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DR. JOHNLITANIE DES SAINTSET BAS-CÔTÉS DES AMÉRIQUES

16 SOUL BAG_N°207

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À l’occasion de la sortie de sonnouvel album “Locked Down”, MacRebennack alias Dr. John nous a

reçus pour évoquer La Nouvelle-Orléans, ses aînés, ses pairs et cettenouvelle génération de musiciens pour lesquels il fait figure d’affectueuxgrand-père. En écho aux paroles du vieux sage insoumis et malicieux, ona aussi demandé ses impressions au producteur du disque, Dan Auerbachdes Black Keys.

Une froide journée de mars à Paris et le cadreaseptisé d’un grand hôtel discret aux abords desChamps-Élysées. Nulle vibration vaudou, nulleeffluve de gumbo ne semblent émaner des mursde la suite moderne dans laquelle on pénètre.À bien y regarder pourtant, le septuagénaireprévenant qui nous accueille, vêtu d’un costume

impeccable et coiffé d’un feutre, a des airs de root doctor.La longue canne de bois sur laquelle il prend appui, aupommeau savamment orné de décorations personnelles etde colifichets organiques (plumes, os et dent d’alligator),ressemble à un ancien sceptre : autant que le chemin àparcourir, elle indique le chemin déjà accompli. Plus qu’ausimple déplacement physique, l’accessoire semble inviterau voyage spirituel. Notre hôte s’exprime lentement, maisson regard est perçant, comme s’il sondait l’âme de sonvisiteur. On bredouille des présentations, en rappelant àson souvenir une première rencontre une quinzaine d’annéesauparavant, et on lui tend un exemplaire du magazine. Il lefeuillette avec gourmandise, apprécie la plastique de lachanteuse Jill Scott mais s’arrête sur la photo d’une artisteemblématique de La Nouvelle-Orléans. Sa ville, son pays.« Mahalia Jackson,dit-il de son accent traînant, en se fendantd’un large sourire… J’adore sa musique. Elle était originaired’un de mes vieux quartiers. Avec son pianiste, elle m’araconté une fois que, quand elle est partie à Chicago, elle aarrêté de remuer son cul et de faire tous les trucs qu’ellefaisait à La Nouvelle-Orléans. C’est à son départ de la villeque Mahalia a commencé à se tenir droite lorsqu’elle chantait.On a une tradition à La Nouvelle-Orléans : si tu es dans uneéglise tu dois remuer ton cul. C’était quelqu’un de marrant. »

Le ton de l’entretien est donné. On parlera de New Orleanset de ses rythmes second line : le “fonk” qui fait remuerles hanches de ceux qui ont tout perdu. On célébrera lavie, et quelques ombres bienveillantes nous aideront àévoquer la mort. De préférence de manière un peu décousueet en laissant au fond de la poche la longue liste des questionsprévues, car comme le Good Doctor en fait la remarque àun point de la discussion : « J’aime bien dériver. Parfois, ilm’arrive de jouer d’une manière que je n’avais pas prévue.Non pas que j’aie l’habitude de tout planifier, mais disonsque, généralement, j’ai une idée à l’avance. Mais cela m’arrivefréquemment d’en changer en cours de route et de partirdans quelque chose de différent. Un bon moment passé àbavarder avec quelqu’un, c’est pareil. » Alors laissons laconversation suivre son flot, en compagnie de Malcolm“Mac” Rebennack, dit Dr. John, celui qui voyage avec lanuit…

Dans votre autobiographie, vous insistez surl’importance de la batterie dans la musique de LaNouvelle-Orléans. Votre fidèle batteur Herman Ernest IIInous a quittés il y a un an de cela. Comment étaitvotre relation musicale ?

Herman et moi, ça remonte à loin… Il a commencé àbosser avec moi, je crois, au moment de l’album “CityLights” (1) et de la tournée qui a suivi – et il est resté àmes côtés jusqu’à sa mort. Avant ça, il avait bossé avecRichie Havens. Il y a un truc marrant à propos de notrerencontre. À une époque, je traînais souvent avec Mr. GoogleEyes (2) et, dans ces occasions, c’était lui notre chauffeur.Mais je ne m’étais pas rendu compte qu’il s’agissait

E N C O U V ’Par Éric Doidy

“On a une traditionà La Nouvelle-

Orléans : si tu esdans une église tu dois remuer

ton cul.”

DOSSIERNEW ORLEANS

© Michael Wilson

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!!!

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E N C O U V ’ DR. JOHN

du même type, que le gars qui nous conduisait étaitaussi batteur ! Jusqu’à ce qu’un jour je me rende à un concertde Google Eyes et que je le vois assis derrière les fûts…Je lui ai dit que je ne savais pas qu’il était aussi batteur etil m’a dit : « Bien sûr que si, on s’est rencontrés sur unetournée où j’accompagnais Richie Havens. » « Ah, c’était toice mec ! Merde, mais tu ne te ressembles même pas, tuas perdu tous tes cheveux ! » [Rires.]On a été de vrais amis.Dans le groupe, c’était lui le straw boss (3). J’aimais bienavoir un gars comme ça – avant lui, c’était mon guitaristeAlvin “Shine” Robinson qui tenait ce rôle. Mais Herman futprobablement le dernier : aujourd’hui ce n’est plus pareil.Il avait un sacré bon sens du temps. Il était si funky avec labatterie ! Il me manque beaucoup. À l’heure actuelle, on abien un batteur, mais il ne connaît pas encore les 230morceaux et quelques qui figurent dans notre répertoire,ceux que Herman avait appris au fil des années. C’est unsacré défi pour lui, d’apprendre tous ces titres en plus desnouveaux qui viennent s’y rajouter. Ça rend aussi les chosesplus difficiles pour moi, parce que j’ai l’habitude d’écrireun show différent d’un soir à l’autre – j’ai toujours beaucoupfonctionné comme cela et j’essaye de continuer ; d’une part,parce que j’aime ça et, d’autre part, parce que c’est unmoyen de garder mon groupe sur la brèche. Mais quand jefais ça, je dois penser à ce pauvre Raymond Weber et autravail que ça va lui demander… Ce n’est pas si facile pourun batteur d’apprendre tous ces morceaux, parce qu’ilsviennent tous de différentes zones de la musique… Alorsil vient parfois me visiter dans mes rêves et me lance :« Tu as une personnalité dictatoriale… Ce sont descigares que tu devrais fumer, au lieu de toutes cescigarettes ! » [Rires.] Et dans mon rêve, il n’entend rien dece que je lui dis, alors c’est OK…

Sur quelques dates de la tournée européenne(Strasbourg, Montreux, Nice) vous accueillez en premièrepartie un musicien de Tremé qui commence à avoir pasmal de succès : Trombone Shorty. Vous avez beaucoupenregistré ensemble. Qu’est-ce qui fait que vous soyezsi complice avec la nouvelle génération de La Nouvelle-Orléans ?

Trombone Shorty et son frère… Leur grand-pèreJessie Hill et moi avons longtemps été partenaires detravail. Avec Alvin “Shine” Robinson on écrivait deschansons. Il y avait aussi Dave Dixon, nous étions quatre.Mais nous trois avions créé une petite affaire à Los Angeles,un label qu’on avait fait l’erreur d’appeler Free Records– un nom hélas prédestiné, parce qu’avec ce qu’on en atiré, c’est comme si on les avait distribués gratuitement[rires]. Bah, c’est des choses qui arrivent quand tu bossesdans la musique… Pour en revenir à ta question, lamusique se transmet d’elle-même : les chansons qu’ona écrites sont reprises par d’autres gens. La musiqueest une bonne chose. À l’heure actuelle, nous nousapprêtons à enregistrer un disque en hommage à LouisArmstrong (4). Ce jour-là, je veux que soient réunis desgens comme Lionel Ferbos, un centenaire (5) ; DaveBartholomew qui a dans les 90 ans ; et ainsi de suitejusqu’à des gens beaucoup plus jeunes que moi-même,comme Kermit Ruffins et Trombone Shorty aux cuivres.Je veux que tous ces gars-là, tous ces musiciens degénérations différentes, soient réunis pour livrer leurhommage personnel à Louis Armstrong. J’espère queça va pouvoir se faire… Tu vois, la musique, c’est une

!!!

Qui est le personnage de Dr. John ? Dans sonautobiographie Under a hoodoo moon (St Martin’sPress, 1994), Mac Rebennacklève le voile sur ce nom de scène adopté en 1967.

“Dr. John” (aussi appelé JohnMontaigne ou Montenet, JohnCreaux ou Croix, ou encore BayouJohn) était un sorcier vaudou dumilieu du XIXe siècle. Originairedu Sénégal où on raconte qu’ilétait un prince, il fut capturé etconduit comme esclave à Cuba.Émancipé, il devint marin avantde se fixer à La Nouvelle-Orléanset de devenir l’homme-médecinerenommé de Congo Square,craint et respecté, puis une figurelégendaire de l’imaginairecollectif populaire local. Il auraitnotamment enseigné les arts duvaudou et de la divination àMarie Laveau elle-même… Initiéau vaudou dès l’adolescence parsa sœur aînée Bobbie et par lemusicien David Lastie, Mac finitpar apprendre (en lisant unenécrologie rédigée par LafcadioHearn) que ce Dr. John qui lefascine alors était lié à unecertaine Pauline Rebennack, avecqui il gérait un temple vaudou etune maison close. Une parente ?

En revendiquant à son proprecompte le patronyme évocateur,Mac Rebennack crée autour delui une mythologie et unspectacle scénique hors norme,même pour les sixitiespsychédéliques. Sur scène àl’époque, il fait son apparitiondans des volutes de fumée, paréd’un costume traditionneld’Indiens de Louisiane etd’accessoires de cérémonie, auxcôtés de Kalinda dansant avecun serpent. S’il poursuit sontravail de session-man en tantque Mac Rebennack, il devientprogressivement Dr. John,encouragé sur cette voie parWalter “Didimus” Washington,

son percussionniste cubain.Si ses concerts sont

aujourd’hui visuellement bienplus sages, Rebennack restepour l’éternité associé à Dr. John,le sorcier et chef spirituel. Du 16 au 20 avril 2012, onpouvait le trouver à Mandeville età La Nouvelle-Orléans dirigeant

la cérémonie SoulFire4TheGulf,un rassemblement spirituel decommunautés indiennes deLouisiane. Les incantations et lesrythmes martelés sur des peauxy avaient pour objectif decontribuer à panser les plaiesdes habitants (humains ou non)des bayous du golfe du Mexique,après le désastre écologique etéconomique causé en 2010 parla marée noire due à l’explosionde la plate-forme pétrolièreDeepwater Horizon de lacompagnie British Petroleum…Gris-gris pour la vie.ED

À écouter :Gris-gris gumbo ya-ya et I walk ongilded splinters sur l’album “Gris-Gris” de Dr. John The Night Tripper(compositions de Mac Rebennacksignées Dr. John Creaux).

GRIS-GRIS, POUDRE DE SERPENT ETMÉDECINES DE L’ÂME

Ann Arbor, Michigan, 1972 © Emmanuel Choisnel

Montreux, 1973© Monique Périn

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Ernest McLean, qui l’avait précédé dans son groupe. Ernestvient de quitter ce monde. Il a entre autres joué sur notrealbum “Gris-Gris”. Quand je l’ai entendu avec EdgarBlanchard & the Gondoliers, j’ai été soufflé. Je n’ai jamaisentendu un groupe jouer comme cela – ni avant, ni après.Ils étaient d’une grande originalité. Deux guitaristes, dessax baryton, ténor et alto et ils jouaient une musiquecomplètement différente de ce que tous les autres jouaienthabituellement. Blanchard jouait des harmoniques sur saguitare, et ça sonnait comme une section de cordes par-dessus les saxophones. Très, très beau. Et Ernest faisaitde beaux accords aussi : le résultat était très, très spécial.Ils étaient extraordinaires. Mais beaucoup de ces musiquesqui faisaient auparavant partie de La Nouvelle-Orléans sesont, disons, évaporées de la ville.

Comment cela ?Une des raisons est que lorsqu’on a commencé cet

embargo sur Cuba, on n’a plus eu tous ces fabuleuxmusiciens cubains qui s’arrêtaient à La Nouvelle-Orléanssur le chemin de New York ou d’ailleurs. Ces gens, cepassage, ça manque à la ville. L’histoire de cette villeest aussi une histoire de perte : avec l’ouragan Katrina,avec la marée noire, ça ne fait que continuer. On doitrassembler les morceaux sans jamais faiblir et mon cœurs’emplit de joie quand je vois les gamins qui, aujourd’hui,font ce boulot-là. Des gens comme Derrick Tabb du RebirthBrass Band, qui enseigne aux plus jeunes enfants commentjouer de la bonne musique. C’est quelque chose de bon.Des gens comme Don Vappie aussi font cela. Don estextraordinaire avec une guitare, avec une basse et avecbien d’autres instruments encore. Des gens commeeux, sont ceux qui permettent aux choses de tenir. À mesyeux, il est primordial que nos traditions puissent vivre,circuler…

Vos albums précédents, comme “The City That CareForgot” (2008) ont beaucoup traité de Katrina, de votrecolère envers les autorités américaines. Une colèrequi s’exprime aussi sur le nouvel album, avec destitres comme Revolution ?

Eh bien, je suis toujours resté, jusqu’à cet instant même,de l’autre côté de la frontière. Je ne fais absolument pasconfiance aux politiciens, ni aux prêcheurs de tout poil.Je me méfie comme de la peste des gens de la lettre P.Autre exemple, la police [rires]. Ça fait du monde…Mais même si on a l’habitude d’appeler certainespersonnes des “prostituées”, elles je leur fais confiance.Je préfère les appeler des entraîneuses, elles ne méritentpas cette lettre P. Ma première femme et moi avionsune maison de passes et beaucoup de filles qui travaillaientpour nous étaient d’un niveau bien au-dessus de beaucoupde gens “respectables”. Par rapport à la police et auxpoliticards, les putes relèvent le niveau [rires]. Disonsqu’au moins elles te parlent avec franchise. Et parlentvrai. Je vais te dire : les politiciens sont des gens quiaimeraient bien maîtriser l’art de la magie, mais qui n’ontque le mensonge pour t’embobiner. Ils “mentent alorsque la vérité sonne mieux” – comme le dit une autrechanson du nouvel album. S’ils disaient la vérité, un certainnombre de gens s’en porteraient mieux. Mais ils ne le fontpas, parce qu’il se sont fait acheter. Cette situation, selonmoi, va en s’aggravant et je n’ai aucun respect pour cesgens-là.

Alors, revenons à la musique… Parmi les grandsartistes qui nous ont quittés récemment, vous étiezparticulièrement proche d’Etta James. Pouvez-vousnous raconter votre première rencontre ?

Notre première rencontre a eu lieu en prison. C’étaitil y a bien longtemps. Elle était venue chanter gratuitementdans le pénitencier où j’avais été condamné. Son

chose que nous devons faire, à laquelle nous nousconsacrons entièrement. Si on ne fait pas ça, qu’est-cequ’on peut bien foutre ? Qu’est-ce qu’on fiche ici ? Onn’a rien d’autre, on n’a pas d’autre but dans la vie. Lesmusiciens n’ont pas de plan de retraite. Tu te dois dejouer, jusqu’à ce qu’un jour arrive où la meilleure choseque tu puisses faire soit de t’étendre puis de mourir. Audernier morceau d’un concert. De cette manière, tongroupe touche sa paye et on ne te demande même pasde faire des rappels ! [Grands rires.]

Vous avez des nouvelles de Fats Domino ?Eh bien, il n’est pas en très bonne santé… Les trois

dernières fois où je lui ai parlé, il m’a passé au téléphone

Antoine Junior [III], comme s’il ne voulait pas entendre ceque je lui disais. Je l’appelais pour lui parler, à lui, et il mepassait son fils. Ce que j’essayais de dire à Antoine,c’était qu’il fallait qu’il donne sa maison du Lower 9th àquelqu’un de sa famille. « Bon sang, tu n’iras jamais teréinstaller là-bas, alors s’il te plaît donne cette maison àquelqu’un qui a besoin d’un endroit. »C’est un des dernierslits qui restent encore debout là-bas… Je reste en contactavec ceux qui ont fait partie de son entourage. HerbertHardesty, qui a fait partie de son groupe, travaille toujourspour nous. Il m’arrive régulièrement de faire des trucs avecDave Bartholomew. J’ai côtoyé ses anciens guitaristes :Papoose [Nelson], qui m’a appris la guitare, ou encore !!!

“Apprendre de la bouche des enfants, eten tirer des restes que je pourrai

recycler, c’est quelque chose d’important pour moi.”

© Michael Wilson

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Quand avez-vous entenduDr. John pour la première fois ?

Mon père avait une grandecollection de disques,notamment plein de rock desannées 1960, et c’est sans douteavec ces disques-là que j’ai faitsa connaissance : Mac étaitforcément là-dedans. Plus j’ypense, plus je me dis que Macdevait être à la guitare ou aupiano sur quantité de faces quej’entendais à la maison étantplus jeune. J’ai probablementconnu sa musique bien avant desavoir que c’était lui quej’écoutais ! Comme nous tous,non ?Où vous êtes-vous rencontrés ?

À La Nouvelle-Orléans, quandje m’y suis rendu en avion pourdiscuter de l’album. J’en avaisdiscuté avec son manager maispas avec lui directement. Je l’airejoint dans son antre et nousavons passé l’après-midiensemble. Nous avons faitconnaissance, écouté de lamusique, parlé de choses etd’autres – nos femmes, nosfamilles, la façon de faire desdisques… On s’est bienentendus. On a passé deux joursensemble après ça, et comme ilavait un piano, on a commencéà jeter des idées en vrac, àbosser quelques trucs, pourmieux se connaître et se jeter un

peu à l’eau. Ce fut fantastique.Avait-il déjà des idées demorceaux ?

Le truc avec Mac, c’est qu’ilest capable de créer quelquechose sur le moment. Là où lesgens normaux vont passer delongues heures en studio àaccoucher d’une création, luipeut te sortir un truc parfaitcomme si tu claquais des doigts.C’est sans doute dû au fait qu’ildevait travailler comme cela autemps où il était musicien destudio dans les années 1960. Tuas l’impression que ça ne luidemande aucun effort.Comment s’est passée la prisede contact entre les musicienset lui ?

Il se trouve que les gens duBonnaroo Festival avaiententendu des rumeursconcernant l’album. Ils nous ontdonc invités. Moi, je me suis ditque c’était une belle opportunitépour réunir les musiciens quej’avais en tête pour l’album – etça permettait que les frais soientpris en charge par quelqu’und’autre ! [Rires.] Ce fut une bellefête.

Mac a l’habitude d’enregistrerdes démos avant d’entrer enstudio faire un album…

Pas cette fois. On n’avait nidémos ni rien. Pas de répétitionspréalables. Rien que ça, ça tedonne une idée de la manièredont ça s’est passé : sans effort,en douceur. Les sessions destudio n’auraient pas pu sedérouler de manière plusplaisante. On a fait 13 morceauxen 9 jours. Tous les musiciensont été très complices, trèsrelax. Quand tu es jeune etstupide et que tu vois Macmarcher avec sa canne, à sontrain de sénateur, tu peux tefaire du souci… Je reconnaisqu’au début j’étais un peuinquiet et je me demandais cequ’on allait bien pouvoir en tirer.Mais je ne pouvais pas être plusloin de la vérité que ça. Mac esttotalement incroyable. Nonseulement il s’est pointé avecdes parties absolumentgéniales, mais il nous les a aussijouées de la manière la plusparfaite qui soit, parfaitementderrière le beat, dès la premièrefois. Exactement comme ellesdevaient être jouées. Comme s’ilavait passé un million d’annéesà les jouer. Ces sessions furentun moment immense, une

grande source d’inspiration.Chacun de nous, qui étionsprésents à ses côtés, avonsénormément appris. Comment prenait-il les idéesque vous lui présentiez ?

Il était très ouvert à toutessortes d’idées. Sa répliquefavorite pendant les sessions aété : « Pas de problème. » Tu luidemandes s’il peut essayer leFarfisa pour le solo et il terépond : « Pas de problème » !En studio, il a placé toute saconfiance en moi. Je lui en suistrès reconnaissant.Pourra-t-on vous voir ensemblesur scène ?

Très bientôt nous allons jouerà Brooklyn*. On aura unejournée et demie de répétitions.Avec un peu de chance, chaquemusicien aura réécouté l’albumet sera capable de retrouvercomment faire sa partie ! Maison ne fera pas de tournéeensemble, j’ai un calendrier tropchargé avec les Black Keys.Quoi qu’il en soit, faire cetalbum fut une expériencetotalement fabuleuse pour moi,un des tout meilleurs momentsde ma vie professionnelle. * Cette série de concerts eut lieu du 5au 7 avril 2012, lors de la résidence deDr. John à la Brooklyn Academy of Music.

était encore un gamin, je me souviens d’un jour où il estvenu me demander de faire un truc. Mais à ce moment-là, j’étais occupé à fumer du crack ou je ne sais quelleautre saloperie. Je lui ai répondu que faire ce qu’il medemandait n’était sans doute pas une très bonne idée…Il m’a alors regardé et m’a dit cette phrase : « Tu n’écoutesmême pas tes propres conseils ! » Là, il m’a appris quelquechose. Il avait parfaitement raison. Les enfants sontcapables de mots d’une grande sagesse… Bref, avec Etta

cousin et son oncle y étaient aussi enfermés. Elleet son groupe sont arrivés et, avec ce concert pournous, ils nous ont offert le plus beau moment que nousavons passé là-bas, j’étais totalement captivé. J’ai pu larencontrer cette nuit-là, et peu de temps après j’ai participéà une de ses sessions d’enregistrement pour je ne saisplus quel label, avec lequel elle était sous contrat àl’époque. Cela a scellé notre amitié pour le reste de nosjours. Bon, je ne vais pas te mentir, je la dépannais ennarcotiques, je l’aidais à s’injecter sa dose. Je la piquaisau sommet du crâne, ou encore dans la veine jugulaire– dans tout un tas d’endroits inhabituels pour la plupartdes gens… Mais elle était ouverte à ça. Comme tu le sais,j’ai longtemps abusé de toutes ces merdes moi aussi. Ily a longtemps de ça, en Louisiane, quand Kermit Ruffins

on a partagé pas mal de bon temps pendant toutes cesannées. Sa disparition, avec aussi celle de Johnny Otisà la même période, est quelque chose qui me laisse undrôle de sentiment. La santé de Johnny était chancelanteet je savais qu’Etta était elle aussi en mauvaise posture.Je l’ai appelée un jour où nous étions à Riverside enCalifornie pour un gig, c’était là où elle vivait. Au téléphone,son fils – pas celui dont je suis le plus proche, maisSametto – m’a dit des mots terribles : « Je ne crois pas

“Mac s’est pointé avec des parties absolument géniales et nous les a jouées de la manière la plus parfaite qui soit, dès la première fois.”

BONUS TRACKS AVEC DAN AUERBACH

“J’ai l’habitude d’écrire un showdifférent d’un soir à l’autre,

c’est un moyen de garder mon groupesur la brèche.”

!!!

E N C O U V ’ DR. JOHN

Dan Auerbach et Dr. John © Alysse Gafkjen

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INTERNETnitetripper.com

CONCERTSDr. John & the Lower 911 feat. Jon Cleary30 juin : Festival Django Reinhardt, Samois-sur-Seine (77)4 juillet : La Cigale, Paris 18e

5 juillet : Strasbourg Jazz Festival (67)6 juillet : Lugano Estival (Suisse)9 juillet : Montreux Jazz Festival (Suisse)10 juillet : Nice Jazz Festival (06)15 juillet : Cahors Blues Festival (46)

JEU CONCOURS5 x 2 places à gagner pour le concert de Dr. John à la Cigale !Voir modalités dans l’agenda p. 88

À ÉCOUTER

• “Locked Down” (Nonesuch, 2012)!!!! (chronique p. 60)

– mais c’est normal, il est jeune. Par exemple, je lui avaisraconté qu'un des fondateurs de mon groupe, Didimus,était originaire d'Ethiopie : et quand on s'est retrouvés enstudio, Dan avait fait venir un batteur allemand qui avaitvécu quelques années en Ethiopie ! C’est un bon guitariste,que j’ai aimé dès la minute où ma petite-fille m’a passéce disque. J’aime les gens comme lui, qui jouent unemusique honnête et vraie. Il n’y en a plus tellement denos jours, hélas : c’est triste, mais c’est bien vrai. Surtout,il a eu des idées très cool pendant l’enregistrement austudio. Il me faisait des suggestions pertinentes, parexemple : « Si tu modifies ce vers que tu chantes ou situ le dis de telle autre manière, les chœurs derrière vontsonner beaucoup mieux. » Il avait de bonnes suggestionssur les mélodies. Il ne perdait pas de vue le projet dansson ensemble, et il l’envisageait depuis une perspectivetotalement différente de celle d’où je viens. J’aime ça.Apprendre de la bouche des enfants, et en tirer des restesque je pourrai recycler, c’est quelque chose d’importantpour moi. "Propos recueillis par Éric Doidy à Paris le 2 mars 2012

1. C’est Steve Gadd qui tient la batterie sur “City Lights” (1978),mais Herman Ernest apparaît sur l’album suivant “Tango Palace”(1979).2. Joe Augustus (1931-1992) alias “Mr. Google Eyes” était unblues shouter de La Nouvelle-Orléans qui, comme Dr. John,avait vécu un temps à Los Angeles. Il a enregistré pour deslabels comme OKeh et Duke.3. En argot de musicien (notamment en jazz), le straw bossest l’instrumentiste qui fait l’intermédiaire entre le patron ouleader et le groupe : homme de confiance de l’artiste, il veilleque l’emploi du temps soit bien respecté, transmet les consigneset fait parfois office de directeur musical.4. Dans le cadre d’une résidence de Dr. John à la BrooklynAcademy of Music, les concerts du 29 au 31 mars ont étéconsacrés à ce “Louis Armstrong Tribute”.5. Trompettiste de jazz de La Nouvelle-Orléans, LionelFerbos est né en 1911 et se produit toujours.

qu’elle va ne serait-ce que se rendre compte de qui luiparle. » Et c’était vrai. J’avais beau lui dire ce que je voulais,elle n’avait pas la moindre idée de qui pouvait lui parler.En raccrochant je me suis senti si triste : « Mon Dieu,elle est dans une sale situation. » Elle nous a quittés àpeu près deux semaines après ça et c’est une personnede plus qui me manque terriblement. J’avais aussibeaucoup d’estime pour Johnny Otis. Je me souviensd’une fois, il avait viré son trompettiste et je lui ai suggéréde reconsidérer sa décision et de rappeler le gars. Sais-tu ce qu’il a fait ? Il a réfléchi, il m’a dit qu’il allait essayer,et il a rappelé. Il était ouvert d’esprit, capable de réviserson jugement. Et j’adore les gens comme ça.

Il est entré dans l’histoire américaine.S’il n’avait pas enregistré Willie Mae Thornton en train

de chanter Hound dog, Elvis Presley n’aurait peut-êtrepas eu la carrière qu’il a eu, et de nombreux autres nonplus. Mais quoi qu’il en soit, il a fait tellement de bonsdisques, comme ceux avec Johnny Ace… J’adoraisécouter le groupe avec Little Esther Phillips, tous cesdisques des débuts sont absolument fantastiques. Bienqu’Esther soit devenue un cauchemar pour mon épouseune fois que nous avons fait connaissance ! [Rires.]Bah, la vie, c’est la vie…

On parlait tout à l’heure de l’importance de passercet héritage aux jeunes générations. “Locked Down”,enregistré avec des gens qui pourraient être vos petits-enfants, a-t-il été fait dans cet esprit ?

Oh, non, en fait les choses se sont imbriquées un peutoutes seules de manière assez spirituelle… Un jour,ma petite-fille me fait écouter un disque de Dan et desBlack Keys, et puis dans la foulée j’apprends par quelqu’und’autre qu’un festival nous a engagés pour participer àune jam session avec eux. Et puis très vite après ça, onm’annonce qu’on va faire un disque ! Tout cela s’estenchaîné comme si de bons esprits y avaient veillé… Danest capable de bien garder certaines choses en mémoire

© DR

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Par ce jeu du balancier publicitaire quidévalorise le passé pour mieux monnayerle présent, il semblerait que la sortie dunouveau – et fort recommandable – Dr. Johnsoit l’occasion de nous resservir le coupletde l’artiste déchu renaissant de ses cendresaprès une décade de disette discographique.

Retour donc sur cette période de soi-disant pannecréative où l’on verra que si un Black Keys peut nourrirl’actuel printemps, les couleurs de l’automnediscographique du Good Doctor engendrent quelquesreflets chatoyants, parfaits miroirs de la personnalitéhors norme de l’artiste. 2000-2010, ou l’histoire de septalbums présentant des géométries variables et despoints communs indéniables.

Hommage fidèle et iconoclaste à la musiqueellingtonienne paru début 2000, “Duke Elegant”marque ce resserrement autour du groupe de scène quiconstituera le dénominateur commun des années à venir.Le Lower 9-11 sera dès lors souvent associé à lacoproduction. Les guitaristes changent, mais HermanErnest à la batterie, David Barard à la basse fournissentles indispensables bases du “skank”, du “fonk”, cegroove à la chaloupe bigarrée propre à la Cité du

E N C O U V ’Par Stéphane Colin

Qui a dit que Dr. John n’avait rien enregistré de notable depuis longtemps ? Ses sept albums des années 2000 sont autant de preuves du contraire. Cap sur une décennie propice à l’épanchement “fonk”.

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DOSSIERNEW ORLEANS

DR. JOHN2000-2010TOUT FONKTIONNE

© Michael Wilson

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Page 9: DR. JOHN 2012v2.pdfTrombone Shorty et son frère… Leur grand-père Jessie Hill et moi avons longtemps été partenaires de travail. Avec Alvin “Shine” Robinson on écrivait des

“City That Care Forgot” ou le complément à froidde “Sippiana Hericane”. La colère n’a rien perdu de sonintensité. Le sentiment d’abandon est toujours aussi fort :« Promises, promises / empty words / the road to White Housepaved with lies », est chanté en duo avec le “country outlaw”Willie Nelson. Eric Clapton habite ses trois interventions. Lesarrangements cuivrés de Wardell Quezergue, CharlieMiller, Jason Mingledorff et Alonzo Bowen claquent dans levent et le contrechant vocal “à la Neville” de Terrance Simienbonifie la composition de Bobby Charles, Save our wetland.Mais, plus que tout, c’est une fois encore le cœur de larythmique du Lower 9-11 qui permet à Mac de s’épancheren toute confiance. My people need a second line, vibrant

appel à la pérennisationd’une culture localeballottée et négligée, enest encore une fois unepreuve indéniable. UnGrammy Award 2008 dumeilleur disque de bluestraditionnel on ne peutplus mérité.

• “City That Care Forgot” (429, 2008) PIED(SB 192)

« Doctorate your bones » : évidence intraduisible du Feelgood music qui ouvre “Tribal” et pourrait résumer lescinquante ans de carrière de l’artiste. Un album de fin dedécade où la nostalgie latente – dédié à Bobby Charlesrécemment disparu, coproduit avec Herman Ernest qui vadécéder l’année suivante – est transcendée par la créativitédes compositions. Le morceau qui donne son nom à l’albumsemble embrasser l’ensemble de l’œuvre enregistrée dudocteur, plongeant dans la musique “native” pour mieuxrebondir chez les Mardi Gras Indians et s’épancher dans desunivers aussi variés que le voodoo rock des années “Gris-

Gris” ou le jazz débridéconfectionné avec lesaxophoniste DonaldHarisson. Une histoiredu skank où chaque notesemble tester son poidsd’histoire pour mieux s’enaffranchir. Only in NewOrleans.

• “Tribal” (429, 2010) PIED (SB 200) Stéphane Colin

croissant. Mac Rebennack peut laisser libre cours à cettecréativité particulière qui l’anime. Il prend là un malinplaisir à tordre les Perdido, Mood indigo et autres Caravanpour mieux leur rendre hommage. Les parties d’orgue

Hammond f e r a i en tcligner l’œil de JamesBooker. It don’t meana thing if it ain’t got thatswing devient dès lorsla profession de foivibrante d’un musicienqui fait ce que bon luisemble.

• “Duke Elegant” (Parlophone, 2000)!!!! (SB 158)

Un an plus tard, “Creole Moon” enfonce le concept.Baron Samedi et Marie Laveau sur la pochette commepour mieux conjurer les esprits caribéens. Le boléro dutitre éponyme fait la part belle au saxophone de FatheadNewman, l’arrangement cuivré de Fred Wesley et CharlieMiller sur Litenin’ afro-cubanise les funky horns et la slidede Sonny Landreth glisse sur le bayou cajun de Georgianna.Plus que tout, les quatre morceaux coécrits avec un DocPomus récemment disparu concluent brillamment unecollaboration superlative. Il y a dans la reprise ralentie et

désenchantée d’Imitationof love une impressionde contrepoint à laversion flamboyanteproduite par Dr. Johnpour Johnny Adams en1991 (“The Real Me:Johnny Adams SingsDoc Pomus”, Rounder).

• “Creole Moon” (Parlophone, 2001) !!!!(SB 165)

En 2004, “N’Awlinz Dis Dat Or D’Udda” élargit lechant d’action à l’ensemble de la Cité du croissant et àquelques-uns de ses plus chauds partisans : B.B. King, RandyNewman, Willie Nelson… Snooks Eaglin habite de son grainde guitare une ode à Cousin Joe du meilleur aloi. Earl Palmerprend régulièrement la place d’Herman Ernest derrière lesfûts. Le tambourin de Smokey Johnson amène sa pincéede Big Chief. Tour à tour, Cyril Neville, Dave Bartholomew,Nicholas Payton, Leroy Jones, Eddie Bo, Walter Washingtonet le Dirty Dozen Brass Band amènent leur contribution àce travail de mémoire arrangée chère au docteur. Les cordesdes Quatre Parishede Wardell Quezergue semblent prolongerla Litanie des Saints du “Going Back To New Orleans” de1992 à la façon du compositeur louisianais du XIXe LouisMoreau Gottschalk. When the Saints chanté en duo avecMavis Staples régénère la rengaine d’une manière

tout aussi détournée etoriginale que la versionsolo du “Dr. John pay MacRebennack” de 1981 ou celle enregistrée avecArt Blakey et FatheadNewman dans le cadre du“Bluesiana Triangle” de1990.

• “N’Awlinz Dis Dat Or D’Udda” (Parlophone,2004) PIED (SB 176)

Changement de décor et de climat en 2005 avec ce“Sippiana Hericane” bâti dans l’urgence de l’aprèsKatrina. Inaugurant une impressionnante série d’hommagesà la ville meurtrie, cette courte suite construite autour dutraditionnel Wade in the water ravive la gravité du moment.Les Lower 9-11 se resserrent dans un studio de Woodstockautour du projet qui s’ouvre et se ferme sur Clean water,composition du vieil ami Bobby Charles. Paradoxalement,c’est dans la troisième partie instrumentale de la suite

intitulée Calm in the stormque le piano tangue àl’extrême. Calme dans latempête ou l’apparenced’un paradoxe pourmettre en exergue le feuet le ressentiment detoute une communautémusicale.

• “Sippiana Hericane” (Parlophone, 2005)!!!! (SB 182)

Après une telle urgence, “Mercernary”, l’hommageà Johnny Mercer de 2006 ferait presque décoratif.Quelques vieilles histoires d’os d’un répertoire surannésemblant sorti de derrière une tenture fanée ne donnentpas forcément prise à une accroche immédiate. Sous laconduite de son leader, le Lower 9-11 transcende legenre, redorant les tentures de Lazy bones et Come rain or come shine avec cette grâce intemporelle quirégénère les vieux pastels pour en faire des opus

funky apaisés. Save thelast bones for HenryJones en miroir toutaussi déformé querespectueux de laversion de Nat King Coleet de son trio. Qui pourbattre le Good Doctorsur ce terrain-là ?

• “Mercernary” (Parlophone, 2006) !!!"(SB 183)

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Le dénominateur des années 2000 :

le Lower 9-11,indispensable

pourvoyeur de fonk

STUDIO TRIPPERLes participationsde Dr. John

À la guitare derrière Professor Longhair, au clavierchez Ringo Starr, en duo avec B.B. King… En près de60 ans de carrière, le Night Tripper a sévi sur unnombre impressionnant de séances en tantqu’accompagnateur ou invité de marque. Impossibleà pister ? Notre collaborateur Danny Garçon a relevéle défi ! Une liste conséquente que nous vousproposons au format pdf sur simple demande à[email protected]

Avec le Lower 9-11 : David Barard, John Fohl, Dr. John, Herman Ernest III

© DR

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