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Risques Infos n°27 - Mai 2011 Institut des Risques Majeurs 13
Applicationde la réglementation parasismique
Grâce aux progrès scientifiques, cezonage initial a pu être affiné,
d’abord lors de l’élaboration de nou-velles normes parasismiques (dites PS82 ou PS 69/82), ensuite en 1992. Les règles parasismiques sont, par ex-cellence, des textes fréquemment révi-sés. Les progrès rapides en géniesismique, l’amélioration des méthodesd’évaluation del’aléa sismique,l’expérience sur lecomportement desouvrages, fournispar les régionssoumises à desséismes majeurs,obligent à cette re-mise en questionquasi permanente.
En 2010, un nouveau décret ((n° 2010-1254 du 22 octobre 2010) et un arrêtéont été adoptés en matière de règlesparasismiques (donnant lieu à l’applica-tion de la norme européen EC8) et sonten vigueur à ce jour en période de tran-sition avec les règles PS92. A cette oc-casion, les différentes zones sismiquesont été redéfinies.D’un décret à un autre ou du PS69 au
EC8, notre société raisonne avec unedémarche par à-coups. Les enseigne-ments tirés de l’observation et de l’ana-lyse des effets sismiques ont été etcontinuent d’être à la base des mesuresde prévention et notamment des codes
parasismiques. Cecaractère expéri-mental du génie pa-rasismique doit êtresouligné avec force,à une époque où lerecours à l’ordina-teur et la soumis-sion aveugle à sesprédictions tiennentsouvent lieu de reli-
gion. Il y a lieu de rappeler aussi quel’étude parasismique s’intéresse aussibien au site, aux fondations, à la formearchitecturale, à la structure porteuse,qu’aux éléments non structuraux et auxfaçades.Par ailleurs, il est important de noterque l’Eurocode 8 n’est pas autonome etque son application entraîne aussi l’ap-plication de la totalité des Eurocodes deEC0 à EC71. A remarquer que l’Eurocode
8-3 formalise la démarche d’évaluationparasismique des bâtiments existants.Pour l'application de la réglementationparasismique, une multitude d'acteursest concernée : services de l'État, col-lectivités, maîtres d'ouvrages publics ouprivés, maîtres d’œuvre, bureaux decontrôle, bureaux d’études, construc-teurs, ouvriers du BTP,... Pour connaîtrel’applicabilité de la réglementation nousavons choisi d’approcher uniquementles bureaux de contrôle.La France a décidé d’encadrer le pro-cessus de construction en imposantl’implication des bureaux de contrôle enamont, au moment de la dépose du per-mis de construire, pendant les phasesde projet et d’exécution et en aval, enfin de mission de contrôle.Soyons clairs : c’est très positif !La circulaire du 31 octobre 2000 relativeau contrôle technique des constructions
Victor Davidovici - Consultant Dynamique Concept
Les premières décisions en matière de préventionsismique datent de 1969lorsqu’ont été définies les normes de constructionparasismiques dites PS 69et le premier zonage sismique qui leur est associé.
Les règles parasismiques sont,
par excellence, des textes
fréquemmentrévisés.
[ [Exemple dʼune construction parasismique : lʼhôpital Pasteur de Nice
© Vinci-Construction
1 NNFF eenn 11999900,, EEuurrooccooddee 00 - Bases de calcul des structures ; NFFeenn 11999911,, EEuurrooccooddee 11 - Actions sur les structures ; En 19992, EEuurrooccooddee 22 - Calcul des structures en béton ; En 1993, Eurocode33 - Calcul des structures en acier ; EEnn 119994, Eurocode 4 - Calculdes structures mixtes acier-béton ; EEnn 11995, Eurocode 5 - Calculdes structures en bois ; EEnn 11999966,, EEuurocode 6 - Calcul des structures en maçonnerie ; EEnn 11999977, Eurocode 7 - Calcul géotechnique ; EEnn 11999988,, EEuurrooccooddee 88 - Calcul des structures pourleur résistance aux séismes.
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pour la prévention du risque sismique (BOdu ministère de l’Équipement, des Trans-ports et du Logement n° 21 du 25 novem-bre 2000) rappelle aux maîtres d’ouvragesqui construisent dans les zones de risquesismique leurs obligations au regard desarticles 40 et 41 de la loi n° 87-565 (plansde prévention des risques sismiques, rè-gles de construction). Elle leur recom-mande de confier à un contrôleurtechnique une mission de contrôle L + S2 étendue à la mission PS. Cette mission est ainsi définie : « Lesaléas techniques à la prévention desquels le contrôle technique contri-bue au titre de la mission PS sont ceuxqui, générateurs d'accidents corporels,découlent de défauts dans l'applicationdes dispositions réglementaires rela-tives à la protection parasismique dansles constructions achevées. La missionporte sur les ouvrages et élémentsd'équipement visés par les règles para-sismiques.». Ainsi, l’exécution d’unemission portant sur la solidité des ou-vrages et des éléments qui font corpsavec ces ouvrages ou d’une mission por-tant sur la sécurité des personnes qui neprendrait pas en compte la sécurité despersonnes en cas de séisme engage directement leur responsabilité pour lesdommages causés ultérieurement aux
personnes comme aux biens. Ayantconstaté en 2003-2004 l’impérieusenécessité du contrôle de la chaînedes intervenants, depuis la conceptionjusqu’aux chantiers où se réalise, infine, la construction parasismique, il aété émis le souhait que les bureaux decontrôle soient sai-sis du projet enmême temps queles Bureauxd’Etudes Tech-niques (BET).Somme toute, l’ar-rêté du 10 septem-bre 2007 imposeau ContrôleurTechnique de four-nir deux attesta-tions, l’une auniveau du permisde construire et l’autre à l’achèvementdes travaux, afin de confirmer que cesconsignes ont été suivies. Le cadre danslequel ces attestations sont à fournir estdéfini à l’article R111-38 du Code de laconstruction et de l’habitation aux ali-néas 4 et 5 par les contrôleurs agrééspar l’état. Il y a environ 25 sociétés decontrôle dont cinq les plus importantes.Nous avons interrogé les bureaux decon-trôle qui, en général, ont confirméque la mission de contrôle PS complé-tée par les deux attestations se passeplutôt bien.
Le problème principal est que cette réglementation n’est probablement passuffisamment connue par l’administra-tion qui demande systématiquement lesattestations en phase de conception, au
moment du dépôt de permis deconstruire (pièce PC12) même si la zonesismique ou la catégorie de bâtimentsne l'exigent pas. Au final cela permetd'impliquer le bureau de contrôle dès laphase du permis de construire.
LLee sseeccoonndd pprroo--bbllèèmmee eesstt qquuee lleeccoonnttrrôôlleeuurr tteecchh--nniiqquuee aa bbiieenn dduummaall àà oobbtteenniirr dduuMMaaîîttrree dd’’OOuuvvrraaggeettoouuss lleess ddooccuu--mmeennttss nnéécceessssaaii-- rreess àà ll’’ééttaabblliissssee--mmeenntt ddee ll’’aatttteess--ttaattiioonn aauu nniivveeaauudduu ppeerrmmiiss ddeeccoonnssttrruuiirree ((PPCC)) ::
■ le dossier de permis de construire,■ les éléments géotechniques faisant
apparaître la classe de sol et le sitesismique,
■ les informations permettant le clas-sement de l’ouvrage vis-à-vis de laréglementation parasismique appli-cable, les études de sol ne compren-nent généralement pas lesclassifications de ces sols, ce quiamène à demander des complé-ments.
■ une notice explicative portant sur lecheminement des charges verticaleset horizontales,
■ une notice explicative sur le principede fondations et de soutènement.
Dans le cas de projets d'importance, lesbureaux de contrôle (BC) sont en mesure
Le problème principal est que cette
réglementation n’est probablementpas suffisamment
connue par l’administration
[ [
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Exemple dʼune construction parasismique : lʼhôpital Pasteur de Nice © Vinci-Construction
2 Décret n°99-443 du 28 mai 1999 : Chapitre II : la mission decontrôle technique. Article 7 Les missions de base. - Les mis-sions de base sont au nombre de deux : (a) la mission L, portant surla solidité des ouvrages et des éléments d'équipement indisso-ciables ; (b) la mission S, portant sur les conditions de sécurité despersonnes dans les constructions. Ces missions de base sont dé-finies dans l'annexe A de la norme NFP 03-100. Dans le cas ducontrôle technique obligatoire, la mission minimale de contrôletechnique comprend la mission L et la mission S. Article 8 : A lamission L + S est ajoutée la mission complémentaire PS dans tousles cas où la réglementation prévoit la protection contre lesséismes.
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de réaliser un rapport correct au stade duPC car on dispose de pré-étude structureet de l'étude géotechnique. Dans le cadrede petits projets, les maîtres d'ouvragen'investissent pas dans l'étude de solavant le retour du PC, donc, quand les mai-ries le demandent, les BC éditent un rap-port au maître d'ouvrage avec denombreuses observations et fournissentl'attestation au stade PC avec la référenceà ce rapport.
En conclusion, comme pour tout, cela dé-pend des maîtres d'ouvrages et des pro-jets; il est même souvent plus compliquéd'avoir les éléments dans le cadre du mar-ché publics que celui du marché privé. Laqualité parasismique des projets dépendbeaucoup de la formation des architecteset bureaux d'études.
S’il n’ont pas l'habitude de projets enzone sismique ils conçoivent des projets« inadaptés » : structure poteau-poutre(transparence) au RDC pour parking etvoile à l’étage pour les habitations, mursne plombant pas dans les niveaux etdalles de répartition... dans ces cas-là, lesBC sont souvent obligés de revoir aveceux la conception globale de l'établisse-ment (ce qui n’est pas toujours simple àfaire entendre).
Ainsi, à travers l’enquête menée auprèsdes bureaux de contrôle on a mis en évi-dence, une fois de plus, de la nécessitéd’une formation adaptée aux besoins desacteurs du BTP. On a encore trop tendanceà dispenser des formations trop théoriquesconcentrées exclusivement sur l’Eurocode8 et sans vision sur la pratique de laconstruction parasismique.
Les formations d’architectes n’aborde-raient que de façon allusive les règles spé-cifiques de construction en zone sis-mique. Pour les bureaux d’études il y a ina-déquation entre la formation et lesréalités des chantiers. Les artisans, qu’ilsinterviennent en entreprise générale surles chantiers individuels, en sous-traitantssur les chantiers importants sontconscients de leurs faiblesses maisfont rarement appel aux formationsparasismiques proposées par leurspropres fédérations, « par manque detemps ».
Finalement, pour les contrôleurs, le pro-blème du contrôle parasismique n’est pasdans la fourniture des attestations ; ilexiste dans la com-plexité de la mis-sion PS qui vients’ajouter aux autresmissions dont lenombre a tendanceà augmenter cesdernières années(incendie, handica-pés, thermique,acoustique…).
Concernant les ho-noraires, il est diffi-cile de valoriser lesmissions PS mêmedans le cas de projets complexes (mêmelorsqu'il faut revoir la conception globale,analyser une note de calculs sis-mique, ...) : les honoraires des missionsn'étant pas toujours en rapport avec lacomplexité de l'opération.
L'attestation PS finale telle que définiepar la réglementation, bien qu’elle nesoit pas demandée d’une manièresystématique, est ressentie comme unpiège pour le contrôleur technique. Elle necouvre en principe que le cas où il ne sub-siste plus aucune observation liée à lamission PS.
Dans la réalité, cela conduit le contrôleurtechnique à être mis sous pression par lemaître d'ouvrage, même en cas d'anoma-lie constatée.
Ceci a conduit le COPREC3 à modifier l'at-testation finale, pour intégrer les deux cas(avec ou sans observation). Il ne s'agit pas
d'une attestationsur le respect desrègles parasis-miques mais sur laprise en compte,par le Maître d'ou-vrage, des avis dubureau de contrôlerelatifs au séisme.
Il est connu quepour une bonneconception parasis-mique des bâti-ments, les concep-teurs doivent pou-
voir intervenir le plus en amont possibledès les premières esquisses d’archi-tecte, tout en sachant que dans le do-maine parasismique on ne peut pas toutencadrer.
Ainsi l’intervention du bureau decontrôle, en amont, au moment dupermis de construire et en aval pourla levée des réserves sont des facteurs positifs pour la constructionparasismique.
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3 La COPREC est une organisation professionnelle qui fédère lesorganismes de prévention, d’inspection et contrôle tierce partieindépendante. Ces organismes agissent, en toute impartialité, pourgarantir la qualité et la conformité des produits, des installations,des constructions et des infrastructures en France.
Exemple dʼune construction parasismique : lʼhôpital Pasteur de Nice © Vinci-Construction
La qualité parasismique des projets
dépend beaucoupde la
formation des architectes
et bureaux d’études.
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