APPEL A COMMUNICATIONS
Le Centre d’Etudes et de Recherche de l’Istec (CERI) organise son colloque annuel
sur le thème :
L’esthétique des pratiques organisationnelles :
reproduction, élégance, innovation
Le 9 décembre 2014
Istec – 128, quai de Jemmapes 75010 Paris
Depuis plus de vingt ans maintenant, les sciences de gestion intègrent peu à peu
l’importance de la dimension esthétique du travail et des organisations (Gagliardi, 1990;
Dean & al., 1997; Strati, 1999; Gherardi, 2000; Ewenstein & Whyte, 2007). De
nombreux travaux ont entendu cette esthétique au sens large, non pas seulement comme
jugement du beau, mais aussi pour caractériser l’omniprésence des corps, des sens, de la
beauté, de l’élégance, des sentiments ou encore des émotions dans les organisations.
Ces dimensions de l’aisthêsis s’avèrent nécessaires aux acteurs devant faire face à des
situations complexes et opérer les multiples adaptations et ajustements nécessaires
(Strati, 2003), tant au niveau opérationnel que managérial et stratégique.
À ce titre, la rencontre entre esthétique et organisation trouve un lieu privilégié
dans les « manières de faire » partagées et instituées que sont les pratiques
organisationnelles. En effet, la notion de pratique est dorénavant privilégiée par de
nombreux chercheurs pour nommer et étudier des phénomènes relevant à la fois du
stable et du mouvant, de l’identique et du divers, du variable et du répétitif. C’est la
floraison des mouvements « as practice » en sciences de gestion (strategy as practice,
marketing as practice, management accounting as practice, etc.). Au cœur de ces
pratiques organisationnelles, ces travaux révèlent l’importance d’éléments esthétiques
relevant du langage, des manières de faire, de la communication, des dress codes, du
style et des corps (Thompson & al., 2001).
Les entreprises, de leur côté, ne semblent bien souvent accorder qu’une place
limitée à cette esthétique qui est souvent reléguée aux activités périphériques (coaching
par le théâtre, décoration, espaces de détente) ou à des entités extérieures relevant du
monde de l’art (partenariat avec des acteurs ou des plasticiens « professionnels »).
Néanmoins, certaines organisations semblent avoir accordé une place centrale à
l’esthétique, ne serait-ce que dans leurs pratiques de marketing et de design. De plus,
dans le cœur de l’exercice du travail, les témoignages vont dans le sens d’une perte de la
beauté du geste et de la place du corps, génératrice de souffrances au travail en lien avec
la taylorisation, voire la re-talyorisation, des activités (Dejours, 2003). Il n’y a pourtant
aucune raison anthropologique d’exclure mutuellement la dimension esthétique et les
éléments techniques des organisations modernes ; cette « aliénation » n’est en rien une
fatalité (Simondon, 1958).
Bien qu’ils doivent toujours être techniquement efficaces, les acteurs se rendent
en même temps compte de l’importance de l’élégance, de la corporalité, des sens, de
l’intuition et même souvent de la beauté dans les adaptations continues de leurs
pratiques collectives. Pour autant, ces pratiques n’existent que parce qu’elles sont
porteuses d’une stabilité, d’une forme de reproduction nécessaire à l’activité
organisationnelle. Dès lors, comprendre leur esthétique revient à saisir comment elles
sont à la fois stables et en permanence adaptées, comment les acteurs innovent en les
faisant évoluer au quotidien.
Reste alors à imaginer comment les managers peuvent intégrer ces aspects tout en
respectant leurs contraintes propres et contingentes. En effet, bien que l’esthétique ne
soit pas directement efficiente à proprement parler, elle constitue une dimension
inhérente aux organisations qui leur permet de fonctionner, de s’adapter et de survivre
dans des environnements complexes et incertains. La dimension esthétique des
pratiques organisationnelles donne aux acteurs un sentiment d’appartenance par lequel
ils partagent « quelque chose d’autre », au-delà de ce qui est explicitement défini ou
clairement formalisé dans les règles, les modèles et les best practices des organisations.
On voit ainsi que des artefacts culturels, comme les règlements, ou les outils, ainsi que
les apparences, comme l’architecture, le design ou encore les dress codes (Bazin &
Aubert-Tarby, 2013) définissent implicitement une identité commune et touchent donc
les pratiques de GRH et de stratégie. Le couplage (certes lâche et non serré) entre les
dimensions esthétiques et techniques des organisations demande alors à être
rigoureusement et systématiquement exploré.
Prenant en compte la diversité des approches concernant les pratiques
organisationnelles et leur dimension esthétique au sens large, nous encourageons la
soumission de travaux empiriques comme conceptuels et mobilisant des méthodologies
qualitatives comme quantitatives. Toutes les disciplines du management sont
susceptibles de servir de point de départ à des questionnements sur l’esthétique des
pratiques organisationnelles. Nous en donnons ci-dessous exemples à titre indicatif :
- En quoi l’esthétique peut-elle éclairer la tension qui existe entre
reproduction et innovation dans les pratiques organisationnelles ?
- Quel est le rôle de l’esthétique dans la prise de décision ?
- Comment penser l’esthétique dans le processus d’apprentissage des
pratiques organisationnelles ?
- Quelle est la place du corps et des sens dans les organisations ?
- Peut-il y avoir de l’élégance et la beauté du geste dans les pratiques
managériales de tous ordres (marketing, stratégie, comptabilité-contrôle,
conception et maintenance des systèmes d’information) ?
- L’esthétique est-elle un problème ou une solution à la rencontre des
différentes cultures et civilisations dans l’entreprise ?
- Quels sont les liens qui peuvent être tissés entre éthique et esthétique ? Y a-
t-il recoupement, superposition ou, pourquoi pas, exclusion, entre ces deux
domaines ?
Ce colloque sera précédé, la veille, d’un séminaire « Meet the editors » auquel tous les
inscrits seront invités.
De plus, une sélection des plus belles communications sera soumise au comité
scientifique de la Revue Interdisciplinaire Management, Homme(s) & Entreprise
(RIMHE) dans la perspective d’un numéro spécial.
REFERENCES
Bazin, Y. & Aubert-Tarby, C. (2013). « Dressing professional, an aesthetic experience
of professions », Society and Business Review, 8 (3), pp. 251-268.
Dean, J., Ottensmeyer, E. and Ramirez, R. (1997). An Aesthetic Perspective on
Organizations, in: Creating Tomorrow’s Organizations, pp. 419-437.
Dejours, C. (2003). L’évaluation du travail à l’épreuve du réel. Paris : INRA.
Ewenstein, B. & Whyte, J. (2007), Beyond words: Aesthetic knowledge and knowing in
design. Organization Studies, 28 (5): 689-708.
Gagliardi, P. (1992). Symbols and Artifacts. Berlin: Walter de Gruyter and Co.
Gherardi, S. (2000). Practice-Based Theorizing on Learning and Knowing in
Organizations. Organization, 7, 2, 211-233.
Simondon, G. (1958). Du mode d’existence des objets techniques. Paris : Aubier.
Strati, A. (1999). Organization and Aesthetics. London: Sage.
Strati, A. (2003), Knowing in practice: aesthetic understanding and tacit knowledge,
Knowing in organizations: a practice-based approaches, M. E. Sharpe.
Thompson, P., Warhurst, C. & Callaghan, G. (2001), Ignorant theory and
knowledgeable workers. Journal of Management Studies, 38 (7): 923-942.
COMITE D’ORGANISATION
ALOUI Adel, Istec
BAZIN Yoann
BEAU Gaelle, Istec
CHENNOUFI Nadia
JANAND Anne, Istec
JARDAT Rémi
LEGROS François
MOREL Sylvie
MORILLON Marina
ROUSSEL Yannick
BENCHERQUI Dominique,
RUZÉ Emmanuel
COMITE SCIENTIFIQUE
ALLARD-POESI Florence, professeur, Université Paris-Est Créteil
BEZES Christophe, Professeur-Chercheur Istec
COLLA Enrico, Professeur HDR Novancia
EL HILALI Nabil, Professeur-Chercheur Istec
GHERARDI Silvia, RUCOLA University of Trento
GIACOMONI Gilbert, Professeur affilié, Istec et Maître de Conférences, Université Paris-Est
Créteil
GUILLET DE MONTHOUX Pierre, Copenhagen Business School
JARDAT Rémi, Professeur-Chercheur HDR et Directeur de la Recherche Istec
MERIC Jérôme, Professeur, Université de Poitiers
MORICEAU Jean-Luc, Professeur HDR, Telecom Ecole de Management
PESQUEUX Yvon, professeur au CNAM
RIOT Elen, NEOMA Business School
STRATI Antonio, RUCOLA University of Trento
PROCEDURE DE SELECTION ET CALENDRIER
Date limite de soumission des intentions (3000-4000 mots) : 28 avril 2014
Retour aux auteurs: 30 juin 2014
Date limite d’envoi des communications (texte complet) : 22 septembre 2014
Date du colloque : 9 décembre 2014
Adresse courriel d’envoi des intentions : [email protected]
INDICATIONS AUX AUTEURS
Les intentions de communication auront une longueur de 3000 à 4000 mots (notes et
bibliographie comprises), en Cambria 12 points, interligne 1,5 et justifié.
La page de garde contiendra : le titre (gras, 16 points), le nom de l’auteur et son institution (12
points) ainsi qu’un résumé (200 mots) et des mots-clés (5 maximum)
Les titres d’ordre 1 seront en gras 14 points et ceux d’ordre 2 seront en italique 12 points.
RENSEIGNEMENTS :
http://www.istec.fr/new-recherche.htm
Sylvie MOREL
12 rue Alexandre Parodi
75010 PARIS
E-mail : [email protected]