Décision n° 2021 – 818 DC - Conseil constitutionnel
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Décision n° 2021 – 818 DC Loi relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion Liste des contributions extérieures Services du Conseil constitutionnel - 2021 Plusieurs auteurs peuvent rédiger une contribution commune Contributions Date de réception Auteur(s) 03/05/2021 Mme le Professeur Wanda MASTOR 04/05/2021 M. Raphaël SCHELLENBERGER, Député du Haut-Rhin, Mme Anne-Laure BLIN, Députée de Maine-et-Loire, M. Jean-Luc BOURGEAUX, Député d’Ille-et-Vilaine, Mme Marine BRENIER, Députée des Alpes-Maritimes, MM. Fabrice BRUN, Député de l’Ardèche, Jacques CATTIN, Député du Haut-Rhin, Claude DE GANAY, Député du Loiret, Éric DIARD, Député des Bouches-du-Rhône, Julien DIVE, Député de l’Aisne, Yves HEMEDINGER, Député du Haut-Rhin, Patrick HETZEL, Député du Bas-Rhin, Mansour KAMARDINE, Député de Mayotte, Marc LE FUR, Député des Côtes-d’Armor, David LORION, Député de la Réunion, Emmanuel MAQUET, Député de la Somme, Philippe MEYER, Député du Bas-Rhin, Jean-François PARIGI, Député de Seine-et-Marne, Julien RAVIER, Député des Bouches-du-Rhône, Jean-Luc REITZER, Député du Haut-Rhin, Vincent ROLLAND, Député de la Savoie, Frédéric REISS, Député du Bas-Rhin, Guy TEISSIER, Député des Bouches-du-Rhône et Mme Laurence TRASTOUR-ISNART, Députée des Alpes-Maritimes. 05/05/2021 Association ESKOKIL 12/05/2021 M. Bertrand PANCHER, président du groupe Libertés et Territoires à l’Assemblée nationale
Loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Liste des contributions exteacuterieures
Services du Conseil constitutionnel - 2021
Plusieurs auteurs peuvent reacutediger une contribution commune
Contributions
Date de reacuteception
Auteur(s)
03052021 Mme le Professeur Wanda MASTOR
04052021 M Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin Mme Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire M Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine Mme Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes MM Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne et Mme Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
05052021 Association ESKOKIL
12052021 M Bertrand PANCHER preacutesident du groupe Liberteacutes et Territoires agrave lrsquoAssembleacutee nationale
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Contribution exteacuterieure agrave lrsquoappui de la conformiteacute agrave la Constitution
de la loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et agrave leur promotion
Longtemps consideacutereacutees comme strictement inconciliables avec le prin-
cipe de lrsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique les langues reacutegionales nrsquoappartenaient
qursquoau monde de la reacutesistance de quelques deacutefenseurs estimeacutes ou meacutepriseacutes1
Elles appartiennent depuis quelques anneacutees au monde du droit y compris du
droit constitutionnel mecircme si ce lien continue de nourrir drsquoimmenses malen-
tendus Car la reconnaissance la protection et la promotion des langues reacute-
gionales nrsquoentravent en rien le principe de lrsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique
Surtout en des peacuteriodes troubleacutees telles que nous avons deacutesormais pris lrsquoha-
bitude de vivre lrsquoarticle premier de la Constitution doit ecirctre sans cesse rap-
peleacute le serment drsquoune Reacutepublique laiumlque qui offre la mecircme eacuteducation pu-
blique agrave toutes et tous qui ne connaicirct qursquoun seul peuple et une seule langue
officielle Si notre Constitution reconnaicirct les laquo populations drsquooutre-mer raquo elle
rejette lrsquoacception des peuples au pluriel sous peine de diluer les valeurs de
la Nation franccedilaise Assureacutement les questions de seacuteparatisme de commu-
nautarisation du repli identitaire mettent agrave mal la laquo coheacutesion nationale raquo2
1 Voir Amane Gogorza et Wanda Mastor (sous la direction de) Les langues reacutegionales et la construction de lrsquoEacutetat LGDJ collection Grands colloques 2019 318 p 2 Conseil drsquoEacutetat ordonnance ndeg374508 du 9 janvier 2014 Ministre de lrsquointeacuterieur c Socieacuteteacute Les Productions de la Plume et M Dieudonneacute MrsquoBala MrsquoBala
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Mais lrsquoamalgame ne saurait ecirctre fait avec lrsquoadmission de certains particula-
rismes locaux qui font tout au contraire la richesse reacutepublicaine Laquelle
nrsquoest agrave aucun moment en contradiction avec le principe de lrsquoindivisibiliteacute de
la Reacutepublique comme le droit constitutionnel compareacute (constitutions et juris-
prudences des cours constitutionnelles) en apporte la preuve irreacutefutable
Les arguments qui consistent agrave rappeler -marteler- sans cesse que lrsquoarticle 75-
1 de la Constitution nrsquoa pas de porteacutee normative depuis la deacutecision ndeg 2011-
130 QPC du 20 mai 2011 du Conseil constitutionnel3 renvoient certaines dis-
positions de notre texte fondamental agrave une fonction deacuteclarative pour ne pas
dire deacutecorative Le fait que lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ne constitue pas
dans le cadre drsquoune proceacutedure de QPC un droit ou une liberteacute que la Consti-
tution garantit ne le vide pas pour autant de tout contenu Pour le dire au-
trement si ledit article ne peut ecirctre invoqueacute agrave lrsquoappui drsquoune QPC cette inter-
preacutetation contentieuse ne saurait le renvoyer au monde des principes pure-
ment deacuteclaratoires qui nrsquoont ce dit en passant pas leur place dans la norme
la plus eacuteleveacutee qui soit (sauf agrave offrir une nouvelle deacutefinition de la norme ce qui
srsquoavegravere compliqueacute)
Non invocable agrave lrsquoappui drsquoune QPC la disposition selon laquelle laquo les langues
reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo nrsquoen est pas moins une
adresse au leacutegislateur Crsquoest agrave cette adresse qui appelle et leacutegitime un deacuteve-
loppement leacutegislatif de la protection et la promotion des langues reacutegionales
que reacutepond la proposition de loi du deacuteputeacute Paul Molac
Il faut mecircme aller plus loin sur la voie de lrsquointerpreacutetation de lrsquoarticle 75-1 Non
seulement la loi deacutefeacutereacutee lui donne une reacutealiteacute mais encore creacutee-t-elle les con-
ditions mateacuterielles de son existence La loi dite laquo Molac raquo est conforme agrave la
3 Deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 Mme Ceacutecile L et autres [Langues reacutegionales] laquo
Consideacuterant quaux termes de larticle 75-1 de la Constitution Les langues reacutegionales ap-
partiennent au patrimoine de la France que cet article ninstitue pas un droit ou une liberteacute
que la Constitution garantit que sa meacuteconnaissance ne peut donc ecirctre invoqueacutee agrave lappui
dune question prioritaire de constitutionnaliteacute sur le fondement de larticle 61-1 de la Cons-titution (hellip) raquo (consideacuterant 3)
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Constitution et comble une lacune Ce nrsquoest pas son existence qui pose pro-
blegraveme mais bien son absence drsquoexistence Il appartient au leacutegislateur de mettre
en œuvre les dispositions de la Constitution afin qursquoelles ne se cantonnent
pas au monde du virtuel La loi sur les langues reacutegionales est lrsquoune des garan-
ties leacutegales de la Constitution
Tout texte transmis au controcircle du Conseil constitutionnel vigile du droit
jouit de la preacutesomption de constitutionnaliteacute Votre jurisprudence teacutemoigne
qursquoau nom de la primauteacute de la Constitution votre rocircle est de sauver la loi en
lrsquoeacutepurant de ses vices drsquoinconstitutionnaliteacute Si la deacutemocratie repreacutesentative
accepte la leacutegitimiteacute drsquoune censure drsquoun texte adopteacute par 925 repreacutesentants
de la Nation par neuf membres nommeacutes crsquoest au nom de ladite primauteacute de
la Constitution Laquelle nrsquoest pas violeacutee par la preacutesente loi soumise agrave votre
examen Il faut au preacutealable rappeler le contexte de lrsquoadoption de la loi qui ne
saurait se limiter au contexte parlementaire Lrsquoobjectif de la loi est de reacutepondre
agrave une adresse faite par le pouvoir constituant lui-mecircme conformeacutement agrave un
esprit plus geacuteneacuteral de protection et promotion des langues reacutegionales qui ir-
rigue conventions internationales et constitutions eacutetrangegraveres (I) Non seule-
ment la loi du 8 avril 2021 ne viole pas la Constitution mais encore met-elle
en œuvre certaines de ses dispositions (II)
I Le contexte de la loi relative agrave la protection patrimoniale des langues
reacutegionales et agrave leur promotion
Dans lrsquoobjectif sans doute drsquoassurer un climat plus serein qui doit preacutesider
agrave lrsquoinstruction et la deacutelibeacuteration la lettre de saisine des soixante deacuteputeacutes nrsquoest
jamais publieacutee par le Conseil constitutionnel en amont de la publication de la
deacutecision Ce nrsquoest ni le moment ni le lieu pour plaider pour ladite publication
mais force est de constater qursquoil nrsquoest pas tregraves sain que dans une deacutemocratie
les eacuteleacutements censeacutes ecirctre secrets laquo fuitent raquo dans la presse dans les couloirs et
autres ceacutenacles reacuteserveacutes agrave une infime partie des citoyens Deacuteposeacutee agrave la hacircte
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la lettre de saisine semble reacutedigeacutee de faccedilon deacuteconcertante La deacutefaillance for-
melle nrsquoenlegraveve pas dans lrsquoabsolu de la force aux arguments mais prouve en
lrsquoespegravece lrsquoextrecircme preacutecipitation dans laquelle les choses se sont deacuterouleacutees
Il est neacutecessaire avant de deacutevelopper les arguments au soutien de la confor-
miteacute agrave la Constitution de la loi et notamment de son article 6 de rappeler le
contexte de son adoption La proposition de loi du deacuteputeacute Paul Molac ayant
par ailleurs les faveurs de lrsquoopinion publique et le soutien de treize preacutesidents
de reacutegions4 srsquoinscrit dans un mouvement Celui de la deacutefense et la promotion
des langues reacutegionales lesquelles appartiennent depuis la reacutevision constitu-
tionnelle du 23 juillet 2008 au laquo patrimoine de la France raquo Ce mouvement
favorable agrave la protection et promotion des langues reacutegionales nrsquoest pas uni-
quement parlementaire il est aussi celui drsquoun ensemble plus vaste Celui de
notre propre Constitution (A) des engagements internationaux et de la grande
majoriteacute des constitutions des pays voisins (B) Ensemble qui permet de mieux
saisir le contexte parlementaire franccedilais de lrsquoadoption de la loi (C)
A Le contexte constitutionnel franccedilais
Lrsquoabsence de protection et de valorisation des langues reacutegionales est une
entrave au rayonnement de la France qui loin de srsquoeacutepuiser dans son caractegravere
indivisible que la loi deacutefeacutereacutee ne remet absolument pas en cause srsquoenrichit de
ses composantes Indivisibiliteacute ne signifie pas uniformiteacute Le constituant a lui-
mecircme choisi en 2003 de preacuteciser degraves lrsquoouverture de notre texte suprecircme que
lrsquoorganisation de notre Reacutepublique eacutetait laquo deacutecentraliseacutee raquo Il faut accepter tous
les contours conseacutequences de cette affirmation solennelle qui ne peut avoir
4 Communiqueacute de presse du 16 mars 2021 laquo Notre responsabiliteacute en tant que preacutesidents de
Reacutegion et de Collectiviteacute est de pouvoir garantir et promouvoir la vitaliteacute culturelle et patri-
moniale de nos territoires Cette proposition va dans le bon sens afin que vivent nos langues
que lrsquoUNESCO classe pour une grande majoriteacute drsquoentre elles en grand danger drsquoextinction
Crsquoest en ce sens que la reacutedaction de la proposition de loi dite Molac tel qursquoissue des travaux du Seacutenat va dans le bon sens et que nous appelons de nos vœux une adoption conforme par
les deacuteputeacutes de tous les bancs afin que ce texte puisse entrer en vigueur raquo httpsregions-
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que des applications laquo particuliegraveres raquo sur certaines parties de notre territoire
Les modifications successives de la Constitution ont progressivement em-
prunteacute la voie de la reconnaissance de ces implications toujours plus de dis-
positions deacuterogatoires de reconnaissances mecircme symboliques laquo drsquointeacuterecircts
particuliers raquo drsquolaquo adaptations neacutecessaires raquo pour ne citer qursquoelles jusqursquoagrave la
diffeacuterenciation des normes toujours inscrite dans lrsquoactuel projet de loi consti-
tutionnelle5 Si lrsquoon observe les discussions actuelles relatives au projet de loi
laquo 4D raquo ou la validation par le Conseil constitutionnel en avril dernier de la loi
organique relative agrave la simplification des expeacuterimentations susceptibles decirctre
meneacutees par les collectiviteacutes territoriales6 la voie de la reconnaissance du par-
ticularisme des territoires semble srsquoannoncer
En 2003 la Constitution a deacutecideacute une fois pour toutes que lrsquouniteacute nrsquoeacutetait pas
neacutecessairement lrsquouniformiteacute Parmi les richesses territoriales qui loin drsquoeacutegra-
tigner lrsquoimage drsquoun Eacutetat unitaire la renforce par sa capaciteacute agrave promouvoir la
diversiteacute au sein drsquoune Nation forte les langues reacutegionales occupent une place
particuliegravere Leur entreacutee remarqueacutee dans lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en
2008 nrsquoa eu pour le moment que des effets symboliques sur lesquels il y aura
lieu de revenir plus loin Sous la preacutesidence de Franccedilois Hollande le Parle-
ment fort de la volonteacute drsquoappliquer la 56egraveme promesse de campagne du candi-
dat devenu preacutesident a remis la question des langues reacutegionales sur le devant
de la scegravene institutionnelle Le rapport drsquoinformation ndeg489 de lrsquoAssembleacutee
nationale sur les implications de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales
et minoritaires7 est essentiellement descriptif mais teacutemoigne de la volonteacute
parlementaire de se saisir de nouveau de la question De leurs cocircteacutes les tri-
bunaux ordinaires ont eacutegalement eu lrsquooccasion ces derniegraveres anneacutees de se
pencher sur la question du bilinguisme notamment que ce soit en matiegravere
5 Projet de loi constitutionnelle pour un renouveau de la vie deacutemocratique enregistreacute agrave la Preacutesi-
dence de lrsquoAssembleacutee nationale le 29 aoucirct 2019 6 Deacutecision ndeg2021-816 DC du 15 avril 2021 Loi organique relative agrave la simplification des ex-peacuterimentations mises en œuvre sur le fondement du quatriegraveme alineacutea de larticle 72 de la Cons-
titution 7 M Jean-Jacques Urvoas Rapport drsquoinformation ndeg 489 du 12 deacutecembre 2012 sur les impli-
cations constitutionnelles drsquoune ratification par la France de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires
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de signaleacutetique routiegravere8 ou de lrsquoutilisation de la langue reacutegionale dans des
organes deacutelibeacuterants9
Agrave lrsquoeacutepoque de lrsquoentreacutee dans lrsquoarticle 75-1 (dont on relegravevera lrsquoeacuteloignement vo-
lontaire vis-agrave-vis de lrsquoarticle 2) de lrsquoeacuteleacutevation des langues reacutegionales au rang de
laquo patrimoine de la France raquo en 2008 certains espoirs avaient pu ecirctre leacutegitime-
ment nourris Cette preacutecision nrsquoest pas loin srsquoen faut le seacutesame pour la rati-
fication de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires10 qui
en lrsquoeacutetat actuel de la jurisprudence du Conseil constitutionnel comporte des
clauses jugeacutees contraires agrave la Constitution
B Le contexte international
Il faut ici distinguer deux niveaux Si le contexte international est favorable
agrave la protection et promotion des langues reacutegionales crsquoest en raison drsquoune part
des engagements internationaux que la France les ait ratifieacutes ou non drsquoautre
part de la plupart des constitutions des pays voisins qui accordent une place
speacutecifique aux langues reacutegionales
En 1999 faisant la synthegravese de ses deacutecisions anteacuterieures11 le
Conseil constitutionnel a estimeacute que la Charte europeacuteenne des langues reacutegio-
nales ou minoritaires ne pouvait au vu des principes drsquouniciteacute du peuple fran-
ccedilais drsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique et drsquoeacutegaliteacute des citoyens ecirctre ratifieacutee
laquo La Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires en ce
qursquoelle confegravere des droits speacutecifiques agrave des groupes de locuteurs de
8 Tribunal administratif de Montpellier 12 octobre 2010 Mouvement reacutepublicain de salut pu-blic ndeg0903420 Cour Administrative dAppel de Marseille 28 juin 2012 Commune de Ville-neuve-les-Maguelone ndeg 10MA04419 9 Conseil drsquoEacutetat 29 mars 2006 Haut-Commissaire de la Reacutepublique en Polyneacutesie Franccedilaise
ndeg282335 Rec 179 22 feacutevrier 2007 Socieacuteteacute immobiliegravere Caroline ndeg299649 Cour adminis-trative drsquoappel de Marseille 13 octobre 2011 Commune de Galeria ndeg10MA02330 10 Table ronde (Jean-Eacuteric Gicquel Ferdinand Meacutelin-Soucramanien Michel Verpeaux et Jean-
Marie Woehrling) organiseacutee par la commission des lois 29 novembre 2012 sur les implications
constitutionnelles de la question de la ratification de la Charte europeacuteenne des langues reacutegio-
nales ou minoritaires httpswwwassemblee-nationalefr14cr-cloi12-13c1213022asp 11 Deacutecisions ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 loi relative agrave lrsquoemploi de la langue franccedilaise et
ndeg96-373 DC du 9 avril 1996 loi organique portant statut drsquoautonomie de la Polyneacutesie fran-ccedilaise
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de territoires dans les-
quels ces langues sont pratiqueacutees porte atteinte aux principes constitu-
tionnels drsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique drsquoeacutegaliteacute devant la loi et drsquouniciteacute
du peuple franccedilais raquo12
Le Conseil se deacutefendant au passage de meacutepriser les langues reacutegionales parmi
les engagements souscrits par la France preacutecise-t-il laquo la plupart au demeu-
rant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France
en faveur des langues reacutegionales raquo
Parmi les arguments qui plaident en faveur drsquoune ratification figure celui de
lrsquoeacutevolution du contexte Honorer de la ratification un texte deacutejagrave signeacute ne se
pose aujourdrsquohui plus dans les mecircmes termes qursquoen 1999 La reacuteforme cons-
titutionnelle de 2003 - dont certains aspects ont eacuteteacute affineacutes en 2008 - rappe-
lons-le a consideacuterablement modifieacute la vision jacobine de notre Reacutepublique qui
reconnaicirct agrave preacutesent lrsquoexistence de laquo populations raquo en son sein les particula-
rismes locaux et les neacutecessiteacutes des adaptations normatives Mais la ratification
par la France de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires
qui avait eacuteteacute voteacutee le 28 janvier 2014 par lrsquoAssembleacutee nationale a eacuteteacute rejeteacutee
par le Seacutenat le 27 octobre 2015 Soulignons que ce rejet nrsquoempecircche pas la
force du contexte qui est au niveau europeacuteen largement favorable agrave la pro-
tection et promotion des langues reacutegionales La France a par ailleurs ratifieacute
drsquoautres conventions internationales qui permettent de poursuivre cet objec-
tif tel est par exemple le cas de la Convention pour la sauvegarde du patri-
moine culturel immateacuteriel de 2003 et de la Convention sur la protection et la
promotion de la diversiteacute des expressions culturelles de 2005 qui rappelle no-
tamment dans son preacuteambule laquo que la diversiteacute linguistique est un eacuteleacutement
fondamental de la diversiteacute culturelle raquo et reacuteaffirme laquo le rocircle fondamental que
joue lrsquoeacuteducation dans la protection et la promotion des expressions cultu-
relles raquo
12 Il srsquoagissait lagrave au demeurant drsquoune affirmation tregraves discutable car la lettre de la Charte
nrsquoimposait nullement mecircme si elle lrsquoencourageait que des droits speacutecifiques fussent reconnus agrave des groupes (voir Guy Carcassonne Rapport au Premier ministre sur la compatibiliteacute entre la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires et la Constitution septembre 1998
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Le droit compareacute apporte la preuve irreacutefutable de lrsquoabsence drsquoin-
compatibiliteacute entre le caractegravere indivisible voire unitaire drsquoune Reacutepublique
et la reconnaissance des langues reacutegionales en son sein13 Un tour drsquohorizon
des textes des constitutions europeacuteennes et des deacutecisions des cours constitu-
tionnelles permet de mettre en eacutevidence plusieurs eacuteleacutements significatifs Le
droit compareacute nous enseigne que juridiquement la question des langues srsquoap-
preacutehende agrave travers deux prismes premiegraverement celui de la forme de lrsquoEacutetat
Le lien entre uniteacute de lrsquoEacutetat et unilinguisme est aussi eacutevident que celui entre
Eacutetat composeacute (reacutegional ou feacutedeacuteral) et multilinguisme Deuxiegravemement celui des
droits des locuteurs Selon cette acception les langues reacutegionales sont tradi-
tionnellement associeacutees de maniegravere neacutegative au principe de non-discrimina-
tion de maniegravere positive aux droits linguistiques dont les locuteurs seraient
les beacuteneacuteficiaires14
En droit constitutionnel compareacute lrsquoameacutenagement de la pluraliteacute linguistique
diverge selon que les Eacutetats reconnaissent une pluri-officialiteacute sur lrsquoensemble
du territoire ou au seul niveau local La premiegravere hypothegravese est celle naturel-
lement choisie par la Belgique et la Suisse Eacutetats feacutedeacuteraux europeacuteens Selon
lrsquoarticle 4 de la Constitution helveacutetique laquo les langues nationales sont lrsquoalle-
mand le franccedilais lrsquoitalien et le romanche raquo De son cocircteacute la Constitution belge
eacutenonce que laquo la Belgique comprend trois communauteacutes la Communauteacute fran-
ccedilaise la Communauteacute flamande et la Communauteacute germanophone raquo et fait
eacutegalement reacutefeacuterence agrave laquo quatre reacutegions linguistiques la reacutegion de langue fran-
ccedilaise la reacutegion de langue neacuteerlandaise la reacutegion bilingue de Bruxelles-Capi-
tale et la reacutegion de langue allemande raquo En revanche lrsquoItalie et lrsquoEspagne ne
reconnaissent qursquoune seule langue officielle sur lrsquoensemble du territoire en
mecircme temps qursquoest ameacutenageacutee au niveau local la pluraliteacute linguistique Crsquoest
13 Voir Veacuteronique Bertile Langues reacutegionales ou minoritaires et Constitution France Espagne et Italie Bruylant Collection Droit public compareacute et europeacuteen 2008 516 p et Wanda Mas-
tor laquo Le statut constitutionnel des langues reacutegionales en droit compareacute De la reconnaissance agrave lrsquoindiffeacuterence raquo Glottopol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html 14 Voir le Rapport explicatif de de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minori-
taires Conseil de lrsquoEurope Seacuterie des Traiteacutes europeacuteens ndeg148 Strasbourg 5 novembre 1992 httpsrmcoeint16800cb620
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ce second type drsquoameacutenagement qui est ici inteacuteressant agrave observer les Eacutetats
reacutegionaux italien15 et espagnol16 eacutetant qualifieacutees par leurs constitutions drsquoin-
divisibles (et mecircme eacutegalement laquo un raquo pour lrsquoItalie alors que le mot a disparu
de la Constitution franccedilaise)
De maniegravere scheacutematique plusieurs postures essentielles vis-agrave-vis des langues
reacutegionales peuvent ecirctre observeacutees dans lrsquoEurope contemporaine La majoriteacute
des pays voisins confegraverent aux langues reacutegionales des statuts juridiques dif-
feacuterencieacutes Coexistent parfois une langue majoritaire et des langues minori-
taires qui beacuteneacuteficient de mesures protectrices Dans ce cas les langues reacutegio-
nales jouissent drsquoune reconnaissance mais seulement au niveau drsquoun terri-
toire identifieacute Pour le dire autrement elles ne concurrencent pas la langue
majoritaire au niveau national Il ne srsquoagit ni plus ni moins que lrsquoexpression
drsquoun droit agrave la diffeacuterence Drsquoun droit agrave la diffeacuterenciation pour reprendre un
terme qui a actuellement les faveurs du gouvernement franccedilais Drsquoautres pays
ont mis en place le bilinguisme officiel qui peut srsquoexprimer dans plusieurs
variantes Ce statut confegravere aux citoyens en principe du moins le choix duti-
liser lune ou lautre des langues officielles dans leurs rapports avec lEacutetat
Cette co-officialiteacute peut srsquoopeacuterer au niveau de tout le territoire (comme en Bel-
gique et en Suisse par exemple) ou seulement sur une partie de celui-ci
(comme en Espagne ou en Italie)
On pourrait objecter que la comparaison avec lrsquoEspagne et lrsquoItalie deux Eacutetats
reacutegionaux nrsquoest pas pertinente Or ces deux Eacutetats sont qualifieacutes de Royaume
ou Reacutepublique indivisibles par leurs constitutions respectives indivisibiliteacute
qui nrsquoempecircche pas la reconnaissance la protection et la promotion des
langues reacutegionales en leur sein Ainsi la Constitution espagnole consacre clai-
rement le multilinguisme dans le cadre de ses communauteacutes autonomes17
15 Article 5 de la Constitution de la Reacutepublique italienne de 1947 laquo La Reacutepublique une et indivisible reconnaicirct et favorise les autonomies locales (hellip) raquo 16 Article 2 de la Constitution du Royaume drsquoEspagne de 1978 laquo La Constitution est fondeacutee
sur luniteacute indissoluble de la nation espagnole patrie commune et indivisible de tous les Es-
pagnols Elle reconnaicirct et garantit le droit agrave lautonomie des nationaliteacutes et des reacutegions qui la
composent et la solidariteacute entre elles raquo 17 En vertu de lrsquoarticle 3 de la Constitution espagnole
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tout comme lrsquoItalie laquo Reacutepublique une et indivisible raquo laquo protegravege par des mesures
particuliegraveres les minoriteacutes linguistiques raquo (article 6)
Cette rapide eacutetude comparative permet de mettre en eacutevidence la singulariteacute de
la France au sein drsquoune Europe qui srsquoenorgueillit de se deacutefinir agrave travers la
richesse de sa diversiteacute Mais notamment depuis la loi constitutionnelle de
2008 le leacutegislateur franccedilais a agi dans le sens drsquoune protection et promotion
des langues reacutegionales la loi du 8 avril 2021 srsquoinscrivant dans ce processus
logique et coheacuterent
C Le contexte parlementaire franccedilais
La loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit donc dans un mouvement leacutegislatif reacutepondant agrave
lrsquoadresse du pouvoir constituant Laquelle concerne aussi le pouvoir exeacutecutif
La politique du ministegravere de lrsquoeacuteducation pour la deacutetermination du nombre de
places pour lrsquoagreacutegation et le CAPES des langues reacutegionales devrait aller de
pair avec les lois qui mettent en œuvre lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Ainsi
pour la langue basque il nrsquoy a pas eu de concours drsquoagreacutegation externe depuis
2018 anneacutee 2021 comprise il y a un seul poste pour lrsquoagreacutegation interne en
2021 2 pour le CAPES externe en 2021 et 2 pour le CAPES interne Pour la
langue bretonne et pour ne citer que lrsquoanneacutee en cours il y a un poste agrave lrsquoagreacute-
gation externe pas de concours pour lrsquoagreacutegation interne deux postes pour
le CAPES externe et 2 pour le CAPES interne Pour la langue corse il nrsquoy a pas
de concours cette anneacutee pour lrsquoagreacutegation externe et interne deux pour le
CAPES externe et aucun pour le CAPES interne Pour lrsquooccitan toujours pour
2021 il y a un poste pour lrsquoagreacutegation externe pas de concours pour lrsquoagreacute-
gation interne quatre pour le CAPES externe et un pour le CAPES interne
Ceci eacutetant juste preacuteciseacute il faut agrave preacutesent se concentrer sur lrsquoaction parlemen-
taire de mise en œuvre des dispositions de la Constitution
laquo 1 Le castillan est la langue espagnole officielle de lEacutetat Tous les Espagnols ont le devoir de
le connaicirctre et le droit de lutiliser
2 Les autres langues espagnoles sont aussi officielles dans leurs communauteacutes autonomes
respectives conformeacutement agrave leurs statuts
3 La richesse de la diversiteacute linguistique de lEspagne est un patrimoine culturel qui fait lobjet dun respect et dune protection speacuteciales raquo
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Videacutee drsquoune large part de sa substance en premiegravere lecture par la commission
des affaires culturelles et de leacuteducation de lrsquoAssembleacutee nationale la proposi-
tion de loi du deacuteputeacute Molac a ensuite retrouveacute ses objectifs initiaux gracircce agrave la
proceacutedure parlementaire qui donne agrave notre reacutegime repreacutesentatif tout son
sens discussions en commissions deacutebats en seacuteances publiques navette
amendements multiples pour parvenir agrave une adoption deacutefinitive agrave une majo-
riteacute non importante mais eacutecrasante des voix Agrave quelques heures de la pro-
mulgation de la loi par le Preacutesident de la Reacutepublique une partie de cette mecircme
majoriteacute a neacuteanmoins saisi le Conseil constitutionnel dans le cadre de lrsquoarticle
61 alineacutea 2 de la Constitution
Deacutepocirct de la proposition de loi
Deacuteposeacutee le 30 deacutecembre 2019 par le deacuteputeacute Paul Molac et autres deacuteputeacutes18
la proposition de loi apporte des mesures de protection et de promotion des
langues reacutegionales dans trois domaines le patrimoine lrsquoenseignement les
services publics via la signaleacutetique et les actes drsquoeacutetat civil Elle a eacuteteacute adopteacutee
le 8 avril 2021 par 247 voix pour 76 voix contre et 19 abstentions au terme
de la proceacutedure ci-dessous rappeleacutee
Renvoi agrave la commission des affaires culturelles et de leacuteducation
La proposition de loi a eacuteteacute renvoyeacutee agrave la commission des affaires cultu-
relles et de leacuteducation agrave deacutefaut de constitution drsquoune commission speacuteciale
dans les deacutelais preacutevus par les articles 30 et 31 du Regraveglement Le rapport fait
au nom de la commission par le deacuteputeacute Paul Molac nommeacute par elle a eacuteteacute
enregistreacute agrave la preacutesidence de lrsquoAssembleacutee nationale le 5 feacutevrier 2020 Preacutesenteacute
18 Sylvain BRIAL Jean-Feacutelix ACQUAVIVA Michel CASTELLANI Jean-Michel CLEacuteMENT
Paul-Andreacute COLOMBANI Charles de COURSON Jeanine DUBIEacute Freacutedeacuterique DUMAS Mrsquojid
EL GUERRAB Olivier FALORNI Yannick FAVENNEC BECOT Sandrine JOSSO Franccedilois-Mi-
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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comme un moyen de deacutefendre les laquo langues de France raquo19 en danger et srsquoap-
puyant sur lrsquoexistant qui est la marque drsquoune eacutevolution rappeleacutee plus loin (II)
le texte entend laquo aller plus loin raquo en rehaussant la protection lrsquoaccessibiliteacute et
la visibiliteacute des langues reacutegionales dans les trois domaines preacuteciteacutes
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle premier re-
latif au patrimoine Ce dernier preacutecise en compleacutetant ainsi lrsquoar-
ticle L 1 du code du patrimoine que la conservation et la con-
naissance du patrimoine immateacuteriel sont drsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et que
les langues reacutegionales font partie de ce patrimoine
o La commission a adopteacute sans modifications lrsquoarticle 2 qui pro-
pose drsquoinclure parmi les treacutesors nationaux les biens preacutesentant
un inteacuterecirct majeur pour la connaissance des langues franccedilaise et
reacutegionales Le texte preacutevoit en effet outre pour les langues reacutegio-
nales des mesures de protection de notre patrimoine linguistique
dans une deacutemarche globale
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 3 qui disposait que des con-
ventions passeacutees entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pouvaient preacutevoir que
la langue reacutegionale est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de
lrsquohoraire normal des enseignements (des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires des collegraveges et des lyceacutees des territoires concerneacutes) Il
ne srsquoagissait pourtant que drsquoeacutetendre une regravegle deacutejagrave applicable en
Corse pour lrsquoenseignement de la langue corse lrsquoarticle L 312-11-
1 du code de lrsquoeacuteducation introduit par la loi ndeg 2002-92 du
22 janvier 2002 relative agrave la Corse dispose en effet que la langue
corse est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de lrsquohoraire normal
des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires de Corse Le Conseil cons-
titutionnel nrsquoa pas censureacute cette disposition tant que lrsquoenseigne-
ment eacutetait entendu comme ne revecirctant pas laquo un caractegravere obliga-
toire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo (deacutecision ndeg2001-
454 DC du 17 janvier 2002)
19 Sur cette notion de laquo langues de France raquo voir Les langues de France vingt ans apregraves Glot-topol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html
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o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 4 qui preacutevoyait que lenseigne-
ment bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale pouvait se reacuteali-
ser sous forme immersive laquo dans le respect des objectifs de maicirc-
trise des deux langues agrave chaque niveau denseignement raquo
o La commission a supprimeacute les articles 5 et 6 de la proposition de
loi Le premier manifestait la volonteacute drsquointroduire au sein drsquoun
nouvel article L 151-4-1 du code de lrsquoeacuteducation une deacuterogation
au principe drsquointerdiction de financement des deacutepenses drsquoinves-
tissement des eacutecoles priveacutees par les collectiviteacutes publiques en fa-
veur de lrsquoenseignement bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale
(article 5 de la proposition de loi) Le second eacutetendait la mecircme
deacuterogation au principe drsquointerdiction de financement des deacute-
penses drsquoinvestissement des collegraveges et lyceacutees par les collectiviteacutes
publiques
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 7 qui preacutevoyait drsquoeacutelargir les
cas dans lesquels existe un droit agrave inscrire son enfant dans une
eacutecole drsquoune autre commune afin qursquoil puisse suivre un enseigne-
ment de langue reacutegionale Inscription qui entraicircnait eacutegalement la
prise en charge du forfait scolaire par la commune de reacutesidence
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle 8 qui a pour
objet de renforcer la place et lrsquousage des langues reacutegionales dans
la vie publique en facilitant la traduction en langue reacutegionale des
inscriptions et signaleacutetiques apposeacutees sur les bacirctiments publics
les voies publiques de circulation et les voies navigables ainsi que
sur les principaux supports de communication institutionnelle
des services publics
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 9 qui avait pour objet la pos-
sibiliteacute pour les services publics drsquoeacutetat civil drsquoutiliser dans les
actes drsquoeacutetat civil qursquoils produisent les signes diacritiques des
langues reacutegionales en usage sur le territoire
o Enfin la commission a eacutegalement supprimeacute lrsquoarticle 10 qui preacute-
voyait un gage pour compenser les charges eacuteventuelles creacuteeacutees par
les dispositions de la proposition de loi
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Crsquoest donc un texte largement laquo eacutepureacute raquo par rapport agrave sa version initiale qui a
eacuteteacute soumis agrave la discussion en seacuteance publique en premiegravere lecture agrave lrsquoAssem-
bleacutee nationale Le porteur de la proposition va naturellement utiliser toutes
les potentialiteacutes offertes par la Constitution pour tenter de revenir par le biais
des amendements agrave son esprit initial
Discussion du texte nordm2654 adopteacute par la commission sur la proposition
de loi de M Paul Molac agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion (2548)
85 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes permettant de revenir sur peu de points
cependant agrave lrsquoobjectif initial de la proposition de loi Ainsi lrsquoamendement ndeg64
deacuteposeacute le 10 feacutevrier 2020 par le deacuteputeacute et rapporteur Paul Molac a permis de
rectifier lrsquoaspect purement deacuteclaratoire de lrsquoarticle premier auquel avait conclu
la commission lrsquoamendement ndeg69 deacuteposeacute le mecircme jour par Paul Molac eacutega-
lement permet lrsquoautorisation dans les actes drsquoeacutetat civil des signes diacritiques
des langues reacutegionales lrsquoamendement ndeg80 toujours deacuteposeacute par Paul Molac
modifie la loi Toubon (article 3 du texte de loi deacutefinitif) Mais agrave ce stade de la
discussion parlementaire le texte eacutetait encore dans une version tregraves eacuteloigneacutee
de sa mouture premiegravere
Adoption le 13 feacutevrier 2020 de la laquo petite loi raquo nordm408 par lAssem-
bleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion
Transmission au Seacutenat de la proposition de loi ndeg321 le 14 feacutevrier
2020
o Travaux en commission La commission de la culture de lrsquoeacuteduca-
tion et de la communication a deacutesigneacute Mme Monique de Marco
rapporteure sur la proposition de loi ndeg321 (2019-2020) adopteacutee
par lAssembleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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des langues reacutegionales et agrave leur promotion Commenccedilant par deacute-
clarer que laquo la question de la promotion des langues reacutegionales
deacutepasse les clivages politiques raquo Monique de Marco a proposeacute en
commission dadopter le texte conforme tout en avouant que des
dispositifs leacutegislatifs laquo plus ambitieux pourraient mieux assurer la
promotion des langues reacutegionales raquo Au cours des discussions le
regret de lrsquoabsence de la question de lrsquoenseignement a eacuteteacute exprimeacute
regret qui concerne en reacutealiteacute non la proposition de loi initiale
mais le texte de la commission de lrsquoAssembleacutee nationale laquo La pro-
position de loi de Paul Molac est la bienvenue parce quelle rap-
pelle agrave lEacutetat un certain nombre de ses obligations en ce quelle
preacutevoit un cadrage de la loi Toubon et quelle seacutecurise la place
des langues dans lespace public En revanche nous avons tous
eacuteteacute surpris par labsence totale de reacutefeacuterence agrave lEacuteducation natio-
nale Nous avons donc fait des recherches qui ont montreacute que les
deacuteputeacutes de la majoriteacute preacutesidentielle certainement agrave lappel du
ministre de leacuteducation nationale avaient systeacutematiquement sup-
primeacute tous les articles concernant lenseignement Nous nous re-
trouvons donc avec une magnifique proposition de loi sur les
langues reacutegionales qui ne dit pas un mot de lenseignement
comme sil pouvait y avoir une politique linguistique en faveur des
langues reacutegionales qui ne passe pas par lenseignement raquo Et le
seacutenateur Max Brisson drsquoen appeler agrave la reacuteinsertion des disposi-
tions sur lrsquoenseignement laquo Ma chegravere collegravegue vous avez proposeacute
un vote conforme mais jespegravere que nous ferons preuve dimagi-
nation dans lheacutemicycle pour deacuteposer quelques amendements qui
rappelleront au Gouvernement quil ny a pas de politique linguis-
tique qui ne sappuie sur leacuteducation Sinon cest de lenfu-
mage raquo20
20 Comptes-rendus de la commission de la culture de lrsquoeacuteducation et de la communication
seacuteance du 2 deacutecembre 2020 httpwwwsenatfrcompte-rendu-commis-
sions20201130culturehtmltoc5
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La rapporteure confirme que laquo lrsquoamputation raquo est le fait des deacutepu-
teacutes et tout en srsquoavouant prudente pousse indirectement ses col-
legravegues seacutenateurs agrave user du droit drsquoamendement laquo Nous venons
dentendre un veacuteritable plaidoyer en faveur des langues reacutegio-
nales Mecircme si cette proposition de loi ne donne pas entiegravere satis-
faction car elle a eacuteteacute largement amputeacutee par lAssembleacutee natio-
nale je preacutefegravere my tenir dans un premier temps par prudence
Et libres agrave vous de deacuteposer des amendements raquo
Aucun amendement nayant eacuteteacute deacuteposeacute en commission le texte
qui en eacutetait issu ne comportait toujours pas de dispositions rela-
tives agrave lenseignement
o Seacuteance publique Vingt amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes notam-
ment celui (deacuteposeacute agrave lidentique par des seacutenateurs issus de six
groupes diffeacuterents) preacutevoyant drsquoinseacuterer agrave lrsquoarticle L 442-5-1 du
code de lrsquoeacuteducation un alineacutea ainsi reacutedigeacute laquo La participation fi-
nanciegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un
enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle
L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence
et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune
autre commune agrave la condition que la commune de reacutesidence ne
dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegio-
nale raquo
Sans surprise lrsquoavis du Gouvernement exprimeacute par le ministre
Jean-Michel Blanquer fut deacutefavorable regrettant au passage
laquo drsquoecirctre sans cesse obligeacute drsquooccuper la position du jacobin reacutetif
sur la deacutefensive alors mecircme que nous avons une politique de pro-
motion des langues reacutegionales Simplement agrave certains moments
ndash par exemple avec la rupture de lrsquoeacutequilibre entre enseignement
public et enseignement priveacute ou avec la creacuteation drsquoune obligation
suppleacutementaire pour les communes ndash les propositions vont trop
loin et cela conduit agrave me placer face aux geacuteneacuterositeacutes diverses
dans la position deacutesagreacuteable du gardien des principes ou dans
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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celle du gardien de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral En effet derriegravere ces deacutebats
se pose la question de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et de la posteacuteriteacute de la loi
Carle car vous risquez de creacuteer un deacuteseacutequilibre alors que cette loi
repreacutesentait un point drsquoeacutequilibre raquo21
o Adoption du texte ndeg32 modifieacute par le Seacutenat le 10 deacutecembre 2020
Le Seacutenat a adopteacute trois articles additionnels (2 ter 2 quater et
2 quinquies) qui rejoignent les positions du deacuteputeacute Paul Molac et
reacutetablit lrsquoarticle 3 (modifieacute) de la proposition de loi qui avait eacuteteacute
supprimeacute en premiegravere lecture agrave lrsquoAssembleacutee nationale
Deuxiegraveme lecture
o Rapport sur la proposition de loi modifieacutee par le Seacutenat relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promo-
tion (ndeg3658) ndeg4035 Sur les six articles supprimeacutes agrave lrsquoAssem-
bleacutee lrsquoarticle 3 a eacuteteacute reacutetabli au Seacutenat qui a par ailleurs adopteacute
trois articles additionnels (2 ter 2 quater et 2 quinquies) Lrsquoen-
semble eacutetant conforme agrave lrsquoesprit de la proposition de loi initiale le
rapporteur souhaite que lrsquoAssembleacutee nationale adopte en deu-
xiegraveme lecture un texte identique agrave celui voteacute par le Seacutenat pour
les quatre articles restant en discussion et nrsquoa donc pas preacutesenteacute
drsquoamendements Mais lrsquoarticle 2 quinquies (article 6 du texte deacute-
finitif) ayant eacuteteacute supprimeacute en commission 16 amendements deacute-
poseacutes agrave lrsquoidentique par 115 deacuteputeacutes membres de huit diffeacuterents
groupes parlementaires ont permis de le reacuteintroduire en seacuteance
o Discussion en seacuteance publique le 8 avril 2021 au cours de la-
quelle 262 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes
o Adoption deacutefinitive le 8 avril 2021 en deuxiegraveme lecture de la
proposition de loi TA nordm591 relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
21 Compte rendu inteacutegral des deacutebats Seacuteance du 10 deacutecembre 2020 httpwwwse-natfrseancess202012s20201210s20201210007htmlsection708
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Saisine du Conseil constitutionnel du 22 avril 2021 par au moins
soixante deacuteputeacutes en application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitu-
tion
Soit un jour avant que nrsquoexpire le deacutelai de saisine du Conseil constitu-
tionnel la promulgation de la loi par le preacutesident de la Reacutepublique devant
intervenir dans les 15 jours de lrsquoadoption deacutefinitive La saisine du Conseil
constitutionnel est un acte non grave mais solennel qui perturbe le temps
leacutegislatif ne serait-ce que pour cette raison elle meacuterite un soin particulier
Soin envers lrsquoinstitution agrave laquelle elle srsquoadresse et agrave qui elle impose des
charges suppleacutementaires soin envers la Constitution qursquoelle entend pro-
teacuteger La lettre de saisine ou du moins la version qui a circuleacute manifeste-
ment reacutedigeacutee agrave la hacircte nrsquoest pas agrave la hauteur du seacuterieux qursquoexige de ma-
niegravere impeacuterieuse cette deacutemarche Une lettre de saisine ne saurait se limiter
agrave invoquer en tregraves peu de lignes la violation de laquo principes constitutionnels raquo
sans que ceux-ci ne soient deacutetailleacutes ni mecircme indiqueacutes Le seul article mis
en cause est lrsquoarticle 6 de la loi qui modifie lrsquoarticle L 442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation
II Discussion de la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la loi
relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Les deacuteputeacutes auteurs de la saisine demandent au Conseil constitutionnel la
censure de lrsquoarticle 6 de la loi
laquo Les sixiegraveme et septiegraveme alineacuteas de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacutedu-
cation sont remplaceacutes par un alineacutea ainsi reacutedigeacute
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacuteta-
blissements priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispen-
sant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L
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312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacuteta-
blissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune
agrave la condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dis-
pensant un enseignement de langue reacutegionale raquo
Une commune dont aucune eacutecole ne propose denseignement de langue reacutegio-
nale devrait donc participer aux frais de scolarisation des enfants domicilieacutes
sur son territoire qui suivent un tel enseignement dans un eacutetablissement situeacute
sur une autre commune Le dispositif concerne les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat drsquoassociation qui sont dans les faits majoritaire-
ment associatifs et laiumlques Cet enseignement peut aussi concerner les eacuteta-
blissements confessionnels mais il faut drsquoembleacutee preacuteciser que comme lrsquoa jugeacute
le Conseil constitutionnel dans son examen de la loi dite laquo Carle raquo le principe
de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute pour le leacutegislateur de preacutevoir la
participation des collectiviteacutes publiques au financement du fonctionnement
des eacutetablissements denseignement priveacute sous contrat dassociation
laquo Consideacuterant quil reacutesulte des regravegles ou principes agrave valeur constitution-
nelle (hellip) que le principe de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute
pour le leacutegislateur de preacutevoir sous reacuteserve de fonder son appreacuteciation
sur des critegraveres objectifs et rationnels la participation des collectiviteacutes
publiques au financement du fonctionnement des eacutetablissements den-
seignement priveacutes sous contrat dassociation selon la nature et limpor-
tance de leur contribution agrave laccomplissement de missions denseigne-
ment raquo (deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 cons 6)
Lrsquoinstauration du laquo forfait scolaire communal raquo ne poursuit pas un objectif de
sanction financiegravere des communes deacutemunies doffre en langue reacutegionale mais
celui de les inciter agrave en proposer Drsquoailleurs lrsquoarticle premier de la loi deacutefeacutereacutee
souligne que laquo LrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales concourent agrave lrsquoenseigne-
ment agrave la diffusion et agrave la promotion de ces langues raquo Comme preacuteciseacute plus
loin les maires sont dispenseacutes du paiement drsquoun tel forfait degraves lors qursquoun
enseignement drsquoune langue reacutegionale y compris au titre drsquoune simple initia-
tion est proposeacute dans leur commune
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Il faut souligner que les articles relatifs agrave lrsquoenseignement ont eacuteteacute introduits par
les seacutenateurs Plus exactement ces derniers ont reacuteintroduit la disposition qui
autorise la conclusion de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pour eacutetendre
lrsquooffre drsquoenseignement en langue reacutegionale aux eacutetablissements publics dans le
cadre horaire normal sous des formes speacutecifiques et inseacutereacute trois articles un
premier autorise lrsquoenseignement dit laquo immersif raquo en langue reacutegionale un deu-
xiegraveme le forfait scolaire communal dont il est ici question un troisiegraveme est
relatif agrave lenseignement des langues reacutegionales agrave Mayotte territoire qui du fait
de sa deacutepartementalisation reacutecente ne pouvait jusqualors pas beacuteneacuteficier des
possibiliteacutes offertes aux autres deacutepartements concernant lenseignement de
ces langues
Trois remarques doivent ecirctre faites sur lrsquoinsertion relative agrave lrsquoenseignement des
langues reacutegionales lors des horaires normaux Premiegraverement cette disposition
existe deacutejagrave pour la Collectiviteacute de Corse deuxiegravemement cet enseignement
doit se faire moyennant un accord entre lrsquoEacutetat et les reacutegions (laquo dans le cadre
de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions la collectiviteacute de Corse la Collectiviteacute
europeacuteenne drsquoAlsace ou les collectiviteacutes territoriales reacutegies par lrsquoarticle 73 de
la Constitution raquo) troisiegravemement il srsquoagit drsquoune option facultative qursquoin fine
les familles deacutecident ou non de prendre
En reacutesumeacute et conclusion la disposition de lrsquoarticle 3
1 Existe deacutejagrave pour une collectiviteacute en lrsquooccurrence la collectiviteacute de Corse
2 Est strictement encadreacutee (existence drsquoun accord entre lrsquoEacutetat et les reacute-
gions)
3 Est conforme agrave la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le ca-
ractegravere facultatif de lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale Dans sa deacute-
cision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi relative agrave la Corse le
Conseil constitutionnel a fixeacute le cadre de lrsquoenseignement drsquoune langue
reacutegionale dans le cadre de lrsquohoraire normal en consideacuterant que laquo si lrsquoen-
seignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquohoraire nor-
mal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir pour
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les ensei-
gnants qursquoil ne saurait non plus avoir pour effet de soustraire les eacutelegraveves
aux droits et obligations applicables agrave lrsquoensemble des usagers des eacuteta-
blissements qui assurent le service public de lrsquoenseignement ou sont
associeacutes agrave celui‑ci Consideacuterant qursquoil reacutesulte de ce qui preacutecegravede que sous
reacuteserve que lrsquoenseignement de la langue corse revecircte tant dans son prin-
cipe que dans ses modaliteacutes de mise en œuvre un caractegravere facultatif
[cette disposition] nrsquoest contraire ni au principe drsquoeacutegaliteacute ni agrave aucun
autre principe ou regravegle de valeur constitutionnelle raquo (cons 24 et 25)
La loi du 8 avril 2021 ne propose pas autre chose et srsquoinscrit en tous
points sur cette ligne deacutejagrave jugeacutee par le Conseil constitutionnel
Lrsquoarticle 6 srsquoinsegravere de maniegravere logique et coheacuterente dans lrsquoensemble des articles
de la loi relative agrave lrsquoenseignement Avant drsquoen examiner dans les deacutetails la
conformiteacute agrave la Constitution il faut souligner que le Seacutenat a deacutejagrave voteacute le prin-
cipe de ce forfait scolaire communal agrave deux reprises
1 Il lrsquoa drsquoabord inseacutereacute dans le projet de loi pour une eacutecole de la confiance
en premiegravere lecture Crsquoest la commission mixte paritaire qui a ajouteacute les
mots laquo contribution volontaire raquo ocirctant au forfait son caractegravere obliga-
toire22
2 Il a reacuteaffirmeacute sa position lors de lrsquoexamen de la proposition de loi ici
discuteacutee supprimant les mots laquo contribution volontaire raquo de la loi en vi-
gueur
Agrave cet argument deacutemocratique respectueux du bicameacuteralisme et rappelant que
le Seacutenat laquo assure la repreacutesentation des collectiviteacutes territoriales de la Reacutepu-
22 Loi ndeg2019-791 du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance JORF ndeg0174 du 28 juillet
2019
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Primo cet article est en coheacuterence avec la leacutegislation existante en matiegravere drsquoen-
seignement des langues reacutegionales agrave lrsquoeacutecole confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute
juridique (A) Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contrevien-
nent pas au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des langues
reacutegionales affirmeacute par le Conseil constitutionnel (B) Tertio la loi ne porte pas
atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur une commune une nouvelle
charge (C) Quarto elle ne viole pas non plus en conseacutequence le principe de
libre administration des collectiviteacutes territoriales (D)
A Forfait scolaire communal et respect de lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique
Cette exigence bien que non explicitement qualifieacutee de principe consti-
tutionnel par le Conseil constitutionnel se rattache notamment agrave la notion de
laquo garantie des droits raquo inscrite agrave lrsquoarticle 16 de la Deacuteclaration de 1789 laquo Toute
socieacuteteacute dans laquelle la garantie des droits nrsquoest pas assureacutee ni la seacuteparation
des pouvoirs deacutetermineacutee nrsquoa point de constitution raquo Deacutecoulant de lrsquoarticle 34
de la Constitution la clarteacute de la loi est un eacuteleacutement essentiel de la seacutecuriteacute
juridique agrave laquelle la jurisprudence du Conseil constitutionnel a offert corps
et protection Aussi le principe de laccessibiliteacute et de lintelligibiliteacute de la loi a-
t-il eacuteteacute eacuterigeacute en objectif de valeur constitutionnelle (deacutecision ndeg99-421 DC du
16 deacutecembre 1999)
Mecircme si les principes de clarteacute drsquoaccessibiliteacute et drsquointelligibiliteacute de la loi per-
mettent avant tout drsquoimposer au leacutegislateur laquo drsquoadopter des dispositions suffi-
samment preacutecises et des formules non eacutequivoques afin de preacutemunir les sujets
de droit contre une interpreacutetation contraire agrave la Constitution ou contre le
risque drsquoarbitraire raquo (deacutecision ndeg2004-500 DC du 29 juillet 2004 cons 13) ils
concourent aussi agrave offrir aux citoyens la seacutecuriteacute juridique neacutee drsquoune cons-
truction drsquoensemble coheacuterente et sans rupture Laquelle se base depuis 2008
sur une disposition claire et sans ambiguiumlteacute de la Constitution laquo Les langues
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reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo (75-1) Elle est une in-
vitation aux repreacutesentants de leacutegifeacuterer pour proteacuteger et promouvoir lesdites
langues et la loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit dans la continuiteacute de ce qursquoils ont fait depuis
2008 notamment La coheacuterence est lrsquoune des artegraveres essentielles de lrsquoexigence
de seacutecuriteacute juridique qui impregravegne la jurisprudence du Conseil constitution-
nelle comme celle du Conseil drsquoEacutetat et de la Cour de cassation Sans ecirctre ex-
plicitement eacutenonceacutee par le Conseil constitutionnel lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique est laquo efficiente raquo23 et est au cœur des preacuteoccupations des juges24 comme
de la doctrine Les Cahiers du Conseil constitutionnel lui consacrant un dossier
speacutecial dans sa livraison drsquooctobre 202025
La loi soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel reacutepond agrave lrsquoexigence de
seacutecuriteacute juridique en eacutetant le prolongement de lrsquoœuvre anteacuterieure du leacutegisla-
teur pour commencer la loi du 8 juillet 2013 drsquoorientation et de programma-
tion pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique qui reconnaicirct lrsquoenseigne-
ment bilingue franccedilais langue reacutegionale Dans lrsquoannexe de la loi figurent cinq
mentions compleacutementaires notamment celle concernant la possibiliteacute de
srsquoinscrire dans une eacutecole publique drsquoune autre commune lorsque la commune
de reacutesidence ne propose pas drsquoenseignement de langue reacutegionale Disposition
deacuteclarative qui a trouveacute une application concregravete dans la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) la parti-
cipation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes dans lrsquoenseigne-
ment public doit deacutesormais faire lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune drsquoac-
cueil et la commune de reacutesidence26
La loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle a
ajouteacute un nouveau motif de discrimination baseacute sur laquo la maitrise drsquoune autre
23 Bertrand Mathieu laquo La seacutecuriteacute juridique un principe clandestin mais efficient raquo Droit constitutionnel Meacutelanges Patrice Geacutelard LGDJ 1999 pp 301-305 24 En teacutemoigne notamment le fait que le Conseil drsquoEacutetat lui ait consacreacute deux rapports annuels celui de 1991 De la seacutecuriteacute juridique et celui de 2006 Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit 25 Dossier La seacutecuriteacute juridique Titre VII Les Cahiers du Conseil constitutionnel ndeg5 octobre
2020 26 Lrsquoarticle 104 de la loi NOTRe consacre par ailleurs la compeacutetence partageacutee des collectiviteacutes
locales dans la promotion des langues reacutegionales tout en donnant une place preacutepondeacuterante
agrave la reacutegion telle que preacutevue agrave lrsquoarticle 1er de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de lrsquoaction publique territoriale et drsquoaffirmation des meacutetropoles (MAPTAM)
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langue que le franccedilais raquo qui concerne eacutegalement les langues reacutegionales Celle
du 28 feacutevrier 2017 de programmation relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend
inopeacuterant le deacutecret du 2 Thermidor an II sur lequel se basait notamment le
ministegravere de la justice pour interdire les livrets de famille bilingues Enfin
lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance vient eacutetendre
aux eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives une laquo contribution volontaire raquo
des communes pour la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoins-
crivant dans une eacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionale en
dehors de sa commune de reacutesidence
La loi du 8 avril 2021 soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel nrsquoest que
le prolongement et le compleacutement de lrsquoarticle L 212-8 du Code de lrsquoeacuteducation
qui preacutecise les conditions dans lesquelles pour lrsquoenseignement public une
commune doit contribuer au financement des deacutepenses scolaires drsquoun enfant
reacutesidant sur son territoire et scolariseacute dans une autre commune Elle vient le
compleacuteter de maniegravere parallegravele eacutetendant ce qui existe deacutejagrave pour lrsquoeacutecole pu-
blique agrave lrsquoeacutecole priveacutee sous contrat Confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
elle ne viole par ailleurs aucun article de la Constitution et ne contredit pas
la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le caractegravere facultatif de lrsquoen-
seignement des langues reacutegionales
B Forfait scolaire communal et respect de la jurisprudence du Conseil
constitutionnel sur la langue franccedilaise
Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contreviennent pas
agrave lrsquoarticle 2 alineacutea premier de la Constitution (laquo La langue de la Reacutepublique est
le Franccedilais raquo) et au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des
langues reacutegionales qui en deacutecoule affirmeacute par le Conseil constitutionnel La
langue de la Reacutepublique est et demeure le Franccedilais et agrave aucun moment la
loi du 8 avril 2021 nrsquoentend y porter atteinte Lrsquoapprentissage des langues reacute-
gionales se fait agrave ses cocircteacutes mais dans une mesure permettant leffectiviteacute pour
les enfants agrave acceacuteder agrave lenseignement des langues reacutegionales laquo patrimoine de
la France raquo selon les termes de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Apprentissage
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qui pour certains enfants est lrsquoun des eacuteleacutements de leur laquo deacuteveloppement raquo au
sens de lrsquoalineacutea 10 du Preacuteambule de la Constitution du 27 octobre 1946 (laquo La
Nation assure agrave lrsquoindividu et agrave la familles les conditions neacutecessaires agrave leur
deacuteveloppement raquo)
Ce que creacutee lrsquoarticle 6 agrave travers le forfait ce nrsquoest pas lrsquoenseignement obligatoire
de la langue reacutegionale mais la possibiliteacute de pouvoir beacuteneacuteficier de cet enseigne-
ment (sans prescription de deacutelai) qui demeure facultatif Le rapporteur Paul
Molac le reacuteaffirme au cours de la seacuteance publique du 8 avril 2021 laquo Je ne
suis pas favorable au caractegravere obligatoire de cet enseignement mais je consi-
degravere que tout eacutelegraveve qui souhaite le suivre doit pouvoir le faire raquo27
Ce faisant la loi sans contrevenir agrave la Constitution offre un contenu agrave son
article 75-1 La jurisprudence du Conseil constitutionnel en vertu de laquelle
lrsquoenseignement des langues reacutegionales nrsquoa qursquoun caractegravere facultatif nrsquoest ici
absolument pas remise en cause Dans sa deacutecision ndeg99-412 DC du 15 juin
1999 il a souligneacute que le principe drsquouniciteacute du peuple franccedilais et lrsquoindivisibiliteacute
de la Reacutepublique assurant lrsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi srsquoopposaient agrave laquo
ce que soient reconnus des droits collectifs agrave quelque groupe que ce soit deacutefini
par une communauteacute drsquoorigine de culture de langue ou de croyance raquo En
outre la langue de la Reacutepublique eacutetant le franccedilais il ne peut ecirctre reconnu un
laquo droit agrave pratiquer une langue autre que le franccedilais non seulement dans la vie
priveacutee mais eacutegalement dans la vie publique agrave laquelle la Charte rattache
la justice et les autoriteacutes administratives et services publics raquo
Deux remarques srsquoimposent drsquoembleacutee drsquoune part cette jurisprudence est an-
teacuterieure agrave lrsquoinsertion en 2008 par le pouvoir constituant de lrsquoarticle 75-1 dis-
posant que laquo les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France
raquo Cette remarque drsquoordre contextuel vient srsquoajouter agrave la suivante drsquoautre part
27 Assembleacutee nationale XVe leacutegislature Session ordinaire de 2020-2021 Seacuteance du jeudi 08
avril 2021 httpswwwassemblee-nationalefrdyn15comptes-rendusseancesession-
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la loi du 8 avril 2021 nrsquoentend pas confier agrave lrsquoenseignement des langues reacutegio-
nales un caractegravere obligatoire En cela elle respecte la jurisprudence du Con-
seil constitutionnel preacuteciteacutee (deacutecision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi
relative agrave la Corse)
laquo Si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquoho-
raire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir
pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les en-
seignants (hellip) raquo (cons 24)
Lrsquoenseignement drsquoune langue minoritaire ne devient donc en aucun cas obli-
gatoire Ce qui doit faire laquo lrsquoobjet drsquoun accord raquo ce sont les conditions permet-
tant effectivement agrave des enfants drsquoacceacuteder agrave un enseignement facultatif qui
contribue agrave leur deacuteveloppement proteacutegeacute par ailleurs par lrsquoalineacutea 10 du Preacuteam-
bule de 1946 preacuteciteacute Ni la Constitution ni son interpreacutetation par le Conseil
constitutionnel ne srsquoopposent agrave ce qursquoune commune de reacutesidence participe y
compris de maniegravere obligatoire au financement de la scolarisation dans une
autre commune des enfants souhaitant suivre un tel enseignement Crsquoest don-
ner aux enfants et aux parents de maniegravere effective et efficiente la possibiliteacute
concregravete de beacuteneacuteficier drsquoun enseignement drsquoune langue reacutegionale composante
de leur laquo deacuteveloppement raquo laquelle appartient en vertu de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution au laquo patrimoine de la France raquo
C Forfait scolaire communal et respect du principe drsquoeacutegaliteacute
Tertio la loi ne contrevient pas au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur
une commune une nouvelle charge
Conformeacutement agrave une jurisprudence du Conseil constitutionnel bien eacutetablie le
principe deacutegaliteacute de lrsquoarticle 6 de la Deacuteclaration des droits de lhomme et du
citoyen de 1789 laquo ne soppose ni agrave ce que le leacutegislateur regravegle de faccedilon diffeacuterente
des situations diffeacuterentes ni agrave ce quil deacuteroge agrave leacutegaliteacute pour des raisons
dinteacuterecirct geacuteneacuteral pourvu que dans lun et lautre cas la diffeacuterence de traite-
ment qui en reacutesulte soit en rapport direct avec lobjet de la loi qui leacutetablit raquo
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(pour lrsquoune des reacutecentes application au domaine de lrsquoenseignement dont il sera
ici question deacutecision ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de
la confiance)
En ce qui concerne preacuteciseacutement le caractegravere obligatoire drsquoune nouvelle charge
pour une collectiviteacute celui-ci nrsquoa pas eacuteteacute censureacute par le Conseil constitutionnel
agrave propos de lrsquoexamen de la loi sur lrsquoavenir de lrsquoeacutecole preacuteciteacutee (deacutecision ndeg 2019-
787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de la confiance) Lrsquoarticle 17 de
la loi alors deacutefeacutereacute au Conseil constitutionnel preacutevoyait dans son premier ali-
neacutea
laquo LrsquoEacutetat attribue de maniegravere peacuterenne agrave chaque commune les ressources
correspondant agrave lrsquoaugmentation des deacutepenses obligatoires qursquoelle a
prises en charge en application des articles L 212-4 L 212-5 et L 442-
5 du code de lrsquoeacuteducation au titre de lrsquoanneacutee scolaire 2019-2020 par rap-
port agrave lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 dans la limite de la part drsquoaugmenta-
tion reacutesultant directement de lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoins-
truction obligatoire raquo
Les deacutepenses qui font lrsquoobjet de lrsquoaccompagnement financier en cause sont
celles qui beacuteneacuteficient aux eacutecoles publiques et aux eacutetablissements drsquoenseigne-
ment priveacutes ayant passeacute un contrat drsquoassociation avec lrsquoEacutetat
Lrsquoabaissement agrave trois ans du deacutebut de lrsquoinstruction obligatoire a donc fait pe-
ser des charges nouvelles pour les communes et leur a mecircme imposeacute de par-
ticiper au financement des eacutecoles maternelles priveacutees sous contrat y compris
lorsqursquoelles nrsquoont pas approuveacute ce contrat La diffeacuterence de traitement entre
les communes est reacuteelle selon qursquoelles financcedilaient ou non des classes mater-
nelles avant lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoinstruction obligatoire mais
nrsquoentraicircne pas pour autant une rupture drsquoeacutegaliteacute
Ainsi lrsquoa jugeacute le Conseil constitutionnel dans la deacutecision preacuteciteacutee drsquoune part
il a estimeacute que cette diffeacuterence de traitement reposait sur une diffeacuterence de
situation
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laquo Les communes qui au cours de lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 avaient
institueacute des classes maternelles ou eacutecoles maternelles publiques ou ap-
prouveacute des contrats drsquoassociation drsquoeacutecoles maternelles priveacutees ont con-
tribueacute agrave ce titre agrave leur financement dans les conditions preacutevues par le
code de lrsquoeacuteducation Ces communes ne sont ainsi pas placeacutees dans une
situation identique agrave celle des autres communes qui nrsquoexerccedilaient pas
deacutejagrave les mecircmes compeacutetences et ne supportaient donc pas les charges
correspondantes raquo (cons 7)
Drsquoautre part le Conseil constitutionnel a jugeacute que la diffeacuterence de traitement
contesteacutee eacutetait en rapport direct avec lrsquoobjet de la loi qui lrsquoeacutetablit
laquo Qui consiste en application de la seconde phrase du quatriegraveme alineacutea
de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution agrave accompagner de ressources finan-
ciegraveres une extension de compeacutetence ayant pour conseacutequence drsquoaugmen-
ter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales raquo (cons 8)
Agrave lrsquoargument opposeacute agrave lrsquoarticle 6 de la loi deacutefeacutereacutee selon lequel ces dispositions
creacuteeraient une diffeacuterence de traitement entre les communes contraire au prin-
cipe deacutegaliteacute devant la loi le Conseil constitutionnel en vertu de sa jurispru-
dence Loi pour une eacutecole de la confiance devrait logiquement apporter la mecircme
reacuteponse Le leacutegislateur entend avec cette loi du 8 avril 2021 donner de ma-
niegravere geacuteneacuterale effectiviteacute agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution agrave travers en par-
ticulier un outil permettant de mettre en œuvre les dispositions de lrsquoarticle 72-
2 de la Constitution relatives aux extensions de compeacutetences imposeacutees aux
collectiviteacutes territoriales Dispositions qui par ailleurs nrsquoobligent pas le leacutegi-
slateur agrave preacutevoir un accompagnement financier de lrsquoensemble des communes
En lien avec cet argument il en reacutesulte que lrsquoarticle 6 ne porte pas atteinte
par ailleurs au principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
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D Forfait scolaire communal et respect du principe de libre administra-
tion des collectiviteacutes territoriales
Quarto le forfait scolaire communal nrsquoest ni contraire agrave la lettre de lrsquoar-
ticle 72 de la Constitution ni agrave son interpreacutetation par le Conseil constitution-
nel
En vertu de lrsquoarticle 72 alineacutea 3 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales
srsquoadministrent librement dans les conditions preacutevues par la loi Correacutelative-
ment lrsquoarticle 34 de la Constitution donne agrave la loi compeacutetence pour deacuteterminer
laquo les principes fondamentaux (hellip) de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales de leurs compeacutetences et de leurs ressources raquo Cette libre admi-
nistration doit en outre se concilier avec drsquoautres principes constitutionnels
tels que le principe drsquoeacutegaliteacute et la liberteacute de lrsquoenseignement Crsquoest ainsi que le
Conseil constitutionnel a jugeacute que laquo si le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacute-
gislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce que les conditions essentielles drsquoap-
plication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de lrsquoenseignement deacutepen-
dent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre
les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (voir notamment la deacutecisions ndeg84-
185 DC du 18 janvier 1985 cons 18)
La libre administration est bien un principe constitutionnel mais crsquoest au leacute-
gislateur qursquoil revient sous le controcircle du Conseil constitutionnel drsquoen preacuteci-
ser le contenu Lrsquointervention du leacutegislateur est neacutecessaire pour la deacutefinition
des regravegles de fonctionnement des collectiviteacutes territoriales la deacutefinition des
compeacutetences qui leur sont deacutevolues (transfert creacuteation extension des compeacute-
tences) et en matiegravere de ressources la fixation du taux des impocircts deacutecideacutes par
les Assembleacutees deacutelibeacuteratives locales
Il ressort de la jurisprudence administrative et constitutionnelle que seule la
loi peut creacuteer une obligationsujeacutetion nouvelle agrave la charge drsquoune collectiviteacute
territoriale Le principe de libre administration ne peut donc pas exister en-
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dehors de lrsquointervention du leacutegislateur lequel nrsquoa pas pour autant toute lati-
tude En drsquoautres termes le principe de libre administration est deacutefini par la
loi mais est aussi proteacutegeacute contre elle qui ne peut notamment pas porter at-
teinte au-delagrave drsquoun certain seuil aux ressources des collectiviteacutes territoriales
restreindre la liberteacute contractuelle intervenir dans les deacutecisions des collecti-
viteacutes territoriales relatives agrave leurs agents ou le fonctionnement de leurs insti-
tutions
En eacutetendant la prise en charge du forfait scolaire communal la loi deacutefeacutereacutee creacutee
une charge suppleacutementaire pour certaines communes
Aux termes du quatriegraveme alineacutea de larticle 72-2 de la Constitution laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales saccom-
pagne de lattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consa-
creacutees agrave leur exercice Toute creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour
conseacutequence daugmenter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales est ac-
compagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Dans le cas ougrave le leacutegislateur
octroie une nouvelle compeacutetence aux collectiviteacutes territoriales (articles 72-2 de
la Constitution et L 1614-1-1 du code geacuteneacuteral des collectiviteacutes territoriales)
il accompagne cette creacuteation de ressources correspondantes uniquement si
lexercice de cette compeacutetence est rendu obligatoire Ainsi en a jugeacute le Conseil
constitutionnel en ajoutant que le leacutegislateur disposait dun pouvoir dappreacute-
ciation en la matiegravere la compensation devant ecirctre naturellement suffisante
pour ne pas constituer une entrave au principe de libre administration
laquo Que ces dispositions ne visent en ce qui concerne les creacuteations et ex-
tensions de compeacutetences que celles qui preacutesentent un caractegravere obliga-
toire que dans cette hypothegravese il nest fait obligation au leacutegislateur
que daccompagner ces creacuteations ou extensions de compeacutetences de res-
sources dont il lui appartient dappreacutecier le niveau sans toutefois deacutena-
turer le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales raquo
(deacutecision ndeg2008-569 DC du 7 aoucirct 2008 Loi instituant un droit daccueil
pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires pendant le temps
scolaire cons 13)
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Le Conseil constitutionnel a jugeacute qursquoen conseacutequence et en lrsquoespegravece le leacutegisla-
teur avait suffisamment deacutetermineacute le niveau des ressources accompagnant la
creacuteation de ce service daccueil pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires pendant le temps scolaire sans meacuteconnaicirctre le quatriegraveme alineacutea de
larticle 72-2 de la Constitution
Lextension de compeacutetences est soumise a fortiori au mecircme reacutegime que la
creacuteation de compeacutetences Elle consiste en leacutelargissement du peacuterimegravetre ou en
la modification de la nature ou de lobjet dune compeacutetence dont lexercice est
deacutejagrave assureacute par les collectiviteacutes territoriales ayant pour conseacutequence de creacuteer
une charge suppleacutementaire pour celles-ci Le droit agrave une compensation finan-
ciegravere nest garanti que si lextension preacutesente un caractegravere obligatoire et le
leacutegislateur en deacutetermine le niveau et les modaliteacutes agrave condition quils nentra-
vent pas la libre administration des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece le principe de libre administration nrsquoest donc pas violeacute par le ca-
ractegravere contraignant que confegravererait la loi deacutefeacutereacutee au forfait scolaire communal
de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation Drsquoune part le Conseil constitu-
tionnel a deacutejagrave comme souligneacute plus haut accepteacute le principe du caractegravere
obligatoire drsquoune nouvelle charge qui nrsquoentraine par ailleurs mecircme pas
lrsquoautomaticiteacute drsquoun accompagnement financier des communes Drsquoautre part
lrsquoargument de proportionnaliteacute est ici deacuteterminant agrave ceux qui avancent un
risque drsquoassegravechement financier de certaines communes rurales contraintes
de prendre en charge la scolarisation dun eacutelegraveve dans une autre commune
mieux doteacutee qui propose lenseignement de la langue reacutegionale (ce qui selon
le deacuteputeacute Molac ne concernerait que 002 des enfants en France) il faut
reacutepondre en mettant en avant lrsquoobjectif incitatif et non sanctionnateur de la
loi Il suffira auxdites communes de proposer un enseignement de langue reacute-
gionale qui ne pourrait repreacutesenter qursquoune heure drsquoinitiation par semaine par
exemple
Une heure drsquoinitiation par semaine pour eacuteviter de payer le forfait scolaire com-
munal lequel ne meacuteconnait pas par ailleurs lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
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les principes constitutionnels drsquoeacutegaliteacute drsquouniciteacute de la langue franccedilaise de la
libre administration des collectiviteacutes territoriales et permet drsquoassurer le deacuteve-
loppement de lrsquoenfant crsquoest bien peu de choses pour censurer une loi souve-
raine adopteacutee qui plus est agrave une eacutecrasante majoriteacute
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De Raphaeumll SchellenbergerA GreffeObjet Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues ReacutegionalesDate mardi 4 mai 2021 101012Piegraveces jointes Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionalespdf
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loirelative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus desoixante deacuteputeacutes ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texteen application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarerlrsquoinconstitutionnaliteacute de son article 6 Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons ennotre qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre lapleine constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sensNous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notreconsideacuteration respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire
- Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
- Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche
- Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret
- Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne
- Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte
- Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor
- David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion
- Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme
- Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne
- Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
1
M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2
Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
3
On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
- Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie
- Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
Ce message ainsi que les piegraveces jointes sont eacutetablis sous la seule responsabiliteacute de lexpeacutediteur agrave lintention exclusive de ses destinataires ils peuvent contenir des informations confidentielles Toute publication utilisation ou diffusion doit ecirctre autoriseacutee preacutealablement Ce message a fait lobjet dun traitement anti-virusIl est rappeleacute que tout message eacutelectronique est susceptible dalteacuteration au cours de son acheminement sur Internet ________________________________________________________________
Vous pouvez consulter le site de lAssembleacutee nationale agrave ladresse suivante httpwwwassemblee-nationalefr
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
1
M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Association ESKOLIMChez Seaska Route de la Pouponniegravere64250 CAMBO LES BAINSeskolim6gmailcomRepreacutesenteacutee par son President Jean Seacutebastien HAYDN11 chemin de Saint Jean66240 SAINT ESTEVE
CONTRIBUTION EXTERIEURE
Observations sur la conformiteacute agrave la Constitution de laproposition de loi relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
Monsieur le Preacutesident du Conseil constitutionnel Mesdames et Messieurs les
membres du Conseil constitutionnel lrsquoassociation Eskolim souhaite porter agrave votre attention
les observations suivantes tendant agrave deacutemontrer la conformiteacute agrave la Constitution de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Parmi lrsquoensemble des dispositions du texte deacutefeacutereacute la plupart nrsquoont donneacute lieu agrave aucun
deacutebat sur leur conformiteacute agrave la Constitution qui est de toute eacutevidence acquise par exemple au
sujet des traductions dont la constitutionnaliteacute a deacutejagrave indirectement eacuteteacute reconnue (CC 99-412
DC 15 juin 1999 CC ndeg2001-452 DC 6 deacutecembre 2001) ou de lrsquoutilisation des signes
diacritiques sur les actes drsquoeacutetat civil
De plus au-delagrave des apparences drsquoune politique jurisprudentielle initieacutee dans un contexte
speacutecifique le Conseil constitutionnel dispose deacutesormais drsquoun cadre constitutionnel de
reacutefeacuterence transformeacute (1) qui lui permettra de valider les dispositions leacutegislatives du texte dont
il est saisi en particulier lrsquoarticle 4 relatif agrave lrsquoenseignement immersif (2) et lrsquoarticle 6 au sujet
de la participation financiegravere agrave la scolarisation par les communes de reacutesidence (3)
1
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
1 Le renouvellement des normes constitutionnelles de reacutefeacuterence en matiegravere de
langues reacutegionales
11 Les ineacutevitables deacuterogations apporteacutees agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution
Toute regravegle constitutionnelle connaicirct des atteacutenuations et peut ecirctre concilieacutee lrsquoarticle 2
de la Constitution ne fait pas exception Le principe demeure inchangeacute laquo La langue de la
Reacutepublique est le franccedilais raquo Sur ce fondement le Conseil constitutionnel a deacuteveloppeacute dans
les anneacutees 90 et 2000 une jurisprudence vigilante sur lrsquousage du franccedilais mais sans pour
autant refuser toute eacutevolution nous y reviendrons
Cependant lrsquoassociation Eskolim souhaite mettre en eacutevidence lrsquoindeacuteniable
changement de cadre constitutionnel en matiegravere de langues reacutegionales pour au
moins trois raisons
En premier lieu la porteacutee de lrsquoarticle 2 de la Constitution nrsquoest pas figeacutee et peut
eacutevoluer avec le temps En effet le Conseil constitutionnel opegravere reacuteguliegraverement des adaptations
de la porteacutee du texte constitutionnel Parmi de nombreuses illustrations jurisprudentielles la
liberteacute drsquoexpression et de communication protegravege deacutesormais la liberteacute drsquoacceacuteder agrave Internet
(CC ndeg 2009-580 DC 10 juin 2009) et de srsquoy exprimer (CC ndeg2020-801 DC du 18 juin 2020)
La liberteacute du mariage comprend deacutesormais le droit de mettre fin aux liens du mariage (CC ndeg
2016-557 QPC du 29 juillet 2016) La monteacutee en puissance des exigences environnementales
dans le deacutebat public a permis au Conseil constitutionnel de juger qursquoil deacutecoule de la Charte de
lrsquoenvironnement laquo que la protection de lrsquoenvironnement patrimoine commun des ecirctres
humains constitue un objectif de valeur constitutionnelle raquo (CC ndeg2019-823 QPC 31 janvier
2020) Certains fondements constitutionnels que lrsquoon croyait endormis ont eacuteteacute reacuteactiveacutes sous
lrsquoeffet du pouvoir interpreacutetatif agrave lrsquoimage de lrsquoarticle 15 de la DDHC (laquo La socieacuteteacute a le droit de
demander compte agrave tout agent public de son administration raquo) agrave lrsquoorigine drsquoun droit drsquoaccegraves
aux archives publiques (CC ndeg2017-655 QPC 15 septembre 2017) et drsquoun droit drsquoaccegraves aux
documents administratifs (CC ndeg2020-834 QPC 3 avril 2020)
En deuxiegraveme lieu la reacutedaction actuelle de lrsquoarticle 2 de la Constitution ne date pas de
1958 mais drsquoun ajout issu de la loi constitutionnelle ndeg 92-554 du 25 juin 1992 voteacutee dans un
contexte particulier au moment ougrave la France ratifiait le traiteacute de Maastricht et reacutevisait sa
Constitution afin de lever les atteintes agrave la souveraineteacute constateacutees par le Conseil
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
constitutionnel En 1992 lrsquoinsertion de la langue franccedilaise au sein de lrsquoarticle 2 vise agrave rassurer
lrsquoopinion face aux craintes heacutegeacutemoniques de la langue anglaise les langues reacutegionales ne
sont ni viseacutees ni nieacutees dans leur existence et leur rocircle Il est sur ce point particuliegraverement
reacuteveacutelateur de se reacutefeacuterer aux deacuteclarations limpides du Garde des Sceaux Michel Vauzelle lors
des deacutebats parlementaires consacreacutes en 1992 au vote de la reacutevision constitutionnelle laquo Les
langues reacutegionales sont naturellement une richesse de notre patrimoine national Agrave ce
titre le Gouvernement exprime par ma voix lrsquoimmense respect et le soin qursquoil porte agrave cette
richesse de la nation [] Je ne vois pas lagrave drsquoatteinte agrave lrsquouniteacute de la nation mais au
contraire une contribution agrave sa richesse [] Aucune atteinte ne sera porteacutee agrave la politique
de respect de la diversiteacute de nos cultures reacutegionales qui est un eacuteleacutement essentiel du
patrimoine national raquo (JO Assembleacutee nationale p 1021)
Il est donc parfaitement possible pour le Conseil constitutionnel drsquoopeacuterer une
interpreacutetation eacutevolutive de lrsquoarticle 2 afin drsquoadapter la porteacutee de la norme constitutionnelle au
contexte actuel favorable agrave lrsquoapprofondissement de lrsquousage des langues reacutegionales Il nrsquoest
drsquoailleurs pas anodin de constater que la preacutesente proposition de loi a largement transcendeacute les
clivages politiques pour ecirctre voteacutee agrave une large majoriteacute avec drsquoailleurs le soutien de
lrsquoensemble des Preacutesidents de Reacutegion
En troisiegraveme lieu dans sa fameuse deacutecision sur la Charte europeacuteenne des langues
reacutegionales et minoritaires du 15 juin 1999 (ndeg99-412 DC) le Conseil constitutionnel a
implicitement reconnu la compatibiliteacute de lrsquoenseignement immersif ou bilingue avec la
Constitution et en particulier avec lrsquoarticle 2 de la Constitution En effet lrsquoinconstitutionnaliteacute
constateacutee entre la Charte et la Constitution concerne seulement les articles 1 et 7 Or le
consideacuterant 13 de cette deacutecision abusivement preacutesenteacutee comme un verrou absolu en matiegravere
de langues reacutegionales prend soin de preacuteciser laquo que nest contraire agrave la Constitution eu eacutegard agrave
leur nature aucun des autres engagements souscrits par la France dont la plupart au
demeurant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France en
faveur des langues reacutegionales raquo Parmi ces laquo autres engagements souscrits par la France raquo
au sein de la Charte figurent certaines stipulations de lrsquoarticle 8 de la Charte1 selon lequel
1 Article 8 ndash Enseignement1En matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel ces langues sontpratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de lenseignement de la (des)langue(s) officielle(s) de lEtat(hellip)ci agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires concerneacutees ou
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
laquo laquoen matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel
ces langues sont pratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de
lenseignement de la (des) langue(s) officielle(s) de lEtat raquo agrave toute une seacuterie drsquoengagements
Au sein des engagements auxquels la France avait souscrits et sur lesquels le Conseil
constitutionnel srsquoest donc prononceacute on trouve le point 1 c (iv) en vertu duquel la France
srsquoengage laquo agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui
le souhaitent ndash ou le cas eacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant raquo
Or ce renvoi concerne les stipulations suivantes
laquo i agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires
concerneacutees ou
Ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les
langues reacutegionales ou minoritaires ou
Iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales
ou minoritaires comme partie inteacutegrante du curriculum
Autrement dit la France srsquoeacutetait engageacutee au moment de la signature de la Charte agrave
appliquer lrsquoune des trois mesures citeacutees qui concernent lrsquoenseignement laquo dans raquo les langues
reacutegionales ou minoritaires dans le secondaire crsquoest-agrave-dire un enseignement immersif ou
bilingue Cet engagement faisait donc partie des stipulations examineacutees par le Conseil
constitutionnel et le consideacuterant 13 de la deacutecision du 15 juin 1999 affirme clairement que ces
stipulations ne sont pas contraires agrave la Constitution Degraves 1999 lrsquoenseignement immersif en
langue reacutegionale est reconnu par le Conseil constitutionnel comme compatible avec
lrsquoarticle 2 de la Constitution
En quatriegraveme lieu le texte mecircme de la Constitution contient drsquoores et deacutejagrave des
ameacutenagements au principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais
Drsquoune part en vertu de la loi constitutionnelle ndeg 98-610 du 20 juillet 1998 lAccord
de Noumeacutea est constitutionnaliseacute agrave larticle 77 de la Constitution Or cet accord stipule en son
ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les langues reacutegionalesou minoritaires ou
iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales ou minoritairescomme partie inteacutegrante du curriculum ou
iv agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui le souhaitent ndash ou le caseacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
point 133 laquo Les langues kanak sont avec le franccedilais des langues denseignement et de
culture en Nouvelle-Caleacutedonie Leur place dans lenseignement et les meacutedias doit donc ecirctre
accrue et faire lobjet dune reacuteflexion approfondie raquo
Drsquoautre part sous lrsquoeffet de la reacutevision constitutionnelle du 23 juillet 2008 la
Constitution consacre deacutesormais les langues reacutegionales sous lrsquoeffet de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution qui par deacutefinition atteacutenue et deacuteroge agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution et dont la
porteacutee ne saurait ecirctre symbolique
12 La porteacutee de lrsquoancrage constitutionnel des langues reacutegionales minoritaires
En vertu de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution laquo Les langues reacutegionales appartiennent
au patrimoine de la France raquo Sans discussion possible cette nouvelle disposition
constitutionnelle constitue un changement de circonstances de droit permettant drsquoatteacutenuer
fortement la porteacutee des preacuteceacutedentes deacutecisions du Conseil constitutionnel rendues avant la
reacutevision constitutionnelle de 2008 Certains voudraient pourtant reacuteduire ce texte agrave une porteacutee
simplement symbolique et pensent pouvoir drsquoores et deacutejagrave trouver une confirmation dans la
jurisprudence du Conseil constitutionnel La reacutealiteacute contentieuse est beaucoup plus nuanceacutee et
ne preacutejuge rien de lrsquoavenir
Le Conseil constitutionnel nrsquoa eu depuis 2008 qursquoune seule et unique occasion de
preacuteciser la porteacutee de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Dans la deacutecision du 20 mai 2011
(ndeg2011-130 QPC) il eacutetait en effet saisi des dispositions de larticle L 312-10 du code de
leacuteducation relative agrave lenseignement des langues et cultures reacutegionales qui eacutetait contesteacute au
regard de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Or estime le Conseil en 2011 lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution ninstitue pas un droit ou une liberteacute que la Constitution garantit Sa
meacuteconnaissance ne peut donc ecirctre invoqueacutee agrave lappui dune question prioritaire de
constitutionnaliteacute sur le fondement de larticle 61-1 de la Constitution
Il convient de ne pas tirer de conclusions excessives du deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en
QPC de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Drsquoune part cela nrsquoempecircche pas le Conseil constitutionnel de se fonder sur lrsquoarticle
75-1 de la Constitution dans le cadre du controcircle a priori comme crsquoest par exemple le cas
pour les regravegles constitutionnelles en matiegravere de recevabiliteacute des amendements ou des principes
constitutionnels en matiegravere budgeacutetaires
5
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Drsquoautre part le deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en QPC drsquoune norme constitutionnelle ne
preacutejuge pas drsquoune forme de hieacuterarchie mateacuterielle ou formelle et srsquoexplique seulement par les
speacutecificiteacutes de chacun des offices Par exemple le respect des regravegles du vote de la loi
imposeacutees par la Constitution impossibles agrave invoquer en QPC font pourtant lrsquoobjet drsquoune
vigilance accrue du Conseil constitutionnel dans le cadre du controcircle a priori justifiant
chaque anneacutee de nombreuses censures
En outre bien que non invocable en QPC lrsquoarticle 75-1 teacutemoigne indubitablement de
la volonteacute du constituant de permettre au leacutegislateur drsquoassouplir les conditions drsquousage des
langues reacutegionales en ouvrant davantage la leacutegislation agrave des possibiliteacutes drsquoapprentissage en la
matiegravere En cela lrsquoarticle 75-1 de la Constitution est une atteacutenuation une disposition
deacuterogatoire agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution selon lequel laquo La langue de la Reacutepublique est le
franccedilais raquo Comme le souligne le rapport drsquoun deacuteputeacute en 2015 laquo la preacuteservation et la
protection des langues reacutegionales sont devenues un objectif de valeur constitutionnelle raquo2 Une
telle interpreacutetation serait drsquoailleurs coheacuterente avec les travaux parlementaires agrave lrsquoorigine de la
reacutevision de 2008 pour le preacutesident de la Commission des lois du Seacutenat lrsquoarticle 75-1 permet
de donner laquo un fondement solide aux dispositions leacutegislatives et reacuteglementaires qui favorisent
la protection et le deacuteveloppement des langues reacutegionales sans diminuer la place que le
franccedilais occupe dans notre sphegravere publique raquo3
Enfin dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel
estime que larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi
ndeg2005-380 du 23 avril 2005 est conforme agrave la Constitution Or les dispositions ainsi
valideacutees sont toujours en vigueur dans une reacutedaction identique laquo Un enseignement de
langues et cultures reacutegionales peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des
modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces
langues sont en usage raquo Ainsi tout en estimant que lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ne
constitue pas un droit ou liberteacute constitutionnel directement invocable en QPC le Conseil
constitutionnel a valideacute le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures
reacutegionales
2JJ Urvoas Rapport sur Proposition de loi constitutionnelle ndeg 1618 visant agrave ratifier la Charte europeacuteenne deslangues reacutegionales ou minoritaires 14 janvier 2014
3JJ Hyest Rapport ndeg 387 (2007-2008) sur le projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions dela Ve Reacutepublique fait au nom de la commission des lois du Seacutenat
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Autre signe eacutevident de la porteacutee effective de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le
leacutegislateur a multiplieacute ces derniegraveres anneacutees lrsquoadoption de textes favorisant lrsquousage et
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et leur promotion La loi du 8 juillet 2013
drsquoorientation et de programmation pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique ouvre la
possibiliteacute drsquoun enseignement bilingue franccedilais-langue reacutegionale la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) eacutetablit la participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes par lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale
lrsquoarticle 86 de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle
modifie lrsquoarticle 225-1 du code peacutenal en creacuteant un nouveau cas de discrimination fondeacute sur laquo
la maitrise drsquoune autre langue que le franccedilais raquo la loi du 28 feacutevrier 2017 de programmation
relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend inopeacuterant lrsquointerdiction des livrets de famille
bilingues lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance eacutetend aux
eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives les modaliteacutes drsquoun accord entre les communes pour
la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoinscrivant dans une eacutecole dispensant un
enseignement de langue reacutegionale en dehors de sa commune de reacutesidence Lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution a donc susciteacute une production leacutegislative qui teacutemoigne de la volonteacute du pouvoir
politique de mettre en œuvre une politique en matiegravere de langue et culture reacutegionales La
particulariteacute de la proposition de loi deacutefeacutereacutee est drsquoecirctre la premiegravere loi dont lrsquoobjet exclusif vise
agrave densifier lrsquoenseignement et lrsquousage des langues reacutegionales mais ce texte confirme les
avanceacutees ponctuelles eacutetablies depuis la reacutevision constitutionnelle de 2008
13 La monteacutee en puissance drsquoexigences constitutionnelles favorisant lrsquousage des langues
reacutegionales
Au-delagrave de lrsquoapport indeacuteniable de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution qui inteacuteresse
directement et clairement la possibiliteacute pour le leacutegislateur de favoriser le deacuteveloppement des
langues reacutegionales la jurisprudence du Conseil constitutionnel atteste drsquoune monteacutee en
puissance de plusieurs liberteacutes qui participent indirectement du mecircme mouvement
En premier lieu la liberteacute drsquoexpression et de communication concerne les langues
reacutegionales Degraves la deacutecision ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 le Conseil constitutionnel avait
concilieacute lrsquoarticle 2 de la Constitution avec la liberteacute drsquoexpression et de communication afin de
censurer certaines dispositions imposant lrsquousage du franccedilais tout en faisant notamment une
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
reacutefeacuterence aux langues reacutegionales cette liberteacute laquo implique le droit pour chacun de choisir les
termes jugeacutes par lui les mieux approprieacutes agrave lexpression de sa penseacutee que la langue franccedilaise
eacutevolue comme toute langue vivante en inteacutegrant dans le vocabulaire usuel des termes
de diverses sources quil sagisse dexpressions issues de langues reacutegionales de vocables
dits populaires ou de mots eacutetrangers raquo Or la liberteacute drsquoexpression et de communication a vu
son reacutegime constitutionnel renforceacute depuis plusieurs anneacutees sous lrsquoeffet du triple test de
proportionnaliteacute en vertu duquel les limites apporteacutees agrave ces liberteacutes doivent ecirctre neacutecessaires
adapteacutees et proportionneacutees agrave lrsquoobjectif poursuivi Norme constitutionnelle prioritaire pour le
Conseil constitutionnel la liberteacute drsquoexpression et de communication a justifieacute de nombreuses
censures de dispositions leacutegislatives ces derniegraveres anneacutees (loi laquo Hadopi raquo consultation des
sites Internet terroristes loi laquo Avia raquohellip) Or cette liberteacute dans ses deux composantes de
lrsquoexpression et de la communication permet au locuteur drsquoutiliser une langue reacutegionale et de
ne pas subir drsquoentraves excessives ou injustifieacutees Le deacuteveloppement des langues reacutegionales et
de leur enseignement lrsquoouverture des possibiliteacutes de srsquoexprimer et de communiquer gracircce agrave
ces langues ne sont pas eacutetrangegraveres aux conditions drsquoexercice de la liberteacute drsquoexpression et de
communication Ainsi la monteacutee en puissance de cette liberteacute dans le contentieux
constitutionnel confirme lrsquoeacutevolution favorable du cadre constitutionnel applicable aux langues
reacutegionales
En deuxiegraveme lieu lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant est deacutesormais consacreacute en tant
qursquoexigence constitutionnelle deacutecoulant des alineacuteas 10 et 11 du Preacuteambule de 1946 Ce
principe a drsquoores et deacutejagrave eacuteteacute appliqueacute en matiegravere de droit des eacutetrangers (CC 2019-797 QPC du
26 juillet 2019) mais aussi en droit de la famille au sujet du divorce (CC ndeg 2019-778 DC du
21 mars 2019) ou de lrsquoaccouchement sous le secret (CC 2019-826 QPC du 7 feacutevrier 2020) Il
serait parfaitement coheacuterent que cette exigence constitutionnelle soit applicable en matiegravere
drsquoeacuteducation et drsquoenseignement ce qui permettrait notamment de justifier le renforcement de
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et le soutien financier qui leur est apporteacute
En troisiegraveme lieu la liberteacute de lrsquoenseignement reconnu en tant que principe
constitutionnel (CC ndeg77-87 DC 23 novembre 1977 2016-745 DC 26 janvier 2017)
pourrait permette de proteacuteger constitutionnellement le libre choix des parents en
matiegravere de meacutethodes eacuteducatives conformeacutement agrave la jurisprudence du Conseil drsquoEtat En
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effet dans une deacutecision du 19 juillet 2017 (Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg
406150) le Conseil drsquoEtat estime que le laquo principe de la liberteacute de lrsquoenseignement qui figure
au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la Reacutepublique implique la
possibiliteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement y compris hors de tout contrat conclu
avec lrsquoEtat tout comme le droit pour les parents de choisir pour leurs enfants des
meacutethodes eacuteducatives alternatives agrave celles proposeacutees par le systegraveme scolaire public y
compris lrsquoinstruction au sein de la famille raquo A fortiori la liberteacute de lrsquoenseignement
permettrait au leacutegislateur drsquooffrir aux eacutelegraveves la possibiliteacute de suivre un enseignement immersif
en langue reacutegionale Faire deacutecouler de la liberteacute drsquoenseignement une exigence en matiegravere de
droit des parents de choisir les meacutethodes eacuteducatives serait drsquoailleurs en coheacuterence avec
lrsquoarticle 2 du Protocole 1 de la CEDH4 et lrsquoarticle 14-3 de la Charte des droits fondamentaux
de lUnion europeacuteenne5
Au-delagrave du principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais unchangement de contexte est intervenu depuis lrsquoinsertion en 1992 de cette disposition agravelrsquoarticle 2 de la Constitution Depuis 2008 le pouvoir constituant a consacreacute leslangues reacutegionales agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution de nombreuses reacuteformesleacutegislatives et regraveglementaires ont accompagneacute le deacuteveloppement des langues reacutegionaleset plusieurs principes constitutionnels accompagnent et pourraient agrave lrsquoavenirrenforcer lrsquoassise normative des langues reacutegionalesCrsquoest agrave lrsquoaune de ce cadre constitutionnel renouveleacute et transformeacute en phase avec leseacutevolutions leacutegislatives et sociales que le Conseil constitutionnel appreacuteciera laconstitutionnaliteacute de la preacutesente proposition de loi qui loin de constituer une rupturesrsquoinscrit dans une forme de continuiteacute
2 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi modifie lrsquoarticle L321-10 du code de lrsquoeacuteducation qui
en lrsquoeacutetat dispose
4laquo Nul ne peut se voir refuser le droit agrave lrsquoinstruction LrsquoEacutetat dans lrsquoexercice des fonctions qursquoil assumera dans ledomaine de lrsquoeacuteducation et de lrsquoenseignement respectera le droit des parents drsquoassurer cette eacuteducation et cetenseignement conformeacutement agrave leurs convictions religieuses et philosophiques raquo
5laquo La liberteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement dans le respect des principes deacutemocratiques ainsi quele droit des parents drsquoassurer lrsquoeacuteducation et lrsquoenseignement de leurs enfants conformeacutement agrave leurs convictionsreligieuses philosophiques et peacutedagogiques sont respecteacutes selon les lois nationales qui en reacutegissent lrsquoexercice raquo
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laquo Les langues et cultures reacutegionales appartenant au patrimoine de la France leurenseignement est favoriseacute prioritairement dans les reacutegions ougrave elles sont en usage
Cet enseignement peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefiniespar voie de convention entre lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont enusage
Le Conseil supeacuterieur de leacuteducation est consulteacute conformeacutement aux attributions qui lui sontconfeacutereacutees agrave larticle L 231-1 sur les moyens de favoriser leacutetude des langues et culturesreacutegionales dans les reacutegions ougrave ces langues sont en usage
Lenseignement facultatif de langue et culture reacutegionales est proposeacute dans lune des deuxformes suivantes
1deg Un enseignement de la langue et de la culture reacutegionales
2deg Un enseignement bilingue en langue franccedilaise et en langue reacutegionale
Les familles sont informeacutees des diffeacuterentes offres dapprentissage des langues et culturesreacutegionales raquo
Lrsquoarticle 4 a simplement pour objet drsquoajouter un 3e cas de forme drsquoenseignementfacultatif de langue et culture reacutegionales en preacutevoyant
laquo3deg Un enseignement immersif en langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectifdrsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo
21 Le Conseil constitutionnel peut ne pas se prononcer sur cette disposition
A titre liminaire il semblerait que lrsquoarticle 4 du texte soumis agrave lrsquoexamen du
Conseil constitutionnel ne soit pas contesteacute par les auteurs de la saisine parlementaire agrave en
croire les deacuteclarations publiques de plusieurs deacuteputeacutes Ce point nrsquoest pas sans importance degraves
lors qursquoil confirme le large consensus politique autour de cette disposition et peut avoir une
conseacutequence sur le peacuterimegravetre de lrsquoobjet de la deacutecision rendue
Certes il arrive ponctuellement au Conseil constitutionnel drsquoexaminer drsquooffice
drsquoautres dispositions que celles contesteacutees par la saisine mais depuis lrsquoentreacutee en vigueur de la
QPC et speacutecialement depuis 2016 une telle pratique tend agrave devenir une exception (Deacutecisions
ndeg 2019-794 DC du 20 deacutecembre 2019 ndeg2018-772 DC du 15 novembre 2018 ndeg2016-745
DC du 26 janvier 2017)
De plus lors de lrsquoexamen de la loi pour une eacutecole de la confiance dans sa deacutecision
ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 le Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute examiner
drsquooffice les dispositions de lrsquoarticle 38 creacuteant en vertu de lrsquoarticle L314-2 du code de
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lrsquoeacuteducation une expeacuterimentation de classe immersive en langue eacutetrangegravere ou reacutegionale6 Si le
Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute se saisir drsquooffice de cette disposition expeacuterimentale
crsquoest qursquoimplicitement il nrsquoa pas consideacutereacute qursquoelle posait une difficulteacute manifeste de
constitutionnaliteacute Degraves lors la coheacuterence voudrait qursquoil en aille de mecircme avec les dispositions
de lrsquoarticle 4 de la preacutesente proposition de loi qui ne font que reprendre les grands principes
de lrsquoexpeacuterimentation preacuteceacutedente en preacutevoyant la possibiliteacute drsquoun enseignement immersif en
langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue
franccedilaise
22 Les exigences anciennes poseacutees par le Conseil constitutionnel sont respecteacutees
Elaboreacutee avant la reacutevision constitutionnelle de 2008 consacrant les langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la jurisprudence
du Conseil constitutionnel en matiegravere drsquoenseignement de langue reacutegionale est totalement
respecteacutee par lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
En premier lieu le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement immersif en langue
reacutegionale rend lrsquoarticle 4 conforme agrave la Constitution
Dans plusieurs deacutecisions le Conseil constitutionnel a eu lrsquooccasion de preacuteciser que
seule lrsquoobligation de suivre un enseignement dans une autre langue que le franccedilais serait
contraire agrave la Constitution Ainsi dans la deacutecision ndeg 2001-456 DC du 27 deacutecembre 2001 il
indique que laquo lusage dune langue autre que le franccedilais ne peut ecirctre imposeacute aux eacutelegraveves des
eacutetablissements de lenseignement public ni dans la vie de leacutetablissement ni dans
lenseignement des disciplines autres que celles de la langue consideacutereacutee raquo Le verbe
6Article L314-2 du code de lrsquoeacuteducation laquo Sous reacuteserve de lrsquoautorisation preacutealable des autoriteacutes acadeacutemiques etapregraves concertation avec les eacutequipes peacutedagogiques le projet drsquoeacutecole ou drsquoeacutetablissement mentionneacute agrave lrsquoarticle L401-1 peut preacutevoir la reacutealisation dans des conditions deacutefinies par deacutecret drsquoexpeacuterimentations peacutedagogiquesportant sur tout ou partie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement drsquoune dureacutee limiteacutee agrave cinq ans Cesexpeacuterimentations peuvent concerner lrsquoorganisation peacutedagogique de la classe de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement laliaison entre les diffeacuterents niveaux drsquoenseignement la coopeacuteration avec les partenaires du systegraveme eacuteducatiflrsquoenseignement dans une langue vivante eacutetrangegravere ou reacutegionale les eacutechanges avec des eacutetablissementseacutetrangers drsquoenseignement scolaire lrsquoutilisation des outils et ressources numeacuteriques la reacutepartition des heuresdrsquoenseignement sur lrsquoensemble de lrsquoanneacutee scolaire les proceacutedures drsquoorientation des eacutelegraveves et la participation desparents drsquoeacutelegraveves agrave la vie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement Les collectiviteacutes territoriales sont systeacutematiquementassocieacutees agrave la deacutefinition des grandes orientations des expeacuterimentations meneacutees par lrsquoeacuteducation nationale ainsiqursquoagrave leurs deacuteclinaisons territoriales raquo
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laquo imposer raquo est employeacute agrave la fois au sujet de lrsquousage drsquoune autre langue que le franccedilais et au
sujet de la vie de lrsquoeacutetablissement et de lrsquoenseignement des disciplines autres que celles de la
langue consideacutereacutee Ce qui signifie qursquoil est constitutionnellement possible au leacutegislateur de
permettre aux eacutelegraveves de choisir de maniegravere facultative une telle orientation dans
lrsquoenseignement De mecircme dans sa deacutecision ndeg2001 454 DC du 17 janvier 2002 le Conseil
constitutionnel avait estimeacute que si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre
de lrsquohoraire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires laquo il ne saurait revecirctir pour autant
un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo Et dans la deacutecision
ndeg2004-490 DC 12 feacutevrier 2004 le Conseil indique que lrsquoenseignement de la langue
tahitienne ou dune autre langue polyneacutesienne dans le cadre de lhoraire normal des eacutecoles
maternelles et primaires dans les eacutetablissements du second degreacute et dans les eacutetablissements
denseignement supeacuterieur laquo ne saurait revecirctir pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les
eacutelegraveves ou eacutetudiants ni pour les enseignants raquo
Or en lrsquoespegravece il nrsquoy a absolument aucun doute sur le caractegravere facultatif du 3deg
ajouteacute agrave lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation En effet le premier alineacutea de lrsquoarticle L312-
10 du code de lrsquoeacuteducation est inchangeacute et eacutevoque un laquo enseignement facultatif raquo Le deacuteputeacute
Molac lrsquoa clairement exprimeacute lors des deacutebats laquo lrsquoenseignement immersif tel qursquoil est ici
proposeacute reacutepond agrave cette condition dans la mesure ougrave il ne serait pas imposeacute mais seulement
proposeacute au sein des eacutetablissements publics au cocircteacute de filiegraveres classiques drsquoenseignement la
deacutecision finale restant du ressort des personnes responsables de lrsquoenfant raquo (Rapport du 31
mars 2021)
En deuxiegraveme lieu lrsquoarticle 4 nrsquoa pas pour objet de soustraire les eacutelegraveves aux
droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements drsquoenseignement
Dans plusieurs deacutecisions relatives agrave lrsquousage drsquoune langue reacutegionale le Conseil
constitutionnel rappelle qursquoun enseignement de ce type nrsquoa pas pour laquo pour objet de soustraire
les eacutelegraveves scolariseacutes (hellip) aux droits et obligations applicables agrave lensemble des usagers des
eacutetablissements qui assurent le service public de lenseignement ou sont associeacutes agrave celui-ci raquo
(ndeg 91-290 DC du 9 mai 1991 ndeg 2001-454 DC du 17 janvier 2002) Or lrsquoarticle 4 a
seulement pour objet drsquoouvrir une 3e modaliteacute facultative drsquoenseignement en langue reacutegionale
La proposition de loi ne confegravere pas des droits speacutecifiques agrave des laquo groupes raquo de locuteurs de
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de laquo territoires raquo dans lesquels ces langues
seraient pratiqueacutees Le texte ne modifie pas non plus les modaliteacutes drsquoexpression dans la vie
publique et dans la relation entre lrsquoadministration et les administreacutes De telle sorte que
lrsquoarticle 4 ne creacutee aucun droit particulier pour les eacutelegraveves comme pour les enseignants de nature
agrave les soustraire aux droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements
drsquoenseignement ou associeacutes agrave celui-ci
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 4 opegravere une conciliation raisonnable et eacutequilibreacutee entre
le principe de lrsquoarticle 2 de la Constitution et lrsquoapprentissage des langues reacutegionales
Lrsquoenseignement immersif en lange reacutegionale doit srsquoopeacuterer laquo sans preacutejudice de
lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo Lrsquoarticle 4 prend soin de ne pas
ignorer le principe poseacute par lrsquoarticle 2 de la Constitution et prolonge au niveau leacutegislatif la
conciliation souhaiteacutee par le constituant depuis 2008 avec lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Il
appartiendra au pouvoir regraveglementaire de preacuteciser la mise en œuvre de lrsquoobjectif de bonne
connaissance de la langue franccedilaise qui en toute hypothegravese garantit une conciliation
eacutequilibreacutee entre les regravegles constitutionnelles en preacutesence
Au surplus les retours drsquoexpeacuteriences des expeacuterimentations de classes en
enseignements immersifs permises par lrsquoarticle L 314-2 du code de lrsquoeacuteducation deacutemontrent
que les eacutelegraveves disposent drsquoun niveau en franccedilais plus eacuteleveacute que la moyenne Comme lrsquoindique
le rapport du Seacutenat sur la proposition de loi 19 expeacuterimentations immersives en langue
basque 6 en langue corse et une en langue catalane ont lieu actuellement dans des eacutecoles
publiques Or pour prendre lrsquoexemple de lrsquoenseignement en basque agrave 100 en eacutecole
maternelle objet drsquoune eacutevaluation preacutecise par lrsquoacadeacutemie de Bordeaux en 2019 (Etude
comparative des filiegraveres de maternelle 100 basque bilingue et franccedilais Acadeacutemie de
Bordeaux 2019) laquo lorsque ces enfants arrivaient en CP leur niveau de franccedilais eacutetait
supeacuterieur agrave la moyenne du deacutepartement Cela prouve que le niveau de franccedilais nrsquoavait
absolument pas eacuteteacute toucheacute raquo (Paul Molac Assembleacutee nationale Seacuteance du 8 avril 2021)
En quatriegraveme lieu lrsquoarticle 4 ne fait qursquoeacutetendre la mise en œuvre drsquoune modaliteacute
drsquoenseignement deacutejagrave valideacute par le Conseil constitutionnel
Dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel a valideacute
le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures reacutegionales en estimant que
larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi ndeg2005-380 du 23
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
avril 2005 est conforme agrave la Constitution En effet apregraves avoir estimeacute inopeacuterant le grief tireacute
de la violation de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la deacutecision preacutecise laquo que les dispositions
contesteacutees ne sont contraires agrave aucun droit ou liberteacute que la Constitution garantit raquo Par
conseacutequent en vertu de lrsquoautoriteacute que lrsquoarticle 62 de la Constitution confegravere aux deacutecisions du
Conseil constitutionnel les dispositions valideacutees dans cette deacutecision et toujours en vigueur
sont conformes agrave la Constitution Il srsquoagit en particulier de lrsquoalineacutea 2 de la version actuelle de
lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation en vertu duquel laquo Cet enseignement peut ecirctre
dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre
lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont en usage raquo Or lrsquoarticle 4 de la
proposition de loi ne fait qursquoajouter une 3e possibiliteacute de mise en œuvre drsquoun principe deacutejagrave
valideacute par le Conseil constitutionnel modaliteacute facultative et sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune
bonne connaissance de la langue franccedilaise Le leacutegislateur srsquoest donc scrupuleusement
conformeacute aux exigences du Conseil constitutionnel
23 La possibiliteacute drsquoun enseignement immersif peut se preacutevaloir de plusieurs exigences constitutionnelles
En plus de srsquoinscrire dans les lignes jurisprudentielles du Conseil constitutionnel et de
respecter lrsquoarticle 2 de la Constitution lrsquoarticle 4 de la proposition de la loi peut se preacutevaloir
plusieurs normes constitutionnelles
En premier lieu lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en vertu duquel laquo Les langues
reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo constitue un changement de
circonstances de droit issu de la reacutevision constitutionnelle de 2008 qui atteacutenue la porteacutee de
lrsquoarticle 2 de la Constitution et permet ainsi de fonder le principe drsquoen enseignement immersif
et facultatif en langue reacutegionale
En second lieu comme preacuteceacutedemment rappeleacute (cf supra point 13) plusieurs
exigences et liberteacutes constitutionnelles peuvent soutenir le deacuteveloppement des langues
reacutegionales et peser favorablement dans la conciliation opeacutereacutee par le Conseil constitutionnel
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
La liberteacute drsquoexpression et de communication garantie par lrsquoarticle 11 de la DDHC
et dont le reacutegime constitutionnel srsquoest renforceacute depuis une dizaine drsquoanneacutees peut permettre de
justifier lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale degraves lors qursquoil srsquoagit drsquoun preacutealable neacutecessaire
agrave lrsquoexpression et agrave la communication dans une autre langue que le franccedilais
Lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant reacutecemment consacreacute sur le fondement des alineacuteas 10
et 11 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 peut permettre au leacutegislateur de diversifier les
possibiliteacutes drsquoapprentissage drsquoune langue et drsquoune culture reacutegionale
La liberteacute de lrsquoenseignement consacreacutee de longue date en tant que principe
fondamental reconnu par les lois de la Reacutepublique implique neacutecessairement comme le
reconnaissent le Conseil drsquoEtat au niveau constitutionnel (CE 19 juillet 2017 Association
Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150) et les textes europeacuteens (article 2 du protocole 1
CEDH article 14-3 Charte des droits fondamentaux de lrsquoUnion europeacuteenne) une possibiliteacute
pour les parents de choisir des meacutethodes eacuteducatives en lien avec leurs convictions
Il est eacutegalement possible drsquoavancer le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction qui
deacutecoule de lrsquoalineacutea 13 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 (CC ndeg2001-450 DC 11
juillet 2001) degraves lors que lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale poursuit un objectif
peacutedagogique auquel les eacutelegraveves doivent pouvoir acceacuteder de maniegravere suffisamment libre et
selon des critegraveres objectifs et rationnels
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi se contente drsquoajouter une modaliteacute de mise enœuvre drsquoun enseignement dont le principe a deacutejagrave eacuteteacute valideacute par le Conseilconstitutionnel La conformiteacute agrave la Constitution de cet enseignement est eacutetablie degraveslors qursquoil est proposeacute de maniegravere facultative sans preacutejudice du respect de lrsquoarticle 2 dela Constitution et qursquoil peut se preacutevaloir de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ainsi quede plusieurs principes constitutionnels comme la liberteacute drsquoexpression lrsquointeacuterecirctsupeacuterieur de lrsquoenfant la liberteacute drsquoenseignement et lrsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction
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3 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi deacutefeacutereacutee modifie lrsquoarticle L442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation en remplaccedilant les alineacuteas 6 et 7 par lrsquoalineacutea suivant
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue
reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de
reacutesidence et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la
condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de
langue reacutegionale raquo
31 Lrsquoimpact subsidiaire et reacutesiduel de lrsquoarticle 6
Au-delagrave des passions et crispations qui peuvent parfois se rencontrer au greacute de deacutebats
relatifs au financement de lrsquoenseignement priveacute la modification apporteacutee par lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi doit ecirctre replaceacutee agrave sa juste porteacutee
En premier le meacutecanisme est subsidiaire En effet la participation financiegravere de la
commune de reacutesidence ne serait solliciteacutee que si cette commune ne laquo dispose pas drsquoeacutecole
dispensant un enseignement de langue reacutegionale raquo Il srsquoagit bien drsquoun laquo enseignement raquo quel
que soit sa forme et son volume Degraves lors comme lrsquoa clairement exprimeacute le deacuteputeacute Paul
Molac devant la Commission des affaires sociales il peut srsquoagir drsquoune laquo initiation drsquoun
enseignement paritaire ou drsquoune immersion raquo (31 mars 2021)
En deuxiegraveme lieu le meacutecanisme est reacutesiduel La participation financiegravere se limite
aux eacutetablissements priveacutes du premier degreacute ndash les eacutecoles ndash ayant conclu un contrat
drsquoassociation Les collegraveges et lyceacutees sont donc exclus du dispositif Un faible nombre
drsquoenfants sera concerneacute et la charge sera donc reacuteduite pour les communes en question De
plus en pratique dans les zones ougrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales est reacutepandu les
eacutecoles drsquoun grand nombre de communes ont deacutejagrave deacuteveloppeacute des offres eacuteducatives
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En troisiegraveme lieu la participation financiegravere est encadreacutee par la loi En application
de lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation non modifieacute par la preacutesente
proposition de loi les modaliteacutes de calcul de la contribution de la commune de reacutesidence sont
clairement eacutetablies
laquo il est tenu compte des ressources de cette commune du nombre deacutelegraveves de cette
commune scolariseacutes dans la commune daccueil et du coucirct moyen par eacutelegraveve calculeacute sur la base
des deacutepenses de fonctionnement de lensemble des eacutecoles publiques de la commune daccueil
sans que le montant de la contribution par eacutelegraveve puisse ecirctre supeacuterieur au coucirct quaurait
repreacutesenteacute pour la commune de reacutesidence leacutelegraveve sil avait eacuteteacute scolariseacute dans une de ses eacutecoles
publiques raquo
La charge financiegravere obeacuteit donc agrave des regravegles claires objectives rationnelles et deacutejagrave en
vigueur depuis plusieurs anneacutees En effet le laquo forfait scolaire raquo est deacutejagrave pratiqueacute sur le
fondement de lrsquoarticle L212-8 du code de lrsquoeacuteducation lorsqursquoune famille scolarise dans une
eacutecole publique ou priveacutee son enfant dans une autre commune que la commune de reacutesidence
32 Lrsquoabsence de violation de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales et du principe drsquoeacutegaliteacute
Ainsi replaceacutee dans sa juste porteacutee il ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi de violer la Constitution et en particulier les principes applicables en
matiegravere de libre administration des collectiviteacutes territoriales ainsi que le principe drsquoeacutegaliteacute
En premier lieu le Conseil constitutionnel a deacutejagrave valideacute le principe de lrsquoaide agrave
lrsquoenseignement priveacute et en particulier aux langues reacutegionales
Avant mecircme la reacutevision constitutionnelle de 2008 et la conseacutecration des langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le Conseil
constitutionnel avait reconnu que laquo pour concourir agrave la sauvegarde des langues reacutegionales
lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales peuvent apporter leur aide aux associations ayant cet
objet raquo (CC ndeg2001-456 DC 27 deacutecembre 2001)
De plus le Conseil constitutionnel rappelle reacuteguliegraverement que laquo le leacutegislateur peut
preacutevoir loctroi dune aide des collectiviteacutes publiques aux eacutetablissements denseignement
priveacutes selon la nature et limportance de leur contribution agrave laccomplissement de missions
denseignement raquo (CC ndeg93-329 DC du 13 janvier 1994)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
En deuxiegraveme lieu le principe de libre administration ne saurait justifier des
traitements diffeacuterencieacutes dans lrsquoexercice des droits et liberteacutes constitutionnels
En vertu de lrsquoarticle 72 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales srsquoadministrent
librement mais laquo dans les conditions preacutevues par la loi raquo De plus le Conseil constitutionnel
prend soin de preacuteciser que laquo si le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacutegislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce
que les conditions essentielles drsquoapplication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de
lrsquoenseignement deacutependent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas
ecirctre les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (CC ndeg 84-185 DC du 18 janvier 1985 CC
ndeg93-329 du 13 janvier 1994) Plus largement dans la deacutecision du 17 janvier 2002 (ndeg2001-
454 DC) le Conseil constitutionnel affirme que laquo le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales ne saurait conduire agrave ce que les conditions essentielles de mise en
oeuvre des liberteacutes publiques et par suite lensemble des garanties que celles-ci comportent
deacutependent des deacutecisions de collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre les mecircmes
sur lensemble du territoire de la Reacutepublique raquo
Or en lrsquoespegravece si les communes pouvaient librement participer au financement de la
scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous contrat
drsquoassociation lrsquoexercice de la liberteacute drsquoenseignement du principe drsquoeacutegaliteacute devant la loi et du
principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction deacutependrait de la seule volonteacute drsquoune collectiviteacute
territoriale ce que le Conseil constitutionnel condamne Degraves lors que la possibiliteacute drsquoun
enseignement en langue reacutegionale est offerte aux enfants les conditions drsquoaccegraves agrave cet
enseignement doivent pouvoir ecirctre effectives et eacutegales Loin de violer le principe drsquoeacutegaliteacute
devant la loi lrsquoarticle 6 de la proposition de loi en assure au contraire la garantie
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne transfert ni ne creacutee de
nouvelles compeacutetences
Srsquoagissant des ressources des collectiviteacutes locales permettant de leur assurer une libre
administration le quatriegraveme alineacutea de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution preacutevoit laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales srsquoaccompagne de
lrsquoattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consacreacutees agrave leur exercice Toute
creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour conseacutequence drsquoaugmenter les deacutepenses des
collectiviteacutes territoriales est accompagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Le Conseil
constitutionnel veille au respect de cette regravegle drsquoune part pour les transferts de compeacutetence
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales et drsquoautre part pour les creacuteations ou extensions de
compeacutetence des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece aucune creacuteation ou transfert de compeacutetence nrsquoest opeacutereacute au sens de
lrsquoarticle 72-2 de la Constitution Il srsquoagit drsquoune simple participation financiegravere agrave caractegravere
subsidiaire reacutesiduel et deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels comme
preacuteceacutedemment eacutevoqueacute (cf supra point 31) De plus le versement de la participation
financiegravere correspond en quelque sorte agrave un allegravegement de charge degraves lors que le coucirct de
lrsquoenfant scolariseacute est reporteacute sur une autre commune que la commune de reacutesidence En
conseacutequence lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne fait que modifier les modaliteacutes drsquoexercice
drsquoune compeacutetence sans en creacuteer ou transfeacuterer une nouvelle
Drsquoailleurs dans la deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 le Conseil
constitutionnel avait jugeacute inopeacuterant le grief tireacute de la violation des articles 72 et 72-2 de la
Constitution agrave propos de la version ancienne de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation en
jugeant que laquo la loi deacutefeacutereacutee nemporte ni creacuteation ni extension des compeacutetences en matiegravere de
contributions des communes aux frais de fonctionnement des classes eacuteleacutementaires des
eacutetablissements du premier degreacute priveacutes sous contrat dassociation que par suite le grief tireacute
de la meacuteconnaissance du principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales manque
en fait raquo
Le Conseil constitutionnel a statueacute dans le mecircme sens au sujet de lrsquoinstitution drsquoun
creacutedit drsquoimpocirct en matiegravere drsquoapprentissage ou de la possibiliteacute de modifier la dureacutee du contrat
drsquoapprentissage mecircme si ces mesures en rendant lrsquoapprentissage plus attrayant ont pour effet
drsquoaugmenter le nombre drsquoapprentis et donc drsquoaccroicirctre les charges des reacutegions dans ce
domaine (CC ndeg 2004-509 DC du 13 janvier 2005)
En quatriegraveme lieu le principe drsquoeacutegaliteacute entre les charges publiques est respecteacute
En effet en plus du caractegravere subsidiaire et reacutesiduel du meacutecanisme la participation
financiegravere preacutevue par lrsquoarticle 6 de la proposition de loi srsquoapplique agrave lrsquoensemble des
communes ne disposant pas drsquoun eacutetablissement dispensant un enseignement de langue
reacutegionale ce qui est coheacuterent au regard de lrsquoobjet de la loi Les critegraveres de la participation
financiegravere preacutevus par lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 sont en tout eacutetat de cause objectifs et
rationnels eacutetablis et mis en œuvre depuis plusieurs anneacutees Les garanties de lrsquoarticle 13 de la
DDHC sont donc respecteacutees
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
En cinquiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir du respect
de plusieurs normes constitutionnelles
En affirmant depuis 2008 que les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la
France lrsquoarticle 75-1 de la Constitution donne un ancrage constitutionnel au deacuteveloppement
de lrsquousage et de lrsquoenseignement des langues reacutegionales Or sans la participation financiegravere des
communes de reacutesidence agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat lrsquoenseignement des langues reacutegionales serait compromis Par
conseacutequent lrsquoarticle 6 de la proposition de loi constitue une garantie leacutegale du respect de
lrsquoaffirmation porteacutee par lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Le mecircme raisonnement sera tenu agrave propos de lrsquoensemble des principes constitutionnels
qui donnent une assise agrave lrsquousage et agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales la liberteacute
drsquoexpression et de communication (article 11 DDHC) la liberteacute drsquoenseignement (PFRLR)
dont pourrait deacutecouler une exigence en matiegravere de droit des parents de choisir les meacutethodes
eacuteducatives (CE 19 juillet 2017 Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150)
lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant (alineacutea 10 et 11 du Preacuteambule de 1946) le principe drsquoeacutegaliteacute
(article 6 DDHC) le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction (alineacutea 13 du Preacuteambule de 1946)
Sans lrsquoarticle 6 de la proposition de loi lrsquoeffectiviteacute de lrsquoensemble de ces normes
constitutionnelles serait consideacuterablement atteacutenueacutee et creacuteerait des diffeacuterences de traitement
injustifieacutees et deacutependantes de la volonteacute des communes
De plus lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir drsquoun objectif de
clarification et de seacutecurisation du droit applicable qui peut se rattacher agrave lrsquoarticle 16 de la
DDHC degraves lors que les textes jusqursquoagrave preacutesent applicables eacutetaient ambigus et ont donneacute lieu agrave
des contentieux En rendant obligatoire ce qui eacutetait avant une faculteacute pour autant soumise agrave
un rocircle non neacutegligeable du preacutefet lrsquoarticle 6 de la proposition de loi clarifie le droit
applicable Ainsi une deacuteputeacutee preacutecisait lors des deacutebats parlementaires que laquo lrsquoarticle 34 de la
loi pour une eacutecole de la confiance relatif au versement du forfait scolaire a susciteacute de
nombreux imbroglios administratifs Ainsi chez moi en Bretagne plus de 150 demandes de
meacutediation ont eacuteteacute transmises aux services de lrsquoEacutetat ce qui met en lumiegravere lrsquoambiguiumlteacute de la loi
et les difficulteacutes de son application Je soutiens donc fortement lrsquoarticle 2 quinquies [devenu
article 6] issu des travaux du Seacutenat qui legraveve toute incertitude raquo (Mme Claudia Rouaux
Commission des affaires sociales Assembleacutee nationale 31 mars 2021)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi creacutee un meacutecanisme subsidiaire et reacutesiduel dont laporteacutee est deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels Sans creacuteer ni transfeacutererde nouvelle compeacutetence aux communes cette disposition assure une mise en œuvreuniforme des droits et liberteacutes et peut se preacutevaloir de nombreuses normesconstitutionnelles confeacuterant agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales et agrave son soutienfinancier de solides justifications constitutionnelles
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 12 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 12 mai 2021
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure Mme Mastorpdf
Lettre Wanda Mastor accompagnant la porte eacutetroite
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure MSchellenberger et autrespdf
Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure assESKOLIL pdf
lettre daccompagnement CC
Porte eacutetroite loi langues reacutegionales (2)
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure M Bertrand Pancherpdf
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
Contribution exteacuterieure agrave lrsquoappui de la conformiteacute agrave la Constitution
de la loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et agrave leur promotion
Longtemps consideacutereacutees comme strictement inconciliables avec le prin-
cipe de lrsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique les langues reacutegionales nrsquoappartenaient
qursquoau monde de la reacutesistance de quelques deacutefenseurs estimeacutes ou meacutepriseacutes1
Elles appartiennent depuis quelques anneacutees au monde du droit y compris du
droit constitutionnel mecircme si ce lien continue de nourrir drsquoimmenses malen-
tendus Car la reconnaissance la protection et la promotion des langues reacute-
gionales nrsquoentravent en rien le principe de lrsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique
Surtout en des peacuteriodes troubleacutees telles que nous avons deacutesormais pris lrsquoha-
bitude de vivre lrsquoarticle premier de la Constitution doit ecirctre sans cesse rap-
peleacute le serment drsquoune Reacutepublique laiumlque qui offre la mecircme eacuteducation pu-
blique agrave toutes et tous qui ne connaicirct qursquoun seul peuple et une seule langue
officielle Si notre Constitution reconnaicirct les laquo populations drsquooutre-mer raquo elle
rejette lrsquoacception des peuples au pluriel sous peine de diluer les valeurs de
la Nation franccedilaise Assureacutement les questions de seacuteparatisme de commu-
nautarisation du repli identitaire mettent agrave mal la laquo coheacutesion nationale raquo2
1 Voir Amane Gogorza et Wanda Mastor (sous la direction de) Les langues reacutegionales et la construction de lrsquoEacutetat LGDJ collection Grands colloques 2019 318 p 2 Conseil drsquoEacutetat ordonnance ndeg374508 du 9 janvier 2014 Ministre de lrsquointeacuterieur c Socieacuteteacute Les Productions de la Plume et M Dieudonneacute MrsquoBala MrsquoBala
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Mais lrsquoamalgame ne saurait ecirctre fait avec lrsquoadmission de certains particula-
rismes locaux qui font tout au contraire la richesse reacutepublicaine Laquelle
nrsquoest agrave aucun moment en contradiction avec le principe de lrsquoindivisibiliteacute de
la Reacutepublique comme le droit constitutionnel compareacute (constitutions et juris-
prudences des cours constitutionnelles) en apporte la preuve irreacutefutable
Les arguments qui consistent agrave rappeler -marteler- sans cesse que lrsquoarticle 75-
1 de la Constitution nrsquoa pas de porteacutee normative depuis la deacutecision ndeg 2011-
130 QPC du 20 mai 2011 du Conseil constitutionnel3 renvoient certaines dis-
positions de notre texte fondamental agrave une fonction deacuteclarative pour ne pas
dire deacutecorative Le fait que lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ne constitue pas
dans le cadre drsquoune proceacutedure de QPC un droit ou une liberteacute que la Consti-
tution garantit ne le vide pas pour autant de tout contenu Pour le dire au-
trement si ledit article ne peut ecirctre invoqueacute agrave lrsquoappui drsquoune QPC cette inter-
preacutetation contentieuse ne saurait le renvoyer au monde des principes pure-
ment deacuteclaratoires qui nrsquoont ce dit en passant pas leur place dans la norme
la plus eacuteleveacutee qui soit (sauf agrave offrir une nouvelle deacutefinition de la norme ce qui
srsquoavegravere compliqueacute)
Non invocable agrave lrsquoappui drsquoune QPC la disposition selon laquelle laquo les langues
reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo nrsquoen est pas moins une
adresse au leacutegislateur Crsquoest agrave cette adresse qui appelle et leacutegitime un deacuteve-
loppement leacutegislatif de la protection et la promotion des langues reacutegionales
que reacutepond la proposition de loi du deacuteputeacute Paul Molac
Il faut mecircme aller plus loin sur la voie de lrsquointerpreacutetation de lrsquoarticle 75-1 Non
seulement la loi deacutefeacutereacutee lui donne une reacutealiteacute mais encore creacutee-t-elle les con-
ditions mateacuterielles de son existence La loi dite laquo Molac raquo est conforme agrave la
3 Deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 Mme Ceacutecile L et autres [Langues reacutegionales] laquo
Consideacuterant quaux termes de larticle 75-1 de la Constitution Les langues reacutegionales ap-
partiennent au patrimoine de la France que cet article ninstitue pas un droit ou une liberteacute
que la Constitution garantit que sa meacuteconnaissance ne peut donc ecirctre invoqueacutee agrave lappui
dune question prioritaire de constitutionnaliteacute sur le fondement de larticle 61-1 de la Cons-titution (hellip) raquo (consideacuterant 3)
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Constitution et comble une lacune Ce nrsquoest pas son existence qui pose pro-
blegraveme mais bien son absence drsquoexistence Il appartient au leacutegislateur de mettre
en œuvre les dispositions de la Constitution afin qursquoelles ne se cantonnent
pas au monde du virtuel La loi sur les langues reacutegionales est lrsquoune des garan-
ties leacutegales de la Constitution
Tout texte transmis au controcircle du Conseil constitutionnel vigile du droit
jouit de la preacutesomption de constitutionnaliteacute Votre jurisprudence teacutemoigne
qursquoau nom de la primauteacute de la Constitution votre rocircle est de sauver la loi en
lrsquoeacutepurant de ses vices drsquoinconstitutionnaliteacute Si la deacutemocratie repreacutesentative
accepte la leacutegitimiteacute drsquoune censure drsquoun texte adopteacute par 925 repreacutesentants
de la Nation par neuf membres nommeacutes crsquoest au nom de ladite primauteacute de
la Constitution Laquelle nrsquoest pas violeacutee par la preacutesente loi soumise agrave votre
examen Il faut au preacutealable rappeler le contexte de lrsquoadoption de la loi qui ne
saurait se limiter au contexte parlementaire Lrsquoobjectif de la loi est de reacutepondre
agrave une adresse faite par le pouvoir constituant lui-mecircme conformeacutement agrave un
esprit plus geacuteneacuteral de protection et promotion des langues reacutegionales qui ir-
rigue conventions internationales et constitutions eacutetrangegraveres (I) Non seule-
ment la loi du 8 avril 2021 ne viole pas la Constitution mais encore met-elle
en œuvre certaines de ses dispositions (II)
I Le contexte de la loi relative agrave la protection patrimoniale des langues
reacutegionales et agrave leur promotion
Dans lrsquoobjectif sans doute drsquoassurer un climat plus serein qui doit preacutesider
agrave lrsquoinstruction et la deacutelibeacuteration la lettre de saisine des soixante deacuteputeacutes nrsquoest
jamais publieacutee par le Conseil constitutionnel en amont de la publication de la
deacutecision Ce nrsquoest ni le moment ni le lieu pour plaider pour ladite publication
mais force est de constater qursquoil nrsquoest pas tregraves sain que dans une deacutemocratie
les eacuteleacutements censeacutes ecirctre secrets laquo fuitent raquo dans la presse dans les couloirs et
autres ceacutenacles reacuteserveacutes agrave une infime partie des citoyens Deacuteposeacutee agrave la hacircte
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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la lettre de saisine semble reacutedigeacutee de faccedilon deacuteconcertante La deacutefaillance for-
melle nrsquoenlegraveve pas dans lrsquoabsolu de la force aux arguments mais prouve en
lrsquoespegravece lrsquoextrecircme preacutecipitation dans laquelle les choses se sont deacuterouleacutees
Il est neacutecessaire avant de deacutevelopper les arguments au soutien de la confor-
miteacute agrave la Constitution de la loi et notamment de son article 6 de rappeler le
contexte de son adoption La proposition de loi du deacuteputeacute Paul Molac ayant
par ailleurs les faveurs de lrsquoopinion publique et le soutien de treize preacutesidents
de reacutegions4 srsquoinscrit dans un mouvement Celui de la deacutefense et la promotion
des langues reacutegionales lesquelles appartiennent depuis la reacutevision constitu-
tionnelle du 23 juillet 2008 au laquo patrimoine de la France raquo Ce mouvement
favorable agrave la protection et promotion des langues reacutegionales nrsquoest pas uni-
quement parlementaire il est aussi celui drsquoun ensemble plus vaste Celui de
notre propre Constitution (A) des engagements internationaux et de la grande
majoriteacute des constitutions des pays voisins (B) Ensemble qui permet de mieux
saisir le contexte parlementaire franccedilais de lrsquoadoption de la loi (C)
A Le contexte constitutionnel franccedilais
Lrsquoabsence de protection et de valorisation des langues reacutegionales est une
entrave au rayonnement de la France qui loin de srsquoeacutepuiser dans son caractegravere
indivisible que la loi deacutefeacutereacutee ne remet absolument pas en cause srsquoenrichit de
ses composantes Indivisibiliteacute ne signifie pas uniformiteacute Le constituant a lui-
mecircme choisi en 2003 de preacuteciser degraves lrsquoouverture de notre texte suprecircme que
lrsquoorganisation de notre Reacutepublique eacutetait laquo deacutecentraliseacutee raquo Il faut accepter tous
les contours conseacutequences de cette affirmation solennelle qui ne peut avoir
4 Communiqueacute de presse du 16 mars 2021 laquo Notre responsabiliteacute en tant que preacutesidents de
Reacutegion et de Collectiviteacute est de pouvoir garantir et promouvoir la vitaliteacute culturelle et patri-
moniale de nos territoires Cette proposition va dans le bon sens afin que vivent nos langues
que lrsquoUNESCO classe pour une grande majoriteacute drsquoentre elles en grand danger drsquoextinction
Crsquoest en ce sens que la reacutedaction de la proposition de loi dite Molac tel qursquoissue des travaux du Seacutenat va dans le bon sens et que nous appelons de nos vœux une adoption conforme par
les deacuteputeacutes de tous les bancs afin que ce texte puisse entrer en vigueur raquo httpsregions-
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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que des applications laquo particuliegraveres raquo sur certaines parties de notre territoire
Les modifications successives de la Constitution ont progressivement em-
prunteacute la voie de la reconnaissance de ces implications toujours plus de dis-
positions deacuterogatoires de reconnaissances mecircme symboliques laquo drsquointeacuterecircts
particuliers raquo drsquolaquo adaptations neacutecessaires raquo pour ne citer qursquoelles jusqursquoagrave la
diffeacuterenciation des normes toujours inscrite dans lrsquoactuel projet de loi consti-
tutionnelle5 Si lrsquoon observe les discussions actuelles relatives au projet de loi
laquo 4D raquo ou la validation par le Conseil constitutionnel en avril dernier de la loi
organique relative agrave la simplification des expeacuterimentations susceptibles decirctre
meneacutees par les collectiviteacutes territoriales6 la voie de la reconnaissance du par-
ticularisme des territoires semble srsquoannoncer
En 2003 la Constitution a deacutecideacute une fois pour toutes que lrsquouniteacute nrsquoeacutetait pas
neacutecessairement lrsquouniformiteacute Parmi les richesses territoriales qui loin drsquoeacutegra-
tigner lrsquoimage drsquoun Eacutetat unitaire la renforce par sa capaciteacute agrave promouvoir la
diversiteacute au sein drsquoune Nation forte les langues reacutegionales occupent une place
particuliegravere Leur entreacutee remarqueacutee dans lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en
2008 nrsquoa eu pour le moment que des effets symboliques sur lesquels il y aura
lieu de revenir plus loin Sous la preacutesidence de Franccedilois Hollande le Parle-
ment fort de la volonteacute drsquoappliquer la 56egraveme promesse de campagne du candi-
dat devenu preacutesident a remis la question des langues reacutegionales sur le devant
de la scegravene institutionnelle Le rapport drsquoinformation ndeg489 de lrsquoAssembleacutee
nationale sur les implications de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales
et minoritaires7 est essentiellement descriptif mais teacutemoigne de la volonteacute
parlementaire de se saisir de nouveau de la question De leurs cocircteacutes les tri-
bunaux ordinaires ont eacutegalement eu lrsquooccasion ces derniegraveres anneacutees de se
pencher sur la question du bilinguisme notamment que ce soit en matiegravere
5 Projet de loi constitutionnelle pour un renouveau de la vie deacutemocratique enregistreacute agrave la Preacutesi-
dence de lrsquoAssembleacutee nationale le 29 aoucirct 2019 6 Deacutecision ndeg2021-816 DC du 15 avril 2021 Loi organique relative agrave la simplification des ex-peacuterimentations mises en œuvre sur le fondement du quatriegraveme alineacutea de larticle 72 de la Cons-
titution 7 M Jean-Jacques Urvoas Rapport drsquoinformation ndeg 489 du 12 deacutecembre 2012 sur les impli-
cations constitutionnelles drsquoune ratification par la France de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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de signaleacutetique routiegravere8 ou de lrsquoutilisation de la langue reacutegionale dans des
organes deacutelibeacuterants9
Agrave lrsquoeacutepoque de lrsquoentreacutee dans lrsquoarticle 75-1 (dont on relegravevera lrsquoeacuteloignement vo-
lontaire vis-agrave-vis de lrsquoarticle 2) de lrsquoeacuteleacutevation des langues reacutegionales au rang de
laquo patrimoine de la France raquo en 2008 certains espoirs avaient pu ecirctre leacutegitime-
ment nourris Cette preacutecision nrsquoest pas loin srsquoen faut le seacutesame pour la rati-
fication de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires10 qui
en lrsquoeacutetat actuel de la jurisprudence du Conseil constitutionnel comporte des
clauses jugeacutees contraires agrave la Constitution
B Le contexte international
Il faut ici distinguer deux niveaux Si le contexte international est favorable
agrave la protection et promotion des langues reacutegionales crsquoest en raison drsquoune part
des engagements internationaux que la France les ait ratifieacutes ou non drsquoautre
part de la plupart des constitutions des pays voisins qui accordent une place
speacutecifique aux langues reacutegionales
En 1999 faisant la synthegravese de ses deacutecisions anteacuterieures11 le
Conseil constitutionnel a estimeacute que la Charte europeacuteenne des langues reacutegio-
nales ou minoritaires ne pouvait au vu des principes drsquouniciteacute du peuple fran-
ccedilais drsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique et drsquoeacutegaliteacute des citoyens ecirctre ratifieacutee
laquo La Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires en ce
qursquoelle confegravere des droits speacutecifiques agrave des groupes de locuteurs de
8 Tribunal administratif de Montpellier 12 octobre 2010 Mouvement reacutepublicain de salut pu-blic ndeg0903420 Cour Administrative dAppel de Marseille 28 juin 2012 Commune de Ville-neuve-les-Maguelone ndeg 10MA04419 9 Conseil drsquoEacutetat 29 mars 2006 Haut-Commissaire de la Reacutepublique en Polyneacutesie Franccedilaise
ndeg282335 Rec 179 22 feacutevrier 2007 Socieacuteteacute immobiliegravere Caroline ndeg299649 Cour adminis-trative drsquoappel de Marseille 13 octobre 2011 Commune de Galeria ndeg10MA02330 10 Table ronde (Jean-Eacuteric Gicquel Ferdinand Meacutelin-Soucramanien Michel Verpeaux et Jean-
Marie Woehrling) organiseacutee par la commission des lois 29 novembre 2012 sur les implications
constitutionnelles de la question de la ratification de la Charte europeacuteenne des langues reacutegio-
nales ou minoritaires httpswwwassemblee-nationalefr14cr-cloi12-13c1213022asp 11 Deacutecisions ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 loi relative agrave lrsquoemploi de la langue franccedilaise et
ndeg96-373 DC du 9 avril 1996 loi organique portant statut drsquoautonomie de la Polyneacutesie fran-ccedilaise
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de territoires dans les-
quels ces langues sont pratiqueacutees porte atteinte aux principes constitu-
tionnels drsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique drsquoeacutegaliteacute devant la loi et drsquouniciteacute
du peuple franccedilais raquo12
Le Conseil se deacutefendant au passage de meacutepriser les langues reacutegionales parmi
les engagements souscrits par la France preacutecise-t-il laquo la plupart au demeu-
rant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France
en faveur des langues reacutegionales raquo
Parmi les arguments qui plaident en faveur drsquoune ratification figure celui de
lrsquoeacutevolution du contexte Honorer de la ratification un texte deacutejagrave signeacute ne se
pose aujourdrsquohui plus dans les mecircmes termes qursquoen 1999 La reacuteforme cons-
titutionnelle de 2003 - dont certains aspects ont eacuteteacute affineacutes en 2008 - rappe-
lons-le a consideacuterablement modifieacute la vision jacobine de notre Reacutepublique qui
reconnaicirct agrave preacutesent lrsquoexistence de laquo populations raquo en son sein les particula-
rismes locaux et les neacutecessiteacutes des adaptations normatives Mais la ratification
par la France de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires
qui avait eacuteteacute voteacutee le 28 janvier 2014 par lrsquoAssembleacutee nationale a eacuteteacute rejeteacutee
par le Seacutenat le 27 octobre 2015 Soulignons que ce rejet nrsquoempecircche pas la
force du contexte qui est au niveau europeacuteen largement favorable agrave la pro-
tection et promotion des langues reacutegionales La France a par ailleurs ratifieacute
drsquoautres conventions internationales qui permettent de poursuivre cet objec-
tif tel est par exemple le cas de la Convention pour la sauvegarde du patri-
moine culturel immateacuteriel de 2003 et de la Convention sur la protection et la
promotion de la diversiteacute des expressions culturelles de 2005 qui rappelle no-
tamment dans son preacuteambule laquo que la diversiteacute linguistique est un eacuteleacutement
fondamental de la diversiteacute culturelle raquo et reacuteaffirme laquo le rocircle fondamental que
joue lrsquoeacuteducation dans la protection et la promotion des expressions cultu-
relles raquo
12 Il srsquoagissait lagrave au demeurant drsquoune affirmation tregraves discutable car la lettre de la Charte
nrsquoimposait nullement mecircme si elle lrsquoencourageait que des droits speacutecifiques fussent reconnus agrave des groupes (voir Guy Carcassonne Rapport au Premier ministre sur la compatibiliteacute entre la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires et la Constitution septembre 1998
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Le droit compareacute apporte la preuve irreacutefutable de lrsquoabsence drsquoin-
compatibiliteacute entre le caractegravere indivisible voire unitaire drsquoune Reacutepublique
et la reconnaissance des langues reacutegionales en son sein13 Un tour drsquohorizon
des textes des constitutions europeacuteennes et des deacutecisions des cours constitu-
tionnelles permet de mettre en eacutevidence plusieurs eacuteleacutements significatifs Le
droit compareacute nous enseigne que juridiquement la question des langues srsquoap-
preacutehende agrave travers deux prismes premiegraverement celui de la forme de lrsquoEacutetat
Le lien entre uniteacute de lrsquoEacutetat et unilinguisme est aussi eacutevident que celui entre
Eacutetat composeacute (reacutegional ou feacutedeacuteral) et multilinguisme Deuxiegravemement celui des
droits des locuteurs Selon cette acception les langues reacutegionales sont tradi-
tionnellement associeacutees de maniegravere neacutegative au principe de non-discrimina-
tion de maniegravere positive aux droits linguistiques dont les locuteurs seraient
les beacuteneacuteficiaires14
En droit constitutionnel compareacute lrsquoameacutenagement de la pluraliteacute linguistique
diverge selon que les Eacutetats reconnaissent une pluri-officialiteacute sur lrsquoensemble
du territoire ou au seul niveau local La premiegravere hypothegravese est celle naturel-
lement choisie par la Belgique et la Suisse Eacutetats feacutedeacuteraux europeacuteens Selon
lrsquoarticle 4 de la Constitution helveacutetique laquo les langues nationales sont lrsquoalle-
mand le franccedilais lrsquoitalien et le romanche raquo De son cocircteacute la Constitution belge
eacutenonce que laquo la Belgique comprend trois communauteacutes la Communauteacute fran-
ccedilaise la Communauteacute flamande et la Communauteacute germanophone raquo et fait
eacutegalement reacutefeacuterence agrave laquo quatre reacutegions linguistiques la reacutegion de langue fran-
ccedilaise la reacutegion de langue neacuteerlandaise la reacutegion bilingue de Bruxelles-Capi-
tale et la reacutegion de langue allemande raquo En revanche lrsquoItalie et lrsquoEspagne ne
reconnaissent qursquoune seule langue officielle sur lrsquoensemble du territoire en
mecircme temps qursquoest ameacutenageacutee au niveau local la pluraliteacute linguistique Crsquoest
13 Voir Veacuteronique Bertile Langues reacutegionales ou minoritaires et Constitution France Espagne et Italie Bruylant Collection Droit public compareacute et europeacuteen 2008 516 p et Wanda Mas-
tor laquo Le statut constitutionnel des langues reacutegionales en droit compareacute De la reconnaissance agrave lrsquoindiffeacuterence raquo Glottopol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html 14 Voir le Rapport explicatif de de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minori-
taires Conseil de lrsquoEurope Seacuterie des Traiteacutes europeacuteens ndeg148 Strasbourg 5 novembre 1992 httpsrmcoeint16800cb620
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ce second type drsquoameacutenagement qui est ici inteacuteressant agrave observer les Eacutetats
reacutegionaux italien15 et espagnol16 eacutetant qualifieacutees par leurs constitutions drsquoin-
divisibles (et mecircme eacutegalement laquo un raquo pour lrsquoItalie alors que le mot a disparu
de la Constitution franccedilaise)
De maniegravere scheacutematique plusieurs postures essentielles vis-agrave-vis des langues
reacutegionales peuvent ecirctre observeacutees dans lrsquoEurope contemporaine La majoriteacute
des pays voisins confegraverent aux langues reacutegionales des statuts juridiques dif-
feacuterencieacutes Coexistent parfois une langue majoritaire et des langues minori-
taires qui beacuteneacuteficient de mesures protectrices Dans ce cas les langues reacutegio-
nales jouissent drsquoune reconnaissance mais seulement au niveau drsquoun terri-
toire identifieacute Pour le dire autrement elles ne concurrencent pas la langue
majoritaire au niveau national Il ne srsquoagit ni plus ni moins que lrsquoexpression
drsquoun droit agrave la diffeacuterence Drsquoun droit agrave la diffeacuterenciation pour reprendre un
terme qui a actuellement les faveurs du gouvernement franccedilais Drsquoautres pays
ont mis en place le bilinguisme officiel qui peut srsquoexprimer dans plusieurs
variantes Ce statut confegravere aux citoyens en principe du moins le choix duti-
liser lune ou lautre des langues officielles dans leurs rapports avec lEacutetat
Cette co-officialiteacute peut srsquoopeacuterer au niveau de tout le territoire (comme en Bel-
gique et en Suisse par exemple) ou seulement sur une partie de celui-ci
(comme en Espagne ou en Italie)
On pourrait objecter que la comparaison avec lrsquoEspagne et lrsquoItalie deux Eacutetats
reacutegionaux nrsquoest pas pertinente Or ces deux Eacutetats sont qualifieacutes de Royaume
ou Reacutepublique indivisibles par leurs constitutions respectives indivisibiliteacute
qui nrsquoempecircche pas la reconnaissance la protection et la promotion des
langues reacutegionales en leur sein Ainsi la Constitution espagnole consacre clai-
rement le multilinguisme dans le cadre de ses communauteacutes autonomes17
15 Article 5 de la Constitution de la Reacutepublique italienne de 1947 laquo La Reacutepublique une et indivisible reconnaicirct et favorise les autonomies locales (hellip) raquo 16 Article 2 de la Constitution du Royaume drsquoEspagne de 1978 laquo La Constitution est fondeacutee
sur luniteacute indissoluble de la nation espagnole patrie commune et indivisible de tous les Es-
pagnols Elle reconnaicirct et garantit le droit agrave lautonomie des nationaliteacutes et des reacutegions qui la
composent et la solidariteacute entre elles raquo 17 En vertu de lrsquoarticle 3 de la Constitution espagnole
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tout comme lrsquoItalie laquo Reacutepublique une et indivisible raquo laquo protegravege par des mesures
particuliegraveres les minoriteacutes linguistiques raquo (article 6)
Cette rapide eacutetude comparative permet de mettre en eacutevidence la singulariteacute de
la France au sein drsquoune Europe qui srsquoenorgueillit de se deacutefinir agrave travers la
richesse de sa diversiteacute Mais notamment depuis la loi constitutionnelle de
2008 le leacutegislateur franccedilais a agi dans le sens drsquoune protection et promotion
des langues reacutegionales la loi du 8 avril 2021 srsquoinscrivant dans ce processus
logique et coheacuterent
C Le contexte parlementaire franccedilais
La loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit donc dans un mouvement leacutegislatif reacutepondant agrave
lrsquoadresse du pouvoir constituant Laquelle concerne aussi le pouvoir exeacutecutif
La politique du ministegravere de lrsquoeacuteducation pour la deacutetermination du nombre de
places pour lrsquoagreacutegation et le CAPES des langues reacutegionales devrait aller de
pair avec les lois qui mettent en œuvre lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Ainsi
pour la langue basque il nrsquoy a pas eu de concours drsquoagreacutegation externe depuis
2018 anneacutee 2021 comprise il y a un seul poste pour lrsquoagreacutegation interne en
2021 2 pour le CAPES externe en 2021 et 2 pour le CAPES interne Pour la
langue bretonne et pour ne citer que lrsquoanneacutee en cours il y a un poste agrave lrsquoagreacute-
gation externe pas de concours pour lrsquoagreacutegation interne deux postes pour
le CAPES externe et 2 pour le CAPES interne Pour la langue corse il nrsquoy a pas
de concours cette anneacutee pour lrsquoagreacutegation externe et interne deux pour le
CAPES externe et aucun pour le CAPES interne Pour lrsquooccitan toujours pour
2021 il y a un poste pour lrsquoagreacutegation externe pas de concours pour lrsquoagreacute-
gation interne quatre pour le CAPES externe et un pour le CAPES interne
Ceci eacutetant juste preacuteciseacute il faut agrave preacutesent se concentrer sur lrsquoaction parlemen-
taire de mise en œuvre des dispositions de la Constitution
laquo 1 Le castillan est la langue espagnole officielle de lEacutetat Tous les Espagnols ont le devoir de
le connaicirctre et le droit de lutiliser
2 Les autres langues espagnoles sont aussi officielles dans leurs communauteacutes autonomes
respectives conformeacutement agrave leurs statuts
3 La richesse de la diversiteacute linguistique de lEspagne est un patrimoine culturel qui fait lobjet dun respect et dune protection speacuteciales raquo
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Videacutee drsquoune large part de sa substance en premiegravere lecture par la commission
des affaires culturelles et de leacuteducation de lrsquoAssembleacutee nationale la proposi-
tion de loi du deacuteputeacute Molac a ensuite retrouveacute ses objectifs initiaux gracircce agrave la
proceacutedure parlementaire qui donne agrave notre reacutegime repreacutesentatif tout son
sens discussions en commissions deacutebats en seacuteances publiques navette
amendements multiples pour parvenir agrave une adoption deacutefinitive agrave une majo-
riteacute non importante mais eacutecrasante des voix Agrave quelques heures de la pro-
mulgation de la loi par le Preacutesident de la Reacutepublique une partie de cette mecircme
majoriteacute a neacuteanmoins saisi le Conseil constitutionnel dans le cadre de lrsquoarticle
61 alineacutea 2 de la Constitution
Deacutepocirct de la proposition de loi
Deacuteposeacutee le 30 deacutecembre 2019 par le deacuteputeacute Paul Molac et autres deacuteputeacutes18
la proposition de loi apporte des mesures de protection et de promotion des
langues reacutegionales dans trois domaines le patrimoine lrsquoenseignement les
services publics via la signaleacutetique et les actes drsquoeacutetat civil Elle a eacuteteacute adopteacutee
le 8 avril 2021 par 247 voix pour 76 voix contre et 19 abstentions au terme
de la proceacutedure ci-dessous rappeleacutee
Renvoi agrave la commission des affaires culturelles et de leacuteducation
La proposition de loi a eacuteteacute renvoyeacutee agrave la commission des affaires cultu-
relles et de leacuteducation agrave deacutefaut de constitution drsquoune commission speacuteciale
dans les deacutelais preacutevus par les articles 30 et 31 du Regraveglement Le rapport fait
au nom de la commission par le deacuteputeacute Paul Molac nommeacute par elle a eacuteteacute
enregistreacute agrave la preacutesidence de lrsquoAssembleacutee nationale le 5 feacutevrier 2020 Preacutesenteacute
18 Sylvain BRIAL Jean-Feacutelix ACQUAVIVA Michel CASTELLANI Jean-Michel CLEacuteMENT
Paul-Andreacute COLOMBANI Charles de COURSON Jeanine DUBIEacute Freacutedeacuterique DUMAS Mrsquojid
EL GUERRAB Olivier FALORNI Yannick FAVENNEC BECOT Sandrine JOSSO Franccedilois-Mi-
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comme un moyen de deacutefendre les laquo langues de France raquo19 en danger et srsquoap-
puyant sur lrsquoexistant qui est la marque drsquoune eacutevolution rappeleacutee plus loin (II)
le texte entend laquo aller plus loin raquo en rehaussant la protection lrsquoaccessibiliteacute et
la visibiliteacute des langues reacutegionales dans les trois domaines preacuteciteacutes
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle premier re-
latif au patrimoine Ce dernier preacutecise en compleacutetant ainsi lrsquoar-
ticle L 1 du code du patrimoine que la conservation et la con-
naissance du patrimoine immateacuteriel sont drsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et que
les langues reacutegionales font partie de ce patrimoine
o La commission a adopteacute sans modifications lrsquoarticle 2 qui pro-
pose drsquoinclure parmi les treacutesors nationaux les biens preacutesentant
un inteacuterecirct majeur pour la connaissance des langues franccedilaise et
reacutegionales Le texte preacutevoit en effet outre pour les langues reacutegio-
nales des mesures de protection de notre patrimoine linguistique
dans une deacutemarche globale
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 3 qui disposait que des con-
ventions passeacutees entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pouvaient preacutevoir que
la langue reacutegionale est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de
lrsquohoraire normal des enseignements (des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires des collegraveges et des lyceacutees des territoires concerneacutes) Il
ne srsquoagissait pourtant que drsquoeacutetendre une regravegle deacutejagrave applicable en
Corse pour lrsquoenseignement de la langue corse lrsquoarticle L 312-11-
1 du code de lrsquoeacuteducation introduit par la loi ndeg 2002-92 du
22 janvier 2002 relative agrave la Corse dispose en effet que la langue
corse est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de lrsquohoraire normal
des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires de Corse Le Conseil cons-
titutionnel nrsquoa pas censureacute cette disposition tant que lrsquoenseigne-
ment eacutetait entendu comme ne revecirctant pas laquo un caractegravere obliga-
toire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo (deacutecision ndeg2001-
454 DC du 17 janvier 2002)
19 Sur cette notion de laquo langues de France raquo voir Les langues de France vingt ans apregraves Glot-topol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html
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o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 4 qui preacutevoyait que lenseigne-
ment bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale pouvait se reacuteali-
ser sous forme immersive laquo dans le respect des objectifs de maicirc-
trise des deux langues agrave chaque niveau denseignement raquo
o La commission a supprimeacute les articles 5 et 6 de la proposition de
loi Le premier manifestait la volonteacute drsquointroduire au sein drsquoun
nouvel article L 151-4-1 du code de lrsquoeacuteducation une deacuterogation
au principe drsquointerdiction de financement des deacutepenses drsquoinves-
tissement des eacutecoles priveacutees par les collectiviteacutes publiques en fa-
veur de lrsquoenseignement bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale
(article 5 de la proposition de loi) Le second eacutetendait la mecircme
deacuterogation au principe drsquointerdiction de financement des deacute-
penses drsquoinvestissement des collegraveges et lyceacutees par les collectiviteacutes
publiques
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 7 qui preacutevoyait drsquoeacutelargir les
cas dans lesquels existe un droit agrave inscrire son enfant dans une
eacutecole drsquoune autre commune afin qursquoil puisse suivre un enseigne-
ment de langue reacutegionale Inscription qui entraicircnait eacutegalement la
prise en charge du forfait scolaire par la commune de reacutesidence
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle 8 qui a pour
objet de renforcer la place et lrsquousage des langues reacutegionales dans
la vie publique en facilitant la traduction en langue reacutegionale des
inscriptions et signaleacutetiques apposeacutees sur les bacirctiments publics
les voies publiques de circulation et les voies navigables ainsi que
sur les principaux supports de communication institutionnelle
des services publics
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 9 qui avait pour objet la pos-
sibiliteacute pour les services publics drsquoeacutetat civil drsquoutiliser dans les
actes drsquoeacutetat civil qursquoils produisent les signes diacritiques des
langues reacutegionales en usage sur le territoire
o Enfin la commission a eacutegalement supprimeacute lrsquoarticle 10 qui preacute-
voyait un gage pour compenser les charges eacuteventuelles creacuteeacutees par
les dispositions de la proposition de loi
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Crsquoest donc un texte largement laquo eacutepureacute raquo par rapport agrave sa version initiale qui a
eacuteteacute soumis agrave la discussion en seacuteance publique en premiegravere lecture agrave lrsquoAssem-
bleacutee nationale Le porteur de la proposition va naturellement utiliser toutes
les potentialiteacutes offertes par la Constitution pour tenter de revenir par le biais
des amendements agrave son esprit initial
Discussion du texte nordm2654 adopteacute par la commission sur la proposition
de loi de M Paul Molac agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion (2548)
85 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes permettant de revenir sur peu de points
cependant agrave lrsquoobjectif initial de la proposition de loi Ainsi lrsquoamendement ndeg64
deacuteposeacute le 10 feacutevrier 2020 par le deacuteputeacute et rapporteur Paul Molac a permis de
rectifier lrsquoaspect purement deacuteclaratoire de lrsquoarticle premier auquel avait conclu
la commission lrsquoamendement ndeg69 deacuteposeacute le mecircme jour par Paul Molac eacutega-
lement permet lrsquoautorisation dans les actes drsquoeacutetat civil des signes diacritiques
des langues reacutegionales lrsquoamendement ndeg80 toujours deacuteposeacute par Paul Molac
modifie la loi Toubon (article 3 du texte de loi deacutefinitif) Mais agrave ce stade de la
discussion parlementaire le texte eacutetait encore dans une version tregraves eacuteloigneacutee
de sa mouture premiegravere
Adoption le 13 feacutevrier 2020 de la laquo petite loi raquo nordm408 par lAssem-
bleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion
Transmission au Seacutenat de la proposition de loi ndeg321 le 14 feacutevrier
2020
o Travaux en commission La commission de la culture de lrsquoeacuteduca-
tion et de la communication a deacutesigneacute Mme Monique de Marco
rapporteure sur la proposition de loi ndeg321 (2019-2020) adopteacutee
par lAssembleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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des langues reacutegionales et agrave leur promotion Commenccedilant par deacute-
clarer que laquo la question de la promotion des langues reacutegionales
deacutepasse les clivages politiques raquo Monique de Marco a proposeacute en
commission dadopter le texte conforme tout en avouant que des
dispositifs leacutegislatifs laquo plus ambitieux pourraient mieux assurer la
promotion des langues reacutegionales raquo Au cours des discussions le
regret de lrsquoabsence de la question de lrsquoenseignement a eacuteteacute exprimeacute
regret qui concerne en reacutealiteacute non la proposition de loi initiale
mais le texte de la commission de lrsquoAssembleacutee nationale laquo La pro-
position de loi de Paul Molac est la bienvenue parce quelle rap-
pelle agrave lEacutetat un certain nombre de ses obligations en ce quelle
preacutevoit un cadrage de la loi Toubon et quelle seacutecurise la place
des langues dans lespace public En revanche nous avons tous
eacuteteacute surpris par labsence totale de reacutefeacuterence agrave lEacuteducation natio-
nale Nous avons donc fait des recherches qui ont montreacute que les
deacuteputeacutes de la majoriteacute preacutesidentielle certainement agrave lappel du
ministre de leacuteducation nationale avaient systeacutematiquement sup-
primeacute tous les articles concernant lenseignement Nous nous re-
trouvons donc avec une magnifique proposition de loi sur les
langues reacutegionales qui ne dit pas un mot de lenseignement
comme sil pouvait y avoir une politique linguistique en faveur des
langues reacutegionales qui ne passe pas par lenseignement raquo Et le
seacutenateur Max Brisson drsquoen appeler agrave la reacuteinsertion des disposi-
tions sur lrsquoenseignement laquo Ma chegravere collegravegue vous avez proposeacute
un vote conforme mais jespegravere que nous ferons preuve dimagi-
nation dans lheacutemicycle pour deacuteposer quelques amendements qui
rappelleront au Gouvernement quil ny a pas de politique linguis-
tique qui ne sappuie sur leacuteducation Sinon cest de lenfu-
mage raquo20
20 Comptes-rendus de la commission de la culture de lrsquoeacuteducation et de la communication
seacuteance du 2 deacutecembre 2020 httpwwwsenatfrcompte-rendu-commis-
sions20201130culturehtmltoc5
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La rapporteure confirme que laquo lrsquoamputation raquo est le fait des deacutepu-
teacutes et tout en srsquoavouant prudente pousse indirectement ses col-
legravegues seacutenateurs agrave user du droit drsquoamendement laquo Nous venons
dentendre un veacuteritable plaidoyer en faveur des langues reacutegio-
nales Mecircme si cette proposition de loi ne donne pas entiegravere satis-
faction car elle a eacuteteacute largement amputeacutee par lAssembleacutee natio-
nale je preacutefegravere my tenir dans un premier temps par prudence
Et libres agrave vous de deacuteposer des amendements raquo
Aucun amendement nayant eacuteteacute deacuteposeacute en commission le texte
qui en eacutetait issu ne comportait toujours pas de dispositions rela-
tives agrave lenseignement
o Seacuteance publique Vingt amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes notam-
ment celui (deacuteposeacute agrave lidentique par des seacutenateurs issus de six
groupes diffeacuterents) preacutevoyant drsquoinseacuterer agrave lrsquoarticle L 442-5-1 du
code de lrsquoeacuteducation un alineacutea ainsi reacutedigeacute laquo La participation fi-
nanciegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un
enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle
L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence
et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune
autre commune agrave la condition que la commune de reacutesidence ne
dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegio-
nale raquo
Sans surprise lrsquoavis du Gouvernement exprimeacute par le ministre
Jean-Michel Blanquer fut deacutefavorable regrettant au passage
laquo drsquoecirctre sans cesse obligeacute drsquooccuper la position du jacobin reacutetif
sur la deacutefensive alors mecircme que nous avons une politique de pro-
motion des langues reacutegionales Simplement agrave certains moments
ndash par exemple avec la rupture de lrsquoeacutequilibre entre enseignement
public et enseignement priveacute ou avec la creacuteation drsquoune obligation
suppleacutementaire pour les communes ndash les propositions vont trop
loin et cela conduit agrave me placer face aux geacuteneacuterositeacutes diverses
dans la position deacutesagreacuteable du gardien des principes ou dans
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celle du gardien de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral En effet derriegravere ces deacutebats
se pose la question de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et de la posteacuteriteacute de la loi
Carle car vous risquez de creacuteer un deacuteseacutequilibre alors que cette loi
repreacutesentait un point drsquoeacutequilibre raquo21
o Adoption du texte ndeg32 modifieacute par le Seacutenat le 10 deacutecembre 2020
Le Seacutenat a adopteacute trois articles additionnels (2 ter 2 quater et
2 quinquies) qui rejoignent les positions du deacuteputeacute Paul Molac et
reacutetablit lrsquoarticle 3 (modifieacute) de la proposition de loi qui avait eacuteteacute
supprimeacute en premiegravere lecture agrave lrsquoAssembleacutee nationale
Deuxiegraveme lecture
o Rapport sur la proposition de loi modifieacutee par le Seacutenat relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promo-
tion (ndeg3658) ndeg4035 Sur les six articles supprimeacutes agrave lrsquoAssem-
bleacutee lrsquoarticle 3 a eacuteteacute reacutetabli au Seacutenat qui a par ailleurs adopteacute
trois articles additionnels (2 ter 2 quater et 2 quinquies) Lrsquoen-
semble eacutetant conforme agrave lrsquoesprit de la proposition de loi initiale le
rapporteur souhaite que lrsquoAssembleacutee nationale adopte en deu-
xiegraveme lecture un texte identique agrave celui voteacute par le Seacutenat pour
les quatre articles restant en discussion et nrsquoa donc pas preacutesenteacute
drsquoamendements Mais lrsquoarticle 2 quinquies (article 6 du texte deacute-
finitif) ayant eacuteteacute supprimeacute en commission 16 amendements deacute-
poseacutes agrave lrsquoidentique par 115 deacuteputeacutes membres de huit diffeacuterents
groupes parlementaires ont permis de le reacuteintroduire en seacuteance
o Discussion en seacuteance publique le 8 avril 2021 au cours de la-
quelle 262 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes
o Adoption deacutefinitive le 8 avril 2021 en deuxiegraveme lecture de la
proposition de loi TA nordm591 relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
21 Compte rendu inteacutegral des deacutebats Seacuteance du 10 deacutecembre 2020 httpwwwse-natfrseancess202012s20201210s20201210007htmlsection708
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Saisine du Conseil constitutionnel du 22 avril 2021 par au moins
soixante deacuteputeacutes en application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitu-
tion
Soit un jour avant que nrsquoexpire le deacutelai de saisine du Conseil constitu-
tionnel la promulgation de la loi par le preacutesident de la Reacutepublique devant
intervenir dans les 15 jours de lrsquoadoption deacutefinitive La saisine du Conseil
constitutionnel est un acte non grave mais solennel qui perturbe le temps
leacutegislatif ne serait-ce que pour cette raison elle meacuterite un soin particulier
Soin envers lrsquoinstitution agrave laquelle elle srsquoadresse et agrave qui elle impose des
charges suppleacutementaires soin envers la Constitution qursquoelle entend pro-
teacuteger La lettre de saisine ou du moins la version qui a circuleacute manifeste-
ment reacutedigeacutee agrave la hacircte nrsquoest pas agrave la hauteur du seacuterieux qursquoexige de ma-
niegravere impeacuterieuse cette deacutemarche Une lettre de saisine ne saurait se limiter
agrave invoquer en tregraves peu de lignes la violation de laquo principes constitutionnels raquo
sans que ceux-ci ne soient deacutetailleacutes ni mecircme indiqueacutes Le seul article mis
en cause est lrsquoarticle 6 de la loi qui modifie lrsquoarticle L 442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation
II Discussion de la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la loi
relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Les deacuteputeacutes auteurs de la saisine demandent au Conseil constitutionnel la
censure de lrsquoarticle 6 de la loi
laquo Les sixiegraveme et septiegraveme alineacuteas de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacutedu-
cation sont remplaceacutes par un alineacutea ainsi reacutedigeacute
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacuteta-
blissements priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispen-
sant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L
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312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacuteta-
blissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune
agrave la condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dis-
pensant un enseignement de langue reacutegionale raquo
Une commune dont aucune eacutecole ne propose denseignement de langue reacutegio-
nale devrait donc participer aux frais de scolarisation des enfants domicilieacutes
sur son territoire qui suivent un tel enseignement dans un eacutetablissement situeacute
sur une autre commune Le dispositif concerne les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat drsquoassociation qui sont dans les faits majoritaire-
ment associatifs et laiumlques Cet enseignement peut aussi concerner les eacuteta-
blissements confessionnels mais il faut drsquoembleacutee preacuteciser que comme lrsquoa jugeacute
le Conseil constitutionnel dans son examen de la loi dite laquo Carle raquo le principe
de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute pour le leacutegislateur de preacutevoir la
participation des collectiviteacutes publiques au financement du fonctionnement
des eacutetablissements denseignement priveacute sous contrat dassociation
laquo Consideacuterant quil reacutesulte des regravegles ou principes agrave valeur constitution-
nelle (hellip) que le principe de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute
pour le leacutegislateur de preacutevoir sous reacuteserve de fonder son appreacuteciation
sur des critegraveres objectifs et rationnels la participation des collectiviteacutes
publiques au financement du fonctionnement des eacutetablissements den-
seignement priveacutes sous contrat dassociation selon la nature et limpor-
tance de leur contribution agrave laccomplissement de missions denseigne-
ment raquo (deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 cons 6)
Lrsquoinstauration du laquo forfait scolaire communal raquo ne poursuit pas un objectif de
sanction financiegravere des communes deacutemunies doffre en langue reacutegionale mais
celui de les inciter agrave en proposer Drsquoailleurs lrsquoarticle premier de la loi deacutefeacutereacutee
souligne que laquo LrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales concourent agrave lrsquoenseigne-
ment agrave la diffusion et agrave la promotion de ces langues raquo Comme preacuteciseacute plus
loin les maires sont dispenseacutes du paiement drsquoun tel forfait degraves lors qursquoun
enseignement drsquoune langue reacutegionale y compris au titre drsquoune simple initia-
tion est proposeacute dans leur commune
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Il faut souligner que les articles relatifs agrave lrsquoenseignement ont eacuteteacute introduits par
les seacutenateurs Plus exactement ces derniers ont reacuteintroduit la disposition qui
autorise la conclusion de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pour eacutetendre
lrsquooffre drsquoenseignement en langue reacutegionale aux eacutetablissements publics dans le
cadre horaire normal sous des formes speacutecifiques et inseacutereacute trois articles un
premier autorise lrsquoenseignement dit laquo immersif raquo en langue reacutegionale un deu-
xiegraveme le forfait scolaire communal dont il est ici question un troisiegraveme est
relatif agrave lenseignement des langues reacutegionales agrave Mayotte territoire qui du fait
de sa deacutepartementalisation reacutecente ne pouvait jusqualors pas beacuteneacuteficier des
possibiliteacutes offertes aux autres deacutepartements concernant lenseignement de
ces langues
Trois remarques doivent ecirctre faites sur lrsquoinsertion relative agrave lrsquoenseignement des
langues reacutegionales lors des horaires normaux Premiegraverement cette disposition
existe deacutejagrave pour la Collectiviteacute de Corse deuxiegravemement cet enseignement
doit se faire moyennant un accord entre lrsquoEacutetat et les reacutegions (laquo dans le cadre
de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions la collectiviteacute de Corse la Collectiviteacute
europeacuteenne drsquoAlsace ou les collectiviteacutes territoriales reacutegies par lrsquoarticle 73 de
la Constitution raquo) troisiegravemement il srsquoagit drsquoune option facultative qursquoin fine
les familles deacutecident ou non de prendre
En reacutesumeacute et conclusion la disposition de lrsquoarticle 3
1 Existe deacutejagrave pour une collectiviteacute en lrsquooccurrence la collectiviteacute de Corse
2 Est strictement encadreacutee (existence drsquoun accord entre lrsquoEacutetat et les reacute-
gions)
3 Est conforme agrave la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le ca-
ractegravere facultatif de lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale Dans sa deacute-
cision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi relative agrave la Corse le
Conseil constitutionnel a fixeacute le cadre de lrsquoenseignement drsquoune langue
reacutegionale dans le cadre de lrsquohoraire normal en consideacuterant que laquo si lrsquoen-
seignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquohoraire nor-
mal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir pour
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autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les ensei-
gnants qursquoil ne saurait non plus avoir pour effet de soustraire les eacutelegraveves
aux droits et obligations applicables agrave lrsquoensemble des usagers des eacuteta-
blissements qui assurent le service public de lrsquoenseignement ou sont
associeacutes agrave celui‑ci Consideacuterant qursquoil reacutesulte de ce qui preacutecegravede que sous
reacuteserve que lrsquoenseignement de la langue corse revecircte tant dans son prin-
cipe que dans ses modaliteacutes de mise en œuvre un caractegravere facultatif
[cette disposition] nrsquoest contraire ni au principe drsquoeacutegaliteacute ni agrave aucun
autre principe ou regravegle de valeur constitutionnelle raquo (cons 24 et 25)
La loi du 8 avril 2021 ne propose pas autre chose et srsquoinscrit en tous
points sur cette ligne deacutejagrave jugeacutee par le Conseil constitutionnel
Lrsquoarticle 6 srsquoinsegravere de maniegravere logique et coheacuterente dans lrsquoensemble des articles
de la loi relative agrave lrsquoenseignement Avant drsquoen examiner dans les deacutetails la
conformiteacute agrave la Constitution il faut souligner que le Seacutenat a deacutejagrave voteacute le prin-
cipe de ce forfait scolaire communal agrave deux reprises
1 Il lrsquoa drsquoabord inseacutereacute dans le projet de loi pour une eacutecole de la confiance
en premiegravere lecture Crsquoest la commission mixte paritaire qui a ajouteacute les
mots laquo contribution volontaire raquo ocirctant au forfait son caractegravere obliga-
toire22
2 Il a reacuteaffirmeacute sa position lors de lrsquoexamen de la proposition de loi ici
discuteacutee supprimant les mots laquo contribution volontaire raquo de la loi en vi-
gueur
Agrave cet argument deacutemocratique respectueux du bicameacuteralisme et rappelant que
le Seacutenat laquo assure la repreacutesentation des collectiviteacutes territoriales de la Reacutepu-
22 Loi ndeg2019-791 du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance JORF ndeg0174 du 28 juillet
2019
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Primo cet article est en coheacuterence avec la leacutegislation existante en matiegravere drsquoen-
seignement des langues reacutegionales agrave lrsquoeacutecole confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute
juridique (A) Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contrevien-
nent pas au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des langues
reacutegionales affirmeacute par le Conseil constitutionnel (B) Tertio la loi ne porte pas
atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur une commune une nouvelle
charge (C) Quarto elle ne viole pas non plus en conseacutequence le principe de
libre administration des collectiviteacutes territoriales (D)
A Forfait scolaire communal et respect de lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique
Cette exigence bien que non explicitement qualifieacutee de principe consti-
tutionnel par le Conseil constitutionnel se rattache notamment agrave la notion de
laquo garantie des droits raquo inscrite agrave lrsquoarticle 16 de la Deacuteclaration de 1789 laquo Toute
socieacuteteacute dans laquelle la garantie des droits nrsquoest pas assureacutee ni la seacuteparation
des pouvoirs deacutetermineacutee nrsquoa point de constitution raquo Deacutecoulant de lrsquoarticle 34
de la Constitution la clarteacute de la loi est un eacuteleacutement essentiel de la seacutecuriteacute
juridique agrave laquelle la jurisprudence du Conseil constitutionnel a offert corps
et protection Aussi le principe de laccessibiliteacute et de lintelligibiliteacute de la loi a-
t-il eacuteteacute eacuterigeacute en objectif de valeur constitutionnelle (deacutecision ndeg99-421 DC du
16 deacutecembre 1999)
Mecircme si les principes de clarteacute drsquoaccessibiliteacute et drsquointelligibiliteacute de la loi per-
mettent avant tout drsquoimposer au leacutegislateur laquo drsquoadopter des dispositions suffi-
samment preacutecises et des formules non eacutequivoques afin de preacutemunir les sujets
de droit contre une interpreacutetation contraire agrave la Constitution ou contre le
risque drsquoarbitraire raquo (deacutecision ndeg2004-500 DC du 29 juillet 2004 cons 13) ils
concourent aussi agrave offrir aux citoyens la seacutecuriteacute juridique neacutee drsquoune cons-
truction drsquoensemble coheacuterente et sans rupture Laquelle se base depuis 2008
sur une disposition claire et sans ambiguiumlteacute de la Constitution laquo Les langues
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reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo (75-1) Elle est une in-
vitation aux repreacutesentants de leacutegifeacuterer pour proteacuteger et promouvoir lesdites
langues et la loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit dans la continuiteacute de ce qursquoils ont fait depuis
2008 notamment La coheacuterence est lrsquoune des artegraveres essentielles de lrsquoexigence
de seacutecuriteacute juridique qui impregravegne la jurisprudence du Conseil constitution-
nelle comme celle du Conseil drsquoEacutetat et de la Cour de cassation Sans ecirctre ex-
plicitement eacutenonceacutee par le Conseil constitutionnel lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique est laquo efficiente raquo23 et est au cœur des preacuteoccupations des juges24 comme
de la doctrine Les Cahiers du Conseil constitutionnel lui consacrant un dossier
speacutecial dans sa livraison drsquooctobre 202025
La loi soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel reacutepond agrave lrsquoexigence de
seacutecuriteacute juridique en eacutetant le prolongement de lrsquoœuvre anteacuterieure du leacutegisla-
teur pour commencer la loi du 8 juillet 2013 drsquoorientation et de programma-
tion pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique qui reconnaicirct lrsquoenseigne-
ment bilingue franccedilais langue reacutegionale Dans lrsquoannexe de la loi figurent cinq
mentions compleacutementaires notamment celle concernant la possibiliteacute de
srsquoinscrire dans une eacutecole publique drsquoune autre commune lorsque la commune
de reacutesidence ne propose pas drsquoenseignement de langue reacutegionale Disposition
deacuteclarative qui a trouveacute une application concregravete dans la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) la parti-
cipation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes dans lrsquoenseigne-
ment public doit deacutesormais faire lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune drsquoac-
cueil et la commune de reacutesidence26
La loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle a
ajouteacute un nouveau motif de discrimination baseacute sur laquo la maitrise drsquoune autre
23 Bertrand Mathieu laquo La seacutecuriteacute juridique un principe clandestin mais efficient raquo Droit constitutionnel Meacutelanges Patrice Geacutelard LGDJ 1999 pp 301-305 24 En teacutemoigne notamment le fait que le Conseil drsquoEacutetat lui ait consacreacute deux rapports annuels celui de 1991 De la seacutecuriteacute juridique et celui de 2006 Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit 25 Dossier La seacutecuriteacute juridique Titre VII Les Cahiers du Conseil constitutionnel ndeg5 octobre
2020 26 Lrsquoarticle 104 de la loi NOTRe consacre par ailleurs la compeacutetence partageacutee des collectiviteacutes
locales dans la promotion des langues reacutegionales tout en donnant une place preacutepondeacuterante
agrave la reacutegion telle que preacutevue agrave lrsquoarticle 1er de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de lrsquoaction publique territoriale et drsquoaffirmation des meacutetropoles (MAPTAM)
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langue que le franccedilais raquo qui concerne eacutegalement les langues reacutegionales Celle
du 28 feacutevrier 2017 de programmation relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend
inopeacuterant le deacutecret du 2 Thermidor an II sur lequel se basait notamment le
ministegravere de la justice pour interdire les livrets de famille bilingues Enfin
lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance vient eacutetendre
aux eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives une laquo contribution volontaire raquo
des communes pour la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoins-
crivant dans une eacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionale en
dehors de sa commune de reacutesidence
La loi du 8 avril 2021 soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel nrsquoest que
le prolongement et le compleacutement de lrsquoarticle L 212-8 du Code de lrsquoeacuteducation
qui preacutecise les conditions dans lesquelles pour lrsquoenseignement public une
commune doit contribuer au financement des deacutepenses scolaires drsquoun enfant
reacutesidant sur son territoire et scolariseacute dans une autre commune Elle vient le
compleacuteter de maniegravere parallegravele eacutetendant ce qui existe deacutejagrave pour lrsquoeacutecole pu-
blique agrave lrsquoeacutecole priveacutee sous contrat Confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
elle ne viole par ailleurs aucun article de la Constitution et ne contredit pas
la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le caractegravere facultatif de lrsquoen-
seignement des langues reacutegionales
B Forfait scolaire communal et respect de la jurisprudence du Conseil
constitutionnel sur la langue franccedilaise
Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contreviennent pas
agrave lrsquoarticle 2 alineacutea premier de la Constitution (laquo La langue de la Reacutepublique est
le Franccedilais raquo) et au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des
langues reacutegionales qui en deacutecoule affirmeacute par le Conseil constitutionnel La
langue de la Reacutepublique est et demeure le Franccedilais et agrave aucun moment la
loi du 8 avril 2021 nrsquoentend y porter atteinte Lrsquoapprentissage des langues reacute-
gionales se fait agrave ses cocircteacutes mais dans une mesure permettant leffectiviteacute pour
les enfants agrave acceacuteder agrave lenseignement des langues reacutegionales laquo patrimoine de
la France raquo selon les termes de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Apprentissage
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qui pour certains enfants est lrsquoun des eacuteleacutements de leur laquo deacuteveloppement raquo au
sens de lrsquoalineacutea 10 du Preacuteambule de la Constitution du 27 octobre 1946 (laquo La
Nation assure agrave lrsquoindividu et agrave la familles les conditions neacutecessaires agrave leur
deacuteveloppement raquo)
Ce que creacutee lrsquoarticle 6 agrave travers le forfait ce nrsquoest pas lrsquoenseignement obligatoire
de la langue reacutegionale mais la possibiliteacute de pouvoir beacuteneacuteficier de cet enseigne-
ment (sans prescription de deacutelai) qui demeure facultatif Le rapporteur Paul
Molac le reacuteaffirme au cours de la seacuteance publique du 8 avril 2021 laquo Je ne
suis pas favorable au caractegravere obligatoire de cet enseignement mais je consi-
degravere que tout eacutelegraveve qui souhaite le suivre doit pouvoir le faire raquo27
Ce faisant la loi sans contrevenir agrave la Constitution offre un contenu agrave son
article 75-1 La jurisprudence du Conseil constitutionnel en vertu de laquelle
lrsquoenseignement des langues reacutegionales nrsquoa qursquoun caractegravere facultatif nrsquoest ici
absolument pas remise en cause Dans sa deacutecision ndeg99-412 DC du 15 juin
1999 il a souligneacute que le principe drsquouniciteacute du peuple franccedilais et lrsquoindivisibiliteacute
de la Reacutepublique assurant lrsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi srsquoopposaient agrave laquo
ce que soient reconnus des droits collectifs agrave quelque groupe que ce soit deacutefini
par une communauteacute drsquoorigine de culture de langue ou de croyance raquo En
outre la langue de la Reacutepublique eacutetant le franccedilais il ne peut ecirctre reconnu un
laquo droit agrave pratiquer une langue autre que le franccedilais non seulement dans la vie
priveacutee mais eacutegalement dans la vie publique agrave laquelle la Charte rattache
la justice et les autoriteacutes administratives et services publics raquo
Deux remarques srsquoimposent drsquoembleacutee drsquoune part cette jurisprudence est an-
teacuterieure agrave lrsquoinsertion en 2008 par le pouvoir constituant de lrsquoarticle 75-1 dis-
posant que laquo les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France
raquo Cette remarque drsquoordre contextuel vient srsquoajouter agrave la suivante drsquoautre part
27 Assembleacutee nationale XVe leacutegislature Session ordinaire de 2020-2021 Seacuteance du jeudi 08
avril 2021 httpswwwassemblee-nationalefrdyn15comptes-rendusseancesession-
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la loi du 8 avril 2021 nrsquoentend pas confier agrave lrsquoenseignement des langues reacutegio-
nales un caractegravere obligatoire En cela elle respecte la jurisprudence du Con-
seil constitutionnel preacuteciteacutee (deacutecision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi
relative agrave la Corse)
laquo Si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquoho-
raire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir
pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les en-
seignants (hellip) raquo (cons 24)
Lrsquoenseignement drsquoune langue minoritaire ne devient donc en aucun cas obli-
gatoire Ce qui doit faire laquo lrsquoobjet drsquoun accord raquo ce sont les conditions permet-
tant effectivement agrave des enfants drsquoacceacuteder agrave un enseignement facultatif qui
contribue agrave leur deacuteveloppement proteacutegeacute par ailleurs par lrsquoalineacutea 10 du Preacuteam-
bule de 1946 preacuteciteacute Ni la Constitution ni son interpreacutetation par le Conseil
constitutionnel ne srsquoopposent agrave ce qursquoune commune de reacutesidence participe y
compris de maniegravere obligatoire au financement de la scolarisation dans une
autre commune des enfants souhaitant suivre un tel enseignement Crsquoest don-
ner aux enfants et aux parents de maniegravere effective et efficiente la possibiliteacute
concregravete de beacuteneacuteficier drsquoun enseignement drsquoune langue reacutegionale composante
de leur laquo deacuteveloppement raquo laquelle appartient en vertu de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution au laquo patrimoine de la France raquo
C Forfait scolaire communal et respect du principe drsquoeacutegaliteacute
Tertio la loi ne contrevient pas au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur
une commune une nouvelle charge
Conformeacutement agrave une jurisprudence du Conseil constitutionnel bien eacutetablie le
principe deacutegaliteacute de lrsquoarticle 6 de la Deacuteclaration des droits de lhomme et du
citoyen de 1789 laquo ne soppose ni agrave ce que le leacutegislateur regravegle de faccedilon diffeacuterente
des situations diffeacuterentes ni agrave ce quil deacuteroge agrave leacutegaliteacute pour des raisons
dinteacuterecirct geacuteneacuteral pourvu que dans lun et lautre cas la diffeacuterence de traite-
ment qui en reacutesulte soit en rapport direct avec lobjet de la loi qui leacutetablit raquo
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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(pour lrsquoune des reacutecentes application au domaine de lrsquoenseignement dont il sera
ici question deacutecision ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de
la confiance)
En ce qui concerne preacuteciseacutement le caractegravere obligatoire drsquoune nouvelle charge
pour une collectiviteacute celui-ci nrsquoa pas eacuteteacute censureacute par le Conseil constitutionnel
agrave propos de lrsquoexamen de la loi sur lrsquoavenir de lrsquoeacutecole preacuteciteacutee (deacutecision ndeg 2019-
787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de la confiance) Lrsquoarticle 17 de
la loi alors deacutefeacutereacute au Conseil constitutionnel preacutevoyait dans son premier ali-
neacutea
laquo LrsquoEacutetat attribue de maniegravere peacuterenne agrave chaque commune les ressources
correspondant agrave lrsquoaugmentation des deacutepenses obligatoires qursquoelle a
prises en charge en application des articles L 212-4 L 212-5 et L 442-
5 du code de lrsquoeacuteducation au titre de lrsquoanneacutee scolaire 2019-2020 par rap-
port agrave lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 dans la limite de la part drsquoaugmenta-
tion reacutesultant directement de lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoins-
truction obligatoire raquo
Les deacutepenses qui font lrsquoobjet de lrsquoaccompagnement financier en cause sont
celles qui beacuteneacuteficient aux eacutecoles publiques et aux eacutetablissements drsquoenseigne-
ment priveacutes ayant passeacute un contrat drsquoassociation avec lrsquoEacutetat
Lrsquoabaissement agrave trois ans du deacutebut de lrsquoinstruction obligatoire a donc fait pe-
ser des charges nouvelles pour les communes et leur a mecircme imposeacute de par-
ticiper au financement des eacutecoles maternelles priveacutees sous contrat y compris
lorsqursquoelles nrsquoont pas approuveacute ce contrat La diffeacuterence de traitement entre
les communes est reacuteelle selon qursquoelles financcedilaient ou non des classes mater-
nelles avant lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoinstruction obligatoire mais
nrsquoentraicircne pas pour autant une rupture drsquoeacutegaliteacute
Ainsi lrsquoa jugeacute le Conseil constitutionnel dans la deacutecision preacuteciteacutee drsquoune part
il a estimeacute que cette diffeacuterence de traitement reposait sur une diffeacuterence de
situation
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laquo Les communes qui au cours de lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 avaient
institueacute des classes maternelles ou eacutecoles maternelles publiques ou ap-
prouveacute des contrats drsquoassociation drsquoeacutecoles maternelles priveacutees ont con-
tribueacute agrave ce titre agrave leur financement dans les conditions preacutevues par le
code de lrsquoeacuteducation Ces communes ne sont ainsi pas placeacutees dans une
situation identique agrave celle des autres communes qui nrsquoexerccedilaient pas
deacutejagrave les mecircmes compeacutetences et ne supportaient donc pas les charges
correspondantes raquo (cons 7)
Drsquoautre part le Conseil constitutionnel a jugeacute que la diffeacuterence de traitement
contesteacutee eacutetait en rapport direct avec lrsquoobjet de la loi qui lrsquoeacutetablit
laquo Qui consiste en application de la seconde phrase du quatriegraveme alineacutea
de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution agrave accompagner de ressources finan-
ciegraveres une extension de compeacutetence ayant pour conseacutequence drsquoaugmen-
ter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales raquo (cons 8)
Agrave lrsquoargument opposeacute agrave lrsquoarticle 6 de la loi deacutefeacutereacutee selon lequel ces dispositions
creacuteeraient une diffeacuterence de traitement entre les communes contraire au prin-
cipe deacutegaliteacute devant la loi le Conseil constitutionnel en vertu de sa jurispru-
dence Loi pour une eacutecole de la confiance devrait logiquement apporter la mecircme
reacuteponse Le leacutegislateur entend avec cette loi du 8 avril 2021 donner de ma-
niegravere geacuteneacuterale effectiviteacute agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution agrave travers en par-
ticulier un outil permettant de mettre en œuvre les dispositions de lrsquoarticle 72-
2 de la Constitution relatives aux extensions de compeacutetences imposeacutees aux
collectiviteacutes territoriales Dispositions qui par ailleurs nrsquoobligent pas le leacutegi-
slateur agrave preacutevoir un accompagnement financier de lrsquoensemble des communes
En lien avec cet argument il en reacutesulte que lrsquoarticle 6 ne porte pas atteinte
par ailleurs au principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
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D Forfait scolaire communal et respect du principe de libre administra-
tion des collectiviteacutes territoriales
Quarto le forfait scolaire communal nrsquoest ni contraire agrave la lettre de lrsquoar-
ticle 72 de la Constitution ni agrave son interpreacutetation par le Conseil constitution-
nel
En vertu de lrsquoarticle 72 alineacutea 3 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales
srsquoadministrent librement dans les conditions preacutevues par la loi Correacutelative-
ment lrsquoarticle 34 de la Constitution donne agrave la loi compeacutetence pour deacuteterminer
laquo les principes fondamentaux (hellip) de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales de leurs compeacutetences et de leurs ressources raquo Cette libre admi-
nistration doit en outre se concilier avec drsquoautres principes constitutionnels
tels que le principe drsquoeacutegaliteacute et la liberteacute de lrsquoenseignement Crsquoest ainsi que le
Conseil constitutionnel a jugeacute que laquo si le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacute-
gislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce que les conditions essentielles drsquoap-
plication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de lrsquoenseignement deacutepen-
dent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre
les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (voir notamment la deacutecisions ndeg84-
185 DC du 18 janvier 1985 cons 18)
La libre administration est bien un principe constitutionnel mais crsquoest au leacute-
gislateur qursquoil revient sous le controcircle du Conseil constitutionnel drsquoen preacuteci-
ser le contenu Lrsquointervention du leacutegislateur est neacutecessaire pour la deacutefinition
des regravegles de fonctionnement des collectiviteacutes territoriales la deacutefinition des
compeacutetences qui leur sont deacutevolues (transfert creacuteation extension des compeacute-
tences) et en matiegravere de ressources la fixation du taux des impocircts deacutecideacutes par
les Assembleacutees deacutelibeacuteratives locales
Il ressort de la jurisprudence administrative et constitutionnelle que seule la
loi peut creacuteer une obligationsujeacutetion nouvelle agrave la charge drsquoune collectiviteacute
territoriale Le principe de libre administration ne peut donc pas exister en-
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dehors de lrsquointervention du leacutegislateur lequel nrsquoa pas pour autant toute lati-
tude En drsquoautres termes le principe de libre administration est deacutefini par la
loi mais est aussi proteacutegeacute contre elle qui ne peut notamment pas porter at-
teinte au-delagrave drsquoun certain seuil aux ressources des collectiviteacutes territoriales
restreindre la liberteacute contractuelle intervenir dans les deacutecisions des collecti-
viteacutes territoriales relatives agrave leurs agents ou le fonctionnement de leurs insti-
tutions
En eacutetendant la prise en charge du forfait scolaire communal la loi deacutefeacutereacutee creacutee
une charge suppleacutementaire pour certaines communes
Aux termes du quatriegraveme alineacutea de larticle 72-2 de la Constitution laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales saccom-
pagne de lattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consa-
creacutees agrave leur exercice Toute creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour
conseacutequence daugmenter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales est ac-
compagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Dans le cas ougrave le leacutegislateur
octroie une nouvelle compeacutetence aux collectiviteacutes territoriales (articles 72-2 de
la Constitution et L 1614-1-1 du code geacuteneacuteral des collectiviteacutes territoriales)
il accompagne cette creacuteation de ressources correspondantes uniquement si
lexercice de cette compeacutetence est rendu obligatoire Ainsi en a jugeacute le Conseil
constitutionnel en ajoutant que le leacutegislateur disposait dun pouvoir dappreacute-
ciation en la matiegravere la compensation devant ecirctre naturellement suffisante
pour ne pas constituer une entrave au principe de libre administration
laquo Que ces dispositions ne visent en ce qui concerne les creacuteations et ex-
tensions de compeacutetences que celles qui preacutesentent un caractegravere obliga-
toire que dans cette hypothegravese il nest fait obligation au leacutegislateur
que daccompagner ces creacuteations ou extensions de compeacutetences de res-
sources dont il lui appartient dappreacutecier le niveau sans toutefois deacutena-
turer le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales raquo
(deacutecision ndeg2008-569 DC du 7 aoucirct 2008 Loi instituant un droit daccueil
pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires pendant le temps
scolaire cons 13)
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Le Conseil constitutionnel a jugeacute qursquoen conseacutequence et en lrsquoespegravece le leacutegisla-
teur avait suffisamment deacutetermineacute le niveau des ressources accompagnant la
creacuteation de ce service daccueil pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires pendant le temps scolaire sans meacuteconnaicirctre le quatriegraveme alineacutea de
larticle 72-2 de la Constitution
Lextension de compeacutetences est soumise a fortiori au mecircme reacutegime que la
creacuteation de compeacutetences Elle consiste en leacutelargissement du peacuterimegravetre ou en
la modification de la nature ou de lobjet dune compeacutetence dont lexercice est
deacutejagrave assureacute par les collectiviteacutes territoriales ayant pour conseacutequence de creacuteer
une charge suppleacutementaire pour celles-ci Le droit agrave une compensation finan-
ciegravere nest garanti que si lextension preacutesente un caractegravere obligatoire et le
leacutegislateur en deacutetermine le niveau et les modaliteacutes agrave condition quils nentra-
vent pas la libre administration des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece le principe de libre administration nrsquoest donc pas violeacute par le ca-
ractegravere contraignant que confegravererait la loi deacutefeacutereacutee au forfait scolaire communal
de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation Drsquoune part le Conseil constitu-
tionnel a deacutejagrave comme souligneacute plus haut accepteacute le principe du caractegravere
obligatoire drsquoune nouvelle charge qui nrsquoentraine par ailleurs mecircme pas
lrsquoautomaticiteacute drsquoun accompagnement financier des communes Drsquoautre part
lrsquoargument de proportionnaliteacute est ici deacuteterminant agrave ceux qui avancent un
risque drsquoassegravechement financier de certaines communes rurales contraintes
de prendre en charge la scolarisation dun eacutelegraveve dans une autre commune
mieux doteacutee qui propose lenseignement de la langue reacutegionale (ce qui selon
le deacuteputeacute Molac ne concernerait que 002 des enfants en France) il faut
reacutepondre en mettant en avant lrsquoobjectif incitatif et non sanctionnateur de la
loi Il suffira auxdites communes de proposer un enseignement de langue reacute-
gionale qui ne pourrait repreacutesenter qursquoune heure drsquoinitiation par semaine par
exemple
Une heure drsquoinitiation par semaine pour eacuteviter de payer le forfait scolaire com-
munal lequel ne meacuteconnait pas par ailleurs lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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les principes constitutionnels drsquoeacutegaliteacute drsquouniciteacute de la langue franccedilaise de la
libre administration des collectiviteacutes territoriales et permet drsquoassurer le deacuteve-
loppement de lrsquoenfant crsquoest bien peu de choses pour censurer une loi souve-
raine adopteacutee qui plus est agrave une eacutecrasante majoriteacute
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
De Raphaeumll SchellenbergerA GreffeObjet Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues ReacutegionalesDate mardi 4 mai 2021 101012Piegraveces jointes Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionalespdf
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loirelative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus desoixante deacuteputeacutes ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texteen application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarerlrsquoinconstitutionnaliteacute de son article 6 Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons ennotre qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre lapleine constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sensNous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notreconsideacuteration respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire
- Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
- Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche
- Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret
- Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne
- Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte
- Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor
- David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion
- Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme
- Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne
- Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
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Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
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On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
- Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie
- Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
Ce message ainsi que les piegraveces jointes sont eacutetablis sous la seule responsabiliteacute de lexpeacutediteur agrave lintention exclusive de ses destinataires ils peuvent contenir des informations confidentielles Toute publication utilisation ou diffusion doit ecirctre autoriseacutee preacutealablement Ce message a fait lobjet dun traitement anti-virusIl est rappeleacute que tout message eacutelectronique est susceptible dalteacuteration au cours de son acheminement sur Internet ________________________________________________________________
Vous pouvez consulter le site de lAssembleacutee nationale agrave ladresse suivante httpwwwassemblee-nationalefr
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M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
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Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
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On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
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Association ESKOLIMChez Seaska Route de la Pouponniegravere64250 CAMBO LES BAINSeskolim6gmailcomRepreacutesenteacutee par son President Jean Seacutebastien HAYDN11 chemin de Saint Jean66240 SAINT ESTEVE
CONTRIBUTION EXTERIEURE
Observations sur la conformiteacute agrave la Constitution de laproposition de loi relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
Monsieur le Preacutesident du Conseil constitutionnel Mesdames et Messieurs les
membres du Conseil constitutionnel lrsquoassociation Eskolim souhaite porter agrave votre attention
les observations suivantes tendant agrave deacutemontrer la conformiteacute agrave la Constitution de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Parmi lrsquoensemble des dispositions du texte deacutefeacutereacute la plupart nrsquoont donneacute lieu agrave aucun
deacutebat sur leur conformiteacute agrave la Constitution qui est de toute eacutevidence acquise par exemple au
sujet des traductions dont la constitutionnaliteacute a deacutejagrave indirectement eacuteteacute reconnue (CC 99-412
DC 15 juin 1999 CC ndeg2001-452 DC 6 deacutecembre 2001) ou de lrsquoutilisation des signes
diacritiques sur les actes drsquoeacutetat civil
De plus au-delagrave des apparences drsquoune politique jurisprudentielle initieacutee dans un contexte
speacutecifique le Conseil constitutionnel dispose deacutesormais drsquoun cadre constitutionnel de
reacutefeacuterence transformeacute (1) qui lui permettra de valider les dispositions leacutegislatives du texte dont
il est saisi en particulier lrsquoarticle 4 relatif agrave lrsquoenseignement immersif (2) et lrsquoarticle 6 au sujet
de la participation financiegravere agrave la scolarisation par les communes de reacutesidence (3)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
1 Le renouvellement des normes constitutionnelles de reacutefeacuterence en matiegravere de
langues reacutegionales
11 Les ineacutevitables deacuterogations apporteacutees agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution
Toute regravegle constitutionnelle connaicirct des atteacutenuations et peut ecirctre concilieacutee lrsquoarticle 2
de la Constitution ne fait pas exception Le principe demeure inchangeacute laquo La langue de la
Reacutepublique est le franccedilais raquo Sur ce fondement le Conseil constitutionnel a deacuteveloppeacute dans
les anneacutees 90 et 2000 une jurisprudence vigilante sur lrsquousage du franccedilais mais sans pour
autant refuser toute eacutevolution nous y reviendrons
Cependant lrsquoassociation Eskolim souhaite mettre en eacutevidence lrsquoindeacuteniable
changement de cadre constitutionnel en matiegravere de langues reacutegionales pour au
moins trois raisons
En premier lieu la porteacutee de lrsquoarticle 2 de la Constitution nrsquoest pas figeacutee et peut
eacutevoluer avec le temps En effet le Conseil constitutionnel opegravere reacuteguliegraverement des adaptations
de la porteacutee du texte constitutionnel Parmi de nombreuses illustrations jurisprudentielles la
liberteacute drsquoexpression et de communication protegravege deacutesormais la liberteacute drsquoacceacuteder agrave Internet
(CC ndeg 2009-580 DC 10 juin 2009) et de srsquoy exprimer (CC ndeg2020-801 DC du 18 juin 2020)
La liberteacute du mariage comprend deacutesormais le droit de mettre fin aux liens du mariage (CC ndeg
2016-557 QPC du 29 juillet 2016) La monteacutee en puissance des exigences environnementales
dans le deacutebat public a permis au Conseil constitutionnel de juger qursquoil deacutecoule de la Charte de
lrsquoenvironnement laquo que la protection de lrsquoenvironnement patrimoine commun des ecirctres
humains constitue un objectif de valeur constitutionnelle raquo (CC ndeg2019-823 QPC 31 janvier
2020) Certains fondements constitutionnels que lrsquoon croyait endormis ont eacuteteacute reacuteactiveacutes sous
lrsquoeffet du pouvoir interpreacutetatif agrave lrsquoimage de lrsquoarticle 15 de la DDHC (laquo La socieacuteteacute a le droit de
demander compte agrave tout agent public de son administration raquo) agrave lrsquoorigine drsquoun droit drsquoaccegraves
aux archives publiques (CC ndeg2017-655 QPC 15 septembre 2017) et drsquoun droit drsquoaccegraves aux
documents administratifs (CC ndeg2020-834 QPC 3 avril 2020)
En deuxiegraveme lieu la reacutedaction actuelle de lrsquoarticle 2 de la Constitution ne date pas de
1958 mais drsquoun ajout issu de la loi constitutionnelle ndeg 92-554 du 25 juin 1992 voteacutee dans un
contexte particulier au moment ougrave la France ratifiait le traiteacute de Maastricht et reacutevisait sa
Constitution afin de lever les atteintes agrave la souveraineteacute constateacutees par le Conseil
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
constitutionnel En 1992 lrsquoinsertion de la langue franccedilaise au sein de lrsquoarticle 2 vise agrave rassurer
lrsquoopinion face aux craintes heacutegeacutemoniques de la langue anglaise les langues reacutegionales ne
sont ni viseacutees ni nieacutees dans leur existence et leur rocircle Il est sur ce point particuliegraverement
reacuteveacutelateur de se reacutefeacuterer aux deacuteclarations limpides du Garde des Sceaux Michel Vauzelle lors
des deacutebats parlementaires consacreacutes en 1992 au vote de la reacutevision constitutionnelle laquo Les
langues reacutegionales sont naturellement une richesse de notre patrimoine national Agrave ce
titre le Gouvernement exprime par ma voix lrsquoimmense respect et le soin qursquoil porte agrave cette
richesse de la nation [] Je ne vois pas lagrave drsquoatteinte agrave lrsquouniteacute de la nation mais au
contraire une contribution agrave sa richesse [] Aucune atteinte ne sera porteacutee agrave la politique
de respect de la diversiteacute de nos cultures reacutegionales qui est un eacuteleacutement essentiel du
patrimoine national raquo (JO Assembleacutee nationale p 1021)
Il est donc parfaitement possible pour le Conseil constitutionnel drsquoopeacuterer une
interpreacutetation eacutevolutive de lrsquoarticle 2 afin drsquoadapter la porteacutee de la norme constitutionnelle au
contexte actuel favorable agrave lrsquoapprofondissement de lrsquousage des langues reacutegionales Il nrsquoest
drsquoailleurs pas anodin de constater que la preacutesente proposition de loi a largement transcendeacute les
clivages politiques pour ecirctre voteacutee agrave une large majoriteacute avec drsquoailleurs le soutien de
lrsquoensemble des Preacutesidents de Reacutegion
En troisiegraveme lieu dans sa fameuse deacutecision sur la Charte europeacuteenne des langues
reacutegionales et minoritaires du 15 juin 1999 (ndeg99-412 DC) le Conseil constitutionnel a
implicitement reconnu la compatibiliteacute de lrsquoenseignement immersif ou bilingue avec la
Constitution et en particulier avec lrsquoarticle 2 de la Constitution En effet lrsquoinconstitutionnaliteacute
constateacutee entre la Charte et la Constitution concerne seulement les articles 1 et 7 Or le
consideacuterant 13 de cette deacutecision abusivement preacutesenteacutee comme un verrou absolu en matiegravere
de langues reacutegionales prend soin de preacuteciser laquo que nest contraire agrave la Constitution eu eacutegard agrave
leur nature aucun des autres engagements souscrits par la France dont la plupart au
demeurant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France en
faveur des langues reacutegionales raquo Parmi ces laquo autres engagements souscrits par la France raquo
au sein de la Charte figurent certaines stipulations de lrsquoarticle 8 de la Charte1 selon lequel
1 Article 8 ndash Enseignement1En matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel ces langues sontpratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de lenseignement de la (des)langue(s) officielle(s) de lEtat(hellip)ci agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires concerneacutees ou
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laquo laquoen matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel
ces langues sont pratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de
lenseignement de la (des) langue(s) officielle(s) de lEtat raquo agrave toute une seacuterie drsquoengagements
Au sein des engagements auxquels la France avait souscrits et sur lesquels le Conseil
constitutionnel srsquoest donc prononceacute on trouve le point 1 c (iv) en vertu duquel la France
srsquoengage laquo agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui
le souhaitent ndash ou le cas eacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant raquo
Or ce renvoi concerne les stipulations suivantes
laquo i agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires
concerneacutees ou
Ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les
langues reacutegionales ou minoritaires ou
Iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales
ou minoritaires comme partie inteacutegrante du curriculum
Autrement dit la France srsquoeacutetait engageacutee au moment de la signature de la Charte agrave
appliquer lrsquoune des trois mesures citeacutees qui concernent lrsquoenseignement laquo dans raquo les langues
reacutegionales ou minoritaires dans le secondaire crsquoest-agrave-dire un enseignement immersif ou
bilingue Cet engagement faisait donc partie des stipulations examineacutees par le Conseil
constitutionnel et le consideacuterant 13 de la deacutecision du 15 juin 1999 affirme clairement que ces
stipulations ne sont pas contraires agrave la Constitution Degraves 1999 lrsquoenseignement immersif en
langue reacutegionale est reconnu par le Conseil constitutionnel comme compatible avec
lrsquoarticle 2 de la Constitution
En quatriegraveme lieu le texte mecircme de la Constitution contient drsquoores et deacutejagrave des
ameacutenagements au principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais
Drsquoune part en vertu de la loi constitutionnelle ndeg 98-610 du 20 juillet 1998 lAccord
de Noumeacutea est constitutionnaliseacute agrave larticle 77 de la Constitution Or cet accord stipule en son
ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les langues reacutegionalesou minoritaires ou
iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales ou minoritairescomme partie inteacutegrante du curriculum ou
iv agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui le souhaitent ndash ou le caseacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant
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point 133 laquo Les langues kanak sont avec le franccedilais des langues denseignement et de
culture en Nouvelle-Caleacutedonie Leur place dans lenseignement et les meacutedias doit donc ecirctre
accrue et faire lobjet dune reacuteflexion approfondie raquo
Drsquoautre part sous lrsquoeffet de la reacutevision constitutionnelle du 23 juillet 2008 la
Constitution consacre deacutesormais les langues reacutegionales sous lrsquoeffet de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution qui par deacutefinition atteacutenue et deacuteroge agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution et dont la
porteacutee ne saurait ecirctre symbolique
12 La porteacutee de lrsquoancrage constitutionnel des langues reacutegionales minoritaires
En vertu de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution laquo Les langues reacutegionales appartiennent
au patrimoine de la France raquo Sans discussion possible cette nouvelle disposition
constitutionnelle constitue un changement de circonstances de droit permettant drsquoatteacutenuer
fortement la porteacutee des preacuteceacutedentes deacutecisions du Conseil constitutionnel rendues avant la
reacutevision constitutionnelle de 2008 Certains voudraient pourtant reacuteduire ce texte agrave une porteacutee
simplement symbolique et pensent pouvoir drsquoores et deacutejagrave trouver une confirmation dans la
jurisprudence du Conseil constitutionnel La reacutealiteacute contentieuse est beaucoup plus nuanceacutee et
ne preacutejuge rien de lrsquoavenir
Le Conseil constitutionnel nrsquoa eu depuis 2008 qursquoune seule et unique occasion de
preacuteciser la porteacutee de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Dans la deacutecision du 20 mai 2011
(ndeg2011-130 QPC) il eacutetait en effet saisi des dispositions de larticle L 312-10 du code de
leacuteducation relative agrave lenseignement des langues et cultures reacutegionales qui eacutetait contesteacute au
regard de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Or estime le Conseil en 2011 lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution ninstitue pas un droit ou une liberteacute que la Constitution garantit Sa
meacuteconnaissance ne peut donc ecirctre invoqueacutee agrave lappui dune question prioritaire de
constitutionnaliteacute sur le fondement de larticle 61-1 de la Constitution
Il convient de ne pas tirer de conclusions excessives du deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en
QPC de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Drsquoune part cela nrsquoempecircche pas le Conseil constitutionnel de se fonder sur lrsquoarticle
75-1 de la Constitution dans le cadre du controcircle a priori comme crsquoest par exemple le cas
pour les regravegles constitutionnelles en matiegravere de recevabiliteacute des amendements ou des principes
constitutionnels en matiegravere budgeacutetaires
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Drsquoautre part le deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en QPC drsquoune norme constitutionnelle ne
preacutejuge pas drsquoune forme de hieacuterarchie mateacuterielle ou formelle et srsquoexplique seulement par les
speacutecificiteacutes de chacun des offices Par exemple le respect des regravegles du vote de la loi
imposeacutees par la Constitution impossibles agrave invoquer en QPC font pourtant lrsquoobjet drsquoune
vigilance accrue du Conseil constitutionnel dans le cadre du controcircle a priori justifiant
chaque anneacutee de nombreuses censures
En outre bien que non invocable en QPC lrsquoarticle 75-1 teacutemoigne indubitablement de
la volonteacute du constituant de permettre au leacutegislateur drsquoassouplir les conditions drsquousage des
langues reacutegionales en ouvrant davantage la leacutegislation agrave des possibiliteacutes drsquoapprentissage en la
matiegravere En cela lrsquoarticle 75-1 de la Constitution est une atteacutenuation une disposition
deacuterogatoire agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution selon lequel laquo La langue de la Reacutepublique est le
franccedilais raquo Comme le souligne le rapport drsquoun deacuteputeacute en 2015 laquo la preacuteservation et la
protection des langues reacutegionales sont devenues un objectif de valeur constitutionnelle raquo2 Une
telle interpreacutetation serait drsquoailleurs coheacuterente avec les travaux parlementaires agrave lrsquoorigine de la
reacutevision de 2008 pour le preacutesident de la Commission des lois du Seacutenat lrsquoarticle 75-1 permet
de donner laquo un fondement solide aux dispositions leacutegislatives et reacuteglementaires qui favorisent
la protection et le deacuteveloppement des langues reacutegionales sans diminuer la place que le
franccedilais occupe dans notre sphegravere publique raquo3
Enfin dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel
estime que larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi
ndeg2005-380 du 23 avril 2005 est conforme agrave la Constitution Or les dispositions ainsi
valideacutees sont toujours en vigueur dans une reacutedaction identique laquo Un enseignement de
langues et cultures reacutegionales peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des
modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces
langues sont en usage raquo Ainsi tout en estimant que lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ne
constitue pas un droit ou liberteacute constitutionnel directement invocable en QPC le Conseil
constitutionnel a valideacute le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures
reacutegionales
2JJ Urvoas Rapport sur Proposition de loi constitutionnelle ndeg 1618 visant agrave ratifier la Charte europeacuteenne deslangues reacutegionales ou minoritaires 14 janvier 2014
3JJ Hyest Rapport ndeg 387 (2007-2008) sur le projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions dela Ve Reacutepublique fait au nom de la commission des lois du Seacutenat
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Autre signe eacutevident de la porteacutee effective de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le
leacutegislateur a multiplieacute ces derniegraveres anneacutees lrsquoadoption de textes favorisant lrsquousage et
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et leur promotion La loi du 8 juillet 2013
drsquoorientation et de programmation pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique ouvre la
possibiliteacute drsquoun enseignement bilingue franccedilais-langue reacutegionale la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) eacutetablit la participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes par lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale
lrsquoarticle 86 de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle
modifie lrsquoarticle 225-1 du code peacutenal en creacuteant un nouveau cas de discrimination fondeacute sur laquo
la maitrise drsquoune autre langue que le franccedilais raquo la loi du 28 feacutevrier 2017 de programmation
relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend inopeacuterant lrsquointerdiction des livrets de famille
bilingues lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance eacutetend aux
eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives les modaliteacutes drsquoun accord entre les communes pour
la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoinscrivant dans une eacutecole dispensant un
enseignement de langue reacutegionale en dehors de sa commune de reacutesidence Lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution a donc susciteacute une production leacutegislative qui teacutemoigne de la volonteacute du pouvoir
politique de mettre en œuvre une politique en matiegravere de langue et culture reacutegionales La
particulariteacute de la proposition de loi deacutefeacutereacutee est drsquoecirctre la premiegravere loi dont lrsquoobjet exclusif vise
agrave densifier lrsquoenseignement et lrsquousage des langues reacutegionales mais ce texte confirme les
avanceacutees ponctuelles eacutetablies depuis la reacutevision constitutionnelle de 2008
13 La monteacutee en puissance drsquoexigences constitutionnelles favorisant lrsquousage des langues
reacutegionales
Au-delagrave de lrsquoapport indeacuteniable de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution qui inteacuteresse
directement et clairement la possibiliteacute pour le leacutegislateur de favoriser le deacuteveloppement des
langues reacutegionales la jurisprudence du Conseil constitutionnel atteste drsquoune monteacutee en
puissance de plusieurs liberteacutes qui participent indirectement du mecircme mouvement
En premier lieu la liberteacute drsquoexpression et de communication concerne les langues
reacutegionales Degraves la deacutecision ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 le Conseil constitutionnel avait
concilieacute lrsquoarticle 2 de la Constitution avec la liberteacute drsquoexpression et de communication afin de
censurer certaines dispositions imposant lrsquousage du franccedilais tout en faisant notamment une
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reacutefeacuterence aux langues reacutegionales cette liberteacute laquo implique le droit pour chacun de choisir les
termes jugeacutes par lui les mieux approprieacutes agrave lexpression de sa penseacutee que la langue franccedilaise
eacutevolue comme toute langue vivante en inteacutegrant dans le vocabulaire usuel des termes
de diverses sources quil sagisse dexpressions issues de langues reacutegionales de vocables
dits populaires ou de mots eacutetrangers raquo Or la liberteacute drsquoexpression et de communication a vu
son reacutegime constitutionnel renforceacute depuis plusieurs anneacutees sous lrsquoeffet du triple test de
proportionnaliteacute en vertu duquel les limites apporteacutees agrave ces liberteacutes doivent ecirctre neacutecessaires
adapteacutees et proportionneacutees agrave lrsquoobjectif poursuivi Norme constitutionnelle prioritaire pour le
Conseil constitutionnel la liberteacute drsquoexpression et de communication a justifieacute de nombreuses
censures de dispositions leacutegislatives ces derniegraveres anneacutees (loi laquo Hadopi raquo consultation des
sites Internet terroristes loi laquo Avia raquohellip) Or cette liberteacute dans ses deux composantes de
lrsquoexpression et de la communication permet au locuteur drsquoutiliser une langue reacutegionale et de
ne pas subir drsquoentraves excessives ou injustifieacutees Le deacuteveloppement des langues reacutegionales et
de leur enseignement lrsquoouverture des possibiliteacutes de srsquoexprimer et de communiquer gracircce agrave
ces langues ne sont pas eacutetrangegraveres aux conditions drsquoexercice de la liberteacute drsquoexpression et de
communication Ainsi la monteacutee en puissance de cette liberteacute dans le contentieux
constitutionnel confirme lrsquoeacutevolution favorable du cadre constitutionnel applicable aux langues
reacutegionales
En deuxiegraveme lieu lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant est deacutesormais consacreacute en tant
qursquoexigence constitutionnelle deacutecoulant des alineacuteas 10 et 11 du Preacuteambule de 1946 Ce
principe a drsquoores et deacutejagrave eacuteteacute appliqueacute en matiegravere de droit des eacutetrangers (CC 2019-797 QPC du
26 juillet 2019) mais aussi en droit de la famille au sujet du divorce (CC ndeg 2019-778 DC du
21 mars 2019) ou de lrsquoaccouchement sous le secret (CC 2019-826 QPC du 7 feacutevrier 2020) Il
serait parfaitement coheacuterent que cette exigence constitutionnelle soit applicable en matiegravere
drsquoeacuteducation et drsquoenseignement ce qui permettrait notamment de justifier le renforcement de
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et le soutien financier qui leur est apporteacute
En troisiegraveme lieu la liberteacute de lrsquoenseignement reconnu en tant que principe
constitutionnel (CC ndeg77-87 DC 23 novembre 1977 2016-745 DC 26 janvier 2017)
pourrait permette de proteacuteger constitutionnellement le libre choix des parents en
matiegravere de meacutethodes eacuteducatives conformeacutement agrave la jurisprudence du Conseil drsquoEtat En
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effet dans une deacutecision du 19 juillet 2017 (Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg
406150) le Conseil drsquoEtat estime que le laquo principe de la liberteacute de lrsquoenseignement qui figure
au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la Reacutepublique implique la
possibiliteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement y compris hors de tout contrat conclu
avec lrsquoEtat tout comme le droit pour les parents de choisir pour leurs enfants des
meacutethodes eacuteducatives alternatives agrave celles proposeacutees par le systegraveme scolaire public y
compris lrsquoinstruction au sein de la famille raquo A fortiori la liberteacute de lrsquoenseignement
permettrait au leacutegislateur drsquooffrir aux eacutelegraveves la possibiliteacute de suivre un enseignement immersif
en langue reacutegionale Faire deacutecouler de la liberteacute drsquoenseignement une exigence en matiegravere de
droit des parents de choisir les meacutethodes eacuteducatives serait drsquoailleurs en coheacuterence avec
lrsquoarticle 2 du Protocole 1 de la CEDH4 et lrsquoarticle 14-3 de la Charte des droits fondamentaux
de lUnion europeacuteenne5
Au-delagrave du principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais unchangement de contexte est intervenu depuis lrsquoinsertion en 1992 de cette disposition agravelrsquoarticle 2 de la Constitution Depuis 2008 le pouvoir constituant a consacreacute leslangues reacutegionales agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution de nombreuses reacuteformesleacutegislatives et regraveglementaires ont accompagneacute le deacuteveloppement des langues reacutegionaleset plusieurs principes constitutionnels accompagnent et pourraient agrave lrsquoavenirrenforcer lrsquoassise normative des langues reacutegionalesCrsquoest agrave lrsquoaune de ce cadre constitutionnel renouveleacute et transformeacute en phase avec leseacutevolutions leacutegislatives et sociales que le Conseil constitutionnel appreacuteciera laconstitutionnaliteacute de la preacutesente proposition de loi qui loin de constituer une rupturesrsquoinscrit dans une forme de continuiteacute
2 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi modifie lrsquoarticle L321-10 du code de lrsquoeacuteducation qui
en lrsquoeacutetat dispose
4laquo Nul ne peut se voir refuser le droit agrave lrsquoinstruction LrsquoEacutetat dans lrsquoexercice des fonctions qursquoil assumera dans ledomaine de lrsquoeacuteducation et de lrsquoenseignement respectera le droit des parents drsquoassurer cette eacuteducation et cetenseignement conformeacutement agrave leurs convictions religieuses et philosophiques raquo
5laquo La liberteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement dans le respect des principes deacutemocratiques ainsi quele droit des parents drsquoassurer lrsquoeacuteducation et lrsquoenseignement de leurs enfants conformeacutement agrave leurs convictionsreligieuses philosophiques et peacutedagogiques sont respecteacutes selon les lois nationales qui en reacutegissent lrsquoexercice raquo
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laquo Les langues et cultures reacutegionales appartenant au patrimoine de la France leurenseignement est favoriseacute prioritairement dans les reacutegions ougrave elles sont en usage
Cet enseignement peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefiniespar voie de convention entre lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont enusage
Le Conseil supeacuterieur de leacuteducation est consulteacute conformeacutement aux attributions qui lui sontconfeacutereacutees agrave larticle L 231-1 sur les moyens de favoriser leacutetude des langues et culturesreacutegionales dans les reacutegions ougrave ces langues sont en usage
Lenseignement facultatif de langue et culture reacutegionales est proposeacute dans lune des deuxformes suivantes
1deg Un enseignement de la langue et de la culture reacutegionales
2deg Un enseignement bilingue en langue franccedilaise et en langue reacutegionale
Les familles sont informeacutees des diffeacuterentes offres dapprentissage des langues et culturesreacutegionales raquo
Lrsquoarticle 4 a simplement pour objet drsquoajouter un 3e cas de forme drsquoenseignementfacultatif de langue et culture reacutegionales en preacutevoyant
laquo3deg Un enseignement immersif en langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectifdrsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo
21 Le Conseil constitutionnel peut ne pas se prononcer sur cette disposition
A titre liminaire il semblerait que lrsquoarticle 4 du texte soumis agrave lrsquoexamen du
Conseil constitutionnel ne soit pas contesteacute par les auteurs de la saisine parlementaire agrave en
croire les deacuteclarations publiques de plusieurs deacuteputeacutes Ce point nrsquoest pas sans importance degraves
lors qursquoil confirme le large consensus politique autour de cette disposition et peut avoir une
conseacutequence sur le peacuterimegravetre de lrsquoobjet de la deacutecision rendue
Certes il arrive ponctuellement au Conseil constitutionnel drsquoexaminer drsquooffice
drsquoautres dispositions que celles contesteacutees par la saisine mais depuis lrsquoentreacutee en vigueur de la
QPC et speacutecialement depuis 2016 une telle pratique tend agrave devenir une exception (Deacutecisions
ndeg 2019-794 DC du 20 deacutecembre 2019 ndeg2018-772 DC du 15 novembre 2018 ndeg2016-745
DC du 26 janvier 2017)
De plus lors de lrsquoexamen de la loi pour une eacutecole de la confiance dans sa deacutecision
ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 le Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute examiner
drsquooffice les dispositions de lrsquoarticle 38 creacuteant en vertu de lrsquoarticle L314-2 du code de
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lrsquoeacuteducation une expeacuterimentation de classe immersive en langue eacutetrangegravere ou reacutegionale6 Si le
Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute se saisir drsquooffice de cette disposition expeacuterimentale
crsquoest qursquoimplicitement il nrsquoa pas consideacutereacute qursquoelle posait une difficulteacute manifeste de
constitutionnaliteacute Degraves lors la coheacuterence voudrait qursquoil en aille de mecircme avec les dispositions
de lrsquoarticle 4 de la preacutesente proposition de loi qui ne font que reprendre les grands principes
de lrsquoexpeacuterimentation preacuteceacutedente en preacutevoyant la possibiliteacute drsquoun enseignement immersif en
langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue
franccedilaise
22 Les exigences anciennes poseacutees par le Conseil constitutionnel sont respecteacutees
Elaboreacutee avant la reacutevision constitutionnelle de 2008 consacrant les langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la jurisprudence
du Conseil constitutionnel en matiegravere drsquoenseignement de langue reacutegionale est totalement
respecteacutee par lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
En premier lieu le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement immersif en langue
reacutegionale rend lrsquoarticle 4 conforme agrave la Constitution
Dans plusieurs deacutecisions le Conseil constitutionnel a eu lrsquooccasion de preacuteciser que
seule lrsquoobligation de suivre un enseignement dans une autre langue que le franccedilais serait
contraire agrave la Constitution Ainsi dans la deacutecision ndeg 2001-456 DC du 27 deacutecembre 2001 il
indique que laquo lusage dune langue autre que le franccedilais ne peut ecirctre imposeacute aux eacutelegraveves des
eacutetablissements de lenseignement public ni dans la vie de leacutetablissement ni dans
lenseignement des disciplines autres que celles de la langue consideacutereacutee raquo Le verbe
6Article L314-2 du code de lrsquoeacuteducation laquo Sous reacuteserve de lrsquoautorisation preacutealable des autoriteacutes acadeacutemiques etapregraves concertation avec les eacutequipes peacutedagogiques le projet drsquoeacutecole ou drsquoeacutetablissement mentionneacute agrave lrsquoarticle L401-1 peut preacutevoir la reacutealisation dans des conditions deacutefinies par deacutecret drsquoexpeacuterimentations peacutedagogiquesportant sur tout ou partie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement drsquoune dureacutee limiteacutee agrave cinq ans Cesexpeacuterimentations peuvent concerner lrsquoorganisation peacutedagogique de la classe de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement laliaison entre les diffeacuterents niveaux drsquoenseignement la coopeacuteration avec les partenaires du systegraveme eacuteducatiflrsquoenseignement dans une langue vivante eacutetrangegravere ou reacutegionale les eacutechanges avec des eacutetablissementseacutetrangers drsquoenseignement scolaire lrsquoutilisation des outils et ressources numeacuteriques la reacutepartition des heuresdrsquoenseignement sur lrsquoensemble de lrsquoanneacutee scolaire les proceacutedures drsquoorientation des eacutelegraveves et la participation desparents drsquoeacutelegraveves agrave la vie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement Les collectiviteacutes territoriales sont systeacutematiquementassocieacutees agrave la deacutefinition des grandes orientations des expeacuterimentations meneacutees par lrsquoeacuteducation nationale ainsiqursquoagrave leurs deacuteclinaisons territoriales raquo
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laquo imposer raquo est employeacute agrave la fois au sujet de lrsquousage drsquoune autre langue que le franccedilais et au
sujet de la vie de lrsquoeacutetablissement et de lrsquoenseignement des disciplines autres que celles de la
langue consideacutereacutee Ce qui signifie qursquoil est constitutionnellement possible au leacutegislateur de
permettre aux eacutelegraveves de choisir de maniegravere facultative une telle orientation dans
lrsquoenseignement De mecircme dans sa deacutecision ndeg2001 454 DC du 17 janvier 2002 le Conseil
constitutionnel avait estimeacute que si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre
de lrsquohoraire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires laquo il ne saurait revecirctir pour autant
un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo Et dans la deacutecision
ndeg2004-490 DC 12 feacutevrier 2004 le Conseil indique que lrsquoenseignement de la langue
tahitienne ou dune autre langue polyneacutesienne dans le cadre de lhoraire normal des eacutecoles
maternelles et primaires dans les eacutetablissements du second degreacute et dans les eacutetablissements
denseignement supeacuterieur laquo ne saurait revecirctir pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les
eacutelegraveves ou eacutetudiants ni pour les enseignants raquo
Or en lrsquoespegravece il nrsquoy a absolument aucun doute sur le caractegravere facultatif du 3deg
ajouteacute agrave lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation En effet le premier alineacutea de lrsquoarticle L312-
10 du code de lrsquoeacuteducation est inchangeacute et eacutevoque un laquo enseignement facultatif raquo Le deacuteputeacute
Molac lrsquoa clairement exprimeacute lors des deacutebats laquo lrsquoenseignement immersif tel qursquoil est ici
proposeacute reacutepond agrave cette condition dans la mesure ougrave il ne serait pas imposeacute mais seulement
proposeacute au sein des eacutetablissements publics au cocircteacute de filiegraveres classiques drsquoenseignement la
deacutecision finale restant du ressort des personnes responsables de lrsquoenfant raquo (Rapport du 31
mars 2021)
En deuxiegraveme lieu lrsquoarticle 4 nrsquoa pas pour objet de soustraire les eacutelegraveves aux
droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements drsquoenseignement
Dans plusieurs deacutecisions relatives agrave lrsquousage drsquoune langue reacutegionale le Conseil
constitutionnel rappelle qursquoun enseignement de ce type nrsquoa pas pour laquo pour objet de soustraire
les eacutelegraveves scolariseacutes (hellip) aux droits et obligations applicables agrave lensemble des usagers des
eacutetablissements qui assurent le service public de lenseignement ou sont associeacutes agrave celui-ci raquo
(ndeg 91-290 DC du 9 mai 1991 ndeg 2001-454 DC du 17 janvier 2002) Or lrsquoarticle 4 a
seulement pour objet drsquoouvrir une 3e modaliteacute facultative drsquoenseignement en langue reacutegionale
La proposition de loi ne confegravere pas des droits speacutecifiques agrave des laquo groupes raquo de locuteurs de
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de laquo territoires raquo dans lesquels ces langues
seraient pratiqueacutees Le texte ne modifie pas non plus les modaliteacutes drsquoexpression dans la vie
publique et dans la relation entre lrsquoadministration et les administreacutes De telle sorte que
lrsquoarticle 4 ne creacutee aucun droit particulier pour les eacutelegraveves comme pour les enseignants de nature
agrave les soustraire aux droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements
drsquoenseignement ou associeacutes agrave celui-ci
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 4 opegravere une conciliation raisonnable et eacutequilibreacutee entre
le principe de lrsquoarticle 2 de la Constitution et lrsquoapprentissage des langues reacutegionales
Lrsquoenseignement immersif en lange reacutegionale doit srsquoopeacuterer laquo sans preacutejudice de
lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo Lrsquoarticle 4 prend soin de ne pas
ignorer le principe poseacute par lrsquoarticle 2 de la Constitution et prolonge au niveau leacutegislatif la
conciliation souhaiteacutee par le constituant depuis 2008 avec lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Il
appartiendra au pouvoir regraveglementaire de preacuteciser la mise en œuvre de lrsquoobjectif de bonne
connaissance de la langue franccedilaise qui en toute hypothegravese garantit une conciliation
eacutequilibreacutee entre les regravegles constitutionnelles en preacutesence
Au surplus les retours drsquoexpeacuteriences des expeacuterimentations de classes en
enseignements immersifs permises par lrsquoarticle L 314-2 du code de lrsquoeacuteducation deacutemontrent
que les eacutelegraveves disposent drsquoun niveau en franccedilais plus eacuteleveacute que la moyenne Comme lrsquoindique
le rapport du Seacutenat sur la proposition de loi 19 expeacuterimentations immersives en langue
basque 6 en langue corse et une en langue catalane ont lieu actuellement dans des eacutecoles
publiques Or pour prendre lrsquoexemple de lrsquoenseignement en basque agrave 100 en eacutecole
maternelle objet drsquoune eacutevaluation preacutecise par lrsquoacadeacutemie de Bordeaux en 2019 (Etude
comparative des filiegraveres de maternelle 100 basque bilingue et franccedilais Acadeacutemie de
Bordeaux 2019) laquo lorsque ces enfants arrivaient en CP leur niveau de franccedilais eacutetait
supeacuterieur agrave la moyenne du deacutepartement Cela prouve que le niveau de franccedilais nrsquoavait
absolument pas eacuteteacute toucheacute raquo (Paul Molac Assembleacutee nationale Seacuteance du 8 avril 2021)
En quatriegraveme lieu lrsquoarticle 4 ne fait qursquoeacutetendre la mise en œuvre drsquoune modaliteacute
drsquoenseignement deacutejagrave valideacute par le Conseil constitutionnel
Dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel a valideacute
le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures reacutegionales en estimant que
larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi ndeg2005-380 du 23
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
avril 2005 est conforme agrave la Constitution En effet apregraves avoir estimeacute inopeacuterant le grief tireacute
de la violation de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la deacutecision preacutecise laquo que les dispositions
contesteacutees ne sont contraires agrave aucun droit ou liberteacute que la Constitution garantit raquo Par
conseacutequent en vertu de lrsquoautoriteacute que lrsquoarticle 62 de la Constitution confegravere aux deacutecisions du
Conseil constitutionnel les dispositions valideacutees dans cette deacutecision et toujours en vigueur
sont conformes agrave la Constitution Il srsquoagit en particulier de lrsquoalineacutea 2 de la version actuelle de
lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation en vertu duquel laquo Cet enseignement peut ecirctre
dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre
lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont en usage raquo Or lrsquoarticle 4 de la
proposition de loi ne fait qursquoajouter une 3e possibiliteacute de mise en œuvre drsquoun principe deacutejagrave
valideacute par le Conseil constitutionnel modaliteacute facultative et sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune
bonne connaissance de la langue franccedilaise Le leacutegislateur srsquoest donc scrupuleusement
conformeacute aux exigences du Conseil constitutionnel
23 La possibiliteacute drsquoun enseignement immersif peut se preacutevaloir de plusieurs exigences constitutionnelles
En plus de srsquoinscrire dans les lignes jurisprudentielles du Conseil constitutionnel et de
respecter lrsquoarticle 2 de la Constitution lrsquoarticle 4 de la proposition de la loi peut se preacutevaloir
plusieurs normes constitutionnelles
En premier lieu lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en vertu duquel laquo Les langues
reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo constitue un changement de
circonstances de droit issu de la reacutevision constitutionnelle de 2008 qui atteacutenue la porteacutee de
lrsquoarticle 2 de la Constitution et permet ainsi de fonder le principe drsquoen enseignement immersif
et facultatif en langue reacutegionale
En second lieu comme preacuteceacutedemment rappeleacute (cf supra point 13) plusieurs
exigences et liberteacutes constitutionnelles peuvent soutenir le deacuteveloppement des langues
reacutegionales et peser favorablement dans la conciliation opeacutereacutee par le Conseil constitutionnel
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
La liberteacute drsquoexpression et de communication garantie par lrsquoarticle 11 de la DDHC
et dont le reacutegime constitutionnel srsquoest renforceacute depuis une dizaine drsquoanneacutees peut permettre de
justifier lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale degraves lors qursquoil srsquoagit drsquoun preacutealable neacutecessaire
agrave lrsquoexpression et agrave la communication dans une autre langue que le franccedilais
Lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant reacutecemment consacreacute sur le fondement des alineacuteas 10
et 11 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 peut permettre au leacutegislateur de diversifier les
possibiliteacutes drsquoapprentissage drsquoune langue et drsquoune culture reacutegionale
La liberteacute de lrsquoenseignement consacreacutee de longue date en tant que principe
fondamental reconnu par les lois de la Reacutepublique implique neacutecessairement comme le
reconnaissent le Conseil drsquoEtat au niveau constitutionnel (CE 19 juillet 2017 Association
Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150) et les textes europeacuteens (article 2 du protocole 1
CEDH article 14-3 Charte des droits fondamentaux de lrsquoUnion europeacuteenne) une possibiliteacute
pour les parents de choisir des meacutethodes eacuteducatives en lien avec leurs convictions
Il est eacutegalement possible drsquoavancer le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction qui
deacutecoule de lrsquoalineacutea 13 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 (CC ndeg2001-450 DC 11
juillet 2001) degraves lors que lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale poursuit un objectif
peacutedagogique auquel les eacutelegraveves doivent pouvoir acceacuteder de maniegravere suffisamment libre et
selon des critegraveres objectifs et rationnels
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi se contente drsquoajouter une modaliteacute de mise enœuvre drsquoun enseignement dont le principe a deacutejagrave eacuteteacute valideacute par le Conseilconstitutionnel La conformiteacute agrave la Constitution de cet enseignement est eacutetablie degraveslors qursquoil est proposeacute de maniegravere facultative sans preacutejudice du respect de lrsquoarticle 2 dela Constitution et qursquoil peut se preacutevaloir de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ainsi quede plusieurs principes constitutionnels comme la liberteacute drsquoexpression lrsquointeacuterecirctsupeacuterieur de lrsquoenfant la liberteacute drsquoenseignement et lrsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
3 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi deacutefeacutereacutee modifie lrsquoarticle L442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation en remplaccedilant les alineacuteas 6 et 7 par lrsquoalineacutea suivant
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue
reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de
reacutesidence et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la
condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de
langue reacutegionale raquo
31 Lrsquoimpact subsidiaire et reacutesiduel de lrsquoarticle 6
Au-delagrave des passions et crispations qui peuvent parfois se rencontrer au greacute de deacutebats
relatifs au financement de lrsquoenseignement priveacute la modification apporteacutee par lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi doit ecirctre replaceacutee agrave sa juste porteacutee
En premier le meacutecanisme est subsidiaire En effet la participation financiegravere de la
commune de reacutesidence ne serait solliciteacutee que si cette commune ne laquo dispose pas drsquoeacutecole
dispensant un enseignement de langue reacutegionale raquo Il srsquoagit bien drsquoun laquo enseignement raquo quel
que soit sa forme et son volume Degraves lors comme lrsquoa clairement exprimeacute le deacuteputeacute Paul
Molac devant la Commission des affaires sociales il peut srsquoagir drsquoune laquo initiation drsquoun
enseignement paritaire ou drsquoune immersion raquo (31 mars 2021)
En deuxiegraveme lieu le meacutecanisme est reacutesiduel La participation financiegravere se limite
aux eacutetablissements priveacutes du premier degreacute ndash les eacutecoles ndash ayant conclu un contrat
drsquoassociation Les collegraveges et lyceacutees sont donc exclus du dispositif Un faible nombre
drsquoenfants sera concerneacute et la charge sera donc reacuteduite pour les communes en question De
plus en pratique dans les zones ougrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales est reacutepandu les
eacutecoles drsquoun grand nombre de communes ont deacutejagrave deacuteveloppeacute des offres eacuteducatives
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
En troisiegraveme lieu la participation financiegravere est encadreacutee par la loi En application
de lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation non modifieacute par la preacutesente
proposition de loi les modaliteacutes de calcul de la contribution de la commune de reacutesidence sont
clairement eacutetablies
laquo il est tenu compte des ressources de cette commune du nombre deacutelegraveves de cette
commune scolariseacutes dans la commune daccueil et du coucirct moyen par eacutelegraveve calculeacute sur la base
des deacutepenses de fonctionnement de lensemble des eacutecoles publiques de la commune daccueil
sans que le montant de la contribution par eacutelegraveve puisse ecirctre supeacuterieur au coucirct quaurait
repreacutesenteacute pour la commune de reacutesidence leacutelegraveve sil avait eacuteteacute scolariseacute dans une de ses eacutecoles
publiques raquo
La charge financiegravere obeacuteit donc agrave des regravegles claires objectives rationnelles et deacutejagrave en
vigueur depuis plusieurs anneacutees En effet le laquo forfait scolaire raquo est deacutejagrave pratiqueacute sur le
fondement de lrsquoarticle L212-8 du code de lrsquoeacuteducation lorsqursquoune famille scolarise dans une
eacutecole publique ou priveacutee son enfant dans une autre commune que la commune de reacutesidence
32 Lrsquoabsence de violation de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales et du principe drsquoeacutegaliteacute
Ainsi replaceacutee dans sa juste porteacutee il ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi de violer la Constitution et en particulier les principes applicables en
matiegravere de libre administration des collectiviteacutes territoriales ainsi que le principe drsquoeacutegaliteacute
En premier lieu le Conseil constitutionnel a deacutejagrave valideacute le principe de lrsquoaide agrave
lrsquoenseignement priveacute et en particulier aux langues reacutegionales
Avant mecircme la reacutevision constitutionnelle de 2008 et la conseacutecration des langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le Conseil
constitutionnel avait reconnu que laquo pour concourir agrave la sauvegarde des langues reacutegionales
lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales peuvent apporter leur aide aux associations ayant cet
objet raquo (CC ndeg2001-456 DC 27 deacutecembre 2001)
De plus le Conseil constitutionnel rappelle reacuteguliegraverement que laquo le leacutegislateur peut
preacutevoir loctroi dune aide des collectiviteacutes publiques aux eacutetablissements denseignement
priveacutes selon la nature et limportance de leur contribution agrave laccomplissement de missions
denseignement raquo (CC ndeg93-329 DC du 13 janvier 1994)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
En deuxiegraveme lieu le principe de libre administration ne saurait justifier des
traitements diffeacuterencieacutes dans lrsquoexercice des droits et liberteacutes constitutionnels
En vertu de lrsquoarticle 72 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales srsquoadministrent
librement mais laquo dans les conditions preacutevues par la loi raquo De plus le Conseil constitutionnel
prend soin de preacuteciser que laquo si le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacutegislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce
que les conditions essentielles drsquoapplication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de
lrsquoenseignement deacutependent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas
ecirctre les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (CC ndeg 84-185 DC du 18 janvier 1985 CC
ndeg93-329 du 13 janvier 1994) Plus largement dans la deacutecision du 17 janvier 2002 (ndeg2001-
454 DC) le Conseil constitutionnel affirme que laquo le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales ne saurait conduire agrave ce que les conditions essentielles de mise en
oeuvre des liberteacutes publiques et par suite lensemble des garanties que celles-ci comportent
deacutependent des deacutecisions de collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre les mecircmes
sur lensemble du territoire de la Reacutepublique raquo
Or en lrsquoespegravece si les communes pouvaient librement participer au financement de la
scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous contrat
drsquoassociation lrsquoexercice de la liberteacute drsquoenseignement du principe drsquoeacutegaliteacute devant la loi et du
principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction deacutependrait de la seule volonteacute drsquoune collectiviteacute
territoriale ce que le Conseil constitutionnel condamne Degraves lors que la possibiliteacute drsquoun
enseignement en langue reacutegionale est offerte aux enfants les conditions drsquoaccegraves agrave cet
enseignement doivent pouvoir ecirctre effectives et eacutegales Loin de violer le principe drsquoeacutegaliteacute
devant la loi lrsquoarticle 6 de la proposition de loi en assure au contraire la garantie
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne transfert ni ne creacutee de
nouvelles compeacutetences
Srsquoagissant des ressources des collectiviteacutes locales permettant de leur assurer une libre
administration le quatriegraveme alineacutea de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution preacutevoit laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales srsquoaccompagne de
lrsquoattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consacreacutees agrave leur exercice Toute
creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour conseacutequence drsquoaugmenter les deacutepenses des
collectiviteacutes territoriales est accompagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Le Conseil
constitutionnel veille au respect de cette regravegle drsquoune part pour les transferts de compeacutetence
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales et drsquoautre part pour les creacuteations ou extensions de
compeacutetence des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece aucune creacuteation ou transfert de compeacutetence nrsquoest opeacutereacute au sens de
lrsquoarticle 72-2 de la Constitution Il srsquoagit drsquoune simple participation financiegravere agrave caractegravere
subsidiaire reacutesiduel et deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels comme
preacuteceacutedemment eacutevoqueacute (cf supra point 31) De plus le versement de la participation
financiegravere correspond en quelque sorte agrave un allegravegement de charge degraves lors que le coucirct de
lrsquoenfant scolariseacute est reporteacute sur une autre commune que la commune de reacutesidence En
conseacutequence lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne fait que modifier les modaliteacutes drsquoexercice
drsquoune compeacutetence sans en creacuteer ou transfeacuterer une nouvelle
Drsquoailleurs dans la deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 le Conseil
constitutionnel avait jugeacute inopeacuterant le grief tireacute de la violation des articles 72 et 72-2 de la
Constitution agrave propos de la version ancienne de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation en
jugeant que laquo la loi deacutefeacutereacutee nemporte ni creacuteation ni extension des compeacutetences en matiegravere de
contributions des communes aux frais de fonctionnement des classes eacuteleacutementaires des
eacutetablissements du premier degreacute priveacutes sous contrat dassociation que par suite le grief tireacute
de la meacuteconnaissance du principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales manque
en fait raquo
Le Conseil constitutionnel a statueacute dans le mecircme sens au sujet de lrsquoinstitution drsquoun
creacutedit drsquoimpocirct en matiegravere drsquoapprentissage ou de la possibiliteacute de modifier la dureacutee du contrat
drsquoapprentissage mecircme si ces mesures en rendant lrsquoapprentissage plus attrayant ont pour effet
drsquoaugmenter le nombre drsquoapprentis et donc drsquoaccroicirctre les charges des reacutegions dans ce
domaine (CC ndeg 2004-509 DC du 13 janvier 2005)
En quatriegraveme lieu le principe drsquoeacutegaliteacute entre les charges publiques est respecteacute
En effet en plus du caractegravere subsidiaire et reacutesiduel du meacutecanisme la participation
financiegravere preacutevue par lrsquoarticle 6 de la proposition de loi srsquoapplique agrave lrsquoensemble des
communes ne disposant pas drsquoun eacutetablissement dispensant un enseignement de langue
reacutegionale ce qui est coheacuterent au regard de lrsquoobjet de la loi Les critegraveres de la participation
financiegravere preacutevus par lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 sont en tout eacutetat de cause objectifs et
rationnels eacutetablis et mis en œuvre depuis plusieurs anneacutees Les garanties de lrsquoarticle 13 de la
DDHC sont donc respecteacutees
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
En cinquiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir du respect
de plusieurs normes constitutionnelles
En affirmant depuis 2008 que les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la
France lrsquoarticle 75-1 de la Constitution donne un ancrage constitutionnel au deacuteveloppement
de lrsquousage et de lrsquoenseignement des langues reacutegionales Or sans la participation financiegravere des
communes de reacutesidence agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat lrsquoenseignement des langues reacutegionales serait compromis Par
conseacutequent lrsquoarticle 6 de la proposition de loi constitue une garantie leacutegale du respect de
lrsquoaffirmation porteacutee par lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Le mecircme raisonnement sera tenu agrave propos de lrsquoensemble des principes constitutionnels
qui donnent une assise agrave lrsquousage et agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales la liberteacute
drsquoexpression et de communication (article 11 DDHC) la liberteacute drsquoenseignement (PFRLR)
dont pourrait deacutecouler une exigence en matiegravere de droit des parents de choisir les meacutethodes
eacuteducatives (CE 19 juillet 2017 Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150)
lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant (alineacutea 10 et 11 du Preacuteambule de 1946) le principe drsquoeacutegaliteacute
(article 6 DDHC) le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction (alineacutea 13 du Preacuteambule de 1946)
Sans lrsquoarticle 6 de la proposition de loi lrsquoeffectiviteacute de lrsquoensemble de ces normes
constitutionnelles serait consideacuterablement atteacutenueacutee et creacuteerait des diffeacuterences de traitement
injustifieacutees et deacutependantes de la volonteacute des communes
De plus lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir drsquoun objectif de
clarification et de seacutecurisation du droit applicable qui peut se rattacher agrave lrsquoarticle 16 de la
DDHC degraves lors que les textes jusqursquoagrave preacutesent applicables eacutetaient ambigus et ont donneacute lieu agrave
des contentieux En rendant obligatoire ce qui eacutetait avant une faculteacute pour autant soumise agrave
un rocircle non neacutegligeable du preacutefet lrsquoarticle 6 de la proposition de loi clarifie le droit
applicable Ainsi une deacuteputeacutee preacutecisait lors des deacutebats parlementaires que laquo lrsquoarticle 34 de la
loi pour une eacutecole de la confiance relatif au versement du forfait scolaire a susciteacute de
nombreux imbroglios administratifs Ainsi chez moi en Bretagne plus de 150 demandes de
meacutediation ont eacuteteacute transmises aux services de lrsquoEacutetat ce qui met en lumiegravere lrsquoambiguiumlteacute de la loi
et les difficulteacutes de son application Je soutiens donc fortement lrsquoarticle 2 quinquies [devenu
article 6] issu des travaux du Seacutenat qui legraveve toute incertitude raquo (Mme Claudia Rouaux
Commission des affaires sociales Assembleacutee nationale 31 mars 2021)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi creacutee un meacutecanisme subsidiaire et reacutesiduel dont laporteacutee est deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels Sans creacuteer ni transfeacutererde nouvelle compeacutetence aux communes cette disposition assure une mise en œuvreuniforme des droits et liberteacutes et peut se preacutevaloir de nombreuses normesconstitutionnelles confeacuterant agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales et agrave son soutienfinancier de solides justifications constitutionnelles
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 12 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 12 mai 2021
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure Mme Mastorpdf
Lettre Wanda Mastor accompagnant la porte eacutetroite
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure MSchellenberger et autrespdf
Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure assESKOLIL pdf
lettre daccompagnement CC
Porte eacutetroite loi langues reacutegionales (2)
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure M Bertrand Pancherpdf
Contribution exteacuterieure agrave lrsquoappui de la conformiteacute agrave la Constitution
de la loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et agrave leur promotion
Longtemps consideacutereacutees comme strictement inconciliables avec le prin-
cipe de lrsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique les langues reacutegionales nrsquoappartenaient
qursquoau monde de la reacutesistance de quelques deacutefenseurs estimeacutes ou meacutepriseacutes1
Elles appartiennent depuis quelques anneacutees au monde du droit y compris du
droit constitutionnel mecircme si ce lien continue de nourrir drsquoimmenses malen-
tendus Car la reconnaissance la protection et la promotion des langues reacute-
gionales nrsquoentravent en rien le principe de lrsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique
Surtout en des peacuteriodes troubleacutees telles que nous avons deacutesormais pris lrsquoha-
bitude de vivre lrsquoarticle premier de la Constitution doit ecirctre sans cesse rap-
peleacute le serment drsquoune Reacutepublique laiumlque qui offre la mecircme eacuteducation pu-
blique agrave toutes et tous qui ne connaicirct qursquoun seul peuple et une seule langue
officielle Si notre Constitution reconnaicirct les laquo populations drsquooutre-mer raquo elle
rejette lrsquoacception des peuples au pluriel sous peine de diluer les valeurs de
la Nation franccedilaise Assureacutement les questions de seacuteparatisme de commu-
nautarisation du repli identitaire mettent agrave mal la laquo coheacutesion nationale raquo2
1 Voir Amane Gogorza et Wanda Mastor (sous la direction de) Les langues reacutegionales et la construction de lrsquoEacutetat LGDJ collection Grands colloques 2019 318 p 2 Conseil drsquoEacutetat ordonnance ndeg374508 du 9 janvier 2014 Ministre de lrsquointeacuterieur c Socieacuteteacute Les Productions de la Plume et M Dieudonneacute MrsquoBala MrsquoBala
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Mais lrsquoamalgame ne saurait ecirctre fait avec lrsquoadmission de certains particula-
rismes locaux qui font tout au contraire la richesse reacutepublicaine Laquelle
nrsquoest agrave aucun moment en contradiction avec le principe de lrsquoindivisibiliteacute de
la Reacutepublique comme le droit constitutionnel compareacute (constitutions et juris-
prudences des cours constitutionnelles) en apporte la preuve irreacutefutable
Les arguments qui consistent agrave rappeler -marteler- sans cesse que lrsquoarticle 75-
1 de la Constitution nrsquoa pas de porteacutee normative depuis la deacutecision ndeg 2011-
130 QPC du 20 mai 2011 du Conseil constitutionnel3 renvoient certaines dis-
positions de notre texte fondamental agrave une fonction deacuteclarative pour ne pas
dire deacutecorative Le fait que lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ne constitue pas
dans le cadre drsquoune proceacutedure de QPC un droit ou une liberteacute que la Consti-
tution garantit ne le vide pas pour autant de tout contenu Pour le dire au-
trement si ledit article ne peut ecirctre invoqueacute agrave lrsquoappui drsquoune QPC cette inter-
preacutetation contentieuse ne saurait le renvoyer au monde des principes pure-
ment deacuteclaratoires qui nrsquoont ce dit en passant pas leur place dans la norme
la plus eacuteleveacutee qui soit (sauf agrave offrir une nouvelle deacutefinition de la norme ce qui
srsquoavegravere compliqueacute)
Non invocable agrave lrsquoappui drsquoune QPC la disposition selon laquelle laquo les langues
reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo nrsquoen est pas moins une
adresse au leacutegislateur Crsquoest agrave cette adresse qui appelle et leacutegitime un deacuteve-
loppement leacutegislatif de la protection et la promotion des langues reacutegionales
que reacutepond la proposition de loi du deacuteputeacute Paul Molac
Il faut mecircme aller plus loin sur la voie de lrsquointerpreacutetation de lrsquoarticle 75-1 Non
seulement la loi deacutefeacutereacutee lui donne une reacutealiteacute mais encore creacutee-t-elle les con-
ditions mateacuterielles de son existence La loi dite laquo Molac raquo est conforme agrave la
3 Deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 Mme Ceacutecile L et autres [Langues reacutegionales] laquo
Consideacuterant quaux termes de larticle 75-1 de la Constitution Les langues reacutegionales ap-
partiennent au patrimoine de la France que cet article ninstitue pas un droit ou une liberteacute
que la Constitution garantit que sa meacuteconnaissance ne peut donc ecirctre invoqueacutee agrave lappui
dune question prioritaire de constitutionnaliteacute sur le fondement de larticle 61-1 de la Cons-titution (hellip) raquo (consideacuterant 3)
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Constitution et comble une lacune Ce nrsquoest pas son existence qui pose pro-
blegraveme mais bien son absence drsquoexistence Il appartient au leacutegislateur de mettre
en œuvre les dispositions de la Constitution afin qursquoelles ne se cantonnent
pas au monde du virtuel La loi sur les langues reacutegionales est lrsquoune des garan-
ties leacutegales de la Constitution
Tout texte transmis au controcircle du Conseil constitutionnel vigile du droit
jouit de la preacutesomption de constitutionnaliteacute Votre jurisprudence teacutemoigne
qursquoau nom de la primauteacute de la Constitution votre rocircle est de sauver la loi en
lrsquoeacutepurant de ses vices drsquoinconstitutionnaliteacute Si la deacutemocratie repreacutesentative
accepte la leacutegitimiteacute drsquoune censure drsquoun texte adopteacute par 925 repreacutesentants
de la Nation par neuf membres nommeacutes crsquoest au nom de ladite primauteacute de
la Constitution Laquelle nrsquoest pas violeacutee par la preacutesente loi soumise agrave votre
examen Il faut au preacutealable rappeler le contexte de lrsquoadoption de la loi qui ne
saurait se limiter au contexte parlementaire Lrsquoobjectif de la loi est de reacutepondre
agrave une adresse faite par le pouvoir constituant lui-mecircme conformeacutement agrave un
esprit plus geacuteneacuteral de protection et promotion des langues reacutegionales qui ir-
rigue conventions internationales et constitutions eacutetrangegraveres (I) Non seule-
ment la loi du 8 avril 2021 ne viole pas la Constitution mais encore met-elle
en œuvre certaines de ses dispositions (II)
I Le contexte de la loi relative agrave la protection patrimoniale des langues
reacutegionales et agrave leur promotion
Dans lrsquoobjectif sans doute drsquoassurer un climat plus serein qui doit preacutesider
agrave lrsquoinstruction et la deacutelibeacuteration la lettre de saisine des soixante deacuteputeacutes nrsquoest
jamais publieacutee par le Conseil constitutionnel en amont de la publication de la
deacutecision Ce nrsquoest ni le moment ni le lieu pour plaider pour ladite publication
mais force est de constater qursquoil nrsquoest pas tregraves sain que dans une deacutemocratie
les eacuteleacutements censeacutes ecirctre secrets laquo fuitent raquo dans la presse dans les couloirs et
autres ceacutenacles reacuteserveacutes agrave une infime partie des citoyens Deacuteposeacutee agrave la hacircte
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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la lettre de saisine semble reacutedigeacutee de faccedilon deacuteconcertante La deacutefaillance for-
melle nrsquoenlegraveve pas dans lrsquoabsolu de la force aux arguments mais prouve en
lrsquoespegravece lrsquoextrecircme preacutecipitation dans laquelle les choses se sont deacuterouleacutees
Il est neacutecessaire avant de deacutevelopper les arguments au soutien de la confor-
miteacute agrave la Constitution de la loi et notamment de son article 6 de rappeler le
contexte de son adoption La proposition de loi du deacuteputeacute Paul Molac ayant
par ailleurs les faveurs de lrsquoopinion publique et le soutien de treize preacutesidents
de reacutegions4 srsquoinscrit dans un mouvement Celui de la deacutefense et la promotion
des langues reacutegionales lesquelles appartiennent depuis la reacutevision constitu-
tionnelle du 23 juillet 2008 au laquo patrimoine de la France raquo Ce mouvement
favorable agrave la protection et promotion des langues reacutegionales nrsquoest pas uni-
quement parlementaire il est aussi celui drsquoun ensemble plus vaste Celui de
notre propre Constitution (A) des engagements internationaux et de la grande
majoriteacute des constitutions des pays voisins (B) Ensemble qui permet de mieux
saisir le contexte parlementaire franccedilais de lrsquoadoption de la loi (C)
A Le contexte constitutionnel franccedilais
Lrsquoabsence de protection et de valorisation des langues reacutegionales est une
entrave au rayonnement de la France qui loin de srsquoeacutepuiser dans son caractegravere
indivisible que la loi deacutefeacutereacutee ne remet absolument pas en cause srsquoenrichit de
ses composantes Indivisibiliteacute ne signifie pas uniformiteacute Le constituant a lui-
mecircme choisi en 2003 de preacuteciser degraves lrsquoouverture de notre texte suprecircme que
lrsquoorganisation de notre Reacutepublique eacutetait laquo deacutecentraliseacutee raquo Il faut accepter tous
les contours conseacutequences de cette affirmation solennelle qui ne peut avoir
4 Communiqueacute de presse du 16 mars 2021 laquo Notre responsabiliteacute en tant que preacutesidents de
Reacutegion et de Collectiviteacute est de pouvoir garantir et promouvoir la vitaliteacute culturelle et patri-
moniale de nos territoires Cette proposition va dans le bon sens afin que vivent nos langues
que lrsquoUNESCO classe pour une grande majoriteacute drsquoentre elles en grand danger drsquoextinction
Crsquoest en ce sens que la reacutedaction de la proposition de loi dite Molac tel qursquoissue des travaux du Seacutenat va dans le bon sens et que nous appelons de nos vœux une adoption conforme par
les deacuteputeacutes de tous les bancs afin que ce texte puisse entrer en vigueur raquo httpsregions-
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que des applications laquo particuliegraveres raquo sur certaines parties de notre territoire
Les modifications successives de la Constitution ont progressivement em-
prunteacute la voie de la reconnaissance de ces implications toujours plus de dis-
positions deacuterogatoires de reconnaissances mecircme symboliques laquo drsquointeacuterecircts
particuliers raquo drsquolaquo adaptations neacutecessaires raquo pour ne citer qursquoelles jusqursquoagrave la
diffeacuterenciation des normes toujours inscrite dans lrsquoactuel projet de loi consti-
tutionnelle5 Si lrsquoon observe les discussions actuelles relatives au projet de loi
laquo 4D raquo ou la validation par le Conseil constitutionnel en avril dernier de la loi
organique relative agrave la simplification des expeacuterimentations susceptibles decirctre
meneacutees par les collectiviteacutes territoriales6 la voie de la reconnaissance du par-
ticularisme des territoires semble srsquoannoncer
En 2003 la Constitution a deacutecideacute une fois pour toutes que lrsquouniteacute nrsquoeacutetait pas
neacutecessairement lrsquouniformiteacute Parmi les richesses territoriales qui loin drsquoeacutegra-
tigner lrsquoimage drsquoun Eacutetat unitaire la renforce par sa capaciteacute agrave promouvoir la
diversiteacute au sein drsquoune Nation forte les langues reacutegionales occupent une place
particuliegravere Leur entreacutee remarqueacutee dans lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en
2008 nrsquoa eu pour le moment que des effets symboliques sur lesquels il y aura
lieu de revenir plus loin Sous la preacutesidence de Franccedilois Hollande le Parle-
ment fort de la volonteacute drsquoappliquer la 56egraveme promesse de campagne du candi-
dat devenu preacutesident a remis la question des langues reacutegionales sur le devant
de la scegravene institutionnelle Le rapport drsquoinformation ndeg489 de lrsquoAssembleacutee
nationale sur les implications de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales
et minoritaires7 est essentiellement descriptif mais teacutemoigne de la volonteacute
parlementaire de se saisir de nouveau de la question De leurs cocircteacutes les tri-
bunaux ordinaires ont eacutegalement eu lrsquooccasion ces derniegraveres anneacutees de se
pencher sur la question du bilinguisme notamment que ce soit en matiegravere
5 Projet de loi constitutionnelle pour un renouveau de la vie deacutemocratique enregistreacute agrave la Preacutesi-
dence de lrsquoAssembleacutee nationale le 29 aoucirct 2019 6 Deacutecision ndeg2021-816 DC du 15 avril 2021 Loi organique relative agrave la simplification des ex-peacuterimentations mises en œuvre sur le fondement du quatriegraveme alineacutea de larticle 72 de la Cons-
titution 7 M Jean-Jacques Urvoas Rapport drsquoinformation ndeg 489 du 12 deacutecembre 2012 sur les impli-
cations constitutionnelles drsquoune ratification par la France de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires
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de signaleacutetique routiegravere8 ou de lrsquoutilisation de la langue reacutegionale dans des
organes deacutelibeacuterants9
Agrave lrsquoeacutepoque de lrsquoentreacutee dans lrsquoarticle 75-1 (dont on relegravevera lrsquoeacuteloignement vo-
lontaire vis-agrave-vis de lrsquoarticle 2) de lrsquoeacuteleacutevation des langues reacutegionales au rang de
laquo patrimoine de la France raquo en 2008 certains espoirs avaient pu ecirctre leacutegitime-
ment nourris Cette preacutecision nrsquoest pas loin srsquoen faut le seacutesame pour la rati-
fication de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires10 qui
en lrsquoeacutetat actuel de la jurisprudence du Conseil constitutionnel comporte des
clauses jugeacutees contraires agrave la Constitution
B Le contexte international
Il faut ici distinguer deux niveaux Si le contexte international est favorable
agrave la protection et promotion des langues reacutegionales crsquoest en raison drsquoune part
des engagements internationaux que la France les ait ratifieacutes ou non drsquoautre
part de la plupart des constitutions des pays voisins qui accordent une place
speacutecifique aux langues reacutegionales
En 1999 faisant la synthegravese de ses deacutecisions anteacuterieures11 le
Conseil constitutionnel a estimeacute que la Charte europeacuteenne des langues reacutegio-
nales ou minoritaires ne pouvait au vu des principes drsquouniciteacute du peuple fran-
ccedilais drsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique et drsquoeacutegaliteacute des citoyens ecirctre ratifieacutee
laquo La Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires en ce
qursquoelle confegravere des droits speacutecifiques agrave des groupes de locuteurs de
8 Tribunal administratif de Montpellier 12 octobre 2010 Mouvement reacutepublicain de salut pu-blic ndeg0903420 Cour Administrative dAppel de Marseille 28 juin 2012 Commune de Ville-neuve-les-Maguelone ndeg 10MA04419 9 Conseil drsquoEacutetat 29 mars 2006 Haut-Commissaire de la Reacutepublique en Polyneacutesie Franccedilaise
ndeg282335 Rec 179 22 feacutevrier 2007 Socieacuteteacute immobiliegravere Caroline ndeg299649 Cour adminis-trative drsquoappel de Marseille 13 octobre 2011 Commune de Galeria ndeg10MA02330 10 Table ronde (Jean-Eacuteric Gicquel Ferdinand Meacutelin-Soucramanien Michel Verpeaux et Jean-
Marie Woehrling) organiseacutee par la commission des lois 29 novembre 2012 sur les implications
constitutionnelles de la question de la ratification de la Charte europeacuteenne des langues reacutegio-
nales ou minoritaires httpswwwassemblee-nationalefr14cr-cloi12-13c1213022asp 11 Deacutecisions ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 loi relative agrave lrsquoemploi de la langue franccedilaise et
ndeg96-373 DC du 9 avril 1996 loi organique portant statut drsquoautonomie de la Polyneacutesie fran-ccedilaise
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de territoires dans les-
quels ces langues sont pratiqueacutees porte atteinte aux principes constitu-
tionnels drsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique drsquoeacutegaliteacute devant la loi et drsquouniciteacute
du peuple franccedilais raquo12
Le Conseil se deacutefendant au passage de meacutepriser les langues reacutegionales parmi
les engagements souscrits par la France preacutecise-t-il laquo la plupart au demeu-
rant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France
en faveur des langues reacutegionales raquo
Parmi les arguments qui plaident en faveur drsquoune ratification figure celui de
lrsquoeacutevolution du contexte Honorer de la ratification un texte deacutejagrave signeacute ne se
pose aujourdrsquohui plus dans les mecircmes termes qursquoen 1999 La reacuteforme cons-
titutionnelle de 2003 - dont certains aspects ont eacuteteacute affineacutes en 2008 - rappe-
lons-le a consideacuterablement modifieacute la vision jacobine de notre Reacutepublique qui
reconnaicirct agrave preacutesent lrsquoexistence de laquo populations raquo en son sein les particula-
rismes locaux et les neacutecessiteacutes des adaptations normatives Mais la ratification
par la France de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires
qui avait eacuteteacute voteacutee le 28 janvier 2014 par lrsquoAssembleacutee nationale a eacuteteacute rejeteacutee
par le Seacutenat le 27 octobre 2015 Soulignons que ce rejet nrsquoempecircche pas la
force du contexte qui est au niveau europeacuteen largement favorable agrave la pro-
tection et promotion des langues reacutegionales La France a par ailleurs ratifieacute
drsquoautres conventions internationales qui permettent de poursuivre cet objec-
tif tel est par exemple le cas de la Convention pour la sauvegarde du patri-
moine culturel immateacuteriel de 2003 et de la Convention sur la protection et la
promotion de la diversiteacute des expressions culturelles de 2005 qui rappelle no-
tamment dans son preacuteambule laquo que la diversiteacute linguistique est un eacuteleacutement
fondamental de la diversiteacute culturelle raquo et reacuteaffirme laquo le rocircle fondamental que
joue lrsquoeacuteducation dans la protection et la promotion des expressions cultu-
relles raquo
12 Il srsquoagissait lagrave au demeurant drsquoune affirmation tregraves discutable car la lettre de la Charte
nrsquoimposait nullement mecircme si elle lrsquoencourageait que des droits speacutecifiques fussent reconnus agrave des groupes (voir Guy Carcassonne Rapport au Premier ministre sur la compatibiliteacute entre la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires et la Constitution septembre 1998
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Le droit compareacute apporte la preuve irreacutefutable de lrsquoabsence drsquoin-
compatibiliteacute entre le caractegravere indivisible voire unitaire drsquoune Reacutepublique
et la reconnaissance des langues reacutegionales en son sein13 Un tour drsquohorizon
des textes des constitutions europeacuteennes et des deacutecisions des cours constitu-
tionnelles permet de mettre en eacutevidence plusieurs eacuteleacutements significatifs Le
droit compareacute nous enseigne que juridiquement la question des langues srsquoap-
preacutehende agrave travers deux prismes premiegraverement celui de la forme de lrsquoEacutetat
Le lien entre uniteacute de lrsquoEacutetat et unilinguisme est aussi eacutevident que celui entre
Eacutetat composeacute (reacutegional ou feacutedeacuteral) et multilinguisme Deuxiegravemement celui des
droits des locuteurs Selon cette acception les langues reacutegionales sont tradi-
tionnellement associeacutees de maniegravere neacutegative au principe de non-discrimina-
tion de maniegravere positive aux droits linguistiques dont les locuteurs seraient
les beacuteneacuteficiaires14
En droit constitutionnel compareacute lrsquoameacutenagement de la pluraliteacute linguistique
diverge selon que les Eacutetats reconnaissent une pluri-officialiteacute sur lrsquoensemble
du territoire ou au seul niveau local La premiegravere hypothegravese est celle naturel-
lement choisie par la Belgique et la Suisse Eacutetats feacutedeacuteraux europeacuteens Selon
lrsquoarticle 4 de la Constitution helveacutetique laquo les langues nationales sont lrsquoalle-
mand le franccedilais lrsquoitalien et le romanche raquo De son cocircteacute la Constitution belge
eacutenonce que laquo la Belgique comprend trois communauteacutes la Communauteacute fran-
ccedilaise la Communauteacute flamande et la Communauteacute germanophone raquo et fait
eacutegalement reacutefeacuterence agrave laquo quatre reacutegions linguistiques la reacutegion de langue fran-
ccedilaise la reacutegion de langue neacuteerlandaise la reacutegion bilingue de Bruxelles-Capi-
tale et la reacutegion de langue allemande raquo En revanche lrsquoItalie et lrsquoEspagne ne
reconnaissent qursquoune seule langue officielle sur lrsquoensemble du territoire en
mecircme temps qursquoest ameacutenageacutee au niveau local la pluraliteacute linguistique Crsquoest
13 Voir Veacuteronique Bertile Langues reacutegionales ou minoritaires et Constitution France Espagne et Italie Bruylant Collection Droit public compareacute et europeacuteen 2008 516 p et Wanda Mas-
tor laquo Le statut constitutionnel des langues reacutegionales en droit compareacute De la reconnaissance agrave lrsquoindiffeacuterence raquo Glottopol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html 14 Voir le Rapport explicatif de de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minori-
taires Conseil de lrsquoEurope Seacuterie des Traiteacutes europeacuteens ndeg148 Strasbourg 5 novembre 1992 httpsrmcoeint16800cb620
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ce second type drsquoameacutenagement qui est ici inteacuteressant agrave observer les Eacutetats
reacutegionaux italien15 et espagnol16 eacutetant qualifieacutees par leurs constitutions drsquoin-
divisibles (et mecircme eacutegalement laquo un raquo pour lrsquoItalie alors que le mot a disparu
de la Constitution franccedilaise)
De maniegravere scheacutematique plusieurs postures essentielles vis-agrave-vis des langues
reacutegionales peuvent ecirctre observeacutees dans lrsquoEurope contemporaine La majoriteacute
des pays voisins confegraverent aux langues reacutegionales des statuts juridiques dif-
feacuterencieacutes Coexistent parfois une langue majoritaire et des langues minori-
taires qui beacuteneacuteficient de mesures protectrices Dans ce cas les langues reacutegio-
nales jouissent drsquoune reconnaissance mais seulement au niveau drsquoun terri-
toire identifieacute Pour le dire autrement elles ne concurrencent pas la langue
majoritaire au niveau national Il ne srsquoagit ni plus ni moins que lrsquoexpression
drsquoun droit agrave la diffeacuterence Drsquoun droit agrave la diffeacuterenciation pour reprendre un
terme qui a actuellement les faveurs du gouvernement franccedilais Drsquoautres pays
ont mis en place le bilinguisme officiel qui peut srsquoexprimer dans plusieurs
variantes Ce statut confegravere aux citoyens en principe du moins le choix duti-
liser lune ou lautre des langues officielles dans leurs rapports avec lEacutetat
Cette co-officialiteacute peut srsquoopeacuterer au niveau de tout le territoire (comme en Bel-
gique et en Suisse par exemple) ou seulement sur une partie de celui-ci
(comme en Espagne ou en Italie)
On pourrait objecter que la comparaison avec lrsquoEspagne et lrsquoItalie deux Eacutetats
reacutegionaux nrsquoest pas pertinente Or ces deux Eacutetats sont qualifieacutes de Royaume
ou Reacutepublique indivisibles par leurs constitutions respectives indivisibiliteacute
qui nrsquoempecircche pas la reconnaissance la protection et la promotion des
langues reacutegionales en leur sein Ainsi la Constitution espagnole consacre clai-
rement le multilinguisme dans le cadre de ses communauteacutes autonomes17
15 Article 5 de la Constitution de la Reacutepublique italienne de 1947 laquo La Reacutepublique une et indivisible reconnaicirct et favorise les autonomies locales (hellip) raquo 16 Article 2 de la Constitution du Royaume drsquoEspagne de 1978 laquo La Constitution est fondeacutee
sur luniteacute indissoluble de la nation espagnole patrie commune et indivisible de tous les Es-
pagnols Elle reconnaicirct et garantit le droit agrave lautonomie des nationaliteacutes et des reacutegions qui la
composent et la solidariteacute entre elles raquo 17 En vertu de lrsquoarticle 3 de la Constitution espagnole
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tout comme lrsquoItalie laquo Reacutepublique une et indivisible raquo laquo protegravege par des mesures
particuliegraveres les minoriteacutes linguistiques raquo (article 6)
Cette rapide eacutetude comparative permet de mettre en eacutevidence la singulariteacute de
la France au sein drsquoune Europe qui srsquoenorgueillit de se deacutefinir agrave travers la
richesse de sa diversiteacute Mais notamment depuis la loi constitutionnelle de
2008 le leacutegislateur franccedilais a agi dans le sens drsquoune protection et promotion
des langues reacutegionales la loi du 8 avril 2021 srsquoinscrivant dans ce processus
logique et coheacuterent
C Le contexte parlementaire franccedilais
La loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit donc dans un mouvement leacutegislatif reacutepondant agrave
lrsquoadresse du pouvoir constituant Laquelle concerne aussi le pouvoir exeacutecutif
La politique du ministegravere de lrsquoeacuteducation pour la deacutetermination du nombre de
places pour lrsquoagreacutegation et le CAPES des langues reacutegionales devrait aller de
pair avec les lois qui mettent en œuvre lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Ainsi
pour la langue basque il nrsquoy a pas eu de concours drsquoagreacutegation externe depuis
2018 anneacutee 2021 comprise il y a un seul poste pour lrsquoagreacutegation interne en
2021 2 pour le CAPES externe en 2021 et 2 pour le CAPES interne Pour la
langue bretonne et pour ne citer que lrsquoanneacutee en cours il y a un poste agrave lrsquoagreacute-
gation externe pas de concours pour lrsquoagreacutegation interne deux postes pour
le CAPES externe et 2 pour le CAPES interne Pour la langue corse il nrsquoy a pas
de concours cette anneacutee pour lrsquoagreacutegation externe et interne deux pour le
CAPES externe et aucun pour le CAPES interne Pour lrsquooccitan toujours pour
2021 il y a un poste pour lrsquoagreacutegation externe pas de concours pour lrsquoagreacute-
gation interne quatre pour le CAPES externe et un pour le CAPES interne
Ceci eacutetant juste preacuteciseacute il faut agrave preacutesent se concentrer sur lrsquoaction parlemen-
taire de mise en œuvre des dispositions de la Constitution
laquo 1 Le castillan est la langue espagnole officielle de lEacutetat Tous les Espagnols ont le devoir de
le connaicirctre et le droit de lutiliser
2 Les autres langues espagnoles sont aussi officielles dans leurs communauteacutes autonomes
respectives conformeacutement agrave leurs statuts
3 La richesse de la diversiteacute linguistique de lEspagne est un patrimoine culturel qui fait lobjet dun respect et dune protection speacuteciales raquo
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Videacutee drsquoune large part de sa substance en premiegravere lecture par la commission
des affaires culturelles et de leacuteducation de lrsquoAssembleacutee nationale la proposi-
tion de loi du deacuteputeacute Molac a ensuite retrouveacute ses objectifs initiaux gracircce agrave la
proceacutedure parlementaire qui donne agrave notre reacutegime repreacutesentatif tout son
sens discussions en commissions deacutebats en seacuteances publiques navette
amendements multiples pour parvenir agrave une adoption deacutefinitive agrave une majo-
riteacute non importante mais eacutecrasante des voix Agrave quelques heures de la pro-
mulgation de la loi par le Preacutesident de la Reacutepublique une partie de cette mecircme
majoriteacute a neacuteanmoins saisi le Conseil constitutionnel dans le cadre de lrsquoarticle
61 alineacutea 2 de la Constitution
Deacutepocirct de la proposition de loi
Deacuteposeacutee le 30 deacutecembre 2019 par le deacuteputeacute Paul Molac et autres deacuteputeacutes18
la proposition de loi apporte des mesures de protection et de promotion des
langues reacutegionales dans trois domaines le patrimoine lrsquoenseignement les
services publics via la signaleacutetique et les actes drsquoeacutetat civil Elle a eacuteteacute adopteacutee
le 8 avril 2021 par 247 voix pour 76 voix contre et 19 abstentions au terme
de la proceacutedure ci-dessous rappeleacutee
Renvoi agrave la commission des affaires culturelles et de leacuteducation
La proposition de loi a eacuteteacute renvoyeacutee agrave la commission des affaires cultu-
relles et de leacuteducation agrave deacutefaut de constitution drsquoune commission speacuteciale
dans les deacutelais preacutevus par les articles 30 et 31 du Regraveglement Le rapport fait
au nom de la commission par le deacuteputeacute Paul Molac nommeacute par elle a eacuteteacute
enregistreacute agrave la preacutesidence de lrsquoAssembleacutee nationale le 5 feacutevrier 2020 Preacutesenteacute
18 Sylvain BRIAL Jean-Feacutelix ACQUAVIVA Michel CASTELLANI Jean-Michel CLEacuteMENT
Paul-Andreacute COLOMBANI Charles de COURSON Jeanine DUBIEacute Freacutedeacuterique DUMAS Mrsquojid
EL GUERRAB Olivier FALORNI Yannick FAVENNEC BECOT Sandrine JOSSO Franccedilois-Mi-
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comme un moyen de deacutefendre les laquo langues de France raquo19 en danger et srsquoap-
puyant sur lrsquoexistant qui est la marque drsquoune eacutevolution rappeleacutee plus loin (II)
le texte entend laquo aller plus loin raquo en rehaussant la protection lrsquoaccessibiliteacute et
la visibiliteacute des langues reacutegionales dans les trois domaines preacuteciteacutes
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle premier re-
latif au patrimoine Ce dernier preacutecise en compleacutetant ainsi lrsquoar-
ticle L 1 du code du patrimoine que la conservation et la con-
naissance du patrimoine immateacuteriel sont drsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et que
les langues reacutegionales font partie de ce patrimoine
o La commission a adopteacute sans modifications lrsquoarticle 2 qui pro-
pose drsquoinclure parmi les treacutesors nationaux les biens preacutesentant
un inteacuterecirct majeur pour la connaissance des langues franccedilaise et
reacutegionales Le texte preacutevoit en effet outre pour les langues reacutegio-
nales des mesures de protection de notre patrimoine linguistique
dans une deacutemarche globale
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 3 qui disposait que des con-
ventions passeacutees entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pouvaient preacutevoir que
la langue reacutegionale est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de
lrsquohoraire normal des enseignements (des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires des collegraveges et des lyceacutees des territoires concerneacutes) Il
ne srsquoagissait pourtant que drsquoeacutetendre une regravegle deacutejagrave applicable en
Corse pour lrsquoenseignement de la langue corse lrsquoarticle L 312-11-
1 du code de lrsquoeacuteducation introduit par la loi ndeg 2002-92 du
22 janvier 2002 relative agrave la Corse dispose en effet que la langue
corse est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de lrsquohoraire normal
des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires de Corse Le Conseil cons-
titutionnel nrsquoa pas censureacute cette disposition tant que lrsquoenseigne-
ment eacutetait entendu comme ne revecirctant pas laquo un caractegravere obliga-
toire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo (deacutecision ndeg2001-
454 DC du 17 janvier 2002)
19 Sur cette notion de laquo langues de France raquo voir Les langues de France vingt ans apregraves Glot-topol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html
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o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 4 qui preacutevoyait que lenseigne-
ment bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale pouvait se reacuteali-
ser sous forme immersive laquo dans le respect des objectifs de maicirc-
trise des deux langues agrave chaque niveau denseignement raquo
o La commission a supprimeacute les articles 5 et 6 de la proposition de
loi Le premier manifestait la volonteacute drsquointroduire au sein drsquoun
nouvel article L 151-4-1 du code de lrsquoeacuteducation une deacuterogation
au principe drsquointerdiction de financement des deacutepenses drsquoinves-
tissement des eacutecoles priveacutees par les collectiviteacutes publiques en fa-
veur de lrsquoenseignement bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale
(article 5 de la proposition de loi) Le second eacutetendait la mecircme
deacuterogation au principe drsquointerdiction de financement des deacute-
penses drsquoinvestissement des collegraveges et lyceacutees par les collectiviteacutes
publiques
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 7 qui preacutevoyait drsquoeacutelargir les
cas dans lesquels existe un droit agrave inscrire son enfant dans une
eacutecole drsquoune autre commune afin qursquoil puisse suivre un enseigne-
ment de langue reacutegionale Inscription qui entraicircnait eacutegalement la
prise en charge du forfait scolaire par la commune de reacutesidence
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle 8 qui a pour
objet de renforcer la place et lrsquousage des langues reacutegionales dans
la vie publique en facilitant la traduction en langue reacutegionale des
inscriptions et signaleacutetiques apposeacutees sur les bacirctiments publics
les voies publiques de circulation et les voies navigables ainsi que
sur les principaux supports de communication institutionnelle
des services publics
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 9 qui avait pour objet la pos-
sibiliteacute pour les services publics drsquoeacutetat civil drsquoutiliser dans les
actes drsquoeacutetat civil qursquoils produisent les signes diacritiques des
langues reacutegionales en usage sur le territoire
o Enfin la commission a eacutegalement supprimeacute lrsquoarticle 10 qui preacute-
voyait un gage pour compenser les charges eacuteventuelles creacuteeacutees par
les dispositions de la proposition de loi
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Crsquoest donc un texte largement laquo eacutepureacute raquo par rapport agrave sa version initiale qui a
eacuteteacute soumis agrave la discussion en seacuteance publique en premiegravere lecture agrave lrsquoAssem-
bleacutee nationale Le porteur de la proposition va naturellement utiliser toutes
les potentialiteacutes offertes par la Constitution pour tenter de revenir par le biais
des amendements agrave son esprit initial
Discussion du texte nordm2654 adopteacute par la commission sur la proposition
de loi de M Paul Molac agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion (2548)
85 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes permettant de revenir sur peu de points
cependant agrave lrsquoobjectif initial de la proposition de loi Ainsi lrsquoamendement ndeg64
deacuteposeacute le 10 feacutevrier 2020 par le deacuteputeacute et rapporteur Paul Molac a permis de
rectifier lrsquoaspect purement deacuteclaratoire de lrsquoarticle premier auquel avait conclu
la commission lrsquoamendement ndeg69 deacuteposeacute le mecircme jour par Paul Molac eacutega-
lement permet lrsquoautorisation dans les actes drsquoeacutetat civil des signes diacritiques
des langues reacutegionales lrsquoamendement ndeg80 toujours deacuteposeacute par Paul Molac
modifie la loi Toubon (article 3 du texte de loi deacutefinitif) Mais agrave ce stade de la
discussion parlementaire le texte eacutetait encore dans une version tregraves eacuteloigneacutee
de sa mouture premiegravere
Adoption le 13 feacutevrier 2020 de la laquo petite loi raquo nordm408 par lAssem-
bleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion
Transmission au Seacutenat de la proposition de loi ndeg321 le 14 feacutevrier
2020
o Travaux en commission La commission de la culture de lrsquoeacuteduca-
tion et de la communication a deacutesigneacute Mme Monique de Marco
rapporteure sur la proposition de loi ndeg321 (2019-2020) adopteacutee
par lAssembleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale
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des langues reacutegionales et agrave leur promotion Commenccedilant par deacute-
clarer que laquo la question de la promotion des langues reacutegionales
deacutepasse les clivages politiques raquo Monique de Marco a proposeacute en
commission dadopter le texte conforme tout en avouant que des
dispositifs leacutegislatifs laquo plus ambitieux pourraient mieux assurer la
promotion des langues reacutegionales raquo Au cours des discussions le
regret de lrsquoabsence de la question de lrsquoenseignement a eacuteteacute exprimeacute
regret qui concerne en reacutealiteacute non la proposition de loi initiale
mais le texte de la commission de lrsquoAssembleacutee nationale laquo La pro-
position de loi de Paul Molac est la bienvenue parce quelle rap-
pelle agrave lEacutetat un certain nombre de ses obligations en ce quelle
preacutevoit un cadrage de la loi Toubon et quelle seacutecurise la place
des langues dans lespace public En revanche nous avons tous
eacuteteacute surpris par labsence totale de reacutefeacuterence agrave lEacuteducation natio-
nale Nous avons donc fait des recherches qui ont montreacute que les
deacuteputeacutes de la majoriteacute preacutesidentielle certainement agrave lappel du
ministre de leacuteducation nationale avaient systeacutematiquement sup-
primeacute tous les articles concernant lenseignement Nous nous re-
trouvons donc avec une magnifique proposition de loi sur les
langues reacutegionales qui ne dit pas un mot de lenseignement
comme sil pouvait y avoir une politique linguistique en faveur des
langues reacutegionales qui ne passe pas par lenseignement raquo Et le
seacutenateur Max Brisson drsquoen appeler agrave la reacuteinsertion des disposi-
tions sur lrsquoenseignement laquo Ma chegravere collegravegue vous avez proposeacute
un vote conforme mais jespegravere que nous ferons preuve dimagi-
nation dans lheacutemicycle pour deacuteposer quelques amendements qui
rappelleront au Gouvernement quil ny a pas de politique linguis-
tique qui ne sappuie sur leacuteducation Sinon cest de lenfu-
mage raquo20
20 Comptes-rendus de la commission de la culture de lrsquoeacuteducation et de la communication
seacuteance du 2 deacutecembre 2020 httpwwwsenatfrcompte-rendu-commis-
sions20201130culturehtmltoc5
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La rapporteure confirme que laquo lrsquoamputation raquo est le fait des deacutepu-
teacutes et tout en srsquoavouant prudente pousse indirectement ses col-
legravegues seacutenateurs agrave user du droit drsquoamendement laquo Nous venons
dentendre un veacuteritable plaidoyer en faveur des langues reacutegio-
nales Mecircme si cette proposition de loi ne donne pas entiegravere satis-
faction car elle a eacuteteacute largement amputeacutee par lAssembleacutee natio-
nale je preacutefegravere my tenir dans un premier temps par prudence
Et libres agrave vous de deacuteposer des amendements raquo
Aucun amendement nayant eacuteteacute deacuteposeacute en commission le texte
qui en eacutetait issu ne comportait toujours pas de dispositions rela-
tives agrave lenseignement
o Seacuteance publique Vingt amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes notam-
ment celui (deacuteposeacute agrave lidentique par des seacutenateurs issus de six
groupes diffeacuterents) preacutevoyant drsquoinseacuterer agrave lrsquoarticle L 442-5-1 du
code de lrsquoeacuteducation un alineacutea ainsi reacutedigeacute laquo La participation fi-
nanciegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un
enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle
L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence
et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune
autre commune agrave la condition que la commune de reacutesidence ne
dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegio-
nale raquo
Sans surprise lrsquoavis du Gouvernement exprimeacute par le ministre
Jean-Michel Blanquer fut deacutefavorable regrettant au passage
laquo drsquoecirctre sans cesse obligeacute drsquooccuper la position du jacobin reacutetif
sur la deacutefensive alors mecircme que nous avons une politique de pro-
motion des langues reacutegionales Simplement agrave certains moments
ndash par exemple avec la rupture de lrsquoeacutequilibre entre enseignement
public et enseignement priveacute ou avec la creacuteation drsquoune obligation
suppleacutementaire pour les communes ndash les propositions vont trop
loin et cela conduit agrave me placer face aux geacuteneacuterositeacutes diverses
dans la position deacutesagreacuteable du gardien des principes ou dans
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celle du gardien de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral En effet derriegravere ces deacutebats
se pose la question de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et de la posteacuteriteacute de la loi
Carle car vous risquez de creacuteer un deacuteseacutequilibre alors que cette loi
repreacutesentait un point drsquoeacutequilibre raquo21
o Adoption du texte ndeg32 modifieacute par le Seacutenat le 10 deacutecembre 2020
Le Seacutenat a adopteacute trois articles additionnels (2 ter 2 quater et
2 quinquies) qui rejoignent les positions du deacuteputeacute Paul Molac et
reacutetablit lrsquoarticle 3 (modifieacute) de la proposition de loi qui avait eacuteteacute
supprimeacute en premiegravere lecture agrave lrsquoAssembleacutee nationale
Deuxiegraveme lecture
o Rapport sur la proposition de loi modifieacutee par le Seacutenat relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promo-
tion (ndeg3658) ndeg4035 Sur les six articles supprimeacutes agrave lrsquoAssem-
bleacutee lrsquoarticle 3 a eacuteteacute reacutetabli au Seacutenat qui a par ailleurs adopteacute
trois articles additionnels (2 ter 2 quater et 2 quinquies) Lrsquoen-
semble eacutetant conforme agrave lrsquoesprit de la proposition de loi initiale le
rapporteur souhaite que lrsquoAssembleacutee nationale adopte en deu-
xiegraveme lecture un texte identique agrave celui voteacute par le Seacutenat pour
les quatre articles restant en discussion et nrsquoa donc pas preacutesenteacute
drsquoamendements Mais lrsquoarticle 2 quinquies (article 6 du texte deacute-
finitif) ayant eacuteteacute supprimeacute en commission 16 amendements deacute-
poseacutes agrave lrsquoidentique par 115 deacuteputeacutes membres de huit diffeacuterents
groupes parlementaires ont permis de le reacuteintroduire en seacuteance
o Discussion en seacuteance publique le 8 avril 2021 au cours de la-
quelle 262 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes
o Adoption deacutefinitive le 8 avril 2021 en deuxiegraveme lecture de la
proposition de loi TA nordm591 relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
21 Compte rendu inteacutegral des deacutebats Seacuteance du 10 deacutecembre 2020 httpwwwse-natfrseancess202012s20201210s20201210007htmlsection708
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Saisine du Conseil constitutionnel du 22 avril 2021 par au moins
soixante deacuteputeacutes en application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitu-
tion
Soit un jour avant que nrsquoexpire le deacutelai de saisine du Conseil constitu-
tionnel la promulgation de la loi par le preacutesident de la Reacutepublique devant
intervenir dans les 15 jours de lrsquoadoption deacutefinitive La saisine du Conseil
constitutionnel est un acte non grave mais solennel qui perturbe le temps
leacutegislatif ne serait-ce que pour cette raison elle meacuterite un soin particulier
Soin envers lrsquoinstitution agrave laquelle elle srsquoadresse et agrave qui elle impose des
charges suppleacutementaires soin envers la Constitution qursquoelle entend pro-
teacuteger La lettre de saisine ou du moins la version qui a circuleacute manifeste-
ment reacutedigeacutee agrave la hacircte nrsquoest pas agrave la hauteur du seacuterieux qursquoexige de ma-
niegravere impeacuterieuse cette deacutemarche Une lettre de saisine ne saurait se limiter
agrave invoquer en tregraves peu de lignes la violation de laquo principes constitutionnels raquo
sans que ceux-ci ne soient deacutetailleacutes ni mecircme indiqueacutes Le seul article mis
en cause est lrsquoarticle 6 de la loi qui modifie lrsquoarticle L 442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation
II Discussion de la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la loi
relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Les deacuteputeacutes auteurs de la saisine demandent au Conseil constitutionnel la
censure de lrsquoarticle 6 de la loi
laquo Les sixiegraveme et septiegraveme alineacuteas de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacutedu-
cation sont remplaceacutes par un alineacutea ainsi reacutedigeacute
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacuteta-
blissements priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispen-
sant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L
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312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacuteta-
blissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune
agrave la condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dis-
pensant un enseignement de langue reacutegionale raquo
Une commune dont aucune eacutecole ne propose denseignement de langue reacutegio-
nale devrait donc participer aux frais de scolarisation des enfants domicilieacutes
sur son territoire qui suivent un tel enseignement dans un eacutetablissement situeacute
sur une autre commune Le dispositif concerne les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat drsquoassociation qui sont dans les faits majoritaire-
ment associatifs et laiumlques Cet enseignement peut aussi concerner les eacuteta-
blissements confessionnels mais il faut drsquoembleacutee preacuteciser que comme lrsquoa jugeacute
le Conseil constitutionnel dans son examen de la loi dite laquo Carle raquo le principe
de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute pour le leacutegislateur de preacutevoir la
participation des collectiviteacutes publiques au financement du fonctionnement
des eacutetablissements denseignement priveacute sous contrat dassociation
laquo Consideacuterant quil reacutesulte des regravegles ou principes agrave valeur constitution-
nelle (hellip) que le principe de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute
pour le leacutegislateur de preacutevoir sous reacuteserve de fonder son appreacuteciation
sur des critegraveres objectifs et rationnels la participation des collectiviteacutes
publiques au financement du fonctionnement des eacutetablissements den-
seignement priveacutes sous contrat dassociation selon la nature et limpor-
tance de leur contribution agrave laccomplissement de missions denseigne-
ment raquo (deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 cons 6)
Lrsquoinstauration du laquo forfait scolaire communal raquo ne poursuit pas un objectif de
sanction financiegravere des communes deacutemunies doffre en langue reacutegionale mais
celui de les inciter agrave en proposer Drsquoailleurs lrsquoarticle premier de la loi deacutefeacutereacutee
souligne que laquo LrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales concourent agrave lrsquoenseigne-
ment agrave la diffusion et agrave la promotion de ces langues raquo Comme preacuteciseacute plus
loin les maires sont dispenseacutes du paiement drsquoun tel forfait degraves lors qursquoun
enseignement drsquoune langue reacutegionale y compris au titre drsquoune simple initia-
tion est proposeacute dans leur commune
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Il faut souligner que les articles relatifs agrave lrsquoenseignement ont eacuteteacute introduits par
les seacutenateurs Plus exactement ces derniers ont reacuteintroduit la disposition qui
autorise la conclusion de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pour eacutetendre
lrsquooffre drsquoenseignement en langue reacutegionale aux eacutetablissements publics dans le
cadre horaire normal sous des formes speacutecifiques et inseacutereacute trois articles un
premier autorise lrsquoenseignement dit laquo immersif raquo en langue reacutegionale un deu-
xiegraveme le forfait scolaire communal dont il est ici question un troisiegraveme est
relatif agrave lenseignement des langues reacutegionales agrave Mayotte territoire qui du fait
de sa deacutepartementalisation reacutecente ne pouvait jusqualors pas beacuteneacuteficier des
possibiliteacutes offertes aux autres deacutepartements concernant lenseignement de
ces langues
Trois remarques doivent ecirctre faites sur lrsquoinsertion relative agrave lrsquoenseignement des
langues reacutegionales lors des horaires normaux Premiegraverement cette disposition
existe deacutejagrave pour la Collectiviteacute de Corse deuxiegravemement cet enseignement
doit se faire moyennant un accord entre lrsquoEacutetat et les reacutegions (laquo dans le cadre
de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions la collectiviteacute de Corse la Collectiviteacute
europeacuteenne drsquoAlsace ou les collectiviteacutes territoriales reacutegies par lrsquoarticle 73 de
la Constitution raquo) troisiegravemement il srsquoagit drsquoune option facultative qursquoin fine
les familles deacutecident ou non de prendre
En reacutesumeacute et conclusion la disposition de lrsquoarticle 3
1 Existe deacutejagrave pour une collectiviteacute en lrsquooccurrence la collectiviteacute de Corse
2 Est strictement encadreacutee (existence drsquoun accord entre lrsquoEacutetat et les reacute-
gions)
3 Est conforme agrave la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le ca-
ractegravere facultatif de lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale Dans sa deacute-
cision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi relative agrave la Corse le
Conseil constitutionnel a fixeacute le cadre de lrsquoenseignement drsquoune langue
reacutegionale dans le cadre de lrsquohoraire normal en consideacuterant que laquo si lrsquoen-
seignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquohoraire nor-
mal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir pour
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autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les ensei-
gnants qursquoil ne saurait non plus avoir pour effet de soustraire les eacutelegraveves
aux droits et obligations applicables agrave lrsquoensemble des usagers des eacuteta-
blissements qui assurent le service public de lrsquoenseignement ou sont
associeacutes agrave celui‑ci Consideacuterant qursquoil reacutesulte de ce qui preacutecegravede que sous
reacuteserve que lrsquoenseignement de la langue corse revecircte tant dans son prin-
cipe que dans ses modaliteacutes de mise en œuvre un caractegravere facultatif
[cette disposition] nrsquoest contraire ni au principe drsquoeacutegaliteacute ni agrave aucun
autre principe ou regravegle de valeur constitutionnelle raquo (cons 24 et 25)
La loi du 8 avril 2021 ne propose pas autre chose et srsquoinscrit en tous
points sur cette ligne deacutejagrave jugeacutee par le Conseil constitutionnel
Lrsquoarticle 6 srsquoinsegravere de maniegravere logique et coheacuterente dans lrsquoensemble des articles
de la loi relative agrave lrsquoenseignement Avant drsquoen examiner dans les deacutetails la
conformiteacute agrave la Constitution il faut souligner que le Seacutenat a deacutejagrave voteacute le prin-
cipe de ce forfait scolaire communal agrave deux reprises
1 Il lrsquoa drsquoabord inseacutereacute dans le projet de loi pour une eacutecole de la confiance
en premiegravere lecture Crsquoest la commission mixte paritaire qui a ajouteacute les
mots laquo contribution volontaire raquo ocirctant au forfait son caractegravere obliga-
toire22
2 Il a reacuteaffirmeacute sa position lors de lrsquoexamen de la proposition de loi ici
discuteacutee supprimant les mots laquo contribution volontaire raquo de la loi en vi-
gueur
Agrave cet argument deacutemocratique respectueux du bicameacuteralisme et rappelant que
le Seacutenat laquo assure la repreacutesentation des collectiviteacutes territoriales de la Reacutepu-
22 Loi ndeg2019-791 du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance JORF ndeg0174 du 28 juillet
2019
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Primo cet article est en coheacuterence avec la leacutegislation existante en matiegravere drsquoen-
seignement des langues reacutegionales agrave lrsquoeacutecole confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute
juridique (A) Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contrevien-
nent pas au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des langues
reacutegionales affirmeacute par le Conseil constitutionnel (B) Tertio la loi ne porte pas
atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur une commune une nouvelle
charge (C) Quarto elle ne viole pas non plus en conseacutequence le principe de
libre administration des collectiviteacutes territoriales (D)
A Forfait scolaire communal et respect de lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique
Cette exigence bien que non explicitement qualifieacutee de principe consti-
tutionnel par le Conseil constitutionnel se rattache notamment agrave la notion de
laquo garantie des droits raquo inscrite agrave lrsquoarticle 16 de la Deacuteclaration de 1789 laquo Toute
socieacuteteacute dans laquelle la garantie des droits nrsquoest pas assureacutee ni la seacuteparation
des pouvoirs deacutetermineacutee nrsquoa point de constitution raquo Deacutecoulant de lrsquoarticle 34
de la Constitution la clarteacute de la loi est un eacuteleacutement essentiel de la seacutecuriteacute
juridique agrave laquelle la jurisprudence du Conseil constitutionnel a offert corps
et protection Aussi le principe de laccessibiliteacute et de lintelligibiliteacute de la loi a-
t-il eacuteteacute eacuterigeacute en objectif de valeur constitutionnelle (deacutecision ndeg99-421 DC du
16 deacutecembre 1999)
Mecircme si les principes de clarteacute drsquoaccessibiliteacute et drsquointelligibiliteacute de la loi per-
mettent avant tout drsquoimposer au leacutegislateur laquo drsquoadopter des dispositions suffi-
samment preacutecises et des formules non eacutequivoques afin de preacutemunir les sujets
de droit contre une interpreacutetation contraire agrave la Constitution ou contre le
risque drsquoarbitraire raquo (deacutecision ndeg2004-500 DC du 29 juillet 2004 cons 13) ils
concourent aussi agrave offrir aux citoyens la seacutecuriteacute juridique neacutee drsquoune cons-
truction drsquoensemble coheacuterente et sans rupture Laquelle se base depuis 2008
sur une disposition claire et sans ambiguiumlteacute de la Constitution laquo Les langues
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reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo (75-1) Elle est une in-
vitation aux repreacutesentants de leacutegifeacuterer pour proteacuteger et promouvoir lesdites
langues et la loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit dans la continuiteacute de ce qursquoils ont fait depuis
2008 notamment La coheacuterence est lrsquoune des artegraveres essentielles de lrsquoexigence
de seacutecuriteacute juridique qui impregravegne la jurisprudence du Conseil constitution-
nelle comme celle du Conseil drsquoEacutetat et de la Cour de cassation Sans ecirctre ex-
plicitement eacutenonceacutee par le Conseil constitutionnel lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique est laquo efficiente raquo23 et est au cœur des preacuteoccupations des juges24 comme
de la doctrine Les Cahiers du Conseil constitutionnel lui consacrant un dossier
speacutecial dans sa livraison drsquooctobre 202025
La loi soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel reacutepond agrave lrsquoexigence de
seacutecuriteacute juridique en eacutetant le prolongement de lrsquoœuvre anteacuterieure du leacutegisla-
teur pour commencer la loi du 8 juillet 2013 drsquoorientation et de programma-
tion pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique qui reconnaicirct lrsquoenseigne-
ment bilingue franccedilais langue reacutegionale Dans lrsquoannexe de la loi figurent cinq
mentions compleacutementaires notamment celle concernant la possibiliteacute de
srsquoinscrire dans une eacutecole publique drsquoune autre commune lorsque la commune
de reacutesidence ne propose pas drsquoenseignement de langue reacutegionale Disposition
deacuteclarative qui a trouveacute une application concregravete dans la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) la parti-
cipation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes dans lrsquoenseigne-
ment public doit deacutesormais faire lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune drsquoac-
cueil et la commune de reacutesidence26
La loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle a
ajouteacute un nouveau motif de discrimination baseacute sur laquo la maitrise drsquoune autre
23 Bertrand Mathieu laquo La seacutecuriteacute juridique un principe clandestin mais efficient raquo Droit constitutionnel Meacutelanges Patrice Geacutelard LGDJ 1999 pp 301-305 24 En teacutemoigne notamment le fait que le Conseil drsquoEacutetat lui ait consacreacute deux rapports annuels celui de 1991 De la seacutecuriteacute juridique et celui de 2006 Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit 25 Dossier La seacutecuriteacute juridique Titre VII Les Cahiers du Conseil constitutionnel ndeg5 octobre
2020 26 Lrsquoarticle 104 de la loi NOTRe consacre par ailleurs la compeacutetence partageacutee des collectiviteacutes
locales dans la promotion des langues reacutegionales tout en donnant une place preacutepondeacuterante
agrave la reacutegion telle que preacutevue agrave lrsquoarticle 1er de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de lrsquoaction publique territoriale et drsquoaffirmation des meacutetropoles (MAPTAM)
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langue que le franccedilais raquo qui concerne eacutegalement les langues reacutegionales Celle
du 28 feacutevrier 2017 de programmation relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend
inopeacuterant le deacutecret du 2 Thermidor an II sur lequel se basait notamment le
ministegravere de la justice pour interdire les livrets de famille bilingues Enfin
lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance vient eacutetendre
aux eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives une laquo contribution volontaire raquo
des communes pour la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoins-
crivant dans une eacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionale en
dehors de sa commune de reacutesidence
La loi du 8 avril 2021 soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel nrsquoest que
le prolongement et le compleacutement de lrsquoarticle L 212-8 du Code de lrsquoeacuteducation
qui preacutecise les conditions dans lesquelles pour lrsquoenseignement public une
commune doit contribuer au financement des deacutepenses scolaires drsquoun enfant
reacutesidant sur son territoire et scolariseacute dans une autre commune Elle vient le
compleacuteter de maniegravere parallegravele eacutetendant ce qui existe deacutejagrave pour lrsquoeacutecole pu-
blique agrave lrsquoeacutecole priveacutee sous contrat Confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
elle ne viole par ailleurs aucun article de la Constitution et ne contredit pas
la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le caractegravere facultatif de lrsquoen-
seignement des langues reacutegionales
B Forfait scolaire communal et respect de la jurisprudence du Conseil
constitutionnel sur la langue franccedilaise
Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contreviennent pas
agrave lrsquoarticle 2 alineacutea premier de la Constitution (laquo La langue de la Reacutepublique est
le Franccedilais raquo) et au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des
langues reacutegionales qui en deacutecoule affirmeacute par le Conseil constitutionnel La
langue de la Reacutepublique est et demeure le Franccedilais et agrave aucun moment la
loi du 8 avril 2021 nrsquoentend y porter atteinte Lrsquoapprentissage des langues reacute-
gionales se fait agrave ses cocircteacutes mais dans une mesure permettant leffectiviteacute pour
les enfants agrave acceacuteder agrave lenseignement des langues reacutegionales laquo patrimoine de
la France raquo selon les termes de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Apprentissage
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qui pour certains enfants est lrsquoun des eacuteleacutements de leur laquo deacuteveloppement raquo au
sens de lrsquoalineacutea 10 du Preacuteambule de la Constitution du 27 octobre 1946 (laquo La
Nation assure agrave lrsquoindividu et agrave la familles les conditions neacutecessaires agrave leur
deacuteveloppement raquo)
Ce que creacutee lrsquoarticle 6 agrave travers le forfait ce nrsquoest pas lrsquoenseignement obligatoire
de la langue reacutegionale mais la possibiliteacute de pouvoir beacuteneacuteficier de cet enseigne-
ment (sans prescription de deacutelai) qui demeure facultatif Le rapporteur Paul
Molac le reacuteaffirme au cours de la seacuteance publique du 8 avril 2021 laquo Je ne
suis pas favorable au caractegravere obligatoire de cet enseignement mais je consi-
degravere que tout eacutelegraveve qui souhaite le suivre doit pouvoir le faire raquo27
Ce faisant la loi sans contrevenir agrave la Constitution offre un contenu agrave son
article 75-1 La jurisprudence du Conseil constitutionnel en vertu de laquelle
lrsquoenseignement des langues reacutegionales nrsquoa qursquoun caractegravere facultatif nrsquoest ici
absolument pas remise en cause Dans sa deacutecision ndeg99-412 DC du 15 juin
1999 il a souligneacute que le principe drsquouniciteacute du peuple franccedilais et lrsquoindivisibiliteacute
de la Reacutepublique assurant lrsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi srsquoopposaient agrave laquo
ce que soient reconnus des droits collectifs agrave quelque groupe que ce soit deacutefini
par une communauteacute drsquoorigine de culture de langue ou de croyance raquo En
outre la langue de la Reacutepublique eacutetant le franccedilais il ne peut ecirctre reconnu un
laquo droit agrave pratiquer une langue autre que le franccedilais non seulement dans la vie
priveacutee mais eacutegalement dans la vie publique agrave laquelle la Charte rattache
la justice et les autoriteacutes administratives et services publics raquo
Deux remarques srsquoimposent drsquoembleacutee drsquoune part cette jurisprudence est an-
teacuterieure agrave lrsquoinsertion en 2008 par le pouvoir constituant de lrsquoarticle 75-1 dis-
posant que laquo les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France
raquo Cette remarque drsquoordre contextuel vient srsquoajouter agrave la suivante drsquoautre part
27 Assembleacutee nationale XVe leacutegislature Session ordinaire de 2020-2021 Seacuteance du jeudi 08
avril 2021 httpswwwassemblee-nationalefrdyn15comptes-rendusseancesession-
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la loi du 8 avril 2021 nrsquoentend pas confier agrave lrsquoenseignement des langues reacutegio-
nales un caractegravere obligatoire En cela elle respecte la jurisprudence du Con-
seil constitutionnel preacuteciteacutee (deacutecision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi
relative agrave la Corse)
laquo Si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquoho-
raire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir
pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les en-
seignants (hellip) raquo (cons 24)
Lrsquoenseignement drsquoune langue minoritaire ne devient donc en aucun cas obli-
gatoire Ce qui doit faire laquo lrsquoobjet drsquoun accord raquo ce sont les conditions permet-
tant effectivement agrave des enfants drsquoacceacuteder agrave un enseignement facultatif qui
contribue agrave leur deacuteveloppement proteacutegeacute par ailleurs par lrsquoalineacutea 10 du Preacuteam-
bule de 1946 preacuteciteacute Ni la Constitution ni son interpreacutetation par le Conseil
constitutionnel ne srsquoopposent agrave ce qursquoune commune de reacutesidence participe y
compris de maniegravere obligatoire au financement de la scolarisation dans une
autre commune des enfants souhaitant suivre un tel enseignement Crsquoest don-
ner aux enfants et aux parents de maniegravere effective et efficiente la possibiliteacute
concregravete de beacuteneacuteficier drsquoun enseignement drsquoune langue reacutegionale composante
de leur laquo deacuteveloppement raquo laquelle appartient en vertu de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution au laquo patrimoine de la France raquo
C Forfait scolaire communal et respect du principe drsquoeacutegaliteacute
Tertio la loi ne contrevient pas au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur
une commune une nouvelle charge
Conformeacutement agrave une jurisprudence du Conseil constitutionnel bien eacutetablie le
principe deacutegaliteacute de lrsquoarticle 6 de la Deacuteclaration des droits de lhomme et du
citoyen de 1789 laquo ne soppose ni agrave ce que le leacutegislateur regravegle de faccedilon diffeacuterente
des situations diffeacuterentes ni agrave ce quil deacuteroge agrave leacutegaliteacute pour des raisons
dinteacuterecirct geacuteneacuteral pourvu que dans lun et lautre cas la diffeacuterence de traite-
ment qui en reacutesulte soit en rapport direct avec lobjet de la loi qui leacutetablit raquo
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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(pour lrsquoune des reacutecentes application au domaine de lrsquoenseignement dont il sera
ici question deacutecision ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de
la confiance)
En ce qui concerne preacuteciseacutement le caractegravere obligatoire drsquoune nouvelle charge
pour une collectiviteacute celui-ci nrsquoa pas eacuteteacute censureacute par le Conseil constitutionnel
agrave propos de lrsquoexamen de la loi sur lrsquoavenir de lrsquoeacutecole preacuteciteacutee (deacutecision ndeg 2019-
787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de la confiance) Lrsquoarticle 17 de
la loi alors deacutefeacutereacute au Conseil constitutionnel preacutevoyait dans son premier ali-
neacutea
laquo LrsquoEacutetat attribue de maniegravere peacuterenne agrave chaque commune les ressources
correspondant agrave lrsquoaugmentation des deacutepenses obligatoires qursquoelle a
prises en charge en application des articles L 212-4 L 212-5 et L 442-
5 du code de lrsquoeacuteducation au titre de lrsquoanneacutee scolaire 2019-2020 par rap-
port agrave lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 dans la limite de la part drsquoaugmenta-
tion reacutesultant directement de lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoins-
truction obligatoire raquo
Les deacutepenses qui font lrsquoobjet de lrsquoaccompagnement financier en cause sont
celles qui beacuteneacuteficient aux eacutecoles publiques et aux eacutetablissements drsquoenseigne-
ment priveacutes ayant passeacute un contrat drsquoassociation avec lrsquoEacutetat
Lrsquoabaissement agrave trois ans du deacutebut de lrsquoinstruction obligatoire a donc fait pe-
ser des charges nouvelles pour les communes et leur a mecircme imposeacute de par-
ticiper au financement des eacutecoles maternelles priveacutees sous contrat y compris
lorsqursquoelles nrsquoont pas approuveacute ce contrat La diffeacuterence de traitement entre
les communes est reacuteelle selon qursquoelles financcedilaient ou non des classes mater-
nelles avant lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoinstruction obligatoire mais
nrsquoentraicircne pas pour autant une rupture drsquoeacutegaliteacute
Ainsi lrsquoa jugeacute le Conseil constitutionnel dans la deacutecision preacuteciteacutee drsquoune part
il a estimeacute que cette diffeacuterence de traitement reposait sur une diffeacuterence de
situation
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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laquo Les communes qui au cours de lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 avaient
institueacute des classes maternelles ou eacutecoles maternelles publiques ou ap-
prouveacute des contrats drsquoassociation drsquoeacutecoles maternelles priveacutees ont con-
tribueacute agrave ce titre agrave leur financement dans les conditions preacutevues par le
code de lrsquoeacuteducation Ces communes ne sont ainsi pas placeacutees dans une
situation identique agrave celle des autres communes qui nrsquoexerccedilaient pas
deacutejagrave les mecircmes compeacutetences et ne supportaient donc pas les charges
correspondantes raquo (cons 7)
Drsquoautre part le Conseil constitutionnel a jugeacute que la diffeacuterence de traitement
contesteacutee eacutetait en rapport direct avec lrsquoobjet de la loi qui lrsquoeacutetablit
laquo Qui consiste en application de la seconde phrase du quatriegraveme alineacutea
de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution agrave accompagner de ressources finan-
ciegraveres une extension de compeacutetence ayant pour conseacutequence drsquoaugmen-
ter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales raquo (cons 8)
Agrave lrsquoargument opposeacute agrave lrsquoarticle 6 de la loi deacutefeacutereacutee selon lequel ces dispositions
creacuteeraient une diffeacuterence de traitement entre les communes contraire au prin-
cipe deacutegaliteacute devant la loi le Conseil constitutionnel en vertu de sa jurispru-
dence Loi pour une eacutecole de la confiance devrait logiquement apporter la mecircme
reacuteponse Le leacutegislateur entend avec cette loi du 8 avril 2021 donner de ma-
niegravere geacuteneacuterale effectiviteacute agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution agrave travers en par-
ticulier un outil permettant de mettre en œuvre les dispositions de lrsquoarticle 72-
2 de la Constitution relatives aux extensions de compeacutetences imposeacutees aux
collectiviteacutes territoriales Dispositions qui par ailleurs nrsquoobligent pas le leacutegi-
slateur agrave preacutevoir un accompagnement financier de lrsquoensemble des communes
En lien avec cet argument il en reacutesulte que lrsquoarticle 6 ne porte pas atteinte
par ailleurs au principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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D Forfait scolaire communal et respect du principe de libre administra-
tion des collectiviteacutes territoriales
Quarto le forfait scolaire communal nrsquoest ni contraire agrave la lettre de lrsquoar-
ticle 72 de la Constitution ni agrave son interpreacutetation par le Conseil constitution-
nel
En vertu de lrsquoarticle 72 alineacutea 3 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales
srsquoadministrent librement dans les conditions preacutevues par la loi Correacutelative-
ment lrsquoarticle 34 de la Constitution donne agrave la loi compeacutetence pour deacuteterminer
laquo les principes fondamentaux (hellip) de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales de leurs compeacutetences et de leurs ressources raquo Cette libre admi-
nistration doit en outre se concilier avec drsquoautres principes constitutionnels
tels que le principe drsquoeacutegaliteacute et la liberteacute de lrsquoenseignement Crsquoest ainsi que le
Conseil constitutionnel a jugeacute que laquo si le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacute-
gislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce que les conditions essentielles drsquoap-
plication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de lrsquoenseignement deacutepen-
dent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre
les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (voir notamment la deacutecisions ndeg84-
185 DC du 18 janvier 1985 cons 18)
La libre administration est bien un principe constitutionnel mais crsquoest au leacute-
gislateur qursquoil revient sous le controcircle du Conseil constitutionnel drsquoen preacuteci-
ser le contenu Lrsquointervention du leacutegislateur est neacutecessaire pour la deacutefinition
des regravegles de fonctionnement des collectiviteacutes territoriales la deacutefinition des
compeacutetences qui leur sont deacutevolues (transfert creacuteation extension des compeacute-
tences) et en matiegravere de ressources la fixation du taux des impocircts deacutecideacutes par
les Assembleacutees deacutelibeacuteratives locales
Il ressort de la jurisprudence administrative et constitutionnelle que seule la
loi peut creacuteer une obligationsujeacutetion nouvelle agrave la charge drsquoune collectiviteacute
territoriale Le principe de libre administration ne peut donc pas exister en-
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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dehors de lrsquointervention du leacutegislateur lequel nrsquoa pas pour autant toute lati-
tude En drsquoautres termes le principe de libre administration est deacutefini par la
loi mais est aussi proteacutegeacute contre elle qui ne peut notamment pas porter at-
teinte au-delagrave drsquoun certain seuil aux ressources des collectiviteacutes territoriales
restreindre la liberteacute contractuelle intervenir dans les deacutecisions des collecti-
viteacutes territoriales relatives agrave leurs agents ou le fonctionnement de leurs insti-
tutions
En eacutetendant la prise en charge du forfait scolaire communal la loi deacutefeacutereacutee creacutee
une charge suppleacutementaire pour certaines communes
Aux termes du quatriegraveme alineacutea de larticle 72-2 de la Constitution laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales saccom-
pagne de lattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consa-
creacutees agrave leur exercice Toute creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour
conseacutequence daugmenter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales est ac-
compagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Dans le cas ougrave le leacutegislateur
octroie une nouvelle compeacutetence aux collectiviteacutes territoriales (articles 72-2 de
la Constitution et L 1614-1-1 du code geacuteneacuteral des collectiviteacutes territoriales)
il accompagne cette creacuteation de ressources correspondantes uniquement si
lexercice de cette compeacutetence est rendu obligatoire Ainsi en a jugeacute le Conseil
constitutionnel en ajoutant que le leacutegislateur disposait dun pouvoir dappreacute-
ciation en la matiegravere la compensation devant ecirctre naturellement suffisante
pour ne pas constituer une entrave au principe de libre administration
laquo Que ces dispositions ne visent en ce qui concerne les creacuteations et ex-
tensions de compeacutetences que celles qui preacutesentent un caractegravere obliga-
toire que dans cette hypothegravese il nest fait obligation au leacutegislateur
que daccompagner ces creacuteations ou extensions de compeacutetences de res-
sources dont il lui appartient dappreacutecier le niveau sans toutefois deacutena-
turer le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales raquo
(deacutecision ndeg2008-569 DC du 7 aoucirct 2008 Loi instituant un droit daccueil
pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires pendant le temps
scolaire cons 13)
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Le Conseil constitutionnel a jugeacute qursquoen conseacutequence et en lrsquoespegravece le leacutegisla-
teur avait suffisamment deacutetermineacute le niveau des ressources accompagnant la
creacuteation de ce service daccueil pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires pendant le temps scolaire sans meacuteconnaicirctre le quatriegraveme alineacutea de
larticle 72-2 de la Constitution
Lextension de compeacutetences est soumise a fortiori au mecircme reacutegime que la
creacuteation de compeacutetences Elle consiste en leacutelargissement du peacuterimegravetre ou en
la modification de la nature ou de lobjet dune compeacutetence dont lexercice est
deacutejagrave assureacute par les collectiviteacutes territoriales ayant pour conseacutequence de creacuteer
une charge suppleacutementaire pour celles-ci Le droit agrave une compensation finan-
ciegravere nest garanti que si lextension preacutesente un caractegravere obligatoire et le
leacutegislateur en deacutetermine le niveau et les modaliteacutes agrave condition quils nentra-
vent pas la libre administration des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece le principe de libre administration nrsquoest donc pas violeacute par le ca-
ractegravere contraignant que confegravererait la loi deacutefeacutereacutee au forfait scolaire communal
de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation Drsquoune part le Conseil constitu-
tionnel a deacutejagrave comme souligneacute plus haut accepteacute le principe du caractegravere
obligatoire drsquoune nouvelle charge qui nrsquoentraine par ailleurs mecircme pas
lrsquoautomaticiteacute drsquoun accompagnement financier des communes Drsquoautre part
lrsquoargument de proportionnaliteacute est ici deacuteterminant agrave ceux qui avancent un
risque drsquoassegravechement financier de certaines communes rurales contraintes
de prendre en charge la scolarisation dun eacutelegraveve dans une autre commune
mieux doteacutee qui propose lenseignement de la langue reacutegionale (ce qui selon
le deacuteputeacute Molac ne concernerait que 002 des enfants en France) il faut
reacutepondre en mettant en avant lrsquoobjectif incitatif et non sanctionnateur de la
loi Il suffira auxdites communes de proposer un enseignement de langue reacute-
gionale qui ne pourrait repreacutesenter qursquoune heure drsquoinitiation par semaine par
exemple
Une heure drsquoinitiation par semaine pour eacuteviter de payer le forfait scolaire com-
munal lequel ne meacuteconnait pas par ailleurs lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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les principes constitutionnels drsquoeacutegaliteacute drsquouniciteacute de la langue franccedilaise de la
libre administration des collectiviteacutes territoriales et permet drsquoassurer le deacuteve-
loppement de lrsquoenfant crsquoest bien peu de choses pour censurer une loi souve-
raine adopteacutee qui plus est agrave une eacutecrasante majoriteacute
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
De Raphaeumll SchellenbergerA GreffeObjet Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues ReacutegionalesDate mardi 4 mai 2021 101012Piegraveces jointes Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionalespdf
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loirelative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus desoixante deacuteputeacutes ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texteen application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarerlrsquoinconstitutionnaliteacute de son article 6 Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons ennotre qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre lapleine constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sensNous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notreconsideacuteration respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire
- Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
- Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche
- Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret
- Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne
- Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte
- Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor
- David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion
- Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme
- Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne
- Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
1
M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2
Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
3
On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
- Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie
- Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
Ce message ainsi que les piegraveces jointes sont eacutetablis sous la seule responsabiliteacute de lexpeacutediteur agrave lintention exclusive de ses destinataires ils peuvent contenir des informations confidentielles Toute publication utilisation ou diffusion doit ecirctre autoriseacutee preacutealablement Ce message a fait lobjet dun traitement anti-virusIl est rappeleacute que tout message eacutelectronique est susceptible dalteacuteration au cours de son acheminement sur Internet ________________________________________________________________
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Association ESKOLIMChez Seaska Route de la Pouponniegravere64250 CAMBO LES BAINSeskolim6gmailcomRepreacutesenteacutee par son President Jean Seacutebastien HAYDN11 chemin de Saint Jean66240 SAINT ESTEVE
CONTRIBUTION EXTERIEURE
Observations sur la conformiteacute agrave la Constitution de laproposition de loi relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
Monsieur le Preacutesident du Conseil constitutionnel Mesdames et Messieurs les
membres du Conseil constitutionnel lrsquoassociation Eskolim souhaite porter agrave votre attention
les observations suivantes tendant agrave deacutemontrer la conformiteacute agrave la Constitution de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Parmi lrsquoensemble des dispositions du texte deacutefeacutereacute la plupart nrsquoont donneacute lieu agrave aucun
deacutebat sur leur conformiteacute agrave la Constitution qui est de toute eacutevidence acquise par exemple au
sujet des traductions dont la constitutionnaliteacute a deacutejagrave indirectement eacuteteacute reconnue (CC 99-412
DC 15 juin 1999 CC ndeg2001-452 DC 6 deacutecembre 2001) ou de lrsquoutilisation des signes
diacritiques sur les actes drsquoeacutetat civil
De plus au-delagrave des apparences drsquoune politique jurisprudentielle initieacutee dans un contexte
speacutecifique le Conseil constitutionnel dispose deacutesormais drsquoun cadre constitutionnel de
reacutefeacuterence transformeacute (1) qui lui permettra de valider les dispositions leacutegislatives du texte dont
il est saisi en particulier lrsquoarticle 4 relatif agrave lrsquoenseignement immersif (2) et lrsquoarticle 6 au sujet
de la participation financiegravere agrave la scolarisation par les communes de reacutesidence (3)
1
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
1 Le renouvellement des normes constitutionnelles de reacutefeacuterence en matiegravere de
langues reacutegionales
11 Les ineacutevitables deacuterogations apporteacutees agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution
Toute regravegle constitutionnelle connaicirct des atteacutenuations et peut ecirctre concilieacutee lrsquoarticle 2
de la Constitution ne fait pas exception Le principe demeure inchangeacute laquo La langue de la
Reacutepublique est le franccedilais raquo Sur ce fondement le Conseil constitutionnel a deacuteveloppeacute dans
les anneacutees 90 et 2000 une jurisprudence vigilante sur lrsquousage du franccedilais mais sans pour
autant refuser toute eacutevolution nous y reviendrons
Cependant lrsquoassociation Eskolim souhaite mettre en eacutevidence lrsquoindeacuteniable
changement de cadre constitutionnel en matiegravere de langues reacutegionales pour au
moins trois raisons
En premier lieu la porteacutee de lrsquoarticle 2 de la Constitution nrsquoest pas figeacutee et peut
eacutevoluer avec le temps En effet le Conseil constitutionnel opegravere reacuteguliegraverement des adaptations
de la porteacutee du texte constitutionnel Parmi de nombreuses illustrations jurisprudentielles la
liberteacute drsquoexpression et de communication protegravege deacutesormais la liberteacute drsquoacceacuteder agrave Internet
(CC ndeg 2009-580 DC 10 juin 2009) et de srsquoy exprimer (CC ndeg2020-801 DC du 18 juin 2020)
La liberteacute du mariage comprend deacutesormais le droit de mettre fin aux liens du mariage (CC ndeg
2016-557 QPC du 29 juillet 2016) La monteacutee en puissance des exigences environnementales
dans le deacutebat public a permis au Conseil constitutionnel de juger qursquoil deacutecoule de la Charte de
lrsquoenvironnement laquo que la protection de lrsquoenvironnement patrimoine commun des ecirctres
humains constitue un objectif de valeur constitutionnelle raquo (CC ndeg2019-823 QPC 31 janvier
2020) Certains fondements constitutionnels que lrsquoon croyait endormis ont eacuteteacute reacuteactiveacutes sous
lrsquoeffet du pouvoir interpreacutetatif agrave lrsquoimage de lrsquoarticle 15 de la DDHC (laquo La socieacuteteacute a le droit de
demander compte agrave tout agent public de son administration raquo) agrave lrsquoorigine drsquoun droit drsquoaccegraves
aux archives publiques (CC ndeg2017-655 QPC 15 septembre 2017) et drsquoun droit drsquoaccegraves aux
documents administratifs (CC ndeg2020-834 QPC 3 avril 2020)
En deuxiegraveme lieu la reacutedaction actuelle de lrsquoarticle 2 de la Constitution ne date pas de
1958 mais drsquoun ajout issu de la loi constitutionnelle ndeg 92-554 du 25 juin 1992 voteacutee dans un
contexte particulier au moment ougrave la France ratifiait le traiteacute de Maastricht et reacutevisait sa
Constitution afin de lever les atteintes agrave la souveraineteacute constateacutees par le Conseil
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
constitutionnel En 1992 lrsquoinsertion de la langue franccedilaise au sein de lrsquoarticle 2 vise agrave rassurer
lrsquoopinion face aux craintes heacutegeacutemoniques de la langue anglaise les langues reacutegionales ne
sont ni viseacutees ni nieacutees dans leur existence et leur rocircle Il est sur ce point particuliegraverement
reacuteveacutelateur de se reacutefeacuterer aux deacuteclarations limpides du Garde des Sceaux Michel Vauzelle lors
des deacutebats parlementaires consacreacutes en 1992 au vote de la reacutevision constitutionnelle laquo Les
langues reacutegionales sont naturellement une richesse de notre patrimoine national Agrave ce
titre le Gouvernement exprime par ma voix lrsquoimmense respect et le soin qursquoil porte agrave cette
richesse de la nation [] Je ne vois pas lagrave drsquoatteinte agrave lrsquouniteacute de la nation mais au
contraire une contribution agrave sa richesse [] Aucune atteinte ne sera porteacutee agrave la politique
de respect de la diversiteacute de nos cultures reacutegionales qui est un eacuteleacutement essentiel du
patrimoine national raquo (JO Assembleacutee nationale p 1021)
Il est donc parfaitement possible pour le Conseil constitutionnel drsquoopeacuterer une
interpreacutetation eacutevolutive de lrsquoarticle 2 afin drsquoadapter la porteacutee de la norme constitutionnelle au
contexte actuel favorable agrave lrsquoapprofondissement de lrsquousage des langues reacutegionales Il nrsquoest
drsquoailleurs pas anodin de constater que la preacutesente proposition de loi a largement transcendeacute les
clivages politiques pour ecirctre voteacutee agrave une large majoriteacute avec drsquoailleurs le soutien de
lrsquoensemble des Preacutesidents de Reacutegion
En troisiegraveme lieu dans sa fameuse deacutecision sur la Charte europeacuteenne des langues
reacutegionales et minoritaires du 15 juin 1999 (ndeg99-412 DC) le Conseil constitutionnel a
implicitement reconnu la compatibiliteacute de lrsquoenseignement immersif ou bilingue avec la
Constitution et en particulier avec lrsquoarticle 2 de la Constitution En effet lrsquoinconstitutionnaliteacute
constateacutee entre la Charte et la Constitution concerne seulement les articles 1 et 7 Or le
consideacuterant 13 de cette deacutecision abusivement preacutesenteacutee comme un verrou absolu en matiegravere
de langues reacutegionales prend soin de preacuteciser laquo que nest contraire agrave la Constitution eu eacutegard agrave
leur nature aucun des autres engagements souscrits par la France dont la plupart au
demeurant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France en
faveur des langues reacutegionales raquo Parmi ces laquo autres engagements souscrits par la France raquo
au sein de la Charte figurent certaines stipulations de lrsquoarticle 8 de la Charte1 selon lequel
1 Article 8 ndash Enseignement1En matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel ces langues sontpratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de lenseignement de la (des)langue(s) officielle(s) de lEtat(hellip)ci agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires concerneacutees ou
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
laquo laquoen matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel
ces langues sont pratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de
lenseignement de la (des) langue(s) officielle(s) de lEtat raquo agrave toute une seacuterie drsquoengagements
Au sein des engagements auxquels la France avait souscrits et sur lesquels le Conseil
constitutionnel srsquoest donc prononceacute on trouve le point 1 c (iv) en vertu duquel la France
srsquoengage laquo agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui
le souhaitent ndash ou le cas eacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant raquo
Or ce renvoi concerne les stipulations suivantes
laquo i agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires
concerneacutees ou
Ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les
langues reacutegionales ou minoritaires ou
Iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales
ou minoritaires comme partie inteacutegrante du curriculum
Autrement dit la France srsquoeacutetait engageacutee au moment de la signature de la Charte agrave
appliquer lrsquoune des trois mesures citeacutees qui concernent lrsquoenseignement laquo dans raquo les langues
reacutegionales ou minoritaires dans le secondaire crsquoest-agrave-dire un enseignement immersif ou
bilingue Cet engagement faisait donc partie des stipulations examineacutees par le Conseil
constitutionnel et le consideacuterant 13 de la deacutecision du 15 juin 1999 affirme clairement que ces
stipulations ne sont pas contraires agrave la Constitution Degraves 1999 lrsquoenseignement immersif en
langue reacutegionale est reconnu par le Conseil constitutionnel comme compatible avec
lrsquoarticle 2 de la Constitution
En quatriegraveme lieu le texte mecircme de la Constitution contient drsquoores et deacutejagrave des
ameacutenagements au principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais
Drsquoune part en vertu de la loi constitutionnelle ndeg 98-610 du 20 juillet 1998 lAccord
de Noumeacutea est constitutionnaliseacute agrave larticle 77 de la Constitution Or cet accord stipule en son
ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les langues reacutegionalesou minoritaires ou
iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales ou minoritairescomme partie inteacutegrante du curriculum ou
iv agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui le souhaitent ndash ou le caseacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
point 133 laquo Les langues kanak sont avec le franccedilais des langues denseignement et de
culture en Nouvelle-Caleacutedonie Leur place dans lenseignement et les meacutedias doit donc ecirctre
accrue et faire lobjet dune reacuteflexion approfondie raquo
Drsquoautre part sous lrsquoeffet de la reacutevision constitutionnelle du 23 juillet 2008 la
Constitution consacre deacutesormais les langues reacutegionales sous lrsquoeffet de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution qui par deacutefinition atteacutenue et deacuteroge agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution et dont la
porteacutee ne saurait ecirctre symbolique
12 La porteacutee de lrsquoancrage constitutionnel des langues reacutegionales minoritaires
En vertu de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution laquo Les langues reacutegionales appartiennent
au patrimoine de la France raquo Sans discussion possible cette nouvelle disposition
constitutionnelle constitue un changement de circonstances de droit permettant drsquoatteacutenuer
fortement la porteacutee des preacuteceacutedentes deacutecisions du Conseil constitutionnel rendues avant la
reacutevision constitutionnelle de 2008 Certains voudraient pourtant reacuteduire ce texte agrave une porteacutee
simplement symbolique et pensent pouvoir drsquoores et deacutejagrave trouver une confirmation dans la
jurisprudence du Conseil constitutionnel La reacutealiteacute contentieuse est beaucoup plus nuanceacutee et
ne preacutejuge rien de lrsquoavenir
Le Conseil constitutionnel nrsquoa eu depuis 2008 qursquoune seule et unique occasion de
preacuteciser la porteacutee de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Dans la deacutecision du 20 mai 2011
(ndeg2011-130 QPC) il eacutetait en effet saisi des dispositions de larticle L 312-10 du code de
leacuteducation relative agrave lenseignement des langues et cultures reacutegionales qui eacutetait contesteacute au
regard de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Or estime le Conseil en 2011 lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution ninstitue pas un droit ou une liberteacute que la Constitution garantit Sa
meacuteconnaissance ne peut donc ecirctre invoqueacutee agrave lappui dune question prioritaire de
constitutionnaliteacute sur le fondement de larticle 61-1 de la Constitution
Il convient de ne pas tirer de conclusions excessives du deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en
QPC de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Drsquoune part cela nrsquoempecircche pas le Conseil constitutionnel de se fonder sur lrsquoarticle
75-1 de la Constitution dans le cadre du controcircle a priori comme crsquoest par exemple le cas
pour les regravegles constitutionnelles en matiegravere de recevabiliteacute des amendements ou des principes
constitutionnels en matiegravere budgeacutetaires
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Drsquoautre part le deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en QPC drsquoune norme constitutionnelle ne
preacutejuge pas drsquoune forme de hieacuterarchie mateacuterielle ou formelle et srsquoexplique seulement par les
speacutecificiteacutes de chacun des offices Par exemple le respect des regravegles du vote de la loi
imposeacutees par la Constitution impossibles agrave invoquer en QPC font pourtant lrsquoobjet drsquoune
vigilance accrue du Conseil constitutionnel dans le cadre du controcircle a priori justifiant
chaque anneacutee de nombreuses censures
En outre bien que non invocable en QPC lrsquoarticle 75-1 teacutemoigne indubitablement de
la volonteacute du constituant de permettre au leacutegislateur drsquoassouplir les conditions drsquousage des
langues reacutegionales en ouvrant davantage la leacutegislation agrave des possibiliteacutes drsquoapprentissage en la
matiegravere En cela lrsquoarticle 75-1 de la Constitution est une atteacutenuation une disposition
deacuterogatoire agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution selon lequel laquo La langue de la Reacutepublique est le
franccedilais raquo Comme le souligne le rapport drsquoun deacuteputeacute en 2015 laquo la preacuteservation et la
protection des langues reacutegionales sont devenues un objectif de valeur constitutionnelle raquo2 Une
telle interpreacutetation serait drsquoailleurs coheacuterente avec les travaux parlementaires agrave lrsquoorigine de la
reacutevision de 2008 pour le preacutesident de la Commission des lois du Seacutenat lrsquoarticle 75-1 permet
de donner laquo un fondement solide aux dispositions leacutegislatives et reacuteglementaires qui favorisent
la protection et le deacuteveloppement des langues reacutegionales sans diminuer la place que le
franccedilais occupe dans notre sphegravere publique raquo3
Enfin dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel
estime que larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi
ndeg2005-380 du 23 avril 2005 est conforme agrave la Constitution Or les dispositions ainsi
valideacutees sont toujours en vigueur dans une reacutedaction identique laquo Un enseignement de
langues et cultures reacutegionales peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des
modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces
langues sont en usage raquo Ainsi tout en estimant que lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ne
constitue pas un droit ou liberteacute constitutionnel directement invocable en QPC le Conseil
constitutionnel a valideacute le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures
reacutegionales
2JJ Urvoas Rapport sur Proposition de loi constitutionnelle ndeg 1618 visant agrave ratifier la Charte europeacuteenne deslangues reacutegionales ou minoritaires 14 janvier 2014
3JJ Hyest Rapport ndeg 387 (2007-2008) sur le projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions dela Ve Reacutepublique fait au nom de la commission des lois du Seacutenat
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Autre signe eacutevident de la porteacutee effective de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le
leacutegislateur a multiplieacute ces derniegraveres anneacutees lrsquoadoption de textes favorisant lrsquousage et
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et leur promotion La loi du 8 juillet 2013
drsquoorientation et de programmation pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique ouvre la
possibiliteacute drsquoun enseignement bilingue franccedilais-langue reacutegionale la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) eacutetablit la participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes par lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale
lrsquoarticle 86 de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle
modifie lrsquoarticle 225-1 du code peacutenal en creacuteant un nouveau cas de discrimination fondeacute sur laquo
la maitrise drsquoune autre langue que le franccedilais raquo la loi du 28 feacutevrier 2017 de programmation
relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend inopeacuterant lrsquointerdiction des livrets de famille
bilingues lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance eacutetend aux
eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives les modaliteacutes drsquoun accord entre les communes pour
la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoinscrivant dans une eacutecole dispensant un
enseignement de langue reacutegionale en dehors de sa commune de reacutesidence Lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution a donc susciteacute une production leacutegislative qui teacutemoigne de la volonteacute du pouvoir
politique de mettre en œuvre une politique en matiegravere de langue et culture reacutegionales La
particulariteacute de la proposition de loi deacutefeacutereacutee est drsquoecirctre la premiegravere loi dont lrsquoobjet exclusif vise
agrave densifier lrsquoenseignement et lrsquousage des langues reacutegionales mais ce texte confirme les
avanceacutees ponctuelles eacutetablies depuis la reacutevision constitutionnelle de 2008
13 La monteacutee en puissance drsquoexigences constitutionnelles favorisant lrsquousage des langues
reacutegionales
Au-delagrave de lrsquoapport indeacuteniable de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution qui inteacuteresse
directement et clairement la possibiliteacute pour le leacutegislateur de favoriser le deacuteveloppement des
langues reacutegionales la jurisprudence du Conseil constitutionnel atteste drsquoune monteacutee en
puissance de plusieurs liberteacutes qui participent indirectement du mecircme mouvement
En premier lieu la liberteacute drsquoexpression et de communication concerne les langues
reacutegionales Degraves la deacutecision ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 le Conseil constitutionnel avait
concilieacute lrsquoarticle 2 de la Constitution avec la liberteacute drsquoexpression et de communication afin de
censurer certaines dispositions imposant lrsquousage du franccedilais tout en faisant notamment une
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reacutefeacuterence aux langues reacutegionales cette liberteacute laquo implique le droit pour chacun de choisir les
termes jugeacutes par lui les mieux approprieacutes agrave lexpression de sa penseacutee que la langue franccedilaise
eacutevolue comme toute langue vivante en inteacutegrant dans le vocabulaire usuel des termes
de diverses sources quil sagisse dexpressions issues de langues reacutegionales de vocables
dits populaires ou de mots eacutetrangers raquo Or la liberteacute drsquoexpression et de communication a vu
son reacutegime constitutionnel renforceacute depuis plusieurs anneacutees sous lrsquoeffet du triple test de
proportionnaliteacute en vertu duquel les limites apporteacutees agrave ces liberteacutes doivent ecirctre neacutecessaires
adapteacutees et proportionneacutees agrave lrsquoobjectif poursuivi Norme constitutionnelle prioritaire pour le
Conseil constitutionnel la liberteacute drsquoexpression et de communication a justifieacute de nombreuses
censures de dispositions leacutegislatives ces derniegraveres anneacutees (loi laquo Hadopi raquo consultation des
sites Internet terroristes loi laquo Avia raquohellip) Or cette liberteacute dans ses deux composantes de
lrsquoexpression et de la communication permet au locuteur drsquoutiliser une langue reacutegionale et de
ne pas subir drsquoentraves excessives ou injustifieacutees Le deacuteveloppement des langues reacutegionales et
de leur enseignement lrsquoouverture des possibiliteacutes de srsquoexprimer et de communiquer gracircce agrave
ces langues ne sont pas eacutetrangegraveres aux conditions drsquoexercice de la liberteacute drsquoexpression et de
communication Ainsi la monteacutee en puissance de cette liberteacute dans le contentieux
constitutionnel confirme lrsquoeacutevolution favorable du cadre constitutionnel applicable aux langues
reacutegionales
En deuxiegraveme lieu lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant est deacutesormais consacreacute en tant
qursquoexigence constitutionnelle deacutecoulant des alineacuteas 10 et 11 du Preacuteambule de 1946 Ce
principe a drsquoores et deacutejagrave eacuteteacute appliqueacute en matiegravere de droit des eacutetrangers (CC 2019-797 QPC du
26 juillet 2019) mais aussi en droit de la famille au sujet du divorce (CC ndeg 2019-778 DC du
21 mars 2019) ou de lrsquoaccouchement sous le secret (CC 2019-826 QPC du 7 feacutevrier 2020) Il
serait parfaitement coheacuterent que cette exigence constitutionnelle soit applicable en matiegravere
drsquoeacuteducation et drsquoenseignement ce qui permettrait notamment de justifier le renforcement de
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et le soutien financier qui leur est apporteacute
En troisiegraveme lieu la liberteacute de lrsquoenseignement reconnu en tant que principe
constitutionnel (CC ndeg77-87 DC 23 novembre 1977 2016-745 DC 26 janvier 2017)
pourrait permette de proteacuteger constitutionnellement le libre choix des parents en
matiegravere de meacutethodes eacuteducatives conformeacutement agrave la jurisprudence du Conseil drsquoEtat En
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
effet dans une deacutecision du 19 juillet 2017 (Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg
406150) le Conseil drsquoEtat estime que le laquo principe de la liberteacute de lrsquoenseignement qui figure
au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la Reacutepublique implique la
possibiliteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement y compris hors de tout contrat conclu
avec lrsquoEtat tout comme le droit pour les parents de choisir pour leurs enfants des
meacutethodes eacuteducatives alternatives agrave celles proposeacutees par le systegraveme scolaire public y
compris lrsquoinstruction au sein de la famille raquo A fortiori la liberteacute de lrsquoenseignement
permettrait au leacutegislateur drsquooffrir aux eacutelegraveves la possibiliteacute de suivre un enseignement immersif
en langue reacutegionale Faire deacutecouler de la liberteacute drsquoenseignement une exigence en matiegravere de
droit des parents de choisir les meacutethodes eacuteducatives serait drsquoailleurs en coheacuterence avec
lrsquoarticle 2 du Protocole 1 de la CEDH4 et lrsquoarticle 14-3 de la Charte des droits fondamentaux
de lUnion europeacuteenne5
Au-delagrave du principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais unchangement de contexte est intervenu depuis lrsquoinsertion en 1992 de cette disposition agravelrsquoarticle 2 de la Constitution Depuis 2008 le pouvoir constituant a consacreacute leslangues reacutegionales agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution de nombreuses reacuteformesleacutegislatives et regraveglementaires ont accompagneacute le deacuteveloppement des langues reacutegionaleset plusieurs principes constitutionnels accompagnent et pourraient agrave lrsquoavenirrenforcer lrsquoassise normative des langues reacutegionalesCrsquoest agrave lrsquoaune de ce cadre constitutionnel renouveleacute et transformeacute en phase avec leseacutevolutions leacutegislatives et sociales que le Conseil constitutionnel appreacuteciera laconstitutionnaliteacute de la preacutesente proposition de loi qui loin de constituer une rupturesrsquoinscrit dans une forme de continuiteacute
2 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi modifie lrsquoarticle L321-10 du code de lrsquoeacuteducation qui
en lrsquoeacutetat dispose
4laquo Nul ne peut se voir refuser le droit agrave lrsquoinstruction LrsquoEacutetat dans lrsquoexercice des fonctions qursquoil assumera dans ledomaine de lrsquoeacuteducation et de lrsquoenseignement respectera le droit des parents drsquoassurer cette eacuteducation et cetenseignement conformeacutement agrave leurs convictions religieuses et philosophiques raquo
5laquo La liberteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement dans le respect des principes deacutemocratiques ainsi quele droit des parents drsquoassurer lrsquoeacuteducation et lrsquoenseignement de leurs enfants conformeacutement agrave leurs convictionsreligieuses philosophiques et peacutedagogiques sont respecteacutes selon les lois nationales qui en reacutegissent lrsquoexercice raquo
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laquo Les langues et cultures reacutegionales appartenant au patrimoine de la France leurenseignement est favoriseacute prioritairement dans les reacutegions ougrave elles sont en usage
Cet enseignement peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefiniespar voie de convention entre lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont enusage
Le Conseil supeacuterieur de leacuteducation est consulteacute conformeacutement aux attributions qui lui sontconfeacutereacutees agrave larticle L 231-1 sur les moyens de favoriser leacutetude des langues et culturesreacutegionales dans les reacutegions ougrave ces langues sont en usage
Lenseignement facultatif de langue et culture reacutegionales est proposeacute dans lune des deuxformes suivantes
1deg Un enseignement de la langue et de la culture reacutegionales
2deg Un enseignement bilingue en langue franccedilaise et en langue reacutegionale
Les familles sont informeacutees des diffeacuterentes offres dapprentissage des langues et culturesreacutegionales raquo
Lrsquoarticle 4 a simplement pour objet drsquoajouter un 3e cas de forme drsquoenseignementfacultatif de langue et culture reacutegionales en preacutevoyant
laquo3deg Un enseignement immersif en langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectifdrsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo
21 Le Conseil constitutionnel peut ne pas se prononcer sur cette disposition
A titre liminaire il semblerait que lrsquoarticle 4 du texte soumis agrave lrsquoexamen du
Conseil constitutionnel ne soit pas contesteacute par les auteurs de la saisine parlementaire agrave en
croire les deacuteclarations publiques de plusieurs deacuteputeacutes Ce point nrsquoest pas sans importance degraves
lors qursquoil confirme le large consensus politique autour de cette disposition et peut avoir une
conseacutequence sur le peacuterimegravetre de lrsquoobjet de la deacutecision rendue
Certes il arrive ponctuellement au Conseil constitutionnel drsquoexaminer drsquooffice
drsquoautres dispositions que celles contesteacutees par la saisine mais depuis lrsquoentreacutee en vigueur de la
QPC et speacutecialement depuis 2016 une telle pratique tend agrave devenir une exception (Deacutecisions
ndeg 2019-794 DC du 20 deacutecembre 2019 ndeg2018-772 DC du 15 novembre 2018 ndeg2016-745
DC du 26 janvier 2017)
De plus lors de lrsquoexamen de la loi pour une eacutecole de la confiance dans sa deacutecision
ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 le Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute examiner
drsquooffice les dispositions de lrsquoarticle 38 creacuteant en vertu de lrsquoarticle L314-2 du code de
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lrsquoeacuteducation une expeacuterimentation de classe immersive en langue eacutetrangegravere ou reacutegionale6 Si le
Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute se saisir drsquooffice de cette disposition expeacuterimentale
crsquoest qursquoimplicitement il nrsquoa pas consideacutereacute qursquoelle posait une difficulteacute manifeste de
constitutionnaliteacute Degraves lors la coheacuterence voudrait qursquoil en aille de mecircme avec les dispositions
de lrsquoarticle 4 de la preacutesente proposition de loi qui ne font que reprendre les grands principes
de lrsquoexpeacuterimentation preacuteceacutedente en preacutevoyant la possibiliteacute drsquoun enseignement immersif en
langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue
franccedilaise
22 Les exigences anciennes poseacutees par le Conseil constitutionnel sont respecteacutees
Elaboreacutee avant la reacutevision constitutionnelle de 2008 consacrant les langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la jurisprudence
du Conseil constitutionnel en matiegravere drsquoenseignement de langue reacutegionale est totalement
respecteacutee par lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
En premier lieu le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement immersif en langue
reacutegionale rend lrsquoarticle 4 conforme agrave la Constitution
Dans plusieurs deacutecisions le Conseil constitutionnel a eu lrsquooccasion de preacuteciser que
seule lrsquoobligation de suivre un enseignement dans une autre langue que le franccedilais serait
contraire agrave la Constitution Ainsi dans la deacutecision ndeg 2001-456 DC du 27 deacutecembre 2001 il
indique que laquo lusage dune langue autre que le franccedilais ne peut ecirctre imposeacute aux eacutelegraveves des
eacutetablissements de lenseignement public ni dans la vie de leacutetablissement ni dans
lenseignement des disciplines autres que celles de la langue consideacutereacutee raquo Le verbe
6Article L314-2 du code de lrsquoeacuteducation laquo Sous reacuteserve de lrsquoautorisation preacutealable des autoriteacutes acadeacutemiques etapregraves concertation avec les eacutequipes peacutedagogiques le projet drsquoeacutecole ou drsquoeacutetablissement mentionneacute agrave lrsquoarticle L401-1 peut preacutevoir la reacutealisation dans des conditions deacutefinies par deacutecret drsquoexpeacuterimentations peacutedagogiquesportant sur tout ou partie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement drsquoune dureacutee limiteacutee agrave cinq ans Cesexpeacuterimentations peuvent concerner lrsquoorganisation peacutedagogique de la classe de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement laliaison entre les diffeacuterents niveaux drsquoenseignement la coopeacuteration avec les partenaires du systegraveme eacuteducatiflrsquoenseignement dans une langue vivante eacutetrangegravere ou reacutegionale les eacutechanges avec des eacutetablissementseacutetrangers drsquoenseignement scolaire lrsquoutilisation des outils et ressources numeacuteriques la reacutepartition des heuresdrsquoenseignement sur lrsquoensemble de lrsquoanneacutee scolaire les proceacutedures drsquoorientation des eacutelegraveves et la participation desparents drsquoeacutelegraveves agrave la vie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement Les collectiviteacutes territoriales sont systeacutematiquementassocieacutees agrave la deacutefinition des grandes orientations des expeacuterimentations meneacutees par lrsquoeacuteducation nationale ainsiqursquoagrave leurs deacuteclinaisons territoriales raquo
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laquo imposer raquo est employeacute agrave la fois au sujet de lrsquousage drsquoune autre langue que le franccedilais et au
sujet de la vie de lrsquoeacutetablissement et de lrsquoenseignement des disciplines autres que celles de la
langue consideacutereacutee Ce qui signifie qursquoil est constitutionnellement possible au leacutegislateur de
permettre aux eacutelegraveves de choisir de maniegravere facultative une telle orientation dans
lrsquoenseignement De mecircme dans sa deacutecision ndeg2001 454 DC du 17 janvier 2002 le Conseil
constitutionnel avait estimeacute que si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre
de lrsquohoraire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires laquo il ne saurait revecirctir pour autant
un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo Et dans la deacutecision
ndeg2004-490 DC 12 feacutevrier 2004 le Conseil indique que lrsquoenseignement de la langue
tahitienne ou dune autre langue polyneacutesienne dans le cadre de lhoraire normal des eacutecoles
maternelles et primaires dans les eacutetablissements du second degreacute et dans les eacutetablissements
denseignement supeacuterieur laquo ne saurait revecirctir pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les
eacutelegraveves ou eacutetudiants ni pour les enseignants raquo
Or en lrsquoespegravece il nrsquoy a absolument aucun doute sur le caractegravere facultatif du 3deg
ajouteacute agrave lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation En effet le premier alineacutea de lrsquoarticle L312-
10 du code de lrsquoeacuteducation est inchangeacute et eacutevoque un laquo enseignement facultatif raquo Le deacuteputeacute
Molac lrsquoa clairement exprimeacute lors des deacutebats laquo lrsquoenseignement immersif tel qursquoil est ici
proposeacute reacutepond agrave cette condition dans la mesure ougrave il ne serait pas imposeacute mais seulement
proposeacute au sein des eacutetablissements publics au cocircteacute de filiegraveres classiques drsquoenseignement la
deacutecision finale restant du ressort des personnes responsables de lrsquoenfant raquo (Rapport du 31
mars 2021)
En deuxiegraveme lieu lrsquoarticle 4 nrsquoa pas pour objet de soustraire les eacutelegraveves aux
droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements drsquoenseignement
Dans plusieurs deacutecisions relatives agrave lrsquousage drsquoune langue reacutegionale le Conseil
constitutionnel rappelle qursquoun enseignement de ce type nrsquoa pas pour laquo pour objet de soustraire
les eacutelegraveves scolariseacutes (hellip) aux droits et obligations applicables agrave lensemble des usagers des
eacutetablissements qui assurent le service public de lenseignement ou sont associeacutes agrave celui-ci raquo
(ndeg 91-290 DC du 9 mai 1991 ndeg 2001-454 DC du 17 janvier 2002) Or lrsquoarticle 4 a
seulement pour objet drsquoouvrir une 3e modaliteacute facultative drsquoenseignement en langue reacutegionale
La proposition de loi ne confegravere pas des droits speacutecifiques agrave des laquo groupes raquo de locuteurs de
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de laquo territoires raquo dans lesquels ces langues
seraient pratiqueacutees Le texte ne modifie pas non plus les modaliteacutes drsquoexpression dans la vie
publique et dans la relation entre lrsquoadministration et les administreacutes De telle sorte que
lrsquoarticle 4 ne creacutee aucun droit particulier pour les eacutelegraveves comme pour les enseignants de nature
agrave les soustraire aux droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements
drsquoenseignement ou associeacutes agrave celui-ci
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 4 opegravere une conciliation raisonnable et eacutequilibreacutee entre
le principe de lrsquoarticle 2 de la Constitution et lrsquoapprentissage des langues reacutegionales
Lrsquoenseignement immersif en lange reacutegionale doit srsquoopeacuterer laquo sans preacutejudice de
lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo Lrsquoarticle 4 prend soin de ne pas
ignorer le principe poseacute par lrsquoarticle 2 de la Constitution et prolonge au niveau leacutegislatif la
conciliation souhaiteacutee par le constituant depuis 2008 avec lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Il
appartiendra au pouvoir regraveglementaire de preacuteciser la mise en œuvre de lrsquoobjectif de bonne
connaissance de la langue franccedilaise qui en toute hypothegravese garantit une conciliation
eacutequilibreacutee entre les regravegles constitutionnelles en preacutesence
Au surplus les retours drsquoexpeacuteriences des expeacuterimentations de classes en
enseignements immersifs permises par lrsquoarticle L 314-2 du code de lrsquoeacuteducation deacutemontrent
que les eacutelegraveves disposent drsquoun niveau en franccedilais plus eacuteleveacute que la moyenne Comme lrsquoindique
le rapport du Seacutenat sur la proposition de loi 19 expeacuterimentations immersives en langue
basque 6 en langue corse et une en langue catalane ont lieu actuellement dans des eacutecoles
publiques Or pour prendre lrsquoexemple de lrsquoenseignement en basque agrave 100 en eacutecole
maternelle objet drsquoune eacutevaluation preacutecise par lrsquoacadeacutemie de Bordeaux en 2019 (Etude
comparative des filiegraveres de maternelle 100 basque bilingue et franccedilais Acadeacutemie de
Bordeaux 2019) laquo lorsque ces enfants arrivaient en CP leur niveau de franccedilais eacutetait
supeacuterieur agrave la moyenne du deacutepartement Cela prouve que le niveau de franccedilais nrsquoavait
absolument pas eacuteteacute toucheacute raquo (Paul Molac Assembleacutee nationale Seacuteance du 8 avril 2021)
En quatriegraveme lieu lrsquoarticle 4 ne fait qursquoeacutetendre la mise en œuvre drsquoune modaliteacute
drsquoenseignement deacutejagrave valideacute par le Conseil constitutionnel
Dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel a valideacute
le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures reacutegionales en estimant que
larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi ndeg2005-380 du 23
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avril 2005 est conforme agrave la Constitution En effet apregraves avoir estimeacute inopeacuterant le grief tireacute
de la violation de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la deacutecision preacutecise laquo que les dispositions
contesteacutees ne sont contraires agrave aucun droit ou liberteacute que la Constitution garantit raquo Par
conseacutequent en vertu de lrsquoautoriteacute que lrsquoarticle 62 de la Constitution confegravere aux deacutecisions du
Conseil constitutionnel les dispositions valideacutees dans cette deacutecision et toujours en vigueur
sont conformes agrave la Constitution Il srsquoagit en particulier de lrsquoalineacutea 2 de la version actuelle de
lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation en vertu duquel laquo Cet enseignement peut ecirctre
dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre
lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont en usage raquo Or lrsquoarticle 4 de la
proposition de loi ne fait qursquoajouter une 3e possibiliteacute de mise en œuvre drsquoun principe deacutejagrave
valideacute par le Conseil constitutionnel modaliteacute facultative et sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune
bonne connaissance de la langue franccedilaise Le leacutegislateur srsquoest donc scrupuleusement
conformeacute aux exigences du Conseil constitutionnel
23 La possibiliteacute drsquoun enseignement immersif peut se preacutevaloir de plusieurs exigences constitutionnelles
En plus de srsquoinscrire dans les lignes jurisprudentielles du Conseil constitutionnel et de
respecter lrsquoarticle 2 de la Constitution lrsquoarticle 4 de la proposition de la loi peut se preacutevaloir
plusieurs normes constitutionnelles
En premier lieu lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en vertu duquel laquo Les langues
reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo constitue un changement de
circonstances de droit issu de la reacutevision constitutionnelle de 2008 qui atteacutenue la porteacutee de
lrsquoarticle 2 de la Constitution et permet ainsi de fonder le principe drsquoen enseignement immersif
et facultatif en langue reacutegionale
En second lieu comme preacuteceacutedemment rappeleacute (cf supra point 13) plusieurs
exigences et liberteacutes constitutionnelles peuvent soutenir le deacuteveloppement des langues
reacutegionales et peser favorablement dans la conciliation opeacutereacutee par le Conseil constitutionnel
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La liberteacute drsquoexpression et de communication garantie par lrsquoarticle 11 de la DDHC
et dont le reacutegime constitutionnel srsquoest renforceacute depuis une dizaine drsquoanneacutees peut permettre de
justifier lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale degraves lors qursquoil srsquoagit drsquoun preacutealable neacutecessaire
agrave lrsquoexpression et agrave la communication dans une autre langue que le franccedilais
Lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant reacutecemment consacreacute sur le fondement des alineacuteas 10
et 11 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 peut permettre au leacutegislateur de diversifier les
possibiliteacutes drsquoapprentissage drsquoune langue et drsquoune culture reacutegionale
La liberteacute de lrsquoenseignement consacreacutee de longue date en tant que principe
fondamental reconnu par les lois de la Reacutepublique implique neacutecessairement comme le
reconnaissent le Conseil drsquoEtat au niveau constitutionnel (CE 19 juillet 2017 Association
Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150) et les textes europeacuteens (article 2 du protocole 1
CEDH article 14-3 Charte des droits fondamentaux de lrsquoUnion europeacuteenne) une possibiliteacute
pour les parents de choisir des meacutethodes eacuteducatives en lien avec leurs convictions
Il est eacutegalement possible drsquoavancer le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction qui
deacutecoule de lrsquoalineacutea 13 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 (CC ndeg2001-450 DC 11
juillet 2001) degraves lors que lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale poursuit un objectif
peacutedagogique auquel les eacutelegraveves doivent pouvoir acceacuteder de maniegravere suffisamment libre et
selon des critegraveres objectifs et rationnels
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi se contente drsquoajouter une modaliteacute de mise enœuvre drsquoun enseignement dont le principe a deacutejagrave eacuteteacute valideacute par le Conseilconstitutionnel La conformiteacute agrave la Constitution de cet enseignement est eacutetablie degraveslors qursquoil est proposeacute de maniegravere facultative sans preacutejudice du respect de lrsquoarticle 2 dela Constitution et qursquoil peut se preacutevaloir de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ainsi quede plusieurs principes constitutionnels comme la liberteacute drsquoexpression lrsquointeacuterecirctsupeacuterieur de lrsquoenfant la liberteacute drsquoenseignement et lrsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction
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3 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi deacutefeacutereacutee modifie lrsquoarticle L442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation en remplaccedilant les alineacuteas 6 et 7 par lrsquoalineacutea suivant
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue
reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de
reacutesidence et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la
condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de
langue reacutegionale raquo
31 Lrsquoimpact subsidiaire et reacutesiduel de lrsquoarticle 6
Au-delagrave des passions et crispations qui peuvent parfois se rencontrer au greacute de deacutebats
relatifs au financement de lrsquoenseignement priveacute la modification apporteacutee par lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi doit ecirctre replaceacutee agrave sa juste porteacutee
En premier le meacutecanisme est subsidiaire En effet la participation financiegravere de la
commune de reacutesidence ne serait solliciteacutee que si cette commune ne laquo dispose pas drsquoeacutecole
dispensant un enseignement de langue reacutegionale raquo Il srsquoagit bien drsquoun laquo enseignement raquo quel
que soit sa forme et son volume Degraves lors comme lrsquoa clairement exprimeacute le deacuteputeacute Paul
Molac devant la Commission des affaires sociales il peut srsquoagir drsquoune laquo initiation drsquoun
enseignement paritaire ou drsquoune immersion raquo (31 mars 2021)
En deuxiegraveme lieu le meacutecanisme est reacutesiduel La participation financiegravere se limite
aux eacutetablissements priveacutes du premier degreacute ndash les eacutecoles ndash ayant conclu un contrat
drsquoassociation Les collegraveges et lyceacutees sont donc exclus du dispositif Un faible nombre
drsquoenfants sera concerneacute et la charge sera donc reacuteduite pour les communes en question De
plus en pratique dans les zones ougrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales est reacutepandu les
eacutecoles drsquoun grand nombre de communes ont deacutejagrave deacuteveloppeacute des offres eacuteducatives
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En troisiegraveme lieu la participation financiegravere est encadreacutee par la loi En application
de lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation non modifieacute par la preacutesente
proposition de loi les modaliteacutes de calcul de la contribution de la commune de reacutesidence sont
clairement eacutetablies
laquo il est tenu compte des ressources de cette commune du nombre deacutelegraveves de cette
commune scolariseacutes dans la commune daccueil et du coucirct moyen par eacutelegraveve calculeacute sur la base
des deacutepenses de fonctionnement de lensemble des eacutecoles publiques de la commune daccueil
sans que le montant de la contribution par eacutelegraveve puisse ecirctre supeacuterieur au coucirct quaurait
repreacutesenteacute pour la commune de reacutesidence leacutelegraveve sil avait eacuteteacute scolariseacute dans une de ses eacutecoles
publiques raquo
La charge financiegravere obeacuteit donc agrave des regravegles claires objectives rationnelles et deacutejagrave en
vigueur depuis plusieurs anneacutees En effet le laquo forfait scolaire raquo est deacutejagrave pratiqueacute sur le
fondement de lrsquoarticle L212-8 du code de lrsquoeacuteducation lorsqursquoune famille scolarise dans une
eacutecole publique ou priveacutee son enfant dans une autre commune que la commune de reacutesidence
32 Lrsquoabsence de violation de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales et du principe drsquoeacutegaliteacute
Ainsi replaceacutee dans sa juste porteacutee il ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi de violer la Constitution et en particulier les principes applicables en
matiegravere de libre administration des collectiviteacutes territoriales ainsi que le principe drsquoeacutegaliteacute
En premier lieu le Conseil constitutionnel a deacutejagrave valideacute le principe de lrsquoaide agrave
lrsquoenseignement priveacute et en particulier aux langues reacutegionales
Avant mecircme la reacutevision constitutionnelle de 2008 et la conseacutecration des langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le Conseil
constitutionnel avait reconnu que laquo pour concourir agrave la sauvegarde des langues reacutegionales
lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales peuvent apporter leur aide aux associations ayant cet
objet raquo (CC ndeg2001-456 DC 27 deacutecembre 2001)
De plus le Conseil constitutionnel rappelle reacuteguliegraverement que laquo le leacutegislateur peut
preacutevoir loctroi dune aide des collectiviteacutes publiques aux eacutetablissements denseignement
priveacutes selon la nature et limportance de leur contribution agrave laccomplissement de missions
denseignement raquo (CC ndeg93-329 DC du 13 janvier 1994)
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En deuxiegraveme lieu le principe de libre administration ne saurait justifier des
traitements diffeacuterencieacutes dans lrsquoexercice des droits et liberteacutes constitutionnels
En vertu de lrsquoarticle 72 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales srsquoadministrent
librement mais laquo dans les conditions preacutevues par la loi raquo De plus le Conseil constitutionnel
prend soin de preacuteciser que laquo si le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacutegislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce
que les conditions essentielles drsquoapplication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de
lrsquoenseignement deacutependent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas
ecirctre les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (CC ndeg 84-185 DC du 18 janvier 1985 CC
ndeg93-329 du 13 janvier 1994) Plus largement dans la deacutecision du 17 janvier 2002 (ndeg2001-
454 DC) le Conseil constitutionnel affirme que laquo le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales ne saurait conduire agrave ce que les conditions essentielles de mise en
oeuvre des liberteacutes publiques et par suite lensemble des garanties que celles-ci comportent
deacutependent des deacutecisions de collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre les mecircmes
sur lensemble du territoire de la Reacutepublique raquo
Or en lrsquoespegravece si les communes pouvaient librement participer au financement de la
scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous contrat
drsquoassociation lrsquoexercice de la liberteacute drsquoenseignement du principe drsquoeacutegaliteacute devant la loi et du
principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction deacutependrait de la seule volonteacute drsquoune collectiviteacute
territoriale ce que le Conseil constitutionnel condamne Degraves lors que la possibiliteacute drsquoun
enseignement en langue reacutegionale est offerte aux enfants les conditions drsquoaccegraves agrave cet
enseignement doivent pouvoir ecirctre effectives et eacutegales Loin de violer le principe drsquoeacutegaliteacute
devant la loi lrsquoarticle 6 de la proposition de loi en assure au contraire la garantie
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne transfert ni ne creacutee de
nouvelles compeacutetences
Srsquoagissant des ressources des collectiviteacutes locales permettant de leur assurer une libre
administration le quatriegraveme alineacutea de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution preacutevoit laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales srsquoaccompagne de
lrsquoattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consacreacutees agrave leur exercice Toute
creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour conseacutequence drsquoaugmenter les deacutepenses des
collectiviteacutes territoriales est accompagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Le Conseil
constitutionnel veille au respect de cette regravegle drsquoune part pour les transferts de compeacutetence
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entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales et drsquoautre part pour les creacuteations ou extensions de
compeacutetence des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece aucune creacuteation ou transfert de compeacutetence nrsquoest opeacutereacute au sens de
lrsquoarticle 72-2 de la Constitution Il srsquoagit drsquoune simple participation financiegravere agrave caractegravere
subsidiaire reacutesiduel et deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels comme
preacuteceacutedemment eacutevoqueacute (cf supra point 31) De plus le versement de la participation
financiegravere correspond en quelque sorte agrave un allegravegement de charge degraves lors que le coucirct de
lrsquoenfant scolariseacute est reporteacute sur une autre commune que la commune de reacutesidence En
conseacutequence lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne fait que modifier les modaliteacutes drsquoexercice
drsquoune compeacutetence sans en creacuteer ou transfeacuterer une nouvelle
Drsquoailleurs dans la deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 le Conseil
constitutionnel avait jugeacute inopeacuterant le grief tireacute de la violation des articles 72 et 72-2 de la
Constitution agrave propos de la version ancienne de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation en
jugeant que laquo la loi deacutefeacutereacutee nemporte ni creacuteation ni extension des compeacutetences en matiegravere de
contributions des communes aux frais de fonctionnement des classes eacuteleacutementaires des
eacutetablissements du premier degreacute priveacutes sous contrat dassociation que par suite le grief tireacute
de la meacuteconnaissance du principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales manque
en fait raquo
Le Conseil constitutionnel a statueacute dans le mecircme sens au sujet de lrsquoinstitution drsquoun
creacutedit drsquoimpocirct en matiegravere drsquoapprentissage ou de la possibiliteacute de modifier la dureacutee du contrat
drsquoapprentissage mecircme si ces mesures en rendant lrsquoapprentissage plus attrayant ont pour effet
drsquoaugmenter le nombre drsquoapprentis et donc drsquoaccroicirctre les charges des reacutegions dans ce
domaine (CC ndeg 2004-509 DC du 13 janvier 2005)
En quatriegraveme lieu le principe drsquoeacutegaliteacute entre les charges publiques est respecteacute
En effet en plus du caractegravere subsidiaire et reacutesiduel du meacutecanisme la participation
financiegravere preacutevue par lrsquoarticle 6 de la proposition de loi srsquoapplique agrave lrsquoensemble des
communes ne disposant pas drsquoun eacutetablissement dispensant un enseignement de langue
reacutegionale ce qui est coheacuterent au regard de lrsquoobjet de la loi Les critegraveres de la participation
financiegravere preacutevus par lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 sont en tout eacutetat de cause objectifs et
rationnels eacutetablis et mis en œuvre depuis plusieurs anneacutees Les garanties de lrsquoarticle 13 de la
DDHC sont donc respecteacutees
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En cinquiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir du respect
de plusieurs normes constitutionnelles
En affirmant depuis 2008 que les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la
France lrsquoarticle 75-1 de la Constitution donne un ancrage constitutionnel au deacuteveloppement
de lrsquousage et de lrsquoenseignement des langues reacutegionales Or sans la participation financiegravere des
communes de reacutesidence agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat lrsquoenseignement des langues reacutegionales serait compromis Par
conseacutequent lrsquoarticle 6 de la proposition de loi constitue une garantie leacutegale du respect de
lrsquoaffirmation porteacutee par lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Le mecircme raisonnement sera tenu agrave propos de lrsquoensemble des principes constitutionnels
qui donnent une assise agrave lrsquousage et agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales la liberteacute
drsquoexpression et de communication (article 11 DDHC) la liberteacute drsquoenseignement (PFRLR)
dont pourrait deacutecouler une exigence en matiegravere de droit des parents de choisir les meacutethodes
eacuteducatives (CE 19 juillet 2017 Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150)
lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant (alineacutea 10 et 11 du Preacuteambule de 1946) le principe drsquoeacutegaliteacute
(article 6 DDHC) le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction (alineacutea 13 du Preacuteambule de 1946)
Sans lrsquoarticle 6 de la proposition de loi lrsquoeffectiviteacute de lrsquoensemble de ces normes
constitutionnelles serait consideacuterablement atteacutenueacutee et creacuteerait des diffeacuterences de traitement
injustifieacutees et deacutependantes de la volonteacute des communes
De plus lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir drsquoun objectif de
clarification et de seacutecurisation du droit applicable qui peut se rattacher agrave lrsquoarticle 16 de la
DDHC degraves lors que les textes jusqursquoagrave preacutesent applicables eacutetaient ambigus et ont donneacute lieu agrave
des contentieux En rendant obligatoire ce qui eacutetait avant une faculteacute pour autant soumise agrave
un rocircle non neacutegligeable du preacutefet lrsquoarticle 6 de la proposition de loi clarifie le droit
applicable Ainsi une deacuteputeacutee preacutecisait lors des deacutebats parlementaires que laquo lrsquoarticle 34 de la
loi pour une eacutecole de la confiance relatif au versement du forfait scolaire a susciteacute de
nombreux imbroglios administratifs Ainsi chez moi en Bretagne plus de 150 demandes de
meacutediation ont eacuteteacute transmises aux services de lrsquoEacutetat ce qui met en lumiegravere lrsquoambiguiumlteacute de la loi
et les difficulteacutes de son application Je soutiens donc fortement lrsquoarticle 2 quinquies [devenu
article 6] issu des travaux du Seacutenat qui legraveve toute incertitude raquo (Mme Claudia Rouaux
Commission des affaires sociales Assembleacutee nationale 31 mars 2021)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi creacutee un meacutecanisme subsidiaire et reacutesiduel dont laporteacutee est deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels Sans creacuteer ni transfeacutererde nouvelle compeacutetence aux communes cette disposition assure une mise en œuvreuniforme des droits et liberteacutes et peut se preacutevaloir de nombreuses normesconstitutionnelles confeacuterant agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales et agrave son soutienfinancier de solides justifications constitutionnelles
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 12 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 12 mai 2021
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure Mme Mastorpdf
Lettre Wanda Mastor accompagnant la porte eacutetroite
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure MSchellenberger et autrespdf
Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure assESKOLIL pdf
lettre daccompagnement CC
Porte eacutetroite loi langues reacutegionales (2)
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure M Bertrand Pancherpdf
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Mais lrsquoamalgame ne saurait ecirctre fait avec lrsquoadmission de certains particula-
rismes locaux qui font tout au contraire la richesse reacutepublicaine Laquelle
nrsquoest agrave aucun moment en contradiction avec le principe de lrsquoindivisibiliteacute de
la Reacutepublique comme le droit constitutionnel compareacute (constitutions et juris-
prudences des cours constitutionnelles) en apporte la preuve irreacutefutable
Les arguments qui consistent agrave rappeler -marteler- sans cesse que lrsquoarticle 75-
1 de la Constitution nrsquoa pas de porteacutee normative depuis la deacutecision ndeg 2011-
130 QPC du 20 mai 2011 du Conseil constitutionnel3 renvoient certaines dis-
positions de notre texte fondamental agrave une fonction deacuteclarative pour ne pas
dire deacutecorative Le fait que lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ne constitue pas
dans le cadre drsquoune proceacutedure de QPC un droit ou une liberteacute que la Consti-
tution garantit ne le vide pas pour autant de tout contenu Pour le dire au-
trement si ledit article ne peut ecirctre invoqueacute agrave lrsquoappui drsquoune QPC cette inter-
preacutetation contentieuse ne saurait le renvoyer au monde des principes pure-
ment deacuteclaratoires qui nrsquoont ce dit en passant pas leur place dans la norme
la plus eacuteleveacutee qui soit (sauf agrave offrir une nouvelle deacutefinition de la norme ce qui
srsquoavegravere compliqueacute)
Non invocable agrave lrsquoappui drsquoune QPC la disposition selon laquelle laquo les langues
reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo nrsquoen est pas moins une
adresse au leacutegislateur Crsquoest agrave cette adresse qui appelle et leacutegitime un deacuteve-
loppement leacutegislatif de la protection et la promotion des langues reacutegionales
que reacutepond la proposition de loi du deacuteputeacute Paul Molac
Il faut mecircme aller plus loin sur la voie de lrsquointerpreacutetation de lrsquoarticle 75-1 Non
seulement la loi deacutefeacutereacutee lui donne une reacutealiteacute mais encore creacutee-t-elle les con-
ditions mateacuterielles de son existence La loi dite laquo Molac raquo est conforme agrave la
3 Deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 Mme Ceacutecile L et autres [Langues reacutegionales] laquo
Consideacuterant quaux termes de larticle 75-1 de la Constitution Les langues reacutegionales ap-
partiennent au patrimoine de la France que cet article ninstitue pas un droit ou une liberteacute
que la Constitution garantit que sa meacuteconnaissance ne peut donc ecirctre invoqueacutee agrave lappui
dune question prioritaire de constitutionnaliteacute sur le fondement de larticle 61-1 de la Cons-titution (hellip) raquo (consideacuterant 3)
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Constitution et comble une lacune Ce nrsquoest pas son existence qui pose pro-
blegraveme mais bien son absence drsquoexistence Il appartient au leacutegislateur de mettre
en œuvre les dispositions de la Constitution afin qursquoelles ne se cantonnent
pas au monde du virtuel La loi sur les langues reacutegionales est lrsquoune des garan-
ties leacutegales de la Constitution
Tout texte transmis au controcircle du Conseil constitutionnel vigile du droit
jouit de la preacutesomption de constitutionnaliteacute Votre jurisprudence teacutemoigne
qursquoau nom de la primauteacute de la Constitution votre rocircle est de sauver la loi en
lrsquoeacutepurant de ses vices drsquoinconstitutionnaliteacute Si la deacutemocratie repreacutesentative
accepte la leacutegitimiteacute drsquoune censure drsquoun texte adopteacute par 925 repreacutesentants
de la Nation par neuf membres nommeacutes crsquoest au nom de ladite primauteacute de
la Constitution Laquelle nrsquoest pas violeacutee par la preacutesente loi soumise agrave votre
examen Il faut au preacutealable rappeler le contexte de lrsquoadoption de la loi qui ne
saurait se limiter au contexte parlementaire Lrsquoobjectif de la loi est de reacutepondre
agrave une adresse faite par le pouvoir constituant lui-mecircme conformeacutement agrave un
esprit plus geacuteneacuteral de protection et promotion des langues reacutegionales qui ir-
rigue conventions internationales et constitutions eacutetrangegraveres (I) Non seule-
ment la loi du 8 avril 2021 ne viole pas la Constitution mais encore met-elle
en œuvre certaines de ses dispositions (II)
I Le contexte de la loi relative agrave la protection patrimoniale des langues
reacutegionales et agrave leur promotion
Dans lrsquoobjectif sans doute drsquoassurer un climat plus serein qui doit preacutesider
agrave lrsquoinstruction et la deacutelibeacuteration la lettre de saisine des soixante deacuteputeacutes nrsquoest
jamais publieacutee par le Conseil constitutionnel en amont de la publication de la
deacutecision Ce nrsquoest ni le moment ni le lieu pour plaider pour ladite publication
mais force est de constater qursquoil nrsquoest pas tregraves sain que dans une deacutemocratie
les eacuteleacutements censeacutes ecirctre secrets laquo fuitent raquo dans la presse dans les couloirs et
autres ceacutenacles reacuteserveacutes agrave une infime partie des citoyens Deacuteposeacutee agrave la hacircte
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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la lettre de saisine semble reacutedigeacutee de faccedilon deacuteconcertante La deacutefaillance for-
melle nrsquoenlegraveve pas dans lrsquoabsolu de la force aux arguments mais prouve en
lrsquoespegravece lrsquoextrecircme preacutecipitation dans laquelle les choses se sont deacuterouleacutees
Il est neacutecessaire avant de deacutevelopper les arguments au soutien de la confor-
miteacute agrave la Constitution de la loi et notamment de son article 6 de rappeler le
contexte de son adoption La proposition de loi du deacuteputeacute Paul Molac ayant
par ailleurs les faveurs de lrsquoopinion publique et le soutien de treize preacutesidents
de reacutegions4 srsquoinscrit dans un mouvement Celui de la deacutefense et la promotion
des langues reacutegionales lesquelles appartiennent depuis la reacutevision constitu-
tionnelle du 23 juillet 2008 au laquo patrimoine de la France raquo Ce mouvement
favorable agrave la protection et promotion des langues reacutegionales nrsquoest pas uni-
quement parlementaire il est aussi celui drsquoun ensemble plus vaste Celui de
notre propre Constitution (A) des engagements internationaux et de la grande
majoriteacute des constitutions des pays voisins (B) Ensemble qui permet de mieux
saisir le contexte parlementaire franccedilais de lrsquoadoption de la loi (C)
A Le contexte constitutionnel franccedilais
Lrsquoabsence de protection et de valorisation des langues reacutegionales est une
entrave au rayonnement de la France qui loin de srsquoeacutepuiser dans son caractegravere
indivisible que la loi deacutefeacutereacutee ne remet absolument pas en cause srsquoenrichit de
ses composantes Indivisibiliteacute ne signifie pas uniformiteacute Le constituant a lui-
mecircme choisi en 2003 de preacuteciser degraves lrsquoouverture de notre texte suprecircme que
lrsquoorganisation de notre Reacutepublique eacutetait laquo deacutecentraliseacutee raquo Il faut accepter tous
les contours conseacutequences de cette affirmation solennelle qui ne peut avoir
4 Communiqueacute de presse du 16 mars 2021 laquo Notre responsabiliteacute en tant que preacutesidents de
Reacutegion et de Collectiviteacute est de pouvoir garantir et promouvoir la vitaliteacute culturelle et patri-
moniale de nos territoires Cette proposition va dans le bon sens afin que vivent nos langues
que lrsquoUNESCO classe pour une grande majoriteacute drsquoentre elles en grand danger drsquoextinction
Crsquoest en ce sens que la reacutedaction de la proposition de loi dite Molac tel qursquoissue des travaux du Seacutenat va dans le bon sens et que nous appelons de nos vœux une adoption conforme par
les deacuteputeacutes de tous les bancs afin que ce texte puisse entrer en vigueur raquo httpsregions-
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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que des applications laquo particuliegraveres raquo sur certaines parties de notre territoire
Les modifications successives de la Constitution ont progressivement em-
prunteacute la voie de la reconnaissance de ces implications toujours plus de dis-
positions deacuterogatoires de reconnaissances mecircme symboliques laquo drsquointeacuterecircts
particuliers raquo drsquolaquo adaptations neacutecessaires raquo pour ne citer qursquoelles jusqursquoagrave la
diffeacuterenciation des normes toujours inscrite dans lrsquoactuel projet de loi consti-
tutionnelle5 Si lrsquoon observe les discussions actuelles relatives au projet de loi
laquo 4D raquo ou la validation par le Conseil constitutionnel en avril dernier de la loi
organique relative agrave la simplification des expeacuterimentations susceptibles decirctre
meneacutees par les collectiviteacutes territoriales6 la voie de la reconnaissance du par-
ticularisme des territoires semble srsquoannoncer
En 2003 la Constitution a deacutecideacute une fois pour toutes que lrsquouniteacute nrsquoeacutetait pas
neacutecessairement lrsquouniformiteacute Parmi les richesses territoriales qui loin drsquoeacutegra-
tigner lrsquoimage drsquoun Eacutetat unitaire la renforce par sa capaciteacute agrave promouvoir la
diversiteacute au sein drsquoune Nation forte les langues reacutegionales occupent une place
particuliegravere Leur entreacutee remarqueacutee dans lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en
2008 nrsquoa eu pour le moment que des effets symboliques sur lesquels il y aura
lieu de revenir plus loin Sous la preacutesidence de Franccedilois Hollande le Parle-
ment fort de la volonteacute drsquoappliquer la 56egraveme promesse de campagne du candi-
dat devenu preacutesident a remis la question des langues reacutegionales sur le devant
de la scegravene institutionnelle Le rapport drsquoinformation ndeg489 de lrsquoAssembleacutee
nationale sur les implications de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales
et minoritaires7 est essentiellement descriptif mais teacutemoigne de la volonteacute
parlementaire de se saisir de nouveau de la question De leurs cocircteacutes les tri-
bunaux ordinaires ont eacutegalement eu lrsquooccasion ces derniegraveres anneacutees de se
pencher sur la question du bilinguisme notamment que ce soit en matiegravere
5 Projet de loi constitutionnelle pour un renouveau de la vie deacutemocratique enregistreacute agrave la Preacutesi-
dence de lrsquoAssembleacutee nationale le 29 aoucirct 2019 6 Deacutecision ndeg2021-816 DC du 15 avril 2021 Loi organique relative agrave la simplification des ex-peacuterimentations mises en œuvre sur le fondement du quatriegraveme alineacutea de larticle 72 de la Cons-
titution 7 M Jean-Jacques Urvoas Rapport drsquoinformation ndeg 489 du 12 deacutecembre 2012 sur les impli-
cations constitutionnelles drsquoune ratification par la France de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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de signaleacutetique routiegravere8 ou de lrsquoutilisation de la langue reacutegionale dans des
organes deacutelibeacuterants9
Agrave lrsquoeacutepoque de lrsquoentreacutee dans lrsquoarticle 75-1 (dont on relegravevera lrsquoeacuteloignement vo-
lontaire vis-agrave-vis de lrsquoarticle 2) de lrsquoeacuteleacutevation des langues reacutegionales au rang de
laquo patrimoine de la France raquo en 2008 certains espoirs avaient pu ecirctre leacutegitime-
ment nourris Cette preacutecision nrsquoest pas loin srsquoen faut le seacutesame pour la rati-
fication de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires10 qui
en lrsquoeacutetat actuel de la jurisprudence du Conseil constitutionnel comporte des
clauses jugeacutees contraires agrave la Constitution
B Le contexte international
Il faut ici distinguer deux niveaux Si le contexte international est favorable
agrave la protection et promotion des langues reacutegionales crsquoest en raison drsquoune part
des engagements internationaux que la France les ait ratifieacutes ou non drsquoautre
part de la plupart des constitutions des pays voisins qui accordent une place
speacutecifique aux langues reacutegionales
En 1999 faisant la synthegravese de ses deacutecisions anteacuterieures11 le
Conseil constitutionnel a estimeacute que la Charte europeacuteenne des langues reacutegio-
nales ou minoritaires ne pouvait au vu des principes drsquouniciteacute du peuple fran-
ccedilais drsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique et drsquoeacutegaliteacute des citoyens ecirctre ratifieacutee
laquo La Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires en ce
qursquoelle confegravere des droits speacutecifiques agrave des groupes de locuteurs de
8 Tribunal administratif de Montpellier 12 octobre 2010 Mouvement reacutepublicain de salut pu-blic ndeg0903420 Cour Administrative dAppel de Marseille 28 juin 2012 Commune de Ville-neuve-les-Maguelone ndeg 10MA04419 9 Conseil drsquoEacutetat 29 mars 2006 Haut-Commissaire de la Reacutepublique en Polyneacutesie Franccedilaise
ndeg282335 Rec 179 22 feacutevrier 2007 Socieacuteteacute immobiliegravere Caroline ndeg299649 Cour adminis-trative drsquoappel de Marseille 13 octobre 2011 Commune de Galeria ndeg10MA02330 10 Table ronde (Jean-Eacuteric Gicquel Ferdinand Meacutelin-Soucramanien Michel Verpeaux et Jean-
Marie Woehrling) organiseacutee par la commission des lois 29 novembre 2012 sur les implications
constitutionnelles de la question de la ratification de la Charte europeacuteenne des langues reacutegio-
nales ou minoritaires httpswwwassemblee-nationalefr14cr-cloi12-13c1213022asp 11 Deacutecisions ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 loi relative agrave lrsquoemploi de la langue franccedilaise et
ndeg96-373 DC du 9 avril 1996 loi organique portant statut drsquoautonomie de la Polyneacutesie fran-ccedilaise
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de territoires dans les-
quels ces langues sont pratiqueacutees porte atteinte aux principes constitu-
tionnels drsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique drsquoeacutegaliteacute devant la loi et drsquouniciteacute
du peuple franccedilais raquo12
Le Conseil se deacutefendant au passage de meacutepriser les langues reacutegionales parmi
les engagements souscrits par la France preacutecise-t-il laquo la plupart au demeu-
rant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France
en faveur des langues reacutegionales raquo
Parmi les arguments qui plaident en faveur drsquoune ratification figure celui de
lrsquoeacutevolution du contexte Honorer de la ratification un texte deacutejagrave signeacute ne se
pose aujourdrsquohui plus dans les mecircmes termes qursquoen 1999 La reacuteforme cons-
titutionnelle de 2003 - dont certains aspects ont eacuteteacute affineacutes en 2008 - rappe-
lons-le a consideacuterablement modifieacute la vision jacobine de notre Reacutepublique qui
reconnaicirct agrave preacutesent lrsquoexistence de laquo populations raquo en son sein les particula-
rismes locaux et les neacutecessiteacutes des adaptations normatives Mais la ratification
par la France de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires
qui avait eacuteteacute voteacutee le 28 janvier 2014 par lrsquoAssembleacutee nationale a eacuteteacute rejeteacutee
par le Seacutenat le 27 octobre 2015 Soulignons que ce rejet nrsquoempecircche pas la
force du contexte qui est au niveau europeacuteen largement favorable agrave la pro-
tection et promotion des langues reacutegionales La France a par ailleurs ratifieacute
drsquoautres conventions internationales qui permettent de poursuivre cet objec-
tif tel est par exemple le cas de la Convention pour la sauvegarde du patri-
moine culturel immateacuteriel de 2003 et de la Convention sur la protection et la
promotion de la diversiteacute des expressions culturelles de 2005 qui rappelle no-
tamment dans son preacuteambule laquo que la diversiteacute linguistique est un eacuteleacutement
fondamental de la diversiteacute culturelle raquo et reacuteaffirme laquo le rocircle fondamental que
joue lrsquoeacuteducation dans la protection et la promotion des expressions cultu-
relles raquo
12 Il srsquoagissait lagrave au demeurant drsquoune affirmation tregraves discutable car la lettre de la Charte
nrsquoimposait nullement mecircme si elle lrsquoencourageait que des droits speacutecifiques fussent reconnus agrave des groupes (voir Guy Carcassonne Rapport au Premier ministre sur la compatibiliteacute entre la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires et la Constitution septembre 1998
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Le droit compareacute apporte la preuve irreacutefutable de lrsquoabsence drsquoin-
compatibiliteacute entre le caractegravere indivisible voire unitaire drsquoune Reacutepublique
et la reconnaissance des langues reacutegionales en son sein13 Un tour drsquohorizon
des textes des constitutions europeacuteennes et des deacutecisions des cours constitu-
tionnelles permet de mettre en eacutevidence plusieurs eacuteleacutements significatifs Le
droit compareacute nous enseigne que juridiquement la question des langues srsquoap-
preacutehende agrave travers deux prismes premiegraverement celui de la forme de lrsquoEacutetat
Le lien entre uniteacute de lrsquoEacutetat et unilinguisme est aussi eacutevident que celui entre
Eacutetat composeacute (reacutegional ou feacutedeacuteral) et multilinguisme Deuxiegravemement celui des
droits des locuteurs Selon cette acception les langues reacutegionales sont tradi-
tionnellement associeacutees de maniegravere neacutegative au principe de non-discrimina-
tion de maniegravere positive aux droits linguistiques dont les locuteurs seraient
les beacuteneacuteficiaires14
En droit constitutionnel compareacute lrsquoameacutenagement de la pluraliteacute linguistique
diverge selon que les Eacutetats reconnaissent une pluri-officialiteacute sur lrsquoensemble
du territoire ou au seul niveau local La premiegravere hypothegravese est celle naturel-
lement choisie par la Belgique et la Suisse Eacutetats feacutedeacuteraux europeacuteens Selon
lrsquoarticle 4 de la Constitution helveacutetique laquo les langues nationales sont lrsquoalle-
mand le franccedilais lrsquoitalien et le romanche raquo De son cocircteacute la Constitution belge
eacutenonce que laquo la Belgique comprend trois communauteacutes la Communauteacute fran-
ccedilaise la Communauteacute flamande et la Communauteacute germanophone raquo et fait
eacutegalement reacutefeacuterence agrave laquo quatre reacutegions linguistiques la reacutegion de langue fran-
ccedilaise la reacutegion de langue neacuteerlandaise la reacutegion bilingue de Bruxelles-Capi-
tale et la reacutegion de langue allemande raquo En revanche lrsquoItalie et lrsquoEspagne ne
reconnaissent qursquoune seule langue officielle sur lrsquoensemble du territoire en
mecircme temps qursquoest ameacutenageacutee au niveau local la pluraliteacute linguistique Crsquoest
13 Voir Veacuteronique Bertile Langues reacutegionales ou minoritaires et Constitution France Espagne et Italie Bruylant Collection Droit public compareacute et europeacuteen 2008 516 p et Wanda Mas-
tor laquo Le statut constitutionnel des langues reacutegionales en droit compareacute De la reconnaissance agrave lrsquoindiffeacuterence raquo Glottopol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html 14 Voir le Rapport explicatif de de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minori-
taires Conseil de lrsquoEurope Seacuterie des Traiteacutes europeacuteens ndeg148 Strasbourg 5 novembre 1992 httpsrmcoeint16800cb620
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ce second type drsquoameacutenagement qui est ici inteacuteressant agrave observer les Eacutetats
reacutegionaux italien15 et espagnol16 eacutetant qualifieacutees par leurs constitutions drsquoin-
divisibles (et mecircme eacutegalement laquo un raquo pour lrsquoItalie alors que le mot a disparu
de la Constitution franccedilaise)
De maniegravere scheacutematique plusieurs postures essentielles vis-agrave-vis des langues
reacutegionales peuvent ecirctre observeacutees dans lrsquoEurope contemporaine La majoriteacute
des pays voisins confegraverent aux langues reacutegionales des statuts juridiques dif-
feacuterencieacutes Coexistent parfois une langue majoritaire et des langues minori-
taires qui beacuteneacuteficient de mesures protectrices Dans ce cas les langues reacutegio-
nales jouissent drsquoune reconnaissance mais seulement au niveau drsquoun terri-
toire identifieacute Pour le dire autrement elles ne concurrencent pas la langue
majoritaire au niveau national Il ne srsquoagit ni plus ni moins que lrsquoexpression
drsquoun droit agrave la diffeacuterence Drsquoun droit agrave la diffeacuterenciation pour reprendre un
terme qui a actuellement les faveurs du gouvernement franccedilais Drsquoautres pays
ont mis en place le bilinguisme officiel qui peut srsquoexprimer dans plusieurs
variantes Ce statut confegravere aux citoyens en principe du moins le choix duti-
liser lune ou lautre des langues officielles dans leurs rapports avec lEacutetat
Cette co-officialiteacute peut srsquoopeacuterer au niveau de tout le territoire (comme en Bel-
gique et en Suisse par exemple) ou seulement sur une partie de celui-ci
(comme en Espagne ou en Italie)
On pourrait objecter que la comparaison avec lrsquoEspagne et lrsquoItalie deux Eacutetats
reacutegionaux nrsquoest pas pertinente Or ces deux Eacutetats sont qualifieacutes de Royaume
ou Reacutepublique indivisibles par leurs constitutions respectives indivisibiliteacute
qui nrsquoempecircche pas la reconnaissance la protection et la promotion des
langues reacutegionales en leur sein Ainsi la Constitution espagnole consacre clai-
rement le multilinguisme dans le cadre de ses communauteacutes autonomes17
15 Article 5 de la Constitution de la Reacutepublique italienne de 1947 laquo La Reacutepublique une et indivisible reconnaicirct et favorise les autonomies locales (hellip) raquo 16 Article 2 de la Constitution du Royaume drsquoEspagne de 1978 laquo La Constitution est fondeacutee
sur luniteacute indissoluble de la nation espagnole patrie commune et indivisible de tous les Es-
pagnols Elle reconnaicirct et garantit le droit agrave lautonomie des nationaliteacutes et des reacutegions qui la
composent et la solidariteacute entre elles raquo 17 En vertu de lrsquoarticle 3 de la Constitution espagnole
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tout comme lrsquoItalie laquo Reacutepublique une et indivisible raquo laquo protegravege par des mesures
particuliegraveres les minoriteacutes linguistiques raquo (article 6)
Cette rapide eacutetude comparative permet de mettre en eacutevidence la singulariteacute de
la France au sein drsquoune Europe qui srsquoenorgueillit de se deacutefinir agrave travers la
richesse de sa diversiteacute Mais notamment depuis la loi constitutionnelle de
2008 le leacutegislateur franccedilais a agi dans le sens drsquoune protection et promotion
des langues reacutegionales la loi du 8 avril 2021 srsquoinscrivant dans ce processus
logique et coheacuterent
C Le contexte parlementaire franccedilais
La loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit donc dans un mouvement leacutegislatif reacutepondant agrave
lrsquoadresse du pouvoir constituant Laquelle concerne aussi le pouvoir exeacutecutif
La politique du ministegravere de lrsquoeacuteducation pour la deacutetermination du nombre de
places pour lrsquoagreacutegation et le CAPES des langues reacutegionales devrait aller de
pair avec les lois qui mettent en œuvre lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Ainsi
pour la langue basque il nrsquoy a pas eu de concours drsquoagreacutegation externe depuis
2018 anneacutee 2021 comprise il y a un seul poste pour lrsquoagreacutegation interne en
2021 2 pour le CAPES externe en 2021 et 2 pour le CAPES interne Pour la
langue bretonne et pour ne citer que lrsquoanneacutee en cours il y a un poste agrave lrsquoagreacute-
gation externe pas de concours pour lrsquoagreacutegation interne deux postes pour
le CAPES externe et 2 pour le CAPES interne Pour la langue corse il nrsquoy a pas
de concours cette anneacutee pour lrsquoagreacutegation externe et interne deux pour le
CAPES externe et aucun pour le CAPES interne Pour lrsquooccitan toujours pour
2021 il y a un poste pour lrsquoagreacutegation externe pas de concours pour lrsquoagreacute-
gation interne quatre pour le CAPES externe et un pour le CAPES interne
Ceci eacutetant juste preacuteciseacute il faut agrave preacutesent se concentrer sur lrsquoaction parlemen-
taire de mise en œuvre des dispositions de la Constitution
laquo 1 Le castillan est la langue espagnole officielle de lEacutetat Tous les Espagnols ont le devoir de
le connaicirctre et le droit de lutiliser
2 Les autres langues espagnoles sont aussi officielles dans leurs communauteacutes autonomes
respectives conformeacutement agrave leurs statuts
3 La richesse de la diversiteacute linguistique de lEspagne est un patrimoine culturel qui fait lobjet dun respect et dune protection speacuteciales raquo
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Videacutee drsquoune large part de sa substance en premiegravere lecture par la commission
des affaires culturelles et de leacuteducation de lrsquoAssembleacutee nationale la proposi-
tion de loi du deacuteputeacute Molac a ensuite retrouveacute ses objectifs initiaux gracircce agrave la
proceacutedure parlementaire qui donne agrave notre reacutegime repreacutesentatif tout son
sens discussions en commissions deacutebats en seacuteances publiques navette
amendements multiples pour parvenir agrave une adoption deacutefinitive agrave une majo-
riteacute non importante mais eacutecrasante des voix Agrave quelques heures de la pro-
mulgation de la loi par le Preacutesident de la Reacutepublique une partie de cette mecircme
majoriteacute a neacuteanmoins saisi le Conseil constitutionnel dans le cadre de lrsquoarticle
61 alineacutea 2 de la Constitution
Deacutepocirct de la proposition de loi
Deacuteposeacutee le 30 deacutecembre 2019 par le deacuteputeacute Paul Molac et autres deacuteputeacutes18
la proposition de loi apporte des mesures de protection et de promotion des
langues reacutegionales dans trois domaines le patrimoine lrsquoenseignement les
services publics via la signaleacutetique et les actes drsquoeacutetat civil Elle a eacuteteacute adopteacutee
le 8 avril 2021 par 247 voix pour 76 voix contre et 19 abstentions au terme
de la proceacutedure ci-dessous rappeleacutee
Renvoi agrave la commission des affaires culturelles et de leacuteducation
La proposition de loi a eacuteteacute renvoyeacutee agrave la commission des affaires cultu-
relles et de leacuteducation agrave deacutefaut de constitution drsquoune commission speacuteciale
dans les deacutelais preacutevus par les articles 30 et 31 du Regraveglement Le rapport fait
au nom de la commission par le deacuteputeacute Paul Molac nommeacute par elle a eacuteteacute
enregistreacute agrave la preacutesidence de lrsquoAssembleacutee nationale le 5 feacutevrier 2020 Preacutesenteacute
18 Sylvain BRIAL Jean-Feacutelix ACQUAVIVA Michel CASTELLANI Jean-Michel CLEacuteMENT
Paul-Andreacute COLOMBANI Charles de COURSON Jeanine DUBIEacute Freacutedeacuterique DUMAS Mrsquojid
EL GUERRAB Olivier FALORNI Yannick FAVENNEC BECOT Sandrine JOSSO Franccedilois-Mi-
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comme un moyen de deacutefendre les laquo langues de France raquo19 en danger et srsquoap-
puyant sur lrsquoexistant qui est la marque drsquoune eacutevolution rappeleacutee plus loin (II)
le texte entend laquo aller plus loin raquo en rehaussant la protection lrsquoaccessibiliteacute et
la visibiliteacute des langues reacutegionales dans les trois domaines preacuteciteacutes
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle premier re-
latif au patrimoine Ce dernier preacutecise en compleacutetant ainsi lrsquoar-
ticle L 1 du code du patrimoine que la conservation et la con-
naissance du patrimoine immateacuteriel sont drsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et que
les langues reacutegionales font partie de ce patrimoine
o La commission a adopteacute sans modifications lrsquoarticle 2 qui pro-
pose drsquoinclure parmi les treacutesors nationaux les biens preacutesentant
un inteacuterecirct majeur pour la connaissance des langues franccedilaise et
reacutegionales Le texte preacutevoit en effet outre pour les langues reacutegio-
nales des mesures de protection de notre patrimoine linguistique
dans une deacutemarche globale
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 3 qui disposait que des con-
ventions passeacutees entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pouvaient preacutevoir que
la langue reacutegionale est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de
lrsquohoraire normal des enseignements (des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires des collegraveges et des lyceacutees des territoires concerneacutes) Il
ne srsquoagissait pourtant que drsquoeacutetendre une regravegle deacutejagrave applicable en
Corse pour lrsquoenseignement de la langue corse lrsquoarticle L 312-11-
1 du code de lrsquoeacuteducation introduit par la loi ndeg 2002-92 du
22 janvier 2002 relative agrave la Corse dispose en effet que la langue
corse est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de lrsquohoraire normal
des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires de Corse Le Conseil cons-
titutionnel nrsquoa pas censureacute cette disposition tant que lrsquoenseigne-
ment eacutetait entendu comme ne revecirctant pas laquo un caractegravere obliga-
toire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo (deacutecision ndeg2001-
454 DC du 17 janvier 2002)
19 Sur cette notion de laquo langues de France raquo voir Les langues de France vingt ans apregraves Glot-topol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html
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o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 4 qui preacutevoyait que lenseigne-
ment bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale pouvait se reacuteali-
ser sous forme immersive laquo dans le respect des objectifs de maicirc-
trise des deux langues agrave chaque niveau denseignement raquo
o La commission a supprimeacute les articles 5 et 6 de la proposition de
loi Le premier manifestait la volonteacute drsquointroduire au sein drsquoun
nouvel article L 151-4-1 du code de lrsquoeacuteducation une deacuterogation
au principe drsquointerdiction de financement des deacutepenses drsquoinves-
tissement des eacutecoles priveacutees par les collectiviteacutes publiques en fa-
veur de lrsquoenseignement bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale
(article 5 de la proposition de loi) Le second eacutetendait la mecircme
deacuterogation au principe drsquointerdiction de financement des deacute-
penses drsquoinvestissement des collegraveges et lyceacutees par les collectiviteacutes
publiques
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 7 qui preacutevoyait drsquoeacutelargir les
cas dans lesquels existe un droit agrave inscrire son enfant dans une
eacutecole drsquoune autre commune afin qursquoil puisse suivre un enseigne-
ment de langue reacutegionale Inscription qui entraicircnait eacutegalement la
prise en charge du forfait scolaire par la commune de reacutesidence
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle 8 qui a pour
objet de renforcer la place et lrsquousage des langues reacutegionales dans
la vie publique en facilitant la traduction en langue reacutegionale des
inscriptions et signaleacutetiques apposeacutees sur les bacirctiments publics
les voies publiques de circulation et les voies navigables ainsi que
sur les principaux supports de communication institutionnelle
des services publics
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 9 qui avait pour objet la pos-
sibiliteacute pour les services publics drsquoeacutetat civil drsquoutiliser dans les
actes drsquoeacutetat civil qursquoils produisent les signes diacritiques des
langues reacutegionales en usage sur le territoire
o Enfin la commission a eacutegalement supprimeacute lrsquoarticle 10 qui preacute-
voyait un gage pour compenser les charges eacuteventuelles creacuteeacutees par
les dispositions de la proposition de loi
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Crsquoest donc un texte largement laquo eacutepureacute raquo par rapport agrave sa version initiale qui a
eacuteteacute soumis agrave la discussion en seacuteance publique en premiegravere lecture agrave lrsquoAssem-
bleacutee nationale Le porteur de la proposition va naturellement utiliser toutes
les potentialiteacutes offertes par la Constitution pour tenter de revenir par le biais
des amendements agrave son esprit initial
Discussion du texte nordm2654 adopteacute par la commission sur la proposition
de loi de M Paul Molac agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion (2548)
85 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes permettant de revenir sur peu de points
cependant agrave lrsquoobjectif initial de la proposition de loi Ainsi lrsquoamendement ndeg64
deacuteposeacute le 10 feacutevrier 2020 par le deacuteputeacute et rapporteur Paul Molac a permis de
rectifier lrsquoaspect purement deacuteclaratoire de lrsquoarticle premier auquel avait conclu
la commission lrsquoamendement ndeg69 deacuteposeacute le mecircme jour par Paul Molac eacutega-
lement permet lrsquoautorisation dans les actes drsquoeacutetat civil des signes diacritiques
des langues reacutegionales lrsquoamendement ndeg80 toujours deacuteposeacute par Paul Molac
modifie la loi Toubon (article 3 du texte de loi deacutefinitif) Mais agrave ce stade de la
discussion parlementaire le texte eacutetait encore dans une version tregraves eacuteloigneacutee
de sa mouture premiegravere
Adoption le 13 feacutevrier 2020 de la laquo petite loi raquo nordm408 par lAssem-
bleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion
Transmission au Seacutenat de la proposition de loi ndeg321 le 14 feacutevrier
2020
o Travaux en commission La commission de la culture de lrsquoeacuteduca-
tion et de la communication a deacutesigneacute Mme Monique de Marco
rapporteure sur la proposition de loi ndeg321 (2019-2020) adopteacutee
par lAssembleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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des langues reacutegionales et agrave leur promotion Commenccedilant par deacute-
clarer que laquo la question de la promotion des langues reacutegionales
deacutepasse les clivages politiques raquo Monique de Marco a proposeacute en
commission dadopter le texte conforme tout en avouant que des
dispositifs leacutegislatifs laquo plus ambitieux pourraient mieux assurer la
promotion des langues reacutegionales raquo Au cours des discussions le
regret de lrsquoabsence de la question de lrsquoenseignement a eacuteteacute exprimeacute
regret qui concerne en reacutealiteacute non la proposition de loi initiale
mais le texte de la commission de lrsquoAssembleacutee nationale laquo La pro-
position de loi de Paul Molac est la bienvenue parce quelle rap-
pelle agrave lEacutetat un certain nombre de ses obligations en ce quelle
preacutevoit un cadrage de la loi Toubon et quelle seacutecurise la place
des langues dans lespace public En revanche nous avons tous
eacuteteacute surpris par labsence totale de reacutefeacuterence agrave lEacuteducation natio-
nale Nous avons donc fait des recherches qui ont montreacute que les
deacuteputeacutes de la majoriteacute preacutesidentielle certainement agrave lappel du
ministre de leacuteducation nationale avaient systeacutematiquement sup-
primeacute tous les articles concernant lenseignement Nous nous re-
trouvons donc avec une magnifique proposition de loi sur les
langues reacutegionales qui ne dit pas un mot de lenseignement
comme sil pouvait y avoir une politique linguistique en faveur des
langues reacutegionales qui ne passe pas par lenseignement raquo Et le
seacutenateur Max Brisson drsquoen appeler agrave la reacuteinsertion des disposi-
tions sur lrsquoenseignement laquo Ma chegravere collegravegue vous avez proposeacute
un vote conforme mais jespegravere que nous ferons preuve dimagi-
nation dans lheacutemicycle pour deacuteposer quelques amendements qui
rappelleront au Gouvernement quil ny a pas de politique linguis-
tique qui ne sappuie sur leacuteducation Sinon cest de lenfu-
mage raquo20
20 Comptes-rendus de la commission de la culture de lrsquoeacuteducation et de la communication
seacuteance du 2 deacutecembre 2020 httpwwwsenatfrcompte-rendu-commis-
sions20201130culturehtmltoc5
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La rapporteure confirme que laquo lrsquoamputation raquo est le fait des deacutepu-
teacutes et tout en srsquoavouant prudente pousse indirectement ses col-
legravegues seacutenateurs agrave user du droit drsquoamendement laquo Nous venons
dentendre un veacuteritable plaidoyer en faveur des langues reacutegio-
nales Mecircme si cette proposition de loi ne donne pas entiegravere satis-
faction car elle a eacuteteacute largement amputeacutee par lAssembleacutee natio-
nale je preacutefegravere my tenir dans un premier temps par prudence
Et libres agrave vous de deacuteposer des amendements raquo
Aucun amendement nayant eacuteteacute deacuteposeacute en commission le texte
qui en eacutetait issu ne comportait toujours pas de dispositions rela-
tives agrave lenseignement
o Seacuteance publique Vingt amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes notam-
ment celui (deacuteposeacute agrave lidentique par des seacutenateurs issus de six
groupes diffeacuterents) preacutevoyant drsquoinseacuterer agrave lrsquoarticle L 442-5-1 du
code de lrsquoeacuteducation un alineacutea ainsi reacutedigeacute laquo La participation fi-
nanciegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un
enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle
L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence
et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune
autre commune agrave la condition que la commune de reacutesidence ne
dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegio-
nale raquo
Sans surprise lrsquoavis du Gouvernement exprimeacute par le ministre
Jean-Michel Blanquer fut deacutefavorable regrettant au passage
laquo drsquoecirctre sans cesse obligeacute drsquooccuper la position du jacobin reacutetif
sur la deacutefensive alors mecircme que nous avons une politique de pro-
motion des langues reacutegionales Simplement agrave certains moments
ndash par exemple avec la rupture de lrsquoeacutequilibre entre enseignement
public et enseignement priveacute ou avec la creacuteation drsquoune obligation
suppleacutementaire pour les communes ndash les propositions vont trop
loin et cela conduit agrave me placer face aux geacuteneacuterositeacutes diverses
dans la position deacutesagreacuteable du gardien des principes ou dans
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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celle du gardien de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral En effet derriegravere ces deacutebats
se pose la question de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et de la posteacuteriteacute de la loi
Carle car vous risquez de creacuteer un deacuteseacutequilibre alors que cette loi
repreacutesentait un point drsquoeacutequilibre raquo21
o Adoption du texte ndeg32 modifieacute par le Seacutenat le 10 deacutecembre 2020
Le Seacutenat a adopteacute trois articles additionnels (2 ter 2 quater et
2 quinquies) qui rejoignent les positions du deacuteputeacute Paul Molac et
reacutetablit lrsquoarticle 3 (modifieacute) de la proposition de loi qui avait eacuteteacute
supprimeacute en premiegravere lecture agrave lrsquoAssembleacutee nationale
Deuxiegraveme lecture
o Rapport sur la proposition de loi modifieacutee par le Seacutenat relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promo-
tion (ndeg3658) ndeg4035 Sur les six articles supprimeacutes agrave lrsquoAssem-
bleacutee lrsquoarticle 3 a eacuteteacute reacutetabli au Seacutenat qui a par ailleurs adopteacute
trois articles additionnels (2 ter 2 quater et 2 quinquies) Lrsquoen-
semble eacutetant conforme agrave lrsquoesprit de la proposition de loi initiale le
rapporteur souhaite que lrsquoAssembleacutee nationale adopte en deu-
xiegraveme lecture un texte identique agrave celui voteacute par le Seacutenat pour
les quatre articles restant en discussion et nrsquoa donc pas preacutesenteacute
drsquoamendements Mais lrsquoarticle 2 quinquies (article 6 du texte deacute-
finitif) ayant eacuteteacute supprimeacute en commission 16 amendements deacute-
poseacutes agrave lrsquoidentique par 115 deacuteputeacutes membres de huit diffeacuterents
groupes parlementaires ont permis de le reacuteintroduire en seacuteance
o Discussion en seacuteance publique le 8 avril 2021 au cours de la-
quelle 262 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes
o Adoption deacutefinitive le 8 avril 2021 en deuxiegraveme lecture de la
proposition de loi TA nordm591 relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
21 Compte rendu inteacutegral des deacutebats Seacuteance du 10 deacutecembre 2020 httpwwwse-natfrseancess202012s20201210s20201210007htmlsection708
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Saisine du Conseil constitutionnel du 22 avril 2021 par au moins
soixante deacuteputeacutes en application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitu-
tion
Soit un jour avant que nrsquoexpire le deacutelai de saisine du Conseil constitu-
tionnel la promulgation de la loi par le preacutesident de la Reacutepublique devant
intervenir dans les 15 jours de lrsquoadoption deacutefinitive La saisine du Conseil
constitutionnel est un acte non grave mais solennel qui perturbe le temps
leacutegislatif ne serait-ce que pour cette raison elle meacuterite un soin particulier
Soin envers lrsquoinstitution agrave laquelle elle srsquoadresse et agrave qui elle impose des
charges suppleacutementaires soin envers la Constitution qursquoelle entend pro-
teacuteger La lettre de saisine ou du moins la version qui a circuleacute manifeste-
ment reacutedigeacutee agrave la hacircte nrsquoest pas agrave la hauteur du seacuterieux qursquoexige de ma-
niegravere impeacuterieuse cette deacutemarche Une lettre de saisine ne saurait se limiter
agrave invoquer en tregraves peu de lignes la violation de laquo principes constitutionnels raquo
sans que ceux-ci ne soient deacutetailleacutes ni mecircme indiqueacutes Le seul article mis
en cause est lrsquoarticle 6 de la loi qui modifie lrsquoarticle L 442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation
II Discussion de la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la loi
relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Les deacuteputeacutes auteurs de la saisine demandent au Conseil constitutionnel la
censure de lrsquoarticle 6 de la loi
laquo Les sixiegraveme et septiegraveme alineacuteas de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacutedu-
cation sont remplaceacutes par un alineacutea ainsi reacutedigeacute
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacuteta-
blissements priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispen-
sant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L
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312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacuteta-
blissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune
agrave la condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dis-
pensant un enseignement de langue reacutegionale raquo
Une commune dont aucune eacutecole ne propose denseignement de langue reacutegio-
nale devrait donc participer aux frais de scolarisation des enfants domicilieacutes
sur son territoire qui suivent un tel enseignement dans un eacutetablissement situeacute
sur une autre commune Le dispositif concerne les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat drsquoassociation qui sont dans les faits majoritaire-
ment associatifs et laiumlques Cet enseignement peut aussi concerner les eacuteta-
blissements confessionnels mais il faut drsquoembleacutee preacuteciser que comme lrsquoa jugeacute
le Conseil constitutionnel dans son examen de la loi dite laquo Carle raquo le principe
de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute pour le leacutegislateur de preacutevoir la
participation des collectiviteacutes publiques au financement du fonctionnement
des eacutetablissements denseignement priveacute sous contrat dassociation
laquo Consideacuterant quil reacutesulte des regravegles ou principes agrave valeur constitution-
nelle (hellip) que le principe de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute
pour le leacutegislateur de preacutevoir sous reacuteserve de fonder son appreacuteciation
sur des critegraveres objectifs et rationnels la participation des collectiviteacutes
publiques au financement du fonctionnement des eacutetablissements den-
seignement priveacutes sous contrat dassociation selon la nature et limpor-
tance de leur contribution agrave laccomplissement de missions denseigne-
ment raquo (deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 cons 6)
Lrsquoinstauration du laquo forfait scolaire communal raquo ne poursuit pas un objectif de
sanction financiegravere des communes deacutemunies doffre en langue reacutegionale mais
celui de les inciter agrave en proposer Drsquoailleurs lrsquoarticle premier de la loi deacutefeacutereacutee
souligne que laquo LrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales concourent agrave lrsquoenseigne-
ment agrave la diffusion et agrave la promotion de ces langues raquo Comme preacuteciseacute plus
loin les maires sont dispenseacutes du paiement drsquoun tel forfait degraves lors qursquoun
enseignement drsquoune langue reacutegionale y compris au titre drsquoune simple initia-
tion est proposeacute dans leur commune
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Il faut souligner que les articles relatifs agrave lrsquoenseignement ont eacuteteacute introduits par
les seacutenateurs Plus exactement ces derniers ont reacuteintroduit la disposition qui
autorise la conclusion de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pour eacutetendre
lrsquooffre drsquoenseignement en langue reacutegionale aux eacutetablissements publics dans le
cadre horaire normal sous des formes speacutecifiques et inseacutereacute trois articles un
premier autorise lrsquoenseignement dit laquo immersif raquo en langue reacutegionale un deu-
xiegraveme le forfait scolaire communal dont il est ici question un troisiegraveme est
relatif agrave lenseignement des langues reacutegionales agrave Mayotte territoire qui du fait
de sa deacutepartementalisation reacutecente ne pouvait jusqualors pas beacuteneacuteficier des
possibiliteacutes offertes aux autres deacutepartements concernant lenseignement de
ces langues
Trois remarques doivent ecirctre faites sur lrsquoinsertion relative agrave lrsquoenseignement des
langues reacutegionales lors des horaires normaux Premiegraverement cette disposition
existe deacutejagrave pour la Collectiviteacute de Corse deuxiegravemement cet enseignement
doit se faire moyennant un accord entre lrsquoEacutetat et les reacutegions (laquo dans le cadre
de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions la collectiviteacute de Corse la Collectiviteacute
europeacuteenne drsquoAlsace ou les collectiviteacutes territoriales reacutegies par lrsquoarticle 73 de
la Constitution raquo) troisiegravemement il srsquoagit drsquoune option facultative qursquoin fine
les familles deacutecident ou non de prendre
En reacutesumeacute et conclusion la disposition de lrsquoarticle 3
1 Existe deacutejagrave pour une collectiviteacute en lrsquooccurrence la collectiviteacute de Corse
2 Est strictement encadreacutee (existence drsquoun accord entre lrsquoEacutetat et les reacute-
gions)
3 Est conforme agrave la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le ca-
ractegravere facultatif de lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale Dans sa deacute-
cision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi relative agrave la Corse le
Conseil constitutionnel a fixeacute le cadre de lrsquoenseignement drsquoune langue
reacutegionale dans le cadre de lrsquohoraire normal en consideacuterant que laquo si lrsquoen-
seignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquohoraire nor-
mal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir pour
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les ensei-
gnants qursquoil ne saurait non plus avoir pour effet de soustraire les eacutelegraveves
aux droits et obligations applicables agrave lrsquoensemble des usagers des eacuteta-
blissements qui assurent le service public de lrsquoenseignement ou sont
associeacutes agrave celui‑ci Consideacuterant qursquoil reacutesulte de ce qui preacutecegravede que sous
reacuteserve que lrsquoenseignement de la langue corse revecircte tant dans son prin-
cipe que dans ses modaliteacutes de mise en œuvre un caractegravere facultatif
[cette disposition] nrsquoest contraire ni au principe drsquoeacutegaliteacute ni agrave aucun
autre principe ou regravegle de valeur constitutionnelle raquo (cons 24 et 25)
La loi du 8 avril 2021 ne propose pas autre chose et srsquoinscrit en tous
points sur cette ligne deacutejagrave jugeacutee par le Conseil constitutionnel
Lrsquoarticle 6 srsquoinsegravere de maniegravere logique et coheacuterente dans lrsquoensemble des articles
de la loi relative agrave lrsquoenseignement Avant drsquoen examiner dans les deacutetails la
conformiteacute agrave la Constitution il faut souligner que le Seacutenat a deacutejagrave voteacute le prin-
cipe de ce forfait scolaire communal agrave deux reprises
1 Il lrsquoa drsquoabord inseacutereacute dans le projet de loi pour une eacutecole de la confiance
en premiegravere lecture Crsquoest la commission mixte paritaire qui a ajouteacute les
mots laquo contribution volontaire raquo ocirctant au forfait son caractegravere obliga-
toire22
2 Il a reacuteaffirmeacute sa position lors de lrsquoexamen de la proposition de loi ici
discuteacutee supprimant les mots laquo contribution volontaire raquo de la loi en vi-
gueur
Agrave cet argument deacutemocratique respectueux du bicameacuteralisme et rappelant que
le Seacutenat laquo assure la repreacutesentation des collectiviteacutes territoriales de la Reacutepu-
22 Loi ndeg2019-791 du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance JORF ndeg0174 du 28 juillet
2019
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Primo cet article est en coheacuterence avec la leacutegislation existante en matiegravere drsquoen-
seignement des langues reacutegionales agrave lrsquoeacutecole confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute
juridique (A) Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contrevien-
nent pas au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des langues
reacutegionales affirmeacute par le Conseil constitutionnel (B) Tertio la loi ne porte pas
atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur une commune une nouvelle
charge (C) Quarto elle ne viole pas non plus en conseacutequence le principe de
libre administration des collectiviteacutes territoriales (D)
A Forfait scolaire communal et respect de lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique
Cette exigence bien que non explicitement qualifieacutee de principe consti-
tutionnel par le Conseil constitutionnel se rattache notamment agrave la notion de
laquo garantie des droits raquo inscrite agrave lrsquoarticle 16 de la Deacuteclaration de 1789 laquo Toute
socieacuteteacute dans laquelle la garantie des droits nrsquoest pas assureacutee ni la seacuteparation
des pouvoirs deacutetermineacutee nrsquoa point de constitution raquo Deacutecoulant de lrsquoarticle 34
de la Constitution la clarteacute de la loi est un eacuteleacutement essentiel de la seacutecuriteacute
juridique agrave laquelle la jurisprudence du Conseil constitutionnel a offert corps
et protection Aussi le principe de laccessibiliteacute et de lintelligibiliteacute de la loi a-
t-il eacuteteacute eacuterigeacute en objectif de valeur constitutionnelle (deacutecision ndeg99-421 DC du
16 deacutecembre 1999)
Mecircme si les principes de clarteacute drsquoaccessibiliteacute et drsquointelligibiliteacute de la loi per-
mettent avant tout drsquoimposer au leacutegislateur laquo drsquoadopter des dispositions suffi-
samment preacutecises et des formules non eacutequivoques afin de preacutemunir les sujets
de droit contre une interpreacutetation contraire agrave la Constitution ou contre le
risque drsquoarbitraire raquo (deacutecision ndeg2004-500 DC du 29 juillet 2004 cons 13) ils
concourent aussi agrave offrir aux citoyens la seacutecuriteacute juridique neacutee drsquoune cons-
truction drsquoensemble coheacuterente et sans rupture Laquelle se base depuis 2008
sur une disposition claire et sans ambiguiumlteacute de la Constitution laquo Les langues
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo (75-1) Elle est une in-
vitation aux repreacutesentants de leacutegifeacuterer pour proteacuteger et promouvoir lesdites
langues et la loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit dans la continuiteacute de ce qursquoils ont fait depuis
2008 notamment La coheacuterence est lrsquoune des artegraveres essentielles de lrsquoexigence
de seacutecuriteacute juridique qui impregravegne la jurisprudence du Conseil constitution-
nelle comme celle du Conseil drsquoEacutetat et de la Cour de cassation Sans ecirctre ex-
plicitement eacutenonceacutee par le Conseil constitutionnel lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique est laquo efficiente raquo23 et est au cœur des preacuteoccupations des juges24 comme
de la doctrine Les Cahiers du Conseil constitutionnel lui consacrant un dossier
speacutecial dans sa livraison drsquooctobre 202025
La loi soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel reacutepond agrave lrsquoexigence de
seacutecuriteacute juridique en eacutetant le prolongement de lrsquoœuvre anteacuterieure du leacutegisla-
teur pour commencer la loi du 8 juillet 2013 drsquoorientation et de programma-
tion pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique qui reconnaicirct lrsquoenseigne-
ment bilingue franccedilais langue reacutegionale Dans lrsquoannexe de la loi figurent cinq
mentions compleacutementaires notamment celle concernant la possibiliteacute de
srsquoinscrire dans une eacutecole publique drsquoune autre commune lorsque la commune
de reacutesidence ne propose pas drsquoenseignement de langue reacutegionale Disposition
deacuteclarative qui a trouveacute une application concregravete dans la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) la parti-
cipation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes dans lrsquoenseigne-
ment public doit deacutesormais faire lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune drsquoac-
cueil et la commune de reacutesidence26
La loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle a
ajouteacute un nouveau motif de discrimination baseacute sur laquo la maitrise drsquoune autre
23 Bertrand Mathieu laquo La seacutecuriteacute juridique un principe clandestin mais efficient raquo Droit constitutionnel Meacutelanges Patrice Geacutelard LGDJ 1999 pp 301-305 24 En teacutemoigne notamment le fait que le Conseil drsquoEacutetat lui ait consacreacute deux rapports annuels celui de 1991 De la seacutecuriteacute juridique et celui de 2006 Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit 25 Dossier La seacutecuriteacute juridique Titre VII Les Cahiers du Conseil constitutionnel ndeg5 octobre
2020 26 Lrsquoarticle 104 de la loi NOTRe consacre par ailleurs la compeacutetence partageacutee des collectiviteacutes
locales dans la promotion des langues reacutegionales tout en donnant une place preacutepondeacuterante
agrave la reacutegion telle que preacutevue agrave lrsquoarticle 1er de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de lrsquoaction publique territoriale et drsquoaffirmation des meacutetropoles (MAPTAM)
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langue que le franccedilais raquo qui concerne eacutegalement les langues reacutegionales Celle
du 28 feacutevrier 2017 de programmation relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend
inopeacuterant le deacutecret du 2 Thermidor an II sur lequel se basait notamment le
ministegravere de la justice pour interdire les livrets de famille bilingues Enfin
lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance vient eacutetendre
aux eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives une laquo contribution volontaire raquo
des communes pour la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoins-
crivant dans une eacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionale en
dehors de sa commune de reacutesidence
La loi du 8 avril 2021 soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel nrsquoest que
le prolongement et le compleacutement de lrsquoarticle L 212-8 du Code de lrsquoeacuteducation
qui preacutecise les conditions dans lesquelles pour lrsquoenseignement public une
commune doit contribuer au financement des deacutepenses scolaires drsquoun enfant
reacutesidant sur son territoire et scolariseacute dans une autre commune Elle vient le
compleacuteter de maniegravere parallegravele eacutetendant ce qui existe deacutejagrave pour lrsquoeacutecole pu-
blique agrave lrsquoeacutecole priveacutee sous contrat Confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
elle ne viole par ailleurs aucun article de la Constitution et ne contredit pas
la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le caractegravere facultatif de lrsquoen-
seignement des langues reacutegionales
B Forfait scolaire communal et respect de la jurisprudence du Conseil
constitutionnel sur la langue franccedilaise
Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contreviennent pas
agrave lrsquoarticle 2 alineacutea premier de la Constitution (laquo La langue de la Reacutepublique est
le Franccedilais raquo) et au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des
langues reacutegionales qui en deacutecoule affirmeacute par le Conseil constitutionnel La
langue de la Reacutepublique est et demeure le Franccedilais et agrave aucun moment la
loi du 8 avril 2021 nrsquoentend y porter atteinte Lrsquoapprentissage des langues reacute-
gionales se fait agrave ses cocircteacutes mais dans une mesure permettant leffectiviteacute pour
les enfants agrave acceacuteder agrave lenseignement des langues reacutegionales laquo patrimoine de
la France raquo selon les termes de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Apprentissage
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qui pour certains enfants est lrsquoun des eacuteleacutements de leur laquo deacuteveloppement raquo au
sens de lrsquoalineacutea 10 du Preacuteambule de la Constitution du 27 octobre 1946 (laquo La
Nation assure agrave lrsquoindividu et agrave la familles les conditions neacutecessaires agrave leur
deacuteveloppement raquo)
Ce que creacutee lrsquoarticle 6 agrave travers le forfait ce nrsquoest pas lrsquoenseignement obligatoire
de la langue reacutegionale mais la possibiliteacute de pouvoir beacuteneacuteficier de cet enseigne-
ment (sans prescription de deacutelai) qui demeure facultatif Le rapporteur Paul
Molac le reacuteaffirme au cours de la seacuteance publique du 8 avril 2021 laquo Je ne
suis pas favorable au caractegravere obligatoire de cet enseignement mais je consi-
degravere que tout eacutelegraveve qui souhaite le suivre doit pouvoir le faire raquo27
Ce faisant la loi sans contrevenir agrave la Constitution offre un contenu agrave son
article 75-1 La jurisprudence du Conseil constitutionnel en vertu de laquelle
lrsquoenseignement des langues reacutegionales nrsquoa qursquoun caractegravere facultatif nrsquoest ici
absolument pas remise en cause Dans sa deacutecision ndeg99-412 DC du 15 juin
1999 il a souligneacute que le principe drsquouniciteacute du peuple franccedilais et lrsquoindivisibiliteacute
de la Reacutepublique assurant lrsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi srsquoopposaient agrave laquo
ce que soient reconnus des droits collectifs agrave quelque groupe que ce soit deacutefini
par une communauteacute drsquoorigine de culture de langue ou de croyance raquo En
outre la langue de la Reacutepublique eacutetant le franccedilais il ne peut ecirctre reconnu un
laquo droit agrave pratiquer une langue autre que le franccedilais non seulement dans la vie
priveacutee mais eacutegalement dans la vie publique agrave laquelle la Charte rattache
la justice et les autoriteacutes administratives et services publics raquo
Deux remarques srsquoimposent drsquoembleacutee drsquoune part cette jurisprudence est an-
teacuterieure agrave lrsquoinsertion en 2008 par le pouvoir constituant de lrsquoarticle 75-1 dis-
posant que laquo les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France
raquo Cette remarque drsquoordre contextuel vient srsquoajouter agrave la suivante drsquoautre part
27 Assembleacutee nationale XVe leacutegislature Session ordinaire de 2020-2021 Seacuteance du jeudi 08
avril 2021 httpswwwassemblee-nationalefrdyn15comptes-rendusseancesession-
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la loi du 8 avril 2021 nrsquoentend pas confier agrave lrsquoenseignement des langues reacutegio-
nales un caractegravere obligatoire En cela elle respecte la jurisprudence du Con-
seil constitutionnel preacuteciteacutee (deacutecision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi
relative agrave la Corse)
laquo Si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquoho-
raire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir
pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les en-
seignants (hellip) raquo (cons 24)
Lrsquoenseignement drsquoune langue minoritaire ne devient donc en aucun cas obli-
gatoire Ce qui doit faire laquo lrsquoobjet drsquoun accord raquo ce sont les conditions permet-
tant effectivement agrave des enfants drsquoacceacuteder agrave un enseignement facultatif qui
contribue agrave leur deacuteveloppement proteacutegeacute par ailleurs par lrsquoalineacutea 10 du Preacuteam-
bule de 1946 preacuteciteacute Ni la Constitution ni son interpreacutetation par le Conseil
constitutionnel ne srsquoopposent agrave ce qursquoune commune de reacutesidence participe y
compris de maniegravere obligatoire au financement de la scolarisation dans une
autre commune des enfants souhaitant suivre un tel enseignement Crsquoest don-
ner aux enfants et aux parents de maniegravere effective et efficiente la possibiliteacute
concregravete de beacuteneacuteficier drsquoun enseignement drsquoune langue reacutegionale composante
de leur laquo deacuteveloppement raquo laquelle appartient en vertu de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution au laquo patrimoine de la France raquo
C Forfait scolaire communal et respect du principe drsquoeacutegaliteacute
Tertio la loi ne contrevient pas au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur
une commune une nouvelle charge
Conformeacutement agrave une jurisprudence du Conseil constitutionnel bien eacutetablie le
principe deacutegaliteacute de lrsquoarticle 6 de la Deacuteclaration des droits de lhomme et du
citoyen de 1789 laquo ne soppose ni agrave ce que le leacutegislateur regravegle de faccedilon diffeacuterente
des situations diffeacuterentes ni agrave ce quil deacuteroge agrave leacutegaliteacute pour des raisons
dinteacuterecirct geacuteneacuteral pourvu que dans lun et lautre cas la diffeacuterence de traite-
ment qui en reacutesulte soit en rapport direct avec lobjet de la loi qui leacutetablit raquo
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(pour lrsquoune des reacutecentes application au domaine de lrsquoenseignement dont il sera
ici question deacutecision ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de
la confiance)
En ce qui concerne preacuteciseacutement le caractegravere obligatoire drsquoune nouvelle charge
pour une collectiviteacute celui-ci nrsquoa pas eacuteteacute censureacute par le Conseil constitutionnel
agrave propos de lrsquoexamen de la loi sur lrsquoavenir de lrsquoeacutecole preacuteciteacutee (deacutecision ndeg 2019-
787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de la confiance) Lrsquoarticle 17 de
la loi alors deacutefeacutereacute au Conseil constitutionnel preacutevoyait dans son premier ali-
neacutea
laquo LrsquoEacutetat attribue de maniegravere peacuterenne agrave chaque commune les ressources
correspondant agrave lrsquoaugmentation des deacutepenses obligatoires qursquoelle a
prises en charge en application des articles L 212-4 L 212-5 et L 442-
5 du code de lrsquoeacuteducation au titre de lrsquoanneacutee scolaire 2019-2020 par rap-
port agrave lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 dans la limite de la part drsquoaugmenta-
tion reacutesultant directement de lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoins-
truction obligatoire raquo
Les deacutepenses qui font lrsquoobjet de lrsquoaccompagnement financier en cause sont
celles qui beacuteneacuteficient aux eacutecoles publiques et aux eacutetablissements drsquoenseigne-
ment priveacutes ayant passeacute un contrat drsquoassociation avec lrsquoEacutetat
Lrsquoabaissement agrave trois ans du deacutebut de lrsquoinstruction obligatoire a donc fait pe-
ser des charges nouvelles pour les communes et leur a mecircme imposeacute de par-
ticiper au financement des eacutecoles maternelles priveacutees sous contrat y compris
lorsqursquoelles nrsquoont pas approuveacute ce contrat La diffeacuterence de traitement entre
les communes est reacuteelle selon qursquoelles financcedilaient ou non des classes mater-
nelles avant lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoinstruction obligatoire mais
nrsquoentraicircne pas pour autant une rupture drsquoeacutegaliteacute
Ainsi lrsquoa jugeacute le Conseil constitutionnel dans la deacutecision preacuteciteacutee drsquoune part
il a estimeacute que cette diffeacuterence de traitement reposait sur une diffeacuterence de
situation
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laquo Les communes qui au cours de lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 avaient
institueacute des classes maternelles ou eacutecoles maternelles publiques ou ap-
prouveacute des contrats drsquoassociation drsquoeacutecoles maternelles priveacutees ont con-
tribueacute agrave ce titre agrave leur financement dans les conditions preacutevues par le
code de lrsquoeacuteducation Ces communes ne sont ainsi pas placeacutees dans une
situation identique agrave celle des autres communes qui nrsquoexerccedilaient pas
deacutejagrave les mecircmes compeacutetences et ne supportaient donc pas les charges
correspondantes raquo (cons 7)
Drsquoautre part le Conseil constitutionnel a jugeacute que la diffeacuterence de traitement
contesteacutee eacutetait en rapport direct avec lrsquoobjet de la loi qui lrsquoeacutetablit
laquo Qui consiste en application de la seconde phrase du quatriegraveme alineacutea
de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution agrave accompagner de ressources finan-
ciegraveres une extension de compeacutetence ayant pour conseacutequence drsquoaugmen-
ter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales raquo (cons 8)
Agrave lrsquoargument opposeacute agrave lrsquoarticle 6 de la loi deacutefeacutereacutee selon lequel ces dispositions
creacuteeraient une diffeacuterence de traitement entre les communes contraire au prin-
cipe deacutegaliteacute devant la loi le Conseil constitutionnel en vertu de sa jurispru-
dence Loi pour une eacutecole de la confiance devrait logiquement apporter la mecircme
reacuteponse Le leacutegislateur entend avec cette loi du 8 avril 2021 donner de ma-
niegravere geacuteneacuterale effectiviteacute agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution agrave travers en par-
ticulier un outil permettant de mettre en œuvre les dispositions de lrsquoarticle 72-
2 de la Constitution relatives aux extensions de compeacutetences imposeacutees aux
collectiviteacutes territoriales Dispositions qui par ailleurs nrsquoobligent pas le leacutegi-
slateur agrave preacutevoir un accompagnement financier de lrsquoensemble des communes
En lien avec cet argument il en reacutesulte que lrsquoarticle 6 ne porte pas atteinte
par ailleurs au principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
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D Forfait scolaire communal et respect du principe de libre administra-
tion des collectiviteacutes territoriales
Quarto le forfait scolaire communal nrsquoest ni contraire agrave la lettre de lrsquoar-
ticle 72 de la Constitution ni agrave son interpreacutetation par le Conseil constitution-
nel
En vertu de lrsquoarticle 72 alineacutea 3 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales
srsquoadministrent librement dans les conditions preacutevues par la loi Correacutelative-
ment lrsquoarticle 34 de la Constitution donne agrave la loi compeacutetence pour deacuteterminer
laquo les principes fondamentaux (hellip) de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales de leurs compeacutetences et de leurs ressources raquo Cette libre admi-
nistration doit en outre se concilier avec drsquoautres principes constitutionnels
tels que le principe drsquoeacutegaliteacute et la liberteacute de lrsquoenseignement Crsquoest ainsi que le
Conseil constitutionnel a jugeacute que laquo si le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacute-
gislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce que les conditions essentielles drsquoap-
plication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de lrsquoenseignement deacutepen-
dent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre
les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (voir notamment la deacutecisions ndeg84-
185 DC du 18 janvier 1985 cons 18)
La libre administration est bien un principe constitutionnel mais crsquoest au leacute-
gislateur qursquoil revient sous le controcircle du Conseil constitutionnel drsquoen preacuteci-
ser le contenu Lrsquointervention du leacutegislateur est neacutecessaire pour la deacutefinition
des regravegles de fonctionnement des collectiviteacutes territoriales la deacutefinition des
compeacutetences qui leur sont deacutevolues (transfert creacuteation extension des compeacute-
tences) et en matiegravere de ressources la fixation du taux des impocircts deacutecideacutes par
les Assembleacutees deacutelibeacuteratives locales
Il ressort de la jurisprudence administrative et constitutionnelle que seule la
loi peut creacuteer une obligationsujeacutetion nouvelle agrave la charge drsquoune collectiviteacute
territoriale Le principe de libre administration ne peut donc pas exister en-
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dehors de lrsquointervention du leacutegislateur lequel nrsquoa pas pour autant toute lati-
tude En drsquoautres termes le principe de libre administration est deacutefini par la
loi mais est aussi proteacutegeacute contre elle qui ne peut notamment pas porter at-
teinte au-delagrave drsquoun certain seuil aux ressources des collectiviteacutes territoriales
restreindre la liberteacute contractuelle intervenir dans les deacutecisions des collecti-
viteacutes territoriales relatives agrave leurs agents ou le fonctionnement de leurs insti-
tutions
En eacutetendant la prise en charge du forfait scolaire communal la loi deacutefeacutereacutee creacutee
une charge suppleacutementaire pour certaines communes
Aux termes du quatriegraveme alineacutea de larticle 72-2 de la Constitution laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales saccom-
pagne de lattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consa-
creacutees agrave leur exercice Toute creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour
conseacutequence daugmenter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales est ac-
compagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Dans le cas ougrave le leacutegislateur
octroie une nouvelle compeacutetence aux collectiviteacutes territoriales (articles 72-2 de
la Constitution et L 1614-1-1 du code geacuteneacuteral des collectiviteacutes territoriales)
il accompagne cette creacuteation de ressources correspondantes uniquement si
lexercice de cette compeacutetence est rendu obligatoire Ainsi en a jugeacute le Conseil
constitutionnel en ajoutant que le leacutegislateur disposait dun pouvoir dappreacute-
ciation en la matiegravere la compensation devant ecirctre naturellement suffisante
pour ne pas constituer une entrave au principe de libre administration
laquo Que ces dispositions ne visent en ce qui concerne les creacuteations et ex-
tensions de compeacutetences que celles qui preacutesentent un caractegravere obliga-
toire que dans cette hypothegravese il nest fait obligation au leacutegislateur
que daccompagner ces creacuteations ou extensions de compeacutetences de res-
sources dont il lui appartient dappreacutecier le niveau sans toutefois deacutena-
turer le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales raquo
(deacutecision ndeg2008-569 DC du 7 aoucirct 2008 Loi instituant un droit daccueil
pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires pendant le temps
scolaire cons 13)
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Le Conseil constitutionnel a jugeacute qursquoen conseacutequence et en lrsquoespegravece le leacutegisla-
teur avait suffisamment deacutetermineacute le niveau des ressources accompagnant la
creacuteation de ce service daccueil pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires pendant le temps scolaire sans meacuteconnaicirctre le quatriegraveme alineacutea de
larticle 72-2 de la Constitution
Lextension de compeacutetences est soumise a fortiori au mecircme reacutegime que la
creacuteation de compeacutetences Elle consiste en leacutelargissement du peacuterimegravetre ou en
la modification de la nature ou de lobjet dune compeacutetence dont lexercice est
deacutejagrave assureacute par les collectiviteacutes territoriales ayant pour conseacutequence de creacuteer
une charge suppleacutementaire pour celles-ci Le droit agrave une compensation finan-
ciegravere nest garanti que si lextension preacutesente un caractegravere obligatoire et le
leacutegislateur en deacutetermine le niveau et les modaliteacutes agrave condition quils nentra-
vent pas la libre administration des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece le principe de libre administration nrsquoest donc pas violeacute par le ca-
ractegravere contraignant que confegravererait la loi deacutefeacutereacutee au forfait scolaire communal
de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation Drsquoune part le Conseil constitu-
tionnel a deacutejagrave comme souligneacute plus haut accepteacute le principe du caractegravere
obligatoire drsquoune nouvelle charge qui nrsquoentraine par ailleurs mecircme pas
lrsquoautomaticiteacute drsquoun accompagnement financier des communes Drsquoautre part
lrsquoargument de proportionnaliteacute est ici deacuteterminant agrave ceux qui avancent un
risque drsquoassegravechement financier de certaines communes rurales contraintes
de prendre en charge la scolarisation dun eacutelegraveve dans une autre commune
mieux doteacutee qui propose lenseignement de la langue reacutegionale (ce qui selon
le deacuteputeacute Molac ne concernerait que 002 des enfants en France) il faut
reacutepondre en mettant en avant lrsquoobjectif incitatif et non sanctionnateur de la
loi Il suffira auxdites communes de proposer un enseignement de langue reacute-
gionale qui ne pourrait repreacutesenter qursquoune heure drsquoinitiation par semaine par
exemple
Une heure drsquoinitiation par semaine pour eacuteviter de payer le forfait scolaire com-
munal lequel ne meacuteconnait pas par ailleurs lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
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les principes constitutionnels drsquoeacutegaliteacute drsquouniciteacute de la langue franccedilaise de la
libre administration des collectiviteacutes territoriales et permet drsquoassurer le deacuteve-
loppement de lrsquoenfant crsquoest bien peu de choses pour censurer une loi souve-
raine adopteacutee qui plus est agrave une eacutecrasante majoriteacute
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
De Raphaeumll SchellenbergerA GreffeObjet Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues ReacutegionalesDate mardi 4 mai 2021 101012Piegraveces jointes Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionalespdf
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loirelative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus desoixante deacuteputeacutes ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texteen application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarerlrsquoinconstitutionnaliteacute de son article 6 Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons ennotre qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre lapleine constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sensNous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notreconsideacuteration respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire
- Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
- Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche
- Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret
- Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne
- Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte
- Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor
- David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion
- Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme
- Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne
- Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
1
M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2
Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
3
On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
- Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie
- Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
Ce message ainsi que les piegraveces jointes sont eacutetablis sous la seule responsabiliteacute de lexpeacutediteur agrave lintention exclusive de ses destinataires ils peuvent contenir des informations confidentielles Toute publication utilisation ou diffusion doit ecirctre autoriseacutee preacutealablement Ce message a fait lobjet dun traitement anti-virusIl est rappeleacute que tout message eacutelectronique est susceptible dalteacuteration au cours de son acheminement sur Internet ________________________________________________________________
Vous pouvez consulter le site de lAssembleacutee nationale agrave ladresse suivante httpwwwassemblee-nationalefr
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Association ESKOLIMChez Seaska Route de la Pouponniegravere64250 CAMBO LES BAINSeskolim6gmailcomRepreacutesenteacutee par son President Jean Seacutebastien HAYDN11 chemin de Saint Jean66240 SAINT ESTEVE
CONTRIBUTION EXTERIEURE
Observations sur la conformiteacute agrave la Constitution de laproposition de loi relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
Monsieur le Preacutesident du Conseil constitutionnel Mesdames et Messieurs les
membres du Conseil constitutionnel lrsquoassociation Eskolim souhaite porter agrave votre attention
les observations suivantes tendant agrave deacutemontrer la conformiteacute agrave la Constitution de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Parmi lrsquoensemble des dispositions du texte deacutefeacutereacute la plupart nrsquoont donneacute lieu agrave aucun
deacutebat sur leur conformiteacute agrave la Constitution qui est de toute eacutevidence acquise par exemple au
sujet des traductions dont la constitutionnaliteacute a deacutejagrave indirectement eacuteteacute reconnue (CC 99-412
DC 15 juin 1999 CC ndeg2001-452 DC 6 deacutecembre 2001) ou de lrsquoutilisation des signes
diacritiques sur les actes drsquoeacutetat civil
De plus au-delagrave des apparences drsquoune politique jurisprudentielle initieacutee dans un contexte
speacutecifique le Conseil constitutionnel dispose deacutesormais drsquoun cadre constitutionnel de
reacutefeacuterence transformeacute (1) qui lui permettra de valider les dispositions leacutegislatives du texte dont
il est saisi en particulier lrsquoarticle 4 relatif agrave lrsquoenseignement immersif (2) et lrsquoarticle 6 au sujet
de la participation financiegravere agrave la scolarisation par les communes de reacutesidence (3)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
1 Le renouvellement des normes constitutionnelles de reacutefeacuterence en matiegravere de
langues reacutegionales
11 Les ineacutevitables deacuterogations apporteacutees agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution
Toute regravegle constitutionnelle connaicirct des atteacutenuations et peut ecirctre concilieacutee lrsquoarticle 2
de la Constitution ne fait pas exception Le principe demeure inchangeacute laquo La langue de la
Reacutepublique est le franccedilais raquo Sur ce fondement le Conseil constitutionnel a deacuteveloppeacute dans
les anneacutees 90 et 2000 une jurisprudence vigilante sur lrsquousage du franccedilais mais sans pour
autant refuser toute eacutevolution nous y reviendrons
Cependant lrsquoassociation Eskolim souhaite mettre en eacutevidence lrsquoindeacuteniable
changement de cadre constitutionnel en matiegravere de langues reacutegionales pour au
moins trois raisons
En premier lieu la porteacutee de lrsquoarticle 2 de la Constitution nrsquoest pas figeacutee et peut
eacutevoluer avec le temps En effet le Conseil constitutionnel opegravere reacuteguliegraverement des adaptations
de la porteacutee du texte constitutionnel Parmi de nombreuses illustrations jurisprudentielles la
liberteacute drsquoexpression et de communication protegravege deacutesormais la liberteacute drsquoacceacuteder agrave Internet
(CC ndeg 2009-580 DC 10 juin 2009) et de srsquoy exprimer (CC ndeg2020-801 DC du 18 juin 2020)
La liberteacute du mariage comprend deacutesormais le droit de mettre fin aux liens du mariage (CC ndeg
2016-557 QPC du 29 juillet 2016) La monteacutee en puissance des exigences environnementales
dans le deacutebat public a permis au Conseil constitutionnel de juger qursquoil deacutecoule de la Charte de
lrsquoenvironnement laquo que la protection de lrsquoenvironnement patrimoine commun des ecirctres
humains constitue un objectif de valeur constitutionnelle raquo (CC ndeg2019-823 QPC 31 janvier
2020) Certains fondements constitutionnels que lrsquoon croyait endormis ont eacuteteacute reacuteactiveacutes sous
lrsquoeffet du pouvoir interpreacutetatif agrave lrsquoimage de lrsquoarticle 15 de la DDHC (laquo La socieacuteteacute a le droit de
demander compte agrave tout agent public de son administration raquo) agrave lrsquoorigine drsquoun droit drsquoaccegraves
aux archives publiques (CC ndeg2017-655 QPC 15 septembre 2017) et drsquoun droit drsquoaccegraves aux
documents administratifs (CC ndeg2020-834 QPC 3 avril 2020)
En deuxiegraveme lieu la reacutedaction actuelle de lrsquoarticle 2 de la Constitution ne date pas de
1958 mais drsquoun ajout issu de la loi constitutionnelle ndeg 92-554 du 25 juin 1992 voteacutee dans un
contexte particulier au moment ougrave la France ratifiait le traiteacute de Maastricht et reacutevisait sa
Constitution afin de lever les atteintes agrave la souveraineteacute constateacutees par le Conseil
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
constitutionnel En 1992 lrsquoinsertion de la langue franccedilaise au sein de lrsquoarticle 2 vise agrave rassurer
lrsquoopinion face aux craintes heacutegeacutemoniques de la langue anglaise les langues reacutegionales ne
sont ni viseacutees ni nieacutees dans leur existence et leur rocircle Il est sur ce point particuliegraverement
reacuteveacutelateur de se reacutefeacuterer aux deacuteclarations limpides du Garde des Sceaux Michel Vauzelle lors
des deacutebats parlementaires consacreacutes en 1992 au vote de la reacutevision constitutionnelle laquo Les
langues reacutegionales sont naturellement une richesse de notre patrimoine national Agrave ce
titre le Gouvernement exprime par ma voix lrsquoimmense respect et le soin qursquoil porte agrave cette
richesse de la nation [] Je ne vois pas lagrave drsquoatteinte agrave lrsquouniteacute de la nation mais au
contraire une contribution agrave sa richesse [] Aucune atteinte ne sera porteacutee agrave la politique
de respect de la diversiteacute de nos cultures reacutegionales qui est un eacuteleacutement essentiel du
patrimoine national raquo (JO Assembleacutee nationale p 1021)
Il est donc parfaitement possible pour le Conseil constitutionnel drsquoopeacuterer une
interpreacutetation eacutevolutive de lrsquoarticle 2 afin drsquoadapter la porteacutee de la norme constitutionnelle au
contexte actuel favorable agrave lrsquoapprofondissement de lrsquousage des langues reacutegionales Il nrsquoest
drsquoailleurs pas anodin de constater que la preacutesente proposition de loi a largement transcendeacute les
clivages politiques pour ecirctre voteacutee agrave une large majoriteacute avec drsquoailleurs le soutien de
lrsquoensemble des Preacutesidents de Reacutegion
En troisiegraveme lieu dans sa fameuse deacutecision sur la Charte europeacuteenne des langues
reacutegionales et minoritaires du 15 juin 1999 (ndeg99-412 DC) le Conseil constitutionnel a
implicitement reconnu la compatibiliteacute de lrsquoenseignement immersif ou bilingue avec la
Constitution et en particulier avec lrsquoarticle 2 de la Constitution En effet lrsquoinconstitutionnaliteacute
constateacutee entre la Charte et la Constitution concerne seulement les articles 1 et 7 Or le
consideacuterant 13 de cette deacutecision abusivement preacutesenteacutee comme un verrou absolu en matiegravere
de langues reacutegionales prend soin de preacuteciser laquo que nest contraire agrave la Constitution eu eacutegard agrave
leur nature aucun des autres engagements souscrits par la France dont la plupart au
demeurant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France en
faveur des langues reacutegionales raquo Parmi ces laquo autres engagements souscrits par la France raquo
au sein de la Charte figurent certaines stipulations de lrsquoarticle 8 de la Charte1 selon lequel
1 Article 8 ndash Enseignement1En matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel ces langues sontpratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de lenseignement de la (des)langue(s) officielle(s) de lEtat(hellip)ci agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires concerneacutees ou
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
laquo laquoen matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel
ces langues sont pratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de
lenseignement de la (des) langue(s) officielle(s) de lEtat raquo agrave toute une seacuterie drsquoengagements
Au sein des engagements auxquels la France avait souscrits et sur lesquels le Conseil
constitutionnel srsquoest donc prononceacute on trouve le point 1 c (iv) en vertu duquel la France
srsquoengage laquo agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui
le souhaitent ndash ou le cas eacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant raquo
Or ce renvoi concerne les stipulations suivantes
laquo i agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires
concerneacutees ou
Ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les
langues reacutegionales ou minoritaires ou
Iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales
ou minoritaires comme partie inteacutegrante du curriculum
Autrement dit la France srsquoeacutetait engageacutee au moment de la signature de la Charte agrave
appliquer lrsquoune des trois mesures citeacutees qui concernent lrsquoenseignement laquo dans raquo les langues
reacutegionales ou minoritaires dans le secondaire crsquoest-agrave-dire un enseignement immersif ou
bilingue Cet engagement faisait donc partie des stipulations examineacutees par le Conseil
constitutionnel et le consideacuterant 13 de la deacutecision du 15 juin 1999 affirme clairement que ces
stipulations ne sont pas contraires agrave la Constitution Degraves 1999 lrsquoenseignement immersif en
langue reacutegionale est reconnu par le Conseil constitutionnel comme compatible avec
lrsquoarticle 2 de la Constitution
En quatriegraveme lieu le texte mecircme de la Constitution contient drsquoores et deacutejagrave des
ameacutenagements au principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais
Drsquoune part en vertu de la loi constitutionnelle ndeg 98-610 du 20 juillet 1998 lAccord
de Noumeacutea est constitutionnaliseacute agrave larticle 77 de la Constitution Or cet accord stipule en son
ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les langues reacutegionalesou minoritaires ou
iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales ou minoritairescomme partie inteacutegrante du curriculum ou
iv agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui le souhaitent ndash ou le caseacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant
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point 133 laquo Les langues kanak sont avec le franccedilais des langues denseignement et de
culture en Nouvelle-Caleacutedonie Leur place dans lenseignement et les meacutedias doit donc ecirctre
accrue et faire lobjet dune reacuteflexion approfondie raquo
Drsquoautre part sous lrsquoeffet de la reacutevision constitutionnelle du 23 juillet 2008 la
Constitution consacre deacutesormais les langues reacutegionales sous lrsquoeffet de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution qui par deacutefinition atteacutenue et deacuteroge agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution et dont la
porteacutee ne saurait ecirctre symbolique
12 La porteacutee de lrsquoancrage constitutionnel des langues reacutegionales minoritaires
En vertu de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution laquo Les langues reacutegionales appartiennent
au patrimoine de la France raquo Sans discussion possible cette nouvelle disposition
constitutionnelle constitue un changement de circonstances de droit permettant drsquoatteacutenuer
fortement la porteacutee des preacuteceacutedentes deacutecisions du Conseil constitutionnel rendues avant la
reacutevision constitutionnelle de 2008 Certains voudraient pourtant reacuteduire ce texte agrave une porteacutee
simplement symbolique et pensent pouvoir drsquoores et deacutejagrave trouver une confirmation dans la
jurisprudence du Conseil constitutionnel La reacutealiteacute contentieuse est beaucoup plus nuanceacutee et
ne preacutejuge rien de lrsquoavenir
Le Conseil constitutionnel nrsquoa eu depuis 2008 qursquoune seule et unique occasion de
preacuteciser la porteacutee de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Dans la deacutecision du 20 mai 2011
(ndeg2011-130 QPC) il eacutetait en effet saisi des dispositions de larticle L 312-10 du code de
leacuteducation relative agrave lenseignement des langues et cultures reacutegionales qui eacutetait contesteacute au
regard de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Or estime le Conseil en 2011 lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution ninstitue pas un droit ou une liberteacute que la Constitution garantit Sa
meacuteconnaissance ne peut donc ecirctre invoqueacutee agrave lappui dune question prioritaire de
constitutionnaliteacute sur le fondement de larticle 61-1 de la Constitution
Il convient de ne pas tirer de conclusions excessives du deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en
QPC de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Drsquoune part cela nrsquoempecircche pas le Conseil constitutionnel de se fonder sur lrsquoarticle
75-1 de la Constitution dans le cadre du controcircle a priori comme crsquoest par exemple le cas
pour les regravegles constitutionnelles en matiegravere de recevabiliteacute des amendements ou des principes
constitutionnels en matiegravere budgeacutetaires
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Drsquoautre part le deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en QPC drsquoune norme constitutionnelle ne
preacutejuge pas drsquoune forme de hieacuterarchie mateacuterielle ou formelle et srsquoexplique seulement par les
speacutecificiteacutes de chacun des offices Par exemple le respect des regravegles du vote de la loi
imposeacutees par la Constitution impossibles agrave invoquer en QPC font pourtant lrsquoobjet drsquoune
vigilance accrue du Conseil constitutionnel dans le cadre du controcircle a priori justifiant
chaque anneacutee de nombreuses censures
En outre bien que non invocable en QPC lrsquoarticle 75-1 teacutemoigne indubitablement de
la volonteacute du constituant de permettre au leacutegislateur drsquoassouplir les conditions drsquousage des
langues reacutegionales en ouvrant davantage la leacutegislation agrave des possibiliteacutes drsquoapprentissage en la
matiegravere En cela lrsquoarticle 75-1 de la Constitution est une atteacutenuation une disposition
deacuterogatoire agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution selon lequel laquo La langue de la Reacutepublique est le
franccedilais raquo Comme le souligne le rapport drsquoun deacuteputeacute en 2015 laquo la preacuteservation et la
protection des langues reacutegionales sont devenues un objectif de valeur constitutionnelle raquo2 Une
telle interpreacutetation serait drsquoailleurs coheacuterente avec les travaux parlementaires agrave lrsquoorigine de la
reacutevision de 2008 pour le preacutesident de la Commission des lois du Seacutenat lrsquoarticle 75-1 permet
de donner laquo un fondement solide aux dispositions leacutegislatives et reacuteglementaires qui favorisent
la protection et le deacuteveloppement des langues reacutegionales sans diminuer la place que le
franccedilais occupe dans notre sphegravere publique raquo3
Enfin dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel
estime que larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi
ndeg2005-380 du 23 avril 2005 est conforme agrave la Constitution Or les dispositions ainsi
valideacutees sont toujours en vigueur dans une reacutedaction identique laquo Un enseignement de
langues et cultures reacutegionales peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des
modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces
langues sont en usage raquo Ainsi tout en estimant que lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ne
constitue pas un droit ou liberteacute constitutionnel directement invocable en QPC le Conseil
constitutionnel a valideacute le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures
reacutegionales
2JJ Urvoas Rapport sur Proposition de loi constitutionnelle ndeg 1618 visant agrave ratifier la Charte europeacuteenne deslangues reacutegionales ou minoritaires 14 janvier 2014
3JJ Hyest Rapport ndeg 387 (2007-2008) sur le projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions dela Ve Reacutepublique fait au nom de la commission des lois du Seacutenat
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Autre signe eacutevident de la porteacutee effective de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le
leacutegislateur a multiplieacute ces derniegraveres anneacutees lrsquoadoption de textes favorisant lrsquousage et
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et leur promotion La loi du 8 juillet 2013
drsquoorientation et de programmation pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique ouvre la
possibiliteacute drsquoun enseignement bilingue franccedilais-langue reacutegionale la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) eacutetablit la participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes par lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale
lrsquoarticle 86 de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle
modifie lrsquoarticle 225-1 du code peacutenal en creacuteant un nouveau cas de discrimination fondeacute sur laquo
la maitrise drsquoune autre langue que le franccedilais raquo la loi du 28 feacutevrier 2017 de programmation
relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend inopeacuterant lrsquointerdiction des livrets de famille
bilingues lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance eacutetend aux
eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives les modaliteacutes drsquoun accord entre les communes pour
la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoinscrivant dans une eacutecole dispensant un
enseignement de langue reacutegionale en dehors de sa commune de reacutesidence Lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution a donc susciteacute une production leacutegislative qui teacutemoigne de la volonteacute du pouvoir
politique de mettre en œuvre une politique en matiegravere de langue et culture reacutegionales La
particulariteacute de la proposition de loi deacutefeacutereacutee est drsquoecirctre la premiegravere loi dont lrsquoobjet exclusif vise
agrave densifier lrsquoenseignement et lrsquousage des langues reacutegionales mais ce texte confirme les
avanceacutees ponctuelles eacutetablies depuis la reacutevision constitutionnelle de 2008
13 La monteacutee en puissance drsquoexigences constitutionnelles favorisant lrsquousage des langues
reacutegionales
Au-delagrave de lrsquoapport indeacuteniable de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution qui inteacuteresse
directement et clairement la possibiliteacute pour le leacutegislateur de favoriser le deacuteveloppement des
langues reacutegionales la jurisprudence du Conseil constitutionnel atteste drsquoune monteacutee en
puissance de plusieurs liberteacutes qui participent indirectement du mecircme mouvement
En premier lieu la liberteacute drsquoexpression et de communication concerne les langues
reacutegionales Degraves la deacutecision ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 le Conseil constitutionnel avait
concilieacute lrsquoarticle 2 de la Constitution avec la liberteacute drsquoexpression et de communication afin de
censurer certaines dispositions imposant lrsquousage du franccedilais tout en faisant notamment une
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reacutefeacuterence aux langues reacutegionales cette liberteacute laquo implique le droit pour chacun de choisir les
termes jugeacutes par lui les mieux approprieacutes agrave lexpression de sa penseacutee que la langue franccedilaise
eacutevolue comme toute langue vivante en inteacutegrant dans le vocabulaire usuel des termes
de diverses sources quil sagisse dexpressions issues de langues reacutegionales de vocables
dits populaires ou de mots eacutetrangers raquo Or la liberteacute drsquoexpression et de communication a vu
son reacutegime constitutionnel renforceacute depuis plusieurs anneacutees sous lrsquoeffet du triple test de
proportionnaliteacute en vertu duquel les limites apporteacutees agrave ces liberteacutes doivent ecirctre neacutecessaires
adapteacutees et proportionneacutees agrave lrsquoobjectif poursuivi Norme constitutionnelle prioritaire pour le
Conseil constitutionnel la liberteacute drsquoexpression et de communication a justifieacute de nombreuses
censures de dispositions leacutegislatives ces derniegraveres anneacutees (loi laquo Hadopi raquo consultation des
sites Internet terroristes loi laquo Avia raquohellip) Or cette liberteacute dans ses deux composantes de
lrsquoexpression et de la communication permet au locuteur drsquoutiliser une langue reacutegionale et de
ne pas subir drsquoentraves excessives ou injustifieacutees Le deacuteveloppement des langues reacutegionales et
de leur enseignement lrsquoouverture des possibiliteacutes de srsquoexprimer et de communiquer gracircce agrave
ces langues ne sont pas eacutetrangegraveres aux conditions drsquoexercice de la liberteacute drsquoexpression et de
communication Ainsi la monteacutee en puissance de cette liberteacute dans le contentieux
constitutionnel confirme lrsquoeacutevolution favorable du cadre constitutionnel applicable aux langues
reacutegionales
En deuxiegraveme lieu lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant est deacutesormais consacreacute en tant
qursquoexigence constitutionnelle deacutecoulant des alineacuteas 10 et 11 du Preacuteambule de 1946 Ce
principe a drsquoores et deacutejagrave eacuteteacute appliqueacute en matiegravere de droit des eacutetrangers (CC 2019-797 QPC du
26 juillet 2019) mais aussi en droit de la famille au sujet du divorce (CC ndeg 2019-778 DC du
21 mars 2019) ou de lrsquoaccouchement sous le secret (CC 2019-826 QPC du 7 feacutevrier 2020) Il
serait parfaitement coheacuterent que cette exigence constitutionnelle soit applicable en matiegravere
drsquoeacuteducation et drsquoenseignement ce qui permettrait notamment de justifier le renforcement de
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et le soutien financier qui leur est apporteacute
En troisiegraveme lieu la liberteacute de lrsquoenseignement reconnu en tant que principe
constitutionnel (CC ndeg77-87 DC 23 novembre 1977 2016-745 DC 26 janvier 2017)
pourrait permette de proteacuteger constitutionnellement le libre choix des parents en
matiegravere de meacutethodes eacuteducatives conformeacutement agrave la jurisprudence du Conseil drsquoEtat En
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
effet dans une deacutecision du 19 juillet 2017 (Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg
406150) le Conseil drsquoEtat estime que le laquo principe de la liberteacute de lrsquoenseignement qui figure
au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la Reacutepublique implique la
possibiliteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement y compris hors de tout contrat conclu
avec lrsquoEtat tout comme le droit pour les parents de choisir pour leurs enfants des
meacutethodes eacuteducatives alternatives agrave celles proposeacutees par le systegraveme scolaire public y
compris lrsquoinstruction au sein de la famille raquo A fortiori la liberteacute de lrsquoenseignement
permettrait au leacutegislateur drsquooffrir aux eacutelegraveves la possibiliteacute de suivre un enseignement immersif
en langue reacutegionale Faire deacutecouler de la liberteacute drsquoenseignement une exigence en matiegravere de
droit des parents de choisir les meacutethodes eacuteducatives serait drsquoailleurs en coheacuterence avec
lrsquoarticle 2 du Protocole 1 de la CEDH4 et lrsquoarticle 14-3 de la Charte des droits fondamentaux
de lUnion europeacuteenne5
Au-delagrave du principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais unchangement de contexte est intervenu depuis lrsquoinsertion en 1992 de cette disposition agravelrsquoarticle 2 de la Constitution Depuis 2008 le pouvoir constituant a consacreacute leslangues reacutegionales agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution de nombreuses reacuteformesleacutegislatives et regraveglementaires ont accompagneacute le deacuteveloppement des langues reacutegionaleset plusieurs principes constitutionnels accompagnent et pourraient agrave lrsquoavenirrenforcer lrsquoassise normative des langues reacutegionalesCrsquoest agrave lrsquoaune de ce cadre constitutionnel renouveleacute et transformeacute en phase avec leseacutevolutions leacutegislatives et sociales que le Conseil constitutionnel appreacuteciera laconstitutionnaliteacute de la preacutesente proposition de loi qui loin de constituer une rupturesrsquoinscrit dans une forme de continuiteacute
2 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi modifie lrsquoarticle L321-10 du code de lrsquoeacuteducation qui
en lrsquoeacutetat dispose
4laquo Nul ne peut se voir refuser le droit agrave lrsquoinstruction LrsquoEacutetat dans lrsquoexercice des fonctions qursquoil assumera dans ledomaine de lrsquoeacuteducation et de lrsquoenseignement respectera le droit des parents drsquoassurer cette eacuteducation et cetenseignement conformeacutement agrave leurs convictions religieuses et philosophiques raquo
5laquo La liberteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement dans le respect des principes deacutemocratiques ainsi quele droit des parents drsquoassurer lrsquoeacuteducation et lrsquoenseignement de leurs enfants conformeacutement agrave leurs convictionsreligieuses philosophiques et peacutedagogiques sont respecteacutes selon les lois nationales qui en reacutegissent lrsquoexercice raquo
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
laquo Les langues et cultures reacutegionales appartenant au patrimoine de la France leurenseignement est favoriseacute prioritairement dans les reacutegions ougrave elles sont en usage
Cet enseignement peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefiniespar voie de convention entre lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont enusage
Le Conseil supeacuterieur de leacuteducation est consulteacute conformeacutement aux attributions qui lui sontconfeacutereacutees agrave larticle L 231-1 sur les moyens de favoriser leacutetude des langues et culturesreacutegionales dans les reacutegions ougrave ces langues sont en usage
Lenseignement facultatif de langue et culture reacutegionales est proposeacute dans lune des deuxformes suivantes
1deg Un enseignement de la langue et de la culture reacutegionales
2deg Un enseignement bilingue en langue franccedilaise et en langue reacutegionale
Les familles sont informeacutees des diffeacuterentes offres dapprentissage des langues et culturesreacutegionales raquo
Lrsquoarticle 4 a simplement pour objet drsquoajouter un 3e cas de forme drsquoenseignementfacultatif de langue et culture reacutegionales en preacutevoyant
laquo3deg Un enseignement immersif en langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectifdrsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo
21 Le Conseil constitutionnel peut ne pas se prononcer sur cette disposition
A titre liminaire il semblerait que lrsquoarticle 4 du texte soumis agrave lrsquoexamen du
Conseil constitutionnel ne soit pas contesteacute par les auteurs de la saisine parlementaire agrave en
croire les deacuteclarations publiques de plusieurs deacuteputeacutes Ce point nrsquoest pas sans importance degraves
lors qursquoil confirme le large consensus politique autour de cette disposition et peut avoir une
conseacutequence sur le peacuterimegravetre de lrsquoobjet de la deacutecision rendue
Certes il arrive ponctuellement au Conseil constitutionnel drsquoexaminer drsquooffice
drsquoautres dispositions que celles contesteacutees par la saisine mais depuis lrsquoentreacutee en vigueur de la
QPC et speacutecialement depuis 2016 une telle pratique tend agrave devenir une exception (Deacutecisions
ndeg 2019-794 DC du 20 deacutecembre 2019 ndeg2018-772 DC du 15 novembre 2018 ndeg2016-745
DC du 26 janvier 2017)
De plus lors de lrsquoexamen de la loi pour une eacutecole de la confiance dans sa deacutecision
ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 le Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute examiner
drsquooffice les dispositions de lrsquoarticle 38 creacuteant en vertu de lrsquoarticle L314-2 du code de
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lrsquoeacuteducation une expeacuterimentation de classe immersive en langue eacutetrangegravere ou reacutegionale6 Si le
Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute se saisir drsquooffice de cette disposition expeacuterimentale
crsquoest qursquoimplicitement il nrsquoa pas consideacutereacute qursquoelle posait une difficulteacute manifeste de
constitutionnaliteacute Degraves lors la coheacuterence voudrait qursquoil en aille de mecircme avec les dispositions
de lrsquoarticle 4 de la preacutesente proposition de loi qui ne font que reprendre les grands principes
de lrsquoexpeacuterimentation preacuteceacutedente en preacutevoyant la possibiliteacute drsquoun enseignement immersif en
langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue
franccedilaise
22 Les exigences anciennes poseacutees par le Conseil constitutionnel sont respecteacutees
Elaboreacutee avant la reacutevision constitutionnelle de 2008 consacrant les langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la jurisprudence
du Conseil constitutionnel en matiegravere drsquoenseignement de langue reacutegionale est totalement
respecteacutee par lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
En premier lieu le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement immersif en langue
reacutegionale rend lrsquoarticle 4 conforme agrave la Constitution
Dans plusieurs deacutecisions le Conseil constitutionnel a eu lrsquooccasion de preacuteciser que
seule lrsquoobligation de suivre un enseignement dans une autre langue que le franccedilais serait
contraire agrave la Constitution Ainsi dans la deacutecision ndeg 2001-456 DC du 27 deacutecembre 2001 il
indique que laquo lusage dune langue autre que le franccedilais ne peut ecirctre imposeacute aux eacutelegraveves des
eacutetablissements de lenseignement public ni dans la vie de leacutetablissement ni dans
lenseignement des disciplines autres que celles de la langue consideacutereacutee raquo Le verbe
6Article L314-2 du code de lrsquoeacuteducation laquo Sous reacuteserve de lrsquoautorisation preacutealable des autoriteacutes acadeacutemiques etapregraves concertation avec les eacutequipes peacutedagogiques le projet drsquoeacutecole ou drsquoeacutetablissement mentionneacute agrave lrsquoarticle L401-1 peut preacutevoir la reacutealisation dans des conditions deacutefinies par deacutecret drsquoexpeacuterimentations peacutedagogiquesportant sur tout ou partie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement drsquoune dureacutee limiteacutee agrave cinq ans Cesexpeacuterimentations peuvent concerner lrsquoorganisation peacutedagogique de la classe de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement laliaison entre les diffeacuterents niveaux drsquoenseignement la coopeacuteration avec les partenaires du systegraveme eacuteducatiflrsquoenseignement dans une langue vivante eacutetrangegravere ou reacutegionale les eacutechanges avec des eacutetablissementseacutetrangers drsquoenseignement scolaire lrsquoutilisation des outils et ressources numeacuteriques la reacutepartition des heuresdrsquoenseignement sur lrsquoensemble de lrsquoanneacutee scolaire les proceacutedures drsquoorientation des eacutelegraveves et la participation desparents drsquoeacutelegraveves agrave la vie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement Les collectiviteacutes territoriales sont systeacutematiquementassocieacutees agrave la deacutefinition des grandes orientations des expeacuterimentations meneacutees par lrsquoeacuteducation nationale ainsiqursquoagrave leurs deacuteclinaisons territoriales raquo
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laquo imposer raquo est employeacute agrave la fois au sujet de lrsquousage drsquoune autre langue que le franccedilais et au
sujet de la vie de lrsquoeacutetablissement et de lrsquoenseignement des disciplines autres que celles de la
langue consideacutereacutee Ce qui signifie qursquoil est constitutionnellement possible au leacutegislateur de
permettre aux eacutelegraveves de choisir de maniegravere facultative une telle orientation dans
lrsquoenseignement De mecircme dans sa deacutecision ndeg2001 454 DC du 17 janvier 2002 le Conseil
constitutionnel avait estimeacute que si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre
de lrsquohoraire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires laquo il ne saurait revecirctir pour autant
un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo Et dans la deacutecision
ndeg2004-490 DC 12 feacutevrier 2004 le Conseil indique que lrsquoenseignement de la langue
tahitienne ou dune autre langue polyneacutesienne dans le cadre de lhoraire normal des eacutecoles
maternelles et primaires dans les eacutetablissements du second degreacute et dans les eacutetablissements
denseignement supeacuterieur laquo ne saurait revecirctir pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les
eacutelegraveves ou eacutetudiants ni pour les enseignants raquo
Or en lrsquoespegravece il nrsquoy a absolument aucun doute sur le caractegravere facultatif du 3deg
ajouteacute agrave lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation En effet le premier alineacutea de lrsquoarticle L312-
10 du code de lrsquoeacuteducation est inchangeacute et eacutevoque un laquo enseignement facultatif raquo Le deacuteputeacute
Molac lrsquoa clairement exprimeacute lors des deacutebats laquo lrsquoenseignement immersif tel qursquoil est ici
proposeacute reacutepond agrave cette condition dans la mesure ougrave il ne serait pas imposeacute mais seulement
proposeacute au sein des eacutetablissements publics au cocircteacute de filiegraveres classiques drsquoenseignement la
deacutecision finale restant du ressort des personnes responsables de lrsquoenfant raquo (Rapport du 31
mars 2021)
En deuxiegraveme lieu lrsquoarticle 4 nrsquoa pas pour objet de soustraire les eacutelegraveves aux
droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements drsquoenseignement
Dans plusieurs deacutecisions relatives agrave lrsquousage drsquoune langue reacutegionale le Conseil
constitutionnel rappelle qursquoun enseignement de ce type nrsquoa pas pour laquo pour objet de soustraire
les eacutelegraveves scolariseacutes (hellip) aux droits et obligations applicables agrave lensemble des usagers des
eacutetablissements qui assurent le service public de lenseignement ou sont associeacutes agrave celui-ci raquo
(ndeg 91-290 DC du 9 mai 1991 ndeg 2001-454 DC du 17 janvier 2002) Or lrsquoarticle 4 a
seulement pour objet drsquoouvrir une 3e modaliteacute facultative drsquoenseignement en langue reacutegionale
La proposition de loi ne confegravere pas des droits speacutecifiques agrave des laquo groupes raquo de locuteurs de
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de laquo territoires raquo dans lesquels ces langues
seraient pratiqueacutees Le texte ne modifie pas non plus les modaliteacutes drsquoexpression dans la vie
publique et dans la relation entre lrsquoadministration et les administreacutes De telle sorte que
lrsquoarticle 4 ne creacutee aucun droit particulier pour les eacutelegraveves comme pour les enseignants de nature
agrave les soustraire aux droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements
drsquoenseignement ou associeacutes agrave celui-ci
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 4 opegravere une conciliation raisonnable et eacutequilibreacutee entre
le principe de lrsquoarticle 2 de la Constitution et lrsquoapprentissage des langues reacutegionales
Lrsquoenseignement immersif en lange reacutegionale doit srsquoopeacuterer laquo sans preacutejudice de
lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo Lrsquoarticle 4 prend soin de ne pas
ignorer le principe poseacute par lrsquoarticle 2 de la Constitution et prolonge au niveau leacutegislatif la
conciliation souhaiteacutee par le constituant depuis 2008 avec lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Il
appartiendra au pouvoir regraveglementaire de preacuteciser la mise en œuvre de lrsquoobjectif de bonne
connaissance de la langue franccedilaise qui en toute hypothegravese garantit une conciliation
eacutequilibreacutee entre les regravegles constitutionnelles en preacutesence
Au surplus les retours drsquoexpeacuteriences des expeacuterimentations de classes en
enseignements immersifs permises par lrsquoarticle L 314-2 du code de lrsquoeacuteducation deacutemontrent
que les eacutelegraveves disposent drsquoun niveau en franccedilais plus eacuteleveacute que la moyenne Comme lrsquoindique
le rapport du Seacutenat sur la proposition de loi 19 expeacuterimentations immersives en langue
basque 6 en langue corse et une en langue catalane ont lieu actuellement dans des eacutecoles
publiques Or pour prendre lrsquoexemple de lrsquoenseignement en basque agrave 100 en eacutecole
maternelle objet drsquoune eacutevaluation preacutecise par lrsquoacadeacutemie de Bordeaux en 2019 (Etude
comparative des filiegraveres de maternelle 100 basque bilingue et franccedilais Acadeacutemie de
Bordeaux 2019) laquo lorsque ces enfants arrivaient en CP leur niveau de franccedilais eacutetait
supeacuterieur agrave la moyenne du deacutepartement Cela prouve que le niveau de franccedilais nrsquoavait
absolument pas eacuteteacute toucheacute raquo (Paul Molac Assembleacutee nationale Seacuteance du 8 avril 2021)
En quatriegraveme lieu lrsquoarticle 4 ne fait qursquoeacutetendre la mise en œuvre drsquoune modaliteacute
drsquoenseignement deacutejagrave valideacute par le Conseil constitutionnel
Dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel a valideacute
le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures reacutegionales en estimant que
larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi ndeg2005-380 du 23
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
avril 2005 est conforme agrave la Constitution En effet apregraves avoir estimeacute inopeacuterant le grief tireacute
de la violation de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la deacutecision preacutecise laquo que les dispositions
contesteacutees ne sont contraires agrave aucun droit ou liberteacute que la Constitution garantit raquo Par
conseacutequent en vertu de lrsquoautoriteacute que lrsquoarticle 62 de la Constitution confegravere aux deacutecisions du
Conseil constitutionnel les dispositions valideacutees dans cette deacutecision et toujours en vigueur
sont conformes agrave la Constitution Il srsquoagit en particulier de lrsquoalineacutea 2 de la version actuelle de
lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation en vertu duquel laquo Cet enseignement peut ecirctre
dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre
lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont en usage raquo Or lrsquoarticle 4 de la
proposition de loi ne fait qursquoajouter une 3e possibiliteacute de mise en œuvre drsquoun principe deacutejagrave
valideacute par le Conseil constitutionnel modaliteacute facultative et sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune
bonne connaissance de la langue franccedilaise Le leacutegislateur srsquoest donc scrupuleusement
conformeacute aux exigences du Conseil constitutionnel
23 La possibiliteacute drsquoun enseignement immersif peut se preacutevaloir de plusieurs exigences constitutionnelles
En plus de srsquoinscrire dans les lignes jurisprudentielles du Conseil constitutionnel et de
respecter lrsquoarticle 2 de la Constitution lrsquoarticle 4 de la proposition de la loi peut se preacutevaloir
plusieurs normes constitutionnelles
En premier lieu lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en vertu duquel laquo Les langues
reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo constitue un changement de
circonstances de droit issu de la reacutevision constitutionnelle de 2008 qui atteacutenue la porteacutee de
lrsquoarticle 2 de la Constitution et permet ainsi de fonder le principe drsquoen enseignement immersif
et facultatif en langue reacutegionale
En second lieu comme preacuteceacutedemment rappeleacute (cf supra point 13) plusieurs
exigences et liberteacutes constitutionnelles peuvent soutenir le deacuteveloppement des langues
reacutegionales et peser favorablement dans la conciliation opeacutereacutee par le Conseil constitutionnel
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
La liberteacute drsquoexpression et de communication garantie par lrsquoarticle 11 de la DDHC
et dont le reacutegime constitutionnel srsquoest renforceacute depuis une dizaine drsquoanneacutees peut permettre de
justifier lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale degraves lors qursquoil srsquoagit drsquoun preacutealable neacutecessaire
agrave lrsquoexpression et agrave la communication dans une autre langue que le franccedilais
Lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant reacutecemment consacreacute sur le fondement des alineacuteas 10
et 11 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 peut permettre au leacutegislateur de diversifier les
possibiliteacutes drsquoapprentissage drsquoune langue et drsquoune culture reacutegionale
La liberteacute de lrsquoenseignement consacreacutee de longue date en tant que principe
fondamental reconnu par les lois de la Reacutepublique implique neacutecessairement comme le
reconnaissent le Conseil drsquoEtat au niveau constitutionnel (CE 19 juillet 2017 Association
Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150) et les textes europeacuteens (article 2 du protocole 1
CEDH article 14-3 Charte des droits fondamentaux de lrsquoUnion europeacuteenne) une possibiliteacute
pour les parents de choisir des meacutethodes eacuteducatives en lien avec leurs convictions
Il est eacutegalement possible drsquoavancer le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction qui
deacutecoule de lrsquoalineacutea 13 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 (CC ndeg2001-450 DC 11
juillet 2001) degraves lors que lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale poursuit un objectif
peacutedagogique auquel les eacutelegraveves doivent pouvoir acceacuteder de maniegravere suffisamment libre et
selon des critegraveres objectifs et rationnels
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi se contente drsquoajouter une modaliteacute de mise enœuvre drsquoun enseignement dont le principe a deacutejagrave eacuteteacute valideacute par le Conseilconstitutionnel La conformiteacute agrave la Constitution de cet enseignement est eacutetablie degraveslors qursquoil est proposeacute de maniegravere facultative sans preacutejudice du respect de lrsquoarticle 2 dela Constitution et qursquoil peut se preacutevaloir de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ainsi quede plusieurs principes constitutionnels comme la liberteacute drsquoexpression lrsquointeacuterecirctsupeacuterieur de lrsquoenfant la liberteacute drsquoenseignement et lrsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction
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3 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi deacutefeacutereacutee modifie lrsquoarticle L442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation en remplaccedilant les alineacuteas 6 et 7 par lrsquoalineacutea suivant
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue
reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de
reacutesidence et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la
condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de
langue reacutegionale raquo
31 Lrsquoimpact subsidiaire et reacutesiduel de lrsquoarticle 6
Au-delagrave des passions et crispations qui peuvent parfois se rencontrer au greacute de deacutebats
relatifs au financement de lrsquoenseignement priveacute la modification apporteacutee par lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi doit ecirctre replaceacutee agrave sa juste porteacutee
En premier le meacutecanisme est subsidiaire En effet la participation financiegravere de la
commune de reacutesidence ne serait solliciteacutee que si cette commune ne laquo dispose pas drsquoeacutecole
dispensant un enseignement de langue reacutegionale raquo Il srsquoagit bien drsquoun laquo enseignement raquo quel
que soit sa forme et son volume Degraves lors comme lrsquoa clairement exprimeacute le deacuteputeacute Paul
Molac devant la Commission des affaires sociales il peut srsquoagir drsquoune laquo initiation drsquoun
enseignement paritaire ou drsquoune immersion raquo (31 mars 2021)
En deuxiegraveme lieu le meacutecanisme est reacutesiduel La participation financiegravere se limite
aux eacutetablissements priveacutes du premier degreacute ndash les eacutecoles ndash ayant conclu un contrat
drsquoassociation Les collegraveges et lyceacutees sont donc exclus du dispositif Un faible nombre
drsquoenfants sera concerneacute et la charge sera donc reacuteduite pour les communes en question De
plus en pratique dans les zones ougrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales est reacutepandu les
eacutecoles drsquoun grand nombre de communes ont deacutejagrave deacuteveloppeacute des offres eacuteducatives
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
En troisiegraveme lieu la participation financiegravere est encadreacutee par la loi En application
de lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation non modifieacute par la preacutesente
proposition de loi les modaliteacutes de calcul de la contribution de la commune de reacutesidence sont
clairement eacutetablies
laquo il est tenu compte des ressources de cette commune du nombre deacutelegraveves de cette
commune scolariseacutes dans la commune daccueil et du coucirct moyen par eacutelegraveve calculeacute sur la base
des deacutepenses de fonctionnement de lensemble des eacutecoles publiques de la commune daccueil
sans que le montant de la contribution par eacutelegraveve puisse ecirctre supeacuterieur au coucirct quaurait
repreacutesenteacute pour la commune de reacutesidence leacutelegraveve sil avait eacuteteacute scolariseacute dans une de ses eacutecoles
publiques raquo
La charge financiegravere obeacuteit donc agrave des regravegles claires objectives rationnelles et deacutejagrave en
vigueur depuis plusieurs anneacutees En effet le laquo forfait scolaire raquo est deacutejagrave pratiqueacute sur le
fondement de lrsquoarticle L212-8 du code de lrsquoeacuteducation lorsqursquoune famille scolarise dans une
eacutecole publique ou priveacutee son enfant dans une autre commune que la commune de reacutesidence
32 Lrsquoabsence de violation de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales et du principe drsquoeacutegaliteacute
Ainsi replaceacutee dans sa juste porteacutee il ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi de violer la Constitution et en particulier les principes applicables en
matiegravere de libre administration des collectiviteacutes territoriales ainsi que le principe drsquoeacutegaliteacute
En premier lieu le Conseil constitutionnel a deacutejagrave valideacute le principe de lrsquoaide agrave
lrsquoenseignement priveacute et en particulier aux langues reacutegionales
Avant mecircme la reacutevision constitutionnelle de 2008 et la conseacutecration des langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le Conseil
constitutionnel avait reconnu que laquo pour concourir agrave la sauvegarde des langues reacutegionales
lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales peuvent apporter leur aide aux associations ayant cet
objet raquo (CC ndeg2001-456 DC 27 deacutecembre 2001)
De plus le Conseil constitutionnel rappelle reacuteguliegraverement que laquo le leacutegislateur peut
preacutevoir loctroi dune aide des collectiviteacutes publiques aux eacutetablissements denseignement
priveacutes selon la nature et limportance de leur contribution agrave laccomplissement de missions
denseignement raquo (CC ndeg93-329 DC du 13 janvier 1994)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
En deuxiegraveme lieu le principe de libre administration ne saurait justifier des
traitements diffeacuterencieacutes dans lrsquoexercice des droits et liberteacutes constitutionnels
En vertu de lrsquoarticle 72 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales srsquoadministrent
librement mais laquo dans les conditions preacutevues par la loi raquo De plus le Conseil constitutionnel
prend soin de preacuteciser que laquo si le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacutegislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce
que les conditions essentielles drsquoapplication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de
lrsquoenseignement deacutependent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas
ecirctre les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (CC ndeg 84-185 DC du 18 janvier 1985 CC
ndeg93-329 du 13 janvier 1994) Plus largement dans la deacutecision du 17 janvier 2002 (ndeg2001-
454 DC) le Conseil constitutionnel affirme que laquo le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales ne saurait conduire agrave ce que les conditions essentielles de mise en
oeuvre des liberteacutes publiques et par suite lensemble des garanties que celles-ci comportent
deacutependent des deacutecisions de collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre les mecircmes
sur lensemble du territoire de la Reacutepublique raquo
Or en lrsquoespegravece si les communes pouvaient librement participer au financement de la
scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous contrat
drsquoassociation lrsquoexercice de la liberteacute drsquoenseignement du principe drsquoeacutegaliteacute devant la loi et du
principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction deacutependrait de la seule volonteacute drsquoune collectiviteacute
territoriale ce que le Conseil constitutionnel condamne Degraves lors que la possibiliteacute drsquoun
enseignement en langue reacutegionale est offerte aux enfants les conditions drsquoaccegraves agrave cet
enseignement doivent pouvoir ecirctre effectives et eacutegales Loin de violer le principe drsquoeacutegaliteacute
devant la loi lrsquoarticle 6 de la proposition de loi en assure au contraire la garantie
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne transfert ni ne creacutee de
nouvelles compeacutetences
Srsquoagissant des ressources des collectiviteacutes locales permettant de leur assurer une libre
administration le quatriegraveme alineacutea de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution preacutevoit laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales srsquoaccompagne de
lrsquoattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consacreacutees agrave leur exercice Toute
creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour conseacutequence drsquoaugmenter les deacutepenses des
collectiviteacutes territoriales est accompagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Le Conseil
constitutionnel veille au respect de cette regravegle drsquoune part pour les transferts de compeacutetence
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entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales et drsquoautre part pour les creacuteations ou extensions de
compeacutetence des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece aucune creacuteation ou transfert de compeacutetence nrsquoest opeacutereacute au sens de
lrsquoarticle 72-2 de la Constitution Il srsquoagit drsquoune simple participation financiegravere agrave caractegravere
subsidiaire reacutesiduel et deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels comme
preacuteceacutedemment eacutevoqueacute (cf supra point 31) De plus le versement de la participation
financiegravere correspond en quelque sorte agrave un allegravegement de charge degraves lors que le coucirct de
lrsquoenfant scolariseacute est reporteacute sur une autre commune que la commune de reacutesidence En
conseacutequence lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne fait que modifier les modaliteacutes drsquoexercice
drsquoune compeacutetence sans en creacuteer ou transfeacuterer une nouvelle
Drsquoailleurs dans la deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 le Conseil
constitutionnel avait jugeacute inopeacuterant le grief tireacute de la violation des articles 72 et 72-2 de la
Constitution agrave propos de la version ancienne de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation en
jugeant que laquo la loi deacutefeacutereacutee nemporte ni creacuteation ni extension des compeacutetences en matiegravere de
contributions des communes aux frais de fonctionnement des classes eacuteleacutementaires des
eacutetablissements du premier degreacute priveacutes sous contrat dassociation que par suite le grief tireacute
de la meacuteconnaissance du principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales manque
en fait raquo
Le Conseil constitutionnel a statueacute dans le mecircme sens au sujet de lrsquoinstitution drsquoun
creacutedit drsquoimpocirct en matiegravere drsquoapprentissage ou de la possibiliteacute de modifier la dureacutee du contrat
drsquoapprentissage mecircme si ces mesures en rendant lrsquoapprentissage plus attrayant ont pour effet
drsquoaugmenter le nombre drsquoapprentis et donc drsquoaccroicirctre les charges des reacutegions dans ce
domaine (CC ndeg 2004-509 DC du 13 janvier 2005)
En quatriegraveme lieu le principe drsquoeacutegaliteacute entre les charges publiques est respecteacute
En effet en plus du caractegravere subsidiaire et reacutesiduel du meacutecanisme la participation
financiegravere preacutevue par lrsquoarticle 6 de la proposition de loi srsquoapplique agrave lrsquoensemble des
communes ne disposant pas drsquoun eacutetablissement dispensant un enseignement de langue
reacutegionale ce qui est coheacuterent au regard de lrsquoobjet de la loi Les critegraveres de la participation
financiegravere preacutevus par lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 sont en tout eacutetat de cause objectifs et
rationnels eacutetablis et mis en œuvre depuis plusieurs anneacutees Les garanties de lrsquoarticle 13 de la
DDHC sont donc respecteacutees
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En cinquiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir du respect
de plusieurs normes constitutionnelles
En affirmant depuis 2008 que les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la
France lrsquoarticle 75-1 de la Constitution donne un ancrage constitutionnel au deacuteveloppement
de lrsquousage et de lrsquoenseignement des langues reacutegionales Or sans la participation financiegravere des
communes de reacutesidence agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat lrsquoenseignement des langues reacutegionales serait compromis Par
conseacutequent lrsquoarticle 6 de la proposition de loi constitue une garantie leacutegale du respect de
lrsquoaffirmation porteacutee par lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Le mecircme raisonnement sera tenu agrave propos de lrsquoensemble des principes constitutionnels
qui donnent une assise agrave lrsquousage et agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales la liberteacute
drsquoexpression et de communication (article 11 DDHC) la liberteacute drsquoenseignement (PFRLR)
dont pourrait deacutecouler une exigence en matiegravere de droit des parents de choisir les meacutethodes
eacuteducatives (CE 19 juillet 2017 Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150)
lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant (alineacutea 10 et 11 du Preacuteambule de 1946) le principe drsquoeacutegaliteacute
(article 6 DDHC) le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction (alineacutea 13 du Preacuteambule de 1946)
Sans lrsquoarticle 6 de la proposition de loi lrsquoeffectiviteacute de lrsquoensemble de ces normes
constitutionnelles serait consideacuterablement atteacutenueacutee et creacuteerait des diffeacuterences de traitement
injustifieacutees et deacutependantes de la volonteacute des communes
De plus lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir drsquoun objectif de
clarification et de seacutecurisation du droit applicable qui peut se rattacher agrave lrsquoarticle 16 de la
DDHC degraves lors que les textes jusqursquoagrave preacutesent applicables eacutetaient ambigus et ont donneacute lieu agrave
des contentieux En rendant obligatoire ce qui eacutetait avant une faculteacute pour autant soumise agrave
un rocircle non neacutegligeable du preacutefet lrsquoarticle 6 de la proposition de loi clarifie le droit
applicable Ainsi une deacuteputeacutee preacutecisait lors des deacutebats parlementaires que laquo lrsquoarticle 34 de la
loi pour une eacutecole de la confiance relatif au versement du forfait scolaire a susciteacute de
nombreux imbroglios administratifs Ainsi chez moi en Bretagne plus de 150 demandes de
meacutediation ont eacuteteacute transmises aux services de lrsquoEacutetat ce qui met en lumiegravere lrsquoambiguiumlteacute de la loi
et les difficulteacutes de son application Je soutiens donc fortement lrsquoarticle 2 quinquies [devenu
article 6] issu des travaux du Seacutenat qui legraveve toute incertitude raquo (Mme Claudia Rouaux
Commission des affaires sociales Assembleacutee nationale 31 mars 2021)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi creacutee un meacutecanisme subsidiaire et reacutesiduel dont laporteacutee est deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels Sans creacuteer ni transfeacutererde nouvelle compeacutetence aux communes cette disposition assure une mise en œuvreuniforme des droits et liberteacutes et peut se preacutevaloir de nombreuses normesconstitutionnelles confeacuterant agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales et agrave son soutienfinancier de solides justifications constitutionnelles
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 12 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 12 mai 2021
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure Mme Mastorpdf
Lettre Wanda Mastor accompagnant la porte eacutetroite
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure MSchellenberger et autrespdf
Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure assESKOLIL pdf
lettre daccompagnement CC
Porte eacutetroite loi langues reacutegionales (2)
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure M Bertrand Pancherpdf
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Constitution et comble une lacune Ce nrsquoest pas son existence qui pose pro-
blegraveme mais bien son absence drsquoexistence Il appartient au leacutegislateur de mettre
en œuvre les dispositions de la Constitution afin qursquoelles ne se cantonnent
pas au monde du virtuel La loi sur les langues reacutegionales est lrsquoune des garan-
ties leacutegales de la Constitution
Tout texte transmis au controcircle du Conseil constitutionnel vigile du droit
jouit de la preacutesomption de constitutionnaliteacute Votre jurisprudence teacutemoigne
qursquoau nom de la primauteacute de la Constitution votre rocircle est de sauver la loi en
lrsquoeacutepurant de ses vices drsquoinconstitutionnaliteacute Si la deacutemocratie repreacutesentative
accepte la leacutegitimiteacute drsquoune censure drsquoun texte adopteacute par 925 repreacutesentants
de la Nation par neuf membres nommeacutes crsquoest au nom de ladite primauteacute de
la Constitution Laquelle nrsquoest pas violeacutee par la preacutesente loi soumise agrave votre
examen Il faut au preacutealable rappeler le contexte de lrsquoadoption de la loi qui ne
saurait se limiter au contexte parlementaire Lrsquoobjectif de la loi est de reacutepondre
agrave une adresse faite par le pouvoir constituant lui-mecircme conformeacutement agrave un
esprit plus geacuteneacuteral de protection et promotion des langues reacutegionales qui ir-
rigue conventions internationales et constitutions eacutetrangegraveres (I) Non seule-
ment la loi du 8 avril 2021 ne viole pas la Constitution mais encore met-elle
en œuvre certaines de ses dispositions (II)
I Le contexte de la loi relative agrave la protection patrimoniale des langues
reacutegionales et agrave leur promotion
Dans lrsquoobjectif sans doute drsquoassurer un climat plus serein qui doit preacutesider
agrave lrsquoinstruction et la deacutelibeacuteration la lettre de saisine des soixante deacuteputeacutes nrsquoest
jamais publieacutee par le Conseil constitutionnel en amont de la publication de la
deacutecision Ce nrsquoest ni le moment ni le lieu pour plaider pour ladite publication
mais force est de constater qursquoil nrsquoest pas tregraves sain que dans une deacutemocratie
les eacuteleacutements censeacutes ecirctre secrets laquo fuitent raquo dans la presse dans les couloirs et
autres ceacutenacles reacuteserveacutes agrave une infime partie des citoyens Deacuteposeacutee agrave la hacircte
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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la lettre de saisine semble reacutedigeacutee de faccedilon deacuteconcertante La deacutefaillance for-
melle nrsquoenlegraveve pas dans lrsquoabsolu de la force aux arguments mais prouve en
lrsquoespegravece lrsquoextrecircme preacutecipitation dans laquelle les choses se sont deacuterouleacutees
Il est neacutecessaire avant de deacutevelopper les arguments au soutien de la confor-
miteacute agrave la Constitution de la loi et notamment de son article 6 de rappeler le
contexte de son adoption La proposition de loi du deacuteputeacute Paul Molac ayant
par ailleurs les faveurs de lrsquoopinion publique et le soutien de treize preacutesidents
de reacutegions4 srsquoinscrit dans un mouvement Celui de la deacutefense et la promotion
des langues reacutegionales lesquelles appartiennent depuis la reacutevision constitu-
tionnelle du 23 juillet 2008 au laquo patrimoine de la France raquo Ce mouvement
favorable agrave la protection et promotion des langues reacutegionales nrsquoest pas uni-
quement parlementaire il est aussi celui drsquoun ensemble plus vaste Celui de
notre propre Constitution (A) des engagements internationaux et de la grande
majoriteacute des constitutions des pays voisins (B) Ensemble qui permet de mieux
saisir le contexte parlementaire franccedilais de lrsquoadoption de la loi (C)
A Le contexte constitutionnel franccedilais
Lrsquoabsence de protection et de valorisation des langues reacutegionales est une
entrave au rayonnement de la France qui loin de srsquoeacutepuiser dans son caractegravere
indivisible que la loi deacutefeacutereacutee ne remet absolument pas en cause srsquoenrichit de
ses composantes Indivisibiliteacute ne signifie pas uniformiteacute Le constituant a lui-
mecircme choisi en 2003 de preacuteciser degraves lrsquoouverture de notre texte suprecircme que
lrsquoorganisation de notre Reacutepublique eacutetait laquo deacutecentraliseacutee raquo Il faut accepter tous
les contours conseacutequences de cette affirmation solennelle qui ne peut avoir
4 Communiqueacute de presse du 16 mars 2021 laquo Notre responsabiliteacute en tant que preacutesidents de
Reacutegion et de Collectiviteacute est de pouvoir garantir et promouvoir la vitaliteacute culturelle et patri-
moniale de nos territoires Cette proposition va dans le bon sens afin que vivent nos langues
que lrsquoUNESCO classe pour une grande majoriteacute drsquoentre elles en grand danger drsquoextinction
Crsquoest en ce sens que la reacutedaction de la proposition de loi dite Molac tel qursquoissue des travaux du Seacutenat va dans le bon sens et que nous appelons de nos vœux une adoption conforme par
les deacuteputeacutes de tous les bancs afin que ce texte puisse entrer en vigueur raquo httpsregions-
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que des applications laquo particuliegraveres raquo sur certaines parties de notre territoire
Les modifications successives de la Constitution ont progressivement em-
prunteacute la voie de la reconnaissance de ces implications toujours plus de dis-
positions deacuterogatoires de reconnaissances mecircme symboliques laquo drsquointeacuterecircts
particuliers raquo drsquolaquo adaptations neacutecessaires raquo pour ne citer qursquoelles jusqursquoagrave la
diffeacuterenciation des normes toujours inscrite dans lrsquoactuel projet de loi consti-
tutionnelle5 Si lrsquoon observe les discussions actuelles relatives au projet de loi
laquo 4D raquo ou la validation par le Conseil constitutionnel en avril dernier de la loi
organique relative agrave la simplification des expeacuterimentations susceptibles decirctre
meneacutees par les collectiviteacutes territoriales6 la voie de la reconnaissance du par-
ticularisme des territoires semble srsquoannoncer
En 2003 la Constitution a deacutecideacute une fois pour toutes que lrsquouniteacute nrsquoeacutetait pas
neacutecessairement lrsquouniformiteacute Parmi les richesses territoriales qui loin drsquoeacutegra-
tigner lrsquoimage drsquoun Eacutetat unitaire la renforce par sa capaciteacute agrave promouvoir la
diversiteacute au sein drsquoune Nation forte les langues reacutegionales occupent une place
particuliegravere Leur entreacutee remarqueacutee dans lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en
2008 nrsquoa eu pour le moment que des effets symboliques sur lesquels il y aura
lieu de revenir plus loin Sous la preacutesidence de Franccedilois Hollande le Parle-
ment fort de la volonteacute drsquoappliquer la 56egraveme promesse de campagne du candi-
dat devenu preacutesident a remis la question des langues reacutegionales sur le devant
de la scegravene institutionnelle Le rapport drsquoinformation ndeg489 de lrsquoAssembleacutee
nationale sur les implications de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales
et minoritaires7 est essentiellement descriptif mais teacutemoigne de la volonteacute
parlementaire de se saisir de nouveau de la question De leurs cocircteacutes les tri-
bunaux ordinaires ont eacutegalement eu lrsquooccasion ces derniegraveres anneacutees de se
pencher sur la question du bilinguisme notamment que ce soit en matiegravere
5 Projet de loi constitutionnelle pour un renouveau de la vie deacutemocratique enregistreacute agrave la Preacutesi-
dence de lrsquoAssembleacutee nationale le 29 aoucirct 2019 6 Deacutecision ndeg2021-816 DC du 15 avril 2021 Loi organique relative agrave la simplification des ex-peacuterimentations mises en œuvre sur le fondement du quatriegraveme alineacutea de larticle 72 de la Cons-
titution 7 M Jean-Jacques Urvoas Rapport drsquoinformation ndeg 489 du 12 deacutecembre 2012 sur les impli-
cations constitutionnelles drsquoune ratification par la France de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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de signaleacutetique routiegravere8 ou de lrsquoutilisation de la langue reacutegionale dans des
organes deacutelibeacuterants9
Agrave lrsquoeacutepoque de lrsquoentreacutee dans lrsquoarticle 75-1 (dont on relegravevera lrsquoeacuteloignement vo-
lontaire vis-agrave-vis de lrsquoarticle 2) de lrsquoeacuteleacutevation des langues reacutegionales au rang de
laquo patrimoine de la France raquo en 2008 certains espoirs avaient pu ecirctre leacutegitime-
ment nourris Cette preacutecision nrsquoest pas loin srsquoen faut le seacutesame pour la rati-
fication de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires10 qui
en lrsquoeacutetat actuel de la jurisprudence du Conseil constitutionnel comporte des
clauses jugeacutees contraires agrave la Constitution
B Le contexte international
Il faut ici distinguer deux niveaux Si le contexte international est favorable
agrave la protection et promotion des langues reacutegionales crsquoest en raison drsquoune part
des engagements internationaux que la France les ait ratifieacutes ou non drsquoautre
part de la plupart des constitutions des pays voisins qui accordent une place
speacutecifique aux langues reacutegionales
En 1999 faisant la synthegravese de ses deacutecisions anteacuterieures11 le
Conseil constitutionnel a estimeacute que la Charte europeacuteenne des langues reacutegio-
nales ou minoritaires ne pouvait au vu des principes drsquouniciteacute du peuple fran-
ccedilais drsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique et drsquoeacutegaliteacute des citoyens ecirctre ratifieacutee
laquo La Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires en ce
qursquoelle confegravere des droits speacutecifiques agrave des groupes de locuteurs de
8 Tribunal administratif de Montpellier 12 octobre 2010 Mouvement reacutepublicain de salut pu-blic ndeg0903420 Cour Administrative dAppel de Marseille 28 juin 2012 Commune de Ville-neuve-les-Maguelone ndeg 10MA04419 9 Conseil drsquoEacutetat 29 mars 2006 Haut-Commissaire de la Reacutepublique en Polyneacutesie Franccedilaise
ndeg282335 Rec 179 22 feacutevrier 2007 Socieacuteteacute immobiliegravere Caroline ndeg299649 Cour adminis-trative drsquoappel de Marseille 13 octobre 2011 Commune de Galeria ndeg10MA02330 10 Table ronde (Jean-Eacuteric Gicquel Ferdinand Meacutelin-Soucramanien Michel Verpeaux et Jean-
Marie Woehrling) organiseacutee par la commission des lois 29 novembre 2012 sur les implications
constitutionnelles de la question de la ratification de la Charte europeacuteenne des langues reacutegio-
nales ou minoritaires httpswwwassemblee-nationalefr14cr-cloi12-13c1213022asp 11 Deacutecisions ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 loi relative agrave lrsquoemploi de la langue franccedilaise et
ndeg96-373 DC du 9 avril 1996 loi organique portant statut drsquoautonomie de la Polyneacutesie fran-ccedilaise
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de territoires dans les-
quels ces langues sont pratiqueacutees porte atteinte aux principes constitu-
tionnels drsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique drsquoeacutegaliteacute devant la loi et drsquouniciteacute
du peuple franccedilais raquo12
Le Conseil se deacutefendant au passage de meacutepriser les langues reacutegionales parmi
les engagements souscrits par la France preacutecise-t-il laquo la plupart au demeu-
rant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France
en faveur des langues reacutegionales raquo
Parmi les arguments qui plaident en faveur drsquoune ratification figure celui de
lrsquoeacutevolution du contexte Honorer de la ratification un texte deacutejagrave signeacute ne se
pose aujourdrsquohui plus dans les mecircmes termes qursquoen 1999 La reacuteforme cons-
titutionnelle de 2003 - dont certains aspects ont eacuteteacute affineacutes en 2008 - rappe-
lons-le a consideacuterablement modifieacute la vision jacobine de notre Reacutepublique qui
reconnaicirct agrave preacutesent lrsquoexistence de laquo populations raquo en son sein les particula-
rismes locaux et les neacutecessiteacutes des adaptations normatives Mais la ratification
par la France de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires
qui avait eacuteteacute voteacutee le 28 janvier 2014 par lrsquoAssembleacutee nationale a eacuteteacute rejeteacutee
par le Seacutenat le 27 octobre 2015 Soulignons que ce rejet nrsquoempecircche pas la
force du contexte qui est au niveau europeacuteen largement favorable agrave la pro-
tection et promotion des langues reacutegionales La France a par ailleurs ratifieacute
drsquoautres conventions internationales qui permettent de poursuivre cet objec-
tif tel est par exemple le cas de la Convention pour la sauvegarde du patri-
moine culturel immateacuteriel de 2003 et de la Convention sur la protection et la
promotion de la diversiteacute des expressions culturelles de 2005 qui rappelle no-
tamment dans son preacuteambule laquo que la diversiteacute linguistique est un eacuteleacutement
fondamental de la diversiteacute culturelle raquo et reacuteaffirme laquo le rocircle fondamental que
joue lrsquoeacuteducation dans la protection et la promotion des expressions cultu-
relles raquo
12 Il srsquoagissait lagrave au demeurant drsquoune affirmation tregraves discutable car la lettre de la Charte
nrsquoimposait nullement mecircme si elle lrsquoencourageait que des droits speacutecifiques fussent reconnus agrave des groupes (voir Guy Carcassonne Rapport au Premier ministre sur la compatibiliteacute entre la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires et la Constitution septembre 1998
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Le droit compareacute apporte la preuve irreacutefutable de lrsquoabsence drsquoin-
compatibiliteacute entre le caractegravere indivisible voire unitaire drsquoune Reacutepublique
et la reconnaissance des langues reacutegionales en son sein13 Un tour drsquohorizon
des textes des constitutions europeacuteennes et des deacutecisions des cours constitu-
tionnelles permet de mettre en eacutevidence plusieurs eacuteleacutements significatifs Le
droit compareacute nous enseigne que juridiquement la question des langues srsquoap-
preacutehende agrave travers deux prismes premiegraverement celui de la forme de lrsquoEacutetat
Le lien entre uniteacute de lrsquoEacutetat et unilinguisme est aussi eacutevident que celui entre
Eacutetat composeacute (reacutegional ou feacutedeacuteral) et multilinguisme Deuxiegravemement celui des
droits des locuteurs Selon cette acception les langues reacutegionales sont tradi-
tionnellement associeacutees de maniegravere neacutegative au principe de non-discrimina-
tion de maniegravere positive aux droits linguistiques dont les locuteurs seraient
les beacuteneacuteficiaires14
En droit constitutionnel compareacute lrsquoameacutenagement de la pluraliteacute linguistique
diverge selon que les Eacutetats reconnaissent une pluri-officialiteacute sur lrsquoensemble
du territoire ou au seul niveau local La premiegravere hypothegravese est celle naturel-
lement choisie par la Belgique et la Suisse Eacutetats feacutedeacuteraux europeacuteens Selon
lrsquoarticle 4 de la Constitution helveacutetique laquo les langues nationales sont lrsquoalle-
mand le franccedilais lrsquoitalien et le romanche raquo De son cocircteacute la Constitution belge
eacutenonce que laquo la Belgique comprend trois communauteacutes la Communauteacute fran-
ccedilaise la Communauteacute flamande et la Communauteacute germanophone raquo et fait
eacutegalement reacutefeacuterence agrave laquo quatre reacutegions linguistiques la reacutegion de langue fran-
ccedilaise la reacutegion de langue neacuteerlandaise la reacutegion bilingue de Bruxelles-Capi-
tale et la reacutegion de langue allemande raquo En revanche lrsquoItalie et lrsquoEspagne ne
reconnaissent qursquoune seule langue officielle sur lrsquoensemble du territoire en
mecircme temps qursquoest ameacutenageacutee au niveau local la pluraliteacute linguistique Crsquoest
13 Voir Veacuteronique Bertile Langues reacutegionales ou minoritaires et Constitution France Espagne et Italie Bruylant Collection Droit public compareacute et europeacuteen 2008 516 p et Wanda Mas-
tor laquo Le statut constitutionnel des langues reacutegionales en droit compareacute De la reconnaissance agrave lrsquoindiffeacuterence raquo Glottopol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html 14 Voir le Rapport explicatif de de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minori-
taires Conseil de lrsquoEurope Seacuterie des Traiteacutes europeacuteens ndeg148 Strasbourg 5 novembre 1992 httpsrmcoeint16800cb620
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ce second type drsquoameacutenagement qui est ici inteacuteressant agrave observer les Eacutetats
reacutegionaux italien15 et espagnol16 eacutetant qualifieacutees par leurs constitutions drsquoin-
divisibles (et mecircme eacutegalement laquo un raquo pour lrsquoItalie alors que le mot a disparu
de la Constitution franccedilaise)
De maniegravere scheacutematique plusieurs postures essentielles vis-agrave-vis des langues
reacutegionales peuvent ecirctre observeacutees dans lrsquoEurope contemporaine La majoriteacute
des pays voisins confegraverent aux langues reacutegionales des statuts juridiques dif-
feacuterencieacutes Coexistent parfois une langue majoritaire et des langues minori-
taires qui beacuteneacuteficient de mesures protectrices Dans ce cas les langues reacutegio-
nales jouissent drsquoune reconnaissance mais seulement au niveau drsquoun terri-
toire identifieacute Pour le dire autrement elles ne concurrencent pas la langue
majoritaire au niveau national Il ne srsquoagit ni plus ni moins que lrsquoexpression
drsquoun droit agrave la diffeacuterence Drsquoun droit agrave la diffeacuterenciation pour reprendre un
terme qui a actuellement les faveurs du gouvernement franccedilais Drsquoautres pays
ont mis en place le bilinguisme officiel qui peut srsquoexprimer dans plusieurs
variantes Ce statut confegravere aux citoyens en principe du moins le choix duti-
liser lune ou lautre des langues officielles dans leurs rapports avec lEacutetat
Cette co-officialiteacute peut srsquoopeacuterer au niveau de tout le territoire (comme en Bel-
gique et en Suisse par exemple) ou seulement sur une partie de celui-ci
(comme en Espagne ou en Italie)
On pourrait objecter que la comparaison avec lrsquoEspagne et lrsquoItalie deux Eacutetats
reacutegionaux nrsquoest pas pertinente Or ces deux Eacutetats sont qualifieacutes de Royaume
ou Reacutepublique indivisibles par leurs constitutions respectives indivisibiliteacute
qui nrsquoempecircche pas la reconnaissance la protection et la promotion des
langues reacutegionales en leur sein Ainsi la Constitution espagnole consacre clai-
rement le multilinguisme dans le cadre de ses communauteacutes autonomes17
15 Article 5 de la Constitution de la Reacutepublique italienne de 1947 laquo La Reacutepublique une et indivisible reconnaicirct et favorise les autonomies locales (hellip) raquo 16 Article 2 de la Constitution du Royaume drsquoEspagne de 1978 laquo La Constitution est fondeacutee
sur luniteacute indissoluble de la nation espagnole patrie commune et indivisible de tous les Es-
pagnols Elle reconnaicirct et garantit le droit agrave lautonomie des nationaliteacutes et des reacutegions qui la
composent et la solidariteacute entre elles raquo 17 En vertu de lrsquoarticle 3 de la Constitution espagnole
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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tout comme lrsquoItalie laquo Reacutepublique une et indivisible raquo laquo protegravege par des mesures
particuliegraveres les minoriteacutes linguistiques raquo (article 6)
Cette rapide eacutetude comparative permet de mettre en eacutevidence la singulariteacute de
la France au sein drsquoune Europe qui srsquoenorgueillit de se deacutefinir agrave travers la
richesse de sa diversiteacute Mais notamment depuis la loi constitutionnelle de
2008 le leacutegislateur franccedilais a agi dans le sens drsquoune protection et promotion
des langues reacutegionales la loi du 8 avril 2021 srsquoinscrivant dans ce processus
logique et coheacuterent
C Le contexte parlementaire franccedilais
La loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit donc dans un mouvement leacutegislatif reacutepondant agrave
lrsquoadresse du pouvoir constituant Laquelle concerne aussi le pouvoir exeacutecutif
La politique du ministegravere de lrsquoeacuteducation pour la deacutetermination du nombre de
places pour lrsquoagreacutegation et le CAPES des langues reacutegionales devrait aller de
pair avec les lois qui mettent en œuvre lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Ainsi
pour la langue basque il nrsquoy a pas eu de concours drsquoagreacutegation externe depuis
2018 anneacutee 2021 comprise il y a un seul poste pour lrsquoagreacutegation interne en
2021 2 pour le CAPES externe en 2021 et 2 pour le CAPES interne Pour la
langue bretonne et pour ne citer que lrsquoanneacutee en cours il y a un poste agrave lrsquoagreacute-
gation externe pas de concours pour lrsquoagreacutegation interne deux postes pour
le CAPES externe et 2 pour le CAPES interne Pour la langue corse il nrsquoy a pas
de concours cette anneacutee pour lrsquoagreacutegation externe et interne deux pour le
CAPES externe et aucun pour le CAPES interne Pour lrsquooccitan toujours pour
2021 il y a un poste pour lrsquoagreacutegation externe pas de concours pour lrsquoagreacute-
gation interne quatre pour le CAPES externe et un pour le CAPES interne
Ceci eacutetant juste preacuteciseacute il faut agrave preacutesent se concentrer sur lrsquoaction parlemen-
taire de mise en œuvre des dispositions de la Constitution
laquo 1 Le castillan est la langue espagnole officielle de lEacutetat Tous les Espagnols ont le devoir de
le connaicirctre et le droit de lutiliser
2 Les autres langues espagnoles sont aussi officielles dans leurs communauteacutes autonomes
respectives conformeacutement agrave leurs statuts
3 La richesse de la diversiteacute linguistique de lEspagne est un patrimoine culturel qui fait lobjet dun respect et dune protection speacuteciales raquo
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Videacutee drsquoune large part de sa substance en premiegravere lecture par la commission
des affaires culturelles et de leacuteducation de lrsquoAssembleacutee nationale la proposi-
tion de loi du deacuteputeacute Molac a ensuite retrouveacute ses objectifs initiaux gracircce agrave la
proceacutedure parlementaire qui donne agrave notre reacutegime repreacutesentatif tout son
sens discussions en commissions deacutebats en seacuteances publiques navette
amendements multiples pour parvenir agrave une adoption deacutefinitive agrave une majo-
riteacute non importante mais eacutecrasante des voix Agrave quelques heures de la pro-
mulgation de la loi par le Preacutesident de la Reacutepublique une partie de cette mecircme
majoriteacute a neacuteanmoins saisi le Conseil constitutionnel dans le cadre de lrsquoarticle
61 alineacutea 2 de la Constitution
Deacutepocirct de la proposition de loi
Deacuteposeacutee le 30 deacutecembre 2019 par le deacuteputeacute Paul Molac et autres deacuteputeacutes18
la proposition de loi apporte des mesures de protection et de promotion des
langues reacutegionales dans trois domaines le patrimoine lrsquoenseignement les
services publics via la signaleacutetique et les actes drsquoeacutetat civil Elle a eacuteteacute adopteacutee
le 8 avril 2021 par 247 voix pour 76 voix contre et 19 abstentions au terme
de la proceacutedure ci-dessous rappeleacutee
Renvoi agrave la commission des affaires culturelles et de leacuteducation
La proposition de loi a eacuteteacute renvoyeacutee agrave la commission des affaires cultu-
relles et de leacuteducation agrave deacutefaut de constitution drsquoune commission speacuteciale
dans les deacutelais preacutevus par les articles 30 et 31 du Regraveglement Le rapport fait
au nom de la commission par le deacuteputeacute Paul Molac nommeacute par elle a eacuteteacute
enregistreacute agrave la preacutesidence de lrsquoAssembleacutee nationale le 5 feacutevrier 2020 Preacutesenteacute
18 Sylvain BRIAL Jean-Feacutelix ACQUAVIVA Michel CASTELLANI Jean-Michel CLEacuteMENT
Paul-Andreacute COLOMBANI Charles de COURSON Jeanine DUBIEacute Freacutedeacuterique DUMAS Mrsquojid
EL GUERRAB Olivier FALORNI Yannick FAVENNEC BECOT Sandrine JOSSO Franccedilois-Mi-
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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comme un moyen de deacutefendre les laquo langues de France raquo19 en danger et srsquoap-
puyant sur lrsquoexistant qui est la marque drsquoune eacutevolution rappeleacutee plus loin (II)
le texte entend laquo aller plus loin raquo en rehaussant la protection lrsquoaccessibiliteacute et
la visibiliteacute des langues reacutegionales dans les trois domaines preacuteciteacutes
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle premier re-
latif au patrimoine Ce dernier preacutecise en compleacutetant ainsi lrsquoar-
ticle L 1 du code du patrimoine que la conservation et la con-
naissance du patrimoine immateacuteriel sont drsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et que
les langues reacutegionales font partie de ce patrimoine
o La commission a adopteacute sans modifications lrsquoarticle 2 qui pro-
pose drsquoinclure parmi les treacutesors nationaux les biens preacutesentant
un inteacuterecirct majeur pour la connaissance des langues franccedilaise et
reacutegionales Le texte preacutevoit en effet outre pour les langues reacutegio-
nales des mesures de protection de notre patrimoine linguistique
dans une deacutemarche globale
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 3 qui disposait que des con-
ventions passeacutees entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pouvaient preacutevoir que
la langue reacutegionale est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de
lrsquohoraire normal des enseignements (des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires des collegraveges et des lyceacutees des territoires concerneacutes) Il
ne srsquoagissait pourtant que drsquoeacutetendre une regravegle deacutejagrave applicable en
Corse pour lrsquoenseignement de la langue corse lrsquoarticle L 312-11-
1 du code de lrsquoeacuteducation introduit par la loi ndeg 2002-92 du
22 janvier 2002 relative agrave la Corse dispose en effet que la langue
corse est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de lrsquohoraire normal
des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires de Corse Le Conseil cons-
titutionnel nrsquoa pas censureacute cette disposition tant que lrsquoenseigne-
ment eacutetait entendu comme ne revecirctant pas laquo un caractegravere obliga-
toire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo (deacutecision ndeg2001-
454 DC du 17 janvier 2002)
19 Sur cette notion de laquo langues de France raquo voir Les langues de France vingt ans apregraves Glot-topol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html
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o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 4 qui preacutevoyait que lenseigne-
ment bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale pouvait se reacuteali-
ser sous forme immersive laquo dans le respect des objectifs de maicirc-
trise des deux langues agrave chaque niveau denseignement raquo
o La commission a supprimeacute les articles 5 et 6 de la proposition de
loi Le premier manifestait la volonteacute drsquointroduire au sein drsquoun
nouvel article L 151-4-1 du code de lrsquoeacuteducation une deacuterogation
au principe drsquointerdiction de financement des deacutepenses drsquoinves-
tissement des eacutecoles priveacutees par les collectiviteacutes publiques en fa-
veur de lrsquoenseignement bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale
(article 5 de la proposition de loi) Le second eacutetendait la mecircme
deacuterogation au principe drsquointerdiction de financement des deacute-
penses drsquoinvestissement des collegraveges et lyceacutees par les collectiviteacutes
publiques
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 7 qui preacutevoyait drsquoeacutelargir les
cas dans lesquels existe un droit agrave inscrire son enfant dans une
eacutecole drsquoune autre commune afin qursquoil puisse suivre un enseigne-
ment de langue reacutegionale Inscription qui entraicircnait eacutegalement la
prise en charge du forfait scolaire par la commune de reacutesidence
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle 8 qui a pour
objet de renforcer la place et lrsquousage des langues reacutegionales dans
la vie publique en facilitant la traduction en langue reacutegionale des
inscriptions et signaleacutetiques apposeacutees sur les bacirctiments publics
les voies publiques de circulation et les voies navigables ainsi que
sur les principaux supports de communication institutionnelle
des services publics
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 9 qui avait pour objet la pos-
sibiliteacute pour les services publics drsquoeacutetat civil drsquoutiliser dans les
actes drsquoeacutetat civil qursquoils produisent les signes diacritiques des
langues reacutegionales en usage sur le territoire
o Enfin la commission a eacutegalement supprimeacute lrsquoarticle 10 qui preacute-
voyait un gage pour compenser les charges eacuteventuelles creacuteeacutees par
les dispositions de la proposition de loi
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Crsquoest donc un texte largement laquo eacutepureacute raquo par rapport agrave sa version initiale qui a
eacuteteacute soumis agrave la discussion en seacuteance publique en premiegravere lecture agrave lrsquoAssem-
bleacutee nationale Le porteur de la proposition va naturellement utiliser toutes
les potentialiteacutes offertes par la Constitution pour tenter de revenir par le biais
des amendements agrave son esprit initial
Discussion du texte nordm2654 adopteacute par la commission sur la proposition
de loi de M Paul Molac agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion (2548)
85 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes permettant de revenir sur peu de points
cependant agrave lrsquoobjectif initial de la proposition de loi Ainsi lrsquoamendement ndeg64
deacuteposeacute le 10 feacutevrier 2020 par le deacuteputeacute et rapporteur Paul Molac a permis de
rectifier lrsquoaspect purement deacuteclaratoire de lrsquoarticle premier auquel avait conclu
la commission lrsquoamendement ndeg69 deacuteposeacute le mecircme jour par Paul Molac eacutega-
lement permet lrsquoautorisation dans les actes drsquoeacutetat civil des signes diacritiques
des langues reacutegionales lrsquoamendement ndeg80 toujours deacuteposeacute par Paul Molac
modifie la loi Toubon (article 3 du texte de loi deacutefinitif) Mais agrave ce stade de la
discussion parlementaire le texte eacutetait encore dans une version tregraves eacuteloigneacutee
de sa mouture premiegravere
Adoption le 13 feacutevrier 2020 de la laquo petite loi raquo nordm408 par lAssem-
bleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion
Transmission au Seacutenat de la proposition de loi ndeg321 le 14 feacutevrier
2020
o Travaux en commission La commission de la culture de lrsquoeacuteduca-
tion et de la communication a deacutesigneacute Mme Monique de Marco
rapporteure sur la proposition de loi ndeg321 (2019-2020) adopteacutee
par lAssembleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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des langues reacutegionales et agrave leur promotion Commenccedilant par deacute-
clarer que laquo la question de la promotion des langues reacutegionales
deacutepasse les clivages politiques raquo Monique de Marco a proposeacute en
commission dadopter le texte conforme tout en avouant que des
dispositifs leacutegislatifs laquo plus ambitieux pourraient mieux assurer la
promotion des langues reacutegionales raquo Au cours des discussions le
regret de lrsquoabsence de la question de lrsquoenseignement a eacuteteacute exprimeacute
regret qui concerne en reacutealiteacute non la proposition de loi initiale
mais le texte de la commission de lrsquoAssembleacutee nationale laquo La pro-
position de loi de Paul Molac est la bienvenue parce quelle rap-
pelle agrave lEacutetat un certain nombre de ses obligations en ce quelle
preacutevoit un cadrage de la loi Toubon et quelle seacutecurise la place
des langues dans lespace public En revanche nous avons tous
eacuteteacute surpris par labsence totale de reacutefeacuterence agrave lEacuteducation natio-
nale Nous avons donc fait des recherches qui ont montreacute que les
deacuteputeacutes de la majoriteacute preacutesidentielle certainement agrave lappel du
ministre de leacuteducation nationale avaient systeacutematiquement sup-
primeacute tous les articles concernant lenseignement Nous nous re-
trouvons donc avec une magnifique proposition de loi sur les
langues reacutegionales qui ne dit pas un mot de lenseignement
comme sil pouvait y avoir une politique linguistique en faveur des
langues reacutegionales qui ne passe pas par lenseignement raquo Et le
seacutenateur Max Brisson drsquoen appeler agrave la reacuteinsertion des disposi-
tions sur lrsquoenseignement laquo Ma chegravere collegravegue vous avez proposeacute
un vote conforme mais jespegravere que nous ferons preuve dimagi-
nation dans lheacutemicycle pour deacuteposer quelques amendements qui
rappelleront au Gouvernement quil ny a pas de politique linguis-
tique qui ne sappuie sur leacuteducation Sinon cest de lenfu-
mage raquo20
20 Comptes-rendus de la commission de la culture de lrsquoeacuteducation et de la communication
seacuteance du 2 deacutecembre 2020 httpwwwsenatfrcompte-rendu-commis-
sions20201130culturehtmltoc5
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La rapporteure confirme que laquo lrsquoamputation raquo est le fait des deacutepu-
teacutes et tout en srsquoavouant prudente pousse indirectement ses col-
legravegues seacutenateurs agrave user du droit drsquoamendement laquo Nous venons
dentendre un veacuteritable plaidoyer en faveur des langues reacutegio-
nales Mecircme si cette proposition de loi ne donne pas entiegravere satis-
faction car elle a eacuteteacute largement amputeacutee par lAssembleacutee natio-
nale je preacutefegravere my tenir dans un premier temps par prudence
Et libres agrave vous de deacuteposer des amendements raquo
Aucun amendement nayant eacuteteacute deacuteposeacute en commission le texte
qui en eacutetait issu ne comportait toujours pas de dispositions rela-
tives agrave lenseignement
o Seacuteance publique Vingt amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes notam-
ment celui (deacuteposeacute agrave lidentique par des seacutenateurs issus de six
groupes diffeacuterents) preacutevoyant drsquoinseacuterer agrave lrsquoarticle L 442-5-1 du
code de lrsquoeacuteducation un alineacutea ainsi reacutedigeacute laquo La participation fi-
nanciegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un
enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle
L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence
et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune
autre commune agrave la condition que la commune de reacutesidence ne
dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegio-
nale raquo
Sans surprise lrsquoavis du Gouvernement exprimeacute par le ministre
Jean-Michel Blanquer fut deacutefavorable regrettant au passage
laquo drsquoecirctre sans cesse obligeacute drsquooccuper la position du jacobin reacutetif
sur la deacutefensive alors mecircme que nous avons une politique de pro-
motion des langues reacutegionales Simplement agrave certains moments
ndash par exemple avec la rupture de lrsquoeacutequilibre entre enseignement
public et enseignement priveacute ou avec la creacuteation drsquoune obligation
suppleacutementaire pour les communes ndash les propositions vont trop
loin et cela conduit agrave me placer face aux geacuteneacuterositeacutes diverses
dans la position deacutesagreacuteable du gardien des principes ou dans
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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celle du gardien de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral En effet derriegravere ces deacutebats
se pose la question de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et de la posteacuteriteacute de la loi
Carle car vous risquez de creacuteer un deacuteseacutequilibre alors que cette loi
repreacutesentait un point drsquoeacutequilibre raquo21
o Adoption du texte ndeg32 modifieacute par le Seacutenat le 10 deacutecembre 2020
Le Seacutenat a adopteacute trois articles additionnels (2 ter 2 quater et
2 quinquies) qui rejoignent les positions du deacuteputeacute Paul Molac et
reacutetablit lrsquoarticle 3 (modifieacute) de la proposition de loi qui avait eacuteteacute
supprimeacute en premiegravere lecture agrave lrsquoAssembleacutee nationale
Deuxiegraveme lecture
o Rapport sur la proposition de loi modifieacutee par le Seacutenat relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promo-
tion (ndeg3658) ndeg4035 Sur les six articles supprimeacutes agrave lrsquoAssem-
bleacutee lrsquoarticle 3 a eacuteteacute reacutetabli au Seacutenat qui a par ailleurs adopteacute
trois articles additionnels (2 ter 2 quater et 2 quinquies) Lrsquoen-
semble eacutetant conforme agrave lrsquoesprit de la proposition de loi initiale le
rapporteur souhaite que lrsquoAssembleacutee nationale adopte en deu-
xiegraveme lecture un texte identique agrave celui voteacute par le Seacutenat pour
les quatre articles restant en discussion et nrsquoa donc pas preacutesenteacute
drsquoamendements Mais lrsquoarticle 2 quinquies (article 6 du texte deacute-
finitif) ayant eacuteteacute supprimeacute en commission 16 amendements deacute-
poseacutes agrave lrsquoidentique par 115 deacuteputeacutes membres de huit diffeacuterents
groupes parlementaires ont permis de le reacuteintroduire en seacuteance
o Discussion en seacuteance publique le 8 avril 2021 au cours de la-
quelle 262 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes
o Adoption deacutefinitive le 8 avril 2021 en deuxiegraveme lecture de la
proposition de loi TA nordm591 relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
21 Compte rendu inteacutegral des deacutebats Seacuteance du 10 deacutecembre 2020 httpwwwse-natfrseancess202012s20201210s20201210007htmlsection708
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Saisine du Conseil constitutionnel du 22 avril 2021 par au moins
soixante deacuteputeacutes en application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitu-
tion
Soit un jour avant que nrsquoexpire le deacutelai de saisine du Conseil constitu-
tionnel la promulgation de la loi par le preacutesident de la Reacutepublique devant
intervenir dans les 15 jours de lrsquoadoption deacutefinitive La saisine du Conseil
constitutionnel est un acte non grave mais solennel qui perturbe le temps
leacutegislatif ne serait-ce que pour cette raison elle meacuterite un soin particulier
Soin envers lrsquoinstitution agrave laquelle elle srsquoadresse et agrave qui elle impose des
charges suppleacutementaires soin envers la Constitution qursquoelle entend pro-
teacuteger La lettre de saisine ou du moins la version qui a circuleacute manifeste-
ment reacutedigeacutee agrave la hacircte nrsquoest pas agrave la hauteur du seacuterieux qursquoexige de ma-
niegravere impeacuterieuse cette deacutemarche Une lettre de saisine ne saurait se limiter
agrave invoquer en tregraves peu de lignes la violation de laquo principes constitutionnels raquo
sans que ceux-ci ne soient deacutetailleacutes ni mecircme indiqueacutes Le seul article mis
en cause est lrsquoarticle 6 de la loi qui modifie lrsquoarticle L 442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation
II Discussion de la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la loi
relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Les deacuteputeacutes auteurs de la saisine demandent au Conseil constitutionnel la
censure de lrsquoarticle 6 de la loi
laquo Les sixiegraveme et septiegraveme alineacuteas de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacutedu-
cation sont remplaceacutes par un alineacutea ainsi reacutedigeacute
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacuteta-
blissements priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispen-
sant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L
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312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacuteta-
blissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune
agrave la condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dis-
pensant un enseignement de langue reacutegionale raquo
Une commune dont aucune eacutecole ne propose denseignement de langue reacutegio-
nale devrait donc participer aux frais de scolarisation des enfants domicilieacutes
sur son territoire qui suivent un tel enseignement dans un eacutetablissement situeacute
sur une autre commune Le dispositif concerne les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat drsquoassociation qui sont dans les faits majoritaire-
ment associatifs et laiumlques Cet enseignement peut aussi concerner les eacuteta-
blissements confessionnels mais il faut drsquoembleacutee preacuteciser que comme lrsquoa jugeacute
le Conseil constitutionnel dans son examen de la loi dite laquo Carle raquo le principe
de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute pour le leacutegislateur de preacutevoir la
participation des collectiviteacutes publiques au financement du fonctionnement
des eacutetablissements denseignement priveacute sous contrat dassociation
laquo Consideacuterant quil reacutesulte des regravegles ou principes agrave valeur constitution-
nelle (hellip) que le principe de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute
pour le leacutegislateur de preacutevoir sous reacuteserve de fonder son appreacuteciation
sur des critegraveres objectifs et rationnels la participation des collectiviteacutes
publiques au financement du fonctionnement des eacutetablissements den-
seignement priveacutes sous contrat dassociation selon la nature et limpor-
tance de leur contribution agrave laccomplissement de missions denseigne-
ment raquo (deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 cons 6)
Lrsquoinstauration du laquo forfait scolaire communal raquo ne poursuit pas un objectif de
sanction financiegravere des communes deacutemunies doffre en langue reacutegionale mais
celui de les inciter agrave en proposer Drsquoailleurs lrsquoarticle premier de la loi deacutefeacutereacutee
souligne que laquo LrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales concourent agrave lrsquoenseigne-
ment agrave la diffusion et agrave la promotion de ces langues raquo Comme preacuteciseacute plus
loin les maires sont dispenseacutes du paiement drsquoun tel forfait degraves lors qursquoun
enseignement drsquoune langue reacutegionale y compris au titre drsquoune simple initia-
tion est proposeacute dans leur commune
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Il faut souligner que les articles relatifs agrave lrsquoenseignement ont eacuteteacute introduits par
les seacutenateurs Plus exactement ces derniers ont reacuteintroduit la disposition qui
autorise la conclusion de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pour eacutetendre
lrsquooffre drsquoenseignement en langue reacutegionale aux eacutetablissements publics dans le
cadre horaire normal sous des formes speacutecifiques et inseacutereacute trois articles un
premier autorise lrsquoenseignement dit laquo immersif raquo en langue reacutegionale un deu-
xiegraveme le forfait scolaire communal dont il est ici question un troisiegraveme est
relatif agrave lenseignement des langues reacutegionales agrave Mayotte territoire qui du fait
de sa deacutepartementalisation reacutecente ne pouvait jusqualors pas beacuteneacuteficier des
possibiliteacutes offertes aux autres deacutepartements concernant lenseignement de
ces langues
Trois remarques doivent ecirctre faites sur lrsquoinsertion relative agrave lrsquoenseignement des
langues reacutegionales lors des horaires normaux Premiegraverement cette disposition
existe deacutejagrave pour la Collectiviteacute de Corse deuxiegravemement cet enseignement
doit se faire moyennant un accord entre lrsquoEacutetat et les reacutegions (laquo dans le cadre
de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions la collectiviteacute de Corse la Collectiviteacute
europeacuteenne drsquoAlsace ou les collectiviteacutes territoriales reacutegies par lrsquoarticle 73 de
la Constitution raquo) troisiegravemement il srsquoagit drsquoune option facultative qursquoin fine
les familles deacutecident ou non de prendre
En reacutesumeacute et conclusion la disposition de lrsquoarticle 3
1 Existe deacutejagrave pour une collectiviteacute en lrsquooccurrence la collectiviteacute de Corse
2 Est strictement encadreacutee (existence drsquoun accord entre lrsquoEacutetat et les reacute-
gions)
3 Est conforme agrave la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le ca-
ractegravere facultatif de lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale Dans sa deacute-
cision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi relative agrave la Corse le
Conseil constitutionnel a fixeacute le cadre de lrsquoenseignement drsquoune langue
reacutegionale dans le cadre de lrsquohoraire normal en consideacuterant que laquo si lrsquoen-
seignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquohoraire nor-
mal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir pour
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les ensei-
gnants qursquoil ne saurait non plus avoir pour effet de soustraire les eacutelegraveves
aux droits et obligations applicables agrave lrsquoensemble des usagers des eacuteta-
blissements qui assurent le service public de lrsquoenseignement ou sont
associeacutes agrave celui‑ci Consideacuterant qursquoil reacutesulte de ce qui preacutecegravede que sous
reacuteserve que lrsquoenseignement de la langue corse revecircte tant dans son prin-
cipe que dans ses modaliteacutes de mise en œuvre un caractegravere facultatif
[cette disposition] nrsquoest contraire ni au principe drsquoeacutegaliteacute ni agrave aucun
autre principe ou regravegle de valeur constitutionnelle raquo (cons 24 et 25)
La loi du 8 avril 2021 ne propose pas autre chose et srsquoinscrit en tous
points sur cette ligne deacutejagrave jugeacutee par le Conseil constitutionnel
Lrsquoarticle 6 srsquoinsegravere de maniegravere logique et coheacuterente dans lrsquoensemble des articles
de la loi relative agrave lrsquoenseignement Avant drsquoen examiner dans les deacutetails la
conformiteacute agrave la Constitution il faut souligner que le Seacutenat a deacutejagrave voteacute le prin-
cipe de ce forfait scolaire communal agrave deux reprises
1 Il lrsquoa drsquoabord inseacutereacute dans le projet de loi pour une eacutecole de la confiance
en premiegravere lecture Crsquoest la commission mixte paritaire qui a ajouteacute les
mots laquo contribution volontaire raquo ocirctant au forfait son caractegravere obliga-
toire22
2 Il a reacuteaffirmeacute sa position lors de lrsquoexamen de la proposition de loi ici
discuteacutee supprimant les mots laquo contribution volontaire raquo de la loi en vi-
gueur
Agrave cet argument deacutemocratique respectueux du bicameacuteralisme et rappelant que
le Seacutenat laquo assure la repreacutesentation des collectiviteacutes territoriales de la Reacutepu-
22 Loi ndeg2019-791 du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance JORF ndeg0174 du 28 juillet
2019
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Primo cet article est en coheacuterence avec la leacutegislation existante en matiegravere drsquoen-
seignement des langues reacutegionales agrave lrsquoeacutecole confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute
juridique (A) Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contrevien-
nent pas au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des langues
reacutegionales affirmeacute par le Conseil constitutionnel (B) Tertio la loi ne porte pas
atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur une commune une nouvelle
charge (C) Quarto elle ne viole pas non plus en conseacutequence le principe de
libre administration des collectiviteacutes territoriales (D)
A Forfait scolaire communal et respect de lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique
Cette exigence bien que non explicitement qualifieacutee de principe consti-
tutionnel par le Conseil constitutionnel se rattache notamment agrave la notion de
laquo garantie des droits raquo inscrite agrave lrsquoarticle 16 de la Deacuteclaration de 1789 laquo Toute
socieacuteteacute dans laquelle la garantie des droits nrsquoest pas assureacutee ni la seacuteparation
des pouvoirs deacutetermineacutee nrsquoa point de constitution raquo Deacutecoulant de lrsquoarticle 34
de la Constitution la clarteacute de la loi est un eacuteleacutement essentiel de la seacutecuriteacute
juridique agrave laquelle la jurisprudence du Conseil constitutionnel a offert corps
et protection Aussi le principe de laccessibiliteacute et de lintelligibiliteacute de la loi a-
t-il eacuteteacute eacuterigeacute en objectif de valeur constitutionnelle (deacutecision ndeg99-421 DC du
16 deacutecembre 1999)
Mecircme si les principes de clarteacute drsquoaccessibiliteacute et drsquointelligibiliteacute de la loi per-
mettent avant tout drsquoimposer au leacutegislateur laquo drsquoadopter des dispositions suffi-
samment preacutecises et des formules non eacutequivoques afin de preacutemunir les sujets
de droit contre une interpreacutetation contraire agrave la Constitution ou contre le
risque drsquoarbitraire raquo (deacutecision ndeg2004-500 DC du 29 juillet 2004 cons 13) ils
concourent aussi agrave offrir aux citoyens la seacutecuriteacute juridique neacutee drsquoune cons-
truction drsquoensemble coheacuterente et sans rupture Laquelle se base depuis 2008
sur une disposition claire et sans ambiguiumlteacute de la Constitution laquo Les langues
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reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo (75-1) Elle est une in-
vitation aux repreacutesentants de leacutegifeacuterer pour proteacuteger et promouvoir lesdites
langues et la loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit dans la continuiteacute de ce qursquoils ont fait depuis
2008 notamment La coheacuterence est lrsquoune des artegraveres essentielles de lrsquoexigence
de seacutecuriteacute juridique qui impregravegne la jurisprudence du Conseil constitution-
nelle comme celle du Conseil drsquoEacutetat et de la Cour de cassation Sans ecirctre ex-
plicitement eacutenonceacutee par le Conseil constitutionnel lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique est laquo efficiente raquo23 et est au cœur des preacuteoccupations des juges24 comme
de la doctrine Les Cahiers du Conseil constitutionnel lui consacrant un dossier
speacutecial dans sa livraison drsquooctobre 202025
La loi soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel reacutepond agrave lrsquoexigence de
seacutecuriteacute juridique en eacutetant le prolongement de lrsquoœuvre anteacuterieure du leacutegisla-
teur pour commencer la loi du 8 juillet 2013 drsquoorientation et de programma-
tion pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique qui reconnaicirct lrsquoenseigne-
ment bilingue franccedilais langue reacutegionale Dans lrsquoannexe de la loi figurent cinq
mentions compleacutementaires notamment celle concernant la possibiliteacute de
srsquoinscrire dans une eacutecole publique drsquoune autre commune lorsque la commune
de reacutesidence ne propose pas drsquoenseignement de langue reacutegionale Disposition
deacuteclarative qui a trouveacute une application concregravete dans la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) la parti-
cipation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes dans lrsquoenseigne-
ment public doit deacutesormais faire lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune drsquoac-
cueil et la commune de reacutesidence26
La loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle a
ajouteacute un nouveau motif de discrimination baseacute sur laquo la maitrise drsquoune autre
23 Bertrand Mathieu laquo La seacutecuriteacute juridique un principe clandestin mais efficient raquo Droit constitutionnel Meacutelanges Patrice Geacutelard LGDJ 1999 pp 301-305 24 En teacutemoigne notamment le fait que le Conseil drsquoEacutetat lui ait consacreacute deux rapports annuels celui de 1991 De la seacutecuriteacute juridique et celui de 2006 Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit 25 Dossier La seacutecuriteacute juridique Titre VII Les Cahiers du Conseil constitutionnel ndeg5 octobre
2020 26 Lrsquoarticle 104 de la loi NOTRe consacre par ailleurs la compeacutetence partageacutee des collectiviteacutes
locales dans la promotion des langues reacutegionales tout en donnant une place preacutepondeacuterante
agrave la reacutegion telle que preacutevue agrave lrsquoarticle 1er de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de lrsquoaction publique territoriale et drsquoaffirmation des meacutetropoles (MAPTAM)
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langue que le franccedilais raquo qui concerne eacutegalement les langues reacutegionales Celle
du 28 feacutevrier 2017 de programmation relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend
inopeacuterant le deacutecret du 2 Thermidor an II sur lequel se basait notamment le
ministegravere de la justice pour interdire les livrets de famille bilingues Enfin
lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance vient eacutetendre
aux eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives une laquo contribution volontaire raquo
des communes pour la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoins-
crivant dans une eacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionale en
dehors de sa commune de reacutesidence
La loi du 8 avril 2021 soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel nrsquoest que
le prolongement et le compleacutement de lrsquoarticle L 212-8 du Code de lrsquoeacuteducation
qui preacutecise les conditions dans lesquelles pour lrsquoenseignement public une
commune doit contribuer au financement des deacutepenses scolaires drsquoun enfant
reacutesidant sur son territoire et scolariseacute dans une autre commune Elle vient le
compleacuteter de maniegravere parallegravele eacutetendant ce qui existe deacutejagrave pour lrsquoeacutecole pu-
blique agrave lrsquoeacutecole priveacutee sous contrat Confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
elle ne viole par ailleurs aucun article de la Constitution et ne contredit pas
la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le caractegravere facultatif de lrsquoen-
seignement des langues reacutegionales
B Forfait scolaire communal et respect de la jurisprudence du Conseil
constitutionnel sur la langue franccedilaise
Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contreviennent pas
agrave lrsquoarticle 2 alineacutea premier de la Constitution (laquo La langue de la Reacutepublique est
le Franccedilais raquo) et au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des
langues reacutegionales qui en deacutecoule affirmeacute par le Conseil constitutionnel La
langue de la Reacutepublique est et demeure le Franccedilais et agrave aucun moment la
loi du 8 avril 2021 nrsquoentend y porter atteinte Lrsquoapprentissage des langues reacute-
gionales se fait agrave ses cocircteacutes mais dans une mesure permettant leffectiviteacute pour
les enfants agrave acceacuteder agrave lenseignement des langues reacutegionales laquo patrimoine de
la France raquo selon les termes de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Apprentissage
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qui pour certains enfants est lrsquoun des eacuteleacutements de leur laquo deacuteveloppement raquo au
sens de lrsquoalineacutea 10 du Preacuteambule de la Constitution du 27 octobre 1946 (laquo La
Nation assure agrave lrsquoindividu et agrave la familles les conditions neacutecessaires agrave leur
deacuteveloppement raquo)
Ce que creacutee lrsquoarticle 6 agrave travers le forfait ce nrsquoest pas lrsquoenseignement obligatoire
de la langue reacutegionale mais la possibiliteacute de pouvoir beacuteneacuteficier de cet enseigne-
ment (sans prescription de deacutelai) qui demeure facultatif Le rapporteur Paul
Molac le reacuteaffirme au cours de la seacuteance publique du 8 avril 2021 laquo Je ne
suis pas favorable au caractegravere obligatoire de cet enseignement mais je consi-
degravere que tout eacutelegraveve qui souhaite le suivre doit pouvoir le faire raquo27
Ce faisant la loi sans contrevenir agrave la Constitution offre un contenu agrave son
article 75-1 La jurisprudence du Conseil constitutionnel en vertu de laquelle
lrsquoenseignement des langues reacutegionales nrsquoa qursquoun caractegravere facultatif nrsquoest ici
absolument pas remise en cause Dans sa deacutecision ndeg99-412 DC du 15 juin
1999 il a souligneacute que le principe drsquouniciteacute du peuple franccedilais et lrsquoindivisibiliteacute
de la Reacutepublique assurant lrsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi srsquoopposaient agrave laquo
ce que soient reconnus des droits collectifs agrave quelque groupe que ce soit deacutefini
par une communauteacute drsquoorigine de culture de langue ou de croyance raquo En
outre la langue de la Reacutepublique eacutetant le franccedilais il ne peut ecirctre reconnu un
laquo droit agrave pratiquer une langue autre que le franccedilais non seulement dans la vie
priveacutee mais eacutegalement dans la vie publique agrave laquelle la Charte rattache
la justice et les autoriteacutes administratives et services publics raquo
Deux remarques srsquoimposent drsquoembleacutee drsquoune part cette jurisprudence est an-
teacuterieure agrave lrsquoinsertion en 2008 par le pouvoir constituant de lrsquoarticle 75-1 dis-
posant que laquo les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France
raquo Cette remarque drsquoordre contextuel vient srsquoajouter agrave la suivante drsquoautre part
27 Assembleacutee nationale XVe leacutegislature Session ordinaire de 2020-2021 Seacuteance du jeudi 08
avril 2021 httpswwwassemblee-nationalefrdyn15comptes-rendusseancesession-
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la loi du 8 avril 2021 nrsquoentend pas confier agrave lrsquoenseignement des langues reacutegio-
nales un caractegravere obligatoire En cela elle respecte la jurisprudence du Con-
seil constitutionnel preacuteciteacutee (deacutecision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi
relative agrave la Corse)
laquo Si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquoho-
raire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir
pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les en-
seignants (hellip) raquo (cons 24)
Lrsquoenseignement drsquoune langue minoritaire ne devient donc en aucun cas obli-
gatoire Ce qui doit faire laquo lrsquoobjet drsquoun accord raquo ce sont les conditions permet-
tant effectivement agrave des enfants drsquoacceacuteder agrave un enseignement facultatif qui
contribue agrave leur deacuteveloppement proteacutegeacute par ailleurs par lrsquoalineacutea 10 du Preacuteam-
bule de 1946 preacuteciteacute Ni la Constitution ni son interpreacutetation par le Conseil
constitutionnel ne srsquoopposent agrave ce qursquoune commune de reacutesidence participe y
compris de maniegravere obligatoire au financement de la scolarisation dans une
autre commune des enfants souhaitant suivre un tel enseignement Crsquoest don-
ner aux enfants et aux parents de maniegravere effective et efficiente la possibiliteacute
concregravete de beacuteneacuteficier drsquoun enseignement drsquoune langue reacutegionale composante
de leur laquo deacuteveloppement raquo laquelle appartient en vertu de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution au laquo patrimoine de la France raquo
C Forfait scolaire communal et respect du principe drsquoeacutegaliteacute
Tertio la loi ne contrevient pas au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur
une commune une nouvelle charge
Conformeacutement agrave une jurisprudence du Conseil constitutionnel bien eacutetablie le
principe deacutegaliteacute de lrsquoarticle 6 de la Deacuteclaration des droits de lhomme et du
citoyen de 1789 laquo ne soppose ni agrave ce que le leacutegislateur regravegle de faccedilon diffeacuterente
des situations diffeacuterentes ni agrave ce quil deacuteroge agrave leacutegaliteacute pour des raisons
dinteacuterecirct geacuteneacuteral pourvu que dans lun et lautre cas la diffeacuterence de traite-
ment qui en reacutesulte soit en rapport direct avec lobjet de la loi qui leacutetablit raquo
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(pour lrsquoune des reacutecentes application au domaine de lrsquoenseignement dont il sera
ici question deacutecision ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de
la confiance)
En ce qui concerne preacuteciseacutement le caractegravere obligatoire drsquoune nouvelle charge
pour une collectiviteacute celui-ci nrsquoa pas eacuteteacute censureacute par le Conseil constitutionnel
agrave propos de lrsquoexamen de la loi sur lrsquoavenir de lrsquoeacutecole preacuteciteacutee (deacutecision ndeg 2019-
787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de la confiance) Lrsquoarticle 17 de
la loi alors deacutefeacutereacute au Conseil constitutionnel preacutevoyait dans son premier ali-
neacutea
laquo LrsquoEacutetat attribue de maniegravere peacuterenne agrave chaque commune les ressources
correspondant agrave lrsquoaugmentation des deacutepenses obligatoires qursquoelle a
prises en charge en application des articles L 212-4 L 212-5 et L 442-
5 du code de lrsquoeacuteducation au titre de lrsquoanneacutee scolaire 2019-2020 par rap-
port agrave lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 dans la limite de la part drsquoaugmenta-
tion reacutesultant directement de lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoins-
truction obligatoire raquo
Les deacutepenses qui font lrsquoobjet de lrsquoaccompagnement financier en cause sont
celles qui beacuteneacuteficient aux eacutecoles publiques et aux eacutetablissements drsquoenseigne-
ment priveacutes ayant passeacute un contrat drsquoassociation avec lrsquoEacutetat
Lrsquoabaissement agrave trois ans du deacutebut de lrsquoinstruction obligatoire a donc fait pe-
ser des charges nouvelles pour les communes et leur a mecircme imposeacute de par-
ticiper au financement des eacutecoles maternelles priveacutees sous contrat y compris
lorsqursquoelles nrsquoont pas approuveacute ce contrat La diffeacuterence de traitement entre
les communes est reacuteelle selon qursquoelles financcedilaient ou non des classes mater-
nelles avant lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoinstruction obligatoire mais
nrsquoentraicircne pas pour autant une rupture drsquoeacutegaliteacute
Ainsi lrsquoa jugeacute le Conseil constitutionnel dans la deacutecision preacuteciteacutee drsquoune part
il a estimeacute que cette diffeacuterence de traitement reposait sur une diffeacuterence de
situation
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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laquo Les communes qui au cours de lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 avaient
institueacute des classes maternelles ou eacutecoles maternelles publiques ou ap-
prouveacute des contrats drsquoassociation drsquoeacutecoles maternelles priveacutees ont con-
tribueacute agrave ce titre agrave leur financement dans les conditions preacutevues par le
code de lrsquoeacuteducation Ces communes ne sont ainsi pas placeacutees dans une
situation identique agrave celle des autres communes qui nrsquoexerccedilaient pas
deacutejagrave les mecircmes compeacutetences et ne supportaient donc pas les charges
correspondantes raquo (cons 7)
Drsquoautre part le Conseil constitutionnel a jugeacute que la diffeacuterence de traitement
contesteacutee eacutetait en rapport direct avec lrsquoobjet de la loi qui lrsquoeacutetablit
laquo Qui consiste en application de la seconde phrase du quatriegraveme alineacutea
de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution agrave accompagner de ressources finan-
ciegraveres une extension de compeacutetence ayant pour conseacutequence drsquoaugmen-
ter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales raquo (cons 8)
Agrave lrsquoargument opposeacute agrave lrsquoarticle 6 de la loi deacutefeacutereacutee selon lequel ces dispositions
creacuteeraient une diffeacuterence de traitement entre les communes contraire au prin-
cipe deacutegaliteacute devant la loi le Conseil constitutionnel en vertu de sa jurispru-
dence Loi pour une eacutecole de la confiance devrait logiquement apporter la mecircme
reacuteponse Le leacutegislateur entend avec cette loi du 8 avril 2021 donner de ma-
niegravere geacuteneacuterale effectiviteacute agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution agrave travers en par-
ticulier un outil permettant de mettre en œuvre les dispositions de lrsquoarticle 72-
2 de la Constitution relatives aux extensions de compeacutetences imposeacutees aux
collectiviteacutes territoriales Dispositions qui par ailleurs nrsquoobligent pas le leacutegi-
slateur agrave preacutevoir un accompagnement financier de lrsquoensemble des communes
En lien avec cet argument il en reacutesulte que lrsquoarticle 6 ne porte pas atteinte
par ailleurs au principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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D Forfait scolaire communal et respect du principe de libre administra-
tion des collectiviteacutes territoriales
Quarto le forfait scolaire communal nrsquoest ni contraire agrave la lettre de lrsquoar-
ticle 72 de la Constitution ni agrave son interpreacutetation par le Conseil constitution-
nel
En vertu de lrsquoarticle 72 alineacutea 3 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales
srsquoadministrent librement dans les conditions preacutevues par la loi Correacutelative-
ment lrsquoarticle 34 de la Constitution donne agrave la loi compeacutetence pour deacuteterminer
laquo les principes fondamentaux (hellip) de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales de leurs compeacutetences et de leurs ressources raquo Cette libre admi-
nistration doit en outre se concilier avec drsquoautres principes constitutionnels
tels que le principe drsquoeacutegaliteacute et la liberteacute de lrsquoenseignement Crsquoest ainsi que le
Conseil constitutionnel a jugeacute que laquo si le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacute-
gislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce que les conditions essentielles drsquoap-
plication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de lrsquoenseignement deacutepen-
dent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre
les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (voir notamment la deacutecisions ndeg84-
185 DC du 18 janvier 1985 cons 18)
La libre administration est bien un principe constitutionnel mais crsquoest au leacute-
gislateur qursquoil revient sous le controcircle du Conseil constitutionnel drsquoen preacuteci-
ser le contenu Lrsquointervention du leacutegislateur est neacutecessaire pour la deacutefinition
des regravegles de fonctionnement des collectiviteacutes territoriales la deacutefinition des
compeacutetences qui leur sont deacutevolues (transfert creacuteation extension des compeacute-
tences) et en matiegravere de ressources la fixation du taux des impocircts deacutecideacutes par
les Assembleacutees deacutelibeacuteratives locales
Il ressort de la jurisprudence administrative et constitutionnelle que seule la
loi peut creacuteer une obligationsujeacutetion nouvelle agrave la charge drsquoune collectiviteacute
territoriale Le principe de libre administration ne peut donc pas exister en-
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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dehors de lrsquointervention du leacutegislateur lequel nrsquoa pas pour autant toute lati-
tude En drsquoautres termes le principe de libre administration est deacutefini par la
loi mais est aussi proteacutegeacute contre elle qui ne peut notamment pas porter at-
teinte au-delagrave drsquoun certain seuil aux ressources des collectiviteacutes territoriales
restreindre la liberteacute contractuelle intervenir dans les deacutecisions des collecti-
viteacutes territoriales relatives agrave leurs agents ou le fonctionnement de leurs insti-
tutions
En eacutetendant la prise en charge du forfait scolaire communal la loi deacutefeacutereacutee creacutee
une charge suppleacutementaire pour certaines communes
Aux termes du quatriegraveme alineacutea de larticle 72-2 de la Constitution laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales saccom-
pagne de lattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consa-
creacutees agrave leur exercice Toute creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour
conseacutequence daugmenter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales est ac-
compagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Dans le cas ougrave le leacutegislateur
octroie une nouvelle compeacutetence aux collectiviteacutes territoriales (articles 72-2 de
la Constitution et L 1614-1-1 du code geacuteneacuteral des collectiviteacutes territoriales)
il accompagne cette creacuteation de ressources correspondantes uniquement si
lexercice de cette compeacutetence est rendu obligatoire Ainsi en a jugeacute le Conseil
constitutionnel en ajoutant que le leacutegislateur disposait dun pouvoir dappreacute-
ciation en la matiegravere la compensation devant ecirctre naturellement suffisante
pour ne pas constituer une entrave au principe de libre administration
laquo Que ces dispositions ne visent en ce qui concerne les creacuteations et ex-
tensions de compeacutetences que celles qui preacutesentent un caractegravere obliga-
toire que dans cette hypothegravese il nest fait obligation au leacutegislateur
que daccompagner ces creacuteations ou extensions de compeacutetences de res-
sources dont il lui appartient dappreacutecier le niveau sans toutefois deacutena-
turer le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales raquo
(deacutecision ndeg2008-569 DC du 7 aoucirct 2008 Loi instituant un droit daccueil
pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires pendant le temps
scolaire cons 13)
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Le Conseil constitutionnel a jugeacute qursquoen conseacutequence et en lrsquoespegravece le leacutegisla-
teur avait suffisamment deacutetermineacute le niveau des ressources accompagnant la
creacuteation de ce service daccueil pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires pendant le temps scolaire sans meacuteconnaicirctre le quatriegraveme alineacutea de
larticle 72-2 de la Constitution
Lextension de compeacutetences est soumise a fortiori au mecircme reacutegime que la
creacuteation de compeacutetences Elle consiste en leacutelargissement du peacuterimegravetre ou en
la modification de la nature ou de lobjet dune compeacutetence dont lexercice est
deacutejagrave assureacute par les collectiviteacutes territoriales ayant pour conseacutequence de creacuteer
une charge suppleacutementaire pour celles-ci Le droit agrave une compensation finan-
ciegravere nest garanti que si lextension preacutesente un caractegravere obligatoire et le
leacutegislateur en deacutetermine le niveau et les modaliteacutes agrave condition quils nentra-
vent pas la libre administration des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece le principe de libre administration nrsquoest donc pas violeacute par le ca-
ractegravere contraignant que confegravererait la loi deacutefeacutereacutee au forfait scolaire communal
de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation Drsquoune part le Conseil constitu-
tionnel a deacutejagrave comme souligneacute plus haut accepteacute le principe du caractegravere
obligatoire drsquoune nouvelle charge qui nrsquoentraine par ailleurs mecircme pas
lrsquoautomaticiteacute drsquoun accompagnement financier des communes Drsquoautre part
lrsquoargument de proportionnaliteacute est ici deacuteterminant agrave ceux qui avancent un
risque drsquoassegravechement financier de certaines communes rurales contraintes
de prendre en charge la scolarisation dun eacutelegraveve dans une autre commune
mieux doteacutee qui propose lenseignement de la langue reacutegionale (ce qui selon
le deacuteputeacute Molac ne concernerait que 002 des enfants en France) il faut
reacutepondre en mettant en avant lrsquoobjectif incitatif et non sanctionnateur de la
loi Il suffira auxdites communes de proposer un enseignement de langue reacute-
gionale qui ne pourrait repreacutesenter qursquoune heure drsquoinitiation par semaine par
exemple
Une heure drsquoinitiation par semaine pour eacuteviter de payer le forfait scolaire com-
munal lequel ne meacuteconnait pas par ailleurs lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
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les principes constitutionnels drsquoeacutegaliteacute drsquouniciteacute de la langue franccedilaise de la
libre administration des collectiviteacutes territoriales et permet drsquoassurer le deacuteve-
loppement de lrsquoenfant crsquoest bien peu de choses pour censurer une loi souve-
raine adopteacutee qui plus est agrave une eacutecrasante majoriteacute
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
De Raphaeumll SchellenbergerA GreffeObjet Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues ReacutegionalesDate mardi 4 mai 2021 101012Piegraveces jointes Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionalespdf
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loirelative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus desoixante deacuteputeacutes ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texteen application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarerlrsquoinconstitutionnaliteacute de son article 6 Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons ennotre qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre lapleine constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sensNous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notreconsideacuteration respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire
- Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
- Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche
- Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret
- Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne
- Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte
- Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor
- David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion
- Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme
- Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne
- Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
1
M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2
Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
3
On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
- Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie
- Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
Ce message ainsi que les piegraveces jointes sont eacutetablis sous la seule responsabiliteacute de lexpeacutediteur agrave lintention exclusive de ses destinataires ils peuvent contenir des informations confidentielles Toute publication utilisation ou diffusion doit ecirctre autoriseacutee preacutealablement Ce message a fait lobjet dun traitement anti-virusIl est rappeleacute que tout message eacutelectronique est susceptible dalteacuteration au cours de son acheminement sur Internet ________________________________________________________________
Vous pouvez consulter le site de lAssembleacutee nationale agrave ladresse suivante httpwwwassemblee-nationalefr
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
1
M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Association ESKOLIMChez Seaska Route de la Pouponniegravere64250 CAMBO LES BAINSeskolim6gmailcomRepreacutesenteacutee par son President Jean Seacutebastien HAYDN11 chemin de Saint Jean66240 SAINT ESTEVE
CONTRIBUTION EXTERIEURE
Observations sur la conformiteacute agrave la Constitution de laproposition de loi relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
Monsieur le Preacutesident du Conseil constitutionnel Mesdames et Messieurs les
membres du Conseil constitutionnel lrsquoassociation Eskolim souhaite porter agrave votre attention
les observations suivantes tendant agrave deacutemontrer la conformiteacute agrave la Constitution de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Parmi lrsquoensemble des dispositions du texte deacutefeacutereacute la plupart nrsquoont donneacute lieu agrave aucun
deacutebat sur leur conformiteacute agrave la Constitution qui est de toute eacutevidence acquise par exemple au
sujet des traductions dont la constitutionnaliteacute a deacutejagrave indirectement eacuteteacute reconnue (CC 99-412
DC 15 juin 1999 CC ndeg2001-452 DC 6 deacutecembre 2001) ou de lrsquoutilisation des signes
diacritiques sur les actes drsquoeacutetat civil
De plus au-delagrave des apparences drsquoune politique jurisprudentielle initieacutee dans un contexte
speacutecifique le Conseil constitutionnel dispose deacutesormais drsquoun cadre constitutionnel de
reacutefeacuterence transformeacute (1) qui lui permettra de valider les dispositions leacutegislatives du texte dont
il est saisi en particulier lrsquoarticle 4 relatif agrave lrsquoenseignement immersif (2) et lrsquoarticle 6 au sujet
de la participation financiegravere agrave la scolarisation par les communes de reacutesidence (3)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
1 Le renouvellement des normes constitutionnelles de reacutefeacuterence en matiegravere de
langues reacutegionales
11 Les ineacutevitables deacuterogations apporteacutees agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution
Toute regravegle constitutionnelle connaicirct des atteacutenuations et peut ecirctre concilieacutee lrsquoarticle 2
de la Constitution ne fait pas exception Le principe demeure inchangeacute laquo La langue de la
Reacutepublique est le franccedilais raquo Sur ce fondement le Conseil constitutionnel a deacuteveloppeacute dans
les anneacutees 90 et 2000 une jurisprudence vigilante sur lrsquousage du franccedilais mais sans pour
autant refuser toute eacutevolution nous y reviendrons
Cependant lrsquoassociation Eskolim souhaite mettre en eacutevidence lrsquoindeacuteniable
changement de cadre constitutionnel en matiegravere de langues reacutegionales pour au
moins trois raisons
En premier lieu la porteacutee de lrsquoarticle 2 de la Constitution nrsquoest pas figeacutee et peut
eacutevoluer avec le temps En effet le Conseil constitutionnel opegravere reacuteguliegraverement des adaptations
de la porteacutee du texte constitutionnel Parmi de nombreuses illustrations jurisprudentielles la
liberteacute drsquoexpression et de communication protegravege deacutesormais la liberteacute drsquoacceacuteder agrave Internet
(CC ndeg 2009-580 DC 10 juin 2009) et de srsquoy exprimer (CC ndeg2020-801 DC du 18 juin 2020)
La liberteacute du mariage comprend deacutesormais le droit de mettre fin aux liens du mariage (CC ndeg
2016-557 QPC du 29 juillet 2016) La monteacutee en puissance des exigences environnementales
dans le deacutebat public a permis au Conseil constitutionnel de juger qursquoil deacutecoule de la Charte de
lrsquoenvironnement laquo que la protection de lrsquoenvironnement patrimoine commun des ecirctres
humains constitue un objectif de valeur constitutionnelle raquo (CC ndeg2019-823 QPC 31 janvier
2020) Certains fondements constitutionnels que lrsquoon croyait endormis ont eacuteteacute reacuteactiveacutes sous
lrsquoeffet du pouvoir interpreacutetatif agrave lrsquoimage de lrsquoarticle 15 de la DDHC (laquo La socieacuteteacute a le droit de
demander compte agrave tout agent public de son administration raquo) agrave lrsquoorigine drsquoun droit drsquoaccegraves
aux archives publiques (CC ndeg2017-655 QPC 15 septembre 2017) et drsquoun droit drsquoaccegraves aux
documents administratifs (CC ndeg2020-834 QPC 3 avril 2020)
En deuxiegraveme lieu la reacutedaction actuelle de lrsquoarticle 2 de la Constitution ne date pas de
1958 mais drsquoun ajout issu de la loi constitutionnelle ndeg 92-554 du 25 juin 1992 voteacutee dans un
contexte particulier au moment ougrave la France ratifiait le traiteacute de Maastricht et reacutevisait sa
Constitution afin de lever les atteintes agrave la souveraineteacute constateacutees par le Conseil
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
constitutionnel En 1992 lrsquoinsertion de la langue franccedilaise au sein de lrsquoarticle 2 vise agrave rassurer
lrsquoopinion face aux craintes heacutegeacutemoniques de la langue anglaise les langues reacutegionales ne
sont ni viseacutees ni nieacutees dans leur existence et leur rocircle Il est sur ce point particuliegraverement
reacuteveacutelateur de se reacutefeacuterer aux deacuteclarations limpides du Garde des Sceaux Michel Vauzelle lors
des deacutebats parlementaires consacreacutes en 1992 au vote de la reacutevision constitutionnelle laquo Les
langues reacutegionales sont naturellement une richesse de notre patrimoine national Agrave ce
titre le Gouvernement exprime par ma voix lrsquoimmense respect et le soin qursquoil porte agrave cette
richesse de la nation [] Je ne vois pas lagrave drsquoatteinte agrave lrsquouniteacute de la nation mais au
contraire une contribution agrave sa richesse [] Aucune atteinte ne sera porteacutee agrave la politique
de respect de la diversiteacute de nos cultures reacutegionales qui est un eacuteleacutement essentiel du
patrimoine national raquo (JO Assembleacutee nationale p 1021)
Il est donc parfaitement possible pour le Conseil constitutionnel drsquoopeacuterer une
interpreacutetation eacutevolutive de lrsquoarticle 2 afin drsquoadapter la porteacutee de la norme constitutionnelle au
contexte actuel favorable agrave lrsquoapprofondissement de lrsquousage des langues reacutegionales Il nrsquoest
drsquoailleurs pas anodin de constater que la preacutesente proposition de loi a largement transcendeacute les
clivages politiques pour ecirctre voteacutee agrave une large majoriteacute avec drsquoailleurs le soutien de
lrsquoensemble des Preacutesidents de Reacutegion
En troisiegraveme lieu dans sa fameuse deacutecision sur la Charte europeacuteenne des langues
reacutegionales et minoritaires du 15 juin 1999 (ndeg99-412 DC) le Conseil constitutionnel a
implicitement reconnu la compatibiliteacute de lrsquoenseignement immersif ou bilingue avec la
Constitution et en particulier avec lrsquoarticle 2 de la Constitution En effet lrsquoinconstitutionnaliteacute
constateacutee entre la Charte et la Constitution concerne seulement les articles 1 et 7 Or le
consideacuterant 13 de cette deacutecision abusivement preacutesenteacutee comme un verrou absolu en matiegravere
de langues reacutegionales prend soin de preacuteciser laquo que nest contraire agrave la Constitution eu eacutegard agrave
leur nature aucun des autres engagements souscrits par la France dont la plupart au
demeurant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France en
faveur des langues reacutegionales raquo Parmi ces laquo autres engagements souscrits par la France raquo
au sein de la Charte figurent certaines stipulations de lrsquoarticle 8 de la Charte1 selon lequel
1 Article 8 ndash Enseignement1En matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel ces langues sontpratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de lenseignement de la (des)langue(s) officielle(s) de lEtat(hellip)ci agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires concerneacutees ou
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
laquo laquoen matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel
ces langues sont pratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de
lenseignement de la (des) langue(s) officielle(s) de lEtat raquo agrave toute une seacuterie drsquoengagements
Au sein des engagements auxquels la France avait souscrits et sur lesquels le Conseil
constitutionnel srsquoest donc prononceacute on trouve le point 1 c (iv) en vertu duquel la France
srsquoengage laquo agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui
le souhaitent ndash ou le cas eacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant raquo
Or ce renvoi concerne les stipulations suivantes
laquo i agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires
concerneacutees ou
Ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les
langues reacutegionales ou minoritaires ou
Iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales
ou minoritaires comme partie inteacutegrante du curriculum
Autrement dit la France srsquoeacutetait engageacutee au moment de la signature de la Charte agrave
appliquer lrsquoune des trois mesures citeacutees qui concernent lrsquoenseignement laquo dans raquo les langues
reacutegionales ou minoritaires dans le secondaire crsquoest-agrave-dire un enseignement immersif ou
bilingue Cet engagement faisait donc partie des stipulations examineacutees par le Conseil
constitutionnel et le consideacuterant 13 de la deacutecision du 15 juin 1999 affirme clairement que ces
stipulations ne sont pas contraires agrave la Constitution Degraves 1999 lrsquoenseignement immersif en
langue reacutegionale est reconnu par le Conseil constitutionnel comme compatible avec
lrsquoarticle 2 de la Constitution
En quatriegraveme lieu le texte mecircme de la Constitution contient drsquoores et deacutejagrave des
ameacutenagements au principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais
Drsquoune part en vertu de la loi constitutionnelle ndeg 98-610 du 20 juillet 1998 lAccord
de Noumeacutea est constitutionnaliseacute agrave larticle 77 de la Constitution Or cet accord stipule en son
ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les langues reacutegionalesou minoritaires ou
iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales ou minoritairescomme partie inteacutegrante du curriculum ou
iv agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui le souhaitent ndash ou le caseacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
point 133 laquo Les langues kanak sont avec le franccedilais des langues denseignement et de
culture en Nouvelle-Caleacutedonie Leur place dans lenseignement et les meacutedias doit donc ecirctre
accrue et faire lobjet dune reacuteflexion approfondie raquo
Drsquoautre part sous lrsquoeffet de la reacutevision constitutionnelle du 23 juillet 2008 la
Constitution consacre deacutesormais les langues reacutegionales sous lrsquoeffet de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution qui par deacutefinition atteacutenue et deacuteroge agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution et dont la
porteacutee ne saurait ecirctre symbolique
12 La porteacutee de lrsquoancrage constitutionnel des langues reacutegionales minoritaires
En vertu de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution laquo Les langues reacutegionales appartiennent
au patrimoine de la France raquo Sans discussion possible cette nouvelle disposition
constitutionnelle constitue un changement de circonstances de droit permettant drsquoatteacutenuer
fortement la porteacutee des preacuteceacutedentes deacutecisions du Conseil constitutionnel rendues avant la
reacutevision constitutionnelle de 2008 Certains voudraient pourtant reacuteduire ce texte agrave une porteacutee
simplement symbolique et pensent pouvoir drsquoores et deacutejagrave trouver une confirmation dans la
jurisprudence du Conseil constitutionnel La reacutealiteacute contentieuse est beaucoup plus nuanceacutee et
ne preacutejuge rien de lrsquoavenir
Le Conseil constitutionnel nrsquoa eu depuis 2008 qursquoune seule et unique occasion de
preacuteciser la porteacutee de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Dans la deacutecision du 20 mai 2011
(ndeg2011-130 QPC) il eacutetait en effet saisi des dispositions de larticle L 312-10 du code de
leacuteducation relative agrave lenseignement des langues et cultures reacutegionales qui eacutetait contesteacute au
regard de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Or estime le Conseil en 2011 lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution ninstitue pas un droit ou une liberteacute que la Constitution garantit Sa
meacuteconnaissance ne peut donc ecirctre invoqueacutee agrave lappui dune question prioritaire de
constitutionnaliteacute sur le fondement de larticle 61-1 de la Constitution
Il convient de ne pas tirer de conclusions excessives du deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en
QPC de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Drsquoune part cela nrsquoempecircche pas le Conseil constitutionnel de se fonder sur lrsquoarticle
75-1 de la Constitution dans le cadre du controcircle a priori comme crsquoest par exemple le cas
pour les regravegles constitutionnelles en matiegravere de recevabiliteacute des amendements ou des principes
constitutionnels en matiegravere budgeacutetaires
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Drsquoautre part le deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en QPC drsquoune norme constitutionnelle ne
preacutejuge pas drsquoune forme de hieacuterarchie mateacuterielle ou formelle et srsquoexplique seulement par les
speacutecificiteacutes de chacun des offices Par exemple le respect des regravegles du vote de la loi
imposeacutees par la Constitution impossibles agrave invoquer en QPC font pourtant lrsquoobjet drsquoune
vigilance accrue du Conseil constitutionnel dans le cadre du controcircle a priori justifiant
chaque anneacutee de nombreuses censures
En outre bien que non invocable en QPC lrsquoarticle 75-1 teacutemoigne indubitablement de
la volonteacute du constituant de permettre au leacutegislateur drsquoassouplir les conditions drsquousage des
langues reacutegionales en ouvrant davantage la leacutegislation agrave des possibiliteacutes drsquoapprentissage en la
matiegravere En cela lrsquoarticle 75-1 de la Constitution est une atteacutenuation une disposition
deacuterogatoire agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution selon lequel laquo La langue de la Reacutepublique est le
franccedilais raquo Comme le souligne le rapport drsquoun deacuteputeacute en 2015 laquo la preacuteservation et la
protection des langues reacutegionales sont devenues un objectif de valeur constitutionnelle raquo2 Une
telle interpreacutetation serait drsquoailleurs coheacuterente avec les travaux parlementaires agrave lrsquoorigine de la
reacutevision de 2008 pour le preacutesident de la Commission des lois du Seacutenat lrsquoarticle 75-1 permet
de donner laquo un fondement solide aux dispositions leacutegislatives et reacuteglementaires qui favorisent
la protection et le deacuteveloppement des langues reacutegionales sans diminuer la place que le
franccedilais occupe dans notre sphegravere publique raquo3
Enfin dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel
estime que larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi
ndeg2005-380 du 23 avril 2005 est conforme agrave la Constitution Or les dispositions ainsi
valideacutees sont toujours en vigueur dans une reacutedaction identique laquo Un enseignement de
langues et cultures reacutegionales peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des
modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces
langues sont en usage raquo Ainsi tout en estimant que lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ne
constitue pas un droit ou liberteacute constitutionnel directement invocable en QPC le Conseil
constitutionnel a valideacute le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures
reacutegionales
2JJ Urvoas Rapport sur Proposition de loi constitutionnelle ndeg 1618 visant agrave ratifier la Charte europeacuteenne deslangues reacutegionales ou minoritaires 14 janvier 2014
3JJ Hyest Rapport ndeg 387 (2007-2008) sur le projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions dela Ve Reacutepublique fait au nom de la commission des lois du Seacutenat
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Autre signe eacutevident de la porteacutee effective de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le
leacutegislateur a multiplieacute ces derniegraveres anneacutees lrsquoadoption de textes favorisant lrsquousage et
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et leur promotion La loi du 8 juillet 2013
drsquoorientation et de programmation pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique ouvre la
possibiliteacute drsquoun enseignement bilingue franccedilais-langue reacutegionale la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) eacutetablit la participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes par lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale
lrsquoarticle 86 de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle
modifie lrsquoarticle 225-1 du code peacutenal en creacuteant un nouveau cas de discrimination fondeacute sur laquo
la maitrise drsquoune autre langue que le franccedilais raquo la loi du 28 feacutevrier 2017 de programmation
relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend inopeacuterant lrsquointerdiction des livrets de famille
bilingues lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance eacutetend aux
eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives les modaliteacutes drsquoun accord entre les communes pour
la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoinscrivant dans une eacutecole dispensant un
enseignement de langue reacutegionale en dehors de sa commune de reacutesidence Lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution a donc susciteacute une production leacutegislative qui teacutemoigne de la volonteacute du pouvoir
politique de mettre en œuvre une politique en matiegravere de langue et culture reacutegionales La
particulariteacute de la proposition de loi deacutefeacutereacutee est drsquoecirctre la premiegravere loi dont lrsquoobjet exclusif vise
agrave densifier lrsquoenseignement et lrsquousage des langues reacutegionales mais ce texte confirme les
avanceacutees ponctuelles eacutetablies depuis la reacutevision constitutionnelle de 2008
13 La monteacutee en puissance drsquoexigences constitutionnelles favorisant lrsquousage des langues
reacutegionales
Au-delagrave de lrsquoapport indeacuteniable de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution qui inteacuteresse
directement et clairement la possibiliteacute pour le leacutegislateur de favoriser le deacuteveloppement des
langues reacutegionales la jurisprudence du Conseil constitutionnel atteste drsquoune monteacutee en
puissance de plusieurs liberteacutes qui participent indirectement du mecircme mouvement
En premier lieu la liberteacute drsquoexpression et de communication concerne les langues
reacutegionales Degraves la deacutecision ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 le Conseil constitutionnel avait
concilieacute lrsquoarticle 2 de la Constitution avec la liberteacute drsquoexpression et de communication afin de
censurer certaines dispositions imposant lrsquousage du franccedilais tout en faisant notamment une
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
reacutefeacuterence aux langues reacutegionales cette liberteacute laquo implique le droit pour chacun de choisir les
termes jugeacutes par lui les mieux approprieacutes agrave lexpression de sa penseacutee que la langue franccedilaise
eacutevolue comme toute langue vivante en inteacutegrant dans le vocabulaire usuel des termes
de diverses sources quil sagisse dexpressions issues de langues reacutegionales de vocables
dits populaires ou de mots eacutetrangers raquo Or la liberteacute drsquoexpression et de communication a vu
son reacutegime constitutionnel renforceacute depuis plusieurs anneacutees sous lrsquoeffet du triple test de
proportionnaliteacute en vertu duquel les limites apporteacutees agrave ces liberteacutes doivent ecirctre neacutecessaires
adapteacutees et proportionneacutees agrave lrsquoobjectif poursuivi Norme constitutionnelle prioritaire pour le
Conseil constitutionnel la liberteacute drsquoexpression et de communication a justifieacute de nombreuses
censures de dispositions leacutegislatives ces derniegraveres anneacutees (loi laquo Hadopi raquo consultation des
sites Internet terroristes loi laquo Avia raquohellip) Or cette liberteacute dans ses deux composantes de
lrsquoexpression et de la communication permet au locuteur drsquoutiliser une langue reacutegionale et de
ne pas subir drsquoentraves excessives ou injustifieacutees Le deacuteveloppement des langues reacutegionales et
de leur enseignement lrsquoouverture des possibiliteacutes de srsquoexprimer et de communiquer gracircce agrave
ces langues ne sont pas eacutetrangegraveres aux conditions drsquoexercice de la liberteacute drsquoexpression et de
communication Ainsi la monteacutee en puissance de cette liberteacute dans le contentieux
constitutionnel confirme lrsquoeacutevolution favorable du cadre constitutionnel applicable aux langues
reacutegionales
En deuxiegraveme lieu lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant est deacutesormais consacreacute en tant
qursquoexigence constitutionnelle deacutecoulant des alineacuteas 10 et 11 du Preacuteambule de 1946 Ce
principe a drsquoores et deacutejagrave eacuteteacute appliqueacute en matiegravere de droit des eacutetrangers (CC 2019-797 QPC du
26 juillet 2019) mais aussi en droit de la famille au sujet du divorce (CC ndeg 2019-778 DC du
21 mars 2019) ou de lrsquoaccouchement sous le secret (CC 2019-826 QPC du 7 feacutevrier 2020) Il
serait parfaitement coheacuterent que cette exigence constitutionnelle soit applicable en matiegravere
drsquoeacuteducation et drsquoenseignement ce qui permettrait notamment de justifier le renforcement de
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et le soutien financier qui leur est apporteacute
En troisiegraveme lieu la liberteacute de lrsquoenseignement reconnu en tant que principe
constitutionnel (CC ndeg77-87 DC 23 novembre 1977 2016-745 DC 26 janvier 2017)
pourrait permette de proteacuteger constitutionnellement le libre choix des parents en
matiegravere de meacutethodes eacuteducatives conformeacutement agrave la jurisprudence du Conseil drsquoEtat En
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effet dans une deacutecision du 19 juillet 2017 (Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg
406150) le Conseil drsquoEtat estime que le laquo principe de la liberteacute de lrsquoenseignement qui figure
au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la Reacutepublique implique la
possibiliteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement y compris hors de tout contrat conclu
avec lrsquoEtat tout comme le droit pour les parents de choisir pour leurs enfants des
meacutethodes eacuteducatives alternatives agrave celles proposeacutees par le systegraveme scolaire public y
compris lrsquoinstruction au sein de la famille raquo A fortiori la liberteacute de lrsquoenseignement
permettrait au leacutegislateur drsquooffrir aux eacutelegraveves la possibiliteacute de suivre un enseignement immersif
en langue reacutegionale Faire deacutecouler de la liberteacute drsquoenseignement une exigence en matiegravere de
droit des parents de choisir les meacutethodes eacuteducatives serait drsquoailleurs en coheacuterence avec
lrsquoarticle 2 du Protocole 1 de la CEDH4 et lrsquoarticle 14-3 de la Charte des droits fondamentaux
de lUnion europeacuteenne5
Au-delagrave du principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais unchangement de contexte est intervenu depuis lrsquoinsertion en 1992 de cette disposition agravelrsquoarticle 2 de la Constitution Depuis 2008 le pouvoir constituant a consacreacute leslangues reacutegionales agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution de nombreuses reacuteformesleacutegislatives et regraveglementaires ont accompagneacute le deacuteveloppement des langues reacutegionaleset plusieurs principes constitutionnels accompagnent et pourraient agrave lrsquoavenirrenforcer lrsquoassise normative des langues reacutegionalesCrsquoest agrave lrsquoaune de ce cadre constitutionnel renouveleacute et transformeacute en phase avec leseacutevolutions leacutegislatives et sociales que le Conseil constitutionnel appreacuteciera laconstitutionnaliteacute de la preacutesente proposition de loi qui loin de constituer une rupturesrsquoinscrit dans une forme de continuiteacute
2 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi modifie lrsquoarticle L321-10 du code de lrsquoeacuteducation qui
en lrsquoeacutetat dispose
4laquo Nul ne peut se voir refuser le droit agrave lrsquoinstruction LrsquoEacutetat dans lrsquoexercice des fonctions qursquoil assumera dans ledomaine de lrsquoeacuteducation et de lrsquoenseignement respectera le droit des parents drsquoassurer cette eacuteducation et cetenseignement conformeacutement agrave leurs convictions religieuses et philosophiques raquo
5laquo La liberteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement dans le respect des principes deacutemocratiques ainsi quele droit des parents drsquoassurer lrsquoeacuteducation et lrsquoenseignement de leurs enfants conformeacutement agrave leurs convictionsreligieuses philosophiques et peacutedagogiques sont respecteacutes selon les lois nationales qui en reacutegissent lrsquoexercice raquo
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laquo Les langues et cultures reacutegionales appartenant au patrimoine de la France leurenseignement est favoriseacute prioritairement dans les reacutegions ougrave elles sont en usage
Cet enseignement peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefiniespar voie de convention entre lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont enusage
Le Conseil supeacuterieur de leacuteducation est consulteacute conformeacutement aux attributions qui lui sontconfeacutereacutees agrave larticle L 231-1 sur les moyens de favoriser leacutetude des langues et culturesreacutegionales dans les reacutegions ougrave ces langues sont en usage
Lenseignement facultatif de langue et culture reacutegionales est proposeacute dans lune des deuxformes suivantes
1deg Un enseignement de la langue et de la culture reacutegionales
2deg Un enseignement bilingue en langue franccedilaise et en langue reacutegionale
Les familles sont informeacutees des diffeacuterentes offres dapprentissage des langues et culturesreacutegionales raquo
Lrsquoarticle 4 a simplement pour objet drsquoajouter un 3e cas de forme drsquoenseignementfacultatif de langue et culture reacutegionales en preacutevoyant
laquo3deg Un enseignement immersif en langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectifdrsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo
21 Le Conseil constitutionnel peut ne pas se prononcer sur cette disposition
A titre liminaire il semblerait que lrsquoarticle 4 du texte soumis agrave lrsquoexamen du
Conseil constitutionnel ne soit pas contesteacute par les auteurs de la saisine parlementaire agrave en
croire les deacuteclarations publiques de plusieurs deacuteputeacutes Ce point nrsquoest pas sans importance degraves
lors qursquoil confirme le large consensus politique autour de cette disposition et peut avoir une
conseacutequence sur le peacuterimegravetre de lrsquoobjet de la deacutecision rendue
Certes il arrive ponctuellement au Conseil constitutionnel drsquoexaminer drsquooffice
drsquoautres dispositions que celles contesteacutees par la saisine mais depuis lrsquoentreacutee en vigueur de la
QPC et speacutecialement depuis 2016 une telle pratique tend agrave devenir une exception (Deacutecisions
ndeg 2019-794 DC du 20 deacutecembre 2019 ndeg2018-772 DC du 15 novembre 2018 ndeg2016-745
DC du 26 janvier 2017)
De plus lors de lrsquoexamen de la loi pour une eacutecole de la confiance dans sa deacutecision
ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 le Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute examiner
drsquooffice les dispositions de lrsquoarticle 38 creacuteant en vertu de lrsquoarticle L314-2 du code de
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lrsquoeacuteducation une expeacuterimentation de classe immersive en langue eacutetrangegravere ou reacutegionale6 Si le
Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute se saisir drsquooffice de cette disposition expeacuterimentale
crsquoest qursquoimplicitement il nrsquoa pas consideacutereacute qursquoelle posait une difficulteacute manifeste de
constitutionnaliteacute Degraves lors la coheacuterence voudrait qursquoil en aille de mecircme avec les dispositions
de lrsquoarticle 4 de la preacutesente proposition de loi qui ne font que reprendre les grands principes
de lrsquoexpeacuterimentation preacuteceacutedente en preacutevoyant la possibiliteacute drsquoun enseignement immersif en
langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue
franccedilaise
22 Les exigences anciennes poseacutees par le Conseil constitutionnel sont respecteacutees
Elaboreacutee avant la reacutevision constitutionnelle de 2008 consacrant les langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la jurisprudence
du Conseil constitutionnel en matiegravere drsquoenseignement de langue reacutegionale est totalement
respecteacutee par lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
En premier lieu le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement immersif en langue
reacutegionale rend lrsquoarticle 4 conforme agrave la Constitution
Dans plusieurs deacutecisions le Conseil constitutionnel a eu lrsquooccasion de preacuteciser que
seule lrsquoobligation de suivre un enseignement dans une autre langue que le franccedilais serait
contraire agrave la Constitution Ainsi dans la deacutecision ndeg 2001-456 DC du 27 deacutecembre 2001 il
indique que laquo lusage dune langue autre que le franccedilais ne peut ecirctre imposeacute aux eacutelegraveves des
eacutetablissements de lenseignement public ni dans la vie de leacutetablissement ni dans
lenseignement des disciplines autres que celles de la langue consideacutereacutee raquo Le verbe
6Article L314-2 du code de lrsquoeacuteducation laquo Sous reacuteserve de lrsquoautorisation preacutealable des autoriteacutes acadeacutemiques etapregraves concertation avec les eacutequipes peacutedagogiques le projet drsquoeacutecole ou drsquoeacutetablissement mentionneacute agrave lrsquoarticle L401-1 peut preacutevoir la reacutealisation dans des conditions deacutefinies par deacutecret drsquoexpeacuterimentations peacutedagogiquesportant sur tout ou partie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement drsquoune dureacutee limiteacutee agrave cinq ans Cesexpeacuterimentations peuvent concerner lrsquoorganisation peacutedagogique de la classe de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement laliaison entre les diffeacuterents niveaux drsquoenseignement la coopeacuteration avec les partenaires du systegraveme eacuteducatiflrsquoenseignement dans une langue vivante eacutetrangegravere ou reacutegionale les eacutechanges avec des eacutetablissementseacutetrangers drsquoenseignement scolaire lrsquoutilisation des outils et ressources numeacuteriques la reacutepartition des heuresdrsquoenseignement sur lrsquoensemble de lrsquoanneacutee scolaire les proceacutedures drsquoorientation des eacutelegraveves et la participation desparents drsquoeacutelegraveves agrave la vie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement Les collectiviteacutes territoriales sont systeacutematiquementassocieacutees agrave la deacutefinition des grandes orientations des expeacuterimentations meneacutees par lrsquoeacuteducation nationale ainsiqursquoagrave leurs deacuteclinaisons territoriales raquo
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laquo imposer raquo est employeacute agrave la fois au sujet de lrsquousage drsquoune autre langue que le franccedilais et au
sujet de la vie de lrsquoeacutetablissement et de lrsquoenseignement des disciplines autres que celles de la
langue consideacutereacutee Ce qui signifie qursquoil est constitutionnellement possible au leacutegislateur de
permettre aux eacutelegraveves de choisir de maniegravere facultative une telle orientation dans
lrsquoenseignement De mecircme dans sa deacutecision ndeg2001 454 DC du 17 janvier 2002 le Conseil
constitutionnel avait estimeacute que si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre
de lrsquohoraire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires laquo il ne saurait revecirctir pour autant
un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo Et dans la deacutecision
ndeg2004-490 DC 12 feacutevrier 2004 le Conseil indique que lrsquoenseignement de la langue
tahitienne ou dune autre langue polyneacutesienne dans le cadre de lhoraire normal des eacutecoles
maternelles et primaires dans les eacutetablissements du second degreacute et dans les eacutetablissements
denseignement supeacuterieur laquo ne saurait revecirctir pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les
eacutelegraveves ou eacutetudiants ni pour les enseignants raquo
Or en lrsquoespegravece il nrsquoy a absolument aucun doute sur le caractegravere facultatif du 3deg
ajouteacute agrave lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation En effet le premier alineacutea de lrsquoarticle L312-
10 du code de lrsquoeacuteducation est inchangeacute et eacutevoque un laquo enseignement facultatif raquo Le deacuteputeacute
Molac lrsquoa clairement exprimeacute lors des deacutebats laquo lrsquoenseignement immersif tel qursquoil est ici
proposeacute reacutepond agrave cette condition dans la mesure ougrave il ne serait pas imposeacute mais seulement
proposeacute au sein des eacutetablissements publics au cocircteacute de filiegraveres classiques drsquoenseignement la
deacutecision finale restant du ressort des personnes responsables de lrsquoenfant raquo (Rapport du 31
mars 2021)
En deuxiegraveme lieu lrsquoarticle 4 nrsquoa pas pour objet de soustraire les eacutelegraveves aux
droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements drsquoenseignement
Dans plusieurs deacutecisions relatives agrave lrsquousage drsquoune langue reacutegionale le Conseil
constitutionnel rappelle qursquoun enseignement de ce type nrsquoa pas pour laquo pour objet de soustraire
les eacutelegraveves scolariseacutes (hellip) aux droits et obligations applicables agrave lensemble des usagers des
eacutetablissements qui assurent le service public de lenseignement ou sont associeacutes agrave celui-ci raquo
(ndeg 91-290 DC du 9 mai 1991 ndeg 2001-454 DC du 17 janvier 2002) Or lrsquoarticle 4 a
seulement pour objet drsquoouvrir une 3e modaliteacute facultative drsquoenseignement en langue reacutegionale
La proposition de loi ne confegravere pas des droits speacutecifiques agrave des laquo groupes raquo de locuteurs de
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de laquo territoires raquo dans lesquels ces langues
seraient pratiqueacutees Le texte ne modifie pas non plus les modaliteacutes drsquoexpression dans la vie
publique et dans la relation entre lrsquoadministration et les administreacutes De telle sorte que
lrsquoarticle 4 ne creacutee aucun droit particulier pour les eacutelegraveves comme pour les enseignants de nature
agrave les soustraire aux droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements
drsquoenseignement ou associeacutes agrave celui-ci
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 4 opegravere une conciliation raisonnable et eacutequilibreacutee entre
le principe de lrsquoarticle 2 de la Constitution et lrsquoapprentissage des langues reacutegionales
Lrsquoenseignement immersif en lange reacutegionale doit srsquoopeacuterer laquo sans preacutejudice de
lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo Lrsquoarticle 4 prend soin de ne pas
ignorer le principe poseacute par lrsquoarticle 2 de la Constitution et prolonge au niveau leacutegislatif la
conciliation souhaiteacutee par le constituant depuis 2008 avec lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Il
appartiendra au pouvoir regraveglementaire de preacuteciser la mise en œuvre de lrsquoobjectif de bonne
connaissance de la langue franccedilaise qui en toute hypothegravese garantit une conciliation
eacutequilibreacutee entre les regravegles constitutionnelles en preacutesence
Au surplus les retours drsquoexpeacuteriences des expeacuterimentations de classes en
enseignements immersifs permises par lrsquoarticle L 314-2 du code de lrsquoeacuteducation deacutemontrent
que les eacutelegraveves disposent drsquoun niveau en franccedilais plus eacuteleveacute que la moyenne Comme lrsquoindique
le rapport du Seacutenat sur la proposition de loi 19 expeacuterimentations immersives en langue
basque 6 en langue corse et une en langue catalane ont lieu actuellement dans des eacutecoles
publiques Or pour prendre lrsquoexemple de lrsquoenseignement en basque agrave 100 en eacutecole
maternelle objet drsquoune eacutevaluation preacutecise par lrsquoacadeacutemie de Bordeaux en 2019 (Etude
comparative des filiegraveres de maternelle 100 basque bilingue et franccedilais Acadeacutemie de
Bordeaux 2019) laquo lorsque ces enfants arrivaient en CP leur niveau de franccedilais eacutetait
supeacuterieur agrave la moyenne du deacutepartement Cela prouve que le niveau de franccedilais nrsquoavait
absolument pas eacuteteacute toucheacute raquo (Paul Molac Assembleacutee nationale Seacuteance du 8 avril 2021)
En quatriegraveme lieu lrsquoarticle 4 ne fait qursquoeacutetendre la mise en œuvre drsquoune modaliteacute
drsquoenseignement deacutejagrave valideacute par le Conseil constitutionnel
Dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel a valideacute
le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures reacutegionales en estimant que
larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi ndeg2005-380 du 23
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avril 2005 est conforme agrave la Constitution En effet apregraves avoir estimeacute inopeacuterant le grief tireacute
de la violation de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la deacutecision preacutecise laquo que les dispositions
contesteacutees ne sont contraires agrave aucun droit ou liberteacute que la Constitution garantit raquo Par
conseacutequent en vertu de lrsquoautoriteacute que lrsquoarticle 62 de la Constitution confegravere aux deacutecisions du
Conseil constitutionnel les dispositions valideacutees dans cette deacutecision et toujours en vigueur
sont conformes agrave la Constitution Il srsquoagit en particulier de lrsquoalineacutea 2 de la version actuelle de
lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation en vertu duquel laquo Cet enseignement peut ecirctre
dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre
lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont en usage raquo Or lrsquoarticle 4 de la
proposition de loi ne fait qursquoajouter une 3e possibiliteacute de mise en œuvre drsquoun principe deacutejagrave
valideacute par le Conseil constitutionnel modaliteacute facultative et sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune
bonne connaissance de la langue franccedilaise Le leacutegislateur srsquoest donc scrupuleusement
conformeacute aux exigences du Conseil constitutionnel
23 La possibiliteacute drsquoun enseignement immersif peut se preacutevaloir de plusieurs exigences constitutionnelles
En plus de srsquoinscrire dans les lignes jurisprudentielles du Conseil constitutionnel et de
respecter lrsquoarticle 2 de la Constitution lrsquoarticle 4 de la proposition de la loi peut se preacutevaloir
plusieurs normes constitutionnelles
En premier lieu lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en vertu duquel laquo Les langues
reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo constitue un changement de
circonstances de droit issu de la reacutevision constitutionnelle de 2008 qui atteacutenue la porteacutee de
lrsquoarticle 2 de la Constitution et permet ainsi de fonder le principe drsquoen enseignement immersif
et facultatif en langue reacutegionale
En second lieu comme preacuteceacutedemment rappeleacute (cf supra point 13) plusieurs
exigences et liberteacutes constitutionnelles peuvent soutenir le deacuteveloppement des langues
reacutegionales et peser favorablement dans la conciliation opeacutereacutee par le Conseil constitutionnel
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La liberteacute drsquoexpression et de communication garantie par lrsquoarticle 11 de la DDHC
et dont le reacutegime constitutionnel srsquoest renforceacute depuis une dizaine drsquoanneacutees peut permettre de
justifier lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale degraves lors qursquoil srsquoagit drsquoun preacutealable neacutecessaire
agrave lrsquoexpression et agrave la communication dans une autre langue que le franccedilais
Lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant reacutecemment consacreacute sur le fondement des alineacuteas 10
et 11 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 peut permettre au leacutegislateur de diversifier les
possibiliteacutes drsquoapprentissage drsquoune langue et drsquoune culture reacutegionale
La liberteacute de lrsquoenseignement consacreacutee de longue date en tant que principe
fondamental reconnu par les lois de la Reacutepublique implique neacutecessairement comme le
reconnaissent le Conseil drsquoEtat au niveau constitutionnel (CE 19 juillet 2017 Association
Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150) et les textes europeacuteens (article 2 du protocole 1
CEDH article 14-3 Charte des droits fondamentaux de lrsquoUnion europeacuteenne) une possibiliteacute
pour les parents de choisir des meacutethodes eacuteducatives en lien avec leurs convictions
Il est eacutegalement possible drsquoavancer le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction qui
deacutecoule de lrsquoalineacutea 13 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 (CC ndeg2001-450 DC 11
juillet 2001) degraves lors que lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale poursuit un objectif
peacutedagogique auquel les eacutelegraveves doivent pouvoir acceacuteder de maniegravere suffisamment libre et
selon des critegraveres objectifs et rationnels
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi se contente drsquoajouter une modaliteacute de mise enœuvre drsquoun enseignement dont le principe a deacutejagrave eacuteteacute valideacute par le Conseilconstitutionnel La conformiteacute agrave la Constitution de cet enseignement est eacutetablie degraveslors qursquoil est proposeacute de maniegravere facultative sans preacutejudice du respect de lrsquoarticle 2 dela Constitution et qursquoil peut se preacutevaloir de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ainsi quede plusieurs principes constitutionnels comme la liberteacute drsquoexpression lrsquointeacuterecirctsupeacuterieur de lrsquoenfant la liberteacute drsquoenseignement et lrsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction
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3 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi deacutefeacutereacutee modifie lrsquoarticle L442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation en remplaccedilant les alineacuteas 6 et 7 par lrsquoalineacutea suivant
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue
reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de
reacutesidence et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la
condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de
langue reacutegionale raquo
31 Lrsquoimpact subsidiaire et reacutesiduel de lrsquoarticle 6
Au-delagrave des passions et crispations qui peuvent parfois se rencontrer au greacute de deacutebats
relatifs au financement de lrsquoenseignement priveacute la modification apporteacutee par lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi doit ecirctre replaceacutee agrave sa juste porteacutee
En premier le meacutecanisme est subsidiaire En effet la participation financiegravere de la
commune de reacutesidence ne serait solliciteacutee que si cette commune ne laquo dispose pas drsquoeacutecole
dispensant un enseignement de langue reacutegionale raquo Il srsquoagit bien drsquoun laquo enseignement raquo quel
que soit sa forme et son volume Degraves lors comme lrsquoa clairement exprimeacute le deacuteputeacute Paul
Molac devant la Commission des affaires sociales il peut srsquoagir drsquoune laquo initiation drsquoun
enseignement paritaire ou drsquoune immersion raquo (31 mars 2021)
En deuxiegraveme lieu le meacutecanisme est reacutesiduel La participation financiegravere se limite
aux eacutetablissements priveacutes du premier degreacute ndash les eacutecoles ndash ayant conclu un contrat
drsquoassociation Les collegraveges et lyceacutees sont donc exclus du dispositif Un faible nombre
drsquoenfants sera concerneacute et la charge sera donc reacuteduite pour les communes en question De
plus en pratique dans les zones ougrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales est reacutepandu les
eacutecoles drsquoun grand nombre de communes ont deacutejagrave deacuteveloppeacute des offres eacuteducatives
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
En troisiegraveme lieu la participation financiegravere est encadreacutee par la loi En application
de lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation non modifieacute par la preacutesente
proposition de loi les modaliteacutes de calcul de la contribution de la commune de reacutesidence sont
clairement eacutetablies
laquo il est tenu compte des ressources de cette commune du nombre deacutelegraveves de cette
commune scolariseacutes dans la commune daccueil et du coucirct moyen par eacutelegraveve calculeacute sur la base
des deacutepenses de fonctionnement de lensemble des eacutecoles publiques de la commune daccueil
sans que le montant de la contribution par eacutelegraveve puisse ecirctre supeacuterieur au coucirct quaurait
repreacutesenteacute pour la commune de reacutesidence leacutelegraveve sil avait eacuteteacute scolariseacute dans une de ses eacutecoles
publiques raquo
La charge financiegravere obeacuteit donc agrave des regravegles claires objectives rationnelles et deacutejagrave en
vigueur depuis plusieurs anneacutees En effet le laquo forfait scolaire raquo est deacutejagrave pratiqueacute sur le
fondement de lrsquoarticle L212-8 du code de lrsquoeacuteducation lorsqursquoune famille scolarise dans une
eacutecole publique ou priveacutee son enfant dans une autre commune que la commune de reacutesidence
32 Lrsquoabsence de violation de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales et du principe drsquoeacutegaliteacute
Ainsi replaceacutee dans sa juste porteacutee il ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi de violer la Constitution et en particulier les principes applicables en
matiegravere de libre administration des collectiviteacutes territoriales ainsi que le principe drsquoeacutegaliteacute
En premier lieu le Conseil constitutionnel a deacutejagrave valideacute le principe de lrsquoaide agrave
lrsquoenseignement priveacute et en particulier aux langues reacutegionales
Avant mecircme la reacutevision constitutionnelle de 2008 et la conseacutecration des langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le Conseil
constitutionnel avait reconnu que laquo pour concourir agrave la sauvegarde des langues reacutegionales
lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales peuvent apporter leur aide aux associations ayant cet
objet raquo (CC ndeg2001-456 DC 27 deacutecembre 2001)
De plus le Conseil constitutionnel rappelle reacuteguliegraverement que laquo le leacutegislateur peut
preacutevoir loctroi dune aide des collectiviteacutes publiques aux eacutetablissements denseignement
priveacutes selon la nature et limportance de leur contribution agrave laccomplissement de missions
denseignement raquo (CC ndeg93-329 DC du 13 janvier 1994)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
En deuxiegraveme lieu le principe de libre administration ne saurait justifier des
traitements diffeacuterencieacutes dans lrsquoexercice des droits et liberteacutes constitutionnels
En vertu de lrsquoarticle 72 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales srsquoadministrent
librement mais laquo dans les conditions preacutevues par la loi raquo De plus le Conseil constitutionnel
prend soin de preacuteciser que laquo si le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacutegislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce
que les conditions essentielles drsquoapplication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de
lrsquoenseignement deacutependent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas
ecirctre les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (CC ndeg 84-185 DC du 18 janvier 1985 CC
ndeg93-329 du 13 janvier 1994) Plus largement dans la deacutecision du 17 janvier 2002 (ndeg2001-
454 DC) le Conseil constitutionnel affirme que laquo le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales ne saurait conduire agrave ce que les conditions essentielles de mise en
oeuvre des liberteacutes publiques et par suite lensemble des garanties que celles-ci comportent
deacutependent des deacutecisions de collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre les mecircmes
sur lensemble du territoire de la Reacutepublique raquo
Or en lrsquoespegravece si les communes pouvaient librement participer au financement de la
scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous contrat
drsquoassociation lrsquoexercice de la liberteacute drsquoenseignement du principe drsquoeacutegaliteacute devant la loi et du
principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction deacutependrait de la seule volonteacute drsquoune collectiviteacute
territoriale ce que le Conseil constitutionnel condamne Degraves lors que la possibiliteacute drsquoun
enseignement en langue reacutegionale est offerte aux enfants les conditions drsquoaccegraves agrave cet
enseignement doivent pouvoir ecirctre effectives et eacutegales Loin de violer le principe drsquoeacutegaliteacute
devant la loi lrsquoarticle 6 de la proposition de loi en assure au contraire la garantie
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne transfert ni ne creacutee de
nouvelles compeacutetences
Srsquoagissant des ressources des collectiviteacutes locales permettant de leur assurer une libre
administration le quatriegraveme alineacutea de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution preacutevoit laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales srsquoaccompagne de
lrsquoattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consacreacutees agrave leur exercice Toute
creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour conseacutequence drsquoaugmenter les deacutepenses des
collectiviteacutes territoriales est accompagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Le Conseil
constitutionnel veille au respect de cette regravegle drsquoune part pour les transferts de compeacutetence
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entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales et drsquoautre part pour les creacuteations ou extensions de
compeacutetence des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece aucune creacuteation ou transfert de compeacutetence nrsquoest opeacutereacute au sens de
lrsquoarticle 72-2 de la Constitution Il srsquoagit drsquoune simple participation financiegravere agrave caractegravere
subsidiaire reacutesiduel et deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels comme
preacuteceacutedemment eacutevoqueacute (cf supra point 31) De plus le versement de la participation
financiegravere correspond en quelque sorte agrave un allegravegement de charge degraves lors que le coucirct de
lrsquoenfant scolariseacute est reporteacute sur une autre commune que la commune de reacutesidence En
conseacutequence lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne fait que modifier les modaliteacutes drsquoexercice
drsquoune compeacutetence sans en creacuteer ou transfeacuterer une nouvelle
Drsquoailleurs dans la deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 le Conseil
constitutionnel avait jugeacute inopeacuterant le grief tireacute de la violation des articles 72 et 72-2 de la
Constitution agrave propos de la version ancienne de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation en
jugeant que laquo la loi deacutefeacutereacutee nemporte ni creacuteation ni extension des compeacutetences en matiegravere de
contributions des communes aux frais de fonctionnement des classes eacuteleacutementaires des
eacutetablissements du premier degreacute priveacutes sous contrat dassociation que par suite le grief tireacute
de la meacuteconnaissance du principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales manque
en fait raquo
Le Conseil constitutionnel a statueacute dans le mecircme sens au sujet de lrsquoinstitution drsquoun
creacutedit drsquoimpocirct en matiegravere drsquoapprentissage ou de la possibiliteacute de modifier la dureacutee du contrat
drsquoapprentissage mecircme si ces mesures en rendant lrsquoapprentissage plus attrayant ont pour effet
drsquoaugmenter le nombre drsquoapprentis et donc drsquoaccroicirctre les charges des reacutegions dans ce
domaine (CC ndeg 2004-509 DC du 13 janvier 2005)
En quatriegraveme lieu le principe drsquoeacutegaliteacute entre les charges publiques est respecteacute
En effet en plus du caractegravere subsidiaire et reacutesiduel du meacutecanisme la participation
financiegravere preacutevue par lrsquoarticle 6 de la proposition de loi srsquoapplique agrave lrsquoensemble des
communes ne disposant pas drsquoun eacutetablissement dispensant un enseignement de langue
reacutegionale ce qui est coheacuterent au regard de lrsquoobjet de la loi Les critegraveres de la participation
financiegravere preacutevus par lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 sont en tout eacutetat de cause objectifs et
rationnels eacutetablis et mis en œuvre depuis plusieurs anneacutees Les garanties de lrsquoarticle 13 de la
DDHC sont donc respecteacutees
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En cinquiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir du respect
de plusieurs normes constitutionnelles
En affirmant depuis 2008 que les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la
France lrsquoarticle 75-1 de la Constitution donne un ancrage constitutionnel au deacuteveloppement
de lrsquousage et de lrsquoenseignement des langues reacutegionales Or sans la participation financiegravere des
communes de reacutesidence agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat lrsquoenseignement des langues reacutegionales serait compromis Par
conseacutequent lrsquoarticle 6 de la proposition de loi constitue une garantie leacutegale du respect de
lrsquoaffirmation porteacutee par lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Le mecircme raisonnement sera tenu agrave propos de lrsquoensemble des principes constitutionnels
qui donnent une assise agrave lrsquousage et agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales la liberteacute
drsquoexpression et de communication (article 11 DDHC) la liberteacute drsquoenseignement (PFRLR)
dont pourrait deacutecouler une exigence en matiegravere de droit des parents de choisir les meacutethodes
eacuteducatives (CE 19 juillet 2017 Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150)
lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant (alineacutea 10 et 11 du Preacuteambule de 1946) le principe drsquoeacutegaliteacute
(article 6 DDHC) le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction (alineacutea 13 du Preacuteambule de 1946)
Sans lrsquoarticle 6 de la proposition de loi lrsquoeffectiviteacute de lrsquoensemble de ces normes
constitutionnelles serait consideacuterablement atteacutenueacutee et creacuteerait des diffeacuterences de traitement
injustifieacutees et deacutependantes de la volonteacute des communes
De plus lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir drsquoun objectif de
clarification et de seacutecurisation du droit applicable qui peut se rattacher agrave lrsquoarticle 16 de la
DDHC degraves lors que les textes jusqursquoagrave preacutesent applicables eacutetaient ambigus et ont donneacute lieu agrave
des contentieux En rendant obligatoire ce qui eacutetait avant une faculteacute pour autant soumise agrave
un rocircle non neacutegligeable du preacutefet lrsquoarticle 6 de la proposition de loi clarifie le droit
applicable Ainsi une deacuteputeacutee preacutecisait lors des deacutebats parlementaires que laquo lrsquoarticle 34 de la
loi pour une eacutecole de la confiance relatif au versement du forfait scolaire a susciteacute de
nombreux imbroglios administratifs Ainsi chez moi en Bretagne plus de 150 demandes de
meacutediation ont eacuteteacute transmises aux services de lrsquoEacutetat ce qui met en lumiegravere lrsquoambiguiumlteacute de la loi
et les difficulteacutes de son application Je soutiens donc fortement lrsquoarticle 2 quinquies [devenu
article 6] issu des travaux du Seacutenat qui legraveve toute incertitude raquo (Mme Claudia Rouaux
Commission des affaires sociales Assembleacutee nationale 31 mars 2021)
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Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi creacutee un meacutecanisme subsidiaire et reacutesiduel dont laporteacutee est deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels Sans creacuteer ni transfeacutererde nouvelle compeacutetence aux communes cette disposition assure une mise en œuvreuniforme des droits et liberteacutes et peut se preacutevaloir de nombreuses normesconstitutionnelles confeacuterant agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales et agrave son soutienfinancier de solides justifications constitutionnelles
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 12 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 12 mai 2021
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure Mme Mastorpdf
Lettre Wanda Mastor accompagnant la porte eacutetroite
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure MSchellenberger et autrespdf
Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure assESKOLIL pdf
lettre daccompagnement CC
Porte eacutetroite loi langues reacutegionales (2)
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure M Bertrand Pancherpdf
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la lettre de saisine semble reacutedigeacutee de faccedilon deacuteconcertante La deacutefaillance for-
melle nrsquoenlegraveve pas dans lrsquoabsolu de la force aux arguments mais prouve en
lrsquoespegravece lrsquoextrecircme preacutecipitation dans laquelle les choses se sont deacuterouleacutees
Il est neacutecessaire avant de deacutevelopper les arguments au soutien de la confor-
miteacute agrave la Constitution de la loi et notamment de son article 6 de rappeler le
contexte de son adoption La proposition de loi du deacuteputeacute Paul Molac ayant
par ailleurs les faveurs de lrsquoopinion publique et le soutien de treize preacutesidents
de reacutegions4 srsquoinscrit dans un mouvement Celui de la deacutefense et la promotion
des langues reacutegionales lesquelles appartiennent depuis la reacutevision constitu-
tionnelle du 23 juillet 2008 au laquo patrimoine de la France raquo Ce mouvement
favorable agrave la protection et promotion des langues reacutegionales nrsquoest pas uni-
quement parlementaire il est aussi celui drsquoun ensemble plus vaste Celui de
notre propre Constitution (A) des engagements internationaux et de la grande
majoriteacute des constitutions des pays voisins (B) Ensemble qui permet de mieux
saisir le contexte parlementaire franccedilais de lrsquoadoption de la loi (C)
A Le contexte constitutionnel franccedilais
Lrsquoabsence de protection et de valorisation des langues reacutegionales est une
entrave au rayonnement de la France qui loin de srsquoeacutepuiser dans son caractegravere
indivisible que la loi deacutefeacutereacutee ne remet absolument pas en cause srsquoenrichit de
ses composantes Indivisibiliteacute ne signifie pas uniformiteacute Le constituant a lui-
mecircme choisi en 2003 de preacuteciser degraves lrsquoouverture de notre texte suprecircme que
lrsquoorganisation de notre Reacutepublique eacutetait laquo deacutecentraliseacutee raquo Il faut accepter tous
les contours conseacutequences de cette affirmation solennelle qui ne peut avoir
4 Communiqueacute de presse du 16 mars 2021 laquo Notre responsabiliteacute en tant que preacutesidents de
Reacutegion et de Collectiviteacute est de pouvoir garantir et promouvoir la vitaliteacute culturelle et patri-
moniale de nos territoires Cette proposition va dans le bon sens afin que vivent nos langues
que lrsquoUNESCO classe pour une grande majoriteacute drsquoentre elles en grand danger drsquoextinction
Crsquoest en ce sens que la reacutedaction de la proposition de loi dite Molac tel qursquoissue des travaux du Seacutenat va dans le bon sens et que nous appelons de nos vœux une adoption conforme par
les deacuteputeacutes de tous les bancs afin que ce texte puisse entrer en vigueur raquo httpsregions-
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que des applications laquo particuliegraveres raquo sur certaines parties de notre territoire
Les modifications successives de la Constitution ont progressivement em-
prunteacute la voie de la reconnaissance de ces implications toujours plus de dis-
positions deacuterogatoires de reconnaissances mecircme symboliques laquo drsquointeacuterecircts
particuliers raquo drsquolaquo adaptations neacutecessaires raquo pour ne citer qursquoelles jusqursquoagrave la
diffeacuterenciation des normes toujours inscrite dans lrsquoactuel projet de loi consti-
tutionnelle5 Si lrsquoon observe les discussions actuelles relatives au projet de loi
laquo 4D raquo ou la validation par le Conseil constitutionnel en avril dernier de la loi
organique relative agrave la simplification des expeacuterimentations susceptibles decirctre
meneacutees par les collectiviteacutes territoriales6 la voie de la reconnaissance du par-
ticularisme des territoires semble srsquoannoncer
En 2003 la Constitution a deacutecideacute une fois pour toutes que lrsquouniteacute nrsquoeacutetait pas
neacutecessairement lrsquouniformiteacute Parmi les richesses territoriales qui loin drsquoeacutegra-
tigner lrsquoimage drsquoun Eacutetat unitaire la renforce par sa capaciteacute agrave promouvoir la
diversiteacute au sein drsquoune Nation forte les langues reacutegionales occupent une place
particuliegravere Leur entreacutee remarqueacutee dans lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en
2008 nrsquoa eu pour le moment que des effets symboliques sur lesquels il y aura
lieu de revenir plus loin Sous la preacutesidence de Franccedilois Hollande le Parle-
ment fort de la volonteacute drsquoappliquer la 56egraveme promesse de campagne du candi-
dat devenu preacutesident a remis la question des langues reacutegionales sur le devant
de la scegravene institutionnelle Le rapport drsquoinformation ndeg489 de lrsquoAssembleacutee
nationale sur les implications de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales
et minoritaires7 est essentiellement descriptif mais teacutemoigne de la volonteacute
parlementaire de se saisir de nouveau de la question De leurs cocircteacutes les tri-
bunaux ordinaires ont eacutegalement eu lrsquooccasion ces derniegraveres anneacutees de se
pencher sur la question du bilinguisme notamment que ce soit en matiegravere
5 Projet de loi constitutionnelle pour un renouveau de la vie deacutemocratique enregistreacute agrave la Preacutesi-
dence de lrsquoAssembleacutee nationale le 29 aoucirct 2019 6 Deacutecision ndeg2021-816 DC du 15 avril 2021 Loi organique relative agrave la simplification des ex-peacuterimentations mises en œuvre sur le fondement du quatriegraveme alineacutea de larticle 72 de la Cons-
titution 7 M Jean-Jacques Urvoas Rapport drsquoinformation ndeg 489 du 12 deacutecembre 2012 sur les impli-
cations constitutionnelles drsquoune ratification par la France de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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de signaleacutetique routiegravere8 ou de lrsquoutilisation de la langue reacutegionale dans des
organes deacutelibeacuterants9
Agrave lrsquoeacutepoque de lrsquoentreacutee dans lrsquoarticle 75-1 (dont on relegravevera lrsquoeacuteloignement vo-
lontaire vis-agrave-vis de lrsquoarticle 2) de lrsquoeacuteleacutevation des langues reacutegionales au rang de
laquo patrimoine de la France raquo en 2008 certains espoirs avaient pu ecirctre leacutegitime-
ment nourris Cette preacutecision nrsquoest pas loin srsquoen faut le seacutesame pour la rati-
fication de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires10 qui
en lrsquoeacutetat actuel de la jurisprudence du Conseil constitutionnel comporte des
clauses jugeacutees contraires agrave la Constitution
B Le contexte international
Il faut ici distinguer deux niveaux Si le contexte international est favorable
agrave la protection et promotion des langues reacutegionales crsquoest en raison drsquoune part
des engagements internationaux que la France les ait ratifieacutes ou non drsquoautre
part de la plupart des constitutions des pays voisins qui accordent une place
speacutecifique aux langues reacutegionales
En 1999 faisant la synthegravese de ses deacutecisions anteacuterieures11 le
Conseil constitutionnel a estimeacute que la Charte europeacuteenne des langues reacutegio-
nales ou minoritaires ne pouvait au vu des principes drsquouniciteacute du peuple fran-
ccedilais drsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique et drsquoeacutegaliteacute des citoyens ecirctre ratifieacutee
laquo La Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires en ce
qursquoelle confegravere des droits speacutecifiques agrave des groupes de locuteurs de
8 Tribunal administratif de Montpellier 12 octobre 2010 Mouvement reacutepublicain de salut pu-blic ndeg0903420 Cour Administrative dAppel de Marseille 28 juin 2012 Commune de Ville-neuve-les-Maguelone ndeg 10MA04419 9 Conseil drsquoEacutetat 29 mars 2006 Haut-Commissaire de la Reacutepublique en Polyneacutesie Franccedilaise
ndeg282335 Rec 179 22 feacutevrier 2007 Socieacuteteacute immobiliegravere Caroline ndeg299649 Cour adminis-trative drsquoappel de Marseille 13 octobre 2011 Commune de Galeria ndeg10MA02330 10 Table ronde (Jean-Eacuteric Gicquel Ferdinand Meacutelin-Soucramanien Michel Verpeaux et Jean-
Marie Woehrling) organiseacutee par la commission des lois 29 novembre 2012 sur les implications
constitutionnelles de la question de la ratification de la Charte europeacuteenne des langues reacutegio-
nales ou minoritaires httpswwwassemblee-nationalefr14cr-cloi12-13c1213022asp 11 Deacutecisions ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 loi relative agrave lrsquoemploi de la langue franccedilaise et
ndeg96-373 DC du 9 avril 1996 loi organique portant statut drsquoautonomie de la Polyneacutesie fran-ccedilaise
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de territoires dans les-
quels ces langues sont pratiqueacutees porte atteinte aux principes constitu-
tionnels drsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique drsquoeacutegaliteacute devant la loi et drsquouniciteacute
du peuple franccedilais raquo12
Le Conseil se deacutefendant au passage de meacutepriser les langues reacutegionales parmi
les engagements souscrits par la France preacutecise-t-il laquo la plupart au demeu-
rant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France
en faveur des langues reacutegionales raquo
Parmi les arguments qui plaident en faveur drsquoune ratification figure celui de
lrsquoeacutevolution du contexte Honorer de la ratification un texte deacutejagrave signeacute ne se
pose aujourdrsquohui plus dans les mecircmes termes qursquoen 1999 La reacuteforme cons-
titutionnelle de 2003 - dont certains aspects ont eacuteteacute affineacutes en 2008 - rappe-
lons-le a consideacuterablement modifieacute la vision jacobine de notre Reacutepublique qui
reconnaicirct agrave preacutesent lrsquoexistence de laquo populations raquo en son sein les particula-
rismes locaux et les neacutecessiteacutes des adaptations normatives Mais la ratification
par la France de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires
qui avait eacuteteacute voteacutee le 28 janvier 2014 par lrsquoAssembleacutee nationale a eacuteteacute rejeteacutee
par le Seacutenat le 27 octobre 2015 Soulignons que ce rejet nrsquoempecircche pas la
force du contexte qui est au niveau europeacuteen largement favorable agrave la pro-
tection et promotion des langues reacutegionales La France a par ailleurs ratifieacute
drsquoautres conventions internationales qui permettent de poursuivre cet objec-
tif tel est par exemple le cas de la Convention pour la sauvegarde du patri-
moine culturel immateacuteriel de 2003 et de la Convention sur la protection et la
promotion de la diversiteacute des expressions culturelles de 2005 qui rappelle no-
tamment dans son preacuteambule laquo que la diversiteacute linguistique est un eacuteleacutement
fondamental de la diversiteacute culturelle raquo et reacuteaffirme laquo le rocircle fondamental que
joue lrsquoeacuteducation dans la protection et la promotion des expressions cultu-
relles raquo
12 Il srsquoagissait lagrave au demeurant drsquoune affirmation tregraves discutable car la lettre de la Charte
nrsquoimposait nullement mecircme si elle lrsquoencourageait que des droits speacutecifiques fussent reconnus agrave des groupes (voir Guy Carcassonne Rapport au Premier ministre sur la compatibiliteacute entre la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires et la Constitution septembre 1998
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Le droit compareacute apporte la preuve irreacutefutable de lrsquoabsence drsquoin-
compatibiliteacute entre le caractegravere indivisible voire unitaire drsquoune Reacutepublique
et la reconnaissance des langues reacutegionales en son sein13 Un tour drsquohorizon
des textes des constitutions europeacuteennes et des deacutecisions des cours constitu-
tionnelles permet de mettre en eacutevidence plusieurs eacuteleacutements significatifs Le
droit compareacute nous enseigne que juridiquement la question des langues srsquoap-
preacutehende agrave travers deux prismes premiegraverement celui de la forme de lrsquoEacutetat
Le lien entre uniteacute de lrsquoEacutetat et unilinguisme est aussi eacutevident que celui entre
Eacutetat composeacute (reacutegional ou feacutedeacuteral) et multilinguisme Deuxiegravemement celui des
droits des locuteurs Selon cette acception les langues reacutegionales sont tradi-
tionnellement associeacutees de maniegravere neacutegative au principe de non-discrimina-
tion de maniegravere positive aux droits linguistiques dont les locuteurs seraient
les beacuteneacuteficiaires14
En droit constitutionnel compareacute lrsquoameacutenagement de la pluraliteacute linguistique
diverge selon que les Eacutetats reconnaissent une pluri-officialiteacute sur lrsquoensemble
du territoire ou au seul niveau local La premiegravere hypothegravese est celle naturel-
lement choisie par la Belgique et la Suisse Eacutetats feacutedeacuteraux europeacuteens Selon
lrsquoarticle 4 de la Constitution helveacutetique laquo les langues nationales sont lrsquoalle-
mand le franccedilais lrsquoitalien et le romanche raquo De son cocircteacute la Constitution belge
eacutenonce que laquo la Belgique comprend trois communauteacutes la Communauteacute fran-
ccedilaise la Communauteacute flamande et la Communauteacute germanophone raquo et fait
eacutegalement reacutefeacuterence agrave laquo quatre reacutegions linguistiques la reacutegion de langue fran-
ccedilaise la reacutegion de langue neacuteerlandaise la reacutegion bilingue de Bruxelles-Capi-
tale et la reacutegion de langue allemande raquo En revanche lrsquoItalie et lrsquoEspagne ne
reconnaissent qursquoune seule langue officielle sur lrsquoensemble du territoire en
mecircme temps qursquoest ameacutenageacutee au niveau local la pluraliteacute linguistique Crsquoest
13 Voir Veacuteronique Bertile Langues reacutegionales ou minoritaires et Constitution France Espagne et Italie Bruylant Collection Droit public compareacute et europeacuteen 2008 516 p et Wanda Mas-
tor laquo Le statut constitutionnel des langues reacutegionales en droit compareacute De la reconnaissance agrave lrsquoindiffeacuterence raquo Glottopol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html 14 Voir le Rapport explicatif de de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minori-
taires Conseil de lrsquoEurope Seacuterie des Traiteacutes europeacuteens ndeg148 Strasbourg 5 novembre 1992 httpsrmcoeint16800cb620
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ce second type drsquoameacutenagement qui est ici inteacuteressant agrave observer les Eacutetats
reacutegionaux italien15 et espagnol16 eacutetant qualifieacutees par leurs constitutions drsquoin-
divisibles (et mecircme eacutegalement laquo un raquo pour lrsquoItalie alors que le mot a disparu
de la Constitution franccedilaise)
De maniegravere scheacutematique plusieurs postures essentielles vis-agrave-vis des langues
reacutegionales peuvent ecirctre observeacutees dans lrsquoEurope contemporaine La majoriteacute
des pays voisins confegraverent aux langues reacutegionales des statuts juridiques dif-
feacuterencieacutes Coexistent parfois une langue majoritaire et des langues minori-
taires qui beacuteneacuteficient de mesures protectrices Dans ce cas les langues reacutegio-
nales jouissent drsquoune reconnaissance mais seulement au niveau drsquoun terri-
toire identifieacute Pour le dire autrement elles ne concurrencent pas la langue
majoritaire au niveau national Il ne srsquoagit ni plus ni moins que lrsquoexpression
drsquoun droit agrave la diffeacuterence Drsquoun droit agrave la diffeacuterenciation pour reprendre un
terme qui a actuellement les faveurs du gouvernement franccedilais Drsquoautres pays
ont mis en place le bilinguisme officiel qui peut srsquoexprimer dans plusieurs
variantes Ce statut confegravere aux citoyens en principe du moins le choix duti-
liser lune ou lautre des langues officielles dans leurs rapports avec lEacutetat
Cette co-officialiteacute peut srsquoopeacuterer au niveau de tout le territoire (comme en Bel-
gique et en Suisse par exemple) ou seulement sur une partie de celui-ci
(comme en Espagne ou en Italie)
On pourrait objecter que la comparaison avec lrsquoEspagne et lrsquoItalie deux Eacutetats
reacutegionaux nrsquoest pas pertinente Or ces deux Eacutetats sont qualifieacutes de Royaume
ou Reacutepublique indivisibles par leurs constitutions respectives indivisibiliteacute
qui nrsquoempecircche pas la reconnaissance la protection et la promotion des
langues reacutegionales en leur sein Ainsi la Constitution espagnole consacre clai-
rement le multilinguisme dans le cadre de ses communauteacutes autonomes17
15 Article 5 de la Constitution de la Reacutepublique italienne de 1947 laquo La Reacutepublique une et indivisible reconnaicirct et favorise les autonomies locales (hellip) raquo 16 Article 2 de la Constitution du Royaume drsquoEspagne de 1978 laquo La Constitution est fondeacutee
sur luniteacute indissoluble de la nation espagnole patrie commune et indivisible de tous les Es-
pagnols Elle reconnaicirct et garantit le droit agrave lautonomie des nationaliteacutes et des reacutegions qui la
composent et la solidariteacute entre elles raquo 17 En vertu de lrsquoarticle 3 de la Constitution espagnole
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tout comme lrsquoItalie laquo Reacutepublique une et indivisible raquo laquo protegravege par des mesures
particuliegraveres les minoriteacutes linguistiques raquo (article 6)
Cette rapide eacutetude comparative permet de mettre en eacutevidence la singulariteacute de
la France au sein drsquoune Europe qui srsquoenorgueillit de se deacutefinir agrave travers la
richesse de sa diversiteacute Mais notamment depuis la loi constitutionnelle de
2008 le leacutegislateur franccedilais a agi dans le sens drsquoune protection et promotion
des langues reacutegionales la loi du 8 avril 2021 srsquoinscrivant dans ce processus
logique et coheacuterent
C Le contexte parlementaire franccedilais
La loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit donc dans un mouvement leacutegislatif reacutepondant agrave
lrsquoadresse du pouvoir constituant Laquelle concerne aussi le pouvoir exeacutecutif
La politique du ministegravere de lrsquoeacuteducation pour la deacutetermination du nombre de
places pour lrsquoagreacutegation et le CAPES des langues reacutegionales devrait aller de
pair avec les lois qui mettent en œuvre lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Ainsi
pour la langue basque il nrsquoy a pas eu de concours drsquoagreacutegation externe depuis
2018 anneacutee 2021 comprise il y a un seul poste pour lrsquoagreacutegation interne en
2021 2 pour le CAPES externe en 2021 et 2 pour le CAPES interne Pour la
langue bretonne et pour ne citer que lrsquoanneacutee en cours il y a un poste agrave lrsquoagreacute-
gation externe pas de concours pour lrsquoagreacutegation interne deux postes pour
le CAPES externe et 2 pour le CAPES interne Pour la langue corse il nrsquoy a pas
de concours cette anneacutee pour lrsquoagreacutegation externe et interne deux pour le
CAPES externe et aucun pour le CAPES interne Pour lrsquooccitan toujours pour
2021 il y a un poste pour lrsquoagreacutegation externe pas de concours pour lrsquoagreacute-
gation interne quatre pour le CAPES externe et un pour le CAPES interne
Ceci eacutetant juste preacuteciseacute il faut agrave preacutesent se concentrer sur lrsquoaction parlemen-
taire de mise en œuvre des dispositions de la Constitution
laquo 1 Le castillan est la langue espagnole officielle de lEacutetat Tous les Espagnols ont le devoir de
le connaicirctre et le droit de lutiliser
2 Les autres langues espagnoles sont aussi officielles dans leurs communauteacutes autonomes
respectives conformeacutement agrave leurs statuts
3 La richesse de la diversiteacute linguistique de lEspagne est un patrimoine culturel qui fait lobjet dun respect et dune protection speacuteciales raquo
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Videacutee drsquoune large part de sa substance en premiegravere lecture par la commission
des affaires culturelles et de leacuteducation de lrsquoAssembleacutee nationale la proposi-
tion de loi du deacuteputeacute Molac a ensuite retrouveacute ses objectifs initiaux gracircce agrave la
proceacutedure parlementaire qui donne agrave notre reacutegime repreacutesentatif tout son
sens discussions en commissions deacutebats en seacuteances publiques navette
amendements multiples pour parvenir agrave une adoption deacutefinitive agrave une majo-
riteacute non importante mais eacutecrasante des voix Agrave quelques heures de la pro-
mulgation de la loi par le Preacutesident de la Reacutepublique une partie de cette mecircme
majoriteacute a neacuteanmoins saisi le Conseil constitutionnel dans le cadre de lrsquoarticle
61 alineacutea 2 de la Constitution
Deacutepocirct de la proposition de loi
Deacuteposeacutee le 30 deacutecembre 2019 par le deacuteputeacute Paul Molac et autres deacuteputeacutes18
la proposition de loi apporte des mesures de protection et de promotion des
langues reacutegionales dans trois domaines le patrimoine lrsquoenseignement les
services publics via la signaleacutetique et les actes drsquoeacutetat civil Elle a eacuteteacute adopteacutee
le 8 avril 2021 par 247 voix pour 76 voix contre et 19 abstentions au terme
de la proceacutedure ci-dessous rappeleacutee
Renvoi agrave la commission des affaires culturelles et de leacuteducation
La proposition de loi a eacuteteacute renvoyeacutee agrave la commission des affaires cultu-
relles et de leacuteducation agrave deacutefaut de constitution drsquoune commission speacuteciale
dans les deacutelais preacutevus par les articles 30 et 31 du Regraveglement Le rapport fait
au nom de la commission par le deacuteputeacute Paul Molac nommeacute par elle a eacuteteacute
enregistreacute agrave la preacutesidence de lrsquoAssembleacutee nationale le 5 feacutevrier 2020 Preacutesenteacute
18 Sylvain BRIAL Jean-Feacutelix ACQUAVIVA Michel CASTELLANI Jean-Michel CLEacuteMENT
Paul-Andreacute COLOMBANI Charles de COURSON Jeanine DUBIEacute Freacutedeacuterique DUMAS Mrsquojid
EL GUERRAB Olivier FALORNI Yannick FAVENNEC BECOT Sandrine JOSSO Franccedilois-Mi-
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comme un moyen de deacutefendre les laquo langues de France raquo19 en danger et srsquoap-
puyant sur lrsquoexistant qui est la marque drsquoune eacutevolution rappeleacutee plus loin (II)
le texte entend laquo aller plus loin raquo en rehaussant la protection lrsquoaccessibiliteacute et
la visibiliteacute des langues reacutegionales dans les trois domaines preacuteciteacutes
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle premier re-
latif au patrimoine Ce dernier preacutecise en compleacutetant ainsi lrsquoar-
ticle L 1 du code du patrimoine que la conservation et la con-
naissance du patrimoine immateacuteriel sont drsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et que
les langues reacutegionales font partie de ce patrimoine
o La commission a adopteacute sans modifications lrsquoarticle 2 qui pro-
pose drsquoinclure parmi les treacutesors nationaux les biens preacutesentant
un inteacuterecirct majeur pour la connaissance des langues franccedilaise et
reacutegionales Le texte preacutevoit en effet outre pour les langues reacutegio-
nales des mesures de protection de notre patrimoine linguistique
dans une deacutemarche globale
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 3 qui disposait que des con-
ventions passeacutees entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pouvaient preacutevoir que
la langue reacutegionale est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de
lrsquohoraire normal des enseignements (des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires des collegraveges et des lyceacutees des territoires concerneacutes) Il
ne srsquoagissait pourtant que drsquoeacutetendre une regravegle deacutejagrave applicable en
Corse pour lrsquoenseignement de la langue corse lrsquoarticle L 312-11-
1 du code de lrsquoeacuteducation introduit par la loi ndeg 2002-92 du
22 janvier 2002 relative agrave la Corse dispose en effet que la langue
corse est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de lrsquohoraire normal
des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires de Corse Le Conseil cons-
titutionnel nrsquoa pas censureacute cette disposition tant que lrsquoenseigne-
ment eacutetait entendu comme ne revecirctant pas laquo un caractegravere obliga-
toire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo (deacutecision ndeg2001-
454 DC du 17 janvier 2002)
19 Sur cette notion de laquo langues de France raquo voir Les langues de France vingt ans apregraves Glot-topol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html
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o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 4 qui preacutevoyait que lenseigne-
ment bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale pouvait se reacuteali-
ser sous forme immersive laquo dans le respect des objectifs de maicirc-
trise des deux langues agrave chaque niveau denseignement raquo
o La commission a supprimeacute les articles 5 et 6 de la proposition de
loi Le premier manifestait la volonteacute drsquointroduire au sein drsquoun
nouvel article L 151-4-1 du code de lrsquoeacuteducation une deacuterogation
au principe drsquointerdiction de financement des deacutepenses drsquoinves-
tissement des eacutecoles priveacutees par les collectiviteacutes publiques en fa-
veur de lrsquoenseignement bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale
(article 5 de la proposition de loi) Le second eacutetendait la mecircme
deacuterogation au principe drsquointerdiction de financement des deacute-
penses drsquoinvestissement des collegraveges et lyceacutees par les collectiviteacutes
publiques
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 7 qui preacutevoyait drsquoeacutelargir les
cas dans lesquels existe un droit agrave inscrire son enfant dans une
eacutecole drsquoune autre commune afin qursquoil puisse suivre un enseigne-
ment de langue reacutegionale Inscription qui entraicircnait eacutegalement la
prise en charge du forfait scolaire par la commune de reacutesidence
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle 8 qui a pour
objet de renforcer la place et lrsquousage des langues reacutegionales dans
la vie publique en facilitant la traduction en langue reacutegionale des
inscriptions et signaleacutetiques apposeacutees sur les bacirctiments publics
les voies publiques de circulation et les voies navigables ainsi que
sur les principaux supports de communication institutionnelle
des services publics
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 9 qui avait pour objet la pos-
sibiliteacute pour les services publics drsquoeacutetat civil drsquoutiliser dans les
actes drsquoeacutetat civil qursquoils produisent les signes diacritiques des
langues reacutegionales en usage sur le territoire
o Enfin la commission a eacutegalement supprimeacute lrsquoarticle 10 qui preacute-
voyait un gage pour compenser les charges eacuteventuelles creacuteeacutees par
les dispositions de la proposition de loi
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Crsquoest donc un texte largement laquo eacutepureacute raquo par rapport agrave sa version initiale qui a
eacuteteacute soumis agrave la discussion en seacuteance publique en premiegravere lecture agrave lrsquoAssem-
bleacutee nationale Le porteur de la proposition va naturellement utiliser toutes
les potentialiteacutes offertes par la Constitution pour tenter de revenir par le biais
des amendements agrave son esprit initial
Discussion du texte nordm2654 adopteacute par la commission sur la proposition
de loi de M Paul Molac agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion (2548)
85 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes permettant de revenir sur peu de points
cependant agrave lrsquoobjectif initial de la proposition de loi Ainsi lrsquoamendement ndeg64
deacuteposeacute le 10 feacutevrier 2020 par le deacuteputeacute et rapporteur Paul Molac a permis de
rectifier lrsquoaspect purement deacuteclaratoire de lrsquoarticle premier auquel avait conclu
la commission lrsquoamendement ndeg69 deacuteposeacute le mecircme jour par Paul Molac eacutega-
lement permet lrsquoautorisation dans les actes drsquoeacutetat civil des signes diacritiques
des langues reacutegionales lrsquoamendement ndeg80 toujours deacuteposeacute par Paul Molac
modifie la loi Toubon (article 3 du texte de loi deacutefinitif) Mais agrave ce stade de la
discussion parlementaire le texte eacutetait encore dans une version tregraves eacuteloigneacutee
de sa mouture premiegravere
Adoption le 13 feacutevrier 2020 de la laquo petite loi raquo nordm408 par lAssem-
bleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion
Transmission au Seacutenat de la proposition de loi ndeg321 le 14 feacutevrier
2020
o Travaux en commission La commission de la culture de lrsquoeacuteduca-
tion et de la communication a deacutesigneacute Mme Monique de Marco
rapporteure sur la proposition de loi ndeg321 (2019-2020) adopteacutee
par lAssembleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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des langues reacutegionales et agrave leur promotion Commenccedilant par deacute-
clarer que laquo la question de la promotion des langues reacutegionales
deacutepasse les clivages politiques raquo Monique de Marco a proposeacute en
commission dadopter le texte conforme tout en avouant que des
dispositifs leacutegislatifs laquo plus ambitieux pourraient mieux assurer la
promotion des langues reacutegionales raquo Au cours des discussions le
regret de lrsquoabsence de la question de lrsquoenseignement a eacuteteacute exprimeacute
regret qui concerne en reacutealiteacute non la proposition de loi initiale
mais le texte de la commission de lrsquoAssembleacutee nationale laquo La pro-
position de loi de Paul Molac est la bienvenue parce quelle rap-
pelle agrave lEacutetat un certain nombre de ses obligations en ce quelle
preacutevoit un cadrage de la loi Toubon et quelle seacutecurise la place
des langues dans lespace public En revanche nous avons tous
eacuteteacute surpris par labsence totale de reacutefeacuterence agrave lEacuteducation natio-
nale Nous avons donc fait des recherches qui ont montreacute que les
deacuteputeacutes de la majoriteacute preacutesidentielle certainement agrave lappel du
ministre de leacuteducation nationale avaient systeacutematiquement sup-
primeacute tous les articles concernant lenseignement Nous nous re-
trouvons donc avec une magnifique proposition de loi sur les
langues reacutegionales qui ne dit pas un mot de lenseignement
comme sil pouvait y avoir une politique linguistique en faveur des
langues reacutegionales qui ne passe pas par lenseignement raquo Et le
seacutenateur Max Brisson drsquoen appeler agrave la reacuteinsertion des disposi-
tions sur lrsquoenseignement laquo Ma chegravere collegravegue vous avez proposeacute
un vote conforme mais jespegravere que nous ferons preuve dimagi-
nation dans lheacutemicycle pour deacuteposer quelques amendements qui
rappelleront au Gouvernement quil ny a pas de politique linguis-
tique qui ne sappuie sur leacuteducation Sinon cest de lenfu-
mage raquo20
20 Comptes-rendus de la commission de la culture de lrsquoeacuteducation et de la communication
seacuteance du 2 deacutecembre 2020 httpwwwsenatfrcompte-rendu-commis-
sions20201130culturehtmltoc5
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La rapporteure confirme que laquo lrsquoamputation raquo est le fait des deacutepu-
teacutes et tout en srsquoavouant prudente pousse indirectement ses col-
legravegues seacutenateurs agrave user du droit drsquoamendement laquo Nous venons
dentendre un veacuteritable plaidoyer en faveur des langues reacutegio-
nales Mecircme si cette proposition de loi ne donne pas entiegravere satis-
faction car elle a eacuteteacute largement amputeacutee par lAssembleacutee natio-
nale je preacutefegravere my tenir dans un premier temps par prudence
Et libres agrave vous de deacuteposer des amendements raquo
Aucun amendement nayant eacuteteacute deacuteposeacute en commission le texte
qui en eacutetait issu ne comportait toujours pas de dispositions rela-
tives agrave lenseignement
o Seacuteance publique Vingt amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes notam-
ment celui (deacuteposeacute agrave lidentique par des seacutenateurs issus de six
groupes diffeacuterents) preacutevoyant drsquoinseacuterer agrave lrsquoarticle L 442-5-1 du
code de lrsquoeacuteducation un alineacutea ainsi reacutedigeacute laquo La participation fi-
nanciegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un
enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle
L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence
et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune
autre commune agrave la condition que la commune de reacutesidence ne
dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegio-
nale raquo
Sans surprise lrsquoavis du Gouvernement exprimeacute par le ministre
Jean-Michel Blanquer fut deacutefavorable regrettant au passage
laquo drsquoecirctre sans cesse obligeacute drsquooccuper la position du jacobin reacutetif
sur la deacutefensive alors mecircme que nous avons une politique de pro-
motion des langues reacutegionales Simplement agrave certains moments
ndash par exemple avec la rupture de lrsquoeacutequilibre entre enseignement
public et enseignement priveacute ou avec la creacuteation drsquoune obligation
suppleacutementaire pour les communes ndash les propositions vont trop
loin et cela conduit agrave me placer face aux geacuteneacuterositeacutes diverses
dans la position deacutesagreacuteable du gardien des principes ou dans
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celle du gardien de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral En effet derriegravere ces deacutebats
se pose la question de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et de la posteacuteriteacute de la loi
Carle car vous risquez de creacuteer un deacuteseacutequilibre alors que cette loi
repreacutesentait un point drsquoeacutequilibre raquo21
o Adoption du texte ndeg32 modifieacute par le Seacutenat le 10 deacutecembre 2020
Le Seacutenat a adopteacute trois articles additionnels (2 ter 2 quater et
2 quinquies) qui rejoignent les positions du deacuteputeacute Paul Molac et
reacutetablit lrsquoarticle 3 (modifieacute) de la proposition de loi qui avait eacuteteacute
supprimeacute en premiegravere lecture agrave lrsquoAssembleacutee nationale
Deuxiegraveme lecture
o Rapport sur la proposition de loi modifieacutee par le Seacutenat relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promo-
tion (ndeg3658) ndeg4035 Sur les six articles supprimeacutes agrave lrsquoAssem-
bleacutee lrsquoarticle 3 a eacuteteacute reacutetabli au Seacutenat qui a par ailleurs adopteacute
trois articles additionnels (2 ter 2 quater et 2 quinquies) Lrsquoen-
semble eacutetant conforme agrave lrsquoesprit de la proposition de loi initiale le
rapporteur souhaite que lrsquoAssembleacutee nationale adopte en deu-
xiegraveme lecture un texte identique agrave celui voteacute par le Seacutenat pour
les quatre articles restant en discussion et nrsquoa donc pas preacutesenteacute
drsquoamendements Mais lrsquoarticle 2 quinquies (article 6 du texte deacute-
finitif) ayant eacuteteacute supprimeacute en commission 16 amendements deacute-
poseacutes agrave lrsquoidentique par 115 deacuteputeacutes membres de huit diffeacuterents
groupes parlementaires ont permis de le reacuteintroduire en seacuteance
o Discussion en seacuteance publique le 8 avril 2021 au cours de la-
quelle 262 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes
o Adoption deacutefinitive le 8 avril 2021 en deuxiegraveme lecture de la
proposition de loi TA nordm591 relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
21 Compte rendu inteacutegral des deacutebats Seacuteance du 10 deacutecembre 2020 httpwwwse-natfrseancess202012s20201210s20201210007htmlsection708
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Saisine du Conseil constitutionnel du 22 avril 2021 par au moins
soixante deacuteputeacutes en application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitu-
tion
Soit un jour avant que nrsquoexpire le deacutelai de saisine du Conseil constitu-
tionnel la promulgation de la loi par le preacutesident de la Reacutepublique devant
intervenir dans les 15 jours de lrsquoadoption deacutefinitive La saisine du Conseil
constitutionnel est un acte non grave mais solennel qui perturbe le temps
leacutegislatif ne serait-ce que pour cette raison elle meacuterite un soin particulier
Soin envers lrsquoinstitution agrave laquelle elle srsquoadresse et agrave qui elle impose des
charges suppleacutementaires soin envers la Constitution qursquoelle entend pro-
teacuteger La lettre de saisine ou du moins la version qui a circuleacute manifeste-
ment reacutedigeacutee agrave la hacircte nrsquoest pas agrave la hauteur du seacuterieux qursquoexige de ma-
niegravere impeacuterieuse cette deacutemarche Une lettre de saisine ne saurait se limiter
agrave invoquer en tregraves peu de lignes la violation de laquo principes constitutionnels raquo
sans que ceux-ci ne soient deacutetailleacutes ni mecircme indiqueacutes Le seul article mis
en cause est lrsquoarticle 6 de la loi qui modifie lrsquoarticle L 442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation
II Discussion de la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la loi
relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Les deacuteputeacutes auteurs de la saisine demandent au Conseil constitutionnel la
censure de lrsquoarticle 6 de la loi
laquo Les sixiegraveme et septiegraveme alineacuteas de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacutedu-
cation sont remplaceacutes par un alineacutea ainsi reacutedigeacute
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacuteta-
blissements priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispen-
sant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L
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312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacuteta-
blissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune
agrave la condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dis-
pensant un enseignement de langue reacutegionale raquo
Une commune dont aucune eacutecole ne propose denseignement de langue reacutegio-
nale devrait donc participer aux frais de scolarisation des enfants domicilieacutes
sur son territoire qui suivent un tel enseignement dans un eacutetablissement situeacute
sur une autre commune Le dispositif concerne les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat drsquoassociation qui sont dans les faits majoritaire-
ment associatifs et laiumlques Cet enseignement peut aussi concerner les eacuteta-
blissements confessionnels mais il faut drsquoembleacutee preacuteciser que comme lrsquoa jugeacute
le Conseil constitutionnel dans son examen de la loi dite laquo Carle raquo le principe
de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute pour le leacutegislateur de preacutevoir la
participation des collectiviteacutes publiques au financement du fonctionnement
des eacutetablissements denseignement priveacute sous contrat dassociation
laquo Consideacuterant quil reacutesulte des regravegles ou principes agrave valeur constitution-
nelle (hellip) que le principe de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute
pour le leacutegislateur de preacutevoir sous reacuteserve de fonder son appreacuteciation
sur des critegraveres objectifs et rationnels la participation des collectiviteacutes
publiques au financement du fonctionnement des eacutetablissements den-
seignement priveacutes sous contrat dassociation selon la nature et limpor-
tance de leur contribution agrave laccomplissement de missions denseigne-
ment raquo (deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 cons 6)
Lrsquoinstauration du laquo forfait scolaire communal raquo ne poursuit pas un objectif de
sanction financiegravere des communes deacutemunies doffre en langue reacutegionale mais
celui de les inciter agrave en proposer Drsquoailleurs lrsquoarticle premier de la loi deacutefeacutereacutee
souligne que laquo LrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales concourent agrave lrsquoenseigne-
ment agrave la diffusion et agrave la promotion de ces langues raquo Comme preacuteciseacute plus
loin les maires sont dispenseacutes du paiement drsquoun tel forfait degraves lors qursquoun
enseignement drsquoune langue reacutegionale y compris au titre drsquoune simple initia-
tion est proposeacute dans leur commune
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Il faut souligner que les articles relatifs agrave lrsquoenseignement ont eacuteteacute introduits par
les seacutenateurs Plus exactement ces derniers ont reacuteintroduit la disposition qui
autorise la conclusion de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pour eacutetendre
lrsquooffre drsquoenseignement en langue reacutegionale aux eacutetablissements publics dans le
cadre horaire normal sous des formes speacutecifiques et inseacutereacute trois articles un
premier autorise lrsquoenseignement dit laquo immersif raquo en langue reacutegionale un deu-
xiegraveme le forfait scolaire communal dont il est ici question un troisiegraveme est
relatif agrave lenseignement des langues reacutegionales agrave Mayotte territoire qui du fait
de sa deacutepartementalisation reacutecente ne pouvait jusqualors pas beacuteneacuteficier des
possibiliteacutes offertes aux autres deacutepartements concernant lenseignement de
ces langues
Trois remarques doivent ecirctre faites sur lrsquoinsertion relative agrave lrsquoenseignement des
langues reacutegionales lors des horaires normaux Premiegraverement cette disposition
existe deacutejagrave pour la Collectiviteacute de Corse deuxiegravemement cet enseignement
doit se faire moyennant un accord entre lrsquoEacutetat et les reacutegions (laquo dans le cadre
de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions la collectiviteacute de Corse la Collectiviteacute
europeacuteenne drsquoAlsace ou les collectiviteacutes territoriales reacutegies par lrsquoarticle 73 de
la Constitution raquo) troisiegravemement il srsquoagit drsquoune option facultative qursquoin fine
les familles deacutecident ou non de prendre
En reacutesumeacute et conclusion la disposition de lrsquoarticle 3
1 Existe deacutejagrave pour une collectiviteacute en lrsquooccurrence la collectiviteacute de Corse
2 Est strictement encadreacutee (existence drsquoun accord entre lrsquoEacutetat et les reacute-
gions)
3 Est conforme agrave la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le ca-
ractegravere facultatif de lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale Dans sa deacute-
cision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi relative agrave la Corse le
Conseil constitutionnel a fixeacute le cadre de lrsquoenseignement drsquoune langue
reacutegionale dans le cadre de lrsquohoraire normal en consideacuterant que laquo si lrsquoen-
seignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquohoraire nor-
mal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir pour
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autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les ensei-
gnants qursquoil ne saurait non plus avoir pour effet de soustraire les eacutelegraveves
aux droits et obligations applicables agrave lrsquoensemble des usagers des eacuteta-
blissements qui assurent le service public de lrsquoenseignement ou sont
associeacutes agrave celui‑ci Consideacuterant qursquoil reacutesulte de ce qui preacutecegravede que sous
reacuteserve que lrsquoenseignement de la langue corse revecircte tant dans son prin-
cipe que dans ses modaliteacutes de mise en œuvre un caractegravere facultatif
[cette disposition] nrsquoest contraire ni au principe drsquoeacutegaliteacute ni agrave aucun
autre principe ou regravegle de valeur constitutionnelle raquo (cons 24 et 25)
La loi du 8 avril 2021 ne propose pas autre chose et srsquoinscrit en tous
points sur cette ligne deacutejagrave jugeacutee par le Conseil constitutionnel
Lrsquoarticle 6 srsquoinsegravere de maniegravere logique et coheacuterente dans lrsquoensemble des articles
de la loi relative agrave lrsquoenseignement Avant drsquoen examiner dans les deacutetails la
conformiteacute agrave la Constitution il faut souligner que le Seacutenat a deacutejagrave voteacute le prin-
cipe de ce forfait scolaire communal agrave deux reprises
1 Il lrsquoa drsquoabord inseacutereacute dans le projet de loi pour une eacutecole de la confiance
en premiegravere lecture Crsquoest la commission mixte paritaire qui a ajouteacute les
mots laquo contribution volontaire raquo ocirctant au forfait son caractegravere obliga-
toire22
2 Il a reacuteaffirmeacute sa position lors de lrsquoexamen de la proposition de loi ici
discuteacutee supprimant les mots laquo contribution volontaire raquo de la loi en vi-
gueur
Agrave cet argument deacutemocratique respectueux du bicameacuteralisme et rappelant que
le Seacutenat laquo assure la repreacutesentation des collectiviteacutes territoriales de la Reacutepu-
22 Loi ndeg2019-791 du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance JORF ndeg0174 du 28 juillet
2019
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Primo cet article est en coheacuterence avec la leacutegislation existante en matiegravere drsquoen-
seignement des langues reacutegionales agrave lrsquoeacutecole confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute
juridique (A) Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contrevien-
nent pas au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des langues
reacutegionales affirmeacute par le Conseil constitutionnel (B) Tertio la loi ne porte pas
atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur une commune une nouvelle
charge (C) Quarto elle ne viole pas non plus en conseacutequence le principe de
libre administration des collectiviteacutes territoriales (D)
A Forfait scolaire communal et respect de lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique
Cette exigence bien que non explicitement qualifieacutee de principe consti-
tutionnel par le Conseil constitutionnel se rattache notamment agrave la notion de
laquo garantie des droits raquo inscrite agrave lrsquoarticle 16 de la Deacuteclaration de 1789 laquo Toute
socieacuteteacute dans laquelle la garantie des droits nrsquoest pas assureacutee ni la seacuteparation
des pouvoirs deacutetermineacutee nrsquoa point de constitution raquo Deacutecoulant de lrsquoarticle 34
de la Constitution la clarteacute de la loi est un eacuteleacutement essentiel de la seacutecuriteacute
juridique agrave laquelle la jurisprudence du Conseil constitutionnel a offert corps
et protection Aussi le principe de laccessibiliteacute et de lintelligibiliteacute de la loi a-
t-il eacuteteacute eacuterigeacute en objectif de valeur constitutionnelle (deacutecision ndeg99-421 DC du
16 deacutecembre 1999)
Mecircme si les principes de clarteacute drsquoaccessibiliteacute et drsquointelligibiliteacute de la loi per-
mettent avant tout drsquoimposer au leacutegislateur laquo drsquoadopter des dispositions suffi-
samment preacutecises et des formules non eacutequivoques afin de preacutemunir les sujets
de droit contre une interpreacutetation contraire agrave la Constitution ou contre le
risque drsquoarbitraire raquo (deacutecision ndeg2004-500 DC du 29 juillet 2004 cons 13) ils
concourent aussi agrave offrir aux citoyens la seacutecuriteacute juridique neacutee drsquoune cons-
truction drsquoensemble coheacuterente et sans rupture Laquelle se base depuis 2008
sur une disposition claire et sans ambiguiumlteacute de la Constitution laquo Les langues
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reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo (75-1) Elle est une in-
vitation aux repreacutesentants de leacutegifeacuterer pour proteacuteger et promouvoir lesdites
langues et la loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit dans la continuiteacute de ce qursquoils ont fait depuis
2008 notamment La coheacuterence est lrsquoune des artegraveres essentielles de lrsquoexigence
de seacutecuriteacute juridique qui impregravegne la jurisprudence du Conseil constitution-
nelle comme celle du Conseil drsquoEacutetat et de la Cour de cassation Sans ecirctre ex-
plicitement eacutenonceacutee par le Conseil constitutionnel lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique est laquo efficiente raquo23 et est au cœur des preacuteoccupations des juges24 comme
de la doctrine Les Cahiers du Conseil constitutionnel lui consacrant un dossier
speacutecial dans sa livraison drsquooctobre 202025
La loi soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel reacutepond agrave lrsquoexigence de
seacutecuriteacute juridique en eacutetant le prolongement de lrsquoœuvre anteacuterieure du leacutegisla-
teur pour commencer la loi du 8 juillet 2013 drsquoorientation et de programma-
tion pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique qui reconnaicirct lrsquoenseigne-
ment bilingue franccedilais langue reacutegionale Dans lrsquoannexe de la loi figurent cinq
mentions compleacutementaires notamment celle concernant la possibiliteacute de
srsquoinscrire dans une eacutecole publique drsquoune autre commune lorsque la commune
de reacutesidence ne propose pas drsquoenseignement de langue reacutegionale Disposition
deacuteclarative qui a trouveacute une application concregravete dans la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) la parti-
cipation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes dans lrsquoenseigne-
ment public doit deacutesormais faire lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune drsquoac-
cueil et la commune de reacutesidence26
La loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle a
ajouteacute un nouveau motif de discrimination baseacute sur laquo la maitrise drsquoune autre
23 Bertrand Mathieu laquo La seacutecuriteacute juridique un principe clandestin mais efficient raquo Droit constitutionnel Meacutelanges Patrice Geacutelard LGDJ 1999 pp 301-305 24 En teacutemoigne notamment le fait que le Conseil drsquoEacutetat lui ait consacreacute deux rapports annuels celui de 1991 De la seacutecuriteacute juridique et celui de 2006 Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit 25 Dossier La seacutecuriteacute juridique Titre VII Les Cahiers du Conseil constitutionnel ndeg5 octobre
2020 26 Lrsquoarticle 104 de la loi NOTRe consacre par ailleurs la compeacutetence partageacutee des collectiviteacutes
locales dans la promotion des langues reacutegionales tout en donnant une place preacutepondeacuterante
agrave la reacutegion telle que preacutevue agrave lrsquoarticle 1er de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de lrsquoaction publique territoriale et drsquoaffirmation des meacutetropoles (MAPTAM)
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langue que le franccedilais raquo qui concerne eacutegalement les langues reacutegionales Celle
du 28 feacutevrier 2017 de programmation relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend
inopeacuterant le deacutecret du 2 Thermidor an II sur lequel se basait notamment le
ministegravere de la justice pour interdire les livrets de famille bilingues Enfin
lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance vient eacutetendre
aux eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives une laquo contribution volontaire raquo
des communes pour la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoins-
crivant dans une eacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionale en
dehors de sa commune de reacutesidence
La loi du 8 avril 2021 soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel nrsquoest que
le prolongement et le compleacutement de lrsquoarticle L 212-8 du Code de lrsquoeacuteducation
qui preacutecise les conditions dans lesquelles pour lrsquoenseignement public une
commune doit contribuer au financement des deacutepenses scolaires drsquoun enfant
reacutesidant sur son territoire et scolariseacute dans une autre commune Elle vient le
compleacuteter de maniegravere parallegravele eacutetendant ce qui existe deacutejagrave pour lrsquoeacutecole pu-
blique agrave lrsquoeacutecole priveacutee sous contrat Confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
elle ne viole par ailleurs aucun article de la Constitution et ne contredit pas
la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le caractegravere facultatif de lrsquoen-
seignement des langues reacutegionales
B Forfait scolaire communal et respect de la jurisprudence du Conseil
constitutionnel sur la langue franccedilaise
Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contreviennent pas
agrave lrsquoarticle 2 alineacutea premier de la Constitution (laquo La langue de la Reacutepublique est
le Franccedilais raquo) et au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des
langues reacutegionales qui en deacutecoule affirmeacute par le Conseil constitutionnel La
langue de la Reacutepublique est et demeure le Franccedilais et agrave aucun moment la
loi du 8 avril 2021 nrsquoentend y porter atteinte Lrsquoapprentissage des langues reacute-
gionales se fait agrave ses cocircteacutes mais dans une mesure permettant leffectiviteacute pour
les enfants agrave acceacuteder agrave lenseignement des langues reacutegionales laquo patrimoine de
la France raquo selon les termes de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Apprentissage
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qui pour certains enfants est lrsquoun des eacuteleacutements de leur laquo deacuteveloppement raquo au
sens de lrsquoalineacutea 10 du Preacuteambule de la Constitution du 27 octobre 1946 (laquo La
Nation assure agrave lrsquoindividu et agrave la familles les conditions neacutecessaires agrave leur
deacuteveloppement raquo)
Ce que creacutee lrsquoarticle 6 agrave travers le forfait ce nrsquoest pas lrsquoenseignement obligatoire
de la langue reacutegionale mais la possibiliteacute de pouvoir beacuteneacuteficier de cet enseigne-
ment (sans prescription de deacutelai) qui demeure facultatif Le rapporteur Paul
Molac le reacuteaffirme au cours de la seacuteance publique du 8 avril 2021 laquo Je ne
suis pas favorable au caractegravere obligatoire de cet enseignement mais je consi-
degravere que tout eacutelegraveve qui souhaite le suivre doit pouvoir le faire raquo27
Ce faisant la loi sans contrevenir agrave la Constitution offre un contenu agrave son
article 75-1 La jurisprudence du Conseil constitutionnel en vertu de laquelle
lrsquoenseignement des langues reacutegionales nrsquoa qursquoun caractegravere facultatif nrsquoest ici
absolument pas remise en cause Dans sa deacutecision ndeg99-412 DC du 15 juin
1999 il a souligneacute que le principe drsquouniciteacute du peuple franccedilais et lrsquoindivisibiliteacute
de la Reacutepublique assurant lrsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi srsquoopposaient agrave laquo
ce que soient reconnus des droits collectifs agrave quelque groupe que ce soit deacutefini
par une communauteacute drsquoorigine de culture de langue ou de croyance raquo En
outre la langue de la Reacutepublique eacutetant le franccedilais il ne peut ecirctre reconnu un
laquo droit agrave pratiquer une langue autre que le franccedilais non seulement dans la vie
priveacutee mais eacutegalement dans la vie publique agrave laquelle la Charte rattache
la justice et les autoriteacutes administratives et services publics raquo
Deux remarques srsquoimposent drsquoembleacutee drsquoune part cette jurisprudence est an-
teacuterieure agrave lrsquoinsertion en 2008 par le pouvoir constituant de lrsquoarticle 75-1 dis-
posant que laquo les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France
raquo Cette remarque drsquoordre contextuel vient srsquoajouter agrave la suivante drsquoautre part
27 Assembleacutee nationale XVe leacutegislature Session ordinaire de 2020-2021 Seacuteance du jeudi 08
avril 2021 httpswwwassemblee-nationalefrdyn15comptes-rendusseancesession-
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la loi du 8 avril 2021 nrsquoentend pas confier agrave lrsquoenseignement des langues reacutegio-
nales un caractegravere obligatoire En cela elle respecte la jurisprudence du Con-
seil constitutionnel preacuteciteacutee (deacutecision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi
relative agrave la Corse)
laquo Si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquoho-
raire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir
pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les en-
seignants (hellip) raquo (cons 24)
Lrsquoenseignement drsquoune langue minoritaire ne devient donc en aucun cas obli-
gatoire Ce qui doit faire laquo lrsquoobjet drsquoun accord raquo ce sont les conditions permet-
tant effectivement agrave des enfants drsquoacceacuteder agrave un enseignement facultatif qui
contribue agrave leur deacuteveloppement proteacutegeacute par ailleurs par lrsquoalineacutea 10 du Preacuteam-
bule de 1946 preacuteciteacute Ni la Constitution ni son interpreacutetation par le Conseil
constitutionnel ne srsquoopposent agrave ce qursquoune commune de reacutesidence participe y
compris de maniegravere obligatoire au financement de la scolarisation dans une
autre commune des enfants souhaitant suivre un tel enseignement Crsquoest don-
ner aux enfants et aux parents de maniegravere effective et efficiente la possibiliteacute
concregravete de beacuteneacuteficier drsquoun enseignement drsquoune langue reacutegionale composante
de leur laquo deacuteveloppement raquo laquelle appartient en vertu de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution au laquo patrimoine de la France raquo
C Forfait scolaire communal et respect du principe drsquoeacutegaliteacute
Tertio la loi ne contrevient pas au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur
une commune une nouvelle charge
Conformeacutement agrave une jurisprudence du Conseil constitutionnel bien eacutetablie le
principe deacutegaliteacute de lrsquoarticle 6 de la Deacuteclaration des droits de lhomme et du
citoyen de 1789 laquo ne soppose ni agrave ce que le leacutegislateur regravegle de faccedilon diffeacuterente
des situations diffeacuterentes ni agrave ce quil deacuteroge agrave leacutegaliteacute pour des raisons
dinteacuterecirct geacuteneacuteral pourvu que dans lun et lautre cas la diffeacuterence de traite-
ment qui en reacutesulte soit en rapport direct avec lobjet de la loi qui leacutetablit raquo
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(pour lrsquoune des reacutecentes application au domaine de lrsquoenseignement dont il sera
ici question deacutecision ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de
la confiance)
En ce qui concerne preacuteciseacutement le caractegravere obligatoire drsquoune nouvelle charge
pour une collectiviteacute celui-ci nrsquoa pas eacuteteacute censureacute par le Conseil constitutionnel
agrave propos de lrsquoexamen de la loi sur lrsquoavenir de lrsquoeacutecole preacuteciteacutee (deacutecision ndeg 2019-
787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de la confiance) Lrsquoarticle 17 de
la loi alors deacutefeacutereacute au Conseil constitutionnel preacutevoyait dans son premier ali-
neacutea
laquo LrsquoEacutetat attribue de maniegravere peacuterenne agrave chaque commune les ressources
correspondant agrave lrsquoaugmentation des deacutepenses obligatoires qursquoelle a
prises en charge en application des articles L 212-4 L 212-5 et L 442-
5 du code de lrsquoeacuteducation au titre de lrsquoanneacutee scolaire 2019-2020 par rap-
port agrave lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 dans la limite de la part drsquoaugmenta-
tion reacutesultant directement de lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoins-
truction obligatoire raquo
Les deacutepenses qui font lrsquoobjet de lrsquoaccompagnement financier en cause sont
celles qui beacuteneacuteficient aux eacutecoles publiques et aux eacutetablissements drsquoenseigne-
ment priveacutes ayant passeacute un contrat drsquoassociation avec lrsquoEacutetat
Lrsquoabaissement agrave trois ans du deacutebut de lrsquoinstruction obligatoire a donc fait pe-
ser des charges nouvelles pour les communes et leur a mecircme imposeacute de par-
ticiper au financement des eacutecoles maternelles priveacutees sous contrat y compris
lorsqursquoelles nrsquoont pas approuveacute ce contrat La diffeacuterence de traitement entre
les communes est reacuteelle selon qursquoelles financcedilaient ou non des classes mater-
nelles avant lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoinstruction obligatoire mais
nrsquoentraicircne pas pour autant une rupture drsquoeacutegaliteacute
Ainsi lrsquoa jugeacute le Conseil constitutionnel dans la deacutecision preacuteciteacutee drsquoune part
il a estimeacute que cette diffeacuterence de traitement reposait sur une diffeacuterence de
situation
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laquo Les communes qui au cours de lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 avaient
institueacute des classes maternelles ou eacutecoles maternelles publiques ou ap-
prouveacute des contrats drsquoassociation drsquoeacutecoles maternelles priveacutees ont con-
tribueacute agrave ce titre agrave leur financement dans les conditions preacutevues par le
code de lrsquoeacuteducation Ces communes ne sont ainsi pas placeacutees dans une
situation identique agrave celle des autres communes qui nrsquoexerccedilaient pas
deacutejagrave les mecircmes compeacutetences et ne supportaient donc pas les charges
correspondantes raquo (cons 7)
Drsquoautre part le Conseil constitutionnel a jugeacute que la diffeacuterence de traitement
contesteacutee eacutetait en rapport direct avec lrsquoobjet de la loi qui lrsquoeacutetablit
laquo Qui consiste en application de la seconde phrase du quatriegraveme alineacutea
de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution agrave accompagner de ressources finan-
ciegraveres une extension de compeacutetence ayant pour conseacutequence drsquoaugmen-
ter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales raquo (cons 8)
Agrave lrsquoargument opposeacute agrave lrsquoarticle 6 de la loi deacutefeacutereacutee selon lequel ces dispositions
creacuteeraient une diffeacuterence de traitement entre les communes contraire au prin-
cipe deacutegaliteacute devant la loi le Conseil constitutionnel en vertu de sa jurispru-
dence Loi pour une eacutecole de la confiance devrait logiquement apporter la mecircme
reacuteponse Le leacutegislateur entend avec cette loi du 8 avril 2021 donner de ma-
niegravere geacuteneacuterale effectiviteacute agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution agrave travers en par-
ticulier un outil permettant de mettre en œuvre les dispositions de lrsquoarticle 72-
2 de la Constitution relatives aux extensions de compeacutetences imposeacutees aux
collectiviteacutes territoriales Dispositions qui par ailleurs nrsquoobligent pas le leacutegi-
slateur agrave preacutevoir un accompagnement financier de lrsquoensemble des communes
En lien avec cet argument il en reacutesulte que lrsquoarticle 6 ne porte pas atteinte
par ailleurs au principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
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D Forfait scolaire communal et respect du principe de libre administra-
tion des collectiviteacutes territoriales
Quarto le forfait scolaire communal nrsquoest ni contraire agrave la lettre de lrsquoar-
ticle 72 de la Constitution ni agrave son interpreacutetation par le Conseil constitution-
nel
En vertu de lrsquoarticle 72 alineacutea 3 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales
srsquoadministrent librement dans les conditions preacutevues par la loi Correacutelative-
ment lrsquoarticle 34 de la Constitution donne agrave la loi compeacutetence pour deacuteterminer
laquo les principes fondamentaux (hellip) de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales de leurs compeacutetences et de leurs ressources raquo Cette libre admi-
nistration doit en outre se concilier avec drsquoautres principes constitutionnels
tels que le principe drsquoeacutegaliteacute et la liberteacute de lrsquoenseignement Crsquoest ainsi que le
Conseil constitutionnel a jugeacute que laquo si le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacute-
gislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce que les conditions essentielles drsquoap-
plication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de lrsquoenseignement deacutepen-
dent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre
les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (voir notamment la deacutecisions ndeg84-
185 DC du 18 janvier 1985 cons 18)
La libre administration est bien un principe constitutionnel mais crsquoest au leacute-
gislateur qursquoil revient sous le controcircle du Conseil constitutionnel drsquoen preacuteci-
ser le contenu Lrsquointervention du leacutegislateur est neacutecessaire pour la deacutefinition
des regravegles de fonctionnement des collectiviteacutes territoriales la deacutefinition des
compeacutetences qui leur sont deacutevolues (transfert creacuteation extension des compeacute-
tences) et en matiegravere de ressources la fixation du taux des impocircts deacutecideacutes par
les Assembleacutees deacutelibeacuteratives locales
Il ressort de la jurisprudence administrative et constitutionnelle que seule la
loi peut creacuteer une obligationsujeacutetion nouvelle agrave la charge drsquoune collectiviteacute
territoriale Le principe de libre administration ne peut donc pas exister en-
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dehors de lrsquointervention du leacutegislateur lequel nrsquoa pas pour autant toute lati-
tude En drsquoautres termes le principe de libre administration est deacutefini par la
loi mais est aussi proteacutegeacute contre elle qui ne peut notamment pas porter at-
teinte au-delagrave drsquoun certain seuil aux ressources des collectiviteacutes territoriales
restreindre la liberteacute contractuelle intervenir dans les deacutecisions des collecti-
viteacutes territoriales relatives agrave leurs agents ou le fonctionnement de leurs insti-
tutions
En eacutetendant la prise en charge du forfait scolaire communal la loi deacutefeacutereacutee creacutee
une charge suppleacutementaire pour certaines communes
Aux termes du quatriegraveme alineacutea de larticle 72-2 de la Constitution laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales saccom-
pagne de lattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consa-
creacutees agrave leur exercice Toute creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour
conseacutequence daugmenter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales est ac-
compagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Dans le cas ougrave le leacutegislateur
octroie une nouvelle compeacutetence aux collectiviteacutes territoriales (articles 72-2 de
la Constitution et L 1614-1-1 du code geacuteneacuteral des collectiviteacutes territoriales)
il accompagne cette creacuteation de ressources correspondantes uniquement si
lexercice de cette compeacutetence est rendu obligatoire Ainsi en a jugeacute le Conseil
constitutionnel en ajoutant que le leacutegislateur disposait dun pouvoir dappreacute-
ciation en la matiegravere la compensation devant ecirctre naturellement suffisante
pour ne pas constituer une entrave au principe de libre administration
laquo Que ces dispositions ne visent en ce qui concerne les creacuteations et ex-
tensions de compeacutetences que celles qui preacutesentent un caractegravere obliga-
toire que dans cette hypothegravese il nest fait obligation au leacutegislateur
que daccompagner ces creacuteations ou extensions de compeacutetences de res-
sources dont il lui appartient dappreacutecier le niveau sans toutefois deacutena-
turer le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales raquo
(deacutecision ndeg2008-569 DC du 7 aoucirct 2008 Loi instituant un droit daccueil
pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires pendant le temps
scolaire cons 13)
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Le Conseil constitutionnel a jugeacute qursquoen conseacutequence et en lrsquoespegravece le leacutegisla-
teur avait suffisamment deacutetermineacute le niveau des ressources accompagnant la
creacuteation de ce service daccueil pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires pendant le temps scolaire sans meacuteconnaicirctre le quatriegraveme alineacutea de
larticle 72-2 de la Constitution
Lextension de compeacutetences est soumise a fortiori au mecircme reacutegime que la
creacuteation de compeacutetences Elle consiste en leacutelargissement du peacuterimegravetre ou en
la modification de la nature ou de lobjet dune compeacutetence dont lexercice est
deacutejagrave assureacute par les collectiviteacutes territoriales ayant pour conseacutequence de creacuteer
une charge suppleacutementaire pour celles-ci Le droit agrave une compensation finan-
ciegravere nest garanti que si lextension preacutesente un caractegravere obligatoire et le
leacutegislateur en deacutetermine le niveau et les modaliteacutes agrave condition quils nentra-
vent pas la libre administration des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece le principe de libre administration nrsquoest donc pas violeacute par le ca-
ractegravere contraignant que confegravererait la loi deacutefeacutereacutee au forfait scolaire communal
de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation Drsquoune part le Conseil constitu-
tionnel a deacutejagrave comme souligneacute plus haut accepteacute le principe du caractegravere
obligatoire drsquoune nouvelle charge qui nrsquoentraine par ailleurs mecircme pas
lrsquoautomaticiteacute drsquoun accompagnement financier des communes Drsquoautre part
lrsquoargument de proportionnaliteacute est ici deacuteterminant agrave ceux qui avancent un
risque drsquoassegravechement financier de certaines communes rurales contraintes
de prendre en charge la scolarisation dun eacutelegraveve dans une autre commune
mieux doteacutee qui propose lenseignement de la langue reacutegionale (ce qui selon
le deacuteputeacute Molac ne concernerait que 002 des enfants en France) il faut
reacutepondre en mettant en avant lrsquoobjectif incitatif et non sanctionnateur de la
loi Il suffira auxdites communes de proposer un enseignement de langue reacute-
gionale qui ne pourrait repreacutesenter qursquoune heure drsquoinitiation par semaine par
exemple
Une heure drsquoinitiation par semaine pour eacuteviter de payer le forfait scolaire com-
munal lequel ne meacuteconnait pas par ailleurs lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
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les principes constitutionnels drsquoeacutegaliteacute drsquouniciteacute de la langue franccedilaise de la
libre administration des collectiviteacutes territoriales et permet drsquoassurer le deacuteve-
loppement de lrsquoenfant crsquoest bien peu de choses pour censurer une loi souve-
raine adopteacutee qui plus est agrave une eacutecrasante majoriteacute
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
De Raphaeumll SchellenbergerA GreffeObjet Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues ReacutegionalesDate mardi 4 mai 2021 101012Piegraveces jointes Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionalespdf
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loirelative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus desoixante deacuteputeacutes ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texteen application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarerlrsquoinconstitutionnaliteacute de son article 6 Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons ennotre qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre lapleine constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sensNous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notreconsideacuteration respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire
- Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
- Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche
- Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret
- Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne
- Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte
- Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor
- David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion
- Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme
- Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne
- Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
1
M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2
Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
3
On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
- Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie
- Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
Ce message ainsi que les piegraveces jointes sont eacutetablis sous la seule responsabiliteacute de lexpeacutediteur agrave lintention exclusive de ses destinataires ils peuvent contenir des informations confidentielles Toute publication utilisation ou diffusion doit ecirctre autoriseacutee preacutealablement Ce message a fait lobjet dun traitement anti-virusIl est rappeleacute que tout message eacutelectronique est susceptible dalteacuteration au cours de son acheminement sur Internet ________________________________________________________________
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Association ESKOLIMChez Seaska Route de la Pouponniegravere64250 CAMBO LES BAINSeskolim6gmailcomRepreacutesenteacutee par son President Jean Seacutebastien HAYDN11 chemin de Saint Jean66240 SAINT ESTEVE
CONTRIBUTION EXTERIEURE
Observations sur la conformiteacute agrave la Constitution de laproposition de loi relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
Monsieur le Preacutesident du Conseil constitutionnel Mesdames et Messieurs les
membres du Conseil constitutionnel lrsquoassociation Eskolim souhaite porter agrave votre attention
les observations suivantes tendant agrave deacutemontrer la conformiteacute agrave la Constitution de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Parmi lrsquoensemble des dispositions du texte deacutefeacutereacute la plupart nrsquoont donneacute lieu agrave aucun
deacutebat sur leur conformiteacute agrave la Constitution qui est de toute eacutevidence acquise par exemple au
sujet des traductions dont la constitutionnaliteacute a deacutejagrave indirectement eacuteteacute reconnue (CC 99-412
DC 15 juin 1999 CC ndeg2001-452 DC 6 deacutecembre 2001) ou de lrsquoutilisation des signes
diacritiques sur les actes drsquoeacutetat civil
De plus au-delagrave des apparences drsquoune politique jurisprudentielle initieacutee dans un contexte
speacutecifique le Conseil constitutionnel dispose deacutesormais drsquoun cadre constitutionnel de
reacutefeacuterence transformeacute (1) qui lui permettra de valider les dispositions leacutegislatives du texte dont
il est saisi en particulier lrsquoarticle 4 relatif agrave lrsquoenseignement immersif (2) et lrsquoarticle 6 au sujet
de la participation financiegravere agrave la scolarisation par les communes de reacutesidence (3)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
1 Le renouvellement des normes constitutionnelles de reacutefeacuterence en matiegravere de
langues reacutegionales
11 Les ineacutevitables deacuterogations apporteacutees agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution
Toute regravegle constitutionnelle connaicirct des atteacutenuations et peut ecirctre concilieacutee lrsquoarticle 2
de la Constitution ne fait pas exception Le principe demeure inchangeacute laquo La langue de la
Reacutepublique est le franccedilais raquo Sur ce fondement le Conseil constitutionnel a deacuteveloppeacute dans
les anneacutees 90 et 2000 une jurisprudence vigilante sur lrsquousage du franccedilais mais sans pour
autant refuser toute eacutevolution nous y reviendrons
Cependant lrsquoassociation Eskolim souhaite mettre en eacutevidence lrsquoindeacuteniable
changement de cadre constitutionnel en matiegravere de langues reacutegionales pour au
moins trois raisons
En premier lieu la porteacutee de lrsquoarticle 2 de la Constitution nrsquoest pas figeacutee et peut
eacutevoluer avec le temps En effet le Conseil constitutionnel opegravere reacuteguliegraverement des adaptations
de la porteacutee du texte constitutionnel Parmi de nombreuses illustrations jurisprudentielles la
liberteacute drsquoexpression et de communication protegravege deacutesormais la liberteacute drsquoacceacuteder agrave Internet
(CC ndeg 2009-580 DC 10 juin 2009) et de srsquoy exprimer (CC ndeg2020-801 DC du 18 juin 2020)
La liberteacute du mariage comprend deacutesormais le droit de mettre fin aux liens du mariage (CC ndeg
2016-557 QPC du 29 juillet 2016) La monteacutee en puissance des exigences environnementales
dans le deacutebat public a permis au Conseil constitutionnel de juger qursquoil deacutecoule de la Charte de
lrsquoenvironnement laquo que la protection de lrsquoenvironnement patrimoine commun des ecirctres
humains constitue un objectif de valeur constitutionnelle raquo (CC ndeg2019-823 QPC 31 janvier
2020) Certains fondements constitutionnels que lrsquoon croyait endormis ont eacuteteacute reacuteactiveacutes sous
lrsquoeffet du pouvoir interpreacutetatif agrave lrsquoimage de lrsquoarticle 15 de la DDHC (laquo La socieacuteteacute a le droit de
demander compte agrave tout agent public de son administration raquo) agrave lrsquoorigine drsquoun droit drsquoaccegraves
aux archives publiques (CC ndeg2017-655 QPC 15 septembre 2017) et drsquoun droit drsquoaccegraves aux
documents administratifs (CC ndeg2020-834 QPC 3 avril 2020)
En deuxiegraveme lieu la reacutedaction actuelle de lrsquoarticle 2 de la Constitution ne date pas de
1958 mais drsquoun ajout issu de la loi constitutionnelle ndeg 92-554 du 25 juin 1992 voteacutee dans un
contexte particulier au moment ougrave la France ratifiait le traiteacute de Maastricht et reacutevisait sa
Constitution afin de lever les atteintes agrave la souveraineteacute constateacutees par le Conseil
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
constitutionnel En 1992 lrsquoinsertion de la langue franccedilaise au sein de lrsquoarticle 2 vise agrave rassurer
lrsquoopinion face aux craintes heacutegeacutemoniques de la langue anglaise les langues reacutegionales ne
sont ni viseacutees ni nieacutees dans leur existence et leur rocircle Il est sur ce point particuliegraverement
reacuteveacutelateur de se reacutefeacuterer aux deacuteclarations limpides du Garde des Sceaux Michel Vauzelle lors
des deacutebats parlementaires consacreacutes en 1992 au vote de la reacutevision constitutionnelle laquo Les
langues reacutegionales sont naturellement une richesse de notre patrimoine national Agrave ce
titre le Gouvernement exprime par ma voix lrsquoimmense respect et le soin qursquoil porte agrave cette
richesse de la nation [] Je ne vois pas lagrave drsquoatteinte agrave lrsquouniteacute de la nation mais au
contraire une contribution agrave sa richesse [] Aucune atteinte ne sera porteacutee agrave la politique
de respect de la diversiteacute de nos cultures reacutegionales qui est un eacuteleacutement essentiel du
patrimoine national raquo (JO Assembleacutee nationale p 1021)
Il est donc parfaitement possible pour le Conseil constitutionnel drsquoopeacuterer une
interpreacutetation eacutevolutive de lrsquoarticle 2 afin drsquoadapter la porteacutee de la norme constitutionnelle au
contexte actuel favorable agrave lrsquoapprofondissement de lrsquousage des langues reacutegionales Il nrsquoest
drsquoailleurs pas anodin de constater que la preacutesente proposition de loi a largement transcendeacute les
clivages politiques pour ecirctre voteacutee agrave une large majoriteacute avec drsquoailleurs le soutien de
lrsquoensemble des Preacutesidents de Reacutegion
En troisiegraveme lieu dans sa fameuse deacutecision sur la Charte europeacuteenne des langues
reacutegionales et minoritaires du 15 juin 1999 (ndeg99-412 DC) le Conseil constitutionnel a
implicitement reconnu la compatibiliteacute de lrsquoenseignement immersif ou bilingue avec la
Constitution et en particulier avec lrsquoarticle 2 de la Constitution En effet lrsquoinconstitutionnaliteacute
constateacutee entre la Charte et la Constitution concerne seulement les articles 1 et 7 Or le
consideacuterant 13 de cette deacutecision abusivement preacutesenteacutee comme un verrou absolu en matiegravere
de langues reacutegionales prend soin de preacuteciser laquo que nest contraire agrave la Constitution eu eacutegard agrave
leur nature aucun des autres engagements souscrits par la France dont la plupart au
demeurant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France en
faveur des langues reacutegionales raquo Parmi ces laquo autres engagements souscrits par la France raquo
au sein de la Charte figurent certaines stipulations de lrsquoarticle 8 de la Charte1 selon lequel
1 Article 8 ndash Enseignement1En matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel ces langues sontpratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de lenseignement de la (des)langue(s) officielle(s) de lEtat(hellip)ci agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires concerneacutees ou
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
laquo laquoen matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel
ces langues sont pratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de
lenseignement de la (des) langue(s) officielle(s) de lEtat raquo agrave toute une seacuterie drsquoengagements
Au sein des engagements auxquels la France avait souscrits et sur lesquels le Conseil
constitutionnel srsquoest donc prononceacute on trouve le point 1 c (iv) en vertu duquel la France
srsquoengage laquo agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui
le souhaitent ndash ou le cas eacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant raquo
Or ce renvoi concerne les stipulations suivantes
laquo i agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires
concerneacutees ou
Ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les
langues reacutegionales ou minoritaires ou
Iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales
ou minoritaires comme partie inteacutegrante du curriculum
Autrement dit la France srsquoeacutetait engageacutee au moment de la signature de la Charte agrave
appliquer lrsquoune des trois mesures citeacutees qui concernent lrsquoenseignement laquo dans raquo les langues
reacutegionales ou minoritaires dans le secondaire crsquoest-agrave-dire un enseignement immersif ou
bilingue Cet engagement faisait donc partie des stipulations examineacutees par le Conseil
constitutionnel et le consideacuterant 13 de la deacutecision du 15 juin 1999 affirme clairement que ces
stipulations ne sont pas contraires agrave la Constitution Degraves 1999 lrsquoenseignement immersif en
langue reacutegionale est reconnu par le Conseil constitutionnel comme compatible avec
lrsquoarticle 2 de la Constitution
En quatriegraveme lieu le texte mecircme de la Constitution contient drsquoores et deacutejagrave des
ameacutenagements au principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais
Drsquoune part en vertu de la loi constitutionnelle ndeg 98-610 du 20 juillet 1998 lAccord
de Noumeacutea est constitutionnaliseacute agrave larticle 77 de la Constitution Or cet accord stipule en son
ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les langues reacutegionalesou minoritaires ou
iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales ou minoritairescomme partie inteacutegrante du curriculum ou
iv agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui le souhaitent ndash ou le caseacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
point 133 laquo Les langues kanak sont avec le franccedilais des langues denseignement et de
culture en Nouvelle-Caleacutedonie Leur place dans lenseignement et les meacutedias doit donc ecirctre
accrue et faire lobjet dune reacuteflexion approfondie raquo
Drsquoautre part sous lrsquoeffet de la reacutevision constitutionnelle du 23 juillet 2008 la
Constitution consacre deacutesormais les langues reacutegionales sous lrsquoeffet de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution qui par deacutefinition atteacutenue et deacuteroge agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution et dont la
porteacutee ne saurait ecirctre symbolique
12 La porteacutee de lrsquoancrage constitutionnel des langues reacutegionales minoritaires
En vertu de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution laquo Les langues reacutegionales appartiennent
au patrimoine de la France raquo Sans discussion possible cette nouvelle disposition
constitutionnelle constitue un changement de circonstances de droit permettant drsquoatteacutenuer
fortement la porteacutee des preacuteceacutedentes deacutecisions du Conseil constitutionnel rendues avant la
reacutevision constitutionnelle de 2008 Certains voudraient pourtant reacuteduire ce texte agrave une porteacutee
simplement symbolique et pensent pouvoir drsquoores et deacutejagrave trouver une confirmation dans la
jurisprudence du Conseil constitutionnel La reacutealiteacute contentieuse est beaucoup plus nuanceacutee et
ne preacutejuge rien de lrsquoavenir
Le Conseil constitutionnel nrsquoa eu depuis 2008 qursquoune seule et unique occasion de
preacuteciser la porteacutee de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Dans la deacutecision du 20 mai 2011
(ndeg2011-130 QPC) il eacutetait en effet saisi des dispositions de larticle L 312-10 du code de
leacuteducation relative agrave lenseignement des langues et cultures reacutegionales qui eacutetait contesteacute au
regard de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Or estime le Conseil en 2011 lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution ninstitue pas un droit ou une liberteacute que la Constitution garantit Sa
meacuteconnaissance ne peut donc ecirctre invoqueacutee agrave lappui dune question prioritaire de
constitutionnaliteacute sur le fondement de larticle 61-1 de la Constitution
Il convient de ne pas tirer de conclusions excessives du deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en
QPC de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Drsquoune part cela nrsquoempecircche pas le Conseil constitutionnel de se fonder sur lrsquoarticle
75-1 de la Constitution dans le cadre du controcircle a priori comme crsquoest par exemple le cas
pour les regravegles constitutionnelles en matiegravere de recevabiliteacute des amendements ou des principes
constitutionnels en matiegravere budgeacutetaires
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Drsquoautre part le deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en QPC drsquoune norme constitutionnelle ne
preacutejuge pas drsquoune forme de hieacuterarchie mateacuterielle ou formelle et srsquoexplique seulement par les
speacutecificiteacutes de chacun des offices Par exemple le respect des regravegles du vote de la loi
imposeacutees par la Constitution impossibles agrave invoquer en QPC font pourtant lrsquoobjet drsquoune
vigilance accrue du Conseil constitutionnel dans le cadre du controcircle a priori justifiant
chaque anneacutee de nombreuses censures
En outre bien que non invocable en QPC lrsquoarticle 75-1 teacutemoigne indubitablement de
la volonteacute du constituant de permettre au leacutegislateur drsquoassouplir les conditions drsquousage des
langues reacutegionales en ouvrant davantage la leacutegislation agrave des possibiliteacutes drsquoapprentissage en la
matiegravere En cela lrsquoarticle 75-1 de la Constitution est une atteacutenuation une disposition
deacuterogatoire agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution selon lequel laquo La langue de la Reacutepublique est le
franccedilais raquo Comme le souligne le rapport drsquoun deacuteputeacute en 2015 laquo la preacuteservation et la
protection des langues reacutegionales sont devenues un objectif de valeur constitutionnelle raquo2 Une
telle interpreacutetation serait drsquoailleurs coheacuterente avec les travaux parlementaires agrave lrsquoorigine de la
reacutevision de 2008 pour le preacutesident de la Commission des lois du Seacutenat lrsquoarticle 75-1 permet
de donner laquo un fondement solide aux dispositions leacutegislatives et reacuteglementaires qui favorisent
la protection et le deacuteveloppement des langues reacutegionales sans diminuer la place que le
franccedilais occupe dans notre sphegravere publique raquo3
Enfin dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel
estime que larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi
ndeg2005-380 du 23 avril 2005 est conforme agrave la Constitution Or les dispositions ainsi
valideacutees sont toujours en vigueur dans une reacutedaction identique laquo Un enseignement de
langues et cultures reacutegionales peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des
modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces
langues sont en usage raquo Ainsi tout en estimant que lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ne
constitue pas un droit ou liberteacute constitutionnel directement invocable en QPC le Conseil
constitutionnel a valideacute le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures
reacutegionales
2JJ Urvoas Rapport sur Proposition de loi constitutionnelle ndeg 1618 visant agrave ratifier la Charte europeacuteenne deslangues reacutegionales ou minoritaires 14 janvier 2014
3JJ Hyest Rapport ndeg 387 (2007-2008) sur le projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions dela Ve Reacutepublique fait au nom de la commission des lois du Seacutenat
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Autre signe eacutevident de la porteacutee effective de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le
leacutegislateur a multiplieacute ces derniegraveres anneacutees lrsquoadoption de textes favorisant lrsquousage et
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et leur promotion La loi du 8 juillet 2013
drsquoorientation et de programmation pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique ouvre la
possibiliteacute drsquoun enseignement bilingue franccedilais-langue reacutegionale la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) eacutetablit la participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes par lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale
lrsquoarticle 86 de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle
modifie lrsquoarticle 225-1 du code peacutenal en creacuteant un nouveau cas de discrimination fondeacute sur laquo
la maitrise drsquoune autre langue que le franccedilais raquo la loi du 28 feacutevrier 2017 de programmation
relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend inopeacuterant lrsquointerdiction des livrets de famille
bilingues lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance eacutetend aux
eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives les modaliteacutes drsquoun accord entre les communes pour
la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoinscrivant dans une eacutecole dispensant un
enseignement de langue reacutegionale en dehors de sa commune de reacutesidence Lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution a donc susciteacute une production leacutegislative qui teacutemoigne de la volonteacute du pouvoir
politique de mettre en œuvre une politique en matiegravere de langue et culture reacutegionales La
particulariteacute de la proposition de loi deacutefeacutereacutee est drsquoecirctre la premiegravere loi dont lrsquoobjet exclusif vise
agrave densifier lrsquoenseignement et lrsquousage des langues reacutegionales mais ce texte confirme les
avanceacutees ponctuelles eacutetablies depuis la reacutevision constitutionnelle de 2008
13 La monteacutee en puissance drsquoexigences constitutionnelles favorisant lrsquousage des langues
reacutegionales
Au-delagrave de lrsquoapport indeacuteniable de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution qui inteacuteresse
directement et clairement la possibiliteacute pour le leacutegislateur de favoriser le deacuteveloppement des
langues reacutegionales la jurisprudence du Conseil constitutionnel atteste drsquoune monteacutee en
puissance de plusieurs liberteacutes qui participent indirectement du mecircme mouvement
En premier lieu la liberteacute drsquoexpression et de communication concerne les langues
reacutegionales Degraves la deacutecision ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 le Conseil constitutionnel avait
concilieacute lrsquoarticle 2 de la Constitution avec la liberteacute drsquoexpression et de communication afin de
censurer certaines dispositions imposant lrsquousage du franccedilais tout en faisant notamment une
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reacutefeacuterence aux langues reacutegionales cette liberteacute laquo implique le droit pour chacun de choisir les
termes jugeacutes par lui les mieux approprieacutes agrave lexpression de sa penseacutee que la langue franccedilaise
eacutevolue comme toute langue vivante en inteacutegrant dans le vocabulaire usuel des termes
de diverses sources quil sagisse dexpressions issues de langues reacutegionales de vocables
dits populaires ou de mots eacutetrangers raquo Or la liberteacute drsquoexpression et de communication a vu
son reacutegime constitutionnel renforceacute depuis plusieurs anneacutees sous lrsquoeffet du triple test de
proportionnaliteacute en vertu duquel les limites apporteacutees agrave ces liberteacutes doivent ecirctre neacutecessaires
adapteacutees et proportionneacutees agrave lrsquoobjectif poursuivi Norme constitutionnelle prioritaire pour le
Conseil constitutionnel la liberteacute drsquoexpression et de communication a justifieacute de nombreuses
censures de dispositions leacutegislatives ces derniegraveres anneacutees (loi laquo Hadopi raquo consultation des
sites Internet terroristes loi laquo Avia raquohellip) Or cette liberteacute dans ses deux composantes de
lrsquoexpression et de la communication permet au locuteur drsquoutiliser une langue reacutegionale et de
ne pas subir drsquoentraves excessives ou injustifieacutees Le deacuteveloppement des langues reacutegionales et
de leur enseignement lrsquoouverture des possibiliteacutes de srsquoexprimer et de communiquer gracircce agrave
ces langues ne sont pas eacutetrangegraveres aux conditions drsquoexercice de la liberteacute drsquoexpression et de
communication Ainsi la monteacutee en puissance de cette liberteacute dans le contentieux
constitutionnel confirme lrsquoeacutevolution favorable du cadre constitutionnel applicable aux langues
reacutegionales
En deuxiegraveme lieu lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant est deacutesormais consacreacute en tant
qursquoexigence constitutionnelle deacutecoulant des alineacuteas 10 et 11 du Preacuteambule de 1946 Ce
principe a drsquoores et deacutejagrave eacuteteacute appliqueacute en matiegravere de droit des eacutetrangers (CC 2019-797 QPC du
26 juillet 2019) mais aussi en droit de la famille au sujet du divorce (CC ndeg 2019-778 DC du
21 mars 2019) ou de lrsquoaccouchement sous le secret (CC 2019-826 QPC du 7 feacutevrier 2020) Il
serait parfaitement coheacuterent que cette exigence constitutionnelle soit applicable en matiegravere
drsquoeacuteducation et drsquoenseignement ce qui permettrait notamment de justifier le renforcement de
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et le soutien financier qui leur est apporteacute
En troisiegraveme lieu la liberteacute de lrsquoenseignement reconnu en tant que principe
constitutionnel (CC ndeg77-87 DC 23 novembre 1977 2016-745 DC 26 janvier 2017)
pourrait permette de proteacuteger constitutionnellement le libre choix des parents en
matiegravere de meacutethodes eacuteducatives conformeacutement agrave la jurisprudence du Conseil drsquoEtat En
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effet dans une deacutecision du 19 juillet 2017 (Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg
406150) le Conseil drsquoEtat estime que le laquo principe de la liberteacute de lrsquoenseignement qui figure
au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la Reacutepublique implique la
possibiliteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement y compris hors de tout contrat conclu
avec lrsquoEtat tout comme le droit pour les parents de choisir pour leurs enfants des
meacutethodes eacuteducatives alternatives agrave celles proposeacutees par le systegraveme scolaire public y
compris lrsquoinstruction au sein de la famille raquo A fortiori la liberteacute de lrsquoenseignement
permettrait au leacutegislateur drsquooffrir aux eacutelegraveves la possibiliteacute de suivre un enseignement immersif
en langue reacutegionale Faire deacutecouler de la liberteacute drsquoenseignement une exigence en matiegravere de
droit des parents de choisir les meacutethodes eacuteducatives serait drsquoailleurs en coheacuterence avec
lrsquoarticle 2 du Protocole 1 de la CEDH4 et lrsquoarticle 14-3 de la Charte des droits fondamentaux
de lUnion europeacuteenne5
Au-delagrave du principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais unchangement de contexte est intervenu depuis lrsquoinsertion en 1992 de cette disposition agravelrsquoarticle 2 de la Constitution Depuis 2008 le pouvoir constituant a consacreacute leslangues reacutegionales agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution de nombreuses reacuteformesleacutegislatives et regraveglementaires ont accompagneacute le deacuteveloppement des langues reacutegionaleset plusieurs principes constitutionnels accompagnent et pourraient agrave lrsquoavenirrenforcer lrsquoassise normative des langues reacutegionalesCrsquoest agrave lrsquoaune de ce cadre constitutionnel renouveleacute et transformeacute en phase avec leseacutevolutions leacutegislatives et sociales que le Conseil constitutionnel appreacuteciera laconstitutionnaliteacute de la preacutesente proposition de loi qui loin de constituer une rupturesrsquoinscrit dans une forme de continuiteacute
2 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi modifie lrsquoarticle L321-10 du code de lrsquoeacuteducation qui
en lrsquoeacutetat dispose
4laquo Nul ne peut se voir refuser le droit agrave lrsquoinstruction LrsquoEacutetat dans lrsquoexercice des fonctions qursquoil assumera dans ledomaine de lrsquoeacuteducation et de lrsquoenseignement respectera le droit des parents drsquoassurer cette eacuteducation et cetenseignement conformeacutement agrave leurs convictions religieuses et philosophiques raquo
5laquo La liberteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement dans le respect des principes deacutemocratiques ainsi quele droit des parents drsquoassurer lrsquoeacuteducation et lrsquoenseignement de leurs enfants conformeacutement agrave leurs convictionsreligieuses philosophiques et peacutedagogiques sont respecteacutes selon les lois nationales qui en reacutegissent lrsquoexercice raquo
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laquo Les langues et cultures reacutegionales appartenant au patrimoine de la France leurenseignement est favoriseacute prioritairement dans les reacutegions ougrave elles sont en usage
Cet enseignement peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefiniespar voie de convention entre lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont enusage
Le Conseil supeacuterieur de leacuteducation est consulteacute conformeacutement aux attributions qui lui sontconfeacutereacutees agrave larticle L 231-1 sur les moyens de favoriser leacutetude des langues et culturesreacutegionales dans les reacutegions ougrave ces langues sont en usage
Lenseignement facultatif de langue et culture reacutegionales est proposeacute dans lune des deuxformes suivantes
1deg Un enseignement de la langue et de la culture reacutegionales
2deg Un enseignement bilingue en langue franccedilaise et en langue reacutegionale
Les familles sont informeacutees des diffeacuterentes offres dapprentissage des langues et culturesreacutegionales raquo
Lrsquoarticle 4 a simplement pour objet drsquoajouter un 3e cas de forme drsquoenseignementfacultatif de langue et culture reacutegionales en preacutevoyant
laquo3deg Un enseignement immersif en langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectifdrsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo
21 Le Conseil constitutionnel peut ne pas se prononcer sur cette disposition
A titre liminaire il semblerait que lrsquoarticle 4 du texte soumis agrave lrsquoexamen du
Conseil constitutionnel ne soit pas contesteacute par les auteurs de la saisine parlementaire agrave en
croire les deacuteclarations publiques de plusieurs deacuteputeacutes Ce point nrsquoest pas sans importance degraves
lors qursquoil confirme le large consensus politique autour de cette disposition et peut avoir une
conseacutequence sur le peacuterimegravetre de lrsquoobjet de la deacutecision rendue
Certes il arrive ponctuellement au Conseil constitutionnel drsquoexaminer drsquooffice
drsquoautres dispositions que celles contesteacutees par la saisine mais depuis lrsquoentreacutee en vigueur de la
QPC et speacutecialement depuis 2016 une telle pratique tend agrave devenir une exception (Deacutecisions
ndeg 2019-794 DC du 20 deacutecembre 2019 ndeg2018-772 DC du 15 novembre 2018 ndeg2016-745
DC du 26 janvier 2017)
De plus lors de lrsquoexamen de la loi pour une eacutecole de la confiance dans sa deacutecision
ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 le Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute examiner
drsquooffice les dispositions de lrsquoarticle 38 creacuteant en vertu de lrsquoarticle L314-2 du code de
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lrsquoeacuteducation une expeacuterimentation de classe immersive en langue eacutetrangegravere ou reacutegionale6 Si le
Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute se saisir drsquooffice de cette disposition expeacuterimentale
crsquoest qursquoimplicitement il nrsquoa pas consideacutereacute qursquoelle posait une difficulteacute manifeste de
constitutionnaliteacute Degraves lors la coheacuterence voudrait qursquoil en aille de mecircme avec les dispositions
de lrsquoarticle 4 de la preacutesente proposition de loi qui ne font que reprendre les grands principes
de lrsquoexpeacuterimentation preacuteceacutedente en preacutevoyant la possibiliteacute drsquoun enseignement immersif en
langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue
franccedilaise
22 Les exigences anciennes poseacutees par le Conseil constitutionnel sont respecteacutees
Elaboreacutee avant la reacutevision constitutionnelle de 2008 consacrant les langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la jurisprudence
du Conseil constitutionnel en matiegravere drsquoenseignement de langue reacutegionale est totalement
respecteacutee par lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
En premier lieu le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement immersif en langue
reacutegionale rend lrsquoarticle 4 conforme agrave la Constitution
Dans plusieurs deacutecisions le Conseil constitutionnel a eu lrsquooccasion de preacuteciser que
seule lrsquoobligation de suivre un enseignement dans une autre langue que le franccedilais serait
contraire agrave la Constitution Ainsi dans la deacutecision ndeg 2001-456 DC du 27 deacutecembre 2001 il
indique que laquo lusage dune langue autre que le franccedilais ne peut ecirctre imposeacute aux eacutelegraveves des
eacutetablissements de lenseignement public ni dans la vie de leacutetablissement ni dans
lenseignement des disciplines autres que celles de la langue consideacutereacutee raquo Le verbe
6Article L314-2 du code de lrsquoeacuteducation laquo Sous reacuteserve de lrsquoautorisation preacutealable des autoriteacutes acadeacutemiques etapregraves concertation avec les eacutequipes peacutedagogiques le projet drsquoeacutecole ou drsquoeacutetablissement mentionneacute agrave lrsquoarticle L401-1 peut preacutevoir la reacutealisation dans des conditions deacutefinies par deacutecret drsquoexpeacuterimentations peacutedagogiquesportant sur tout ou partie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement drsquoune dureacutee limiteacutee agrave cinq ans Cesexpeacuterimentations peuvent concerner lrsquoorganisation peacutedagogique de la classe de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement laliaison entre les diffeacuterents niveaux drsquoenseignement la coopeacuteration avec les partenaires du systegraveme eacuteducatiflrsquoenseignement dans une langue vivante eacutetrangegravere ou reacutegionale les eacutechanges avec des eacutetablissementseacutetrangers drsquoenseignement scolaire lrsquoutilisation des outils et ressources numeacuteriques la reacutepartition des heuresdrsquoenseignement sur lrsquoensemble de lrsquoanneacutee scolaire les proceacutedures drsquoorientation des eacutelegraveves et la participation desparents drsquoeacutelegraveves agrave la vie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement Les collectiviteacutes territoriales sont systeacutematiquementassocieacutees agrave la deacutefinition des grandes orientations des expeacuterimentations meneacutees par lrsquoeacuteducation nationale ainsiqursquoagrave leurs deacuteclinaisons territoriales raquo
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laquo imposer raquo est employeacute agrave la fois au sujet de lrsquousage drsquoune autre langue que le franccedilais et au
sujet de la vie de lrsquoeacutetablissement et de lrsquoenseignement des disciplines autres que celles de la
langue consideacutereacutee Ce qui signifie qursquoil est constitutionnellement possible au leacutegislateur de
permettre aux eacutelegraveves de choisir de maniegravere facultative une telle orientation dans
lrsquoenseignement De mecircme dans sa deacutecision ndeg2001 454 DC du 17 janvier 2002 le Conseil
constitutionnel avait estimeacute que si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre
de lrsquohoraire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires laquo il ne saurait revecirctir pour autant
un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo Et dans la deacutecision
ndeg2004-490 DC 12 feacutevrier 2004 le Conseil indique que lrsquoenseignement de la langue
tahitienne ou dune autre langue polyneacutesienne dans le cadre de lhoraire normal des eacutecoles
maternelles et primaires dans les eacutetablissements du second degreacute et dans les eacutetablissements
denseignement supeacuterieur laquo ne saurait revecirctir pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les
eacutelegraveves ou eacutetudiants ni pour les enseignants raquo
Or en lrsquoespegravece il nrsquoy a absolument aucun doute sur le caractegravere facultatif du 3deg
ajouteacute agrave lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation En effet le premier alineacutea de lrsquoarticle L312-
10 du code de lrsquoeacuteducation est inchangeacute et eacutevoque un laquo enseignement facultatif raquo Le deacuteputeacute
Molac lrsquoa clairement exprimeacute lors des deacutebats laquo lrsquoenseignement immersif tel qursquoil est ici
proposeacute reacutepond agrave cette condition dans la mesure ougrave il ne serait pas imposeacute mais seulement
proposeacute au sein des eacutetablissements publics au cocircteacute de filiegraveres classiques drsquoenseignement la
deacutecision finale restant du ressort des personnes responsables de lrsquoenfant raquo (Rapport du 31
mars 2021)
En deuxiegraveme lieu lrsquoarticle 4 nrsquoa pas pour objet de soustraire les eacutelegraveves aux
droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements drsquoenseignement
Dans plusieurs deacutecisions relatives agrave lrsquousage drsquoune langue reacutegionale le Conseil
constitutionnel rappelle qursquoun enseignement de ce type nrsquoa pas pour laquo pour objet de soustraire
les eacutelegraveves scolariseacutes (hellip) aux droits et obligations applicables agrave lensemble des usagers des
eacutetablissements qui assurent le service public de lenseignement ou sont associeacutes agrave celui-ci raquo
(ndeg 91-290 DC du 9 mai 1991 ndeg 2001-454 DC du 17 janvier 2002) Or lrsquoarticle 4 a
seulement pour objet drsquoouvrir une 3e modaliteacute facultative drsquoenseignement en langue reacutegionale
La proposition de loi ne confegravere pas des droits speacutecifiques agrave des laquo groupes raquo de locuteurs de
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de laquo territoires raquo dans lesquels ces langues
seraient pratiqueacutees Le texte ne modifie pas non plus les modaliteacutes drsquoexpression dans la vie
publique et dans la relation entre lrsquoadministration et les administreacutes De telle sorte que
lrsquoarticle 4 ne creacutee aucun droit particulier pour les eacutelegraveves comme pour les enseignants de nature
agrave les soustraire aux droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements
drsquoenseignement ou associeacutes agrave celui-ci
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 4 opegravere une conciliation raisonnable et eacutequilibreacutee entre
le principe de lrsquoarticle 2 de la Constitution et lrsquoapprentissage des langues reacutegionales
Lrsquoenseignement immersif en lange reacutegionale doit srsquoopeacuterer laquo sans preacutejudice de
lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo Lrsquoarticle 4 prend soin de ne pas
ignorer le principe poseacute par lrsquoarticle 2 de la Constitution et prolonge au niveau leacutegislatif la
conciliation souhaiteacutee par le constituant depuis 2008 avec lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Il
appartiendra au pouvoir regraveglementaire de preacuteciser la mise en œuvre de lrsquoobjectif de bonne
connaissance de la langue franccedilaise qui en toute hypothegravese garantit une conciliation
eacutequilibreacutee entre les regravegles constitutionnelles en preacutesence
Au surplus les retours drsquoexpeacuteriences des expeacuterimentations de classes en
enseignements immersifs permises par lrsquoarticle L 314-2 du code de lrsquoeacuteducation deacutemontrent
que les eacutelegraveves disposent drsquoun niveau en franccedilais plus eacuteleveacute que la moyenne Comme lrsquoindique
le rapport du Seacutenat sur la proposition de loi 19 expeacuterimentations immersives en langue
basque 6 en langue corse et une en langue catalane ont lieu actuellement dans des eacutecoles
publiques Or pour prendre lrsquoexemple de lrsquoenseignement en basque agrave 100 en eacutecole
maternelle objet drsquoune eacutevaluation preacutecise par lrsquoacadeacutemie de Bordeaux en 2019 (Etude
comparative des filiegraveres de maternelle 100 basque bilingue et franccedilais Acadeacutemie de
Bordeaux 2019) laquo lorsque ces enfants arrivaient en CP leur niveau de franccedilais eacutetait
supeacuterieur agrave la moyenne du deacutepartement Cela prouve que le niveau de franccedilais nrsquoavait
absolument pas eacuteteacute toucheacute raquo (Paul Molac Assembleacutee nationale Seacuteance du 8 avril 2021)
En quatriegraveme lieu lrsquoarticle 4 ne fait qursquoeacutetendre la mise en œuvre drsquoune modaliteacute
drsquoenseignement deacutejagrave valideacute par le Conseil constitutionnel
Dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel a valideacute
le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures reacutegionales en estimant que
larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi ndeg2005-380 du 23
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avril 2005 est conforme agrave la Constitution En effet apregraves avoir estimeacute inopeacuterant le grief tireacute
de la violation de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la deacutecision preacutecise laquo que les dispositions
contesteacutees ne sont contraires agrave aucun droit ou liberteacute que la Constitution garantit raquo Par
conseacutequent en vertu de lrsquoautoriteacute que lrsquoarticle 62 de la Constitution confegravere aux deacutecisions du
Conseil constitutionnel les dispositions valideacutees dans cette deacutecision et toujours en vigueur
sont conformes agrave la Constitution Il srsquoagit en particulier de lrsquoalineacutea 2 de la version actuelle de
lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation en vertu duquel laquo Cet enseignement peut ecirctre
dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre
lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont en usage raquo Or lrsquoarticle 4 de la
proposition de loi ne fait qursquoajouter une 3e possibiliteacute de mise en œuvre drsquoun principe deacutejagrave
valideacute par le Conseil constitutionnel modaliteacute facultative et sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune
bonne connaissance de la langue franccedilaise Le leacutegislateur srsquoest donc scrupuleusement
conformeacute aux exigences du Conseil constitutionnel
23 La possibiliteacute drsquoun enseignement immersif peut se preacutevaloir de plusieurs exigences constitutionnelles
En plus de srsquoinscrire dans les lignes jurisprudentielles du Conseil constitutionnel et de
respecter lrsquoarticle 2 de la Constitution lrsquoarticle 4 de la proposition de la loi peut se preacutevaloir
plusieurs normes constitutionnelles
En premier lieu lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en vertu duquel laquo Les langues
reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo constitue un changement de
circonstances de droit issu de la reacutevision constitutionnelle de 2008 qui atteacutenue la porteacutee de
lrsquoarticle 2 de la Constitution et permet ainsi de fonder le principe drsquoen enseignement immersif
et facultatif en langue reacutegionale
En second lieu comme preacuteceacutedemment rappeleacute (cf supra point 13) plusieurs
exigences et liberteacutes constitutionnelles peuvent soutenir le deacuteveloppement des langues
reacutegionales et peser favorablement dans la conciliation opeacutereacutee par le Conseil constitutionnel
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La liberteacute drsquoexpression et de communication garantie par lrsquoarticle 11 de la DDHC
et dont le reacutegime constitutionnel srsquoest renforceacute depuis une dizaine drsquoanneacutees peut permettre de
justifier lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale degraves lors qursquoil srsquoagit drsquoun preacutealable neacutecessaire
agrave lrsquoexpression et agrave la communication dans une autre langue que le franccedilais
Lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant reacutecemment consacreacute sur le fondement des alineacuteas 10
et 11 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 peut permettre au leacutegislateur de diversifier les
possibiliteacutes drsquoapprentissage drsquoune langue et drsquoune culture reacutegionale
La liberteacute de lrsquoenseignement consacreacutee de longue date en tant que principe
fondamental reconnu par les lois de la Reacutepublique implique neacutecessairement comme le
reconnaissent le Conseil drsquoEtat au niveau constitutionnel (CE 19 juillet 2017 Association
Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150) et les textes europeacuteens (article 2 du protocole 1
CEDH article 14-3 Charte des droits fondamentaux de lrsquoUnion europeacuteenne) une possibiliteacute
pour les parents de choisir des meacutethodes eacuteducatives en lien avec leurs convictions
Il est eacutegalement possible drsquoavancer le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction qui
deacutecoule de lrsquoalineacutea 13 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 (CC ndeg2001-450 DC 11
juillet 2001) degraves lors que lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale poursuit un objectif
peacutedagogique auquel les eacutelegraveves doivent pouvoir acceacuteder de maniegravere suffisamment libre et
selon des critegraveres objectifs et rationnels
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi se contente drsquoajouter une modaliteacute de mise enœuvre drsquoun enseignement dont le principe a deacutejagrave eacuteteacute valideacute par le Conseilconstitutionnel La conformiteacute agrave la Constitution de cet enseignement est eacutetablie degraveslors qursquoil est proposeacute de maniegravere facultative sans preacutejudice du respect de lrsquoarticle 2 dela Constitution et qursquoil peut se preacutevaloir de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ainsi quede plusieurs principes constitutionnels comme la liberteacute drsquoexpression lrsquointeacuterecirctsupeacuterieur de lrsquoenfant la liberteacute drsquoenseignement et lrsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction
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3 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi deacutefeacutereacutee modifie lrsquoarticle L442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation en remplaccedilant les alineacuteas 6 et 7 par lrsquoalineacutea suivant
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue
reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de
reacutesidence et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la
condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de
langue reacutegionale raquo
31 Lrsquoimpact subsidiaire et reacutesiduel de lrsquoarticle 6
Au-delagrave des passions et crispations qui peuvent parfois se rencontrer au greacute de deacutebats
relatifs au financement de lrsquoenseignement priveacute la modification apporteacutee par lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi doit ecirctre replaceacutee agrave sa juste porteacutee
En premier le meacutecanisme est subsidiaire En effet la participation financiegravere de la
commune de reacutesidence ne serait solliciteacutee que si cette commune ne laquo dispose pas drsquoeacutecole
dispensant un enseignement de langue reacutegionale raquo Il srsquoagit bien drsquoun laquo enseignement raquo quel
que soit sa forme et son volume Degraves lors comme lrsquoa clairement exprimeacute le deacuteputeacute Paul
Molac devant la Commission des affaires sociales il peut srsquoagir drsquoune laquo initiation drsquoun
enseignement paritaire ou drsquoune immersion raquo (31 mars 2021)
En deuxiegraveme lieu le meacutecanisme est reacutesiduel La participation financiegravere se limite
aux eacutetablissements priveacutes du premier degreacute ndash les eacutecoles ndash ayant conclu un contrat
drsquoassociation Les collegraveges et lyceacutees sont donc exclus du dispositif Un faible nombre
drsquoenfants sera concerneacute et la charge sera donc reacuteduite pour les communes en question De
plus en pratique dans les zones ougrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales est reacutepandu les
eacutecoles drsquoun grand nombre de communes ont deacutejagrave deacuteveloppeacute des offres eacuteducatives
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En troisiegraveme lieu la participation financiegravere est encadreacutee par la loi En application
de lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation non modifieacute par la preacutesente
proposition de loi les modaliteacutes de calcul de la contribution de la commune de reacutesidence sont
clairement eacutetablies
laquo il est tenu compte des ressources de cette commune du nombre deacutelegraveves de cette
commune scolariseacutes dans la commune daccueil et du coucirct moyen par eacutelegraveve calculeacute sur la base
des deacutepenses de fonctionnement de lensemble des eacutecoles publiques de la commune daccueil
sans que le montant de la contribution par eacutelegraveve puisse ecirctre supeacuterieur au coucirct quaurait
repreacutesenteacute pour la commune de reacutesidence leacutelegraveve sil avait eacuteteacute scolariseacute dans une de ses eacutecoles
publiques raquo
La charge financiegravere obeacuteit donc agrave des regravegles claires objectives rationnelles et deacutejagrave en
vigueur depuis plusieurs anneacutees En effet le laquo forfait scolaire raquo est deacutejagrave pratiqueacute sur le
fondement de lrsquoarticle L212-8 du code de lrsquoeacuteducation lorsqursquoune famille scolarise dans une
eacutecole publique ou priveacutee son enfant dans une autre commune que la commune de reacutesidence
32 Lrsquoabsence de violation de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales et du principe drsquoeacutegaliteacute
Ainsi replaceacutee dans sa juste porteacutee il ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi de violer la Constitution et en particulier les principes applicables en
matiegravere de libre administration des collectiviteacutes territoriales ainsi que le principe drsquoeacutegaliteacute
En premier lieu le Conseil constitutionnel a deacutejagrave valideacute le principe de lrsquoaide agrave
lrsquoenseignement priveacute et en particulier aux langues reacutegionales
Avant mecircme la reacutevision constitutionnelle de 2008 et la conseacutecration des langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le Conseil
constitutionnel avait reconnu que laquo pour concourir agrave la sauvegarde des langues reacutegionales
lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales peuvent apporter leur aide aux associations ayant cet
objet raquo (CC ndeg2001-456 DC 27 deacutecembre 2001)
De plus le Conseil constitutionnel rappelle reacuteguliegraverement que laquo le leacutegislateur peut
preacutevoir loctroi dune aide des collectiviteacutes publiques aux eacutetablissements denseignement
priveacutes selon la nature et limportance de leur contribution agrave laccomplissement de missions
denseignement raquo (CC ndeg93-329 DC du 13 janvier 1994)
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En deuxiegraveme lieu le principe de libre administration ne saurait justifier des
traitements diffeacuterencieacutes dans lrsquoexercice des droits et liberteacutes constitutionnels
En vertu de lrsquoarticle 72 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales srsquoadministrent
librement mais laquo dans les conditions preacutevues par la loi raquo De plus le Conseil constitutionnel
prend soin de preacuteciser que laquo si le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacutegislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce
que les conditions essentielles drsquoapplication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de
lrsquoenseignement deacutependent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas
ecirctre les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (CC ndeg 84-185 DC du 18 janvier 1985 CC
ndeg93-329 du 13 janvier 1994) Plus largement dans la deacutecision du 17 janvier 2002 (ndeg2001-
454 DC) le Conseil constitutionnel affirme que laquo le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales ne saurait conduire agrave ce que les conditions essentielles de mise en
oeuvre des liberteacutes publiques et par suite lensemble des garanties que celles-ci comportent
deacutependent des deacutecisions de collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre les mecircmes
sur lensemble du territoire de la Reacutepublique raquo
Or en lrsquoespegravece si les communes pouvaient librement participer au financement de la
scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous contrat
drsquoassociation lrsquoexercice de la liberteacute drsquoenseignement du principe drsquoeacutegaliteacute devant la loi et du
principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction deacutependrait de la seule volonteacute drsquoune collectiviteacute
territoriale ce que le Conseil constitutionnel condamne Degraves lors que la possibiliteacute drsquoun
enseignement en langue reacutegionale est offerte aux enfants les conditions drsquoaccegraves agrave cet
enseignement doivent pouvoir ecirctre effectives et eacutegales Loin de violer le principe drsquoeacutegaliteacute
devant la loi lrsquoarticle 6 de la proposition de loi en assure au contraire la garantie
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne transfert ni ne creacutee de
nouvelles compeacutetences
Srsquoagissant des ressources des collectiviteacutes locales permettant de leur assurer une libre
administration le quatriegraveme alineacutea de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution preacutevoit laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales srsquoaccompagne de
lrsquoattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consacreacutees agrave leur exercice Toute
creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour conseacutequence drsquoaugmenter les deacutepenses des
collectiviteacutes territoriales est accompagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Le Conseil
constitutionnel veille au respect de cette regravegle drsquoune part pour les transferts de compeacutetence
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entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales et drsquoautre part pour les creacuteations ou extensions de
compeacutetence des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece aucune creacuteation ou transfert de compeacutetence nrsquoest opeacutereacute au sens de
lrsquoarticle 72-2 de la Constitution Il srsquoagit drsquoune simple participation financiegravere agrave caractegravere
subsidiaire reacutesiduel et deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels comme
preacuteceacutedemment eacutevoqueacute (cf supra point 31) De plus le versement de la participation
financiegravere correspond en quelque sorte agrave un allegravegement de charge degraves lors que le coucirct de
lrsquoenfant scolariseacute est reporteacute sur une autre commune que la commune de reacutesidence En
conseacutequence lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne fait que modifier les modaliteacutes drsquoexercice
drsquoune compeacutetence sans en creacuteer ou transfeacuterer une nouvelle
Drsquoailleurs dans la deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 le Conseil
constitutionnel avait jugeacute inopeacuterant le grief tireacute de la violation des articles 72 et 72-2 de la
Constitution agrave propos de la version ancienne de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation en
jugeant que laquo la loi deacutefeacutereacutee nemporte ni creacuteation ni extension des compeacutetences en matiegravere de
contributions des communes aux frais de fonctionnement des classes eacuteleacutementaires des
eacutetablissements du premier degreacute priveacutes sous contrat dassociation que par suite le grief tireacute
de la meacuteconnaissance du principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales manque
en fait raquo
Le Conseil constitutionnel a statueacute dans le mecircme sens au sujet de lrsquoinstitution drsquoun
creacutedit drsquoimpocirct en matiegravere drsquoapprentissage ou de la possibiliteacute de modifier la dureacutee du contrat
drsquoapprentissage mecircme si ces mesures en rendant lrsquoapprentissage plus attrayant ont pour effet
drsquoaugmenter le nombre drsquoapprentis et donc drsquoaccroicirctre les charges des reacutegions dans ce
domaine (CC ndeg 2004-509 DC du 13 janvier 2005)
En quatriegraveme lieu le principe drsquoeacutegaliteacute entre les charges publiques est respecteacute
En effet en plus du caractegravere subsidiaire et reacutesiduel du meacutecanisme la participation
financiegravere preacutevue par lrsquoarticle 6 de la proposition de loi srsquoapplique agrave lrsquoensemble des
communes ne disposant pas drsquoun eacutetablissement dispensant un enseignement de langue
reacutegionale ce qui est coheacuterent au regard de lrsquoobjet de la loi Les critegraveres de la participation
financiegravere preacutevus par lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 sont en tout eacutetat de cause objectifs et
rationnels eacutetablis et mis en œuvre depuis plusieurs anneacutees Les garanties de lrsquoarticle 13 de la
DDHC sont donc respecteacutees
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En cinquiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir du respect
de plusieurs normes constitutionnelles
En affirmant depuis 2008 que les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la
France lrsquoarticle 75-1 de la Constitution donne un ancrage constitutionnel au deacuteveloppement
de lrsquousage et de lrsquoenseignement des langues reacutegionales Or sans la participation financiegravere des
communes de reacutesidence agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat lrsquoenseignement des langues reacutegionales serait compromis Par
conseacutequent lrsquoarticle 6 de la proposition de loi constitue une garantie leacutegale du respect de
lrsquoaffirmation porteacutee par lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Le mecircme raisonnement sera tenu agrave propos de lrsquoensemble des principes constitutionnels
qui donnent une assise agrave lrsquousage et agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales la liberteacute
drsquoexpression et de communication (article 11 DDHC) la liberteacute drsquoenseignement (PFRLR)
dont pourrait deacutecouler une exigence en matiegravere de droit des parents de choisir les meacutethodes
eacuteducatives (CE 19 juillet 2017 Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150)
lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant (alineacutea 10 et 11 du Preacuteambule de 1946) le principe drsquoeacutegaliteacute
(article 6 DDHC) le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction (alineacutea 13 du Preacuteambule de 1946)
Sans lrsquoarticle 6 de la proposition de loi lrsquoeffectiviteacute de lrsquoensemble de ces normes
constitutionnelles serait consideacuterablement atteacutenueacutee et creacuteerait des diffeacuterences de traitement
injustifieacutees et deacutependantes de la volonteacute des communes
De plus lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir drsquoun objectif de
clarification et de seacutecurisation du droit applicable qui peut se rattacher agrave lrsquoarticle 16 de la
DDHC degraves lors que les textes jusqursquoagrave preacutesent applicables eacutetaient ambigus et ont donneacute lieu agrave
des contentieux En rendant obligatoire ce qui eacutetait avant une faculteacute pour autant soumise agrave
un rocircle non neacutegligeable du preacutefet lrsquoarticle 6 de la proposition de loi clarifie le droit
applicable Ainsi une deacuteputeacutee preacutecisait lors des deacutebats parlementaires que laquo lrsquoarticle 34 de la
loi pour une eacutecole de la confiance relatif au versement du forfait scolaire a susciteacute de
nombreux imbroglios administratifs Ainsi chez moi en Bretagne plus de 150 demandes de
meacutediation ont eacuteteacute transmises aux services de lrsquoEacutetat ce qui met en lumiegravere lrsquoambiguiumlteacute de la loi
et les difficulteacutes de son application Je soutiens donc fortement lrsquoarticle 2 quinquies [devenu
article 6] issu des travaux du Seacutenat qui legraveve toute incertitude raquo (Mme Claudia Rouaux
Commission des affaires sociales Assembleacutee nationale 31 mars 2021)
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Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi creacutee un meacutecanisme subsidiaire et reacutesiduel dont laporteacutee est deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels Sans creacuteer ni transfeacutererde nouvelle compeacutetence aux communes cette disposition assure une mise en œuvreuniforme des droits et liberteacutes et peut se preacutevaloir de nombreuses normesconstitutionnelles confeacuterant agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales et agrave son soutienfinancier de solides justifications constitutionnelles
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 12 mai 2021
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure Mme Mastorpdf
Lettre Wanda Mastor accompagnant la porte eacutetroite
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure MSchellenberger et autrespdf
Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure assESKOLIL pdf
lettre daccompagnement CC
Porte eacutetroite loi langues reacutegionales (2)
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure M Bertrand Pancherpdf
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que des applications laquo particuliegraveres raquo sur certaines parties de notre territoire
Les modifications successives de la Constitution ont progressivement em-
prunteacute la voie de la reconnaissance de ces implications toujours plus de dis-
positions deacuterogatoires de reconnaissances mecircme symboliques laquo drsquointeacuterecircts
particuliers raquo drsquolaquo adaptations neacutecessaires raquo pour ne citer qursquoelles jusqursquoagrave la
diffeacuterenciation des normes toujours inscrite dans lrsquoactuel projet de loi consti-
tutionnelle5 Si lrsquoon observe les discussions actuelles relatives au projet de loi
laquo 4D raquo ou la validation par le Conseil constitutionnel en avril dernier de la loi
organique relative agrave la simplification des expeacuterimentations susceptibles decirctre
meneacutees par les collectiviteacutes territoriales6 la voie de la reconnaissance du par-
ticularisme des territoires semble srsquoannoncer
En 2003 la Constitution a deacutecideacute une fois pour toutes que lrsquouniteacute nrsquoeacutetait pas
neacutecessairement lrsquouniformiteacute Parmi les richesses territoriales qui loin drsquoeacutegra-
tigner lrsquoimage drsquoun Eacutetat unitaire la renforce par sa capaciteacute agrave promouvoir la
diversiteacute au sein drsquoune Nation forte les langues reacutegionales occupent une place
particuliegravere Leur entreacutee remarqueacutee dans lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en
2008 nrsquoa eu pour le moment que des effets symboliques sur lesquels il y aura
lieu de revenir plus loin Sous la preacutesidence de Franccedilois Hollande le Parle-
ment fort de la volonteacute drsquoappliquer la 56egraveme promesse de campagne du candi-
dat devenu preacutesident a remis la question des langues reacutegionales sur le devant
de la scegravene institutionnelle Le rapport drsquoinformation ndeg489 de lrsquoAssembleacutee
nationale sur les implications de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales
et minoritaires7 est essentiellement descriptif mais teacutemoigne de la volonteacute
parlementaire de se saisir de nouveau de la question De leurs cocircteacutes les tri-
bunaux ordinaires ont eacutegalement eu lrsquooccasion ces derniegraveres anneacutees de se
pencher sur la question du bilinguisme notamment que ce soit en matiegravere
5 Projet de loi constitutionnelle pour un renouveau de la vie deacutemocratique enregistreacute agrave la Preacutesi-
dence de lrsquoAssembleacutee nationale le 29 aoucirct 2019 6 Deacutecision ndeg2021-816 DC du 15 avril 2021 Loi organique relative agrave la simplification des ex-peacuterimentations mises en œuvre sur le fondement du quatriegraveme alineacutea de larticle 72 de la Cons-
titution 7 M Jean-Jacques Urvoas Rapport drsquoinformation ndeg 489 du 12 deacutecembre 2012 sur les impli-
cations constitutionnelles drsquoune ratification par la France de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires
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de signaleacutetique routiegravere8 ou de lrsquoutilisation de la langue reacutegionale dans des
organes deacutelibeacuterants9
Agrave lrsquoeacutepoque de lrsquoentreacutee dans lrsquoarticle 75-1 (dont on relegravevera lrsquoeacuteloignement vo-
lontaire vis-agrave-vis de lrsquoarticle 2) de lrsquoeacuteleacutevation des langues reacutegionales au rang de
laquo patrimoine de la France raquo en 2008 certains espoirs avaient pu ecirctre leacutegitime-
ment nourris Cette preacutecision nrsquoest pas loin srsquoen faut le seacutesame pour la rati-
fication de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires10 qui
en lrsquoeacutetat actuel de la jurisprudence du Conseil constitutionnel comporte des
clauses jugeacutees contraires agrave la Constitution
B Le contexte international
Il faut ici distinguer deux niveaux Si le contexte international est favorable
agrave la protection et promotion des langues reacutegionales crsquoest en raison drsquoune part
des engagements internationaux que la France les ait ratifieacutes ou non drsquoautre
part de la plupart des constitutions des pays voisins qui accordent une place
speacutecifique aux langues reacutegionales
En 1999 faisant la synthegravese de ses deacutecisions anteacuterieures11 le
Conseil constitutionnel a estimeacute que la Charte europeacuteenne des langues reacutegio-
nales ou minoritaires ne pouvait au vu des principes drsquouniciteacute du peuple fran-
ccedilais drsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique et drsquoeacutegaliteacute des citoyens ecirctre ratifieacutee
laquo La Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires en ce
qursquoelle confegravere des droits speacutecifiques agrave des groupes de locuteurs de
8 Tribunal administratif de Montpellier 12 octobre 2010 Mouvement reacutepublicain de salut pu-blic ndeg0903420 Cour Administrative dAppel de Marseille 28 juin 2012 Commune de Ville-neuve-les-Maguelone ndeg 10MA04419 9 Conseil drsquoEacutetat 29 mars 2006 Haut-Commissaire de la Reacutepublique en Polyneacutesie Franccedilaise
ndeg282335 Rec 179 22 feacutevrier 2007 Socieacuteteacute immobiliegravere Caroline ndeg299649 Cour adminis-trative drsquoappel de Marseille 13 octobre 2011 Commune de Galeria ndeg10MA02330 10 Table ronde (Jean-Eacuteric Gicquel Ferdinand Meacutelin-Soucramanien Michel Verpeaux et Jean-
Marie Woehrling) organiseacutee par la commission des lois 29 novembre 2012 sur les implications
constitutionnelles de la question de la ratification de la Charte europeacuteenne des langues reacutegio-
nales ou minoritaires httpswwwassemblee-nationalefr14cr-cloi12-13c1213022asp 11 Deacutecisions ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 loi relative agrave lrsquoemploi de la langue franccedilaise et
ndeg96-373 DC du 9 avril 1996 loi organique portant statut drsquoautonomie de la Polyneacutesie fran-ccedilaise
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de territoires dans les-
quels ces langues sont pratiqueacutees porte atteinte aux principes constitu-
tionnels drsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique drsquoeacutegaliteacute devant la loi et drsquouniciteacute
du peuple franccedilais raquo12
Le Conseil se deacutefendant au passage de meacutepriser les langues reacutegionales parmi
les engagements souscrits par la France preacutecise-t-il laquo la plupart au demeu-
rant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France
en faveur des langues reacutegionales raquo
Parmi les arguments qui plaident en faveur drsquoune ratification figure celui de
lrsquoeacutevolution du contexte Honorer de la ratification un texte deacutejagrave signeacute ne se
pose aujourdrsquohui plus dans les mecircmes termes qursquoen 1999 La reacuteforme cons-
titutionnelle de 2003 - dont certains aspects ont eacuteteacute affineacutes en 2008 - rappe-
lons-le a consideacuterablement modifieacute la vision jacobine de notre Reacutepublique qui
reconnaicirct agrave preacutesent lrsquoexistence de laquo populations raquo en son sein les particula-
rismes locaux et les neacutecessiteacutes des adaptations normatives Mais la ratification
par la France de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires
qui avait eacuteteacute voteacutee le 28 janvier 2014 par lrsquoAssembleacutee nationale a eacuteteacute rejeteacutee
par le Seacutenat le 27 octobre 2015 Soulignons que ce rejet nrsquoempecircche pas la
force du contexte qui est au niveau europeacuteen largement favorable agrave la pro-
tection et promotion des langues reacutegionales La France a par ailleurs ratifieacute
drsquoautres conventions internationales qui permettent de poursuivre cet objec-
tif tel est par exemple le cas de la Convention pour la sauvegarde du patri-
moine culturel immateacuteriel de 2003 et de la Convention sur la protection et la
promotion de la diversiteacute des expressions culturelles de 2005 qui rappelle no-
tamment dans son preacuteambule laquo que la diversiteacute linguistique est un eacuteleacutement
fondamental de la diversiteacute culturelle raquo et reacuteaffirme laquo le rocircle fondamental que
joue lrsquoeacuteducation dans la protection et la promotion des expressions cultu-
relles raquo
12 Il srsquoagissait lagrave au demeurant drsquoune affirmation tregraves discutable car la lettre de la Charte
nrsquoimposait nullement mecircme si elle lrsquoencourageait que des droits speacutecifiques fussent reconnus agrave des groupes (voir Guy Carcassonne Rapport au Premier ministre sur la compatibiliteacute entre la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires et la Constitution septembre 1998
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Le droit compareacute apporte la preuve irreacutefutable de lrsquoabsence drsquoin-
compatibiliteacute entre le caractegravere indivisible voire unitaire drsquoune Reacutepublique
et la reconnaissance des langues reacutegionales en son sein13 Un tour drsquohorizon
des textes des constitutions europeacuteennes et des deacutecisions des cours constitu-
tionnelles permet de mettre en eacutevidence plusieurs eacuteleacutements significatifs Le
droit compareacute nous enseigne que juridiquement la question des langues srsquoap-
preacutehende agrave travers deux prismes premiegraverement celui de la forme de lrsquoEacutetat
Le lien entre uniteacute de lrsquoEacutetat et unilinguisme est aussi eacutevident que celui entre
Eacutetat composeacute (reacutegional ou feacutedeacuteral) et multilinguisme Deuxiegravemement celui des
droits des locuteurs Selon cette acception les langues reacutegionales sont tradi-
tionnellement associeacutees de maniegravere neacutegative au principe de non-discrimina-
tion de maniegravere positive aux droits linguistiques dont les locuteurs seraient
les beacuteneacuteficiaires14
En droit constitutionnel compareacute lrsquoameacutenagement de la pluraliteacute linguistique
diverge selon que les Eacutetats reconnaissent une pluri-officialiteacute sur lrsquoensemble
du territoire ou au seul niveau local La premiegravere hypothegravese est celle naturel-
lement choisie par la Belgique et la Suisse Eacutetats feacutedeacuteraux europeacuteens Selon
lrsquoarticle 4 de la Constitution helveacutetique laquo les langues nationales sont lrsquoalle-
mand le franccedilais lrsquoitalien et le romanche raquo De son cocircteacute la Constitution belge
eacutenonce que laquo la Belgique comprend trois communauteacutes la Communauteacute fran-
ccedilaise la Communauteacute flamande et la Communauteacute germanophone raquo et fait
eacutegalement reacutefeacuterence agrave laquo quatre reacutegions linguistiques la reacutegion de langue fran-
ccedilaise la reacutegion de langue neacuteerlandaise la reacutegion bilingue de Bruxelles-Capi-
tale et la reacutegion de langue allemande raquo En revanche lrsquoItalie et lrsquoEspagne ne
reconnaissent qursquoune seule langue officielle sur lrsquoensemble du territoire en
mecircme temps qursquoest ameacutenageacutee au niveau local la pluraliteacute linguistique Crsquoest
13 Voir Veacuteronique Bertile Langues reacutegionales ou minoritaires et Constitution France Espagne et Italie Bruylant Collection Droit public compareacute et europeacuteen 2008 516 p et Wanda Mas-
tor laquo Le statut constitutionnel des langues reacutegionales en droit compareacute De la reconnaissance agrave lrsquoindiffeacuterence raquo Glottopol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html 14 Voir le Rapport explicatif de de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minori-
taires Conseil de lrsquoEurope Seacuterie des Traiteacutes europeacuteens ndeg148 Strasbourg 5 novembre 1992 httpsrmcoeint16800cb620
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ce second type drsquoameacutenagement qui est ici inteacuteressant agrave observer les Eacutetats
reacutegionaux italien15 et espagnol16 eacutetant qualifieacutees par leurs constitutions drsquoin-
divisibles (et mecircme eacutegalement laquo un raquo pour lrsquoItalie alors que le mot a disparu
de la Constitution franccedilaise)
De maniegravere scheacutematique plusieurs postures essentielles vis-agrave-vis des langues
reacutegionales peuvent ecirctre observeacutees dans lrsquoEurope contemporaine La majoriteacute
des pays voisins confegraverent aux langues reacutegionales des statuts juridiques dif-
feacuterencieacutes Coexistent parfois une langue majoritaire et des langues minori-
taires qui beacuteneacuteficient de mesures protectrices Dans ce cas les langues reacutegio-
nales jouissent drsquoune reconnaissance mais seulement au niveau drsquoun terri-
toire identifieacute Pour le dire autrement elles ne concurrencent pas la langue
majoritaire au niveau national Il ne srsquoagit ni plus ni moins que lrsquoexpression
drsquoun droit agrave la diffeacuterence Drsquoun droit agrave la diffeacuterenciation pour reprendre un
terme qui a actuellement les faveurs du gouvernement franccedilais Drsquoautres pays
ont mis en place le bilinguisme officiel qui peut srsquoexprimer dans plusieurs
variantes Ce statut confegravere aux citoyens en principe du moins le choix duti-
liser lune ou lautre des langues officielles dans leurs rapports avec lEacutetat
Cette co-officialiteacute peut srsquoopeacuterer au niveau de tout le territoire (comme en Bel-
gique et en Suisse par exemple) ou seulement sur une partie de celui-ci
(comme en Espagne ou en Italie)
On pourrait objecter que la comparaison avec lrsquoEspagne et lrsquoItalie deux Eacutetats
reacutegionaux nrsquoest pas pertinente Or ces deux Eacutetats sont qualifieacutes de Royaume
ou Reacutepublique indivisibles par leurs constitutions respectives indivisibiliteacute
qui nrsquoempecircche pas la reconnaissance la protection et la promotion des
langues reacutegionales en leur sein Ainsi la Constitution espagnole consacre clai-
rement le multilinguisme dans le cadre de ses communauteacutes autonomes17
15 Article 5 de la Constitution de la Reacutepublique italienne de 1947 laquo La Reacutepublique une et indivisible reconnaicirct et favorise les autonomies locales (hellip) raquo 16 Article 2 de la Constitution du Royaume drsquoEspagne de 1978 laquo La Constitution est fondeacutee
sur luniteacute indissoluble de la nation espagnole patrie commune et indivisible de tous les Es-
pagnols Elle reconnaicirct et garantit le droit agrave lautonomie des nationaliteacutes et des reacutegions qui la
composent et la solidariteacute entre elles raquo 17 En vertu de lrsquoarticle 3 de la Constitution espagnole
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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tout comme lrsquoItalie laquo Reacutepublique une et indivisible raquo laquo protegravege par des mesures
particuliegraveres les minoriteacutes linguistiques raquo (article 6)
Cette rapide eacutetude comparative permet de mettre en eacutevidence la singulariteacute de
la France au sein drsquoune Europe qui srsquoenorgueillit de se deacutefinir agrave travers la
richesse de sa diversiteacute Mais notamment depuis la loi constitutionnelle de
2008 le leacutegislateur franccedilais a agi dans le sens drsquoune protection et promotion
des langues reacutegionales la loi du 8 avril 2021 srsquoinscrivant dans ce processus
logique et coheacuterent
C Le contexte parlementaire franccedilais
La loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit donc dans un mouvement leacutegislatif reacutepondant agrave
lrsquoadresse du pouvoir constituant Laquelle concerne aussi le pouvoir exeacutecutif
La politique du ministegravere de lrsquoeacuteducation pour la deacutetermination du nombre de
places pour lrsquoagreacutegation et le CAPES des langues reacutegionales devrait aller de
pair avec les lois qui mettent en œuvre lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Ainsi
pour la langue basque il nrsquoy a pas eu de concours drsquoagreacutegation externe depuis
2018 anneacutee 2021 comprise il y a un seul poste pour lrsquoagreacutegation interne en
2021 2 pour le CAPES externe en 2021 et 2 pour le CAPES interne Pour la
langue bretonne et pour ne citer que lrsquoanneacutee en cours il y a un poste agrave lrsquoagreacute-
gation externe pas de concours pour lrsquoagreacutegation interne deux postes pour
le CAPES externe et 2 pour le CAPES interne Pour la langue corse il nrsquoy a pas
de concours cette anneacutee pour lrsquoagreacutegation externe et interne deux pour le
CAPES externe et aucun pour le CAPES interne Pour lrsquooccitan toujours pour
2021 il y a un poste pour lrsquoagreacutegation externe pas de concours pour lrsquoagreacute-
gation interne quatre pour le CAPES externe et un pour le CAPES interne
Ceci eacutetant juste preacuteciseacute il faut agrave preacutesent se concentrer sur lrsquoaction parlemen-
taire de mise en œuvre des dispositions de la Constitution
laquo 1 Le castillan est la langue espagnole officielle de lEacutetat Tous les Espagnols ont le devoir de
le connaicirctre et le droit de lutiliser
2 Les autres langues espagnoles sont aussi officielles dans leurs communauteacutes autonomes
respectives conformeacutement agrave leurs statuts
3 La richesse de la diversiteacute linguistique de lEspagne est un patrimoine culturel qui fait lobjet dun respect et dune protection speacuteciales raquo
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Videacutee drsquoune large part de sa substance en premiegravere lecture par la commission
des affaires culturelles et de leacuteducation de lrsquoAssembleacutee nationale la proposi-
tion de loi du deacuteputeacute Molac a ensuite retrouveacute ses objectifs initiaux gracircce agrave la
proceacutedure parlementaire qui donne agrave notre reacutegime repreacutesentatif tout son
sens discussions en commissions deacutebats en seacuteances publiques navette
amendements multiples pour parvenir agrave une adoption deacutefinitive agrave une majo-
riteacute non importante mais eacutecrasante des voix Agrave quelques heures de la pro-
mulgation de la loi par le Preacutesident de la Reacutepublique une partie de cette mecircme
majoriteacute a neacuteanmoins saisi le Conseil constitutionnel dans le cadre de lrsquoarticle
61 alineacutea 2 de la Constitution
Deacutepocirct de la proposition de loi
Deacuteposeacutee le 30 deacutecembre 2019 par le deacuteputeacute Paul Molac et autres deacuteputeacutes18
la proposition de loi apporte des mesures de protection et de promotion des
langues reacutegionales dans trois domaines le patrimoine lrsquoenseignement les
services publics via la signaleacutetique et les actes drsquoeacutetat civil Elle a eacuteteacute adopteacutee
le 8 avril 2021 par 247 voix pour 76 voix contre et 19 abstentions au terme
de la proceacutedure ci-dessous rappeleacutee
Renvoi agrave la commission des affaires culturelles et de leacuteducation
La proposition de loi a eacuteteacute renvoyeacutee agrave la commission des affaires cultu-
relles et de leacuteducation agrave deacutefaut de constitution drsquoune commission speacuteciale
dans les deacutelais preacutevus par les articles 30 et 31 du Regraveglement Le rapport fait
au nom de la commission par le deacuteputeacute Paul Molac nommeacute par elle a eacuteteacute
enregistreacute agrave la preacutesidence de lrsquoAssembleacutee nationale le 5 feacutevrier 2020 Preacutesenteacute
18 Sylvain BRIAL Jean-Feacutelix ACQUAVIVA Michel CASTELLANI Jean-Michel CLEacuteMENT
Paul-Andreacute COLOMBANI Charles de COURSON Jeanine DUBIEacute Freacutedeacuterique DUMAS Mrsquojid
EL GUERRAB Olivier FALORNI Yannick FAVENNEC BECOT Sandrine JOSSO Franccedilois-Mi-
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comme un moyen de deacutefendre les laquo langues de France raquo19 en danger et srsquoap-
puyant sur lrsquoexistant qui est la marque drsquoune eacutevolution rappeleacutee plus loin (II)
le texte entend laquo aller plus loin raquo en rehaussant la protection lrsquoaccessibiliteacute et
la visibiliteacute des langues reacutegionales dans les trois domaines preacuteciteacutes
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle premier re-
latif au patrimoine Ce dernier preacutecise en compleacutetant ainsi lrsquoar-
ticle L 1 du code du patrimoine que la conservation et la con-
naissance du patrimoine immateacuteriel sont drsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et que
les langues reacutegionales font partie de ce patrimoine
o La commission a adopteacute sans modifications lrsquoarticle 2 qui pro-
pose drsquoinclure parmi les treacutesors nationaux les biens preacutesentant
un inteacuterecirct majeur pour la connaissance des langues franccedilaise et
reacutegionales Le texte preacutevoit en effet outre pour les langues reacutegio-
nales des mesures de protection de notre patrimoine linguistique
dans une deacutemarche globale
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 3 qui disposait que des con-
ventions passeacutees entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pouvaient preacutevoir que
la langue reacutegionale est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de
lrsquohoraire normal des enseignements (des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires des collegraveges et des lyceacutees des territoires concerneacutes) Il
ne srsquoagissait pourtant que drsquoeacutetendre une regravegle deacutejagrave applicable en
Corse pour lrsquoenseignement de la langue corse lrsquoarticle L 312-11-
1 du code de lrsquoeacuteducation introduit par la loi ndeg 2002-92 du
22 janvier 2002 relative agrave la Corse dispose en effet que la langue
corse est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de lrsquohoraire normal
des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires de Corse Le Conseil cons-
titutionnel nrsquoa pas censureacute cette disposition tant que lrsquoenseigne-
ment eacutetait entendu comme ne revecirctant pas laquo un caractegravere obliga-
toire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo (deacutecision ndeg2001-
454 DC du 17 janvier 2002)
19 Sur cette notion de laquo langues de France raquo voir Les langues de France vingt ans apregraves Glot-topol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html
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o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 4 qui preacutevoyait que lenseigne-
ment bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale pouvait se reacuteali-
ser sous forme immersive laquo dans le respect des objectifs de maicirc-
trise des deux langues agrave chaque niveau denseignement raquo
o La commission a supprimeacute les articles 5 et 6 de la proposition de
loi Le premier manifestait la volonteacute drsquointroduire au sein drsquoun
nouvel article L 151-4-1 du code de lrsquoeacuteducation une deacuterogation
au principe drsquointerdiction de financement des deacutepenses drsquoinves-
tissement des eacutecoles priveacutees par les collectiviteacutes publiques en fa-
veur de lrsquoenseignement bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale
(article 5 de la proposition de loi) Le second eacutetendait la mecircme
deacuterogation au principe drsquointerdiction de financement des deacute-
penses drsquoinvestissement des collegraveges et lyceacutees par les collectiviteacutes
publiques
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 7 qui preacutevoyait drsquoeacutelargir les
cas dans lesquels existe un droit agrave inscrire son enfant dans une
eacutecole drsquoune autre commune afin qursquoil puisse suivre un enseigne-
ment de langue reacutegionale Inscription qui entraicircnait eacutegalement la
prise en charge du forfait scolaire par la commune de reacutesidence
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle 8 qui a pour
objet de renforcer la place et lrsquousage des langues reacutegionales dans
la vie publique en facilitant la traduction en langue reacutegionale des
inscriptions et signaleacutetiques apposeacutees sur les bacirctiments publics
les voies publiques de circulation et les voies navigables ainsi que
sur les principaux supports de communication institutionnelle
des services publics
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 9 qui avait pour objet la pos-
sibiliteacute pour les services publics drsquoeacutetat civil drsquoutiliser dans les
actes drsquoeacutetat civil qursquoils produisent les signes diacritiques des
langues reacutegionales en usage sur le territoire
o Enfin la commission a eacutegalement supprimeacute lrsquoarticle 10 qui preacute-
voyait un gage pour compenser les charges eacuteventuelles creacuteeacutees par
les dispositions de la proposition de loi
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Crsquoest donc un texte largement laquo eacutepureacute raquo par rapport agrave sa version initiale qui a
eacuteteacute soumis agrave la discussion en seacuteance publique en premiegravere lecture agrave lrsquoAssem-
bleacutee nationale Le porteur de la proposition va naturellement utiliser toutes
les potentialiteacutes offertes par la Constitution pour tenter de revenir par le biais
des amendements agrave son esprit initial
Discussion du texte nordm2654 adopteacute par la commission sur la proposition
de loi de M Paul Molac agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion (2548)
85 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes permettant de revenir sur peu de points
cependant agrave lrsquoobjectif initial de la proposition de loi Ainsi lrsquoamendement ndeg64
deacuteposeacute le 10 feacutevrier 2020 par le deacuteputeacute et rapporteur Paul Molac a permis de
rectifier lrsquoaspect purement deacuteclaratoire de lrsquoarticle premier auquel avait conclu
la commission lrsquoamendement ndeg69 deacuteposeacute le mecircme jour par Paul Molac eacutega-
lement permet lrsquoautorisation dans les actes drsquoeacutetat civil des signes diacritiques
des langues reacutegionales lrsquoamendement ndeg80 toujours deacuteposeacute par Paul Molac
modifie la loi Toubon (article 3 du texte de loi deacutefinitif) Mais agrave ce stade de la
discussion parlementaire le texte eacutetait encore dans une version tregraves eacuteloigneacutee
de sa mouture premiegravere
Adoption le 13 feacutevrier 2020 de la laquo petite loi raquo nordm408 par lAssem-
bleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion
Transmission au Seacutenat de la proposition de loi ndeg321 le 14 feacutevrier
2020
o Travaux en commission La commission de la culture de lrsquoeacuteduca-
tion et de la communication a deacutesigneacute Mme Monique de Marco
rapporteure sur la proposition de loi ndeg321 (2019-2020) adopteacutee
par lAssembleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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des langues reacutegionales et agrave leur promotion Commenccedilant par deacute-
clarer que laquo la question de la promotion des langues reacutegionales
deacutepasse les clivages politiques raquo Monique de Marco a proposeacute en
commission dadopter le texte conforme tout en avouant que des
dispositifs leacutegislatifs laquo plus ambitieux pourraient mieux assurer la
promotion des langues reacutegionales raquo Au cours des discussions le
regret de lrsquoabsence de la question de lrsquoenseignement a eacuteteacute exprimeacute
regret qui concerne en reacutealiteacute non la proposition de loi initiale
mais le texte de la commission de lrsquoAssembleacutee nationale laquo La pro-
position de loi de Paul Molac est la bienvenue parce quelle rap-
pelle agrave lEacutetat un certain nombre de ses obligations en ce quelle
preacutevoit un cadrage de la loi Toubon et quelle seacutecurise la place
des langues dans lespace public En revanche nous avons tous
eacuteteacute surpris par labsence totale de reacutefeacuterence agrave lEacuteducation natio-
nale Nous avons donc fait des recherches qui ont montreacute que les
deacuteputeacutes de la majoriteacute preacutesidentielle certainement agrave lappel du
ministre de leacuteducation nationale avaient systeacutematiquement sup-
primeacute tous les articles concernant lenseignement Nous nous re-
trouvons donc avec une magnifique proposition de loi sur les
langues reacutegionales qui ne dit pas un mot de lenseignement
comme sil pouvait y avoir une politique linguistique en faveur des
langues reacutegionales qui ne passe pas par lenseignement raquo Et le
seacutenateur Max Brisson drsquoen appeler agrave la reacuteinsertion des disposi-
tions sur lrsquoenseignement laquo Ma chegravere collegravegue vous avez proposeacute
un vote conforme mais jespegravere que nous ferons preuve dimagi-
nation dans lheacutemicycle pour deacuteposer quelques amendements qui
rappelleront au Gouvernement quil ny a pas de politique linguis-
tique qui ne sappuie sur leacuteducation Sinon cest de lenfu-
mage raquo20
20 Comptes-rendus de la commission de la culture de lrsquoeacuteducation et de la communication
seacuteance du 2 deacutecembre 2020 httpwwwsenatfrcompte-rendu-commis-
sions20201130culturehtmltoc5
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La rapporteure confirme que laquo lrsquoamputation raquo est le fait des deacutepu-
teacutes et tout en srsquoavouant prudente pousse indirectement ses col-
legravegues seacutenateurs agrave user du droit drsquoamendement laquo Nous venons
dentendre un veacuteritable plaidoyer en faveur des langues reacutegio-
nales Mecircme si cette proposition de loi ne donne pas entiegravere satis-
faction car elle a eacuteteacute largement amputeacutee par lAssembleacutee natio-
nale je preacutefegravere my tenir dans un premier temps par prudence
Et libres agrave vous de deacuteposer des amendements raquo
Aucun amendement nayant eacuteteacute deacuteposeacute en commission le texte
qui en eacutetait issu ne comportait toujours pas de dispositions rela-
tives agrave lenseignement
o Seacuteance publique Vingt amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes notam-
ment celui (deacuteposeacute agrave lidentique par des seacutenateurs issus de six
groupes diffeacuterents) preacutevoyant drsquoinseacuterer agrave lrsquoarticle L 442-5-1 du
code de lrsquoeacuteducation un alineacutea ainsi reacutedigeacute laquo La participation fi-
nanciegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un
enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle
L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence
et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune
autre commune agrave la condition que la commune de reacutesidence ne
dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegio-
nale raquo
Sans surprise lrsquoavis du Gouvernement exprimeacute par le ministre
Jean-Michel Blanquer fut deacutefavorable regrettant au passage
laquo drsquoecirctre sans cesse obligeacute drsquooccuper la position du jacobin reacutetif
sur la deacutefensive alors mecircme que nous avons une politique de pro-
motion des langues reacutegionales Simplement agrave certains moments
ndash par exemple avec la rupture de lrsquoeacutequilibre entre enseignement
public et enseignement priveacute ou avec la creacuteation drsquoune obligation
suppleacutementaire pour les communes ndash les propositions vont trop
loin et cela conduit agrave me placer face aux geacuteneacuterositeacutes diverses
dans la position deacutesagreacuteable du gardien des principes ou dans
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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celle du gardien de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral En effet derriegravere ces deacutebats
se pose la question de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et de la posteacuteriteacute de la loi
Carle car vous risquez de creacuteer un deacuteseacutequilibre alors que cette loi
repreacutesentait un point drsquoeacutequilibre raquo21
o Adoption du texte ndeg32 modifieacute par le Seacutenat le 10 deacutecembre 2020
Le Seacutenat a adopteacute trois articles additionnels (2 ter 2 quater et
2 quinquies) qui rejoignent les positions du deacuteputeacute Paul Molac et
reacutetablit lrsquoarticle 3 (modifieacute) de la proposition de loi qui avait eacuteteacute
supprimeacute en premiegravere lecture agrave lrsquoAssembleacutee nationale
Deuxiegraveme lecture
o Rapport sur la proposition de loi modifieacutee par le Seacutenat relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promo-
tion (ndeg3658) ndeg4035 Sur les six articles supprimeacutes agrave lrsquoAssem-
bleacutee lrsquoarticle 3 a eacuteteacute reacutetabli au Seacutenat qui a par ailleurs adopteacute
trois articles additionnels (2 ter 2 quater et 2 quinquies) Lrsquoen-
semble eacutetant conforme agrave lrsquoesprit de la proposition de loi initiale le
rapporteur souhaite que lrsquoAssembleacutee nationale adopte en deu-
xiegraveme lecture un texte identique agrave celui voteacute par le Seacutenat pour
les quatre articles restant en discussion et nrsquoa donc pas preacutesenteacute
drsquoamendements Mais lrsquoarticle 2 quinquies (article 6 du texte deacute-
finitif) ayant eacuteteacute supprimeacute en commission 16 amendements deacute-
poseacutes agrave lrsquoidentique par 115 deacuteputeacutes membres de huit diffeacuterents
groupes parlementaires ont permis de le reacuteintroduire en seacuteance
o Discussion en seacuteance publique le 8 avril 2021 au cours de la-
quelle 262 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes
o Adoption deacutefinitive le 8 avril 2021 en deuxiegraveme lecture de la
proposition de loi TA nordm591 relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
21 Compte rendu inteacutegral des deacutebats Seacuteance du 10 deacutecembre 2020 httpwwwse-natfrseancess202012s20201210s20201210007htmlsection708
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Saisine du Conseil constitutionnel du 22 avril 2021 par au moins
soixante deacuteputeacutes en application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitu-
tion
Soit un jour avant que nrsquoexpire le deacutelai de saisine du Conseil constitu-
tionnel la promulgation de la loi par le preacutesident de la Reacutepublique devant
intervenir dans les 15 jours de lrsquoadoption deacutefinitive La saisine du Conseil
constitutionnel est un acte non grave mais solennel qui perturbe le temps
leacutegislatif ne serait-ce que pour cette raison elle meacuterite un soin particulier
Soin envers lrsquoinstitution agrave laquelle elle srsquoadresse et agrave qui elle impose des
charges suppleacutementaires soin envers la Constitution qursquoelle entend pro-
teacuteger La lettre de saisine ou du moins la version qui a circuleacute manifeste-
ment reacutedigeacutee agrave la hacircte nrsquoest pas agrave la hauteur du seacuterieux qursquoexige de ma-
niegravere impeacuterieuse cette deacutemarche Une lettre de saisine ne saurait se limiter
agrave invoquer en tregraves peu de lignes la violation de laquo principes constitutionnels raquo
sans que ceux-ci ne soient deacutetailleacutes ni mecircme indiqueacutes Le seul article mis
en cause est lrsquoarticle 6 de la loi qui modifie lrsquoarticle L 442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation
II Discussion de la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la loi
relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Les deacuteputeacutes auteurs de la saisine demandent au Conseil constitutionnel la
censure de lrsquoarticle 6 de la loi
laquo Les sixiegraveme et septiegraveme alineacuteas de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacutedu-
cation sont remplaceacutes par un alineacutea ainsi reacutedigeacute
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacuteta-
blissements priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispen-
sant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L
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312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacuteta-
blissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune
agrave la condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dis-
pensant un enseignement de langue reacutegionale raquo
Une commune dont aucune eacutecole ne propose denseignement de langue reacutegio-
nale devrait donc participer aux frais de scolarisation des enfants domicilieacutes
sur son territoire qui suivent un tel enseignement dans un eacutetablissement situeacute
sur une autre commune Le dispositif concerne les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat drsquoassociation qui sont dans les faits majoritaire-
ment associatifs et laiumlques Cet enseignement peut aussi concerner les eacuteta-
blissements confessionnels mais il faut drsquoembleacutee preacuteciser que comme lrsquoa jugeacute
le Conseil constitutionnel dans son examen de la loi dite laquo Carle raquo le principe
de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute pour le leacutegislateur de preacutevoir la
participation des collectiviteacutes publiques au financement du fonctionnement
des eacutetablissements denseignement priveacute sous contrat dassociation
laquo Consideacuterant quil reacutesulte des regravegles ou principes agrave valeur constitution-
nelle (hellip) que le principe de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute
pour le leacutegislateur de preacutevoir sous reacuteserve de fonder son appreacuteciation
sur des critegraveres objectifs et rationnels la participation des collectiviteacutes
publiques au financement du fonctionnement des eacutetablissements den-
seignement priveacutes sous contrat dassociation selon la nature et limpor-
tance de leur contribution agrave laccomplissement de missions denseigne-
ment raquo (deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 cons 6)
Lrsquoinstauration du laquo forfait scolaire communal raquo ne poursuit pas un objectif de
sanction financiegravere des communes deacutemunies doffre en langue reacutegionale mais
celui de les inciter agrave en proposer Drsquoailleurs lrsquoarticle premier de la loi deacutefeacutereacutee
souligne que laquo LrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales concourent agrave lrsquoenseigne-
ment agrave la diffusion et agrave la promotion de ces langues raquo Comme preacuteciseacute plus
loin les maires sont dispenseacutes du paiement drsquoun tel forfait degraves lors qursquoun
enseignement drsquoune langue reacutegionale y compris au titre drsquoune simple initia-
tion est proposeacute dans leur commune
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Il faut souligner que les articles relatifs agrave lrsquoenseignement ont eacuteteacute introduits par
les seacutenateurs Plus exactement ces derniers ont reacuteintroduit la disposition qui
autorise la conclusion de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pour eacutetendre
lrsquooffre drsquoenseignement en langue reacutegionale aux eacutetablissements publics dans le
cadre horaire normal sous des formes speacutecifiques et inseacutereacute trois articles un
premier autorise lrsquoenseignement dit laquo immersif raquo en langue reacutegionale un deu-
xiegraveme le forfait scolaire communal dont il est ici question un troisiegraveme est
relatif agrave lenseignement des langues reacutegionales agrave Mayotte territoire qui du fait
de sa deacutepartementalisation reacutecente ne pouvait jusqualors pas beacuteneacuteficier des
possibiliteacutes offertes aux autres deacutepartements concernant lenseignement de
ces langues
Trois remarques doivent ecirctre faites sur lrsquoinsertion relative agrave lrsquoenseignement des
langues reacutegionales lors des horaires normaux Premiegraverement cette disposition
existe deacutejagrave pour la Collectiviteacute de Corse deuxiegravemement cet enseignement
doit se faire moyennant un accord entre lrsquoEacutetat et les reacutegions (laquo dans le cadre
de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions la collectiviteacute de Corse la Collectiviteacute
europeacuteenne drsquoAlsace ou les collectiviteacutes territoriales reacutegies par lrsquoarticle 73 de
la Constitution raquo) troisiegravemement il srsquoagit drsquoune option facultative qursquoin fine
les familles deacutecident ou non de prendre
En reacutesumeacute et conclusion la disposition de lrsquoarticle 3
1 Existe deacutejagrave pour une collectiviteacute en lrsquooccurrence la collectiviteacute de Corse
2 Est strictement encadreacutee (existence drsquoun accord entre lrsquoEacutetat et les reacute-
gions)
3 Est conforme agrave la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le ca-
ractegravere facultatif de lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale Dans sa deacute-
cision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi relative agrave la Corse le
Conseil constitutionnel a fixeacute le cadre de lrsquoenseignement drsquoune langue
reacutegionale dans le cadre de lrsquohoraire normal en consideacuterant que laquo si lrsquoen-
seignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquohoraire nor-
mal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir pour
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les ensei-
gnants qursquoil ne saurait non plus avoir pour effet de soustraire les eacutelegraveves
aux droits et obligations applicables agrave lrsquoensemble des usagers des eacuteta-
blissements qui assurent le service public de lrsquoenseignement ou sont
associeacutes agrave celui‑ci Consideacuterant qursquoil reacutesulte de ce qui preacutecegravede que sous
reacuteserve que lrsquoenseignement de la langue corse revecircte tant dans son prin-
cipe que dans ses modaliteacutes de mise en œuvre un caractegravere facultatif
[cette disposition] nrsquoest contraire ni au principe drsquoeacutegaliteacute ni agrave aucun
autre principe ou regravegle de valeur constitutionnelle raquo (cons 24 et 25)
La loi du 8 avril 2021 ne propose pas autre chose et srsquoinscrit en tous
points sur cette ligne deacutejagrave jugeacutee par le Conseil constitutionnel
Lrsquoarticle 6 srsquoinsegravere de maniegravere logique et coheacuterente dans lrsquoensemble des articles
de la loi relative agrave lrsquoenseignement Avant drsquoen examiner dans les deacutetails la
conformiteacute agrave la Constitution il faut souligner que le Seacutenat a deacutejagrave voteacute le prin-
cipe de ce forfait scolaire communal agrave deux reprises
1 Il lrsquoa drsquoabord inseacutereacute dans le projet de loi pour une eacutecole de la confiance
en premiegravere lecture Crsquoest la commission mixte paritaire qui a ajouteacute les
mots laquo contribution volontaire raquo ocirctant au forfait son caractegravere obliga-
toire22
2 Il a reacuteaffirmeacute sa position lors de lrsquoexamen de la proposition de loi ici
discuteacutee supprimant les mots laquo contribution volontaire raquo de la loi en vi-
gueur
Agrave cet argument deacutemocratique respectueux du bicameacuteralisme et rappelant que
le Seacutenat laquo assure la repreacutesentation des collectiviteacutes territoriales de la Reacutepu-
22 Loi ndeg2019-791 du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance JORF ndeg0174 du 28 juillet
2019
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Primo cet article est en coheacuterence avec la leacutegislation existante en matiegravere drsquoen-
seignement des langues reacutegionales agrave lrsquoeacutecole confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute
juridique (A) Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contrevien-
nent pas au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des langues
reacutegionales affirmeacute par le Conseil constitutionnel (B) Tertio la loi ne porte pas
atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur une commune une nouvelle
charge (C) Quarto elle ne viole pas non plus en conseacutequence le principe de
libre administration des collectiviteacutes territoriales (D)
A Forfait scolaire communal et respect de lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique
Cette exigence bien que non explicitement qualifieacutee de principe consti-
tutionnel par le Conseil constitutionnel se rattache notamment agrave la notion de
laquo garantie des droits raquo inscrite agrave lrsquoarticle 16 de la Deacuteclaration de 1789 laquo Toute
socieacuteteacute dans laquelle la garantie des droits nrsquoest pas assureacutee ni la seacuteparation
des pouvoirs deacutetermineacutee nrsquoa point de constitution raquo Deacutecoulant de lrsquoarticle 34
de la Constitution la clarteacute de la loi est un eacuteleacutement essentiel de la seacutecuriteacute
juridique agrave laquelle la jurisprudence du Conseil constitutionnel a offert corps
et protection Aussi le principe de laccessibiliteacute et de lintelligibiliteacute de la loi a-
t-il eacuteteacute eacuterigeacute en objectif de valeur constitutionnelle (deacutecision ndeg99-421 DC du
16 deacutecembre 1999)
Mecircme si les principes de clarteacute drsquoaccessibiliteacute et drsquointelligibiliteacute de la loi per-
mettent avant tout drsquoimposer au leacutegislateur laquo drsquoadopter des dispositions suffi-
samment preacutecises et des formules non eacutequivoques afin de preacutemunir les sujets
de droit contre une interpreacutetation contraire agrave la Constitution ou contre le
risque drsquoarbitraire raquo (deacutecision ndeg2004-500 DC du 29 juillet 2004 cons 13) ils
concourent aussi agrave offrir aux citoyens la seacutecuriteacute juridique neacutee drsquoune cons-
truction drsquoensemble coheacuterente et sans rupture Laquelle se base depuis 2008
sur une disposition claire et sans ambiguiumlteacute de la Constitution laquo Les langues
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo (75-1) Elle est une in-
vitation aux repreacutesentants de leacutegifeacuterer pour proteacuteger et promouvoir lesdites
langues et la loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit dans la continuiteacute de ce qursquoils ont fait depuis
2008 notamment La coheacuterence est lrsquoune des artegraveres essentielles de lrsquoexigence
de seacutecuriteacute juridique qui impregravegne la jurisprudence du Conseil constitution-
nelle comme celle du Conseil drsquoEacutetat et de la Cour de cassation Sans ecirctre ex-
plicitement eacutenonceacutee par le Conseil constitutionnel lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique est laquo efficiente raquo23 et est au cœur des preacuteoccupations des juges24 comme
de la doctrine Les Cahiers du Conseil constitutionnel lui consacrant un dossier
speacutecial dans sa livraison drsquooctobre 202025
La loi soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel reacutepond agrave lrsquoexigence de
seacutecuriteacute juridique en eacutetant le prolongement de lrsquoœuvre anteacuterieure du leacutegisla-
teur pour commencer la loi du 8 juillet 2013 drsquoorientation et de programma-
tion pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique qui reconnaicirct lrsquoenseigne-
ment bilingue franccedilais langue reacutegionale Dans lrsquoannexe de la loi figurent cinq
mentions compleacutementaires notamment celle concernant la possibiliteacute de
srsquoinscrire dans une eacutecole publique drsquoune autre commune lorsque la commune
de reacutesidence ne propose pas drsquoenseignement de langue reacutegionale Disposition
deacuteclarative qui a trouveacute une application concregravete dans la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) la parti-
cipation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes dans lrsquoenseigne-
ment public doit deacutesormais faire lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune drsquoac-
cueil et la commune de reacutesidence26
La loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle a
ajouteacute un nouveau motif de discrimination baseacute sur laquo la maitrise drsquoune autre
23 Bertrand Mathieu laquo La seacutecuriteacute juridique un principe clandestin mais efficient raquo Droit constitutionnel Meacutelanges Patrice Geacutelard LGDJ 1999 pp 301-305 24 En teacutemoigne notamment le fait que le Conseil drsquoEacutetat lui ait consacreacute deux rapports annuels celui de 1991 De la seacutecuriteacute juridique et celui de 2006 Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit 25 Dossier La seacutecuriteacute juridique Titre VII Les Cahiers du Conseil constitutionnel ndeg5 octobre
2020 26 Lrsquoarticle 104 de la loi NOTRe consacre par ailleurs la compeacutetence partageacutee des collectiviteacutes
locales dans la promotion des langues reacutegionales tout en donnant une place preacutepondeacuterante
agrave la reacutegion telle que preacutevue agrave lrsquoarticle 1er de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de lrsquoaction publique territoriale et drsquoaffirmation des meacutetropoles (MAPTAM)
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langue que le franccedilais raquo qui concerne eacutegalement les langues reacutegionales Celle
du 28 feacutevrier 2017 de programmation relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend
inopeacuterant le deacutecret du 2 Thermidor an II sur lequel se basait notamment le
ministegravere de la justice pour interdire les livrets de famille bilingues Enfin
lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance vient eacutetendre
aux eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives une laquo contribution volontaire raquo
des communes pour la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoins-
crivant dans une eacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionale en
dehors de sa commune de reacutesidence
La loi du 8 avril 2021 soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel nrsquoest que
le prolongement et le compleacutement de lrsquoarticle L 212-8 du Code de lrsquoeacuteducation
qui preacutecise les conditions dans lesquelles pour lrsquoenseignement public une
commune doit contribuer au financement des deacutepenses scolaires drsquoun enfant
reacutesidant sur son territoire et scolariseacute dans une autre commune Elle vient le
compleacuteter de maniegravere parallegravele eacutetendant ce qui existe deacutejagrave pour lrsquoeacutecole pu-
blique agrave lrsquoeacutecole priveacutee sous contrat Confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
elle ne viole par ailleurs aucun article de la Constitution et ne contredit pas
la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le caractegravere facultatif de lrsquoen-
seignement des langues reacutegionales
B Forfait scolaire communal et respect de la jurisprudence du Conseil
constitutionnel sur la langue franccedilaise
Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contreviennent pas
agrave lrsquoarticle 2 alineacutea premier de la Constitution (laquo La langue de la Reacutepublique est
le Franccedilais raquo) et au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des
langues reacutegionales qui en deacutecoule affirmeacute par le Conseil constitutionnel La
langue de la Reacutepublique est et demeure le Franccedilais et agrave aucun moment la
loi du 8 avril 2021 nrsquoentend y porter atteinte Lrsquoapprentissage des langues reacute-
gionales se fait agrave ses cocircteacutes mais dans une mesure permettant leffectiviteacute pour
les enfants agrave acceacuteder agrave lenseignement des langues reacutegionales laquo patrimoine de
la France raquo selon les termes de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Apprentissage
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qui pour certains enfants est lrsquoun des eacuteleacutements de leur laquo deacuteveloppement raquo au
sens de lrsquoalineacutea 10 du Preacuteambule de la Constitution du 27 octobre 1946 (laquo La
Nation assure agrave lrsquoindividu et agrave la familles les conditions neacutecessaires agrave leur
deacuteveloppement raquo)
Ce que creacutee lrsquoarticle 6 agrave travers le forfait ce nrsquoest pas lrsquoenseignement obligatoire
de la langue reacutegionale mais la possibiliteacute de pouvoir beacuteneacuteficier de cet enseigne-
ment (sans prescription de deacutelai) qui demeure facultatif Le rapporteur Paul
Molac le reacuteaffirme au cours de la seacuteance publique du 8 avril 2021 laquo Je ne
suis pas favorable au caractegravere obligatoire de cet enseignement mais je consi-
degravere que tout eacutelegraveve qui souhaite le suivre doit pouvoir le faire raquo27
Ce faisant la loi sans contrevenir agrave la Constitution offre un contenu agrave son
article 75-1 La jurisprudence du Conseil constitutionnel en vertu de laquelle
lrsquoenseignement des langues reacutegionales nrsquoa qursquoun caractegravere facultatif nrsquoest ici
absolument pas remise en cause Dans sa deacutecision ndeg99-412 DC du 15 juin
1999 il a souligneacute que le principe drsquouniciteacute du peuple franccedilais et lrsquoindivisibiliteacute
de la Reacutepublique assurant lrsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi srsquoopposaient agrave laquo
ce que soient reconnus des droits collectifs agrave quelque groupe que ce soit deacutefini
par une communauteacute drsquoorigine de culture de langue ou de croyance raquo En
outre la langue de la Reacutepublique eacutetant le franccedilais il ne peut ecirctre reconnu un
laquo droit agrave pratiquer une langue autre que le franccedilais non seulement dans la vie
priveacutee mais eacutegalement dans la vie publique agrave laquelle la Charte rattache
la justice et les autoriteacutes administratives et services publics raquo
Deux remarques srsquoimposent drsquoembleacutee drsquoune part cette jurisprudence est an-
teacuterieure agrave lrsquoinsertion en 2008 par le pouvoir constituant de lrsquoarticle 75-1 dis-
posant que laquo les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France
raquo Cette remarque drsquoordre contextuel vient srsquoajouter agrave la suivante drsquoautre part
27 Assembleacutee nationale XVe leacutegislature Session ordinaire de 2020-2021 Seacuteance du jeudi 08
avril 2021 httpswwwassemblee-nationalefrdyn15comptes-rendusseancesession-
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la loi du 8 avril 2021 nrsquoentend pas confier agrave lrsquoenseignement des langues reacutegio-
nales un caractegravere obligatoire En cela elle respecte la jurisprudence du Con-
seil constitutionnel preacuteciteacutee (deacutecision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi
relative agrave la Corse)
laquo Si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquoho-
raire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir
pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les en-
seignants (hellip) raquo (cons 24)
Lrsquoenseignement drsquoune langue minoritaire ne devient donc en aucun cas obli-
gatoire Ce qui doit faire laquo lrsquoobjet drsquoun accord raquo ce sont les conditions permet-
tant effectivement agrave des enfants drsquoacceacuteder agrave un enseignement facultatif qui
contribue agrave leur deacuteveloppement proteacutegeacute par ailleurs par lrsquoalineacutea 10 du Preacuteam-
bule de 1946 preacuteciteacute Ni la Constitution ni son interpreacutetation par le Conseil
constitutionnel ne srsquoopposent agrave ce qursquoune commune de reacutesidence participe y
compris de maniegravere obligatoire au financement de la scolarisation dans une
autre commune des enfants souhaitant suivre un tel enseignement Crsquoest don-
ner aux enfants et aux parents de maniegravere effective et efficiente la possibiliteacute
concregravete de beacuteneacuteficier drsquoun enseignement drsquoune langue reacutegionale composante
de leur laquo deacuteveloppement raquo laquelle appartient en vertu de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution au laquo patrimoine de la France raquo
C Forfait scolaire communal et respect du principe drsquoeacutegaliteacute
Tertio la loi ne contrevient pas au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur
une commune une nouvelle charge
Conformeacutement agrave une jurisprudence du Conseil constitutionnel bien eacutetablie le
principe deacutegaliteacute de lrsquoarticle 6 de la Deacuteclaration des droits de lhomme et du
citoyen de 1789 laquo ne soppose ni agrave ce que le leacutegislateur regravegle de faccedilon diffeacuterente
des situations diffeacuterentes ni agrave ce quil deacuteroge agrave leacutegaliteacute pour des raisons
dinteacuterecirct geacuteneacuteral pourvu que dans lun et lautre cas la diffeacuterence de traite-
ment qui en reacutesulte soit en rapport direct avec lobjet de la loi qui leacutetablit raquo
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(pour lrsquoune des reacutecentes application au domaine de lrsquoenseignement dont il sera
ici question deacutecision ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de
la confiance)
En ce qui concerne preacuteciseacutement le caractegravere obligatoire drsquoune nouvelle charge
pour une collectiviteacute celui-ci nrsquoa pas eacuteteacute censureacute par le Conseil constitutionnel
agrave propos de lrsquoexamen de la loi sur lrsquoavenir de lrsquoeacutecole preacuteciteacutee (deacutecision ndeg 2019-
787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de la confiance) Lrsquoarticle 17 de
la loi alors deacutefeacutereacute au Conseil constitutionnel preacutevoyait dans son premier ali-
neacutea
laquo LrsquoEacutetat attribue de maniegravere peacuterenne agrave chaque commune les ressources
correspondant agrave lrsquoaugmentation des deacutepenses obligatoires qursquoelle a
prises en charge en application des articles L 212-4 L 212-5 et L 442-
5 du code de lrsquoeacuteducation au titre de lrsquoanneacutee scolaire 2019-2020 par rap-
port agrave lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 dans la limite de la part drsquoaugmenta-
tion reacutesultant directement de lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoins-
truction obligatoire raquo
Les deacutepenses qui font lrsquoobjet de lrsquoaccompagnement financier en cause sont
celles qui beacuteneacuteficient aux eacutecoles publiques et aux eacutetablissements drsquoenseigne-
ment priveacutes ayant passeacute un contrat drsquoassociation avec lrsquoEacutetat
Lrsquoabaissement agrave trois ans du deacutebut de lrsquoinstruction obligatoire a donc fait pe-
ser des charges nouvelles pour les communes et leur a mecircme imposeacute de par-
ticiper au financement des eacutecoles maternelles priveacutees sous contrat y compris
lorsqursquoelles nrsquoont pas approuveacute ce contrat La diffeacuterence de traitement entre
les communes est reacuteelle selon qursquoelles financcedilaient ou non des classes mater-
nelles avant lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoinstruction obligatoire mais
nrsquoentraicircne pas pour autant une rupture drsquoeacutegaliteacute
Ainsi lrsquoa jugeacute le Conseil constitutionnel dans la deacutecision preacuteciteacutee drsquoune part
il a estimeacute que cette diffeacuterence de traitement reposait sur une diffeacuterence de
situation
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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laquo Les communes qui au cours de lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 avaient
institueacute des classes maternelles ou eacutecoles maternelles publiques ou ap-
prouveacute des contrats drsquoassociation drsquoeacutecoles maternelles priveacutees ont con-
tribueacute agrave ce titre agrave leur financement dans les conditions preacutevues par le
code de lrsquoeacuteducation Ces communes ne sont ainsi pas placeacutees dans une
situation identique agrave celle des autres communes qui nrsquoexerccedilaient pas
deacutejagrave les mecircmes compeacutetences et ne supportaient donc pas les charges
correspondantes raquo (cons 7)
Drsquoautre part le Conseil constitutionnel a jugeacute que la diffeacuterence de traitement
contesteacutee eacutetait en rapport direct avec lrsquoobjet de la loi qui lrsquoeacutetablit
laquo Qui consiste en application de la seconde phrase du quatriegraveme alineacutea
de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution agrave accompagner de ressources finan-
ciegraveres une extension de compeacutetence ayant pour conseacutequence drsquoaugmen-
ter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales raquo (cons 8)
Agrave lrsquoargument opposeacute agrave lrsquoarticle 6 de la loi deacutefeacutereacutee selon lequel ces dispositions
creacuteeraient une diffeacuterence de traitement entre les communes contraire au prin-
cipe deacutegaliteacute devant la loi le Conseil constitutionnel en vertu de sa jurispru-
dence Loi pour une eacutecole de la confiance devrait logiquement apporter la mecircme
reacuteponse Le leacutegislateur entend avec cette loi du 8 avril 2021 donner de ma-
niegravere geacuteneacuterale effectiviteacute agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution agrave travers en par-
ticulier un outil permettant de mettre en œuvre les dispositions de lrsquoarticle 72-
2 de la Constitution relatives aux extensions de compeacutetences imposeacutees aux
collectiviteacutes territoriales Dispositions qui par ailleurs nrsquoobligent pas le leacutegi-
slateur agrave preacutevoir un accompagnement financier de lrsquoensemble des communes
En lien avec cet argument il en reacutesulte que lrsquoarticle 6 ne porte pas atteinte
par ailleurs au principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
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D Forfait scolaire communal et respect du principe de libre administra-
tion des collectiviteacutes territoriales
Quarto le forfait scolaire communal nrsquoest ni contraire agrave la lettre de lrsquoar-
ticle 72 de la Constitution ni agrave son interpreacutetation par le Conseil constitution-
nel
En vertu de lrsquoarticle 72 alineacutea 3 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales
srsquoadministrent librement dans les conditions preacutevues par la loi Correacutelative-
ment lrsquoarticle 34 de la Constitution donne agrave la loi compeacutetence pour deacuteterminer
laquo les principes fondamentaux (hellip) de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales de leurs compeacutetences et de leurs ressources raquo Cette libre admi-
nistration doit en outre se concilier avec drsquoautres principes constitutionnels
tels que le principe drsquoeacutegaliteacute et la liberteacute de lrsquoenseignement Crsquoest ainsi que le
Conseil constitutionnel a jugeacute que laquo si le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacute-
gislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce que les conditions essentielles drsquoap-
plication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de lrsquoenseignement deacutepen-
dent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre
les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (voir notamment la deacutecisions ndeg84-
185 DC du 18 janvier 1985 cons 18)
La libre administration est bien un principe constitutionnel mais crsquoest au leacute-
gislateur qursquoil revient sous le controcircle du Conseil constitutionnel drsquoen preacuteci-
ser le contenu Lrsquointervention du leacutegislateur est neacutecessaire pour la deacutefinition
des regravegles de fonctionnement des collectiviteacutes territoriales la deacutefinition des
compeacutetences qui leur sont deacutevolues (transfert creacuteation extension des compeacute-
tences) et en matiegravere de ressources la fixation du taux des impocircts deacutecideacutes par
les Assembleacutees deacutelibeacuteratives locales
Il ressort de la jurisprudence administrative et constitutionnelle que seule la
loi peut creacuteer une obligationsujeacutetion nouvelle agrave la charge drsquoune collectiviteacute
territoriale Le principe de libre administration ne peut donc pas exister en-
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dehors de lrsquointervention du leacutegislateur lequel nrsquoa pas pour autant toute lati-
tude En drsquoautres termes le principe de libre administration est deacutefini par la
loi mais est aussi proteacutegeacute contre elle qui ne peut notamment pas porter at-
teinte au-delagrave drsquoun certain seuil aux ressources des collectiviteacutes territoriales
restreindre la liberteacute contractuelle intervenir dans les deacutecisions des collecti-
viteacutes territoriales relatives agrave leurs agents ou le fonctionnement de leurs insti-
tutions
En eacutetendant la prise en charge du forfait scolaire communal la loi deacutefeacutereacutee creacutee
une charge suppleacutementaire pour certaines communes
Aux termes du quatriegraveme alineacutea de larticle 72-2 de la Constitution laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales saccom-
pagne de lattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consa-
creacutees agrave leur exercice Toute creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour
conseacutequence daugmenter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales est ac-
compagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Dans le cas ougrave le leacutegislateur
octroie une nouvelle compeacutetence aux collectiviteacutes territoriales (articles 72-2 de
la Constitution et L 1614-1-1 du code geacuteneacuteral des collectiviteacutes territoriales)
il accompagne cette creacuteation de ressources correspondantes uniquement si
lexercice de cette compeacutetence est rendu obligatoire Ainsi en a jugeacute le Conseil
constitutionnel en ajoutant que le leacutegislateur disposait dun pouvoir dappreacute-
ciation en la matiegravere la compensation devant ecirctre naturellement suffisante
pour ne pas constituer une entrave au principe de libre administration
laquo Que ces dispositions ne visent en ce qui concerne les creacuteations et ex-
tensions de compeacutetences que celles qui preacutesentent un caractegravere obliga-
toire que dans cette hypothegravese il nest fait obligation au leacutegislateur
que daccompagner ces creacuteations ou extensions de compeacutetences de res-
sources dont il lui appartient dappreacutecier le niveau sans toutefois deacutena-
turer le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales raquo
(deacutecision ndeg2008-569 DC du 7 aoucirct 2008 Loi instituant un droit daccueil
pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires pendant le temps
scolaire cons 13)
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Le Conseil constitutionnel a jugeacute qursquoen conseacutequence et en lrsquoespegravece le leacutegisla-
teur avait suffisamment deacutetermineacute le niveau des ressources accompagnant la
creacuteation de ce service daccueil pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires pendant le temps scolaire sans meacuteconnaicirctre le quatriegraveme alineacutea de
larticle 72-2 de la Constitution
Lextension de compeacutetences est soumise a fortiori au mecircme reacutegime que la
creacuteation de compeacutetences Elle consiste en leacutelargissement du peacuterimegravetre ou en
la modification de la nature ou de lobjet dune compeacutetence dont lexercice est
deacutejagrave assureacute par les collectiviteacutes territoriales ayant pour conseacutequence de creacuteer
une charge suppleacutementaire pour celles-ci Le droit agrave une compensation finan-
ciegravere nest garanti que si lextension preacutesente un caractegravere obligatoire et le
leacutegislateur en deacutetermine le niveau et les modaliteacutes agrave condition quils nentra-
vent pas la libre administration des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece le principe de libre administration nrsquoest donc pas violeacute par le ca-
ractegravere contraignant que confegravererait la loi deacutefeacutereacutee au forfait scolaire communal
de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation Drsquoune part le Conseil constitu-
tionnel a deacutejagrave comme souligneacute plus haut accepteacute le principe du caractegravere
obligatoire drsquoune nouvelle charge qui nrsquoentraine par ailleurs mecircme pas
lrsquoautomaticiteacute drsquoun accompagnement financier des communes Drsquoautre part
lrsquoargument de proportionnaliteacute est ici deacuteterminant agrave ceux qui avancent un
risque drsquoassegravechement financier de certaines communes rurales contraintes
de prendre en charge la scolarisation dun eacutelegraveve dans une autre commune
mieux doteacutee qui propose lenseignement de la langue reacutegionale (ce qui selon
le deacuteputeacute Molac ne concernerait que 002 des enfants en France) il faut
reacutepondre en mettant en avant lrsquoobjectif incitatif et non sanctionnateur de la
loi Il suffira auxdites communes de proposer un enseignement de langue reacute-
gionale qui ne pourrait repreacutesenter qursquoune heure drsquoinitiation par semaine par
exemple
Une heure drsquoinitiation par semaine pour eacuteviter de payer le forfait scolaire com-
munal lequel ne meacuteconnait pas par ailleurs lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
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les principes constitutionnels drsquoeacutegaliteacute drsquouniciteacute de la langue franccedilaise de la
libre administration des collectiviteacutes territoriales et permet drsquoassurer le deacuteve-
loppement de lrsquoenfant crsquoest bien peu de choses pour censurer une loi souve-
raine adopteacutee qui plus est agrave une eacutecrasante majoriteacute
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
De Raphaeumll SchellenbergerA GreffeObjet Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues ReacutegionalesDate mardi 4 mai 2021 101012Piegraveces jointes Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionalespdf
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loirelative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus desoixante deacuteputeacutes ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texteen application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarerlrsquoinconstitutionnaliteacute de son article 6 Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons ennotre qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre lapleine constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sensNous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notreconsideacuteration respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire
- Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
- Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche
- Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret
- Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne
- Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte
- Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor
- David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion
- Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme
- Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne
- Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
1
M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2
Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
3
On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
- Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie
- Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
Ce message ainsi que les piegraveces jointes sont eacutetablis sous la seule responsabiliteacute de lexpeacutediteur agrave lintention exclusive de ses destinataires ils peuvent contenir des informations confidentielles Toute publication utilisation ou diffusion doit ecirctre autoriseacutee preacutealablement Ce message a fait lobjet dun traitement anti-virusIl est rappeleacute que tout message eacutelectronique est susceptible dalteacuteration au cours de son acheminement sur Internet ________________________________________________________________
Vous pouvez consulter le site de lAssembleacutee nationale agrave ladresse suivante httpwwwassemblee-nationalefr
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M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
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Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Association ESKOLIMChez Seaska Route de la Pouponniegravere64250 CAMBO LES BAINSeskolim6gmailcomRepreacutesenteacutee par son President Jean Seacutebastien HAYDN11 chemin de Saint Jean66240 SAINT ESTEVE
CONTRIBUTION EXTERIEURE
Observations sur la conformiteacute agrave la Constitution de laproposition de loi relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
Monsieur le Preacutesident du Conseil constitutionnel Mesdames et Messieurs les
membres du Conseil constitutionnel lrsquoassociation Eskolim souhaite porter agrave votre attention
les observations suivantes tendant agrave deacutemontrer la conformiteacute agrave la Constitution de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Parmi lrsquoensemble des dispositions du texte deacutefeacutereacute la plupart nrsquoont donneacute lieu agrave aucun
deacutebat sur leur conformiteacute agrave la Constitution qui est de toute eacutevidence acquise par exemple au
sujet des traductions dont la constitutionnaliteacute a deacutejagrave indirectement eacuteteacute reconnue (CC 99-412
DC 15 juin 1999 CC ndeg2001-452 DC 6 deacutecembre 2001) ou de lrsquoutilisation des signes
diacritiques sur les actes drsquoeacutetat civil
De plus au-delagrave des apparences drsquoune politique jurisprudentielle initieacutee dans un contexte
speacutecifique le Conseil constitutionnel dispose deacutesormais drsquoun cadre constitutionnel de
reacutefeacuterence transformeacute (1) qui lui permettra de valider les dispositions leacutegislatives du texte dont
il est saisi en particulier lrsquoarticle 4 relatif agrave lrsquoenseignement immersif (2) et lrsquoarticle 6 au sujet
de la participation financiegravere agrave la scolarisation par les communes de reacutesidence (3)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
1 Le renouvellement des normes constitutionnelles de reacutefeacuterence en matiegravere de
langues reacutegionales
11 Les ineacutevitables deacuterogations apporteacutees agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution
Toute regravegle constitutionnelle connaicirct des atteacutenuations et peut ecirctre concilieacutee lrsquoarticle 2
de la Constitution ne fait pas exception Le principe demeure inchangeacute laquo La langue de la
Reacutepublique est le franccedilais raquo Sur ce fondement le Conseil constitutionnel a deacuteveloppeacute dans
les anneacutees 90 et 2000 une jurisprudence vigilante sur lrsquousage du franccedilais mais sans pour
autant refuser toute eacutevolution nous y reviendrons
Cependant lrsquoassociation Eskolim souhaite mettre en eacutevidence lrsquoindeacuteniable
changement de cadre constitutionnel en matiegravere de langues reacutegionales pour au
moins trois raisons
En premier lieu la porteacutee de lrsquoarticle 2 de la Constitution nrsquoest pas figeacutee et peut
eacutevoluer avec le temps En effet le Conseil constitutionnel opegravere reacuteguliegraverement des adaptations
de la porteacutee du texte constitutionnel Parmi de nombreuses illustrations jurisprudentielles la
liberteacute drsquoexpression et de communication protegravege deacutesormais la liberteacute drsquoacceacuteder agrave Internet
(CC ndeg 2009-580 DC 10 juin 2009) et de srsquoy exprimer (CC ndeg2020-801 DC du 18 juin 2020)
La liberteacute du mariage comprend deacutesormais le droit de mettre fin aux liens du mariage (CC ndeg
2016-557 QPC du 29 juillet 2016) La monteacutee en puissance des exigences environnementales
dans le deacutebat public a permis au Conseil constitutionnel de juger qursquoil deacutecoule de la Charte de
lrsquoenvironnement laquo que la protection de lrsquoenvironnement patrimoine commun des ecirctres
humains constitue un objectif de valeur constitutionnelle raquo (CC ndeg2019-823 QPC 31 janvier
2020) Certains fondements constitutionnels que lrsquoon croyait endormis ont eacuteteacute reacuteactiveacutes sous
lrsquoeffet du pouvoir interpreacutetatif agrave lrsquoimage de lrsquoarticle 15 de la DDHC (laquo La socieacuteteacute a le droit de
demander compte agrave tout agent public de son administration raquo) agrave lrsquoorigine drsquoun droit drsquoaccegraves
aux archives publiques (CC ndeg2017-655 QPC 15 septembre 2017) et drsquoun droit drsquoaccegraves aux
documents administratifs (CC ndeg2020-834 QPC 3 avril 2020)
En deuxiegraveme lieu la reacutedaction actuelle de lrsquoarticle 2 de la Constitution ne date pas de
1958 mais drsquoun ajout issu de la loi constitutionnelle ndeg 92-554 du 25 juin 1992 voteacutee dans un
contexte particulier au moment ougrave la France ratifiait le traiteacute de Maastricht et reacutevisait sa
Constitution afin de lever les atteintes agrave la souveraineteacute constateacutees par le Conseil
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
constitutionnel En 1992 lrsquoinsertion de la langue franccedilaise au sein de lrsquoarticle 2 vise agrave rassurer
lrsquoopinion face aux craintes heacutegeacutemoniques de la langue anglaise les langues reacutegionales ne
sont ni viseacutees ni nieacutees dans leur existence et leur rocircle Il est sur ce point particuliegraverement
reacuteveacutelateur de se reacutefeacuterer aux deacuteclarations limpides du Garde des Sceaux Michel Vauzelle lors
des deacutebats parlementaires consacreacutes en 1992 au vote de la reacutevision constitutionnelle laquo Les
langues reacutegionales sont naturellement une richesse de notre patrimoine national Agrave ce
titre le Gouvernement exprime par ma voix lrsquoimmense respect et le soin qursquoil porte agrave cette
richesse de la nation [] Je ne vois pas lagrave drsquoatteinte agrave lrsquouniteacute de la nation mais au
contraire une contribution agrave sa richesse [] Aucune atteinte ne sera porteacutee agrave la politique
de respect de la diversiteacute de nos cultures reacutegionales qui est un eacuteleacutement essentiel du
patrimoine national raquo (JO Assembleacutee nationale p 1021)
Il est donc parfaitement possible pour le Conseil constitutionnel drsquoopeacuterer une
interpreacutetation eacutevolutive de lrsquoarticle 2 afin drsquoadapter la porteacutee de la norme constitutionnelle au
contexte actuel favorable agrave lrsquoapprofondissement de lrsquousage des langues reacutegionales Il nrsquoest
drsquoailleurs pas anodin de constater que la preacutesente proposition de loi a largement transcendeacute les
clivages politiques pour ecirctre voteacutee agrave une large majoriteacute avec drsquoailleurs le soutien de
lrsquoensemble des Preacutesidents de Reacutegion
En troisiegraveme lieu dans sa fameuse deacutecision sur la Charte europeacuteenne des langues
reacutegionales et minoritaires du 15 juin 1999 (ndeg99-412 DC) le Conseil constitutionnel a
implicitement reconnu la compatibiliteacute de lrsquoenseignement immersif ou bilingue avec la
Constitution et en particulier avec lrsquoarticle 2 de la Constitution En effet lrsquoinconstitutionnaliteacute
constateacutee entre la Charte et la Constitution concerne seulement les articles 1 et 7 Or le
consideacuterant 13 de cette deacutecision abusivement preacutesenteacutee comme un verrou absolu en matiegravere
de langues reacutegionales prend soin de preacuteciser laquo que nest contraire agrave la Constitution eu eacutegard agrave
leur nature aucun des autres engagements souscrits par la France dont la plupart au
demeurant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France en
faveur des langues reacutegionales raquo Parmi ces laquo autres engagements souscrits par la France raquo
au sein de la Charte figurent certaines stipulations de lrsquoarticle 8 de la Charte1 selon lequel
1 Article 8 ndash Enseignement1En matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel ces langues sontpratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de lenseignement de la (des)langue(s) officielle(s) de lEtat(hellip)ci agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires concerneacutees ou
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
laquo laquoen matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel
ces langues sont pratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de
lenseignement de la (des) langue(s) officielle(s) de lEtat raquo agrave toute une seacuterie drsquoengagements
Au sein des engagements auxquels la France avait souscrits et sur lesquels le Conseil
constitutionnel srsquoest donc prononceacute on trouve le point 1 c (iv) en vertu duquel la France
srsquoengage laquo agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui
le souhaitent ndash ou le cas eacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant raquo
Or ce renvoi concerne les stipulations suivantes
laquo i agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires
concerneacutees ou
Ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les
langues reacutegionales ou minoritaires ou
Iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales
ou minoritaires comme partie inteacutegrante du curriculum
Autrement dit la France srsquoeacutetait engageacutee au moment de la signature de la Charte agrave
appliquer lrsquoune des trois mesures citeacutees qui concernent lrsquoenseignement laquo dans raquo les langues
reacutegionales ou minoritaires dans le secondaire crsquoest-agrave-dire un enseignement immersif ou
bilingue Cet engagement faisait donc partie des stipulations examineacutees par le Conseil
constitutionnel et le consideacuterant 13 de la deacutecision du 15 juin 1999 affirme clairement que ces
stipulations ne sont pas contraires agrave la Constitution Degraves 1999 lrsquoenseignement immersif en
langue reacutegionale est reconnu par le Conseil constitutionnel comme compatible avec
lrsquoarticle 2 de la Constitution
En quatriegraveme lieu le texte mecircme de la Constitution contient drsquoores et deacutejagrave des
ameacutenagements au principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais
Drsquoune part en vertu de la loi constitutionnelle ndeg 98-610 du 20 juillet 1998 lAccord
de Noumeacutea est constitutionnaliseacute agrave larticle 77 de la Constitution Or cet accord stipule en son
ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les langues reacutegionalesou minoritaires ou
iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales ou minoritairescomme partie inteacutegrante du curriculum ou
iv agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui le souhaitent ndash ou le caseacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
point 133 laquo Les langues kanak sont avec le franccedilais des langues denseignement et de
culture en Nouvelle-Caleacutedonie Leur place dans lenseignement et les meacutedias doit donc ecirctre
accrue et faire lobjet dune reacuteflexion approfondie raquo
Drsquoautre part sous lrsquoeffet de la reacutevision constitutionnelle du 23 juillet 2008 la
Constitution consacre deacutesormais les langues reacutegionales sous lrsquoeffet de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution qui par deacutefinition atteacutenue et deacuteroge agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution et dont la
porteacutee ne saurait ecirctre symbolique
12 La porteacutee de lrsquoancrage constitutionnel des langues reacutegionales minoritaires
En vertu de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution laquo Les langues reacutegionales appartiennent
au patrimoine de la France raquo Sans discussion possible cette nouvelle disposition
constitutionnelle constitue un changement de circonstances de droit permettant drsquoatteacutenuer
fortement la porteacutee des preacuteceacutedentes deacutecisions du Conseil constitutionnel rendues avant la
reacutevision constitutionnelle de 2008 Certains voudraient pourtant reacuteduire ce texte agrave une porteacutee
simplement symbolique et pensent pouvoir drsquoores et deacutejagrave trouver une confirmation dans la
jurisprudence du Conseil constitutionnel La reacutealiteacute contentieuse est beaucoup plus nuanceacutee et
ne preacutejuge rien de lrsquoavenir
Le Conseil constitutionnel nrsquoa eu depuis 2008 qursquoune seule et unique occasion de
preacuteciser la porteacutee de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Dans la deacutecision du 20 mai 2011
(ndeg2011-130 QPC) il eacutetait en effet saisi des dispositions de larticle L 312-10 du code de
leacuteducation relative agrave lenseignement des langues et cultures reacutegionales qui eacutetait contesteacute au
regard de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Or estime le Conseil en 2011 lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution ninstitue pas un droit ou une liberteacute que la Constitution garantit Sa
meacuteconnaissance ne peut donc ecirctre invoqueacutee agrave lappui dune question prioritaire de
constitutionnaliteacute sur le fondement de larticle 61-1 de la Constitution
Il convient de ne pas tirer de conclusions excessives du deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en
QPC de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Drsquoune part cela nrsquoempecircche pas le Conseil constitutionnel de se fonder sur lrsquoarticle
75-1 de la Constitution dans le cadre du controcircle a priori comme crsquoest par exemple le cas
pour les regravegles constitutionnelles en matiegravere de recevabiliteacute des amendements ou des principes
constitutionnels en matiegravere budgeacutetaires
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Drsquoautre part le deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en QPC drsquoune norme constitutionnelle ne
preacutejuge pas drsquoune forme de hieacuterarchie mateacuterielle ou formelle et srsquoexplique seulement par les
speacutecificiteacutes de chacun des offices Par exemple le respect des regravegles du vote de la loi
imposeacutees par la Constitution impossibles agrave invoquer en QPC font pourtant lrsquoobjet drsquoune
vigilance accrue du Conseil constitutionnel dans le cadre du controcircle a priori justifiant
chaque anneacutee de nombreuses censures
En outre bien que non invocable en QPC lrsquoarticle 75-1 teacutemoigne indubitablement de
la volonteacute du constituant de permettre au leacutegislateur drsquoassouplir les conditions drsquousage des
langues reacutegionales en ouvrant davantage la leacutegislation agrave des possibiliteacutes drsquoapprentissage en la
matiegravere En cela lrsquoarticle 75-1 de la Constitution est une atteacutenuation une disposition
deacuterogatoire agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution selon lequel laquo La langue de la Reacutepublique est le
franccedilais raquo Comme le souligne le rapport drsquoun deacuteputeacute en 2015 laquo la preacuteservation et la
protection des langues reacutegionales sont devenues un objectif de valeur constitutionnelle raquo2 Une
telle interpreacutetation serait drsquoailleurs coheacuterente avec les travaux parlementaires agrave lrsquoorigine de la
reacutevision de 2008 pour le preacutesident de la Commission des lois du Seacutenat lrsquoarticle 75-1 permet
de donner laquo un fondement solide aux dispositions leacutegislatives et reacuteglementaires qui favorisent
la protection et le deacuteveloppement des langues reacutegionales sans diminuer la place que le
franccedilais occupe dans notre sphegravere publique raquo3
Enfin dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel
estime que larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi
ndeg2005-380 du 23 avril 2005 est conforme agrave la Constitution Or les dispositions ainsi
valideacutees sont toujours en vigueur dans une reacutedaction identique laquo Un enseignement de
langues et cultures reacutegionales peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des
modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces
langues sont en usage raquo Ainsi tout en estimant que lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ne
constitue pas un droit ou liberteacute constitutionnel directement invocable en QPC le Conseil
constitutionnel a valideacute le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures
reacutegionales
2JJ Urvoas Rapport sur Proposition de loi constitutionnelle ndeg 1618 visant agrave ratifier la Charte europeacuteenne deslangues reacutegionales ou minoritaires 14 janvier 2014
3JJ Hyest Rapport ndeg 387 (2007-2008) sur le projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions dela Ve Reacutepublique fait au nom de la commission des lois du Seacutenat
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Autre signe eacutevident de la porteacutee effective de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le
leacutegislateur a multiplieacute ces derniegraveres anneacutees lrsquoadoption de textes favorisant lrsquousage et
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et leur promotion La loi du 8 juillet 2013
drsquoorientation et de programmation pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique ouvre la
possibiliteacute drsquoun enseignement bilingue franccedilais-langue reacutegionale la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) eacutetablit la participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes par lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale
lrsquoarticle 86 de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle
modifie lrsquoarticle 225-1 du code peacutenal en creacuteant un nouveau cas de discrimination fondeacute sur laquo
la maitrise drsquoune autre langue que le franccedilais raquo la loi du 28 feacutevrier 2017 de programmation
relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend inopeacuterant lrsquointerdiction des livrets de famille
bilingues lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance eacutetend aux
eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives les modaliteacutes drsquoun accord entre les communes pour
la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoinscrivant dans une eacutecole dispensant un
enseignement de langue reacutegionale en dehors de sa commune de reacutesidence Lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution a donc susciteacute une production leacutegislative qui teacutemoigne de la volonteacute du pouvoir
politique de mettre en œuvre une politique en matiegravere de langue et culture reacutegionales La
particulariteacute de la proposition de loi deacutefeacutereacutee est drsquoecirctre la premiegravere loi dont lrsquoobjet exclusif vise
agrave densifier lrsquoenseignement et lrsquousage des langues reacutegionales mais ce texte confirme les
avanceacutees ponctuelles eacutetablies depuis la reacutevision constitutionnelle de 2008
13 La monteacutee en puissance drsquoexigences constitutionnelles favorisant lrsquousage des langues
reacutegionales
Au-delagrave de lrsquoapport indeacuteniable de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution qui inteacuteresse
directement et clairement la possibiliteacute pour le leacutegislateur de favoriser le deacuteveloppement des
langues reacutegionales la jurisprudence du Conseil constitutionnel atteste drsquoune monteacutee en
puissance de plusieurs liberteacutes qui participent indirectement du mecircme mouvement
En premier lieu la liberteacute drsquoexpression et de communication concerne les langues
reacutegionales Degraves la deacutecision ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 le Conseil constitutionnel avait
concilieacute lrsquoarticle 2 de la Constitution avec la liberteacute drsquoexpression et de communication afin de
censurer certaines dispositions imposant lrsquousage du franccedilais tout en faisant notamment une
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reacutefeacuterence aux langues reacutegionales cette liberteacute laquo implique le droit pour chacun de choisir les
termes jugeacutes par lui les mieux approprieacutes agrave lexpression de sa penseacutee que la langue franccedilaise
eacutevolue comme toute langue vivante en inteacutegrant dans le vocabulaire usuel des termes
de diverses sources quil sagisse dexpressions issues de langues reacutegionales de vocables
dits populaires ou de mots eacutetrangers raquo Or la liberteacute drsquoexpression et de communication a vu
son reacutegime constitutionnel renforceacute depuis plusieurs anneacutees sous lrsquoeffet du triple test de
proportionnaliteacute en vertu duquel les limites apporteacutees agrave ces liberteacutes doivent ecirctre neacutecessaires
adapteacutees et proportionneacutees agrave lrsquoobjectif poursuivi Norme constitutionnelle prioritaire pour le
Conseil constitutionnel la liberteacute drsquoexpression et de communication a justifieacute de nombreuses
censures de dispositions leacutegislatives ces derniegraveres anneacutees (loi laquo Hadopi raquo consultation des
sites Internet terroristes loi laquo Avia raquohellip) Or cette liberteacute dans ses deux composantes de
lrsquoexpression et de la communication permet au locuteur drsquoutiliser une langue reacutegionale et de
ne pas subir drsquoentraves excessives ou injustifieacutees Le deacuteveloppement des langues reacutegionales et
de leur enseignement lrsquoouverture des possibiliteacutes de srsquoexprimer et de communiquer gracircce agrave
ces langues ne sont pas eacutetrangegraveres aux conditions drsquoexercice de la liberteacute drsquoexpression et de
communication Ainsi la monteacutee en puissance de cette liberteacute dans le contentieux
constitutionnel confirme lrsquoeacutevolution favorable du cadre constitutionnel applicable aux langues
reacutegionales
En deuxiegraveme lieu lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant est deacutesormais consacreacute en tant
qursquoexigence constitutionnelle deacutecoulant des alineacuteas 10 et 11 du Preacuteambule de 1946 Ce
principe a drsquoores et deacutejagrave eacuteteacute appliqueacute en matiegravere de droit des eacutetrangers (CC 2019-797 QPC du
26 juillet 2019) mais aussi en droit de la famille au sujet du divorce (CC ndeg 2019-778 DC du
21 mars 2019) ou de lrsquoaccouchement sous le secret (CC 2019-826 QPC du 7 feacutevrier 2020) Il
serait parfaitement coheacuterent que cette exigence constitutionnelle soit applicable en matiegravere
drsquoeacuteducation et drsquoenseignement ce qui permettrait notamment de justifier le renforcement de
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et le soutien financier qui leur est apporteacute
En troisiegraveme lieu la liberteacute de lrsquoenseignement reconnu en tant que principe
constitutionnel (CC ndeg77-87 DC 23 novembre 1977 2016-745 DC 26 janvier 2017)
pourrait permette de proteacuteger constitutionnellement le libre choix des parents en
matiegravere de meacutethodes eacuteducatives conformeacutement agrave la jurisprudence du Conseil drsquoEtat En
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effet dans une deacutecision du 19 juillet 2017 (Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg
406150) le Conseil drsquoEtat estime que le laquo principe de la liberteacute de lrsquoenseignement qui figure
au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la Reacutepublique implique la
possibiliteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement y compris hors de tout contrat conclu
avec lrsquoEtat tout comme le droit pour les parents de choisir pour leurs enfants des
meacutethodes eacuteducatives alternatives agrave celles proposeacutees par le systegraveme scolaire public y
compris lrsquoinstruction au sein de la famille raquo A fortiori la liberteacute de lrsquoenseignement
permettrait au leacutegislateur drsquooffrir aux eacutelegraveves la possibiliteacute de suivre un enseignement immersif
en langue reacutegionale Faire deacutecouler de la liberteacute drsquoenseignement une exigence en matiegravere de
droit des parents de choisir les meacutethodes eacuteducatives serait drsquoailleurs en coheacuterence avec
lrsquoarticle 2 du Protocole 1 de la CEDH4 et lrsquoarticle 14-3 de la Charte des droits fondamentaux
de lUnion europeacuteenne5
Au-delagrave du principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais unchangement de contexte est intervenu depuis lrsquoinsertion en 1992 de cette disposition agravelrsquoarticle 2 de la Constitution Depuis 2008 le pouvoir constituant a consacreacute leslangues reacutegionales agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution de nombreuses reacuteformesleacutegislatives et regraveglementaires ont accompagneacute le deacuteveloppement des langues reacutegionaleset plusieurs principes constitutionnels accompagnent et pourraient agrave lrsquoavenirrenforcer lrsquoassise normative des langues reacutegionalesCrsquoest agrave lrsquoaune de ce cadre constitutionnel renouveleacute et transformeacute en phase avec leseacutevolutions leacutegislatives et sociales que le Conseil constitutionnel appreacuteciera laconstitutionnaliteacute de la preacutesente proposition de loi qui loin de constituer une rupturesrsquoinscrit dans une forme de continuiteacute
2 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi modifie lrsquoarticle L321-10 du code de lrsquoeacuteducation qui
en lrsquoeacutetat dispose
4laquo Nul ne peut se voir refuser le droit agrave lrsquoinstruction LrsquoEacutetat dans lrsquoexercice des fonctions qursquoil assumera dans ledomaine de lrsquoeacuteducation et de lrsquoenseignement respectera le droit des parents drsquoassurer cette eacuteducation et cetenseignement conformeacutement agrave leurs convictions religieuses et philosophiques raquo
5laquo La liberteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement dans le respect des principes deacutemocratiques ainsi quele droit des parents drsquoassurer lrsquoeacuteducation et lrsquoenseignement de leurs enfants conformeacutement agrave leurs convictionsreligieuses philosophiques et peacutedagogiques sont respecteacutes selon les lois nationales qui en reacutegissent lrsquoexercice raquo
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laquo Les langues et cultures reacutegionales appartenant au patrimoine de la France leurenseignement est favoriseacute prioritairement dans les reacutegions ougrave elles sont en usage
Cet enseignement peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefiniespar voie de convention entre lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont enusage
Le Conseil supeacuterieur de leacuteducation est consulteacute conformeacutement aux attributions qui lui sontconfeacutereacutees agrave larticle L 231-1 sur les moyens de favoriser leacutetude des langues et culturesreacutegionales dans les reacutegions ougrave ces langues sont en usage
Lenseignement facultatif de langue et culture reacutegionales est proposeacute dans lune des deuxformes suivantes
1deg Un enseignement de la langue et de la culture reacutegionales
2deg Un enseignement bilingue en langue franccedilaise et en langue reacutegionale
Les familles sont informeacutees des diffeacuterentes offres dapprentissage des langues et culturesreacutegionales raquo
Lrsquoarticle 4 a simplement pour objet drsquoajouter un 3e cas de forme drsquoenseignementfacultatif de langue et culture reacutegionales en preacutevoyant
laquo3deg Un enseignement immersif en langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectifdrsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo
21 Le Conseil constitutionnel peut ne pas se prononcer sur cette disposition
A titre liminaire il semblerait que lrsquoarticle 4 du texte soumis agrave lrsquoexamen du
Conseil constitutionnel ne soit pas contesteacute par les auteurs de la saisine parlementaire agrave en
croire les deacuteclarations publiques de plusieurs deacuteputeacutes Ce point nrsquoest pas sans importance degraves
lors qursquoil confirme le large consensus politique autour de cette disposition et peut avoir une
conseacutequence sur le peacuterimegravetre de lrsquoobjet de la deacutecision rendue
Certes il arrive ponctuellement au Conseil constitutionnel drsquoexaminer drsquooffice
drsquoautres dispositions que celles contesteacutees par la saisine mais depuis lrsquoentreacutee en vigueur de la
QPC et speacutecialement depuis 2016 une telle pratique tend agrave devenir une exception (Deacutecisions
ndeg 2019-794 DC du 20 deacutecembre 2019 ndeg2018-772 DC du 15 novembre 2018 ndeg2016-745
DC du 26 janvier 2017)
De plus lors de lrsquoexamen de la loi pour une eacutecole de la confiance dans sa deacutecision
ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 le Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute examiner
drsquooffice les dispositions de lrsquoarticle 38 creacuteant en vertu de lrsquoarticle L314-2 du code de
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lrsquoeacuteducation une expeacuterimentation de classe immersive en langue eacutetrangegravere ou reacutegionale6 Si le
Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute se saisir drsquooffice de cette disposition expeacuterimentale
crsquoest qursquoimplicitement il nrsquoa pas consideacutereacute qursquoelle posait une difficulteacute manifeste de
constitutionnaliteacute Degraves lors la coheacuterence voudrait qursquoil en aille de mecircme avec les dispositions
de lrsquoarticle 4 de la preacutesente proposition de loi qui ne font que reprendre les grands principes
de lrsquoexpeacuterimentation preacuteceacutedente en preacutevoyant la possibiliteacute drsquoun enseignement immersif en
langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue
franccedilaise
22 Les exigences anciennes poseacutees par le Conseil constitutionnel sont respecteacutees
Elaboreacutee avant la reacutevision constitutionnelle de 2008 consacrant les langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la jurisprudence
du Conseil constitutionnel en matiegravere drsquoenseignement de langue reacutegionale est totalement
respecteacutee par lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
En premier lieu le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement immersif en langue
reacutegionale rend lrsquoarticle 4 conforme agrave la Constitution
Dans plusieurs deacutecisions le Conseil constitutionnel a eu lrsquooccasion de preacuteciser que
seule lrsquoobligation de suivre un enseignement dans une autre langue que le franccedilais serait
contraire agrave la Constitution Ainsi dans la deacutecision ndeg 2001-456 DC du 27 deacutecembre 2001 il
indique que laquo lusage dune langue autre que le franccedilais ne peut ecirctre imposeacute aux eacutelegraveves des
eacutetablissements de lenseignement public ni dans la vie de leacutetablissement ni dans
lenseignement des disciplines autres que celles de la langue consideacutereacutee raquo Le verbe
6Article L314-2 du code de lrsquoeacuteducation laquo Sous reacuteserve de lrsquoautorisation preacutealable des autoriteacutes acadeacutemiques etapregraves concertation avec les eacutequipes peacutedagogiques le projet drsquoeacutecole ou drsquoeacutetablissement mentionneacute agrave lrsquoarticle L401-1 peut preacutevoir la reacutealisation dans des conditions deacutefinies par deacutecret drsquoexpeacuterimentations peacutedagogiquesportant sur tout ou partie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement drsquoune dureacutee limiteacutee agrave cinq ans Cesexpeacuterimentations peuvent concerner lrsquoorganisation peacutedagogique de la classe de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement laliaison entre les diffeacuterents niveaux drsquoenseignement la coopeacuteration avec les partenaires du systegraveme eacuteducatiflrsquoenseignement dans une langue vivante eacutetrangegravere ou reacutegionale les eacutechanges avec des eacutetablissementseacutetrangers drsquoenseignement scolaire lrsquoutilisation des outils et ressources numeacuteriques la reacutepartition des heuresdrsquoenseignement sur lrsquoensemble de lrsquoanneacutee scolaire les proceacutedures drsquoorientation des eacutelegraveves et la participation desparents drsquoeacutelegraveves agrave la vie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement Les collectiviteacutes territoriales sont systeacutematiquementassocieacutees agrave la deacutefinition des grandes orientations des expeacuterimentations meneacutees par lrsquoeacuteducation nationale ainsiqursquoagrave leurs deacuteclinaisons territoriales raquo
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laquo imposer raquo est employeacute agrave la fois au sujet de lrsquousage drsquoune autre langue que le franccedilais et au
sujet de la vie de lrsquoeacutetablissement et de lrsquoenseignement des disciplines autres que celles de la
langue consideacutereacutee Ce qui signifie qursquoil est constitutionnellement possible au leacutegislateur de
permettre aux eacutelegraveves de choisir de maniegravere facultative une telle orientation dans
lrsquoenseignement De mecircme dans sa deacutecision ndeg2001 454 DC du 17 janvier 2002 le Conseil
constitutionnel avait estimeacute que si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre
de lrsquohoraire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires laquo il ne saurait revecirctir pour autant
un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo Et dans la deacutecision
ndeg2004-490 DC 12 feacutevrier 2004 le Conseil indique que lrsquoenseignement de la langue
tahitienne ou dune autre langue polyneacutesienne dans le cadre de lhoraire normal des eacutecoles
maternelles et primaires dans les eacutetablissements du second degreacute et dans les eacutetablissements
denseignement supeacuterieur laquo ne saurait revecirctir pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les
eacutelegraveves ou eacutetudiants ni pour les enseignants raquo
Or en lrsquoespegravece il nrsquoy a absolument aucun doute sur le caractegravere facultatif du 3deg
ajouteacute agrave lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation En effet le premier alineacutea de lrsquoarticle L312-
10 du code de lrsquoeacuteducation est inchangeacute et eacutevoque un laquo enseignement facultatif raquo Le deacuteputeacute
Molac lrsquoa clairement exprimeacute lors des deacutebats laquo lrsquoenseignement immersif tel qursquoil est ici
proposeacute reacutepond agrave cette condition dans la mesure ougrave il ne serait pas imposeacute mais seulement
proposeacute au sein des eacutetablissements publics au cocircteacute de filiegraveres classiques drsquoenseignement la
deacutecision finale restant du ressort des personnes responsables de lrsquoenfant raquo (Rapport du 31
mars 2021)
En deuxiegraveme lieu lrsquoarticle 4 nrsquoa pas pour objet de soustraire les eacutelegraveves aux
droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements drsquoenseignement
Dans plusieurs deacutecisions relatives agrave lrsquousage drsquoune langue reacutegionale le Conseil
constitutionnel rappelle qursquoun enseignement de ce type nrsquoa pas pour laquo pour objet de soustraire
les eacutelegraveves scolariseacutes (hellip) aux droits et obligations applicables agrave lensemble des usagers des
eacutetablissements qui assurent le service public de lenseignement ou sont associeacutes agrave celui-ci raquo
(ndeg 91-290 DC du 9 mai 1991 ndeg 2001-454 DC du 17 janvier 2002) Or lrsquoarticle 4 a
seulement pour objet drsquoouvrir une 3e modaliteacute facultative drsquoenseignement en langue reacutegionale
La proposition de loi ne confegravere pas des droits speacutecifiques agrave des laquo groupes raquo de locuteurs de
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de laquo territoires raquo dans lesquels ces langues
seraient pratiqueacutees Le texte ne modifie pas non plus les modaliteacutes drsquoexpression dans la vie
publique et dans la relation entre lrsquoadministration et les administreacutes De telle sorte que
lrsquoarticle 4 ne creacutee aucun droit particulier pour les eacutelegraveves comme pour les enseignants de nature
agrave les soustraire aux droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements
drsquoenseignement ou associeacutes agrave celui-ci
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 4 opegravere une conciliation raisonnable et eacutequilibreacutee entre
le principe de lrsquoarticle 2 de la Constitution et lrsquoapprentissage des langues reacutegionales
Lrsquoenseignement immersif en lange reacutegionale doit srsquoopeacuterer laquo sans preacutejudice de
lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo Lrsquoarticle 4 prend soin de ne pas
ignorer le principe poseacute par lrsquoarticle 2 de la Constitution et prolonge au niveau leacutegislatif la
conciliation souhaiteacutee par le constituant depuis 2008 avec lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Il
appartiendra au pouvoir regraveglementaire de preacuteciser la mise en œuvre de lrsquoobjectif de bonne
connaissance de la langue franccedilaise qui en toute hypothegravese garantit une conciliation
eacutequilibreacutee entre les regravegles constitutionnelles en preacutesence
Au surplus les retours drsquoexpeacuteriences des expeacuterimentations de classes en
enseignements immersifs permises par lrsquoarticle L 314-2 du code de lrsquoeacuteducation deacutemontrent
que les eacutelegraveves disposent drsquoun niveau en franccedilais plus eacuteleveacute que la moyenne Comme lrsquoindique
le rapport du Seacutenat sur la proposition de loi 19 expeacuterimentations immersives en langue
basque 6 en langue corse et une en langue catalane ont lieu actuellement dans des eacutecoles
publiques Or pour prendre lrsquoexemple de lrsquoenseignement en basque agrave 100 en eacutecole
maternelle objet drsquoune eacutevaluation preacutecise par lrsquoacadeacutemie de Bordeaux en 2019 (Etude
comparative des filiegraveres de maternelle 100 basque bilingue et franccedilais Acadeacutemie de
Bordeaux 2019) laquo lorsque ces enfants arrivaient en CP leur niveau de franccedilais eacutetait
supeacuterieur agrave la moyenne du deacutepartement Cela prouve que le niveau de franccedilais nrsquoavait
absolument pas eacuteteacute toucheacute raquo (Paul Molac Assembleacutee nationale Seacuteance du 8 avril 2021)
En quatriegraveme lieu lrsquoarticle 4 ne fait qursquoeacutetendre la mise en œuvre drsquoune modaliteacute
drsquoenseignement deacutejagrave valideacute par le Conseil constitutionnel
Dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel a valideacute
le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures reacutegionales en estimant que
larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi ndeg2005-380 du 23
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avril 2005 est conforme agrave la Constitution En effet apregraves avoir estimeacute inopeacuterant le grief tireacute
de la violation de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la deacutecision preacutecise laquo que les dispositions
contesteacutees ne sont contraires agrave aucun droit ou liberteacute que la Constitution garantit raquo Par
conseacutequent en vertu de lrsquoautoriteacute que lrsquoarticle 62 de la Constitution confegravere aux deacutecisions du
Conseil constitutionnel les dispositions valideacutees dans cette deacutecision et toujours en vigueur
sont conformes agrave la Constitution Il srsquoagit en particulier de lrsquoalineacutea 2 de la version actuelle de
lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation en vertu duquel laquo Cet enseignement peut ecirctre
dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre
lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont en usage raquo Or lrsquoarticle 4 de la
proposition de loi ne fait qursquoajouter une 3e possibiliteacute de mise en œuvre drsquoun principe deacutejagrave
valideacute par le Conseil constitutionnel modaliteacute facultative et sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune
bonne connaissance de la langue franccedilaise Le leacutegislateur srsquoest donc scrupuleusement
conformeacute aux exigences du Conseil constitutionnel
23 La possibiliteacute drsquoun enseignement immersif peut se preacutevaloir de plusieurs exigences constitutionnelles
En plus de srsquoinscrire dans les lignes jurisprudentielles du Conseil constitutionnel et de
respecter lrsquoarticle 2 de la Constitution lrsquoarticle 4 de la proposition de la loi peut se preacutevaloir
plusieurs normes constitutionnelles
En premier lieu lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en vertu duquel laquo Les langues
reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo constitue un changement de
circonstances de droit issu de la reacutevision constitutionnelle de 2008 qui atteacutenue la porteacutee de
lrsquoarticle 2 de la Constitution et permet ainsi de fonder le principe drsquoen enseignement immersif
et facultatif en langue reacutegionale
En second lieu comme preacuteceacutedemment rappeleacute (cf supra point 13) plusieurs
exigences et liberteacutes constitutionnelles peuvent soutenir le deacuteveloppement des langues
reacutegionales et peser favorablement dans la conciliation opeacutereacutee par le Conseil constitutionnel
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La liberteacute drsquoexpression et de communication garantie par lrsquoarticle 11 de la DDHC
et dont le reacutegime constitutionnel srsquoest renforceacute depuis une dizaine drsquoanneacutees peut permettre de
justifier lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale degraves lors qursquoil srsquoagit drsquoun preacutealable neacutecessaire
agrave lrsquoexpression et agrave la communication dans une autre langue que le franccedilais
Lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant reacutecemment consacreacute sur le fondement des alineacuteas 10
et 11 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 peut permettre au leacutegislateur de diversifier les
possibiliteacutes drsquoapprentissage drsquoune langue et drsquoune culture reacutegionale
La liberteacute de lrsquoenseignement consacreacutee de longue date en tant que principe
fondamental reconnu par les lois de la Reacutepublique implique neacutecessairement comme le
reconnaissent le Conseil drsquoEtat au niveau constitutionnel (CE 19 juillet 2017 Association
Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150) et les textes europeacuteens (article 2 du protocole 1
CEDH article 14-3 Charte des droits fondamentaux de lrsquoUnion europeacuteenne) une possibiliteacute
pour les parents de choisir des meacutethodes eacuteducatives en lien avec leurs convictions
Il est eacutegalement possible drsquoavancer le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction qui
deacutecoule de lrsquoalineacutea 13 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 (CC ndeg2001-450 DC 11
juillet 2001) degraves lors que lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale poursuit un objectif
peacutedagogique auquel les eacutelegraveves doivent pouvoir acceacuteder de maniegravere suffisamment libre et
selon des critegraveres objectifs et rationnels
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi se contente drsquoajouter une modaliteacute de mise enœuvre drsquoun enseignement dont le principe a deacutejagrave eacuteteacute valideacute par le Conseilconstitutionnel La conformiteacute agrave la Constitution de cet enseignement est eacutetablie degraveslors qursquoil est proposeacute de maniegravere facultative sans preacutejudice du respect de lrsquoarticle 2 dela Constitution et qursquoil peut se preacutevaloir de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ainsi quede plusieurs principes constitutionnels comme la liberteacute drsquoexpression lrsquointeacuterecirctsupeacuterieur de lrsquoenfant la liberteacute drsquoenseignement et lrsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction
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3 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi deacutefeacutereacutee modifie lrsquoarticle L442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation en remplaccedilant les alineacuteas 6 et 7 par lrsquoalineacutea suivant
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue
reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de
reacutesidence et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la
condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de
langue reacutegionale raquo
31 Lrsquoimpact subsidiaire et reacutesiduel de lrsquoarticle 6
Au-delagrave des passions et crispations qui peuvent parfois se rencontrer au greacute de deacutebats
relatifs au financement de lrsquoenseignement priveacute la modification apporteacutee par lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi doit ecirctre replaceacutee agrave sa juste porteacutee
En premier le meacutecanisme est subsidiaire En effet la participation financiegravere de la
commune de reacutesidence ne serait solliciteacutee que si cette commune ne laquo dispose pas drsquoeacutecole
dispensant un enseignement de langue reacutegionale raquo Il srsquoagit bien drsquoun laquo enseignement raquo quel
que soit sa forme et son volume Degraves lors comme lrsquoa clairement exprimeacute le deacuteputeacute Paul
Molac devant la Commission des affaires sociales il peut srsquoagir drsquoune laquo initiation drsquoun
enseignement paritaire ou drsquoune immersion raquo (31 mars 2021)
En deuxiegraveme lieu le meacutecanisme est reacutesiduel La participation financiegravere se limite
aux eacutetablissements priveacutes du premier degreacute ndash les eacutecoles ndash ayant conclu un contrat
drsquoassociation Les collegraveges et lyceacutees sont donc exclus du dispositif Un faible nombre
drsquoenfants sera concerneacute et la charge sera donc reacuteduite pour les communes en question De
plus en pratique dans les zones ougrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales est reacutepandu les
eacutecoles drsquoun grand nombre de communes ont deacutejagrave deacuteveloppeacute des offres eacuteducatives
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En troisiegraveme lieu la participation financiegravere est encadreacutee par la loi En application
de lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation non modifieacute par la preacutesente
proposition de loi les modaliteacutes de calcul de la contribution de la commune de reacutesidence sont
clairement eacutetablies
laquo il est tenu compte des ressources de cette commune du nombre deacutelegraveves de cette
commune scolariseacutes dans la commune daccueil et du coucirct moyen par eacutelegraveve calculeacute sur la base
des deacutepenses de fonctionnement de lensemble des eacutecoles publiques de la commune daccueil
sans que le montant de la contribution par eacutelegraveve puisse ecirctre supeacuterieur au coucirct quaurait
repreacutesenteacute pour la commune de reacutesidence leacutelegraveve sil avait eacuteteacute scolariseacute dans une de ses eacutecoles
publiques raquo
La charge financiegravere obeacuteit donc agrave des regravegles claires objectives rationnelles et deacutejagrave en
vigueur depuis plusieurs anneacutees En effet le laquo forfait scolaire raquo est deacutejagrave pratiqueacute sur le
fondement de lrsquoarticle L212-8 du code de lrsquoeacuteducation lorsqursquoune famille scolarise dans une
eacutecole publique ou priveacutee son enfant dans une autre commune que la commune de reacutesidence
32 Lrsquoabsence de violation de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales et du principe drsquoeacutegaliteacute
Ainsi replaceacutee dans sa juste porteacutee il ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi de violer la Constitution et en particulier les principes applicables en
matiegravere de libre administration des collectiviteacutes territoriales ainsi que le principe drsquoeacutegaliteacute
En premier lieu le Conseil constitutionnel a deacutejagrave valideacute le principe de lrsquoaide agrave
lrsquoenseignement priveacute et en particulier aux langues reacutegionales
Avant mecircme la reacutevision constitutionnelle de 2008 et la conseacutecration des langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le Conseil
constitutionnel avait reconnu que laquo pour concourir agrave la sauvegarde des langues reacutegionales
lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales peuvent apporter leur aide aux associations ayant cet
objet raquo (CC ndeg2001-456 DC 27 deacutecembre 2001)
De plus le Conseil constitutionnel rappelle reacuteguliegraverement que laquo le leacutegislateur peut
preacutevoir loctroi dune aide des collectiviteacutes publiques aux eacutetablissements denseignement
priveacutes selon la nature et limportance de leur contribution agrave laccomplissement de missions
denseignement raquo (CC ndeg93-329 DC du 13 janvier 1994)
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En deuxiegraveme lieu le principe de libre administration ne saurait justifier des
traitements diffeacuterencieacutes dans lrsquoexercice des droits et liberteacutes constitutionnels
En vertu de lrsquoarticle 72 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales srsquoadministrent
librement mais laquo dans les conditions preacutevues par la loi raquo De plus le Conseil constitutionnel
prend soin de preacuteciser que laquo si le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacutegislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce
que les conditions essentielles drsquoapplication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de
lrsquoenseignement deacutependent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas
ecirctre les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (CC ndeg 84-185 DC du 18 janvier 1985 CC
ndeg93-329 du 13 janvier 1994) Plus largement dans la deacutecision du 17 janvier 2002 (ndeg2001-
454 DC) le Conseil constitutionnel affirme que laquo le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales ne saurait conduire agrave ce que les conditions essentielles de mise en
oeuvre des liberteacutes publiques et par suite lensemble des garanties que celles-ci comportent
deacutependent des deacutecisions de collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre les mecircmes
sur lensemble du territoire de la Reacutepublique raquo
Or en lrsquoespegravece si les communes pouvaient librement participer au financement de la
scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous contrat
drsquoassociation lrsquoexercice de la liberteacute drsquoenseignement du principe drsquoeacutegaliteacute devant la loi et du
principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction deacutependrait de la seule volonteacute drsquoune collectiviteacute
territoriale ce que le Conseil constitutionnel condamne Degraves lors que la possibiliteacute drsquoun
enseignement en langue reacutegionale est offerte aux enfants les conditions drsquoaccegraves agrave cet
enseignement doivent pouvoir ecirctre effectives et eacutegales Loin de violer le principe drsquoeacutegaliteacute
devant la loi lrsquoarticle 6 de la proposition de loi en assure au contraire la garantie
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne transfert ni ne creacutee de
nouvelles compeacutetences
Srsquoagissant des ressources des collectiviteacutes locales permettant de leur assurer une libre
administration le quatriegraveme alineacutea de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution preacutevoit laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales srsquoaccompagne de
lrsquoattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consacreacutees agrave leur exercice Toute
creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour conseacutequence drsquoaugmenter les deacutepenses des
collectiviteacutes territoriales est accompagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Le Conseil
constitutionnel veille au respect de cette regravegle drsquoune part pour les transferts de compeacutetence
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entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales et drsquoautre part pour les creacuteations ou extensions de
compeacutetence des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece aucune creacuteation ou transfert de compeacutetence nrsquoest opeacutereacute au sens de
lrsquoarticle 72-2 de la Constitution Il srsquoagit drsquoune simple participation financiegravere agrave caractegravere
subsidiaire reacutesiduel et deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels comme
preacuteceacutedemment eacutevoqueacute (cf supra point 31) De plus le versement de la participation
financiegravere correspond en quelque sorte agrave un allegravegement de charge degraves lors que le coucirct de
lrsquoenfant scolariseacute est reporteacute sur une autre commune que la commune de reacutesidence En
conseacutequence lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne fait que modifier les modaliteacutes drsquoexercice
drsquoune compeacutetence sans en creacuteer ou transfeacuterer une nouvelle
Drsquoailleurs dans la deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 le Conseil
constitutionnel avait jugeacute inopeacuterant le grief tireacute de la violation des articles 72 et 72-2 de la
Constitution agrave propos de la version ancienne de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation en
jugeant que laquo la loi deacutefeacutereacutee nemporte ni creacuteation ni extension des compeacutetences en matiegravere de
contributions des communes aux frais de fonctionnement des classes eacuteleacutementaires des
eacutetablissements du premier degreacute priveacutes sous contrat dassociation que par suite le grief tireacute
de la meacuteconnaissance du principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales manque
en fait raquo
Le Conseil constitutionnel a statueacute dans le mecircme sens au sujet de lrsquoinstitution drsquoun
creacutedit drsquoimpocirct en matiegravere drsquoapprentissage ou de la possibiliteacute de modifier la dureacutee du contrat
drsquoapprentissage mecircme si ces mesures en rendant lrsquoapprentissage plus attrayant ont pour effet
drsquoaugmenter le nombre drsquoapprentis et donc drsquoaccroicirctre les charges des reacutegions dans ce
domaine (CC ndeg 2004-509 DC du 13 janvier 2005)
En quatriegraveme lieu le principe drsquoeacutegaliteacute entre les charges publiques est respecteacute
En effet en plus du caractegravere subsidiaire et reacutesiduel du meacutecanisme la participation
financiegravere preacutevue par lrsquoarticle 6 de la proposition de loi srsquoapplique agrave lrsquoensemble des
communes ne disposant pas drsquoun eacutetablissement dispensant un enseignement de langue
reacutegionale ce qui est coheacuterent au regard de lrsquoobjet de la loi Les critegraveres de la participation
financiegravere preacutevus par lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 sont en tout eacutetat de cause objectifs et
rationnels eacutetablis et mis en œuvre depuis plusieurs anneacutees Les garanties de lrsquoarticle 13 de la
DDHC sont donc respecteacutees
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En cinquiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir du respect
de plusieurs normes constitutionnelles
En affirmant depuis 2008 que les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la
France lrsquoarticle 75-1 de la Constitution donne un ancrage constitutionnel au deacuteveloppement
de lrsquousage et de lrsquoenseignement des langues reacutegionales Or sans la participation financiegravere des
communes de reacutesidence agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat lrsquoenseignement des langues reacutegionales serait compromis Par
conseacutequent lrsquoarticle 6 de la proposition de loi constitue une garantie leacutegale du respect de
lrsquoaffirmation porteacutee par lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Le mecircme raisonnement sera tenu agrave propos de lrsquoensemble des principes constitutionnels
qui donnent une assise agrave lrsquousage et agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales la liberteacute
drsquoexpression et de communication (article 11 DDHC) la liberteacute drsquoenseignement (PFRLR)
dont pourrait deacutecouler une exigence en matiegravere de droit des parents de choisir les meacutethodes
eacuteducatives (CE 19 juillet 2017 Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150)
lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant (alineacutea 10 et 11 du Preacuteambule de 1946) le principe drsquoeacutegaliteacute
(article 6 DDHC) le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction (alineacutea 13 du Preacuteambule de 1946)
Sans lrsquoarticle 6 de la proposition de loi lrsquoeffectiviteacute de lrsquoensemble de ces normes
constitutionnelles serait consideacuterablement atteacutenueacutee et creacuteerait des diffeacuterences de traitement
injustifieacutees et deacutependantes de la volonteacute des communes
De plus lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir drsquoun objectif de
clarification et de seacutecurisation du droit applicable qui peut se rattacher agrave lrsquoarticle 16 de la
DDHC degraves lors que les textes jusqursquoagrave preacutesent applicables eacutetaient ambigus et ont donneacute lieu agrave
des contentieux En rendant obligatoire ce qui eacutetait avant une faculteacute pour autant soumise agrave
un rocircle non neacutegligeable du preacutefet lrsquoarticle 6 de la proposition de loi clarifie le droit
applicable Ainsi une deacuteputeacutee preacutecisait lors des deacutebats parlementaires que laquo lrsquoarticle 34 de la
loi pour une eacutecole de la confiance relatif au versement du forfait scolaire a susciteacute de
nombreux imbroglios administratifs Ainsi chez moi en Bretagne plus de 150 demandes de
meacutediation ont eacuteteacute transmises aux services de lrsquoEacutetat ce qui met en lumiegravere lrsquoambiguiumlteacute de la loi
et les difficulteacutes de son application Je soutiens donc fortement lrsquoarticle 2 quinquies [devenu
article 6] issu des travaux du Seacutenat qui legraveve toute incertitude raquo (Mme Claudia Rouaux
Commission des affaires sociales Assembleacutee nationale 31 mars 2021)
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Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi creacutee un meacutecanisme subsidiaire et reacutesiduel dont laporteacutee est deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels Sans creacuteer ni transfeacutererde nouvelle compeacutetence aux communes cette disposition assure une mise en œuvreuniforme des droits et liberteacutes et peut se preacutevaloir de nombreuses normesconstitutionnelles confeacuterant agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales et agrave son soutienfinancier de solides justifications constitutionnelles
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 12 mai 2021
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure Mme Mastorpdf
Lettre Wanda Mastor accompagnant la porte eacutetroite
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure MSchellenberger et autrespdf
Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure assESKOLIL pdf
lettre daccompagnement CC
Porte eacutetroite loi langues reacutegionales (2)
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure M Bertrand Pancherpdf
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de signaleacutetique routiegravere8 ou de lrsquoutilisation de la langue reacutegionale dans des
organes deacutelibeacuterants9
Agrave lrsquoeacutepoque de lrsquoentreacutee dans lrsquoarticle 75-1 (dont on relegravevera lrsquoeacuteloignement vo-
lontaire vis-agrave-vis de lrsquoarticle 2) de lrsquoeacuteleacutevation des langues reacutegionales au rang de
laquo patrimoine de la France raquo en 2008 certains espoirs avaient pu ecirctre leacutegitime-
ment nourris Cette preacutecision nrsquoest pas loin srsquoen faut le seacutesame pour la rati-
fication de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires10 qui
en lrsquoeacutetat actuel de la jurisprudence du Conseil constitutionnel comporte des
clauses jugeacutees contraires agrave la Constitution
B Le contexte international
Il faut ici distinguer deux niveaux Si le contexte international est favorable
agrave la protection et promotion des langues reacutegionales crsquoest en raison drsquoune part
des engagements internationaux que la France les ait ratifieacutes ou non drsquoautre
part de la plupart des constitutions des pays voisins qui accordent une place
speacutecifique aux langues reacutegionales
En 1999 faisant la synthegravese de ses deacutecisions anteacuterieures11 le
Conseil constitutionnel a estimeacute que la Charte europeacuteenne des langues reacutegio-
nales ou minoritaires ne pouvait au vu des principes drsquouniciteacute du peuple fran-
ccedilais drsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique et drsquoeacutegaliteacute des citoyens ecirctre ratifieacutee
laquo La Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires en ce
qursquoelle confegravere des droits speacutecifiques agrave des groupes de locuteurs de
8 Tribunal administratif de Montpellier 12 octobre 2010 Mouvement reacutepublicain de salut pu-blic ndeg0903420 Cour Administrative dAppel de Marseille 28 juin 2012 Commune de Ville-neuve-les-Maguelone ndeg 10MA04419 9 Conseil drsquoEacutetat 29 mars 2006 Haut-Commissaire de la Reacutepublique en Polyneacutesie Franccedilaise
ndeg282335 Rec 179 22 feacutevrier 2007 Socieacuteteacute immobiliegravere Caroline ndeg299649 Cour adminis-trative drsquoappel de Marseille 13 octobre 2011 Commune de Galeria ndeg10MA02330 10 Table ronde (Jean-Eacuteric Gicquel Ferdinand Meacutelin-Soucramanien Michel Verpeaux et Jean-
Marie Woehrling) organiseacutee par la commission des lois 29 novembre 2012 sur les implications
constitutionnelles de la question de la ratification de la Charte europeacuteenne des langues reacutegio-
nales ou minoritaires httpswwwassemblee-nationalefr14cr-cloi12-13c1213022asp 11 Deacutecisions ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 loi relative agrave lrsquoemploi de la langue franccedilaise et
ndeg96-373 DC du 9 avril 1996 loi organique portant statut drsquoautonomie de la Polyneacutesie fran-ccedilaise
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de territoires dans les-
quels ces langues sont pratiqueacutees porte atteinte aux principes constitu-
tionnels drsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique drsquoeacutegaliteacute devant la loi et drsquouniciteacute
du peuple franccedilais raquo12
Le Conseil se deacutefendant au passage de meacutepriser les langues reacutegionales parmi
les engagements souscrits par la France preacutecise-t-il laquo la plupart au demeu-
rant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France
en faveur des langues reacutegionales raquo
Parmi les arguments qui plaident en faveur drsquoune ratification figure celui de
lrsquoeacutevolution du contexte Honorer de la ratification un texte deacutejagrave signeacute ne se
pose aujourdrsquohui plus dans les mecircmes termes qursquoen 1999 La reacuteforme cons-
titutionnelle de 2003 - dont certains aspects ont eacuteteacute affineacutes en 2008 - rappe-
lons-le a consideacuterablement modifieacute la vision jacobine de notre Reacutepublique qui
reconnaicirct agrave preacutesent lrsquoexistence de laquo populations raquo en son sein les particula-
rismes locaux et les neacutecessiteacutes des adaptations normatives Mais la ratification
par la France de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires
qui avait eacuteteacute voteacutee le 28 janvier 2014 par lrsquoAssembleacutee nationale a eacuteteacute rejeteacutee
par le Seacutenat le 27 octobre 2015 Soulignons que ce rejet nrsquoempecircche pas la
force du contexte qui est au niveau europeacuteen largement favorable agrave la pro-
tection et promotion des langues reacutegionales La France a par ailleurs ratifieacute
drsquoautres conventions internationales qui permettent de poursuivre cet objec-
tif tel est par exemple le cas de la Convention pour la sauvegarde du patri-
moine culturel immateacuteriel de 2003 et de la Convention sur la protection et la
promotion de la diversiteacute des expressions culturelles de 2005 qui rappelle no-
tamment dans son preacuteambule laquo que la diversiteacute linguistique est un eacuteleacutement
fondamental de la diversiteacute culturelle raquo et reacuteaffirme laquo le rocircle fondamental que
joue lrsquoeacuteducation dans la protection et la promotion des expressions cultu-
relles raquo
12 Il srsquoagissait lagrave au demeurant drsquoune affirmation tregraves discutable car la lettre de la Charte
nrsquoimposait nullement mecircme si elle lrsquoencourageait que des droits speacutecifiques fussent reconnus agrave des groupes (voir Guy Carcassonne Rapport au Premier ministre sur la compatibiliteacute entre la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires et la Constitution septembre 1998
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Le droit compareacute apporte la preuve irreacutefutable de lrsquoabsence drsquoin-
compatibiliteacute entre le caractegravere indivisible voire unitaire drsquoune Reacutepublique
et la reconnaissance des langues reacutegionales en son sein13 Un tour drsquohorizon
des textes des constitutions europeacuteennes et des deacutecisions des cours constitu-
tionnelles permet de mettre en eacutevidence plusieurs eacuteleacutements significatifs Le
droit compareacute nous enseigne que juridiquement la question des langues srsquoap-
preacutehende agrave travers deux prismes premiegraverement celui de la forme de lrsquoEacutetat
Le lien entre uniteacute de lrsquoEacutetat et unilinguisme est aussi eacutevident que celui entre
Eacutetat composeacute (reacutegional ou feacutedeacuteral) et multilinguisme Deuxiegravemement celui des
droits des locuteurs Selon cette acception les langues reacutegionales sont tradi-
tionnellement associeacutees de maniegravere neacutegative au principe de non-discrimina-
tion de maniegravere positive aux droits linguistiques dont les locuteurs seraient
les beacuteneacuteficiaires14
En droit constitutionnel compareacute lrsquoameacutenagement de la pluraliteacute linguistique
diverge selon que les Eacutetats reconnaissent une pluri-officialiteacute sur lrsquoensemble
du territoire ou au seul niveau local La premiegravere hypothegravese est celle naturel-
lement choisie par la Belgique et la Suisse Eacutetats feacutedeacuteraux europeacuteens Selon
lrsquoarticle 4 de la Constitution helveacutetique laquo les langues nationales sont lrsquoalle-
mand le franccedilais lrsquoitalien et le romanche raquo De son cocircteacute la Constitution belge
eacutenonce que laquo la Belgique comprend trois communauteacutes la Communauteacute fran-
ccedilaise la Communauteacute flamande et la Communauteacute germanophone raquo et fait
eacutegalement reacutefeacuterence agrave laquo quatre reacutegions linguistiques la reacutegion de langue fran-
ccedilaise la reacutegion de langue neacuteerlandaise la reacutegion bilingue de Bruxelles-Capi-
tale et la reacutegion de langue allemande raquo En revanche lrsquoItalie et lrsquoEspagne ne
reconnaissent qursquoune seule langue officielle sur lrsquoensemble du territoire en
mecircme temps qursquoest ameacutenageacutee au niveau local la pluraliteacute linguistique Crsquoest
13 Voir Veacuteronique Bertile Langues reacutegionales ou minoritaires et Constitution France Espagne et Italie Bruylant Collection Droit public compareacute et europeacuteen 2008 516 p et Wanda Mas-
tor laquo Le statut constitutionnel des langues reacutegionales en droit compareacute De la reconnaissance agrave lrsquoindiffeacuterence raquo Glottopol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html 14 Voir le Rapport explicatif de de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minori-
taires Conseil de lrsquoEurope Seacuterie des Traiteacutes europeacuteens ndeg148 Strasbourg 5 novembre 1992 httpsrmcoeint16800cb620
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ce second type drsquoameacutenagement qui est ici inteacuteressant agrave observer les Eacutetats
reacutegionaux italien15 et espagnol16 eacutetant qualifieacutees par leurs constitutions drsquoin-
divisibles (et mecircme eacutegalement laquo un raquo pour lrsquoItalie alors que le mot a disparu
de la Constitution franccedilaise)
De maniegravere scheacutematique plusieurs postures essentielles vis-agrave-vis des langues
reacutegionales peuvent ecirctre observeacutees dans lrsquoEurope contemporaine La majoriteacute
des pays voisins confegraverent aux langues reacutegionales des statuts juridiques dif-
feacuterencieacutes Coexistent parfois une langue majoritaire et des langues minori-
taires qui beacuteneacuteficient de mesures protectrices Dans ce cas les langues reacutegio-
nales jouissent drsquoune reconnaissance mais seulement au niveau drsquoun terri-
toire identifieacute Pour le dire autrement elles ne concurrencent pas la langue
majoritaire au niveau national Il ne srsquoagit ni plus ni moins que lrsquoexpression
drsquoun droit agrave la diffeacuterence Drsquoun droit agrave la diffeacuterenciation pour reprendre un
terme qui a actuellement les faveurs du gouvernement franccedilais Drsquoautres pays
ont mis en place le bilinguisme officiel qui peut srsquoexprimer dans plusieurs
variantes Ce statut confegravere aux citoyens en principe du moins le choix duti-
liser lune ou lautre des langues officielles dans leurs rapports avec lEacutetat
Cette co-officialiteacute peut srsquoopeacuterer au niveau de tout le territoire (comme en Bel-
gique et en Suisse par exemple) ou seulement sur une partie de celui-ci
(comme en Espagne ou en Italie)
On pourrait objecter que la comparaison avec lrsquoEspagne et lrsquoItalie deux Eacutetats
reacutegionaux nrsquoest pas pertinente Or ces deux Eacutetats sont qualifieacutes de Royaume
ou Reacutepublique indivisibles par leurs constitutions respectives indivisibiliteacute
qui nrsquoempecircche pas la reconnaissance la protection et la promotion des
langues reacutegionales en leur sein Ainsi la Constitution espagnole consacre clai-
rement le multilinguisme dans le cadre de ses communauteacutes autonomes17
15 Article 5 de la Constitution de la Reacutepublique italienne de 1947 laquo La Reacutepublique une et indivisible reconnaicirct et favorise les autonomies locales (hellip) raquo 16 Article 2 de la Constitution du Royaume drsquoEspagne de 1978 laquo La Constitution est fondeacutee
sur luniteacute indissoluble de la nation espagnole patrie commune et indivisible de tous les Es-
pagnols Elle reconnaicirct et garantit le droit agrave lautonomie des nationaliteacutes et des reacutegions qui la
composent et la solidariteacute entre elles raquo 17 En vertu de lrsquoarticle 3 de la Constitution espagnole
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tout comme lrsquoItalie laquo Reacutepublique une et indivisible raquo laquo protegravege par des mesures
particuliegraveres les minoriteacutes linguistiques raquo (article 6)
Cette rapide eacutetude comparative permet de mettre en eacutevidence la singulariteacute de
la France au sein drsquoune Europe qui srsquoenorgueillit de se deacutefinir agrave travers la
richesse de sa diversiteacute Mais notamment depuis la loi constitutionnelle de
2008 le leacutegislateur franccedilais a agi dans le sens drsquoune protection et promotion
des langues reacutegionales la loi du 8 avril 2021 srsquoinscrivant dans ce processus
logique et coheacuterent
C Le contexte parlementaire franccedilais
La loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit donc dans un mouvement leacutegislatif reacutepondant agrave
lrsquoadresse du pouvoir constituant Laquelle concerne aussi le pouvoir exeacutecutif
La politique du ministegravere de lrsquoeacuteducation pour la deacutetermination du nombre de
places pour lrsquoagreacutegation et le CAPES des langues reacutegionales devrait aller de
pair avec les lois qui mettent en œuvre lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Ainsi
pour la langue basque il nrsquoy a pas eu de concours drsquoagreacutegation externe depuis
2018 anneacutee 2021 comprise il y a un seul poste pour lrsquoagreacutegation interne en
2021 2 pour le CAPES externe en 2021 et 2 pour le CAPES interne Pour la
langue bretonne et pour ne citer que lrsquoanneacutee en cours il y a un poste agrave lrsquoagreacute-
gation externe pas de concours pour lrsquoagreacutegation interne deux postes pour
le CAPES externe et 2 pour le CAPES interne Pour la langue corse il nrsquoy a pas
de concours cette anneacutee pour lrsquoagreacutegation externe et interne deux pour le
CAPES externe et aucun pour le CAPES interne Pour lrsquooccitan toujours pour
2021 il y a un poste pour lrsquoagreacutegation externe pas de concours pour lrsquoagreacute-
gation interne quatre pour le CAPES externe et un pour le CAPES interne
Ceci eacutetant juste preacuteciseacute il faut agrave preacutesent se concentrer sur lrsquoaction parlemen-
taire de mise en œuvre des dispositions de la Constitution
laquo 1 Le castillan est la langue espagnole officielle de lEacutetat Tous les Espagnols ont le devoir de
le connaicirctre et le droit de lutiliser
2 Les autres langues espagnoles sont aussi officielles dans leurs communauteacutes autonomes
respectives conformeacutement agrave leurs statuts
3 La richesse de la diversiteacute linguistique de lEspagne est un patrimoine culturel qui fait lobjet dun respect et dune protection speacuteciales raquo
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Videacutee drsquoune large part de sa substance en premiegravere lecture par la commission
des affaires culturelles et de leacuteducation de lrsquoAssembleacutee nationale la proposi-
tion de loi du deacuteputeacute Molac a ensuite retrouveacute ses objectifs initiaux gracircce agrave la
proceacutedure parlementaire qui donne agrave notre reacutegime repreacutesentatif tout son
sens discussions en commissions deacutebats en seacuteances publiques navette
amendements multiples pour parvenir agrave une adoption deacutefinitive agrave une majo-
riteacute non importante mais eacutecrasante des voix Agrave quelques heures de la pro-
mulgation de la loi par le Preacutesident de la Reacutepublique une partie de cette mecircme
majoriteacute a neacuteanmoins saisi le Conseil constitutionnel dans le cadre de lrsquoarticle
61 alineacutea 2 de la Constitution
Deacutepocirct de la proposition de loi
Deacuteposeacutee le 30 deacutecembre 2019 par le deacuteputeacute Paul Molac et autres deacuteputeacutes18
la proposition de loi apporte des mesures de protection et de promotion des
langues reacutegionales dans trois domaines le patrimoine lrsquoenseignement les
services publics via la signaleacutetique et les actes drsquoeacutetat civil Elle a eacuteteacute adopteacutee
le 8 avril 2021 par 247 voix pour 76 voix contre et 19 abstentions au terme
de la proceacutedure ci-dessous rappeleacutee
Renvoi agrave la commission des affaires culturelles et de leacuteducation
La proposition de loi a eacuteteacute renvoyeacutee agrave la commission des affaires cultu-
relles et de leacuteducation agrave deacutefaut de constitution drsquoune commission speacuteciale
dans les deacutelais preacutevus par les articles 30 et 31 du Regraveglement Le rapport fait
au nom de la commission par le deacuteputeacute Paul Molac nommeacute par elle a eacuteteacute
enregistreacute agrave la preacutesidence de lrsquoAssembleacutee nationale le 5 feacutevrier 2020 Preacutesenteacute
18 Sylvain BRIAL Jean-Feacutelix ACQUAVIVA Michel CASTELLANI Jean-Michel CLEacuteMENT
Paul-Andreacute COLOMBANI Charles de COURSON Jeanine DUBIEacute Freacutedeacuterique DUMAS Mrsquojid
EL GUERRAB Olivier FALORNI Yannick FAVENNEC BECOT Sandrine JOSSO Franccedilois-Mi-
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comme un moyen de deacutefendre les laquo langues de France raquo19 en danger et srsquoap-
puyant sur lrsquoexistant qui est la marque drsquoune eacutevolution rappeleacutee plus loin (II)
le texte entend laquo aller plus loin raquo en rehaussant la protection lrsquoaccessibiliteacute et
la visibiliteacute des langues reacutegionales dans les trois domaines preacuteciteacutes
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle premier re-
latif au patrimoine Ce dernier preacutecise en compleacutetant ainsi lrsquoar-
ticle L 1 du code du patrimoine que la conservation et la con-
naissance du patrimoine immateacuteriel sont drsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et que
les langues reacutegionales font partie de ce patrimoine
o La commission a adopteacute sans modifications lrsquoarticle 2 qui pro-
pose drsquoinclure parmi les treacutesors nationaux les biens preacutesentant
un inteacuterecirct majeur pour la connaissance des langues franccedilaise et
reacutegionales Le texte preacutevoit en effet outre pour les langues reacutegio-
nales des mesures de protection de notre patrimoine linguistique
dans une deacutemarche globale
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 3 qui disposait que des con-
ventions passeacutees entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pouvaient preacutevoir que
la langue reacutegionale est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de
lrsquohoraire normal des enseignements (des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires des collegraveges et des lyceacutees des territoires concerneacutes) Il
ne srsquoagissait pourtant que drsquoeacutetendre une regravegle deacutejagrave applicable en
Corse pour lrsquoenseignement de la langue corse lrsquoarticle L 312-11-
1 du code de lrsquoeacuteducation introduit par la loi ndeg 2002-92 du
22 janvier 2002 relative agrave la Corse dispose en effet que la langue
corse est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de lrsquohoraire normal
des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires de Corse Le Conseil cons-
titutionnel nrsquoa pas censureacute cette disposition tant que lrsquoenseigne-
ment eacutetait entendu comme ne revecirctant pas laquo un caractegravere obliga-
toire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo (deacutecision ndeg2001-
454 DC du 17 janvier 2002)
19 Sur cette notion de laquo langues de France raquo voir Les langues de France vingt ans apregraves Glot-topol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html
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o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 4 qui preacutevoyait que lenseigne-
ment bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale pouvait se reacuteali-
ser sous forme immersive laquo dans le respect des objectifs de maicirc-
trise des deux langues agrave chaque niveau denseignement raquo
o La commission a supprimeacute les articles 5 et 6 de la proposition de
loi Le premier manifestait la volonteacute drsquointroduire au sein drsquoun
nouvel article L 151-4-1 du code de lrsquoeacuteducation une deacuterogation
au principe drsquointerdiction de financement des deacutepenses drsquoinves-
tissement des eacutecoles priveacutees par les collectiviteacutes publiques en fa-
veur de lrsquoenseignement bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale
(article 5 de la proposition de loi) Le second eacutetendait la mecircme
deacuterogation au principe drsquointerdiction de financement des deacute-
penses drsquoinvestissement des collegraveges et lyceacutees par les collectiviteacutes
publiques
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 7 qui preacutevoyait drsquoeacutelargir les
cas dans lesquels existe un droit agrave inscrire son enfant dans une
eacutecole drsquoune autre commune afin qursquoil puisse suivre un enseigne-
ment de langue reacutegionale Inscription qui entraicircnait eacutegalement la
prise en charge du forfait scolaire par la commune de reacutesidence
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle 8 qui a pour
objet de renforcer la place et lrsquousage des langues reacutegionales dans
la vie publique en facilitant la traduction en langue reacutegionale des
inscriptions et signaleacutetiques apposeacutees sur les bacirctiments publics
les voies publiques de circulation et les voies navigables ainsi que
sur les principaux supports de communication institutionnelle
des services publics
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 9 qui avait pour objet la pos-
sibiliteacute pour les services publics drsquoeacutetat civil drsquoutiliser dans les
actes drsquoeacutetat civil qursquoils produisent les signes diacritiques des
langues reacutegionales en usage sur le territoire
o Enfin la commission a eacutegalement supprimeacute lrsquoarticle 10 qui preacute-
voyait un gage pour compenser les charges eacuteventuelles creacuteeacutees par
les dispositions de la proposition de loi
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Crsquoest donc un texte largement laquo eacutepureacute raquo par rapport agrave sa version initiale qui a
eacuteteacute soumis agrave la discussion en seacuteance publique en premiegravere lecture agrave lrsquoAssem-
bleacutee nationale Le porteur de la proposition va naturellement utiliser toutes
les potentialiteacutes offertes par la Constitution pour tenter de revenir par le biais
des amendements agrave son esprit initial
Discussion du texte nordm2654 adopteacute par la commission sur la proposition
de loi de M Paul Molac agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion (2548)
85 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes permettant de revenir sur peu de points
cependant agrave lrsquoobjectif initial de la proposition de loi Ainsi lrsquoamendement ndeg64
deacuteposeacute le 10 feacutevrier 2020 par le deacuteputeacute et rapporteur Paul Molac a permis de
rectifier lrsquoaspect purement deacuteclaratoire de lrsquoarticle premier auquel avait conclu
la commission lrsquoamendement ndeg69 deacuteposeacute le mecircme jour par Paul Molac eacutega-
lement permet lrsquoautorisation dans les actes drsquoeacutetat civil des signes diacritiques
des langues reacutegionales lrsquoamendement ndeg80 toujours deacuteposeacute par Paul Molac
modifie la loi Toubon (article 3 du texte de loi deacutefinitif) Mais agrave ce stade de la
discussion parlementaire le texte eacutetait encore dans une version tregraves eacuteloigneacutee
de sa mouture premiegravere
Adoption le 13 feacutevrier 2020 de la laquo petite loi raquo nordm408 par lAssem-
bleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion
Transmission au Seacutenat de la proposition de loi ndeg321 le 14 feacutevrier
2020
o Travaux en commission La commission de la culture de lrsquoeacuteduca-
tion et de la communication a deacutesigneacute Mme Monique de Marco
rapporteure sur la proposition de loi ndeg321 (2019-2020) adopteacutee
par lAssembleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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des langues reacutegionales et agrave leur promotion Commenccedilant par deacute-
clarer que laquo la question de la promotion des langues reacutegionales
deacutepasse les clivages politiques raquo Monique de Marco a proposeacute en
commission dadopter le texte conforme tout en avouant que des
dispositifs leacutegislatifs laquo plus ambitieux pourraient mieux assurer la
promotion des langues reacutegionales raquo Au cours des discussions le
regret de lrsquoabsence de la question de lrsquoenseignement a eacuteteacute exprimeacute
regret qui concerne en reacutealiteacute non la proposition de loi initiale
mais le texte de la commission de lrsquoAssembleacutee nationale laquo La pro-
position de loi de Paul Molac est la bienvenue parce quelle rap-
pelle agrave lEacutetat un certain nombre de ses obligations en ce quelle
preacutevoit un cadrage de la loi Toubon et quelle seacutecurise la place
des langues dans lespace public En revanche nous avons tous
eacuteteacute surpris par labsence totale de reacutefeacuterence agrave lEacuteducation natio-
nale Nous avons donc fait des recherches qui ont montreacute que les
deacuteputeacutes de la majoriteacute preacutesidentielle certainement agrave lappel du
ministre de leacuteducation nationale avaient systeacutematiquement sup-
primeacute tous les articles concernant lenseignement Nous nous re-
trouvons donc avec une magnifique proposition de loi sur les
langues reacutegionales qui ne dit pas un mot de lenseignement
comme sil pouvait y avoir une politique linguistique en faveur des
langues reacutegionales qui ne passe pas par lenseignement raquo Et le
seacutenateur Max Brisson drsquoen appeler agrave la reacuteinsertion des disposi-
tions sur lrsquoenseignement laquo Ma chegravere collegravegue vous avez proposeacute
un vote conforme mais jespegravere que nous ferons preuve dimagi-
nation dans lheacutemicycle pour deacuteposer quelques amendements qui
rappelleront au Gouvernement quil ny a pas de politique linguis-
tique qui ne sappuie sur leacuteducation Sinon cest de lenfu-
mage raquo20
20 Comptes-rendus de la commission de la culture de lrsquoeacuteducation et de la communication
seacuteance du 2 deacutecembre 2020 httpwwwsenatfrcompte-rendu-commis-
sions20201130culturehtmltoc5
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La rapporteure confirme que laquo lrsquoamputation raquo est le fait des deacutepu-
teacutes et tout en srsquoavouant prudente pousse indirectement ses col-
legravegues seacutenateurs agrave user du droit drsquoamendement laquo Nous venons
dentendre un veacuteritable plaidoyer en faveur des langues reacutegio-
nales Mecircme si cette proposition de loi ne donne pas entiegravere satis-
faction car elle a eacuteteacute largement amputeacutee par lAssembleacutee natio-
nale je preacutefegravere my tenir dans un premier temps par prudence
Et libres agrave vous de deacuteposer des amendements raquo
Aucun amendement nayant eacuteteacute deacuteposeacute en commission le texte
qui en eacutetait issu ne comportait toujours pas de dispositions rela-
tives agrave lenseignement
o Seacuteance publique Vingt amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes notam-
ment celui (deacuteposeacute agrave lidentique par des seacutenateurs issus de six
groupes diffeacuterents) preacutevoyant drsquoinseacuterer agrave lrsquoarticle L 442-5-1 du
code de lrsquoeacuteducation un alineacutea ainsi reacutedigeacute laquo La participation fi-
nanciegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un
enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle
L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence
et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune
autre commune agrave la condition que la commune de reacutesidence ne
dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegio-
nale raquo
Sans surprise lrsquoavis du Gouvernement exprimeacute par le ministre
Jean-Michel Blanquer fut deacutefavorable regrettant au passage
laquo drsquoecirctre sans cesse obligeacute drsquooccuper la position du jacobin reacutetif
sur la deacutefensive alors mecircme que nous avons une politique de pro-
motion des langues reacutegionales Simplement agrave certains moments
ndash par exemple avec la rupture de lrsquoeacutequilibre entre enseignement
public et enseignement priveacute ou avec la creacuteation drsquoune obligation
suppleacutementaire pour les communes ndash les propositions vont trop
loin et cela conduit agrave me placer face aux geacuteneacuterositeacutes diverses
dans la position deacutesagreacuteable du gardien des principes ou dans
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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celle du gardien de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral En effet derriegravere ces deacutebats
se pose la question de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et de la posteacuteriteacute de la loi
Carle car vous risquez de creacuteer un deacuteseacutequilibre alors que cette loi
repreacutesentait un point drsquoeacutequilibre raquo21
o Adoption du texte ndeg32 modifieacute par le Seacutenat le 10 deacutecembre 2020
Le Seacutenat a adopteacute trois articles additionnels (2 ter 2 quater et
2 quinquies) qui rejoignent les positions du deacuteputeacute Paul Molac et
reacutetablit lrsquoarticle 3 (modifieacute) de la proposition de loi qui avait eacuteteacute
supprimeacute en premiegravere lecture agrave lrsquoAssembleacutee nationale
Deuxiegraveme lecture
o Rapport sur la proposition de loi modifieacutee par le Seacutenat relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promo-
tion (ndeg3658) ndeg4035 Sur les six articles supprimeacutes agrave lrsquoAssem-
bleacutee lrsquoarticle 3 a eacuteteacute reacutetabli au Seacutenat qui a par ailleurs adopteacute
trois articles additionnels (2 ter 2 quater et 2 quinquies) Lrsquoen-
semble eacutetant conforme agrave lrsquoesprit de la proposition de loi initiale le
rapporteur souhaite que lrsquoAssembleacutee nationale adopte en deu-
xiegraveme lecture un texte identique agrave celui voteacute par le Seacutenat pour
les quatre articles restant en discussion et nrsquoa donc pas preacutesenteacute
drsquoamendements Mais lrsquoarticle 2 quinquies (article 6 du texte deacute-
finitif) ayant eacuteteacute supprimeacute en commission 16 amendements deacute-
poseacutes agrave lrsquoidentique par 115 deacuteputeacutes membres de huit diffeacuterents
groupes parlementaires ont permis de le reacuteintroduire en seacuteance
o Discussion en seacuteance publique le 8 avril 2021 au cours de la-
quelle 262 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes
o Adoption deacutefinitive le 8 avril 2021 en deuxiegraveme lecture de la
proposition de loi TA nordm591 relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
21 Compte rendu inteacutegral des deacutebats Seacuteance du 10 deacutecembre 2020 httpwwwse-natfrseancess202012s20201210s20201210007htmlsection708
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Saisine du Conseil constitutionnel du 22 avril 2021 par au moins
soixante deacuteputeacutes en application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitu-
tion
Soit un jour avant que nrsquoexpire le deacutelai de saisine du Conseil constitu-
tionnel la promulgation de la loi par le preacutesident de la Reacutepublique devant
intervenir dans les 15 jours de lrsquoadoption deacutefinitive La saisine du Conseil
constitutionnel est un acte non grave mais solennel qui perturbe le temps
leacutegislatif ne serait-ce que pour cette raison elle meacuterite un soin particulier
Soin envers lrsquoinstitution agrave laquelle elle srsquoadresse et agrave qui elle impose des
charges suppleacutementaires soin envers la Constitution qursquoelle entend pro-
teacuteger La lettre de saisine ou du moins la version qui a circuleacute manifeste-
ment reacutedigeacutee agrave la hacircte nrsquoest pas agrave la hauteur du seacuterieux qursquoexige de ma-
niegravere impeacuterieuse cette deacutemarche Une lettre de saisine ne saurait se limiter
agrave invoquer en tregraves peu de lignes la violation de laquo principes constitutionnels raquo
sans que ceux-ci ne soient deacutetailleacutes ni mecircme indiqueacutes Le seul article mis
en cause est lrsquoarticle 6 de la loi qui modifie lrsquoarticle L 442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation
II Discussion de la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la loi
relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Les deacuteputeacutes auteurs de la saisine demandent au Conseil constitutionnel la
censure de lrsquoarticle 6 de la loi
laquo Les sixiegraveme et septiegraveme alineacuteas de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacutedu-
cation sont remplaceacutes par un alineacutea ainsi reacutedigeacute
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacuteta-
blissements priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispen-
sant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L
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312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacuteta-
blissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune
agrave la condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dis-
pensant un enseignement de langue reacutegionale raquo
Une commune dont aucune eacutecole ne propose denseignement de langue reacutegio-
nale devrait donc participer aux frais de scolarisation des enfants domicilieacutes
sur son territoire qui suivent un tel enseignement dans un eacutetablissement situeacute
sur une autre commune Le dispositif concerne les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat drsquoassociation qui sont dans les faits majoritaire-
ment associatifs et laiumlques Cet enseignement peut aussi concerner les eacuteta-
blissements confessionnels mais il faut drsquoembleacutee preacuteciser que comme lrsquoa jugeacute
le Conseil constitutionnel dans son examen de la loi dite laquo Carle raquo le principe
de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute pour le leacutegislateur de preacutevoir la
participation des collectiviteacutes publiques au financement du fonctionnement
des eacutetablissements denseignement priveacute sous contrat dassociation
laquo Consideacuterant quil reacutesulte des regravegles ou principes agrave valeur constitution-
nelle (hellip) que le principe de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute
pour le leacutegislateur de preacutevoir sous reacuteserve de fonder son appreacuteciation
sur des critegraveres objectifs et rationnels la participation des collectiviteacutes
publiques au financement du fonctionnement des eacutetablissements den-
seignement priveacutes sous contrat dassociation selon la nature et limpor-
tance de leur contribution agrave laccomplissement de missions denseigne-
ment raquo (deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 cons 6)
Lrsquoinstauration du laquo forfait scolaire communal raquo ne poursuit pas un objectif de
sanction financiegravere des communes deacutemunies doffre en langue reacutegionale mais
celui de les inciter agrave en proposer Drsquoailleurs lrsquoarticle premier de la loi deacutefeacutereacutee
souligne que laquo LrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales concourent agrave lrsquoenseigne-
ment agrave la diffusion et agrave la promotion de ces langues raquo Comme preacuteciseacute plus
loin les maires sont dispenseacutes du paiement drsquoun tel forfait degraves lors qursquoun
enseignement drsquoune langue reacutegionale y compris au titre drsquoune simple initia-
tion est proposeacute dans leur commune
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Il faut souligner que les articles relatifs agrave lrsquoenseignement ont eacuteteacute introduits par
les seacutenateurs Plus exactement ces derniers ont reacuteintroduit la disposition qui
autorise la conclusion de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pour eacutetendre
lrsquooffre drsquoenseignement en langue reacutegionale aux eacutetablissements publics dans le
cadre horaire normal sous des formes speacutecifiques et inseacutereacute trois articles un
premier autorise lrsquoenseignement dit laquo immersif raquo en langue reacutegionale un deu-
xiegraveme le forfait scolaire communal dont il est ici question un troisiegraveme est
relatif agrave lenseignement des langues reacutegionales agrave Mayotte territoire qui du fait
de sa deacutepartementalisation reacutecente ne pouvait jusqualors pas beacuteneacuteficier des
possibiliteacutes offertes aux autres deacutepartements concernant lenseignement de
ces langues
Trois remarques doivent ecirctre faites sur lrsquoinsertion relative agrave lrsquoenseignement des
langues reacutegionales lors des horaires normaux Premiegraverement cette disposition
existe deacutejagrave pour la Collectiviteacute de Corse deuxiegravemement cet enseignement
doit se faire moyennant un accord entre lrsquoEacutetat et les reacutegions (laquo dans le cadre
de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions la collectiviteacute de Corse la Collectiviteacute
europeacuteenne drsquoAlsace ou les collectiviteacutes territoriales reacutegies par lrsquoarticle 73 de
la Constitution raquo) troisiegravemement il srsquoagit drsquoune option facultative qursquoin fine
les familles deacutecident ou non de prendre
En reacutesumeacute et conclusion la disposition de lrsquoarticle 3
1 Existe deacutejagrave pour une collectiviteacute en lrsquooccurrence la collectiviteacute de Corse
2 Est strictement encadreacutee (existence drsquoun accord entre lrsquoEacutetat et les reacute-
gions)
3 Est conforme agrave la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le ca-
ractegravere facultatif de lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale Dans sa deacute-
cision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi relative agrave la Corse le
Conseil constitutionnel a fixeacute le cadre de lrsquoenseignement drsquoune langue
reacutegionale dans le cadre de lrsquohoraire normal en consideacuterant que laquo si lrsquoen-
seignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquohoraire nor-
mal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir pour
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autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les ensei-
gnants qursquoil ne saurait non plus avoir pour effet de soustraire les eacutelegraveves
aux droits et obligations applicables agrave lrsquoensemble des usagers des eacuteta-
blissements qui assurent le service public de lrsquoenseignement ou sont
associeacutes agrave celui‑ci Consideacuterant qursquoil reacutesulte de ce qui preacutecegravede que sous
reacuteserve que lrsquoenseignement de la langue corse revecircte tant dans son prin-
cipe que dans ses modaliteacutes de mise en œuvre un caractegravere facultatif
[cette disposition] nrsquoest contraire ni au principe drsquoeacutegaliteacute ni agrave aucun
autre principe ou regravegle de valeur constitutionnelle raquo (cons 24 et 25)
La loi du 8 avril 2021 ne propose pas autre chose et srsquoinscrit en tous
points sur cette ligne deacutejagrave jugeacutee par le Conseil constitutionnel
Lrsquoarticle 6 srsquoinsegravere de maniegravere logique et coheacuterente dans lrsquoensemble des articles
de la loi relative agrave lrsquoenseignement Avant drsquoen examiner dans les deacutetails la
conformiteacute agrave la Constitution il faut souligner que le Seacutenat a deacutejagrave voteacute le prin-
cipe de ce forfait scolaire communal agrave deux reprises
1 Il lrsquoa drsquoabord inseacutereacute dans le projet de loi pour une eacutecole de la confiance
en premiegravere lecture Crsquoest la commission mixte paritaire qui a ajouteacute les
mots laquo contribution volontaire raquo ocirctant au forfait son caractegravere obliga-
toire22
2 Il a reacuteaffirmeacute sa position lors de lrsquoexamen de la proposition de loi ici
discuteacutee supprimant les mots laquo contribution volontaire raquo de la loi en vi-
gueur
Agrave cet argument deacutemocratique respectueux du bicameacuteralisme et rappelant que
le Seacutenat laquo assure la repreacutesentation des collectiviteacutes territoriales de la Reacutepu-
22 Loi ndeg2019-791 du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance JORF ndeg0174 du 28 juillet
2019
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Primo cet article est en coheacuterence avec la leacutegislation existante en matiegravere drsquoen-
seignement des langues reacutegionales agrave lrsquoeacutecole confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute
juridique (A) Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contrevien-
nent pas au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des langues
reacutegionales affirmeacute par le Conseil constitutionnel (B) Tertio la loi ne porte pas
atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur une commune une nouvelle
charge (C) Quarto elle ne viole pas non plus en conseacutequence le principe de
libre administration des collectiviteacutes territoriales (D)
A Forfait scolaire communal et respect de lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique
Cette exigence bien que non explicitement qualifieacutee de principe consti-
tutionnel par le Conseil constitutionnel se rattache notamment agrave la notion de
laquo garantie des droits raquo inscrite agrave lrsquoarticle 16 de la Deacuteclaration de 1789 laquo Toute
socieacuteteacute dans laquelle la garantie des droits nrsquoest pas assureacutee ni la seacuteparation
des pouvoirs deacutetermineacutee nrsquoa point de constitution raquo Deacutecoulant de lrsquoarticle 34
de la Constitution la clarteacute de la loi est un eacuteleacutement essentiel de la seacutecuriteacute
juridique agrave laquelle la jurisprudence du Conseil constitutionnel a offert corps
et protection Aussi le principe de laccessibiliteacute et de lintelligibiliteacute de la loi a-
t-il eacuteteacute eacuterigeacute en objectif de valeur constitutionnelle (deacutecision ndeg99-421 DC du
16 deacutecembre 1999)
Mecircme si les principes de clarteacute drsquoaccessibiliteacute et drsquointelligibiliteacute de la loi per-
mettent avant tout drsquoimposer au leacutegislateur laquo drsquoadopter des dispositions suffi-
samment preacutecises et des formules non eacutequivoques afin de preacutemunir les sujets
de droit contre une interpreacutetation contraire agrave la Constitution ou contre le
risque drsquoarbitraire raquo (deacutecision ndeg2004-500 DC du 29 juillet 2004 cons 13) ils
concourent aussi agrave offrir aux citoyens la seacutecuriteacute juridique neacutee drsquoune cons-
truction drsquoensemble coheacuterente et sans rupture Laquelle se base depuis 2008
sur une disposition claire et sans ambiguiumlteacute de la Constitution laquo Les langues
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reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo (75-1) Elle est une in-
vitation aux repreacutesentants de leacutegifeacuterer pour proteacuteger et promouvoir lesdites
langues et la loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit dans la continuiteacute de ce qursquoils ont fait depuis
2008 notamment La coheacuterence est lrsquoune des artegraveres essentielles de lrsquoexigence
de seacutecuriteacute juridique qui impregravegne la jurisprudence du Conseil constitution-
nelle comme celle du Conseil drsquoEacutetat et de la Cour de cassation Sans ecirctre ex-
plicitement eacutenonceacutee par le Conseil constitutionnel lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique est laquo efficiente raquo23 et est au cœur des preacuteoccupations des juges24 comme
de la doctrine Les Cahiers du Conseil constitutionnel lui consacrant un dossier
speacutecial dans sa livraison drsquooctobre 202025
La loi soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel reacutepond agrave lrsquoexigence de
seacutecuriteacute juridique en eacutetant le prolongement de lrsquoœuvre anteacuterieure du leacutegisla-
teur pour commencer la loi du 8 juillet 2013 drsquoorientation et de programma-
tion pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique qui reconnaicirct lrsquoenseigne-
ment bilingue franccedilais langue reacutegionale Dans lrsquoannexe de la loi figurent cinq
mentions compleacutementaires notamment celle concernant la possibiliteacute de
srsquoinscrire dans une eacutecole publique drsquoune autre commune lorsque la commune
de reacutesidence ne propose pas drsquoenseignement de langue reacutegionale Disposition
deacuteclarative qui a trouveacute une application concregravete dans la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) la parti-
cipation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes dans lrsquoenseigne-
ment public doit deacutesormais faire lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune drsquoac-
cueil et la commune de reacutesidence26
La loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle a
ajouteacute un nouveau motif de discrimination baseacute sur laquo la maitrise drsquoune autre
23 Bertrand Mathieu laquo La seacutecuriteacute juridique un principe clandestin mais efficient raquo Droit constitutionnel Meacutelanges Patrice Geacutelard LGDJ 1999 pp 301-305 24 En teacutemoigne notamment le fait que le Conseil drsquoEacutetat lui ait consacreacute deux rapports annuels celui de 1991 De la seacutecuriteacute juridique et celui de 2006 Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit 25 Dossier La seacutecuriteacute juridique Titre VII Les Cahiers du Conseil constitutionnel ndeg5 octobre
2020 26 Lrsquoarticle 104 de la loi NOTRe consacre par ailleurs la compeacutetence partageacutee des collectiviteacutes
locales dans la promotion des langues reacutegionales tout en donnant une place preacutepondeacuterante
agrave la reacutegion telle que preacutevue agrave lrsquoarticle 1er de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de lrsquoaction publique territoriale et drsquoaffirmation des meacutetropoles (MAPTAM)
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langue que le franccedilais raquo qui concerne eacutegalement les langues reacutegionales Celle
du 28 feacutevrier 2017 de programmation relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend
inopeacuterant le deacutecret du 2 Thermidor an II sur lequel se basait notamment le
ministegravere de la justice pour interdire les livrets de famille bilingues Enfin
lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance vient eacutetendre
aux eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives une laquo contribution volontaire raquo
des communes pour la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoins-
crivant dans une eacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionale en
dehors de sa commune de reacutesidence
La loi du 8 avril 2021 soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel nrsquoest que
le prolongement et le compleacutement de lrsquoarticle L 212-8 du Code de lrsquoeacuteducation
qui preacutecise les conditions dans lesquelles pour lrsquoenseignement public une
commune doit contribuer au financement des deacutepenses scolaires drsquoun enfant
reacutesidant sur son territoire et scolariseacute dans une autre commune Elle vient le
compleacuteter de maniegravere parallegravele eacutetendant ce qui existe deacutejagrave pour lrsquoeacutecole pu-
blique agrave lrsquoeacutecole priveacutee sous contrat Confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
elle ne viole par ailleurs aucun article de la Constitution et ne contredit pas
la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le caractegravere facultatif de lrsquoen-
seignement des langues reacutegionales
B Forfait scolaire communal et respect de la jurisprudence du Conseil
constitutionnel sur la langue franccedilaise
Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contreviennent pas
agrave lrsquoarticle 2 alineacutea premier de la Constitution (laquo La langue de la Reacutepublique est
le Franccedilais raquo) et au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des
langues reacutegionales qui en deacutecoule affirmeacute par le Conseil constitutionnel La
langue de la Reacutepublique est et demeure le Franccedilais et agrave aucun moment la
loi du 8 avril 2021 nrsquoentend y porter atteinte Lrsquoapprentissage des langues reacute-
gionales se fait agrave ses cocircteacutes mais dans une mesure permettant leffectiviteacute pour
les enfants agrave acceacuteder agrave lenseignement des langues reacutegionales laquo patrimoine de
la France raquo selon les termes de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Apprentissage
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qui pour certains enfants est lrsquoun des eacuteleacutements de leur laquo deacuteveloppement raquo au
sens de lrsquoalineacutea 10 du Preacuteambule de la Constitution du 27 octobre 1946 (laquo La
Nation assure agrave lrsquoindividu et agrave la familles les conditions neacutecessaires agrave leur
deacuteveloppement raquo)
Ce que creacutee lrsquoarticle 6 agrave travers le forfait ce nrsquoest pas lrsquoenseignement obligatoire
de la langue reacutegionale mais la possibiliteacute de pouvoir beacuteneacuteficier de cet enseigne-
ment (sans prescription de deacutelai) qui demeure facultatif Le rapporteur Paul
Molac le reacuteaffirme au cours de la seacuteance publique du 8 avril 2021 laquo Je ne
suis pas favorable au caractegravere obligatoire de cet enseignement mais je consi-
degravere que tout eacutelegraveve qui souhaite le suivre doit pouvoir le faire raquo27
Ce faisant la loi sans contrevenir agrave la Constitution offre un contenu agrave son
article 75-1 La jurisprudence du Conseil constitutionnel en vertu de laquelle
lrsquoenseignement des langues reacutegionales nrsquoa qursquoun caractegravere facultatif nrsquoest ici
absolument pas remise en cause Dans sa deacutecision ndeg99-412 DC du 15 juin
1999 il a souligneacute que le principe drsquouniciteacute du peuple franccedilais et lrsquoindivisibiliteacute
de la Reacutepublique assurant lrsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi srsquoopposaient agrave laquo
ce que soient reconnus des droits collectifs agrave quelque groupe que ce soit deacutefini
par une communauteacute drsquoorigine de culture de langue ou de croyance raquo En
outre la langue de la Reacutepublique eacutetant le franccedilais il ne peut ecirctre reconnu un
laquo droit agrave pratiquer une langue autre que le franccedilais non seulement dans la vie
priveacutee mais eacutegalement dans la vie publique agrave laquelle la Charte rattache
la justice et les autoriteacutes administratives et services publics raquo
Deux remarques srsquoimposent drsquoembleacutee drsquoune part cette jurisprudence est an-
teacuterieure agrave lrsquoinsertion en 2008 par le pouvoir constituant de lrsquoarticle 75-1 dis-
posant que laquo les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France
raquo Cette remarque drsquoordre contextuel vient srsquoajouter agrave la suivante drsquoautre part
27 Assembleacutee nationale XVe leacutegislature Session ordinaire de 2020-2021 Seacuteance du jeudi 08
avril 2021 httpswwwassemblee-nationalefrdyn15comptes-rendusseancesession-
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la loi du 8 avril 2021 nrsquoentend pas confier agrave lrsquoenseignement des langues reacutegio-
nales un caractegravere obligatoire En cela elle respecte la jurisprudence du Con-
seil constitutionnel preacuteciteacutee (deacutecision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi
relative agrave la Corse)
laquo Si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquoho-
raire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir
pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les en-
seignants (hellip) raquo (cons 24)
Lrsquoenseignement drsquoune langue minoritaire ne devient donc en aucun cas obli-
gatoire Ce qui doit faire laquo lrsquoobjet drsquoun accord raquo ce sont les conditions permet-
tant effectivement agrave des enfants drsquoacceacuteder agrave un enseignement facultatif qui
contribue agrave leur deacuteveloppement proteacutegeacute par ailleurs par lrsquoalineacutea 10 du Preacuteam-
bule de 1946 preacuteciteacute Ni la Constitution ni son interpreacutetation par le Conseil
constitutionnel ne srsquoopposent agrave ce qursquoune commune de reacutesidence participe y
compris de maniegravere obligatoire au financement de la scolarisation dans une
autre commune des enfants souhaitant suivre un tel enseignement Crsquoest don-
ner aux enfants et aux parents de maniegravere effective et efficiente la possibiliteacute
concregravete de beacuteneacuteficier drsquoun enseignement drsquoune langue reacutegionale composante
de leur laquo deacuteveloppement raquo laquelle appartient en vertu de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution au laquo patrimoine de la France raquo
C Forfait scolaire communal et respect du principe drsquoeacutegaliteacute
Tertio la loi ne contrevient pas au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur
une commune une nouvelle charge
Conformeacutement agrave une jurisprudence du Conseil constitutionnel bien eacutetablie le
principe deacutegaliteacute de lrsquoarticle 6 de la Deacuteclaration des droits de lhomme et du
citoyen de 1789 laquo ne soppose ni agrave ce que le leacutegislateur regravegle de faccedilon diffeacuterente
des situations diffeacuterentes ni agrave ce quil deacuteroge agrave leacutegaliteacute pour des raisons
dinteacuterecirct geacuteneacuteral pourvu que dans lun et lautre cas la diffeacuterence de traite-
ment qui en reacutesulte soit en rapport direct avec lobjet de la loi qui leacutetablit raquo
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(pour lrsquoune des reacutecentes application au domaine de lrsquoenseignement dont il sera
ici question deacutecision ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de
la confiance)
En ce qui concerne preacuteciseacutement le caractegravere obligatoire drsquoune nouvelle charge
pour une collectiviteacute celui-ci nrsquoa pas eacuteteacute censureacute par le Conseil constitutionnel
agrave propos de lrsquoexamen de la loi sur lrsquoavenir de lrsquoeacutecole preacuteciteacutee (deacutecision ndeg 2019-
787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de la confiance) Lrsquoarticle 17 de
la loi alors deacutefeacutereacute au Conseil constitutionnel preacutevoyait dans son premier ali-
neacutea
laquo LrsquoEacutetat attribue de maniegravere peacuterenne agrave chaque commune les ressources
correspondant agrave lrsquoaugmentation des deacutepenses obligatoires qursquoelle a
prises en charge en application des articles L 212-4 L 212-5 et L 442-
5 du code de lrsquoeacuteducation au titre de lrsquoanneacutee scolaire 2019-2020 par rap-
port agrave lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 dans la limite de la part drsquoaugmenta-
tion reacutesultant directement de lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoins-
truction obligatoire raquo
Les deacutepenses qui font lrsquoobjet de lrsquoaccompagnement financier en cause sont
celles qui beacuteneacuteficient aux eacutecoles publiques et aux eacutetablissements drsquoenseigne-
ment priveacutes ayant passeacute un contrat drsquoassociation avec lrsquoEacutetat
Lrsquoabaissement agrave trois ans du deacutebut de lrsquoinstruction obligatoire a donc fait pe-
ser des charges nouvelles pour les communes et leur a mecircme imposeacute de par-
ticiper au financement des eacutecoles maternelles priveacutees sous contrat y compris
lorsqursquoelles nrsquoont pas approuveacute ce contrat La diffeacuterence de traitement entre
les communes est reacuteelle selon qursquoelles financcedilaient ou non des classes mater-
nelles avant lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoinstruction obligatoire mais
nrsquoentraicircne pas pour autant une rupture drsquoeacutegaliteacute
Ainsi lrsquoa jugeacute le Conseil constitutionnel dans la deacutecision preacuteciteacutee drsquoune part
il a estimeacute que cette diffeacuterence de traitement reposait sur une diffeacuterence de
situation
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laquo Les communes qui au cours de lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 avaient
institueacute des classes maternelles ou eacutecoles maternelles publiques ou ap-
prouveacute des contrats drsquoassociation drsquoeacutecoles maternelles priveacutees ont con-
tribueacute agrave ce titre agrave leur financement dans les conditions preacutevues par le
code de lrsquoeacuteducation Ces communes ne sont ainsi pas placeacutees dans une
situation identique agrave celle des autres communes qui nrsquoexerccedilaient pas
deacutejagrave les mecircmes compeacutetences et ne supportaient donc pas les charges
correspondantes raquo (cons 7)
Drsquoautre part le Conseil constitutionnel a jugeacute que la diffeacuterence de traitement
contesteacutee eacutetait en rapport direct avec lrsquoobjet de la loi qui lrsquoeacutetablit
laquo Qui consiste en application de la seconde phrase du quatriegraveme alineacutea
de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution agrave accompagner de ressources finan-
ciegraveres une extension de compeacutetence ayant pour conseacutequence drsquoaugmen-
ter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales raquo (cons 8)
Agrave lrsquoargument opposeacute agrave lrsquoarticle 6 de la loi deacutefeacutereacutee selon lequel ces dispositions
creacuteeraient une diffeacuterence de traitement entre les communes contraire au prin-
cipe deacutegaliteacute devant la loi le Conseil constitutionnel en vertu de sa jurispru-
dence Loi pour une eacutecole de la confiance devrait logiquement apporter la mecircme
reacuteponse Le leacutegislateur entend avec cette loi du 8 avril 2021 donner de ma-
niegravere geacuteneacuterale effectiviteacute agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution agrave travers en par-
ticulier un outil permettant de mettre en œuvre les dispositions de lrsquoarticle 72-
2 de la Constitution relatives aux extensions de compeacutetences imposeacutees aux
collectiviteacutes territoriales Dispositions qui par ailleurs nrsquoobligent pas le leacutegi-
slateur agrave preacutevoir un accompagnement financier de lrsquoensemble des communes
En lien avec cet argument il en reacutesulte que lrsquoarticle 6 ne porte pas atteinte
par ailleurs au principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
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D Forfait scolaire communal et respect du principe de libre administra-
tion des collectiviteacutes territoriales
Quarto le forfait scolaire communal nrsquoest ni contraire agrave la lettre de lrsquoar-
ticle 72 de la Constitution ni agrave son interpreacutetation par le Conseil constitution-
nel
En vertu de lrsquoarticle 72 alineacutea 3 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales
srsquoadministrent librement dans les conditions preacutevues par la loi Correacutelative-
ment lrsquoarticle 34 de la Constitution donne agrave la loi compeacutetence pour deacuteterminer
laquo les principes fondamentaux (hellip) de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales de leurs compeacutetences et de leurs ressources raquo Cette libre admi-
nistration doit en outre se concilier avec drsquoautres principes constitutionnels
tels que le principe drsquoeacutegaliteacute et la liberteacute de lrsquoenseignement Crsquoest ainsi que le
Conseil constitutionnel a jugeacute que laquo si le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacute-
gislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce que les conditions essentielles drsquoap-
plication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de lrsquoenseignement deacutepen-
dent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre
les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (voir notamment la deacutecisions ndeg84-
185 DC du 18 janvier 1985 cons 18)
La libre administration est bien un principe constitutionnel mais crsquoest au leacute-
gislateur qursquoil revient sous le controcircle du Conseil constitutionnel drsquoen preacuteci-
ser le contenu Lrsquointervention du leacutegislateur est neacutecessaire pour la deacutefinition
des regravegles de fonctionnement des collectiviteacutes territoriales la deacutefinition des
compeacutetences qui leur sont deacutevolues (transfert creacuteation extension des compeacute-
tences) et en matiegravere de ressources la fixation du taux des impocircts deacutecideacutes par
les Assembleacutees deacutelibeacuteratives locales
Il ressort de la jurisprudence administrative et constitutionnelle que seule la
loi peut creacuteer une obligationsujeacutetion nouvelle agrave la charge drsquoune collectiviteacute
territoriale Le principe de libre administration ne peut donc pas exister en-
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dehors de lrsquointervention du leacutegislateur lequel nrsquoa pas pour autant toute lati-
tude En drsquoautres termes le principe de libre administration est deacutefini par la
loi mais est aussi proteacutegeacute contre elle qui ne peut notamment pas porter at-
teinte au-delagrave drsquoun certain seuil aux ressources des collectiviteacutes territoriales
restreindre la liberteacute contractuelle intervenir dans les deacutecisions des collecti-
viteacutes territoriales relatives agrave leurs agents ou le fonctionnement de leurs insti-
tutions
En eacutetendant la prise en charge du forfait scolaire communal la loi deacutefeacutereacutee creacutee
une charge suppleacutementaire pour certaines communes
Aux termes du quatriegraveme alineacutea de larticle 72-2 de la Constitution laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales saccom-
pagne de lattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consa-
creacutees agrave leur exercice Toute creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour
conseacutequence daugmenter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales est ac-
compagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Dans le cas ougrave le leacutegislateur
octroie une nouvelle compeacutetence aux collectiviteacutes territoriales (articles 72-2 de
la Constitution et L 1614-1-1 du code geacuteneacuteral des collectiviteacutes territoriales)
il accompagne cette creacuteation de ressources correspondantes uniquement si
lexercice de cette compeacutetence est rendu obligatoire Ainsi en a jugeacute le Conseil
constitutionnel en ajoutant que le leacutegislateur disposait dun pouvoir dappreacute-
ciation en la matiegravere la compensation devant ecirctre naturellement suffisante
pour ne pas constituer une entrave au principe de libre administration
laquo Que ces dispositions ne visent en ce qui concerne les creacuteations et ex-
tensions de compeacutetences que celles qui preacutesentent un caractegravere obliga-
toire que dans cette hypothegravese il nest fait obligation au leacutegislateur
que daccompagner ces creacuteations ou extensions de compeacutetences de res-
sources dont il lui appartient dappreacutecier le niveau sans toutefois deacutena-
turer le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales raquo
(deacutecision ndeg2008-569 DC du 7 aoucirct 2008 Loi instituant un droit daccueil
pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires pendant le temps
scolaire cons 13)
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Le Conseil constitutionnel a jugeacute qursquoen conseacutequence et en lrsquoespegravece le leacutegisla-
teur avait suffisamment deacutetermineacute le niveau des ressources accompagnant la
creacuteation de ce service daccueil pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires pendant le temps scolaire sans meacuteconnaicirctre le quatriegraveme alineacutea de
larticle 72-2 de la Constitution
Lextension de compeacutetences est soumise a fortiori au mecircme reacutegime que la
creacuteation de compeacutetences Elle consiste en leacutelargissement du peacuterimegravetre ou en
la modification de la nature ou de lobjet dune compeacutetence dont lexercice est
deacutejagrave assureacute par les collectiviteacutes territoriales ayant pour conseacutequence de creacuteer
une charge suppleacutementaire pour celles-ci Le droit agrave une compensation finan-
ciegravere nest garanti que si lextension preacutesente un caractegravere obligatoire et le
leacutegislateur en deacutetermine le niveau et les modaliteacutes agrave condition quils nentra-
vent pas la libre administration des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece le principe de libre administration nrsquoest donc pas violeacute par le ca-
ractegravere contraignant que confegravererait la loi deacutefeacutereacutee au forfait scolaire communal
de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation Drsquoune part le Conseil constitu-
tionnel a deacutejagrave comme souligneacute plus haut accepteacute le principe du caractegravere
obligatoire drsquoune nouvelle charge qui nrsquoentraine par ailleurs mecircme pas
lrsquoautomaticiteacute drsquoun accompagnement financier des communes Drsquoautre part
lrsquoargument de proportionnaliteacute est ici deacuteterminant agrave ceux qui avancent un
risque drsquoassegravechement financier de certaines communes rurales contraintes
de prendre en charge la scolarisation dun eacutelegraveve dans une autre commune
mieux doteacutee qui propose lenseignement de la langue reacutegionale (ce qui selon
le deacuteputeacute Molac ne concernerait que 002 des enfants en France) il faut
reacutepondre en mettant en avant lrsquoobjectif incitatif et non sanctionnateur de la
loi Il suffira auxdites communes de proposer un enseignement de langue reacute-
gionale qui ne pourrait repreacutesenter qursquoune heure drsquoinitiation par semaine par
exemple
Une heure drsquoinitiation par semaine pour eacuteviter de payer le forfait scolaire com-
munal lequel ne meacuteconnait pas par ailleurs lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
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les principes constitutionnels drsquoeacutegaliteacute drsquouniciteacute de la langue franccedilaise de la
libre administration des collectiviteacutes territoriales et permet drsquoassurer le deacuteve-
loppement de lrsquoenfant crsquoest bien peu de choses pour censurer une loi souve-
raine adopteacutee qui plus est agrave une eacutecrasante majoriteacute
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De Raphaeumll SchellenbergerA GreffeObjet Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues ReacutegionalesDate mardi 4 mai 2021 101012Piegraveces jointes Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionalespdf
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loirelative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus desoixante deacuteputeacutes ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texteen application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarerlrsquoinconstitutionnaliteacute de son article 6 Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons ennotre qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre lapleine constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sensNous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notreconsideacuteration respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire
- Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
- Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche
- Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret
- Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne
- Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte
- Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor
- David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion
- Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme
- Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne
- Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
1
M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2
Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
3
On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
- Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie
- Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
Ce message ainsi que les piegraveces jointes sont eacutetablis sous la seule responsabiliteacute de lexpeacutediteur agrave lintention exclusive de ses destinataires ils peuvent contenir des informations confidentielles Toute publication utilisation ou diffusion doit ecirctre autoriseacutee preacutealablement Ce message a fait lobjet dun traitement anti-virusIl est rappeleacute que tout message eacutelectronique est susceptible dalteacuteration au cours de son acheminement sur Internet ________________________________________________________________
Vous pouvez consulter le site de lAssembleacutee nationale agrave ladresse suivante httpwwwassemblee-nationalefr
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
1
M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Association ESKOLIMChez Seaska Route de la Pouponniegravere64250 CAMBO LES BAINSeskolim6gmailcomRepreacutesenteacutee par son President Jean Seacutebastien HAYDN11 chemin de Saint Jean66240 SAINT ESTEVE
CONTRIBUTION EXTERIEURE
Observations sur la conformiteacute agrave la Constitution de laproposition de loi relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
Monsieur le Preacutesident du Conseil constitutionnel Mesdames et Messieurs les
membres du Conseil constitutionnel lrsquoassociation Eskolim souhaite porter agrave votre attention
les observations suivantes tendant agrave deacutemontrer la conformiteacute agrave la Constitution de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Parmi lrsquoensemble des dispositions du texte deacutefeacutereacute la plupart nrsquoont donneacute lieu agrave aucun
deacutebat sur leur conformiteacute agrave la Constitution qui est de toute eacutevidence acquise par exemple au
sujet des traductions dont la constitutionnaliteacute a deacutejagrave indirectement eacuteteacute reconnue (CC 99-412
DC 15 juin 1999 CC ndeg2001-452 DC 6 deacutecembre 2001) ou de lrsquoutilisation des signes
diacritiques sur les actes drsquoeacutetat civil
De plus au-delagrave des apparences drsquoune politique jurisprudentielle initieacutee dans un contexte
speacutecifique le Conseil constitutionnel dispose deacutesormais drsquoun cadre constitutionnel de
reacutefeacuterence transformeacute (1) qui lui permettra de valider les dispositions leacutegislatives du texte dont
il est saisi en particulier lrsquoarticle 4 relatif agrave lrsquoenseignement immersif (2) et lrsquoarticle 6 au sujet
de la participation financiegravere agrave la scolarisation par les communes de reacutesidence (3)
1
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
1 Le renouvellement des normes constitutionnelles de reacutefeacuterence en matiegravere de
langues reacutegionales
11 Les ineacutevitables deacuterogations apporteacutees agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution
Toute regravegle constitutionnelle connaicirct des atteacutenuations et peut ecirctre concilieacutee lrsquoarticle 2
de la Constitution ne fait pas exception Le principe demeure inchangeacute laquo La langue de la
Reacutepublique est le franccedilais raquo Sur ce fondement le Conseil constitutionnel a deacuteveloppeacute dans
les anneacutees 90 et 2000 une jurisprudence vigilante sur lrsquousage du franccedilais mais sans pour
autant refuser toute eacutevolution nous y reviendrons
Cependant lrsquoassociation Eskolim souhaite mettre en eacutevidence lrsquoindeacuteniable
changement de cadre constitutionnel en matiegravere de langues reacutegionales pour au
moins trois raisons
En premier lieu la porteacutee de lrsquoarticle 2 de la Constitution nrsquoest pas figeacutee et peut
eacutevoluer avec le temps En effet le Conseil constitutionnel opegravere reacuteguliegraverement des adaptations
de la porteacutee du texte constitutionnel Parmi de nombreuses illustrations jurisprudentielles la
liberteacute drsquoexpression et de communication protegravege deacutesormais la liberteacute drsquoacceacuteder agrave Internet
(CC ndeg 2009-580 DC 10 juin 2009) et de srsquoy exprimer (CC ndeg2020-801 DC du 18 juin 2020)
La liberteacute du mariage comprend deacutesormais le droit de mettre fin aux liens du mariage (CC ndeg
2016-557 QPC du 29 juillet 2016) La monteacutee en puissance des exigences environnementales
dans le deacutebat public a permis au Conseil constitutionnel de juger qursquoil deacutecoule de la Charte de
lrsquoenvironnement laquo que la protection de lrsquoenvironnement patrimoine commun des ecirctres
humains constitue un objectif de valeur constitutionnelle raquo (CC ndeg2019-823 QPC 31 janvier
2020) Certains fondements constitutionnels que lrsquoon croyait endormis ont eacuteteacute reacuteactiveacutes sous
lrsquoeffet du pouvoir interpreacutetatif agrave lrsquoimage de lrsquoarticle 15 de la DDHC (laquo La socieacuteteacute a le droit de
demander compte agrave tout agent public de son administration raquo) agrave lrsquoorigine drsquoun droit drsquoaccegraves
aux archives publiques (CC ndeg2017-655 QPC 15 septembre 2017) et drsquoun droit drsquoaccegraves aux
documents administratifs (CC ndeg2020-834 QPC 3 avril 2020)
En deuxiegraveme lieu la reacutedaction actuelle de lrsquoarticle 2 de la Constitution ne date pas de
1958 mais drsquoun ajout issu de la loi constitutionnelle ndeg 92-554 du 25 juin 1992 voteacutee dans un
contexte particulier au moment ougrave la France ratifiait le traiteacute de Maastricht et reacutevisait sa
Constitution afin de lever les atteintes agrave la souveraineteacute constateacutees par le Conseil
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
constitutionnel En 1992 lrsquoinsertion de la langue franccedilaise au sein de lrsquoarticle 2 vise agrave rassurer
lrsquoopinion face aux craintes heacutegeacutemoniques de la langue anglaise les langues reacutegionales ne
sont ni viseacutees ni nieacutees dans leur existence et leur rocircle Il est sur ce point particuliegraverement
reacuteveacutelateur de se reacutefeacuterer aux deacuteclarations limpides du Garde des Sceaux Michel Vauzelle lors
des deacutebats parlementaires consacreacutes en 1992 au vote de la reacutevision constitutionnelle laquo Les
langues reacutegionales sont naturellement une richesse de notre patrimoine national Agrave ce
titre le Gouvernement exprime par ma voix lrsquoimmense respect et le soin qursquoil porte agrave cette
richesse de la nation [] Je ne vois pas lagrave drsquoatteinte agrave lrsquouniteacute de la nation mais au
contraire une contribution agrave sa richesse [] Aucune atteinte ne sera porteacutee agrave la politique
de respect de la diversiteacute de nos cultures reacutegionales qui est un eacuteleacutement essentiel du
patrimoine national raquo (JO Assembleacutee nationale p 1021)
Il est donc parfaitement possible pour le Conseil constitutionnel drsquoopeacuterer une
interpreacutetation eacutevolutive de lrsquoarticle 2 afin drsquoadapter la porteacutee de la norme constitutionnelle au
contexte actuel favorable agrave lrsquoapprofondissement de lrsquousage des langues reacutegionales Il nrsquoest
drsquoailleurs pas anodin de constater que la preacutesente proposition de loi a largement transcendeacute les
clivages politiques pour ecirctre voteacutee agrave une large majoriteacute avec drsquoailleurs le soutien de
lrsquoensemble des Preacutesidents de Reacutegion
En troisiegraveme lieu dans sa fameuse deacutecision sur la Charte europeacuteenne des langues
reacutegionales et minoritaires du 15 juin 1999 (ndeg99-412 DC) le Conseil constitutionnel a
implicitement reconnu la compatibiliteacute de lrsquoenseignement immersif ou bilingue avec la
Constitution et en particulier avec lrsquoarticle 2 de la Constitution En effet lrsquoinconstitutionnaliteacute
constateacutee entre la Charte et la Constitution concerne seulement les articles 1 et 7 Or le
consideacuterant 13 de cette deacutecision abusivement preacutesenteacutee comme un verrou absolu en matiegravere
de langues reacutegionales prend soin de preacuteciser laquo que nest contraire agrave la Constitution eu eacutegard agrave
leur nature aucun des autres engagements souscrits par la France dont la plupart au
demeurant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France en
faveur des langues reacutegionales raquo Parmi ces laquo autres engagements souscrits par la France raquo
au sein de la Charte figurent certaines stipulations de lrsquoarticle 8 de la Charte1 selon lequel
1 Article 8 ndash Enseignement1En matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel ces langues sontpratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de lenseignement de la (des)langue(s) officielle(s) de lEtat(hellip)ci agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires concerneacutees ou
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
laquo laquoen matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel
ces langues sont pratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de
lenseignement de la (des) langue(s) officielle(s) de lEtat raquo agrave toute une seacuterie drsquoengagements
Au sein des engagements auxquels la France avait souscrits et sur lesquels le Conseil
constitutionnel srsquoest donc prononceacute on trouve le point 1 c (iv) en vertu duquel la France
srsquoengage laquo agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui
le souhaitent ndash ou le cas eacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant raquo
Or ce renvoi concerne les stipulations suivantes
laquo i agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires
concerneacutees ou
Ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les
langues reacutegionales ou minoritaires ou
Iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales
ou minoritaires comme partie inteacutegrante du curriculum
Autrement dit la France srsquoeacutetait engageacutee au moment de la signature de la Charte agrave
appliquer lrsquoune des trois mesures citeacutees qui concernent lrsquoenseignement laquo dans raquo les langues
reacutegionales ou minoritaires dans le secondaire crsquoest-agrave-dire un enseignement immersif ou
bilingue Cet engagement faisait donc partie des stipulations examineacutees par le Conseil
constitutionnel et le consideacuterant 13 de la deacutecision du 15 juin 1999 affirme clairement que ces
stipulations ne sont pas contraires agrave la Constitution Degraves 1999 lrsquoenseignement immersif en
langue reacutegionale est reconnu par le Conseil constitutionnel comme compatible avec
lrsquoarticle 2 de la Constitution
En quatriegraveme lieu le texte mecircme de la Constitution contient drsquoores et deacutejagrave des
ameacutenagements au principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais
Drsquoune part en vertu de la loi constitutionnelle ndeg 98-610 du 20 juillet 1998 lAccord
de Noumeacutea est constitutionnaliseacute agrave larticle 77 de la Constitution Or cet accord stipule en son
ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les langues reacutegionalesou minoritaires ou
iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales ou minoritairescomme partie inteacutegrante du curriculum ou
iv agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui le souhaitent ndash ou le caseacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
point 133 laquo Les langues kanak sont avec le franccedilais des langues denseignement et de
culture en Nouvelle-Caleacutedonie Leur place dans lenseignement et les meacutedias doit donc ecirctre
accrue et faire lobjet dune reacuteflexion approfondie raquo
Drsquoautre part sous lrsquoeffet de la reacutevision constitutionnelle du 23 juillet 2008 la
Constitution consacre deacutesormais les langues reacutegionales sous lrsquoeffet de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution qui par deacutefinition atteacutenue et deacuteroge agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution et dont la
porteacutee ne saurait ecirctre symbolique
12 La porteacutee de lrsquoancrage constitutionnel des langues reacutegionales minoritaires
En vertu de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution laquo Les langues reacutegionales appartiennent
au patrimoine de la France raquo Sans discussion possible cette nouvelle disposition
constitutionnelle constitue un changement de circonstances de droit permettant drsquoatteacutenuer
fortement la porteacutee des preacuteceacutedentes deacutecisions du Conseil constitutionnel rendues avant la
reacutevision constitutionnelle de 2008 Certains voudraient pourtant reacuteduire ce texte agrave une porteacutee
simplement symbolique et pensent pouvoir drsquoores et deacutejagrave trouver une confirmation dans la
jurisprudence du Conseil constitutionnel La reacutealiteacute contentieuse est beaucoup plus nuanceacutee et
ne preacutejuge rien de lrsquoavenir
Le Conseil constitutionnel nrsquoa eu depuis 2008 qursquoune seule et unique occasion de
preacuteciser la porteacutee de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Dans la deacutecision du 20 mai 2011
(ndeg2011-130 QPC) il eacutetait en effet saisi des dispositions de larticle L 312-10 du code de
leacuteducation relative agrave lenseignement des langues et cultures reacutegionales qui eacutetait contesteacute au
regard de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Or estime le Conseil en 2011 lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution ninstitue pas un droit ou une liberteacute que la Constitution garantit Sa
meacuteconnaissance ne peut donc ecirctre invoqueacutee agrave lappui dune question prioritaire de
constitutionnaliteacute sur le fondement de larticle 61-1 de la Constitution
Il convient de ne pas tirer de conclusions excessives du deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en
QPC de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Drsquoune part cela nrsquoempecircche pas le Conseil constitutionnel de se fonder sur lrsquoarticle
75-1 de la Constitution dans le cadre du controcircle a priori comme crsquoest par exemple le cas
pour les regravegles constitutionnelles en matiegravere de recevabiliteacute des amendements ou des principes
constitutionnels en matiegravere budgeacutetaires
5
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Drsquoautre part le deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en QPC drsquoune norme constitutionnelle ne
preacutejuge pas drsquoune forme de hieacuterarchie mateacuterielle ou formelle et srsquoexplique seulement par les
speacutecificiteacutes de chacun des offices Par exemple le respect des regravegles du vote de la loi
imposeacutees par la Constitution impossibles agrave invoquer en QPC font pourtant lrsquoobjet drsquoune
vigilance accrue du Conseil constitutionnel dans le cadre du controcircle a priori justifiant
chaque anneacutee de nombreuses censures
En outre bien que non invocable en QPC lrsquoarticle 75-1 teacutemoigne indubitablement de
la volonteacute du constituant de permettre au leacutegislateur drsquoassouplir les conditions drsquousage des
langues reacutegionales en ouvrant davantage la leacutegislation agrave des possibiliteacutes drsquoapprentissage en la
matiegravere En cela lrsquoarticle 75-1 de la Constitution est une atteacutenuation une disposition
deacuterogatoire agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution selon lequel laquo La langue de la Reacutepublique est le
franccedilais raquo Comme le souligne le rapport drsquoun deacuteputeacute en 2015 laquo la preacuteservation et la
protection des langues reacutegionales sont devenues un objectif de valeur constitutionnelle raquo2 Une
telle interpreacutetation serait drsquoailleurs coheacuterente avec les travaux parlementaires agrave lrsquoorigine de la
reacutevision de 2008 pour le preacutesident de la Commission des lois du Seacutenat lrsquoarticle 75-1 permet
de donner laquo un fondement solide aux dispositions leacutegislatives et reacuteglementaires qui favorisent
la protection et le deacuteveloppement des langues reacutegionales sans diminuer la place que le
franccedilais occupe dans notre sphegravere publique raquo3
Enfin dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel
estime que larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi
ndeg2005-380 du 23 avril 2005 est conforme agrave la Constitution Or les dispositions ainsi
valideacutees sont toujours en vigueur dans une reacutedaction identique laquo Un enseignement de
langues et cultures reacutegionales peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des
modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces
langues sont en usage raquo Ainsi tout en estimant que lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ne
constitue pas un droit ou liberteacute constitutionnel directement invocable en QPC le Conseil
constitutionnel a valideacute le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures
reacutegionales
2JJ Urvoas Rapport sur Proposition de loi constitutionnelle ndeg 1618 visant agrave ratifier la Charte europeacuteenne deslangues reacutegionales ou minoritaires 14 janvier 2014
3JJ Hyest Rapport ndeg 387 (2007-2008) sur le projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions dela Ve Reacutepublique fait au nom de la commission des lois du Seacutenat
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Autre signe eacutevident de la porteacutee effective de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le
leacutegislateur a multiplieacute ces derniegraveres anneacutees lrsquoadoption de textes favorisant lrsquousage et
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et leur promotion La loi du 8 juillet 2013
drsquoorientation et de programmation pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique ouvre la
possibiliteacute drsquoun enseignement bilingue franccedilais-langue reacutegionale la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) eacutetablit la participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes par lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale
lrsquoarticle 86 de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle
modifie lrsquoarticle 225-1 du code peacutenal en creacuteant un nouveau cas de discrimination fondeacute sur laquo
la maitrise drsquoune autre langue que le franccedilais raquo la loi du 28 feacutevrier 2017 de programmation
relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend inopeacuterant lrsquointerdiction des livrets de famille
bilingues lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance eacutetend aux
eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives les modaliteacutes drsquoun accord entre les communes pour
la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoinscrivant dans une eacutecole dispensant un
enseignement de langue reacutegionale en dehors de sa commune de reacutesidence Lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution a donc susciteacute une production leacutegislative qui teacutemoigne de la volonteacute du pouvoir
politique de mettre en œuvre une politique en matiegravere de langue et culture reacutegionales La
particulariteacute de la proposition de loi deacutefeacutereacutee est drsquoecirctre la premiegravere loi dont lrsquoobjet exclusif vise
agrave densifier lrsquoenseignement et lrsquousage des langues reacutegionales mais ce texte confirme les
avanceacutees ponctuelles eacutetablies depuis la reacutevision constitutionnelle de 2008
13 La monteacutee en puissance drsquoexigences constitutionnelles favorisant lrsquousage des langues
reacutegionales
Au-delagrave de lrsquoapport indeacuteniable de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution qui inteacuteresse
directement et clairement la possibiliteacute pour le leacutegislateur de favoriser le deacuteveloppement des
langues reacutegionales la jurisprudence du Conseil constitutionnel atteste drsquoune monteacutee en
puissance de plusieurs liberteacutes qui participent indirectement du mecircme mouvement
En premier lieu la liberteacute drsquoexpression et de communication concerne les langues
reacutegionales Degraves la deacutecision ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 le Conseil constitutionnel avait
concilieacute lrsquoarticle 2 de la Constitution avec la liberteacute drsquoexpression et de communication afin de
censurer certaines dispositions imposant lrsquousage du franccedilais tout en faisant notamment une
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
reacutefeacuterence aux langues reacutegionales cette liberteacute laquo implique le droit pour chacun de choisir les
termes jugeacutes par lui les mieux approprieacutes agrave lexpression de sa penseacutee que la langue franccedilaise
eacutevolue comme toute langue vivante en inteacutegrant dans le vocabulaire usuel des termes
de diverses sources quil sagisse dexpressions issues de langues reacutegionales de vocables
dits populaires ou de mots eacutetrangers raquo Or la liberteacute drsquoexpression et de communication a vu
son reacutegime constitutionnel renforceacute depuis plusieurs anneacutees sous lrsquoeffet du triple test de
proportionnaliteacute en vertu duquel les limites apporteacutees agrave ces liberteacutes doivent ecirctre neacutecessaires
adapteacutees et proportionneacutees agrave lrsquoobjectif poursuivi Norme constitutionnelle prioritaire pour le
Conseil constitutionnel la liberteacute drsquoexpression et de communication a justifieacute de nombreuses
censures de dispositions leacutegislatives ces derniegraveres anneacutees (loi laquo Hadopi raquo consultation des
sites Internet terroristes loi laquo Avia raquohellip) Or cette liberteacute dans ses deux composantes de
lrsquoexpression et de la communication permet au locuteur drsquoutiliser une langue reacutegionale et de
ne pas subir drsquoentraves excessives ou injustifieacutees Le deacuteveloppement des langues reacutegionales et
de leur enseignement lrsquoouverture des possibiliteacutes de srsquoexprimer et de communiquer gracircce agrave
ces langues ne sont pas eacutetrangegraveres aux conditions drsquoexercice de la liberteacute drsquoexpression et de
communication Ainsi la monteacutee en puissance de cette liberteacute dans le contentieux
constitutionnel confirme lrsquoeacutevolution favorable du cadre constitutionnel applicable aux langues
reacutegionales
En deuxiegraveme lieu lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant est deacutesormais consacreacute en tant
qursquoexigence constitutionnelle deacutecoulant des alineacuteas 10 et 11 du Preacuteambule de 1946 Ce
principe a drsquoores et deacutejagrave eacuteteacute appliqueacute en matiegravere de droit des eacutetrangers (CC 2019-797 QPC du
26 juillet 2019) mais aussi en droit de la famille au sujet du divorce (CC ndeg 2019-778 DC du
21 mars 2019) ou de lrsquoaccouchement sous le secret (CC 2019-826 QPC du 7 feacutevrier 2020) Il
serait parfaitement coheacuterent que cette exigence constitutionnelle soit applicable en matiegravere
drsquoeacuteducation et drsquoenseignement ce qui permettrait notamment de justifier le renforcement de
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et le soutien financier qui leur est apporteacute
En troisiegraveme lieu la liberteacute de lrsquoenseignement reconnu en tant que principe
constitutionnel (CC ndeg77-87 DC 23 novembre 1977 2016-745 DC 26 janvier 2017)
pourrait permette de proteacuteger constitutionnellement le libre choix des parents en
matiegravere de meacutethodes eacuteducatives conformeacutement agrave la jurisprudence du Conseil drsquoEtat En
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effet dans une deacutecision du 19 juillet 2017 (Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg
406150) le Conseil drsquoEtat estime que le laquo principe de la liberteacute de lrsquoenseignement qui figure
au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la Reacutepublique implique la
possibiliteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement y compris hors de tout contrat conclu
avec lrsquoEtat tout comme le droit pour les parents de choisir pour leurs enfants des
meacutethodes eacuteducatives alternatives agrave celles proposeacutees par le systegraveme scolaire public y
compris lrsquoinstruction au sein de la famille raquo A fortiori la liberteacute de lrsquoenseignement
permettrait au leacutegislateur drsquooffrir aux eacutelegraveves la possibiliteacute de suivre un enseignement immersif
en langue reacutegionale Faire deacutecouler de la liberteacute drsquoenseignement une exigence en matiegravere de
droit des parents de choisir les meacutethodes eacuteducatives serait drsquoailleurs en coheacuterence avec
lrsquoarticle 2 du Protocole 1 de la CEDH4 et lrsquoarticle 14-3 de la Charte des droits fondamentaux
de lUnion europeacuteenne5
Au-delagrave du principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais unchangement de contexte est intervenu depuis lrsquoinsertion en 1992 de cette disposition agravelrsquoarticle 2 de la Constitution Depuis 2008 le pouvoir constituant a consacreacute leslangues reacutegionales agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution de nombreuses reacuteformesleacutegislatives et regraveglementaires ont accompagneacute le deacuteveloppement des langues reacutegionaleset plusieurs principes constitutionnels accompagnent et pourraient agrave lrsquoavenirrenforcer lrsquoassise normative des langues reacutegionalesCrsquoest agrave lrsquoaune de ce cadre constitutionnel renouveleacute et transformeacute en phase avec leseacutevolutions leacutegislatives et sociales que le Conseil constitutionnel appreacuteciera laconstitutionnaliteacute de la preacutesente proposition de loi qui loin de constituer une rupturesrsquoinscrit dans une forme de continuiteacute
2 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi modifie lrsquoarticle L321-10 du code de lrsquoeacuteducation qui
en lrsquoeacutetat dispose
4laquo Nul ne peut se voir refuser le droit agrave lrsquoinstruction LrsquoEacutetat dans lrsquoexercice des fonctions qursquoil assumera dans ledomaine de lrsquoeacuteducation et de lrsquoenseignement respectera le droit des parents drsquoassurer cette eacuteducation et cetenseignement conformeacutement agrave leurs convictions religieuses et philosophiques raquo
5laquo La liberteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement dans le respect des principes deacutemocratiques ainsi quele droit des parents drsquoassurer lrsquoeacuteducation et lrsquoenseignement de leurs enfants conformeacutement agrave leurs convictionsreligieuses philosophiques et peacutedagogiques sont respecteacutes selon les lois nationales qui en reacutegissent lrsquoexercice raquo
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laquo Les langues et cultures reacutegionales appartenant au patrimoine de la France leurenseignement est favoriseacute prioritairement dans les reacutegions ougrave elles sont en usage
Cet enseignement peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefiniespar voie de convention entre lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont enusage
Le Conseil supeacuterieur de leacuteducation est consulteacute conformeacutement aux attributions qui lui sontconfeacutereacutees agrave larticle L 231-1 sur les moyens de favoriser leacutetude des langues et culturesreacutegionales dans les reacutegions ougrave ces langues sont en usage
Lenseignement facultatif de langue et culture reacutegionales est proposeacute dans lune des deuxformes suivantes
1deg Un enseignement de la langue et de la culture reacutegionales
2deg Un enseignement bilingue en langue franccedilaise et en langue reacutegionale
Les familles sont informeacutees des diffeacuterentes offres dapprentissage des langues et culturesreacutegionales raquo
Lrsquoarticle 4 a simplement pour objet drsquoajouter un 3e cas de forme drsquoenseignementfacultatif de langue et culture reacutegionales en preacutevoyant
laquo3deg Un enseignement immersif en langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectifdrsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo
21 Le Conseil constitutionnel peut ne pas se prononcer sur cette disposition
A titre liminaire il semblerait que lrsquoarticle 4 du texte soumis agrave lrsquoexamen du
Conseil constitutionnel ne soit pas contesteacute par les auteurs de la saisine parlementaire agrave en
croire les deacuteclarations publiques de plusieurs deacuteputeacutes Ce point nrsquoest pas sans importance degraves
lors qursquoil confirme le large consensus politique autour de cette disposition et peut avoir une
conseacutequence sur le peacuterimegravetre de lrsquoobjet de la deacutecision rendue
Certes il arrive ponctuellement au Conseil constitutionnel drsquoexaminer drsquooffice
drsquoautres dispositions que celles contesteacutees par la saisine mais depuis lrsquoentreacutee en vigueur de la
QPC et speacutecialement depuis 2016 une telle pratique tend agrave devenir une exception (Deacutecisions
ndeg 2019-794 DC du 20 deacutecembre 2019 ndeg2018-772 DC du 15 novembre 2018 ndeg2016-745
DC du 26 janvier 2017)
De plus lors de lrsquoexamen de la loi pour une eacutecole de la confiance dans sa deacutecision
ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 le Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute examiner
drsquooffice les dispositions de lrsquoarticle 38 creacuteant en vertu de lrsquoarticle L314-2 du code de
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lrsquoeacuteducation une expeacuterimentation de classe immersive en langue eacutetrangegravere ou reacutegionale6 Si le
Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute se saisir drsquooffice de cette disposition expeacuterimentale
crsquoest qursquoimplicitement il nrsquoa pas consideacutereacute qursquoelle posait une difficulteacute manifeste de
constitutionnaliteacute Degraves lors la coheacuterence voudrait qursquoil en aille de mecircme avec les dispositions
de lrsquoarticle 4 de la preacutesente proposition de loi qui ne font que reprendre les grands principes
de lrsquoexpeacuterimentation preacuteceacutedente en preacutevoyant la possibiliteacute drsquoun enseignement immersif en
langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue
franccedilaise
22 Les exigences anciennes poseacutees par le Conseil constitutionnel sont respecteacutees
Elaboreacutee avant la reacutevision constitutionnelle de 2008 consacrant les langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la jurisprudence
du Conseil constitutionnel en matiegravere drsquoenseignement de langue reacutegionale est totalement
respecteacutee par lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
En premier lieu le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement immersif en langue
reacutegionale rend lrsquoarticle 4 conforme agrave la Constitution
Dans plusieurs deacutecisions le Conseil constitutionnel a eu lrsquooccasion de preacuteciser que
seule lrsquoobligation de suivre un enseignement dans une autre langue que le franccedilais serait
contraire agrave la Constitution Ainsi dans la deacutecision ndeg 2001-456 DC du 27 deacutecembre 2001 il
indique que laquo lusage dune langue autre que le franccedilais ne peut ecirctre imposeacute aux eacutelegraveves des
eacutetablissements de lenseignement public ni dans la vie de leacutetablissement ni dans
lenseignement des disciplines autres que celles de la langue consideacutereacutee raquo Le verbe
6Article L314-2 du code de lrsquoeacuteducation laquo Sous reacuteserve de lrsquoautorisation preacutealable des autoriteacutes acadeacutemiques etapregraves concertation avec les eacutequipes peacutedagogiques le projet drsquoeacutecole ou drsquoeacutetablissement mentionneacute agrave lrsquoarticle L401-1 peut preacutevoir la reacutealisation dans des conditions deacutefinies par deacutecret drsquoexpeacuterimentations peacutedagogiquesportant sur tout ou partie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement drsquoune dureacutee limiteacutee agrave cinq ans Cesexpeacuterimentations peuvent concerner lrsquoorganisation peacutedagogique de la classe de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement laliaison entre les diffeacuterents niveaux drsquoenseignement la coopeacuteration avec les partenaires du systegraveme eacuteducatiflrsquoenseignement dans une langue vivante eacutetrangegravere ou reacutegionale les eacutechanges avec des eacutetablissementseacutetrangers drsquoenseignement scolaire lrsquoutilisation des outils et ressources numeacuteriques la reacutepartition des heuresdrsquoenseignement sur lrsquoensemble de lrsquoanneacutee scolaire les proceacutedures drsquoorientation des eacutelegraveves et la participation desparents drsquoeacutelegraveves agrave la vie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement Les collectiviteacutes territoriales sont systeacutematiquementassocieacutees agrave la deacutefinition des grandes orientations des expeacuterimentations meneacutees par lrsquoeacuteducation nationale ainsiqursquoagrave leurs deacuteclinaisons territoriales raquo
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laquo imposer raquo est employeacute agrave la fois au sujet de lrsquousage drsquoune autre langue que le franccedilais et au
sujet de la vie de lrsquoeacutetablissement et de lrsquoenseignement des disciplines autres que celles de la
langue consideacutereacutee Ce qui signifie qursquoil est constitutionnellement possible au leacutegislateur de
permettre aux eacutelegraveves de choisir de maniegravere facultative une telle orientation dans
lrsquoenseignement De mecircme dans sa deacutecision ndeg2001 454 DC du 17 janvier 2002 le Conseil
constitutionnel avait estimeacute que si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre
de lrsquohoraire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires laquo il ne saurait revecirctir pour autant
un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo Et dans la deacutecision
ndeg2004-490 DC 12 feacutevrier 2004 le Conseil indique que lrsquoenseignement de la langue
tahitienne ou dune autre langue polyneacutesienne dans le cadre de lhoraire normal des eacutecoles
maternelles et primaires dans les eacutetablissements du second degreacute et dans les eacutetablissements
denseignement supeacuterieur laquo ne saurait revecirctir pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les
eacutelegraveves ou eacutetudiants ni pour les enseignants raquo
Or en lrsquoespegravece il nrsquoy a absolument aucun doute sur le caractegravere facultatif du 3deg
ajouteacute agrave lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation En effet le premier alineacutea de lrsquoarticle L312-
10 du code de lrsquoeacuteducation est inchangeacute et eacutevoque un laquo enseignement facultatif raquo Le deacuteputeacute
Molac lrsquoa clairement exprimeacute lors des deacutebats laquo lrsquoenseignement immersif tel qursquoil est ici
proposeacute reacutepond agrave cette condition dans la mesure ougrave il ne serait pas imposeacute mais seulement
proposeacute au sein des eacutetablissements publics au cocircteacute de filiegraveres classiques drsquoenseignement la
deacutecision finale restant du ressort des personnes responsables de lrsquoenfant raquo (Rapport du 31
mars 2021)
En deuxiegraveme lieu lrsquoarticle 4 nrsquoa pas pour objet de soustraire les eacutelegraveves aux
droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements drsquoenseignement
Dans plusieurs deacutecisions relatives agrave lrsquousage drsquoune langue reacutegionale le Conseil
constitutionnel rappelle qursquoun enseignement de ce type nrsquoa pas pour laquo pour objet de soustraire
les eacutelegraveves scolariseacutes (hellip) aux droits et obligations applicables agrave lensemble des usagers des
eacutetablissements qui assurent le service public de lenseignement ou sont associeacutes agrave celui-ci raquo
(ndeg 91-290 DC du 9 mai 1991 ndeg 2001-454 DC du 17 janvier 2002) Or lrsquoarticle 4 a
seulement pour objet drsquoouvrir une 3e modaliteacute facultative drsquoenseignement en langue reacutegionale
La proposition de loi ne confegravere pas des droits speacutecifiques agrave des laquo groupes raquo de locuteurs de
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de laquo territoires raquo dans lesquels ces langues
seraient pratiqueacutees Le texte ne modifie pas non plus les modaliteacutes drsquoexpression dans la vie
publique et dans la relation entre lrsquoadministration et les administreacutes De telle sorte que
lrsquoarticle 4 ne creacutee aucun droit particulier pour les eacutelegraveves comme pour les enseignants de nature
agrave les soustraire aux droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements
drsquoenseignement ou associeacutes agrave celui-ci
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 4 opegravere une conciliation raisonnable et eacutequilibreacutee entre
le principe de lrsquoarticle 2 de la Constitution et lrsquoapprentissage des langues reacutegionales
Lrsquoenseignement immersif en lange reacutegionale doit srsquoopeacuterer laquo sans preacutejudice de
lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo Lrsquoarticle 4 prend soin de ne pas
ignorer le principe poseacute par lrsquoarticle 2 de la Constitution et prolonge au niveau leacutegislatif la
conciliation souhaiteacutee par le constituant depuis 2008 avec lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Il
appartiendra au pouvoir regraveglementaire de preacuteciser la mise en œuvre de lrsquoobjectif de bonne
connaissance de la langue franccedilaise qui en toute hypothegravese garantit une conciliation
eacutequilibreacutee entre les regravegles constitutionnelles en preacutesence
Au surplus les retours drsquoexpeacuteriences des expeacuterimentations de classes en
enseignements immersifs permises par lrsquoarticle L 314-2 du code de lrsquoeacuteducation deacutemontrent
que les eacutelegraveves disposent drsquoun niveau en franccedilais plus eacuteleveacute que la moyenne Comme lrsquoindique
le rapport du Seacutenat sur la proposition de loi 19 expeacuterimentations immersives en langue
basque 6 en langue corse et une en langue catalane ont lieu actuellement dans des eacutecoles
publiques Or pour prendre lrsquoexemple de lrsquoenseignement en basque agrave 100 en eacutecole
maternelle objet drsquoune eacutevaluation preacutecise par lrsquoacadeacutemie de Bordeaux en 2019 (Etude
comparative des filiegraveres de maternelle 100 basque bilingue et franccedilais Acadeacutemie de
Bordeaux 2019) laquo lorsque ces enfants arrivaient en CP leur niveau de franccedilais eacutetait
supeacuterieur agrave la moyenne du deacutepartement Cela prouve que le niveau de franccedilais nrsquoavait
absolument pas eacuteteacute toucheacute raquo (Paul Molac Assembleacutee nationale Seacuteance du 8 avril 2021)
En quatriegraveme lieu lrsquoarticle 4 ne fait qursquoeacutetendre la mise en œuvre drsquoune modaliteacute
drsquoenseignement deacutejagrave valideacute par le Conseil constitutionnel
Dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel a valideacute
le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures reacutegionales en estimant que
larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi ndeg2005-380 du 23
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avril 2005 est conforme agrave la Constitution En effet apregraves avoir estimeacute inopeacuterant le grief tireacute
de la violation de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la deacutecision preacutecise laquo que les dispositions
contesteacutees ne sont contraires agrave aucun droit ou liberteacute que la Constitution garantit raquo Par
conseacutequent en vertu de lrsquoautoriteacute que lrsquoarticle 62 de la Constitution confegravere aux deacutecisions du
Conseil constitutionnel les dispositions valideacutees dans cette deacutecision et toujours en vigueur
sont conformes agrave la Constitution Il srsquoagit en particulier de lrsquoalineacutea 2 de la version actuelle de
lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation en vertu duquel laquo Cet enseignement peut ecirctre
dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre
lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont en usage raquo Or lrsquoarticle 4 de la
proposition de loi ne fait qursquoajouter une 3e possibiliteacute de mise en œuvre drsquoun principe deacutejagrave
valideacute par le Conseil constitutionnel modaliteacute facultative et sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune
bonne connaissance de la langue franccedilaise Le leacutegislateur srsquoest donc scrupuleusement
conformeacute aux exigences du Conseil constitutionnel
23 La possibiliteacute drsquoun enseignement immersif peut se preacutevaloir de plusieurs exigences constitutionnelles
En plus de srsquoinscrire dans les lignes jurisprudentielles du Conseil constitutionnel et de
respecter lrsquoarticle 2 de la Constitution lrsquoarticle 4 de la proposition de la loi peut se preacutevaloir
plusieurs normes constitutionnelles
En premier lieu lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en vertu duquel laquo Les langues
reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo constitue un changement de
circonstances de droit issu de la reacutevision constitutionnelle de 2008 qui atteacutenue la porteacutee de
lrsquoarticle 2 de la Constitution et permet ainsi de fonder le principe drsquoen enseignement immersif
et facultatif en langue reacutegionale
En second lieu comme preacuteceacutedemment rappeleacute (cf supra point 13) plusieurs
exigences et liberteacutes constitutionnelles peuvent soutenir le deacuteveloppement des langues
reacutegionales et peser favorablement dans la conciliation opeacutereacutee par le Conseil constitutionnel
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La liberteacute drsquoexpression et de communication garantie par lrsquoarticle 11 de la DDHC
et dont le reacutegime constitutionnel srsquoest renforceacute depuis une dizaine drsquoanneacutees peut permettre de
justifier lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale degraves lors qursquoil srsquoagit drsquoun preacutealable neacutecessaire
agrave lrsquoexpression et agrave la communication dans une autre langue que le franccedilais
Lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant reacutecemment consacreacute sur le fondement des alineacuteas 10
et 11 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 peut permettre au leacutegislateur de diversifier les
possibiliteacutes drsquoapprentissage drsquoune langue et drsquoune culture reacutegionale
La liberteacute de lrsquoenseignement consacreacutee de longue date en tant que principe
fondamental reconnu par les lois de la Reacutepublique implique neacutecessairement comme le
reconnaissent le Conseil drsquoEtat au niveau constitutionnel (CE 19 juillet 2017 Association
Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150) et les textes europeacuteens (article 2 du protocole 1
CEDH article 14-3 Charte des droits fondamentaux de lrsquoUnion europeacuteenne) une possibiliteacute
pour les parents de choisir des meacutethodes eacuteducatives en lien avec leurs convictions
Il est eacutegalement possible drsquoavancer le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction qui
deacutecoule de lrsquoalineacutea 13 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 (CC ndeg2001-450 DC 11
juillet 2001) degraves lors que lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale poursuit un objectif
peacutedagogique auquel les eacutelegraveves doivent pouvoir acceacuteder de maniegravere suffisamment libre et
selon des critegraveres objectifs et rationnels
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi se contente drsquoajouter une modaliteacute de mise enœuvre drsquoun enseignement dont le principe a deacutejagrave eacuteteacute valideacute par le Conseilconstitutionnel La conformiteacute agrave la Constitution de cet enseignement est eacutetablie degraveslors qursquoil est proposeacute de maniegravere facultative sans preacutejudice du respect de lrsquoarticle 2 dela Constitution et qursquoil peut se preacutevaloir de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ainsi quede plusieurs principes constitutionnels comme la liberteacute drsquoexpression lrsquointeacuterecirctsupeacuterieur de lrsquoenfant la liberteacute drsquoenseignement et lrsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction
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3 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi deacutefeacutereacutee modifie lrsquoarticle L442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation en remplaccedilant les alineacuteas 6 et 7 par lrsquoalineacutea suivant
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue
reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de
reacutesidence et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la
condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de
langue reacutegionale raquo
31 Lrsquoimpact subsidiaire et reacutesiduel de lrsquoarticle 6
Au-delagrave des passions et crispations qui peuvent parfois se rencontrer au greacute de deacutebats
relatifs au financement de lrsquoenseignement priveacute la modification apporteacutee par lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi doit ecirctre replaceacutee agrave sa juste porteacutee
En premier le meacutecanisme est subsidiaire En effet la participation financiegravere de la
commune de reacutesidence ne serait solliciteacutee que si cette commune ne laquo dispose pas drsquoeacutecole
dispensant un enseignement de langue reacutegionale raquo Il srsquoagit bien drsquoun laquo enseignement raquo quel
que soit sa forme et son volume Degraves lors comme lrsquoa clairement exprimeacute le deacuteputeacute Paul
Molac devant la Commission des affaires sociales il peut srsquoagir drsquoune laquo initiation drsquoun
enseignement paritaire ou drsquoune immersion raquo (31 mars 2021)
En deuxiegraveme lieu le meacutecanisme est reacutesiduel La participation financiegravere se limite
aux eacutetablissements priveacutes du premier degreacute ndash les eacutecoles ndash ayant conclu un contrat
drsquoassociation Les collegraveges et lyceacutees sont donc exclus du dispositif Un faible nombre
drsquoenfants sera concerneacute et la charge sera donc reacuteduite pour les communes en question De
plus en pratique dans les zones ougrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales est reacutepandu les
eacutecoles drsquoun grand nombre de communes ont deacutejagrave deacuteveloppeacute des offres eacuteducatives
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En troisiegraveme lieu la participation financiegravere est encadreacutee par la loi En application
de lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation non modifieacute par la preacutesente
proposition de loi les modaliteacutes de calcul de la contribution de la commune de reacutesidence sont
clairement eacutetablies
laquo il est tenu compte des ressources de cette commune du nombre deacutelegraveves de cette
commune scolariseacutes dans la commune daccueil et du coucirct moyen par eacutelegraveve calculeacute sur la base
des deacutepenses de fonctionnement de lensemble des eacutecoles publiques de la commune daccueil
sans que le montant de la contribution par eacutelegraveve puisse ecirctre supeacuterieur au coucirct quaurait
repreacutesenteacute pour la commune de reacutesidence leacutelegraveve sil avait eacuteteacute scolariseacute dans une de ses eacutecoles
publiques raquo
La charge financiegravere obeacuteit donc agrave des regravegles claires objectives rationnelles et deacutejagrave en
vigueur depuis plusieurs anneacutees En effet le laquo forfait scolaire raquo est deacutejagrave pratiqueacute sur le
fondement de lrsquoarticle L212-8 du code de lrsquoeacuteducation lorsqursquoune famille scolarise dans une
eacutecole publique ou priveacutee son enfant dans une autre commune que la commune de reacutesidence
32 Lrsquoabsence de violation de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales et du principe drsquoeacutegaliteacute
Ainsi replaceacutee dans sa juste porteacutee il ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi de violer la Constitution et en particulier les principes applicables en
matiegravere de libre administration des collectiviteacutes territoriales ainsi que le principe drsquoeacutegaliteacute
En premier lieu le Conseil constitutionnel a deacutejagrave valideacute le principe de lrsquoaide agrave
lrsquoenseignement priveacute et en particulier aux langues reacutegionales
Avant mecircme la reacutevision constitutionnelle de 2008 et la conseacutecration des langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le Conseil
constitutionnel avait reconnu que laquo pour concourir agrave la sauvegarde des langues reacutegionales
lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales peuvent apporter leur aide aux associations ayant cet
objet raquo (CC ndeg2001-456 DC 27 deacutecembre 2001)
De plus le Conseil constitutionnel rappelle reacuteguliegraverement que laquo le leacutegislateur peut
preacutevoir loctroi dune aide des collectiviteacutes publiques aux eacutetablissements denseignement
priveacutes selon la nature et limportance de leur contribution agrave laccomplissement de missions
denseignement raquo (CC ndeg93-329 DC du 13 janvier 1994)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
En deuxiegraveme lieu le principe de libre administration ne saurait justifier des
traitements diffeacuterencieacutes dans lrsquoexercice des droits et liberteacutes constitutionnels
En vertu de lrsquoarticle 72 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales srsquoadministrent
librement mais laquo dans les conditions preacutevues par la loi raquo De plus le Conseil constitutionnel
prend soin de preacuteciser que laquo si le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacutegislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce
que les conditions essentielles drsquoapplication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de
lrsquoenseignement deacutependent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas
ecirctre les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (CC ndeg 84-185 DC du 18 janvier 1985 CC
ndeg93-329 du 13 janvier 1994) Plus largement dans la deacutecision du 17 janvier 2002 (ndeg2001-
454 DC) le Conseil constitutionnel affirme que laquo le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales ne saurait conduire agrave ce que les conditions essentielles de mise en
oeuvre des liberteacutes publiques et par suite lensemble des garanties que celles-ci comportent
deacutependent des deacutecisions de collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre les mecircmes
sur lensemble du territoire de la Reacutepublique raquo
Or en lrsquoespegravece si les communes pouvaient librement participer au financement de la
scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous contrat
drsquoassociation lrsquoexercice de la liberteacute drsquoenseignement du principe drsquoeacutegaliteacute devant la loi et du
principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction deacutependrait de la seule volonteacute drsquoune collectiviteacute
territoriale ce que le Conseil constitutionnel condamne Degraves lors que la possibiliteacute drsquoun
enseignement en langue reacutegionale est offerte aux enfants les conditions drsquoaccegraves agrave cet
enseignement doivent pouvoir ecirctre effectives et eacutegales Loin de violer le principe drsquoeacutegaliteacute
devant la loi lrsquoarticle 6 de la proposition de loi en assure au contraire la garantie
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne transfert ni ne creacutee de
nouvelles compeacutetences
Srsquoagissant des ressources des collectiviteacutes locales permettant de leur assurer une libre
administration le quatriegraveme alineacutea de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution preacutevoit laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales srsquoaccompagne de
lrsquoattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consacreacutees agrave leur exercice Toute
creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour conseacutequence drsquoaugmenter les deacutepenses des
collectiviteacutes territoriales est accompagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Le Conseil
constitutionnel veille au respect de cette regravegle drsquoune part pour les transferts de compeacutetence
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales et drsquoautre part pour les creacuteations ou extensions de
compeacutetence des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece aucune creacuteation ou transfert de compeacutetence nrsquoest opeacutereacute au sens de
lrsquoarticle 72-2 de la Constitution Il srsquoagit drsquoune simple participation financiegravere agrave caractegravere
subsidiaire reacutesiduel et deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels comme
preacuteceacutedemment eacutevoqueacute (cf supra point 31) De plus le versement de la participation
financiegravere correspond en quelque sorte agrave un allegravegement de charge degraves lors que le coucirct de
lrsquoenfant scolariseacute est reporteacute sur une autre commune que la commune de reacutesidence En
conseacutequence lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne fait que modifier les modaliteacutes drsquoexercice
drsquoune compeacutetence sans en creacuteer ou transfeacuterer une nouvelle
Drsquoailleurs dans la deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 le Conseil
constitutionnel avait jugeacute inopeacuterant le grief tireacute de la violation des articles 72 et 72-2 de la
Constitution agrave propos de la version ancienne de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation en
jugeant que laquo la loi deacutefeacutereacutee nemporte ni creacuteation ni extension des compeacutetences en matiegravere de
contributions des communes aux frais de fonctionnement des classes eacuteleacutementaires des
eacutetablissements du premier degreacute priveacutes sous contrat dassociation que par suite le grief tireacute
de la meacuteconnaissance du principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales manque
en fait raquo
Le Conseil constitutionnel a statueacute dans le mecircme sens au sujet de lrsquoinstitution drsquoun
creacutedit drsquoimpocirct en matiegravere drsquoapprentissage ou de la possibiliteacute de modifier la dureacutee du contrat
drsquoapprentissage mecircme si ces mesures en rendant lrsquoapprentissage plus attrayant ont pour effet
drsquoaugmenter le nombre drsquoapprentis et donc drsquoaccroicirctre les charges des reacutegions dans ce
domaine (CC ndeg 2004-509 DC du 13 janvier 2005)
En quatriegraveme lieu le principe drsquoeacutegaliteacute entre les charges publiques est respecteacute
En effet en plus du caractegravere subsidiaire et reacutesiduel du meacutecanisme la participation
financiegravere preacutevue par lrsquoarticle 6 de la proposition de loi srsquoapplique agrave lrsquoensemble des
communes ne disposant pas drsquoun eacutetablissement dispensant un enseignement de langue
reacutegionale ce qui est coheacuterent au regard de lrsquoobjet de la loi Les critegraveres de la participation
financiegravere preacutevus par lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 sont en tout eacutetat de cause objectifs et
rationnels eacutetablis et mis en œuvre depuis plusieurs anneacutees Les garanties de lrsquoarticle 13 de la
DDHC sont donc respecteacutees
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
En cinquiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir du respect
de plusieurs normes constitutionnelles
En affirmant depuis 2008 que les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la
France lrsquoarticle 75-1 de la Constitution donne un ancrage constitutionnel au deacuteveloppement
de lrsquousage et de lrsquoenseignement des langues reacutegionales Or sans la participation financiegravere des
communes de reacutesidence agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat lrsquoenseignement des langues reacutegionales serait compromis Par
conseacutequent lrsquoarticle 6 de la proposition de loi constitue une garantie leacutegale du respect de
lrsquoaffirmation porteacutee par lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Le mecircme raisonnement sera tenu agrave propos de lrsquoensemble des principes constitutionnels
qui donnent une assise agrave lrsquousage et agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales la liberteacute
drsquoexpression et de communication (article 11 DDHC) la liberteacute drsquoenseignement (PFRLR)
dont pourrait deacutecouler une exigence en matiegravere de droit des parents de choisir les meacutethodes
eacuteducatives (CE 19 juillet 2017 Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150)
lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant (alineacutea 10 et 11 du Preacuteambule de 1946) le principe drsquoeacutegaliteacute
(article 6 DDHC) le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction (alineacutea 13 du Preacuteambule de 1946)
Sans lrsquoarticle 6 de la proposition de loi lrsquoeffectiviteacute de lrsquoensemble de ces normes
constitutionnelles serait consideacuterablement atteacutenueacutee et creacuteerait des diffeacuterences de traitement
injustifieacutees et deacutependantes de la volonteacute des communes
De plus lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir drsquoun objectif de
clarification et de seacutecurisation du droit applicable qui peut se rattacher agrave lrsquoarticle 16 de la
DDHC degraves lors que les textes jusqursquoagrave preacutesent applicables eacutetaient ambigus et ont donneacute lieu agrave
des contentieux En rendant obligatoire ce qui eacutetait avant une faculteacute pour autant soumise agrave
un rocircle non neacutegligeable du preacutefet lrsquoarticle 6 de la proposition de loi clarifie le droit
applicable Ainsi une deacuteputeacutee preacutecisait lors des deacutebats parlementaires que laquo lrsquoarticle 34 de la
loi pour une eacutecole de la confiance relatif au versement du forfait scolaire a susciteacute de
nombreux imbroglios administratifs Ainsi chez moi en Bretagne plus de 150 demandes de
meacutediation ont eacuteteacute transmises aux services de lrsquoEacutetat ce qui met en lumiegravere lrsquoambiguiumlteacute de la loi
et les difficulteacutes de son application Je soutiens donc fortement lrsquoarticle 2 quinquies [devenu
article 6] issu des travaux du Seacutenat qui legraveve toute incertitude raquo (Mme Claudia Rouaux
Commission des affaires sociales Assembleacutee nationale 31 mars 2021)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi creacutee un meacutecanisme subsidiaire et reacutesiduel dont laporteacutee est deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels Sans creacuteer ni transfeacutererde nouvelle compeacutetence aux communes cette disposition assure une mise en œuvreuniforme des droits et liberteacutes et peut se preacutevaloir de nombreuses normesconstitutionnelles confeacuterant agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales et agrave son soutienfinancier de solides justifications constitutionnelles
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 12 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 12 mai 2021
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure Mme Mastorpdf
Lettre Wanda Mastor accompagnant la porte eacutetroite
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure MSchellenberger et autrespdf
Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure assESKOLIL pdf
lettre daccompagnement CC
Porte eacutetroite loi langues reacutegionales (2)
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure M Bertrand Pancherpdf
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de territoires dans les-
quels ces langues sont pratiqueacutees porte atteinte aux principes constitu-
tionnels drsquoindivisibiliteacute de la Reacutepublique drsquoeacutegaliteacute devant la loi et drsquouniciteacute
du peuple franccedilais raquo12
Le Conseil se deacutefendant au passage de meacutepriser les langues reacutegionales parmi
les engagements souscrits par la France preacutecise-t-il laquo la plupart au demeu-
rant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France
en faveur des langues reacutegionales raquo
Parmi les arguments qui plaident en faveur drsquoune ratification figure celui de
lrsquoeacutevolution du contexte Honorer de la ratification un texte deacutejagrave signeacute ne se
pose aujourdrsquohui plus dans les mecircmes termes qursquoen 1999 La reacuteforme cons-
titutionnelle de 2003 - dont certains aspects ont eacuteteacute affineacutes en 2008 - rappe-
lons-le a consideacuterablement modifieacute la vision jacobine de notre Reacutepublique qui
reconnaicirct agrave preacutesent lrsquoexistence de laquo populations raquo en son sein les particula-
rismes locaux et les neacutecessiteacutes des adaptations normatives Mais la ratification
par la France de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires
qui avait eacuteteacute voteacutee le 28 janvier 2014 par lrsquoAssembleacutee nationale a eacuteteacute rejeteacutee
par le Seacutenat le 27 octobre 2015 Soulignons que ce rejet nrsquoempecircche pas la
force du contexte qui est au niveau europeacuteen largement favorable agrave la pro-
tection et promotion des langues reacutegionales La France a par ailleurs ratifieacute
drsquoautres conventions internationales qui permettent de poursuivre cet objec-
tif tel est par exemple le cas de la Convention pour la sauvegarde du patri-
moine culturel immateacuteriel de 2003 et de la Convention sur la protection et la
promotion de la diversiteacute des expressions culturelles de 2005 qui rappelle no-
tamment dans son preacuteambule laquo que la diversiteacute linguistique est un eacuteleacutement
fondamental de la diversiteacute culturelle raquo et reacuteaffirme laquo le rocircle fondamental que
joue lrsquoeacuteducation dans la protection et la promotion des expressions cultu-
relles raquo
12 Il srsquoagissait lagrave au demeurant drsquoune affirmation tregraves discutable car la lettre de la Charte
nrsquoimposait nullement mecircme si elle lrsquoencourageait que des droits speacutecifiques fussent reconnus agrave des groupes (voir Guy Carcassonne Rapport au Premier ministre sur la compatibiliteacute entre la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minoritaires et la Constitution septembre 1998
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Le droit compareacute apporte la preuve irreacutefutable de lrsquoabsence drsquoin-
compatibiliteacute entre le caractegravere indivisible voire unitaire drsquoune Reacutepublique
et la reconnaissance des langues reacutegionales en son sein13 Un tour drsquohorizon
des textes des constitutions europeacuteennes et des deacutecisions des cours constitu-
tionnelles permet de mettre en eacutevidence plusieurs eacuteleacutements significatifs Le
droit compareacute nous enseigne que juridiquement la question des langues srsquoap-
preacutehende agrave travers deux prismes premiegraverement celui de la forme de lrsquoEacutetat
Le lien entre uniteacute de lrsquoEacutetat et unilinguisme est aussi eacutevident que celui entre
Eacutetat composeacute (reacutegional ou feacutedeacuteral) et multilinguisme Deuxiegravemement celui des
droits des locuteurs Selon cette acception les langues reacutegionales sont tradi-
tionnellement associeacutees de maniegravere neacutegative au principe de non-discrimina-
tion de maniegravere positive aux droits linguistiques dont les locuteurs seraient
les beacuteneacuteficiaires14
En droit constitutionnel compareacute lrsquoameacutenagement de la pluraliteacute linguistique
diverge selon que les Eacutetats reconnaissent une pluri-officialiteacute sur lrsquoensemble
du territoire ou au seul niveau local La premiegravere hypothegravese est celle naturel-
lement choisie par la Belgique et la Suisse Eacutetats feacutedeacuteraux europeacuteens Selon
lrsquoarticle 4 de la Constitution helveacutetique laquo les langues nationales sont lrsquoalle-
mand le franccedilais lrsquoitalien et le romanche raquo De son cocircteacute la Constitution belge
eacutenonce que laquo la Belgique comprend trois communauteacutes la Communauteacute fran-
ccedilaise la Communauteacute flamande et la Communauteacute germanophone raquo et fait
eacutegalement reacutefeacuterence agrave laquo quatre reacutegions linguistiques la reacutegion de langue fran-
ccedilaise la reacutegion de langue neacuteerlandaise la reacutegion bilingue de Bruxelles-Capi-
tale et la reacutegion de langue allemande raquo En revanche lrsquoItalie et lrsquoEspagne ne
reconnaissent qursquoune seule langue officielle sur lrsquoensemble du territoire en
mecircme temps qursquoest ameacutenageacutee au niveau local la pluraliteacute linguistique Crsquoest
13 Voir Veacuteronique Bertile Langues reacutegionales ou minoritaires et Constitution France Espagne et Italie Bruylant Collection Droit public compareacute et europeacuteen 2008 516 p et Wanda Mas-
tor laquo Le statut constitutionnel des langues reacutegionales en droit compareacute De la reconnaissance agrave lrsquoindiffeacuterence raquo Glottopol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html 14 Voir le Rapport explicatif de de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minori-
taires Conseil de lrsquoEurope Seacuterie des Traiteacutes europeacuteens ndeg148 Strasbourg 5 novembre 1992 httpsrmcoeint16800cb620
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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ce second type drsquoameacutenagement qui est ici inteacuteressant agrave observer les Eacutetats
reacutegionaux italien15 et espagnol16 eacutetant qualifieacutees par leurs constitutions drsquoin-
divisibles (et mecircme eacutegalement laquo un raquo pour lrsquoItalie alors que le mot a disparu
de la Constitution franccedilaise)
De maniegravere scheacutematique plusieurs postures essentielles vis-agrave-vis des langues
reacutegionales peuvent ecirctre observeacutees dans lrsquoEurope contemporaine La majoriteacute
des pays voisins confegraverent aux langues reacutegionales des statuts juridiques dif-
feacuterencieacutes Coexistent parfois une langue majoritaire et des langues minori-
taires qui beacuteneacuteficient de mesures protectrices Dans ce cas les langues reacutegio-
nales jouissent drsquoune reconnaissance mais seulement au niveau drsquoun terri-
toire identifieacute Pour le dire autrement elles ne concurrencent pas la langue
majoritaire au niveau national Il ne srsquoagit ni plus ni moins que lrsquoexpression
drsquoun droit agrave la diffeacuterence Drsquoun droit agrave la diffeacuterenciation pour reprendre un
terme qui a actuellement les faveurs du gouvernement franccedilais Drsquoautres pays
ont mis en place le bilinguisme officiel qui peut srsquoexprimer dans plusieurs
variantes Ce statut confegravere aux citoyens en principe du moins le choix duti-
liser lune ou lautre des langues officielles dans leurs rapports avec lEacutetat
Cette co-officialiteacute peut srsquoopeacuterer au niveau de tout le territoire (comme en Bel-
gique et en Suisse par exemple) ou seulement sur une partie de celui-ci
(comme en Espagne ou en Italie)
On pourrait objecter que la comparaison avec lrsquoEspagne et lrsquoItalie deux Eacutetats
reacutegionaux nrsquoest pas pertinente Or ces deux Eacutetats sont qualifieacutes de Royaume
ou Reacutepublique indivisibles par leurs constitutions respectives indivisibiliteacute
qui nrsquoempecircche pas la reconnaissance la protection et la promotion des
langues reacutegionales en leur sein Ainsi la Constitution espagnole consacre clai-
rement le multilinguisme dans le cadre de ses communauteacutes autonomes17
15 Article 5 de la Constitution de la Reacutepublique italienne de 1947 laquo La Reacutepublique une et indivisible reconnaicirct et favorise les autonomies locales (hellip) raquo 16 Article 2 de la Constitution du Royaume drsquoEspagne de 1978 laquo La Constitution est fondeacutee
sur luniteacute indissoluble de la nation espagnole patrie commune et indivisible de tous les Es-
pagnols Elle reconnaicirct et garantit le droit agrave lautonomie des nationaliteacutes et des reacutegions qui la
composent et la solidariteacute entre elles raquo 17 En vertu de lrsquoarticle 3 de la Constitution espagnole
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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tout comme lrsquoItalie laquo Reacutepublique une et indivisible raquo laquo protegravege par des mesures
particuliegraveres les minoriteacutes linguistiques raquo (article 6)
Cette rapide eacutetude comparative permet de mettre en eacutevidence la singulariteacute de
la France au sein drsquoune Europe qui srsquoenorgueillit de se deacutefinir agrave travers la
richesse de sa diversiteacute Mais notamment depuis la loi constitutionnelle de
2008 le leacutegislateur franccedilais a agi dans le sens drsquoune protection et promotion
des langues reacutegionales la loi du 8 avril 2021 srsquoinscrivant dans ce processus
logique et coheacuterent
C Le contexte parlementaire franccedilais
La loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit donc dans un mouvement leacutegislatif reacutepondant agrave
lrsquoadresse du pouvoir constituant Laquelle concerne aussi le pouvoir exeacutecutif
La politique du ministegravere de lrsquoeacuteducation pour la deacutetermination du nombre de
places pour lrsquoagreacutegation et le CAPES des langues reacutegionales devrait aller de
pair avec les lois qui mettent en œuvre lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Ainsi
pour la langue basque il nrsquoy a pas eu de concours drsquoagreacutegation externe depuis
2018 anneacutee 2021 comprise il y a un seul poste pour lrsquoagreacutegation interne en
2021 2 pour le CAPES externe en 2021 et 2 pour le CAPES interne Pour la
langue bretonne et pour ne citer que lrsquoanneacutee en cours il y a un poste agrave lrsquoagreacute-
gation externe pas de concours pour lrsquoagreacutegation interne deux postes pour
le CAPES externe et 2 pour le CAPES interne Pour la langue corse il nrsquoy a pas
de concours cette anneacutee pour lrsquoagreacutegation externe et interne deux pour le
CAPES externe et aucun pour le CAPES interne Pour lrsquooccitan toujours pour
2021 il y a un poste pour lrsquoagreacutegation externe pas de concours pour lrsquoagreacute-
gation interne quatre pour le CAPES externe et un pour le CAPES interne
Ceci eacutetant juste preacuteciseacute il faut agrave preacutesent se concentrer sur lrsquoaction parlemen-
taire de mise en œuvre des dispositions de la Constitution
laquo 1 Le castillan est la langue espagnole officielle de lEacutetat Tous les Espagnols ont le devoir de
le connaicirctre et le droit de lutiliser
2 Les autres langues espagnoles sont aussi officielles dans leurs communauteacutes autonomes
respectives conformeacutement agrave leurs statuts
3 La richesse de la diversiteacute linguistique de lEspagne est un patrimoine culturel qui fait lobjet dun respect et dune protection speacuteciales raquo
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Videacutee drsquoune large part de sa substance en premiegravere lecture par la commission
des affaires culturelles et de leacuteducation de lrsquoAssembleacutee nationale la proposi-
tion de loi du deacuteputeacute Molac a ensuite retrouveacute ses objectifs initiaux gracircce agrave la
proceacutedure parlementaire qui donne agrave notre reacutegime repreacutesentatif tout son
sens discussions en commissions deacutebats en seacuteances publiques navette
amendements multiples pour parvenir agrave une adoption deacutefinitive agrave une majo-
riteacute non importante mais eacutecrasante des voix Agrave quelques heures de la pro-
mulgation de la loi par le Preacutesident de la Reacutepublique une partie de cette mecircme
majoriteacute a neacuteanmoins saisi le Conseil constitutionnel dans le cadre de lrsquoarticle
61 alineacutea 2 de la Constitution
Deacutepocirct de la proposition de loi
Deacuteposeacutee le 30 deacutecembre 2019 par le deacuteputeacute Paul Molac et autres deacuteputeacutes18
la proposition de loi apporte des mesures de protection et de promotion des
langues reacutegionales dans trois domaines le patrimoine lrsquoenseignement les
services publics via la signaleacutetique et les actes drsquoeacutetat civil Elle a eacuteteacute adopteacutee
le 8 avril 2021 par 247 voix pour 76 voix contre et 19 abstentions au terme
de la proceacutedure ci-dessous rappeleacutee
Renvoi agrave la commission des affaires culturelles et de leacuteducation
La proposition de loi a eacuteteacute renvoyeacutee agrave la commission des affaires cultu-
relles et de leacuteducation agrave deacutefaut de constitution drsquoune commission speacuteciale
dans les deacutelais preacutevus par les articles 30 et 31 du Regraveglement Le rapport fait
au nom de la commission par le deacuteputeacute Paul Molac nommeacute par elle a eacuteteacute
enregistreacute agrave la preacutesidence de lrsquoAssembleacutee nationale le 5 feacutevrier 2020 Preacutesenteacute
18 Sylvain BRIAL Jean-Feacutelix ACQUAVIVA Michel CASTELLANI Jean-Michel CLEacuteMENT
Paul-Andreacute COLOMBANI Charles de COURSON Jeanine DUBIEacute Freacutedeacuterique DUMAS Mrsquojid
EL GUERRAB Olivier FALORNI Yannick FAVENNEC BECOT Sandrine JOSSO Franccedilois-Mi-
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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comme un moyen de deacutefendre les laquo langues de France raquo19 en danger et srsquoap-
puyant sur lrsquoexistant qui est la marque drsquoune eacutevolution rappeleacutee plus loin (II)
le texte entend laquo aller plus loin raquo en rehaussant la protection lrsquoaccessibiliteacute et
la visibiliteacute des langues reacutegionales dans les trois domaines preacuteciteacutes
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle premier re-
latif au patrimoine Ce dernier preacutecise en compleacutetant ainsi lrsquoar-
ticle L 1 du code du patrimoine que la conservation et la con-
naissance du patrimoine immateacuteriel sont drsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et que
les langues reacutegionales font partie de ce patrimoine
o La commission a adopteacute sans modifications lrsquoarticle 2 qui pro-
pose drsquoinclure parmi les treacutesors nationaux les biens preacutesentant
un inteacuterecirct majeur pour la connaissance des langues franccedilaise et
reacutegionales Le texte preacutevoit en effet outre pour les langues reacutegio-
nales des mesures de protection de notre patrimoine linguistique
dans une deacutemarche globale
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 3 qui disposait que des con-
ventions passeacutees entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pouvaient preacutevoir que
la langue reacutegionale est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de
lrsquohoraire normal des enseignements (des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires des collegraveges et des lyceacutees des territoires concerneacutes) Il
ne srsquoagissait pourtant que drsquoeacutetendre une regravegle deacutejagrave applicable en
Corse pour lrsquoenseignement de la langue corse lrsquoarticle L 312-11-
1 du code de lrsquoeacuteducation introduit par la loi ndeg 2002-92 du
22 janvier 2002 relative agrave la Corse dispose en effet que la langue
corse est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de lrsquohoraire normal
des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires de Corse Le Conseil cons-
titutionnel nrsquoa pas censureacute cette disposition tant que lrsquoenseigne-
ment eacutetait entendu comme ne revecirctant pas laquo un caractegravere obliga-
toire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo (deacutecision ndeg2001-
454 DC du 17 janvier 2002)
19 Sur cette notion de laquo langues de France raquo voir Les langues de France vingt ans apregraves Glot-topol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 4 qui preacutevoyait que lenseigne-
ment bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale pouvait se reacuteali-
ser sous forme immersive laquo dans le respect des objectifs de maicirc-
trise des deux langues agrave chaque niveau denseignement raquo
o La commission a supprimeacute les articles 5 et 6 de la proposition de
loi Le premier manifestait la volonteacute drsquointroduire au sein drsquoun
nouvel article L 151-4-1 du code de lrsquoeacuteducation une deacuterogation
au principe drsquointerdiction de financement des deacutepenses drsquoinves-
tissement des eacutecoles priveacutees par les collectiviteacutes publiques en fa-
veur de lrsquoenseignement bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale
(article 5 de la proposition de loi) Le second eacutetendait la mecircme
deacuterogation au principe drsquointerdiction de financement des deacute-
penses drsquoinvestissement des collegraveges et lyceacutees par les collectiviteacutes
publiques
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 7 qui preacutevoyait drsquoeacutelargir les
cas dans lesquels existe un droit agrave inscrire son enfant dans une
eacutecole drsquoune autre commune afin qursquoil puisse suivre un enseigne-
ment de langue reacutegionale Inscription qui entraicircnait eacutegalement la
prise en charge du forfait scolaire par la commune de reacutesidence
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle 8 qui a pour
objet de renforcer la place et lrsquousage des langues reacutegionales dans
la vie publique en facilitant la traduction en langue reacutegionale des
inscriptions et signaleacutetiques apposeacutees sur les bacirctiments publics
les voies publiques de circulation et les voies navigables ainsi que
sur les principaux supports de communication institutionnelle
des services publics
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 9 qui avait pour objet la pos-
sibiliteacute pour les services publics drsquoeacutetat civil drsquoutiliser dans les
actes drsquoeacutetat civil qursquoils produisent les signes diacritiques des
langues reacutegionales en usage sur le territoire
o Enfin la commission a eacutegalement supprimeacute lrsquoarticle 10 qui preacute-
voyait un gage pour compenser les charges eacuteventuelles creacuteeacutees par
les dispositions de la proposition de loi
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Crsquoest donc un texte largement laquo eacutepureacute raquo par rapport agrave sa version initiale qui a
eacuteteacute soumis agrave la discussion en seacuteance publique en premiegravere lecture agrave lrsquoAssem-
bleacutee nationale Le porteur de la proposition va naturellement utiliser toutes
les potentialiteacutes offertes par la Constitution pour tenter de revenir par le biais
des amendements agrave son esprit initial
Discussion du texte nordm2654 adopteacute par la commission sur la proposition
de loi de M Paul Molac agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion (2548)
85 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes permettant de revenir sur peu de points
cependant agrave lrsquoobjectif initial de la proposition de loi Ainsi lrsquoamendement ndeg64
deacuteposeacute le 10 feacutevrier 2020 par le deacuteputeacute et rapporteur Paul Molac a permis de
rectifier lrsquoaspect purement deacuteclaratoire de lrsquoarticle premier auquel avait conclu
la commission lrsquoamendement ndeg69 deacuteposeacute le mecircme jour par Paul Molac eacutega-
lement permet lrsquoautorisation dans les actes drsquoeacutetat civil des signes diacritiques
des langues reacutegionales lrsquoamendement ndeg80 toujours deacuteposeacute par Paul Molac
modifie la loi Toubon (article 3 du texte de loi deacutefinitif) Mais agrave ce stade de la
discussion parlementaire le texte eacutetait encore dans une version tregraves eacuteloigneacutee
de sa mouture premiegravere
Adoption le 13 feacutevrier 2020 de la laquo petite loi raquo nordm408 par lAssem-
bleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion
Transmission au Seacutenat de la proposition de loi ndeg321 le 14 feacutevrier
2020
o Travaux en commission La commission de la culture de lrsquoeacuteduca-
tion et de la communication a deacutesigneacute Mme Monique de Marco
rapporteure sur la proposition de loi ndeg321 (2019-2020) adopteacutee
par lAssembleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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des langues reacutegionales et agrave leur promotion Commenccedilant par deacute-
clarer que laquo la question de la promotion des langues reacutegionales
deacutepasse les clivages politiques raquo Monique de Marco a proposeacute en
commission dadopter le texte conforme tout en avouant que des
dispositifs leacutegislatifs laquo plus ambitieux pourraient mieux assurer la
promotion des langues reacutegionales raquo Au cours des discussions le
regret de lrsquoabsence de la question de lrsquoenseignement a eacuteteacute exprimeacute
regret qui concerne en reacutealiteacute non la proposition de loi initiale
mais le texte de la commission de lrsquoAssembleacutee nationale laquo La pro-
position de loi de Paul Molac est la bienvenue parce quelle rap-
pelle agrave lEacutetat un certain nombre de ses obligations en ce quelle
preacutevoit un cadrage de la loi Toubon et quelle seacutecurise la place
des langues dans lespace public En revanche nous avons tous
eacuteteacute surpris par labsence totale de reacutefeacuterence agrave lEacuteducation natio-
nale Nous avons donc fait des recherches qui ont montreacute que les
deacuteputeacutes de la majoriteacute preacutesidentielle certainement agrave lappel du
ministre de leacuteducation nationale avaient systeacutematiquement sup-
primeacute tous les articles concernant lenseignement Nous nous re-
trouvons donc avec une magnifique proposition de loi sur les
langues reacutegionales qui ne dit pas un mot de lenseignement
comme sil pouvait y avoir une politique linguistique en faveur des
langues reacutegionales qui ne passe pas par lenseignement raquo Et le
seacutenateur Max Brisson drsquoen appeler agrave la reacuteinsertion des disposi-
tions sur lrsquoenseignement laquo Ma chegravere collegravegue vous avez proposeacute
un vote conforme mais jespegravere que nous ferons preuve dimagi-
nation dans lheacutemicycle pour deacuteposer quelques amendements qui
rappelleront au Gouvernement quil ny a pas de politique linguis-
tique qui ne sappuie sur leacuteducation Sinon cest de lenfu-
mage raquo20
20 Comptes-rendus de la commission de la culture de lrsquoeacuteducation et de la communication
seacuteance du 2 deacutecembre 2020 httpwwwsenatfrcompte-rendu-commis-
sions20201130culturehtmltoc5
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La rapporteure confirme que laquo lrsquoamputation raquo est le fait des deacutepu-
teacutes et tout en srsquoavouant prudente pousse indirectement ses col-
legravegues seacutenateurs agrave user du droit drsquoamendement laquo Nous venons
dentendre un veacuteritable plaidoyer en faveur des langues reacutegio-
nales Mecircme si cette proposition de loi ne donne pas entiegravere satis-
faction car elle a eacuteteacute largement amputeacutee par lAssembleacutee natio-
nale je preacutefegravere my tenir dans un premier temps par prudence
Et libres agrave vous de deacuteposer des amendements raquo
Aucun amendement nayant eacuteteacute deacuteposeacute en commission le texte
qui en eacutetait issu ne comportait toujours pas de dispositions rela-
tives agrave lenseignement
o Seacuteance publique Vingt amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes notam-
ment celui (deacuteposeacute agrave lidentique par des seacutenateurs issus de six
groupes diffeacuterents) preacutevoyant drsquoinseacuterer agrave lrsquoarticle L 442-5-1 du
code de lrsquoeacuteducation un alineacutea ainsi reacutedigeacute laquo La participation fi-
nanciegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un
enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle
L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence
et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune
autre commune agrave la condition que la commune de reacutesidence ne
dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegio-
nale raquo
Sans surprise lrsquoavis du Gouvernement exprimeacute par le ministre
Jean-Michel Blanquer fut deacutefavorable regrettant au passage
laquo drsquoecirctre sans cesse obligeacute drsquooccuper la position du jacobin reacutetif
sur la deacutefensive alors mecircme que nous avons une politique de pro-
motion des langues reacutegionales Simplement agrave certains moments
ndash par exemple avec la rupture de lrsquoeacutequilibre entre enseignement
public et enseignement priveacute ou avec la creacuteation drsquoune obligation
suppleacutementaire pour les communes ndash les propositions vont trop
loin et cela conduit agrave me placer face aux geacuteneacuterositeacutes diverses
dans la position deacutesagreacuteable du gardien des principes ou dans
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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celle du gardien de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral En effet derriegravere ces deacutebats
se pose la question de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et de la posteacuteriteacute de la loi
Carle car vous risquez de creacuteer un deacuteseacutequilibre alors que cette loi
repreacutesentait un point drsquoeacutequilibre raquo21
o Adoption du texte ndeg32 modifieacute par le Seacutenat le 10 deacutecembre 2020
Le Seacutenat a adopteacute trois articles additionnels (2 ter 2 quater et
2 quinquies) qui rejoignent les positions du deacuteputeacute Paul Molac et
reacutetablit lrsquoarticle 3 (modifieacute) de la proposition de loi qui avait eacuteteacute
supprimeacute en premiegravere lecture agrave lrsquoAssembleacutee nationale
Deuxiegraveme lecture
o Rapport sur la proposition de loi modifieacutee par le Seacutenat relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promo-
tion (ndeg3658) ndeg4035 Sur les six articles supprimeacutes agrave lrsquoAssem-
bleacutee lrsquoarticle 3 a eacuteteacute reacutetabli au Seacutenat qui a par ailleurs adopteacute
trois articles additionnels (2 ter 2 quater et 2 quinquies) Lrsquoen-
semble eacutetant conforme agrave lrsquoesprit de la proposition de loi initiale le
rapporteur souhaite que lrsquoAssembleacutee nationale adopte en deu-
xiegraveme lecture un texte identique agrave celui voteacute par le Seacutenat pour
les quatre articles restant en discussion et nrsquoa donc pas preacutesenteacute
drsquoamendements Mais lrsquoarticle 2 quinquies (article 6 du texte deacute-
finitif) ayant eacuteteacute supprimeacute en commission 16 amendements deacute-
poseacutes agrave lrsquoidentique par 115 deacuteputeacutes membres de huit diffeacuterents
groupes parlementaires ont permis de le reacuteintroduire en seacuteance
o Discussion en seacuteance publique le 8 avril 2021 au cours de la-
quelle 262 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes
o Adoption deacutefinitive le 8 avril 2021 en deuxiegraveme lecture de la
proposition de loi TA nordm591 relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
21 Compte rendu inteacutegral des deacutebats Seacuteance du 10 deacutecembre 2020 httpwwwse-natfrseancess202012s20201210s20201210007htmlsection708
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Saisine du Conseil constitutionnel du 22 avril 2021 par au moins
soixante deacuteputeacutes en application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitu-
tion
Soit un jour avant que nrsquoexpire le deacutelai de saisine du Conseil constitu-
tionnel la promulgation de la loi par le preacutesident de la Reacutepublique devant
intervenir dans les 15 jours de lrsquoadoption deacutefinitive La saisine du Conseil
constitutionnel est un acte non grave mais solennel qui perturbe le temps
leacutegislatif ne serait-ce que pour cette raison elle meacuterite un soin particulier
Soin envers lrsquoinstitution agrave laquelle elle srsquoadresse et agrave qui elle impose des
charges suppleacutementaires soin envers la Constitution qursquoelle entend pro-
teacuteger La lettre de saisine ou du moins la version qui a circuleacute manifeste-
ment reacutedigeacutee agrave la hacircte nrsquoest pas agrave la hauteur du seacuterieux qursquoexige de ma-
niegravere impeacuterieuse cette deacutemarche Une lettre de saisine ne saurait se limiter
agrave invoquer en tregraves peu de lignes la violation de laquo principes constitutionnels raquo
sans que ceux-ci ne soient deacutetailleacutes ni mecircme indiqueacutes Le seul article mis
en cause est lrsquoarticle 6 de la loi qui modifie lrsquoarticle L 442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation
II Discussion de la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la loi
relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Les deacuteputeacutes auteurs de la saisine demandent au Conseil constitutionnel la
censure de lrsquoarticle 6 de la loi
laquo Les sixiegraveme et septiegraveme alineacuteas de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacutedu-
cation sont remplaceacutes par un alineacutea ainsi reacutedigeacute
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacuteta-
blissements priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispen-
sant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L
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312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacuteta-
blissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune
agrave la condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dis-
pensant un enseignement de langue reacutegionale raquo
Une commune dont aucune eacutecole ne propose denseignement de langue reacutegio-
nale devrait donc participer aux frais de scolarisation des enfants domicilieacutes
sur son territoire qui suivent un tel enseignement dans un eacutetablissement situeacute
sur une autre commune Le dispositif concerne les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat drsquoassociation qui sont dans les faits majoritaire-
ment associatifs et laiumlques Cet enseignement peut aussi concerner les eacuteta-
blissements confessionnels mais il faut drsquoembleacutee preacuteciser que comme lrsquoa jugeacute
le Conseil constitutionnel dans son examen de la loi dite laquo Carle raquo le principe
de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute pour le leacutegislateur de preacutevoir la
participation des collectiviteacutes publiques au financement du fonctionnement
des eacutetablissements denseignement priveacute sous contrat dassociation
laquo Consideacuterant quil reacutesulte des regravegles ou principes agrave valeur constitution-
nelle (hellip) que le principe de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute
pour le leacutegislateur de preacutevoir sous reacuteserve de fonder son appreacuteciation
sur des critegraveres objectifs et rationnels la participation des collectiviteacutes
publiques au financement du fonctionnement des eacutetablissements den-
seignement priveacutes sous contrat dassociation selon la nature et limpor-
tance de leur contribution agrave laccomplissement de missions denseigne-
ment raquo (deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 cons 6)
Lrsquoinstauration du laquo forfait scolaire communal raquo ne poursuit pas un objectif de
sanction financiegravere des communes deacutemunies doffre en langue reacutegionale mais
celui de les inciter agrave en proposer Drsquoailleurs lrsquoarticle premier de la loi deacutefeacutereacutee
souligne que laquo LrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales concourent agrave lrsquoenseigne-
ment agrave la diffusion et agrave la promotion de ces langues raquo Comme preacuteciseacute plus
loin les maires sont dispenseacutes du paiement drsquoun tel forfait degraves lors qursquoun
enseignement drsquoune langue reacutegionale y compris au titre drsquoune simple initia-
tion est proposeacute dans leur commune
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Il faut souligner que les articles relatifs agrave lrsquoenseignement ont eacuteteacute introduits par
les seacutenateurs Plus exactement ces derniers ont reacuteintroduit la disposition qui
autorise la conclusion de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pour eacutetendre
lrsquooffre drsquoenseignement en langue reacutegionale aux eacutetablissements publics dans le
cadre horaire normal sous des formes speacutecifiques et inseacutereacute trois articles un
premier autorise lrsquoenseignement dit laquo immersif raquo en langue reacutegionale un deu-
xiegraveme le forfait scolaire communal dont il est ici question un troisiegraveme est
relatif agrave lenseignement des langues reacutegionales agrave Mayotte territoire qui du fait
de sa deacutepartementalisation reacutecente ne pouvait jusqualors pas beacuteneacuteficier des
possibiliteacutes offertes aux autres deacutepartements concernant lenseignement de
ces langues
Trois remarques doivent ecirctre faites sur lrsquoinsertion relative agrave lrsquoenseignement des
langues reacutegionales lors des horaires normaux Premiegraverement cette disposition
existe deacutejagrave pour la Collectiviteacute de Corse deuxiegravemement cet enseignement
doit se faire moyennant un accord entre lrsquoEacutetat et les reacutegions (laquo dans le cadre
de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions la collectiviteacute de Corse la Collectiviteacute
europeacuteenne drsquoAlsace ou les collectiviteacutes territoriales reacutegies par lrsquoarticle 73 de
la Constitution raquo) troisiegravemement il srsquoagit drsquoune option facultative qursquoin fine
les familles deacutecident ou non de prendre
En reacutesumeacute et conclusion la disposition de lrsquoarticle 3
1 Existe deacutejagrave pour une collectiviteacute en lrsquooccurrence la collectiviteacute de Corse
2 Est strictement encadreacutee (existence drsquoun accord entre lrsquoEacutetat et les reacute-
gions)
3 Est conforme agrave la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le ca-
ractegravere facultatif de lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale Dans sa deacute-
cision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi relative agrave la Corse le
Conseil constitutionnel a fixeacute le cadre de lrsquoenseignement drsquoune langue
reacutegionale dans le cadre de lrsquohoraire normal en consideacuterant que laquo si lrsquoen-
seignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquohoraire nor-
mal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir pour
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les ensei-
gnants qursquoil ne saurait non plus avoir pour effet de soustraire les eacutelegraveves
aux droits et obligations applicables agrave lrsquoensemble des usagers des eacuteta-
blissements qui assurent le service public de lrsquoenseignement ou sont
associeacutes agrave celui‑ci Consideacuterant qursquoil reacutesulte de ce qui preacutecegravede que sous
reacuteserve que lrsquoenseignement de la langue corse revecircte tant dans son prin-
cipe que dans ses modaliteacutes de mise en œuvre un caractegravere facultatif
[cette disposition] nrsquoest contraire ni au principe drsquoeacutegaliteacute ni agrave aucun
autre principe ou regravegle de valeur constitutionnelle raquo (cons 24 et 25)
La loi du 8 avril 2021 ne propose pas autre chose et srsquoinscrit en tous
points sur cette ligne deacutejagrave jugeacutee par le Conseil constitutionnel
Lrsquoarticle 6 srsquoinsegravere de maniegravere logique et coheacuterente dans lrsquoensemble des articles
de la loi relative agrave lrsquoenseignement Avant drsquoen examiner dans les deacutetails la
conformiteacute agrave la Constitution il faut souligner que le Seacutenat a deacutejagrave voteacute le prin-
cipe de ce forfait scolaire communal agrave deux reprises
1 Il lrsquoa drsquoabord inseacutereacute dans le projet de loi pour une eacutecole de la confiance
en premiegravere lecture Crsquoest la commission mixte paritaire qui a ajouteacute les
mots laquo contribution volontaire raquo ocirctant au forfait son caractegravere obliga-
toire22
2 Il a reacuteaffirmeacute sa position lors de lrsquoexamen de la proposition de loi ici
discuteacutee supprimant les mots laquo contribution volontaire raquo de la loi en vi-
gueur
Agrave cet argument deacutemocratique respectueux du bicameacuteralisme et rappelant que
le Seacutenat laquo assure la repreacutesentation des collectiviteacutes territoriales de la Reacutepu-
22 Loi ndeg2019-791 du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance JORF ndeg0174 du 28 juillet
2019
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Primo cet article est en coheacuterence avec la leacutegislation existante en matiegravere drsquoen-
seignement des langues reacutegionales agrave lrsquoeacutecole confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute
juridique (A) Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contrevien-
nent pas au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des langues
reacutegionales affirmeacute par le Conseil constitutionnel (B) Tertio la loi ne porte pas
atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur une commune une nouvelle
charge (C) Quarto elle ne viole pas non plus en conseacutequence le principe de
libre administration des collectiviteacutes territoriales (D)
A Forfait scolaire communal et respect de lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique
Cette exigence bien que non explicitement qualifieacutee de principe consti-
tutionnel par le Conseil constitutionnel se rattache notamment agrave la notion de
laquo garantie des droits raquo inscrite agrave lrsquoarticle 16 de la Deacuteclaration de 1789 laquo Toute
socieacuteteacute dans laquelle la garantie des droits nrsquoest pas assureacutee ni la seacuteparation
des pouvoirs deacutetermineacutee nrsquoa point de constitution raquo Deacutecoulant de lrsquoarticle 34
de la Constitution la clarteacute de la loi est un eacuteleacutement essentiel de la seacutecuriteacute
juridique agrave laquelle la jurisprudence du Conseil constitutionnel a offert corps
et protection Aussi le principe de laccessibiliteacute et de lintelligibiliteacute de la loi a-
t-il eacuteteacute eacuterigeacute en objectif de valeur constitutionnelle (deacutecision ndeg99-421 DC du
16 deacutecembre 1999)
Mecircme si les principes de clarteacute drsquoaccessibiliteacute et drsquointelligibiliteacute de la loi per-
mettent avant tout drsquoimposer au leacutegislateur laquo drsquoadopter des dispositions suffi-
samment preacutecises et des formules non eacutequivoques afin de preacutemunir les sujets
de droit contre une interpreacutetation contraire agrave la Constitution ou contre le
risque drsquoarbitraire raquo (deacutecision ndeg2004-500 DC du 29 juillet 2004 cons 13) ils
concourent aussi agrave offrir aux citoyens la seacutecuriteacute juridique neacutee drsquoune cons-
truction drsquoensemble coheacuterente et sans rupture Laquelle se base depuis 2008
sur une disposition claire et sans ambiguiumlteacute de la Constitution laquo Les langues
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo (75-1) Elle est une in-
vitation aux repreacutesentants de leacutegifeacuterer pour proteacuteger et promouvoir lesdites
langues et la loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit dans la continuiteacute de ce qursquoils ont fait depuis
2008 notamment La coheacuterence est lrsquoune des artegraveres essentielles de lrsquoexigence
de seacutecuriteacute juridique qui impregravegne la jurisprudence du Conseil constitution-
nelle comme celle du Conseil drsquoEacutetat et de la Cour de cassation Sans ecirctre ex-
plicitement eacutenonceacutee par le Conseil constitutionnel lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique est laquo efficiente raquo23 et est au cœur des preacuteoccupations des juges24 comme
de la doctrine Les Cahiers du Conseil constitutionnel lui consacrant un dossier
speacutecial dans sa livraison drsquooctobre 202025
La loi soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel reacutepond agrave lrsquoexigence de
seacutecuriteacute juridique en eacutetant le prolongement de lrsquoœuvre anteacuterieure du leacutegisla-
teur pour commencer la loi du 8 juillet 2013 drsquoorientation et de programma-
tion pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique qui reconnaicirct lrsquoenseigne-
ment bilingue franccedilais langue reacutegionale Dans lrsquoannexe de la loi figurent cinq
mentions compleacutementaires notamment celle concernant la possibiliteacute de
srsquoinscrire dans une eacutecole publique drsquoune autre commune lorsque la commune
de reacutesidence ne propose pas drsquoenseignement de langue reacutegionale Disposition
deacuteclarative qui a trouveacute une application concregravete dans la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) la parti-
cipation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes dans lrsquoenseigne-
ment public doit deacutesormais faire lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune drsquoac-
cueil et la commune de reacutesidence26
La loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle a
ajouteacute un nouveau motif de discrimination baseacute sur laquo la maitrise drsquoune autre
23 Bertrand Mathieu laquo La seacutecuriteacute juridique un principe clandestin mais efficient raquo Droit constitutionnel Meacutelanges Patrice Geacutelard LGDJ 1999 pp 301-305 24 En teacutemoigne notamment le fait que le Conseil drsquoEacutetat lui ait consacreacute deux rapports annuels celui de 1991 De la seacutecuriteacute juridique et celui de 2006 Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit 25 Dossier La seacutecuriteacute juridique Titre VII Les Cahiers du Conseil constitutionnel ndeg5 octobre
2020 26 Lrsquoarticle 104 de la loi NOTRe consacre par ailleurs la compeacutetence partageacutee des collectiviteacutes
locales dans la promotion des langues reacutegionales tout en donnant une place preacutepondeacuterante
agrave la reacutegion telle que preacutevue agrave lrsquoarticle 1er de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de lrsquoaction publique territoriale et drsquoaffirmation des meacutetropoles (MAPTAM)
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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langue que le franccedilais raquo qui concerne eacutegalement les langues reacutegionales Celle
du 28 feacutevrier 2017 de programmation relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend
inopeacuterant le deacutecret du 2 Thermidor an II sur lequel se basait notamment le
ministegravere de la justice pour interdire les livrets de famille bilingues Enfin
lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance vient eacutetendre
aux eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives une laquo contribution volontaire raquo
des communes pour la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoins-
crivant dans une eacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionale en
dehors de sa commune de reacutesidence
La loi du 8 avril 2021 soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel nrsquoest que
le prolongement et le compleacutement de lrsquoarticle L 212-8 du Code de lrsquoeacuteducation
qui preacutecise les conditions dans lesquelles pour lrsquoenseignement public une
commune doit contribuer au financement des deacutepenses scolaires drsquoun enfant
reacutesidant sur son territoire et scolariseacute dans une autre commune Elle vient le
compleacuteter de maniegravere parallegravele eacutetendant ce qui existe deacutejagrave pour lrsquoeacutecole pu-
blique agrave lrsquoeacutecole priveacutee sous contrat Confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
elle ne viole par ailleurs aucun article de la Constitution et ne contredit pas
la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le caractegravere facultatif de lrsquoen-
seignement des langues reacutegionales
B Forfait scolaire communal et respect de la jurisprudence du Conseil
constitutionnel sur la langue franccedilaise
Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contreviennent pas
agrave lrsquoarticle 2 alineacutea premier de la Constitution (laquo La langue de la Reacutepublique est
le Franccedilais raquo) et au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des
langues reacutegionales qui en deacutecoule affirmeacute par le Conseil constitutionnel La
langue de la Reacutepublique est et demeure le Franccedilais et agrave aucun moment la
loi du 8 avril 2021 nrsquoentend y porter atteinte Lrsquoapprentissage des langues reacute-
gionales se fait agrave ses cocircteacutes mais dans une mesure permettant leffectiviteacute pour
les enfants agrave acceacuteder agrave lenseignement des langues reacutegionales laquo patrimoine de
la France raquo selon les termes de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Apprentissage
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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qui pour certains enfants est lrsquoun des eacuteleacutements de leur laquo deacuteveloppement raquo au
sens de lrsquoalineacutea 10 du Preacuteambule de la Constitution du 27 octobre 1946 (laquo La
Nation assure agrave lrsquoindividu et agrave la familles les conditions neacutecessaires agrave leur
deacuteveloppement raquo)
Ce que creacutee lrsquoarticle 6 agrave travers le forfait ce nrsquoest pas lrsquoenseignement obligatoire
de la langue reacutegionale mais la possibiliteacute de pouvoir beacuteneacuteficier de cet enseigne-
ment (sans prescription de deacutelai) qui demeure facultatif Le rapporteur Paul
Molac le reacuteaffirme au cours de la seacuteance publique du 8 avril 2021 laquo Je ne
suis pas favorable au caractegravere obligatoire de cet enseignement mais je consi-
degravere que tout eacutelegraveve qui souhaite le suivre doit pouvoir le faire raquo27
Ce faisant la loi sans contrevenir agrave la Constitution offre un contenu agrave son
article 75-1 La jurisprudence du Conseil constitutionnel en vertu de laquelle
lrsquoenseignement des langues reacutegionales nrsquoa qursquoun caractegravere facultatif nrsquoest ici
absolument pas remise en cause Dans sa deacutecision ndeg99-412 DC du 15 juin
1999 il a souligneacute que le principe drsquouniciteacute du peuple franccedilais et lrsquoindivisibiliteacute
de la Reacutepublique assurant lrsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi srsquoopposaient agrave laquo
ce que soient reconnus des droits collectifs agrave quelque groupe que ce soit deacutefini
par une communauteacute drsquoorigine de culture de langue ou de croyance raquo En
outre la langue de la Reacutepublique eacutetant le franccedilais il ne peut ecirctre reconnu un
laquo droit agrave pratiquer une langue autre que le franccedilais non seulement dans la vie
priveacutee mais eacutegalement dans la vie publique agrave laquelle la Charte rattache
la justice et les autoriteacutes administratives et services publics raquo
Deux remarques srsquoimposent drsquoembleacutee drsquoune part cette jurisprudence est an-
teacuterieure agrave lrsquoinsertion en 2008 par le pouvoir constituant de lrsquoarticle 75-1 dis-
posant que laquo les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France
raquo Cette remarque drsquoordre contextuel vient srsquoajouter agrave la suivante drsquoautre part
27 Assembleacutee nationale XVe leacutegislature Session ordinaire de 2020-2021 Seacuteance du jeudi 08
avril 2021 httpswwwassemblee-nationalefrdyn15comptes-rendusseancesession-
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
27
la loi du 8 avril 2021 nrsquoentend pas confier agrave lrsquoenseignement des langues reacutegio-
nales un caractegravere obligatoire En cela elle respecte la jurisprudence du Con-
seil constitutionnel preacuteciteacutee (deacutecision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi
relative agrave la Corse)
laquo Si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquoho-
raire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir
pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les en-
seignants (hellip) raquo (cons 24)
Lrsquoenseignement drsquoune langue minoritaire ne devient donc en aucun cas obli-
gatoire Ce qui doit faire laquo lrsquoobjet drsquoun accord raquo ce sont les conditions permet-
tant effectivement agrave des enfants drsquoacceacuteder agrave un enseignement facultatif qui
contribue agrave leur deacuteveloppement proteacutegeacute par ailleurs par lrsquoalineacutea 10 du Preacuteam-
bule de 1946 preacuteciteacute Ni la Constitution ni son interpreacutetation par le Conseil
constitutionnel ne srsquoopposent agrave ce qursquoune commune de reacutesidence participe y
compris de maniegravere obligatoire au financement de la scolarisation dans une
autre commune des enfants souhaitant suivre un tel enseignement Crsquoest don-
ner aux enfants et aux parents de maniegravere effective et efficiente la possibiliteacute
concregravete de beacuteneacuteficier drsquoun enseignement drsquoune langue reacutegionale composante
de leur laquo deacuteveloppement raquo laquelle appartient en vertu de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution au laquo patrimoine de la France raquo
C Forfait scolaire communal et respect du principe drsquoeacutegaliteacute
Tertio la loi ne contrevient pas au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur
une commune une nouvelle charge
Conformeacutement agrave une jurisprudence du Conseil constitutionnel bien eacutetablie le
principe deacutegaliteacute de lrsquoarticle 6 de la Deacuteclaration des droits de lhomme et du
citoyen de 1789 laquo ne soppose ni agrave ce que le leacutegislateur regravegle de faccedilon diffeacuterente
des situations diffeacuterentes ni agrave ce quil deacuteroge agrave leacutegaliteacute pour des raisons
dinteacuterecirct geacuteneacuteral pourvu que dans lun et lautre cas la diffeacuterence de traite-
ment qui en reacutesulte soit en rapport direct avec lobjet de la loi qui leacutetablit raquo
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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(pour lrsquoune des reacutecentes application au domaine de lrsquoenseignement dont il sera
ici question deacutecision ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de
la confiance)
En ce qui concerne preacuteciseacutement le caractegravere obligatoire drsquoune nouvelle charge
pour une collectiviteacute celui-ci nrsquoa pas eacuteteacute censureacute par le Conseil constitutionnel
agrave propos de lrsquoexamen de la loi sur lrsquoavenir de lrsquoeacutecole preacuteciteacutee (deacutecision ndeg 2019-
787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de la confiance) Lrsquoarticle 17 de
la loi alors deacutefeacutereacute au Conseil constitutionnel preacutevoyait dans son premier ali-
neacutea
laquo LrsquoEacutetat attribue de maniegravere peacuterenne agrave chaque commune les ressources
correspondant agrave lrsquoaugmentation des deacutepenses obligatoires qursquoelle a
prises en charge en application des articles L 212-4 L 212-5 et L 442-
5 du code de lrsquoeacuteducation au titre de lrsquoanneacutee scolaire 2019-2020 par rap-
port agrave lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 dans la limite de la part drsquoaugmenta-
tion reacutesultant directement de lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoins-
truction obligatoire raquo
Les deacutepenses qui font lrsquoobjet de lrsquoaccompagnement financier en cause sont
celles qui beacuteneacuteficient aux eacutecoles publiques et aux eacutetablissements drsquoenseigne-
ment priveacutes ayant passeacute un contrat drsquoassociation avec lrsquoEacutetat
Lrsquoabaissement agrave trois ans du deacutebut de lrsquoinstruction obligatoire a donc fait pe-
ser des charges nouvelles pour les communes et leur a mecircme imposeacute de par-
ticiper au financement des eacutecoles maternelles priveacutees sous contrat y compris
lorsqursquoelles nrsquoont pas approuveacute ce contrat La diffeacuterence de traitement entre
les communes est reacuteelle selon qursquoelles financcedilaient ou non des classes mater-
nelles avant lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoinstruction obligatoire mais
nrsquoentraicircne pas pour autant une rupture drsquoeacutegaliteacute
Ainsi lrsquoa jugeacute le Conseil constitutionnel dans la deacutecision preacuteciteacutee drsquoune part
il a estimeacute que cette diffeacuterence de traitement reposait sur une diffeacuterence de
situation
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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laquo Les communes qui au cours de lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 avaient
institueacute des classes maternelles ou eacutecoles maternelles publiques ou ap-
prouveacute des contrats drsquoassociation drsquoeacutecoles maternelles priveacutees ont con-
tribueacute agrave ce titre agrave leur financement dans les conditions preacutevues par le
code de lrsquoeacuteducation Ces communes ne sont ainsi pas placeacutees dans une
situation identique agrave celle des autres communes qui nrsquoexerccedilaient pas
deacutejagrave les mecircmes compeacutetences et ne supportaient donc pas les charges
correspondantes raquo (cons 7)
Drsquoautre part le Conseil constitutionnel a jugeacute que la diffeacuterence de traitement
contesteacutee eacutetait en rapport direct avec lrsquoobjet de la loi qui lrsquoeacutetablit
laquo Qui consiste en application de la seconde phrase du quatriegraveme alineacutea
de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution agrave accompagner de ressources finan-
ciegraveres une extension de compeacutetence ayant pour conseacutequence drsquoaugmen-
ter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales raquo (cons 8)
Agrave lrsquoargument opposeacute agrave lrsquoarticle 6 de la loi deacutefeacutereacutee selon lequel ces dispositions
creacuteeraient une diffeacuterence de traitement entre les communes contraire au prin-
cipe deacutegaliteacute devant la loi le Conseil constitutionnel en vertu de sa jurispru-
dence Loi pour une eacutecole de la confiance devrait logiquement apporter la mecircme
reacuteponse Le leacutegislateur entend avec cette loi du 8 avril 2021 donner de ma-
niegravere geacuteneacuterale effectiviteacute agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution agrave travers en par-
ticulier un outil permettant de mettre en œuvre les dispositions de lrsquoarticle 72-
2 de la Constitution relatives aux extensions de compeacutetences imposeacutees aux
collectiviteacutes territoriales Dispositions qui par ailleurs nrsquoobligent pas le leacutegi-
slateur agrave preacutevoir un accompagnement financier de lrsquoensemble des communes
En lien avec cet argument il en reacutesulte que lrsquoarticle 6 ne porte pas atteinte
par ailleurs au principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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D Forfait scolaire communal et respect du principe de libre administra-
tion des collectiviteacutes territoriales
Quarto le forfait scolaire communal nrsquoest ni contraire agrave la lettre de lrsquoar-
ticle 72 de la Constitution ni agrave son interpreacutetation par le Conseil constitution-
nel
En vertu de lrsquoarticle 72 alineacutea 3 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales
srsquoadministrent librement dans les conditions preacutevues par la loi Correacutelative-
ment lrsquoarticle 34 de la Constitution donne agrave la loi compeacutetence pour deacuteterminer
laquo les principes fondamentaux (hellip) de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales de leurs compeacutetences et de leurs ressources raquo Cette libre admi-
nistration doit en outre se concilier avec drsquoautres principes constitutionnels
tels que le principe drsquoeacutegaliteacute et la liberteacute de lrsquoenseignement Crsquoest ainsi que le
Conseil constitutionnel a jugeacute que laquo si le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacute-
gislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce que les conditions essentielles drsquoap-
plication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de lrsquoenseignement deacutepen-
dent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre
les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (voir notamment la deacutecisions ndeg84-
185 DC du 18 janvier 1985 cons 18)
La libre administration est bien un principe constitutionnel mais crsquoest au leacute-
gislateur qursquoil revient sous le controcircle du Conseil constitutionnel drsquoen preacuteci-
ser le contenu Lrsquointervention du leacutegislateur est neacutecessaire pour la deacutefinition
des regravegles de fonctionnement des collectiviteacutes territoriales la deacutefinition des
compeacutetences qui leur sont deacutevolues (transfert creacuteation extension des compeacute-
tences) et en matiegravere de ressources la fixation du taux des impocircts deacutecideacutes par
les Assembleacutees deacutelibeacuteratives locales
Il ressort de la jurisprudence administrative et constitutionnelle que seule la
loi peut creacuteer une obligationsujeacutetion nouvelle agrave la charge drsquoune collectiviteacute
territoriale Le principe de libre administration ne peut donc pas exister en-
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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dehors de lrsquointervention du leacutegislateur lequel nrsquoa pas pour autant toute lati-
tude En drsquoautres termes le principe de libre administration est deacutefini par la
loi mais est aussi proteacutegeacute contre elle qui ne peut notamment pas porter at-
teinte au-delagrave drsquoun certain seuil aux ressources des collectiviteacutes territoriales
restreindre la liberteacute contractuelle intervenir dans les deacutecisions des collecti-
viteacutes territoriales relatives agrave leurs agents ou le fonctionnement de leurs insti-
tutions
En eacutetendant la prise en charge du forfait scolaire communal la loi deacutefeacutereacutee creacutee
une charge suppleacutementaire pour certaines communes
Aux termes du quatriegraveme alineacutea de larticle 72-2 de la Constitution laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales saccom-
pagne de lattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consa-
creacutees agrave leur exercice Toute creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour
conseacutequence daugmenter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales est ac-
compagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Dans le cas ougrave le leacutegislateur
octroie une nouvelle compeacutetence aux collectiviteacutes territoriales (articles 72-2 de
la Constitution et L 1614-1-1 du code geacuteneacuteral des collectiviteacutes territoriales)
il accompagne cette creacuteation de ressources correspondantes uniquement si
lexercice de cette compeacutetence est rendu obligatoire Ainsi en a jugeacute le Conseil
constitutionnel en ajoutant que le leacutegislateur disposait dun pouvoir dappreacute-
ciation en la matiegravere la compensation devant ecirctre naturellement suffisante
pour ne pas constituer une entrave au principe de libre administration
laquo Que ces dispositions ne visent en ce qui concerne les creacuteations et ex-
tensions de compeacutetences que celles qui preacutesentent un caractegravere obliga-
toire que dans cette hypothegravese il nest fait obligation au leacutegislateur
que daccompagner ces creacuteations ou extensions de compeacutetences de res-
sources dont il lui appartient dappreacutecier le niveau sans toutefois deacutena-
turer le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales raquo
(deacutecision ndeg2008-569 DC du 7 aoucirct 2008 Loi instituant un droit daccueil
pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires pendant le temps
scolaire cons 13)
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Le Conseil constitutionnel a jugeacute qursquoen conseacutequence et en lrsquoespegravece le leacutegisla-
teur avait suffisamment deacutetermineacute le niveau des ressources accompagnant la
creacuteation de ce service daccueil pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires pendant le temps scolaire sans meacuteconnaicirctre le quatriegraveme alineacutea de
larticle 72-2 de la Constitution
Lextension de compeacutetences est soumise a fortiori au mecircme reacutegime que la
creacuteation de compeacutetences Elle consiste en leacutelargissement du peacuterimegravetre ou en
la modification de la nature ou de lobjet dune compeacutetence dont lexercice est
deacutejagrave assureacute par les collectiviteacutes territoriales ayant pour conseacutequence de creacuteer
une charge suppleacutementaire pour celles-ci Le droit agrave une compensation finan-
ciegravere nest garanti que si lextension preacutesente un caractegravere obligatoire et le
leacutegislateur en deacutetermine le niveau et les modaliteacutes agrave condition quils nentra-
vent pas la libre administration des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece le principe de libre administration nrsquoest donc pas violeacute par le ca-
ractegravere contraignant que confegravererait la loi deacutefeacutereacutee au forfait scolaire communal
de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation Drsquoune part le Conseil constitu-
tionnel a deacutejagrave comme souligneacute plus haut accepteacute le principe du caractegravere
obligatoire drsquoune nouvelle charge qui nrsquoentraine par ailleurs mecircme pas
lrsquoautomaticiteacute drsquoun accompagnement financier des communes Drsquoautre part
lrsquoargument de proportionnaliteacute est ici deacuteterminant agrave ceux qui avancent un
risque drsquoassegravechement financier de certaines communes rurales contraintes
de prendre en charge la scolarisation dun eacutelegraveve dans une autre commune
mieux doteacutee qui propose lenseignement de la langue reacutegionale (ce qui selon
le deacuteputeacute Molac ne concernerait que 002 des enfants en France) il faut
reacutepondre en mettant en avant lrsquoobjectif incitatif et non sanctionnateur de la
loi Il suffira auxdites communes de proposer un enseignement de langue reacute-
gionale qui ne pourrait repreacutesenter qursquoune heure drsquoinitiation par semaine par
exemple
Une heure drsquoinitiation par semaine pour eacuteviter de payer le forfait scolaire com-
munal lequel ne meacuteconnait pas par ailleurs lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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les principes constitutionnels drsquoeacutegaliteacute drsquouniciteacute de la langue franccedilaise de la
libre administration des collectiviteacutes territoriales et permet drsquoassurer le deacuteve-
loppement de lrsquoenfant crsquoest bien peu de choses pour censurer une loi souve-
raine adopteacutee qui plus est agrave une eacutecrasante majoriteacute
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
De Raphaeumll SchellenbergerA GreffeObjet Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues ReacutegionalesDate mardi 4 mai 2021 101012Piegraveces jointes Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionalespdf
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loirelative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus desoixante deacuteputeacutes ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texteen application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarerlrsquoinconstitutionnaliteacute de son article 6 Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons ennotre qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre lapleine constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sensNous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notreconsideacuteration respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire
- Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
- Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche
- Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret
- Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne
- Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte
- Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor
- David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion
- Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme
- Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne
- Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
1
M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2
Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
3
On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
- Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie
- Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
Ce message ainsi que les piegraveces jointes sont eacutetablis sous la seule responsabiliteacute de lexpeacutediteur agrave lintention exclusive de ses destinataires ils peuvent contenir des informations confidentielles Toute publication utilisation ou diffusion doit ecirctre autoriseacutee preacutealablement Ce message a fait lobjet dun traitement anti-virusIl est rappeleacute que tout message eacutelectronique est susceptible dalteacuteration au cours de son acheminement sur Internet ________________________________________________________________
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
1
M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Association ESKOLIMChez Seaska Route de la Pouponniegravere64250 CAMBO LES BAINSeskolim6gmailcomRepreacutesenteacutee par son President Jean Seacutebastien HAYDN11 chemin de Saint Jean66240 SAINT ESTEVE
CONTRIBUTION EXTERIEURE
Observations sur la conformiteacute agrave la Constitution de laproposition de loi relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
Monsieur le Preacutesident du Conseil constitutionnel Mesdames et Messieurs les
membres du Conseil constitutionnel lrsquoassociation Eskolim souhaite porter agrave votre attention
les observations suivantes tendant agrave deacutemontrer la conformiteacute agrave la Constitution de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Parmi lrsquoensemble des dispositions du texte deacutefeacutereacute la plupart nrsquoont donneacute lieu agrave aucun
deacutebat sur leur conformiteacute agrave la Constitution qui est de toute eacutevidence acquise par exemple au
sujet des traductions dont la constitutionnaliteacute a deacutejagrave indirectement eacuteteacute reconnue (CC 99-412
DC 15 juin 1999 CC ndeg2001-452 DC 6 deacutecembre 2001) ou de lrsquoutilisation des signes
diacritiques sur les actes drsquoeacutetat civil
De plus au-delagrave des apparences drsquoune politique jurisprudentielle initieacutee dans un contexte
speacutecifique le Conseil constitutionnel dispose deacutesormais drsquoun cadre constitutionnel de
reacutefeacuterence transformeacute (1) qui lui permettra de valider les dispositions leacutegislatives du texte dont
il est saisi en particulier lrsquoarticle 4 relatif agrave lrsquoenseignement immersif (2) et lrsquoarticle 6 au sujet
de la participation financiegravere agrave la scolarisation par les communes de reacutesidence (3)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
1 Le renouvellement des normes constitutionnelles de reacutefeacuterence en matiegravere de
langues reacutegionales
11 Les ineacutevitables deacuterogations apporteacutees agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution
Toute regravegle constitutionnelle connaicirct des atteacutenuations et peut ecirctre concilieacutee lrsquoarticle 2
de la Constitution ne fait pas exception Le principe demeure inchangeacute laquo La langue de la
Reacutepublique est le franccedilais raquo Sur ce fondement le Conseil constitutionnel a deacuteveloppeacute dans
les anneacutees 90 et 2000 une jurisprudence vigilante sur lrsquousage du franccedilais mais sans pour
autant refuser toute eacutevolution nous y reviendrons
Cependant lrsquoassociation Eskolim souhaite mettre en eacutevidence lrsquoindeacuteniable
changement de cadre constitutionnel en matiegravere de langues reacutegionales pour au
moins trois raisons
En premier lieu la porteacutee de lrsquoarticle 2 de la Constitution nrsquoest pas figeacutee et peut
eacutevoluer avec le temps En effet le Conseil constitutionnel opegravere reacuteguliegraverement des adaptations
de la porteacutee du texte constitutionnel Parmi de nombreuses illustrations jurisprudentielles la
liberteacute drsquoexpression et de communication protegravege deacutesormais la liberteacute drsquoacceacuteder agrave Internet
(CC ndeg 2009-580 DC 10 juin 2009) et de srsquoy exprimer (CC ndeg2020-801 DC du 18 juin 2020)
La liberteacute du mariage comprend deacutesormais le droit de mettre fin aux liens du mariage (CC ndeg
2016-557 QPC du 29 juillet 2016) La monteacutee en puissance des exigences environnementales
dans le deacutebat public a permis au Conseil constitutionnel de juger qursquoil deacutecoule de la Charte de
lrsquoenvironnement laquo que la protection de lrsquoenvironnement patrimoine commun des ecirctres
humains constitue un objectif de valeur constitutionnelle raquo (CC ndeg2019-823 QPC 31 janvier
2020) Certains fondements constitutionnels que lrsquoon croyait endormis ont eacuteteacute reacuteactiveacutes sous
lrsquoeffet du pouvoir interpreacutetatif agrave lrsquoimage de lrsquoarticle 15 de la DDHC (laquo La socieacuteteacute a le droit de
demander compte agrave tout agent public de son administration raquo) agrave lrsquoorigine drsquoun droit drsquoaccegraves
aux archives publiques (CC ndeg2017-655 QPC 15 septembre 2017) et drsquoun droit drsquoaccegraves aux
documents administratifs (CC ndeg2020-834 QPC 3 avril 2020)
En deuxiegraveme lieu la reacutedaction actuelle de lrsquoarticle 2 de la Constitution ne date pas de
1958 mais drsquoun ajout issu de la loi constitutionnelle ndeg 92-554 du 25 juin 1992 voteacutee dans un
contexte particulier au moment ougrave la France ratifiait le traiteacute de Maastricht et reacutevisait sa
Constitution afin de lever les atteintes agrave la souveraineteacute constateacutees par le Conseil
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constitutionnel En 1992 lrsquoinsertion de la langue franccedilaise au sein de lrsquoarticle 2 vise agrave rassurer
lrsquoopinion face aux craintes heacutegeacutemoniques de la langue anglaise les langues reacutegionales ne
sont ni viseacutees ni nieacutees dans leur existence et leur rocircle Il est sur ce point particuliegraverement
reacuteveacutelateur de se reacutefeacuterer aux deacuteclarations limpides du Garde des Sceaux Michel Vauzelle lors
des deacutebats parlementaires consacreacutes en 1992 au vote de la reacutevision constitutionnelle laquo Les
langues reacutegionales sont naturellement une richesse de notre patrimoine national Agrave ce
titre le Gouvernement exprime par ma voix lrsquoimmense respect et le soin qursquoil porte agrave cette
richesse de la nation [] Je ne vois pas lagrave drsquoatteinte agrave lrsquouniteacute de la nation mais au
contraire une contribution agrave sa richesse [] Aucune atteinte ne sera porteacutee agrave la politique
de respect de la diversiteacute de nos cultures reacutegionales qui est un eacuteleacutement essentiel du
patrimoine national raquo (JO Assembleacutee nationale p 1021)
Il est donc parfaitement possible pour le Conseil constitutionnel drsquoopeacuterer une
interpreacutetation eacutevolutive de lrsquoarticle 2 afin drsquoadapter la porteacutee de la norme constitutionnelle au
contexte actuel favorable agrave lrsquoapprofondissement de lrsquousage des langues reacutegionales Il nrsquoest
drsquoailleurs pas anodin de constater que la preacutesente proposition de loi a largement transcendeacute les
clivages politiques pour ecirctre voteacutee agrave une large majoriteacute avec drsquoailleurs le soutien de
lrsquoensemble des Preacutesidents de Reacutegion
En troisiegraveme lieu dans sa fameuse deacutecision sur la Charte europeacuteenne des langues
reacutegionales et minoritaires du 15 juin 1999 (ndeg99-412 DC) le Conseil constitutionnel a
implicitement reconnu la compatibiliteacute de lrsquoenseignement immersif ou bilingue avec la
Constitution et en particulier avec lrsquoarticle 2 de la Constitution En effet lrsquoinconstitutionnaliteacute
constateacutee entre la Charte et la Constitution concerne seulement les articles 1 et 7 Or le
consideacuterant 13 de cette deacutecision abusivement preacutesenteacutee comme un verrou absolu en matiegravere
de langues reacutegionales prend soin de preacuteciser laquo que nest contraire agrave la Constitution eu eacutegard agrave
leur nature aucun des autres engagements souscrits par la France dont la plupart au
demeurant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France en
faveur des langues reacutegionales raquo Parmi ces laquo autres engagements souscrits par la France raquo
au sein de la Charte figurent certaines stipulations de lrsquoarticle 8 de la Charte1 selon lequel
1 Article 8 ndash Enseignement1En matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel ces langues sontpratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de lenseignement de la (des)langue(s) officielle(s) de lEtat(hellip)ci agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires concerneacutees ou
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laquo laquoen matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel
ces langues sont pratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de
lenseignement de la (des) langue(s) officielle(s) de lEtat raquo agrave toute une seacuterie drsquoengagements
Au sein des engagements auxquels la France avait souscrits et sur lesquels le Conseil
constitutionnel srsquoest donc prononceacute on trouve le point 1 c (iv) en vertu duquel la France
srsquoengage laquo agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui
le souhaitent ndash ou le cas eacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant raquo
Or ce renvoi concerne les stipulations suivantes
laquo i agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires
concerneacutees ou
Ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les
langues reacutegionales ou minoritaires ou
Iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales
ou minoritaires comme partie inteacutegrante du curriculum
Autrement dit la France srsquoeacutetait engageacutee au moment de la signature de la Charte agrave
appliquer lrsquoune des trois mesures citeacutees qui concernent lrsquoenseignement laquo dans raquo les langues
reacutegionales ou minoritaires dans le secondaire crsquoest-agrave-dire un enseignement immersif ou
bilingue Cet engagement faisait donc partie des stipulations examineacutees par le Conseil
constitutionnel et le consideacuterant 13 de la deacutecision du 15 juin 1999 affirme clairement que ces
stipulations ne sont pas contraires agrave la Constitution Degraves 1999 lrsquoenseignement immersif en
langue reacutegionale est reconnu par le Conseil constitutionnel comme compatible avec
lrsquoarticle 2 de la Constitution
En quatriegraveme lieu le texte mecircme de la Constitution contient drsquoores et deacutejagrave des
ameacutenagements au principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais
Drsquoune part en vertu de la loi constitutionnelle ndeg 98-610 du 20 juillet 1998 lAccord
de Noumeacutea est constitutionnaliseacute agrave larticle 77 de la Constitution Or cet accord stipule en son
ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les langues reacutegionalesou minoritaires ou
iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales ou minoritairescomme partie inteacutegrante du curriculum ou
iv agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui le souhaitent ndash ou le caseacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant
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point 133 laquo Les langues kanak sont avec le franccedilais des langues denseignement et de
culture en Nouvelle-Caleacutedonie Leur place dans lenseignement et les meacutedias doit donc ecirctre
accrue et faire lobjet dune reacuteflexion approfondie raquo
Drsquoautre part sous lrsquoeffet de la reacutevision constitutionnelle du 23 juillet 2008 la
Constitution consacre deacutesormais les langues reacutegionales sous lrsquoeffet de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution qui par deacutefinition atteacutenue et deacuteroge agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution et dont la
porteacutee ne saurait ecirctre symbolique
12 La porteacutee de lrsquoancrage constitutionnel des langues reacutegionales minoritaires
En vertu de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution laquo Les langues reacutegionales appartiennent
au patrimoine de la France raquo Sans discussion possible cette nouvelle disposition
constitutionnelle constitue un changement de circonstances de droit permettant drsquoatteacutenuer
fortement la porteacutee des preacuteceacutedentes deacutecisions du Conseil constitutionnel rendues avant la
reacutevision constitutionnelle de 2008 Certains voudraient pourtant reacuteduire ce texte agrave une porteacutee
simplement symbolique et pensent pouvoir drsquoores et deacutejagrave trouver une confirmation dans la
jurisprudence du Conseil constitutionnel La reacutealiteacute contentieuse est beaucoup plus nuanceacutee et
ne preacutejuge rien de lrsquoavenir
Le Conseil constitutionnel nrsquoa eu depuis 2008 qursquoune seule et unique occasion de
preacuteciser la porteacutee de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Dans la deacutecision du 20 mai 2011
(ndeg2011-130 QPC) il eacutetait en effet saisi des dispositions de larticle L 312-10 du code de
leacuteducation relative agrave lenseignement des langues et cultures reacutegionales qui eacutetait contesteacute au
regard de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Or estime le Conseil en 2011 lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution ninstitue pas un droit ou une liberteacute que la Constitution garantit Sa
meacuteconnaissance ne peut donc ecirctre invoqueacutee agrave lappui dune question prioritaire de
constitutionnaliteacute sur le fondement de larticle 61-1 de la Constitution
Il convient de ne pas tirer de conclusions excessives du deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en
QPC de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Drsquoune part cela nrsquoempecircche pas le Conseil constitutionnel de se fonder sur lrsquoarticle
75-1 de la Constitution dans le cadre du controcircle a priori comme crsquoest par exemple le cas
pour les regravegles constitutionnelles en matiegravere de recevabiliteacute des amendements ou des principes
constitutionnels en matiegravere budgeacutetaires
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Drsquoautre part le deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en QPC drsquoune norme constitutionnelle ne
preacutejuge pas drsquoune forme de hieacuterarchie mateacuterielle ou formelle et srsquoexplique seulement par les
speacutecificiteacutes de chacun des offices Par exemple le respect des regravegles du vote de la loi
imposeacutees par la Constitution impossibles agrave invoquer en QPC font pourtant lrsquoobjet drsquoune
vigilance accrue du Conseil constitutionnel dans le cadre du controcircle a priori justifiant
chaque anneacutee de nombreuses censures
En outre bien que non invocable en QPC lrsquoarticle 75-1 teacutemoigne indubitablement de
la volonteacute du constituant de permettre au leacutegislateur drsquoassouplir les conditions drsquousage des
langues reacutegionales en ouvrant davantage la leacutegislation agrave des possibiliteacutes drsquoapprentissage en la
matiegravere En cela lrsquoarticle 75-1 de la Constitution est une atteacutenuation une disposition
deacuterogatoire agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution selon lequel laquo La langue de la Reacutepublique est le
franccedilais raquo Comme le souligne le rapport drsquoun deacuteputeacute en 2015 laquo la preacuteservation et la
protection des langues reacutegionales sont devenues un objectif de valeur constitutionnelle raquo2 Une
telle interpreacutetation serait drsquoailleurs coheacuterente avec les travaux parlementaires agrave lrsquoorigine de la
reacutevision de 2008 pour le preacutesident de la Commission des lois du Seacutenat lrsquoarticle 75-1 permet
de donner laquo un fondement solide aux dispositions leacutegislatives et reacuteglementaires qui favorisent
la protection et le deacuteveloppement des langues reacutegionales sans diminuer la place que le
franccedilais occupe dans notre sphegravere publique raquo3
Enfin dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel
estime que larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi
ndeg2005-380 du 23 avril 2005 est conforme agrave la Constitution Or les dispositions ainsi
valideacutees sont toujours en vigueur dans une reacutedaction identique laquo Un enseignement de
langues et cultures reacutegionales peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des
modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces
langues sont en usage raquo Ainsi tout en estimant que lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ne
constitue pas un droit ou liberteacute constitutionnel directement invocable en QPC le Conseil
constitutionnel a valideacute le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures
reacutegionales
2JJ Urvoas Rapport sur Proposition de loi constitutionnelle ndeg 1618 visant agrave ratifier la Charte europeacuteenne deslangues reacutegionales ou minoritaires 14 janvier 2014
3JJ Hyest Rapport ndeg 387 (2007-2008) sur le projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions dela Ve Reacutepublique fait au nom de la commission des lois du Seacutenat
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Autre signe eacutevident de la porteacutee effective de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le
leacutegislateur a multiplieacute ces derniegraveres anneacutees lrsquoadoption de textes favorisant lrsquousage et
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et leur promotion La loi du 8 juillet 2013
drsquoorientation et de programmation pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique ouvre la
possibiliteacute drsquoun enseignement bilingue franccedilais-langue reacutegionale la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) eacutetablit la participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes par lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale
lrsquoarticle 86 de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle
modifie lrsquoarticle 225-1 du code peacutenal en creacuteant un nouveau cas de discrimination fondeacute sur laquo
la maitrise drsquoune autre langue que le franccedilais raquo la loi du 28 feacutevrier 2017 de programmation
relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend inopeacuterant lrsquointerdiction des livrets de famille
bilingues lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance eacutetend aux
eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives les modaliteacutes drsquoun accord entre les communes pour
la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoinscrivant dans une eacutecole dispensant un
enseignement de langue reacutegionale en dehors de sa commune de reacutesidence Lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution a donc susciteacute une production leacutegislative qui teacutemoigne de la volonteacute du pouvoir
politique de mettre en œuvre une politique en matiegravere de langue et culture reacutegionales La
particulariteacute de la proposition de loi deacutefeacutereacutee est drsquoecirctre la premiegravere loi dont lrsquoobjet exclusif vise
agrave densifier lrsquoenseignement et lrsquousage des langues reacutegionales mais ce texte confirme les
avanceacutees ponctuelles eacutetablies depuis la reacutevision constitutionnelle de 2008
13 La monteacutee en puissance drsquoexigences constitutionnelles favorisant lrsquousage des langues
reacutegionales
Au-delagrave de lrsquoapport indeacuteniable de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution qui inteacuteresse
directement et clairement la possibiliteacute pour le leacutegislateur de favoriser le deacuteveloppement des
langues reacutegionales la jurisprudence du Conseil constitutionnel atteste drsquoune monteacutee en
puissance de plusieurs liberteacutes qui participent indirectement du mecircme mouvement
En premier lieu la liberteacute drsquoexpression et de communication concerne les langues
reacutegionales Degraves la deacutecision ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 le Conseil constitutionnel avait
concilieacute lrsquoarticle 2 de la Constitution avec la liberteacute drsquoexpression et de communication afin de
censurer certaines dispositions imposant lrsquousage du franccedilais tout en faisant notamment une
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reacutefeacuterence aux langues reacutegionales cette liberteacute laquo implique le droit pour chacun de choisir les
termes jugeacutes par lui les mieux approprieacutes agrave lexpression de sa penseacutee que la langue franccedilaise
eacutevolue comme toute langue vivante en inteacutegrant dans le vocabulaire usuel des termes
de diverses sources quil sagisse dexpressions issues de langues reacutegionales de vocables
dits populaires ou de mots eacutetrangers raquo Or la liberteacute drsquoexpression et de communication a vu
son reacutegime constitutionnel renforceacute depuis plusieurs anneacutees sous lrsquoeffet du triple test de
proportionnaliteacute en vertu duquel les limites apporteacutees agrave ces liberteacutes doivent ecirctre neacutecessaires
adapteacutees et proportionneacutees agrave lrsquoobjectif poursuivi Norme constitutionnelle prioritaire pour le
Conseil constitutionnel la liberteacute drsquoexpression et de communication a justifieacute de nombreuses
censures de dispositions leacutegislatives ces derniegraveres anneacutees (loi laquo Hadopi raquo consultation des
sites Internet terroristes loi laquo Avia raquohellip) Or cette liberteacute dans ses deux composantes de
lrsquoexpression et de la communication permet au locuteur drsquoutiliser une langue reacutegionale et de
ne pas subir drsquoentraves excessives ou injustifieacutees Le deacuteveloppement des langues reacutegionales et
de leur enseignement lrsquoouverture des possibiliteacutes de srsquoexprimer et de communiquer gracircce agrave
ces langues ne sont pas eacutetrangegraveres aux conditions drsquoexercice de la liberteacute drsquoexpression et de
communication Ainsi la monteacutee en puissance de cette liberteacute dans le contentieux
constitutionnel confirme lrsquoeacutevolution favorable du cadre constitutionnel applicable aux langues
reacutegionales
En deuxiegraveme lieu lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant est deacutesormais consacreacute en tant
qursquoexigence constitutionnelle deacutecoulant des alineacuteas 10 et 11 du Preacuteambule de 1946 Ce
principe a drsquoores et deacutejagrave eacuteteacute appliqueacute en matiegravere de droit des eacutetrangers (CC 2019-797 QPC du
26 juillet 2019) mais aussi en droit de la famille au sujet du divorce (CC ndeg 2019-778 DC du
21 mars 2019) ou de lrsquoaccouchement sous le secret (CC 2019-826 QPC du 7 feacutevrier 2020) Il
serait parfaitement coheacuterent que cette exigence constitutionnelle soit applicable en matiegravere
drsquoeacuteducation et drsquoenseignement ce qui permettrait notamment de justifier le renforcement de
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et le soutien financier qui leur est apporteacute
En troisiegraveme lieu la liberteacute de lrsquoenseignement reconnu en tant que principe
constitutionnel (CC ndeg77-87 DC 23 novembre 1977 2016-745 DC 26 janvier 2017)
pourrait permette de proteacuteger constitutionnellement le libre choix des parents en
matiegravere de meacutethodes eacuteducatives conformeacutement agrave la jurisprudence du Conseil drsquoEtat En
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effet dans une deacutecision du 19 juillet 2017 (Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg
406150) le Conseil drsquoEtat estime que le laquo principe de la liberteacute de lrsquoenseignement qui figure
au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la Reacutepublique implique la
possibiliteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement y compris hors de tout contrat conclu
avec lrsquoEtat tout comme le droit pour les parents de choisir pour leurs enfants des
meacutethodes eacuteducatives alternatives agrave celles proposeacutees par le systegraveme scolaire public y
compris lrsquoinstruction au sein de la famille raquo A fortiori la liberteacute de lrsquoenseignement
permettrait au leacutegislateur drsquooffrir aux eacutelegraveves la possibiliteacute de suivre un enseignement immersif
en langue reacutegionale Faire deacutecouler de la liberteacute drsquoenseignement une exigence en matiegravere de
droit des parents de choisir les meacutethodes eacuteducatives serait drsquoailleurs en coheacuterence avec
lrsquoarticle 2 du Protocole 1 de la CEDH4 et lrsquoarticle 14-3 de la Charte des droits fondamentaux
de lUnion europeacuteenne5
Au-delagrave du principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais unchangement de contexte est intervenu depuis lrsquoinsertion en 1992 de cette disposition agravelrsquoarticle 2 de la Constitution Depuis 2008 le pouvoir constituant a consacreacute leslangues reacutegionales agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution de nombreuses reacuteformesleacutegislatives et regraveglementaires ont accompagneacute le deacuteveloppement des langues reacutegionaleset plusieurs principes constitutionnels accompagnent et pourraient agrave lrsquoavenirrenforcer lrsquoassise normative des langues reacutegionalesCrsquoest agrave lrsquoaune de ce cadre constitutionnel renouveleacute et transformeacute en phase avec leseacutevolutions leacutegislatives et sociales que le Conseil constitutionnel appreacuteciera laconstitutionnaliteacute de la preacutesente proposition de loi qui loin de constituer une rupturesrsquoinscrit dans une forme de continuiteacute
2 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi modifie lrsquoarticle L321-10 du code de lrsquoeacuteducation qui
en lrsquoeacutetat dispose
4laquo Nul ne peut se voir refuser le droit agrave lrsquoinstruction LrsquoEacutetat dans lrsquoexercice des fonctions qursquoil assumera dans ledomaine de lrsquoeacuteducation et de lrsquoenseignement respectera le droit des parents drsquoassurer cette eacuteducation et cetenseignement conformeacutement agrave leurs convictions religieuses et philosophiques raquo
5laquo La liberteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement dans le respect des principes deacutemocratiques ainsi quele droit des parents drsquoassurer lrsquoeacuteducation et lrsquoenseignement de leurs enfants conformeacutement agrave leurs convictionsreligieuses philosophiques et peacutedagogiques sont respecteacutes selon les lois nationales qui en reacutegissent lrsquoexercice raquo
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laquo Les langues et cultures reacutegionales appartenant au patrimoine de la France leurenseignement est favoriseacute prioritairement dans les reacutegions ougrave elles sont en usage
Cet enseignement peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefiniespar voie de convention entre lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont enusage
Le Conseil supeacuterieur de leacuteducation est consulteacute conformeacutement aux attributions qui lui sontconfeacutereacutees agrave larticle L 231-1 sur les moyens de favoriser leacutetude des langues et culturesreacutegionales dans les reacutegions ougrave ces langues sont en usage
Lenseignement facultatif de langue et culture reacutegionales est proposeacute dans lune des deuxformes suivantes
1deg Un enseignement de la langue et de la culture reacutegionales
2deg Un enseignement bilingue en langue franccedilaise et en langue reacutegionale
Les familles sont informeacutees des diffeacuterentes offres dapprentissage des langues et culturesreacutegionales raquo
Lrsquoarticle 4 a simplement pour objet drsquoajouter un 3e cas de forme drsquoenseignementfacultatif de langue et culture reacutegionales en preacutevoyant
laquo3deg Un enseignement immersif en langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectifdrsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo
21 Le Conseil constitutionnel peut ne pas se prononcer sur cette disposition
A titre liminaire il semblerait que lrsquoarticle 4 du texte soumis agrave lrsquoexamen du
Conseil constitutionnel ne soit pas contesteacute par les auteurs de la saisine parlementaire agrave en
croire les deacuteclarations publiques de plusieurs deacuteputeacutes Ce point nrsquoest pas sans importance degraves
lors qursquoil confirme le large consensus politique autour de cette disposition et peut avoir une
conseacutequence sur le peacuterimegravetre de lrsquoobjet de la deacutecision rendue
Certes il arrive ponctuellement au Conseil constitutionnel drsquoexaminer drsquooffice
drsquoautres dispositions que celles contesteacutees par la saisine mais depuis lrsquoentreacutee en vigueur de la
QPC et speacutecialement depuis 2016 une telle pratique tend agrave devenir une exception (Deacutecisions
ndeg 2019-794 DC du 20 deacutecembre 2019 ndeg2018-772 DC du 15 novembre 2018 ndeg2016-745
DC du 26 janvier 2017)
De plus lors de lrsquoexamen de la loi pour une eacutecole de la confiance dans sa deacutecision
ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 le Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute examiner
drsquooffice les dispositions de lrsquoarticle 38 creacuteant en vertu de lrsquoarticle L314-2 du code de
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lrsquoeacuteducation une expeacuterimentation de classe immersive en langue eacutetrangegravere ou reacutegionale6 Si le
Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute se saisir drsquooffice de cette disposition expeacuterimentale
crsquoest qursquoimplicitement il nrsquoa pas consideacutereacute qursquoelle posait une difficulteacute manifeste de
constitutionnaliteacute Degraves lors la coheacuterence voudrait qursquoil en aille de mecircme avec les dispositions
de lrsquoarticle 4 de la preacutesente proposition de loi qui ne font que reprendre les grands principes
de lrsquoexpeacuterimentation preacuteceacutedente en preacutevoyant la possibiliteacute drsquoun enseignement immersif en
langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue
franccedilaise
22 Les exigences anciennes poseacutees par le Conseil constitutionnel sont respecteacutees
Elaboreacutee avant la reacutevision constitutionnelle de 2008 consacrant les langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la jurisprudence
du Conseil constitutionnel en matiegravere drsquoenseignement de langue reacutegionale est totalement
respecteacutee par lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
En premier lieu le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement immersif en langue
reacutegionale rend lrsquoarticle 4 conforme agrave la Constitution
Dans plusieurs deacutecisions le Conseil constitutionnel a eu lrsquooccasion de preacuteciser que
seule lrsquoobligation de suivre un enseignement dans une autre langue que le franccedilais serait
contraire agrave la Constitution Ainsi dans la deacutecision ndeg 2001-456 DC du 27 deacutecembre 2001 il
indique que laquo lusage dune langue autre que le franccedilais ne peut ecirctre imposeacute aux eacutelegraveves des
eacutetablissements de lenseignement public ni dans la vie de leacutetablissement ni dans
lenseignement des disciplines autres que celles de la langue consideacutereacutee raquo Le verbe
6Article L314-2 du code de lrsquoeacuteducation laquo Sous reacuteserve de lrsquoautorisation preacutealable des autoriteacutes acadeacutemiques etapregraves concertation avec les eacutequipes peacutedagogiques le projet drsquoeacutecole ou drsquoeacutetablissement mentionneacute agrave lrsquoarticle L401-1 peut preacutevoir la reacutealisation dans des conditions deacutefinies par deacutecret drsquoexpeacuterimentations peacutedagogiquesportant sur tout ou partie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement drsquoune dureacutee limiteacutee agrave cinq ans Cesexpeacuterimentations peuvent concerner lrsquoorganisation peacutedagogique de la classe de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement laliaison entre les diffeacuterents niveaux drsquoenseignement la coopeacuteration avec les partenaires du systegraveme eacuteducatiflrsquoenseignement dans une langue vivante eacutetrangegravere ou reacutegionale les eacutechanges avec des eacutetablissementseacutetrangers drsquoenseignement scolaire lrsquoutilisation des outils et ressources numeacuteriques la reacutepartition des heuresdrsquoenseignement sur lrsquoensemble de lrsquoanneacutee scolaire les proceacutedures drsquoorientation des eacutelegraveves et la participation desparents drsquoeacutelegraveves agrave la vie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement Les collectiviteacutes territoriales sont systeacutematiquementassocieacutees agrave la deacutefinition des grandes orientations des expeacuterimentations meneacutees par lrsquoeacuteducation nationale ainsiqursquoagrave leurs deacuteclinaisons territoriales raquo
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laquo imposer raquo est employeacute agrave la fois au sujet de lrsquousage drsquoune autre langue que le franccedilais et au
sujet de la vie de lrsquoeacutetablissement et de lrsquoenseignement des disciplines autres que celles de la
langue consideacutereacutee Ce qui signifie qursquoil est constitutionnellement possible au leacutegislateur de
permettre aux eacutelegraveves de choisir de maniegravere facultative une telle orientation dans
lrsquoenseignement De mecircme dans sa deacutecision ndeg2001 454 DC du 17 janvier 2002 le Conseil
constitutionnel avait estimeacute que si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre
de lrsquohoraire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires laquo il ne saurait revecirctir pour autant
un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo Et dans la deacutecision
ndeg2004-490 DC 12 feacutevrier 2004 le Conseil indique que lrsquoenseignement de la langue
tahitienne ou dune autre langue polyneacutesienne dans le cadre de lhoraire normal des eacutecoles
maternelles et primaires dans les eacutetablissements du second degreacute et dans les eacutetablissements
denseignement supeacuterieur laquo ne saurait revecirctir pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les
eacutelegraveves ou eacutetudiants ni pour les enseignants raquo
Or en lrsquoespegravece il nrsquoy a absolument aucun doute sur le caractegravere facultatif du 3deg
ajouteacute agrave lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation En effet le premier alineacutea de lrsquoarticle L312-
10 du code de lrsquoeacuteducation est inchangeacute et eacutevoque un laquo enseignement facultatif raquo Le deacuteputeacute
Molac lrsquoa clairement exprimeacute lors des deacutebats laquo lrsquoenseignement immersif tel qursquoil est ici
proposeacute reacutepond agrave cette condition dans la mesure ougrave il ne serait pas imposeacute mais seulement
proposeacute au sein des eacutetablissements publics au cocircteacute de filiegraveres classiques drsquoenseignement la
deacutecision finale restant du ressort des personnes responsables de lrsquoenfant raquo (Rapport du 31
mars 2021)
En deuxiegraveme lieu lrsquoarticle 4 nrsquoa pas pour objet de soustraire les eacutelegraveves aux
droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements drsquoenseignement
Dans plusieurs deacutecisions relatives agrave lrsquousage drsquoune langue reacutegionale le Conseil
constitutionnel rappelle qursquoun enseignement de ce type nrsquoa pas pour laquo pour objet de soustraire
les eacutelegraveves scolariseacutes (hellip) aux droits et obligations applicables agrave lensemble des usagers des
eacutetablissements qui assurent le service public de lenseignement ou sont associeacutes agrave celui-ci raquo
(ndeg 91-290 DC du 9 mai 1991 ndeg 2001-454 DC du 17 janvier 2002) Or lrsquoarticle 4 a
seulement pour objet drsquoouvrir une 3e modaliteacute facultative drsquoenseignement en langue reacutegionale
La proposition de loi ne confegravere pas des droits speacutecifiques agrave des laquo groupes raquo de locuteurs de
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de laquo territoires raquo dans lesquels ces langues
seraient pratiqueacutees Le texte ne modifie pas non plus les modaliteacutes drsquoexpression dans la vie
publique et dans la relation entre lrsquoadministration et les administreacutes De telle sorte que
lrsquoarticle 4 ne creacutee aucun droit particulier pour les eacutelegraveves comme pour les enseignants de nature
agrave les soustraire aux droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements
drsquoenseignement ou associeacutes agrave celui-ci
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 4 opegravere une conciliation raisonnable et eacutequilibreacutee entre
le principe de lrsquoarticle 2 de la Constitution et lrsquoapprentissage des langues reacutegionales
Lrsquoenseignement immersif en lange reacutegionale doit srsquoopeacuterer laquo sans preacutejudice de
lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo Lrsquoarticle 4 prend soin de ne pas
ignorer le principe poseacute par lrsquoarticle 2 de la Constitution et prolonge au niveau leacutegislatif la
conciliation souhaiteacutee par le constituant depuis 2008 avec lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Il
appartiendra au pouvoir regraveglementaire de preacuteciser la mise en œuvre de lrsquoobjectif de bonne
connaissance de la langue franccedilaise qui en toute hypothegravese garantit une conciliation
eacutequilibreacutee entre les regravegles constitutionnelles en preacutesence
Au surplus les retours drsquoexpeacuteriences des expeacuterimentations de classes en
enseignements immersifs permises par lrsquoarticle L 314-2 du code de lrsquoeacuteducation deacutemontrent
que les eacutelegraveves disposent drsquoun niveau en franccedilais plus eacuteleveacute que la moyenne Comme lrsquoindique
le rapport du Seacutenat sur la proposition de loi 19 expeacuterimentations immersives en langue
basque 6 en langue corse et une en langue catalane ont lieu actuellement dans des eacutecoles
publiques Or pour prendre lrsquoexemple de lrsquoenseignement en basque agrave 100 en eacutecole
maternelle objet drsquoune eacutevaluation preacutecise par lrsquoacadeacutemie de Bordeaux en 2019 (Etude
comparative des filiegraveres de maternelle 100 basque bilingue et franccedilais Acadeacutemie de
Bordeaux 2019) laquo lorsque ces enfants arrivaient en CP leur niveau de franccedilais eacutetait
supeacuterieur agrave la moyenne du deacutepartement Cela prouve que le niveau de franccedilais nrsquoavait
absolument pas eacuteteacute toucheacute raquo (Paul Molac Assembleacutee nationale Seacuteance du 8 avril 2021)
En quatriegraveme lieu lrsquoarticle 4 ne fait qursquoeacutetendre la mise en œuvre drsquoune modaliteacute
drsquoenseignement deacutejagrave valideacute par le Conseil constitutionnel
Dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel a valideacute
le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures reacutegionales en estimant que
larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi ndeg2005-380 du 23
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avril 2005 est conforme agrave la Constitution En effet apregraves avoir estimeacute inopeacuterant le grief tireacute
de la violation de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la deacutecision preacutecise laquo que les dispositions
contesteacutees ne sont contraires agrave aucun droit ou liberteacute que la Constitution garantit raquo Par
conseacutequent en vertu de lrsquoautoriteacute que lrsquoarticle 62 de la Constitution confegravere aux deacutecisions du
Conseil constitutionnel les dispositions valideacutees dans cette deacutecision et toujours en vigueur
sont conformes agrave la Constitution Il srsquoagit en particulier de lrsquoalineacutea 2 de la version actuelle de
lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation en vertu duquel laquo Cet enseignement peut ecirctre
dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre
lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont en usage raquo Or lrsquoarticle 4 de la
proposition de loi ne fait qursquoajouter une 3e possibiliteacute de mise en œuvre drsquoun principe deacutejagrave
valideacute par le Conseil constitutionnel modaliteacute facultative et sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune
bonne connaissance de la langue franccedilaise Le leacutegislateur srsquoest donc scrupuleusement
conformeacute aux exigences du Conseil constitutionnel
23 La possibiliteacute drsquoun enseignement immersif peut se preacutevaloir de plusieurs exigences constitutionnelles
En plus de srsquoinscrire dans les lignes jurisprudentielles du Conseil constitutionnel et de
respecter lrsquoarticle 2 de la Constitution lrsquoarticle 4 de la proposition de la loi peut se preacutevaloir
plusieurs normes constitutionnelles
En premier lieu lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en vertu duquel laquo Les langues
reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo constitue un changement de
circonstances de droit issu de la reacutevision constitutionnelle de 2008 qui atteacutenue la porteacutee de
lrsquoarticle 2 de la Constitution et permet ainsi de fonder le principe drsquoen enseignement immersif
et facultatif en langue reacutegionale
En second lieu comme preacuteceacutedemment rappeleacute (cf supra point 13) plusieurs
exigences et liberteacutes constitutionnelles peuvent soutenir le deacuteveloppement des langues
reacutegionales et peser favorablement dans la conciliation opeacutereacutee par le Conseil constitutionnel
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La liberteacute drsquoexpression et de communication garantie par lrsquoarticle 11 de la DDHC
et dont le reacutegime constitutionnel srsquoest renforceacute depuis une dizaine drsquoanneacutees peut permettre de
justifier lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale degraves lors qursquoil srsquoagit drsquoun preacutealable neacutecessaire
agrave lrsquoexpression et agrave la communication dans une autre langue que le franccedilais
Lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant reacutecemment consacreacute sur le fondement des alineacuteas 10
et 11 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 peut permettre au leacutegislateur de diversifier les
possibiliteacutes drsquoapprentissage drsquoune langue et drsquoune culture reacutegionale
La liberteacute de lrsquoenseignement consacreacutee de longue date en tant que principe
fondamental reconnu par les lois de la Reacutepublique implique neacutecessairement comme le
reconnaissent le Conseil drsquoEtat au niveau constitutionnel (CE 19 juillet 2017 Association
Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150) et les textes europeacuteens (article 2 du protocole 1
CEDH article 14-3 Charte des droits fondamentaux de lrsquoUnion europeacuteenne) une possibiliteacute
pour les parents de choisir des meacutethodes eacuteducatives en lien avec leurs convictions
Il est eacutegalement possible drsquoavancer le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction qui
deacutecoule de lrsquoalineacutea 13 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 (CC ndeg2001-450 DC 11
juillet 2001) degraves lors que lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale poursuit un objectif
peacutedagogique auquel les eacutelegraveves doivent pouvoir acceacuteder de maniegravere suffisamment libre et
selon des critegraveres objectifs et rationnels
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi se contente drsquoajouter une modaliteacute de mise enœuvre drsquoun enseignement dont le principe a deacutejagrave eacuteteacute valideacute par le Conseilconstitutionnel La conformiteacute agrave la Constitution de cet enseignement est eacutetablie degraveslors qursquoil est proposeacute de maniegravere facultative sans preacutejudice du respect de lrsquoarticle 2 dela Constitution et qursquoil peut se preacutevaloir de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ainsi quede plusieurs principes constitutionnels comme la liberteacute drsquoexpression lrsquointeacuterecirctsupeacuterieur de lrsquoenfant la liberteacute drsquoenseignement et lrsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction
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3 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi deacutefeacutereacutee modifie lrsquoarticle L442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation en remplaccedilant les alineacuteas 6 et 7 par lrsquoalineacutea suivant
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue
reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de
reacutesidence et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la
condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de
langue reacutegionale raquo
31 Lrsquoimpact subsidiaire et reacutesiduel de lrsquoarticle 6
Au-delagrave des passions et crispations qui peuvent parfois se rencontrer au greacute de deacutebats
relatifs au financement de lrsquoenseignement priveacute la modification apporteacutee par lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi doit ecirctre replaceacutee agrave sa juste porteacutee
En premier le meacutecanisme est subsidiaire En effet la participation financiegravere de la
commune de reacutesidence ne serait solliciteacutee que si cette commune ne laquo dispose pas drsquoeacutecole
dispensant un enseignement de langue reacutegionale raquo Il srsquoagit bien drsquoun laquo enseignement raquo quel
que soit sa forme et son volume Degraves lors comme lrsquoa clairement exprimeacute le deacuteputeacute Paul
Molac devant la Commission des affaires sociales il peut srsquoagir drsquoune laquo initiation drsquoun
enseignement paritaire ou drsquoune immersion raquo (31 mars 2021)
En deuxiegraveme lieu le meacutecanisme est reacutesiduel La participation financiegravere se limite
aux eacutetablissements priveacutes du premier degreacute ndash les eacutecoles ndash ayant conclu un contrat
drsquoassociation Les collegraveges et lyceacutees sont donc exclus du dispositif Un faible nombre
drsquoenfants sera concerneacute et la charge sera donc reacuteduite pour les communes en question De
plus en pratique dans les zones ougrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales est reacutepandu les
eacutecoles drsquoun grand nombre de communes ont deacutejagrave deacuteveloppeacute des offres eacuteducatives
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En troisiegraveme lieu la participation financiegravere est encadreacutee par la loi En application
de lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation non modifieacute par la preacutesente
proposition de loi les modaliteacutes de calcul de la contribution de la commune de reacutesidence sont
clairement eacutetablies
laquo il est tenu compte des ressources de cette commune du nombre deacutelegraveves de cette
commune scolariseacutes dans la commune daccueil et du coucirct moyen par eacutelegraveve calculeacute sur la base
des deacutepenses de fonctionnement de lensemble des eacutecoles publiques de la commune daccueil
sans que le montant de la contribution par eacutelegraveve puisse ecirctre supeacuterieur au coucirct quaurait
repreacutesenteacute pour la commune de reacutesidence leacutelegraveve sil avait eacuteteacute scolariseacute dans une de ses eacutecoles
publiques raquo
La charge financiegravere obeacuteit donc agrave des regravegles claires objectives rationnelles et deacutejagrave en
vigueur depuis plusieurs anneacutees En effet le laquo forfait scolaire raquo est deacutejagrave pratiqueacute sur le
fondement de lrsquoarticle L212-8 du code de lrsquoeacuteducation lorsqursquoune famille scolarise dans une
eacutecole publique ou priveacutee son enfant dans une autre commune que la commune de reacutesidence
32 Lrsquoabsence de violation de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales et du principe drsquoeacutegaliteacute
Ainsi replaceacutee dans sa juste porteacutee il ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi de violer la Constitution et en particulier les principes applicables en
matiegravere de libre administration des collectiviteacutes territoriales ainsi que le principe drsquoeacutegaliteacute
En premier lieu le Conseil constitutionnel a deacutejagrave valideacute le principe de lrsquoaide agrave
lrsquoenseignement priveacute et en particulier aux langues reacutegionales
Avant mecircme la reacutevision constitutionnelle de 2008 et la conseacutecration des langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le Conseil
constitutionnel avait reconnu que laquo pour concourir agrave la sauvegarde des langues reacutegionales
lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales peuvent apporter leur aide aux associations ayant cet
objet raquo (CC ndeg2001-456 DC 27 deacutecembre 2001)
De plus le Conseil constitutionnel rappelle reacuteguliegraverement que laquo le leacutegislateur peut
preacutevoir loctroi dune aide des collectiviteacutes publiques aux eacutetablissements denseignement
priveacutes selon la nature et limportance de leur contribution agrave laccomplissement de missions
denseignement raquo (CC ndeg93-329 DC du 13 janvier 1994)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
En deuxiegraveme lieu le principe de libre administration ne saurait justifier des
traitements diffeacuterencieacutes dans lrsquoexercice des droits et liberteacutes constitutionnels
En vertu de lrsquoarticle 72 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales srsquoadministrent
librement mais laquo dans les conditions preacutevues par la loi raquo De plus le Conseil constitutionnel
prend soin de preacuteciser que laquo si le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacutegislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce
que les conditions essentielles drsquoapplication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de
lrsquoenseignement deacutependent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas
ecirctre les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (CC ndeg 84-185 DC du 18 janvier 1985 CC
ndeg93-329 du 13 janvier 1994) Plus largement dans la deacutecision du 17 janvier 2002 (ndeg2001-
454 DC) le Conseil constitutionnel affirme que laquo le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales ne saurait conduire agrave ce que les conditions essentielles de mise en
oeuvre des liberteacutes publiques et par suite lensemble des garanties que celles-ci comportent
deacutependent des deacutecisions de collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre les mecircmes
sur lensemble du territoire de la Reacutepublique raquo
Or en lrsquoespegravece si les communes pouvaient librement participer au financement de la
scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous contrat
drsquoassociation lrsquoexercice de la liberteacute drsquoenseignement du principe drsquoeacutegaliteacute devant la loi et du
principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction deacutependrait de la seule volonteacute drsquoune collectiviteacute
territoriale ce que le Conseil constitutionnel condamne Degraves lors que la possibiliteacute drsquoun
enseignement en langue reacutegionale est offerte aux enfants les conditions drsquoaccegraves agrave cet
enseignement doivent pouvoir ecirctre effectives et eacutegales Loin de violer le principe drsquoeacutegaliteacute
devant la loi lrsquoarticle 6 de la proposition de loi en assure au contraire la garantie
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne transfert ni ne creacutee de
nouvelles compeacutetences
Srsquoagissant des ressources des collectiviteacutes locales permettant de leur assurer une libre
administration le quatriegraveme alineacutea de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution preacutevoit laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales srsquoaccompagne de
lrsquoattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consacreacutees agrave leur exercice Toute
creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour conseacutequence drsquoaugmenter les deacutepenses des
collectiviteacutes territoriales est accompagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Le Conseil
constitutionnel veille au respect de cette regravegle drsquoune part pour les transferts de compeacutetence
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entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales et drsquoautre part pour les creacuteations ou extensions de
compeacutetence des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece aucune creacuteation ou transfert de compeacutetence nrsquoest opeacutereacute au sens de
lrsquoarticle 72-2 de la Constitution Il srsquoagit drsquoune simple participation financiegravere agrave caractegravere
subsidiaire reacutesiduel et deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels comme
preacuteceacutedemment eacutevoqueacute (cf supra point 31) De plus le versement de la participation
financiegravere correspond en quelque sorte agrave un allegravegement de charge degraves lors que le coucirct de
lrsquoenfant scolariseacute est reporteacute sur une autre commune que la commune de reacutesidence En
conseacutequence lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne fait que modifier les modaliteacutes drsquoexercice
drsquoune compeacutetence sans en creacuteer ou transfeacuterer une nouvelle
Drsquoailleurs dans la deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 le Conseil
constitutionnel avait jugeacute inopeacuterant le grief tireacute de la violation des articles 72 et 72-2 de la
Constitution agrave propos de la version ancienne de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation en
jugeant que laquo la loi deacutefeacutereacutee nemporte ni creacuteation ni extension des compeacutetences en matiegravere de
contributions des communes aux frais de fonctionnement des classes eacuteleacutementaires des
eacutetablissements du premier degreacute priveacutes sous contrat dassociation que par suite le grief tireacute
de la meacuteconnaissance du principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales manque
en fait raquo
Le Conseil constitutionnel a statueacute dans le mecircme sens au sujet de lrsquoinstitution drsquoun
creacutedit drsquoimpocirct en matiegravere drsquoapprentissage ou de la possibiliteacute de modifier la dureacutee du contrat
drsquoapprentissage mecircme si ces mesures en rendant lrsquoapprentissage plus attrayant ont pour effet
drsquoaugmenter le nombre drsquoapprentis et donc drsquoaccroicirctre les charges des reacutegions dans ce
domaine (CC ndeg 2004-509 DC du 13 janvier 2005)
En quatriegraveme lieu le principe drsquoeacutegaliteacute entre les charges publiques est respecteacute
En effet en plus du caractegravere subsidiaire et reacutesiduel du meacutecanisme la participation
financiegravere preacutevue par lrsquoarticle 6 de la proposition de loi srsquoapplique agrave lrsquoensemble des
communes ne disposant pas drsquoun eacutetablissement dispensant un enseignement de langue
reacutegionale ce qui est coheacuterent au regard de lrsquoobjet de la loi Les critegraveres de la participation
financiegravere preacutevus par lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 sont en tout eacutetat de cause objectifs et
rationnels eacutetablis et mis en œuvre depuis plusieurs anneacutees Les garanties de lrsquoarticle 13 de la
DDHC sont donc respecteacutees
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
En cinquiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir du respect
de plusieurs normes constitutionnelles
En affirmant depuis 2008 que les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la
France lrsquoarticle 75-1 de la Constitution donne un ancrage constitutionnel au deacuteveloppement
de lrsquousage et de lrsquoenseignement des langues reacutegionales Or sans la participation financiegravere des
communes de reacutesidence agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat lrsquoenseignement des langues reacutegionales serait compromis Par
conseacutequent lrsquoarticle 6 de la proposition de loi constitue une garantie leacutegale du respect de
lrsquoaffirmation porteacutee par lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Le mecircme raisonnement sera tenu agrave propos de lrsquoensemble des principes constitutionnels
qui donnent une assise agrave lrsquousage et agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales la liberteacute
drsquoexpression et de communication (article 11 DDHC) la liberteacute drsquoenseignement (PFRLR)
dont pourrait deacutecouler une exigence en matiegravere de droit des parents de choisir les meacutethodes
eacuteducatives (CE 19 juillet 2017 Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150)
lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant (alineacutea 10 et 11 du Preacuteambule de 1946) le principe drsquoeacutegaliteacute
(article 6 DDHC) le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction (alineacutea 13 du Preacuteambule de 1946)
Sans lrsquoarticle 6 de la proposition de loi lrsquoeffectiviteacute de lrsquoensemble de ces normes
constitutionnelles serait consideacuterablement atteacutenueacutee et creacuteerait des diffeacuterences de traitement
injustifieacutees et deacutependantes de la volonteacute des communes
De plus lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir drsquoun objectif de
clarification et de seacutecurisation du droit applicable qui peut se rattacher agrave lrsquoarticle 16 de la
DDHC degraves lors que les textes jusqursquoagrave preacutesent applicables eacutetaient ambigus et ont donneacute lieu agrave
des contentieux En rendant obligatoire ce qui eacutetait avant une faculteacute pour autant soumise agrave
un rocircle non neacutegligeable du preacutefet lrsquoarticle 6 de la proposition de loi clarifie le droit
applicable Ainsi une deacuteputeacutee preacutecisait lors des deacutebats parlementaires que laquo lrsquoarticle 34 de la
loi pour une eacutecole de la confiance relatif au versement du forfait scolaire a susciteacute de
nombreux imbroglios administratifs Ainsi chez moi en Bretagne plus de 150 demandes de
meacutediation ont eacuteteacute transmises aux services de lrsquoEacutetat ce qui met en lumiegravere lrsquoambiguiumlteacute de la loi
et les difficulteacutes de son application Je soutiens donc fortement lrsquoarticle 2 quinquies [devenu
article 6] issu des travaux du Seacutenat qui legraveve toute incertitude raquo (Mme Claudia Rouaux
Commission des affaires sociales Assembleacutee nationale 31 mars 2021)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi creacutee un meacutecanisme subsidiaire et reacutesiduel dont laporteacutee est deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels Sans creacuteer ni transfeacutererde nouvelle compeacutetence aux communes cette disposition assure une mise en œuvreuniforme des droits et liberteacutes et peut se preacutevaloir de nombreuses normesconstitutionnelles confeacuterant agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales et agrave son soutienfinancier de solides justifications constitutionnelles
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 12 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 12 mai 2021
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure Mme Mastorpdf
Lettre Wanda Mastor accompagnant la porte eacutetroite
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure MSchellenberger et autrespdf
Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure assESKOLIL pdf
lettre daccompagnement CC
Porte eacutetroite loi langues reacutegionales (2)
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure M Bertrand Pancherpdf
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Le droit compareacute apporte la preuve irreacutefutable de lrsquoabsence drsquoin-
compatibiliteacute entre le caractegravere indivisible voire unitaire drsquoune Reacutepublique
et la reconnaissance des langues reacutegionales en son sein13 Un tour drsquohorizon
des textes des constitutions europeacuteennes et des deacutecisions des cours constitu-
tionnelles permet de mettre en eacutevidence plusieurs eacuteleacutements significatifs Le
droit compareacute nous enseigne que juridiquement la question des langues srsquoap-
preacutehende agrave travers deux prismes premiegraverement celui de la forme de lrsquoEacutetat
Le lien entre uniteacute de lrsquoEacutetat et unilinguisme est aussi eacutevident que celui entre
Eacutetat composeacute (reacutegional ou feacutedeacuteral) et multilinguisme Deuxiegravemement celui des
droits des locuteurs Selon cette acception les langues reacutegionales sont tradi-
tionnellement associeacutees de maniegravere neacutegative au principe de non-discrimina-
tion de maniegravere positive aux droits linguistiques dont les locuteurs seraient
les beacuteneacuteficiaires14
En droit constitutionnel compareacute lrsquoameacutenagement de la pluraliteacute linguistique
diverge selon que les Eacutetats reconnaissent une pluri-officialiteacute sur lrsquoensemble
du territoire ou au seul niveau local La premiegravere hypothegravese est celle naturel-
lement choisie par la Belgique et la Suisse Eacutetats feacutedeacuteraux europeacuteens Selon
lrsquoarticle 4 de la Constitution helveacutetique laquo les langues nationales sont lrsquoalle-
mand le franccedilais lrsquoitalien et le romanche raquo De son cocircteacute la Constitution belge
eacutenonce que laquo la Belgique comprend trois communauteacutes la Communauteacute fran-
ccedilaise la Communauteacute flamande et la Communauteacute germanophone raquo et fait
eacutegalement reacutefeacuterence agrave laquo quatre reacutegions linguistiques la reacutegion de langue fran-
ccedilaise la reacutegion de langue neacuteerlandaise la reacutegion bilingue de Bruxelles-Capi-
tale et la reacutegion de langue allemande raquo En revanche lrsquoItalie et lrsquoEspagne ne
reconnaissent qursquoune seule langue officielle sur lrsquoensemble du territoire en
mecircme temps qursquoest ameacutenageacutee au niveau local la pluraliteacute linguistique Crsquoest
13 Voir Veacuteronique Bertile Langues reacutegionales ou minoritaires et Constitution France Espagne et Italie Bruylant Collection Droit public compareacute et europeacuteen 2008 516 p et Wanda Mas-
tor laquo Le statut constitutionnel des langues reacutegionales en droit compareacute De la reconnaissance agrave lrsquoindiffeacuterence raquo Glottopol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html 14 Voir le Rapport explicatif de de la Charte europeacuteenne des langues reacutegionales ou minori-
taires Conseil de lrsquoEurope Seacuterie des Traiteacutes europeacuteens ndeg148 Strasbourg 5 novembre 1992 httpsrmcoeint16800cb620
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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ce second type drsquoameacutenagement qui est ici inteacuteressant agrave observer les Eacutetats
reacutegionaux italien15 et espagnol16 eacutetant qualifieacutees par leurs constitutions drsquoin-
divisibles (et mecircme eacutegalement laquo un raquo pour lrsquoItalie alors que le mot a disparu
de la Constitution franccedilaise)
De maniegravere scheacutematique plusieurs postures essentielles vis-agrave-vis des langues
reacutegionales peuvent ecirctre observeacutees dans lrsquoEurope contemporaine La majoriteacute
des pays voisins confegraverent aux langues reacutegionales des statuts juridiques dif-
feacuterencieacutes Coexistent parfois une langue majoritaire et des langues minori-
taires qui beacuteneacuteficient de mesures protectrices Dans ce cas les langues reacutegio-
nales jouissent drsquoune reconnaissance mais seulement au niveau drsquoun terri-
toire identifieacute Pour le dire autrement elles ne concurrencent pas la langue
majoritaire au niveau national Il ne srsquoagit ni plus ni moins que lrsquoexpression
drsquoun droit agrave la diffeacuterence Drsquoun droit agrave la diffeacuterenciation pour reprendre un
terme qui a actuellement les faveurs du gouvernement franccedilais Drsquoautres pays
ont mis en place le bilinguisme officiel qui peut srsquoexprimer dans plusieurs
variantes Ce statut confegravere aux citoyens en principe du moins le choix duti-
liser lune ou lautre des langues officielles dans leurs rapports avec lEacutetat
Cette co-officialiteacute peut srsquoopeacuterer au niveau de tout le territoire (comme en Bel-
gique et en Suisse par exemple) ou seulement sur une partie de celui-ci
(comme en Espagne ou en Italie)
On pourrait objecter que la comparaison avec lrsquoEspagne et lrsquoItalie deux Eacutetats
reacutegionaux nrsquoest pas pertinente Or ces deux Eacutetats sont qualifieacutes de Royaume
ou Reacutepublique indivisibles par leurs constitutions respectives indivisibiliteacute
qui nrsquoempecircche pas la reconnaissance la protection et la promotion des
langues reacutegionales en leur sein Ainsi la Constitution espagnole consacre clai-
rement le multilinguisme dans le cadre de ses communauteacutes autonomes17
15 Article 5 de la Constitution de la Reacutepublique italienne de 1947 laquo La Reacutepublique une et indivisible reconnaicirct et favorise les autonomies locales (hellip) raquo 16 Article 2 de la Constitution du Royaume drsquoEspagne de 1978 laquo La Constitution est fondeacutee
sur luniteacute indissoluble de la nation espagnole patrie commune et indivisible de tous les Es-
pagnols Elle reconnaicirct et garantit le droit agrave lautonomie des nationaliteacutes et des reacutegions qui la
composent et la solidariteacute entre elles raquo 17 En vertu de lrsquoarticle 3 de la Constitution espagnole
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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tout comme lrsquoItalie laquo Reacutepublique une et indivisible raquo laquo protegravege par des mesures
particuliegraveres les minoriteacutes linguistiques raquo (article 6)
Cette rapide eacutetude comparative permet de mettre en eacutevidence la singulariteacute de
la France au sein drsquoune Europe qui srsquoenorgueillit de se deacutefinir agrave travers la
richesse de sa diversiteacute Mais notamment depuis la loi constitutionnelle de
2008 le leacutegislateur franccedilais a agi dans le sens drsquoune protection et promotion
des langues reacutegionales la loi du 8 avril 2021 srsquoinscrivant dans ce processus
logique et coheacuterent
C Le contexte parlementaire franccedilais
La loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit donc dans un mouvement leacutegislatif reacutepondant agrave
lrsquoadresse du pouvoir constituant Laquelle concerne aussi le pouvoir exeacutecutif
La politique du ministegravere de lrsquoeacuteducation pour la deacutetermination du nombre de
places pour lrsquoagreacutegation et le CAPES des langues reacutegionales devrait aller de
pair avec les lois qui mettent en œuvre lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Ainsi
pour la langue basque il nrsquoy a pas eu de concours drsquoagreacutegation externe depuis
2018 anneacutee 2021 comprise il y a un seul poste pour lrsquoagreacutegation interne en
2021 2 pour le CAPES externe en 2021 et 2 pour le CAPES interne Pour la
langue bretonne et pour ne citer que lrsquoanneacutee en cours il y a un poste agrave lrsquoagreacute-
gation externe pas de concours pour lrsquoagreacutegation interne deux postes pour
le CAPES externe et 2 pour le CAPES interne Pour la langue corse il nrsquoy a pas
de concours cette anneacutee pour lrsquoagreacutegation externe et interne deux pour le
CAPES externe et aucun pour le CAPES interne Pour lrsquooccitan toujours pour
2021 il y a un poste pour lrsquoagreacutegation externe pas de concours pour lrsquoagreacute-
gation interne quatre pour le CAPES externe et un pour le CAPES interne
Ceci eacutetant juste preacuteciseacute il faut agrave preacutesent se concentrer sur lrsquoaction parlemen-
taire de mise en œuvre des dispositions de la Constitution
laquo 1 Le castillan est la langue espagnole officielle de lEacutetat Tous les Espagnols ont le devoir de
le connaicirctre et le droit de lutiliser
2 Les autres langues espagnoles sont aussi officielles dans leurs communauteacutes autonomes
respectives conformeacutement agrave leurs statuts
3 La richesse de la diversiteacute linguistique de lEspagne est un patrimoine culturel qui fait lobjet dun respect et dune protection speacuteciales raquo
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Videacutee drsquoune large part de sa substance en premiegravere lecture par la commission
des affaires culturelles et de leacuteducation de lrsquoAssembleacutee nationale la proposi-
tion de loi du deacuteputeacute Molac a ensuite retrouveacute ses objectifs initiaux gracircce agrave la
proceacutedure parlementaire qui donne agrave notre reacutegime repreacutesentatif tout son
sens discussions en commissions deacutebats en seacuteances publiques navette
amendements multiples pour parvenir agrave une adoption deacutefinitive agrave une majo-
riteacute non importante mais eacutecrasante des voix Agrave quelques heures de la pro-
mulgation de la loi par le Preacutesident de la Reacutepublique une partie de cette mecircme
majoriteacute a neacuteanmoins saisi le Conseil constitutionnel dans le cadre de lrsquoarticle
61 alineacutea 2 de la Constitution
Deacutepocirct de la proposition de loi
Deacuteposeacutee le 30 deacutecembre 2019 par le deacuteputeacute Paul Molac et autres deacuteputeacutes18
la proposition de loi apporte des mesures de protection et de promotion des
langues reacutegionales dans trois domaines le patrimoine lrsquoenseignement les
services publics via la signaleacutetique et les actes drsquoeacutetat civil Elle a eacuteteacute adopteacutee
le 8 avril 2021 par 247 voix pour 76 voix contre et 19 abstentions au terme
de la proceacutedure ci-dessous rappeleacutee
Renvoi agrave la commission des affaires culturelles et de leacuteducation
La proposition de loi a eacuteteacute renvoyeacutee agrave la commission des affaires cultu-
relles et de leacuteducation agrave deacutefaut de constitution drsquoune commission speacuteciale
dans les deacutelais preacutevus par les articles 30 et 31 du Regraveglement Le rapport fait
au nom de la commission par le deacuteputeacute Paul Molac nommeacute par elle a eacuteteacute
enregistreacute agrave la preacutesidence de lrsquoAssembleacutee nationale le 5 feacutevrier 2020 Preacutesenteacute
18 Sylvain BRIAL Jean-Feacutelix ACQUAVIVA Michel CASTELLANI Jean-Michel CLEacuteMENT
Paul-Andreacute COLOMBANI Charles de COURSON Jeanine DUBIEacute Freacutedeacuterique DUMAS Mrsquojid
EL GUERRAB Olivier FALORNI Yannick FAVENNEC BECOT Sandrine JOSSO Franccedilois-Mi-
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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comme un moyen de deacutefendre les laquo langues de France raquo19 en danger et srsquoap-
puyant sur lrsquoexistant qui est la marque drsquoune eacutevolution rappeleacutee plus loin (II)
le texte entend laquo aller plus loin raquo en rehaussant la protection lrsquoaccessibiliteacute et
la visibiliteacute des langues reacutegionales dans les trois domaines preacuteciteacutes
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle premier re-
latif au patrimoine Ce dernier preacutecise en compleacutetant ainsi lrsquoar-
ticle L 1 du code du patrimoine que la conservation et la con-
naissance du patrimoine immateacuteriel sont drsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et que
les langues reacutegionales font partie de ce patrimoine
o La commission a adopteacute sans modifications lrsquoarticle 2 qui pro-
pose drsquoinclure parmi les treacutesors nationaux les biens preacutesentant
un inteacuterecirct majeur pour la connaissance des langues franccedilaise et
reacutegionales Le texte preacutevoit en effet outre pour les langues reacutegio-
nales des mesures de protection de notre patrimoine linguistique
dans une deacutemarche globale
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 3 qui disposait que des con-
ventions passeacutees entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pouvaient preacutevoir que
la langue reacutegionale est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de
lrsquohoraire normal des enseignements (des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires des collegraveges et des lyceacutees des territoires concerneacutes) Il
ne srsquoagissait pourtant que drsquoeacutetendre une regravegle deacutejagrave applicable en
Corse pour lrsquoenseignement de la langue corse lrsquoarticle L 312-11-
1 du code de lrsquoeacuteducation introduit par la loi ndeg 2002-92 du
22 janvier 2002 relative agrave la Corse dispose en effet que la langue
corse est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de lrsquohoraire normal
des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires de Corse Le Conseil cons-
titutionnel nrsquoa pas censureacute cette disposition tant que lrsquoenseigne-
ment eacutetait entendu comme ne revecirctant pas laquo un caractegravere obliga-
toire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo (deacutecision ndeg2001-
454 DC du 17 janvier 2002)
19 Sur cette notion de laquo langues de France raquo voir Les langues de France vingt ans apregraves Glot-topol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 4 qui preacutevoyait que lenseigne-
ment bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale pouvait se reacuteali-
ser sous forme immersive laquo dans le respect des objectifs de maicirc-
trise des deux langues agrave chaque niveau denseignement raquo
o La commission a supprimeacute les articles 5 et 6 de la proposition de
loi Le premier manifestait la volonteacute drsquointroduire au sein drsquoun
nouvel article L 151-4-1 du code de lrsquoeacuteducation une deacuterogation
au principe drsquointerdiction de financement des deacutepenses drsquoinves-
tissement des eacutecoles priveacutees par les collectiviteacutes publiques en fa-
veur de lrsquoenseignement bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale
(article 5 de la proposition de loi) Le second eacutetendait la mecircme
deacuterogation au principe drsquointerdiction de financement des deacute-
penses drsquoinvestissement des collegraveges et lyceacutees par les collectiviteacutes
publiques
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 7 qui preacutevoyait drsquoeacutelargir les
cas dans lesquels existe un droit agrave inscrire son enfant dans une
eacutecole drsquoune autre commune afin qursquoil puisse suivre un enseigne-
ment de langue reacutegionale Inscription qui entraicircnait eacutegalement la
prise en charge du forfait scolaire par la commune de reacutesidence
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle 8 qui a pour
objet de renforcer la place et lrsquousage des langues reacutegionales dans
la vie publique en facilitant la traduction en langue reacutegionale des
inscriptions et signaleacutetiques apposeacutees sur les bacirctiments publics
les voies publiques de circulation et les voies navigables ainsi que
sur les principaux supports de communication institutionnelle
des services publics
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 9 qui avait pour objet la pos-
sibiliteacute pour les services publics drsquoeacutetat civil drsquoutiliser dans les
actes drsquoeacutetat civil qursquoils produisent les signes diacritiques des
langues reacutegionales en usage sur le territoire
o Enfin la commission a eacutegalement supprimeacute lrsquoarticle 10 qui preacute-
voyait un gage pour compenser les charges eacuteventuelles creacuteeacutees par
les dispositions de la proposition de loi
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Crsquoest donc un texte largement laquo eacutepureacute raquo par rapport agrave sa version initiale qui a
eacuteteacute soumis agrave la discussion en seacuteance publique en premiegravere lecture agrave lrsquoAssem-
bleacutee nationale Le porteur de la proposition va naturellement utiliser toutes
les potentialiteacutes offertes par la Constitution pour tenter de revenir par le biais
des amendements agrave son esprit initial
Discussion du texte nordm2654 adopteacute par la commission sur la proposition
de loi de M Paul Molac agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion (2548)
85 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes permettant de revenir sur peu de points
cependant agrave lrsquoobjectif initial de la proposition de loi Ainsi lrsquoamendement ndeg64
deacuteposeacute le 10 feacutevrier 2020 par le deacuteputeacute et rapporteur Paul Molac a permis de
rectifier lrsquoaspect purement deacuteclaratoire de lrsquoarticle premier auquel avait conclu
la commission lrsquoamendement ndeg69 deacuteposeacute le mecircme jour par Paul Molac eacutega-
lement permet lrsquoautorisation dans les actes drsquoeacutetat civil des signes diacritiques
des langues reacutegionales lrsquoamendement ndeg80 toujours deacuteposeacute par Paul Molac
modifie la loi Toubon (article 3 du texte de loi deacutefinitif) Mais agrave ce stade de la
discussion parlementaire le texte eacutetait encore dans une version tregraves eacuteloigneacutee
de sa mouture premiegravere
Adoption le 13 feacutevrier 2020 de la laquo petite loi raquo nordm408 par lAssem-
bleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion
Transmission au Seacutenat de la proposition de loi ndeg321 le 14 feacutevrier
2020
o Travaux en commission La commission de la culture de lrsquoeacuteduca-
tion et de la communication a deacutesigneacute Mme Monique de Marco
rapporteure sur la proposition de loi ndeg321 (2019-2020) adopteacutee
par lAssembleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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des langues reacutegionales et agrave leur promotion Commenccedilant par deacute-
clarer que laquo la question de la promotion des langues reacutegionales
deacutepasse les clivages politiques raquo Monique de Marco a proposeacute en
commission dadopter le texte conforme tout en avouant que des
dispositifs leacutegislatifs laquo plus ambitieux pourraient mieux assurer la
promotion des langues reacutegionales raquo Au cours des discussions le
regret de lrsquoabsence de la question de lrsquoenseignement a eacuteteacute exprimeacute
regret qui concerne en reacutealiteacute non la proposition de loi initiale
mais le texte de la commission de lrsquoAssembleacutee nationale laquo La pro-
position de loi de Paul Molac est la bienvenue parce quelle rap-
pelle agrave lEacutetat un certain nombre de ses obligations en ce quelle
preacutevoit un cadrage de la loi Toubon et quelle seacutecurise la place
des langues dans lespace public En revanche nous avons tous
eacuteteacute surpris par labsence totale de reacutefeacuterence agrave lEacuteducation natio-
nale Nous avons donc fait des recherches qui ont montreacute que les
deacuteputeacutes de la majoriteacute preacutesidentielle certainement agrave lappel du
ministre de leacuteducation nationale avaient systeacutematiquement sup-
primeacute tous les articles concernant lenseignement Nous nous re-
trouvons donc avec une magnifique proposition de loi sur les
langues reacutegionales qui ne dit pas un mot de lenseignement
comme sil pouvait y avoir une politique linguistique en faveur des
langues reacutegionales qui ne passe pas par lenseignement raquo Et le
seacutenateur Max Brisson drsquoen appeler agrave la reacuteinsertion des disposi-
tions sur lrsquoenseignement laquo Ma chegravere collegravegue vous avez proposeacute
un vote conforme mais jespegravere que nous ferons preuve dimagi-
nation dans lheacutemicycle pour deacuteposer quelques amendements qui
rappelleront au Gouvernement quil ny a pas de politique linguis-
tique qui ne sappuie sur leacuteducation Sinon cest de lenfu-
mage raquo20
20 Comptes-rendus de la commission de la culture de lrsquoeacuteducation et de la communication
seacuteance du 2 deacutecembre 2020 httpwwwsenatfrcompte-rendu-commis-
sions20201130culturehtmltoc5
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La rapporteure confirme que laquo lrsquoamputation raquo est le fait des deacutepu-
teacutes et tout en srsquoavouant prudente pousse indirectement ses col-
legravegues seacutenateurs agrave user du droit drsquoamendement laquo Nous venons
dentendre un veacuteritable plaidoyer en faveur des langues reacutegio-
nales Mecircme si cette proposition de loi ne donne pas entiegravere satis-
faction car elle a eacuteteacute largement amputeacutee par lAssembleacutee natio-
nale je preacutefegravere my tenir dans un premier temps par prudence
Et libres agrave vous de deacuteposer des amendements raquo
Aucun amendement nayant eacuteteacute deacuteposeacute en commission le texte
qui en eacutetait issu ne comportait toujours pas de dispositions rela-
tives agrave lenseignement
o Seacuteance publique Vingt amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes notam-
ment celui (deacuteposeacute agrave lidentique par des seacutenateurs issus de six
groupes diffeacuterents) preacutevoyant drsquoinseacuterer agrave lrsquoarticle L 442-5-1 du
code de lrsquoeacuteducation un alineacutea ainsi reacutedigeacute laquo La participation fi-
nanciegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un
enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle
L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence
et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune
autre commune agrave la condition que la commune de reacutesidence ne
dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegio-
nale raquo
Sans surprise lrsquoavis du Gouvernement exprimeacute par le ministre
Jean-Michel Blanquer fut deacutefavorable regrettant au passage
laquo drsquoecirctre sans cesse obligeacute drsquooccuper la position du jacobin reacutetif
sur la deacutefensive alors mecircme que nous avons une politique de pro-
motion des langues reacutegionales Simplement agrave certains moments
ndash par exemple avec la rupture de lrsquoeacutequilibre entre enseignement
public et enseignement priveacute ou avec la creacuteation drsquoune obligation
suppleacutementaire pour les communes ndash les propositions vont trop
loin et cela conduit agrave me placer face aux geacuteneacuterositeacutes diverses
dans la position deacutesagreacuteable du gardien des principes ou dans
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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celle du gardien de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral En effet derriegravere ces deacutebats
se pose la question de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et de la posteacuteriteacute de la loi
Carle car vous risquez de creacuteer un deacuteseacutequilibre alors que cette loi
repreacutesentait un point drsquoeacutequilibre raquo21
o Adoption du texte ndeg32 modifieacute par le Seacutenat le 10 deacutecembre 2020
Le Seacutenat a adopteacute trois articles additionnels (2 ter 2 quater et
2 quinquies) qui rejoignent les positions du deacuteputeacute Paul Molac et
reacutetablit lrsquoarticle 3 (modifieacute) de la proposition de loi qui avait eacuteteacute
supprimeacute en premiegravere lecture agrave lrsquoAssembleacutee nationale
Deuxiegraveme lecture
o Rapport sur la proposition de loi modifieacutee par le Seacutenat relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promo-
tion (ndeg3658) ndeg4035 Sur les six articles supprimeacutes agrave lrsquoAssem-
bleacutee lrsquoarticle 3 a eacuteteacute reacutetabli au Seacutenat qui a par ailleurs adopteacute
trois articles additionnels (2 ter 2 quater et 2 quinquies) Lrsquoen-
semble eacutetant conforme agrave lrsquoesprit de la proposition de loi initiale le
rapporteur souhaite que lrsquoAssembleacutee nationale adopte en deu-
xiegraveme lecture un texte identique agrave celui voteacute par le Seacutenat pour
les quatre articles restant en discussion et nrsquoa donc pas preacutesenteacute
drsquoamendements Mais lrsquoarticle 2 quinquies (article 6 du texte deacute-
finitif) ayant eacuteteacute supprimeacute en commission 16 amendements deacute-
poseacutes agrave lrsquoidentique par 115 deacuteputeacutes membres de huit diffeacuterents
groupes parlementaires ont permis de le reacuteintroduire en seacuteance
o Discussion en seacuteance publique le 8 avril 2021 au cours de la-
quelle 262 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes
o Adoption deacutefinitive le 8 avril 2021 en deuxiegraveme lecture de la
proposition de loi TA nordm591 relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
21 Compte rendu inteacutegral des deacutebats Seacuteance du 10 deacutecembre 2020 httpwwwse-natfrseancess202012s20201210s20201210007htmlsection708
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Saisine du Conseil constitutionnel du 22 avril 2021 par au moins
soixante deacuteputeacutes en application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitu-
tion
Soit un jour avant que nrsquoexpire le deacutelai de saisine du Conseil constitu-
tionnel la promulgation de la loi par le preacutesident de la Reacutepublique devant
intervenir dans les 15 jours de lrsquoadoption deacutefinitive La saisine du Conseil
constitutionnel est un acte non grave mais solennel qui perturbe le temps
leacutegislatif ne serait-ce que pour cette raison elle meacuterite un soin particulier
Soin envers lrsquoinstitution agrave laquelle elle srsquoadresse et agrave qui elle impose des
charges suppleacutementaires soin envers la Constitution qursquoelle entend pro-
teacuteger La lettre de saisine ou du moins la version qui a circuleacute manifeste-
ment reacutedigeacutee agrave la hacircte nrsquoest pas agrave la hauteur du seacuterieux qursquoexige de ma-
niegravere impeacuterieuse cette deacutemarche Une lettre de saisine ne saurait se limiter
agrave invoquer en tregraves peu de lignes la violation de laquo principes constitutionnels raquo
sans que ceux-ci ne soient deacutetailleacutes ni mecircme indiqueacutes Le seul article mis
en cause est lrsquoarticle 6 de la loi qui modifie lrsquoarticle L 442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation
II Discussion de la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la loi
relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Les deacuteputeacutes auteurs de la saisine demandent au Conseil constitutionnel la
censure de lrsquoarticle 6 de la loi
laquo Les sixiegraveme et septiegraveme alineacuteas de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacutedu-
cation sont remplaceacutes par un alineacutea ainsi reacutedigeacute
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacuteta-
blissements priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispen-
sant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L
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312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacuteta-
blissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune
agrave la condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dis-
pensant un enseignement de langue reacutegionale raquo
Une commune dont aucune eacutecole ne propose denseignement de langue reacutegio-
nale devrait donc participer aux frais de scolarisation des enfants domicilieacutes
sur son territoire qui suivent un tel enseignement dans un eacutetablissement situeacute
sur une autre commune Le dispositif concerne les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat drsquoassociation qui sont dans les faits majoritaire-
ment associatifs et laiumlques Cet enseignement peut aussi concerner les eacuteta-
blissements confessionnels mais il faut drsquoembleacutee preacuteciser que comme lrsquoa jugeacute
le Conseil constitutionnel dans son examen de la loi dite laquo Carle raquo le principe
de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute pour le leacutegislateur de preacutevoir la
participation des collectiviteacutes publiques au financement du fonctionnement
des eacutetablissements denseignement priveacute sous contrat dassociation
laquo Consideacuterant quil reacutesulte des regravegles ou principes agrave valeur constitution-
nelle (hellip) que le principe de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute
pour le leacutegislateur de preacutevoir sous reacuteserve de fonder son appreacuteciation
sur des critegraveres objectifs et rationnels la participation des collectiviteacutes
publiques au financement du fonctionnement des eacutetablissements den-
seignement priveacutes sous contrat dassociation selon la nature et limpor-
tance de leur contribution agrave laccomplissement de missions denseigne-
ment raquo (deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 cons 6)
Lrsquoinstauration du laquo forfait scolaire communal raquo ne poursuit pas un objectif de
sanction financiegravere des communes deacutemunies doffre en langue reacutegionale mais
celui de les inciter agrave en proposer Drsquoailleurs lrsquoarticle premier de la loi deacutefeacutereacutee
souligne que laquo LrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales concourent agrave lrsquoenseigne-
ment agrave la diffusion et agrave la promotion de ces langues raquo Comme preacuteciseacute plus
loin les maires sont dispenseacutes du paiement drsquoun tel forfait degraves lors qursquoun
enseignement drsquoune langue reacutegionale y compris au titre drsquoune simple initia-
tion est proposeacute dans leur commune
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Il faut souligner que les articles relatifs agrave lrsquoenseignement ont eacuteteacute introduits par
les seacutenateurs Plus exactement ces derniers ont reacuteintroduit la disposition qui
autorise la conclusion de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pour eacutetendre
lrsquooffre drsquoenseignement en langue reacutegionale aux eacutetablissements publics dans le
cadre horaire normal sous des formes speacutecifiques et inseacutereacute trois articles un
premier autorise lrsquoenseignement dit laquo immersif raquo en langue reacutegionale un deu-
xiegraveme le forfait scolaire communal dont il est ici question un troisiegraveme est
relatif agrave lenseignement des langues reacutegionales agrave Mayotte territoire qui du fait
de sa deacutepartementalisation reacutecente ne pouvait jusqualors pas beacuteneacuteficier des
possibiliteacutes offertes aux autres deacutepartements concernant lenseignement de
ces langues
Trois remarques doivent ecirctre faites sur lrsquoinsertion relative agrave lrsquoenseignement des
langues reacutegionales lors des horaires normaux Premiegraverement cette disposition
existe deacutejagrave pour la Collectiviteacute de Corse deuxiegravemement cet enseignement
doit se faire moyennant un accord entre lrsquoEacutetat et les reacutegions (laquo dans le cadre
de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions la collectiviteacute de Corse la Collectiviteacute
europeacuteenne drsquoAlsace ou les collectiviteacutes territoriales reacutegies par lrsquoarticle 73 de
la Constitution raquo) troisiegravemement il srsquoagit drsquoune option facultative qursquoin fine
les familles deacutecident ou non de prendre
En reacutesumeacute et conclusion la disposition de lrsquoarticle 3
1 Existe deacutejagrave pour une collectiviteacute en lrsquooccurrence la collectiviteacute de Corse
2 Est strictement encadreacutee (existence drsquoun accord entre lrsquoEacutetat et les reacute-
gions)
3 Est conforme agrave la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le ca-
ractegravere facultatif de lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale Dans sa deacute-
cision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi relative agrave la Corse le
Conseil constitutionnel a fixeacute le cadre de lrsquoenseignement drsquoune langue
reacutegionale dans le cadre de lrsquohoraire normal en consideacuterant que laquo si lrsquoen-
seignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquohoraire nor-
mal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir pour
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autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les ensei-
gnants qursquoil ne saurait non plus avoir pour effet de soustraire les eacutelegraveves
aux droits et obligations applicables agrave lrsquoensemble des usagers des eacuteta-
blissements qui assurent le service public de lrsquoenseignement ou sont
associeacutes agrave celui‑ci Consideacuterant qursquoil reacutesulte de ce qui preacutecegravede que sous
reacuteserve que lrsquoenseignement de la langue corse revecircte tant dans son prin-
cipe que dans ses modaliteacutes de mise en œuvre un caractegravere facultatif
[cette disposition] nrsquoest contraire ni au principe drsquoeacutegaliteacute ni agrave aucun
autre principe ou regravegle de valeur constitutionnelle raquo (cons 24 et 25)
La loi du 8 avril 2021 ne propose pas autre chose et srsquoinscrit en tous
points sur cette ligne deacutejagrave jugeacutee par le Conseil constitutionnel
Lrsquoarticle 6 srsquoinsegravere de maniegravere logique et coheacuterente dans lrsquoensemble des articles
de la loi relative agrave lrsquoenseignement Avant drsquoen examiner dans les deacutetails la
conformiteacute agrave la Constitution il faut souligner que le Seacutenat a deacutejagrave voteacute le prin-
cipe de ce forfait scolaire communal agrave deux reprises
1 Il lrsquoa drsquoabord inseacutereacute dans le projet de loi pour une eacutecole de la confiance
en premiegravere lecture Crsquoest la commission mixte paritaire qui a ajouteacute les
mots laquo contribution volontaire raquo ocirctant au forfait son caractegravere obliga-
toire22
2 Il a reacuteaffirmeacute sa position lors de lrsquoexamen de la proposition de loi ici
discuteacutee supprimant les mots laquo contribution volontaire raquo de la loi en vi-
gueur
Agrave cet argument deacutemocratique respectueux du bicameacuteralisme et rappelant que
le Seacutenat laquo assure la repreacutesentation des collectiviteacutes territoriales de la Reacutepu-
22 Loi ndeg2019-791 du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance JORF ndeg0174 du 28 juillet
2019
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Primo cet article est en coheacuterence avec la leacutegislation existante en matiegravere drsquoen-
seignement des langues reacutegionales agrave lrsquoeacutecole confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute
juridique (A) Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contrevien-
nent pas au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des langues
reacutegionales affirmeacute par le Conseil constitutionnel (B) Tertio la loi ne porte pas
atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur une commune une nouvelle
charge (C) Quarto elle ne viole pas non plus en conseacutequence le principe de
libre administration des collectiviteacutes territoriales (D)
A Forfait scolaire communal et respect de lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique
Cette exigence bien que non explicitement qualifieacutee de principe consti-
tutionnel par le Conseil constitutionnel se rattache notamment agrave la notion de
laquo garantie des droits raquo inscrite agrave lrsquoarticle 16 de la Deacuteclaration de 1789 laquo Toute
socieacuteteacute dans laquelle la garantie des droits nrsquoest pas assureacutee ni la seacuteparation
des pouvoirs deacutetermineacutee nrsquoa point de constitution raquo Deacutecoulant de lrsquoarticle 34
de la Constitution la clarteacute de la loi est un eacuteleacutement essentiel de la seacutecuriteacute
juridique agrave laquelle la jurisprudence du Conseil constitutionnel a offert corps
et protection Aussi le principe de laccessibiliteacute et de lintelligibiliteacute de la loi a-
t-il eacuteteacute eacuterigeacute en objectif de valeur constitutionnelle (deacutecision ndeg99-421 DC du
16 deacutecembre 1999)
Mecircme si les principes de clarteacute drsquoaccessibiliteacute et drsquointelligibiliteacute de la loi per-
mettent avant tout drsquoimposer au leacutegislateur laquo drsquoadopter des dispositions suffi-
samment preacutecises et des formules non eacutequivoques afin de preacutemunir les sujets
de droit contre une interpreacutetation contraire agrave la Constitution ou contre le
risque drsquoarbitraire raquo (deacutecision ndeg2004-500 DC du 29 juillet 2004 cons 13) ils
concourent aussi agrave offrir aux citoyens la seacutecuriteacute juridique neacutee drsquoune cons-
truction drsquoensemble coheacuterente et sans rupture Laquelle se base depuis 2008
sur une disposition claire et sans ambiguiumlteacute de la Constitution laquo Les langues
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reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo (75-1) Elle est une in-
vitation aux repreacutesentants de leacutegifeacuterer pour proteacuteger et promouvoir lesdites
langues et la loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit dans la continuiteacute de ce qursquoils ont fait depuis
2008 notamment La coheacuterence est lrsquoune des artegraveres essentielles de lrsquoexigence
de seacutecuriteacute juridique qui impregravegne la jurisprudence du Conseil constitution-
nelle comme celle du Conseil drsquoEacutetat et de la Cour de cassation Sans ecirctre ex-
plicitement eacutenonceacutee par le Conseil constitutionnel lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique est laquo efficiente raquo23 et est au cœur des preacuteoccupations des juges24 comme
de la doctrine Les Cahiers du Conseil constitutionnel lui consacrant un dossier
speacutecial dans sa livraison drsquooctobre 202025
La loi soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel reacutepond agrave lrsquoexigence de
seacutecuriteacute juridique en eacutetant le prolongement de lrsquoœuvre anteacuterieure du leacutegisla-
teur pour commencer la loi du 8 juillet 2013 drsquoorientation et de programma-
tion pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique qui reconnaicirct lrsquoenseigne-
ment bilingue franccedilais langue reacutegionale Dans lrsquoannexe de la loi figurent cinq
mentions compleacutementaires notamment celle concernant la possibiliteacute de
srsquoinscrire dans une eacutecole publique drsquoune autre commune lorsque la commune
de reacutesidence ne propose pas drsquoenseignement de langue reacutegionale Disposition
deacuteclarative qui a trouveacute une application concregravete dans la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) la parti-
cipation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes dans lrsquoenseigne-
ment public doit deacutesormais faire lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune drsquoac-
cueil et la commune de reacutesidence26
La loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle a
ajouteacute un nouveau motif de discrimination baseacute sur laquo la maitrise drsquoune autre
23 Bertrand Mathieu laquo La seacutecuriteacute juridique un principe clandestin mais efficient raquo Droit constitutionnel Meacutelanges Patrice Geacutelard LGDJ 1999 pp 301-305 24 En teacutemoigne notamment le fait que le Conseil drsquoEacutetat lui ait consacreacute deux rapports annuels celui de 1991 De la seacutecuriteacute juridique et celui de 2006 Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit 25 Dossier La seacutecuriteacute juridique Titre VII Les Cahiers du Conseil constitutionnel ndeg5 octobre
2020 26 Lrsquoarticle 104 de la loi NOTRe consacre par ailleurs la compeacutetence partageacutee des collectiviteacutes
locales dans la promotion des langues reacutegionales tout en donnant une place preacutepondeacuterante
agrave la reacutegion telle que preacutevue agrave lrsquoarticle 1er de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de lrsquoaction publique territoriale et drsquoaffirmation des meacutetropoles (MAPTAM)
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langue que le franccedilais raquo qui concerne eacutegalement les langues reacutegionales Celle
du 28 feacutevrier 2017 de programmation relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend
inopeacuterant le deacutecret du 2 Thermidor an II sur lequel se basait notamment le
ministegravere de la justice pour interdire les livrets de famille bilingues Enfin
lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance vient eacutetendre
aux eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives une laquo contribution volontaire raquo
des communes pour la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoins-
crivant dans une eacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionale en
dehors de sa commune de reacutesidence
La loi du 8 avril 2021 soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel nrsquoest que
le prolongement et le compleacutement de lrsquoarticle L 212-8 du Code de lrsquoeacuteducation
qui preacutecise les conditions dans lesquelles pour lrsquoenseignement public une
commune doit contribuer au financement des deacutepenses scolaires drsquoun enfant
reacutesidant sur son territoire et scolariseacute dans une autre commune Elle vient le
compleacuteter de maniegravere parallegravele eacutetendant ce qui existe deacutejagrave pour lrsquoeacutecole pu-
blique agrave lrsquoeacutecole priveacutee sous contrat Confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
elle ne viole par ailleurs aucun article de la Constitution et ne contredit pas
la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le caractegravere facultatif de lrsquoen-
seignement des langues reacutegionales
B Forfait scolaire communal et respect de la jurisprudence du Conseil
constitutionnel sur la langue franccedilaise
Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contreviennent pas
agrave lrsquoarticle 2 alineacutea premier de la Constitution (laquo La langue de la Reacutepublique est
le Franccedilais raquo) et au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des
langues reacutegionales qui en deacutecoule affirmeacute par le Conseil constitutionnel La
langue de la Reacutepublique est et demeure le Franccedilais et agrave aucun moment la
loi du 8 avril 2021 nrsquoentend y porter atteinte Lrsquoapprentissage des langues reacute-
gionales se fait agrave ses cocircteacutes mais dans une mesure permettant leffectiviteacute pour
les enfants agrave acceacuteder agrave lenseignement des langues reacutegionales laquo patrimoine de
la France raquo selon les termes de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Apprentissage
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qui pour certains enfants est lrsquoun des eacuteleacutements de leur laquo deacuteveloppement raquo au
sens de lrsquoalineacutea 10 du Preacuteambule de la Constitution du 27 octobre 1946 (laquo La
Nation assure agrave lrsquoindividu et agrave la familles les conditions neacutecessaires agrave leur
deacuteveloppement raquo)
Ce que creacutee lrsquoarticle 6 agrave travers le forfait ce nrsquoest pas lrsquoenseignement obligatoire
de la langue reacutegionale mais la possibiliteacute de pouvoir beacuteneacuteficier de cet enseigne-
ment (sans prescription de deacutelai) qui demeure facultatif Le rapporteur Paul
Molac le reacuteaffirme au cours de la seacuteance publique du 8 avril 2021 laquo Je ne
suis pas favorable au caractegravere obligatoire de cet enseignement mais je consi-
degravere que tout eacutelegraveve qui souhaite le suivre doit pouvoir le faire raquo27
Ce faisant la loi sans contrevenir agrave la Constitution offre un contenu agrave son
article 75-1 La jurisprudence du Conseil constitutionnel en vertu de laquelle
lrsquoenseignement des langues reacutegionales nrsquoa qursquoun caractegravere facultatif nrsquoest ici
absolument pas remise en cause Dans sa deacutecision ndeg99-412 DC du 15 juin
1999 il a souligneacute que le principe drsquouniciteacute du peuple franccedilais et lrsquoindivisibiliteacute
de la Reacutepublique assurant lrsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi srsquoopposaient agrave laquo
ce que soient reconnus des droits collectifs agrave quelque groupe que ce soit deacutefini
par une communauteacute drsquoorigine de culture de langue ou de croyance raquo En
outre la langue de la Reacutepublique eacutetant le franccedilais il ne peut ecirctre reconnu un
laquo droit agrave pratiquer une langue autre que le franccedilais non seulement dans la vie
priveacutee mais eacutegalement dans la vie publique agrave laquelle la Charte rattache
la justice et les autoriteacutes administratives et services publics raquo
Deux remarques srsquoimposent drsquoembleacutee drsquoune part cette jurisprudence est an-
teacuterieure agrave lrsquoinsertion en 2008 par le pouvoir constituant de lrsquoarticle 75-1 dis-
posant que laquo les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France
raquo Cette remarque drsquoordre contextuel vient srsquoajouter agrave la suivante drsquoautre part
27 Assembleacutee nationale XVe leacutegislature Session ordinaire de 2020-2021 Seacuteance du jeudi 08
avril 2021 httpswwwassemblee-nationalefrdyn15comptes-rendusseancesession-
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la loi du 8 avril 2021 nrsquoentend pas confier agrave lrsquoenseignement des langues reacutegio-
nales un caractegravere obligatoire En cela elle respecte la jurisprudence du Con-
seil constitutionnel preacuteciteacutee (deacutecision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi
relative agrave la Corse)
laquo Si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquoho-
raire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir
pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les en-
seignants (hellip) raquo (cons 24)
Lrsquoenseignement drsquoune langue minoritaire ne devient donc en aucun cas obli-
gatoire Ce qui doit faire laquo lrsquoobjet drsquoun accord raquo ce sont les conditions permet-
tant effectivement agrave des enfants drsquoacceacuteder agrave un enseignement facultatif qui
contribue agrave leur deacuteveloppement proteacutegeacute par ailleurs par lrsquoalineacutea 10 du Preacuteam-
bule de 1946 preacuteciteacute Ni la Constitution ni son interpreacutetation par le Conseil
constitutionnel ne srsquoopposent agrave ce qursquoune commune de reacutesidence participe y
compris de maniegravere obligatoire au financement de la scolarisation dans une
autre commune des enfants souhaitant suivre un tel enseignement Crsquoest don-
ner aux enfants et aux parents de maniegravere effective et efficiente la possibiliteacute
concregravete de beacuteneacuteficier drsquoun enseignement drsquoune langue reacutegionale composante
de leur laquo deacuteveloppement raquo laquelle appartient en vertu de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution au laquo patrimoine de la France raquo
C Forfait scolaire communal et respect du principe drsquoeacutegaliteacute
Tertio la loi ne contrevient pas au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur
une commune une nouvelle charge
Conformeacutement agrave une jurisprudence du Conseil constitutionnel bien eacutetablie le
principe deacutegaliteacute de lrsquoarticle 6 de la Deacuteclaration des droits de lhomme et du
citoyen de 1789 laquo ne soppose ni agrave ce que le leacutegislateur regravegle de faccedilon diffeacuterente
des situations diffeacuterentes ni agrave ce quil deacuteroge agrave leacutegaliteacute pour des raisons
dinteacuterecirct geacuteneacuteral pourvu que dans lun et lautre cas la diffeacuterence de traite-
ment qui en reacutesulte soit en rapport direct avec lobjet de la loi qui leacutetablit raquo
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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(pour lrsquoune des reacutecentes application au domaine de lrsquoenseignement dont il sera
ici question deacutecision ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de
la confiance)
En ce qui concerne preacuteciseacutement le caractegravere obligatoire drsquoune nouvelle charge
pour une collectiviteacute celui-ci nrsquoa pas eacuteteacute censureacute par le Conseil constitutionnel
agrave propos de lrsquoexamen de la loi sur lrsquoavenir de lrsquoeacutecole preacuteciteacutee (deacutecision ndeg 2019-
787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de la confiance) Lrsquoarticle 17 de
la loi alors deacutefeacutereacute au Conseil constitutionnel preacutevoyait dans son premier ali-
neacutea
laquo LrsquoEacutetat attribue de maniegravere peacuterenne agrave chaque commune les ressources
correspondant agrave lrsquoaugmentation des deacutepenses obligatoires qursquoelle a
prises en charge en application des articles L 212-4 L 212-5 et L 442-
5 du code de lrsquoeacuteducation au titre de lrsquoanneacutee scolaire 2019-2020 par rap-
port agrave lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 dans la limite de la part drsquoaugmenta-
tion reacutesultant directement de lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoins-
truction obligatoire raquo
Les deacutepenses qui font lrsquoobjet de lrsquoaccompagnement financier en cause sont
celles qui beacuteneacuteficient aux eacutecoles publiques et aux eacutetablissements drsquoenseigne-
ment priveacutes ayant passeacute un contrat drsquoassociation avec lrsquoEacutetat
Lrsquoabaissement agrave trois ans du deacutebut de lrsquoinstruction obligatoire a donc fait pe-
ser des charges nouvelles pour les communes et leur a mecircme imposeacute de par-
ticiper au financement des eacutecoles maternelles priveacutees sous contrat y compris
lorsqursquoelles nrsquoont pas approuveacute ce contrat La diffeacuterence de traitement entre
les communes est reacuteelle selon qursquoelles financcedilaient ou non des classes mater-
nelles avant lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoinstruction obligatoire mais
nrsquoentraicircne pas pour autant une rupture drsquoeacutegaliteacute
Ainsi lrsquoa jugeacute le Conseil constitutionnel dans la deacutecision preacuteciteacutee drsquoune part
il a estimeacute que cette diffeacuterence de traitement reposait sur une diffeacuterence de
situation
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laquo Les communes qui au cours de lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 avaient
institueacute des classes maternelles ou eacutecoles maternelles publiques ou ap-
prouveacute des contrats drsquoassociation drsquoeacutecoles maternelles priveacutees ont con-
tribueacute agrave ce titre agrave leur financement dans les conditions preacutevues par le
code de lrsquoeacuteducation Ces communes ne sont ainsi pas placeacutees dans une
situation identique agrave celle des autres communes qui nrsquoexerccedilaient pas
deacutejagrave les mecircmes compeacutetences et ne supportaient donc pas les charges
correspondantes raquo (cons 7)
Drsquoautre part le Conseil constitutionnel a jugeacute que la diffeacuterence de traitement
contesteacutee eacutetait en rapport direct avec lrsquoobjet de la loi qui lrsquoeacutetablit
laquo Qui consiste en application de la seconde phrase du quatriegraveme alineacutea
de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution agrave accompagner de ressources finan-
ciegraveres une extension de compeacutetence ayant pour conseacutequence drsquoaugmen-
ter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales raquo (cons 8)
Agrave lrsquoargument opposeacute agrave lrsquoarticle 6 de la loi deacutefeacutereacutee selon lequel ces dispositions
creacuteeraient une diffeacuterence de traitement entre les communes contraire au prin-
cipe deacutegaliteacute devant la loi le Conseil constitutionnel en vertu de sa jurispru-
dence Loi pour une eacutecole de la confiance devrait logiquement apporter la mecircme
reacuteponse Le leacutegislateur entend avec cette loi du 8 avril 2021 donner de ma-
niegravere geacuteneacuterale effectiviteacute agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution agrave travers en par-
ticulier un outil permettant de mettre en œuvre les dispositions de lrsquoarticle 72-
2 de la Constitution relatives aux extensions de compeacutetences imposeacutees aux
collectiviteacutes territoriales Dispositions qui par ailleurs nrsquoobligent pas le leacutegi-
slateur agrave preacutevoir un accompagnement financier de lrsquoensemble des communes
En lien avec cet argument il en reacutesulte que lrsquoarticle 6 ne porte pas atteinte
par ailleurs au principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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D Forfait scolaire communal et respect du principe de libre administra-
tion des collectiviteacutes territoriales
Quarto le forfait scolaire communal nrsquoest ni contraire agrave la lettre de lrsquoar-
ticle 72 de la Constitution ni agrave son interpreacutetation par le Conseil constitution-
nel
En vertu de lrsquoarticle 72 alineacutea 3 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales
srsquoadministrent librement dans les conditions preacutevues par la loi Correacutelative-
ment lrsquoarticle 34 de la Constitution donne agrave la loi compeacutetence pour deacuteterminer
laquo les principes fondamentaux (hellip) de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales de leurs compeacutetences et de leurs ressources raquo Cette libre admi-
nistration doit en outre se concilier avec drsquoautres principes constitutionnels
tels que le principe drsquoeacutegaliteacute et la liberteacute de lrsquoenseignement Crsquoest ainsi que le
Conseil constitutionnel a jugeacute que laquo si le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacute-
gislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce que les conditions essentielles drsquoap-
plication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de lrsquoenseignement deacutepen-
dent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre
les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (voir notamment la deacutecisions ndeg84-
185 DC du 18 janvier 1985 cons 18)
La libre administration est bien un principe constitutionnel mais crsquoest au leacute-
gislateur qursquoil revient sous le controcircle du Conseil constitutionnel drsquoen preacuteci-
ser le contenu Lrsquointervention du leacutegislateur est neacutecessaire pour la deacutefinition
des regravegles de fonctionnement des collectiviteacutes territoriales la deacutefinition des
compeacutetences qui leur sont deacutevolues (transfert creacuteation extension des compeacute-
tences) et en matiegravere de ressources la fixation du taux des impocircts deacutecideacutes par
les Assembleacutees deacutelibeacuteratives locales
Il ressort de la jurisprudence administrative et constitutionnelle que seule la
loi peut creacuteer une obligationsujeacutetion nouvelle agrave la charge drsquoune collectiviteacute
territoriale Le principe de libre administration ne peut donc pas exister en-
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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dehors de lrsquointervention du leacutegislateur lequel nrsquoa pas pour autant toute lati-
tude En drsquoautres termes le principe de libre administration est deacutefini par la
loi mais est aussi proteacutegeacute contre elle qui ne peut notamment pas porter at-
teinte au-delagrave drsquoun certain seuil aux ressources des collectiviteacutes territoriales
restreindre la liberteacute contractuelle intervenir dans les deacutecisions des collecti-
viteacutes territoriales relatives agrave leurs agents ou le fonctionnement de leurs insti-
tutions
En eacutetendant la prise en charge du forfait scolaire communal la loi deacutefeacutereacutee creacutee
une charge suppleacutementaire pour certaines communes
Aux termes du quatriegraveme alineacutea de larticle 72-2 de la Constitution laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales saccom-
pagne de lattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consa-
creacutees agrave leur exercice Toute creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour
conseacutequence daugmenter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales est ac-
compagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Dans le cas ougrave le leacutegislateur
octroie une nouvelle compeacutetence aux collectiviteacutes territoriales (articles 72-2 de
la Constitution et L 1614-1-1 du code geacuteneacuteral des collectiviteacutes territoriales)
il accompagne cette creacuteation de ressources correspondantes uniquement si
lexercice de cette compeacutetence est rendu obligatoire Ainsi en a jugeacute le Conseil
constitutionnel en ajoutant que le leacutegislateur disposait dun pouvoir dappreacute-
ciation en la matiegravere la compensation devant ecirctre naturellement suffisante
pour ne pas constituer une entrave au principe de libre administration
laquo Que ces dispositions ne visent en ce qui concerne les creacuteations et ex-
tensions de compeacutetences que celles qui preacutesentent un caractegravere obliga-
toire que dans cette hypothegravese il nest fait obligation au leacutegislateur
que daccompagner ces creacuteations ou extensions de compeacutetences de res-
sources dont il lui appartient dappreacutecier le niveau sans toutefois deacutena-
turer le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales raquo
(deacutecision ndeg2008-569 DC du 7 aoucirct 2008 Loi instituant un droit daccueil
pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires pendant le temps
scolaire cons 13)
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Le Conseil constitutionnel a jugeacute qursquoen conseacutequence et en lrsquoespegravece le leacutegisla-
teur avait suffisamment deacutetermineacute le niveau des ressources accompagnant la
creacuteation de ce service daccueil pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires pendant le temps scolaire sans meacuteconnaicirctre le quatriegraveme alineacutea de
larticle 72-2 de la Constitution
Lextension de compeacutetences est soumise a fortiori au mecircme reacutegime que la
creacuteation de compeacutetences Elle consiste en leacutelargissement du peacuterimegravetre ou en
la modification de la nature ou de lobjet dune compeacutetence dont lexercice est
deacutejagrave assureacute par les collectiviteacutes territoriales ayant pour conseacutequence de creacuteer
une charge suppleacutementaire pour celles-ci Le droit agrave une compensation finan-
ciegravere nest garanti que si lextension preacutesente un caractegravere obligatoire et le
leacutegislateur en deacutetermine le niveau et les modaliteacutes agrave condition quils nentra-
vent pas la libre administration des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece le principe de libre administration nrsquoest donc pas violeacute par le ca-
ractegravere contraignant que confegravererait la loi deacutefeacutereacutee au forfait scolaire communal
de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation Drsquoune part le Conseil constitu-
tionnel a deacutejagrave comme souligneacute plus haut accepteacute le principe du caractegravere
obligatoire drsquoune nouvelle charge qui nrsquoentraine par ailleurs mecircme pas
lrsquoautomaticiteacute drsquoun accompagnement financier des communes Drsquoautre part
lrsquoargument de proportionnaliteacute est ici deacuteterminant agrave ceux qui avancent un
risque drsquoassegravechement financier de certaines communes rurales contraintes
de prendre en charge la scolarisation dun eacutelegraveve dans une autre commune
mieux doteacutee qui propose lenseignement de la langue reacutegionale (ce qui selon
le deacuteputeacute Molac ne concernerait que 002 des enfants en France) il faut
reacutepondre en mettant en avant lrsquoobjectif incitatif et non sanctionnateur de la
loi Il suffira auxdites communes de proposer un enseignement de langue reacute-
gionale qui ne pourrait repreacutesenter qursquoune heure drsquoinitiation par semaine par
exemple
Une heure drsquoinitiation par semaine pour eacuteviter de payer le forfait scolaire com-
munal lequel ne meacuteconnait pas par ailleurs lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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les principes constitutionnels drsquoeacutegaliteacute drsquouniciteacute de la langue franccedilaise de la
libre administration des collectiviteacutes territoriales et permet drsquoassurer le deacuteve-
loppement de lrsquoenfant crsquoest bien peu de choses pour censurer une loi souve-
raine adopteacutee qui plus est agrave une eacutecrasante majoriteacute
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
De Raphaeumll SchellenbergerA GreffeObjet Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues ReacutegionalesDate mardi 4 mai 2021 101012Piegraveces jointes Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionalespdf
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loirelative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus desoixante deacuteputeacutes ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texteen application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarerlrsquoinconstitutionnaliteacute de son article 6 Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons ennotre qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre lapleine constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sensNous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notreconsideacuteration respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire
- Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
- Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche
- Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret
- Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne
- Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte
- Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor
- David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion
- Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme
- Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne
- Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2
Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
3
On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
- Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie
- Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
Ce message ainsi que les piegraveces jointes sont eacutetablis sous la seule responsabiliteacute de lexpeacutediteur agrave lintention exclusive de ses destinataires ils peuvent contenir des informations confidentielles Toute publication utilisation ou diffusion doit ecirctre autoriseacutee preacutealablement Ce message a fait lobjet dun traitement anti-virusIl est rappeleacute que tout message eacutelectronique est susceptible dalteacuteration au cours de son acheminement sur Internet ________________________________________________________________
Vous pouvez consulter le site de lAssembleacutee nationale agrave ladresse suivante httpwwwassemblee-nationalefr
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M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
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Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
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On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Association ESKOLIMChez Seaska Route de la Pouponniegravere64250 CAMBO LES BAINSeskolim6gmailcomRepreacutesenteacutee par son President Jean Seacutebastien HAYDN11 chemin de Saint Jean66240 SAINT ESTEVE
CONTRIBUTION EXTERIEURE
Observations sur la conformiteacute agrave la Constitution de laproposition de loi relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
Monsieur le Preacutesident du Conseil constitutionnel Mesdames et Messieurs les
membres du Conseil constitutionnel lrsquoassociation Eskolim souhaite porter agrave votre attention
les observations suivantes tendant agrave deacutemontrer la conformiteacute agrave la Constitution de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Parmi lrsquoensemble des dispositions du texte deacutefeacutereacute la plupart nrsquoont donneacute lieu agrave aucun
deacutebat sur leur conformiteacute agrave la Constitution qui est de toute eacutevidence acquise par exemple au
sujet des traductions dont la constitutionnaliteacute a deacutejagrave indirectement eacuteteacute reconnue (CC 99-412
DC 15 juin 1999 CC ndeg2001-452 DC 6 deacutecembre 2001) ou de lrsquoutilisation des signes
diacritiques sur les actes drsquoeacutetat civil
De plus au-delagrave des apparences drsquoune politique jurisprudentielle initieacutee dans un contexte
speacutecifique le Conseil constitutionnel dispose deacutesormais drsquoun cadre constitutionnel de
reacutefeacuterence transformeacute (1) qui lui permettra de valider les dispositions leacutegislatives du texte dont
il est saisi en particulier lrsquoarticle 4 relatif agrave lrsquoenseignement immersif (2) et lrsquoarticle 6 au sujet
de la participation financiegravere agrave la scolarisation par les communes de reacutesidence (3)
1
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
1 Le renouvellement des normes constitutionnelles de reacutefeacuterence en matiegravere de
langues reacutegionales
11 Les ineacutevitables deacuterogations apporteacutees agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution
Toute regravegle constitutionnelle connaicirct des atteacutenuations et peut ecirctre concilieacutee lrsquoarticle 2
de la Constitution ne fait pas exception Le principe demeure inchangeacute laquo La langue de la
Reacutepublique est le franccedilais raquo Sur ce fondement le Conseil constitutionnel a deacuteveloppeacute dans
les anneacutees 90 et 2000 une jurisprudence vigilante sur lrsquousage du franccedilais mais sans pour
autant refuser toute eacutevolution nous y reviendrons
Cependant lrsquoassociation Eskolim souhaite mettre en eacutevidence lrsquoindeacuteniable
changement de cadre constitutionnel en matiegravere de langues reacutegionales pour au
moins trois raisons
En premier lieu la porteacutee de lrsquoarticle 2 de la Constitution nrsquoest pas figeacutee et peut
eacutevoluer avec le temps En effet le Conseil constitutionnel opegravere reacuteguliegraverement des adaptations
de la porteacutee du texte constitutionnel Parmi de nombreuses illustrations jurisprudentielles la
liberteacute drsquoexpression et de communication protegravege deacutesormais la liberteacute drsquoacceacuteder agrave Internet
(CC ndeg 2009-580 DC 10 juin 2009) et de srsquoy exprimer (CC ndeg2020-801 DC du 18 juin 2020)
La liberteacute du mariage comprend deacutesormais le droit de mettre fin aux liens du mariage (CC ndeg
2016-557 QPC du 29 juillet 2016) La monteacutee en puissance des exigences environnementales
dans le deacutebat public a permis au Conseil constitutionnel de juger qursquoil deacutecoule de la Charte de
lrsquoenvironnement laquo que la protection de lrsquoenvironnement patrimoine commun des ecirctres
humains constitue un objectif de valeur constitutionnelle raquo (CC ndeg2019-823 QPC 31 janvier
2020) Certains fondements constitutionnels que lrsquoon croyait endormis ont eacuteteacute reacuteactiveacutes sous
lrsquoeffet du pouvoir interpreacutetatif agrave lrsquoimage de lrsquoarticle 15 de la DDHC (laquo La socieacuteteacute a le droit de
demander compte agrave tout agent public de son administration raquo) agrave lrsquoorigine drsquoun droit drsquoaccegraves
aux archives publiques (CC ndeg2017-655 QPC 15 septembre 2017) et drsquoun droit drsquoaccegraves aux
documents administratifs (CC ndeg2020-834 QPC 3 avril 2020)
En deuxiegraveme lieu la reacutedaction actuelle de lrsquoarticle 2 de la Constitution ne date pas de
1958 mais drsquoun ajout issu de la loi constitutionnelle ndeg 92-554 du 25 juin 1992 voteacutee dans un
contexte particulier au moment ougrave la France ratifiait le traiteacute de Maastricht et reacutevisait sa
Constitution afin de lever les atteintes agrave la souveraineteacute constateacutees par le Conseil
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
constitutionnel En 1992 lrsquoinsertion de la langue franccedilaise au sein de lrsquoarticle 2 vise agrave rassurer
lrsquoopinion face aux craintes heacutegeacutemoniques de la langue anglaise les langues reacutegionales ne
sont ni viseacutees ni nieacutees dans leur existence et leur rocircle Il est sur ce point particuliegraverement
reacuteveacutelateur de se reacutefeacuterer aux deacuteclarations limpides du Garde des Sceaux Michel Vauzelle lors
des deacutebats parlementaires consacreacutes en 1992 au vote de la reacutevision constitutionnelle laquo Les
langues reacutegionales sont naturellement une richesse de notre patrimoine national Agrave ce
titre le Gouvernement exprime par ma voix lrsquoimmense respect et le soin qursquoil porte agrave cette
richesse de la nation [] Je ne vois pas lagrave drsquoatteinte agrave lrsquouniteacute de la nation mais au
contraire une contribution agrave sa richesse [] Aucune atteinte ne sera porteacutee agrave la politique
de respect de la diversiteacute de nos cultures reacutegionales qui est un eacuteleacutement essentiel du
patrimoine national raquo (JO Assembleacutee nationale p 1021)
Il est donc parfaitement possible pour le Conseil constitutionnel drsquoopeacuterer une
interpreacutetation eacutevolutive de lrsquoarticle 2 afin drsquoadapter la porteacutee de la norme constitutionnelle au
contexte actuel favorable agrave lrsquoapprofondissement de lrsquousage des langues reacutegionales Il nrsquoest
drsquoailleurs pas anodin de constater que la preacutesente proposition de loi a largement transcendeacute les
clivages politiques pour ecirctre voteacutee agrave une large majoriteacute avec drsquoailleurs le soutien de
lrsquoensemble des Preacutesidents de Reacutegion
En troisiegraveme lieu dans sa fameuse deacutecision sur la Charte europeacuteenne des langues
reacutegionales et minoritaires du 15 juin 1999 (ndeg99-412 DC) le Conseil constitutionnel a
implicitement reconnu la compatibiliteacute de lrsquoenseignement immersif ou bilingue avec la
Constitution et en particulier avec lrsquoarticle 2 de la Constitution En effet lrsquoinconstitutionnaliteacute
constateacutee entre la Charte et la Constitution concerne seulement les articles 1 et 7 Or le
consideacuterant 13 de cette deacutecision abusivement preacutesenteacutee comme un verrou absolu en matiegravere
de langues reacutegionales prend soin de preacuteciser laquo que nest contraire agrave la Constitution eu eacutegard agrave
leur nature aucun des autres engagements souscrits par la France dont la plupart au
demeurant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France en
faveur des langues reacutegionales raquo Parmi ces laquo autres engagements souscrits par la France raquo
au sein de la Charte figurent certaines stipulations de lrsquoarticle 8 de la Charte1 selon lequel
1 Article 8 ndash Enseignement1En matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel ces langues sontpratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de lenseignement de la (des)langue(s) officielle(s) de lEtat(hellip)ci agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires concerneacutees ou
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laquo laquoen matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel
ces langues sont pratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de
lenseignement de la (des) langue(s) officielle(s) de lEtat raquo agrave toute une seacuterie drsquoengagements
Au sein des engagements auxquels la France avait souscrits et sur lesquels le Conseil
constitutionnel srsquoest donc prononceacute on trouve le point 1 c (iv) en vertu duquel la France
srsquoengage laquo agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui
le souhaitent ndash ou le cas eacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant raquo
Or ce renvoi concerne les stipulations suivantes
laquo i agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires
concerneacutees ou
Ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les
langues reacutegionales ou minoritaires ou
Iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales
ou minoritaires comme partie inteacutegrante du curriculum
Autrement dit la France srsquoeacutetait engageacutee au moment de la signature de la Charte agrave
appliquer lrsquoune des trois mesures citeacutees qui concernent lrsquoenseignement laquo dans raquo les langues
reacutegionales ou minoritaires dans le secondaire crsquoest-agrave-dire un enseignement immersif ou
bilingue Cet engagement faisait donc partie des stipulations examineacutees par le Conseil
constitutionnel et le consideacuterant 13 de la deacutecision du 15 juin 1999 affirme clairement que ces
stipulations ne sont pas contraires agrave la Constitution Degraves 1999 lrsquoenseignement immersif en
langue reacutegionale est reconnu par le Conseil constitutionnel comme compatible avec
lrsquoarticle 2 de la Constitution
En quatriegraveme lieu le texte mecircme de la Constitution contient drsquoores et deacutejagrave des
ameacutenagements au principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais
Drsquoune part en vertu de la loi constitutionnelle ndeg 98-610 du 20 juillet 1998 lAccord
de Noumeacutea est constitutionnaliseacute agrave larticle 77 de la Constitution Or cet accord stipule en son
ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les langues reacutegionalesou minoritaires ou
iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales ou minoritairescomme partie inteacutegrante du curriculum ou
iv agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui le souhaitent ndash ou le caseacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant
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point 133 laquo Les langues kanak sont avec le franccedilais des langues denseignement et de
culture en Nouvelle-Caleacutedonie Leur place dans lenseignement et les meacutedias doit donc ecirctre
accrue et faire lobjet dune reacuteflexion approfondie raquo
Drsquoautre part sous lrsquoeffet de la reacutevision constitutionnelle du 23 juillet 2008 la
Constitution consacre deacutesormais les langues reacutegionales sous lrsquoeffet de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution qui par deacutefinition atteacutenue et deacuteroge agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution et dont la
porteacutee ne saurait ecirctre symbolique
12 La porteacutee de lrsquoancrage constitutionnel des langues reacutegionales minoritaires
En vertu de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution laquo Les langues reacutegionales appartiennent
au patrimoine de la France raquo Sans discussion possible cette nouvelle disposition
constitutionnelle constitue un changement de circonstances de droit permettant drsquoatteacutenuer
fortement la porteacutee des preacuteceacutedentes deacutecisions du Conseil constitutionnel rendues avant la
reacutevision constitutionnelle de 2008 Certains voudraient pourtant reacuteduire ce texte agrave une porteacutee
simplement symbolique et pensent pouvoir drsquoores et deacutejagrave trouver une confirmation dans la
jurisprudence du Conseil constitutionnel La reacutealiteacute contentieuse est beaucoup plus nuanceacutee et
ne preacutejuge rien de lrsquoavenir
Le Conseil constitutionnel nrsquoa eu depuis 2008 qursquoune seule et unique occasion de
preacuteciser la porteacutee de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Dans la deacutecision du 20 mai 2011
(ndeg2011-130 QPC) il eacutetait en effet saisi des dispositions de larticle L 312-10 du code de
leacuteducation relative agrave lenseignement des langues et cultures reacutegionales qui eacutetait contesteacute au
regard de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Or estime le Conseil en 2011 lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution ninstitue pas un droit ou une liberteacute que la Constitution garantit Sa
meacuteconnaissance ne peut donc ecirctre invoqueacutee agrave lappui dune question prioritaire de
constitutionnaliteacute sur le fondement de larticle 61-1 de la Constitution
Il convient de ne pas tirer de conclusions excessives du deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en
QPC de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Drsquoune part cela nrsquoempecircche pas le Conseil constitutionnel de se fonder sur lrsquoarticle
75-1 de la Constitution dans le cadre du controcircle a priori comme crsquoest par exemple le cas
pour les regravegles constitutionnelles en matiegravere de recevabiliteacute des amendements ou des principes
constitutionnels en matiegravere budgeacutetaires
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Drsquoautre part le deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en QPC drsquoune norme constitutionnelle ne
preacutejuge pas drsquoune forme de hieacuterarchie mateacuterielle ou formelle et srsquoexplique seulement par les
speacutecificiteacutes de chacun des offices Par exemple le respect des regravegles du vote de la loi
imposeacutees par la Constitution impossibles agrave invoquer en QPC font pourtant lrsquoobjet drsquoune
vigilance accrue du Conseil constitutionnel dans le cadre du controcircle a priori justifiant
chaque anneacutee de nombreuses censures
En outre bien que non invocable en QPC lrsquoarticle 75-1 teacutemoigne indubitablement de
la volonteacute du constituant de permettre au leacutegislateur drsquoassouplir les conditions drsquousage des
langues reacutegionales en ouvrant davantage la leacutegislation agrave des possibiliteacutes drsquoapprentissage en la
matiegravere En cela lrsquoarticle 75-1 de la Constitution est une atteacutenuation une disposition
deacuterogatoire agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution selon lequel laquo La langue de la Reacutepublique est le
franccedilais raquo Comme le souligne le rapport drsquoun deacuteputeacute en 2015 laquo la preacuteservation et la
protection des langues reacutegionales sont devenues un objectif de valeur constitutionnelle raquo2 Une
telle interpreacutetation serait drsquoailleurs coheacuterente avec les travaux parlementaires agrave lrsquoorigine de la
reacutevision de 2008 pour le preacutesident de la Commission des lois du Seacutenat lrsquoarticle 75-1 permet
de donner laquo un fondement solide aux dispositions leacutegislatives et reacuteglementaires qui favorisent
la protection et le deacuteveloppement des langues reacutegionales sans diminuer la place que le
franccedilais occupe dans notre sphegravere publique raquo3
Enfin dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel
estime que larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi
ndeg2005-380 du 23 avril 2005 est conforme agrave la Constitution Or les dispositions ainsi
valideacutees sont toujours en vigueur dans une reacutedaction identique laquo Un enseignement de
langues et cultures reacutegionales peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des
modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces
langues sont en usage raquo Ainsi tout en estimant que lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ne
constitue pas un droit ou liberteacute constitutionnel directement invocable en QPC le Conseil
constitutionnel a valideacute le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures
reacutegionales
2JJ Urvoas Rapport sur Proposition de loi constitutionnelle ndeg 1618 visant agrave ratifier la Charte europeacuteenne deslangues reacutegionales ou minoritaires 14 janvier 2014
3JJ Hyest Rapport ndeg 387 (2007-2008) sur le projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions dela Ve Reacutepublique fait au nom de la commission des lois du Seacutenat
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Autre signe eacutevident de la porteacutee effective de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le
leacutegislateur a multiplieacute ces derniegraveres anneacutees lrsquoadoption de textes favorisant lrsquousage et
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et leur promotion La loi du 8 juillet 2013
drsquoorientation et de programmation pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique ouvre la
possibiliteacute drsquoun enseignement bilingue franccedilais-langue reacutegionale la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) eacutetablit la participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes par lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale
lrsquoarticle 86 de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle
modifie lrsquoarticle 225-1 du code peacutenal en creacuteant un nouveau cas de discrimination fondeacute sur laquo
la maitrise drsquoune autre langue que le franccedilais raquo la loi du 28 feacutevrier 2017 de programmation
relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend inopeacuterant lrsquointerdiction des livrets de famille
bilingues lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance eacutetend aux
eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives les modaliteacutes drsquoun accord entre les communes pour
la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoinscrivant dans une eacutecole dispensant un
enseignement de langue reacutegionale en dehors de sa commune de reacutesidence Lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution a donc susciteacute une production leacutegislative qui teacutemoigne de la volonteacute du pouvoir
politique de mettre en œuvre une politique en matiegravere de langue et culture reacutegionales La
particulariteacute de la proposition de loi deacutefeacutereacutee est drsquoecirctre la premiegravere loi dont lrsquoobjet exclusif vise
agrave densifier lrsquoenseignement et lrsquousage des langues reacutegionales mais ce texte confirme les
avanceacutees ponctuelles eacutetablies depuis la reacutevision constitutionnelle de 2008
13 La monteacutee en puissance drsquoexigences constitutionnelles favorisant lrsquousage des langues
reacutegionales
Au-delagrave de lrsquoapport indeacuteniable de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution qui inteacuteresse
directement et clairement la possibiliteacute pour le leacutegislateur de favoriser le deacuteveloppement des
langues reacutegionales la jurisprudence du Conseil constitutionnel atteste drsquoune monteacutee en
puissance de plusieurs liberteacutes qui participent indirectement du mecircme mouvement
En premier lieu la liberteacute drsquoexpression et de communication concerne les langues
reacutegionales Degraves la deacutecision ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 le Conseil constitutionnel avait
concilieacute lrsquoarticle 2 de la Constitution avec la liberteacute drsquoexpression et de communication afin de
censurer certaines dispositions imposant lrsquousage du franccedilais tout en faisant notamment une
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reacutefeacuterence aux langues reacutegionales cette liberteacute laquo implique le droit pour chacun de choisir les
termes jugeacutes par lui les mieux approprieacutes agrave lexpression de sa penseacutee que la langue franccedilaise
eacutevolue comme toute langue vivante en inteacutegrant dans le vocabulaire usuel des termes
de diverses sources quil sagisse dexpressions issues de langues reacutegionales de vocables
dits populaires ou de mots eacutetrangers raquo Or la liberteacute drsquoexpression et de communication a vu
son reacutegime constitutionnel renforceacute depuis plusieurs anneacutees sous lrsquoeffet du triple test de
proportionnaliteacute en vertu duquel les limites apporteacutees agrave ces liberteacutes doivent ecirctre neacutecessaires
adapteacutees et proportionneacutees agrave lrsquoobjectif poursuivi Norme constitutionnelle prioritaire pour le
Conseil constitutionnel la liberteacute drsquoexpression et de communication a justifieacute de nombreuses
censures de dispositions leacutegislatives ces derniegraveres anneacutees (loi laquo Hadopi raquo consultation des
sites Internet terroristes loi laquo Avia raquohellip) Or cette liberteacute dans ses deux composantes de
lrsquoexpression et de la communication permet au locuteur drsquoutiliser une langue reacutegionale et de
ne pas subir drsquoentraves excessives ou injustifieacutees Le deacuteveloppement des langues reacutegionales et
de leur enseignement lrsquoouverture des possibiliteacutes de srsquoexprimer et de communiquer gracircce agrave
ces langues ne sont pas eacutetrangegraveres aux conditions drsquoexercice de la liberteacute drsquoexpression et de
communication Ainsi la monteacutee en puissance de cette liberteacute dans le contentieux
constitutionnel confirme lrsquoeacutevolution favorable du cadre constitutionnel applicable aux langues
reacutegionales
En deuxiegraveme lieu lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant est deacutesormais consacreacute en tant
qursquoexigence constitutionnelle deacutecoulant des alineacuteas 10 et 11 du Preacuteambule de 1946 Ce
principe a drsquoores et deacutejagrave eacuteteacute appliqueacute en matiegravere de droit des eacutetrangers (CC 2019-797 QPC du
26 juillet 2019) mais aussi en droit de la famille au sujet du divorce (CC ndeg 2019-778 DC du
21 mars 2019) ou de lrsquoaccouchement sous le secret (CC 2019-826 QPC du 7 feacutevrier 2020) Il
serait parfaitement coheacuterent que cette exigence constitutionnelle soit applicable en matiegravere
drsquoeacuteducation et drsquoenseignement ce qui permettrait notamment de justifier le renforcement de
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et le soutien financier qui leur est apporteacute
En troisiegraveme lieu la liberteacute de lrsquoenseignement reconnu en tant que principe
constitutionnel (CC ndeg77-87 DC 23 novembre 1977 2016-745 DC 26 janvier 2017)
pourrait permette de proteacuteger constitutionnellement le libre choix des parents en
matiegravere de meacutethodes eacuteducatives conformeacutement agrave la jurisprudence du Conseil drsquoEtat En
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effet dans une deacutecision du 19 juillet 2017 (Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg
406150) le Conseil drsquoEtat estime que le laquo principe de la liberteacute de lrsquoenseignement qui figure
au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la Reacutepublique implique la
possibiliteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement y compris hors de tout contrat conclu
avec lrsquoEtat tout comme le droit pour les parents de choisir pour leurs enfants des
meacutethodes eacuteducatives alternatives agrave celles proposeacutees par le systegraveme scolaire public y
compris lrsquoinstruction au sein de la famille raquo A fortiori la liberteacute de lrsquoenseignement
permettrait au leacutegislateur drsquooffrir aux eacutelegraveves la possibiliteacute de suivre un enseignement immersif
en langue reacutegionale Faire deacutecouler de la liberteacute drsquoenseignement une exigence en matiegravere de
droit des parents de choisir les meacutethodes eacuteducatives serait drsquoailleurs en coheacuterence avec
lrsquoarticle 2 du Protocole 1 de la CEDH4 et lrsquoarticle 14-3 de la Charte des droits fondamentaux
de lUnion europeacuteenne5
Au-delagrave du principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais unchangement de contexte est intervenu depuis lrsquoinsertion en 1992 de cette disposition agravelrsquoarticle 2 de la Constitution Depuis 2008 le pouvoir constituant a consacreacute leslangues reacutegionales agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution de nombreuses reacuteformesleacutegislatives et regraveglementaires ont accompagneacute le deacuteveloppement des langues reacutegionaleset plusieurs principes constitutionnels accompagnent et pourraient agrave lrsquoavenirrenforcer lrsquoassise normative des langues reacutegionalesCrsquoest agrave lrsquoaune de ce cadre constitutionnel renouveleacute et transformeacute en phase avec leseacutevolutions leacutegislatives et sociales que le Conseil constitutionnel appreacuteciera laconstitutionnaliteacute de la preacutesente proposition de loi qui loin de constituer une rupturesrsquoinscrit dans une forme de continuiteacute
2 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi modifie lrsquoarticle L321-10 du code de lrsquoeacuteducation qui
en lrsquoeacutetat dispose
4laquo Nul ne peut se voir refuser le droit agrave lrsquoinstruction LrsquoEacutetat dans lrsquoexercice des fonctions qursquoil assumera dans ledomaine de lrsquoeacuteducation et de lrsquoenseignement respectera le droit des parents drsquoassurer cette eacuteducation et cetenseignement conformeacutement agrave leurs convictions religieuses et philosophiques raquo
5laquo La liberteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement dans le respect des principes deacutemocratiques ainsi quele droit des parents drsquoassurer lrsquoeacuteducation et lrsquoenseignement de leurs enfants conformeacutement agrave leurs convictionsreligieuses philosophiques et peacutedagogiques sont respecteacutes selon les lois nationales qui en reacutegissent lrsquoexercice raquo
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laquo Les langues et cultures reacutegionales appartenant au patrimoine de la France leurenseignement est favoriseacute prioritairement dans les reacutegions ougrave elles sont en usage
Cet enseignement peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefiniespar voie de convention entre lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont enusage
Le Conseil supeacuterieur de leacuteducation est consulteacute conformeacutement aux attributions qui lui sontconfeacutereacutees agrave larticle L 231-1 sur les moyens de favoriser leacutetude des langues et culturesreacutegionales dans les reacutegions ougrave ces langues sont en usage
Lenseignement facultatif de langue et culture reacutegionales est proposeacute dans lune des deuxformes suivantes
1deg Un enseignement de la langue et de la culture reacutegionales
2deg Un enseignement bilingue en langue franccedilaise et en langue reacutegionale
Les familles sont informeacutees des diffeacuterentes offres dapprentissage des langues et culturesreacutegionales raquo
Lrsquoarticle 4 a simplement pour objet drsquoajouter un 3e cas de forme drsquoenseignementfacultatif de langue et culture reacutegionales en preacutevoyant
laquo3deg Un enseignement immersif en langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectifdrsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo
21 Le Conseil constitutionnel peut ne pas se prononcer sur cette disposition
A titre liminaire il semblerait que lrsquoarticle 4 du texte soumis agrave lrsquoexamen du
Conseil constitutionnel ne soit pas contesteacute par les auteurs de la saisine parlementaire agrave en
croire les deacuteclarations publiques de plusieurs deacuteputeacutes Ce point nrsquoest pas sans importance degraves
lors qursquoil confirme le large consensus politique autour de cette disposition et peut avoir une
conseacutequence sur le peacuterimegravetre de lrsquoobjet de la deacutecision rendue
Certes il arrive ponctuellement au Conseil constitutionnel drsquoexaminer drsquooffice
drsquoautres dispositions que celles contesteacutees par la saisine mais depuis lrsquoentreacutee en vigueur de la
QPC et speacutecialement depuis 2016 une telle pratique tend agrave devenir une exception (Deacutecisions
ndeg 2019-794 DC du 20 deacutecembre 2019 ndeg2018-772 DC du 15 novembre 2018 ndeg2016-745
DC du 26 janvier 2017)
De plus lors de lrsquoexamen de la loi pour une eacutecole de la confiance dans sa deacutecision
ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 le Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute examiner
drsquooffice les dispositions de lrsquoarticle 38 creacuteant en vertu de lrsquoarticle L314-2 du code de
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lrsquoeacuteducation une expeacuterimentation de classe immersive en langue eacutetrangegravere ou reacutegionale6 Si le
Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute se saisir drsquooffice de cette disposition expeacuterimentale
crsquoest qursquoimplicitement il nrsquoa pas consideacutereacute qursquoelle posait une difficulteacute manifeste de
constitutionnaliteacute Degraves lors la coheacuterence voudrait qursquoil en aille de mecircme avec les dispositions
de lrsquoarticle 4 de la preacutesente proposition de loi qui ne font que reprendre les grands principes
de lrsquoexpeacuterimentation preacuteceacutedente en preacutevoyant la possibiliteacute drsquoun enseignement immersif en
langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue
franccedilaise
22 Les exigences anciennes poseacutees par le Conseil constitutionnel sont respecteacutees
Elaboreacutee avant la reacutevision constitutionnelle de 2008 consacrant les langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la jurisprudence
du Conseil constitutionnel en matiegravere drsquoenseignement de langue reacutegionale est totalement
respecteacutee par lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
En premier lieu le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement immersif en langue
reacutegionale rend lrsquoarticle 4 conforme agrave la Constitution
Dans plusieurs deacutecisions le Conseil constitutionnel a eu lrsquooccasion de preacuteciser que
seule lrsquoobligation de suivre un enseignement dans une autre langue que le franccedilais serait
contraire agrave la Constitution Ainsi dans la deacutecision ndeg 2001-456 DC du 27 deacutecembre 2001 il
indique que laquo lusage dune langue autre que le franccedilais ne peut ecirctre imposeacute aux eacutelegraveves des
eacutetablissements de lenseignement public ni dans la vie de leacutetablissement ni dans
lenseignement des disciplines autres que celles de la langue consideacutereacutee raquo Le verbe
6Article L314-2 du code de lrsquoeacuteducation laquo Sous reacuteserve de lrsquoautorisation preacutealable des autoriteacutes acadeacutemiques etapregraves concertation avec les eacutequipes peacutedagogiques le projet drsquoeacutecole ou drsquoeacutetablissement mentionneacute agrave lrsquoarticle L401-1 peut preacutevoir la reacutealisation dans des conditions deacutefinies par deacutecret drsquoexpeacuterimentations peacutedagogiquesportant sur tout ou partie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement drsquoune dureacutee limiteacutee agrave cinq ans Cesexpeacuterimentations peuvent concerner lrsquoorganisation peacutedagogique de la classe de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement laliaison entre les diffeacuterents niveaux drsquoenseignement la coopeacuteration avec les partenaires du systegraveme eacuteducatiflrsquoenseignement dans une langue vivante eacutetrangegravere ou reacutegionale les eacutechanges avec des eacutetablissementseacutetrangers drsquoenseignement scolaire lrsquoutilisation des outils et ressources numeacuteriques la reacutepartition des heuresdrsquoenseignement sur lrsquoensemble de lrsquoanneacutee scolaire les proceacutedures drsquoorientation des eacutelegraveves et la participation desparents drsquoeacutelegraveves agrave la vie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement Les collectiviteacutes territoriales sont systeacutematiquementassocieacutees agrave la deacutefinition des grandes orientations des expeacuterimentations meneacutees par lrsquoeacuteducation nationale ainsiqursquoagrave leurs deacuteclinaisons territoriales raquo
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laquo imposer raquo est employeacute agrave la fois au sujet de lrsquousage drsquoune autre langue que le franccedilais et au
sujet de la vie de lrsquoeacutetablissement et de lrsquoenseignement des disciplines autres que celles de la
langue consideacutereacutee Ce qui signifie qursquoil est constitutionnellement possible au leacutegislateur de
permettre aux eacutelegraveves de choisir de maniegravere facultative une telle orientation dans
lrsquoenseignement De mecircme dans sa deacutecision ndeg2001 454 DC du 17 janvier 2002 le Conseil
constitutionnel avait estimeacute que si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre
de lrsquohoraire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires laquo il ne saurait revecirctir pour autant
un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo Et dans la deacutecision
ndeg2004-490 DC 12 feacutevrier 2004 le Conseil indique que lrsquoenseignement de la langue
tahitienne ou dune autre langue polyneacutesienne dans le cadre de lhoraire normal des eacutecoles
maternelles et primaires dans les eacutetablissements du second degreacute et dans les eacutetablissements
denseignement supeacuterieur laquo ne saurait revecirctir pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les
eacutelegraveves ou eacutetudiants ni pour les enseignants raquo
Or en lrsquoespegravece il nrsquoy a absolument aucun doute sur le caractegravere facultatif du 3deg
ajouteacute agrave lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation En effet le premier alineacutea de lrsquoarticle L312-
10 du code de lrsquoeacuteducation est inchangeacute et eacutevoque un laquo enseignement facultatif raquo Le deacuteputeacute
Molac lrsquoa clairement exprimeacute lors des deacutebats laquo lrsquoenseignement immersif tel qursquoil est ici
proposeacute reacutepond agrave cette condition dans la mesure ougrave il ne serait pas imposeacute mais seulement
proposeacute au sein des eacutetablissements publics au cocircteacute de filiegraveres classiques drsquoenseignement la
deacutecision finale restant du ressort des personnes responsables de lrsquoenfant raquo (Rapport du 31
mars 2021)
En deuxiegraveme lieu lrsquoarticle 4 nrsquoa pas pour objet de soustraire les eacutelegraveves aux
droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements drsquoenseignement
Dans plusieurs deacutecisions relatives agrave lrsquousage drsquoune langue reacutegionale le Conseil
constitutionnel rappelle qursquoun enseignement de ce type nrsquoa pas pour laquo pour objet de soustraire
les eacutelegraveves scolariseacutes (hellip) aux droits et obligations applicables agrave lensemble des usagers des
eacutetablissements qui assurent le service public de lenseignement ou sont associeacutes agrave celui-ci raquo
(ndeg 91-290 DC du 9 mai 1991 ndeg 2001-454 DC du 17 janvier 2002) Or lrsquoarticle 4 a
seulement pour objet drsquoouvrir une 3e modaliteacute facultative drsquoenseignement en langue reacutegionale
La proposition de loi ne confegravere pas des droits speacutecifiques agrave des laquo groupes raquo de locuteurs de
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de laquo territoires raquo dans lesquels ces langues
seraient pratiqueacutees Le texte ne modifie pas non plus les modaliteacutes drsquoexpression dans la vie
publique et dans la relation entre lrsquoadministration et les administreacutes De telle sorte que
lrsquoarticle 4 ne creacutee aucun droit particulier pour les eacutelegraveves comme pour les enseignants de nature
agrave les soustraire aux droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements
drsquoenseignement ou associeacutes agrave celui-ci
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 4 opegravere une conciliation raisonnable et eacutequilibreacutee entre
le principe de lrsquoarticle 2 de la Constitution et lrsquoapprentissage des langues reacutegionales
Lrsquoenseignement immersif en lange reacutegionale doit srsquoopeacuterer laquo sans preacutejudice de
lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo Lrsquoarticle 4 prend soin de ne pas
ignorer le principe poseacute par lrsquoarticle 2 de la Constitution et prolonge au niveau leacutegislatif la
conciliation souhaiteacutee par le constituant depuis 2008 avec lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Il
appartiendra au pouvoir regraveglementaire de preacuteciser la mise en œuvre de lrsquoobjectif de bonne
connaissance de la langue franccedilaise qui en toute hypothegravese garantit une conciliation
eacutequilibreacutee entre les regravegles constitutionnelles en preacutesence
Au surplus les retours drsquoexpeacuteriences des expeacuterimentations de classes en
enseignements immersifs permises par lrsquoarticle L 314-2 du code de lrsquoeacuteducation deacutemontrent
que les eacutelegraveves disposent drsquoun niveau en franccedilais plus eacuteleveacute que la moyenne Comme lrsquoindique
le rapport du Seacutenat sur la proposition de loi 19 expeacuterimentations immersives en langue
basque 6 en langue corse et une en langue catalane ont lieu actuellement dans des eacutecoles
publiques Or pour prendre lrsquoexemple de lrsquoenseignement en basque agrave 100 en eacutecole
maternelle objet drsquoune eacutevaluation preacutecise par lrsquoacadeacutemie de Bordeaux en 2019 (Etude
comparative des filiegraveres de maternelle 100 basque bilingue et franccedilais Acadeacutemie de
Bordeaux 2019) laquo lorsque ces enfants arrivaient en CP leur niveau de franccedilais eacutetait
supeacuterieur agrave la moyenne du deacutepartement Cela prouve que le niveau de franccedilais nrsquoavait
absolument pas eacuteteacute toucheacute raquo (Paul Molac Assembleacutee nationale Seacuteance du 8 avril 2021)
En quatriegraveme lieu lrsquoarticle 4 ne fait qursquoeacutetendre la mise en œuvre drsquoune modaliteacute
drsquoenseignement deacutejagrave valideacute par le Conseil constitutionnel
Dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel a valideacute
le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures reacutegionales en estimant que
larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi ndeg2005-380 du 23
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
avril 2005 est conforme agrave la Constitution En effet apregraves avoir estimeacute inopeacuterant le grief tireacute
de la violation de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la deacutecision preacutecise laquo que les dispositions
contesteacutees ne sont contraires agrave aucun droit ou liberteacute que la Constitution garantit raquo Par
conseacutequent en vertu de lrsquoautoriteacute que lrsquoarticle 62 de la Constitution confegravere aux deacutecisions du
Conseil constitutionnel les dispositions valideacutees dans cette deacutecision et toujours en vigueur
sont conformes agrave la Constitution Il srsquoagit en particulier de lrsquoalineacutea 2 de la version actuelle de
lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation en vertu duquel laquo Cet enseignement peut ecirctre
dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre
lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont en usage raquo Or lrsquoarticle 4 de la
proposition de loi ne fait qursquoajouter une 3e possibiliteacute de mise en œuvre drsquoun principe deacutejagrave
valideacute par le Conseil constitutionnel modaliteacute facultative et sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune
bonne connaissance de la langue franccedilaise Le leacutegislateur srsquoest donc scrupuleusement
conformeacute aux exigences du Conseil constitutionnel
23 La possibiliteacute drsquoun enseignement immersif peut se preacutevaloir de plusieurs exigences constitutionnelles
En plus de srsquoinscrire dans les lignes jurisprudentielles du Conseil constitutionnel et de
respecter lrsquoarticle 2 de la Constitution lrsquoarticle 4 de la proposition de la loi peut se preacutevaloir
plusieurs normes constitutionnelles
En premier lieu lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en vertu duquel laquo Les langues
reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo constitue un changement de
circonstances de droit issu de la reacutevision constitutionnelle de 2008 qui atteacutenue la porteacutee de
lrsquoarticle 2 de la Constitution et permet ainsi de fonder le principe drsquoen enseignement immersif
et facultatif en langue reacutegionale
En second lieu comme preacuteceacutedemment rappeleacute (cf supra point 13) plusieurs
exigences et liberteacutes constitutionnelles peuvent soutenir le deacuteveloppement des langues
reacutegionales et peser favorablement dans la conciliation opeacutereacutee par le Conseil constitutionnel
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La liberteacute drsquoexpression et de communication garantie par lrsquoarticle 11 de la DDHC
et dont le reacutegime constitutionnel srsquoest renforceacute depuis une dizaine drsquoanneacutees peut permettre de
justifier lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale degraves lors qursquoil srsquoagit drsquoun preacutealable neacutecessaire
agrave lrsquoexpression et agrave la communication dans une autre langue que le franccedilais
Lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant reacutecemment consacreacute sur le fondement des alineacuteas 10
et 11 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 peut permettre au leacutegislateur de diversifier les
possibiliteacutes drsquoapprentissage drsquoune langue et drsquoune culture reacutegionale
La liberteacute de lrsquoenseignement consacreacutee de longue date en tant que principe
fondamental reconnu par les lois de la Reacutepublique implique neacutecessairement comme le
reconnaissent le Conseil drsquoEtat au niveau constitutionnel (CE 19 juillet 2017 Association
Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150) et les textes europeacuteens (article 2 du protocole 1
CEDH article 14-3 Charte des droits fondamentaux de lrsquoUnion europeacuteenne) une possibiliteacute
pour les parents de choisir des meacutethodes eacuteducatives en lien avec leurs convictions
Il est eacutegalement possible drsquoavancer le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction qui
deacutecoule de lrsquoalineacutea 13 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 (CC ndeg2001-450 DC 11
juillet 2001) degraves lors que lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale poursuit un objectif
peacutedagogique auquel les eacutelegraveves doivent pouvoir acceacuteder de maniegravere suffisamment libre et
selon des critegraveres objectifs et rationnels
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi se contente drsquoajouter une modaliteacute de mise enœuvre drsquoun enseignement dont le principe a deacutejagrave eacuteteacute valideacute par le Conseilconstitutionnel La conformiteacute agrave la Constitution de cet enseignement est eacutetablie degraveslors qursquoil est proposeacute de maniegravere facultative sans preacutejudice du respect de lrsquoarticle 2 dela Constitution et qursquoil peut se preacutevaloir de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ainsi quede plusieurs principes constitutionnels comme la liberteacute drsquoexpression lrsquointeacuterecirctsupeacuterieur de lrsquoenfant la liberteacute drsquoenseignement et lrsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction
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3 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi deacutefeacutereacutee modifie lrsquoarticle L442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation en remplaccedilant les alineacuteas 6 et 7 par lrsquoalineacutea suivant
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue
reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de
reacutesidence et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la
condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de
langue reacutegionale raquo
31 Lrsquoimpact subsidiaire et reacutesiduel de lrsquoarticle 6
Au-delagrave des passions et crispations qui peuvent parfois se rencontrer au greacute de deacutebats
relatifs au financement de lrsquoenseignement priveacute la modification apporteacutee par lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi doit ecirctre replaceacutee agrave sa juste porteacutee
En premier le meacutecanisme est subsidiaire En effet la participation financiegravere de la
commune de reacutesidence ne serait solliciteacutee que si cette commune ne laquo dispose pas drsquoeacutecole
dispensant un enseignement de langue reacutegionale raquo Il srsquoagit bien drsquoun laquo enseignement raquo quel
que soit sa forme et son volume Degraves lors comme lrsquoa clairement exprimeacute le deacuteputeacute Paul
Molac devant la Commission des affaires sociales il peut srsquoagir drsquoune laquo initiation drsquoun
enseignement paritaire ou drsquoune immersion raquo (31 mars 2021)
En deuxiegraveme lieu le meacutecanisme est reacutesiduel La participation financiegravere se limite
aux eacutetablissements priveacutes du premier degreacute ndash les eacutecoles ndash ayant conclu un contrat
drsquoassociation Les collegraveges et lyceacutees sont donc exclus du dispositif Un faible nombre
drsquoenfants sera concerneacute et la charge sera donc reacuteduite pour les communes en question De
plus en pratique dans les zones ougrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales est reacutepandu les
eacutecoles drsquoun grand nombre de communes ont deacutejagrave deacuteveloppeacute des offres eacuteducatives
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En troisiegraveme lieu la participation financiegravere est encadreacutee par la loi En application
de lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation non modifieacute par la preacutesente
proposition de loi les modaliteacutes de calcul de la contribution de la commune de reacutesidence sont
clairement eacutetablies
laquo il est tenu compte des ressources de cette commune du nombre deacutelegraveves de cette
commune scolariseacutes dans la commune daccueil et du coucirct moyen par eacutelegraveve calculeacute sur la base
des deacutepenses de fonctionnement de lensemble des eacutecoles publiques de la commune daccueil
sans que le montant de la contribution par eacutelegraveve puisse ecirctre supeacuterieur au coucirct quaurait
repreacutesenteacute pour la commune de reacutesidence leacutelegraveve sil avait eacuteteacute scolariseacute dans une de ses eacutecoles
publiques raquo
La charge financiegravere obeacuteit donc agrave des regravegles claires objectives rationnelles et deacutejagrave en
vigueur depuis plusieurs anneacutees En effet le laquo forfait scolaire raquo est deacutejagrave pratiqueacute sur le
fondement de lrsquoarticle L212-8 du code de lrsquoeacuteducation lorsqursquoune famille scolarise dans une
eacutecole publique ou priveacutee son enfant dans une autre commune que la commune de reacutesidence
32 Lrsquoabsence de violation de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales et du principe drsquoeacutegaliteacute
Ainsi replaceacutee dans sa juste porteacutee il ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi de violer la Constitution et en particulier les principes applicables en
matiegravere de libre administration des collectiviteacutes territoriales ainsi que le principe drsquoeacutegaliteacute
En premier lieu le Conseil constitutionnel a deacutejagrave valideacute le principe de lrsquoaide agrave
lrsquoenseignement priveacute et en particulier aux langues reacutegionales
Avant mecircme la reacutevision constitutionnelle de 2008 et la conseacutecration des langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le Conseil
constitutionnel avait reconnu que laquo pour concourir agrave la sauvegarde des langues reacutegionales
lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales peuvent apporter leur aide aux associations ayant cet
objet raquo (CC ndeg2001-456 DC 27 deacutecembre 2001)
De plus le Conseil constitutionnel rappelle reacuteguliegraverement que laquo le leacutegislateur peut
preacutevoir loctroi dune aide des collectiviteacutes publiques aux eacutetablissements denseignement
priveacutes selon la nature et limportance de leur contribution agrave laccomplissement de missions
denseignement raquo (CC ndeg93-329 DC du 13 janvier 1994)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
En deuxiegraveme lieu le principe de libre administration ne saurait justifier des
traitements diffeacuterencieacutes dans lrsquoexercice des droits et liberteacutes constitutionnels
En vertu de lrsquoarticle 72 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales srsquoadministrent
librement mais laquo dans les conditions preacutevues par la loi raquo De plus le Conseil constitutionnel
prend soin de preacuteciser que laquo si le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacutegislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce
que les conditions essentielles drsquoapplication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de
lrsquoenseignement deacutependent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas
ecirctre les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (CC ndeg 84-185 DC du 18 janvier 1985 CC
ndeg93-329 du 13 janvier 1994) Plus largement dans la deacutecision du 17 janvier 2002 (ndeg2001-
454 DC) le Conseil constitutionnel affirme que laquo le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales ne saurait conduire agrave ce que les conditions essentielles de mise en
oeuvre des liberteacutes publiques et par suite lensemble des garanties que celles-ci comportent
deacutependent des deacutecisions de collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre les mecircmes
sur lensemble du territoire de la Reacutepublique raquo
Or en lrsquoespegravece si les communes pouvaient librement participer au financement de la
scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous contrat
drsquoassociation lrsquoexercice de la liberteacute drsquoenseignement du principe drsquoeacutegaliteacute devant la loi et du
principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction deacutependrait de la seule volonteacute drsquoune collectiviteacute
territoriale ce que le Conseil constitutionnel condamne Degraves lors que la possibiliteacute drsquoun
enseignement en langue reacutegionale est offerte aux enfants les conditions drsquoaccegraves agrave cet
enseignement doivent pouvoir ecirctre effectives et eacutegales Loin de violer le principe drsquoeacutegaliteacute
devant la loi lrsquoarticle 6 de la proposition de loi en assure au contraire la garantie
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne transfert ni ne creacutee de
nouvelles compeacutetences
Srsquoagissant des ressources des collectiviteacutes locales permettant de leur assurer une libre
administration le quatriegraveme alineacutea de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution preacutevoit laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales srsquoaccompagne de
lrsquoattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consacreacutees agrave leur exercice Toute
creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour conseacutequence drsquoaugmenter les deacutepenses des
collectiviteacutes territoriales est accompagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Le Conseil
constitutionnel veille au respect de cette regravegle drsquoune part pour les transferts de compeacutetence
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entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales et drsquoautre part pour les creacuteations ou extensions de
compeacutetence des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece aucune creacuteation ou transfert de compeacutetence nrsquoest opeacutereacute au sens de
lrsquoarticle 72-2 de la Constitution Il srsquoagit drsquoune simple participation financiegravere agrave caractegravere
subsidiaire reacutesiduel et deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels comme
preacuteceacutedemment eacutevoqueacute (cf supra point 31) De plus le versement de la participation
financiegravere correspond en quelque sorte agrave un allegravegement de charge degraves lors que le coucirct de
lrsquoenfant scolariseacute est reporteacute sur une autre commune que la commune de reacutesidence En
conseacutequence lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne fait que modifier les modaliteacutes drsquoexercice
drsquoune compeacutetence sans en creacuteer ou transfeacuterer une nouvelle
Drsquoailleurs dans la deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 le Conseil
constitutionnel avait jugeacute inopeacuterant le grief tireacute de la violation des articles 72 et 72-2 de la
Constitution agrave propos de la version ancienne de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation en
jugeant que laquo la loi deacutefeacutereacutee nemporte ni creacuteation ni extension des compeacutetences en matiegravere de
contributions des communes aux frais de fonctionnement des classes eacuteleacutementaires des
eacutetablissements du premier degreacute priveacutes sous contrat dassociation que par suite le grief tireacute
de la meacuteconnaissance du principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales manque
en fait raquo
Le Conseil constitutionnel a statueacute dans le mecircme sens au sujet de lrsquoinstitution drsquoun
creacutedit drsquoimpocirct en matiegravere drsquoapprentissage ou de la possibiliteacute de modifier la dureacutee du contrat
drsquoapprentissage mecircme si ces mesures en rendant lrsquoapprentissage plus attrayant ont pour effet
drsquoaugmenter le nombre drsquoapprentis et donc drsquoaccroicirctre les charges des reacutegions dans ce
domaine (CC ndeg 2004-509 DC du 13 janvier 2005)
En quatriegraveme lieu le principe drsquoeacutegaliteacute entre les charges publiques est respecteacute
En effet en plus du caractegravere subsidiaire et reacutesiduel du meacutecanisme la participation
financiegravere preacutevue par lrsquoarticle 6 de la proposition de loi srsquoapplique agrave lrsquoensemble des
communes ne disposant pas drsquoun eacutetablissement dispensant un enseignement de langue
reacutegionale ce qui est coheacuterent au regard de lrsquoobjet de la loi Les critegraveres de la participation
financiegravere preacutevus par lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 sont en tout eacutetat de cause objectifs et
rationnels eacutetablis et mis en œuvre depuis plusieurs anneacutees Les garanties de lrsquoarticle 13 de la
DDHC sont donc respecteacutees
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En cinquiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir du respect
de plusieurs normes constitutionnelles
En affirmant depuis 2008 que les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la
France lrsquoarticle 75-1 de la Constitution donne un ancrage constitutionnel au deacuteveloppement
de lrsquousage et de lrsquoenseignement des langues reacutegionales Or sans la participation financiegravere des
communes de reacutesidence agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat lrsquoenseignement des langues reacutegionales serait compromis Par
conseacutequent lrsquoarticle 6 de la proposition de loi constitue une garantie leacutegale du respect de
lrsquoaffirmation porteacutee par lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Le mecircme raisonnement sera tenu agrave propos de lrsquoensemble des principes constitutionnels
qui donnent une assise agrave lrsquousage et agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales la liberteacute
drsquoexpression et de communication (article 11 DDHC) la liberteacute drsquoenseignement (PFRLR)
dont pourrait deacutecouler une exigence en matiegravere de droit des parents de choisir les meacutethodes
eacuteducatives (CE 19 juillet 2017 Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150)
lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant (alineacutea 10 et 11 du Preacuteambule de 1946) le principe drsquoeacutegaliteacute
(article 6 DDHC) le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction (alineacutea 13 du Preacuteambule de 1946)
Sans lrsquoarticle 6 de la proposition de loi lrsquoeffectiviteacute de lrsquoensemble de ces normes
constitutionnelles serait consideacuterablement atteacutenueacutee et creacuteerait des diffeacuterences de traitement
injustifieacutees et deacutependantes de la volonteacute des communes
De plus lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir drsquoun objectif de
clarification et de seacutecurisation du droit applicable qui peut se rattacher agrave lrsquoarticle 16 de la
DDHC degraves lors que les textes jusqursquoagrave preacutesent applicables eacutetaient ambigus et ont donneacute lieu agrave
des contentieux En rendant obligatoire ce qui eacutetait avant une faculteacute pour autant soumise agrave
un rocircle non neacutegligeable du preacutefet lrsquoarticle 6 de la proposition de loi clarifie le droit
applicable Ainsi une deacuteputeacutee preacutecisait lors des deacutebats parlementaires que laquo lrsquoarticle 34 de la
loi pour une eacutecole de la confiance relatif au versement du forfait scolaire a susciteacute de
nombreux imbroglios administratifs Ainsi chez moi en Bretagne plus de 150 demandes de
meacutediation ont eacuteteacute transmises aux services de lrsquoEacutetat ce qui met en lumiegravere lrsquoambiguiumlteacute de la loi
et les difficulteacutes de son application Je soutiens donc fortement lrsquoarticle 2 quinquies [devenu
article 6] issu des travaux du Seacutenat qui legraveve toute incertitude raquo (Mme Claudia Rouaux
Commission des affaires sociales Assembleacutee nationale 31 mars 2021)
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Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi creacutee un meacutecanisme subsidiaire et reacutesiduel dont laporteacutee est deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels Sans creacuteer ni transfeacutererde nouvelle compeacutetence aux communes cette disposition assure une mise en œuvreuniforme des droits et liberteacutes et peut se preacutevaloir de nombreuses normesconstitutionnelles confeacuterant agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales et agrave son soutienfinancier de solides justifications constitutionnelles
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2021-818 DC - Contribution exteacuterieure Mme Mastorpdf
Lettre Wanda Mastor accompagnant la porte eacutetroite
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure MSchellenberger et autrespdf
Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure assESKOLIL pdf
lettre daccompagnement CC
Porte eacutetroite loi langues reacutegionales (2)
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure M Bertrand Pancherpdf
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ce second type drsquoameacutenagement qui est ici inteacuteressant agrave observer les Eacutetats
reacutegionaux italien15 et espagnol16 eacutetant qualifieacutees par leurs constitutions drsquoin-
divisibles (et mecircme eacutegalement laquo un raquo pour lrsquoItalie alors que le mot a disparu
de la Constitution franccedilaise)
De maniegravere scheacutematique plusieurs postures essentielles vis-agrave-vis des langues
reacutegionales peuvent ecirctre observeacutees dans lrsquoEurope contemporaine La majoriteacute
des pays voisins confegraverent aux langues reacutegionales des statuts juridiques dif-
feacuterencieacutes Coexistent parfois une langue majoritaire et des langues minori-
taires qui beacuteneacuteficient de mesures protectrices Dans ce cas les langues reacutegio-
nales jouissent drsquoune reconnaissance mais seulement au niveau drsquoun terri-
toire identifieacute Pour le dire autrement elles ne concurrencent pas la langue
majoritaire au niveau national Il ne srsquoagit ni plus ni moins que lrsquoexpression
drsquoun droit agrave la diffeacuterence Drsquoun droit agrave la diffeacuterenciation pour reprendre un
terme qui a actuellement les faveurs du gouvernement franccedilais Drsquoautres pays
ont mis en place le bilinguisme officiel qui peut srsquoexprimer dans plusieurs
variantes Ce statut confegravere aux citoyens en principe du moins le choix duti-
liser lune ou lautre des langues officielles dans leurs rapports avec lEacutetat
Cette co-officialiteacute peut srsquoopeacuterer au niveau de tout le territoire (comme en Bel-
gique et en Suisse par exemple) ou seulement sur une partie de celui-ci
(comme en Espagne ou en Italie)
On pourrait objecter que la comparaison avec lrsquoEspagne et lrsquoItalie deux Eacutetats
reacutegionaux nrsquoest pas pertinente Or ces deux Eacutetats sont qualifieacutes de Royaume
ou Reacutepublique indivisibles par leurs constitutions respectives indivisibiliteacute
qui nrsquoempecircche pas la reconnaissance la protection et la promotion des
langues reacutegionales en leur sein Ainsi la Constitution espagnole consacre clai-
rement le multilinguisme dans le cadre de ses communauteacutes autonomes17
15 Article 5 de la Constitution de la Reacutepublique italienne de 1947 laquo La Reacutepublique une et indivisible reconnaicirct et favorise les autonomies locales (hellip) raquo 16 Article 2 de la Constitution du Royaume drsquoEspagne de 1978 laquo La Constitution est fondeacutee
sur luniteacute indissoluble de la nation espagnole patrie commune et indivisible de tous les Es-
pagnols Elle reconnaicirct et garantit le droit agrave lautonomie des nationaliteacutes et des reacutegions qui la
composent et la solidariteacute entre elles raquo 17 En vertu de lrsquoarticle 3 de la Constitution espagnole
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tout comme lrsquoItalie laquo Reacutepublique une et indivisible raquo laquo protegravege par des mesures
particuliegraveres les minoriteacutes linguistiques raquo (article 6)
Cette rapide eacutetude comparative permet de mettre en eacutevidence la singulariteacute de
la France au sein drsquoune Europe qui srsquoenorgueillit de se deacutefinir agrave travers la
richesse de sa diversiteacute Mais notamment depuis la loi constitutionnelle de
2008 le leacutegislateur franccedilais a agi dans le sens drsquoune protection et promotion
des langues reacutegionales la loi du 8 avril 2021 srsquoinscrivant dans ce processus
logique et coheacuterent
C Le contexte parlementaire franccedilais
La loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit donc dans un mouvement leacutegislatif reacutepondant agrave
lrsquoadresse du pouvoir constituant Laquelle concerne aussi le pouvoir exeacutecutif
La politique du ministegravere de lrsquoeacuteducation pour la deacutetermination du nombre de
places pour lrsquoagreacutegation et le CAPES des langues reacutegionales devrait aller de
pair avec les lois qui mettent en œuvre lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Ainsi
pour la langue basque il nrsquoy a pas eu de concours drsquoagreacutegation externe depuis
2018 anneacutee 2021 comprise il y a un seul poste pour lrsquoagreacutegation interne en
2021 2 pour le CAPES externe en 2021 et 2 pour le CAPES interne Pour la
langue bretonne et pour ne citer que lrsquoanneacutee en cours il y a un poste agrave lrsquoagreacute-
gation externe pas de concours pour lrsquoagreacutegation interne deux postes pour
le CAPES externe et 2 pour le CAPES interne Pour la langue corse il nrsquoy a pas
de concours cette anneacutee pour lrsquoagreacutegation externe et interne deux pour le
CAPES externe et aucun pour le CAPES interne Pour lrsquooccitan toujours pour
2021 il y a un poste pour lrsquoagreacutegation externe pas de concours pour lrsquoagreacute-
gation interne quatre pour le CAPES externe et un pour le CAPES interne
Ceci eacutetant juste preacuteciseacute il faut agrave preacutesent se concentrer sur lrsquoaction parlemen-
taire de mise en œuvre des dispositions de la Constitution
laquo 1 Le castillan est la langue espagnole officielle de lEacutetat Tous les Espagnols ont le devoir de
le connaicirctre et le droit de lutiliser
2 Les autres langues espagnoles sont aussi officielles dans leurs communauteacutes autonomes
respectives conformeacutement agrave leurs statuts
3 La richesse de la diversiteacute linguistique de lEspagne est un patrimoine culturel qui fait lobjet dun respect et dune protection speacuteciales raquo
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Videacutee drsquoune large part de sa substance en premiegravere lecture par la commission
des affaires culturelles et de leacuteducation de lrsquoAssembleacutee nationale la proposi-
tion de loi du deacuteputeacute Molac a ensuite retrouveacute ses objectifs initiaux gracircce agrave la
proceacutedure parlementaire qui donne agrave notre reacutegime repreacutesentatif tout son
sens discussions en commissions deacutebats en seacuteances publiques navette
amendements multiples pour parvenir agrave une adoption deacutefinitive agrave une majo-
riteacute non importante mais eacutecrasante des voix Agrave quelques heures de la pro-
mulgation de la loi par le Preacutesident de la Reacutepublique une partie de cette mecircme
majoriteacute a neacuteanmoins saisi le Conseil constitutionnel dans le cadre de lrsquoarticle
61 alineacutea 2 de la Constitution
Deacutepocirct de la proposition de loi
Deacuteposeacutee le 30 deacutecembre 2019 par le deacuteputeacute Paul Molac et autres deacuteputeacutes18
la proposition de loi apporte des mesures de protection et de promotion des
langues reacutegionales dans trois domaines le patrimoine lrsquoenseignement les
services publics via la signaleacutetique et les actes drsquoeacutetat civil Elle a eacuteteacute adopteacutee
le 8 avril 2021 par 247 voix pour 76 voix contre et 19 abstentions au terme
de la proceacutedure ci-dessous rappeleacutee
Renvoi agrave la commission des affaires culturelles et de leacuteducation
La proposition de loi a eacuteteacute renvoyeacutee agrave la commission des affaires cultu-
relles et de leacuteducation agrave deacutefaut de constitution drsquoune commission speacuteciale
dans les deacutelais preacutevus par les articles 30 et 31 du Regraveglement Le rapport fait
au nom de la commission par le deacuteputeacute Paul Molac nommeacute par elle a eacuteteacute
enregistreacute agrave la preacutesidence de lrsquoAssembleacutee nationale le 5 feacutevrier 2020 Preacutesenteacute
18 Sylvain BRIAL Jean-Feacutelix ACQUAVIVA Michel CASTELLANI Jean-Michel CLEacuteMENT
Paul-Andreacute COLOMBANI Charles de COURSON Jeanine DUBIEacute Freacutedeacuterique DUMAS Mrsquojid
EL GUERRAB Olivier FALORNI Yannick FAVENNEC BECOT Sandrine JOSSO Franccedilois-Mi-
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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comme un moyen de deacutefendre les laquo langues de France raquo19 en danger et srsquoap-
puyant sur lrsquoexistant qui est la marque drsquoune eacutevolution rappeleacutee plus loin (II)
le texte entend laquo aller plus loin raquo en rehaussant la protection lrsquoaccessibiliteacute et
la visibiliteacute des langues reacutegionales dans les trois domaines preacuteciteacutes
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle premier re-
latif au patrimoine Ce dernier preacutecise en compleacutetant ainsi lrsquoar-
ticle L 1 du code du patrimoine que la conservation et la con-
naissance du patrimoine immateacuteriel sont drsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et que
les langues reacutegionales font partie de ce patrimoine
o La commission a adopteacute sans modifications lrsquoarticle 2 qui pro-
pose drsquoinclure parmi les treacutesors nationaux les biens preacutesentant
un inteacuterecirct majeur pour la connaissance des langues franccedilaise et
reacutegionales Le texte preacutevoit en effet outre pour les langues reacutegio-
nales des mesures de protection de notre patrimoine linguistique
dans une deacutemarche globale
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 3 qui disposait que des con-
ventions passeacutees entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pouvaient preacutevoir que
la langue reacutegionale est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de
lrsquohoraire normal des enseignements (des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires des collegraveges et des lyceacutees des territoires concerneacutes) Il
ne srsquoagissait pourtant que drsquoeacutetendre une regravegle deacutejagrave applicable en
Corse pour lrsquoenseignement de la langue corse lrsquoarticle L 312-11-
1 du code de lrsquoeacuteducation introduit par la loi ndeg 2002-92 du
22 janvier 2002 relative agrave la Corse dispose en effet que la langue
corse est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de lrsquohoraire normal
des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires de Corse Le Conseil cons-
titutionnel nrsquoa pas censureacute cette disposition tant que lrsquoenseigne-
ment eacutetait entendu comme ne revecirctant pas laquo un caractegravere obliga-
toire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo (deacutecision ndeg2001-
454 DC du 17 janvier 2002)
19 Sur cette notion de laquo langues de France raquo voir Les langues de France vingt ans apregraves Glot-topol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html
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o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 4 qui preacutevoyait que lenseigne-
ment bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale pouvait se reacuteali-
ser sous forme immersive laquo dans le respect des objectifs de maicirc-
trise des deux langues agrave chaque niveau denseignement raquo
o La commission a supprimeacute les articles 5 et 6 de la proposition de
loi Le premier manifestait la volonteacute drsquointroduire au sein drsquoun
nouvel article L 151-4-1 du code de lrsquoeacuteducation une deacuterogation
au principe drsquointerdiction de financement des deacutepenses drsquoinves-
tissement des eacutecoles priveacutees par les collectiviteacutes publiques en fa-
veur de lrsquoenseignement bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale
(article 5 de la proposition de loi) Le second eacutetendait la mecircme
deacuterogation au principe drsquointerdiction de financement des deacute-
penses drsquoinvestissement des collegraveges et lyceacutees par les collectiviteacutes
publiques
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 7 qui preacutevoyait drsquoeacutelargir les
cas dans lesquels existe un droit agrave inscrire son enfant dans une
eacutecole drsquoune autre commune afin qursquoil puisse suivre un enseigne-
ment de langue reacutegionale Inscription qui entraicircnait eacutegalement la
prise en charge du forfait scolaire par la commune de reacutesidence
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle 8 qui a pour
objet de renforcer la place et lrsquousage des langues reacutegionales dans
la vie publique en facilitant la traduction en langue reacutegionale des
inscriptions et signaleacutetiques apposeacutees sur les bacirctiments publics
les voies publiques de circulation et les voies navigables ainsi que
sur les principaux supports de communication institutionnelle
des services publics
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 9 qui avait pour objet la pos-
sibiliteacute pour les services publics drsquoeacutetat civil drsquoutiliser dans les
actes drsquoeacutetat civil qursquoils produisent les signes diacritiques des
langues reacutegionales en usage sur le territoire
o Enfin la commission a eacutegalement supprimeacute lrsquoarticle 10 qui preacute-
voyait un gage pour compenser les charges eacuteventuelles creacuteeacutees par
les dispositions de la proposition de loi
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Crsquoest donc un texte largement laquo eacutepureacute raquo par rapport agrave sa version initiale qui a
eacuteteacute soumis agrave la discussion en seacuteance publique en premiegravere lecture agrave lrsquoAssem-
bleacutee nationale Le porteur de la proposition va naturellement utiliser toutes
les potentialiteacutes offertes par la Constitution pour tenter de revenir par le biais
des amendements agrave son esprit initial
Discussion du texte nordm2654 adopteacute par la commission sur la proposition
de loi de M Paul Molac agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion (2548)
85 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes permettant de revenir sur peu de points
cependant agrave lrsquoobjectif initial de la proposition de loi Ainsi lrsquoamendement ndeg64
deacuteposeacute le 10 feacutevrier 2020 par le deacuteputeacute et rapporteur Paul Molac a permis de
rectifier lrsquoaspect purement deacuteclaratoire de lrsquoarticle premier auquel avait conclu
la commission lrsquoamendement ndeg69 deacuteposeacute le mecircme jour par Paul Molac eacutega-
lement permet lrsquoautorisation dans les actes drsquoeacutetat civil des signes diacritiques
des langues reacutegionales lrsquoamendement ndeg80 toujours deacuteposeacute par Paul Molac
modifie la loi Toubon (article 3 du texte de loi deacutefinitif) Mais agrave ce stade de la
discussion parlementaire le texte eacutetait encore dans une version tregraves eacuteloigneacutee
de sa mouture premiegravere
Adoption le 13 feacutevrier 2020 de la laquo petite loi raquo nordm408 par lAssem-
bleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion
Transmission au Seacutenat de la proposition de loi ndeg321 le 14 feacutevrier
2020
o Travaux en commission La commission de la culture de lrsquoeacuteduca-
tion et de la communication a deacutesigneacute Mme Monique de Marco
rapporteure sur la proposition de loi ndeg321 (2019-2020) adopteacutee
par lAssembleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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des langues reacutegionales et agrave leur promotion Commenccedilant par deacute-
clarer que laquo la question de la promotion des langues reacutegionales
deacutepasse les clivages politiques raquo Monique de Marco a proposeacute en
commission dadopter le texte conforme tout en avouant que des
dispositifs leacutegislatifs laquo plus ambitieux pourraient mieux assurer la
promotion des langues reacutegionales raquo Au cours des discussions le
regret de lrsquoabsence de la question de lrsquoenseignement a eacuteteacute exprimeacute
regret qui concerne en reacutealiteacute non la proposition de loi initiale
mais le texte de la commission de lrsquoAssembleacutee nationale laquo La pro-
position de loi de Paul Molac est la bienvenue parce quelle rap-
pelle agrave lEacutetat un certain nombre de ses obligations en ce quelle
preacutevoit un cadrage de la loi Toubon et quelle seacutecurise la place
des langues dans lespace public En revanche nous avons tous
eacuteteacute surpris par labsence totale de reacutefeacuterence agrave lEacuteducation natio-
nale Nous avons donc fait des recherches qui ont montreacute que les
deacuteputeacutes de la majoriteacute preacutesidentielle certainement agrave lappel du
ministre de leacuteducation nationale avaient systeacutematiquement sup-
primeacute tous les articles concernant lenseignement Nous nous re-
trouvons donc avec une magnifique proposition de loi sur les
langues reacutegionales qui ne dit pas un mot de lenseignement
comme sil pouvait y avoir une politique linguistique en faveur des
langues reacutegionales qui ne passe pas par lenseignement raquo Et le
seacutenateur Max Brisson drsquoen appeler agrave la reacuteinsertion des disposi-
tions sur lrsquoenseignement laquo Ma chegravere collegravegue vous avez proposeacute
un vote conforme mais jespegravere que nous ferons preuve dimagi-
nation dans lheacutemicycle pour deacuteposer quelques amendements qui
rappelleront au Gouvernement quil ny a pas de politique linguis-
tique qui ne sappuie sur leacuteducation Sinon cest de lenfu-
mage raquo20
20 Comptes-rendus de la commission de la culture de lrsquoeacuteducation et de la communication
seacuteance du 2 deacutecembre 2020 httpwwwsenatfrcompte-rendu-commis-
sions20201130culturehtmltoc5
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La rapporteure confirme que laquo lrsquoamputation raquo est le fait des deacutepu-
teacutes et tout en srsquoavouant prudente pousse indirectement ses col-
legravegues seacutenateurs agrave user du droit drsquoamendement laquo Nous venons
dentendre un veacuteritable plaidoyer en faveur des langues reacutegio-
nales Mecircme si cette proposition de loi ne donne pas entiegravere satis-
faction car elle a eacuteteacute largement amputeacutee par lAssembleacutee natio-
nale je preacutefegravere my tenir dans un premier temps par prudence
Et libres agrave vous de deacuteposer des amendements raquo
Aucun amendement nayant eacuteteacute deacuteposeacute en commission le texte
qui en eacutetait issu ne comportait toujours pas de dispositions rela-
tives agrave lenseignement
o Seacuteance publique Vingt amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes notam-
ment celui (deacuteposeacute agrave lidentique par des seacutenateurs issus de six
groupes diffeacuterents) preacutevoyant drsquoinseacuterer agrave lrsquoarticle L 442-5-1 du
code de lrsquoeacuteducation un alineacutea ainsi reacutedigeacute laquo La participation fi-
nanciegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un
enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle
L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence
et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune
autre commune agrave la condition que la commune de reacutesidence ne
dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegio-
nale raquo
Sans surprise lrsquoavis du Gouvernement exprimeacute par le ministre
Jean-Michel Blanquer fut deacutefavorable regrettant au passage
laquo drsquoecirctre sans cesse obligeacute drsquooccuper la position du jacobin reacutetif
sur la deacutefensive alors mecircme que nous avons une politique de pro-
motion des langues reacutegionales Simplement agrave certains moments
ndash par exemple avec la rupture de lrsquoeacutequilibre entre enseignement
public et enseignement priveacute ou avec la creacuteation drsquoune obligation
suppleacutementaire pour les communes ndash les propositions vont trop
loin et cela conduit agrave me placer face aux geacuteneacuterositeacutes diverses
dans la position deacutesagreacuteable du gardien des principes ou dans
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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celle du gardien de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral En effet derriegravere ces deacutebats
se pose la question de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et de la posteacuteriteacute de la loi
Carle car vous risquez de creacuteer un deacuteseacutequilibre alors que cette loi
repreacutesentait un point drsquoeacutequilibre raquo21
o Adoption du texte ndeg32 modifieacute par le Seacutenat le 10 deacutecembre 2020
Le Seacutenat a adopteacute trois articles additionnels (2 ter 2 quater et
2 quinquies) qui rejoignent les positions du deacuteputeacute Paul Molac et
reacutetablit lrsquoarticle 3 (modifieacute) de la proposition de loi qui avait eacuteteacute
supprimeacute en premiegravere lecture agrave lrsquoAssembleacutee nationale
Deuxiegraveme lecture
o Rapport sur la proposition de loi modifieacutee par le Seacutenat relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promo-
tion (ndeg3658) ndeg4035 Sur les six articles supprimeacutes agrave lrsquoAssem-
bleacutee lrsquoarticle 3 a eacuteteacute reacutetabli au Seacutenat qui a par ailleurs adopteacute
trois articles additionnels (2 ter 2 quater et 2 quinquies) Lrsquoen-
semble eacutetant conforme agrave lrsquoesprit de la proposition de loi initiale le
rapporteur souhaite que lrsquoAssembleacutee nationale adopte en deu-
xiegraveme lecture un texte identique agrave celui voteacute par le Seacutenat pour
les quatre articles restant en discussion et nrsquoa donc pas preacutesenteacute
drsquoamendements Mais lrsquoarticle 2 quinquies (article 6 du texte deacute-
finitif) ayant eacuteteacute supprimeacute en commission 16 amendements deacute-
poseacutes agrave lrsquoidentique par 115 deacuteputeacutes membres de huit diffeacuterents
groupes parlementaires ont permis de le reacuteintroduire en seacuteance
o Discussion en seacuteance publique le 8 avril 2021 au cours de la-
quelle 262 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes
o Adoption deacutefinitive le 8 avril 2021 en deuxiegraveme lecture de la
proposition de loi TA nordm591 relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
21 Compte rendu inteacutegral des deacutebats Seacuteance du 10 deacutecembre 2020 httpwwwse-natfrseancess202012s20201210s20201210007htmlsection708
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Saisine du Conseil constitutionnel du 22 avril 2021 par au moins
soixante deacuteputeacutes en application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitu-
tion
Soit un jour avant que nrsquoexpire le deacutelai de saisine du Conseil constitu-
tionnel la promulgation de la loi par le preacutesident de la Reacutepublique devant
intervenir dans les 15 jours de lrsquoadoption deacutefinitive La saisine du Conseil
constitutionnel est un acte non grave mais solennel qui perturbe le temps
leacutegislatif ne serait-ce que pour cette raison elle meacuterite un soin particulier
Soin envers lrsquoinstitution agrave laquelle elle srsquoadresse et agrave qui elle impose des
charges suppleacutementaires soin envers la Constitution qursquoelle entend pro-
teacuteger La lettre de saisine ou du moins la version qui a circuleacute manifeste-
ment reacutedigeacutee agrave la hacircte nrsquoest pas agrave la hauteur du seacuterieux qursquoexige de ma-
niegravere impeacuterieuse cette deacutemarche Une lettre de saisine ne saurait se limiter
agrave invoquer en tregraves peu de lignes la violation de laquo principes constitutionnels raquo
sans que ceux-ci ne soient deacutetailleacutes ni mecircme indiqueacutes Le seul article mis
en cause est lrsquoarticle 6 de la loi qui modifie lrsquoarticle L 442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation
II Discussion de la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la loi
relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Les deacuteputeacutes auteurs de la saisine demandent au Conseil constitutionnel la
censure de lrsquoarticle 6 de la loi
laquo Les sixiegraveme et septiegraveme alineacuteas de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacutedu-
cation sont remplaceacutes par un alineacutea ainsi reacutedigeacute
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacuteta-
blissements priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispen-
sant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L
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312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacuteta-
blissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune
agrave la condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dis-
pensant un enseignement de langue reacutegionale raquo
Une commune dont aucune eacutecole ne propose denseignement de langue reacutegio-
nale devrait donc participer aux frais de scolarisation des enfants domicilieacutes
sur son territoire qui suivent un tel enseignement dans un eacutetablissement situeacute
sur une autre commune Le dispositif concerne les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat drsquoassociation qui sont dans les faits majoritaire-
ment associatifs et laiumlques Cet enseignement peut aussi concerner les eacuteta-
blissements confessionnels mais il faut drsquoembleacutee preacuteciser que comme lrsquoa jugeacute
le Conseil constitutionnel dans son examen de la loi dite laquo Carle raquo le principe
de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute pour le leacutegislateur de preacutevoir la
participation des collectiviteacutes publiques au financement du fonctionnement
des eacutetablissements denseignement priveacute sous contrat dassociation
laquo Consideacuterant quil reacutesulte des regravegles ou principes agrave valeur constitution-
nelle (hellip) que le principe de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute
pour le leacutegislateur de preacutevoir sous reacuteserve de fonder son appreacuteciation
sur des critegraveres objectifs et rationnels la participation des collectiviteacutes
publiques au financement du fonctionnement des eacutetablissements den-
seignement priveacutes sous contrat dassociation selon la nature et limpor-
tance de leur contribution agrave laccomplissement de missions denseigne-
ment raquo (deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 cons 6)
Lrsquoinstauration du laquo forfait scolaire communal raquo ne poursuit pas un objectif de
sanction financiegravere des communes deacutemunies doffre en langue reacutegionale mais
celui de les inciter agrave en proposer Drsquoailleurs lrsquoarticle premier de la loi deacutefeacutereacutee
souligne que laquo LrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales concourent agrave lrsquoenseigne-
ment agrave la diffusion et agrave la promotion de ces langues raquo Comme preacuteciseacute plus
loin les maires sont dispenseacutes du paiement drsquoun tel forfait degraves lors qursquoun
enseignement drsquoune langue reacutegionale y compris au titre drsquoune simple initia-
tion est proposeacute dans leur commune
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Il faut souligner que les articles relatifs agrave lrsquoenseignement ont eacuteteacute introduits par
les seacutenateurs Plus exactement ces derniers ont reacuteintroduit la disposition qui
autorise la conclusion de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pour eacutetendre
lrsquooffre drsquoenseignement en langue reacutegionale aux eacutetablissements publics dans le
cadre horaire normal sous des formes speacutecifiques et inseacutereacute trois articles un
premier autorise lrsquoenseignement dit laquo immersif raquo en langue reacutegionale un deu-
xiegraveme le forfait scolaire communal dont il est ici question un troisiegraveme est
relatif agrave lenseignement des langues reacutegionales agrave Mayotte territoire qui du fait
de sa deacutepartementalisation reacutecente ne pouvait jusqualors pas beacuteneacuteficier des
possibiliteacutes offertes aux autres deacutepartements concernant lenseignement de
ces langues
Trois remarques doivent ecirctre faites sur lrsquoinsertion relative agrave lrsquoenseignement des
langues reacutegionales lors des horaires normaux Premiegraverement cette disposition
existe deacutejagrave pour la Collectiviteacute de Corse deuxiegravemement cet enseignement
doit se faire moyennant un accord entre lrsquoEacutetat et les reacutegions (laquo dans le cadre
de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions la collectiviteacute de Corse la Collectiviteacute
europeacuteenne drsquoAlsace ou les collectiviteacutes territoriales reacutegies par lrsquoarticle 73 de
la Constitution raquo) troisiegravemement il srsquoagit drsquoune option facultative qursquoin fine
les familles deacutecident ou non de prendre
En reacutesumeacute et conclusion la disposition de lrsquoarticle 3
1 Existe deacutejagrave pour une collectiviteacute en lrsquooccurrence la collectiviteacute de Corse
2 Est strictement encadreacutee (existence drsquoun accord entre lrsquoEacutetat et les reacute-
gions)
3 Est conforme agrave la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le ca-
ractegravere facultatif de lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale Dans sa deacute-
cision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi relative agrave la Corse le
Conseil constitutionnel a fixeacute le cadre de lrsquoenseignement drsquoune langue
reacutegionale dans le cadre de lrsquohoraire normal en consideacuterant que laquo si lrsquoen-
seignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquohoraire nor-
mal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir pour
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les ensei-
gnants qursquoil ne saurait non plus avoir pour effet de soustraire les eacutelegraveves
aux droits et obligations applicables agrave lrsquoensemble des usagers des eacuteta-
blissements qui assurent le service public de lrsquoenseignement ou sont
associeacutes agrave celui‑ci Consideacuterant qursquoil reacutesulte de ce qui preacutecegravede que sous
reacuteserve que lrsquoenseignement de la langue corse revecircte tant dans son prin-
cipe que dans ses modaliteacutes de mise en œuvre un caractegravere facultatif
[cette disposition] nrsquoest contraire ni au principe drsquoeacutegaliteacute ni agrave aucun
autre principe ou regravegle de valeur constitutionnelle raquo (cons 24 et 25)
La loi du 8 avril 2021 ne propose pas autre chose et srsquoinscrit en tous
points sur cette ligne deacutejagrave jugeacutee par le Conseil constitutionnel
Lrsquoarticle 6 srsquoinsegravere de maniegravere logique et coheacuterente dans lrsquoensemble des articles
de la loi relative agrave lrsquoenseignement Avant drsquoen examiner dans les deacutetails la
conformiteacute agrave la Constitution il faut souligner que le Seacutenat a deacutejagrave voteacute le prin-
cipe de ce forfait scolaire communal agrave deux reprises
1 Il lrsquoa drsquoabord inseacutereacute dans le projet de loi pour une eacutecole de la confiance
en premiegravere lecture Crsquoest la commission mixte paritaire qui a ajouteacute les
mots laquo contribution volontaire raquo ocirctant au forfait son caractegravere obliga-
toire22
2 Il a reacuteaffirmeacute sa position lors de lrsquoexamen de la proposition de loi ici
discuteacutee supprimant les mots laquo contribution volontaire raquo de la loi en vi-
gueur
Agrave cet argument deacutemocratique respectueux du bicameacuteralisme et rappelant que
le Seacutenat laquo assure la repreacutesentation des collectiviteacutes territoriales de la Reacutepu-
22 Loi ndeg2019-791 du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance JORF ndeg0174 du 28 juillet
2019
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Primo cet article est en coheacuterence avec la leacutegislation existante en matiegravere drsquoen-
seignement des langues reacutegionales agrave lrsquoeacutecole confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute
juridique (A) Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contrevien-
nent pas au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des langues
reacutegionales affirmeacute par le Conseil constitutionnel (B) Tertio la loi ne porte pas
atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur une commune une nouvelle
charge (C) Quarto elle ne viole pas non plus en conseacutequence le principe de
libre administration des collectiviteacutes territoriales (D)
A Forfait scolaire communal et respect de lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique
Cette exigence bien que non explicitement qualifieacutee de principe consti-
tutionnel par le Conseil constitutionnel se rattache notamment agrave la notion de
laquo garantie des droits raquo inscrite agrave lrsquoarticle 16 de la Deacuteclaration de 1789 laquo Toute
socieacuteteacute dans laquelle la garantie des droits nrsquoest pas assureacutee ni la seacuteparation
des pouvoirs deacutetermineacutee nrsquoa point de constitution raquo Deacutecoulant de lrsquoarticle 34
de la Constitution la clarteacute de la loi est un eacuteleacutement essentiel de la seacutecuriteacute
juridique agrave laquelle la jurisprudence du Conseil constitutionnel a offert corps
et protection Aussi le principe de laccessibiliteacute et de lintelligibiliteacute de la loi a-
t-il eacuteteacute eacuterigeacute en objectif de valeur constitutionnelle (deacutecision ndeg99-421 DC du
16 deacutecembre 1999)
Mecircme si les principes de clarteacute drsquoaccessibiliteacute et drsquointelligibiliteacute de la loi per-
mettent avant tout drsquoimposer au leacutegislateur laquo drsquoadopter des dispositions suffi-
samment preacutecises et des formules non eacutequivoques afin de preacutemunir les sujets
de droit contre une interpreacutetation contraire agrave la Constitution ou contre le
risque drsquoarbitraire raquo (deacutecision ndeg2004-500 DC du 29 juillet 2004 cons 13) ils
concourent aussi agrave offrir aux citoyens la seacutecuriteacute juridique neacutee drsquoune cons-
truction drsquoensemble coheacuterente et sans rupture Laquelle se base depuis 2008
sur une disposition claire et sans ambiguiumlteacute de la Constitution laquo Les langues
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reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo (75-1) Elle est une in-
vitation aux repreacutesentants de leacutegifeacuterer pour proteacuteger et promouvoir lesdites
langues et la loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit dans la continuiteacute de ce qursquoils ont fait depuis
2008 notamment La coheacuterence est lrsquoune des artegraveres essentielles de lrsquoexigence
de seacutecuriteacute juridique qui impregravegne la jurisprudence du Conseil constitution-
nelle comme celle du Conseil drsquoEacutetat et de la Cour de cassation Sans ecirctre ex-
plicitement eacutenonceacutee par le Conseil constitutionnel lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique est laquo efficiente raquo23 et est au cœur des preacuteoccupations des juges24 comme
de la doctrine Les Cahiers du Conseil constitutionnel lui consacrant un dossier
speacutecial dans sa livraison drsquooctobre 202025
La loi soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel reacutepond agrave lrsquoexigence de
seacutecuriteacute juridique en eacutetant le prolongement de lrsquoœuvre anteacuterieure du leacutegisla-
teur pour commencer la loi du 8 juillet 2013 drsquoorientation et de programma-
tion pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique qui reconnaicirct lrsquoenseigne-
ment bilingue franccedilais langue reacutegionale Dans lrsquoannexe de la loi figurent cinq
mentions compleacutementaires notamment celle concernant la possibiliteacute de
srsquoinscrire dans une eacutecole publique drsquoune autre commune lorsque la commune
de reacutesidence ne propose pas drsquoenseignement de langue reacutegionale Disposition
deacuteclarative qui a trouveacute une application concregravete dans la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) la parti-
cipation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes dans lrsquoenseigne-
ment public doit deacutesormais faire lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune drsquoac-
cueil et la commune de reacutesidence26
La loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle a
ajouteacute un nouveau motif de discrimination baseacute sur laquo la maitrise drsquoune autre
23 Bertrand Mathieu laquo La seacutecuriteacute juridique un principe clandestin mais efficient raquo Droit constitutionnel Meacutelanges Patrice Geacutelard LGDJ 1999 pp 301-305 24 En teacutemoigne notamment le fait que le Conseil drsquoEacutetat lui ait consacreacute deux rapports annuels celui de 1991 De la seacutecuriteacute juridique et celui de 2006 Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit 25 Dossier La seacutecuriteacute juridique Titre VII Les Cahiers du Conseil constitutionnel ndeg5 octobre
2020 26 Lrsquoarticle 104 de la loi NOTRe consacre par ailleurs la compeacutetence partageacutee des collectiviteacutes
locales dans la promotion des langues reacutegionales tout en donnant une place preacutepondeacuterante
agrave la reacutegion telle que preacutevue agrave lrsquoarticle 1er de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de lrsquoaction publique territoriale et drsquoaffirmation des meacutetropoles (MAPTAM)
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langue que le franccedilais raquo qui concerne eacutegalement les langues reacutegionales Celle
du 28 feacutevrier 2017 de programmation relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend
inopeacuterant le deacutecret du 2 Thermidor an II sur lequel se basait notamment le
ministegravere de la justice pour interdire les livrets de famille bilingues Enfin
lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance vient eacutetendre
aux eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives une laquo contribution volontaire raquo
des communes pour la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoins-
crivant dans une eacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionale en
dehors de sa commune de reacutesidence
La loi du 8 avril 2021 soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel nrsquoest que
le prolongement et le compleacutement de lrsquoarticle L 212-8 du Code de lrsquoeacuteducation
qui preacutecise les conditions dans lesquelles pour lrsquoenseignement public une
commune doit contribuer au financement des deacutepenses scolaires drsquoun enfant
reacutesidant sur son territoire et scolariseacute dans une autre commune Elle vient le
compleacuteter de maniegravere parallegravele eacutetendant ce qui existe deacutejagrave pour lrsquoeacutecole pu-
blique agrave lrsquoeacutecole priveacutee sous contrat Confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
elle ne viole par ailleurs aucun article de la Constitution et ne contredit pas
la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le caractegravere facultatif de lrsquoen-
seignement des langues reacutegionales
B Forfait scolaire communal et respect de la jurisprudence du Conseil
constitutionnel sur la langue franccedilaise
Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contreviennent pas
agrave lrsquoarticle 2 alineacutea premier de la Constitution (laquo La langue de la Reacutepublique est
le Franccedilais raquo) et au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des
langues reacutegionales qui en deacutecoule affirmeacute par le Conseil constitutionnel La
langue de la Reacutepublique est et demeure le Franccedilais et agrave aucun moment la
loi du 8 avril 2021 nrsquoentend y porter atteinte Lrsquoapprentissage des langues reacute-
gionales se fait agrave ses cocircteacutes mais dans une mesure permettant leffectiviteacute pour
les enfants agrave acceacuteder agrave lenseignement des langues reacutegionales laquo patrimoine de
la France raquo selon les termes de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Apprentissage
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qui pour certains enfants est lrsquoun des eacuteleacutements de leur laquo deacuteveloppement raquo au
sens de lrsquoalineacutea 10 du Preacuteambule de la Constitution du 27 octobre 1946 (laquo La
Nation assure agrave lrsquoindividu et agrave la familles les conditions neacutecessaires agrave leur
deacuteveloppement raquo)
Ce que creacutee lrsquoarticle 6 agrave travers le forfait ce nrsquoest pas lrsquoenseignement obligatoire
de la langue reacutegionale mais la possibiliteacute de pouvoir beacuteneacuteficier de cet enseigne-
ment (sans prescription de deacutelai) qui demeure facultatif Le rapporteur Paul
Molac le reacuteaffirme au cours de la seacuteance publique du 8 avril 2021 laquo Je ne
suis pas favorable au caractegravere obligatoire de cet enseignement mais je consi-
degravere que tout eacutelegraveve qui souhaite le suivre doit pouvoir le faire raquo27
Ce faisant la loi sans contrevenir agrave la Constitution offre un contenu agrave son
article 75-1 La jurisprudence du Conseil constitutionnel en vertu de laquelle
lrsquoenseignement des langues reacutegionales nrsquoa qursquoun caractegravere facultatif nrsquoest ici
absolument pas remise en cause Dans sa deacutecision ndeg99-412 DC du 15 juin
1999 il a souligneacute que le principe drsquouniciteacute du peuple franccedilais et lrsquoindivisibiliteacute
de la Reacutepublique assurant lrsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi srsquoopposaient agrave laquo
ce que soient reconnus des droits collectifs agrave quelque groupe que ce soit deacutefini
par une communauteacute drsquoorigine de culture de langue ou de croyance raquo En
outre la langue de la Reacutepublique eacutetant le franccedilais il ne peut ecirctre reconnu un
laquo droit agrave pratiquer une langue autre que le franccedilais non seulement dans la vie
priveacutee mais eacutegalement dans la vie publique agrave laquelle la Charte rattache
la justice et les autoriteacutes administratives et services publics raquo
Deux remarques srsquoimposent drsquoembleacutee drsquoune part cette jurisprudence est an-
teacuterieure agrave lrsquoinsertion en 2008 par le pouvoir constituant de lrsquoarticle 75-1 dis-
posant que laquo les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France
raquo Cette remarque drsquoordre contextuel vient srsquoajouter agrave la suivante drsquoautre part
27 Assembleacutee nationale XVe leacutegislature Session ordinaire de 2020-2021 Seacuteance du jeudi 08
avril 2021 httpswwwassemblee-nationalefrdyn15comptes-rendusseancesession-
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la loi du 8 avril 2021 nrsquoentend pas confier agrave lrsquoenseignement des langues reacutegio-
nales un caractegravere obligatoire En cela elle respecte la jurisprudence du Con-
seil constitutionnel preacuteciteacutee (deacutecision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi
relative agrave la Corse)
laquo Si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquoho-
raire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir
pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les en-
seignants (hellip) raquo (cons 24)
Lrsquoenseignement drsquoune langue minoritaire ne devient donc en aucun cas obli-
gatoire Ce qui doit faire laquo lrsquoobjet drsquoun accord raquo ce sont les conditions permet-
tant effectivement agrave des enfants drsquoacceacuteder agrave un enseignement facultatif qui
contribue agrave leur deacuteveloppement proteacutegeacute par ailleurs par lrsquoalineacutea 10 du Preacuteam-
bule de 1946 preacuteciteacute Ni la Constitution ni son interpreacutetation par le Conseil
constitutionnel ne srsquoopposent agrave ce qursquoune commune de reacutesidence participe y
compris de maniegravere obligatoire au financement de la scolarisation dans une
autre commune des enfants souhaitant suivre un tel enseignement Crsquoest don-
ner aux enfants et aux parents de maniegravere effective et efficiente la possibiliteacute
concregravete de beacuteneacuteficier drsquoun enseignement drsquoune langue reacutegionale composante
de leur laquo deacuteveloppement raquo laquelle appartient en vertu de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution au laquo patrimoine de la France raquo
C Forfait scolaire communal et respect du principe drsquoeacutegaliteacute
Tertio la loi ne contrevient pas au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur
une commune une nouvelle charge
Conformeacutement agrave une jurisprudence du Conseil constitutionnel bien eacutetablie le
principe deacutegaliteacute de lrsquoarticle 6 de la Deacuteclaration des droits de lhomme et du
citoyen de 1789 laquo ne soppose ni agrave ce que le leacutegislateur regravegle de faccedilon diffeacuterente
des situations diffeacuterentes ni agrave ce quil deacuteroge agrave leacutegaliteacute pour des raisons
dinteacuterecirct geacuteneacuteral pourvu que dans lun et lautre cas la diffeacuterence de traite-
ment qui en reacutesulte soit en rapport direct avec lobjet de la loi qui leacutetablit raquo
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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(pour lrsquoune des reacutecentes application au domaine de lrsquoenseignement dont il sera
ici question deacutecision ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de
la confiance)
En ce qui concerne preacuteciseacutement le caractegravere obligatoire drsquoune nouvelle charge
pour une collectiviteacute celui-ci nrsquoa pas eacuteteacute censureacute par le Conseil constitutionnel
agrave propos de lrsquoexamen de la loi sur lrsquoavenir de lrsquoeacutecole preacuteciteacutee (deacutecision ndeg 2019-
787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de la confiance) Lrsquoarticle 17 de
la loi alors deacutefeacutereacute au Conseil constitutionnel preacutevoyait dans son premier ali-
neacutea
laquo LrsquoEacutetat attribue de maniegravere peacuterenne agrave chaque commune les ressources
correspondant agrave lrsquoaugmentation des deacutepenses obligatoires qursquoelle a
prises en charge en application des articles L 212-4 L 212-5 et L 442-
5 du code de lrsquoeacuteducation au titre de lrsquoanneacutee scolaire 2019-2020 par rap-
port agrave lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 dans la limite de la part drsquoaugmenta-
tion reacutesultant directement de lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoins-
truction obligatoire raquo
Les deacutepenses qui font lrsquoobjet de lrsquoaccompagnement financier en cause sont
celles qui beacuteneacuteficient aux eacutecoles publiques et aux eacutetablissements drsquoenseigne-
ment priveacutes ayant passeacute un contrat drsquoassociation avec lrsquoEacutetat
Lrsquoabaissement agrave trois ans du deacutebut de lrsquoinstruction obligatoire a donc fait pe-
ser des charges nouvelles pour les communes et leur a mecircme imposeacute de par-
ticiper au financement des eacutecoles maternelles priveacutees sous contrat y compris
lorsqursquoelles nrsquoont pas approuveacute ce contrat La diffeacuterence de traitement entre
les communes est reacuteelle selon qursquoelles financcedilaient ou non des classes mater-
nelles avant lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoinstruction obligatoire mais
nrsquoentraicircne pas pour autant une rupture drsquoeacutegaliteacute
Ainsi lrsquoa jugeacute le Conseil constitutionnel dans la deacutecision preacuteciteacutee drsquoune part
il a estimeacute que cette diffeacuterence de traitement reposait sur une diffeacuterence de
situation
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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laquo Les communes qui au cours de lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 avaient
institueacute des classes maternelles ou eacutecoles maternelles publiques ou ap-
prouveacute des contrats drsquoassociation drsquoeacutecoles maternelles priveacutees ont con-
tribueacute agrave ce titre agrave leur financement dans les conditions preacutevues par le
code de lrsquoeacuteducation Ces communes ne sont ainsi pas placeacutees dans une
situation identique agrave celle des autres communes qui nrsquoexerccedilaient pas
deacutejagrave les mecircmes compeacutetences et ne supportaient donc pas les charges
correspondantes raquo (cons 7)
Drsquoautre part le Conseil constitutionnel a jugeacute que la diffeacuterence de traitement
contesteacutee eacutetait en rapport direct avec lrsquoobjet de la loi qui lrsquoeacutetablit
laquo Qui consiste en application de la seconde phrase du quatriegraveme alineacutea
de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution agrave accompagner de ressources finan-
ciegraveres une extension de compeacutetence ayant pour conseacutequence drsquoaugmen-
ter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales raquo (cons 8)
Agrave lrsquoargument opposeacute agrave lrsquoarticle 6 de la loi deacutefeacutereacutee selon lequel ces dispositions
creacuteeraient une diffeacuterence de traitement entre les communes contraire au prin-
cipe deacutegaliteacute devant la loi le Conseil constitutionnel en vertu de sa jurispru-
dence Loi pour une eacutecole de la confiance devrait logiquement apporter la mecircme
reacuteponse Le leacutegislateur entend avec cette loi du 8 avril 2021 donner de ma-
niegravere geacuteneacuterale effectiviteacute agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution agrave travers en par-
ticulier un outil permettant de mettre en œuvre les dispositions de lrsquoarticle 72-
2 de la Constitution relatives aux extensions de compeacutetences imposeacutees aux
collectiviteacutes territoriales Dispositions qui par ailleurs nrsquoobligent pas le leacutegi-
slateur agrave preacutevoir un accompagnement financier de lrsquoensemble des communes
En lien avec cet argument il en reacutesulte que lrsquoarticle 6 ne porte pas atteinte
par ailleurs au principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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D Forfait scolaire communal et respect du principe de libre administra-
tion des collectiviteacutes territoriales
Quarto le forfait scolaire communal nrsquoest ni contraire agrave la lettre de lrsquoar-
ticle 72 de la Constitution ni agrave son interpreacutetation par le Conseil constitution-
nel
En vertu de lrsquoarticle 72 alineacutea 3 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales
srsquoadministrent librement dans les conditions preacutevues par la loi Correacutelative-
ment lrsquoarticle 34 de la Constitution donne agrave la loi compeacutetence pour deacuteterminer
laquo les principes fondamentaux (hellip) de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales de leurs compeacutetences et de leurs ressources raquo Cette libre admi-
nistration doit en outre se concilier avec drsquoautres principes constitutionnels
tels que le principe drsquoeacutegaliteacute et la liberteacute de lrsquoenseignement Crsquoest ainsi que le
Conseil constitutionnel a jugeacute que laquo si le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacute-
gislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce que les conditions essentielles drsquoap-
plication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de lrsquoenseignement deacutepen-
dent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre
les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (voir notamment la deacutecisions ndeg84-
185 DC du 18 janvier 1985 cons 18)
La libre administration est bien un principe constitutionnel mais crsquoest au leacute-
gislateur qursquoil revient sous le controcircle du Conseil constitutionnel drsquoen preacuteci-
ser le contenu Lrsquointervention du leacutegislateur est neacutecessaire pour la deacutefinition
des regravegles de fonctionnement des collectiviteacutes territoriales la deacutefinition des
compeacutetences qui leur sont deacutevolues (transfert creacuteation extension des compeacute-
tences) et en matiegravere de ressources la fixation du taux des impocircts deacutecideacutes par
les Assembleacutees deacutelibeacuteratives locales
Il ressort de la jurisprudence administrative et constitutionnelle que seule la
loi peut creacuteer une obligationsujeacutetion nouvelle agrave la charge drsquoune collectiviteacute
territoriale Le principe de libre administration ne peut donc pas exister en-
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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dehors de lrsquointervention du leacutegislateur lequel nrsquoa pas pour autant toute lati-
tude En drsquoautres termes le principe de libre administration est deacutefini par la
loi mais est aussi proteacutegeacute contre elle qui ne peut notamment pas porter at-
teinte au-delagrave drsquoun certain seuil aux ressources des collectiviteacutes territoriales
restreindre la liberteacute contractuelle intervenir dans les deacutecisions des collecti-
viteacutes territoriales relatives agrave leurs agents ou le fonctionnement de leurs insti-
tutions
En eacutetendant la prise en charge du forfait scolaire communal la loi deacutefeacutereacutee creacutee
une charge suppleacutementaire pour certaines communes
Aux termes du quatriegraveme alineacutea de larticle 72-2 de la Constitution laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales saccom-
pagne de lattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consa-
creacutees agrave leur exercice Toute creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour
conseacutequence daugmenter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales est ac-
compagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Dans le cas ougrave le leacutegislateur
octroie une nouvelle compeacutetence aux collectiviteacutes territoriales (articles 72-2 de
la Constitution et L 1614-1-1 du code geacuteneacuteral des collectiviteacutes territoriales)
il accompagne cette creacuteation de ressources correspondantes uniquement si
lexercice de cette compeacutetence est rendu obligatoire Ainsi en a jugeacute le Conseil
constitutionnel en ajoutant que le leacutegislateur disposait dun pouvoir dappreacute-
ciation en la matiegravere la compensation devant ecirctre naturellement suffisante
pour ne pas constituer une entrave au principe de libre administration
laquo Que ces dispositions ne visent en ce qui concerne les creacuteations et ex-
tensions de compeacutetences que celles qui preacutesentent un caractegravere obliga-
toire que dans cette hypothegravese il nest fait obligation au leacutegislateur
que daccompagner ces creacuteations ou extensions de compeacutetences de res-
sources dont il lui appartient dappreacutecier le niveau sans toutefois deacutena-
turer le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales raquo
(deacutecision ndeg2008-569 DC du 7 aoucirct 2008 Loi instituant un droit daccueil
pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires pendant le temps
scolaire cons 13)
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Le Conseil constitutionnel a jugeacute qursquoen conseacutequence et en lrsquoespegravece le leacutegisla-
teur avait suffisamment deacutetermineacute le niveau des ressources accompagnant la
creacuteation de ce service daccueil pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires pendant le temps scolaire sans meacuteconnaicirctre le quatriegraveme alineacutea de
larticle 72-2 de la Constitution
Lextension de compeacutetences est soumise a fortiori au mecircme reacutegime que la
creacuteation de compeacutetences Elle consiste en leacutelargissement du peacuterimegravetre ou en
la modification de la nature ou de lobjet dune compeacutetence dont lexercice est
deacutejagrave assureacute par les collectiviteacutes territoriales ayant pour conseacutequence de creacuteer
une charge suppleacutementaire pour celles-ci Le droit agrave une compensation finan-
ciegravere nest garanti que si lextension preacutesente un caractegravere obligatoire et le
leacutegislateur en deacutetermine le niveau et les modaliteacutes agrave condition quils nentra-
vent pas la libre administration des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece le principe de libre administration nrsquoest donc pas violeacute par le ca-
ractegravere contraignant que confegravererait la loi deacutefeacutereacutee au forfait scolaire communal
de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation Drsquoune part le Conseil constitu-
tionnel a deacutejagrave comme souligneacute plus haut accepteacute le principe du caractegravere
obligatoire drsquoune nouvelle charge qui nrsquoentraine par ailleurs mecircme pas
lrsquoautomaticiteacute drsquoun accompagnement financier des communes Drsquoautre part
lrsquoargument de proportionnaliteacute est ici deacuteterminant agrave ceux qui avancent un
risque drsquoassegravechement financier de certaines communes rurales contraintes
de prendre en charge la scolarisation dun eacutelegraveve dans une autre commune
mieux doteacutee qui propose lenseignement de la langue reacutegionale (ce qui selon
le deacuteputeacute Molac ne concernerait que 002 des enfants en France) il faut
reacutepondre en mettant en avant lrsquoobjectif incitatif et non sanctionnateur de la
loi Il suffira auxdites communes de proposer un enseignement de langue reacute-
gionale qui ne pourrait repreacutesenter qursquoune heure drsquoinitiation par semaine par
exemple
Une heure drsquoinitiation par semaine pour eacuteviter de payer le forfait scolaire com-
munal lequel ne meacuteconnait pas par ailleurs lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
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les principes constitutionnels drsquoeacutegaliteacute drsquouniciteacute de la langue franccedilaise de la
libre administration des collectiviteacutes territoriales et permet drsquoassurer le deacuteve-
loppement de lrsquoenfant crsquoest bien peu de choses pour censurer une loi souve-
raine adopteacutee qui plus est agrave une eacutecrasante majoriteacute
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
De Raphaeumll SchellenbergerA GreffeObjet Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues ReacutegionalesDate mardi 4 mai 2021 101012Piegraveces jointes Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionalespdf
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loirelative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus desoixante deacuteputeacutes ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texteen application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarerlrsquoinconstitutionnaliteacute de son article 6 Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons ennotre qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre lapleine constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sensNous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notreconsideacuteration respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire
- Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
- Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche
- Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret
- Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne
- Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte
- Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor
- David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion
- Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme
- Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne
- Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
1
M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2
Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
3
On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
- Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie
- Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
Ce message ainsi que les piegraveces jointes sont eacutetablis sous la seule responsabiliteacute de lexpeacutediteur agrave lintention exclusive de ses destinataires ils peuvent contenir des informations confidentielles Toute publication utilisation ou diffusion doit ecirctre autoriseacutee preacutealablement Ce message a fait lobjet dun traitement anti-virusIl est rappeleacute que tout message eacutelectronique est susceptible dalteacuteration au cours de son acheminement sur Internet ________________________________________________________________
Vous pouvez consulter le site de lAssembleacutee nationale agrave ladresse suivante httpwwwassemblee-nationalefr
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
1
M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Association ESKOLIMChez Seaska Route de la Pouponniegravere64250 CAMBO LES BAINSeskolim6gmailcomRepreacutesenteacutee par son President Jean Seacutebastien HAYDN11 chemin de Saint Jean66240 SAINT ESTEVE
CONTRIBUTION EXTERIEURE
Observations sur la conformiteacute agrave la Constitution de laproposition de loi relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
Monsieur le Preacutesident du Conseil constitutionnel Mesdames et Messieurs les
membres du Conseil constitutionnel lrsquoassociation Eskolim souhaite porter agrave votre attention
les observations suivantes tendant agrave deacutemontrer la conformiteacute agrave la Constitution de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Parmi lrsquoensemble des dispositions du texte deacutefeacutereacute la plupart nrsquoont donneacute lieu agrave aucun
deacutebat sur leur conformiteacute agrave la Constitution qui est de toute eacutevidence acquise par exemple au
sujet des traductions dont la constitutionnaliteacute a deacutejagrave indirectement eacuteteacute reconnue (CC 99-412
DC 15 juin 1999 CC ndeg2001-452 DC 6 deacutecembre 2001) ou de lrsquoutilisation des signes
diacritiques sur les actes drsquoeacutetat civil
De plus au-delagrave des apparences drsquoune politique jurisprudentielle initieacutee dans un contexte
speacutecifique le Conseil constitutionnel dispose deacutesormais drsquoun cadre constitutionnel de
reacutefeacuterence transformeacute (1) qui lui permettra de valider les dispositions leacutegislatives du texte dont
il est saisi en particulier lrsquoarticle 4 relatif agrave lrsquoenseignement immersif (2) et lrsquoarticle 6 au sujet
de la participation financiegravere agrave la scolarisation par les communes de reacutesidence (3)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
1 Le renouvellement des normes constitutionnelles de reacutefeacuterence en matiegravere de
langues reacutegionales
11 Les ineacutevitables deacuterogations apporteacutees agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution
Toute regravegle constitutionnelle connaicirct des atteacutenuations et peut ecirctre concilieacutee lrsquoarticle 2
de la Constitution ne fait pas exception Le principe demeure inchangeacute laquo La langue de la
Reacutepublique est le franccedilais raquo Sur ce fondement le Conseil constitutionnel a deacuteveloppeacute dans
les anneacutees 90 et 2000 une jurisprudence vigilante sur lrsquousage du franccedilais mais sans pour
autant refuser toute eacutevolution nous y reviendrons
Cependant lrsquoassociation Eskolim souhaite mettre en eacutevidence lrsquoindeacuteniable
changement de cadre constitutionnel en matiegravere de langues reacutegionales pour au
moins trois raisons
En premier lieu la porteacutee de lrsquoarticle 2 de la Constitution nrsquoest pas figeacutee et peut
eacutevoluer avec le temps En effet le Conseil constitutionnel opegravere reacuteguliegraverement des adaptations
de la porteacutee du texte constitutionnel Parmi de nombreuses illustrations jurisprudentielles la
liberteacute drsquoexpression et de communication protegravege deacutesormais la liberteacute drsquoacceacuteder agrave Internet
(CC ndeg 2009-580 DC 10 juin 2009) et de srsquoy exprimer (CC ndeg2020-801 DC du 18 juin 2020)
La liberteacute du mariage comprend deacutesormais le droit de mettre fin aux liens du mariage (CC ndeg
2016-557 QPC du 29 juillet 2016) La monteacutee en puissance des exigences environnementales
dans le deacutebat public a permis au Conseil constitutionnel de juger qursquoil deacutecoule de la Charte de
lrsquoenvironnement laquo que la protection de lrsquoenvironnement patrimoine commun des ecirctres
humains constitue un objectif de valeur constitutionnelle raquo (CC ndeg2019-823 QPC 31 janvier
2020) Certains fondements constitutionnels que lrsquoon croyait endormis ont eacuteteacute reacuteactiveacutes sous
lrsquoeffet du pouvoir interpreacutetatif agrave lrsquoimage de lrsquoarticle 15 de la DDHC (laquo La socieacuteteacute a le droit de
demander compte agrave tout agent public de son administration raquo) agrave lrsquoorigine drsquoun droit drsquoaccegraves
aux archives publiques (CC ndeg2017-655 QPC 15 septembre 2017) et drsquoun droit drsquoaccegraves aux
documents administratifs (CC ndeg2020-834 QPC 3 avril 2020)
En deuxiegraveme lieu la reacutedaction actuelle de lrsquoarticle 2 de la Constitution ne date pas de
1958 mais drsquoun ajout issu de la loi constitutionnelle ndeg 92-554 du 25 juin 1992 voteacutee dans un
contexte particulier au moment ougrave la France ratifiait le traiteacute de Maastricht et reacutevisait sa
Constitution afin de lever les atteintes agrave la souveraineteacute constateacutees par le Conseil
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
constitutionnel En 1992 lrsquoinsertion de la langue franccedilaise au sein de lrsquoarticle 2 vise agrave rassurer
lrsquoopinion face aux craintes heacutegeacutemoniques de la langue anglaise les langues reacutegionales ne
sont ni viseacutees ni nieacutees dans leur existence et leur rocircle Il est sur ce point particuliegraverement
reacuteveacutelateur de se reacutefeacuterer aux deacuteclarations limpides du Garde des Sceaux Michel Vauzelle lors
des deacutebats parlementaires consacreacutes en 1992 au vote de la reacutevision constitutionnelle laquo Les
langues reacutegionales sont naturellement une richesse de notre patrimoine national Agrave ce
titre le Gouvernement exprime par ma voix lrsquoimmense respect et le soin qursquoil porte agrave cette
richesse de la nation [] Je ne vois pas lagrave drsquoatteinte agrave lrsquouniteacute de la nation mais au
contraire une contribution agrave sa richesse [] Aucune atteinte ne sera porteacutee agrave la politique
de respect de la diversiteacute de nos cultures reacutegionales qui est un eacuteleacutement essentiel du
patrimoine national raquo (JO Assembleacutee nationale p 1021)
Il est donc parfaitement possible pour le Conseil constitutionnel drsquoopeacuterer une
interpreacutetation eacutevolutive de lrsquoarticle 2 afin drsquoadapter la porteacutee de la norme constitutionnelle au
contexte actuel favorable agrave lrsquoapprofondissement de lrsquousage des langues reacutegionales Il nrsquoest
drsquoailleurs pas anodin de constater que la preacutesente proposition de loi a largement transcendeacute les
clivages politiques pour ecirctre voteacutee agrave une large majoriteacute avec drsquoailleurs le soutien de
lrsquoensemble des Preacutesidents de Reacutegion
En troisiegraveme lieu dans sa fameuse deacutecision sur la Charte europeacuteenne des langues
reacutegionales et minoritaires du 15 juin 1999 (ndeg99-412 DC) le Conseil constitutionnel a
implicitement reconnu la compatibiliteacute de lrsquoenseignement immersif ou bilingue avec la
Constitution et en particulier avec lrsquoarticle 2 de la Constitution En effet lrsquoinconstitutionnaliteacute
constateacutee entre la Charte et la Constitution concerne seulement les articles 1 et 7 Or le
consideacuterant 13 de cette deacutecision abusivement preacutesenteacutee comme un verrou absolu en matiegravere
de langues reacutegionales prend soin de preacuteciser laquo que nest contraire agrave la Constitution eu eacutegard agrave
leur nature aucun des autres engagements souscrits par la France dont la plupart au
demeurant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France en
faveur des langues reacutegionales raquo Parmi ces laquo autres engagements souscrits par la France raquo
au sein de la Charte figurent certaines stipulations de lrsquoarticle 8 de la Charte1 selon lequel
1 Article 8 ndash Enseignement1En matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel ces langues sontpratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de lenseignement de la (des)langue(s) officielle(s) de lEtat(hellip)ci agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires concerneacutees ou
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
laquo laquoen matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel
ces langues sont pratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de
lenseignement de la (des) langue(s) officielle(s) de lEtat raquo agrave toute une seacuterie drsquoengagements
Au sein des engagements auxquels la France avait souscrits et sur lesquels le Conseil
constitutionnel srsquoest donc prononceacute on trouve le point 1 c (iv) en vertu duquel la France
srsquoengage laquo agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui
le souhaitent ndash ou le cas eacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant raquo
Or ce renvoi concerne les stipulations suivantes
laquo i agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires
concerneacutees ou
Ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les
langues reacutegionales ou minoritaires ou
Iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales
ou minoritaires comme partie inteacutegrante du curriculum
Autrement dit la France srsquoeacutetait engageacutee au moment de la signature de la Charte agrave
appliquer lrsquoune des trois mesures citeacutees qui concernent lrsquoenseignement laquo dans raquo les langues
reacutegionales ou minoritaires dans le secondaire crsquoest-agrave-dire un enseignement immersif ou
bilingue Cet engagement faisait donc partie des stipulations examineacutees par le Conseil
constitutionnel et le consideacuterant 13 de la deacutecision du 15 juin 1999 affirme clairement que ces
stipulations ne sont pas contraires agrave la Constitution Degraves 1999 lrsquoenseignement immersif en
langue reacutegionale est reconnu par le Conseil constitutionnel comme compatible avec
lrsquoarticle 2 de la Constitution
En quatriegraveme lieu le texte mecircme de la Constitution contient drsquoores et deacutejagrave des
ameacutenagements au principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais
Drsquoune part en vertu de la loi constitutionnelle ndeg 98-610 du 20 juillet 1998 lAccord
de Noumeacutea est constitutionnaliseacute agrave larticle 77 de la Constitution Or cet accord stipule en son
ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les langues reacutegionalesou minoritaires ou
iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales ou minoritairescomme partie inteacutegrante du curriculum ou
iv agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui le souhaitent ndash ou le caseacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
point 133 laquo Les langues kanak sont avec le franccedilais des langues denseignement et de
culture en Nouvelle-Caleacutedonie Leur place dans lenseignement et les meacutedias doit donc ecirctre
accrue et faire lobjet dune reacuteflexion approfondie raquo
Drsquoautre part sous lrsquoeffet de la reacutevision constitutionnelle du 23 juillet 2008 la
Constitution consacre deacutesormais les langues reacutegionales sous lrsquoeffet de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution qui par deacutefinition atteacutenue et deacuteroge agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution et dont la
porteacutee ne saurait ecirctre symbolique
12 La porteacutee de lrsquoancrage constitutionnel des langues reacutegionales minoritaires
En vertu de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution laquo Les langues reacutegionales appartiennent
au patrimoine de la France raquo Sans discussion possible cette nouvelle disposition
constitutionnelle constitue un changement de circonstances de droit permettant drsquoatteacutenuer
fortement la porteacutee des preacuteceacutedentes deacutecisions du Conseil constitutionnel rendues avant la
reacutevision constitutionnelle de 2008 Certains voudraient pourtant reacuteduire ce texte agrave une porteacutee
simplement symbolique et pensent pouvoir drsquoores et deacutejagrave trouver une confirmation dans la
jurisprudence du Conseil constitutionnel La reacutealiteacute contentieuse est beaucoup plus nuanceacutee et
ne preacutejuge rien de lrsquoavenir
Le Conseil constitutionnel nrsquoa eu depuis 2008 qursquoune seule et unique occasion de
preacuteciser la porteacutee de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Dans la deacutecision du 20 mai 2011
(ndeg2011-130 QPC) il eacutetait en effet saisi des dispositions de larticle L 312-10 du code de
leacuteducation relative agrave lenseignement des langues et cultures reacutegionales qui eacutetait contesteacute au
regard de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Or estime le Conseil en 2011 lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution ninstitue pas un droit ou une liberteacute que la Constitution garantit Sa
meacuteconnaissance ne peut donc ecirctre invoqueacutee agrave lappui dune question prioritaire de
constitutionnaliteacute sur le fondement de larticle 61-1 de la Constitution
Il convient de ne pas tirer de conclusions excessives du deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en
QPC de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Drsquoune part cela nrsquoempecircche pas le Conseil constitutionnel de se fonder sur lrsquoarticle
75-1 de la Constitution dans le cadre du controcircle a priori comme crsquoest par exemple le cas
pour les regravegles constitutionnelles en matiegravere de recevabiliteacute des amendements ou des principes
constitutionnels en matiegravere budgeacutetaires
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Drsquoautre part le deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en QPC drsquoune norme constitutionnelle ne
preacutejuge pas drsquoune forme de hieacuterarchie mateacuterielle ou formelle et srsquoexplique seulement par les
speacutecificiteacutes de chacun des offices Par exemple le respect des regravegles du vote de la loi
imposeacutees par la Constitution impossibles agrave invoquer en QPC font pourtant lrsquoobjet drsquoune
vigilance accrue du Conseil constitutionnel dans le cadre du controcircle a priori justifiant
chaque anneacutee de nombreuses censures
En outre bien que non invocable en QPC lrsquoarticle 75-1 teacutemoigne indubitablement de
la volonteacute du constituant de permettre au leacutegislateur drsquoassouplir les conditions drsquousage des
langues reacutegionales en ouvrant davantage la leacutegislation agrave des possibiliteacutes drsquoapprentissage en la
matiegravere En cela lrsquoarticle 75-1 de la Constitution est une atteacutenuation une disposition
deacuterogatoire agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution selon lequel laquo La langue de la Reacutepublique est le
franccedilais raquo Comme le souligne le rapport drsquoun deacuteputeacute en 2015 laquo la preacuteservation et la
protection des langues reacutegionales sont devenues un objectif de valeur constitutionnelle raquo2 Une
telle interpreacutetation serait drsquoailleurs coheacuterente avec les travaux parlementaires agrave lrsquoorigine de la
reacutevision de 2008 pour le preacutesident de la Commission des lois du Seacutenat lrsquoarticle 75-1 permet
de donner laquo un fondement solide aux dispositions leacutegislatives et reacuteglementaires qui favorisent
la protection et le deacuteveloppement des langues reacutegionales sans diminuer la place que le
franccedilais occupe dans notre sphegravere publique raquo3
Enfin dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel
estime que larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi
ndeg2005-380 du 23 avril 2005 est conforme agrave la Constitution Or les dispositions ainsi
valideacutees sont toujours en vigueur dans une reacutedaction identique laquo Un enseignement de
langues et cultures reacutegionales peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des
modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces
langues sont en usage raquo Ainsi tout en estimant que lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ne
constitue pas un droit ou liberteacute constitutionnel directement invocable en QPC le Conseil
constitutionnel a valideacute le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures
reacutegionales
2JJ Urvoas Rapport sur Proposition de loi constitutionnelle ndeg 1618 visant agrave ratifier la Charte europeacuteenne deslangues reacutegionales ou minoritaires 14 janvier 2014
3JJ Hyest Rapport ndeg 387 (2007-2008) sur le projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions dela Ve Reacutepublique fait au nom de la commission des lois du Seacutenat
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Autre signe eacutevident de la porteacutee effective de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le
leacutegislateur a multiplieacute ces derniegraveres anneacutees lrsquoadoption de textes favorisant lrsquousage et
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et leur promotion La loi du 8 juillet 2013
drsquoorientation et de programmation pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique ouvre la
possibiliteacute drsquoun enseignement bilingue franccedilais-langue reacutegionale la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) eacutetablit la participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes par lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale
lrsquoarticle 86 de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle
modifie lrsquoarticle 225-1 du code peacutenal en creacuteant un nouveau cas de discrimination fondeacute sur laquo
la maitrise drsquoune autre langue que le franccedilais raquo la loi du 28 feacutevrier 2017 de programmation
relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend inopeacuterant lrsquointerdiction des livrets de famille
bilingues lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance eacutetend aux
eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives les modaliteacutes drsquoun accord entre les communes pour
la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoinscrivant dans une eacutecole dispensant un
enseignement de langue reacutegionale en dehors de sa commune de reacutesidence Lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution a donc susciteacute une production leacutegislative qui teacutemoigne de la volonteacute du pouvoir
politique de mettre en œuvre une politique en matiegravere de langue et culture reacutegionales La
particulariteacute de la proposition de loi deacutefeacutereacutee est drsquoecirctre la premiegravere loi dont lrsquoobjet exclusif vise
agrave densifier lrsquoenseignement et lrsquousage des langues reacutegionales mais ce texte confirme les
avanceacutees ponctuelles eacutetablies depuis la reacutevision constitutionnelle de 2008
13 La monteacutee en puissance drsquoexigences constitutionnelles favorisant lrsquousage des langues
reacutegionales
Au-delagrave de lrsquoapport indeacuteniable de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution qui inteacuteresse
directement et clairement la possibiliteacute pour le leacutegislateur de favoriser le deacuteveloppement des
langues reacutegionales la jurisprudence du Conseil constitutionnel atteste drsquoune monteacutee en
puissance de plusieurs liberteacutes qui participent indirectement du mecircme mouvement
En premier lieu la liberteacute drsquoexpression et de communication concerne les langues
reacutegionales Degraves la deacutecision ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 le Conseil constitutionnel avait
concilieacute lrsquoarticle 2 de la Constitution avec la liberteacute drsquoexpression et de communication afin de
censurer certaines dispositions imposant lrsquousage du franccedilais tout en faisant notamment une
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
reacutefeacuterence aux langues reacutegionales cette liberteacute laquo implique le droit pour chacun de choisir les
termes jugeacutes par lui les mieux approprieacutes agrave lexpression de sa penseacutee que la langue franccedilaise
eacutevolue comme toute langue vivante en inteacutegrant dans le vocabulaire usuel des termes
de diverses sources quil sagisse dexpressions issues de langues reacutegionales de vocables
dits populaires ou de mots eacutetrangers raquo Or la liberteacute drsquoexpression et de communication a vu
son reacutegime constitutionnel renforceacute depuis plusieurs anneacutees sous lrsquoeffet du triple test de
proportionnaliteacute en vertu duquel les limites apporteacutees agrave ces liberteacutes doivent ecirctre neacutecessaires
adapteacutees et proportionneacutees agrave lrsquoobjectif poursuivi Norme constitutionnelle prioritaire pour le
Conseil constitutionnel la liberteacute drsquoexpression et de communication a justifieacute de nombreuses
censures de dispositions leacutegislatives ces derniegraveres anneacutees (loi laquo Hadopi raquo consultation des
sites Internet terroristes loi laquo Avia raquohellip) Or cette liberteacute dans ses deux composantes de
lrsquoexpression et de la communication permet au locuteur drsquoutiliser une langue reacutegionale et de
ne pas subir drsquoentraves excessives ou injustifieacutees Le deacuteveloppement des langues reacutegionales et
de leur enseignement lrsquoouverture des possibiliteacutes de srsquoexprimer et de communiquer gracircce agrave
ces langues ne sont pas eacutetrangegraveres aux conditions drsquoexercice de la liberteacute drsquoexpression et de
communication Ainsi la monteacutee en puissance de cette liberteacute dans le contentieux
constitutionnel confirme lrsquoeacutevolution favorable du cadre constitutionnel applicable aux langues
reacutegionales
En deuxiegraveme lieu lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant est deacutesormais consacreacute en tant
qursquoexigence constitutionnelle deacutecoulant des alineacuteas 10 et 11 du Preacuteambule de 1946 Ce
principe a drsquoores et deacutejagrave eacuteteacute appliqueacute en matiegravere de droit des eacutetrangers (CC 2019-797 QPC du
26 juillet 2019) mais aussi en droit de la famille au sujet du divorce (CC ndeg 2019-778 DC du
21 mars 2019) ou de lrsquoaccouchement sous le secret (CC 2019-826 QPC du 7 feacutevrier 2020) Il
serait parfaitement coheacuterent que cette exigence constitutionnelle soit applicable en matiegravere
drsquoeacuteducation et drsquoenseignement ce qui permettrait notamment de justifier le renforcement de
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et le soutien financier qui leur est apporteacute
En troisiegraveme lieu la liberteacute de lrsquoenseignement reconnu en tant que principe
constitutionnel (CC ndeg77-87 DC 23 novembre 1977 2016-745 DC 26 janvier 2017)
pourrait permette de proteacuteger constitutionnellement le libre choix des parents en
matiegravere de meacutethodes eacuteducatives conformeacutement agrave la jurisprudence du Conseil drsquoEtat En
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effet dans une deacutecision du 19 juillet 2017 (Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg
406150) le Conseil drsquoEtat estime que le laquo principe de la liberteacute de lrsquoenseignement qui figure
au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la Reacutepublique implique la
possibiliteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement y compris hors de tout contrat conclu
avec lrsquoEtat tout comme le droit pour les parents de choisir pour leurs enfants des
meacutethodes eacuteducatives alternatives agrave celles proposeacutees par le systegraveme scolaire public y
compris lrsquoinstruction au sein de la famille raquo A fortiori la liberteacute de lrsquoenseignement
permettrait au leacutegislateur drsquooffrir aux eacutelegraveves la possibiliteacute de suivre un enseignement immersif
en langue reacutegionale Faire deacutecouler de la liberteacute drsquoenseignement une exigence en matiegravere de
droit des parents de choisir les meacutethodes eacuteducatives serait drsquoailleurs en coheacuterence avec
lrsquoarticle 2 du Protocole 1 de la CEDH4 et lrsquoarticle 14-3 de la Charte des droits fondamentaux
de lUnion europeacuteenne5
Au-delagrave du principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais unchangement de contexte est intervenu depuis lrsquoinsertion en 1992 de cette disposition agravelrsquoarticle 2 de la Constitution Depuis 2008 le pouvoir constituant a consacreacute leslangues reacutegionales agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution de nombreuses reacuteformesleacutegislatives et regraveglementaires ont accompagneacute le deacuteveloppement des langues reacutegionaleset plusieurs principes constitutionnels accompagnent et pourraient agrave lrsquoavenirrenforcer lrsquoassise normative des langues reacutegionalesCrsquoest agrave lrsquoaune de ce cadre constitutionnel renouveleacute et transformeacute en phase avec leseacutevolutions leacutegislatives et sociales que le Conseil constitutionnel appreacuteciera laconstitutionnaliteacute de la preacutesente proposition de loi qui loin de constituer une rupturesrsquoinscrit dans une forme de continuiteacute
2 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi modifie lrsquoarticle L321-10 du code de lrsquoeacuteducation qui
en lrsquoeacutetat dispose
4laquo Nul ne peut se voir refuser le droit agrave lrsquoinstruction LrsquoEacutetat dans lrsquoexercice des fonctions qursquoil assumera dans ledomaine de lrsquoeacuteducation et de lrsquoenseignement respectera le droit des parents drsquoassurer cette eacuteducation et cetenseignement conformeacutement agrave leurs convictions religieuses et philosophiques raquo
5laquo La liberteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement dans le respect des principes deacutemocratiques ainsi quele droit des parents drsquoassurer lrsquoeacuteducation et lrsquoenseignement de leurs enfants conformeacutement agrave leurs convictionsreligieuses philosophiques et peacutedagogiques sont respecteacutes selon les lois nationales qui en reacutegissent lrsquoexercice raquo
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laquo Les langues et cultures reacutegionales appartenant au patrimoine de la France leurenseignement est favoriseacute prioritairement dans les reacutegions ougrave elles sont en usage
Cet enseignement peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefiniespar voie de convention entre lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont enusage
Le Conseil supeacuterieur de leacuteducation est consulteacute conformeacutement aux attributions qui lui sontconfeacutereacutees agrave larticle L 231-1 sur les moyens de favoriser leacutetude des langues et culturesreacutegionales dans les reacutegions ougrave ces langues sont en usage
Lenseignement facultatif de langue et culture reacutegionales est proposeacute dans lune des deuxformes suivantes
1deg Un enseignement de la langue et de la culture reacutegionales
2deg Un enseignement bilingue en langue franccedilaise et en langue reacutegionale
Les familles sont informeacutees des diffeacuterentes offres dapprentissage des langues et culturesreacutegionales raquo
Lrsquoarticle 4 a simplement pour objet drsquoajouter un 3e cas de forme drsquoenseignementfacultatif de langue et culture reacutegionales en preacutevoyant
laquo3deg Un enseignement immersif en langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectifdrsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo
21 Le Conseil constitutionnel peut ne pas se prononcer sur cette disposition
A titre liminaire il semblerait que lrsquoarticle 4 du texte soumis agrave lrsquoexamen du
Conseil constitutionnel ne soit pas contesteacute par les auteurs de la saisine parlementaire agrave en
croire les deacuteclarations publiques de plusieurs deacuteputeacutes Ce point nrsquoest pas sans importance degraves
lors qursquoil confirme le large consensus politique autour de cette disposition et peut avoir une
conseacutequence sur le peacuterimegravetre de lrsquoobjet de la deacutecision rendue
Certes il arrive ponctuellement au Conseil constitutionnel drsquoexaminer drsquooffice
drsquoautres dispositions que celles contesteacutees par la saisine mais depuis lrsquoentreacutee en vigueur de la
QPC et speacutecialement depuis 2016 une telle pratique tend agrave devenir une exception (Deacutecisions
ndeg 2019-794 DC du 20 deacutecembre 2019 ndeg2018-772 DC du 15 novembre 2018 ndeg2016-745
DC du 26 janvier 2017)
De plus lors de lrsquoexamen de la loi pour une eacutecole de la confiance dans sa deacutecision
ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 le Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute examiner
drsquooffice les dispositions de lrsquoarticle 38 creacuteant en vertu de lrsquoarticle L314-2 du code de
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lrsquoeacuteducation une expeacuterimentation de classe immersive en langue eacutetrangegravere ou reacutegionale6 Si le
Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute se saisir drsquooffice de cette disposition expeacuterimentale
crsquoest qursquoimplicitement il nrsquoa pas consideacutereacute qursquoelle posait une difficulteacute manifeste de
constitutionnaliteacute Degraves lors la coheacuterence voudrait qursquoil en aille de mecircme avec les dispositions
de lrsquoarticle 4 de la preacutesente proposition de loi qui ne font que reprendre les grands principes
de lrsquoexpeacuterimentation preacuteceacutedente en preacutevoyant la possibiliteacute drsquoun enseignement immersif en
langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue
franccedilaise
22 Les exigences anciennes poseacutees par le Conseil constitutionnel sont respecteacutees
Elaboreacutee avant la reacutevision constitutionnelle de 2008 consacrant les langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la jurisprudence
du Conseil constitutionnel en matiegravere drsquoenseignement de langue reacutegionale est totalement
respecteacutee par lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
En premier lieu le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement immersif en langue
reacutegionale rend lrsquoarticle 4 conforme agrave la Constitution
Dans plusieurs deacutecisions le Conseil constitutionnel a eu lrsquooccasion de preacuteciser que
seule lrsquoobligation de suivre un enseignement dans une autre langue que le franccedilais serait
contraire agrave la Constitution Ainsi dans la deacutecision ndeg 2001-456 DC du 27 deacutecembre 2001 il
indique que laquo lusage dune langue autre que le franccedilais ne peut ecirctre imposeacute aux eacutelegraveves des
eacutetablissements de lenseignement public ni dans la vie de leacutetablissement ni dans
lenseignement des disciplines autres que celles de la langue consideacutereacutee raquo Le verbe
6Article L314-2 du code de lrsquoeacuteducation laquo Sous reacuteserve de lrsquoautorisation preacutealable des autoriteacutes acadeacutemiques etapregraves concertation avec les eacutequipes peacutedagogiques le projet drsquoeacutecole ou drsquoeacutetablissement mentionneacute agrave lrsquoarticle L401-1 peut preacutevoir la reacutealisation dans des conditions deacutefinies par deacutecret drsquoexpeacuterimentations peacutedagogiquesportant sur tout ou partie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement drsquoune dureacutee limiteacutee agrave cinq ans Cesexpeacuterimentations peuvent concerner lrsquoorganisation peacutedagogique de la classe de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement laliaison entre les diffeacuterents niveaux drsquoenseignement la coopeacuteration avec les partenaires du systegraveme eacuteducatiflrsquoenseignement dans une langue vivante eacutetrangegravere ou reacutegionale les eacutechanges avec des eacutetablissementseacutetrangers drsquoenseignement scolaire lrsquoutilisation des outils et ressources numeacuteriques la reacutepartition des heuresdrsquoenseignement sur lrsquoensemble de lrsquoanneacutee scolaire les proceacutedures drsquoorientation des eacutelegraveves et la participation desparents drsquoeacutelegraveves agrave la vie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement Les collectiviteacutes territoriales sont systeacutematiquementassocieacutees agrave la deacutefinition des grandes orientations des expeacuterimentations meneacutees par lrsquoeacuteducation nationale ainsiqursquoagrave leurs deacuteclinaisons territoriales raquo
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laquo imposer raquo est employeacute agrave la fois au sujet de lrsquousage drsquoune autre langue que le franccedilais et au
sujet de la vie de lrsquoeacutetablissement et de lrsquoenseignement des disciplines autres que celles de la
langue consideacutereacutee Ce qui signifie qursquoil est constitutionnellement possible au leacutegislateur de
permettre aux eacutelegraveves de choisir de maniegravere facultative une telle orientation dans
lrsquoenseignement De mecircme dans sa deacutecision ndeg2001 454 DC du 17 janvier 2002 le Conseil
constitutionnel avait estimeacute que si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre
de lrsquohoraire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires laquo il ne saurait revecirctir pour autant
un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo Et dans la deacutecision
ndeg2004-490 DC 12 feacutevrier 2004 le Conseil indique que lrsquoenseignement de la langue
tahitienne ou dune autre langue polyneacutesienne dans le cadre de lhoraire normal des eacutecoles
maternelles et primaires dans les eacutetablissements du second degreacute et dans les eacutetablissements
denseignement supeacuterieur laquo ne saurait revecirctir pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les
eacutelegraveves ou eacutetudiants ni pour les enseignants raquo
Or en lrsquoespegravece il nrsquoy a absolument aucun doute sur le caractegravere facultatif du 3deg
ajouteacute agrave lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation En effet le premier alineacutea de lrsquoarticle L312-
10 du code de lrsquoeacuteducation est inchangeacute et eacutevoque un laquo enseignement facultatif raquo Le deacuteputeacute
Molac lrsquoa clairement exprimeacute lors des deacutebats laquo lrsquoenseignement immersif tel qursquoil est ici
proposeacute reacutepond agrave cette condition dans la mesure ougrave il ne serait pas imposeacute mais seulement
proposeacute au sein des eacutetablissements publics au cocircteacute de filiegraveres classiques drsquoenseignement la
deacutecision finale restant du ressort des personnes responsables de lrsquoenfant raquo (Rapport du 31
mars 2021)
En deuxiegraveme lieu lrsquoarticle 4 nrsquoa pas pour objet de soustraire les eacutelegraveves aux
droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements drsquoenseignement
Dans plusieurs deacutecisions relatives agrave lrsquousage drsquoune langue reacutegionale le Conseil
constitutionnel rappelle qursquoun enseignement de ce type nrsquoa pas pour laquo pour objet de soustraire
les eacutelegraveves scolariseacutes (hellip) aux droits et obligations applicables agrave lensemble des usagers des
eacutetablissements qui assurent le service public de lenseignement ou sont associeacutes agrave celui-ci raquo
(ndeg 91-290 DC du 9 mai 1991 ndeg 2001-454 DC du 17 janvier 2002) Or lrsquoarticle 4 a
seulement pour objet drsquoouvrir une 3e modaliteacute facultative drsquoenseignement en langue reacutegionale
La proposition de loi ne confegravere pas des droits speacutecifiques agrave des laquo groupes raquo de locuteurs de
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de laquo territoires raquo dans lesquels ces langues
seraient pratiqueacutees Le texte ne modifie pas non plus les modaliteacutes drsquoexpression dans la vie
publique et dans la relation entre lrsquoadministration et les administreacutes De telle sorte que
lrsquoarticle 4 ne creacutee aucun droit particulier pour les eacutelegraveves comme pour les enseignants de nature
agrave les soustraire aux droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements
drsquoenseignement ou associeacutes agrave celui-ci
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 4 opegravere une conciliation raisonnable et eacutequilibreacutee entre
le principe de lrsquoarticle 2 de la Constitution et lrsquoapprentissage des langues reacutegionales
Lrsquoenseignement immersif en lange reacutegionale doit srsquoopeacuterer laquo sans preacutejudice de
lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo Lrsquoarticle 4 prend soin de ne pas
ignorer le principe poseacute par lrsquoarticle 2 de la Constitution et prolonge au niveau leacutegislatif la
conciliation souhaiteacutee par le constituant depuis 2008 avec lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Il
appartiendra au pouvoir regraveglementaire de preacuteciser la mise en œuvre de lrsquoobjectif de bonne
connaissance de la langue franccedilaise qui en toute hypothegravese garantit une conciliation
eacutequilibreacutee entre les regravegles constitutionnelles en preacutesence
Au surplus les retours drsquoexpeacuteriences des expeacuterimentations de classes en
enseignements immersifs permises par lrsquoarticle L 314-2 du code de lrsquoeacuteducation deacutemontrent
que les eacutelegraveves disposent drsquoun niveau en franccedilais plus eacuteleveacute que la moyenne Comme lrsquoindique
le rapport du Seacutenat sur la proposition de loi 19 expeacuterimentations immersives en langue
basque 6 en langue corse et une en langue catalane ont lieu actuellement dans des eacutecoles
publiques Or pour prendre lrsquoexemple de lrsquoenseignement en basque agrave 100 en eacutecole
maternelle objet drsquoune eacutevaluation preacutecise par lrsquoacadeacutemie de Bordeaux en 2019 (Etude
comparative des filiegraveres de maternelle 100 basque bilingue et franccedilais Acadeacutemie de
Bordeaux 2019) laquo lorsque ces enfants arrivaient en CP leur niveau de franccedilais eacutetait
supeacuterieur agrave la moyenne du deacutepartement Cela prouve que le niveau de franccedilais nrsquoavait
absolument pas eacuteteacute toucheacute raquo (Paul Molac Assembleacutee nationale Seacuteance du 8 avril 2021)
En quatriegraveme lieu lrsquoarticle 4 ne fait qursquoeacutetendre la mise en œuvre drsquoune modaliteacute
drsquoenseignement deacutejagrave valideacute par le Conseil constitutionnel
Dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel a valideacute
le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures reacutegionales en estimant que
larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi ndeg2005-380 du 23
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avril 2005 est conforme agrave la Constitution En effet apregraves avoir estimeacute inopeacuterant le grief tireacute
de la violation de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la deacutecision preacutecise laquo que les dispositions
contesteacutees ne sont contraires agrave aucun droit ou liberteacute que la Constitution garantit raquo Par
conseacutequent en vertu de lrsquoautoriteacute que lrsquoarticle 62 de la Constitution confegravere aux deacutecisions du
Conseil constitutionnel les dispositions valideacutees dans cette deacutecision et toujours en vigueur
sont conformes agrave la Constitution Il srsquoagit en particulier de lrsquoalineacutea 2 de la version actuelle de
lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation en vertu duquel laquo Cet enseignement peut ecirctre
dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre
lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont en usage raquo Or lrsquoarticle 4 de la
proposition de loi ne fait qursquoajouter une 3e possibiliteacute de mise en œuvre drsquoun principe deacutejagrave
valideacute par le Conseil constitutionnel modaliteacute facultative et sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune
bonne connaissance de la langue franccedilaise Le leacutegislateur srsquoest donc scrupuleusement
conformeacute aux exigences du Conseil constitutionnel
23 La possibiliteacute drsquoun enseignement immersif peut se preacutevaloir de plusieurs exigences constitutionnelles
En plus de srsquoinscrire dans les lignes jurisprudentielles du Conseil constitutionnel et de
respecter lrsquoarticle 2 de la Constitution lrsquoarticle 4 de la proposition de la loi peut se preacutevaloir
plusieurs normes constitutionnelles
En premier lieu lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en vertu duquel laquo Les langues
reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo constitue un changement de
circonstances de droit issu de la reacutevision constitutionnelle de 2008 qui atteacutenue la porteacutee de
lrsquoarticle 2 de la Constitution et permet ainsi de fonder le principe drsquoen enseignement immersif
et facultatif en langue reacutegionale
En second lieu comme preacuteceacutedemment rappeleacute (cf supra point 13) plusieurs
exigences et liberteacutes constitutionnelles peuvent soutenir le deacuteveloppement des langues
reacutegionales et peser favorablement dans la conciliation opeacutereacutee par le Conseil constitutionnel
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La liberteacute drsquoexpression et de communication garantie par lrsquoarticle 11 de la DDHC
et dont le reacutegime constitutionnel srsquoest renforceacute depuis une dizaine drsquoanneacutees peut permettre de
justifier lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale degraves lors qursquoil srsquoagit drsquoun preacutealable neacutecessaire
agrave lrsquoexpression et agrave la communication dans une autre langue que le franccedilais
Lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant reacutecemment consacreacute sur le fondement des alineacuteas 10
et 11 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 peut permettre au leacutegislateur de diversifier les
possibiliteacutes drsquoapprentissage drsquoune langue et drsquoune culture reacutegionale
La liberteacute de lrsquoenseignement consacreacutee de longue date en tant que principe
fondamental reconnu par les lois de la Reacutepublique implique neacutecessairement comme le
reconnaissent le Conseil drsquoEtat au niveau constitutionnel (CE 19 juillet 2017 Association
Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150) et les textes europeacuteens (article 2 du protocole 1
CEDH article 14-3 Charte des droits fondamentaux de lrsquoUnion europeacuteenne) une possibiliteacute
pour les parents de choisir des meacutethodes eacuteducatives en lien avec leurs convictions
Il est eacutegalement possible drsquoavancer le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction qui
deacutecoule de lrsquoalineacutea 13 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 (CC ndeg2001-450 DC 11
juillet 2001) degraves lors que lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale poursuit un objectif
peacutedagogique auquel les eacutelegraveves doivent pouvoir acceacuteder de maniegravere suffisamment libre et
selon des critegraveres objectifs et rationnels
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi se contente drsquoajouter une modaliteacute de mise enœuvre drsquoun enseignement dont le principe a deacutejagrave eacuteteacute valideacute par le Conseilconstitutionnel La conformiteacute agrave la Constitution de cet enseignement est eacutetablie degraveslors qursquoil est proposeacute de maniegravere facultative sans preacutejudice du respect de lrsquoarticle 2 dela Constitution et qursquoil peut se preacutevaloir de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ainsi quede plusieurs principes constitutionnels comme la liberteacute drsquoexpression lrsquointeacuterecirctsupeacuterieur de lrsquoenfant la liberteacute drsquoenseignement et lrsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction
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3 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi deacutefeacutereacutee modifie lrsquoarticle L442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation en remplaccedilant les alineacuteas 6 et 7 par lrsquoalineacutea suivant
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue
reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de
reacutesidence et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la
condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de
langue reacutegionale raquo
31 Lrsquoimpact subsidiaire et reacutesiduel de lrsquoarticle 6
Au-delagrave des passions et crispations qui peuvent parfois se rencontrer au greacute de deacutebats
relatifs au financement de lrsquoenseignement priveacute la modification apporteacutee par lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi doit ecirctre replaceacutee agrave sa juste porteacutee
En premier le meacutecanisme est subsidiaire En effet la participation financiegravere de la
commune de reacutesidence ne serait solliciteacutee que si cette commune ne laquo dispose pas drsquoeacutecole
dispensant un enseignement de langue reacutegionale raquo Il srsquoagit bien drsquoun laquo enseignement raquo quel
que soit sa forme et son volume Degraves lors comme lrsquoa clairement exprimeacute le deacuteputeacute Paul
Molac devant la Commission des affaires sociales il peut srsquoagir drsquoune laquo initiation drsquoun
enseignement paritaire ou drsquoune immersion raquo (31 mars 2021)
En deuxiegraveme lieu le meacutecanisme est reacutesiduel La participation financiegravere se limite
aux eacutetablissements priveacutes du premier degreacute ndash les eacutecoles ndash ayant conclu un contrat
drsquoassociation Les collegraveges et lyceacutees sont donc exclus du dispositif Un faible nombre
drsquoenfants sera concerneacute et la charge sera donc reacuteduite pour les communes en question De
plus en pratique dans les zones ougrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales est reacutepandu les
eacutecoles drsquoun grand nombre de communes ont deacutejagrave deacuteveloppeacute des offres eacuteducatives
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En troisiegraveme lieu la participation financiegravere est encadreacutee par la loi En application
de lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation non modifieacute par la preacutesente
proposition de loi les modaliteacutes de calcul de la contribution de la commune de reacutesidence sont
clairement eacutetablies
laquo il est tenu compte des ressources de cette commune du nombre deacutelegraveves de cette
commune scolariseacutes dans la commune daccueil et du coucirct moyen par eacutelegraveve calculeacute sur la base
des deacutepenses de fonctionnement de lensemble des eacutecoles publiques de la commune daccueil
sans que le montant de la contribution par eacutelegraveve puisse ecirctre supeacuterieur au coucirct quaurait
repreacutesenteacute pour la commune de reacutesidence leacutelegraveve sil avait eacuteteacute scolariseacute dans une de ses eacutecoles
publiques raquo
La charge financiegravere obeacuteit donc agrave des regravegles claires objectives rationnelles et deacutejagrave en
vigueur depuis plusieurs anneacutees En effet le laquo forfait scolaire raquo est deacutejagrave pratiqueacute sur le
fondement de lrsquoarticle L212-8 du code de lrsquoeacuteducation lorsqursquoune famille scolarise dans une
eacutecole publique ou priveacutee son enfant dans une autre commune que la commune de reacutesidence
32 Lrsquoabsence de violation de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales et du principe drsquoeacutegaliteacute
Ainsi replaceacutee dans sa juste porteacutee il ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi de violer la Constitution et en particulier les principes applicables en
matiegravere de libre administration des collectiviteacutes territoriales ainsi que le principe drsquoeacutegaliteacute
En premier lieu le Conseil constitutionnel a deacutejagrave valideacute le principe de lrsquoaide agrave
lrsquoenseignement priveacute et en particulier aux langues reacutegionales
Avant mecircme la reacutevision constitutionnelle de 2008 et la conseacutecration des langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le Conseil
constitutionnel avait reconnu que laquo pour concourir agrave la sauvegarde des langues reacutegionales
lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales peuvent apporter leur aide aux associations ayant cet
objet raquo (CC ndeg2001-456 DC 27 deacutecembre 2001)
De plus le Conseil constitutionnel rappelle reacuteguliegraverement que laquo le leacutegislateur peut
preacutevoir loctroi dune aide des collectiviteacutes publiques aux eacutetablissements denseignement
priveacutes selon la nature et limportance de leur contribution agrave laccomplissement de missions
denseignement raquo (CC ndeg93-329 DC du 13 janvier 1994)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
En deuxiegraveme lieu le principe de libre administration ne saurait justifier des
traitements diffeacuterencieacutes dans lrsquoexercice des droits et liberteacutes constitutionnels
En vertu de lrsquoarticle 72 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales srsquoadministrent
librement mais laquo dans les conditions preacutevues par la loi raquo De plus le Conseil constitutionnel
prend soin de preacuteciser que laquo si le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacutegislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce
que les conditions essentielles drsquoapplication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de
lrsquoenseignement deacutependent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas
ecirctre les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (CC ndeg 84-185 DC du 18 janvier 1985 CC
ndeg93-329 du 13 janvier 1994) Plus largement dans la deacutecision du 17 janvier 2002 (ndeg2001-
454 DC) le Conseil constitutionnel affirme que laquo le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales ne saurait conduire agrave ce que les conditions essentielles de mise en
oeuvre des liberteacutes publiques et par suite lensemble des garanties que celles-ci comportent
deacutependent des deacutecisions de collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre les mecircmes
sur lensemble du territoire de la Reacutepublique raquo
Or en lrsquoespegravece si les communes pouvaient librement participer au financement de la
scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous contrat
drsquoassociation lrsquoexercice de la liberteacute drsquoenseignement du principe drsquoeacutegaliteacute devant la loi et du
principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction deacutependrait de la seule volonteacute drsquoune collectiviteacute
territoriale ce que le Conseil constitutionnel condamne Degraves lors que la possibiliteacute drsquoun
enseignement en langue reacutegionale est offerte aux enfants les conditions drsquoaccegraves agrave cet
enseignement doivent pouvoir ecirctre effectives et eacutegales Loin de violer le principe drsquoeacutegaliteacute
devant la loi lrsquoarticle 6 de la proposition de loi en assure au contraire la garantie
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne transfert ni ne creacutee de
nouvelles compeacutetences
Srsquoagissant des ressources des collectiviteacutes locales permettant de leur assurer une libre
administration le quatriegraveme alineacutea de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution preacutevoit laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales srsquoaccompagne de
lrsquoattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consacreacutees agrave leur exercice Toute
creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour conseacutequence drsquoaugmenter les deacutepenses des
collectiviteacutes territoriales est accompagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Le Conseil
constitutionnel veille au respect de cette regravegle drsquoune part pour les transferts de compeacutetence
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entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales et drsquoautre part pour les creacuteations ou extensions de
compeacutetence des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece aucune creacuteation ou transfert de compeacutetence nrsquoest opeacutereacute au sens de
lrsquoarticle 72-2 de la Constitution Il srsquoagit drsquoune simple participation financiegravere agrave caractegravere
subsidiaire reacutesiduel et deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels comme
preacuteceacutedemment eacutevoqueacute (cf supra point 31) De plus le versement de la participation
financiegravere correspond en quelque sorte agrave un allegravegement de charge degraves lors que le coucirct de
lrsquoenfant scolariseacute est reporteacute sur une autre commune que la commune de reacutesidence En
conseacutequence lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne fait que modifier les modaliteacutes drsquoexercice
drsquoune compeacutetence sans en creacuteer ou transfeacuterer une nouvelle
Drsquoailleurs dans la deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 le Conseil
constitutionnel avait jugeacute inopeacuterant le grief tireacute de la violation des articles 72 et 72-2 de la
Constitution agrave propos de la version ancienne de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation en
jugeant que laquo la loi deacutefeacutereacutee nemporte ni creacuteation ni extension des compeacutetences en matiegravere de
contributions des communes aux frais de fonctionnement des classes eacuteleacutementaires des
eacutetablissements du premier degreacute priveacutes sous contrat dassociation que par suite le grief tireacute
de la meacuteconnaissance du principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales manque
en fait raquo
Le Conseil constitutionnel a statueacute dans le mecircme sens au sujet de lrsquoinstitution drsquoun
creacutedit drsquoimpocirct en matiegravere drsquoapprentissage ou de la possibiliteacute de modifier la dureacutee du contrat
drsquoapprentissage mecircme si ces mesures en rendant lrsquoapprentissage plus attrayant ont pour effet
drsquoaugmenter le nombre drsquoapprentis et donc drsquoaccroicirctre les charges des reacutegions dans ce
domaine (CC ndeg 2004-509 DC du 13 janvier 2005)
En quatriegraveme lieu le principe drsquoeacutegaliteacute entre les charges publiques est respecteacute
En effet en plus du caractegravere subsidiaire et reacutesiduel du meacutecanisme la participation
financiegravere preacutevue par lrsquoarticle 6 de la proposition de loi srsquoapplique agrave lrsquoensemble des
communes ne disposant pas drsquoun eacutetablissement dispensant un enseignement de langue
reacutegionale ce qui est coheacuterent au regard de lrsquoobjet de la loi Les critegraveres de la participation
financiegravere preacutevus par lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 sont en tout eacutetat de cause objectifs et
rationnels eacutetablis et mis en œuvre depuis plusieurs anneacutees Les garanties de lrsquoarticle 13 de la
DDHC sont donc respecteacutees
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En cinquiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir du respect
de plusieurs normes constitutionnelles
En affirmant depuis 2008 que les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la
France lrsquoarticle 75-1 de la Constitution donne un ancrage constitutionnel au deacuteveloppement
de lrsquousage et de lrsquoenseignement des langues reacutegionales Or sans la participation financiegravere des
communes de reacutesidence agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat lrsquoenseignement des langues reacutegionales serait compromis Par
conseacutequent lrsquoarticle 6 de la proposition de loi constitue une garantie leacutegale du respect de
lrsquoaffirmation porteacutee par lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Le mecircme raisonnement sera tenu agrave propos de lrsquoensemble des principes constitutionnels
qui donnent une assise agrave lrsquousage et agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales la liberteacute
drsquoexpression et de communication (article 11 DDHC) la liberteacute drsquoenseignement (PFRLR)
dont pourrait deacutecouler une exigence en matiegravere de droit des parents de choisir les meacutethodes
eacuteducatives (CE 19 juillet 2017 Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150)
lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant (alineacutea 10 et 11 du Preacuteambule de 1946) le principe drsquoeacutegaliteacute
(article 6 DDHC) le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction (alineacutea 13 du Preacuteambule de 1946)
Sans lrsquoarticle 6 de la proposition de loi lrsquoeffectiviteacute de lrsquoensemble de ces normes
constitutionnelles serait consideacuterablement atteacutenueacutee et creacuteerait des diffeacuterences de traitement
injustifieacutees et deacutependantes de la volonteacute des communes
De plus lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir drsquoun objectif de
clarification et de seacutecurisation du droit applicable qui peut se rattacher agrave lrsquoarticle 16 de la
DDHC degraves lors que les textes jusqursquoagrave preacutesent applicables eacutetaient ambigus et ont donneacute lieu agrave
des contentieux En rendant obligatoire ce qui eacutetait avant une faculteacute pour autant soumise agrave
un rocircle non neacutegligeable du preacutefet lrsquoarticle 6 de la proposition de loi clarifie le droit
applicable Ainsi une deacuteputeacutee preacutecisait lors des deacutebats parlementaires que laquo lrsquoarticle 34 de la
loi pour une eacutecole de la confiance relatif au versement du forfait scolaire a susciteacute de
nombreux imbroglios administratifs Ainsi chez moi en Bretagne plus de 150 demandes de
meacutediation ont eacuteteacute transmises aux services de lrsquoEacutetat ce qui met en lumiegravere lrsquoambiguiumlteacute de la loi
et les difficulteacutes de son application Je soutiens donc fortement lrsquoarticle 2 quinquies [devenu
article 6] issu des travaux du Seacutenat qui legraveve toute incertitude raquo (Mme Claudia Rouaux
Commission des affaires sociales Assembleacutee nationale 31 mars 2021)
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Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi creacutee un meacutecanisme subsidiaire et reacutesiduel dont laporteacutee est deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels Sans creacuteer ni transfeacutererde nouvelle compeacutetence aux communes cette disposition assure une mise en œuvreuniforme des droits et liberteacutes et peut se preacutevaloir de nombreuses normesconstitutionnelles confeacuterant agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales et agrave son soutienfinancier de solides justifications constitutionnelles
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 12 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 12 mai 2021
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure Mme Mastorpdf
Lettre Wanda Mastor accompagnant la porte eacutetroite
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure MSchellenberger et autrespdf
Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure assESKOLIL pdf
lettre daccompagnement CC
Porte eacutetroite loi langues reacutegionales (2)
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure M Bertrand Pancherpdf
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tout comme lrsquoItalie laquo Reacutepublique une et indivisible raquo laquo protegravege par des mesures
particuliegraveres les minoriteacutes linguistiques raquo (article 6)
Cette rapide eacutetude comparative permet de mettre en eacutevidence la singulariteacute de
la France au sein drsquoune Europe qui srsquoenorgueillit de se deacutefinir agrave travers la
richesse de sa diversiteacute Mais notamment depuis la loi constitutionnelle de
2008 le leacutegislateur franccedilais a agi dans le sens drsquoune protection et promotion
des langues reacutegionales la loi du 8 avril 2021 srsquoinscrivant dans ce processus
logique et coheacuterent
C Le contexte parlementaire franccedilais
La loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit donc dans un mouvement leacutegislatif reacutepondant agrave
lrsquoadresse du pouvoir constituant Laquelle concerne aussi le pouvoir exeacutecutif
La politique du ministegravere de lrsquoeacuteducation pour la deacutetermination du nombre de
places pour lrsquoagreacutegation et le CAPES des langues reacutegionales devrait aller de
pair avec les lois qui mettent en œuvre lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Ainsi
pour la langue basque il nrsquoy a pas eu de concours drsquoagreacutegation externe depuis
2018 anneacutee 2021 comprise il y a un seul poste pour lrsquoagreacutegation interne en
2021 2 pour le CAPES externe en 2021 et 2 pour le CAPES interne Pour la
langue bretonne et pour ne citer que lrsquoanneacutee en cours il y a un poste agrave lrsquoagreacute-
gation externe pas de concours pour lrsquoagreacutegation interne deux postes pour
le CAPES externe et 2 pour le CAPES interne Pour la langue corse il nrsquoy a pas
de concours cette anneacutee pour lrsquoagreacutegation externe et interne deux pour le
CAPES externe et aucun pour le CAPES interne Pour lrsquooccitan toujours pour
2021 il y a un poste pour lrsquoagreacutegation externe pas de concours pour lrsquoagreacute-
gation interne quatre pour le CAPES externe et un pour le CAPES interne
Ceci eacutetant juste preacuteciseacute il faut agrave preacutesent se concentrer sur lrsquoaction parlemen-
taire de mise en œuvre des dispositions de la Constitution
laquo 1 Le castillan est la langue espagnole officielle de lEacutetat Tous les Espagnols ont le devoir de
le connaicirctre et le droit de lutiliser
2 Les autres langues espagnoles sont aussi officielles dans leurs communauteacutes autonomes
respectives conformeacutement agrave leurs statuts
3 La richesse de la diversiteacute linguistique de lEspagne est un patrimoine culturel qui fait lobjet dun respect et dune protection speacuteciales raquo
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Videacutee drsquoune large part de sa substance en premiegravere lecture par la commission
des affaires culturelles et de leacuteducation de lrsquoAssembleacutee nationale la proposi-
tion de loi du deacuteputeacute Molac a ensuite retrouveacute ses objectifs initiaux gracircce agrave la
proceacutedure parlementaire qui donne agrave notre reacutegime repreacutesentatif tout son
sens discussions en commissions deacutebats en seacuteances publiques navette
amendements multiples pour parvenir agrave une adoption deacutefinitive agrave une majo-
riteacute non importante mais eacutecrasante des voix Agrave quelques heures de la pro-
mulgation de la loi par le Preacutesident de la Reacutepublique une partie de cette mecircme
majoriteacute a neacuteanmoins saisi le Conseil constitutionnel dans le cadre de lrsquoarticle
61 alineacutea 2 de la Constitution
Deacutepocirct de la proposition de loi
Deacuteposeacutee le 30 deacutecembre 2019 par le deacuteputeacute Paul Molac et autres deacuteputeacutes18
la proposition de loi apporte des mesures de protection et de promotion des
langues reacutegionales dans trois domaines le patrimoine lrsquoenseignement les
services publics via la signaleacutetique et les actes drsquoeacutetat civil Elle a eacuteteacute adopteacutee
le 8 avril 2021 par 247 voix pour 76 voix contre et 19 abstentions au terme
de la proceacutedure ci-dessous rappeleacutee
Renvoi agrave la commission des affaires culturelles et de leacuteducation
La proposition de loi a eacuteteacute renvoyeacutee agrave la commission des affaires cultu-
relles et de leacuteducation agrave deacutefaut de constitution drsquoune commission speacuteciale
dans les deacutelais preacutevus par les articles 30 et 31 du Regraveglement Le rapport fait
au nom de la commission par le deacuteputeacute Paul Molac nommeacute par elle a eacuteteacute
enregistreacute agrave la preacutesidence de lrsquoAssembleacutee nationale le 5 feacutevrier 2020 Preacutesenteacute
18 Sylvain BRIAL Jean-Feacutelix ACQUAVIVA Michel CASTELLANI Jean-Michel CLEacuteMENT
Paul-Andreacute COLOMBANI Charles de COURSON Jeanine DUBIEacute Freacutedeacuterique DUMAS Mrsquojid
EL GUERRAB Olivier FALORNI Yannick FAVENNEC BECOT Sandrine JOSSO Franccedilois-Mi-
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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comme un moyen de deacutefendre les laquo langues de France raquo19 en danger et srsquoap-
puyant sur lrsquoexistant qui est la marque drsquoune eacutevolution rappeleacutee plus loin (II)
le texte entend laquo aller plus loin raquo en rehaussant la protection lrsquoaccessibiliteacute et
la visibiliteacute des langues reacutegionales dans les trois domaines preacuteciteacutes
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle premier re-
latif au patrimoine Ce dernier preacutecise en compleacutetant ainsi lrsquoar-
ticle L 1 du code du patrimoine que la conservation et la con-
naissance du patrimoine immateacuteriel sont drsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et que
les langues reacutegionales font partie de ce patrimoine
o La commission a adopteacute sans modifications lrsquoarticle 2 qui pro-
pose drsquoinclure parmi les treacutesors nationaux les biens preacutesentant
un inteacuterecirct majeur pour la connaissance des langues franccedilaise et
reacutegionales Le texte preacutevoit en effet outre pour les langues reacutegio-
nales des mesures de protection de notre patrimoine linguistique
dans une deacutemarche globale
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 3 qui disposait que des con-
ventions passeacutees entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pouvaient preacutevoir que
la langue reacutegionale est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de
lrsquohoraire normal des enseignements (des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires des collegraveges et des lyceacutees des territoires concerneacutes) Il
ne srsquoagissait pourtant que drsquoeacutetendre une regravegle deacutejagrave applicable en
Corse pour lrsquoenseignement de la langue corse lrsquoarticle L 312-11-
1 du code de lrsquoeacuteducation introduit par la loi ndeg 2002-92 du
22 janvier 2002 relative agrave la Corse dispose en effet que la langue
corse est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de lrsquohoraire normal
des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires de Corse Le Conseil cons-
titutionnel nrsquoa pas censureacute cette disposition tant que lrsquoenseigne-
ment eacutetait entendu comme ne revecirctant pas laquo un caractegravere obliga-
toire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo (deacutecision ndeg2001-
454 DC du 17 janvier 2002)
19 Sur cette notion de laquo langues de France raquo voir Les langues de France vingt ans apregraves Glot-topol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 4 qui preacutevoyait que lenseigne-
ment bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale pouvait se reacuteali-
ser sous forme immersive laquo dans le respect des objectifs de maicirc-
trise des deux langues agrave chaque niveau denseignement raquo
o La commission a supprimeacute les articles 5 et 6 de la proposition de
loi Le premier manifestait la volonteacute drsquointroduire au sein drsquoun
nouvel article L 151-4-1 du code de lrsquoeacuteducation une deacuterogation
au principe drsquointerdiction de financement des deacutepenses drsquoinves-
tissement des eacutecoles priveacutees par les collectiviteacutes publiques en fa-
veur de lrsquoenseignement bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale
(article 5 de la proposition de loi) Le second eacutetendait la mecircme
deacuterogation au principe drsquointerdiction de financement des deacute-
penses drsquoinvestissement des collegraveges et lyceacutees par les collectiviteacutes
publiques
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 7 qui preacutevoyait drsquoeacutelargir les
cas dans lesquels existe un droit agrave inscrire son enfant dans une
eacutecole drsquoune autre commune afin qursquoil puisse suivre un enseigne-
ment de langue reacutegionale Inscription qui entraicircnait eacutegalement la
prise en charge du forfait scolaire par la commune de reacutesidence
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle 8 qui a pour
objet de renforcer la place et lrsquousage des langues reacutegionales dans
la vie publique en facilitant la traduction en langue reacutegionale des
inscriptions et signaleacutetiques apposeacutees sur les bacirctiments publics
les voies publiques de circulation et les voies navigables ainsi que
sur les principaux supports de communication institutionnelle
des services publics
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 9 qui avait pour objet la pos-
sibiliteacute pour les services publics drsquoeacutetat civil drsquoutiliser dans les
actes drsquoeacutetat civil qursquoils produisent les signes diacritiques des
langues reacutegionales en usage sur le territoire
o Enfin la commission a eacutegalement supprimeacute lrsquoarticle 10 qui preacute-
voyait un gage pour compenser les charges eacuteventuelles creacuteeacutees par
les dispositions de la proposition de loi
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Crsquoest donc un texte largement laquo eacutepureacute raquo par rapport agrave sa version initiale qui a
eacuteteacute soumis agrave la discussion en seacuteance publique en premiegravere lecture agrave lrsquoAssem-
bleacutee nationale Le porteur de la proposition va naturellement utiliser toutes
les potentialiteacutes offertes par la Constitution pour tenter de revenir par le biais
des amendements agrave son esprit initial
Discussion du texte nordm2654 adopteacute par la commission sur la proposition
de loi de M Paul Molac agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion (2548)
85 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes permettant de revenir sur peu de points
cependant agrave lrsquoobjectif initial de la proposition de loi Ainsi lrsquoamendement ndeg64
deacuteposeacute le 10 feacutevrier 2020 par le deacuteputeacute et rapporteur Paul Molac a permis de
rectifier lrsquoaspect purement deacuteclaratoire de lrsquoarticle premier auquel avait conclu
la commission lrsquoamendement ndeg69 deacuteposeacute le mecircme jour par Paul Molac eacutega-
lement permet lrsquoautorisation dans les actes drsquoeacutetat civil des signes diacritiques
des langues reacutegionales lrsquoamendement ndeg80 toujours deacuteposeacute par Paul Molac
modifie la loi Toubon (article 3 du texte de loi deacutefinitif) Mais agrave ce stade de la
discussion parlementaire le texte eacutetait encore dans une version tregraves eacuteloigneacutee
de sa mouture premiegravere
Adoption le 13 feacutevrier 2020 de la laquo petite loi raquo nordm408 par lAssem-
bleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion
Transmission au Seacutenat de la proposition de loi ndeg321 le 14 feacutevrier
2020
o Travaux en commission La commission de la culture de lrsquoeacuteduca-
tion et de la communication a deacutesigneacute Mme Monique de Marco
rapporteure sur la proposition de loi ndeg321 (2019-2020) adopteacutee
par lAssembleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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des langues reacutegionales et agrave leur promotion Commenccedilant par deacute-
clarer que laquo la question de la promotion des langues reacutegionales
deacutepasse les clivages politiques raquo Monique de Marco a proposeacute en
commission dadopter le texte conforme tout en avouant que des
dispositifs leacutegislatifs laquo plus ambitieux pourraient mieux assurer la
promotion des langues reacutegionales raquo Au cours des discussions le
regret de lrsquoabsence de la question de lrsquoenseignement a eacuteteacute exprimeacute
regret qui concerne en reacutealiteacute non la proposition de loi initiale
mais le texte de la commission de lrsquoAssembleacutee nationale laquo La pro-
position de loi de Paul Molac est la bienvenue parce quelle rap-
pelle agrave lEacutetat un certain nombre de ses obligations en ce quelle
preacutevoit un cadrage de la loi Toubon et quelle seacutecurise la place
des langues dans lespace public En revanche nous avons tous
eacuteteacute surpris par labsence totale de reacutefeacuterence agrave lEacuteducation natio-
nale Nous avons donc fait des recherches qui ont montreacute que les
deacuteputeacutes de la majoriteacute preacutesidentielle certainement agrave lappel du
ministre de leacuteducation nationale avaient systeacutematiquement sup-
primeacute tous les articles concernant lenseignement Nous nous re-
trouvons donc avec une magnifique proposition de loi sur les
langues reacutegionales qui ne dit pas un mot de lenseignement
comme sil pouvait y avoir une politique linguistique en faveur des
langues reacutegionales qui ne passe pas par lenseignement raquo Et le
seacutenateur Max Brisson drsquoen appeler agrave la reacuteinsertion des disposi-
tions sur lrsquoenseignement laquo Ma chegravere collegravegue vous avez proposeacute
un vote conforme mais jespegravere que nous ferons preuve dimagi-
nation dans lheacutemicycle pour deacuteposer quelques amendements qui
rappelleront au Gouvernement quil ny a pas de politique linguis-
tique qui ne sappuie sur leacuteducation Sinon cest de lenfu-
mage raquo20
20 Comptes-rendus de la commission de la culture de lrsquoeacuteducation et de la communication
seacuteance du 2 deacutecembre 2020 httpwwwsenatfrcompte-rendu-commis-
sions20201130culturehtmltoc5
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La rapporteure confirme que laquo lrsquoamputation raquo est le fait des deacutepu-
teacutes et tout en srsquoavouant prudente pousse indirectement ses col-
legravegues seacutenateurs agrave user du droit drsquoamendement laquo Nous venons
dentendre un veacuteritable plaidoyer en faveur des langues reacutegio-
nales Mecircme si cette proposition de loi ne donne pas entiegravere satis-
faction car elle a eacuteteacute largement amputeacutee par lAssembleacutee natio-
nale je preacutefegravere my tenir dans un premier temps par prudence
Et libres agrave vous de deacuteposer des amendements raquo
Aucun amendement nayant eacuteteacute deacuteposeacute en commission le texte
qui en eacutetait issu ne comportait toujours pas de dispositions rela-
tives agrave lenseignement
o Seacuteance publique Vingt amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes notam-
ment celui (deacuteposeacute agrave lidentique par des seacutenateurs issus de six
groupes diffeacuterents) preacutevoyant drsquoinseacuterer agrave lrsquoarticle L 442-5-1 du
code de lrsquoeacuteducation un alineacutea ainsi reacutedigeacute laquo La participation fi-
nanciegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un
enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle
L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence
et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune
autre commune agrave la condition que la commune de reacutesidence ne
dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegio-
nale raquo
Sans surprise lrsquoavis du Gouvernement exprimeacute par le ministre
Jean-Michel Blanquer fut deacutefavorable regrettant au passage
laquo drsquoecirctre sans cesse obligeacute drsquooccuper la position du jacobin reacutetif
sur la deacutefensive alors mecircme que nous avons une politique de pro-
motion des langues reacutegionales Simplement agrave certains moments
ndash par exemple avec la rupture de lrsquoeacutequilibre entre enseignement
public et enseignement priveacute ou avec la creacuteation drsquoune obligation
suppleacutementaire pour les communes ndash les propositions vont trop
loin et cela conduit agrave me placer face aux geacuteneacuterositeacutes diverses
dans la position deacutesagreacuteable du gardien des principes ou dans
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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celle du gardien de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral En effet derriegravere ces deacutebats
se pose la question de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et de la posteacuteriteacute de la loi
Carle car vous risquez de creacuteer un deacuteseacutequilibre alors que cette loi
repreacutesentait un point drsquoeacutequilibre raquo21
o Adoption du texte ndeg32 modifieacute par le Seacutenat le 10 deacutecembre 2020
Le Seacutenat a adopteacute trois articles additionnels (2 ter 2 quater et
2 quinquies) qui rejoignent les positions du deacuteputeacute Paul Molac et
reacutetablit lrsquoarticle 3 (modifieacute) de la proposition de loi qui avait eacuteteacute
supprimeacute en premiegravere lecture agrave lrsquoAssembleacutee nationale
Deuxiegraveme lecture
o Rapport sur la proposition de loi modifieacutee par le Seacutenat relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promo-
tion (ndeg3658) ndeg4035 Sur les six articles supprimeacutes agrave lrsquoAssem-
bleacutee lrsquoarticle 3 a eacuteteacute reacutetabli au Seacutenat qui a par ailleurs adopteacute
trois articles additionnels (2 ter 2 quater et 2 quinquies) Lrsquoen-
semble eacutetant conforme agrave lrsquoesprit de la proposition de loi initiale le
rapporteur souhaite que lrsquoAssembleacutee nationale adopte en deu-
xiegraveme lecture un texte identique agrave celui voteacute par le Seacutenat pour
les quatre articles restant en discussion et nrsquoa donc pas preacutesenteacute
drsquoamendements Mais lrsquoarticle 2 quinquies (article 6 du texte deacute-
finitif) ayant eacuteteacute supprimeacute en commission 16 amendements deacute-
poseacutes agrave lrsquoidentique par 115 deacuteputeacutes membres de huit diffeacuterents
groupes parlementaires ont permis de le reacuteintroduire en seacuteance
o Discussion en seacuteance publique le 8 avril 2021 au cours de la-
quelle 262 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes
o Adoption deacutefinitive le 8 avril 2021 en deuxiegraveme lecture de la
proposition de loi TA nordm591 relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
21 Compte rendu inteacutegral des deacutebats Seacuteance du 10 deacutecembre 2020 httpwwwse-natfrseancess202012s20201210s20201210007htmlsection708
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Saisine du Conseil constitutionnel du 22 avril 2021 par au moins
soixante deacuteputeacutes en application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitu-
tion
Soit un jour avant que nrsquoexpire le deacutelai de saisine du Conseil constitu-
tionnel la promulgation de la loi par le preacutesident de la Reacutepublique devant
intervenir dans les 15 jours de lrsquoadoption deacutefinitive La saisine du Conseil
constitutionnel est un acte non grave mais solennel qui perturbe le temps
leacutegislatif ne serait-ce que pour cette raison elle meacuterite un soin particulier
Soin envers lrsquoinstitution agrave laquelle elle srsquoadresse et agrave qui elle impose des
charges suppleacutementaires soin envers la Constitution qursquoelle entend pro-
teacuteger La lettre de saisine ou du moins la version qui a circuleacute manifeste-
ment reacutedigeacutee agrave la hacircte nrsquoest pas agrave la hauteur du seacuterieux qursquoexige de ma-
niegravere impeacuterieuse cette deacutemarche Une lettre de saisine ne saurait se limiter
agrave invoquer en tregraves peu de lignes la violation de laquo principes constitutionnels raquo
sans que ceux-ci ne soient deacutetailleacutes ni mecircme indiqueacutes Le seul article mis
en cause est lrsquoarticle 6 de la loi qui modifie lrsquoarticle L 442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation
II Discussion de la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la loi
relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Les deacuteputeacutes auteurs de la saisine demandent au Conseil constitutionnel la
censure de lrsquoarticle 6 de la loi
laquo Les sixiegraveme et septiegraveme alineacuteas de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacutedu-
cation sont remplaceacutes par un alineacutea ainsi reacutedigeacute
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacuteta-
blissements priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispen-
sant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L
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312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacuteta-
blissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune
agrave la condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dis-
pensant un enseignement de langue reacutegionale raquo
Une commune dont aucune eacutecole ne propose denseignement de langue reacutegio-
nale devrait donc participer aux frais de scolarisation des enfants domicilieacutes
sur son territoire qui suivent un tel enseignement dans un eacutetablissement situeacute
sur une autre commune Le dispositif concerne les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat drsquoassociation qui sont dans les faits majoritaire-
ment associatifs et laiumlques Cet enseignement peut aussi concerner les eacuteta-
blissements confessionnels mais il faut drsquoembleacutee preacuteciser que comme lrsquoa jugeacute
le Conseil constitutionnel dans son examen de la loi dite laquo Carle raquo le principe
de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute pour le leacutegislateur de preacutevoir la
participation des collectiviteacutes publiques au financement du fonctionnement
des eacutetablissements denseignement priveacute sous contrat dassociation
laquo Consideacuterant quil reacutesulte des regravegles ou principes agrave valeur constitution-
nelle (hellip) que le principe de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute
pour le leacutegislateur de preacutevoir sous reacuteserve de fonder son appreacuteciation
sur des critegraveres objectifs et rationnels la participation des collectiviteacutes
publiques au financement du fonctionnement des eacutetablissements den-
seignement priveacutes sous contrat dassociation selon la nature et limpor-
tance de leur contribution agrave laccomplissement de missions denseigne-
ment raquo (deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 cons 6)
Lrsquoinstauration du laquo forfait scolaire communal raquo ne poursuit pas un objectif de
sanction financiegravere des communes deacutemunies doffre en langue reacutegionale mais
celui de les inciter agrave en proposer Drsquoailleurs lrsquoarticle premier de la loi deacutefeacutereacutee
souligne que laquo LrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales concourent agrave lrsquoenseigne-
ment agrave la diffusion et agrave la promotion de ces langues raquo Comme preacuteciseacute plus
loin les maires sont dispenseacutes du paiement drsquoun tel forfait degraves lors qursquoun
enseignement drsquoune langue reacutegionale y compris au titre drsquoune simple initia-
tion est proposeacute dans leur commune
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Il faut souligner que les articles relatifs agrave lrsquoenseignement ont eacuteteacute introduits par
les seacutenateurs Plus exactement ces derniers ont reacuteintroduit la disposition qui
autorise la conclusion de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pour eacutetendre
lrsquooffre drsquoenseignement en langue reacutegionale aux eacutetablissements publics dans le
cadre horaire normal sous des formes speacutecifiques et inseacutereacute trois articles un
premier autorise lrsquoenseignement dit laquo immersif raquo en langue reacutegionale un deu-
xiegraveme le forfait scolaire communal dont il est ici question un troisiegraveme est
relatif agrave lenseignement des langues reacutegionales agrave Mayotte territoire qui du fait
de sa deacutepartementalisation reacutecente ne pouvait jusqualors pas beacuteneacuteficier des
possibiliteacutes offertes aux autres deacutepartements concernant lenseignement de
ces langues
Trois remarques doivent ecirctre faites sur lrsquoinsertion relative agrave lrsquoenseignement des
langues reacutegionales lors des horaires normaux Premiegraverement cette disposition
existe deacutejagrave pour la Collectiviteacute de Corse deuxiegravemement cet enseignement
doit se faire moyennant un accord entre lrsquoEacutetat et les reacutegions (laquo dans le cadre
de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions la collectiviteacute de Corse la Collectiviteacute
europeacuteenne drsquoAlsace ou les collectiviteacutes territoriales reacutegies par lrsquoarticle 73 de
la Constitution raquo) troisiegravemement il srsquoagit drsquoune option facultative qursquoin fine
les familles deacutecident ou non de prendre
En reacutesumeacute et conclusion la disposition de lrsquoarticle 3
1 Existe deacutejagrave pour une collectiviteacute en lrsquooccurrence la collectiviteacute de Corse
2 Est strictement encadreacutee (existence drsquoun accord entre lrsquoEacutetat et les reacute-
gions)
3 Est conforme agrave la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le ca-
ractegravere facultatif de lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale Dans sa deacute-
cision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi relative agrave la Corse le
Conseil constitutionnel a fixeacute le cadre de lrsquoenseignement drsquoune langue
reacutegionale dans le cadre de lrsquohoraire normal en consideacuterant que laquo si lrsquoen-
seignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquohoraire nor-
mal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir pour
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autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les ensei-
gnants qursquoil ne saurait non plus avoir pour effet de soustraire les eacutelegraveves
aux droits et obligations applicables agrave lrsquoensemble des usagers des eacuteta-
blissements qui assurent le service public de lrsquoenseignement ou sont
associeacutes agrave celui‑ci Consideacuterant qursquoil reacutesulte de ce qui preacutecegravede que sous
reacuteserve que lrsquoenseignement de la langue corse revecircte tant dans son prin-
cipe que dans ses modaliteacutes de mise en œuvre un caractegravere facultatif
[cette disposition] nrsquoest contraire ni au principe drsquoeacutegaliteacute ni agrave aucun
autre principe ou regravegle de valeur constitutionnelle raquo (cons 24 et 25)
La loi du 8 avril 2021 ne propose pas autre chose et srsquoinscrit en tous
points sur cette ligne deacutejagrave jugeacutee par le Conseil constitutionnel
Lrsquoarticle 6 srsquoinsegravere de maniegravere logique et coheacuterente dans lrsquoensemble des articles
de la loi relative agrave lrsquoenseignement Avant drsquoen examiner dans les deacutetails la
conformiteacute agrave la Constitution il faut souligner que le Seacutenat a deacutejagrave voteacute le prin-
cipe de ce forfait scolaire communal agrave deux reprises
1 Il lrsquoa drsquoabord inseacutereacute dans le projet de loi pour une eacutecole de la confiance
en premiegravere lecture Crsquoest la commission mixte paritaire qui a ajouteacute les
mots laquo contribution volontaire raquo ocirctant au forfait son caractegravere obliga-
toire22
2 Il a reacuteaffirmeacute sa position lors de lrsquoexamen de la proposition de loi ici
discuteacutee supprimant les mots laquo contribution volontaire raquo de la loi en vi-
gueur
Agrave cet argument deacutemocratique respectueux du bicameacuteralisme et rappelant que
le Seacutenat laquo assure la repreacutesentation des collectiviteacutes territoriales de la Reacutepu-
22 Loi ndeg2019-791 du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance JORF ndeg0174 du 28 juillet
2019
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Primo cet article est en coheacuterence avec la leacutegislation existante en matiegravere drsquoen-
seignement des langues reacutegionales agrave lrsquoeacutecole confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute
juridique (A) Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contrevien-
nent pas au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des langues
reacutegionales affirmeacute par le Conseil constitutionnel (B) Tertio la loi ne porte pas
atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur une commune une nouvelle
charge (C) Quarto elle ne viole pas non plus en conseacutequence le principe de
libre administration des collectiviteacutes territoriales (D)
A Forfait scolaire communal et respect de lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique
Cette exigence bien que non explicitement qualifieacutee de principe consti-
tutionnel par le Conseil constitutionnel se rattache notamment agrave la notion de
laquo garantie des droits raquo inscrite agrave lrsquoarticle 16 de la Deacuteclaration de 1789 laquo Toute
socieacuteteacute dans laquelle la garantie des droits nrsquoest pas assureacutee ni la seacuteparation
des pouvoirs deacutetermineacutee nrsquoa point de constitution raquo Deacutecoulant de lrsquoarticle 34
de la Constitution la clarteacute de la loi est un eacuteleacutement essentiel de la seacutecuriteacute
juridique agrave laquelle la jurisprudence du Conseil constitutionnel a offert corps
et protection Aussi le principe de laccessibiliteacute et de lintelligibiliteacute de la loi a-
t-il eacuteteacute eacuterigeacute en objectif de valeur constitutionnelle (deacutecision ndeg99-421 DC du
16 deacutecembre 1999)
Mecircme si les principes de clarteacute drsquoaccessibiliteacute et drsquointelligibiliteacute de la loi per-
mettent avant tout drsquoimposer au leacutegislateur laquo drsquoadopter des dispositions suffi-
samment preacutecises et des formules non eacutequivoques afin de preacutemunir les sujets
de droit contre une interpreacutetation contraire agrave la Constitution ou contre le
risque drsquoarbitraire raquo (deacutecision ndeg2004-500 DC du 29 juillet 2004 cons 13) ils
concourent aussi agrave offrir aux citoyens la seacutecuriteacute juridique neacutee drsquoune cons-
truction drsquoensemble coheacuterente et sans rupture Laquelle se base depuis 2008
sur une disposition claire et sans ambiguiumlteacute de la Constitution laquo Les langues
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reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo (75-1) Elle est une in-
vitation aux repreacutesentants de leacutegifeacuterer pour proteacuteger et promouvoir lesdites
langues et la loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit dans la continuiteacute de ce qursquoils ont fait depuis
2008 notamment La coheacuterence est lrsquoune des artegraveres essentielles de lrsquoexigence
de seacutecuriteacute juridique qui impregravegne la jurisprudence du Conseil constitution-
nelle comme celle du Conseil drsquoEacutetat et de la Cour de cassation Sans ecirctre ex-
plicitement eacutenonceacutee par le Conseil constitutionnel lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique est laquo efficiente raquo23 et est au cœur des preacuteoccupations des juges24 comme
de la doctrine Les Cahiers du Conseil constitutionnel lui consacrant un dossier
speacutecial dans sa livraison drsquooctobre 202025
La loi soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel reacutepond agrave lrsquoexigence de
seacutecuriteacute juridique en eacutetant le prolongement de lrsquoœuvre anteacuterieure du leacutegisla-
teur pour commencer la loi du 8 juillet 2013 drsquoorientation et de programma-
tion pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique qui reconnaicirct lrsquoenseigne-
ment bilingue franccedilais langue reacutegionale Dans lrsquoannexe de la loi figurent cinq
mentions compleacutementaires notamment celle concernant la possibiliteacute de
srsquoinscrire dans une eacutecole publique drsquoune autre commune lorsque la commune
de reacutesidence ne propose pas drsquoenseignement de langue reacutegionale Disposition
deacuteclarative qui a trouveacute une application concregravete dans la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) la parti-
cipation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes dans lrsquoenseigne-
ment public doit deacutesormais faire lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune drsquoac-
cueil et la commune de reacutesidence26
La loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle a
ajouteacute un nouveau motif de discrimination baseacute sur laquo la maitrise drsquoune autre
23 Bertrand Mathieu laquo La seacutecuriteacute juridique un principe clandestin mais efficient raquo Droit constitutionnel Meacutelanges Patrice Geacutelard LGDJ 1999 pp 301-305 24 En teacutemoigne notamment le fait que le Conseil drsquoEacutetat lui ait consacreacute deux rapports annuels celui de 1991 De la seacutecuriteacute juridique et celui de 2006 Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit 25 Dossier La seacutecuriteacute juridique Titre VII Les Cahiers du Conseil constitutionnel ndeg5 octobre
2020 26 Lrsquoarticle 104 de la loi NOTRe consacre par ailleurs la compeacutetence partageacutee des collectiviteacutes
locales dans la promotion des langues reacutegionales tout en donnant une place preacutepondeacuterante
agrave la reacutegion telle que preacutevue agrave lrsquoarticle 1er de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de lrsquoaction publique territoriale et drsquoaffirmation des meacutetropoles (MAPTAM)
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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langue que le franccedilais raquo qui concerne eacutegalement les langues reacutegionales Celle
du 28 feacutevrier 2017 de programmation relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend
inopeacuterant le deacutecret du 2 Thermidor an II sur lequel se basait notamment le
ministegravere de la justice pour interdire les livrets de famille bilingues Enfin
lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance vient eacutetendre
aux eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives une laquo contribution volontaire raquo
des communes pour la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoins-
crivant dans une eacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionale en
dehors de sa commune de reacutesidence
La loi du 8 avril 2021 soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel nrsquoest que
le prolongement et le compleacutement de lrsquoarticle L 212-8 du Code de lrsquoeacuteducation
qui preacutecise les conditions dans lesquelles pour lrsquoenseignement public une
commune doit contribuer au financement des deacutepenses scolaires drsquoun enfant
reacutesidant sur son territoire et scolariseacute dans une autre commune Elle vient le
compleacuteter de maniegravere parallegravele eacutetendant ce qui existe deacutejagrave pour lrsquoeacutecole pu-
blique agrave lrsquoeacutecole priveacutee sous contrat Confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
elle ne viole par ailleurs aucun article de la Constitution et ne contredit pas
la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le caractegravere facultatif de lrsquoen-
seignement des langues reacutegionales
B Forfait scolaire communal et respect de la jurisprudence du Conseil
constitutionnel sur la langue franccedilaise
Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contreviennent pas
agrave lrsquoarticle 2 alineacutea premier de la Constitution (laquo La langue de la Reacutepublique est
le Franccedilais raquo) et au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des
langues reacutegionales qui en deacutecoule affirmeacute par le Conseil constitutionnel La
langue de la Reacutepublique est et demeure le Franccedilais et agrave aucun moment la
loi du 8 avril 2021 nrsquoentend y porter atteinte Lrsquoapprentissage des langues reacute-
gionales se fait agrave ses cocircteacutes mais dans une mesure permettant leffectiviteacute pour
les enfants agrave acceacuteder agrave lenseignement des langues reacutegionales laquo patrimoine de
la France raquo selon les termes de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Apprentissage
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
26
qui pour certains enfants est lrsquoun des eacuteleacutements de leur laquo deacuteveloppement raquo au
sens de lrsquoalineacutea 10 du Preacuteambule de la Constitution du 27 octobre 1946 (laquo La
Nation assure agrave lrsquoindividu et agrave la familles les conditions neacutecessaires agrave leur
deacuteveloppement raquo)
Ce que creacutee lrsquoarticle 6 agrave travers le forfait ce nrsquoest pas lrsquoenseignement obligatoire
de la langue reacutegionale mais la possibiliteacute de pouvoir beacuteneacuteficier de cet enseigne-
ment (sans prescription de deacutelai) qui demeure facultatif Le rapporteur Paul
Molac le reacuteaffirme au cours de la seacuteance publique du 8 avril 2021 laquo Je ne
suis pas favorable au caractegravere obligatoire de cet enseignement mais je consi-
degravere que tout eacutelegraveve qui souhaite le suivre doit pouvoir le faire raquo27
Ce faisant la loi sans contrevenir agrave la Constitution offre un contenu agrave son
article 75-1 La jurisprudence du Conseil constitutionnel en vertu de laquelle
lrsquoenseignement des langues reacutegionales nrsquoa qursquoun caractegravere facultatif nrsquoest ici
absolument pas remise en cause Dans sa deacutecision ndeg99-412 DC du 15 juin
1999 il a souligneacute que le principe drsquouniciteacute du peuple franccedilais et lrsquoindivisibiliteacute
de la Reacutepublique assurant lrsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi srsquoopposaient agrave laquo
ce que soient reconnus des droits collectifs agrave quelque groupe que ce soit deacutefini
par une communauteacute drsquoorigine de culture de langue ou de croyance raquo En
outre la langue de la Reacutepublique eacutetant le franccedilais il ne peut ecirctre reconnu un
laquo droit agrave pratiquer une langue autre que le franccedilais non seulement dans la vie
priveacutee mais eacutegalement dans la vie publique agrave laquelle la Charte rattache
la justice et les autoriteacutes administratives et services publics raquo
Deux remarques srsquoimposent drsquoembleacutee drsquoune part cette jurisprudence est an-
teacuterieure agrave lrsquoinsertion en 2008 par le pouvoir constituant de lrsquoarticle 75-1 dis-
posant que laquo les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France
raquo Cette remarque drsquoordre contextuel vient srsquoajouter agrave la suivante drsquoautre part
27 Assembleacutee nationale XVe leacutegislature Session ordinaire de 2020-2021 Seacuteance du jeudi 08
avril 2021 httpswwwassemblee-nationalefrdyn15comptes-rendusseancesession-
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la loi du 8 avril 2021 nrsquoentend pas confier agrave lrsquoenseignement des langues reacutegio-
nales un caractegravere obligatoire En cela elle respecte la jurisprudence du Con-
seil constitutionnel preacuteciteacutee (deacutecision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi
relative agrave la Corse)
laquo Si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquoho-
raire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir
pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les en-
seignants (hellip) raquo (cons 24)
Lrsquoenseignement drsquoune langue minoritaire ne devient donc en aucun cas obli-
gatoire Ce qui doit faire laquo lrsquoobjet drsquoun accord raquo ce sont les conditions permet-
tant effectivement agrave des enfants drsquoacceacuteder agrave un enseignement facultatif qui
contribue agrave leur deacuteveloppement proteacutegeacute par ailleurs par lrsquoalineacutea 10 du Preacuteam-
bule de 1946 preacuteciteacute Ni la Constitution ni son interpreacutetation par le Conseil
constitutionnel ne srsquoopposent agrave ce qursquoune commune de reacutesidence participe y
compris de maniegravere obligatoire au financement de la scolarisation dans une
autre commune des enfants souhaitant suivre un tel enseignement Crsquoest don-
ner aux enfants et aux parents de maniegravere effective et efficiente la possibiliteacute
concregravete de beacuteneacuteficier drsquoun enseignement drsquoune langue reacutegionale composante
de leur laquo deacuteveloppement raquo laquelle appartient en vertu de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution au laquo patrimoine de la France raquo
C Forfait scolaire communal et respect du principe drsquoeacutegaliteacute
Tertio la loi ne contrevient pas au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur
une commune une nouvelle charge
Conformeacutement agrave une jurisprudence du Conseil constitutionnel bien eacutetablie le
principe deacutegaliteacute de lrsquoarticle 6 de la Deacuteclaration des droits de lhomme et du
citoyen de 1789 laquo ne soppose ni agrave ce que le leacutegislateur regravegle de faccedilon diffeacuterente
des situations diffeacuterentes ni agrave ce quil deacuteroge agrave leacutegaliteacute pour des raisons
dinteacuterecirct geacuteneacuteral pourvu que dans lun et lautre cas la diffeacuterence de traite-
ment qui en reacutesulte soit en rapport direct avec lobjet de la loi qui leacutetablit raquo
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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(pour lrsquoune des reacutecentes application au domaine de lrsquoenseignement dont il sera
ici question deacutecision ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de
la confiance)
En ce qui concerne preacuteciseacutement le caractegravere obligatoire drsquoune nouvelle charge
pour une collectiviteacute celui-ci nrsquoa pas eacuteteacute censureacute par le Conseil constitutionnel
agrave propos de lrsquoexamen de la loi sur lrsquoavenir de lrsquoeacutecole preacuteciteacutee (deacutecision ndeg 2019-
787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de la confiance) Lrsquoarticle 17 de
la loi alors deacutefeacutereacute au Conseil constitutionnel preacutevoyait dans son premier ali-
neacutea
laquo LrsquoEacutetat attribue de maniegravere peacuterenne agrave chaque commune les ressources
correspondant agrave lrsquoaugmentation des deacutepenses obligatoires qursquoelle a
prises en charge en application des articles L 212-4 L 212-5 et L 442-
5 du code de lrsquoeacuteducation au titre de lrsquoanneacutee scolaire 2019-2020 par rap-
port agrave lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 dans la limite de la part drsquoaugmenta-
tion reacutesultant directement de lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoins-
truction obligatoire raquo
Les deacutepenses qui font lrsquoobjet de lrsquoaccompagnement financier en cause sont
celles qui beacuteneacuteficient aux eacutecoles publiques et aux eacutetablissements drsquoenseigne-
ment priveacutes ayant passeacute un contrat drsquoassociation avec lrsquoEacutetat
Lrsquoabaissement agrave trois ans du deacutebut de lrsquoinstruction obligatoire a donc fait pe-
ser des charges nouvelles pour les communes et leur a mecircme imposeacute de par-
ticiper au financement des eacutecoles maternelles priveacutees sous contrat y compris
lorsqursquoelles nrsquoont pas approuveacute ce contrat La diffeacuterence de traitement entre
les communes est reacuteelle selon qursquoelles financcedilaient ou non des classes mater-
nelles avant lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoinstruction obligatoire mais
nrsquoentraicircne pas pour autant une rupture drsquoeacutegaliteacute
Ainsi lrsquoa jugeacute le Conseil constitutionnel dans la deacutecision preacuteciteacutee drsquoune part
il a estimeacute que cette diffeacuterence de traitement reposait sur une diffeacuterence de
situation
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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laquo Les communes qui au cours de lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 avaient
institueacute des classes maternelles ou eacutecoles maternelles publiques ou ap-
prouveacute des contrats drsquoassociation drsquoeacutecoles maternelles priveacutees ont con-
tribueacute agrave ce titre agrave leur financement dans les conditions preacutevues par le
code de lrsquoeacuteducation Ces communes ne sont ainsi pas placeacutees dans une
situation identique agrave celle des autres communes qui nrsquoexerccedilaient pas
deacutejagrave les mecircmes compeacutetences et ne supportaient donc pas les charges
correspondantes raquo (cons 7)
Drsquoautre part le Conseil constitutionnel a jugeacute que la diffeacuterence de traitement
contesteacutee eacutetait en rapport direct avec lrsquoobjet de la loi qui lrsquoeacutetablit
laquo Qui consiste en application de la seconde phrase du quatriegraveme alineacutea
de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution agrave accompagner de ressources finan-
ciegraveres une extension de compeacutetence ayant pour conseacutequence drsquoaugmen-
ter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales raquo (cons 8)
Agrave lrsquoargument opposeacute agrave lrsquoarticle 6 de la loi deacutefeacutereacutee selon lequel ces dispositions
creacuteeraient une diffeacuterence de traitement entre les communes contraire au prin-
cipe deacutegaliteacute devant la loi le Conseil constitutionnel en vertu de sa jurispru-
dence Loi pour une eacutecole de la confiance devrait logiquement apporter la mecircme
reacuteponse Le leacutegislateur entend avec cette loi du 8 avril 2021 donner de ma-
niegravere geacuteneacuterale effectiviteacute agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution agrave travers en par-
ticulier un outil permettant de mettre en œuvre les dispositions de lrsquoarticle 72-
2 de la Constitution relatives aux extensions de compeacutetences imposeacutees aux
collectiviteacutes territoriales Dispositions qui par ailleurs nrsquoobligent pas le leacutegi-
slateur agrave preacutevoir un accompagnement financier de lrsquoensemble des communes
En lien avec cet argument il en reacutesulte que lrsquoarticle 6 ne porte pas atteinte
par ailleurs au principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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D Forfait scolaire communal et respect du principe de libre administra-
tion des collectiviteacutes territoriales
Quarto le forfait scolaire communal nrsquoest ni contraire agrave la lettre de lrsquoar-
ticle 72 de la Constitution ni agrave son interpreacutetation par le Conseil constitution-
nel
En vertu de lrsquoarticle 72 alineacutea 3 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales
srsquoadministrent librement dans les conditions preacutevues par la loi Correacutelative-
ment lrsquoarticle 34 de la Constitution donne agrave la loi compeacutetence pour deacuteterminer
laquo les principes fondamentaux (hellip) de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales de leurs compeacutetences et de leurs ressources raquo Cette libre admi-
nistration doit en outre se concilier avec drsquoautres principes constitutionnels
tels que le principe drsquoeacutegaliteacute et la liberteacute de lrsquoenseignement Crsquoest ainsi que le
Conseil constitutionnel a jugeacute que laquo si le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacute-
gislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce que les conditions essentielles drsquoap-
plication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de lrsquoenseignement deacutepen-
dent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre
les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (voir notamment la deacutecisions ndeg84-
185 DC du 18 janvier 1985 cons 18)
La libre administration est bien un principe constitutionnel mais crsquoest au leacute-
gislateur qursquoil revient sous le controcircle du Conseil constitutionnel drsquoen preacuteci-
ser le contenu Lrsquointervention du leacutegislateur est neacutecessaire pour la deacutefinition
des regravegles de fonctionnement des collectiviteacutes territoriales la deacutefinition des
compeacutetences qui leur sont deacutevolues (transfert creacuteation extension des compeacute-
tences) et en matiegravere de ressources la fixation du taux des impocircts deacutecideacutes par
les Assembleacutees deacutelibeacuteratives locales
Il ressort de la jurisprudence administrative et constitutionnelle que seule la
loi peut creacuteer une obligationsujeacutetion nouvelle agrave la charge drsquoune collectiviteacute
territoriale Le principe de libre administration ne peut donc pas exister en-
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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dehors de lrsquointervention du leacutegislateur lequel nrsquoa pas pour autant toute lati-
tude En drsquoautres termes le principe de libre administration est deacutefini par la
loi mais est aussi proteacutegeacute contre elle qui ne peut notamment pas porter at-
teinte au-delagrave drsquoun certain seuil aux ressources des collectiviteacutes territoriales
restreindre la liberteacute contractuelle intervenir dans les deacutecisions des collecti-
viteacutes territoriales relatives agrave leurs agents ou le fonctionnement de leurs insti-
tutions
En eacutetendant la prise en charge du forfait scolaire communal la loi deacutefeacutereacutee creacutee
une charge suppleacutementaire pour certaines communes
Aux termes du quatriegraveme alineacutea de larticle 72-2 de la Constitution laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales saccom-
pagne de lattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consa-
creacutees agrave leur exercice Toute creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour
conseacutequence daugmenter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales est ac-
compagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Dans le cas ougrave le leacutegislateur
octroie une nouvelle compeacutetence aux collectiviteacutes territoriales (articles 72-2 de
la Constitution et L 1614-1-1 du code geacuteneacuteral des collectiviteacutes territoriales)
il accompagne cette creacuteation de ressources correspondantes uniquement si
lexercice de cette compeacutetence est rendu obligatoire Ainsi en a jugeacute le Conseil
constitutionnel en ajoutant que le leacutegislateur disposait dun pouvoir dappreacute-
ciation en la matiegravere la compensation devant ecirctre naturellement suffisante
pour ne pas constituer une entrave au principe de libre administration
laquo Que ces dispositions ne visent en ce qui concerne les creacuteations et ex-
tensions de compeacutetences que celles qui preacutesentent un caractegravere obliga-
toire que dans cette hypothegravese il nest fait obligation au leacutegislateur
que daccompagner ces creacuteations ou extensions de compeacutetences de res-
sources dont il lui appartient dappreacutecier le niveau sans toutefois deacutena-
turer le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales raquo
(deacutecision ndeg2008-569 DC du 7 aoucirct 2008 Loi instituant un droit daccueil
pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires pendant le temps
scolaire cons 13)
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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Le Conseil constitutionnel a jugeacute qursquoen conseacutequence et en lrsquoespegravece le leacutegisla-
teur avait suffisamment deacutetermineacute le niveau des ressources accompagnant la
creacuteation de ce service daccueil pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires pendant le temps scolaire sans meacuteconnaicirctre le quatriegraveme alineacutea de
larticle 72-2 de la Constitution
Lextension de compeacutetences est soumise a fortiori au mecircme reacutegime que la
creacuteation de compeacutetences Elle consiste en leacutelargissement du peacuterimegravetre ou en
la modification de la nature ou de lobjet dune compeacutetence dont lexercice est
deacutejagrave assureacute par les collectiviteacutes territoriales ayant pour conseacutequence de creacuteer
une charge suppleacutementaire pour celles-ci Le droit agrave une compensation finan-
ciegravere nest garanti que si lextension preacutesente un caractegravere obligatoire et le
leacutegislateur en deacutetermine le niveau et les modaliteacutes agrave condition quils nentra-
vent pas la libre administration des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece le principe de libre administration nrsquoest donc pas violeacute par le ca-
ractegravere contraignant que confegravererait la loi deacutefeacutereacutee au forfait scolaire communal
de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation Drsquoune part le Conseil constitu-
tionnel a deacutejagrave comme souligneacute plus haut accepteacute le principe du caractegravere
obligatoire drsquoune nouvelle charge qui nrsquoentraine par ailleurs mecircme pas
lrsquoautomaticiteacute drsquoun accompagnement financier des communes Drsquoautre part
lrsquoargument de proportionnaliteacute est ici deacuteterminant agrave ceux qui avancent un
risque drsquoassegravechement financier de certaines communes rurales contraintes
de prendre en charge la scolarisation dun eacutelegraveve dans une autre commune
mieux doteacutee qui propose lenseignement de la langue reacutegionale (ce qui selon
le deacuteputeacute Molac ne concernerait que 002 des enfants en France) il faut
reacutepondre en mettant en avant lrsquoobjectif incitatif et non sanctionnateur de la
loi Il suffira auxdites communes de proposer un enseignement de langue reacute-
gionale qui ne pourrait repreacutesenter qursquoune heure drsquoinitiation par semaine par
exemple
Une heure drsquoinitiation par semaine pour eacuteviter de payer le forfait scolaire com-
munal lequel ne meacuteconnait pas par ailleurs lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
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les principes constitutionnels drsquoeacutegaliteacute drsquouniciteacute de la langue franccedilaise de la
libre administration des collectiviteacutes territoriales et permet drsquoassurer le deacuteve-
loppement de lrsquoenfant crsquoest bien peu de choses pour censurer une loi souve-
raine adopteacutee qui plus est agrave une eacutecrasante majoriteacute
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 3 mai 2021
De Raphaeumll SchellenbergerA GreffeObjet Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues ReacutegionalesDate mardi 4 mai 2021 101012Piegraveces jointes Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionalespdf
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loirelative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus desoixante deacuteputeacutes ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texteen application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarerlrsquoinconstitutionnaliteacute de son article 6 Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons ennotre qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre lapleine constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sensNous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notreconsideacuteration respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire
- Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
- Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche
- Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret
- Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne
- Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte
- Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor
- David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion
- Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme
- Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne
- Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
1
M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2
Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
3
On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
- Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie
- Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
Ce message ainsi que les piegraveces jointes sont eacutetablis sous la seule responsabiliteacute de lexpeacutediteur agrave lintention exclusive de ses destinataires ils peuvent contenir des informations confidentielles Toute publication utilisation ou diffusion doit ecirctre autoriseacutee preacutealablement Ce message a fait lobjet dun traitement anti-virusIl est rappeleacute que tout message eacutelectronique est susceptible dalteacuteration au cours de son acheminement sur Internet ________________________________________________________________
Vous pouvez consulter le site de lAssembleacutee nationale agrave ladresse suivante httpwwwassemblee-nationalefr
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M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Association ESKOLIMChez Seaska Route de la Pouponniegravere64250 CAMBO LES BAINSeskolim6gmailcomRepreacutesenteacutee par son President Jean Seacutebastien HAYDN11 chemin de Saint Jean66240 SAINT ESTEVE
CONTRIBUTION EXTERIEURE
Observations sur la conformiteacute agrave la Constitution de laproposition de loi relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
Monsieur le Preacutesident du Conseil constitutionnel Mesdames et Messieurs les
membres du Conseil constitutionnel lrsquoassociation Eskolim souhaite porter agrave votre attention
les observations suivantes tendant agrave deacutemontrer la conformiteacute agrave la Constitution de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Parmi lrsquoensemble des dispositions du texte deacutefeacutereacute la plupart nrsquoont donneacute lieu agrave aucun
deacutebat sur leur conformiteacute agrave la Constitution qui est de toute eacutevidence acquise par exemple au
sujet des traductions dont la constitutionnaliteacute a deacutejagrave indirectement eacuteteacute reconnue (CC 99-412
DC 15 juin 1999 CC ndeg2001-452 DC 6 deacutecembre 2001) ou de lrsquoutilisation des signes
diacritiques sur les actes drsquoeacutetat civil
De plus au-delagrave des apparences drsquoune politique jurisprudentielle initieacutee dans un contexte
speacutecifique le Conseil constitutionnel dispose deacutesormais drsquoun cadre constitutionnel de
reacutefeacuterence transformeacute (1) qui lui permettra de valider les dispositions leacutegislatives du texte dont
il est saisi en particulier lrsquoarticle 4 relatif agrave lrsquoenseignement immersif (2) et lrsquoarticle 6 au sujet
de la participation financiegravere agrave la scolarisation par les communes de reacutesidence (3)
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1 Le renouvellement des normes constitutionnelles de reacutefeacuterence en matiegravere de
langues reacutegionales
11 Les ineacutevitables deacuterogations apporteacutees agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution
Toute regravegle constitutionnelle connaicirct des atteacutenuations et peut ecirctre concilieacutee lrsquoarticle 2
de la Constitution ne fait pas exception Le principe demeure inchangeacute laquo La langue de la
Reacutepublique est le franccedilais raquo Sur ce fondement le Conseil constitutionnel a deacuteveloppeacute dans
les anneacutees 90 et 2000 une jurisprudence vigilante sur lrsquousage du franccedilais mais sans pour
autant refuser toute eacutevolution nous y reviendrons
Cependant lrsquoassociation Eskolim souhaite mettre en eacutevidence lrsquoindeacuteniable
changement de cadre constitutionnel en matiegravere de langues reacutegionales pour au
moins trois raisons
En premier lieu la porteacutee de lrsquoarticle 2 de la Constitution nrsquoest pas figeacutee et peut
eacutevoluer avec le temps En effet le Conseil constitutionnel opegravere reacuteguliegraverement des adaptations
de la porteacutee du texte constitutionnel Parmi de nombreuses illustrations jurisprudentielles la
liberteacute drsquoexpression et de communication protegravege deacutesormais la liberteacute drsquoacceacuteder agrave Internet
(CC ndeg 2009-580 DC 10 juin 2009) et de srsquoy exprimer (CC ndeg2020-801 DC du 18 juin 2020)
La liberteacute du mariage comprend deacutesormais le droit de mettre fin aux liens du mariage (CC ndeg
2016-557 QPC du 29 juillet 2016) La monteacutee en puissance des exigences environnementales
dans le deacutebat public a permis au Conseil constitutionnel de juger qursquoil deacutecoule de la Charte de
lrsquoenvironnement laquo que la protection de lrsquoenvironnement patrimoine commun des ecirctres
humains constitue un objectif de valeur constitutionnelle raquo (CC ndeg2019-823 QPC 31 janvier
2020) Certains fondements constitutionnels que lrsquoon croyait endormis ont eacuteteacute reacuteactiveacutes sous
lrsquoeffet du pouvoir interpreacutetatif agrave lrsquoimage de lrsquoarticle 15 de la DDHC (laquo La socieacuteteacute a le droit de
demander compte agrave tout agent public de son administration raquo) agrave lrsquoorigine drsquoun droit drsquoaccegraves
aux archives publiques (CC ndeg2017-655 QPC 15 septembre 2017) et drsquoun droit drsquoaccegraves aux
documents administratifs (CC ndeg2020-834 QPC 3 avril 2020)
En deuxiegraveme lieu la reacutedaction actuelle de lrsquoarticle 2 de la Constitution ne date pas de
1958 mais drsquoun ajout issu de la loi constitutionnelle ndeg 92-554 du 25 juin 1992 voteacutee dans un
contexte particulier au moment ougrave la France ratifiait le traiteacute de Maastricht et reacutevisait sa
Constitution afin de lever les atteintes agrave la souveraineteacute constateacutees par le Conseil
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constitutionnel En 1992 lrsquoinsertion de la langue franccedilaise au sein de lrsquoarticle 2 vise agrave rassurer
lrsquoopinion face aux craintes heacutegeacutemoniques de la langue anglaise les langues reacutegionales ne
sont ni viseacutees ni nieacutees dans leur existence et leur rocircle Il est sur ce point particuliegraverement
reacuteveacutelateur de se reacutefeacuterer aux deacuteclarations limpides du Garde des Sceaux Michel Vauzelle lors
des deacutebats parlementaires consacreacutes en 1992 au vote de la reacutevision constitutionnelle laquo Les
langues reacutegionales sont naturellement une richesse de notre patrimoine national Agrave ce
titre le Gouvernement exprime par ma voix lrsquoimmense respect et le soin qursquoil porte agrave cette
richesse de la nation [] Je ne vois pas lagrave drsquoatteinte agrave lrsquouniteacute de la nation mais au
contraire une contribution agrave sa richesse [] Aucune atteinte ne sera porteacutee agrave la politique
de respect de la diversiteacute de nos cultures reacutegionales qui est un eacuteleacutement essentiel du
patrimoine national raquo (JO Assembleacutee nationale p 1021)
Il est donc parfaitement possible pour le Conseil constitutionnel drsquoopeacuterer une
interpreacutetation eacutevolutive de lrsquoarticle 2 afin drsquoadapter la porteacutee de la norme constitutionnelle au
contexte actuel favorable agrave lrsquoapprofondissement de lrsquousage des langues reacutegionales Il nrsquoest
drsquoailleurs pas anodin de constater que la preacutesente proposition de loi a largement transcendeacute les
clivages politiques pour ecirctre voteacutee agrave une large majoriteacute avec drsquoailleurs le soutien de
lrsquoensemble des Preacutesidents de Reacutegion
En troisiegraveme lieu dans sa fameuse deacutecision sur la Charte europeacuteenne des langues
reacutegionales et minoritaires du 15 juin 1999 (ndeg99-412 DC) le Conseil constitutionnel a
implicitement reconnu la compatibiliteacute de lrsquoenseignement immersif ou bilingue avec la
Constitution et en particulier avec lrsquoarticle 2 de la Constitution En effet lrsquoinconstitutionnaliteacute
constateacutee entre la Charte et la Constitution concerne seulement les articles 1 et 7 Or le
consideacuterant 13 de cette deacutecision abusivement preacutesenteacutee comme un verrou absolu en matiegravere
de langues reacutegionales prend soin de preacuteciser laquo que nest contraire agrave la Constitution eu eacutegard agrave
leur nature aucun des autres engagements souscrits par la France dont la plupart au
demeurant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France en
faveur des langues reacutegionales raquo Parmi ces laquo autres engagements souscrits par la France raquo
au sein de la Charte figurent certaines stipulations de lrsquoarticle 8 de la Charte1 selon lequel
1 Article 8 ndash Enseignement1En matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel ces langues sontpratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de lenseignement de la (des)langue(s) officielle(s) de lEtat(hellip)ci agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires concerneacutees ou
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laquo laquoen matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel
ces langues sont pratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de
lenseignement de la (des) langue(s) officielle(s) de lEtat raquo agrave toute une seacuterie drsquoengagements
Au sein des engagements auxquels la France avait souscrits et sur lesquels le Conseil
constitutionnel srsquoest donc prononceacute on trouve le point 1 c (iv) en vertu duquel la France
srsquoengage laquo agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui
le souhaitent ndash ou le cas eacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant raquo
Or ce renvoi concerne les stipulations suivantes
laquo i agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires
concerneacutees ou
Ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les
langues reacutegionales ou minoritaires ou
Iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales
ou minoritaires comme partie inteacutegrante du curriculum
Autrement dit la France srsquoeacutetait engageacutee au moment de la signature de la Charte agrave
appliquer lrsquoune des trois mesures citeacutees qui concernent lrsquoenseignement laquo dans raquo les langues
reacutegionales ou minoritaires dans le secondaire crsquoest-agrave-dire un enseignement immersif ou
bilingue Cet engagement faisait donc partie des stipulations examineacutees par le Conseil
constitutionnel et le consideacuterant 13 de la deacutecision du 15 juin 1999 affirme clairement que ces
stipulations ne sont pas contraires agrave la Constitution Degraves 1999 lrsquoenseignement immersif en
langue reacutegionale est reconnu par le Conseil constitutionnel comme compatible avec
lrsquoarticle 2 de la Constitution
En quatriegraveme lieu le texte mecircme de la Constitution contient drsquoores et deacutejagrave des
ameacutenagements au principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais
Drsquoune part en vertu de la loi constitutionnelle ndeg 98-610 du 20 juillet 1998 lAccord
de Noumeacutea est constitutionnaliseacute agrave larticle 77 de la Constitution Or cet accord stipule en son
ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les langues reacutegionalesou minoritaires ou
iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales ou minoritairescomme partie inteacutegrante du curriculum ou
iv agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui le souhaitent ndash ou le caseacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant
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point 133 laquo Les langues kanak sont avec le franccedilais des langues denseignement et de
culture en Nouvelle-Caleacutedonie Leur place dans lenseignement et les meacutedias doit donc ecirctre
accrue et faire lobjet dune reacuteflexion approfondie raquo
Drsquoautre part sous lrsquoeffet de la reacutevision constitutionnelle du 23 juillet 2008 la
Constitution consacre deacutesormais les langues reacutegionales sous lrsquoeffet de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution qui par deacutefinition atteacutenue et deacuteroge agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution et dont la
porteacutee ne saurait ecirctre symbolique
12 La porteacutee de lrsquoancrage constitutionnel des langues reacutegionales minoritaires
En vertu de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution laquo Les langues reacutegionales appartiennent
au patrimoine de la France raquo Sans discussion possible cette nouvelle disposition
constitutionnelle constitue un changement de circonstances de droit permettant drsquoatteacutenuer
fortement la porteacutee des preacuteceacutedentes deacutecisions du Conseil constitutionnel rendues avant la
reacutevision constitutionnelle de 2008 Certains voudraient pourtant reacuteduire ce texte agrave une porteacutee
simplement symbolique et pensent pouvoir drsquoores et deacutejagrave trouver une confirmation dans la
jurisprudence du Conseil constitutionnel La reacutealiteacute contentieuse est beaucoup plus nuanceacutee et
ne preacutejuge rien de lrsquoavenir
Le Conseil constitutionnel nrsquoa eu depuis 2008 qursquoune seule et unique occasion de
preacuteciser la porteacutee de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Dans la deacutecision du 20 mai 2011
(ndeg2011-130 QPC) il eacutetait en effet saisi des dispositions de larticle L 312-10 du code de
leacuteducation relative agrave lenseignement des langues et cultures reacutegionales qui eacutetait contesteacute au
regard de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Or estime le Conseil en 2011 lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution ninstitue pas un droit ou une liberteacute que la Constitution garantit Sa
meacuteconnaissance ne peut donc ecirctre invoqueacutee agrave lappui dune question prioritaire de
constitutionnaliteacute sur le fondement de larticle 61-1 de la Constitution
Il convient de ne pas tirer de conclusions excessives du deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en
QPC de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Drsquoune part cela nrsquoempecircche pas le Conseil constitutionnel de se fonder sur lrsquoarticle
75-1 de la Constitution dans le cadre du controcircle a priori comme crsquoest par exemple le cas
pour les regravegles constitutionnelles en matiegravere de recevabiliteacute des amendements ou des principes
constitutionnels en matiegravere budgeacutetaires
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Drsquoautre part le deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en QPC drsquoune norme constitutionnelle ne
preacutejuge pas drsquoune forme de hieacuterarchie mateacuterielle ou formelle et srsquoexplique seulement par les
speacutecificiteacutes de chacun des offices Par exemple le respect des regravegles du vote de la loi
imposeacutees par la Constitution impossibles agrave invoquer en QPC font pourtant lrsquoobjet drsquoune
vigilance accrue du Conseil constitutionnel dans le cadre du controcircle a priori justifiant
chaque anneacutee de nombreuses censures
En outre bien que non invocable en QPC lrsquoarticle 75-1 teacutemoigne indubitablement de
la volonteacute du constituant de permettre au leacutegislateur drsquoassouplir les conditions drsquousage des
langues reacutegionales en ouvrant davantage la leacutegislation agrave des possibiliteacutes drsquoapprentissage en la
matiegravere En cela lrsquoarticle 75-1 de la Constitution est une atteacutenuation une disposition
deacuterogatoire agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution selon lequel laquo La langue de la Reacutepublique est le
franccedilais raquo Comme le souligne le rapport drsquoun deacuteputeacute en 2015 laquo la preacuteservation et la
protection des langues reacutegionales sont devenues un objectif de valeur constitutionnelle raquo2 Une
telle interpreacutetation serait drsquoailleurs coheacuterente avec les travaux parlementaires agrave lrsquoorigine de la
reacutevision de 2008 pour le preacutesident de la Commission des lois du Seacutenat lrsquoarticle 75-1 permet
de donner laquo un fondement solide aux dispositions leacutegislatives et reacuteglementaires qui favorisent
la protection et le deacuteveloppement des langues reacutegionales sans diminuer la place que le
franccedilais occupe dans notre sphegravere publique raquo3
Enfin dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel
estime que larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi
ndeg2005-380 du 23 avril 2005 est conforme agrave la Constitution Or les dispositions ainsi
valideacutees sont toujours en vigueur dans une reacutedaction identique laquo Un enseignement de
langues et cultures reacutegionales peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des
modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces
langues sont en usage raquo Ainsi tout en estimant que lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ne
constitue pas un droit ou liberteacute constitutionnel directement invocable en QPC le Conseil
constitutionnel a valideacute le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures
reacutegionales
2JJ Urvoas Rapport sur Proposition de loi constitutionnelle ndeg 1618 visant agrave ratifier la Charte europeacuteenne deslangues reacutegionales ou minoritaires 14 janvier 2014
3JJ Hyest Rapport ndeg 387 (2007-2008) sur le projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions dela Ve Reacutepublique fait au nom de la commission des lois du Seacutenat
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Autre signe eacutevident de la porteacutee effective de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le
leacutegislateur a multiplieacute ces derniegraveres anneacutees lrsquoadoption de textes favorisant lrsquousage et
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et leur promotion La loi du 8 juillet 2013
drsquoorientation et de programmation pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique ouvre la
possibiliteacute drsquoun enseignement bilingue franccedilais-langue reacutegionale la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) eacutetablit la participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes par lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale
lrsquoarticle 86 de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle
modifie lrsquoarticle 225-1 du code peacutenal en creacuteant un nouveau cas de discrimination fondeacute sur laquo
la maitrise drsquoune autre langue que le franccedilais raquo la loi du 28 feacutevrier 2017 de programmation
relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend inopeacuterant lrsquointerdiction des livrets de famille
bilingues lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance eacutetend aux
eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives les modaliteacutes drsquoun accord entre les communes pour
la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoinscrivant dans une eacutecole dispensant un
enseignement de langue reacutegionale en dehors de sa commune de reacutesidence Lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution a donc susciteacute une production leacutegislative qui teacutemoigne de la volonteacute du pouvoir
politique de mettre en œuvre une politique en matiegravere de langue et culture reacutegionales La
particulariteacute de la proposition de loi deacutefeacutereacutee est drsquoecirctre la premiegravere loi dont lrsquoobjet exclusif vise
agrave densifier lrsquoenseignement et lrsquousage des langues reacutegionales mais ce texte confirme les
avanceacutees ponctuelles eacutetablies depuis la reacutevision constitutionnelle de 2008
13 La monteacutee en puissance drsquoexigences constitutionnelles favorisant lrsquousage des langues
reacutegionales
Au-delagrave de lrsquoapport indeacuteniable de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution qui inteacuteresse
directement et clairement la possibiliteacute pour le leacutegislateur de favoriser le deacuteveloppement des
langues reacutegionales la jurisprudence du Conseil constitutionnel atteste drsquoune monteacutee en
puissance de plusieurs liberteacutes qui participent indirectement du mecircme mouvement
En premier lieu la liberteacute drsquoexpression et de communication concerne les langues
reacutegionales Degraves la deacutecision ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 le Conseil constitutionnel avait
concilieacute lrsquoarticle 2 de la Constitution avec la liberteacute drsquoexpression et de communication afin de
censurer certaines dispositions imposant lrsquousage du franccedilais tout en faisant notamment une
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reacutefeacuterence aux langues reacutegionales cette liberteacute laquo implique le droit pour chacun de choisir les
termes jugeacutes par lui les mieux approprieacutes agrave lexpression de sa penseacutee que la langue franccedilaise
eacutevolue comme toute langue vivante en inteacutegrant dans le vocabulaire usuel des termes
de diverses sources quil sagisse dexpressions issues de langues reacutegionales de vocables
dits populaires ou de mots eacutetrangers raquo Or la liberteacute drsquoexpression et de communication a vu
son reacutegime constitutionnel renforceacute depuis plusieurs anneacutees sous lrsquoeffet du triple test de
proportionnaliteacute en vertu duquel les limites apporteacutees agrave ces liberteacutes doivent ecirctre neacutecessaires
adapteacutees et proportionneacutees agrave lrsquoobjectif poursuivi Norme constitutionnelle prioritaire pour le
Conseil constitutionnel la liberteacute drsquoexpression et de communication a justifieacute de nombreuses
censures de dispositions leacutegislatives ces derniegraveres anneacutees (loi laquo Hadopi raquo consultation des
sites Internet terroristes loi laquo Avia raquohellip) Or cette liberteacute dans ses deux composantes de
lrsquoexpression et de la communication permet au locuteur drsquoutiliser une langue reacutegionale et de
ne pas subir drsquoentraves excessives ou injustifieacutees Le deacuteveloppement des langues reacutegionales et
de leur enseignement lrsquoouverture des possibiliteacutes de srsquoexprimer et de communiquer gracircce agrave
ces langues ne sont pas eacutetrangegraveres aux conditions drsquoexercice de la liberteacute drsquoexpression et de
communication Ainsi la monteacutee en puissance de cette liberteacute dans le contentieux
constitutionnel confirme lrsquoeacutevolution favorable du cadre constitutionnel applicable aux langues
reacutegionales
En deuxiegraveme lieu lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant est deacutesormais consacreacute en tant
qursquoexigence constitutionnelle deacutecoulant des alineacuteas 10 et 11 du Preacuteambule de 1946 Ce
principe a drsquoores et deacutejagrave eacuteteacute appliqueacute en matiegravere de droit des eacutetrangers (CC 2019-797 QPC du
26 juillet 2019) mais aussi en droit de la famille au sujet du divorce (CC ndeg 2019-778 DC du
21 mars 2019) ou de lrsquoaccouchement sous le secret (CC 2019-826 QPC du 7 feacutevrier 2020) Il
serait parfaitement coheacuterent que cette exigence constitutionnelle soit applicable en matiegravere
drsquoeacuteducation et drsquoenseignement ce qui permettrait notamment de justifier le renforcement de
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et le soutien financier qui leur est apporteacute
En troisiegraveme lieu la liberteacute de lrsquoenseignement reconnu en tant que principe
constitutionnel (CC ndeg77-87 DC 23 novembre 1977 2016-745 DC 26 janvier 2017)
pourrait permette de proteacuteger constitutionnellement le libre choix des parents en
matiegravere de meacutethodes eacuteducatives conformeacutement agrave la jurisprudence du Conseil drsquoEtat En
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effet dans une deacutecision du 19 juillet 2017 (Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg
406150) le Conseil drsquoEtat estime que le laquo principe de la liberteacute de lrsquoenseignement qui figure
au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la Reacutepublique implique la
possibiliteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement y compris hors de tout contrat conclu
avec lrsquoEtat tout comme le droit pour les parents de choisir pour leurs enfants des
meacutethodes eacuteducatives alternatives agrave celles proposeacutees par le systegraveme scolaire public y
compris lrsquoinstruction au sein de la famille raquo A fortiori la liberteacute de lrsquoenseignement
permettrait au leacutegislateur drsquooffrir aux eacutelegraveves la possibiliteacute de suivre un enseignement immersif
en langue reacutegionale Faire deacutecouler de la liberteacute drsquoenseignement une exigence en matiegravere de
droit des parents de choisir les meacutethodes eacuteducatives serait drsquoailleurs en coheacuterence avec
lrsquoarticle 2 du Protocole 1 de la CEDH4 et lrsquoarticle 14-3 de la Charte des droits fondamentaux
de lUnion europeacuteenne5
Au-delagrave du principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais unchangement de contexte est intervenu depuis lrsquoinsertion en 1992 de cette disposition agravelrsquoarticle 2 de la Constitution Depuis 2008 le pouvoir constituant a consacreacute leslangues reacutegionales agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution de nombreuses reacuteformesleacutegislatives et regraveglementaires ont accompagneacute le deacuteveloppement des langues reacutegionaleset plusieurs principes constitutionnels accompagnent et pourraient agrave lrsquoavenirrenforcer lrsquoassise normative des langues reacutegionalesCrsquoest agrave lrsquoaune de ce cadre constitutionnel renouveleacute et transformeacute en phase avec leseacutevolutions leacutegislatives et sociales que le Conseil constitutionnel appreacuteciera laconstitutionnaliteacute de la preacutesente proposition de loi qui loin de constituer une rupturesrsquoinscrit dans une forme de continuiteacute
2 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi modifie lrsquoarticle L321-10 du code de lrsquoeacuteducation qui
en lrsquoeacutetat dispose
4laquo Nul ne peut se voir refuser le droit agrave lrsquoinstruction LrsquoEacutetat dans lrsquoexercice des fonctions qursquoil assumera dans ledomaine de lrsquoeacuteducation et de lrsquoenseignement respectera le droit des parents drsquoassurer cette eacuteducation et cetenseignement conformeacutement agrave leurs convictions religieuses et philosophiques raquo
5laquo La liberteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement dans le respect des principes deacutemocratiques ainsi quele droit des parents drsquoassurer lrsquoeacuteducation et lrsquoenseignement de leurs enfants conformeacutement agrave leurs convictionsreligieuses philosophiques et peacutedagogiques sont respecteacutes selon les lois nationales qui en reacutegissent lrsquoexercice raquo
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laquo Les langues et cultures reacutegionales appartenant au patrimoine de la France leurenseignement est favoriseacute prioritairement dans les reacutegions ougrave elles sont en usage
Cet enseignement peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefiniespar voie de convention entre lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont enusage
Le Conseil supeacuterieur de leacuteducation est consulteacute conformeacutement aux attributions qui lui sontconfeacutereacutees agrave larticle L 231-1 sur les moyens de favoriser leacutetude des langues et culturesreacutegionales dans les reacutegions ougrave ces langues sont en usage
Lenseignement facultatif de langue et culture reacutegionales est proposeacute dans lune des deuxformes suivantes
1deg Un enseignement de la langue et de la culture reacutegionales
2deg Un enseignement bilingue en langue franccedilaise et en langue reacutegionale
Les familles sont informeacutees des diffeacuterentes offres dapprentissage des langues et culturesreacutegionales raquo
Lrsquoarticle 4 a simplement pour objet drsquoajouter un 3e cas de forme drsquoenseignementfacultatif de langue et culture reacutegionales en preacutevoyant
laquo3deg Un enseignement immersif en langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectifdrsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo
21 Le Conseil constitutionnel peut ne pas se prononcer sur cette disposition
A titre liminaire il semblerait que lrsquoarticle 4 du texte soumis agrave lrsquoexamen du
Conseil constitutionnel ne soit pas contesteacute par les auteurs de la saisine parlementaire agrave en
croire les deacuteclarations publiques de plusieurs deacuteputeacutes Ce point nrsquoest pas sans importance degraves
lors qursquoil confirme le large consensus politique autour de cette disposition et peut avoir une
conseacutequence sur le peacuterimegravetre de lrsquoobjet de la deacutecision rendue
Certes il arrive ponctuellement au Conseil constitutionnel drsquoexaminer drsquooffice
drsquoautres dispositions que celles contesteacutees par la saisine mais depuis lrsquoentreacutee en vigueur de la
QPC et speacutecialement depuis 2016 une telle pratique tend agrave devenir une exception (Deacutecisions
ndeg 2019-794 DC du 20 deacutecembre 2019 ndeg2018-772 DC du 15 novembre 2018 ndeg2016-745
DC du 26 janvier 2017)
De plus lors de lrsquoexamen de la loi pour une eacutecole de la confiance dans sa deacutecision
ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 le Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute examiner
drsquooffice les dispositions de lrsquoarticle 38 creacuteant en vertu de lrsquoarticle L314-2 du code de
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lrsquoeacuteducation une expeacuterimentation de classe immersive en langue eacutetrangegravere ou reacutegionale6 Si le
Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute se saisir drsquooffice de cette disposition expeacuterimentale
crsquoest qursquoimplicitement il nrsquoa pas consideacutereacute qursquoelle posait une difficulteacute manifeste de
constitutionnaliteacute Degraves lors la coheacuterence voudrait qursquoil en aille de mecircme avec les dispositions
de lrsquoarticle 4 de la preacutesente proposition de loi qui ne font que reprendre les grands principes
de lrsquoexpeacuterimentation preacuteceacutedente en preacutevoyant la possibiliteacute drsquoun enseignement immersif en
langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue
franccedilaise
22 Les exigences anciennes poseacutees par le Conseil constitutionnel sont respecteacutees
Elaboreacutee avant la reacutevision constitutionnelle de 2008 consacrant les langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la jurisprudence
du Conseil constitutionnel en matiegravere drsquoenseignement de langue reacutegionale est totalement
respecteacutee par lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
En premier lieu le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement immersif en langue
reacutegionale rend lrsquoarticle 4 conforme agrave la Constitution
Dans plusieurs deacutecisions le Conseil constitutionnel a eu lrsquooccasion de preacuteciser que
seule lrsquoobligation de suivre un enseignement dans une autre langue que le franccedilais serait
contraire agrave la Constitution Ainsi dans la deacutecision ndeg 2001-456 DC du 27 deacutecembre 2001 il
indique que laquo lusage dune langue autre que le franccedilais ne peut ecirctre imposeacute aux eacutelegraveves des
eacutetablissements de lenseignement public ni dans la vie de leacutetablissement ni dans
lenseignement des disciplines autres que celles de la langue consideacutereacutee raquo Le verbe
6Article L314-2 du code de lrsquoeacuteducation laquo Sous reacuteserve de lrsquoautorisation preacutealable des autoriteacutes acadeacutemiques etapregraves concertation avec les eacutequipes peacutedagogiques le projet drsquoeacutecole ou drsquoeacutetablissement mentionneacute agrave lrsquoarticle L401-1 peut preacutevoir la reacutealisation dans des conditions deacutefinies par deacutecret drsquoexpeacuterimentations peacutedagogiquesportant sur tout ou partie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement drsquoune dureacutee limiteacutee agrave cinq ans Cesexpeacuterimentations peuvent concerner lrsquoorganisation peacutedagogique de la classe de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement laliaison entre les diffeacuterents niveaux drsquoenseignement la coopeacuteration avec les partenaires du systegraveme eacuteducatiflrsquoenseignement dans une langue vivante eacutetrangegravere ou reacutegionale les eacutechanges avec des eacutetablissementseacutetrangers drsquoenseignement scolaire lrsquoutilisation des outils et ressources numeacuteriques la reacutepartition des heuresdrsquoenseignement sur lrsquoensemble de lrsquoanneacutee scolaire les proceacutedures drsquoorientation des eacutelegraveves et la participation desparents drsquoeacutelegraveves agrave la vie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement Les collectiviteacutes territoriales sont systeacutematiquementassocieacutees agrave la deacutefinition des grandes orientations des expeacuterimentations meneacutees par lrsquoeacuteducation nationale ainsiqursquoagrave leurs deacuteclinaisons territoriales raquo
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laquo imposer raquo est employeacute agrave la fois au sujet de lrsquousage drsquoune autre langue que le franccedilais et au
sujet de la vie de lrsquoeacutetablissement et de lrsquoenseignement des disciplines autres que celles de la
langue consideacutereacutee Ce qui signifie qursquoil est constitutionnellement possible au leacutegislateur de
permettre aux eacutelegraveves de choisir de maniegravere facultative une telle orientation dans
lrsquoenseignement De mecircme dans sa deacutecision ndeg2001 454 DC du 17 janvier 2002 le Conseil
constitutionnel avait estimeacute que si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre
de lrsquohoraire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires laquo il ne saurait revecirctir pour autant
un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo Et dans la deacutecision
ndeg2004-490 DC 12 feacutevrier 2004 le Conseil indique que lrsquoenseignement de la langue
tahitienne ou dune autre langue polyneacutesienne dans le cadre de lhoraire normal des eacutecoles
maternelles et primaires dans les eacutetablissements du second degreacute et dans les eacutetablissements
denseignement supeacuterieur laquo ne saurait revecirctir pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les
eacutelegraveves ou eacutetudiants ni pour les enseignants raquo
Or en lrsquoespegravece il nrsquoy a absolument aucun doute sur le caractegravere facultatif du 3deg
ajouteacute agrave lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation En effet le premier alineacutea de lrsquoarticle L312-
10 du code de lrsquoeacuteducation est inchangeacute et eacutevoque un laquo enseignement facultatif raquo Le deacuteputeacute
Molac lrsquoa clairement exprimeacute lors des deacutebats laquo lrsquoenseignement immersif tel qursquoil est ici
proposeacute reacutepond agrave cette condition dans la mesure ougrave il ne serait pas imposeacute mais seulement
proposeacute au sein des eacutetablissements publics au cocircteacute de filiegraveres classiques drsquoenseignement la
deacutecision finale restant du ressort des personnes responsables de lrsquoenfant raquo (Rapport du 31
mars 2021)
En deuxiegraveme lieu lrsquoarticle 4 nrsquoa pas pour objet de soustraire les eacutelegraveves aux
droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements drsquoenseignement
Dans plusieurs deacutecisions relatives agrave lrsquousage drsquoune langue reacutegionale le Conseil
constitutionnel rappelle qursquoun enseignement de ce type nrsquoa pas pour laquo pour objet de soustraire
les eacutelegraveves scolariseacutes (hellip) aux droits et obligations applicables agrave lensemble des usagers des
eacutetablissements qui assurent le service public de lenseignement ou sont associeacutes agrave celui-ci raquo
(ndeg 91-290 DC du 9 mai 1991 ndeg 2001-454 DC du 17 janvier 2002) Or lrsquoarticle 4 a
seulement pour objet drsquoouvrir une 3e modaliteacute facultative drsquoenseignement en langue reacutegionale
La proposition de loi ne confegravere pas des droits speacutecifiques agrave des laquo groupes raquo de locuteurs de
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de laquo territoires raquo dans lesquels ces langues
seraient pratiqueacutees Le texte ne modifie pas non plus les modaliteacutes drsquoexpression dans la vie
publique et dans la relation entre lrsquoadministration et les administreacutes De telle sorte que
lrsquoarticle 4 ne creacutee aucun droit particulier pour les eacutelegraveves comme pour les enseignants de nature
agrave les soustraire aux droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements
drsquoenseignement ou associeacutes agrave celui-ci
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 4 opegravere une conciliation raisonnable et eacutequilibreacutee entre
le principe de lrsquoarticle 2 de la Constitution et lrsquoapprentissage des langues reacutegionales
Lrsquoenseignement immersif en lange reacutegionale doit srsquoopeacuterer laquo sans preacutejudice de
lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo Lrsquoarticle 4 prend soin de ne pas
ignorer le principe poseacute par lrsquoarticle 2 de la Constitution et prolonge au niveau leacutegislatif la
conciliation souhaiteacutee par le constituant depuis 2008 avec lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Il
appartiendra au pouvoir regraveglementaire de preacuteciser la mise en œuvre de lrsquoobjectif de bonne
connaissance de la langue franccedilaise qui en toute hypothegravese garantit une conciliation
eacutequilibreacutee entre les regravegles constitutionnelles en preacutesence
Au surplus les retours drsquoexpeacuteriences des expeacuterimentations de classes en
enseignements immersifs permises par lrsquoarticle L 314-2 du code de lrsquoeacuteducation deacutemontrent
que les eacutelegraveves disposent drsquoun niveau en franccedilais plus eacuteleveacute que la moyenne Comme lrsquoindique
le rapport du Seacutenat sur la proposition de loi 19 expeacuterimentations immersives en langue
basque 6 en langue corse et une en langue catalane ont lieu actuellement dans des eacutecoles
publiques Or pour prendre lrsquoexemple de lrsquoenseignement en basque agrave 100 en eacutecole
maternelle objet drsquoune eacutevaluation preacutecise par lrsquoacadeacutemie de Bordeaux en 2019 (Etude
comparative des filiegraveres de maternelle 100 basque bilingue et franccedilais Acadeacutemie de
Bordeaux 2019) laquo lorsque ces enfants arrivaient en CP leur niveau de franccedilais eacutetait
supeacuterieur agrave la moyenne du deacutepartement Cela prouve que le niveau de franccedilais nrsquoavait
absolument pas eacuteteacute toucheacute raquo (Paul Molac Assembleacutee nationale Seacuteance du 8 avril 2021)
En quatriegraveme lieu lrsquoarticle 4 ne fait qursquoeacutetendre la mise en œuvre drsquoune modaliteacute
drsquoenseignement deacutejagrave valideacute par le Conseil constitutionnel
Dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel a valideacute
le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures reacutegionales en estimant que
larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi ndeg2005-380 du 23
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
avril 2005 est conforme agrave la Constitution En effet apregraves avoir estimeacute inopeacuterant le grief tireacute
de la violation de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la deacutecision preacutecise laquo que les dispositions
contesteacutees ne sont contraires agrave aucun droit ou liberteacute que la Constitution garantit raquo Par
conseacutequent en vertu de lrsquoautoriteacute que lrsquoarticle 62 de la Constitution confegravere aux deacutecisions du
Conseil constitutionnel les dispositions valideacutees dans cette deacutecision et toujours en vigueur
sont conformes agrave la Constitution Il srsquoagit en particulier de lrsquoalineacutea 2 de la version actuelle de
lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation en vertu duquel laquo Cet enseignement peut ecirctre
dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre
lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont en usage raquo Or lrsquoarticle 4 de la
proposition de loi ne fait qursquoajouter une 3e possibiliteacute de mise en œuvre drsquoun principe deacutejagrave
valideacute par le Conseil constitutionnel modaliteacute facultative et sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune
bonne connaissance de la langue franccedilaise Le leacutegislateur srsquoest donc scrupuleusement
conformeacute aux exigences du Conseil constitutionnel
23 La possibiliteacute drsquoun enseignement immersif peut se preacutevaloir de plusieurs exigences constitutionnelles
En plus de srsquoinscrire dans les lignes jurisprudentielles du Conseil constitutionnel et de
respecter lrsquoarticle 2 de la Constitution lrsquoarticle 4 de la proposition de la loi peut se preacutevaloir
plusieurs normes constitutionnelles
En premier lieu lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en vertu duquel laquo Les langues
reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo constitue un changement de
circonstances de droit issu de la reacutevision constitutionnelle de 2008 qui atteacutenue la porteacutee de
lrsquoarticle 2 de la Constitution et permet ainsi de fonder le principe drsquoen enseignement immersif
et facultatif en langue reacutegionale
En second lieu comme preacuteceacutedemment rappeleacute (cf supra point 13) plusieurs
exigences et liberteacutes constitutionnelles peuvent soutenir le deacuteveloppement des langues
reacutegionales et peser favorablement dans la conciliation opeacutereacutee par le Conseil constitutionnel
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
La liberteacute drsquoexpression et de communication garantie par lrsquoarticle 11 de la DDHC
et dont le reacutegime constitutionnel srsquoest renforceacute depuis une dizaine drsquoanneacutees peut permettre de
justifier lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale degraves lors qursquoil srsquoagit drsquoun preacutealable neacutecessaire
agrave lrsquoexpression et agrave la communication dans une autre langue que le franccedilais
Lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant reacutecemment consacreacute sur le fondement des alineacuteas 10
et 11 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 peut permettre au leacutegislateur de diversifier les
possibiliteacutes drsquoapprentissage drsquoune langue et drsquoune culture reacutegionale
La liberteacute de lrsquoenseignement consacreacutee de longue date en tant que principe
fondamental reconnu par les lois de la Reacutepublique implique neacutecessairement comme le
reconnaissent le Conseil drsquoEtat au niveau constitutionnel (CE 19 juillet 2017 Association
Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150) et les textes europeacuteens (article 2 du protocole 1
CEDH article 14-3 Charte des droits fondamentaux de lrsquoUnion europeacuteenne) une possibiliteacute
pour les parents de choisir des meacutethodes eacuteducatives en lien avec leurs convictions
Il est eacutegalement possible drsquoavancer le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction qui
deacutecoule de lrsquoalineacutea 13 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 (CC ndeg2001-450 DC 11
juillet 2001) degraves lors que lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale poursuit un objectif
peacutedagogique auquel les eacutelegraveves doivent pouvoir acceacuteder de maniegravere suffisamment libre et
selon des critegraveres objectifs et rationnels
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi se contente drsquoajouter une modaliteacute de mise enœuvre drsquoun enseignement dont le principe a deacutejagrave eacuteteacute valideacute par le Conseilconstitutionnel La conformiteacute agrave la Constitution de cet enseignement est eacutetablie degraveslors qursquoil est proposeacute de maniegravere facultative sans preacutejudice du respect de lrsquoarticle 2 dela Constitution et qursquoil peut se preacutevaloir de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ainsi quede plusieurs principes constitutionnels comme la liberteacute drsquoexpression lrsquointeacuterecirctsupeacuterieur de lrsquoenfant la liberteacute drsquoenseignement et lrsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
3 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi deacutefeacutereacutee modifie lrsquoarticle L442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation en remplaccedilant les alineacuteas 6 et 7 par lrsquoalineacutea suivant
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue
reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de
reacutesidence et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la
condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de
langue reacutegionale raquo
31 Lrsquoimpact subsidiaire et reacutesiduel de lrsquoarticle 6
Au-delagrave des passions et crispations qui peuvent parfois se rencontrer au greacute de deacutebats
relatifs au financement de lrsquoenseignement priveacute la modification apporteacutee par lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi doit ecirctre replaceacutee agrave sa juste porteacutee
En premier le meacutecanisme est subsidiaire En effet la participation financiegravere de la
commune de reacutesidence ne serait solliciteacutee que si cette commune ne laquo dispose pas drsquoeacutecole
dispensant un enseignement de langue reacutegionale raquo Il srsquoagit bien drsquoun laquo enseignement raquo quel
que soit sa forme et son volume Degraves lors comme lrsquoa clairement exprimeacute le deacuteputeacute Paul
Molac devant la Commission des affaires sociales il peut srsquoagir drsquoune laquo initiation drsquoun
enseignement paritaire ou drsquoune immersion raquo (31 mars 2021)
En deuxiegraveme lieu le meacutecanisme est reacutesiduel La participation financiegravere se limite
aux eacutetablissements priveacutes du premier degreacute ndash les eacutecoles ndash ayant conclu un contrat
drsquoassociation Les collegraveges et lyceacutees sont donc exclus du dispositif Un faible nombre
drsquoenfants sera concerneacute et la charge sera donc reacuteduite pour les communes en question De
plus en pratique dans les zones ougrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales est reacutepandu les
eacutecoles drsquoun grand nombre de communes ont deacutejagrave deacuteveloppeacute des offres eacuteducatives
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
En troisiegraveme lieu la participation financiegravere est encadreacutee par la loi En application
de lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation non modifieacute par la preacutesente
proposition de loi les modaliteacutes de calcul de la contribution de la commune de reacutesidence sont
clairement eacutetablies
laquo il est tenu compte des ressources de cette commune du nombre deacutelegraveves de cette
commune scolariseacutes dans la commune daccueil et du coucirct moyen par eacutelegraveve calculeacute sur la base
des deacutepenses de fonctionnement de lensemble des eacutecoles publiques de la commune daccueil
sans que le montant de la contribution par eacutelegraveve puisse ecirctre supeacuterieur au coucirct quaurait
repreacutesenteacute pour la commune de reacutesidence leacutelegraveve sil avait eacuteteacute scolariseacute dans une de ses eacutecoles
publiques raquo
La charge financiegravere obeacuteit donc agrave des regravegles claires objectives rationnelles et deacutejagrave en
vigueur depuis plusieurs anneacutees En effet le laquo forfait scolaire raquo est deacutejagrave pratiqueacute sur le
fondement de lrsquoarticle L212-8 du code de lrsquoeacuteducation lorsqursquoune famille scolarise dans une
eacutecole publique ou priveacutee son enfant dans une autre commune que la commune de reacutesidence
32 Lrsquoabsence de violation de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales et du principe drsquoeacutegaliteacute
Ainsi replaceacutee dans sa juste porteacutee il ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi de violer la Constitution et en particulier les principes applicables en
matiegravere de libre administration des collectiviteacutes territoriales ainsi que le principe drsquoeacutegaliteacute
En premier lieu le Conseil constitutionnel a deacutejagrave valideacute le principe de lrsquoaide agrave
lrsquoenseignement priveacute et en particulier aux langues reacutegionales
Avant mecircme la reacutevision constitutionnelle de 2008 et la conseacutecration des langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le Conseil
constitutionnel avait reconnu que laquo pour concourir agrave la sauvegarde des langues reacutegionales
lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales peuvent apporter leur aide aux associations ayant cet
objet raquo (CC ndeg2001-456 DC 27 deacutecembre 2001)
De plus le Conseil constitutionnel rappelle reacuteguliegraverement que laquo le leacutegislateur peut
preacutevoir loctroi dune aide des collectiviteacutes publiques aux eacutetablissements denseignement
priveacutes selon la nature et limportance de leur contribution agrave laccomplissement de missions
denseignement raquo (CC ndeg93-329 DC du 13 janvier 1994)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
En deuxiegraveme lieu le principe de libre administration ne saurait justifier des
traitements diffeacuterencieacutes dans lrsquoexercice des droits et liberteacutes constitutionnels
En vertu de lrsquoarticle 72 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales srsquoadministrent
librement mais laquo dans les conditions preacutevues par la loi raquo De plus le Conseil constitutionnel
prend soin de preacuteciser que laquo si le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacutegislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce
que les conditions essentielles drsquoapplication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de
lrsquoenseignement deacutependent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas
ecirctre les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (CC ndeg 84-185 DC du 18 janvier 1985 CC
ndeg93-329 du 13 janvier 1994) Plus largement dans la deacutecision du 17 janvier 2002 (ndeg2001-
454 DC) le Conseil constitutionnel affirme que laquo le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales ne saurait conduire agrave ce que les conditions essentielles de mise en
oeuvre des liberteacutes publiques et par suite lensemble des garanties que celles-ci comportent
deacutependent des deacutecisions de collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre les mecircmes
sur lensemble du territoire de la Reacutepublique raquo
Or en lrsquoespegravece si les communes pouvaient librement participer au financement de la
scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous contrat
drsquoassociation lrsquoexercice de la liberteacute drsquoenseignement du principe drsquoeacutegaliteacute devant la loi et du
principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction deacutependrait de la seule volonteacute drsquoune collectiviteacute
territoriale ce que le Conseil constitutionnel condamne Degraves lors que la possibiliteacute drsquoun
enseignement en langue reacutegionale est offerte aux enfants les conditions drsquoaccegraves agrave cet
enseignement doivent pouvoir ecirctre effectives et eacutegales Loin de violer le principe drsquoeacutegaliteacute
devant la loi lrsquoarticle 6 de la proposition de loi en assure au contraire la garantie
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne transfert ni ne creacutee de
nouvelles compeacutetences
Srsquoagissant des ressources des collectiviteacutes locales permettant de leur assurer une libre
administration le quatriegraveme alineacutea de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution preacutevoit laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales srsquoaccompagne de
lrsquoattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consacreacutees agrave leur exercice Toute
creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour conseacutequence drsquoaugmenter les deacutepenses des
collectiviteacutes territoriales est accompagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Le Conseil
constitutionnel veille au respect de cette regravegle drsquoune part pour les transferts de compeacutetence
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales et drsquoautre part pour les creacuteations ou extensions de
compeacutetence des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece aucune creacuteation ou transfert de compeacutetence nrsquoest opeacutereacute au sens de
lrsquoarticle 72-2 de la Constitution Il srsquoagit drsquoune simple participation financiegravere agrave caractegravere
subsidiaire reacutesiduel et deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels comme
preacuteceacutedemment eacutevoqueacute (cf supra point 31) De plus le versement de la participation
financiegravere correspond en quelque sorte agrave un allegravegement de charge degraves lors que le coucirct de
lrsquoenfant scolariseacute est reporteacute sur une autre commune que la commune de reacutesidence En
conseacutequence lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne fait que modifier les modaliteacutes drsquoexercice
drsquoune compeacutetence sans en creacuteer ou transfeacuterer une nouvelle
Drsquoailleurs dans la deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 le Conseil
constitutionnel avait jugeacute inopeacuterant le grief tireacute de la violation des articles 72 et 72-2 de la
Constitution agrave propos de la version ancienne de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation en
jugeant que laquo la loi deacutefeacutereacutee nemporte ni creacuteation ni extension des compeacutetences en matiegravere de
contributions des communes aux frais de fonctionnement des classes eacuteleacutementaires des
eacutetablissements du premier degreacute priveacutes sous contrat dassociation que par suite le grief tireacute
de la meacuteconnaissance du principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales manque
en fait raquo
Le Conseil constitutionnel a statueacute dans le mecircme sens au sujet de lrsquoinstitution drsquoun
creacutedit drsquoimpocirct en matiegravere drsquoapprentissage ou de la possibiliteacute de modifier la dureacutee du contrat
drsquoapprentissage mecircme si ces mesures en rendant lrsquoapprentissage plus attrayant ont pour effet
drsquoaugmenter le nombre drsquoapprentis et donc drsquoaccroicirctre les charges des reacutegions dans ce
domaine (CC ndeg 2004-509 DC du 13 janvier 2005)
En quatriegraveme lieu le principe drsquoeacutegaliteacute entre les charges publiques est respecteacute
En effet en plus du caractegravere subsidiaire et reacutesiduel du meacutecanisme la participation
financiegravere preacutevue par lrsquoarticle 6 de la proposition de loi srsquoapplique agrave lrsquoensemble des
communes ne disposant pas drsquoun eacutetablissement dispensant un enseignement de langue
reacutegionale ce qui est coheacuterent au regard de lrsquoobjet de la loi Les critegraveres de la participation
financiegravere preacutevus par lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 sont en tout eacutetat de cause objectifs et
rationnels eacutetablis et mis en œuvre depuis plusieurs anneacutees Les garanties de lrsquoarticle 13 de la
DDHC sont donc respecteacutees
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En cinquiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir du respect
de plusieurs normes constitutionnelles
En affirmant depuis 2008 que les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la
France lrsquoarticle 75-1 de la Constitution donne un ancrage constitutionnel au deacuteveloppement
de lrsquousage et de lrsquoenseignement des langues reacutegionales Or sans la participation financiegravere des
communes de reacutesidence agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat lrsquoenseignement des langues reacutegionales serait compromis Par
conseacutequent lrsquoarticle 6 de la proposition de loi constitue une garantie leacutegale du respect de
lrsquoaffirmation porteacutee par lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Le mecircme raisonnement sera tenu agrave propos de lrsquoensemble des principes constitutionnels
qui donnent une assise agrave lrsquousage et agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales la liberteacute
drsquoexpression et de communication (article 11 DDHC) la liberteacute drsquoenseignement (PFRLR)
dont pourrait deacutecouler une exigence en matiegravere de droit des parents de choisir les meacutethodes
eacuteducatives (CE 19 juillet 2017 Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150)
lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant (alineacutea 10 et 11 du Preacuteambule de 1946) le principe drsquoeacutegaliteacute
(article 6 DDHC) le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction (alineacutea 13 du Preacuteambule de 1946)
Sans lrsquoarticle 6 de la proposition de loi lrsquoeffectiviteacute de lrsquoensemble de ces normes
constitutionnelles serait consideacuterablement atteacutenueacutee et creacuteerait des diffeacuterences de traitement
injustifieacutees et deacutependantes de la volonteacute des communes
De plus lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir drsquoun objectif de
clarification et de seacutecurisation du droit applicable qui peut se rattacher agrave lrsquoarticle 16 de la
DDHC degraves lors que les textes jusqursquoagrave preacutesent applicables eacutetaient ambigus et ont donneacute lieu agrave
des contentieux En rendant obligatoire ce qui eacutetait avant une faculteacute pour autant soumise agrave
un rocircle non neacutegligeable du preacutefet lrsquoarticle 6 de la proposition de loi clarifie le droit
applicable Ainsi une deacuteputeacutee preacutecisait lors des deacutebats parlementaires que laquo lrsquoarticle 34 de la
loi pour une eacutecole de la confiance relatif au versement du forfait scolaire a susciteacute de
nombreux imbroglios administratifs Ainsi chez moi en Bretagne plus de 150 demandes de
meacutediation ont eacuteteacute transmises aux services de lrsquoEacutetat ce qui met en lumiegravere lrsquoambiguiumlteacute de la loi
et les difficulteacutes de son application Je soutiens donc fortement lrsquoarticle 2 quinquies [devenu
article 6] issu des travaux du Seacutenat qui legraveve toute incertitude raquo (Mme Claudia Rouaux
Commission des affaires sociales Assembleacutee nationale 31 mars 2021)
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi creacutee un meacutecanisme subsidiaire et reacutesiduel dont laporteacutee est deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels Sans creacuteer ni transfeacutererde nouvelle compeacutetence aux communes cette disposition assure une mise en œuvreuniforme des droits et liberteacutes et peut se preacutevaloir de nombreuses normesconstitutionnelles confeacuterant agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales et agrave son soutienfinancier de solides justifications constitutionnelles
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 12 mai 2021
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure Mme Mastorpdf
Lettre Wanda Mastor accompagnant la porte eacutetroite
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure MSchellenberger et autrespdf
Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure assESKOLIL pdf
lettre daccompagnement CC
Porte eacutetroite loi langues reacutegionales (2)
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure M Bertrand Pancherpdf
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Videacutee drsquoune large part de sa substance en premiegravere lecture par la commission
des affaires culturelles et de leacuteducation de lrsquoAssembleacutee nationale la proposi-
tion de loi du deacuteputeacute Molac a ensuite retrouveacute ses objectifs initiaux gracircce agrave la
proceacutedure parlementaire qui donne agrave notre reacutegime repreacutesentatif tout son
sens discussions en commissions deacutebats en seacuteances publiques navette
amendements multiples pour parvenir agrave une adoption deacutefinitive agrave une majo-
riteacute non importante mais eacutecrasante des voix Agrave quelques heures de la pro-
mulgation de la loi par le Preacutesident de la Reacutepublique une partie de cette mecircme
majoriteacute a neacuteanmoins saisi le Conseil constitutionnel dans le cadre de lrsquoarticle
61 alineacutea 2 de la Constitution
Deacutepocirct de la proposition de loi
Deacuteposeacutee le 30 deacutecembre 2019 par le deacuteputeacute Paul Molac et autres deacuteputeacutes18
la proposition de loi apporte des mesures de protection et de promotion des
langues reacutegionales dans trois domaines le patrimoine lrsquoenseignement les
services publics via la signaleacutetique et les actes drsquoeacutetat civil Elle a eacuteteacute adopteacutee
le 8 avril 2021 par 247 voix pour 76 voix contre et 19 abstentions au terme
de la proceacutedure ci-dessous rappeleacutee
Renvoi agrave la commission des affaires culturelles et de leacuteducation
La proposition de loi a eacuteteacute renvoyeacutee agrave la commission des affaires cultu-
relles et de leacuteducation agrave deacutefaut de constitution drsquoune commission speacuteciale
dans les deacutelais preacutevus par les articles 30 et 31 du Regraveglement Le rapport fait
au nom de la commission par le deacuteputeacute Paul Molac nommeacute par elle a eacuteteacute
enregistreacute agrave la preacutesidence de lrsquoAssembleacutee nationale le 5 feacutevrier 2020 Preacutesenteacute
18 Sylvain BRIAL Jean-Feacutelix ACQUAVIVA Michel CASTELLANI Jean-Michel CLEacuteMENT
Paul-Andreacute COLOMBANI Charles de COURSON Jeanine DUBIEacute Freacutedeacuterique DUMAS Mrsquojid
EL GUERRAB Olivier FALORNI Yannick FAVENNEC BECOT Sandrine JOSSO Franccedilois-Mi-
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comme un moyen de deacutefendre les laquo langues de France raquo19 en danger et srsquoap-
puyant sur lrsquoexistant qui est la marque drsquoune eacutevolution rappeleacutee plus loin (II)
le texte entend laquo aller plus loin raquo en rehaussant la protection lrsquoaccessibiliteacute et
la visibiliteacute des langues reacutegionales dans les trois domaines preacuteciteacutes
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle premier re-
latif au patrimoine Ce dernier preacutecise en compleacutetant ainsi lrsquoar-
ticle L 1 du code du patrimoine que la conservation et la con-
naissance du patrimoine immateacuteriel sont drsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et que
les langues reacutegionales font partie de ce patrimoine
o La commission a adopteacute sans modifications lrsquoarticle 2 qui pro-
pose drsquoinclure parmi les treacutesors nationaux les biens preacutesentant
un inteacuterecirct majeur pour la connaissance des langues franccedilaise et
reacutegionales Le texte preacutevoit en effet outre pour les langues reacutegio-
nales des mesures de protection de notre patrimoine linguistique
dans une deacutemarche globale
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 3 qui disposait que des con-
ventions passeacutees entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pouvaient preacutevoir que
la langue reacutegionale est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de
lrsquohoraire normal des enseignements (des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires des collegraveges et des lyceacutees des territoires concerneacutes) Il
ne srsquoagissait pourtant que drsquoeacutetendre une regravegle deacutejagrave applicable en
Corse pour lrsquoenseignement de la langue corse lrsquoarticle L 312-11-
1 du code de lrsquoeacuteducation introduit par la loi ndeg 2002-92 du
22 janvier 2002 relative agrave la Corse dispose en effet que la langue
corse est une matiegravere enseigneacutee dans le cadre de lrsquohoraire normal
des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires de Corse Le Conseil cons-
titutionnel nrsquoa pas censureacute cette disposition tant que lrsquoenseigne-
ment eacutetait entendu comme ne revecirctant pas laquo un caractegravere obliga-
toire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo (deacutecision ndeg2001-
454 DC du 17 janvier 2002)
19 Sur cette notion de laquo langues de France raquo voir Les langues de France vingt ans apregraves Glot-topol ndeg34 2020 httpglottopoluniv-rouenfrnumero_34html
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o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 4 qui preacutevoyait que lenseigne-
ment bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale pouvait se reacuteali-
ser sous forme immersive laquo dans le respect des objectifs de maicirc-
trise des deux langues agrave chaque niveau denseignement raquo
o La commission a supprimeacute les articles 5 et 6 de la proposition de
loi Le premier manifestait la volonteacute drsquointroduire au sein drsquoun
nouvel article L 151-4-1 du code de lrsquoeacuteducation une deacuterogation
au principe drsquointerdiction de financement des deacutepenses drsquoinves-
tissement des eacutecoles priveacutees par les collectiviteacutes publiques en fa-
veur de lrsquoenseignement bilingue en franccedilais et en langue reacutegionale
(article 5 de la proposition de loi) Le second eacutetendait la mecircme
deacuterogation au principe drsquointerdiction de financement des deacute-
penses drsquoinvestissement des collegraveges et lyceacutees par les collectiviteacutes
publiques
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 7 qui preacutevoyait drsquoeacutelargir les
cas dans lesquels existe un droit agrave inscrire son enfant dans une
eacutecole drsquoune autre commune afin qursquoil puisse suivre un enseigne-
ment de langue reacutegionale Inscription qui entraicircnait eacutegalement la
prise en charge du forfait scolaire par la commune de reacutesidence
o La commission a adopteacute avec modifications lrsquoarticle 8 qui a pour
objet de renforcer la place et lrsquousage des langues reacutegionales dans
la vie publique en facilitant la traduction en langue reacutegionale des
inscriptions et signaleacutetiques apposeacutees sur les bacirctiments publics
les voies publiques de circulation et les voies navigables ainsi que
sur les principaux supports de communication institutionnelle
des services publics
o La commission a supprimeacute lrsquoarticle 9 qui avait pour objet la pos-
sibiliteacute pour les services publics drsquoeacutetat civil drsquoutiliser dans les
actes drsquoeacutetat civil qursquoils produisent les signes diacritiques des
langues reacutegionales en usage sur le territoire
o Enfin la commission a eacutegalement supprimeacute lrsquoarticle 10 qui preacute-
voyait un gage pour compenser les charges eacuteventuelles creacuteeacutees par
les dispositions de la proposition de loi
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Crsquoest donc un texte largement laquo eacutepureacute raquo par rapport agrave sa version initiale qui a
eacuteteacute soumis agrave la discussion en seacuteance publique en premiegravere lecture agrave lrsquoAssem-
bleacutee nationale Le porteur de la proposition va naturellement utiliser toutes
les potentialiteacutes offertes par la Constitution pour tenter de revenir par le biais
des amendements agrave son esprit initial
Discussion du texte nordm2654 adopteacute par la commission sur la proposition
de loi de M Paul Molac agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion (2548)
85 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes permettant de revenir sur peu de points
cependant agrave lrsquoobjectif initial de la proposition de loi Ainsi lrsquoamendement ndeg64
deacuteposeacute le 10 feacutevrier 2020 par le deacuteputeacute et rapporteur Paul Molac a permis de
rectifier lrsquoaspect purement deacuteclaratoire de lrsquoarticle premier auquel avait conclu
la commission lrsquoamendement ndeg69 deacuteposeacute le mecircme jour par Paul Molac eacutega-
lement permet lrsquoautorisation dans les actes drsquoeacutetat civil des signes diacritiques
des langues reacutegionales lrsquoamendement ndeg80 toujours deacuteposeacute par Paul Molac
modifie la loi Toubon (article 3 du texte de loi deacutefinitif) Mais agrave ce stade de la
discussion parlementaire le texte eacutetait encore dans une version tregraves eacuteloigneacutee
de sa mouture premiegravere
Adoption le 13 feacutevrier 2020 de la laquo petite loi raquo nordm408 par lAssem-
bleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegio-
nales et agrave leur promotion
Transmission au Seacutenat de la proposition de loi ndeg321 le 14 feacutevrier
2020
o Travaux en commission La commission de la culture de lrsquoeacuteduca-
tion et de la communication a deacutesigneacute Mme Monique de Marco
rapporteure sur la proposition de loi ndeg321 (2019-2020) adopteacutee
par lAssembleacutee nationale relative agrave la protection patrimoniale
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des langues reacutegionales et agrave leur promotion Commenccedilant par deacute-
clarer que laquo la question de la promotion des langues reacutegionales
deacutepasse les clivages politiques raquo Monique de Marco a proposeacute en
commission dadopter le texte conforme tout en avouant que des
dispositifs leacutegislatifs laquo plus ambitieux pourraient mieux assurer la
promotion des langues reacutegionales raquo Au cours des discussions le
regret de lrsquoabsence de la question de lrsquoenseignement a eacuteteacute exprimeacute
regret qui concerne en reacutealiteacute non la proposition de loi initiale
mais le texte de la commission de lrsquoAssembleacutee nationale laquo La pro-
position de loi de Paul Molac est la bienvenue parce quelle rap-
pelle agrave lEacutetat un certain nombre de ses obligations en ce quelle
preacutevoit un cadrage de la loi Toubon et quelle seacutecurise la place
des langues dans lespace public En revanche nous avons tous
eacuteteacute surpris par labsence totale de reacutefeacuterence agrave lEacuteducation natio-
nale Nous avons donc fait des recherches qui ont montreacute que les
deacuteputeacutes de la majoriteacute preacutesidentielle certainement agrave lappel du
ministre de leacuteducation nationale avaient systeacutematiquement sup-
primeacute tous les articles concernant lenseignement Nous nous re-
trouvons donc avec une magnifique proposition de loi sur les
langues reacutegionales qui ne dit pas un mot de lenseignement
comme sil pouvait y avoir une politique linguistique en faveur des
langues reacutegionales qui ne passe pas par lenseignement raquo Et le
seacutenateur Max Brisson drsquoen appeler agrave la reacuteinsertion des disposi-
tions sur lrsquoenseignement laquo Ma chegravere collegravegue vous avez proposeacute
un vote conforme mais jespegravere que nous ferons preuve dimagi-
nation dans lheacutemicycle pour deacuteposer quelques amendements qui
rappelleront au Gouvernement quil ny a pas de politique linguis-
tique qui ne sappuie sur leacuteducation Sinon cest de lenfu-
mage raquo20
20 Comptes-rendus de la commission de la culture de lrsquoeacuteducation et de la communication
seacuteance du 2 deacutecembre 2020 httpwwwsenatfrcompte-rendu-commis-
sions20201130culturehtmltoc5
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La rapporteure confirme que laquo lrsquoamputation raquo est le fait des deacutepu-
teacutes et tout en srsquoavouant prudente pousse indirectement ses col-
legravegues seacutenateurs agrave user du droit drsquoamendement laquo Nous venons
dentendre un veacuteritable plaidoyer en faveur des langues reacutegio-
nales Mecircme si cette proposition de loi ne donne pas entiegravere satis-
faction car elle a eacuteteacute largement amputeacutee par lAssembleacutee natio-
nale je preacutefegravere my tenir dans un premier temps par prudence
Et libres agrave vous de deacuteposer des amendements raquo
Aucun amendement nayant eacuteteacute deacuteposeacute en commission le texte
qui en eacutetait issu ne comportait toujours pas de dispositions rela-
tives agrave lenseignement
o Seacuteance publique Vingt amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes notam-
ment celui (deacuteposeacute agrave lidentique par des seacutenateurs issus de six
groupes diffeacuterents) preacutevoyant drsquoinseacuterer agrave lrsquoarticle L 442-5-1 du
code de lrsquoeacuteducation un alineacutea ainsi reacutedigeacute laquo La participation fi-
nanciegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un
enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle
L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence
et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune
autre commune agrave la condition que la commune de reacutesidence ne
dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegio-
nale raquo
Sans surprise lrsquoavis du Gouvernement exprimeacute par le ministre
Jean-Michel Blanquer fut deacutefavorable regrettant au passage
laquo drsquoecirctre sans cesse obligeacute drsquooccuper la position du jacobin reacutetif
sur la deacutefensive alors mecircme que nous avons une politique de pro-
motion des langues reacutegionales Simplement agrave certains moments
ndash par exemple avec la rupture de lrsquoeacutequilibre entre enseignement
public et enseignement priveacute ou avec la creacuteation drsquoune obligation
suppleacutementaire pour les communes ndash les propositions vont trop
loin et cela conduit agrave me placer face aux geacuteneacuterositeacutes diverses
dans la position deacutesagreacuteable du gardien des principes ou dans
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celle du gardien de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral En effet derriegravere ces deacutebats
se pose la question de lrsquointeacuterecirct geacuteneacuteral et de la posteacuteriteacute de la loi
Carle car vous risquez de creacuteer un deacuteseacutequilibre alors que cette loi
repreacutesentait un point drsquoeacutequilibre raquo21
o Adoption du texte ndeg32 modifieacute par le Seacutenat le 10 deacutecembre 2020
Le Seacutenat a adopteacute trois articles additionnels (2 ter 2 quater et
2 quinquies) qui rejoignent les positions du deacuteputeacute Paul Molac et
reacutetablit lrsquoarticle 3 (modifieacute) de la proposition de loi qui avait eacuteteacute
supprimeacute en premiegravere lecture agrave lrsquoAssembleacutee nationale
Deuxiegraveme lecture
o Rapport sur la proposition de loi modifieacutee par le Seacutenat relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promo-
tion (ndeg3658) ndeg4035 Sur les six articles supprimeacutes agrave lrsquoAssem-
bleacutee lrsquoarticle 3 a eacuteteacute reacutetabli au Seacutenat qui a par ailleurs adopteacute
trois articles additionnels (2 ter 2 quater et 2 quinquies) Lrsquoen-
semble eacutetant conforme agrave lrsquoesprit de la proposition de loi initiale le
rapporteur souhaite que lrsquoAssembleacutee nationale adopte en deu-
xiegraveme lecture un texte identique agrave celui voteacute par le Seacutenat pour
les quatre articles restant en discussion et nrsquoa donc pas preacutesenteacute
drsquoamendements Mais lrsquoarticle 2 quinquies (article 6 du texte deacute-
finitif) ayant eacuteteacute supprimeacute en commission 16 amendements deacute-
poseacutes agrave lrsquoidentique par 115 deacuteputeacutes membres de huit diffeacuterents
groupes parlementaires ont permis de le reacuteintroduire en seacuteance
o Discussion en seacuteance publique le 8 avril 2021 au cours de la-
quelle 262 amendements ont eacuteteacute deacuteposeacutes
o Adoption deacutefinitive le 8 avril 2021 en deuxiegraveme lecture de la
proposition de loi TA nordm591 relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
21 Compte rendu inteacutegral des deacutebats Seacuteance du 10 deacutecembre 2020 httpwwwse-natfrseancess202012s20201210s20201210007htmlsection708
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Saisine du Conseil constitutionnel du 22 avril 2021 par au moins
soixante deacuteputeacutes en application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitu-
tion
Soit un jour avant que nrsquoexpire le deacutelai de saisine du Conseil constitu-
tionnel la promulgation de la loi par le preacutesident de la Reacutepublique devant
intervenir dans les 15 jours de lrsquoadoption deacutefinitive La saisine du Conseil
constitutionnel est un acte non grave mais solennel qui perturbe le temps
leacutegislatif ne serait-ce que pour cette raison elle meacuterite un soin particulier
Soin envers lrsquoinstitution agrave laquelle elle srsquoadresse et agrave qui elle impose des
charges suppleacutementaires soin envers la Constitution qursquoelle entend pro-
teacuteger La lettre de saisine ou du moins la version qui a circuleacute manifeste-
ment reacutedigeacutee agrave la hacircte nrsquoest pas agrave la hauteur du seacuterieux qursquoexige de ma-
niegravere impeacuterieuse cette deacutemarche Une lettre de saisine ne saurait se limiter
agrave invoquer en tregraves peu de lignes la violation de laquo principes constitutionnels raquo
sans que ceux-ci ne soient deacutetailleacutes ni mecircme indiqueacutes Le seul article mis
en cause est lrsquoarticle 6 de la loi qui modifie lrsquoarticle L 442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation
II Discussion de la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la loi
relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Les deacuteputeacutes auteurs de la saisine demandent au Conseil constitutionnel la
censure de lrsquoarticle 6 de la loi
laquo Les sixiegraveme et septiegraveme alineacuteas de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacutedu-
cation sont remplaceacutes par un alineacutea ainsi reacutedigeacute
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacuteta-
blissements priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispen-
sant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L
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312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacuteta-
blissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune
agrave la condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dis-
pensant un enseignement de langue reacutegionale raquo
Une commune dont aucune eacutecole ne propose denseignement de langue reacutegio-
nale devrait donc participer aux frais de scolarisation des enfants domicilieacutes
sur son territoire qui suivent un tel enseignement dans un eacutetablissement situeacute
sur une autre commune Le dispositif concerne les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat drsquoassociation qui sont dans les faits majoritaire-
ment associatifs et laiumlques Cet enseignement peut aussi concerner les eacuteta-
blissements confessionnels mais il faut drsquoembleacutee preacuteciser que comme lrsquoa jugeacute
le Conseil constitutionnel dans son examen de la loi dite laquo Carle raquo le principe
de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute pour le leacutegislateur de preacutevoir la
participation des collectiviteacutes publiques au financement du fonctionnement
des eacutetablissements denseignement priveacute sous contrat dassociation
laquo Consideacuterant quil reacutesulte des regravegles ou principes agrave valeur constitution-
nelle (hellip) que le principe de laiumlciteacute ne fait pas obstacle agrave la possibiliteacute
pour le leacutegislateur de preacutevoir sous reacuteserve de fonder son appreacuteciation
sur des critegraveres objectifs et rationnels la participation des collectiviteacutes
publiques au financement du fonctionnement des eacutetablissements den-
seignement priveacutes sous contrat dassociation selon la nature et limpor-
tance de leur contribution agrave laccomplissement de missions denseigne-
ment raquo (deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 cons 6)
Lrsquoinstauration du laquo forfait scolaire communal raquo ne poursuit pas un objectif de
sanction financiegravere des communes deacutemunies doffre en langue reacutegionale mais
celui de les inciter agrave en proposer Drsquoailleurs lrsquoarticle premier de la loi deacutefeacutereacutee
souligne que laquo LrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales concourent agrave lrsquoenseigne-
ment agrave la diffusion et agrave la promotion de ces langues raquo Comme preacuteciseacute plus
loin les maires sont dispenseacutes du paiement drsquoun tel forfait degraves lors qursquoun
enseignement drsquoune langue reacutegionale y compris au titre drsquoune simple initia-
tion est proposeacute dans leur commune
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Il faut souligner que les articles relatifs agrave lrsquoenseignement ont eacuteteacute introduits par
les seacutenateurs Plus exactement ces derniers ont reacuteintroduit la disposition qui
autorise la conclusion de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions pour eacutetendre
lrsquooffre drsquoenseignement en langue reacutegionale aux eacutetablissements publics dans le
cadre horaire normal sous des formes speacutecifiques et inseacutereacute trois articles un
premier autorise lrsquoenseignement dit laquo immersif raquo en langue reacutegionale un deu-
xiegraveme le forfait scolaire communal dont il est ici question un troisiegraveme est
relatif agrave lenseignement des langues reacutegionales agrave Mayotte territoire qui du fait
de sa deacutepartementalisation reacutecente ne pouvait jusqualors pas beacuteneacuteficier des
possibiliteacutes offertes aux autres deacutepartements concernant lenseignement de
ces langues
Trois remarques doivent ecirctre faites sur lrsquoinsertion relative agrave lrsquoenseignement des
langues reacutegionales lors des horaires normaux Premiegraverement cette disposition
existe deacutejagrave pour la Collectiviteacute de Corse deuxiegravemement cet enseignement
doit se faire moyennant un accord entre lrsquoEacutetat et les reacutegions (laquo dans le cadre
de conventions entre lrsquoEacutetat et les reacutegions la collectiviteacute de Corse la Collectiviteacute
europeacuteenne drsquoAlsace ou les collectiviteacutes territoriales reacutegies par lrsquoarticle 73 de
la Constitution raquo) troisiegravemement il srsquoagit drsquoune option facultative qursquoin fine
les familles deacutecident ou non de prendre
En reacutesumeacute et conclusion la disposition de lrsquoarticle 3
1 Existe deacutejagrave pour une collectiviteacute en lrsquooccurrence la collectiviteacute de Corse
2 Est strictement encadreacutee (existence drsquoun accord entre lrsquoEacutetat et les reacute-
gions)
3 Est conforme agrave la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le ca-
ractegravere facultatif de lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale Dans sa deacute-
cision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi relative agrave la Corse le
Conseil constitutionnel a fixeacute le cadre de lrsquoenseignement drsquoune langue
reacutegionale dans le cadre de lrsquohoraire normal en consideacuterant que laquo si lrsquoen-
seignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquohoraire nor-
mal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir pour
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autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les ensei-
gnants qursquoil ne saurait non plus avoir pour effet de soustraire les eacutelegraveves
aux droits et obligations applicables agrave lrsquoensemble des usagers des eacuteta-
blissements qui assurent le service public de lrsquoenseignement ou sont
associeacutes agrave celui‑ci Consideacuterant qursquoil reacutesulte de ce qui preacutecegravede que sous
reacuteserve que lrsquoenseignement de la langue corse revecircte tant dans son prin-
cipe que dans ses modaliteacutes de mise en œuvre un caractegravere facultatif
[cette disposition] nrsquoest contraire ni au principe drsquoeacutegaliteacute ni agrave aucun
autre principe ou regravegle de valeur constitutionnelle raquo (cons 24 et 25)
La loi du 8 avril 2021 ne propose pas autre chose et srsquoinscrit en tous
points sur cette ligne deacutejagrave jugeacutee par le Conseil constitutionnel
Lrsquoarticle 6 srsquoinsegravere de maniegravere logique et coheacuterente dans lrsquoensemble des articles
de la loi relative agrave lrsquoenseignement Avant drsquoen examiner dans les deacutetails la
conformiteacute agrave la Constitution il faut souligner que le Seacutenat a deacutejagrave voteacute le prin-
cipe de ce forfait scolaire communal agrave deux reprises
1 Il lrsquoa drsquoabord inseacutereacute dans le projet de loi pour une eacutecole de la confiance
en premiegravere lecture Crsquoest la commission mixte paritaire qui a ajouteacute les
mots laquo contribution volontaire raquo ocirctant au forfait son caractegravere obliga-
toire22
2 Il a reacuteaffirmeacute sa position lors de lrsquoexamen de la proposition de loi ici
discuteacutee supprimant les mots laquo contribution volontaire raquo de la loi en vi-
gueur
Agrave cet argument deacutemocratique respectueux du bicameacuteralisme et rappelant que
le Seacutenat laquo assure la repreacutesentation des collectiviteacutes territoriales de la Reacutepu-
22 Loi ndeg2019-791 du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance JORF ndeg0174 du 28 juillet
2019
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Primo cet article est en coheacuterence avec la leacutegislation existante en matiegravere drsquoen-
seignement des langues reacutegionales agrave lrsquoeacutecole confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute
juridique (A) Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contrevien-
nent pas au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des langues
reacutegionales affirmeacute par le Conseil constitutionnel (B) Tertio la loi ne porte pas
atteinte au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur une commune une nouvelle
charge (C) Quarto elle ne viole pas non plus en conseacutequence le principe de
libre administration des collectiviteacutes territoriales (D)
A Forfait scolaire communal et respect de lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique
Cette exigence bien que non explicitement qualifieacutee de principe consti-
tutionnel par le Conseil constitutionnel se rattache notamment agrave la notion de
laquo garantie des droits raquo inscrite agrave lrsquoarticle 16 de la Deacuteclaration de 1789 laquo Toute
socieacuteteacute dans laquelle la garantie des droits nrsquoest pas assureacutee ni la seacuteparation
des pouvoirs deacutetermineacutee nrsquoa point de constitution raquo Deacutecoulant de lrsquoarticle 34
de la Constitution la clarteacute de la loi est un eacuteleacutement essentiel de la seacutecuriteacute
juridique agrave laquelle la jurisprudence du Conseil constitutionnel a offert corps
et protection Aussi le principe de laccessibiliteacute et de lintelligibiliteacute de la loi a-
t-il eacuteteacute eacuterigeacute en objectif de valeur constitutionnelle (deacutecision ndeg99-421 DC du
16 deacutecembre 1999)
Mecircme si les principes de clarteacute drsquoaccessibiliteacute et drsquointelligibiliteacute de la loi per-
mettent avant tout drsquoimposer au leacutegislateur laquo drsquoadopter des dispositions suffi-
samment preacutecises et des formules non eacutequivoques afin de preacutemunir les sujets
de droit contre une interpreacutetation contraire agrave la Constitution ou contre le
risque drsquoarbitraire raquo (deacutecision ndeg2004-500 DC du 29 juillet 2004 cons 13) ils
concourent aussi agrave offrir aux citoyens la seacutecuriteacute juridique neacutee drsquoune cons-
truction drsquoensemble coheacuterente et sans rupture Laquelle se base depuis 2008
sur une disposition claire et sans ambiguiumlteacute de la Constitution laquo Les langues
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reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo (75-1) Elle est une in-
vitation aux repreacutesentants de leacutegifeacuterer pour proteacuteger et promouvoir lesdites
langues et la loi deacutefeacutereacutee srsquoinscrit dans la continuiteacute de ce qursquoils ont fait depuis
2008 notamment La coheacuterence est lrsquoune des artegraveres essentielles de lrsquoexigence
de seacutecuriteacute juridique qui impregravegne la jurisprudence du Conseil constitution-
nelle comme celle du Conseil drsquoEacutetat et de la Cour de cassation Sans ecirctre ex-
plicitement eacutenonceacutee par le Conseil constitutionnel lrsquoexigence de seacutecuriteacute juri-
dique est laquo efficiente raquo23 et est au cœur des preacuteoccupations des juges24 comme
de la doctrine Les Cahiers du Conseil constitutionnel lui consacrant un dossier
speacutecial dans sa livraison drsquooctobre 202025
La loi soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel reacutepond agrave lrsquoexigence de
seacutecuriteacute juridique en eacutetant le prolongement de lrsquoœuvre anteacuterieure du leacutegisla-
teur pour commencer la loi du 8 juillet 2013 drsquoorientation et de programma-
tion pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique qui reconnaicirct lrsquoenseigne-
ment bilingue franccedilais langue reacutegionale Dans lrsquoannexe de la loi figurent cinq
mentions compleacutementaires notamment celle concernant la possibiliteacute de
srsquoinscrire dans une eacutecole publique drsquoune autre commune lorsque la commune
de reacutesidence ne propose pas drsquoenseignement de langue reacutegionale Disposition
deacuteclarative qui a trouveacute une application concregravete dans la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) la parti-
cipation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes dans lrsquoenseigne-
ment public doit deacutesormais faire lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune drsquoac-
cueil et la commune de reacutesidence26
La loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle a
ajouteacute un nouveau motif de discrimination baseacute sur laquo la maitrise drsquoune autre
23 Bertrand Mathieu laquo La seacutecuriteacute juridique un principe clandestin mais efficient raquo Droit constitutionnel Meacutelanges Patrice Geacutelard LGDJ 1999 pp 301-305 24 En teacutemoigne notamment le fait que le Conseil drsquoEacutetat lui ait consacreacute deux rapports annuels celui de 1991 De la seacutecuriteacute juridique et celui de 2006 Seacutecuriteacute juridique et complexiteacute du droit 25 Dossier La seacutecuriteacute juridique Titre VII Les Cahiers du Conseil constitutionnel ndeg5 octobre
2020 26 Lrsquoarticle 104 de la loi NOTRe consacre par ailleurs la compeacutetence partageacutee des collectiviteacutes
locales dans la promotion des langues reacutegionales tout en donnant une place preacutepondeacuterante
agrave la reacutegion telle que preacutevue agrave lrsquoarticle 1er de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de lrsquoaction publique territoriale et drsquoaffirmation des meacutetropoles (MAPTAM)
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langue que le franccedilais raquo qui concerne eacutegalement les langues reacutegionales Celle
du 28 feacutevrier 2017 de programmation relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend
inopeacuterant le deacutecret du 2 Thermidor an II sur lequel se basait notamment le
ministegravere de la justice pour interdire les livrets de famille bilingues Enfin
lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance vient eacutetendre
aux eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives une laquo contribution volontaire raquo
des communes pour la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoins-
crivant dans une eacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionale en
dehors de sa commune de reacutesidence
La loi du 8 avril 2021 soumise agrave lrsquoexamen du Conseil constitutionnel nrsquoest que
le prolongement et le compleacutement de lrsquoarticle L 212-8 du Code de lrsquoeacuteducation
qui preacutecise les conditions dans lesquelles pour lrsquoenseignement public une
commune doit contribuer au financement des deacutepenses scolaires drsquoun enfant
reacutesidant sur son territoire et scolariseacute dans une autre commune Elle vient le
compleacuteter de maniegravere parallegravele eacutetendant ce qui existe deacutejagrave pour lrsquoeacutecole pu-
blique agrave lrsquoeacutecole priveacutee sous contrat Confortant lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
elle ne viole par ailleurs aucun article de la Constitution et ne contredit pas
la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le caractegravere facultatif de lrsquoen-
seignement des langues reacutegionales
B Forfait scolaire communal et respect de la jurisprudence du Conseil
constitutionnel sur la langue franccedilaise
Secundo cet article et la loi dans son ensemble ne contreviennent pas
agrave lrsquoarticle 2 alineacutea premier de la Constitution (laquo La langue de la Reacutepublique est
le Franccedilais raquo) et au principe du caractegravere facultatif de lrsquoenseignement des
langues reacutegionales qui en deacutecoule affirmeacute par le Conseil constitutionnel La
langue de la Reacutepublique est et demeure le Franccedilais et agrave aucun moment la
loi du 8 avril 2021 nrsquoentend y porter atteinte Lrsquoapprentissage des langues reacute-
gionales se fait agrave ses cocircteacutes mais dans une mesure permettant leffectiviteacute pour
les enfants agrave acceacuteder agrave lenseignement des langues reacutegionales laquo patrimoine de
la France raquo selon les termes de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Apprentissage
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qui pour certains enfants est lrsquoun des eacuteleacutements de leur laquo deacuteveloppement raquo au
sens de lrsquoalineacutea 10 du Preacuteambule de la Constitution du 27 octobre 1946 (laquo La
Nation assure agrave lrsquoindividu et agrave la familles les conditions neacutecessaires agrave leur
deacuteveloppement raquo)
Ce que creacutee lrsquoarticle 6 agrave travers le forfait ce nrsquoest pas lrsquoenseignement obligatoire
de la langue reacutegionale mais la possibiliteacute de pouvoir beacuteneacuteficier de cet enseigne-
ment (sans prescription de deacutelai) qui demeure facultatif Le rapporteur Paul
Molac le reacuteaffirme au cours de la seacuteance publique du 8 avril 2021 laquo Je ne
suis pas favorable au caractegravere obligatoire de cet enseignement mais je consi-
degravere que tout eacutelegraveve qui souhaite le suivre doit pouvoir le faire raquo27
Ce faisant la loi sans contrevenir agrave la Constitution offre un contenu agrave son
article 75-1 La jurisprudence du Conseil constitutionnel en vertu de laquelle
lrsquoenseignement des langues reacutegionales nrsquoa qursquoun caractegravere facultatif nrsquoest ici
absolument pas remise en cause Dans sa deacutecision ndeg99-412 DC du 15 juin
1999 il a souligneacute que le principe drsquouniciteacute du peuple franccedilais et lrsquoindivisibiliteacute
de la Reacutepublique assurant lrsquoeacutegaliteacute des citoyens devant la loi srsquoopposaient agrave laquo
ce que soient reconnus des droits collectifs agrave quelque groupe que ce soit deacutefini
par une communauteacute drsquoorigine de culture de langue ou de croyance raquo En
outre la langue de la Reacutepublique eacutetant le franccedilais il ne peut ecirctre reconnu un
laquo droit agrave pratiquer une langue autre que le franccedilais non seulement dans la vie
priveacutee mais eacutegalement dans la vie publique agrave laquelle la Charte rattache
la justice et les autoriteacutes administratives et services publics raquo
Deux remarques srsquoimposent drsquoembleacutee drsquoune part cette jurisprudence est an-
teacuterieure agrave lrsquoinsertion en 2008 par le pouvoir constituant de lrsquoarticle 75-1 dis-
posant que laquo les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France
raquo Cette remarque drsquoordre contextuel vient srsquoajouter agrave la suivante drsquoautre part
27 Assembleacutee nationale XVe leacutegislature Session ordinaire de 2020-2021 Seacuteance du jeudi 08
avril 2021 httpswwwassemblee-nationalefrdyn15comptes-rendusseancesession-
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la loi du 8 avril 2021 nrsquoentend pas confier agrave lrsquoenseignement des langues reacutegio-
nales un caractegravere obligatoire En cela elle respecte la jurisprudence du Con-
seil constitutionnel preacuteciteacutee (deacutecision ndeg2001‑454 DC du 17 janvier 2002 Loi
relative agrave la Corse)
laquo Si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre de lrsquoho-
raire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires il ne saurait revecirctir
pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les en-
seignants (hellip) raquo (cons 24)
Lrsquoenseignement drsquoune langue minoritaire ne devient donc en aucun cas obli-
gatoire Ce qui doit faire laquo lrsquoobjet drsquoun accord raquo ce sont les conditions permet-
tant effectivement agrave des enfants drsquoacceacuteder agrave un enseignement facultatif qui
contribue agrave leur deacuteveloppement proteacutegeacute par ailleurs par lrsquoalineacutea 10 du Preacuteam-
bule de 1946 preacuteciteacute Ni la Constitution ni son interpreacutetation par le Conseil
constitutionnel ne srsquoopposent agrave ce qursquoune commune de reacutesidence participe y
compris de maniegravere obligatoire au financement de la scolarisation dans une
autre commune des enfants souhaitant suivre un tel enseignement Crsquoest don-
ner aux enfants et aux parents de maniegravere effective et efficiente la possibiliteacute
concregravete de beacuteneacuteficier drsquoun enseignement drsquoune langue reacutegionale composante
de leur laquo deacuteveloppement raquo laquelle appartient en vertu de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution au laquo patrimoine de la France raquo
C Forfait scolaire communal et respect du principe drsquoeacutegaliteacute
Tertio la loi ne contrevient pas au principe drsquoeacutegaliteacute en faisant peser sur
une commune une nouvelle charge
Conformeacutement agrave une jurisprudence du Conseil constitutionnel bien eacutetablie le
principe deacutegaliteacute de lrsquoarticle 6 de la Deacuteclaration des droits de lhomme et du
citoyen de 1789 laquo ne soppose ni agrave ce que le leacutegislateur regravegle de faccedilon diffeacuterente
des situations diffeacuterentes ni agrave ce quil deacuteroge agrave leacutegaliteacute pour des raisons
dinteacuterecirct geacuteneacuteral pourvu que dans lun et lautre cas la diffeacuterence de traite-
ment qui en reacutesulte soit en rapport direct avec lobjet de la loi qui leacutetablit raquo
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(pour lrsquoune des reacutecentes application au domaine de lrsquoenseignement dont il sera
ici question deacutecision ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de
la confiance)
En ce qui concerne preacuteciseacutement le caractegravere obligatoire drsquoune nouvelle charge
pour une collectiviteacute celui-ci nrsquoa pas eacuteteacute censureacute par le Conseil constitutionnel
agrave propos de lrsquoexamen de la loi sur lrsquoavenir de lrsquoeacutecole preacuteciteacutee (deacutecision ndeg 2019-
787 DC du 25 juillet 2019 Loi pour une eacutecole de la confiance) Lrsquoarticle 17 de
la loi alors deacutefeacutereacute au Conseil constitutionnel preacutevoyait dans son premier ali-
neacutea
laquo LrsquoEacutetat attribue de maniegravere peacuterenne agrave chaque commune les ressources
correspondant agrave lrsquoaugmentation des deacutepenses obligatoires qursquoelle a
prises en charge en application des articles L 212-4 L 212-5 et L 442-
5 du code de lrsquoeacuteducation au titre de lrsquoanneacutee scolaire 2019-2020 par rap-
port agrave lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 dans la limite de la part drsquoaugmenta-
tion reacutesultant directement de lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoins-
truction obligatoire raquo
Les deacutepenses qui font lrsquoobjet de lrsquoaccompagnement financier en cause sont
celles qui beacuteneacuteficient aux eacutecoles publiques et aux eacutetablissements drsquoenseigne-
ment priveacutes ayant passeacute un contrat drsquoassociation avec lrsquoEacutetat
Lrsquoabaissement agrave trois ans du deacutebut de lrsquoinstruction obligatoire a donc fait pe-
ser des charges nouvelles pour les communes et leur a mecircme imposeacute de par-
ticiper au financement des eacutecoles maternelles priveacutees sous contrat y compris
lorsqursquoelles nrsquoont pas approuveacute ce contrat La diffeacuterence de traitement entre
les communes est reacuteelle selon qursquoelles financcedilaient ou non des classes mater-
nelles avant lrsquoabaissement agrave trois ans de lrsquoacircge de lrsquoinstruction obligatoire mais
nrsquoentraicircne pas pour autant une rupture drsquoeacutegaliteacute
Ainsi lrsquoa jugeacute le Conseil constitutionnel dans la deacutecision preacuteciteacutee drsquoune part
il a estimeacute que cette diffeacuterence de traitement reposait sur une diffeacuterence de
situation
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laquo Les communes qui au cours de lrsquoanneacutee scolaire 2018-2019 avaient
institueacute des classes maternelles ou eacutecoles maternelles publiques ou ap-
prouveacute des contrats drsquoassociation drsquoeacutecoles maternelles priveacutees ont con-
tribueacute agrave ce titre agrave leur financement dans les conditions preacutevues par le
code de lrsquoeacuteducation Ces communes ne sont ainsi pas placeacutees dans une
situation identique agrave celle des autres communes qui nrsquoexerccedilaient pas
deacutejagrave les mecircmes compeacutetences et ne supportaient donc pas les charges
correspondantes raquo (cons 7)
Drsquoautre part le Conseil constitutionnel a jugeacute que la diffeacuterence de traitement
contesteacutee eacutetait en rapport direct avec lrsquoobjet de la loi qui lrsquoeacutetablit
laquo Qui consiste en application de la seconde phrase du quatriegraveme alineacutea
de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution agrave accompagner de ressources finan-
ciegraveres une extension de compeacutetence ayant pour conseacutequence drsquoaugmen-
ter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales raquo (cons 8)
Agrave lrsquoargument opposeacute agrave lrsquoarticle 6 de la loi deacutefeacutereacutee selon lequel ces dispositions
creacuteeraient une diffeacuterence de traitement entre les communes contraire au prin-
cipe deacutegaliteacute devant la loi le Conseil constitutionnel en vertu de sa jurispru-
dence Loi pour une eacutecole de la confiance devrait logiquement apporter la mecircme
reacuteponse Le leacutegislateur entend avec cette loi du 8 avril 2021 donner de ma-
niegravere geacuteneacuterale effectiviteacute agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution agrave travers en par-
ticulier un outil permettant de mettre en œuvre les dispositions de lrsquoarticle 72-
2 de la Constitution relatives aux extensions de compeacutetences imposeacutees aux
collectiviteacutes territoriales Dispositions qui par ailleurs nrsquoobligent pas le leacutegi-
slateur agrave preacutevoir un accompagnement financier de lrsquoensemble des communes
En lien avec cet argument il en reacutesulte que lrsquoarticle 6 ne porte pas atteinte
par ailleurs au principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
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D Forfait scolaire communal et respect du principe de libre administra-
tion des collectiviteacutes territoriales
Quarto le forfait scolaire communal nrsquoest ni contraire agrave la lettre de lrsquoar-
ticle 72 de la Constitution ni agrave son interpreacutetation par le Conseil constitution-
nel
En vertu de lrsquoarticle 72 alineacutea 3 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales
srsquoadministrent librement dans les conditions preacutevues par la loi Correacutelative-
ment lrsquoarticle 34 de la Constitution donne agrave la loi compeacutetence pour deacuteterminer
laquo les principes fondamentaux (hellip) de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales de leurs compeacutetences et de leurs ressources raquo Cette libre admi-
nistration doit en outre se concilier avec drsquoautres principes constitutionnels
tels que le principe drsquoeacutegaliteacute et la liberteacute de lrsquoenseignement Crsquoest ainsi que le
Conseil constitutionnel a jugeacute que laquo si le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacute-
gislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce que les conditions essentielles drsquoap-
plication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de lrsquoenseignement deacutepen-
dent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre
les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (voir notamment la deacutecisions ndeg84-
185 DC du 18 janvier 1985 cons 18)
La libre administration est bien un principe constitutionnel mais crsquoest au leacute-
gislateur qursquoil revient sous le controcircle du Conseil constitutionnel drsquoen preacuteci-
ser le contenu Lrsquointervention du leacutegislateur est neacutecessaire pour la deacutefinition
des regravegles de fonctionnement des collectiviteacutes territoriales la deacutefinition des
compeacutetences qui leur sont deacutevolues (transfert creacuteation extension des compeacute-
tences) et en matiegravere de ressources la fixation du taux des impocircts deacutecideacutes par
les Assembleacutees deacutelibeacuteratives locales
Il ressort de la jurisprudence administrative et constitutionnelle que seule la
loi peut creacuteer une obligationsujeacutetion nouvelle agrave la charge drsquoune collectiviteacute
territoriale Le principe de libre administration ne peut donc pas exister en-
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dehors de lrsquointervention du leacutegislateur lequel nrsquoa pas pour autant toute lati-
tude En drsquoautres termes le principe de libre administration est deacutefini par la
loi mais est aussi proteacutegeacute contre elle qui ne peut notamment pas porter at-
teinte au-delagrave drsquoun certain seuil aux ressources des collectiviteacutes territoriales
restreindre la liberteacute contractuelle intervenir dans les deacutecisions des collecti-
viteacutes territoriales relatives agrave leurs agents ou le fonctionnement de leurs insti-
tutions
En eacutetendant la prise en charge du forfait scolaire communal la loi deacutefeacutereacutee creacutee
une charge suppleacutementaire pour certaines communes
Aux termes du quatriegraveme alineacutea de larticle 72-2 de la Constitution laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales saccom-
pagne de lattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consa-
creacutees agrave leur exercice Toute creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour
conseacutequence daugmenter les deacutepenses des collectiviteacutes territoriales est ac-
compagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Dans le cas ougrave le leacutegislateur
octroie une nouvelle compeacutetence aux collectiviteacutes territoriales (articles 72-2 de
la Constitution et L 1614-1-1 du code geacuteneacuteral des collectiviteacutes territoriales)
il accompagne cette creacuteation de ressources correspondantes uniquement si
lexercice de cette compeacutetence est rendu obligatoire Ainsi en a jugeacute le Conseil
constitutionnel en ajoutant que le leacutegislateur disposait dun pouvoir dappreacute-
ciation en la matiegravere la compensation devant ecirctre naturellement suffisante
pour ne pas constituer une entrave au principe de libre administration
laquo Que ces dispositions ne visent en ce qui concerne les creacuteations et ex-
tensions de compeacutetences que celles qui preacutesentent un caractegravere obliga-
toire que dans cette hypothegravese il nest fait obligation au leacutegislateur
que daccompagner ces creacuteations ou extensions de compeacutetences de res-
sources dont il lui appartient dappreacutecier le niveau sans toutefois deacutena-
turer le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales raquo
(deacutecision ndeg2008-569 DC du 7 aoucirct 2008 Loi instituant un droit daccueil
pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires pendant le temps
scolaire cons 13)
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Le Conseil constitutionnel a jugeacute qursquoen conseacutequence et en lrsquoespegravece le leacutegisla-
teur avait suffisamment deacutetermineacute le niveau des ressources accompagnant la
creacuteation de ce service daccueil pour les eacutelegraveves des eacutecoles maternelles et eacuteleacute-
mentaires pendant le temps scolaire sans meacuteconnaicirctre le quatriegraveme alineacutea de
larticle 72-2 de la Constitution
Lextension de compeacutetences est soumise a fortiori au mecircme reacutegime que la
creacuteation de compeacutetences Elle consiste en leacutelargissement du peacuterimegravetre ou en
la modification de la nature ou de lobjet dune compeacutetence dont lexercice est
deacutejagrave assureacute par les collectiviteacutes territoriales ayant pour conseacutequence de creacuteer
une charge suppleacutementaire pour celles-ci Le droit agrave une compensation finan-
ciegravere nest garanti que si lextension preacutesente un caractegravere obligatoire et le
leacutegislateur en deacutetermine le niveau et les modaliteacutes agrave condition quils nentra-
vent pas la libre administration des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece le principe de libre administration nrsquoest donc pas violeacute par le ca-
ractegravere contraignant que confegravererait la loi deacutefeacutereacutee au forfait scolaire communal
de lrsquoarticle L 442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation Drsquoune part le Conseil constitu-
tionnel a deacutejagrave comme souligneacute plus haut accepteacute le principe du caractegravere
obligatoire drsquoune nouvelle charge qui nrsquoentraine par ailleurs mecircme pas
lrsquoautomaticiteacute drsquoun accompagnement financier des communes Drsquoautre part
lrsquoargument de proportionnaliteacute est ici deacuteterminant agrave ceux qui avancent un
risque drsquoassegravechement financier de certaines communes rurales contraintes
de prendre en charge la scolarisation dun eacutelegraveve dans une autre commune
mieux doteacutee qui propose lenseignement de la langue reacutegionale (ce qui selon
le deacuteputeacute Molac ne concernerait que 002 des enfants en France) il faut
reacutepondre en mettant en avant lrsquoobjectif incitatif et non sanctionnateur de la
loi Il suffira auxdites communes de proposer un enseignement de langue reacute-
gionale qui ne pourrait repreacutesenter qursquoune heure drsquoinitiation par semaine par
exemple
Une heure drsquoinitiation par semaine pour eacuteviter de payer le forfait scolaire com-
munal lequel ne meacuteconnait pas par ailleurs lrsquoexigence de seacutecuriteacute juridique
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les principes constitutionnels drsquoeacutegaliteacute drsquouniciteacute de la langue franccedilaise de la
libre administration des collectiviteacutes territoriales et permet drsquoassurer le deacuteve-
loppement de lrsquoenfant crsquoest bien peu de choses pour censurer une loi souve-
raine adopteacutee qui plus est agrave une eacutecrasante majoriteacute
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De Raphaeumll SchellenbergerA GreffeObjet Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues ReacutegionalesDate mardi 4 mai 2021 101012Piegraveces jointes Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionalespdf
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loirelative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus desoixante deacuteputeacutes ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texteen application de larticle 61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarerlrsquoinconstitutionnaliteacute de son article 6 Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons ennotre qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre lapleine constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sensNous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notreconsideacuteration respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire
- Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
- Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche
- Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret
- Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne
- Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte
- Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor
- David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion
- Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme
- Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne
- Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
1
M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2
Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
3
On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
- Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin
- Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie
- Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin
- Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne
- Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
Ce message ainsi que les piegraveces jointes sont eacutetablis sous la seule responsabiliteacute de lexpeacutediteur agrave lintention exclusive de ses destinataires ils peuvent contenir des informations confidentielles Toute publication utilisation ou diffusion doit ecirctre autoriseacutee preacutealablement Ce message a fait lobjet dun traitement anti-virusIl est rappeleacute que tout message eacutelectronique est susceptible dalteacuteration au cours de son acheminement sur Internet ________________________________________________________________
Vous pouvez consulter le site de lAssembleacutee nationale agrave ladresse suivante httpwwwassemblee-nationalefr
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
1
M Laurent FABIUS Preacutesident du Conseil Constitutionnel
2 rue Montpensier 75001 PARIS
Paris le 4 mai 2021
Monsieur le Preacutesident
Le 8 avril dernier lrsquoAssembleacutee nationale adoptait deacutefinitivement la proposition de loi relative agrave
la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur promotion Plus de soixante deacuteputeacutes
ont souhaiteacute saisir le Conseil Constitutionnel le 22 avril sur ce texte en application de larticle
61 alineacutea 2 de la Constitution vous demandant de deacuteclarer lrsquoinconstitutionnaliteacute de son
article 6
Attacheacutes agrave la Constitution de la Vegraveme Reacutepublique et agrave son respect nous souhaitons en notre
qualiteacute de leacutegislateurs ayant voteacute en faveur de cette proposition de loi deacutefendre la pleine
constitutionnaliteacute de ce texte fidegravele aux eacutequilibres essentiels de notre socieacuteteacute
Aussi nous avons lrsquohonneur de vous adresser en attache un meacutemoire en ce sens
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident en lrsquoassurance de notre consideacuteration
respectueuse
Signataires
- Raphaeumll SCHELLENBERGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Anne-Laure BLIN Deacuteputeacutee de Maine-et-Loire - Jean-Luc BOURGEAUX Deacuteputeacute drsquoIlle-et-Vilaine - Marine BRENIER Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes - Fabrice BRUN Deacuteputeacute de lrsquoArdegraveche - Jacques CATTIN Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Claude DE GANAY Deacuteputeacute du Loiret - Eacuteric DIARD Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Julien DIVE Deacuteputeacute de lrsquoAisne - Yves HEMEDINGER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Patrick HETZEL Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Mansour KAMARDINE Deacuteputeacute de Mayotte - Marc LE FUR Deacuteputeacute des Cocirctes-drsquoArmor - David LORION Deacuteputeacute de la Reacuteunion - Emmanuel MAQUET Deacuteputeacute de la Somme - Philippe MEYER Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Jean-Franccedilois PARIGI Deacuteputeacute de Seine-et-Marne - Julien RAVIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Jean-Luc REITZER Deacuteputeacute du Haut-Rhin - Vincent ROLLAND Deacuteputeacute de la Savoie - Freacutedeacuteric REISS Deacuteputeacute du Bas-Rhin - Guy TEISSIER Deacuteputeacute des Bouches-du-Rhocircne - Laurence TRASTOUR-ISNART Deacuteputeacutee des Alpes-Maritimes
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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Proposition de loi relative a la protection patrimoniale des langues reacutegionales
et a leur promotion
Deacutefense de la constitutionnaliteacute de son article 6
Monsieur le Preacutesident
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
Vous avez eacuteteacute saisis par plus de soixante deacuteputeacutes sur la constitutionnaliteacute de lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement de langue reacutegionale nrsquoest en rien modifieacute par la
disposition contesteacutee Cette derniegravere ne concerne que la question de la participation financiegravere
des communes de reacutesidence des enfants scolariseacutes dans des eacutetablissements priveacutes sous
contrat et non le caractegravere obligatoire de cet enseignement
Au terme de la disposition adopteacutee par la loi contesteacutee qui creacuteeacutee agrave lrsquoarticle L442-5-1 du code
de lrsquoeacuteducation un nouvel alineacutea 6 se substituant aux alineacuteas 6 et 7 laquoLa participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous
contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue reacutegionale au sens du 2deg de
lrsquoarticle L312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de reacutesidence et lrsquoeacutetablissement
drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la condition que la commune de
reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de langue reacutegionaleraquo
Cet alineacutea est suivi dans lrsquoarticle L442-5-1 par un alineacutea non modifieacute aux termes duquel
laquo A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat dans le deacutepartement reacuteunit le maire de la
commune de reacutesidence et le responsable de leacutetablissement concerneacute afin de permettre la
reacutesolution du diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation
des enfants concerneacutes raquo
Cette nouvelle reacutedaction se borne agrave clarifier la question de la participation de la commune de
reacutesidence Elle est agrave mettre en relation avec ce qui est preacutevu par lrsquoarticle L 218 al 5 du code
de lrsquoeacuteducation pour les cas ougrave un enfant fait lrsquoobjet drsquoun enseignement de langue reacutegionale
dans une eacutecole publique situeacutee hors de sa commune de reacutesidence laquo le maire de la commune
de reacutesidence dont les eacutecoles ne dispensent pas un enseignement de langue reacutegionale ne peut
sopposer y compris lorsque la capaciteacute daccueil de ces eacutecoles permet de scolariser les
enfants concerneacutes agrave la scolarisation denfants dans une eacutecole dune autre commune
proposant un enseignement de langue reacutegionale et disposant de places disponibles La
participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes fait lobjet dun accord entre la
commune daccueil et la commune de reacutesidence A deacutefaut daccord le repreacutesentant de lEacutetat
dans le deacutepartement reacuteunit les maires de ces communes afin de permettre la reacutesolution du
diffeacuterend en matiegravere de participation financiegravere dans linteacuterecirct de la scolarisation des enfants
concerneacutes raquo
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
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On constate que la modification contesteacutee se borne agrave instituer la mecircme proceacutedure dans le
cas drsquoune classe freacutequenteacutee hors de sa commune par un enfant deacutesireux de suivre un
enseignement de langue reacutegionale qursquoil srsquoagisse drsquoune classe publique ou drsquoune classe priveacutee
sous contrat Cette solution est parfaitement leacutegitime car il nrsquoy a pas de raison que les
obligations des communes soient diffeacuterentes dans cette hypothegravese pour des classes publiques
et pour des classes priveacutees sous contrat Ceci est conforme agrave lrsquoarticle L 442-5 laquo Les deacutepenses
de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mecircmes conditions
que celles des classes correspondantes de lenseignement public raquo
Aucun principe constitutionnel nrsquoest en cause En particulier le meacutecanisme institueacute pouvait
ecirctre deacutecideacute par le leacutegislateur sans qursquoil soit porteacute une atteinte inconstitutionnelle au principe de
la libre administration des collectiviteacutes territoriales Si le leacutegislateur peut placer des deacutepenses
agrave la charge des communes en vue de lrsquoorganisation de lrsquoinstruction cette faculteacute existe aussi
bien dans le cas de structures drsquoinstruction publiques que de structures drsquoinstruction priveacutee
sous contrat
Nous vous prions de croire Monsieur le Preacutesident Mesdames et Messieurs les membres du
Conseil Constitutionnel en lrsquoassurance de notre consideacuteration respectueuse
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 4 mai 2021
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Association ESKOLIMChez Seaska Route de la Pouponniegravere64250 CAMBO LES BAINSeskolim6gmailcomRepreacutesenteacutee par son President Jean Seacutebastien HAYDN11 chemin de Saint Jean66240 SAINT ESTEVE
CONTRIBUTION EXTERIEURE
Observations sur la conformiteacute agrave la Constitution de laproposition de loi relative agrave la protection patrimoniale
des langues reacutegionales et agrave leur promotion
Monsieur le Preacutesident du Conseil constitutionnel Mesdames et Messieurs les
membres du Conseil constitutionnel lrsquoassociation Eskolim souhaite porter agrave votre attention
les observations suivantes tendant agrave deacutemontrer la conformiteacute agrave la Constitution de la
proposition de loi relative agrave la protection patrimoniale des langues reacutegionales et agrave leur
promotion
Parmi lrsquoensemble des dispositions du texte deacutefeacutereacute la plupart nrsquoont donneacute lieu agrave aucun
deacutebat sur leur conformiteacute agrave la Constitution qui est de toute eacutevidence acquise par exemple au
sujet des traductions dont la constitutionnaliteacute a deacutejagrave indirectement eacuteteacute reconnue (CC 99-412
DC 15 juin 1999 CC ndeg2001-452 DC 6 deacutecembre 2001) ou de lrsquoutilisation des signes
diacritiques sur les actes drsquoeacutetat civil
De plus au-delagrave des apparences drsquoune politique jurisprudentielle initieacutee dans un contexte
speacutecifique le Conseil constitutionnel dispose deacutesormais drsquoun cadre constitutionnel de
reacutefeacuterence transformeacute (1) qui lui permettra de valider les dispositions leacutegislatives du texte dont
il est saisi en particulier lrsquoarticle 4 relatif agrave lrsquoenseignement immersif (2) et lrsquoarticle 6 au sujet
de la participation financiegravere agrave la scolarisation par les communes de reacutesidence (3)
1
2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
1 Le renouvellement des normes constitutionnelles de reacutefeacuterence en matiegravere de
langues reacutegionales
11 Les ineacutevitables deacuterogations apporteacutees agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution
Toute regravegle constitutionnelle connaicirct des atteacutenuations et peut ecirctre concilieacutee lrsquoarticle 2
de la Constitution ne fait pas exception Le principe demeure inchangeacute laquo La langue de la
Reacutepublique est le franccedilais raquo Sur ce fondement le Conseil constitutionnel a deacuteveloppeacute dans
les anneacutees 90 et 2000 une jurisprudence vigilante sur lrsquousage du franccedilais mais sans pour
autant refuser toute eacutevolution nous y reviendrons
Cependant lrsquoassociation Eskolim souhaite mettre en eacutevidence lrsquoindeacuteniable
changement de cadre constitutionnel en matiegravere de langues reacutegionales pour au
moins trois raisons
En premier lieu la porteacutee de lrsquoarticle 2 de la Constitution nrsquoest pas figeacutee et peut
eacutevoluer avec le temps En effet le Conseil constitutionnel opegravere reacuteguliegraverement des adaptations
de la porteacutee du texte constitutionnel Parmi de nombreuses illustrations jurisprudentielles la
liberteacute drsquoexpression et de communication protegravege deacutesormais la liberteacute drsquoacceacuteder agrave Internet
(CC ndeg 2009-580 DC 10 juin 2009) et de srsquoy exprimer (CC ndeg2020-801 DC du 18 juin 2020)
La liberteacute du mariage comprend deacutesormais le droit de mettre fin aux liens du mariage (CC ndeg
2016-557 QPC du 29 juillet 2016) La monteacutee en puissance des exigences environnementales
dans le deacutebat public a permis au Conseil constitutionnel de juger qursquoil deacutecoule de la Charte de
lrsquoenvironnement laquo que la protection de lrsquoenvironnement patrimoine commun des ecirctres
humains constitue un objectif de valeur constitutionnelle raquo (CC ndeg2019-823 QPC 31 janvier
2020) Certains fondements constitutionnels que lrsquoon croyait endormis ont eacuteteacute reacuteactiveacutes sous
lrsquoeffet du pouvoir interpreacutetatif agrave lrsquoimage de lrsquoarticle 15 de la DDHC (laquo La socieacuteteacute a le droit de
demander compte agrave tout agent public de son administration raquo) agrave lrsquoorigine drsquoun droit drsquoaccegraves
aux archives publiques (CC ndeg2017-655 QPC 15 septembre 2017) et drsquoun droit drsquoaccegraves aux
documents administratifs (CC ndeg2020-834 QPC 3 avril 2020)
En deuxiegraveme lieu la reacutedaction actuelle de lrsquoarticle 2 de la Constitution ne date pas de
1958 mais drsquoun ajout issu de la loi constitutionnelle ndeg 92-554 du 25 juin 1992 voteacutee dans un
contexte particulier au moment ougrave la France ratifiait le traiteacute de Maastricht et reacutevisait sa
Constitution afin de lever les atteintes agrave la souveraineteacute constateacutees par le Conseil
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
constitutionnel En 1992 lrsquoinsertion de la langue franccedilaise au sein de lrsquoarticle 2 vise agrave rassurer
lrsquoopinion face aux craintes heacutegeacutemoniques de la langue anglaise les langues reacutegionales ne
sont ni viseacutees ni nieacutees dans leur existence et leur rocircle Il est sur ce point particuliegraverement
reacuteveacutelateur de se reacutefeacuterer aux deacuteclarations limpides du Garde des Sceaux Michel Vauzelle lors
des deacutebats parlementaires consacreacutes en 1992 au vote de la reacutevision constitutionnelle laquo Les
langues reacutegionales sont naturellement une richesse de notre patrimoine national Agrave ce
titre le Gouvernement exprime par ma voix lrsquoimmense respect et le soin qursquoil porte agrave cette
richesse de la nation [] Je ne vois pas lagrave drsquoatteinte agrave lrsquouniteacute de la nation mais au
contraire une contribution agrave sa richesse [] Aucune atteinte ne sera porteacutee agrave la politique
de respect de la diversiteacute de nos cultures reacutegionales qui est un eacuteleacutement essentiel du
patrimoine national raquo (JO Assembleacutee nationale p 1021)
Il est donc parfaitement possible pour le Conseil constitutionnel drsquoopeacuterer une
interpreacutetation eacutevolutive de lrsquoarticle 2 afin drsquoadapter la porteacutee de la norme constitutionnelle au
contexte actuel favorable agrave lrsquoapprofondissement de lrsquousage des langues reacutegionales Il nrsquoest
drsquoailleurs pas anodin de constater que la preacutesente proposition de loi a largement transcendeacute les
clivages politiques pour ecirctre voteacutee agrave une large majoriteacute avec drsquoailleurs le soutien de
lrsquoensemble des Preacutesidents de Reacutegion
En troisiegraveme lieu dans sa fameuse deacutecision sur la Charte europeacuteenne des langues
reacutegionales et minoritaires du 15 juin 1999 (ndeg99-412 DC) le Conseil constitutionnel a
implicitement reconnu la compatibiliteacute de lrsquoenseignement immersif ou bilingue avec la
Constitution et en particulier avec lrsquoarticle 2 de la Constitution En effet lrsquoinconstitutionnaliteacute
constateacutee entre la Charte et la Constitution concerne seulement les articles 1 et 7 Or le
consideacuterant 13 de cette deacutecision abusivement preacutesenteacutee comme un verrou absolu en matiegravere
de langues reacutegionales prend soin de preacuteciser laquo que nest contraire agrave la Constitution eu eacutegard agrave
leur nature aucun des autres engagements souscrits par la France dont la plupart au
demeurant se bornent agrave reconnaicirctre des pratiques deacutejagrave mises en œuvre par la France en
faveur des langues reacutegionales raquo Parmi ces laquo autres engagements souscrits par la France raquo
au sein de la Charte figurent certaines stipulations de lrsquoarticle 8 de la Charte1 selon lequel
1 Article 8 ndash Enseignement1En matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel ces langues sontpratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de lenseignement de la (des)langue(s) officielle(s) de lEtat(hellip)ci agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires concerneacutees ou
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
laquo laquoen matiegravere denseignement les Parties sengagent en ce qui concerne le territoire sur lequel
ces langues sont pratiqueacutees selon la situation de chacune de ces langues et sans preacutejudice de
lenseignement de la (des) langue(s) officielle(s) de lEtat raquo agrave toute une seacuterie drsquoengagements
Au sein des engagements auxquels la France avait souscrits et sur lesquels le Conseil
constitutionnel srsquoest donc prononceacute on trouve le point 1 c (iv) en vertu duquel la France
srsquoengage laquo agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui
le souhaitent ndash ou le cas eacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant raquo
Or ce renvoi concerne les stipulations suivantes
laquo i agrave preacutevoir un enseignement secondaire assureacute dans les langues reacutegionales ou minoritaires
concerneacutees ou
Ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les
langues reacutegionales ou minoritaires ou
Iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales
ou minoritaires comme partie inteacutegrante du curriculum
Autrement dit la France srsquoeacutetait engageacutee au moment de la signature de la Charte agrave
appliquer lrsquoune des trois mesures citeacutees qui concernent lrsquoenseignement laquo dans raquo les langues
reacutegionales ou minoritaires dans le secondaire crsquoest-agrave-dire un enseignement immersif ou
bilingue Cet engagement faisait donc partie des stipulations examineacutees par le Conseil
constitutionnel et le consideacuterant 13 de la deacutecision du 15 juin 1999 affirme clairement que ces
stipulations ne sont pas contraires agrave la Constitution Degraves 1999 lrsquoenseignement immersif en
langue reacutegionale est reconnu par le Conseil constitutionnel comme compatible avec
lrsquoarticle 2 de la Constitution
En quatriegraveme lieu le texte mecircme de la Constitution contient drsquoores et deacutejagrave des
ameacutenagements au principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais
Drsquoune part en vertu de la loi constitutionnelle ndeg 98-610 du 20 juillet 1998 lAccord
de Noumeacutea est constitutionnaliseacute agrave larticle 77 de la Constitution Or cet accord stipule en son
ii agrave preacutevoir quune partie substantielle de lenseignement secondaire soit assureacutee dans les langues reacutegionalesou minoritaires ou
iii agrave preacutevoir dans le cadre de leacuteducation secondaire lenseignement des langues reacutegionales ou minoritairescomme partie inteacutegrante du curriculum ou
iv agrave appliquer lune des mesures viseacutees sous i agrave iii ci-dessus au moins aux eacutelegraveves qui le souhaitent ndash ou le caseacutecheacuteant dont les familles le souhaitent ndash en nombre jugeacute suffisant
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
point 133 laquo Les langues kanak sont avec le franccedilais des langues denseignement et de
culture en Nouvelle-Caleacutedonie Leur place dans lenseignement et les meacutedias doit donc ecirctre
accrue et faire lobjet dune reacuteflexion approfondie raquo
Drsquoautre part sous lrsquoeffet de la reacutevision constitutionnelle du 23 juillet 2008 la
Constitution consacre deacutesormais les langues reacutegionales sous lrsquoeffet de lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution qui par deacutefinition atteacutenue et deacuteroge agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution et dont la
porteacutee ne saurait ecirctre symbolique
12 La porteacutee de lrsquoancrage constitutionnel des langues reacutegionales minoritaires
En vertu de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution laquo Les langues reacutegionales appartiennent
au patrimoine de la France raquo Sans discussion possible cette nouvelle disposition
constitutionnelle constitue un changement de circonstances de droit permettant drsquoatteacutenuer
fortement la porteacutee des preacuteceacutedentes deacutecisions du Conseil constitutionnel rendues avant la
reacutevision constitutionnelle de 2008 Certains voudraient pourtant reacuteduire ce texte agrave une porteacutee
simplement symbolique et pensent pouvoir drsquoores et deacutejagrave trouver une confirmation dans la
jurisprudence du Conseil constitutionnel La reacutealiteacute contentieuse est beaucoup plus nuanceacutee et
ne preacutejuge rien de lrsquoavenir
Le Conseil constitutionnel nrsquoa eu depuis 2008 qursquoune seule et unique occasion de
preacuteciser la porteacutee de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Dans la deacutecision du 20 mai 2011
(ndeg2011-130 QPC) il eacutetait en effet saisi des dispositions de larticle L 312-10 du code de
leacuteducation relative agrave lenseignement des langues et cultures reacutegionales qui eacutetait contesteacute au
regard de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Or estime le Conseil en 2011 lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution ninstitue pas un droit ou une liberteacute que la Constitution garantit Sa
meacuteconnaissance ne peut donc ecirctre invoqueacutee agrave lappui dune question prioritaire de
constitutionnaliteacute sur le fondement de larticle 61-1 de la Constitution
Il convient de ne pas tirer de conclusions excessives du deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en
QPC de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Drsquoune part cela nrsquoempecircche pas le Conseil constitutionnel de se fonder sur lrsquoarticle
75-1 de la Constitution dans le cadre du controcircle a priori comme crsquoest par exemple le cas
pour les regravegles constitutionnelles en matiegravere de recevabiliteacute des amendements ou des principes
constitutionnels en matiegravere budgeacutetaires
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Drsquoautre part le deacutefaut drsquoinvocabiliteacute en QPC drsquoune norme constitutionnelle ne
preacutejuge pas drsquoune forme de hieacuterarchie mateacuterielle ou formelle et srsquoexplique seulement par les
speacutecificiteacutes de chacun des offices Par exemple le respect des regravegles du vote de la loi
imposeacutees par la Constitution impossibles agrave invoquer en QPC font pourtant lrsquoobjet drsquoune
vigilance accrue du Conseil constitutionnel dans le cadre du controcircle a priori justifiant
chaque anneacutee de nombreuses censures
En outre bien que non invocable en QPC lrsquoarticle 75-1 teacutemoigne indubitablement de
la volonteacute du constituant de permettre au leacutegislateur drsquoassouplir les conditions drsquousage des
langues reacutegionales en ouvrant davantage la leacutegislation agrave des possibiliteacutes drsquoapprentissage en la
matiegravere En cela lrsquoarticle 75-1 de la Constitution est une atteacutenuation une disposition
deacuterogatoire agrave lrsquoarticle 2 de la Constitution selon lequel laquo La langue de la Reacutepublique est le
franccedilais raquo Comme le souligne le rapport drsquoun deacuteputeacute en 2015 laquo la preacuteservation et la
protection des langues reacutegionales sont devenues un objectif de valeur constitutionnelle raquo2 Une
telle interpreacutetation serait drsquoailleurs coheacuterente avec les travaux parlementaires agrave lrsquoorigine de la
reacutevision de 2008 pour le preacutesident de la Commission des lois du Seacutenat lrsquoarticle 75-1 permet
de donner laquo un fondement solide aux dispositions leacutegislatives et reacuteglementaires qui favorisent
la protection et le deacuteveloppement des langues reacutegionales sans diminuer la place que le
franccedilais occupe dans notre sphegravere publique raquo3
Enfin dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel
estime que larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi
ndeg2005-380 du 23 avril 2005 est conforme agrave la Constitution Or les dispositions ainsi
valideacutees sont toujours en vigueur dans une reacutedaction identique laquo Un enseignement de
langues et cultures reacutegionales peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des
modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces
langues sont en usage raquo Ainsi tout en estimant que lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ne
constitue pas un droit ou liberteacute constitutionnel directement invocable en QPC le Conseil
constitutionnel a valideacute le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures
reacutegionales
2JJ Urvoas Rapport sur Proposition de loi constitutionnelle ndeg 1618 visant agrave ratifier la Charte europeacuteenne deslangues reacutegionales ou minoritaires 14 janvier 2014
3JJ Hyest Rapport ndeg 387 (2007-2008) sur le projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions dela Ve Reacutepublique fait au nom de la commission des lois du Seacutenat
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
Autre signe eacutevident de la porteacutee effective de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le
leacutegislateur a multiplieacute ces derniegraveres anneacutees lrsquoadoption de textes favorisant lrsquousage et
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et leur promotion La loi du 8 juillet 2013
drsquoorientation et de programmation pour la refondation de lrsquoeacutecole de la Reacutepublique ouvre la
possibiliteacute drsquoun enseignement bilingue franccedilais-langue reacutegionale la loi du 7 aoucirct 2015
portant nouvelle organisation territoriale de la Reacutepublique (NOTRe) eacutetablit la participation
financiegravere agrave la scolarisation des enfants concerneacutes par lrsquoenseignement drsquoune langue reacutegionale
lrsquoarticle 86 de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siegravecle
modifie lrsquoarticle 225-1 du code peacutenal en creacuteant un nouveau cas de discrimination fondeacute sur laquo
la maitrise drsquoune autre langue que le franccedilais raquo la loi du 28 feacutevrier 2017 de programmation
relative agrave lrsquoeacutegaliteacute reacuteelle outre-mer rend inopeacuterant lrsquointerdiction des livrets de famille
bilingues lrsquoarticle 34 de loi du 26 juillet 2019 pour une eacutecole de la confiance eacutetend aux
eacutecoles priveacutees sous contrat et associatives les modaliteacutes drsquoun accord entre les communes pour
la prise en charge du forfait scolaire pour tout eacutelegraveve srsquoinscrivant dans une eacutecole dispensant un
enseignement de langue reacutegionale en dehors de sa commune de reacutesidence Lrsquoarticle 75-1 de la
Constitution a donc susciteacute une production leacutegislative qui teacutemoigne de la volonteacute du pouvoir
politique de mettre en œuvre une politique en matiegravere de langue et culture reacutegionales La
particulariteacute de la proposition de loi deacutefeacutereacutee est drsquoecirctre la premiegravere loi dont lrsquoobjet exclusif vise
agrave densifier lrsquoenseignement et lrsquousage des langues reacutegionales mais ce texte confirme les
avanceacutees ponctuelles eacutetablies depuis la reacutevision constitutionnelle de 2008
13 La monteacutee en puissance drsquoexigences constitutionnelles favorisant lrsquousage des langues
reacutegionales
Au-delagrave de lrsquoapport indeacuteniable de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution qui inteacuteresse
directement et clairement la possibiliteacute pour le leacutegislateur de favoriser le deacuteveloppement des
langues reacutegionales la jurisprudence du Conseil constitutionnel atteste drsquoune monteacutee en
puissance de plusieurs liberteacutes qui participent indirectement du mecircme mouvement
En premier lieu la liberteacute drsquoexpression et de communication concerne les langues
reacutegionales Degraves la deacutecision ndeg94-345 DC du 29 juillet 1994 le Conseil constitutionnel avait
concilieacute lrsquoarticle 2 de la Constitution avec la liberteacute drsquoexpression et de communication afin de
censurer certaines dispositions imposant lrsquousage du franccedilais tout en faisant notamment une
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2021-818 DC - Reccedilu au greffe du Conseil constitutionnel le 5 mai 2021
reacutefeacuterence aux langues reacutegionales cette liberteacute laquo implique le droit pour chacun de choisir les
termes jugeacutes par lui les mieux approprieacutes agrave lexpression de sa penseacutee que la langue franccedilaise
eacutevolue comme toute langue vivante en inteacutegrant dans le vocabulaire usuel des termes
de diverses sources quil sagisse dexpressions issues de langues reacutegionales de vocables
dits populaires ou de mots eacutetrangers raquo Or la liberteacute drsquoexpression et de communication a vu
son reacutegime constitutionnel renforceacute depuis plusieurs anneacutees sous lrsquoeffet du triple test de
proportionnaliteacute en vertu duquel les limites apporteacutees agrave ces liberteacutes doivent ecirctre neacutecessaires
adapteacutees et proportionneacutees agrave lrsquoobjectif poursuivi Norme constitutionnelle prioritaire pour le
Conseil constitutionnel la liberteacute drsquoexpression et de communication a justifieacute de nombreuses
censures de dispositions leacutegislatives ces derniegraveres anneacutees (loi laquo Hadopi raquo consultation des
sites Internet terroristes loi laquo Avia raquohellip) Or cette liberteacute dans ses deux composantes de
lrsquoexpression et de la communication permet au locuteur drsquoutiliser une langue reacutegionale et de
ne pas subir drsquoentraves excessives ou injustifieacutees Le deacuteveloppement des langues reacutegionales et
de leur enseignement lrsquoouverture des possibiliteacutes de srsquoexprimer et de communiquer gracircce agrave
ces langues ne sont pas eacutetrangegraveres aux conditions drsquoexercice de la liberteacute drsquoexpression et de
communication Ainsi la monteacutee en puissance de cette liberteacute dans le contentieux
constitutionnel confirme lrsquoeacutevolution favorable du cadre constitutionnel applicable aux langues
reacutegionales
En deuxiegraveme lieu lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant est deacutesormais consacreacute en tant
qursquoexigence constitutionnelle deacutecoulant des alineacuteas 10 et 11 du Preacuteambule de 1946 Ce
principe a drsquoores et deacutejagrave eacuteteacute appliqueacute en matiegravere de droit des eacutetrangers (CC 2019-797 QPC du
26 juillet 2019) mais aussi en droit de la famille au sujet du divorce (CC ndeg 2019-778 DC du
21 mars 2019) ou de lrsquoaccouchement sous le secret (CC 2019-826 QPC du 7 feacutevrier 2020) Il
serait parfaitement coheacuterent que cette exigence constitutionnelle soit applicable en matiegravere
drsquoeacuteducation et drsquoenseignement ce qui permettrait notamment de justifier le renforcement de
lrsquoenseignement des langues reacutegionales et le soutien financier qui leur est apporteacute
En troisiegraveme lieu la liberteacute de lrsquoenseignement reconnu en tant que principe
constitutionnel (CC ndeg77-87 DC 23 novembre 1977 2016-745 DC 26 janvier 2017)
pourrait permette de proteacuteger constitutionnellement le libre choix des parents en
matiegravere de meacutethodes eacuteducatives conformeacutement agrave la jurisprudence du Conseil drsquoEtat En
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effet dans une deacutecision du 19 juillet 2017 (Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg
406150) le Conseil drsquoEtat estime que le laquo principe de la liberteacute de lrsquoenseignement qui figure
au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la Reacutepublique implique la
possibiliteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement y compris hors de tout contrat conclu
avec lrsquoEtat tout comme le droit pour les parents de choisir pour leurs enfants des
meacutethodes eacuteducatives alternatives agrave celles proposeacutees par le systegraveme scolaire public y
compris lrsquoinstruction au sein de la famille raquo A fortiori la liberteacute de lrsquoenseignement
permettrait au leacutegislateur drsquooffrir aux eacutelegraveves la possibiliteacute de suivre un enseignement immersif
en langue reacutegionale Faire deacutecouler de la liberteacute drsquoenseignement une exigence en matiegravere de
droit des parents de choisir les meacutethodes eacuteducatives serait drsquoailleurs en coheacuterence avec
lrsquoarticle 2 du Protocole 1 de la CEDH4 et lrsquoarticle 14-3 de la Charte des droits fondamentaux
de lUnion europeacuteenne5
Au-delagrave du principe selon lequel la langue de la Reacutepublique est le franccedilais unchangement de contexte est intervenu depuis lrsquoinsertion en 1992 de cette disposition agravelrsquoarticle 2 de la Constitution Depuis 2008 le pouvoir constituant a consacreacute leslangues reacutegionales agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution de nombreuses reacuteformesleacutegislatives et regraveglementaires ont accompagneacute le deacuteveloppement des langues reacutegionaleset plusieurs principes constitutionnels accompagnent et pourraient agrave lrsquoavenirrenforcer lrsquoassise normative des langues reacutegionalesCrsquoest agrave lrsquoaune de ce cadre constitutionnel renouveleacute et transformeacute en phase avec leseacutevolutions leacutegislatives et sociales que le Conseil constitutionnel appreacuteciera laconstitutionnaliteacute de la preacutesente proposition de loi qui loin de constituer une rupturesrsquoinscrit dans une forme de continuiteacute
2 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi modifie lrsquoarticle L321-10 du code de lrsquoeacuteducation qui
en lrsquoeacutetat dispose
4laquo Nul ne peut se voir refuser le droit agrave lrsquoinstruction LrsquoEacutetat dans lrsquoexercice des fonctions qursquoil assumera dans ledomaine de lrsquoeacuteducation et de lrsquoenseignement respectera le droit des parents drsquoassurer cette eacuteducation et cetenseignement conformeacutement agrave leurs convictions religieuses et philosophiques raquo
5laquo La liberteacute de creacuteer des eacutetablissements drsquoenseignement dans le respect des principes deacutemocratiques ainsi quele droit des parents drsquoassurer lrsquoeacuteducation et lrsquoenseignement de leurs enfants conformeacutement agrave leurs convictionsreligieuses philosophiques et peacutedagogiques sont respecteacutes selon les lois nationales qui en reacutegissent lrsquoexercice raquo
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laquo Les langues et cultures reacutegionales appartenant au patrimoine de la France leurenseignement est favoriseacute prioritairement dans les reacutegions ougrave elles sont en usage
Cet enseignement peut ecirctre dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefiniespar voie de convention entre lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont enusage
Le Conseil supeacuterieur de leacuteducation est consulteacute conformeacutement aux attributions qui lui sontconfeacutereacutees agrave larticle L 231-1 sur les moyens de favoriser leacutetude des langues et culturesreacutegionales dans les reacutegions ougrave ces langues sont en usage
Lenseignement facultatif de langue et culture reacutegionales est proposeacute dans lune des deuxformes suivantes
1deg Un enseignement de la langue et de la culture reacutegionales
2deg Un enseignement bilingue en langue franccedilaise et en langue reacutegionale
Les familles sont informeacutees des diffeacuterentes offres dapprentissage des langues et culturesreacutegionales raquo
Lrsquoarticle 4 a simplement pour objet drsquoajouter un 3e cas de forme drsquoenseignementfacultatif de langue et culture reacutegionales en preacutevoyant
laquo3deg Un enseignement immersif en langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectifdrsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo
21 Le Conseil constitutionnel peut ne pas se prononcer sur cette disposition
A titre liminaire il semblerait que lrsquoarticle 4 du texte soumis agrave lrsquoexamen du
Conseil constitutionnel ne soit pas contesteacute par les auteurs de la saisine parlementaire agrave en
croire les deacuteclarations publiques de plusieurs deacuteputeacutes Ce point nrsquoest pas sans importance degraves
lors qursquoil confirme le large consensus politique autour de cette disposition et peut avoir une
conseacutequence sur le peacuterimegravetre de lrsquoobjet de la deacutecision rendue
Certes il arrive ponctuellement au Conseil constitutionnel drsquoexaminer drsquooffice
drsquoautres dispositions que celles contesteacutees par la saisine mais depuis lrsquoentreacutee en vigueur de la
QPC et speacutecialement depuis 2016 une telle pratique tend agrave devenir une exception (Deacutecisions
ndeg 2019-794 DC du 20 deacutecembre 2019 ndeg2018-772 DC du 15 novembre 2018 ndeg2016-745
DC du 26 janvier 2017)
De plus lors de lrsquoexamen de la loi pour une eacutecole de la confiance dans sa deacutecision
ndeg2019-787 DC du 25 juillet 2019 le Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute examiner
drsquooffice les dispositions de lrsquoarticle 38 creacuteant en vertu de lrsquoarticle L314-2 du code de
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lrsquoeacuteducation une expeacuterimentation de classe immersive en langue eacutetrangegravere ou reacutegionale6 Si le
Conseil constitutionnel nrsquoa pas souhaiteacute se saisir drsquooffice de cette disposition expeacuterimentale
crsquoest qursquoimplicitement il nrsquoa pas consideacutereacute qursquoelle posait une difficulteacute manifeste de
constitutionnaliteacute Degraves lors la coheacuterence voudrait qursquoil en aille de mecircme avec les dispositions
de lrsquoarticle 4 de la preacutesente proposition de loi qui ne font que reprendre les grands principes
de lrsquoexpeacuterimentation preacuteceacutedente en preacutevoyant la possibiliteacute drsquoun enseignement immersif en
langue reacutegionale sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue
franccedilaise
22 Les exigences anciennes poseacutees par le Conseil constitutionnel sont respecteacutees
Elaboreacutee avant la reacutevision constitutionnelle de 2008 consacrant les langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la jurisprudence
du Conseil constitutionnel en matiegravere drsquoenseignement de langue reacutegionale est totalement
respecteacutee par lrsquoarticle 4 de la proposition de loi
En premier lieu le caractegravere facultatif de lrsquoenseignement immersif en langue
reacutegionale rend lrsquoarticle 4 conforme agrave la Constitution
Dans plusieurs deacutecisions le Conseil constitutionnel a eu lrsquooccasion de preacuteciser que
seule lrsquoobligation de suivre un enseignement dans une autre langue que le franccedilais serait
contraire agrave la Constitution Ainsi dans la deacutecision ndeg 2001-456 DC du 27 deacutecembre 2001 il
indique que laquo lusage dune langue autre que le franccedilais ne peut ecirctre imposeacute aux eacutelegraveves des
eacutetablissements de lenseignement public ni dans la vie de leacutetablissement ni dans
lenseignement des disciplines autres que celles de la langue consideacutereacutee raquo Le verbe
6Article L314-2 du code de lrsquoeacuteducation laquo Sous reacuteserve de lrsquoautorisation preacutealable des autoriteacutes acadeacutemiques etapregraves concertation avec les eacutequipes peacutedagogiques le projet drsquoeacutecole ou drsquoeacutetablissement mentionneacute agrave lrsquoarticle L401-1 peut preacutevoir la reacutealisation dans des conditions deacutefinies par deacutecret drsquoexpeacuterimentations peacutedagogiquesportant sur tout ou partie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement drsquoune dureacutee limiteacutee agrave cinq ans Cesexpeacuterimentations peuvent concerner lrsquoorganisation peacutedagogique de la classe de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement laliaison entre les diffeacuterents niveaux drsquoenseignement la coopeacuteration avec les partenaires du systegraveme eacuteducatiflrsquoenseignement dans une langue vivante eacutetrangegravere ou reacutegionale les eacutechanges avec des eacutetablissementseacutetrangers drsquoenseignement scolaire lrsquoutilisation des outils et ressources numeacuteriques la reacutepartition des heuresdrsquoenseignement sur lrsquoensemble de lrsquoanneacutee scolaire les proceacutedures drsquoorientation des eacutelegraveves et la participation desparents drsquoeacutelegraveves agrave la vie de lrsquoeacutecole ou de lrsquoeacutetablissement Les collectiviteacutes territoriales sont systeacutematiquementassocieacutees agrave la deacutefinition des grandes orientations des expeacuterimentations meneacutees par lrsquoeacuteducation nationale ainsiqursquoagrave leurs deacuteclinaisons territoriales raquo
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laquo imposer raquo est employeacute agrave la fois au sujet de lrsquousage drsquoune autre langue que le franccedilais et au
sujet de la vie de lrsquoeacutetablissement et de lrsquoenseignement des disciplines autres que celles de la
langue consideacutereacutee Ce qui signifie qursquoil est constitutionnellement possible au leacutegislateur de
permettre aux eacutelegraveves de choisir de maniegravere facultative une telle orientation dans
lrsquoenseignement De mecircme dans sa deacutecision ndeg2001 454 DC du 17 janvier 2002 le Conseil
constitutionnel avait estimeacute que si lrsquoenseignement de la langue corse est preacutevu dans le cadre
de lrsquohoraire normal des eacutecoles maternelles et eacuteleacutementaires laquo il ne saurait revecirctir pour autant
un caractegravere obligatoire ni pour les eacutelegraveves ni pour les enseignants raquo Et dans la deacutecision
ndeg2004-490 DC 12 feacutevrier 2004 le Conseil indique que lrsquoenseignement de la langue
tahitienne ou dune autre langue polyneacutesienne dans le cadre de lhoraire normal des eacutecoles
maternelles et primaires dans les eacutetablissements du second degreacute et dans les eacutetablissements
denseignement supeacuterieur laquo ne saurait revecirctir pour autant un caractegravere obligatoire ni pour les
eacutelegraveves ou eacutetudiants ni pour les enseignants raquo
Or en lrsquoespegravece il nrsquoy a absolument aucun doute sur le caractegravere facultatif du 3deg
ajouteacute agrave lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation En effet le premier alineacutea de lrsquoarticle L312-
10 du code de lrsquoeacuteducation est inchangeacute et eacutevoque un laquo enseignement facultatif raquo Le deacuteputeacute
Molac lrsquoa clairement exprimeacute lors des deacutebats laquo lrsquoenseignement immersif tel qursquoil est ici
proposeacute reacutepond agrave cette condition dans la mesure ougrave il ne serait pas imposeacute mais seulement
proposeacute au sein des eacutetablissements publics au cocircteacute de filiegraveres classiques drsquoenseignement la
deacutecision finale restant du ressort des personnes responsables de lrsquoenfant raquo (Rapport du 31
mars 2021)
En deuxiegraveme lieu lrsquoarticle 4 nrsquoa pas pour objet de soustraire les eacutelegraveves aux
droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements drsquoenseignement
Dans plusieurs deacutecisions relatives agrave lrsquousage drsquoune langue reacutegionale le Conseil
constitutionnel rappelle qursquoun enseignement de ce type nrsquoa pas pour laquo pour objet de soustraire
les eacutelegraveves scolariseacutes (hellip) aux droits et obligations applicables agrave lensemble des usagers des
eacutetablissements qui assurent le service public de lenseignement ou sont associeacutes agrave celui-ci raquo
(ndeg 91-290 DC du 9 mai 1991 ndeg 2001-454 DC du 17 janvier 2002) Or lrsquoarticle 4 a
seulement pour objet drsquoouvrir une 3e modaliteacute facultative drsquoenseignement en langue reacutegionale
La proposition de loi ne confegravere pas des droits speacutecifiques agrave des laquo groupes raquo de locuteurs de
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langues reacutegionales ou minoritaires agrave lrsquointeacuterieur de laquo territoires raquo dans lesquels ces langues
seraient pratiqueacutees Le texte ne modifie pas non plus les modaliteacutes drsquoexpression dans la vie
publique et dans la relation entre lrsquoadministration et les administreacutes De telle sorte que
lrsquoarticle 4 ne creacutee aucun droit particulier pour les eacutelegraveves comme pour les enseignants de nature
agrave les soustraire aux droits et obligations applicables aux usagers des eacutetablissements
drsquoenseignement ou associeacutes agrave celui-ci
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 4 opegravere une conciliation raisonnable et eacutequilibreacutee entre
le principe de lrsquoarticle 2 de la Constitution et lrsquoapprentissage des langues reacutegionales
Lrsquoenseignement immersif en lange reacutegionale doit srsquoopeacuterer laquo sans preacutejudice de
lrsquoobjectif drsquoune bonne connaissance de la langue franccedilaise raquo Lrsquoarticle 4 prend soin de ne pas
ignorer le principe poseacute par lrsquoarticle 2 de la Constitution et prolonge au niveau leacutegislatif la
conciliation souhaiteacutee par le constituant depuis 2008 avec lrsquoarticle 75-1 de la Constitution Il
appartiendra au pouvoir regraveglementaire de preacuteciser la mise en œuvre de lrsquoobjectif de bonne
connaissance de la langue franccedilaise qui en toute hypothegravese garantit une conciliation
eacutequilibreacutee entre les regravegles constitutionnelles en preacutesence
Au surplus les retours drsquoexpeacuteriences des expeacuterimentations de classes en
enseignements immersifs permises par lrsquoarticle L 314-2 du code de lrsquoeacuteducation deacutemontrent
que les eacutelegraveves disposent drsquoun niveau en franccedilais plus eacuteleveacute que la moyenne Comme lrsquoindique
le rapport du Seacutenat sur la proposition de loi 19 expeacuterimentations immersives en langue
basque 6 en langue corse et une en langue catalane ont lieu actuellement dans des eacutecoles
publiques Or pour prendre lrsquoexemple de lrsquoenseignement en basque agrave 100 en eacutecole
maternelle objet drsquoune eacutevaluation preacutecise par lrsquoacadeacutemie de Bordeaux en 2019 (Etude
comparative des filiegraveres de maternelle 100 basque bilingue et franccedilais Acadeacutemie de
Bordeaux 2019) laquo lorsque ces enfants arrivaient en CP leur niveau de franccedilais eacutetait
supeacuterieur agrave la moyenne du deacutepartement Cela prouve que le niveau de franccedilais nrsquoavait
absolument pas eacuteteacute toucheacute raquo (Paul Molac Assembleacutee nationale Seacuteance du 8 avril 2021)
En quatriegraveme lieu lrsquoarticle 4 ne fait qursquoeacutetendre la mise en œuvre drsquoune modaliteacute
drsquoenseignement deacutejagrave valideacute par le Conseil constitutionnel
Dans la deacutecision ndeg 2011-130 QPC du 20 mai 2011 le Conseil constitutionnel a valideacute
le principe mecircme de lrsquoenseignement des langues et cultures reacutegionales en estimant que
larticle L 312-10 du code de leacuteducation dans sa version issue de la loi ndeg2005-380 du 23
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avril 2005 est conforme agrave la Constitution En effet apregraves avoir estimeacute inopeacuterant le grief tireacute
de la violation de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution la deacutecision preacutecise laquo que les dispositions
contesteacutees ne sont contraires agrave aucun droit ou liberteacute que la Constitution garantit raquo Par
conseacutequent en vertu de lrsquoautoriteacute que lrsquoarticle 62 de la Constitution confegravere aux deacutecisions du
Conseil constitutionnel les dispositions valideacutees dans cette deacutecision et toujours en vigueur
sont conformes agrave la Constitution Il srsquoagit en particulier de lrsquoalineacutea 2 de la version actuelle de
lrsquoarticle L312-10 du code de lrsquoeacuteducation en vertu duquel laquo Cet enseignement peut ecirctre
dispenseacute tout au long de la scolariteacute selon des modaliteacutes deacutefinies par voie de convention entre
lEtat et les collectiviteacutes territoriales ougrave ces langues sont en usage raquo Or lrsquoarticle 4 de la
proposition de loi ne fait qursquoajouter une 3e possibiliteacute de mise en œuvre drsquoun principe deacutejagrave
valideacute par le Conseil constitutionnel modaliteacute facultative et sans preacutejudice de lrsquoobjectif drsquoune
bonne connaissance de la langue franccedilaise Le leacutegislateur srsquoest donc scrupuleusement
conformeacute aux exigences du Conseil constitutionnel
23 La possibiliteacute drsquoun enseignement immersif peut se preacutevaloir de plusieurs exigences constitutionnelles
En plus de srsquoinscrire dans les lignes jurisprudentielles du Conseil constitutionnel et de
respecter lrsquoarticle 2 de la Constitution lrsquoarticle 4 de la proposition de la loi peut se preacutevaloir
plusieurs normes constitutionnelles
En premier lieu lrsquoarticle 75-1 de la Constitution en vertu duquel laquo Les langues
reacutegionales appartiennent au patrimoine de la France raquo constitue un changement de
circonstances de droit issu de la reacutevision constitutionnelle de 2008 qui atteacutenue la porteacutee de
lrsquoarticle 2 de la Constitution et permet ainsi de fonder le principe drsquoen enseignement immersif
et facultatif en langue reacutegionale
En second lieu comme preacuteceacutedemment rappeleacute (cf supra point 13) plusieurs
exigences et liberteacutes constitutionnelles peuvent soutenir le deacuteveloppement des langues
reacutegionales et peser favorablement dans la conciliation opeacutereacutee par le Conseil constitutionnel
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La liberteacute drsquoexpression et de communication garantie par lrsquoarticle 11 de la DDHC
et dont le reacutegime constitutionnel srsquoest renforceacute depuis une dizaine drsquoanneacutees peut permettre de
justifier lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale degraves lors qursquoil srsquoagit drsquoun preacutealable neacutecessaire
agrave lrsquoexpression et agrave la communication dans une autre langue que le franccedilais
Lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant reacutecemment consacreacute sur le fondement des alineacuteas 10
et 11 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 peut permettre au leacutegislateur de diversifier les
possibiliteacutes drsquoapprentissage drsquoune langue et drsquoune culture reacutegionale
La liberteacute de lrsquoenseignement consacreacutee de longue date en tant que principe
fondamental reconnu par les lois de la Reacutepublique implique neacutecessairement comme le
reconnaissent le Conseil drsquoEtat au niveau constitutionnel (CE 19 juillet 2017 Association
Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150) et les textes europeacuteens (article 2 du protocole 1
CEDH article 14-3 Charte des droits fondamentaux de lrsquoUnion europeacuteenne) une possibiliteacute
pour les parents de choisir des meacutethodes eacuteducatives en lien avec leurs convictions
Il est eacutegalement possible drsquoavancer le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction qui
deacutecoule de lrsquoalineacutea 13 du Preacuteambule de la Constitution de 1946 (CC ndeg2001-450 DC 11
juillet 2001) degraves lors que lrsquoapprentissage drsquoune langue reacutegionale poursuit un objectif
peacutedagogique auquel les eacutelegraveves doivent pouvoir acceacuteder de maniegravere suffisamment libre et
selon des critegraveres objectifs et rationnels
Lrsquoarticle 4 de la proposition de loi se contente drsquoajouter une modaliteacute de mise enœuvre drsquoun enseignement dont le principe a deacutejagrave eacuteteacute valideacute par le Conseilconstitutionnel La conformiteacute agrave la Constitution de cet enseignement est eacutetablie degraveslors qursquoil est proposeacute de maniegravere facultative sans preacutejudice du respect de lrsquoarticle 2 dela Constitution et qursquoil peut se preacutevaloir de lrsquoarticle 75-1 de la Constitution ainsi quede plusieurs principes constitutionnels comme la liberteacute drsquoexpression lrsquointeacuterecirctsupeacuterieur de lrsquoenfant la liberteacute drsquoenseignement et lrsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction
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3 Sur la conformiteacute agrave la Constitution de lrsquoarticle 6 de la proposition de loi
Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi deacutefeacutereacutee modifie lrsquoarticle L442-5-1 du code de
lrsquoeacuteducation en remplaccedilant les alineacuteas 6 et 7 par lrsquoalineacutea suivant
laquo La participation financiegravere agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements
priveacutes du premier degreacute sous contrat drsquoassociation dispensant un enseignement de langue
reacutegionale au sens du 2deg de lrsquoarticle L 312-10 fait lrsquoobjet drsquoun accord entre la commune de
reacutesidence et lrsquoeacutetablissement drsquoenseignement situeacute sur le territoire drsquoune autre commune agrave la
condition que la commune de reacutesidence ne dispose pas drsquoeacutecole dispensant un enseignement de
langue reacutegionale raquo
31 Lrsquoimpact subsidiaire et reacutesiduel de lrsquoarticle 6
Au-delagrave des passions et crispations qui peuvent parfois se rencontrer au greacute de deacutebats
relatifs au financement de lrsquoenseignement priveacute la modification apporteacutee par lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi doit ecirctre replaceacutee agrave sa juste porteacutee
En premier le meacutecanisme est subsidiaire En effet la participation financiegravere de la
commune de reacutesidence ne serait solliciteacutee que si cette commune ne laquo dispose pas drsquoeacutecole
dispensant un enseignement de langue reacutegionale raquo Il srsquoagit bien drsquoun laquo enseignement raquo quel
que soit sa forme et son volume Degraves lors comme lrsquoa clairement exprimeacute le deacuteputeacute Paul
Molac devant la Commission des affaires sociales il peut srsquoagir drsquoune laquo initiation drsquoun
enseignement paritaire ou drsquoune immersion raquo (31 mars 2021)
En deuxiegraveme lieu le meacutecanisme est reacutesiduel La participation financiegravere se limite
aux eacutetablissements priveacutes du premier degreacute ndash les eacutecoles ndash ayant conclu un contrat
drsquoassociation Les collegraveges et lyceacutees sont donc exclus du dispositif Un faible nombre
drsquoenfants sera concerneacute et la charge sera donc reacuteduite pour les communes en question De
plus en pratique dans les zones ougrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales est reacutepandu les
eacutecoles drsquoun grand nombre de communes ont deacutejagrave deacuteveloppeacute des offres eacuteducatives
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En troisiegraveme lieu la participation financiegravere est encadreacutee par la loi En application
de lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation non modifieacute par la preacutesente
proposition de loi les modaliteacutes de calcul de la contribution de la commune de reacutesidence sont
clairement eacutetablies
laquo il est tenu compte des ressources de cette commune du nombre deacutelegraveves de cette
commune scolariseacutes dans la commune daccueil et du coucirct moyen par eacutelegraveve calculeacute sur la base
des deacutepenses de fonctionnement de lensemble des eacutecoles publiques de la commune daccueil
sans que le montant de la contribution par eacutelegraveve puisse ecirctre supeacuterieur au coucirct quaurait
repreacutesenteacute pour la commune de reacutesidence leacutelegraveve sil avait eacuteteacute scolariseacute dans une de ses eacutecoles
publiques raquo
La charge financiegravere obeacuteit donc agrave des regravegles claires objectives rationnelles et deacutejagrave en
vigueur depuis plusieurs anneacutees En effet le laquo forfait scolaire raquo est deacutejagrave pratiqueacute sur le
fondement de lrsquoarticle L212-8 du code de lrsquoeacuteducation lorsqursquoune famille scolarise dans une
eacutecole publique ou priveacutee son enfant dans une autre commune que la commune de reacutesidence
32 Lrsquoabsence de violation de la libre administration des collectiviteacutes
territoriales et du principe drsquoeacutegaliteacute
Ainsi replaceacutee dans sa juste porteacutee il ne saurait ecirctre reprocheacute agrave lrsquoarticle 6 de la
proposition de loi de violer la Constitution et en particulier les principes applicables en
matiegravere de libre administration des collectiviteacutes territoriales ainsi que le principe drsquoeacutegaliteacute
En premier lieu le Conseil constitutionnel a deacutejagrave valideacute le principe de lrsquoaide agrave
lrsquoenseignement priveacute et en particulier aux langues reacutegionales
Avant mecircme la reacutevision constitutionnelle de 2008 et la conseacutecration des langues
reacutegionales comme patrimoine de la France agrave lrsquoarticle 75-1 de la Constitution le Conseil
constitutionnel avait reconnu que laquo pour concourir agrave la sauvegarde des langues reacutegionales
lEacutetat et les collectiviteacutes territoriales peuvent apporter leur aide aux associations ayant cet
objet raquo (CC ndeg2001-456 DC 27 deacutecembre 2001)
De plus le Conseil constitutionnel rappelle reacuteguliegraverement que laquo le leacutegislateur peut
preacutevoir loctroi dune aide des collectiviteacutes publiques aux eacutetablissements denseignement
priveacutes selon la nature et limportance de leur contribution agrave laccomplissement de missions
denseignement raquo (CC ndeg93-329 DC du 13 janvier 1994)
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En deuxiegraveme lieu le principe de libre administration ne saurait justifier des
traitements diffeacuterencieacutes dans lrsquoexercice des droits et liberteacutes constitutionnels
En vertu de lrsquoarticle 72 de la Constitution les collectiviteacutes territoriales srsquoadministrent
librement mais laquo dans les conditions preacutevues par la loi raquo De plus le Conseil constitutionnel
prend soin de preacuteciser que laquo si le principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales
a valeur constitutionnelle les dispositions que le leacutegislateur eacutedicte ne sauraient conduire agrave ce
que les conditions essentielles drsquoapplication drsquoune loi relative agrave lrsquoexercice de la liberteacute de
lrsquoenseignement deacutependent de deacutecisions des collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas
ecirctre les mecircmes sur lrsquoensemble du territoire raquo (CC ndeg 84-185 DC du 18 janvier 1985 CC
ndeg93-329 du 13 janvier 1994) Plus largement dans la deacutecision du 17 janvier 2002 (ndeg2001-
454 DC) le Conseil constitutionnel affirme que laquo le principe de libre administration des
collectiviteacutes territoriales ne saurait conduire agrave ce que les conditions essentielles de mise en
oeuvre des liberteacutes publiques et par suite lensemble des garanties que celles-ci comportent
deacutependent des deacutecisions de collectiviteacutes territoriales et ainsi puissent ne pas ecirctre les mecircmes
sur lensemble du territoire de la Reacutepublique raquo
Or en lrsquoespegravece si les communes pouvaient librement participer au financement de la
scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du premier degreacute sous contrat
drsquoassociation lrsquoexercice de la liberteacute drsquoenseignement du principe drsquoeacutegaliteacute devant la loi et du
principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction deacutependrait de la seule volonteacute drsquoune collectiviteacute
territoriale ce que le Conseil constitutionnel condamne Degraves lors que la possibiliteacute drsquoun
enseignement en langue reacutegionale est offerte aux enfants les conditions drsquoaccegraves agrave cet
enseignement doivent pouvoir ecirctre effectives et eacutegales Loin de violer le principe drsquoeacutegaliteacute
devant la loi lrsquoarticle 6 de la proposition de loi en assure au contraire la garantie
En troisiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne transfert ni ne creacutee de
nouvelles compeacutetences
Srsquoagissant des ressources des collectiviteacutes locales permettant de leur assurer une libre
administration le quatriegraveme alineacutea de lrsquoarticle 72-2 de la Constitution preacutevoit laquo Tout
transfert de compeacutetences entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales srsquoaccompagne de
lrsquoattribution de ressources eacutequivalentes agrave celles qui eacutetaient consacreacutees agrave leur exercice Toute
creacuteation ou extension de compeacutetences ayant pour conseacutequence drsquoaugmenter les deacutepenses des
collectiviteacutes territoriales est accompagneacutee de ressources deacutetermineacutees par la loi raquo Le Conseil
constitutionnel veille au respect de cette regravegle drsquoune part pour les transferts de compeacutetence
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entre lrsquoEacutetat et les collectiviteacutes territoriales et drsquoautre part pour les creacuteations ou extensions de
compeacutetence des collectiviteacutes territoriales
En lrsquoespegravece aucune creacuteation ou transfert de compeacutetence nrsquoest opeacutereacute au sens de
lrsquoarticle 72-2 de la Constitution Il srsquoagit drsquoune simple participation financiegravere agrave caractegravere
subsidiaire reacutesiduel et deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels comme
preacuteceacutedemment eacutevoqueacute (cf supra point 31) De plus le versement de la participation
financiegravere correspond en quelque sorte agrave un allegravegement de charge degraves lors que le coucirct de
lrsquoenfant scolariseacute est reporteacute sur une autre commune que la commune de reacutesidence En
conseacutequence lrsquoarticle 6 de la proposition de loi ne fait que modifier les modaliteacutes drsquoexercice
drsquoune compeacutetence sans en creacuteer ou transfeacuterer une nouvelle
Drsquoailleurs dans la deacutecision ndeg2009-591 DC du 22 octobre 2009 le Conseil
constitutionnel avait jugeacute inopeacuterant le grief tireacute de la violation des articles 72 et 72-2 de la
Constitution agrave propos de la version ancienne de lrsquoarticle L442-5-1 du code de lrsquoeacuteducation en
jugeant que laquo la loi deacutefeacutereacutee nemporte ni creacuteation ni extension des compeacutetences en matiegravere de
contributions des communes aux frais de fonctionnement des classes eacuteleacutementaires des
eacutetablissements du premier degreacute priveacutes sous contrat dassociation que par suite le grief tireacute
de la meacuteconnaissance du principe de libre administration des collectiviteacutes territoriales manque
en fait raquo
Le Conseil constitutionnel a statueacute dans le mecircme sens au sujet de lrsquoinstitution drsquoun
creacutedit drsquoimpocirct en matiegravere drsquoapprentissage ou de la possibiliteacute de modifier la dureacutee du contrat
drsquoapprentissage mecircme si ces mesures en rendant lrsquoapprentissage plus attrayant ont pour effet
drsquoaugmenter le nombre drsquoapprentis et donc drsquoaccroicirctre les charges des reacutegions dans ce
domaine (CC ndeg 2004-509 DC du 13 janvier 2005)
En quatriegraveme lieu le principe drsquoeacutegaliteacute entre les charges publiques est respecteacute
En effet en plus du caractegravere subsidiaire et reacutesiduel du meacutecanisme la participation
financiegravere preacutevue par lrsquoarticle 6 de la proposition de loi srsquoapplique agrave lrsquoensemble des
communes ne disposant pas drsquoun eacutetablissement dispensant un enseignement de langue
reacutegionale ce qui est coheacuterent au regard de lrsquoobjet de la loi Les critegraveres de la participation
financiegravere preacutevus par lrsquoalineacutea 10 de lrsquoarticle L442-5-1 sont en tout eacutetat de cause objectifs et
rationnels eacutetablis et mis en œuvre depuis plusieurs anneacutees Les garanties de lrsquoarticle 13 de la
DDHC sont donc respecteacutees
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En cinquiegraveme lieu lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir du respect
de plusieurs normes constitutionnelles
En affirmant depuis 2008 que les langues reacutegionales appartiennent au patrimoine de la
France lrsquoarticle 75-1 de la Constitution donne un ancrage constitutionnel au deacuteveloppement
de lrsquousage et de lrsquoenseignement des langues reacutegionales Or sans la participation financiegravere des
communes de reacutesidence agrave la scolarisation des enfants dans les eacutetablissements priveacutes du
premier degreacute sous contrat lrsquoenseignement des langues reacutegionales serait compromis Par
conseacutequent lrsquoarticle 6 de la proposition de loi constitue une garantie leacutegale du respect de
lrsquoaffirmation porteacutee par lrsquoarticle 75-1 de la Constitution
Le mecircme raisonnement sera tenu agrave propos de lrsquoensemble des principes constitutionnels
qui donnent une assise agrave lrsquousage et agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales la liberteacute
drsquoexpression et de communication (article 11 DDHC) la liberteacute drsquoenseignement (PFRLR)
dont pourrait deacutecouler une exigence en matiegravere de droit des parents de choisir les meacutethodes
eacuteducatives (CE 19 juillet 2017 Association Les Enfants drsquoabord et autres ndeg 406150)
lrsquointeacuterecirct supeacuterieur de lrsquoenfant (alineacutea 10 et 11 du Preacuteambule de 1946) le principe drsquoeacutegaliteacute
(article 6 DDHC) le principe drsquoeacutegal accegraves agrave lrsquoinstruction (alineacutea 13 du Preacuteambule de 1946)
Sans lrsquoarticle 6 de la proposition de loi lrsquoeffectiviteacute de lrsquoensemble de ces normes
constitutionnelles serait consideacuterablement atteacutenueacutee et creacuteerait des diffeacuterences de traitement
injustifieacutees et deacutependantes de la volonteacute des communes
De plus lrsquoarticle 6 de la proposition de loi peut se preacutevaloir drsquoun objectif de
clarification et de seacutecurisation du droit applicable qui peut se rattacher agrave lrsquoarticle 16 de la
DDHC degraves lors que les textes jusqursquoagrave preacutesent applicables eacutetaient ambigus et ont donneacute lieu agrave
des contentieux En rendant obligatoire ce qui eacutetait avant une faculteacute pour autant soumise agrave
un rocircle non neacutegligeable du preacutefet lrsquoarticle 6 de la proposition de loi clarifie le droit
applicable Ainsi une deacuteputeacutee preacutecisait lors des deacutebats parlementaires que laquo lrsquoarticle 34 de la
loi pour une eacutecole de la confiance relatif au versement du forfait scolaire a susciteacute de
nombreux imbroglios administratifs Ainsi chez moi en Bretagne plus de 150 demandes de
meacutediation ont eacuteteacute transmises aux services de lrsquoEacutetat ce qui met en lumiegravere lrsquoambiguiumlteacute de la loi
et les difficulteacutes de son application Je soutiens donc fortement lrsquoarticle 2 quinquies [devenu
article 6] issu des travaux du Seacutenat qui legraveve toute incertitude raquo (Mme Claudia Rouaux
Commission des affaires sociales Assembleacutee nationale 31 mars 2021)
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Lrsquoarticle 6 de la proposition de loi creacutee un meacutecanisme subsidiaire et reacutesiduel dont laporteacutee est deacutetermineacutee selon des critegraveres objectifs et rationnels Sans creacuteer ni transfeacutererde nouvelle compeacutetence aux communes cette disposition assure une mise en œuvreuniforme des droits et liberteacutes et peut se preacutevaloir de nombreuses normesconstitutionnelles confeacuterant agrave lrsquoenseignement des langues reacutegionales et agrave son soutienfinancier de solides justifications constitutionnelles
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2021-818 DC - Contribution exteacuterieure Mme Mastorpdf
Lettre Wanda Mastor accompagnant la porte eacutetroite
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure MSchellenberger et autrespdf
Courrier agrave lattention de M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
Courrier agrave M Laurent FABIUS - Langues Reacutegionales
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure assESKOLIL pdf
lettre daccompagnement CC
Porte eacutetroite loi langues reacutegionales (2)
2021-818 DC - Contribution exteacuterieure M Bertrand Pancherpdf