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UNIVERSIT DU QUBEC MONTRAL
IMPACT DE LA CULTURE SUR L'INTGRATION TECHNOLOGIQUE ET L'INNOVATION: CAS DU SECTEUR AGROALIMENTAIRE QUBCOIS
THSE PRSENTE
COMME EXIGENCE PARTIELLE DU DOCTORAT EN ADMINISTRATION
PAR LAMIA KERZAZI
AVRIL 2010
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UNIVERSIT DU QUBEC MONTRAL Service des bibliothques
Avertissement
La diffusion de cette thse se fait dans le respect des droits de son auteur, qui a sign le formulaire Autorisation de reproduire et de diffuser un travail de recherche de cycles suprieurs (SDU-522 - Rv.1-26). Cette autorisation stipule que conformment l'article 11 du Rglement no 8 des tudes de cycles suprieurs, [l'auteur] concde l'Universit du Qubec Montral une licence non exclusive d'utilisation et de publication de la totalit ou d'une partie importante de [son] travail de recherche pour des fins pdagogiques et non commerciales. Plus prcisment, [l'auteur] autorise l'Universit du Qubec Montral reproduire, diffuser, prter, distribuer ou vendre des copies de [son] travail de recherche des fins non commerciales sur quelque support que ce soit, y compris l'Internet. Cette licence et cette autorisation n'entranent pas une renonciation de [la] part [de l'auteur] [ses] droits moraux ni [ses] droits de proprit intellectuelle. Sauf entente contraire, [l'auteur] conserve la libert de diffuser et de commercialiser ou non ce travail dont [il] possde un exemplaire.
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mes prcieux parents
mes chers Slimane et Aymane
mes adorables Sami et Rabia
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REMERCIEMENTS
Je tiens tout d'abord remercier Monsieur Mehran Ebrahimi, professeur au
dpartement de Management et Technologie l'UQAM, pour m'avoir oriente et
appuye depuis que mon entre au programme de doctorat tait encore un projet, et
pour avoir ensuite accept de me diriger dans la rdaction de cette thse.
Ensuite, je dois remerCIer madame Anne-Laure Saives, professeure au
dpartement de Management et Technologie l'UQAM, qui m'a beaucoup aide
dans ma recherche, travers sa grande disponibilit et ses prcieux conseils, et m'a
toujours motive pousser ma rflexion tout au long de mon projet de thse. Son
encadrement m'a t d'une valeur inestimable pour l'accomplissement de cette tude
mais galement pour le perfectionnement de mes capacits de recherche et mes
habilets de communication.
Merci galement au MAPAQ (programme de recherche technologique en
bioalimentaire) qui a financ le projet de l'tude, ainsi qu'aux directeurs et
responsables des entreprises agroalimentaires qubcoises, qui ont accept de
participer aux entrevues et de rpondre gnreusement nos divers
questionnements.
Je remercie galement les membres du jury qui ont accept de lire et de
commenter ce travail, ainsi que l'ensemble des professeurs pour la qualit des cours
reus durant ma scolarit.
Mes remerciements les plus sincres mes parents adorables, qui m'ont
toujours entoure de leur tendresse, et m'ont particulirement soutenue moralement
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IV
pour la ralisation de ce travail. Cette thse n'aurait pu voir le jour sans l'ducation
quilibre que vous m'avez donne, et sans votre amour inconditionnel.
Je remercie galement mon cher mari Slimane, d'abord pour ses prcieux
conseils, qui m'apportaient beaucoup d'assurance chaque fois que j'avais des
questionnements, ensuite pour sa patience lorsque mes tudes me prenaient
beaucoup de mon temps, et enfin pour sa tendresse et son grand soutien. Finalement,
je remercie mon prcieux bijou Aymane dont la naissance a illumin ma vie et m'a
motive travailler davantage.
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TABLE DES MATIRES
LISTE DES FIGURES x
LISTE DES TABLEAUX xiv
LISTE DES ABRVIATIONS xvi
RSLTM xvii
RESUME xviii
INTRODUCTION 1
PREMIRE PARTIE: PARTIE THORIQUE 5
CHAPITRE l DIMENSION THORIQUE DE LA CULTURE 6
1.1 Revue de littrature de la culture 6
1.1.1 Dfinitions de la culture: deux approches 6
1.1.2 Perspectives de la culture: cinq perspectives Il
1.1.3 Culture et mondialisation: trois thses 11
1.1.4 Hirarchie et niveaux de la culture............ 12
1.1.5 La culture: d'une approche isole une approche englobante 27
1.1.6 Les caractristiques du milieu local 31
1.2 Positionnement de la recherche 39
1.3 Dfinition retenue de la culture 40
CHAPITRE II DIMENSION THORIQUE DE LA TECHNOLOGIE ET DE L'INNOVATION 41
2.1 Revue de littrature sur la technologie 43
2.1.1 La technologie et l'intgration technologique - dfinitions 43
2.1.2 La technologie dans les courants conomiques et les sciences sociales 45
2.1.3 La technologie dans les organisations: une approche managriale 58
2.1.4 Dfinition retenue de la technologie 61
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VI
2.2 Revue de littrature sur l'innovation 62
2.2.1 Dfinition gnrale de l'innovation 62
2.2.2 L'innovation selon la thorie des clusters 63
2.2.3 Les systmes rgionaux et nationaux d'innovation 64
2.2.4 Dfinition retenue de l'innovation 68
2.3 Conclusion 69
2.4 Positionnement de la recherche 69
CHAPITRE III DIMENSION THORIQUE DE L'IMPACT DE LA CULTURE SUR LA TECHNOLOGIE ET L'INNOVATION 70
3.1 Impact de la culture sur la technologie 70
3.2 Impact de la culture sur l'innovation 80
3.3 Conclusion: limites et ncessit de la contextualisation de la culture 83
3.4 Effet contextualis de la culture: culture, milieu et technologie-innovation 84
3.4.1 Facteurs culturels affectant la technologie et l'innovation 84
3.4.2 Le secteur agroalimentaire : un secteur intrinsquement
dfavorable l'innovation? 89
3.5 Apports et limites de la recherche par rapport la littrature actuelle 90
CHAPITRE IV APERU DE LA TECHNOLOGIE ET DE L'INNOVATION DANS LE SECTEUR AGROALIMENTAIRE QUBCOIS 92
4.1 Secteur agroalimentaire : dfinition 92
4.2 Secteur agroalimentaire qubcois: profil conomique 92
4.3 Aperu de l'innovation technologique et par produit dans le secteur lmen aIre que ecols agroal t' 'b" . 94
4.3.1 Les gouvemements 94
4.3.2 Les centres de recherche & dveloppement et les universits 95
4.3.3 Les entreprises 96
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vii
4.4 Rcapitulation des forces et faiblesses de l'innovation dans le secteur 1 .agroa Imentm 'b" . 97re que ecOls
4.5 Conclusion: motivations du choix du secteur agroalimentaire qubcois comme terrain d'tude 97
CHAPITRE V PROBLMATIQUE ET QUESTIONS DE RECHERCHE 99
5.1 Construction de la problmatique de recherche 99
5.2 Les questions de recherche 100
CHAPITRE VI MODLE THORIQUE PRLIMINAIRE 103
6.1 Introduction au modle thorique 103
6.1.1 Influences culturelles larges: trois niveaux d'analyse 104
6.1.2 Approche systmique du milieu 105
6.1.3 Conclusion: positionnement thorique du modle conceptuel 106
6.2 Le modle thorique 106
6.3 Conclusion 108
DEUXIME PARTIE: PARTIE PRATIQUE 110
CHAPITRE VII CADRE MTHODOLOGIQUE III
7.1 Dfinition du design de la recherche III
7.1.1 Cadre de la recherche III
7.1.2 Mthodologie de la recherche................................... 112
7.1.3 Instrument de recherche............................................................................. 113
7.1.4 Stratgie d'chantillonnage 115
7.2 Collecte de donnes..................... 118
7.2.1 Sources de donnes documentaires 119
7.2.2 Entrevues 120
7.2.3 Observation 123
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Vll1
7.3 Critres de rigueur scientifiques de la recherche 125
7.3.1 La validit de la recherche 125
7.3.2 La fidlit de la recherche 128
CHAPITRE VIII ANALYSE DES DONNES ET PRSENTATION DES RSULTATS 132
8.1 Prsentation des logiciels utiliss 133
8.1.1 Introduction aux logiciels et leur pertinence 133
8.1.2 Le logiciel Alceste 136
8.1.3 Le logiciel SPSS 13 8
8.1.4 Le logiciel SPAD 139
8.1.5 Conclusion 140
8.2 Une analyse interprtative, d'ordre mique et d'inspiration constructiviste 140
8.3 Analyse des rsultats 143
8.3.1 Analyses linguistique Alceste 143
8.3.2 Analyses de rgression SPSS 232
8.3.3 Analyse multifactorielle SPAD 243
CHAPITRE IX ANALYSE ET DISCUSSION DES RSULTATS 330
9.1 Analyse des rsultats 331
9.1.1 Cluster 1 : les imitateurs combattants........................................................ 331
9.1.2 Cluster 2 : les innovateurs artistes 339
9.1.3 Cluster 3 : les manufactures globalises 342
9.1.4 Cluster 4 : les figures nationales 354
9.1.5 Rcapitulatif des points forts et des points pathologiques des quatre clusters 362
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IX
9.2 Discussion des rsultats 365
9.2.1 Culture-Technologie-Innovation: Diffrentes coles pour diffrents c1usters 380
9.2.2 Les figures nationales: perspective glocalise, approche post-industrielle, lien C-T-1 nouveau 392
9.2.3 Enjeux managriaux de la glocalisation 395
9.2.4 Implications conceptuelles du concept de glocalisation sur le lien Culture-Technologie-Innovation 397
9.2.5 Conclusion: Fondements conomiques et fondements stratgiques des quatre modles Culture-Technologie-Innovation 400
CHAPITRE X CONTRIBUTIONS, LIMITES ET VOIES DE RECHERCHE FUTURES 411
10.1 Contributions 411
10.1.1 Contributions acadmiques 411
10.1.2 Contributions mthodologiques 421
10.1.3 Implications pratiques 422
10.2 Limites et voies de recherches futures 427
CONCLUSION 431
APPENDICES 433
RFRENCES 468
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LISTE DES FIGURES
Figure Page
2.1 Thorie de l'Action Raisonne (TAR) 59
2.2 Modle d'Acceptation de la Technologie (MAT) 60
6.1 Modle conceptuel de la culture, technologie et innovation 107
8.1 Traitement thmatique textuel du thme influences supranationales ..... 146
8.2 Projection des mots du thme influences supranationales analyss ....... 147 sur le plan 1 2
8.3 Traitement thmatique textuel du thme influences nationales 152
8.4 Projection des mots du thme influences nationales analyss 153 sur le plan 1 2
8.5 Traitement thmatique textuel du thme influences rgionales 158
8.6 Projection des mots du thme influences rgionales analyss 159 sur le plan 1 2
8.7 Traitement thmatique textuel du thme influences sectorielles 164
8.8 Projection des mots du thme influences sectorielles analyss 165 sur le plan 1 2
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Xl
8.9 Traitement thmatique textuel du thme influences organisationnelles 171
8.10 Projection des mots du thme influences organisationnelles analyss sur le plan 1 2 172
8.11 Traitement thmatique textuel du thme Influences professionnelles. 179
8.12 Projection des mots du thme influences professionnelles analyss .. 180 sur le plan 1 2
8.13 Traitement thmatique textuel du thme culture locale 184
8.14 Projection des mots du thme culture locale analyss 185 sur le plan 1 2
8.15 Traitement thmatique textuel du thme structure 191
8.16 Projection des mots du thme structure analyss sur le plan 1 2 ........ 192
8.17 Traitement thmatique textuel du thme institutions 198
8.18 Projection des mots du thme institutions analyss sur le plan 1 2 .... 199
8.19 Traitement thmatique textuel du thme ressources matrielles .......... 205
8.20 Projection des mots du thme ressources matrielles analyss 206 sur le plan 1 2
8.21 Traitement thmatique textuel du thme ressources immatrielles ..... 213
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Xli
8.22 Projection des mots du thme ressources immatrielles analyss ...... 214 sur le plan 1 2
8.23 Traitement thmatique textuel du thme technologie et innovation .... 221
8.24 Projection des mots du thme technologie et innovation analyss ..... 222 sur le plan 1 2
8.25 Projection de l'espace multifactoriel en deux dimensions 245
8.26 Carte factorielle des 7 clusters 292
8.27 Carte factorielle des 4 c1usters 329
9.1 Application du modle conceptuel au cluster 1 336
9.2 Application du modle conceptuel au cluster 2 343
9.3 Application du modle conceptuel au cluster 3 350
9.4 Application du modle conceptuel au cluster 4 360
9.5 Philosophies d'action de quatre modles Culture-Technologie- 402 Innovation
9.6 Fondements stratgiques de quatre modles Culture-Technologie- 406 Innovation
A.I Les acteurs principaux du systme de recherche et de dveloppement 435 scientifique et technologique en appui en secteur agroalimentaire au Qubec
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Xlll
A.2 Proportion des entreprises rencontres en rgions versus entreprises 438 rencontres Montral
A.3 Regroupement type des entreprises en clusters 439
A.4 Classification descendante hirarchique en classes 444
A.5 Cas illustratif du prsuppos de normalit des observations pour la 464 variable ouverture aux marchs internationaux
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LISTE DES TABLEAUX
Tableau Page
7.1 Caractristiques saillantes des firmes de l'chantillon 118
8.1 Rcapitulatif des thmes Alceste, des classes des discours et du 228 poids de chaque classe
8.2 Rsum des variables culturelles, structurelles, institutionnelles 235 matrielles et immatrielles affectant significativernent les variables technologiques
8.3 Rsum des variables culturelles, structurelles, institutionnelles 236 matrielles et immatrielles affectant significativement les variables d'innovation
8.4 Rcapitulatif des caractristiques des trois clusters d'imitateurs 295
8.5 Rcapitulatif des caractristiques des deux clusters d'innovateurs 302
8.6 Rcapitulatif des caractristiques de chaque cluster selon SPAD 326
9.1 Rcapitulatif des points forts et des points pathologiques par cluster 364
A.l Caractristiques teclmiques des entreprises rpondantes 442
A.2 Dfinitions des variables de la base de donnes 447 rsultant des analyses Alceste
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xv
A.3 Tableau comparatif des forces et faiblesses de quatre 458 logiciels d'analyse qualitative
A.4 Correspondance entre classes Alceste et items de la base de donnes 459
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LISTE DES ABRVIATIONS
APIA Alliance Pour l'Innovation en Agroalimentaire
AAC Agriculture et Agroalimentaire Canada
CAAAQ Commission sur l'Avenir de l'Agroalimentaire et de l'Agriculture au Qubec
CFAM Centre de Formation Agricole de Mirabel
CRDA Centre de Recherche et Dveloppement sur les Aliments
CRDBL Centre de Recherche et de Dveloppement sur le Bovin Laitier et le porc
CRDH Centre de Recherche et de Dveloppement en Horticulture
CRDSGC Centre de Recherche et de Dveloppement sur les Sols et les Grandes Cultures
GREMI Groupe de Recherche Europen sur les Milieux Innovateurs
ITA Institut de Technologie Agroalimentaire
MAPAQ Ministre de l'Agriculture, des Pcheries et de l'Alimentation du Qubec
OMC Organisation Mondiale du Commerce
PASCAA Programme pour l'avancement du secteur canadien de l'agriculture et de l'agroalimentaire
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RSUM
La problmatique du prsent travail porte sur les effets de la culture sur l'intgration technologique et l'innovation dans les organisations agroalimentaires qubcoises. Diffrentes approches ont tent de mettre en vidence les facteurs faonnant les technologies et l'innovation. La thorie des clusters, par exemple, attribue la sophistication technologique et innovatrice diffrents facteurs comme la spcialisation des actifs, les externalits et interactions locales engendrant des flux d'ides d'innovation. La littrature sur les systmes rgionaux et nationaux d'innovation insiste sur l'importance centrale que revtent ces systmes dans l'innovation, notamment du fait des interactions technique, commerciale, juridique, sociale ou financire entre les institutions prives ou publiques, les universits et agences gouvernementales les composant, dans l'objectif de produire de la science et de la technologie. Les deux littratures prcdentes sont intressantes mais n'abordent pas de faon approfondie le rle du facteur culturel dans les processus technologiques et novateurs des firmes. La littrature sur les milieux innovateurs, quant elle, reconnat la prsence de la culture comme une caractristique de tout milieu, mais la relgue un second plan pour l'explication des choix technologiques et d'innovation, derrire des facteurs d'ordre purement matriel et cognitif. l'autre extrme, des travaux s'inscrivant dans l'approche culturelle par dimension de G. Hofstede (1980, 1991), se focalisent sur le rle de la culture dans l'intgration technologique et l'innovation, mais restent galement rducteurs. En effet, ils ngligent le rle d'autres variables contextuelles, limitent l'tude de la culture un seul niveau d'analyse (culture organisationnelle par exemple) et ignorent par ailleurs ses interactions avec son contexte plus large. Par consquent, dans le prsent travail, on adopte une approche constructiviste, reconnaissant la complexit du concept de la culture, pour analyser comment ce construit multidimensionnel interagit avec des lments structurels et institutionnels du milieu pour faonner les comportements technologiques et novateurs des firmes.
Nous avons effectu 64 entrevues individuelles qualitatives ouvertes avec des dirigeants et responsables d'entreprises agroalimentaires qubcoises, rparties dans trois rgions du Qubec diffrents degrs de ruralit. Le secteur agroalimentaire qubcois a t choisi comme terrain d'tude, car selon plusieurs travaux et mmoires destins rcemment la CAAAQ, il s'agit d'un secteur priodiquement en crise d'innovation, o les dpenses en recherche et dveloppement sont faibles par rapport aux autres secteurs, et o la culture d'innovatio"n semble peu prsente.
Nous avons identifi quatre archtypes de configurations cultliretechnologie-innovation , partir d'une typologie des comportements technonovateurs de ces firmes. Ils permettront une conception cible de mesures publiques d'accompagnement du dveloppement de ce secteur au Qubec.
Mots cls: Culture, intgration technologique, technologie, innovation, organisation, milieu, secteur agroalimentaire qubcois.
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RESUME
The main objective of this research is to analyze the effect of culture on technology and innovation in Quebec' s agri-food organizations. Many attempts have been made in the past to identify 1he factors that shape technology and innovation in these firms. As an example, the theory of clusters attributes technological sophistication and innovation to various factors such as the specialization of assets, extemalities and local interactions as the origin of innovative ideas. The literature on national and regional systems of innovation emphasizes the fundamental role of these systems on innovation, most notably the fact that the technical, commercial, judiciary, social or financial interactions between private or public organizations, universities, and govemment agencies that constitute them generate science and technology. Both literatures are interesting to understand the factors that shape technology and innovation. However, they tend to neglect the cultural factor. On the other hand, the literature on "innovative milieus" recognizes the concept of culture as a feature of every "milieu". Culture, however, is secondary, behind factors such as cognitive and material resources, when the time cornes to explain innovation and technology.
At the other extreme, numerous researches based on the cultural approach by Hofstede (1980, 1991) focus on the role of culture in technology integration and innovation. However, culture tends to be somewhat reduced to one dimension (organisational culture, for example). Moreover, these works neglect other contextual variables such us institutions and exchange flows taking place into the firm's environment.
Consequently, we adopt a constructivist approach which recognizes the complexity of the concept of culture, in order to analyse how this variable interacts with structural and institutional components of the milieu so as to shape technological and innovative behaviour in these firms.
We conducted 64 individual interviews with top management and executive directors of agri-food organizations, located in three regions of Quebec at different degree of rurality. The agri-food industry was chosen because nurnerous studies recently submitted to the CAAAQ point out that this sector is currently undergoing a significant innovation crisis. In fact, there is a lack of a culture which values innovation within this industry. As such, research and development expenditures are low compared to other sectors.
We have identified four archetypal models of the configuration "culturetechnology-innovation" from a typology oftechno-innovative behaviour in Quebec's agri-food organizations. These can facilitate the design of specific public policies oriented to foster the developmen1 ofthis industry in Quebec.
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INTRODUCTION
Le prsent travail a pour objectif d'analyser l'impact de la culture sur
l'intgration technologique et l'innovation dans le secteur agroalimentaire
qubcois. Il s'inscrit dans un projet d'tude plus large, mandat par le Ministre de
l'Agriculture, des Pcheries et de l'Alimentation du Qubec, et intitul Scruter
l'ancrage territorial et la responsabilit sociale des entreprises bioalimentaires
qubcoises l'aide des types de gouvernance exercs et des modles d'affaire
dploys . Ce projet a t men au sein d'une quipe multidisciplinaire, constitue
notamment de trois professeurs, une tudiante au doctorat, deux tudiants de
matrise et un professionnel de recherche.
L'objectif de notre travail l'intrieur de ce projet tait de profiter de
l'aspect pluridisciplinaire, de la richesse et de la synergie amene par le travail en
quipe d'une part, et d'apporter en change une contribution concernant
l'environnement culturel des organisations agroalimentaires qubcoises, et son
impact sur les technologies adoptes et les comportements d'innovation.
L'intrt pour le domaine de la culture ne date pas du prsent travail. En
effet, il est n depuis notre projet de recherche de matrise, o nous avions eu
l'occasion d'tudier ce concept dans sa dimension collectiviste versus individualiste
(Hofstede, 1980, 1991). Cependant, la recherche ayant t mene l'poque de
manire hypothtico-dductive, certaines questions sont demeures sans rponse, et
une impression d'tre passe ct d'un concept beaucoup plus riche et intense que
les rsultats ne le laissaient croire, nous a motiv poursuivre l'exploration de ce
champs, mais cette fois-ci de manire inductive et constructiviste. Aussi, l' obj ectif
de ce travail est-il de laisser merger le sens et les dimensions de la culture, et non
de les encapsuler l'avance dans un cadre prdetermin.
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2
Avoir l'opportunit de creuser le lien entre ce concept de culture d'une part,
et de technologie et d'innovation d'autre part, nous a paru d'un grand intrt. En
effet, on s'inscrit dans la perspective reconnaissant l'importance du rle jou par des
facteurs non techniques (sociaux, culturels, attitudinaux) dans les processus
technologiques et d'innovation. On a retenu le secteur agroalimentaire qubcois
comme terrain de recherche et de collecte d'informations pour au moins trois
raisons. D'abord, il s'agit d'un secteur complexe et trs htrogne, que ce soit en
termes de taille d'entreprises ou de leur capacit innover. Or, peu d'tudes ont
tent par le pass de creuser le lien spcifique culture-technologie-innovation dans
ce secteur. Par ailleurs, en termes de technologie et d'innovation, divers travaux et
mmoires destins rcemment la CAAAQ, montrent qu'il s'agit d'un secteur
priodiquement en crise d'innovation, o les dpenses en recherche et
dveloppement sont faibles par rapport aux autres secteurs, et o la culture
d'innovation semble peu prsente. En dernier lieu et non le moindre, le choix du
secteur dcoule du type de mandataire de la recherche, savoir le Ministre de
l'Agriculture, Pcheries et Alimentation du Qubec (MAPAQ). Cet acteur
s'intresse la comprhension des enjeux et des contraintes auxquelles font face les
firmes agroalimentaires qubcoises, ainsi que des opportunits qui pourraient tre
exploites pour faire avancer le secteur.
Enfm, jugeant intressant d'enrichir le cadre conceptuel, comme cit
prcdemment, et de ne pas encapsuler le concept de culture dans une dimension
restreinte, on se propose de l'tudier en interrelation avec diffrents autres lments
sans lesquels son rle perd sa pertinence. Aussi, s'intresse-t-on aux composantes
structurelles et institutionnelles avec lesquelles la culture est en relation systmique,
et qui participent conjointement du faonnement des processus technologiques et
d'innovation dans les organisations.
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3
Par consquent, on se propose dans le prsent travail d'apporter des lments
de rponse la problmatique suivante: Comment le contexte culturel interagit
avec les caractristiques structurelles et institutionnelles du milieu, pour
faonner l'intgration technologique et l'innovation dans les entreprises
agroalimentaires qubcoises? .
Dans un premIer chapitre, nous prsentons une revue de la littrature de
recherche sur la culture. On exposera les diffrents courants thoriques qui
s'intressent ce concept, puis on prsentera les perspectives dans lesquelles on se
positionne dans le prsent travail et l'on expliquera pourquoi.
Dans un second chapitre, on examinera les concepts et modles thoriques de
la technologie et de l'innovation, et on prsentera leur conception dans diffrents
courants conomiques et thories sociales. Cette dmarche nous permettra, la fin
de ce travail, d'insrer ventuellement les diffrents liens entre culture d'une part, et
technologie/innovation d'autre part, dans les philosophies d'action et les
perspectives de gestion, selon les caractristiques qu'ils reprsentent chacun.
Ensuite, on prsentera la fin de ce chapitre les dfinitions auxquelles on adhre
dans le prsent travail.
Dans un troisime chapitre, on prsentera la littrature sur le lien entre la
culture d'une part, et l'intgration technologique et l'innovation d'autre part.
L'objectif est d'en reprer les apports intressants d'une part, mais aussi d'en
identifier les volets peu creuss, afin de s'y intresser dans notre recherche sur le
terrain. Dans un quatrime chapitre, on prsentera le terrain d'tude, savoir le
secteur agroalimentaire qubcois. On abordera ses caractristiques et ses diffrents
enjeux relatifs l'intgration technologique et l'innovation, qui expliquent son
choix comme terrain d'analyse.
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4
En s'inspirant de la littrature sur la culture, la technologie et l'innovation,
ainsi que des enjeux et dfis du secteur agroalimentaire qubcois, on tentera de
construire dans les deux chapitres suivants la question de recherche et un modle
conceptuel prliminaire pennettant d'y rpondre. Ce modle prsentera des lments
intressants inspirs de la littrature, mais s'intressera galement aux lments
relativement ngligs.
On passera par la suite la phase pratique, o il s'agira d'introduire la
mthodologie poursuivie pour nourrir le modle conceptuel partir des donnes du
terrain (chapitre 7). Ensuite, on prsentera les mthodes d'analyse des rsultats ainsi
que les rsultats obtenus dans le chapitre 8. On passera la discussion des rsultats
dans le chapitre 9. On y fera le lien entre la littrature examine en dbut de ce
travail, mais on explorera galement d'autres littratures sur les concepts importants
qui auront merg la fin de cette recherche. L'aboutissement de ce travail y sera
schmatis sous la forme de deux figures, la premire intgrant les diffrents liens
culture-technologie-innovation identifis dans diffrentes philosophie d'action,
et la seconde les intgrant dans diffrentes perspectives stratgiques. On conclura ce
travail par la prsentation des contributions et limites de l'tude, puis on exposera les
voies de recherche intressantes creuser dans le futur.
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, PREMIERE PARTIE
, PARTIE THEORIQUE
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CHAPITRE l
DIMENSION THORIQUE DE LA CULTURE
1.1. Revue de littrature de la culture
Dans le prsent chapitre, on commencera par situer le cadre conceptuel dans
lequel s'inscrit ce travail, plus prcisment le courant de pense auquel on adhre
dans la dfinition du concept de culture, la perspective exacte dans laquelle on
s'inscrit, et enfin la thse de mondialisation dans laquelle on s'insre dans la
dfinition donne la culture et ses impacts.
Ensuite, on examinera en profondeur le construit complexe de la culture, ses
dimensions, les diffrents niveaux de culture identifis dans la littrature et la
dfinition de chaque niveau.
1.1.1. Dfinitions de la culture: deux approches
La culture est un concept qui tire ses origines des sciences sociales et dont
l'utilisation en management vise avoir une orientation comparatiste et
comprendre l'exprience sociale dans l'organisation. Celle-ci tant considre
comme une socit en miniature (Silverman, 1970), elle possde des
caractristiques lies son histoire, au vcu des acteurs, ce qui suppose une
influence sur les pratiques organisationnelles et le management de l'organisation.
Ainsi, pour marquer l'ancrage de la culture dans son environnement social, le terme
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7
socioculturel a pour vocation de rendre compte de phnomnes sociologiques qui
s'expliquent par rfrence la culture qui prvaut dans l'organisation.
La premire dfinition du concept de culture remonte Tylor (1877), qui,
dans son ouvrage Primitive culture , a t le premier utiliser ce terme, en le
dfinissant comme: Ce tout complexe qui inclut les savoirs, les croyances, l'art,
les lois, la morale, les coutumes, et toutes autres aptitudes et habitudes acquises par
l'homme en tant que membre d'une socit (cit par Barnouw (1963, p. 68),
traduit par Aktouf (1990.
La culture est un concept tellement complexe (Straub et al., 1998) que
plusieurs dfinitions lui ont t donnes par les chercheurs travers le temps, et ce,
en fonction de leurs courants d'appartenance, mais galement selon qu'on se situe en
Europe ou en Amrique du Nord. En effet, dans l'acception europenne, notamment
franaise, la culture dsigne l'ensemble des savoirs accumuls par une personne, et
qui se transmet d'autres individus travers des processus comme l'acculturation,
la socialisation etc. Cette dfinition est supporte par plusieurs courants tel que
l'volutionnisme (Tylor, 1873 et les cologistes ultrieurement), le structuralisme ou
la recherche des structures inconscientes (Lvi-Strauss, 1958), pour dsigner par
consquent les connaissances, croyances, art, morale, droit, coutumes et toutes les
autres capacits acquises par 1'homme en tant que membre dans une socit.
Par contre, dans la socit amricaine, on ne parle pas d'une seule culture
mais de cultureS au pluriel, qui dsignent l'ensemble de comportements concrets
d'individus, propres chaque groupe humain et pouvant expliquer un emprunt
culturel particulier (Sapir, 1949). Ds lors, on parle de particularisme et de di versit.
Particularisme dans la mesure o tout groupe culturel est homogne et a ses propres
spcificits, elles mmes fruit de l'environnement dans lequel les individus de cette
culture vivent, et diversit puisqu'en passant d'un groupe culturel l'autre, on
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8
constatera l'existence de diffrences marquantes entre les deux, et engendrant une
pluralit culturelle. Nous faisons ici rfrence, entre autres, au relativisme culturel de
Boas (1940), aux modles culturels de Kroeber (1930) et Wisslet (1917), au
culturalisme de Benedict (1934), Mead (1956), Linton (1945), l'approche
diffrentielle de Lvy-Bruhl (1918), au culturalisme psychologique d'Hofstede
(1980, 1991). En effet, Lvy-Bruhl, avec son approche diffrentielle, voit la culture
comme un ensemble d'activits mentales acceptes plus dans une socit que dans
une autre. Malinowski (1944), dans son analyse fonctionnaliste de la culture, la voit
comme un systme d'lments interdpendants (objets, ides, croyances,
coutumes ... ), remplissant chacun une fonction vitale et constituant une totalit
organique. Lvi-Strauss apporte galement l'ide d'carts culturels (et donc de
diversit culturelle). Hofstede (2005), partir de sa dmarche de culturalisme
psychologigue, s'est intress au concept de diffrences culturelles, travers sa
dfinition de la culture comme programmation collective de l'esprit qui distingue
les membres d'un groupe ou d'une catgorie de personnes par rapport un autre
(p. 4).
On identifie galement Sapir (1949), qui voit la culture comme un ensemble
de comportements concrets d'individus, propres chaque culture et pouvant
expliquer un emprunt culturel particulier. On retrouve galement d'autres auteurs
selon lesquels la culture se dfinit travers les relations de production (Godelier,
1982), les conditions matrielles d'une socit (Harris, 1975, 1981), travers la
capacit de l'individu symboliser (Turner, 1967; Sclmeider, 1980), travers
l'interprtation spcifique que certains groupes d'individus font de certains
symboles (Geertz, 1973; 1974), etc.
Malgr une dominance amricaine dans l'approche relativiste de la culture, il
est intressant de noter que de grands etlmologues europens, notamment franais,
adhrent galement cette conception (Cuch, 2004). On peut citer titre d'exemple
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Durkheim (1897), un des piliers de l'ethnologie franaise, adoptant une dmarche
relativiste, une approche unitaire des faits de culture. Pour ce chercheur, l'humanit
est une, et toutes les civilisations contribuent la civilisation humaine. Ce chercheur
entend, par-del l'tude des variations culturelles, analyser l'invariabilit de la
Culture. Les cultures particulires ne peuvent tre comprises sans rfrence la
Culture, ce capital commun de l'humanit dans lequel elles puisent pour laborer
leurs modles spcifiques. De mme, on citera Levi-Strauss (1949), qui va au-del
des variations culturelles, pour analyser l'invariabilit de la Culture, en tant que
capital commun de l'humanit. Les deux auteurs citent la prohibition de l'inceste
comme exemple d'un trait culturel universel. La culture est dornavant comprise
comme un ensemble dynamique, plus ou moins cohrent et plus ou moins
homogne. Toutes les cultures, par le fait universel des contacts culturels, sont des
degrs divers des cultures mixtes . Hannertz (1992) explique bien ce trait de
mixit ou de complexit de la culture. Il voque la culture contemporaine comme
une organisation de la diversit, et non comme une unit commune organise et
partage. L'auteur se fonde sur les flux de communication, en tant que patterns de la
culture entretenus entre divers acteurs (tat, march ... ), qui sont de diffrentes
natures (matrielle, symbolique etc), et qui sont en constante volution, pour
indiquer que le concept culturel qui les supporte est en dynamique permanente,
contrairement aux socits traditionnelles.
Dupuis (1990) identifie trois composantes sans lesquelles on ne peut
prtendre une bonne dfinition de la culture CP 544), savoir le contexte
d'int~raction sociale, qui renvoie un contexte situ spatialement et
temporellement , les pratiques des acteurs, et les significations qui sont accordes
par les acteurs leurs actions. Ces trois composantes, tant indispensables dans la
dlimitation du territoire de la culture, le sont par consquent pour sa dfinition.
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D'Iribame (1997), dfinit la culture comme un langage, un code, un
rfrentiel de sens. Ce rfrentiel permet aux acteurs de donner un sens au monde o
ils vivent et leurs propres actions. La continuit de chaque culture, alors mme
qu'elle est marque par de multiples volutions, vient de la stabilit du systme
d'oppositions fondament2les sur lequel elle est construite. On trouve ICI une
rfrence vidente au structuralisme de Lvi-Strauss.
Par consquent, on parle dans cette seconde catgorie de plusieurs cultures et
de plusieurs niveaux de cultures les supportant: cultures populaires, cultures
nationales, cultures d'immigrs, cultures d'entreprises etc.
Ainsi, on constate que la culture est un concept chelle variable et dpend
de l'unit d'analyse considre par le chercheur (organisation, groupe, ville, nation,
rgion, village etc.). Il s'agit galement, comme on vient de le constater travers la
multiplicit des dfinitions prcites, d'un concept contenu variable, qui sert la
fois singulariser les tres humains dans le rgne animal et diffrencier les
groupes humains ou sociaux les uns des autres. Enfin, il s'agit d'un concept
synthtique, dans la mesure o il runit un ensemble d'lments caractrisant un
groupe humain, mais aussi dans la mesure o ces lments sont organiss en systme
de sens comprhensibles pour les membres du groupe, et que le changement d'un
lment peut provoquer un changement des autres lments appartenant au systme.
Devant la varit des dfinitions prcites, et pour des raisons touchant
l'orientation qu'on a voulu donner au prsent travail, nous retenons l'orientation
relativiste reconnaissant l'existence de plusieurs cultures.
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1.1.2. Perspectives de la culture: cinq perspectives
Selon Bhate (2001), le concept de culture est tellement large qu'il convient
de le classifier selon la perspective dans laquelle on se situe pour le dfinir. Ce
dernier identifie cinq perspectives culturelles, savoir les perspectives physique et
psychologique, se focalisant sur des considrations d'ordre gntique,
volutionnaire, psychologique et anthropologique; la perspective expreSSIve
comportementale, qui se consacre l'tude de la culture travers les considrations
lies au sexe, l'esthtique et l'apprciation de la gestuelle et au langage non
verbal; la perspective sociale, qui s'intresse aux systmes de croyance, aux castes et
aux classes sociales ainsi qu'aux jeux de pouvoir dans une culture donne; la
perspective socio-politico-conomique, qui traite du gouvernement, de l'conomie,
du commerce, des volets relatifs la guerre, l'ordre et aux lois qui rgissent les
socits; et enfin la perspective anthropologique applique, qui s'intresse la
recherche qui a des implications pratiques de l'anthropologie sur le terrain. Il s'agit
d'une application de l'anthropologie dans des domaines tels que les services de
sant, le journalisme, les affaires, la gestion. Dans le prsent travail, sans pour autant
ngliger les autres perspectives, on se focalisera sur la dernire, puisqu'il s'agit
d'appliquer l'anthropologie au domaine managrial, plus spcifiquement aux
pratiques relatives l'intgration technologique et l'innovation.
1.1.3. Culture et mondialisation: trois thses
Peut-on prtendre aujourd'hui, l're de la mondialisation par excellence, la
persistance de divergences culturelles, et donc l'existence de cultures nationales
diverses, affectant de manire diffrente les pratiques de management adoptes au
sein de ces cultures?
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cette question, trois thses se proposent d'apporter des lments de
rponses. Il s'agit de la thse de convergence culturelle, stipulant que la pousse de
la mondialisation de l'conomie a engendr ill1e ill1iformisation des valeurs au
niveau universel (conomistes du FMI, de la Banque Mondiale etc.). Ensuite, on
retrouve la thse de divergence culturelle, stipulant que malgr la mondialisation de
l'conomie, les diffrences culturelles persistent, notamment celles d'ordre national
(Inglehart et Baker, 2000; D'Iribame, 1997; Hofstede, 1980,1991,2002... ). cette
thse s'opposent certains anti-culturalistes (Slim, 1991). Enfin, on retrouve la thse
de la cross-vergence ou de l'hybridation culturelle, selon laquelle la rencontre de
la culture mondiale conomique avec des cultures nationales entrane la naissance de
socits et de cultures hybrides. Dans cette perspective, les pratiques de management
sont influences par les deux mouvements culturels et sont donc des formes hybrides
Dans le prsent travail, on s'inscrit dans la troisime thse, puisqu'on ne peut
nier que certaines valeurs culturelles sont troitement relies leur territoire, mais
on recOlmat galement le fait que la mondialisation exerce un mouvement
d'uniformisation de certaines pratiques. Ceci dit, cet effet reste partiel. Ds lors, on
ne peut parler d'uniformisation intgrale des valeurs culturelles.
1.1.4. Hirarchie et niveaux: de la culture
La culture peut tre examine travers diffrents niveaux d'analyse. En effet,
tudier la culture l'chelle d'un pays diffre largement de son tude l'chelle plus
restreinte de l'organisation. Cependant, chaque niveau d'analyse de la culture ne
peut tre isol des niveaux plus larges. En effet, tudier la culture d'une rgion ou
d'une organisation est vain si l'on ne considre pas le contexte national, voire
supranational dans lequel les interactions caractristiques de la culture ont lieu.
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L'approche cognitive de la culture organisationnelle de Sackmann (1997)
s'intresse diffrents niveaux culturels qUI influencent les pratiques
organisationnelles. Selon cet auteur, la culture organisationnelle ne peut tre isole
de son contexte plus large, savoir le niveau continental ou supranational, le niveau
national, le niveau rgional, et le niveau sectoriel voire mme le niveau de sous
culture organisationnelle. De mme, Sainsaulieu (1997), dans son livre la
dynamique culturelle des ensembles organiss , adopte une approche contextuelle
de la culture, qui tient compte des communauts, du contexte, des rapports
l'extrieur pour tudier ceux l'intrieur d'une communaut.
Enfin, Karahanna et al (2005), dans leur approche intgrative des niveaux de
culture, en distinguent cinq, savoir la culture supranationale, la culture nationale, la
culture professionnelle, la culture organisationnelle et la culture de groupe.
Karahanna a abord la culture supranationale, la culture nationale, la culture
professionnelle, organisationnelle et de groupe, mais a omis le niveau rgional ainsi
que le niveau sectoriel abords par Sackmann. Par ailleurs, la sous
culture organisationnelle voque par Sackmann et qui semble tre absente chez
Karahanna ne l'est pas vraiment, puisque ce dernier s'y rfre avec le terme de
culture de groupe , telle que la dfinition donne ce niveau nous a permis de
constater. En effet, les deux auteurs prciter dont allusion l'existence de deux ou
plusieurs cultures l'intrieur d'une mme organisation, portes par deux ou
plusieurs groupes y appartenant.
En tenant compte de ce qui prcde, on peut distinguer au moms sept
niveaux d'analyse de la culture dans la littrature, savoir la culture supranationale,
la culture nationale, la culture rgionale, la culture sectorielle, la culture
organisationnelle, la culture de groupe, galement nomme sous-culture
organisationnelle et la culture professionnelle.
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1.1.4.1. La culture supranationale
Selon Karahanna et al (2005), ce niveau couvre les diffrences culturelles qui
dpassent les frontires nationales, ou les traits culturels qui peuvent exister dans
plus d'une nation, savoir la culture rgionale (la rgion tant dans cette conception
tendue au-del des frontires nationales, conune la culture africaine ou la culture
asiatique), la culture ethnique, qui renvoie, selon le mme auteur, l'appartenance
un groupe d'individus partageant des caractristiques ethniques communes et
distinctives des autres groupes (culture berbre pouvant transcender les frontires
nationales), la culture religieuse, dfinie conune l'appartenance un groupe
d'individus partageant les mmes croyances religieuses (culture musulmane), et
enfin la culture linguistique, dfinie conune l'appartenance un groupe qui parle la
mme langue (culture francophone dpassant les frontires nationales).
1.1.4.2. La culture nationale
Il s'agit d'un des niveaux de la culture les plus documents dans la littrature
par des auteurs appartenant diverses approches thoriques, notanunent l'approche
culturelle par dimensions, alimente par une perspective ethno-historique dans
certains cas. On peut citer dans ce sens Kulckholn et Strodtbeck (1961), deux
anthropologues qui ont dvelopp la toute premire approche dimensionnelle de la
culture, en s'inspirant de travaux utiliss pendant des sicles .par les philosophes et
scientifiques sociaux. Leurs dimensions portent notanunent sur la conception de la
nature humaine, de la relation honune-nature, du bien et du mal, du temps et de
l'espace. Dans. le mme sens, Edward T. Hall se focalise sur les traits de
conununication trouvs l'intrieur des cultures travers quatre dimensions,
savoir le contexte de communication, la gestion de l'espace, le rapport au temps et la
structure des flux conununicationnels. On peut noter galement Hofstede (1980,
1991), qui s'intresse aux caractristiques collectives runissant les citoyens des
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pays. Cet auteur considre la culture comme une sorte de programmation collective
du cerveau consistant tablir une distinction entre les individus de nations
diffrentes. Ses dimensions regroupent la distance hirarchique (degr d'acceptation
de la non-quit dpendamment du statut social), l'individualisme/collectivisme
(degr d'troitesse des rapports sociaux et importance de la loyaut au groupe), la
masculinit/fminit (degr de division des rles entre les deux sexes), le contrle
d'incertitude (degr de tolrance de l'incertitude et besoin de structuration dans les
socits) et l'orientation au temps (vers le pass et le prsent consistant vivre au
jour le jour versus vers l'avenir consistant pargner).
Triandis et al (1995) ont dcoup la dimension
individualismelcollectivisme d'Hofstede, considre comme tant
multidimensionnelle ou polythtique (Triandis et Gelfand, 1998), en quatre
dimensions, savoir le collectivisme horizontal ou community sharing (Gannon,
2004), renvoyant des individus qui se runissent en groupes sans pour autant s'y
sentir soumis; l'individualisme horizontal ou equality matching (Gannon, 2004),
renvoyant des individus qui vivent indpendamment des autres et sans sentir le
besoin de les devancer; le collectivisme vertical, ou authority ranking selon
Gannon, renvoyant la loyaut et la soumission un groupe d'appartenance, et
l'individualisme vertical ou market princing selon Gannon, trait culturel
dominant aux Etats-Unis et dans d'autres pays domins par la logique du march.
Enfin, on retrouve d'Iribarne qui, travers son approche ethno-historique
comparatiste de trois pays, identifie des dimensions dominantes dans chacun,
savoir l'honneur bas sur l'opposition vil/vain en France, l'quit base sur le
contrat aux tats-Unis et la logique du consensus aux Pays Bas.
Cependant, certains des travaux prcits, notamment ceux d'Hofstede ou qui
s'inspirent de ses dimensions culturelles, restent d'ordre normatif et rationnel. En
effet, ces chercheurs se basent sur des scores et non sur une analyse qualitative
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fouille de la culture. Par consquent, les recherches inspires des scores culturels
d 'Hofstede restent descriptives, car elles se contentent de mesurer les diffrences
(notamment managriales) et de les attribuer des diffrences entre les cultures
tudies au niveau des scores. Cette dmarche limite les tentatives d'une
comprhension plus pousse des diffrences culturelles et de leurs origines relles.
1.1.4.3. La culture rgionale
l'intrieur d'un mme pays, l'on peut identifier plusieurs cultures
rgionales trs htrognes, d'o l'intrt de considrer galement les influences
culturelles rgionales dans l'tude de la culture.
Dans le cas spcifique du Canada, Carr (2003) distingue au mOlns deux
cultures rgionales, savoir la culture qubcoise francophone et la culture
anglophone du reste du Canada. La divergence entre ces deux cultures coexistant au
sein du mme pays se manifeste selon l'auteure par au moins cinq spcificits de la
culture qubcoise. Il s'agit de la francit la qubcoise, consistant conserver
l'usage de la langue franaise et la protger contre les anglicismes, de la nordicit
qui dfinit l'identit qubcoise au sein du reste de la francophonie, de la modernit
utilise pour entretenir et assurer la fidlit au pass (sites Internet consacrs la
valorisation de l'histoire et de l'identit du Qubec), de l' amricanit qui, jointe la
latinit, influence le mode de vie des qubcois. La dernire spcificit est la
qubecit en tension avec la canadiennit, pour faire face au risque de perte
d'identit d'une part, et pour grer les questions lies la diversit ethnique et
intgrer les immigrants la culture qubcoise d'autre part.
Le lllveau de la culture rgionale n'a pas t aussi bien document et
structur que celui de la culture nationale ou de la culture organisationnelle.
Cependant, l'on trouve des travaux intressants, plutt d'ordre qualitatif, qui
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s'intressent ce niveau culturel et ses interactions avec d'autres lments du
systme rgional.
Marie-Thrse Claes (2004)1 propose plusieurs dimensions sur la base
desquelles on peut constituer des cultures rgionales, notamment l'histoire et la
gographie de chaque rgion (culture du nord, culture du centre du pays). L'auteure
cite galement cet effet l'exemple de l'histoire du Qubec, dont les forces
conomiques et politiques constituent une composante spcifique la culture
rgionale, de mme que le climat, la religion et mme la langue, surtout que cette
dernire n'est pas parle dans l'ensemble du pays.
Un des travaux les plus intressants dans ce sens demeure cependant celui de
Saxenian (1994). travers une tude qualitative base essentiellement sur des
entrevues et sur l'observation du tenain, cette auteure a pu identifier deux cultures
rgionales diffrentes, ayant substantiellement faOlm les comportements locaux
d'innovation. Il s'agit de la Silicon Valley versus la Route 128. Il est important de
noter que Saxenian place la culture rgionale au cur d'un systme plus large,
savoir le systme rgional industriel, dont les composantes interagissent et
s'influencent mutuellement pour donner naissance des comportements
d'entreprenariat et d'innovation spcifiques chaque rgion. Ces composantes sont
les institutions rgionales, dfinies comme les organisations publiques et prives
telles que les universits, les associations d'affaires, les gouvernements locaux, les
organisations moins formelles telles que les clubs lobbyistes, les socits
professionnelles et d'autres forums qui crent et soutiennent des modles rguliers
d'interaction sociale dans une rgion. Ces institutions faonnent et sont faonnes
par la culture locale (Saxenian, 1994; p7). La seconde composante est la culture
rgionale, dfinie comme les conceptions partages et les pratiques qui unifient
J Voir aussi: Cours organization and professional cultures and diplomacy" Malta, 13-15 fvrier 2004. ICHEC Brussels Business School. UCL University of Louvain. Professeure Marie-Thrse Claes
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une communaut et qui dfinissent toute chose, en partant du comportement du
march du travail jusqu'aux attitudes envers la prise de risque , (p. 7). La troisime
composante est la structure industrielle rgionale, dfinie comme la division
sociale de la main d'uvre ou le degr d'intgration verticale, ainsi que l'tendue et
la nature des liens entre clients, fournisseurs et concurrents dans un secteur
particulier ou dans des secteurs complexes relis . (Saxenian, 1994; p7). Enfin, la
dernire composante est l'organisation corporative interne des entreprises
rgionales, dfinie comme le degr de coordination horizontale et verticale, la
centralisation ou dcentralisation, l'allocation des responsabilits et la spcialisation
des tches l'intrieur de la firme . (Saxenian, 1994; p7).
Des travaux europens plus rcents, notamment ceux du GREMf (Maillat,
Quvit, Senn, 1993; Crevoisier et al., 1989; Ratti et D'Ambrogio, 1989; Maillat,
1995; Camagni, 1995b; Maillat, Crevoisier et Vasserot, 1992; Matteaccioli, 1999),
s'intressent la culture rgionale sous diffrentes nominations, telles que culture
technique, tradition, racines culturelles, systmes de reprsentation communes,
identification collective qui permet aux acteurs de se rapprocher et de faire
converger leurs points de vue, grce notamment un systme de reprsentations, de
normes et de valeurs partages propres au milieu (Perrin, 1997). Selon ces auteurs,
les normes, rgles et valeurs sont autant d'lments culturels qui rgissent les
comportements des acteurs ainsi que les relations qu'ils entretiennent entre eux.
Elles sont spcifiques l'espace considr, dans la mesure o elles contribuent
gnrer une certaine thique du travail et des principes de confiance et de
rciprocit, de solidarit et d'entraide. Elles sont particulirement importantes en ce
qu'elles participent la cration d'un espace de travail commun (rationalit
commune, horizons temporels communs, objectifs communs).
2 Groupe de recherche europen sur les milieux innovateurs
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Dans le mme ordre d'ides, on retrouve Julien (2005), qui s'intresse la
culture comme une composante parmi les cinq lments principaux de tout milieu
(les institutions locales publiques ou parapubliques, la structure industrielle
renvoyant la nature des liens entre les acteurs du milieu, la main-d'oeuvre plus ou
moins forme et participative ou capable de soutenir le dveloppement,
l'organisation de la coopration et la culture entrepreneuriale commune aux acteurs
socioconomiques). Il dfinit la culture entrepreneuriale du milieu comme une
mme comprhension de l'ide d'entreprendre et du fonctionnement des affaires,
des rgles communes, et donc des conventions et des pratiques qui unifient la
communaut et dfinissent tant les comportements de la main-d'oeuvre que les
attitudes des entrepreneurs eu gard au risque, au changement et aux ressources
disponibles .
Ces travaux sont trs intressants, car ils adoptent une perspective
systmique ouverte de la culture (comme unit d'un ensemble plus large), une
dmarche qualitative allant dans un sens constructiviste (la culture n'est pas dfinie
l'avance mais on essaie de la cerner en poussant la recherche un stade analytique),
ce qui les dmarque des travaux bass sur des approches dimensionnelles vues
prcdemment.
1.1.4.4. La culture sectorielle
La culture sectorielle renvoie aux caractristiques essentielles du secteur dans
lequel opre l'organisation, telles que la structure du secteur, la forme de rivalit
entre les firmes qui le constituent, l'inter connectivit entre ces dernires, le type de
pratiques d'embauches ambiantes etc. (Weisinger et Trauth, 2003).
Il n'existe pas de consensus sur ce que peut trele contenu ou les dimensions
de la culture sectorielle. En effet, les dimensions importantes explorer dans ce
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niveau culturel sont fonction du type du secteur. Dans ce sens, Marie-Thrse Claes
(2004)3 donne l'exemple des codes vestimentaires, du comportement d'innovation et
des interactions comme volets intressants explorer pour comparer la culture du
secteur bancaire et celle du secteur de la haute technologie, ou encore les sources
d'avantage comptitif qui caractrisent les secteurs, puisqu'elles peuvent tre
financires dans certains, humaines, ou encore cognitives dans d'autres. Le taux de
changement technologique est galement une caractristique culturelle importante
explorer dans le cas de certains secteurs, de mme que la nature du produit-march
et des rgulations ambiantes.
titre d'exemple, la professeure compare quatre cultures sectorielles,
l'aide de deux dimensions pertinentes, savoir le degr de risque caractrisant ces
secteurs, et la rapidit des profits raliss. Sur une carte perceptuelle deux
dimensions, nommment le degr de risque et la rapidit des profits, la
biotechnologie serait un secteur domin par une culture de degr lev de risque et
de faible rapidit de profits, tout fait l'oppos du secteur du dtail, caractris par
une culture de faible risque et de rapidit leve des profits. Le secteur de ngoce
obligataire serait caractris par un degr de risque lev mais en revanche les
profits y sont rapides. l'inverse, le secteur de consultance comptable est
caractris aussi bien par un faible risque que des profits lents.
Par ailleurs, les caractristiques culturelles du secteur agissent amplement sur
les pratiques managriales des organisations. Weisinger et Trauth (2003) ont, titre
d'exemple, intgr la dimension sectorielle structure et complexit du secteur
ainsi que taille du secteur dans leur tude sur l'intgration de certaines
technologies dans les organisations.
3 Voir aussi: Cours organization and professional cultures and diplomacy" Malta, 13-15 fvrier 2004. ICHEC Brussels Business School. UCL University of Louvain. Professeure Marie-Thrse Claes
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1.1.4.5. La culture organisationnelle
Les crits abordant le concept de culture organisationnelle sont aUSSI
nombreux et diversifis que le sont les cultures d'organisation elles-mmes. Certains
sont analytiques et traitent de cas d'organisations de manire spcifique, d'autres
adoptent une approche plutt normative.
Par consquent, le concept de culture organisationnelle est dfini diffremment selon
les auteurs et leur courant d'appartenance.
~ Perspectives normatives positivistes
Les auteurs qui se situent dans cette approche dfinissent la culture comme
un consensus, puisqu'ils finissent tous par trouver des composantes spcifiques de la
culture qui ne font l'objet d'aucune contestation au sein de l'organisation. Il s'agit
d'auteurs positivistes classiques, qui rduisent la culture une seule dimension
(valeurs, postulats etc.) et qui mettent l'emphase sur le dirigeant comme fondateur
de la culture organisationnelle, ignorant ainsi l'existence de sous-cultures qui
s'opposeraient cette dernire.
On peut citer des auteurs tels que Schein (1991), qui aborde la culture
organisationnelle comme tant le fruit de la vision du dirigeant, c'est--dire ses
ides, croyances et convictions bases sur ses expriences antrieures. Ce dernier
transmet cette vision au reste des employs en adoptant plusieurs techniques telles
que la coercition ou le mimtisme. Une fois ces ides, croyances et convictions
acquises et intgres par les employs, elles donnent naissance un ensemble de
postulats qui, regroups ensemble, donnent ce qu'on appelle la culture
organisationnelle. Comme on peut le constater, il existe une infinit de cultures
organisationnelle selon cet auteur, dans la mesure o chaque fondateur peut avoir
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22
des convictions tout fait diffrentes d'un autre. Ainsi, on peut avoir une culture
organisationnelle axe sur le contrle, une autre axe sur la concertation, etc.
La culture organisationnelle se dfinit, selon Siehl & Martin (1990), comme
les caractristiques sociales et normatives qui soutiennent l'organisation et lui
permettent de tenir, ou encore, comme un systme model de perceptions, de
significations et de croyances sur l'organisation, qui facilite la formation des
significations parmi un groupe d'individus partageant des expriences en commun,
et qui guide le comportement individuel au travail . Cette dfinition met l'accent
sur l'interaction entre le comportement individuel et l'aspect de partage des
significations et cognitif au niveau du groupe (Bloor & Dawson, 1994).
C'est en rponse ces chercheurs classiques positivistes, qu'est apparue
l'approche par diffrenciation, selon laquelle la culture organisationnelle n'est pas
forcment consensuelle. Ds lors, on parle de plusieurs sous-cultures. Cette
approche a t amene par des chercheurs postmodernistes, scientifiques et critiques
rcents.
>- Perspective interprtative et perspectives post-modernes
Baba (2001) apporte une nouvelle ide par rapport la littrature sur la
culture organisationnelle: il assimile l'organisation aux socits d'aujourd'hui,
complexes et turbulentes, pour constater qu'on ne peut parler d'une seule culture
organisationnelle mais plutt de plusieurs sous-cultures qui coexistent au sein d'une
mme organisation. Dans le mme sens, Mats (2002) remet en cause l'aspect
rducteur des approches normatives l'gard de la culture organisationnelle, qui se
manifeste par une sursimplification de ce concept complexe et une confusion entre
ce construit et celui des idologies managriales de l'entreprise. Un peu dans le
mme sens que les significations partages, Mills et al (2001), qui se situent
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galement dans les approches post-modernistes, assimilent le processus de cration
de culture organisationnelle des histoires racontes par les membres des quipes
aussi bien internes qu'externes au sein d'une communaut dans l'organisation.
Schwatrzman (1992), dans son livre Ethnography in organizations ,
s'intresse la culture organisationnelle dans ses deux aspects: formel et informel.
Il propose qu' partir d'lments comme les interactions entre individus, entre
groupes, entre l'intrieur et l'extrieur de l'organisation, comme les processus
organisationnels (vnements, rituels, routines, runions etc.), il est possible
d'analyser et de comprendre la culture organisationnelle dominante. Rosen (1991),
avec quelques diffrences mthodologiques avec Schwatrzman, s'intresse peu
prs aux mmes lments de contenu que ce dernier pour comprendre la culture
organisationnelle. Il s'git notamment des relations sociales, des significations et
comportements des gens, d'vnements tels que les conversations, les anniversaires
etc. Czarniwska-Joerges (1992) s'intresse plus spcifiquement aux organisations
complexes, et propose galement un ensemble important de composantes permettant
de comprendre la culture organisationnelle, telles que la centralisation du contrle, la
construction des normes, le systme de prise de dcision etc. Bates (1997) apporte la
notion de l'activit quotidienne de l'organisation et des processus informels, comme
composantes lmentaires et indispensables analyser si l'on dsire cerner la culture
organisationnelle.
Goodall (1994), dans son approche interprtative post-moderne de la culture,
insiste sur l'importance des significations et des symboles comme composantes
principales de ce concept, puisqu'ils permettent de le dchiffrer et d'en dgager les
sens cachs, et ce, travers l'interprtation.
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~ Perspective critique de la culture
Flamant (2002), dans son approche critique de l'instrumentalisation de la
culture, met l'accent sur le pouvoir. Selon lui, la culture organisationnelle est une
sorte de valeur incantatoire derrire laquelle les responsables d'entreprises pensent
souvent trouver refuge .
Les approches prcdentes sont toutes riches et apportent des lments
intressants pour la comprhension de la culture organisationnelle, cependant, elles
ne regardent majoritairement que l'intrieur de l'organisation, ignorant ainsi
l'impact de l'environnement externe o vit cette dernire, sur la culture d'entreprise.
Sainsaulieu (1997) a combl en grande partie cette lacune en proposant un bon
nombre de composantes dans lesquelles baigne la culture organisationnelle. Son
travail sera revu en dtail dans une section ultrieure, consacre l'importance de
contextualisation de la culture.
Par ailleurs, dans le sens des post-modernistes, qUl rejettent l'acception
d'existence d'une seule culture organisationnelle homogne, on abordera dans le
prochain paragraphe les cultures de groupes, qui refltent la pluralit de conceptions
et pratiques partages au sein d'une mme organisation.
1.1.4.6. La culture de groupe, la sous-culture, la culture professionnelle
Ce niveau d'analyse est important, dans la mesure o il sert affiner l'tude
de la culture, puisqu'on peut reprer, au sein d'une mme organisation, plusieurs
groupes homognes l'intrieur et htrognes avec les autres groupes de la mme
entreprise.
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La culture de groupe renvoie aux caractristiques culturelles contenues
l'intrieur d'un groupe de travail ou de tout autre ensemble cl 'individus un niveau
situ en dessous du niveau de l'organisation (Karahanna et al, 2005). Il peut s'agir
de la culture professionnelle, de la culture cl 'un dpartement etc.
Selon Karahanna et al (2005), la culture professionnelle renvoie la loyaut
des employs la culture de leur profession plutt qu' l'organisation o ils
travaillent. En effet, les groupes professionnels crent des codes qui constituent des
interprtations porteuses de significations des vnements, des individus et des
objets trouvs dans leur univers professionnel (Van Maanen et Barley, 1984; p300).
Ces codes incluent les schmas conscients qui peuvent tre appris soit de faon
formelle durant la formation acadmique ou le stade de socialisation au travail,
comme ils peuvent tre intgrs de faon inconsciente (Bourdieu, 1986; 1988). Ces
codes, combins la possession d'un savoir unique, rare et valoris socialement,
renforcent la cohsion du groupe et faonnent les pratiques oprationnelles ainsi que
les codes, croyances, valeurs et crmonies (Bloor et Dawson, 1994).
Dans le mme sens, et concernant spcifiquement le poids des cultures
professionnelles dans les organisations, Gouldner (1957) a montr qu' l'intrieur
des firmes, on retrouve deux catgories d'individus, ceux qui s'identifient davantage
la culture de l'organisation et qu'il appelle locaux , et ceux qui s'identifient
davantage leur profession ou d'autres associations, dont les frontires sont plus
larges que celles de l'organisation. Il appelle cette dernire catgorie les
cosmopolitiques . Gagliardi (1990) a mis l'hypothse selon laquelle ceux qui ont
travaill pour une seule organisation seraient plus loyaux l'organisation tandis que
ceux qui ont travaill dans plusieurs seraient plutt loyaux leur profession.
l'inverse des hypothses prcites, Bloor et Dawson (1994) indiquent que
les cultures professionnelles ne sont pas fatalement en lutte entre elles. Van Maanen
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et Barley (1984, p35) indiquent que une fois que des tensions ont lieu entre la
culture organisationnelle et les sous-cultures, les consquences du conflit dpendent
d'un nombre de variables, incluant les conditions qui faonnent la position de
chaque groupe par rapport aux autres au sein de l'organisation, etc .
De faon gnrale, il existe diffrentes cultures de groupe. Siehl et Martin
(1984) et Rose (1988) en identifient trois types, savoir la culture dominante ou
renforante, qui occupe une position d'influence au sein de l'organisation; la contre
culture, qui questionne les postulats de base de la culture dominante; et la culture
orthogonale, qui accepte les postulats de base de la culture dominante mais porte des
croyances en conflit avec cette dernire, sans pour autant les mettre en pratique. Par
ailleurs, Bloor et Dawson (1994) en rajoutent deux catgories, savoir la culture
discordante, qui partage les valeurs fondamentales de l'organisation, mais peut les
interprter de faon diffrente des autres groupes au sein de l'organisation, et la
culture respectueuse, qui affiche un respect et quasiment une soumission vis--vis la
culture dominante, et constitue dans ce sens une sous-culture compatible avec la
culture organisationnelle.
Par ailleurs, on peut citer titre d'exemple de conflit entre deux cultures de
groupe, le travail de Scardigli (2001), qui aborde la culture professionnelle des
ingnieurs-concepteurs d'avions, et celle des pilotes. La caractrisation de ces
cultures de groupe sera dveloppe dans une section ultrieure, ddie l'impact de
la culture sur la technologie.
travers le parcours prcdent des diffrentes thorisations de la culture, on
peut constater qu'il y a des travaux d'ordre normatif, positiviste, qui se sont limits
dcrire la culture comme un tout homogne, isol par ailleurs de son contexte plus
large, tandis qu'on retrouve des travaux interprtatifs, allant en profondeur et
laissant une plus grande libert dans la dfinition de ce concept. Cependant, certains
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d'entre eux l'isolent de son environnement plus large (approche interprtative de la
culture organisationnelle de Goodall, l'isolant du contexte culturel plus large). Dans
la prochaine section, on remettra en cause cette conception de la culture et on
positionnera le prsent travail en consquence.
1.1.5. La culture: d'une approche isole une approche englobante
Dans ce paragraphe, on discutera de l'volution de la conception de la culture
dans le discours acadmique, en partant d'un discours qui la percevait comme un
tout homogne, intrieur l'organisation, vers un discours plus rcent, qui reconnat
la complexit de ce phnomne et son enracinement dans un contexte plus large,
discours dans lequel on s'inscrit dans le prsent travail.
1.1.5.1. La culture: d'une approche instrurnentaliste vers une approche
constructiviste
Dupuis (1990) met en relief deux conceptions de la relation entre la culture et
l'organisation, qui divisent les chercheurs des sciences de l'organisation, notamment
les anthropologues et les chercheurs sociaux. La premire conception voit la culture
comme une composante au sein de l'organisation, ou une caractristique, parmi
d'autres, que possderait toute organisation CP 545). Cette conception, toujours
selon Dupuis, s'inspire d'une vision instrumentale de la culture et relate une
confusion entre culture et stratgie (Weick, 1965). l'oppos, on retrouve la
deuxime conception, adopte par la majorit des anthropologues (Dupuis, 1990),
qui voit la culture comme un systme structurant et non comme une variable
isolable . Au sein de cette deuxime conception, Dupuis identifie au moins deux
orientations. La premire aborde la culture comme un systme d'ides, de
significations ou de connaissances que l'on retrouve dans toute socit . Cette
orientation met l'emphase sur les mythes, langages, symboles ... comme objets
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d'tude de la culture et s'inscrit dans l'anthropologie interprtative adopte par
Geertz, Goodenough et d'autres (Dupuis, 1990). Dupuis reproche cette premire
orientation, dans sa qute de mise en vidence de la culture organisationnelle comme
univers cohrent et harmonieux, de ngliger le contexte plus large de l'organisation.
La seconde orientation palie cette faille, dans la mesure o elle ne cherche pas
tout prix mettre en vidence une culture organisationnelle bien spcifique. Selon
Dupuis (1990, p547), cette orientation s'inspire du courant anthropologique de
Malinowski Harris, qui voit la culture comme un systme socioculturel (Allaire
et Firsirotu, 1984a). Ce systme est ouvert son contexte plus large. La culture est
faonne, dans cette deuxime orientation, aussi bien par le contexte externe ou
global, que par la dynamique interne de l'organisation. Dans le prsent travail, et
dans le souci de ne pas limiter le champ de la recherche, ainsi que de tenir compte de
la complexit des influences culturelles auxquelles sont exposes les organisations,
on se situe dans la deuxime conception, plus spcifiquement dans la deuxime
orientation, celle o l'organisation est un processus, un systme socioculturel
complexe, fruit de son contexte tant interne qu'externe, et non une variable interne,
prdfinie l'avance, isole et manipulable. partir de cette dfinition large, on
tentera de construire le sens de ce concept, en tenant compte aussi bien du contexte
o se situe l'organisation, que des conceptions de ses acteurs.
Outre les considrations prcdentes rejoignant une approche constructiviste,
on abordera dans ce qui suit les fondements thoriques et pistmologiques du
constructivisme sur lesquelles on s'est bas dans le prsent travail, ainsi que les
implications mthodologiques qui en dcoulent et qui faonneront la recherche sur le
terrain.
Divers chercheurs, notamment du domaine de l'ducation, se sont intresss
au paradigme constructiviste en tant que construction du savoir (Denzin et Lincoln,
2003; Guba et Lincoln, 1989). Ce paradigme met en vidence la limite de
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l'objectivit et de la neutralit de la science, tant donn que le chercheur et le sujet
de la recherche sont unis dans une seule entit interactive, et c'est leur interaction
qui cre les rsultats de l'investigation (Guba, 1990). On parle ds lors d'une
pistmologie subjectiviste du constructivisme (le sens merge de la relation entre
l'investigueur et l'investigu). Outre cette dimension, le constructivisme engage une
ontologie relativiste, impliquant la multiplicit des ralits. Un seul individu ne
relate que sa propre ralit perue, et non la ralit de tous les sujets comme telle.
Enfin, l'implication mthologique du constructivisme consiste en un ensemble de
procdures mthodologiques naturalistes (Denzin et Lincoln, 1998, p. 27).
Par consquent, dans le prsent travail, on adhre l'pistmologie
subjectiviste, tant donn qu'on ne dfinira les concepts cls que de manire
gnrique, laissant place l'mergence du sens tout au long du travail
d'investigation, vitant ainsi une approche dterministe ou positiviste, o les
concepts sont encapsuls l'avance dans une dfinition donne. Par ailleurs, dans la
section pratique, on expliquera en quoi on adhre une mthodologie naturaliste
telle que le veut la conception constructiviste prcite.
1.1.5.2. L'approche de contextuation de la culture situating culture
Weisinger et Trauth (2003) introduisent un cadre conceptuel intressant pour
approcher la culture, nomm situating culture , selon lequel la comprhension de
la culture est localement situe, fonde dans les comportements rels et enracins
dans des activits de travail quotidiennes et socialement ngocies.
Le cadre conceptuel de situating culture a t employ pour la premire
fois dans une tude d'ingnieurs japonais et amricains ainsi que de professionnels
techniques travaillant dans une joint venture (Weisinger et Salipante, 2000). Selon
ce champ conceptuel, la culture est un processus socialement ngoci, dynamique,
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pratique et localement situ. Il s'agit par consquent d'une vIsIon de la culture
comme un agir (doing), qui met l'accent sur le comportement rel des personnes,
plutt que comme un processus de penser , qui met l'accent sur les schmas
cognitifs partags. Par ailleurs, cette conception voit l'interaction entre les membres
du groupe d'une culture donne comme tant situe dans un contexte particulier.
Ainsi, en situant la culture dans un contexte donn, le gestionnaire est en mesure de
comprendre l'mergence de processus culturels locaux, refltant diffrentes ralits
et des pratiques de travail socialement ngocies. Ce cadre conceptuel a galement
t utilis par Weisinger et Trauth (2003), dans l'analyse des dynamiques de la
culture locale des firmes oprant dans le secteur multinational des technologies de
l'information. Dans un article consacr l'importance du situating culture dans
le management transculturel des technologies de l'information, l'application de ce
champ conceptuel a permis aux chercheurs d'identifier une diffrence de perception
des pratiques managriales. En effet, certaines pratiques ont t perues comme
tant pertinentes dans un contexte local d'une firme multinationale, et ces mmes
actions ont t perues comme tant non ncessaires voire culturellement offensives
dans un contexte local diffrent pour la mme firme. Ceci s'explique, selon les
auteurs, par le fait que la culture est ancre dans son territoire. L'tude a galement
permis d'identifier les pratiques managriales acceptes dans le contexte culturel
d'un pays et qui peuvent tre transfres avec succs un pays diffrent, afin de
rsoudre des problmes de management mme lorsque les gestionnaires n'taient
pas familiers avec ce nouveau contexte.
Dans le prsent travail, on appliquera ce cadre conceptuel pour comprendre
comment les organisations sont imprgnes de la culture locale environnante, elle
mme rsultant de la combinaison entre diffrents niveaux culturels (culture
nationale, culture rgionale, culture professionnelle). Cependant, on ne se limitera
pas la dimension comportementale de la culture (actions), mais galement sa
dimension cognitive (conceptions).
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Ainsi, on analysera comment ces diffrents niveaux culturels interagissent
pour imprgner les organisations d'une culture locale dOlU1e, et engendrer par
consquent des significations et des comportements bien spcifiques.
1.1.6. Les caractristiques du milieu local
1.1.6.1. Le milieu local: dfinition
Selon les chercheurs du GREMI, le milieu se dfinit comme un ensemble
de rapports territorialiss qui runissent dans un ensemble cohrent un systme de
production, des acteurs sociaux diffrents, une culture determine et un systme
spcifique de reprsentation, qUI dclenchent un processus dynamique
d'apprentissage collectif (Crevoisier et al., 1989, Ratti et D'Ambrogio, 1989), ou
encore comme un ensemble territorialis dans lequel des interactions entre agents
conomiques se dveloppent par l'apprentissage qu'ils font de transactions
multilatrales gnratrices d' externalits spcifiques l' ilU1ovation et par la
convergence des apprentissages vers des formes de plus en plus performantes de
gestion en commun des ressources (Maillat, Quvit, SelU1, 1993, p6), ou comme
une configuration d'agents et d'lments conomiques, socioculturels, politiques,
institutiolU1els, possdant des modes d'organisation et de rgulation spcifiques
Maillat et Perrin (1992).
Selon Pierre-Andr Julien (2005), le milieu, c'est la construction sociale du
march, qui facilite les multiples liens entre les diverses ressources d'une part, et les
acheteurs d'autre part (Bagnasco, 1999). C'est un contexte de production territorial
mesur par les savoir-faire, la culture technique et les capacits d'apprentissage,
valorisant plus ou moins la proximit des acteurs pour crer une synergie avec
l'envirolU1ement (Ratti et al, 1997).
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1.1.6.2. Le milieu local comme rseau hybride: thorie de l'acteur-rseau
D'aprs les dfinitions prcdentes, le milieu est caractris par plusieurs
lments qui s'influencent mutuellement, notamment les institutions locales, la
culture locale, la structure des interactions entre les acteurs (Saxenian, 1994,
GREMI, 2006, Julien, 2005), et les hommes qui y vivent (Julien, 2005). Ces
caractristiques seront dfinies dans le prochain paragraphe. Il s'agit d'un rseau
d'lments hybrides, runissant des humains (hommes, culture) et des objets
(infrastructure, institutions industrielles, associations industrielles etc), qui
interagissent pour dOIU1er lieu des activits spcifiques (d'ordre technologique et
novateur dans le cas du prsent travail). Cette hybridit d'humains et d'objets ainsi
que leur aspect dynamique d'interactivit nous renvoie la thorie de l'acteur rseau
qu'on prsentera dans ce qui suit.
En effet, CaUon (1986, 1989, 2006), Akrich (1987), Latour (1984, 1989,
1991, 1992), qu'on identifie panni les tenants de la thorie de la traduction, plus
spcifiquement de la thorie de l'acteur rseau, indiquent que le social doit tre
apprhend comme tant un effet caus par les interactions successives d'actants
htrognes, c'est--dire de l'acteur-rseau. Tout acteur est un rseau et inversement.
L'action d'une entit du rseau entrane la modification de ce dernier. Par
consquent, toute action impliquant l'ensemble du rseau a une incidence sur les
composantes du rseau. Ds lors, l'action ri'a pas de source prcise, elle engage
toujours une srie d'entits et mobilise la force collective que celles-ci reprsentent.
De mme, l'acteur-rseau est la fois local et global, en fonction de sa taille ou de sa
longueur. Il peut tre la fois un micro et un macro-acteur puisque sa taille est
variable dans le temps et dpend des oprations de traduction de ses portes-parole.
Cette thorie s'avre importante dans l'aspect systmique de la culture, que l'on
tudie dans le prsent travail comme une composante en interaction avec divers
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lments, et non comme une variable isole. Aussi, des entits telles que les
institutions, la structure des interactions, les conceptions et pratiques lies la
culture, seront-elles prises en compte conune lments d'un rseau ou d'un systme
ouvert, affectant les activits technologiques et novatrices des entreprises.
Ces lments interagissent entre eux, pour donner naissance des
consquences propres au milieu, de nature matrielle (financement de proximit et
institutionnel offert par des acteurs du milieu qui croient aux projets locaux; Julien,
2005) et immatrielle, telles que la culture entrepreneuriale du milieu, tendant soit
bloquer ou soutenir l'innovation (Saxenian, 1994; Julien, 2005; GREMI, 2006), la
formation disponible dans le milieu, l'information sur les faons de fonctionner et de
grer auprs des gens que l'entrepreneur connat et en qui il a une double
confiance technique et morale (Julien, 2005). Enfin, le milieu engendre diffrents
types de proximits. Il s'agit de la proximit cognitive, dfinie conune le partage de
connaissances de base, d'expertise et de rfrences communes, tels les mtiers
rgionaux parfois hrits de l'histoire (Julien, 2005; Saxenian, 1994; GREMI, 2006),
de la proximit organisationnelle, qui favorise l'intensit et la qualit des relations
internes (et des transactions) entre les organisations, ou externes entre les rseaux.
On distingue galement la proximit socioculturelle, c'est--dire que l'encastrement
dans un tissu structur de relations personnelles, qui se fonde sur une histoire
commune et le partage de valeurs, de normes et de conventions, et permet de
comprendre et de renforcer les relations entre les organisations du milieu. On
retrouve ensuite la proximit institutionnelle, qui renvoie l'exposition des acteurs
locaux aux mmes lois et normes et l'accs aux mmes institutions de savoir. Enfin,
le type de proximit le plus vident dans tout milieu est la proximit gographique
(physique ou spatiale), qui facilite les rencontres non officielles pour obtenir des
ressources de base. Elle est particulirement utile pour les PME qui n'ont pas les
ressources des grandes entreprises (Gallaud et Torre, 2001). Par ailleurs, ce type de
proximit peut donner plus de poids aux autres types de proximits et favoriser des
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changes tacites (Rallet et Torre, 1999) qui stimulent l'innovation par la
multiplication des ides, ainsi que par les changes sociaux.
Ces consquences tangibles et intangibles, combines ensemble, influencent
substantiellement l'entreprenariat et l'innovation dans le milieu.
1.1.6.3. La culture locale
Le concept de culture locale a t utilis par bon nombre de chercheurs pour
dsigner la culture rgionale (Saxenian, 1994), ou la culture du milieu (Crevoisier et
al., 1989, Ratti et D'Ambrogio, 1989, Maillat, Quvit et Senn, 1993; Maillat, 1995;
Camagni, 1995b, GREMI, 1989, Maillat, Crevoisier et Vasserot, 1992).
Cependant, dans le prsent travail, quoiqu'on adhre l'ide que le niveau
d'analyse le plus proche de la culture locale est celui de la rgion, on considre que
la culture locale est galement le rsultat d'une combinaison de niveaux culturels,
savoir la culture supranationale, la culture nationale, la culture du secteur o opre
une organisation, et mme la culture organisationnelle et la culture des groupes
auxquelles sont exposes les organisations du milieu.
Par consquent, la culture locale sera dfinie dans le prsent travail comme
l'ensemble des actions et
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ailleurs, l'interaction de la culture locale avec les autres composantes du milieu
(institutions, structure des interactions), donne naissance des consquences
matrielles et immatrielles spcifiques au milieu, et qui faonneront leur tour les
comportements technologiques et d'innovation dans les organisations, comme on le
verra ultrieurement.
1.1.6.4. La structure locale
La structure des interactions entre les acteurs locaux est dfinie comme la
division sociale de la main d'uvre ou le degr d'intgration verticale, ainsi que
l'tendue et la nature des liens entre clients, fournisseurs et concurrents dans un
secteur particulier ou dans des secteurs complexes relis (Saxenian, 1994; p7). Par
ailleurs, la structure des interactions peut inclure des rapports entre les organisations
et leur communaut locale. La communaut local