département de géographie -aménagement
TRANSCRIPT
BACQ Mohamed Nasser
DEA AMENAGEMENT,
IMémoire de Recherchel
Année Universitaire 2002 - 2003
DEVELOPPEMENT, ENVIRONNEMENT (ADEn)
UFR Lettres, Langues et Sciences Humaines
Département de Géographie - Aménagement
1,
,JEtude de faisabilité d'une gestion et d'une conservation in situ de ~
1 l'agrobiodiversité : le modèle igname dans le nord du Bénin. i1,.
1 i1 1,i Option B : Politiques du développement et de l'environnement: nonnes et acteurs
1
1
1
DEA ADEn
MEMOIRE DE RECHERCHE
Etude de faisabilité d'une gestion et d'une conservation in situ del'agrobiodiversité : le modèle igname dans le nord du Bénin.
BACQ Mohamed Nasser
Directeur de recherche: Jean-Paul LESCURE, Directeur de recherche à l'IRD
Responsable de stage: Monsieur Clément AGBANGLA
Laboratoire d'accueil: Laboratoire de Génétique de l'Université d'Abomey Calavi (R. Bénin).
Membres du jury
Madame Cathérine AU BERTIN, Directrice de Recherche (IRD).
Madame Françoise GRENAND, Chargée de Recherche (CNRS).
Monsieur Jean-Paut LESCURE, Directeur de Recherche (IRD).
Date de soutenance : 15 Septembre 2003
SOMMAIRE
SOMMAIRE
Dédicace
Remerciements
Résumé
Abstract
Introduction
Objectifs et hypothèses
Cadre conceptuel de l'étude
1. Définition de certains concepts
2. En quoi l'agrobiodiversité est-elle nécessaire ?
3. Dans quelle mesure l'agrobiodiversité est-elle menacée ?
4. Prise en compte de la biodiversité par l'économie
5. Les conventions et les débats politiques sur la biodiversité
6. Méthodes de conservation de l'agrobiodiversité
7. Quelques facteurs pouvant influencer le maintien de la diversité
Cadre métbodologique
1. Brève présentation de l'igname (Dioscorea sp.)
2. Présentation de la République du Bénin
3. Caractéristiques du département du Borgou
4. Choix des communes de Sinendé et de Tchaourou
5. Sélection des villages d'étude et des unités d'observation
6. Outils et méthodes de collecte des données
7. Données collectées et outils d'analyses
8. Limites du travail
Résultats
1. Ampleur de la diversité variétale maintenue par les paysans dans le temps et dansl'espace
Il. Processus utilisés pour maintenir et créer la diversité agricole de l'igname
III. Déterminants socio-économiques des détenteurs de la diversité
DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser
IV. Caractéristiques agro-morphologiques, commerciales et socio- culinaires et desvariétés
Discussion
Conclusion et recommandations
Références bibliographiques
Liste des figures, photo et tableaux
Liste des acronymes
Liste des annexes
TABLE DES MATIERES
2
DEAADEn2003
Dédicace
BAca Mohamed Nasser
A mon fils, Fadil.
3
DEAADEn 2003
Remerciements
BAca MohamedNasser
Au Conseil Ouest et Centre Africain pour la Recherche et le Développement Agricoles (CORAF) et
l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD), pour avoir financé mon séjour en France et mes
recherches sur le terrain.
A mon Directeur de recherche, Monsieur Jean-Paul Lescure, Directeur de Recherche à l'IRD Orléans
qui malgré ses nombreuses occupations n'a ménagé aucun effort pour mon encadrement. Je le prie
de trouver ici l'expression de ma profonde gratitude.
A Monsieur Jean-Louis Pham, Chercheur à l'IRD Montpellier, il a accordé un intérêt particulier à ce
travail. Qu'il en soit remercié pour l'avoir lu et corrigé.
A Monsieur Serge Tostain, chercheur au Centre IRD de Montpellier qui m'a donné le goût à la
recherche sur l'igname. Il a contribué à la conception et à la soumission du projet de recherche au
CORAF pendant son séjour au Bénin. Au cours de mes recherches sur le terrain, j'ai profité de sa
supervision, et de ses conseils.
A Messieurs Ogoubi Dainou et Clément Agbangla, Enseignants-Chercheurs au laboratoire de
génétique de la FAST (Université d'Abomey Calavi), pour avoir parrainé ce projet d'étude, et facilité la
gestion administrative et financière du projet CORAF.
A tous les enseignants du DEA ADEn particulièrement à Françoise Grenand, Responsable de l'option
Bdu DEA.
Aux personnels administratifs de ('IRD Orléans en particulier à la Directrice Yveline Poncet et à sa
secrétaire Jocelyne Petit.
A tous les amis du DEA avec qui nous avons passé de merveilleux moments.
A Bio Idrissou, Ayetiton Mashouidi, Marna Razack, Souley Idrissou ; ils ont été mes enquêteurs et
guides sur le terrain et m'ont aidé dans la phase de collecte des données.
Aux paysans du nord Bénin dont la collaboration a permis de collecter les informations contenues
dans ce document..
A ma famille pour m'avoir encouragé à poursuivre mes études.
A mon épouse Aleyya pour son soutien et ses sacrifices.
Enfin, à tous les lecteurs de ce document qui reconnaissent qu'il n'est qu'une œuvre humaine
susceptible d'être corrigée.
4
DEAADEn2003
Résumé
BACO Mohamed Nasser
L'igname (Dioscorea cayenensis- D. rotundata ) est une plante alimentaire largement produite au
Bénin. Elle joue un rôle essentiel dans la sécurité alimentaire chez les ménages ruraux du norel Bénin.
Pourtant, de nos jours, cette plante se trouve dans un environnement agro-écologique, socio-culturel,
économique et politico-juridique en pleine mutation. Cette situation amène à craindre des menaces
dont les conséquences seraient irrémédiables. Parmi celles-ci, on cite la perte de la diversité des
ignames cultivées. C'est pour contribuer à gérer de façon durable la diversité de cette plante que cette
étude a été menée. Elle a été conduite au nord Bénin dans 4 villages avec 60 exploitations agricoles.
Il ressort que les paysans détiennent une grande diversité de cultivars soit 112 variétés. La gestion de
cette variété se fait de façon dynamique grâce à des pratiques de maintien et d'enrichissement et de
création de la diversité. La détention de ces savoirs n'est pas l'apanage de tous les paysans. Elle est
sous-tendue par des déterminants socio-économiques tels que le groupe ethnique et la structure de
l'exploitation. Les paysans ont su adapter la production de la diversité dont ils disposent aux
conditions agro-écologiques (types de sol, niveau de fertilité, parasite, inondation...). En ce qui
concerne l'aspect politico-juridique, l'igname a l'avantage d'être parmi les espèces prises en compte
par le Traité International pour les Ressources Phylogénétiques pour l'agriculture et l'Alimentation.
Les conditions pour une conservation in situ de l'igname semblent réunies. Pour qu'elle soit efficace,
l'étude a débouché sur la proposition d'une approche interventionniste qui fédère les actions de
plusieurs acteurs tels que les paysans, les associations de paysans, les ONG, les Institutions de
Recherches, les décideurs politiques, etc.
Mots-clefs: Igname, variétés, agrobiodiversité, conservation in situ, exploitations agricoles, nord Bénin.
AbstractYam (Dioscorea cayenensis- D. rotundata ), is a staple food crop widely product in Benin. It plays an
essential role in food security in rural families of north Benin. Nevertheless, this crop is nowadays in
the changing environment: agro-ecology, socio-cultural, economic and politico-juridical, ...This
situation cannot be without consequences on yam and its diversity. The study was proposed in order
to contribute to manage in sustainable ways yam's diversity. The study was conducted in the north of
Benin in four villages with 60 farms.
Farms have large crop diversity. 112 varieties was be inventoried in the region investigates. The
management of this diversity is dynamic and is support by maintenance creation and enrichment
practices. These practices are influence by sorne socio-economics parameters Iike ethnic groups,
structure of family. The farmers know how to produœ the diversity they have in diverse agrosystems
(Ievels of fertility, parasites, f1ooding ...). As far as political and juridical aspects, yam has an advantage
in comparison with other staple food crops. Yam ls one of the crops concem by the International
Treaty on Plant Genetic Resources for food and Agriculture.
ln situ conservation is possible. To emphasize on it, the study show that many actors as farmers and
their organisation, NGOs, Research Institutes, policies makers, etc. are requested.
Key words: yom, varieties, agrobiodiversity, in situ conservation, farmers, North Benin.
5
DEAADEn 2003
1ntroduction
. BACQ MohamedNasser•
Pendant des siècles, l'homme a utilisé des milliers d'espèces végétales pour se nourrir et en
a cultivé un grand nombre. Aujourd'hui, 150 espèces végétales seulement sont cultivées,
12% d'entre elles assurent près de 75% de notre alimentation et 4% fournissent plus de la
moitié des aliments que nous consommons (FAO, 2001). Cette évolution a fragilisé
l'agriculture et appauvri la qualité de notre régime alimentaire. En conséquence, de
nombreuses cultures locales, traditionnellement vitales pour l'alimentation sont maintenant
sous- utilisées ou négligées. Dans les pays tropicaux, cette tendance fragilise la sécurité
alimentaire des sociétés paysannes. L'exemple de l'igname au Bénin en est une parfaite
illustration. Cette plante a été pendant longtemps une culture orpheline de la recherche,
malgré son importance locale.
Avec une production d'environ 30 millions de tonnes, l'igname est la quatrième plante à
racine et tubercule du monde après la pomme de terre, le manioc, et la patate douce (FAO,
1994). Le Bénin est le quatrième producteur d'igname en Afrique avec 1 770 000 T en 2000,
après le Nigeria, la Côte d'Ivoire et le Ghana. Sur le plan national, l'igname occupe 8 % des
superficies cultivées et vient en cinquième position après le maïs, le sorgho, le coton et le
manioc (MOR, 1995). Dans presque toutes les contrées où elle est cultivée, l'igname a joué
et joue encore un rôle prépondérant, comme culture de subsistance, comme culture
commerciale, comme culture à caractère socioculturel ou encore comme culture englobant
ces différents aspects.
Sur le plan alimentaire, l'igname est au Bénin, consommée sous diverses formes: bouillie,
frite, pilée, grillée, cossette ... Elle est moins sensible aux aléas climatiques que les céréales
cultivées dans les mêmes zones, ce qui lui confère un rôle prépondérant en terme de
sécurité alimentaire (Bricas et al, 1998).
Sur le plan commercial, l'igname qui autrefois avait une présence s'impose de plus en plus
dans le commerce au point de devenir une culture de rente sur laquelle le pays compte pour
accroître son Produit National Brut (PNB). L'igname béninoise est aujourd'hui exportée en
direction des pays sahéliens tels que le Niger et le Burkina. Au niveau micro, ce récent
positionnement commercial contribue à améliorer l'économie familiale des ménages ruraux.
L'igname rapporte à ces ménages parfois plus de revenus que le coton, qui est la principale
culture de rente du pays.
6
DEAADEn 2003 BACO Mohamed Nasser
Au plan socio-culturel, dans la symbolique coutumière, c'est au travers de l'igname que
renaît la vie des ancêtres. Manger l'igname, c'est bien sûr se nourrir, mais c'est surtout vivre
une communion. Pour cela, une fête spéciale était organisée à la sortie de la nouvelle
igname. Elle couvrait plusieurs jours, mobilisait toute la contrée et se terminait par un rituel
important, marquant le début de la consommation d'igname.
Toutes ces raisons amènent l'liTA (1998), à conclure que l'igname est une culture vivrière
très importante pour les peuples d'Afrique Occidentale dont ceux du Bénin.
Nonobstant ses multiples fonctions et l'ancienneté de la pratique de sa culture, les conditions
de production de l'igname n'ont pas sensiblement varié. La culture de l'igname est sujette à
de nombreuses difficultés qui peuvent conduire à l'abandon et la disparition de certaines
variétés. Aujourd'hui, l'igname subit la concurrence d'autres cultures telles que le coton, le
maïs et le manioc. L'objectif commercial commence à prendre le pas sur la fonction
alimentaire qui jadis était la principale raison de production de cette plante. Une autre
menace qui pourrait avoir des conséquences sur la diversité des ignames est l'introduction
de la variété Florido, issue de Porto Rico. En Côte d'Ivoire, Hamon et al., (1995) ont révélé
que l'introduction de cette variété a conduit dans de nombreux villages à l'abandon des
variétés traditionnelles.
On constate également la quasi-inexistence de création variétale par la recherche et
l'abandon progressif des pratiques endogènes de création variétale. La domestication, qui
est la forme de création traditionnelle des variétés, est de nos jours pratiquée par très peu de
paysans (Baco, 2000). Les écosystèmes où les paysans puisaient des ignames sauvages
pour les domestiquer et créer la diversité s'amenuisent et disparaissent du fait de
l'agriculture extensive et de la poussée démographique.
Toutes ces menaces s'opèrent dans un environnement politico-Iégislatif en pleine mutation,
régi par des conventions et accords internationaux qui peuvent être défavorables aux plantes
alimentaires en général et à l'igname en particulier. Dans ces conditions, que faut-il faire?
Pour Gass (1998), l'agriculture ne sera en mesure de faire face aux défis de l'avenir que si
l'amélioration des plantes cultivées peut compter sur la conservation à long terme des
ressources phytogénétiques. En effet, les ressources génétiques conservées doivent
permettre de répondre aux attentes que l'homme formulera demain dans des domaines
aussi variés que "agriculture, l'industrie, la pharmacie, la recherche et l'enseignement ou à
des attentes sociales et culturelles (Lefort et al. 1998). La création ou le maintien de la
diversité inter et intra spécifique est une stratégie de survie utilisée par les paysans pour
7
DEA ADEn 2003 BAca Mohamed Nasser
assurer leur sécurité alimentaire particulièrement dans les régions marginales où les variétés
améliorées et les intrants sont moins accessibles aux paysans. Deux choix sont à
envisager: la conservation in situ et la conservation ex situ. Celle-ci n'empêche pas la
persistance de l'érosion génétique, que ce soit dans le milieu naturel, dans les
agrosystèmes, et même dans les banques de gènes, où pourtant les ressources génétiques
devraient être en sécurité. Les liens entre les activités de conservation et l'utilisation par les
sélectionneurs ou les agriculteurs, sont faibles (Mckey et al. 2001). Les bénéfices
considérables qui pourraient être réalisés au travers de ces ressources ne sont ni atteints ni
équitablement partagés (Gass, 1998). Les limites d'une stratégie de gestion des ressources
génétiques des plantes cultivées fondée uniquement sur une conservation ex situ sont
maintenant claires (Brush, 1995, Hamilton, 1994, Miller et al.,1995) et la nécessité de
développer des stratégies complémentaires in situ est aujourd'hui largement admise. Dans
cette étude, nous voulons analyser la possibilité de conserver in situ l'agrobiodiversité
générale en nous inspirant du modèle igname. Brush (1992) fait remarquer que dans le
domaine de la conservation des ressources phytogénétiques, la prise en compte des
populations locales est timide, bien que leur rôle de producteurs et de conservateurs de
diversité ait été mis en évidence dans plusieurs contextes. A travers cette étude de la
conservation des ressources génétiques de l'igname, nous voulons voir comment les
exploitations agricoles participent à la gestion et au maintien de la biodiversité. Puis nous
analyserons la possibilité de développer un programme de conservation de cette diversité
sous gestion paysanne dans un environnement politico- juridique qu'ils ne maîtrisent pas.
Objectifs et hypothèses
Objectif général
A travers ce travail, nous voulons contribuer à gérer de façon durable l'aqrobiodiversité, Pour
cela, les pratiques paysannes de gestion (conservation et utilisation) des ressources
génétiques de l'igname seront analysées.
Objectifs spécifiques
Pour faciliter l'atteinte de l'objectif général, nous avons dégagé des objectifs spécifiques dont
la réalisation permettra de répondre à notre objectif. Cette étude nous conduira donc à :
• Répertorier et documenter toutes les variétés cultivées et maintenues dans le
système cultural du Nord- Bénin
• Analyser la diversité variétale des ignames cultivées dans le Nord- Bénin et les
déterminants socio-économiques qui affectent cette diversité.
8
DEAADEn2003 BACO Mohamed Nasser
• Apprécier les formes de gestion (conservation et utilisation) paysanne de cette
diversité et les savoirs locaux qui y sont liés.
• Déduire s'il est possible de contractualiser une conservation durable de cette
diversité avec les producteurs dans un environnement en pleine mutation
commerciale, sociale, environnementale et surtout politique.
Hypothèses de travail
Sur la base de ces objectifs, 3 hypothèses se dégagent:
• Une grande diversité variétale existe et est bien gérée malgré les mutations actuelles.
• Quelques producteurs par village disposant de connaissances endogènes peuvent
conserver toute la diversité du village.
• Une contractualisation de la conservation de l'agrobiodiversité entre les services de
l'agriculture, les ONG et les paysans ayant un savoir-faire important est possible.
9
DEAADEn 2003
Cadre conceptuel de l'étude
1. Définition de certains concepts
~ BACQ Mohamed Nasser
Avant d'entamer ce travail, je trouve nécessaire de définir certains termes auxquels j'aurai
recours (dans ce travail) et dont le sens porte à ambiguïté ou ne fait pas l'unanimité dans les
débats scientifiques contemporains.
Biodiversité: encore appelée diversité biologique, elle regroupe la totalité de la variabilité
existant entre et au sein des espèces de tous les organismes vivants (Friis-Hansen et
Sthapit, 2000). Cette variabilité s'exprime aux niveaux des écosystèmes, des espèces, et
des gènes.
Agrobiodiversité: ce terme vient de la combinaison des mots agriculture et biodiversité.
Selon la GTZ (2000), l'agrobiodiversité est une partie de la biodiversité qui à travers la
production agricole, contribue à l'alimentation, à la subsistance de même qu'à la
préservation des écosystèmes. L'agrobiodiversité est le fruit d'un long travail d'observation,
de sélection et d'échange des paysans au fiJ des millénaires. Elle regroupe les ressources
phyto et zoogénétiques. Mais dans le cadre de ce travail, je m'intéresse exclusivement aux
ressources phytogénétiques.
Ressources phytogénétiques (RPG) : désignent le matériel prélevé dans la biodiversité et
utilisé par les hommes à des fins agricoles. Elles englobent le matériel génétique varié
contenu dans les variétés traditionnelles, Jes cultivars modernes ainsi que les plantes
sauvages apparentées aux espèces cultivées. Les RPG sont le fondement biologique de la
sécurité alimentaire mondiale et protègent de manière directe et indirecte les moyens de
subsistance de tous les habitants de la planète.
Exploitation agricole: je vais privilégier «l'unité de production» comme l'unité d'analyse
tout en gardant à l'esprit les relations qu'elle a avec les autres unités. L'exploitation agricole
est une unité de production qui se repère à partir de l'existence de champs cultivés en
commun sous l'autorité d'un chef d'unité de production. A cette unité de production pourront
être rattachés les champs individuels des indépendants, des femmes, des fils ou des frères
cadets.
Communautés: ce terme désignera dans ce travail, un groupe social organisé ayant des
caractéristiques distinctives bien définies. La communauté peut être l'ensemble des paysans
10
DEAADEn 2003 BACO Mohamecl Nasser
d'un village donné ou l'ensemble des producteurs appartenant à un même groupe
sociolinguistique. Etant donné que nous sommes dans une approche systémique, les
comportements individuels seront vus à travers la communauté et vice-versa.
Variétés: ce terme reviendra à plusieurs niveaux dans ce document. Il désigne le matériel
végétal de production qu'un groupe de paysans reconnaît et nomme, comme unité distincte.
Les autres définitions de ce terme seront reprises dans ce travail et analysées par rapport
aux débats sur la conservation et aux différents acteurs qu'elle implique.
La diversité génétique: c'est la variabilité de la structure génétique au sein d'une plante,
d'une espèce, entre espèces. Les individus peuvent être génétiquement homogènes ou
hétérogènes (Almerkinders et al., 1995). Dans ce travail, nous nous intéresserons surtout à
la diversité intra-spécifique, et spécifiquement dans l'ensemble des variétés de l'espèce O.
cayenensis- O. rotundata.
Erosion génétique: c'est la perte de diversité génétique. Pour les cultures comme l'igname,
l'érosion génétique se traduit non seulement en terme de réduction du nombre de variétés,
mais aussi en terme de réduction de l'aire géographique de distribution des plantes
sauvages.
Etude de faisabilité: il s'agit de voir si un projet, une activité est faisable et quelles sont les
conditions de sa réalisation. Dans le cadre de ce travail, il est question de voir si on peut
envisager la conservation in situ dans des contextes agro-écologiques et socio-économiques
qui sont souvent influencés par un contexte juridico-politique à un niveau supérieur.
2. En quoi l'agrobiodiversité est-elle nécessaire?
Depuis 12000 ans que l'agriculture est pratiquée, les paysans ont contribué à la conservation
et au développement de la diversité biologique agricole en domestiquant les plantes
sauvages pour différentes utilisations. Le corollaire de l'érosion de l'agrobiodiversité, est que
les générations actuelles et futures auront de moins en moins de matériels génétiques à leur
disposition pour garantir la sécurité alimentaire au plan local et régional (GTZ, 2000). En
effet, l'agrobiodiversité contribue à :
.:. conférer à l'ensemble du système de production une résistance, une tolérance et une
résilience face aux facteurs biotiques (les parasites, les compétitions entre plantes et les
relations symbiotiques avec d'autres organismes) et abiotiques (la température, le sol,
l'eau, l'humidité relative, la lumière et le vent) de l'environnement de culture. Ainsi, face
aux menaces d'un parasite donné ou d'une inondation dans un champ, il existe dans
11
DEA ADEn 2003 BACQ Mohamed Nasser
l'ensemble du matériel végétal cultivé des individus qui résisteraient naturellement aux
fléaux pendant que d'autres en subiraient les effets. Il en est de même pour les types de
sols avec différents gradients de fertilité rencontrés sur la toposéquence des champs.
L'agrobiodiversité permet aussi dans ce cas de cultiver sur ces différents types de sols
différents cultivars sans un apport d'engrais chimique. De ce fait, l'utilisation de
l'agrobiodiversité permet aux paysans pauvres de réduire l'utilisation des intrants
chimiques onéreux, de maîtriser les risques et par conséquent de rendre leur agriculture
plus durable.
•:. une alimentation diversifiée et d'autres fonctions socio-économiques: l'agrobiodiversité
regorge des cultivars qui répondent à des préparations culinaires différentes. D'autres
cultivars par contre sont cultivés pour leurs fonctions cultuelles, culturelles ou sociales.
Certains sont cultivés pour le revenu qu'ils génèrent à l'exploitation.
•:. la sécurité alimentaire: la maturité physiologique des différents cultivars est différée
dans le temps (les cultivars sont récoltés à différentes dates). Ainsi les exploitations
agricoles pauvres parviennent à étaler les récoltes dans le temps et à disposer du stock
de vivrier nécessaire pour passer les périodes de soudure et donc pour lutter contre
l'insécurité alimentaire dans le ménage.
3. Dans quelle mesure l'agrobiodiversité est-elle menacée?
L'état actuel de la diversité génétique réalisé par la FAO (2000) indique des données
inquiétantes. On pense en effet que la diversité des cultures a été réduite de 75% environ
depuis le milieu du 19 ème siècle. Alors que jadis, l'homme utilisait plusieurs milliers
d'espèces végétales pour se nourrir et se vêtir, ce nombre est ramené aujourd'hui à 150
environ et même seulement à 12 dans certains endroits (GTZ, 2000). Si ces statistiques
diffèrent selon les études, elles ont tout de même le mérite de poser le problème. Les causes
de l'érosion de l'agrobiodiversité sont multiples.
En Afrique sub- saharienne, on note une croissance démographique galopante associée aux
problèmes climatiques. Pour répondre à la demande alimentaire de cette population, on
assiste à une extension de l'agriculture commerciale moderne faisant intervenir des variétés
hautement performantes. Dans les zones où le climat est aride ou semi-aride les
écosystèmes se modifient continuellement, de même que les pratiques culturales
notamment à travers la réduction des jachères et le développement des cultures de rentes.
Selon Zoundjihèkpon et al., (1999), le développement du café et du cacao en Côte d'Ivoire,
du coton au Bénin et au Mali conduit actuellement à des problèmes de conservation des
12
DEAADEn2003 BAca Mohamed Nasser
ressources génétiques. Les législations et les politiques nationales soutiennent souvent
unilatéralement ce type d'agriculture, sous la pression parfois d'accords internationaux.
D'autres facteurs contribuent aussi à l'érosion de l'agrobiodiversité et des savoirs-faire s'y
rapportant comme par exemple les nouvelles habitudes alimentaires, les changements
climatiques, les conflits politiques ou les guerres intestines et les mouvements de réfugiés
qu'ils occasionnent.
Dans ces conditions, les générations futures auront de moins en moins de matériel
génétique pour faire des sélections d'adaptation.
4. Prise en compte de la biodiversité par l'économie
« La biodiversité est l'une des plus grandes richesses de la planète, et pourtant la moins
reconnue comme telle » (Wilson, 1992). Wilson relaye ainsi l'appel de certains écologues
comme Meyers (1983) qui demandaient l'intégration des aspects économiques dans la
protection de la biodiversité. La convention sur la diversité biologique (PNUE,1992) vient
formaliser cette vision. Elle s'inscrit dans un contexte de libéralisation des échanges et de
mondialisation. Le marché joue un rôle croissant dans tous les secteurs de la société alors
que l'Etat voit son rôle diminuer (Revéret et Webster, 1997). Dans l'article 11 de la
convention, on fait expressément appel à J'économie et aux mesures sociales rationnelles
pour conserver et utiliser durablement les éléments constitutifs de la diversité biologique.
Le premier intérêt des économistes de l'environnement a été de déterminer la valeur
économique totale de la biodiversité. Pour y parvenir, il est important de cerner toutes les
fonctions écologiques de la biodiversité. Revéret et Webster (1997) signalent que la
détermination de cette valeur économique totale de la biodiversité ne se limite pas
seulement à l'évaluation de la valeur d'usage mais aussi de la valeur de non-usage et de la
valeur d'option.
Pour les économistes néo-classiques, la préservation de la biodiversité ne se justifiera que
dans la mesure ou la valeur totale des bénéfices nets de la conservation est positive
(Pearce, 1996) Cette évaluation amène à s'interroger sur l'optimum économique de cette
biodiversité. On peut se demander s'il correspond aux seuils limites d'utilisation de cette
dernière. Répondant à la question, Milon (1995) fait le lien entre la valeur économique totale
de la diversité biologique et le concept de soufenabilifé.
Face à cette question, deux auteurs sont généralement cités: Solow et Holling. La
soutenabilité selon Solow est fondée sur la substitution du capital naturel par le capital
fabriqué. Cette soutenabilité qualifiée de faible se distingue nettement de la soutenabilité à la
13
DEAADEn2003 BACO Mohamed Nasser
Holling (soutenabilité forte) qui prône le maintien du capital naturel. La soutenabilité forte ne
conçoit pas la substitution entre les deux formes de capital. Dans le cas de l'agrobiodiversité,
cette dernière soutenabilité est difficilement réalisable. Les paysans participent à
l'enrichissement ou à la diminution de leur pool variétal à travers la substitution continuelle
du patrimoine initial par du matériel nouveau. Deux questions se dégagent: toute la diversité
est-elle substituable ? Peut- on dire que la stabilité et la résilience des agrosystèmes ont été
possibles grâce à l'apport par les paysans de «sang neuf» dans le pool variétal? Il est
difficile de répondre à ces questions. Compte tenu de l'incertitude quand au degré de
substituabilité et les incertitudes entourant la relation entre biodiversité, résilience et maintien
des écosystèmes, le principe de précaution devrait nous conduire à n'envisager qu'avec la
plus grande prudence toute diminution de cette biodiversité (Revéret et Webster, 1997).
5. Les conventions et les débats politiques sur la biodiversité
L'analyse du cadre politique et législatif de la gestion des ressources biologiques agricoles
relève d'une analyse multi-scalaire qui prend en compte le Bénin, la sous-région ouest
africaine et la communauté internationale. Sur la plan sous-régional, dans le but d'améliorer
les performances économiques liées à l'agriculture, les seize pays de l'Afrique de l'Ouest ont
créé en 1975 la Communauté Economique Ouest Africaine (CEDEAO) (Grain 2003, a). Ces
pays, parmi lesquels il yale Bénin, ont signé, ratifié et mis en œuvre des Conventions et
Traités Internationaux relatifs à la gestion de l'agriculture et de la biodiversité. C'est le cas :
de la Convention sur la Diversité Biologique, l'Accord sur les Droits de Propriété liés au
Commerce (ADPIC), la Convention sur la désertification, la Convention sur les zones
humides, la convention sur le changement climatique ... Nous analyserons brièvement les
deux premières conventions et les implications qu'elles entraînent sur la conservation de la
diversité biologique en général et sur l'agrobiodiversité en particulier.
5.1. La Convention sur la Diversité Biologique (CBD)
L'utilisation traditionnelle des ressources biologiques se trouvait sous le contrôle social des
familles et des communautés. Les semences et les plantes médicinales étaient échangées
entre paysans et guérisseurs traditionnels. Ainsi les ressources génétiques appartenaient à
l'humanité, et n'importe qui pouvait aller n'importe où chercher n'importe quelles ressources
génétiques sans restriction (GRAIN, 2000).
Au sommet de Rio en 1992, le contexte a changé avec la signature de la CBD. Cette
convention, ratifiée par le Bénin reconnaît le droit de souveraineté des Etats sur leurs
ressources. Désormais, la collecte des ressources est subordonnée à l'accord préalable des
14
DEAADEn2003 < BACO MohamedNasser
Etats. La CBO vise entre autres, le partage juste et équitable des bénéfices tirés de
l'exploitation des ressources génétiques.
La CBO stipule en son article 8 alinea j, que chaque partie contractante «... sous réserve
des dispositions de sa législation nationale, respecte, préserve et maintient les
connaissances, innovations et pratiques des communautés autochtones et locales qui
incarnent des modes de vie traditionnels présentant un intérêt pour la conservation et
l'utilisation durable de la diversité biologique et en favorise l'application sur une plus grande
échelle, avec l'accord et la participation des dépositaires de ces connaissances, innovations
et pratiques et encourage le partage équitable des avantages découlant de l'utilisation de
ces connaissances, innovations et pratiques». Ainsi cet article soutient et recommande la
nécessité d'une conservation in situ de la biodiversité. Si ce texte comme plusieurs autres
fait référence aux populations locales, à la prise en compte de leur savoir-faire et leurs
connaissances traditionnelles, force est de reconnaître qu'en Afrique de l'Ouest, les
populations ne sont généralement pas informées des engagements pris en leur nom par les
autorités politiques nationales (GRAIN, 2003 a).
Dans un document sur la mise en œuvre au Bénin de la CBD (sur Internet), il est écrit que le
bilan des actions menées au Bénin depuis le sommet de Rio est positif bien qu'il reste
beaucoup à faire. Entre autres actions menées depuis lors, on peut citer l'élaboration de
stratégies sectorielles pour la gestion durable des ressources biologiques, la mise en œuvre
du Plan National de Gestion de l'Environnement, l'identification des modes d'exploitation
actuelles des ressources biologiques (par exemple en agriculture), la prise en compte dans
l'élaboration de la stratégie d'action pour la conservation de la biodiversité de l'accès aux
ressources.
La CBO vise aussi de façon ambiguë « le partage juste et équitable des bénéfices tirés de
l'exploitation des ressources génétiques ». Les problèmes nés des droits de propriétés sur la
biodiversité amèneront Aubertin et Boisvert, (1998) à parler d'une mise en œuvre
conflictuelle. •
5.2. Le Traité International sur les ressources phytogénétiques pour
l'alimentation et l'agriculture (TIRPAA)
Pendant longtemps les ressources génétiques étaient considérées comme un patrimoine
commun de l'humanité. Leur accès était libre et sans contrainte. Certaines puissances
financières et industrielles en avaient profité pour développer des semences particulières
(rendement, résistance...) et des produits commercialisables. Ces inventions protégées par
15
DEAADEn 2003 ,-,BACO Mohamed Nasser
des droits de propriété intellectuelle: (brevets, certificats d'obtention végétale, marques
déposées, droits d'auteurs, secrets commerciaux, etc... ) leur ont généré des bénéfices
considérables (Boisvert et Vivien, 1998). Pendant ce temps les communautés d'origine de
ces ressources n'ont reçu en retour ni transfert de technologie, ni contrepartie monétaire.
Cette situation a engendré des contestations et des conflits. Pour répondre aux
revendications des Pays en Développement, la FAO a initié des négociations sur
l'Engagement Internationale sur les ressources phylogénétiques en 1983. Dans cet
engagement, la notion de ressources génétiques comme patrimoine de l'humanité a été
retenu. Mais il a été ajouté des mécanismes de financement comme compensations pour les
pays d'origine des ressources. Malheureusement, ces «royalties» doivent être versées
délibérément et de façon volontaire par les pays ou entreprises qui le désirent dans un fonds
international. Face aux échecs de ce fonds, la FAO a défini en 1989 le «droit des
agriculteurs» qui reconnaît le travail de domestication et d'amélioration des variétés locales
pendant des générations successives d'agriculteurs. Ce droit devait être rémunéré. Les
Etats-Unis à travers leur politique de protection par brevet, ont fait échouer cette proposition.
Cette situation a de nouveau provoqué le mécontentement des pays du Sud qui demandent
la souveraineté nationale sur les ressources phylogénétiques (Trommetter, 2002). Ce droit
leur sera concédé en 1992 dans la CDB de même que leur responsabilité dans la gestion et
la conservation de ces ressources.
Sur la base de sa mission qui est d'assurer la sécurité alimentaire pour tous les peuples de
la planète, la FAO a poursuivi les négociations sur l'engagement international initiées en
1983. Elle est parvenue en 2001 à élaborer le Traité International sur les ressources
phylogénétiques pour l'agriculture et "alimentation. Ce traité est une avancée vers le libre
accès rémunéré généralisé. Il offre un cadre agréé par la communauté internationale pour la
conservation et l'utilisation durable ressources génétiques intéressant l'alimentation et
l'agriculture. Parmi la trentaine d'espèces concernées par le système multilatéral se trouve
l'igname, ce qui est un avantage pour sa conservation in situ.
La liste des espèces n'est pas exhaustive et les espèces qui ne figurent pas dans cette liste
seront gérées par la CDB. On constate bien que la solution n'est pas définitive et à ce jour
des préoccupations demeurent encore sans solution.
5.3. Les réglementations de l'accès et du partage des bénéfices
Après l'entrée en vigueur de la CBD, l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) à travers
son Accord sur les Droits de Propriété Intellectuelle liés au Commerce (ADPIC) oblige les
pays membres à reconnaître les droits de propriété sur les obtentions végétales pour faire
16
DEAADEn2003 BACO Mohamed Nasser.;:.
partie de l'OMC. Ainsi, l'OAPI sous l'incitation de l'UPOV et de l'OMPI révise l'accord de
Bangui signé en 1977 et qui concerne les innovations industrielles. Le Bénin tout comme les
autres pays n'ayant pas de législation nationaJe relative à l'accès aux ressources biologiques
et au partage des bénéfices, les multinationales continuent d'exploiter les ressources sans
payer de royalties, allant même jusqu'à déposer des brevets sur ces ressources. Ce type de
collecte des ressources biologiques est qualifié de bio-piraterie par RAFI/ETC (1999).
Comme exemple de plantes africaines sur lesquelles il y a des brevets, on peut citer:
Dioscorea dumetorum (igname jaune), Thaumatococcus daniel/i, Pygeum Prunus africana,
Hoodi trichocaulon, Dioscoreophytum cumminisii, Harpagophytum procumbens, etc (Grain,
2003 b). L'accord révisé de Bangui signé par les pays francophones d'Afrique, dont le Bénin,
est entré en vigueur en février 2002. Cet accord donne des droits commerciaux exclusifs à
ceux qui produisent des variétés végétales qui sont nouvelles, distinctes, uniformes, et
stables, c'est-à-dire les multinationales (GRAIN, 2003, b). Les paysans auront à payer des
redevances sur les nouvelles semences et n'auront le droit de destiner une partie de leur
récolte pour les plantations futures que sous certaines conditions. Dans cet engrenage
politique-commercial l'igname se trouve en bonne place. En effet, il n'existe pas de brevet
qui soit déposé sur l'igname. D'autre part, la loi modèle de l'OUA sur l'accès aux ressources
biologiques et les droits de propriétés des communautés locales semblent être une
alternative. Ce projet de loi adoptée par le sommet des Chefs d'Etat à Lusaka (Zambie) en
juillet 2002 a quatre composantes:
• l'accès aux ressources biologiques nécessite une autorisation et l'accord préalable
donné par les communautés;
• les droits des communautés locales sont inaliénables, collectifs et impliquent le
contrôle de l'accès aux ressources et aux connaissances.
• les droits des agriculteurs impliquent la protection des récoltes et des semences, en
accord avec les critères issus des pratiques traditionnelles, le droit de conserver...
• les droits des sélectionneurs.
Cette loi sert aujourd'hui de modèle à certains pays, dont le Bénin, dans l'élaboration de leur
législation nationale. Le comité de la stratégie nationale pour la biodiversité prend en
compte:
• la rédaction d'une législation sur l'accès aux ressources génétiques, le partage des
bénéfices et la protection des connaissances traditionnelles,
• la sensibilisation et la formation des dépositaires de ces connaissances sur la
propriété intellectuelle.
17
DEAADEn2003
&. Méthodes deconservation de l'agrobiodiversité
BACOMohamed Nasser
6.1. Des méthodes empiriques à l'instrumentalisation internationale
Avant la prise de conscience internationale sur les enjeux de la diversité biologique, la
gestion des ressources génétiques végétales a été assurée par les utilisateurs de cette
diversité. Dès le 17ème siècle, les puissances coloniales ont créé des collections de matériel
phytogénétique sous forme de jardins botaniques avec les diverses espèces végétales que
les explorateurs ramenaient du monde entier (Trommetter, 2002). Au début du 20ème siècle,
les travaux du botaniste Nikolaï Vavilov ont montré l'importance des ressources génétiques
végétales dans l'amélioration de la productivité et la création de nouvelles variétés. Il a
constitué une collection dans son pays avec les échantillons de cultivars venus de toute la
planète afin d'améliorer les rendements des plantes cultivées. Il a fallu près d'un demi-siècle
pour voir certains gouvemements et certaines fondations telles que Ford et Rockefeller
s'impliquer dans l'amélioration variétale et la conservation de ressources génétiques. En
1960, ces actions ont abouti à la création de l'IRRI (Institut International de Recherche sur le
Riz) et la mise sur pieds de 4 collections de ressources génétiques qui deviendront par la
suite des Centres Internationaux de Recherche Agricole (CIRA).
Vers la fin des années 60, les dangers de la révolution verte et la généralisation des cultures
de rente étaient déjà perceptibles. Ainsi au cours de la conférence de la FAO et du
Programme Biologique International il a été convenu de l'importance de constituer de
grandes collections de ressources génétiques végétales (Trommetter, 2002, ). Evitée par le
Club de Rome en 1972, la gestion des ressources génétiques sera largement évoquée à la
conférence de Stockholm sur l'environnement en 1972. La recommandation 39 de cette
conférence demande aux pays de s'entendre sur un programme international de protection
des ressources génétiques mondiales. Cette mission a été confiée au Groupe Consultatif
pour la Recherche Agronomique International (CGIAR en Anglais), créé en 1971. Le CGIAR
poursuit la création d'autres Centres et une nouvelle organisation coordonnatrice, le Conseil
International des Ressources Phytogénétiques (CIRPG). Aujourd'hui, on dénombre un total
de six millions d'échantillons maintenus en banques de gènes. Parmi ceux-ci, 600 000 sont
conservés par les Centres Internationaux faisant partie du Groupe consultatif pour la
Recherche Agronomique Intemationale (CGIAR) (FAO, 1996, Gass, 1998).
6.2. Les méthodes de conservation retenues dans la CDS
Deux méthodes de conservation ont été reconnues dans la COB. Il s'agit de la conservation
ex situ (article 9) et de la conservation in situ (article 8).
18
DEAADEn2003 BACO Mohamed Nasser
6. 2.1. La conservation ex situ
Dans l'article 9 de la COB, elle a été définie comme la conservation d'éléments constitutifs
de la diversité biologique en dehors de leur milieu naturel. Les principales techniques
utilisées sont les banques de gènes, les jardins botaniques, la culture in vitro, la
cryoconservation. Ce sont les matériels génétiques ayant une valeur économique importante
ou présentant un intérêt pour les généticiens qui sont le plus souvent conservés dans ces
milieux artificiels. Selon Zoundjihèkon et al, (1998) on enregistre de nombreuses pertes dans
cette forme de conservation.
Les jardins botaniques: ce sont des jardins de végétation appartenant à des organismes et
structures de recherche. Il existe des jardins botaniques d'ignames en Guadeloupe, en
Nouvelle-Calédonie, au Ghana, en Inde, au Nigeria, au Bénin... Les pertes de ces
collections sont très élevées et peuvent atteindre 25% par an (Zoudjihèkpon et al. 1996). Les
pertes sont liées aux retards de plantation, aux non levées après plantation et aux attaques
des parasites (Hamon et al., 1995). Ce mode de conservation des ressources génétiques
nécessite de grands espaces et d'importants moyens financiers pour la plantation et
l'entretien des cultures.
Les banques de gènes: ce sont des chambres froides qui permettent de conserver les
gènes d'ignames. La difficulté ici réside dans la fourniture permanente de l'énergie
électrique. L'approvisionnement de l'énergie électrique des pays comme le Bénin dépend du
régime des cours d'eau, des fluctuations de niveaux d'eau dans les barrages. Cette situation
précaire conduit à des délestages saisonniers engendrant la perte de la diversité conservée
dans les chambres froides.
La conservation in vitro: sur l'igname, elle a été développée par l'ex-ORSTOM, "IRSDA,
"Université Nationale de Côte d'Ivoire et l'liTA au Nigeria. Les difficultés dans l'utilisation de
ce mode de conservation sont: l'obtention d'une bonne asepsie, le brunissement du milieu
de culture, la période de mise en culture et les génotypes utilisés. Le complexe Dioscorea
cayenensis- rotundata est très difficile à conserver in vitro car certains génotypes se
montrent récalcitrants. (Zoudjihèkpon et al., 1999).
La cryoconservation: c'est la conservation dans de l'azote liquide des méristèmes prélevés
sur des vitroplants. Ce produit chimique coûte cher et n'est pas toujours disponible.
Dans l'ensemble, les techniques de conservation ex situ sont exigeantes en logistique, elles
sont onéreuses et les Etats surtout du Sud n'arrivent pas à y faire face. Les difficultés de
conservation ex situ de l'igname sont aggravées par le mode de multiplication de la plante.
L'igname est une plante à multiplication végétative dont la conservation ne se fait pas de la
même façon que les céréales. Dans ces conditions, les collections se perdent. C'est le cas
19
DEAADEn 2003 BACO MohamecJ Nasser
des collections d'ignames de l'université de Cocody en Côte d'Ivoire, de l'liTA au Nigeria, de
l'IRAT au Bénin et au Burkina Faso qui ont drastiquement diminué au fil des années.
La conservation ex situ a cependant des avantages. Dans cette forme de conservation, il est
relativement facile d'identifier le matériel conservé étant donné que les matériels sont
complètement documentés. De plus la diversité génétique maintenue par cette méthode est
directement contrôlable (Brown, 2000).
6.2.2. La conservation in situ
La CDB la définit comme la conservation des écosystèmes et des habitats naturels, le
maintien et la reconstitution de populations viables d'espèces dans leur milieu naturel et
dans le cas d'espèces domestiquées et cultivées dans le milieu où se sont développés leurs
caractères distinctifs.
Pour Louette et Smale, (1996) c'est la préservation, dans leur agroécosystème original, de
variétés cultivées par les paysans en utilisant leurs propres méthodes et leurs critères de
sélection. Elle désigne la gestion durable de la diversité des cultivars locaux associés aux
formes et espèces sauvages par les paysans dans leur système agricole traditionnel
(Maxted et al.,1997). La conservation in situ est censée :
• conserver les processus d'évolution et d'adaptation, les conditions qui favorisent la
création d'autres cultivars. Elle est dynamique, et favorise les interactions entre les
plantes sauvages et les cultivées.
• conserver la diversité aux trois niveaux: de biodiversité mentionnés dans la CDB:
inter espèces, intra espèces, et l'écosystème. Elle permet aussi de maintenir la
diversité des pratiques endogènes (diversité culturelle).
• intégrer les paysans dans les systèmes nationaux de conservation des RPG. Les
paysans sont ici perçus comme des partenaires dans le maintien des cultivars
sélectionnés.
• conserver les services de l'écosystème.
• augmenter les moyens de subsistance des paysans pauvres.
• maintenir l'accès et le contrôle des paysans sur les ressources génétiques.
7. Quelques facteurs pouvant influencer le maintien de la diversité
Certains travaux antérieurs ont révélé qu'il existe des facteurs qui peuvent influencer la
gestion de la diversité. Entre autres facteurs, on peut citer:
Les facteurs socio- culturels: les mutations culturelles peuvent réduire les pratiques qui
valorisent et maintiennent la diversité des cultures. Ainsi, sur le niébé au Bénin, ce sont
20
DEAADEn 2003 BACO Mohamed Nasser
surtout les variétés rouges de niébé peu cultivées qui sont utilisées pour les cérémonies.
Cette nécessité d'avoir les variétés rouges pour ces cérémonies amènent certains paysans à
réserver des petites parcelles à la culture de ces variétés (1999). Brush (1995) et Zimmerer
(1996) étudient les rôles spécifiques des cultivars traditionnels qui sont utilisés pour faire des
plats particuliers lors des cérémonies.
les facteurs techniques: L'adoption de nouvelles technologies (intrants agricoles,
nouvelles variétés, techniques culturales, matériels de production...) est aussi perçue
comme un facteur qui influence le maintien de la diversité, souvent négativement. Ainsi sur
le riz, cela a été observé dans la vallée Cagayan aux Philipines. Les producteurs ont
abandonné leur variété locale à régime pluvial pour adopter une variété améliorée à régime
irrigué (Bellon et al. 1998 a). Dans une étude sur la fertilité du sol au Nord- Ouest du Bénin,
Mulder (2000) a noté que comment les paysans s'orientent davantage vers les cultures qui
bénéficient d'intrants agricoles.
les facteurs du marché: Selon Bellon (2001), l'explication conventionnelle que l'on trouve
pour expliquer la perte de la diversité dans un système de marché est la demande, cela
suppose que les paysans remplacent leurs variétés traditionnelles par des variétés qui
génèrent plus de revenus. Quelle est la situation sur l'igname?
les réseaux sociaux: Dans une étude réalisée sur la maïs en mesoamérique, Bellon
(2001) rapporte que les paysans indigènes se reposent mutuellement les uns sur les autres
pour accéder à la semence et à l'information sur les caractéristiques des différentes variétés.
Ce même constat a été fait par Emperaire et al. (1998) sur le manioc en amazonie. Le tissu
social est-il aussi un support de la circulation des vartétés d'igname entre paysans?
les facteurs socio-économiques: Selon Jarvis et al. (2000), les paramètres socle
économiques tels que l'âge, le genre, le niveau de prospérité, le statut social, l'ethnie
d'origine sont des éléments qui influencent la diversité cultivée. Au Burkina Faso, les
femmes possèdent des champs en dehors du champ familial où elles cultivent des variétés
et des cultures qui seront vendues sur le marché pour satisfaire les besoins de l'exploitation
(Belem, 2000). Au Nepal, Rana et al., (2000) montrent que les variétés de riz cultivées,
dépendent du niveau de prospérité des exploitations. Les riches cultivent les variétés à haute
valeur commerciale et alimentaire alors que les pauvres préfèrent les variétés résistantes à
l'inondation. La diversité des cultivars d'igname est-elle aussi influencée par ces
déterminants socio-économiques?
21
DEA ADEn 2003
Cadre méthodologique
BAca MohamedNasser
Dans cette partie, je présenterai l'igname, j'examinerai successivement les caractéristiques
du milieu, les techniques d'échantillonnage et la taille de l'échantillon, les méthodes et
instruments de collectes des données, les données collectées , les outils d'analyses et les
limites des données collectées. L'étude du milieu permettra d'avoir une vue panoramique du
pays, de la région et de la zone enquêtée.
1. Brève présentation de l'igname (Dioscorea Sp.)
Les ignames sont des plantes herbacées volubiles à tubercules (Photo 1 & 2). Elles ont une
répartition très large, qui couvre tous les continents, et sont adaptées à des milieux
écologiques très divers. Elles appartiennent au genre Dioscorea de la famille des
Dioscoreacées, rattachée aux Monocotylédones. En Afrique , on dénombre une vingtaine
d'espèces autochtones ou introduites (Miège et Lyonga, 1982 ; N'Kounkou et al., 1993). La
domestication de plusieurs d'entre-elles a fourni des ignames cultivées, qui sont aujourd'hui
regroupées dans le complexe D. cayenensis- D. rotundata (Hamon et al. 1997). En Afrique
de l'Ouest, l'essentiel de la production repose sur les ignames du complexe D. cayenensis
D. rotundata. Cependant d'autres espèces peuvent avoir localement une grande importance
économique. C'est le cas de D. a/ata d'origine asiatique , qui prédomine dans le centre de la
Côte d'Ivoire et de D. dumetorum , espèce autochtone en Afrique très cultivée dans la partie
occidentale du Cameroun.
Photo 1 : Plant d'igname Photo 2 : Tubercules d'igname
22
DEA ADEn 2003 BACO Mohamed Nasser
Les ignames constituent une ressource vivrière essentielle pour de nombreux pays d'Afrique
de l'Ouest. La production est pour une large part, directement utilisée par les agriculteurs,
mais elle est aussi commercialisée pour approvisionner les marchés urbains. Les tubercules
sont généralement consommés sous forme de purée compacte. Récemment, leur
transformation en cossettes séchées s'est développée au Nigeria et au Bénin.
2. Présentation de la République du Bénin
La République du Bénin est un pays ouest africain situé entre le Nigeria à l'est, le Togo à
l'ouest, le Niger et le Burkina Faso au nord et enfin l'Océan Atlantique au sud (figure 1). Elle
se présente comme une longue bande de terre mesurant environ 700 Km du Golfe du Bénin
(sud) aux rives du Niger, entre le sixième et le douzième parallèle Nord. La superficie du
Bénin est de l'ordre de 114 763 Km2. D'après le dernier recensement général, la population
du Bénin est estimée 6 500 000 habitants, correspondant à une densité de 45 habitants/
Km2. '64% de cette population résident en milieu rural.
~--"'----"-------~--" -'-"" _._------~"--
~d'~::.:.~·~::':~:':':":.1 _ t';"",. ~.-: ~:'f; 1':' ....J'X) •
Figure 1 : Localisation de la République du Bénin : Nord Ouest de l'Afrique
Le Bénin est divisé en deux grandes zones climatiques: le sud et le nord . Le sud jouit d'un
climat modéré et relativement peu pluvieux. C'est un climat de type équatorial caractérisé
par une forte humidité et une température relativement constante avec deux saisons de
pluies et deux saisons sèches . Quant au nord, c'est le climat de type tropical avec de plus
grands écarts de température et un degré hygrométrique bien moindre que dans le sud. On y
distingue deux saisons : une saison pluvieuse et une saison sèche.
23
DEA ADEn 2003 BAGa Mohamed Nasser
Nous avons choisi la zone nord pour cette étude car elle est la zone par excellence de
production d'igname. La culture de l'igname est comprise entre les latitudes 8,50 et 110 Nord
(Dossou, 1993) et mobilise 65% des producteurs.
Pour appréhender la démarche méthodologique de choix des espaces territoriaux de l'étude,
il importe de s'intéresser au découpage administratif du pays. Administrativement, le Bénin
est divisé en 12 départements. Chaque département est à son tour divisé en communes. Les
communes sont des entités territoriales composées généralement d'une ville principale et de
plusieurs villages. Avant ce nouveau découpage administratif intervenu en décembre 2002 (il
Y a moins d'un an), le Bénin comptait 6 départements. Notre étude tient compte de cet
ancien découpage dans la mesure où les données statistiques actuellement disponibles ne
sont pas encore actualisées et ne concernent que les anciens départements.
Les 6 départements que comptait le Bénin sont: Atacora, Atlantique, Borgou, Mono, Ouémé,
et la Zou. Notre étude a été conduite dans le département du Borgou. Il a été choisi car sa
production d'igname représente 44% de la production nationale ce qui le place en première
position par rapport aux 5 autres départements (figure 2).
Figure 2 : Importance de la production de l'igname dans les 6 départements du Bénin
3. Caractéristiques du département du Borgou
Le département du Borgou se situe au Nord- Est de la République du Bénin. Il est limité au
Nord par la République du Niger, au Sud par le département des collines, à l'Est par la
République Fédérale du Nigeria et à l'Ouest par la République du Burkina Faso et le
département de l'Atacora (figure 3). La superficie du Département du Borgou est de 51 000
Km2 (soit 45 % du territoire national) , avec 28 000 km2 de terres cultivables (55 % du
département) et 115 000 ha de forêts classées (CARDER, 1998).
24
DEA ADEn 2003 BAGO Mohamed Nasser
En moyenne la durée d'exploitation d'une terre est de 4 ans suivie d'un temps de jachère de
plus de 10 ans. L'indice de Ruthenberq ' calculé sur la base des données recueillies nous
donne R = 28,6 %. D'après Ruthenberg (1980 dans Serpentie, 1993), R < 33 correspond à la
culture itinérante. Avec la forte poussée démographique des milieux ruraux, ce système de
culture itinérante va se heurter aux problèmes de manque de terre. La densité de la
population du département est de 20 habtsl km2 alors que le seuil de densité qui limite la
pratique d'une culture itinérante est de 25 habtsl km2 (Lumeur, 1994). Dans ce contexte, la
durabilité de la production itinérante de l'igname sera bientôt remise en cause. Les paysans
devront faire face à des pratiques d'intensification et de conservation des terres.
".
NIGERIA
l---- - - -f-----'-- -'---------' 6 0
4""E1 0
B. FASO
11 0 mm
1200
900
t
1000
Figure 3 : Carte du Bénin montrant le Département du Borgou et la délimitation l'espace Bariba.
l' Indice de Ruthenberg permet de caractériser un système de culture. R= Cu x 100/ Cu + Ja avec Cu= nbre d'années deculture, Ja= durée de la jachère. Si R > 66, on parle de système de culture permanent, si R < 33, le système de culture estqualifiéd'itinérant, lorsque 33 < R > 66 on parle de système de jachère.
25
DEAADEn2003 BAca Mohamed Nasser
Le Département du Borgou abrite pour une grande partie la société Bariba. On y retrouve
aussi les Gando, les Nagot, les Dendi, les Lokpa, les Peuhl, ... Ces ethnies vivent souvent
en communautés et partagent pour la majorité une même histoire.
L'agriculture constitue la principale activité du Département par son importance et le nombre
de personnes qu'elle mobilise. Elle occupe 43 % des actifs agricoles et nourrit 75 % de la
population du Bénin (INSAE, 1992).
Dans le passé, les cultures vivrières pratiquées étaient essentiellement le maïs, le manioc,
l'igname, l'arachide, le niébé et le sorgho, plus ou moins associées. L'épuisement des terres
était réduit par de très longues jachères, rendues possibles par la grande disponibilité en
terres cultivables. Plusieurs changements sont apparus depuis dans le Borgou. Parmi ceux
ci, on peut citer: l'introduction du coton afin de satisfaire les besoins monétaires,
l'introduction de la culture attelée, l'introduction de la fertilisation minérale et des traitements
phytosanitaires, l'introduction des variétés améliorées (maïs, arachide... ), la structuration du
milieu rural et une intensification de la commercialisation après le développement des
moyens de communication. L'augmentation de la production de certaines cultures s'explique
en partie par ces changements.
On distingue deux grandes zones agricoles : le Borgou- Nord et le Borgou- Sud, qui sont
subdivisées en six sous-zones (CARDER Borgou, 1985). Dans le Borgou- Nord, il y a
premièrement la zone des communes de Malanville et de Karimama caractérisée par une
agriculture basée sur le sorgho - mil, l'arachide, et les cultures irriguées d'oignon et de
pomme de terre. La deuxième zone qui comprend Banikoara, Kandi et Gogounou, a de
fortes potentialités cotonnières et arachidiaires. La commune de Ségbana, la troisième zone
est comparable à la deuxième, mais elle a des possibilités plus limitées à cause de la faible
densité de la population. Dans le Borgou Nord, le sorgho est le produit vivrier le plus
important.
Le Borgou-Sud connaît également trois sous-zones. Dans la zone de Sinendé, Bembéreké
et N'Dali, il y a un bon équilibre entre les différentes cultures, bien que le coton prenne la
première place. Dans la deuxième, celle de Kalalé, Nikki et Pèrèrè, la production de produits
vivriers est favorisée par la proximité du Nigeria et dépasse la production de coton. La
dernière zone de Parakou et Tchaourou est caractérisée par un développement limité des
cultures de rente comme le coton et l'arachide.
Les principales cultures pratiquées dans le département sont:
> les céréales: mil, sorgho, maïs, riz. Le Département du Borgou vient en tête dans la
production céréalière avec 210854 T soit 29 % de la production nationale (ESA, 1993) ;
26
DEA ADEn 2003 BACO Mohamed Nasser
~ les racines et tubercules: igname, manioc, patate douce, et pomme de terre. Le Borgou
est le premier Département producteur d'igname. " fournit environ 44 % de la production
nationale (MOR, 1998, Baco, 2000) ;
~ les cultures industrielles: le coton, l'arachide
~ les légumineuses: niébé, soja, arachide, voandzou
~ les cultures maraîchères: gombo, tomate, oignon, piment, courge.
Les cultures de rente telles que le Coton, le maïs, le manioc livrent une concurrence à
l'igname. On peut s'inquiéter des répercutions de cette concurrence sur le maintien de la
diversité des cultivars.
Les sols sont majoritairement de type argilo-sablo-ferralitique. Cette composition confère
aux sols des propriétés physiques, chimiques et biologiques favorables au développement
végétatif d'une gamme variée de cultures, dont l'igname.
Le nord du Bénin est une zone qui abrite de fortes populations d'ignames sauvages de
l'espèce Dioscorea abyssinica. Au Bénin, c'est surtout cette espèce qui est domestiquée
(Dumont et Vernier, 1997, Baco 2000). Les paysans utilisent cette espèce pour créer de
nouvelles variétés et faire face aux nouvelles contraintes de l'agriculture.
Le climat du Borgou va du type soudano-guinéen au type soudano-sahélien. Il est
caractérisé par deux saisons: une saison des pluies allant d'avril à octobre avec une hauteur
de pluie variant entre 900 et 1200 mm. Une saison sèche allant de novembre à mars. La
figure 4 montre la répartition mensuelle de la pluviométrie au cours de la campagne 2001
2002 où il a été enregistré environ 975 mm de pluie en 71 jours.
Figure 4 : Pluviométrie (Hm/ mois) du Borgou au cours de la campagne 2002-2003.
27
DEAADEn 2003 BACQMohamed Nasser
Les pluies étant mieux réparties, les paysans se plaignent moins des inondations. Les mois
d'août et de septembre demeurent les plus pluvieux en nombre de jours et en quantité de
pluie. Les fréquentes inondations de ces mois constituent aujourd'hui une importante
préoccupation pour les exploitations situées près des bas-fonds , conduisant à la baisse de
la production, à la perte de certaines variétés d'igname très sensibles et au développement
du complexe parasitaire (cas du village Guessou-bani pendant la campagne 1998-1999).
Les facteurs agroécologiques concernent aussi bien les facteurs abiotiques que biotiques.
Pour faire face aux aléas climatiques, édaphiques et aux facteurs biotiques (parasites,
agents pathogènes... ), les producteurs du nord Bénin détiennent plusieurs variétés qui
peuvent résister à la sécheresse, à l'inondation, aux maladies, aux agents pathogènes, à la
baisse de fertilité des sols... La détention d'un grand nombre de variétés est perçue comme
un moyen de gérer le risque. La diversité variétale est un élément de stratégie anti-risque
(Emperaire et al., 1998). Sur le plateau adja, Agbo (1991), mentionne aussi que la
diversification des cultures et les associations culturales sont des alternatives des paysans
pour gérer le risque et les incertitudes.
Il ressort que les facteurs agroécologiques sont favorables au maintien de la diversité des
cultivars d'igname. Face à leurs caprices, les producteurs ont trouvé des stratégies
alternatives pour s'adapter. Contrairement aux constats de Bellon et al. (1998),
l'intensification agricole et les conditions agroécologiques menacent relativement la gestion
des cultivars d'igname.
4. Choix des communes de Sinendé et de Tchaourou
Les communes de Sinendé et de Tchaourou ont été choisies, pour abriter cette étude pour
plusieurs raisons :
~ Elles sont les deux premières communes en matière de production d'igname (figure
5) dans le Département du Borgou. A la lecture des statistiques de production, il
ressort que la commune de Sinendé vient en deuxième position en matière de
production d'igname après celle de Tchaourou. La production d'igname de ces deux
communes représente plus 35% de la production totale des 14 communes que
compte le département.
~ Les deux communes sont occupées en majorité par les Bariba, ethnie, dont la
civilisation s'est faite avec l'igname. De plus on note une forte diversité linguistique
dans ces deux communes, ce qui pourrait expliquer une partie de l'agrodiversité que
nous voulons étudier (Friis- Hasen 2000).
28
DEA ADEn 2003 BAca MohamedNasser
Figure 5: Production moyenne annuelle d'igname des communes du département du Borgou
(moyenne calculée sur 10 ans, 1991 à 2000).
;.. La plupart des villages de ces deux communes sont accessibles et les paysans sont
ouverts aux innovations. L'intérêt qu'offre le choix de ces villages est triple. En
premier lieu il a permis d'éviter les pertes de temps excessives pendant les prises de
contact. La collaboration des producteurs a été totale. Enfin le choix des villages
accessibles où les paysans sont ouverts aux innovations permet de tester notre
hypothèse selon laquelle la diversité est plus menacée dans les villages ouverts sur
l'extérieur que dans les villages isolés, ce qui justifierait des actions rapides en terme
de conservation.
;.. L'igname produite dans ces deux communes est orientée vers des fonctions
différentes. Les producteurs de Sinendé, auto-consomment majoritairement l'igname
qu'ils produisent alors que ceux de Tchaourou optent beaucoup plus pour la
commercialisation. Les différents usages auxquels les producteurs des deux
communes destinent l'igname permettent de voir en fonction de l'objectif de
production, quelles sont les variétés qui sont cultivées et quelles sont les stratégies
de gestion de ces variétés.
5. Sélection des villages d'étude et des unités d'observation
Par commune, deux villages ont été étudiés soit un total de 4 villages pour l'ensemble de la
recherche. Les villages ont été choisis, de façon à avoir les deux groupes socio-lingustiques
majoritaires de chaque commune.
A Sinendé, ce sont les villages de Wari et de Gorobani qui ont été étudiés. Wari est composé
majoritairement de Bariba alors que Gorobani est surtout peuplé par les Gando.
29
DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser
A Tchaourou par contre, ce sont les villages de Kinnoukpanou et de Yébéssi qui ont été
sélectionnés. Le premier village est composé majoritairement de Nago alors que le second
compte beaucoup plus de Lokpa.
Par commune, 30 exploitations ont été étudiées soit 60 exploitations pour l'ensemble de la
recherche (tableau 1 ). Les exploitations étudiées ont été choisies de façon à avoir toute la
diversité des exploitations agricoles du nord Bénin signalées dans les études diagnostiques
(DRA, 1993; Baco et Djènontin, 2003).
Tableau 1 : Choix des unités d'observation
• ( ) abréviation des ethnies etudiees
Communes Sinendé Tchaourou
Villages Wari Gorobani Kinnoukpanou Yébéssi
Groupe sociolinguistique majoritaire Bariba (B)* Gando (G) Nago (N) Lokpa (L)
Autres ethnies Gando Bariba Bariba Bariba
Nombre d'exploitations étudiées 15 15 15 15
Répartition linguistique des 9 (B) 9 (G) 10 (N) 12 (L)
enquêtés 6 (G) 6 (B) 5 (B) 3 (B)
Total 60. . ..
Il n'y pas eu un taux de sondage prédéfini ayant permis de choisir les exploitations étudiées.
J'ai simplement veillé à avoir plus d'enquêtés appartenant à l'ethnie majoritaire. Les
exploitations ont été aussi choisies de façon raisonnée, de manière à avoir la diversité
soupçonnée. Ainsi nous avons veillé à avoir toutes les ethnies (figure 6), toutes les classes
d'âge, toutes les tailles de superficie présentes dans chaque village étudié.
Figure 6 : Répartition des enquêtés dans les groupes linguistiques
30
DEAADEn 2003
6. Outils et méthodes de collecte des données
BAca Mohamed Nasser
Plusieurs outils et techniques de collecte de données qualitatives et quantitatives ont été
utilisées dans cette étude:
Enquêtes exploratoires: cette étape a permis de parcourir tout le département du Borgou
et d'avoir des données secondaires à travers des discussions que nous avons eues avec
des personnes ressources (responsables du développement rural, chefs de village,
notables... Suite à cette enquête exploratoire une base de données a été établie et a permis
de choisir les villages à étudier.
Récits de vie: ce sont des entretiens au cours desquels, nous avons amené les
producteurs à relater leur profil historique orienté sur la production d'igname, les variétés
qu'ils cultivent et la gestion qu'ils font de ces variétés.
Entretiens semi-structurés: ils ont été conduits individuellement avec les producteurs
individuels, les responsables de groupement villageois à l'aide de fiches de collecte de
données. Un exemplaire de ces fiches est mis en annexe 1 de ce document. Les
producteurs ont été interrogés sur différents aspects de la production, d'igname, de la
conservation des tubercules, de la transformation et de la gestion de la diversité variétale,
les utilisations (culturelles, alimentaires, économiques...) des variétés.
Entretiens de groupe au niveau du village: afin de cerner toute la diversité des situations
les entretiens ont été faits à l'échelle du village pour discuter avec plusieurs producteurs. Par
village, il y a eu en moyenne 3 entretiens de groupe. Les entretiens ont été chaque fois
conduits avec environ 10 personnes choisies au hasard dans le village. Ces entretiens ont
permis de recenser les informations d'ordre général (écosystèmes abritant les ignames
sauvages et susceptibles d'être préservés, le répertoire des variétés cultivées, les origines et
l'historique des variétés cultivées...).
Recherche documentaire: les sources documentaires écrites ont servi à avoir une bonne
connaissance de la zone d'étude, à circonscrire l'étude et à avoir les données secondaires.
Les bibliothèques de l'université d'Orléans, de l'IRD, du CARDER, de la FSA, de l'liTA, de
l'IPGRI, de l'INRAB et de l'INSAE ont été visitées à cet effet.
Observation participante: c'est une immersion prolongée de l'enquêteur dans le milieu de
vie des enquêtés. Dans ce cadre, nous avons pris part à plusieurs activités où nous avons
observé les acteurs du milieu rural dans leur vécu quotidien (travaux champêtres y compris
la récolte des ignames sauvages, savoirs liés à ces travaux, circulation des variétés entre
paysans, gestion de la diversité variétale après la récolte) et écouté leurs propos en public
comme en privé.
31
DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser
Triangulation: cette démarche a permis de confronter les informations obtenues au niveau
des producteurs individuels à celles tirées des sources indépendantes. Pour cela, deux
informateurs clés ont été choisis par village pour parler des 15 producteurs, de leur niveau
de prospérité, de la culture de l'igname, du nombre de variété, de la gestion de ces variétés,
de la commercialisation des ignames... Les informateurs clés sont dans chaque village les
secrétaires des groupements villageois. Ils détiennent de par leurs fonctions des
informations (taille de l'exploitation, cultures et superficies consacrées à chaque culture,
capacité matérielle et financière ... ) sur la quasi-totalité des producteurs du villageois.
7. Données collectées et outils d'analysesPlusieurs données ont été collectées et analysées (tableau 2)
Tableau 2 : Récapitulatif des données collectées et des outils d'analyse
Relatif à Données collectées Sources de Instruments de mesure Outils d'analyse
données
Nombre d'actifs de Exploitation Moyenne, ratio de
l'exploitation agricole Interview semi-structurée dépendance
Superficie emblavée en Exploitation Interview semi-structurée Statistique descriptive:
igname agricole moyenne, Anova
Objectifs Nombre de variétés Exploitation Interview semi-structurée, Régression, Indice de
1 et 2 cultivées par exploitation et agricole entretien de groupe, similarité de Sorensen « Four
par village Tout le village observation participante square analysis »
Caractéristiques des Exploitations Interview semi-structurée Hiérarchisation
variétés Village et entretien de groupe Classification matricielle
Critères paysans de Exploitation Interview
reconnaissance des agricole Observation participante Classification par score,
variétés cultivées
Mode et plan de semis des Exploitation Plan des champs
variétés d'igname agricole Observation directe
Objectif Mode de récolte des Exploitation Plan des champs Analyse descriptive des
3: variétés agricole Observation directe pratiques, moyenne, plan de
Méthode de conservation Exploitation Visite des greniers répartition spatiale des
des variétés cultivées agricole Observation directe variétés.
Origine et flux des variétés Exploitation Profil historique Graphe, analyse de discours,
cultivées agricole, village Interview semi-structurée analyse descriptive
Importance/raisons de la Exploitation Dénombrement, interviews, Coefficient de Sorensen
production des variétés agricole Tableaux et graphes
Caractéristiques des Exploitation Observation directe Corrélation, régression
Objectif utilisateurs des variétés agricole Interview semi- structuré Tableau, pourcentage
4: Caractéristiq ues des
centres de conservation Documentation Tableau de comparaison
32
DEA ADEn 2003 BAca Mohamed Nasser
Pour mieux comprendre pourquoi les paysans maintiennent la diversité, où ils la
maintiennent, et pour détenniner les points d'action, je procéderai à une analyse participative
de la distribution suivant la méthode des 4 carrés connue sous le nom de « four square
analysis ».
Le « four square anlysis » implique les agriculteurs. Il pennet de bénéficier de la capacité
analytique des producteurs et de les amener à juger de l'état des cultivars locaux qu'ils
maintiennent au champ. L'exercice se fait en groupe hétérogène comprenant des vieux et
des jeunes. Pour une conduite plus facile, j'ai travaillé avec une moyenne de 15 paysans par
village. Ils sont invités à produire une liste de variétés y compris les variétés qu'ils ne
cultivent plus dans le village. Aux jeunes on demande de lister les variétés cultivées
actuellement dans le village et aux vieux on demande de lister les variétés cultivées dans le
passé et qu'ils ne cultivent plus. Les variétés ainsi recensées sont réparties dans quatre
carrés. Ces derniers sont la combinaison de deux critères: le nombre d'exploitation cultivant
une variété quelconque et la superficie qui est consacrée généralement à cette variété. Pour
une meilleure participation des figurines sont proposées par les paysans afin de matérialiser
chaque critère. Les figurines varient en fonction des villages. Par critère, deux groupes sont
possibles. En ce qui concerne la superficie, on a : les groupes grandes et petites superficies
et le critère, nombre d'exploitations se divise en plusieurs et quelques exploitations.
L'inconvénient de l'approche, c'est qu'elle limite les producteurs dans la constitution des
groupes. Les variétés recensées ne peuvent être réparties que dans 4 carrés.
Le fil conducteur des analyses se base sur l'approche préconisée par Jarvis et al. (2000).
Avant toute mise en œuvre de la conservation in situ, certaines questions, méritent réponse:
• Quelle est l'ampleur de la distribution et de la diversité génétique maintenue par les
paysans dans le temps et dans l'espace ?
• Quels sont les processus utilisés pour maintenir cette diversité au champ?
• Quels sont les facteurs qui influencent les décisions des paysans à maintenir la
diversité au champ?
• Qui maintient cette diversité au champ (homme, femme, jeune, vieux, riche, pauvres,
certains groupes ethniques) ?
La réponse à ces questions, pourra pennettre de fournir les bases scientifiques d'une
stratégie effective et à long tenne de conservation de l'agrobiodiversité au champ.
8. Limites du travail
Comme tout oeuvre humaine, ce travail pourrait contenir des imperfections liées aux
conditions de collecte des données et de déroulement de la recherche sur le terrain. J'ai tenu
dans ce paragraphe, à attirer l'attention des lecteurs sur les probables causes de biais.
33
DEAADEn2003 BAca Mohamed Nasser
Cette recherche m'a conduit dans quatre villages où les producteurs parlent des langues que
je ne maîtrise pas. J'ai dû recruter des guides qui m'ont servi d'interprètes sur le terrain. Bien
que les guides soient d'un niveau appréciable, il faut dire que la traduction des questions et
des réponses n'a pas toujours été aisée. Par ailleurs, certains paysans n'ont pas voulu livrer
les informations qu'ils jugeaient délicates et secrètes en présence d'un interprète. Ils
voyaient en lui un producteur d'igname donc un concurrent potentiel susceptible d'utiliser les
recettes qu'ils nous donneraient pour améliorer sa production.
L'igname est une culture annuelle dont la production dure toute une année. Notre stage sur
le terrain n'a durée que 4,5 mois. Ceci ne nous a pas permis de suivre de façon
chronologique les différentes étapes de gestion de la diversité des cultivars depuis la
plantation jusqu'à la récolte. Toutefois, nous avons eu recours aux données antérieurement
collectées pour combler les informations manquantes.
Sur la base des noms et des caractéristiques morpho-botaniques, on peut dire qu'il y a une
grande diversité des ignames cultivées. Nous avons veillé à réduire les duplications de nom
qui pourraient faire penser à plus de variétés. Il est possible que toutes les synonymies ne
soient pas détectées. Dans ces conditions, le nombre de variétés inventorié dans cette étude
devra être revu à la baisse. En général les noms des variétés que je mentionne sont en
Bariba dans le cas où la variété à un synonyme dans cette langue. Autrement, je garde le
nom que l'ethnie qui la détient lui donne.
Je tiens aussi à dire aux lecteurs de ce document que les noms des variétés sont écrits en
alphabet français et sur la base de leur prononciation. Pour être plus fidèle, il aurait été
judicieux de les transcrire selon la démarche des linguistes. Mais faute de maîtrise de cette
approche, j'ai retenu de les présenter sous la forme que vous aurez à lire tout au long de ce
document.
34
DEA ADEn2003
Résultats
BACQMohamed Nasser
1. Ampleur de la diversité variétale maintenue par les paysans dans
le temps et dans l'espace
Il s'agit dans cette partie de faire l'inventaire de la diversité des ignames cultivées dans la
zone d'étude et au niveau des exploitations suivies. Cette description permettra de suivre et
d'identifier les variétés qui ont dans le temps et dans l'espace constitué le support des
systèmes de cultures à base d'igname dans le nord du Bénin.
1.1. Les ignames sauvages rencontrées dans le nord Bénin
Les différents recensements, réalisés dans les formations végétales (savanes et jachères)
du nord Bénin ont permis de dégager six Dioscorera sauvages. /1 s'agit: Dioscorea bu/bitera
L., Dioscorea sansibarensis Pax, Dioscorea dumetorum (Kunth) Pax., Dioscorea smilacitolia
De Wild, Dioscorea togoensis Knuth, Dioscorea abyssinica Hochst. Ex Kunth. Les quatre
premières espèces sont fréquentes dans les écosystèmes humides et les galeries
forestières. Elles produisent des bulbilles et des tubercules toxiques non comestibles. De
toutes les espèces du genre Dioscorea, observées dans la zone d'étude, seule D. abyssinica
présente un intérêt alimentaire pour tous les groupes socio-linguistiques rencontrés. On
l'observe dans les forêts galeries, dans les savanes arborées, naturelles ou en jachère, dans
les milieux perturbés, notamment les bords de piste et de champs. Communément appelés
« Dika» en bariba, les tubercules de cette espèce sont les seuls parmi les 6 à être
« domestiqués» c'est-à-dire transformés en ignames cultivées.
1.2. Les ignames cultivées
1.2.1. Inventaire de la diversité
Pour l'ensemble des terroirs villageois visités et enquêtés, quatre espèces d'ignames ont été
recensées dans les champs: D. cayenensis - D. rotundata, D. a/ata, D. dumetorum, D.
bu/bitera . Chacune de ces espèces est représentée par une ou plusieurs variétés (tableau
3). On remarque que dans cette liste, il n'y a pas les D. abyssinica qui est pourtant l'espèce
que les paysans domestiquent dans la zone d'étude. La dénomination scientifique de
certaines ignames cultivées a posée d'énorme problèmes (Hamon et a/., 1997). Ce sont les
travaux récents (Hladik et al., 1984; Hamon et Touré; 1991, Terrauchi et al. 1992; Dumont
et al., 1994) qui ont montré que, les ignames cultivées actuelles proviennent de plusieurs
espèces. Respectant cette origine plurispécifiques, le séminaire international sur les plantes
à racines et tubercules, tenu au Cameroun en 1978 a recommandé la dénomination D.
35
DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser
cayennensis - O. roundata pour les ignames cultivées dont celles issues de la domestication
des O. abyssinica. Ce regroupement de plusieurs variétés sous le même nom pose des
problèmes qui pourraient se répercuter sur le concept de variété. J'y reviendrai dans la suite
dans la partie discussion.
100%
Tassou
Mokorou
Sangourou
Yanssourérou
Total
O. cayenensis - O. rotundata
O. a/ata
O. dumetorum
O. bu/bitera
Tableau 3 : espèces d'igname cultivée et nombre de variétés correspondantes
Espèces Nom en bariba Nombre de % Superficies
variétés occupées
112 95,8
14 4
1
1
128
Ce résultat est proche de ceux obtenus par Orkwor et al. (1998) et Dumont (1998), qui
totalisent cinq espèces d'ignames cultivées pour toute l'agriculture ouest-africaine. En plus
des 4 espèces que nous signalons pour notre zone d'étude, ils ajoutent O. escu/enta. On
constate aussi que Sinendé a une gamme très importante de variétés cultivées dont la
totalité se retrouve dans l'espèce O. Cayenensis- O. rotundata.
En considérant les quatre espèces cultivées, O. cayenensis - rotundata est la plus
rencontrée dans les champs. Le dénombrement a été fait sur la base des buttes consacrées
à chaque espèce au niveau des 60 exploitations enquêtées. L'espèce O. cayenensis
rotundata occupe environ 96 % des superficies cultivées. Ce résultat est proche de celui
obtenu par Dumont (1998), lorsqu'il rapporte que 90 % des surfaces consacrées à l'igname
dans chacun des différents pays producteurs d'Afrique Occidentale, exception faite toutefois
de la Côte d'Ivoire, sont cultivées avec ce complexe d'espèces.
L'espèce O. a/ata suit avec environ 4 %. Ce pourcentage est faible par rapport à celui de
Côte d'Ivoire (60 % d'après Dumont et Marti, 1997). C'est le bon comportement en
conservation des tubercules qui fait l'intérêt principal de cette espèce. Contrairement à la
Côte d'Ivoire, ce sont les paysans eux-mêmes qui ont assuré son introduction et qui
maintiennent sa diversité génétique depuis de très nombreuses années. Par rapport aux
résultats antérieurs (Saco 2000), on note une légère augmentation des superficies
consacrées à O. a/ata. Cette situation pourrait s'expliquer par la vulgarisation récente de la
variété Florido. On peut encore s'attendre pour les années à venir à une expansion plus
importante de cette variété d'a/ata. Actuellement il parait difficile de conclure sur la
diminution des superficies consacrées aux variétés du complexe O. Cayenensis- O.
36
DEAADEn2003 BACQMohamed Nasser
rotundata suite à une augmentation des Florido. Néanmoins la menace semble réelle. Je
reviendrai sur cette situation dans la partie discussion.
La production de D. durnetorum et D. bu/bifera demeure encore insignifiante. Ceci n'est pas
le cas au Cameroun où Ngeve (1998), souligne l'importance de D. durnetorum dans
l'agriculture. Cette igname se prête à l'échelonnement de la production parce que les
différents tubercules fournis par la plante se développent au cours d'une période de 15
semaines environ et conservent une excellente qualité culinaire aussi longtemps qu'ils
peuvent être maintenus en terre (Trèche, 1984).
Contrairement aux autres espèces cultivées dans la zone, l'espèce D. bu/bifera est cultivée
pour ses bulbilles. Ces dernières sont conservées jusqu'au début de la nouvelle saison des
pluies. A ce moment, les bulbilles ont perdu assez d'eau. Leur goût rappellerait celui de la
pomme de terre.
La production de D. dumetorum et D. bu/bifera est très marginale. Elle ne s'observe que
chez quelques rares paysans, représentées par quelques pieds.
Au total, le complexe d'espèces D. cayenensis- D. rotundata est le plus cultivé parmi
l'ensemble des espèces d'igname retrouvées dans l'agriculture du nord Bénin. La raison
fondamentale qui lui donne ce statut, serait due au fait qu'elle est celle dont les
caractéristiques permettent de faire les plats appréciés par les populations du nord Bénin.
Cette raison couplée au fait que l'espèce D. Cayenensis- D. rotundata a une origine
africaine, m'amène à limiter mon étude à cette espèce. Les résultats que je donne dans la
suite de ce document concernent exclusivement l'espèce D. cayenensis-rotundata.
1.2.2. Les différents groupes de D. cayenensis- D. rotundata
Dans l'ensemble des 4 villages parcourus, les producteurs distinguent trois grands groupes
d'ignames sur la base du cycle de production :
• Les ignames précoces: sur les 112 variétés, 32 appartiennent à ce groupe. Les
variétés de ce groupe sont exploitées en double récolte. La double récolte consiste à
interrompre volontairement le cycle de la plante en récoltant les tubercules appelés
précoces qui seront consommés ou vendus. L'interruption est faite délicatement de
façon à permettre la reprise du cycle. La néo-formation donnera cette fois des
tubercules plus petits qui seront utilisés comme semenceaux à la prochaine
campagne. La première récolte se fait entre (fin juillet à mi-octobre) et la deuxième
entre décembre et janvier.
37
DEAADEn2003 BACO Mohamed Nasser
• Les ignames tardives: elles sont récoltées en une seule fois et tardivement (entre
novembre - janvier). Parmi les variétés recensées, 70 d'entre elles peuvent être
classées dans ce groupe, ce qui représente 63% du total des variétés cultivées.
• Les ignames intermédiaires: Elles peuvent être récoltées en une fois ou en deux fois.
10 variétés au total peuvent passer d'un groupe à l'autre, selon le choix du paysan,
les conditions de culture ou selon les techniques culturales mises en œuvre.
En général, les ignames précoces sont plus grosses que les tardives. Ces dernières donnent
souvent plusieurs petits tubercules par buttes alors que les précoces donnent un maximum
de 3 par butte.
Selon le groupe sociolinguistique, ces classes de variétés portent des noms différents. Les
ignames tardives occupent la plus grande partie des superficies cultivées en igname (tableau
4). Les raisons de cette situation seront abordées par la suite.
Tableau 4 : répartition des variétés recensées dans les grands groupes variétaux.
Types Dénomination Nombre de % des Superficies
d'igname Baribal Gandol Nago Lokpa variétés cultivées
Précoces Tandoua Hê-hapa/a 32 33,0
Tardives Yassounou A/sora 70 58,8
1ntermédiaires - - 10 4,0
Total 112 95,8
1.3. Distribution de la diversité inter et intra villages
1.3.1. Distribution inter villages
Les 112 variétés dénombrées pendant l'étude, ne sont pas produites sur l'ensemble des 4
villages (tableau 5).
Tableau 5 : distribution géographique des variétés dans les villages étudiés
Paramètres Présence dans Total
d'analyse 4 villages 3 villages 2 villages 1 village
Nombre 10 13 19 70 112
Moroko, Singou Gogo Atéoulo
Variétés Exemples Ahimon, Douyessirou Kinkérékou Ofégui
Baniwouré Soussou Bagourou N. moussou
Pourcentage 9 12 17 62 100
La carte de distribution révèle qu'il y a :
38
DEA ADEn 2003 BACQ MohamedNasser
• des variétés cultivées dans chacun des 4 villages: ces variétés sont communes à
tous les villages. Elles ne sont pas menacées de disparition. Ainsi, la multiplication et
la diversification des lieux de production d'une variété est une pratique de
conservation de celle-ci.
• des variétés produites dans 3 villages: à l'instar des premières, elles ne sont presque
pas menacées.
• des variétés présentes dans 2 villages : dans ce cas, des menaces existent et sont
inversement fonction de la superficie et du nombre de personnes qui cultivent ces
variétés.
• des variétés qu'on ne retrouve que dans un seul village, souvent appelées variétés
endémiques, elles sont fragiles et des risques sérieux de perte de la diversité
existent. Ces variétés sont généralement de domestication ou d'introduction,
récentes. Lorsqu'il s'agit de variétés anciennement présentes dans le milieu, il est
urgent de veiller à leur préservation.
• Une forte spécificité villageoise avec 62% des variétés cultivées dans un seul village.
Globalement on pourrait parler d'une fragile situation de la diversité.
1.3.2. Diversité des cultivars d'igname à Yébéssi
L'agriculture de Yébéssi est caractérisée par plusieurs variétés. Au total, 52 variétés ont été
inventoriées. Parmi celles-ci on dénombre 20 variétés précoces, 29 tardives et 3
intermédiaires. Ici aussi, ce sont les variétés tardives qui sont les plus produites. Elles
couvrent plus de 60% des superficies cultivées. L'analyse des quatre carrés réalisée avec
des groupes de producteurs, a permis de dégager le niveau de production de toutes les
variétés (figure 7). Cette qui se veut participative a permis de dégager les variétés les « plus
menacées» (quadrant bas droit) et les variétés les « moins menacées» (quadrant haut
gauche) menacées. Deux critères ont été considérés. Il s'agit:
• de la superficie allouée à chaque variété dans les champs; ce paramètre a été
représenté par un grand cercle ou un petit cercle selon qu'il s'agit d'une grande
superficie ou d'une petite superficie.
• du nombre d'exploitation agricole chez lesquelles on retrouve chaque variété. Ici, les
figurines choisies sont les cases. Plusieurs cases sont affectées aux variétés que
plusieurs producteurs cultivent, alors que les variétés présentent chez quelques rares
paysans sont représentées par une seule case. Cette démarche a permis de faire
participer plusieurs producteurs et de décrire les multiples variétés rencontrées dans
ce village.
39
DEA ADEn 2003 BAca MohamedNasser
• Le groupe des variét és produites sur de grandes superficies et présentes chez
plusieurs paysans. On pourrait dire que ces variétés ne sont pas menacées de
disparition.
Al5ieus expIoitaIiorsGran:Ies 54JeIflCies
.J\... .J'---. .J'---.U U U
.J'---. J'---.U U
féaballo'MtanamKokourraMirokoAbimonKouméniAlsoro
BombeTalam bedj èTouno-hêBmiv.ouréKètèkobouBaniwouréwouloukaba
BoloLabokoTèkoutèkouSoussouCoutonou
Qœqœs expIdlctia"s.
~es st.perficies
UAœlornaBcpètèSoagonaKoutalaKpakaraDanwariMmguiKoussadiKpanhouraKpaoat é
SingouBakassinin
TchakapimKpahassahAlèolÙO
TanganaTambanaKpakagnmaTcbon tholoumTchibiriPapakouiAlibéhouTanlanboukaAdièWaho
Figure 7 : Analyse de la distribution des variétés de Yébéssi à travers le four square analysis
Quatre groupes sont ainsi constitués :
• Le groupe des variétés produites sur de grandes superficies et cultivées par quelques
rares exploitations . Ces variétés sont appréciées par quelques producteurs qui les
produisent pour leurs fonctions spécifiques.
• Le groupe des variétés produites sur de petites superficies par plusieurs
exploitations. Certaines de ces variétés ont une grande valeur commerciale,
alimentaire, et productive , c'est le cas de Coutonou. D'autres variétés appartiennent
à ce groupe parce qu'il est difficile de disposer d'une grande quantité de leur
semence nonobstant leur grande valeur commerciale, donc recherchée par tout le
monde.
• Le groupe des variétés produites sur de petites superficies par quelques rares
producteurs. Les menaces d'érosions génétiques pèsent surtout sur les variétés de
40
DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser
ce groupe. En général, ce sont des variétés récemment introduites dans le milieu,
c'est le cas de Waho, Adiè, Anc/oma. Il faudra alors du temps pour leur
généralisation dans les systèmes de cultures à base d'igname de Yébéssi. Les
menaces de disparition de ces variétés sont quasi- inexistantes. Par contre, pour ce
qui concerne les anciennes variétés qui demeurent toujours produites sur de faibles
superficies par un petit nombre de producteurs, on peut prévoir leur disparition avec
le temps. Des mesures de conservation doivent être prises pour assurer leur
présence dans le pool variétal des ignames de ce village. Parmi les variétés
concernées par cette menace d'érosion, on peut citer: Soagona, Kpanhoura.
Dans le village de Yébéssi, on dénombre 5 variétés par exploitation dans ce village et les
variétés les plus produites sont: A/soro, Hê aballo, Morokorou, Witanam. Ces variétés se
conservent bien et ont un bon rendement. Aussi se prêtent-elles mieux à l'igname pilée.
En considérant les deux ethnies (Lokpa et Sariba) du village, il ressort que sur les 52
variétés, les Sariba détiennent 15 variétés, et les Lokpa 33 variétés. 4 variétés sont
communes aux deux ethnies dans le village. Il s'agit de Kpouna, Moroko, Awèrè et Ahimon.
1.3.3. Diversité des cultivars d'igname à Kinnoukpanou
Dans le village de Kinnoukpanou, les entretiens individuels et les entretiens de groupe
couplés au « four square analysis » ont permis de recenser 41 variétés d'igname pour tout le
terroir. Les variétés tardives connues sous le nom de Kokoro ou Kokorogbanon sont les plus
produites et occupent 55% des superficies en igname. Elles sont au nombre de 21 contre 12
pour les variétés précoces et 8 pour les variétés intermédiaires. En moyenne, les
producteurs ont 7 variétés dans leurs champs.
L'élaboration du four square s'est faite avec des figurines différents de ceux du précédent
village. Le four square analysis (figure 8) indique qu'il y a seulement 5 variétés qui ont une
production à grande échelle et que près de la moitié des variétés, sont produites sur de
faibles superficies par quelques producteurs.
Les variétés les plus produites sont Kokouma, Yakanougo, Gambari Vinon . Les raisons qui
expliquent la forte production de ces variétés sont essentiellement commerciales. En effet,
Kinnoukpanou est un village dont la production d'igname est surtout destinée à la
commercialisation. Sur le marché, les consommateurs préfèrent les variétés à gros
tubercules aptes à être pilées. Les variétés Kokouma, Yakanougo et Gambari yinon
possèdent ces caractéristiques, ce qui leur donne un avantage comparatif par rapport aux
autres variétés.
41
DEA ADEn 2003 BAGa Mohamed Nasser
La grande production des variétés tardives s'explique par le fait que ces variétés sont
transformées en cossettes pour être aussi vendues sur le marché. Il existe plusieurs variétés
tardives qui sont produites sur de petites superficies, c'est le cas de Saria, Kpêyé, Doundou
worou. Les variétés ayant ce statut ont en général un faible rendement.
Plusieurs exploitationsPetites superficies
Plusieurs exploitationsGrandes superficies
~.. ~~.... ..~ ~
B.wauloukabaGambari yinonKokoumaYakanougoKokorogbanon
~.. ~~.... ..~ ~
Agarou MimonAoorè B. KètèkobaGnon woko SariaSoussouKpakaraOféguiSingouKpounaDoubayessiTOUAndorokou
Quelques exploitationsGrandes superficies
Quelques exploitationsPetites superficies
AssoukpanaGourokoKagourouOkxJo
Ad~
BandéBembèrèkèDounclou waTOUGbanwakiriGbédoGominiGomminHomoyaibèreyinsséKohoungouKonyoSingor
SounouclourouBadébaKoyoDébaOfégui
Figure 8 :Analyse de distribution des variétés de Kinnoukpanou à travers le four square analysis
Sur les 41 variétés cultivées, 37 noms sont communs aux deux ethnies (Nago et Bariba)
étudiées dans le village. Une seule variété détenue par les Bariba ne se retrouve pas chez
les Nago. Ces derniers à leur tour cultivent au total 3 variétés qui sont absentes chez les
Bariba.
1.3.4. Diversité des cultivars d'igname de Wari
Wari est un village composé majoritairement de Bariba. Les inventaires réalisés dans ce
village ont permis de recenser 46 variétés. Parmi celles-ci, on dénombre 24 variétés
tardives, 16 précoces Et 6 intermédiaires . En moyenne, les producteurs détiennent 11
variétés. Le "four square analysis" réalisé, a donné les résultats mentionnés en annexe 2.
Les tendances sont les mêmes que ceux des deux villages précédents. 20% des variétés
dénombrées sont cultivées sur de grandes superficies par plusieurs exploitation, 15% sur de
grandes superficies et par quelques rares ménages, 24% sur de petites superficies mais par
42
DEAADEn 2003 BACOMohamed Nasser
plusieurs exploitations et environ 40% ont une production marginale c'est à dire qu'elles sont
cultivées sur de petites superficies par quelques rares personnes.
Les variétés les plus cultivées sont Moroko, Baniwouré, et Gogo. Plusieurs variétés seraient
menacées de disparition car elles sont produites sur de faibles superficies et par quelques
rares producteurs. Parmi elle, on peut citer: Soagona, Kpanhouri, Kpouna, womakou, ...
Sur les 46 variétés, seules 2 variétés (Anka korou woura et Kourotoko kparérou) cultivées
par les Bariba n'ont pas été retrouvées chez les Gando. Les autres variétés sont communes
aux deux ethnies.
1.3.5. Diversité des cultivars d'igname de Gorobani
A l'instar des autres villages, Gorobani regorge aussi de plusieurs variétés réparties en
grande partie dans le groupe des variétés tardives. Sur les 48 variétés inventoriées dans ce
village, 25 variétés soit 52% sont des variétés tardives. Les variétés précoces intermédiaires
sont respectivement au nombre de 17 et 6. En moyenne chaque exploitation cultive environ
14 variétés. Les variétés les plus cultivées sont Morokorou, Baniwouré, Tabané. Ici aussi, le
« four square analysis » (Annexe 3) révèle que 1aseulement des variétés de ce village sont
cultivées sur de grandes superficies par plusieurs personnes, et la grande partie des variétés
se retrouve sur de petites superficies.
Deux variétés sont détenues par les Gando et ne se retrouvent par chez les Bariba. Ces
variétés (Noro moussou et Donkpirikou) ont été domestiquées récemment par des Gando.
Les 46 autres variétés se retrouvent aussi bien par les Bariba que les Gando.
1.4.Analyse comparée de la diversité des villages étudiés.
1.4.1. Comparaison de la diversité intra- village
Au vu des résultats obtenus séparément par village, il ressort que le nord du Bénin regorge
d'un pool variétal assez fourni et très varié. Au total, 112 variétés de l'espèce O. cayenensis
rotundata ont été inventoriées. La spécificité notée dans chaque village mérite d'être
analysée pour comprendre l'apport de la forte diversité signalée sur la dynamique et la
durabilité des systèmes de cultures à base d'igname de cette région du Bénin.
L'analyse des résultats révèle que la diversité des ignames ne s'exprime pas de la même
façon dans tous les villages (tableau 6).
Il ressort aussi que dans le nord Bénin, les producteurs ont en moyenne 9 variétés d'igname
dans leurs champs. Certains peuvent en posséder jusqu'à 23 alors que d'autres se
contentent seulement de 3. Ce grand écart autour de la moyenne traduit la diversité des
43
DEA ADEn2003 BAca Mohamed Nasser
options qu'il y a sur la gestion de la diversité des ignames. 26 exploitations sur les 60
étudiées (soit 43%) ont entre 3 à 7 variétés. 35%, 13%, et 8% des exploitations enquêtées
ont respectivement entre 8 à 12, 13 à 17 et 18 à 23 variétés.
Tableau 6: Quelques données sur la diversité variétale dans les villages étudiés.
VARIETES
Villages Nombre! Moy! Maxi! Mini! Classes
village exploitat exploitat exploitat 3à7 8 à 12 13 à 17 18 à 23
ion ion ion
Kinnoukpanou 41 7 17 4 10 4 2 2
Yébéssi 52 5 9 3 12 3 0 0
Wari 46 11 20 5 3 8 2 2
Gorobani 48 14 23 5 1 6 5 3
Nord Bénin 112 9 23 3 26 21 8 5
L'analyse de variance2 abouti à un F qui est hautement significatif (tableau 7). L"hypothèse
selon laquelle les paysans des quatre villages étudiés cultivent le même nombre de variétés
est rejetée. On conclue que la moyenne des variétés par paysans n'est pas la même dans
les 4 villages.
Tableau 7 : Analyse de variance: comparaison des moyennes de variétés
Source de variation ddl Sommedes carrés Variance F de Fisher PI'> F
Modèle
Résidus
Total
3,0
56,0
59,0
687,6
760,1
1447,7
229,2
13,6 16,8 0,0001
1.4.2. Comparaison de la diversité entre les communautés étudiées
Pour étudier l'existence ou non d'une similitude d'usage des variétés entre les 4
communautés étudiées, nous avons procédé à l'analyse du coefficient de similarité de
Sorensen (1948). Il s'exprime comme suit: K= (100 x 2c) 1 (a+b), avec:
c = nombre de variétés communes à deux communautés A et B
b = nombre de variétés propres à la communauté B
a = nombre de variétés propres à la communauté A.
L'analyse se fait entre deux communautés (tableau 8) et les conclusions sont tirées pour
l'ensemble de la communauté.
2 L'analyse de variance est un test statistique de comparaison de moyenne. Il abouti au calcul d'une valeur F dont la probabilitéindiquede seuil de signification de l'hypothèse selon laquelle les échantillons comparés ont la mêmemoyenne
44
DEAADEn2003 BAca Mohamed Nasser
La valeur de K varie de 0 à 100. Plus K est élevé, plus les deux communautés comparées
utilisent les mêmes variétés. On suppose qu'il n'y a pas de différence entre les
communautés en ce qui concerne l'utilisation et la production des variétés pour K> 95. En
considérant les 4 villages étudiés, le K le plus élevé est obtenu pour le couple Gorobani-wari.
Tableau B : Coefficient de similarité de Sorensen calculé pour les quatre localités
Coefficient K Kinnoukpanou Yébéssi Gorobani Wari1
Wari 41 27 72
Gorobani 43 30
Yébéssi 19
Kinnoukpanou
1.4.3. Niveau et importance de production des variétés
A l'échelle du nord Bénin les 112 variétés se répartissent en 4 classes (tableau 9) :
• La classe des variétés produites sur de grandes superficies et cultivées par plusieurs
exploitations (GSPE),
• La classe des variétés produites sur de grandes superficies et cultivées par quelques
exploitations (GSQE),
• La classe des variétés produites sur de petites superficies et présentes chez
plusieurs exploitations (PSGE),
• La classe des variétés produites sur de petites superficies et cultivées par quelques
exploitanons (PSQE).
On remarque que seules quelques variétés sont produites à grande échelle, d'autres, par
contre, ont une production· marginale.
Tableau 9 : Répartition des variétés cultivées dans 4 claSses suivant 2 critères discriminants.
GSPE GSQE PSGE PSQE
Localités Nombre % Nombre % Nombre % Nombre %
Wari 9 20 7 15 11 24 18 39
Gorobani 10 21 8 17 13 27 17 35
Yébessi 7 8 10 27 52
Kinnoukpanou 5 12 4 10 12 29 20 49
Nord Bénin 10 9 12 11 25 22 65 58
45
DEA ADEn 2003 BACO Mohamed Nasser
1.4.4. Répartition des variétés entre les ethnies
A l'instar de l'analyse au niveau village (dimension géographique), j'ai voulu apprecrer
comment se réparties les variétés au niveau des groupes ethniques (dimension anthropique
et socioculturelle) (Tableau 10).
Tableau 10 : Répartition des variétés par couple d'ethniques
Ethnies Bariba Gando Lokpa Nago1
l\Iago 28 25 5
Lokpa 4 4
Gando 51
Bariba
Le couple Bariba- Gando est celui qui a le plus de variétés communes. Les Lokpa ont très
peu de variétés communes avec les trois autres ethnies. Les couples Bariba- Nago et
Gando- Nago ont presque les mêmes variétés communes.
En considérant les 4 ethnies étudiées à travers les 4 villages, il ressort que (figure 9), la
grande partie (48%) des 112 variétés, est cultivée par une seule ethnie . Seules 4 variétés
(3,5%) sont communes aux 4 ethnies.
Figure 9 : Répartition des variétés par groupe d'ethnies
Les variétés communes aux 4 ethnies (voir annexe 4) sont Moroko, Ahimon, Kpouna et
Awèrè. Ce sont les Lokpa qui détiennent le plus de variétés spécifiques Sur les 54 variétés
de ce groupe, ils en détiennent 46. Quelles sont les raisons de cette spécificité des Lokpa ?
La discussion permettra s'apporter quelques éléments de réponse.
46
DEA ADEn 2003 BAGa Mohamed Nasser
Il. Processus utilisés pour maintenir et créer la diversité agricole de
l'igname
Dans ce chapitre, il est question d'analyser toutes les pratiques de gestion et de
conservation de la diversité des ignames utilisées par les producteurs. L'accent sera mis sur
les pratiques qui permettent de créer et d'enrichir la diversité et les pratiques qui permettent
de conserver la diversité de façon durable. Nous considérons les pratiques de gestion et de
conservation comme un système, une organisation ou un processus qui, dans un espace
donné et au-delà du temps, maintient, améliore ou crée les ressources génétiques agricoles
et assure leur disponibilité aux agriculteurs et autres utilisateurs pour l'amélioration durable
des niveaux de vie.
2.1. Pratiques paysannes de maintien et de conservation de la diversité
variétale des ignames
2.1.1. Stockage différentiel des variétés
A l'instar de ce qui ce fait à la plantation, les variétés sont stockées en tas séparés quelle
que soit la méthode de conservation. Il existe différentes méthodes de conservation :
• Stockage dans les greniers: les matériaux utilisés pour construire ces greniers sont
les mêmes quel que soit le village. Les matières premières habituellement utilisées
sont les tiges d'igname, les chaumes de sorgho, les piquets de bois et la paille. La
différence entre les villages étudiés réside dans la forme des greniers. Les
producteurs Wari et de Gorobani optent pour les greniers circulaires, ceux de
Yébéssi préfèrent des greniers de forme conique et les producteurs de Kinnoukpanou
ont des greniers trapézoïdaux (Photo 3).
Photo 3 : Grenier de conservation de l'igname
47
DEA ADEn 2003 BAca Moh8medNasser
En général, les producteurs ne conservent pas leurs semenceaux d'igname dans ces
greniers. Ces greniers servent à la conservation des ignames destinées à la consommation .
Les greniers ainsi construits ont une durée de vie maximale de 2 ans. Par contre les
ignames peuvent y être gardées pendant 6 mois.
• La conservation en tas sous des arbres: les producteurs profitent de l'ombre de
quelques arbres présents dans le champ pour garder leurs semences pendant un
mois maximum. Chaque variété a son tas distinct de celui des autres. Cette méthode
de conservation a l'avantage d'éviter le mélange des variétés pendant la plantation.
Son inconvénient est que les ignames sont à la portée des voleurs, des feux de
brousse et des dégâts des animaux transhumants. Pour minimiser ses risques,
certains producteurs n'hésitent pas à poser des fétiches pour dissuader les étrangers
(photo 4).
Photo 4 : Tas d'ignames de la variété Baniwouré conservées au champ sous un arbre
• La conservation en buttes permet d'éviter au maximum les pourritures des
semenceaux et les attaques de cochenilles (cause de perte variétale). C'est la forme
de conservation la plus utilisée pour les semences. Les semenceaux d'igname sont
gardés dans les buttes jusqu'à l'approche de la prochaine plantation. Pour environ
60% des paysans enquêtés, la durée maximale de conservation des semences
d'igname hors des buttes est de 3 semaines.
2.1.2. Le sevrage précoce ou la double récolte
Cette pratique est faite sur les variétés précoces. Elle consiste à interrompre le cycle en
faisant une récolte anticipée. Pendant la première récolte, qui est une opération délicate, les
48
DEA ADEn 2003 BACQ MohamedNasser
racines ne doivent pas être abîmées pour permettre une néo-tubérisation. La première
récolte fournit de l'igname qui est consommée alors que la néo-tubérisation donne des
semences qui seront utilisées la campagne suivante. Cette pratique de sevrage précoce ou
de double récolte est nécessaire pour l'obtention des semences des variétés précoces et
donc pour leur maintien continu dans le système de cultures. Les variétés comme Kpouna,
Soagona, Dani, Ahimon, hê aballo, etc. doivent subir ce traitement particulier au risque de
les perdre.
2.1.3. Association de certaines variétés à des pratiques culturelles
L'igname n'a jamais été considérée comme une culture ordinaire dans les aires culturelles
étudiées. Plusieurs rites et cultes régissaient sa culture, sa récolte et sa consommation. Pour
accomplir chacune de ces cérémonies certaines variétés d'igname étaient investies de
fonctions bien précises (tableau 11.
Tableau 11: variétés d'igname et les croyances qui leur sont liées
Variétés
Hê-aballo
Moroko
Sounou dourou
Kinkérégou
Soagona
Kpanhouri dingui
Kpouna
Droubayessirou
Ethnies
Lokpa
Bariba, Gando
Bariba, Gando
Bariba, Gando
Bariba
Bariba
Bariba, Gando
Gando
Croyances
Données pour les cérémonies dans la belle-famille
Données pour les cérémonies dans la belle-famille
Préparée lors des cérémonies nuptiales
Tests culinaires pour la mariée lors des cérémonies
nuptiales
Ne doit pas être récoltée simultanément par le père et
son fils
Destinée aux offrandes pour les ancêtres et les fêtes
d'igname
Les chances de succès sont liées à des critères
psychologiques
Un développement anormal est annonciateur de
malédiction
Ces traditions ont régressé avec le temps pour la grande majorité des paysans surtout chez
les Nagot pour qui la culture de l'igname est aujourd'hui réalisée plus à des fins
commerciales qu'alimentaires et culturelles. Chez les Bariba, les Gando et dans une certaine
mesure les Lokpa, certaines de ces traditions ont survécu. La variété Kpanhouri demeure à
ce jour la seule igname utilisée dans les cérémonies culturelles et religieuses. Elle sert aussi
dans les offrandes aux ancêtres. A la sortie de la nouvelle igname, c'est cette variété que les
Chefs de Terre, les « Féticheurs» utilisent pour faire les sacrifices et honorer les dieux pour
le fait que la campagne agricole a été bonne. Ce n'est qu'après ces cérémonies que
49
DEAADEn2003 BAce Mohamed Nasser
l'autorisation est donnée à tout le village pour consommer la nouvelle igname. Bien que cette
variété n'ait pas un bon rendement, qu'elle ait une faible valeur commerciale, et qu'elle
pourrisse vite, elle continue d'être cultivée pour honorer et sacraliser les engagements pris
auprès des dieux des mânes des ancêtres.
Les variétés Hê-aballo et Moroko sont les plus présentes lors des cérémonies festives chez
les beaux-parents, lors des baptêmes et des mariages. Du fait de la grosseur de leur
tubercules, les producteurs les utilisent pour montrer leur entrain au travail et pour se
distinguer socialement. Ces raisons expliquent en partie pourquoi ces deux variétés sont
parmi les plus cultivées dans le nord Bénin.
Les variétés Sounou dourou et kinkérékou, du fait de la difficulté à les piler, étaient autrefois
utilisées pour tester les compétences culinaires des jeunes filles en instance de mariage.
Au total, l'association des variétés à des pratiques culturelles a l'avantage de permettre une
conservation durable des variétés concernées, même quand elles cessent d'être
compétitives. L'abandon ou l'indifférence actuelle des jeunes vis-à-vis des pratiques
culturelles impliquant ces variétés pourrait compromettre à la longue leur maintien et
favoriser leur disparition (Adoukonou-Sagbadja , 2001 ; Tostain et al., 2002).
2.2. Pratiques paysannes liées au renforcement de la diversité variétale des
ignames
Il est question dans cette partie d'analyser les pratiques paysannes et les savoirs endogènes
qui permettent de créer et d'enrichir la diversité.
2.2.1. Les circulations de variétés entre paysans
C'est une pratique qui permet à un producteur d'acquérir chez un autre paysan une variété
dont il ne dispose pas. Toutes les variétés sont concernées par cette pratique, toutefois, les
variétés rares et chères (Kpouna, hê aballo... ) sont moins citées dans les échanges. Les
variétés peuvent être acquises par des dons, l'héritage, les échanges simples, la rétribution
de travail ou par achat. Il arrive qu'une même variété soit acquise par un paysan à travers
une seule source, deux, trois ou par toutes les sources. Pour apprécier le poids de chacune
de ces formes de circulation variétale, nous avons procédé à une enquête approfondie
auprès d'un échantillon restreint de 20 producteurs dont 5 par village (figure 10). Dans le cas
où une variété a plusieurs sources, nous avons affecté la même fréquence à chacune des
sources.
50
DEA ADEn 2003 BAca Mohamed Nasser
Figure 10: Diversité et origine géographique des variétés
Il ressort de ce tableau que le principal mode d'accès aux variétés est l'héritage. Le terme
héritage ici n'est pas pris dans son sens strict, il est utilisé pour les variétés obtenues du
père (y compris de son vivant). Les variétés héritées du « père» représentent 42% des
variétés cultivées. L'héritage est suivi respectivement du Don (37%), de l'achat (14%) et des
échanges (7%). Au niveau de chacun de ces modes d'accès aux variétés, nous avons
analysé l'origine géographique des variétés. Il apparaît que dans chacun des cas, les modes
d'accès sont plus développés à l'intérieur du même village. La grande partie des variétés
héritées, achetées, échangées ou obtenues par don dans une aire géographique, est
cultivée dans la même aire. Il n'existe presque pas de variété achetée ou obtenue par
échange dans une autre région qui soit produite dans le Borgou. On peut en conclure que
les achats ou les échanges de variétés d'igname à des fins de production ne se font pas
dans un rayon supérieur à 200 km. Par contre, les variétés données ou héritées peuvent être
transportées sur des centaines de Kilomètres pour être produites et par conséquent pour
enrichir la diversité existante.
En dehors de la dimension géographique qui régit la circulation des variétés entre paysans, il
existe une dimension'sociale basée sur le tissu social et les liens affectifs existants entre les
producteurs qu'il faut prendre en compte.
2.2.1.1. Les dons de variétés entre paysans
Ce sont des offres de variétés sans contre- partie exigible. Ils témoignent parfois une marque
de solidarité vis-à-vis des producteurs qui pour diverses raisons (maladies, calamités,
voyage, etc.) ont perdu leur matériel végétal (Okry, 2002). En milieu Bariba, les dons sont
aussi un signe de reconnaissance ou une marque de relations d'alliance et, concernent des
variétés rares ou particulières. Dans la circulation de variétés entre les paysans, le don
51
DEA ADEn 2003 BAca MohamedNasser
représente 37%. Les producteurs acquièrent les variétés de leurs amis, de leurs frères, de
leurs oncles, de leurs parrains, de leur belle-famille par l'intermédiaire des femmes, des
voisins de champ (figure 11).
Figure 11 : Lien social et proportion de don des variétés
Les dons issus des voisins de champ sont rares. Cela s'explique par la concurrence qui
existe entre producteurs ayant des champs dans la même zone. Par contre les amis se font
beaucoup de dons, ce qui fait que sur le terrain nous avons remarqué que les variétés
cultivées par deux amis sont dans la majorité des cas les mêmes. En général, les dons
n'excèdent jamais 50 semenceaux.
Les pratiques agricoles de renouvellement et d'enrichissement de la diversité sont couplées
à des pratiques sociales qui dépassent le cadre de l'unité de production. Elles s'inscrivent
dans une dynamique sociale qui rend compte, de certains aspects du fonctionnement de la
population du nord Bénin. Dans les monts Mandara du Nord Cameroun Seignobos (1996),
remarque qu'on ne remet jamais gratuitement un pied d'igname. Il est échangé dans certains
cas contre une chèvre ou contre deux ou trois fers de houe ou contre la promesse d'une
alliance matrimoniale. Cette pratique notée chez les paysans du Nord Bénin est donc la
manifestation d'une solidarité collective limitée à des réseaux de connaissances. Rapportant
l'exemple du Manioc en Amazonie, Emperaire et al., (1998), constatent que le don permet au
paysan donateur de renforcer sa position sociale.
2.2.1.2. L'héritage de variétés
Il s'agit de variétés provenant du père. Après la mort du père, les enfants récupèrent les
variétés qu'ils cultivaient de son vivant. C'est le mode d'accès le plus courant aux variétés.
Le paysan Boubou Tchaga du village de Wari justifiant le faible nombre de variétés qu'il a
nous déclara: « . . .. Je n'ai pas beaucoup de variétés carje n'ai pas pu hériter celles de mon
52
DEA ADEn 2003 BACO Mohamed Nasser
père. A sa mort, j'étais absent et mes frères ainés ont profité pour se partager les
cultivars... »,
2.2.1.3. L'achat de variétés
Les achats de semenceaux d'ignames se font mais à des proportions moindres (14%). Il n'y
a pas de marché à proprement parler pour les semences. Les ventes se font au champ.
Dans l'ensemble des 4 villages étudiés, il existe des paysans qui sont connus pour la vente
de semenceaux d'igname. En moyenne un semenceau est vendu à 40 fcfa (0,06 centime
d'euro). En général, la vente est aux producteurs qui veulent accroître le nombre de
tubercules d'une variété qu'ils possèdent déjà. Lorsqu'il s'agit d'un producteur qui cherche
des échantillons de semence pour démarrer un champ d'igname, il reçoit en général
gratuitement le matériel de culture.
2.2.1.1. Les échanges de variétés entre paysans
Ils sont les moins fréquents dans la circulation des variétés entre paysans. Dans un travail
similaire sur le manioc, (Emperaire et al, 1998) remarquent que les échanges de variétés se
font entre individus bien déterminés sur le plan social et empruntent des réseaux déjà
constitués. Ils interviennent entre producteurs souhaitant l'un et l'autre avoir des variétés
particulières détenues par le voisin. Les échanges portent aussi sur les variétés tardives et
les précoces. Dans ce cas, les bases de l'échange diffèrent selon les villages. A
Kinnoukpanou pour un sac de semences de Tandoua (variétés précoces), il faut en échange
plus d'un sac de Kokoro (variétés précoces). Dans les trois autres villages, les échanges se
font dans les mêmes proportions. Le cas du premier village s'explique par le fait que la
culture des variétés tardives est faite par tout le monde à grande échelle au détriment des
variétés précoces. Dans ces conditions, l'accès aux semences des variétés précoces est
plus difficile, ce qui n'est pas le cas dans les autres villages.
Différents modes de circulation des variétés entre producteurs ont été observés dans toute la
zone étudiée. Les dons et les échanges simples concernent aussi bien les membres d'un
même réseau socio-affectif que des individus extérieurs dépassant parfois le cadre de leur
communauté. La circulation inter-paysanne des variétés favorise le brassage et la
dissémination géographique des variétés. Plus la variété est dans la main de plusieurs
paysans et surtout à des endroits différents, moins rapide sera sa disparition. Ces échanges
jouent donc un grand rôle dans le renouvellement et la conservation à la ferme des ignames
cultivées.
53
DEAADEn 2003 BACQMohamedNasser
2.2.2. Introductions variétales
Ce sont des importations de variétés à partir d'autres régions éloignées de la zone d'étude
ou à partir des pays voisins (tableau 12).
Tableau 12 : Introductions des variétés: origine et ancienneté
Villages
Kinnoukpanou Yébéssi Wari Gorobani
Variétés Année Variétés Année Variétés Année Variétés Année
d'intro d'intro d'intro d'intro
Aéwélé,
AlihéhouKpa
Autres hassaha,
régionsPlus de Kpakagnina, 15 ans
Kpakara, 20 ans Tambana, Kpakara Plus dedu
Ibèrèyinssé Talambadjè, Gnonbouanri Plus de 20 ansBénin
Alihéhou, Kpakara 20 ans
Adjiné, Adjë
Cotonou, 10 ans Ibèreyinssé 15 ans
Ahimon
Lafou 5 ans Pabi 5 ans
Ahimon 20 ans Aboudja 10 ans Ahimon 15 ans Ahimon 15 ans
Autres Olodo, Awèrè 10 ans Olodo 10 ans Oodo 10 ans
pays Ofégui,
(Nigéria Homoya, 8 ans Mongui 5 ans Alakissa 3 ans Alakissa 3 ans
Lafou Aboudja
Total 8 variétés 13 variétés 5 variétés 7 variétés
TOTAL 21 variétés
Pour l'ensemble de la zone étudiée, 21 variétés ont été introduites. Le village de Yébéssi a la
plus forte introduction. Cela est dû au fait que la grande majorité des jeunes de ce village
vont en exode rural dans les régions environnantes d'où ils ramènent de nouvelles variétés.
Kinnoukpanou vient en deuxième position du fait de sa relative proximité avec le Nigéria.
Les introductions ont lieu à la faveur des voyages entrepris par certains paysans dans
d'autres régions. Le mouvement interne le plus rencontré est celui qui se fait par les paysans
de l'Atacora qui descendent avec leurs variétés dans les départements du Borgou en quête
de bonnes terres arables (Okry, 2000; Adoukonou-Sagbadja, 2001). Les introductions à
partir des pays voisins sont surtout intenses au niveau des villages frontaliers du Nigeria. Les
acteurs impliqués dans cette pratique sont de deux catégories: les paysans émigrants qui
reviennent au pays avec les variétés d'ignames du pays hôte; et les paysans immigrants
des pays voisins ou d'autres zones de production du Bénin et qui amènent avec eux leurs
variétés préférées dans les villages d'installation.
54
DEAADEn2003 BACOMohamed Nasser
Les transferts variétaux s'accompagnent rarement de transferts de noms. Lorsque
l'importation de la variété n'est pas suivie de transfert de nom, le paysan introducteur de la
variété baptise à nouveau cette variété. Deux cas de figure peuvent se présenter:
• Le nom donné est celui d'une variété déjà existante bien que les deux variétés soient
différentes génétiquement. Il est dans la liste des noms de variétés habituellement
introduites à partir du Nigeria. Il s'agit de : Ahimon, Abudja, Olodo, Homoya, Oféhui.
La conséquence de cette pratique est que ces variétés ne seraient plus
monoclonales mais plutôt polyclonales, elles sont hétérogènes. Aussi cette
introduction de matériel, a t-elle été suivie d'un enrichissement réel du pool génétique
du point de vue du généticien. Pourtant la pratique paysanne, masque cet
enrichissement.
• Un nom émanant du paysan introducteur différent de ceux en usage dans la zone
d'introduction alors que le matériel introduit existait déjà dans le milieu. La
conséquence ici est l'augmentation « apparente» de la diversité due aux synonymes
alors que génétiquement le pool génétique est demeuré inchangé.
• En dehors de ces introductions qui ne s'accompagnent pas du nom du matériel
introduit, il y a des cas où le transfert de variétés se fait avec le nom d'usage de la
zone d'origine. Dans ce cas, il est facile de dire si l'introduction a induit un
enrichissement ou non de la diversité.
2.2.3. Domestication des ignames sauvages
Parmi les pratiques de création et d'enrichissement variétal observées sur le terrain, figure
en bonne place la domestication des ignames sauvages. Elle consiste à cultiver des
ignames sauvages collectées dans leur habitat naturel (forêts, savanes, jachères) et à les
soumettre à une série de contraintes dans le but d'obtenir des ignames cultivées. Elle est
pratiquée aujourd'hui par très peu de paysans: 3,7% en milieu Sariba (Saco, 2000), 9.2%
en milieu Nagot (Okry, 2000) et 19% en milieu Fon (Houémassou, 2002).
Au cours de nos investigations sur le terrain, 18 « domesticateurs » ont été recensés parmi
les 60 exploitations suivies (soit 30%). Ce résultat paraît nettement supérieur à ceux obtenus
dans les études antérieures sur le sujet. Cette différence pourrait s'expliquer par la méthode
d'échantillonnage utilisée dans ce travail. On peut aussi penser que les précédentes études
ont largement sous-évalué la pratique ou qu'elles ont créé des artéfacts dans le milieu ce qui
aurait conduit plus de personnes à domestiquer. Les acteurs impliqués sont tous des
hommes; les femmes participent à l'évaluation des produits finis de la domestication. Elle
n'est pas une pratique spécifique à une ethnie mais se pratique plus par les Sariba que par
les autres ethnies. La pratique de la domestication ne dépend pas forcément de la religion,
55
DEA ADEn 2003 BACO MohamedNasser
de l'âge ou de la classe sociale. En milieu Sariba, la considération que la société a du
domesticateur est fonction de son profil social et de sa performance dans la production de
l'igname. Mais, la pratique de la domestication est abandonnée au fur et à mesure que le
niveau de prospérité du paysan s'améliore (Saco, 2000). Dans l'aire culturelle Sariba qui
constitue la plus grande zone de production des ignames au Sénin, la pratique de la
domestication a un caractère déshonorant et l'utilisation publique des ignames sauvages est
une honte (Saco, 2000). Ces divers paramètres sont pour la plupart les raisons évoquées
par les paysans pour l'abandon ou la non pratique de la domestication.
Pour l'ensemble des domesticateurs, la pratique est quasiment la même et se décompose
en 8 sous pratiques que sont (1) le choix des individus à domestiquer, (2) le prélèvement
partiel des pieds, (3) utilisation d'obstacles pendant la phase de culture, (4) la pratique de la
double récolte, (5) la sélection des clones intéressants, (6) le mélange variétal, (7) la
dénomination des nouveaux clones et (8) la multiplication et la diffusion des nouveaux
clones.
2.2.3.1. Choix des individus à domestiquer
Les domesticateurs sélectionnent des pieds d'ignames sauvages Dioscorea abyssinica dans
leurs habitats naturels (savanes, forêts et îlots forestiers et jachères). Les critères de choix
utilisés concernent :
• La partie aérienne de l'appareil végétatif: la ressemblance du feuillage avec celui
d'autres variétés cultivées, la couleur et grosseur de la tige, la taille et la phyllotaxie
des feuilles ;
• La partie souterraine (tubercule) de l'appareil végétatif: Couleur de la chair, le goût
du tubercule, la présence ou l'absence d'épines. Cette sous-pratique permet de
sélectionner des génotypes facilement domesticables et évite des pertes de temps au
paysan. Les critères de choix de ces génotypes sont résumés dans le tableau 13.
Tableau 13: Critères de sélection des ignames spontanées destinées à la domestication
Caractères Ignames spontanées Ignames spontanées domestiquéesnon domestiquées
Feuilles + tiges
Couleur tigeTaille de la tige adulteEpines sur la tigeForme des feuillesTaille tuberculeForme tuberculeEpines sur tubercules
Chair tubercule après sectionAmertume du tubercule
Peu de ressemblanceavec les cultivarsRoseFinePrésenceRondeFinAllongéePrésence ou absence
Jaune à blancheAmertume
Forte ressemblance avec une variété endisparition ou ayant disparuVerteGrosse et vigoureuseAbsence ou faible présenceOvaleGrosAllongée et invaginéeAbsenceBlanche ou jaune, faible brillance, chairdense, faible écoulement de sèveFaible amertume, peu ou pas d'odeur,bonne texture, friable
56
DEA ADEn 2003 BAca Mohamed Nasser
2.2.3.2. Prélèvement partiel des individus choisis
Cette sous-pratique consiste à récolter partiellement les tubercules des plants sauvages
sélectionnés tout en laissant un ou une partie du tubercule dans le trou pour perpétuer le
génotype (Photo 5). Le nombre de génotypes collectés varie d'un paysan à un autre et est
de 4 en moyenne chez les Sariba. Les tubercules sauvages prélevés sont apportés au
champ pour être plantés; ainsi commence la phase active de la domestication.
Photo 5 : Tubercules d'igname sauvage prélevés de la forêt pour être domestiqués.
2.2.3.3. lntroouction d'obstacle pendant l'ennoblissement
C'est une pratique qui consiste à placer en position sous-jacente un obstacle (fragment de
poterie, pierre plate, morceau de tôle, etc.) dans le but de limiter la croissance en longueur
des tubercules néoformés (Vemier et Dumont, 2000 ; Baco, 2000). La pratique favorise aussi
le développement en grosseur et facilite la récolte (Photo 6).
Photo 6: Igname en domestication soumis à la pose d'une feuille de tôle comme obstacle
57
DEA ADEn 2003 BACO MohamedNasser
2.2.3.4. La double récolte des tubercules de domestication.
Elle consiste à interrompre le processus de tubérisation en sevrant la plante de son
tubercule. Elle peut être appliquée ou non pendant la première, la deuxième ou la nième
année de domestication. La pratique est observée chez les 18 domesticateurs. Elle vise en
fin de domestication à sélectionner beaucoup de clones précoces.
2.2.3.5. La sélection des clones intéressants
Plusieurs critères sont utilisés pour la sélection des meilleurs clones. 1/ s'agit de la forme du
tubercule, du rendement, de la qualité culinaire, de l'aptitude à la conservation. Le test
gustatif des produits de domestication joue un rôle primordial pendant cette phase de
sélection. 1/ comptera pour beaucoup dans le rejet ou l'acceptation du produit concerné.
L'implication indirecte des femmes dans le processus de la domestication se note à ce
niveau. Elles « participent» à l'évaluation culinaire des ignames en voie de domestication.
La pratique permet, en général, aux paysans de retrouver des variétés existantes ou ayant
existé avec toutes leurs qualités. EI/e permet l'enrichissement de la diversité variétale par
l'obtention de nouveaux clones (ou nouvelles variétés) performants et bien adaptés aux
nouvelles conditions pédologiques du milieu (figure 12). C'est donc une stratégie paysanne
d'amélioration variétale (Saco, 2000 ; Vernier et Dumont, 2000).
~ •• I~':--· :-. 1
~Ition de départ prenière dcmestication mJtiplicatia1
1 jachères1
Figure 12: résultat de l'ennoblissement sur l'enrichissement de la diversité d'un champ d'igname.
La durée de sélection des nouveaux clones est relativement longue et peut durer entre 3 à 5
ans selon le producteur. A la fin de la domestication, différents itinéraires sont possibles pour
la nouvelle variété ainsi créée.
58
DEAADEn2003 BACO Mohamed Nasser
2.2.3.6. Le mélange variétal après sélection
Après la sélection des meilleurs clones, les produits ressemblant aux variétés existantes
sont reversés aux groupes variétaux correspondants. C'est une pratique très fréquemment
observée dans toutes les zones de production et qui concerne tous les domesticateurs. Elle
a l'avantage d'enrichir la diversité génétique intra-variétale car les tubercules domestiqués
proviennent des graines issues de fécondations libres. C'est une stratégie de renouvellement
variétal dont l'objectif est de lutter contre le vieillissement du stock variétal du paysan
(Dumont, 1998).
2.2.3.7. La dénomination des nouveaux clones
Les nouveaux clones issus de la domestication et différents des variétés existantes ou ayant
existé sont considérés comme de nouvelles variétés. Le domesticateur procède à leur
dénomination en leur attribuant un nom local. Ce nom donné peut faire référence à un
événement ou un objet particulier, au lieu de collecte, aux qualités organoleptiques, et à la
précocité.
Le nom peut être donné sur la base de la ressemblance des tubercules issus de
domestication avec ceux des variétés existantes. C'est le cas des variétés cultivées
Soussou, Kpouna et Dani Moroko.
Parfois, les domesticateurs établissent la ressemblance entre les ignames cultivées et le
matériel végétal sauvage d'origine. Dans ce cas, les noms donnés sont Soagona, Orou
Yinsingui ou Kpanhouri. Ce cas est le plus courant puisque dans 40 % des cas, les noms
donnés sont Soagona ou Orou Yinssingui.
D'autres paysans choissent de donner des noms particuliers: Noro moussou, Donkpirikou.
Après avoir baptisé les ignames domestiquées, elles sont introduites dans le stock des
ignames cultivées. Comme elles portent à 95 % des noms d'anciennes variétés, elles se
dissimulent parmi celles-ci après quelques années et il devient impossible de retrouver leur
trace. On peut s'attendre à observer une certaine hétérogénéité au niveau de chacune de
ces variétés puisque les ignames sauvages issues de graines, sont génétiquement
différentes des clones cultivés.
Il se dégage que de nombreuses variétés domestiquées à partir de D. abyssinica, sont
renommées et réintégrées dans des groupes déjà connus. Il y a de forte chance que les
variétés du complexe D. cayensis- D. rotundata soient des mélanges. Quelles sont les
implications de cette pratique sur le concept de « variété» dans les stratégies et politiques
de conservation ?
59
DEA ADEn 2003 BAca Mohamed Nasser
Des travaux en cours, conduits par les chercheurs IRD Montpellier visent à évaluer les effets
génétiques de la domestication (Scarceli, 2002).
2.2.3.8. Multiplication et diffusion des nouveaux clones
Les variétés nouvellement créées entrent en phase de multiplication intensive afin d'obtenir
une grande quantité de produits. La diffusion, à l'instar des autres produits de domestication
ou des anciennes variétés du paysan, se fait par le biais de la commercialisation et de la
donation, des échanges et de l'héritage.
60
DEAADEn2003 BAca Mohamed Nasser
III. Déterminants socio-économiques des détenteurs de la diversité
Dans ce chapitre, il sera question de faire une analyse de la diversité variétale, ciblée sur
l'exploitation. Pour cela, nous aurons recours aux déterminants socio-économiques (âge,
sexe, groupe ethnique, niveau de prospérité, mode d'accès à la terre, nombre d'actifs
agricoles, superficie cultivée, ... ). La prise en compte de la dimension socio- culturelle est
due au fait que les anthropologues ont depuis longtemps reconnu le rôle de la tradition dans
la détermination des cultivars que les paysans choisissent de cultiver (Jarvis et al,2000).
Quant à la dimension économique, elle sera utilisée dans ce travail pour étudier le choix des
meilleurs moyens qui permettent d'atteindre les objectifs.
La prise en compte de l'aspect socio-culturel et de l'aspect économique aidera à choisir les
personnes susceptibles d'être impliquées dans le maintien de la diversité agricole.
3.1. Terre et gestion de la diversité
3.1.1. Influence du mode d'accès à la terre sur la richesse variétale
Le mode d'accès à la terre est l'ensemble des voies d'accès, les règles et les normes qui
régissent la distribution, les droits d'usufruit sur la terre. Dans le Borgou qui est notre région
d'étude, la terre n'est pas un facteur limitant et les paysans autochtones comme immigrés
ont des conditions faciles d'accès à la terre. 90% des exploitations enquêtées ont accès à la
terre soit par héritage soit par don. Le mode d'accès à la terre est direct, il confère à chaque
exploitation une sécurité foncière. Cette particularité du nord Bénin ne permet pas de tester
l'hypothèse selon laquelle le mode d'accès à la terre influencerait la diversité variétale
détenue par les exploitations. Selon (Omiti et a', 1999) le mode de tenure foncière
n'influence pas directement la diversité agricole.
3.1.2. Influence de la superficie et du nombre de champ sur la diversité des ignames
Le mode d'accès à la terre est pour la grande majorité des exploitations le même, mais les
superficies consacrées à l'igname ne sont pas les mêmes. Certaines exploitations optent
pour les grandes superficies (3- 5 ha) alors que d'autres ne cultivent que de petites
superficies (0,25- 75). De même, le nombre de champ d'ignames n'est pas le même par
exploitation. Ce nombre varie de 1 à 4. C'est à Kinnoukpanou et à Yébessi que les paysans
ont plus de 2 champs. A Gorobani et à Wari par contre, quelques rares exploitations cultivent
l'igname sur 2 champs (figure 13).
Les producteurs qui cultivent l'igname sur plusieurs champs ont les plus faibles moyennes
de variétés par exploitation. L'analyse révèle aussi que les quatre villages sont comparables
deux à deuX:
61
DEA ADEn 2003 BAca MohamedNasser
Yébessi et Kinnoukpanou : les paysans ont en moyenne plus de 2 champs par exploitation
et ont très peu de variétés (6-7 variétés).
Wari et Gorobani ; les exploitations ici ont en général un seul champ, mais cultivent en
moyenne plusieurs variétés (11-14).
Figure 13: Nombre moyen de variétés et de champs d'ignames en fonction des villages
L'analyse de variance faite entre les moyennes des superficies d'ignames a donné un F=
12,8. Ce coefficient est significatif au seuil de 5%. L'hypothèse selon laquelle la superficie
moyenne des champs d'igname est la même dans les différents villages du nord Bénin est
rejetée et on peut déduire que les superficies moyennes des champs d'igname varient en
fonction des villages. Le village de Kinnoukpanou est celui où les producteurs cultivent de
grandes superficies. Il est suivi respectivement de Yébessi, Wari et Gorobani (tableau 14).
Le coefficient de corrélation calculé sur l'ensemble des 4 villages n'est pas significatif. Il
confirme mes premières conclusions selon lesquelles Wari et Gorobani sont comparables ,
Kinnoukpanou et Yebessi sont aussi comparables sur certains aspects de la diversité.
Tableau 14 : Superficie des champs d'igname et nombre moyen de variétés par village.
Villages Total
1,00 1,10
3,00 3,50
0,50 0,37
6,00 14,00
0,02*
Superficie moyenne (ha)
Superficie maximale (ha)
Superficie minimale (ha)
Nombre moyen de variété
Coefficient de corrélation : r
* Pas significatif au seuil de 5%
Kinnoukpanou
2,85
6,00
0,75
7,00
Yébessi Gorobani Wari
0,75
3,00
0,50
11,00
1,50
6,00
0,37
9,00
62
DEA ADEn 2003 BACO Mohamed Nasser
3.2. Lien entre l'âge des paysans et le nombre de variétés
Cette étude a révélé qu'il existe plusieurs pratiques endogènes qui permettent de gérer et de
conserver l'agrobiodiversité. En général, les savoirs locaux sont détenus par les personnes
âgées de la communauté. Selon Jarvis et al. (2000), cette détention des savoirs par les
vieilles personnes est précaire dans la mesure où les savoirs peuvent être perdus si les plus
âgés ne les passent pas à la jeune génération. J'ai pour cette raison, voulu comprendre
l'influence de l'âge des producteurs sur l'ampleur de la diversité des ignames qu'ils cultivent.
L'âge des producteurs étudiés varie de 25 à 60 ans et l'âge moyen est de 43 ans. Sur la
base des données, trois tranches d'âge ont été constituées (tableau 15). Les personnes
âgées constituent 26% de l'échantillon étudié.
Tableau 15 : Nombre moyen de variétés cunivées par tranche d'âge
Paramètres Tranche d'âge
21- 35 36- 50 51- 65
Fréquence 22 22 16
Pourcentage 37 37 26
Nombre moyen de variétés 8 9 10
Pour comparer le nombre moyen de variétés entre les tranches d'âge, j'ai fait le test
d'analyse de variance (tableau 16).
Tableau 16: comparaison des moyennes de variétés suivant les classes d'âges
Sourcede variation ddl Somme des carrés Variance F de Fisher PI'> F
Modèle
Résidus
Total
2,0
57,0
59,0
37,9
1409,8
1447,7
18,9
24,7 0,766 0,469
F calculé n'est pas significatif au seuil de 5%. L'hypothèse selon laquelle le nombre moyen
de variétés varie avec l'âge est rejetée. On conclue que la moyenne de variété est la même
entre les classes d'âge. Les personnes plus âgées, les adultes et les jeunes cultivent le
même nombre de variétés dans leurs champs. Les personnes âgées n'accumulent pas les
variétés avec le temps. Elles entretiennent tout comme les jeunes un processus dynamique
dans lequel elles abandonnent certaines variétés, et en adoptent de nouvelles.
La tranche d'âge 51-65 (celle des personnes âgées) ne se différencie pas des autres en
nombre de variétés, il ressort cependant que les personnes âgées détiennent des variétés
spécifiques que les jeunes n'aiment pas cultiver. C'est le cas de Kpanhoura utilisée dans les
63
DEA ADEn 2003 BAca MohamedNasser
offrandes. De même les jeunes à leur tour cultivent des variétés (Olodo, Awèrè, Aboudja, ... )
qu'on ne retrouve pas chez les plus âgées.
3.3. Genre et gestion de la diversité
L'approche par le genre est un outil qui permet d'examiner les activités, les responsabilités,
les opportunités dans la vie de chaque membre d'une communauté, prenant en compte les
relations existant entre les hommes et les femmes. A la suite de l'IPGRI (1991), la prise en
compte du genre doit permettre de voir comment les relations hommes-femmes affectent la
manipulation de l'environnement et des ressources agricoles. Parmi les 60 chefs
d'exploitations enquêtés, il n'y a aucune femme. La culture de l'igname est une activité
exclusivement réservée aux hommes. L'implication des femmes ne se fait qu'après la récolte
dans les transformations alimentaires, dans la commercialisation sur le marché. C'est à ces
niveaux que de façon indirecte elles influencent le choix des variétés cultivées dans
l'exploitation. L'igname pilée est la principale forme de consommation des ignames dans
l'ensemble des 4 groupes socio-lingustiques étudiés. La préparation de ce repas qui relève
des activités des femmes est fastidieuse et contraignante. Cette pénibilité est accrue lorsque
l'igname ne se prête pas à cette préparation du fait de ces caractéristiques texturales. Pour
cette raison, les femmes préfèrent les variétés qui possèdent d'excellentes qualités
organoleptiques qui sont aptes à faire de l'igname pilée. En générale, ce sont aussi ces
variétés qui se vendent à des prix élevés sur le marché. Parmi ces variétés, on peut citer:
Kpouna, Moroko, Dani, Hê-aballo, etc. Les caractéristiques culinaires et commerciales de
l'ensemble des variétés sont abordées dans le prochain chapitre.
En moyenne par exploitation, il y a 3 femmes. L'implication des femmes dans la gestion des
variétés d'ignames se remarque aussi lorsqu'elles apportent du matériel neuf de leur maison
familiale. Au cours de nos investigations, plusieurs chefs d'exploitations ont reconnu avoir
obtenu de nouvelles variétés par leur beau-père (voir figure 12 page antérieure). Les
exploitations à régime polygamique semble avoir obtenu plus de variétés de leurs belles
familles que les monogames.
Vu sous l'angle du genre, on peut dire que dans l'exploitation:
• les femmes mettent prioritairement J'accent sur les variétés à bonnes qualités
organoleptiques, faciles à piler et qui se vendent bien. Les critères de choix des
femmes sont donc essentiellement culinaires et commerciaux.
• les hommes quant-à eux préfèrent surtout les variétés à bons rendements, qui
donnent beaucoup de semenceaux pour la prochaine campagne. Les paramètres de
sélection variétale sont ici agronomiques.
64
DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser
La diversité de ces critères de choix contribue à entretenir et à maintenir la grande diversité
variétale dégagée sur l'igname au cours de cette recherche.
3.4. Lien entre l'effectif des actifs par exploitation et la diversité variétale des
ignames
L'igname est une culture exigeante en main d'œuvre. Toutes les opérations en particulier le
buttage, la plantation et la récolte sont pénibles et nécessitent plusieurs actifs. Le nombre
moyen d'actifs par exploitation est de 7 personnes. Malgré cette main d'œuvre familiale, il
arrive que des exploitations aient recours à la main d'œuvre extérieure salariée ou non.
Les ouvriers salariés sont parfois rétribués en nature avec des semenceaux de différentes
variétés. Par le système des entraides au champ, les actifs d'une exploitation vont aider ceux
d'une autre et vice-versa. Pendant ce séjour dans le champ, les hôtes identifient des variétés
dont ils ne disposent pas dans leurs champs. Ils peuvent solliciter des échantillons de ces
variétés pour aller enrichir leur pool variétal. Pour cette raison, j'ai supposé qu'il y a un lien
entre le nombre de variétés et le nombre d'actifs agricoles dans les exploitations. Le
coefficient de corrélation calculé entre ces deux variables 0,14. " n'est pas significatif au
seuil de 5%. Il n'y a donc pas de lien entre le nombre d'actif et le nombre de variétés.
Cependant le lien inverse semble probable. Plus un paysan loue ses services, plus il a de
variétés, cette hypothèse pourra être testée dans d'autres études.
3.5. Lien entre l'appartenance linguistique et la diversité variétale
Quatre groupes linguistiques ont été étudiés à travers cette étude. Chacune de ces ethnies
s'identifie à travers une tradition, une histoire, des habitudes alimentaires qui peuvent être
des bases d'un maintien des pratiques endogènes autour de l'agrobiodiversité. " existe des
variétés qui sont spécifiques à chaque ethnie.
Les Lokpa, ethnie majoritaire du village Yébessi, préfèrent les variétés à tubercules
énormes. Les variétés les plus appréciées sont: Hê-aballo, Witanam, Samassi-hê. Cette
préférence pour des variétés à gros tubercules amène les Lokpa à confectionner de très
grosses buttes.
Les Nagot qui sont la principale ethnie de Kinnoukpanou cultivent plus les Kokoro qui sont
des variétés à petits tubercules. Les Nagot utilisent ces variétés pour faire des cossettes
d'igname qui sont commercialisées sur le marché. Ce choix variétal amène les Nagot à faire
des buttes de petites tailles.
Les Sariba et les Gando préfèrent des variétés telles que Moroko, Ahimon, Dani, Kpouna qui
sont de tailles moyennes ce qui explique que dans les champs de ces ethnies on retrouve
des buttes de taille moyenne.
65
DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser
Dans l'hypothèse que la diversité culturelle participe aussi à maintenir la richesse variétale,
le test de comparaison des moyennes a été effectué pour voir s'il existe une différence de
moyenne de variétés entre les différentes ethnies étudiées (tableau 17).
Tableau 17: comparaison des moyennes de variétés entre les ethnies
Source devariation ddl Somme des carrés Variance F de Fisher PI> F
Modèle 1,0 144,628 144,628
Résidus 58,0 1303,104 22,467 6,437 0,013***
Total 59,0 1447,733
*** significatif au seuil de 1%
Le F calculé est hautement significatif. Il existe une différence entre le nombre moyen de
variétés cultivées par les différents groupes socio-Iinguistiques. Les Gando ont la plus
grande moyenne avec 13 variétés. Ils sont respectivement suivis des Sariba (11 variétés),
les Nagot (8 variétés) et les Lokpa (6 variétés).
66
DEAADEn2003 BACOMohamed Nasser
IV. Caractéristiques agro- morphologiques, commerciales et soclo
culinaires et des variétés
A travers ce module, nous voulons aborder:
• les caractéristiques agro- morphologiques culinaires et commerciales utilisées par les
paysans pour distinguer les variétés ;
• la manière dont le choix de ces caractéristiques affecte la variété, la pureté variétale
et la diversité des ignames.
4.1. Utilisation paysanne des critères agro- morphologiques
4.1.1. Caractéristiques morphologiques des variétés
Les producteurs identifient principalement leurs variétés d'igname sur la base des
caractéristiques morphobotaniques. Ces caractères qui sont phénotypiques sont liés au
feuillage, aux tubercules ou à la plante entière. Les tests de reconnaissance que j'ai faits
avec quelques producteurs m'ont révélé des taux d'erreur très élevés lorsque le producteur
tente de reconnaître les ignames sur la base du feuillage ou du tubercule. Les erreurs
s'expliquent en partie par l'hétérogénéité des zones de culture. Ainsi, la même variété peut
dans deux agrosystèmes se comporter différemment. Mais le taux d'erreur s'améliore
nettement et peut passer à 80% de taux de réussite lorsque la reconnaissance se base sur
la plante entière (à la fois le feuillage et les tubercules). Dans ce cas, les paysans croisent
plusieurs critères pour affiner la reconnaissance. Par exemple:
• les variétés Kpouna et Dani se ressemblent par le tubercule. Pour les départager, il
faut tenir compte du feuillage.
• droubayessirou et Ahimon sont indiscutablement identiques par le feuillage et le
tubercule. Pour les distinguer, le paysan fait une coupe dans la chair du tubercule.
4.1.2. Caractéristiques agronomiques des variétés
Le premier critère utilisé ici est le cycle des variétés. Il ya des variétés précoces (appelées
Tandoua en Sariba) et des variétés tardives ( ou Yassounou en Banba). En dehors de ce
critère, les producteurs s'appuient sur la sensibilité aux maladies, aux parasites et aux
mauvaises herbes, la sensibilité à la sécheresse, à l'inondation, l'exigence en fertilité du sol,
le rendement, etc. pour choisir les variétés.
Par exemple, en appliquant ces critères, les producteurs s'aperçoivent que:
• les variétés Saniwouré sont des variétés tardives, frugales et qu'elles ne sont pas
exigeantes en sols fertiles
• Kpouna, Soagona, sont des variétés précoces, très sensibles aux maladies et
exigeantes en sols riches.
67
DEAADEn2003 BACOMohamed Nasser
• Kpanhouri et Orou gnissinqui sont des variétés à faibles rendements;
J'ai décrit avec les producteurs les 112 variétés sur la base de certains critères
agronomiques (annexe 5). Pour le faire, j'ai utilisé les approches de sélections variétales
participatives. A travers des petits groupes constitués dans chaque village nous définissons
dans un premier temps les critères. Ces derniers sont représentés sur un papier craft par
des figurines choisies par les paysans eux-mêmes. Ensuite, les variétés sont passées en
revue une à une. Pour chaque critère elles reçoivent un point. On affecte trois cailloux à la
variété lorsque pour le critère considéré elle a un bon potentiel, 2 cailloux pour une
expression moyenne et 1 caillou lorsque pour le critère la variété a un faible potentiel.
4.2. les caractéristiques culinaires, culturelles et commerciales des variétés
4.2.1. Les caractéristiques culinaires
L'igname est une plante utilisée pour préparer plusieurs mets. Les principaux plats à base
d'igname sont:
L'igname pilée: Communément appelée «tchokourou », elle est la forme de consommation
la plus fréquente et la plus appréciée. Sa préparation, consiste à éplucher l'igname puis à le
découper en morceaux assez gros que l'on porte à ébullition complète. Les morceaux sont
ensuite pilés dans le mortier en ajoutant, à petits coups, l'eau de cuisson de manière à
obtenir une pâte élastique et assez consistante que l'on mange avec différentes sauces.
L'igname frite et /'igname bouillie: les variétés précoces sont les plus appréciées pour ces
formes de préparation.
L'igname braisée: les variétés tardives qui sont surtout recherchées pour être braisées.
Les cossettes d'igname: C'est une pré-transformation de l'igname qui vise à améliorer sa
conservation. La consommation se fait sous forme de pâte ou de « couscous»
Les aptitudes des variétés à faire telle ou telle autre préparation alimentaire ont été évaluées
(annexe 6). Il ressort que très peu de variétés sont aptes à faire l'igname pilée. Presque
toutes les variétés tardives conviennent aux cossettes et à l'igname braisée. L'igname
bouillie est un plat qui se fait avec presque toutes les variétés.
4.2.2. Caractéristiques culturelles des variétés
Certaines variétés d'igname ont des fonctions culturelles et cultuelles qui les distinguent des
autres. Il y a des variétés utilisées dans les cérémonies (fête d'igname, mariage, baptême,
cérémonies funèbres chez les beaux parents,...). Dans le choix variétal, les producteurs
tiennent compte de cette dimension. Ainsi sur les champs de la caste des «Chefs de
Terre», chargés de faire les offrandes de la nouvelle igname aux ancêtres, on retrouve
68
DEA ADEn 2003 BACOMohamed Nasser
toujours la variété Kpanhouri. C'est cette variété qui est exclusivement utilisée pour ces
cérémonies. Sur les 112 variétés, seules 8 ont des caractéristiques culturelles (annexe 6).
4.2.3. Caractéristiques commerciales des variétés
Toutes les variétés cultivées ne sont pas présentes dans le commerce. A l'état frais, ce sont
surtout les variétés à double récolte qui sont commercialisées. La commercialisation des
variétés tardives se fait surtout sous forme cossettes. Les mêmes constats ont été faits au
sud ouest du Cameroun (Acquah et Evange, 1994) et au Ghana (Ghartey, 1995). Les
variétés les plus rencontrées dans le commerce sont Hê-aballo, Kokoro, Kpouna, Moroko,
Dani et Kokouma, et Baniwouré.
Kpouna est la variété la plus recherchée, du fait de ses qualités organoleptiques et son
aptitude à la réalisation de tous les plats. Dans le même temps, Kpouna est une variété très
contraignante ce qui fait que les paysans n'arrivent pas à réussir sa production. Son offre est
faible et sa demande forte, il s'ensuit une hausse de son prix. Sur le marché, Kpouna est la
variété la plus appréciée et la plus chère, vendue à 400fcfa soit 0,6 centimes d'eurol Kg.
Moroko et kokouma, et Baniwouré wouloukaba donnent aussi de bons plats, dont l'igname
pilée. Elles ont l'avantage de se conserver sur une période plus longue.
Environ 25% des variétés recensées sont surtout concernées par les transactions
commerciales (annexe 6). La commercialisation ne concerne pas la majorité des variétés car
leur récolte se fait à une période où les exploitations ont d'autres sources de revenus dont
l'argent issu de la vente du coton.
4.3. Noms des variétés paysannes
La prise en compte des noms que les paysans donnent aux variétés est très importante, car
le nom est l'unité d'identification et de gestion de la variété à travers le temps et l'espace. En
fonction de plusieurs critères, les paysans donnent des noms aux variétés qu'ils cultivent. La
même variété peut aussi avoir plusieurs noms. Dans ce paragraphe, nous voulons expliquer
la logique qui sous-tend la systématique paysanne.
4.3.1. Signification des noms donnés aux variétés.
Les noms des variétés se donnent en se basant sur la source, les critères
morphobotaniques, les performances agronomiques, l'adaptation aux facteurs
environnementaux, les usages (tableau 15). Ainsi, les paramètres utilisés par les paysans
pour identifier et classer les variétés sont complexes et inter-reliés.
69
DEAADEn2003 BAGO Mohamed Nasser
Suivant les caractéristiques agromorphologiques les paysans donnent le nom Kokorogbanon
(en Bariba et Nago) et Alsoro (en Lokpa) aux variétés ayant de très petits tubercules. Dans
le même registre, les variétés à gros tubercules sont désignées sous le nom de Hê-appala.
Dans la culture Bariba, les noms, Orou, Boni sont des noms donnés aux garçons. Dans la
dénomination de certaines variétés, on retrouve ces noms. Le même phénomène est
observé avec Gnon, Baké qui sont des noms donnés aux filles.
Lorsque, par exemple les noms Orou, Boni désignent des variétés, ils indiquent que ces
ignames donnent peu de tubercules par plante, mais que ces tubercules sont vigoureux de
grosse taille. Par contre les noms Yon et Baké indiquent que la variété concernée donne
plusieurs tubercules par plante. En fait une analogie est faite avec l'aptitude procréatrice des
femmes.
La majeure partie des variétés est nommée par référence à des objets naturels, plantes ou
animaux. Le même constat a été fait par Emperaire et al. (1998) sur le manioc en Amazonie.
On pourrait supposer que dans ce cas, qu'elles ont une origine ancienne.
Certaines variétés portent des noms de villes, de villages de leur origine. On peut supposer
que ces variétés ne sont pas endémiques et qu'elles sont d'introduction récente.
4.3.2. Synonymes des variétés
Les variétés cultivées par différents groupes socio-lingustiques portent un nom dans chacun
de ces groupes. Dans la conduite de ce travail, nous avons tenté de dégager ces
synonymies (tableau 18). L'intérêt est qu'il permet d'éviter de considérer la même variété
comme étant plusieurs variétés du fait de la diversité des noms. Les confrontations,
entretiens de groupe, et triangulation ont servi à faire cette analyse.
Au total, 154 noms ont été enregistrés pour les 112 variétés cultivées. Cette situation est
typique aux ignames puisqu'en Nouvelle-Calédonie, Bourret (1973) dénombre une centaine
de variétés connues sous près de 750 dénominations vernaculaires. Le nombre de 112
variétés que nous avons recensé n'est pas une valeur absolue. Pour réduire ces biais, une
bonne connaissance de la morphologie et de la génétique des ignames est nécessaire.
70
DEA ADEn 2003 BACQ Mohamed Nasser
Tableau 18: Signification, synonyme et interprétation des noms de quelques variétés rencontrées.
Nom variété (B Synonymes Signification Interprétation
Ahimon Yorouba-hë (L) Hé= Igname, Yorouba= une ethnie du Nigeria Igname obtenue à partir des yorouba du NigeriaAkouyabougnin Akouvamon (B) Akou = si tu, Yabou = danse, gnin = savoir Cette igname ne se donne pas à celui Qui ne sait pas danser.Ayé - Ayé = Tu es mûr, adulte. Igname donnée aux enfants adultes qui doivent quitter
l'exploitation pour fonder la leur.Bagourou - Bagourou = arbuste des zones tropicales Igname dont les feuilles ressemblent à celles de Bagourou ou
Piliostigma thonningii. Pi/iostigma thonningii.Baké sorou - Baké = Nom de la troisième fille dans la famille Tubercule en forme de mortier. Donne plusieurs tubercules.
Bariba.Sorou = mortier.
Baniwouré Baniwouré bakarou (B) Boni=Bani= nom du quatrième garçon chez les Les tubercules de cette igname sont vigoureuxs et sont dewouloukaba Bariba grosse taille.
Wouré = qui s'adapte à toutbakarou
Baniwouré -Boniwouré Yadonou Boni = nom du quatrième garçons chez les Bariba Igname sans exigence particulière. Elle s'adapte à tous les sols:Yakoba -Boniwouré Kpassikoba Wouré = qui s'adapte à tout ses tubercules sont allongés comme les cornes de bœuf.
-Boniwouré Ketekoba (B) Yakoba = Cornes de boeuf.Bembèrekè - Bembèrèkè= une localité béninoise Variété venue de BembèrèkèBombe (L) - Bombe= mot emprunté du Français Igname qui du fait de la grosseur de ses tubercules, fait éclater
les buttes.Boni Yakpa - Assou Boni (B) Boni = nom du quatrième garçon chez les Bariba. Igname qui ne produit rien si elle est plantée tardivement.
- Aoo (G) Yakna = c'est fini !Coutonou - Cotonou= capitale du Bénin, situé au sud Variété venue du sud du pays.Dani - Engbawobé (B) Engba = Après récolte Il faut se laver après sa récolte, car le tubercule est gros et
• Witani (B) Wobé = laver difficile à creuser. Le moissonneur se salit.- Witanam (L)
Droubayessirou - Diessi (G) Drouba = planter- Gnon woko (N) Yessirou = préparation du sol pour la culture. -
Gammar Vinon - Gambari = Houssa, Vinon = qui refuse Igname abandonnée par un commerçant Haoussa du fait de sonétat de pourriture.
Gogo - Gogodjé (P) Allusion au bruit du tam-tam des Yoruba. Le tubercule résonne quand il est secoué.Gouroko Kourotoko Koura Kourotoko= femme âgée, koura= ne se, gouroko= Igname qui quelque soit son âge donne toujours de bons
uouroko (B) vieillie jamais tubercules.Kpakara - Pakaradlé (P) Sans grande importance Variété non soumise aux contraintes de culture.
71
DEA ADEn 2003 BACO Mohamed Nasser
Nom variété (B Synonymes Signification interprétation
Kpouna - Daiboko (G)- Kpounadjé (G) - -
Morokorou Moroko (G) Samassi= Bariba en Lokpa, hê= igname Igname des BaribaSamassi-hê (L)Kokouma (N)
Soagona - Soagonadjé (P) Soa = oreille, gona = peau- Fagona (B) -
Sossou Soussounadjé (P) Igname guêpe Le tubercule non mature, irrite la peau au contact de celle-ci.Sika Assou sika (B)- Assou = Tardive Sika = jumelle Igname tardive produisant beaucoup de tubercules qui se
ressemblent.Singou - Singou = arbre des zones tropicales. Feuilles ressemblent à celle de l'arbre singou (Hymenocardia
acida).Orou Binssi - Orou = nom du premier garçon chez les Bariba. Variété faisant de gros tubercules qu'il faut nécessairement
Binssi = couper. couper avant plantationYakassougo - Yakassou = herbes, Ngo = tuer Variété à fort étalement végétatif qui couvre bien le sol et tue
les mauvaises herbesSobasson - Soba = étranger, Son = assis Igname Qu'on peut donner aux étrangers.
- Orou Kountou (N, B) Sounou = Eléphant- Orou Fougou (B) dourou = genoux Tubercule développé en forme de genoux d'éléphant ou de
Sounou dourou - Assou Kounkounou(B) Kpérou = Hippopotame patte d'hippopotame.- Kofaniwa (G) Nassou = patte- Kpérou Nassou (B)
Kouri-kouri - Kouri-Kouri = Cobaye Tubercule lisse comme la peau du cobaye.Sogoto Sokoto (N)- Sogoto = culotte Tubercule court comme une culotte.Sankounin - Sankounin = épine Igname dont le tubercule porte des épines.
Légende:
N= Nagot, B= Bariba L= Lokpa, G= Gando
72
DEAADEn2003
Discussion
BACQ Mohamed Nasser
1. Analyse de la diversité des ignames cultivées
1.1. Une diversité variétale à relativiser entre les terroirs étudiés
Sur l'ensemble des quatre villages étudiés, Yébessi a le plus de variété. Ce village à l'instar
des autres est polyglotte, mais la différence avec les autres villages est que les groupes
sociolinguistiques (Lokpa, Bariba) qui y vivent ne cultivent presque pas les mêmes variétés.
Sur les 52 variétés recencées dans le village, seules les variétés Morokorou (ou Samassi
hê) et Ahimon (ou Yorouba-hê) leur sont communes. Les autres variétés cultivées par un
groupe sociolinguistique, ne le sont pas par le second. Ces variétés sont assimilées à des
groupes sociaux bien précis. Dans ces conditions, le nombre de variétés recensées dans ce
village apparaît comme la somme des variétés cultivées par les deux communautés. En ce
qui concerne les autres villages, le phénomène n'est pas le même. Les variétés recensées
sont indifféremment cultivées par toutes les ethnies du village.
Les villages de Gorobani et de Wari ont respectivement les moyennes de variété par
exploitation les plus élevées. Bien qu'ayant la plus grande diversité variétale, Yébessi a la
moyenne la plus faible. Cette situation s'explique par les terminologies utilisées par les
producteurs pour désigner leurs variétés. En effet, on constate surtout dans les villages
Kinnoukpanou et de Yébessi que plusieurs variétés portent le même nom.
La désignation de différentes variétés sous le même nom est due à une érosion linguistique,
ce qui n'est pas sans corollaire sur la diversité des cultivars. Pour les producteurs, cette
perte linguistique s'explique par le fait que la jeune génération ne s'investit plus dans la
culture d'igname comme cela se faisait jadis. A analyser de près, les causes sont multiples
et sont une combinaison de facteurs catalyseurs. Autrefois, d'après certains paysans, ce
sont les variétés Boniwouré ou pour d'autres les variétés kagourou, Singoua, et Singorqu'on
appelait Kokoro gbana ou Kokoro ou Alsoro. Mais depuis une vingtaine d'années où les
cossettes d'igname ont commencé à percer le marché et avoir une importante valeur
marchande (Atègbo et al, 1999, Vernier et al, 2000), on a noté une diversification des
variétés utilisées pour faire ces cossettes. Ainsi, la production des cossettes ne concerne
plus quelques variétés tardives, mais presque toutes les variétés à une récolte. Désormais le
nom Kokoro gbana ou Alsoro utilisé pour les variétés destinées à faire les cossettes s'étend
aux autres. Ce nom ne désigne plus seulement des variétés mais aussi une fonction, une
aptitude culinaire. La conséquence sur la diversité des cultivars serait irrémédiable dans les
années à venir. Toutes les variétés tardives ne seront plus identifiées distinctement. Pour les
séparer, il faudra recourir aux méthodes de génétique moléculaire qui sont très onéreuses.
73
DEA ADEn 2003 BACOMohamed Nasser
On doit pouvoir trouver des solutions simples et pratiques pour freiner cette perte de nom.
Ceci passe par une formation de la jeune génération de producteurs d'igname.
La situation qui vient d'être décrite sur les variétés tardives se pose aussi sur les variétés
précoces dans le village de Yébéssi. Le groupe des variétés précoces est désigné sous le
nom de Hê-aballo. Très souvent par méconnaissance du nom originel de chaque variété,
certains producteurs utilisent à la place le nom du groupe variétal auquel elle appartient.
Cette situation identique à la première est le résultat d'une érosion linguistique qui n'est pas
sans conséquence sur l'érosion variétale.
Dans les calculs qui ont été faits, seul le K (coefficient de similarité de Sorensen) calculé
entre Gorobani et Wari est supérieur à 50%. C'est donc pour ces deux communautés qui
produisent presque les mêmes variétés. Rappelons que les ethnies majoritaires de ces
communautés sont Bariba pour le village de wari et Gando pour le village de Gorobani. Ce
résultat pourrait se comprendre par l'histoire commune que ces deux ethnies ont partagé
depuis des siècles (Bio Bigou, 1994). En ce qui concerne les autres couples de
communautés, il n'y a pas de similitude. Cette absence de similarité est surtout prononcée
entre Kinnoukpanou et Yébéssi. Pourtant on s'attendait à un résultat contraire compte tenu
de la proximité géographique de ces 2 villages par rapport aux autres. Les ethnies
majoritaires de Kinnoukpanou et de Yébessi étant respectivement les Nagot et les Lokpa.
Ces deux groupes sociolinguistiques n'ont pas la même histoire et ont des origines
différentes. Les Lokpa seraient venus de l'Ouest du Golfe de Guinée, alors que les Nagot
seraient originaires tout comme les Bariba de l'Est, précisément du Nigéria. Il se dégage que
la proximité linguistique et historique entretient une ressemblance au niveau de la diversité
agricole plus que la proximité géographique.
1.2. Des échelles de production inégales entre les variétés
L'analyse sur le niveau de production de chacune des variétés, indique qu'il y a des variétés
produites à grande échelle et des variétés dont la production est marginale au point où les
producteurs constatent la disparition de certaines d'entre elles.
1.2.1. Les variétés les plus produites
Les 10 variétés les plus produites au niveau régional sont respectivement: Moroko,
Kokorogbana, Baniwouré wouloukaba, Kokouma, Dani, Ahimon, Gogo, Yakanougo, et
Singou. Ces variétés sont très appréciées sur le plan culinaire et se vendent bien dans le
commerce. Elles se conservent sur une période plus ou moins longue et ne sont soumises à
aucune barrière socio-culturelle. A elles seules, ces 9 variétés occupent plus de 50% des
74
DEAADEn2003 BACOMohamed Nasser
superficies allouées aux 112 variétés d'igname. Les raisons commerciales ne dictent pas
toujours les variétés à cultiver. En effet, la variété Kpouna qui est la plus chèrement vendue
(3 à 4 fois le prix des autres variétés) dans le commerce, vient en 1r me position dans l'ordre
des variétés les plus produites. En plus de la raison commerciale, les producteurs semblent
tenir compte d'autres paramètres.
1.2.2. Les variétés les moins produites
Les variétés les moins produites sont les plus nombreuses. Environ 60% du total de variétés
recensées est produit sur 30% des superficies en igname. Parmi ces cultivars, on retrouve:
Noro moussou, Soagona, Orou Yinssingui, Tchakapim, Arro, Tambana, ...
La variétés à production marginale s'observent à deux niveaux:
• Au niveau villages: ce sont des variétés produites sur de petites superficies et par
quelques rares producteurs. Elles constituent environ 45% des variétés dans chaque
village.
• Au niveau régional: ce sont des variétés qu'on ne retrouve que dans un seul village.
Elles représentent 62% des variétés cultivées.
Ce constat amène à se poser une question fondamentale dans le cadre de la mise en
oeuvre d'un programme de conservation in situ. Entre les variétés de ces deux niveaux,
lesquelles doivent être prioritaires dans la stratégie de conservation? Autrement dit sur quel
niveau pèse t-il plus de menaces? Dans l'approche que je préconise, ces deux niveaux
doivent être considérés avec la même importance. Toutefois, je préconise qu'une analyse
plus approfondie soit faite sur la « carte d'identité» de chaque variété. En effet, parmi ces
variétés à faible production, il y a plusieurs groupes:
~ le groupe des variétés locales (donc anciennes et endémiques). Exemple: Soagona,
Orou Yinssingui, Tambana ...
~ le groupe des variétés récemment introduites d'une autre région: cas de Alakissa,
Aboudja, Ofégui...
~ le groupe des variétés récemment domestiquées. Exemples: Noro moussou,
Donkpirikou, Akpannou...
Le premier groupe semble celui sur lequel il faut mettre le plus d'attention car il regroupe les
variétés locales et anciennes. Dans la mesure où le programme de conservation que je
propose est une conservation basée sur le maintien des processus (et non sur le maintien du
matériel), il est important que ces processus puissent favoriser la création ou l'introduction
de variétés ayant les caractéristiques de ce groupe. C'est la condition pour que l'érosion des
variétés endémiques soit suivie de moindres conséquences.
75
DEAADEn 2003 BACO Mohamed Nasser
En ce qui concerne les 2 autres groupes, on peut espérer que les variétés se multiplient à
grande échelle avec le temps. La diffusion sera conditionnée par les fonctions alimentaires,
culturelles et commerciales qu'ils pourront jouer, mais aussi par leurs caractéristiques agro
écologiques. Les variétés inaptes à assurer convenablement l'une ou l'autre de ces fonctions
disparaîtront à court ou à moyen terme.
1.2.3. Les variétés abandonnées
Au fil du temps, les variétés disparaissent des champs et à l'allure où les choses évoluent
d'autres variétés quitteront définitivement les champs. Les variétés ayant disparu sont:
Touko-nou-Woura, Soassé, Boubiri-boubiri, Bomatangui, Moussougou souan, Akpinnou, YÔ
soussou, Kpouna botorou. Ce sont les producteurs âgés qui reconnaissent les variétés ayant
disparu. En 20 ans une dizaine de variétés semblent avoir quitté les champs. Les raisons de
l'abandon de ces variétés se résument à leur faible productivité, la forte exigence en travail
et les changements climatiques (raccourcissement de la saison pluvieuse). L'abandon de
certains cultivars pourrait aussi se justifier par l'indifférence que manifeste la jeune
génération vis-à-vis du dispositif rituel et culturel lié à certaines variétés. Cette disparition
n'est pas sans conséquence sur l'agrobiodiversité qui s'amenuise avec le temps.
Un autre facteur signalé dans la littérature et qui explique la perte de diversité est
l'introduction de nouvelles technologies (amélioration des techniques culturales, adoption de
nouvelles variétés...). Selon Frankel (1970), l'introduction de nouvelles technologies y
compris les variétés modernes est un phénomène récent qui conduit à l'instabilité. En ce qui
concerne les techniques culturales, elles n'ont presque pas varié avec le temps (Vernier,
2002). On ne peut donc expliquer la perte de la diversité par l'introduction de nouvelles
techniques culturales.
En ce qui concerne l'introduction de variété, à l'exception de Florido (D. alata), aucune autre
variété n'a été vulgarisée par les structures d'encadrement (recherche agronomique,
vulgarisateurs et ONG) au Bénin. A ce jour, l'adoption de cette variété n'est pas encore
significative (Vernier et Dansi, 2000). En Côte d'Ivoire, Hamon et al., (1995) rapportent que
l'introduction de cette nouvelle variété a conduit dans de nombreux villages à l'abandon des
variétés traditionnelles. En s'intéressant aux années d'introduction, on constate que la
variété Florido a été introduite en Côte d'Ivoire depuis 1970 (Zoundjihèkpon et al. 1998),
alors que sa vulgarisation officielle n'a commencé au Bénin qu'en 1998 (Dossou,
communication personnelle). On peut penser qu'avec le temps, cette variété conduirait aussi
au Bénin si rien n'est fait à la perte des variétés traditionnelles.
76
DEA ADEn2003 BACO Mohamed Nasser
En dehors des variétés introduites par le système formel, il existe aussi des introductions
faites par les producteurs eux-mêmes. La compétition entre les variétés locales et les
variétés introduites, pourrait expliquer en partie la perte ou le remplacement des variétés
locales.
1.3. Motivations qui sous-tendent la diversité
Les producteurs d'igname optent pour une culture polyvariétale. Ils cultivent à la fois
plusieurs variétés ayant différentes caractéristiques agronomiques (précocité, rendement,
résistance aux maladies, parasites, sécheresse, etc.) et culinaires dans un même champ ou
dans différents champs. Cette pratique permet la conservation d'une grande diversité
variétale intra et inter-spécifique. Les variétés associées dépendent des préférences du
paysan. La moyenne des variétés cultivées dans la zone d'étude est de 9 cultivars par
exploitation. Cette moyenne cache certaines valeurs car il y a des producteurs qui ont une
vingtaine de variétés dans leurs champs.
Plusieurs raisons justifient pourquoi certains producteurs cultivent une grande diversité
d'igname. La pratique permet aux paysans de cultiver les variétés qui s'adaptent mieux aux
conditions pédologiques de leurs champs et qui répondent à la fois à leurs divers besoins.
Expliquant le fondement de cette pratique, le paysan Boure Moumouni du village de
Gorobani nous dit ceci: «...vous me dites que j'ai plusieurs variétés si j'en avais pas autant
je n'aurais pas pu cultiver de l'igname sur tout mon champ. Je plante les Baniwouré dans les
parties pauvres, Kpouna et Soagona dans les sols riches, Sounou dourou sur les sols
gravillonnaires, Yakassougo en proie à l'enherbement, Moroko, Droubayessirou Kpakara et
les autres ne sont pas très exigents ....». En somme la culture polyvariétale assure
l'utilisation de diverses niches écologiques dans le paysage agricole. Les multiples variétés
adaptées à différentes toposéquences et à différentes conditions biophysiques peuvent être
valorisées et exploitées.
Aussi, Dansi et al. (1997) ont-ils montré que l'association de variétés de précocités
différentes permet aux paysans un échelonnement de la récolte dans le temps et donc de
disposer d'igname jusqu'à la nouvelle récolte. La forte diversité s'observe aussi chez les
producteurs qui veulent:
• Faire de la sélection. Les paysans affirment: « on ne sait quelle variété marchera
avec soi ». Ils lient ainsi la réussite d'une variété aux chances de l'individu. Pour cela,
il faut débuter avec toutes les variétés afin d'éliminer progressivement celles qui ne
répondent pas.
77
DEA ADEn 2003 BACQMohamed Nasser
• Gérer les risques: cette raison est liée à la précédente. Face aux perturbations
climatiques, aux parasites, Jes variétés résistent différemment. Il y en a qui sont
tolérantes, par contre certaines sont sensibles et meurent. La détention d'un grand
nombre de variétés pennet ainsi de dominer ces risques.
• Se distinguer sur le plan social : la détention de nombreuses variétés confère au
paysan un prestige dans le village; tout le monde en parie et vous reconnaît comme
tel. Cela pennet de faire des dons: chaque don est valorisé car le paysan receveur
pariera toujours de son donateur chaque fois que quelqu'un l'interrogera sur l'histoire
de ses variétés.
• Vendre les semences d'igname : posséder plusieurs variétés pennet de vendre des
semenceaux qui reconstituent ou enrichissent le stock semencier d'autres paysans.
On peut avoir un revenu transitoire en ayant plusieurs variétés.
La philosophie qui sous-tend la diversité des cultivars d'Igname est un atout qui peut être
exploité par la conservation in situ. Les paysans recensés pourraient être organisés pour
recevoir des fonnations leur pennettant de s'installer in situ comme producteurs de
semences par exemple.
L'étude a aussi permis de comprendre que tous les producteurs ne cultivent pas une grande
diversité. 43% des exploitations enquêtées ont entre 3 et 7 variétés. Comme pour le premier
groupe, les raisons de la faible diversité détenue sont multiples. Ce sont essentiellement:
• La satisfaction d'avoir fait la sélection des meilleures variétés;
• L'incapacité (physique et financière) d'obtenir de nouvelles variétés. Ces dernières
pouvant être acquises comme salaire en nature ou par achat auprès d'autres
paysans ou au marché;
• Les effets néfastes des facteurs biotiques (parasites) et abiotiques (inondation,
fertilité) sur de nombreuses variétés rares;
• Le groupe ethnique d'origine
La moyenne de variété gérée par les paysans (9 variétés) paraît élevée et amène à
s'interroger sur leur capacité à les conduire de façon fiable à la plantation et à la récolte.
Pour mieux gérer leurs variétés, ils font des semis en ligne. Cette pratique consiste à planter
séparément les variétés dans le champ sur des lignes distinctes de buttes. Dans le cas où
plusieurs variétés, doivent partager la même ligne de butte, un indicateur de limite (bois, pied
de maïs, de sorgho ou de D. alata) est prévu. L'affectation des variétés aux différentes
parties du champ ne se fait pas toujours au hasard. Le paysan tient parfois compte du
gradient de fertilité observée dans le champ ou des exigences culturelles. Ainsi, les variétés
78
DEA ADEn 2003 BAGa Mohamed Nasser
non exigeantes en fertilité du sol sont plantées dans les parties les moins fertiles alors que
celles sensibles sont affectées aux parties les plus fertiles. Compte tenu de la rigueur que
requiert cette pratique, ce sont les chefs d'exploitation censés connaître la systématique des
ignames, qui veillent sur la bonne répartition des différentes variétés dans le champ (Photo
7).
La plantation en ligne par variété est une pratique de gestion qui vise à éviter les mélanges
de variétés pendant la récolte, à garantir à chaque variété une certaine homogénéité. Elle
présente des inconvénients majeurs :
• l'importante demande en main d'œuvre
• la gestion difficile qui en découle et qui peut conduire à des mélanges de tubercules,
ce qui arrive souvent ;
• la nécessité d'un suivi rigoureux du chef d'exploitation.
Photo 7 : Chef d'exploitation assurant la plantation en ligne de ces variétés.
2. Comment conserver durablement les pratiques et les variétés dans le
programme de conservation in situ?
L'observation de la production d'igname a permis de déceler des pratiques endogènes qui
permettent de gérer la diversité des ignames. Il existe des pratiques de maintien de la
diversité et des pratiques d'enrichissement ou de création. La combinaison de ces pratiques
fait qu'on peut parler d'une gestion dynamique de la diversité des ignames. Plusieurs
insuffisances sont à reprocher à ces pratiques. Dans la démarche de proposition d'un
programme de conservation in situ, deux scénarios peuvent être envisagés:
79
DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser
~ Le premier scénario: Zéro intervention. Dans ce scénario, on laisse les producteurs
faire.
~ Le deuxième scénario: Interventionniste. Dans ce scénario, il faut intervenir.
Plusieurs institutions et organisations doivent être impliquées dans la conservation in situ à
différents niveaux. Cette diversité institutionnelle est nécessaire dans la mesure où chaque
organisation a son expérience et c'est seulement à travers la combinaison de ces capacités
qu'il sera possible de cerner la complexité des attentes de la conservation in situ. J'opte
alors pour le deuxième scénario. Pour intervenir, il faut connaître ces faiblesses et pouvoir
les minimiser.
2.1. Les faiblesses liées aux pratiques de gestion de la diversité
Le stockage différentiel, la double récolte, l'association des variétés à des pratiques
culturelles permettent de maintenir la diversité des ignames.
Le stockage différentiel, ne garantit pas toujours des semences saines. Aussi les ignames
stockées ne sont-elles pas à l'abri des voleurs, des feux de brousse et des dégâts des
animaux transhumants. La double récolte est une opération délicate et exigeante. Le savoir
paysan ne donne pas la période optimale à laquelle il faut la faire. En ce qui concerne
l'association des variétés aux us et coutumes, on note une forte régression des traditions
surtout chez les jeunes et certaines ethnies (les Nagots).
En ce qui concerne les faiblesses liées aux pratiques d'enrichissement l'étude a permis de
comprendre que les savoirs liés à la domestication ne sont pas partagés entre les
producteurs.
Les introductions variétales constituent une véritable source de renforcement de la diversité
variétale. Il faut cependant que les conditions de l'introduction et le matériel à introduire,
soient clairement maîtrisés. Plusieurs faiblesses sont à signaler dans ces introductions de
variétés. Entre autres, on peut citer leur caractère individuel et isolé ce qui fait qu'elles
échappent aux contrôles sanitaires de la part des services compétents. Dans le système de
diffusion actuel, le temps de diffusion des variétés introduites est souvent trop long. Il faut en
général plusieurs années pour voir une variété qui a été introduite se répandre dans un
milieu.
2.2. Vers une intervention sur les pratiques de gestion de la diversité
Suite à cette analyse sur les faiblesses des pratiques paysannes de gestion de la diversité,
on pourrait se poser plusieurs questions. Comment rendre les pratiques plus efficaces?
80
DEA ADEn 2003 BAca Mohamed Nasser
Comment se distribuent, s'échangent et s'apprennent les pratiques au sein des
communautés?
Dans l'approche interventionniste que je propose pour les programmes de conservation in
situ de l'agrobiodiversité, les insuffisances notées sur les savoirs locaux doivent être
minimisées à travers des actions complémentaires provenant du dehors de la communauté.
Dans le cas de l'igname, les interventions extérieures pourraient encourager la
domestication, former les producteurs sur des structures de conservation plus fiables, établir
pour les variétés très sensibles, les dates probables de la double récolte. Elles peuvent aussi
favoriser la circulation sans frontière d'âge, de terroir, de région et de sexe des savoirs
locaux relatifs à la gestion de la diversité. En effet dans le dispositif actuel, les savoirs liés au
maintien et à la création variétale (domestication par exemple) ne sont que l'apanage de
quelques-uns. Les échanges entre individus se limitent au matériel végétal. Les
connaissances sur les pratiques de gestion étant très peu échangées. En considérant le
résultat principal visé par la conservation in situ qui est la conservation des processus
dynamiques, l'intervention parait vitale et nécessaire.
En ce qui concerne la diffusion des variétés introduites, pour remédier à la lente propagation,
des producteurs multiplicateurs peuvent être choisis et formés dans chaque zone sur les
techniques de multiplication rapides.
Pour une réussite de l'intervention, le statut des intervenants extérieurs et le profil des
producteurs concernés (multiplicateur des ignames, semencier...) sont des déterminants
importants. Cette question est abordée dans les paragraphes suivants.
3. Des paramètres à considérer pour le choix des conservateurs
Une des conditions de la réussite des programmes de conservation in situ est le choix des
«paysans conservateurs». Tous les producteurs d'igname peuvent-ils être des
conservateurs de l'agrobiodiversité? L'étude des déterminants socio-économiques permet
de comprendre que pour être efficace, le choix des conservateurs doit être très sélectif. Ce
choix de conservateurs n'exclut pas l'implication des autres producteurs. Elle permet de
rendre plus efficace le système. Pour choisir ces conservateurs, il faut se baser sur le mode
d'accès à la terre, la superficie des champs cultivés, le nombre de champs, l'âge des
paysans, le genre, la structure de l'exploitation, l'appartenance linguistique,...
En ce qui concerne l'igname, tous ces critères ne sont pas pertinents. Le mode d'accès à la
terre par exemple n'est pas un facteur qui discrimine les producteurs. Les analyses
statistiques ont prouvé que les personnes âgées, les adultes et les jeunes cultivent le même
81
DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser
nombre de variétés. L'hypothèse selon laquelle les variétés s'accumulent avec l'âge a été
rejetée. Toutefois les observations sur le terrain font apparaître que l'âge est un facteur non
négligeable dans la gestion de la diversité. En effet, les personnes âgées détiennent des
variétés qu'on ne retrouve pas chez les jeunes et vice versa. Sur cette base, les
conservateurs doivent appartenir à toutes les tranches d'âge. Il faut veiller à avoir des
représentants de chaque classe d'âge dans les programmes de conservation in situ.
La culture d'igname n'est pas l'apanage des femmes. Pourtant elles interviennent de façon
indirecte dans la gestion des variétés. Les variétés que les femmes préfèrent ne sont pas
souvent celles voulues par le chef d'exploitation. En général, les hommes mettent l'accent
sur les critères de production alors que les femmes fondent leurs choix sur les critères post
récolte. Les conservateurs à choisir doivent favoriser et tenir compte de l'effet genre dans la
gestion de leurs variétés.
La structure des exploitations est aussi un facteur important sur lequel il faut s'appuyer dans
le choix des conservateurs. Les actifs agricoles participent à l'enrichissement de la diversité
à travers les introductions de variétés. Ils contribuent au renouvellement dynamique du pool
variétal.
Un autre paramètre très important à prendre en compte est l'appartenance linguistique des
producteurs. Malgré les conditions environnementales similaires, les ethnies étudiées
cultivent différentes variétés et utilisent des techniques culturales en rapport avec leur
tradition. Il y a des ethnies qui préfèrent les gros tubercules, certaines optent pour les
variétés de taille moyenne, d'autres par contre cultivent des variétés à petits tubercules.
Chaque groupe linguistique détient et perpétue des savoirs liés aux variétés qu'il cultive.
Pour conserver tous ces types d'igname, il faut veiller à avoir les représentants de chacun
des groupes linguistiques.
4. Qui impliquer dans la conservation in situ de l'igname?
Quels sont les partenaires (privés, publics) qui méritent d'être impliqués dans les
programmes nationaux de conservation in situ? Quels sont leurs rôles et leur importance ?
Quels sont les liens existants entre ces partenaires et comment renforcer la capacité de
chaque acteur?
Parmi les acteurs de la conservation de la biodiversité au Bénin, on retrouve:
Les paysans: Ils constituent l'élément central de la conservation. Leur participation renforce
la réussite des programmes nationaux de conservation. Comme nous l'avons montré dans
les précédents chapitres, ce sont les paysans qui détiennent les variétés à conserver. Ils
82
DEA ADEn 2003 BACQ MohamedNasser
possèdent aussi une gamme de pratiques endogènes de gestion et de conservation de ces
variétés.
Les organisations paysannes: Au nord Bénin comme dans tout le reste du pays, il existe
des associations paysannes à différentes échelles qui représentent les intérêts des paysans.
Parmi ces associations, ont peut citer: les Groupements Villageois (G V), les Groupements
de Femmes (G F), les Unions Départementales des Producteurs (UDP),... Ces différentes
associations veillent à une bonne gestion de la production agricole dans leur zone de
compétence. Au sein de chaque Groupement villageois se trouvent des secrétaires qui
détiennent une bonne base de données (liste des membres, âge, structure du ménage,
cultures pratiquées, superficies allouées à chaque culture, moyens disponibles, ... ) sur tous
les paysans du village. Du fait de cette position, ils sont pris comme des informateurs clés
pour plusieurs actions dans les villages. Dans le cadre de la mise en œuvre de la
conservation in situ, ces « paysans particuliers» peuvent jouer un rôle fondamental dans le
choix des « paysans-conservateurs ».
Les organisations communautaires de base: Dans ce groupe, on retrouve les autorités
locales, les groupes socio-lingustiques, et les associations de développement de chaque
village. Ces associations peuvent contribuer à la conservation in situ à travers la mobilisation
des personnes autres que les paysans. Les actions peuvent se trouver au niveau de la
sensibilisation du public, des réseaux commerciaux, ...
Les organisations non gouvernementales (ONG) : Il existe plusieurs ONG au nord Bénin
intervenant dans l'agriculture. Depuis les quatre dernières années, on note un regain
d'intérêt de certaines d'entre elles sur les ressources phytogénétiques. Il s'agit de Nature
Tropicale, de Institut de Recherche pour le Développement des plantes Cultivées,
Aromatiques et Médicinales (IRDCAM-ONG), l'Organisation des femmes pour la Protection
de l'Environnement et le Développement Intégré (OFEDI), et de l'Action Internationale pour
les Ressources Génétiques (GRAIN). Le rôle des ONG se note surtout dans l'encadrement
et les formations qu'elles peuvent donner aux paysans dans la conservation de
l'agrobiodiversité. Dans un entretien que nous avons eu avec Alexandre Dansi, Directeur de
IRDCAM-ONG, il déclara: « notre ONG assiste actuellement les communautés locales à
créer des comités villageois de conserveiion de la biodiversité et à réfléchir sur le
développement des banques villageoises de gènes». Ces déclarations confirment le rôle
que certaines ONG commencent à jouer pour le renforcement de la conservation de la
biodiversité. OFEDI- ONG aide les femmes à mieux structurer leurs actions économiques
basées sur une meilleure utilisation des ressources biologiques dans le respect de la nature
et surtout des connaissances traditionnelles (Grain, 2003, b).
83
DEA ADEn 2003 BACQ Mohamed Nasser
Les institutions nationales de recherches: Au Bénin, plusieurs institutions de recherches
sont impliquées dans la conservation et l'utilisation durable des ressources phytogénétiques.
Il s'agit entre autres de l'Institut National des Recherches Agricoles du Bénin (INRAB), de la
Faculté des Sciences Agronomiques de l'Université d'Abomey Calavi (UAC), du Laboratoire
de Génétique de l'UAC, du Centre Béninois pour la Recherche Scientifique et Technique
(CBRST). Chacune de ces structures intervient de façon active à travers les multiples
recherches qu'elles mènent à la conservation des cultivars d'igname.
Les projets de développement: Il existe aujourd'hui au Bénin des projets de
Développement chargés de faire la promotion des tubercules et racines. Le programme de
développement des Racines et Tubercules (PDRT) en est une parfaite illustration. Il appui
techniquement et financièrement les producteurs d'ignames et d'autres cultures à
l'approvisionnement en semences, à l'amélioration de leur production, de la transformation,
de la commercialisation et à la bonne conservation.
On note aussi la présence de projets spécifiques comme le Projet de Communication
Nationale sur les Changements Climatiques (PCNCC), le Projet de Lutte contre la
Désertification, le projet Growing Diversity qui a permis de révéler l'extraordinaire variété et
la richesse incomparable des ressources génétiques disponibles en Afrique de l'Ouest et
particulièrement au Bénin (Grain 2003), ...
Les ministères du gouvernement: Au Bénin c'est le Ministère de l'Agriculture de l'Elevage
et de la Pêche (MAEP) et le Ministère de l'Environnement de l'Habitat et de l'Urbanisme
(MEHU) qui sont les plus impliqués dans la conservation de la Biodiversité. Pour aider ces
ministères dans leurs rôles, des services spécialisés ont été créés. Il s'agit: de l'Agence
Béninoise pour l'Environnement (ABE), le Centre Béninois du Développement Durable
(CBDD), ...
Les institutions Internationales: Le Bénin domicilie l'Institut International d'Agriculture
Tropicale (liTA) et l'Institut International des Ressources Phytogénétiques. A travers ses
chercheurs, le Bénin entretient aussi des relations avec d'autres structures des Centres
Internationaux de Recherches Agronomiques (CGIAR). Ces partenariats lui confèrent une
assistance technique pour le développement et la mise en œuvre de son programme de
politique nationale sur les ressources phytogénétiques.
5. Organiser les liens entre les acteurs
Les multiples acteurs de la conservation de la biodiversité ne peuvent jouer efficacement
leurs rôles que s'ils travaillent et collaborent ensemble (Starkey, 1997). Convaincu de cette
84
DEAADEn2003 BAca Mohamed Nasser
collaboration, le Bénin s'est doté en 1995 d'un Comité National des Ressources
Phytogénétiques (CNRPG-BN). C'est une structure multi-institutionnelle, et pluridisciplinaire
ce qui peut lui permettre d'analyser les problèmes sous différents angles. On reproche
toutefois à ce réseau, la faible représentation des paysans qui sont les principaux acteurs de
la conservation in situ des ressources.
Selon Lucien Owolabi coordonnateur principal de la Stratégie Nationale sur la Diversité
Biologique, (site internet), l'action conjuguée de tous les acteurs a conduit à la création d'un
ministère en charge de l'environnement, à la rédaction du Plan d'Action Environnemental
(PAE), à la rédaction de l'Agenda 21 national, l'adoption de loi cadre sur l'environnement qui
exige la réalisation des études d'impact environnemental pour les projets de grande
envergure, à l'élaboration de stratégies sectorielles pour la gestion durable des ressources
biologiques,...
6. Des efforts favorables à la conservation in situ
En dehors de l'identification et de la collaboration entre les différents acteurs, un autre
élément de la conservation in situ est la formation et la sensibilisation.
La sensibilisation des communautés locales sur l'utilité de la conservation des RPG est une
priorité absolue pour certains acteurs dont les ONG. Pour ce faire, plusieurs actions ont
commencé à être menées dans certains villages. Par exemple, l'ONG IRDCAM organise et
intensifie des séances de discussions et d'échanges avec les communautés rurales sur
l'importance de la conservation des ressources phytogénétiques pour les générations
présentes et futures. Pour l'ONG, l'existence des radios rurales et des journaux paraissant
dans les langues locales constitue un atout important pour atteindre les communautés
villageoises. La formation et la sensibilisation des animateurs des radios rurales sur
l'importance de la conservation des RPG, l'organisation d'émissions (par les chercheurs)
portant sur la biodiversité et sa conservation sur les antennes des radios rurales, la
publication d'articles dans les journaux paraissant dans les langues nationales des zones
sélectionnées sont autant d'actions prévues par l'Institut pour une sensibilisation effective
des communautés locales. Plusieurs autres activités comme la réalisation de films
documentaires et de diapositives avec les communautés villageoises sur la biodiversité et sa
conservation in situ, l'organisation de foires de diversité avec attribution de prix aux meilleurs
conservateurs est programmée par l'IPGRI et l'INRAB.
Les différents acteurs peuvent assister les communautés locales à créer des comités
villageois de conservation de la biodiversité et à réfléchir sur le développement des banques
villageoises de gènes.
85
DEA ADEn 2003 BAca Mohamed Nasser
7. La variété: un concept à te opérationnaliser » pour faciliter la conservation
Dans la description qui a été faite jusqu'ici, j'ai considéré la variété telle qu'elle est perçue
par les paysans. Les remarques sur le mode de gestion de ces variétés obligent à relativiser
le concept selon le groupe qui l'utilise. Ce cadrage est surtout nécessaire dans la mise en
œuvre de la conservation in situ .
Du point de vue des paysans, la variété est le matériel végétal qu'ils cultivent et qui se
distingue par des critères morpho-botaniques : la couleur et la grosseur de la tige, l'absence
ou la présence d'épines sur la tige eU ou le tubercule, la taille de la plante, la phyllotaxie, le
nombre et la grosseur des tubercules, la couleur de la chair,... Selon Smale et Bellon (1999),
les variétés des paysans sont des groupes qui combinent un ensemble particulier de
caractéristiques que les paysans reconnaissent comme le rendement potentiel, le cycle
cultural, une réponse au système de gestion, aux propriétés culinaires et de stockage. Des
entités de diversités issues de plusieurs sources (domestication, don, achat, héritage,
échange, introduction d'une autre région,... ) peuvent se retrouver sous le même nom et
correspondre ainsi à une variété. Parfois les erreurs de manipulation (au moment de la
plantation, de la récolte, du stockage) favorisent le mélange des variétés. Malgré l'extraction
de certains hors types, l'erreur persiste et le groupe portera le nom de la «variété»
dominante.
Cette conception de la variété contraste avec la vision du généticien et du sélectionneur. Ici,
la variété est un matériel végétal homogène. Elle se définit par sa pureté liée au même
génotype que partage les individus. Pour éviter les erreurs probables liées à la
reconnaissance morphologique, Hamon et Lebot (1998), en vue de la caractérisation et de la
classification des variétés d'igname, préconisent l'utilisation de marqueurs génotypiques
stables, indépendants du milieu. Par exemple la technique d'électrophorèse d'enzyme fournit
un outil performant pour l'identification clonale et la classification des ignames (Hamon 1997
et Dansi, 2000). Les marqueurs RAPD (Ramser et al. 1996) , microsatellites (Terauchi,
1993) ou AFLP (Mignouna et al. 1998) sont aussi possibles. La variété au sens du généticien
est donc un matériel uniforme.
En s'intéressant à la vision des conservateurs telle que mentionnée dans la Convention sur
Diversité Biologique, le concept de variété est perçu à trois niveaux: le niveau espèce, le
niveau génétique et le niveau écosystème (espace géographique). Cette vision multiscalaire
de la diversité peut poser des problèmes lorsqu'elle est confrontée à l'approche paysanne.
Ces problèmes s'accentuent avec la prise en compte de la vision du législateur. Les textes
de l'UPOV de l'OMPI, et de l'OAPI, considèrent la variété comme une entité distincte, stable,
86
DEAADEn 2003 BACQMohamed Nasser
et uniforme. Cette définition presque contradictoire de la définition que les paysans donnent
de leurs variétés est le début des multiples controverses liées à l'application du cadre
politique et législatif.
8. Comment les cadres juridiques national, régional et international se
positionnent face à la question de la conservation in situ des ignames
Les multiples textes de loi régissant la conservation des RPG et les droits de propriété
ramènent tous à des questions et à des controverses qui demeurent à ce jour sans solutions
définitives.
• A qui appartient les ressources biologiques et qui contrôle leur disponibilité?
• Comment réglementer leur exploitation et distribuer équitablement les avantages qui
en résultent?
• Comment dédommager les communautés locales pour leur travail de sélection
préalable sur plusieurs générations?
• Enfin comment mettre en œuvre des mesures efficaces pour la conservation des
ressources génétiques pour l'alimentation et l'agriculture?
Dans ce travail, j'ai surtout tenté d'apporter une réponse à la dernière problématique. Au
cours de cet exercice, la problématique sur la propriété des variétés d'igname est apparue et
pose la récurrente question: «à qui appartiennent les ressources biologiques et comment
dédommager les communautés détentrices pour leur travail de sélection
transgénérationnelle ?» Les variétés d'igname circule d'un paysan à un autre, d'un village à
un autre, d'une région à une autre, parfois d'un pays (Nigeria) à l'autre (Bénin). La littérature
signale aussi qu'on retrouve en Côte d'Ivoire, au Ghana, et au Togo certaines des variétés
que j'ai recensé au nord Bénin. Il est probable que les communautés de ces pays aient
domestiqués l'une ou l'autre des variétés. Dans ces conditions, comment établir la paternité
de chaque domestication? Sur quelle base dédommager telle ou telle communauté? Si au
niveau international, on peut s'accorder sur la définition de ces communautés en les
considérant simplement comme la population de ce pays, au sein des pays, cette étude de
cas sur l'igname a révélé que ce concept n'est pas facilement maîtrisable. La communauté à
dédommager reste encore à élucider. Identifier dans le contexte actuel la communauté qui
percevra les dividendes de la conservation des cultivars d'igname paraît difficile. Que faire?
La principale question à mon avis se trouve dans le positionnement de l'agriculture africaine
en général face à l'économie contemporaine avec le concept de biens marchands. Quel est
l'intérêt et la portée des connaissances endogènes entretenues telles quelles depuis des
millénaires, face à l'économie du marché international?
87
DEAADEn 2003 BACQ MohamedNasser
L'accord de Bangui révisé (qui instaure un droit de propriété intellectuelle sur les semences
ou obtentions végétales) donne des droits commerciaux exclusifs à ceux qui produisent des
variétés végétales qui sont nouvelles, distinctes, uniformes et stables. Or les variétés des
paysans ne remplissent pas ces conditions, ce sont des groupes hétérogènes. Ils ne
pourront alors être dédommagés. Aussi suivant cet accord, des redevances devront-elles
être payés par les paysans sur les nouvelles semences. Ils n'auront le droit de destiner une
partie de leur récolte pour les plantations futures, que sous certaines conditions. Ainsi, cet
accord restreint le droit des paysans à conserver des semences.
La situation sur les ignames cultivées (0. cayenensis- D. rotundata) n'est peut être pas
assez alarmante car il n'existe pas encore de brevet sur les cultivars. Mais vu la rapide
avancée des biotechnologies et considérant que les bases des variétés améliorées sont les
variétés traditionnelles et les savoirs qui y sont rattachés, la question ne peut être occultée.
Que faire pour valoriser sous forme marchande les ressources biologiques des paysans. Il
faut certainement rechercher des solutions socio-économiques appropriées pour la
valorisation des ressources biologiques au niveau local tout en mettant en place des
mécanismes juridico-politiques et diplomatiques de négociation. C'est en cela que la loi
cadre de l'OUA peut être salutaire.
88
DEA ADEn 2003
Conclusion et recommandations
BACQMohamed Nasser
Tout au long de ce travail, j'ai tenté de comprendre si au vu de l'environnement
(agroécologique, social, et politico-législatif) de production de l'igname, s'il était possible de
proposer la conservation in situ.
Il ressort que le nord Bénin est une grande zone de production d'igname. Il jouit de
conditions agroécologiques favorables à la culture de l'igname. On y retrouve dans les
formations végétales des ignames sauvages surtout Dioscorea abyssinica que certains
paysans continuent à « domestiquer ». Quatre espèces d'igname sont cultivées. Il s'agit de
D. cayenensis- D. rotundata, D. a/ata, D. durnetorum, D. bu/bitera. Parmi celles-ci l'espèce
D. cayenensis- D. rotundata est la plus cultivée, elle occupe environ 96% des superficies
cultivées en igname.
Pour l'ensemble de la zone étudiée, on dénombre environ 112 variétés. Parmi elles on
compte 32 variétés précoces, 70 variétés tardives et 10 variétés à cycle intermédiaire. Les
ignames tardives sont les plus produites car elles se conservent bien, donnent beaucoup de
semenceaux. Dans la grande diversité signalée, toutes les variétés ne sont pas produites à
la même échelle. Il existe des variétés produites à grande échelle et des variétés dont la
production est marginale. 9% des variétés sont communes aux quatre villages étudiés et
62% des variétés ne se retrouvent que dans un seul village. Dans chacun des vill~ges les
tendances de production des variétés sont les mêmes. Plusieurs variétés sont produites sur
de petites superficies par quelques rares personnes. Les variétés les plus produites sont
celles qui sont aptes à l'igname pilée, qui se conservent bien, qui donnent beaucoup de
semenceaux et qui se vendent à des prix compétitifs.
Près d'une dizaine de variétés semble avoir disparu. Les raisons de leur disparition sont
imputables à leur faible rendement, à la sensibilité aux parasites et à l'inaptitude à faire une
bonne igname pilée.
Le nombre moyen de variétés varie en fonction du village. Le terroir de Yébessi a la plus
grande diversité avec 52 variétés ce qui est dû à la spécificité de cohabitation entre les
groupes ethniques qui y vivent. Il est suivi respectivement par Gorobani, Wari et
Kinnoukpanou. Les terroirs étudiés se singularisent aussi à travers leur composition
linguistique. Les 4 principales ethnies ne gèrent pas la diversité des ignames de la même
façon:
89
DEA ADEn 2003 BAca MohamecJ Nasser
• Les Bariba et les Gando préfèrent des ignames de taille moyenne. Ce sont ces
ethnies qui détiennent le plus de variétés dans leurs champs (11 à 14). Elles cultivent
l'igname surtout pour des raisons alimentaires.
• Les Nagot préfèrent des ignames à petits tubercules. L'objectif principal de la
production d'igname de ce groupe ethnique est la vente. Cette raison pourrait
expliquer pourquoi les paysans de ce groupe ethnique cultivent en moyenne moins
de variétés (6 variétés) par rapport aux autres ethnies.
• Les Lokpa : dans ce groupe, ce sont surtout les variétés à gros tubercules que les
producteurs cultivent. Ils ont une moyenne de 9 variétés.
D'autres paramètres socio-économiques ont été identifiés comme facteurs importants dans
la gestion de l'agrobiodiversité. Il s'agit de l'âge, du genre, du nombre d'actifs, de la
superficie et du nombre de champs. L'hypothèse selon laquelle les variétés s'accumulent
avec le temps c'est à dire que les personnes les plus âgées ont plus de variétés que les plus
jeunes, n'est pas vérifiée. Il n'y a pas de différence significative entre le nombre moyen de
variétés détenu par les différentes tranches d'âges.
L'implication des femmes dans la gestion des variétés est indirecte. Elle contribue parfois à
augmenter le nombre de cultivars de l'exploitation à partir des introductions de leur famille
d'origine. La différence de nombre de variétés entre les exploitations polygames et les
monogames n'est pas évidente. Les critères de choix des variétés sont influencés par le
genre. Les femmes choisissent sur la base de critère post récoltes (aptitude culinaire, prix
sur le marché,...) alors que les hommes mettent l'accent sur les critères de production
(rendement, production de semence, adaptabilité aux conditions agro-écologiques, ...).
Il existe un lien entre le nombre de variétés et la superficie du champ d'igname. Ce lien est
surtout remarqué à Wari et à Gorobani. Les exploitations qui ont plusieurs variétés cultivent
des superficies importantes. Parfois, elles préfèrent avoir 2 à 3 champs.
Les actifs agricoles au niveau de l'exploitation semblent aussi influencer le nombre de
variétés cultivées. Ils participent à enrichir la diversité variétale en procédant à des
introductions à partir des exploitations où ils vont servir de main d'œuvre.
Pour gérer la diversité, plusieurs pratiques endogènes de gestion et de conservation des
ignames existent au niveau paysan dans toutes les zones de production au Bénin. Les
pratiques peuvent être rangées en deux groupes:
~ Celles qui permettent de maintenir la diversité: stockage différentiel, double récolte,
association des variétés à des rites cultuelles.
90
DEAADEn 2003 BACQ Mohamed Nasser
~ Les pratiques qui permettent de créer et d'enrichir la diversité: domestication
introduction de variétés, circulation des variétés (don, achat, héritage, échange).
Dans l'ensemble, ces pratiques varient très peu selon la zone, l'ethnie et le rang social. Les
hommes sont les acteurs les plus impliqués parce que l'igname est beaucoup plus une
culture d'homme. Ces pratiques ont joué un grand rôle dans le maintien de cette importante
plante à tubercule alimentaire. Elles sont donc utiles pour la mise en œuvre d'une stratégie
adéquate de conservation in situ des ignames au Bénin.
Sur l'aspect organisationnel, politique et législatif l'igname à l'instar d'autres cultures se
cultive dans un milieu où existent déjà des organisations paysannes, des institutions dont les
activités peuvent s'inscrire dans la conservation de l'agrobiodiversité. Mais le cadre politique
qui doit servir de levier pour toutes les actions demeure encore ambigu. Dans ce jeu, les
communautés locales qui sont les meilleures gestionnaires de la diversité biologique agricole
sont écartées des grands débats ce qui aboutit à la signature de traités difficiles à appliquer.
La loi modèle de l'OUA annonce quelques lueurs d'espoirs. Il faudra pour concrétiser cela
que chaque pays élabore sa législation, organise des campagnes d'information, de
formation, et de sensibilisation des paysans, des ONG, et de la société civile en général
autour des traités internationaux. La bataille contribuera à garantir les conditions de réussite
des programmes de conservation in situ.
En somme, l'exemple de l'igname étudiée dans le nord Bénin prouve que la conservation in
situ est possible. Les producteurs gèrent une grande diversité et détiennent des savoirs
locaux qui ont permis de la perpétuer. Toutefois les nouvelles contraintes de l'agriculture
contemporaine (aléas agro- climatiques, poussée démographique, intégration du commerce
à tous les niveaux, nouvelles politiques commerciales et agricoles,... ) montrent que ces
savoirs à eux seuls ne suffisent plus pour conduire un programme durable de conservation in
situ. C'est pour cela que ce travail débouche sur la proposition d'une approche
interventionniste qui vise à associer plusieurs acteurs.
Cette étude a permis de déceler plusieurs axes de recherche dont les résultats peuvent
contribuer à mieux comprendre les préalables à la conservation in situ de l'agrobiodiversité.
En se basant sur l'exemple de l'igname comment peut-on envisager la conservation durable
de la diversité des autres cultures vivrières? Quelles sont les pratiques liées à la gestion de
la diversité de ces plantes vivrières? Peut-on envisager à l'instar de l'igname leur
conservation in situ?
91
DEAADEn2003 BACQMohamed Nasser
Dans le travail, la nécessité d'associer différents acteurs pour la réussite de la conservation
in situ de l'agrobiodiversité est apparue. Toutefois le mode de fonctionnement de cette
association reste à définir? Quelle doit être la configuration de la structure ad'hoc à mettre
en place pour coordonner les actions? Entre la forme privée (ONG, société civile... ) et les
structure publiques ou parapubliques, quelle est l'entité qui pourra jouer un rôle efficace et
dynamique de premier plan?
Le projet loi cadre de l'OUA sur les droits de propriété se veut être une loi modèle pour la
protection des droits des communautés, des agriculteurs et des obtenteurs ? Quelles sont
les avantages comparatifs de cette loi par rapport aux autres déjà en vigueur? Comment se
positionne t-elle par rapport à l'arsenal juridique qui régit les droits de propriété au niveau
international?
Avec le développement des circuits commerciaux et l'adoption de nouvelles innovations
techniques, on se demande quelles sont les variables économiques et technologiques qui
influencent la diversité? Quelles sont les conséquences et impacts de la perte de diversité
génétique sur le système de production? Quels sont les facteurs de politiques agricoles qui
ont un impact sur l'agrobiodiversité ?
Plus globalement, il serait nécessaire d'approfondir les recherches sur les facteurs
techniques, culturels, socio-économiques ou politiques qui influencent l'agrobiodiversité au
Bénin.
Ces différentes pistes de recherche pourraient faire objet d'étude dans le cadre d'une thèse.
92
DEAADEn 2003
Références bibliographiques
BAca Mohamed Nasser
Adoukonou-Sagbadja, A. H. 2001. Gestion paysanne de la diversité génétique des
ignames du complexe Dioscorea / Dioscorea rotundata au Centre du Bénin. Mémoire de
DEA, Option Biologie Végétale Appliquée. Université de Lomé, Togo. 56p.
Agbo, V. A., 1991. Civilisation et agriculture paysannes en pays Adja-Mono (Bénin) : rites
production - réduction des risques et gestion de l'incertitude. Thèse de Doctorat d'Etat,
Université de Paris V, Paris.
Allomasso, T. 2001. Conservation des ressources génétiques forestières du Département
de l'Atlantique: stratégies de conservation de l'igname sauvage Dioscorea praehensilis dans
les forêts sacrées et étude de sa domestication. Mémoire DESS, FSA 1UAC. 88 p.
Almekinders, C. J.M., L. O. Fresco & P. C. Struik. 1995. The need to study and manage
variation in agro-ecosystèms. Netherlands Journal Agricultural Science 43 (1995) 127-142;
Aubertin, C., V. Boisvert. 1998. Les droits de propriété intellectuelle au service de la
biodiversité. Une mise en œuvre bien de conflictuelle. In Nature Science et Société, vol. 6,
n02, : 7-16.
Baco, M. N. 2000. La domestication des ignames sauvages dans la sous-préfecture de
Sinendé : savoirs locaux et pratiques endogènes d'amélioration génétique des Dioscorea
abyssinica Hochst. Thèse d'ingénieur agronome. FSA, UNB. 172 p.
Baco, M. N., A. J. Djènontin. 2003. Typologie des exploitations agricoles: vers un ciblage
des actions de recherché- développement. 2003. In Acte Atelier Scientifique Nord. Parakou
25-26 février 2003. Sous presse.
Belem, M. O. 2000. Socioeconomic data collection and analysis. Burkina Faso. In
Conserving agricultural biodiversity in situ: a scientific basis for sustainable agriculture. D.
Jarvis, B. Sthapit and L. Sears, eds. Pp 46-48. IPGRI, Rome, ltaly.
Bellon, M. R 2001. Demand and supply of crop intraspecific diversity on farms: towards a
policy framework for on -farm conservation. CIMMYT Economies working paper.
Bellon, M. R, D. S. Brar, et J. L. Pham. 1998 a. Rice genetic resources. In Sustainability of
Rice in the Global Development and Cultural Change. N. G. Dowling, S. M. Greenfield, et K.
S. Fischer, eds. Davis, CA: Pacifie Basin Study Center and Manila: IPGRI. Pp. 251-283.
Bellon, M.R, J.L Pham, L.S. Sébastian, S.R. Francisco, G.C. Loresto, D. Erasga, P.
Sanchez, M. CaUbo, G. Abrigo et S. Quilloy. 1998 b. Farmers' perceptions of varietal
diversity: implications for on-farm conservation of rice. In Farmers, Gene Banks, and Crop
breeding: Economie Analyses of Diversity in Wheat, Maize, and Rice (M. smale, ed.) Kluwer
Academie Publishers, The Nethertandsl CIMMYT, Mexico.
93
DEA ADEn 2003 BACQ Mohamed Nasser
Berthaud, J. 1997. Stratégies for conservation of genetic ressources in relation with their
utilization. Euphytica 96: 1-12.
Bio Bigou, L. B. 1994. Bref aperçu sur les valeurs socio-culturelles du peuple Baatonu
" Bariba ": musique et religion traditionnelles, artisanat. Elément de civilisation du peuple
Baatonu (Bariba). Cotonou, 55 p.
Boisvert, V., Vivien, F.-D., 1998. Un prix pour la biodiversité. L'évaluation économique entre
différentes légitimités, Natures Sciences, Société 6,2,7- 16.
Bourret, D., 1973. Etude ethnobotanique des Dioscoreacées alimentaires. Igname de
Nouvelle-Calédonie. Thèse de doctorat 3ème cycle, spécialité biologie végétale, Paris,
France.
Brown, H. D. 2000. The genetic structure of crop landraces and the challenge to conserve
them in situ on farms. Pp. 29-48 in Genes in the field: On Fann Conservation of Crop
Diversity. Ed Brush S. B. Boca Raton, FL, USA.
Brush, S. 1995. In situ conservation of landraces in centres of crop diversity. Crop Science
35: 346-354.
Brush, S. B., 1992. Ethnoécology, biodiversity and modemization. In Andean potato
agriculture, J. Ethnobiol. N° 12. pp. 161-185.
Brush, S. B., 1995. In situ conservation of landraces in centers of crop diversity. In crop
science. N°35. pp. 346-354.
Dansi A., J. Zoundjihékpon, H. D. Mignouna & M. Quin, 1997. Collecte d'ignames
cultivées du complexe Dioscorea cayenensis-rotundata au Bénin. Plant Genetic Resources
Newsletter, 112 : 81- 85
Dansi, A., 2003. Connaissances endogènes et savoir-faire paysans relatifs aux ignames du
complexe Dioscorea cayenensis-rotundata au Bénin. Rapport FAo-CIRAD, 35 p.
Doukouré, S., 2000. Amélioration de la production de l'igname par bouturage in vitro. chez
les cultivars f1orido et brazo fuente. Thèse Doctorat Ingénieur, UFR Biosciences, Université
de Cocody, Côte d'Ivoire, 143 p.
Dounias, E. 1995. Comment les pygmées du sud-Cameroun forestier modèlent la forêt à
l'usage de leur vie nomade? Le Flamboyant 36 : 28-30.
DRA,. 1993. Rapport de zonage et sondage diagnostic du département du Borgou. Projet
Borgou /1 Ina, 123 pages.
Dumont, R. & P. Vernier. 1997. La domestication des ignames (D. cayenensis-rotundata)
chez la population Bariba du Bénin. In Colloque Gestion des ressources génétiques des
plantes en Afrique de l'Ouest. Bamako, Mali, 24-28 février 1997, 13p.
Dumont, R. & P. Vernier. 2000. Domestication of yams (Dioscorea cayenensis-rotundata)
within the Bariba ethnie group in Benin. Outlook on Agriculture, 29 : 137-142
94
DEAADEn 2003 BACQMohamed Nasser
Dumont, R. 1998. Domestication des ignames en Afrique. In ..1. Berthaud, N. Bricas...I-L.
Marchand (Eds), 1998: L'igname, plante séculaire et culture d'avenir, pp: 119-123
Dumont, R., Hamon, P., Seignobos, C. 1994. Les ignames du Cameroon. Montpellier,
France, CIRAD, collection Repères, 80 p.
Emperaire, L. Pinton, F., Second, G., 1998. Gestion dynamique de la diversité variétale du
manioc en Amazonie du nord-ouest. Nature, Sciences et Sociétés 6(2) : 27-42.
Engelmann, F. 1992. Les nouvelles méthodes de conservation ex situ. In: Actes du colloque
en hommage à Jean Pemès. Pp. 435-445.
FAO. 1995. , Annuaire de production, 1983 à 1995.
FAO. 1996. Rapport sur l'état des ressources phytogénétiques dans le monde. Oganisation
des Nation Unie pour l'Alimentation et l'Agriculture, Rome, Italie.
FAO. 2001. Annuaire de production.
Frankel, O. H. 1970. Genetic conservation in perspective. In Genetic resources in plants
Theirexploration and conservation. O. H. Frackel, and E. Bennett, eds. Oxford: International
Biological Programme Handbook ND 11. Blackwell Scientific Publications. Pp. 469- 489.
Friis-Hansen, E. & B. Sthapit. 2000. Participatory approaches to the conservation and use
of plant genetic resources. International plant Genetic Resources 1nstitute, Rome, Italy.
Gass, T. 1998. La conservation des ressources phytogénétiques : une préoccupation
internationale. In Biotechnology Agronomy sociology Environment ND2: pp 7-14.
GRAIN. 2003 a. La piraterie des ressources biologiques ou bio-piraterie en Afrique. Ed.
Ruisseaux d'Afrique, 47 p.
GRAIN. 2003 b. Promouvoir la diversité biologique en agriculture en Afrique de l'Ouest. Ed.
Ruisseaux d'Afrique, 47 p.
GTZ, 2000. Gestion de l'agrobiodiversité dans les zones rurales. 10p.
Hamilton, M. B., 1994. Ex situ conservation of wild plant species: time to reassess the
génetic assumption and implications of seed banks. Conservation biol. ND 8. pp 39-49.
Hamon P., Dumont R., Zoundjihékpon J., Tio-Touré B. & S. Hamon, 1995. Les ignames
sauvages d'Afrique de l'Ouest. Caractères morphologiques. Eds. ORSTOM, Paris, 84 p.
Hamon, P., R. Dumont, J. Zoundjihékpon, N. Ahoussou, & B. Tio-Touré. 1997. Les
ignames. In L'amélioration des plantes tropicales. Ed. Repères, CIRAD-ORTOM. Pp. 385
400.
Hamon, P., Touré, B. 1991. New trends for yam improvement in the D. cayenensis
rotundata complex. In: Crop genetic resources of Africa, N. Q. Ng et al. éd., Rome, Italie,
IBPGR, Pp. 119-125.
Hamon, P., V. LEBOT. 1998. Les ressources génétiques de l'igname: Caractérisation et
classification. In L'igname, plante séculaire et culture d'avenir. Actes du séminaire
9S
DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser
international CIRAD-ORTOM-INRA-CORAF. Edited by: J. Berthaud, N. Bricas, J-L.
Marchand. Montpellier, France. Pp. 127 - 133.
Hladik, A., Bahuchet, S., Ducatillon, C., Hladik, C. M. 1984. Les plantes tubercules de la
forêt dense d'Afrique centrale. Revue d'écologie, 39 : 249-290.
Houémassou, B J. 2002. Gestion de la diversité variétale au sein du complexe D.
cayenensis- D. rotundata et la domestication de D. praehensilis : savoirs locaux et pratiques
endogènes dans la SIP de Djidja. Thèse d'ingénieur agronome. FSAlUAC. 130 p.
liTA. 1992.Sustainable food production in sub-Saharian Africa. liTA, Ibadan 208p.
IIbert, H., L. Tubiana. 1992. Protection juridique des inventions biotechnologiques. analyse
de la directive européenne et propositions. Solagral, collection « Réseau Biotechnologies»,
201 p.
Ingebord, B. 1999. Les OGM, comment la science de l'industrie biotechnologique altère
secrètement nos aliments. Ed. Berger A. C., 228 p.
INSAE. 1992. Enquêtes sur les ménages au Bénin.
IPGRI. 1991. Geneflow: Women and Plant Génétic Ressources. IPGRI, Rome. Jarvis, D., B.
Sthapit et L. Sears, editors. 2000. Conserving agricultural biodiversity in situ: A scientific
basis for sustainable agriculture. International Plant Genetic Resources Institute, Rome, ltaly.
Jarvis, D. 1., Myer L., Klemick H., Guarino L., Smale M., Brown A. H. O., Sadiki M., Stapit
B., Hodgkin T. 2000. A traning guide for in situ conservation on farrn. IPGRI, 161 p.
Lefort, M., Sontot A., Mitteau M., Chauvet M., Thaler L. 1998. La préservation des
ressources phylogénétiques: Stratégie nationale et enjeux. C.R. Acad. Agric. Fr., N° 3. pp
183-194.
Louette, O., Charrier A., Berthaud J. 1997. In situ conservation of maize in Mexico: genetic
diversity and maize seed management in a traditional community. Economy Botanic. N° 51.
pp 20-38.
Maxted, N., Hawkes J. G., Ford-Lioyd B. V., et Williams J. T. 1997. A pratical model for in
situ genetic conservation complementary conservation strategies. Pp. 339-367 in Plant
Genetic Conservation: The in situ A pproach. Eds MAXTED N., HAWKES J. G., FORD
llOYD B. V., et WILLIAMS J. T., Chapman and Hall, London.
Mckey, O., Emperaire L., Elias M., Pinto F., Robert T., Desmoulière S., Rival L., 2001.
Gestions locales et dynamiques régionales de la diversité variétale du manioc en Amazonie.
ln Genet. Sel. Evol. W 33. pp 465-490.
MOR. 1995. Filière igname.
Meyer, N. 1983. A wealth of wild species. Boulder, colorado, westwiew Press.
Miège,J., S. N. Lyonga. 1982. Yams-Ignames. Oxford, Royaume-Uni, Clarendon Press,
412 p.
96
DEAADEn 2003 BACOMohamedNasser
Mignouna, H. & A. Dansi. 2003. Yam domestication by Nago and Fon ethnie groups in
Benin. Genetic Resources and Crop Evolution (in press).
Miller K., Allergretti M. H., Johnson N., Johnson B. 1995. Measures for conservation of
biodiversity and sustainable use of its compnents in: Heywood V. H. (ed), Global Biodiversity
Assement, United Nations Environment Programme, Cambridge University Press,
Cambridge.
Millon, J. W. 1995. Implications of alternative concepts of sustainability for total valuation of
environmental resources. In Economie appliquée, tome XLVIII, n°. 2, pp. 59-73.
Mulder, 1. 2000. Farmers' perceptions of soil fertility in Bénin. CREED Working Paper, Series
N° 28. liED. London.
N'kounkou J.S., J. Lejoly, D. Geerinck. 1993. Les dioscoreacees du Congo. Fragmenta
Floristica Geobotanica, Supplementum, 2: 139-182.
Nicolas, B., Vernier, P., Ategbo, E.,Hounhouingan, J., Mitchikpe, E., N'kenu, E. K.,
Okwor, G. 1998. Le développement de la filière cossette d'igname en Afrique de l'Ouest. In
les Cahiers de la Recherche Développement. N° 44-1997. CIRAD.
Okry, K. F. 2000. L'igname dans le système de production agricole de Bantè et la
domestication de quelques-unes unes de ses formes sauvages: savoirs locaux et pratiques
endogènes de culture et d'amélioration génétique. Thèse d'ingénieur agronome. FSA / UNB.
119 p.
Omiti, J. M., K. A. Parton, J. A Sinden et S. K. Etui. 1999. Monitoring changes in land-use
pratices following agrarian de-collectivisation in Ethiopia. In Agriculture, Ecosystems, and
Environment 72: 111-118.
Pearce, D. 1996. Economie valuation and Ecological Economies. Plenary Adress to the
European Ecological Economies Inaugural International Conference, Université de Versailles
France, 23-25 Mai 1996.
PNUE, 1992. Convention sur la diversité biologiqque.
RAFI. 1999. Les petits agriculteurs pris au piège des accords sur les Aspects des Droits de
Propriété Intellectuelle liés au Commerce (ADPIC). La sécurité alimentaire et les ménages
ruraux n'ont pas encore ressenti l'effet des droits de propriété intellectuelle, 5 p.
Rana, R. B., D. Gauchan, D. K. Rijal, S. P. Ktatiwada, C. L. Paudel, P. Chaudhary et P.
R. Tiware. 2000. Socioeconomic data collection and analysis. Nepal. In Conserving
agricultural biodiversity in situ: a scientific basis for sustainable agriculture. D. Jarvis, B.
Sthapit and L. Sears, eds. Pp. 54- 59. IPGRI, Rome, Italy.
Reveret, J. P., Webster A. 1997. Vers une économie de la biodiversité? ln La biodiversité
Tout conserver ou tout exploiter? (éd) Marie-Hélène Parizeau. De Boeck Université.
Collection Sciences Ethiques Societés, pp. 47-59.
97
DEAADEn 2003 BAca Moharned Nasser
5carcelli, N. 2002. Etude des relations entre les sauvages apparentées (Dioscorea sp.) au
Bénin: Impact de la domestication sur la diversité des plantes cultivées. Mémoire de DEA.
Université de Montpellier II. 47p.
5erpentie, G. 1993. Rôles et significations de la jachères dans les systèmes de production
agricole en Afrique de l'Ouest. Problématique de son emplacement. In Floret, C.; Pontanier,
R. et Serpentie, G. La jachère en Afrique tropicale. Dossier Mab 16 UNESCO. Paris, France.
86p.
SOLAGRAL. 2000. Pourquoi un forum sur la gestion de la diversité génétique?
Solbrig, O. T. 1991. The origin and function of biodiversity. Environmentvol. 33, n° 5: 17-38.
Sorensen, T. 1948. A méthod of establishing groups of equal amplitude in plan sociology
based on similarity of species content and its application to analyses of the vegetation on
Danish common. Kong!. Danske vidensk. Selsk. Biolg. Skr. Kjobenhavn 4: 1-34.
Starkey, P. 1997. Networking for Développement. IFRTD, London.
Tostain 5., N. M. Baco, F. K. Okry, R. L. Mongbo, C. Agbangla & o. DaYnou. 2002.
Système traditionnel de production des ignames au Bénin. Annales des Sciences
agronomiques du Bénin (3), n° 2 Spécial Colloque; p 55-72.
Trommetter, M. 2002. La gestion des ressources génétiques végétales: d'une approche
empirique à une institutionnalisation internationale. In Johanesburg Sommet Mondial du
Développement Durable 2002 Quels enjeux? Quelle contribution des scientifiques? adpf,
Ministère des affaires étrangères, pp. 45-49.
UNEP- CBD. 1994. Convention sur la Diversité Biologique. Texte et Annexes: 34 p.
Vernier, P. & Dansi A. 2000. Participatory asseessment and farmers knowledge on yam
varieties in Benin. In Makoto Nakatani and Katsumi Komaki: Potential of root crops for food
and industrial resources. 12th Symposium of the International Society for Tropical Root
Crops (ISTRC); Pp 360-365.
Vernier, P. 2002. Enquêtes sur les systèmes de culture à base d'igname dans le
département du Borgou et du zou, Bénin. Document de travail. CIRAD-CA- liTA.
Wilson E.O., 1992. La diversité de la vie. Traduction française, Paris, Ed. Odile Jacob, 1993.
Zimmerer, K. S. 1996. Changing fortunes: biodiversity and peasant Iivelihood in the
Peruvien Andes. University of California Press, Berkeley.
Zoudjihèkpon, J., A. Dansi, J.H.D. Mignouna, A. M. Kouakou, J. D. Zongo, K. E.
N'kpenou, D. Sunu, F. Camara, S. Kourouma, J. Sanou, H. Sanou, J. Belem, R. Dossou,
P. Vernier, R. Dumont, P. Hamon, & B. Tio-Touré. 1998. Gestion des resources
génétiques des ignames africaines et conservation in situ. In Aménagement et Nature. N°
135. Pp. 85- 94.
98
DEAADEn 2003
Liste des figures
Liste des figures, photo et tableaux
BACO Mohamed Nasser
Figure 1 : Localisation de la République du Bénin: Nord Ouest de l'Afrique 23
Figure 2 : Importance de la production de l'igname dans les 6 départements du Bénin 24
Figure 3 : Carte du Bénin montrant le Département du Borgou et la délimitation l'espace Bariba.
......................................................................................................................................................... 25
Figure 4 : Pluviométrie (Hm! mois) du Borgou au cours de la campagne 2002-2003..•.................. 27
Figure 5 : Production moyenne annuelle d'igname des communes du département du Borgou
(moyenne calculée sur 10 ans, 1991 à 2000)...•............................................................•.••...•..•........ 29
Figure 6 : Répartition des enquêtés dans les groupes linguistiques 30
Figure 7 : Analyse de la distribution des variétés de Yébéssi à travers le four square analysis 40
Figure 8 :Analyse de distribution des variétés de Kinnoukpanou à travers le four square analysis
......................................................................................................................................................... 42
Figure 9 : Répartition des variétés par groupe d'ethnies 46
Figure 10 : Diversité et origine géographique des variétés .......................................................•.... 51
Figure 11 : Uen social etproportion de don des variétés 52
Figure 12 : résultat de l'ennoblissement sur l'enrichissement de la diversité d'un champ
d'igname 58
Figure 13: Nombre moyen de variétés et de champs d'ignames en fonction des villages 62
Liste des photos
Photo 1 : Plant d'igname ••••.••••.•...............................................................•.............................••..•.•.. 22
Photo 2 : Tubercules d'igname 22
Photo 3 : Grenier de conservation de l'igname........................................................•...................... 47
Photo 4 : Tas d'ignames de la variété Baniwouré conservées au champ sous un arbre 48
Photo 5 : Tubercules d'igname sauvage prélevés de la forfit pour être domestiqués 57
Photo 6: Igname en domestication soumis à la pose d'une feuille de t6le comme obstacle 57
Photo 7 : Chef d'exploitation assurant la plantation en ligne de ces variétés. ..............•.•.....•....... 79
Liste des tableaux
Tableau 1 : Choix des unités d'observation..•.•............................................................................... 30
Tableau 2 : Récapitulatif des données collectées et des outils d'analyse 32
Tableau 3 : espèces d'igname cultivée et nombre de variétés correspondantes ....•..................... 36
Tableau 4 : répartition des variétés recensées dans les grands groupes variétaux 38
Tableau 5 : distribution géographique des variétés dans les villages étudiés 38
Tableau 6: Quelques données sur la divetsité variétale dans les villages étudiés 44
Tableau 7 : Analyse de variance: comparaison des moyennes de variétés............•..................... 44
99
DEA ADEn 2003 BACOMohamed Nasser
Tableau 8 : Coefficient de similarité de Sorensen calculé pour les quatre localités 45
Tableau 9 : Répartition des variétés cultivées dans 4 classes suivant 2 critères discriminants 45
Tableau 10 : Répartition des variétés par couple d'ethniques 46
Tableau 11: variétés d'igname et les croyances qui leur sont liées 49
Tableau 12 : Introductions des variétés: origine et ancienneté••.••..•..•.•........................................ 54
Tableau 13 : Critér'es de sélection des ignames spontanées destinées à la domestication 56
Tableau 14 : Superficie des champs d'igname et nombre moyen de variétés par village 62
Tableau 15: Nombre moyen de variétés cultivées par tlanche d'âge 63
Tableau 16 : comparaison des moyennes de variétés suivant les classes d'âges 63
Tableau 17: comparaison des moyennes de variétés entre les ethnies 66
Tableau 18: Signjf"lCation, synonyme et interprétation des noms de quelques variétés
rencontrées 71
100
DEAADEn 2003
Liste des acronymes
BACQMohamed Nasser
ABE : Agence Béninoise pour l'Environnement.
ADPIC : Accords sur les Droits de propriété Intellectuelle liés au Commerce.
CARDER: Centre d'Action Régional pour le Développement Rural.
CBD : Convention sur la Diversité Biologique.
CBDD : Centre Béninois pour le Développement Durable.
CEDEAO : Communauté Economiques des Etats de l'Afrique de l'Ouest.
CGIAR : Groupe Consultatif pour la Recherche Agronomique Internationale
CIRA: Centre Internationaux de Recherche Agronomique.
CIRPG : Centre International des Ressources Phylogénétiques.
CNRPG-BEN : Comité National des Ressources Phylogénétiques du Bénin.
E5A : Enquêtes sur les Statistiques Agricoles
FAO : Food Agriculture Association (Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et
l'Agriculture).
F5A : Faculté des Sciences Agronomiques.
GRAIN: Action Internationales pour les Ressources Génétiques.
GTZ : Technishe Zusammenarbeit.
liTA: International Institute of Tropical Agriculture.
INRAB : Institut National des Recherches Agricoles du Bénin.
IPGRI : International Plant Genetic Resources Institute.
IRD: Institut de Recherche pour le Développement (France).
IRDCAM..QNG : Institut de Recherche pour le Développement des plantes Cultivées, Aromatiques et
Médicinales.
IRRI : Institut International de Recherche sur le Riz.
MAEP : Ministère de l'Agriculture de l'Elevage et de la Pêche.
MOR: Ministère du Développement Rural.
OAPI : Organisation Africaine de la Propriété Intellectuelle.
OFRDI..QNG : l'Organisation des femmes pour la Protection de l'Environnement et le Développement
Intégré
OMC : Organisation Mondiale du Commerce.
OMPI : Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle
ONG : Organisation Non Gouvernementale
PORT: Programme de Développement des Racines et Tubercules.
PNB: Produit National Brut.
PNUE : Programme des Nations Unies pour l'Environnement
RAFI : Rural Advancement Foundation International
RPG : Ressources Phylogénétiques
UNB : Université Nationale du Bénin.
UPOV : Union pour la Protection des Obtentions Végétales
101
DEA ADEn 2003
Liste des annexes
BAca Mohamed Nasser
Annexe 1 : Fiche de collecte des données exploitation agricole & village
Annexe 2 : Analyse de la distribution des variétés de Wari à travers le four
square analysis
Annexe 3 : Analyse de la distribution des variétés de Goro bani à travers le four
square analysis
Annexe 4 : Répartition des variétés au sein des 4 ethnies étudiées
Annexe 5 : Caractéristiques agromorphologiques des variétés cultivées dans le
nord Bénin
Annexe 6: Caractéristiques socio-culinaires et commerciale des variétés du
nord Bénin
102
Annexes
Annexe 1 : Fiche de collecte des données exploitation agricole & village
Prénoms:-----------
Village: ----------------------------
Données démographiques
1.1 Chef d'exploitation: Noms:------
1.2 Age:-------------
1.3 Ethnie:---------·----·
Non,Oui,
1.4 Religion-------------- .-------------------
1.5 Scolarisé:
1.6 Si oui quel est son niveau d'instruction: -----------------------
1.7 Avez-vousjamais domestiqué l'igname sauvage?--
1.8 A quand remonte la dernière domestication ?-----
1.9 Quellesvariétés avez-vous obtenu?------------------------
1.10Ressources humaines de l'exploitation
Hommes: ------ Femmes: -----
1.10.1 - Taille du ménage: -------Hommes : -------IFemmes :------
1.10.2 - Nombre d'actifs dans le ménage: ---
1.10.3 Nombre d'hommesactifs---------------------------
1.11Superficietotale disponible: --------------------------
1.12Superficietotale cultivée cette année: ------------------------
1.13Superficie affectée aux différentes cultures et ordre de priorité: ---------------
Cultures Igname Manioc Patate Maïs Sorghol Coton Arachide Niébé
douce mil
Superficies
Ordre de
priorité
1.14Parmi ces cultures qu'elle est celle qui vous génère plus de revenu? -------------
1.15Quelleest la principale source alimentaire? -------------------------
B. Diversité variétale
1- Quelles sont les variétés d'igname que vous cultivez ?
Nom Provenance* Année d'obtention Nombre de buttes
2- Etes vous satisfait des variétés que vous cultivez7'---------------------
3- Justifiez:------------------------------------
4- Aimeriez vous disposez de nouvellesvariétés 7---------------------
5- Pourquoi 7-----------------------------------
6- Donnez les caractéristiques des variétés que vous aimeriez avoir 7--------------
7- Pour vous, quelle est la caractéristique principale qu'une variété d'igname doit avoir 7------
8- Echangervous des variétés d'igname entre paysans7-------------------
9- Quels sont les liens que vous lient aux paysans qui échangent leurs variétés avec vous 7-----
10- Où achetez-vousvos semencesd'igname 7------------------------
11- Quelles sont les variétés dont l'approvisionnement en semences est difficile 7-----------
12- Quelles sont les variétés qui sont soumises à des barrières sociales7-------------
13- Y a t-il des variétés qui existaient dans le passé et qui ont disparu des champs 7----------
14- Donnez les raisons de leur disparition: -------------------------
15- Comment conservez-vousvos variétés pour quelles ne soient pas perdues 7-----------
16- Quelles sont les variétés sur lesquellesvous veillez le plus 7-----------------
17- Pourquoi 7-----------------------------------
18- Comment faites-vous pour reconnaître les variétés entre elles 7---------------
19- Comment faites-vous pour éviter le mélange des variétés 7------------------
A la plantation7------------
A la récolte7--------------------------------
Au stockage 7-----------
17 Où stockervous vos igname (description) 7
18 Qui assure le stockage des ignames 7 (homme, femmes, jeunes, vieux...)1------------
19 Pourquoi 7-----------------------------------
20 Quelles sont les variétés que vous avez dans le passé et que vous ne cultivez plus 7--------
21 Pourquoi7------------------------------------
22 Nombre de champ d'igname et variété dominante
Champ 1 2 3 4
Superficie
Variétés
dominantes
11
FICHE DE COLLECTE DES DONNEES GENERALES DANS LES VILLAGES
Informations sur les variétés
Signification des noms
Nom des variétés Synonyme Signification et interprétations
Caractéristiques culturales (3= élevé ou bon, 2= moyen ou acceptable; 1 = faible mauvais)
Période de Tuteurage Nombre de Nre tubercule Grosseur Exigence en Sensibilité Sensibilité Sensibilité à Sensibilité à
Variétés plantation récolte 1butte tubercules sol riche aux maladies mauv herbe sécheresse l'inondation
Caractéristiques culinaires et socioculturelles (3= élevé ou bon, 2= moyen ou acceptable; 1 = faible ou mauvais)
Variétés Utilisation culinaire Utilisation Interdits Valeur Aptitude à laPilée Bouillie/ragoût Frite Cossette cultuelle commerciale conservation
111
1. Quelles sont les variétés les plus cultivée ?-
2. Pourquoi?----------------------------------
--------------_._---------------------------
3. Est ce qu'il y a des variétés qui existaient dans le passé et qui ont disparu de nos jours (Donnez les) ?-
4. Pourquoi?-----------
5. Quelles sont les variétés que les femmes aiment?
6. Comment avezvous conservezles autres variétés à ce jour ?----------------
7. Serezvous-prêts à faire des foires de semences?--------------------
8. Voudrez-vous avoir une banquescommunautaires de variétés d'igname?-----------
9. Accepterez-vous de créer une association pour conserver les variétés ?------------
10. Existe-il des ignames sauvages les formations végétales du village?-------------
11. Serez-vous prêts à les protéger?---.------------------------
12. Donnez les noms de ceux qui ont beaucoupde variétés dans le village?------------
13. Donner le nom de ceux chez qui ont achète souvent les semences d'ignames?---------
v
Annexe 2 : Analyse de la distribution des variétés de Wari à travers le four
square analysis
Plusieurs exploltatlonsGrandes superficies
Plusieurs exploitationsPetUes superficie.
ego~0 Moroko
KpakaraGogoM;m onB. lM>uloukabaB. Kèlèk obaSingorDan ;Gogo
ege~ÇJ Soussou
Dou bayessirouKilDanwariGumsi bakafOuKago uro uSounoudoUfouSingouBakésorouDanwar;Assou sika
Quelques exploitationsGrandes superficies
AwèfèAssou bagourouMoroB. YintéguerouTèkokoroKinkèrèkouTabané
SoagonaKpanhouriKpounaVW>mskouMonguiAiakjssaOrou gnissinguiYonbouanriGambari YinnonAnkakorouWOUI11KinkérékouGourokoWomakou
IM>mèKékouroTan kpanou0I0d0WomokouSoko lo
Annexe 3 : Analyse de la distribution des variétés de Goro bani à travers le
four square analysis
Plusieurs exploitationsGrandes superficies
Plusieurs exploitationsPetites superf icies
egôQ0 Ah;mDn
Baniwouré kélèkobaB. WOUJoUkBbaB. yinfJl!guerouDan;DoubByeSS;-OUGogoKokoumaMaokoSingou
~.. gQ
•• r.:<i- \,d
M a nGnon mombouGourokoKékouroKpBkarBOlodoSingorTaba néSoussou
Quelques explol1atlonsGrandes superllcles
BakèsorouBoniakpaGutissi bakarouKogourouKinkérékouSounoudourouYakaRougoSobasson
Quelques exploitationsPetites superficies
Orou gnissinguiAboudjaAJaJ(ÎSSS
Babak oDlkpriDonkpirikouûoueninIbère gninsséKourikouriKonhouraKpounaMonguiNora moussou
PabiSsn}(QuninSoag onaYakou gnaro
VI
Annexe 4 : Répartition des variétés au sein des 4 ethnies étudiées
Ethnies
Variétés Bariba Gando lokpa Nago
Aboudia Aboudia
Adéwelè Adéwelè
Adié Adjé
Adjnè Adjinè
Adoro Adoro Adoro Adoro
Agarou Agarou Aaarou Aaarou
Ahimon Ahimon Ammon Ammon Ammon
Akpanna Akoanna
Alassika Alassika Alassika
Atihéhou Aihéhou
Alsoro Alsoro
Anclouma Anclouma
Andorokou Andorokou Andorokou
Anka korou woura Anka korou woura
Arro Arro
Assoukoana Assoukoana Assoukoana
Assou sika Assou sika Assou sika
Ateoufo Ateoulo
Awèrè Awèrè Awèrè Awèrè Awèrè
Babako Babako
Badéba Badéba Badéba
Bagourou Bagourou Bagourou Bagourou
Baké sorou Baké sorou Baké sorou
Bandé Bandé
Baniwouré kètèkoba Baniwouré kètèkoba Baniwouré kètèkoba Baniwouré kètèkoba
Baniwouré wouloukaba Baniwouré woufoukaba Baniwouré woufoukaba Baniwouré wouloukaba
Baniwouré yintéguerou Baniwouré yintéguerou Baniwouré yintéguerou Baniwouré yintéguerou
Bembèrèkè Bembèrèkè Bembèrèkè
Bombe Bomba
BoniaktJ8 Boniakpa Boniak/Ja Boniakoa
Colobo Cofobo
Coutonou Coutonou
Dani Dani Dani Dan;
Danwari Danwari Danwari
Déba Déba Déba
Dikpiri Dikpiri Dikoiri
Donkpirikou Donkpirikou
Douemn Douanin
Doubavessirou Doubayessirou Doubayessirou Doubayessirou
Doundou worou Doundou worou Doundou worou Doundou worou
Etolo Etofo
Gambari gn;non Gambari gn;non Gambari gninon Gambari amnon
Gbanwokiri Gbanwokiri Gbanwokiri
Gbédo Gbédo
Gnonmombou Gnonmombou Gnonmombou
GnonMoré Gnon Moré Gnon Moré Gnon Moré
Gogo Gogo Gogo Gogo
VII
Gomin; Gomin; Gomin;
Gommin Gommin Gommin
Gouroko Gouroko Gouroko
Gu;fÏSSi bakarou Gu;fÏSSi bakarou Gu;rissi bakarou
Hé-aba60 Hé-aba60
Hamoya Homoya Homoya
Ibère gninssé Ibère gninssé Ibère aninssé
Kagourou Kagourou Kagourou Kagourou
Ké Ké Ké Ké
Kèkouro Kèkouro Kèkouro
Kinkérékou Kinkérékou Kinkérékou Kinkérékou
Kohounf/ou Kohoungou
Kokorobanon Kokorobanon
Kokouma Kokouma Kokouma Kokouma
Ko-N'yo Ko-N'yo
Kouméni Kouméni
Kouri kouri Kouri kouri Kouri kouri
Kourotoko Kol<Darérou
Koutala Koutala
Koyo Koyo
Kpaganna Koaaanna
Kpahassaha Koahassaha
Kpakagn;na Koakaanina
Kpakara Kpakara Koakara Koakara
Kpakpa-téoun Kpakpa-téoun
Kpanaté Kpanaté
Kpanhoura Kpanhoura Kpanhoura Kpanhoura
Kpého Kpého
Kpéyé Kpéyé
Kpouna Kpouna Kpouna Kpouna Kpouna
Latou Latou
Makpona Makpona
Mongui Mongui Mongu; Mongui
Morokorou Morokorou Morokorou Morokorou Morokorou
Noro moussou Noro moussou
Oféf/ui Oféaui Ofégui
01000 O/odo Olodo Olodo
Orougnissinau; Orouanissinaui Orouanissinaui
Pabi Pabi
Po/aaa Po/aga
Sankounin Sankounin Sankounin
Saria Saria
Sinf/or Sinaor Singor
Singou Singou Singou Singou
Soaaona Soaaona Soagona
Sobasson Sobasson Sobasson
Sokoto Sokoto Sokoto
Sounoudounou Sounoudounou Sounoudounou
Soussou Soussou Soussou Soussou
Tabané Tabané Tabané
Talambadiè Talambadiè
Tambana Tambana
V111
TanKpannou TanKpannou
Tantanboulca Tantanboulca
Tchalcapim Tchalcapim
Tchibiri Tchibiri
Tchilcpélé TchilcDé/é
Tchon-tcholoun Tchon-tcholoun
Tèlcolco Tèlcolco Tèlcolco
Tèlcoutèlcou Tèlcoutèlcou
Tounon-hé Tounon-hé
Waho Waho
Womalcou Womalcou Womalcou Womalcou
Yalcanouflo YalcanouflO Yalcanougo Yakanouflo
Yalcou gnaro Yalcougnaro
IX
Annexe 5 : Caractéristiques agromorphologiques des variétés cultivées dans le nord Bénin
Grosseur Exigence Sensibilité Sensibilité aux Sensibilité à
Variétés Nbre tubercule/des en sol aux mauvaises la Sensibilité à Aptitude à laCycle butte tubercules riche maladies herbes sécheresse l'inondation conservation
Aboudja P 2 2 3 2 1 3 2 1Adéwe/è T 3 2 1 2 1 1 1 3Adjê T 3 1 2 1 2 1 1 3Adjinè T 3 1 1 2 1 1 1 3Adoro 1 2 2 2 1 2 2 2 2Agarou T 3 1 1 1 1 1 2 3Ahimon P 2 2 3 2 1 3 2 1Akpanna T 2 2 1 1 2 2 2 3A/assika 1 2 2 2 1 2 2 2 2Alihéhou T 2 2 1 1 2 2 2 3A/soro T 3 1 1 1 1 1 2 3Anc/ouma P 2 2 3 2 1 3 2 1Andorokou P 2 2 3 2 1 3 2 1Anka korou woura T 2 2 1 1 2 2 2 3Arro P 2 2 3 2 1 3 2 1Assoukpana T 2 2 1 1 2 2 2 3Assou sika T 3 1 1 1 1 1 2 3Ateou/o T 3 1 1 1 1 1 2 3Awèrè P 2 2 3 2 1 3 2 1Babako T 3 1 1 1 1 1 2 3Badéba T 3 1 1 1 1 1 2 3Bagourou T 3 1 1 1 1 1 2 3Baké sorou T 3 1 1 1 1 1 2 3Bandé T 2 2 1 1 2 2 2 3Baniwouré kètèkoba T 3 1 1 1 1 1 2 3Baniwouré wou/oukaba 1 2 2 2 1 2 2 2 2
x
Grosseur Exigence Sensibilité Sensibilité aux Sensibilité à
Variétés Nbre tubercule/des en sol aux mauvaises la Sensibilité à Aptitude à laCycle butte tubercules riche maladies herbes sécheresse l'inondation conservation
Baniwouré yintéguerou T 3 1 1 1 1 1 2 3Bembèrèkè P 2 2 3 2 1 3 2 1Bombe P 1 3 2 2 1 2 2 2Boniakpa T 3 1 1 1 1 1 2 3Colobo T 3 1 1 1 1 1 2 3Coutonou P 2 2 3 2 1 3 2 1Dani P 1 3 2 2 1 2 2 2Danwari P 2 2 3 2 1 3 2 1Déba T 2 2 1 1 2 2 2 3Dikpiri 1 2 2 2 1 2 2 2 2Donkpirikou P 2 2 3 3 3 3 3 1Douanin T 3 1 1 1 1 1 2 3Doubayessirou P 1 3 2 2 1 2 2 2Doundou worou T 2 2 1 1 2 2 2 3Etolo P 2 2 3 2 1 3 2 1Gambari gninon T 3 1 1 1 1 1 2 3Gbanwokiri T 3 1 1 1 1 1 2 3Gbêdo T 2 2 1 1 2 2 2 3Gnonmombou T 3 1 1 1 1 1 2 3Gnon Moré T 3 1 1 1 1 1 2 3Gogo P 1 3 2 2 1 2 2 2Gomini T 3 1 1 1 1 1 2 3Gommin T 3 1 1 1 1 1 2 3Gouroko T 3 1 1 1 1 1 2 3Guirissi bakarou 1 2 2 2 1 2 2 2 2Hê-aballo P 1 3 2 2 1 2 2 2Homoya T 2 2 1 1 2 2 2 3Ibère gninssé T 2 2 1 1 2 2 2 3Kagourou T 3 1 1 1 1 1 2 3Ké P 2 2 3 2 1 3 2 1Kèkouro 1 2 2 2 1 2 2 2 2
Xl
Grosseur Exigence Sensibilité Sensi bilité aux Sensibilité à
Variétés Nbre tubercule/des en sol aux mauvaises la Sensibilité à Aptitude à laCycle butte tubercules riche maladies herbes sécheresse l'inondation conservation
Kinkérékou T 3 1 1 1 1 1 2 3Kohoungou T 3 1 1 1 1 1 2 3Kokorobanon T 3 1 1 1 1 1 2 3Kokouma P 1 3 2 2 1 2 2 2Ko-N'yo T 2 2 1 1 2 2 2 3Kouméni T 3 1 1 1 1 1 2 3Kouri kouri T 3 1 1 1 1 1 2 3Kourotoko Kokparérou 1 2 2 2 1 2 2 2 2Kouta/a P 2 2 3 2 1 3 2 1Koyo P 2 2 3 2 1 3 2 1Kpaganna T 2 2 1 1 2 2 2 3Kpahassaha T 2 2 1 1 2 2 2 3Kpakagnina T 2 2 1 1 2 2 2 3Kpakara P 2 2 3 2 1 3 2 1Kpakpa-féoun P 2 2 3 2 1 3 2 1Kpanafé T 2 2 1 1 2 2 2 3Kpanhoura P 2 2 3 3 3 3 3 1Kpêho P 2 2 3 2 1 3 2 1Kpéyé T 3 1 1 1 1 1 2 3Kpouna P 2 2 3 3 3 3 3 1Lafou T 2 2 1 1 2 2 2 3Makpona T 2 2 1 1 2 2 2 3Mongui P 2 2 3 2 1 3 2 1Morokorou P 1 3 2 2 1 2 2 2Noro moussou P 2 2 3 3 3 3 3 1Ofégui T 3 1 1 1 1 1 2 3O/odo P 2 2 3 2 1 3 2 1Orougnissingui P 2 2 3 3 3 3 3 1Pabi P 2 2 3 2 1 3 2 1Po/aga T 3 1 1 1 1 1 2 3Sankounin T 3 1 1 1 1 1 2 3
XlI
Grosseur Exigence Sensibilité Sensibilité aux Sensibilité àVariétés Nbre tubercule/des en sol aux mauvaises la Sensibilité à Aptitude à la
Cycle butte tubercules riche maladies herbes sécheresse l'inondation conservationSaria 1 2 2 2 1 2 2 2 2Singor T 3 1 1 1 1 1 2 3Singou T 3 1 1 1 1 1 2 3Soagona P 2 2 3 3 3 3 3 1Sobasson T 3 1 1 1 1 1 2 3Sokoto T 3 1 1 1 1 1 2 3Sounoudounou T 3 1 1 1 1 1 2 3Soussou 1 2 2 2 1 2 2 2 2Tabané T 3 1 1 1 1 1 2 3Ta/am badjè T 3 1 1 1 1 1 2 3Tambana T 2 2 1 1 2 2 2 3Tan Kpannou T 2 2 1 1 2 2 2 3Tantanbouka T 2 2 1 1 2 2 2 3Tchakapim T 3 1 1 1 1 1 2 3Tchibiri T 3 1 1 1 1 1 2 3Tchikpé/é T 3 1 1 1 1 1 2 3Tcnon-tcnotoun T 2 2 1 1 2 2 2 3Tèkoko T 3 1 1 1 1 1 2 3Tèkoutèkou T 3 1 1 1 1 1 2 3Tounon-nê T 3 1 1 1 1 1 2 3Waho T 3 1 1 1 1 1 2 3Womakou T 3 1 1 1 1 1 2 3Yakanougo P 2 2 3 2 1 3 2 1Yakou gnaro T 3 1 1 1 1 1 2 3
Légende: 3= élevé ou bon, 2= moyen ou acceptable, 1= faible ou mauvaisP=précoce 1= intermédiaire T= tardive
XIll
Annexe 6 : Caractéristiques socio-culinaires et commerciale des variétés du
nord Bénin
Variétés Cycle utilisation culinaire Utilisation Pesanteur Valeur
Pilée Bouillie Frite Cossette cultuelle sociologiquecommerciale
~boudja P 2 3 3 1 1 1 2~déwelè T 2 3 2 2 1 1 3~djé T 2 3 2 2 1 1 3~qjinè T 2 3 2 2 1 1 3~doro 1 2 3 3 2 1 1 2~garou T 2 3 2 2 1 1 3~himon P 3 3 3 1 2 1 3~kpanna T 2 3 2 2 1 1 3~/assika 1 2 3 3 2 1 1 2~lihéhou T 2 3 2 2 1 1 3~/soro T 3 3 2 3 2 1 3~nclouma P 3 3 3 1 2 1 3IAndorokou p 2 3 3 1 1 1 2IAnka korou woura T 2 3 2 2 1 1 3IAffo P 2 2 3 1 1 1 1IAssoukpana T 2 3 2 2 1 1 3Ass sika T 3 3 2 3 2 1 3Ateoulo T 2 3 2 2 1 1 3Awèrè P 2 3 3 1 1 1 2Babako T 2 3 2 2 1 1 3Badéba T 2 3 2 2 1 1 3Bagourou T 3 3 2 3 2 1 3Baké sorou T 3 3 2 3 2 1 3Bandé T 2 3 2 2 1 1 3Baniwouré kèfèkoba T 3 3 2 3 2 1 3IBaniwouré wouloukabé 1 2 3 3 2 3 1 3lBaniwouré yintéguerou T 3 3 2 3 2 1 3IBembèrèkè p 2 3 3 1 1 1 2IBombe p 3 3 3 1 2 1 3IBoni akpa T 2 3 2 2 1 1 3Colobo T 2 3 2 2 1 1 3Coutonou P 3 3 3 1 2 1 3iDani p 3 3 3 1 2 1 3lDanwari p 2 3 3 1 1 1 2lDéba T 2 3 2 2 1 1 3lDikpiri 1 2 3 3 2 1 1 2lDonkpirikou p 1 2 1 1 2 3 1iOouanin T 2 3 2 2 1 1 3lDoubayessirou P 3 3 3 1 2 1 3lDoundou worou T 2 3 2 2 1 1 3!,Etolo P 2 3 3 1 1 1 2Gambari gninon T 3 3 2 3 2 1 3Gbanwokiri T 2 3 2 2 1 1 3Gbédo T 2 3 2 2 1 1 3Gnonmombou T 2 3 2 2 1 1 3
XlV
Variétés Cycle Utilisation culinaire utilisation Pesanteur Valeur
Pilée Bouillie Frite Cossette cultuelle sociologiquecommerciale
Gnon Moré T 2 3 2 2 1 1 3Gogo P 3 3 3 1 2 1 3Gomini T 2 3 2 2 1 1 3Gommin T 2 3 2 2 1 1 3Gouroko T 3 3 2 3 2 1 3Guirissibakarou 1 2 3 3 2 1 1 2lHé-aballo P 3 3 3 1 3 1 3lHomoya T 2 3 2 2 1 1 3I/bèrè gninssé T 3 3 2 3 2 1 3iKagourou T 3 3 2 3 2 1 3
iKé P 2 3 3 1 1 1 2Kèkouro 1 2 3 3 2 1 1 2Kinkérékou T 3 3 2 3 2 1 3Kohoungou T 2 3 2 2 1 1 3Kokorobanon T 3 3 2 3 2 1 3Kokouma P 3 3 3 1 2 1 3Ko-N'yo T 3 3 2 3 2 1 3iKouméni T 3 3 2 3 2 1 3!Kouri kouri T 3 3 2 3 2 1 3!Kourotoko Kokparérou 1 2 3 3 2 1 1 2!Koutala p 2 3 3 1 1 1 2Koyo P 2 2 2 1 2 3 1Kpaganna T 3 3 2 3 2 1 3Kpahassaha T 3 3 2 3 2 1 3!Kpakagnina T 3 3 2 3 2 1 3[Kpakara P 3 3 3 1 2 1 3[Kpakpa-téoun P 2 3 3 1 1 1 2!Kpanaté T 2 3 3 1 1 1 2iKPanhoura p 1 2 1 1 3 3 1[Kpého P 2 3 3 1 1 1 2IKpéyé T 2 3 2 2 1 1 3lKPouna p 3 3 3 1 3 3 3lLafou T 2 3 2 2 1 1 3lMakpona T 2 3 2 2 1 1 3lMongui p 2 3 3 1 1 1 2lMorokorou p 3 3 3 1 3 1 3lNoro moussou P 1 2 1 1 2 3 1Ofégui T 2 3 2 2 1 1 3Olodo P 2 3 3 1 1 1 2Orou gnissingui P 1 2 1 1 3 3 1IPabi P 2 3 3 1 1 1 21Polaga T 2 3 2 2 1 1 3Sankounin T 2 3 2 2 1 1 3Saria 1 2 3 3 2 1 1 2Singor T 3 3 2 3 2 1 3Singou T 3 3 2 3 2 1 3Soagona P 1 2 1 1 3 3 1Sobasson T 2 3 2 2 1 1 3Sokoto T 3 3 2 3 2 1 3
xv
Variétés Cycle Utilisation culinaire utilisation Pesanteur Valeur
Pilée Bouillie Frite Cossette cultuelle sociologiquecommerciale
Sounoudounou T 3 3 2 3 2 1 3Isoussou 1 2 3 3 2 1 1 2Tabané T 3 3 2 3 2 1 3Talambadjè T 2 3 2 2 1 1 3Tambana T 2 3 2 2 1 1 3Tan Kpannou T 2 3 2 2 1 1 3Tantanbouka T 2 3 2 2 1 1 3Tchakapim T 3 3 2 3 2 1 3Tchibiri T 3 3 2 3 2 1 3Tchikpé/é T 3 3 2 3 2 1 3Tchon-tcholoun T 2 3 2 2 1 1 3Tèkoko T 3 3 2 3 2 1 3Tèkoufèkou T 3 3 2 3 2 1 3Tounon-hé T 3 3 2 3 2 1 3Waho T 2 3 2 2 1 1 3Womakou T 2 3 2 2 1 1 3Yakanougo P 3 3 3 1 2 1 3Yakougnaro T 3 3 2 3 2 1 3
Léaende: 3= élevé ou bon, 2= moyen ou acceptable, 1= faible ou mauvaisP=précoce, 1= intermédiaire T=tardive
XVI
DEAADEn 2003
TABLE DES MATIERES
BAGa Mohamed Nasser
SOMMAIR.E 1Dédicace ................•.............•.••••••••••.............••••••........................•...•..••••••••••..........•.••.••••••..•..3Remerciements 4Résumé 5Abstract 5Introduction 6
Objectifs et hypothèses 8Objectifgénéral 8Objectifs spécifiques 8Hypothèses de travail 9
Cadre conceptuel de l'étude 101. Définition de certains concepts 102. En quoi / 'agrobiodiversité est-elle nécessaire ? 113. Dans quelle mesure / 'agrobiodiversité est-elle menacée ? 124. Prise en compte de /a biodiversité par / 'économie 135. Les conventions et les débats politiques sur /a biodiversité 14
5.1. La Convention sur la Diversité Biologique (CBD) 145.2. Le Traité International sur les ressources phytogénétiques pour l'alimentation etl'agriculture (TIRPAA) 155.3. Les réglementations de l'accès et du partage des bénéfices 16
6. Méthodes de conservation de / 'agrobiodiversité 186.1. Des méthodes empiriques à l'instrumentalisation internationale 186.2. Les méthodes de conservation retenues dans la CDB. 18
6. 2.1. La conservation ex situ 196.2.2. La conservation in situ 20
7. Que/quesfacteurs pouvant influencer /e maintien de /a diversité 20Cadre méthodologique 22
1. Brève présentation de l'igname (Dioscorea sp.) 222. Présentation de /a République du Bénin 233. Caractéristiques du département du Borgou 244. Choix des communes de Sinendé et de Tchaourou 285. Sélection des vil/ages d'étude et des unités d'observation 296. Outils et méthodes de collecte des données 317. Données collectées et outils d'ana/yses 328. Limites du travail 33
Résultats 351. Amp/eur de /a diversité variétale maintenue par les paysans dans /e temps et dansl'espace 35
1.1. Les ignames sauvages rencontrées dans le nord Bénin 351.2. Les ignames cultivées 35
1.2.1. Inventaire de la diversité 351.2.2. Les différents groupes de D. cayenensis- D. rotundata 37
1.3. Distribution de la diversité inter et intra villages 381.3.1. Distribution inter villages 38132 D' . ê d l' d" à Yébé. .. iversite es cu tivars Igname a e essl 391 3 3 D' .,dl' d" . K' k. .. rversitè es cu tivars Igname a mnou panou .411.3.4. Diversité des cultivars d'igname de Wari .42
103
DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser
1.3.5. Diversité des cultivars d'igname de Gorobani .431.4. Analyse comparée de la diversité des villages étudiés .43
1.4.1. Comparaison de la diversité intra- village .431.4.2. Comparaison de la diversité entre les communautés étudiées .441.4.3. Niveau et importance de production des variétés .45
, .. d ., , 1 hni 461.4.4. Repartition es varietes entre es et mes .II. Processus utilisés pour maintenir et créer la diversité agricole de l'igname .47
2.1. Pratiques paysannes de maintien et de conservation de la diversité variétale des. 47Ignames .
2.1.1. Stockage différentiel des variétés .472.1.2. Le sevrage précoce ou la double récolte .482.1.3. Association de certaines variétés à des pratiques culturelles .49
2.2. Pratiques paysannes liées au renforcement de la diversité variétale des ignames 502.2.1. Les circulations de variétés entre paysans 50
2.2.1.1. Les dons de variétés entre paysans 512.2.1.2. L'héritage de variétés 522.2.1.3. L'achat de variétés 532.2.1.1. Les échanges de variétés entre paysans 53
2.2.2. Introductions variétales 542.2.3. Domestication des ignames sauvages 55
2.2.3.1. Choix des individus à domestiquer. 562.2.3.2. Prélèvement partiel des individus choisis 572.2.3.3. Introduction d'obstacle pendant l'ennoblissement 572.2.3.4. La double récolte des tubercules de domestication 582.2.3.5. La sélection des clones intéressants 582.2.3.6. Le mélange variétal après sélection 592.2.3.7. La dénomination des nouveaux clones 592.2.3.8. Multiplication et diffusion des nouveaux clones 60
IlL Déterminants socio-économiques des détenteurs de la diversité 613.1. Terre et gestion de la diversité 61
3.1.1. Influence du mode d'accès à la terre sur la richesse variétale 613.1.2. Influence de la superficie et du nombre de champ sur la diversité des ignames 61
3.2. Lien entre l'âge des paysans et le nombre de variétés 633.3. Genre et gestion de la diversité 643.4. Lien entre l'effectif des actifs par exploitation et la diversité variétale des ignames 653.5. Lien entre l'appartenance linguistique et la diversité variétale 65
IV. Caractéristiques agro- morphologiques, commerciales et socio- culinaires et desvariétés 67
4.1. Utilisation paysanne des critères agro- morphologiques 674.1.1. Caractéristiques morphologiques des variétés 67412C ". . d .". .. aractènstiques agronomiques es varietes 67
4.2. les caractéristiques culinaires, culturelles et commerciales des variétés 684.2.1. Les caractéristiques culinaires 684.2.2. Caractéristiques culturelles des variétés 684.2.3. Caractéristiques commerciales des variétés 69
4.3. Noms des variétés paysannes 694.3.1. Signification des noms donnés aux variétés 694.3.2. Synonymes des variétés 70
Discussion 731 An 1 d 1 d' " d . l' ,. a yse e a iversité es Ignames cu trvees 73
104
DEAADEn 2003 BACO Mohamed Nasser
1.1. Une diversité variétale à relativiser entre les terroirs étudiés 731.2. Des échelles de production inégales entre les variétés 74
1.2.1. Les variétés les plus produites 741.2.2. Les variétés les moins produites 751.2.3. Les variétés abandonnées 76
1.3. Motivations qui sous-tendent la diversité 772. Comment conserver durablement les pratiques et les variétés dans le programme deconservation in situ ? 79
2.1. Les faiblesses liées aux pratiques de gestion de la diversité 802.2. Vers une intervention sur les pratiques de gestion de la diversité 80
3. Des paramètres à considérer pour le choix des conservateurs 81Q .. l' dans la conservation i dl" ? 824. ui imp iquer ans a conservation In Situ e Igname .
5. Organiser les liens entre les acteurs 846. Des efforts favorables à la conservation in situ 857. La variété: un concept à « opérationnaliser» pour faciliter la conservation 868. Comment les cadres juridiques national, régional et international se positionnent face àla question de la conservation in situ des ignames 87
Conclusion et recommandations 89Références bibliographiques 93Liste des figures, photo et tableaux 99Liste des acronymes 101Liste des annexes 102
Annexe 1 : Fiche de collecte des données exploitation agricole & village 102Annexe 2 : Analyse de la distribution des variétés de Wari à travers le four squareanalysis 102Annexe 3 : Analyse de la distribution des variétés de Goro bani à travers le four squareanalysis 102Annexe 4 : Répartition des variétés au sein des 4 ethnies étudiées 102Annexe 5 : Caractéristiques agromorphologiques des variétés cultivées dans le nordBénin 102Annexe 6 : Caractéristiques socio-culinaires et commerciale des variétés du nord Bénin................................................................................................................................... 102
TABLE DES MATIERES 103
105