découper dans l'amorphe : mise en matériel sonore

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DÉCOUPER DANS L'AMORPHE : MISE EN MATÉRIEL SONORE Antonia Soulez Collège international de Philosophie | Rue Descartes 2014/1 - n° 80 pages 38 à 48 ISSN 1144-0821 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-rue-descartes-2014-1-page-38.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Soulez Antonia, « Découper dans l'amorphe : mise en matériel sonore », Rue Descartes, 2014/1 n° 80, p. 38-48. DOI : 10.3917/rdes.080.0038 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Collège international de Philosophie. © Collège international de Philosophie. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 134.208.103.160 - 03/04/2014 22h41. © Collège international de Philosophie Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 134.208.103.160 - 03/04/2014 22h41. © Collège international de Philosophie

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DÉCOUPER DANS L'AMORPHE : MISE EN MATÉRIEL SONORE Antonia Soulez Collège international de Philosophie | Rue Descartes 2014/1 - n° 80pages 38 à 48

ISSN 1144-0821

Article disponible en ligne à l'adresse:

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-rue-descartes-2014-1-page-38.htm

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Soulez Antonia, « Découper dans l'amorphe : mise en matériel sonore »,

Rue Descartes, 2014/1 n° 80, p. 38-48. DOI : 10.3917/rdes.080.0038

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La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites desconditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votreétablissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière quece soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur enFrance. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.

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ANTONIA SOULEZDécouper dans l’amorphe :mise en matériel sonore

Scelsi a écrit « Un homme qui peut se tenir tout seul sur uneficelle n’a pas besoin de philosophie ».

Cette expression, « découper dans l’amorphe », m’est venue à l’écoute de Scelsi* et varese, le 21 novembre 2005 à l’opéra Garnier. M’intéressant à la musique de Scelsi en particulier, jecherchais à comprendre l’étrange démarche du compositeur italien qui est aussi un poète, dupoint de vue du travail sur le matériau qui conduit à tirer des formes sonores d’un substratinforme, non construit, bref à extraire la forme de l’amorphe.

1. Question : est-il possible de tirer directement, sans médiation, une forme de rien ?La question revient à se demander si l’on peut faire l’économie du symbolisme intermédiaireentre forme et matière. Nous devons à Aristote le couple forme/matière, soit ce qui est lié etqui est fini/ce qui n’est pas lié par des lois, amorphe, et est un infini redoutable « apeiron ». Lapoésie est une sorte d’« acte plasmateur » aspirant à la forme d’un matériau opaque, dont onne connaît la provenance. Pour moi, le matériau de la langue est tel un continuum sonore qui selaisse discrétiser. À Pygmalion, figure de l’échec de cette extraction directe, échouant à donner la vie à sonœuvre sculptée Galatée, il fallait « précipiter l’art dans la vie » sans transition. Car il faut bien,disait Spinoza, un «  marteau pour créer le marteau, et une enclume sur laquelle faire

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l’enclume  ». Épistémologiquement 1,ces considérations conduisent à marquer l’importancedes opérations pour constituer des structures d’objets. Donc un « travail ».

2. Le matériau réserve de sonsOn notera d’abord que la notion de matériau qui est à l’arrière-plan de cet exposé est celle dumusicien. On la trouve peu dans le langage de la peinture, sauf chez les «  matiéristes  »espagnols qui se réclament explicitement d’une démarche picturale précise. Par exempleTapiès, qui veut dire aussi, rappelle-t-il lui-même, en catalan, « mur ».Dans la musique, la notion a son histoire. Et Adorno qui l’emprunte à Max Weber ne l’ignorepas. Le matériau est un terme de métallurgie. Max Weber l’utilisait dans le champ de larationalisation technique dans sa Sociologie de la musique. On parle de matériaux industriels, dematériaux lourds, de science des matériaux. Son usage en musique est un déplacementsignificatif. On parle avec Adorno de « beherrschen », dominer le matériau par l’impositionhumaine d’une forme. Les douze sons chez Schoenberg ont ainsi constitué un « matériau »construit, formellement préparé pour la composition. Ce qui laisse supposer une mise enordre de relations entre des éléments d’abord mêlés indistinctement. On peut alors se demander quel nom donner à ce qui est préalable au matériau dont lematériau élaboré provient. On peut être tenté d’appeler « materia prima » ce matériau premierdont le matériau construit provient. On dédouble alors le matériau. Ce dédoublement estphilosophique ou peut intéresser le philosophe. Husserl le thématise, mettant à part lematériau au sens matériel qu’Aristote jugeait inarticulable, à peine susceptible d’être désignéen parole. Dans le langage, le « matériau » comme materia prima pourrait être l’équivalent de la glaisepour le potier, ou du marbre qui sert de socle à la Pieta Rondanini de Michel-Ange, le continuumsonore dans le domaine des sons où la matière sonore se présente comme contigüe et fluide,assimilée pour cette raison au temps qui passe avec perception de moments auto-contenus (cf. Carole Gubernikoff sur le travail de Kramer). Ce point de vue qui place les sons enpriorité, fait d’eux le fondement nouveau de la musique depuis Helmholtz qui a mis aupremier plan cette « grammaire inférieure » de la sensation auditive.

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3. Figures d’événements à partir d’un plan indifférencié : vers la forme-forceÀ ce niveau plus proche du substrat acoustique, l’approche confine à ce que Deleuze nous aappris à comprendre sous l’expression mystérieuse de « plan d’immanence » à même lequelles événements sonores se laissent «  découper  ». Ainsi, l’expression «  découper dansl’amorphe » pourrait-elle rendre un son deleuzien. Il est intéressant à cet égard de constater que ces pensées du continuum sonore qui suggèrent desdécoupages à même ce plan d’immanence inspirent tout particulièrement les musiciens. Pasd’intermédiaires, de médiations symboliques, mais le surgissement d’événements sonores à partird’un plan indifférencié, surface et substrat de multiplicités de qualités de vibration émergeant de l’espacesonore plein comme dans des champs de forces. Par quelques-uns de ces mots que je lui emprunte,Carole Gubernikoff songe ici à des musiques inspirées par le courant constructiviste russe dudébut du xxe siècle : ainsi Wyschnegradsky 2 dont jeune fille Pascale Criton, compositrice, asuivi l’enseignement avant de rencontrer Deleuze. Il est important de comprendre que le planprécède les combinaisons d’entités discrètes résultant de découpages. On discrétise ensuite. La questionse pose cependant de savoir comment se présente l’accès au plan d’immanence qui est préalableà toute représentation musicale. On peut le figurer comme une réserve de sons possibles decaractère virtuel. Mais il faut prendre garde à ne pas faire de ce continuum une totalité (dangermystique de la « Pansonorité ») et d’autre part, se prémunir contre la tendance à projeter une«  loi » de développement programmable de toutes les possibilités sonores qui seraient ainsicontenues d’avance dans cet espace sonore plein. Il y a en effet plus d’aléatoire dans lalibération de ces qualités-processus sonores, que de nécessité prévisible.

4. L’image de la réserve profonde : « lalangue »«  Tanaris  » pour récitant, composé par françois-Bernard Mâche (né en 1935, écrivain etcompositeur utilisant volontiers hauts parleurs et instruments acoustiques) et donné à la Citéde la musique avec choeur et orchestre, évoque justement une citerne. Il en a également écritle poème. J’écrivais alors « Ma cathédrale engloutie » que Jean-Daniel Hégé a interprété unsoir de colloque à la contrebasse, à l’INHA. Comme je l’ai spécifié en marge, mon poèmereprend ce motif de la réserve des sons, mais en moins métaphysique.On serait tenté d’entendre, dans cet espace sonore plein, résonner « lalangue », expression de

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Lacan reprise par Jean-Claude Milner. En effet, cette réserve ou espace sonore plein du pland’immanence se rapporte à quelque chose qui «  n’est pas épuisé  » par le signifiant (avecl’ensemble des propriétés minimales d’un langage qui le caractérisent, à savoir ce « minimum »qui veut que le signifiant, pour être ce qu’il est fonctionnellement parlant, articule un type d’objetet des relations). Conçu comme plein, contrairement à ce que lui reproche injustement Deleuze,Lacan dit aussi «  qu’il n’existe pas de langue insuffisante à couvrir le champ du signifié  »,autrement dit, cette langue qui couvre ce champ est un « matériel » avec sa « batterie ». Loind’inscrire le signifiant par rapport à un espace manquant propre au désir, comme chez Platon,Lacan insiste sur le caractère pleinement suffisant car « L’inconscient l’habite 3 », dit Lacan. Certesce « plein » n’est pas à comprendre avec les mots de Deleuze. Il emplit au contraire tout le champdu signifié au sens où il se situe en deçà de la relation signifiant-signifié. Le pas de vide entre « la »et «  langue  » figure l’aspect de soudure qui empêche la «  distinction  », entre expression etexprimé (partout où il y a l’expression, il y a, dit Merleau-Ponty, de l’exprimé, à l’état en quelquesorte non détachable 4), ainsi dans le rêve. Mais l’ennui pour Deleuze, est que ce mot forgé parLacan pour rendre cette indistinction palpable, infantilise le langage. On est tenté d’assimiler cette approche du matériau de la langue comme réserve profonde à unprocédé par lequel l’artiste travaillerait «  sans le savoir  » à partir de matériaux enfouis (dansl’inconscient) : comme si, conception douteuse, la poésie s’assimilait à la simple émissionassociative, la moins contrôlée possible, de signifiants en quelque sorte sur le divan. Mais l’atelierou le studio n’est pas un divan. Deleuze nous met en garde contre cette illusion d’une démarcheinfantilisante. Ainsi, quand Deleuze déclare les écrivains « bègues du langage » (Mille Plateaux,p. 168) en ce qu’ils parlent une langue étrangère chez eux, ce n’est pas pour abonder dans le sensde l’argument de l’infantilisation dont il se méfie à juste titre. Si comme l’a dit Proust : « lesbeaux livres sont écrits dans une sorte de langue étrangère 5», cela n’est en rien une concession àun matériau venu droit d’une pulsion primaire sans transformation. On retrouve le problèmementionné plus haut. D’un côté, comme il est écrit dans Critique et clinique : «  écrire n’estcertainement pas imposer une forme (d’expression) à une matière vécue  ». Par ces mots,Deleuze tourne le dos à la symbolisation du vécu si importante pour Granger. Mais quand ilajoute en guise de conséquence, que : « La littérature est plutôt du côté de l’informe » (chap. 1,premières lignes, p. 11), il ne suggère aucune régression du signifiant poétique au signifiantcliniquement parlant.Deleuze s’oppose autant à une vue intercalant un système de symboles entre forme et

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matériau propre à résoudre la tension insoluble matière-forme, qu’à une « psychanalysationde la littérature » (ainsi Marthe Robert). Il récuse jusqu’à l’idée-même d’extraction d’uneforme hors de l’informe, façon de ramener l’écrivain au langage informe, au sens réfractaire àla forme, « a-grammatical » comme dans « he danced his did » du poète américain Cummings.Cependant, un tel passage à l’informe est déparentalisé, dé-complexé, comme rendu à safonction d’agencement « du dehors » sans référence à l’ego, compris par contiguïté, tel le« neutre » blanchotien, impliquant de « se dessaisir du pouvoir de dire “je”  ».Plus exactement, la dimension clinique demeure mais comprise autrement, et même inverséevers l’extériorité, comme on sait, en référence au psychotique. À l’époque le cas de Wolfson,l’écrivain psychotique, focalisait toutes les attentions. Le parti de Deleuze dans le Schizo et leslangues (Seuil, 1970) était de contrecarrer le motif œdipien freudo-lacanien du papa-mamanen littérature, et, à l’inverse de freud qui « ramène tout à l’éternel père-mère » et familialisel’écriture, d’instruire un « devenir-processus » régi par la « puissance d’un impersonnel ».Quelles que soient les manières d’exploiter la dimension « neutre » à distance de l’ego, onmesure le service rendu par Deleuze aux musiciens qui le lui rendaient bien. Et l’on peut voirlà les fruits d’une élaboration paradoxale pour un philosophe qui, à l’affût de la pensée artiste,prenait le concept à rebrousse-poil, tout à fait à l’inverse des philosophies du concept venuesdes mathématiques, comme chez Granger après Cavaillès ou Carnap.Mon chemin s’inscrit à distance du symbolique, comme du clinique qu’il soit freudien oudeleuzien. Il prend au sérieux la stratégie du bas revendiquée par Adorno (« partir du bas,c’est-à-dire de l’œuvre ») avec cette différence que je voudrais aller plus bas que le « bas » quipour Adorno reste toujours l’œuvre, plus bas qu’un système de cohérences. Partir d’un absolument non-encore-formé est illusoire. L’amorphe s’atteint avec un certaintravail de résistance à ce qui y fait écran. La forme, généralement héritée, la syntaxe apprise, leTout reçu, l’usage, une grammaire de l’usage comme moule d’emplois intelligibles, tout celaconstitue un milieu discursivement pré-découpé dans lequel j’arrive à l’être et qui portereprésentations comme préjugés. Le monde n’est pas le silence dont on remonte au cogitocomme d’une tabula rasa, mais le monde pré-cogitatif bruyant dont j’ai à m’abstraire. Ungrouillement de vie. Wittgenstein l’a dit et aussi Merleau-Ponty contre Descartes. Le vraicogito, écrit Merleau-Ponty 6 est un « être au monde », une immersion dans un monde donnélà « avant toute analyse », et qui me précède. L’opération suppose un écart à la langue commemoyen de communication des pensées.

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Là serait à mes yeux le « travail », non un travail de « séparation » de la pensée (Trennung),mais à l’inverse un travail (conflictuel) de «  réunion  » par l’expression, en vertu d’uneaspiration à l’indissocié (Zum Ungeschiedenen) : à savoir, à ce qui est tressé inextricablement(verwebt) avec la langue et ne connaît pas la synonymie 7, un être dit « organique » pour cetteraison par Humboldt. Ainsi, l’informe est loin d’être donné. Il se conquiert par résistancecontre les formes reçues. C’est une « lutte » (et non un ajustement sans heurt entre penséeet expression) au corps à corps, entre une matière reçue (la langue héritée) et l’articulationnouvelle, séparatrice, individualisante. Sous l’aspect de cette « lutte », la forme est force.Donc l’informe doit être lui aussi produit. Mais ici le résultat de cette production n’est pas du formelmais un devenir-de-la-forme produit par le « travail d’énergie » d’un écrire ou d’un parler ou encored’un sonner exploitant la langue. Dans ce travail d’énergie (energeia vs ergon), ce qui s’élabore estimmanent à l’opération conduisant à se forger les mêmes moyens (différents de moyens decommunication) pour « produire » des figures, que ces figures qui en résultent. Et ce travail de« réunion » n’est nullement de réconciliation pacifique. Il contrarie, comme le dit Humboldt, lemouvement de la pensée conceptuelle en la prenant à rebrousse-poil. La difficulté, pour que cetravail de découpage (Gliederung) s’effectue, tient à l’écart pris par rapport au matériau, écartdans lequel s’est installé le philosophe, justement parce que la langue naturelle, avec sesrésonances et sa richesse expressive, dérange ses plans, perturbe sa sémantique de l’objectivité. C’est cet écart qu’il faut donc réduire jusqu’à l’immanence à reconquérir, ou «  blocd’incompréhension fiché au cœur du poème » (Meschonnic 8) et indétachable de la langueparticulière en son opacité de matériau. «  fiché au cœur du matériau  », ce non-compréhensible vient bien d’un «  conflit entre l’expression et la pensée  », source de larésistance dont je parlais plus haut. « Masse de formes et de sons embrouillés » en quoi consiste l’essence de la langue, celle-ciest « matière du monde phénoménal coulée dans la forme de la pensée ». Mais, défi à lapensée claire, elle est aussi un facteur de «  retardement de l’esprit  ». Ainsi, d’elle vientl’obstacle, l’écran, qui maintient sa tension fondamentale avec la pensée articulée et claire.Cette fonction de réserve, faite de rétention, «  retenue », mais aussi d’inexpliqué (maisaudible) est ce qui rend le poème « intraductible », sauf à respecter l’obscurité du texte età rendre l’élément étranger en lui 9. L’immanence à reconquérir, loin de ressembler à uneplongée facile et sans résistance dans le matériau de la langue, réclame bien un travailconsistant, pour résumer les étapes, à

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1- repartir des éléments et distinctions d’un moyen articulé pour communiquer pour 2- produire ce que cette articulation a recouvert, en s’attaquant au besoin à l’usage pour en démonter lesformes reçues, et 3- découper ensuite. Le mot « découper » peut décrire différentes stratégies : Ex. : celles de Pierre Henry, partant du classement des sons de la vie dans Journal de mes sons(Actes Sud, Éd. Séguier, 1996, p. 21) où un son est gros de « micro-œuvres », sans notes,comme le bruit d’une porte qui bat (p.  26), ou celle de Scelsi, très différente et peu« concrète » , plus mystique aussi. En ce sens le « matériau » est très variable. Des « éléments »peuvent être matériau, comme chez Klee, le point, la ligne, la surface… (pour que la peinturedise quelque chose de musical…).

5. Ce « bloc d’incompréhension » fiché dans l’œuvreSi le matériau se pense de façon immanente comme un devenir-force de la forme, musique,couleur ou sons, c’est que sa notion dépend de ce qu’on en fait, en vertu d’une élaborationdes moyens pour produire ces formes de la même pâte que ces moyens : des sons avec dessons, des couleurs avec des couleurs, des mots avec des mots, etc. Cet exposé est un défi auphilosophe : car, où pour lui est le matériau (Stoff) ? Peut-il même en parler ? On a rappelé quedepuis les Grecs, la matière seule, non marquée par le sceau de la forme, n’est pas susceptibled’être parlée. Il y a aussi un sens immatériel du «  matériau  » pour le philosophe, ex.  : laproposition en soi selon Bolzano n’est pas objet mais «  Stoff » du sens, sans pour autants’identifier à l’expression linguistique. Il y a bien un sens immatériel de la matière (Hourya Sinaceur 10). La matière se dédouble donc chez le philosophe en matière matérielle et« matière de la pensée », celle-ci étant déphysicalisée. C’est en effet ce que montre l’usage dumot « matière » chez Husserl quand il s’attache à l’expression de la signification du langage.Une première proposition serait de dire que ce qui est matériau au sens matériel pour lemusicien ou le phonologue par exemple, ou le poète, est bien une sorte d’informe pour lephilosophe, à savoir quelque chose d’indéterminé dont on ne tirera rien d’articulé ni de significatif.C’est donc d’un point de vue philosophique que le matériau est conceptuellementimprésentable.

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6. Le « sifflement » de « Joséphine die Sängerin » ( Kafka)On entendra « marmonner » si on a dans l’idée d’entendre un message clair. Marmonner,« mauscheln » (cf. Kafka, dans la traduction de Marthe Robert) en allemand, le balbutiementdu poète, le grondement de sonorités brutes et impropres à l’articulation sous le mot. Bref,ce qui n’est pas à « comprendre », comme le « sifflement » de « Joséphine die Sängerin »,ce récit de Kafka 11. Le sifflement est « la langue de notre peuple » que le peuple émet « sansle savoir » et sans comprendre non plus l’art de Joséphine qu’il écoute pourtant et admire.L’incompréhension si l’on peut dire est mutuelle. Des souris à la cantatrice et de lacantatrice aux souris. Ce non-compréhensible de l’art de Joséphine est un chant qu’elle sifflepeut-être aussi avec des roulades, mais autrement que « nous », le peuple qui l’écoutonssans comprendre. Elle chante au-dessus des lois. Le propos dit qu’il s’agit pourtant de lamême langue naturelle parlée par tous, et en même temps qu’elle en fait un usage non-familier qui détonne et enchante jusqu’à ce qu’elle-même, Joséphine, disparaisse commeune voix qui s’éteint, disparition où l’on peut avec Walter Benjamin déceler un «  gaged’évasion » hors du communautaire qui « nous » enferme. Même thème dans « Recherchesd’un chien » ou « Le nageur », autres petits récits de Kafka sur l’étrangeté d’un natif dans sapropre langue. Il n’est pas exclu que ce jargon soit aussi un peu celui que Kafka appelle lessonorités de « mon » allemand (de juif allemand de Prague dans une lettre à Max Brod de1920) dont on peut douter, et dans lequel il ne se sent pas en sécurité (ibid., 1921).La différence est indiquée par Kafka lui-même, dans le récit de la cantatrice, par l’exemple dela manière dont on casse une noix. L’exemple est excellent parce que, choisi dans l’ordinaire,il dit exactement ce qui fait la différence entre l’objet de tous les jours auquel on ne prête pasd’attention et le même objet considéré comme de l’art. « Casser une noix n’est vraiment pasun art, aussi personne n’osera-t-il convoquer un public pour le distraire en cassant des noix.S’il le fait cependant, et que son intention se voit couronnée de succès, c’est qu’il s’agit aufond d’autre chose que d’un simple cassement de noix » et qu’il est apparu que c’est un art. Le récit de Joséphine inspire un très intéressant article du musicologue allemand H. Danuser, dans Sens et signification en musique 12. L’espace expressif qui se trouve ainsiouvert à la musique ne correspond pas à l’attente d’un sens articulé au sens où on al’habitude de le comprendre. Ce n’est même pas la musique dissonante dont Adorno disaitqu’elle aurait pu musicaliser Fin de partie de Beckett. L’idée nous éloigne donc de la prioritésémantique du sens articulé, si importante pour Carl Dahlhaus comme pour Adorno. On

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entre peut-être dans ce que Adorno appelait la part d’énigme qui fait que la compréhensiond’une œuvre résiste en dernier ressort à son herméneutique. Sans être musicien, Kafkas’est ingénié à suggérer sa « musicalisation ».

7. La philosophie franchirait-elle le mur du son ? Une philosophie du son en questionIl y aurait comme une incompatibilité entre l’essence phonique du langage et une grammairede la signification. Si un mot dans une phrase articulée a un sens, ce n’est pas à l’aide de règlesqui régiraient l’ordre des sons phonologiquement parlant. Cette idée est vieille et remonte auCratyle de Platon auquel, comme on sait, Gérard Genette a consacré tant d’attention. L’ordre,s’il en est un des sons (en l’occurrence ceux des caractères littéraux), ignore et repoussemême toute «  grammaire » du sens, digne de ce nom. Ainsi, si le philosophe s’occupe designification, il ne peut aller plus loin que les mots dans une phrase. Il n’y a rien à comprendrepour lui, plus bas et en dessous que ces séquences du langage. À la question : « La philosophiefranchirait-elle le mur du son  ? » on est tenté de dire non. C’est aussi, à mon avis, ce quiexplique que les philosophes écrivent mal. Ils manquent d’oreille.D’ailleurs, il n’y a pas beaucoup de place pour une «  philosophie du sonore  » chez lesphilosophes sauf quand elle s’attache à des données épistémologiques, ainsi relatives à laperception sonore, aux qualités sonores perçues, comme chez R. Casati et J. Dokic 13, maisaussi Stephen McAdams, avec Emmanuel Bigand dont la démarche emprunte à la psychologiecognitive (cf. Penser les sons, PUf, 1994). En revanche, un intérêt direct pour le son en lui-même semble requérir une forme d’intuitionfrisant le mystique, tout aussi peu compatible avec la philosophie. Je ne suis pas non plus sûreque la philosophie soit, comme dit Deleuze, un « véritable chant » autre que celui de la voix,et que, pour cette raison, elle suive le même sens du mouvement que celui de la musique 14. Jecrois plutôt que si l’on s’oriente vers le matériau, c’est la philosophie et ses concepts quidoivent lâcher du lest d’abord. Le son met le philosophe au pied du mur du matériau sonorequi résiste au concept (Adorno a raison sur cette résistance mais tort de croire le philosophecapable de la réduire en réduisant l’hétérogénéïté du matériau grâce à la dialectique entreforme et contenu).En effet, de quelque côté que l’on se tourne, la philosophie nous oblige à lâcher quelque

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chose : tantôt le matériau, tantôt la grammaire, mais pas les deux. Le philosophe n’aime pasl’informe, l’indétermination du sens… S’il pense le matériau, il le dématérialise, s’il réclameune grammaire, celle-ci rejette le matériau matériel.

* G. Scelsi, souvent qualifié de « compositeur et poète », né en 1905 à La Spezia, mort le 8août 1988 à Rome. v. Hommage à Scelsi à Salzbourg, en 2008.

NOTES

1. G. Granger, ch. 1 de Formes, opérations, objets, Paris, Vrin, 1994, sur « le complexe

de Pygmalion », texte écrit en 1947.

2. Ivan Wyschnegradsky, La Loi de la pansonorité, Éd. Contrechamps , 1996.

3. Cf. ce que j’ai écrit à Frédéric Vinot (LIRCES, Univ. Nice après le 26 nov. 2012) :

« Au livre xx, séminaire, que vous me signalez, je tombe dessus, et à la page dite que j’ai

gribouillée il y a longtemps. Car l’époque où je travaillais avec des psy (les cartels

constituants et les gens d’Essaim quand ça s’appelait Littoral) est un peu loin, mais je

le retrouve volontiers, car je l’ai intégré dans mon travail sur d’autres rivages que

j’explore avec la poésie. C’est mon passage personnel à autre chose par la psychanalyse.

L’habitation de lalangue ou cohabitation survient avec l’histoire du labyrinthe et le

montage du clapet. Suivant l’exemple de Bateson, Lacan revient en effet au “savoir” déjà

là (non communicationnel) de lalangue à la griffe (grippe du concept) duquel

l’expérimenteur s’accroche avec le rat, capable de “se dépasser” (dans la survie). Pour

moi, l’important est ce sur-passement par la survie dans l’ignorance de ce “savoir”

permettant à l’animal de réagir au “signe”. L’habitation ou cohabitation se révèle à ce

point de réaction au signe par le montage et on ne le saurait pas sinon. Jeu de mot sur

“apprendre” à-prendre donc. Motif très aristotélicien, c’est le point de départ de

l’hexis, ou “habitude”. Il faut avoir “commencé” pour qu’une manière d’être se fraie et

devienne une conduite qui de proche en proche se mue en action (morale ou autre). Aristote

explique ainsi la conduite morale (vertu qui naît par la pratique répétée avant qu’on

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sache ce qu’est le Bien – ceci contre Platon). Je pense que c’est très profond et qu’il

y a dans lalangue (qui n’existe pas évidemment) cette ressource. Elle ne “se connaît”

qu’à y puiser pour la mobiliser et la faire ainsi “être”. Je le ressens ainsi. Et pour

cela il faut y aller. Je l’appelle “réserve”, réserve d’une citerne par exemple, mais

c’est trop dire peut-être. J’ai écrit un texte sur “Ma cathédrale engloutie”, et renvoyé

à ce propos aussi à la citerne Tanaris dont Mâche, le compositeur, a fait une musique.

Mais c’est très personnel. Comme poète, on ne colle jamais tout à fait à une “leçon”. »

4. Phénoménologie de la perception, Paris, Éd. Gallimard, p. 447,

5. Proust, Contre Sainte-Beuve, cité en exergue par Deleuze dans Critique et clinique,

Paris, Éd. Minuit, 1993.

6. Phénoménologie de la perception, 3e partie, sur le Cogito.

7. Cf. W. von Humboldt, Sur le caractère national de la langue et autres écrits, édition

bilingue, prés. D. Thouard, Paris, Seuil, 2000, p. 93. Voir en particulier, dans ce

volume, le texte « Sur l’étude comparée des langues dans son rapport aux différentes

époques du développement du langage ». L’aspect de lutte est indiqué p. 91.

8. Voir « traduire », ibid., p. 24-25, (D. Thouard), ainsi de l’Agamemnon d’Eschyle dont

Humboldt entreprit la traduction, qu’il introduit par ces considérations en 1816.

9. Henri Meschonnic à propos de W. von Humboldt.

10. Hourya Sinaceur « Différents aspects du formalisme » in Le Formalisme en question, le

tournant des années 30, Vrin, 1998, coéd. Fr. Nef et Denis Vernant, p. 129.

11. Je renvoie ici à l’analyse de ce récit faite par Hermann Danuser dans « L’éloge de la folie

ou de la fonction de la non-compréhension » s-e. dans la musique, in Sens et signification en

musique, sous la dir. de Marta Grabocz, Paris, Éd. Hermann, 2007, p. 87. Ce point de vue se heurte

au paradigme de la compréhensibilité adornienne de l’œuvre dont l’autonomie passe par cette

condition de « sens ». Un exemple d’incompréhensibilité dans la musique « classique » que donne

H. Danuser est les mesures 113-119 du 2e mouvement de l’op. 111 de Beethoven, op. cit., p. 71. Un

autre exemple est celui de Ch. Ives « Le chant Nov. 2, 1920  » parmi les 114 « Songs», à propos de

l’élection présidentielle historique de cet automne-là (cf. H. Danuser, ibid., p. 76).

12. Vol. dirigé par Martha Grabosz, Paris, Éd. Hermann, 2007.

13. Auteurs d’un livre intitulé Philosophie du son, chez J. Chambon, 1994.

14. À Robert Maggiori dans Libération, 22 septembre 1988, cf. Pourparlers, Paris,

Éd. Minuit, p. 222.

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