Où en est le contrôle des collectivités territoriales en matière financière ?
Raymond FERRETTI, Maître de conférences à l’Université de Lorraine, 2 avril 2012 Article publié sur le site CNFPT Wiki Territorial Page 1
La décentralisation ne signifie pas la suppression des contrôles des collectivités territoriales
et notamment en matière financière. Ceux-ci sont nombreux
comptes qui jouent en ce domaine un rôle important. Le premier contrôle est celui pratiqué sur les
comptes des comptables, on sait que sa procédure a été profondément modifiée par la loi du 28
octobre 2008 (Voir notre précédent article). Mais, en dehors de ce contrôle de nature juridictionnelle,
deux autres, de nature administrative ceux-là, coexistent. Ils n’ont pas été aussi profondément
modifiés, et c’est pourquoi il est intéressant de voir comment ils fonctionnent. Plusieurs rapports ont,
ces derniers temps, évalué leur performance. Il s’agit d’abord, du vingt-et-unième « Rapport du
Gouvernement au Parlement sur le contrôle a posteriori des actes des collectivités locales et des
établissements publics locaux » portant sur les années 2007, 2008, 2009. Il s’agit aussi du Rapport
d’information du Sénat du 25 janvier 2012, fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales et
à la décentralisation par M. Jacques Mézard sur « Les contrôles de l’État sur les collectivités
territoriales ». Il s’agit enfin du Rapport public de février 2012 de la Cour des comptes et plus
précisément de sa Troisième partie où sont précisées et mesurées les activités des juridictions
financières. On trouvera dans ces trois rapports de précieuses informations sur le contrôle des actes
budgétaires encore appelé contrôle budgétaire et sur le contrôle de la gestion des ordonnateurs.
I - LE CONTRÔLE BUDGETAIRE
Ce contrôle est organisé de manière précise par le Code général des collectivités territoriales (CGCT)
(Articles L1612-1 à L1612-20), mais il fonctionne de manière parfois défectueuse.
A - Une organisation précise
Le contrôle des actes budgétaire permet de vérifier un certain nombre de points limitativement
énumérés par le CGCT : le respect des délais d’adoption, le respect de l’équilibre et l’inscription des
dépenses obligatoires. Il vise à substituer à l’acte budgétaire initial, un acte conforme au droit et non
pas son annulation.
C’est le préfet qui déclenche le contrôle en saisissant la Chambre régionale des comptes. Si celle-ci
n’aboutit pas, le préfet se substitue à la collectivité territoriale défaillante. Le contrôle peut être
déclenché dans quatre cas.
a) Le contrôle en cas de non-mandatement d’une dépense obligatoire (Art. L. 1612-16 du CGCT)
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Certaines dépenses sont obligatoires, elles doivent donc être inscrites dans le budget. Si cette
condition n’est pas respectée, la dépense sera inscrite d’office par le préfet.
1- La notion de dépense obligatoire
Le Code général des collectivités territoriales met en avant deux critères pour définir les dépenses
obligatoires : « les dépenses nécessaires à l'acquittement des dettes exigibles et les dépenses pour
lesquelles la loi l'a expressément décidé ». (CGCT ; art 1612-15)
Les dépenses pour lesquelles la loi l'a expressément décidé
Ce sont les dépenses que le Code énonce en trois listes. L’une concerne les communes, l’autre les
départements, la dernière s’applique aux régions.
En gros il s’agit des dépenses de rémunération de personnel, d’entretien des bâtiments et des
ouvrages de la collectivité territoriale. Ce sont aussi des dépenses relatives aux services publics ainsi
que les dépenses correspondant à une participation aux dépenses d’une autre collectivité territoriale.
Enfin il s’agit des provisions et des amortissements.
Dépenses obligatoires des communes : Article L2321-2 du CGCT :
1° L'entretien de l'hôtel de ville ou, si la commune n'en possède pas, la location d'une maison ou d'une salle pour en tenir lieu ; 2° Les frais de bureau et d'impression pour le service de la commune, les frais de conservation des archives communales et du recueil des actes administratifs du département et, pour les communes chefs-lieux de canton, les frais de conservation du Journal officiel ; 3° Les indemnités de fonction prévues à l'article L. 2123-20, les cotisations des communes aux régimes de retraite en application des articles L. 2123-26 à L. 2123-28 et les frais de formation des élus visés à l'article L. 2123-13 ; 4° La rémunération des agents communaux ; 5° La cotisation au budget du Centre national de la fonction publique territoriale ; 6° Les traitements et autres frais du personnel de la police municipale et rurale ; 7° Les dépenses de personnel et de matériel relatives au service d'incendie et de secours. Toutefois, les communes peuvent exiger des intéressés ou de leurs ayants droit le remboursement des frais de secours qu'elles ont engagés à l'occasion d'accidents consécutifs à la pratique des activités sportives dont la liste est établie par décret en Conseil d'Etat. Elles déterminent les conditions dans lesquelles s'effectue le remboursement de ces dépenses qui peut porter sur tout ou partie des frais visés. Les communes sont tenues d'informer le public des conditions d'application du présent article sur leur territoire par une publicité appropriée en mairie et sur les lieux où se pratiquent ces activités sportives ; 8° Les pensions à la charge de la commune lorsqu'elles ont été régulièrement liquidées et approuvées ; 9° Les dépenses dont elle a la charge en matière d'éducation nationale ; 10° Les dépenses résultant de l'application de l'article L. 521-1 du code de la mutualité ; 11° Abrogé ; 12° Les dépenses des services communaux de désinfection et des services communaux d'hygiène et de santé dans les conditions prévues par le titre Ier du livre Ier du code de la santé publique ; 13° Les frais de livrets de famille ; 14° La clôture des cimetières, leur entretien et leur translation dans les cas déterminés par le chapitre III du titre II du livre II de la présente partie ; 15° Les dépenses de prospections, traitements, travaux et contrôles nécessaires à l'action de lutte contre les moustiques conformément à l'article 1er de la loi n° 64-1246 du 16 décembre 1964 relative à la lutte contre les moustiques et à l'article 65 de la loi de finances pour 1975 (n° 74-1129 du 30 décembre 1974) ; 16° Les dépenses relatives au système d'assainissement collectif mentionnées au premier alinéa de l'article L. 2224-8 ; 17° Les dépenses liées à la police de la salubrité visées à l'article L. 2213-30 ; 18° Les frais d'établissement et de conservation des plans d'alignement et de nivellement, sous la réserve prévue par l'article L. 121-2 du code de l'urbanisme ; 19° La part contributive de la commune aux dépenses de la rénovation du cadastre au cas d'exécution à la demande du conseil municipal ; 20° Les dépenses d'entretien des voies communales ;
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21° Les dépenses d'entretien et de conservation en bon état d'ouvrages, mentionnées à l'article L. 151-40 du code rural ; 22° Les dépenses résultant de l'entretien des biens autres que ceux mentionnés au 20°, transférés à la commune par application de l'article L. 318-2 du code de l'urbanisme ; 23° Les prélèvements et contributions établis par les lois sur les biens et revenus communaux ; 24° Les dépenses occasionnées par l'application de l'article L. 2122-34 ; 25° Le versement au fonds de coopération prévu à l'article L. 5334-7 et le reversement de l'excédent prévu à l'article L. 5334-10 ; 26° Les dépenses résultant de l'application de l'article 25 de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques ; 27° Pour les communes ou les groupements de communes dont la population est égale ou supérieure à 3 500 habitants et pour leurs établissements publics, les dotations aux amortissements des immobilisations ; 28° Pour les communes et les groupements de communes dont la population est égale ou supérieure à 3 500 habitants et pour leurs établissements publics, les dotations aux provisions ; 29° Les dotations aux provisions spéciales constituées pour toute dette financière faisant l'objet d'un différé de remboursement ; 30° Les intérêts de la dette et les dépenses de remboursement de la dette en capital ; 31° Les dépenses occasionnées par l'application des dispositions des articles 2 et 3 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage ; 32° L'acquittement des dettes exigibles. Dépenses obligatoires des départements : Article L3321-1 du CGCT 1° Les dépenses relatives au fonctionnement des organes délibérants et à l'entretien de l'hôtel du département ; 2° Les dépenses relatives aux indemnités de fonction prévues aux articles L. 3123-15 à L. 3123-18 et aux frais de formation des élus visés à l'article L. 3123-11 ; 3° Les cotisations aux régimes de retraites des élus en application des articles L. 3123-21 à L. 3123-24 ; 4° La cotisation au Centre national de la fonction publique territoriale ; 5° La rémunération des agents départementaux ; 6° Les intérêts de la dette ; 7° Les dépenses de fonctionnement des collèges ; 8° La participation du département aux dépenses de fonctionnement des instituts universitaires de formation des maîtres ; 9° Les dépenses liées à l'organisation des transports scolaires ; 10° Les dépenses relatives à l'action sociale, à la santé et à l'insertion mises à la charge du département ; 11° Les frais du service départemental des épizooties ; 12° La participation au service départemental d'incendie et de secours ; Dépenses obligatoires des régions : Art L4321-1 du CGCT : 1° Les dépenses relatives au fonctionnement des organes délibérants et à l'entretien de l'hôtel de la région ; 2° Les dépenses relatives aux indemnités de fonction prévues aux articles L. 4135-15 à L. 4135-18 et aux frais de formation des élus visés à l'article L. 4135-11 ; 3° Les cotisations aux régimes de retraite des élus en application des articles L. 4135-21 à L. 4135-24 ; 4° La cotisation au Centre national de la fonction publique territoriale ; 5° La rémunération des agents régionaux ; 6° Les intérêts de la dette et les dépenses de remboursement de la dette en capital ; 7° Les dépenses dont elle a la charge en matière d'éducation nationale ; 8° Les dépenses résultant de l'entretien des biens transférés à la région en application des dispositions de l'article L. 318-2 du code de l'urbanisme ; 9° Les dettes exigibles.
Les dépenses nécessaires à l'acquittement des dettes exigibles
Les dettes exigibles sont les dettes certaines, liquides et incontestées. Elles correspondent
principalement aux remboursements des emprunts ainsi qu’aux garanties des emprunts. Les dettes
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exigibles correspondent également aux dettes résultant d’engagements contractuels ou de décisions
de justice.
2° L’inscription d’office
Elle est réalisée par le préfet sur proposition de la Chambre régionale des comptes.
L’intervention de la Chambre régionale des comptes (CRC)
La CRC ne peut intervenir que dans la mesure où elle est saisie par :
- Le représentant de l'Etat dans le département ou,
- Le comptable de la collectivité territoriale ou,
- Toute personne y ayant intérêt
Aucun délai n’est prévu.
La Chambre régionale des comptes dispose d’un mois pour constater la non-inscription. Plusieurs
hypothèses peuvent alors se présenter :
- La chambre régionale rejette la demande, cette décision pourra faire l’objet d’un recours
pour excès de pouvoir (CE, 23 mars 1984, Office de gestion des écoles catholiques de Couëron)
- Elle met en demeure la collectivité territoriale d’inscrire la dépense.
Soit la collectivité suit la CRC et la question est réglée, soit elle refuse. Dans ce dernier cas, la CRC
demande au préfet de se substituer à la collectivité défaillante : la chambre assortit sa demande d’une
proposition de « création de ressources ou de diminution de dépenses facultatives destinées à
couvrir la dépense obligatoire »
L’intervention du préfet
«le représentant de l'Etat dans le département règle et rend exécutoire le budget rectifié en
conséquence ». Toutefois, le préfet n’est pas obligé de suivre la CRC. S’il s’écarte des propositions de
la Chambre il doit prendre une décision motivée. (CE, 10 fév 1988, Commune de Brives-Charensac).
Mais la décision de la CRC elle, n’est pas susceptible d’un recours pour excès de pouvoir (CE, 30
janv. 1987, Département de la Moselle.
Quand une dépense est obligatoire, il faut non seulement qu’elle soit inscrite dans le budget, mais
encore qu’elle soit mandatée sans quoi elle ne pourra être payée. A défaut de mandatement le préfet
met en demeure le Maire, le Président du Conseil général ou le Président du Conseil régional d’y
procéder. Si la mise en demeure reste sans effet dans le mois, qui suit le préfet procède d’office au
mandatement. (Art. L. 1612-16 du CGCT).
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Le préfet
Le comptable
Toute personne interressée
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La CRC constate la non-inscription et met en demeure la collectivité territoriale d’inscrire la dépense Dan
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Si la collectivité territoriale rejette la mise en demeure la CRC demande au préfet de se substituer à la collectivité défaillante
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b) Le contrôle en cas de non- respect des délais de vote du budget (Art. L. 1612-2 du CGCT)
Si le budget n’est pas voté le 31 mars une procédure de contrôle budgétaire est intentée par le préfet
auprès de la Chambre régionale des comptes. On remarquera que l’échéance du 31 mars est
reportée au 15 avril, les années de renouvellement des organes délibérants ou lorsque les données
que l’Etat doit transmettre aux collectivités territoriales ne l’ont pas été le 15 mars.
La Chambre régionale des comptes est saisie dans les quinze jours suivant la date limite du vote. Elle
dispose d’un mois pour formuler au préfet des propositions en vue du règlement du budget. Ce
dernier règle alors et rend exécutoire le budget.
c) Le contrôle en cas de non-respect de l’équilibre du budget voté (Art. L. 1612-4 et L. 1612-5 du
CGCT)
Le Code (Art. L. 1612-4) précise que le budget doit être voté en équilibre réel. Ce principe est garanti
par la Chambre régionale des comptes à travers une procédure de contrôle budgétaire.
1- La signification du principe : la notion d’équilibre réel
Cette notion peut être précisée à partir de trois éléments.
Les deux sections doivent être chacune en équilibre
Avant 1982, l’équilibre s’appréciait globalement. Aujourd’hui ce n’est plus le cas, chaque section doit
être en équilibre.
Les recettes et les dépenses doivent être évaluées de manière sincère
C’est là une allusion au principe de sincérité. Cela signifie que les recettes doivent correspondre aux
évaluations qui résultent des informations transmises par l’Etat. Quant aux autres recettes, elles ne
doivent pas être majorées. Enfin, les dépenses ne peuvent être ni minorées ni majorées.
Le remboursement de la dette en capital doit se faire par l’épargne brute
L’article L. 1612-4 du CGCT précise de manière très technique ce qu’il faut entendre par là :
« lorsque le prélèvement sur les recettes de la section de fonctionnement au profit de la section
d'investissement, ajouté aux recettes propres de cette section, à l'exclusion du produit des emprunts,
et éventuellement aux dotations des comptes d'amortissements et de provisions, fournit des
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Date limite du vote du budget
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Saisine de la CRC par le préfet
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La CRC fait des propositions au préfet en vue du règlement du budget
Le préfet règle et rend exécutoire le budget
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ressources suffisantes pour couvrir le remboursement en capital des annuités d'emprunt à échoir au
cours de l'exercice. »
En d’autres termes, le remboursement des annuités en capital des emprunts doit se faire par le
virement de la section de fonctionnement vers la section d'investissement, ou encore par les dotations
aux amortissements et aux provisions.
2-La garantie du principe
La Chambre régionale des comptes garantit l’application du principe à travers une procédure de
contrôle budgétaire qui est initiée par l’intervention du Préfet.
L’intervention du préfet
Si le budget transmis au préfet n’est pas en équilibre réel, il saisit la CRC dans le mois qui suit. Si tel
est le cas, l'organe délibérant de la collectivité territoriale ne peut se prononcer en matière budgétaire,
pendant toute la durée de la procédure.
L’intervention de la CRC
- Dans le mois qui suit sa saisine, la CRC ayant constaté le déséquilibre du budget demande
une nouvelle délibération à la collectivité territoriale en lui proposant des mesures visant à rétablir
l’équilibre.
- Si aucune mesure n’est adoptée dans le mois suivant ou si les mesures prises sont
insuffisantes, la CRC demande au préfet de régler le budget et de le rendre exécutoire dans un délai
de quinze jours. S’il s’écarte des propositions de la Chambre, il doit motiver sa décision.
d) Le contrôle du non-respect de l’équilibre du budget exécuté (Art. L. 1612-14 du CGCT)
1- La signification du principe : l’interdiction du déficit
Un budget peut très bien être voté en équilibre et pour autant être exécuté en déséquilibre. Cette
situation se constatera lors de l’arrêté de compte par l’organe délibérant, puisque le compte
administratif, comme d’ailleurs le compte de gestion retraçant l’exécution du budget feront apparaître
un déficit.
Toutefois, le CGCT admet un léger déficit.. Deux seuils différents, selon l’importance de la collectivité
territoriale sont prévus :
- Le seuil « haut » s’applique aux régions, départements ainsi qu’aux communes de plus de
20.000 habitants. Dans ces cas le déficit toléré doit être inférieur à 5 % des recettes de
fonctionnement.
- Le seuil « bas » s’applique aux communes de moins de 20.000 habitants. Le déficit admis
doit être inférieur à 10 % de ces mêmes recettes.
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Transmission au préfet
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Le préfet saisit la CRC
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La CRC propose à la Collectivité des mesures visant à rétablir l'équilibre
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Si rien n'est fait, la CRC demande au préfet de régler et rendre exécutoire le budget dans les 15 jours
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2-La garantie du principe
L’intervention du préfet
Au vu du compte administratif qui doit être transmis au préfet au plus tard le 1er
juillet, ce dernier saisit
sans délai la CRC, si un déficit supérieur aux valeurs indiquées apparaît.
L’intervention de la CRC
- Dans le mois qui suit sa saisine par le préfet, la CRC propose à la collectivité territoriale, des
mesures permettant de rétablir l’équilibre.
- Le budget primitif suivant sera alors automatiquement transmis à la CRC.
Lors de l’examen du budget primitif suivant, la CRC est à même de constater si ses propositions ont
été suivies ou non.
- S’il apparaît que le déficit n’est pas résorbé, la Chambre formule des propositions au préfet.
Sur la base de celles-ci, il réglera et rendra exécutoire le budget.
- Là encore, s’il s’écarte des propositions de la Chambre il doit motiver explicitement sa
décision.
Rappelons qu’une procédure identique sera entamée si le compte administratif n’est pas transmis
dans les délais (au plus tard le 15 juillet) (art L.1612-13 du CGCT).
B - Un fonctionnement parfois défectueux
Le contrôle budgétaire présente aujourd’hui quelques défaillances, c’est pourquoi des remèdes
doivent être recherchés et surtout appliqués.
a) La situation
La situation doit d’abord être appréciée sur un plan statistique avant de l’être sur un plan plus
qualitatif.
1- Sur le plan statistique
De manière générale, le nombre de saisine tend à stagner ces dernières années, mais la situation
varie selon le type de procédure.
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Si un déficit supérieur au taux admis apparaît, le Préfet saisit sans délai la CRC D
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La CRC propose des mesures visant à résorber le déficit
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Si le déficit n'est pas résorbé, la CRC formule des propositions au préfet
Le préfet règle et rend exécutoire le budget
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Les dépenses obligatoires
La procédure d’inscription d’office et la procédure de mandatement d’office des dépenses obligatoires
connaissent l’une et l’autre une baisse sensible depuis 2003, mais ont tendance à stagner ces
dernières années. Après une forte augmentation du nombre de mandatements d’office effectués par
le préfet en 2003, celui-ci chute de plus de 75 % en 2004, pour ensuite connaître une nouvelle hausse
en 2005 et une baisse continue depuis 2006 (- 83% entre 2003 et 2009).
Le respect des délais de vote
Le respect du délai d’adoption des documents budgétaires par les collectivités territoriales et leurs
établissements publics s’était amélioré de 1998 à 2008, mais depuis la situation s’est inversée. Le
dépassement de la date limite de vote du budget résulte surtout, soit de problèmes informatiques
(logiciel) ou humains (disponibilité du personnel), de difficultés ou de retard de transmission (article
L.1612-8) ainsi que de volonté délibérée de blocage à la suite de tensions au sein de l’organe
délibérant ou encore pour protester contre une situation particulière.
Le respect de l’équilibre du budget voté
Depuis 2007, on constate une diminution progressive du nombre d’actes budgétaires votés en
déséquilibre réel. Le nombre de saisines diminue (- 30% entre 1998 et 2009). Il atteint des niveaux
largement inférieurs au nombre d’actes budgétaires initialement votés en déséquilibre (135 saisines
en 2004 pour 2811 actes votés en déséquilibre, 108 saisines en 2006 pour 2730 actes votés en
déséquilibre, 118 saisines en 2009 pour 1606 actes votés en déséquilibre). Seuls 7,3% des budgets
votés en déséquilibre ont fait l’objet d’une saisine par la Chambre régionale des comptes en 2009.
Le respect de l’équilibre du budget exécuté
Le nombre de comptes administratifs présentant un déficit réel est stable. Depuis 2001, le nombre de
saisines des Chambres régionales des comptes pour compte administratif en déficit connaît une
inflexion constante. Toutefois, depuis 2010, une très légère hausse peut être constatée.
Contrôle des actes budgétaires NOMBRE DE SAISINES PAR TYPE DE PROCEDURE 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011
Budget non voté dans le délai légal 146 159 129 114 49 108 129 147
Budget voté en déséquilibre réel 153 142 115 112 146 116 170 120
Rejet ou non transmission des comptes administratifs 57 103 84 70 33 43 72 74
Déficit important du compte administratif 160 143 119 101 148 112 116 129
Non inscription de dépenses obligatoires 325 326 283 225 175 180 160 196
Total des saisines 841 873 730 622 569 577 677 685 Source : Cour des comptes
2- Sur le plan qualitatif
Deux questions posent problème : celle des délais de saisine des Chambres régionales des comptes
et celle de l’interprétation des règles de droit.
Des délais de saisine trop courts
Dans trois cas sur quatre le préfet dispose d’un mois pour saisir la Chambre régionale des comptes et
de quinze jours seulement en cas de dépassement du délai de vote du budget.
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Les conséquences de cette brièveté des délais se sont d’autant plus aggravées que les collectivités
territoriales tendent de plus en plus systématiquement à voter en même temps ou presque leur budget
et leur compte administratif ce qui place les services préfectoraux dans une situation délicate
puisqu’ils doivent traiter un nombre plus important d’actes. Et ce d’autant plus que ce nombre a
augmenté de façon importante jusqu’en 2007 du fait de la hausse du nombre de budgets annexes.
En outre, une réception tardive des documents nécessaires à l’élaboration des budgets (dotations de
l’Etat, bases prévisionnelles des impôts locaux, etc…) entraîne souvent des votes tardifs et donc une
concentration des budgets transmis sur une période très courte.
Mais on remarquera que depuis 2003, date de la mise en ligne des dotations sur le site internet de la
direction générale des collectivités locales du ministère de l’intérieur, une grande partie des
collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité
propre votent plus promptement leur budget.
Toutefois, certains services préfectoraux souhaiteraient un alignement du délai de contrôle budgétaire
(30 jours) sur le délai existant en matière de contrôle de légalité (2 mois).
Des règles parfois difficiles à appréhender
Certaines règles budgétaires et comptables restent difficiles à appréhender en dépit des efforts
d’harmonisation et de simplification entrepris ces dernières années. Il s’agit notamment des règles
relatives aux provisions et aux cessions ainsi que de celles des procédures de reprise et d’affectation
des résultats. D’application délicate, ces règles entrainent souvent des litiges entre les préfectures et
les collectivités territoriales.
L’appréciation de la sincérité du budget, est souvent aléatoire. L’un des obstacles à cette appréciation
de la sincérité, avec la vérification de la sincérité des dotations, des dépenses de personnel et des
dépenses sociales pour les départements, est celui de la justification des restes à réaliser.
Enfin, le changement systématique des règles budgétaires et comptables ainsi que des maquettes
budgétaires constitue un obstacle à la bonne compréhension de celles-ci et à leur application.
b) Les remèdes
Plusieurs remèdes peuvent sont possibles.
1-Une réorganisation du système institutionnel
Devant les difficultés rencontrées, il a été décidé par circulaire du 23 juillet 2009, une centralisation du
contrôle budgétaire en préfecture. Certes, les sous préfectures continuent à recevoir les différents
actes et procèdent à un tri, mais le contrôle est désormais réalisé en préfecture. Cette démarche avait
parfois été anticipée dès la fin 2008. Elle s’inscrit dans le cadre de la révision générale des politiques
publiques.
D’autre part, les préfectures coopèrent de plus en plus avec les directions départementales et
régionales des finances publiques. Une convention cadre nationale a été signée le 14 septembre
2004 par le secrétaire général du ministère de l’intérieur, le directeur général des collectivités locales
et le directeur général de la comptabilité publique. Ce partenariat vise notamment à surmonter les
difficultés rencontrées dans le traitement de dossiers complexes relatifs à la situation financière des
collectivités territoriales et de leurs établissements publics
Enfin, l’amélioration du contrôle budgétaire passe par la qualité et le développement des relations
entre les préfectures et les élus locaux. Les fonctions de conseil qu’exercent les services préfectoraux
auprès des collectivités locales et de leurs établissements publics doivent permettre de prévenir les
difficultés et donc les saisines.
2-La formation des agents en charge du contrôle budgétaire
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La formation doit être développée à tous les niveaux. Une fois par an au moins, des agents participent
aux journées organisées par la Direction générale des collectivités locales au ministère de l’intérieur.
D’autres formations sont également organisées au niveau interrégional ainsi qu’au niveau local. Des
journées de formation sont parfois mises en place avec des magistrats des Chambres régionales des
comptes. Une participation accrue de ces derniers à la formation des agents des services
préfectoraux doit être l’occasion pour eux de présenter la jurisprudence de leur institution, souvent
méconnue des services préfectoraux ou dont les effets ne sont pas suffisamment pris en compte.
3-Le développement des certains instruments
Afin de faciliter l’exercice du contrôle budgétaire, les préfectures disposent d’un dispositif d’alerte
dénommé OSIRIS. Il leur permet de détecter les groupements de communes présentant des difficultés
financières. Cet instrument pourrait être enrichi et comporter plus d’informations, il pourrait également
être étendu à toute les collectivités territoriales.
Dans le même ordre d’idée, certains préconisent la création de pôles régionaux d’expertise, sur le
même modèle que le pôle interrégional d’appui au contrôle de légalité (PIACL)
Enfin, l’extension de l’application Actes aux documents budgétaires permettrait, à moyens humains
constants, d’étendre et d’approfondir l’exercice du contrôle budgétaire par les services préfectoraux.
Activité de chacune des chambres régionales et territoriales des comptes en 2009 , 2010 et 2011
AVIS EMIS EN CONTROLE DES ACTES BUDGETAIRES 2009 2010 2011
ALSACE 2 3 6 AQUITAINE 35 146 39 AUVERGNE 12 25 54 BOURGOGNE 24 17 34 BRETAGNE 20 20 19 CENTRE 20 25 33 CHAMPAGNE ARDENNE 10 20 37 CORSE 25 15 17 FRANCHE-COMTE 12 23 21 ILE-DE-FRANCE 41 53 44 LANGUEDOC-ROUSSILLON 36 31 45 LIMOUSIN 7 6 20 LORRAINE 19 26 20 MIDI-PYRENEES 46 44 43 NORD-PAS-DE-CALAIS 25 31 36 BASSE-NORMANDIE 8 11 11 HAUTE-NORMANDIE 23 28 14 PAYS-DE-LA-LOIRE 7 9 10 PICARDIE 10 20 7 POITOU-CHARENTES 27 26 13 PROVENCE-ALPES-COTE -D’AZUR 33 39 35 RHONE-ALPES 36 52 33 GUADELOUPE, GUYANE, MARTINIQUE, ST BARTHELEMY, ST MARTIN 117 86 86 LA REUNION MAYOTTE 37 32 42 NOUVELLE- CALEDONIE 5 7 5 POLYNESIE FRANCAISE 3 12 8 TOTAL 640 795 732 Source : Cour des comptes
Où en est le contrôle des collectivités territoriales en matière financière ?
Raymond FERRETTI, Maître de conférences à l’Université de Lorraine, 2 avril 2012 Article publié sur le site CNFPT Wiki Territorial Page 11
II - LE CONTRÔLE DE LA GESTION
Ce deuxième contrôle concerne les ordonnateurs et leur gestion. Il est organisé de manière
minutieuse par le Code des juridictions financières (Articles L243-1 à L243-6), mais son
fonctionnement pourrait être amélioré.
A - Une organisation minutieuse
Ce contrôle présente des caractéristiques différentes de celui pratiqué sur les comptables, il se
déroule également de manière différente.
a) Les caractéristiques du contrôle
Il s’agit d’un contrôle administratif qui porte sur la gestion de l’administrateur.
1 - Un contrôle administratif
Ce contrôle n’est pas juridictionnel comme celui exercé sur les comptables, mais administratif comme
le précédent. C’est dire qu’il ne débouche pas sur un jugement qui est un acte juridictionnel, mais sur
un rapport d’observations. Certes, il ne s’agit pas d’un acte administratif au sens d’un acte faisant
grief, c'est-à-dire pouvant faire l’objet d’un recours devant le juge administratif. Mais ce sont des
rapports du même type que ceux élaborés par la Cour des comptes qui tout au plus peuvent
déboucher sur un débat au sein de l’organe délibérant. Plus précisément ce sont des documents
administratifs au sens de la loi sur la communication des documents administratifs. C’est ce que le
Conseil d’Etat, dans un arrêt du 30 juin 1989, Ministère du Budget c/ David, a reconnu.
2 - Un contrôle de la gestion
Il a fallu trois textes successifs pour préciser la nature exacte de ce contrôle.
- La loi du 2 mars 1982 parlait de contrôle «du bon emploi des fonds publics » Cette formule était
ambiguë puisque l’on pouvait penser que les CRC étaient habilitées à contrôler l’opportunité des
décisions des ordonnateurs.
- La loi du 5 janvier 1988 parlait, elle, de «contrôle de l’emploi régulier» des fonds publics. Cette
formule était trop réductrice. Il fallait donc revenir sur cette définition et trouver un moyen terme.
- La loi du 21 décembre 2001 utilise une formule plus longue qui se situe entre les deux extrémités
précédentes et qui permet de mieux correspondre à la situation : « L'examen de la gestion porte sur la
régularité des actes de gestion, sur l'économie des moyens mis en œuvre et sur l'évaluation des
résultats atteints par rapport aux objectifs fixés par l'assemblée délibérante ou par l'organe délibérant.
L'opportunité de ces objectifs ne peut faire l'objet d'observations. »
Il n’est plus question dans cette formule de contrôle, mais d’examen de la gestion ce qui laisse penser
que l’on se dirige plutôt vers un audit financier. Cette impression est confirmée par le reste de la
formule, puisque après avoir évoqué le contrôle de la régularité, puis le contrôle de l’efficacité et
même de l’efficience on évoque la qualité de la gestion ce qui conduit vers la voie de l'évaluation des
politiques publiques locales.
Cependant, il faut souligner que le contrôle pratiqué sur les organismes divers qui bénéficient de
concours financiers des collectivités territoriales, se réduit à une simple vérification des comptes.
b) Le déroulement du contrôle
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1 - L’initiative
C’est la Chambre régionale des comptes qui prend l’initiative du contrôle. Mais la loi du 6 février
1992, permet au préfet de demander à la chambre de pratiquer ce contrôle. De même, l’exécutif local
peut en faire autant.
2 - Les investigations
Un magistrat rapporteur est désigné. Il dispose de pouvoirs d’investigations importants. Il peut se
rendre dans les services et prendre connaissance des écritures et documents tenus. Il peut procéder
à la vérification des fournitures, matériels, travaux et constructions. Il peut se faire communiquer, les
rapports des services d'inspection et corps de contrôle.
Les ordonnateurs, les comptables, les dirigeants, les agents des organismes vérifiés, les
représentants et agents de l'Etat dans le département ou la région sont tenus de lui communiquer tous
documents et de fournir tous renseignements relatifs à la gestion des organismes dont les actes sont
soumis à l'examen de la Chambre régionale des comptes.
Ces pouvoirs d’enquête sur pièce et sur place sont d’ailleurs sanctionnés puisque le fait de faire
obstacle aux investigations de la Chambre constitue un délit passible d'une amende de 650 000 €. A
la suite de ces investigations un rapport est établi.
3- Les observations
Les observations provisoires
A l’issue de ses investigations, le magistrat rapporteur rédigera des observations provisoires.
Cependant, un entretien préalable entre le rapporteur ou le président de la chambre et l'ordonnateur
de la collectivité territoriale qui était en fonctions au cours de l'exercice examiné est nécessaire.
L’ordonnateur dispose d'un délai de deux mois pour remettre au greffe de la chambre régionale des
comptes une réponse écrite.
Le rapport d’observations définitives
Les Chambres régionales des comptes arrêtent leurs observations définitives sous la forme d'un
rapport d'observations. Celui-ci ne peut être arrêté définitivement qu'après réception de la réponse de
l’ordonnateur, ou, à défaut, à l'expiration du délai de deux mois.
La réponse écrite de l’ordonnateur au rapport d’observations définitives
Les destinataires du rapport d'observations disposent d'un délai d'un mois pour adresser au greffe de
la chambre régionale des comptes une réponse écrite. Dès lors qu'elles ont été adressées dans le
délai précité, ces réponses sont jointes au rapport. Elles engagent la seule responsabilité de leurs
auteurs.
La communication du rapport d’observations définitives à l’assemblée
délibérante
Le rapport d'observations est communiqué par l'exécutif de la collectivité territoriale ou de
l'établissement public à son assemblée délibérante, dès sa plus proche réunion. Il fait l'objet d'une
inscription à l'ordre du jour de l'assemblée délibérante ; il est joint à la convocation adressée à chacun
des membres de l'assemblée et donne lieu à un débat.
Le rapport d'observations ne peut être publié ni communiqué à ses destinataires ou à des tiers à
compter du premier jour du troisième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à
des élections pour la collectivité concernée et jusqu'au lendemain du tour de scrutin où l'élection est
acquise.
Enfin, les observations sont communiquées à la Cour des comptes qui peut ainsi alimenter la partie de
son Rapport public consacrée aux collectivités territoriales.
Où en est le contrôle des collectivités territoriales en matière financière ?
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B - Un fonctionnement à améliorer
Là encore il est nécessaire de constater la situation avant de présenter quelques solutions.
a) La situation
1- Sur le plan statistique
Le nombre de rapport d’observations définitives qui était stationnaire tend à diminuer en 2011 et ce
notamment pour les collectivités territoriales (320 en 2011 contre 359 en 2010) et les établissements
publiques (165 en 2011 contre 189 en 2010).
La diminution du nombre de rapports d’observations définitives en 2011 (639 contre 697 en 2010, 655
en 2009 et 683 en 2008) s’explique par l’augmentation de la contribution des Chambres régionales
aux travaux menés en commun avec la Cour des comptes. Cette contribution accrue s’est notamment
traduite par l’accroissement du nombre de rapports publics thématiques passé de six en 2010 à
quatorze en 2011, dont sept ont été réalisés majoritairement ou conjointement à partir des travaux des
chambres.
EXAMEN DE LA GESTION 2008 2009 2010 2011
Organismes soumis aux règles de la comptabilité publique
Collectivités territoriales
- Rapports d’observations définitives 274 278 359 320
Établissements publics locaux ;
- Rapports d’observations définitives 175 205 189 165
Établissements publics spécialisés
- Rapports d’observations définitives 143 101 86 95
Organismes non soumis aux règles de la comptabilité publique
Sociétés d’économie mixte
- Rapports d’observations définitives 34 28 35 21
Associations subventionnées et autres
Init
iati
ve
La CRC
Le préfet
L'ordonnateur Inve
stig
atio
ns
Contrôle sur pièces
Contrôle sur place
Ob
serv
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ns
pro
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Après entretien préalable
L'ordonnateur a 2 mois pour répondre R
app
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s
Il est communiqué à l'ordonnateur
Il est communiqué à l'assemblée délibérante
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organismes recevant un concours financier
- Rapports d’observations définitives 57 43 28 38
Total rapports d’observations définitives 683 655 697 639 Source : Cour des comptes
La disparité entre les différentes Chambres régionales est frappante. Elle justifie la récente
suppression par le Décret du 23 février 2012 relatif au siège et au ressort des chambres régionales
des comptes de certaines d’entre elles (Auvergne ; Champagne Ardenne ; Picardie ; Franche Comté ;
Limousin ; Basse Normandie ; Pays de Loire).
Activité de chacune des chambres régionales et territoriales des comptes en 2009, 2010 et 2011
RAPPORTS D’OBSERVATIONS DEFINITIVES
Chambres régionales des comptes 2009 2010 2011 ALSACE 21 29 20
AQUITAINE 48 54 56
AUVERGNE 4 17 8
BOURGOGNE 6 13 19
BRETAGNE 39 53 48
CENTRE 25 20 25
CHAMPAGNE-ARDENNE 16 15 16
CORSE 9 12 9
FRANCHE-COMTE 15 11 11
ILE-DE-FRANCE 71 58 49
LANGUEDOC-ROUSSILLON 22 24 14
LIMOUSIN 15 10 10
LORRAINE 44 39 32
MIDI-PYRENEES 26 31 36
NORD-PAS-DE-CALAIS 27 44 31
BASSE-NORMANDIE 12 16 19
HAUTE-NORMANDIE 28 20 21
PAYS-DE-LA-LOIRE 43 44 44
PICARDIE 17 22 19
POITOU-CHARENTES 18 13 19
PROVENCE-ALPES-COTE-D’AZUR 39 31 27
RHONE-ALPES 73 83 57
GUADELOUPE, GUYANE, MARTINIQUE, ST MARTIN ST BARTHELEMY 7 12 12
LA REUNION MAYOTTE 16 11 13
NOUVELLE-CALEDONIE 9 10 11
POLYNESIE FRANCAISE 5 5 13
TOTAL 655 697 639 Source : Cour des comptes
2- Sur le plan qualitatif
Le contrôle de la gestion a fait l’objet de nombreuses critiques de la part des élus, ce qui a provoqué
une succession de textes définissant celui-ci. Dans ces conditions, une amélioration du dialogue avec
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les élus et des conditions dans lesquelles se déroulent aujourd’hui les examens de la gestion ne peut
qu’être constatée. Mais, plusieurs difficultés subsistent
Difficultés liées au manque d’harmonisation des contrôles
Les contrôles se déroulent selon une programmation qui est fixée de manière indépendante par le
président de chaque Chambre. L’hétérogénéité qui en découle dans la programmation des examens
de la gestion des différentes chambres réduit considérablement la portée de leurs observations.
De ce fait, les rapports d’observations définitives ne constituent pas véritablement des « instruments
d’aide à la gestion
régionales des comptes..
Cette situation avait d’ailleurs justifié le projet de l’ancien Premier président de la Cour des comptes,
Philippe Séguin, visant à transformer les CRC en Chambres de la Cour des comptes.
Difficultés liées au choix des comptes contrôlés
Les ne peuvent examiner la gestion de toutes les collectivités
territoriales de leur ressort. C’est pourquoi, elles procèdent à un ciblage sur les comptes dits
«significatifs». Ces comptes représentent environ 10 à 15 % des comptes du ressort des
régionales des comptes. Cet échantillon est-il suffisamment représentatif ? C’est une question que l’on
peut se poser. Toujours est-il que la notion de comptes « significatifs » semble définie de manière trop
restrictive.
D’autre part, les collectivités situées juste en-dessous du seuil, qui peuvent cependant avoir des
budgets relativement importants, bénéficient rarement de l’expertise des Chambres régionales des
comptes.
Difficultés liées à l’application du principe du contradictoire
Le caractère contradictoire de la procédure a été renforcé à plusieurs reprises, ce qui a conduit à un
allongement assez important de la durée de l’examen de la gestion. Entre l’annonce d’une ouverture
de ce dernier à la collectivité, et la remise du rapport d’observations définitives le clôturant, s’écoulent
au minimum huit mois. Mais parfois, la procédure peut durer plus longtemps. Il existe quelques cas
dans lesquels trois années ont été nécessaires.
Or pendant tout ce temps, les services de la collectivité territoriale restent mobilisés ce qui n’est pas
sans conséquences sur sa gestion.
Le principe du contradictoire appliqué à la procédure de contrôle entraine un autre inconvénient. Les
observations provisoires doivent être communiquées à l’ordonnateur de façon à pouvoir assurer sa
défense en présentant au greffe de la chambre régionale des comptes une réponse écrite dans un
délai de deux mois. Or, les droits de la défense de l’ordonnateur ne sont garantis que dans la mesure
où le rapport d’observations provisoires reste secret. Malheureusement, il est, en pratique, illusoire de
compter sur la confidentialité de celui-ci.
b) Les remèdes
Le sénateur Mézard a formulé 21 propositions dans son rapport. On peut les résumer en allant à
l’essentiel, de la manière suivante.
1-Agir sur les méthodes de contrôle
Ce sont essentiellement les méthodes du contrôle qui sont, sinon à revoir, du moins à perfectionner
en les harmonisant le plus possible mais aussi en leur donnant une dimension plus concrète.
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Favoriser l’harmonisation du contrôle de gestion
L’intérêt du contrôle serait renforcé si les rapports d’observations ne se limitaient pas à un catalogue
des irrégularités ou des incohérences de gestion des collectivités. Au contraire, elles devraient devenir
un guide des bonnes pratiques, et une source d’inspiration pour les collectivités. A cette fin,
l’homogénéisation des méthodes devrait être développée.
Certes, les enquêtes interjuridictionnelles, menées par la Cour des comptes et les Chambres
régionales des comptes se multiplient. De plus la création, le 10 octobre 2011 d’une formation
commune à la Cour des comptes et aux consacrée aux finances
locales va dans le même sens. Son rapporteur général, Frédéric Advielle reconnaît le caractère trop
parcellaire du discours des . Dans le rapport que rendra cette
nouvelle formation, un discours plus global sur les finances publiques locales sera tenu ainsi, des
points particuliers de conjoncture seront mis en évidence pour objectiver les débats sur le monde local
et sa dette, l'évolution du coût de son personnel, l'accès au crédit, etc.
Donner une dimension plus concrète aux observations
Trop souvent, on l’a dit les rapports d’observations se limitent à un repérage des incohérences ou des
économies à réaliser dans la gestion d’une collectivité. L’ordonnateur est invité à prendre des
mesures, sans que nécessairement leur contenu soit précisé.
devraient accompagner leurs observations de recommandations concrètes. Elles deviendraient ainsi
non seulement des censeurs des collectivités territoriales, mais bien plus des conseillers. Un dialogue
pourrait alors se développer sur une base constructive.
Dans le même ordre d’idée il faudrait obliger la à répondre aux
questions relatives à la gestion des finances locales posées par les ordonnateurs, dans le cadre d’un
examen de la gestion ce qui aurait pour effet de renforcer l’efficacité du contrôle.
2-Renforcer l’efficacité du contrôle
Le contrôle de gestion n’est légitime que dans la mesure où il est efficace. A cette fin il doit être
possible d’assurer le suivi du contrôle mais aussi d’éviter son détournement.
Assurer un suivi du contrôle de la gestion
Aujourd’hui, cela n’est possible que dans la mesure où une nouvelle procédure d’examen de la
gestion est ouverte ce qui demande du temps et ce qui ne facilite pas les choses. C’est pourquoi, il
faudrait permettre à l’ordonnateur, dont la gestion a été contrôlée par une Chambre régionale, de
rendre compte des suites qu’il a données aux observations, dans un délai d’un an à partir de leur
publication, et ce aussi bien auprès de la Chambre qu’auprès des membres de l’assemblée
délibérante de la collectivité concernée.
Empêcher le détournement de la procédure
L’examen de la gestion peut être détourné à des fins politiques. Le Code envisage cette possibilité et
afin de la réduire a prévu que le rapport ne peut être publié ni communiqué à ses destinataires ou à
des tiers à compter du premier jour du troisième mois précédant le mois au cours duquel il doit être
procédé à des élections pour la collectivité concernée. Le Sénateur Mézard estime d’une part qu’il
faudrait allonger le délai, de trois à six mois et d’autre part étendre cette mesure aux cas où
l’ordonnateur se présente à des élections différentes de celle de la collectivité concernée (élections
législatives, par exemple).