1
Programme de recherche
Gestion et Impact du Changement Climatique (GICC)
Quel climat à l’école ?
Les « jeunes » face aux changements climatiques
Rapport intermédiaire GICC
Décembre-janvier 2011
Susan Kovacs
Maître de Conférences en Sciences de l’information et de communication,
Université de Lille 3, GERIICO
Sandrine Bernier
Chargée d’études à l’APPA
2
Présentation
Ce second rapport a pour objectif de faire un état de l’avancement du projet GICC, depuis
avril 2010, date de remise du premier rapport intermédiaire, jusqu’en novembre 2010. Après avoir
pris contact avec les établissements scolaires et établi précisément le protocole d’enquête que nous
voulions mener à l’intérieur de ces collèges, ces huit mois ont permis de véritablement explorer le
terrain afin de croiser et d’analyser les premières données recueillies. Cette période d’analyse et
d’observation nous a permis notamment de prendre contact avec les équipes pédagogiques et
administratives, ainsi qu’avec les collégiens des quatre établissements, et en particulier certaines
classes de 5ème, et de procéder au recueil de données quantitatives et qualitatives au sein des
établissements, après avoir élaboré un calendrier de passation des questionnaires prenant en
compte les contraintes organisationnelles et de rythme des établissements scolaires. Cette période
de terrain a été riche de contacts et d’enseignements au-delà du strict cadre des entretiens et des
questionnaires puisque nous avons pu mener des observations de cours et d’ateliers dont l’objet
était l’environnement, le développement durable et/ou le changement climatique. Enfin en
complément de ces aspects empiriques, l’équipe de recherche et les coordinateurs de l’étude ont eu
l’occasion de se rencontrer trois matinées (en juin, septembre et novembre) afin de partager les
données et autres analyses déjà en notre possession et enfin de participer à deux séminaires
thématiques (en juin et novembre), lors desquels plusieurs chercheurs en Sciences de l’information
et de la communication du laboratoire GERIICO de l’Université de Lille 3, un chercheur en sémiologie
d’EDF, service R&D et un chercheur en Sciences de l’éducation de l’Ecole Normale Supérieure de
Lyon sont venus exposer leurs travaux et leurs approches méthodologiques ; ces apports ont ainsi
nourri notre réflexion d’un ensemble de regards croisés pluridisciplinaires.
Ce second rapport s’inscrit dans la continuité du premier, en ce sens qu’il présente un état
des lieux des différentes analyses et données que nous avons pu recueillir et analyser pendant la
période (avril à décembre 2010). Nous présenterons les principaux résultats extraits de l’analyse des
questionnaires menés auprès des collégiens inscrits dans les quatre établissements choisis (partie I),
puis de l’analyse des entretiens menés avec les équipes enseignantes et administratives (partie II) ;
nous proposerons ensuite la synthèse d’un colloque (partie III) auquel nous avons participé en
novembre 2010 à Bruxelles, sur la « communication verte », intitulé « Communicating green », avant
de présenter un article que nous avons soumis au comité organisateur du colloque pour publication
des actes (partie IV) et enfin le rapport sera clôturé par des ajouts bibliographiques (partie V) et des
documents annexés (partie VI).
3
I. Analyse des questionnaires menés avec les collégiens
Dans notre recherche, nous étudions d’un côté la manière dont les équipes pédagogiques
produisent et font circuler des messages sur le changement climatique à destination de leurs élèves
et de l’autre côté, la manière dont ces mêmes élèves intègrent les messages et se représentent les
phénomènes et les enjeux climatiques. Un autre axe de l’étude porte sur le rôle des politiques
environnementales locales dans l’orientation des établissements scolaires dans leurs actions
d’éducation aux changements climatiques. Dans ce rapport nous nous focaliserons en particulier sur
la création et la circulation des messages sur l’environnement et le changement climatique au sein
des collèges sélectionnés pour l’étude. L’enquête auprès des collectivités ainsi que l’étude des
phénomènes de réception et d’appropriation des informations sur le changement climatique par les
élèves viendront compléter cette première analyse des résultats de notre étude de terrain. En effet,
il nous a semblé important de commencer par interroger les équipes pédagogiques et
administratives afin de mieux cibler l’étude du contexte politique local par la suite.
Notre méthodologie d’enquête dans nos quatre établissements repose à la fois sur un outil
quantitatif (le questionnaire1 adressé à tous les collégiens) et sur des outils qualitatifs (entretiens
avec l’équipe pédagogique et administrative de chaque établissement, observations de cours et
d’ateliers, analyses d’entretiens, de corpus et de pratiques). Il nous a semblé important de privilégier
cette approche mixte et complémentaire. L’analyse quantitative a constitué une première approche
au recueil des attitudes des collégiens vis-à-vis du changement climatique, que l’analyse qualitative a
permis d’étayer et d’approfondir dans une seconde approche. A travers le questionnaire, une analyse
globale, statistique, a permis d’étudier un ensemble d’indicateurs de l’engagement des élèves sur les
questions liées à l’environnement et le changement climatique, tandis qu’à travers les entretiens et
les observations menées, un travail plus fin, en profondeur, dans le quotidien des collèges, nous a
permis de recueillir le discours des acteurs concernés et de confronter ces discours aux pratiques
observées. Le questionnaire s’est adressé aux collégiens, il a été distribué quelques mois avant le
début des entretiens avec les élèves, et parallèlement à nos entretiens avec les équipes
pédagogiques. Il offre une première prise de connaissance du degré de sensibilisation des collégiens
à l’environnement et au changement climatique, que nous avons pu croiser avec des facteurs
internes à chaque établissement et des données plus sociologiques telles que le niveau et le sexe des
élèves, la nature de leurs pratiques informationnelles, le profil socioprofessionnel des familles, et les
activités des familles en faveur de l’environnement.
A partir de ce questionnaire, nous nous sommes donc attachés à comprendre la manière
dont se structurent les discours et les pratiques des collégiens en matière d’environnement et de
changement climatique2. Il importe de préciser que l’objectif principal de notre étude consiste à
1 Une copie du questionnaire est ajoutée en annexe 1. Nous tenons à ajouter que ces données quantitatives
seront ultérieurement croisées et complétées à des entretiens réalisés avec 8 classes de 5ème
de ces mêmes établissements et qui sont actuellement en cours d’analyse. 2 L’exploitation des résultats de ce questionnaire a été étendue, suite à une demande de l’ADEME, pour
améliorer la sensibilisation des jeunes en matière d’environnement et de développement durable, à l’idée de
4
réaliser un état des lieux des discours et des pratiques sur le changement climatique mais que cette
question est à la fois très précise et chargée idéologiquement. Or, nous cherchons à recueillir les avis
au plus près de ce que pensent les personnes et à éviter qu’elles nous donnent à voir soit une image
qu’elles estiment être bonne de ce qu’il faudrait faire ou penser, soit un discours qui semblerait
correspondre à ce que souhaite entendre un intervieweur ou un enquêteur3 s’intéressant à une
question d’ordre environnemental. Ainsi, après avoir mené une pré-enquête au cours de laquelle
nous avons découvert qu’aborder la question du changement climatique sans entrée en matière
avait tendance à bloquer le discours parce que le thème prenait les personnes au dépourvu et ne
correspondait pas à la construction ni à la catégorisation scolaire de ce thème, nous avons opté pour
une entrée en matière plus large et générale, d’abord ciblée sur l’intérêt consacré à l’environnement
ou au développement durable avant d’aborder le changement climatique d’un point de vue
théorique puis mis en œuvre concrètement par des pratiques quotidiennes comme le tri des déchets,
notamment.
Plus précisément l’hypothèse de départ du questionnaire est que l’intérêt de l’élève pour les
questions liées au changement climatique est influencé par plusieurs variables, y compris la
participation aux activités et aux projets menés au sein du collège, mais aussi les pratiques
informationnelles (les médias et les supports privilégiés pour la recherche ou pour les loisirs) et les
pratiques en famille (tri des déchets, modalités de déplacements au niveau des transports).
Le questionnaire est composé plus précisément de six sous parties, non explicitées et non
numérotées afin de ne pas dérouter l’élève ni trop formater les réponses. Les premières questions
constituent une entrée en matière progressive que nous avons élaborée afin de voir quel langage et
quelles problématiques venaient à l’esprit de l’élève pour désigner les phénomènes liés au
développement durable, à l’environnement, au changement climatique. Le choix de termes était
délicat : nous n’avons pas souhaité débuter ni sur un langage polémique ni sur des termes abstraits
et difficiles. Nous avons ainsi privilégié le terme « environnement » pour les deux premières
questions, plus neutre que « l’écologie » mais moins précis que le « changement climatique », et plus
pertinent par rapport à l’univers scolaire (depuis l’essor des programmes et des activités en lien avec
« l’enseignement à l’environnement et au développement durable ») afin de voir quelles associations
d’idées étaient proposées par l’élève. Dans les contenus d’enseignement, le changement climatique
est abordé directement dans les programmes de 4ème seulement ; nous n’avons pas voulu limiter le
cadre de référence à cet élément des programmes, alors que les activités, les projets, et les ateliers
dans les collèges qui permettent aux élèves de travailler sur le changement climatique, ont le plus
souvent des entrées (et des dénominations) plus larges sur la science, l’environnement ou encore
l’éco-citoyenneté. C’est pour cette raison que nous avons également privilégié le terme
déterminer si le collégien pouvait constituer un vecteur intéressant pour favoriser une sensibilisation environnementale et inciter à des actes de développement durable. Une présentation des résultats a eu lieu le 30 septembre 2010 dans les locaux de l’APPA Le Kremlin-Bicêtre pour en rendre compte. 3 Les questions de positionnement neutre d’un enquêteur sur une étude sont très importantes et font l’objet
d’un travail important de remise en question préalable de ses a priori et de ses manières d’aborder un sujet avant l’entrée sur le terrain. Voir ouvrages de GHIGLIONE R. et MATALON B. (1991), Les enquêtes sociologiques.
Théories et pratique, Paris, Armand Colin. Plus particulièrement chapitre 4 : « Comment interroger : les questionnaires » et chapitre 5 : « le déroulement d’une enquête ». Voir également DE SINGLY F. (1992), L’enquête et ses méthodes : le questionnaire, Paris, Nathan.
5
d’environnement et également de développement durable dans les questions de la deuxième partie
du questionnaire qui portent sur la connaissance des élèves des cours et des projets menés au sein
de l’école.
Une troisième partie du questionnaire interroge l’élève sur ses pratiques informationnelles et
médiatiques (connaissance de documentaires grand public, habitudes et préférences dans la
recherche d’informations) ; nous avons cherché ici à comprendre par quels supports l’élève prend
connaissance de l’actualité scientifique sur le climat et l’environnement, dans le cadre scolaire ou
extra scolaire. Etant donné nos hypothèses de départ concernant la manière dont les supports
façonnent les messages sur le climat (voir premier rapport intermédiaire, avril 2010, p. 22-31), il nous
a paru important d’interroger l’élève sur la nature de sa réception des documents et de ses
préférences en matière de documentation afin de constituer une première typologie d’usages.
Une quatrième partie du questionnaire, plus ouverte, propose à l’élève trois images à
commenter. Il s’agissait pour nous d’étudier le vocabulaire des jeunes, de voir leur capacité à lire et à
interpréter des images-types portant sur le climat et l’environnement. Les images, en général,
envahissent de plus en plus le quotidien des jeunes et sont de plus en plus présentes en tant que
véhicules (publicitaires, télévisuels mais aussi pédagogiques) des messages sur l’environnement. La
présentation d’images nous a également permis d’ouvrir le questionnaire à l’expression des
sentiments, des préoccupations de l’élève et ainsi d’étudier de façon préliminaire les
correspondances entre idées, et les représentations des phénomènes (les causes, conséquences du
réchauffement, la responsabilité des acteurs) chez les jeunes. Cette partie se décline en deux
versions qui diffèrent au niveau des trois images que nous avons données à définir aux collégiens.
L’objectif était de diversifier les discours et autres associations d’idées des collégiens sur les images
que nous leur donnions à comprendre. Les deux versions ont été réparties respectivement dans un
collège du Nord et un d’Alsace. La première version a été donnée à Carpeaux (Valenciennes) et à La
Robertsau (Strasbourg), la seconde a été distribuée au Triolo (Villeneuve d’Ascq) et à Fustel de
Coulanges (Strasbourg).
La fin du questionnaire vise à mettre en perspective les données recueillies avec des
informations sur les pratiques familiales (de tri, d’utilisation de transports pour venir à l’école), qui
fournissent un indicateur de l’implication de l’entourage familial des élèves par rapport à la
protection de l’environnement d’une part et d’autre part des caractéristiques plus sociologiques.
En somme, le questionnaire a été conçu pour permettre la prise en compte des pratiques
d’apprentissage et d’information formelles (pédagogiques) et informelles (en famille mais aussi à
l’école, en dehors des cours obligatoires, lors d’ateliers ou d’événements fréquentés volontairement
par l’élève). Il nous a semblé particulièrement important de pouvoir considérer les synergies et les
complémentarités ou les oppositions, entre les pratiques au sein de l’école et en famille, d’autant
plus que pour l’élève ces univers ne sont pas étanches mais s’interpénètrent et contribuent
ensemble à la formation des représentations et des opinions chez le jeune.
6
1. Caractéristiques sociologiques des collégiens de l’échantillon
Les 4 niveaux de classe ont été pris en compte et le taux de réponses sur chaque niveau est
assez proche. Il est à noter que nous reprendrons indépendamment les chiffres des 5ème pour les
mettre en relation avec les données des entretiens qui ont été réalisés avec deux classes de 5ème dans
chaque établissement.
Graphique 1 : un taux de réponse assez homogène selon chaque niveau de classe mis en
comparaison avec chaque établissement4 (en %)
Sur 1949 questionnaires distribués, nous avons eu un retour de plus de 68%, soit 1326
questionnaires, l’échantillon est donc conséquent et permet une exploitation intéressante. Le taux
de réponses est assez similaire dans les 4 collèges sauf à la Robertsau (Strasbourg) où on enregistre
un taux de réponses un petit peu plus faible, ce qui est dû au fait qu’un certain nombre de parents
n’aient pas donné l’autorisation au collège pour que leur enfant réponde. Le fort taux de réponses
recueilli vient du fait qu’ayant préalablement présenté l’étude aux principaux des établissements
choisis ainsi qu’aux enseignants y exerçant leur activité et ayant obtenu leur accord, nous avons
demandé aux professeurs principaux de chaque classe de réaliser la passation des questionnaires en
début de cours, afin que le déroulement de l’enseignement ne soit pas perturbé. De plus cette
passation s’est voulue neutre dans la mesure où le sujet n’était pas préalablement présenté aux
collégiens et ne faisait pas l’objet d’une entrée en matière quelconque. De plus, elle s’est déroulée
dans un lieu qui se veut studieux, calme et encadré. Cette restitution importante tient également au
fait que ces collégiens ont été sollicités, tous, en une seule fois, pour remplir ce questionnaire sur
place et que le document n’est jamais sorti de la salle de classe, ce qui réduit considérablement les
déperditions et aussi les aides extérieures qu’auraient pu apporter les parents ou les camarades s’ils
avaient eu la possibilité de le remplir livrés à eux-mêmes.
4 Nous tenons à préciser que pour une lecture correcte des différents graphiques et cela est valable pour
l’ensemble de l’analyse de l’enquête quantitative, les données incluant la variable de la ville ou de l’établissement fournissent des données séparées à Carpeaux (Valenciennes) et au Triolo (Villeneuve d’Ascq) mais que les données de Strasbourg mêlent les deux collèges de La Robertsau et de Fustel de Coulanges. Ainsi, il faut diviser en deux les chiffres de Strasbourg pour obtenir les répartitions par établissement.
0
20
40
60
80
100
120
6ème (%) 5ème (%) 4ème (%) 3ème (%) Total (%)
Strasbourg Villeneuve d'Ascq Valenciennes Total
7
Interrogés sur leur intérêt ainsi que sur leurs pratiques qu’ils expriment en matière
d’environnement puis sur le changement climatique, nous allons dresser un portrait des collégiens
rencontrés, bâti à partir de caractéristiques sociales qui ont été posées dans le questionnaire. Puis
nous reviendrons sur l’intérêt qu’ils disent porter aux questions environnementales d’abord
théoriquement et de façon générale puis aux documents et supports visuels qu’ils consultent avant
de nous intéresser à leurs pratiques concrètes au quotidien, que ce soit au collège ou dans leur vie
privée.
1.1. Données sociologiques sur les collégiens de notre échantillon
Sur les 1326 retours de questionnaires enregistrés, les 4 établissements scolaires
comptabilisent respectivement : 538 collégiens à Carpeaux, 426 au Triolo, 533 à Fustel de Coulanges
et 452 à La Robertsau. Le taux de retour est assez homogène pour les 4 collèges, autour de 25-26 %
pour Le Triolo, Carpeaux et Fustel de Coulanges et une petite sous-représentation de la Robertsau
autour de 22%.
Graphique 2 : des taux de réponses assez homogènes selon chaque commune (en %)
0
10
20
30
40
50
60
Non réponse Strasbourg Villeneuve d'Ascq Valenciennes
Fréquence (%)
On note une répartition assez homogène des lieux de résidence entre Strasbourg,
Villeneuve-d’Ascq et Valenciennes et aussi selon les effectifs des différents niveaux de classe. On
observe également une légère surreprésentation de garçons par rapport aux filles qui ont répondu
alors que le pourcentage moyen de filles présentes au sein de ces établissements tourne autour de
47%. Cependant, en remettant dans un contexte plus général, grâce aux données IPES5 de
l’Education nationale, nous voyons que les effectifs globaux des établissements font ressortir une
proportion plus importante de garçons, ce qui conforte la représentativité de nos questionnaires
dans un contexte plus large.
5 IPES : Indicateurs pour le Pilotage des Etablissements du Second degré.
8
Graphique 3 : un peu plus de garçons que de filles qui ont répondu au questionnaire dans nos 4
établissements confondus. Données 2009-2010 (en %)
Graphique 4 : proportions de filles présentes à Fustel de Coulanges (Strasbourg), données mises en perspective avec le département, l’Académie et la France - Année 2009-2010. Données IPES
38
40
42
44
46
48
50
52
ETABL. DEPARTEMENT ACADEMIE FRANCE
%f i l les
Graphique 5 : proportions de filles présentes à La Robertsau (Strasbourg), données mises en perspective avec le département, l’Académie et la France - Année 2009-2010. Données IPES
48,4
48,6
48,8
49
49,2
49,4
49,6
49,8
50
50,2
50,4
ETABL. DEPARTEMENT ACADEMIE FRANCE
% f il les
Graphique 6 : proportions de filles présentes au Triolo (Villeneuve d'Ascq), données mises en perspective avec le département, l’Académie et la France - Année 2009-2010. Données IPES
41
42
43
44
45
46
47
48
49
50
51
ETABL. DEPARTEMENT ACADEMIE FRANCE
% f il les
0 10 20 30 40 50 60
Non réponse un garçon une fille
Proportion de garçon s et de filles présents dans notre échantillon (en%)
9
Graphique 7 : proportions de filles présentes à Carpeaux (Valenciennes), données mises en perspective avec le département, l’Académie et la France - Année 2009-2010. Données IPES
48
48,5
49
49,5
50
50,5
51
51,5
52
52,5
ETABL. DEPARTEMENT ACADEMIE FRANCE
% f i l l es
La proportion de filles est un peu plus élevée à Carpeaux (52%) que dans le reste du
département, de l’Académie et de la France, qui varient tous les trois autour de 49-50%. Comparés à
ces mêmes chiffres départementaux à nationaux, la proportion de filles, au Triolo, est plus faible
puisqu’elle tourne autour de 44%. Quant à La Robertsau, les pourcentages féminins s’approchent
très près des moyennes départementales à nationales puisqu’ils tournent respectivement autour de
49% pour le collège considéré et 50% pour le département, l’Académie et la France. Enfin à Fustel de
Coulanges, on note une présence féminine moindre puisque leur taux de présence ne dépasse pas
43%. Nos données locales mettent en évidence un taux de réponse féminin à hauteur de 47% ce qui
est un petit peu élevé que les proportions relevées au Triolo et à Fustel de Coulanges et un peu
moins élevé qu’à Carpeaux et à La Robertsau mais cela reste dans des proportions assez proches.
Interrogés sur la catégorie socio-professionnelle de leurs parents, toutes réponses
confondues, le nombre de « non-réponse » arrive en premier lieu avec 20% des réponses recueillies
pour les pères de collégiens. Puis ce sont les ouvriers (qualifiés ou non-qualifiés) qui arrivent
véritablement en second lieu avec 16% des réponses, puis 15,5% de cadres et 8,5% de professions
intermédiaires : enseignement, santé, fonction publique. On assiste dans nos résultats à une
représentation assez proche des ouvriers, une sur-représentation du nombre de cadres et une
sous-représentation des professons intermédiaires, au regard des caractéristiques socio-
professionnelles présentes dans le Nord-Pas-de-Calais et dans l’Alsace. En ce qui concerne les
mères, autant la proportion de « non-réponse » reste le premier taux de réponse, autant ce sont les
professions intermédiaires qui arrivent en seconde position avec 15,5%, puis les « sans profession »
avec 14% et les ouvrières (qualifiées et non-qualifiées) avec 13%. Même si la proportion de « non-
réponses » reste la 1ère des réponses choisie, il ressort malgré tout une légère sur-représentation de
collégiens dont la mère est employée de la fonction publique ou occupant une profession
intermédiaire avec à Valenciennes (35% de réponses), 25% à Villeneuve d’Ascq et 20% à Strasbourg
pour chaque établissement. En revanche, on note une petite prédominance à Valenciennes de 35%
de mères « sans profession », contre seulement 24% au Triolo et 20,5% pour chaque collège de
Strasbourg. Il ressort aussi une présence plus importante de mères employées de commerce parmi
les mères de collégiens à Strasbourg que dans les deux autres communes (avec 56% des réponses).
Enfin plus de la moitié des mères qui ont déclaré occuper des postes d’ouvrières sont à Strasbourg
(56% des réponses) contre 26% à Villeneuve d’Ascq et 17% à Valenciennes.
10
Ces chiffres remis dans chaque contexte régional (données INSEE) font ressortir un taux de
7,5% de cadres et de 14% de professions intermédiaires en 2006 en Alsace, alors que la part des
ouvriers tourne autour de 18% en 2006. Dans le Nord-Pas-de-Calais, les parts des cadres tournent
autour de 5%, des professions intermédiaires autour de 10%, quant à celle des ouvriers, elle est plus
élevée puisqu’elle tourne autour de 13%. La répartition des principales professions exercées par les
pères de famille de notre échantillon suit assez bien la proportion d’ouvriers présente dans les
deux régions mais diffère au niveau de la présence des cadres qui sont sur-représentés dans nos
collèges alors que les catégories intermédiaires sont sous-représentées. Quant aux professions des
mères des collégiens, elles suivent une répartition un peu différente, puisqu’elles sont sur-
représentées dans les professions intermédiaires, très nombreuses dans la catégorie sans
profession et dans les proportions d’ouvrières de leur région respective.
Tableau 1 et graphique 8 : les catégories socioprofessionnelles en Alsace, données INSEE 2006
11
Tableau 2 : les catégories socioprofessionnelles en Nord-Pas-de-Calais, données INSEE 2007
Population par catégorie socioprofessionnelle (Nord-Pas-de-Calais)
en nombre
Au 1er janvier 2007
Nord Pas-de-Calais Nord - Pas-de-Calais France
Hommes 1 235 298 702 141 1 937 440 30 769 678
Agriculteurs exploitants 5 776 6 556 12 332 387 216
Artisans, commerçants, chefs d’entreprise 32 086 18 453 50 539 1 201 817
Cadres, professions intellectuelles supérieures 93 493 33 704 127 197 2 672 968
Professions intermédiaires 135 073 70 234 205 307 3 406 976
Employés 77 226 45 948 123 173 2 020 833
Ouvriers 263 291 168 104 431 395 5 757 296
Retraités 201 188 128 735 329 923 5 964 791
Autres sans activité professionnelle 427 165 230 408 657 574 9 357 782
Femmes 1 329 081 754 411 2 083 492 32 804 374
Agriculteurs exploitants 2 469 2 616 5 085 158 087
Artisans, commerçants, chefs d’entreprise 13 503 9 670 23 173 476 643
Cadres, professions intellectuelles supérieures 50 941 16 393 67 334 1 628 563
Professions intermédiaires 137 522 65 430 202 952 3 646 981
Employés 252 902 146 762 399 664 6 658 253
Ouvriers 59 913 32 990 92 903 1 397 801
Retraités 254 672 153 620 408 292 7 154 446
Autres sans activité professionnelle 557 159 326 930 884 090 11 683 599
Total 2 564 379 1 456 552 4 020 931 63 574 051
Agriculteurs exploitants 8 244 9 172 17 416 545 303
Artisans, commerçants, chefs d’entreprise 45 589 28 123 73 712 1 678 459
Cadres, professions intellectuelles supérieures 144 434 50 097 194 531 4 301 531
Professions intermédiaires 272 595 135 663 408 258 7 053 958
Employés 330 128 192 710 522 837 8 679 086
Ouvriers 323 204 201 093 524 297 7 155 096
Retraités 455 860 282 355 738 215 13 119 237
Autres sans activité professionnelle 984 325 557 339 1 541 664 21 041 381 Source : Insee, RP 2007 (exploitation
complémentaire).
Quant aux taux de chômage, il atteint 10,5% en Alsace en 2007 et 15% dans le Nord et 11%
sur l’ensemble du territoire métropolitain. Les taux de chômage touchent 11,5% des femmes en
Alsace, 15,5% dans le Nord et 12% sur l’ensemble du territoire, ce qui en fait une catégorie de
personnes particulièrement impactée par le chômage dans ces deux régions.
Graphique 9 : taux de chômage des femmes et général en Alsace, Nord et en France, en 2007.
Données INSEE.
0% 2% 4% 6% 8%
10% 12% 14% 16% 18%
Alsace Nord France
Taux de chômage Taux de chômage des femmes
12
Les catégories socioprofessionnelles des parents des collégiens de notre échantillon ont été
également mises en perspective avec les données IPES qui nous permettent d’inscrire nos résultats
dans un contexte départemental, académique et national de l’ensemble des personnes scolarisant
leur enfant dans un établissement secondaire. L’analyse comparée des catégories
socioprofessionnelles présentes dans les établissements scolaires issus de notre terrain avec celles
des données fait ressortir au premier abord une proportion plus importante de CSP défavorisées que
les autres CSP dans nos 4 établissements : 32% à Fustel de Coulanges, idem à La Robertsau, et cela
est encore plus marqué à Carpeaux avec 39% et au Triolo avec 36%. Les chiffres IPES de nos deux
collèges du Bas-Rhin reste dans des proportions un peu moins élevées que dans le reste de la France
(33%), du département du Bas-Rhin (36%) et de la région Alsace (38%) alors que les proportions de
CSP défavorisées des deux collèges du Nord sont dans des proportions un peu plus élevées que la
moyenne nationale (33%) mais moins élevées que dans le reste du département (44%) et de
l’Académie (47%).
Cependant, nous avons rapproché les CSP dites « favorisées » et « bonnes » des classements
IPES car elles sont plus significatives au regard de nos résultats. Elles font également ressortir des
proportions importantes et dépassent même les taux de CSP défavorisés, puisqu’elles atteignent
respectivement pour nos quatre établissements : 31% à Fustel de Coulanges, 42% à La Robertsau,
40% au Triolo et 41% à Carpeaux. Le taux de présence de ces CSP favorisées est plus important à La
Robertsau (42%) que dans l’ensemble du département (38%), de l’Académie et en France (37%),
alors qu’à Fustel de Coulanges, il n’atteint que 31,5% et se trouve donc en sous-représentation. Les
deux autres collèges témoignent d’une présence plus marquée de CSP favorisées puisque Le Triolo
avec 40% et Carpeaux avec 41,5% sont au-dessus des moyennes départementales (32%),
académiques (30%) et nationales (37%). Ces quatre établissements mettent en évidence une
présence clivée et marquée des CSP favorisées et des CSP défavorisées, au détriment des CSP
moyennes.
Graphique 10 : caractéristiques des CSP en % des parents d'élèves de Fustel de Coulanges (Strasbourg) mis en perspective avec le département, l'Académie et la France - Année 2009.
Données IPES
0
5
10
15
20
25
30
35
40
45
% PCS FA % PCS FB % PCS MY % PCS DF % PCS NR
ETABL.
DEPARTEMENT
ACADEMIE
FRANCE
13
Graphique 11 : caractéristiques des CSP en % des parents d'élèves de La Robertsau (Strasbourg) mis en perspective avec le département, l'Académie et la France - Année 2009. Données IPES
0
5
10
15
20
25
30
35
40
45
% PCS FA % PCS FB % PCS MY % PCS DF % PCS NR
ETABL.
DEPARTEMENT
ACADEMIE
FRANCE
Graphique 12 : caractéristiques des CSP en % des parents d'élèves du Triolo (Villeneuve d'Ascq) mis en perspective avec le département, l'Académie et la France - Année 2009. Données IPES
0
510
15
20
2530
35
4045
50
% PCS FA % PCS FB % PCS MY % PCS DF % PCS NR
ETABL.
DEPARTEMENT
ACADEMIE
FRANCE
Graphique 13 : caractéristiques des CSP en % des parents d'élèves de Carpeaux (Valenciennes) mis en perspective avec le département, l'Académie et la France - Année 2009. Données IPES
0
510
15
20
2530
35
4045
50
% PCS FA % PCS FB % PCS MY % PCS DF % PCS NR
ETABL.
DEPARTEMENT
ACADEMIE
FRANCE
→ Les caractéristiques sociologiques des collégiens qui ont répondu, font ressortir une réalité assez
homogène entre les 4 établissements et une représentativité assez intéressante et exploitable de la
réalité locale dans ces différents établissements scolaires. La CSP des parents vient ensuite s’inscrire
de façon assez cohérente dans les paysages locaux et régionaux, ce qui devrait permettre de rendre
compte de discours et de pratiques locales en matière d’environnement et de changement
climatique et d’en dresser des portraits intéressants.
14
1.2. Les modes de déplacement des collégiens de notre échantillon
Interrogés sur la ou les manière(s) de se déplacer, 55% des collégiens interrogés répondent
venir au collège à pied (cela provient du fait que beaucoup sont citadins et résident près de leur
établissement scolaire), 28% répondent venir au collège en bus et 16% en tramway, qui sont tous
deux des transports collectifs plutôt citadins. 25% déclarent venir en voiture surtout pour des
raisons d’éloignement ou simplement de confort (pas de contraintes de transports collectifs ou
d’exposition aux intempéries) et 17% à vélo.
Un peu plus de collégiens du Triolo viennent au collège à pied (27% contre 24,5% à
Carpeaux et 24,5% pour chaque collège de Strasbourg). Les transports en commun incluant le bus et
le tramway concernent 30,6% de réponses pour chaque établissement de Strasbourg, 23,5% à
Valenciennes et seulement et 15% au Triolo. Si les déplacements en voiture n’arrivent qu’en 3ème
position, 43,5% se font à Valenciennes contre seulement 29% au Triolo et 14,5% pour chaque
collège de Strasbourg. Cela reprend assez bien les discours entendus des enseignants qui déclarent
qu’à Carpeaux, beaucoup de collégiens sont déposés par leurs parents en voiture alors qu’ils sont
tout aussi citadins que les collégiens des autres établissements qui, eux, privilégient les
déplacements individuels à pied et dans une moindre mesure à vélo (surtout au Triolo). Il faut aussi
noter qu’à Carpeaux, un ensemble de collégiens disent habiter hors agglomération mais dans des
zones, malgré tout, desservies par les transports en commun comme les bus ou le tram et à
Strasbourg, ce sont des citadins proches agglomération qui les utilisent.
Les raisons invoquées pour les choix de ces transports sont la proximité avec 23% des
réponses, l’éloignement avec 15% des réponses, l’unique moyen avec 10%, 9% disent privilégier un
mode de déplacement écologique et 7% la rapidité.
Graphique 14 : justifications des moyens de transport pour des raisons de modes de vie citadins ou
d’éloignement et de confort (en %)
0%
20%
40%
60%
80%
100%
Non
rép
onse loin
proc
he
prat
ique
rapi
dité
écol
o
selo
n cl
imat
(pl
uie/
sole
il)
envi
e
seul
moy
en
spor
t
hand
icap
écon
omiq
ue
autre
autres
scooter
métro
trotinette
tram
train
en roller
en voiture
à pied
à vélo
en bus
Non réponse
15
Parmi les 35,5% de collégiens qui déclarent venir à pied, 35% le font parce qu’ils habitent
près du collège, 10,5% par souci de l’écologie et 8% parce qu’ils ont envie. Parmi les 28% qui
viennent en transports en commun (bus ou tram), 22% optent pour ce choix qu’ils expliquent par
l’éloignement de leur habitat et 14% le choisissent parce que c’est le seul moyen. Chez les 16% de
collégiens qui viennent en voiture, 23% choisissent ce moyen parce qu’ils déclarent habiter loin et
9% parce que c’est rapide. Enfin 12% de collégiens qui ont répondu déclarent venir à vélo parce que
c’est écolo (15%) et proche (10%).
Le mode de transport pratiqué et déclaré choisi, pour sa proximité avec leur lieu d’habitat et
leur collège, concerne avant tout les collégiens du Triolo, à raison de 31% de réponses, suivi de près
par Strasbourg avec 25,5% de réponses puis seulement 18% à Valenciennes. A l’inverse, 35,5% de
collégiens de Valenciennes déclarent choisir un mode de transport lié à un habitat éloigné, 23% au
Triolo et 21% pour chaque établissement de Strasbourg.
Graphique 15 : des choix de modalités de transport fortement dépendants de la proximité ou de
l’éloignement de l’habitat des collégiens
0%10%20%30%40%50%60%70%80%90%
100%
Non ré
ponse lo in
proch
e
pratiq
ue
rapid ité
écolo
selon
clim
at (p
lu ie/so
leil)
envie
seul
moyen
sport
hand
icap
écon
omiqu
eau
tre
Valenciennes
Villeneuve d'Ascq
Strasbourg
Non réponse
Les choix de déplacements pour des raisons écologiques sont dits être privilégiés dans 31%
des cas à Valenciennes, 25,5% des cas pour chaque établissement de Strasbourg et 16,5% au Triolo.
Enfin le choix du mode de transport pour la rapidité est privilégié à 27% à Valenciennes, 25% pour
chaque collège de Strasbourg et 22% à Villeneuve d’Ascq.
→ Les répartitions des collégiens dans un établissement scolaire suivent, en théorie, une répartition
de proximité d’habitat. Il peut paraître, ainsi, assez logique, qu’une très majorité de collégiens
déclare venir à pied au collège. Ce qui est intéressant de faire ressortir, ce sont les raisons qu’ils
invoquent pour justifier ces choix de déplacement et comprendre dans quel contexte familial,
culturel ou conjoncturel ils s’inscrivent. Il ressort qu’une majorité de collégiens sont des citadins et
ont des modes de vie plutôt urbains mais leurs comportements peuvent varier. Dans le Nord, ils
privilégient davantage les déplacements à pied au Triolo (plus grande proximité du collège que dans
les autres cas) et en voiture à Carpeaux (plus d’éloignement apparemment, recherche de rapidité et
de confort), même si une autre partie de collégiens déclarent venir également à pied ou en
16
transports en commun. En Alsace, ce sont les transports en commun qui sont privilégiés, que le lieu
d’habitat soit proche ou éloigné.
1.3. Influence de l’offre de transports en commun significative dans le choix des
modalités de transport
Tableau 3 : Modes de déplacement des collégiens selon le type de transport et l’unité urbaine
La taille des unités urbaines où sont situés les collèges et l’offre de transport en commun
permet d’objectiver certains choix de mode de transports. Nous chercherons dans la suite de la
recherche aussi à mettre en perspective les résultats en fonction des enquêtes ménage et
déplacement réalisées sur les unités urbaines considérées (LMCU6 2006, Bas-Rhin 2009, Valenciennes
2010, exploitation en cours pour cette dernière).
6 LMCU : Ligne Métropole Communauté Urbaine.
Strasbourg Villeneuve d'Ascq Valenciennes Total
Non réponse 2,8 1,6 1,4 2,6
train 0,5 0,6 2,8 1,1
en bus 21,5 17,3 12,7 18,2
métro 11,8 2,8
tram 12,9 0,2 14,5 10,2
Total transports en commun 34,9 29,9 30 32,3
à pied 33,9 39,5 35 35,4
à vélo 16,8 6,1 4,6 11,1
en roller 2,1 0,8 0,2 1,3
trotinette 0,4 0,2 0,4 0,3
Total (marche et activités physiques) 53,2 46,6 40,2 48,1
en voiture 8,7 19,3 27,9 15,9
scooter 0,2 0,2 0,1
Total transport motorisé individuel 8,7 19,5 28,1 16
autres 0,4 2,2 0,4 0,8
Total 100 100 100 100
17
Fig. 1 : Carte du centre ville de Valenciennes et de la déserte en transport en commun (tramway et bus)
Les premiers éléments d’analyses font apparaître un écart entre les modes de déplacement
des collégiens des deux collèges strasbourgeois (préférence pour l’utilisation des transports en
commun et du vélo) avec ceux des deux villes du département du Nord qui sont assez semblables
entre elles et font ressortir une préférence pour les transports en commun et la voiture. Ainsi, il
apparaît que la plus-part des écarts s’explique par un moindre usage des transports en commun à
Valenciennes et Villeneuve d’Ascq (environ 5 points) et par un fort usage du vélo (environ 10 points)
à Strasbourg au profit de la voiture individuelle. On constate que le Tramway, nouvellement implanté
à Valenciennes (inauguration en 2006) est bien utilisé. Enfin nous notons que seule la commune de
Villeneuve d’Ascq est équipée d’un métro.
18
Fig. 2 : Carte du centre ville de Villeneuve d’Ascq et de la déserte en transport en commun (métro et bus)
Les plans de déplacement urbain sur La CUS (Communauté Urbaine de Strasbourg) accordent
une place importante à l’usage du vélo et à l’aménagement urbain nécessaire, ainsi 170 km de voies
sont aménagées (les Notes de l’ADEUS, Observatoire Vélo n°B-01, septembre 2001). Toutefois, dans
le cadre du Plan de Déplacement Urbain (PDU), la ville de Valenciennes a lancé en 2009 un plan Vélo
et la LMCU en a fait une priorité dans son nouveau PDU, soumis à enquête publique à l’automne
2010.
19
Fig. 3 : Carte du centre ville de Strasbourg et de la déserte en transport en commun (Tram et bus)
Une analyse plus fine des offres de transports sera réalisée ultérieurement. En effet, l’analyse
des motivations des collégiens dans le choix du type de transport ne laisse pas transparaître un
élément prépondérant que représente l’influence de la cellule familiale. Ainsi, il sera intéressant de
s’intéresser au critère d’influence des parents dans le choix de modalités de déplacement de leurs
enfants. En effet, l’ensemble des études menées dans le cadre de la mise en place de plans de
déplacement école, font apparaître que la sécurité des enfants est un des premiers motifs pour
l’usage de la voiture au détriment du vélo ou de la marche, même à proximité de l’établissement.
→ Au travers de ce premier éclairage très général, on constate que les collectivités locales portent
aux modalités de transport une attention toute particulière avec des critères de développement
durable et de prise en compte du changement climatique en intégrant les établissements scolaires
dans un dispositif dense (proximité des arrêts de transports en commun, aménagement des voies de
proximité, etc.). Toutefois les motivations à l’usage de ces transports et des modes de déplacement
obéissent à des critères subjectifs pour lesquels les arguments environnementaux ne sont pas
prioritaires dans les modalités de choix.
20
2. L’intérêt des collégiens pour l’environnement : des discours et des
pratiques sans grande implication
2.1. Quel intérêt de façon générale pour les questions environnementales ?
On observe que si un peu plus de filles tentent de définir le mot environnement, elles le
définissent plutôt comme faisant référence à « la nature » (17%), à « la terre » (6%), à « la faune et à
la flore » (5%). Dans une proportion moindre, elles sont plus nombreuses que les garçons à déclarer
que cela fait référence à « de la pollution ». Les garçons sont également nombreux à définir
l’environnement faisant référence à « la nature » (15%), à « la faune et à la flore » (5%), à « la terre »
(5%) et sont plus nombreux que les filles, même si c’est dans des proportions moindres, c’est-à-dire
que cela renvoie à ce qui nous entoure et constitue notre « cadre de vie ». Dans l’ensemble, les
collégiens rapprochent essentiellement l’environnement de la nature et des différentes formes de
vie qui la composent. De façon assez proche, le CREDOC, dans son étude7 de 2010, montre que les
Français associent le développement durable à « la protection de l’environnement »8 avec 62% des
réponses avec des associations de termes tels que « préserver la planète », « écologie » et « lutte
contre la pollution » notamment.
Graphique 16 : définition de la notion d’environnement selon les garçons et les filles (en %)
0 5 10 15 20 25 30 35
Non réponsenature
notre avenirà protéger
à rienDD
terrepollution
réchauffement climatiquetri
déforestationéco-système
couche d'ozonece qui nous entoure, lieu
faune et floreécologie
espèce en disparitioneauair
dangervie
effet de serrepaysage
autre
un garçon
une fille
Ce sont les collégiens de Carpeaux qui définissent le plus le mot environnement (27,5%),
suivis par ceux des collèges de Strasbourg (24,5% pour chaque établissement) et ceux de Triolo
(23,5%). Les collégiens de Carpeaux voient surtout la nature (9%), la terre (3%) et la faune et la flore.
7 HOIBIAN S., « Du Caddie à la poubelle : les Français sont plus sensibles aux emballages », Consommation et
modes de vie, CREDOC, n° 234, novembre 2010, p. 4. 8 HOIBIAN S., « Enquête sur les attitudes et comportements des Français en matière d’environnement »,
Enquête « conditions de vie et aspirations des Français », CREDOC, n° 270, novembre 2010, p. 15 et 17.
21
Graphique 17 : définition de la notion d’environnement selon le lieu d’habitat des collégiens (en %)
0% 20% 40% 60% 80% 100%
Non réponsenature
notre avenirà protéger
à rienDD
terrepollution
réchauffement climatiquecouche d'ozone
ce qui nous entoure, lieu de viefaune et flore
écologieespèce en disparition
eauair
dangervie
effet de serrepaysage
autre
Strasbourg
Villeneuve d'Ascq
Valenciennes
Tous les niveaux de classe définissent l’environnement comme étant la nature avec une
petite prédominance de la part des 6ème (9%) et des 5ème (8%). La terre et le lieu de vie sont plutôt
définis par les 4ème (3%), la faune et la flore par les 5ème et les 6ème. Cela provient des centres d’intérêt
des collégiens et du contenu de leurs programmes scolaires.
Graphique 18 : définition de la notion d’environnement selon le niveau de classe des collégiens (en
%)
0
5
10
15
20
25
30
35
natur
e
notre
ave
nir
à pr
otége
r
à rie
nDD
terre
pollu
tion
réch
auffem
ent c
limat
ique tri
couc
he d
'ozone
ce q
ui nou
s ento
ure,
lieu
de vi
e
faun
e et fl
ore
écolo
gie
espè
ce e
n dis
paritio
nea
u air vie
effe
t de se
rre
pays
age
autre
3ème (%)
4ème (%)
5ème (%)
6ème (%)
→ Globalement, 41 % de collégiens porte un intérêt moyen au thème de l’environnement. Si on
n’observe pas d’influence de sexe, de CSP des parents ou encore de région, les variables du niveau
de classe et de l’âge, quant à elles, montrent leur importance. Plus les collégiens avancent en âge,
plus leur intérêt pour l’environnement diminue. On peut corroborer ce fait par le discours des
enseignants des 4 établissements déclarant qu’à partir de la 4ème les élèves sont plus dissipés en
22
raison de changements dans leurs centres d’intérêt et aussi par l’entrée dans l’adolescence, l’individu
se centre sur lui-même.
Effet croisé de l’environnement et des films vus
On peut sans doute lier, en modérant bien sûr car les chiffres sont assez faibles, les notions
renvoyant au terme d’environnement au fait que des films en matière d’environnement aient été
diffusés et vus récemment par les collégiens. En effet, il ressort que deux fois plus de collégiens
ayant vu des films en matière d’environnement sont en capacité d’en donner une définition que
ceux qui n’en ont pas vu.
On observe que ce sont surtout les supports visuels, constituant des supports assez
facilement accessibles par les élèves, qui sont privilégiés et ce, tous sexe, âge et lieu d’habitat
confondus. Près de 18,5% des collégiens répondant la nature pour définir l’environnement se basent
sur des documentaires ou des émissions vues à la télévision et 12% sur des magazines. 62,5% des
collégiens déclarent avoir déjà regardé des films au cinéma et/ou à la maison ou à l’école sur
l’environnement.
47% des collégiens qui répondent avoir déjà regardé des films portant sur le thème de
l’environnement ne citent pas de titre particulier alors même qu’on leur pose la question. En
revanche, près de 20% citent Home, 15% Océans et 6% Microcosmos. On remarque que la diversité
des films regardés est très limitée et qu’elle est très conjoncturelle, entre l’impact médiatique de
Home, la sortie très récente d’Océans (automne 2009) au moment de la passation des
questionnaires. Mais dans l’ensemble, la diversité croissante des films ne semble pas provoquer
d’engouement particulier pour les collégiens. De plus, même si on sait qu’ils visionnent des films
qui peuvent être attribués à l’environnement, nous ne sommes pas sûrs qu’ils fassent le lien entre
la fiction et l’intérêt environnemental. Preuve en est : 2012 est perçu pour certains collégiens
comme étant un film annonçant la fin prochaine du monde. On n’observe pas de recul et de prise de
distance avec le sens des films.
Graphique 19 : principaux films cités par les collégiens sur le thème de l’environnement (en %)
0
5
10
15
20
25
NS
P
Ava
tar
Hom
e
Ver
ité q
uidé
rang
e
2012
Océ
ans
Mic
roco
smos
C'e
st p
asso
rcie
rLa
ter
re v
uedu
cie
l
Con
go R
iver
La m
arch
ede
l'em
pere
urN
os e
nfan
tsno
us
Ter
re e
t m
er
Oui (%)
Non (%)
Je ne sais pas (%)
23
Parmi les 62,5% de collégiens qui déclarent avoir regardé des films en matière
d’environnement, près de la moitié trouvent que c’est « intéressant », ¼ « très intéressant » et le
dernier ¼ « moyennement intéressant ». A partir de ce constat, on peut au moins dire que ces films
sont regardés plus par envie que par obligation.
Graphique 20 : intérêt des collégiens pour les films vus sur le thème de l’environnement (en %)
0
5
10
15
20
25
30
35
Non réponse pas intéressant moyennement
int éressant
int éressant t rès intéressant
Oui (%)
Non (%)
Je ne sais pas (%)
Au regard des chiffres recueillis dans nos questionnaires, on voit également que ce sont un
petit peu plus des garçons (52%) que des filles (45,5%) qui ont regardé ces films, qu’on observe un
nombre important de réponses à Valenciennes, à hauteur de 27%, puis cela n’atteint plus que 25% à
Strasbourg et 22% à Villeneuve d’Ascq. Parmi les collégiens qui ont déclaré avoir déjà regardé des
films sur l’environnement et le développement durable, on note une prédominance des 6ème qui
répondent avec 27% par l’affirmative, puis cela décroît avec les 5ème qui sont 25%, les 3ème avec 25%
et les 4ème avec 23%, même si ces variations restent malgré tout faibles d’un niveau de classe à
l’autre. On note peu d’influence de la classe sociale des parents de collégiens dans le fait de
regarder des films portant sur l’environnement.
→ Le fait de s’intéresser à l’environnement semble inciter à regarder des films qui y sont
consacrés. En revanche, on note que vient se greffer de façon importante une envie de regarder
ces films parce que c’est un outil visuel qui plaît aux jeunes, de façon générale mais l’impact et le
sens du thème traité ne semble pas tellement les questionner. Cela est à remettre dans un contexte
plus général du sens, de la crédibilité et de l’intérêt que les collégiens accordent aux différents films
qu’ils sont amenés à voir dans leur quotidien et à confronter nos analyses sémio-pragmatiques de
documents, qui ont permis de mettre en avant les obstacles à la compréhension des messages.
2.2. Analyse des images des questionnaires
Dans la suite de l’analyse de l’intérêt porté à l’environnement, nous avons présenté deux
séries de trois images aux collégiens, qui étaient libres de les définir selon les idées et les associations
d’idées qui leur venaient à l’esprit. Notre objectif est d’évaluer le vocabulaire employé par les élèves
pour caractériser des images portant un message sur l’environnement. Nous sommes aussi sensibles
à la nature du vocabulaire employé qu’à l’expression des sentiments, des émotions, voire des
24
directives, par les élèves ; pour cette raison l’analyse des réponses est effectuée sans recours au
traitement automatique. Le vocabulaire utilisé, que ce soit des termes ou des phrases, nous permet
de comprendre comment l’élève projette sur les scènes ou les objets (ours polaire, embouteillages
sur une autoroute, éoliennes, etc.), un sens de causalité, ou de la responsabilité de différents
acteurs. Nous cherchons aussi à évaluer une éventuelle évolution de la représentation du collégien
de la 6ème à la 3ème afin de dégager par exemple des liens entre son vocabulaire et les programmes
scolaires ou les activités de l’année, et afin de détecter un niveau de technicité croissante dans ses
propos. Nous souhaitons également croiser les différences de terminologie avec des variables tels
que le sexe et la réponse des élèves à la première ou à la troisième question (qui sont des indicateurs
d’un intérêt pour le sujet), identifier un « effet établissement » dans l’emploi d’un langage
particulier, et enfin comparer le choix de termes utilisés dans le questionnaire au langage des élèves
lors des entretiens individuels.
Il va sans dire qu’aujourd’hui, la communication visuelle entoure les jeunes dans leur
quotidien. Ils sont exposés à des logos, à des images publicitaires, à des reportages à la télé et des
images sur Internet. Ces images, tout comme celles sur les supports pédagogiques, véhiculent des
messages très variés sur les questions environnementales. De plus, comme les travaux sur la
sémiotique et la culture visuelle l’ont montré, l’image est polysémique, et donc la lecture de l’image
peut poser des problèmes pour le jeune, et en particulier lorsqu’il s’agit d’une image métaphorique.
Notre choix de deux images métaphoriques parmi les six images proposées nous permet de
comprendre quelles sont les aptitudes que les élèves mobilisent pour décrypter ces images
potentiellement difficiles.
Une autre difficulté de l’exercice de lecture des images pour l’élève vient de la consigne elle-
même sur le questionnaire, qui suggère qu’une description simple est recherchée et non une
véritable interprétation ; pour beaucoup d’élèves l’exercice est envisagé plutôt comme une forme de
« libre association ». Il faut donc rester prudent dans l’interprétation des résultats, d’autant plus que
beaucoup d’élèves ont préféré proposer un terme descripteur tel que « environnement », en
reprenant tout simplement le sujet du questionnaire, sans forcément creuser le sujet ni offrir une
interprétation personnelle. En plus, comme les résultats le montrent, bon nombre d’élèves ne font
pas l’association entre le sujet du questionnaire et le contenu des images ; on a noté que l’élève a
tendance parfois à sortir du thème de l’environnement dans ses descriptions des images, d’où la
présence de nombreuses réponses hors sujet. Et enfin, les deux séries d’images ne permettent pas
de faire une analyse comparative entre les quatre collèges pour toutes les images, puisque les
collégiens n’ont pas tous traité la même série d’images. Cette analyse sera complétée ultérieurement
par les résultats au questionnaire provenant du collège Fustel de Coulanges, indisponibles lors de ce
travail sur la partie consacrée aux images.
La première série de trois images a été distribuée dans les collèges Carpeaux (Valenciennes)
et La Robertsau (Strasbourg), la seconde au Triolo (Villeneuve d’Ascq) et à Fustel de Coulanges
(Strasbourg).
25
Image 1 : une sensibilisation des élèves à l’importance des moyens écologiques de déplacement.
Quelque soit le niveau du collégien, et quelque soit l’établissement, les termes choisis par les
élèves pour décrire cette image se sont centrés sur un noyau de trois concepts : « déplacement
écologique », « transport non polluant », et « vélo plutôt que la voiture ». On ne trouve pas de
nuances ni de différences notables entre les niveaux de la 6ème à la 3ème, et donc on peut parler d’une
grande homogénéité et d’une stabilité dans les termes évoqués par cette image. Il est à noter
pourtant que chez certains élèves de niveau 5ème fréquentant les collèges Carpeaux (Valenciennes) et
La Robertsau (Strasbourg) (où il existe une forte dynamique environnementale), la notion
« d’économies d’essence » est également mentionnée, alors que cette notion ne figure pas dans les
réponses des élèves d’autres niveaux, et que chez quelques élèves niveau 3ème, est évoquée la
« génération non polluante » (certainement par rapport au fait qu’il s’agit de jeunes dans la photo),
et donc une idée de la différence de comportement entre générations.
Image 2 : du constat de la pollution vers une responsabilisation
Les termes proposés par les collégiens pour décrire cette image sont pour la plupart soit « la
pollution » soit « les bouchons sur l’autoroute ». On peut donc parler d’un large consensus par
rapport à la terminologie choisie, et donc par rapport à l’interprétation de cette photo. Ce sont les
élèves du collège Carpeaux qui ont fait mention de « CO2 » pour décrire cette image, et ce qui nous
paraît encore plus significatif, chez certains élèves de 4ème de Carpeaux, à la différence des élèves de
6ème qui font le constat simple de la présence de la pollution, on retrouve quelques reproches à
l’encontre des « riches », des « soumis » ou des « moutons » (et donc envers la société de
consommation). Nous constatons donc un degré d’engagement plus marqué dans les termes utilisés
par les élèves de 4ème au collège Carpeaux, ce qui fait contraste aux réponses données par les élèves
de La Robertsau par exemple, qui restent neutres et constatifs plutôt qu’évaluatifs. Il est à noter que
si les collégiens de Carpeaux sont critiques envers les automobilistes, les données du questionnaire
montrent que ce sont eux qui ont le plus recours à ce mode de transport que les collégiens des trois
26
autres établissements. Les collégiens de La Robertsau se sentent peut-être moins concernés par les
embouteillages car ils se déplacent plus facilement en transport en commun.
Image 3 : une métaphore ouverte, difficile à traduire
Avec cette troisième image, nous avons constaté que les élèves du collège Carpeaux ont su
déchiffrer la métaphore avec plus d’aisance que les collégiens de La Robertsau, et ce, à tous les
niveaux disponibles lors de notre analyse, c’est-à-dire, de la 6ème à la 4ème. Dans les classes de 6ème,
40% des élèves du collège Carpeaux ayant proposé des termes pour décrire cette image ont su
identifier le sens de la métaphore avec des phrases de type « protégeons la terre », ou « la terre est
entre nos mains » ou encore « la terre est fragile – à nous de la sauver », alors que seulement 20%
des élèves de 6ème du collège La Robertsau ayant répondu à cette question ont déchiffré la
métaphore. Cet écart se réduit pour les niveaux de 5ème à 4ème, car en 5ème, si 50% des élèves de
Carpeaux ayant proposé une description de cette image ont correctement déchiffré le sens de la
métaphore, 30% des élèves de La Robertsau ont su l’interpréter, et au niveau 4ème, la différence est
encore moins remarquable, avec 40% d’interprétations correctes pour les élèves de Carpeaux, et
36% de réponses correctes pour les élèves de La Robertsau. Il semblerait ici qu’on pourrait signaler
un effet établissement pour le collège Carpeaux, qui peut être lié à la nature des activités menées au
sein de cet établissement, notamment en matière d’environnement.
Image 4 : un discours sur les éoliennes lié aux programmes d’enseignement
Cette quatrième photo (1ère de la seconde série donnée aux collégiens du Triolo (Villeneuve
d’Ascq) et Fustel de Coulanges (Strasbourg)), représentant un champ d’éoliennes, permet de tracer
une évolution dans les réponses des élèves du collège Triolo liée au programme de SVT, car si en 6ème
les termes choisis par les élèves sont majoritairement des mots qui identifient l’objet ou ses
applications (« éoliennes », « électricité », « énergie »), on constate, en 3e, année où figure sur les
27
programmes un projet interdisciplinaire sur la santé et l’environnement, une dominance des termes
plus précis tels que « énergie renouvelable » ou « énergie durable ». Il est à noter également que le
niveau de la 5ème produit des réponses qui montrent un certain engagement voire un avis exprimé
sur cette source d’énergie, comme on le voit dans les réponses telles que « ça nous sert beaucoup,
mais les gens n’aiment pas », « à du bruit qui gène les habitants », ou encore « c’est moche mais
c’est écologique ». Cette connaissance de l’aspect polémique des éoliennes est remplacée, pour les
élèves de 4ème et 3ème, par des réponses techniques. L’on peut se demander si, malgré l’effet de
l’enseignement en 3ème qui permet aux élèves de reconnaître et de situer cette source d’énergie dans
le cadre du développement durable, l’absence d’éléments de débat ou de polémique citoyenne lors
de ces enseignements transparaît en partie dans ces réponses « technicistes » mais cette hypothèse
reste à vérifier.
Image 5 : une image métaphorique qui suscite un sens de menace potentielle mais évitable, chez
les jeunes
Cette deuxième image métaphorique de notre corpus a généré des réponses d’une assez
grande hétérogénéité (seules sont prises en compte les réponses des élèves du Triolo pour l’instant ;
ces résultats seront ultérieurement croisés avec les réponses données par les élèves du collège Fustel
de Coulanges). La difficulté posée par la compréhension de cette métaphore conduit certains élèves
à ne retenir que la notion de recyclage. Beaucoup de termes proposés tournent autour de la notion
de « recyclage », « recycler » ou encore de « tri ». L’idée d’un danger imminent est aussi exprimée
par les élèves qui ont choisi des termes tels que « la terre se détruit », la « terre va à la poubelle ».
Pourtant, certains élèves tentent exceptionnellement d’interpréter ces deux composantes ensemble
(tri – menace) en proposant une sorte d’alternative ou rappel à l’ordre : « si on continue comme ça la
Terre deviendra un déchet », « il faut recycler pour sauver notre planète », « la terre va devenir une
poubelle si on fait rien » ; ce type de réponse se trouve dans les trois niveaux de 5ème, 4ème et 3ème
mais il est absent chez les élèves de 6ème.
28
Image 6 : une image sans ambiguïté : l’ours polaire
A la différence des cinq autres images du corpus, celle-ci semble avoir suscité, sans variation
significative, une même série de réponses chez les élèves du collège Triolo, qui l’ont associé à trois
signifiés, quelque soit leur niveau : « changement climatique », « fonte des glaces » et « animaux en
voie de disparition ». L’uniformité des réponses peut s’expliquer par la circulation des images de
l’ours polaire, devenu emblématique du problème du changement climatique et de ses effets sur
certaines espèces. Il reste en effet peu de marge pour une interprétation subjective ou personnelle,
quand la médiatisation de certaines images « types » leur confie une valeur plus symbolique
qu’informative.
→ Quelle conclusion peut-on tirer de ces analyses ? Il semble que certaines images renvoient à des
changements de comportements à avoir et elles sont marquées par une certaine part de
culpabilisation. Ces idées semblent avoir été assez intégrées par une partie de nos collégiens
interrogés qui se sont approprié certains de ces sens. Les images les moins strictement connotées
changement climatique et développement durable telles que « les jeunes à vélo » et les « éoliennes »
leur laissent plus de liberté d’analyse et de libre-association. Ils ne manquent pas de s’en saisir même
si cela reste dans des proportions limitées et des termes assez peu variés.
On note également des différences d’expression dans chaque image selon le niveau de classe des
collégiens, provenant des sujets qu’ils ont abordé progressivement dans les programmes scolaires et
également quelques différences selon qu’il y ait ou non une présence plus marquée d’un
engagement environnemental dans leur établissement scolaire, au travers d’ateliers ou de club
environnement, notamment.
3. Un intérêt pour le changement climatique qui est corrélé à l’intérêt pour
l’environnement
Au-delà des images et des discours des collégiens sur l’environnement en général qui nous
ont permis d’introduire le thème de l’environnement et celui du développement durable dans un
premier temps, nous avons abordé ensuite la question du changement climatique. Nous avons choisi
d’aborder cette question dans un second temps afin de ne pas l’amener trop brutalement et de ne
pas biaiser les résultats dans un contexte où l’on en parle beaucoup et ce pas toujours de façon très
neutre. Les réponses que nous avons pu recueillir témoignent d’avis voulus plus objectifs.
29
Les élèves disent percevoir le changement climatique comme d’autant plus important pour
leur avenir qu’ils sont intéressés par le thème de l’environnement et inversement, la corrélation
entre ces deux variables permet de montrer que plus les élèves disent être intéressés par
l’environnement, plus ils ont entendu parler de ce sujet par leur professeur, on peut donc penser
que plus ils sont intéressés, plus ils ont prêté attention au sujet.
Graphique 21 : importance du changement climatique, selon les collégiens, pour leur avenir et
l’intérêt qu’ils portent à l’environnement
0
5
10
15
20
25
30
Non ré
pons
e
pas
du to
ut
un p
eu
moyen
beau
coup
énor
mém
ent
Oui (%)
Non (%)
Je ne sais pas (%)
Dans l’ensemble, 66% des collégiens déclarent que le changement climatique est un sujet
important pour l’avenir et 11% qui ne trouvent pas cela important pour leur avenir. Il est,
cependant, intéressant de noter le nombre conséquent de collégiens, autour de 21,5%, ne sachant
pas se déterminer sur l’importance de ce sujet pour leur avenir.
Graphique 22 : estimation de l’importance que peut jouer le changement climatique pour l’avenir
des jeunes collégiens (en %)
0
10
20
30
40
50
60
70
Non réponse Oui Non Je ne saispas
Le changementclimatique te semble-t-ilun sujet important pourton avenir ? (%)
Ces chiffres sont assez représentatifs des positionnements flous entendus dans la société, à
savoir d’un côté les personnes qui accordent leur confiance aux discours et arguments du GIEC
annonçant un changement climatique, de l’autre celles qui émettent des doutes sur ces analyses et
privilégient les discours des climato-sceptiques, notamment, et au final un nombre non négligeable
de personnes qui ne savent pas comment se positionner.
30
Les filles, à hauteur de 69%, sont légèrement plus nombreuses que les garçons (65,5%) à
considérer le changement climatique comme un sujet important pour leur avenir. Cependant,
l’influence du sexe reste faible ainsi que l’âge, l’influence de la région ou encore la catégorie
socioprofessionnelle dans l’intérêt porté au changement climatique.
→ On peut faire un lien entre l’importance du changement climatique considéré pour l’avenir et la
connaissance de projets menés au collège. En effet, plus ils font le lien entre changement climatique
et leur avenir, plus ils prêtent attention aux actions menées (club ou atelier environnement, sorties
thématiques, etc.) dans leur établissement. Pourtant, même s’il existe un lien, on ne peut pas dire
que la considération du changement climatique par rapport à leur avenir conduit les élèves à
s’investir davantage dans les projets menés. On observe un taux élevé de non-participation. On
constate également que parmi les élèves ne sachant pas si le changement climatique peut être
important pour leur avenir, une grande majorité d’entre eux ne savent pas s’ils ont participé à des
projets. On peut penser que le lien ne se fait pas encore pour eux et que les notions de
changement climatique, de projet environnemental restent assez vagues dans leur esprit.
4. Les pratiques concrètes d’intérêt pour l’environnement et le
développement durable au collège
Dans l’ensemble, de nombreux élèves savent que des projets portant sur l’environnement
sont menés dans leur collège. Lorsqu’ils savent que des projets sont menés, ils savent dire de quel
type de projet il est question et ils semblent en avoir une connaissance au moins superficielle du
contenu. Pourtant, la participation s’avère faible (22,5% des réponses de collégiens déclarant
participer à ces ateliers), voire marginale selon les établissements (par exemple, au Triolo, le club
environnement a attiré une dizaine de personnes, au total, sur l’année 2009-2010).
La faible participation ne semble pas liée à un manque d’information de la part des élèves
mais plutôt à une absence de volonté d’y participer affichée comme telle par 18,6%. Tous collèges
confondus, 27% des élèves participant à un projet disent le faire parce que le sujet leur semble
important et 28% parce qu’ils ont envie d’y participer. 20% des élèves évoquent une participation
liée à une obligation scolaire. On observe également une petite différence de participation selon
l’âge et le niveau de classe, notamment que la participation est légèrement plus marquée en 5ème
avec un taux de participation de 27% que les autres niveaux de classe. Les élèves qui participent à
ces ateliers ou clubs retiennent davantage les informations formulées sous forme de discours, à
hauteur de 41% et 17% pour ce qui est des comportements à tenir. Ils retiennent assez logiquement
des informations lorsque leur intérêt pour l’environnement est important.
En revanche, parmi les collégiens participant à des actions ou projets environnementaux au
sein de leur établissement, 25% d’entre eux définissent le mot « environnement » par ordre de
réponse comme étant ce qui fait référence à « la nature », puis à « la terre », à « la faune et à la
31
flore » et enfin à ce qui nous entoure, ce qui constitue « le cadre de vie ». Il ressort que globalement
le peu de collégiens, qui déclarent participer à des projets, se représentent l’environnement
comme étant surtout le milieu naturel qui les entoure.
→ En somme, on observe donc que l’intérêt pour l’environnement augmente la connaissance de
ces projets, la participation à ces mêmes projets ainsi que la mémorisation d’informations et de
discours, plus que de comportements écologiques. Pourtant, ces résultats sont à relativiser en
raison de la très faible participation des élèves. Les élèves peuvent donc déclarer l’environnement
comme un sujet qui les intéresse sans pourtant participer aux projets qui sont en lien avec ce
thème. De plus quand les collégiens disent s’intéresser à l’environnement de façon importante, ils
déclarent dans le même sens visionner un certain nombre de films consacrés à ce thème.
En incluant les cours du programme scolaire et aussi les actions et autres projets
environnementaux, les collégiens qui ont entendu parler d’environnement l’ont été en SVT et en
histoire-géo le plus souvent. Ce sont les 6ème qui citent surtout ces deux disciplines. Les 5ème citent en
premier lieu également la SVT, puis la physique-chimie et enfin la technologie, les 4ème la SVT, la
physique-chimie puis l’histoire-géo, enfin les 3ème citent avant tout la SVT et la physique-chimie,
devant l’histoire-géo. Les autres disciplines, malgré les témoignages des enseignants rencontrés et de
leurs projets mis en place, ne semblent pas être très connus ou reconnus comme menant des projets
concernant l’environnement ou le développement durable. On ne note pas de différence notable
entre les garçons et les filles dans l’énonciation des disciplines abordant les questions
d’environnement ou de développement durable.
Graphique 23 : les disciplines citées en matière d’environnement selon les niveaux de classe (en %)
0123456789
10
Non ré
pons
e
Educa
tion
civiq
ueSVT
Physiq
ue-C
himie
Mat
hém
atiqu
es
Techn
o
Franç
ais
Histoire
-Géo
Docum
enta
liste
(au
CDI)
En LV
1Aut
re
6ème (%)
5ème (%)
4ème (%)
3ème (%)
Les collégiens des deux collèges de Strasbourg citent moins de disciplines où l’on aborde les
questions d’environnement et de développement durable que les collégiens du Nord. Cependant, ils
citent majoritairement par ordre décroissant la SVT puis l’histoire-géo, la physique-chimie et la
documentaliste. A Carpeaux (Valenciennes) où le plus fort taux de réponses est apporté, les
32
disciplines citées sont, majoritairement, la SVT, la physique-chimie, l’histoire-géo et les
mathématiques. Dans ce collège, le fort taux de réponses et le poids disciplinaire est directement lié
aux figures emblématiques des enseignants locaux et de leur engagement très fort et connu comme
tel en matière de développement durable et de changement climatique. Enfin au Triolo (Villeneuve-
d’Ascq), les taux de réponses sont un peu plus élevés que ceux de Strasbourg mais on enregistre les
mêmes disciplines, respectivement : la SVT, la physique-chimie et l’histoire-géo, enfin la
documentaliste.
Graphique 24 : les disciplines abordant l’environnement selon les collèges selon les discours des
collégiens (en %)
0
5
10
15
20
25
30
35
40
Non ré
pons
e
Educa
tion
civiq
ueSVT
Physiq
ue-C
himie
Math
émati
ques
Techno
Franç
ais
Histoi
re-G
éo
Docum
enta
liste
(au
CDI)
En LV
1
Autre
Valenciennes (%)
Villeneuve d'Ascq (%)
Strasbourg (%)
→ Des différences de discipline ressortent selon les différentes régions ainsi que l’idée qu’à
engagement égal, les expressions et mises en perspectives de ces idées sont très différentes
suivant les enseignants. Par exemple, dans le Nord, ce sont les sciences expérimentales qui sont
très identifiées comme porteuses d’actions environnementales comme la physique-chimie, avec
des projets concrets. Leur objectif vise surtout à faire changer les comportements et à faire des
collégiens des éco-citoyens en termes de civisme. En Alsace, les projets sont plutôt portés par les
sciences humaines, même si le moteur reste la SVT (pour l’aspect concret des expériences), le
projet est très vite relayé et appuyé par la documentaliste et le professeur de français. L’idée est de
responsabiliser et d’amener à des prises de conscience sur le long terme des collégiens.
5. Les pratiques concrètes en matière d’environnement à la maison
Concernant les comportements écologiques, on observe que plus les élèves se disent
intéressés par l’environnement, plus ils déclarent trier les déchets à la maison. La réalisation du tri
semble agir en effet miroir entre les parents et les enfants, c’est-à-dire que si les parents impulsent le
tri des déchets ou bien les enfants, parce qu’ils en ont entendu parler dans les médias ou en milieu
scolaire, il y a un effet d’impulsion qui est émis et qui s’intègre dans les mœurs et habitudes
33
quotidiennes de la famille. Et aujourd’hui dans un contexte où l’idée de trier s’est considérablement
diffusée dans la société, un certain nombre de jeunes semblent avoir intégré cette idée de trier et
disent le faire de façon presque naturelle comme un apprentissage ordinaire sans action réflexive.
Graphique 25 : pratique du tri en fonction de l'intérêt porté à l'environnement (en %)
0
5
10
15
20
25
30
35
l'env
ironn
emen
tne
m'in
tére
sse
pas
du to
ut
l'env
ironn
emen
tm
'inté
ress
e un
peu
l'env
ironn
emen
tm
'inté
ress
em
oyen
nem
ent
l'env
ironn
emen
tm
'inté
ress
ebe
auco
up
l'env
ironn
emen
tm
'inté
ress
eén
orm
émen
t
Non réponse (%)
Je trie les déchets à la maison(%)
Je ne trie pas les déchets à lamaison (%)
Dans l’ensemble les élèves sont assez nombreux à déclarer trier à la maison et ce sans
influence de variable de sexe ou de la région où ils habitent. Il est important de préciser qu’une très
grande majorité de collégiens interrogés vit en milieu urbain et qu’une des particularités de la vie
urbaine est de ne pas pouvoir offrir la même possibilité de tri des déchets que dans des zones plus
décentrées et pavillonnaires notamment. Par exemple, se rapprochant des particularités de la région
parisienne, les habitants d’appartements de grande ville ont « des logements de taille plus restreinte
et de locaux à poubelles parfois exigus »9, ce qui rend compliqué le tri et réduit même la possibilité
de le faire parfois. L’âge, en revanche, révèle un léger affaiblissement des pratiques (autour de 23%)
vers la 3ème, alors que ce taux était entre 25,5% en 6ème et 26% en 4ème. La CSP semble avoir une
petite influence, même si elle reste à affiner. En effet, quand les parents exercent des professions de
cadres ou d’ouvriers, on enregistre davantage de réponses selon lesquelles leurs enfants trient.
D’après les données de notre étude, les collégiens semblent trier surtout les déchets courants tels
que les emballages plastiques, cartons, papiers et verre.
9 HOIBIAN S., Du Caddie à la poubelle : les Français sont plus sensibles aux emballages », Consommation et
modes de vie, CREDOC, n° 234, novembre 2010, p. 3.
34
Graphique 26 : pratique du tri des déchets en fonction de l’intérêt porté au changement climatique
(en %)
0
10
20
30
40
50
60
Oui, lechangementclimatique estimportant pourmon avenir (%)
Non, lechangement
climatique n'estpas important
pour mon avenir(%)
Je ne sais pas(%)
Non réponse (%)
Je trie les déchets à la maison(%)
Je ne trie pas les déchets à lamaison (%)
La pratique du tri s’avère encore plus fréquente lorsque le changement climatique est
considéré comme un sujet important ou même l’environnement de façon générale. Nous pouvons
cependant nuancer ce discours car il est loin d’être majoritaire. En effet, si on reprend les raisons que
les collégiens invoquent dans le fait de trier leurs déchets, c’est le fait que leurs parents leur
imposent de trier qu’ils le font ou alors ils le font sans réfléchir comme un acte banal à réaliser au
sein de la sphère familiale. L’étude du CREDOC10 de 2010 reprend bien cette idée selon laquelle les
jeunes notamment de moins de 25 ans faisaient partie des « moins assidus à trier leurs détritus »
parce qu’une « partie d’entre eux étant encore chez leurs parents, ils se sentent moins responsables
de leurs tâches quotidiennes » mais que désormais ils s’y mettent de plus en plus. Le tri des déchets
semble bien se diffuser de façon continue dans la société et notamment auprès des jeunes dans un
mouvement de fond mais assez lent.
→ Mis en perspective avec les résultats et chiffres d’autres études comme celles du CREDOC, notre
échantillon de répondants s’aligne dans le mouvement général global du contexte français qui est
celui d’accroître les actes de tris des déchets. Même si les jeunes sont connus pour trier un peu
moins que leurs aînés, ils intègrent les actes de tri de plus ou moins bonne grâce qu’ils
reproduiront sans doute plus tard quand ils seront autonomes financièrement, notamment. De
plus, on note que le fait de trier augmente ainsi que le nombre et le type de produits triés qui vont
croissant également mais les chiffres restent à améliorer. Une des difficultés freinant l’amélioration
du tri repose sur la complexité et la méconnaissance des habitants sur « les règles à respecter et
aussi la complexité à se rendre dans les déchetteries »11.
10
HOIBIAN S., « Enquête sur les attitudes et comportements des Français en matière d’environnement », Enquête « conditions de vie et aspirations des Français », CREDOC, n° 270, novembre 2010, p. 32-33. 11
HOIBIAN S., « Enquête sur les attitudes et comportements des Français en matière d’environnement », Enquête « conditions de vie et aspirations des Français », CREDOC, n° 270, novembre 2010, p. 36.
35
Conclusion de cette partie
Il ressort globalement de nos données quantitatives, qui seront ensuite enrichies, affinées et
nuancées par des données qualitatives, que les collégiens portent assez peu d’intérêt spontanément
pour l’environnement, ce que leurs actes témoignent et illustrent. Par exemple, on ne note pas de
lien apparent entre le tri et la conscience environnementale.
On peut proposer comme hypothèses qu’ils sont peut-être trop jeunes12 et qu’ils expriment
encore une sorte de mimétisme13 lié aux discours et autres comportements de leurs parents. On
peut avancer l’hypothèse également qu’ils cherchent à donner une certaine image d’eux puisqu’on
les interroge sur un thème qu’ils n’ont peut-être pas forcément envie d’aborder spontanément, etc.
et qu’en plus ils sont mis dans une situation qu’ils peuvent prendre comme un jeu, sortant du cadre
scolaire quotidien habituel14.
De plus ces derniers, interrogés ici par questionnaire, ce qui a été renforcé par leurs discours
dans les entretiens, s’inscrivent dans les générations nouvelles, montrant que les craintes exprimées
en matière d’environnement aujourd’hui ne semblent pas constituer une menace pour leur avenir
personnel mais concernent plutôt l’avenir de leurs enfants voire de leurs petits-enfants. Ils se
projettent peu (effet d’âge ou situation conjoncturelle généralisée à l’ensemble de la société dans un
contexte enraciné de crise économique et d’inquiétudes environnementales) et aussi peut-être parce
que le mode de vie que leurs parents et les influences sociétales leur tracent depuis leur enfance
semble difficile à remettre en question et demande un certain effort de projection. Il sera important
d’interroger ces questions dans l’exploitation de nos données qualitatives afin de déterminer quel
sens recouvre les discours des collégiens.
12
GALLAND O., (2001), Sociologie de la jeunesse, Paris, Armand colin. 13
Le mimétisme en sociologie et plus particulièrement en anthropologie a fait l’objet d’un ensemble de recherches menées par René Girard. Ses ouvrages montrent que les imitations dans les comportements sont constitutives d’échanges réciproques entre les hommes mais qu’ils sont également sources de conflits et donc ils comportent à la fois autant d’éléments positifs que négatifs mais importants à prendre en considération. 14
DUBET F., MARTUCELLI D., (1996), A l’école. Sociologie de l’expérience scolaire, Paris, Seuil.
36
II. Analyse des entretiens15 réalisés auprès des enseignants :
Pour comprendre comment les actions, projets et cours portant sur le développement
durable et le changement climatique sont abordés, il importe de revenir sur ces relations qui lient les
personnes entre elles (équipe pédagogique, équipe administrative, collégiens, etc.), ainsi qu’avec la
structure organisationnelle que constitue le collège. Ainsi, avant de présenter l’analyse des données
issues des entretiens, nous aborderons une approche globale des établissements, inspirée de la
sociologie des organisations. Puis, à travers les entretiens menés dans les quatre établissements,
nous étudierons la manière dont se positionnent les différentes équipes pédagogiques et
administratives prises individuellement au sein d’un établissement scolaire afin d’en faire ressortir
les jeux d’acteurs et les logiques de fonctionnement propres à ces structures ainsi qu’aux personnes
la composant après être revenus succinctement sur le fonctionnement des logiques
organisationnelles de façon plus générale.
1. Vue d’ensemble sur les choix et caractéristiques de ces 4 collèges
Le collège Le Triolo à Villeneuve d’Ascq est un établissement situé en zone urbaine, à 20
minutes en métro de la gare SNCF. Comme il s’agit d’un collège accueillant un certain nombre
d’enfants handicapés en plus des autres, l’établissement est construit de plain-pied. Le collège du
Triolo est implanté dans un quartier, certes, résidentiel mais socialement assez modeste. On le voit à
la proximité de bâtiments HLM. On note aussi de petites zones pavillonnaires et la présence de
l’université de Lille 1, à 5 minutes à pied. Il accueille les enfants du quartier Triolo et de celui de
Lezennes. C’est un bon collège public de l’académie de Lille. Ce collège est connu pour son
volontarisme et son dynamisme pédagogique, notamment en matière d’environnement. L’équipe
pédagogique a permis, apparemment sur demande de certains élèves, la création d’un atelier
environnement pour les élèves sensibles aux questions environnementales. Elle a également réalisé
un « voyage développement durable » à Fribourg. La Principale, soutenue par une équipe
pédagogique désireuse de promouvoir des messages en faveur du développement durable, semble
vouloir s’investir dans cette problématique. Pour pouvoir répondre aux interrogations
environnementales, des spécialistes peuvent être sollicités pour mener une séance d’atelier :
associations, chercheurs, etc.
Le collège Carpeaux à Valenciennes, est implanté à 300 mètres de la gare, en centre ville. Il
attire les enfants des quartiers voisins, à la fois issus de quartiers aisés et aussi de quartiers plus
défavorisés. C’est le collège le plus dynamique en matière d’environnement dans le département. Il
possède notamment une station météo installée en mai 2009 dans la cour du collège. Il s’agit d’un
outil permettant de faire de la bio-surveillance, notamment grâce à l’intervention de personnes
extérieures telles que des associations (ATMO Nord-Pas-de-Calais), notamment. Dans ce collège,
l’équipe pédagogique travaille beaucoup avec le réseau de surveillance de Qualité de l’air. Elle a
également mené récemment une enquête sur l’air et la santé auprès de la population de
15
La grille d’entretien qui a servi pour le recueil de données est jointe en annexes.
37
Valenciennes. L’élément déterminant pour comprendre cet engouement pour le développement
durable semble provenir de certains enseignants qui constituent des éléments moteurs, à la fois
scientifiques et experts motivés, sensibles à l’environnement et désireux de partager leurs
connaissances et leurs préoccupations avec leurs élèves. De plus, ils ont su tisser un réseau de
relations et de connaissances entre les acteurs locaux pour développer leurs connaissances en
matière de développement durable et favoriser la diffusion de leurs messages.
Le collège de La Roberstau à Strasbourg est situé en limite de périphérie de la ville mais il est
accessible en 20 minutes de bus depuis la gare. Il est implanté dans un quartier résidentiel, proche de
zones inondables et de sites industriels classés Seveso et entouré par une forêt au nord du quartier.
On trouve à proximité des espaces résidentiels, des espaces verts, une zone industrielle, une voie
rapide, etc. De nouveau, nous sommes dans un collège sensible aux questions environnementales.
Celui-ci possède un agenda 21 scolaire, qui s’inscrit lui-même dans un contexte communal possédant
un agenda environnemental (PCT, Agenda 21, etc.). Dans cet établissement un certain nombre
d’événements scientifiques et environnementaux sont organisés, par exemple, en 2008-2009, une
classe de 6ème a participé aux 8ème Trophées de l’environnement. Cet événement a été encadré à la
fois par la documentaliste, l’enseignante chargée du sport et celle chargée de la SVT qui ont
demandé, notamment, la participation de l’ASPA (Association pour la Surveillance et l’Etude de la
Pollution atmosphérique en Alsace).
Quant au dernier collège, Fustel de Coulanges, il est situé, dans le centre ville et quartier
historique de Strasbourg, à 10 minutes à pied de la gare. Ce collège accueille, comme à Carpeaux, des
collégiens provenant des quartiers alentour mixant les origines sociales mais laissant une
prédominance de classes sociales défavorisées. Cet établissement mène des actions
environnementales portées par les enseignants de sport, de SVT et de maths. Leurs initiatives sont
relayées par la documentaliste du CDI. Par exemple, depuis l’année 2008-2009, un atelier
environnement a été créé à destination des élèves de 6ème, à l’issue duquel un journal a été rédigé.
L’idée est de poursuivre cet atelier sur 4 ans puis de renouveler les actions et autres projets.
Nous avons choisi 4 établissements qui font davantage preuve d’initiatives
environnementales16 que d’autres même si dans chacun de ces établissements choisis, les actions et
autres projets sont menés différemment et font preuve d’un investissement différent sur ces
questions. En effet, nos 4 collèges font preuve d’un volontarisme politique réel et reconnu, validant
les actions et autres projets menés et marque le caractère innovant de certains acteurs
(action/pédagogie de besoin de matériels). Tous les enseignants des équipes pédagogiques que nous
avons rencontrés ne s’investissent pas de la même manière dans les projets EEDD. La proportion est
d’environ 5 à 12 personnes dans les établissements les plus impliqués, sachant que dans nos 4
16
L’accueil à l’intérieur de chaque collège a été plutôt assez aisé, à partir du moment où nous avons pu franchir les barrières administratives et réussi à prendre les premiers rendez-vous. Il y a une certaine difficulté à entrer dans ce système qui fonctionne beaucoup ou en grande partie en circuit clos. Une fois les 2 ou 3 premiers rendez-vous pris et le temps de nous familiariser avec les équipes pédagogique et administrative, les demandes d’entretiens, de réalisation d’observations, etc. se sont très bien déroulées et ont été grandement facilitées par les équipes enseignantes et administratives qui ont su se montrer très disponibles.
38
établissements, les équipes pédagogiques tournent autour d’une quarantaine d’enseignants en
moyenne.
Tableau 4 : Récapitulatif des entretiens réalisés auprès des enseignants de chaque collège
Collège : Personnes de l'administration :
Disciplines des enseignants : Nombre d'entretiens réalisés :
Carpeaux (Valenciennes) Principal et principal adjoint 2
Mathématiques 1
Physique-chimie 1
Sciences intégrées 1
Histoire-géographie 2
EPS 2
Arts plastiques 1
Anglais 1
Documentaliste 1
Total : 12
Le Triolo (Villeneuve d'Ascq) Principal et principal adjoint 1
Mathématiques 1
Physique-chimie 1
SVT 1
Histoire-géographie 1
Musique 1
Allemand 1
Documentaliste 1
Total : 8
Fustel de Coulanges (Strasbourg) Principal et gestionnaire 2
Mathématiques 1
Physique-chimie 1
SVT 1
Français 1
Histoire-géographie 1
EPS 2
Arts plastiques 1
Documentaliste 1
Classe relais 1
Total : 12
La Robertsau (Strasbourg) SVT 2
Français 1
EPS 1
Documentaliste 1
Total : 5
Total global : 37
Nous les avons interrogé sur 3 grands ensembles de questions que l’on peut retrouver dans
la grille d’entretien17 : (1) leurs connaissances des actions existantes sur le développement durable
et/ou le changement climatique dans la ville et au sein de leur établissement, (2) leur participation et
17
La grille d’entretien est annexée.
39
leur implication dans des projets au sein de l’établissement et leur rôle, ainsi que leur regard sur la
portée de ces actions, enfin (3) les supports d’information auxquels ils ont recours à l’intérieur de
leurs cours, que ce soit au moment de la préparation des supports du cours que de la pratique de
recherche d’information.
2. Logiques organisationnelles
Pour comprendre comment les relations à l’intérieur d’un collège s’organisent, il importe de
comprendre d’abord comment fonctionne une organisation scolaire et comprendre ensuite
comment les enseignants y trouvent leur place. Nous allons tenter d’expliquer qu’un collège
fonctionne comme un microcosme qui n’est pas dénué de contacts avec l’extérieur et d’impacts avec
lui mais que ses règles de fonctionnement agissent de façon assez coercitive et contraignante sur les
membres qui le composent même si ces derniers ne sont pas privés non plus de zones de liberté.
Pour appuyer notre propos, nous aurons recours à différents apports de la sociologie des
organisations qui définissent la manière dont les acteurs construisent et coordonnent des activités et
aussi les interactions avec leur environnement sociétal.
2.1. Place du collège au sein des autres organisations et de la société
La sociologie des organisations interroge la manière dont les structures organisationnelles
maintiennent leur identité et leur fonctionnement malgré les tensions internes et externes qu’elles
subissent au quotidien, de l’intérieur comme de l’extérieur. Elle étudie les liens entre la structure
formelle et les relations sociales informelles au sein des structures organisationnelles. Elle interroge
la manière dont les institutions résistent et adaptent leurs règles en gérant l’innovation afin de
comprendre comment elles s’adaptent à leur environnement technique et social et aussi aux
changements techniques et sociaux. L’établissement scolaire et notamment le collège est une
structure cohérente saisie comme un système d’interactions entre acteurs sociaux internes (élèves,
enseignants, administrateurs, Ministère,…) et externes (politiques, parents, associations, médias,
etc.). Ce système s’intéresse aux différents types de structures organisationnelles existants comme la
gestion de pouvoir, d’autorité, de répartition des ressources, de négociation, etc., également aux
liens sociaux et identitaires existants entre les individus, enfin aux phénomènes culturels agissant à
l’intérieur d’elle-même. Il s’agit, également, d’étudier la circulation de l’information et les outils de
communication, enfin d’étudier les situations de conflit, de blocages ou au contraire les situations
favorisant les échanges au sein de cette institution.
A partir de cette définition, nous allons voir qu’un établissement scolaire tel qu’un collège est
à étudier comme une structure organisationnelle au sein de laquelle se jouent de multiples enjeux
qui constituent à la fois la raison d’être de cette institution donc en sont des éléments intégrateurs et
à la fois contribuent à la déstabiliser de l’intérieur au quotidien. Ces enjeux incluent les objectifs
d’enseignement à atteindre, les appropriations aux nouveaux programmes et autres réformes du
système, les contenus d’enseignement et les manières plus ou personnelles de mises en œuvre par
les enseignants, les enjeux de travail en partenariat également en complémentarité toujours entre
40
enseignants notamment et surtout d’éducation, en termes de réussites des élèves. Ces enjeux
incluent également des perspectives de carrières et de positionnement des enseignants sur leur
discipline et plus largement au sein du collège enfin d’appropriation et d’adaptation à l’introduction
de nouvelles pratiques technologiques, etc. impulsées (pratiques de l’ordinateur, de l’internet et plus
généralement des technologies numériques) notamment par les élèves.
Les travaux de H. Fayol et d’E. Mayo apportent beaucoup à la compréhension des jeux
d’acteurs au sein de la structure organisationnelle que représente le collège. En effet, leurs travaux
respectifs, qui ont porté pour le premier sur la division du travail et la spécialisation des tâches, dans
différents cas d’administration et plus particulièrement sur les procédés de gestion dans les
entreprises mis en place apparaissant les mieux adaptés pour améliorer et optimiser
l’administration18 et pour le second avec l’école des relations humaines, sur l’affirmation contre le
taylorisme qui prône la spécialisation des tâches par l’étude des postes (segmentation horizontale),
la limitation du gaspillage de temps et de matière et la division verticale en séparant par la hiérarchie
la réalisation des concepts, de l’exécution et du contrôle, le rôle essentiel du facteur humain et
relationnel dans la détermination de la productivité quelle qu’elle soit19. Les théories de H. Fayol et
d’E. Mayo nous permettent de saisir l’importance de la complexité de l’organisation que constitue le
collège en tant que système scolaire et de comprendre comment se mettent en place les relations
des personnes qui y travaillent et comment elles s’articulent autour des différents enjeux présents.
Leurs théories permettent de nous éclairer sur la situation actuelle dans nos établissements scolaires
et d’essayer d’en dégager une vision pour notre analyse une visions assez complète et claire de la
mission de chacun et de la façon qu’il a de la mener à bien. En effet, aujourd’hui nous en sommes
arrivés à des cloisonnements des activités de chaque catégorie d’acteurs en fonction du poste qu’ils
occupent et en même temps à une nécessité de communiquer et d’échanger beaucoup pour pouvoir
réussir à travailler ensemble et à faire fonctionner la structure de façon cohérente suivant un élan
commun.
L. Demailly reprend bien cette idée dans l’un de ses ouvrages que le collège doit remplir des
finalités spécifiques pour maintenir son équilibre interne. Ces finalités doivent être « suffisamment
cohérentes pour ne pas engendrer de contradictions insupportables à l’intérieur de la structure »,
« suffisamment légitimes aux yeux des enseignants dont elles confortent l’identité professionnelle »,
et « identifiables et admises socialement »20. Par exemple on note le besoin du soutien du chef
d’établissement pour mener un projet quel qu’il soit (au niveau de l’autorisation à donner, de la
confiance à accorder et du soutien financier à accorder également). Or, l’organisation rationnelle de
l’établissement scolaire instituée est confrontée actuellement aux ambiguïtés de la mise en œuvre
de la notion de politique éducative locale. Comment envisager l’intégration de l’éducation21 à
18
FAYOL H., (1917), Administration Industrielle et Générale, Paris, Dunod, édition de 1999. 19
Voir ouvrages d’Elton MAYO et l’école des relations humaines. 20
DEMAILLY L., Le collège. Crise, mythes et métiers, Lille, Presses universitaires de Lille, 1991. 21
L’arrivée dans les programmes en 2004 de l’EEDD : éducation à l’environnement et au développement durable constitue le socle de la mise en œuvre dans les programmes des thèmes de l’environnement, du développement durable et du changement climatique, et également des actions qui peuvent être menées au sein des établissements. Ainsi, dans cette partie nous parlerons régulièrement de l’EEDD pour aborder la
41
l’environnement et au développement durable (EEDD) dans des programmes déjà institués et ayant
une certaine logique ? Comment les enseignants parviennent-ils ou non et doivent-ils
déontologiquement s’investir dans l’EEDD pour respecter le cadre de leurs missions ? Quels impacts
l’arrivée de l’EEDD va-t-elle provoquer dans les établissements scolaires ?
2.2. Regard sur la structure collège et les contraintes qui s’imposent aux
enseignants
Le collège : un système d’interactions entre acteurs
Dans notre cadre d’observation, nous consacrons un intérêt particulier aux stratégies et aux
pratiques des acteurs, notamment les pratiques professionnelles22 des enseignants et leurs pratiques
de l’enseignement. Ainsi, nous allons tenter de rendre compte que les organisations se structurent
en fonction des objectifs que se fixent les équipes enseignantes et administratives et également le
chef d’établissement et aussi des facteurs extérieurs contingents avec lesquels le système scolaire
doit composer afin de trouver un équilibre dans son organisation et son fonctionnement interne23.
Professeur de français, Strasbourg : « Cela reprend bien les envies de s’impliquer très personnelles et
propres à chacun. Chacun accorde le temps qui lui semble nécessaire et dont il a disposition ».
Professeur d’arts plastiques, Strasbourg : « C’est la sensibilité à des questions environnementales et la
connaissance des actions menées ailleurs ou déjà impulsées qui fait l’engagement et l’implication
dans ces projets ».
Cadre d’observation
La structure collège inclut dans son fonctionnement les influences de différentes structures
(publiques/privées (collège, parents, interventions d’associations, etc.) et publiques/publiques
(Inspection académique et collège, etc.)) ainsi que les relations interpersonnelles ou systèmes
d’alliances existants entre personnes de structures différentes. Le collège n’est pas non plus
indépendant et déconnecté des influences extérieures (conjoncture économique, CSP des parents et
modes de vie des parents des élèves, etc.).
La classe dans le collège a une autonomie relative au sens où elle suit une logique
organisationnelle spécifique, inscrite au sein d’une structure elle-même particulière et incluse dans le
reste de la société. Par exemple, la temporalité est différente avec l’extérieur de l’enceinte du collège
(rythme de travail et calendrier scolaire notamment). Il y a une certaine régularité et routine au
quotidien et pourtant la structure n’est pas figée et change, doit s’adapter aux impulsions extérieures
qui ne manquent pas de se répercuter à l’intérieur sous des formes plus ou moins prévues, que ce
question du changement climatique puisqu’elle constitue une porte d’accès réglementaire officielle et reconnue comme telle par l’ensemble des personnes que nous avons rencontrées lors de nos entretiens. 22
Les pratiques professionnelles des enseignants rentrent dans les idéaux-type de Max Weber. En ce sens, les pratiques des enseignants constituent des activités rationnelles en valeur et en finalité, affective et traditionnelle. 23
Voir les ouvrages d’Henri MINTZBERG et l’école de la contingence.
42
soit les réformes, les motivations des enseignants, les comportements et autres motivations des
élèves, les influences des parents, etc.
D’un point de vue global, le collège est un lieu intéressant et cohérent d’analyse d’émergence
d’innovations sociales24, un lieu pertinent d’observations des changements qui affectent le métier
d’enseignants et également un lieu pertinent d’action et ce d’autant que son autonomie est partielle.
Les volontés de changement se heurtent à l’organisation bureaucratique des pouvoirs : la question
du changement dans le système scolaire ne relève pas tant d’un problème de rationalisation
organisationnelle (rationalisation locale de la gestion des ressources humaines) que d’affrontements
portant sur la « culture professionnelle »25 des enseignants et l’orientation sociopolitique et
culturelle de l’enseignement. Par exemple, « le thème de l’EEDD apparaît dans certains
établissements comme un moyen d’éduquer les enfants de milieux défavorisés » et il importe de
relever que c’est par leurs centres d’intérêts, leurs manières de voir leur profession et
d’expérimenter leurs pratiques que les enseignants développent une culture professionnelle et aussi
un regard personnel sur leurs propres pratiques et aussi un regard sur celles des autres26.
2.3. Modifications du rôle de l’enseignant et de sa culture professionnelle suivant
les réformes successives. Poids des impulsions extérieures pour faire changer les
choses
Les réformes successives27 qui ont eu lieu au niveau de l’école ne sont pas restées sans
impact sur les missions et les pratiques des enseignants : les cursus, les niveaux scolaires initiaux,
l’âge et les expériences antérieures des nouveaux enseignants recrutés changent. Les diplômes
terminaux sont remodifiés. D’après L. Demailly : « à partir des années 1970, on a observé des
modifications du recrutement des élèves et de leurs enseignants : élévation de l’origine sociale,
disparition de la référence à l’amour des enfants »28. On observe un certain cloisonnement identitaire
des enseignants entre eux et dans leur discipline et aussi vis-à-vis de l’extérieur, également des
obligations de se former et remettre à jour29 continuellement leurs connaissances. Nous allons
étudier comment certains enseignants se positionnent aujourd’hui dans un contexte de mise en
place de projet EEDD et voir comment ce genre de projets constitue une opportunité de refaçonner
et d’adapter l’identité professionnelle des enseignants qui les initient ou y participent seulement.
24
DEMAILLY L., Le collège. Crise, mythes et métiers, Lille, Presses universitaires de Lille, 1991. 25
LIU M., Fondements et pratiques de la recherche-action, Paris, l'Harmattan, 1997. 26
Voir ouvrages de Claude Dubar. 27
ZAY D., La formation des instituteurs, Paris, Edition universitaire, 1988. 28
DEMAILLY L., Le collège. Crise, mythes et métiers, Lille, Presses universitaires de Lille, 1991. 29
ORIANNE J.-F., DRAELANTS H. et DONNAY J.-Y., « Les politiques de l’autocontrainte », Education et sociétés, 2008/2, n° 22, p.127-143.
43
L’école comme facteur de reproduction de l’ordre social
De plus, même si l’école est perçue comme un système permettant de reproduire et
maintenir l’ordre social30 au sens où l’entend P. Bourdieu, c’est-à-dire qu’il tend à reproduire de
façon élitiste les mêmes dominations de classes sociales, il s’agit pour nous de mettre à distance ce
fait afin de nous saisir le plus objectivement possible des systèmes de position des enseignants et
autres personnes impliquées dans le système scolaire. Nous cherchons ainsi à appréhender la
subjectivité des acteurs en étudiant leurs motifs, la cohérence de leurs actions et leur bonne foi, à
analyser les enjeux qui sous-tendent leurs actions et à rendre compte des freins et des contraintes
qu’ils rencontrent31.
Le facteur de la classe d’âge pour comprendre les comportements des personnes
Au cours de nos entretiens, nous avons interrogé essentiellement des enseignants impliqués
dans des actions ou projets EEDD, notamment. Il est ressorti au regard de leurs discours portant en
matière de développement durable et de changement climatique, un poids non négligeable de la
variable de l’âge et de la génération32.
En effet, même si l’âge des enseignants est très varié, marquant des débuts de carrière pour
certains jusqu’à des carrières qui arrivent à leur terme dans les prochaines semaines pour d’autres,
leur implication dans des projets environnementaux n’est pas la même. On note par exemple, que les
personnes arrivant en fin de carrière, portent un regard plus global, à la fois plus motivé pour
convaincre et faire passer des messages et inciter à de nouveaux comportements. Ils essaient de
prendre le problème à bras le corps et d’être efficaces dans leurs actions, en conférant un sens
important à celles-ci. C’est le cas de 5 enseignants, qui sont sensibles au développement durable et
cherchent à diffuser ces messages à d’autres personnes de façon motivée et convaincante, de façon
même assez prosélyte.
Une autre catégorie ressort, il s’agit des plus jeunes enseignants recrutés (qui ont autour de
27-33 ans). Ces derniers expriment une sensibilité à l’environnement et pensent que cela fait partie
des priorités d’aujourd’hui. Ils vont essayer d’en parler dans leurs cours ou de s’inscrire dans un
projet mais ils sont moins porteurs de sens que de volonté de sensibiliser mais cela est beaucoup
plus modéré et superficiel que leurs aînés. Ils sont plus dans l’adaptation de modes de vie et de
« modes » que dans l’aspect apparemment crucial et urgent d’agir pour préserver l’environnement
comme le pensent les plus âgés. C’est le cas de 3 enseignants.
Ils vont développer particulièrement des actions ou des projets EEDD pour développer la
citoyenneté des jeunes, leur apprendre à avoir confiance en eux, leur faire découvrir la nature,
changer les comportements (économies d’énergie, etc.) mais sans mise en contexte plus générale et
30
BOURDIEU P. PASSERON J.-C., (1964), Les héritiers. Les étudiants et la culture, Paris, Minuit. Et BOURDIEU P., PASSERON J.-C., La reproduction, Paris, Minuit, 1970. 31
BAUDELOT C., ESTABLET R., L’Ecole capitaliste en France, Paris, Maspéro, 1971. 32
ZAY D., La formation des instituteurs, Paris, Edition universitaire, 1988.
44
plus globale. On le voit avec la mise en place du tri des déchets dans un des collèges, la rénovation
d’un établissement avec une mise en conformité avec les normes environnementales, la classe
« nature », les comportements des enseignants qui se veulent modèles en venant de plus en plus au
collège à vélo. Pour eux, « le collège est un bon endroit pour parler d’environnement ». Certains
enseignants croient au mimétisme des comportements, ce qui constitue une manière de transmettre
un message.
2.4. Pratiques professionnelles des enseignants
Il importe de mettre en perspective la dimension stratégique de la pratique de
l’enseignement, c’est-à-dire de montrer que les enseignants et les chefs d’établissement ne sont pas
des supports passifs de la mission qu’ils ont à remplir33. Les enseignants ont une marge de manœuvre
entre les programmes qu’ils ont à faire passer et leurs contraintes d’horaires et de pratiques.
Enseignant de physique-chimie : « on ne voit pas beaucoup les élèves mais on peut parler de
développement durable dans plusieurs parties de cours. On peut lancer des projets en prenant sur les
heures de vie de classe et lancer des ateliers entre midi et deux ».
Ces mêmes enseignants ont aussi une certaine marge de manœuvre dans les initiatives qu’ils
peuvent porter (documentaliste autodidacte en informatique, possibilité de parler environnement en
sport), incluant des enjeux éthiques, politiques et culturels et amenant à générer de nouvelles zones
d’incertitudes34 entre les relations entre collègues comme avec la hiérarchie.
Les pratiques éducatives se jouent en partie sur un ensemble de dispositions déjà constituées
de goûts, de ressources culturelles, de positions idéologiques, de valeurs, de rapports sociaux de
sexe, de représentation de l’univers scolaire, de réussite sociale et aussi de réussite personnelle. Il
faut également inclure leurs représentations, leur regard sur les médias, leur idéologie
professionnelle, leur position à l’égard de leurs collègues, de la hiérarchie et des personnes
extérieures à l’établissement.
Les enseignants sont pris dans leur quotidien et dans leurs programmes, ils perdent l’aspect
critique sur les événements passés, les pratiques mises en œuvre et les orientations socioculturelles
des projets et des enjeux du contenu des programmes.
Dans leurs pratiques professionnelles au quotidien avec ou sans projet environnemental,
certains souhaitent :
- un meilleur partenariat entre l’équipe dirigeante et l’équipe pédagogique, avoir une
meilleure reconnaissance au niveau de leur discipline car certaines sont perçues comme des
« matières secondaires » : sport, arts plastiques, etc.,
33
BARRERE A., « Les directions d’établissement scolaire à l’épreuve de l’évaluation locale », Carrefours de
l’éducation, 2009/2, n° 28, p. 199-214. 34
CROZIER M., FRIEDBERG E., (1977), L’acteur et le système. Les contraintes de l’action collective, Paris, Essais, 2000.
45
- des projets fédérateurs entre enseignants qui créent des liens et ce encore plus sur le long
terme,
- plus de relationnels entre eux, administration et élèves.
Professeur d’EPS, Strasbourg : « J’aimerais un travail en partenariat pour le développement durable,
découverte de la nature et s’y sensibiliser en EPS, que ce soit relayé ensuite par la SVT, puis par le
français pour faire des débats…, l’histoire-géo ».
2.5. Comment développer des initiatives dans les collèges ? Opportunités et freins
Les projets lancés par des enseignants ont pour but de parvenir à transmettre de nouvelles
connaissances par un biais novateur, non limité au cours mais ouvert sur le monde extérieur, afin
de renforcer les apprentissages traditionnels et d’améliorer les chances d’une bonne intégration des
messages. Ces projets peuvent être menés sous couvert d’un objectif avoué et ils peuvent inclure
une part plus secrète que nous chercherons à décrypter.
La classe « nature » a été créée suite à une initiative d’enseignants, ce qui permet de lier des
personnes entre elles autour d’un projet fédérateur et du moteur qu’est l’enseignant d’EPS. Ce sont
des projets qu’il est possible de mener sur plusieurs années consécutives. C’est le cas de la classe
« nature » ou une année sur deux comme les Trophées de l’environnement, ou des projets ponctuels
(expositions, sorties découverte, séances cinéma-débat) ou encore d’approches thématiques à
l’intérieur des cours (en EPS avec l’acrosport, en arts plastiques, etc.).
Les projets doivent être remis très souvent à jour, ils sont fortement personnalisés et sont
révélateurs d’un groupe de collégiens « motivé » ou « porteur » et du sens des messages qu’ils
veulent y donner. Ils reposent sur des piliers et quelques autres personnes motivées mais qui ne sont
pas porteuses parce qu’elles sont sensibles aux questions de développement durable et elles ont
besoin d’être convaincues de la réussite du projet.
Professeur documentaliste, Strasbourg : « Des panneaux ont été réalisés par les 6ème
qu’ils ont ensuite
expliqué aux adultes (jury). Objectif : élaborer des panneaux répondant à une problématique simple
et y répondre de façon cohérente, maîtriser l’information, savoir la contextualiser et évaluer sa valeur
scientifique, synthétiser le résultat de la recherche. (…) Le fait de mener des projets de façon
complémentaire entre enseignants permet d’approcher le même sujet sous des manières différentes.
(…) Les projets fonctionnent car il y a un travail en partenariat et une implication entre tous et un
apport complémentaire des compétences ».
On note une certaine opposition de conviction entre les enseignants qui pensent que l’EEDD
ne peut pas être abordée en cours et qu’un manque très important de temps peut se faire sentir
pour pouvoir l’aborder et mener des projets allant dans ce sens et ceux qui pensent que l’on peut
greffer sans trop de difficultés le développement durable aux cours en abordant des thèmes qui s’y
rapportent.
A chaque projet qui nous a été présenté au cours des entretiens, des limites et des freins ont
été rencontrés (forces d’inertie, changements non-maîtrisés, imprévus, effets inverses à l’intention
46
de départ, résultats pas obtenus). Il importe de comprendre pourquoi certaines initiatives
fonctionnent et d’autres pas. D’abord il ressort une limite de temps (contraintes individuelles
d’emplois du temps et aussi en complémentarité de celui des collègues), de formations sur le thème
du développement durable et sur les moyens technologiques actuels pour se former et ainsi former
les jeunes (documentaliste et l’informatique).
Un sentiment de lobbying sur le montage d’un projet et un manque de communication peut
ressortir, parfois, entre enseignants de disciplines différentes sur ce qu’ils font au sein de leurs cours
et au sein de leurs activités développement durable ou quotidiennes. De plus, les priorités pour
l’EEDD sont très variables d’un enseignant à l’autre. En effet, certains critiquent le manque relatif
d’investissement de leurs collègues et souhaiteraient voir s’impliquer davantage les autres. Une
nuance est à apporter, ce ne sont pas ceux qui portent les projets qui dénoncent le manque de
participation des autres enseignants car ils disent trouver du relais là où ils en cherchent (collègues
du collège ou à l’extérieur : experts sur un thème particulier, écrivains invités, etc.), ce sont ceux qui
y participent sans être porteurs, qui souhaiteraient être plus soutenus. La sensibilité croissante
portée à l’environnement de manière générale aujourd’hui semble avoir eu une répercussion
positive sur la notion de projet de classe plus que sur l’environnement. Enfin, il ressort un manque de
moyens financiers puisque certains projets peuvent voir le jour grâce au soutien apporté par un
supermarché.
Les enseignants semblent apprécier, en appui des apprentissages classiques en cours, la
présence d’expériences spécifiques y compris par la délégation à des intervenants perçus comme
plus compétents, la réalisation du projet. Il semble que l’apprentissage par échanges interactifs et
réflexifs entre enseignants et élèves prend de plus en plus d’importance sur les formes de
transmission classique. Cela contribue à modifier un tant soit peu la forme scolaire. Cela inclut
notamment l’introduction d’éléments de contractualisation (entre les collégiens, leur famille, les
collectivités territoriales, les communautés culturelles, etc.)35 Il faut mettre beaucoup de bonne
volonté.
Professeur d’histoire-géographie, Strasbourg (La Robertsau) : « L’Association A. est intervenue la
semaine dernière car je trouve que c’est intéressant de faire intervenir des personnes de l’extérieur et
faire des incises dans le programme prévu du cours ».
Professeur classe relais, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « La mare a été créée par la classe relais
sur initiative d’un collègue qui a été porteur et initiateur de créer un biotope. L’axe nature c’est (1)
travailler la place de l’homme dans le monde et sa place et son impact sur la nature, (2) cela permet
d’aborder la rudesse de la vie (morts suite à un hiver rude, etc.) cela remet en place les
questionnements métaphysiques du rythme de la vie. Ces activités ont remis du lien entre certains
enfants et leurs parents ».
35
BARRERE A., « Les directions d’établissement scolaire à l’épreuve de l’évaluation locale », Carrefours de
l’éducation, 2009/2, n° 28, p. 199-214. Egalement référence à DUTERCQ Y., LANG V., « L’émergence d’un espace de régulation intermédiaire dans le système scolaire français », Education et sociétés, n° 8/2001/2, p 49-64.
47
2.6. Poids de la pédagogie et liberté d’action des enseignants et aussi poids de
l’immobilisme ressenti par eux
L’importance consacrée à la réflexion pédagogique dans l’enseignement devient de plus en
plus prépondérante aujourd’hui. Les enseignants sont soucieux de l’efficacité de leur activité
d’enseignement et tentent de développer, à travers l’EEDD, de nouveaux outils ou de nouvelles
approches dans le but de permettre d’apporter un nouveau souffle et de redonner de la hauteur à
des enseignements ressentis comme routiniers et/ou inadaptés pour certains élèves, etc. En même
temps, même s’ils gardent à l’esprit que la priorité est de réaliser leur programme, ils souhaiteraient
pouvoir se consacrer au développement durable. Or, cela nécessite beaucoup de temps, de moyens
et d’investissements. Certains déclarent donc ne pas pouvoir s’investir dans de tels projets, d’autres
au contraire, trouvent le temps et se lancent dans des projets :
Professeur d’EPS, Strasbourg : « Des activités comme la « classe nature » qu’ils trouvent
« stimulantes », « fun » pour les élèves, intéressantes en termes de pédagogie, riches en termes de
motricité pour eux. C’est intéressant mais coûteux en termes d’organisation, de disponibilités,
d’énergies et puis de financements, puisque c’est l’argent de la famille ».
Professeur de physique-chimie, Valenciennes (Carpeaux) : « Par exemple, en 3ème
, toute une partie du
programme est consacrée à l’environnement (à la responsabilité humaine) et les élèves doivent faire
des diaporamas et vont le présenter à tous les autres élèves de 3ème ».
Alors qu’un des premiers principes de l’enseignement national est sa qualité dépolitisée,
parler du développement durable réintroduit une part du politique. Cependant, les enseignants qui
se lancent dans des actions ou projets environnementaux tentent d’argumenter « leur utilité
sociale » et de développer des savoirs autres, socialement efficaces, moins routiniers, etc.
Professeur d’histoire-géographie, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Parler de l’environnement
comme asséner les bons conseils peut être contre-productif. Il faut échanger, parler et puis ensuite
agir pour donner l’exemple. Il ne faut pas en parler à toutes les sauces car on va en faire un concept
creux (…) De plus, entre choix économique et choix environnemental, il faut encore impulser en faveur
du développement durable car le train est plus cher que la voiture ».
Dans cette situation de recherche d’ouverture et de dialogue, un certain immobilisme
demeure dans le recrutement et dans une certaine mesure dans le « formatage » des personnes
recrutées dans leur poste, leur quotidien organisationnel (pratiques d’enseignement au sein du
collège et rapport aux contenus des enseignements ou des programmes), logiques hiérarchiques,
différences de statuts, etc.
Professeur documentaliste, Valenciennes : « On peut aider les enfants à faire des recherches mais
vous savez, moi je suis de formation littéraire et les enfants ont besoin de pratiquer, de voir et de
comprendre les choses (du concret), donc les sciences physiques… s’y prêtent plus que celles du
français, etc. Moi, je viens du littéraire donc je ne peux les orienter que de façon indirecte. Je les
oriente vers les sites tels que l’ADEME, etc. mais ils ont besoin de voir les choses ».
Professeur de SVT, Strasbourg (La Robertsau) : « Ce projet a été mené sur les heures de vie de classe
sur toute l’année car les heures de vie de classe sont destinées aussi à régler les problèmes dans la
classe ».
48
Des enseignants mènent des projets mais souvent sans supports écrits, qui constituent une
valeur et une référence académique. Le projet « sans cahier » et sans support n’a donc pas la même
légitimité que les disciplines qui possèdent cet appui matériel et concret. Alors qu’est-ce que les
enseignants considèrent de fait comme données fiables et comme données intangibles ? Quels sont
à l’inverse les points d’appui, les leviers, les zones d’incertitude, les zones d’initiatives qui sont
historiquement constituées en objets de changement ? Qu’est-ce que les acteurs du changement
reconnaissent comme déterminants du système ? Quels sont les effets sociaux des projets, quand ils
sont les éléments moteurs des processus ? Leur représentation du système et de ses possibilités
d’évolution est-elle suffisamment précise pour que les effets réels soient conformes aux effets
prévus ? Marquent-ils des changements effectifs et des prises de conscience sur les priorités à
défendre et à promouvoir durablement ou un simple effet de mode ?
Professeur d’histoire-géographie, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Je me demande souvent ce
qu’on laisse comme traces ».
Professeur de SVT, Strasbourg (La Robertsau) : « Commencer à parler de l’environnement à l’école
primaire, c’est de l’endoctrinement, au collège, c’est tôt encore mais au lycée, oui. Au collège, c’est du
« réflexe » ».
Les pratiques des enseignants, aussi diverses soient-elles, que ce soit en général ou plus
spécifiquement en matière d’EEDD, font ressortir une certaine liberté d’action dont ils ont
conscience et qu’ils apprécient d’une certaine manière car cela leur permet de s’échapper quelque
peu des contraintes de l’organisation du collège. De même, les enseignants montrent aussi qu’ils
sont en demande d’une reconnaissance officielle dans leurs actions et qu’ils ont besoin d’un soutien
réglementaire, notamment, afin de pouvoir accorder une certaine légitimité à leurs actions et la
revendiquer.
3. Inscription du développement durable au collège et logiques
interactionnelles dans les projets portant sur le changement climatique
3.1. Inscription du développement durable dans les programmes et types de mises
en application
Le développement durable est entré dans les programmes scolaires en 200436. Il est institué
dans un plan triennal pour l’éducation à l’environnement pour un développement durable (EEDD).
Les premières matières impactées ont été la SVT et l’histoire-géographie, même si au final ce sont
toutes les disciplines qui sont visées. A noter également que dans le cycle central (5ème et 4ème), les
croisements disciplinaires ont été préconisés notamment entre sciences physiques, chimie, SVT et
maths. Sur cette base, des projets EEDD ont vu le jour dans certains établissements après impulsion
d’enseignants, de l’équipe pédagogique et de soutien de la Direction.
36
Circulaire (n°2004-110 du 8 juillet 2004) du Ministère de l’éducation.
49
Le second plan triennal couvrant la période 2007-2010 tend à remplir trois objectifs :
« inclure l’éducation au développement durable dans les programmes de toutes les disciplines à
l’école, au collège et au lycée, multiplier les établissements en démarche de développement durable
(E3D) et former les professeurs à cet enseignement, quelle que soit leur discipline ». Jusqu’à présent, il
ne touche véritablement que des établissements qui montent des projets pilotes et se montrent
volontaires à cette démarche de développement durable. Certains établissements inscrivent même
des projets environnementaux dans leur projet d’établissement. Cependant, il est à relever que si
certains enseignants, équipes pédagogiques et chefs d’établissements se révèlent très porteurs de
projets environnementaux témoignant d’un engouement certain pour ces questions qu’ils estiment
prioritaires et vitales, et cherchent à diffuser leur sentiment, l’ensemble des personnes constituant la
totalité des personnes et directeurs des établissements scolaires ne marquent pas la même
sensibilité ni témoignent du même intérêt à bouleverser le contenu de leur programme et leur
organisation de cours pour suivre l’approche développement durable.
Nos 4 collèges étudiés expriment tous, même si c’est à des niveaux variés, un certain
engagement pour l’EEDD. Au regard de sites internet officiels, de données produites par ces 4
établissements et des observations menées dans l’enceinte de ces mêmes collèges, il ressort des
types d’action variées et originales, toujours uniques dans leurs expressions (élèves et leurs
vocabulaires propres, etc.) mais aux finalités assez identiques. En effet, ces messages visent souvent
des prises de conscience de l’état de l’environnement et expriment des volontés d’agir et aussi des
efforts de sensibilisation.
A Villeneuve d’Ascq (Le Triolo), on assiste :
- à un travail plutôt collégial dans l’atelier environnement selon l’envie et la disponibilité de
chacun de s’investir sur l’année,
- et à un travail plutôt individuel dans la réalisation des cours selon les contraintes des
programmes des uns (SVT, histoire-géo, etc.) et des libertés des autres (français, musique,
EPS, etc.)
A Valenciennes (Carpeaux), il s’agit plutôt :
- d’un travail d’équipe entre personnes qui sont très motivées par la question de
l’environnement, s’entendent bien et ont la même approche de l’environnement (approche
par expériences concrètes type sciences exactes),
- et d’un travail plutôt individuel dans la réalisation des cours et un investissement selon
chaque personne.
Au collège Carpeaux, l’approche du développement durable et du changement climatique est
plutôt associée aux sciences expérimentales. La compréhension des messages passe par la
démonstration scientifique et des effets visibles et concrets. Au Triolo l’approche est
pluridisciplinaire et une forte impulsion vient de la principale adjointe et aussi de l’enseignante
d’allemand.
A Strasbourg (La Robertsau), il ressort plutôt :
50
- des projets portés par un nombre réduit de personnes mais toutes très impliquées déjà
individuellement et que l’on peut retrouver ensemble sur d’autres projets,
- et des projets originaux qui s’inscrivent dans les objectifs des disciplines et dans les libertés
que certaines laissent (français, EPS, etc.).
Strasbourg (Fustel de Coulanges) :
- Des projets portés par des enseignants surtout ceux d’EPS mais aussi impulsés par des
administratifs. Un élan commun est impulsé en matière de développement durable avec des
projets menés tour à tour collectivement par des partenariats de sciences exactes et aussi de
libre expression (EPS) et individuellement suivant l’objectif des disciplines.
En Alsace, même si l’approche du développement durable et du changement climatique peut
rester amorcée par la SVT, les disciplines laissant place à de la créativité et à l’expression est tout
aussi importante (EPS, documentation, français). C’est prioritairement un apprentissage d’un savoir-
être et de prise de conscience de la place de l’homme dans son environnement qui est visé.
Quelques exemples illustrant des projets ou des implications du développement durable dans les
programmes scolaires :
Professeur de SVT, Strasbourg (La Robertsau) : « En SVT, on parle du développement durable à
travers l’eau en 5ème
, l’effet de serre en 4ème
, les énergies renouvelables en 3ème
, ainsi qu’itinéraire de
découverte (développement durable). (…) Le projet avec Trophées de l’environnement a émergé
l’année dernière avec les 6ème
1 (classe difficile pour diverses raisons). J’avais déjà mené de tels projets
auparavant ».
Professeur documentaliste, Villeneuve d’Ascq (Le Triolo) : « Toute une partie du programme de SVT
se fait avec le CDI : l’homme et son environnement (en 3ème
). Ils font un diaporama à partir de
recherches documentaires. Les travaux sont menés en groupe ou individuellement selon les demandes
des enseignants. Il y a mobilisation d’idées sur thème, le problématiser et faire un plan avec l’aide de
la documentaliste ».
Professeur de SVT, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « On intervient à tous les niveaux de la 6ème
à la
3ème
dans le programme de SVT. On étudie un article de journal, réalise des exposés et ils doivent
confronter la véracité des sources ».
Professeur d’histoire-géo, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Il faudrait plus de sensibilités
environnementales, de toutes les matières mais certaines s’y prêtent plus ».
Professeur d’arts plastiques, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « j’ai proposé un pantin à
personnaliser pour montrer ce qu’il faut faire ou ne pas faire en matière de développement durable.
Cela a plu et cela a bien marché sur le DD. J’ai fabriqué aussi un récupérateur de bouchons aussi ».
Professeur en classe relais, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Les interventions extérieures de
l’ARIENA, la LPO… sont très facilement identifiées et mobilisables, ils ont apporté un regard d’expert
et technique, le partenariat s’est très bien passé avec l’équipe pédagogique et avec les élèves. (…) Les
intervenants, ça apporte beaucoup. C’est différent de l’approche des profs ».
Une enseignante de français, Strasbourg (La Robertsau) a fait étudier deux ouvrages pouvant donner
lieu à des échanges et des discussions à propos de développement durable. Ce projet a été menée
seule. « Les oubliés de Vulcain a été plus apprécié par les 4ème
et l’Or bleu par les 5ème
: concours DRAC
51
d’écriture réalisé cette année avec des 5ème
. Le rapport au développement durable… le sujet c’est la
couleur bleue. L’or bleu traite du problème de l’eau alors que les oubliés de Vulcain consacré aux
déchets. Cela permet de parler du monde et des problèmes actuels de façon originale et peut-être
moins dure ».
Un travail de partenariat entre une prof de français, Strasbourg (La Robertsau) et sa collègue de SVT,
à monter : « Il y a suffisamment de liberté pédagogique et c’est assez large pour pouvoir aborder des
romans comme l’Or bleu sans détourner le programme. On se préoccupe plus de l’eau que des
déchets, peut-être qu’il y a une question de maturité et puis l’eau, c’est ce qui vient vers nous et les
déchets, c’est ce qu’on laisse derrière nous ». Cette enseignante de français ne continuera pas son
action l’année prochaine car elle passe chef d’établissement. Ce genre de situations témoigne de la
fragilité encore actuelle à enraciner ces projets dans le temps.
3.2. L’implication des personnes dans les projets selon de multiples facteurs. Quels
jeux d’acteurs ?
Actions menées grâce au soutien de la direction du collège ainsi que des initiatives portées par des
enseignants
Même si le thème du développement durable et du changement climatique donnent à
penser a priori que certaines disciplines sont plus aptes à l’aborder, il ressort avant tout, au-delà de
ce préjugé, un engagement avant tout individuel des personnes. En effet, c’est parce que les
enseignants se sentent sensibles ou non à l’environnement qu’ils trouvent le moyen et l’envie de
réaliser des projets ou de faire passer des messages à l’intérieur de leurs cours. Ainsi, des
enseignants de sciences-physiques ou de mathématiques disent que cela rentre tout-à-fait dans le
cadre de leurs cours et que cela peut faire l’objet de clubs, d’ateliers, etc. alors que d’autres disent
dans la même situation que leur discipline est trop abstraite et ne se prête pas à aborder les
questions de développement durable, ou que leur discipline n’a pas la légitimité suffisante pour en
parler. D’autres disciplines comme le français, les langues vivantes, le sport ou les arts plastiques, qui
sont plus libres dans leurs modalités d’expression, puisque leur programme vise avant tout à faire
intégrer un ensemble de techniques et s’exprimer, peuvent faire l’objet d’une appropriation afin de
parler développement durable. De la même manière que précédemment, certains se saisissent de
l’occasion et d’autres pas du tout.
Les actions menées en EEDD font ressortir des initiatives de terrain, des expériences
concrètes, dans le sens où la compréhension du phénomène doit être facilitée par sa visibilité et son
accessibilité scientifique pour les collégiens.
Professeur documentaliste, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Les initiatives de ce collège sont
assez rares dans les autres collèges. (…) Cet établissement cherche à intégrer et à attirer les élèves
d’autres établissements pour venir dans cette classe nature. (…) Les élèves peuvent s’inscrire dans des
classes nature qui sont initiés part des enseignants car les enfants sont citadins et cela permet de les
emmener en sorties découverte ».
52
Professeur de SVT, Strasbourg (La Robertsau) : « Les élèves apprennent à réfléchir sur les produits
écolos » etc. et apprennent à choisir ce qui est « bon » ou non à consommer durable, en manipulant
des produits ».
Professeur de français, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Ils ont fait un blog, un journal ».
Professeurs de maths et physique-chimie, Valenciennes (Carpeaux) : « le club environnement ».
Professeur d’histoire-géo, Villeneuve d’Ascq (Le Triolo) : « En 6ème
, aujourd’hui, les ouvrages incluent
le développement durable, en 5ème
, c’est la rentrée prochaine (et cela bouleverse l’ensemble de
l’approche de la géographie) et en 3ème
. Il y a une liberté pédagogique à l’intérieur des cours. Aborde
le développement durable au fur et à mesure des initiatives qu’il a lui ou une de ses collègues et au fil
de ce qu’il trouve et des études de cas. Du coup s’est assez peu servi du manuel scolaire (en plus le
trouvait mauvais) ».
Professeur de musique, Villeneuve d’Ascq (Le Triolo) : « En 2010-2011, on va faire des chants
consacrés à l’environnement et on va organiser un petit spectacle en fin d’année sur cette même
activité. Les thèmes abordés : respect de l’environnement, respect de la nature et du développement
durable et le projet « aux arbres, citoyens ! » pour l’année prochaine avec une étude des paroles. Ce
sera pour la chorale, c’est entre midi et 14h00 le lundi ».
Professeur de SVT Villeneuve d’Ascq (Le Triolo) : « L’action de l’homme sur son environnement à
chaque niveau du programme de la 6ème
à la 3ème
. Les programmes ont changé, en 3ème
: il y a le projet
où les élèves sont au CDI, ils doivent travailler sur l’environnement : biodiversité ou santé. Ils doivent
réaliser un diaporama ou une affiche et ils doivent ensuite présenter leur travail à l’oral aux autres. Ils
sont plus intéressés par la santé que par l’environnement en 3ème
. On a des libertés dans les
apprentissages et des outils technologiques : diaporama, internet… Je pars aussi de l’actualité : « La
voix du nord ». J’essaie de me rapprocher de ce qui se passe ici pour les intéresser » ».
Les différents types de projets menés reprennent donc des travaux de cours (étude
d’ouvrages en français avec invitation d’un écrivain pour échanger sur le développement durable à La
Robertsau, des travaux sur l’environnement en arts plastiques à Carpeaux et à Fustel de Coulanges,
en musique au Triolo, en EPS à Carpeaux), des éco-comportements (en matière de tri des déchets à
Carpeaux et à Fustel notamment, des consommations d’énergie (lumière, etc.)), des e-
comportements (carnet de correspondance électronique et carnet de liaison en ligne, devoirs à la
maison à faire sur le PC et à envoyer par mail), des activités de pleine nature (pêche, constitution
d’un biotope, découverte de la nature (forêt, montagne, etc.)), des visites d’industries et des
expériences faites grâce à la station météo à Carpeaux pour réaliser des mesures de pollution.
Les élèves peuvent s’impliquer et constater par eux-mêmes le résultat de leurs expériences.
Ils peuvent apprendre à réfléchir ensemble, donner leur avis et développer du lien entre eux par les
travaux de groupe. Ils peuvent être valorisés par le résultat de leurs actions.
Professeur de SVT, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « On note des résultats assez positifs car les
élèves s’impliquent. Ils choisissent un animal à préserver (6ème
). En 5ème
, ils étudient l’effet de la
pollution et les poissons dans une rivière proche. Il y a possibilité de le faire avec la classe nature ».
Professeur documentaliste, Strasbourg (La Robertsau) : « Les trophées de l’environnement est une
initiative motivante pour les élèves car c’est une production ».
53
Directeur d’établissement, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « La classe relais fait un relais avec la
classe nature. Elle accueille des élèves de la CUS qui sont complètement désorientés (problèmes de
violence…). Il faut les aider à retrouver des repères grâce à des cours et des activités (pêche, classe
nature…) ».
Mais pour d’autres enseignants, il semble difficile d’aborder le thème de l’environnement,
notamment par manque d’investissement de leurs élèves ou parce que cela leur demande trop
d’efforts :
Professeur documentaliste, Villeneuve d’Ascq (Le Triolo) : « Pense que les collégiens « connaissent
peu de choses en fait sur l’environnement. Ils ne se rendent pas bien compte. (…) Et ce qui me désole,
c’est que dans la pratique environnementale, ça leur est complètement extérieur. D’autres sont dans
l’idée qu’après 2012, c’est fini. Mais il faut continuer c’est sûr. » « Je ne les pense pas mûrs pour faire
des efforts. Ils ont baigné dans la facilité. » Pas facile de parler d’environnement ».
Professeur d’histoire-géo, Villeneuve d’Ascq (Le Triolo) : « Atelier existe depuis 2 ans et cela ne s’est
pas très bien passé car trop d’enseignants présents et pas assez d’élèves, ainsi la « mayonnaise n’a
pas pris ». A co-animé en secondant M. H. Ce sont plutôt des 6ème
qui sont présents, ils sont plus
disponibles en termes d’emploi du temps et plus spontanés. Et puis les 3ème
ont d’autres
préoccupations et ont peut-être moins baigné dans le développement durable que les 6ème
d’aujourd’hui. (…) Je pense qu’ils sont restés un peu trop sur une vision catastrophiste de l’atelier
développement durable, du fait du nombre trop peu important des séances ».
3.3. Approche du contenu des actions
3.3.1. Caractéristiques des enfants
L’ensemble des enseignants rencontrés pensent que les collégiens sont sensibles à
l’environnement, notamment en termes de nature, même si l’intérêt qu’ils y portent n’est pas
toujours stable avec le temps. Ces mêmes collégiens apprécient d’autant plus la nature que celle-ci
leur apparaît concrète et a des impacts locaux ressentis au niveau de leur vie. Dans tous les
entretiens où cela a été abordé par les enseignants, il ressort l’idée « d’agir local avant de penser au
global » et de mettre ce dernier en perspective.
Professeur documentaliste, Valenciennes (Carpeaux) : « Les élèves semblent sensibles à
l’environnement et à leur environnement, également à ce qui est concret ».
Professeur d’arts plastiques Valenciennes (Carpeaux) : « Des élèves sont de plus en plus sensibles à
l’environnement même si cela diffère selon les pratiques de chacun ».
Professeur en classe relais, Strasbourg (Fustel de coulanges) : « Au départ ils ne connaissent que le
béton, la nature les apaise. L’environnement c’est un facteur d’accalmie sociale. Ce sont des enfants
dénaturés qu’on renature ».
Les élèves semblent avoir au regard des discours de leurs enseignants impliqués dans l’EEDD
des connaissances très variables en matière d’environnement et posent aussi des questions de façon
très diverse. Les élèves semblent assez motivés apparemment pour l’environnement, ils posent des
questions et se montrent curieux.
54
Pour d’autres enseignants, il faut jouer sur le ludique pour sensibiliser :
Professeur documentaliste, Villeneuve d’Ascq (Le Triolo) : « Les canaux utilisés pour sensibiliser les
collégiens ne sont pas faciles à trouver : les quiz marchent bien sinon c’est difficile car ils n’aiment pas
forcément lire. Ils sont aussi un peu jeunes pour comprendre la complexité des enjeux ».
La majorité des collégiens recensés dans nos 4 établissements vivent en milieu urbain ou ont
des modes de vie urbains. Ils semblent très peu connaître la nature ou de très loin. Ce qui légitime
pour les enseignants leurs initiatives pour aller faire visiter et découvrir la nature environnante.
Cependant, la différence entre le milieu urbain et le milieu rural en Alsace est ressenti par le fait que
les élèves ne connaissent rien à la nature alors que dans le Nord, il est ressenti par le fait que les
élèves manquent de citoyenneté et de respect envers les autres et leur environnement.
Professeur de physique-chimie, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Les enfants sont très urbains et
ne connaissent pas forcément grand-chose en dehors de Strasbourg. (…) Ils sont très sensibles à des
choses que l’on voit/concrètes et il faut leur expliquer l’impact réel et concret de leurs actes
personnels, des choses et des effets directs. Il faut partir du local au global ».
Il ressort une différence de genre relevée différemment par les enseignants. Quelques
femmes pensent qu’il n’y a pas de différence de comportements selon les garçons et les filles envers
l’environnement alors que les autres ainsi que tous les hommes pensent que les filles sont souvent
soigneuses, attentives, etc. parce qu’elles sont plus matures. Ce constat a déjà été analysé et
reconnu plusieurs fois notamment dans un ouvrage de Christian Baudelot et Roger Establet37 où en
dehors de l’intérêt qu’elles peuvent montrer envers l’environnement et la nature, c’est l’idée de
respecter le contenu des cours et s’y intéresser au moins suffisamment pour avoir de bonnes notes
et réussir à l’école afin de faire plaisir à leurs parents et à leurs enseignants. C’est un poids normatif
très fort, intégré depuis l’enfance et très marqué en termes de rapports sociaux de sexe.
Professeur de français, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : Il y a « des différences de discours entre les
filles et les garçons, pas au niveau des motivations mais les filles sont plus soigneuses, plus matures,
elles se rendent plus compte alors que les garçons sont plus brouillons ».
Professeur d’EPS, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : Dans les projets EEDD, « les filles sont beaucoup
plus majoritaires, elles sont moins craintives à l’égard du travail, plus matures, elles font plus face aux
questionnements et prennent des décisions ».
Gestionnaire, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Les filles sont plus sensibles car elles sont plus
matures. Les filles impulsent plus quand même que les garçons ».
Pour ces enseignants, sensibles au développement durable, la variable de l’âge tient un rôle
déterminant et décisif en matière d’EEDD. En effet, selon eux, dans le contexte actuel, les questions
de développement durable et de changement climatique deviennent des questions essentielles
relayées par les médias et une part importante de la société. Ces enseignants croient que les jeunes
dont les collégiens font l’objet d’une sensibilisation de fond sur ce sujet mais qu’ils l’intègrent par à-
coups. En effet, ils semblent très réceptifs en 6ème, également en 5ème, même si la motivation et
l’intérêt change entre ces deux années. En 4ème et 3ème, cela ne semble plus les intéresser mais les
prises de conscience sont là et elles ré-émergeront plus tard quand ils seront de nouveau réceptifs.
37
BAUDELOT C., ESTABLET R., Allez les filles !, Paris, Seuil, 1992.
55
Professeur documentaliste, Strasbourg (La Robertsau) : L’âge joue « plus ils grandissent, plus ils
prennent conscience. (…) Avec l’âge, si la sensibilisation a eu lieu, elle restera même si les priorités
changent à un moment donné. (…) La sensibilité est plus importante chez les plus jeunes ou les plus
« vieux » mais pas les 4ème
- 3ème
(âge du rejet…). Les 4ème
et les 3ème
est un âge difficile, ils ne lisent plus
alors qu’ils le faisaient en 6ème
et 5ème
».
Professeur de français, Strasbourg (La Robertsau) : « L’élève de 5ème
ne peut pas faire de débats, il est
très manichéen dans sa réflexion intellectuelle, cela va mieux en 3ème
. Il faut une maturation
intellectuelle ».
Professeur d’allemand, Villeneuve d’Ascq (Le Triolo) : « Les 4ème
et les 3ème
n’ont pas envie de
s’investir dans des actions supplémentaires au niveau du collège. Mais l’écriture de sketchs sur la
malbouffe en expression écrite notamment avec les 5ème
, ils écrivent facilement des petits sketchs ».
Professeur de SVT, Villeneuve d’Ascq (Le Triolo) : « L’état de maturité des élèves est très variable. Ils
ne sont pas critiques à l’égard de la critique des messages. Il faut transmettre les messages en
matière de développement durable plusieurs fois à échéance décalée pour avoir un impact sur le long
terme ».
La CSP des parents semble jouer dans les centres d’intérêt et aussi dans les comportements
et attitudes des collégiens malgré le fait que certains enseignants, dans la continuité de la réussite
scolaire selon Jules Ferry, continuent de penser qu’il n’y a pas d’effet. Les autres, à savoir plus des ¾
des enseignants rencontrés reconnaissent que la CSP joue un rôle non négligeable mais que d’autres
facteurs sont en jeu, y compris, la culture des parents et l’implication de ces derniers dans
l’éducation de leurs enfants. Le poids de la CSP semble plus marqué et reconnu dans le Nord que
dans l’Alsace, où il est plus pondéré. En Alsace, les intérêts pour l’environnement de la part des
enfants dépendent de la CSP et surtout de la culture plus que des moyens financiers.
Professeur documentaliste, Strasbourg (La Robertsau) : « Influence de la CSP des parents : les plus
aisés sont ceux qui sont plus demandeurs à l’égard de l’école. (…) Il y a un lien visible entre enfants qui
se cultivent (suivent les infos, etc.) et d’autres moins ».
Gestionnaire, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Les enfants sont plus sensibilisés à l’environnement
quand la CSP est élevée, idem pour l’alimentation ».
Professeur d’EPS, Strasbourg (La Robertsau) : « Ce sont plutôt les CSP aisées qui se consacrent à
l’environnement et c’est plutôt la sensibilité personnelle qui joue : l’environnement familial joue
beaucoup : société de consommation, connaissance de la nature ».
3.3.2. Quelle implication personnelle dans les actions, quel rôle, quelle sensibilité et quel
poids culturel ?
On observe une prise de conscience généralisée de se préoccuper de l’environnement pour
les générations à venir de la part des enseignants que nous avons rencontré. Si cet avis est partagé
par tous, la mobilisation de l’équipe pédagogique diffère selon chaque personne, selon ses
convictions. Nous pouvons alors nous interroger sur les alliances et les compromis établis entre les
personnes pour réaliser leurs projets. Ces efforts d’intégration autour d’un projet font apparaître des
56
dynamiques38 de groupes restreints autour desquelles nous cherchons à comprendre comment ces
personnes s’y inscrivent, ce qu’elles y cherchent, comment elles œuvrent pour la réussite de
l’objectif commun. Il ressort un certain nombre d’attitudes et de logiques comportementales (leader,
etc.) que nous avons pu recenser et établir suivant une certaine logique :
- Entre ceux qui impulsent et ont envie d’impulser :
Ce sont des enseignants qui montent un projet souvent seuls qu’il est possible d’inclure d’une
certaine manière dans leur programme et leurs créneaux d’emplois du temps. S’ils peuvent avoir du
relais pour compléter leur action par une autre approche, ils l’acceptent. Un projet d’intervention
ponctuel a été envisagé et mené :
Professeur documentaliste, Strasbourg (La Robertsau) : « par manque de temps, j’ai fait ce que j’ai pu
avec les moyens et le temps imparti ».
Professeur de maths, Villeneuve d’Ascq (Le Triolo) : « Passer du temps à trouver des thèmes de
chanson, etc. ne m’a pas demandé de temps car quand on aime, on ne compte pas ».
Professeur de SVT, Villeneuve d’Ascq (Le Triolo) : « La mise en place d’un projet peut se faire par mail.
Les projets peuvent se pérenniser si les motivations et les participations des collèges se poursuivent.
Les projets se montent surtout suite à la motivation des élèves, donc cela évolue d’année en année
suivant les idées des élèves ».
- Ceux qui ont des idées mais ne sont pas moteurs :
Certains enseignants souhaitent s’investir dans des projets EEDD mais ils craignent de se lancer seuls.
Ils ont besoin d’être rassurés et de travailler en équipe. Nous avons eu le cas d’une enseignante d’EPS
qui a du temps de disponible, qui est sensible à l’environnement et qui est prête à s’engager mais
elle a eu besoin d’une année pour observer les actions qui étaient menées, constater les résultats
avant de se lancer à la prochaine rentrée.
- Ceux qui veulent participer :
Ce sont des enseignants qui reconnaissent la paternité d’un projet à l’un de leurs collègues (EPS à
Strasbourg (Fustel de Coulanges), physique-chimie à Valenciennes (Carpeaux)) ou maths à Villeneuve
d’Ascq (Le Triolo) et qui participent au projet en valorisant la personne porteuse et initiatrice, tout en
restant malgré tout en retrait. On note aussi que la motivation personnelle peut être de plus en plus
forte suite à des prises de conscience dans le vécu personnel.
- Ceux qui attendent qu’on les mobilise (ou attendent de saisir une opportunité comme le fait de
devenir professeur principal car cela procure plus de poids auprès d’une classe) :
Certains enseignants souhaiteraient s’investir mais ils pensent qu’ils n’ont pas assez de temps
disponible à consacrer à une classe ou d’importance dans le quotidien de cette classe. Ainsi
38
ANZIEU D., Dynamiques de groupes restreints, Paris, PUF, 1994.
57
l’opportunité de passer professeur principal peut être saisie comme une occasion de se lancer dans
des projets EEDD :
Professeur de SVT, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « S’est lancée parce que l’opportunité était là
avec le projet ».
- Ceux qui souhaitent faire intervenir des personnes extérieures, qu’ils pensent plus spécialistes
qu’eux sur une question du développement durable (voir Assises d’octobre 200939).
Certains enseignants souhaiteraient s’investir dans des projets environnementaux mais ils ne se
sentent pas compétents ni légitimes dans le fait d’enseigner un thème à propos duquel ils ne sont
pas formés.
Professeur de SVT, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Par exemple, F. de Coulanges fait intervenir
ARIENA dans un projet (réaménagement de la mare du biotope du collège) en tant qu’experts sur des
questions thématiques précises ».
D’autres enseignants s’investissent et souhaitent en même temps que d’autres collègues viennent se
greffer et grossir le projet mais les attentes ne sont pas toujours satisfaites.
- Ceux qui dénoncent l’attitude volontariste d’autres enseignants qui font du développement
durable pour l’affichage
Certains dénoncent l’effet d’affichage que donnent certains enseignants qui participent au projet
EEDD pour se valoriser et montrer qu’ils sont actifs. D’autres dénoncent le manque de disponibilités
de leurs collègues parce qu’ils privilégient leur vie privée par exemple ou alors parce que les emplois
du temps de personnes qui souhaiteraient travailler ensemble ne sont pas homogénéisés, faute
d’effort de l’administration. Enfin certains dénoncent le fait de ne pas être associés à des projets
EEDD alors que cela les intéresse mais que les porteurs de projets apparaissent trop individualistes
ou encore ne se sentent pas suffisamment légitimes dans leur discipline pour participer à un projet.
- Influences culturelles des pays à proximité
En Alsace, l’influence culturelle allemande est ressentie et même assez revendiquée comme étant
plus exemplaire en matière d’environnement et de développement durable. L’enseignante
d’allemand au Triolo perçoit la même chose.
Professeur de SVT, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : les « influences germanique et suisse très
fortes, ainsi que la volonté politique de se tourner vers l’environnement, font de l’Alsace une région en
avance ».
Professeur d’EPS, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Je pense que l’Alsace commence à rattraper
son retard en matière d’environnement par rapport à d’autres régions. Les allemands sont plus en
avance, c’est l’éducation et la culture ».
Professeur d’allemand, Villeneuve d’Ascq (Le Triolo) : « L’idée d’atelier développement durable a été
lancée l’année dernière suite à ce qui se fait à Fribourg en Allemagne. L’Allemagne est très en avance
(au niveau du tri, des énergies renouvelables, compost, etc.) Il y a une grande place pour le vert en
39
Cf le rapport intermédiaire d’avril 2009 qui reprend des éléments des Assises EEDD d’octobre 2009.
58
Allemagne. On a travaillé l’année dernière sur un projet de récupération des déchets à Magdeburg.
(…) C’est facile de parler écologie en allemand car les Allemands sont tellement écolos et cela est
entré dans les manuels il y a environ deux ans. Ce qui réduit le choix des thèmes, c’est le vocabulaire,
par exemple : les éoliennes nécessitent beaucoup de vocabulaire ».
Professeur documentaliste, Strasbourg (La Robertsau) : « Mais c’est comme d’habitude, il faut un
moteur pour lancer. Les allemands semblent plus organisés, ils vont plus au fond des choses et sont
plus disciplinés. Le latin est râleur mais est moins malléable ou manœuvrable ».
Professeur de SVT, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Sur les poubelles en Allemagne, il y a des
puces qui mesurent le poids du contenu et le poids détermine le prix à payer pour chaque foyer. Cela
fonctionne vraiment. En revanche, en France, c’est indirect, plus il y a de poubelles, plus cela coûte
cher mais cela retombe sur la commune donc l’impact individuel est difficilement perçu. (…) En Alsace,
l’impact environnemental est plus important que dans le Nord et encore plus que dans le sud et la
prise en compte de l’environnement est plus importante que dans d’autres régions ».
Au sein des projets EEDD, on ne ressent pas trop de conflits entre les personnes qui
interviennent, puisqu’elles sont toutes volontaires et peu nombreuses. Chaque personne peut
trouver une place dans le projet et apporter une pierre à l’édifice, sans créer de jalousie au sein du
projet. En revanche, il n’en va pas de même avec les autres enseignants qui ne participent pas aux
actions, au motif de ne pas avoir envie de s’y investir et qui du coup montrent, pour certains d’entre
eux, un peu d’animosité à l’égard des porteurs de projets. Il faudrait creuser davantage ce qui a été
dit ou laissé sous-entendre par quelques enseignants qui ont vécu cette situation. Le collège étant un
lieu clos, il n’est pas forcément aisé de faire éclater les conflits au grand jour pour pouvoir continuer
à exercer au quotidien dans des conditions acceptables ou favorables.
3.3.3. Connaissance de l’influence des politiques publiques et des dispositifs (agenda 21,
PCT…), sources de financements des projets
Peu d’enseignants déclarent avoir connaissance des politiques publiques menées en matière
d’environnement et de développement durable. Par exemple, 3 personnes ont pu définir un petit
peu ce qu’était un agenda 2140. La première est une personne qui était responsable du
développement durable dans l’établissement scolaire où elle exerçait, qui devait relater les
différentes actions menées par ses collègues à leur responsable académique et les deux autres sont
des professeurs d’histoire-géo, qui s’intéressent, de par leurs disciplines à ces thèmes. Les PCT41 (plan
climat territorial) sont encore moins connus.
Professeur, Strasbourg : « Dans l’ancien établissement où j’étais, j’étais responsable du
développement durable et je devais recenser les différentes actions menées par mes collègues au
responsable académique. Je sais ce qu’est un agenda 21 mais pas un plan climat ».
40
Agenda 21 : suite au sommet de Rio en 1992, 49 Etats se sont engagés à mener des actions en faveur du développement durable. L’agenda 21 est une adaptation plus locale de ces actions par les acteurs impliqués sur ces territoires. Ils s'engagent dans la déclinaison de 21 engagements pour le XXI
ème siècle.
41 PCT : Le plan climat territorial est un programme d’action institué par le Plan Climat National en 2004, visant
les collectivités territoriales (locales à régionales) à se lancer dans une démarche de développement durable et plus particulièrement des programmes de réduction d’émissions de gaz à effets de serre.
59
Enfin, il ressort que la plupart des enseignants connaissent de façon fragmentée et assez
superficielle les politiques publiques parce qu’en tant que citoyen de la commune ou de
l’agglomération, ils reçoivent des informations à ce sujet mais cela reste vague pour eux. Ils ne se
sentent pas potentiellement influents dans ce domaine ni très concernés, leurs priorités et leurs
centres d’intérêt étant ciblés sur le collège et leurs enseignements. Une potentielle implication
pourrait aller à l’encontre de la neutralité déontologique qui est attendue d’eux. Cela peut expliquer
que la plupart d’entre eux, mis à part ceux qui impulsent les projets ne connaissent pas les sources
de financements potentielles, voire même ne pensent pas qu’il y en ait.
Professeur d’histoire-géo, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Un agenda 21, c’est un programme
d’objectifs que peut se fixer une CUS par rapport à un ensemble d’actions à mener pour le
développement durable ».
Certains peuvent dresser malgré tout une analyse de ce qu’ils estiment se jouer en matière
de politique en matière de développement durable et de changement climatique. Cependant le
regard qu’ils portent est avant tout un regard global et distancié.
Professeur de français, Strasbourg, (Fustel de Coulanges) : « Les projets municipaux en matière de
développement durable semblent être surtout du « donné à voir » mais ils ne font pas grand-chose ».
Professeur de SVT, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Il y a eu des déceptions face à Copenhague,
comme pour le Grenelle. On a l’impression de beaucoup d’inertie mais heureusement des gens y
croient et se donnent les moyens d’éduquer à l’environnement ».
Professeur d’arts plastiques, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Je n’ai pas trop de point de vue sur
le développement durable car c’est avant tout aux politiques de bouger. Des choses se font mais on
ne le sait pas forcément. Les beaux films de Y.-A. Bertrand n’empêchent-ils pas de passer à l’action ? »
Professeur de physique-chimie, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Je pense que les politiques
tentent de développer des choses pour l’environnement comme les transports… mais je ne sais pas
plus que ça ».
Professeur documentaliste, Strasbourg (La Robertsau) : « Un scepticisme peut apparaître avec
Copenhague qui est très politisé, Claude Allègre, le bilan carbone qui est un trou noir, N. Hulot qui se
désolidarise du gouvernement, que chacun n’est pas obligé de se servir de sa voiture. Tous ces
éléments contribuent à ne pas responsabiliser les gens ».
Professeur d’EPS, Strasbourg (La Robertsau) : « Un impulsion politique est fondamentale pour que
l’engagement collectif des habitants suive. L’arrivée et le développement du vélib’ en est une
preuve ».
Tous les enseignants ne se sentent pas aussi investis et prêts à se lancer individuellement
dans l’idée d’aller chercher des sources de financements. Majoritairement pour eux, il revient
surtout aux politiques d’impulser à tous des changements de comportements par des actions, des
financements, etc., dans une logique « top-down ». Au final, les enseignants se sentent plutôt
spectateurs qu’acteurs dans le domaine politique. Le contexte politique local sera donc étudié en
prenant en compte cette méconnaissance relative des équipes enseignantes. Nous tenterons de
mettre en avant la nature des actions par rapport aux activités de communication, pour savoir quels
effets indirects l’action « verte » des communes exercent sur les milieux éducatifs.
60
3.3.4. Sentiment de légitimité selon disciplines et régions
Selon les disciplines et la région où ils exercent, les enseignants que nous avons rencontrés
n’expriment pas la même légitimité à se lancer dans des projets EEDD. Au-delà des différences
disciplinaires relevées entre les établissements considérés, il ressort avant tout une volonté assez
collégiale de travailler ensemble entre personnes qui se sentent légitimes dans leur discipline. C’est
ce sentiment de légitimité42 qui varie selon les personnes, en effet, un enseignant de français ou
d’arts plastiques va se sentir légitime dans un collège parce qu’il se sent soutenu ou accompagné par
ses collègues alors que d’autres dans la même situation ne pensent pas pouvoir mener ou participer
à un projet. De même, on observe que 3 des documentalistes se sentent très concernées par les
projets EEDD et savent comment s’y inscrire, alors que la 4ème est laissée de côté et se sent
complètement démunie face à de tels sujets qui ne lui apparaissent appréhendables que par les
sciences expérimentales.
Une enseignante de SVT, Strasbourg (La Robertsau) présente la documentaliste de son établissement
comme : « La documentaliste est très bien, disponible, autodidacte et compétente ».
Les enseignants, en fonction de leur discipline, se hiérarchisent les uns par rapport aux
autres, selon qu’ils estiment exercer dans une discipline importante et reconnue (français, histoire-
géo, maths, etc.) ou dans une discipline pas toujours prise au sérieux (arts plastiques et EPS
essentiellement).
Professeur de SVT, Strasbourg (La Robertsau) : « Pour l’opinion commune, c’est le prof de SVT qui fait
des actions de développement durable, pas celui de français (les livres, c’est du papier, ça tue des
arbres). De plus, dans les programmes scolaires, le développement durable n’est jamais abordé pour
le français. Cela devrait finir par changer ».
Pour aller plus loin, les alliances de personnes se font en fonction de la cordialité de leurs
relations, ainsi que de la hiérarchie de leur discipline. Par exemple, le professeur d’EPS qui a initié son
projet a été accompagné par son autre collègue d’EPS mais le soutien qu’ils attendaient et
souhaitaient de la part de leurs autres collègues n’est pas venu ou tarde. Une enseignante d’EPS,
Strasbourg (Fustel de Coulanges) pense que c’est très difficile de monter un projet en éducation
sportive car il faut faire ses preuves auprès des autres disciplines et qu’elle a le sentiment que l’EPS
est jugée comme une sous-discipline. La même chose est formulée par les deux enseignants d’arts
plastiques. Ce sont aussi des personnes motivées mais sans prétentions de supériorité mais qui ne se
sentent pas véritablement reconnus comme enseignants des disciplines aussi importantes que les
autres.
La légitimité d’action des enseignants de SVT ne fait jamais aucun doute dans nos 4
établissements. En revanche, les sciences physiques sont plus contrastées, exprimant une légitimité
totale dans le Nord, mais beaucoup moins en Alsace, où elles sont perçues comme trop théoriques et
pas suffisamment concrètes.
42
Voir groupe d’appartenance, groupe de référence, chapitres 6 et 7 de R. K. Merton. MERTON R.-K., Eléments
de théorie et de méthode sociologique, Paris, Armand Colin, édition de 2001.
61
Une enseignante en physique-chimie de Fustel de Coulanges, notamment, est sensible à
l’environnement mais ne peut pas l’intégrer beaucoup à ses cours car elle pense que c’est théorique
pour les élèves, et qu’elle n’a pas les 5ème A et que les 6ème n’ont pas de sciences physiques : « La
classe nature, c’est la 6ème
A, la 5ème
A et je n’ai jamais eu la 5ème
». La distribution des classes se fait
un peu par hasard, si je pouvais avoir la classe nature, oui je serai pour. (…) L’environnement c’est un
sujet qui m’intéresse et que j’aimerais traiter avec les élèves mais il faut plus de libertés ».
Enfin, il ressort que les enseignants sensibles à l’EEDD et qui ont envie de monter des projets
mais qui ne sentent pas toujours très légitimes dans leur discipline, prennent des initiatives plutôt
individuelles au sein de leurs cours, agissant ainsi en solo. C’est le cas de 2 enseignants d’arts
plastiques, une prof d’anglais, une prof d’allemand, un enseignant de musique, etc. qui se saisissent
de la liberté d’action dont ils disposent au sein de leurs programmes scolaires. Ces enseignants
portent des projets très originaux et spécifiques à un enseignant et à une classe et aux élèves de
chaque classe.
Ce sont avant tout les disciplines dites de « sciences dures » qui sont plus dans la recherche
de financements de leurs projets, plus souvent portés à l’extérieur de l’établissement et nécessitant
de moyens pour expérimenter alors que les disciplines littéraires (français, arts plastiques, anglais,
histoire-géographie également) restent plus dans l’idée de compréhension, d’échanges, de débats.
3.3.5. Volonté d’impulser quelque chose (sens de l’action engagée)
Toutes les actions menées ou initiatives portées au sein de l’établissement ou des cours
montrent une volonté d’impulser une action en matière d’EEDD afin de sensibiliser les collégiens et
de favoriser un déclic à terme.
Professeur de français, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Les motivations doivent être impulsées
pour prendre racine auprès des personnes ».
Professeur documentaliste, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Sensibiliser à l’environnement et au
développement durable fait partie du projet d’établissement, d’éducation à la citoyenneté ».
Professeur en classe relais, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Le message qui passe, c’est une
avancée sur la prise de conscience de la vie, du respect de la vie, et respecte la vie des autres, la
sienne. (…) Des films comme homo sapiens, le sacre de l’homme, génèrent de la discussion. De la
discussion et de l’échange naissent les prises de conscience. (…) L’éducation, c’est accompagner dans
la réflexion ».
Professeur documentaliste, Villeneuve d’Ascq (Le Triolo) : « Sensibles à l’environnement. Elle réfléchit
et passe aux actes. Pour elle, il faut sensibiliser les gens en les formant : campagnes d’affichages…
« Les idées, c’est bien mais cela n’avance pas. Il faudrait des petites choses concrètes ». Les enfants
qui participent à l’atelier environnement doivent avoir commencé leur sensibilisation par leurs
parents. (…) Les messages sur l’environnement transmis sont catastrophistes et ne donnent pas
d’explication. Il faudrait expliquer les causes pour chercher des alternatives. En plus, cela les
culpabilise alors qu’ils ne comprennent pas le sens et la portée de leurs actes au quotidien. Pour moi,
les industriels seraient sensibilisés en les taxant. Au collège, il faut transmettre des messages
individuels pour donner envie de changer leurs comportements. Il faut jouer sur « leur petit monde à
62
eux ». Les enfants aiment bien l’atelier environnement mais ils ne sont pas assez costauds pour savoir
transmettre leurs intérêts aux autres (pour attirer du monde à l’atelier) ».
Professeur de musique, Villeneuve d’Ascq (Le Triolo) : « Je souhaite éveiller les élèves au
développement durable. Il faut attirer les élèves par l’éveil de la curiosité, parler sous forme d’images,
donner beaucoup d’explications. Il faut toujours que ce soit une surprise, il faut beaucoup échanger,
valoriser le travail et ne pas punir. L’objectif : informer mais pas faire changer d’avis, analyser et
développer l’esprit critique. Après l’élève a le choix de faire ce qu’il veut de sa vie. Nous, on offre
l’information et le choix, c’est eux. Il faut proposer des choses et des thèmes qui intéressent les
collégiens. Les élèves sont récompensés ensuite au niveau du travail effectué. Il faut qu’ils soient
assidus au Club. Il faut leur apprendre à prendre conscience des choses ».
L’EEDD apparaît nécessaire et primordiale. C’est une réalité aujourd’hui qui doit permettre
des prises de conscience sans culpabilité. Cependant, les façons de l’aborder doivent être bien
réfléchies afin de ne pas être négatives ou démotivantes et montrer l’exemple tout en valorisant des
qualités citoyennes et des valeurs associées à la vie en collectivité. En ce sens, les actions ou projets
en matière d’EEDD peuvent être perçus comme une forme « d’accompagnement »43, où l’on cherche
à privilégier une autonomie de points de vue et d’attitudes et à créer du lien entre les personnes et
ce de façon positive et constructive, afin de faire des collégiens de futurs adultes et citoyens
responsables.
Professeur documentaliste, Strasbourg (La Robertsau) : « Le développement durable est intéressant si
on l’aborde de façon positive et constructive comme on peut le voir avec les photos de Yann Artus
Bertrand ».
Professeur d’EPS, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Responsabiliser et sensibiliser les collégiens à
l’égard de la nature, en partant d’actions concrètes de terrain pour montrer le respect à avoir : ne pas
jeter des choses dans la nature, donner des devoirs à faire (recherches documentaires, interventions
d’experts sur place (à propos des avalanches), vie en collectivité, évaluations seulement sur la
progression en ski ».
Professeur d’allemand, Villeneuve d’Ascq (Le Triolo) : « Les disciplines restent assez cloisonnées
malgré la volonté de multidisciplinarité recherchée dans les actions de développement durable. C’est
plus facile de travailler avec des collégiens petits ou des élèves. Il existe d’autres initiatives sur
Villeneuve d’Ascq en matière de développement durable. J’aimerais qu’on ouvre une classe bilingue
mais c’est refusé. Les moyens sont donnés au collège Rimbaud. Le tri du papier et des cartouches
d’encre avait lieu et il semble avoir été abandonné. La place des parents est très importante aussi
dans la sensibilisation à l’environnement et il faut travailler en complémentarité avec eux ».
On retrouve continuellement cette volonté de s’ouvrir, de communiquer et de faire passer
un message en diffusant des informations à l’extérieur par le biais des enfants mais cela ressort
beaucoup sous forme d’injonctions. Notamment, un des canaux fréquemment utilisé est la
réalisation d’expositions.
Professeur de maths, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Il faut modifier les attitudes des gens parce
qu’un jour, on n’aura peut-être plus le choix. (…) Les enfants intègrent des idées transmises en
matière d’environnement et le retransmettront ».
43
DEMAILLY L., « Fortunes et ambiguïtés de l’accompagnement », EMPAN, 2009/2, n° 74, p. 21-28.
63
Professeur de français, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Il faut communiquer et sensibiliser pour
contribuer à faire changer par impact de personne en personne ».
Professeur de SVT, Strasbourg (La Robertsau) : « Je travaille beaucoup à responsabiliser, à
questionner les choses, les droits d’auteurs sur internet, à prendre de la distance par rapport à ce
qu’ils entendent et à ce qu’ils voient. Ils sont formatés et c’est dangereux ».
Ces tentatives de sensibilisation des enfants s’apparentent parfois beaucoup à du
prosélytisme. En effet, dans un de nos 4 établissements, l’idée de sensibiliser les enfants par
l’intermédiaire d’expositions constitue la première étape avant que ces derniers aillent diffuser
officiellement leurs messages à d’autres personnes (élèves, lycéens, personnes âgées résidant dans
des maisons de retraite, politiques). Les collégiens, en tant que public jeune, sont perçus comme un
canal intéressant et porteur pour diffuser de l’information et favoriser des prises de conscience.
Professeur de maths, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Les enfants peuvent relayer des infos
auprès des parents ».
Professeur de français, Strasbourg (La Robertsau) : « Les enjeux du développement durable et du
changement climatique, c’est de la citoyenneté, de la formation à être citoyen pour qu’on respecte les
autres et la nature ».
Un des enjeux dans la sensibilisation aux questions de développement durable et de
changement climatique, notamment, réside dans le fait de tenter de faire intégrer la complexité des
questions et l’importance des changements de comportements en profondeur. Cela est dit dans le
but assez collectivement admis de développer le libre-arbitre. L’objectif n’apparaît donc pas tant
comme dans l’exemple précédent de faire du prosélytisme que de développer des esprits libres.
Professeur de physique-chimie, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « L’environnement, c’est
important d’en parler, de comprendre la complexité, d’éviter les idées reçues, de sensibiliser les élèves
en développant leurs réflexions et leurs idées par eux-mêmes, les guider vers des choix de vue mais ne
pas les obliger ».
Professeur d’EPS, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Je fais partie de la classe nature depuis 7-8
ans. L’objectif est de sensibiliser les collégiens au développement durable et en faire des
consommateurs responsables ».
Enfin il ressort une prise de conscience que le fait d’agir sur l’environnement est devenue
une évidence urgente.
Professeur de SVT, Villeneuve d’Ascq (Le Triolo) : « Transmettre des messages simples à partir de
projets concrets et locaux, qui ont un impact sur leur vie ».
Professeur d’EPS, Strasbourg (Fustel de coulanges) : « Les enseignants s’impliquent dans des projets
parce qu’ils y croient et qu’ils ont envie de voir avancer les choses ».
Gestionnaire, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Sensibiliser pour une prise de conscience est une
action simple car c’est leur avenir quand même. Les élèves sont conscients que nous n’avons pas fait
grand-chose pour sauvegarder l’environnement ».
Professeur d’arts plastiques, Strasbourg (Fustel de Coulanges) : « Il faut que les gens sachent que
c’est urgentissime de faire quelque chose. C’est pour le futur de l’humanité ».
64
Professeur de SVT, Strasbourg (La Robertsau) : « Ce qu’il faut c’est que les comportements changent
et vite car ça fait 20 ans qu’on nous parle donc ça arrive tard ».
Conclusion de cette partie
L’exploitation de nos entretiens menés auprès des équipes pédagogiques et administratives
fait ressortir un réel engagement en matière d’EEDD de la part de personnes porteuses d’initiatives
que ce soit sur les questions environnementales d’un point de vue général ou plus spécifiquement
sur les questions de changement climatique. Ces personnes ne sont pas majoritaires dans leur
établissement mais leurs actions, relayées et appuyées par leur administration, contribuent à
impulser un souffle environnemental fort à l’établissement dans lequel elles exercent leur mission et
elles font ressortir une sur-représentation d’une sensibilité écologique au sein de ces collèges.
Selon les motivations qui les animent, ces personnalités portent des initiatives originales et
spécifiques à la représentation qu’elles se font de l’Education à l’Environnement et au
Développement Durable, et ce en fonction de leurs possibilités d’action à l’intérieur de
l’établissement. Leurs motivations peuvent révéler un intérêt environnemental fort et plutôt global
ou encore servir une double cause environnementale et éco-citoyenne où l’environnement constitue
un point d’ancrage auprès des collégiens afin que ceux-ci (1) se saisissent à la fois de ces questions de
développement durable ou de changement climatique, (2) développent du lien social entre eux au
sein du collège et de la cohésion de groupe afin d’améliorer leur réussite dans leurs études et (3)
deviennent de futurs acteurs citoyens responsables de leurs actes (au sens consommer durable et
être éco-citoyen).
65
III. Synthèse du colloque44 « Communicating Green » prévue
pour la prochaine parution de la revue Pollution
atmosphérique :
Synthèse réalisée par Sandrine Bernier45 et Susan Kovacs46
Ce colloque international, organisé sur deux jours par le LASCO47, a eu pour objectif de
présenter et mêler les points de vue de scientifiques issus de disciplines multiples (essentiellement
sciences de l’information et de la communication, sémiologie, sociologie) et aussi de professionnels
exerçant dans la communication au sein d’entreprises.
Dans un contexte de forte médiatisation des notions d’environnement et de développement
durable et des effets imprévus, incontrôlés et parfois contradictoires des messages reçus les
organisateurs de ce colloque ont souhaité aborder 3 questionnements principaux : 1) comment les
valeurs et autres représentations environnementales sont-elles définies dans les stratégies
d’entreprise ou organisationnelles et comment sont-elles appliquées dans les faits (part du
greenwashing) ? 2) Comment les entreprises et les organisations se représentent-elles
l’environnement concrètement dans leurs stratégies de communication interne et externe ? 3)
Quelles analyses peuvent être réalisées sur les formes de communication utilisées dans les
organisations pour regagner la confiance du public ?
Les communications de la 1ère journée ont porté sur les discours collectifs et plus précisément
sur la manière dont des entreprises décident de faire de la communication « verte ». Le contenu de
ces interventions a pu être mis en perspective avec des cas concrets d’entreprises qui intègrent le
changement climatique. Deux sessions de jeunes chercheurs ont ensuite permis de présenter une
analyse de discours « communications vertes » dans des cadres aussi bien institutionnels que
publicitaires ou d’entreprise. Ces doctorants ont cherché à mettre en valeur des rhétoriques
environnementales et le sens que veulent donner les entreprises ou les décideurs à leurs actions de
communication. Enfin cette première journée s’est achevée après une série d’interventions
consacrées à une analyse du discours d’un point de vue linguistique (analyse sémantique ou
stratégies de communication, notamment). Dans la poursuite de la 1ère journée, la 2nde s’est ouverte
sur des interventions portant sur l’analyse réflexive de la communication verte menée par les
entreprises et autres institutions et sur la manière dont les salariés des entreprises et les habitants
s’approprient les messages émis sur l’environnement. Cela interroge la confiance qu’ils accordent à
ces discours comme à leurs émetteurs. L’après-midi a d’abord donné lieu à des interventions
confrontant les discours émis par les structures organisationnelles et les pratiques effectives des
44
Voir en annexe l’appel à communication du colloque, le lien internet pour accéder au programme et notre proposition de réponse qui a été retenue. 45
Chargée d’études à l’APPA. Docteure en sociologie. 46
Maître de Conférences, Sciences de l’information et de la Communication, Laboratoire Geriico (groupe d’études et de recherches interdisciplinaire en Information et communication). 47
LASCO : Laboratoire d’analyse des systèmes de communication des organisations.
66
acteurs les composant. Puis ces interventions ont été suivies de 3 exposés de points de vue
industriels, institutionnels et associatifs, qui ont permis d’aborder le discours vert du point de vue
interne aux organisations avant de laisser place au point de vue des sponsors de cette rencontre qui
ont eux-mêmes présenté et insisté sur leurs valeurs intrinsèques de l’écologie.
Au regard des différentes interventions qui ont été présentées, 5 points ont retenu
particulièrement notre attention, ces points sont ressortis du regard croisé que nous avons pu porter
sur l’ensemble de ce colloque. Nous avons relevé : 1) les dates marquantes de prises de conscience,
2) les contextes et les influences culturelles, 3) les phénomènes d’occultation : les stratégies
d’évitement et de contournement, 4) la question des publics, de la réception des messages et 5) le
langage, la terminologie.
1. Les dates marquantes de prises de conscience
Quelles ont été les prises de conscience en matière d’environnement dans les pays
occidentaux ? Quels en ont été les éléments de discours les plus marquants ? Quels en ont été les
principaux acteurs émetteurs et quels ont été les publics récepteurs visés ?
Les prises de conscience abordées lors de ce colloque à propos du changement climatique
ont concerné plus précisément l’émergence et l’évolution des discours qui ont entouré cette notion
et la manière dont elle fait l’objet de conflits d’intérêt, de difficultés de positionnements pour des
populations qui n’ont pas nécessairement les clés de compréhension et d’analyse scientifique pour
se construire leur opinion et de craintes pour l’avenir de la vie sur la planète, etc. Plusieurs
intervenants ont montré que le GIEC a bénéficié d’une légitimité croissante entre 1990 et 2007 en
appuyant ses discours sur des arguments scientifiques mais ne s’étant pas doté d’un réel service de
communication avec l’extérieur notamment les populations, il n’a pas assuré le suivi de l’intégration
et l’appropriation de ses messages auprès des populations pour qui l’annonce d’un changement
climatique et de ses conséquences a soulevé des inquiétudes. De plus, l’analyse de la médiatisation
du discours48 du GIEC dans la presse française montre que l’intérêt pour cette question a pris une
ampleur sans précédent à partir du moment où elle est sortie de la rubrique environnement pour
s’ouvrir à la rubrique politique, actualités, etc. Cependant, progressivement les thèses contraires
amenées par les climato-sceptiques ont contribué non pas à rassurer les populations sur le fait qu’il
n’y avait pas de changement climatique mais a déstabilisé la légitimité du GIEC sans apporter de
réponse satisfaisante sur ces questions très complexes et dont les enjeux sont loin d’être compris par
tous. Aujourd’hui « le public doute de plus en plus et ne sait plus qui croire et que croire »49.
Suite à des attentes fortes de la société civile50 pour développer l’accès à l’information et à la
communication sur l’environnement et sur le développement durable et ce depuis plusieurs
décennies, la législation en matière de droit à l’information s’est accrue progressivement en France,
notamment depuis 1975. Cela n’empêche pas les populations de connaître peu, mal voire pas du
48
D’ALMEIDA N., PELIZ A. C., (Paris IV-Sorbonne) « Le changement climatique en texte et en image ». 49
VAN YPERSELE J.-P., (vice-président IPCC et UCL), « L’enjeu de la communication environnementale à l’heure du réchauffement climatique ». 50
JALENQUES-VIGOUROUX B., (Toulouse), « développement durable et grand récit : comprendre les mutations de la communication ».
67
tout les notions comme le développement durable, notamment. Cela témoigne d’évolutions
législatives lentes et qui ne répondent pas aux attentes du public.
Dans le même sens, depuis les années 2000, au Québec les préoccupations51 envers le
développement durable se sont accrues et ont fait ressortir un intérêt plus marqué et réel des
Québécois que l’ensemble des Canadiens sur ces questions et également davantage de salariés
d’entreprises gouvernementales que les autres, quand bien même un certain nombre d’entreprises
pratiquent plus du greenwashing qu’elles ne portent un intérêt réel à l’environnement et au
développement durable.
2. Les contextes et les influences culturelles
L’influence des différents éléments constituant les contextes semble tenir un rôle de premier
plan dans les stratégies de communication car elles sont constitutives de l’élaboration du contenu
intrinsèque des messages.
Pour qu’un projet environnemental soit un succès, la communication qui doit être faite
autour est très importante et des effets de contextes culturels tiennent une place très importante.
Par exemple, en Italie52, il importe d’inclure de façon précise le contexte local, de bien comprendre
les enjeux et les relations entre les personnes à qui destiner le message, enfin de lancer une
stimulation managériale appuyée par un processus de décisions environnementales.
On observe que vendre un produit écologique nécessite des stratégies de communication
spécifiques. En Belgique, dans une étude53 sur la montée et la redescente écologique dans la
publicité, il est relevé que les Belges sont d’importants consommateurs en énergie mais que 9/10
tentent d’apporter leur contribution au quotidien à l’égard de l’environnement en limitant leur
consommation. Ce sont des efforts mis en œuvre individuellement en faveur de l’environnement. En
France, dans un même contexte où les préoccupations environnementales s’accroissent et où les
comportements environnementaux sont de plus en plus attendus, on note un effet de saturation
important face à ces messages, notamment dans le secteur automobile où la recherche de confort
reste importante et prédomine sur l’environnement. Au final, dans les deux pays même si c’est à des
vitesses différentes, les habitants préfèrent privilégier la volonté de confort sur l’écologie.
Enfin, on note une demande formalisée de la part de la société civile (associations, etc.) à
vouloir créer une instance de régulation54 des publicités pour contrôler les processus publicitaires
que les entreprises mettent en œuvre. Cependant, ces tentatives restent en partie vaines par
manque de moyens (financiers, prise en compte d’avis contradictoires, accès aux informations, etc.).
51
TREMBLAY S., (UQAM Montréal), « Communication verte et responsable : du profil vertueux au verdict citoyen, qu’en est-il ? » 52
ROMENTI S., MURTARELLI G., (IULM, Milan), « Strategic Communication and Environmental Decision Making: An Italian Case Study ». 53
POCHET S., (UCL), « l’usage abusif des arguments écologiques dans la publicité diffusée en Belgique ». 54
GAERTNER L., (Sciences Po-CNRS) : « la gouvernance des pratiques publicitaire liées à l’environnement : l’ajustement aux contraintes comme stratégie professionnelle structurante ».
68
3. Phénomènes d’occultation : les stratégies d’évitement ou de contournement
Plusieurs communications ont soulevé le problème des discours environnementaux qui
cachaient la réalité ou qui la masquait sous une rhétorique stratégique et trompeuse. Selon un des
intervenants (Ferenc Fodor, chercheur EDF), la publicité chez les fabricants de voitures présente un
discours environnemental qui a pour but de faire croire que la voiture est écologique. Ce discours est
euphorisant, ludique, stéréotypé, et non dramatisé.
Ce qui se trouve occulté dans ce discours, est toute mention de la causalité des problèmes
environnementaux, ainsi que toute évocation du changement climatique. Un substitut commode
pour suggérer indirectement ces problèmes, c’est le CO2, dont le terme figure largement dans la
publicité pour les voitures, ou alors l’idée de la protection de l’environnement et de la planète. La
réduction du C02 est présentée sous une lumière très positive, comme s’il s’agissait d’une sorte de
« bonus écologique ». On cherche à faire croire à l’acheteur potentiel qu’il y a un lien entre la
réduction de C02 et la possibilité de faire des économies.
Par ailleurs, dans une étude d’un corpus de films documentaires sur l’environnement (films
d’Al Gore, de N. Hulot, de Y. A. Bertrand), a été mise en avant une tendance à instrumentaliser le
discours du GIEC, qui sert un discours catastrophiste sur le changement climatique. La prudence et
les nuances dans le discours du GIEC se trouvent ainsi gommées, ce qui fausse la représentation de
cet organisme et de son rôle, auprès du public.
D’autres communications ont mis en avant le phénomène de désinformation dans la
publicité, appelée greenwashing ou « blanchiment écologique », ce qui a quand même amené une
prise de conscience par différents publics. On constate un début d’opposition au greenwahsing à
travers la mise en place des formes de régulation de la publicité (notamment, le prix « Pinocchio »),
et à travers l’augmentation des plaintes déposées contre les publicitaires. En même temps, à été
évoqué le phénomène de saturation chez les publics par rapport à la montée de l’argumentation
écologique entre 2008 et 2009 ; on constate à partir de 2010 un retour à des discours publicitaires
hédonistes, et notamment, chez les constructeurs d’automobiles, on retrouve le retour de
l’argument publicitaire du « plaisir de conduire » (BMW).
Une véritable stratégie de l’esquive et de la forclusion ou du déni a été mise en avant par un
des intervenants du colloque, qui a montré comment s’opère le détournement de l’attention dans les
médias et les journaux télévisés. L’accent mis d’un côté sur les récits de catastrophe (comme par
exemple le cas BP dans le Golfe du Mexique en 2010), et de l’autre côté, l’adoption d’une stratégie
dilatoire, témoignent des tentatives d’obstruction politique. Les médias et les politiques remplacent
la véritable action de prévention ou de changement par la « promesse » d’action ; c’est ainsi que le
langage « performatif » contribue à éviter la recherche de solutions. Les énoncés performatifs
manipulatoires témoignent de ce problème de non ingérence politique vis-à-vis des problèmes
environnementaux, leurs causes, leurs solutions possibles.
Dans les communications consacrées au discours verts des entreprises, la contradiction entre
une politique de communication « verte » et l’absence de stratégies d’action environnementale a été
analysée. Quelques propositions ont été faites afin de mettre en place des modalités pour mesurer
et pour évaluer l’écart entre discours et action, ce qui montre que la recherche en communication se
rapproche souvent de recherche-action appliquée notamment à des tentatives de réduire les écarts
69
entre le discours de l’éco-blanchiment et les dispositifs réels en matière d’environnement dans le
contexte des organisations.
4. La question des publics, de la réception des messages
Dans ce colloque consacré aux enjeux de la communication verte, il n’est pas étonnant de
constater que de nombreuses interventions aient étudié la question de la réception et des publics
des messages environnementaux. Les approches à cette question sont variées et montrent des
tentatives de mettre en question les modèles de la transmission-réception qui ont dominé les
théories communicationnelles depuis longtemps.
D’un côté il s’agissait d’étudier les publics réels des messages. Dans l’étude de la réception
des films documentaires, par exemple, on a constaté chez les spectateurs une attitude de
scepticisme et rejet, par rapport notamment à ce qui est perçu comme l’hypocrisie de certains
auteurs comme Al Gore (avec son empreinte carbone gigantesque), ou par rapport à la tonalité
dogmatique des messages. Au sein des entreprises et des organisations, les études de réception ont
permis de dégager des stratégies qui cherchent, de plus en plus, à mettre les actionnaires au centre
de la communication sur l’environnement dans une approche de management « proactif » afin
d’obtenir une acceptabilité dans les démarches.
De l’autre côté, les interventions ont tenté de décrypter, en se servant d’une approche
sémiologique et linguistique, les publics « virtuels », ceux qui sont construits par les discours et les
contenus. Dans le cadre de la publicité automobile notamment, on constate la création, au sein des
messages, d’un public à qui on confie un rôle plutôt passif. Le consommateur représenté dans la
publicité automobile est « lecteur » et non acteur, et donc tributaire du discours publicitaire qui le
définit entièrement. Dans d’autres cas, les publicitaires tentent de projeter l’image d’un « sujet
sachant », d’un consommateur maîtrisant un savoir sur l’énergie, ce qui a pour but d’affirmer le
discours euphorisant de la publicité en suggérant au consommateur réel que lui aussi, à l’instar du
sujet récepteur virtuel, arrivera lui-même à dominer les problèmes écologiques en achetant tel
produit. Le public construit est un public qu’on ne cherche pas à choquer ni à bousculer ; il s’agit d’un
lecteur-consommateur qu’on invite à agir, sans imposer une vision brutale de l’avenir, sans faire de
prescriptions. C’est le discours de la consommation qui domine et qui l’emporte sur celui des
impératifs de la réduction de la consommation ; le public de ce discours est donc avant tout un public
de consommateurs.
L’écart entre les publics construits et les publics réels des messages sur l’environnement a
été évoqué dans une des communications, consacrée aux médias de masse. En effet, si dans les
médias on retrouve la figure d’un « citoyen global imaginaire », destinataire des messages
environnementaux, héros et sujet indifférencié, de l’autre coté les moments de crise montrent en
fait que cette figure « vole en éclats » car l’acteur singulier social n’est pas homogène mais est
diversement touché par les problèmes liés à la pollution, aux accidents industriels, et au
réchauffement climatique. Ce sont justement les particularismes des victimes qui permettent
d’exposer l’aspect illusoire d’un public imaginaire global agissant de façon uniforme.
D’autres études ont mis en avant l’impact potentiel sur les publics des choix de langage dans
les messages environnementaux. Une analyse de l’essor des termes composés à partir du mot :
70
carbone (« bas carbone ») a permis de soulever le problème de la dissonance cognitive chez les
lecteurs et chez les publics, à qui on demande d’assimiler l’idée d’une « baisse » à quelque chose de
positif, ce qui va à l’encontre de nos habitudes à associer le « bonheur » à la croissance. En effet le
mythe de la croissance, une transposition contemporaine du discours de la croissance industrielle,
imprègne notre inconscient collectif : happy is up ! ; l’appropriation d’un message contraire aux idées
reçues ne va pas de soi.
Enfin, une série de communications a permis de mettre en question la notion même de
public en tant que « récepteur ». Nous nous trouvons, en effet, dans une période de « seconde
modernité » caractérisée par des frontières floues entre les rôles des scientifiques, du grand public,
des personnages politiques, et ceci, à la différence de l’époque de la première modernité, pendant
laquelle il y a un cloisonnement rassurant des rôles sociaux. Cette période de complexification des
relations entre publics, entreprises et pouvoirs nécessite d’adopter une stratégie de développement
de « l’informativité » dans les messages afin de mettre les lecteurs dans une position plus active. Il ne
suffit plus pour une entreprise de transmettre un message simple du type « nous nettoyons l’eau » ;
maintenant il faut approfondir le degré d’information, préciser le contexte et l’étendue des actions,
pour montrer comment, pourquoi, avec qui, etc., « on nettoie l’eau ».
En effet, le public doit maintenant être considéré comme potentiellement ou réellement
engagé dans le débat sur l’environnement. Dans les entreprises et les organisations, nous constatons
une politique publique et communicationnelle de plus en plus « participative » qui constitue une
forme de réponse à l’évolution des attitudes des parties prenantes. Dans un premier temps, le public
a fait confiance aux entreprises et aux pouvoirs publics. Par la suite ces publics ont commencé à
exiger des explications, des précisions, sur les politiques environnementales des organisations et des
collectivités. Maintenant nous en sommes à un autre tournant : de la demande « montrez-nous », on
est passé à la demande « impliquez-nous » de la part des publics ; la communication doit suivre cette
évolution et anticiper les souhaits d’engagement des parties prenantes et des citoyens. Dans cette
optique, la communication doit être engageante et « instituante » et elle doit permettre au lecteur
de s’identifier à l’action. Les destinataires sont maintenant des partenaires potentiels. En fin de
compte, ces exemples montrent que la théorie traditionnelle de la réception est débordée par les
pratiques sociales contemporaines : un récepteur « actif » n’est plus véritablement un récepteur, car
il accède au statut d’acteur-émetteur et sujet-partenaire.
5. Le langage, la terminologie
Quelques-unes des interventions ont présenté le résultat d’études terminologiques
quantitatives pour montrer l’évolution du langage de l’environnement dans les médias. Deux
communications en particulier ont été consacrées à l’évolution de l’emploi du terme « carbone » et
des termes composés à partir de ce mot. En effet, les changements sémantiques sont révélateurs de
l’intégration des problématiques environnementales dans les discours.
En effet, jusqu’en 2005 les termes forgés à partir du terme « carbone », c’est à dire « bas
carbone », « coût carbone », « monnaie carbone » (ou an anglais low carbon, carbon cost, carbon
currency) sont surtout en lien avec le monde des affaires et le monde des finances, avec la
connotation d’une occasion à saisir dans l’investissement. A partir de 2005, l’on constate l’ouverture
71
à un questionnement social sur le comportement individuel, avec la création et l’emploi généralisé
des termes tels que « vie bas carbone », « régime bas carbone », « société bas carbone » (ou en
anglais low carbon living, low carbon diet, low carbon societies, low carbon futures). En anglais, le
terme anglais « low carbon » est même devenu un substantif autonome ; le fait qu’il n’a pas besoin
d’un autre substantif pour lui donner du sens, montre toute l’importance dévolue à cette notion.
Une étude des co-occurrences de mots liés aux termes forgés à partir de « carbone », dans un corpus
d’articles de presse a permis de mettre en avant par ailleurs l’augmentation progressive des
associations entre le « bas carbone » et le changement climatique.
Ces exemples terminologiques montrent que le langage se modifie en fonction des
changements dans le monde politique. Le langage construit le monde et reflète des situations
politiques et culturelles. Les termes composés à partir de « bas carbone » pourraient en effet aider
les sociétés à l’heure actuelle à passer de l’idée de mitigation du changement climatique, vers une
l’idée de développement durable.
72
IV. Article issu de notre communication au colloque
« Communicating Green55 » et soumis au comité scientifique
le 20/01/11 pour publication :
(VERSION ENCORE PROVISOIRE)
L’information environnementale et les dispositifs de communication ‘verte’ à l’école : étude
comparative de quatre collèges dans les départements du Nord et du Bas Rhin
Quelles sont les formes de communication environnementale à l’école ? En quoi la mise en
place de projets environnementaux influe-t-elle sur les pratiques communicationnelles et
informationnelles des acteurs au sein de l’école ? Si des travaux dans le domaine des sciences de
l’éducation ont permis de mettre en lumière les obstacles à une « éducation à l’environnement »
transversale et interdisciplinaire, peu de recherches ont à ce jour été consacrées à la production et la
circulation des discours sur l’environnement au sein des établissements scolaires, non seulement
dans les classes, en direction des élèves, mais aussi parmi l’ensemble des activités et pratiques
communicationnelles menées par les équipes et les partenaires parascolaires ou associatifs. Dans le
cadre du projet de recherche : « Quel climat à l’école ? Les jeunes face aux changements
climatiques »56, notre équipe interdisciplinaire de chercheurs en sciences de l’information et de la
communication, sciences politiques et sociologie étudie la manière dont les dynamiques
environnementales locales (plans climat territoriaux, présence d’associations) orientent
l’investissement des établissements scolaires dans des actions de sensibilisation et d’éducation au
développement durable et en particulier aux changements climatiques. L’objectif du projet est de
comprendre dans quelle mesure le système scolaire peut contribuer à créer un imaginaire collectif
des problèmes climatiques. A partir d’observations au sein de quatre collèges, et des entretiens semi-
directifs, l’équipe s’attache à identifier les mécanismes qui structurent la production et les usages des
discours sur les enjeux climatiques et environnementaux à l’école. Un volet de ce projet, consacré
plus particulièrement aux conditions de production et de circulation des discours sur le
développement durable au sein de l’école, cherche à établir la nature des synergies et des
concurrences entre différents dispositifs d’information et de communication.
Dans cette communication nous proposons les premiers résultats de l’analyse d’une série
d’entretiens et d’observations menés dans quatre collèges depuis février 2010, afin d’analyser les
55
A noter cet article n’est encore qu’une version provisoire, néanmoins, étant susceptible d’être acceptée pour une publication, les données et résultats sont encore confidentiels. 56
Le programme de recherche GICC « Gestion et Impacts du Changement Climatique » (GICC) est financé par la Direction de la Recherche et de l'Innovation (DRI) du Commissariat Général du Développement Durable. (3ème APR du « GICC-2 » 2008 « Atténuation, adaptation et régionalisation », 2009-2011, financement ADEME). Voir http://www.gip-ecofor.org/publi/page.php?id=417&rang=0&domain=38&var=0&lang=fr_FR
73
stratégies communicationnelles et les dispositifs informationnels privilégiés en vue de la création et
la transmission des messages sur l’environnement.
Dans une première partie, nous reviendrons sur les logiques organisationnelles au sein du
collège afin de questionner l’implication des acteurs des établissements. Dans un deuxième temps,
nous proposerons une discussion des modèles de communication et de circulation des savoirs qui
ressortent du discours des enseignants, et les valeurs qui leur sont associées.
1. Logiques organisationnelles et représentations sociales de l’environnement
Selon les perspectives ouvertes par la sociologie des organisations, le collège est à étudier
comme une structure au sein de laquelle se jouent des enjeux d’éducation, de contenus des
enseignements, des enjeux de travail en partenariat et en complémentarité, d’enjeux de réussites
des élèves, des enjeux de carrière, de résistances à changer de pratiques ou encore de réformes
successives du système. Il s’agit pour nous, ici, de comprendre l’importance de la complexité de
l’organisation collège en tant que système scolaire comme objet social et ensuite comprendre
comment les personnes qui y travaillent s’y inscrivent. Les théories de H. Fayol et d’E. Mayo peuvent
contribuer à nous éclairer sur la position qu’occupent les enseignants au sein de l’établissement
scolaire aujourd’hui. Dans la division du travail et la spécialisation des tâches (H. Fayol), on
s’intéresse aux différents types d’administration et plus particulièrement aux procédés de gestion
dans les entreprises mis en place apparaissant les mieux adaptés pour établir une administration
optimale. Avec l’école des relations humaines (E. Mayo), on poursuit en affirmant, contre le
taylorisme, le rôle essentiel du facteur humain et relationnel dans la détermination de la productivité
économique. On en arrive à des situations aujourd’hui de cloisonnement des activités de chacun
avec la nécessité de communiquer et d’échanger beaucoup pour pouvoir travailler ensemble, faire
fonctionner la structure et en même temps de perdre de vue la vision complète et claire de la
mission de chacun.
En particulier on note le besoin du soutien du chef d’établissement pour mener un projet
quel qu’il soit (au niveau de l’autorisation, de la confiance et du soutien financier). Or, l’organisation
rationnelle de l’établissement scolaire instituée est confrontée actuellement aux ambiguïtés de la
mise en œuvre de la notion de politique éducative locale. Comment envisager l’intégration de l’EEDD
(éducation à l’environnement et au développement durable) dans des programmes déjà institués et
ayant une certaine logique ? Comment les enseignants parviennent-ils ou non et doivent-ils
déontologiquement s’investir dans l’EEDD pour respecter le cadre de leurs missions ? Quels impacts
l’arrivée de l’EEDD va-t-elle provoquer dans les établissements scolaires ?
1.1 Regard sur la structure collège et les contraintes qui s’imposent aux enseignants
L’établissement scolaire et notamment le collège est une structure cohérente saisie comme
un système d’interactions entre acteurs sociaux internes (élèves, parents, administrateurs, Ministère,
spécialistes…) et externes (politiques, parents, groupes sociaux associatifs, médias, etc.). Dans notre
cadre d’observation, nous consacrons un intérêt particulier aux stratégies et aux pratiques des
74
acteurs, notamment les pratiques professionnelles des enseignants et leurs pratiques de
l’enseignement. Ainsi, nous tentons de rendre compte que les organisations se structurent en
fonction des objectifs que se fixent les équipes enseignantes et administratives et également le chef
d’établissement et aussi des facteurs extérieurs contingents avec lesquels le système scolaire doit
composer afin de trouver un équilibre dans son organisation et son fonctionnement interne57.
Professeur de français, collège Strasbourg : « Cela reprend bien les envies de s’impliquer très
personnelles et propres à chacun. Chacun accorde le temps qui lui semble nécessaire et dont il a à
disposition ».
Professeur d’arts plastiques, collège Strasbourg : « C’est la sensibilité à des questions
environnementales et la connaissance des actions menées ailleurs ou déjà impulsées qui fait
l’engagement et l’implication dans ces projets ».
Même si l’école est perçue comme un système permettant de reproduire et maintenir l’ordre
social, il s’agit pour nous de mettre à distance ce fait afin de se saisir des systèmes de position des
enseignants et autres personnes impliquées dans le système scolaire, d’appréhender la subjectivité
des acteurs en étudiant leurs motifs, la cohérence de leurs actions et leur bonne foi, d’analyser les
enjeux qui sous-tendent leurs actions et de rendre compte des freins et des contraintes qu’ils
rencontrent.
Dans les entretiens menés avec les enseignants, nous notons en effet que dans leurs
pratiques professionnelles au quotidien avec ou sans projet environnemental, certains souhaitent : 1)
un meilleur partenariat entre l’équipe dirigeante et l’équipe pédagogique, obtenir une meilleure
reconnaissance au niveau de leur discipline car certaines sont perçues comme des « matières
secondaires » : sport, arts plastiques, etc., 2) des projets fédérateurs entre enseignants qui créent
des liens et ce encore plus sur le long terme ou 3) plus de relationnels entre eux, avec
l’administration et avec les élèves.
Professeur d’EPS, collège Strasbourg : « J’aimerais un travail en partenariat pour le développement
durable : découverte de la nature, s’y sensibiliser en EPS, relais ensuite par la SVT, puis par le français
pour faire des débats…, l’histoire-géo ».
Dans ce sens, il importe de mettre en perspective la dimension stratégique de la pratique de
l’enseignement, c’est-à-dire de montrer que les enseignants et les chefs d’établissement ne sont pas
des supports passifs de la mission qu’ils ont à remplir. Les enseignants ont une marge de manœuvre
entre les programmes qu’ils ont à faire passer et leurs contraintes d’horaires et de pratiques mais ils
ont aussi une certaine marge de manœuvre dans les initiatives qu’ils peuvent porter (documentaliste
autodidacte en informatique, possibilité de parler environnement en sport), incluant des enjeux
éthiques, politiques et culturels et amenant à générer de nouvelles zones d’incertitudes dans les
relations entre collègues comme avec la hiérarchie.
Enseignant de physique-chimie, collège Strasbourg : « on ne voit pas beaucoup les élèves mais on
peut parler de développement durable dans plusieurs parties de cours. On peut lancer des projets en
prenant sur les heures de vie de classe et lancer des ateliers entre midi et deux ».
En somme, les pratiques éducatives se jouent en partie sur un ensemble de dispositions déjà
constituées de goûts, de ressources culturelles, de positions idéologiques, de valeurs, de rapports
57
Voir les ouvrages d’Henri MINTZBERG et l’école de la contingence.
75
sociaux de sexe, de représentation de l’univers scolaire, de réussite sociale et aussi de réussite
personnelle. Il faut également inclure leurs représentations, leur regard sur les médias, leur idéologie
professionnelle, leur position à l’égard de ses collègues, de la hiérarchie et des personnes extérieures
à l’établissement.
1.2. Pratiques professionnelles des enseignants : quelles représentations sociales des enjeux
environnementaux ?
Les projets lancés par des enseignants ont pour but de parvenir à transmettre de nouvelles
connaissances par un biais novateur pour parvenir à la transmission et à l’intégration des messages.
Dans l’ensemble, les enseignants privilégient des projets qu’il est possible de mener sur plusieurs
années consécutives (classe « nature ») ou une année sur deux (Trophées de l’environnement), ou
des projets ponctuels (expositions, sorties découverte, séances cinéma-débat) ou encore des
mobilisations à l’intérieur des cours (EPS, arts plastiques, etc.).
Les projets doivent être remis très souvent à jour, ils sont fortement personnalisés et sont
révélateurs d’un groupe de collégiens motivé ou porteur et du sens des messages qu’ils veulent y
donner. Ils reposent sur des piliers et quelques autres personnes motivées mais qui ne sont pas
porteuses parce qu’elles sont sensibles aux questions de développement durable et elles ont besoin
d’être convaincues de la réussite du projet.
Professeur documentaliste, Strasbourg : « Des panneaux ont été réalisés par les 6ème
qu’ils ont ensuite
expliqué aux adultes (jury). Objectif : élaborer des panneaux répondant à une problématique simple
et y répondre de façon cohérente, maîtriser l’information, savoir la contextualiser et évaluer sa valeur
scientifique, synthétiser le résultat de la recherche. (…) Le fait de mener des projets de façon
complémentaire entre enseignants permet d’approcher le même sujet sous des manières différentes.
(…) Les projets fonctionnent car il y a un travail en partenariat et une implication entre tous et un
apport complémentaire des compétences ».
On note une certaine opposition de conviction entre les enseignants qui pensent que l’EEDD
ne peut pas être abordée en cours et qu’un manque de temps très important peut se faire sentir
pour pouvoir l’aborder et mener des projets allant dans ce sens et les autres qui pensent que l’on
peut greffer sans trop de difficultés le développement durable aux cours en abordant des thèmes qui
s’y rapportent.
A chaque projet qui nous a été présenté au cours des entretiens, des limites et des freins ont
été rencontrés (forces d’inertie, changements non-maîtrisés, imprévus, effets inverses à l’intention
de départ, résultats pas obtenus). Il importe de comprendre pourquoi certaines initiatives
fonctionnent tandis que d’autres ne fonctionnent pas. D’abord, il ressort une limite de temps
(contraintes d’emplois du temps individuellement et aussi en complémentarité de celui des
collègues), et un manque de formations sur le thème du développement durable et sur les moyens
technologiques actuels pour se former et ainsi former les jeunes (documentaliste et l’informatique).
Parfois il y a un sentiment de lobbying sur le montage d’un projet et un manque de communication
entre enseignants de disciplines différentes sur ce qu’ils font au sein de leurs cours, de leurs activités
développement durable ou quotidiennes.
76
De plus, les priorités pour l’EEDD sont très variables d’un enseignant à l’autre. En effet,
certains critiquent le manque d’investissement de leurs collègues et souhaiteraient voir s’impliquer
davantage les autres. Une nuance est à apporter, ce ne sont pas ceux qui portent les projets qui
dénoncent le manque de participation des autres enseignants car ils disent trouver du relais là où ils
en cherchent (collègues du collège ou à l’extérieur : experts sur un thème précis, invitation
d’écrivain, etc.), ce sont ceux qui y participent sans être porteurs de projet qui souhaiteraient être
plus soutenus.
La sensibilité croissante portée à l’environnement de manière générale aujourd’hui a eu une
répercussion positive sur la notion de projet de classe plus que sur l’environnement.
Enfin, il ressort un manque de moyens financiers puisque certains projets peuvent voir le jour grâce
au soutien apporté par un supermarché. Pourtant, les apprentissages semblent nécessiter de plus en
plus d’expériences spécifiques comme la séparation du temps et du lieu, de confier par délégation à
des personnes, dont c’est le métier, la réalisation du projet. Il semble que l’apprentissage par
échanges plus interactifs et réflexifs entre enseignants et élèves prennent de plus en plus
d’importance sur les formes de transmission classique, ce qui contribue à modifier un tant soit peu la
forme scolaire. Cela inclut notamment l’introduction d’éléments de contractualisation (avec les
collégiens, les familles, les collectivités territoriales, les communautés culturelles, etc.). Il faut mettre
beaucoup de bonne volonté :
Professeur d’histoire-géographie, collège Strasbourg : « L’Association A. est intervenue la semaine
dernière car je trouve que c’est intéressant de faire intervenir des personnes de l’extérieur et faire des
incises dans le programme prévu du cours ».
Le système scolaire est une organisation cadrant de façon rigoureuse et assez contraignante
les activités des enseignants, ces derniers n’en restant pas moins des acteurs pouvant se saisir
d’occasions pour développer des actions particulières. L’apparition récente de l’EEDD dans les
programmes scolaires et son manque encore actuel d’encadrement permet aux enseignants de s’en
saisir de façon assez libre en s’impliquant dans des projets innovants et qui se veulent diversifiés
mais cela fait ressortir également des motivations différentes à s’impliquer (intérêt pour
l’environnement, envie de sensibiliser les collégiens, moyen de se valoriser personnellement, etc.).
2. Dispositifs communicationnels : transmission ou échange ?
Les projets et les actions environnementaux au sein des collèges étudiés se concrétisent
globalement de quatre manières différentes. Ces actions peuvent être 1) des dispositifs impulsés par
l’équipe de direction (classes à projet environnemental, classes nature, ateliers ou clubs scientifiques,
présence d’un potager ou d’une station météo) ; 2) des initiatives collaboratives ou individuelles
entreprises par des professeurs de disciplines différentes qui s’appuient parfois sur des dispositifs
existants (programmes SVT 3e, concours nationaux) ou qui partent d’un choix d’un thème
fédérateur ; 3) les « briques du savoir » sur l’environnement et le développement durable dans
différentes disciplines, concernant des thèmes variés (impact de l’homme sur l’environnement, la
composition de l’atmosphère, l’effet de serre, la respiration et la santé, l’énergie, les notions de
risque et d’aléa, etc.) selon les programmes disciplinaires (SVT, histoire-géographie, Chimie-Physique,
Technologie), et qui font l’objet d’un traitement ponctuel par les enseignants que ce soit sous forme
77
de leçons formelles ou de moments d’échanges et de discussions avec les élèves ; 4) les pratiques au
quotidien des professeurs et des membres de l’équipe administrative, et des élèves eux-mêmes, qui
« affichent » leur sensibilité environnementale (choix du vélo ou des transports en commun,
participation à titre personnel à des actions locales.
Ces quatre niveaux d’actions s’enchevêtrent souvent, concernent un noyau d’acteurs
particulièrement motivés qui créent un rayonnement d’un centre vers la périphérie, et génèrent un
ensemble de messages qui circulent au sein du collège à travers des supports variés (affiches,
newsletters, exposés, conférences, pages du site web du collège, etc.). Si dans certains cas ces
acteurs partagent un intérêt pour l’environnement sans que l’on puisse parler de « nouage », dans
d’autres cas (notamment un collège étudié dans le Nord) se forme une « communauté de pratiques »
avec mise en commun et mise à jour des savoirs, échange des informations, et partage de réseaux de
contacts, y compris experts ou acteurs associatifs qui contribuent à la construction et à l’actualisation
des connaissances58.
A travers leur discours, les enseignants que nous avons rencontrés dessinent les principes de
communication et de médiation sur l’environnement qui ont guidé la mise en place des dispositifs.
Comment les enseignants et les membres de l’équipe perçoivent-ils la dimension
communicationnelle des actions menées au sein de l’école ? Quels modèles de communication
environnementale sont privilégiés, implicitement ou explicitement, par les enseignants ?
Dans les recherches en Sciences de l’éducation, des critiques de la « forme scolaire » visent à
démontrer les insuffisances des pratiques traditionnelles de transmission des savoirs disciplinaires,
souvent découpés des contextes sociaux de leur élaboration, et présentés par les professeurs selon
un schéma linéaire et diffusionniste de la communication face à l’élève passif59. L’opposition entre
modèles « mécanistes » et « interactionnistes » de la communication ne permet pourtant pas de
saisir la valeur accordée par l’équipe à l’ensemble des échanges sur l’environnement qui ont lieu au
sein des établissements. Au lieu d’opposer les deux modèles communicationnels impliqués par le
contraste entre savoirs ‘transmis’ et les savoirs construits par les élèves, nos observations nous ont
permis de considérer leurs complémentarités. Comme nous le dit Jean-Pierre Meunier « [l]a
communication n'est pas ou transmissive ou relationnelle ou cognitive, inférentielle ou d'autres
choses ; elle est tout cela à la fois mais selon des degrés ou des proportions qui dépendent des
dispositifs concrets dans lesquels on entre ».60
Quelle complémentarité entre le « dirigisme » de la communication scolaire et la mise en scène de
l’expression des jeunes ?
Dans l’espace-temps de la classe, si le modèle transmissif prédomine, des modèles
concurrents et complémentaires sont également mobilisés et on note un souci chez certains
58
Sur l’analyse des communautés de pratiques au sein des organisations, voir Nicole Giroux, « Le Nouage des savoirs en organisation », In A. Bouzon (dir.), La communication organisationnelle en débat : champs, concepts,
perspectives, Paris, L’Harmattan, 2006. 59
Voir les travaux de François Audigier, et notamment, « Formes scolaires, formes sociales : un point de vue de didactiques des sciences sociales – Histoire, géographie, éducation à la citoyenneté », Babylonia, 2008, p. 8-13. 60
Jean-Pierre Meunier, Dispositifs et théories de la communication : deux concepts en rapport de
codétermination, Paris, Hermès, n° 25, 1999, 83-91.
78
enseignants d’accorder une place au sein de la classe à la discussion, au questionnement, à la mise
en doute, parfois à partir des événements d’actualité.
Professeur SVT, collège Strasbourg : « Parfois les gamins posent des questions en début de cours – je
dis OK et je mets de côté les classeurs. Ca arrive, ce n’est pas fréquent mais cela arrive. [….] Cela ne
me dérange pas qu’ils mettent en doute ce que je dis. […] On m’a posé la question récemment [du
réchauffement climatique], ‘Madame on a eu un printemps et un hiver froid, et le réchauffement ?’.
J’ai essayé de leur répondre, à partir des cours de la fac ». Dans le cadre des enseignements
disciplinaires également, certains dispositifs pédagogiques expérimentaux mettent à l’honneur une
démarche d’investigation qui part des questionnements des élèves. Cette expérimentation
pédagogique, dans le cadre d’un programme de sciences intégrées mis en place dans un des
établissements étudiés, bouleverse les rapports traditionnels entre professeurs et élèves en
privilégiant la construction active des connaissances.
En même temps, les deux modèles peuvent se rencontrer et se compléter même au sein des
dispositifs informels, comme le montre l’exemple d’une intervention proposée lors d’une séance
d’atelier environnemental par un professeur d’Histoire-Géo, qui souhaitait à corriger l’influence des
médias sur la formulation des questionnements par l’élève.
Professeur d’Histoire Géo, collège Villeneuve d’Ascq : « Les élèves [de l’atelier développement
durable] sont restés dans une idée superficielle de catastrophisme car on n’a pas assez approfondi les
questions qu’ils se posaient […] Lors d’une séance je leur ai quand même montré le travail des acteurs
sociaux, ils doivent voir plus que le côté négatif ».
Le bilan est donc encourageant si on considère ces exemples de la parole donnée à l’élève
qui participe donc à la transmission des savoirs, une forme d’empowerment. Cependant, cette prise
de parole par l’élève n’est pas sans poser problème. Ce n’est pas un objectif avoué dans les propos
des enseignants qui citent avant tout comme motivation : sensibiliser aux problèmes
environnementaux, faire prendre conscience d’une nécessité d’agir ou de réfléchir, développer une
pensée critique, corriger « l’endoctrinement » de l’école primaire. Ces objectifs se traduisent aussi
par le désir de faire porter un regard critique sur soi, sur ses actions, sur ses gestes. Le prétexte
donné par les enseignants pour ce regard tourné vers l’intérieur est l’idée qu’il faut toucher le
collégien en évoquant sa propre vie, son monde, ses pratiques, ce qui le concerne directement. En
même temps, le résultat de cette forme d’« accroche » ou séduction est d’occulter la dimension
socio-politique des phénomènes sous le prétexte que le collégien ne comprendrait pas ou ne
s’intéresserait pas aux aspects sociaux et politiques du développement durable. De l’autre côté on
note une certaine réticence à assumer le contraste entre une transmission de type « scolaire » des
savoirs sur la nature et l’environnement, et une communication plus « militante » et engagée visant à
convertir à la cause écologiste.
L’ambigüité de cette approche qui s’ouvre au débat et aux questionnements mais en même
temps constitue un « oubli » du social et des liens entre science et société se voit de façon
surprenante à travers l’exemple du collège Carpeaux à Valenciennes où nous avons pu constater une
vision très affirmée de l’élève en tant que sujet, co-concepteur et co-énonciateur des dispositifs de
médiation des savoirs sur l’environnement. L’acteur ‘moteur’ des projets environnementaux dans ce
collège nous a décrit le travail des élèves de l’atelier scientifique en termes qui font penser à une
79
activité d’évangélisation. Le discours de ce professeur, qui intègre le point de vue de ses élèves
(‘nous’) dans ses propres propos, traduit la volonté de donner la parole aux jeunes :
Professeur SVT et Physique-Chimie : « ils sont venus à l’atelier, ils ont bien aimé et puis ils se sont
rendus compte que y’avait un problème, qu’il fallait dire ça aux gens. Ils sont passionnés par ce
phénomène la, c’est notre avenir qui joue, qu’est ce qu’on peut faire, nous on peut rien faire, y’a que
les adultes qui peuvent faire donc on prévient les adultes, on fait quelque chose pour prévenir les
adultes ». Le discours indirect libre de cette citation montre bien la tendance à « instrumentaliser » la
parole de l’élève.
Le collège lui-même doit sa notoriété (locale, régionale) à cette approche interactive à
l’éducation à l’environnement, qui présente un mélange d’actions, allant des recherches
d’information par les élèves lors des ateliers, à la conduite d’expériences scientifiques pour mesurer
la qualité de l’air dans l’espace urbain par les élèves et le professeur, et à l’organisation de
campagnes de sensibilisation par les élèves et l’enseignant.
Dans l’organisation des ateliers et des actions de communication internes et externes l’élève
agit pourtant essentiellement comme le relais de la communication pratiquée par ce professeur. Il
s’agit d’une émulation par les élèves (une « mini conférence » élaborée et prononcée par les élèves
est comme le miroir de la « conférence » du professeur) d’une activité intense de communication
externe de la part de l’enseignant. Chez cet enseignant ‘moteur’, la construction des savoirs est
indissociable des tentatives de porter le message environnemental vers l’extérieur de l’établissement
(couverture des actions dans la presse locale ; projet sur la qualité de l’air impliquant les acteurs de la
municipalité, partenariats avec des associations et d’autres établissements) ; toute initiative de la
part des élèves qui tend à légitimer cette visée communicationnelle est donc particulièrement bien
reçue et suivie, même si, au sein de l’établissement, cette médiatisation n’est pas bien reçue par tous
les acteurs, et est créatrice de tensions et de conflits.
Principal adjoint, collège Valenciennes : « Maintenant, il y a des actions qui sont menées à l’extérieur,
beaucoup, qui contribuent aussi au rayonnement de l’établissement même si c’est pas l’objectif,
l’objectif c’est pas de se faire mousser mais y’a quelque chose de l’ordre de porter une certaine bonne
parole à l’extérieur, l’idée c’est de toucher un certain public et de faire passer un message en veillant
à ce que ce message soit juste mais pas anxiogène non plus. »
Ce modèle « évangélisant » de l’enseignant, et par extension, de l’établissement, semble
d’ailleurs incompatible avec la tentative de mettre en place un Agenda 21 scolaire au sein de
l’établissement. Si l’intention de l’équipe de direction en lançant un Agenda 21 scolaire, était surtout
de pérenniser les efforts du professeur initiateur (qui partait bientôt à la retraite), et de fédérer
l’équipe autour d’un projet environnemental, l’aspect technique, formaliste, et la démarche
managerielle du dispositif de l’Agenda 21 rencontre des réticences parmi les membres de la
communauté de pratiques (élargie) sur l’environnement61. Les impératifs d’efficacité et la pratique
de modélisation est en conflit avec la pratique spontanée, volontaire, et semble contraire au
positionnement de la micro communauté des « écologistes » dont le cachet et l’aura proviennent
61
Une réunion de « réactivation» du projet de l’Agenda 21 scolaire de cet établissement nous a permis d’observer l’attitude (hésitations, rappel des contraintes des acteurs à l’égard des projets proposés par le cabinet de consultants externes).
80
justement d’une notoriété et de la bouche à oreille ; cette « contreculture » repose surtout sur la
présence d’un leader d’opinion charismatique et son cercle d’initiés.
Communication et redocumentarisation : les supports d’information sur l’environnement
L’imbrication des modèles transmissifs et interactifs de la communication sur
l’environnement que nous avons observée au sein des établissements étudiés peut également
permettre de comprendre la nature et le contenu des supports élaborés par les élèves et les
enseignants sur des sujets environnementaux. En effet, dans le cadre des enseignements ainsi que
des projets et ateliers environnementaux, l’aboutissement des travaux comprend souvent la création
d’un support original par les enseignants comme par les élèves (affiche, poster, panneau, newsletter
mais aussi, exposition, performance sportive, tract, lettre au conseil municipal, site web), présenté
ou exposé à un public interne ou externe. La circulation des savoirs sur l’environnement résulte en
fait d’une activité intense de transposition, de recontextualisation, et de ‘redocumentarisation’ des
informations effectuée par tous les acteurs concernés. Ces activités sont décrites surtout comme des
formes de ‘valorisation’, ‘restitution’ ou ‘archivage’ plutôt que comme des opérations sociales et
médiatiques. En tant qu’« inscriptions » les supports produits sur le développement durable
correspondent donc à une activité de médiation, qui implique une opérativité sociale et symbolique,
en engageant des acteurs, l’institution et des représentations62. (« La folle aventure de ce site se
concrétise sur ces fichiers que vous nous faîtes l’honneur de lire », site environnemental des élèves du
collège à Valenciennes).
Il semble que l’EEDD implique une éducation aux enjeux sociaux de l’information-
communication. La culture informationnelle pourrait fournir la clé ou tout au moins une entrée
possible pour aborder les aspects sociaux des questions environnementales. En effet, si les équipes
enseignantes restent réservées quant à la place et à la pertinence d’une discussion sur le contexte
socio-politique du développement durable au niveau collège, les dispositifs crées (site web, exposés)
placent souvent les élèves mobilisés dans la position d’un acteur-sujet au sein de la communauté
locale ou même nationale ; et pourtant la production de discours sur l’environnement par l’élève
n’est pas conçu comme une forme d’engagement, ni comme un agir communicationnel, ce qui
permettrait de donner du sens aux inscriptions en interrogeant l’idée de destinataire et l’idée
d’échange et de débat parmi les acteurs sociaux.
La production et la mise en circulation des inscriptions variées par les acteurs des
établissements, tout comme les autres activités et projets mis en place par les équipes (visites,
sorties, balades nature, étude des éco-emballages, expériences scientifiques) correspondent à des
tentatives, par les acteurs responsables, de mettre en place et de soutenir un apprentissage situé du
développement durable. Pourtant malgré cela la dimension sociale, communicationnelle, des objets,
des supports, et des pratiques, reste inavouée en tant qu’objectif par les enseignants.
Pour conclure, les projets et les pratiques en lien avec l’EEDD au sein des collèges étudiés
concernent un nombre restreint d’acteurs qui doivent composer avec des contraintes matérielles et
62
Voir la discussion d’Yves Jeanneret sur la médiation La relation entre médiation et usage dans les recherches en information communication en France. RECIIS – Elect. J. Commun. Inf. Innov. Health. Rio de Janeiro, vol.3, n°3, Sep., 2009.
81
organisationnelles liées à leur cadre de travail qui nécessitent des négociations sur la nature des
initiatives transversales. Malgré ces contraintes, on a pu étudier quelques exemples d’approches
variées pour ouvrir la communauté scolaire à des pratiques visant une sensibilisation active et
participative aux contenus scientifiques du développement durable ; les pratiques, actions, et
dispositifs de médiation comportent une dimension communicationnelle qui fait entrer les élèves et
la communauté éducative dans une forme d’engagement inavoué et inexploité, notamment à partir
de la production et la circulation des supports d’information à l’intention d’un public interne et
externe. Dans notre prochaine phase d’analyse, la question des modalités d’appropriation de ces
actions par les collégiens eux-mêmes permettra d’étudier l’impact des initiatives sur les
représentations sociales des jeunes des enjeux du développement durable.
82
V. Bibliographie :
ANZIEU D., MARTIN J.-Y., (1994), Dynamiques de groupes restreints, Paris, PUF.
BARRERE A., « Les directions d’établissement scolaire à l’épreuve de l’évaluation locale », Carrefours
de l’éducation, 2009/2, n° 28, p. 199-214.
BAUDELOT C., ESTABLET R., (1971), L’Ecole capitaliste en France, Paris, Maspéro.
BAUDELOT C., ESTABLET R., (1992), Allez les filles !, Paris, Seuil.
BECKERS J., (1998), Comprendre l’enseignement secondaire, Paris, De Boeck Université.
BOURDIEU P. PASSERON J.-C., (1964), Les héritiers. Les étudiants et la culture, Paris, Minuit.
BOURDIEU P., PASSERON J.-C., (1970), La reproduction. Eléments pour une théorie du système
d’enseignement, paris, Editions de Minuit.
BREGEON J. (prés.) et al., (2008), Rapport du Groupe de travail interministériel sur l’éducation au
développement durable.
CHETOUANI L., (2002), Polémique sur l’effet de serre, Paris, l’Harmattan.
CHETOUANI L. et al., in AUBERT-PERES J. et VIEUXLOUP J. (dir°), (2003), « Comment donner la parole
aux élèves. Aide à la pratique argumentée en classe », CRDP Bretagne.
CHETOUANI L., « Les mots de la controverse sur le changement climatique », Le Télémaque, Presses
universitaires de Caen, n°31, mai 2007, p.81-104.
Circulaire (n°2004-110 du 8 juillet 2004) du Ministère de l’éducation.
COMBAZ G., (2007), Autonomie des établissements et inégalités scolaires, Editions Fabert, Paris.
CROZIER M., FRIEDBERG E., (1977), L’acteur et le système. Les contraintes de l’action collective, Paris,
Essais, 2000.
DEMAILLY L., (1991), Le collège. Crise, mythes et métiers, Lille, Presses universitaires de Lille.
DEMAILLY L., « Fortunes et ambiguïtés de l’accompagnement », EMPAN, 2009/2, n° 74, p. 21-28.
DEROUET J.-L. (sous la dir°), (1999), L’école dans plusieurs mondes, Paris, De Boeck Université.
DE SINGLY F. (1992), L’enquête et ses méthodes : le questionnaire, Paris, Nathan.
DUBAR, (1998), Sociologie des professions, Paris, Armand Colin, édition de 2003.
DUBET F., MARTUCELLI D., (1996), A l’école. Sociologie de l’expérience scolaire, Paris, Seuil.
DURU-BELLAT M., VAN ZANTEN A., (1999), Sociologie de l’école, Armand Colin, Paris, 2007.
DUTERCQ Y., LANG V., « L’émergence d’un espace de régulation intermédiaire dans le système
scolaire français », Education et sociétés, n° 8/2001/2, p 49-64.
FAYOL H., (1917), Administration Industrielle et Générale, Paris, Dunod, édition de 1999.
GALLAND O., (2001), Sociologie de la jeunesse, Paris, Armand colin.
GHIGLIONE R. et MATALON B. (1991), Les enquêtes sociologiques. Théories et pratique, Paris, Armand Colin. HOIBIAN S., « Enquête sur les attitudes et comportements des Français en matière
d’environnement », Enquête « conditions de vie et aspirations des Français », CREDOC, n° 270,
novembre 2010.
HOIBIAN S., Du Caddie à la poubelle : les Français sont plus sensibles aux emballages »,
Consommation et modes de vie, CREDOC, n° 234, novembre 2010.
LIU M., (1997), Fondements et pratiques de la recherche-action, Paris, l'Harmattan.
83
MAGNE N., « Le catastrophisme climatique dans le cinéma grand public », Ethnologie française,
2009/4, tome XXXIX, p. 687-695.
MAYO E., (1933), The Human Problems of an Industrialised Civilisation. New York, Macmillan.
MINTZBERG H., (1982), Structure et dynamique des organisations, Paris, Edition d’organisation.
ORIANNE J.-F., DRAELANTS H. et DONNAY J.-Y., « Les politiques de l’autocontrainte », Education et
sociétés, 2008/2, n° 22, p.127-143.
PEREIRA A., (2005), « développement et changement climatique », Passages de Paris, 1, p. 225-237.
RADANNE P., (2006), « Changement climatique et société(s) », in DELEAGE J.-P., LE TREUT H.,
Ecologie et politique, Réchauffement climatique, de la recherche à l’engagement, Paris, Syllepse,
n°33.
ROUER M., (2010), « L’avenir climatique et la jeune génération », Projet, n° 316, p. 54-59.
RUDOLF F., (2009), Le climat change… et la société, Paris, éditions la ville brûle.
SCARWELL H-J., ROUSSEL I. (eds), (2010), Le changement climatique. Quand le climat nous pousse à
changer d’ère, Paris, Presses universitaires du Septentrion.
TABEAUD M., BROWEYS X., « En vérité je vous le dis… Le cinéma d’Al Gore », Ethnologie française,
2009/4, tome XXXIX, p. 697-708.
URGELLI B., (2009), « Logiques d’engagement des enseignants face à une question socio-scientifique
médiatisée : le cas du réchauffement climatique », thèse de Doctorat, ENS Lyon.
VAN HAECHT A., (1998), L’école à l’épreuve de la sociologie : question à la sociologie de l’éducation,
Paris, De Boeck Université.
VIEILLEFOSSE A., (2009), Le Changement climatique. Quelles solutions ?, Paris, La Documentation
française.
ZAY D., (1988), La formation des instituteurs, Paris, Edition universitaire.
84
VI. Annexes :
1. Questionnaire à destination des collégiens
2. Grille d’entretien à mener auprès des collégiens
3. Grille d’entretien à mener auprès des enseignants
4. Programme du colloque « Communicating green »
5. Proposition de communication de S. Kovacs et S. Bernier
85
1. QUESTIONNAIRE A DESTINATION DES COLLEGIENS Ce questionnaire cherche à connaître ton avis sur l’environnement. Il est anonyme. L’environnement est-il un sujet qui t’intéresse ? □ pas du tout □ un peu □ moyen □ beaucoup □ énormément Le mot « environnement » te fait penser à quoi ? …………………………………………………………………………………………………………………….……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………….…………………………… Le changement climatique te semble-t-il un sujet important pour ton avenir ? □ oui □ non □ je ne sais pas Tes professeurs ont-ils déjà parlé de l’environnement dans leurs cours ? □ oui □ non □ je ne sais pas Si oui, les professeurs de quelles matières ? □ Education civique □ SVT □ Physique-Chimie □ Mathématiques □ Techno □ Français □ Histoire-Géo □ Documentaliste (au CDI) □ En LV1 □ Autre ? Laquelle ? ………………………………………………. Mène-t-on des projets, des activités, des ateliers sur l’environnement ou sur le développement durable dans ton collège ? □ oui □ non □ je ne sais pas Si oui, peux-tu en citer ? …………………………………………………………………………………………………………………….……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………….…………………………… Y as-tu participé ? □ oui □ non Pour quelle raison ? ............................................................................ A quelle date ou vers quel moment de l’année ce(s) projet(s) ou activité(s) a-t-il ou ont-ils eu lieu ? …………………………………………………………………………………………………………………….……………………………………………………… Qu’est-ce que tu as fait au cours de ce ou de ces projet(s) ? …………………………………………………………………………………………………………………….……………………………………………………… Qu’est-ce que tu as retenu de ce ou de ces projet(s) ? …………………………………………………………………………………………………………………….………………………………………………………………………………………………………………………………………….………………………………………………………………………………………… As-tu déjà regardé des films, au cinéma, à la maison ou à l’école, sur l’environnement tels que Home, Une
vérité qui dérange, Microcosmos, Océans, etc. ? □ oui □ non □ je ne sais pas Si oui, lesquels ?.......................................................................... Tu as trouvé que c’était : □ pas intéressant □ moyennement intéressant □ intéressant □ très intéressant Pourquoi ? ………………………………………………………………………………….. Quels types de documents ou d’animations as-tu déjà lu ou vu, sur l’environnement ou le développement durable ? □ documentaires ou émissions à la télévision □ films à la télévision
86
□ films au cinéma □ journaux □ magazines □ livres □ sites web □ DVD (films, documentaires) □ animations ou ateliers (au collège) □ expositions - stands □ autres, lesquels ?……………………………………………. Lesquels trouves-tu les plus intéressants pour que l’on te parle de l’environnement ? …………………………………………………………………………………………………………………….……………………………………………………… Peux-tu dire en quelques mots ce à quoi ces images te font penser ?
…………………………………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………………………………… A la maison, pratiques-tu le tri des déchets ? □ oui □ non Tes parents trient-ils ? □ oui □ non Si oui, coche les déchets qu’ils trient : □ Cartons □ Métaux □ Plastique □ Papier □ Piles □ Végétaux □ Déchets ménagers □ Verre □ Autres, lesquels ?..................................................................... Si non, pour quelle raison ?..................................................................... Es-tu : □ un garçon □ une fille
87
Dans quelle ville habites-tu ? …………………………………………………………………………………………… Dans quelle classe es-tu ? □ 6
ème □ 5
ème □ 4
ème □ 3
ème
Quelle profession exerce : ton père ? ……………………………………….…........ ta mère ? ..............……………………………………... Comment te déplaces-tu pour venir au collège ? □ en bus □ à vélo □ à pied □ en voiture □ en roller □ autres (à définir) :…………….................... Pour quelles raisons ?................................................................................................ Merci d’avoir participé à ce questionnaire.
88
2. GRILLE D’ENTRETIEN A MENER AUPRES DES COLLEGIENS
I. Compréhension des phénomènes ; hiérarchisation des notions ; langage utilisé ; intérêt pour le sujet ; culture informationnelle
1. Pour toi, le mot environnement te fait penser à quoi ? - Pour quelle raison ? - Comment l’expliquerais-tu à un plus jeune (élève) ?
2. Peux-tu commenter ces deux images ? [images : pollution ; eau polluée ; la planète ou les
océans, un champ d’éoliens ; une pub] 3. Sais-tu ce que le terme « l’effet de serre » veut dire ? Ou « changement climatique » ?
Peux-tu l’expliquer ? Où l’as-tu appris ?
4. Peux-tu citer quelque chose qui nuit, qui est mauvais, pour la planète ? As-tu récemment entendu parler d’événements concernant la protection ou la dégradation de la planète ?
- Où/par qui (presse, télé, internet, films) ? - Est-ce que tu y crois ? Ou pas ? Pourquoi ? - Y a-t-il des sources pas fiables, auxquelles tu ne fais pas confiance ? - Penses-tu que les scientifiques peuvent avoir tort dans leurs conclusions ou leurs
prédictions (réchauffement climatique, futur de la planète) ? - Est-ce que tu trouves que les documents (à la télé, dans des ouvrages, sites web,
documentaires, films) que tu as vus ou consultés sur l’environnement sont intéressants ? faciles à comprendre ?
- Connais-tu des sites web ou des jeux sur Internet sur l’environnement ? Peux-tu les citer ?
5. As-tu déjà travaillé sur l’environnement dans tes cours ou dans des clubs, au collège ?
- Dans quelle(s) matière(s), ou par quels profs, cette année? (Exemples de leçons : physique-chimie, SVT, Education civique, Histoire-Géo)
- Dans quelles activités en dehors des classes ? (ateliers, clubs, sorties, etc.) - Qu’est-ce qui t’a intéressé le plus ? Pourquoi ? - Sais-tu si au CDI de ton collège il y a des livres sur ce(s) sujet(s) ? - Connais-tu le rayon d’ouvrages qui concernent le sujet de DD ? - As-tu fait un travail ou exposé ou fait des recherches sur l’environnement pour
l’école ? - Comment est-ce que tu t’es pris (ou te prendrais-tu si tu avais un devoir) pour le
préparer ? Sources ? Images ? Moteur de recherche ? Google Images ? Demander aux parents/frères/soeurs de t’aider ? etc.
II. Familiarisation avec/intérêt pour les activités de sensibilisation ou les actions en faveur de l’environnement au niveau de l’école, de la famille, de la communauté
6. As-tu entendu parler d’actions environnementales (que ce soit des activités ou des ‘gestes’ comme le tri) au collège ?
- Cette année ou une autre ? - Dans ta classe ou dans une autre ? - Au collège, en dehors des cours ? Cantine, etc. - Qu’en as-tu retenu ?
89
- Y’as-tu participé ? Pourquoi ?
7. As-tu entendu parler d’actions environnementales dans ton quartier ou ta ville ?
8. Est-ce que ta famille, tes parents, tes frères et sœurs, parlent de l’environnement ? - Qu’en disent-ils ?
9. Peux-tu me dire si au quotidien ils font des action(s) en faveur de l’environnement ? - Si oui, lesquelles ? (Tri des déchets, économies d’énergie, économies d’eau,
déplacement en transports communs, covoiturage,…) - Trouves-tu cela utile ? - Sais-tu à quoi sert le tri des déchets ? le tri du papier ? et comment cela marche ? - Si non, pourquoi ?
10. Est-ce que tu aides tes parents dans leurs actions en faveur de l’environnement?
- Oui ? Non ? - Comment ? (Tri des déchets, économies d’énergie, économies d’eau…) - Pourquoi ? (Corvée ? Plaisir ?)
III. Se projeter, agir, s’investir : l’élève en tant qu’acteur
11. Si tu pouvais agir maintenant sur l’environnement, voudrais-tu faire quelque chose ? - Oui ? Non ? - Quoi ? (Exemple du choix de déplacement pour venir au collège) - Pour quelle(s) raison(s) ? - Et demain en tant qu’adulte ?
12. Pour toi, agir en faveur de l’environnement, ça passe par quoi ?
- Quels types d’action ? - Comment les mettre en œuvre ? - Qui devrait s’occuper de protéger l’environnement ? (institutions-collectivités-
organismes-partis politiques, tout le monde ?) - Penses-tu qu’il est difficile de motiver les gens pour agir en faveur de
l’environnement ? - Peut-on/Doit-on obliger les gens à contribuer à préserver l’environnement ? - Comment ?
13. Est-ce que tu penses que tu es aidé et encouragé à agir en faveur de la
Terre/l’environnement ? - Par qui ? (l’école, la ville, la télé, la pub…) - Comment par exemple ?
14. Trouves-tu que l’on te parle trop ou pas assez d’environnement ou de développement
durable aujourd’hui ? - Oui ? non ? - Pourquoi ?
15. Est-ce que tu es plutôt optimiste ou plutôt inquiet à propos de la santé de la
Terre/environnement ? - Pourquoi ?
90
16. Comment te vois-tu, quand tu seras plus grand (au lycée, ou après) : transports, style de vie, mobilisation pour l’environnement ?
91
3. GRILLE D’ENTRETIEN A MENER AUPRES DES ENSEIGNANTS
THEME1 : Actions globales impulsées dans un contexte de changement climatique : Comment se mobilise votre établissement sur ce sujet ? Etablissement de quelle taille ? Nb d’élèves ? Des particularités historiques de cet établissement ? Qu’est-ce que les collectivités territoriales impulsent dans le sens de la lutte contre le changement climatique ? Quelle synergie émerge de ces échanges ? Quelles sont les approches menées en théorie et concrètement (en termes d’actions originales bâties sur le programme et hors-programme) ? Quel rôle tiennent les politiques locales (communes, département, région) d’éducation et d’information dans les politiques d’adaptation que sont les dispositifs pédagogiques ? Des intervenants extérieurs (dont des associations, etc.) interviennent-ils ? Si oui, qui sont-ils ? Participent-ils à la mise en œuvre de ces dispositifs ? Quelles formes d’action mènent-ils ? Sur quels critères sont-ils choisis ? Qu’apportent-ils à l’enseignement classique ? Actions mises en œuvre localement dans les établissements scolaires : Quelles sont les actions mises en place ? Suite à quelle(s) initiative(s) ? Dans quelle(s) discipline(s) ? (Histoire-géo, éducation civique, technologie, SVT, physique, centre de documentation, français, sport, etc.) Quelle(s) forme(s) revêtent les actions engagées ? Sur quels supports reposent-ils ? (Journal dans l’école, etc. ?) Quels sont les types d’action privilégiés ? Quelles sont les cibles privilégiées (âge des enfants, etc.) ? Attendus des actions lancées localement : Quels sont les résultats escomptés et perçus ? Quels sont les messages qui restent le plus ? Le moins ? Auprès de quels types de personnes ? Quelles sont les idées intégrées au final ? Des retours d’expérience sont-ils menés ? Qu’est-ce que cela donne ? THEME 2 : Contenus - supports de communication – pratiques de recherche d’information Recherche d’informations : Quels contenus est-ce que vous cherchez à transmettre aux élèves ? Quels liens avec les programmes scolaires ? Quels liens avec l’actualité sur le climat ou le développement durable ? Comment vous documentez-vous ? Quels sont vos critères de choix ? (Consultation de bases de données ? CRDP ? Sites de références ? Acteurs/scientifiques/contacts ? Veille ? Attitude dynamique ou passive ? Activités en réseaux ? Associations des profs des disciplines ? Associations ?) Quels types de sources privilégiez-vous pour votre usage personnel (culture générale du sujet) ou dans la préparation des cours ou des activités ? Pour quelles raisons ?) Utilisation des supports dans la préparation des cours/ateliers : Quels supports utilisez-vous en cours ou dans les activités/ateliers que vous animez ? Pourquoi ? Comment exploitez-vous des images/graphiques/tableaux lors de vos cours ? Les adaptez-vous au niveau ou aux intérêts perçus de vos élèves ?
92
Recherche par les élèves : Demandez-vous aux élèves de chercher de l’information sur ce sujet ? (Consultation de quelles sources ? de quels types d’ouvrages ou sites (CDI ? Internet ?) Pour quels types d’activités ou exercices?) Vérifiez-vous les sources utilisées par les élèves ? Parlez-vous des critères de validation des sources? Quelles difficultés voyez-vous dans les démarches de recherche des élèves sur le climat ou le développement durable? Trouvez-vous qu’il existe des documents pertinents et adaptés aux élèves sur ce sujet ? Que pensez-vous de la vulgarisation scientifique à l’attention des jeunes sur ce sujet ? THEME 3 : Intérêts et motivations des acteurs à se consacrer concrètement et localement aux actions concernant le changement climatique : Quels sont les intérêts et autres motivations pour chaque enseignant à s’impliquer dans ces démarches ? Sont-ce des démarches personnelles ? Pour quelle(s) raison(s) ? De quels créneaux horaires disposent-ils pour mener à bien leurs actions ? Est-ce trop ? Pas assez ? Pour quelles raisons ? Comment répartissent-ils leurs actions dans le contenu de leur programme à mettre en œuvre ? Quelle liberté d’action avez-vous dans votre ou vos programme(s) ? Quels sont les intérêts et autres motivations pour la direction de l’établissement à impliquer sa structure ou non dans des projets précis ainsi que des intervenants extérieurs ? Quels sont les intérêts et autres motivations pour les collégiens à s’intéresser aux questions d’environnement et de changement climatique ? Est-ce que vous notez des différences d’attitudes et de discours des enfants en fonction des variables telles que leur sexe, leur âge, l’emploi et la CSP des parents, leur rapport aux technologies (hi-fi, etc.), leur dépendance à la voiture, leur lieu et type d’habitat, etc., le tout en fonction des éléments dont vous disposez ? L’intégration d’actions à portée environnementale dans les programmes scolaires influe-t-il sur les attitudes et discours des collégiens, des enseignants, etc. ? Influence du politique sur l’intégration et l’appropriation des politiques globales et des applications locales ? L’intérêt croissant porté à l’environnement contribue-t-il à surenchérir et à mettre la pression par sur-sollicitation auprès des enseignants ? Quels poids représentent les départements, les communes et les intercommunalités sur les actions à mettre en œuvre localement ? Quelles sont les appropriations faites localement et départementalement des politiques climatiques plus globales ? Que pensez-vous des agendas 21 ? Que pensez-vous des plans climat ? En termes de points positifs et de points négatifs ? Ont-ils un impact sur la vie des collèges ? A développer. Croyez-vous que les parents puissent transmettre un intérêt environnemental à leurs enfants et inversement ? Question globale de retour sur l’ensemble de la grille d’entretien : Quels sont pour vous les enjeux en matière d’éducation à l’environnement et au changement climatique aujourd’hui et pour demain ? Cela montre les contradictions du système.
93
4. PROGRAMME DU COLLOQUE : COMMUNICATING GREENBER ihecs – institut des hautes Études des communications sociales – rue de l’Étuve 58-60 – b-1000
Bruxelles
Accès au site du colloque : http://www.uclouvain.be/309350.html
Retenez la date ! A l’initiative du Pôle de recherches en communication d'organisation de l'Université de Louvain se tiendra les 18 et 19 novembre 2010 à Bruxelles un colloque international intitulé "Communication & Environnement, évolution des approches, changement des pratiques" A l'initiative de l’Université Catholique de Louvain, se tiendra à Bruxelles les 18 et 19 novembre 2010 un colloque international et multidisciplinaire intitulé « Communication d’organisation et environnement : évolution des approches, changement des pratiques ». Les chercheurs seront invités à présenter les résultats de leurs travaux et à confronter leurs points de vue sur les modalités et les pratiques du discours environnemental par les organisations et les entreprises avec des professionnels de la communication. Après un état des lieux des pratiques, chercheurs et professionnels de la communication tenteront d’analyser la « communication verte » sous différents prismes. Pourquoi ? Sous quelles formes ? Avec quelles valeurs ? Pour quels résultats ? Du changement de logo aux relations avec les salariés en passant par la mise en place d’indicateurs pour sanctionner les pratiques non-éthiques, toutes les imbrications, stratégies et implications seront passées au crible. Les actes du colloque seront publiés dans un numéro spécial de la revue scientifique Recherche en
communication. Colloque « Communication d’organisation et environnement : évolution des approches, changement des pratiques » 18 et 19 novembre 2010 Université Catholique de Louvain Pour tout renseignement complémentaire : Thierry Libaert: [email protected] Andrea Catellani: [email protected]
94
pr ogram
Program November 18th 2010 08h30 Accueil / Reception 09h00 Introduction par les organisateurs Mot d’accueil de John Van Tiggelen (directeur IHECS), Thierry Libaert et Andrea Catellani Introduction by the organizers – Welcome speech by John Van Tiggelen (director IHECS), Thierry Libaert and Andrea Catellani 09h10 Emanuele Invernizzi (IULM, Milan - EUPRERA) : Speech of the President of EUPRERA (European Public Relations Association) 09h15 Jean-Pascal van Ypersele (vice-president IPCC/GIEC - UCL) : L’enjeu de la communication environnementale à l’heure du réchauffement climatique
Corporate Discourse 09h45 Ihlen Øyvind (BI Norwegian School of Management): « Sustainability » as Shield or Standard: Corporate Environmental Rhetoric in Action 10h15 Valérie Swaen (UCL) : Corporate Social Responsibility communication campaigns towards the consumer: Analysis of the risks during a crisis involving socially irresponsible corporate activities 10h45 Stefania Romenti and Grazia Murtarelli (IULM, Milan): Strategic Communication and Environmental Decision Making: An Italian Case Study 11h15 Pause café / Coffee break
Climate change communication 11h30 Nicole D’Almeida and Ana Carolina Peliz (Paris IV-Sorbonne): Le changement climatique en texte et en image 12h00 Ferenc Fodor (Paris V) : Communication d’organisation et occultation discursive : le cas du changement climatique 12h30 Débat et repas / Debate and lunch 14h00 – 15h40 Espace jeunes chercheurs (deux sessions parallèles, doctorants) Young researchers panels (two parallel panels, phd students)
Panel A : Discourse analy sis
95
• Fanny Domenec (Bordeaux I): From “Environmental Impact” to “Environmental Performance”: the evolution of “green communication” in the annual reports of oil and gas companies between 2002 and 2009 • Nelya Koteyco (Leicester): The Rise and Rise of Corporate Carbon: a Linguistic Enquiry into “market driven sustainability” • Clémence Emprin (Ens Lyon) : L’évolution de la communication institutionnelle sur la biodiversité • Sophie Pochet (UCL) : L’usage abusif des arguments écologiques dans la publicité diffusée en Belgique • Jeanne Riot (Centre de Gestion Scientifique Mines) : ACV comparative et communication d’entreprise : le cas de Tetra Pak
Panel B : Public relations, environmental rhetoric, communicative actions • Inga Schlichting (Université d’Hambourg): Relevance, Aims and Risks of Environmental Public Affairs Campaigns • Christophe Bultel (Paris IV-Sorbonne) : Comment nouer une relation de confiance avec les parties prenantes critiques, pour garantir la valeur du discours vert de l’entreprise sur le produit et élaborer des messages éthiquement responsables ? • Eli Lipmen (London School of Economics & Political Science, University of Southern California Annenberg School for Communication): Actions Speak Louder than Words: Evaluating Persuasive Narratives on Behavioral Intention to support Individual & Political Action on Climate Change (to be confirmed) • Aurélien Taburet (Maine / Le Mans) : Communiquer pour mieux convaincre ? L’exemple des promoteurs privés • Gerti Szili (Flinders University, Australia) : Seeing “red” in a sea of “green” : The politics of environmental rhetoric in large scale urban redevelopments 15h40 Débat et pause café / Debate and coffee break
Linguistics and discursive analysis 16h00 Gino Gramaccia (Bordeaux 1) : Les stratégies performatives dans le discours environnementaliste 16h30 Brigitte Nerlich (Leicester): “Low carbon” Metals, Markets and Metaphors: The Creation of Economic Expectations about Climate Change Mitigation 17h00 Céline Pascual Espuny (Groupe Sup de Co Montpellier) : « Parler vert » ou « intérêt général » ? : Étude d’une valse hésitation des grandes enseignes historiques positionnées sur l’intérêt général en France 17h30 Béatrice Jalenques-Vigouroux (Toulouse) : Développement durable et grand récit : comprendre les mutations de la communication 18h00 Marie-Pascale Senkel (Nantes) : L’analyse longitudinale du discours sur l’environnement dans le rapport d’entreprise : Le cas DHL 18h30 Débat / Debate 20h30 Souper de gala / Official Supper
Program November 19th 2010
Green communication, responsibility, reflexivity 08h30 Valérie Colomb, Dana Popescu-Jourdy, Elizabeth Vercher (Lyon 2, ELICO) : Discours environnemental et mise en scène de la solidarité : le cas du Grand Lyon 09h00 Solange Tremblay (UQUAM Montréal) : Communication verte et responsable : du profil vertueux au verdict citoyen, qu’en est-il ? 09h30 Magnus Fredriksson (Gothenburg), Eva-Karin Olsson (Lund University): The Institutional Impediments for Reflexive Corporate Environmental Communication
Advertising and marketing 10h00 François Lambotte (FUCAM) and Marc David (Sherbrooke) : La communication verte : stratégie de développement durable ou stratagème de communication marketing ? 10h30 Laure Gaertner (Sciences Po-CNRS) : La gouvernance des pratiques publicitaires liées à l’environnement : l’ajustement aux contraintes comme stratégie professionnelle structurante 11H00 Pause café /Coffee break
96
Public relations and dialogue 11h15 Magda Pieczka (Queen Margaret University, Edinburgh): Public engagement and dialogue as a way of green communication 11H45 Anne-Marie Gagné (UQUAM Montréal) : Relations publiques et responsabilité sociale : la confiance et le soupçon 12H15 Débat et repas / Debate and lunch
Research and action 13H40 Françoise Bernard (Aix-Marseille I) : Communication et action : enjeux théoriques et pratiques – le bilan de 10 ans de projets de recherche financés en communication environnementale 14H10 Olivier Dupont (Lyon 3) and Marc Divry (professionnal) : La communication citoyenne : quels investissements sociaux et appropriations sémantiques par les acteurs de la communication ? 14H40 Susan Kovacs (Lille 3) and Sandrine Bernier (Association pour la Prévention de la Pollution Atmosphérique) : L’information environnementale et les dispositifs de communication « verte « à l’école : étude comparative de quatre collèges dans les départements du Nord et du Bas Rhin 15H10 Fin de la session académique / End of academic session 15H15 Pause café / Coffee break
professional speeches Exposés thématiques / Thematic speeches : 15H25 Didier LIVIO (Synergence) : Un dispositif communicationnel au service de nouvelles pratiques agro-environnementales, les enseignements des concertations agricoles de McDonald’s France 15H45 Ujjef Communication et Entreprise (Jean Laloux : Directeur associé du cabinet d’études et de conseil Inférences, Consultant senior, and Michèle Buinet : Directrice de la communication et des relations extérieures de la Chambre régionale de commerce et d’industrie du Nord Pas de Calais, France) : Analyse sémantique du discours corporate des entreprises sur l’environnement 16H05 Jean-Marie Pierlot (Amnesty International, UCL) : Le discours des associations sur l’environnement : développement durable, développement soutenable, décroissance. Essai de typologie des positions des milieux associatifs dans leur communication verte Le point de vue des sponsors / Partners point of view : 16H25 Alcatel-Lucent Bell Kathleen De Smedt, Director Communications, “Inspiring Employees to take up the Challenge” 16H45 Voice Green events, planet-friendly or greenwashing ? 17H05 Région Wallonne (to be confirmed) 17H25 Fin des présentations / End of speeches 17H30 Table ronde animée par l’association 3 C (sous réserve) / Roundtable debate animated by 3C association (to be confirmed) avec : Occurrence, Mostra, SCK-CEN, B & S, CAP Conseil, PEFC 18H15 Conclusions des organisateurs Conclusions by the organizers Andrea Catellani and Thierry Libaert 18H20 Mot de conclusion de Marc Lits (doyen faculté ESPO, UCL) / Final speech by Marc Lits (dean of the ESPO faculty, UCL) 18H30 Fin de la conférence / End of the conference
97
5. PROPOSITION DE COMMUNICATION Communicating Green : Communication d'organisation et environnement : évolution des
approches, changement des pratiques.
Université Catholique de Louvain, 18 et 19 novembre 2010 ──────────────
Auteurs: Susan Kovacs Maître de conférences, Sciences de l’information et de la communication, Laboratoire Geriico (Groupe d’études et de recherche interdisciplinaire en Information et Communication) Université Charles de Gaulle - Lille 3 UFR IDIST Bâtiment B5 Domaine universitaire du « Pont de Bois » rue du Barreau - BP 60149 59653 Villeneuve d'Ascq Cedex Tél : 03.20.41.66.38 / 06.29.70.28.42 [email protected] Sandrine Bernier, Docteur en sociologie Chargée d'études APPA (Association pour la Prévention de la Pollution Atmosphérique) 10, rue Pierre Brossolette 94270 Le Kremlin Bicêtre [email protected] Mots-clés : pratiques communicationnelles, éducation à l’environnement, politiques éducatives, Agenda 21 scolaire.
98
L’information environnementale et les dispositifs de communication « verte » à l’école : étude comparative de quatre collèges dans les départements du Nord et du Bas Rhin
Quelles sont les formes de communication environnementale à l’école ? En quoi la mise en place de projets environnementaux -- et notamment d’une démarche « Agenda 21 » scolaire – influe-t-elle sur les pratiques communicationnelles et informationnelles des acteurs au sein de l’école ? Comment ces acteurs s’approprient-ils le modèle managérial proposé (ou imposé) pour accompagner la mise en œuvre d’actions de sensibilisation environnementale ?
Si des travaux dans le domaine des sciences de l’éducation ont permis de mettre en lumière les obstacles à une « éducation à l’environnement » transversale et interdisciplinaire, peu de recherches ont à ce jour été consacrées à la production et la circulation des discours sur l’environnement au sein des établissements scolaires, non seulement dans les classes, en direction des élèves, mais aussi parmi l’ensemble des activités et pratiques communicationnelles menées par les équipes et les partenaires parascolaires ou associatifs.
Dans le cadre du projet de recherche « Quel climat à l’école ? Les jeunes face aux changements climatiques » (3ème APR du « GICC-2 » 2008 « Atténuation, adaptation et régionalisation », 2009-2011, financement ADEME)63, notre équipe interdisciplinaire de chercheurs en sciences de l’information et de la communication, sciences politiques et sociologie étudie actuellement la manière dont les dynamiques environnementales locales (plans climat territoriaux, présence d’associations) orientent l’investissement des établissements scolaires dans des actions de sensibilisation et d’éducation au développement durable et en particulier aux changements climatiques. L’objectif du projet est de comprendre dans quelle mesure le système scolaire peut contribuer à créer un imaginaire collectif des problèmes climatiques. A partir d’observations de type ethnographique au sein de quatre collèges, et des entretiens approfondis, l’équipe s’attache à identifier les mécanismes qui structurent la production et les usages des discours sur les enjeux climatiques et environnementaux à l’école.
Un volet de ce projet, consacré plus particulièrement aux conditions de production et de circulation des discours sur le développement durable au sein de l’école, cherche à établir la nature des synergies et des concurrences entre différents dispositifs d’information et de communication.
Dans cette communication nous proposerons les premiers résultats de l’analyse d’une série d’entretiens et d’observations menés dans quatre collèges depuis février 2010, afin d’analyser les stratégies communicationnelles et les dispositifs informationnels privilégiés en vue de la création et la transmission des messages sur l’environnement. Notre analyse portera à la fois sur les formes de médiation communicationnelle adoptées, élaborées pour et/ou par les élèves et les membres de la communauté scolaire (newsletters, exposés, événements ou actions organisés par les établissements en direction des habitants du quartier, etc.) que nous considérerons selon une approche sémio-pragmatique, et sur les représentations sociales des enjeux environnementaux telle qu’elles sont mises en évidence dans le discours des acteurs de chaque établissement.
63
Le programme de recherche GICC «Gestion et Impacts du Changement Climatique» (GICC) est financé par la Direction de la Recherche et de l'Innovation (DRI) du Commissariat Général du Développement Durable. Voir http://www.gip-ecofor.org/publi/page.php?id=417&rang=0&domain=38&var=0&lang=fr_FR
99
Table des matières
Présentation ............................................................................................................................................ 2 I. Analyse des questionnaires menés avec les collégiens........................................................................ 3
1. Caractéristiques sociologiques des collégiens de l’échantillon ...................................................... 6 1.1. Données sociologiques sur les collégiens de notre échantillon .............................................. 7 1.2. Les modes de déplacement des collégiens de notre échantillon.......................................... 14 1.3. Influence de l’offre de transports en commun significative dans le choix des modalités de transport ....................................................................................................................................... 16
2. L’intérêt des collégiens pour l’environnement : des discours et des pratiques sans grande implication ........................................................................................................................................ 20
2.1. Quel intérêt de façon générale pour les questions environnementales ? ............................ 20 2.2. Analyse des images des questionnaires ................................................................................ 23
3. Un intérêt pour le changement climatique qui est corrélé à l’intérêt pour l’environnement ..... 28 4. Les pratiques concrètes d’intérêt pour l’environnement et le développement durable au collège........................................................................................................................................................... 30 5. Les pratiques concrètes en matière d’environnement à la maison.............................................. 32
II. Analyse des entretiens réalisés auprès des enseignants : ................................................................ 36 1. Vue d’ensemble sur les choix et caractéristiques de ces 4 collèges............................................. 36 2. Logiques organisationnelles.......................................................................................................... 39
2.1. Place du collège au sein des autres organisations et de la société ....................................... 39 2.2. Regard sur la structure collège et les contraintes qui s’imposent aux enseignants ............. 41 2.3. Modifications du rôle de l’enseignant et de sa culture professionnelle suivant les réformes successives. Poids des impulsions extérieures pour faire changer les choses............................. 42 2.4. Pratiques professionnelles des enseignants.......................................................................... 44 2.5. Comment développer des initiatives dans les collèges ? Opportunités et freins ................. 45 2.6. Poids de la pédagogie et liberté d’action des enseignants et aussi poids de l’immobilisme ressenti par eux ............................................................................................................................ 47
3. Inscription du développement durable au collège et logiques interactionnelles dans les projets portant sur le changement climatique ............................................................................................. 48
3.1. Inscription du développement durable dans les programmes et types de mises en application .................................................................................................................................... 48 3.2. L’implication des personnes dans les projets selon de multiples facteurs. Quels jeux d’acteurs ? .................................................................................................................................... 51 3.3. Approche du contenu des actions ......................................................................................... 53
3.3.1. Caractéristiques des enfants .......................................................................................... 53 3.3.2. Quelle implication personnelle dans les actions, quel rôle, quelle sensibilité et quel poids culturel ? ......................................................................................................................... 55 3.3.3. Connaissance de l’influence des politiques publiques et des dispositifs (agenda 21, PCT…), sources de financements des projets........................................................................... 58 3.3.4. Sentiment de légitimité selon disciplines et régions...................................................... 60 3.3.5. Volonté d’impulser quelque chose (sens de l’action engagée)...................................... 61
III. Synthèse du colloque « Communicating Green » prévue pour la prochaine parution de la revue Pollution atmosphérique : ..................................................................................................................... 65 IV. Article issu de notre communication au colloque « Communicating Green » et soumis au comité scientifique le 20/01/11 pour publication :........................................................................................... 72 V. Bibliographie : ................................................................................................................................... 82 VI. Annexes : .......................................................................................................................................... 84