distribution spatio-temporelle et etude des parametres de

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DISTRIBUTION SPATIO-TEMPORELLE ET ETUDE DES PARAMETRES DE LA PRESENCE DU BLEUET ET DU COQUELICOT EN SYSTEME CEREALIER INRA DU MAGNERAUD (DEUX-SEVRES) JULIEN MORERE MAITRE DE STAGE : JEAN-FRANÇOIS ODOUX Année 2018 LICENCE PROFESSIONNELLE « GESTION AGRICOLE DES ESPACES NATURELS RURAUX » (GENA) © Julien MORERE

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Page 1: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

DISTRIBUTION SPATIO-TEMPORELLE ET ETUDE DES PARAMETRES DE LA

PRESENCE DU BLEUET ET DU COQUELICOT EN SYSTEME CEREALIER

INRA DU MAGNERAUD (DEUX-SEVRES)

JULIEN MORERE MAITRE DE STAGE : JEAN-FRANÇOIS ODOUX

Année 2018

LICENCE PROFESSIONNELLE « GESTION AGRICOLE DES ESPACES NATURELS RURAUX » (GENA)

© Julien MORERE

Page 2: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

RESUME

Sur la « Zone Atelier Plaine & Val de Sèvre », nous étudierons la distribution spatio-

temporelle et certains paramètres impactant ou non les populations de bleuet et de coquelicot

essentielles pour l’abeille domestique en période de disette entre la culture du colza et du tournesol.

Pour cela, nous mettons d’abord en place un inventaire floristique (mi-mai à mi-juin) sur l’ensemble

de la zone étudiée afin d’estimer le nombre de fleurs présentes et leur localisation. Nous étudierons

ensuite ces données et nous les comparerons à celles des années précédentes (2014-2015-2016 et

2017). Nous utiliserons aussi ces données pour voir s’il y a corrélation avec différents facteurs

agricoles (type de pratique et occupation du sol) et environnementaux (pédologie, couverture

ligneuse et type d’habitat). 95 % des fleurs inventoriées sont des coquelicots. Les habitats situés en

bord de champs du côté de la route présentent les plus fortes densités de fleurs de bleuets et de

coquelicots. Les cultures semblant favoriser le bleuet est le colza et pour le coquelicot, le lin. Ces

deux plantes messicoles sont majoritairement présentes en sol peu profond et dans des zones

ouvertes. L’agriculture biologique semblerait être favorable au bon développement du coquelicot

mais moins pour celui du bleuet.

Page 3: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

REMERCIEMENTS

En premier temps, je tiens à remercier Pierrick Aupinel, directeur de l’unité Entomologie

INRA Le Magneraud, de m’avoir accueilli dans sa structure durant ces quatre mois pour réaliser mon

stage de Licence Professionnelle.

Je remercie également plus particulièrement Jean-François Odoux, responsable apiculture et

environnement de l’unité Entomologie INRA Le Magneraud pour sa patience, sa disponibilité, sa

gentillesse et sa joie de vivre. De plus, je tiens également à remercier Vincent Bretagnolle, directeur

de recherches à l’institut écologie et environnement du CNRS de Chizé, pour ses conseils pertinents.

Je remercie également Thierry Tamic, Emilie Cadet, Mélanie Chabirand, Claude Hamaide et

l’ensemble de l’équipe pour leur implication et leur bonne humeur quotidienne.

Enfin j’adresse mes remerciements à tous les stagiaires que j’ai pu rencontrer durant cette période et

toutes autres personnes ayant contribué de près ou de loin au bon déroulement de mon stage.

Page 4: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

LEXIQUE

Patch : Point géoréférencé comptant une quantité de fleurs définie par une classe

Services écosystémiques : Services rendus pour le bien-être humain par des organismes

interagissant dans les écosystèmes

SIG : Système d’information conçu pour recueillir, stocker, traiter, analyser, gérer et présenter

diverses données spatiales et géographiques

CNRS : Centre National de la Recherche Scientifique.

INRA : Institut National de la Recherche Agronomique.

Pollen : Elément fécondant mâle de la fleur en forme de minuscules grains plus ou moins ovoïde de

quelques dizaines de micromètres de diamètre.

Nectar : Suc sécrété par les nectaires des plantes pour attirer les pollinisateurs et utilisé comme

matière première du miel.

Agrosystème : Ecosystème modifié et utilisé par l’Homme afin d’exploiter par exemple la matière

organique qu’il produit.

Archéophyte : Plante non originaire d’une région géographique, mais qui a été introduite dans des

temps anciens.

Polylectique : Insecte pollinisateur capable de butiner de nombreuses plantes différentes.

Thérophyte : Plante annuelle mourant après leur reproduction. Leur durée de vie est courte mais

leur développement est rapide.

Page 5: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

TABLE DES FIGURES

Figure 1: Localisation de la Zone Atelier ................................................................................................. 3

Figure 2: Mélange floral © Julien MORERE ............................................................................................. 3

Figure 3: Ruchers 2018 sur la Zone Atelier (QGIS) .................................................................................. 5

Figure 4: Abeilles domestiques sur une ruche ECOBEE ©Julien MORERE .............................................. 5

Figure 5: Le bleuet © Julien MORERE ..................................................................................................... 6

Figure 6: Le coquelicot © Julien MORERE ............................................................................................... 6

Figure 7 : Fonctionnement du dispositif Géo-Poppy ............................................................................... 7

Figure 8: Interface du dispositif Géo-Poppy ............................................................................................ 7

Figure 9 : Zone d'étude référence 2014 (QGIS) ....................................................................................... 8

Figure 10 : Totalité des inventaires (QGIS) .............................................................................................. 9

Figure 11: Pédologie de la zone d'étude (QGIS) .................................................................................... 10

Figure 12: Couverture ligneuse sur la zone d'étude (QGIS) .................................................................. 10

Figure 13: Assolement et inventaire de l'année 2014 sur la zone d'étude (QGIS) ............................... 11

Figure 14: Assolement des cultures biologiques et inventaire de l'année 2014 sur la zone d'étude

(QGIS) .................................................................................................................................................... 11

Figure 15 : Evolution temporelle du nombre de fleurs et de patches de bleuets et de coquelicots

(Excel) .................................................................................................................................................... 12

Figure 16: Evolution temporelle du nombre de fleurs et de patches de bleuets (Excel) ...................... 13

Figure 17: Evolution temporelle du nombre de fleurs et de patches de coquelicots (Excel) ............... 13

Figure 18: Evolution temporelle du nombre de fleurs de bleuets en fonction de sa localisation (Excel)

............................................................................................................................................................... 14

Figure 19: Evolution temporelle du nombre de fleurs de coquelicots en fonction de sa localisation

(Excel) .................................................................................................................................................... 14

Figure 20: Densité de fleurs de bleuets et de coquelicots en fonction de la pédologie sur l'ensemble

des années étudiées (Excel) .................................................................................................................. 15

Figure 21: Densité de fleurs de bleuets en fonction de la pédologie sur l'ensemble des années étudiée

(Excel) .................................................................................................................................................... 15

Figure 22: Densité de fleurs de coquelicots en fonction de la pédologie sur l'ensemble des années

étudiées (Excel) ..................................................................................................................................... 16

Figure 23: Influence des haies sur ces deux messicoles (Excel) ............................................................ 16

Figure 24: Densité de bleuets et de coquelicots en fonction de la culture présente sur l’ensemble des

années étudiées (Excel) ......................................................................................................................... 17

Figure 25: Densité de bleuets en fonction de la culture présente sur l'ensemble des années étudiées

(Excel) .................................................................................................................................................... 17

Figure 26: Densité de fleurs de coquelicots en fonction de la culture présente sur l'ensemble des

années étudiées (Excel) ......................................................................................................................... 18

Figure 27: Evolution de la densité de fleurs de coquelicots et bleuets par hectare en fonction du type

de pratique (Excel) ................................................................................................................................ 19

Figure 28: Evolution de la densité de fleurs de bleuets par hectare en fonction du type de pratique

(Excel) .................................................................................................................................................... 20

Figure 29: Evolution de la densité de coquelicots par hectare en fonction du type de pratique (Excel)

............................................................................................................................................................... 21

Page 6: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

TABLE DES TABLEAUX

Tableau 1: Moyenne géométrique en fonction de la classe ................................................................... 8

Tableau 2: Nombre de fleurs en fonction de l'espèce et des années (Excel) ........................................ 12

Tableau 3: Nombre de fleurs et d'hectare par type de sol (Excel) ........................................................ 15

Tableau 4: Nombre de fleurs en fonction du type de pratique et des années (Excel) .......................... 19

Tableau 5: Nombre de bleuets en fonction du type de culture (Excel) ................................................ 20

Page 7: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

SOMMAIRE

INTRODUCTION ....................................................................................................................................... 1

CONTEXTE D’ETUDE ................................................................................................................................ 2

1. Structures d’accueil ..................................................................................................................... 2

a. L’INRA : Institut National de Recherche Agronomique ........................................................... 2

i. L’INRA en Nouvelle-Aquitaine ................................................................................................. 2

ii. L’unité expérimentale Abeilles, Paysages, Interactions et Systèmes de culture (APIS) du

Magneraud ...................................................................................................................................... 2

b. Le CNRS : Centre National de la Recherches Scientifiques ..................................................... 2

i. Le CNRS de Chizé (CEBC : Centre d’Etudes Biologiques de Chizé) .......................................... 2

2. La zone d’étude, un territoire avec un gradient paysager .......................................................... 3

3. Les plantes messicoles, rôle stratégique dans la survie des abeilles .......................................... 3

a. Une plante messicole, c’est quoi ? .......................................................................................... 3

b. Une ressource menacée par l’agriculture moderne ............................................................... 4

c. L’intérêt des plantes messicoles pour les abeilles .................................................................. 4

4. Mes missions et objectifs à accomplir ......................................................................................... 5

MODELE D’ETUDE ET MISE EN APPLICATION .......................................................................................... 6

1. Matériels biologiques inventoriés ............................................................................................... 6

a. Le bleuet (Cyanus segetum) .................................................................................................... 6

b. Le coquelicot (Papaver sp.) ..................................................................................................... 6

2. Le dispositif d’observation Géo-Poppy ....................................................................................... 7

3. L’inventaire floristique ................................................................................................................ 8

4. L’analyse des données ................................................................................................................. 8

RESULTATS ET INTERPRETATIONS ......................................................................................................... 12

1. Distribution et évolution de ces deux messicoles sur la zone d’étude référence 2014-2017 .. 12

2. Influence de différents facteurs sur la distribution spatiale de ces deux messicoles sur la zone

d’étude référence 2014 ..................................................................................................................... 14

a. Facteurs environnementaux ................................................................................................. 14

b. Facteurs agricoles .................................................................................................................. 17

CONCLUSION ......................................................................................................................................... 22

PERSPECTIVES ........................................................................................................................................ 23

BILAN PERSONNEL ................................................................................................................................. 24

BIBLIOGRAPHIE ...................................................................................................................................... 25

Page 8: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

1

INTRODUCTION Depuis la moitié du XXème siècle, les paysages agricoles ont été fortement modifiés à la suite

de l’intensification de l’agriculture afin de répondre aux besoins et exigences alimentaires croissants

(Requier et al, 2015). La création de la politique d’agriculture commune (PAC) en 1962 a favorisé la

mécanisation, l’utilisation d’intrants et le remembrement dans le but d’obtenir de meilleurs

rendements. Des problèmes environnementaux ont ensuite vu le jour (Odoux et al, 2012)

notamment sur la qualité de l’eau, des sols, des paysages et de la biodiversité (Bretagnolle et Gaba,

2015). Ces 30 dernières années, on observe un déclin de 44 % de la diversité des adventices et de 67

% de la diversité floristique (Fried et al, 2008). Une accélération de cette décroissance est d’ailleurs

envisagée pour les décennies à venir expliquée par la perte d’habitats naturels. Aujourd’hui les

agrosystèmes occupent 42 % en Europe et 56 % en France (Marot et al, 2012) rendant le

développement des espèces sauvages dépendant de l’activité humaine. Les différents facteurs

agricoles rentrant en cause sont le type de culture, les techniques agricoles utilisées et leur

intensification. Cette diminution de biodiversité floristique affecte également ces agrosystèmes. En

effet, les adventices jouent le rôle de ressources trophiques pour de nombreux organismes tels que

les insectes, les oiseaux et les macromammifères (Stoate C et al, 2009). De nombreux taxons en sont

influencés comme par exemple l’abeille domestique (Apis mellifera L.). En France, depuis dix ans, 25

% des colonies ne passent pas l’hiver, alors que le taux normal est d’environ 10 %. L’abeille

domestique fournit un service écosystémique de pollinisation indispensable pour les agrosystèmes et

écosystèmes naturels. En Europe, 84 % des espèces cultivées et 80 % des espèces sauvages

dépendraient de ce service pour leur reproduction. Le changement de paysage serait une cause

majeure expliquant cette diminution des populations soumises à un stress alimentaire. Entre la

culture du colza (mai) et du tournesol (juillet), la ressource alimentaire est amoindrie, c’est la période

de disette. Or, c’est également lors de cette période que la taille et l’activité des populations au sein

des ruches est la plus importante (Odoux et al. 2012). Les abeilles domestiques se tournent donc vers

d’autres espèces mellifères permettant de répondre à leurs forts besoins : les plantes messicoles en

particulier. Nous nous intéresserons à deux espèces emblématiques : le bleuet (Cyanus segetum) et

le coquelicot (Papaver sp.). Ces deux espèces fleurissent pendant la période de disette alimentaire et

fournissent aux abeilles de très grandes quantités de pollen et de nectar de qualité (Odoux et al.

2012).

Nous tenterons de répondre à la problématique suivante : « Comment évoluent au cours du temps

les populations de bleuets et de coquelicots essentielles aux abeilles et quels facteurs influencent

cette évolution ? ».

Pour cela, nous commencerons par un inventaire floristique de ces deux espèces sur une zone à large

échelle pour l’année 2018. Nous étudierons ensuite la distribution et l’évolution des populations de

bleuets et de coquelicots en fonction de plusieurs facteurs (édaphiques, agricoles et couverture

ligneuse) à l’échelle de cinq années (2014, 2015, 2016, 2017 et 2018). Cette étude s’inscrit dans le

cadre du programme CENTAURE dont le chef de file est Jouffray-Drillaud. Elle répond à l’appel à

projets CASDAR 2014 (Compte d’Affectation Spéciale pour le Développement Agricole et Rural) et est

financé par le ministère de l’agriculture et la fondation d’entreprise LISEA-Biodiversité (Ligne à

Grande Vitesse Sud Europe Atlantique). Cette étude est pilotée par l’unité expérimentale Abeilles,

Paysages, Interactions et Systèmes de culture (APIS) du Magneraud (INRA) en coopération avec le

CNRS de Chizé (CEBC).

Page 9: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

2

CONTEXTE D’ETUDE

1. Structures d’accueil

a. L’INRA : Institut National de Recherche Agronomique

L’INRA est le premier institut européen de recherche agronomique et dans les premiers

mondiaux dans le domaine des sciences agricoles, de l’écologie, de la microbiologie et de

l’environnement. Cet institut se préoccupe de trois enjeux majeurs de société : l’alimentation,

l’agriculture et l’environnement. Il s’inscrit dans la recherche publique française en tant

qu’établissement public à caractère scientifique et technologique. Leurs principales missions sont de

produire, diffuser des connaissances scientifiques et de concevoir des innovations et des savoir-faire.

Ces dernières sont définies par les lois sur la recherche de 1982 et de 2006. Cet institut mène des

recherches au service d’enjeux de société majeurs avec 250 laboratoires dont 45 unités

expérimentales sur le territoire français. 13 000 personnes y travaillent dont environ 8 000 agents

titulaires. La totalité du budget s’élève à 850,89 millions d’euros provenant à 77 % du ministère de la

Recherche et 20 % d’autres crédits publics.

i. L’INRA en Nouvelle-Aquitaine

Le centre de Nouvelle-Aquitaine-Poitiers s’intéresse à la gestion durable des prairies, des systèmes fourragers, des territoires et des zones de productions animales. Quatre sites sont présents (Lusignan-Rouillé, le Magneraud, Saint-Laurent-de-la-Prée et Chizé) et regroupent 230 techniciens, ingénieurs et chercheurs, répartis en 10 unités. L’INRA Nouvelle-Aquitaine s’efforce de prendre en compte les relations agriculteurs-environnement afin de développer une gestion durable des écosystèmes agricoles ; pour cela diverses plateformes expérimentales sont mises en place. C’est notamment le cas d’ECOBEE piloté par l’unité expérimentale APIS du Magneraud qui permet d’avoir une expertise concrète sur les problèmes rencontrés actuellement par l’abeille domestique dans ces milieux.

ii. L’unité expérimentale Abeilles, Paysages, Interactions et Systèmes

de culture (APIS) du Magneraud

L’unité APIS du Magneraud composée de 12 agents permanents, met au point des méthodes

permettant l’évaluation des effets des pratiques agricoles sur les insectes pollinisateurs. Son enjeu

est d’améliorer ces pratiques afin de préserver et de pérenniser les services écosystémiques qu’ils

fournissent. Pour cela, l’unité dispose d’un laboratoire de palynologie, d’une base de données

botaniques et palynologiques, de structures destinées à l’élevage d’insectes, d’un rucher de 150

ruches et d’un rucher intérieur (pouvant accueillir 10 ruches).

b. Le CNRS : Centre National de la Recherches Scientifiques

Le CNRS est le plus grand organisme public français de recherche scientifique. En 2015, il

employait environ 31 444 personnes (dont 24617 permanents) et son budget annuel était de 3,3

milliards d’euros. Le CNRS exerce dans tous les domaines de la connaissance avec en tout 1 116

unités de recherche dont la plupart sont gérées avec d’autres structures (universités, écoles...).

i. Le CNRS de Chizé (CEBC : Centre d’Etudes Biologiques de Chizé)

Le laboratoire est situé dans les Deux-Sèvres, au sud de Niort, dans la forêt domaniale de Chizé.

L’équipe est constituée d’une dizaine de chercheurs, d’une soixantaine d’ingénieurs, de techniciens

et d’étudiants. L’objectif principal est l’identification de mécanismes et/ou de processus régulant une

dynamique des populations dans un contexte de gestion durable des ressources naturelles. Les

principaux sites d’étude se situent en Europe continentale, en Afrique et dans les Terres Australes et

Page 10: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

3

Antarctiques Françaises et concernent des vertébrés, prédateurs (oiseaux et mammifères marins,

oiseaux coloniaux et reptiles) ou herbivores.

2. La zone d’étude, un territoire avec un gradient paysager Cette étude a été menée dans la « Zone Atelier

Plaine & Val de Sèvre » située dans le centre-ouest

de la France dans la région Nouvelle-Aquitaine

(figure 1) (Odoux et al. 2012). Elle se situe plus

précisément entre la ville de Niort au nord et le

massif forestier de Chizé au sud. 40 villages sont

présents et sa population avoisine les 28 000

habitants. Sa surface équivaut à 45 000 hectares de

plaine calcaire soumise à un climat océanique

tempéré et chaud en été. Chaque année en

moyenne cette zone reçoit 840 millimètres de

précipitations (Requier et al. 2015)

Le paysage agricole est dominant avec 75 % de terres arables principalement consacrées à la culture

de céréales (blé et orge). Les cultures oléagineuses sont également présentes avec 10 % de

tournesol, 9 % de colza. Le maïs représente 8 % et les prairies 18 % de la superficie totale (Requier et

al. 2015). Aujourd’hui 15 500 parcelles sont dénombrées réparties sur 450 exploitations agricoles.

Leur taille moyenne est de 94 hectares, mais certaines peuvent parfois atteindre les 200 hectares. La

moitié de la zone d’étude est classée NATURA 2000 (FR5412007-Plaine de Niort Sud-Est) ce qui

favorise la mise en place de mesures agro-environnementales.

3. Les plantes messicoles, rôle stratégique dans la survie des abeilles

a. Une plante messicole, c’est quoi ?

Les plantes messicoles dites archéophytes se sont adaptées aux pratiques culturales de

l’homme en calquant leur cycle biologique avec celui des cultures. La plante germe, se développe et

termine son cycle juste avant la moisson. Leur mode de persistance est la graine, ce qui rend ces

plantes peu sensibles aux travaux du sol tel que le labour. La plupart de ces plantes adoptent une

stratégie de reproduction de type r caractérisée par une production de graines importante et une

mort rapide permettant une adaptation rapide aux aléas. Certaines messicoles dites strictes sont

toutefois plus sensibles aux perturbations de milieu. C’est le cas du bleuet (Cyanus segetum), qui

s’adapte par exemple plus difficilement que le coquelicot (Papaver sp.), à l’intensification agricole

progressive. Actuellement, la liste nationale des plantes messicoles contient 100 taxons, dont 56 sont

considérés en situation précaire et 30 à surveiller. Ces plantes sont une richesse floristique et

favorisent de nombreux services écosystémiques en fournissant une ressource alimentaire (nectar et

pollen) et un refuge pour la faune.

Figure 2: Mélange floral © Julien MORERE

Figure 1: Localisation de la Zone Atelier

Page 11: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

4

b. Une ressource menacée par l’agriculture moderne

Le type de culture et son itinéraire technique :

La richesse floristique d’un milieu cultivé varie en fonction du type de culture implanté et de

l’itinéraire cultural pratiqué. En effet, le travail du sol, le période d’implantation, la densité de semis

et le type de d’intrants jouent par exemple un rôle majeur. Pour les plantes messicoles, comme

notamment le bleuet et le coquelicot, les cultures d’hiver, semées à l’automne favorisent leurs

implantations. En revanche, les cultures de printemps nécessitant un travail du sol printanier ou les

prairies temporaires restant en places durant plusieurs années conduisent à éliminer ces espèces.

Pour le coquelicot, le labour se révèle par exemple peu opérant pour épuiser la viabilité des graines

car ces dernières peuvent avoir une viabilité supérieure à 50 % après un séjour de 6 ans dans le sol

(www.arvalis-infos.fr/fiche-adventice-le-coquelicot-papaver-rhoeas--@/view-8294-arvarticle.html).

Suite au développement de l’utilisation de désherbants chimiques, à l’augmentation de fertilisation

azotée et de produits phytosanitaires, la flore se banalise et des phénomènes de résistance

apparaissent (Marshall et Moonen, 2002).

Les bordures de champs :

Les bordures de champs regorgent d’espèces messicoles (Marshall et Moonen, 2002). En

effet, les pratiques agricoles y sont différentes, l’agriculture y est plus extensive, la lumière y est plus

abondante et les quantités d’intrants et de mécanisation sont différentes, notamment le tassement

du sol. Ces facteurs permettent aux espèces sauvages de se développer dans de meilleures

conditions et de pérenniser leur population (Fried et al, 2009). Les bordures jouent également un

rôle clé pour la faune tels que les oiseaux, les arthropodes, les mammifères qui permettent par leur

action de disséminer les graines.

Ainsi, les bords de champs présentent une richesse floristique et faunistique plus importante qu’en

plein champs (Romero, Chamorro et Sans, 2008).

Agriculture biologique :

L’agriculture biologique paraitrait être plus favorable à la présence de plantes messicoles que

l’agriculture conventionnelle mais les résultats d’études actuelles restent encore mitigés.

Par exemple, une étude (Hyvonen T et al., 2003) a prouvé que la richesse floristique est

environ 70 % plus grande en agriculture biologique grâce à une faible application d’herbicides, une

densité de semis plus faible et une meilleure tolérance des adventices.

D’autres pratiques en agriculture biologique semblent avoir un effet négatif sur la flore

messicole. En effet, un désherbage mécanique intensif ou le pratique de faux semis empêche le

développement du stock de graines (Fleuri et Fric, 2002). De plus, l’abandon de tout type de travail

du sol favorise les espèces vivaces au détriment des annuelles (coquelicot et bleuet par exemple).

c. L’intérêt des plantes messicoles pour les abeilles

Le régime alimentaire des abeilles se constitue essentiellement de nectar et de pollen venant de

diverses plantes. Les abeilles domestiques sont dites polylectiques car elles s’intéressent à un grand

panel de nectar et pollen. Le pollen, riche en protéine et lipides (Haydak, 1970) joue un rôle essentiel

pour le développement larvaire et le système immunitaire des abeilles. Leur consommation limiterait

les risques sanitaires liés aux champignons et aux bactéries (Alaux C et al., 2017).

Page 12: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

5

Figure 3: Ruchers 2018 sur la Zone Atelier (QGIS)

Le dispositif Ecobee a été créé en 2008 afin de permettre de suivre l’évolution de colonies

testées en zone de grande culture et d’évaluer de la politique agricole sur celles-ci. Il mobilise

actuellement 10 agents permanents et 3 infrastructures complémentaires, la Zone Atelier Plaine &

Val de Sèvre (450 km²) coordonnée par le CNRS de Chizé (www.za.plainevalsevre.cnrs.fr), un rucher

de 50 colonies d’abeilles domestiques et un laboratoire de palynologie situé sur l’unité

expérimentale APIS de l’INRA au Magneraud. (www.nouvelle-

aquitaine-poitiers.inra.fr/Outils-et-Ressources/Dispositifs-

experimentaux/Ecobee)

La zone atelier est découpée en 50 secteurs de 10 km² chacun.

Chaque année 10 sont tirés au sort afin d’accueillir un groupe

de 5 ruches (figure 2). Plusieurs paramètres sont mesurés et

observés tels que les réserves et récoltes de miel, les

effectifs de population adultes, les températures, les

reproductions et les problèmes sanitaires. Une trappe à

pollen est disposée sous chaque ruche afin de pouvoir

identifier la quantité et le type de pollen que récolte les

abeilles et d’ainsi caractériser l’environnement floral qu’elles fréquentent.

4. Mes missions et objectifs à accomplir Ma mission principale était de poursuivre l’inventaire floristique (coquelicot et bleuet) réalisé

chaque année sur la zone atelier en priorisant les 10 zones contenant les ruchers expérimentaux

ECOBEE. Cet inventaire quotidien a commencé mi-mai et s’est terminé mi-juin. Avant cela, j’ai eu

quelques semaines disponibles pour bien me renseigner sur le sujet et préparer mon inventaire en

réalisant les cartes de l’itinéraire à suivre sur QGIS. Une fois les

résultats obtenus, j’ai évalué l’évolution spatiale du nombre

d’observations entre les 5 années d’inventaire. Je me suis ensuite

intéressé aux facteurs influençant la distribution spatiale (type de

culture, couverture ligneuse, humidité, pédologie).

J’ai également participé à la récolte de nectar sur colza, bleuet et

tournesol dans le but d’estimer la présence ou non et la quantité

de néonicotinoides en fonction du type de pratiques agricoles.

A plusieurs reprises, j’ai eu l’occasion de me rendre sur les ruchers

expérimentaux ECOBEE (figure 4), afin d’y réaliser les diverses

mesures bi-mensuelles (pesées, point sanitaire...).

La pose de puce RFID sur abeilles m’a également été confiée dans

le but d’observer les risques de désorientation d’abeilles exposées

au traitement des cultures au thiaméthoxame. L’étude révèle que cette molécule diminue

l’espérance de vie des abeilles en contact. En réponse à cette mortalité, les colonies modifient leur

stratégie de production et privilégient le renouvellement des ouvrières pour se préparer à l’hiver.

Figure 4: Abeilles domestiques sur une ruche ECOBEE ©Julien MORERE

Page 13: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

6

MODELE D’ETUDE ET MISE EN APPLICATION

1. Matériels biologiques inventoriés

a. Le bleuet (Cyanus segetum)

Originaire d’Eurasie, sa floraison a lieu de mai à juillet et appartient à la famille des

Asteraceae. Cette plante est annuelle ou bisannuelle. Sa tige allongée est de couleur vert blanchâtre

et légèrement cotonneuse. Ses feuilles sont étroites et sessiles. Sa taille

varie de 30 à 80 cm. Les fleurs, réunies en capitules sont bleues et

tubuleuses (figure 5). Le fruit est un akène jaunâtre surmonté d’une

aigrette. Les exigences du bleuet sont proches de celles du coquelicot, il

aura tendance à préférer les zones ensoleillées, ouvertes et poussera

ainsi facilement dans les cultures qui possèdent un cycle biologique

proche du sien. Cependant sa germination automnale le rend plus

sensible aux herbicides et au labour. On le retrouve principalement dans les cultures d’hiver (blé,

orge, colza et moutarde) et occasionnellement dans celles de printemps (tournesol). Cette plante

thérophyte est auto-incompatible et dépend de la pollinisation par les insectes. En effet, elle possède

un système de protandrie rendant le contact pollen/stigmate physiquement impossible. Sa floraison

a également lieu durant une période dite de disette (mai-juillet) ce qui de plus fournit une source

alimentaire non négligeable pour les abeilles par exemple. Encore plus que le coquelicot, cette plante

messicole se fait rare dans les campagnes et fait actuellement partie des 30 taxons de plantes à

surveiller. Des études ont montré que lorsque le bleuet est commun dans une zone, cela signifie

qu’une forte diversité végétale y est présente (Bellanger S, 2011). L’important de le protéger parait

donc évident, il pourrait servir d’espèce parapluie.

b. Le coquelicot (Papaver sp.)

Originaire d’Eurasie, sa période de floraison a lieu de mai à juillet. Le coquelicot comme les

pavots appartient à la famille des Papaveraceae et se dissocie en quatre espèces différentes : le

grand coquelicot (Papaver rhoeas), le coquelicot intermédiaire (Papaver

hybridum), le coquelicot argenome (Papaver argemone) et le coquelicot

douteux (Papaver dubium).

Le coquelicot (figure 6) est une plante herbacée annuelle d’une hauteur

générale comprise entre 30 et 60 cm. La tige est ramifiée et entièrement

hérissée de poils rudes, tout comme les feuilles qui sont sessiles. Les

fleurs sont solitaires à l’extrémité de longs pédoncules. Leur taille est

assez conséquente pouvant aller de 6 à 10 cm en pleine floraison. La

corolle est formée de 4 larges pétales qui se chevauchent. Les étamines sont nombreuses et insérées

au cœur de la fleur. Les anthères sont de couleur noire et libère un abondant pollen gris de qualité.

Enfin, le pistil est formé de 7 à 12 carpelles soudés en un ovaire conique. Le fruit est une capsule

sèche contenant de nombreuses petites graines sombres (Abeilles et Fleurs n°805 – Juin 2018).

Le grand coquelicot est le plus commun de tous et est facilement reconnaissable par sa taille et sa

capsule glabre et arrondie. Il est le seul à porter éventuellement concurrence aux cultures. Il est peu

exigeant en ce qui concerne le type de sol, on le retrouve principalement en milieux ouverts,

Figure 6: Le coquelicot © Julien MORERE

Figure 5: Le bleuet © Julien MORERE

Page 14: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

7

ensoleillés et nus, ce qui correspond parfaitement aux milieux associés aux moissons, aux bords de

routes, de chemins et de friches.

Le maintien de cette espèce thérophyte est expliqué par plusieurs facteurs. Premièrement, un pied

produit un nombre considérable de graines (jusqu’à 50 000 à 60 000) et leur durée de vie est très

longue (jusqu’à 40 ans) grâce à leur capacité à résister à l’enfouissement et au manque d’eau.

Seulement 4 % des graines germent lors des deux premières années contre 60 % lors de la sixième

année (Olivereau, 1996).

Néanmoins, cette plante est dite auto-incompatible. En effet un pollen ne peut pas germer sur le

stigmate d’une même fleur. Sa reproduction est donc dépendante principalement par les insectes

pollinisateurs comme notamment les abeilles qui jouent un rôle clé pour le maintien de cette espèce.

Cette plante messicole apporte donc également un fort intérêt pour les abeilles. En effet, elle fournit

un pollen de bonne qualité en quantité durant une période dite de disette entre la floraison du colza

(mai) et du tournesol (juillet).

2. Le dispositif d’observation Géo-Poppy Le dispositif d’observation Géo-Poppy est un serveur web SIG portable qui permet

l’enregistrement de données directement sur le terrain. Le dispositif est divisé en deux parties, une

partie matérielle qui comprend un nano-ordinateur « Raspberry » et une partie logicielle sur une

tablette tactile (figure 7 et 8). Le Raspberry est alimenté par une batterie externe qui permet une

autonomie en extérieur. De retour au bureau, les données contenues dans le Raspberry sont

déchargées et peuvent être utilisées sous QGIS.

Figure 7 : Fonctionnement du dispositif Géo-Poppy

Figure 8: Interface du dispositif Géo-Poppy

Page 15: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

8

3. L’inventaire floristique L’objectif est de réaliser un inventaire exhaustif de la présence de bleuet et de coquelicot sur

l’intégralité de la zone atelier. Certaines années, l’intervalle de temps entre la floraison de ces

plantes messicoles et les moissons est plus ou moins court. Il est donc nécessaire de réaliser

l’inventaire en priorité sur les 10 zones accueillant les ruchers expérimentaux du projet ECOBEE

spécifiques à chaque année. Pour cela il est nécessaire d’emprunter tous les chemins et routes

possibles pour pouvoir obtenir des résultats représentatifs.

L’inventaire se réalise en binôme, l’un conduit et l’autre pose les points GPS correspondant aux

patches de coquelicots ou de bleuets observés. Pour chaque point posé, il est nécessaire d’intégrer

les informations suivantes :

- La nature de la plante observée

- La classe qui correspond à l’estimation du nombre de fleurs au sein du patch (1-10, 11-100,

101-1 000, 1 001-10 000 et 10 001-100 000)

- Le type d’habitat : plein champs, bordure de champs (5m) et bordure de route

Pour chaque classe, un nombre de fleur arbitraire correspondant à la moyenne géométrique de la

classe est utilisé afin de pouvoir estimer le nombre de fleurs par patch (tableau 1).

Classes Moyennes géométriques 1 (1-10) 3.162

2 (11-100) 33.166

3 (101-1 000) 317.805

4 (1 001-10 000) 3 163.858

5 (10 001-100 000) 31 624.358 Tableau 1: Moyenne géométrique en fonction de la classe

4. L’analyse des données A la suite des inventaires, nous obtenons une couche vectrice QGIS contenant l’ensemble des

points placés et leurs caractéristiques (espèce végétale, habitat et classe). Nous disposons également

d’une couche vectrice de la zone atelier complète. Lors des années 2014 et 2017, l’ensemble de la

zone n’a pas été inventorié. En effet, lors de l’inventaire 2014, le dispositif d’observation Géo-Poppy

n’avait pas encore été mis au point rendant l’inventaire plus long. Seulement les zones comprenant

des ruchers ont été inventoriées. Lors de l’inventaire 2017, des problèmes techniques et

météorologiques ont été rencontrés et une partie de l’Est de la Zone Atelier n’a pas pu être terminé.

Zone d’étude référence 2014

Zone Atelier « Plaine & Val de Sèvre »

Figure 9 : Zone d'étude référence 2014 (QGIS)

Page 16: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

9

Il a donc été nécessaire de réaliser une couche tampon correspondant aux zones inventoriées en

2014 et d’ainsi obtenir une zone d’étude commune sur l’ensemble des années appelée « Zone

d’étude référence 2014 » (figure 9). Cette zone représente 70 % de la surface totale de la Zone

Atelier soit environ 31 000 hectares (zones urbaines comprises).

Pour l’année 2015, nous avons constaté une surestimation du nombre de fleurs et de patches,

par notamment la présence de points doublés. Il a donc été nécessaire de corriger cela pour obtenir

des résultats fiables.

Lors de l’inventaire 2018, nous avons rencontré un dysfonctionnement du dispositif Géo-Poppy.

En effet, la classe correspondant à l’estimation du nombre de fleurs au sein des patches était décalée

lors de l’ouverture sous QGIS. Il a donc été nécessaire de corriger ce décalage avant de pouvoir

commencer à exploiter les résultats.

Nous nous sommes d’abord intéressés à l’évolution de la distribution des populations de

bleuets et coquelicots au cours des cinq années d’étude. Pour cela nous avons comparé les années

inventoriées entre elles en prenant soin de sélectionner seulement les points présents dans la zone

d’étude convenue. Sur l’ensemble des cinq années, 17 009 points (bleuet et coquelicot) ont été

recensés (figure 10).

Nous avons ensuite comparé le nombre de fleurs et de patches inventorié de chaque année afin

d’obtenir une courbe de l’évolution des populations au cours du temps par le logiciel Excel.

Nous avons ensuite estimé l’importance de différents facteurs environnementaux sur la présence

de bleuets et de coquelicots : le type d’habitat, le type de sol et la couverture ligneuse.

Pour étudier l’influence du type d’habitat, nous nous somme principalement penchés sur les zones

de bordure de parcelle et de plein champs. En effet, lors des années 2014 et 2015 la catégorie « bord

de route » n’existait pas. Nous avons donc additionné pour les années suivantes, les catégories

« bord de route » et « bord de champs » afin de pouvoir comparer les cinq années entre elles. Pour

chaque point inventorié, le type d’habitat est précisé, il a donc été possible de définir le milieu le plus

propice au bon développement de ces deux messicoles.

Inventaires 2014-2015-2016-2017 et 2018

Figure 10 : Totalité des inventaires (QGIS)

Page 17: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

10

Pour estimer l’influence du type de sol sur le développement des bleuets et coquelicots,

nous avons utilisé une couche vectorielle de la zone atelier où toutes les données pédologiques

étaient mentionnées. A l’aide de QGIS, une intersection des inventaires et de cette couche a permis

d’obtenir une table de données ouvrable dans Excel contenant 12 catégories de type de sol différents

(figure 11).

Nous avons choisi de les regrouper en fonction de leur profondeur : « Sol profond », « Sol

moyennement profond » et « Sol peu profond ». Nous obtenons alors les superficies et le nombre de

fleurs présentes pour chaque groupe défini. Il suffit par la suite de calculer la densité de fleurs par

hectare de type de sol et de les comparer.

Pour définir l’effet de la couverture ligneuse sur le développement de ces deux messicoles, nous

avons d’abord dû définir la longueur de haie et le nombre de points inventoriés présents dans

chaque km² de la zone d’étude. Pour cela, nous avons utilisé sous QGIS une grille contenant des

carrés de 1km (figure 12).

Après extraction de la table de données, nous avons pu estimer sous Excel si la couverture ligneuse

influence ou non la présence de bleuets et coquelicots.

Figure 12: Couverture ligneuse sur la zone d'étude (QGIS)

Carré de 1 km² avec ses haies et ses points

inventoriés

Figure 11: Pédologie de la zone d'étude (QGIS)

Page 18: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

11

Nous avons ensuite estimé l’importance de différents facteurs agricoles sur la présence de bleuets et

de coquelicots : Le type de culture et le type de pratique.

Pour étudier l’effet du type de culture sur le développement de ces deux messicoles, nous avons

procédé de la même façon que pour l’étude du facteur environnemental « Type de sol ». Nous avons

utilisé la couche vectorielle de l’assolement pour chaque année et nous avons réalisé une

intersection avec chaque inventaire (figure 13). Nous nous sommes seulement intéressés aux

cultures céréalières (blés, avoine et orge), aux cultures de lin, de colza et de luzerne, qui sont les

cultures où nous avons observé le plus grand nombre de fleurs.

Nous obtenons ensuite une table de données ouvrable sous Excel nous permettant de calculer

les densités de fleurs par hectare de culture par année. Pour terminer, nous avons additionné chaque

densité pour obtenir un bilan global sur l’ensemble des 5 années.

Pour le type de pratique (biologique ou non), nous avons procédé de la même manière avec une

couche vectorielle contenant toutes les parcelles en agriculture biologique par année (figure 14).

Figure 14: Assolement des cultures biologiques et inventaire de l'année 2014 sur la zone d'étude (QGIS)

Figure 13: Assolement et inventaire de l'année 2014 sur la zone d'étude (QGIS)

Page 19: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

12

RESULTATS ET INTERPRETATIONS

1. Distribution et évolution de ces deux messicoles sur la zone d’étude

référence 2014-2017

En premier temps, nous constatons que les valeurs correspondantes à l’année 2014 sont

nettement inférieures à celles des autres années (figure 15). Comme indiqué précédemment, la

réalisation de cet inventaire n’est pas identique à celles des années suivantes. Le matériel utilisé

n’était pas aussi perfectionné et les conditions climatiques semblaient défavorables à la bonne mise

en place du protocole d’inventaire. En effet, en période pluvieuse, la visibilité est amoindrie et les

fleurs ont tendance à se replier sur elles-mêmes. Pour les années suivantes, nous constatons une

tendance assez frappante avec une diminution annuelle du nombre de fleurs et de patches. De 2016

à 2018 par exemple, le nombre de fleurs diminue de quasiment la moitié. L’année 2016 a été propice

au bon développement des messicoles avec notamment de bonnes conditions météorologiques, ceci

explique donc le grand nombre de patches et de fleurs.

Avant de nous intéresser plus en détail aux deux espèces étudiées, il est important de constater

une plus grande majorité de coquelicot que de bleuet sur la zone d’étude référence 2014 (tableau 2).

En effet, le bleuet est une plante messicole stricte contrairement au coquelicot qui est une plante

rudérale avant tout qui est moins exigeant. Ainsi par exemple, en 2018, 56 patches de bleuets ont

été inventoriés contre 2 352 de coquelicots, ce qui représente 36 684 bleuets pour 893 224

coquelicots.

-

500 000

1 000 000

1 500 000

2 000 000

2 500 000

0

1 000

2 000

3 000

4 000

5 000

6 000

2014 2015 2016 2017 2018

No

mb

re d

e fl

eurs

No

mb

re d

e p

atch

es

Nombre de fleurs Nombre de patches

Figure 15 : Evolution temporelle du nombre de fleurs et de patches de bleuets et de coquelicots (Excel)

Tableau 2: Nombre de fleurs en fonction de l'espèce et des années (Excel)

Page 20: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

13

-

20 000

40 000

60 000

80 000

100 000

120 000

140 000

160 000

180 000

200 000

0

20

40

60

80

100

120

140

160

180

200

2014 2015 2016 2017 2018

No

mb

re d

e fl

eurs

No

mb

re d

e p

atch

es

Nombre de bleuets Nombre de patches

En 2015, nous observons un nombre de fleurs élevé pour un nombre de patches plus faibles, ce

qui signifierait que les patches seraient moins nombreux et de classe élevée (figure 16). A l’inverse, le

nombre de fleurs pour l’année 2016 est particulièrement faible pour un grand nombre de patches.

Cela signifierait donc que lors de cette année, les patches seraient nombreux mais de classe faible.

Pour les années suivantes (2017 et 2018), nous constatons une diminution globale des patches et du

nombre de fleurs.

Pour le cas du coquelicot, l’évolution est similaire à celle réalisée sur l’ensemble de l’inventaire

(bleuet et coquelicot). En effet, le coquelicot, moins sélectif reste présent en grande majorité sur la

zone d’étude (figure 17).

-

200 000

400 000

600 000

800 000

1 000 000

1 200 000

1 400 000

1 600 000

1 800 000

2 000 000

0

1 000

2 000

3 000

4 000

5 000

6 000

2014 2015 2016 2017 2018

No

mb

re d

e fl

eurs

No

mb

re d

e p

atch

es

Nombre de coquelicots Nombre de patches

Figure 16: Evolution temporelle du nombre de fleurs et de patches de bleuets (Excel)

Figure 17: Evolution temporelle du nombre de fleurs et de patches de coquelicots (Excel)

Page 21: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

14

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

90%

100%

2014 2015 2016 2017 2018

No

mb

re d

e fl

eurs

Bordures Plein champs

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

90%

100%

2014 2015 2016 2017 2018

No

mb

re d

e fl

eurs

Bordures Plein champs

Figure 18: Evolution temporelle du nombre de fleurs de bleuets en fonction de sa localisation (Excel)

Figure 19: Evolution temporelle du nombre de fleurs de coquelicots en fonction de sa localisation (Excel)

2. Influence de différents facteurs sur la distribution spatiale de ces

deux messicoles sur la zone d’étude référence 2014

a. Facteurs environnementaux

Type d’habitat

Lorsqu’on s’intéresse au type d’habitat, on constate que le bleuet (figure 18) est

majoritairement présent sur les bordures hormis en 2015, où visiblement la quasi-totalité des fleurs

ont été observées en bordure de champs. Ainsi, comme l’affirmait (Romero, Chamorro et Sans,

2008), les bordures de champs moins traitées et plus préservées permettraient à certaines plantes

messicoles comme le bleuet de prospérer.

Pour le coquelicot (figure 19), on constate que sa localisation reste partagée entre les

bordures et les pleins champs. Une étude (Rousselet S, 2016) avait conclu que le coquelicot était

moins sensible aux herbicides sur un autre jeu de données de cette même étude. Cela expliquerait

donc sa présence équilibrée sur les deux types d’habitat.

Page 22: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

15

Figure 21: Densité de fleurs de bleuets en fonction de la pédologie sur l'ensemble des années étudiée (Excel)

Type de sol

Pour l’étude de ce paramètre environnemental, nous comparerons les cinq années

d’inventaire entre elles.

L’étude de la densité de ces deux fleurs messicoles révèle une forte présence de ces

dernières sur les sols peu profonds (figure 20 et tableau 3). Ces sols sont plus secs et correspondent

parfaitement à la culture des céréales donc au développement de plantes messicoles et rudérales.

On remarque ensuite que les sols profonds plus hydromorphes ne sont pas propices à ces plantes

messicoles.

Les bleuets sont présents en grande quantité dans les sols peu profonds et profonds (figure

21). Cette plante non rudérale nécessiterait donc d’un sol sec peu profond pour son bon

développement mais affectionnerait également les sols profonds argileux. Aucune autre étude n’a

permis de consolider ces résultats.

Figure 20: Densité de fleurs de bleuets et de coquelicots en fonction de la pédologie sur l'ensemble des années étudiées (Excel)

Tableau 3: Nombre de fleurs et d'hectare par type de sol (Excel)

0

5

10

15

20

25

Peu profond Moyennement profond Profond, hydromorphe et terrerouge

Fleu

rs/h

a

0

50

100

150

200

250

300

350

Peu profond Moyennement profond Profond, hydromorphe etterre rouge

Fleu

rs/h

a

Page 23: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

16

Pour le cas du coquelicot (figure 22), on constate que sa présence est décroissante en

fonction de la profondeur du sol, plus un sol est profond et moins les coquelicots sont présents.

Cette plante rudérale est plus polyvalente que le bleuet et peut se développer sur un panel

pédologique plus large.

Couverture ligneuse

Lorsqu’on étudie l’influence des haies sur ces deux messicoles (figure 23), on constate déjà en

premier temps une majorité de valeur située entre 0 - 50 000 fleurs/km² et 0 - 10 000 m de haie/km².

En dessous de ces valeurs on pourrait penser que les haies n’influencent pas la densité de fleurs/km².

Pour les valeurs supérieures à 10 000 m de haie/km², on remarque une tendance : plus les haies sont

nombreuses et denses et moins les fleurs sont présentes en quantité. Le coefficient de corrélation

est négatif, ce qui tendrait à croire que cet effet inverse est confirmé. Il serait ensuite intéressant

d’utiliser un test de corrélation (sous R Studio par exemple) afin de savoir si ce coefficient de

corrélation est significatif ou non.

0

50000

100000

150000

200000

250000

0 10 000 20 000 30 000 40 000 50 000 60 000

Fleu

rs/k

Densité de linéaire de haie/km²

Coefficient de corrélation : -0,084678452

Figure 22: Densité de fleurs de coquelicots en fonction de la pédologie sur l'ensemble des années étudiées (Excel)

0

50

100

150

200

250

300

350

Peu profond Moyennement profond Profond, hydromorphe et terrerouge

Fleu

rs /

ha

Figure 23: Influence des haies sur ces deux messicoles (Excel)

Page 24: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

17

0

2

4

6

8

10

12

14

16

Céréales Colza Lin Luzerne

Fleu

rs/h

a

b. Facteurs agricoles

Assolement

Pour l’étude de ce facteur agricole, l’année 2018 a été exclue car son assolement n’était pas terminé

à la date de rédaction de ce document.

Figure 24: Densité de bleuets et de coquelicots en fonction de la culture présente sur l’ensemble des années étudiées (Excel)

Lorsqu’on s’intéresse à l’ensemble bleuet/coquelicot (figure 24), nous constatons que les

cultures d’hiver favorisent le développement de ces plantes messicoles. Le lin est en tête suivi du

colza et de la luzerne. Les céréales (blé, avoine et orge) présentent néanmoins la densité en fleurs

par hectare la plus faible. Ces résultats pourraient être expliqués par un recouvrement cultural plus

important chez les céréales que le colza par exemple.

Figure 25: Densité de bleuets en fonction de la culture présente sur l'ensemble des années étudiées (Excel)

Sur ce graphique (figure 25), nous nous concentrons sur le cas du bleuet sur l’ensemble des

années hormis 2018. Nous constatons qu’il est largement plus présent dans les cultures de colza qui

est semé à l’automne. Comme indiqué précédemment, le bleuet est une plante messicole au sens

strict et son cycle de développement est favorisé par les cultures d’hiver, ce qui n’est pas le cas du lin

et de la luzerne.

0

20

40

60

80

100

120

140

160

180

Céréales Colza Lin Luzerne

Fleu

rs/h

a

Page 25: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

18

Figure 26: Densité de fleurs de coquelicots en fonction de la culture présente sur l'ensemble des années étudiées (Excel)

Maintenant, nous nous intéressons à l’ensemble coquelicot (figure 26) qui est prédominant

sur la zone d’étude. Nous constatons la plus forte densité de fleurs par hectare sur les parcelles de

lin, de colza et de luzerne. Les céréales présentent toujours une densité en fleurs par hectare plus

faible.

La différence de densité constatée entre ces quatre cultures différentes correspondrait aux nombres,

aux doses et à la sélectivité des désherbants appliqués. Contrairement au bleuet, le coquelicot est

une plante rudérale et sa capacité d’adaptation est plus élevée, ce qui lui permet de s’implanter plus

facilement sur différentes cultures. Ceci explique notamment sa forte présence dans les cultures de

lin qui est une culture d’hiver. Sa forte présence dans les parcelles de luzerne (destinée à la fauche)

est expliquée par son faible indice de fréquence de traitement (IFT).

Une étude (Gandar J, 2016) révèle des résultats similaires notamment pour la culture de lin

qui semblerait être la plus favorable au développement du coquelicot. Pour le bleuet, les résultats

sont encore partagés. En effet, l’étude (Gandar J, 2016) avance le lin comme culture optimale au bon

développement du bleuet suivi de près par le colza qui ressort en première position dans mon étude.

Le colza et le lin sembleraient donc être les cultures les plus favorables à ces deux plantes messicoles.

En effet, si on s’intéresse plus en détail à leurs itinéraires techniques, on constate que peu

d’herbicides sont utilisés chez le lin par exemple, ce qui engendre à long terme l’apparition de

résistances (Terre Inovia).

0

20

40

60

80

100

120

140

160

180

Céréales Colza Lin Luzerne

Fleu

rs/h

a

Page 26: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

19

Tableau 4: Nombre de fleurs en fonction du type de pratique et des années (Excel)

Pratique biologique

Pour étudier ce facteur agricole, les cinq années d’inventaire de la zone d’étude ont été

comparées.

On constate en premier temps (tableau 4) que les superficies en agriculture biologique sont

nettement moins importantes que celles en agriculture conventionnelle. De plus, la superficie des

parcelles en agriculture biologique augmente entre les années 2014 et 2016 avant de stagner à 2 405

hectares sur la zone d’étude référence 2014.

Lorsqu’on s’intéresse à l’ensemble bleuet/coquelicot (figure 27), on constate que l’agriculture

biologique semblerait jouer un rôle positif au développement de ces deux plantes messicoles.

Comme indiqué précédemment, la différence flagrante entre les années 2015-2016 et 2017-2018 est

dû à un déclin global de ces populations messicoles. L’inventaire 2015 a été surestimé et l’année

2016 a été propice aux messicoles, ceci explique donc ces résultats élevés notamment en agriculture

biologique.

0

50

100

150

200

250

300

350

400

2014 2015 2016 2017 2018

Fleu

rs/h

a

Agriculture biologique Agriculture conventionnelle

Figure 27: Evolution de la densité de fleurs de coquelicots et bleuets par hectare en fonction du type de pratique (Excel)

Page 27: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

20

0,020,15

0,3

0,00250,15

1,7

3,9

0,4

1,43

0,8

0

0,5

1

1,5

2

2,5

3

3,5

4

4,5

2014 2015 2016 2017 2018

No

mb

re d

e b

leu

et /

ha

Agriculture biologique Agriculture conventionnelle

Figure 28: Evolution de la densité de fleurs de bleuets par hectare en fonction du type de pratique (Excel)

Si on s’intéresse maintenant plus particulièrement aux bleuets (figure 28), on constate que

c’est l’effet inverse, sa présence serait plus accrue en agriculture conventionnelle. Ces résultats

semblent étonnants car nous aurions pensé que cette plante plus sensible aux herbicides que le

coquelicot serait plus présente en agriculture biologique. On pourrait expliquer cela par la nature des

cultures dans lesquelles nous avons observé du bleuet. En effet, peu de cultures d’hiver sont en

agriculture biologique alors que le développement du bleuet est inféodé à ces dernières. On constate

également que la comparaison du nombre de fleurs est parfois dérisoire (par exemple en 2017, 6

fleurs en agriculture biologique contre 63 052 en conventionnel) (tableau 5).

Tableau 5: Nombre de bleuets en fonction du type de culture (Excel)

Page 28: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

21

Pour le cas du coquelicot (figure 29), qui est le plus prédominant, les résultats sont

semblables à l’étude de l’évolution globale. L’agriculture biologique semblerait favoriser son

développement pour chacune des années étudiées. Le coquelicot semble s’adapter plus facilement

aux pratiques biologiques qui ont tendance à plus perturber le bleuet. Nous pensons notamment par

exemple au désherbage mécanique.

Ces résultats correspondent à ceux obtenus par une étude (Gandar J, 2016), ce qui donne une

meilleure crédibilité aux résultats obtenus ci-dessus.

0

50

100

150

200

250

300

350

400

2014 2015 2016 2017 2018

Co

qu

elic

ot/

ha

Agriculture biologique Agriculture conventionnelle

Figure 29: Evolution de la densité de coquelicots par hectare en fonction du type de pratique (Excel)

Page 29: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

22

CONCLUSION

Les deux plantes messicoles étudiées sont globalement en décroissance. Le nombre de fleurs

et de patches diminuent au cours des années hormis quelques exceptions en 2015. On constate que

les populations de bleuet sont moins conséquentes que celles de coquelicots qui représentent 95%

de la totalité des fleurs inventoriées sur les cinq années d’étude. La distribution spatiale des bleuets

est également irrégulière par rapport à celle des coquelicots qui sont bien répartie sur l’ensemble de

la zone d’étude. Seules les zones de marais et fortement boisées sont faiblement peuplées par ces

deux plantes messicoles. On observe les plus fortes concentrations de bleuets dans les zones

fortement peuplées en coquelicot. Ceci semble confirmer l’idée que le bleuet est plus sensible que le

coquelicot aux pratiques agricoles et à la culture présente. On constate que le bleuet a tendance à

plus se développer sur les cultures d’hiver qui sont majoritairement en agriculture conventionnelle.

Ceci est paradoxal, car le bleuet serait donc présent sur des zones à forts IFT. On constate ensuite

que plus de 70% des bleuets observés sont présents en bordure de champs où l’agriculture y est plus

extensive et la concurrence moins présente. Pour le coquelicot, on constate que son développement

est moins exigeant. On le retrouve majoritairement en culture de printemps, qui représente la

majorité des parcelles biologiques. Contrairement au bleuet, le coquelicot se développe autant en

bordure qu’en plein champs ce qui justifie sa grande polyvalence.

Plusieurs limites de l’étude sont à prendre en compte. En effet, par exemple en 2014, le matériel

utilisé n’était pas le même que celui utilisé les années suivantes. Malgré la présence de données, on

constate que ces dernières sont nettement inférieures aux autres. Nous nous posons alors la

question si cela est dû au matériel ou à une année particulière défavorable aux plantes messicoles.

En 2015, nous constatons des valeurs nettement supérieures expliquées par une surestimation

globale des effectifs. Il est également important de réfléchir sur les périodes d’inventaires. En effet

lors de l’année 2014, l’inventaire n’a pas pu se faire sur la zone d’étude complète. Il doit se réaliser

avant le début des moissons d’orge et les périodes de fauchage des bords de route afin de pouvoir

obtenir des valeurs représentatives. En fonction de la précocité des cultures, les inventaires n’ont pas

pu se réaliser sur le même intervalle temps. La météo rentre aussi en compte et limite les

observations. Enfin, un effet potentiel important de l’opérateur qui a changé chaque année serait à

prendre en compte, nous n’avons pas tous la même vue, ni les mêmes facilités à estimer un nombre

de fleurs. Cette question importante appelle à réfléchir à la standardisation des relevés d’observation

pour d’éventuelles études futures similaires.

Page 30: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

23

PERSPECTIVES

Suite aux précédentes études et aux résultats obtenus dans celle-ci, il apparait important de

mettre en place des mesures de protections sur les zones colonisées par ces deux plantes messicoles.

En effet, leur importance pour l’alimentation des insectes pollinisateurs est essentielle alors que leur

population est en décroissance depuis plusieurs années. Ces mesures citées en dessous doivent

avant tout prendre en considération l’aspect agricole et ne pas nuire aux agriculteurs qui considèrent

encore bien souvent ces plantes comme inutiles.

Une protection réglementaire a déjà été mise en place et le bleuet est considéré comme plante

messicole à « surveiller », le coquelicot n’est pas considéré comme espèces vulnérables. D’autres

moyens comme le programme DEPHY-Abeilles par exemple, sont mis en place permettant d’appuyer

techniquement les agriculteurs qui veulent maintenir la diversité floristique de leur parcelle en

limitant au maximum les impacts sur les rendements par exemple. Des Mesures Agro-

Environnementales (MAE) sont aussi mises en place afin de gérer au mieux ces problématiques. Elles

sont basées sur un contrat de cinq ans entre un exploitant agricole et une structure publique (Parc

National, CNRS …) pour pallier aux pertes économiques impliquées par des changements de

pratiques. Plusieurs MAE en faveur des plantes messicoles existent (Phyto002, BIOMAINT...) et

pourrait inciter à les protéger par le biais d’une aide financière.

Depuis plusieurs années, nous remarquons un fauchage des bords de route de plus en plus intensif.

Cette fauche excessive ne serait pas forcément nécessaire et sa diminution permettrait de favoriser

les plantes messicoles (et la biodiversité en général) qui sont majoritairement présentes en bord de

route et de champs. Il serait donc intéressant de mettre en place des bandes enherbées pouvant

accueillir par exemple du bleuet, qui au-delà de son intérêt pharmaceutique et cosmétique, attire les

syrphes, les coccinelles et chysopes qui sont d’excellents prédateurs du puceron par exemple.

Nous avons constaté que la couverture ligneuse n’était pas favorable aux messicoles à partir d’une

certaine densité au km². Cependant, ces ligneux formant souvent des haies sont fortement utiles. En

effet, ils jouent en premier temps un effet brise-vent en ralentissant de 50 à 75 % la vitesse du vent

sur une distance de 5 à 7 fois la hauteur de haie. Ceci permet d’éviter les pertes notamment en

arboriculture et de créer un micro-climat constant sur la parcelle. Les haies jouent également un rôle

dans la protection des sols en limitant leurs érosions en cas de fortes pluies. Lors de leur entretien,

les rémanents peuvent être utilisés comme fertilisants organiques. La présence de prédateurs est

également favorisée par des haies qui jouent un rôle de perchoir ou d’abris, et permettent ainsi de

contrôler les ravageurs de cultures. Les pollinisateurs en profiteront également lors des périodes de

floraison (Dossier d’information, L’arbre au service de l’agriculture, 2012). De part tous ces

avantages, il parait difficile d’ouvrir le milieu afin de favoriser la présence de messicoles telles que le

bleuet et le coquelicot.

Le dernier point à aborder est le point de vue des agriculteurs. En effet, un bon nombre d’entre eux

considèrent les plantes messicoles comme inutiles et ne peuvent pas concevoir leur présence sur

leurs parcelles. Le bleuet et le coquelicot en particulier concurrencent peu les cultures et leurs

graines extrêmement petites sont faciles à trier. Pour améliorer cela, une sensibilisation à l’utilité de

ces plantes est essentielle, en organisant par exemple des rencontres ou des journées dédiées à ce

sujet.

Page 31: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

24

BILAN PERSONNEL

Ce stage a été pour moi très enrichissant, que ce soit lors de ma mission principale ou toutes

les missions annexes que j’ai eu l’occasion de réaliser. Tout d’abord, je me sens concerné par l’abeille

et ses problématiques actuelles, ce qui m’a permis d’être motivé tout au long de cette étude. J’ai

également fait beaucoup de terrain, ce qui me correspond le mieux et m’a permis d’acquérir des

connaissances concrètes. J’ai pu également approfondir mes connaissances agricoles, botaniques et

apicoles qui sont pour moi essentielles pour mon futur professionnel. Je n’oublie également pas

l’équipe avec qui j’ai eu la chance de travailler, grâce à leurs compétences et leur joie de vivre, j’ai pu

accomplir chacune de mes missions avec motivation et engouement. Je retiens que du positif de ce

stage qui m’a permis de savoir concrètement ce qu’était le domaine de la recherche. Cela m’a plu et

m’a conforté dans l’idée que je voulais continuer mon parcours professionnel dans le domaine

agricole et environnemental. De plus, j’ai pu mettre en application des connaissances acquises

durant ma licence professionnelle GENA comme notamment la manipulation du logiciel QGIS qui a

été essentielle lors de ce stage.

Page 32: DIStribution spatio-temporelle et etude des parametres de

25

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