dette conventionnelle, la banqueest, au départ, propriétaire de l’actif

que le client souhaite acquérir et enassume un risque de détention, alorsque le client bénéficie de l’utilisationde l’actif. La banque se rémunère parune commission correspondant à unemajoration sur le prix d’achat de l’ac-tif : un surplus monétaire contre unemise à disposition d’actif. Cettemarge est définie par les deux partieset est connue du client acheteur àl’initiation du contrat. Il y a un trans-fert progressif de propriété moyen-nant le paiement échelonné du prix.La plupart des banques requièrent lepaiement de 10 % à la signature ducontrat. Les paiements périodiquesdiminuent la part de la banque enaugmentant la part du clientacheteur. Comme le montre le schéma 3, cetype de contrat consiste en un doubletransfert de propriété du sous-jacentet en un double paiement de son prix.La banque achète le sous-jacent à unprix donné et le transfère au client-acheteur à prix supérieur réglé sou-vent périodiquement.

Schéma 2. La relation banque-projet-entrepreneurdans un contrat Musharaka

Page 27: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT26

La Mourabaha représente plus que lamoitié des instruments financiersislamiques, suivie de très loin de laMudharaba et de la Musharaka,même si ces deux dernières font plusl’unanimité des Conseils deConformité10. La Musharaka pourraitconstituer une étape avancée d’uncontrat de Mourabaha, permettantaux banques de tester dans un pre-mier temps la crédibilité des nou-veaux investisseurs avant de passer àl’étape de la participation. De telsinvestisseurs bénéficient à leur tourde l’expérience de gestion de la ban-que. Bien que largement répandu, cet ins-trument est souvent l’objet de polémi-ques contestant son caractère islami-que. La marge obtenue par la banqueau delà du prix de l’actif pourrait êtreassimilable à un intérêt. Les adeptesde cet instrument évoquent le carac-tère licite des ventes à crédit ados-

sées à un actif tangible11, insistantsur le fait qu’il ne s’agit pas d’un prêtrémunéré par un intérêt. La commis-sion de la banque rémunère ainsi leservice rendu par celle-ci, indépen-damment de l’utilisation de l’argent.

2.2. L’IjaraL’Ijara est un moyen de financementdes actifs en vertu duquel le bailleurde fonds finance des biens durables(équipements, par exemple) et lesfournit à bail pour une période déter-minée, en contrepartie du paiementde loyers fixes à des échéances prédé-terminées. Dans cette formule, il nes’agit pas d’une vente d’un bien maisd’une vente de l’usufruit de ce bienpendant une période déterminée.L’équivalent en finance convention-nelle est le crédit-bail. Par rapport àce dernier, les pénalités de retardsont interdites en finance islamique.Aussi, le bailleur est obligé de détenirl’actif objet du contrat avant d’encais-

10. Ahmad (1985) étudie la pratique de Mourabaha par les banques islamiques.11. Saadallah (1985) soumet la légitimité de la valeur temps de l’argent à la condition nécessaire du caractère réeldes transactions.

Schéma 3. La relation fournisseur-banque-clientdans un contrat Mourabaha

Page 28: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 27

ser le premier versement. Il supporteainsi un risque de détention tant quel’actif n’est pas livré pour la location.Ici encore, le contrat se résume en untransfert de propriété du sous-jacentet un double paiement de son prix

(schéma 4). La banque achète le sous-jacent à un prix donné et transfèreson usufruit au client-acheteur à unprix supérieur réglé souvent périodi-quement.

Schéma 4. La relation fournisseur-banque-client dans un contrat Ijara

L’Ijara peut se décliner en un contratde bail simple « Ijara tachghilia ».Elle peut, dans un contrat « Ijara waiqtinaa », être assorti d’un engage-ment d’acquisition du bien de la partdu locataire au terme d’une périodeconvenue à l’avance et d’un engage-ment de la banque de lui céder cebien. Le contrat Ijara ne peut pasavoir comme objet des biens intangi-bles (tels les brevets d’invention,droits d’auteur, droits d’exploitationde ressources naturelles, etc.).

2.3. La vente Salam (vente à terme)La vente Salam ou Bay Salam est unevente à terme (forward) dont le paie-ment s’effectue au comptant et lalivraison dans le futur. La banqueintervient en qualité d’acquéreurd’un actif qui sera livrée à terme,

alors que le client (le vendeur) béné-ficie d’un paiement comptant immé-diat. Cela permet à ce dernier de dis-poser de liquidités à court terme pourfinancer son cycle de production. Leterme, le prix et les caractéristiquesdu bien vendu sont fixés à la conclu-sion du contrat. Ce type de contratest utilisé notamment dans l’agricul-ture, l’artisanat, l’import-export et ladistribution. Dans les contrats de vente Salam,l’objet de la livraison ne peut être demême espèce (ou d’espèce semblable)que le mode de paiement. Il est fait iciexception au principe de prohibitionde la vente d’un bien non existant. Lavente à terme ne peut être coupléeavec un rachat à un prix moindre,payable au comptant ou à un termeplus court. De même, la vente à termene peut être réalisée simultanément

Page 29: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT28

avec un rachat à un prix plus fortpayable à un terme supérieur. Lavente et le rachat au même terme estlicite quel que soit le prix : «Muqâça»(compensation). La vente Salam est

l’équivalent islamique des crédits àcourt terme tels que les facilités decaisse, les découverts, les avancessur marchandises et l’escomptecommercial.

Schéma 5. La relation fournisseur-banque-clientdans un contrat Bay Salam

2.4. L’Istisna (contrat d’entreprise)L’Istisna (deferred payment, deferreddelivery) est un mode de financementdes projets. C’est un contrat quiengage une entreprise à produire auprofit d’un donneur d’ordre un bien àun délai, à un prix et selon des spéci-fications convenues à l’avance. Lepaiement peut être au comptant,échelonné ou à terme, alors que lalivraison a toujours lieu à terme. Lesbanques islamiques interviennentdans ce type de contrats commegarantes de la bonne réalisation destransactions moyennant une commis-sion. L’Istisna est généralement uti-lisé pour financer des travaux deconstruction ou d’aménagement, defabrication d’équipements, etc.L’Istisna s’apparente à une venteSalam mais présente la particularité

d’avoir un objet du contrat nonachevé à l’initiation du contrat.Lorsque le paiement s’effectue àterme, l’Istisna correspond en financemoderne à un contrat à terme (for-ward) qui donne le droit d’acheter unactif à un prix et à une date futureconvenus d’avance.

3. Les instruments àsous-jacents participatifset assimilables à de la dette

Le Sukuk est un titre d’investisse-ment adossé à un ou plusieurs actifssous-jacents tangibles définis. Cesderniers peuvent être des services,des biens ou droits, ou l’usufruit deces biens ou droits. Le rendement de

Page 30: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 29

l’actif sous-jacent permet de rémuné-rer l’investisseur à travers un revenuqui est lié à la performance de l’actifjusqu’à une échéance prédéterminée.La détention d’un Sukuk confèredonc à l’investisseur un droit de pro-priété indivis sur l’actif sous-jacent.Les Sukuks peuvent être émis à l’ini-tiative de Gouvernements ou d’agen-ces gouvernementales (SukukSouverain) ou encore à l’initiatived’entreprises (Sukuk Corporate).

3.1. Les Sukuks par rapport aux obligations conventionnellesBien que souvent qualifiés d’«obliga-tions islamiques», les Sukuks sedémarquent remarquablement desobligations conventionnelles et nedoivent pas être considérés commede simples substituts à ces dernières.Conçu dans un souci de proposer destitres d’investissement conformesaux préceptes islamiques, la premièrecaractéristique principale d’unSukuk est l’adossement à un ou plu-sieurs actifs sous-jacent tangibles, etdont la nature et l’usage sont confor-mes à la Charia. Ce principe d’adosse-ment à un actif rapproche les Sukuksaux titres adossés aux actifs (Asset-Backed Securities, ABS) en financemoderne. La deuxième caractéristique distinc-tive des Sukuks a trait aux modalitésde rémunération des investisseurs.Contrairement aux obligations classi-

ques qui offrent une rémunérationsous forme d’intérêts périodiques(coupons), les Sukuks permettent àleurs détenteurs un partage des pro-fits réalisés dépendamment de la per-formance de l’actif sous-jacent, maisles exposent aussi au risque de sous-performance de l’actif. Le rendementpériodique des Sukuks peut varierdans le temps et peut être nul ounégatif dans le cas d’une performancenulle ou négative du sous-jacentdurant la période de référence.La rémunération des Sukuks est engénéral plafonnée à un taux convenuau départ. Un taux de rendementespéré peut être indiqué au momentde l’émission pour rémunérer lesdétenteurs de Sukuks. Afin de pou-voir servir ce taux, le contrat d’émis-sion peut prévoir la création d’uncompte de réserve qui peut être ali-menté en cas de surperformance dusous-jacent (lorsque le rendement del’actif est supérieur au taux de rende-ment espéré). Les fonds accumulésdans ce compte permettent de com-penser une éventuelle sous-perfor-mance de l’actif et assurent ainsi unestabilité des rendements périodiquesdes Sukuks. À l’échéance des Sukuks,le compte de réserve est clôturé ettout excédent de rendement est dis-tribué aux détenteurs des Sukuks. Letableau 1 confronte les principalescaractéristiques distinctives desSukuks et obligations classiques.

Page 31: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT30

Tableau 1. Les principales caractéristiquesdes Sukuks et des obligations classiques

Sukuks Obligations classiques

Titre de propriété représentant unepart d’un actif réel défini.

Le contrat sous-jacent portant surune opération islamique licite (i.e.Location pour le contrat Ijara)

La nature et l’usage de l’actif sous-jacent doivent être conformes auxpréceptes islamiques

Le prix du Sukuk dépend du risqueassocié à l’émetteur mais aussi dela valeur de marché de l’actif sous-jacent

Les coûts induits par l’actif sous-jacent peuvent être affectés auxdétenteurs de Sukuks

Titre de créance représentant une part d’unedette due par un émetteur

Contrat de prêt classique générant des inté-rêts (Riba)

Aucune restriction sur l’utilisation des fondscollectés

Le prix de l’obligation dépend uniquement durisque associé à l’émetteur et du risque demarché

Les détenteurs des obligations ne sont pasconcernés par l’utilisation des fonds

3.2. La structuration généraled’une émission de Sukuk Le Sukuk est émis pour le compte del’émetteur par le biais d’une entitécréée et destinée expressément à cetusage : Le Fonds Commun deCréances (FCC), plus connu sous sonappellation anglophone : SpecialPurpose Vehicle (SPV). Ce dernierréalise une opération de titrisationdu sous-jacent et fait remonter sesrevenus vers les détenteurs desSukuks. Le processus d’émissioncommence par l’identification et laségrégation d’un pool d’actifs sous-jacents tangibles et conformes aux

principes de la finance islamique (desbiens immobiliers ou des parts defonds propres). À l’origine, ce poold’actifs est détenu par l’émetteur desSukuks comme un droit aux fluxfuturs. Les droits de propriété atta-chés au pool d’actifs sont transférésau SPV qui détient alors ces droitspour le compte des investisseurs, encontrepartie de leur paiement du prixdes Sukuks. Les liquidités reçues parle SPV en contrepartie de l’émissiondes Sukuks servent à rémunérerl’émetteur de sa cession des droitsattachés au pool d’actifs.

Page 32: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 31

Schéma 6. La relation souscripteurs-SPV-émetteurdans la structuration générale d’un contrat Sukuk

À l’échéance des Sukuks, les actifssous-jacents font l’objet d’une reventedont la recette sert à rembourser leprincipal de l’émission. Ce rembour-sement peut être effectué en cours ouen fin de durée de vie du contrat.Comme expliqué précédemment, lescoupons sont servis aux investis-seurs pendant la durée de vie desSukuks, à partir du rendement del’actif sous-jacent : s’il existe un écartentre les coupons servis et les rende-ments reçus, l’émetteur ou tout autregarant peut compenser cet écart (viaun compte de réserve éventuelle-ment). Les émissions de Sukuks peu-vent faire l’objet d’un « tranching »entre différentes classes de Sukuk, àl’instar des opérations de titrisation

conventionnelle : « senior », « mezza-nine » et « equity », en fonction de leurqualité de crédit et donc en fonctionde leur degré de risque. Cette techni-que est similaire en finance moderneà celle des ABS (Asset BackedSecurities) qui constituent des titresde créances adossées à des actifs.

3.3. Les principaux types deSukuksSelon l’AAOIFI12, il existe 14 types deSukuks classifiés selon la techniqueutilisée pour acquérir le bien réelsous-jacent. Notre étude se concentresur les Sukuks les plus observés dansla pratique, portant sur des contratsd’Ijara (leasing), de Mudharaba (com-mandite), et de Musharaka (joint-venture).

12. Accounting and Auditing Organisation for Islamic Financial Institutions.

Page 33: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT32

Dans un Sukuk Ijara, une entreprisesouhaitant acquérir un actif réel créeun SPV qui émet les Sukuks pour lecompte de l’entreprise. Les fondsainsi collectés sont utilisés pouracheter l’actif demandé et le mettre àla disposition de l’entreprise initia-trice dans le cadre d’une opérationd’Ijara. Le bien est ainsi donné enlocation à l’entreprise contre le paie-

ment d’un loyer périodique qui esttransféré ensuite par le SPV auxdétenteurs des Sukuks. À l’échéancedes Sukuks, le bien est racheté parl’entreprise et le produit de la venteest redistribué aux détenteurs desSukuks à titre de remboursement duprincipal. Le schéma 7 explique cetteopération.

Schéma 7. La relation souscripteurs-SPV-émetteurdans un contrat Sukuk-Ijara

Un Sukuk Mudharaba est un ensemblede titres de participation représen-tant des projets ou activités gérésselon les principes de l’instrumentMudharaba. L’émetteur des Sukuksjoue le rôle du Mudarib (ou gérant),qui est désigné pour la gestion duprojet et n’effectue aucun apport encapital. Les souscripteurs des Sukukssont les apporteurs du capital (« rabbal-mal ») et sont propriétaires des

actifs sous-jacents. Les profits sontrépartis selon des ratios définiscontractuellement, alors que les per-tes sont supportées uniquement parles investisseurs, le gérant ne per-dant que sa contribution au projet(efforts, temps, réputation…). Dans un Sukuk Musharaka, l’actifsous-jacent correspond à un projet ouune activité gérés en vertu d’uncontrat Musharaka. L’émetteur des

Page 34: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 33

Sukuks lance l’appel à participation àses côtés dans un projet ou une acti-vité déterminée. Les souscripteursdes Sukuks sont des associés dans lecontrat de Musharaka à hauteur deleur participation et sont des copro-priétaires des actifs du projet sous-jacent. Ils se partagent les bénéficeset les pertes découlant du projet,selon des ratios définis contractuelle-ment. Contrairement au SukukMudharaba, un comité représentantles porteurs de Sukuks est désignépour participer aux décisions auxcôtés du gérant.

3.4. Le potentiel de développementdes SukuksMalgré une grande réticence, lesSukuks se développent et constituentaujourd’hui les instruments les plusdynamiques en finance islamique.Certains Charia Boards ont mêmereconnu le caractère éligible du cash-

flow futur, incertain au moment del’émission. Le graphique 1 retracel’évolution des émissions globales deSukuks entre 2001 et 2012. À l’instardes marchés mondiaux, l’activitéd’émission des Sukuks a connu undéclin notable à la suite de la crisefinancière de 2008, pour ensuiterebondir et atteindre un niveaurecord de 109 milliards de dollars à lafin du 3ème trimestre de 2012. Lesprincipaux acteurs du marché mon-dial de Sukuks sont l’État Malaisien,l’État Indonésien, ainsi que certainesbanques d’investissement d’enver-gure internationale comme GoldmanSachs, Barclays, etc. Les Sukuks sontémis majoritairement en dollars etpeuvent être listés en bourse. Sur lemarché européen, les Sukuks sontprincipalement côtés sur la Bourse deLondres et la Bourse duLuxembourg.

Graphique 1. L’évolution de l’émission de Sukuks entre 2001 et 2012(en Milliards $)

Source : IIFM Sukuk Issuance Database, Zawya

Page 35: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT34

Le développement du marché desSukuks est toutefois entravé par lemanque de liquidité et/ou l’absencede marché secondaire. L’absence de «fenêtres » d’encaissement contraintainsi les souscripteurs à détenir lesSukuks jusqu’à leur maturité. Étantdes certificats d’investissement, leniveau de risque et de rendement desSukuks peut varier fortement selonla nature de l’actif sous-jacent. Étantdonné que cette technique fait appelà de nombreuses parties prenantes,les risques de crédit (risques de dété-rioration de la qualité des engage-ments et des recouvrements) sontmultiples, et peuvent provenir d’undéfaut de l’émetteur, du locataire del’actif (si différent de l’émetteur), oude toute autre partie, dépendammentde la technique utilisée. À titred’exemple, le Sukuk Salam est exposéau risque de non livraison de l’actif àterme. Le Sukuk Istitna’â induit unrisque de performance de la part duvendeur (l’émetteur). Certains pays(la Malaisie notamment) imposentune notation du risque de crédit deces instruments. Les porteurs deSukuks sont exposés au risque debaisse de la valeur de marché de l’ac-tif sous-jacent, ce qui réduit le mon-tant du remboursement à échéance.Un autre risque non moins importanta trait aux considérations légaleslorsque les engagements contrac-tuels de conformité à la Charia nesont pas respectés par l’émetteur,auquel cas le contrat pourrait êtreannulé.

3.5. L’assurance islamique TakafulDans le domaine de l’assurance, leTakaful est une forme de garantie

mutuelle. Il est basé sur le principede l’assistance mutuelle, de l’entraideet de la solidarité entre les individustel que dicté par l’Islam. Les partici-pants se garantissent collectivement,les uns les autres, contre des risquespotentiels clairement prédéfinis. Unfonds commun est ainsi créé et ali-menté par les primes ou les dons ver-sés par les participants, et servira àindemniser ces derniers. Ce fonds estgéré et investi dans le but de réaliserdes profits conformément à la Charia.Le but de cet instrument n’est pas leprofit, mais la garantie du principede l’assistance et l’aide d’autrui. Lesressources et les risques sont ainsimutualisés.Le Takaful diffère de l’assuranceconventionnelle en se rapprochant dela mutuelle, où les assurés sont enmême temps propriétaires des fondscollectés et bénéficiaires des presta-tions. Aujourd’hui, deux modèlesd’assurances Takaful existent : la «Mudharaba » et la « Wakala » où ladifférence se situe au niveau du cal-cul de la rémunération de l’assureur.Dans le cas de la Mudharaba (com-mandite), les assurés peuvent conve-nir avec une société de gestion d’unaccord pour exploiter et investir lesfonds collectés. Les assurés ont alorsun droit de regard sur les comptes etles investissements réalisés afin delimiter les problèmes d’agence. Selonle contrat Mudharaba, les profitsdécoulant de l’investissement desfonds sont partagés entre les assuréset la société de gestion (l’opérateurTakaful). Le fonds des assurés estaugmenté des gains réalisés et dimi-nué des différentes charges et pertesrésultant de la gestion du fonds. Le

Page 36: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 35

surplus éventuel peut être distribuéaux assurés ou reporté aux annéessuivantes. Dans le cas de la Wakala(contrat d’agent), la société de ges-tion agit en tant qu’un agent au nomdes assurés pour fructifier les fondsde Takaful. Tous les risques sontassumés par les fonds. L’opérateurTakaful (la société de gestion) reçoitdes honoraires de Wakala pour secharger de la gestion des fonds aunom des assurés, qui est générale-

ment un pourcentage des contribu-tions payées. « Tabarru » signifie lacharité ou don. En Takaful, il s’agitd’un fonds de contributions volontai-res mis en commun pour le bénéficedu fonds des assurés. Le tableau 2exprime des différences significativesentre l’assurance conventionnelle etle Takaful. Les principes de la Chariadictent au Takaful des caractéristi-ques distinctes par rapport à l’assu-rance conventionnelle.

Schéma 8. La relation assurés-fonds de Takaful-investissement dans un contrat Takaful - Wakala

Page 37: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT36

Schéma 9. La relation assurés-fonds de Takaful-investissementdans un contrat Takaful - Mudharaba

Page 38: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 37

Tableau 2. La comparaison des modèles Takaful, mutuelle et assuranceconventionnelle

Takaful

Les fonds des participants

Donation et/ou contratmutuel. Le Takaful est baséla solidarité d’un groupepour mutualiser les risques

Takaful est exempt de toutintérêt « Riba », de jeu« Maysir », et de l’incertitude« Gharar ».

Conformité à la Charia

Les surplus du Fonds«Takaful» sont partagésexclusivement entre les parti-cipants (assurés). Les reve-nus des investissements sontrépartis entre les participants(assurés) et les actionnairessur la base des modèlesMudharaba ou Wakala

Paiement sur les fonds collec-tés. En cas de déficit, l’opéra-teur Takaful offre des prêtssans intérêt (Quard Hasan13)pour les participants (assu-rés)

Les contributions versées parles participants au fondsTakaful constituent une cou-verture collective au profit del’ensemble des participants(assurés) contre les risquespotentiels

Assurance conventionnelle

Le capital apporté par lesactionnaires

Contrat d’échange, l’assu-rance conventionnelle estbasée uniquement sur desfacteurs commerciaux

L’assurance conventionnellecomporte des éléments d’inté-rêt, de jeu et d’incertitude

Des restrictions d’ordre prudentiel

Le surplus et les profitsappartiennent uniquementaux actionnaires

Paiement sur les fonds collec-tés. En cas d’insuffisance de paiement sur les fondspropres

Les primes sont versées auxcompagnies d’assurance enéchange de supporter les risques couverts.

Capitaux propres

Contrat & objectif

Intérêts et incertitude

Conditions d’investissement

Utilisation des surplus

Responsabilité de lacompagnie

Responsabilités desparticipants (assurés)

13. Selon Ahmad (1947), les banques islamiques et les fonds coopératifs de Quard peuvent s’entre-promouvoir etcoexister utilement. Les coopératives peuvent placer leurs excédents et réaliser des bénéfices. Les banquesislamiques peuvent utiliser leurs excédents de liquidités sous la forme de Quard.

Page 39: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT38

Conclusion

L’exclusion de l’usure et la rentabilitéprédéterminée (le taux directeur),l’inégalité entre les cocontractants,les contrats amplificateurs de risqueset quelques secteurs très particuliers; couplée avec la conception d’instru-ments de couverture des risquesinternationaux qui soient conformesà la Charia, les finances islamique etconventionnelle tendraient vers unmodèle homogène. Les banques par-ticipatives ont des défis à relever enmatière de transparence, de gouver-nance et de standardisation des ins-truments financiers. La publicationdu projet de loi de Bank Al Maghriben date du 4 septembre 2012 intituleofficiellement les futures banquesparticipatives marocaines banquesparticipatives14. Leur activité, atten-due conforme à la Charia, engloberaitla réception de fonds, la gestion desmoyens de paiement, les opérationsde crédit, les opérations commercia-les, financières et d’investissement,les opérations sur devises et surmétaux précieux, les opérations d’as-surance et les opérations de location,toutes avec la contrainte de l’exclu-sion de l’intérêt15. Les futures ban-ques participatives marocaines col-lecteraient des dépôts d’investisse-ment dont la rentabilité serait tribu-taire de l’investissement sous-jacent.

Il s’agirait de contrats Mudharaba, oùles banques s’occuperaient de la ges-tion, réaliseraient des économiesd’échelle et partageraient les bénéfi-ces avec les déposants. Ces banquespourraient concevoir et gérer des ins-truments financiers, des patrimoines,des épargnes et vendre des conseilset des services afférents à l’investis-sement et au financement. Les ban-ques participatives marocaines pour-raient financer la clientèle avec descontrats de Mourabaha, de Ijara, deMoucharaka et de Mudharaba. Leprojet de loi ne prévoit pas de diffé-rence entre les instruments partici-patifs et les dettes. Notre étude ayantcouvert la consistance des principauxinstruments financiers islamiques etconventionnels, le tableau 3 synthé-tise leur utilité et leur correspon-dance. Le texte de loi autorisant lacréation de banques participatives aété validé par le Conseil du gouverne-ment en janvier dernier et a étéapprouvé par le Parlement le 25 juin.Le Conseil supérieur des Oulémasveillera à la conformité à la Chariades produits. Un fonds de garantiedifférent de celui des banquesconventionnelles est en train d’êtrecrée. L’objectif de ce fonds est degarantir l’indemnisation des dépo-sants en cas défaut d’une banque etl’accord de concours exceptionnelsaux banques en difficultés ■

14. Le projet de loi relatif aux établissements de crédits a été adopté le jeudi 16 janvier 2014 par le Gouvernement.15. Article 52 du Titre Troisième du Projet de Loi 34-03.

Page 40: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 39

Tableau 3. La correspondance entre les principaux instruments financiers islamiques

Utilité

Financement d’un projetpar la banque avec partage des pertes et profits selon un ratio préétabli

Cofinancement par la banque et le client avecpartage des pertes et profits selon un ratio préétabli

Prêt sans intérêt à courtterme avec marge bancaire préétablie (intermédiation)

Achat d’un actif par labanque puis location à unclient avec promesse devente à terme

Achat d’un actif par labanque puis sa revente àterme à son client (paiement différé)

Prêt sans intérêt

Titre d’investissementadossé à un actif réel

Mutualisation des risques

Instrument conventionnel correspondant

Commandite

Joint-venture

Vente à crédit

Crédit-bail

Vente à terme ou Forward

Emprunt obligataire

Assurance classique

Instrument islamique

Mudharaba

Musharaka

Mourabaha

Ijara

Bay Salam

Quard Hassan

Sukuk

Takaful

Page 41: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT40

Bibliographie

• Saint Coran, Sourate Al-Baqarah.• Ahmad, S. Mahmud, 1947, Economics ofIslam, Sh. M. Ashraf, Lahore.• Ahmad, Ziauddin, 1985, Some MisgivingsAbout Islamic Interest Free Banking, IIIE,Islamabad.• Al-Abji, K. A., 1985, A Study of InvestmentFeasibility in the Light of Fiqh, Journal ofResearch in Islamic Economics, Vol.2,No.2: 1-44. • Al Masri, Rafic, 1986, “Participation ofCapital Goods in the Produce or the Pro-fit”,Journal of Research in IslamicEconomics, Vol. 3, No. 1, pp. 3-57.• Al-Qaffal Ash-Shaghir, 417 H., Abdullahbin Ahmad Al Qaffal Al Marwazy.• El Farissi, Inass et Ibn Abdeljalil, Najib,2013, “Finance islamique vs financemoderne : Réflexions sur quelques élé-ments de convergence et de divergence”,Revue Marocaine des Sciences duManagement, No. 2.• Guermas-Sayegh Lila, 2011, La religiondans les affaires : la finance islamique, LaFondation pour l’innovation politique,Mai.• Irshad, S.A., 1963, Interest Free Banking,Orient Press of Pakistan, Karachi.• Ismail, Abdul Halim, 1989, “Al Quran onDeferred Contracts of Exchange:Commentary on Three Verses ofInjunctions”, Paper presented to a works-hop on Thoughts Relating to Islamic

Economic System Based on Shari’ah,Islamic Affairs Division, Prime Ministry,Kuala Lumpur, March 21. • Kahf, Monzer and Tariqullah Khan,1992, Principles of Islamic Financing : ASurvey, Research Paper No. 16, IslamicResearch and Training Institute, IslamicDevelopment Bank, JEDDAH.• Kahf, Monzer, 1991, The Concept of Creditin Islamic Economics (Arabic), IslamicResearch and Training Institute.• Khan, S. R., 1984, “An Economic Analysisof a PLS Model for the Financial Sector”,Pakistan Journal of Applied Economics,Vol. IV, No. 2. • Khan, Waqar Masood, 1985, Towards anInterest Free Islamic Economic System: ATheoretical Analysis of Prohibiting DebtFinancing, The Islamic Foundation,Liecester.• Maududi Abul A’La, 1950, Islamic Way ofLife, Islamic Publications.• Rapport du Conseil de l’IdéologieIslamique Pakistan (1981).• Saadalla, Ridha, 1986, “Concept of Timein Islamic Economics” unpublished paper, • Islamic Research and TrainingInstitute.• Samdani, S., 2006, Islamic Mutual Funds.University of Leicester, August. In TahirMohammad, Umar Mohammad, 2008,Marketing Strategy for Islamic BankingSector in Pakistan, Blekinge Institute ofTechnology.

Page 42: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 41

L’assurance islamique etl’assurance conventionnelle

Résumé. Après une exploration de l’assurance conventionnelle, notre réflexionporte sur l’assurance islamique. Nous examinons les risques que prennent encharge les assureurs conventionnels. Nous explorons les variables dont dépendle revenu de tels assureurs. Nous traitons les objections islamiques contre l’as-surance conventionnelle. L’origine de l’assurance islamique est précisée commeune pratique de l’époque du Prophète. La structuration des produits Takaful estdécomposée en Tabarru, Wakalah et Mudharaba. Le principe du partage despertes et des profits est mis en valeur. La théorie des incitations retrouve sonapplication dans ce domaine particulier. Le ReTakaful est enfin étudié à l’instarde Takaful comme une condition nécessaire mais non suffisante du développe-ment d’un système d’assurance islamique.

Abstract. Economic agents subscribe to insurance for damages. Insurance pro-tects against the risk of potential loss. Many activities are based on insurance.To shed some light, we understand first how conventional insurance works,and why it violates Charia principles. Then we will present Takaful, the Islamicversion of insurance. Takaful models are largely based on Wakalah (agency)and Mudharabah (profit-sharing) methods.

Mohamed EL MOUEFFAKEnseignant-chercheur au Groupe ISCAE

Karim CHARAFEnseignant-chercheur au Groupe ISCAE

Inass EL FARISSIEnseignant-chercheur au Groupe ISCAE

L’assurance est un service qui fournitune couverture contre la réalisationd’un risque. Le bénéficiaire de laprestation est assuré et le fournis-seur est un assureur, en échange dela perception d’une prime ou d’unecotisation. L’assurance protègecontre le risque de perte potentielle.Elle peut être considérée comme unedépense (la somme consentie pour ceservice) qui garantit l’évitementd’une autre perte qui, elle, pourraitse montrer plus importante.L’assureur s’engage à assurer totale-ment ou partiellement le risque viaun contrat d’assurance alors que l’as-

suré est la personne bénéficiaire desgaranties stipulées dans le contratd’assurance. Les agents économiques souscriventà des assurances contre les sinistreséventuels. De nombreuses activitésse basent sur l’assurance. Les couver-tures des risques de transport, desrisques immobiliers et des risquessociaux en sont des exemples. Dansce chapitre, nous examinons com-ment fonctionne l’assurance conven-tionnelle, et pourquoi elle ne respectepas les principes de Charia. Enseconde partie, nous introduirons leconcept de Takaful, la version islami-

REVUE RMSM N°4 DEF 22/03/15 11:26 Page 41

Page 43: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT42

que de l’assurance et verrons que lesmodèles Takaful sont souvent baséssur Wakalah (l’agence) et surMudharabah (l’intéressement).

1. L’assurance conventionnelle

Cette partie traite des questions sui-vantes. Quels sont les risques pris encharge par les assureurs convention-nels ? Comment se compose la fonc-tion du revenu de ces assureurs ?Quelles sont les objections islamiqueà l’encontre de ce système conven-tionnel ?

1.1. Les risques pris en charge Les risques pris en charge par unesociété d’assurance présentent géné-ralement six caractéristiques.

• Selon la loi des grands nombres,les sinistres des assurés sont desvariables aléatoires indépendantes.L’indemnité moyenne par assuré (quiest aléatoire) est presque constanteet donc prévisible. Force est deconstater que la grande majorité despolices d’assurance sont prévisiblespour les grands groupes.

• La perte doit être accidentelle, ausens où elle doit dépasser la capacitéde contrôle de l’assuré (risque pur).Elle ne doit pas être liée à un risquespéculatif. Un risque pur signifie unrisque indépendant de la volonté del’assuré et se traduisant par uneperte. Le risque est dit spéculatiflorsqu’il y a une incertitude quant àun événement à venir, qui pourrait setraduire par un gain ou une perte.Ces risques sont appelés spéculatifsparce que l’agent économique s’ex-pose intentionnellement à un danger

dans l’espoir d’obtenir un avantage(bourse, loto).

• Les circonstances du sinistre etles dommages subis doivent êtreidentifiables. L’heure, le lieu et lacause du sinistre doivent être formel-lement constatées.

• L’ampleur de la perte doit êtresignificative. Les primes d’assurancedoivent couvrir les coûts prévus pourla gestion et les pertes. À cause de cescoûts, les assurances préfèrent cou-vrir les pertes potentiellement impor-tantes. Les indemnités peuvent cou-vrir des pertes extrêmes.

• La prime doit être relativementsymbolique comparée à la taille de laperte assurée pour être incitative.

• La perte doit être mesurable. Laprobabilité de perte et l’ampleur de laperte peuvent généralement être esti-mées.

1.2. La fonction de revenu d’unassureur conventionnelL’équation suivante explicite lerevenu d’un assureur :

Revenu = Primes + Revenus de placements – (Sinistres + Frais

d’exploitation)

Les assureurs tirent leur revenu dedeux sources. La souscription est leprocessus par lequel les assureurssélectionnent les types de risques àassurer et acceptent les primes àpayer pour les risques à couvrir.L’investissement est le placementdes primes collectées auprès desassurés.L’aspect le plus compliqué des entre-prises d’assurance est la souscrip-

Page 44: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 43

tion. En utilisant une grande variétéde données, les assureurs prédisentla probabilité qu’une demande leursera portée touchant par exemple, lepaiement d’un bien endommagé, etils fixent le prix des produits enconséquence.Du point de vue de l’assureur, certai-nes polices sont gagnantes (lorsquela somme des indemnités versées estinférieure aux revenus des souscrip-tions et des placements). D’autressont perdantes (dans la situationinverse).

1.3. Les objections islamiquescontre l’assurance conventionnelleL’assurance conventionnelle contientdes éléments interdits en Islam(Illicites) : Gharar (l’incertitude),Riba (l’intérêt) et Maysir (le jeu). Lesmusulmans qui souhaitent se confor-mer à Charia ne peuvent pas sous-crire à des produits d’assurance clas-siques, car ces produits contiennentdes éléments illicites selon les prin-cipes islamiques. Plusieurs incompa-tibilités sont liées au système d’assu-rance conventionnelle qui n’est pasen conformité avec Charia.

• L’assurance peut encourager lehasard moralLe hasard moral est la tentation natu-relle qu’un assuré accroît sa prise derisque, eu égard à la situation où ilassumerait entièrement les consé-quences négatives d’un sinistre. C’estl’absence de toute incitation à éviterle risque lorsqu’un agent est assuré.Si un agent économique disposed’une assurance qui le protège contrele risque, il pourrait être tenté d’avoirdes comportements plus risqués ques’il n’avait pas d’assurance. Pour limi-ter leur exposition au risque, les com-pagnies d’assurance utilisent des

clauses contractuelles pour se libérerde leurs obligations de dédommagerles assurés si des comportements ris-qués sont prouvés.

• La police d’assurance peut êtreambiguëLes polices d’assurance peuvent êtreambiguës, et de nombreux assurés necomprennent pas les frais et lesgaranties incluses dans les contratsd’assurance. En raison de la com-plexité possible, les agents économi-ques peuvent inconsciemment ache-ter des polices à des conditions défa-vorables.

• Les compagnies d’assurance clas-siques par rapport aux mutuellesLes compagnies d’assurance classi-ques sont généralement organiséessous forme de sociétés appartenant àdes actionnaires ou sous forme demutuelles. L’objectif d’une compagnied’assurance détenue par des action-naires est de générer des profits pourses actionnaires. Les mutuelles d’as-surance sont la propriété de leursassurés. L’objectif d’un tel assureurest de minimiser le coût de l’assu-rance payée par ses assurés. Pouratteindre son objectif, la mutuelled’assurance pourrait verser des divi-dendes à ses assurés, en fonction desperformances de l’entreprise.

• La similitude avec les jeux dehasard (Maysir)Lorsqu’un assureur classique estorganisé en une société d’actionnai-res analysant les tables actuariellespour calculer la probabilité d’occur-rence des risques à l’avenir, les spé-cialistes de Charia estiment que cecomportement n’est pas différent decelui rencontré dans les jeux dehasard ou « Maysir ». Si les estima-

Page 45: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT44

tions de souscription sont calculéesavec précision et les primes évaluéesde façon appropriée, l’assureur réa-lise un profit pour ses actionnairesau détriment des assurés. À l’inverse,si l’assureur sous-estime les primes,le résultat sera une perte pour lesactionnaires et un gain pour les assu-rés. Cette situation est considéréecomme illicite parce qu’il s’agit d’unjeu à somme nulle, jugé injuste toutautant pour les actionnaires que pourles souscripteurs.

• L’incertitude extrême (Ghararmajeur)Le Gharar peut revêtir le sens de l’in-certitude, du risque et du hasard. LeGharar peut introduire un déséquili-bre entre les parties menant à desconfusions. L’assurance convention-nelle s’appuie sur l’incertitudeextrême (Gharar majeur) qui estinterdite par Charia. Au moment oùune police est contractée, l’assureurne contrôle pas le moment ni lasomme qu’il devra verser en cas desinistre. De même, l’assuré paie uneprime, mais ne pourra pas savoir s’ily aura une contrepartie à cette der-nière car il souscrit dans le but de secouvrir contre des évènements incer-tains. Cette pratique va ainsi à l’en-contre de Charia.

• L’intérêtLes intérêts ou Riba peuvent se pro-duire de deux façons : soit par Ribagénéré par les primes payées, soit parle placement de primes générant desintérêts. Riba est généré quand unepolice d’assurance rapporte unesomme prédéterminée qui est supé-

rieure à celle placée. Le problème deRiba peut être évité si le contrat pré-voit une part des résultats plutôtqu’un intérêt fixe.

2. L’assurance islamique

Comme les autres produits islami-ques, les produits Takaful ont unedouble contrainte : ils doivent êtreconformes à Charia et être compéti-tifs sur le marché des assurances. Lesassureurs classiques sont connuspour investir dans des sociétés quisont impliquées dans des activitésconsidérées comme illicite d’un pointde vue religieux. Par exemple, lesgrandes compagnies d’assurance-vieet de santé américaines, canadienneset anglaises investissent des mil-liards de dollars dans des entreprisesde tabac1.

2.1. Takaful ou l’assurance islamiqueL’assurance islamique s’assimile àune société coopérative financée parles fonds des assurés selon le prin-cipe de la mutualisation des risques.Dans un tel système, les membressont à la fois assureurs et assurés.C’est un arrangement par un groupede personnes voulant se protégermutuellement contre des risques etdes accidents définis en contribuant àla constitution d’une réserve d’argentsur ??leurs propres ressources.Cette pratique d’entraide et de res-ponsabilité partagée est basée sur leprincipe de l’Aqilah (personnes derelation) qui était d’usage dans les

1. Nos principales références sur le Takaful sont Gönülal (2012), Stiftl (2012, 2014), Jagga et Khan (2012), Ouendi(2014), Archer, Abdel Karim et Nienhaus (2009) et Marjan (2010).

Page 46: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 45

tribus à l’époque du ProphèteMohammed Paix et Salut sur Lui. Àchaque fois qu’un sinistre survenait,les membres de la tribu participaientpour aider les parties touchées. Leprincipe de l’Aqilah est le fondementdu Takaful.L’opérateur Takaful (la société quiexploite le système d’assurance pourle compte de ses assurés) divise lescontributions en deux parties. Unmontant prélevé pour Tabarru (dons)est mis de côté pour satisfaire les per-tes et les sinistres des assurés. Ladeuxième partie est consacrée à l’in-vestissement.Après la distribution des bénéficesobligatoires, le surplus restant estreversé aux assurés ou donné sousforme de charité. Il n’y a pas degagnant ou de perdant dans cetarrangement. Le but du groupe estd’assurer une couverture des intérêtsmutuels.L’utilisation du Takaful érigé en sys-tème entrepreneurial est récente. Lapremière entreprise a été mise enplace au Soudan en 1979. Ensuite, en1985, l’Académie de l’Organisation dela Conférence Islamique a conclu unaccord sur l’assurance islamique et aformellement interdit l’assuranceconventionnelle. Suite à cet accord,les institutions islamiques ont étéencouragées à établir des contratsd’assurance sur la base de contribu-tions volontaires, de la coopérationmutuelle et du respect des principesde Charia.

2.2. Les principales parties prenantes dans TakafulIl y a deux principales parties pre-nantes dans une entreprise deTakaful : les assurés (égalementappelés participants ou membres) quiont besoin d’une assurance, et l’opé-

rateur qui fournit l’expertise d’assu-rance islamique. Le mécanisme estassez similaire au concept des fondscommuns de placement où les inves-tisseurs confient la gestion des fondsà des professionnels de ce secteurd’activité dans un but de fructifica-tion. Avec la présence de l’opérateur,l’entreprise Takaful prend une orien-tation commerciale et entrepreneu-riale. L’opérateur, qui appartientgénéralement à un groupe d’action-naires, vise un rendement raisonna-ble sur les investissements réaliséspar ces derniers.

2.3. Comment les produits Takafulsont-ils structurés ? Les produits Takaful sont structurés àl’instar de plusieurs grands modèles :❐ leur but est non lucratif (Tabarru) ;❐ l’opérateur gagne une commissionversée par l’agence (Wakalah) ;❐ l’opérateur partage les profits avecles assurés (Mudharabah) ;❐ l’on aboutit à une hybridation del’intéressement entre l’agence et lesassurés.

• Les produits Takaful sont à butnon lucratif (Tabarru)Le Takaful peut être exercé sur labase du Tabarru ou, de manière plusgénérale, sur une base non lucrative.Dans ce modèle, la contribution ini-tiale permettant la création et l’orga-nisation de l’entreprise peut provenird’un promoteur, comme le gouverne-ment, ou d’un prêt sans intérêt (QardHassan). Les assurés font des dons aufonds Takaful qui est utilisé pourfournir une protection financière auxsouscripteurs. Les assurés sont lesopérateurs du fonds, et donc égale-ment les actionnaires de la sociétéTakaful. Ce modèle est utilisé auSoudan. L’entreprise de Takaful n’at-

Page 47: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT46

teint pas une grande taille car elles’inscrit dans le cadre des entreprisessociales à but non lucratif.

• L’opérateur perçoit des honorairesde l’agence (Wakalah)En utilisant le modèle Wakalah, l’opé-rateur gère le fonds Takaful en tantqu’agent des assurés et reçoit encontrepartie de ses services unerémunération. L’excédent du fondsappartient aux assurés. Les honorai-res de l’opérateur sont déterminés àl’avance et ne varient pas en fonctiondes excédents. Un opérateur Takafulest sélectionné pour fournir uneexpertise dans la gestion d’uneentreprise d’assurance islamique.L’opérateur dispose de ses propresfonds d’actionnaires. Les souscrip-teurs versent des cotisations au fondsdes assurés. L’opérateur Takafulinvestit les fonds des assurés, les-quels reçoivent des remboursementsfaisant suite aux différentes déclara-tions (par exemple de sinistres) qu’ilsauront émises. Les charges d’exploi-tation sont imputées sur les fonds desassurés, puisque ces frais sont sup-portés par l’opérateur pour le comptedes assurés. L’opérateur Takafulreçoit une rémunération prédéfiniequi est prise sur les fonds des assu-rés. Le montant peut être une valeurabsolue ou un pourcentage des coti-sations brutes reçues. Les excédentssont actualisés à différentes périodes(en fonction de la somme initiale del’investissement et des bénéfices desouscription perçus). Les assurésreçoivent leur quote-part sur les sur-plus et doivent effectuer des verse-ments supplémentaires en cas dedéficit. L’opérateur peut financer ledéficit par des prêts sans intérêt(Qard Hassan).

2.4. L’opérateur partage les profitsavec les assurés (Mudharabah)Dans le modèle Mudharabah, l’opéra-teur et les souscripteurs concluentun accord d’intéressement sur le ren-dement des investissements. Lesassurés ne profitent des bénéficesréalisés par l’entreprise que si elle estrentable. L’opérateur de Takaful ne reçoitaucune rémunération sur la gestionde l’entreprise. Les souscripteursversent des cotisations au fonds desassurés. L’opérateur Takaful investitalors les fonds des assurés. Par lasuite, les assurés reçoivent des rem-boursements faisant suite aux diffé-rentes déclarations qu’ils auront émi-ses. Les charges d’exploitation sontimputées sur les fonds des assurés,puisque ces frais sont supportés parl’opérateur pour le compte des assu-rés. Les bénéfices générés par l’inves-tissement des fonds des assurés sontpartagés entre les assurés et l’opéra-teur selon un ratio de partage prééta-bli. Les pertes ne sont facturées quepour le fonds des assurés (puisque lesassurés sont apporteurs de capital).Les excédents sont actualisés à diffé-rentes périodes (selon la somme del’investissement initial et les bénéfi-ces tirés des souscriptions). Les assu-rés reçoivent alors leur quote-partsur chaque surplus, et ils doiventeffectuer des versements supplémen-taires s’il y a un déficit. Comme dansle modèle précédent, l’opérateurfinance souvent le déficit par desprêts sans intérêt (Qard Hassan).

2.5. L’effet hybride de l’intéresse-ment entre l’agence et les assurés Le modèle Mudharabah, avec sonintéressement, offre une incitationfavorable pour l’opérateur afin degérer les fonds. Lorsque le rende-

Page 48: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 47

ment des placements est important,l’opérateur en bénéficie directement.Le modèle Wakalah ne prévoit pas untel avantage, car il ne prend pas encompte l’état du rendement desinvestissements, puisque la rémuné-ration de l’opérateur est prédéfinie àl’avance. Généralement la rémunéra-tion prédéfinie est suffisante pourque l’opérateur gère et exploite cor-rectement l’entreprise Takaful. Veiller au bon fonctionnement de l’en-treprise Takaful est une fonction dis-tincte de la gestion de portefeuille.Mais lorsque l’on compare ces modè-les, on en vient à la conclusion que lameilleure solution pourrait être lacombinaison des modèlesMudharabah et Wakalah. Car l’opéra-teur réaliserait alors deux types defonctions, regroupées en une seule :la gestion de portefeuille et les opéra-tions de l’entreprise. Des fonctionspour lesquelles, en principe, il reçoitdes rémunérations séparées. Avec uncumul des deux modèles, l’opérateurrecevrait une part des cotisations desassurés et une part des revenus del’investissement déterminée àl’avance.

2.6. Le partage des excédents dessouscriptionsLes surplus des souscriptionsdevraient-ils être partagés avec l’opé-rateur ? Dans le modèle duMudharabah, les surplus ne sont dis-ponibles que pour les assurés et nesont pas partagés avec l’opérateur.Ceux qui s’opposent au partage pré-tendent qu’en cas de partage, il y aalors conflit d’intérêts.Dans certaines entreprises Takafulqui utilisent le modèle Mudharabah,les excédents des souscriptions sontpartagés avec l’opérateur. Ces entre-

prises utilisent ce genre de pratiquesafin de rendre le produit islamiqueaussi compétitif que les produits del’assurance conventionnelle classi-que.Sans avoir accès aux excédents dessouscriptions, l’opérateur peut factu-rer un taux de cotisation plus élevé,ce qui peut causer une faiblesse dansla compétitivité du produit. Recevoirune part de l’excédent des souscrip-tions constitue une forme de compen-sation pour l’opérateur pour être enligne avec les taux conventionnels.Certains modèles de Wakalah utiliséssont structurés de façon à partagerles excédents de souscription en plusde recevoir une commissiond’agence. Les partisans avancent quele partage des surplus réduit le pro-blème du hasard moral associé auWakalah où l’opérateur, qui sait par-faitement ce qu’il se fait indépendam-ment des résultats d’exploitation, neserait pas incité à mieux remplir samission. Le partage de l’excédent estdonc une incitation, pour l’opérateurTakaful, à œuvrer efficacement et àfixer un prix compétitif pour mainte-nir une bonne place sur le marché.

2.7. Les différences entre les modè-les TakafulLa responsabilité suprême de laconformité à Charia incombe auconseil de surveillance Charia de cha-que entreprise. Étant donné que cesdirectoires ne sont pas unanimesdans leurs décisions, les modèlesTakaful sont mis en place en fonctiondu marché, du pays et de la société.Le tableau ci-après présente les prin-cipales différences entre l’assuranceislamique et l’assurance convention-nelle.

Page 49: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT48

Les propriétaires

Source de loi et de régulation

Risque de perte

Investissements

Surplus desouscription

Dissolution de l’entreprise

Assuranceconventionnelle

Les actionnaires sontpropriétaires de

l’entreprise. L’objectif dela firme est de maximi-

ser les profits.

Loi d’assurance.

Assumé par les actionnaires.

Pas de restrictions.

Le directoire décide,selon la conjoncture,comment le surplussera distribué entre les actionnaires et

les assurés.

Les réserves et surplusappartiennent aux

actionnaires.

Assurance Takaful

Les assurés sont propriétairesde l’entreprise. L’opérateur

reçoit des indemnités (par le biais d’intéressement

ou de frais). L’objectif est de

minimiser le coût de l’assurance.

Un conseil de Charia quirégule l’activité en assurant

que les activités, les produitset les investissements sont

conformes à Charia.

Assumé par les assurés.

L’investissement doit êtreconforme aux règles

de Charia.

La distribution du surplus est déterminée dans

le contrat de Takaful.

Les réserves et surplus sont reversés aux assurés

ou donnés sous formede charité

Page 50: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 49

2.8. Les défis soulignés par le conseil des services financiersislamiquesReTakaful (ou réassurance islami-que) est une composante essentiellede l’industrie du Takaful pour répar-tir et équilibrer les risques pris parles opérateurs. C’est un outil de ges-tion des risques utilisé par les opéra-teurs pour transférer une partie durisque d’un fonds Takaful à un autreopérateur Takaful ou à un exploitantReTakaful.Sans la présence de ReTakaful auxcôtés des entreprises Takaful, l’indus-trie serait incapable de développerson potentiel. Selon le rapport du ser-vice financier islamique du dévelop-pement industriel, après dix ans detravail effectué par le Conseil des ser-vices financiers islamiques enmatière de structures et de straté-gies, nous soulevons en date d’au-jourd’hui un manque dans les socié-tés de ReTakaful. C’est pourquoiCharia a autorisé le recours auxsociétés de réassurance tradition-nelle. Cela signifie que l’activité deTakaful peut se définir comme unensemble d’institutions islamiques etconventionnelles en coexistence.ReTakaful et Takaful partagent lemême principe de Charia et leurs opé-rations ne sont pas différentes lesunes des autres. Les opérateursTakaful sont les assurés du systèmeReTakaful, les souscripteurs indivi-duels étant les assurés du modèleTakaful. La contrainte la plus impor-tante à laquelle doit faire face l’indus-trie Takaful est l’absence de cadre juri-dique et réglementaire pouvant servir

de régulateur et de support à l’indus-trie. Outre le Bahreïn, la Malaisie et leSoudan, d’autres pays disposent detextes codifiant le Takaful dans lecadre réglementaire de l’assuranceconventionnelle. Les fournisseurs deservices Takaful sont confrontés à desdifficultés de compétitivité face auxassureurs traditionnels.

Conclusion

Parmi les principaux obstacles à lacroissance du modèle d’assuranceTakaful, nous soulevons la diversitédes opinions et des pratiques. Le sys-tème Takaful permet à diverses inter-prétations de coexister. La poursuitede l’uniformisation des modèles defonctionnement aiderait l’industrie àcroître à plus grande échelle. La stan-dardisation permettrait aussi laréduction des coûts, l’amélioration dela clarté entre les clients et leur assu-reur, et la libération des ressourcesauprès d’institutions financièresoffrant des produits conformes àCharia. Une autre contrainte est lemanque général d’actifs de placementqui, sur le marché, soient conformesà Charia. Malgré une croissance posi-tive de l’émission des Sukuks, l’offreest encore insuffisante. Les entreprisesde Takaful ont dû se doter d’instru-ments différents pris sur le marché,pour diversifier leurs risques.Certaines compagnies d’assurancevont-elles jusqu’à entrer sur le marchéboursier et le marché de l’immobilier ■

Page 51: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT50

Bibliographie

• Gönülal, Serap (éd.), Takaful and MutualInsurance: Alternative Approaches toManaging Risks. Directions in

Development. World Bank Publications,

23 octobre 2012.

• Marjan, Muhammad, 2010, MusharakahTa’awuniyyah for Takaful Operations. ISRA

Bulletin, vol. 06, p. 10 ff. Kuala Lumpur.

• Stiftl, Ludwig, 2012, On the role ofTakaful in the Transformation of MiddleEastern societies. In Towards preparing theground. Contributions de Munich Re au

discours de fond concernant le Takaful et

le Retakaful, Munich Re.

• Stiftl, Ludwig, 2014, How can takafuldeliver on its promise? A proposal for broade-ning its range and reach. Münchener

R ü c k v e r s i c h e r u n g s - G e s e l l s c h a f t

Königinstrasse, München, Allemagne.

• Simon Archer, Rifaat Ahmed Abdel

Karim, and Volker Nienhaus, 2009,

Takaful Islamic Insurance : Concepts andRegulatory Issues, Wiley Finance Editions.

• Ouendi, Lynda, 2014, Le takaful islami-

que : Est - il une simple frontière de l’assu-rance mondiale? Working Paper, Université

Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou,

Algérie.

• Ernest & Young, 2013, «Global TakafulInsights: Finding growth markets».

• Ernst & Young, 2012, «The WorldTakaful», Dubai.

• Islamic Finance News, 2012, «2012guide», Malaysia, February.

• Islamic Financial Services Board, 2009,

«Guiding principles on governance for taka-ful (Islamic insurance) undertakings »,

Malaysia, December.

• Jagga. A and Khan. J, 2012, «Takafulmodels : Overview from an actuarial perspec-tive», Actuarial Society of South Africa,

16-17 october.

Page 52: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 51

1. Introduction

Dans le contexte d’intensification dela concurrence pour l’environnementindustriel, de nouveaux paradigmesde conception, de planification et decontrôle de systèmes manufacturiersont été développés, notamment leparadigme de l’entreprise agile.Goldman et al. (1995, p 8) définissent

l’entreprise agile comme une organi-sation capable de s’adapter dans unenvironnement continuellement com-pétitif et de prospérer dans des mar-chés imprévisibles. Selon Hermel(1986, p1) « les exigences nouvellesdes divers environnements des entrepri-ses interpellent leur fonctionnement tra-ditionnel et semblent conférer à la capa-cité de changement un statut de facteurstratégique de performance ». Ces

Impact de la flexibilité et des préférencesdes employés sur l’ordonnancement dupersonnel : une approche par simulationmulti-agents

Résumé. Dans cet article nous exploitons un algorithme à base d’agents et unautre de recuit simulé pour l’ordonnancement du personnel dans un contextedynamique, et ce afin d’étudier l’impact deux aspects de la gestion stratégiquedes ressources humaines. Ces aspects sont : la flexibilité dans l’élaboration deshoraires de travail et l’impact de la prise en considération des préférences dansle processus d’ordonnancement du personnel.Un intérêt particulier est porté auproblème d’ordonnancement en temps réel des activités du personnel travail-lant sur une chaîne d’assemblage. Nous abordons cette problématique dans uneperspective de gestion par compétences, et ce, en nous basant sur le profil decompétences dans la modélisation de l’offre et de la demande en personnel.

Mots-clés. Ordonnancement agile du personnel, Systémes Multi-agents,Gestion par compétences.

Abstract. This article presents a multi-agent based algorithm for personnelscheduling and rescheduling in the dynamic environment of a paced multi-pro-duct assembly center. We exploit the algorithms based agents and simulatedannealing for studying two aspects of strategic human resource management.These aspects are: The flexibility in the elaboration of work schedules and theimpact of the consideration of preferences in the staff scheduling process.

Mohamed SABAREnseignant-chercheur au Groupe ISCAE

Mohamed EL MOUEFFAKEnseignant-chercheur au Groupe ISCAE

Page 53: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT52

auteurs considèrent l’entreprisecomme une entité proactive engagéedans un processus d’adaptation et deremise en question continue. À ceteffet, pour être agile, l’entreprise doitêtre en mesure de réagir rapidementface aux changements de la demande etêtre capable de reconfigurer aisémentses processus d’affaires pour répondreaux nouveaux besoins du marché.Selon Malecki (1996)1, l’agilité dansle domaine manufacturier peut êtreconsidérée selon trois axes. Le pre-mier axe porte sur l’agilité dans lesrelations interentreprises. Celainclut, par exemple, une flexibilitédans la gestion de la chaîne logisti-que et le développement de partena-riats stratégiques. Le deuxième axes’intéresse à l’agilité des processus deproduction et des infrastructures uti-lisées. Cette agilité se manifeste à tra-vers la capacité de planifier et de pro-duire avec facilité et rapidité des lotsde produits de natures et de taillesvariantes de manière importante. Letroisième axe, dans lequel se placentces travaux, porte sur l’agilité dans lagestion des ressources humaines.C’est une agilité portant sur la capa-cité des employés à effectuer plu-sieurs types d’opérations sur diffé-rents postes de travail (formation croi-sée) et à répondre aux besoins desclients dans de courts délais tout enmaintenant un niveau de qualité éle-vée (Hopp et Van Oyen, 2004; Kula etal. 2004). En effet, des employés poly-valents permettent à l’entreprise deréagir en adéquation avec les fluctua-tions des charges de travail tout enprofitant d’un vaste bassin de compé-tences (Jordan et al. 2004).

Goldman et al. (1995, p 107) considè-rent que dans une entreprise agile,les ressources humaines constituentle noyau du système de production.Dans le même ordre d’idées, Wrightet McMahan (1992) identifient lesressources humaines comme unesource d’avantage concurrentieldurable dans les organisations. Ilssoulignent que l’avantage concurren-tiel procuré par les employés est lié,d’une part, à la capacité des organisa-tions à les gérer et à les mobiliser et,d’autre part, à leurs compétences. Dans cette perspective, la gestion desressources humaines (GRH) consti-tue une préoccupation de premierplan pour les gestionnaires. Afin des’ajuster aux nouvelles tendances dumarché, certaines pratiques utiliséesjusqu’à présent en matière de GRHsont remises en question.Notamment, l’approche de type taylo-rien-fordien du travail, où le posteconstitue le pivot des pratiques degestion des ressources humaines(Cazal et Dietrich 2003) et l’approchede gestion prévisionnelle des RHbasée sur la recherche d’un équilibreentre l’offre et la demande enemployés sans tenir compte desobjectifs stratégiques de l’organisa-tion (Bayad et al. 2001). Pour remé-dier à ces problèmes, plusieurs tra-vaux se sont tournés vers des modè-les de gestion et de planification desRH intégrant les activités des RH auxobjectifs stratégiques de l’organisa-tion et plaçant l’employé au centredes préoccupations managériales.Ces modèles ont été générés dans lecadre d’un courant de pensée appelé :Gestion Stratégique des Ressources

1. Cité par Hopp et Van Oyen (2004).

Page 54: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 53

Humaines (GSRH) (Bayad et al.2001). Le modèle de gestion par com-pétences des RH s’inscrit dans cecourant de pensée. Il vise l’utilisationdes compétences comme élément cen-tral de la gestion du capital humainau sein de l’organisation (Rivard2001). L’approche de gestion par compéten-ces présente l’avantage d’être plusflexible et de s’adapter aux change-ments fréquents et aux réorganisa-tions. Elle remplace ainsi la tradition-nelle description de tâches souventrestrictive et inadaptée à la rapiditédes mutations des types d’emplois(Rivard 2001). Dans notre recherche, nous nousintéressons à la gestion des ressour-ces humaines opérationnelles, et plusspécifiquement, aux problèmes deplanification de ces ressources, dansun contexte dynamique. Un intérêtparticulier est porté au problèmed’ordonnancement en temps réel desactivités du personnel travaillant surune chaîne d’assemblage. Nous abor-dons cette problématique dans uneperspective de gestion par compéten-ces, et ce, en nous basant sur le pro-fil de compétences dans la modélisa-tion de l’offre et de la demande enpersonnel.En plus, pour marquer l’agilité dupersonnel, nous nous plaçons dansun contexte manufacturier favorisantla gestion par la polyvalence inter-postes des employés (formation croi-sée) (Vairaktarakis et Winch 1999 ;Hopp et al. 2004 ; Jordan et al. 2004; Bokhorst et al. 2004, Bard 2004 ;Kula et al. 2004 ; Sumukadas etSawney 2004). Ce style de gestionporte sur le renforcement de la com-plémentarité entre les compétencesdisponibles et celles requises ainsique sur l’augmentation de la redon-

dance de certaines compétences pri-mordiales à travers la formation desemployés. L’objectif est d’augmenterle bassin des compétences disponi-bles à l’interne en rendant lesemployés de plus en plus polyvalents.Cela confère à l’entreprise unegrande flexibilité (Hopp et al. 2004).De telles entreprises sont plus aptes àrenforcer la capacité des ressourceshumaines sur certains postes affi-chant une augmentation imprévisiblede la charge de travail (Jordan et al.2004) ou bien pour faire face auxabsences ou aux retards d’employéset ce, en mobilisant d’autresemployés puisés à partir du bassin decompétences disponibles.

Notre recherche se focalise sur :a. Élaboration d’un plan d’ordonnan-cement et d’affectation des employésen prenant en considération les dis-ponibilités, les compétences et lesexpériences de chacun d’eux. Ce plandoit spécifier les employés affectés,les machines sur lesquelles chaqueemployé doit opérer, l’intervalle dutemps dans lequel il doit intervenir etles périodes de pause. b. Gestion et contrôle de l’exécutiondu plan d’ordonnancement.Il est question de proposer uneapproche qui permet d’une part, unordonnancement quotidien d’em-ployés hétérogènes dans un contextede chaîne d’assemblage et d’autrepart, un ajustement et un ordonnan-cement réactif des plans d’affectationdes employés en cas de perturba-tions, notamment l’absentéisme d’unou de plusieurs employés.Plusieurs méthodes, pour la plupartdes heuristiques ou des méta-heuris-tiques (Alfares 2004), ont été propo-sées pour la résolution du problèmed’ordonnancement du personnel. Le

Page 55: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT54

recours à de telles méthodes est dû àla nature complexe du problème. Eneffet, Garey et Johnson (1979) ontprouvé qu’il est de complexité NP-complet. Dans cette perspective, l’approchedes systèmes multi-agents (SMA) quis’intéresse aux interactions d’unensemble d’entités autonomes, appe-lées agents, ayant un comportementcollectif qui permet d’atteindre unefonction désirée dans un environne-ment donné, nous semble très perti-nente et prometteuse pour appréhen-der notre problématique. En effet,l’approche des systèmes multi-agentsest appropriée pour le développementdes systèmes manufacturiers distri-bués (Jennings et al. 1995; Jenningset Wooldridge 1998). Elle offre plu-sieurs possibilités de modélisation etde simulation des systèmes, particu-lièrement pour les systèmes sociaux(Panzarasa et Jennings 2001) où lacomposante humaine constitue unélément clé. C’est le cas, par exemple,de l’ordonnancement du personnelnécessitant la coordination et la col-laboration entre plusieurs acteurs(gestionnaires, contremaîtres, trans-porteurs, employés, etc.).Par ailleurs, nous avons retenucomme mécanisme d’interaction et denégociation pour notre systèmemulti-agents l’approche du jeu coopé-ratif avec utilité transférable qui estune branche de la théorie des jeux àn-personnes. Dans un article précèdent (Sabar etal. 2008), nous avons présentéuneformulation du problème liée à l’or-donnancement en temps réel du per-sonnel dans un environnementmanufacturier dynamique. À ce sujet,nous avons proposé un modèlemathématique du problème d’affecta-tion dynamique des employés sur une

chaîne d’assemblage avec prise enconsidération des préférences, descompétences et des déplacementsinter-postes des employés.En nousbasant sur ce modèle, et grâce à l’uti-lisation du solveur commercial detype Ilog CPLEX Version 9.0, nousavons pu résoudre des instances deproblèmes de petite taille. Les résul-tats obtenus ont démontré que la pro-duction d’une solution optimalerequiert un temps de calcul impor-tant, ce qui risque de générer unerigidité et une moindre réactivité dela fonction d’ordonnancement face àdes perturbations d’un environne-ment dynamique.À cet effet, nous avons jugé qu’uneapproche de résolution dynamique etdistribuée à base d’agents serait judi-cieuse. Dans cette perspective, nousavons présenté une approche à based’agents pour la résolution des pro-blèmes d’ordonnancement. Cetteapproche est structurée autour de lanotion de coopération inter-agent etce, grâce à la formation de coalitions(Sabar et al. 2009). Afin de mettre en œuvre cette appro-che, nous avons présenté une modéli-sation multi-agents d’une chaîned’assemblage. Cette modélisation sebase sur l’utilisation de plusieurstypes d’agents intelligents qui encap-sulent d’une part, les processus déci-sionnels d’ordonnancement du per-sonnel et d’autre part, les entités phy-siques de la chaîne. Les résultatsd’ordonnancement du personnelobtenus à partir des premiers testssont encourageants. Ils démontrentque notre approche à base d’agentspermet d’avoir des solutions debonne qualité en des temps raisonna-bles (Sabar et al. 2009). De plus, pour faire face aux aléas liésà l’absence d’employés, nous nous

Page 56: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 55

sommes intéressés au processus deréordonnancement du personnel. Àcet effet, nous avons développé uneextension de l’approche à based’agents ainsi qu’une approche derecuit simulé, qui permettent derésoudre le problème de réordonnan-cement (Sabar et al. 2012). Nousavons pu tester les performances deces deux approches sur plusieurs casdu problème d’ordonnancement et deréordonnancement du personnel.L’ensemble des résultats démontreque l’algorithme à base d’agentsconduit à de très bonnes solutions encomparaison avec le recuit simulé.Le présent papier a pour objectif l’ex-ploitation des algorithmes à based’agents et de recuit simulé, qui sontdéveloppés dans notre recherche,pour étudier deux aspects de la ges-tion stratégique des ressourceshumaines : la flexibilité dans l’élabo-ration des horaires de travail et l’im-pact de la prise en considération despréférences dans le processus d’or-donnancement du personnel. Dansles deux cas, les résultats de simula-tion obtenus corroborent les hypo-thèses initiales de recherche, à savoirla pertinence et l’intérêt de la notionde flexibilité et de la prise en comptedes préférences dans le processusd’ordonnancement du personnel.

2. Analyse de l’impact de la flexibilité

2. 1. Description des simulationsDans le processus d’ordonnancementdu personnel, la dimension liée à laflexibilité du temps de travail appa-raît aujourd’hui comment étant unélément clé pour l’amélioration de lagestion des ressources humaines. Denombreuses recherches ont démon-

tré les effets bénéfiques de la flexibi-lité (Bailey & Field 1985 ; Jacobs&Bechtold 1993). Il se dégage de cesrecherches qu’une flexibilité élevéeoffre plus de souplesse dans l’élabora-tion des plannings de travail et per-met par la même occasion d’améliorerla productivité des employés. Eneffet, selon Bailey et Field (1985), laflexibilité a un impact positif sur l’en-vironnement de travail, qui se traduitpar une motivation plus élevée desemployés et une diminution du tauxd’absentéisme et des retards. L’idéede base de la flexibilité du temps detravail consiste à diversifier lesmodèles des horaires de travail possi-bles en termes de durées et d’empla-cements des périodes de travail, ou àréduire au minimum les limites tem-porelles de tels modèles et ce, afin defaire face aux fluctuations et auxaléas de la production et pour s’ac-commoder aux préférences et auxcontraintes personnelles desemployés.La flexibilité dans l’ordonnancementdu personnel peut prendre plusieursformes. Les exemples les plus répan-dus sont :1. Adoption de plusieurs types dequart de travail qui ont des durées etdes plages horaires distinctes (Shift-lengthflexibility) (Jacobs &Bechtold1993 ; Thompson 1995 ; Brusco&Jacobs 2003 ; Klabjanet al. 2000 ;Rekik et al 2004) ;2. Flexibilité sur les heures de démar-rage du quart de travail par jour et parsemaine (Start-time flexibility)(Thompson 1995 ; Rekik et al. 2004) ;3. Flexibilité sur l’emplacement et ladurée des jours de repos hebdoma-daire (Days-off flexibility)(Topaloglu&Ozkarahan 2004). Cetype de flexibilité est lié principale-ment au cas du problème d’élabora-

Page 57: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT56

tion de patrons de travail (Tour sche-dulingproblem);4. Flexibilité liée aux emplacementsdes périodes de pause quotidiennes(Break-placement flexibility) (Jacobs&Bechtold 1993 ; Thompson 1995 ;Brusco& Jacobs 2000 ; Rekik et al2004).Dans ce papier, nous nous intéres-sons à la flexibilité liée d’une part, àla dimension de durée du quart detravail, et d’autre part, à la dimensionde l’heure de démarrage du quart detravail. Notre objectif consiste à éva-luer les gains potentiels que peut pro-duire une stratégie flexible d’aména-gement du temps de travail en com-paraison avec le modèle traditionnelet typique du quart de travail qui secaractérise généralement par unedurée de 9-heures et une seulepériode de début de travail, générale-ment à 8 h du matin (appelé dans cequi suit : modèle#1). Pour chacune des deux dimensionsde flexibilité choisies, nous considé-rons deux niveaux distincts qui reflè-tent respectivement un niveau moyenet un niveau élevé de flexibilité :

- Pour la dimension de la durée duquart de travail, le premier niveau deflexibilité consiste en quatre duréesde travail possibles pour un employéspécifique à chaque quart. Les duréeschoisies sont respectivement 4, 5, 7 et9 heures de travail. Dans le cas dudeuxième niveau de flexibilité, aucunedurée de présence n’est préétablie. Laseule contrainte à ce niveau porte surla durée minimale de présence d’unemployé. Cette durée est considéréecomme étant égale à 4 heures consécu-tives de travail par quart.- Pour la dimension du démarrage duquart de travail, nous considéronsdans un premier niveau qu’un quartde travail peut débuter toutes les 2heures en commençant à partir d’uneheure de référence (8 h du matin parexemple). Dans le deuxième niveau, lafréquence de démarrage est plus éle-vée. Dans ce cas, un quart de travailpeut commencer toutes les heures. La combinaison de ces deux dimen-sions donne lieu à quatre modèlespossibles pour l’aménagement dutemps de travail tel qu’illustré dans lafigure 1.

Figure 1 : modèles flexibles d’aménagement du temps de travail

Page 58: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 57

Afin d’évaluer l’impact des cinqmodèles de flexibilité choisis, nousprocédons à la résolution d’un pro-blème d’ordonnancement du person-nel qui correspond à un plan de pro-duction s’étalant sur un horizon desoixante quarts de travail. Un soinparticulier a été accordé à l’élabora-tion de ce plan de production, et ce,de telle manière à avoir une multi-tude de types de charge de travail,qui varie d’une charge faible à unecharge forte en termes du nombred’employés requis. En plus, au niveaude chaque quart, nous simulons uncertain nombre de perturbations liéesà l’absence totale ou partiale d’em-ployés. Nous considérons un tauxd’absence variant entre 1 à 5 % dunombre total de la main-d’œuvre. Lataille du bassin de la main-d’œuvreest de 200 employés dont 5% sont deschefs d’équipes. En cas de surplusd’employés, les employés qui neseront pas affectés à des activitésdurant le quart de travail serontconsidérés comme étant des travail-leurs sur appel. Le système d’assem-blage est composé de 40 stations d’as-semblage. Pour chaque quart, l’hori-zon de planification est égal à 9 heu-res. Nous avons considéré un tempsde cycle de 15 min, ce qui donne uneplanification étalée sur 36 périodesde temps. Durant un quart de travail,la fréquence de changement degamme de produits à assembler variede 1 à 4 fois. Au niveau de chaque sta-tion, le passage d’un modèle à unautre requiert un temps de setup égalà 15 min. Pour la mise en œuvre de ces diffé-rents modèles, nous utilisons deuxapproches de résolution pour l’ordon-nancement du personnel : l’approcheà base d’agents ainsi que la deuxièmevariante de l’algorithme de recuit

simulé (permutation par bloc d’activi-tés). Cela nous permet par la mêmeoccasion de comparer les performan-ces de ces deux approches sur unhorizon assez important. En ce quiconcerne le temps de calcul utilisépour chaque quart de travail, nousnous sommes fixés une durée égale à10 minutes pour le processus d’or-donnancement et une durée de 100secondes pour le réordonnancementen cas d’absence totale ou partialed’employés.

2. 2. Résultats et analyse de l’impact de la flexibilité Nous allons maintenant étudier lesrésultats expérimentaux issus de larésolution de la série des cinq modè-les à travers l’utilisation simultanéede l’approche à base d’agents et durecuit simulé. Dans un premiertemps, nous nous focalisons surl’analyse de l’impact de la flexibilité,et ce, en comparant les coûts des dif-férents modèles d’aménagement dutemps de travail. Dans un deuxièmetemps, nous réexaminons les perfor-mances des deux approches de réso-lution, car grâce à la durée assezimportante des simulations (60quarts/modèle), nous serons enmesure d’avoir une idée plus repré-sentative de la performance de l’ap-proche à base d’agents vis-à-vis del’algorithme de recuit simulé. Le tableau 1 présente les résultatscumulés de la fonction objectif pour lesdifférents modèles de flexibilité et pourchacune des deux méthodes d’ordon-nancement-réordonnancement.Les tableaux 2 et 3 comparent lesécarts entre les différents modèles deflexibilité. Pour chacune des deuxméthodes de résolution, l’écart entredeux modèles distincts est calculéselon la formule :

Page 59: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT58

(Solution du modèle en colonne - Solution du modèle en ligne)Solution du modèle en ligne

Tableau 1 : Résultats cumulés des solutionsd’ordonnancement/ réordonnancement

Modèle 1 (quart de travail Modèle 2 Modèle 3 Modèle 4 Modèle 5

traditionnel)

Approche SMA 1 502 191 $ 1 489 087 $ 1 479 411 $ 1 469 174 $ 1 462 620 $

Recuit simulé (variance 2) 1 514 589 $ 1 499 607 $ 1 491 662 $ 1 487 892 $ 1 485 603 $

Tableau 2 : Comparaison des coûts des modèles de flexibilitépour l’approche SMA

Modèle 1 Modèle 2 Modèle 3 Modèle 4 Modèle 5

Modèle 1 _ - 0,9 % - 1,5 % - 2,2 % - 2,6 %

Modèle 2 _ - 0,6 % - 1,3 % -1,8 %

Modèle 3 _ - 0,7 % - 1,1 %

Modèle 4 _ - 0,4 %

Modèle 5 _

Tableau 3 : Comparaison des coûts des modèles de flexibilitépour le recuit simulé

Modèle 1 Modèle 2 Modèle 3 Modèle 4 Modèle 5

Modèle 1 _ - 1 % - 1,5 % - 1,8 % - 1,9 %

Modèle 2 _ - 0,5 % - 0,8 % - 0,9 %

Modèle 3 _ - 0,3 % - 0,4 %

Modèle 4 _ - 0,2 %

Modèle 5 _

Page 60: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 59

On constate qu’en termes d’écartentre les trois premiers modèles, lesdeux approches de résolution abou-tissent à des résultats similaires. Parcontre, pour les modèles les plusflexibles 4 et 5, les écarts obtenus parl’approche SMA sont presque le dou-ble de ceux du recuit simulé.Au niveau de l’impact de la flexibilitésur le coût d’ordonnancement et deréordonnancement du personnel, lesdeux approches de résolution appor-tent des résultats intéressants, et ce,dans la mesure où elles démontrentque l’adoption de la notion de flexibi-lité peut générer des gains notables.En effet, le principal résultat est quela diminution des coûts est au moinségale à -0.9 % entre l’utilisationd’une part, d’un quart de travailconventionnel de 9-heures de travailsans aucune flexibilité sur le démar-rage du quart (modèle 1) et d’autrepart, de n’importe lequel des modèlesde flexibilité proposé. En comparantle modèle 1 au modèle 5, cette dimi-nution des coûts peut atteindrejusqu’à -1,9 % dans le cas d’utilisa-tion du recuit simulé et -2,6 % dansle cas de l’approche SMA. Par ailleurs, en comparant le modèle2 respectivement aux modèles 3 et 4,les résultats suggèrent que la flexibi-lité sur la durée du quart de travailpeut s’avérer plus intéressante que laflexibilité sur les périodes de démar-rage de quarts de travail. En effet, enpassant du modèle 2 au 3 (démarragede quarts toutes les 2 heures vs tou-tes les heures), la diminution descoûts est de l’ordre de -0,5 % à - 0,6%, alors que le passage du modèle 2au 4 (durée du quart fixée à 4, 5, 7 et9h vs uniquement une limite de pré-sence minimale des employés égale à4h) permet des réductions des coûtsde l’ordre de -0,8 % à - 1,3 %.

Au niveau de la gestion des ressour-ces humaines, ces résultats confir-ment la pertinence et l’intérêt de lanotion de flexibilité dans le processusd’ordonnancement du personnel.Cependant, il est primordial quetoute stratégie de flexibilité prenneen considération les spécificités liéesd’une part, à la nature du secteurd’activité de l’entreprise et d’autrepart, au statut, à la disponibilité etaux préférences des employés. Carl’utilisation abusive d’une grandeflexibilité par l’employeur peutengendrer des effets pervers.Notamment, des horaires fréquem-ment irréguliers pour les employésou amener des employés à travaillermoins que d’autres. De tels effetsaugmentent le risque que la vie pro-fessionnelle des employés empiètesur leur temps familial. En pratique,l’implantation d’une stratégie deflexibilité dans certains secteurs d’ac-tivité peut s’avérer une tâche difficilequi nécessite l’adaptation de l’organi-sation de l’entreprise à cette nouvellesituation et parfois même requiert denouveaux investissements liés parexemple aux moyens de transport desemployés en cas de travail à des heu-res tardives de la journée.Par ailleurs, sur la base des résultatsqui proviennent de la résolution duproblème d’ordonnancement du per-sonnel pour soixante quarts de tra-vail et pour cinq modèles de flexibi-lité distincts suivant les approchesSMA et recuit simulé, il est possiblede procéder à un réexamen des per-formances de ces deux approches surun horizon plus vaste que celui précé-demment utilisé à la section 8.6. La figure 2 illustre l’évolution del’écart entre les coûts cumulés obte-nus par les deux approches pour cha-cun des modèles de flexibilité. Au

Page 61: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT60

niveau de chaque quart de travail q, l’écart entre les deux approches est calculéà travers la formule :

entreprise de 200 employés, la massesalariale hebdomadaire du personnelpeut atteindre 180 000 $ = 200employés ? 5 jours/employé ? 9 heu-res/jour ? 20$/heures. Dans ce cas,une économie moyenne de 1 % grâceà l’utilisation de l’approche SMAreprésente 1800 $ par semaine, celase traduit en une économie de 93 600$ par an. Si on additionne à ce mon-tant une économie moyenne de 2 %grâce à l’instauration d’une politiqueflexible de gestion des horaires detravail, on obtient un total d’environ280 800 $ par an. À notre sens, cemontant représente une économiesubstantielle qui peut être allouée àdifférents usages, notamment, à laformation des employés et à l’amélio-ration de leur environnement de tra-

Nous observons aisément que lesrésultats obtenus confirment les bon-nes performances de l’approche àbase d’agents en comparaison avecl’approche de recuit simulé. La meil-leure performance est obtenue pourle cas du modèle des horaires les plusflexibles (modèle 5). Dans ce cas, lesrésultats indiquent un écart de -1,6%. L’écart le plus faible est enregistrédans le cas du modèle 2. Cet écartégal -0,7 %.Sur la base de ces résultats, il est per-tinent de noter que même si lesvaleurs des écarts entre les deuxapproches de résolution apparaissentpeu significatives en terme relatif depourcentage, leurs valeurs absoluespeuvent s’avérer significatives. Àtitre d’exemple, pour une moyenne

(Coût cumulé SMA au niveau de q - Coût cumulé recuit simulé au niveau de q)Coût cumulé recuit simulé au niveau de q

Figure 2 : Comparaison des performances de l’approcheà base d’agents vs recuit simulé

Page 62: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 61

vail. Dans cette perspective, un desmoyens consiste à accorder un inté-rêt particulier à la prise en considé-ration des préférences des employésdans le processus d’ordonnancement.Afin d’évaluer l’impact d’une telledémarche, nous analysons dans cequi suit l’influence de la prise encompte des préférences des employéssur le coût total d’ordonnancementdu personnel.

3. Analyse de l’Impactdes Préférences

Dans cette section, notre intérêtporte sur l’évaluation de l’impact dela prise en considération des préfé-rences des employés sur le coût de lasolution d’ordonnancement et deréordonnancement du personnel.Plusieurs recherches ont soulignél’importance et l’impact positif de lasatisfaction des employés et desmesures qui améliorent leur qualitéde vie sur la productivité au travail(Deery&Mahony 1994 ; Gärtner2004). De plus, plusieurs recherchesont intégré les dimensions liées auxpréférences des employés dans le pro-cessus de résolution du problèmed’ordonnancement du personnel(Warner 1976 ; Sinuany-Stern&Teomi 1986 ; Dowsland 1998;Dowsland& Thompson 2000 ; Ernstet al.2004). Les aspects de préféren-ces les plus fréquents dans l’ordon-nancement sont liés à la durée duquart de travail, au nombre d’heuresde travail hebdomadaire, au nombredes journées de travail consécutif, aumodèle de rotation entre lesemployés, et aux jours de repos. Au

meilleur de notre connaissance, laplupart des recherches liées à l’or-donnancement du personnel se sontlimitées à la modélisation du pro-blème en tenant compte des aspectsde préférences et à la recherche d’unemeilleure approche de résolution.Aucune exploitation des résultats n’aété faite dans le sens d’explorer l’im-pact des préférences sur le coût d’or-donnancement. À ce stade de notrerecherche, nous avons intégré dansnotre modélisation trois dimensionsqui expriment les préférences desemployés. Les dimensions retenuesdans notre modèle sont (Sabar et al.2008) :1. Préférences des employés au sujetde la durée du quart de travail. Cettepréférence est exprimée en termesd’heures de travail souhaitées ; 2. Préférences des employés au sujetdes activités préférées. Chaqueemployé exprime ses choix en préci-sant si une activité en question estsouhaitée, non souhaitée ou bien s’ilest indifférent ; 3. Préférences des employés au sujetdu nombre de transferts inter-postes. Ces préférences sont modélisées dansnotre fonction objectif à travers despénalités et des gains qui reflètentl’amplitude de la déviation par rap-port aux valeurs souhaitées par cha-cun des employés. Afin d’évaluer l’impact de ces préfé-rences sur le résultat d’ordonnance-ment, nous procédons à une série desix simulations. À chaque simulation,on varie le poids relatif accordé auxpénalités et aux gains liés aux préfé-rences dans la fonction objective.Cette démarche permet de relever lesvariations de l’incidence des

Page 63: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT62

préférences sur le résultat d’ordon-nancement.Pour chaque employé, nous considé-rons que la valeur nominale p despénalités et des gains rattachés à sespréférences est choisie en corrélationavec le coût correspondant à sa pré-sence au travail durant une unité detemps. Le tableau 4 illustre les diffé-

rents coefficients de corrélation choi-sis pour chaque simulation. Ainsi,pour chacune des six simulations,nous considérons un coefficient decorrélation C, la valeur nominale pest calculée à travers la formule :p = C x coût unitaire de présence. Avecun coefficient égal à 0des préférencesdans l’ordonnancement.

Tableau 4 : coefficients de corrélation des valeurs de pénalitéset de gains liés aux préférences / aux coûts de présence d’employés

simulation simulation simulation simulation simulation simulation1 2 3 4 5 6

Coefficient de corrélation C 0% 6,5% 20% 50% 80% 100%

Par ailleurs, la distribution de lavaleur nominale p entre les trois caté-gories des préférences est effectuéeselon le schéma suivant : • Préférence des activités : une péna-lité de p/3 si l’employé est affecté àune des activités non désirées ; 0 s’ilest indifférent ; et un gain de - p/3s’il est affecté à une des activités pré-férées. • Préférence pour la durée du quartde travail : une pénalité de p/3 pourchaque période de planification deplus ou de moins par rapport à ladurée souhaitée par l’employé.• Préférence pour le transfert inter-postes : une pénalité de p/3 pour cha-que transfert de plus ou de moins parrapport au nombre souhaité parl’employé.

Pour la mise en œuvre des simula-tions, nous avons choisi des paramè-tres de production identique à ceuxqui sont utilisés dans la section pré-cédente avec le modèle 5 comme stra-tégie de flexibilité. En plus, nousavons utilisé l’approche à based’agents comme méthode de résolu-tion du problème d’ordonnancementdu personnel.Dans la comparaison des résultats dessimulations, nous nous intéressons àdeux mesures de performance : • Le coût net de la solution : désignele coût total de présence desemployés. Il ne tient pas compte despénalités ou des gains rattachés auxpréférences.• Les préférences des employés : vuque les simulations ont des valeurs

Page 64: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 63

nominales distinctes pour les pénali-tés et les gains rattachés aux préfé-rences, nous présentons les résultatsdes trois dimensions de préférencesramenés à base unitaire de coût (i.e.appliquer à la solution de chaquesimulation une pénalité de 1 $ et ungain de -1 $ pour le calcul des préfé-rences), et ce, afin de simplifierl’interprétation et la comparaison desrésultats sur une base commune àtoutes les simulations.Pour chacune de ces deux mesures,nous nous intéressons à l’écart relatifpar rapport à la valeur obtenue dansle cas de la simulation #1, dont lesrésultats sont considérés commeétant la base comparative pour lescinq autres simulations qui tiennentcompte des préférences desemployés. Le tableau 5 présente unesynthèse des résultats de simulationobtenus. Nous observons que l’augmentationdu poids relatif des préférencesaffecte à une moindre échelle le coûtnet de la solution en comparaisonavec son impact sur les mesures depréférences des employés. En effet,en comparant les simulations 1 et 6,on constate qu’une augmentation de100 % du poids des préférences dansla fonction objective donne lieu d’unepart, à une augmentation d’environ0.96 % du coût net de la solutiond’ordonnancement, et d’autre part àune amélioration dans l’affectationdes activités et des durées de quartde travail préférées par les employésdont la valeur est respectivementégale à 470 % et 10%.

De plus, tenant compte du fait qu’unemployé est affecté au maximum à32-périodes de travail par quart (unquart de 9-heures = 32-périodes de15 min de travail + 4-périodes de 15min de pauses), un gain moyen de 25$/quart dû aux activités préférées estéquivalent à une affectation moyennede l’employé durant 83% = 25/32 deson temps de travail aux activitésqu’il préfère le plus. On note aussi,qu’une légère augmentation du poidsde préférences à 6.5 % permet d’ac-croître exponentiellement la satisfac-tion des employés en ce qui concerneles activités qui leur sont allouées(environ 448 % d’amélioration). Au-delà d’un poids égal à 20 %, le tauxd’amélioration de cette préférence esttrès peu significatif. Par ailleurs, concernant la pénalitémoyenne liée au nombre de transfertinter-postes des employés, nous n’ob-servons aucune variation en fonctiondu changement du poids de cette pré-férence dans la fonction objective.Une explication possible de ce phéno-mène tient au caractère rigide de lacontrainte utilisée pour modéliserl’état de transfert des employés. Eneffet, un transfert d’un employé entredeux postes de travail ne peut êtreconstaté que si le plan de productionimpose une telle mesure. Lescontraintes liées à cet aspect ne per-mettent pas de créer un état artificielde déplacement des employés unique-ment pour satisfaire les préférencesde l’employé.

Page 65: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT64

4. Conclusion

Dans cette partie de notre recherche,nous nous sommes intéressés à l’im-pact de la flexibilité dans l’aménage-ment du temps de travail sur la solu-tion d’ordonnancement du personnel.Les résultats de simulation que nousavons élaborés ont démontré que laflexibilité peut conduire à une réduc-tion du coût d’allocation du person-nel. Suivant la stratégie adoptée, laréduction varie de -0.9 à -2.6 % encomparaison avec un modèle conven-tionnel de quart de travail.Nous avons également cherché àconnaître l’impact de la prise encompte des préférences sur le coûtnet d’ordonnancement. L’analyse desrésultats de simulations montre

qu’une amélioration de la satisfactiondes employés de 448 % au sujet desactivités allouées et de 1 % au sujetde la durée du quart de travail (simu-lation 2) augmente le coût d’ordon-nancement d’environ 0.14 %. Alorsqu’une amélioration de 470 % et de10 % pour les mêmes préférencesaugmente le coût d’environ 0,96 %.De cet ensemble de résultats, onconstate que les gains liés à l’implan-tation de la stratégie de flexibilitépermettraient de compenser les coûtsrattaches à la prise en considérationdes préférences des employés dans leprocessus d’ordonnancement. Ainsi,la combinaison de ces deux dimen-sions de gestion du personnel permetde répondre le mieux possible auxintérêts de l’employeur et de l’em-ployé. En effet, d’un côté, grâce à la

Tableau 5 : résultats des simulations de l’impact des préférencessur les résultats d’ordonnancement

Pénalité & gainmoyen/employé/préférence/quart de travail

Activités Durée du Transfert Coefficient de Fonction Coût Var. préférées quart inter-postes

corrélation objectif ($) net ($) Coût netPénalité/ Var. Pénalité/ Var. Pénalité/ Var.

gain % gain % gain %

simulation 1 0% 1 502 845 1 502 845 - -4,4 $ - 5,48 $ - 2 $ -

simulation 2 6,5% 1 462 620 1 505 016 0,14 % -24 $ 448 5,43 $ -1 2 $ 0

simulation 3 20% 1 370 415 1 506 308 0,23 % -24,5 $ 461 5,43 $ -1 2 $ 0

simulation 4 50% 1 166 042 1 509 816 0,46 % -25 $ 470 5,20 $ -5 2 $ 0

simulation 5 80% 945 510 1 511 413 0,57 % -25 $ 470 5,07 $ -8 2 $ 0

simulation 6 100% 812 243 1 517 295 0,96 % -25 $ 470 4,95 $ -10 2 $ 0

Page 66: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 65

flexibilité, l’entreprise gagne en réac-tivité et en dynamique afin de s’adap-ter et de faire face aux aléas de la pro-duction et aux fluctuations du mar-ché, et d’un autre côté, les employésseront plus satisfaits de leurs condi-tions de travail ■

Bibliographie

• Goldman, S. L., Nagel, R. N., &Preiss,

K. (1995).Agile competitors and virtualorganizations: strategies for enriching thecustomer (Vol. 8). New York: Van Nostrand

Reinhold.

• Hermel,P. (1986), Stratégie, changementet ressources humaines : quelles relations?.,Centre d’étude et de recherche sur les

organisations et la gestion, Aix en

Provence.

• Hopp, W. J., & OYEN, M. P. (2004). Agile

workforce evaluation: a framework for

cross-training and coordination. IieTransactions, 36(10), 919-940.

• Kula, U., Duenyas, I., &Iravani, S. M.

(2004). Estimating job waiting times in

production systems with cross-trained

setup crews.IIE Transactions, 36(10), 999-

1010.

• Jordan, W. C., Inman, R. R.,

&Blumenfeld, D. E. (2004).Chained cross-

training of workers for robust perfor-

mance.IIE Transactions, 36(10), 953-967.

• Wright, P. M., & McMahan, G. C.

(1992).Theoretical perspectives for stra-

tegic human resource management.

Journal of management, 18(2), 295-320.

• Cazal, Didier et Anne Dietrich (2003),

Compétences et savoirs : entre GRH et

stratégie ?, Les Cahiers de la recherche,

CLAREE, UPRESA, CNRS 8020.

• Bayad, M., Arcand, G., Arcand, M., &

ALLANI-SOLTAN, N. (2004).Gestion stra-

tégique des ressources humaines:

Fondements et modèles. Gestion, 74, 93.

• Rivard, P. (2002). La gestion de la forma-tion en entreprise: pour préserver et accroîtrele capital compétence de votre organisation.

Presses de l’Université du Québec.

• Vairaktarakis, G., & Winch, J. K.

(1999).Worker cross-training in paced

assembly lines.Manufacturing & ServiceOperations Management, 1(2), 112-131.

• Bokhorst, J. A., Slomp, J., &Molleman,

E. (2004).Development and evaluation of

cross-training policies for manufacturing

teams.Iie Transactions, 36(10), 969-984.

• Bard, J. F. (2004). Staff scheduling in

high volume service facilities with down-

grading. Iie Transactions, 36(10), 985-997.

• Sumukadas, N., & Sawhney, R.

(2004).Workforce agility through

employee involvement.IIE Transactions,

36(10), 1011-1021.

• Jordan, W. C., Inman, R. R.,

&Blumenfeld, D. E. (2004).Chained cross-

training of workers for robust perfor-

mance.IIE Transactions, 36(10), 953-967.

• Alfares, H. K. (2004). Survey, categori-

zation, and comparison of recent tour

scheduling literature.Annals of OperationsResearch, 127(1-4), 145-175.

• Michael, R. G., & Johnson, D. S. (1979).

Computers and Intractability: A guide to

the theory of NP-completeness. WHFreeman & Co., San Francisco.

• Jennings, N. R., Corera, J. M.,

&Laresgoiti, I. (1995, June). Developing

Industrial Multi-Agent Systems. In

ICMAS (pp. 423-430).

• Jennings, N., & Wooldridge, M. J.

(Eds.). (1998). Agent technology: founda-tions, applications, and markets. Springer.

Page 67: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT66

• Jacobs, L. W., &Bechtold, S. E. (1993).

Labor utilization effects of labor schedu-

ling flexibility alternatives in a tour sche-

duling environment. Decision Sciences,

24(1), 148-166.

• Bailey, J., & Field, J. (1985).Personnel

scheduling with flexshift models.Journalof Operations Management, 5(3), 327-338.

• Thompson, G. M. (1995). Improved

implicit optimal modeling of the labor

shift scheduling problem.ManagementScience, 41(4), 595-607.

• Brusco, M. J., & Jacobs, L. W. (1993).A

simulated annealing approach to the

solution of flexible labour scheduling pro-

blems.Journal of the Operational ResearchSociety, 1191-1200.

• Rekik, M., Cordeau, J. F., & Soumis, F.

(2004). Using benders decomposition to

implicitly model tour scheduling.

• Panzarasa, P., & Jennings, N. R. (2001).

The organisation of sociality: a manifesto

for a new science of multi-agent systems.

• Sabar, M., Montreuil, B., &Frayret, J. M.(2008). Competency and preference basedpersonnel scheduling in large assembly lines.International Journal of Computer

Integrated Manufacturing, 21(4), 468-

479.

• Sabar, M., Montreuil, B., &Frayret, J. M.

(2009). A multi-agent-based approach forpersonnel scheduling in assembly centers.Engineering Applications of Artificial

Intelligence, 22(7), 1080-1088.

• Sabar, M., Montreuil, B., &Frayret, J. M.

(2012).An agent-based algorithm for person-nel shift-scheduling and rescheduling in flexi-ble assembly lines.Journal of Intelligent

Manufacturing, 23(6), 2623-2634.

• Bailey, J., & Field, J. (1985).Personnel

scheduling with flexshift models.Journalof Operations Management, 5(3), 327-338.

Page 68: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 67

1. Introduction

The social entrepreneurship recentlyattracts more and more attentionfrom researchers and policy makers.This type of entrepreneurship con-tains innovative and risky activities.The sustainability of social entrepre-neurship is an issue that constantlychallenges researchers. For this rea-son, microfinance represents a finan-

cial innovation whose objective is todevelop a win-win situation thatallows high-risk individuals toreceive funding through microfi-nance institutions (MFIs), whoseprofitability is unquestioned (Yunuset al., 2012).Microfinance thus provides a solu-tion to financial exclusion and allowsfor the economic and financial inclu-sion” of disadvantaged populations

Microfinance as socialentrepreneurship in SouthernMorocco

Abstract. This paper aims to evaluate microfinance institutions in the contextof social entrepreneurship. Based on the European approach to social entrepre-neurship as well as the BOP 2.0 social business protocol, we propose a concep-tual model to analyze the activities of microfinance foundations. Our modelcontains two main components: the financing process as perceived by benefi-ciaries (individuals or enterprises) and the impact of microfinance on the eco-nomic and social situations of beneficiaries. We verified our conceptual modelthrough the case study method. Using face-to-face in-depth interviews, we stu-died three cases in which microfinance was provided by the El Karama founda-tion in southern Morocco. We observed a significant impact of microfinance onthe socio-economic situations of the beneficiaries, particularly among women.The foundation provides microcredit to disadvantaged people and uses an inno-vative method to decrease associated risks. We also noted that voluntary socialcapital initiations are absent in the activities of microfinance institutions.

Keyword. social entrepreneurship, microfinance, social capital, microcredit

HégerGABTENIAssociate Professor ESGManagement [email protected]

Adil BAMIAssociate ProfessorISCAE [email protected]

Ghasem SHIRIPhD, Post doctoralResearcherInstitut Polytechnique- La Salle [email protected]

Page 69: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT68

through entrepreneurial activities(Boye et al., 2009). These activitiesgenerate income that improves theliving conditions and access to prop-erty of beneficiaries (Anderson et al.,2002). Women are the primary bene-ficiaries of microfinance; this leads todeclines in fertility rates, especiallyin countries where the rate is veryhigh, which subsequently translatesinto improvements in the living con-ditions of children (Murali, 2006).However, MFIs apply interest ratesthat are fairly correlated with thesubstantial risk represented by thesepopulations (Schreiner, 2002). Somestudies have shown that this barrieris not discouraging. This can beexplained by the situation before theintroduction of microfinance. Thesepopulations have been deprived ofservices provided by the conventionalfinancial system (Morduch, 2000).High interest rates are also attenuat-ed by grants to MFIs, which allowthem to provide loans with subsi-dized interest rates (Hermes andLensink, 2007).The aim of our research is to analyzethe extent to which microfinancecould be considered to be a form ofsocial entrepreneurship. To do this,we study microfinance’s economic,social and cultural impacts on benefi-ciaries. In the section 2, we developthe conceptual framework of ourresearch. Section 3 will address ouremployed methodology, which specif-ically involves the use of case studies.Section 4 is devoted to the case analy-sis investigated by our study. Finally,we discuss our results in the fifthpart of this study.

2. Microfinance and SocialEntrepreneurship : a conceptual Framework

2.1 Social Entrepreneurshipand Social BusinessSocial entrepreneurship can bedefined as the implementation ofinnovative actions to propose one ormore solutions to social problemsand social issues. Many researchers(Fayolle and Omrane, 2010; Dees,1998; Mair and Marti, 2006) agree innoting the lack of consensus on theconceptual definition of social entre-preneurship. Johnson (2000) statesthat the emergence and developmentof social entrepreneurship can beparticularly explained by the innova-tions it represents within the resolu-tion of social problems and socialissues. Social entrepreneurship is aninnovation that shows a form ofmicrofinance subsidiarity on publicaction (Guerin and Servet, 2005).This innovation is part of the deregu-latory vision of the state.Based on the social entrepreneurshipdefinitions formulated by Zahra(2008), Martin and Osberg (2007),and Mort et al. (2002), Fayolle andOmrane (2010) specify that socialentrepreneurship refers to the exis-tence of two central elements, whichare the discovery and exploitation ofthe business opportunities generatedby the emergence of new problemswithout support from traditionalorganizations as well as the creationof social value intended for disadvan-taged and marginalized people.

Page 70: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 69

Social entrepreneurship can beunderstood as social non-profitorganizations or social for-profitorganizations. The first view consid-ers a social entrepreneurial ventureto be a non-governmental or publicorganization whose objectives are tosolve social problems based on publicfinancial resources or donations.Thus, profit is not the priority of thisorganizational form and the organi-zational model is based on volun-tarism (Weerawardena and SullivanMort, 2006, Austin et al., 2006).The second version, which encom-passes “social companies”, postulatesthat social enterprises are, first andforemost, economic entities and, assuch, should preserve this essentialfeature via the search for profitability(Yunus et al., 2012). These companieshave furthermore a social and socie-tal vocation. Peredo and McLean(2006) cite the example of theBangladesh Rural AdvancementCommittee (BRAC), which is a compa-ny in the economic sense in that it gen-erates profits, but it is also involved inprojects to support poor people inrural areas. MFIs can potentially takethe form of for-profit or non-profitorganizations (Mayoux, 2001).In this study, we chose to considersocial entrepreneurship to involvefor-profit companies that meet thesocial enterprise criteria developedby the Emergence of SocialEnterprise network (EMES). EMEShas thus tried to build an ideal typeof social enterprise according to dif-ferent economic, social and gover-nance criteria (Defourny and

Nyssens, 2011). EMES specifies thatsocial enterprises have to makeinvestment decisions like traditionalcompanies and should be exposed toorganizational risk. In addition,social enterprises are responsible forgenerating the financial resourcesnecessary for their survival and thusfor social actions.In addition to the economic criteria,to be called social, companies mustserve society, provide “service to thecommunity” and integrate the princi-ples of social responsibility into theiractions. Finally, the EMES networkproposes that social enterprises mustmaintain their independence andremain under the sole control of theirfounding members to ensure thattheir social objectives are respected.Social enterprises must remain inde-pendent and not be subject to poten-tial government constraints.

2.2. Microfinance understood as aform of social entrepreneurshipMicrofinance, whose appearance anddevelopment in its most modern formtook place in the 70s, has the mainpurpose of encouraging the develop-ment of solidarity-based, social andsustainable economies. Indeed,microfinance, especially throughmicrocredit, has the main objective offinancing activities that generatecash flows and, a fortiori, participat-ing in the growth of economies par-ticularly in developing countries.This type of finance is therefore asso-ciated with notions of ethics, sociallyresponsible investment and sustain-able development.

REVUE RMSM N°4 DEF 22/03/15 11:26 Page 69

Page 71: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT70

The economic and social impacts ofmicrofinance on beneficiaries are atthe heart of microfinance research.Researchers who investigated thissubject show that microfinanceincreases the income and the revenuediversity of beneficiaries. Similarly,the revenues of beneficiaries arebecoming more regular because ofmicrofinance. Researchers also notethe positive impact of microfinanceon the knowledge and skills of bene-ficiaries, the living standards andproperty ownership (Anderson et al.,2002; Murali, 2006).The most extensively addressed con-cept in the microfinance literature issocial capital. It is defined byFukuyama (2002) as “the competenceof individuals to work together andshare common values ??and stan-dards to achieve common goals.” Iteo(2003) criticizes the conceptual het-erogeneity of social capital in themicrofinance literature and the lackof consensus on the definition of thisconcept by the research community. Mayoux (2001) proposes a multidi-mensional definition of social capitalto study the impact of microfinance.In that way, he studies social capitalin horizontal, vertical and multi-gen-eral or macro-level dimensions.Horizontal relationships reflect theability of individuals from the samesocial class to collaborate. Verticalrelationships reflect the ability ofindividuals from different socialclasses to help each other and shareresources. Macro-level relationshipsinclude standards, regulations andassociations to facilitate horizontaland vertical linkages. Anderson et al.

(2002) consider social capital to rep-resent the use of shared resourcepools. Quinonis and Seibel (2000)found social capital to be a vehicle forsocial cohesion. Regardless of thedefinition of social capital, mostresearchers have found a positiverelationship between microfinanceand the formation of social capital.This relationship can be explained byinnovative financing methods suchas group lending programs. Themajority of loans granted by MFIsrepresent joint credit insofar as cred-it that is given to a group of people.In this way each member of groupprovide guarantees vis-à-vis othermembers (Hermes and Lensink,2007). This system has facilitatedaccess to financing for those who hadpreviously been excluded, such aswomen and the poor (Cull et al.,2007).Boye et al. (2009) state that financialexclusion is one of the factors thatexplains the perpetuation of povertyand serves as a barrier to dynamicentrepreneurship in developingcountries. In this context, and todefine microfinance, the financialinclusion concept has been developed(as opposed to the previously devel-oped concept of financial exclusion),and its main objective is to enabledisadvantaged people to accessfinancing resources, which are con-sidered to be entrepreneurial levers.Some research highlights the posi-tive impact of microfinance on socialcapital but also the positive impact ofsocial capital on access to microcred-it and the success of the entrepre-neurial projects of beneficiaries

Page 72: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 71

(Schreiner, 2002; Cassar et al., 2007;Feigenberg et al., 2010; Gomez andSantor, 2001).

2.3. Microfinance and SocialEntrepreneurship: a proposed con-ceptual modelThe model we have chosen is part ofa lucrative vision of social entrepre-neurship. Indeed, economic prof-itability is not a minor imperative. Weuse the BOP protocol to develop ourconceptual model. Simanis and Hart(2008) state that it would be muchmore relevant to foster collaborationamong different social businessactors, business enterprises and com-munities in particular, to allow forthe emergence of new business mod-els that are aligned with the intrinsiccharacteristics of the targeted popu-lations.Simanis and Hart define a BOP busi-ness as a business “that creates sus-tainable value for the community,while providing the foundation ofinnovation and growth in the longterm for the company.” The BOP pro-tocol considers beneficiaries to bebusiness partners and allows socialenterprises to develop creativity,combine skills and build shared com-mitment (Simanis and Hart, 2008).We also consider the different varia-bles studied in previous research toexamine the impact of microfinanceon revenue of beneficiaries(Anderson et al., 2002; Ashe, 2000)and on the empowerment of vulnera-ble populations (Mayoux, 2001;

Murali, 2006). We also study theimpact of microfinance on the crea-tion of social capital among beneficia-ries. This impact is widely studied inthe microfinance literature(Anderson and al., 2002; Quinonisand Seibel, 2000; Mayoux, 2001;Ashe, 2000). We consider horizontalrelationships to be indicators ofsocial capital; this indicator repre-sents relationships in which actorsfrom same social class share resour-ces and knowledge to succeed intheir entrepreneurial activities(Mayoux, 2001). To achieve the objective of financialinclusion (Boyé et al., 2009), MFIsshould facilitate access to creditamong poor populations. This aspectof microfinance is present in themajority of research on this subject.This is why, in our conceptual model,we are interested in the procedure foraccessing microfinance. More specifi-cally, the general perceptions of ben-eficiaries, the conditions and ease ofaccess to funding, support for benefi-ciaries, and additional resourcesmade ??available to beneficiaries areincluded in the model. As previouslymentioned, microfinance should havesome impact on beneficiaries to beconsidered a type of social entrepre-neurship. In our conceptual model,we are interested in socio-economicimpact, the creation of social capitaland the impact on the beneficiaries’perspectives of future. The differentdimensions of our model are present-ed in figure 1.

Page 73: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT72

3. Methodology ofResearch

This research is based on the casestudy methodology. Given the magni-tude and complexity of the informa-tion necessary to verify the previous-ly developed conceptual model andgiven the educational level of microfi-nance beneficiaries, we conducteddata collection in two stages. We ini-tially conducted seven preliminaryinterviews, whose objectives were tocategorize the beneficiaries accord-ing to three criteria: family situation,experience with microfinance andwillingness to share information. To study the model, we needed infor-mation on the perceptions of micro-credit of the beneficiaries and theimpact of microcredit on their eco-nomic, social and cultural circum-stances. Recipients must have had at

least one full microcredit experienceto provide reliable answers in thisregard. Single beneficiaries withoutfamily attachments were eliminatedfrom our study because the economicand social impact on them is less per-ceptible. In addition, the willingnessto share information and the sensi-tive nature of certain information(income, living conditions, etc.) was adetermining factor in the collectionof information. From these criteria,we selected three cases with whom toconduct our interviews. In-depthinterview was used for data collectionin this research. Semi-structuredinterviews in Arabic and Berber wereconducted by a researcher aware ofthe economic and cultural situationin the region.

3.1. Overview of CasesRespondents in this study are benefi-ciaries of microloans granted by theEl Karama – MC Foundation. The

Figure 1: Microfinance as social entrepreneurship

Funding process

• General perception of MFI by beneficiaries

• Financing Promotion by MFI

• Easy access to Microcredit

• Support during the funding

• Additional resources and provision of capital

Impacts

• Economic impact

• Social and Cultural impact

• Social Capital creation

• Impact on Future Prospects

Page 74: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 73

Foundation’s primary mission is theeconomic integration of the most vul-nerable populations and it worksmainly in underdeveloped regions inMorocco. The interviews were con-ducted with three beneficiaries: twofemale beneficiaries aged 64 and 37years, respectively, and a 40-year-oldmale beneficiary. The three intervie-wees are all married and live withinlarge families constituted by five ormore people. The male beneficiary isemployed, lives in a rural area andhas a primary school level of educa-tion. Both female beneficiaries live inurban areas and are illiterate. Bothwomen and their spouses own theirhomes, whereas the man is living forfree on the family farm. Among the children of the three ben-eficiaries, the highest attained educa-tion is at the university level, specifi-cally, the second academic year. Theinterviewed beneficiaries can beregarded as regular MFI clients andare excluded from the traditionalbanking system to the extent thatthey do not meet the eligibility crite-ria for bank financing.

4. Case analyses

The purpose of this section is to ana-lyze the three investigated cases. Theanalyses are based on the conceptualmodel proposed in the first section ofthis article. We first analyze the ele-ments related to the perceptions ofMFI activities of the beneficiaries, fol-lowed by the impact of microfinanceon their lives and circumstances.

4.1. Case Study 1Case 1 concerns a 64-year-old womanwho is married and is the mother ofseven children, including one adopt-ed daughter. Her activity, which isfinanced through microcredit, is acommercial and unskilled business.The products she offers are diverseand can be classified as localMoroccan products (e.g., almonds,lentils, honey, olives, and olive oil).She has repeatedly received micro-credit; she has received her last fourcredits from the El Karama microcre-dit Foundation.

4.1.1. Access to microfinanceThe beneficiary notes the presence ofseveral microcredit offers in theregion and considers this to allowher to choose the offer that is themost adequate for her needs. Forexample, she decided to change herMFI when the repayment conditionsof her first MFI changed from month-ly repayments to biweekly repay-ments. These terms were no longerrelevant to the reality of her busi-ness. Case 1 considers the IMF to bea major player in the local economy.She is satisfied with the serviceoffered by the MFI through her rela-tionships with her interlocutor. Case1 explains that microcredit hasallowed her to undertake finishingwork in her apartment as well as in asecond apartment that she nowrents. The collected rent constitutesthe main source of income for case 1.The MFI communicates throughinformal networks and awarenesscampaigns, notably through the dis-

Page 75: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT74

tribution of prospectuses in schools.In fact, case 1 was approachedthrough the school of her adopteddaughter. The beneficiary considersthat “trust is an important element ofthe IMF - beneficiary relationshipinsofar as it is easy for a customer toobtain new loans when previous oneswere settled in good conditions”.Visits conducted by MFI staff to theapplicant’s home seem to be a deter-mining factor in granting creditbecause the home is considered to bea guarantee by the recipient.Administrative costs are approxi-mately 420 dirhams (approximately49$); these costs are directly dis-counted from the credit and are con-sidered to be reasonable by cus-tomers.It is important to note that microcre-dit represents joint and solidary cred-it in the sense that it is granted to agroup of 2 to 7 people; each memberof the group serves as a guarantor forthe other members of the group. Risksharing between group membersfacilitates access to credit and repre-sents a second serious guarantee forthe MFI after the home visit.The beneficiary specifies that MFIsare mainly funders. Logistical sup-port is not provided after the alloca-tion of funding and training anddevelopment activities are also notconducted. The best perceived accom-paniment is that concerning theimplementation of the financing andits management in the strict sense.Case 1 clearly illustrates the commer-cial relationship that binds her to theMFI and states that “each one feedsthe other.”

4.1.2. Impact of Microfinance Case 1 experienced a significantimprovement in her economic situa-tion. In addition, microcredit hasfacilitated access to an economicactivity to the extent that the respon-dent was previously a housewife. Shealso specifies that she does notintend to turn to the traditionalbanking system because of theimportance of collateral. The benefi-ciary states that her overall house-hold income has tripled compared tobefore obtaining the first microloan:“my income is now rather higherthan the minimum wage in Morocco”.The savings rate of the beneficiaryhas become significant (greater than10%). This has impacted the livingstandards and consumer habits of thefamily. In fact, the recipient is able toafford private schooling for herdaughter. She declares that she pur-chased capital goods (refrigerator,color TV, etc.) with the proceeds ofher activity.Her living conditions have alsoimproved. The beneficiary does notnote any impact of microfinance onher access to medical care becausethe family also benefits from the wel-fare of the retired father.Microfinance seems to be generatingsocial capital among beneficiaries.Indeed, case 1 believes that she hasbecome an influential member of hercommunity. MF has generated finan-cial autonomy but also decision inde-pendence. In addition, a network ofMC beneficiaries seems to have beencreated and has a double impact: eco-nomic impact because it allows recip-ients to find business partners (cus-

Page 76: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 75

tomers and suppliers) and a socialimpact through the creation of socialcapital by learning from the experi-ences of others. To succeed, the beneficiary recom-mends being able “understand the dif-ference between turnover and profit”and “to save or reinvest, but alsoensure loans are repaid on time”. Therecipient’s perception of the future hasimproved, and she feels that she is anactor in her environment and home.She has confidence in the future andwants to maintain her business,although she does not wish to developit further due to her age.

4.2. Case Study 2Case 2 concerns a woman who is 37years old and married with 3 chil-dren. She lives in an urban area andis the owner of an old property. She isan artisan baker and her businessinvolves making cakes at home onbehalf of clients who she recruitsthrough “word of mouth”. She also hasa sewing machine that allows her towork as a seamstress when her bak-ing activities decline. Case 2 hasobtained a microloan for the secondtime.

4.2.1. Access to microfinance The recipient became aware of thepresence of MFIs through friendsand she does not seem to be aware ofthe potential communication andpromotional approaches used byMFIs. She confirms the presence ofseveral offers in the region and rec-ognizes that microfinance allowswomen to become active members ofsociety. She has also tried to intro-

duce her daughter to microcredit;however, because she is young, sin-gle, and has no resources, her profilewas too risky for the MFI and shecould therefore not benefit frommicrocredit. Generally, case 2 has avery positive perception of microfi-nance. Dissuasive guarantees in con-ventional finance are much lessrestrictive in microfinance but existin other forms (holding certainassets, home stability).MFI offers are standardized andfocus on the implementation of fund-ing. Offer conditions cannot be nego-tiated. However, the operating mech-anisms are simple and correspond tothe statement of the concept. Contactbetween the beneficiary and the MFImainly occurs through the telephone,with the beneficiary going to theagency when necessary. She believesthat people who need funding mustdevelop a monitoring activity thatwill allow them to find “the IMF solu-tion.” The beneficiary believes that“MFIs and their staff should be mobi-lized to provide answers to customerswho initiated contact”.The formalization of demand formicrocredit requires the deposit of afile containing identity documentsand the payment of processing feesand insurance. This procedure doesnot seem to affect the beneficiarybeyond the financial aspect of theprocess. The application fee can bediscounted from the credit. Thesesteps are to be taken only once, andno documentation is required for thesecond loan.The relationship between the cus-tomer on one side and the MFI on the

Page 77: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT76

other side denotes a quality of servicedeemed “appropriate, cordial andrespectful” by the recipient. However,no support for the beneficiary fromthe MFI in the implementation of theproject, even for studying the feasi-bility of project, has been found. Therelationship between the two part-ners is revealed to be purely finan-cial: the amount of credit and repay-ments are the main concerns of bothparties. Case 2 does not have anyconcerns or misunderstandingsregarding these elements. Shebelieves that the answers provided byMFI staff are convincing.

4.2.2. Impact of microfinanceThe economic impact is obviously feltby the beneficiary. Indeed, she statesthat she is able to earn a regularincome due to microfinance.Although she already had a savingsaccount for several years, the benefi-ciary specifies that “microcredit hashelped her to significantly increaseher savings level to 30% of her rev-enues”. In terms of socio-culturalimpact, case 2 believes that microfi-nance has a positive impact on theschooling conditions of children(e.g., individual courses, internetaccess, clothing, and school sup-plies). In terms of outlook, case 2 tellsus that she wants to refurbish herworking tools, and she also plans tocontinue to make expenditures aimedat enabling her children to gainmobility and independence. She con-siders that the main contribution ofmicrofinance “is essentially financialwithout forgetting the independenceand autonomy it gives to women”. In

this case, she regards the future as“very positively and correlated withthe continuity of microfinance”.

4.3. Case Study 3Case 3 involves a 40-year-old manwho is married, has a child and livesin a peri-urban area. He lives in hisparental home, which thus consistsof five people. He is a worker andtherefore engages in a salaried activ-ity. Microfinance enables him tofinance agricultural activities (farm-ing and the production of olive oiland cereals).

4.3.1. Access to microfinanceThe beneficiary discovered MFIsthrough relatives, and he finds thatthe concept of microfinance bringsreal added value. According to him,the most obvious differentiation,compared to the conventional finan-cial system, is the lack of requiredguarantees. He believes that microfi-nance “is based on a human relation-ship whose main engine is trust”. Thebeneficiary has easy access to theMFI and its representatives becauseof proximity. The only difficultiesexpressed by the beneficiary relate tothe lack of flexibility of MFIs, whichmay interfere with his salaried activ-ity (The recipient works as a mechan-ic for an SME and his working dayends at 14:00). He states that the con-ditions of the first loan are muchmore stringent than those for subse-quent loans. He believes that supportshould be provided throughout theprocess, from financing to the imple-mentation of the project, which is notthe case today. This is accentuated by

Page 78: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 77

the fact that there is a high turnover ofstaff working within the MFI, which islikely to destabilize a previously estab-lished relationship. He states thatpremises of MFIs are informal meetingplaces where customer-supplier rela-tionships are created.Case 3 corroborates the statements ofcases 1 and 2 on the factors related tothe importance of MFIs; he confirmsthe positive perception of MFI benefici-aries. He also believes that there is nopossibility to negotiate loan conditionsbut that this is an understandable con-dition. In fact, the costs associatedwith the creation of the file are quali-fied by the recipient as negligible.

4.3.2. Impact of microfinanceThe economic impact is considered tobe very positive by the recipient andcan be summarized by the seasonalagricultural incomes that supple-ment his wage income. On average,case 3 considers that he savesapproximately 25% of his agricultur-al income. These savings allows himto invest in new agricultural activi-ties. Case 3 has held a bank accountsince obtaining his first microloan.Household consumption hasincreased and relates mainly tohousehold appliances. The benefici-ary specifies that he now has moreleisure that he spends more time withhis family. Socio-cultural aspects arenot present in the discourse, whereaseconomic and financial aspects seemto dominate. Through his observa-tions, Case 3 confirms the impact ofmicrofinance on the place of womenin society insofar as he finds that themajority of beneficiaries are women.The beneficiary stated his ambition

to develop his agricultural activity atthe regional level; he explains thatthis will be possible when his finan-cial situation improves significantly.He hopes to achieve this through sav-ings. Case 3 states that financial fac-tors are certainly important, but thenetwork of customers and suppliersdeveloped through informal meet-ings among MFIs should not be over-looked. Case 3 believes that “micro-credit is a long-term solution” and hecounts on his activities to provide abetter future for his children.

5. Discussion andConclusion

The question raised by this studyconcerns the extent to which microfi-nance might be called social entre-preneurship. Thus, Fayolle andOmrane (2010) explain the two fun-damental characteristics inherent tosocial entrepreneurship: the discov-ery and exploitation of businessopportunities related to the emer-gence of new problems that are notaddressed by traditional organiza-tions and the creation of social andsocietal value. In addition, the discov-ery and creation of opportunitiesshould be innovative and must con-stitute risk taking (Peredo andMcLean, 2006; Weerawardena andSullivan Mort, 2006).Microfinance itself is often regardedas an innovative way to create socialvalue. Social and societal value cre-ation can take many forms.Improvements in educational levels,the health status of targeted popula-

Page 79: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

<<< REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT78

tions and the economic circum-stances at the local level can beviewed to create social value (Dees,1993). Our study shows that micro-credit can generate social value.Microfinance positively impacts thebeneficiaries of loans. It allows themto diversify their sources of income.This type of financing facilitates theeducation of children and improvesthe lives of women. We can thereforeconfirm the results of previousresearch on the socio-economicimpact of microfinance (see Andersonet al., 2002 ; Ashe, 2000 ; Mayoux,2001; Murali, 2006).Like Morduch (2000), we observe theease with which high interest ratesare accepted by microfinance benefi-ciaries. Indeed, exclusion from theconventional financial system as wellas easy access to microfinance makeshigh interest rates reasonable forbeneficiaries. In addition, MFIs useinnovative procedures to providefunding. Solidarity group lending isan innovation that helps MFIs over-come risks. It allows beneficiaries toaccess funding more easily but alsoto create social capital (Hermes andLensink, 2007; Mayoux 2001; andSeibel Quinonis, 2000). Our casestudy shows that solidarity grouplending can facilitate the financialaccess of disadvantaged populations.It also allows beneficiaries to createnetworks to develop their businesses.Despite the creation of social capitaland the major socio-economic impactof microfinance on the lives of benefi-ciaries, we observe a lack of supportof beneficiaries and an unwillingnessto create social capital by the IMF.

This can be explained by the lucrativenature of the IMF being studied.Non-profit microfinance institutionsare often interested in coaching ben-eficiaries and in creating social capi-tal (Mayoux, 2001). By creating addi-tional costs, these activities can hin-der the sustainability of profits andeconomic entities ■

Bibliography

• Anderson, L.C., Locker, L. and Nugent,R. (2002). Microcredit, social capital andcommon pool resources. WorldDevelopment, 30(1): 95–105.• Ashe, J. (2000). Microfinance in theUnited States: The working capital expe-rience ten years of lending and learning.Journal of Microfinance, 2(2): 22-60• Austin, J., Stevenson, H. and Wei-Skillern, J. (2006). Social and commercialentrepreneurship: Same, different, orboth? Entrepreneurship Theory andPractice, 30(1): 1–22. • Boye, S., Hadjenberg, J. and Poursat, C.(2009). Le guide de la microfinance:Microcrédit et épargne pour le développement,Editions d’Organisation, 2th edition. • Cassar, A., Crowley, L. and Wydick, B.(2007). The effect of social capital ongroup loan repayment: Evidence fromfield experiments. The Economic Journal,117(517): F85–F106• Cull, R., Demirguc-Kunt, A. andMorduch, J. (2007). Financial perfor-mance and outreach: A global analysis ofleading microbanks, Economic Journal,117: F107–F133.• Dees, J. G. (1998). The meaning ofsocial entrepreneurship. Comments andsuggestions contributed from the SocialEntrepreneurship Funders Working Group,6pp. http://www.stanford.edu/group/e145/cgi-bin/spring/upload/handouts/dees_SE.pdf Visited March 15, 2013• Defourny, J. and Nyssens, M. (2011).Approches européennes et américaines del’entreprise sociale, une perspective com-parative. Revue internationale de l’économie

Page 80: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

DOSSIER

REVUE MAROCAINE DES SCIENCES DE MANAGEMENT >>> 79

sociale, 319: 18-35. • Fayolle, A. and Omrane, A. (2010).L’entrepreneuriat social et le développe-ment durable : Quels modèles d’affairesdans le champ social, paper presented in19th colloque of AIMS, 1-4 June 2010, • Feigenberg, B., Field, E. M. andPande, R. (2010). Building social capitalthrough Microfinance. NBER WorkingPaper, No. 16018,http://www.nber.org/papers/w16018, visi-ted March 10, 2013• Fukuyama, F. (2002). Social capital anddevelopment: The coming agenda. SAISReview, 22(1): 23-37• Gomez, R. and Santor, E. (2001).Membership has its privileges: The effectof social capital and neighborhood cha-racteristics on the earnings ofMicrofinance borrowers. The CanadianJournal of Economics / Revue canadienned’Economique, 34(4): 943-966• Guerin, I. and Servet, J. M. (2005).L’économie solidaire entre le local et leglobal : l’exemple de la microfinance.Revue internationale de l’économie sociale,296: 83-99.• Hermes, N. and Lensink, R. (2007). Theempirics of Microfinance: What do weknow? The Economic Journal, 117(517):F1–F10.• Ito, S. (2003). Microfinance and socialcapital: Does social capital help creategood practice? Development in Practice,13(4): 322-332• Johnson, S. (2000). Literature reviewon Social entrepreneurship. Workingpaper, Canadian center for social entrepre-neurship, 16.• Mair, J. and Marti, I. (2006). Socialentrepreneurship research: A source ofexplanation, prediction and delight.Journal of World business, 41(1): 36-44.• Martin, R. L. and Osberg S. (2007).Social entrepreneurship: The case for adefinition. Stanford social innovationreview, 5(2): 28-39.• Mayoux, L. (2001). Tackling the downside: Social capital, women’s empower-ment and Micro-Finance in Cameroon.Development and Change, 32(3): 435–464• Morduch, J. (2000). The Microfinance

schism. World Development, 28(4): 617-629.• Mort, G., Weerawardena, J. andCarneige, K. (2002). Social entrepreneur-ship: Towards conceptualization andmeasurement. American marketing associa-tion conference proceedings, San Diego, 3-6August, 2002• Murali, K.S. (2006). Microfinance,social capital and natural resource mana-gement systems: Conceptual issues andempirical evidences. Int. J. AgriculturalResources Governance and Ecology, 5(4):327-337• Peredo, A. M. and McLean, M. (2006).Social entrepreneurship: A critical reviewof the concept. Journal of World Business,41(1): 56–65.• Prahaland, C. K. and Hart, S. L. (2002).The Fortune at the Bottom of thePyramid. Strategy and Business, 26: 2-14.• Quinones, Jr. B. R. and Seibel, H. D.(2000). Social capital in microfinance:Case studies in the Philippines. PolicySciences, 33(3-4): 421-433• Schreiner, M. (2002). Aspects ofoutreach: a framework for discussion ofthe social benefits of microfinance.Journal of International Development, 14(5):591- 603.• Servet, J. M. and Some, Y. D. (2011). Lamicrofinance, un outil de finance durable,in D. Saïdane, P. Grandin and C. deBoissieu (Ed.), La finance durable : Unenouvelle finance pour le XXIe siècle, LaRevue Banque Edition, pp. 125-137.• Simanis, E. and Hart, S. (2008). TheBase of the Pyramid Protocol: Toward NextGeneration BoP Strategy. (2th edition),Cornell University, Ithaca, NY.• Yunus, M., Sibieude, T. and Lesueur E.(2012). Social business et grandes entre-prises : des solutions innovantes et pro-metteuses pour vaincre la pauvreté ?Journal of Field Action Science Reports,Special Issue 4: 67-74• Zahra, S. A., Gedajlovic, E., Neubaum,D. O., and Shulman, J. M. (2009). A typo-logy of social entrepreneurs: Motives,search processes and ethical challenges.Journal of Business Venturing, 24(5),519-532.

Page 81: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école

Le Groupe ISCAE n’entend donner aucune approbation ni improbation auxopinions émises dans cette revue. Ces opinions doivent être considérées commepropres à leur auteur.

Toute reproduction sans le consentement de l’auteur ou de ses ayans droits,même partielle, de cette revue constitue une contrefaçon passible des peinesprévues par la loi sur la protection des droits d’auteur.

Page 82: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école
Page 83: EDITORIAL · 1.1. Ecoles de pensées de l’innovation Tzeng (2009) résume les écoles de pensée de l’innovation en trois types d’écoles : l’école des capacités, l’école