département de géographie -aménagement

123
BACQ Mohamed Nasser DEA AMENAGEMENT, IMémoire de Recherchel Année Universitaire 2002 - 2003 DEVELOPPEMENT, ENVIRONNEMENT (ADEn) UFR Lettres, Langues et Sciences Humaines Département de Géographie - Aménagement 1 , , J Etude de faisabilité d'une gestion et d'une conservation in situ de 1 l' agrobiodiversité : le modèle igname dans le nord du Bénin. i 1 ,. 1 i 1 1 , i Option B : Politiques du développement et de l'environnement: nonnes et acteurs 1 1 1

Upload: others

Post on 17-Jun-2022

4 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: Département de Géographie -Aménagement

BACQ Mohamed Nasser

DEA AMENAGEMENT,

IMémoire de Recherchel

Année Universitaire 2002 - 2003

DEVELOPPEMENT, ENVIRONNEMENT (ADEn)

UFR Lettres, Langues et Sciences Humaines

Département de Géographie - Aménagement

1,

,JEtude de faisabilité d'une gestion et d'une conservation in situ de ~

1 l'agrobiodiversité : le modèle igname dans le nord du Bénin. i1,.

1 i1 1,i Option B : Politiques du développement et de l'environnement: nonnes et acteurs

1

1

1

Page 2: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn

MEMOIRE DE RECHERCHE

Etude de faisabilité d'une gestion et d'une conservation in situ del'agrobiodiversité : le modèle igname dans le nord du Bénin.

BACQ Mohamed Nasser

Directeur de recherche: Jean-Paul LESCURE, Directeur de recherche à l'IRD

Responsable de stage: Monsieur Clément AGBANGLA

Laboratoire d'accueil: Laboratoire de Génétique de l'Université d'Abomey Calavi (R. Bénin).

Membres du jury

Madame Cathérine AU BERTIN, Directrice de Recherche (IRD).

Madame Françoise GRENAND, Chargée de Recherche (CNRS).

Monsieur Jean-Paut LESCURE, Directeur de Recherche (IRD).

Date de soutenance : 15 Septembre 2003

Page 3: Département de Géographie -Aménagement

SOMMAIRE

SOMMAIRE

Dédicace

Remerciements

Résumé

Abstract

Introduction

Objectifs et hypothèses

Cadre conceptuel de l'étude

1. Définition de certains concepts

2. En quoi l'agrobiodiversité est-elle nécessaire ?

3. Dans quelle mesure l'agrobiodiversité est-elle menacée ?

4. Prise en compte de la biodiversité par l'économie

5. Les conventions et les débats politiques sur la biodiversité

6. Méthodes de conservation de l'agrobiodiversité

7. Quelques facteurs pouvant influencer le maintien de la diversité

Cadre métbodologique

1. Brève présentation de l'igname (Dioscorea sp.)

2. Présentation de la République du Bénin

3. Caractéristiques du département du Borgou

4. Choix des communes de Sinendé et de Tchaourou

5. Sélection des villages d'étude et des unités d'observation

6. Outils et méthodes de collecte des données

7. Données collectées et outils d'analyses

8. Limites du travail

Résultats

1. Ampleur de la diversité variétale maintenue par les paysans dans le temps et dansl'espace

Il. Processus utilisés pour maintenir et créer la diversité agricole de l'igname

III. Déterminants socio-économiques des détenteurs de la diversité

Page 4: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser

IV. Caractéristiques agro-morphologiques, commerciales et socio- culinaires et desvariétés

Discussion

Conclusion et recommandations

Références bibliographiques

Liste des figures, photo et tableaux

Liste des acronymes

Liste des annexes

TABLE DES MATIERES

2

Page 5: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003

Dédicace

BAca Mohamed Nasser

A mon fils, Fadil.

3

Page 6: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003

Remerciements

BAca MohamedNasser

Au Conseil Ouest et Centre Africain pour la Recherche et le Développement Agricoles (CORAF) et

l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD), pour avoir financé mon séjour en France et mes

recherches sur le terrain.

A mon Directeur de recherche, Monsieur Jean-Paul Lescure, Directeur de Recherche à l'IRD Orléans

qui malgré ses nombreuses occupations n'a ménagé aucun effort pour mon encadrement. Je le prie

de trouver ici l'expression de ma profonde gratitude.

A Monsieur Jean-Louis Pham, Chercheur à l'IRD Montpellier, il a accordé un intérêt particulier à ce

travail. Qu'il en soit remercié pour l'avoir lu et corrigé.

A Monsieur Serge Tostain, chercheur au Centre IRD de Montpellier qui m'a donné le goût à la

recherche sur l'igname. Il a contribué à la conception et à la soumission du projet de recherche au

CORAF pendant son séjour au Bénin. Au cours de mes recherches sur le terrain, j'ai profité de sa

supervision, et de ses conseils.

A Messieurs Ogoubi Dainou et Clément Agbangla, Enseignants-Chercheurs au laboratoire de

génétique de la FAST (Université d'Abomey Calavi), pour avoir parrainé ce projet d'étude, et facilité la

gestion administrative et financière du projet CORAF.

A tous les enseignants du DEA ADEn particulièrement à Françoise Grenand, Responsable de l'option

Bdu DEA.

Aux personnels administratifs de ('IRD Orléans en particulier à la Directrice Yveline Poncet et à sa

secrétaire Jocelyne Petit.

A tous les amis du DEA avec qui nous avons passé de merveilleux moments.

A Bio Idrissou, Ayetiton Mashouidi, Marna Razack, Souley Idrissou ; ils ont été mes enquêteurs et

guides sur le terrain et m'ont aidé dans la phase de collecte des données.

Aux paysans du nord Bénin dont la collaboration a permis de collecter les informations contenues

dans ce document..

A ma famille pour m'avoir encouragé à poursuivre mes études.

A mon épouse Aleyya pour son soutien et ses sacrifices.

Enfin, à tous les lecteurs de ce document qui reconnaissent qu'il n'est qu'une œuvre humaine

susceptible d'être corrigée.

4

Page 7: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003

Résumé

BACO Mohamed Nasser

L'igname (Dioscorea cayenensis- D. rotundata ) est une plante alimentaire largement produite au

Bénin. Elle joue un rôle essentiel dans la sécurité alimentaire chez les ménages ruraux du norel Bénin.

Pourtant, de nos jours, cette plante se trouve dans un environnement agro-écologique, socio-culturel,

économique et politico-juridique en pleine mutation. Cette situation amène à craindre des menaces

dont les conséquences seraient irrémédiables. Parmi celles-ci, on cite la perte de la diversité des

ignames cultivées. C'est pour contribuer à gérer de façon durable la diversité de cette plante que cette

étude a été menée. Elle a été conduite au nord Bénin dans 4 villages avec 60 exploitations agricoles.

Il ressort que les paysans détiennent une grande diversité de cultivars soit 112 variétés. La gestion de

cette variété se fait de façon dynamique grâce à des pratiques de maintien et d'enrichissement et de

création de la diversité. La détention de ces savoirs n'est pas l'apanage de tous les paysans. Elle est

sous-tendue par des déterminants socio-économiques tels que le groupe ethnique et la structure de

l'exploitation. Les paysans ont su adapter la production de la diversité dont ils disposent aux

conditions agro-écologiques (types de sol, niveau de fertilité, parasite, inondation...). En ce qui

concerne l'aspect politico-juridique, l'igname a l'avantage d'être parmi les espèces prises en compte

par le Traité International pour les Ressources Phylogénétiques pour l'agriculture et l'Alimentation.

Les conditions pour une conservation in situ de l'igname semblent réunies. Pour qu'elle soit efficace,

l'étude a débouché sur la proposition d'une approche interventionniste qui fédère les actions de

plusieurs acteurs tels que les paysans, les associations de paysans, les ONG, les Institutions de

Recherches, les décideurs politiques, etc.

Mots-clefs: Igname, variétés, agrobiodiversité, conservation in situ, exploitations agricoles, nord Bénin.

AbstractYam (Dioscorea cayenensis- D. rotundata ), is a staple food crop widely product in Benin. It plays an

essential role in food security in rural families of north Benin. Nevertheless, this crop is nowadays in

the changing environment: agro-ecology, socio-cultural, economic and politico-juridical, ...This

situation cannot be without consequences on yam and its diversity. The study was proposed in order

to contribute to manage in sustainable ways yam's diversity. The study was conducted in the north of

Benin in four villages with 60 farms.

Farms have large crop diversity. 112 varieties was be inventoried in the region investigates. The

management of this diversity is dynamic and is support by maintenance creation and enrichment

practices. These practices are influence by sorne socio-economics parameters Iike ethnic groups,

structure of family. The farmers know how to produœ the diversity they have in diverse agrosystems

(Ievels of fertility, parasites, f1ooding ...). As far as political and juridical aspects, yam has an advantage

in comparison with other staple food crops. Yam ls one of the crops concem by the International

Treaty on Plant Genetic Resources for food and Agriculture.

ln situ conservation is possible. To emphasize on it, the study show that many actors as farmers and

their organisation, NGOs, Research Institutes, policies makers, etc. are requested.

Key words: yom, varieties, agrobiodiversity, in situ conservation, farmers, North Benin.

5

Page 8: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003

1ntroduction

. BACQ MohamedNasser•

Pendant des siècles, l'homme a utilisé des milliers d'espèces végétales pour se nourrir et en

a cultivé un grand nombre. Aujourd'hui, 150 espèces végétales seulement sont cultivées,

12% d'entre elles assurent près de 75% de notre alimentation et 4% fournissent plus de la

moitié des aliments que nous consommons (FAO, 2001). Cette évolution a fragilisé

l'agriculture et appauvri la qualité de notre régime alimentaire. En conséquence, de

nombreuses cultures locales, traditionnellement vitales pour l'alimentation sont maintenant

sous- utilisées ou négligées. Dans les pays tropicaux, cette tendance fragilise la sécurité

alimentaire des sociétés paysannes. L'exemple de l'igname au Bénin en est une parfaite

illustration. Cette plante a été pendant longtemps une culture orpheline de la recherche,

malgré son importance locale.

Avec une production d'environ 30 millions de tonnes, l'igname est la quatrième plante à

racine et tubercule du monde après la pomme de terre, le manioc, et la patate douce (FAO,

1994). Le Bénin est le quatrième producteur d'igname en Afrique avec 1 770 000 T en 2000,

après le Nigeria, la Côte d'Ivoire et le Ghana. Sur le plan national, l'igname occupe 8 % des

superficies cultivées et vient en cinquième position après le maïs, le sorgho, le coton et le

manioc (MOR, 1995). Dans presque toutes les contrées où elle est cultivée, l'igname a joué

et joue encore un rôle prépondérant, comme culture de subsistance, comme culture

commerciale, comme culture à caractère socioculturel ou encore comme culture englobant

ces différents aspects.

Sur le plan alimentaire, l'igname est au Bénin, consommée sous diverses formes: bouillie,

frite, pilée, grillée, cossette ... Elle est moins sensible aux aléas climatiques que les céréales

cultivées dans les mêmes zones, ce qui lui confère un rôle prépondérant en terme de

sécurité alimentaire (Bricas et al, 1998).

Sur le plan commercial, l'igname qui autrefois avait une présence s'impose de plus en plus

dans le commerce au point de devenir une culture de rente sur laquelle le pays compte pour

accroître son Produit National Brut (PNB). L'igname béninoise est aujourd'hui exportée en

direction des pays sahéliens tels que le Niger et le Burkina. Au niveau micro, ce récent

positionnement commercial contribue à améliorer l'économie familiale des ménages ruraux.

L'igname rapporte à ces ménages parfois plus de revenus que le coton, qui est la principale

culture de rente du pays.

6

Page 9: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BACO Mohamed Nasser

Au plan socio-culturel, dans la symbolique coutumière, c'est au travers de l'igname que

renaît la vie des ancêtres. Manger l'igname, c'est bien sûr se nourrir, mais c'est surtout vivre

une communion. Pour cela, une fête spéciale était organisée à la sortie de la nouvelle

igname. Elle couvrait plusieurs jours, mobilisait toute la contrée et se terminait par un rituel

important, marquant le début de la consommation d'igname.

Toutes ces raisons amènent l'liTA (1998), à conclure que l'igname est une culture vivrière

très importante pour les peuples d'Afrique Occidentale dont ceux du Bénin.

Nonobstant ses multiples fonctions et l'ancienneté de la pratique de sa culture, les conditions

de production de l'igname n'ont pas sensiblement varié. La culture de l'igname est sujette à

de nombreuses difficultés qui peuvent conduire à l'abandon et la disparition de certaines

variétés. Aujourd'hui, l'igname subit la concurrence d'autres cultures telles que le coton, le

maïs et le manioc. L'objectif commercial commence à prendre le pas sur la fonction

alimentaire qui jadis était la principale raison de production de cette plante. Une autre

menace qui pourrait avoir des conséquences sur la diversité des ignames est l'introduction

de la variété Florido, issue de Porto Rico. En Côte d'Ivoire, Hamon et al., (1995) ont révélé

que l'introduction de cette variété a conduit dans de nombreux villages à l'abandon des

variétés traditionnelles.

On constate également la quasi-inexistence de création variétale par la recherche et

l'abandon progressif des pratiques endogènes de création variétale. La domestication, qui

est la forme de création traditionnelle des variétés, est de nos jours pratiquée par très peu de

paysans (Baco, 2000). Les écosystèmes où les paysans puisaient des ignames sauvages

pour les domestiquer et créer la diversité s'amenuisent et disparaissent du fait de

l'agriculture extensive et de la poussée démographique.

Toutes ces menaces s'opèrent dans un environnement politico-Iégislatif en pleine mutation,

régi par des conventions et accords internationaux qui peuvent être défavorables aux plantes

alimentaires en général et à l'igname en particulier. Dans ces conditions, que faut-il faire?

Pour Gass (1998), l'agriculture ne sera en mesure de faire face aux défis de l'avenir que si

l'amélioration des plantes cultivées peut compter sur la conservation à long terme des

ressources phytogénétiques. En effet, les ressources génétiques conservées doivent

permettre de répondre aux attentes que l'homme formulera demain dans des domaines

aussi variés que "agriculture, l'industrie, la pharmacie, la recherche et l'enseignement ou à

des attentes sociales et culturelles (Lefort et al. 1998). La création ou le maintien de la

diversité inter et intra spécifique est une stratégie de survie utilisée par les paysans pour

7

Page 10: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BAca Mohamed Nasser

assurer leur sécurité alimentaire particulièrement dans les régions marginales où les variétés

améliorées et les intrants sont moins accessibles aux paysans. Deux choix sont à

envisager: la conservation in situ et la conservation ex situ. Celle-ci n'empêche pas la

persistance de l'érosion génétique, que ce soit dans le milieu naturel, dans les

agrosystèmes, et même dans les banques de gènes, où pourtant les ressources génétiques

devraient être en sécurité. Les liens entre les activités de conservation et l'utilisation par les

sélectionneurs ou les agriculteurs, sont faibles (Mckey et al. 2001). Les bénéfices

considérables qui pourraient être réalisés au travers de ces ressources ne sont ni atteints ni

équitablement partagés (Gass, 1998). Les limites d'une stratégie de gestion des ressources

génétiques des plantes cultivées fondée uniquement sur une conservation ex situ sont

maintenant claires (Brush, 1995, Hamilton, 1994, Miller et al.,1995) et la nécessité de

développer des stratégies complémentaires in situ est aujourd'hui largement admise. Dans

cette étude, nous voulons analyser la possibilité de conserver in situ l'agrobiodiversité

générale en nous inspirant du modèle igname. Brush (1992) fait remarquer que dans le

domaine de la conservation des ressources phytogénétiques, la prise en compte des

populations locales est timide, bien que leur rôle de producteurs et de conservateurs de

diversité ait été mis en évidence dans plusieurs contextes. A travers cette étude de la

conservation des ressources génétiques de l'igname, nous voulons voir comment les

exploitations agricoles participent à la gestion et au maintien de la biodiversité. Puis nous

analyserons la possibilité de développer un programme de conservation de cette diversité

sous gestion paysanne dans un environnement politico- juridique qu'ils ne maîtrisent pas.

Objectifs et hypothèses

Objectif général

A travers ce travail, nous voulons contribuer à gérer de façon durable l'aqrobiodiversité, Pour

cela, les pratiques paysannes de gestion (conservation et utilisation) des ressources

génétiques de l'igname seront analysées.

Objectifs spécifiques

Pour faciliter l'atteinte de l'objectif général, nous avons dégagé des objectifs spécifiques dont

la réalisation permettra de répondre à notre objectif. Cette étude nous conduira donc à :

• Répertorier et documenter toutes les variétés cultivées et maintenues dans le

système cultural du Nord- Bénin

• Analyser la diversité variétale des ignames cultivées dans le Nord- Bénin et les

déterminants socio-économiques qui affectent cette diversité.

8

Page 11: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BACO Mohamed Nasser

• Apprécier les formes de gestion (conservation et utilisation) paysanne de cette

diversité et les savoirs locaux qui y sont liés.

• Déduire s'il est possible de contractualiser une conservation durable de cette

diversité avec les producteurs dans un environnement en pleine mutation

commerciale, sociale, environnementale et surtout politique.

Hypothèses de travail

Sur la base de ces objectifs, 3 hypothèses se dégagent:

• Une grande diversité variétale existe et est bien gérée malgré les mutations actuelles.

• Quelques producteurs par village disposant de connaissances endogènes peuvent

conserver toute la diversité du village.

• Une contractualisation de la conservation de l'agrobiodiversité entre les services de

l'agriculture, les ONG et les paysans ayant un savoir-faire important est possible.

9

Page 12: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003

Cadre conceptuel de l'étude

1. Définition de certains concepts

~ BACQ Mohamed Nasser

Avant d'entamer ce travail, je trouve nécessaire de définir certains termes auxquels j'aurai

recours (dans ce travail) et dont le sens porte à ambiguïté ou ne fait pas l'unanimité dans les

débats scientifiques contemporains.

Biodiversité: encore appelée diversité biologique, elle regroupe la totalité de la variabilité

existant entre et au sein des espèces de tous les organismes vivants (Friis-Hansen et

Sthapit, 2000). Cette variabilité s'exprime aux niveaux des écosystèmes, des espèces, et

des gènes.

Agrobiodiversité: ce terme vient de la combinaison des mots agriculture et biodiversité.

Selon la GTZ (2000), l'agrobiodiversité est une partie de la biodiversité qui à travers la

production agricole, contribue à l'alimentation, à la subsistance de même qu'à la

préservation des écosystèmes. L'agrobiodiversité est le fruit d'un long travail d'observation,

de sélection et d'échange des paysans au fiJ des millénaires. Elle regroupe les ressources

phyto et zoogénétiques. Mais dans le cadre de ce travail, je m'intéresse exclusivement aux

ressources phytogénétiques.

Ressources phytogénétiques (RPG) : désignent le matériel prélevé dans la biodiversité et

utilisé par les hommes à des fins agricoles. Elles englobent le matériel génétique varié

contenu dans les variétés traditionnelles, Jes cultivars modernes ainsi que les plantes

sauvages apparentées aux espèces cultivées. Les RPG sont le fondement biologique de la

sécurité alimentaire mondiale et protègent de manière directe et indirecte les moyens de

subsistance de tous les habitants de la planète.

Exploitation agricole: je vais privilégier «l'unité de production» comme l'unité d'analyse

tout en gardant à l'esprit les relations qu'elle a avec les autres unités. L'exploitation agricole

est une unité de production qui se repère à partir de l'existence de champs cultivés en

commun sous l'autorité d'un chef d'unité de production. A cette unité de production pourront

être rattachés les champs individuels des indépendants, des femmes, des fils ou des frères

cadets.

Communautés: ce terme désignera dans ce travail, un groupe social organisé ayant des

caractéristiques distinctives bien définies. La communauté peut être l'ensemble des paysans

10

Page 13: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BACO Mohamecl Nasser

d'un village donné ou l'ensemble des producteurs appartenant à un même groupe

sociolinguistique. Etant donné que nous sommes dans une approche systémique, les

comportements individuels seront vus à travers la communauté et vice-versa.

Variétés: ce terme reviendra à plusieurs niveaux dans ce document. Il désigne le matériel

végétal de production qu'un groupe de paysans reconnaît et nomme, comme unité distincte.

Les autres définitions de ce terme seront reprises dans ce travail et analysées par rapport

aux débats sur la conservation et aux différents acteurs qu'elle implique.

La diversité génétique: c'est la variabilité de la structure génétique au sein d'une plante,

d'une espèce, entre espèces. Les individus peuvent être génétiquement homogènes ou

hétérogènes (Almerkinders et al., 1995). Dans ce travail, nous nous intéresserons surtout à

la diversité intra-spécifique, et spécifiquement dans l'ensemble des variétés de l'espèce O.

cayenensis- O. rotundata.

Erosion génétique: c'est la perte de diversité génétique. Pour les cultures comme l'igname,

l'érosion génétique se traduit non seulement en terme de réduction du nombre de variétés,

mais aussi en terme de réduction de l'aire géographique de distribution des plantes

sauvages.

Etude de faisabilité: il s'agit de voir si un projet, une activité est faisable et quelles sont les

conditions de sa réalisation. Dans le cadre de ce travail, il est question de voir si on peut

envisager la conservation in situ dans des contextes agro-écologiques et socio-économiques

qui sont souvent influencés par un contexte juridico-politique à un niveau supérieur.

2. En quoi l'agrobiodiversité est-elle nécessaire?

Depuis 12000 ans que l'agriculture est pratiquée, les paysans ont contribué à la conservation

et au développement de la diversité biologique agricole en domestiquant les plantes

sauvages pour différentes utilisations. Le corollaire de l'érosion de l'agrobiodiversité, est que

les générations actuelles et futures auront de moins en moins de matériels génétiques à leur

disposition pour garantir la sécurité alimentaire au plan local et régional (GTZ, 2000). En

effet, l'agrobiodiversité contribue à :

.:. conférer à l'ensemble du système de production une résistance, une tolérance et une

résilience face aux facteurs biotiques (les parasites, les compétitions entre plantes et les

relations symbiotiques avec d'autres organismes) et abiotiques (la température, le sol,

l'eau, l'humidité relative, la lumière et le vent) de l'environnement de culture. Ainsi, face

aux menaces d'un parasite donné ou d'une inondation dans un champ, il existe dans

11

Page 14: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BACQ Mohamed Nasser

l'ensemble du matériel végétal cultivé des individus qui résisteraient naturellement aux

fléaux pendant que d'autres en subiraient les effets. Il en est de même pour les types de

sols avec différents gradients de fertilité rencontrés sur la toposéquence des champs.

L'agrobiodiversité permet aussi dans ce cas de cultiver sur ces différents types de sols

différents cultivars sans un apport d'engrais chimique. De ce fait, l'utilisation de

l'agrobiodiversité permet aux paysans pauvres de réduire l'utilisation des intrants

chimiques onéreux, de maîtriser les risques et par conséquent de rendre leur agriculture

plus durable.

•:. une alimentation diversifiée et d'autres fonctions socio-économiques: l'agrobiodiversité

regorge des cultivars qui répondent à des préparations culinaires différentes. D'autres

cultivars par contre sont cultivés pour leurs fonctions cultuelles, culturelles ou sociales.

Certains sont cultivés pour le revenu qu'ils génèrent à l'exploitation.

•:. la sécurité alimentaire: la maturité physiologique des différents cultivars est différée

dans le temps (les cultivars sont récoltés à différentes dates). Ainsi les exploitations

agricoles pauvres parviennent à étaler les récoltes dans le temps et à disposer du stock

de vivrier nécessaire pour passer les périodes de soudure et donc pour lutter contre

l'insécurité alimentaire dans le ménage.

3. Dans quelle mesure l'agrobiodiversité est-elle menacée?

L'état actuel de la diversité génétique réalisé par la FAO (2000) indique des données

inquiétantes. On pense en effet que la diversité des cultures a été réduite de 75% environ

depuis le milieu du 19 ème siècle. Alors que jadis, l'homme utilisait plusieurs milliers

d'espèces végétales pour se nourrir et se vêtir, ce nombre est ramené aujourd'hui à 150

environ et même seulement à 12 dans certains endroits (GTZ, 2000). Si ces statistiques

diffèrent selon les études, elles ont tout de même le mérite de poser le problème. Les causes

de l'érosion de l'agrobiodiversité sont multiples.

En Afrique sub- saharienne, on note une croissance démographique galopante associée aux

problèmes climatiques. Pour répondre à la demande alimentaire de cette population, on

assiste à une extension de l'agriculture commerciale moderne faisant intervenir des variétés

hautement performantes. Dans les zones où le climat est aride ou semi-aride les

écosystèmes se modifient continuellement, de même que les pratiques culturales

notamment à travers la réduction des jachères et le développement des cultures de rentes.

Selon Zoundjihèkpon et al., (1999), le développement du café et du cacao en Côte d'Ivoire,

du coton au Bénin et au Mali conduit actuellement à des problèmes de conservation des

12

Page 15: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BAca Mohamed Nasser

ressources génétiques. Les législations et les politiques nationales soutiennent souvent

unilatéralement ce type d'agriculture, sous la pression parfois d'accords internationaux.

D'autres facteurs contribuent aussi à l'érosion de l'agrobiodiversité et des savoirs-faire s'y

rapportant comme par exemple les nouvelles habitudes alimentaires, les changements

climatiques, les conflits politiques ou les guerres intestines et les mouvements de réfugiés

qu'ils occasionnent.

Dans ces conditions, les générations futures auront de moins en moins de matériel

génétique pour faire des sélections d'adaptation.

4. Prise en compte de la biodiversité par l'économie

« La biodiversité est l'une des plus grandes richesses de la planète, et pourtant la moins

reconnue comme telle » (Wilson, 1992). Wilson relaye ainsi l'appel de certains écologues

comme Meyers (1983) qui demandaient l'intégration des aspects économiques dans la

protection de la biodiversité. La convention sur la diversité biologique (PNUE,1992) vient

formaliser cette vision. Elle s'inscrit dans un contexte de libéralisation des échanges et de

mondialisation. Le marché joue un rôle croissant dans tous les secteurs de la société alors

que l'Etat voit son rôle diminuer (Revéret et Webster, 1997). Dans l'article 11 de la

convention, on fait expressément appel à J'économie et aux mesures sociales rationnelles

pour conserver et utiliser durablement les éléments constitutifs de la diversité biologique.

Le premier intérêt des économistes de l'environnement a été de déterminer la valeur

économique totale de la biodiversité. Pour y parvenir, il est important de cerner toutes les

fonctions écologiques de la biodiversité. Revéret et Webster (1997) signalent que la

détermination de cette valeur économique totale de la biodiversité ne se limite pas

seulement à l'évaluation de la valeur d'usage mais aussi de la valeur de non-usage et de la

valeur d'option.

Pour les économistes néo-classiques, la préservation de la biodiversité ne se justifiera que

dans la mesure ou la valeur totale des bénéfices nets de la conservation est positive

(Pearce, 1996) Cette évaluation amène à s'interroger sur l'optimum économique de cette

biodiversité. On peut se demander s'il correspond aux seuils limites d'utilisation de cette

dernière. Répondant à la question, Milon (1995) fait le lien entre la valeur économique totale

de la diversité biologique et le concept de soufenabilifé.

Face à cette question, deux auteurs sont généralement cités: Solow et Holling. La

soutenabilité selon Solow est fondée sur la substitution du capital naturel par le capital

fabriqué. Cette soutenabilité qualifiée de faible se distingue nettement de la soutenabilité à la

13

Page 16: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BACO Mohamed Nasser

Holling (soutenabilité forte) qui prône le maintien du capital naturel. La soutenabilité forte ne

conçoit pas la substitution entre les deux formes de capital. Dans le cas de l'agrobiodiversité,

cette dernière soutenabilité est difficilement réalisable. Les paysans participent à

l'enrichissement ou à la diminution de leur pool variétal à travers la substitution continuelle

du patrimoine initial par du matériel nouveau. Deux questions se dégagent: toute la diversité

est-elle substituable ? Peut- on dire que la stabilité et la résilience des agrosystèmes ont été

possibles grâce à l'apport par les paysans de «sang neuf» dans le pool variétal? Il est

difficile de répondre à ces questions. Compte tenu de l'incertitude quand au degré de

substituabilité et les incertitudes entourant la relation entre biodiversité, résilience et maintien

des écosystèmes, le principe de précaution devrait nous conduire à n'envisager qu'avec la

plus grande prudence toute diminution de cette biodiversité (Revéret et Webster, 1997).

5. Les conventions et les débats politiques sur la biodiversité

L'analyse du cadre politique et législatif de la gestion des ressources biologiques agricoles

relève d'une analyse multi-scalaire qui prend en compte le Bénin, la sous-région ouest

africaine et la communauté internationale. Sur la plan sous-régional, dans le but d'améliorer

les performances économiques liées à l'agriculture, les seize pays de l'Afrique de l'Ouest ont

créé en 1975 la Communauté Economique Ouest Africaine (CEDEAO) (Grain 2003, a). Ces

pays, parmi lesquels il yale Bénin, ont signé, ratifié et mis en œuvre des Conventions et

Traités Internationaux relatifs à la gestion de l'agriculture et de la biodiversité. C'est le cas :

de la Convention sur la Diversité Biologique, l'Accord sur les Droits de Propriété liés au

Commerce (ADPIC), la Convention sur la désertification, la Convention sur les zones

humides, la convention sur le changement climatique ... Nous analyserons brièvement les

deux premières conventions et les implications qu'elles entraînent sur la conservation de la

diversité biologique en général et sur l'agrobiodiversité en particulier.

5.1. La Convention sur la Diversité Biologique (CBD)

L'utilisation traditionnelle des ressources biologiques se trouvait sous le contrôle social des

familles et des communautés. Les semences et les plantes médicinales étaient échangées

entre paysans et guérisseurs traditionnels. Ainsi les ressources génétiques appartenaient à

l'humanité, et n'importe qui pouvait aller n'importe où chercher n'importe quelles ressources

génétiques sans restriction (GRAIN, 2000).

Au sommet de Rio en 1992, le contexte a changé avec la signature de la CBD. Cette

convention, ratifiée par le Bénin reconnaît le droit de souveraineté des Etats sur leurs

ressources. Désormais, la collecte des ressources est subordonnée à l'accord préalable des

14

Page 17: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 < BACO MohamedNasser

Etats. La CBO vise entre autres, le partage juste et équitable des bénéfices tirés de

l'exploitation des ressources génétiques.

La CBO stipule en son article 8 alinea j, que chaque partie contractante «... sous réserve

des dispositions de sa législation nationale, respecte, préserve et maintient les

connaissances, innovations et pratiques des communautés autochtones et locales qui

incarnent des modes de vie traditionnels présentant un intérêt pour la conservation et

l'utilisation durable de la diversité biologique et en favorise l'application sur une plus grande

échelle, avec l'accord et la participation des dépositaires de ces connaissances, innovations

et pratiques et encourage le partage équitable des avantages découlant de l'utilisation de

ces connaissances, innovations et pratiques». Ainsi cet article soutient et recommande la

nécessité d'une conservation in situ de la biodiversité. Si ce texte comme plusieurs autres

fait référence aux populations locales, à la prise en compte de leur savoir-faire et leurs

connaissances traditionnelles, force est de reconnaître qu'en Afrique de l'Ouest, les

populations ne sont généralement pas informées des engagements pris en leur nom par les

autorités politiques nationales (GRAIN, 2003 a).

Dans un document sur la mise en œuvre au Bénin de la CBD (sur Internet), il est écrit que le

bilan des actions menées au Bénin depuis le sommet de Rio est positif bien qu'il reste

beaucoup à faire. Entre autres actions menées depuis lors, on peut citer l'élaboration de

stratégies sectorielles pour la gestion durable des ressources biologiques, la mise en œuvre

du Plan National de Gestion de l'Environnement, l'identification des modes d'exploitation

actuelles des ressources biologiques (par exemple en agriculture), la prise en compte dans

l'élaboration de la stratégie d'action pour la conservation de la biodiversité de l'accès aux

ressources.

La CBO vise aussi de façon ambiguë « le partage juste et équitable des bénéfices tirés de

l'exploitation des ressources génétiques ». Les problèmes nés des droits de propriétés sur la

biodiversité amèneront Aubertin et Boisvert, (1998) à parler d'une mise en œuvre

conflictuelle. •

5.2. Le Traité International sur les ressources phytogénétiques pour

l'alimentation et l'agriculture (TIRPAA)

Pendant longtemps les ressources génétiques étaient considérées comme un patrimoine

commun de l'humanité. Leur accès était libre et sans contrainte. Certaines puissances

financières et industrielles en avaient profité pour développer des semences particulières

(rendement, résistance...) et des produits commercialisables. Ces inventions protégées par

15

Page 18: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 ,-,BACO Mohamed Nasser

des droits de propriété intellectuelle: (brevets, certificats d'obtention végétale, marques

déposées, droits d'auteurs, secrets commerciaux, etc... ) leur ont généré des bénéfices

considérables (Boisvert et Vivien, 1998). Pendant ce temps les communautés d'origine de

ces ressources n'ont reçu en retour ni transfert de technologie, ni contrepartie monétaire.

Cette situation a engendré des contestations et des conflits. Pour répondre aux

revendications des Pays en Développement, la FAO a initié des négociations sur

l'Engagement Internationale sur les ressources phylogénétiques en 1983. Dans cet

engagement, la notion de ressources génétiques comme patrimoine de l'humanité a été

retenu. Mais il a été ajouté des mécanismes de financement comme compensations pour les

pays d'origine des ressources. Malheureusement, ces «royalties» doivent être versées

délibérément et de façon volontaire par les pays ou entreprises qui le désirent dans un fonds

international. Face aux échecs de ce fonds, la FAO a défini en 1989 le «droit des

agriculteurs» qui reconnaît le travail de domestication et d'amélioration des variétés locales

pendant des générations successives d'agriculteurs. Ce droit devait être rémunéré. Les

Etats-Unis à travers leur politique de protection par brevet, ont fait échouer cette proposition.

Cette situation a de nouveau provoqué le mécontentement des pays du Sud qui demandent

la souveraineté nationale sur les ressources phylogénétiques (Trommetter, 2002). Ce droit

leur sera concédé en 1992 dans la CDB de même que leur responsabilité dans la gestion et

la conservation de ces ressources.

Sur la base de sa mission qui est d'assurer la sécurité alimentaire pour tous les peuples de

la planète, la FAO a poursuivi les négociations sur l'engagement international initiées en

1983. Elle est parvenue en 2001 à élaborer le Traité International sur les ressources

phylogénétiques pour l'agriculture et "alimentation. Ce traité est une avancée vers le libre

accès rémunéré généralisé. Il offre un cadre agréé par la communauté internationale pour la

conservation et l'utilisation durable ressources génétiques intéressant l'alimentation et

l'agriculture. Parmi la trentaine d'espèces concernées par le système multilatéral se trouve

l'igname, ce qui est un avantage pour sa conservation in situ.

La liste des espèces n'est pas exhaustive et les espèces qui ne figurent pas dans cette liste

seront gérées par la CDB. On constate bien que la solution n'est pas définitive et à ce jour

des préoccupations demeurent encore sans solution.

5.3. Les réglementations de l'accès et du partage des bénéfices

Après l'entrée en vigueur de la CBD, l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) à travers

son Accord sur les Droits de Propriété Intellectuelle liés au Commerce (ADPIC) oblige les

pays membres à reconnaître les droits de propriété sur les obtentions végétales pour faire

16

Page 19: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BACO Mohamed Nasser.;:.

partie de l'OMC. Ainsi, l'OAPI sous l'incitation de l'UPOV et de l'OMPI révise l'accord de

Bangui signé en 1977 et qui concerne les innovations industrielles. Le Bénin tout comme les

autres pays n'ayant pas de législation nationaJe relative à l'accès aux ressources biologiques

et au partage des bénéfices, les multinationales continuent d'exploiter les ressources sans

payer de royalties, allant même jusqu'à déposer des brevets sur ces ressources. Ce type de

collecte des ressources biologiques est qualifié de bio-piraterie par RAFI/ETC (1999).

Comme exemple de plantes africaines sur lesquelles il y a des brevets, on peut citer:

Dioscorea dumetorum (igname jaune), Thaumatococcus daniel/i, Pygeum Prunus africana,

Hoodi trichocaulon, Dioscoreophytum cumminisii, Harpagophytum procumbens, etc (Grain,

2003 b). L'accord révisé de Bangui signé par les pays francophones d'Afrique, dont le Bénin,

est entré en vigueur en février 2002. Cet accord donne des droits commerciaux exclusifs à

ceux qui produisent des variétés végétales qui sont nouvelles, distinctes, uniformes, et

stables, c'est-à-dire les multinationales (GRAIN, 2003, b). Les paysans auront à payer des

redevances sur les nouvelles semences et n'auront le droit de destiner une partie de leur

récolte pour les plantations futures que sous certaines conditions. Dans cet engrenage

politique-commercial l'igname se trouve en bonne place. En effet, il n'existe pas de brevet

qui soit déposé sur l'igname. D'autre part, la loi modèle de l'OUA sur l'accès aux ressources

biologiques et les droits de propriétés des communautés locales semblent être une

alternative. Ce projet de loi adoptée par le sommet des Chefs d'Etat à Lusaka (Zambie) en

juillet 2002 a quatre composantes:

• l'accès aux ressources biologiques nécessite une autorisation et l'accord préalable

donné par les communautés;

• les droits des communautés locales sont inaliénables, collectifs et impliquent le

contrôle de l'accès aux ressources et aux connaissances.

• les droits des agriculteurs impliquent la protection des récoltes et des semences, en

accord avec les critères issus des pratiques traditionnelles, le droit de conserver...

• les droits des sélectionneurs.

Cette loi sert aujourd'hui de modèle à certains pays, dont le Bénin, dans l'élaboration de leur

législation nationale. Le comité de la stratégie nationale pour la biodiversité prend en

compte:

• la rédaction d'une législation sur l'accès aux ressources génétiques, le partage des

bénéfices et la protection des connaissances traditionnelles,

• la sensibilisation et la formation des dépositaires de ces connaissances sur la

propriété intellectuelle.

17

Page 20: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003

&. Méthodes deconservation de l'agrobiodiversité

BACOMohamed Nasser

6.1. Des méthodes empiriques à l'instrumentalisation internationale

Avant la prise de conscience internationale sur les enjeux de la diversité biologique, la

gestion des ressources génétiques végétales a été assurée par les utilisateurs de cette

diversité. Dès le 17ème siècle, les puissances coloniales ont créé des collections de matériel

phytogénétique sous forme de jardins botaniques avec les diverses espèces végétales que

les explorateurs ramenaient du monde entier (Trommetter, 2002). Au début du 20ème siècle,

les travaux du botaniste Nikolaï Vavilov ont montré l'importance des ressources génétiques

végétales dans l'amélioration de la productivité et la création de nouvelles variétés. Il a

constitué une collection dans son pays avec les échantillons de cultivars venus de toute la

planète afin d'améliorer les rendements des plantes cultivées. Il a fallu près d'un demi-siècle

pour voir certains gouvemements et certaines fondations telles que Ford et Rockefeller

s'impliquer dans l'amélioration variétale et la conservation de ressources génétiques. En

1960, ces actions ont abouti à la création de l'IRRI (Institut International de Recherche sur le

Riz) et la mise sur pieds de 4 collections de ressources génétiques qui deviendront par la

suite des Centres Internationaux de Recherche Agricole (CIRA).

Vers la fin des années 60, les dangers de la révolution verte et la généralisation des cultures

de rente étaient déjà perceptibles. Ainsi au cours de la conférence de la FAO et du

Programme Biologique International il a été convenu de l'importance de constituer de

grandes collections de ressources génétiques végétales (Trommetter, 2002, ). Evitée par le

Club de Rome en 1972, la gestion des ressources génétiques sera largement évoquée à la

conférence de Stockholm sur l'environnement en 1972. La recommandation 39 de cette

conférence demande aux pays de s'entendre sur un programme international de protection

des ressources génétiques mondiales. Cette mission a été confiée au Groupe Consultatif

pour la Recherche Agronomique International (CGIAR en Anglais), créé en 1971. Le CGIAR

poursuit la création d'autres Centres et une nouvelle organisation coordonnatrice, le Conseil

International des Ressources Phytogénétiques (CIRPG). Aujourd'hui, on dénombre un total

de six millions d'échantillons maintenus en banques de gènes. Parmi ceux-ci, 600 000 sont

conservés par les Centres Internationaux faisant partie du Groupe consultatif pour la

Recherche Agronomique Intemationale (CGIAR) (FAO, 1996, Gass, 1998).

6.2. Les méthodes de conservation retenues dans la CDS

Deux méthodes de conservation ont été reconnues dans la COB. Il s'agit de la conservation

ex situ (article 9) et de la conservation in situ (article 8).

18

Page 21: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BACO Mohamed Nasser

6. 2.1. La conservation ex situ

Dans l'article 9 de la COB, elle a été définie comme la conservation d'éléments constitutifs

de la diversité biologique en dehors de leur milieu naturel. Les principales techniques

utilisées sont les banques de gènes, les jardins botaniques, la culture in vitro, la

cryoconservation. Ce sont les matériels génétiques ayant une valeur économique importante

ou présentant un intérêt pour les généticiens qui sont le plus souvent conservés dans ces

milieux artificiels. Selon Zoundjihèkon et al, (1998) on enregistre de nombreuses pertes dans

cette forme de conservation.

Les jardins botaniques: ce sont des jardins de végétation appartenant à des organismes et

structures de recherche. Il existe des jardins botaniques d'ignames en Guadeloupe, en

Nouvelle-Calédonie, au Ghana, en Inde, au Nigeria, au Bénin... Les pertes de ces

collections sont très élevées et peuvent atteindre 25% par an (Zoudjihèkpon et al. 1996). Les

pertes sont liées aux retards de plantation, aux non levées après plantation et aux attaques

des parasites (Hamon et al., 1995). Ce mode de conservation des ressources génétiques

nécessite de grands espaces et d'importants moyens financiers pour la plantation et

l'entretien des cultures.

Les banques de gènes: ce sont des chambres froides qui permettent de conserver les

gènes d'ignames. La difficulté ici réside dans la fourniture permanente de l'énergie

électrique. L'approvisionnement de l'énergie électrique des pays comme le Bénin dépend du

régime des cours d'eau, des fluctuations de niveaux d'eau dans les barrages. Cette situation

précaire conduit à des délestages saisonniers engendrant la perte de la diversité conservée

dans les chambres froides.

La conservation in vitro: sur l'igname, elle a été développée par l'ex-ORSTOM, "IRSDA,

"Université Nationale de Côte d'Ivoire et l'liTA au Nigeria. Les difficultés dans l'utilisation de

ce mode de conservation sont: l'obtention d'une bonne asepsie, le brunissement du milieu

de culture, la période de mise en culture et les génotypes utilisés. Le complexe Dioscorea

cayenensis- rotundata est très difficile à conserver in vitro car certains génotypes se

montrent récalcitrants. (Zoudjihèkpon et al., 1999).

La cryoconservation: c'est la conservation dans de l'azote liquide des méristèmes prélevés

sur des vitroplants. Ce produit chimique coûte cher et n'est pas toujours disponible.

Dans l'ensemble, les techniques de conservation ex situ sont exigeantes en logistique, elles

sont onéreuses et les Etats surtout du Sud n'arrivent pas à y faire face. Les difficultés de

conservation ex situ de l'igname sont aggravées par le mode de multiplication de la plante.

L'igname est une plante à multiplication végétative dont la conservation ne se fait pas de la

même façon que les céréales. Dans ces conditions, les collections se perdent. C'est le cas

19

Page 22: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BACO MohamecJ Nasser

des collections d'ignames de l'université de Cocody en Côte d'Ivoire, de l'liTA au Nigeria, de

l'IRAT au Bénin et au Burkina Faso qui ont drastiquement diminué au fil des années.

La conservation ex situ a cependant des avantages. Dans cette forme de conservation, il est

relativement facile d'identifier le matériel conservé étant donné que les matériels sont

complètement documentés. De plus la diversité génétique maintenue par cette méthode est

directement contrôlable (Brown, 2000).

6.2.2. La conservation in situ

La CDB la définit comme la conservation des écosystèmes et des habitats naturels, le

maintien et la reconstitution de populations viables d'espèces dans leur milieu naturel et

dans le cas d'espèces domestiquées et cultivées dans le milieu où se sont développés leurs

caractères distinctifs.

Pour Louette et Smale, (1996) c'est la préservation, dans leur agroécosystème original, de

variétés cultivées par les paysans en utilisant leurs propres méthodes et leurs critères de

sélection. Elle désigne la gestion durable de la diversité des cultivars locaux associés aux

formes et espèces sauvages par les paysans dans leur système agricole traditionnel

(Maxted et al.,1997). La conservation in situ est censée :

• conserver les processus d'évolution et d'adaptation, les conditions qui favorisent la

création d'autres cultivars. Elle est dynamique, et favorise les interactions entre les

plantes sauvages et les cultivées.

• conserver la diversité aux trois niveaux: de biodiversité mentionnés dans la CDB:

inter espèces, intra espèces, et l'écosystème. Elle permet aussi de maintenir la

diversité des pratiques endogènes (diversité culturelle).

• intégrer les paysans dans les systèmes nationaux de conservation des RPG. Les

paysans sont ici perçus comme des partenaires dans le maintien des cultivars

sélectionnés.

• conserver les services de l'écosystème.

• augmenter les moyens de subsistance des paysans pauvres.

• maintenir l'accès et le contrôle des paysans sur les ressources génétiques.

7. Quelques facteurs pouvant influencer le maintien de la diversité

Certains travaux antérieurs ont révélé qu'il existe des facteurs qui peuvent influencer la

gestion de la diversité. Entre autres facteurs, on peut citer:

Les facteurs socio- culturels: les mutations culturelles peuvent réduire les pratiques qui

valorisent et maintiennent la diversité des cultures. Ainsi, sur le niébé au Bénin, ce sont

20

Page 23: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BACO Mohamed Nasser

surtout les variétés rouges de niébé peu cultivées qui sont utilisées pour les cérémonies.

Cette nécessité d'avoir les variétés rouges pour ces cérémonies amènent certains paysans à

réserver des petites parcelles à la culture de ces variétés (1999). Brush (1995) et Zimmerer

(1996) étudient les rôles spécifiques des cultivars traditionnels qui sont utilisés pour faire des

plats particuliers lors des cérémonies.

les facteurs techniques: L'adoption de nouvelles technologies (intrants agricoles,

nouvelles variétés, techniques culturales, matériels de production...) est aussi perçue

comme un facteur qui influence le maintien de la diversité, souvent négativement. Ainsi sur

le riz, cela a été observé dans la vallée Cagayan aux Philipines. Les producteurs ont

abandonné leur variété locale à régime pluvial pour adopter une variété améliorée à régime

irrigué (Bellon et al. 1998 a). Dans une étude sur la fertilité du sol au Nord- Ouest du Bénin,

Mulder (2000) a noté que comment les paysans s'orientent davantage vers les cultures qui

bénéficient d'intrants agricoles.

les facteurs du marché: Selon Bellon (2001), l'explication conventionnelle que l'on trouve

pour expliquer la perte de la diversité dans un système de marché est la demande, cela

suppose que les paysans remplacent leurs variétés traditionnelles par des variétés qui

génèrent plus de revenus. Quelle est la situation sur l'igname?

les réseaux sociaux: Dans une étude réalisée sur la maïs en mesoamérique, Bellon

(2001) rapporte que les paysans indigènes se reposent mutuellement les uns sur les autres

pour accéder à la semence et à l'information sur les caractéristiques des différentes variétés.

Ce même constat a été fait par Emperaire et al. (1998) sur le manioc en amazonie. Le tissu

social est-il aussi un support de la circulation des vartétés d'igname entre paysans?

les facteurs socio-économiques: Selon Jarvis et al. (2000), les paramètres socle­

économiques tels que l'âge, le genre, le niveau de prospérité, le statut social, l'ethnie

d'origine sont des éléments qui influencent la diversité cultivée. Au Burkina Faso, les

femmes possèdent des champs en dehors du champ familial où elles cultivent des variétés

et des cultures qui seront vendues sur le marché pour satisfaire les besoins de l'exploitation

(Belem, 2000). Au Nepal, Rana et al., (2000) montrent que les variétés de riz cultivées,

dépendent du niveau de prospérité des exploitations. Les riches cultivent les variétés à haute

valeur commerciale et alimentaire alors que les pauvres préfèrent les variétés résistantes à

l'inondation. La diversité des cultivars d'igname est-elle aussi influencée par ces

déterminants socio-économiques?

21

Page 24: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003

Cadre méthodologique

BAca MohamedNasser

Dans cette partie, je présenterai l'igname, j'examinerai successivement les caractéristiques

du milieu, les techniques d'échantillonnage et la taille de l'échantillon, les méthodes et

instruments de collectes des données, les données collectées , les outils d'analyses et les

limites des données collectées. L'étude du milieu permettra d'avoir une vue panoramique du

pays, de la région et de la zone enquêtée.

1. Brève présentation de l'igname (Dioscorea Sp.)

Les ignames sont des plantes herbacées volubiles à tubercules (Photo 1 & 2). Elles ont une

répartition très large, qui couvre tous les continents, et sont adaptées à des milieux

écologiques très divers. Elles appartiennent au genre Dioscorea de la famille des

Dioscoreacées, rattachée aux Monocotylédones. En Afrique , on dénombre une vingtaine

d'espèces autochtones ou introduites (Miège et Lyonga, 1982 ; N'Kounkou et al., 1993). La

domestication de plusieurs d'entre-elles a fourni des ignames cultivées, qui sont aujourd'hui

regroupées dans le complexe D. cayenensis- D. rotundata (Hamon et al. 1997). En Afrique

de l'Ouest, l'essentiel de la production repose sur les ignames du complexe D. cayenensis­

D. rotundata. Cependant d'autres espèces peuvent avoir localement une grande importance

économique. C'est le cas de D. a/ata d'origine asiatique , qui prédomine dans le centre de la

Côte d'Ivoire et de D. dumetorum , espèce autochtone en Afrique très cultivée dans la partie

occidentale du Cameroun.

Photo 1 : Plant d'igname Photo 2 : Tubercules d'igname

22

Page 25: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BACO Mohamed Nasser

Les ignames constituent une ressource vivrière essentielle pour de nombreux pays d'Afrique

de l'Ouest. La production est pour une large part, directement utilisée par les agriculteurs,

mais elle est aussi commercialisée pour approvisionner les marchés urbains. Les tubercules

sont généralement consommés sous forme de purée compacte. Récemment, leur

transformation en cossettes séchées s'est développée au Nigeria et au Bénin.

2. Présentation de la République du Bénin

La République du Bénin est un pays ouest africain situé entre le Nigeria à l'est, le Togo à

l'ouest, le Niger et le Burkina Faso au nord et enfin l'Océan Atlantique au sud (figure 1). Elle

se présente comme une longue bande de terre mesurant environ 700 Km du Golfe du Bénin

(sud) aux rives du Niger, entre le sixième et le douzième parallèle Nord. La superficie du

Bénin est de l'ordre de 114 763 Km2. D'après le dernier recensement général, la population

du Bénin est estimée 6 500 000 habitants, correspondant à une densité de 45 habitants/

Km2. '64% de cette population résident en milieu rural.

~--"'----"-------~--" -'-"" _._------~"--

~d'~::.:.~·~::':~:':':":.1 _ t';"",. ~.-: ~:'f; 1':' ....J'X) •

Figure 1 : Localisation de la République du Bénin : Nord Ouest de l'Afrique

Le Bénin est divisé en deux grandes zones climatiques: le sud et le nord . Le sud jouit d'un

climat modéré et relativement peu pluvieux. C'est un climat de type équatorial caractérisé

par une forte humidité et une température relativement constante avec deux saisons de

pluies et deux saisons sèches . Quant au nord, c'est le climat de type tropical avec de plus

grands écarts de température et un degré hygrométrique bien moindre que dans le sud. On y

distingue deux saisons : une saison pluvieuse et une saison sèche.

23

Page 26: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BAGa Mohamed Nasser

Nous avons choisi la zone nord pour cette étude car elle est la zone par excellence de

production d'igname. La culture de l'igname est comprise entre les latitudes 8,50 et 110 Nord

(Dossou, 1993) et mobilise 65% des producteurs.

Pour appréhender la démarche méthodologique de choix des espaces territoriaux de l'étude,

il importe de s'intéresser au découpage administratif du pays. Administrativement, le Bénin

est divisé en 12 départements. Chaque département est à son tour divisé en communes. Les

communes sont des entités territoriales composées généralement d'une ville principale et de

plusieurs villages. Avant ce nouveau découpage administratif intervenu en décembre 2002 (il

Y a moins d'un an), le Bénin comptait 6 départements. Notre étude tient compte de cet

ancien découpage dans la mesure où les données statistiques actuellement disponibles ne

sont pas encore actualisées et ne concernent que les anciens départements.

Les 6 départements que comptait le Bénin sont: Atacora, Atlantique, Borgou, Mono, Ouémé,

et la Zou. Notre étude a été conduite dans le département du Borgou. Il a été choisi car sa

production d'igname représente 44% de la production nationale ce qui le place en première

position par rapport aux 5 autres départements (figure 2).

Figure 2 : Importance de la production de l'igname dans les 6 départements du Bénin

3. Caractéristiques du département du Borgou

Le département du Borgou se situe au Nord- Est de la République du Bénin. Il est limité au

Nord par la République du Niger, au Sud par le département des collines, à l'Est par la

République Fédérale du Nigeria et à l'Ouest par la République du Burkina Faso et le

département de l'Atacora (figure 3). La superficie du Département du Borgou est de 51 000

Km2 (soit 45 % du territoire national) , avec 28 000 km2 de terres cultivables (55 % du

département) et 115 000 ha de forêts classées (CARDER, 1998).

24

Page 27: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BAGO Mohamed Nasser

En moyenne la durée d'exploitation d'une terre est de 4 ans suivie d'un temps de jachère de

plus de 10 ans. L'indice de Ruthenberq ' calculé sur la base des données recueillies nous

donne R = 28,6 %. D'après Ruthenberg (1980 dans Serpentie, 1993), R < 33 correspond à la

culture itinérante. Avec la forte poussée démographique des milieux ruraux, ce système de

culture itinérante va se heurter aux problèmes de manque de terre. La densité de la

population du département est de 20 habtsl km2 alors que le seuil de densité qui limite la

pratique d'une culture itinérante est de 25 habtsl km2 (Lumeur, 1994). Dans ce contexte, la

durabilité de la production itinérante de l'igname sera bientôt remise en cause. Les paysans

devront faire face à des pratiques d'intensification et de conservation des terres.

".

NIGERIA

l---- - - -f-----'-- -'---------' 6 0

4""E1 0

B. FASO

11 0 mm

1200

900

t

1000

Figure 3 : Carte du Bénin montrant le Département du Borgou et la délimitation l'espace Bariba.

l' Indice de Ruthenberg permet de caractériser un système de culture. R= Cu x 100/ Cu + Ja avec Cu= nbre d'années deculture, Ja= durée de la jachère. Si R > 66, on parle de système de culture permanent, si R < 33, le système de culture estqualifiéd'itinérant, lorsque 33 < R > 66 on parle de système de jachère.

25

Page 28: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BAca Mohamed Nasser

Le Département du Borgou abrite pour une grande partie la société Bariba. On y retrouve

aussi les Gando, les Nagot, les Dendi, les Lokpa, les Peuhl, ... Ces ethnies vivent souvent

en communautés et partagent pour la majorité une même histoire.

L'agriculture constitue la principale activité du Département par son importance et le nombre

de personnes qu'elle mobilise. Elle occupe 43 % des actifs agricoles et nourrit 75 % de la

population du Bénin (INSAE, 1992).

Dans le passé, les cultures vivrières pratiquées étaient essentiellement le maïs, le manioc,

l'igname, l'arachide, le niébé et le sorgho, plus ou moins associées. L'épuisement des terres

était réduit par de très longues jachères, rendues possibles par la grande disponibilité en

terres cultivables. Plusieurs changements sont apparus depuis dans le Borgou. Parmi ceux

ci, on peut citer: l'introduction du coton afin de satisfaire les besoins monétaires,

l'introduction de la culture attelée, l'introduction de la fertilisation minérale et des traitements

phytosanitaires, l'introduction des variétés améliorées (maïs, arachide... ), la structuration du

milieu rural et une intensification de la commercialisation après le développement des

moyens de communication. L'augmentation de la production de certaines cultures s'explique

en partie par ces changements.

On distingue deux grandes zones agricoles : le Borgou- Nord et le Borgou- Sud, qui sont

subdivisées en six sous-zones (CARDER Borgou, 1985). Dans le Borgou- Nord, il y a

premièrement la zone des communes de Malanville et de Karimama caractérisée par une

agriculture basée sur le sorgho - mil, l'arachide, et les cultures irriguées d'oignon et de

pomme de terre. La deuxième zone qui comprend Banikoara, Kandi et Gogounou, a de

fortes potentialités cotonnières et arachidiaires. La commune de Ségbana, la troisième zone

est comparable à la deuxième, mais elle a des possibilités plus limitées à cause de la faible

densité de la population. Dans le Borgou Nord, le sorgho est le produit vivrier le plus

important.

Le Borgou-Sud connaît également trois sous-zones. Dans la zone de Sinendé, Bembéreké

et N'Dali, il y a un bon équilibre entre les différentes cultures, bien que le coton prenne la

première place. Dans la deuxième, celle de Kalalé, Nikki et Pèrèrè, la production de produits

vivriers est favorisée par la proximité du Nigeria et dépasse la production de coton. La

dernière zone de Parakou et Tchaourou est caractérisée par un développement limité des

cultures de rente comme le coton et l'arachide.

Les principales cultures pratiquées dans le département sont:

> les céréales: mil, sorgho, maïs, riz. Le Département du Borgou vient en tête dans la

production céréalière avec 210854 T soit 29 % de la production nationale (ESA, 1993) ;

26

Page 29: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BACO Mohamed Nasser

~ les racines et tubercules: igname, manioc, patate douce, et pomme de terre. Le Borgou

est le premier Département producteur d'igname. " fournit environ 44 % de la production

nationale (MOR, 1998, Baco, 2000) ;

~ les cultures industrielles: le coton, l'arachide

~ les légumineuses: niébé, soja, arachide, voandzou

~ les cultures maraîchères: gombo, tomate, oignon, piment, courge.

Les cultures de rente telles que le Coton, le maïs, le manioc livrent une concurrence à

l'igname. On peut s'inquiéter des répercutions de cette concurrence sur le maintien de la

diversité des cultivars.

Les sols sont majoritairement de type argilo-sablo-ferralitique. Cette composition confère

aux sols des propriétés physiques, chimiques et biologiques favorables au développement

végétatif d'une gamme variée de cultures, dont l'igname.

Le nord du Bénin est une zone qui abrite de fortes populations d'ignames sauvages de

l'espèce Dioscorea abyssinica. Au Bénin, c'est surtout cette espèce qui est domestiquée

(Dumont et Vernier, 1997, Baco 2000). Les paysans utilisent cette espèce pour créer de

nouvelles variétés et faire face aux nouvelles contraintes de l'agriculture.

Le climat du Borgou va du type soudano-guinéen au type soudano-sahélien. Il est

caractérisé par deux saisons: une saison des pluies allant d'avril à octobre avec une hauteur

de pluie variant entre 900 et 1200 mm. Une saison sèche allant de novembre à mars. La

figure 4 montre la répartition mensuelle de la pluviométrie au cours de la campagne 2001­

2002 où il a été enregistré environ 975 mm de pluie en 71 jours.

Figure 4 : Pluviométrie (Hm/ mois) du Borgou au cours de la campagne 2002-2003.

27

Page 30: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BACQMohamed Nasser

Les pluies étant mieux réparties, les paysans se plaignent moins des inondations. Les mois

d'août et de septembre demeurent les plus pluvieux en nombre de jours et en quantité de

pluie. Les fréquentes inondations de ces mois constituent aujourd'hui une importante

préoccupation pour les exploitations situées près des bas-fonds , conduisant à la baisse de

la production, à la perte de certaines variétés d'igname très sensibles et au développement

du complexe parasitaire (cas du village Guessou-bani pendant la campagne 1998-1999).

Les facteurs agroécologiques concernent aussi bien les facteurs abiotiques que biotiques.

Pour faire face aux aléas climatiques, édaphiques et aux facteurs biotiques (parasites,

agents pathogènes... ), les producteurs du nord Bénin détiennent plusieurs variétés qui

peuvent résister à la sécheresse, à l'inondation, aux maladies, aux agents pathogènes, à la

baisse de fertilité des sols... La détention d'un grand nombre de variétés est perçue comme

un moyen de gérer le risque. La diversité variétale est un élément de stratégie anti-risque

(Emperaire et al., 1998). Sur le plateau adja, Agbo (1991), mentionne aussi que la

diversification des cultures et les associations culturales sont des alternatives des paysans

pour gérer le risque et les incertitudes.

Il ressort que les facteurs agroécologiques sont favorables au maintien de la diversité des

cultivars d'igname. Face à leurs caprices, les producteurs ont trouvé des stratégies

alternatives pour s'adapter. Contrairement aux constats de Bellon et al. (1998),

l'intensification agricole et les conditions agroécologiques menacent relativement la gestion

des cultivars d'igname.

4. Choix des communes de Sinendé et de Tchaourou

Les communes de Sinendé et de Tchaourou ont été choisies, pour abriter cette étude pour

plusieurs raisons :

~ Elles sont les deux premières communes en matière de production d'igname (figure

5) dans le Département du Borgou. A la lecture des statistiques de production, il

ressort que la commune de Sinendé vient en deuxième position en matière de

production d'igname après celle de Tchaourou. La production d'igname de ces deux

communes représente plus 35% de la production totale des 14 communes que

compte le département.

~ Les deux communes sont occupées en majorité par les Bariba, ethnie, dont la

civilisation s'est faite avec l'igname. De plus on note une forte diversité linguistique

dans ces deux communes, ce qui pourrait expliquer une partie de l'agrodiversité que

nous voulons étudier (Friis- Hasen 2000).

28

Page 31: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BAca MohamedNasser

Figure 5: Production moyenne annuelle d'igname des communes du département du Borgou

(moyenne calculée sur 10 ans, 1991 à 2000).

;.. La plupart des villages de ces deux communes sont accessibles et les paysans sont

ouverts aux innovations. L'intérêt qu'offre le choix de ces villages est triple. En

premier lieu il a permis d'éviter les pertes de temps excessives pendant les prises de

contact. La collaboration des producteurs a été totale. Enfin le choix des villages

accessibles où les paysans sont ouverts aux innovations permet de tester notre

hypothèse selon laquelle la diversité est plus menacée dans les villages ouverts sur

l'extérieur que dans les villages isolés, ce qui justifierait des actions rapides en terme

de conservation.

;.. L'igname produite dans ces deux communes est orientée vers des fonctions

différentes. Les producteurs de Sinendé, auto-consomment majoritairement l'igname

qu'ils produisent alors que ceux de Tchaourou optent beaucoup plus pour la

commercialisation. Les différents usages auxquels les producteurs des deux

communes destinent l'igname permettent de voir en fonction de l'objectif de

production, quelles sont les variétés qui sont cultivées et quelles sont les stratégies

de gestion de ces variétés.

5. Sélection des villages d'étude et des unités d'observation

Par commune, deux villages ont été étudiés soit un total de 4 villages pour l'ensemble de la

recherche. Les villages ont été choisis, de façon à avoir les deux groupes socio-lingustiques

majoritaires de chaque commune.

A Sinendé, ce sont les villages de Wari et de Gorobani qui ont été étudiés. Wari est composé

majoritairement de Bariba alors que Gorobani est surtout peuplé par les Gando.

29

Page 32: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser

A Tchaourou par contre, ce sont les villages de Kinnoukpanou et de Yébéssi qui ont été

sélectionnés. Le premier village est composé majoritairement de Nago alors que le second

compte beaucoup plus de Lokpa.

Par commune, 30 exploitations ont été étudiées soit 60 exploitations pour l'ensemble de la

recherche (tableau 1 ). Les exploitations étudiées ont été choisies de façon à avoir toute la

diversité des exploitations agricoles du nord Bénin signalées dans les études diagnostiques

(DRA, 1993; Baco et Djènontin, 2003).

Tableau 1 : Choix des unités d'observation

• ( ) abréviation des ethnies etudiees

Communes Sinendé Tchaourou

Villages Wari Gorobani Kinnoukpanou Yébéssi

Groupe sociolinguistique majoritaire Bariba (B)* Gando (G) Nago (N) Lokpa (L)

Autres ethnies Gando Bariba Bariba Bariba

Nombre d'exploitations étudiées 15 15 15 15

Répartition linguistique des 9 (B) 9 (G) 10 (N) 12 (L)

enquêtés 6 (G) 6 (B) 5 (B) 3 (B)

Total 60. . ..

Il n'y pas eu un taux de sondage prédéfini ayant permis de choisir les exploitations étudiées.

J'ai simplement veillé à avoir plus d'enquêtés appartenant à l'ethnie majoritaire. Les

exploitations ont été aussi choisies de façon raisonnée, de manière à avoir la diversité

soupçonnée. Ainsi nous avons veillé à avoir toutes les ethnies (figure 6), toutes les classes

d'âge, toutes les tailles de superficie présentes dans chaque village étudié.

Figure 6 : Répartition des enquêtés dans les groupes linguistiques

30

Page 33: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003

6. Outils et méthodes de collecte des données

BAca Mohamed Nasser

Plusieurs outils et techniques de collecte de données qualitatives et quantitatives ont été

utilisées dans cette étude:

Enquêtes exploratoires: cette étape a permis de parcourir tout le département du Borgou

et d'avoir des données secondaires à travers des discussions que nous avons eues avec

des personnes ressources (responsables du développement rural, chefs de village,

notables... Suite à cette enquête exploratoire une base de données a été établie et a permis

de choisir les villages à étudier.

Récits de vie: ce sont des entretiens au cours desquels, nous avons amené les

producteurs à relater leur profil historique orienté sur la production d'igname, les variétés

qu'ils cultivent et la gestion qu'ils font de ces variétés.

Entretiens semi-structurés: ils ont été conduits individuellement avec les producteurs

individuels, les responsables de groupement villageois à l'aide de fiches de collecte de

données. Un exemplaire de ces fiches est mis en annexe 1 de ce document. Les

producteurs ont été interrogés sur différents aspects de la production, d'igname, de la

conservation des tubercules, de la transformation et de la gestion de la diversité variétale,

les utilisations (culturelles, alimentaires, économiques...) des variétés.

Entretiens de groupe au niveau du village: afin de cerner toute la diversité des situations

les entretiens ont été faits à l'échelle du village pour discuter avec plusieurs producteurs. Par

village, il y a eu en moyenne 3 entretiens de groupe. Les entretiens ont été chaque fois

conduits avec environ 10 personnes choisies au hasard dans le village. Ces entretiens ont

permis de recenser les informations d'ordre général (écosystèmes abritant les ignames

sauvages et susceptibles d'être préservés, le répertoire des variétés cultivées, les origines et

l'historique des variétés cultivées...).

Recherche documentaire: les sources documentaires écrites ont servi à avoir une bonne

connaissance de la zone d'étude, à circonscrire l'étude et à avoir les données secondaires.

Les bibliothèques de l'université d'Orléans, de l'IRD, du CARDER, de la FSA, de l'liTA, de

l'IPGRI, de l'INRAB et de l'INSAE ont été visitées à cet effet.

Observation participante: c'est une immersion prolongée de l'enquêteur dans le milieu de

vie des enquêtés. Dans ce cadre, nous avons pris part à plusieurs activités où nous avons

observé les acteurs du milieu rural dans leur vécu quotidien (travaux champêtres y compris

la récolte des ignames sauvages, savoirs liés à ces travaux, circulation des variétés entre

paysans, gestion de la diversité variétale après la récolte) et écouté leurs propos en public

comme en privé.

31

Page 34: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser

Triangulation: cette démarche a permis de confronter les informations obtenues au niveau

des producteurs individuels à celles tirées des sources indépendantes. Pour cela, deux

informateurs clés ont été choisis par village pour parler des 15 producteurs, de leur niveau

de prospérité, de la culture de l'igname, du nombre de variété, de la gestion de ces variétés,

de la commercialisation des ignames... Les informateurs clés sont dans chaque village les

secrétaires des groupements villageois. Ils détiennent de par leurs fonctions des

informations (taille de l'exploitation, cultures et superficies consacrées à chaque culture,

capacité matérielle et financière ... ) sur la quasi-totalité des producteurs du villageois.

7. Données collectées et outils d'analysesPlusieurs données ont été collectées et analysées (tableau 2)

Tableau 2 : Récapitulatif des données collectées et des outils d'analyse

Relatif à Données collectées Sources de Instruments de mesure Outils d'analyse

données

Nombre d'actifs de Exploitation Moyenne, ratio de

l'exploitation agricole Interview semi-structurée dépendance

Superficie emblavée en Exploitation Interview semi-structurée Statistique descriptive:

igname agricole moyenne, Anova

Objectifs Nombre de variétés Exploitation Interview semi-structurée, Régression, Indice de

1 et 2 cultivées par exploitation et agricole entretien de groupe, similarité de Sorensen « Four

par village Tout le village observation participante square analysis »

Caractéristiques des Exploitations Interview semi-structurée Hiérarchisation

variétés Village et entretien de groupe Classification matricielle

Critères paysans de Exploitation Interview

reconnaissance des agricole Observation participante Classification par score,

variétés cultivées

Mode et plan de semis des Exploitation Plan des champs

variétés d'igname agricole Observation directe

Objectif Mode de récolte des Exploitation Plan des champs Analyse descriptive des

3: variétés agricole Observation directe pratiques, moyenne, plan de

Méthode de conservation Exploitation Visite des greniers répartition spatiale des

des variétés cultivées agricole Observation directe variétés.

Origine et flux des variétés Exploitation Profil historique Graphe, analyse de discours,

cultivées agricole, village Interview semi-structurée analyse descriptive

Importance/raisons de la Exploitation Dénombrement, interviews, Coefficient de Sorensen

production des variétés agricole Tableaux et graphes

Caractéristiques des Exploitation Observation directe Corrélation, régression

Objectif utilisateurs des variétés agricole Interview semi- structuré Tableau, pourcentage

4: Caractéristiq ues des

centres de conservation Documentation Tableau de comparaison

32

Page 35: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BAca Mohamed Nasser

Pour mieux comprendre pourquoi les paysans maintiennent la diversité, où ils la

maintiennent, et pour détenniner les points d'action, je procéderai à une analyse participative

de la distribution suivant la méthode des 4 carrés connue sous le nom de « four square

analysis ».

Le « four square anlysis » implique les agriculteurs. Il pennet de bénéficier de la capacité

analytique des producteurs et de les amener à juger de l'état des cultivars locaux qu'ils

maintiennent au champ. L'exercice se fait en groupe hétérogène comprenant des vieux et

des jeunes. Pour une conduite plus facile, j'ai travaillé avec une moyenne de 15 paysans par

village. Ils sont invités à produire une liste de variétés y compris les variétés qu'ils ne

cultivent plus dans le village. Aux jeunes on demande de lister les variétés cultivées

actuellement dans le village et aux vieux on demande de lister les variétés cultivées dans le

passé et qu'ils ne cultivent plus. Les variétés ainsi recensées sont réparties dans quatre

carrés. Ces derniers sont la combinaison de deux critères: le nombre d'exploitation cultivant

une variété quelconque et la superficie qui est consacrée généralement à cette variété. Pour

une meilleure participation des figurines sont proposées par les paysans afin de matérialiser

chaque critère. Les figurines varient en fonction des villages. Par critère, deux groupes sont

possibles. En ce qui concerne la superficie, on a : les groupes grandes et petites superficies

et le critère, nombre d'exploitations se divise en plusieurs et quelques exploitations.

L'inconvénient de l'approche, c'est qu'elle limite les producteurs dans la constitution des

groupes. Les variétés recensées ne peuvent être réparties que dans 4 carrés.

Le fil conducteur des analyses se base sur l'approche préconisée par Jarvis et al. (2000).

Avant toute mise en œuvre de la conservation in situ, certaines questions, méritent réponse:

• Quelle est l'ampleur de la distribution et de la diversité génétique maintenue par les

paysans dans le temps et dans l'espace ?

• Quels sont les processus utilisés pour maintenir cette diversité au champ?

• Quels sont les facteurs qui influencent les décisions des paysans à maintenir la

diversité au champ?

• Qui maintient cette diversité au champ (homme, femme, jeune, vieux, riche, pauvres,

certains groupes ethniques) ?

La réponse à ces questions, pourra pennettre de fournir les bases scientifiques d'une

stratégie effective et à long tenne de conservation de l'agrobiodiversité au champ.

8. Limites du travail

Comme tout oeuvre humaine, ce travail pourrait contenir des imperfections liées aux

conditions de collecte des données et de déroulement de la recherche sur le terrain. J'ai tenu

dans ce paragraphe, à attirer l'attention des lecteurs sur les probables causes de biais.

33

Page 36: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BAca Mohamed Nasser

Cette recherche m'a conduit dans quatre villages où les producteurs parlent des langues que

je ne maîtrise pas. J'ai dû recruter des guides qui m'ont servi d'interprètes sur le terrain. Bien

que les guides soient d'un niveau appréciable, il faut dire que la traduction des questions et

des réponses n'a pas toujours été aisée. Par ailleurs, certains paysans n'ont pas voulu livrer

les informations qu'ils jugeaient délicates et secrètes en présence d'un interprète. Ils

voyaient en lui un producteur d'igname donc un concurrent potentiel susceptible d'utiliser les

recettes qu'ils nous donneraient pour améliorer sa production.

L'igname est une culture annuelle dont la production dure toute une année. Notre stage sur

le terrain n'a durée que 4,5 mois. Ceci ne nous a pas permis de suivre de façon

chronologique les différentes étapes de gestion de la diversité des cultivars depuis la

plantation jusqu'à la récolte. Toutefois, nous avons eu recours aux données antérieurement

collectées pour combler les informations manquantes.

Sur la base des noms et des caractéristiques morpho-botaniques, on peut dire qu'il y a une

grande diversité des ignames cultivées. Nous avons veillé à réduire les duplications de nom

qui pourraient faire penser à plus de variétés. Il est possible que toutes les synonymies ne

soient pas détectées. Dans ces conditions, le nombre de variétés inventorié dans cette étude

devra être revu à la baisse. En général les noms des variétés que je mentionne sont en

Bariba dans le cas où la variété à un synonyme dans cette langue. Autrement, je garde le

nom que l'ethnie qui la détient lui donne.

Je tiens aussi à dire aux lecteurs de ce document que les noms des variétés sont écrits en

alphabet français et sur la base de leur prononciation. Pour être plus fidèle, il aurait été

judicieux de les transcrire selon la démarche des linguistes. Mais faute de maîtrise de cette

approche, j'ai retenu de les présenter sous la forme que vous aurez à lire tout au long de ce

document.

34

Page 37: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn2003

Résultats

BACQMohamed Nasser

1. Ampleur de la diversité variétale maintenue par les paysans dans

le temps et dans l'espace

Il s'agit dans cette partie de faire l'inventaire de la diversité des ignames cultivées dans la

zone d'étude et au niveau des exploitations suivies. Cette description permettra de suivre et

d'identifier les variétés qui ont dans le temps et dans l'espace constitué le support des

systèmes de cultures à base d'igname dans le nord du Bénin.

1.1. Les ignames sauvages rencontrées dans le nord Bénin

Les différents recensements, réalisés dans les formations végétales (savanes et jachères)

du nord Bénin ont permis de dégager six Dioscorera sauvages. /1 s'agit: Dioscorea bu/bitera

L., Dioscorea sansibarensis Pax, Dioscorea dumetorum (Kunth) Pax., Dioscorea smilacitolia

De Wild, Dioscorea togoensis Knuth, Dioscorea abyssinica Hochst. Ex Kunth. Les quatre

premières espèces sont fréquentes dans les écosystèmes humides et les galeries

forestières. Elles produisent des bulbilles et des tubercules toxiques non comestibles. De

toutes les espèces du genre Dioscorea, observées dans la zone d'étude, seule D. abyssinica

présente un intérêt alimentaire pour tous les groupes socio-linguistiques rencontrés. On

l'observe dans les forêts galeries, dans les savanes arborées, naturelles ou en jachère, dans

les milieux perturbés, notamment les bords de piste et de champs. Communément appelés

« Dika» en bariba, les tubercules de cette espèce sont les seuls parmi les 6 à être

« domestiqués» c'est-à-dire transformés en ignames cultivées.

1.2. Les ignames cultivées

1.2.1. Inventaire de la diversité

Pour l'ensemble des terroirs villageois visités et enquêtés, quatre espèces d'ignames ont été

recensées dans les champs: D. cayenensis - D. rotundata, D. a/ata, D. dumetorum, D.

bu/bitera . Chacune de ces espèces est représentée par une ou plusieurs variétés (tableau

3). On remarque que dans cette liste, il n'y a pas les D. abyssinica qui est pourtant l'espèce

que les paysans domestiquent dans la zone d'étude. La dénomination scientifique de

certaines ignames cultivées a posée d'énorme problèmes (Hamon et a/., 1997). Ce sont les

travaux récents (Hladik et al., 1984; Hamon et Touré; 1991, Terrauchi et al. 1992; Dumont

et al., 1994) qui ont montré que, les ignames cultivées actuelles proviennent de plusieurs

espèces. Respectant cette origine plurispécifiques, le séminaire international sur les plantes

à racines et tubercules, tenu au Cameroun en 1978 a recommandé la dénomination D.

35

Page 38: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser

cayennensis - O. roundata pour les ignames cultivées dont celles issues de la domestication

des O. abyssinica. Ce regroupement de plusieurs variétés sous le même nom pose des

problèmes qui pourraient se répercuter sur le concept de variété. J'y reviendrai dans la suite

dans la partie discussion.

100%

Tassou

Mokorou

Sangourou

Yanssourérou

Total

O. cayenensis - O. rotundata

O. a/ata

O. dumetorum

O. bu/bitera

Tableau 3 : espèces d'igname cultivée et nombre de variétés correspondantes

Espèces Nom en bariba Nombre de % Superficies

variétés occupées

112 95,8

14 4

1

1

128

Ce résultat est proche de ceux obtenus par Orkwor et al. (1998) et Dumont (1998), qui

totalisent cinq espèces d'ignames cultivées pour toute l'agriculture ouest-africaine. En plus

des 4 espèces que nous signalons pour notre zone d'étude, ils ajoutent O. escu/enta. On

constate aussi que Sinendé a une gamme très importante de variétés cultivées dont la

totalité se retrouve dans l'espèce O. Cayenensis- O. rotundata.

En considérant les quatre espèces cultivées, O. cayenensis - rotundata est la plus

rencontrée dans les champs. Le dénombrement a été fait sur la base des buttes consacrées

à chaque espèce au niveau des 60 exploitations enquêtées. L'espèce O. cayenensis ­

rotundata occupe environ 96 % des superficies cultivées. Ce résultat est proche de celui

obtenu par Dumont (1998), lorsqu'il rapporte que 90 % des surfaces consacrées à l'igname

dans chacun des différents pays producteurs d'Afrique Occidentale, exception faite toutefois

de la Côte d'Ivoire, sont cultivées avec ce complexe d'espèces.

L'espèce O. a/ata suit avec environ 4 %. Ce pourcentage est faible par rapport à celui de

Côte d'Ivoire (60 % d'après Dumont et Marti, 1997). C'est le bon comportement en

conservation des tubercules qui fait l'intérêt principal de cette espèce. Contrairement à la

Côte d'Ivoire, ce sont les paysans eux-mêmes qui ont assuré son introduction et qui

maintiennent sa diversité génétique depuis de très nombreuses années. Par rapport aux

résultats antérieurs (Saco 2000), on note une légère augmentation des superficies

consacrées à O. a/ata. Cette situation pourrait s'expliquer par la vulgarisation récente de la

variété Florido. On peut encore s'attendre pour les années à venir à une expansion plus

importante de cette variété d'a/ata. Actuellement il parait difficile de conclure sur la

diminution des superficies consacrées aux variétés du complexe O. Cayenensis- O.

36

Page 39: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BACQMohamed Nasser

rotundata suite à une augmentation des Florido. Néanmoins la menace semble réelle. Je

reviendrai sur cette situation dans la partie discussion.

La production de D. durnetorum et D. bu/bifera demeure encore insignifiante. Ceci n'est pas

le cas au Cameroun où Ngeve (1998), souligne l'importance de D. durnetorum dans

l'agriculture. Cette igname se prête à l'échelonnement de la production parce que les

différents tubercules fournis par la plante se développent au cours d'une période de 15

semaines environ et conservent une excellente qualité culinaire aussi longtemps qu'ils

peuvent être maintenus en terre (Trèche, 1984).

Contrairement aux autres espèces cultivées dans la zone, l'espèce D. bu/bifera est cultivée

pour ses bulbilles. Ces dernières sont conservées jusqu'au début de la nouvelle saison des

pluies. A ce moment, les bulbilles ont perdu assez d'eau. Leur goût rappellerait celui de la

pomme de terre.

La production de D. dumetorum et D. bu/bifera est très marginale. Elle ne s'observe que

chez quelques rares paysans, représentées par quelques pieds.

Au total, le complexe d'espèces D. cayenensis- D. rotundata est le plus cultivé parmi

l'ensemble des espèces d'igname retrouvées dans l'agriculture du nord Bénin. La raison

fondamentale qui lui donne ce statut, serait due au fait qu'elle est celle dont les

caractéristiques permettent de faire les plats appréciés par les populations du nord Bénin.

Cette raison couplée au fait que l'espèce D. Cayenensis- D. rotundata a une origine

africaine, m'amène à limiter mon étude à cette espèce. Les résultats que je donne dans la

suite de ce document concernent exclusivement l'espèce D. cayenensis-rotundata.

1.2.2. Les différents groupes de D. cayenensis- D. rotundata

Dans l'ensemble des 4 villages parcourus, les producteurs distinguent trois grands groupes

d'ignames sur la base du cycle de production :

• Les ignames précoces: sur les 112 variétés, 32 appartiennent à ce groupe. Les

variétés de ce groupe sont exploitées en double récolte. La double récolte consiste à

interrompre volontairement le cycle de la plante en récoltant les tubercules appelés

précoces qui seront consommés ou vendus. L'interruption est faite délicatement de

façon à permettre la reprise du cycle. La néo-formation donnera cette fois des

tubercules plus petits qui seront utilisés comme semenceaux à la prochaine

campagne. La première récolte se fait entre (fin juillet à mi-octobre) et la deuxième

entre décembre et janvier.

37

Page 40: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BACO Mohamed Nasser

• Les ignames tardives: elles sont récoltées en une seule fois et tardivement (entre

novembre - janvier). Parmi les variétés recensées, 70 d'entre elles peuvent être

classées dans ce groupe, ce qui représente 63% du total des variétés cultivées.

• Les ignames intermédiaires: Elles peuvent être récoltées en une fois ou en deux fois.

10 variétés au total peuvent passer d'un groupe à l'autre, selon le choix du paysan,

les conditions de culture ou selon les techniques culturales mises en œuvre.

En général, les ignames précoces sont plus grosses que les tardives. Ces dernières donnent

souvent plusieurs petits tubercules par buttes alors que les précoces donnent un maximum

de 3 par butte.

Selon le groupe sociolinguistique, ces classes de variétés portent des noms différents. Les

ignames tardives occupent la plus grande partie des superficies cultivées en igname (tableau

4). Les raisons de cette situation seront abordées par la suite.

Tableau 4 : répartition des variétés recensées dans les grands groupes variétaux.

Types Dénomination Nombre de % des Superficies

d'igname Baribal Gandol Nago Lokpa variétés cultivées

Précoces Tandoua Hê-hapa/a 32 33,0

Tardives Yassounou A/sora 70 58,8

1ntermédiaires - - 10 4,0

Total 112 95,8

1.3. Distribution de la diversité inter et intra villages

1.3.1. Distribution inter villages

Les 112 variétés dénombrées pendant l'étude, ne sont pas produites sur l'ensemble des 4

villages (tableau 5).

Tableau 5 : distribution géographique des variétés dans les villages étudiés

Paramètres Présence dans Total

d'analyse 4 villages 3 villages 2 villages 1 village

Nombre 10 13 19 70 112

Moroko, Singou Gogo Atéoulo

Variétés Exemples Ahimon, Douyessirou Kinkérékou Ofégui

Baniwouré Soussou Bagourou N. moussou

Pourcentage 9 12 17 62 100

La carte de distribution révèle qu'il y a :

38

Page 41: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BACQ MohamedNasser

• des variétés cultivées dans chacun des 4 villages: ces variétés sont communes à

tous les villages. Elles ne sont pas menacées de disparition. Ainsi, la multiplication et

la diversification des lieux de production d'une variété est une pratique de

conservation de celle-ci.

• des variétés produites dans 3 villages: à l'instar des premières, elles ne sont presque

pas menacées.

• des variétés présentes dans 2 villages : dans ce cas, des menaces existent et sont

inversement fonction de la superficie et du nombre de personnes qui cultivent ces

variétés.

• des variétés qu'on ne retrouve que dans un seul village, souvent appelées variétés

endémiques, elles sont fragiles et des risques sérieux de perte de la diversité

existent. Ces variétés sont généralement de domestication ou d'introduction,

récentes. Lorsqu'il s'agit de variétés anciennement présentes dans le milieu, il est

urgent de veiller à leur préservation.

• Une forte spécificité villageoise avec 62% des variétés cultivées dans un seul village.

Globalement on pourrait parler d'une fragile situation de la diversité.

1.3.2. Diversité des cultivars d'igname à Yébéssi

L'agriculture de Yébéssi est caractérisée par plusieurs variétés. Au total, 52 variétés ont été

inventoriées. Parmi celles-ci on dénombre 20 variétés précoces, 29 tardives et 3

intermédiaires. Ici aussi, ce sont les variétés tardives qui sont les plus produites. Elles

couvrent plus de 60% des superficies cultivées. L'analyse des quatre carrés réalisée avec

des groupes de producteurs, a permis de dégager le niveau de production de toutes les

variétés (figure 7). Cette qui se veut participative a permis de dégager les variétés les « plus

menacées» (quadrant bas droit) et les variétés les « moins menacées» (quadrant haut

gauche) menacées. Deux critères ont été considérés. Il s'agit:

• de la superficie allouée à chaque variété dans les champs; ce paramètre a été

représenté par un grand cercle ou un petit cercle selon qu'il s'agit d'une grande

superficie ou d'une petite superficie.

• du nombre d'exploitation agricole chez lesquelles on retrouve chaque variété. Ici, les

figurines choisies sont les cases. Plusieurs cases sont affectées aux variétés que

plusieurs producteurs cultivent, alors que les variétés présentent chez quelques rares

paysans sont représentées par une seule case. Cette démarche a permis de faire

participer plusieurs producteurs et de décrire les multiples variétés rencontrées dans

ce village.

39

Page 42: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BAca MohamedNasser

• Le groupe des variét és produites sur de grandes superficies et présentes chez

plusieurs paysans. On pourrait dire que ces variétés ne sont pas menacées de

disparition.

Al5ieus expIoitaIiorsGran:Ies 54JeIflCies

.J\... .J'---. .J'---.U U U

.J'---. J'---.U U

féaballo'MtanamKokourraMirokoAbimonKouméniAlsoro

BombeTalam bedj èTouno-hêBmiv.ouréKètèkobouBaniwouréwouloukaba

BoloLabokoTèkoutèkouSoussouCoutonou

Qœqœs expIdlctia"s.

~es st.perficies

UAœlornaBcpètèSoagonaKoutalaKpakaraDanwariMmguiKoussadiKpanhouraKpaoat é

SingouBakassinin

TchakapimKpahassahAlèolÙO

TanganaTambanaKpakagnmaTcbon tholoumTchibiriPapakouiAlibéhouTanlanboukaAdièWaho

Figure 7 : Analyse de la distribution des variétés de Yébéssi à travers le four square analysis

Quatre groupes sont ainsi constitués :

• Le groupe des variétés produites sur de grandes superficies et cultivées par quelques

rares exploitations . Ces variétés sont appréciées par quelques producteurs qui les

produisent pour leurs fonctions spécifiques.

• Le groupe des variétés produites sur de petites superficies par plusieurs

exploitations. Certaines de ces variétés ont une grande valeur commerciale,

alimentaire, et productive , c'est le cas de Coutonou. D'autres variétés appartiennent

à ce groupe parce qu'il est difficile de disposer d'une grande quantité de leur

semence nonobstant leur grande valeur commerciale, donc recherchée par tout le

monde.

• Le groupe des variétés produites sur de petites superficies par quelques rares

producteurs. Les menaces d'érosions génétiques pèsent surtout sur les variétés de

40

Page 43: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser

ce groupe. En général, ce sont des variétés récemment introduites dans le milieu,

c'est le cas de Waho, Adiè, Anc/oma. Il faudra alors du temps pour leur

généralisation dans les systèmes de cultures à base d'igname de Yébéssi. Les

menaces de disparition de ces variétés sont quasi- inexistantes. Par contre, pour ce

qui concerne les anciennes variétés qui demeurent toujours produites sur de faibles

superficies par un petit nombre de producteurs, on peut prévoir leur disparition avec

le temps. Des mesures de conservation doivent être prises pour assurer leur

présence dans le pool variétal des ignames de ce village. Parmi les variétés

concernées par cette menace d'érosion, on peut citer: Soagona, Kpanhoura.

Dans le village de Yébéssi, on dénombre 5 variétés par exploitation dans ce village et les

variétés les plus produites sont: A/soro, Hê aballo, Morokorou, Witanam. Ces variétés se

conservent bien et ont un bon rendement. Aussi se prêtent-elles mieux à l'igname pilée.

En considérant les deux ethnies (Lokpa et Sariba) du village, il ressort que sur les 52

variétés, les Sariba détiennent 15 variétés, et les Lokpa 33 variétés. 4 variétés sont

communes aux deux ethnies dans le village. Il s'agit de Kpouna, Moroko, Awèrè et Ahimon.

1.3.3. Diversité des cultivars d'igname à Kinnoukpanou

Dans le village de Kinnoukpanou, les entretiens individuels et les entretiens de groupe

couplés au « four square analysis » ont permis de recenser 41 variétés d'igname pour tout le

terroir. Les variétés tardives connues sous le nom de Kokoro ou Kokorogbanon sont les plus

produites et occupent 55% des superficies en igname. Elles sont au nombre de 21 contre 12

pour les variétés précoces et 8 pour les variétés intermédiaires. En moyenne, les

producteurs ont 7 variétés dans leurs champs.

L'élaboration du four square s'est faite avec des figurines différents de ceux du précédent

village. Le four square analysis (figure 8) indique qu'il y a seulement 5 variétés qui ont une

production à grande échelle et que près de la moitié des variétés, sont produites sur de

faibles superficies par quelques producteurs.

Les variétés les plus produites sont Kokouma, Yakanougo, Gambari Vinon . Les raisons qui

expliquent la forte production de ces variétés sont essentiellement commerciales. En effet,

Kinnoukpanou est un village dont la production d'igname est surtout destinée à la

commercialisation. Sur le marché, les consommateurs préfèrent les variétés à gros

tubercules aptes à être pilées. Les variétés Kokouma, Yakanougo et Gambari yinon

possèdent ces caractéristiques, ce qui leur donne un avantage comparatif par rapport aux

autres variétés.

41

Page 44: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BAGa Mohamed Nasser

La grande production des variétés tardives s'explique par le fait que ces variétés sont

transformées en cossettes pour être aussi vendues sur le marché. Il existe plusieurs variétés

tardives qui sont produites sur de petites superficies, c'est le cas de Saria, Kpêyé, Doundou

worou. Les variétés ayant ce statut ont en général un faible rendement.

Plusieurs exploitationsPetites superficies

Plusieurs exploitationsGrandes superficies

~.. ~~.... ..~ ~

B.wauloukabaGambari yinonKokoumaYakanougoKokorogbanon

~.. ~~.... ..~ ~

Agarou MimonAoorè B. KètèkobaGnon woko SariaSoussouKpakaraOféguiSingouKpounaDoubayessiTOUAndorokou

Quelques exploitationsGrandes superficies

Quelques exploitationsPetites superficies

AssoukpanaGourokoKagourouOkxJo

Ad~

BandéBembèrèkèDounclou waTOUGbanwakiriGbédoGominiGomminHomoyaibèreyinsséKohoungouKonyoSingor

SounouclourouBadébaKoyoDébaOfégui

Figure 8 :Analyse de distribution des variétés de Kinnoukpanou à travers le four square analysis

Sur les 41 variétés cultivées, 37 noms sont communs aux deux ethnies (Nago et Bariba)

étudiées dans le village. Une seule variété détenue par les Bariba ne se retrouve pas chez

les Nago. Ces derniers à leur tour cultivent au total 3 variétés qui sont absentes chez les

Bariba.

1.3.4. Diversité des cultivars d'igname de Wari

Wari est un village composé majoritairement de Bariba. Les inventaires réalisés dans ce

village ont permis de recenser 46 variétés. Parmi celles-ci, on dénombre 24 variétés

tardives, 16 précoces Et 6 intermédiaires . En moyenne, les producteurs détiennent 11

variétés. Le "four square analysis" réalisé, a donné les résultats mentionnés en annexe 2.

Les tendances sont les mêmes que ceux des deux villages précédents. 20% des variétés

dénombrées sont cultivées sur de grandes superficies par plusieurs exploitation, 15% sur de

grandes superficies et par quelques rares ménages, 24% sur de petites superficies mais par

42

Page 45: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BACOMohamed Nasser

plusieurs exploitations et environ 40% ont une production marginale c'est à dire qu'elles sont

cultivées sur de petites superficies par quelques rares personnes.

Les variétés les plus cultivées sont Moroko, Baniwouré, et Gogo. Plusieurs variétés seraient

menacées de disparition car elles sont produites sur de faibles superficies et par quelques

rares producteurs. Parmi elle, on peut citer: Soagona, Kpanhouri, Kpouna, womakou, ...

Sur les 46 variétés, seules 2 variétés (Anka korou woura et Kourotoko kparérou) cultivées

par les Bariba n'ont pas été retrouvées chez les Gando. Les autres variétés sont communes

aux deux ethnies.

1.3.5. Diversité des cultivars d'igname de Gorobani

A l'instar des autres villages, Gorobani regorge aussi de plusieurs variétés réparties en

grande partie dans le groupe des variétés tardives. Sur les 48 variétés inventoriées dans ce

village, 25 variétés soit 52% sont des variétés tardives. Les variétés précoces intermédiaires

sont respectivement au nombre de 17 et 6. En moyenne chaque exploitation cultive environ

14 variétés. Les variétés les plus cultivées sont Morokorou, Baniwouré, Tabané. Ici aussi, le

« four square analysis » (Annexe 3) révèle que 1aseulement des variétés de ce village sont

cultivées sur de grandes superficies par plusieurs personnes, et la grande partie des variétés

se retrouve sur de petites superficies.

Deux variétés sont détenues par les Gando et ne se retrouvent par chez les Bariba. Ces

variétés (Noro moussou et Donkpirikou) ont été domestiquées récemment par des Gando.

Les 46 autres variétés se retrouvent aussi bien par les Bariba que les Gando.

1.4.Analyse comparée de la diversité des villages étudiés.

1.4.1. Comparaison de la diversité intra- village

Au vu des résultats obtenus séparément par village, il ressort que le nord du Bénin regorge

d'un pool variétal assez fourni et très varié. Au total, 112 variétés de l'espèce O. cayenensis­

rotundata ont été inventoriées. La spécificité notée dans chaque village mérite d'être

analysée pour comprendre l'apport de la forte diversité signalée sur la dynamique et la

durabilité des systèmes de cultures à base d'igname de cette région du Bénin.

L'analyse des résultats révèle que la diversité des ignames ne s'exprime pas de la même

façon dans tous les villages (tableau 6).

Il ressort aussi que dans le nord Bénin, les producteurs ont en moyenne 9 variétés d'igname

dans leurs champs. Certains peuvent en posséder jusqu'à 23 alors que d'autres se

contentent seulement de 3. Ce grand écart autour de la moyenne traduit la diversité des

43

Page 46: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn2003 BAca Mohamed Nasser

options qu'il y a sur la gestion de la diversité des ignames. 26 exploitations sur les 60

étudiées (soit 43%) ont entre 3 à 7 variétés. 35%, 13%, et 8% des exploitations enquêtées

ont respectivement entre 8 à 12, 13 à 17 et 18 à 23 variétés.

Tableau 6: Quelques données sur la diversité variétale dans les villages étudiés.

VARIETES

Villages Nombre! Moy! Maxi! Mini! Classes

village exploitat exploitat exploitat 3à7 8 à 12 13 à 17 18 à 23

ion ion ion

Kinnoukpanou 41 7 17 4 10 4 2 2

Yébéssi 52 5 9 3 12 3 0 0

Wari 46 11 20 5 3 8 2 2

Gorobani 48 14 23 5 1 6 5 3

Nord Bénin 112 9 23 3 26 21 8 5

L'analyse de variance2 abouti à un F qui est hautement significatif (tableau 7). L"hypothèse

selon laquelle les paysans des quatre villages étudiés cultivent le même nombre de variétés

est rejetée. On conclue que la moyenne des variétés par paysans n'est pas la même dans

les 4 villages.

Tableau 7 : Analyse de variance: comparaison des moyennes de variétés

Source de variation ddl Sommedes carrés Variance F de Fisher PI'> F

Modèle

Résidus

Total

3,0

56,0

59,0

687,6

760,1

1447,7

229,2

13,6 16,8 0,0001

1.4.2. Comparaison de la diversité entre les communautés étudiées

Pour étudier l'existence ou non d'une similitude d'usage des variétés entre les 4

communautés étudiées, nous avons procédé à l'analyse du coefficient de similarité de

Sorensen (1948). Il s'exprime comme suit: K= (100 x 2c) 1 (a+b), avec:

c = nombre de variétés communes à deux communautés A et B

b = nombre de variétés propres à la communauté B

a = nombre de variétés propres à la communauté A.

L'analyse se fait entre deux communautés (tableau 8) et les conclusions sont tirées pour

l'ensemble de la communauté.

2 L'analyse de variance est un test statistique de comparaison de moyenne. Il abouti au calcul d'une valeur F dont la probabilitéindiquede seuil de signification de l'hypothèse selon laquelle les échantillons comparés ont la mêmemoyenne

44

Page 47: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BAca Mohamed Nasser

La valeur de K varie de 0 à 100. Plus K est élevé, plus les deux communautés comparées

utilisent les mêmes variétés. On suppose qu'il n'y a pas de différence entre les

communautés en ce qui concerne l'utilisation et la production des variétés pour K> 95. En

considérant les 4 villages étudiés, le K le plus élevé est obtenu pour le couple Gorobani-wari.

Tableau B : Coefficient de similarité de Sorensen calculé pour les quatre localités

Coefficient K Kinnoukpanou Yébéssi Gorobani Wari1

Wari 41 27 72

Gorobani 43 30

Yébéssi 19

Kinnoukpanou

1.4.3. Niveau et importance de production des variétés

A l'échelle du nord Bénin les 112 variétés se répartissent en 4 classes (tableau 9) :

• La classe des variétés produites sur de grandes superficies et cultivées par plusieurs

exploitations (GSPE),

• La classe des variétés produites sur de grandes superficies et cultivées par quelques

exploitations (GSQE),

• La classe des variétés produites sur de petites superficies et présentes chez

plusieurs exploitations (PSGE),

• La classe des variétés produites sur de petites superficies et cultivées par quelques

exploitanons (PSQE).

On remarque que seules quelques variétés sont produites à grande échelle, d'autres, par

contre, ont une production· marginale.

Tableau 9 : Répartition des variétés cultivées dans 4 claSses suivant 2 critères discriminants.

GSPE GSQE PSGE PSQE

Localités Nombre % Nombre % Nombre % Nombre %

Wari 9 20 7 15 11 24 18 39

Gorobani 10 21 8 17 13 27 17 35

Yébessi 7 8 10 27 52

Kinnoukpanou 5 12 4 10 12 29 20 49

Nord Bénin 10 9 12 11 25 22 65 58

45

Page 48: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BACO Mohamed Nasser

1.4.4. Répartition des variétés entre les ethnies

A l'instar de l'analyse au niveau village (dimension géographique), j'ai voulu apprecrer

comment se réparties les variétés au niveau des groupes ethniques (dimension anthropique

et socioculturelle) (Tableau 10).

Tableau 10 : Répartition des variétés par couple d'ethniques

Ethnies Bariba Gando Lokpa Nago1

l\Iago 28 25 5

Lokpa 4 4

Gando 51

Bariba

Le couple Bariba- Gando est celui qui a le plus de variétés communes. Les Lokpa ont très

peu de variétés communes avec les trois autres ethnies. Les couples Bariba- Nago et

Gando- Nago ont presque les mêmes variétés communes.

En considérant les 4 ethnies étudiées à travers les 4 villages, il ressort que (figure 9), la

grande partie (48%) des 112 variétés, est cultivée par une seule ethnie . Seules 4 variétés

(3,5%) sont communes aux 4 ethnies.

Figure 9 : Répartition des variétés par groupe d'ethnies

Les variétés communes aux 4 ethnies (voir annexe 4) sont Moroko, Ahimon, Kpouna et

Awèrè. Ce sont les Lokpa qui détiennent le plus de variétés spécifiques Sur les 54 variétés

de ce groupe, ils en détiennent 46. Quelles sont les raisons de cette spécificité des Lokpa ?

La discussion permettra s'apporter quelques éléments de réponse.

46

Page 49: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BAGa Mohamed Nasser

Il. Processus utilisés pour maintenir et créer la diversité agricole de

l'igname

Dans ce chapitre, il est question d'analyser toutes les pratiques de gestion et de

conservation de la diversité des ignames utilisées par les producteurs. L'accent sera mis sur

les pratiques qui permettent de créer et d'enrichir la diversité et les pratiques qui permettent

de conserver la diversité de façon durable. Nous considérons les pratiques de gestion et de

conservation comme un système, une organisation ou un processus qui, dans un espace

donné et au-delà du temps, maintient, améliore ou crée les ressources génétiques agricoles

et assure leur disponibilité aux agriculteurs et autres utilisateurs pour l'amélioration durable

des niveaux de vie.

2.1. Pratiques paysannes de maintien et de conservation de la diversité

variétale des ignames

2.1.1. Stockage différentiel des variétés

A l'instar de ce qui ce fait à la plantation, les variétés sont stockées en tas séparés quelle

que soit la méthode de conservation. Il existe différentes méthodes de conservation :

• Stockage dans les greniers: les matériaux utilisés pour construire ces greniers sont

les mêmes quel que soit le village. Les matières premières habituellement utilisées

sont les tiges d'igname, les chaumes de sorgho, les piquets de bois et la paille. La

différence entre les villages étudiés réside dans la forme des greniers. Les

producteurs Wari et de Gorobani optent pour les greniers circulaires, ceux de

Yébéssi préfèrent des greniers de forme conique et les producteurs de Kinnoukpanou

ont des greniers trapézoïdaux (Photo 3).

Photo 3 : Grenier de conservation de l'igname

47

Page 50: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BAca Moh8medNasser

En général, les producteurs ne conservent pas leurs semenceaux d'igname dans ces

greniers. Ces greniers servent à la conservation des ignames destinées à la consommation .

Les greniers ainsi construits ont une durée de vie maximale de 2 ans. Par contre les

ignames peuvent y être gardées pendant 6 mois.

• La conservation en tas sous des arbres: les producteurs profitent de l'ombre de

quelques arbres présents dans le champ pour garder leurs semences pendant un

mois maximum. Chaque variété a son tas distinct de celui des autres. Cette méthode

de conservation a l'avantage d'éviter le mélange des variétés pendant la plantation.

Son inconvénient est que les ignames sont à la portée des voleurs, des feux de

brousse et des dégâts des animaux transhumants. Pour minimiser ses risques,

certains producteurs n'hésitent pas à poser des fétiches pour dissuader les étrangers

(photo 4).

Photo 4 : Tas d'ignames de la variété Baniwouré conservées au champ sous un arbre

• La conservation en buttes permet d'éviter au maximum les pourritures des

semenceaux et les attaques de cochenilles (cause de perte variétale). C'est la forme

de conservation la plus utilisée pour les semences. Les semenceaux d'igname sont

gardés dans les buttes jusqu'à l'approche de la prochaine plantation. Pour environ

60% des paysans enquêtés, la durée maximale de conservation des semences

d'igname hors des buttes est de 3 semaines.

2.1.2. Le sevrage précoce ou la double récolte

Cette pratique est faite sur les variétés précoces. Elle consiste à interrompre le cycle en

faisant une récolte anticipée. Pendant la première récolte, qui est une opération délicate, les

48

Page 51: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BACQ MohamedNasser

racines ne doivent pas être abîmées pour permettre une néo-tubérisation. La première

récolte fournit de l'igname qui est consommée alors que la néo-tubérisation donne des

semences qui seront utilisées la campagne suivante. Cette pratique de sevrage précoce ou

de double récolte est nécessaire pour l'obtention des semences des variétés précoces et

donc pour leur maintien continu dans le système de cultures. Les variétés comme Kpouna,

Soagona, Dani, Ahimon, hê aballo, etc. doivent subir ce traitement particulier au risque de

les perdre.

2.1.3. Association de certaines variétés à des pratiques culturelles

L'igname n'a jamais été considérée comme une culture ordinaire dans les aires culturelles

étudiées. Plusieurs rites et cultes régissaient sa culture, sa récolte et sa consommation. Pour

accomplir chacune de ces cérémonies certaines variétés d'igname étaient investies de

fonctions bien précises (tableau 11.

Tableau 11: variétés d'igname et les croyances qui leur sont liées

Variétés

Hê-aballo

Moroko

Sounou dourou

Kinkérégou

Soagona

Kpanhouri dingui

Kpouna

Droubayessirou

Ethnies

Lokpa

Bariba, Gando

Bariba, Gando

Bariba, Gando

Bariba

Bariba

Bariba, Gando

Gando

Croyances

Données pour les cérémonies dans la belle-famille

Données pour les cérémonies dans la belle-famille

Préparée lors des cérémonies nuptiales

Tests culinaires pour la mariée lors des cérémonies

nuptiales

Ne doit pas être récoltée simultanément par le père et

son fils

Destinée aux offrandes pour les ancêtres et les fêtes

d'igname

Les chances de succès sont liées à des critères

psychologiques

Un développement anormal est annonciateur de

malédiction

Ces traditions ont régressé avec le temps pour la grande majorité des paysans surtout chez

les Nagot pour qui la culture de l'igname est aujourd'hui réalisée plus à des fins

commerciales qu'alimentaires et culturelles. Chez les Bariba, les Gando et dans une certaine

mesure les Lokpa, certaines de ces traditions ont survécu. La variété Kpanhouri demeure à

ce jour la seule igname utilisée dans les cérémonies culturelles et religieuses. Elle sert aussi

dans les offrandes aux ancêtres. A la sortie de la nouvelle igname, c'est cette variété que les

Chefs de Terre, les « Féticheurs» utilisent pour faire les sacrifices et honorer les dieux pour

le fait que la campagne agricole a été bonne. Ce n'est qu'après ces cérémonies que

49

Page 52: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BAce Mohamed Nasser

l'autorisation est donnée à tout le village pour consommer la nouvelle igname. Bien que cette

variété n'ait pas un bon rendement, qu'elle ait une faible valeur commerciale, et qu'elle

pourrisse vite, elle continue d'être cultivée pour honorer et sacraliser les engagements pris

auprès des dieux des mânes des ancêtres.

Les variétés Hê-aballo et Moroko sont les plus présentes lors des cérémonies festives chez

les beaux-parents, lors des baptêmes et des mariages. Du fait de la grosseur de leur

tubercules, les producteurs les utilisent pour montrer leur entrain au travail et pour se

distinguer socialement. Ces raisons expliquent en partie pourquoi ces deux variétés sont

parmi les plus cultivées dans le nord Bénin.

Les variétés Sounou dourou et kinkérékou, du fait de la difficulté à les piler, étaient autrefois

utilisées pour tester les compétences culinaires des jeunes filles en instance de mariage.

Au total, l'association des variétés à des pratiques culturelles a l'avantage de permettre une

conservation durable des variétés concernées, même quand elles cessent d'être

compétitives. L'abandon ou l'indifférence actuelle des jeunes vis-à-vis des pratiques

culturelles impliquant ces variétés pourrait compromettre à la longue leur maintien et

favoriser leur disparition (Adoukonou-Sagbadja , 2001 ; Tostain et al., 2002).

2.2. Pratiques paysannes liées au renforcement de la diversité variétale des

ignames

Il est question dans cette partie d'analyser les pratiques paysannes et les savoirs endogènes

qui permettent de créer et d'enrichir la diversité.

2.2.1. Les circulations de variétés entre paysans

C'est une pratique qui permet à un producteur d'acquérir chez un autre paysan une variété

dont il ne dispose pas. Toutes les variétés sont concernées par cette pratique, toutefois, les

variétés rares et chères (Kpouna, hê aballo... ) sont moins citées dans les échanges. Les

variétés peuvent être acquises par des dons, l'héritage, les échanges simples, la rétribution

de travail ou par achat. Il arrive qu'une même variété soit acquise par un paysan à travers

une seule source, deux, trois ou par toutes les sources. Pour apprécier le poids de chacune

de ces formes de circulation variétale, nous avons procédé à une enquête approfondie

auprès d'un échantillon restreint de 20 producteurs dont 5 par village (figure 10). Dans le cas

où une variété a plusieurs sources, nous avons affecté la même fréquence à chacune des

sources.

50

Page 53: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BAca Mohamed Nasser

Figure 10: Diversité et origine géographique des variétés

Il ressort de ce tableau que le principal mode d'accès aux variétés est l'héritage. Le terme

héritage ici n'est pas pris dans son sens strict, il est utilisé pour les variétés obtenues du

père (y compris de son vivant). Les variétés héritées du « père» représentent 42% des

variétés cultivées. L'héritage est suivi respectivement du Don (37%), de l'achat (14%) et des

échanges (7%). Au niveau de chacun de ces modes d'accès aux variétés, nous avons

analysé l'origine géographique des variétés. Il apparaît que dans chacun des cas, les modes

d'accès sont plus développés à l'intérieur du même village. La grande partie des variétés

héritées, achetées, échangées ou obtenues par don dans une aire géographique, est

cultivée dans la même aire. Il n'existe presque pas de variété achetée ou obtenue par

échange dans une autre région qui soit produite dans le Borgou. On peut en conclure que

les achats ou les échanges de variétés d'igname à des fins de production ne se font pas

dans un rayon supérieur à 200 km. Par contre, les variétés données ou héritées peuvent être

transportées sur des centaines de Kilomètres pour être produites et par conséquent pour

enrichir la diversité existante.

En dehors de la dimension géographique qui régit la circulation des variétés entre paysans, il

existe une dimension'sociale basée sur le tissu social et les liens affectifs existants entre les

producteurs qu'il faut prendre en compte.

2.2.1.1. Les dons de variétés entre paysans

Ce sont des offres de variétés sans contre- partie exigible. Ils témoignent parfois une marque

de solidarité vis-à-vis des producteurs qui pour diverses raisons (maladies, calamités,

voyage, etc.) ont perdu leur matériel végétal (Okry, 2002). En milieu Bariba, les dons sont

aussi un signe de reconnaissance ou une marque de relations d'alliance et, concernent des

variétés rares ou particulières. Dans la circulation de variétés entre les paysans, le don

51

Page 54: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BAca MohamedNasser

représente 37%. Les producteurs acquièrent les variétés de leurs amis, de leurs frères, de

leurs oncles, de leurs parrains, de leur belle-famille par l'intermédiaire des femmes, des

voisins de champ (figure 11).

Figure 11 : Lien social et proportion de don des variétés

Les dons issus des voisins de champ sont rares. Cela s'explique par la concurrence qui

existe entre producteurs ayant des champs dans la même zone. Par contre les amis se font

beaucoup de dons, ce qui fait que sur le terrain nous avons remarqué que les variétés

cultivées par deux amis sont dans la majorité des cas les mêmes. En général, les dons

n'excèdent jamais 50 semenceaux.

Les pratiques agricoles de renouvellement et d'enrichissement de la diversité sont couplées

à des pratiques sociales qui dépassent le cadre de l'unité de production. Elles s'inscrivent

dans une dynamique sociale qui rend compte, de certains aspects du fonctionnement de la

population du nord Bénin. Dans les monts Mandara du Nord Cameroun Seignobos (1996),

remarque qu'on ne remet jamais gratuitement un pied d'igname. Il est échangé dans certains

cas contre une chèvre ou contre deux ou trois fers de houe ou contre la promesse d'une

alliance matrimoniale. Cette pratique notée chez les paysans du Nord Bénin est donc la

manifestation d'une solidarité collective limitée à des réseaux de connaissances. Rapportant

l'exemple du Manioc en Amazonie, Emperaire et al., (1998), constatent que le don permet au

paysan donateur de renforcer sa position sociale.

2.2.1.2. L'héritage de variétés

Il s'agit de variétés provenant du père. Après la mort du père, les enfants récupèrent les

variétés qu'ils cultivaient de son vivant. C'est le mode d'accès le plus courant aux variétés.

Le paysan Boubou Tchaga du village de Wari justifiant le faible nombre de variétés qu'il a

nous déclara: « . . .. Je n'ai pas beaucoup de variétés carje n'ai pas pu hériter celles de mon

52

Page 55: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BACO Mohamed Nasser

père. A sa mort, j'étais absent et mes frères ainés ont profité pour se partager les

cultivars... »,

2.2.1.3. L'achat de variétés

Les achats de semenceaux d'ignames se font mais à des proportions moindres (14%). Il n'y

a pas de marché à proprement parler pour les semences. Les ventes se font au champ.

Dans l'ensemble des 4 villages étudiés, il existe des paysans qui sont connus pour la vente

de semenceaux d'igname. En moyenne un semenceau est vendu à 40 fcfa (0,06 centime

d'euro). En général, la vente est aux producteurs qui veulent accroître le nombre de

tubercules d'une variété qu'ils possèdent déjà. Lorsqu'il s'agit d'un producteur qui cherche

des échantillons de semence pour démarrer un champ d'igname, il reçoit en général

gratuitement le matériel de culture.

2.2.1.1. Les échanges de variétés entre paysans

Ils sont les moins fréquents dans la circulation des variétés entre paysans. Dans un travail

similaire sur le manioc, (Emperaire et al, 1998) remarquent que les échanges de variétés se

font entre individus bien déterminés sur le plan social et empruntent des réseaux déjà

constitués. Ils interviennent entre producteurs souhaitant l'un et l'autre avoir des variétés

particulières détenues par le voisin. Les échanges portent aussi sur les variétés tardives et

les précoces. Dans ce cas, les bases de l'échange diffèrent selon les villages. A

Kinnoukpanou pour un sac de semences de Tandoua (variétés précoces), il faut en échange

plus d'un sac de Kokoro (variétés précoces). Dans les trois autres villages, les échanges se

font dans les mêmes proportions. Le cas du premier village s'explique par le fait que la

culture des variétés tardives est faite par tout le monde à grande échelle au détriment des

variétés précoces. Dans ces conditions, l'accès aux semences des variétés précoces est

plus difficile, ce qui n'est pas le cas dans les autres villages.

Différents modes de circulation des variétés entre producteurs ont été observés dans toute la

zone étudiée. Les dons et les échanges simples concernent aussi bien les membres d'un

même réseau socio-affectif que des individus extérieurs dépassant parfois le cadre de leur

communauté. La circulation inter-paysanne des variétés favorise le brassage et la

dissémination géographique des variétés. Plus la variété est dans la main de plusieurs

paysans et surtout à des endroits différents, moins rapide sera sa disparition. Ces échanges

jouent donc un grand rôle dans le renouvellement et la conservation à la ferme des ignames

cultivées.

53

Page 56: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BACQMohamedNasser

2.2.2. Introductions variétales

Ce sont des importations de variétés à partir d'autres régions éloignées de la zone d'étude

ou à partir des pays voisins (tableau 12).

Tableau 12 : Introductions des variétés: origine et ancienneté

Villages

Kinnoukpanou Yébéssi Wari Gorobani

Variétés Année Variétés Année Variétés Année Variétés Année

d'intro d'intro d'intro d'intro

Aéwélé,

AlihéhouKpa

Autres hassaha,

régionsPlus de Kpakagnina, 15 ans

Kpakara, 20 ans Tambana, Kpakara Plus dedu

Ibèrèyinssé Talambadjè, Gnonbouanri Plus de 20 ansBénin

Alihéhou, Kpakara 20 ans

Adjiné, Adjë

Cotonou, 10 ans Ibèreyinssé 15 ans

Ahimon

Lafou 5 ans Pabi 5 ans

Ahimon 20 ans Aboudja 10 ans Ahimon 15 ans Ahimon 15 ans

Autres Olodo, Awèrè 10 ans Olodo 10 ans Oodo 10 ans

pays Ofégui,

(Nigéria Homoya, 8 ans Mongui 5 ans Alakissa 3 ans Alakissa 3 ans

Lafou Aboudja

Total 8 variétés 13 variétés 5 variétés 7 variétés

TOTAL 21 variétés

Pour l'ensemble de la zone étudiée, 21 variétés ont été introduites. Le village de Yébéssi a la

plus forte introduction. Cela est dû au fait que la grande majorité des jeunes de ce village

vont en exode rural dans les régions environnantes d'où ils ramènent de nouvelles variétés.

Kinnoukpanou vient en deuxième position du fait de sa relative proximité avec le Nigéria.

Les introductions ont lieu à la faveur des voyages entrepris par certains paysans dans

d'autres régions. Le mouvement interne le plus rencontré est celui qui se fait par les paysans

de l'Atacora qui descendent avec leurs variétés dans les départements du Borgou en quête

de bonnes terres arables (Okry, 2000; Adoukonou-Sagbadja, 2001). Les introductions à

partir des pays voisins sont surtout intenses au niveau des villages frontaliers du Nigeria. Les

acteurs impliqués dans cette pratique sont de deux catégories: les paysans émigrants qui

reviennent au pays avec les variétés d'ignames du pays hôte; et les paysans immigrants

des pays voisins ou d'autres zones de production du Bénin et qui amènent avec eux leurs

variétés préférées dans les villages d'installation.

54

Page 57: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BACOMohamed Nasser

Les transferts variétaux s'accompagnent rarement de transferts de noms. Lorsque

l'importation de la variété n'est pas suivie de transfert de nom, le paysan introducteur de la

variété baptise à nouveau cette variété. Deux cas de figure peuvent se présenter:

• Le nom donné est celui d'une variété déjà existante bien que les deux variétés soient

différentes génétiquement. Il est dans la liste des noms de variétés habituellement

introduites à partir du Nigeria. Il s'agit de : Ahimon, Abudja, Olodo, Homoya, Oféhui.

La conséquence de cette pratique est que ces variétés ne seraient plus

monoclonales mais plutôt polyclonales, elles sont hétérogènes. Aussi cette

introduction de matériel, a t-elle été suivie d'un enrichissement réel du pool génétique

du point de vue du généticien. Pourtant la pratique paysanne, masque cet

enrichissement.

• Un nom émanant du paysan introducteur différent de ceux en usage dans la zone

d'introduction alors que le matériel introduit existait déjà dans le milieu. La

conséquence ici est l'augmentation « apparente» de la diversité due aux synonymes

alors que génétiquement le pool génétique est demeuré inchangé.

• En dehors de ces introductions qui ne s'accompagnent pas du nom du matériel

introduit, il y a des cas où le transfert de variétés se fait avec le nom d'usage de la

zone d'origine. Dans ce cas, il est facile de dire si l'introduction a induit un

enrichissement ou non de la diversité.

2.2.3. Domestication des ignames sauvages

Parmi les pratiques de création et d'enrichissement variétal observées sur le terrain, figure

en bonne place la domestication des ignames sauvages. Elle consiste à cultiver des

ignames sauvages collectées dans leur habitat naturel (forêts, savanes, jachères) et à les

soumettre à une série de contraintes dans le but d'obtenir des ignames cultivées. Elle est

pratiquée aujourd'hui par très peu de paysans: 3,7% en milieu Sariba (Saco, 2000), 9.2%

en milieu Nagot (Okry, 2000) et 19% en milieu Fon (Houémassou, 2002).

Au cours de nos investigations sur le terrain, 18 « domesticateurs » ont été recensés parmi

les 60 exploitations suivies (soit 30%). Ce résultat paraît nettement supérieur à ceux obtenus

dans les études antérieures sur le sujet. Cette différence pourrait s'expliquer par la méthode

d'échantillonnage utilisée dans ce travail. On peut aussi penser que les précédentes études

ont largement sous-évalué la pratique ou qu'elles ont créé des artéfacts dans le milieu ce qui

aurait conduit plus de personnes à domestiquer. Les acteurs impliqués sont tous des

hommes; les femmes participent à l'évaluation des produits finis de la domestication. Elle

n'est pas une pratique spécifique à une ethnie mais se pratique plus par les Sariba que par

les autres ethnies. La pratique de la domestication ne dépend pas forcément de la religion,

55

Page 58: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BACO MohamedNasser

de l'âge ou de la classe sociale. En milieu Sariba, la considération que la société a du

domesticateur est fonction de son profil social et de sa performance dans la production de

l'igname. Mais, la pratique de la domestication est abandonnée au fur et à mesure que le

niveau de prospérité du paysan s'améliore (Saco, 2000). Dans l'aire culturelle Sariba qui

constitue la plus grande zone de production des ignames au Sénin, la pratique de la

domestication a un caractère déshonorant et l'utilisation publique des ignames sauvages est

une honte (Saco, 2000). Ces divers paramètres sont pour la plupart les raisons évoquées

par les paysans pour l'abandon ou la non pratique de la domestication.

Pour l'ensemble des domesticateurs, la pratique est quasiment la même et se décompose

en 8 sous pratiques que sont (1) le choix des individus à domestiquer, (2) le prélèvement

partiel des pieds, (3) utilisation d'obstacles pendant la phase de culture, (4) la pratique de la

double récolte, (5) la sélection des clones intéressants, (6) le mélange variétal, (7) la

dénomination des nouveaux clones et (8) la multiplication et la diffusion des nouveaux

clones.

2.2.3.1. Choix des individus à domestiquer

Les domesticateurs sélectionnent des pieds d'ignames sauvages Dioscorea abyssinica dans

leurs habitats naturels (savanes, forêts et îlots forestiers et jachères). Les critères de choix

utilisés concernent :

• La partie aérienne de l'appareil végétatif: la ressemblance du feuillage avec celui

d'autres variétés cultivées, la couleur et grosseur de la tige, la taille et la phyllotaxie

des feuilles ;

• La partie souterraine (tubercule) de l'appareil végétatif: Couleur de la chair, le goût

du tubercule, la présence ou l'absence d'épines. Cette sous-pratique permet de

sélectionner des génotypes facilement domesticables et évite des pertes de temps au

paysan. Les critères de choix de ces génotypes sont résumés dans le tableau 13.

Tableau 13: Critères de sélection des ignames spontanées destinées à la domestication

Caractères Ignames spontanées Ignames spontanées domestiquéesnon domestiquées

Feuilles + tiges

Couleur tigeTaille de la tige adulteEpines sur la tigeForme des feuillesTaille tuberculeForme tuberculeEpines sur tubercules

Chair tubercule après sectionAmertume du tubercule

Peu de ressemblanceavec les cultivarsRoseFinePrésenceRondeFinAllongéePrésence ou absence

Jaune à blancheAmertume

Forte ressemblance avec une variété endisparition ou ayant disparuVerteGrosse et vigoureuseAbsence ou faible présenceOvaleGrosAllongée et invaginéeAbsenceBlanche ou jaune, faible brillance, chairdense, faible écoulement de sèveFaible amertume, peu ou pas d'odeur,bonne texture, friable

56

Page 59: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BAca Mohamed Nasser

2.2.3.2. Prélèvement partiel des individus choisis

Cette sous-pratique consiste à récolter partiellement les tubercules des plants sauvages

sélectionnés tout en laissant un ou une partie du tubercule dans le trou pour perpétuer le

génotype (Photo 5). Le nombre de génotypes collectés varie d'un paysan à un autre et est

de 4 en moyenne chez les Sariba. Les tubercules sauvages prélevés sont apportés au

champ pour être plantés; ainsi commence la phase active de la domestication.

Photo 5 : Tubercules d'igname sauvage prélevés de la forêt pour être domestiqués.

2.2.3.3. lntroouction d'obstacle pendant l'ennoblissement

C'est une pratique qui consiste à placer en position sous-jacente un obstacle (fragment de

poterie, pierre plate, morceau de tôle, etc.) dans le but de limiter la croissance en longueur

des tubercules néoformés (Vemier et Dumont, 2000 ; Baco, 2000). La pratique favorise aussi

le développement en grosseur et facilite la récolte (Photo 6).

Photo 6: Igname en domestication soumis à la pose d'une feuille de tôle comme obstacle

57

Page 60: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BACO MohamedNasser

2.2.3.4. La double récolte des tubercules de domestication.

Elle consiste à interrompre le processus de tubérisation en sevrant la plante de son

tubercule. Elle peut être appliquée ou non pendant la première, la deuxième ou la nième

année de domestication. La pratique est observée chez les 18 domesticateurs. Elle vise en

fin de domestication à sélectionner beaucoup de clones précoces.

2.2.3.5. La sélection des clones intéressants

Plusieurs critères sont utilisés pour la sélection des meilleurs clones. 1/ s'agit de la forme du

tubercule, du rendement, de la qualité culinaire, de l'aptitude à la conservation. Le test

gustatif des produits de domestication joue un rôle primordial pendant cette phase de

sélection. 1/ comptera pour beaucoup dans le rejet ou l'acceptation du produit concerné.

L'implication indirecte des femmes dans le processus de la domestication se note à ce

niveau. Elles « participent» à l'évaluation culinaire des ignames en voie de domestication.

La pratique permet, en général, aux paysans de retrouver des variétés existantes ou ayant

existé avec toutes leurs qualités. EI/e permet l'enrichissement de la diversité variétale par

l'obtention de nouveaux clones (ou nouvelles variétés) performants et bien adaptés aux

nouvelles conditions pédologiques du milieu (figure 12). C'est donc une stratégie paysanne

d'amélioration variétale (Saco, 2000 ; Vernier et Dumont, 2000).

~ •• I~':--· :-. 1

~Ition de départ prenière dcmestication mJtiplicatia1

1 jachères1

Figure 12: résultat de l'ennoblissement sur l'enrichissement de la diversité d'un champ d'igname.

La durée de sélection des nouveaux clones est relativement longue et peut durer entre 3 à 5

ans selon le producteur. A la fin de la domestication, différents itinéraires sont possibles pour

la nouvelle variété ainsi créée.

58

Page 61: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BACO Mohamed Nasser

2.2.3.6. Le mélange variétal après sélection

Après la sélection des meilleurs clones, les produits ressemblant aux variétés existantes

sont reversés aux groupes variétaux correspondants. C'est une pratique très fréquemment

observée dans toutes les zones de production et qui concerne tous les domesticateurs. Elle

a l'avantage d'enrichir la diversité génétique intra-variétale car les tubercules domestiqués

proviennent des graines issues de fécondations libres. C'est une stratégie de renouvellement

variétal dont l'objectif est de lutter contre le vieillissement du stock variétal du paysan

(Dumont, 1998).

2.2.3.7. La dénomination des nouveaux clones

Les nouveaux clones issus de la domestication et différents des variétés existantes ou ayant

existé sont considérés comme de nouvelles variétés. Le domesticateur procède à leur

dénomination en leur attribuant un nom local. Ce nom donné peut faire référence à un

événement ou un objet particulier, au lieu de collecte, aux qualités organoleptiques, et à la

précocité.

Le nom peut être donné sur la base de la ressemblance des tubercules issus de

domestication avec ceux des variétés existantes. C'est le cas des variétés cultivées

Soussou, Kpouna et Dani Moroko.

Parfois, les domesticateurs établissent la ressemblance entre les ignames cultivées et le

matériel végétal sauvage d'origine. Dans ce cas, les noms donnés sont Soagona, Orou

Yinsingui ou Kpanhouri. Ce cas est le plus courant puisque dans 40 % des cas, les noms

donnés sont Soagona ou Orou Yinssingui.

D'autres paysans choissent de donner des noms particuliers: Noro moussou, Donkpirikou.

Après avoir baptisé les ignames domestiquées, elles sont introduites dans le stock des

ignames cultivées. Comme elles portent à 95 % des noms d'anciennes variétés, elles se

dissimulent parmi celles-ci après quelques années et il devient impossible de retrouver leur

trace. On peut s'attendre à observer une certaine hétérogénéité au niveau de chacune de

ces variétés puisque les ignames sauvages issues de graines, sont génétiquement

différentes des clones cultivés.

Il se dégage que de nombreuses variétés domestiquées à partir de D. abyssinica, sont

renommées et réintégrées dans des groupes déjà connus. Il y a de forte chance que les

variétés du complexe D. cayensis- D. rotundata soient des mélanges. Quelles sont les

implications de cette pratique sur le concept de « variété» dans les stratégies et politiques

de conservation ?

59

Page 62: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BAca Mohamed Nasser

Des travaux en cours, conduits par les chercheurs IRD Montpellier visent à évaluer les effets

génétiques de la domestication (Scarceli, 2002).

2.2.3.8. Multiplication et diffusion des nouveaux clones

Les variétés nouvellement créées entrent en phase de multiplication intensive afin d'obtenir

une grande quantité de produits. La diffusion, à l'instar des autres produits de domestication

ou des anciennes variétés du paysan, se fait par le biais de la commercialisation et de la

donation, des échanges et de l'héritage.

60

Page 63: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BAca Mohamed Nasser

III. Déterminants socio-économiques des détenteurs de la diversité

Dans ce chapitre, il sera question de faire une analyse de la diversité variétale, ciblée sur

l'exploitation. Pour cela, nous aurons recours aux déterminants socio-économiques (âge,

sexe, groupe ethnique, niveau de prospérité, mode d'accès à la terre, nombre d'actifs

agricoles, superficie cultivée, ... ). La prise en compte de la dimension socio- culturelle est

due au fait que les anthropologues ont depuis longtemps reconnu le rôle de la tradition dans

la détermination des cultivars que les paysans choisissent de cultiver (Jarvis et al,2000).

Quant à la dimension économique, elle sera utilisée dans ce travail pour étudier le choix des

meilleurs moyens qui permettent d'atteindre les objectifs.

La prise en compte de l'aspect socio-culturel et de l'aspect économique aidera à choisir les

personnes susceptibles d'être impliquées dans le maintien de la diversité agricole.

3.1. Terre et gestion de la diversité

3.1.1. Influence du mode d'accès à la terre sur la richesse variétale

Le mode d'accès à la terre est l'ensemble des voies d'accès, les règles et les normes qui

régissent la distribution, les droits d'usufruit sur la terre. Dans le Borgou qui est notre région

d'étude, la terre n'est pas un facteur limitant et les paysans autochtones comme immigrés

ont des conditions faciles d'accès à la terre. 90% des exploitations enquêtées ont accès à la

terre soit par héritage soit par don. Le mode d'accès à la terre est direct, il confère à chaque

exploitation une sécurité foncière. Cette particularité du nord Bénin ne permet pas de tester

l'hypothèse selon laquelle le mode d'accès à la terre influencerait la diversité variétale

détenue par les exploitations. Selon (Omiti et a', 1999) le mode de tenure foncière

n'influence pas directement la diversité agricole.

3.1.2. Influence de la superficie et du nombre de champ sur la diversité des ignames

Le mode d'accès à la terre est pour la grande majorité des exploitations le même, mais les

superficies consacrées à l'igname ne sont pas les mêmes. Certaines exploitations optent

pour les grandes superficies (3- 5 ha) alors que d'autres ne cultivent que de petites

superficies (0,25- 75). De même, le nombre de champ d'ignames n'est pas le même par

exploitation. Ce nombre varie de 1 à 4. C'est à Kinnoukpanou et à Yébessi que les paysans

ont plus de 2 champs. A Gorobani et à Wari par contre, quelques rares exploitations cultivent

l'igname sur 2 champs (figure 13).

Les producteurs qui cultivent l'igname sur plusieurs champs ont les plus faibles moyennes

de variétés par exploitation. L'analyse révèle aussi que les quatre villages sont comparables

deux à deuX:

61

Page 64: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BAca MohamedNasser

Yébessi et Kinnoukpanou : les paysans ont en moyenne plus de 2 champs par exploitation

et ont très peu de variétés (6-7 variétés).

Wari et Gorobani ; les exploitations ici ont en général un seul champ, mais cultivent en

moyenne plusieurs variétés (11-14).

Figure 13: Nombre moyen de variétés et de champs d'ignames en fonction des villages

L'analyse de variance faite entre les moyennes des superficies d'ignames a donné un F=

12,8. Ce coefficient est significatif au seuil de 5%. L'hypothèse selon laquelle la superficie

moyenne des champs d'igname est la même dans les différents villages du nord Bénin est

rejetée et on peut déduire que les superficies moyennes des champs d'igname varient en

fonction des villages. Le village de Kinnoukpanou est celui où les producteurs cultivent de

grandes superficies. Il est suivi respectivement de Yébessi, Wari et Gorobani (tableau 14).

Le coefficient de corrélation calculé sur l'ensemble des 4 villages n'est pas significatif. Il

confirme mes premières conclusions selon lesquelles Wari et Gorobani sont comparables ,

Kinnoukpanou et Yebessi sont aussi comparables sur certains aspects de la diversité.

Tableau 14 : Superficie des champs d'igname et nombre moyen de variétés par village.

Villages Total

1,00 1,10

3,00 3,50

0,50 0,37

6,00 14,00

0,02*

Superficie moyenne (ha)

Superficie maximale (ha)

Superficie minimale (ha)

Nombre moyen de variété

Coefficient de corrélation : r

* Pas significatif au seuil de 5%

Kinnoukpanou

2,85

6,00

0,75

7,00

Yébessi Gorobani Wari

0,75

3,00

0,50

11,00

1,50

6,00

0,37

9,00

62

Page 65: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BACO Mohamed Nasser

3.2. Lien entre l'âge des paysans et le nombre de variétés

Cette étude a révélé qu'il existe plusieurs pratiques endogènes qui permettent de gérer et de

conserver l'agrobiodiversité. En général, les savoirs locaux sont détenus par les personnes

âgées de la communauté. Selon Jarvis et al. (2000), cette détention des savoirs par les

vieilles personnes est précaire dans la mesure où les savoirs peuvent être perdus si les plus

âgés ne les passent pas à la jeune génération. J'ai pour cette raison, voulu comprendre

l'influence de l'âge des producteurs sur l'ampleur de la diversité des ignames qu'ils cultivent.

L'âge des producteurs étudiés varie de 25 à 60 ans et l'âge moyen est de 43 ans. Sur la

base des données, trois tranches d'âge ont été constituées (tableau 15). Les personnes

âgées constituent 26% de l'échantillon étudié.

Tableau 15 : Nombre moyen de variétés cunivées par tranche d'âge

Paramètres Tranche d'âge

21- 35 36- 50 51- 65

Fréquence 22 22 16

Pourcentage 37 37 26

Nombre moyen de variétés 8 9 10

Pour comparer le nombre moyen de variétés entre les tranches d'âge, j'ai fait le test

d'analyse de variance (tableau 16).

Tableau 16: comparaison des moyennes de variétés suivant les classes d'âges

Sourcede variation ddl Somme des carrés Variance F de Fisher PI'> F

Modèle

Résidus

Total

2,0

57,0

59,0

37,9

1409,8

1447,7

18,9

24,7 0,766 0,469

F calculé n'est pas significatif au seuil de 5%. L'hypothèse selon laquelle le nombre moyen

de variétés varie avec l'âge est rejetée. On conclue que la moyenne de variété est la même

entre les classes d'âge. Les personnes plus âgées, les adultes et les jeunes cultivent le

même nombre de variétés dans leurs champs. Les personnes âgées n'accumulent pas les

variétés avec le temps. Elles entretiennent tout comme les jeunes un processus dynamique

dans lequel elles abandonnent certaines variétés, et en adoptent de nouvelles.

La tranche d'âge 51-65 (celle des personnes âgées) ne se différencie pas des autres en

nombre de variétés, il ressort cependant que les personnes âgées détiennent des variétés

spécifiques que les jeunes n'aiment pas cultiver. C'est le cas de Kpanhoura utilisée dans les

63

Page 66: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BAca MohamedNasser

offrandes. De même les jeunes à leur tour cultivent des variétés (Olodo, Awèrè, Aboudja, ... )

qu'on ne retrouve pas chez les plus âgées.

3.3. Genre et gestion de la diversité

L'approche par le genre est un outil qui permet d'examiner les activités, les responsabilités,

les opportunités dans la vie de chaque membre d'une communauté, prenant en compte les

relations existant entre les hommes et les femmes. A la suite de l'IPGRI (1991), la prise en

compte du genre doit permettre de voir comment les relations hommes-femmes affectent la

manipulation de l'environnement et des ressources agricoles. Parmi les 60 chefs

d'exploitations enquêtés, il n'y a aucune femme. La culture de l'igname est une activité

exclusivement réservée aux hommes. L'implication des femmes ne se fait qu'après la récolte

dans les transformations alimentaires, dans la commercialisation sur le marché. C'est à ces

niveaux que de façon indirecte elles influencent le choix des variétés cultivées dans

l'exploitation. L'igname pilée est la principale forme de consommation des ignames dans

l'ensemble des 4 groupes socio-lingustiques étudiés. La préparation de ce repas qui relève

des activités des femmes est fastidieuse et contraignante. Cette pénibilité est accrue lorsque

l'igname ne se prête pas à cette préparation du fait de ces caractéristiques texturales. Pour

cette raison, les femmes préfèrent les variétés qui possèdent d'excellentes qualités

organoleptiques qui sont aptes à faire de l'igname pilée. En générale, ce sont aussi ces

variétés qui se vendent à des prix élevés sur le marché. Parmi ces variétés, on peut citer:

Kpouna, Moroko, Dani, Hê-aballo, etc. Les caractéristiques culinaires et commerciales de

l'ensemble des variétés sont abordées dans le prochain chapitre.

En moyenne par exploitation, il y a 3 femmes. L'implication des femmes dans la gestion des

variétés d'ignames se remarque aussi lorsqu'elles apportent du matériel neuf de leur maison

familiale. Au cours de nos investigations, plusieurs chefs d'exploitations ont reconnu avoir

obtenu de nouvelles variétés par leur beau-père (voir figure 12 page antérieure). Les

exploitations à régime polygamique semble avoir obtenu plus de variétés de leurs belles­

familles que les monogames.

Vu sous l'angle du genre, on peut dire que dans l'exploitation:

• les femmes mettent prioritairement J'accent sur les variétés à bonnes qualités

organoleptiques, faciles à piler et qui se vendent bien. Les critères de choix des

femmes sont donc essentiellement culinaires et commerciaux.

• les hommes quant-à eux préfèrent surtout les variétés à bons rendements, qui

donnent beaucoup de semenceaux pour la prochaine campagne. Les paramètres de

sélection variétale sont ici agronomiques.

64

Page 67: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser

La diversité de ces critères de choix contribue à entretenir et à maintenir la grande diversité

variétale dégagée sur l'igname au cours de cette recherche.

3.4. Lien entre l'effectif des actifs par exploitation et la diversité variétale des

ignames

L'igname est une culture exigeante en main d'œuvre. Toutes les opérations en particulier le

buttage, la plantation et la récolte sont pénibles et nécessitent plusieurs actifs. Le nombre

moyen d'actifs par exploitation est de 7 personnes. Malgré cette main d'œuvre familiale, il

arrive que des exploitations aient recours à la main d'œuvre extérieure salariée ou non.

Les ouvriers salariés sont parfois rétribués en nature avec des semenceaux de différentes

variétés. Par le système des entraides au champ, les actifs d'une exploitation vont aider ceux

d'une autre et vice-versa. Pendant ce séjour dans le champ, les hôtes identifient des variétés

dont ils ne disposent pas dans leurs champs. Ils peuvent solliciter des échantillons de ces

variétés pour aller enrichir leur pool variétal. Pour cette raison, j'ai supposé qu'il y a un lien

entre le nombre de variétés et le nombre d'actifs agricoles dans les exploitations. Le

coefficient de corrélation calculé entre ces deux variables 0,14. " n'est pas significatif au

seuil de 5%. Il n'y a donc pas de lien entre le nombre d'actif et le nombre de variétés.

Cependant le lien inverse semble probable. Plus un paysan loue ses services, plus il a de

variétés, cette hypothèse pourra être testée dans d'autres études.

3.5. Lien entre l'appartenance linguistique et la diversité variétale

Quatre groupes linguistiques ont été étudiés à travers cette étude. Chacune de ces ethnies

s'identifie à travers une tradition, une histoire, des habitudes alimentaires qui peuvent être

des bases d'un maintien des pratiques endogènes autour de l'agrobiodiversité. " existe des

variétés qui sont spécifiques à chaque ethnie.

Les Lokpa, ethnie majoritaire du village Yébessi, préfèrent les variétés à tubercules

énormes. Les variétés les plus appréciées sont: Hê-aballo, Witanam, Samassi-hê. Cette

préférence pour des variétés à gros tubercules amène les Lokpa à confectionner de très

grosses buttes.

Les Nagot qui sont la principale ethnie de Kinnoukpanou cultivent plus les Kokoro qui sont

des variétés à petits tubercules. Les Nagot utilisent ces variétés pour faire des cossettes

d'igname qui sont commercialisées sur le marché. Ce choix variétal amène les Nagot à faire

des buttes de petites tailles.

Les Sariba et les Gando préfèrent des variétés telles que Moroko, Ahimon, Dani, Kpouna qui

sont de tailles moyennes ce qui explique que dans les champs de ces ethnies on retrouve

des buttes de taille moyenne.

65

Page 68: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser

Dans l'hypothèse que la diversité culturelle participe aussi à maintenir la richesse variétale,

le test de comparaison des moyennes a été effectué pour voir s'il existe une différence de

moyenne de variétés entre les différentes ethnies étudiées (tableau 17).

Tableau 17: comparaison des moyennes de variétés entre les ethnies

Source devariation ddl Somme des carrés Variance F de Fisher PI> F

Modèle 1,0 144,628 144,628

Résidus 58,0 1303,104 22,467 6,437 0,013***

Total 59,0 1447,733

*** significatif au seuil de 1%

Le F calculé est hautement significatif. Il existe une différence entre le nombre moyen de

variétés cultivées par les différents groupes socio-Iinguistiques. Les Gando ont la plus

grande moyenne avec 13 variétés. Ils sont respectivement suivis des Sariba (11 variétés),

les Nagot (8 variétés) et les Lokpa (6 variétés).

66

Page 69: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BACOMohamed Nasser

IV. Caractéristiques agro- morphologiques, commerciales et soclo­

culinaires et des variétés

A travers ce module, nous voulons aborder:

• les caractéristiques agro- morphologiques culinaires et commerciales utilisées par les

paysans pour distinguer les variétés ;

• la manière dont le choix de ces caractéristiques affecte la variété, la pureté variétale

et la diversité des ignames.

4.1. Utilisation paysanne des critères agro- morphologiques

4.1.1. Caractéristiques morphologiques des variétés

Les producteurs identifient principalement leurs variétés d'igname sur la base des

caractéristiques morphobotaniques. Ces caractères qui sont phénotypiques sont liés au

feuillage, aux tubercules ou à la plante entière. Les tests de reconnaissance que j'ai faits

avec quelques producteurs m'ont révélé des taux d'erreur très élevés lorsque le producteur

tente de reconnaître les ignames sur la base du feuillage ou du tubercule. Les erreurs

s'expliquent en partie par l'hétérogénéité des zones de culture. Ainsi, la même variété peut

dans deux agrosystèmes se comporter différemment. Mais le taux d'erreur s'améliore

nettement et peut passer à 80% de taux de réussite lorsque la reconnaissance se base sur

la plante entière (à la fois le feuillage et les tubercules). Dans ce cas, les paysans croisent

plusieurs critères pour affiner la reconnaissance. Par exemple:

• les variétés Kpouna et Dani se ressemblent par le tubercule. Pour les départager, il

faut tenir compte du feuillage.

• droubayessirou et Ahimon sont indiscutablement identiques par le feuillage et le

tubercule. Pour les distinguer, le paysan fait une coupe dans la chair du tubercule.

4.1.2. Caractéristiques agronomiques des variétés

Le premier critère utilisé ici est le cycle des variétés. Il ya des variétés précoces (appelées

Tandoua en Sariba) et des variétés tardives ( ou Yassounou en Banba). En dehors de ce

critère, les producteurs s'appuient sur la sensibilité aux maladies, aux parasites et aux

mauvaises herbes, la sensibilité à la sécheresse, à l'inondation, l'exigence en fertilité du sol,

le rendement, etc. pour choisir les variétés.

Par exemple, en appliquant ces critères, les producteurs s'aperçoivent que:

• les variétés Saniwouré sont des variétés tardives, frugales et qu'elles ne sont pas

exigeantes en sols fertiles

• Kpouna, Soagona, sont des variétés précoces, très sensibles aux maladies et

exigeantes en sols riches.

67

Page 70: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BACOMohamed Nasser

• Kpanhouri et Orou gnissinqui sont des variétés à faibles rendements;

J'ai décrit avec les producteurs les 112 variétés sur la base de certains critères

agronomiques (annexe 5). Pour le faire, j'ai utilisé les approches de sélections variétales

participatives. A travers des petits groupes constitués dans chaque village nous définissons

dans un premier temps les critères. Ces derniers sont représentés sur un papier craft par

des figurines choisies par les paysans eux-mêmes. Ensuite, les variétés sont passées en

revue une à une. Pour chaque critère elles reçoivent un point. On affecte trois cailloux à la

variété lorsque pour le critère considéré elle a un bon potentiel, 2 cailloux pour une

expression moyenne et 1 caillou lorsque pour le critère la variété a un faible potentiel.

4.2. les caractéristiques culinaires, culturelles et commerciales des variétés

4.2.1. Les caractéristiques culinaires

L'igname est une plante utilisée pour préparer plusieurs mets. Les principaux plats à base

d'igname sont:

L'igname pilée: Communément appelée «tchokourou », elle est la forme de consommation

la plus fréquente et la plus appréciée. Sa préparation, consiste à éplucher l'igname puis à le

découper en morceaux assez gros que l'on porte à ébullition complète. Les morceaux sont

ensuite pilés dans le mortier en ajoutant, à petits coups, l'eau de cuisson de manière à

obtenir une pâte élastique et assez consistante que l'on mange avec différentes sauces.

L'igname frite et /'igname bouillie: les variétés précoces sont les plus appréciées pour ces

formes de préparation.

L'igname braisée: les variétés tardives qui sont surtout recherchées pour être braisées.

Les cossettes d'igname: C'est une pré-transformation de l'igname qui vise à améliorer sa

conservation. La consommation se fait sous forme de pâte ou de « couscous»

Les aptitudes des variétés à faire telle ou telle autre préparation alimentaire ont été évaluées

(annexe 6). Il ressort que très peu de variétés sont aptes à faire l'igname pilée. Presque

toutes les variétés tardives conviennent aux cossettes et à l'igname braisée. L'igname

bouillie est un plat qui se fait avec presque toutes les variétés.

4.2.2. Caractéristiques culturelles des variétés

Certaines variétés d'igname ont des fonctions culturelles et cultuelles qui les distinguent des

autres. Il y a des variétés utilisées dans les cérémonies (fête d'igname, mariage, baptême,

cérémonies funèbres chez les beaux parents,...). Dans le choix variétal, les producteurs

tiennent compte de cette dimension. Ainsi sur les champs de la caste des «Chefs de

Terre», chargés de faire les offrandes de la nouvelle igname aux ancêtres, on retrouve

68

Page 71: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BACOMohamed Nasser

toujours la variété Kpanhouri. C'est cette variété qui est exclusivement utilisée pour ces

cérémonies. Sur les 112 variétés, seules 8 ont des caractéristiques culturelles (annexe 6).

4.2.3. Caractéristiques commerciales des variétés

Toutes les variétés cultivées ne sont pas présentes dans le commerce. A l'état frais, ce sont

surtout les variétés à double récolte qui sont commercialisées. La commercialisation des

variétés tardives se fait surtout sous forme cossettes. Les mêmes constats ont été faits au

sud ouest du Cameroun (Acquah et Evange, 1994) et au Ghana (Ghartey, 1995). Les

variétés les plus rencontrées dans le commerce sont Hê-aballo, Kokoro, Kpouna, Moroko,

Dani et Kokouma, et Baniwouré.

Kpouna est la variété la plus recherchée, du fait de ses qualités organoleptiques et son

aptitude à la réalisation de tous les plats. Dans le même temps, Kpouna est une variété très

contraignante ce qui fait que les paysans n'arrivent pas à réussir sa production. Son offre est

faible et sa demande forte, il s'ensuit une hausse de son prix. Sur le marché, Kpouna est la

variété la plus appréciée et la plus chère, vendue à 400fcfa soit 0,6 centimes d'eurol Kg.

Moroko et kokouma, et Baniwouré wouloukaba donnent aussi de bons plats, dont l'igname

pilée. Elles ont l'avantage de se conserver sur une période plus longue.

Environ 25% des variétés recensées sont surtout concernées par les transactions

commerciales (annexe 6). La commercialisation ne concerne pas la majorité des variétés car

leur récolte se fait à une période où les exploitations ont d'autres sources de revenus dont

l'argent issu de la vente du coton.

4.3. Noms des variétés paysannes

La prise en compte des noms que les paysans donnent aux variétés est très importante, car

le nom est l'unité d'identification et de gestion de la variété à travers le temps et l'espace. En

fonction de plusieurs critères, les paysans donnent des noms aux variétés qu'ils cultivent. La

même variété peut aussi avoir plusieurs noms. Dans ce paragraphe, nous voulons expliquer

la logique qui sous-tend la systématique paysanne.

4.3.1. Signification des noms donnés aux variétés.

Les noms des variétés se donnent en se basant sur la source, les critères

morphobotaniques, les performances agronomiques, l'adaptation aux facteurs

environnementaux, les usages (tableau 15). Ainsi, les paramètres utilisés par les paysans

pour identifier et classer les variétés sont complexes et inter-reliés.

69

Page 72: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BAGO Mohamed Nasser

Suivant les caractéristiques agromorphologiques les paysans donnent le nom Kokorogbanon

(en Bariba et Nago) et Alsoro (en Lokpa) aux variétés ayant de très petits tubercules. Dans

le même registre, les variétés à gros tubercules sont désignées sous le nom de Hê-appala.

Dans la culture Bariba, les noms, Orou, Boni sont des noms donnés aux garçons. Dans la

dénomination de certaines variétés, on retrouve ces noms. Le même phénomène est

observé avec Gnon, Baké qui sont des noms donnés aux filles.

Lorsque, par exemple les noms Orou, Boni désignent des variétés, ils indiquent que ces

ignames donnent peu de tubercules par plante, mais que ces tubercules sont vigoureux de

grosse taille. Par contre les noms Yon et Baké indiquent que la variété concernée donne

plusieurs tubercules par plante. En fait une analogie est faite avec l'aptitude procréatrice des

femmes.

La majeure partie des variétés est nommée par référence à des objets naturels, plantes ou

animaux. Le même constat a été fait par Emperaire et al. (1998) sur le manioc en Amazonie.

On pourrait supposer que dans ce cas, qu'elles ont une origine ancienne.

Certaines variétés portent des noms de villes, de villages de leur origine. On peut supposer

que ces variétés ne sont pas endémiques et qu'elles sont d'introduction récente.

4.3.2. Synonymes des variétés

Les variétés cultivées par différents groupes socio-lingustiques portent un nom dans chacun

de ces groupes. Dans la conduite de ce travail, nous avons tenté de dégager ces

synonymies (tableau 18). L'intérêt est qu'il permet d'éviter de considérer la même variété

comme étant plusieurs variétés du fait de la diversité des noms. Les confrontations,

entretiens de groupe, et triangulation ont servi à faire cette analyse.

Au total, 154 noms ont été enregistrés pour les 112 variétés cultivées. Cette situation est

typique aux ignames puisqu'en Nouvelle-Calédonie, Bourret (1973) dénombre une centaine

de variétés connues sous près de 750 dénominations vernaculaires. Le nombre de 112

variétés que nous avons recensé n'est pas une valeur absolue. Pour réduire ces biais, une

bonne connaissance de la morphologie et de la génétique des ignames est nécessaire.

70

Page 73: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BACQ Mohamed Nasser

Tableau 18: Signification, synonyme et interprétation des noms de quelques variétés rencontrées.

Nom variété (B Synonymes Signification Interprétation

Ahimon Yorouba-hë (L) Hé= Igname, Yorouba= une ethnie du Nigeria Igname obtenue à partir des yorouba du NigeriaAkouyabougnin Akouvamon (B) Akou = si tu, Yabou = danse, gnin = savoir Cette igname ne se donne pas à celui Qui ne sait pas danser.Ayé - Ayé = Tu es mûr, adulte. Igname donnée aux enfants adultes qui doivent quitter

l'exploitation pour fonder la leur.Bagourou - Bagourou = arbuste des zones tropicales Igname dont les feuilles ressemblent à celles de Bagourou ou

Piliostigma thonningii. Pi/iostigma thonningii.Baké sorou - Baké = Nom de la troisième fille dans la famille Tubercule en forme de mortier. Donne plusieurs tubercules.

Bariba.Sorou = mortier.

Baniwouré Baniwouré bakarou (B) Boni=Bani= nom du quatrième garçon chez les Les tubercules de cette igname sont vigoureuxs et sont dewouloukaba Bariba grosse taille.

Wouré = qui s'adapte à toutbakarou

Baniwouré -Boniwouré Yadonou Boni = nom du quatrième garçons chez les Bariba Igname sans exigence particulière. Elle s'adapte à tous les sols:Yakoba -Boniwouré Kpassikoba Wouré = qui s'adapte à tout ses tubercules sont allongés comme les cornes de bœuf.

-Boniwouré Ketekoba (B) Yakoba = Cornes de boeuf.Bembèrekè - Bembèrèkè= une localité béninoise Variété venue de BembèrèkèBombe (L) - Bombe= mot emprunté du Français Igname qui du fait de la grosseur de ses tubercules, fait éclater

les buttes.Boni Yakpa - Assou Boni (B) Boni = nom du quatrième garçon chez les Bariba. Igname qui ne produit rien si elle est plantée tardivement.

- Aoo (G) Yakna = c'est fini !Coutonou - Cotonou= capitale du Bénin, situé au sud Variété venue du sud du pays.Dani - Engbawobé (B) Engba = Après récolte Il faut se laver après sa récolte, car le tubercule est gros et

• Witani (B) Wobé = laver difficile à creuser. Le moissonneur se salit.- Witanam (L)

Droubayessirou - Diessi (G) Drouba = planter- Gnon woko (N) Yessirou = préparation du sol pour la culture. -

Gammar Vinon - Gambari = Houssa, Vinon = qui refuse Igname abandonnée par un commerçant Haoussa du fait de sonétat de pourriture.

Gogo - Gogodjé (P) Allusion au bruit du tam-tam des Yoruba. Le tubercule résonne quand il est secoué.Gouroko Kourotoko Koura Kourotoko= femme âgée, koura= ne se, gouroko= Igname qui quelque soit son âge donne toujours de bons

uouroko (B) vieillie jamais tubercules.Kpakara - Pakaradlé (P) Sans grande importance Variété non soumise aux contraintes de culture.

71

Page 74: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BACO Mohamed Nasser

Nom variété (B Synonymes Signification interprétation

Kpouna - Daiboko (G)- Kpounadjé (G) - -

Morokorou Moroko (G) Samassi= Bariba en Lokpa, hê= igname Igname des BaribaSamassi-hê (L)Kokouma (N)

Soagona - Soagonadjé (P) Soa = oreille, gona = peau- Fagona (B) -

Sossou Soussounadjé (P) Igname guêpe Le tubercule non mature, irrite la peau au contact de celle-ci.Sika Assou sika (B)- Assou = Tardive Sika = jumelle Igname tardive produisant beaucoup de tubercules qui se

ressemblent.Singou - Singou = arbre des zones tropicales. Feuilles ressemblent à celle de l'arbre singou (Hymenocardia

acida).Orou Binssi - Orou = nom du premier garçon chez les Bariba. Variété faisant de gros tubercules qu'il faut nécessairement

Binssi = couper. couper avant plantationYakassougo - Yakassou = herbes, Ngo = tuer Variété à fort étalement végétatif qui couvre bien le sol et tue

les mauvaises herbesSobasson - Soba = étranger, Son = assis Igname Qu'on peut donner aux étrangers.

- Orou Kountou (N, B) Sounou = Eléphant- Orou Fougou (B) dourou = genoux Tubercule développé en forme de genoux d'éléphant ou de

Sounou dourou - Assou Kounkounou(B) Kpérou = Hippopotame patte d'hippopotame.- Kofaniwa (G) Nassou = patte- Kpérou Nassou (B)

Kouri-kouri - Kouri-Kouri = Cobaye Tubercule lisse comme la peau du cobaye.Sogoto Sokoto (N)- Sogoto = culotte Tubercule court comme une culotte.Sankounin - Sankounin = épine Igname dont le tubercule porte des épines.

Légende:

N= Nagot, B= Bariba L= Lokpa, G= Gando

72

Page 75: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003

Discussion

BACQ Mohamed Nasser

1. Analyse de la diversité des ignames cultivées

1.1. Une diversité variétale à relativiser entre les terroirs étudiés

Sur l'ensemble des quatre villages étudiés, Yébessi a le plus de variété. Ce village à l'instar

des autres est polyglotte, mais la différence avec les autres villages est que les groupes

sociolinguistiques (Lokpa, Bariba) qui y vivent ne cultivent presque pas les mêmes variétés.

Sur les 52 variétés recencées dans le village, seules les variétés Morokorou (ou Samassi­

hê) et Ahimon (ou Yorouba-hê) leur sont communes. Les autres variétés cultivées par un

groupe sociolinguistique, ne le sont pas par le second. Ces variétés sont assimilées à des

groupes sociaux bien précis. Dans ces conditions, le nombre de variétés recensées dans ce

village apparaît comme la somme des variétés cultivées par les deux communautés. En ce

qui concerne les autres villages, le phénomène n'est pas le même. Les variétés recensées

sont indifféremment cultivées par toutes les ethnies du village.

Les villages de Gorobani et de Wari ont respectivement les moyennes de variété par

exploitation les plus élevées. Bien qu'ayant la plus grande diversité variétale, Yébessi a la

moyenne la plus faible. Cette situation s'explique par les terminologies utilisées par les

producteurs pour désigner leurs variétés. En effet, on constate surtout dans les villages

Kinnoukpanou et de Yébessi que plusieurs variétés portent le même nom.

La désignation de différentes variétés sous le même nom est due à une érosion linguistique,

ce qui n'est pas sans corollaire sur la diversité des cultivars. Pour les producteurs, cette

perte linguistique s'explique par le fait que la jeune génération ne s'investit plus dans la

culture d'igname comme cela se faisait jadis. A analyser de près, les causes sont multiples

et sont une combinaison de facteurs catalyseurs. Autrefois, d'après certains paysans, ce

sont les variétés Boniwouré ou pour d'autres les variétés kagourou, Singoua, et Singorqu'on

appelait Kokoro gbana ou Kokoro ou Alsoro. Mais depuis une vingtaine d'années où les

cossettes d'igname ont commencé à percer le marché et avoir une importante valeur

marchande (Atègbo et al, 1999, Vernier et al, 2000), on a noté une diversification des

variétés utilisées pour faire ces cossettes. Ainsi, la production des cossettes ne concerne

plus quelques variétés tardives, mais presque toutes les variétés à une récolte. Désormais le

nom Kokoro gbana ou Alsoro utilisé pour les variétés destinées à faire les cossettes s'étend

aux autres. Ce nom ne désigne plus seulement des variétés mais aussi une fonction, une

aptitude culinaire. La conséquence sur la diversité des cultivars serait irrémédiable dans les

années à venir. Toutes les variétés tardives ne seront plus identifiées distinctement. Pour les

séparer, il faudra recourir aux méthodes de génétique moléculaire qui sont très onéreuses.

73

Page 76: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BACOMohamed Nasser

On doit pouvoir trouver des solutions simples et pratiques pour freiner cette perte de nom.

Ceci passe par une formation de la jeune génération de producteurs d'igname.

La situation qui vient d'être décrite sur les variétés tardives se pose aussi sur les variétés

précoces dans le village de Yébéssi. Le groupe des variétés précoces est désigné sous le

nom de Hê-aballo. Très souvent par méconnaissance du nom originel de chaque variété,

certains producteurs utilisent à la place le nom du groupe variétal auquel elle appartient.

Cette situation identique à la première est le résultat d'une érosion linguistique qui n'est pas

sans conséquence sur l'érosion variétale.

Dans les calculs qui ont été faits, seul le K (coefficient de similarité de Sorensen) calculé

entre Gorobani et Wari est supérieur à 50%. C'est donc pour ces deux communautés qui

produisent presque les mêmes variétés. Rappelons que les ethnies majoritaires de ces

communautés sont Bariba pour le village de wari et Gando pour le village de Gorobani. Ce

résultat pourrait se comprendre par l'histoire commune que ces deux ethnies ont partagé

depuis des siècles (Bio Bigou, 1994). En ce qui concerne les autres couples de

communautés, il n'y a pas de similitude. Cette absence de similarité est surtout prononcée

entre Kinnoukpanou et Yébéssi. Pourtant on s'attendait à un résultat contraire compte tenu

de la proximité géographique de ces 2 villages par rapport aux autres. Les ethnies

majoritaires de Kinnoukpanou et de Yébessi étant respectivement les Nagot et les Lokpa.

Ces deux groupes sociolinguistiques n'ont pas la même histoire et ont des origines

différentes. Les Lokpa seraient venus de l'Ouest du Golfe de Guinée, alors que les Nagot

seraient originaires tout comme les Bariba de l'Est, précisément du Nigéria. Il se dégage que

la proximité linguistique et historique entretient une ressemblance au niveau de la diversité

agricole plus que la proximité géographique.

1.2. Des échelles de production inégales entre les variétés

L'analyse sur le niveau de production de chacune des variétés, indique qu'il y a des variétés

produites à grande échelle et des variétés dont la production est marginale au point où les

producteurs constatent la disparition de certaines d'entre elles.

1.2.1. Les variétés les plus produites

Les 10 variétés les plus produites au niveau régional sont respectivement: Moroko,

Kokorogbana, Baniwouré wouloukaba, Kokouma, Dani, Ahimon, Gogo, Yakanougo, et

Singou. Ces variétés sont très appréciées sur le plan culinaire et se vendent bien dans le

commerce. Elles se conservent sur une période plus ou moins longue et ne sont soumises à

aucune barrière socio-culturelle. A elles seules, ces 9 variétés occupent plus de 50% des

74

Page 77: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BACOMohamed Nasser

superficies allouées aux 112 variétés d'igname. Les raisons commerciales ne dictent pas

toujours les variétés à cultiver. En effet, la variété Kpouna qui est la plus chèrement vendue

(3 à 4 fois le prix des autres variétés) dans le commerce, vient en 1r me position dans l'ordre

des variétés les plus produites. En plus de la raison commerciale, les producteurs semblent

tenir compte d'autres paramètres.

1.2.2. Les variétés les moins produites

Les variétés les moins produites sont les plus nombreuses. Environ 60% du total de variétés

recensées est produit sur 30% des superficies en igname. Parmi ces cultivars, on retrouve:

Noro moussou, Soagona, Orou Yinssingui, Tchakapim, Arro, Tambana, ...

La variétés à production marginale s'observent à deux niveaux:

• Au niveau villages: ce sont des variétés produites sur de petites superficies et par

quelques rares producteurs. Elles constituent environ 45% des variétés dans chaque

village.

• Au niveau régional: ce sont des variétés qu'on ne retrouve que dans un seul village.

Elles représentent 62% des variétés cultivées.

Ce constat amène à se poser une question fondamentale dans le cadre de la mise en

oeuvre d'un programme de conservation in situ. Entre les variétés de ces deux niveaux,

lesquelles doivent être prioritaires dans la stratégie de conservation? Autrement dit sur quel

niveau pèse t-il plus de menaces? Dans l'approche que je préconise, ces deux niveaux

doivent être considérés avec la même importance. Toutefois, je préconise qu'une analyse

plus approfondie soit faite sur la « carte d'identité» de chaque variété. En effet, parmi ces

variétés à faible production, il y a plusieurs groupes:

~ le groupe des variétés locales (donc anciennes et endémiques). Exemple: Soagona,

Orou Yinssingui, Tambana ...

~ le groupe des variétés récemment introduites d'une autre région: cas de Alakissa,

Aboudja, Ofégui...

~ le groupe des variétés récemment domestiquées. Exemples: Noro moussou,

Donkpirikou, Akpannou...

Le premier groupe semble celui sur lequel il faut mettre le plus d'attention car il regroupe les

variétés locales et anciennes. Dans la mesure où le programme de conservation que je

propose est une conservation basée sur le maintien des processus (et non sur le maintien du

matériel), il est important que ces processus puissent favoriser la création ou l'introduction

de variétés ayant les caractéristiques de ce groupe. C'est la condition pour que l'érosion des

variétés endémiques soit suivie de moindres conséquences.

75

Page 78: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BACO Mohamed Nasser

En ce qui concerne les 2 autres groupes, on peut espérer que les variétés se multiplient à

grande échelle avec le temps. La diffusion sera conditionnée par les fonctions alimentaires,

culturelles et commerciales qu'ils pourront jouer, mais aussi par leurs caractéristiques agro­

écologiques. Les variétés inaptes à assurer convenablement l'une ou l'autre de ces fonctions

disparaîtront à court ou à moyen terme.

1.2.3. Les variétés abandonnées

Au fil du temps, les variétés disparaissent des champs et à l'allure où les choses évoluent

d'autres variétés quitteront définitivement les champs. Les variétés ayant disparu sont:

Touko-nou-Woura, Soassé, Boubiri-boubiri, Bomatangui, Moussougou souan, Akpinnou, YÔ

soussou, Kpouna botorou. Ce sont les producteurs âgés qui reconnaissent les variétés ayant

disparu. En 20 ans une dizaine de variétés semblent avoir quitté les champs. Les raisons de

l'abandon de ces variétés se résument à leur faible productivité, la forte exigence en travail

et les changements climatiques (raccourcissement de la saison pluvieuse). L'abandon de

certains cultivars pourrait aussi se justifier par l'indifférence que manifeste la jeune

génération vis-à-vis du dispositif rituel et culturel lié à certaines variétés. Cette disparition

n'est pas sans conséquence sur l'agrobiodiversité qui s'amenuise avec le temps.

Un autre facteur signalé dans la littérature et qui explique la perte de diversité est

l'introduction de nouvelles technologies (amélioration des techniques culturales, adoption de

nouvelles variétés...). Selon Frankel (1970), l'introduction de nouvelles technologies y

compris les variétés modernes est un phénomène récent qui conduit à l'instabilité. En ce qui

concerne les techniques culturales, elles n'ont presque pas varié avec le temps (Vernier,

2002). On ne peut donc expliquer la perte de la diversité par l'introduction de nouvelles

techniques culturales.

En ce qui concerne l'introduction de variété, à l'exception de Florido (D. alata), aucune autre

variété n'a été vulgarisée par les structures d'encadrement (recherche agronomique,

vulgarisateurs et ONG) au Bénin. A ce jour, l'adoption de cette variété n'est pas encore

significative (Vernier et Dansi, 2000). En Côte d'Ivoire, Hamon et al., (1995) rapportent que

l'introduction de cette nouvelle variété a conduit dans de nombreux villages à l'abandon des

variétés traditionnelles. En s'intéressant aux années d'introduction, on constate que la

variété Florido a été introduite en Côte d'Ivoire depuis 1970 (Zoundjihèkpon et al. 1998),

alors que sa vulgarisation officielle n'a commencé au Bénin qu'en 1998 (Dossou,

communication personnelle). On peut penser qu'avec le temps, cette variété conduirait aussi

au Bénin si rien n'est fait à la perte des variétés traditionnelles.

76

Page 79: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn2003 BACO Mohamed Nasser

En dehors des variétés introduites par le système formel, il existe aussi des introductions

faites par les producteurs eux-mêmes. La compétition entre les variétés locales et les

variétés introduites, pourrait expliquer en partie la perte ou le remplacement des variétés

locales.

1.3. Motivations qui sous-tendent la diversité

Les producteurs d'igname optent pour une culture polyvariétale. Ils cultivent à la fois

plusieurs variétés ayant différentes caractéristiques agronomiques (précocité, rendement,

résistance aux maladies, parasites, sécheresse, etc.) et culinaires dans un même champ ou

dans différents champs. Cette pratique permet la conservation d'une grande diversité

variétale intra et inter-spécifique. Les variétés associées dépendent des préférences du

paysan. La moyenne des variétés cultivées dans la zone d'étude est de 9 cultivars par

exploitation. Cette moyenne cache certaines valeurs car il y a des producteurs qui ont une

vingtaine de variétés dans leurs champs.

Plusieurs raisons justifient pourquoi certains producteurs cultivent une grande diversité

d'igname. La pratique permet aux paysans de cultiver les variétés qui s'adaptent mieux aux

conditions pédologiques de leurs champs et qui répondent à la fois à leurs divers besoins.

Expliquant le fondement de cette pratique, le paysan Boure Moumouni du village de

Gorobani nous dit ceci: «...vous me dites que j'ai plusieurs variétés si j'en avais pas autant

je n'aurais pas pu cultiver de l'igname sur tout mon champ. Je plante les Baniwouré dans les

parties pauvres, Kpouna et Soagona dans les sols riches, Sounou dourou sur les sols

gravillonnaires, Yakassougo en proie à l'enherbement, Moroko, Droubayessirou Kpakara et

les autres ne sont pas très exigents ....». En somme la culture polyvariétale assure

l'utilisation de diverses niches écologiques dans le paysage agricole. Les multiples variétés

adaptées à différentes toposéquences et à différentes conditions biophysiques peuvent être

valorisées et exploitées.

Aussi, Dansi et al. (1997) ont-ils montré que l'association de variétés de précocités

différentes permet aux paysans un échelonnement de la récolte dans le temps et donc de

disposer d'igname jusqu'à la nouvelle récolte. La forte diversité s'observe aussi chez les

producteurs qui veulent:

• Faire de la sélection. Les paysans affirment: « on ne sait quelle variété marchera

avec soi ». Ils lient ainsi la réussite d'une variété aux chances de l'individu. Pour cela,

il faut débuter avec toutes les variétés afin d'éliminer progressivement celles qui ne

répondent pas.

77

Page 80: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BACQMohamed Nasser

• Gérer les risques: cette raison est liée à la précédente. Face aux perturbations

climatiques, aux parasites, Jes variétés résistent différemment. Il y en a qui sont

tolérantes, par contre certaines sont sensibles et meurent. La détention d'un grand

nombre de variétés pennet ainsi de dominer ces risques.

• Se distinguer sur le plan social : la détention de nombreuses variétés confère au

paysan un prestige dans le village; tout le monde en parie et vous reconnaît comme

tel. Cela pennet de faire des dons: chaque don est valorisé car le paysan receveur

pariera toujours de son donateur chaque fois que quelqu'un l'interrogera sur l'histoire

de ses variétés.

• Vendre les semences d'igname : posséder plusieurs variétés pennet de vendre des

semenceaux qui reconstituent ou enrichissent le stock semencier d'autres paysans.

On peut avoir un revenu transitoire en ayant plusieurs variétés.

La philosophie qui sous-tend la diversité des cultivars d'Igname est un atout qui peut être

exploité par la conservation in situ. Les paysans recensés pourraient être organisés pour

recevoir des fonnations leur pennettant de s'installer in situ comme producteurs de

semences par exemple.

L'étude a aussi permis de comprendre que tous les producteurs ne cultivent pas une grande

diversité. 43% des exploitations enquêtées ont entre 3 et 7 variétés. Comme pour le premier

groupe, les raisons de la faible diversité détenue sont multiples. Ce sont essentiellement:

• La satisfaction d'avoir fait la sélection des meilleures variétés;

• L'incapacité (physique et financière) d'obtenir de nouvelles variétés. Ces dernières

pouvant être acquises comme salaire en nature ou par achat auprès d'autres

paysans ou au marché;

• Les effets néfastes des facteurs biotiques (parasites) et abiotiques (inondation,

fertilité) sur de nombreuses variétés rares;

• Le groupe ethnique d'origine

La moyenne de variété gérée par les paysans (9 variétés) paraît élevée et amène à

s'interroger sur leur capacité à les conduire de façon fiable à la plantation et à la récolte.

Pour mieux gérer leurs variétés, ils font des semis en ligne. Cette pratique consiste à planter

séparément les variétés dans le champ sur des lignes distinctes de buttes. Dans le cas où

plusieurs variétés, doivent partager la même ligne de butte, un indicateur de limite (bois, pied

de maïs, de sorgho ou de D. alata) est prévu. L'affectation des variétés aux différentes

parties du champ ne se fait pas toujours au hasard. Le paysan tient parfois compte du

gradient de fertilité observée dans le champ ou des exigences culturelles. Ainsi, les variétés

78

Page 81: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BAGa Mohamed Nasser

non exigeantes en fertilité du sol sont plantées dans les parties les moins fertiles alors que

celles sensibles sont affectées aux parties les plus fertiles. Compte tenu de la rigueur que

requiert cette pratique, ce sont les chefs d'exploitation censés connaître la systématique des

ignames, qui veillent sur la bonne répartition des différentes variétés dans le champ (Photo

7).

La plantation en ligne par variété est une pratique de gestion qui vise à éviter les mélanges

de variétés pendant la récolte, à garantir à chaque variété une certaine homogénéité. Elle

présente des inconvénients majeurs :

• l'importante demande en main d'œuvre

• la gestion difficile qui en découle et qui peut conduire à des mélanges de tubercules,

ce qui arrive souvent ;

• la nécessité d'un suivi rigoureux du chef d'exploitation.

Photo 7 : Chef d'exploitation assurant la plantation en ligne de ces variétés.

2. Comment conserver durablement les pratiques et les variétés dans le

programme de conservation in situ?

L'observation de la production d'igname a permis de déceler des pratiques endogènes qui

permettent de gérer la diversité des ignames. Il existe des pratiques de maintien de la

diversité et des pratiques d'enrichissement ou de création. La combinaison de ces pratiques

fait qu'on peut parler d'une gestion dynamique de la diversité des ignames. Plusieurs

insuffisances sont à reprocher à ces pratiques. Dans la démarche de proposition d'un

programme de conservation in situ, deux scénarios peuvent être envisagés:

79

Page 82: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser

~ Le premier scénario: Zéro intervention. Dans ce scénario, on laisse les producteurs

faire.

~ Le deuxième scénario: Interventionniste. Dans ce scénario, il faut intervenir.

Plusieurs institutions et organisations doivent être impliquées dans la conservation in situ à

différents niveaux. Cette diversité institutionnelle est nécessaire dans la mesure où chaque

organisation a son expérience et c'est seulement à travers la combinaison de ces capacités

qu'il sera possible de cerner la complexité des attentes de la conservation in situ. J'opte

alors pour le deuxième scénario. Pour intervenir, il faut connaître ces faiblesses et pouvoir

les minimiser.

2.1. Les faiblesses liées aux pratiques de gestion de la diversité

Le stockage différentiel, la double récolte, l'association des variétés à des pratiques

culturelles permettent de maintenir la diversité des ignames.

Le stockage différentiel, ne garantit pas toujours des semences saines. Aussi les ignames

stockées ne sont-elles pas à l'abri des voleurs, des feux de brousse et des dégâts des

animaux transhumants. La double récolte est une opération délicate et exigeante. Le savoir

paysan ne donne pas la période optimale à laquelle il faut la faire. En ce qui concerne

l'association des variétés aux us et coutumes, on note une forte régression des traditions

surtout chez les jeunes et certaines ethnies (les Nagots).

En ce qui concerne les faiblesses liées aux pratiques d'enrichissement l'étude a permis de

comprendre que les savoirs liés à la domestication ne sont pas partagés entre les

producteurs.

Les introductions variétales constituent une véritable source de renforcement de la diversité

variétale. Il faut cependant que les conditions de l'introduction et le matériel à introduire,

soient clairement maîtrisés. Plusieurs faiblesses sont à signaler dans ces introductions de

variétés. Entre autres, on peut citer leur caractère individuel et isolé ce qui fait qu'elles

échappent aux contrôles sanitaires de la part des services compétents. Dans le système de

diffusion actuel, le temps de diffusion des variétés introduites est souvent trop long. Il faut en

général plusieurs années pour voir une variété qui a été introduite se répandre dans un

milieu.

2.2. Vers une intervention sur les pratiques de gestion de la diversité

Suite à cette analyse sur les faiblesses des pratiques paysannes de gestion de la diversité,

on pourrait se poser plusieurs questions. Comment rendre les pratiques plus efficaces?

80

Page 83: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BAca Mohamed Nasser

Comment se distribuent, s'échangent et s'apprennent les pratiques au sein des

communautés?

Dans l'approche interventionniste que je propose pour les programmes de conservation in

situ de l'agrobiodiversité, les insuffisances notées sur les savoirs locaux doivent être

minimisées à travers des actions complémentaires provenant du dehors de la communauté.

Dans le cas de l'igname, les interventions extérieures pourraient encourager la

domestication, former les producteurs sur des structures de conservation plus fiables, établir

pour les variétés très sensibles, les dates probables de la double récolte. Elles peuvent aussi

favoriser la circulation sans frontière d'âge, de terroir, de région et de sexe des savoirs

locaux relatifs à la gestion de la diversité. En effet dans le dispositif actuel, les savoirs liés au

maintien et à la création variétale (domestication par exemple) ne sont que l'apanage de

quelques-uns. Les échanges entre individus se limitent au matériel végétal. Les

connaissances sur les pratiques de gestion étant très peu échangées. En considérant le

résultat principal visé par la conservation in situ qui est la conservation des processus

dynamiques, l'intervention parait vitale et nécessaire.

En ce qui concerne la diffusion des variétés introduites, pour remédier à la lente propagation,

des producteurs multiplicateurs peuvent être choisis et formés dans chaque zone sur les

techniques de multiplication rapides.

Pour une réussite de l'intervention, le statut des intervenants extérieurs et le profil des

producteurs concernés (multiplicateur des ignames, semencier...) sont des déterminants

importants. Cette question est abordée dans les paragraphes suivants.

3. Des paramètres à considérer pour le choix des conservateurs

Une des conditions de la réussite des programmes de conservation in situ est le choix des

«paysans conservateurs». Tous les producteurs d'igname peuvent-ils être des

conservateurs de l'agrobiodiversité? L'étude des déterminants socio-économiques permet

de comprendre que pour être efficace, le choix des conservateurs doit être très sélectif. Ce

choix de conservateurs n'exclut pas l'implication des autres producteurs. Elle permet de

rendre plus efficace le système. Pour choisir ces conservateurs, il faut se baser sur le mode

d'accès à la terre, la superficie des champs cultivés, le nombre de champs, l'âge des

paysans, le genre, la structure de l'exploitation, l'appartenance linguistique,...

En ce qui concerne l'igname, tous ces critères ne sont pas pertinents. Le mode d'accès à la

terre par exemple n'est pas un facteur qui discrimine les producteurs. Les analyses

statistiques ont prouvé que les personnes âgées, les adultes et les jeunes cultivent le même

81

Page 84: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser

nombre de variétés. L'hypothèse selon laquelle les variétés s'accumulent avec l'âge a été

rejetée. Toutefois les observations sur le terrain font apparaître que l'âge est un facteur non

négligeable dans la gestion de la diversité. En effet, les personnes âgées détiennent des

variétés qu'on ne retrouve pas chez les jeunes et vice versa. Sur cette base, les

conservateurs doivent appartenir à toutes les tranches d'âge. Il faut veiller à avoir des

représentants de chaque classe d'âge dans les programmes de conservation in situ.

La culture d'igname n'est pas l'apanage des femmes. Pourtant elles interviennent de façon

indirecte dans la gestion des variétés. Les variétés que les femmes préfèrent ne sont pas

souvent celles voulues par le chef d'exploitation. En général, les hommes mettent l'accent

sur les critères de production alors que les femmes fondent leurs choix sur les critères post

récolte. Les conservateurs à choisir doivent favoriser et tenir compte de l'effet genre dans la

gestion de leurs variétés.

La structure des exploitations est aussi un facteur important sur lequel il faut s'appuyer dans

le choix des conservateurs. Les actifs agricoles participent à l'enrichissement de la diversité

à travers les introductions de variétés. Ils contribuent au renouvellement dynamique du pool

variétal.

Un autre paramètre très important à prendre en compte est l'appartenance linguistique des

producteurs. Malgré les conditions environnementales similaires, les ethnies étudiées

cultivent différentes variétés et utilisent des techniques culturales en rapport avec leur

tradition. Il y a des ethnies qui préfèrent les gros tubercules, certaines optent pour les

variétés de taille moyenne, d'autres par contre cultivent des variétés à petits tubercules.

Chaque groupe linguistique détient et perpétue des savoirs liés aux variétés qu'il cultive.

Pour conserver tous ces types d'igname, il faut veiller à avoir les représentants de chacun

des groupes linguistiques.

4. Qui impliquer dans la conservation in situ de l'igname?

Quels sont les partenaires (privés, publics) qui méritent d'être impliqués dans les

programmes nationaux de conservation in situ? Quels sont leurs rôles et leur importance ?

Quels sont les liens existants entre ces partenaires et comment renforcer la capacité de

chaque acteur?

Parmi les acteurs de la conservation de la biodiversité au Bénin, on retrouve:

Les paysans: Ils constituent l'élément central de la conservation. Leur participation renforce

la réussite des programmes nationaux de conservation. Comme nous l'avons montré dans

les précédents chapitres, ce sont les paysans qui détiennent les variétés à conserver. Ils

82

Page 85: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BACQ MohamedNasser

possèdent aussi une gamme de pratiques endogènes de gestion et de conservation de ces

variétés.

Les organisations paysannes: Au nord Bénin comme dans tout le reste du pays, il existe

des associations paysannes à différentes échelles qui représentent les intérêts des paysans.

Parmi ces associations, ont peut citer: les Groupements Villageois (G V), les Groupements

de Femmes (G F), les Unions Départementales des Producteurs (UDP),... Ces différentes

associations veillent à une bonne gestion de la production agricole dans leur zone de

compétence. Au sein de chaque Groupement villageois se trouvent des secrétaires qui

détiennent une bonne base de données (liste des membres, âge, structure du ménage,

cultures pratiquées, superficies allouées à chaque culture, moyens disponibles, ... ) sur tous

les paysans du village. Du fait de cette position, ils sont pris comme des informateurs clés

pour plusieurs actions dans les villages. Dans le cadre de la mise en œuvre de la

conservation in situ, ces « paysans particuliers» peuvent jouer un rôle fondamental dans le

choix des « paysans-conservateurs ».

Les organisations communautaires de base: Dans ce groupe, on retrouve les autorités

locales, les groupes socio-lingustiques, et les associations de développement de chaque

village. Ces associations peuvent contribuer à la conservation in situ à travers la mobilisation

des personnes autres que les paysans. Les actions peuvent se trouver au niveau de la

sensibilisation du public, des réseaux commerciaux, ...

Les organisations non gouvernementales (ONG) : Il existe plusieurs ONG au nord Bénin

intervenant dans l'agriculture. Depuis les quatre dernières années, on note un regain

d'intérêt de certaines d'entre elles sur les ressources phytogénétiques. Il s'agit de Nature

Tropicale, de Institut de Recherche pour le Développement des plantes Cultivées,

Aromatiques et Médicinales (IRDCAM-ONG), l'Organisation des femmes pour la Protection

de l'Environnement et le Développement Intégré (OFEDI), et de l'Action Internationale pour

les Ressources Génétiques (GRAIN). Le rôle des ONG se note surtout dans l'encadrement

et les formations qu'elles peuvent donner aux paysans dans la conservation de

l'agrobiodiversité. Dans un entretien que nous avons eu avec Alexandre Dansi, Directeur de

IRDCAM-ONG, il déclara: « notre ONG assiste actuellement les communautés locales à

créer des comités villageois de conserveiion de la biodiversité et à réfléchir sur le

développement des banques villageoises de gènes». Ces déclarations confirment le rôle

que certaines ONG commencent à jouer pour le renforcement de la conservation de la

biodiversité. OFEDI- ONG aide les femmes à mieux structurer leurs actions économiques

basées sur une meilleure utilisation des ressources biologiques dans le respect de la nature

et surtout des connaissances traditionnelles (Grain, 2003, b).

83

Page 86: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BACQ Mohamed Nasser

Les institutions nationales de recherches: Au Bénin, plusieurs institutions de recherches

sont impliquées dans la conservation et l'utilisation durable des ressources phytogénétiques.

Il s'agit entre autres de l'Institut National des Recherches Agricoles du Bénin (INRAB), de la

Faculté des Sciences Agronomiques de l'Université d'Abomey Calavi (UAC), du Laboratoire

de Génétique de l'UAC, du Centre Béninois pour la Recherche Scientifique et Technique

(CBRST). Chacune de ces structures intervient de façon active à travers les multiples

recherches qu'elles mènent à la conservation des cultivars d'igname.

Les projets de développement: Il existe aujourd'hui au Bénin des projets de

Développement chargés de faire la promotion des tubercules et racines. Le programme de

développement des Racines et Tubercules (PDRT) en est une parfaite illustration. Il appui

techniquement et financièrement les producteurs d'ignames et d'autres cultures à

l'approvisionnement en semences, à l'amélioration de leur production, de la transformation,

de la commercialisation et à la bonne conservation.

On note aussi la présence de projets spécifiques comme le Projet de Communication

Nationale sur les Changements Climatiques (PCNCC), le Projet de Lutte contre la

Désertification, le projet Growing Diversity qui a permis de révéler l'extraordinaire variété et

la richesse incomparable des ressources génétiques disponibles en Afrique de l'Ouest et

particulièrement au Bénin (Grain 2003), ...

Les ministères du gouvernement: Au Bénin c'est le Ministère de l'Agriculture de l'Elevage

et de la Pêche (MAEP) et le Ministère de l'Environnement de l'Habitat et de l'Urbanisme

(MEHU) qui sont les plus impliqués dans la conservation de la Biodiversité. Pour aider ces

ministères dans leurs rôles, des services spécialisés ont été créés. Il s'agit: de l'Agence

Béninoise pour l'Environnement (ABE), le Centre Béninois du Développement Durable

(CBDD), ...

Les institutions Internationales: Le Bénin domicilie l'Institut International d'Agriculture

Tropicale (liTA) et l'Institut International des Ressources Phytogénétiques. A travers ses

chercheurs, le Bénin entretient aussi des relations avec d'autres structures des Centres

Internationaux de Recherches Agronomiques (CGIAR). Ces partenariats lui confèrent une

assistance technique pour le développement et la mise en œuvre de son programme de

politique nationale sur les ressources phytogénétiques.

5. Organiser les liens entre les acteurs

Les multiples acteurs de la conservation de la biodiversité ne peuvent jouer efficacement

leurs rôles que s'ils travaillent et collaborent ensemble (Starkey, 1997). Convaincu de cette

84

Page 87: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BAca Mohamed Nasser

collaboration, le Bénin s'est doté en 1995 d'un Comité National des Ressources

Phytogénétiques (CNRPG-BN). C'est une structure multi-institutionnelle, et pluridisciplinaire

ce qui peut lui permettre d'analyser les problèmes sous différents angles. On reproche

toutefois à ce réseau, la faible représentation des paysans qui sont les principaux acteurs de

la conservation in situ des ressources.

Selon Lucien Owolabi coordonnateur principal de la Stratégie Nationale sur la Diversité

Biologique, (site internet), l'action conjuguée de tous les acteurs a conduit à la création d'un

ministère en charge de l'environnement, à la rédaction du Plan d'Action Environnemental

(PAE), à la rédaction de l'Agenda 21 national, l'adoption de loi cadre sur l'environnement qui

exige la réalisation des études d'impact environnemental pour les projets de grande

envergure, à l'élaboration de stratégies sectorielles pour la gestion durable des ressources

biologiques,...

6. Des efforts favorables à la conservation in situ

En dehors de l'identification et de la collaboration entre les différents acteurs, un autre

élément de la conservation in situ est la formation et la sensibilisation.

La sensibilisation des communautés locales sur l'utilité de la conservation des RPG est une

priorité absolue pour certains acteurs dont les ONG. Pour ce faire, plusieurs actions ont

commencé à être menées dans certains villages. Par exemple, l'ONG IRDCAM organise et

intensifie des séances de discussions et d'échanges avec les communautés rurales sur

l'importance de la conservation des ressources phytogénétiques pour les générations

présentes et futures. Pour l'ONG, l'existence des radios rurales et des journaux paraissant

dans les langues locales constitue un atout important pour atteindre les communautés

villageoises. La formation et la sensibilisation des animateurs des radios rurales sur

l'importance de la conservation des RPG, l'organisation d'émissions (par les chercheurs)

portant sur la biodiversité et sa conservation sur les antennes des radios rurales, la

publication d'articles dans les journaux paraissant dans les langues nationales des zones

sélectionnées sont autant d'actions prévues par l'Institut pour une sensibilisation effective

des communautés locales. Plusieurs autres activités comme la réalisation de films

documentaires et de diapositives avec les communautés villageoises sur la biodiversité et sa

conservation in situ, l'organisation de foires de diversité avec attribution de prix aux meilleurs

conservateurs est programmée par l'IPGRI et l'INRAB.

Les différents acteurs peuvent assister les communautés locales à créer des comités

villageois de conservation de la biodiversité et à réfléchir sur le développement des banques

villageoises de gènes.

85

Page 88: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BAca Mohamed Nasser

7. La variété: un concept à te opérationnaliser » pour faciliter la conservation

Dans la description qui a été faite jusqu'ici, j'ai considéré la variété telle qu'elle est perçue

par les paysans. Les remarques sur le mode de gestion de ces variétés obligent à relativiser

le concept selon le groupe qui l'utilise. Ce cadrage est surtout nécessaire dans la mise en

œuvre de la conservation in situ .

Du point de vue des paysans, la variété est le matériel végétal qu'ils cultivent et qui se

distingue par des critères morpho-botaniques : la couleur et la grosseur de la tige, l'absence

ou la présence d'épines sur la tige eU ou le tubercule, la taille de la plante, la phyllotaxie, le

nombre et la grosseur des tubercules, la couleur de la chair,... Selon Smale et Bellon (1999),

les variétés des paysans sont des groupes qui combinent un ensemble particulier de

caractéristiques que les paysans reconnaissent comme le rendement potentiel, le cycle

cultural, une réponse au système de gestion, aux propriétés culinaires et de stockage. Des

entités de diversités issues de plusieurs sources (domestication, don, achat, héritage,

échange, introduction d'une autre région,... ) peuvent se retrouver sous le même nom et

correspondre ainsi à une variété. Parfois les erreurs de manipulation (au moment de la

plantation, de la récolte, du stockage) favorisent le mélange des variétés. Malgré l'extraction

de certains hors types, l'erreur persiste et le groupe portera le nom de la «variété»

dominante.

Cette conception de la variété contraste avec la vision du généticien et du sélectionneur. Ici,

la variété est un matériel végétal homogène. Elle se définit par sa pureté liée au même

génotype que partage les individus. Pour éviter les erreurs probables liées à la

reconnaissance morphologique, Hamon et Lebot (1998), en vue de la caractérisation et de la

classification des variétés d'igname, préconisent l'utilisation de marqueurs génotypiques

stables, indépendants du milieu. Par exemple la technique d'électrophorèse d'enzyme fournit

un outil performant pour l'identification clonale et la classification des ignames (Hamon 1997

et Dansi, 2000). Les marqueurs RAPD (Ramser et al. 1996) , microsatellites (Terauchi,

1993) ou AFLP (Mignouna et al. 1998) sont aussi possibles. La variété au sens du généticien

est donc un matériel uniforme.

En s'intéressant à la vision des conservateurs telle que mentionnée dans la Convention sur

Diversité Biologique, le concept de variété est perçu à trois niveaux: le niveau espèce, le

niveau génétique et le niveau écosystème (espace géographique). Cette vision multiscalaire

de la diversité peut poser des problèmes lorsqu'elle est confrontée à l'approche paysanne.

Ces problèmes s'accentuent avec la prise en compte de la vision du législateur. Les textes

de l'UPOV de l'OMPI, et de l'OAPI, considèrent la variété comme une entité distincte, stable,

86

Page 89: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BACQMohamed Nasser

et uniforme. Cette définition presque contradictoire de la définition que les paysans donnent

de leurs variétés est le début des multiples controverses liées à l'application du cadre

politique et législatif.

8. Comment les cadres juridiques national, régional et international se

positionnent face à la question de la conservation in situ des ignames

Les multiples textes de loi régissant la conservation des RPG et les droits de propriété

ramènent tous à des questions et à des controverses qui demeurent à ce jour sans solutions

définitives.

• A qui appartient les ressources biologiques et qui contrôle leur disponibilité?

• Comment réglementer leur exploitation et distribuer équitablement les avantages qui

en résultent?

• Comment dédommager les communautés locales pour leur travail de sélection

préalable sur plusieurs générations?

• Enfin comment mettre en œuvre des mesures efficaces pour la conservation des

ressources génétiques pour l'alimentation et l'agriculture?

Dans ce travail, j'ai surtout tenté d'apporter une réponse à la dernière problématique. Au

cours de cet exercice, la problématique sur la propriété des variétés d'igname est apparue et

pose la récurrente question: «à qui appartiennent les ressources biologiques et comment

dédommager les communautés détentrices pour leur travail de sélection

transgénérationnelle ?» Les variétés d'igname circule d'un paysan à un autre, d'un village à

un autre, d'une région à une autre, parfois d'un pays (Nigeria) à l'autre (Bénin). La littérature

signale aussi qu'on retrouve en Côte d'Ivoire, au Ghana, et au Togo certaines des variétés

que j'ai recensé au nord Bénin. Il est probable que les communautés de ces pays aient

domestiqués l'une ou l'autre des variétés. Dans ces conditions, comment établir la paternité

de chaque domestication? Sur quelle base dédommager telle ou telle communauté? Si au

niveau international, on peut s'accorder sur la définition de ces communautés en les

considérant simplement comme la population de ce pays, au sein des pays, cette étude de

cas sur l'igname a révélé que ce concept n'est pas facilement maîtrisable. La communauté à

dédommager reste encore à élucider. Identifier dans le contexte actuel la communauté qui

percevra les dividendes de la conservation des cultivars d'igname paraît difficile. Que faire?

La principale question à mon avis se trouve dans le positionnement de l'agriculture africaine

en général face à l'économie contemporaine avec le concept de biens marchands. Quel est

l'intérêt et la portée des connaissances endogènes entretenues telles quelles depuis des

millénaires, face à l'économie du marché international?

87

Page 90: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BACQ MohamedNasser

L'accord de Bangui révisé (qui instaure un droit de propriété intellectuelle sur les semences

ou obtentions végétales) donne des droits commerciaux exclusifs à ceux qui produisent des

variétés végétales qui sont nouvelles, distinctes, uniformes et stables. Or les variétés des

paysans ne remplissent pas ces conditions, ce sont des groupes hétérogènes. Ils ne

pourront alors être dédommagés. Aussi suivant cet accord, des redevances devront-elles

être payés par les paysans sur les nouvelles semences. Ils n'auront le droit de destiner une

partie de leur récolte pour les plantations futures, que sous certaines conditions. Ainsi, cet

accord restreint le droit des paysans à conserver des semences.

La situation sur les ignames cultivées (0. cayenensis- D. rotundata) n'est peut être pas

assez alarmante car il n'existe pas encore de brevet sur les cultivars. Mais vu la rapide

avancée des biotechnologies et considérant que les bases des variétés améliorées sont les

variétés traditionnelles et les savoirs qui y sont rattachés, la question ne peut être occultée.

Que faire pour valoriser sous forme marchande les ressources biologiques des paysans. Il

faut certainement rechercher des solutions socio-économiques appropriées pour la

valorisation des ressources biologiques au niveau local tout en mettant en place des

mécanismes juridico-politiques et diplomatiques de négociation. C'est en cela que la loi

cadre de l'OUA peut être salutaire.

88

Page 91: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003

Conclusion et recommandations

BACQMohamed Nasser

Tout au long de ce travail, j'ai tenté de comprendre si au vu de l'environnement

(agroécologique, social, et politico-législatif) de production de l'igname, s'il était possible de

proposer la conservation in situ.

Il ressort que le nord Bénin est une grande zone de production d'igname. Il jouit de

conditions agroécologiques favorables à la culture de l'igname. On y retrouve dans les

formations végétales des ignames sauvages surtout Dioscorea abyssinica que certains

paysans continuent à « domestiquer ». Quatre espèces d'igname sont cultivées. Il s'agit de

D. cayenensis- D. rotundata, D. a/ata, D. durnetorum, D. bu/bitera. Parmi celles-ci l'espèce

D. cayenensis- D. rotundata est la plus cultivée, elle occupe environ 96% des superficies

cultivées en igname.

Pour l'ensemble de la zone étudiée, on dénombre environ 112 variétés. Parmi elles on

compte 32 variétés précoces, 70 variétés tardives et 10 variétés à cycle intermédiaire. Les

ignames tardives sont les plus produites car elles se conservent bien, donnent beaucoup de

semenceaux. Dans la grande diversité signalée, toutes les variétés ne sont pas produites à

la même échelle. Il existe des variétés produites à grande échelle et des variétés dont la

production est marginale. 9% des variétés sont communes aux quatre villages étudiés et

62% des variétés ne se retrouvent que dans un seul village. Dans chacun des vill~ges les

tendances de production des variétés sont les mêmes. Plusieurs variétés sont produites sur

de petites superficies par quelques rares personnes. Les variétés les plus produites sont

celles qui sont aptes à l'igname pilée, qui se conservent bien, qui donnent beaucoup de

semenceaux et qui se vendent à des prix compétitifs.

Près d'une dizaine de variétés semble avoir disparu. Les raisons de leur disparition sont

imputables à leur faible rendement, à la sensibilité aux parasites et à l'inaptitude à faire une

bonne igname pilée.

Le nombre moyen de variétés varie en fonction du village. Le terroir de Yébessi a la plus

grande diversité avec 52 variétés ce qui est dû à la spécificité de cohabitation entre les

groupes ethniques qui y vivent. Il est suivi respectivement par Gorobani, Wari et

Kinnoukpanou. Les terroirs étudiés se singularisent aussi à travers leur composition

linguistique. Les 4 principales ethnies ne gèrent pas la diversité des ignames de la même

façon:

89

Page 92: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BAca MohamecJ Nasser

• Les Bariba et les Gando préfèrent des ignames de taille moyenne. Ce sont ces

ethnies qui détiennent le plus de variétés dans leurs champs (11 à 14). Elles cultivent

l'igname surtout pour des raisons alimentaires.

• Les Nagot préfèrent des ignames à petits tubercules. L'objectif principal de la

production d'igname de ce groupe ethnique est la vente. Cette raison pourrait

expliquer pourquoi les paysans de ce groupe ethnique cultivent en moyenne moins

de variétés (6 variétés) par rapport aux autres ethnies.

• Les Lokpa : dans ce groupe, ce sont surtout les variétés à gros tubercules que les

producteurs cultivent. Ils ont une moyenne de 9 variétés.

D'autres paramètres socio-économiques ont été identifiés comme facteurs importants dans

la gestion de l'agrobiodiversité. Il s'agit de l'âge, du genre, du nombre d'actifs, de la

superficie et du nombre de champs. L'hypothèse selon laquelle les variétés s'accumulent

avec le temps c'est à dire que les personnes les plus âgées ont plus de variétés que les plus

jeunes, n'est pas vérifiée. Il n'y a pas de différence significative entre le nombre moyen de

variétés détenu par les différentes tranches d'âges.

L'implication des femmes dans la gestion des variétés est indirecte. Elle contribue parfois à

augmenter le nombre de cultivars de l'exploitation à partir des introductions de leur famille

d'origine. La différence de nombre de variétés entre les exploitations polygames et les

monogames n'est pas évidente. Les critères de choix des variétés sont influencés par le

genre. Les femmes choisissent sur la base de critère post récoltes (aptitude culinaire, prix

sur le marché,...) alors que les hommes mettent l'accent sur les critères de production

(rendement, production de semence, adaptabilité aux conditions agro-écologiques, ...).

Il existe un lien entre le nombre de variétés et la superficie du champ d'igname. Ce lien est

surtout remarqué à Wari et à Gorobani. Les exploitations qui ont plusieurs variétés cultivent

des superficies importantes. Parfois, elles préfèrent avoir 2 à 3 champs.

Les actifs agricoles au niveau de l'exploitation semblent aussi influencer le nombre de

variétés cultivées. Ils participent à enrichir la diversité variétale en procédant à des

introductions à partir des exploitations où ils vont servir de main d'œuvre.

Pour gérer la diversité, plusieurs pratiques endogènes de gestion et de conservation des

ignames existent au niveau paysan dans toutes les zones de production au Bénin. Les

pratiques peuvent être rangées en deux groupes:

~ Celles qui permettent de maintenir la diversité: stockage différentiel, double récolte,

association des variétés à des rites cultuelles.

90

Page 93: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BACQ Mohamed Nasser

~ Les pratiques qui permettent de créer et d'enrichir la diversité: domestication

introduction de variétés, circulation des variétés (don, achat, héritage, échange).

Dans l'ensemble, ces pratiques varient très peu selon la zone, l'ethnie et le rang social. Les

hommes sont les acteurs les plus impliqués parce que l'igname est beaucoup plus une

culture d'homme. Ces pratiques ont joué un grand rôle dans le maintien de cette importante

plante à tubercule alimentaire. Elles sont donc utiles pour la mise en œuvre d'une stratégie

adéquate de conservation in situ des ignames au Bénin.

Sur l'aspect organisationnel, politique et législatif l'igname à l'instar d'autres cultures se

cultive dans un milieu où existent déjà des organisations paysannes, des institutions dont les

activités peuvent s'inscrire dans la conservation de l'agrobiodiversité. Mais le cadre politique

qui doit servir de levier pour toutes les actions demeure encore ambigu. Dans ce jeu, les

communautés locales qui sont les meilleures gestionnaires de la diversité biologique agricole

sont écartées des grands débats ce qui aboutit à la signature de traités difficiles à appliquer.

La loi modèle de l'OUA annonce quelques lueurs d'espoirs. Il faudra pour concrétiser cela

que chaque pays élabore sa législation, organise des campagnes d'information, de

formation, et de sensibilisation des paysans, des ONG, et de la société civile en général

autour des traités internationaux. La bataille contribuera à garantir les conditions de réussite

des programmes de conservation in situ.

En somme, l'exemple de l'igname étudiée dans le nord Bénin prouve que la conservation in

situ est possible. Les producteurs gèrent une grande diversité et détiennent des savoirs

locaux qui ont permis de la perpétuer. Toutefois les nouvelles contraintes de l'agriculture

contemporaine (aléas agro- climatiques, poussée démographique, intégration du commerce

à tous les niveaux, nouvelles politiques commerciales et agricoles,... ) montrent que ces

savoirs à eux seuls ne suffisent plus pour conduire un programme durable de conservation in

situ. C'est pour cela que ce travail débouche sur la proposition d'une approche

interventionniste qui vise à associer plusieurs acteurs.

Cette étude a permis de déceler plusieurs axes de recherche dont les résultats peuvent

contribuer à mieux comprendre les préalables à la conservation in situ de l'agrobiodiversité.

En se basant sur l'exemple de l'igname comment peut-on envisager la conservation durable

de la diversité des autres cultures vivrières? Quelles sont les pratiques liées à la gestion de

la diversité de ces plantes vivrières? Peut-on envisager à l'instar de l'igname leur

conservation in situ?

91

Page 94: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn2003 BACQMohamed Nasser

Dans le travail, la nécessité d'associer différents acteurs pour la réussite de la conservation

in situ de l'agrobiodiversité est apparue. Toutefois le mode de fonctionnement de cette

association reste à définir? Quelle doit être la configuration de la structure ad'hoc à mettre

en place pour coordonner les actions? Entre la forme privée (ONG, société civile... ) et les

structure publiques ou parapubliques, quelle est l'entité qui pourra jouer un rôle efficace et

dynamique de premier plan?

Le projet loi cadre de l'OUA sur les droits de propriété se veut être une loi modèle pour la

protection des droits des communautés, des agriculteurs et des obtenteurs ? Quelles sont

les avantages comparatifs de cette loi par rapport aux autres déjà en vigueur? Comment se

positionne t-elle par rapport à l'arsenal juridique qui régit les droits de propriété au niveau

international?

Avec le développement des circuits commerciaux et l'adoption de nouvelles innovations

techniques, on se demande quelles sont les variables économiques et technologiques qui

influencent la diversité? Quelles sont les conséquences et impacts de la perte de diversité

génétique sur le système de production? Quels sont les facteurs de politiques agricoles qui

ont un impact sur l'agrobiodiversité ?

Plus globalement, il serait nécessaire d'approfondir les recherches sur les facteurs

techniques, culturels, socio-économiques ou politiques qui influencent l'agrobiodiversité au

Bénin.

Ces différentes pistes de recherche pourraient faire objet d'étude dans le cadre d'une thèse.

92

Page 95: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003

Références bibliographiques

BAca Mohamed Nasser

Adoukonou-Sagbadja, A. H. 2001. Gestion paysanne de la diversité génétique des

ignames du complexe Dioscorea / Dioscorea rotundata au Centre du Bénin. Mémoire de

DEA, Option Biologie Végétale Appliquée. Université de Lomé, Togo. 56p.

Agbo, V. A., 1991. Civilisation et agriculture paysannes en pays Adja-Mono (Bénin) : rites­

production - réduction des risques et gestion de l'incertitude. Thèse de Doctorat d'Etat,

Université de Paris V, Paris.

Allomasso, T. 2001. Conservation des ressources génétiques forestières du Département

de l'Atlantique: stratégies de conservation de l'igname sauvage Dioscorea praehensilis dans

les forêts sacrées et étude de sa domestication. Mémoire DESS, FSA 1UAC. 88 p.

Almekinders, C. J.M., L. O. Fresco & P. C. Struik. 1995. The need to study and manage

variation in agro-ecosystèms. Netherlands Journal Agricultural Science 43 (1995) 127-142;

Aubertin, C., V. Boisvert. 1998. Les droits de propriété intellectuelle au service de la

biodiversité. Une mise en œuvre bien de conflictuelle. In Nature Science et Société, vol. 6,

n02, : 7-16.

Baco, M. N. 2000. La domestication des ignames sauvages dans la sous-préfecture de

Sinendé : savoirs locaux et pratiques endogènes d'amélioration génétique des Dioscorea

abyssinica Hochst. Thèse d'ingénieur agronome. FSA, UNB. 172 p.

Baco, M. N., A. J. Djènontin. 2003. Typologie des exploitations agricoles: vers un ciblage

des actions de recherché- développement. 2003. In Acte Atelier Scientifique Nord. Parakou

25-26 février 2003. Sous presse.

Belem, M. O. 2000. Socioeconomic data collection and analysis. Burkina Faso. In

Conserving agricultural biodiversity in situ: a scientific basis for sustainable agriculture. D.

Jarvis, B. Sthapit and L. Sears, eds. Pp 46-48. IPGRI, Rome, ltaly.

Bellon, M. R 2001. Demand and supply of crop intraspecific diversity on farms: towards a

policy framework for on -farm conservation. CIMMYT Economies working paper.

Bellon, M. R, D. S. Brar, et J. L. Pham. 1998 a. Rice genetic resources. In Sustainability of

Rice in the Global Development and Cultural Change. N. G. Dowling, S. M. Greenfield, et K.

S. Fischer, eds. Davis, CA: Pacifie Basin Study Center and Manila: IPGRI. Pp. 251-283.

Bellon, M.R, J.L Pham, L.S. Sébastian, S.R. Francisco, G.C. Loresto, D. Erasga, P.

Sanchez, M. CaUbo, G. Abrigo et S. Quilloy. 1998 b. Farmers' perceptions of varietal

diversity: implications for on-farm conservation of rice. In Farmers, Gene Banks, and Crop

breeding: Economie Analyses of Diversity in Wheat, Maize, and Rice (M. smale, ed.) Kluwer

Academie Publishers, The Nethertandsl CIMMYT, Mexico.

93

Page 96: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BACQ Mohamed Nasser

Berthaud, J. 1997. Stratégies for conservation of genetic ressources in relation with their

utilization. Euphytica 96: 1-12.

Bio Bigou, L. B. 1994. Bref aperçu sur les valeurs socio-culturelles du peuple Baatonu

" Bariba ": musique et religion traditionnelles, artisanat. Elément de civilisation du peuple

Baatonu (Bariba). Cotonou, 55 p.

Boisvert, V., Vivien, F.-D., 1998. Un prix pour la biodiversité. L'évaluation économique entre

différentes légitimités, Natures Sciences, Société 6,2,7- 16.

Bourret, D., 1973. Etude ethnobotanique des Dioscoreacées alimentaires. Igname de

Nouvelle-Calédonie. Thèse de doctorat 3ème cycle, spécialité biologie végétale, Paris,

France.

Brown, H. D. 2000. The genetic structure of crop landraces and the challenge to conserve

them in situ on farms. Pp. 29-48 in Genes in the field: On Fann Conservation of Crop

Diversity. Ed Brush S. B. Boca Raton, FL, USA.

Brush, S. 1995. In situ conservation of landraces in centres of crop diversity. Crop Science

35: 346-354.

Brush, S. B., 1992. Ethnoécology, biodiversity and modemization. In Andean potato

agriculture, J. Ethnobiol. N° 12. pp. 161-185.

Brush, S. B., 1995. In situ conservation of landraces in centers of crop diversity. In crop

science. N°35. pp. 346-354.

Dansi A., J. Zoundjihékpon, H. D. Mignouna & M. Quin, 1997. Collecte d'ignames

cultivées du complexe Dioscorea cayenensis-rotundata au Bénin. Plant Genetic Resources

Newsletter, 112 : 81- 85

Dansi, A., 2003. Connaissances endogènes et savoir-faire paysans relatifs aux ignames du

complexe Dioscorea cayenensis-rotundata au Bénin. Rapport FAo-CIRAD, 35 p.

Doukouré, S., 2000. Amélioration de la production de l'igname par bouturage in vitro. chez

les cultivars f1orido et brazo fuente. Thèse Doctorat Ingénieur, UFR Biosciences, Université

de Cocody, Côte d'Ivoire, 143 p.

Dounias, E. 1995. Comment les pygmées du sud-Cameroun forestier modèlent la forêt à

l'usage de leur vie nomade? Le Flamboyant 36 : 28-30.

DRA,. 1993. Rapport de zonage et sondage diagnostic du département du Borgou. Projet

Borgou /1 Ina, 123 pages.

Dumont, R. & P. Vernier. 1997. La domestication des ignames (D. cayenensis-rotundata)

chez la population Bariba du Bénin. In Colloque Gestion des ressources génétiques des

plantes en Afrique de l'Ouest. Bamako, Mali, 24-28 février 1997, 13p.

Dumont, R. & P. Vernier. 2000. Domestication of yams (Dioscorea cayenensis-rotundata)

within the Bariba ethnie group in Benin. Outlook on Agriculture, 29 : 137-142

94

Page 97: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BACQMohamed Nasser

Dumont, R. 1998. Domestication des ignames en Afrique. In ..1. Berthaud, N. Bricas...I-L.

Marchand (Eds), 1998: L'igname, plante séculaire et culture d'avenir, pp: 119-123

Dumont, R., Hamon, P., Seignobos, C. 1994. Les ignames du Cameroon. Montpellier,

France, CIRAD, collection Repères, 80 p.

Emperaire, L. Pinton, F., Second, G., 1998. Gestion dynamique de la diversité variétale du

manioc en Amazonie du nord-ouest. Nature, Sciences et Sociétés 6(2) : 27-42.

Engelmann, F. 1992. Les nouvelles méthodes de conservation ex situ. In: Actes du colloque

en hommage à Jean Pemès. Pp. 435-445.

FAO. 1995. , Annuaire de production, 1983 à 1995.

FAO. 1996. Rapport sur l'état des ressources phytogénétiques dans le monde. Oganisation

des Nation Unie pour l'Alimentation et l'Agriculture, Rome, Italie.

FAO. 2001. Annuaire de production.

Frankel, O. H. 1970. Genetic conservation in perspective. In Genetic resources in plants­

Theirexploration and conservation. O. H. Frackel, and E. Bennett, eds. Oxford: International

Biological Programme Handbook ND 11. Blackwell Scientific Publications. Pp. 469- 489.

Friis-Hansen, E. & B. Sthapit. 2000. Participatory approaches to the conservation and use

of plant genetic resources. International plant Genetic Resources 1nstitute, Rome, Italy.

Gass, T. 1998. La conservation des ressources phytogénétiques : une préoccupation

internationale. In Biotechnology Agronomy sociology Environment ND2: pp 7-14.

GRAIN. 2003 a. La piraterie des ressources biologiques ou bio-piraterie en Afrique. Ed.

Ruisseaux d'Afrique, 47 p.

GRAIN. 2003 b. Promouvoir la diversité biologique en agriculture en Afrique de l'Ouest. Ed.

Ruisseaux d'Afrique, 47 p.

GTZ, 2000. Gestion de l'agrobiodiversité dans les zones rurales. 10p.

Hamilton, M. B., 1994. Ex situ conservation of wild plant species: time to reassess the

génetic assumption and implications of seed banks. Conservation biol. ND 8. pp 39-49.

Hamon P., Dumont R., Zoundjihékpon J., Tio-Touré B. & S. Hamon, 1995. Les ignames

sauvages d'Afrique de l'Ouest. Caractères morphologiques. Eds. ORSTOM, Paris, 84 p.

Hamon, P., R. Dumont, J. Zoundjihékpon, N. Ahoussou, & B. Tio-Touré. 1997. Les

ignames. In L'amélioration des plantes tropicales. Ed. Repères, CIRAD-ORTOM. Pp. 385­

400.

Hamon, P., Touré, B. 1991. New trends for yam improvement in the D. cayenensis­

rotundata complex. In: Crop genetic resources of Africa, N. Q. Ng et al. éd., Rome, Italie,

IBPGR, Pp. 119-125.

Hamon, P., V. LEBOT. 1998. Les ressources génétiques de l'igname: Caractérisation et

classification. In L'igname, plante séculaire et culture d'avenir. Actes du séminaire

9S

Page 98: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser

international CIRAD-ORTOM-INRA-CORAF. Edited by: J. Berthaud, N. Bricas, J-L.

Marchand. Montpellier, France. Pp. 127 - 133.

Hladik, A., Bahuchet, S., Ducatillon, C., Hladik, C. M. 1984. Les plantes tubercules de la

forêt dense d'Afrique centrale. Revue d'écologie, 39 : 249-290.

Houémassou, B J. 2002. Gestion de la diversité variétale au sein du complexe D.

cayenensis- D. rotundata et la domestication de D. praehensilis : savoirs locaux et pratiques

endogènes dans la SIP de Djidja. Thèse d'ingénieur agronome. FSAlUAC. 130 p.

liTA. 1992.Sustainable food production in sub-Saharian Africa. liTA, Ibadan 208p.

IIbert, H., L. Tubiana. 1992. Protection juridique des inventions biotechnologiques. analyse

de la directive européenne et propositions. Solagral, collection « Réseau Biotechnologies»,

201 p.

Ingebord, B. 1999. Les OGM, comment la science de l'industrie biotechnologique altère

secrètement nos aliments. Ed. Berger A. C., 228 p.

INSAE. 1992. Enquêtes sur les ménages au Bénin.

IPGRI. 1991. Geneflow: Women and Plant Génétic Ressources. IPGRI, Rome. Jarvis, D., B.

Sthapit et L. Sears, editors. 2000. Conserving agricultural biodiversity in situ: A scientific

basis for sustainable agriculture. International Plant Genetic Resources Institute, Rome, ltaly.

Jarvis, D. 1., Myer L., Klemick H., Guarino L., Smale M., Brown A. H. O., Sadiki M., Stapit

B., Hodgkin T. 2000. A traning guide for in situ conservation on farrn. IPGRI, 161 p.

Lefort, M., Sontot A., Mitteau M., Chauvet M., Thaler L. 1998. La préservation des

ressources phylogénétiques: Stratégie nationale et enjeux. C.R. Acad. Agric. Fr., N° 3. pp

183-194.

Louette, O., Charrier A., Berthaud J. 1997. In situ conservation of maize in Mexico: genetic

diversity and maize seed management in a traditional community. Economy Botanic. N° 51.

pp 20-38.

Maxted, N., Hawkes J. G., Ford-Lioyd B. V., et Williams J. T. 1997. A pratical model for in

situ genetic conservation complementary conservation strategies. Pp. 339-367 in Plant

Genetic Conservation: The in situ A pproach. Eds MAXTED N., HAWKES J. G., FORD­

llOYD B. V., et WILLIAMS J. T., Chapman and Hall, London.

Mckey, O., Emperaire L., Elias M., Pinto F., Robert T., Desmoulière S., Rival L., 2001.

Gestions locales et dynamiques régionales de la diversité variétale du manioc en Amazonie.

ln Genet. Sel. Evol. W 33. pp 465-490.

MOR. 1995. Filière igname.

Meyer, N. 1983. A wealth of wild species. Boulder, colorado, westwiew Press.

Miège,J., S. N. Lyonga. 1982. Yams-Ignames. Oxford, Royaume-Uni, Clarendon Press,

412 p.

96

Page 99: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BACOMohamedNasser

Mignouna, H. & A. Dansi. 2003. Yam domestication by Nago and Fon ethnie groups in

Benin. Genetic Resources and Crop Evolution (in press).

Miller K., Allergretti M. H., Johnson N., Johnson B. 1995. Measures for conservation of

biodiversity and sustainable use of its compnents in: Heywood V. H. (ed), Global Biodiversity

Assement, United Nations Environment Programme, Cambridge University Press,

Cambridge.

Millon, J. W. 1995. Implications of alternative concepts of sustainability for total valuation of

environmental resources. In Economie appliquée, tome XLVIII, n°. 2, pp. 59-73.

Mulder, 1. 2000. Farmers' perceptions of soil fertility in Bénin. CREED Working Paper, Series

N° 28. liED. London.

N'kounkou J.S., J. Lejoly, D. Geerinck. 1993. Les dioscoreacees du Congo. Fragmenta

Floristica Geobotanica, Supplementum, 2: 139-182.

Nicolas, B., Vernier, P., Ategbo, E.,Hounhouingan, J., Mitchikpe, E., N'kenu, E. K.,

Okwor, G. 1998. Le développement de la filière cossette d'igname en Afrique de l'Ouest. In

les Cahiers de la Recherche Développement. N° 44-1997. CIRAD.

Okry, K. F. 2000. L'igname dans le système de production agricole de Bantè et la

domestication de quelques-unes unes de ses formes sauvages: savoirs locaux et pratiques

endogènes de culture et d'amélioration génétique. Thèse d'ingénieur agronome. FSA / UNB.

119 p.

Omiti, J. M., K. A. Parton, J. A Sinden et S. K. Etui. 1999. Monitoring changes in land-use

pratices following agrarian de-collectivisation in Ethiopia. In Agriculture, Ecosystems, and

Environment 72: 111-118.

Pearce, D. 1996. Economie valuation and Ecological Economies. Plenary Adress to the

European Ecological Economies Inaugural International Conference, Université de Versailles

France, 23-25 Mai 1996.

PNUE, 1992. Convention sur la diversité biologiqque.

RAFI. 1999. Les petits agriculteurs pris au piège des accords sur les Aspects des Droits de

Propriété Intellectuelle liés au Commerce (ADPIC). La sécurité alimentaire et les ménages

ruraux n'ont pas encore ressenti l'effet des droits de propriété intellectuelle, 5 p.

Rana, R. B., D. Gauchan, D. K. Rijal, S. P. Ktatiwada, C. L. Paudel, P. Chaudhary et P.

R. Tiware. 2000. Socioeconomic data collection and analysis. Nepal. In Conserving

agricultural biodiversity in situ: a scientific basis for sustainable agriculture. D. Jarvis, B.

Sthapit and L. Sears, eds. Pp. 54- 59. IPGRI, Rome, Italy.

Reveret, J. P., Webster A. 1997. Vers une économie de la biodiversité? ln La biodiversité

Tout conserver ou tout exploiter? (éd) Marie-Hélène Parizeau. De Boeck Université.

Collection Sciences Ethiques Societés, pp. 47-59.

97

Page 100: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BAca Moharned Nasser

5carcelli, N. 2002. Etude des relations entre les sauvages apparentées (Dioscorea sp.) au

Bénin: Impact de la domestication sur la diversité des plantes cultivées. Mémoire de DEA.

Université de Montpellier II. 47p.

5erpentie, G. 1993. Rôles et significations de la jachères dans les systèmes de production

agricole en Afrique de l'Ouest. Problématique de son emplacement. In Floret, C.; Pontanier,

R. et Serpentie, G. La jachère en Afrique tropicale. Dossier Mab 16 UNESCO. Paris, France.

86p.

SOLAGRAL. 2000. Pourquoi un forum sur la gestion de la diversité génétique?

Solbrig, O. T. 1991. The origin and function of biodiversity. Environmentvol. 33, n° 5: 17-38.

Sorensen, T. 1948. A méthod of establishing groups of equal amplitude in plan sociology

based on similarity of species content and its application to analyses of the vegetation on

Danish common. Kong!. Danske vidensk. Selsk. Biolg. Skr. Kjobenhavn 4: 1-34.

Starkey, P. 1997. Networking for Développement. IFRTD, London.

Tostain 5., N. M. Baco, F. K. Okry, R. L. Mongbo, C. Agbangla & o. DaYnou. 2002.

Système traditionnel de production des ignames au Bénin. Annales des Sciences

agronomiques du Bénin (3), n° 2 Spécial Colloque; p 55-72.

Trommetter, M. 2002. La gestion des ressources génétiques végétales: d'une approche

empirique à une institutionnalisation internationale. In Johanesburg Sommet Mondial du

Développement Durable 2002 Quels enjeux? Quelle contribution des scientifiques? adpf,

Ministère des affaires étrangères, pp. 45-49.

UNEP- CBD. 1994. Convention sur la Diversité Biologique. Texte et Annexes: 34 p.

Vernier, P. & Dansi A. 2000. Participatory asseessment and farmers knowledge on yam

varieties in Benin. In Makoto Nakatani and Katsumi Komaki: Potential of root crops for food

and industrial resources. 12th Symposium of the International Society for Tropical Root

Crops (ISTRC); Pp 360-365.

Vernier, P. 2002. Enquêtes sur les systèmes de culture à base d'igname dans le

département du Borgou et du zou, Bénin. Document de travail. CIRAD-CA- liTA.

Wilson E.O., 1992. La diversité de la vie. Traduction française, Paris, Ed. Odile Jacob, 1993.

Zimmerer, K. S. 1996. Changing fortunes: biodiversity and peasant Iivelihood in the

Peruvien Andes. University of California Press, Berkeley.

Zoudjihèkpon, J., A. Dansi, J.H.D. Mignouna, A. M. Kouakou, J. D. Zongo, K. E.

N'kpenou, D. Sunu, F. Camara, S. Kourouma, J. Sanou, H. Sanou, J. Belem, R. Dossou,

P. Vernier, R. Dumont, P. Hamon, & B. Tio-Touré. 1998. Gestion des resources

génétiques des ignames africaines et conservation in situ. In Aménagement et Nature. N°

135. Pp. 85- 94.

98

Page 101: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003

Liste des figures

Liste des figures, photo et tableaux

BACO Mohamed Nasser

Figure 1 : Localisation de la République du Bénin: Nord Ouest de l'Afrique 23

Figure 2 : Importance de la production de l'igname dans les 6 départements du Bénin 24

Figure 3 : Carte du Bénin montrant le Département du Borgou et la délimitation l'espace Bariba.

......................................................................................................................................................... 25

Figure 4 : Pluviométrie (Hm! mois) du Borgou au cours de la campagne 2002-2003..•.................. 27

Figure 5 : Production moyenne annuelle d'igname des communes du département du Borgou

(moyenne calculée sur 10 ans, 1991 à 2000)...•............................................................•.••...•..•........ 29

Figure 6 : Répartition des enquêtés dans les groupes linguistiques 30

Figure 7 : Analyse de la distribution des variétés de Yébéssi à travers le four square analysis 40

Figure 8 :Analyse de distribution des variétés de Kinnoukpanou à travers le four square analysis

......................................................................................................................................................... 42

Figure 9 : Répartition des variétés par groupe d'ethnies 46

Figure 10 : Diversité et origine géographique des variétés .......................................................•.... 51

Figure 11 : Uen social etproportion de don des variétés 52

Figure 12 : résultat de l'ennoblissement sur l'enrichissement de la diversité d'un champ

d'igname 58

Figure 13: Nombre moyen de variétés et de champs d'ignames en fonction des villages 62

Liste des photos

Photo 1 : Plant d'igname ••••.••••.•...............................................................•.............................••..•.•.. 22

Photo 2 : Tubercules d'igname 22

Photo 3 : Grenier de conservation de l'igname........................................................•...................... 47

Photo 4 : Tas d'ignames de la variété Baniwouré conservées au champ sous un arbre 48

Photo 5 : Tubercules d'igname sauvage prélevés de la forfit pour être domestiqués 57

Photo 6: Igname en domestication soumis à la pose d'une feuille de t6le comme obstacle 57

Photo 7 : Chef d'exploitation assurant la plantation en ligne de ces variétés. ..............•.•.....•....... 79

Liste des tableaux

Tableau 1 : Choix des unités d'observation..•.•............................................................................... 30

Tableau 2 : Récapitulatif des données collectées et des outils d'analyse 32

Tableau 3 : espèces d'igname cultivée et nombre de variétés correspondantes ....•..................... 36

Tableau 4 : répartition des variétés recensées dans les grands groupes variétaux 38

Tableau 5 : distribution géographique des variétés dans les villages étudiés 38

Tableau 6: Quelques données sur la divetsité variétale dans les villages étudiés 44

Tableau 7 : Analyse de variance: comparaison des moyennes de variétés............•..................... 44

99

Page 102: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003 BACOMohamed Nasser

Tableau 8 : Coefficient de similarité de Sorensen calculé pour les quatre localités 45

Tableau 9 : Répartition des variétés cultivées dans 4 classes suivant 2 critères discriminants 45

Tableau 10 : Répartition des variétés par couple d'ethniques 46

Tableau 11: variétés d'igname et les croyances qui leur sont liées 49

Tableau 12 : Introductions des variétés: origine et ancienneté••.••..•..•.•........................................ 54

Tableau 13 : Critér'es de sélection des ignames spontanées destinées à la domestication 56

Tableau 14 : Superficie des champs d'igname et nombre moyen de variétés par village 62

Tableau 15: Nombre moyen de variétés cultivées par tlanche d'âge 63

Tableau 16 : comparaison des moyennes de variétés suivant les classes d'âges 63

Tableau 17: comparaison des moyennes de variétés entre les ethnies 66

Tableau 18: Signjf"lCation, synonyme et interprétation des noms de quelques variétés

rencontrées 71

100

Page 103: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003

Liste des acronymes

BACQMohamed Nasser

ABE : Agence Béninoise pour l'Environnement.

ADPIC : Accords sur les Droits de propriété Intellectuelle liés au Commerce.

CARDER: Centre d'Action Régional pour le Développement Rural.

CBD : Convention sur la Diversité Biologique.

CBDD : Centre Béninois pour le Développement Durable.

CEDEAO : Communauté Economiques des Etats de l'Afrique de l'Ouest.

CGIAR : Groupe Consultatif pour la Recherche Agronomique Internationale

CIRA: Centre Internationaux de Recherche Agronomique.

CIRPG : Centre International des Ressources Phylogénétiques.

CNRPG-BEN : Comité National des Ressources Phylogénétiques du Bénin.

E5A : Enquêtes sur les Statistiques Agricoles

FAO : Food Agriculture Association (Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et

l'Agriculture).

F5A : Faculté des Sciences Agronomiques.

GRAIN: Action Internationales pour les Ressources Génétiques.

GTZ : Technishe Zusammenarbeit.

liTA: International Institute of Tropical Agriculture.

INRAB : Institut National des Recherches Agricoles du Bénin.

IPGRI : International Plant Genetic Resources Institute.

IRD: Institut de Recherche pour le Développement (France).

IRDCAM..QNG : Institut de Recherche pour le Développement des plantes Cultivées, Aromatiques et

Médicinales.

IRRI : Institut International de Recherche sur le Riz.

MAEP : Ministère de l'Agriculture de l'Elevage et de la Pêche.

MOR: Ministère du Développement Rural.

OAPI : Organisation Africaine de la Propriété Intellectuelle.

OFRDI..QNG : l'Organisation des femmes pour la Protection de l'Environnement et le Développement

Intégré

OMC : Organisation Mondiale du Commerce.

OMPI : Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle

ONG : Organisation Non Gouvernementale

PORT: Programme de Développement des Racines et Tubercules.

PNB: Produit National Brut.

PNUE : Programme des Nations Unies pour l'Environnement

RAFI : Rural Advancement Foundation International

RPG : Ressources Phylogénétiques

UNB : Université Nationale du Bénin.

UPOV : Union pour la Protection des Obtentions Végétales

101

Page 104: Département de Géographie -Aménagement

DEA ADEn 2003

Liste des annexes

BAca Mohamed Nasser

Annexe 1 : Fiche de collecte des données exploitation agricole & village

Annexe 2 : Analyse de la distribution des variétés de Wari à travers le four

square analysis

Annexe 3 : Analyse de la distribution des variétés de Goro bani à travers le four

square analysis

Annexe 4 : Répartition des variétés au sein des 4 ethnies étudiées

Annexe 5 : Caractéristiques agromorphologiques des variétés cultivées dans le

nord Bénin

Annexe 6: Caractéristiques socio-culinaires et commerciale des variétés du

nord Bénin

102

Page 105: Département de Géographie -Aménagement

Annexes

Annexe 1 : Fiche de collecte des données exploitation agricole & village

Prénoms:-----------

Village: ----------------------------­

Données démographiques

1.1 Chef d'exploitation: Noms:------

1.2 Age:-------------

1.3 Ethnie:---------·----·

Non,Oui,

1.4 Religion-------------- .-------------------­

1.5 Scolarisé:

1.6 Si oui quel est son niveau d'instruction: -----------------------

1.7 Avez-vousjamais domestiqué l'igname sauvage?--­

1.8 A quand remonte la dernière domestication ?-----

1.9 Quellesvariétés avez-vous obtenu?------------------------

1.10Ressources humaines de l'exploitation

Hommes: ------ Femmes: -----

1.10.1 - Taille du ménage: -------Hommes : -------IFemmes :------­

1.10.2 - Nombre d'actifs dans le ménage: ---­

1.10.3 Nombre d'hommesactifs---------------------------

1.11Superficietotale disponible: --------------------------­

1.12Superficietotale cultivée cette année: ------------------------­

1.13Superficie affectée aux différentes cultures et ordre de priorité: ---------------

Cultures Igname Manioc Patate Maïs Sorghol Coton Arachide Niébé

douce mil

Superficies

Ordre de

priorité

1.14Parmi ces cultures qu'elle est celle qui vous génère plus de revenu? -------------­

1.15Quelleest la principale source alimentaire? -------------------------­

B. Diversité variétale

1- Quelles sont les variétés d'igname que vous cultivez ?

Nom Provenance* Année d'obtention Nombre de buttes

Page 106: Département de Géographie -Aménagement

2- Etes vous satisfait des variétés que vous cultivez7'---------------------

3- Justifiez:------------------------------------

4- Aimeriez vous disposez de nouvellesvariétés 7---------------------­

5- Pourquoi 7-----------------------------------­

6- Donnez les caractéristiques des variétés que vous aimeriez avoir 7--------------­

7- Pour vous, quelle est la caractéristique principale qu'une variété d'igname doit avoir 7------

8- Echangervous des variétés d'igname entre paysans7-------------------­

9- Quels sont les liens que vous lient aux paysans qui échangent leurs variétés avec vous 7-----

10- Où achetez-vousvos semencesd'igname 7------------------------­

11- Quelles sont les variétés dont l'approvisionnement en semences est difficile 7-----------­

12- Quelles sont les variétés qui sont soumises à des barrières sociales7-------------­

13- Y a t-il des variétés qui existaient dans le passé et qui ont disparu des champs 7----------­

14- Donnez les raisons de leur disparition: -------------------------­

15- Comment conservez-vousvos variétés pour quelles ne soient pas perdues 7-----------­

16- Quelles sont les variétés sur lesquellesvous veillez le plus 7-----------------­

17- Pourquoi 7-----------------------------------­

18- Comment faites-vous pour reconnaître les variétés entre elles 7---------------­

19- Comment faites-vous pour éviter le mélange des variétés 7------------------

A la plantation7------------

A la récolte7--------------------------------­

Au stockage 7-----------

17 Où stockervous vos igname (description) 7

18 Qui assure le stockage des ignames 7 (homme, femmes, jeunes, vieux...)1------------­

19 Pourquoi 7-----------------------------------­

20 Quelles sont les variétés que vous avez dans le passé et que vous ne cultivez plus 7--------­

21 Pourquoi7------------------------------------­

22 Nombre de champ d'igname et variété dominante

Champ 1 2 3 4

Superficie

Variétés

dominantes

11

Page 107: Département de Géographie -Aménagement

FICHE DE COLLECTE DES DONNEES GENERALES DANS LES VILLAGES

Informations sur les variétés

Signification des noms

Nom des variétés Synonyme Signification et interprétations

Caractéristiques culturales (3= élevé ou bon, 2= moyen ou acceptable; 1 = faible mauvais)

Période de Tuteurage Nombre de Nre tubercule Grosseur Exigence en Sensibilité Sensibilité Sensibilité à Sensibilité à

Variétés plantation récolte 1butte tubercules sol riche aux maladies mauv herbe sécheresse l'inondation

Caractéristiques culinaires et socioculturelles (3= élevé ou bon, 2= moyen ou acceptable; 1 = faible ou mauvais)

Variétés Utilisation culinaire Utilisation Interdits Valeur Aptitude à laPilée Bouillie/ragoût Frite Cossette cultuelle commerciale conservation

111

Page 108: Département de Géographie -Aménagement
Page 109: Département de Géographie -Aménagement

1. Quelles sont les variétés les plus cultivée ?-

2. Pourquoi?----------------------------------

--------------_._---------------------------

3. Est ce qu'il y a des variétés qui existaient dans le passé et qui ont disparu de nos jours (Donnez les) ?-

4. Pourquoi?-----------

5. Quelles sont les variétés que les femmes aiment?

6. Comment avezvous conservezles autres variétés à ce jour ?----------------

7. Serezvous-prêts à faire des foires de semences?--------------------

8. Voudrez-vous avoir une banquescommunautaires de variétés d'igname?-----------

9. Accepterez-vous de créer une association pour conserver les variétés ?------------

10. Existe-il des ignames sauvages les formations végétales du village?-------------

11. Serez-vous prêts à les protéger?---.------------------------

12. Donnez les noms de ceux qui ont beaucoupde variétés dans le village?------------

13. Donner le nom de ceux chez qui ont achète souvent les semences d'ignames?---------

v

Page 110: Département de Géographie -Aménagement

Annexe 2 : Analyse de la distribution des variétés de Wari à travers le four

square analysis

Plusieurs exploltatlonsGrandes superficies

Plusieurs exploitationsPetUes superficie.

ego~0 Moroko

KpakaraGogoM;m onB. lM>uloukabaB. Kèlèk obaSingorDan ;Gogo

ege~ÇJ Soussou

Dou bayessirouKilDanwariGumsi bakafOuKago uro uSounoudoUfouSingouBakésorouDanwar;Assou sika

Quelques exploitationsGrandes superficies

AwèfèAssou bagourouMoroB. YintéguerouTèkokoroKinkèrèkouTabané

SoagonaKpanhouriKpounaVW>mskouMonguiAiakjssaOrou gnissinguiYonbouanriGambari YinnonAnkakorouWOUI11KinkérékouGourokoWomakou

IM>mèKékouroTan kpanou0I0d0WomokouSoko lo

Annexe 3 : Analyse de la distribution des variétés de Goro bani à travers le

four square analysis

Plusieurs exploitationsGrandes superficies

Plusieurs exploitationsPetites superf icies

egôQ0 Ah;mDn

Baniwouré kélèkobaB. WOUJoUkBbaB. yinfJl!guerouDan;DoubByeSS;-OUGogoKokoumaMaokoSingou

~.. gQ

•• r.:<i- \,d

M a nGnon mombouGourokoKékouroKpBkarBOlodoSingorTaba néSoussou

Quelques explol1atlonsGrandes superllcles

BakèsorouBoniakpaGutissi bakarouKogourouKinkérékouSounoudourouYakaRougoSobasson

Quelques exploitationsPetites superficies

Orou gnissinguiAboudjaAJaJ(ÎSSS

Babak oDlkpriDonkpirikouûoueninIbère gninsséKourikouriKonhouraKpounaMonguiNora moussou

PabiSsn}(QuninSoag onaYakou gnaro

VI

Page 111: Département de Géographie -Aménagement

Annexe 4 : Répartition des variétés au sein des 4 ethnies étudiées

Ethnies

Variétés Bariba Gando lokpa Nago

Aboudia Aboudia

Adéwelè Adéwelè

Adié Adjé

Adjnè Adjinè

Adoro Adoro Adoro Adoro

Agarou Agarou Aaarou Aaarou

Ahimon Ahimon Ammon Ammon Ammon

Akpanna Akoanna

Alassika Alassika Alassika

Atihéhou Aihéhou

Alsoro Alsoro

Anclouma Anclouma

Andorokou Andorokou Andorokou

Anka korou woura Anka korou woura

Arro Arro

Assoukoana Assoukoana Assoukoana

Assou sika Assou sika Assou sika

Ateoufo Ateoulo

Awèrè Awèrè Awèrè Awèrè Awèrè

Babako Babako

Badéba Badéba Badéba

Bagourou Bagourou Bagourou Bagourou

Baké sorou Baké sorou Baké sorou

Bandé Bandé

Baniwouré kètèkoba Baniwouré kètèkoba Baniwouré kètèkoba Baniwouré kètèkoba

Baniwouré wouloukaba Baniwouré woufoukaba Baniwouré woufoukaba Baniwouré wouloukaba

Baniwouré yintéguerou Baniwouré yintéguerou Baniwouré yintéguerou Baniwouré yintéguerou

Bembèrèkè Bembèrèkè Bembèrèkè

Bombe Bomba

BoniaktJ8 Boniakpa Boniak/Ja Boniakoa

Colobo Cofobo

Coutonou Coutonou

Dani Dani Dani Dan;

Danwari Danwari Danwari

Déba Déba Déba

Dikpiri Dikpiri Dikoiri

Donkpirikou Donkpirikou

Douemn Douanin

Doubavessirou Doubayessirou Doubayessirou Doubayessirou

Doundou worou Doundou worou Doundou worou Doundou worou

Etolo Etofo

Gambari gn;non Gambari gn;non Gambari gninon Gambari amnon

Gbanwokiri Gbanwokiri Gbanwokiri

Gbédo Gbédo

Gnonmombou Gnonmombou Gnonmombou

GnonMoré Gnon Moré Gnon Moré Gnon Moré

Gogo Gogo Gogo Gogo

VII

Page 112: Département de Géographie -Aménagement

Gomin; Gomin; Gomin;

Gommin Gommin Gommin

Gouroko Gouroko Gouroko

Gu;fÏSSi bakarou Gu;fÏSSi bakarou Gu;rissi bakarou

Hé-aba60 Hé-aba60

Hamoya Homoya Homoya

Ibère gninssé Ibère gninssé Ibère aninssé

Kagourou Kagourou Kagourou Kagourou

Ké Ké Ké Ké

Kèkouro Kèkouro Kèkouro

Kinkérékou Kinkérékou Kinkérékou Kinkérékou

Kohounf/ou Kohoungou

Kokorobanon Kokorobanon

Kokouma Kokouma Kokouma Kokouma

Ko-N'yo Ko-N'yo

Kouméni Kouméni

Kouri kouri Kouri kouri Kouri kouri

Kourotoko Kol<Darérou

Koutala Koutala

Koyo Koyo

Kpaganna Koaaanna

Kpahassaha Koahassaha

Kpakagn;na Koakaanina

Kpakara Kpakara Koakara Koakara

Kpakpa-téoun Kpakpa-téoun

Kpanaté Kpanaté

Kpanhoura Kpanhoura Kpanhoura Kpanhoura

Kpého Kpého

Kpéyé Kpéyé

Kpouna Kpouna Kpouna Kpouna Kpouna

Latou Latou

Makpona Makpona

Mongui Mongui Mongu; Mongui

Morokorou Morokorou Morokorou Morokorou Morokorou

Noro moussou Noro moussou

Oféf/ui Oféaui Ofégui

01000 O/odo Olodo Olodo

Orougnissinau; Orouanissinaui Orouanissinaui

Pabi Pabi

Po/aaa Po/aga

Sankounin Sankounin Sankounin

Saria Saria

Sinf/or Sinaor Singor

Singou Singou Singou Singou

Soaaona Soaaona Soagona

Sobasson Sobasson Sobasson

Sokoto Sokoto Sokoto

Sounoudounou Sounoudounou Sounoudounou

Soussou Soussou Soussou Soussou

Tabané Tabané Tabané

Talambadiè Talambadiè

Tambana Tambana

V111

Page 113: Département de Géographie -Aménagement

TanKpannou TanKpannou

Tantanboulca Tantanboulca

Tchalcapim Tchalcapim

Tchibiri Tchibiri

Tchilcpélé TchilcDé/é

Tchon-tcholoun Tchon-tcholoun

Tèlcolco Tèlcolco Tèlcolco

Tèlcoutèlcou Tèlcoutèlcou

Tounon-hé Tounon-hé

Waho Waho

Womalcou Womalcou Womalcou Womalcou

Yalcanouflo YalcanouflO Yalcanougo Yakanouflo

Yalcou gnaro Yalcougnaro

IX

Page 114: Département de Géographie -Aménagement

Annexe 5 : Caractéristiques agromorphologiques des variétés cultivées dans le nord Bénin

Grosseur Exigence Sensibilité Sensibilité aux Sensibilité à

Variétés Nbre tubercule/des en sol aux mauvaises la Sensibilité à Aptitude à laCycle butte tubercules riche maladies herbes sécheresse l'inondation conservation

Aboudja P 2 2 3 2 1 3 2 1Adéwe/è T 3 2 1 2 1 1 1 3Adjê T 3 1 2 1 2 1 1 3Adjinè T 3 1 1 2 1 1 1 3Adoro 1 2 2 2 1 2 2 2 2Agarou T 3 1 1 1 1 1 2 3Ahimon P 2 2 3 2 1 3 2 1Akpanna T 2 2 1 1 2 2 2 3A/assika 1 2 2 2 1 2 2 2 2Alihéhou T 2 2 1 1 2 2 2 3A/soro T 3 1 1 1 1 1 2 3Anc/ouma P 2 2 3 2 1 3 2 1Andorokou P 2 2 3 2 1 3 2 1Anka korou woura T 2 2 1 1 2 2 2 3Arro P 2 2 3 2 1 3 2 1Assoukpana T 2 2 1 1 2 2 2 3Assou sika T 3 1 1 1 1 1 2 3Ateou/o T 3 1 1 1 1 1 2 3Awèrè P 2 2 3 2 1 3 2 1Babako T 3 1 1 1 1 1 2 3Badéba T 3 1 1 1 1 1 2 3Bagourou T 3 1 1 1 1 1 2 3Baké sorou T 3 1 1 1 1 1 2 3Bandé T 2 2 1 1 2 2 2 3Baniwouré kètèkoba T 3 1 1 1 1 1 2 3Baniwouré wou/oukaba 1 2 2 2 1 2 2 2 2

x

Page 115: Département de Géographie -Aménagement

Grosseur Exigence Sensibilité Sensibilité aux Sensibilité à

Variétés Nbre tubercule/des en sol aux mauvaises la Sensibilité à Aptitude à laCycle butte tubercules riche maladies herbes sécheresse l'inondation conservation

Baniwouré yintéguerou T 3 1 1 1 1 1 2 3Bembèrèkè P 2 2 3 2 1 3 2 1Bombe P 1 3 2 2 1 2 2 2Boniakpa T 3 1 1 1 1 1 2 3Colobo T 3 1 1 1 1 1 2 3Coutonou P 2 2 3 2 1 3 2 1Dani P 1 3 2 2 1 2 2 2Danwari P 2 2 3 2 1 3 2 1Déba T 2 2 1 1 2 2 2 3Dikpiri 1 2 2 2 1 2 2 2 2Donkpirikou P 2 2 3 3 3 3 3 1Douanin T 3 1 1 1 1 1 2 3Doubayessirou P 1 3 2 2 1 2 2 2Doundou worou T 2 2 1 1 2 2 2 3Etolo P 2 2 3 2 1 3 2 1Gambari gninon T 3 1 1 1 1 1 2 3Gbanwokiri T 3 1 1 1 1 1 2 3Gbêdo T 2 2 1 1 2 2 2 3Gnonmombou T 3 1 1 1 1 1 2 3Gnon Moré T 3 1 1 1 1 1 2 3Gogo P 1 3 2 2 1 2 2 2Gomini T 3 1 1 1 1 1 2 3Gommin T 3 1 1 1 1 1 2 3Gouroko T 3 1 1 1 1 1 2 3Guirissi bakarou 1 2 2 2 1 2 2 2 2Hê-aballo P 1 3 2 2 1 2 2 2Homoya T 2 2 1 1 2 2 2 3Ibère gninssé T 2 2 1 1 2 2 2 3Kagourou T 3 1 1 1 1 1 2 3Ké P 2 2 3 2 1 3 2 1Kèkouro 1 2 2 2 1 2 2 2 2

Xl

Page 116: Département de Géographie -Aménagement

Grosseur Exigence Sensibilité Sensi bilité aux Sensibilité à

Variétés Nbre tubercule/des en sol aux mauvaises la Sensibilité à Aptitude à laCycle butte tubercules riche maladies herbes sécheresse l'inondation conservation

Kinkérékou T 3 1 1 1 1 1 2 3Kohoungou T 3 1 1 1 1 1 2 3Kokorobanon T 3 1 1 1 1 1 2 3Kokouma P 1 3 2 2 1 2 2 2Ko-N'yo T 2 2 1 1 2 2 2 3Kouméni T 3 1 1 1 1 1 2 3Kouri kouri T 3 1 1 1 1 1 2 3Kourotoko Kokparérou 1 2 2 2 1 2 2 2 2Kouta/a P 2 2 3 2 1 3 2 1Koyo P 2 2 3 2 1 3 2 1Kpaganna T 2 2 1 1 2 2 2 3Kpahassaha T 2 2 1 1 2 2 2 3Kpakagnina T 2 2 1 1 2 2 2 3Kpakara P 2 2 3 2 1 3 2 1Kpakpa-féoun P 2 2 3 2 1 3 2 1Kpanafé T 2 2 1 1 2 2 2 3Kpanhoura P 2 2 3 3 3 3 3 1Kpêho P 2 2 3 2 1 3 2 1Kpéyé T 3 1 1 1 1 1 2 3Kpouna P 2 2 3 3 3 3 3 1Lafou T 2 2 1 1 2 2 2 3Makpona T 2 2 1 1 2 2 2 3Mongui P 2 2 3 2 1 3 2 1Morokorou P 1 3 2 2 1 2 2 2Noro moussou P 2 2 3 3 3 3 3 1Ofégui T 3 1 1 1 1 1 2 3O/odo P 2 2 3 2 1 3 2 1Orougnissingui P 2 2 3 3 3 3 3 1Pabi P 2 2 3 2 1 3 2 1Po/aga T 3 1 1 1 1 1 2 3Sankounin T 3 1 1 1 1 1 2 3

XlI

Page 117: Département de Géographie -Aménagement

Grosseur Exigence Sensibilité Sensibilité aux Sensibilité àVariétés Nbre tubercule/des en sol aux mauvaises la Sensibilité à Aptitude à la

Cycle butte tubercules riche maladies herbes sécheresse l'inondation conservationSaria 1 2 2 2 1 2 2 2 2Singor T 3 1 1 1 1 1 2 3Singou T 3 1 1 1 1 1 2 3Soagona P 2 2 3 3 3 3 3 1Sobasson T 3 1 1 1 1 1 2 3Sokoto T 3 1 1 1 1 1 2 3Sounoudounou T 3 1 1 1 1 1 2 3Soussou 1 2 2 2 1 2 2 2 2Tabané T 3 1 1 1 1 1 2 3Ta/am badjè T 3 1 1 1 1 1 2 3Tambana T 2 2 1 1 2 2 2 3Tan Kpannou T 2 2 1 1 2 2 2 3Tantanbouka T 2 2 1 1 2 2 2 3Tchakapim T 3 1 1 1 1 1 2 3Tchibiri T 3 1 1 1 1 1 2 3Tchikpé/é T 3 1 1 1 1 1 2 3Tcnon-tcnotoun T 2 2 1 1 2 2 2 3Tèkoko T 3 1 1 1 1 1 2 3Tèkoutèkou T 3 1 1 1 1 1 2 3Tounon-nê T 3 1 1 1 1 1 2 3Waho T 3 1 1 1 1 1 2 3Womakou T 3 1 1 1 1 1 2 3Yakanougo P 2 2 3 2 1 3 2 1Yakou gnaro T 3 1 1 1 1 1 2 3

Légende: 3= élevé ou bon, 2= moyen ou acceptable, 1= faible ou mauvaisP=précoce 1= intermédiaire T= tardive

XIll

Page 118: Département de Géographie -Aménagement

Annexe 6 : Caractéristiques socio-culinaires et commerciale des variétés du

nord Bénin

Variétés Cycle utilisation culinaire Utilisation Pesanteur Valeur

Pilée Bouillie Frite Cossette cultuelle sociologiquecommerciale

~boudja P 2 3 3 1 1 1 2~déwelè T 2 3 2 2 1 1 3~djé T 2 3 2 2 1 1 3~qjinè T 2 3 2 2 1 1 3~doro 1 2 3 3 2 1 1 2~garou T 2 3 2 2 1 1 3~himon P 3 3 3 1 2 1 3~kpanna T 2 3 2 2 1 1 3~/assika 1 2 3 3 2 1 1 2~lihéhou T 2 3 2 2 1 1 3~/soro T 3 3 2 3 2 1 3~nclouma P 3 3 3 1 2 1 3IAndorokou p 2 3 3 1 1 1 2IAnka korou woura T 2 3 2 2 1 1 3IAffo P 2 2 3 1 1 1 1IAssoukpana T 2 3 2 2 1 1 3Ass sika T 3 3 2 3 2 1 3Ateoulo T 2 3 2 2 1 1 3Awèrè P 2 3 3 1 1 1 2Babako T 2 3 2 2 1 1 3Badéba T 2 3 2 2 1 1 3Bagourou T 3 3 2 3 2 1 3Baké sorou T 3 3 2 3 2 1 3Bandé T 2 3 2 2 1 1 3Baniwouré kèfèkoba T 3 3 2 3 2 1 3IBaniwouré wouloukabé 1 2 3 3 2 3 1 3lBaniwouré yintéguerou T 3 3 2 3 2 1 3IBembèrèkè p 2 3 3 1 1 1 2IBombe p 3 3 3 1 2 1 3IBoni akpa T 2 3 2 2 1 1 3Colobo T 2 3 2 2 1 1 3Coutonou P 3 3 3 1 2 1 3iDani p 3 3 3 1 2 1 3lDanwari p 2 3 3 1 1 1 2lDéba T 2 3 2 2 1 1 3lDikpiri 1 2 3 3 2 1 1 2lDonkpirikou p 1 2 1 1 2 3 1iOouanin T 2 3 2 2 1 1 3lDoubayessirou P 3 3 3 1 2 1 3lDoundou worou T 2 3 2 2 1 1 3!,Etolo P 2 3 3 1 1 1 2Gambari gninon T 3 3 2 3 2 1 3Gbanwokiri T 2 3 2 2 1 1 3Gbédo T 2 3 2 2 1 1 3Gnonmombou T 2 3 2 2 1 1 3

XlV

Page 119: Département de Géographie -Aménagement

Variétés Cycle Utilisation culinaire utilisation Pesanteur Valeur

Pilée Bouillie Frite Cossette cultuelle sociologiquecommerciale

Gnon Moré T 2 3 2 2 1 1 3Gogo P 3 3 3 1 2 1 3Gomini T 2 3 2 2 1 1 3Gommin T 2 3 2 2 1 1 3Gouroko T 3 3 2 3 2 1 3Guirissibakarou 1 2 3 3 2 1 1 2lHé-aballo P 3 3 3 1 3 1 3lHomoya T 2 3 2 2 1 1 3I/bèrè gninssé T 3 3 2 3 2 1 3iKagourou T 3 3 2 3 2 1 3

iKé P 2 3 3 1 1 1 2Kèkouro 1 2 3 3 2 1 1 2Kinkérékou T 3 3 2 3 2 1 3Kohoungou T 2 3 2 2 1 1 3Kokorobanon T 3 3 2 3 2 1 3Kokouma P 3 3 3 1 2 1 3Ko-N'yo T 3 3 2 3 2 1 3iKouméni T 3 3 2 3 2 1 3!Kouri kouri T 3 3 2 3 2 1 3!Kourotoko Kokparérou 1 2 3 3 2 1 1 2!Koutala p 2 3 3 1 1 1 2Koyo P 2 2 2 1 2 3 1Kpaganna T 3 3 2 3 2 1 3Kpahassaha T 3 3 2 3 2 1 3!Kpakagnina T 3 3 2 3 2 1 3[Kpakara P 3 3 3 1 2 1 3[Kpakpa-téoun P 2 3 3 1 1 1 2!Kpanaté T 2 3 3 1 1 1 2iKPanhoura p 1 2 1 1 3 3 1[Kpého P 2 3 3 1 1 1 2IKpéyé T 2 3 2 2 1 1 3lKPouna p 3 3 3 1 3 3 3lLafou T 2 3 2 2 1 1 3lMakpona T 2 3 2 2 1 1 3lMongui p 2 3 3 1 1 1 2lMorokorou p 3 3 3 1 3 1 3lNoro moussou P 1 2 1 1 2 3 1Ofégui T 2 3 2 2 1 1 3Olodo P 2 3 3 1 1 1 2Orou gnissingui P 1 2 1 1 3 3 1IPabi P 2 3 3 1 1 1 21Polaga T 2 3 2 2 1 1 3Sankounin T 2 3 2 2 1 1 3Saria 1 2 3 3 2 1 1 2Singor T 3 3 2 3 2 1 3Singou T 3 3 2 3 2 1 3Soagona P 1 2 1 1 3 3 1Sobasson T 2 3 2 2 1 1 3Sokoto T 3 3 2 3 2 1 3

xv

Page 120: Département de Géographie -Aménagement

Variétés Cycle Utilisation culinaire utilisation Pesanteur Valeur

Pilée Bouillie Frite Cossette cultuelle sociologiquecommerciale

Sounoudounou T 3 3 2 3 2 1 3Isoussou 1 2 3 3 2 1 1 2Tabané T 3 3 2 3 2 1 3Talambadjè T 2 3 2 2 1 1 3Tambana T 2 3 2 2 1 1 3Tan Kpannou T 2 3 2 2 1 1 3Tantanbouka T 2 3 2 2 1 1 3Tchakapim T 3 3 2 3 2 1 3Tchibiri T 3 3 2 3 2 1 3Tchikpé/é T 3 3 2 3 2 1 3Tchon-tcholoun T 2 3 2 2 1 1 3Tèkoko T 3 3 2 3 2 1 3Tèkoufèkou T 3 3 2 3 2 1 3Tounon-hé T 3 3 2 3 2 1 3Waho T 2 3 2 2 1 1 3Womakou T 2 3 2 2 1 1 3Yakanougo P 3 3 3 1 2 1 3Yakougnaro T 3 3 2 3 2 1 3

Léaende: 3= élevé ou bon, 2= moyen ou acceptable, 1= faible ou mauvaisP=précoce, 1= intermédiaire T=tardive

XVI

Page 121: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003

TABLE DES MATIERES

BAGa Mohamed Nasser

SOMMAIR.E 1Dédicace ................•.............•.••••••••••.............••••••........................•...•..••••••••••..........•.••.••••••..•..3Remerciements 4Résumé 5Abstract 5Introduction 6

Objectifs et hypothèses 8Objectifgénéral 8Objectifs spécifiques 8Hypothèses de travail 9

Cadre conceptuel de l'étude 101. Définition de certains concepts 102. En quoi / 'agrobiodiversité est-elle nécessaire ? 113. Dans quelle mesure / 'agrobiodiversité est-elle menacée ? 124. Prise en compte de /a biodiversité par / 'économie 135. Les conventions et les débats politiques sur /a biodiversité 14

5.1. La Convention sur la Diversité Biologique (CBD) 145.2. Le Traité International sur les ressources phytogénétiques pour l'alimentation etl'agriculture (TIRPAA) 155.3. Les réglementations de l'accès et du partage des bénéfices 16

6. Méthodes de conservation de / 'agrobiodiversité 186.1. Des méthodes empiriques à l'instrumentalisation internationale 186.2. Les méthodes de conservation retenues dans la CDB. 18

6. 2.1. La conservation ex situ 196.2.2. La conservation in situ 20

7. Que/quesfacteurs pouvant influencer /e maintien de /a diversité 20Cadre méthodologique 22

1. Brève présentation de l'igname (Dioscorea sp.) 222. Présentation de /a République du Bénin 233. Caractéristiques du département du Borgou 244. Choix des communes de Sinendé et de Tchaourou 285. Sélection des vil/ages d'étude et des unités d'observation 296. Outils et méthodes de collecte des données 317. Données collectées et outils d'ana/yses 328. Limites du travail 33

Résultats 351. Amp/eur de /a diversité variétale maintenue par les paysans dans /e temps et dansl'espace 35

1.1. Les ignames sauvages rencontrées dans le nord Bénin 351.2. Les ignames cultivées 35

1.2.1. Inventaire de la diversité 351.2.2. Les différents groupes de D. cayenensis- D. rotundata 37

1.3. Distribution de la diversité inter et intra villages 381.3.1. Distribution inter villages 38132 D' . ê d l' d" à Yébé. .. iversite es cu tivars Igname a e essl 391 3 3 D' .,dl' d" . K' k. .. rversitè es cu tivars Igname a mnou panou .411.3.4. Diversité des cultivars d'igname de Wari .42

103

Page 122: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BAca Mohamed Nasser

1.3.5. Diversité des cultivars d'igname de Gorobani .431.4. Analyse comparée de la diversité des villages étudiés .43

1.4.1. Comparaison de la diversité intra- village .431.4.2. Comparaison de la diversité entre les communautés étudiées .441.4.3. Niveau et importance de production des variétés .45

, .. d ., , 1 hni 461.4.4. Repartition es varietes entre es et mes .II. Processus utilisés pour maintenir et créer la diversité agricole de l'igname .47

2.1. Pratiques paysannes de maintien et de conservation de la diversité variétale des. 47Ignames .

2.1.1. Stockage différentiel des variétés .472.1.2. Le sevrage précoce ou la double récolte .482.1.3. Association de certaines variétés à des pratiques culturelles .49

2.2. Pratiques paysannes liées au renforcement de la diversité variétale des ignames 502.2.1. Les circulations de variétés entre paysans 50

2.2.1.1. Les dons de variétés entre paysans 512.2.1.2. L'héritage de variétés 522.2.1.3. L'achat de variétés 532.2.1.1. Les échanges de variétés entre paysans 53

2.2.2. Introductions variétales 542.2.3. Domestication des ignames sauvages 55

2.2.3.1. Choix des individus à domestiquer. 562.2.3.2. Prélèvement partiel des individus choisis 572.2.3.3. Introduction d'obstacle pendant l'ennoblissement 572.2.3.4. La double récolte des tubercules de domestication 582.2.3.5. La sélection des clones intéressants 582.2.3.6. Le mélange variétal après sélection 592.2.3.7. La dénomination des nouveaux clones 592.2.3.8. Multiplication et diffusion des nouveaux clones 60

IlL Déterminants socio-économiques des détenteurs de la diversité 613.1. Terre et gestion de la diversité 61

3.1.1. Influence du mode d'accès à la terre sur la richesse variétale 613.1.2. Influence de la superficie et du nombre de champ sur la diversité des ignames 61

3.2. Lien entre l'âge des paysans et le nombre de variétés 633.3. Genre et gestion de la diversité 643.4. Lien entre l'effectif des actifs par exploitation et la diversité variétale des ignames 653.5. Lien entre l'appartenance linguistique et la diversité variétale 65

IV. Caractéristiques agro- morphologiques, commerciales et socio- culinaires et desvariétés 67

4.1. Utilisation paysanne des critères agro- morphologiques 674.1.1. Caractéristiques morphologiques des variétés 67412C ". . d .". .. aractènstiques agronomiques es varietes 67

4.2. les caractéristiques culinaires, culturelles et commerciales des variétés 684.2.1. Les caractéristiques culinaires 684.2.2. Caractéristiques culturelles des variétés 684.2.3. Caractéristiques commerciales des variétés 69

4.3. Noms des variétés paysannes 694.3.1. Signification des noms donnés aux variétés 694.3.2. Synonymes des variétés 70

Discussion 731 An 1 d 1 d' " d . l' ,. a yse e a iversité es Ignames cu trvees 73

104

Page 123: Département de Géographie -Aménagement

DEAADEn 2003 BACO Mohamed Nasser

1.1. Une diversité variétale à relativiser entre les terroirs étudiés 731.2. Des échelles de production inégales entre les variétés 74

1.2.1. Les variétés les plus produites 741.2.2. Les variétés les moins produites 751.2.3. Les variétés abandonnées 76

1.3. Motivations qui sous-tendent la diversité 772. Comment conserver durablement les pratiques et les variétés dans le programme deconservation in situ ? 79

2.1. Les faiblesses liées aux pratiques de gestion de la diversité 802.2. Vers une intervention sur les pratiques de gestion de la diversité 80

3. Des paramètres à considérer pour le choix des conservateurs 81Q .. l' dans la conservation i dl" ? 824. ui imp iquer ans a conservation In Situ e Igname .

5. Organiser les liens entre les acteurs 846. Des efforts favorables à la conservation in situ 857. La variété: un concept à « opérationnaliser» pour faciliter la conservation 868. Comment les cadres juridiques national, régional et international se positionnent face àla question de la conservation in situ des ignames 87

Conclusion et recommandations 89Références bibliographiques 93Liste des figures, photo et tableaux 99Liste des acronymes 101Liste des annexes 102

Annexe 1 : Fiche de collecte des données exploitation agricole & village 102Annexe 2 : Analyse de la distribution des variétés de Wari à travers le four squareanalysis 102Annexe 3 : Analyse de la distribution des variétés de Goro bani à travers le four squareanalysis 102Annexe 4 : Répartition des variétés au sein des 4 ethnies étudiées 102Annexe 5 : Caractéristiques agromorphologiques des variétés cultivées dans le nordBénin 102Annexe 6 : Caractéristiques socio-culinaires et commerciale des variétés du nord Bénin................................................................................................................................... 102

TABLE DES MATIERES 103

105