BEP/GPl/6
L'AFRIQUE CENTRALE
Stratégies de développement
et Perspectives
par
Elikia M'BOKOLO
Directeur d'Etudes
Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales
BEP-87/WS/7 Novembre 1987
P R E S E N T A T I O N
La présente étude a été élaborée dans le cadre du programme
d'études régionales consacré à l'Afrique. Elle a trait, d'une
part, à l'analyse des plans, stratégies et politiques de
développement mis en oeuvre par les Etats d'Afrique centrale dans
les domaines de l'éducation, la science, la culture et la
communication et, d'autre part, à l'évaluation des perspectives
d'évolution de cette sous-région à l'horizon 2 000, notamment au
plan de la coopération interétatique dans les domaines de
compétence de 1'UNESCO.
(1)
I N T R O D U C T I O N
L'une des difficultés majeures de la présente étude, d'ailleurs
familière aux spécialistes, a été de réunir des chiffres sûrs,
fiables, complets et à jour car dans certains cas les données
quantitatives se contredisent et, dans d'autres, elles manquent
purement et simplement sur plusieurs années. Malgré cet
obstacle, évoqué par tous lors de l'atelier organisé à Dakar en
juillet 1987 dans le cadre du projet régional "Afrique", le
travail présenté couvre tous les pays de la sous-région à la fois
dans leurs stratégies de développement et dans les secteurs qui
correspondent aux domaines de compétence de 1'UNESCO. Il
s'articule en cinq parties principales:
Caractéristiques et définition de la sous-région
Problématique du développement
- Réalisation dans les domaines de compétence de 1'Unesco
Coopération sous-régionale
Eléments de prospective
Des annexes et une bibliographie sélective complètent l'étude.
(3)
I
Caractéristiques, profil général et définition
de la sous-région
(5)
I 2
A. Les Etats de l'Afrique Centrale.
Dans cette étude, on entend par "Afrique Centrale" l'ensemble formé par les
Dix Etats suivants :
TABLEAU I : Les Etats de l'Afrique Centrale
BURUNDI
CAMEROUN
CENTRAFRIQUE (République Centrafrique)
CONGO
GABON
GUINEE EQUATORIALE
RUANDA
SAO TOME et Principe
TCHAD
ZAIRE
Superficie
(km2)
27.834
475.442
622.984
342.000
267.667
28.050
26.338
960
1.284.000
2.345.409
Population Estimation 1986
4.900.000
10.000.000
2.700.000
1.800.000
1.200.000
380.000
6.500.000
90.000
5.200.0CC'
31.300.000
Allemande, puis mandat belge
Allemande, puis mandat Français et Britannique
Française
Française
Française
Espagnole
Allemande, puis mandat Belge
Portugaise
Française
Propriété personnelle de Leopold II puis colonie Belge
Date de l'Indépendance
1er Juillet 1962
Langue officielle
Français
1er Janvier Anglais 1960 et (c.français) et Français 1er Octobre | 1961 (c. anglais)
13 Août 1960
15 Août 1960
17 Août 1960
14 Octobre 1968
1er Juillet 1962
12 Juillet 1975 .
11 Août 1960
30 Juin 1960
Français
Français
Français
Espagnol
Français
Portugais
Français
Français
Source : Elikia M'BOKOLO L'AFRIQUE AU XXème siècle. Le Continent Convoité. Paris, Le Seuil, Coll. Points Histoire, 1985 pp.
Plutôt que de commenter la fiche d'identité de chacun des Etats nommés ci-
dessus, on s'efforcera de définir la sous région "Afrique Centrale" à partir de
trois angles d'attaque : la "longue durée", la spécificité et la personnalité
de la sous-région. , 7.
1.3
B. Définition en termes de structures et de longue durée.
Les notions de "structures" et de "longue durée", telles que les en
tendent les historiens, peuvent être d'un apport décisif à toute démar
che qui, s'inscrivant dans le temps, analyse le présent avant tout aux
fins de dégager les tendances d'avenir : tendances lourdes, incontrôla
bles, possédant leur dynamisme et leur rythme propres, sur lesquelles
les hommes ne peuvent pour ainsi dire pas agir ; ou , au contraire,
mouvements ouverts, esquissés, qui autorisent toutes les initiatives,
qui se laissent volontiers infléchir et sur lesquels l'on peut par
conséquent définir des politiques offertes par le présent, la prospec
tive se retrouve ainsi parente proche de l'histoire. Car, pour les
historiens, la "structure", identifiée à la "longue durée" est "sans
doute assemblage, architecture, mais plus encore une réalité que le
temps use mal et véhicule très longuement. Certaines structures, à
vivre longtemps, deviennent des éléments stables d'une infinité de
générations : elles encombrent l'histoire, en gênent, donc en comman
dent, l'écoulement. D'autres sont plus promptes à s'effriter. Mais
toutes sont à la fois soutiens et obstacles" (1).
Or les éléments de "structure" les plus facilement repérables en
Afrique centrale contribuent à la fois à l'éclatement et à l'intégra
tion de la sous-région.
B.l. Principal témoin de cet éclatement, l'ouverture et la perméabilité
de presque toutes ses frontières.
(1) Fernand Braudel "Histoire et sciences sociales : la longue durée" in Ecrits sur l'Histoire. Paris, Flammarion, 1969, p. 41.
(8)
I. 4
Cette ouverture est particulièrement évidente aujourd'hui, sous une
forme spectaculaire et critique (les relations entre le Tchad et la
Lybie), pour la frontière nord. Cette ouverture tient d'abord à l'his
toire. Loin de constituer une barrière, le Sahara apparaît aujourd'hui
comme ayant été un lieu de passage privilégié, une sorte de mer inté
rieure, sillonnée par de nombreuses caravanes marchandes, transportant
des produits, mais aussi des hommes, des croyances et des idées. A
partir du Tchad, l'Afrique centrale a ainsi entretenu des relations
étroites et suivies avec les villes de Lybie (Tripoli et Banghazi)
et d'Egypte (Salum, Le Caire, Alexandrie) et, via Abéché, Khartoum et
El Obeid, avec les ports de la Mer Rouge et, au-delà, avec l'Arabie.
Ces relations séculaires se sont renforcées au siècle dernier par suite
de la politique expansionniste de l'Egypte, sous l'impulsion de Muhanmed
Ali : l'Etat fondé par l'un des agents égyptiens, Rabah, au coeur du
Tchad, a exercé sa domination et ses effets jusqu'en Centrafrique et
au Zaïre et n'a disparu qu'en 1900, sous les coups de l'impérialisme
colonial. La dernière caravane marchande en provenance de Tripoli arri
va au Tchad en 1913. L'islam tchadien (environ 20% de la population
totale, mais 90% de la population située au nord du lie parallèle)
et centrafricain (environ 6% de la population) est ainsi lié, au plan
spirituel, essentiellement à la sanûsiyya libyenne et à la mahdiyya
soudanaise. Dans le domaine politique, cette frontière nord est ou
verte dans trois directions au moins :
- vers la Libye dont l'intérêt actuel pour le Tchad remonte au
moins aux années 1930 (1934 accord Mussolini. Laval donnant
à la Libye alors italienne la "bande d'Aouzou" appartenant
au Tchad français) ;
- vers le Soudan où, au début des années 1960, se sont repliés
de nombreux Congolais (aujourd'hui Zaïrois) fuyant la guerre
civile qui sévissait alors dans leur pays tandis que la ré
bellion du sud-Soudan provoquait une importante émigration
(9)
1.5
refugies dans l'autre sens, vers le Zaïre ;
- vers le Cameroun enfin dont les relations avec le Nigeria sont
anciennes et multiples : certains peuples, comme les Peul (qu'on
trouve ailleurs en Afrique occidentale) sont communs aux deux
pays : l'islam camerounais (15% de la population, nombreux
surtout dans le nord) est venu du nord Nigeria dont il a reçu
au 19e siècle une impulsion rénovatrice décisive ; enfin
l'institution au Cameroun d'un double mandat, britannique et
français, a provoqué le rattachement au Nigeria de l'Ouest
camerounais (dont une partie est resté nigériane à la suite
du referendum de 1961) et explique le bilinguisme franco-
anglais de ce pays.
La frontière est de l'Afrique centrale, du côté des pays riverains
de l'Océan Indien, n'est pas moins ouverte.
Ce fait est d'abord attesté par l'existence d'une véritable "civi
lisation des Grands Lacs". Ancienne, enracinée dans une longue his
toire, celle-ci n'en continue pas moins de nourrir une conscience très
vive d'une origine, d'une identité ou de problèmes communs, comme le
montre le colloque réuni à Bujumbura en septembre 1972 sous l'égide du
Centre de civilisation burundaise et de 1'UNESCO (1). Soutenu par le
Burundi, le &ianda, la Tanzanie et le Zaïre, ce colloque a montré
l'existence d'une parenté immédiate et structurelle entre les peuples
riverains des Grands Lacs dans ces quatre Etats, mais aussi ceux du
Kenya, de l'Ouganda et, dans une moindre mesure, de la Zambie, du
Malawi et du Mozambique. Cette parenté se rapporte à la fois aux structures
(1) Le rapport général, les recommandations et les actes de ce colloque ont été publiés sous le titre La Civilisation ancienne des peuples des Grands Lacs, Paris, Karthala, 1981.
(10)
1.6
politiques (généralisation des royaumes cen-ralisés), aux activités
économiques et aux valeurs en découlant (primauté de l'élevage), aux
particularités du peuplement (densités relativement élevées) et jusqu'
aux interrogations relatives à l'origine des groupes humains.
Dans une perspective plus large,au plan géographique, historique et
culturel, on voit bien aujourd'hui toute l'importance des processus d'assi
milation, de réaction et de création mis en oeuvre - il n'y a pas si long
temps - par Zanzibar et la côte swahili (1). Nous disons "il n'y a pas
si longtemps", car ces processus ne sont entrés dans une phase d'accélé
ration que vers 1840 et se poursuivent sous nos yeux. Ils révèlent d'abord
des relations commerciales et humaines anciennes et intenses avec la pé
ninsule arabe, l'Iran et le subcontinent indien, à tel point que des com
munautés relativement nombreuses ont émigré de ces dernières régions pour
s'installer en Afrique de l'Est. Lorsque, dans les années 1840, le sultan
de Zanzibar entreprit une exploitation économique intense de la terre
ferme, il se constitua un véritable "empire" (d'après l'expression de
l'historien tanzanien Abdul Sharif) (2) dont la frontière, avançant sians
cesse dans le continent, finit par s'étendre jusqu'à englober l'est du
Zaïre. Il en est issu principalement quatre faits qui sont encore de
notre temps :
- la "question arabe", ainsi appelée par les autorités coloniales,
désignant l'importance des communautés d'Arabes ou d'arabisés,
assez souvent bien intégrés, au sein des peuples africains ;
- l'islam, certes minoritaire, mais très actif, au Zaïre (1,5%
de la population, concentré dans l'est du pays), au Burundi (1,5%
et au Rvanda (0,5%) ; essentiellement sunnite, il s'exprime à
travers de nombreuses associations soucieuses d'obtenir l'égalité
(1) De l'arabe Sahil ou Sahel (rivage) : désigne la partie de la côte est-africaine allant de Mogadiscio au nord du Mozambique.
(2) Abd ul Sharif Zanzibar. The rise of a commercial empire. Londres, Longman, 1987.
(11)
1.7
de traitement avec les autres confessions ;
- la langue swahili dont la diffusion, loin de s'arrêter avec la
colonisation, a au contraire bénéficié de celle-ci : parlée au
Burundi et au Paanda, elle jouit au Zaïre du statut de "langue
nationale" ; tous les locuteurs de cette langue en Afrique cen
trale considérant que le meilleur swahili (le swahili bora) reste
celui de Tanzanie ou, plus précisément, celui de Zanzibar et de
la côte voisine ;
- les solidarités ethniques transfrontalières : plusieurs groupements
ethniques bien enracinés dans des Etats de la sous-région ont une
conscience très claire de leur origine est-africaine que, dans un
raisonnement prospectif, ils valorisent comme l'un de ces petits
pas qui pourraient conduire à l'unité africaine.
Ajoutons qu'au plan économique, l'importance actuelle et future de
l'Afrique orientale est cruciale pour les Etats enclavés de la sous-région
Afrique centrale (Burundi et Ruanda) et pour l'est zaïrois, dont le ravi
taillement et l'écoulement des productions dépendent de Mombasa et, dans
un bien moindre mesure, de Dar es Salaam.
Enfin, la frontière sud présente les mêmes caractéristiques que celles
du nord et de l'est, avec néanmoins les particularités inévitables imposées
par les problèmes de l'Afrique australe. L'ouverture de la frontière sud
est donc perceptible à deux niveaux : ouverture sur ses voisins et ouver
ture sur l'Afrique australe.
L'ouverture de la sous-région sur ses voisins immédiats du sud
(Angola, Zambie, Zimbabwe) est évidente. Historiquement, il s'agit d'une
zone homogène qui a produit le même type d'Etats (dits à "royauté sacrée")
et le-même système de valeurs et de croyances (1). Beaucoup de ces Etats
(1) Luc de Heusch Le roi ivre ou l'origine de l'Etat, Mythes et rites bantous. Paris, Gallimard, 1972.
(12)
Ii 8
précoloniaux, qui ont plus ou moins survécu pendant notre siècle, d é b o r
daient les frontières actuelles. Il suffit de penser au royaume lunda ou
à l'Etat tshokwe qui embrassaient des peuples écartelés a u j o u r d ' h u i , du
fait des frontières issues de la colonisation, entre l 'Ango la , le Zaïre
et la Z a m b i e . D'a i l leurs , les crises polit iques et militaires c o n t e m p o
raines, de la sécession katangaise à la guerre civile angolaise, m o n t r e n t
la fluidité et la fragilité extrêmes de ces frontières. Sur le plan é c o n o
m i q u e , les solidarités anciennes, tissées avant la colonisation, ont été
prolongées par celles-ci et maintenues depuis : importance de l ' économie
cuprifère surtout intégration par la réseau de transports car l 'anc ien
réseau "luso-africain" (1 ) , qui reliait les pays katangais et zambien à
la côte angolaise , se retrouve aujourd 'hu i dans le réseau ferroviaire et,
en particul ier , dans le très stratégique "chemin de fer de Benguela" (du
port angolais de Benguela aux mines de cuivre du S h a b a ) . Enfin, au plan
culturel, c'est en Angola que sont a p p a r u s , aux 17e et 18e siècles, ces
mess ianismes et syncrêtismes q u ' o n voit proliférer au 20e siècle dans
toute la sous-région avec le k imbanguisme zaïro-congolais , le m a t s o u a n i s m e
congolais et les multiples sectes actuel les .
Vers l 'Afrique australe, en dehors de l 'apartheid qui mobil ise contre
lui l ' ensemble du continent, les relations sont surtout économiques et
culturelles. U n autre réseau ferroviaire, dit "de Rhodês ie" , a très tôt
aidé à remédier à l 'anclavement du copperbelt en facilitant l 'écoulement
du méta l rouge vers les ports mozambica ins de Beira et M a p u t o . A u plan
culturel, il faut souligner q u e , depuis la fin du 19e , l 'Afrique du sud
a connu également le phénomène de diss idence religieuse, avec les Eglises
indépendantes noires qui se sont qualifiées d 1 "éthiopiennes". Ce d y n a
misme créateur a progressivement remonté vers le nord et, via la R h o d ê s i e
(Zimbabwe et Z a m b i e ) , gagné le Katanga où des mouvements religieux tels
que M w a n a Lesa (Fils de Dieu) et Ki tawala (déformation de W a t c h T o w e r )
furent u n e étape décisive dans l 'expression du nat ional i sme.
(1) Express ion de J . L . Vel lut , cf. "Notes sur le lunda et la frontière luso-africaine (1700-1900) in Etudes d'Histoire Africaines (Lubumbashi; III , 1972 , p p . 6 1 - 1 6 6 .
(13)
1,9
B.2. En termes de "longue durée, les facteurs d'intégration existent
aussi et sont nombreux, comme le montrera la suite de cette étude. On
peut déjà en retenir, à ce stade, trois dominants.
Le premier facteur est d'ordre humain : c'est ce qu'on pourrait ap
peler la composante bantu dont l'importance est illustrée par la créa
tion récente et par les activités du CICIBA (Centre International des
Civilisations Bantu). Certes tous les peuples de la sous-région n'appar
tiennent pas à la civilisation bantu. Les classifications anthropologi
ques habituelles relèvent des peuplements relativement importants de
Pygmées (Cameroun, Centrafrique, Congo et Zaïre), de "Soudanais" (Came
roun, Centrairique, Tchad et Zaïre), de Peul (Cameroun et Tchad) et
"d'Arabes", terme générique qui désigne au Tchad les gens de culture
arabe et de religion musulmane et qui regroupe des Arabes, des Berbères,
des peuples issus de métissages de ces derniers avec les Africains et
enfin des Africains, connus sous l'appellation d' "Arabes Noirs". Cepen
dant, les Bantu représentent de loin le peuplement majoritaire de cette
partie du continent et, aussi, de l'Afrique orientale et australe. Si la
pertinence du concept de bantu est remise en cause par certains spécia
listes, l'on s'accorde nénamoins à reconnaître aux peuples appelés par
ce nom des caractéristiques communes :
- une relative unité linguistique affirmée de bonne heure par les
premiers voyageurs européens et reconnue par la plupart des spé
cialistes depuis les célèbres travaux de William Bleek (Comparative
Grammar of South African Languages 1862) et L. Homburger (Phoné
tique historique du Bantou, 1913);
- un patrimoine commun des croyances, de rites, de valeurs à tel
point que beaucoup, depuis le livre retentissant publié par le
R.P. Tempels en 1945, affirment l'existence d'une "philosophie
bantoue".
Le second facteur est d'ordre politique : c'est la présence, en de nom
breux endroits de l'Afrique centrale, de peuples transfrontaliers qui s'af
firment par un irrédentisme plus ou moins prononcé. L'exemple du groupe konj
(14)
I-10
est tout à fait instructif à cet égard. Issu du royaume le plus ancien
et le plus prestigieux de cette partie du continent, le Royaume de Kongo,
ce peuple s'est trouvé, du fait des découpages coloniaux, dispersé entre
l'Angola, le Zaïre et le Congo. Or, il a su conserver une conscience très
claire de son origine commune et de son identité : le partage colonial et
les pratiques culturelles de la colonisation ont peut-être même avivé cette
conscience (1). La revendication de l'indépendance, exprimée depuis le dé
but du siècle sous des formes multiples, est allée de pair avec la volonté
de reconstituer, dans le cadre d'un Etat moderne, l'unité ancienne et le
prestige du royaume perdu : commencé avec les messianismes politico-religieu
de la première moitié du siècle, ce mouvement a pris de l'ampleur grâce à
l'Abako (Association des Bakongo fondé au Zaïre, alors Congo Belge, en
1950) d'abord sous une forme culturelle, puis sous une forme politique
au début des années 1960. Si cet irrédentisme s'est atténué depuis cette
époque, rien ne dit que des circonstances particulières ne pourraient pas
lui redonner de la vigueur. Sous des formes moins accusées sans doute,
ce phénomène se retrouve sur d'autres frontières, en particulier chez les
Lunda (Angola, Zaïre, Zambie), les Teke (Congo, Gabon, Zaïre), les Fang
(Cameroun, Gabon, Guinée Equatoriale), les Ngbandi (Centrafrique, Zaïre),
les Azande (Centrafrique, Soudan, Zaïre) ou encore les "Rwandais" (Rwanda,
Zaïre).
Un dernier facteur d'intégration est d'ordre géopolitique : c'est le
fleuve Congo/Zaïre et son principal affluent, l'Oubangui. Dans une célèbre
chanson du milieu des années 1960, le musicien zaïrois Joseph Kabasele
a redit avec force cette évidence historique et popularisé l'idée selon
la quelle "le fleuve Congo n'est pas une barrière, mais un lieu de pas
sage" (2). Bien avant le XVe siècle, époque à laquelle ce rôle a été
(1) Voir ci-dessous chapitre III, D (c, 1).
(2) "Ebale ya Congo ezali lopango te, ezali nzela".
(15)
1.11
revelé par les premiers voyageurs portugais, le grand fleuve a servi de
support à un vaste réseau d' .changes drainant les produits du commerce
local puis, plus tard, les marchandises destinées à l'exportation (ivoire
et esclaves) . Le "grand commerce congolais" a ainsi donné naissance à
des identités ethniques, façonné des langues, brassé des peuples d'ori
gines diverses, suscité des comportements économiques que certains
historiens n'ont pas hésité à qualifier de "capitalistes" (1). Gravement
compromis par les entraves des colonisateurs belges et français, les
anciens courants d'échanges de produits, d'hommes et, avec eux, d'idées
ont repris depuis les indépendances une vigueur remarquable, en particu
lier entre Brazzaville et Kinshasa.
C. Spécificités de l'Afrique centrale.
A côté de ces caractéristiques lourdes et durables, l'Afrique centrale
tire de l'histoire récente une partie de sa physionomie. Ces traits spéci
fiques, issus d'un passé récent, ne sont sans doute pas définitifs, ni
peut-être aussi contraignants qu'ils apparaissent au premier regard.
1. Spécificités coloniales.
L'Afrique centrale a expérimenté presque toutes les formes de coloni
sation, qu'il s'agisse de l'origine des colonisateurs ou des formes juri
diques de la domination étrangère. Presque toutes les nations colonisatri
ces ont été présentes dans la sous-région, aussi bien les vieilles puissan
ces ces coloniales (Portugal au Cabinda et en Angola, Espagne en Guinée
Equatoriale et à Sâo Tomé et Principe, Royaume Uni dans une partie du
Cameroun, France au Cameroun et en Afrique Equatoriale Française (2)
(1) Robert W. Harms River of wealth, River of Sorrow. The Central Zaire Basin in the Era of the Slave and Ivory Trade 1500-1891.New Haven, Yale University Press, 1981.
(2) Formée en 1910, l'A.E.F. a réuni jusqu'en 1960 la Centrafrique (Ouban-gui-Chari), le Gabon, le Tchad et le Congo (Moyen Congo).
(16)
I, 12
que les nouvelles puissances coloniales (Allemagne au Cameroun, au
Burundi et au Ruanda ; Belgique au Zaïre, puis au Burundi et au Ruanda).
Au plan juridique, la plupart des Etats ont été des colonies, soumises
à l'administration directe des puissances européennes ; mais, après
la première Guerre Mondiale, les territoires allemands - Burundi, Cameroun
et Ruanda - sont devenus des mandats de la Société des Nations, puis pays
sous tutelle de l'Organisation des Nations Unies : à ce titre, ils étaient
placés sous l'autorité d'un pays colonisateur, tout en relevant du con
trôle régulier de l'Organisation internationale.
Malgré cette diversité, la colonisation de l'Afrique centrale présente
de nombreux points communs. En premier lieu, elle fut relativement tar
dive : si l'on excepte la côte gabonaise, où les Français se sont établis
dès la première moitié du XIXe siècle, l'Afrique centrale a été colonisée
seulement à partir des années 1880 à la différence de l'Ouest africain où
les postes français (au Sénégal), portugais (en Guinée Bissau et dans le
Golfe de Guinée) et anglais (au Ghana et en Sierra Leone) remontant au
XVIIe siècle, voire au-delà, et à la différence de l'Afrique australe
(colonisation hollandaise en Afrique du Sud dès le 17e siècle, colonisation
portugaise au Mozambique depuis les années 1550) et orientale (colonisa
tion arabe depuis le Moyen Age). Tardive, la colonisation européenne
a eu recours ici à des méthodes brutales, expéditives qui se sont prolon
gées parfois bien après la deuxième Guerre Mondiale.
Il en est résulté, pour l'Afrique centrale, une série de conséquences
spécifiques :
- au plan économique, des formes particulières de dépendance et de
sous- développement évoquées ci-dessous (chapitre II, A) ;
- au plan politique, un type d'Etat particulièrement autoritaire
et contraignant dont la logique propre continue, aujourd'hui
(17)
1.13
encore, à imprimer sa marque dans tous les secteurs d'activité
et, en particulier, dans ceux de la culture, de la communication
et de l'éducation ;
- au plan culturel enfin, une adhésion unanime à la francophonie
puisque même la Guinée equatoriale, naguère colonisée par l'Es
pagne, a rejoint la zone franc et accorde depuis une place de
choix à la langue française dans son système éducatif et dans
ses moyens d'information.
2. Les croisements de l'histoire contemporaine.
Si l'histoire des trente ou quarante dernières années s'est déroulée
dans le cadre privilégié des frontières "nationales" issues de la coloni
sation, elle a donné lieu aussi, en certains moments, à des croisements
dont on peut attendre - et espérer - que les plus heureux se reproduisent
à l'avenir.
Il en est ainsi d'abord des deux Congo, car le Zaïre n'a pris son
nom actuel qu'en 1973. On rappellera, le moment venu, la parenté profon
de des créations culturelles contemporaines de part et d'autre du fleuve
Congo/Zaïre : indiquons seulement que la continuité est remarquable,
pour prendre deux générations extrêmes, entre le premier romancier du
Congo et du Zaïre, Paul Lomani-Tchibamba et l'un des romanciers congo
lais les plus en vue aujourd'hui, Sony Labou Tansi : l'un et l'autre
sont nés au Zaïre et ont vu leur art s'épanouir à Brazzaville tandis
que leurs oeuvres prennent indifféremment pour cadre le Congo ou le
Zaïre. Au niveau politique, les mouvements nationalistes des deux pays
se sont constamment influencés et enrichis, depuis les organisations po
litico-religieuses (Kimbanguisme zaïrois et matsouanisme congolais)
jusqu'aux partis politiques qui ont arraché l'indépendance en 1960.
La situation exceptionnelle des deux capitales, Brazzaville et Kinshasa
(18)
I. 14
qui se font face sur le Pool Malebo, explique aussi les échanges
incessants, parfois involontaires et non dénués de drames, d'idéologies
politiques, de réfugiés et autres personnalités indésirables, de techni
ques de mobilisation . . .
Les péripéties de la décolonisation angolaise, acquise en 1975, mais
dont les rebondissements se prolongent sous nos yeux ont encore fourni
au Congo et au Zaïre l'occasion de se rencontrer sur le même terrain,
même si ce ne fut pas toujours pour agir de concert. Chacun d'eux a
abrité l'un des mouvements nationalistes rivaux de l'Angola. L 'un et
l'autre ont donc eu à intervenir, avec des succès inégaux, dans le
règlement des conflits angolais.
La question tchadienne pour sa part concerne au premier chef l'en
semble de la sous-région, pour des raisons variables selon les Etats : le
Cameroun, la Centrafrique, le Congo et le Gabon parce qu'ils ont long
temps appartenu au même ensemble politique colonial (L'Afrique Equato-
riale Française) et aux organisations de coopération sous régionale qui
en sont issues ; le Cameroun et la Centrafrique parce qu'en outre ils
sont frontaliers du Tchad ; le Zaïre enfin parce que , d'une part, il a
entretenu des relations étroites avec certains des régimes qui se sont
succédé au Tchad (notamment le régime Tombalbaye, 1960-1975) et,
d'autre part, son poids propre lui impose de ne pas être absent des
tentatives de règlement d 'un drame aussi grave et aussi durable que
celui du Tchad (1). Il est donc normal qu'avec d'autres, les Etats
de la sous-région, ensemble ou individuellement, aient lancé, amplifié
ou relayé les multiples projets de règlement de cette crise épineuse.
Toutes ces expériences, souvent douloureuses, auront eu au moins le
mérite de rapprocher, dans la recherche de solutions négociées, les gouver-
(1) Voir Sylvain Soriba Cámara "Le Zaïre et la puissance" in Le Mois en Afrique, Revue Française d'Etudes Politiques Africaines, (203-204) déc . 82-janv. 8 3 , pp . 17-38 et (205-206) , févr.-mars 1983, p p . 3 8 - 6 1 .
(19)
I. 15
liants, les élites et les peuples de la sous-région.
3. Le sous-peuplement.
Dans l'ensemble de la sous-région, les densités de population se si-
situent à un bas niveau mais cette caractéristique pourrait, avec les
tendances démographiques actuelles, subir des modifications sensibles, au
moins dans certains Etats.
Tableau II : Les densités de population en Afrique Centrale
(Habitants au km2, 1986)
Burundi 176
Cameroun 21
Centrafrique 4,3
Congo 5,3
Gabon 4,5
Guinée Equatoriale 13,4
Ruanda 246,8
Sao Tomé et Principe 98
Tchad 4
Zaïre 13,3
Ces faibles densités ne s'expliquent que pour une part, sans doute mi
nime, par des facteurs tenant à la géographie physique (désert au Tchad ;
obstacle de la forêt equatoriale, véritable "enfer vert", pour repren
dre une expression couramment employée pour l'Amazonie). La saignée due
au commerce des esclaves, par l'Atlantique, le Sahara et l'Océan Indien
a joué un rôle indéniable, quoique discuté par les spécialistes, dans
le blocage de la croissance, donc dans les faibles densités de la popula-
(20)
I- 16
tion. Les recherches plus récentes inästent sur les incidences négatives,
depuis la fin du XIXe siècle, de graves maladies épidémiques ou endémi
ques dont la diffusion est presque toujours liée aux péripéties de la
vie politique et économique (1). Ce sont précisément ces derniers facteurs
qui peuvent évoluer et qui ont commencé à évoluer du fait de la volonté
des pouvoirs publics : Ces progrès peuvent s'intensifier avec une éduca
tion appropriée et une recherche scientifique mieux orientée.
D. L'Afrique centrale : personnalité et capacité d'action.
Malgré les multiples agents d'éclatement, les facteurs d'intégration
sont assez nombreux, et assez puissants pour donner à l'Afrique centrale
une sorte de personnalité, qui détermine déjà une véritable capacité auto
nome d'agir.
Si l'Afrique centrale existe, elle existe de plusieurs manières et
l'une de ces existences est, pourrait-on dire, "métaphysique" en ce
sens qu'elle relève d'un projet ambitieux, dont la réalisation politique
n'a pas eu lieu, mais dont l'économie générale et la philosophie conser
vent toute leur pertinence. Il s'agit d'un projet vieux de presque trente
ans, lancé par l'homme d'Etat centrafricain Barthélémy Boganda sous le
nom d'Afrique latine.Celui-ci expliquait en raillant quelque peu les fron
tières coloniales : "moi-même je suis né congolais et je suis devenu ou-
banguien. Une partie de ma tribu se trouve au Congo Belge (Zaïre), une
autre dans l'ancien territoire de l'Oubangui (Centrafrique) et une autre
au Tchad. Mais c'est la langue française et notre culture latine commune
(1) Voir par exemple A. Retel-Laurentin Infécondité en Afrique noire ; maladies et conséquences sociales. Paris, Masson,1974 et E. M'Bokolo "Histoire des maladies, Histoire et maladie : l'Afrique" in Marc Auge et Claudine Herzlich Le sens du mal, Anthropologie, Histoire, Sociologie de la maladie. Paris, Editions des Archives Contemporaines, 1984, pp. 155-186.
(21)
I. 17
qui sont pour nous l'un des liens essentiels. C'est pourquoi je crois
fermement à l'avenir de ce que l'on doit appeler Afrique latine, comme on
parle de l'Amérique latine". C'est cette unité potentielle qui semble se
réaliser à petits pas.
Boganda prévoyait une unification en trois étapes : 1) union des
quatre territoires (Centrâtrique, Congo, Gabon, Tchad) issus de l'A.E.F.
pour former la "République Centrafricaine" (1); 2) "unification des deux
Congos" : le Congo belge (Zaïre) et le Congo français (A.E.F.); 3) création
des Etats Unis de l'Afrique latine comprenant, outre les deux Congos, le
Cameroun, le Ruanda, le Burundi et l'Angola.
L'unification telle que l'a vue Boganda ne s'est pas réalisée. Mais
les organisations de coopération sous-régionale se sont multipliées : elles
se caractérisent par leur tendance à englober un nombre de plus en plus
grand d'Etats. Au départ il s'agissait avant tout de maintenir les liens
de coopération, essentiellement économique, mis en place pendant la pé
riode coloniale. Les transformations de ces organisations de coopération
ont été multiples : d'une part, leurs compétences se sont élargies ou di
versifiées ; d'autre part les Etats membres ne sont plus tous issus du même
régime colonial. Première en date, l'UDEAC (Union douanière et économique
de l'Afrique Centrale) a vu le jour en 1964 lors de la signature du Traité
de Brazzaville et ne regroupait à sa naissance que les pays de l'ancienne
A.E.F. (Afrique Equatoriale Française) et le Cameroun ; le Traité de
Brazzaville a été revu en 1974 et l'UDEAC a incorporé la Guinée Equatoria
le et, en 1984, le Tchad qui l'avait quittée en 1968.L'UDEAC est d'abord
une union douanière, fondée sur la libre circulation des produits entre
les Etats membres et un tarif extérieur commun, visant les importations
en provenance des pays tiers. Mais ses compétences ne se limitent pas aux
échanges : l'UDEAC a aussi contribué à harmoniser les codes des investis
sements des Etats membres et adopté un Fond de solidarité destiné à remédier
(1) La République Centrafricaine actuelle n'est qu'un avatar du projet de Barthélémy Boganda.
(22)
1.18
aux disparités de développement et de richesses entre les pays constitutifs.
Quant à la CEPGL (Communauté Economique des Pays des Grands Lacs), elle ne
regroupe depuis sa création en 1976 que le Burundi, le Ruanda et le Zaïre
tous trois issus de la colonisation belge. Ses compétences, strictement
économiques, reposent sur quatre agences techniques spécialisées : la Ban
que de Développement des Etats des Grands Lacs établie à Goma (Zaïre) ; un
centre d'énergie à Bukavu (Zaïre) ; et en^fin l'Institut de Recherche Agro
nomique et Zootechnique de Gitega (Burundi). Au sommet de décembre 1981,
les chefs d'Etat de l'UDEAC ont adopté le principe de l'élargissement de
l'Union aux autres pays de la sous-région. C'est ainsi que la C.E.E.A.C.
(Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale) a vu le jour en
1983 : devenue opérationnelle en 1985, elle vise à promouvoir la coopéra
tion entre les Etats membres, par l'établissement d'un tarif extérieur
commun et l'abolition des restrictions commerciales et un fond de dévelop
pement à moyen terme. En plus des pays membres de l'UDEAC (Cameroun, Cen-
trafrique, Congo, Gabon, Guinée équatoriale et Tchad), la Communauté Eco
nomique des Etats de l'Afrique centrale comprend les trois pays de la
CEPGL (Burundi, Ruanda et Zaïre), Sao Tomé et Principe et l'Angola, qui
bénéficie d'un statut d'observateur. La création récente du CICIBA est
venue donner à cette dynamique unificatrice une dimension radicalement
nouvelle, celle de la culture.
Il apparaît donc clairement que si, à première vue, l'Afrique cen
trale peut ressembler à un domaine écartelé, elle possède bel et bien des
héritages historiques proches et une personnalité propre, assez bien ac
cusée.
(23)
II
Problématique de développement
(24)
II 2
L'évolution économique des pays de l'Afrique centrale présente des
caractéristiques fondamentales qu'on trouve dans d'autres Etats africains.
En effet, autant les secteurs de la culture, des idéologies, de la politi
que et même des rapports sociaux semblent ouverts et sort effectivement
ouverts à l'initiative et à la créativité des peuples et des élites, autant
le domaine de l'économie est bloqué par les multiples contraintes structu
relles issues de la colonisation (1). Ce point est capital car la grande
question d'avenir que posent les économies africaines est de savoir si et
à quel terme elles seront capables de rompre avec cet héritage. Car jus
qu'à présent les transformations, qui sont évidentes dans certains cas,
affectent moins la substance que la forme des économies : des ressources
nouvelles sont découvertes et mises en valeur, des plans de développement
sont élaborés : mais la générosité de la nature et le volontarisme des
hommes ne changent rien aux structures.
A. Les héritages : une structure de dépendance et de désarticulation.
A.l. Les particularités historiques de l'Afrique centrale.
A la différence de nombreuses autres parties de l'Afrique, la mise en
valeur de type colonial de l'Afrique centrale fut tardive. En Afrique oc
cidentale par exemple la division internationale du travail spécifique
du colonialisme (production de matières premières par les pays africains,
fourniture des biens industriels, des capitaux et des services par les
pays européens) a commencé relativement tôt : en effet, pour répondre à
la demande pressante de l'Europe occidentale, plusieurs pays se sont lan
cés dans la culture des oléagineux parfois avant l'instauration effective
du colonialisme (le Danxomè dès les années 1830 pour le palmier à huile,
(1) Pour les développements de cette thèse, voir Elikia M'Bokolo "Afrique noire (4) Société et Economie" in Encyclopeadia Universalis, nie ed., vol. 1, pp. 423-431.
(25)
II 3
le Sénégal à partir des années 1860 pour l'arachide) (1). Si l'on
prend l'exemple de l'Afrique du kud, la découverte précoce de fabuleux
gisements miniers (diamant en 1867, or en 1881) a entraîné dès la fin
du XIXe siècle et le début du XXe l'apparition d'un capitalisme spécifi
que dont nous voyons aujourd'hui encore les caractéristiques scandaleuses
et les effets pernicieux (2). Rien de tel n'eut lieu en Afrique centrale
qui, pendant longtemps, exporta principalement des produits de chasse,
de cueillette et de ramassage (bois, caoutchouc, ivoire). Les Allemands
établirent bien au Cameroun quelques plantations, dont le nombre et la
production étaient trop peu importants pour susciter des effets d'entraî
nement. En fait la mise en valeur coloniale moderne commença au Zaïre
(alors Congo belge) peu avant la première guerre mondiale dans le secteur
minier. En A.E.F. et au Cameroun, il faut attendre les lendemains de la
deuxième guerre mondiale pour voir des initiatives durables dans le sec
teur économique : dans ce cas, comme dans celui du Burundi, de la Guinée
équatoriale, du Rtianda, de Safo Tomé et Principe, la conviction que ces
pays ne recelaient pas dans leur sous-sol des richesses minières fut l'une
des causes décisives du manque d'intérêt des Etats et des investisse I/R-s
coloniaux.
Tardive, la mise en valeur coloniale donna; aussi lieu à des méthodes
d'une brutalité sans précédent dont les effets psychologiques n'ont
peut-être pas entièrement disparu. Tous les régimes coloniaux, en Afri
que comme en Amérique et en Asie orientale, ont utilisé la contrainte pour
extraire des richesses ou pour mobiliser la force de travail. Mais, en
Afrique centrale, on alla plus loin. Ce fut ici que fleurit le système
des "compagnies à charte" dans lequel l'Etat colonisateur abandonnait
de jure ou de facto tout ou partie de ses droits régaliens entre les
mains de puissantes compagnies privées. Ce système a été particulièrement
(1) Voir A.G. Hopkins An Economie History of West Africa. Londres, Longman
(2) Apartheid et capitalisme. Textes réunis et présentés par Christine Messiant et Roger Meunier. Paris, François Maspero, 1979.
(26)
II 4
elaboré au Zaïre à l'initiative du roi des Belges, Leopold II, à la
fin du XIXe siècle : mais il fa»it souligner que certaines compagnies
constituées à cette époque, comme la Compagnie du Katanga, sont restées
en activité jusqu'à la décolonisation, souvent, mais pas toujours, au
prix de quelques aménagements juridiques et financiers. Mais l'A.E.F.
aussi connut dans sa majtitre partie (Centrafrique, Congo et Gabon) le
terrible régime des compagnies concessionnaires qui dura jusqu'aux années
1930. Plusieurs études consacrées à la "modernité" en Afrique noire ont
souligné les multiples formes de résistance des sociétés africaines à
l'intrusion de celle-ci : il n'est pas interdit de penser que le rejet,
en certaines régions, des contraintes et des implications de l'économie
moderne et du développement soit une conséquence durable du terrible
régime des compagnies à charte. C'est dire aussi à quel point une saine
politique de développement devrait se soucier, par une éducation appro
priée, de lever les malentendus hérités de l'histoire et de recueillir t
d'adhésion active des populations interésete^ .
En termes sociologiques, cette mise en valeur n'a pas manqué de pro
duire des particularités dont les effets sont aussi de longue durée. Il
y a d'abord la question des acteurs sociaux du développement et, en
particulier, des "entrepreneurs" dont le rôle, souligné naguère dans les
travaux aussi divers que ceux de Max Weber, Joseph S chump et er et de W.W.
Rostow, est présenté aujourd'hui comme déterminant, voire exclusif, par
les organismes financiers internationaux et même par certains Etats. Or,
dans la forme particulière que la mise en valeur coloniale a prise en
Afrique centrale, il n'y eut pas de place pour des "bourgeoisies natio
nales" africaines alors que celles-ci ont pu se constituer en groupes
sociaux avec lesquels il fallait compter dans certains pays d'Afrique
occidentale (Côte d'Ivoire, Ghana et Nigeria) et orientale (Kenya).
Toute l'Afrique centrale se retrouve peu ou prou dans les chiffres dis
ponibles pour le Zaïre où, au moment de l'indépendance, la "bourgeoisie
coloniale" (1% de la population totale) contrôlait 95 % du stock de
(27)
II 5
capital investi, 82% des unités de production, 88% de l'épargne des
particuliers (I). La bourgeoisie noire - plutôt petite et moyenne que
grande bourgeoisie - dut se contenter de positions de refuge à l'ombre
de l'Etat et de la fonction publique. Il n'est donc pas étonnant qu'une
fois l'indépendance politique acquise, les pays d'Afrique centrale, où le
pouvoir était revenu précisément à cette bourgeoisie noire, aient cherché
à faire de l'Etat le principal agent du développement économique. Mais,
contrairement aux idées reçues, ce rôle de l'Etat n'est pas nouveau en
Afrique centrale : il se situe même dans une remarquable continuité avec
la période coloniale. Au Zaïre l'intervention de l'Etat dans l'économie
commença des les débuts mêmes de la colonisation soit indirectement (mo
bilisation de la force de travail, instauration des cultures obligatoires,
etc.) soit directement (création d'entreprises dont le rôle était straté
gique, comme l'OTRACO (2) dans le secteur des transports ; participation
financière dans les entreprises privées). Dans le reste de la sous-région
l'action économique de l'Etat ne commença qu'aux lendemains de la deuxième
guerre mondiale et fut le plus souvent indirecte : ainsi au Cameroun
et en A . E . F . , le F . I . D . E . S . (Fonds d'Investissement et de Développement
Economique et Social des Territoires d'Outre-Mer) finança de nombreux
travaux d'infrastructure. Certes aujourd'hui, l'action économique de 1'
Etat est justifiée par d'autres arguments : il s'agit, par la nationali
sation, de rendre au pays la propriété juridique de ses richesses. Mais
il n'est pas certain que l'idéologie technocratique liée à l'action de
l'Etat soit radicalement nouvelle ; par ailleurs la propriété juridique
a peu d'implication sur le contrôle social des richesses nationales
qui reste entre les mains du petit groupe qui contrôle l'appareil d'Etat.
(1) Jean-Philippe Peemans Diffusion du progrès économique et convergence des prix. Le cas Congo.. Belgique 1900-1960. Louvain, Nauwelaerts, 1968, p . 386.
(2) Office des Transports du Congo devenu ONATRA (Office National des Transports) avec les mêmes attributions et le même pouvoir.
(28)
II 6
A. 2. Typologie : les inégalités de la mise en valeur.
Si des rééquilibrages sont intervenus depuis les années 1960 et 1970,
les inégalités subsistent entre Etats et, au sein de chaque Etat, entre
régions, qui remontent eux aussi au petit siècle colonial (1880-1960).
Inégalités entre Etats.
Ces inégalités apparaissàent clairement dès les années 1930. En 1936,
on estimait les capitaux (publics et privés, cotés ou non en bourse) in
vestis en Afrique subsaharienne à 1 221 686 000 î dont 941 307 000 X
pour l'Afrique britannique et 280 379 000 ^*pour l'Afrique non britanni
que, ce dernier chiffre comprenant les territoires belges, français et
portugais dont l'Afrique centrale (1). Or les capitaux investis en Afri
que belge - c'est-à-dire essentiellement dans l'actuel Zaïre, puisque
le R anda-Urundi était passablement négligé - s'élevaient à 143 337 000r£,
ce qui faisait du Zaïre le pays d'Afrique noire où les Européens avaient
le plus investi après l'Afrique du Sud. En revanche, il n'y avait que
21 260 000 <£ investis dans toute l 'A.E.F. et 18 624 000¿ pour l'ensemble
des deux mandats français, Cameroun et Togo. Trente ans plus tard, au
moment de l'indépendance, le volume des capitaux investis dans la sous-
région avait sensiblement augmenté mais les inégalités persistaient.
Le Zaïre apparaissait indiscutablement comme le pays le plus avancé
dans la voie de l'industrialisation, sinon du développement. L'industrie,
fondée d'abord sur le secteur minier, connut une diversification accrue
avec l'apparition de branches de consommation de plus en plus dynamiques
à tel point que, dans la dernière décennie de la colonisation, la part
de l'industrie locale dans les biens industriels consommés s'éleva de 30%
(1) Herbert S. Franke1 Capital Investment in Africa. Its Course and Effects. New York, Howard Fertig, 1969 (1ère éd. 1938) pp. 158-9.
(29)
II 7
(1950) à 45% (1958/1960). Les mutations sociales accompagnant cette
phase de l'industrialisation du Zaïre furent spectaculaires. Il y eut
d'abord un exode rural massif, portant la population "extra-coutumière"
(autrement dit celle des grandes et moyennes villes) de 8,8% en 1938 à
14,8% en 1945 et 23% à la veille de l'indépendance, ce taux étant le plus
élevé de l'Afrique noire, Afrique du Sud non comprise. Le capitalisme colo
nial atteignit au Zaïre un degré de concentration sans précédent puisque,
en 1958 comme en 1932, quatre groupes financiers belges contrôlaient les
3/4 du capital investi, dont 60% revenaient au groupe le plus important,
celui de la Société Générale (1). Encouragés par l'Etat colonial, qui
prêcha par l'exemple, ces firmes eurent une politique sociale audacieuse :
hausse des salaires ouvriers, avantages multiples aux "classes moyennes"
africaines. A tel point que, au sein des catégories ouvrières et intermé
diaires, la période 1945-1960 apparaît comme "le bon temps", si l'on en
juge du moins par la vision qu'elles en ont aujourd'hui. Par conséquent,
lorsqu'il est question de "développement", certains groupes sociaux l'en
visagent purement et simplement comme un retour aux tendances et aux pra
tiques de la dernière décennie coloniale.
Les autres économies de la sous-région répondaient assez exactement â
l'image que donnent du sous-développement les études qui décrivent celui-
ci en terme de dualisme. Le secteur "traditionnel", largement prédominant,
et correspondant à l'agriculture, fournissait pour l'essentiel des biens
de subsistance. Cette situation était particulièrement flagrante dans les
territoires de faible dimension et dans les pays enclavés, tels que le
Burundi, la Centrafrique, la Guinée équatoriale, le Ruanda, Sao Tomé et
Principe, ainsi que le Tchad. Dans ces pays, les pratiques coloniale» ont
poussé les paysans à produire pour les marchés urbains et, surtout pour
les marchés extérieurs. Le café fut, dans presque tous ces pays, le produit
(1) Les trois autres groupes étaient la Cominière (Compagnie Minière et Forestière du Congo), Brufina et le groupe Empain.
(30)
II 8
roi de ces exportations. Les pays côtiers disposaient - et disposent
toujours - d'avantages certains qui ont alors servi à amorcer le proces
sus d'industrialisation. Le Cameroun figurait en bonne place dans ce
groupe : il disposait déjà d'une agriculture d'exportation dynamique domi
née par le. café (50% de la valeur de l'ensemble des exportations du pays),
le cacao et les bananes (20% pour les deux réunis) mais fournissait aussi
de nombreux autres produits, bois, coton, caoutchouc, huile et noix de
palme, arachide et tabac (17,6%). Le secteur minier était apparu avec
principalement l'ëtain, le titane et l'or. Quant à l'industrie, elle
reposait principalement sur le complexe électrique et métallurgique d'Edéa
où la société Alucam (Aluminium du Cameroun) transformait en aliminium
de l'alumine envoyée de France : cette industrie naissante dépendait
étroitement du pays colonisateur qui contrôlait la production au plan fi
nancier (82% des investissements réalisés par la société française Péchi-
ney-Ugine) et technique (fourniture de la matière première). Au Congo et
au Gabon les rares activités industrielles étaient liées aux ports (Pointe-
Noire et Port Gentil) et aux chemins de fer (Congo-Océan et Comilog).
Inégalités entre régions.
Les inégalités actuelles entre régions ont en partie des causes natu
relles et des causes résultant de choix de politique économique. Mais elles
découlent aussi des modalités de la mise en valeur coloniale, principale
ment dans les territoires de grandes dimensions. Ainsi, au Tchad, la mise
en valeur se fit dans la partie sud où elle pesa très lourdement sur
les paysans : le nord et le centre en revanche conservaient une écono
mie traditionnelle fondée sur l'élevage bovin et ovin. Le scénario était
identique au Cameroun avec schématiquement un clivage entre ur "nord"
traditionnel et un "sud" engagé dans l'économie moderne : cependant des
études récentes poussées ont montré l'existence, dans ce sud camerounais,
d'une grande diversité des formations sociales en fonction de l'organisa
tion antérieure à la colonisation et des formes particulières d'intro-
(31)
II 9
auction des rapports économiques modernes : ainsi il y avait peu de
choses en commun entre la petite paysannerie égalitaire bulu produc
trice de cacao, les Bassa appauvris par un demi-siècle de colonisation
allemande et française et par l'émigration des jeunes vers les villes,
les planteurs bamiléké immigrés dans la région de Mungo et les populations
douala regroupant une élite marchande et administrative de tradition
ancienne et un prolétariat et sous-prolétariat misérable (1).
On pourrait multiplier à l'envi > ces exemples dont on verra, le mo
ment venu, l'actualité et la pesanteur pour l'avenir (2). L'essentiel pour
le moment est de noter que ces inégalités économiques se sont accompagnées
de déséquilibres sociaux graves, notamment en matière d'infrastructures
scolaires et que toutes ces disparités ont généré des pratiques et des
revendications régionalistes, tribalistes, ethnicistes susceptibles de
compromettre de fragiles unités nationales. C'est donc à la lumière de
ces inégalités qu'il faut analyser les politiques actuelles de rééquili
brage régional adoptées par certains Etats.
B. Les contraintes politiques.
Quoique la nature de ce rapport n'ait pas véritablement donné lieu
à des théories satisfaisantes, il est évident que le politique et l'éco
nomique entretiennent des relations étroites, mais complexes, dans la
phase décisive et plus ou moins durable du décollage. Karl Marx déjà,
dans un chapitre justement célèbre du Capital.a montré à quel point les
lois et mesures promulguées par le gouvernement britannique au cours du
XVIIIe siècle ont très largement contribué à l'avènement du capitalisme
(1) Joseph, Richard Le mouvement nationaliste au Cameroun. Les origines sociales de l'U.P.C. Paris, Karthala, 1986, pp. 141-184.
(2) Voir ci-dessous, II, D.
(32)
II 10
et à l'essor de l'industrie au Royaume-Uni qui a été le premier pays
a s'industrialiser (1). Au siècle dernier, réfléchissant aux conditions
dans lesquelles une nation non encore industrialisée comme l'Allemagne
pourrait rattraper rapidement son retard sur l'Angleterre, l'économiste
Friedrich List insista sur le rôle décisif de l'Etat (2). Les exemples
plus tardifs et aussi divers que ceux de la Russie tsariste, du Japon du
Meiji et de l'URSS - pour s'en tenir aux expériences achevées d'indus
trialisation - confirment tous la nécessité et le bien-fondé, dans cer
taines phases, de l'action de l'Etat.
Or c'est précisément dans une phase qui sollicite au premier chef
l'Etat que se trouvent aujourd'hui les pays africains. C'est sans doute
ainsi qu'il faut entendre la phrase célèbre de Kwame Nkrumah aux Ghané
ens : "Prenez le pouvoir politique, le reste suivra". Seulement, dans le
contexte historique africain, l'Etat avait déjà initié une action de mise
en valeur plus ou moins cohérente et continue sous la colonisation : cette
action, liée à la domination étrangère, avait donné de l'Etat une image
particulièrement autoritaire et arbitraire contre laquelle se sont pré
cisément insurgés les peuples africains. Dans la mesure où toute politi
que de développement visant à une efficacité relativement rapide suppose
une mobilisation exceptionnelle des ressources matérielles et humaines,
les Etats africains actuels ont à résoudre le délicat problème de savoir
jusqu'à quel point ils pourraient reprendre des techniques de mobilisa
tion éprouvég$ sous la colonisation, mais dans une perspective et une
orientation différentes : il ne s'agirait plus d'extorquer des surplus
pour le seul bénéfice des économies des puissances colonisatrices ; on
viserait au contraire, par le développement économique, ot, consolider
l'unité nationale, Cv fonder l'indépendance sur des bases matérielles
(1) Marx, K. Le Capital, Livre premier, Huitième section ("L'accumulation primitive"). Paris, Editions sociales, Tome 3, 1950, pp. 153-215.
(2) Schumpeter, Joseph A History of Economie Analysis. New York, Oxford University Press, 1954, pp. 504-506.
(33)
II 11
sûres et à* renforcer l'Etat. Cependant l'Etat n'est pas neutre, tota
lement détaché des clivages et des conflits qui agitent la société.
Aussi seuls des systèmes démocratiques, fondant d'une manière précise
la participation et le contrôle des citoyens, semblent en mesure d'obte
nir la mobilisation durable des hommes qui conditionne le développements
Autrement , cette mobilisation semblerait servir d'abord à produire
des richesses captées et détournées au seul profit des groupes sociaux
qui occupent l'appareil d'Etat.
Mais l'inévitable implication du politique dans l'économique, au cours
de la phase actuelle, pose un autre problème : celui de la capacité des
régimes â mener des politiques de développement qui, pour être efficaces,
doivent bénéficier de la durée. C'est tout le problème de l'instabilité
des régimes politiques africains dont certains auteurs ont fait un phéno
mène de structure (1) alors qu'il s'agit sans doute d'une situation de
conjoncture, liée aux attentes multiples suscitées par la décolonisation,
à la formation des classes sociales, à l'incertitude des équilibres géo
politiques, à la fragilité des structures nationales, etc.
Dans le cas de l'Afrique centrale, presque tous les pays ont eu à
connaître une instabilité plus ou moins grande, susceptible de compromettre
la mise en oeuvre de politiques de développement (2). Schématiquement, on
peut distinguer quatre cas de figure :
- il y a d'abord des situations de crise chronique dans lesquelles
non seulement les régimes succejsifs mais même l'Etat sont mis en
question, ce qui ne laisse pour ainsi dire aucune place à la défini
tion et à l'application d'une véritable politique de développement:
tel est le cas du Tchad ;
(1) Voir par exemple Schatzberg, Michael G. Politics and Class in Zaire. Bureaucracy, Business and Beer in Ltsala. New York, Africana Publishing Cy., 1980.
(2) Les limites de cette étude ne permettent pas d'évoquer la question, beaucoup trop complexe, de la stabilité ou de l'instabilité des personnels dirigeants au sein des régimes successifs.
(34)
II 12
- il y a ensuite des Etats qui ont été soumis à des régimes de dic
tature et d'arbitraire relativement longs au cours desquels les
pouvoirs politiques non seulement n'ont pas développé ni même géré
les économies nationales, mais ont instauré des systèmes prédateurs
dont les effets catastrophiques annihilent les efforts actuels ;
on y rangerait la Centrafrique après la longue dictature de Jean
Bedel Bokassa (1966-1979) et la Guinée équatoriale après celle de
Macias Nguema (1968-1979) ;
- la majorité des Etats de la sous-région se rangent dans la troisième
catégorie : les premières années des indépendances ont été très
difficiles, au point d'instaurer dans certains cas un état de crise
larvée jusqu'aux années 1970, depuis lesquelles une accalmie semble
instaurée (Burundi, Congo, Ruanda, Zaïre) ;
- le dernier groupe (Cameroun, Gabon, Sao Tomé et Principe) correspond
à une situation d'assez durable stabilité (1).
C. Les politiques de développement.
Presque tous les Etats de la sous-région ont des plans de développe
ment, de durée variable. Mais la réalisation de ces plans, qui sont tous
indicatifs, souffre non seulement des structures de dépendance des écono
mies nationales, mais aussi de la conjoncture de crise ; à tel point que
ce qui semble le plus opérant, ce sont moins ces plans que les mesures
d'urgence adoptées ici et là et les plans d'ajustement structurel imposés
ou recommandés par les grands organismes financiers internationaux. Plu
tôt qu'un panorama général de la sous-région, il faut ici un examen ra
il) Le Cameroun a vécu, sous Ahmadou Ahidjo, dans un régime d'une exceptionnelle longévité (1960-1982). L'effervescence qui a accompagné sa succession n'a pas remis en cause la stabilité des institutions et de l'Etat.
(35)
II 13
pide de chaque cas particulier.
Le Burundi a aiepté un système de plans quinquennaux qui paraissent
avoir été trop ambitieux et dont les objectifs n'ont jamais été atteints,
notamment faute de moyens financiers appropriés. la. quatrième plan quin
quennal (1983-1987) prévoit un volume de dépenses de 107 000 M.(l) de
francs burundais, soit deux fois plus que le troisième plan. Mais le
démarrage de ce plan a correspondu avec une grave crise financière : en
1983, le franc burundais fut dévalué de 23% et rattaché, non plus au
dollar des Etats-Unis d'Amérique, mais au D.T.S. du F.M.I.. Le budget
lui-même fut comprimé à 20 000 M. de francs. L'Etat dut donc emprunter
à l'étranger pour financer le plan, ce qui alourdissait d'autant le ser
vice de la dette extérieure : l'apport extérieur doit être de 56%, le
reste venant des ressources propres du Burundi. Ce quatrième plan met da
vantage l'accent sur les secteurs productifs : agriculture (22,8% des
dépenses), industrie (18,2%), le secteur énergétique et minier (12,7%) et
les services (14,6%).
La planification fonctionne au Cameroun depuis l'indépendance. A par
tir du milieu des années 1970, une situation nouvelle existe grâce à la
mise en exploitation du pétrole (0,6 M de tonnes en 1978 ; 9 M T.
en 1985). Cette situation a des effets sur le plan. Ainsi le quatrième
plan quinquennal (1976-1981 )pi* évoyait des investissements de l'ordre de
725 230 M de francs CFA, avec un financement extérieur supérieur à 50%.
Dans le cadre du cinquième P .Q .. (1981-1986), les investissements
prévus se sont élevés à 2 300 000 M de francs CFA : le financement devrait
venirr pour 40% du secteur privé tandis que la moitié des 60% laissés
au secteur public proviendrait des ressources locales. Ce plan prévoyait
aussi un taux de croissance annuelle du P.W.B. de 7%. La part de chaque
secteur d'activité évolue aussi. Dans le quatrième plan, le secteur
industriel et minier recevait 33% des investissements ; les transports, 20%
(1) Principales abréviations : M : millions, T : tonnes ; P.Q. : plan quinquennal.
(36)
II 14
l'agriculture et l'élevage, 1 4% ; le reste se répartissent entre les
divers secteurs sociaux (2% pour la santé ; 5% pour l'éducation ; 12,5%
pour l'aménagement urbain). Dans le cadre du cinquième plan en revanche
l'agriculture et le secteur des transports reçoivent chacun plus de 20%/
Jusqu'à une époque récente les plans ccuirafricains ©nt vu leur réa
lisation handicapée par plusieurs facteurs. Le régime de Jean Bedel
Bokassa avait adopté trois plans, un quadriennal (1967-1970) et deux
quinquennaux (1971-1975 et 1976-1980). Mais en termes réels, le PNB était
en 1975 inférieur à son niveau de 1970. Parmi les facteurs négatifs, il
y eut les gaspillages propres à ce régime, mais aussi les effets de la
guerre du Tchad (batailles entre groupes tchadiens rivaux dans le nord
de la Centrafrique ; présence de quelque 30 000 réfugiés tchadiens). La
chute de Bokassa en 1979 a entraîné l'abandon du plan dont 17% seulement
des investissements prévus avaient été réalisés en trois ans. En 1980, sur
les recommandations du F.M.I., un plan d'austérité a été adopté en vue
de réduire le déficit budgétaire et de concentrer les investissements
dans le secteur agricole. Le plan quadriennal 1983-1986 porte aussi les
marques visibles des propositions du F.M.I., avec une attention particu
lière pour l'agriculture et les transports (31 300 M de francs CFA pour
les deux) .
Au Congo, les années 1970 ont été celles du lancement de la production
pétrolière qui n'a pas réalisé tous les espoirs qu'on avait mis en elle.
Le plan quinquennal 1982-1986 était très ambitieux prévoyant un taux de
croissance annuelle de 10% et des investissements de l'ordre de 1 105 000 M
de francs CFA. Le plan prévoyait précisément de réduire la trop grande
dépendance de l'économie à l'égard du pétrole, en utilisant les revenus
pétroliers pour développer les infrastructures (48% des investissements
pour les transports fluviaux et routiers et les barrages) et l'agriculture
(recentrage de la politique agricole autour de "villages centres" équi
pés de nombreux services et destinés à maintenir dans les villages la
(37)
II 15
population rurale tout en modernisant l'agriculture) ; il s'agissait
aussi de réhabiliter le secteur industriel d'Etat, d'accroître les
investissements sociaux en matière d'éducation et de santé et de réduire
les inégalités régionales. La réalisation du plan s'est trouvée compro
mise par une mauvaise conjoncture, évidente dès 1984 : baisse des prix
des produits pétroliers, contraction des exportations. Soucieux de ne pas
se soumettre au F.M.I. et à la Banque Mondiale, le Comité Central du Parti
Congolais du Travail a décidé de sa propre initiative en 1985 d'adopter
un P.A.S. (Plan d'ajustement structurel) dont la philosophie et l'écono
mie générale puisent cependant beaucoup dans la stratégie actuelle de
ces deux organismes. Etalé sur les années 1985-1987 et susceptible d'être
prolongé, le P.A.S. comporte vinot-neuf mesures destinées à comprimer
les dépenses budgétaires, à remettre de l'ordre dans les finances publi
ques, à réformer le secteur d'Etat, enfin à améliorer la collecte et la
gestion des ressources publiques. Du coup la plupart des projets prévus
dans le plan ont été abandonnés ou reportés, sauf les aménagements fer
roviaires, la construction de la route du nord et les projets d'électri-
fication.
La situation du Gabon n'est pas sans évoquer celle du Congo, à ceci
près que les ressources pétrolières, elles aussi d'exploitation récente,
sont plus abondantes et, surtout, que le pays peut compter en outre sur
le manganèse et l'uranium. A examiner l'évolution des plans de développe
ment, on constate une ambition de plus en plus grande et la mobilisation
de ressources financières croissantes : 90 000 M de francs CFA pour le
premier P.Q. (1966-1970) ; 150 000 M pour le second (1971-1975) ; 1 269 00C
enfin pour le troisième (1976-1980). Les secteurs privilégiés ont été les
mêmes d'un plan à l'autre : transports ferroviaires, portuaires et rou
tiers (un tiers des investissements du troisième plan) et les infrastruc
tures sociales (éducation, logement et santé : 18% des investissements du
plan 1976-1980). Comme au Congo, les risques d'une trop grande dépendance
à l'égard du pétrole sont perçus et régulièrement réaffirmés. Le plan
(38)
II 16
intérimaire de trois ans (1980-1982, 879 000 M de francs CFA d'investis
sements) et le plan 1984-1988 (1 230 000 M de francs CFA d'investissements)
visent à atténuer ces risques : si les transports restent privilégiés
(50% des investissements, destinés en particulier au Transgabonais), une
attention beaucoup plus grande est accordée au monde rural (20% des in
vestissements) tandis que l'éducation et les services sociaux continuent
de recevoir la même part (17%).
Le Ruanda n'est venu que tardivement au système de la planification ¿
Le premier plan date seulement de 1977. Sur la période 1977-1981, l'ambi
tion était d'investir 600 M de dollars U.S., dont 70% dev aient être
fournis par des Etats et des institutions financières du Nord (Belgique,
France, République Fédérale d'Allemagne) et du Sud (Egypte, Libye, Répu
blique Populaire de Chine). Les pays voisins ont aussi été sollicités :
ainsi dans le cadre de la CEPGL, une banque de développement a vu le jour
en 1980, avec son siège à Goma, dans l'est du Zaïre. Le principal objectif
du plan était la construction du barrage de Kitimba, destiné à rendre
le Ruanda entièrement indépendant du Zaïre pour l'électricité. Le troisiè
me plan (1982-1986) vise principalement à assurer l'autosuffisance ali
mentaire grâce à un accroissement annuel de 3,3% de la production agri
cole : compte tenu de la très forte croissance démographique (3% par an
dans les prévisions pour 1982-1986), un effort est prévu dans le secteur
industriel aux fins d'étendre la transformation des produits primaires
locaux. Malheureusement, en 1984, la sécheresse a compromis les récoltes
et acculé le pays à importer des vivres à des coûts excessifs (difficul
tés des transports et insécurité en Ouganda). Un programme baptisé
"Rigueur et austérité" a donc été adopté en avril 1984 et maintenu en
1985 et sans doute pour les années ultérieures : la priorité est donnée
aux seuls projets qui touchent à l'agriculture, à l'eau, à l'énergie
et aux infrastructures.
Au Tchad, les plans successifs ont su être modestes et sélectifs. Dès
le premier P.Q. (1966-1970, doté de 47 000 M de francs CFA), l'accent
(39)
II 17
avait été mis sur troisàecteurs : la diversification et l'augmentation,
grâce à des gains de productivité, de la production agricole ; l'améliora
tion du système de transports ; - le développement des ressources humaines.
Il était précisé qu'on éviterait absolument le saupoudrage : le dévelop
pement industriel et éducatif serait concentré à N'Djamena, Sarh et Moun-
dou, tandis que l'effort agricole se limiterait à un petit nombre de
régions et de produits (coton, sucre et bétail). Ces orientations ont été
maintenues depuis. Mais le Tchad a toujours souffert du manque de res
sources financières qui l'a poussé à compter beaucoup trop sur l'aide
extérieure (70% pour le premier plan ; 75% aujourd'hui). On adopta ensuite
un plan de dix ans, abandonné en 1978 et remplacé par un plan d'urgence
(1978-1981). Doté d'un budget d'investissement de 226 800 M de francs CFA,
dont 75% à trouver à l'étranger, ce plan n'a pu être réalisé faute de
moyens financiers. Depuis 19£2 Un plan de reconstruction est en cours
qui privilégie l'agriculture, les transports, la santé, d'éducation et
l'administration. Mais nulle part ailleurs l'économique ne révèle autant
ses rapports multiples et complexes avec le politique qu'au Tchad, où
toutes les perspectives de développement sont soumises au règlement
des enjeux politiques et militaires en cours.
S'ils n'ont pas élaboré de plan, les trois autres Etats de la sous-
région ont une politique économique plus ou moins ambitieuse et cohérente.
Depuis 1979, date du renversement du dictateur Macias Nguema en Guinée
Equatoriale, plusieurs programmes de développement sont en oeuvre, qui
s'appuient tous massivement sur l'aide étrangère, surtout depuis la con
férence internationale pour l'aide à la Guinée réunie à Genève en avril
1982 : une aide d'urgence de 140 M de dollars U.S. y a été décidée tandis
que des projets très spécifiques reçoivent des aides diverses (France,
CEE, République Populaire de Chine, Espagne, etc...). L'aide étrangère
apparaît encore plus décisive à Sao Tomé et Principe qui bénéficie des
apports dé la CEE, de la BADEA (Banque Arabe pour le Développement Eco
nomique de l'Afrique) et de plusieurs Etats africains (Angola, Libye)
ou non (URSS, Portugal, France). Comme la Guinée Equatoriale qui a obtenu
(40)
II 18
d'y., entrer en 1985, Sao Tomé et Principe est le deuxième Etat non
francophone à demander l'adhésion à la zone franc.
Le cas du Zaïre est naturellement différent, compte tenu de l'immen
sité du pays, de ses ressources, du niveau déjà atteint dans la mise en
valeur de celles-ci. Il existe un service du plan, au statut variable,
parfois simple organisme relevant de la Présidence de la République, par
fois véritable ministère. Ce service a néanmoins affirmé à plusieurs re
prises la philosophie économique du régime instauré en 1965 (développe
ment dans le cadre d'une économie mixte) et défini de bonne date trois
secteurs prioritaires (l'agriculture, élevée au rang de "priorité des
priorités" dès 1977 ; les transports ; et les petites et moyennes entre
prises). Il y eut ensuite un programme de relance agricole (1978-1980)
destiné à réaliser 1'autosuffisance alimentaire et à améliorer les condi
tions de vie des populations rurales. A la mime époque (1977) on élabora
un plan de redressement économique qui comptait sur une importante aide
étrangère car le Zaïre avait souffert depuis 1975 environ de la chute dra
matique des cours du cuivre, sa principale exportation, et des retombées
des guerres de l'indépendance en Angola. Ce plan reçut bientôt le nom de
"Plan Mobutu". Mais les bailleurs de fonds sollicités (Banque Mondiale,
CEE et FMI principalement) posèrent de sévères conditions à l'octroi de
leur aide, tant au plan politique (amnistie et démocratisation) que dans
le domaine économique (stricte remise en ordre de la gestion de l'Etat ;
contrôle étroit de nombreux services stratégiques par des experts étran
gers ; stabilisation économique et financière). A ces conditions, ils ont
octroyé un crédit de 1455 M de zaïres, soit 30% des investissements pro
grammés dans le cadre du "plan Mobutu" et destinés à quatre secteurs
clés (agriculture, transports, mines et énergie). Il est trop tôt pour
juger de la réalisation de ce plan auquel aucun terme précis n'a d'ail
leurs été fixé. Une chose est certaine : de grands projets ont vu le
jour et ont été menés à bien comme, en particulier, l'aménagement hydro
électrique du site d'Inga et la construction de la ligne à haute tension
Ingcc-Shaba (1820 km) ; l'érection à Kinshasa de la "cité de la voix du
(41)
II 19
Zaïre" et du "World Trade Center" et à Kisangani d'un luxueux aéroport ;
ou encore la construction à Maluku d'une coûteuse usine sidérurgique
(250 millions de dolías US) qui ne fonctionne plus ... Si, en termes
économiques le bien fondé de ces projets et de ces réalisations est
discuté, en termes politiques leur résultat est indiscutable puisqu'ils
ont consolidé et renforcé la classe dirigeante non seulement dans ses
relations avec le reste de la société zaïroise, mais aussi et surtout
dans son pouvoir et sa capacité de négociation avec les sociétés multi
nationales, les partenaires étrangers et les organismes internationaux.
D. Bilan actuel des économies.
Le Zaïre n'est qu'un cas, peut-être le plus spectaculaire,, parmi
d'autres. Il ne faut donc pas, en examinant les résultats des stratégies
de développement, s'en tenir à la seule sphère de l'économie. Et cela
surtout quand on se rend compte que dans cette sphère les résultats pa
raissent bien maigres.
Certes, dans les quinze dernières années, la sous-région a enregistré
des transformations positives indiscutables. Elles touchent d'abord à
l'économie. Il s'agit, pour l'essentiel, de l'apparition d'un secteur mi
nier et, en particulier, pétrolier dans certains pays dont l'économie
jusqu'alors reposait sur l'agriculture : il faut ranger dans ce groupe
le Congo et le Gabon, précédemment exportateurs de bois essentiellement,
et le Cameroun dont l'économie agricole reposait sur un judicieux équi
libre entre cultures vivrières et cultures d'exportation . L'exploitation
du pétrole a donné aux pouvoirs publics des moyens financiers plus im
portants et, par conséquent, des ambitions plus grandes, dont l'examen
des plans de développement a donné un exemple ; quoique cette donnée quan
titative ne soit pas très significative, le PNB par habitant s'en est
trouvé sensiblement accru, atteignant en 1983 4 250 dollarsU.S. au Gabon
(42)
II 20
(2e pays africain derrière la Libye), l 230 au Congo et 800 au Cameroun.
Dans le domaine social, les changements ne sont pas moindres et ouvrent
des perspectives multiples quant à l'avenir. Il s'agit d'abord de l'accé
lération de la croissance urbaine (voir Tableau III, page suivante). Ce
phénomène est bien sûr général en Afrique, où la proportion des citadins
est passé ?-de 16,3% en 1963 à 27,4% en 1980 pour atteindre probablement
40 à 45% en 2000 (1): cela donne des taux de croissance annuelle de 5,3%
pour les années 1960-1970 ; 5,2% pour la décennie 1970 ; 5,3% pour les
années 1980 ; 4,6 à 5% pour les années 1990. Ces tendances générales sont
particulièrement accentuées en Afrique centrale, devenue la deuxième sous-
région urbanisée de l'Afrique avec 34,5% de population citadine au début
des années 1980, juste derrière l'Afrique du Vord (43%), mais assez loin
devant l'Afrique occidentale (22,3%), orientale (22,6%) et australe
(22,4%). Ces chiffres sont à mettre en rapport avec les transformations
des structures socio-professionnelles (voir Tableau III, page suivante).
On constate une diminution réelle de la population paysanne qui atteignait
en moyenne 80 à 90% au début des années 1960 : cette chute est même dra
matique dans certains pays (Congo et Sao Tomé et Principe, mais aussi
Gabon, Zaïre), car il faut bien tenir compte de ce qu'elle n'est pas
compensée par des hausses de productivité. Parallèlement, l'augmentation,
parfois spectaculaire (Congo, Sao Tomé et Principe, Zaïre et Gabon) du
secteur tertiaire atteste du poids considérable de la fonction publique,
lié au nécessaire développement de l'Etat, mais aussi au système de
clientèle. Il est remarquable, en revanche, que le secteur secondaire
soit partout aussi faible : encore faut-il ajouter que, là où il atteint
une proportion significative, il comprend les travailleurs du secteur
énergétique et minier plutôt que ceux de l'industrie de transformation.
(1) 25 Years of Service to African Development and Integration. United Nations, s.d., p. 23.
(43)
II 21
TABLEAU III : Indicateurs des changements sociaux (année de référence
1985 sauf indication contraire)
BURUNDI
CAMEROUN
CENTRAFRIQUE
CONGO
GABON
GUINEE EQUATORIALE
RUANDA
SAO TOME et PRINCIPE
TCHAD
ZAIRE
Citations
%
11
37
37
46
36
54
5
33
19
38
Population Active
en 1000
2.480
3.635
487 (1975)
380 (1975
2.700 (1978)
30
13.000 (1975)
% Pop.
50,6
36,5
47
50
55
35
40
Réparti
I
93,75
77
80
41
70
91
53
72
on par
II
1,5
9
21
15
5
12
10
secteur d'activité
1 m (1)
1
4
III (2)
3,8
10
33
15
1 3
35
18
Sources. ILO Labour Force Estimates and Projections, 1950-2000
Africa South Of The Sahara Londres, Europa Ltd, 1987
Légende : I = agriculture, élevage, forêt et pêche.
II = industrie, énergie et mines
III (1) = commerce, notamment traditionnel
III (2) = administration et services
(44)
II 22
Ces indications laissent entrevoir un certain nombre de contreperfor-
mances et de blocages plus ou moins graves. Il est clair d'abord que la
mutation fondamentale, qui consiste à briser les structures de dépendance
issues de la colonisation, n'a pas encore eu lieu. On peut même, sans para
doxe, considérer que cette dépendance se renforce. Aujourd'hui comme hier,
les économiebd'Afrique centrale sont essentiellement exportatrices de ma
tières premières en direction des Etats développés. De la même manière, un
très petit nombre de produits représente la quasi-totalité des exporta
tions (voir Tableau IV page suivante). Le cas des pays miniers est même
catastrophique : ainsi au Congo et au Gabon, comme au Zaïre, les quinze
ou vingt dernières années se caractérisent par une diminution dramatique
de la production agricole, ce qui implique des importations massives de
produits vivriers. Ainsi le Gabon importe 85% de sa consommation courante
et le Zaïre, naguère exportateur de produits agricoles, importe pour 17%
des produits alimentaires.
Si l'agriculture s'effondre, l'industrie a beaucoup de mal à démarrer.
Dans beaucoup de pays, elle est à peu près inexistante : c'est le cas du
Burundi, de la Centrafrique, de la Guinée equatoriale, du Ruanda, de Sao
Tomé et Principe et du Tchad. Ailleurs, l'industrie est présente mais elle
n'est pas intégrée. Le plus souvent il s'agit de procéder à une première
transformation des produits locaux. L'industrie textile et les brasseries
constituent une tradition relativement ancienne au Zaïre, plus récente
au Congo et au Cameroun. Le processus d'industrialisation par substitution
aux importations, qui avait été amorcé pendant les années I960 et 1970,
s'est trouvé compromis par la conjoncture actuelle et par* les différentes
politiques d'ajustement, de rigueur ou de stabilisation.
La dette extérieure représente un autre élément de fragilité et un as
pect important de la dépendance. L'endettement extérieur du Zaïre (4500 M
de dollars U.S.) est l'un des plus élevés du continent. Mais les proportions
atteintes au Cameroun (2400 M de dollars U.S. en 1985, contre 820 M en 1977)
et au Congo (1800 M de dollars U.S.) ne sont pas moins inquiétantes : au
Cameroun, grâce aux revenus pétroliers, dont on mesure désormais la fragilit
le service de la dette ne repré-
(45)
II 23
TABLEAU IV : Principaux produits d'exportation
BURUNDI
CAMEROUN
CENTRAFRIQUE
CONGO
GABON
GUINEE EQUATORIALE
RUANDA
SÀO TOME et PRINCIPE
TCHAD
ZAIRE
Produits bruts
Café
Cacao, café, banane
Pétrole
Café
Bois
Diamant
Bois
Pétrole
Bois
Pétrole
Manganèse
Cacao
Café
Cacao
Coton
Minerais. (dont cuivre)
Produits industriels
Café et oléagineux
Part dans les exportations (%) 1984
84
43
38
27
29.
25
4,5
90
8
81
5
71
70 à 90
90
75 (42)
15
7
Sources : U.N. Trade Statistics (annuel)
Africa South of the Sahara 1987 Londres, Europa Publications LTD, 1987
(46)
II 24
sente que 10% des recettes extérieures du pays. Mais au Congo
il correspond à 36% des dépenses budgétaires tandis qu'au Gabon il
représente 38% de la production nationale (1).
Quant à l'équilibre de la sous-région, on constate de très fortes
disparités. D'une part, au plan des échanges, chacun des Etats est en
relations principalement avec les pays développés : ainsi le commerce
sous-régional inter-Etats est à peu près nul. A l'intérieur de chaque
Etat, les disparités régionales restent très fortes et s'observent à
travers tous les indicateurs (taux d'urbanisation ; infrastructures sco
laires, culturelles et hospitalières ; investissements ; structures
des activités et de la production) (2). Entre les Etats enfin, les dé
séquilibres sont flagrants puisque un Etat sur deux, dans la sous-région^
figure parmi ce qu'il est convenu d'appeler les pays les moins avancés
(P.M.A.).
(1) Chiffres de 1984.
(2) Voir l'étude stimulante de Tiker-Tiker "Inégal développement des régions zaïroises. Essai d'une analyse de la dimension d'intégration économique au Zaïre", Cahiers Economiques et Sociaux (Université de Kinshasa), XX (1982), 1-2, pp. 71-119.
(47)
II 25
TABLEAU V - Les P.M.A. d'Afrique Centrale
(Année de référence 1980, sauf indications contraires)
Population (millions)
Densité (hab./km2)
Croissance annuelle moyenne (1970-1980) population
Paysannerie (% de la population active)
PIB/habitant ($)
Croissance annuelle du PIB
1960-1970
1970-1980
Consommation d'énergie (kg/hab)
Médecins par 100 000 h.
Inscrits dans le secondaire (% de la classe d'âge)
BURUNDI
4,4
157
2,1%
95
146
- 1,6%
1,2%
12
2
3
CENTRAFRIQUE
C\J
3
2,2%
88
248
- 0,9%
- 1,2%
44
5,7
9
1
GUINEE E.
0,37
13,2
2,2
400
RUANDA
4,7
177
2,9%
95
188
1,5%
1,1%
17
2,7
2
TCHAD
4,4
3
2,2
84
188
- 1,4% 1
' - 1,1% i
22
2,4
1
3 !
Source : Afrique Contemporaine n° 119, janvier-février 1982, p. 2
et L'Etat du Monde 1982, Paris, François Maspero, 1982
Note : Faute de chiffres fiables, la situation de la Guinée Equatoriale peut prêter à discussion.
(48)
II 26
E. Des perspectives plutôt bonnes.
Malgré ces déséquilibres et dans le cadre d'une réflexion tournée
vers l'action, les perspectives à moyen terme sont plutôt bonnes en ce qui
concerne l'Afrique centrale. Les atouts, nombreux, sont de structure et
attendent d'être exploités et maîtrisés ; les handicaps, au contraire,
sont" »>ëut-être de conjoncture.
E.1. Les atouts.
Il y a plus de quarante ans, J.P. Harroy écrivait un beau livre,
Afrique terre qui meurt, qui élevait des mises en garde contre les risques
de dégradation du milieu naturel. Le spectacle qu'offrent aujourd'hui des
régions aussi différentes que le Sahel, les hautes terres d'Afrique orien
tale et, particulièrement, de Tanzanie, les pays riverains du Kalahari,
confirme tout le bien-fondé de ce cri d'alarme. De ce point de vue, l'Afri
que centrale paraît plutôt privilégiée. Certes deux pays sont à problèmes.
Le Tchad, en tant que pays sahélien, participe de tous les risques éco
logiques - sécheresses, désertification - qui menacent cette partie de
l'Afrique. Quant au Ruanda, il connaît depuis un siècle des crises de sub
sistance périodiques, provoquées par des sécheresses localisées, dont
celle de 1984 a été le dernier exemple. Cependant, en dehors de ces deux
cas, la nature est plutôt généreuse en Afrique centrale. L'eau d'abord
se donne en abondance, tant pour les activités agricoles que pour la
pêche. Malgré une exploitation intensive en certains endroits, la forêt
est massivement présente au Congo, au Gabon, au Zaïre et dans une partie
du Cameroun et de la Centrafrique. Les sols sont de valeur inégale, sou
vent fragiles, tandis que la faune a beaucoup souffert des pillages de la
fin du XlXe siècle et de la liberté excessive laissée à une chasse préda
trice dans les trois premiers lustres de l'indépendance. En définitive la
chance immense de l'Afrique centrale et l'un de ses grands atouts est
(49)
II 27
de disposer de milieux naturels relativement préservés.
Quant au sous-sol, les tendances observables depuis les années 1970
montrent que les ressources sont nombreuses et encore fort mal connues.
Cette situation résulte en partie de la période coloniale car si les
Belges ont commencé à prospecter certaines parties du Zaïre dès les an
nées 1890, il a fallu attendre la fin de la deuxième guerre mondiale pour
voir des recherches sérieuses dans certains territoires français (Cameroun,
et surtout Congo et Gabon) . La situation actuelle permet de distinguer
schématiquement trois cas :
1) Le Zaïre où l'exploitation du sous-sol a commencé vers 1910 au
Shaba et au Kasai alors que des prospections systématiques res
tent à faire ailleurs, en particulier en zone forestière ;
2) les pays où des recherches récentes ont révélé des ressources, essen
tiellemant dans le domaine pétrolier, mais où d'autres richesses
pourraient être misesAtt jour : tel est le. cas du Cameroun et du
Congo pour le pétrole et celui du Gabon où, en plus du pétrole,
des gisements importants de manganèse, uranium et fer ont été
trouvés ;
3) les autres pays, c'est-à-dire la majorité des Etats de la sous-
région, souvent gênés par leur position géographique où presque
tout le travail de prospection reste à entreprendre.
E.2. Les handicaps.
L'Afrique centrale souffre d'abord d'une faiblesse chronique du peu
plement (voir Tableau II). La rareté du capital humain devient catastro
phique dans un Etat tel que le Gabon et représente un obstacle sérieux
à l'exploitation de ressources par ailleurs considérables. Pour tous les
pays, en termes quantitatifs, le marché intérieur potentiel semble insuf
fisant pour soutenir un effort d'industrialisation autocentrée. Les pré
visions pour l'avenir laissent d'ailleurs perplexe, puisque la crois
sance démographique de l'Afrique centrale, qui était déjà relativement
(50)
II 28
faible jusqu'à ce jour, semble appelée à un niveau inférieur à la
moyenne du continent et par rapport à toutes les autres sous-régions
(voir Tableau VI).
Tableau VI : Taux de croissance annuelle de la population africaine
(1960-2000)
1960/ 1965/ 1970/ 1975/ 1980/ 1985/ 1990/ 1995/ 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000
Afrique du (Jord 2.8 2.9 3.0 3.1 3.1 2.9 2.8 2.6
Afrique de l'ouest 2.5 2.5 2.8 2.9 2.7 2.8 2.7 2.7
Afrique centrale 1.5 1.7 2.1 2.3 2.3 2.5 2.5 2.5
Afrique de 1' fest 2 < 4 2 # 6 2 . 7 3.1 3.0 2.8 2.8 2.8
Afrique australe 2»° 2'1 2»4 2»6 2«9 2«9 2«7 2«5
Ensemble des pays membres 2 # ¿ ¿. 4 2.<ô 2.Ù 2.3 ¿.ts 2.7 ¿.b de la C E A
Note : par Afr ique , il faut entendre les Etats indépendants , m e m
bres de l ' O . N . U . et de la C E . A . (Commission Economique pour
l 'Afr ique ) .
Source : 25 Years of Service to African Development and Integration United Nat ions , s . d . , p . 2 2 .
Du coup , si la population de la sous-région est appelée à augmenter ,
la part de l 'Afrique centrale dans l 'ensemble du continent devrait stagner
dans les quinze prochaines années (voir Tableau V I I ) .
(51)
II 29
Tableau VII : La population de l'Afrique centrale dans
le contexte africain (1960-2000)
1960 1970 1980 1985 1990 1995 2000
Afrique du ftford 6 4 5 4 5 8 2 5 6 2 1 0 8 6 9 3 1 2 5 4 7 1 1 4 4 0 0 8 1 6 4 5 4 5 1 8 6 2 5 6
(25.5) (25.4) (25.0) [24.8) (24.5) (24.1) (23.6)
Afrique de l'aiest 7 9 *» 1 0 5 1 5 6 1 4 2 7 7 2 1 6 7 4 5 3 1 9 5 8 6 1 23° 9 2 0 * 9 3 3 1
(31.5) (32.3) (32.9) (33.2) (33.3) (33.8) (34.1)
29 746 35 969 46 018 52 629 60 354 69 251 79 312 Afrique centrale ( n # 8 ) ( u # 0 ) ( 1 0 # 6 ) { 1 0 # 4 ) ( 1 0 # 3 ) ( 1 0 > 1 ) { 1 0 > 0 )
Afrique de l'Est 77 149 99 809 133 917 157 008 183 715 214 737 249 992 (30.5) (30.6) (30.9) (31.0) (31.3) (31.4) (31.7)
/ 1 739 2 121 2 70S 3 113 3 578 4 093 4 635 Afrique australe ^ ( Q > 7 ) {Q^ ( Q > 6 ) ( Q > 6 ) ( Q # 6 ) {Q^
_ , , j _,_ . 253 063 325 617 434 105 505 674 587 516 683 546 789 526 Ensemble des Etats membres de la CEA. (100'0) (100-0) (100-0) (100-0) ll00'0) (1°°-0) (100*0)
Source : 25 Years of Service to African Development and Integration. United Nations, s.d., p. 22. Chiffres en 1000 (et en % de la population africaine).
L'autre série de handicaps ne concerne pas la sous-région, mais cer
tains Etats victimes de leur enclavement. C'est le cas évidemment du Bu
rundi, de la Centrafrique, du Ruanda et du Tchad. Pour ne prendre qu'un
exemple, celui du Burundi, il faut se rappeler que les ports les plus
proches sont à 1400 km sur les rives de l'océan Indien (Dar es Salaam) et
à 2 000 km du côté de l'Atlantique (Matadi). Rares sont les produits in
dustriels qui pourraient, fabriqués au Burundi, supporter des coûts de
transports aussi élevés sans que cela nuise à leur compétitivité. Dans
l'autre sens, toutes les importations se trouvent renchéries sensiblement
du fait des distances. Le Zaïre lui-même, dont la façade maritime est si
étroite , partage beaucoup de ces handicaps.
Une véritable intégration, à l'échelle de la sous-région, apparaît
comme la condition nécessaire à la suppression de ces obstacles.
(52)
Ill
Communication, culture, éducation, science et technologie
performances et défaillances
(53)
Ill 2
Les domaines de compétence de l'Unesco, qui font l'objet du présent
chapitre sont traités avec une attention particulière dans chacun des
Etats de l'Afrique centrale, comme dans le reste du continent, et cela
pour deux raisons au moins. D'une part, dans ces pays neufs où l'Etat a
été privé de légitimité pendant la colonisation et où il doit établir
et affirmer sa propre légitimité, ils constituent soit l'une des condi
tions de l'existence de l'Etat, soit l'une de ses manifestations les plus
visibles. D'autre part ces secteurs donnent lieu soit à une attente,
souvent impatiente, de la part de la société civile (en particulier l'édu
cation), soit à des espérances confuses, comme étant susceptibles de
promouvoir le développement (notamment la science et la technologie), soit
enfin à une prise en charge directe ou détournée exprimant une volonté,
d'autonomie face à l'Etat (ainsi la communication et la culture).
Indiquons que dans ces domaines, où les données chiffrées seraient
si nécessaires, celles-ci font souvent cruellement défaut : quand elles
existent, leur fiabilité est plus que douteuse.
J'examinerai les secteurs qui relèvent du domaine de compétence de
l'Unesco dans l'ordre suivant :
A. La science et la technologie
B. L'éducation
C. La communication
D. La culture
(54)
Ill 3
A. La science et la technologie
On ne s'attardera pas ici sur l'opinion, largement répandue dans
les milieux politiques africains et du Tiers-Monde, parmi leurs élites in
tellectuelles et parmi les spécialistes de tous ordres (universitaires,
développeurs, experts internationaux...)» selon laquelle la recherche
scientifique et le progrès technologique sont l'une des conditions néces
saires du développement économique et social (1). Un accord certain existe
autour de quelques constats et principes :
1) le transfert pur et simple des connaissances scientifiques et des
acquis technologiques est difficile, voire impossible pour cer
tains et inutile pour d'autres ;
2) il est nécessaire, pour les pays en développement, de créer une
recherche scientifique et technique spécifique et, peut-être, com
plètement neuve (2) .
Pour être efficace, cette nouvelle politique de la science et de la
technologie doit s'appuyer sur une conception très claire et des choix
précis en matière de développement, ce qui - du moins dans la sous-région -
est rarement le cas. Mais elle doit aussi, elle peut encore tirer un grand
parti de tout l'héritage colonial qui est loin d'être aussi négatif qu'on
l'a souvent cru.
A.1. Un bilan nécessaire : la recherche coloniale
D'une certaine manière, la colonisation a eu, en son temps, à affronter
le problème que les Etats actuels ont à résoudre : quelle recherche scienti-
(1) Voir notamment les Actes, dont la publication est annoncée, du "Premier Congrès des Hommes de Sciences en Afrique", réuni à Brazzaville en janvier 1987.
(2) Chatelin, Yvon "La science et le développement. L'histoire peut-être recommencée ?" Tiers-Monde, XXVII, n°105 (janvier-mars 1986), pp. 5-24.
(55)
Ill 4
fique et quelles technologies pour quel développement ? Dans le cas de
l'Afrique centrale, elle s'en est plutôt assez bien tirée, ce qui n'est
pas sans conséquences sur les orientations actuelles des Etats de la sous-
région dans ce domaine. Or, en matière de recherche, la colonisation a pri
vilégié ses préoccupations économiques. Certes, à la fin du siècle dernier
et au début du XXe siècle, certaines recherches - en particulier celles qui
concernaient la trypanosomiase - ont été motivées, du côté des Etats, par
des considérations humanitaires ou, du côté des savants, par le simple ap
pétit de connaissances scientifiques. Mais lorsque, à partir de 1920 en
viron, les recherches s'intensifièrent, ce fut très précisément en rapport
avec des calculs économiques. Il s'agissait d'abord, dans le cadre de la
division internationale du travail spécifique au colonialisme, de pros
pecter les ressources diverses, surtout minières, des territoires dominés
et de rechercher les meilleurs moyens de les mettre en valeur. Il s'agis
sait aussi, dès lors qu'on s'est rendu compte du faible peuplement de la
sous-région, de préserver autant que possible la force de travail : d'où
les recherches très poussées en matière de maladies tropicales.
La colonisation belge (au Zaïre et, dans une moindre mesure, au
purundi et au Ruanda) a été, aussi bien dans la conception que dans l'exé
cution de la politique scientifique, à la fois efficace et exemplaire.
Elle a ouvert à peu près tous les domaines sur lesquels s'appuie une éco
nomie soucieuse de performance : agronomie ; géologie et mines ; géodésie,
géophysique et hydrologie ; médecine ; protection de la nature dans le
cadre de parcs nationaux ; économie et conjoncture. Les institutions de
recherche créées à cette époque sont encore, sous des noms divers, en ac
tivité aujourd'hui ; en revanche les structures les plus volontaristes
et les plus performantes, telles que l'I.R.S.A.C. (Institut pour la re
cherche scientifique en Afrique centrale, établi en 1947) et 1'I.N.U.T.O.M.
(Institut universitaire des territoires d'outre-mer, établi en 1949),
n'ont pas encore trouvé leur équivalent dans le Zaïre d'aujourd'hui. Il
est certain que la croissance économique spectaculaire du Zaïre à l'épo
que coloniale n'est pas sans rapport avec les succès de cette politique
(56)
Ill 5
scientifique : c'est la raison pour laquelle nous avons reproduit, malgré
son caractère éminemment apologétique et triomphaliste, la description
de cette politique et de ses effets faite par les colonisateurs eux-
mêmes (1).
Quant à la partie française de la sous-région (Cameroun, Centrafrique,
Congo, Gabon et Tchad) la recherche y a été moins systématique, moins
exhaustive, plus tardive et plus incohérente. Plusieurs institutions ont
cependant vu le jour qui continuent de fonctionner sous les mêmes noms
ou sous des appellations différentes (2) :
- Institut Pasteur établi dès 1908 à Brazzaville : des filiales ont
été créées plus tard dans les autres capitales ;
- Institut d'Etudes Centrafricaines, fondé en 1946 et établi à Brazza
ville dans une orientation franchement pluridisciplinaire (entomolo
gie médicale ; botanique et biologie végétale ; géophysique ; pédolo
gie : océanographie pour ce qui est des "sciences exactes" ; géogra
phie, sociologie et psychologie sociale, ethnologie musicale et pré
histoire dans le domaine des "sciences humaines") ;
- Institut de recherches pour les huiles et oléagineux ;
- Institut de recherches du coton et des textiles exotiques ;
- Syndicat d'Etudes et de Recherches Pétrolières en A.E.F., fondé
dès 1934 ;
- Enfin des centres de recherches rattachés à l'O.R.S.T.O.M. (Office
de la Recherche Scientifique et Technique d.'Outre-Mer) ;
A.2. La politique scientifique et technologique : lenteurs, hésitations
et incohérences.
Ces trois mots (lenteurs, hésitations et incohérences) caractérisent
(1) Voir ci-dessus Annexe I.
(2) Guernier, Eugène (éd.) Afrique Equatoriale Française. Paris, Encyclopédie Coloniale et Maritime, 1950, pp. 227-230 et 245-256.
(57)
Ill 6
bien la politique menée par les Etats de la sous-région dans les domaines
de la science et de la technologie. En plus de leur héritage propre, ceux-
ci ont voulu tenir compte des recommandations émises à plusieurs reprises
par des conférences panafricaines ad hoc auxquelles leurs représentants
ont participé :
- Conférence de Lagos, convoquée par l'Unesco et la Commission Econo
mique pour l'Afrique en 1964, qui a recommandé aux Etats de con
vaincre 60% des étudiants universitaires d'opter pour les sciences,
et d'allouer 0,5% des budgets nationaux aux activités de recherche
scientifique, les quatre cinquièmes devant aller à la recherche ap
pliquée et orientée, en vue d'inventorier et développer les ressour
ces naturelles ;
- Colloque de Yaounde (1967), envore convoqué par l'Unesco, sur la
politique scientifique et l'administration de la recherche, qui a
en substance répété les mêmes recommandations ;
- Symposium de Dakar (organisé par l'OUA en 1968) sur les pharmacopées
traditionnelles et les plantes médicinales africaines, dont les con
clusions ont été reprises lors de la première réunion du Comité
interafricain pour l'étude des plantes médicinales et la pharmacopée
traditionnelle (Lagos, 1972) ;
- Conference de Lagos, dont Je "Plan d'action" accorde une grande at
tention à la science et à ia technologie (1) ;
- Enfin Conférence de Yamoussoukro (octobre 1983) qui recommanda de
privilégier les recherches en rapport avec le monde rural et la for
mation des personnels.
Le caractère répétitif de ces recommandations ne doit pas surprendre. Il
indique à la fois la permanence d'un problème et les difficultés qu'éprouven
(1) Voir Plan d'Action de Lagos pour le développement économique de l'Afrique 1980-2000; Organisation de l'Unité Africaine, édité par l'Institut International d'études sociales (Genève), '981, pp, 47-76.
(58)
Ill 7
les Etats à le résoudre. Ces difficultés sont communes à l'ensemble des
pays africains, voire au Tiers-Monde : difficultés de financement dans le
cadre des Etats actuels ; ampleur et diversité des exigences toutes aussi
urgentes ; complexité des problèmes de la recherche qui touchent aussi à
la politique de l'enseignement (formation des personnels), à la politique
de la communication (développement d'une information scientifique et tech
nique digne de ce nom) et à la politique de coopération tant au niveau
sous-régional que régional et international. Quatre cas nous paraissent
tout à fait significatif des efforts consentis et des difficultés ren
contrées :
a - Le cas du Cameroun
Une première organisation de la recherche a eu lieu en 1965, qui lais
sait la part belle aux intitutions étrangères. En 1974, l'ONAREST (Office
National de la Recherche Scientifique et Technique) comptait neuf instituts
1) Institut des cultures perennes ;
2) Institut des cultures vivrières et textiles ;
3) Institut de recherches forestières et piscicoles ;
4) Institut de recherches zootechniques, pastorales et vétérinaires ;
5) Institut de recherches médicales et d'études des plantes médicinales
6) Institut de recherches hydrologiques, géologiques et minières ;
7) Institut de recherches industrielles et technologiques ;
8) Institut des Sciences humaines ;
9) Institut National d'éducation.
Cette structure, on le voit, privilégiait bel et bien les recherches en
relation, avec le secteur agricole et le monde rural (5 instituts sur 9)
dans un pays dont l'économie, d'ailleurs performante, tirait alors l'es
sentiel de ses richesses de l'agriculture. Une réorganisation intervenue
en 1976 a ramené le nombre des instituts de neuf à cinq, l'ONAREST rece
vant le statut d1 "établissement public" à caractère scientifique doté
(59)
Ill 8
de la personnalité civile et de l'autonomie financière et placé sous
la tutelle du ministre chargé de la recherche scientifique et technique .
La principale caractéristique de cette nouvelle organisation est sa vo
lonté de régler la question des enclaves étrangères en les intégrant aux
institutions camerounaises :
1) Institut de recherches agricoles et forestières absorbant plusieurs
organismes français (Institut de recherches pour les huiles et oléa
gineux ; Institut français du café, du cacao et autres plantes sti
mulantes ; Institut de recherche sur le caoutchouc en Afrique ;
Centre technique forestier tropical et Office de recherche scienti
fique et technique d' outre-mer, O.R.S.T.O.M.) ;
2) Institut de Recherches Zootechniques, intégrant l'Institut d'élevage
et de Médecine vétérinaire des pays tropicaux ;
3) Institut de Recherches médicales et des études des plantes médicina
les, intégrant l'Institut Pasteur et l'O.R.S.T.O.M. ;
4) Institut de recherches sur les techniques, l'industrie et le sous-
sol ;
5) Institut des Sciences humaines.
D'autre part la recherche n'est pas menée en vase clos par ces organis
mes : elle se fait en rapport avec les différents départements ministériels
et avec de nombreuses sociétés de développement (SODERLM, SEMRY, HEVECAM,
etc.) .
Au-delà des organigrammes, les rares chiffres disponibles attestent
l'effort des pouvoirs publics (1) : 830 millions (francs CFA) en 1974 et
4 700 millions en 1983 pour les crédits de fonctionnement ; 1000 millions
en 1974 et 4500 millions en 1983 pour les crédits ,d'éouipement Quant aux
chercheurs nationaux, leur nombre serait passé de 120 environ en 1974 à
plus de 350 en 1984 auxquels il faut ajouter les nombreux chercheurs et
techniciens en formation ou en stage dans le pays même ou à l'étranger. La
relative continuité de la politique camerounaise est assez remarquable.
(1) Chiffres tirés d'un entretien avec M. Nya Ngatchou, directeur des programmes au Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique et technique, in Cameroun Tribune 12 mai 1984.
(60)
Ill 9
Les organismes originels ont été progressivement étoffés plutôt que
bouleversés et cela tranche avec les autres expériences dans la sous-région.
Dans les années 1980, deux nouvelles entités ont vu le jour : le Comité
national de développement des technologies et le Comité national perma
nent de l'homme etde la biosphère.
b. Le cas du Congo.
La vie politique très agitée que le Congo a connue dans les deux pre
mières décennies de son indépendance a évidemment eu des répercussions
sur la politique scientifique du pays. Jusqu'en 1963, sous le régime de
l'Abbé Fulbert Youlou, la recherche relevait entièrement d'organismes fran
çais. En 1965, à la suite de la Révolution des "Trois Glorieuses" (13-15
août 1963) dans laquelle les intellectuels ont joué un certain rplé, est
créé un Comité National de la Recherche Scientifique et Technique. Au con
grès de décembre 1972, le Parti Congolais du Travail (P.C.T.), parti uni
que, adopta une proclamation importante selon laquelle "le PCT considère
qu'il serait illusoire de parler d'amélioration de la production et de la
productivité sans progrès technique et sans développement scientifique".
Un décret du 21 février 1977 donna naissance à une Direction Générale de
la Recherche Scientifique et Technique, placé rsous la tutelle du Ministère
de la Recherche scientifique et sous le contrôle du P.C.T. : ce décret
définit aussi 70 programmes de recherche privilégiant les relations entre
science et application. Enfin depuis 1981 existe un Conseil National de la
Recherche Scientifique, contrôlé par le P.CT. et présidé par le membre
du Bureau Politique responsable de l'idéologie et de l'éducation avec,
pour vice-président, le ministre chargé de la recherche scientifique. Les
principaux organismes de recherche sont les suivants.
_ 1) Le Centre de Recherche Agronomique de Loudima (C.R.A.L.) qui tra
vaille actuellement sur six programmes, subdivisés chacun en sous-
progranmes: a) fertilité du sol (fertilité chimique, fertilité
(61)
Ill 10
physique, fertilité biologique) ;.b). système de production
(techniques culturales mécanisées ; économie de l'exploitation ;
relation travail du sol - eau - conservation du sol) ; c) plantes
à racines et tubercules amylacées (manioc, igname, patate douce,
pomme de terre, taro et macabo) ; d) céréales ; e) légumineuses à
graines ; f) valorisation des produits agricoles ;
2)Le Centre Technique Forestier Tropical créé sous la colonisation dont
les principaux programmes se rapportent à l'amélioration génétique
de plusieurs espèces (eucalyptus, pins, limba, arancaria, etc..) ;
3)Le Centre de recherches vétérinaires et zootechniques ;
4)Le Centre de recherche géographique et de production cartographique ;
5)Les stations de recherche écologique forestière de Dimonika, dans
le Mayombe ;
6)L'Université Marien Ngouabi qui réunit le plus important potentiel
de recherche du pays (plus de 110 enseignants-chercheurs nationaux)
7)L'0.R.S.T.0.M.
Enfin plusieurs centres de recherche relativement actifs relèvent d'autres
ministères (comme le Laboratoire d'études et de travaux publics, contrôlé
par la Régie Nationale des Transports et Travaux publics ou le Complexe
agro-industriel de Mantsoumba, placé sous la tutelle du Ministère de l'Eco
nomie rurale) (l),Si l'organigramme est impressionnant et les projets am
bitieux, les moyens financiers paraissent bien maigres : la recherche
scientifique représente à peine 0,45% des dépenses globales de l'Etat et,
sur ces crédits fort limités, moins de la moitié fut décaissée en 1982 et
1983.
(1) Voir le n° spécial de Congo Magazine (n° 17, juin 1987) consacré à "La science au secours de l'Afrique".
(62)
Ill 11
c) Le cas du Gabon.
Comme au Congo, la recherche a été d'abord largement dominée par la
France, qui avait signé avec le Gabon une importante convention dès 1960.
Mais, avec le deuxième plan (1971-1976) franchement orienté vers l'indus
trialisation, on commença à se préoccuper d'une véritable politique natio
nales. En 1973 apparaît un Ministère de l'Education Nationale et de la
Recherche Scientifique. Trois ans plus tard est créé un autonome Ministère
de la Recherche Scientifique, chargé de l'environnement et de la protec
tion de la nature (décret du 4 mars 1976). La même année est constitué
le CENAREST (Centre National de la Recherche Scientifique et Technique)
dont les cinq instituts sont établis un an plus tard (1) :
1) Institut de pharmacopée et de médecine traditionnelles ;
2) Institut pour la recherche en sciences humaines ;
3) Institut de technologie ;
4) Institut de recherche agronomique et forestière ;
5) Centre de lutte anti-pollution.
Parallèlement aux instituts ont été établis un Commissariat général de
la recherche scientifique et un Bureau de la Coordination des recherches.
C'est la recherche agronomique et forestière qui s'adjuge la plus grande
partie des crédits (90 millions de francs CFA sur 187 en 1983).
Mais la recherche est menée aussi en dehors du CENAREST, soit dans
des entreprises privées, comme Elf-Gabon, soit dans d'autres organismes
publics, comme le Ministère de la Planification et de l'Aménagement du
territoire et, surtout, la Présidence de la République où se trouvent
notamment un conseiller privé en matière de recherche scientifique, un
conseiller civil pour les affaires médicales et deux autres pour les
(1) Des détails importants et nombreux sur ces organismes ont été donnés dans le journal L'Union du 17 février 1977.
(63)
Ill 12
questions pétrolières et minières.
d) Le cas du Zaïre.
Malgré l'héritage important qui a été décrit précédemment, le Zaïre
n'a pas encore su se doter d'une véritable politique scientifique.
Cela se voit d'abord au niveau des institutions de recherche qui ont
souffert d'une trop grande instabilité. Retenons seulement, pour aller à
l'essentiel, la création en 1967 de l'O.N.R.D. (Office National de la Re
cherche et du Développement) qui prit sous tatelle les grands établisse
ments scientifiques nés sous la colonisation, en particulier l'Institut
National pour l'Etude Agronomique au Congo (fondé en 1933 et devenu l'Ins
titut National d'Etudes et de Recherches Agronomiques en 1960), L'Institut
de Médecine Tropicale (créé en 1950) et l'Institut pour la Recherche Scien
tifique en Afrique Centrale (érigé en 1947). Machine trop lourde, l'O.N.R.D.
fut rapidement écrasé par sa propre masse et rongé par un bureaucratisme
excessif au point que le Président de la République décida de le prendre
sous son contrôle. En 1975, il disparut, cédant la place à l'I.R.S. (Insti
tut de Recherche Scientifique) qui fut à son tour remplacé en 1982 par un
Département (Ministère) de la Recherche Scientifique.
En fait une grande partie de la recherche se m?ne dans les universités
et les instituts d'enseignement supérieur. Il existe aussi, auprès de la
Présidence de la République, un Service Présidentiel d'Etudes depuis 1972 ;
au sein du S.P.E., des économistes définissent des projets de recherche
en relations avec les urgences et les priorités nationales. Il est aussi
certain que, dans la droite ligne de la tradition coloniale, les grandes
entreprises mènent leurs propres recherches ou en financent dans les éta
blissements universitaires : tel est le cas en particulier de la GECAMINES,
héritière de l'Union Minière du Haut-Katanga, qui, avec quelque 35 000
salariés, est de loin la première entreprise du pays.
Les chiffres manquent cruellement. Mais le potentiel humain apparaît
(64)
Ill 13
comme impressionnant. Il est déjà en mesure de vouloir peser sur la poli
tique scientifique nationale, comme on pourra en juger par la lucidité, le
courage et l'audace de la position expriméépar les hommes de science
zaïrois lors d'un important "colloque national sur l'authenticité" réuni
à Kinshasa du 14 au 21 septembre 1981 (1).
A.3. Un bilan médiocre.
Parmi les éléments qui définissent cette médiocrité, il y a d'abord
et avant tout la dépendance que les élites scientifiques nationales suppor
tent d'ailleurs de moins en moins. Cette dépendance n'est pas seulement
le fait de l'héritage colonial : elle découle aussi des habitudes prises
au début de l'ère des indépendances ou l'on avait trop facilement recours
aux Etats développés et aux organismes internationaux tant eft ce qui con
cerne les experts que pour le financement. Cette dépendance est visible
à plusieurs niveaux :
a) au niveau de la définition des programmes de recherche. Ainsi, de
nombreux organismes fonctionnent localement sur le rythme et selon
les préoccupations de l'époque coloniale (ainsi le Centre Technique
Forestier Tropical qu'on trouve sous divers noms à Bangui, à Libre
ville, à Pointe Noire et à Yaounde est une vieille institution fran
çaise qui dispose de ramifications en Côte d'Ivoire, au Niger ou
au Sénégal). De nombreux organismes nouveaux ont vu le jour sous
l'impulsion de pays étrangers : ainsi le GERDAT (Groupe d'Etudes
et de Recherches pour le Développement de l'Agronomie Tropicale)
établi par la France à la fois au Congo et au Gabon ; ou encore
l'important Centre International de Recherche Médicale de Franceville
Enfin de véritables enclaves continuent d'opérer en vase clos,
indépendamment du milieu scientifique national . et des préoccupa
tions des pays : les centres O.R.T.S.O.M. en sont un bon exemple,
(1) Voir ci-dessous Annexe II.
(65)
Ill 14
dont les budgets les personnes et les programmes relèvent
tous du siège parisien ;
b) au niveau du financement. Que dire des pays les plus pauvres
(Burundi, Centrairique, Guinée Equatoriale, Ruanda, Sao Tomé et
Principe, Tchad) lorsque les pays réputés 'riches" éprouvent du
rablement des difficultés de financement ? Le Zaïre, qui a vu son
PNB baisser de 30% entre 1974 et 1983, a dû s'en remettre pres
que totalement à l'aide étrangère en matière de recherche.
En 1981, le Congo, qui bénéficiait pourtant d'importants revenus
pétroliers, ne finançait que 34% de la recherche : en 1982 cette
proportion est même tombée à 30%, le reste, c'est-à-dire l'es
sentiel, venant principalement de la France et de l'URSS ;
c) enfin, comme ailleurs, cette dépendance se manifeste de manière
non moins inquiétante dans la formation des chercheurs (assurée
majoritairement à l'étranger) et au niveau^ftatériel de recherche
(importé tel quel des pays développés).
Mais la médiocrité c'est aussi le manque d'intégration d'une part
entre la science et la technologie et, d'autre part, entre celles-ci et le
développement économique et social. La recherche scientifique ne concerne
qu'une minorité : les élites intellectuelles qui la pratiquent ; ou les
Etats qui voient dans les applications de la science un bon moyen de ratio
naliser leur gestion et d'accroître leur emprise sur les sociétés .civiles,
même si cela se fait au prix d'une extraversion accentuée. Il en est ainsi
par exemple de l'information-que les Etats de La sous-région ont utilisée
très tôt (par exemple le Congo dès 1964, le Gabon en 1965 et le Zaïre à
partir de 1968) : or l'information a été dans tous les cas l'oeuvre de
sociétés de service, souvent sinon toujours issues de sociétés européennes,
japonaises et nord-américaines (I.B.M. en tête, suivie de très loin par
C.I.I. Honneywell Bull, NCR, Hewlett-Packard et Burroughs) ; le matériel
est fourni par ces mêmes entreprises ; enfin en l'absence d'un personnel
(66)
Ill 15
africain suffisamment nombreux ou suffisamment qualifié, le parc d'or
dinateurs est notoirement sous-employé. En fait, la grande majorité de
la population n'a accès, et cela uniquement au niveau des retombées et
de loin, aux progrès de la science et de la technologie que dans les
domaines agricole et sanitaire.
Enfin, quoique la quantification soit difficile en ces domaines, il
ne faut pas négliger la fuite du savoir et le drainage des cerveaux dont
souffrent les Etats d'Afrique centrale, comme beaucoup d'autres pays afri
cains. La fuite du savoir concerne le terrible problème des publications :
quoique les conditions de travail soient difficilles, les chercheurs réa
lisent des travaux nombreux, parfois pionniers, souvent remarquables qui
ne trouvent pas à se publier sur place car les revues scientifiques sont
dépourvues de moyens financiers ; les éditions universitaires, quand elles
existent, sont balbutiantes et les éditeurs privés, d'ailleurs très rares,
répugnent à publier des travaux fondamentaux ou de vulgarisation dont le
public est restreint. Aussi les chercheurs publient-ils dans les pays dé
veloppés (d'autant plus facilement que presque tous y ont été formés) en
richissant ainsi le potentiel scientifique et intellectuel de ces pays.
Le drainage extérieur des cerveaux est un phénomène connu dans l'ensemble
du Tiers^Monde et l'Afrique centrale n'y échappe pas. Retenons seulement
une série de chiffres : une étude réalisée en 1970 sur le plan quinquennal
(1966-1980) du développement des services de santé au Gabon faisait état
de 5 retours seulement d'étudiants en médecine gabonais sur les 17 prévus
en 1970. Le taux de retour global dans la sous-région est; sans doute plus
élevé mais l'exode des cerveaux existe bel et bien, justifié selon les
intéressés par des contraintes financières (rémunérations peu stimulantes),
sociales (prestige très faible reconnu aux métiers de la recherche) et
politiques (absence d'un statut du chercheur et absence de démocratie).
Ces mêmes contraintes déterminent aussi un autre exode, l'exode intérieur,
dont les effets ne sont pas moins pernicieux sur l'avenir de la science
et de la technologie dans la sous-région : cette fuite se fait en effet de
manière le plus souvent irréversible en direction de l'administration ou de
la classe politique sans aucun profit pour les activités de recherche.
(67)
Ill 16
II est donc evident que, sans une philosophie claire et des choix
précis en matière de développement, la politique scientifique risque pen
dant longtemps encore de se réduire, dans le domaine du budget, à la ges
tion équilibriste de la pénurie et, dans le domaine des programmes, à une
simple coordination de pratiques dont on ne contrôle pas la stratégie. Sans
ces éclaircissements, on peut douter mime de la réussite de la mise en
commun, au niveau sous-régional, du potentiel humain qui est déjà relative
ment important dans ce secteur.
III B L'éducation : volontarisme et handicap.
Le secteur de l'éducation est sans doute celui dans lequel les Etats
de la sous-région présentent le plus de similitudes avec le reste du con
tinent et cela quand on considère aussi bien les ambitions que les réalisa
tions et les perspectives. Il existe certes quelques particularités : mais
celles-ci se rapportent davantage à la philosophie de l'éducation qu'aux
transformations et aux effets visibles des systèmes éducatifs.
B.l. Un médiocre point de départ.
Il faut évidemment tenir compte du niveau de départ pour mesurer les
progrès accomplis. Or, ce niveau de départ était, à tous points de vue, par
ticulièrement bas : analphabétisme massif (voir Tableau VIII), rareté dra
matique des cadres. C'est que, faute de moyens financiers ou par choix poli
tique et philosophique, le malthusianisme des pouvoirs coloniaux a revêtu
ses formes extrêmes en Afrique centrale : la sous-région n'a pas bénéficié
de l'équivalent - en qualité d'enseignement ou en durée de fonctionnement -
de Fourah Bay College (Sierra Leone), de l'Ecole William Ponty (Sénégal),
de Makarere College (Ouganda) ou de l'Université de Dakar pour s'en tenir
aux exemples les plus prestigieux. L'Afrique centrale a donc accumulé un
retard considérable par rapport aux autres sous-régions du continent et ses
performances actuelles en matière d'éducation n'en sont que plus remar
quables .
Le développement de l'enseignement dans le cadre colonial fut ainsi
tardif et, examiné après coup, non sans rapports avec les tendances et les
débats d'aujourd'hui. En effet, d'une part, il se fit dans le cadre d'une
stratégie délibérée de "développement" : l'accélération des années 1945-1960
s'inscrit dans les "plans de développement décennal" élaborés après la guerre
par les Belges et les Français, qui ont alors fait de l'enseignement un fac-
(68)
Ill 17
Tableau VIII : Taux d'analphabétisme
Burundi
Cameroun
Centrairique
Congo
Gabon
Guinée Equatoriale
Ruanda
Sao Tomé et Principe
Tchad
Zaïre
1965
81
70
84
87
N.D.
N.D.
94,5
1980
73
55
67
43,5
47
63
62
42,5
45,5
N.D. : chiffres non disponibles
1965 : estimations au début des années 1960
Sources : UNESCO Statistical Yearbook et L'Etat du Monde
(annuel, Paris, François Maspero et la Découverte)
(69)
Ill 18
teur essentiel du développement des colonies. Mais d'autre part, ce fut
à cette époque que les revendications nationalistes s'exprimèrent avec le
plus de force : l'éducation (et non pas seulement l'enseignement) y occupa
une place de choix car les nationalistes africains, en posant le problème
du contenu de l'enseignement, exigeaient que celui-ci répondît aux exigences
les plus rigoureuses de qualité tout en incorporant ou en préservant les
valeurs culturelles du monde noir. Ainsi se trouvaient formulées plusieurs
des questions majeures d'aujourd'hui : celle d'abord des rapports entre
l'école et le monde du travail ou, plus généralement, de l'économie ; celle
ensu.te, ¿es relations entre l'école et l'identité culturelle. Les problèmes
purement quantitatifs (exigence d'une scolarisation moins malthusienne,
plus démocratique, c'est-à-dire ouverte au plus grand nombre) apparaissaient
comme les plus urgents mais n'excluaient pas qu'on posât déjà les problèmes
qualitatifs.
Il faut dire un mot du cas particulier du Zaïre ou une véritable
i
politique scolaire (qui cependant obéissait à la règle généralA,du malthu
sianisme) avait vu le jour dès le début de la colonisation, en s'appuyant
sur deux bases : d'une part, sur le plan administratif, une démission to
tale de l'Etat colonial qui abandonna l'éducation aux missions catholiques
d'autre part sur le plan philosophique, la conviction qu'il y avait "né
cessité de privilégier une instruction utilitaire, susceptible de conduire
les jeunes tonjplais pris en main à une technicité manuelle ou profession
nelle rentable pour le jeune Etat colonial" (1). D'où une hiérarchie très
spécifique à la situation coloniale zaïroise : à la base de la pyramide,
la masse énorme des analphabètes ; ensuite tous ceux qui avaient eu la
chance ou le privilège d'aller à l'école où ils avaient été alphabétisés
en langues africaines (et non en français , comme c'était le cas au Came
roun ou en A.E.F.) ; enfin, au sommet, les très rares "évolués" (la même
expression existait en Afrique centrale française pour désigner le même
groupe social) qui avaient pu apprendre le français et un métier - moniteur
(1) Nudimbe V.Y. "La culture" in Vanderlinden J. (éd.) Du Congo au Zaïre 1960-1980. Essai de bilan. Bruxelles, C.R.I.S.P., 1981, p. 370. Rappelons que le Zaïre colonial s'est appelé, entre autres, Congo belge.
(70)
Ill 19
commis de bureau, dactylographe - qui en faisaient de parfaits agents
d'exécution et collaborateurs de la colonisation. On connaît le résultat
de cette politique ; au moment de son indépendance, la situation du Zaïre
était précaire : moins de 20 diplômés d'Université, presque pas de cadres
de conception, de nombreux agents d'exécution. Mais il faut souligner que
dans le reste de la sous-région la situation n'était guère meilleure (2).
B.2. Les philosophies de l'éducation : éducation pour le développe
ment et pour la renaissance culturelle.
Il n'est donc pas surprenant que, au moment même de l'accession à
la souveraineté, voire peu avant ce moment symbolique,les "pères de l'in
dépendance aient tenu à préciser leurs conceptions en matière d'éducation.
Certes tous n'ont pas éprouvé le besoin d'exprimer leur point de vue.
Mais deux, parmi les plus éminents, ont émis des idées d'une brûlante ac
tualité : il s'agit de Barthélémy Boganda en Centrafrique et de Patrice
Lumumba dans ce qui était alors le Congo.
Dans des discours nombreux, prononcés jusqu'à sa mort accidentelle en
1959, un peu plus d'un an avant l'indépendance, B. Boganda a défini les
grandes lignes d'une philosophie et d'un système d'éducation fortement en
racinés dans une sorte d'humanisme négro-africain ; pour lui, la formation
des hommes à l'école était un impératif absolu puisqu'il s'agissait, par
ce moyen, de jeter les bases de la société future. Mais la définition d'un
bon système éducatif était seconde, subordonnée à une priorité dont aucun
jeune Etat ne pouvait faire l'économie : la formation du type de société
qu'on se proposait de construire et, par conséquent, du type de citoyens
qu'on entendait non pas former ou façonner, mais promouvoir ; car, se
(1) Voir notamment M'Bokolo, E. "French Colonial Policy in Equatorial Africa" in Gifford, P. et Roger Louis, W. (eds) The Transfer of Power in Africa. New Haven, Yale University Press, 1982.
(71)
Ill 20
plaisait-il à expliquer, le citoyen ne sort pas de l'école comme une
statuette des mains du sculpteur, ce n'est pas une matière morte qu'on
pourrait enfermer dans des formes rigides et définitives ; c'est une
personne dont il faut éveiller la curiosité et les sens, susciter les
talents, solliciter le génie de telle sorte qu'elle apporte librement sa
contribution originale à l'oeuvre collective de la construction de la
société. Mais, chrétien tout en étant sensible aux valeurs de l'animisme,
patriote centrafricain tout en restant actif dans le combat pour l'unité
effective de la sous-région et, ultérieurement, du continent, il insis
tait sur le fait que cette éducation nouvelle se devait d'être ouverte :
sur le monde ; apportant des savoirs et des connaissances, mais sensible
aux valeurs morales et civiques ; aidant à comprendre la société, mais
donnant aussi les outils intellectuels de critique, de remise en cause,
voire de transformation du système économique et social dans lequel le
citoyen vit.
L'approche de Lumumba est quelque peu différente : plus volonta
riste, plus nationaliste, en définitive plus politique. Dans un discours
justement célèbre, prononcé à l'occasion même de la proclamation de l'in
dépendance et devenu depuis un texte de référence dans les cours et épreu
ves d'instruction civique du Zaïre, il s'exclame en substance : "L'His
toire dira un jour ... Mais ce ne sera pas l'Histoire qu'on enseignera
à Bruxelles, Paris ou Washington ... Ce sera l'Histoire qu'on enseignera
chez nous". C'était proclamer la nécessité d'une rupture radicale avec
l'enseignement colonial et inviter à l'innovation. Chez Lumumba comme
chez Boganda, ces propos ne formaient pas un simple catalogue de bonnes
intentions ; ils s'articulaient en une philosophie cohérente, certes exi
geante, proposés aux nouveaux appareils d'Etat.
En fait, assaillis par les demandes pressantes de la société civile
et prisonniers de leurs propres engagements, ceux-ci ont plutôt voulu
agir que réfléchir. Le système éducatif existant a donc été repris tel
quel, quitte à ce qu'on prit l'engagement de le réformer une fois résolaî
les problèmes les plus urgents : or, dans la pratique, ceux-ci se sont
(72)
Ill 21
reveles beaucoup plus durables qu'on ne l'avait cru, compte tenu notam
ment de la persistance d'une forte croissance démographique. Dans la
sous-région,1¿ Cí y a à vrai dire, que deux exceptions dans lesquelles
les urgences de la pratique quotidienne n'ont pas bloqué la réflexion
de fond sur l'éducation, même si, à y regarder de près, cette réflexion
n'a pas toujours su se donner les moyens de s'inscrire dans le concret.
C'est le cas d'abord áu Zaïre où la réflexion se porte constamment,
depuis une vingtaine d'années sur l'aliénation culturelle, ses mécanis
mes et les moyens d'en sortir, en particulier grâce à un système scolaire • menée
rénove. Cette réflexion a été par un essayiste de talent, Mabika Kalanda,
dans un livre décapant, La remise en question, base de la décolonisation
mentale (1): l'ouvrage, qui a provoqué un débat long et passionné dans
le pays, démontrait que, produite par l'école "moderne", toute l'élite
zaïroise était culturellement aliénée, c'est-à-dire ignorante de ses tra
ditions, coupée du reste de la société, fascinée par les modèles économi
ques et sociaux des Etats occidentaux élevés au rang de références exclu
sives ; pour l'auteur, si l'école de tradition coloniale avait produit
cette élite aliénée, il revenait à une autre école de donner à la nation
en construction des cadres plus en accord avec ses préoccupations. Est-il
besoin de préciser que l'idéologie de l'authenticité, devenue depuis
1971 l'idéologie officielle de l'Etat zaïrois, n'est qu'une réactualisa
tion des propositions exprimées dans La remise en question ?
Il y a aussi la réflexion engagée au Congo au plus haut niveau,
par les élites intellectuelles comme par la classe politique, autour de
"l'Ecole du Peuple" (2). Il s'agit là, assurément, de l'une des réflexions
(1) Publié aux Editions Remarques Africaines à Bruxelles en 1966.
(2) La plupart des textes sur l'Etat du Peuple sont inédits. Débats présen • tés par Eliou, Marie La formation de la conscience nationale en République Populaire du Congo. Paris, Anthropos, 1977.
(73)
Ill 22
les plus cohérentes et les plus audacieuses sur l'école dans l'Afrique
indépendante. Cette réflexion, unissant pour une fois dans un même élan
les intellectuels et les responsables politiques, s'appuyait sur une cri
tique radicale de tous les effets produits par l'école issue de la coloni
sation : dévalorisation du travail manuel; culte des diplômes européens
et, plus particulièrement, français ; valorisation extrême et outranciëre
de la culture européenne ; faible emploi ou mauvais emploi des cadres
formés par l'école ; isolement des élèves par rapport à leur famille et à
leur communauté. L'Ecole du Peuple, dont le projet a été entériné par le
Comité Central du Parti Congolais du Travail (parti unique) en 1971, se
donnait pour objectif "la formation de l'esprit africain et socialiste",
la réalisation de "l'indépendance nationale" et de la "décolonisation
culturelle". Des mécanismes précis ont été échafaudés, notamment en ce
qui concerne l'organisation des différents cycles, les passerelles entre
l'école et le monde du travail, l'introduction et la généralisation des
langues nationales dans les programmes scolaires (1). Il était même prévu
de réaliser par étapes, de 1975 à 1985, ce que le Programme triennal in
térimaire adopté en 1971 décrivait comme "un bouleversement complet du
système éducatif dans son ensemble".
B.3. Un bilan mitigé.
Force est de constater que la réforme de l'Ecole du Peuple est
restée lettre morte, alors qu'elle a été voulue et qu'apparemment, dix-
sept ans après son élaboration, elle reste d'actualité : aujourd'hui
encore, il existe, auprès du Comité Central du Parti Congolais du Travail,
un Comité permanent de l'Ecole du Peuple "chargé d'orienter la politique
(1) Bourliou, P. ; Eliou, M. ; Gnali, A. ; Le Thanh Khoi et Philipenko, D. Création de l'Ecole du Peuple. République Populaire du Congo, Paris, Unesco, 1976.
(74)
Ill 23
4-1 Eta de l' CO
CD ens (X
VCD
-o
CO
CD i—
1
co
C
CO
T3
£ o
• i-l
4J CO
O
3
T3
VCD
i—i CD
"O
4J
U
CO
CL
CO
J ••
X
l-l X 3 CO
CD
abl
H
/—s
co CD 4-1
C
CO
U
3 O
O
CO
CD
co
C
CD
a VCD
-a -
LO
0
0 av
<N 198 1981
o
oo
av ~—
0\
»—
00
r
a\ ~-r-. p~ O
v •
—•
u
o
P3
< M
< m
< 03
<
CO
er> ** C
M
CM
*• —
~ C
M
oo
00
LO
—*
^3-•* ^-C
M
-Í L
O
-* —
*
v£> C
M
»a-p
^ t-^
— c 3 h
3 pa
LO
CO
Ov ^
CM
1
CO
C
O
o
as C
O
CM
* —
* C
M
vO
CO
C
M
-3 C
N
r-» •» O
S
~
vO
r-. -3-
as ~ 0
0 * ~3-
~-CN
»3-
,—
CO
a 3 o
u <u
1 u
as
"•3-
CT
v •V
CO
1
00
o
en
LO
00
•—.
OS
0
0
—
CO
rique
LW
CO
U
4-1
C
CD
O
00
v£>
00
—H
* <
f C
M
r
—~
LO
—i
CM
~~ •> r
C
M
LO
L
O
LO
in
•—i
-3-* C
O
CN
P-.
LO
C
M
LO
—"
O
M
c o
o
CO
r *
CO
1
<t L
O
o
vO
_i 1
CM
O
o r
•—i
er. »i
as
CN
-3-
as oo
C
O
XI CO
O
Equatoriale <u
VCD
C
•i-l
3 O
vO
-<r
LO
WS
CN
LO
^ —
C
N
00
CO
-3-
CM
CM
#» C
O
CN
CM
V
O
as
—*
»—i *
CN
C
M
•^
-
CO
L
O
—
r-~ r< C
M
CM
f—i
CM
-a--CO
T3
G
CO
3 0Í
r-.
CM
#v
Ov
—
r~» C
N é et Principe
g H
O
CO
w
CO
CM
CN
•V
*-~ •—«
<3-
*—
oo
-*a « 4= U
H
~~l
r->
CO
CO
00
LO
O
v
CN
C
O
00
-3-O
S
VO
C
N
CN
C
O
vO
CM
«. C
M
as C
N
r~ «K
m
LO
_*
CD
M
IH CO
tNJ
•"N
en
udoi
ais) e esc
urund ons d
¿a
.H
1—4
CO >—
1 O
-l-l
C
B
cfl ^-'
l-i Lt-I
CD
D.
CD
T4
-O
U
C
10
>i-l d
i-i
O
Pu
• r4 l-l
4J i—
1 C
D
• H
S
VCD
& B
o
• H
H
T
J C
O
3
« U
c/3
3 pa
« /—
\ CD
CO
4-1
i—1 .H
CD
CO
6
0 H
-O
T
3 3
C
3 O
CO
J3
CX
3
>
-N
M
co
3 «M
CD
-a
3 co
.V
4 <1
U>
rl
<0 CO
C
CO
CD
CO
N
I ¡U
<
l-l .H
tu
L
M
0) C
TJ
O
-OC
CD
-H
M
-o
m
>o
U
B
Vi
C
(0 O
O
CO
C
'H
h
O
H nj
14-1 .H
i—l
CD
i—1
.i-l C0
«H
g
c
. 13
-H
^ CD
P
3 B
C
L, •
05 w
CD
\C
D
M
C
h
"O
• O
CO
¡H
P
H
•H
»a CO
(0
•-i C
N
CD
3
i-i co
T
3 T
3 •
H 3
CD
S
(¿
H
N
N
C
CD
4-1 C
C
CD
i-l
CD
CD
CD
•• •«
••
< M
U
eu Découvert' CO
iJ -co •
iH
co P
M Monde 3
T3
4-1 CO
4J W
J 4-1
(D rbook
CO
CD
>• i—
i
CO U
.i-4 4J co
• i-l
4J CO
4J
W B
CO
• H
U
LM
< CO
c o
•
H
4J
CO
z aurces : United
C/3
(75)
Ill 24
de l'enseignement et de préparer la mise sur pied de l'Ecole Nouvelle".
Tant de temps, pour réaliser une réforme certes radicale, est instructif
et doit donner à réfléchir. Il n'y a pas lieu d'invoquer seulement les
pesanteurs historiques et sociologiques pour rendre compte d'un retard
qui ressemble bien à un blocage pur et simple. C'est que, au Congo comme
dans le reste de la sous-région et du continent, l'école est liée à des
enjeux vitaux, en particulier aux yeux du plus grand nombre, la masse
paysanne et les classes populaires des villes.
Pour elles, l'école n'évoque pas le développement ni l'identité
culturelle : non qu'elles récusent ces objectifs, mais parce qu'elles n'y
sont pas associées. Tout projet relatif à l'école doit donc intégrer, une
réflexion spécifique sur la dynamique sociale et sur la mobilité sociale.
Jusqu'à présent l'école ou, plus exactement, le diplôme délivré avec une
parcimonie excessive par l'école ouvrait toutes grandes les portes de la
fonction publique, avec tous les avantages, le prestige, les privilèges et
les possibilités (notamment politiques) qui lui sont, à tort ou à raison,
associés. On comprend ainsi les sacrifices immenses consentis par les fa
milles pour assurer la scolarisation des enfants, mais aussi leur attache
ment passionnel aux diplômes de qualité (identifiés d'ailleurs aux diplô
mes de l'ancienne métropole coloniale, d'où le lancinant problème de
l'équivalence des diplômes africains et européens) car c'est le seul moyen
de promotion et, croyait-on, de sécurité sociale. L'importance de la dé
perdition et des déchets ne change rien à cette vision des choses, compte
tenu des mécanismes de solidarité qui continuent d'opérer tant bien que
mal en milieu citadin ou rural : il suffit que l'un au moins des enfants
scolarisés réussisse à obtenir un diplôme aussi élevé que possible. Cette
situation compromet et condamne à l'échec toute réforme de l'éducation
qui ne concerne que l'éducation et qui ne s'intégrerait pas dans un com
plexe plus ou moins vaste de réformes engageant d'autres secteurs, sinon
tous les secteurs, de la vie du pays. D'ailleurs toutes les enquêtes le
confirment : toutes les réformes qui se limitent au secteur éducatif sont
(76)
Ill 25
Tableau X : Evolution du nombre des enseignants
i. I s : i»vf i - 1 # ' 1 e j r * 3 . Zra rvel * 2 e * * ae j ré c . 3ra l.*v*l -3*<i» d c * r é
: j . - ;^y - ' iv i 1 V 3 1 » 7t 1 v * 5 1 = 7 » 1 9 7 7 1 9 7 8 1979 1 9 8 0 1951 n j '
T « j ; , e r s - f i e l p j r : ¿ C V .. - = e ' - s -i - ? r . )
3 . r „ - c i
c
C ' i J - l í N O 4
: 3 " ¿ o 1
: . J • _ r i a l J I . I " Í I - ' .< ' " J <e : : u 1 t : r - j l í *
¡i:." »
C
* C
9
c
c
Sources : United Nations African Statistical Yearbook
(77)
< - ; * 2 .
1 45
9 * 1 9 - o 3 3
"• Z ? 3
2 5 - Û -
>5
4o50
*a?l 1 90
.1 ; 9 .
215
-*:sc3 5 ? t 9
31 39
. . . :?<c«
; ¿
5 1Ï 3 2 ' 4 !
>25
«.209« 731 223
Z'219 »óC5
3329
. . . 25 12-
5.34 2-13
145
4221.
2302' o3;a
3535
1 lo
2613
o2
• • •
4379
24,46 0938
. . . 1 35
. . .
. . . 0075 3344
25»
4445
24S
24!»3 7521
. . . 2oG
. . .
. . .
5132 3 ' *4
4623
231
2528« J374
397
. . . 279
. . .
M 5 2
931
48D5
2»7«S
.130
444
. . .
. . . 718« 5117-
292
5252
. . .
. . . 303
6997 »899
3 3«
. . . 7'7 »34
9«
. . .
241?
7ÍÍ4 7C7 1 .?
. . .
; O Ó 4
1 3 1 6
. . . » 0 2 2
7 5 2 1 75
. . .
271.6 1 '21
. . . äl6l
320 215
. . .
236«
476
213
527
3088 13*3
. . . 8508
iîê
. . .
346» U 3 7
. . . 1 3002
903 229
. . .
3**1 1587
. . . 11912
887
. . .
. . .
. . . 13041
984
. . .
1 4.!3 20S3 2433
Ill 26
Tableau XI : Evolution du nombre des élèves
et Etudiants
A. 1<t level- 1er degré
Country - Pays 1973
I. 2nd level • 2eae dejrt
1974 1975 197*
C. 3rd level - 3 » M de»re
197» 1979 1910
tudent» - el*»»! COCO)
Burundi
Caaeroon - Caaeroun
Central Afr.ReP. - Rep.Centrafricaine
Cnad - Tchad
Congo
Equatorial Guiñe* - Guinée Equatorial«
Sao Ton« 4 Pfî ne i pé
• - • 335 18
3*2° 44« il
3344 511 25
13
3*82*
2«
14
3790 704 77
3919
"îî
1912
127 11 1
014 111
« 200 1««
19« 13 1
29J 73 3
130 14 1
1074 127
« 21« 20*
193
" 307 il 3
130 14 1
1123 144
7
221 23 1
21J 1* 1
319 102
3
131 13
114« 1*4
234 25 1
211 20 1
330 122
4
142 14
1203 113
9
241 31 1
...
... 34* 137
5
14« 1« 2
«234 199
241 33 1
...
... J59 149
1*0 1« 2
1303 213 11
241 39 2
...
... 313 139
7
17« 19 2
137» 234 «O
24« 4« 2
".'. ... 391 1*1
7 •
20« 19
...
" 2
'". • • •
«07 1*0
114 18 1
398 11 1
121 21 1
317 11 1
129 23 1
402 12 1
130 23 1
434 13 1
141 2« 1
" S 1
142 24 1
51» 14 1
149 27 2
«07 12 1
153 29
703 11 1
...
74 3 13
Sources : United Nations African Statistical Yearbook
(78)
Ill 27
interprétées par les classes populaires comme un moyen diabolique, ima
giné par des politiciens machiavéliques (qui possèdent des diplômes
étrangers et dont les enfants poursuivent tranquillement leurs études
à l'étranger), pour maintenir dans une situation inférieure les gens
issus des classes modestes.
Les perspectives sont cependant beaucoup plus ouvertes qu'on ne
pourrait le croire. C'est peut-être maintenant, plus que jamais, qu'il
faut revenir à la réflexion de fond sur les objectifs et sur le sens de
l'éducation. Car la crise durable des économies et des sociétés d'Afrique
centrale n'est pas sans effet sur l'éducation et la perception qu'en a.aae
jusqu'à présent la majorité de la population. Le débouché privilégié
de la fonction publique et du secteur d'Etat ou bien ne recrute plus ou
même, dans certains pays (Congo et Zaïre en particulier), est tenu par
les "programmes d'ajustement structurel" de licencier (1). Si, comme tout
semble l'indiquer, cette tendance devait durer, elle entraînerait une
reconsidération totale des diplômes, donc de l'organisation et de la
signification de l'éducation. On risque en particulier de trouver une
nouvelle actualité à la philosophie de l'éducation d'un homme comme
Barthélémy Boganda. D'autre part, le processus même de formation et de
reproduction des classes sociales semble entrer dans une phase nouvelle
oü l'occupation de l'appareil d'Etat n'est plus une garantie pour entrer
et pour demeurer durablement au sein des classes dirigeantes.
A la lumière de ces réflexions, il apparaît qu'il faut lire avec
beaucoup de distance les chiffres donnés dans les tableaux VIII, XLX, X,
et XI.- Car ces chiffres escamotent totalement la signification sociale
de l'école, analysée ci-dessus et ses effets sur les niveaux de culture
(1) Compte tenu de la dimension politique et polémique de ces mesures, les chiffres ne sont donnés officiellement dans aucun pays. La "purge" est particulièrement sévère dans l'enseignement supérieur (Zaïre), la fonction publique (Congo et Zaïre), les grandes entreprises (Congo).
(79)
Ill 28
(voir ci-dessous B.4).
Ils indiquent néanmoins des tendances qu'on retrouve dans le
reste du continent : effort financier significatif des Etats (encore que
les chiffres relatifs au Zaïre donnés aussi bien dans les publications
de l'Unesco que dans celles de la CEA laissent perplexe ...) ; développe
ment et généralisation de l'enseignement primaire qui cependant est loin
d'être devenu universel ; médiocrité de l'enseignement secondaire et de
l'enseignement supérieur. Il faudrait cependant des études plus détaillées
pour chacun des Etats pour percevoir l'ampleur des déséquilibres. Prenons
seulement pour finir l'exemple du Cameroun (1). L'effort financier en
faveur de l'éducation y est considérable : 202 milliards de francs CFA
prévus dans le cadre du 5e plan quinquennal (1981/82 - 1985/86) sur un
total de 2300 milliards (soit 8,8%) : cela permet à l'Etat, dont les ins
titutions d'enseignement sont gratuites, d'aider financièrement les écoles
missionnaires et privées ; dans le secteur universitaire, où la France
avait presque tout pris en charge depuis l'ouverture de l'Université de
Yaounde en 1962, la "camerounisation" des personnels et des finances
commencée en 1973 est arrivée à son terme. Si le taux de scolarisation
primaire et secondaire (66%) est l'un des plus élevés d'Afrique, l'anal
phabétisme reste important, surtout chez les femmes (55%, au lieu de 31%
chez les hommes). Surtout, il subsiste de très graves inégalités régiona
les entre d'une part le nord et d'autre part le centre, le sud et les ré
gions côtières : ainsi le taux de scolarisation primaire n'est que de 20%
dans le nord, alors qu'il atteint 100% dans le reste du pays : une poli
tique audacieuse de décentralisation a été décidée, dont les résultats
ne sont pas encore visibles, avec notamment la construction de facultés
universitaires à Buéa, Douala, Dschang et Ngaoundéré ; de même, décidée en
1972, l'harmonisation des systèmes d'enseignement français et britannique
s'est achevée en 1976.
Le Cameroun n'est certes qu'un cas particulier : mais s'agissant
d'un pays relativement privilégié, il permet de bien prendre la mesure des
déséquilibres et des inégalités que les données brutes masquent presque
toujours.
(1) D'après les chiffres pour 1983-1984, donnés par le Ministère de l'Education Nationale, Yaounde.
(80)
Ill 29
III.C. Un instrument privilégié : la communication.
Dans l'ensemble de la sous-région, la communication connaît un dé
veloppement relativement important, qui a d'ailleurs été assez précoce,
du moins dans certaines de ses branches. Aujourd'hui encore, malgré de
nombreuses difficultés, le secteur de la communication fait preuve d'un
indiscutable dynamisme.
CTl. CaractéiTsTn^pres gércéraijesT
Historiquement et actuellement, le développement et l'importance des
médias s'expliquent par les multiples enjeux politiques et stratégiques
qui leur sont liés. Pendant la colonisation, c'est moins l'Etat que cer
tains de ses appareils et certaines institutions qui ont été à l'origine
de la naissance et de l'essor de la presse écrite. Ainsi, à la différence
de pays tels que le Ghana ou le Nigeria, où une presse africaine indépen
dante et florissante - réservée à l'élite intellectuelle et politique,
il est vrai - a vu le jour très tôt (1), en Afrique centrale la presse
écrite a été dès sa naissance et est restée longtemps sous le contrôle
de puissants appareils sur lesquels les citoyens n'avaient aucune prise.
Il y a donc une tradition qui veut que les citoyens consomment, crédules
ou incrédules, une information qu'ils ne produisent pas. Mais la situation
héritée n'a pas été aussi simple : en effet les grandes institutions co
loniales ont aussi instauré une communication en langues nationales, ce
qui lui donnait d'ailleurs une force de persuasion sans précédent. Partout
en Afrique centrale, les Eglises missionnaires ont eu une presse écrite
très active en langues locales. Au Zaïre les choses sont allées encore
plus loin puisque l'armée coloniale (la Force Publique), dont la langue
(1) Voir par exemple, Kimble D. A Political History of Ghana 1850-1928. Oxford, Clarendon Press, 1963. Omu F.I.A. Press and Politics in Nigeria 1880-1937. Londres, Longman, 1978. Les cas du Bénin, du Sénégal et de Sierra Leone en Afrique occidentale, celui de l'Angola en Afrique centrale sont comparables à ces deux-là.
(81)
Ill 30
de travail des soldats africains était le lingala, a eu des journaux
écrits et des émissions radiophoniques en lingala.
Quant à la radio, précisément, son développement a été aussi, du
fait de circonstances exceptionnelles, assez précoce. Ce fut la deuxième
guerre mondiale qui en a précipité le développement. Radio-Brazzaville
a en effet été, dès 1940 et jusqu'en 1944, la radio de la France libre,
qui avait d'ailleurs pris pour capitale la capitale de l'A.E.F. Au Zaïre
voisin, où de nombreux résistants belges, américains, anglais et autres
s'étaient réfugiés, tous les vieux témoins se souviennent d'un développe
ment soudain et spectaculaire de la radio à partir de la seconde guerre
mondiale. La radio s'est donc trouvée parée d'un prestige sans précédent
en même temps que chacun en saisissait le rôle politique majeur.
Du passé au présent, les liens sont nombreux.
D'abord dans le statut juridique de la communication. Dans la prati
que, aucun des Etats de la sous-région ne reconnaît la liberté de la presse
malgré les attentes de l'opinion. Il y a eu en effet, dans l'expérience
vécue par une partie significative de la population, une dizaine d'années
pendant lesquelles la presse a connu une réelle liberté. Cette période
correspond en gros aux cinq dernières années de la colonisation et aux
cinq premières de l'indépendance : on s'aperçut alors que liberté n'était
pas incompatible, bien au contraire, avec qualité.Le durcissement général
des pouvoirs après le milieu des années soixante - à la suite ou non de
coups d'Etats militaires - a partout sonné le glas de cette liberté trop
nouvelle, trop éphémère et trop passagère pour laisser des habitudes. Il
paraît inutile de commenter ici les lois sur la presse : en droit, elles
précisent les conditions d'autorisation et d'interdiction des journaux,
magazines et revues ; en fait, dans le cadre de régimes de parti unique
et, parfois, de pouvoir personnel, écrite, parlée ou visuelle, la presse
est soumise à un contrôle étroit des pouvoirs et, en définitive, à une
véritable censure. Dans quelques rares cas, certaines institutions arri
vent à imposer un journal écrit, le plus souvent hebdomadaire ou mensuel,
(82)
Ill 31
indépendant. Prenons le cas extrême du Congo, république populaire,
dirigée par un parti d'inspiration marxiste, où l'Eglise catholique
publie un hebdomadaire d'origine ancienne et fort réputé : La Semaine
Africaine. Cette unicité de fait de la communication pose de graves pro
blèmes quant aux perspectives de développement : dans la mesure où celui-
ci implique une adhésion consciente, active et prolongée de la population,
comment susciter et entretenir cette nécessaire adhésion par une presse
qui ne se voit pas reconnaître ou qui ne tolère pas la liberté de débattre?
Ensuite le système et l'organisation générale de la communication tra
duisent des déséquilibres graves qui sont souvent, presque toujours, une
conséquence de la faiblesse des moyens. Chacun des pays de la sous-région
possède une agence de presse : Agence Congolaise d'Information, Agence
Zaïre Press, Société de Presse et d'Edition du Cameroun, Agence Burundaise
de Presse, Agence Tchadienne de Presse, Agence Gabonaise de Presse, etc..
Chacune publie un bulletin, en principe quotidien : mais celui-ci se réduii
souvent à présenter ou à commenter les activités du gouvernement et l'agen
da du chef de l'Etat ; parfois il commente les nouvelles importantes de
l'étranger. En dehors de l'AZAP ( Zaïre), qui entretient par intermittence
un bureau à Bruxelles, aucune de ces agences de presse étrangèrestlne sont
présentes et actives. Ce sont elles qui fournissent 100% des nouvelles
concernant les pays développés et les grands problèmes économiques, poli
tico-militaires et culturels mondiaux : beaucoup d'informations relatives
aux pays africains ou du Tiers-Monde transitent encore par elles ; ainsi,
un sondage fait par nous dans la presse écrite et parlée en juillet et
août 1987 montre que plus de 90% des informations concernant le Tchad
viennent de l'A.F.P. (Agence France Presse). Il y a là une dépendance
catastrophique que la plupart des Etats, compte tenu de leurs moyens li
mités, n'ont pas la possibilité de briser. D'autres faiblesses apparais
sent : la reprise, sans altération, des nouvelles venant de l'étranger,
ce qui précipite la déculturation, voire l'aliénation culturelle ; la
néglicence des problèmes liés au développement économique et social de
chaque pays. Ces faiblesses sont cependant plus ou moins graves selon le
média considéré.
(83)
Ill 32
C.2. La radio : emancipation et blocages.
Le tableau qu'offre la radio est très contraste : les difficultés
nombreuses, que se plaisent à évoquer les hommes de radio eux-mêmes, sont
heureusement contrebalancées par des réalisations et des tentatives qui
donnent toutes les raisons d'espérer en un avenir brillant (1).
Il faut d'abord partir d'un cas précis, que j'ai choisi en fonction
des opportunités et se reporter à l'annexe III qui présente les program
mes de radio de Libreville II (2). Mis progressivement au point, ces pro
grammes sont ceux de 1986 et ne semblent paspavoir fondamentalement changé
depuis. On constatera d'abord la très bonne couverture horaire des émis
sions qui prennent littéralement les gens au sortir du lit (5h25 du matin)
pour se prolonger, pour les rares "couche-tard", jusqu'au-delà de minuit.
Il faut remarquer aussi que, même si les émissions se font en français -
ce qui pourrait constituer un facteur très grave de dépendance - les pro
ductions nationales l'emportent très nettement sur les "productions de
coopération" : 5 tranches sur 41 le lundi ; 3 sur 42 le mardi ; 4 sur 42
le mercredi ; 9 sur 41 le jeudi ; 4 sur 42 le vendredi ; 4 sur 41 le sa
medi et 5 sur 42 le dimanche. Par "production de coopération", il faut
entendre ou des émissions réalisées à partir de dossiers complets fournis
par des radios étrangères que les animateurs n'ont, en somme, qu'à mettre
en forme vocalement ; ou des émissions déjà montées par des radios étran
gères et reprises en tout ou en partie par la radio nationale. Dans le cas
(1) La plupart des réflexions qui suivent viennent de constatations et d'entretiens faits avec les responsables et, surtout, les producteurs nationaux au cours de missions que j'ai menées pour R.F.I. en 1981, 1983, 1984 et 1986.
(2) Ce dossier m'a été aimablement communiqué par le service de coopération de R.F.I. (Radio France Internationale).
(84)
I 23
00
o c l-í a CD
en
0)
et
p- o 3 CO
er
3 H-
CA
I»
3 D
C eu
H'
1 CD
CO
ft CU
ei n
en
et
H
- c CD
T3 O c •1
H-
-Q
C CD
"O
O l-i ci
H-
CD
3=
i-h
1 H-
J3 C
CD
Q.
C o CD
3 et
hj CD
3»
C
et
i-J
CD
W CD
3
'
i-vi
3»
M 33
m 00
o CD
O I-»
O O h->
O CO hi r\j en
\-*
CO
o hi 4^
O I-» en
O r\3
o o ro
CJl o
—1
o X > o VJ
o VJ
o VJ
en
VJ
CT)
CO
O 00 en
i-> o o i-* o o hi
hi o h*
h-i en
en
3a
O —1
OME ET PRINCIPE 00
CD
H»
O ro
o ro
t-»
PO
r\j ro
ro
ro
co
ro
£>
ro
en
33
CZ
33
Z O 33
-fe
CD
en
co
CD
en
vj o co
o co
en
t-» en
o hi en
O H>
en
en
t-> en
co
cr>
cz:
i-i z m E EQUATORIALE CT)
O vj
O VJ
00 œ o œ ro
00 CT}
CD
O hi O o hi o en
h»
o CD
o 33
03
O z CD
O CD
O CD
PO
CD
00
CD
en
CD
CD
CD
CD
CD
CD
CD
00
hi
O ro
o o z
CD
o VJ
en
co
O œ hi
CD
co
CD
CO
CO
o CD
PO
CO
00 co
00
hi o *. o m z -H
33
AFRIQUE CD
CJl
vj
O vj
O •vi
CJl œ o i-> o en
i->
i-» o h-> ro
o hi co
O i-> co
vj
o 33
3 m 33 OUN PO
PO
CJl
PO
PO
VJ
PO
co
PO
PO
00
VJ
PO
.fc.
o en
o o vj en
O vj CD
O vj 00 o 00
hi o
CO
cz
33 CZ z i-> o o M o o I-* o o hi o en
hi o vj
h->
i-i
O i-»
CJl o i-»
CJl o hi
CJl
PO
hi
CJl en
>-*
CO
-vi co
hi CO
vj
Ji.
hi co
vj en
hi CD
•vi
CD
hi CD
vj
vj
hi CD
vj
00
hi CD
vj
CD
hi CD
00
O hi
CD
00
t-i
hi CD
00 PO
33
CO
CD
3 O
h)
O
CD
O
w
Q.
CD
13
O CO
C
t CD
cn
co
ro
O
(85)
Ill 34
du Gabon, "radios étrangères" désigne, pour 75% des émissions concernées,
Radio France Internationale (France), les autres émissions étant fournies,
toujours en français, par la République Fédérale Allemande, le Canada
et même la Voice of America. Ajoutons d'ailleurs que, dans le cas de
R.F.I., beaucoup des émissions fournies aux radios nationales africaines
ne font que transiter par R.F.I. puisqu'elles sont l'oeuvre de réalisateurs
africains et viennent souvent des radios nationales africaines ; ainsi,
assez curieusement, des radios étrangères au continent contribuent à la
coopération radiophonique au sein du continent. Ce ne sont d'ailleurs pas
les émissions les plus extraverties quant à leur contenu : si "Fenêtre ou
verte sur ..." se contente de faire connaître le pays d'origine ou l'ins
titution productrice de l'émission (R.F.A., Canada, ONU...), des émissions
comme "Découvertes", "Mémoire d'un continent", "Concours théâtral" ou
"Grands moments du tiers-monde", participent à la promotion des cultures
anciennes et actuelles du continent africain. Enfin, il est nécessaire de
souligner que les productions nationales font la part trop belle aux "in
formations" et aux "animations" trop chargées de politique partisane aux
dépens des émissions de service (notamment les très populaires "avis et
communiqués") et, surtout, des émissions que, faute de mieux, on pourrait
qualifier d'émissions de développement (magazine de la femme, magazine
des éducateurs, service-santé). Tous les entretiens avec les hommes de
radio de la sous-région confirment que le cas gabonais n'est qu'une va
riante, peu éloignée de l'original, d'un modèle général.
Parmi les problèmes incriminés par les professionnels, il y a d'abord
et avant tout l'insuffisance des moyens matériels qui explique bien des
choses : le manque dramatique des outils de travail, tous importés de
l'étranger (magnétophones, microphones, bandes d'enregistrement, etc...),
fait que les rares moyens disponibles sont mis au service de ce qui paraît
urgent et essentiel, c'est-à-dire le politique. Cela explique aussi qu'à
peine diffusés, les enregistrements sont effacés puisqu'il faut utiliser
les bandes à autre chose : les exemples sont déjà très nombreux qui mon
trent que les pays d'Afrique centrale (et sans doute d'ailleurs) se pri
vent de leur mémoire radiophonique, alors que les pays développés stockent
(86)
Ill 35
toutes les informations dont ils disposent sur l'Afrique : cette situa
tion, qui se vérifie aussi pour la télévision et la presse écrite, fait
déjà qu'il faut parfois recourir aux archives des pays développés pour
avoir des éléments concernant la sous-région. Au nombre des problèmes
perçus par l'opinion publique figure la surpolitisation de ce média, qui
rend compte à la fois d'une dépendance excessive à l'égard du pouvoir po
litique et de la part quasi-exclusive réservée aux informations nationales:
d'où, parmi les élites intellectuelles et même politiques, le discrédit
relatif des radios nationales alors que les radios étrangères bénéficient,
au sein de cette catégorie sociale, de taux d'écoute élevée.
Cependant, la radio reste le média le plus suivi en Afrique centrale
(voir tableau XII). Dans les dix Etats de la sous-région un effort réel a
été fait dans le sens de la décentralisation ; certes, faute de moyens, les
stations provinciales se contentent de reprendre en langues locales, les
informations données en français par la radiodiffusion nationale ; mais
dans quelques cas, comme au Cameroun (où il existe sept stations provin
ciales), on assiste à la production d'une véritable information locale,
théoriquement plus proche des préoccupations du peuple.
Ainsi se trouve posée la question de la communication pour le dévelop
pement, en ce qui concerne ce support privilégié qu'est la radio. Disons
d'abord qu'à examiner les programmes, le développement n'apparaît pas comme
la préoccupation principale des radios d'Afrique centrale : celle-ci reste
l'information et le divertissement. Il a cependant été tenté des opérations
spécifiques de radio rurale aux fins de promouvoir le développement écono
mique.
Au Cameroun, deux expériences ont vu le jour, à peu près à la même
époque (milieu et fin des années 1970), qui ont donné des résultats tout
à fait contradictoires (1). Toutes les deux ont associé les mêmes parte
naires camerounais (Radio Cameroun et ses stations provinciales, le Bureau
national et les bureaux provinciaux de la production agricole) et étrangers,
(1) Entretiens avec des participants de cette opération réalisés à Paris en août 1987.
(87)
Ill 36
en 1'occurence français (l'OCORA, Office de Coopération radiophonique, et
la BDPA, Bureau pour le développement de la production agricole). Dans un
cas l'expérience a réussi, dans l'autre non. Là où elle a réussi, en zone
cacaoyère, elle a été menée sur dix mois : un calendrier initial a été
diffusé, puis des parties en ont été régulièrement répétées à l'antenne ;
chaque jour, on donnait des conseils et des dossiers, illustrés par des
proverbes, des contes et des adages locaux ; un concours du meilleur plan
teur a été organisé, tout comme on a diffusé le calendrier du meilleur
planteur. Résultat : 100 000 tonnes de cacao. En revanche, les mêmes tech
niques, utilisées dans le nord n'ont produit aucun effet : on était en
région cotonnière et, surtout, les responsables locaux, tant à la radio
que dans les services agricoles, se sont peu investis dans l'opération. La
question principale n'est donc pas celle des techniques car celles-ci sont
connues et dépendent des moyens qu'on veut y mettre ; elle est plutôt celle
des hommes, c'est-à-dire celle de la mobilisation des agents de vulgarisa
tion qui, par ricochet, peut entraîner la mobilisation des énergies pay
sannes (1 ) .
C.3. Splendeurs et misères des autres médias.
Comparés à la radio, les autres moyens de communication apparaissent
bien médiocres dans leur production et leur apport à la problématique du
développement économique et social, même si leur support visible semble
plus impressionnant.
Cela est vrai d'abord pour le dernier venu, la télévision. Ce n'est
pas peu dire : dans un continent où la télévision est peu développée,
l'Afrique centrale fait figure de parent pauvre. Un Etat aussi grand que le
Zaïre ne bénéficie que de 10 000 postes de télévision (voir Tableau XIII).
(1) Voir aussi Querré, F. "Radio rurale au Burundi : une solution radicale" in Multiplex (R.F.I.) n°6, juin 1979 et Ayikoué, Fidèle "La radio rurale en questions (séminaire du CIERRO, Centre interafricain d'étude en radio rurale", Multiplex n° 1, 1985, pp. 42-50.
(88)
111-
37
co
o c l-i n
CD
m
co
D
o
CO
et
m
et
H
- co
et
H- n
0)
CD
0)
i-J
CT
O
O
7s
" CD
CO
CO
M
ï»
1—1
33
m
j i-»
o
l-i O o
"co
o
CO
o
-c*
CT
cz
M
•z
. EE EQUATORIALE o
o
h* K>
O
O ro
« 00
ro
00
CD
ï»
co
o
z 1,2 C
D
H»
O ro
<* -C»
l-i
CD
H»
00
O
O
Z CD
O
0,4 1,8 CO
en
CO
--vi
O
-Ci
I-i
<m
en
ro
« co
ro
«• co
o
m
2 -1
RAFRIQUE o
o 0,7 l-i O o
o
"co
o
« -C*
CD
C
D
en
I-i
CD
o
l-i 980 I-i CD
0
0 I-i
I-i co
en
U
l
I-i
CD
J o
l-i CD
0
0 o
l-i CD
C
O
I-i
Nomb CD
CD
n milli CD
l-J co
z ambre •Q
O
C
I-)
l-i O o
o
CT
Q
] bitan et
CO
3=»
CO
O 3 CT
>-l
CD
O.
CD
TJ O CO
et
CD
CO
Q.
CD
et
CD<
H-1
CD>
<
CO
H-
O
3
(89)
Ill 38
alors que des pays moins étendus, moins peuplés et réputés moins riches
en possèdent sensiblement plus, le Ghana, le Kenya et la Zambie 70 000
chacun ; le Soudan 107 000. Le nombre de téléviseurs pour 1000 habitants
est encore plus éloquent puisque les Etats d'Afrique centrale se retrou
vent au bas du tableau continental juste devant des pays tels que le
¡?zambique (0,1) ou la Tanzanie (0,4). Le mieux équipé, le Gaixfn - avec
18 postes pour 1000 habitants - ne figure qu'au lie rang d'un échantillon
de 37 pays africains retenus par les statisticiens de l'Unesco. Ces chif
fres insignifiants sont à rapporter aux bas revenus dont la population dis
pose et au coût élevé d'un bien qu'aucun pays de la sous-région ne produit :
le téléviseur reste donc un produit de luxe, exclusivement réservé aux
villes les plus importantes et, dans ces villes, aux catégories sociales
aisées. Il est donc significatif des choix et des modèles de référence
des Etats de voir que des moyens relativement importants sont investis
pour le plaisir d'une infime minorité : car, à la différence de la radio
qui, en particulier dans les zones rurales, s'écoute dehors en compagnie
de voisins, la télévision se regarde chez soi, dans 1' lAtimité de la
famille. Il y a donc, dans le fait même de posséder une télévision, au-
delà du signe de richesse relative, un effet - à moins que ce n'en soit
la manifestation - sur les rapports sociaux et les modes de vie. Quant au
contenu, nul média en Afrique centrale n'est aussi extraverti, aussi dé
pendant et aussi peu créateur que celui-ci. Une indice parmi d'autres :
il a été impossible d'obtenir des programmes précis, en dehors des heures
de diffusion du journal. Avant et après le journal on se contente le
plus souvent de "balancer", pour reprendre le jargon des professionnels,
des films ou des feuilletons étrangers, des émissions "culturelles" étran
gères (émissions de variétés, découverte de la nature ou des performances
techniques de tel ou tel pays), voire des débats politiques étrangers. Si
l'on tient compte de ce que les émissions proprement nationales ne sont
le plus souvent que des retransmissions (concerts de musique, pièces de
théâtre, événements sportifs ou religieux), il apparaît qu'il n'y a pas
encore de véritable production. Aussi n'y a-t-il pas lieu de s'étonner
(90)
Ill 39
que plusieurs pays aient tardé (le Cameroun jusqu'en 1985) et tardent
encore (le Pu'anda) à aggraver leur endettement pour un luxe jugé par eux
inutile.
Si elle est plus ancienne, la presse écrite n'est guère mieux lotie.
Ici encore la question n'est pas celle des hommes, souvent expérimentés,
techniquement capables, croyant en leur métier. Elle est celle du contexte
et de l'environnement socio-politiques. Le fait que la presse soit écrite
la coupe irrémédiablement de toute la portion analphabète de la population.
Le fait qu'elle soit écrite en français lui aliène ceux qui, même alphabé
tisés, maîtrisent mal cette langue. Comme la télévision, elle concerne
donc en Afrique centrale une catégorie très restreinte de la population
et cela d'autant plus que c'est un produit coûteux (1) : les informations
pratiques dont les gens ont besoin sont données gratuitement par les
"avis et communiqués" radiophoniques. Quant à la politique, elle est à la
fois trop présente et trop absente : trop présente parce qu'elle fait
constamment la "une" des journaux, trop absente parce que les informations
données sont univoques, unilatérales. Quant à la problématique nationale
de développement elle est absente des grands titres quotidiens ou hebdoma
daires : seules les revues spécialisées, à la diffusion nationale très
restreinte, lui consacrent des développements substantiels ; la plus
importante - si l'on écarte les revues universitaires - est sans doute
Zaïre-Afrique, fondée en 1961 (10 numéros par an, à raison de 5 500 exem
plaires en moyenne par numéro, servis essentiellement par abonnement). Le
cas de Zaïre-Afrique en celui, évoqué plus haut, de la Semaine Africaine
de Brazzaville permettent de souligner le dynamisme de la presse "alterna
tive" : partout où elle existe, elle répond aux exigences à la fois de
précision, d'exactitude et d'équilibre, ce qui lui assure la fidélité d'une
(1) Malgré les apparences, la dépendance technologique de la presse écrite est dramatique : en dehors des compétences, qui sont nationales, les journaux importent tout ce dont ils ont besoin pour exister : papier, machines imprimantes et mène informations fournies par les grandes agences.
(91)
Ill
39
bis
•Q
rr C
H-T
3
3 C
i-t
rr rt
> rr
H
- O
rr
••
C
rt
n rr
H-
H-
Dl
S S
C
Hl
C
Hl
O
rt
•o o 3
O
CL
C
S CD
3 «
§o c
cr
3
« 3- 01
o-
l-l 0)
n>
rr
en
n>
D.
C
rr H
- 3
Ol
B
3 H
- (u
rt
313
. C
TJ
rr
01
H
- C
§ 3 H
-D
. in
C
(n
(5
rt S
tn o c i-i
n CD
a.
i-i
3 0*
3 H
- C
3
t-C
H
-
H-
11
o 3 m
rr
a.
n»
a-I—'
to
01
3 01
S> n o 3 en
rr 01
rr ro
i-i 01
.Û c ro
SCO - Sta et
H-
i r -«.
II) CT U
7C-
M
3»
l-l 33
m
I-* CO
1 en
tn
ro
O
O 1 -Ci
tn *>
tn to 1 I-» tn
i->
(SI
-H
O
T I>
O 1 *. .&.
.t. 1 1 l I-* en
i i i i
33
C 3>
Z. i i-> i i-k
O C-
l-H ^ EE EQUATORIAL m
i i ro
ro
i o ro
i o ro
i i i O
r-1
i i i i-» i i i i
C7> 3»
CO
O :z i H'
t->
l-i 1 1 1 I-»
tn i i -Ci
o r>
Ü en
Ü
CO
i i->
i-> i i i i i i i i
n •c
-<
m ROUN ro
ro
to ro
h-»
j ro
tn
ro
œ
co
tn co
co
co
^
CD
cr
•
33
CZ NDI i-* i-k h-»
ro
O « CO
I-»
—
tn
i i o i-> 0,4 i i
i-»
CD
^J
O
197 tn 197 CD
198 ro
i-»
CD
•v
l O
I-»
CO
^1
tn
i->
CD
-J
CD
I-»
CD
œ
ro
i-» co
-vl o 1975 i-»
CD
CD
h-'
CD
C
O
ro
Nomb H.
CD
3 3 H-
I-i I-1 H-ers -a
o ur 1000 3"
m
cr
H-tants
CD
cr
x CD
O
C 1-1
3 01
C X JD
C o et
p-
Q.
H-
CD
3 C/l Q.
CD
—1
H-
>i eu
CQ
CD
*—«
CD
C/)
et
H-
3 0)
rt H'
O
3
•-1
H-
.• C
CD
C-)
CD
3 rt i-l 01 (-" CD
(92)
Ill 40
clientèle nombreuse parmi les elites et au-delà de ses frontières intel
lectuelles et idéologiques ; car cette presse, souvent d'inspiration catho
lique ou protestante, est soutenue par de puissants appareils religieux.
Citons par exemple au Cameroun Cameroon Panorama (mensuel catholique, 3000
exemplaires), L'Essor des Jeunes (mensuel catholique, 3000 exemplaires),
Le Serviteur (mensuel protestant, 3500 exemplaires), Nleb Bekristen (vieux
mensuel catholique, fondé en 1935 et publié à environ 6000 exemplaires en
ewondo). Les titres sont également nombreux au Zaïre : fondé en 1974,
Telema, revue trimestrielle catholique rédigée en lingala, tire à environ
3000 exemplaires ; il existe aussi une revue Documentation et Informations
Protestantes (DIP) et une autre Presse et Information Kimbanguiste (PIK)
dont le tirage n'est pas connu.
Ainsi la communication en Afrique centrale apparaît comme l'effet ou
le produit d'une situation, dont ses faiblesses expriment le blocage et la
crise, plus que comme un facteur de transformation économique et sociale.
Même ses incidences dans le domaine des mentalités et de la culture ne sont
que l'expression d'une situation générale caractérisée par 1'extraversion.
On retrouve ici encore la question déjà évoquée de l'urgence, pour les
décideurs, de définir clairement des voies et des modèles de développement
qui permettraient à la communication de jouer pleinement son rôle grâce
aux moyens modernes importants dont elle dispose.
(93)
Ill 41
III. D. Un secteur dynamique : la culture.
On prendra la culture ici dans une acception relativement large qui,
tout en tenant compte des niveaux sur lesquels il est le plus courant et le
plus facile d'agir (ceux des politiques culturelles et des productions cul
turelles individualisées), puisse faire une grande place aux pratiques, sou
vent collectives et populaires, moins formalisées. De ce point de vue, il
est impossible d'esquisser la moindre perspective pour l'avenir sans l'en
raciner dans une profondeur historique relativement grande : car, sur un
siècle ou un peu davantage, dans des contextes économiques et socio-politi
ques au moins aussi difficiles que celui de la crise actuelle, les peuples
d'Afrique centrale n'ont pas cessé de déployer une remarquable créativité
dont les effets se sont accumulés pour expliquer le foisonnement actuel.
D.I. Le dernier âge précolonial.
Il n'y a rien de plus approximatif ni de plus fou que les thèmes et les
concepts les plus couramment employés pour parler de la culture en Afrique
noire : en particulier celui de l'unité culturelle du continent et celui
de l'opposition quasi conflictuelle entre "traditions" et modernité". Il
est clair, par exemple, que l'Afrique centrale a élaboré et expérimenté
des formes culturelles sensiblement différentes de celles de l'Afrique
sahélo-soudanienne ou de l'Afrique arabo-swahili, ne serait-ce qu'à cause
du facteur religieux : animisme ici, islam là-bas. Mais, d'autre part, pour
s'en tenir seulement au "dernier âge précolonial" (disons, en gros, à la
deuxième moitié du XIXe siècle), il est clair qu'il n'y a pas en Afrique
centrale une quelconque rigidité ou de l'immobilisme dans les pratiques ou
les attitudes culturelles. La problématique actuelle de l'internationali
sation de l'échange des biens culturels peut tout à fait s'appliquer mutatis
mutandis à l'Afrique centrale d'il y a un siècle. On constate alors
partout un élargissement spectaculaire du cadre de vie et de référence
(94)
Ill 42
des gens dans la mesure où l'Afrique centrale se voit pénétrée par des
influences lointaines, venues de l'océan indien ou de l'Europe(l). Elle
ne reste pas cependant passive face à ces influences puisqu'elle y opère
des tris et que, pour résister aux effets dévastateurs de cErtaines d'en
tre elles, elle s'attache constamment à innover. Ce dynamisme culturel est
particulièrement visible dans quelques domaines : langues, religions,
structures socio-politiques et tentatives de réforme globale.
Dans le domaine linguistique, on assite alors au déclin des langues
locales, enracinées dans un terroir restreint et à la diffusion limitée. Il
ne s'agit pas le plus souvent d'une disparition pure et simple : parfois
la langue ancienne s'adapte, incorporant des éléments des langues nouvelles
ou s'incorporant plus ou moins largement dans celles-ci ; parfois, elle
parvient à se préserver, quitte pour ses locuteurs à devenir bilingues ou
même trilingues en maîtrisant les langues nouvelles. C'est qu'il s'agit
d'une époque à laquelle, avec les développements impétueux des échanges,
tout circule à une allure rapide : les produits, les idées et, avec eux,
les hommes. Justement ces nouvelles langues sont d'abord des langues de com
merce, liées aux gens du voyage. Prenons seulement deux exemples. A un
bout de l'échantillon, il y a le swahili : langue et structure bantu (qui
de ce fait pouvait 's'adapter à tous les terroirs de l'Afrique centrale)
et comportant de nombreux éléments arabes. A l'autre bout, on trouve le
lingala formé par l'amalgame des langues de peuples bantu pratiquant le
grand commerce du fleuve Congo/Zaïre. Comme preuve de ce que le passé ris
que ici d'informer l'avenir, il faut constater qu'au Zaïre, par exemple,
une partie de plus en plus grande de la culture populaire s'exprime en lin-
gala, tandis que dans l'est -du Zaïre, au Burundi; au Fti/anda et, surtout,
en Tanzanie et au Kenya, la culture populaire et la culture lettrée tendent
à s'exprimer en swahili.
Sur le plan religieux, on assiste d'abord, sur les marges de la sous-
région, à un développement relativement fort de l'islam (1). Certes
(1) Voir ci-dessus, chapitre I, Bl.
(95)
Ill 43
l'adhésion à l'islam n'était pas fondée, dans la majorité des cas, sur
des considérations strictement religieuses : dans la mesure où les commer
çants esclavagistes et les nouveaux chefs politiques se revendiquaient de
l'islam, tous ceux qui voulaient survivre ou réussir trouvèrent intérêt à
embrasser à leur tour l'islam. Cependant l'animisme ne s'est pas trouvé
menacé pour autant : on assiste même, au contraire, à une mise à jour des
croyances anciennes et à un véritable renouveau des cultes.
Quant au terrain politique et social, il y a partout un éclatement des
lignages, des clans et des ethnies (l).£>e nouveaux modes de sociabilité
et de référence au politique se développent. Le principal gagnant n'est
sans doute pas l'Etat qui certes tend à englober des espaces de plus en
plus grands. L'opposition Etat/ethnie est sans doute trop schématique pour
exprimer cette mutation dont les grands bénéficiaires sont les hommes nou
veaux, souvent déracinés (au sens propre et figuré, en tant que fossoyeurs
des moeurs anciennes), initiateurs de pratiques inédites, enrichis dans le
commerce et capables, par l'accumulation de moyens de domination et la
mobilisation de nombreux dépendants, de fonder des Etats d'un nouveau type,
souvent autoritaires mais aussi soucieux d'efficacité et de rationalité (2).
Cependant^3 démocraties villageoises ont réussi ici et là à se préserver.
Et ce sont ces deux structures - Etats rénovés et démocraties revigorées -
qui allaient opposer une vive résistance à la colonisation. Quant aux
Etats, leur souci de rationalité et d'efficacité touchait bien sûr à l'éco
nomie (il fallait produire davantage et accumuler le maximum de richesse
pour être le plus puissant possible) ; mais il concernait aussi la culture :
c'est ainsi qu'au Cameroun le sultan Njoya fonda sa propre écriture aux
fins de mieux gérer son royaume (3).
(1) Voir Amselle, J.L. et M'Bokolo, E. (eds) Au coeur de l'ethnie. Paris La Découverte, 1985.
(2) J'en ai étudié un exemple dans Msiri. Paris-Dakar, A.B.C.-N.E.A., 1977.
(3) Voir pour plus de détails Tardits, C. Le royaume bamoun. Paris, Editions de la Sorbonne, 1973.
(96)
Ill 44
D.2. L'intermède colonial.
Les trois quarts de siècle de domination coloniale représentent en eux-
mêmes un durée assez courte. Mais leur importance est capitale en matière
de culture car ils ont érigé des constantes dans les rapports des élites
et de l'Etat à la culture en même temps qu'ils ont vu ëclore des formes
de culture très florissantes aujourd'hui. Il est donc nécessaire d'avoir
une approche globale et, par conséquent, moins manichéenne que les analyses
courantes des politiques et des pratiques culturelles pendant la coloni
sation.
Certes, dans le contexte de l'Afrique centrale, il y a eu une constante
des attitudes coloniales qu'un seul mot peut résumer : le mépris. Il n'y
eut pas en Afrique centrale ces velléités d' "administration indirecte"
qui ont fait que, dans certains territoires britanniques, certaines tradi
tions culturelles ont été préservées, parfois valorisées. D'autre part, les
colonisateurs n'ont pas trouvé en Afrique centrale ces belles architectures
religieuses (islam) ou politiques (Etats de tradition ancienne)qui ailleurs
ont suscité quelque considération de leur part. Ce mépris généralisé impli
quait théoriquement une politique de la table rase entreprise par l'admi
nistration et les missions chrétiennes. Cette politique se heurtait cepen
dant à de nombreuses résistances, tant culturelles que franchement politi
ques, qui en compromettaient l'efficacité. En même temps ces résistances
manifestaient l'existence d'une réalité dont il fallait bien tenir compte.
Aussi, avec le temps, un assouplissement relatif intervint-il dans les
attitudes coloniales. L'ethnographie coloniale apparut au Zaïre et au
Cameroun dès les débuts de la colonisation, mais beaucoup plus tard dans
les autres pays de la sous-région : quelle que soit la valeur individuelle
des travaux publiés dans ce cadre, l'effet global de cette ethnographie
fut de folkloriser les cultures d'Afrique centrale : c'est-à-dire, ayant
nié leur dynamique et leur caractère évolutif, les ayant enfermées dans un
cadre qui bloquait toute possibilité de transformation, de les fixer dans
une rigidité, une immobilité, une éternité qui étaient contraires à leur
(97)
Ill 45
génie. Le support le plus visible de cette folklorisation fut l'ensemble
des musées ethnographiques de création coloniale. Cependant, à partir des
années 1930 environ, des voix de plus en plus nombreuses se sont élevées
pour affirmer l'existence d'une véritable culture africaine et en exiger
la reconnaissance avec toutes les conséquences que cela impliquait. Ces
voix étaient d'abord bien sûr africaines : on pense à tous ces "përes de
l'indépendance" qui, à l'instar de Léon Mba au Gabon ou de Fulbert Youlou
au Congo, ont commencé leur carrière en essayant d'expliquer et de défendre
les valeurs, alors condamnées, du "fétichisme" (1). Mais ces voix s'élevè
rent aussi parmi les coloniaux eux-mêmes, par exemple de la part de Félix
Eboué, gouverneur de l'A.E.F. (1940-1944) et surtout du missionnaire belge
opérant au Zaïre, Placide Tempels : dans un livre célèbre, dont l'une des
toutes premières éditions françaises fut publiée à Paris par Présence Afri
caine en 1947 - La philosophie bantoue - celui-ci s'efforçait de démontrer
que les Noirs d'Afrique centrale possédaient, plus que des croyances inco
hérentes, une véritable philosophie, définie comme un système cohérent
et logique de pensée. Il faut remarquer que le livre, fondé sur la connais
sance que le missionnaire avait de 1'un des peuples du Zaïre, prétendait
s'appliquer à tous les peuples bantu. Dans cette vision uniformisante,
il y avait d'abord, au plan intellectuel, une simplification abusive,
mais aussi, dans ses prolongements pratiques, une tendance grave, au nom
d'une unité hypothétique et postulée mais pas prouvée, de nier les diffé
rences culturelles entre les peuples d'Afrique centrale.
Contrairement à une idée commode, les Africains ne se sont pas conten
tés de subir en victimes passives la destruction brutale ou insidieuse de
(1) Ainsi F. Youlou, tout en étant abbé; a publié un essai sur L'Art noir ou les croyances en Afrique Centrale (Brazzaville, s.d.) qui essayait de rendre compte du "fétichisme". L. Mba de son côté a été arrêté et condamné à la déportation pour participation aux activités fétichistes et jugées criminelles d'une société secrète.
(98)
Ill 46
leur culture. En fait, même si le calcul des colonisateurs a été, en
Afrique centrale, de faire table rase des cultures existantes, la situa
tion coloniale semble au contraire avoir paradoxalement exacerbé la créati
vité culturelle des Africains, le plus souvent dans le sens d'une résis
tance à la domination étrangère. Il faut opérer ici deux distinctions uti
les : entre culture d'élite et culture populaire d'une part et entre cultu
re d'assimilation, voire de collaboration et culture de résistance.
Les élites d'Afrique centrale, formées et façonnées par l'école colo
niale, représentaient ce milieu que les colonisateurs appelaient avec con
descendance "évolué" et qui correspond en réalité à la petite bourgeoisie
administrative. Elles ont produit une culture de synthèse à travers des
textes écrits et relativement nombreux qui témoignaient de l'adoption, par
fois passionnée, de la langue française. Si les premiers textes ont paru
dans 1'entre-deux»guerres, ce fut à partir de 1945 environ qu'une véritable
littérature commença à voir le jour, avec ses thèmes privilégiés, ses modes
et ses manies, ses courants (1). Deux revues, patronnées l'une et l'autre
par le pouvoir colonial, ont servi de creuset à cette littérature naissante.
Il est intéressant de souligner, dans une réflexion sur les possibilités
et les réalités de la coopération interrégionale, qu'elles ont été toutes
les deux dirigées et animées par deux intllectuels de Kinshasa. Ce fut
La voix du Congolais publiée à Léopoldville(Kinshasa) et animée par le poète
et romancier Antoine Roger Bolamba qui est encore vivant ; pour les quatre
territoires de l'A.E.F. (Centrairique, Congo, Gabon et Tchad) et, secondai
rement pour le Cameroun, les Français lancèrent à Brazzaville la revue
Liaison dont la direction échut à un nouvelliste et romancier de Kinshasa,
poursuivi pour agitation nationaliste et réfugié dans la capitale de l'A.E.
F., Paul Lomami Tshibamba. Souvent complaisante à l'égard de la situation
coloniale qu'elle feignait parfois d'ignorer, cette littérature sut aussi
se montrer critique et d'une férocité redoutable si l'on en juge par la
(1) Voir notamment Kadima-Nzuji La littérature zaïroise. Paris, L'Harmattan, 1985.
(99)
Ill 47
belle nouvelle de Lomani-Tshibamba Ngando, véritable modèle d'une litté
rature qui se veut de combat, mais aussi de qualité.
Quoique active, cette élite représentait une infime minorité dans la
masse de la population composée essentiellement de paysans et d'un petit
prolétariat urbain naissant. Ces classes populaires ont aussi fait preuve
d'une indiscutable créativité culturelle. Dans le monde rural la chose la
plus spectaculaire fut la vitalité des traditions religieuses et des nou
veaux messianismes et syncrétisraes qui animèrent des mouvements de résis
tance variés : guerre de Kongo Wara pendant les années 1920 en Centrafrique
s'appuyant sur les croyances animistes ; kimbanguisrae au Zaïre et au Congo
à partir des années 1920 (1) ; matsouanisme au Congo à partir des années
1930, etc. D'une manière générale, les très nombreux mouvements de résis
tance paysanne de l'époque coloniale et du début des indépendances (comme
les insurrections populaires du Zaïre des années 1961-1965) se fondèrent
sur l'exaltation des pratiques religieuses combattues par l'administration
coloniale et les missionnaires.
Dans les théories du développement comme dans la pensée africaine, la
ville n'a pas bonne presse. En Afrique centrale l'image classique de la
ville coloniale est celle qu'a décrite le romancier camerounais Eza Boto
dans Ville cruelle (2) : la ville monde anonyme, lieu de souffrance ou de
perdition. Or la réalité n'est pas aussi simple. Pour s'en tenir à la cul-?
ture, les villes d'Afrique centrale ont été le lieu d'un étonnant foisonne
ment culturel. Ainsi les deux capitales soeurs Kinshasa et Brazzaville
ont-elles vu naître et proliférer les ensembles de musique moderne qui,
de l'African Jazz de Joseph Kabasele (1953) aux orchestres actuels de
Tabuley, Luambo Makiadi, Youlou et autres Zaïrois Langa Langa, n'ont pas
seulement produit des rengaines à la mode, plus éphémères les unes que
les autres : ils ont aussi suscité des manières d'être et de sentir,
(1) Dérivé du protestantisme et fondé par le prophète Simon Kimbangu mort en prison, le (¿imbanguisme est, avec le catholicisme et le protestantisme, l'une des trois religions reconnues par l'Etat zaïrois.
(2) Paris, Présence Africaine, 1955. Eza Boto est l'un des noms de Mongo Beti.
(100)
Ill 48
des comportements tant dans la vie privée que publique (1). Il est remar
quable aussi que cette culture nouvelle se soit exprimée dès le départ et
continue de s'exprimer dans les langues nationales qu'elle contribue
ainsi à faire rayonner. Notons enfin que, dans ce cas précis, la produc
tion culturelle donne naissance à une véritable industrie, d'ailleurs
très prospère semble-t-il. Depuis le très célèbre Bolingo ya La Joie
chanté par Lucie Yenga Moseka au milieu des années cinquante et qui, en
pleine période coloniale, disait sa joie de vivre et exaltait les plaisirs
de la ville, cette musique se refuse dans l'ensemble à aborder des thèmes
politiques.
D.3. Le temps des indépendances : les politiques culturelles.
Si les mouvements nationalistes d'Afrique centrale se sont développés
en puisant dans les cultures locales, il ne semble pas cependant qu'ils
aient inscrit la culture au rang de leurs priorités. Le cas de l'Abako
(Association des Bakongo) au Zaïre est à cet égard exemplaire : fondé en
1950, ce mouvement se développa et se fit connaître grâce à l'histoire et
à l'exaltation du royaume de Kongo, l'un des tout premiers royaumes bantu
d'Afrique centrale ; sa propagande fut très efficace dans la lutte contre
l'aliénation culturelle et contre le pessimisme politique puisqu'elle disait
en substance : "Si, dans le passé, nous avons été grands et capables de
fonder et de maintenir des royaumes puissants, pourquoi ne pourrions-nous
pas redevenir grands dans l'avenir ?". L'un de ses animateurs, Joseph Kasa-
vubu, devint d'ailleurs le premier président de la République de l'histoire
du Zaïre. Mais, une fois au pouvoir, l'Abako se laissa submerger par la
recherche de solutions aux problèmes strictement politiques. La culture
s'en trouva du même coup reléguée au rang des préoccupations mineures.
L'expérience de l'Abako se retrouve dans les autres Etats de la sous-région
car les premières années des indépendances, en gros de 1960 à 1965, ont été
(1) Voir le très beau livre de Sylvaine Bemba 50 ans de musique du Congo-Zaïre. Paris, Présence Africaine, 1984.
(101)
Ill 49
très instables et dominées par la recherche des meilleures formules
politiques. Ce fut donc seulement après 1965, plus ou moins vite selon
les cas, que les régimes arrivèrent à une certaine stabilité et eurent
le loisir d'élaborer des politiques cohérentes. Le constat général, dans
la sous-région, est que tous les pouvoirs ont privilégié le développement
économique pour lequel toutes les énergies devaient se mobiliser. Dans la
hiérarchie politique et administrative, le ministère de la culture est
un petit ministère au point que, dans certains pays, comme au Zaïre, le
ministre de la culture doit, entre autres attributions organiser le con
cours annuel de beauté pour l'élection de Miss Zaïre : il est d'ailleurs
tenu d'assister personnellement à la dernière phase de ce concours. Perçue
comme une chose à part et un.luxe inutile, la culture n'est donc intégrée
à l'élaboration d'aucune des politiques nationales, ni à celle-du dévelop
pement, ni à celle de la communication, ni même à celle de l'éducation.
L'idée selon laquelle la culture serait inutile tient en grande partie
au fait que les bénéfices qu'on peut en tirer pour le secteur politique au
sens strict semblent faibles, sinon nuls. Tout se passe comme si les pou
voirs actuels avaient des cultures nationales une vision qui s'inscrit
en continuité et non en rupture avec celle des administrations coloniales,
c'est-à-dire une vision muséographique, folklorisante et, si l'on peut dire
"ethnologisante" (1). Les cultures nationales ne sont pas perçues comme
ayant une dynamique propre, une capacité de création et de renouvellement
qui se poursuive aujourd'hui. Elles sont perçues comme achevées et figées :
d'où ces procédures de canonisation qui enferment les produits culturels
qualifiés d'ailleurs de "traditionnels" dans des musées morts, coupés des
préoccupations et des interrogations actuelles des gens et, pour ces rai
sons, le plus souvent déserts. Quant à la dimension folklorisante, on en
a une manifestation caricaturale dans les pratiques actuelles d' "animation1
qui font que, à l'occasion des visites de chefs d'Etat.et de hauts respon
sables étrangers ou lors de manifestations officielles, des ensembles soi-
disant traditionnels donnent des exhibitions de musique et de danse "authen-
tiquement" africaines.
(1) J'emprunte ce beau néologisme au philosophe béninois Paulin J. Houn-s tondji : séminaire sur "La Philosophie africaine", Collège Internatior nal de Philosophie (Paris),. 1986-1987.
(102)
Ill 50
Certes, au niveau des discours politiques, il existe un volontarisme
indiscutable qui pourrait produire des effets sur la culture. La quasi-
totalité des Etats de la sous-région se réclament d'idéologies qui sont
autant de variantes de l'idéologie de la personnalité africaine. Le premier
exemple historique a été 1' "authenticité", lancée par la régime zaïrois,
qui prétendait fonder l'ensemble de sa politique et de sa pratique sur le
"retour" puis sur le "recours" aux traditions et aux valeurs spécifiquement
africaines et zaïroises. L' "authenticité" zaïroise a fait école puisque,
directement ou indirectement, elle a suscité des pratiques analogues au
Tchad à l'époque de Tombalbaye, au Gabon (idéologie de la "Rénovation") et,
aujourd'hui, au Cameroun (idéologie du "Libéralisme communautaire"). Ces
idéologies ont certainement des retombées politiques, au niveau de la sous-
région ou même du continent : c'est le cas, par exemple, du projet de Ligue
des Etats Négro-africains (LENA), lancé par le Zaïre, qui a séduit de nom
breux intellectuels du continent. Mais sur le plan culturel, ces discours
et ces références idéologiques sont loin d'avoir produit des effets visi
bles. Dans la sous-région, un Etat se réclame ouvertement d'une idéologie
autre que la personnalité africaine. Il s'agit du Congo qui, depuis presque
vingt ans, a choisi le "socialisme scientifique", autrement dit le marxisme-
léninisme. Celui-ci se veut extrêmement rigoureux et conforme à l'orthodoxie
marxiste originelle .Cependant cette référence idéologique précise ne semble
concerner que les hommes d'Etat et pas du tout les acteurs culturels.
D.4. Le temps des indépendances : les pratiques culturelles.
Les indépendances n'ont pas opéré une rupture dans les pratiques cultu
relles par rapport à la fin de la période coloniale. Il y a eu plutôt des
aménagements successifs notamment en fonction de la crise économique grave
qui affecte la plupart des pays de la sous-région.
(103)
111-51
De ce point de vue, il semble nécessaire d'aller au-delà du thème
de la "dimension culturelle du développement" popularisé surtout depuis
Lomé III. Car il est évident - tous les précédents historiques qui ont
réussi le montrent - qu'aucun développement ne peut se faire s'il n'intègre
l'expérience vécue par les individus concernés. Mais ce qu'il est plus
important de voir c'est le rôle de la culture dans la situation concrète
d'aujourd'hui : elle n'est pas seulement un ensemble de constructions
plus ou moins abstraites reflétant les interrogations, les convictions
et les aspirations des gens : elle n'est pas seulement le feu intérieur
qui fait vivre ; elle est aussi et surtout, dans la conjoncture actuelle,
la force qui aide les individus et les collectivités à surmonter la crise
et à survivre à la crise.
Certes, l'Afrique centrale continu«de subir la pénétration insidieuse
ou agressive des cultures étrangères, c'est-à-dire en réalité des cultures
occidentales qui se présentent aujourd'hui sous des traits moins triompha
listes que pendant la colonisation, mais qui n'en prétendent pas moins
à l'hégémonie. Cette pénétration est d'autant plus difficile à contenir
qu'elle se fait par les voies les plus diverses : système scolaire, moyens
d'information, circulation des hommes et des produits, modèle de développe
ment industrialiste choisi par les Etats. Il ne faut pas oublier le cinéma,
même si la fréquentation des salles de cinéma semble très faible dans
les Etats pour lesquels les chiffres sont disponibles (voir tableau XIV) :
c'est que, étant donné la quasi—inexistence de la production cinématogra
phique dans les dix Etats de la sous-région, tous les films projetés dans
les rares salles sont étrangers et à 90% occidentaux (les 10% restants
venant de Hong-Kong ou de l'Inde).
Pour ce qui est de la créativité interne, elle se manifeste à tous
les niveaux.
Il y a d'abord toute la production écrite, relativement abondante
malgré la très grande faiblesse, pour ne pas dire la misère, des moyens
nationaux d'édition : les livres effectivement publiés ne représentent
ainsi qu'une partie infime des manuscrits disponibles ; une action décisive
(104)
111-52
TABLEAUX XIV : Le cinéma, salles et fréquentation
BURUNDI
CAMEROUN
GUINEE EQUATO-RIALE
RUANDA
TCHAD
Année
1981
1979
1977
1981
1977
Nombre
(D
7
52
10
12
13
Nombre de sièges total en milliers
2,5
29
4,5
3,6
12,4
Fréquentation annuelle (milliers)
(D
0,1
-
0,5
0,3
24,2
Nombre de sièges pour 1000 habitants
(2)
0,6
3,5
14
0,7
2,9
Fréquentation annuelle par habitant
(2)
0,0
-
1,6
0,1
6
(1) Chiffres relatifs aux établissements fixes.
(2) Chiffres comprenant, outre les établissements fixes, les cinémas
itinérants.
Sources : UNESCO Statistical Yearbook
dans ce domaine devrait même inciter à publier des gens Cpji ont des choses
à dire, mais qui ne prennent même pas la peine de les écrire compte tenu
de l'impossibilité actuelle de publier. L'incertitude des chiffres fait
qu'on ne possède pas le nombre total, année par année, des livres publiés
en Afrique centrale. Il faut remarquer d'abord que l'Afrique noire produit
encore peu de livres, même si en une trentaine d'année (de 1955 à 1983),
l'a production y a été multipliée par 6 alors que dans l'ensemble du monde
(105)
111-53
TABLEAU XV : La production de livres
:AMEROUN
ZAIRE
Année
1979
1979
Total
22
231
Généralités
5
13
Philosophie
4
1
Religion
0
142
Sciences sociales
5
38
Sciences
(1)
3
6
Sciences
appliquées
2
7
Beaux arts
0
3
Littérature
2
19
Géographie Histoire
1
2
(1) Mathématiques, physique et sciences naturelles
Sources : UNESCO Statistical Yearbook
elle n'a été multipliée que par 2,8. Mais la part de l'Afrique reste encore
minime (voir tableau XVI). Deux pays se distinguent en Afrique centrale
par la quantité de livre publiés : le Zaïre figure ainsi au sixième rang
du continent, loin derrière le Nigeria (2316 titres en 1980) et la Tanzanie
(512 titres en 1980), mais assez près de Madagascar (284 en 1981), de l'Algérie
(275 en 1979) et du Kenya (232 en 1980) ; la production camerounaise en
revanche se situe à la hauteur de celle de la Côte d'Ivoire ou du Niger.
Plutôt que de se prononcer sur la qualité de cette production, on a préféré
retenir une ventilation par type de sujets (Tableau XV) : on constatera
la part importante de la production d'origine universitaire et, vu le poids
et les moyens d'édition de l'Çglise catholique au Zaïre, le nombre élevé
de livres ayant un rapport avec la religion (1) . Si ces deux pays sont ceux
qui publient le plus dans la sous-région, la raison en est sans doute la
même. L'un et l'autre disposent en effet de moyens d'édition importants
(1) Publiés en rapport avec la Faculté de théologie et le Centre de recherches sur les religions africaines, beaucoup de ces livres pourraient aussi bien figurer sous la rubrique "Sciences sociales".
(106)
111-54
TABLEAU XVI : L'Afrique noire dans la production mondiale de livres
1955
1960
1965
1970
1975
1980
1983
Nombre
Monde
269.000
332.000
426.000
521.000
572.000
715.000
772.000
de titres
Afrique noire
1.600
2.400
4.300
4.600
8.300
9.000
10.000
% Afrique
0,59
0,72
1
0,88
1,45
1,25
1,29
Nombre de titre par million d'h
Monde
131
144
168
187
184
161
165
abitants
Afrique
10
12
18
17
27
25
25
Source : UNESCO Statistical Yearbook
avec, au centre du dispositif, une maison d'édition importante et souvent rela
tivement ancienne ("clé" à Yaounde depuis 1963, "Editions Saint-Paul" à
Kinshasa) et tout autour, surtout dans la capitale, d'assez nombreux petits
éditeurs institutionnels ou privés.
Plus difficile à quantifier, la culture populaire est au moins aussi
active que la culture lettrée. La musique d'abord n'a pas cessé de se diversi
fier depuis son rameau originel zaïro-congolais : si Brazzaville abrite
depuis 1983 la maison d'édition de disques la plus importante d'Afrique
noire, il existe désormais des musiques centrafricaine et gabonaise encore
fortement influencées par les modèles du Congo et du Zaïre et surtout une
musique camerounaise très concuit&ntielle par rapport à ses devancières.
(107)
111-55
La ville continue d'être le lieu d'une remarquable effervescence cultu
relle. C'est là que le brassage des langues nationales est en train, loin
des calculs et des débats politiciens, de promouvoir une ou deux d'entre
elles au rang de langue dominante : ce processus, qui est en cours partout,
mais très visible au Zaire (lingala et swahili) et au Congo (lingala et
lari), a presque atteint son achèvement en Centrafrique (sango). De nombreux
artistes locaux donnent une production importante qui, jusqu'à présent,
n'a heureusement pas eu à souffrir des inévitables appauvrissements imposés
par le tourisme (à peu près inexistant dans la sous-région). L'exemple
de la sculpture et celui, peut être plus connu grâce à plusieurs expositions
récentes en Occident, de la peinture zaïroise moitrènt que, même en période
de crise prolongée, une clientèle proprement nationale peut être un stimulant
à la qualité. Enfin, à cause sans doute de la crise, l'effervescence religieu
se - traditionnelle en Afrique centrale - semble poussée à son paroxysme :
dans les villes surtout on ne compte plus le nombre de "prophètes" et de
"sectes" strictement nationales ou importées dont la prolifération, souvent
mal vue des autorités, traduit bien le malaise de la société et la recherche
balbutiante de modes de vie, sinon de modèles de société alternatifs.
Si l'on veut donc impulser des actions nouvelles, il n'est pas certain
qu'ont ait intérêt à choisir les politiques culturelles : il faudrait plutôt
songer à ces pratiques souvent spontanées qui sont la manifestion la plus
vivante de la créativité africaine.
(108)
IV
La Coopération sous-régionale
une volonté et des initiatives prometteuses
(109)
IV-2
Tout au long de cette étude, on a indiqué aussi bien les projets
que les activités qui ont donné et qui donnent lieu à une coopération
bilatérale et multilatérale dans la sous-région. Il faut maintenant en
dresser un bilan complet et s'arrêter un peu sur l'entreprise qui, correspon
dant d'ailleurs au domaine de compétence de 1'Unesco, apparaît comme la
plus significative et la plus prometteuse pour l'avenir.
A - Une coopération aux visages multiples.
L'existence de cette coopération est déjà en elle-même un acquis
tout à fait appréciable. En effet, si les éléments contribuant à rapprocher
les Etats ne manquent pas (voir ci-dessus chapitre I, § B2, C et D).
i] existe aussi de nombreux facteurs de division qu'on peut sommairement
ranger en quatre groupes.
En premier lieu, pour avoir été colonisés par quatre nations européennes
différentes (Allemagne, Belgique, Espagne et France), les pays d'Afrique
centrale affichent des différences indiscutables dans les domaines les
plus divers : systèmes administratifs ; organisation et méthodes d'enseigne
ment ; monnaies ; etc..
D'autre part, le fait que les économies, façonnées par la colonisation,
présentent des structures identiques^ ne facilite . pas, il s'en faut de
beaucoup, la coopération entre les pays. Toutes ces économies sont extra
verties et dépendantes. Mais, précisément à cause de cela, leur intégration
est différente : elles fournissent souvent les mêmes produits et ce à
l'état brut (pétrole au Cameroun, au Congo et au Gabon ; diamant en
Centrafrique et au Zaïre ; bois au Congo et au Gabon). On peut même dire
qu'elles se trouvent souvent en concurrence pour vendre leurs produits.
En troisième lieu, cette extraversion de l'économie et des autres
secteurs de la vie sociale contribue à renforcer les relations Nord-Sud
aux dépens des relations au sein de la sous-région. Au plan économique,
mais aussi dans les domaines politique, militaire, universitaire et scienti
fique chacun des Etats de la sous-région est plus lié aux pays développés
qu'avec ses voisins.
(110)
IV-3
Enfin il ne faut pas négliger les différences d'idéologies officielles,
de stratégies ou simplement de discours. Le marxisme-léninisme dont se
réclame le Congo est un cas unique dans la sous-région et rapprocherait
ce pays plutôt de l'Angola. Si dans la pratique les modèles de développe
ment ne divergent guère, ne serait-ce que parce qu'ils ne sont nulle part
clairement formulés, les idéologies officielles - souvent proclamés avec
ostentation - affirment les différences entre les Etats ; elles permettent
aussi d'opposer ceux qui en ont une (libéralisme communautaire au Cameroun,
socialisme scientifique au Congo, rénovation au Gabon, authenticité au
Zaïre) et ceux qui, notamment par suite d'une évolution récente trop trou
blée, n'en ont pas (Centrafrique, Guinée Equatoriale et Tchad, par exemple).
Malgré tout, la coopération sous-régionale existe et tend à couvrir
des domaines de plus en plus nombreux. Il est important de souligner que
cette coopération a subi des infléchissements sensibles au cours des années
et cela, nous semble-t-il, dans le sens d'un enrichissement : en effet,
alors que l'économie avait été privilégiéçdans un premier temps, les actions
communes s'orientent de plus en plus vers les secteurs éducatifs, scientifi
ques et culturels.
On a déjà fait état des institutions de coopération économique sous-ré
gionale (voir ci-dessus I, D) (1) : U.D.E.A.C., B.CE.A.C., C.E.E.A.C.
et C.E.P.G.L. Ces institutions, dont la vocation originelle était douanière,
monétaire ou de simple concertation, ont essayé de lancer de véritables
projets que les pays doivent réaliser ensemble et qui sont de nature à
inciter à l'intégration des économies sous_régionales. Ainsi, dans le
cadre de l'UDEAC, l'année 1977 a vu l'adaptation de quatre programmes
de développement industriel (un complexe pétroléo-chimique au Gabon ;
un complexe chimique au Congo ; un complexe d1électro-métallurgie au
Cameroun ; un laboratoire pharmaceutique et une fabrique de montres en
Centrafrique) : la volonté politique était donc réelle ; malheureusement
la persistance de la crise et la rigueur des différents plans d'ajustement
ont, jusqu'à présent, empêché la réalisation de ces programmes. Le même
constat peut être dressé pour les programmes, certes moins ambitieux, adoptés
dans le cadre de la CEPGL.
(1) Ci-dessus pp. 19.21.
(111)
IV-4
Dans les domaines de compétence de l1UNESCO, les institutions et
les formes de coopération sont nombreuses.
Il y a d'abord les institutions basées dans l'une des villes de
la sous-région, mais dont la vocation est tout à fait panafricaine : il
s'agit le souvent de centres de réflexion théorique ou de conseil :
- le Bureau Africain des Sciences de l'Education (BASE) de Kisangani
(Zaïre) ;
- le Bureau Africain et Mauricien de Recherches et d'Etudes Législatives
de Bangui (Centrafrique), dont l'ambition est de coordonner les
recherches dans le domaine juridique aux fins d'harmoniser progressi-
ment les législations des pays membres ;
- L'institut Informatique Africain de Libreville (Gabon) chargé prin
cipalement de la formation des cadres ;
- Enfin, la dernière née l'Union Panafricaine de la Science et de
la Technologie créée à Brazzaville en juin 1987, à l'issue du pre
mier Congrès des Hommes de Sciences en Afrique, avec pour mission
de promouvoir la science et la technologie en Afrique.
Il existe aussi bien évidemment des institutions à vocation sous-
régionale, dont les ambitions sont plus modestes et l'efficacité plus
grande. Citons en particulier :
- la Conférence des Recteurs des Universités d'Afrique centrale qui
joue un rôle majeur dans la concertation sur les programmes, les
carrières et dans l'échange des personnels enseignants ;
- le Centre de recherches nucléaires de Kinshasa ;
- le CICIBA, dont il sera plus longuement question.
Il faut enfin signaler que les différentes capitales d'Afrique centrale
organisent tour a tour des manifestations scientifiques et culturelles
à vocation sous-régionale, continentale ou universelle qui contribuent
beaucoup au rapprochement des élites et à la fraternisation des peuples :
(112)
IV-5
- les Jeux d'Afrique centrale, dont la troisième édition a eu lieu en
1987 è Brazzaville et qui, malgré les inévitables passions que
les compétitions soulèvent parmi les spectateurs, tissent des liens
d'amitié durables entre les jeunes ;
- le premier Congrès des hommes de Sciences en Afrique (Brazzaville,
juin 1987) qui a réuni, pour la première fois dans l'histoire du
continent, les praticiens de la recherche soucieux d'apporter leur
contribution è la solution rapide des problèmes du développement ;
- la Conférence sur le centenaire de la Conférence de Berlin (Brazzaville,
1985) : si l'idéal panafricain cher aux pères des indépendances
n'a pas pu réaliser toutes ses ambitions, les hommes de science
et de culture réunis à cette occasion ont proposé des mesures réalis
tes susceptibles de lever progressivement les obstacles de toutes
natures imposées par les frontières issues de la colonisation ;
- la conférence internationale sur "la crise de l'Afrique et les moyens
d'y remédier" (Kinshasa 1978) ;
B - Le cas du CICIBA
Si l'expérience du CICIBA parvient à durer et à réussir dans ses
entreprises, elle constituera indiscutablement un précédent heureux et
un exemple stimulant pour l'ensemble du continent. Ce qui est déjà instruc
tif et encourageant, c'est la rapidité avec laquelle le projet du CICIBA
a été conçu, puis mis en route et enfin doté de moyens pour réaliser les
premières étapes de son programme et tout cela dans le contexte d'une
crise sans précédent.
Rappelons d'abord les origines et la philosophie du Centre International
des Civilisations Bantu. On a indiqué précédemment qu'en termes de "longue
durée" l'un des facteurs remarquables d'intégration de la sous-région
était précisément, sur le plan humain, sa composante bantu (1). C'est
en 1982, après que de nombreux contacts aient été pris par des émissaires
gabonais à travers tout le continent, qu'est créée à Libreville l'Associa
tion du Centre International des Civilisations Bantu. Lorsque, au cours
(1) Voir ci-dessus pp. 12-13.
(113)
IV-6
de la même année est réunie la première conférence des ministres de la
culture, la quasi-totalité des Etats de la zone bantu a été consultée,
soit une vingtaine, à l'exclusion des deux pays encore dominés par le
colonialisme, Azanie et Namibie. C'est à Mexico, en août 1982, à l'occasion
de la Conférence sur les Politiques Culturelles (Mondiacult), qu'est annon
cée la création prochaine du CICIBA. Plusieurs organisations internationa
les sollicitées promirent alors leur soutien, sous une forme ou une autre ;
il s'agit principalement du PNUD, de l'UNESCO, de l'O.U.A., de l'ICA (Insti
tut Culturel Africain), de l'ACCT (Agence de Coopération Culturelle et
Technique), de la S.A.C. (Société africaine de Culture) et de l'organisation
Islamique pour l'Education, la Science et la Culture. Dès Janvier 1983,
le CICIBA était officiellement créé. Il y a lieu de souligner la coincidence
dans le temps (1983) et dans le lieu (Libreville) entre la création du
CICIBA et celle de la Communauté Economique des Etats de l'Afrique.
Si l'on veut déjà tirer quelques enseignements de la fondation du
CICIBA, il semble que trois facteurs principaux expliquent la remarquable
rapidité qui a présidé à sa conception et à sa réalisation. En premier
lieu, il a fallu qu'un Etat, quelles qu'aient été par ailleurs ses motiva
tions, s'investisse totalement dans ce projet ; non seulement dans l'ini
tiative originelle, mais aussi dans le financement (65% du budget de fonc
tionnement sont à la charge du Gabon et 35% à celle des autres Etats mem
bres ; l'Etat hôte a dû aussi construire l'ensemble des infrastructures
et s'engager à les louer pendant 99 ans au CICIBA au prix symbolique de
1 franc CFA) ; or, malgré ce rôle déterminant joué par le Gabon, les autres
Etats membres sont activement associés à parité avec le pays hôte dans
la définition des programmes et, surtout, dans la composition des instances
dirigeantes du CICIBA. En second lieu le Centre a eu la chance, dès le
berceau, de bénéficier des faveurs et des attentions d'institutions inter
nationales, en particulier le PNUD qui lui a accordé une substantielle
dotation initiale (plus de 210 000 dollars U.S. pour 1982-1984) sans laquelle
le démarrage du projet eût peut-être été compromis. Enfin le contexte
intellectuel international a aussi beaucoup servi : si, en Afrique et
dans l'ensemble du Tiers-Monde, les années 1950 et 1960 ont été celles
(114)
IV-7
de la lutte politique, on s'est vite rendu compte - pour reprendre le
verdict lucide de l'homme d'Etat indonésien Ahmed SQokarno - que "pour un
ventre affamé, l'indépendance n'est qu'un slogan politique vide de sens" ;
il y eut ensuite le temps du "développement" et du "nouvel ordre économique
mondial dont les retombées concrètes se sont avérées bien décevantes
pour le plus grand nombre. Aussi, ayant éprouvé l'inadéquation des modèles
importés, ressent-on la nécessité, pour aller réellement de l'avant, de
revenir un peu en arrière pour vérifier la solidité des fondations et
des enracinements ainsi que la nature des parentés. A tous ceux qui, dans
d'autres régions culturelles de l'Afrique et à l'échelle continent, envisa
gent des institutions comparables au CICIBA, il faut donc dire que ce
n'est pas seulement la rente pétrolière gabonaise qui le soutient depuis
le début, mais un faisceau complexe de facteurs très divers.
Car, en quelques années seulement d'existence, le CICIBA a fait plus
que beaucoup d'organismes qui existent seulement sur le papier. La moitié
des pays partiellament ou totalement bantu a adhéré à sa charte (1). Il a
déjà organisé des colloques (1985 : "Migrations, expansion et identité
culturelle des peuples bantu" ; 1986 :"Médecines traditionnelles et techni
ques agricoles traditionnelles") et des manifestations culturelles (1985
et 1987 Biennale des arts bantu contemporains) et entrepris la publication
régulière d'une revue (Muntu ) et de plusieurs ouvrages réalisés par ses
chercheurs ou sous son égide. A ces activités, appelées à continuer, il
faut ajouter la création prochaine d'une "banque de données" qui doit
être une étape décisive dans l'effort de réappropriation par les Africains
d'un savoir et d'un patrimoine confisqués par un siècle de colonialisme.
(1) Angola, Centrafrique, Comores, Congo, Gabon, Guinée Equatoriale, Ruanda, Sâo-Tomé et Principe, Zaïre et Zambie.
(115)
V
Conclusion : elements de prospective
(116)
V-2
A - La Logique de l'Etat
Toutes les réflexions développés précédemment aboutissent è un constat
identique : la logique de la construction de l'Etat et de l'affirmation
de l'Etat l'emporte en Afrique centrale sur la logique du développement
économique, social, culturel et scientifique.
Cette logique de l'Etat est présente partout, quelles que soient
par ailleurs les différences entre les idéologies dont les réqimes se légendaire
réclament et entre le destin de ces régimes dans la mesure où à la stabilité/des
uns, s'opposent la crise larvée de certains et l'instabilité chronique des au
tres. Or, dans la pensée politique africaine comme dans la tradition intellec
tuelle africaniste, on a tendance à confondre cette logique avec celle de la
construction nationale ; cependant, la construction nationale, même si elle
peut se prêter au volontarisme des décideurs, ne s'y plie pas, elle implique
l'adhésion prolongée du plus grand nombre et son rythme est lent ; au contraire,
l'Etat inscrit son action dans le temps court, dans un rythme précipité et dans
un espace de décision socialement restreint. Car qui dit Etat, dit classe ou
groupe (s) social (aux) qui tiennent l'Etat et qui, dans le contexte du pouvoir
actuel en Afrique centrale, excluent le plus grand nombre. Il y a donc une iné
galité fondamentale des groupes sociaux dans la conception, la conduite et le
bénéfice des processus en cours. On en revient ainsi à la question lancinante
du développement : de quel développement s'agit-il ? à quoi doit servir ce
développement ? et aussi à qui ?
S'agissant de la communication, la culture, l'éducation, la science
et la technologie, la logique de l'Etat, qui est par essence et par vocation
instrumentaliste, les réduit à l'état d'effets. Il faut bien que les insti
tutions correspondant à ces activités existent, il faut bien que des crédits
leur soient accordés : non pas, d'abord, pour qu'elles contribuent au déve
loppement, mais parce que l'Etat en a besoin pour exercer ses effets :
effet d'existence d'abord, car la communication, la technologie et la
science par exemple sont nécessaires à l'existence d'un Etat fort : effet
de démonstration voire d'ostentation pour ce qui concerne la culture>
(117)
V-3
réduite souvent, comme on l'a montré, au rang d'un divertissement folklorique
de luxe ; effet de captation enfin pour ce qui touche à l'éducation, coupée
le plus souvent des réalités nationales et des préoccupations des citoyens.
Or le présent et sans doute l'avenir au moins proche sont à la crise
de l'Etat dont les causes et les manifestations sont multiples : ici,
poussé par les rigueurs d'un "plan d'ajustement structurel", l'Etat désin-
vestit et renonce à l'une de ses légitimations fondatrices, qui faisait
de lui l'instrument privilégié du développement. ; là, il cesse de recruter
et parfois débauche ; partout, il apparaît de moins en moins fort, crédible
et capable de réagir face aux entreprises, aux technologies et aux produits,
notamment les produits immatériels, transnationaux. Cette crise peut
avoir des conséquences bénéfiques dans la mesure où elle peut accélérer
les processus de coopération et d'intégration au moins au niveau sous-
régional. Il y a donc une actualisation de l'idée panafricaine a laquelle
une organisation telle que 1'Unesco peut participer, en particulier par
le biais de l'éducation, de la culture et de la communication. Mais les
effets négatifs éventuels ne sont pas à exclure car le sauvetage de l'Etat,
par le moyen aujourd'hui à la mode de très sévères cures d'amaigrissement,
peut conduire au naufrage de l'éducation, de la recherche scientifique
et de l'innovation technologique.
B - Etat et société civile
Le récent atelier scientifique réuni à 1'Unesco en Juin 1987 sur
"Le monde à 1' horizon 2000" (1) a très justement conclu sur la nécessité
d'"engager une réflexion fondamentale sur les rapports entre Etat et société
civile ainsi que sur la démocratie et l'avenir des institutions politiques".
(1) Le monde à l'horizon 2000. Paris, UNESCO (BEP), 1987 (Grand Programme I, Réflexion sur les problèmes mondiaux et études prospectives. Etudes et Documents 1.).
(118)
V-4
Le constat relatif à l'Afrique centrale pourrait conforter un certain
pessimisme dans la mesure où, dans tous les secteurs envisagés ici, l'Etat
ignore, voire marginalise la société civile. Mais, précisément, une cons
tante séculaire de l'Afrique centrale est la présence, peut être même
la poussée, de la société civile. Et cela pour deux raisons au moins :
d'une part, parce que, d'une manière générale, là où il y a Etat, il ne
saurait pas ne pas y avoir résistance à l'Etat ; et d'autre part, parce
que, dans le contexte politique particulier de l'Afrique centrale, l'Etat
contemporain est issu des luttes menées contre le colonialisme par la
société civile ; l'Etat se retrouve ainsi, consciemment ou confusément,
redevable de son existence même à la société civile ; mais, celle-ci de
son côté n'hésite pas à se prendre pleinement en charge face à un Etat
démissionnaire et à prendre en charge face à un Etat arbitraire certains
secteurs de la vie sociale.
Cette prise en charge est particulièrement visible dans plusieurs
domaines. En matière de développement économique, on voit se multiplier
dans plusieurs pays (Cameroun, Centrafrique, Ruanda et Zaïre en particulier)
des structures de type coopératif, totalement indépendantes ou soutenues
par les appareils religieux : ces structures permettent aux paysans, qui
sont souvent les parents pauvres des projets de développement, d'abord
de survivre, puis de s'auto-organiser. Même en ville, des initiatives
analogues existent, notamment en matière d'éducation : avec la constitution
ou la reconstitution d'écoles tenues par des religieux et, ce qui est
plus nouveau et plus original, avec la création d'écoles privées, payantes,
mais pas forcément chères, tenues par des nationaux, qui prétendent dis
penser un savoir certes, mais aussi des valeurs qu'on ne trouve plus à
l'école publique. Le domaine de la culture est peut-être plus significatif
encore. La politique et les actions culturelles des Etats sont presque
toujours délibérément unificatrices et destructrices des diversités.
Or, l'on constate, surtout en milieu rural, une remarquable persistance,
voire une réelle vitalité des civilisations matérielles et des créations
culturelles. D'autre part si, dans une orientation ethonologisante et
folklorisante, l'Etat voit la culture principalement dans les traditions,
(119)
V-5
parmi le peuple au contraire, surtout en milieu urbain, il y a une synthèse
permanente entre tradition et modernité, que celle-ci soit importée ou
qu'elle vienne de défis internes que les difficultés du développement posent
à la société : la musique en est un bon exemple, mais aussi les langues
qui se transforment et s'enrichissent à une allure rapide. Enfin il est
remarquable de constater que, si les modes actuels de développement se
caractérisent par leur technicisme et leur matérialisme, il y a dans la
société civile un renouveau spectaculaire de la spiritualité, dont témoigne
en milieu urbain le foisonnement des "sectes" dissidentes par rapport
aux Eglises établies et des "groupes de prières" liés aux institutions
religieuses anciennes.
Cette vitalité de la société civile face à l'Etat pose de nombreuses
questions quant à l'avenir. Notons d'abord la question de la contradiction
de fait entre la "culture nationale", en cours de constitution et souvent
identifiée à l'Etat unificateur et uniciste, et les "cultures locales",
fortement enracinées dans leur terroir et riches à la fois de leur passé
et de leur dynamisme actuel. Tout se passe comme si, face au rouleau
compresseur de l'Etat, les sociétés civiles avaient fait leur la devise
"E pluribus unum". La construction de la nation implique-t-elle nécessaire
ment l'élimination, par absorption ou par folklorisation, des cultures
originelles ? Tout cela indique qu'il est nécessaire de réinventer la
démocratie. Dans le contexte de l'Afrique centrale, il apparaît que celle-ci
n'implique pas seulement le pluralisme politique (qui a d'ailleurs été
expérimenté non sans bonheur à la fin de la colonisation et au début
des indépendances), ni automatiquement l'assistance réputée nécessaire
de l'Etat tout puissant (dans la mesure où la crise des finances publiques
semble appelée à durer et où la société civile a entrepris de se prendre
en charge) : elle implique aussi la reconnaissance, en plus des droits
classiques, du droit à l'initiative et à la création.
Dès lors se pose la question de la pertinence des niveaux sur les
quels il y a lieu d'agir. Plutôt que sur les politiques culturelles, ce
qui aurait pour effet de renforcer encore l'Etat, l'action devrait se
(120)
V-6
tourner vers les acteurs sociaux qui sont les véritables producteurs d'in
novation et vers la promotion des structures de type coopératif.
C - Problèmes de géopolitique
En terme de prospective, l'une des questions les plus complexes con
cerne la profondeur pertinente à laquelle on ne saurait éviter de descen
dre pour construire l'avenir. Car le futur ne sort pas du néant, il existe
à l'état d'ébauche et d'esquisse plus ou moins grossière dans les hommes
et les choses d'aujourd'hui. Or en Afrique centrale, il y a bien des raci
nes, des structures et des enracinements, issus d'un passé relativement
récent et que, au cours des deux dernières décennies, les hommes ont eu
toutes les peines du monde à modifier : pourront-ils les transformer plus
rapidement demain ? Plusieurs facteurs militent en faveur d'une inévitable
transformation dans un terme plus ou moins proche. Il s'agit d'abord du
rajeunissement, du renouvellement des effectifs humains lié aux comportements
démographiques actuels. Il faut tenir compte également d'un
déracinement croissant, par suite de l'exode rural et de l'urbanisation,
mais aussi de l'école et de la communication. Parmi les éléments prioritai
res qui devraient retenir notre attention figurent donc la jeunesse et
la ville, l'une en tant qu' acteur imprévisible d'un futur qui peut nous
surprendre, l'autre en tant que lieu ou s'élaborent certaines des rationa
lités de demain.
Dans la sous-région il existe aussi des tendances qui sont par ailleurs
perceptibles à l'échelle du continent. Ce sont ces inégalités, déséquilibres
et antagonismes non mesurables (comme les idéologies d'Etat), ou mesurables
(comme l'économie et la démographie). Concernant la démographie, on a
vu que, si la sous-région dans l'ensemble se caractérise par son sous-
peuplement, il existe aussi de grandes différences dans les densités
(par exemple 246 au Ruanda pour seulement 13 au Zaïre, ou 176 au Burundi
pour 4,5 au Gabon). Il faut ajouter à cela les différences de taux de
croissance annuelle qui risquent d'aggraver encore les déséquilibres exis
tants (voir Tableau XVII).
(121)
V-7
Tableau XVII : les taux de croissance démographique annuelle
(en °ú par ordre décroissant)
RUANDA
ZAIRE
SAO TOME ET PRINCIPE
CONGO
BURUNDI
TCHAD
GUINEE EQUATORIALE
CAMEROUN
CENTRAFRIQUE
GABON
41
28
27
26
24
23
21
19
16
16
Sources : estimations Des Nations Unis et des ministères nationaux chargés
de la population, cf Africa South Of The Sahara, Londres,
Europa, 1987.
Disons, pour terminer, qu'à partir de tous ces éléments, deux scénarii
paraissent possibles, l'un "pessimiste" (scénario I), l'autre "optimiste"
(scénario II), ces qualificatifs n'impliquant, aux yeux de l'auteur, aucun
jugement de valeur.
Scénario I
Il existe de nombreux facteurs externes et internes de crise généra
lisée. Parmi les facteurs externes signalons (outre la situation économi
que, financière, politique et militaire mondiale), les risques très graves
que représentent aux frontières mêmes de la sous-région le problème tchadien,
la guerre civile et étrangère en Angola et les blocages de la situation
sud-africaine. Parmi les facteurs internes, il y a d'abord la crise de
l'Etat (dont on ne voit que les premières manifestations), puis la crise
possible des régimes (dont le meilleur précédent reste la crise du Zaïre,
(122)
V-8
alors Congo, au début des années 1960) mais aussi les fureurs nationalistes
(dont les expulsions d'"étrangers" africains ne sont qu'un exemple et
qui, dans un contexte de marasme économique prolongé, pourraient provisoire
ment réconcilier l'Etat et la société civile) et enfin des querelles de
frontières (qui sont presque partout latentes et que sont susceptibles
de raviver, par exemple, des découvertes de ressources minières ou autres).
Dans un tel scénario, la rupture des équilibres actuels ne pourrait se
faire qu'aux dépens des Etats les plus pauvres, économiquement ou démogra-
phiquement.
Scénario II
Il s'inscrit logiquement dans la poursuite des évolutions et des ten
dances actuelles. Le travail présenté ici et les recommandations suggérées
se fondent sur la plus grande probabilité de ce scénario. Avec du volonta
risme, même mesuré, il est possible de renforcer l'intégration, qui, au
jourd'hui, n'est qu'ébauchée et cela, notamment, en activant l'échange
des élites ; en instaurant la libre circulation des hommes et des produits ;
en élaborant enfin des projets et - pourquoi pas ? - des modèles de dévelop
pement communs. Mais on peut aider le futur à survenir : si l'on veut plus
que des avatars de ce scénario, des actions multiples sont évidemment
à entreprendre.
(123)
A N N E X E I : L ' h é r i t a g e colonial , le cas d u Zaïre (1)
i le développement d'un pays neuf repose, en ordre principal, sur l'exploitation des matières premières, la nécessité de modifier cette politique d'écumoire pour la remplacer par des productions concur
rentes ne tarde pas à s'imposer. Cette modification implique l'intervention
de recherches scientifiques, et, c o m m e le disait M . le Ministre W ' I G N Y , dans l'introduction du Plan Décennal. « dans notre monde moderne, le chemin le plus court vers la prospérité passe par les laboratoires ».
Recherches agronomiques.
A u moment où le jeune Etat Indépendant du Congo cherchait la voie la plus rationnelle de développement, le Baron V A N E E T V E L D E sut persuade]1 le Roi Leopold II qu'un pays à économie basée uniquement sur des produits de cueillette est destiné à végéter.
Dès 1892, V A N E E T V E I . D E cherche à installer des plantations de café, de cacao, de coton, de tabac, etc..
E n 1895. il envoie le Professeur E . L A U R E N T au Con pro pour étudier les moyens d'établir ces plantations.
Dès son arrivée. L A U R E N T installe, au Jardin Botanique d Eala, le premier centre de recherches agronomiques.
Ses investigations lui permirent de découvrir les premiers parasites des caféiers, de stigmatiser les pratiques culturales susceptibles de provoquer l'érosion, de préconiser l'ombrage des plantations de caféiers et de cacaoyers. Sa perspicacité de savant naturaliste lui avait fait toucher du doigt l'importance de problèmes agronomiques dont la solution n'est encore apparue que fragmen-tairement de nos jours. Lors du second et hélas! dernier voyage qu'il entreprit en 1903, il put constater, plus encore qu'en 1895,
(1) D'après G. Vossen, conseiller "Les institutions scientifiqu Editions Bieleveld, s.d., ten
combien le manque d'organisation scientifique était fâcheux pour l'avenir des cultures: il déplora le dépérissement des plantations de caféiers qui avaient été installées sur d'anciennes cultures indigènes et montra le danger de l'établissement de cultures sans étude systématique préalable des conditions locales de sol et de climat.
C'est en 1910 seulement que l'on entrevoit un nouvel effort d'organisation de la recherche scientifique par l'appel que fit le premier Ministre des Colonies, M . R E N K I N , au Professeur L E P L A E qui donnait, depuis 1906, à l'Université de Louvain, un enseignement à tendance coloniale basé sur les doctrines qui s'élaboraient progressivement aux Indes. L'acte fondamental qu'il posa en sa qualité de Directeur Général de l'Agriculture au Conir;> fut l'organisation systématique des stations expérimentales. L E P L A E , ne concevait pas de bonne agriculture sans recherche scientifique préalable.
Les stations expérimentales qu'il crée ou qu'il réorganise auront pour mission, dit-il, d'étudiei- les conditions climatologiques locales, la nature des terres, l'extension et la qualité des pâturages naturels. Il fonde le Service météorologique; veut faire d'Eala un jardin de recherches agrologiques et botaniques: il veut que la composition des sols soit étudiée et que divers problèmes agronomiques d'ordre général reçoivent une solution. Les essences à caoutchouc, le cacaoyer, le caféier, les plantes textiles, le riz, les plantations vivrières et l'elaeis, seront expérimentés systématiquement.
Bien que L A U R E N T eût déjà attiré l'attention sur l'intérêt que pourrait revêtir la culture du palmier à huile, c'est la première fois que les essais culturaux de ce palmier sont tentés.
Il s'agit surtout, dit L E P L A E , d'essais de plantation dans les milieux écologiques les
adjoint au ninistsre belge des colonies : s" in Encyclopédie du Con^o Belge. Bruxelles. III pp. 591-597.
(124)
l>lus adéquats et, ensuite, d'études des parasites et de la technologie des produits. Il vise, écrit-il, au perfectionnement des méthodes des cultures indigènes.
La protection des forêts retient son attention; il crée des missions forestières qui doivent délimiter des réserves et en étudier lo contenu.
Vingt ferries expérimentales s'occuperont d'études zootechniques.
Les agronomes itinérants doivent procéder à I étude approfondie des régions où ils exercent leurs fonctions.
Ce programme de grande envergure ne lient se réaliser que progressivement suivant los disponibilités en h o m m e s et en moyens budgétaires.
L E I U A E pense aux Indes Néerlandaises; il y envoie plusieurs spécialistes qui iront se familiariser, à Java et à Sumatr.i. avec les méthodes de recherches en honneur dans ces pays.
Le Service phytopathologique est mis sur pied. Le Professeur R . M A Y N É part en qualité d'entomologiste; peu après, le D r Y E S M O E S E N , rentrant des Indes, vient prendre à ses côtés les fonctions de mycologiste. Tout de suite la principale culture expérimentale de l'époque, le cacaoyer, fait l'objet de leurs recherches. La biologie des parasites et les moyens de les contrôler sont précisés, au point que les ouvrages qu'ils publièrent alors font encore autorité.
Deux dates importantes sont à retenir dans l'évolution de la recherche scientifique agronomique : 1926 : fondation de la Régie des plantations de la Colonie, et 1933 : fondation de l'Institut national pour l'étude agronomique du Congo Belge t l . N . E . A . C . ).
Bien que la Régie des plantations eût c o m m e préoccupation fondamentale de déterminer par la culture le prix de revient réel des produits agricoles et d'amener ainsi le-; capitaux belges à s'intéresser aux investisse merits agricoles au Congo, elle ne négligea cependant pas la recherche scientifique. Les premières sélections réalisées à l'époque constituèrent la base des sélections actuelles; mais c'est en décembre 1933 que commença réellement la recherche scientifique sur le plan agronomique ainsi que sur celui des disciplines connexes, l ' I . N . E . A . C . constituant à proprement parler le laboratoire où s'édifièrent les principes de l'agriculture, de la sylviculture et de la zootechnie congolaises.
L'ensemble des travaux qui y sont entrepris réside moins dans un effort d'amélioration des plantes ou des animaux et des techniques culturales ou zootechniques, que dans l'étude systématique et approfondie des divers facteurs qui régissent la production agricole dans son sens large.
L ' I . N . E . A . C . s'est efforcé de créer ci d'organiser d'abord un centre de recherches sis au coeur m ê m e du Congo sous l'Equateur, doté des installations et des instruments de recherche les plus perfectionnés, et ensuite un réseau de stations de recherches choisies de manière à couvrir la plupart des régions naturelles du Congo ou encore les principales activités agronomiques harmonisées à des conditions particulières du milieu.
C'est d'abord Yangambi qui constitue le centre îles études et comprend une section de recherches scientifiques et une section de recherches agronomiques.
La première comporte les divisions de bota nique, de Phytopathologie, de génétique, de physiologie, de recherches forestières, de pédologie, de climatologie et de technologie.
La seconde comprend les divisions du palmier à huile, de l'hévéa, du caféier, du cacaoyer et des plantes vivrières. Yangambi possède, en outre, des plantations expérimentales où les études se poursuivent à l'échelon d'application.
L'ensemble de ce complexe comprend 5.00(1 hectares où travaillent dans des laboratoires bien outillés plus de 100 Européens, pour la plupart universitaires.
Le Bas-Congo comprend quatre sections : Mvuazi pour les fruits, Cimbi pour le fibres, Kondo pour les cultures du M a y n m b e . et Luki pour la sylviculture.
L ' O l e a les stations de Bambesa et de Bokcta pour le coton, et du .Mont H a w a pour la soie.
Dans l'Est de la Colonie se trouvent les stations de Nioka. Mulungu et Lubarika et. au Ruanda-l'rundi, celles de Rubona et de Kisozi.
Le secteur Sud comprend les stations de (¡andajika, Mukumar i , Kiaka. Kaniama et Elisa bethville.
Recherchée géologiques et minières.
Les recherches fondamentales des D L P O N T , CORNET, BLTTGENB*CH, ROBERT, SAI.ÉE, DEL-
(125)
H A V E ont permis la connaissance progressive de la géologie congolaise et de 1 "important domaine minier du Congo. Ces études se poursuivent systémati()uement.
Le Service géologique officiel continue les recherches sur le sous-sol et l'hydrologie souterraine pour permettre la mise au point de la carte géologique de l'immense territoire congolais. Il possède des laboratoires de chimie et de spectrographie. de minéralogie, de minérographie. des instruments de recherche géophysique, ainsi que des appareils pour l'étude thermique et rontgénographique des minéraux.
Parallèlement à l'activité scientifique du Service géologique de l'Etat, il y a lieu de signaler celle du service similaire du Comité Spécial du Katanga iC.S.K.i . Celui-ci. en effet, possède un Service géographique et géologique depuis 1 9 m . Il publie les annales du Service des mines du C . S . K . . les cartes géologiques au 1 200.000' et au 1 '1.000.000". l'atlas du Katanga.
Le Ministère des Colonies a inslallé. en 1930, une Commission de géologie qui. grâce à la collaboration des géologues belges et coloniaux, édite la carte géologique du Congo et du Ruanda-Urundi. dont les éditions se m o difient suivant les données nouvelles fournies tant par les « field gélogues » que par les chercheurs des laboratoires tels que ceux du Musée Royal du Congo Belge ou des Universités belges.
Ces documents fondamentaux ont permis le repérage des gisements miniers et leur mise en valeur si remarquable.
Partant de telles données, il importait poulies grands organismes d'exploitation minière d'approfondir les renseignements d'ordre général pour localiser, au mieux de leurs intérêts, les gîtes possibles d'exploitation et pour en étudier les meilleures conditions de rentabilité. Sans vouloir préciser l'activité déployée dans ce domaine par le Comité National du Kivu iC.N.Kii, la Foi-minière, la Minière des Crands Lacs, les Mines d ' O r de Kilo-Moto, nous nous arrêterons quelques instants à l'organisation des services de recherche de l'Union Minière du Haut Katanga.
La grande diversité des richesses minérales exploitées, et la complexité des minerais traités imposaient à la Société d'effectuer continuellement de nouvelles études pour adapter les procédés métallurgiques à la
nature variable du produit à traiter e1 aux nouvelle, circonstances de l'exploitation minière et du marché des métaux.
Il élail. d'autre part, intéressant de suivie attentivement les progrès réalisés dans la technique et de pouvoir étudier soigneusement lout nouvel appareil ou réactif métallurgique.
C'est en vue de ce double objectif que l'Union Minière a créé en Afrique son département des recherches.
Ce Service est chargé de l'élaboration des procédés de traitement des minerais et de l'établissement des données de base pour l'exécution des nouvelles installations industrielles. Son activité comprend aussi le contrôle métallurgique du fonctionnement des installations existantes et l'expérimentation des nouvelles machines ou produits.
La plupart des essais concernant les traitements thermiques sont réalisés directement dans les installations industrielles en collaboration avec les services d'exploitation. Pour toutes les autres études, le Service des recherches .utilise les laboratoires de Jadotvillc parfaitement équipés. Des spécialistes y procèdent notamment aux mesures physiques, chimiques, condurtimétriques. spectrographi-ques. speetrophotométriques. polarocraphi-ques. électrolytiques. etc..
Le Service des recherches est amené parfois à mettre au point de nouveaux procédés de fabrication soit pour améliorer certaines technique», soit pour récupérer des produits secondaires associés dans les minerais dont le traitement constitue l'activité principale de la Société.
C'est grâce, notamment, à ce Service, (pic la mise au point d 'un procédé clectrolytique de récupération du cobalt des minerais oxydé* cuprifères traités à l'usine d electrolyse de Jadotvillc a pu être réalisée el appliquée depuis 19JS. O l a permii d'augmenter dans de notables proportions la production de ce métal si recherché.
Plus encore «pi'en agronomie, la recherche scientifique s'est révélée, dans le domaine minier, d'une efficience remarquable et nous dirions volontiers presque immédiatement chiffrable sur le plan économique.
Recherches géodé»ique*. géophysiquee et hydrologiques.
Ces recherches, peut-être moins tangibles dans leurs résultats « palpables », n'en présentent pas moins une importance essentielle.
(126)
I,'Institut (íéographique du Congo a été croó on 1950. Il s'est fixé une tâche en rapport direct avec les besoins sans cesse croissants de la mise en valeur de la Colonie. Ce programme comporte, entre autres activités principales, des travaux géodésiques fondamentaux pour l'établissement des grands réseaux. Il constitue la base indispensable aux travaux topographiques dans un grand pays. L'Institut est aidé par des travaux de nivellement barométrique et les déterminations de points astronomiques réalisés par le Service géophysique.
Sur le plan météorologique, on peut considérer que !e Service météorologique groupe, depuis 1017, les activités de recherche et d'application géophysiques au Congo, e'est-à-dire la mété »rMogie proprement dite, le magnétisme terrestre, la séismologie, le rayonnement, l'électricité atmosphérique et la gravimétrie.
Toutefois, les études météorologiques inté-lessant spécialement l'agriculture, la sylviculture et l'élevage ont été centralisées par l'I.N E . A . C . pour lui permettre de mener à bien ses études d'écoclimatologie.
K n relation étroite avec la géophysique se situe l'hydrologie.
Cette discipline comporte des problèmes nombreux qui se rattachent au cycle des précipitations, au régime de l'écoulement, de 1'evaporation des eaux et aux cours souterrains et, d 'une manière générale, au bilan de 1 eau.
Cette question intéressant l ' I . N . E . A . C , les services météorologiques, géologiques et des voies navigeables, il a été décidé de créer un Institut hydrographique qui centralisera toutes les données hydrographiques, se livrera aux recherches fondamentales et pourra fournir aux organismes scientifiques, aux services gouvernementaux et aux particuliers, des documents rationnellement étudiés.
Recherches médicales.
Jusqu'à présent nous avons envisagé, en ordre principal, les activités scientifiques ayant trait à la production.
Envisageons maintenant le producteur.
Ici encore l'effort réalisé au Congo sur le plan de la recherche ne le cède en rien an domaine de la production.
Nous n'entrerons pas dans le détail de l'organisation médico-sociale et pédagogique.
Qu'il suffise d'esquisser brièvement la recherche médicale en considérant celle-ci sur le plan humanitaire et n'obéissant pas à dc> impératifs économiques rigoureux.
l'n réseau très complet de laboratoires médicaux est établi, dont les activités son' partagées entre les analyses cliniques et l.i recherche scientifique.
L'Institut Princesse Astrid de Léopoldville. créé dès 1897. étudie spécialement la trypanosomiases le Laboratoire de Stanleyville est spécialisé en fièvre jaune; celui d'Astrida en rickettsiose ; celui de Blukwa en peste, et enfin celui «le Pawn, en lèpre.
L'n Service d'études et de recherches anti-malariennes fonctionne à Klisahethville. Deux nouveaux laboratoires fonctionnent à Lulua-bourg et à Bukavu. Ajoutons que le Service de l'hygièr.c étudie dans les centres urbains et les ports la biologie des vecteurs de maladie, et détermine les reírles et les moyens de lutte.
Le Fonds Reine Elisabeth pour l'aide médicale aux indigènes ( F . O . R . E . A . M . I . Ï , la Fondation médicale de l'Université de Lnu-vain au Congo i F . O . M . U L A . C . t . le Centre médical et scientifique de l'Université libre de Bruxelles au Congo ( C E M . U . B . A . C . i. la Fondation Père iDamien i F . O . P . E . R . D . A . i contribuent largement aux recherches et aux développements médicaux. Il en est de m ê m e des laboratoires des grandes sociétés.
La répartition des centres d'études médicales démontre abondamment que les pouvoirs publies se préoccupent autant des milieux ruraux (pie des milieux urbains et industriels, et l'on constate une amélioration réelle de I état de santé au Congo.
Si l'indigène est moins malade qu'il y a trente ans. c'est en tout premier lieu aux médecins qu'on le doit, mais aussi au fait qu'il se nourrit mieux. Là encore les efforts s'amplifient sans cesse.
Institut des Parcs Nationaux d u C o n g o Belge.
(Voir p. 497.)
Institut pour la recherche scientifique en Afrique Centrale.
Le Gouvernement belge souhaitant voir entreprendre l'étude de certains sujets peu ou guère considérés et voulant assurer, d'antre part, une indispensable coordination entre disciplines apparentées, a créé, en 1947.
(127)
1 "Institut pour la recherche scientifique en Afrique Centrale ( I .R .S .A.C. ) .
A u x termes de ses statuts, l'objet de cet Institut est de susciter, promouvoir, réaliser el coordonner, au Congo Belge et au Ruanda-Urundi, l'étude des sciences de l ' H o m m e et de la Nature.
Pour réaliser son but, l'institution a créé à la Colonie et au Ruanda-Urundi plusieurs centres où des chercheurs belges et étrangers peuvent s"adonner à leurs études; elle favorise, d'autre part, par l'octroi de subsides, tontes études, recherches et expérimentations qui se trouvent étroitement en rapport avec le développement de l'étude des sciences de l ' H o m m e et de la Nature.
A u sein de l'Institut, plusieurs commissions scientifiques ont été créées en vue d'établir des programmes précis de recherches ou d'instruire des demandes de subsides.
Il existe actuellement huit Commissions, à s«voir :
1" la Commission de l'Alimentation et de la Nutrition de l'Indigène au Congo;
2° la Commission de Biologie animale; 3" In Commission des Sciences de l ' h o m m e : 4" la Commission de Pathologie humaine
et animale; 5° la Commission de Géophysique et d'As
tronomie, qui compte trois sous-commissions : de Céophysique, de Météorologie et d'Astronomie;
6° la Commission de Biologie végétale; 7" la Commission de Géologie qui compte
deux sous-commissions : celle de la Carte géomorphologique du Congo Belge et celle de Vulcanologie :
8" la Commission de Cartographie.
Par ailleurs l ' I .R .S .A .C. comprend plusieurs sections qui sont des rouages d'exécution constitués lorsque, à la demande du Ministre des Colonies ou spontanément, l'Institut décide de consacrer une fraction de ses efforts et de ses ressources à entreprendre, à la Colonie, l'exécution d'un programme important de recherches dans un domaine déterminé. Ces sections font partie intégrante de l'institution et sont entièrement subordonnées au Conseil d'Administration et au Comité de Direction, mais disposent de certains pouvoirs d'administration et d'un statut suffisamment souple pour permettre une coopération réelle avec d'autres institutions ou associations désireuses de participer au financement de ces recherches.
Ces sections sont actuellement au nombre de trois :
1° Hydrologie; 2° Alimentation et nutrition de l'indigène
au Congo Belge et au Ruanda-Urundi; 3° Hydrobiologie.
Les Centres de recherches scientifiques établis ou en voie d'établissement sont le« suivants :
10 Le Centre de Recherches Scientifiques du Tanganyika, à Uvira (Hydrobiologie el station météorologique) ;
2° Le Centre de Recherches scientifiques du Ruanda-Urundi, à Astrida (essentiellement dédié aux problèmes humains) ;
3° Le Centre de Recherches Scientifiques de l'Equateur, à Mabali (lac T u m b a ) , situé dans la région biogéographique la moins étudiée du Congo. (Travaux de prospection dans les domaines de la sociologie, de la nutrition, de la bioclimatologie, de la botanique, de la zoologie générale, e t c . ) :
4" Le Centre de Recherches Scientifiques du Kivu. à Lwiro 'Recherches géophysiques et géochimiques et notamment les recherches vulcanologiques, séismologiques, eravimétri-ques. etc..) :
5° Le Centre de Recherches Piscicoles de Kipopo (à 20 k m d'Elisabethville) ;
6° Le Centre de Recherches Scientifiques d'Elisabethville. Ce Centre fonctionnera en association avec les nouveaux laboratoires médical, vétérinaire et d'hygiène du Gouvernement.
Par l'organisation de ces Centres de recherche, l ' I .R.S .A.C. facilitera les missions d'étude des h o m m e s de sciences de la M é tropole.
11 en est de m ê m e de l ' I . N . E . A . C , dont le vaste réseau de stations bien équipées sera toujours à m ê m e d'accueillir des chercheurs métropolitains.
Nous touchons là à une des caractéristiques de la recherche scientifique au Congo : à savoir, la part importante que ne cessent de prendre au développement de la Colonie les milieux scientifiques belges.
Depuis 1945, notamment, nombreux sont les Professeurs d'Universités qui se sont rendus en Afrique et ont recueilli, au cours de leur séjour, matière à études remarquables.
Citons notamment les missions I . R . S . A . C . du Professeur D O R Y , qui s'est occupé spécialement de biométrie, et du Professeur U R B A I N , qui a étudié les problèmes de structure sociale
(128)
et de structure des marchés des biens et des revenus ruraux.
Citons encore les recherches des Professeurs K'OCH, BlCWOOD, BOI'ILLENNE. L E G R A Y E , (TIL-LIAFD, etc. (voir aussi p. 500V
L ' T . N . E . A . C , également, accueille régulièrement des chargés de mission, et accentue encore la collaboration de ses services de recherche avec ceux de la Métropole en confiant à des Professeurs l'organisation de nouvelles sections.
Nous pensons, entre autres, à la section de physiologie végétale confiée au Professeur H O M E S et à la section de mécanique agricole fondée par le Professeur M A L C O R P S .
D'autre part, l ' I . N . E . A . C . base les principes de sa sélection cotonnière sur les travaux conduits au laboratoire du Professeur D E M E I L E M E E S T E R de ftand sur la technologie des fibres.
LTne forme de réciprocité s'est d'ailleurs établie au sein de cette Institution dont plusieurs chercheurs travaillant en Afrique viennent régulièrement en Belgique donner un cycle de cours universitaires et entamer des recherches dans les laboratoires belges.
Cet état de choses présente le double avantage d'entretenir au Congo les sages traditions de la recherche scientifique belge et d'orienter l'enseignement universitaire et les travaux des laboratoires belges vers les choses «le la Colonie. Il entretient, par ailleurs, un excellent esprit de large collaboration éminemment favorable au développement général du Congo.
Cette orientation reste dans la tradition quand on considère la part considérable que revêt l'activité congolaise de certains centres de recherche métropolitains.
Citons les principaux : Le Musée Royal du Congo Belge, à Ter-
vuren, a été créé par Leopold TI en 1902 et organisé en sections ressortissant à diverses disciplines : zoologie; minéralogie et géologie; ethnologie; anthropologie et pré-histoire; sciences morales, politiques et historiques et enfin sciences économiques. Chacune d'entre elles procède à l'inventaire du patrimoine congolais et publie les travaux de base indispensables ;
Le Laboratoire de Recherches Chimiques de Tervuren a c o m m e mission l'examen de toutes les questions d'ordre chimique que comporte l'inventaire scientifique complet des productions naturelles du Congo. Il com
prend plusieurs services s'attachant aux recherches de chimie minérale, organique, physique, de biochimie et de phytochimic. Entre autres recherches citons, notamment, celles qui ont trait à la chimie des minéraux argileux et des oligo-éléments, ainsi que les travaux approfondis sur les celluloses congolaises ;
L'Institut de Médecine tropicale d'Anvers, créé en 1906, contribue pour une large part aux études de base en médecine humaine et animale;
L'Institut Royal Colonial Belge, dont l'activité des sections (Sections des Sciences morales et politiques; des Sciences naturelles et médicales; des Sciences techniques : transports, communications, génie civil, matériel colonial, outillage, exploitation des mines» est axée uniquement sur le Congo et qui publie des travaux remarquables ayant contribué, pour une part importante, au développement de la Colonie.
E n dehors de ces organismes ou institutions orientés exclusivement vers les choses du Congo, nombreux sont les laboratoires belges dont une grande part d'activité est réservée à la Colonie.
Le Jardin Botanique de l'Etat, notamment, se consacre depuis 1900 à l'étude des végétaux congolais. Ces cinquante années de recherche permettent à l'heure actuelle la publication, sous l'égide de l I . N . E . A . C . de la flore du Congo Belge.
L'Institut Royal des Sciences Naturelles de Belgique a orienté une partie importante de ses travaux vers l'étude systématique du Congo, principalement dans les domaines zoologique, anthropologique et paléontologique. Il organise régulièrement des missions d'études au Congo (voir p . 500V
Etudes conjoncturelles et économiques.
Il est un autre domaine où l'activité scientifique métropolitaine exerce une influence économique importante, c'est celui des études conjoncturelles et économiques proprement dites.
Le Ministère des Colonies dispose d 'un Service d'Etudes Economiques où la statistique fait l'objet d'investigations régulières dans les domaines du commerce extérieur, de la production, des finances, des transports, des prix, des salaires et de la population.
(129)
(.¿race à ces recherches, les tendances économiques peuvent être précisées et permettent nu Département de déterminer sa politique en matière économique.
L'Association des Intérêts coloniaux belges a organisé un Bureau d'études et des C o m missions techniques qui envisagent les divers problème* économiques de la Colonie.
Les organismes bancaires belges ont également des services où s'élaborent les études économiques destinées à l'observation de la situation de la Colonie. Ces éludes sont basées sur le dépouillement quotidien d'une abondante documentation relatant, notamment, les cours des produits coloniaux sur les marchés ainsi que le> tendances de ceux-ci.
L'évolution de la situation conjoncturelle en Belgique et à l'étranger peut être suivie grâce, notamment, aux données transmises mensuellement par l'Institut de Recherches Economiques et Sociales de lTniversité de Louvain.
(juani à l'évolution économique du Congo, elle est étudiée grâce aux informations et aux chiffres fournis par les statistique* économiques de production et de vente des produits coloniaux, ainsi que par les statistiques financières des sociétés exerçant leur activité à la Colonie.
Sur le plan bancaire, les études statistiques permettent la surveillance des engagements du commerce colonial et l'appréciation du risque bancaire encouru par la distribution du crédit.
Elles sont basées sur les documents établis par les Services d'études économiques, et étudiées suivant les spécialisations de l'activité commerciale : l'importation, la distribution et l'exportation.
Cetlc simple esquisse montre à suffisance l'importance de la recherche scientifique dans ce domaine et de son influence sur les courants économiques.
Institut universitaire des territoires d'outremer (INI T O M ) .
L'arrêté royal du 11 janvier 1920 créa, à Anvers. l'Ecole Coloniale Supérieure qui reçut la personnification civile par la loi du 8 mars 1920. L'arrêté royal du 21 novembre 1923 transforma l'Ecole Coloniale Supérieure en Université Coloniale- La loi du 4 mai 1949
modifia cette dernière dénomination en « Institut universitaire des territoires d'outremer » et autorisa l'institution à conférer les grades et diplômes de candidature et de licence en Sciences coloniales et administratives.
L'Institut a pour but l'enseignement spécial des Sciences coloniales théoriques et appliquées. 11 se préoccupe, notamment, de former des fonctionnaires pour la Colonie du Congo et pour le territoire du Ruanda-l'rundi.
Nul n'est admis à l'Institut s'il n'est porteur d 'un certificat homologué ou agréé d'études moyennes complètes du degré supérieur et s'il n'a, en outre, subi avec succès un examen d'entrée dont le Ministre des Colonies a déierminé les conditions et le prog r a m m e par arrêté du 2 décembre 1950.
Le Roi, par arrêté du 14 décembre 1950, a fixé le programme des études. Celles-ci comprennent deux cycles dont le premier, comptant deux années d'études, se termine par la délivrance du grade de candidat en Sciences coloniales et administratives, le second également de deux années d'études, par la délivrance du grade de licencié en Sciences coloniales et administratives.
Le Ministre des Colonies fixe annuellement le nombre m a x i m u m d'étudiants qui. à la fin de leurs études, seront admis au service de la Colonie. Ces étudiants sont désignés dans l'ordre du classement obtenu lors des examens à la fin de la première année de candidature.
• • •
Nous pensons avoir brossé une fresque des divers plans sur lesquels se manifeste la recherche scientifique au Congo, et pouvons en tirer la conclusion tout à l'honneur de la Belgique : notre pays a compris l'importance de cette recherche scientifique et n'a pas hésité à y consacrer des somme.s considérables pour en stabiliser les assises.
Rares sont, au monde, les pays neufs qui investissent annuellement 3 r,'c de leurs dépenses totales dans cette recherche.
Les pouvoirs publics ont pleinement conscience que l'organisation scientifique congolaise est loin d'être parfaite, mais ils s'efforcent d 'y remédier dans la mesure de leurs moyens.
Ils sont persuadés qu'en continuant de la sorte, ils arriveront à faire du Congo un pays digne des traditions de la Mère Patrie.
(130)
ANNEXE II : Les hommes de science et la politique, le cas du Zaïre (1).
Dans le cadre du Colloque National sur l'Authenticité, la commission
"Sciences et technologie" a examiné tous les aspects de la dépendance
technologique du Zaïre vis-à-vis de l'étranger et a préconisé les voies
et moyens de la diminuer.
Président : Professeur Mubandu Mpelenda
Rapporteur : Professeur Kandjingu Katanga
I - INTRODUCTION
A l'heure actuelle, le Zaïre est confronté à des problèmes aussi
urgents, les uns que les autres, dans divers domaines tels que :
- l'énergie
- la nutrition
- les soins médicaux
- l'habitat, etc.
Pour résoudre ces problèmes, le pays a jusqu'ici fait appel à l'aide
étrangère. Malgré la générosité et la bonne volonté des donateurs, cette
aide présente les inconvénients suivants : l'insuffisance, les conditions
d'octroi peu favorables que nous acceptons parfois pour résoudre les pro
blèmes immédiats, la dépendance qu'elle entraîne surtout dans le domaine
technologique.
Cette dépendance rend difficile l'épanouissement de l'homme zaïrois
et 1'eclosión d'une technologie zaïroise appropriée capable de privilégier
l'utilisation des matières premières locales abondantes et bon marché.
Une telle technologie est pourtant susceptible de mettre en relief les
valeurs nationales et surtout d'économiser les devises.
(1) Rapport et résolution de la commission "Sciences et technologie" du Colloque national sur l'authenticité (kiushasa 14-21 septembre 1981), in Authenticité et développement. Paris, Présence Africaine, 1982, pp. 355-359.
(131)
II - CONSIDERATIONS ET PROPOSITIONS
La Science, ensemble des connaissances humaines se basant sur des
faits régis par des principes rigides appelés lois, étant universelle,
elle ne peut être authentique, c'est-à-dire exclusive.
Par contre, la technologie qui est l'application pratique des connais
sances dans les divers domaines de la vie, peut, quant à elle, avoir un
caractère authentique.
C'est ainsi que dans l'optique du concept de l'Authenticité, la recher
che dans notre pays devrait s'orienter vers la revalorisation des techniques
locales, vers la mise au point de nouvelles techniques authentiquement
zaïroises, ou encore vers l'adaptation des techniques étrangères aux réalités
du pays, etc..
A ce titre, la commission, considérant :
a) que dans la confiance de l'Etat en ses cadres nationaux compétents,
la technologie zaïroise ne pourrait réellement se développer,
b) que les sciences exactes ne font pas l'objet d'une attention toute
particulière de la part des pouvoirs publics,
c) que le Zaïre ne possède pas encore une politique scientifique et technolo
gique nationale,
d) que cette politique scientifique et technologique ne peut se réaliser
efficacement sans un cadre juridique approprié,
e) que le transfert de technologie pose le problème de son adaptation à nos
besoins spécifiques,
f) que le manque de devises handicape souvent l'approvisionnement du pays
en biens de première nécessité,
recommande,
1) que les pouvoirs publics créent, grâce à une politique scientifique cohé
rente, toutes les conditions favorables à 1'eclosión et au développement
de la science et de la technologie zaïroise appropriée,
(132)
2) que les cadres nationaux soient utilisés rationnellement en tenant compte
de leur spécialisation,
3) qu'il soit créé au sein du Conseil Exécutif un Département de "Technolo
gie et Industrie" ayant pour mission :
a) d'inventorier les procédés technologiques traditionnels,
b) de favoriser la réhabilitation et la création des petites et moyennes
entreprises appartenant aux nationaux en mettant l'accent sur les
industries de base,
c) d'élaborer les normes industrielles zaïroises,
d) d'homologuer tout projet ayant trait à l'industrie, à implanter au
zaïre et de protéger scrupuleusement les droits d'invention des
nationaux,
e) de promouvoir les possibilités de recherche technologique au sein des
industries, et la récolte des données de compilation en vue de
redynamiser celles-ci et d'améliorer la production,
4) qu'en vue de stimuler la concurrence loyale, la conclusion des accords en
rapport avec le développement national tienne compte des intérêts primor
diaux du pays et qu'aucun monopole ne soit reconnu aux entreprises tant
nationales qu'étrangères,
5) qu'il soit créé une Commission nationale pour la politique et la recherche
scientifique et technologique, commission qui aidera les pouvoirs publics
à définir et à déterminer les objectifs primordiaux dans les domaines de
la recherche et de la technologie,
Dans le cadre du Département de "Technologie et Industrie" proposé
au sein du Conseil Exécutif, la commission propose les réalisations concrètes
dans les domaines ne présentant aucune difficulté technique et pour lesquels
il existe un personnel zaïrois qualifié.
Il s'agit, notamment, des domaines suivants :
1) énergie : - énergie hydroélectrique,
- extraction des bitumes à partir des schistes bitumeux,
- production du méthamol, de l'éthanol, du méthane, etc.. à
partir des résidus végétaux.
(133)
2) santé : - création et promotion des industries pharmaceutiques basées
sur les connaissances de la médecine traditionnelle.
3) agriculture et alimentation :
- mise au point de nouvelles denrées alimentaires à partir des
produits agricoles locaux,
- mise au point des techniques de conservation adaptées aux con
ditions climatiques zaïroises.
4) chimie : - fabrication des engrais, des aliments pour bétails et volailles,
- fabrication de la soude caustique, du savon et des détergents.
5) habitat: - mise au point des modèles de construction adaptée aux condi
tions climatiques et utilisant les matériaux locaux tels que
bois, argile, paille, etc..
6) infrastructure routière :
- utilisation des termitières pour la construction, la réhabilita
tion et l'entretien des routes en terre.
(134)
ANNEXE III : La radio au Gabon , programme de Libreville II
28
2
o <?
o o
W M
W -•
_» O
O U3
^'u
bw
U
l O
O O
D.c
oc
DN
j-jM
Cs
aiiiiu
iA
tiu
uM
uu
i»
-.'
(Jl
OÍ
I y
io
ot
iO
üi
öu
'O
OO
Oü
'ö
-jp
fS
iûœ
Ϟ
o^
i-g
çfîd
iaît
nc
h
bó
— O
oi
bo
— n
u-
o U
NÍ
Wo
in
öü
iw
ou
io
Oc
iö
Oü
1
c z o
o
1*
3 =
IÏÏI
ill
I« 1.3
I
•o
§•
S.
5
|f|
5' £
. »
II!
ill >
t_
>
-n
r-
< O
<
(5
O
2 »
n
2'-
2 3
5.3
c
o c
3
3
5'
5
c
c
cc*>
o
o a
< _
1 =
t» Ö
'
TI
3
>a
• TJ
O c
3 2
<-
? 1
o.
es art a
W
"n
m
i»
3"
o- 1
mation w
r- o
3 CL
c
week n
T a.
m
c
2 ri
Q. 5 ormat o
3 w
O 3"
Q>
J
to
rt>
men des f ct-
ri
c
Tl
CD
n
o
Ö
CD
-n
CD
a 1
mation v>
(ñ
c
CD
Q.
c>
eil ma 1 <_
o
c
3 •o 5¡
+
O
V)
T3
C
fJ ñ S
^r t I o -i r*
ó I
~n
fO mation w
Tl
rt>
<
eil matin ÜL T
-<
mne z CD
3
I f
o 3 o 2 CT
SI a 5'
<o
u
2 >
OO
MN
MM
WM
IO
J
8¡?
88
S8
Sc>
8e
CD
CO
OM
^IS
OlÇ
lU
lO
lf
cû
UU
MW
M
'í>
^b
uiu
ob
Í5
Í3
0A
l.u
ou
Í5
(5
u
iu
iS
vo
ou
oü
>o
ui
oo
So
iJ
>S
gO
OO
OO
OO
Q
co
^j-
<JC
7)a
)Ç7>
uiç
Ji
ob
b-
ib
oi
bb
-o
a-
óu
N
uo
Su
io
vu
oo
io
oo
io
Qo
'
_.
-.
-;
O O
O
—
— O
<£
> tO
CO
I
> C
tir
i-o
F
a'llfl
I § I
8 |
¡:°5
f i-
£.
» a
Ifilí
if CO
o 3 2 o
11
, i.
o 1
Ipil
*
IH*
?p
z a o'
c
3 CCI
c
I O
C
33
z
TJ m
jl
H
i
f 3"
sL £
. 3
°- s
- S- s
W
3 ^
O
ri
P
=
CT.
Co ~
-
sl 3 CT
CU
N
2 >
(135)
r»
O¿
tG
JN
)N
>rtO
Pf0
Ov
oO
œo
ui
ou
û
r^
r^p
ÇD
f5Ç
D0
0p
0<
Nl^
Ç|)
^5
Su
1§
u>
8o
ôi8
uiu
8u
i8ë
ûî8
cju
i
C
33
m
v>
2 m
33
O
33
m
O
o
o 3 iprendr o
aujourd 31
C
Fla vi zr
a
'inform Ol
¡ons
Fla vi
3" +
suite du 2 Q)
CD
G
) N
s' E ? S.
ne de 1 Cl I I S DD
Q S
2
: 01
es
3
r. <
o 3
S
a3
_: a
3 3
Ili!
llll ¡fil!
S
c •>
q 5
"
S
S' _
r ä »
=•
I O
C
3
3
Z m
Z o £.
S
o c <o
o 3 er
o 2
.
— *
I«
O
ttl-
OI
o o
3 n
« c I î
o 3
w
S
m
-o
r?
« r>
33
O
- ¿
"• i
°
3 •*
°
? 3
=
01
3
oí
-*
ûj
—
i!
î
2 z
I
S§ H
fo
M _
* l
p
p co
•
88
8
6-.Í
3u
ibo
ob
bb
*-u
¡5
úb
i O
IO
IO
UIU
OÜ
IO
UIO
UIO
O 8
8S
8
^^
piû
fc
ύ
oœ
sjM
Çb
pp
uip
i
uo
oô
io
iiiu
oijio
oû
io
oc
"
C
33
m
C o
r—
o"
3 CT
c 2 <
(A
tère
m
ulle *•
3'
a
5 5"
3 eu
Ô'i
Hi
"H
K'f
t
B*
? K
-Q
•*
• <
K ffl
B'A
sur
> S- »
com 3 i ?nbi
t_
ouri l S 3.
a-
in
O O C
3
3
Z m
co
c
e du révei *~
3
ai
tin 3L c
O
c
rnal parlé +
¡A
T3
O
Séci
TJ
C
O-
licites
m
•o
3-émérides
2 01
VI
h d'inform 01
tions
r- x
a <
mne Natior jour se lèv
â.
ô ~
b
2
2
X
o
2 >
O o_
o3 c 3 5 o o
(13
6)
2£
v |t
s>
K>
tOM
MM
KJ
-i
|wfO
t°r'
PP
Píc
>
8S
8O
Í0S
0O
aS
aN
l^
vl(D
a<
)IU
IJ
>,J
>U
UN
)N
K)
(jiô
iou
'iio
uo
iî'o
oio
oo
ow
o
88
8iS
oo
'wo
öi8
o5
oo
u'
c
3!
<
m
z o
30
m
O
y o
o ?
V*
a. S
•o
5T
C" <
"> ET
O
3*
O
w
8] o
o,
a
-¡
3
3
a-
*u
^_
1"*
<
D
1
f 11; ili
If
n
»> 5
3"
o-
3"
SI.
o
I c 3
y-
, w
x ?
»
9§ r-
a
j to
»
C T3.
</»
= O
o
S
~
3" =
5' Sí
.
> >
-• S
.
38
M
o 3
5'
c
3
c
o
c
Ipí ti! o c
z
rpr
3 C
3
o.
=; »
IH|
tí
01
O b
Z Z
z >
o
3
^ S
O
U U
S)
8 iS
oo
íf o
•M ro
NJ
-*
T-»
p
p fo
|ií o
8 o
I
ço
œp
^^
pp
ui
ii
i*
.4
uu
uw
M
-.
QO
iQ
OO
QO
wfiu
iou
ov
oi
8OJ
O
O r
o 8
m 8
> O
¡7 Q
S-§
3|
'3 a
si
9 O
3
3
3 3
a 2
3
S S
i
i *
* 5
CD
CD
¿W
M
ill llj;
¡f.r Hl
Hi o
III II
II II
S-
8 3
B °:
9-a
O
O
* 3
i' 3 CT
I?
Iî
* Z
&3
(13
7)
OO
OO
OQ
PO
Q
3
o
-^ o
u
^
5
u
N
o
c
z
c
3
0 c F
>
1 in' i £ »i i ¿
m
o
o
c
r*
m
i ^m
0)
tre * a
0 nne le t est VI use 0>
ble détr s 3
9-.
s
i 3
S
S
»
»
sit
o
3"
CD
3
O Z 0)
O
3
û>
et»
o
(A
c»
0)
"O
•a
n n
2 a
CD
•a
.
c
</)
H
O
J.
CO
>
s
o
>
-o
o
31
H
O
m
NTI
to
_.
.-*
Ol
2 u
i
I I
N
N
O
•<
m
2
•n
o
""
""
? 2
S
2
CD
Ol 8
8
o
oi
a
;*: x
N
CD
2
co
> H 5
z "0
33
O
<
Z o
>
r- m
2
o
o
c
8 S
C
O C
O
CO
C)
22
X
X
isi
fsl
88 o
c
m
Z O
m
O
m
oí
O
X
m
to
V> 2
O -<
m
Z Z m
(A
O
>
O
X 8
CO
CO
CO
o
Ol
X
N
CO
C
_
o o
5 c
m
m
X
m
>
2 t"
X
>
«
X
Si
§2
co
O =?
rv>
»
j o
;*
x
CO
33
2 S
> s
H
O
m
O
C
33
CO
8
M
O
m
D Z O m c/)
33
O
33
> m I
m
œ
D
O
> D
> 55
m
m
3B
r—
c
*» ç
3
0
>
(138
BIBLIOGRAPHIE SELECTIVE
A. Généralités
Annuaire Statistique. O.N.U.
Annuaire Statistique. Unesco
La civilisation ancienne des peuples des Grands Lacs. Colloque de Bujumbura 4-10 septembre 1979. Paris, Karthala, 1981.
Découverte et innovation scientifique au service du Tiers Monde (Association Henri Laugier). Revue Tiers Monde XX, 78, 1979.
Développement de l'activité scientifique en Afrique intertropicale. Actes du Colloque sur la pratique scientifique et l'administration de la recherche en Afrique (Yaounde 10-21 juillet 1967). Paris, UNESCO, 1969.
Les plans de développement des pays d'Afrique noire. Paris, Ediafric, le éd. 4e éd. 1977.
Les politiques scientifiques nationales en Afrique. Paris, Unesco, 1974.
Recherche scientifique et développement. Répertoire des institutions francophones. Paris, Agence de Coopération Culturelle et Technique, 1980.
La science et la technologie au service du développement en Afrique. Paris, Unesco, 1974.
AMSELLE, J.L. et M'BOKOLO, E. (eds.) Au coeur de l'ethnie. Ethnicité, tribalisme et Etats en Afrique. Paris, La Découverte, 1985.
CHATELIN, Y. "La science et le développement. L'Histoire peut-elle recommencer ?", Revue Tiers-Monde, XXVII, n° 105 (janvier-mars 1986), pp. 5-24.
CHATELIN, Y. et ARVANITIS, R. (eds.) Pratiques et politiques scientifiques. Paris, ORSTOM, 1984.
COHEN, R. (éd.) African Islands and Enclaves. Londres, Sage Publications, 1983.
CROUSSE, B. ; QUERMONNE, J.L. et Rouban, L. Science Politique et Politique de la Science. Paris, Económica, 1983.
CUOQ, J.M. Les musulmans en Afrique. Paris, Maisonneuve et Larose, 1975.
GOONATILAKE, S. Aborted Discovery : science and creativity in the Third World. Londres, Zed Press, 1984.
GUERNIER, E. (éd.) Afrique Equatoriale Française. Paris, Encyclopédie Coloniale et Maritime, 1950.
HAILEY, Lord An African Survey. A Study of Problems arising in Africa South of the Sahara. Londres, Oxford University Press, 1957.
DE HEUSCH, L. Le roi ivre ou l'origine de l'Etat. Mythes et rites bantous. I. Paris, Gallimard, 1972.
(139)
KATZENELLENBOGEN, S.E. Railways and the Copper Mines of Katanga. Oxford, Clarendon Press, 1973.
MAGUBANE, B. et NZONGOLA-NTALAJA (eds.) Proleterianization and class Struggle in Africa, Contemporary Marxism (San Francisco, 6, 1983.
M'BOKOLO, E. L'Afrique au XXe siècle. Paris, Editions du Seuil, 1985.
MORTIMER, E. France and the Africans 1944-1960.Londres, Faber and Faber, 1969.
PELISSIER, R. Los territorios españoles de Africa. Madrid, 1964.
SAUTTER, G. De l'Atlantique au fleuve Congo. Une géographie du sous-peuplement. Paris-La Haye, Mouton, 1966.
SINDA, M. Le messianisme congolais et ses incidences politiques. Paris, Payot, 1972.
SURET-CANALE, J. Afrique noire. Tome II L'ère coloniale Tome III De la colonisation aux indépendances. Paris, Editions sociales, 1966 et 1972.
THOMPSON, V. et ADLOHH, R. The Emerging States of French Equatorial Africa. Stanford, Stanford University Press, 1960.
WOILLET, J.C. et ALLAD, M. Répertoire des instituts africains de technologie. Genève, B.I.T., 1984, 2 vol.
B. BURUNDI
Plan quinquennal de développement économique et social du Burundi (1978-1982). Bujumbura, Présidence de la République, s. d.
CHRETIEN, J.P. "La société du Burundi : des mythes aux réalités". Revue Française d'Etudes Politiques Africaines, n° 163-4, 1979, pp. 94-118.
GAHAMA, J. Le Burundi sous administration belge. Paris, Karthala, 1983.
HAUSNER, K.H. et JEZIC, B. Rwanda et Burundi. Bonn, Kurt Schroeder, 1968.
LEMARCHAND, R. Rwanda and Burundi. Londres, Pall Mall, 1970.
MPOZAGANA, G. La République du Burundi. Paris, Berger Levrault, 1971.
NSANZE, T. Le Burundi au carrefour de l'Afrique. Bruxelles, Remarques Africaines, 1970.
NSANZE, T. L'édification de la République du Burundi. Bruxelles, Remarques Africaines, 1970.
(140)
C. CAMEROUN
ANSPENGER, F. Politik im Schwarzen Afrika. Cologne, Suetscher Verlag. 1961.
ARDENER, E. et S. et WARMINGTON, W.A. Plantation and village in the Cameroons : Some Economic and Social Studies. Londres, Oxford University Press, 1960.
BELINGA, E. Cameroun : La révolution pacifique du 20 mai. Yaounde, 1976.
BILLARD, P. Le Cameroun fédéral. Paris, 1968-9.
BIYITI BI ESSAM, J.P. Cameroun : Complots et Bruits de Bottes. Paris, L'Harmattan, 1984.
DELANCEY, M. W. et SCHRAEDER, P.J. Cameroon. Londres, Cleo, 1986.
EPALE, S.J. Plantations and Development in Western Cameroon 1875-1975 . A Study in Agrarian Capitalism. New York, Vantage Press, 1985.
EYINGA, A. Introduction â la politique camerounaise. Paris, L'Harmattan, 1984.
HUGON, P. Analyse du sous-développement en Afrique noire : l'exemple de l'économie du Cameroun. Paris, Presses Universitaires de France, 1968.
IMBERT, J. Le Cameroun. Paris, Presses Universitaires de France, 1973.
JOHNSON, W.R. The Cameroon Federation. Princeton, The University Press, 1970.
JOSEPH RICHARD, A. Radical Nationalism in Cameroon. Londres, Oxford University Press, 1977. (Traduction française, Paris, Karthala, 1986).
LEMBEZAT, B. Cameroun. Paris, Nouvelles Editions Latines, 1984.
LE VINE, V.T. The Cameroons from Mandate to Independence. Berkeley, University of California Press, 1984.
11 " The Cameroon Federal Republic. Ithaca, Cornell University Press, 1971.
LE VINE, V.T. et NYE, R. Historical Dictionary of Cameroon. Metuchen N.J., Scarecrow Press, 1974.
MARC, A. La politique économique de l'Etat britannique dans la région du Sud Cameroun 1920-1960. Paris, 1985.
MBEMBE, A. Ruben Um Nyobé : le problème national camerounais. Paris, L'Harmattan, 1984.
MVENG, E. Histoire du Cameroun. Paris, Présence Africaine, 1983.
NDAM NJOYA, A. Le Cameroun dans les relations internationales. Paris, 1976.
NGONGO, L. Histoire des forces religieuses au Cameroun. Paris, Karthala,
1982.
(141)
NGWA, J.A. A New Geography of Cameroon. Londres, Longman, 1979, 2erne ed.
RUBIN %EVILLE, M. Cameroun. Londres, Pall Mall, 1971.
RUDIN, H.H. Germans in the Cameroons 1884-1914. A Case Study in Modern Imperialism. New Haven, Yale University Press, 1938.
WOUNGLY-MASSAGA Ou va le Kamerun ? Paris, L'Harmattan, 1984.
D. CENTRAFRIQUE
KALCK, P. Histoire de la République Centrafricaine. Paris, Berger-Levrault, 1974.
ZOCTIZOUM, Y. Histoire de la Centrafrique. 1959 Violence du développement, domination et inégalités. Vol. I : 1879-1959, Vol. II : 1959-1979. Paris, L'Harmattan, 1983 et 1984.
E. CONGO
AMIN, S. et COQUERY-VIDROVITCH, C. Histoire économique du Congo 1880-1968. Paris, Anthropos, 1969.
BEMBA, S. 50 ans de musique du Congo-Zaïre. Paris, Présence Africaine, 1984.
BERTRAND, H. Le Congo, formation sociale et mode de développement économique. Paris, François Maspero, 1975.
ELIOU, M. La formation de la conscience nationale en République Populaire du Congo. Paris, Anthropos, 1977.
M'BOKOLO, E. Congo. Paris, R.F.I., 1986 (Archives Radiophoniques, Pays du Monde).
REY, P.P. Colonialisme, néo-colonialisme et transition au capitalisme Exemple de la "Comilog" au Congo Brazzaville. Paris, François Maspero, 1971 .
F. GABON
L'économie gabonaise. Paris, Ediafric, 1977.
BORY, P. The New Gabon. Monaco, 1978.
BOUQUEREL, J. Le Gabon. Paris, Presses Universitaires de France, 1970.
CHARBONNIER, F. Gabon : terre d'avenir. Paris, Editions Maritimes et Coloniales, 1957.
M'BOKOÜO, E. Gabon. Paris, R.F.I., 1985 (Archives Radiophoniques, Pays du Monde).
(142)
G. GUINEE EQUATORIALE
BIDYOGO, D. Ndongo Historia t Tragedia di Guinea Ecuatorial. Madrid, 1977.
CRONJE, S. Equatorial Guinea ; the Forgotten Dictatorship. Londres, 1976.
FERNANDEZ, R. Guinea : Materia reservada. Madrid, 1977.
GARCIA DOMÍNGUEZ, R. Guinea : Macias, la ley del silencio. Barcelone, 1977.
LINIGER GOUMAZ-, M. Guinea Ecuatorial : Bibliografía General (4 vols) . Berne, 1976-1980.
" " La Guinée equatoriale, un pays méconnu. Paris, L'Harmattan, 1980.
" " De la Guinée Equatoriale nguemiste. Eléments pour le dossier de 1'afro-fascisme. Genève, Editions du Temps, 1983.
PELISSIER; R. Etudes hispano-guinéennes• Orgeval, Editions Pélissier, 1969.
H. RWANDA
Situation économique du Rwanda en 1984. Kigali, Ministère des Finances et de l'Economie, s.d. (1984).
ERNY, P. "L'enseignement au Rwanda", Tiers-Monde, XV (1974), 59-60, pp. 707-722.
SIRVEN, P. ; GOTANEGRE, J.F. et PRIOUL, G. Géographie du Rwanda. Bruxelles, A. de Boack, 1974.
SLEDSENS, G . L'explosion démographique du Rwanda. Butare, 1971.
I. SAO TOME ET PRINCIPE
J. TCHAD
BOAHEN, A . A . Britain, the Sahara and the Western Sudan 1788-1861 Oxford, Clarendon Press, 1964.
LANNE, B .
(143)
K. ZAIRE
Authenticité et développement. Colloque national sur l'authenticité organisé par l'Union des Ecrivains Zaïrois (Kinshasa 14-21 septembre 1981). Paris, Présence Africaine, 1982.
Encyclopédie du Congo Belge. 3 vols. Bruxelles, Editions Bieleveld, s.d.
Evolution de l'économie zaïroise en vingt and d'indépendance : bilan et perspectives d'intégration nationale (Actes du Colloque tenu à Kinshasa 15-20 juin 1981), Cahiers Economiques et Sociaux, XIX (1981), 3-4 et XX
(1982), 1-2.
Indépendance, inflation, développement. L'économie congolaise de 1960 à 1965. Paris-La Haye, Mouton, 1968.
ABI-SAAB, G. The United Nations Operations in the Gongo. Londres, Oxford University Press, 1978.
BEZI, F. ; PEEMANS, J.P., WAUTELET, J.M. Accumulation et sous-développement au Zaïre 1960-1980. Louvain-la-Neuve, Presses Universitaires de Louvain, 1981.
BONTINCK, F. L'évangélisation du Zaïre. Kinshasa, Saint-Paul, 1980.
CORNEVIN, R. Le Zaïre. Paris, Presses Universitaires de France, 1977.
" " Histoire du Congo Léopoldville-Kinshasa. Paris, Berger-Levrault, 1966.
GOUROU, P. La population du Congo. Paris, Hachette, 1966.
GRAM, G. (éd.) Zaire.The Political Economy of underdevelopment. New York, Praeger, 1979.
JEWSIEWICKI, B. (ed.) Etat indépendant du Congo, Congo Belge, République démocratique du Congo, République du Zaïre ? Sainte-Foy (Québec), SAFI Press, 1984.
KAMITATU-MASSAMBA Zaïre. Le pouvoir à la portée du peuple. Paris, L'harmattan, 1977.
KRONSTEN, G. Zaire to the 1990s : will Retrenchment work ? Londres, Economist Intelligence Unit (Economic Prospects Series), 1986.
MERLIER, M. Le Congo, de la colonisation belge à l'indépendance. Paris, François Maspero, 1962.
MOUMBA NGIMBI Kinshasa 1881-1981, 100 ans après Stanley. Problèmes et avenir d'une ville. Kinshasa, Centre de Recherches Pédagogiques, 1982.
N'KANZA (Zalá L.) Les origines sociales du sous-développement politique au Congo Belge, de padroado à la loi fondamentale 1480-1960. Kinshasa, Presses Universitaires du Zaïre, 1985.
SCHATZBERG, M.G. Politics and class in Zaïre. Bureaucraty, Business and Beer in Lisala. New York, Africana Publishing Cy., 1980.
VANDERLINDEN, J. (éd.) Du Congo au Zaïre 1960-1980. Essai de bilan. Bruxelles, CRISP, 1980.
(144)
YOUND, C. Politics in the Congo : Decolonization and Independence. Princeton, Princeton University Press, 1985.
YOUNG, C. et TURNER, T. The Rise and Decline of the Zairian State. Madison, The University of Wisconsin Press, 1985.
(145)
TABLE DES TABLEAUX
I. Les Etats de l'Afrique Centrale 1.2
II. Les densités de population en Afrique Centrale 1.15
III. Indicateurs des changements sociaux 11.21
IV. Principaux produits d'exportations 11.23
V. Les P.M.A. d'Afrique Centrale 11.25
VI. Taux de croissance annuelle de la population
africaine (1960-2000) 11.28
VII. La population de l'Afrique centrale dans le
contexte africain (1960-2000) 11.29
VIII. Taux d'analphabétisme III.17
LX. La part de l'éducation dans les dépenses de
l'Etat III.23
X. Evolution du nombre des enseignants III.25
XI. Evolution du nombre des élèves et Etudiants III.26
XII. Nombre de postes de radio III.33
XIII. Nombre de postes de télévision III.37
XTV. Les journaux quotidiens de l'Afrique centrale III.39 bis
XV. Le cinéma, salles et fréquentation III.52
XVI. La production de livres III.53
XVII. Les taux de croissance démographique annuelle V.7
(146)
TABLE DES ANNEXES
I. Science : l'héritage colonial, le cas du Zaïre
II. Les hommes de science et la politique scientifique :
le cas du Zaïre
III. La radio au Gabon
(147)
TABLE DES MATIERES
Introduction
I. Caractéristiques, profil général et définition
de la sous-région I. 1
A. Les Etats d'Afrique centrale I. 2
B. Définition en termes de structures et de longue durée I. 3
1. La perméabilité des frontières I. 3
2. Les facteurs d'intégration I. 9
C. Les spécificités de l'Afrique centrale I. 11
1. Spécificités coloniales I. 11
2. Les croisements de l'histoire contemporaine I. 13
3. Le sous-peuplement I. 15
D. L'Afrique centrale : personnalité et capacité d'action I. 16
II. Problématique de développement
A. Les héritages : une structure de dépendance et de
désarticulation
1. Les particularités historiques
2. Typologie : les inégalités de mise en valeur
Inégalités entre Etats
Inégalités entre régions
B. Les contraintes politiques
C. Les politiques de développement
D. Bilan actuel des économies
E. Des perspectives plutôt bonnes
1. Les atouts
2. Les handicaps II. 27
III. Communication, culture, éducation, science et technologie
performances et défaillances
A. La science et la technologie III. 3
1. Un bilan nécessaire : la recherche coloniale III. 3
2. La politique scientifique et technologique :
lenteurs, hésitations et incohérences III. 5
Le cas du Cameroun. Le cas du Congo. Le cas
du Gabon. Le cas du Zaïre
II.
II.
II.
II.
II.
II.
II.
II.
II.
II.
2 2
6
6
8
9
12
19
26
26
(148)
III.
III.
III.
III.
III.
III.
III.
III.
III.
III.
III.
III.
13
16
16
19
22
29
29
32
36
41
41
44
3. Un bilan mediocre
B. L'éducation : volontarisme et handicap
1. Un médiocre point de départ
2. Les philosophes de l'éducation
3. Un bilan mitigé
C. Un instrument privilégie : la communication
1. Caractéristiques générales
2. La radio : émancipation et blocages
3. Splendeurs et misères des autres médias
D. Un secteur dynamique : la culture
1. Le dernier âge précolonial
2. L'intermède colonial
3. Le temps des indépendances : les politiques
culturelles III. 48
4. Le temps des indépendances : les pratiques
culturelles III. 50
IV. La coopération sous-régionale : une volonté et des
initiatives prometteuses
A. Une coopération aux visages multiples IV. 2
B. Le cas du CICIBA IV. 5
V. Conclusion : éléments de prospective
A. La logique de l'Etat V. 2
B. Etat et société civile V. 3
C. Problèmes de géopolitique V. 6
Annexes
Bibliographie sélective
Tableau des Tableaux
Table des Annexes
Table des matières
(149)