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ROZEL Claire-Marie Université Catholique de l'Ouest Institut de Psychologie et de Sociologie Appliquées Année universitaire 2007 - 2008 MASTER 2 MEMOIRE DE RECHERCHE Spécialité : Psychologie Sociale Parcours : Ingénierie des Ressources Humaines Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ? Directeur de mémoire : Philippe-Didier GAUTHIER Session : Septembre 2008

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L’objet de cette étude vise à mieux connaître les chercheurs d’emploi qui utilisent les supports du Web 2.0 : leurs stratégies, leurs attentes face à l’emploi et à confronter leurs propos à ceux de consultants en cabinet de recrutement ou en agence de communication RH. Ainsi, après être revenu sur l’ensemble des pratiques de ces professionnels et avoir décrit les outils et services du Web 2.0 exploités dans une démarche de e-recrutement, cette étude questionne les raisons qui poussent ces acteurs à utiliser ces nouveaux supports. Il s’agit donc de comprendre comment les candidats et les recruteurs s’approprient le Web 2.0 pour atteindre leurs buts : Pourquoi et comment s’approprient-ils les outils et services du Web 2.0? Ces outils constituent-ils un simple dispositif de rencontre entre candidat et recruteur ou modifient-ils la nature de leur relation ?

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ROZEL Claire-Marie Université Catholique de l'Ouest

Institut de Psychologie et de Sociologie Appliquées

Année universitaire 2007 - 2008

MASTER 2

MEMOIRE DE RECHERCHE

Spécialité : Psychologie Sociale

Parcours : Ingénierie des Ressources Humaines

Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la

promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

Directeur de mémoire : Philippe-Didier GAUTHIER

Session : Septembre 2008

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“ Demain, le problème principal sera peut-être bien la capacité

à sortir de la communication médiatisée pour

éprouver une communication directe, humaine, sociale.”

Dominique Wolton, Révolution dans la communication

(Le Monde Diplomatique – Juillet 1999 – p. 90)

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Charte de non-plagiat

Je soussignée, Claire-Marie ROZEL, étudiante à l'IPSA en Master 2, certifie que le texte présenté comme dossier (validé officiellement dans le cadre d'un diplôme d'Etat) est strictement le fruit de mon travail personnel. Toute citation (sources Internet incluses) doit être formellement notée comme telle, tout crédit (photo, illustration diverse) doit également figurer sur le document remis. Tout manquement à cette charte entraînera la non prise en compte du dossier.

Fait à Paris, le 11 septembre 2008. Signature Claire Marie ROZEL

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Remerciements

Je tiens tout particulièrement à remercier chaleureusement Philippe-Didier

GAUTHIER pour ses précieux conseils, son infinie patience, sa grande curiosité et son

humanité. Merci d’avoir toujours su trouver les mots et le temps pour m’encourager.

Je souhaite aussi remercier Marine DE LUZE et Sophie ANTHIME, directrices du

cabinet Alter Ego, de m’avoir accueillie avec confiance au sein de leur formidable équipe

durant huit mois.

Par ailleurs, je remercie chacun des candidats et des recruteurs ayant accepté de

collaborer à notre projet et sans lesquels rien n’aurait été possible. Merci pour leur

disponibilité et leur ouverture d’esprit.

Je tiens, une nouvelle fois, à remercier Julie ROTEREAU qui a veillé sur moi durant

plusieurs mois, et m’a permis de finaliser sereinement cette étude, et mes études !

J’ai enfin, une pensée émue pour ma fille, Eponine. Nous avons été solidaires l’une de

l’autre tout au long de cette recherche…Merci ! Et merci à Nicolas, son papa.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 2 -

Table des matières

Introduction .............................................................................................................................. 4

Chapitre 1 : Du recrutement au e-recrutement avec le Web 2.0 ........................................ 9

I – Le recrutement « traditionnel »..................................................................................... 9 II- Internet et le modèle classique d’intermédiation du marché du travail .................. 13

1- Le e-recrutement par les intermédiaires marchands du marché du travail........ 13 A) Les pratiques des cabinets de recrutement .............................................................. 13 B) Les pratiques des agences de communication RH .................................................. 15

2- Le profil des employeurs-utilisateurs d’Internet .................................................... 17 A) Les principales utilisations d’Internet dans le recrutement..................................... 17 B) Les différents sites Internet utilisés par les annonceurs pour recruter..................... 19

3- Le profil des candidats - utilisateurs d’Internet..................................................... 22 A) Les utilisateurs d’Internet au quotidien................................................................... 22 B) Les chercheurs d’emploi sur Internet ...................................................................... 24 C) Le rôle des concepteurs de sites emploi dans la situation de e-recrutement ........... 27

4 - Schéma récapitulatif de la situation de e-recrutement .......................................... 30 III- Impacts des technologies 2.0 sur la relation candidat / recruteur .......................... 31

1- Les mutations technologiques du Web 2.0 ............................................................... 33 A) Le développement des contenus générés par l’utilisateur....................................... 34 B) L’apparition des réseaux sociaux et des outils collaboratifs ................................... 35 C) L’avènement des blogs et des médias personnels ................................................... 37 D) L’évolution de la relation Homme / Ordinateur...................................................... 38

2- Du recrutement 1.0 au recrutement 2.0 ? ................................................................ 42

Chapitre 2 : Méthodologie ..................................................................................................... 48 I- Fondements de l’étude ............................................................................................... 48

A) Rappel de la problématique......................................................................................... 48 B) Concepts clés et cadre de référence............................................................................. 49

II- Choix méthodologiques et recueil des données........................................................... 58 A) Positionnement méthodologique : une approche qualitative...................................... 58 B) Choix de la population interrogée .............................................................................. 58 C) Méthode de recueil des données : les entretiens semi-directifs................................... 59 D) Méthodologie d’analyse des données.......................................................................... 60 E) Les différents thèmes d’analyse................................................................................... 61 F) Présentation des entretiens........................................................................................... 64

Chapitre 3 : Analyse des données et interprétation des résultats ...................................... 68

I- Point de vue des candidats / chercheurs d’emploi .................Erreur ! Signet non défini. A) Thème 1 : Le Web 2.0 et le marché du travail ...................Erreur ! Signet non défini. B) Thème 2 : Stratégies d’usages du Web 2.0.........................Erreur ! Signet non défini. C) Thème 3: Représentations vis à vis du recrutement ...........Erreur ! Signet non défini.

II- Point de vue des recruteurs / annonceurs ................................................................... 85 A) Thème 1 : Web 2.0 et recrutement .............................................................................. 85

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B) Thème 2 : Stratégies d’usages du Web 2.0.................................................................. 92 C) Thème 3 : Représentations vis à vis des candidats et du Web 2.0 .............................. 96

III- Synthèse de l’analyse des données .......................................Erreur ! Signet non défini.

Chapitre 4 : Discussion ........................................................................................................ 101 I - Raisons et modalités d’appropriation des supports Web 2.0 par les intermédiaires non institutionnels du marché de l’emploi ..................................................................... 101 II Evolution des pratiques du recrutement pour les candidats, les recruteurs et les concepteurs de site........................................................................Erreur ! Signet non défini.

Conclusion............................................................................................................................. 107

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Introduction

Dans une société où se généralisent les difficultés d’accès à l’emploi des jeunes

comme des seniors, où se développe le travail précaire, où la concurrence entre les entreprises

mais aussi entre les candidats s’accroît, et dans laquelle 40 % des entreprises éprouvent tout

de même des difficultés à recruter, les acteurs du marché du travail sont à la recherche de

nouveaux outils leur permettant de répondre à leurs attentes.

Depuis 1995, Internet a justement fourni au marché du travail un ensemble de

technologies permettant de diffuser et de traiter de l’information de manière décentralisée, en

temps réel et à faible coût : depuis leurs postes, employeurs et candidats peuvent dès lors

diffuser offres et demandes, les consulter, les trier ; les délais de traitement sont

considérablement réduits et les coûts, sans comparaison avec ceux induits par une diffusion

dans la presse ou au sein d’un réseau physique. Ainsi en 2003, « 85% des entreprises qui

utilisent Internet pour recruter en sont satisfaites »1. Mais que signifie aujourd’hui « recruter

par Internet » ? Et surtout quels sont les nouveaux usages d’Internet dans ce domaine?

Depuis 2005, le e-recrutement a en effet considérablement évolué avec l’avènement du

Web 2.02 qui offre la possibilité à tout internaute de devenir auteur et acteur du réseau. Le réel

apport du Web 2.0 se situe dans sa capacité à proposer des outils tels que les blogs, les

réseaux sociaux, les plate-formes de mise en relation professionnelle ou les services de

partage en ligne, notamment utilisés par les candidats et les recruteurs pour se rencontrer sur

le marché du travail. Mais quels sont ces outils ? Quels intérêts présentent-ils dans une

démarche de recrutement ou de recherche d’emploi et quels peuvent être leurs effets sur la

relation candidat / recruteur ? L’APPEI3 souligne par exemple qu’« Internet permet au

candidat d’accéder à des informations complètes concernant l’employeur, ce qui facilite

l’identification au poste et à l’entreprise ». La situation est à peu près identique du côté des

recruteurs qui, dès lors qu’ils ont un poste à pourvoir, cherchent à le faire dans des conditions

1 In PERROT, S. (2003). Recrutement en ligne : les entreprises du CAC 40. CREPA. Deuxième journée d’étude et de recherche « GRH et TIC », p.1. 2 A partir du Web 2.0, l’internaute devient actif : il crée son propre contenu, il partage des informations (photos, vidéos…), se crée un réseau etc. Le Web 2.0 c’est le Web interactif et collaboratif. 3 Association des Professionnels pour la Promotion de l’Emploi sur Internet.

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optimum en exploitant les nouveaux services offerts par Internet. Sutter4 établit d’ailleurs un

parallèle entre une démarche e-business et une démarche e-recrutement : « vendre / recruter

en ligne, c’est fidéliser les clients / candidats afin qu’ils renouvellent leur acte d’achat / de

candidature sur le site de l’entreprise et non des concurrents ». Ainsi, par l’intermédiaire

d’Internet, les entreprises cherchent à améliorer leur image pour attirer et fidéliser les

candidats.

L’objet de cette étude vise à mieux connaître les chercheurs d’emploi qui utilisent les

supports du Web 2.0 : leurs stratégies, leurs attentes face à l’emploi et à confronter leurs

propos à ceux de consultants en cabinet de recrutement ou en agence de communication RH.

Ainsi, après être revenu sur l’ensemble des pratiques de ces professionnels et avoir décrit les

outils et services du Web 2.0 exploités dans une démarche de e-recrutement, cette étude

questionne les raisons qui poussent ces acteurs à utiliser ces nouveaux supports. Il s’agit donc

de comprendre comment les candidats et les recruteurs s’approprient le Web 2.0 pour

atteindre leurs buts : Pourquoi et comment s’approprient-ils les outils et services du Web

2.0 ? Ces outils constituent-ils un simple dispositif de rencontre entre candidat et

recruteur ou modifient-ils la nature de leur relation?

Ayant effectué mon stage de fin d’études au sein d’un cabinet de recrutement

généraliste et indépendant, j’ai été amenée à explorer toutes les potentialités de l’outil Internet

en consultant des blogs5, des e-portfolios6, des CV vidéos7 ou interactifs8, en parcourant les

réseaux sociaux nouvellement présents sur le Net via des actions spécifiques (e-mailing, push

d’annonces, sur des sites sociaux tels que « copains pro » ou « Viadéo » et publicité pour des

évènements recrutements à grande échelle sur « Facebook » par exemple).

Force est de constater en effet, que l’arrivée des générations du « Baby-boom » à l’âge

de la retraite, va avoir pour conséquence des perspectives de pénuries de main-d’œuvre dans

divers secteurs. Aussi, parce que les jeunes qui sont en âge d’intégrer les entreprises

considèrent moins que jamais le travail comme une finalité, et parce que nombre de métiers

traditionnels ont une mauvaise image et sont délaissés par les jeunes générations, les

entreprises se trouvent face à un défi inédit qui les oblige à repenser leur image en fonction

4 Cité dans PERROT, S. (2003). Recrutement en ligne : les entreprises du CAC 40. CREPA. Deuxième journée d’étude et de recherche « GRH et TIC ». 5 Exemple de blog CV: www.antoineleroux.fr 6 Exemple de e-portfolio : www.viadeo.com/en/profile/bonnaud.gisela 7 Exemple de CV Vidéo : www.youtube.com/watch?v=pYBN9Y6ymaQ 8 Exemple de CV interactif : www.moncvinteractif.fr

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des valeurs qu’elles veulent partager avec des collaborateurs considérés comme leurs premiers

clients. Déjà de 1998 à 2001, les entreprises françaises ont connu ce que certains ont appelé

« une guerre des talents ». Elles ont du rivaliser d’imagination pour attirer et retenir les jeunes

diplômés et les hauts potentiels en mettant en place des salles de massage dans l'entreprise,

des crèches, des stock-options…En témoigne la nouvelle tendance qui émerge tout juste sur la

toile via Dailymotion 9 : les entreprises qui réalisent un « lipdub »10 (aussi appelé « ipud »),

tentent de se montrer attractives et modernes.

▫ Le cabinet de recrutement « Alter Ego Solutions » comme lieu de stage

Le cabinet Alter Ego Solutions de recrutement, cabinet au sein duquel j’ai effectué

mon stage de fin d’études propose justement une offre mixte, a mi-chemin entre un cabinet et

une agence de communication : l’objectif du cabinet est de développer pour les entreprises

une stratégie construite sur mesure, afin d’améliorer la performance globale de leur fonction

recrutement en s’appuyant notamment sur des actions de communication et de marketing RH.

Ces « savoir-faire » s’appuient sur une connaissance approfondie du marché de l’emploi, des

attentes des entreprises, mais aussi des attentes des candidats eux-mêmes. Alter Ego mène en

ce sens des études qualitatives et quantitatives permettant de mieux cerner l’image employeur

d’un groupe client. Certaines de ces études ont d’ailleurs donné lieu à la préparation de tables

rondes : réunions de personnes appartenant à la même population cible, pour discuter de

problématiques liées à l’emploi et à la relation entreprises / candidats.

Pour répondre à tous les types de besoins en recrutement exprimés par les entreprises,

Alter Ego Solutions use notamment de deux approches :

La première approche mise avant tout sur la réflexion et l’analyse. Ce travail permet

d’établir une problématique claire et précise, expliquant les difficultés de recrutement connues

par l’entreprise. Alter Ego doit alors être capable d’apporter un avis objectif sur les pratiques

et sur les outils employés par l’entreprise qui connaît des difficultés de recrutement (moyens

de sourcing utilisés, la cooptation, les annonces presse et Web etc.). Prendre connaissance de

l’histoire du groupe, de sa culture d’entreprise, de son actualité dans la presse fait aussi partie 9 Dailymotion est une entreprise d'origine française offrant un service en ligne de partage et de visionnage de clips vidéos. Source Wikipedia. 10 Un Lipdub désigne une vidéo réalisé en play back par des particuliers destiné généralement à une diffusion sur Internet ou autre réseau. Réalisé dans le milieu professionnel, plus particulièrement dans celui de la communication, ces vidéos démontrent généralement de la bonne humeur qui règne dans une équipe ou une entreprise. Source Wikipedia.

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de ce travail d’analyse, tout comme l’évaluation de l’attractivité de l’image employeur de

l’entreprise. Elle doit aboutir à des propositions concrètes pour améliorer la performance

globale du recrutement de la structure cliente.

La deuxième approche est beaucoup plus opérationnelle. Il s’agit d’une proposition

d’assistance au recrutement. A la différence d’un cabinet classique, les consultants d’Alter

Ego s’attachent à évaluer l’adéquation entre les projets professionnels des uns et les besoins et

la performance économique des autres. Cette démarche laisse à l’entreprise cliente une totale

maîtrise du processus d’évaluation du « savoir-être » des candidats. En effet, le travail du

consultant consiste à effectuer une mission de sourcing11 sur les CVthèques des sites emplois

principalement, puis à effectuer une sélection via une série d’entretiens téléphoniques plus ou

moins longs. Les CV des candidats retenus sont alors transmis à l’entreprise qui cherche à

recruter, qui entre à son tour en contact avec les candidats pour les convier à des entretiens

dans ses locaux.

▫ Ma pratique professionnelle au sein du cabinet

Alter Ego Solutions étant un cabinet généraliste, ses clients appartiennent à tous les

secteurs d’activité. J’ai ainsi pu travailler en tant que « chargée de stratégie de sourcing », sur

une multitude de missions d’assistance au recrutement pour des groupes évoluant aussi bien

dans les secteurs de la Grande Distribution, de l’Industrie, que des Services. Chaque

entreprise ou groupe a en effet, sa manière de collaborer avec un prestataire en recrutement :

certaines préfèrent faire appel à un prestataire pour une mission ponctuelle, d’autres sollicitent

cette aide pour des missions de veille (pour être sûres de pouvoir recruter tout au long de

l’année les meilleurs profils). D’autres entreprises encore, peuvent seulement demander un

« webdragon » (simple recherche de CV sur le Web). Dans d’autres cas, l’entreprise demande

au prestataire d’effectuer une mission de sourcing, dûment complétée par une étape de pré

qualification des candidatures. Le consultant convient du profil et de la cible recherchée par

l’entreprise et débute ses recherches : la plupart des offres sont aujourd’hui diffusées sur les

sites emplois. Rapides, ces sites sont devenus l’outil privilégié des recruteurs, comme des

11 Le sourcing (ou identification en français) est un terme utilisé en gestion des ressources humaines pour décrire un processus qui a pour objectif d'identifier des candidats correspondant aux profils recherchés par le client. L'identification est à la fois un processus interne — recherches multicritères au sein du vivier de candidats, bases de données internes, annuaires des Écoles... — et externe — phoning par les chargés de recherche, recherches sur le Web, accès à des candidathèques et à des cvthèques. Source Wikipedia.

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candidats. Doublés de cvthèques consultables par tous les recruteurs inscrits et clients, ils sont

devenus un vivier essentiel mais peut-être aujourd’hui insuffisant, dans les recherches de

profils.

Ainsi, pour toujours être en mesure de proposer de nouvelles solutions adaptées au

marché, ma pratique professionnelle s’est inscrite dans ce cadre particulier au sein duquel la

mobilisation d’Internet pour recruter permet de concurrencer ou de se substituer aux autres

canaux existants, mais aussi d’innover dans les manières d’approcher des candidats potentiels.

Cette nouvelle manière de travailler, via les supports du Web 2.0, impose aux recruteurs

d’être visibles sur la toile car les candidats semblent se faire de plus en plus exigeants et

sélectifs.

▫ Plan du mémoire

Nous débuterons cette étude en posant les règles de base du processus de recrutement

et du métier de consultant en recrutement et en marketing RH, puis en brossant en quelques

traits les origines et la terminologie courante du Web 2.0. Nous terminerons cette première

partie contextuelle en évoquant de manière non exhaustive, les différents usages du Web 2.0

et leurs enjeux dans une situation de « e-recrutement ».

Dans un second temps, nous présenterons les données qualitatives recueillies pour

supporter notre réflexion sur les modes d’appropriation du Web 2.0 par les acteurs du

recrutement, candidats comme recruteurs et agences de communication (concepteurs de sites).

Cette méthodologie se centre sur l’exploitation d’entretiens, que nous détaillerons dans cette

seconde partie.

Après avoir analysé ces témoignages, nous tâcherons de définir le lien entre candidats

et recruteurs via les différents usages des supports du Web 2.0, et de comprendre leurs

impacts sur le e-recrutement en questionnant l’évolution de la relation candidat / recruteur.

Enfin, après avoir confronté cette analyse au regard de supports plus théoriques, nous

conclurons cette discussion par les enjeux concernant la posture des acteurs du marché face à

ces nouveaux usages, ainsi que par quelques tentatives de pronostic sur les perspectives

d’avenir du Web dans le domaine du recrutement.

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Chapitre 1 : Du recrutement au e-recrutement avec le Web 2.0

Le recrutement est une fonction stratégique pour la gestion des ressources humaines et

pour l’entreprise d’une façon générale. Le responsable du recrutement doit pouvoir procéder à

une allocation optimale des ressources humaines en trouvant la meilleure concordance

possible entre les besoins de l’entreprise et les souhaits et compétences des candidats. Dans ce

premier chapitre nous évoquerons ainsi le processus « traditionnel » du recrutement avant

d’expliciter ses évolutions en lien avec l’avènement et le développement de l’Internet depuis

1995.

I – Le recrutement « traditionnel »

Barber12 en 1998, définit le recrutement comme « les pratiques et activités supportées

par les entreprises, ayant pour but d’identifier et attirer les candidats potentiels ». Selon

Heneman et al., le recrutement est « une partie du processus de développement du personnel,

où le candidat et l’entreprise s’allient pour former une relation de travail »13.

Différentes raisons peuvent généralement inciter une entreprise à recruter :

- Le remplacement d’un collaborateur en mobilité interne, partant en retraite,

démissionnaire, licencié, en congé maternité, en congé maladie ou en congé paternité,

- L’accroissement de l’activité,

- La volonté d’anticiper des évolutions futures.

Traditionnellement, le processus de recrutement comporte sept voire huit étapes

incontournables14 :

12 Cité dans IN, L. (2005). The Evolution of e-recruiting : a content analysis of fortune 100 career web sites. Journal of Electronic Commerce of Organizations, vol.n°3, Iss. 3, p.58. 13 IN, L (2005). Idem, p.58. 14 GRENAIN, L ; LEROND, M. (1987). Stratégie du recrutement, Paris : Editions Performa, p. 30 et p.54.

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- L’analyse de la demande

Cette étape correspond à l’évaluation du besoin réel. Il s’agit de s’assurer que le

recrutement est la bonne solution.

- La définition de fonction

Pour s’assurer que le recrutement prévu réponde aux besoins réels de l’entreprise, il est

nécessaire de réaliser une définition de fonction qui détaille le contenu du poste à pourvoir et

les responsabilités associées à ce poste.

- Le profil de poste (qui va orienter la rédaction de l’annonce)

Le profil de poste vient compléter la définition de fonction pour permettre d’identifier le

profil du candidat idéal et les compétences recherchées en terme de savoirs, de savoirs faire et

de savoirs être.

- Le choix de la stratégie et des sources de candidatures

Afin de trouver des candidats, il existait avant l’avènement du « e-recrutement »,

différentes méthodes de sourcing ou canaux de recrutement, tels que :

- La rédaction et la passation d’annonce (à paraître dans la presse, à l’ANPE ou à l’APEC,

dans les écoles cibles…)

- L’approche directe (chasse de tête) ou les cabinets de recrutement (dits de publication)

- La cooptation ou le parrainage

- Les relations écoles et les associations d’anciens élèves

- Les salons de recrutement

- Les agences d’intérim

- L’ANPE (Agence Nationale Pour l’Emploi) et l’APEC (Association Professionnelle pour

l’Emploi des Cadres) qui sont les intermédiaires institutionnels du marché du travail.

- Le réseau personnel et professionnel

- La candidature spontanée

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ROZEL Claire-Marie - 11 -

D’une manière générale, les entreprises s’adressent au « marché » pour recruter, soit

en limitant la prospection à un public restreint (membres de l’entreprise, à des ex-employés,

stagiaires, à un réseau de connaissance personnel et aux personnes ayant envoyé leur

candidature de manière spontanée), soit en faisant un large appel à candidatures en utilisant

une adresse directe (en publiant une annonce), ou une adresse indirecte (en passant par un

intermédiaire formel). L’entreprise peut ainsi décider :

- de réaliser seule le recrutement et de prendre en charge l’intégralité du processus (de la

recherche de candidatures à l’intégration de la nouvelle recrue).

- de l’externaliser et donc de le sous-traiter auprès d’un cabinet spécialisé dans le

recrutement, voire spécialisé dans la « chasse de tête » (approche directe).

Le consultant externe peut ainsi intervenir à différents moments du processus de

recrutement : dès l’analyse de poste, pour la recherche de candidatures, à partir du tri des CV,

pour la réalisation de l’évaluation des compétences (tests et/ou entretiens) ou bien encore

pour des conseils à la mise en œuvre de la méthodologie de recherche de candidats.

- Le tri des candidatures

Il est nécessaire de réaliser un premier tri dans les candidatures reçues afin de ne

convoquer en entretien que les candidats susceptibles de répondre aux besoins de l’entreprise.

Il s’agit alors par l’analyse des curriculums vitae reçus et des lettres de motivation, de

confronter leurs caractéristiques (expériences, formation) avec les exigences du poste.

- L’entretien de sélection (éventuellement accompagné de tests)

L’entretien permet de présenter le poste à pourvoir au candidat et de recueillir son

sentiment. Il s’agit concrètement pour le recruteur de l’interroger sur sa formation, son

parcours professionnel et ses motivations pour le poste et l’entreprise, mais aussi de tenter

d’évaluer son potentiel d’acquisition de compétences et d’adaptation.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

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- La proposition

Une fois la décision arrêtée par le responsable hiérarchique, celui-ci doit réaliser une

proposition afin de négocier les différents éléments du contrat de travail avec le candidat

retenu.

Ajoutons que la signature du contrat de travail ne signifie pas la fin du recrutement : il est

important d’assurer l’accueil et l’intégration du nouveau collaborateur. Un livret d’accueil

expliquant le fonctionnement de l’entreprise peut donc être remis au salarié et une formation

aux outils requis pour le poste peut être dispensée durant les premiers jours, pour en faciliter

la prise en main.

Le recrutement est une situation qui met en présence deux types d’acteur à satisfaire :

le candidat et le recruteur. Chacun de ces acteurs est porteur d’une stratégie : le candidat, celle

de son projet professionnel, traduction de ses souhaits d’évolution, en fonction de son capital

de compétences acquises durant son expérience professionnelle ; le recruteur, celle du profil

des compétences requises pour le poste à pourvoir, traduction des orientations stratégiques de

l’entreprise. Chaque acteur est à ce titre porteur d’une offre et d’une demande. Le candidat

«offre» son capital de compétences acquises, il recherche des emplois qui correspondent à sa

«demande», son projet professionnel. Le recruteur «offre» un emploi, il recherche des

candidats qui correspondent à sa demande, le profil du poste à pourvoir.

D’après « Façons de recruter »15 de Eymard-Duvernay, le recrutement consiste ainsi à

priori, à fixer des critères de compétence ou d’incompétence pour juger si les personnes

proposant leurs candidatures conviendront au poste à pourvoir. Il est possible de résumer ce

processus de cette manière16 :

15 BESSY, C ; EYMARD-DUVERNAY, F. (sous la direction de), (1997). Les intermédiaires du marché du travail, Paris, PUF-386 p. 16 Schéma extrait du mémoire de recherche présenté par BAHIER, L. (2000). Internet transforme-t-il les règles de la rencontre candidat / recruteur ? DESS de Psychologie Sociale.

Rencontre dispositif de jugement

Offre d’emploi : - entreprises - cabinet conseil

Demande : - candidats

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Dans cette configuration, il existe une dissymétrie de l’information : les recruteurs et

annonceurs possèdent l’information sur leurs besoins en RH, tandis que les candidats savent

de leur côté à quels types de postes ils souhaitent accéder ainsi que leurs environnements. La

rencontre entre ces deux types d’acteurs permet un échange d’information et met en œuvre un

dispositif de jugement mutuel entre candidat et recruteur, qui tentent d’évaluer ce que peut lui

apporter l’autre. Au cours de la rencontre, il s’établit un compromis (de type accord ou

désaccord) entre les attentes et les besoins de chacun. Ainsi, si dans une situation de

recrutement la rencontre est nécessaire, elle est « troublée » par la notion de jugement ou

d’évaluation (connotations, attributions, représentations sociales…).

II- Internet et le modèle classique d’intermédiation du marché du travail

Depuis 2000, on assiste en France au développement du e-recrutement, définit par In

comme « les pratiques et activités supportées par l’entreprise qui utilise une variété de

moyens électroniques pour remplir les postes vacants de manière efficace et efficiente »17. En

effet, le e-recrutement permet « au responsable opérationnel [au recruteur] d’intervenir tôt

dans le processus de sélection, d’être actif dans la prospection, vérifiant l’adéquation entre

les compétences qu’il recherche et celles disponibles sur le vaste marché des CVthèques »18.

1- Le e-recrutement par les intermédiaires marchands du marché du travail

A) Les pratiques des cabinets de recrutement

Faire appel à un prestataire externe permet à l’entreprise de bénéficier d’un regard

neuf, conscient et connaisseur de la réalité du marché et neutre sur les questions en jeu.

Généralement, les cabinets de recrutement se déclinent en trois genres : les cabinets de

publication d’offres (annonces), les chasseurs de tête et les autres cabinets de recrutement,

comme celui au sein duquel j’ai réalisé mon stage de fin d’études, qui concilient les deux

approches.

17 IN, L. (2005). The evolution of e-recruiting : a content analysis of fortune 100 career web sites. In Journal of Electronic commerce in Organizations. Vol 3, Iss. 3, p. 57. 18 PERETTI, J.M. (2003). Ressources Humaines (8ème édition). Paris :Librairies Vuibert.

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Nous avons vu que pour trouver la « perle rare » en tant qu’intermédiaire, il est

nécessaire de suivre plusieurs étapes clés : l’analyse et la définition du profil, la recherche des

candidats, la présélection et la sélection des candidats retenus. Ainsi, après un premier travail

d’analyse survient la recherche de candidats, aujourd’hui facilitée et plus accessible grâce à

l’avènement d’Internet.

Les cabinets de publication diffusent généralement leurs annonces soit dans la presse,

soit sur le Web (sur des sites généralistes ou spécialisés), pour attirer l’attention des candidats

et recruter. Dans un premier temps, le conseiller en recrutement reprend sa description de

poste pour rédiger une offre d’emploi pertinente. L’utilisation et la rédaction des annonces

impliquent en effet une réflexion de la part du consultant, qui axe son choix selon la stratégie

adoptée pour toucher le maximum de candidats.

Cette procédure n’est pas la même que celle choisie par les chasseurs de tête, dont la

mission est généralement plus confidentielle et la technique plus précise : après identification

et sélection de « cibles » potentielles en poste, le chasseur de tête utilise l’approche directe en

prenant directement contact avec le candidat identifié, par exemple par le biais de forums

emploi ou de groupes de discussion. Ces applications Internet sont encore peu connues, car

davantage utilisées par les recruteurs qui se mêlent aux conversations pour repérer les

internautes disposés à déposer leur CV sur le site du cabinet. Certaines entreprises choisissent

ce mode de communication interactif avec les chercheurs d’emploi car cela leur permet aussi

de poser des questions aux recruteurs et de recevoir des réponses immédiates. Cette pratique

donne une image moderne de l’entreprise et nous verrons qu’elle peut induire de lourds

bénéfices en terme de sourcing.

L’innovation majeure permise par Internet dans le domaine du recrutement a trait à la

possibilité de consulter des candidatures sur des CVthèques ou candidathèques ou sites

d’offres d’emploi. Ce sont des bases de données de CV, accessibles par les entreprises ou les

cabinets de recrutement, qui offrent des listes d’offres d’emploi mises à jour quasiment en

temps réel. De telles candidathèques étaient auparavant constituées par des intermédiaires

professionnels sans que les entreprises y aient un accès direct. Aujourd’hui, elles se

positionnent comme des intermédiaires incontournables entre les annonceurs (qu’ils soient

cabinets ou entreprises) et les candidats potentiels. Ces sites emplois peuvent être généralistes

ou bien spécialisés sur une région ou un secteur d’activité et proposent des offres d’emploi

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(service historique), des candidathèques, des conseils à chacun des utilisateurs de ces

logiciels, etc. Une entreprise ou un cabinet souhaitant utiliser ces sites devra choisir une

stratégie en fonction de la population qu’elle souhaite cibler. A noter que pour la plupart, les

jobboards offrent des services gratuits aux candidats tandis qu’ils proposent un abonnement

(ou forfait) d’accès aux bases de CV et un achat d’espace Web (dans le cas de la diffusion

d’annonces), aux recruteurs.

Enfin, toute analyse de CV doit porter sur des critères logiques et objectifs :

l’expérience professionnelle, le niveau de formation, les compétences acquises au cours des

précédentes expériences professionnelles, la disponibilité et la mobilité géographique. Une

fois ce travail de présélection effectué, le recruteur contacte et rencontre au cours d’un

entretien les personnes dont le profil semble adéquat. Le consultant peut établir une « short-

list », composée des noms des meilleurs candidats rencontrés et faire part de ses conclusions à

l’entreprise pour laquelle il travaille. Les responsables du recrutement de l’entreprise en

question peuvent alors prendre contact avec les candidats et décider de recruter. Mais le plus

souvent, c’est le conseiller en recrutement lui-même qui prend cette décision finale et mène à

bien le processus jusqu’à son terme.

B) Les pratiques des agences de communication RH19

Au-delà des cabinets de recrutement, qu’ils soient de publication ou de chasse,

d’autres prestataires peuvent intervenir pour soutenir les campagnes de recrutement d’une

entreprise. Il s’agit des agences de communication.

Ces prestataires valorisent également une expertise bien particulière par l’utilisation de

moyens de communication pour augmenter la notoriété de leur client. Ces agences sont

orientées vers le monde des Ressources Humaines et connaissent les stratégies à adopter pour

promouvoir auprès du grand public « l’employeur branding » ou « l’image employeur » du

client en question. La mission de ces agences est donc de travailler sur la notoriété de

19 Les agences de communication « globales » proposent de prendre en charge l'ensemble des besoins de communication d'une entreprise au travers des cinq principaux pôles du domaine de la communication : audit de la communication, conseil (avec recommandation d'actions) ; communication globale (communication commerciale ou produit), communication institutionnelle, communication de marque, communication événementielle, communication corporate et financière) ; studio graphique (création visuelle, effets spéciaux, retouche et traitement de l'image, prise de vue, objet, signalétique, Virtual Intelligence...) ; Internet (création de site vitrine, dynamique, e-commerce) et le Multimédia (e-card, CD rom)

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l’entreprise, en jouant s’il le faut, sur l’identité et sur les valeurs du groupe : communiquer sur

une image employeur attractive, gage d’une plus grande efficacité notamment dans les

campagnes de recrutement de masse. Là aussi, ces agences doivent en premier lieu mener une

sorte d’enquête pour découvrir qui est l’entreprise pour laquelle elles travaillent, quelle est

son histoire, ses valeurs, ses défauts. Par exemple, il est nécessaire de connaître les points

forts et les points faibles de l’entreprise, notamment en terme de politique RH, pour bien les

expliquer aux futurs recrutés. C’est de cette transparence que vient aussi le potentiel de

séduction d’une entreprise qui recrute.

Le marketing RH20 définit comme « l’ensemble des méthodes et des moyens dont

dispose une entreprise pour créer, délivrer et communiquer de la valeur, auprès de ses

salariés actuels et/ou potentiels et pour gérer la relation avec eux d’une manière qui soit

profitable à l’organisation et aux salariés », est un travail de communication qui offre une

place de choix au média Web : le site officiel d’une entreprise ou d’un grand groupe devient

aujourd’hui sa vitrine principale. La possibilité de diffuser des annonces sur son propre site

d’entreprise apparaît comme l’une des innovations majeures autorisées par Internet, sur lequel

se sont multipliés les sites corporate. Elle permet à l’entreprise de prospecter plus largement

le marché du travail, sans sortir pour autant l’annonce du contexte dans lequel l’emploi est

offert. Les sociétés, obligées de se différencier les unes des autres en mettant en avant leurs

atouts d’employeur, y présentent leur activité, leur localisation, leurs données économiques,

leur effectif, etc. au gré de la politique de communication externe souhaitée, et offrent aussi la

possibilité d’entrer en contact avec les Ressources Humaines. Cette partie RH du site Web de

l’entreprise comporte non seulement les descriptifs des postes existant dans la société, mais

aussi les offres d’emploi disponibles, et surtout donne la possibilité au candidat potentiel de

postuler directement en ligne, de manière spontanée.

Par ailleurs, les agences de communication peuvent aussi apporter leur touche

marketing à ce site pour valoriser l’image d’un employeur mondial, riche de marques et de

produits universels. Ainsi, au delà de l’aide que ces agences peuvent apporter à une entreprise

lors d’une campagne de recrutement, elles peuvent aussi porter durablement les messages RH

d’une entreprise et valoriser l’identité et les valeurs de ce groupe auprès du public interne.

20 FLAMBARD-RUAUD S. (1997) , « Les évolutions du concept de marketing », Décisions Marketing, n°11, Mai-Août, p.7-20.

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Leur expertise peut s’adapter à la culture de chaque entreprise, du livret d’accueil au journal

interne, en passant par la communication managériale. Des « candidats idéaux » ne forment

plus dans ce cas, la cible à atteindre et c’est bien auprès des collaborateurs mêmes de

l’entreprise qu’il faut communiquer et convaincre. Le travail des agences de communication

sur l’image d’un groupe qui veut affiner et mettre en avant sa position de recruteur et

d’employeur émérite, aide également à vendre ce même groupe auprès de consommateurs

potentiels. En ce sens, les agences de communication ou de publicité RH sont capables de

toucher un plus large public que les cabinets de recrutement lors d’une campagne de

recrutement, tandis que les cabinets de recrutement « traditionnels » montrent une réelle

efficacité pour toucher de près une cible définie et particulièrement recherchée pour pourvoir

des postes ouverts à l’embauche.

2- Le profil des employeurs-utilisateurs d’Internet

A) Les principales utilisations d’Internet dans le recrutement

Une enquête OFER21 conçue en 2005 pour répertorier les différents usages d’Internet

dans le processus de recrutement, confirme que l’utilisation d’Internet dans ce domaine

concerne d’abord la réception de candidatures spontanées (23.4% des établissements en ont

réceptionné sur Internet), puis la diffusion d’annonces sur des sites corporate ou un site

emploi (16.8%) et enfin la consultation de candidathèques (6.8%).

A noter que tous les usages d’Internet progressent avec la taille de l’établissement et

cela se vérifie aussi pour la consultation de candidathèques nettement plus répandue dans les

grands que dans les petits et que la réception de candidature et la diffusion d’annonces sur

Internet sont plus fréquentes dans les secteurs de l’énergie et des activités financières que

dans les autres secteurs.

Selon une autre enquête publiée par l’Observatoire de l’ANPE en avril 200522, plus

d’un établissement sur neuf (12%) à déjà eu recours à Internet pour déposer une ou plusieurs

21 L’enquête « Offre d’emploi et recrutement » s’adresse aux établissements du secteur privé employant au moins un salarié. Tirés au sort à partir du répertoire SIRENE de l’Insee et sélectionnés par téléphone, les établissements interrogés sont ceux ayant recruté ou essayé de recruter (hors intérim) au moins un salarié au cours des douze mois précédant la collecte de l’enquête. 22 Enquête réalisée par ZANDA, J-L. (2005). Les Employeurs qui recrutent par Internet. www.anpe.fr/observatoire/emploi_activite/recrutent_par_37.html

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offres d’emploi et /ou sélectionner des candidatures. Cette proportion varie selon les

caractéristiques des établissements : elle est faible dans la construction, le commerce et les

transports et élevée dans les services aux entreprises. Par ailleurs, elle augmente avec la

tranche d’effectifs. Ces proportions doivent cependant être considérées au regard de la

« structure globale » des établissements : voisines dans le commerce et les transports (8%),

mais ne représentant que 3% des établissements, tandis que le commerce en rassemble le

quart. Mais comme les TPE de moins de dix salariés regroupent la grande majorité (84%) des

entreprises, les recruteurs qui ont utilisé Internet sont en grande majorité de petits

établissements. Paradoxalement, les secteurs d’activité où les employeurs sont en proportion

les plus nombreux à vouloir embaucher (construction et transports) sont aussi ceux qui

utilisent le moins ce canal : alors que l’Industrie et le commerce l’emploient assez rarement, il

est souvent mis à contribution dans les services aux entreprises (23%), les services collectifs

(éducation, santé, action sociale…A hauteur de 22%) et les services marchands divers (22%).

Tableau 1 : Proportions d’établissements ayant cherché à recruter et parmi ceux-ci,

d’établissements ayant utilisé Internet (à la fin 2003)

Nous l’avons dit, chercher à recruter par Internet implique particulièrement deux

modalités de recours à ce canal, non exclusives l’une de l’autre : le dépôt d’offres sur un site

et la consultation de candidatures.

Le dépôt d’offre constitue la modalité d’utilisation privilégiée probablement parce que

cette opération est moins coûteuse en temps que la consultation de candidatures : la très

grande majorité des employeurs (89%) qui ont eu recours à Internet pour recruter en 2003, ont

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déposé des offres d’emploi en ligne. Ce dépôt d’offre peut être effectué sur le site de

l’entreprise (site corporate), sur un site spécialisé d’offres d’emploi ou sur un autre site

Internet (généraliste). Les candidats mettent en œuvre une sorte d’auto sélection qui diminue

d’autant les coûts de recherche et de tri, mais qui présente en revanche l’inconvénient de

placer hors de portée certaines candidatures qui auraient pu être intéressantes.

B) Les différents sites Internet utilisés par les annonceurs pour recruter

Compte tenu de ces chiffres, l’existence éventuelle d’un site propre à l’entreprise

semble déterminante car la présence d’un tel site peut avoir une incidence sur le recours au

canal Internet dans des opérations de recrutement et sur les modalités de ce recours.

Ainsi, parmi les employeurs ayant utilisé Internet pour rechercher des candidats, plus

de deux tiers (69%) disposent d’un site d’entreprise. On peut d’ailleurs noter que si les

catégories qui ont plus fréquemment accès à un site d’entreprise y ont plus souvent recours

pour recruter que les autres, celui-ci est loin d’être systématique : seuls 54% des

établissements recruteurs disposant d’un site propre y déposent des offres d’emploi car dans

bien des cas, la probabilité d’attirer uniquement par ce moyen les candidatures souhaitées est

faible. Il est ainsi évident que ces sites d’entreprise sont utilisés conjointement avec un ou

plusieurs sites externes.

Par ailleurs, les employeurs ayant cherché à recruter des cadres (et qui ont tenté de

recruter en ligne, quelle que soit la catégorie visée) sont très peu nombreux (9 %) à n’avoir

déposé aucune offre de cadre sur un site, alors que 26 % de ceux qui ont cherché à recruter

des ouvriers se sont abstenus d’utiliser Internet à cette fin.

Tableau 2 : Etablissements ayant déposé des offres d’emploi sur un site Internet

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Les proportions d’employeurs utilisant les trois grandes catégories de sites (tableau 4)

présentent quelques différences avec celles qui ont été observées en ce qui concerne le dépôt

d’offres. En premier lieu, la consultation de candidatures est un peu plus souvent (44%)

opérée sur le site de l’entreprise. On peut alors penser que le rapport coût/avantages est plus

favorable dans le cas de la consultation que dans celui du dépôt.

Tableau 3 : Etablissements ayant sélectionné des candidatures sur un site Internet

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Tableau 4 : Sites mentionnés par les employeurs ayant consulté des candidatures ligne

Bien qu’il demeure souvent cité, le site Anpe.fr ne l’est plus que par 35 % des

répondants. Ce sont les sites dédiés aux cadres et en particulier celui de l’APEC qui sont en

revanche plus fréquemment consultés : ils totalisent plus de 25 % des mentions.

Par ailleurs, seuls les sites emplois divers restent stables. Ces résultats sont sans doute

à relier aux différences induites en termes de coûts de recherche dans le cas du dépôt d’offres

en ligne et dans celui de la consultation de candidatures. On remarque en effet que les sites

spécialisés ont, dans le cas de la consultation, une place sensiblement plus importante, que

cette spécialisation vaille au regard de la qualification (les sites « cadres ») ou au regard du

domaine professionnel.

La consultation de candidatures apparaît plus fortement génératrice de coûts de

recherche que le dépôt d’offres et l’écart global entre les deux modes d’usage d’Internet par

les recruteurs en témoigne, sauf si cette consultation est réalisée dans des conditions qui

permettent d’améliorer le « ciblage » de ces candidatures, ce qu’autorisent précisément les

sites spécialisés. Le poids de ces derniers s’en trouve ainsi accru, au détriment de celui des

sites généralistes comme celui de l’ANPE ou ceux de la presse généraliste, moins attractifs de

ce point de vue. Une exception notable est cependant fournie par la place importante

qu’occupent Monster et Email-job, qui sont eux aussi des sites généralistes. On peut penser

que cette place tient au volume et peut être à la nature de leur CVthèques, qui compense le

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handicap que pourrait constituer leur absence de spécialisation. En définitive, quelle que soit

la modalité du recours à Internet – dépôt d’offres ou consultation de candidatures –

l’optimisation des coûts de recherche semble bien rendre compte de la nature des sites

utilisés.

3- Le profil des candidats - utilisateurs d’Internet

A) Les utilisateurs d’Internet au quotidien23

Aujourd'hui, plus d'un Français sur deux a déjà utilisé Internet au moins une fois dans

sa vie. La quasi-totalité des jeunes, des cadres et des diplômés de l'enseignement supérieur

sont aujourd'hui initiés à l'usage du Web. En 2005, une personne sur quatre s'est connectée

quotidiennement. C'est deux fois moins qu'en Suède ou au Danemark, leaders européens dans

l'utilisation d'Internet. La recherche d'informations et la messagerie électronique sont les

usages les plus répandus. La messagerie instantanée ou les forums de discussion sont d'autres

moyens pour communiquer sur Internet, surtout utilisés par les plus jeunes.

Fin 2005, 54 % des 15 ans ou plus ont déjà utilisé Internet au moins une fois dans leur

vie. Depuis 2001, chaque année en moyenne, trois millions de nouveaux utilisateurs goûtent à

l'Internet. Mais son usage n’est pas identique selon l’âge, le diplôme, la profession ou encore

le milieu social. Il y a proportionnellement quatre fois plus d'utilisateurs chez les diplômés du

supérieur (89 %) que chez les non-diplômés (23 %). Le même fossé sépare les cadres des

ouvriers ainsi que les hauts revenus des bas revenus. Enfin, le Parisien est plus connecté que

le rural.

La part des personnes ayant déjà surfé sur le réseau est de 95 % chez les 15-19 ans

et tombe à 7 % chez les 70-79 ans. Depuis 2001, toutes les générations n'ont pas connu le

même engouement pour l'Internet : c'est parmi les 30-39 ans, soit parmi la population

active, qu'il a été le plus fort (+ 27 points en 4 ans).

23 FRYDEL, Y (mai 2006). Internet au quotidien : un français sur quatre, division condition de vie des ménages. N°1076, INSEE. Site : http://www.inse.fr/fr/ffc/ipweb/ip1076/ip1076.html

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Tableau 1 : Accès et Usage d’Internet En %

Dispose

d'Internet à la maison

Dispose d’Internet haut

débit à la maison

A utilisé Internet au

moins une fois

A utilisé Internet au cours du dernier mois

(internautes)

Dont internautes utilisant Internet tous les jours ou

presque Ensemble 42,7 32,0 54,3 46,9 55,6 Homme 45,4 33,4 57,8 50,4 57,6 Femme 40,2 30,6 51,0 43,6 53,4

15-19 ans 61,7 48,0 95,2 83,0 46,0 20-29 ans 57,4 47,5 86,6 77,3 58,9 30-39 ans 53,6 38,8 74,3 64,9 60,4 40-49 ans 55,1 41,6 59,5 50,8 56,1 50-59 ans 42,2 30,2 45,0 38,0 53,8 60-69 ans 20,5 12,7 22,0 16,2 54,4 70-79 ans 9,2 5,6 7,4 5,7 56,7 Plus de 80

ans 3,8 2,8 2,0 1,6 Ns

Actif cadre 77,3 55,8 93,3 90,8 71,3 Actif

employé 44,4 33,9 62,8 50,8 54,1

Actif ouvrier 33,9 24,7 44,6 34,6 37,6 Enseignement

supérieur 73,3 54,8 89,4 83,6 66,3

Sans diplôme 19,9 15,0 23,5 18,4 43,5 1er quartile 25,6 19,2 39,8 32,0 40,3 4e quartile 62,3 47,2 72,3 65,2 64,2

Paris 58,2 49,6 67,2 60,9 66,1 Rural isolé 27,9 13,3 37,8 32,2 39,4

Parmi les personnes ayant un emploi, 47 % disposent d'un accès sur leur lieu de

travail. Chez les cadres et les professions intermédiaires, accès professionnel et domestique

se cumulent souvent et rares sont les membres de ces deux groupes professionnels ne

disposant d'aucun des deux accès (5 % pour les premiers, 11 % pour les seconds). À

l'inverse pour les ouvriers, et particulièrement les moins qualifiés, l'accès professionnel est

peu fréquent et va de pair avec un faible accès à la maison.

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Tableau 2 : Internet à la maison et au travail En %

Accès au travail et à la maison

Accès au travail seulement

Accès à la maison seulement Aucun accès

Cadres 65,4 18,5 11,1 5,0 Professions intermédiaires 43,3 22,9 23,2 10,6 Agriculteurs 33,5 0,6 13,4 52,6 Artisans 32,2 9,4 27,1 31,3 Employés 23,0 17,1 22,0 38,0 Ouvrier qualifié 9,5 8,4 25,7 56,5 Ouvrier non qualifié 5,2 4,5 27,7 62,6

B) Les chercheurs d’emploi sur Internet

Dans Le Monde du 21 avril 2005, un article analysant « le marché des offres d’emploi»

se félicitait de ce que « le Net est entré dans les habitudes des candidats, attirés par sa facilité

d’accès»24. L’usage d’Internet est donc devenu une évidence pour les demandeurs d’emploi,

tant les gains permis par cet outil par rapport aux autres méthodes de recherche d’emploi

seraient perceptibles.

Plusieurs études ont mis en avant le profil des Internautes chercheurs d’emplois. Il

ressort ainsi d’une étude de Barel25 en 2002, que plus du tiers des connectés ont entre 25 et 29

ans, que plus de deux tiers sont titulaires d’un bac+3 minimum et que les trois quarts des

cadres et des jeunes diplômés utilisent Internet dans leur recherche d’emploi.

24 ARMAGNAC, B. « Le Marché des offres d’emploi profite au Net », Le Monde, 21 avril 2005. 25 BAREL, Y. (2002). « L’e-recrutement : le point de vue des candidats à l’emploi ». In La GRH dans, et, ou la société de l’information. Actes du XIIème congrès de l’AGRH, p.50.

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Tableau 1 : Impact de l’âge sur les raisons du choix de postulation par Internet

Age Rapidité et

fonctionnalité des services

Eviter de réécrire des lettres de motivations

Adresser un CV sur

mesure et adaptable

Mettre en évidence ses

connaissances techniques

Sonder la pertinence de son CV

Eviter d’être jugé de manière

trop subjective

Total

- 25 ans 54% 26% 6% 3% 0% 11% 100%

25-30 ans 43% 20% 18% 9% 6% 4% 100%

30-35 ans 49% 8% 20% 8% 9% 6% 100%

35-40 ans 49% 21% 11% 4% 10% 5% 100%

40 ans et + 47% 12% 14% 15% 4% 7% 100%

Moyenne 48% 15% 15% 9% 7% 6% 100%

Il apparaît ainsi que, tous âges confondus, 48% des personnes interrogées choisissent

de postuler via Internet pour la rapidité et la fonctionnalité des services Internet. A noter que

seulement 26% des moins de 25 ans utilisent Internet parce que cela leur évite de réécrire les

lettres de motivation.

Barel a par ailleurs analysé les différentes utilisations possibles d’Internet dans la

recherche d’emploi :

Tableau 2 : Principaux usages d’Internet dans la recherche d’emploi

En % Rechercher des informations sur une société 74%

Rechercher un emploi sur un site de recrutement 68%

Visiter le site d’un employeur potentiel 65%

Rechercher des offres d’emploi par secteur 57%

Rechercher des informations sur un secteur d’activité 45%

Envoyer directement son CV à l’employeur 41%

Répondre en ligne à une offre d’emploi 39%

Envoyer son CV à un cabinet de recrutement 38%

Accéder au site d’un employeur depuis un site de recrutement 29%

Déposer son CV sur Internet 24%

Demander des conseils sur la recherche d’emploi 20%

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 26 -

Dans le cadre de leur recherche d’emploi, les candidats utilisent Internet pour trois

raisons principales : rechercher l’information sur une société via un autre support que son site

corporate (74% des personnes interrogées), rechercher un emploi sur un site de recrutement

(68%) et visiter le site d’un employeur potentiel (65%). A noter qu’en 2002, seulement 24%

des personnes interrogées utilisaient Internet pour y déposer leur CV.

Une autre étude26 « Emploi et Internet » datant de 2006, s’est aussi penchée sur les

usages d’Internet dans la recherche d’emploi et a montré que 63 % des personnes interrogées

utilisent les sites emploi lorsqu’elles projettent de changer de travail.

Parmi ces 63% de répondants, 69% sont des hommes âgés entre 18 et 49 ans, 77% ont

au moins un bac+2 et 73% sont parisiens. Ils ont en grande majorité (94%) souligné la

rapidité qu’offre Internet dans la recherche d’emploi et le fait qu’il constitue un canal de

recherche complémentaire aux canaux traditionnels. 91% ont évoqué son aspect pratique et

71% considèrent que les offres y sont plus nombreuses.

A noter qu’à la question, « d’une manière générale, consultez vous des sites emploi

sur Internet ? », 38% des personnes interrogées disent les consulter lorsqu’ils sont en veille,

pour se tenir au courant de l’évolution du marché de l’emploi. Ainsi, par l’avènement d’Internet, faire acte de candidature, postuler, au sens d’être

candidat à un emploi ou de demander une place, est devenu de plus en plus facile et banal : on

peut le faire en un seul « clic ». Néanmoins, le développement du e-recrutement a favorisé

l’émergence d’un nouveau profil de chercheurs d’emploi ; passifs et n’ayant pas forcément

l’intention de quitter leur poste qui mettent leur CV à disposition des recruteurs pour être

consultés.

26 Etude TNS Sofres réalisée pour l'APPEI (Association des professionnels pour la promotion de l'emploi sur Internet) vise à mieux connaître le profil de la population « mobile » ; approfondir les usages en terme de recherche d'emploi - et plus particulièrement les usages d'Internet ; recueillir le jugement des utilisateurs sur ce mode de recherche. Etude réalisée auprès de 331 personnes en 2006.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 27 -

C) Le rôle des concepteurs de sites emploi dans la situation de e-recrutement27

Contrairement aux annonces presse, qui peuvent être consultées en tournant les pages

du journal, les offres diffusées sur Internet sont numérisées et rangées dans des bases de

données a priori invisibles au regard. Leur consultation réclame de nouveaux apprentissages

qui ne sont pas laissés au hasard mais pris en charge par les sites dédiés à l’emploi. En tant

qu’intermédiaires, ceux-ci doivent s’assurer que les anticipations croisées des offreurs et des

demandeurs convergent les unes vers les autres (pour assurer le matching28). Il leur faut donc

intervenir sur les deux versants du marché afin de donner aux candidats les bonnes clés

d’accès aux offres et d’inciter les rédacteurs des annonces à formater ces dernières. Les

gestionnaires de sites développent ainsi des outils pour faciliter les « bonnes » et prévenir les

« mauvaises » rencontres, ce qui suppose de choisir de bons repères d’appariement.

Concrètement, la configuration du moteur de recherche installé sur la page d’accueil

des sites a une dimension stratégique pour les gestionnaires de ces sites. Que devra renseigner

le candidat ? Un titre d’emploi ou un niveau de diplôme ? Un lieu de travail ou un niveau de

salaire ? En effet, si le candidat définit des critères de recherche trop sélectifs, il risque de

passer à côté d’annonces auxquelles il pourrait candidater et si il définit des critères de

recherche trop larges, il risque de se laisser submerger par le flot d’annonces lui parvenant.

▫ Mettre en ordre pour connecter :

Deux modes d’accès (modes d’entrée et de saisie) aux sites emploi peuvent être

privilégiés par les candidats dans leur recherche d’emploi: la recherche par mots clé et les

rubriques.

La recherche par mots clé laisse une grande latitude au candidat dans la définition de

ses critères de recherche. Sur la plupart des sites, cette définition porte sur le contenu complet

de l’annonce : le candidat rentre les mots clé dans un champ spécial et le moteur balaie la base

de données pour en retenir les annonces contenant les termes de la recherche. Il peut s’agir du 27 Paragraphe inspiré de BUREAU M.-C. ; MARCHAL,E. (octobre 2005). Au risque de l’évaluation. Paris, Editions du septentrion. 28 Le terme matching peut se traduire par « correspondance » ou « complémentarité » ou « appariement ». Dans le domaine de la rencontre sur Internet ou via les supports presse/ petites annonces, le matching peut englober les affinités, ressemblances ou différences qui font que deux personnes peuvent se correspondre ou pas.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 28 -

titre d’emploi (ou des synonymes), du secteur d’activité, d’une compétence, du nom d’une

entreprise, d’un outil ou d’un langage informatique. Ce type de recherche témoigne de la

faiblesse d’intervention du site sur les mises en relation : en ouvrant sur une multiplicité de

formes d’équivalences, l’outil « mots clé » rend en effet inutile la construction d’une

classification générale recouvrant la totalité des médiations entre offreurs et demandeurs. Et le

travail de catégorisation (consistant à détacher le candidat ou le poste de sa singularité pour

l’attacher à une catégorie commune permettant des mises en équivalence) est pris en charge

par le chercheur d’emploi. Avec les mots clé, le calcul aboutissant aux mises en relation est

distribué entre offreurs, demandeurs, intermédiaires et moteurs de recherche. Mais cette

distribution peut être inégale lorsque la recherche du candidat s’effectue en aveugle, sans

connaître les termes privilégiés par les annonceurs.

Les recherches par rubriques permettent de définir les repères conventionnels

d’appariement et sont adoptées par la majorité des sites emploi. Elle consiste à proposer au

candidat d’effectuer une recherche « multicritères » en renseignant des rubriques intégrant des

listes déroulantes. Ces rubriques mentionnent de manière quasi systématique le lieu de travail,

le secteur d’activité, la fonction recherchée, ou encore le type de contrat. Mais cette liste n’est

pas close et certains sites peuvent proposer au candidat de mentionner un salaire minimum,

son nombre d’années d’expérience ou encore la date de parution des annonces qu’il souhaite

consulter. Avec cette procédure, les intermédiaires décrivent les repères conventionnels

d’appariement sur le marché sans leur donner un caractère obligatoire pour autant.

L’intervention des sites est décisive pour établir et maintenir les conventions du

marché. Elle est d’autant plus efficace qu’elle se situe également au niveau de la rédaction de

l’offre. L’accès aux offres est conditionné par le renseignement de rubriques qui structurent la

présentation de l’annonce, et par delà, le contenu de l’information diffusée.

▫ Le « formatage » des annonces : mise en relation ou sélection ?

Le cadrage opéré sur les annonces peut rester discret (lorsque seules quelques

rubriques existent, comme sur Monster.fr) ou peut être très poussé et ce sont alors de

véritables « annonces formulaires » qui sont diffusées. Le rédacteur de l’annonce est influencé

par le formatage de celle-ci : il n’est pas obligé de remplir les rubriques mais leur présence

l’incite à penser et présenter son offre selon des catégories qui ne sont pas forcément celles

qu’il adopterait spontanément. Ainsi, l’affichage de l’expérience du candidat, sa formation ou

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 29 -

encore sa maîtrise d’une langue étrangère, critères pour lequel le pré-formatage est fréquent,

devient quasi systématique dans les annonces diffusées sur internet.

Certaines rubriques requièrent d’emblée de s’inscrire sur une échelle de grandeur : il

s’agit ici de renseigner un « niveau de langue », un « niveau d’informatique » ou le « montant

du salaire ». La nécessité d’être concis conduit également les rédacteurs à résumer leurs

attentes par une grandeur chiffrée : seront alors affichées « la durée » de l’expérience et pas

seulement le fait qu’une expérience est requise. Sur toutes ces variables mesurables, on assiste

à une standardisation des formes d’expression véhiculées dans les annonces : « x milliers

d’€uros annuels », « bac + x années d’études », « x années d’expérience »…

Le changement par rapport à la presse n’est pas seulement d’ordre quantitatif. Ce sont

certaines informations qui sont privilégiées et précisées : celles qui permettent de résumer le

profil du candidat et les contours du poste autour de signaux clairs et chiffrés. Ce paramétrage

incite les rédacteurs des offres à afficher des critères plus sélectifs que dans la presse et à

demander par exemple d’être « bilingue français/anglais » plutôt que de «connaître l’anglais».

Le « rubricage » les oblige également à être plus explicites sur le poste à pourvoir qu’ils ne le

sont lorsque la formulation de l’annonce est laissée à leur seule discrétion.

Un résultat s’impose: les deux versants du marché devraient être travaillés en parallèle

pour que s’opère l’appariement « poste / individu ». Les critères privilégiés actuellement sont

des repères codifiés ou standardisés, qui se prêtent aisément aux calculs des moteurs de

recherche pour effectuer les appariements. Le risque est de favoriser une sélection sur la base

des compétences les plus «observables», tels que le diplôme, l’âge ou l’expérience, au

détriment d’autres variables (tels les parcours des candidats ou leurs compétences

singulières) : on risque ainsi de tendre vers une dissolution des singularités des candidats et

des offres. Or, comme le soulève Neuville29 en 2001, seules les relations de proximité entre

recruteurs (annonceurs) et candidats sembleraient susceptibles de les avérer.

29 NEUVILLE, J.-P.(2001), « Les bons « tuyaux » du marché de l’emploi », In Sociologie du Travail. Vol. 43, n°3, pp. 349-368.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 30 -

4 - Schéma synthétique de la situation de e-recrutement

Dans une situation de e-recrutement, les candidats et les recruteurs s’approprient

Internet et particulièrement les sites emploi proposés par des webmasters (concepteurs de

sites), pour se rencontrer et répondre à leurs besoins : trouver le collaborateur correspondant

au profil recherché pour le recruteur et rencontrer la structure professionnelle correspondant

aux attentes professionnelles du chercheur d’emploi.

CANDIDAT WEBMASTER ANNONCEUR

Internet

CANDIDAT RECRUTEUR

Postule / Candidate Identifie

En conclusion, avec l’émergence du Web en 1995, les premiers acteurs du marché de

l’emploi ont tenté de reproduire sur Internet le modèle classique d’intermédiation de « l’offre

et de la demande », en estimant que le Web allait leur permettre de dépasser les contraintes

ancestrales du recrutement : en amont, une communication limitée à quelques espaces de

publication trop onéreux pour être accessibles au plus grand nombre (presse généraliste et

spécialisée) ; en aval, des échanges entre recruteurs et candidats et un traitement administratif

Sites emploi

Offres d’emploi

Banque de CV

Appariement

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 31 -

des candidatures ponctué de nombreux goulots d’étranglement (candidatures papier difficiles

à stocker sous format électronique, barrages de secrétaire, délais de réponses aux candidats

longs et incompressibles, etc.).

Concrètement, quelques entreprises précurseurs ont ainsi créé un site Web puis ont

mis en ligne leurs plaquettes commerciales, leurs brochures métier et leurs offres d’emploi, en

enjoignant les candidats de répondre à ces dernières par e-mail ou par la saisie d’un

formulaire. Certains sites se sont spécialisés dans la publication d’offres d’emploi : les

jobboards ont recrée à moindre coût et sans ligne éditoriale, le modèle de publication des

petites annonces des journaux sur support papier et ont offert aux entreprises n’ayant pas ou

peu de présence sur Internet d’y publier leurs offres d’emploi en ligne. En ce qui concerne les

candidats, les jobboards leur ont offert la possibilité de consulter ces offres et d’y postuler

selon la procédure prévue par les entreprises. Ainsi, avec la mobilisation d’Internet pour

recruter, la concurrence à l’égard des canaux traditionnels que nous avons évoqués

précédemment, s’exerce principalement dans deux cas : pour réceptionner et traiter les

candidatures spontanées (qui auparavant arrivaient par courrier postal) et pour diffuser des

offres d’emploi sur des sites dédiés. Avant d’aborder les évolutions (en terme de pratiques) induites par l’apparition des

technologies Web 2.0 dans cette situation de e- recrutement, il est nécessaire de définir d’un

point de vue technologique ce qu’est le Web 2.0, puis de présenter (de manière non

exhaustive), les différents supports 2.0 spécifiquement utilisés par les acteurs du marché du

travail.

III- Impacts des technologies 2.0 sur la relation candidat / recruteur

Depuis 2005, les techniques de recrutement sur Internet ont été une nouvelle fois

modifiées par le développement de technologies telles que les standards RSS30 et les

techniques de développement AJAX31. Celles-ci ont eu un impact majeur sur la notion de site

30 « Really Simple Syndication »: “Rich Site Summary” ou “RDF Site Summary” qui sont un jeu de plusieurs standards, initialement élaborés comme cadre technique permettant de traiter des métadonnées pour diffuser des informations sous formes de news ou alertes. Ces standards utilisent les balises XML qui qualifient l’information transmise. 31« Asynchronous JavaScript and XML » : en matière de recrutement, l’adoption de cette technique associée aux flux RSS permet aux diffuseurs d’annonces, comme aux personnes à la recherche d’un emploi de pouvoir créer un environnement personnel qui leur permet, comme sur l’écran ci-dessus, de recevoir des informations presque en temps réel. Pour une définition complète voir : http://en.wikipedia.org/wiki/Ajax_%28programming%29.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 32 -

Web qui, dans sa conception initiale, comprenait des pages statiques rarement mises à jour.

Le site était alors considéré comme un outil de diffusion et de visualisation de données. Mais

depuis quelques années, le Web subit de fortes mutations au niveau technologique et

fonctionnel. Cette métamorphose a un nom: le « Web 2.0 ».

Selon Tim O’Reilly32, les technologies utilisées dans le Web 2.0 ne se caractérisent

pas tant par leur nouveauté que par leur appartenance à la mouvance « Open Source » (le

monde du logiciel libre et gratuit). Dans sa version 2.0, le Web devient une véritable plate-

forme d’applications ; transformation rendue possible par l’évolution du navigateur (FireFox,

Internet Explorer…) en un « client riche »33. Ainsi, l’utilisateur peut jouer avec les différents

éléments de la page : personnalisation des contenus, intégration de ses propres médias,

partage avec d’autres internautes, création d’un réseau…Dans le Web 1.0, l’internaute était

passif, à partir du Web 2.0, il devient actif.

Le succès du Web 2.0 repose notamment sur sa capacité à proposer des nouveaux

services en combinant des briques déjà existantes: la plupart des services du Web 2.0 sont

gratuits et les modèles économiques reposent pour l’instant sur la publicité en ligne qui

connaît un véritable essor et présente de nombreux avantages (ciblage, interactivité34…).

Maintenant, les individus ont la possibilité de se mettre en avant par rapport à une

communauté ou de se regrouper en ligne, via Internet : on assiste au développement de

forums emploi, de blogs, de réseaux sociaux et autres outils collaboratifs, qui sont les

nouveaux supports dont se servent les recruteurs pour alimenter leur pipeline de candidatures

et approcher certains potentiels.

32 Fondateur d’une société d’édition aux Etats-Unis, il réfléchit aux transformations qu’il observe sur le Web et lance le terme de Web 2.0. Source http://radar.oreilly.com/archives/2005/10/web_20_compact_definition.html. 33 Le client est la dénomination en informatique du navigateur. Le Web 2.0 s’articule sur deux composantes, le client ou le serveur : le client lance des requêtes sur le serveur, dans le but de rapatrier les documents et de les afficher. On parle alors d’architecture « client-serveur ». L’adjectif « riche » est à prendre au sens d’enrichi comme dans « rich media » (média enrichi). Amazon, Yahoo ! Mail, Google Maps, Youtube, pour ne citer qu’eux, exploitent à leur manière les potentiels offerts par le client riche. C’est la nouveauté « technique » la plus visible du Web 2.0. 34 L'interactivité est une activité nécessitant la coopération de plusieurs êtres ou systèmes, naturels ou artificiels qui agissent en ajustant leur comportement. L'interactivité est souvent associée aux technologies permettant des échanges homme-machine. Toutefois elle est présente dans toutes les formes de communication et d'échange où la conduite et le déroulement de la situation sont liées à des processus de rétroaction, de collaboration, de coopération entre les acteurs qui produisent ainsi un contenu, réalisent un objectif, ou plus simplement modifient et adaptent leur comportement. Elle distingue une communication interactive qui s'opposerait à une communication à sens unique, sans réaction du destinataire, sans feedback. Source Wikipedia.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 33 -

1- Les mutations technologiques du Web 2.0

Jesse James Garrett est à l’origine en février 2005, du néologisme AJAX35. Il cherchait

un mot pour définir l’ensemble des technologies mises en œuvre dans un projet qu’il

s’apprêtait, en tant qu’architecte des systèmes d’information, à présenter à un client.

AJAX est l’ensemble des technologies suivantes36 :

- présentations standard avec XHTML37 ,

- affichage dynamique et interaction,

- échange et transfert asynchrone de données,

- JavaScript pour lier les éléments entre eux dans le navigateur.

AJAX permet la création d’interfaces riches (« Rich Internet Application ») dans

lesquelles l’utilisateur peut librement manipuler des éléments, déplacer des blocs, ou inscrire

son propre texte dans des champs prévus à cet effet. Jusqu’à présent son action était limitée :

cliquer sur des liens ou rentrer des données au moyen d’un formulaire mais avec Ajax ce ne

sont plus des pages mais des applications qui peuvent s’afficher directement dans le

navigateur. La transmission asynchrone des données enrichit le confort d’utilisation :

l’utilisateur est en ligne et saute pas d’une page à une autre mais reste dans la même interface.

Il a donc une activité en continu dans l’application.

En matière de recrutement, l’adoption de cette technique, associée aux flux RSS,

permet aux diffuseurs d’annonces comme aux personnes en recherche d’emploi de se créer un

environnement personnel leur permettant de recevoir des informations presque en temps réel

(annonces emploi, candidatures,…). Ainsi, les simples inscriptions sur les sites emplois et la

réception d’alertes e-mail ont été supplantées par les abonnements à des flux RSS. Avec le

Web 2.0, le rôle des sites a considérablement évolué puisque les internautes ne sont plus

obligés de les consulter pour accéder à de l’information : un flux RSS est une news (ou billet)

35 Asynchrones Java script And XML 36 GERVAIS, J-F. (2007). Les Internautes au pouvoir : blogs, réseaux sociaux, partage de vidéo…Paris. Dunod, p. 73, 74. 37 XHTML est le successeur de HTML (HyperText Markup Language) où langage des pages Web.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 34 -

codée pour être lue et interprétée par les agrégateurs 38 et applications configurés en fonction

de ces mêmes standards. Ces agrégateurs ou applications dédiées, comportent une fonction

logicielle chargée de rechercher, d’identifier et de rapatrier les nouvelles informations

publiées sous forme de flux. D’un point de vue technique, le logiciel envoie selon des

fréquences, variables en fonction de son degré de sophistication, des requêtes aux sites

émetteurs pour savoir si de nouvelles news ou alertes ont été publiées. Ces requêtes sont

envoyées toutes les heures, ou fraction d’heures et permettent à l’internaute d’être informé de

la publication d’une offre lui correspondant sans même avoir eu à se connecter à un site. Cette

révolution est due au principe de la « syndication »39.

A) Le développement des contenus générés par l’Utilisateur

« User Generated Content » (UGC) signifie « contenu généré par l’utilisateur ». La

création de contenu par l’utilisateur n’est pas une nouveauté, mais avec l’avènement du Web

2.0, il est désormais permis à l’internaute de réaliser lui-même ses propres contenus et de les

partager avec le monde entier.

- Les sites de partage de vidéos :

Faire des images, faire des films et les publier sur le Net devient aussi facile que

d’écrire un billet pour son blog. Le Web 2.0 mérite ici son suffixe. Il symbolise la seconde

tentative dans l’histoire du Web de réussir cette étape : simplifier la publication et la diffusion

de vidéos. Les plates-formes permettent de diffuser du contenu, souvent multimédias (vidéo et

son) aux internautes. La mise en ligne et le partage de vidéos devient facile car accessible par

tous les internautes de la communauté. Exemples de tels sites : YouTube, Dailymotion, ou

YouJob.

Ces plate-formes de partage de vidéo offrent la possibilité à chaque Internaute de

déposer une leur CV vidéo s’ils sont en recherche d’emploi et aux entreprises de diffuser une

certaine image d’elles-mêmes et de leur ambiance de travail : elles peuvent réaliser et y 38 Ce sont des logiciels qui permettent de suivre plusieurs fils de syndication en même temps. L'objectif d'un tel logiciel est de permettre l'agrégation de plusieurs sources de contenus Internet en une seule application. Le suivi du contenu est réalisé quasiment en temps réel. Proche dans son fonctionnement de la messagerie électronique, l'agrégateur est le plus souvent un outil limité à la lecture des messages reçus. 39 La syndication consiste à vendre le droit de reproduire un contenu ou de diffuser un programme à plusieurs diffuseurs. Le système de la syndication a été créé par la presse écrite américaine, les syndicates vendant leur production (cartoons, comic-strips, chroniques, etc.) à plusieurs journaux locaux.

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ROZEL Claire-Marie - 35 -

déposer un lipdub (vidéo réalisé en play back par les collaborateurs destinée à une diffusion

sur Internet ou un autre réseau et réalisée dans le milieu professionnel).

- Les sites de partage de photos :

La photographie est un travail solitaire ne nécessitant aucune équipe contrairement au

cinéma. C’est donc naturellement que la photo s’est imposée comme le premier User

Generated Content. Néologisme construit à partir de folks (gens) et de taxonomie (ou

taxinomie), méthode de classification d’élément, la folksonomie est un « système de

classification collaborative et spontanée de contenus Internet, basé sur l’attribution de mots-

clés librement choisis par des utilisateurs non spécialistes, qui favorise le partage de

ressources et permet d’améliorer la recherche d’informations »40. Techniquement, les mots

clés choisis par l’utilisateur sont qualifiés de descripteurs ou d’étiquettes (« tags » en anglais).

L’utilisateur peut ainsi marquer chacune de ses photos selon son sujet et les moteurs de

recherche intelligents interprètent ce tag pour faciliter l’accès au document.

La recherche d’informations, qui se faisait auparavant sous forme de listes

déroulantes, est aujourd’hui réalisée grâce à ces tags, qui rendent les informations directement

accessibles via un moteur de recherche. Jamais l’accès à l’information sur une entreprise ou

sur un individu n’a été aussi rapide.

B) L’apparition des réseaux sociaux et des outils collaboratifs

D’un point de vue sociologique, « un réseau social est un ensemble de relations entre

des entités sociales (individus) »41. Les contacts entre ces individus peuvent être, par exemple,

des relations de collaboration, d'amitié, ou des citations bibliographiques. Ces ressources sont

donc aussi bien formelles qu'informelles, matérielles qu'immatérielles. Nous avons ainsi tous

les concepts sociologiques pour définir un réseau social : les individus, leurs liens (contacts),

leurs affinités et l’environnement les entourant.

D’un point de vue technologique, le réseau définit un ensemble d'équipements

interconnectés qui servent à acheminer un flux d'informations. Le réseau des réseaux est

Internet. Il permet de mettre en relation des milliers d’individus autour des mêmes centres

40 GERVAIS, J-F. (2007). « Les Internautes au pouvoir : blogs, réseaux sociaux, partage de vidéo… ». Paris, Dunod, p. 82. 41 WASSERMAN, S. ; FAUST, K. (1994). “Social Network Analysis : Methods and Applications”. Cambridge University Press, Cambridge.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 36 -

d’intérêt ou non, de les faire échanger des informations ou encore de les faire participer à des

évènements, le tout à distance et sans contacts réels. Ainsi, le réseau social sur Internet, peut-

être définit, en reprenant les aspects technologiques et sociaux, par des outils qui facilitent le

processus de mise en relation autour d’un centre d’intérêt commun et permettent la prise de

contact en ligne.

Friendster était le premier « réseau social » de l’après bulle Internet de 2001. La page

d’accueil du site décrivait ainsi les étapes du processus :

- Trouver : chercher un ancien ami, un camarade de classe ou autre

- Se connecter : regarder des profils, agrandir son réseau

- Rester en contact : obtenir des nouvelles de ses amis, partager ses photos et ses vidéos.

Chaque utilisateur dispose de sa propre fiche d’identité : son profil, son métier, centres

d’intérêts, livres, musique, films favoris, etc. Le profil peut être privatisé (accès limité à ses

amis).

Tout comme les réseaux informatiques, les réseaux sociaux en ligne peuvent être classés

selon différentes typologies :

▫ Les réseaux personnels et généralistes sont souvent orientés autour d’un centre d’intérêt

(musique, lecture…), le but de ce type de réseaux n’est autre que de faire partager ses

passions au reste de la communauté. Les mises en relation directes sont rares sur ce type de

réseaux. Exemples : MySpace, Skyblog…

▫ Les réseaux personnels et thématiques fonctionnent souvent sur le même principe que les

réseaux généralistes mais sont orientés autour d’une thématique : les voitures, la musique, la

cuisine… Exemples : Boompa, EonsCom…

▫ Les réseaux professionnels sont les réseaux les plus aboutis dans le sens réel du terme. Ils

offrent la possibilité de mise en relation ainsi que le partage d’informations (coordonnées,

informations sur les entreprises…) entre candidats et recruteurs potentiels. Ils peuvent par

exemple constituer une base de données de type CVthèques ou candidathèques pour les

recruteurs. Exemples : 6nergies, Viadéo, LinkedIn, Copains pro…

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 37 -

De plus en plus de recruteurs ont recours aux réseaux sociaux ou à Internet pour

trouver leur futur candidat, et surtout les contacter. Le but étant d'avoir dans ses contacts le

plus de personnes, afin d'avoir un vivier disponible. Dans le cadre d’un recrutement en

France, Viadéo est le réseau social le plus orienté ressources humaines (1,2 millions de

personnes environ). Ce site est composé de fiches personnelles, incluant un CV. Les centres

d’intérêt ou d’expertise de la personne peuvent également être mentionnés. Par ailleurs,

l’ensemble des contacts d’une personne est visible, tout comme les recommandations

d’anciens collègues. A cela, s’ajoute un moteur de recherche avec divers filtres qui permettent

de sélectionner les profils. Plus simplement, on peut y déposer une offre d’emploi.

Facebook quant à lui est actuellement le réseau social qui connaît la plus forte

croissance (2006-2007 : +270%) car il est le seul à conjuguer « business » et « amusement ».

En France, on trouve surtout des étudiants (50% des nouveaux inscrits français sont

étudiants), mais il ne cesse de croître et comporte déjà plus d’un million d’inscrits.

Néanmoins, Facebook n’est pas un réservoir à CV comme Viadéo ou Linked’In. L’intérêt de

Facebook pour les entreprises semble surtout de permettre un mode plus fin de

communication avec leur clientèle : large mais ciblé.

Ainsi, chaque réseau social possède sa propre logique de classement, d’utilisation, de

fonctionnement. Ces logiques nécessitent un minimum d’investissement de la part du

recruteur pour en comprendre les subtilités et les contraintes, afin de cerner les différents

profils qui s’y trouvent et s'expriment, souvent indépendamment d'une activité

professionnelle. Il est alors possible d'identifier des experts dans différents domaines (par les

« groupes » sur Facebook ou les « hubs » sur Viadéo) et de générer des actions de

recrutements innovantes : nous verrons que se sont aussi les gens qui vont voir l’entreprise

pour être recrutés.

C) L’avènement des blogs et des médias personnels

Un blog se différencie d’un site Web statique ou dynamique principalement par ses

fonctionnalités : le blog est un site Web constitué par la réunion de billets écrits dans l'ordre

chronologique. Les blogs se distinguent d'autres systèmes de publication sur le Web par des

auteurs primaires. Chaque billet (appelé aussi note ou article) est, à l'image d'un journal de

bord ou d'un journal intime, un ajout au blog ; le blogueur y délivre un contenu souvent

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

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textuel, enrichi d'hyper liens et d'éléments multimédias, sur lequel chaque lecteur peut

généralement apporter des commentaires ou opinions personnelles (auteurs secondaires).

Dans le domaine du recrutement, les blogs, alimentés par des candidats potentiels sont

orientés vers un sujet métier et/ou technique et permettent d’en apprendre beaucoup sur

l’environnement professionnel de l’internaute et sur sa personnalité42. Ils sont communément

appelés blogs emploi ou blog CV, certains pouvant par exemple, servir de support à la

publication de « portfolios »43 qui retracent le parcours d’expériences de l’internaute.

Les Nouvelles Technologies de l’Internet offrent aujourd’hui aux candidats et aux

recruteurs de nouvelles possibilités de recherche et de choix, bien supérieures à celles que

propose le modèle classique d’intermédiation du marché de l’emploi. La mise en oeuvre

d’une démarche de e-recrutement doit intégrer ces possibilités offertes aux acteurs ; pour que

des transactions via Internet puissent déboucher vers des embauches de candidats aux profils

qui intéressent les recruteurs, l’entreprise offre aux candidats la possibilité d’accéder à toute

l’information qui les concerne, leur donne la possibilité de prendre l’initiative d’établir des

transactions avec le ou les recruteurs finaux (concernés par leur profil) et aussi celle de se

présenter, soi et/ou son parcours d’expérience de manière inédite (par opposition au CV

traditionnel).

D) L’évolution de la relation Homme / Ordinateur

Il semble ici nécessaire de faire un retour sur l’évolution de nos rapports avec les

machines depuis que les ordinateurs sont apparus pour bien expliciter l’évolution même du

Web. Nous reviendrons ensuite plus précisément sur les impacts des technologies 2.0 sur la

situation de recrutement en elle-même.

Il est dès lors impératif de faire la distinction entre le Web (qui est un sous ensemble

d’Internet) et Internet en lui-même. Le Web, initialement « World Wide Web » et littéralement

« Toile d’araignée mondiale », est la partie la plus populaire de l’Internet, notamment grâce à

sa convivialité d’utilisation. Cette interactivité est permise surtout par l’hypertexte (ensemble

de données interconnectées les unes aux autres dont on obtient la visualisation sur l’écran

42 Un exemple de blog, celui de Julien Hermetet sur le marketing sportif : http://www.hermetet.com/blog/. 43 C’est un dossier qui présente les compétences de son auteur. Il y apporte des preuves de ce qu'il sait faire : photos de réalisations, attestations d'employeurs, comptes-rendus d'activités de stage, etc. C’est un travail personnel qui se construit et s’enrichit au fil du temps. L'e-portfolio est un portefeuille de compétences qui est réalisé et accessible en utilisant l'informatique.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

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d’un ordinateur en cliquant sur un mot ou une icône). Le Web est ainsi un système

hypermédia (hypertexte et multimédia) d’accès aux informations disponibles sur Internet, par

un système de liens. Internet est quant à lui, un réseau informatique mondial fondé sur

l’alliance de l’informatique et des télécommunications. Il a trois fonctions principales : le

courrier électronique, le transfert de fichier et la connexion à distance44.

L’évolution de la relation Homme/ Ordinateur se décompose globalement en trois

périodes, comme autant de jalons dans la navigation à travers l’écosystème45 Internet :

▫ Période 1 : Le composant électronique coûte cher. Les ordinateurs sont par

conséquent rares, contrôlés par un nombre réduit d’acteurs, et partagés entre de nombreux

utilisateurs. C’est l’époque de l’ordinateur central : un ordinateur pour plusieurs utilisateurs.

L’Homme n’était alors qu’un utilisateur, son moyen d’accès s’appelait un Terminal. Il ne

pouvait que très peu altérer le comportement de la machine. Les ressources informatiques

étaient tellement chères qu’il était plus avantageux de construire des réseaux pour en partager

les capacités.

▫ Période 2 : Le composant électronique est plus abordable. Il devient possible de

construire un plus grand nombre d’ordinateurs, pratiquement un par personne (ou par foyer).

C’est l’époque de l’ordinateur personnel (PC) : un ordinateur pour un utilisateur. Avec

l’avènement du PC (de son vrai nom, Personal Computer), la capacité de traitement a été

donnée à l’Homme. Chacun devenait une cellule de production plus ou moins autonome.

L’Utilisateur avait désormais plus de pouvoir. Il pouvait effectuer les tâches qu’il souhaitait,

installer des progiciels et les paramétrer pour un usage beaucoup moins contraint qu’en mode

Terminal. Toutefois, son action restait limitée à sa seule machine. Internet a connu l’essor que

nous connaissons avec la banalisation de l’usage du PC.

▫ Période 3 : le composant électronique coûte un prix dérisoire, n’importe quel objet

peut en contenir un et devenir plus ou moins une machine « intelligente », c'est-à-dire un

44 Paragraphe tiré du Dossier « Nouvelles Technologies : Mythes et Réalités ». In Sciences Humaines, mars 1996, n°59, p.14-19. 45 En écologie, un écosystème désigne l'ensemble formé par une association ou communauté d'êtres vivants et son environnement géologique, pédologique et atmosphérique (le biotope). Les éléments constituant un écosystème développent un réseau d'interdépendances permettant le maintien et le développement de la vie.

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ordinateur. C’est l’époque des objets intelligents : plusieurs ordinateurs pour un seul

utilisateur.

Nous sommes aujourd’hui à l’orée de la troisième période. Le nombre d’objets

disposant de capacités de calcul, de logiciels, de données, devient de plus en plus en plus

important : téléphones portables aux fonctions multiples, assistants personnels, appareils

photo ou baladeurs numériques, ordinateurs embarqués de voiture, systèmes audiovisuels,

jouets etc. L’utilisateur est entouré d’objets dotés des caractéristiques d’un ordinateur. Ce

canevas schématique de l’évolution de l’informatique et de l’électronique, mais aussi de la

relation de l’homme à la machine, permet de structurer l’observation d’un certain nombre de

tendances :

Dans les premiers temps de l’Internet, la connexion de l’utilisateur se faisait à travers

un modem analogique sur une ligne téléphonique ordinaire. L’Utilisateur se connectait à

l’Internet. Pendant la durée de cette connexion il effectuait l’ensemble des tâches à faire sur le

réseau puis il retournait à son mode déconnecté. Avec le développement des liaisons louées

dans les entreprises, puis de l’ADSL et du câble chez les particuliers, sont apparues les

connexions permanentes. Désormais, l’Utilisateur ne se connecte plus, il est connecté. Le

réseau, la connectivité sont des prolongements naturels de l’Utilisateur et de ses équipements.

Ils en étendent les capacités et les données. L’Utilisateur passe indifféremment de données qui

se trouvent localement à d’autres, qui sont lointaines, et il devient inconcevable de travailler

sans avoir une connexion au réseau. C’est la véritable naissance de l’Homme en Réseau, celui

qui n’est plus un touriste sur l’Internet mais qui en est un résident.

Il s’est en effet produit à la fin des années 90, une véritable révolution avec le « peer

to peer ». Il faut avant tout y voir la possibilité pour chaque individu d’être à la fois un offreur

et un demandeur de contenu. C’est là le début d’un Internet « post-webique » au contenu

désormais non centralisé, dispersé. Chacun y est client et serveur. En termes de pouvoir, il

marque l’avènement de la communauté des utilisateurs comme acteur à part entière de

l’écosystème: un très grand nombre d’unités aux ressources très limitées collaborent ensemble

en réseau et peuvent devenir beaucoup plus puissantes que de grandes unités ayant beaucoup

de ressources. C’est l’avènement du Web 2.0.

En parallèle, on a pu observer une tendance vers le personnel et le permanent qui est

beaucoup plus structurante que la dichotomie sédentaire/mobile. Une adresse e-mail reste

permanente et personnelle indépendamment de l’endroit d’où on la consulte, il en va de même

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de son téléphone portable sur lequel on peut être joint où que l’on soit. Le phénomène le plus

intéressant de ces dernières années est celui apporté par le Wi- Fi.

L’irrésistible tendance à la prise de pouvoir de l’Utilisateur (« empowerment »)

démarre avec le PC. Aujourd’hui, n’importe qui, avec très peu de moyens et relativement peu

de savoir-faire, peut construire un réseau. Il est de plus en plus facile pour des entreprises de

tailles diverses, des collectivités, des groupes d’individus de construire leur propre réseau,

leur « Personal Networks ». Il est inéluctable que nous entrons dans une ère où chacun d’entre

nous est entouré d’un ensemble d’objets intelligents. Il nous faut donc considérer ces

appareils non pas comme autant d’unités discrètes, mais comme une communauté nous

rendant conjointement des services. Nous devons les penser comme un réseau (ou une

extension de l’Internet) qui permettrait d’embrasser l’ensemble des objets isolés, qui les

tisserait dans une même toile à laquelle l’utilisateur ne se connectera plus, mais dans laquelle

il sera immergé. C’est ce réseau que nous pouvons appeler réseau pervasif 46.

Le réseau pervasif est ainsi le réseau de la continuité et se doit d’être présent partout,

tout le temps, et ce sans rupture : plus de distinction intérieur/extérieur (ma voiture est par

exemple un des éléments essentiels de mon réseau d’objets), géographique (ex : mon appareil

photo numérique doit pouvoir stocker ses images directement sur mon serveur depuis

l’étranger) ou de contexte d’usage (un email, reste un email qu’on le lise debout ou assis).

C’est alors la déconnexion volontaire du réseau (totale ou partielle) qui devient un acte

exceptionnel et non pas la connexion.

En résumé, on peut dire qu’aujourd’hui « les internautes vont sur Internet ; on le

consulte par l’intermédiaire d’un objet : l’ordinateur » et que demain, « les internautes

n’iront plus sur Internet mais seront dans Internet, parce qu’Internet est un écosystème

informationnel, fait de nœuds (Intervenants ou Utilisateurs), de liens, de relations ». Internet

n’est plus considéré comme un outil d’information et de communication mais devient « une

technologie de la relation »47.

Ainsi, on peut schématiser comme suit les différentes évolutions du Web, en lien avec

l’évolution de la relation Homme / Ordinateur :

46 Tiré de l’article « De l'inéluctabilité du réseau pervasif » , écrit par Rafi Haladjian, fondateur d’Ozone, fournisseur de connexion Wi-Fi. 47 Paragraphe inspiré d’une Interview « L'évolution d'Internet, jusqu'au web 4.0 » de Joël DE ROSNAY, Docteur ès Sciences et auteur de « La révolte du pronétariat ». Interview « publiée » sur Dailymotion.

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ROZEL Claire-Marie - 42 -

▫ Le Web 1.0 est le Web descendant, qui nous envoie de l’info sur des sites de

contenus.

▫ Le Web 2.0 est celui des contenus générés par l’utilisateur, les acteurs d’Internet,

avec des logiciels puissants, capables de créer des contenus photos, vidéos, musicaux.

▫ Le Web 3.0 est le Web intuitif, tout juste en train d’émerger. On l’appelle aussi Web

sémantique, car il permet des interrelations transversales entre des Web services.

Concrètement, le Web sémantique consiste en un système capable de donner une réponse

raisonnable et complète à une question du type : « Je recherche un endroit chaud pour les

vacances. J’ai un budget de 3 000 dollars. Ah, et nous avons un enfant de 11 ans. ». Répondre

à une telle question aujourd’hui peut exiger des heures de tri dans des listes distinctes de vols,

hôtels et locations de voitures, qui proposent des options souvent contradictoires. Avec le

Web 3.0, la requête appellerait une réponse cohérente, aussi méticuleusement assemblée que

si elle l’avait été par un agent de voyage humain.

2- Du recrutement 1.0 au recrutement 2.0 ?

Avec les apports technologiques du Web 2.0, il est aisé de constater à quel point le

comportement des internautes a pu évoluer: une personne en recherche d’emploi peut

exploiter un maximum de supports pour être vu et/ou reconnu ou pour partager, et un

recruteur ou un annonceur peut modifier radicalement son approche candidat et orienter sa

diffusion d’information.

Concrètement, le demandeur d’emploi peut utiliser les moteurs de recherche, les

réseaux sociaux, les blogs ou tout autre site « récupérant » des informations sur le recruteur

pour « toucher » directement le responsable opérationnel, le chargé de recrutement ou le

consultant en RH. Avec les moteurs de recherche, les candidats ne trouvent plus

l’information sur Internet en fonction de sa taille ou de son volume, mais en fonction de sa

pertinence avec leurs besoins immédiats. De même, leur visibilité sur Internet se crée de

façon interactive et dynamique par le biais des multiples canaux d’échange d’information et

de communication qu’utilisent spontanément les candidats-cible : les « chats » (sorte de

salons de conversation virtuels regroupant les individus par centre d’intérêt), les « news

letters » (lettres d’information envoyées par e-mail), les liens hypertextes de site à site, les

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ROZEL Claire-Marie - 43 -

bandeaux d’information ou de publicité sur les sites professionnels ou sur le site de leur

fournisseur d’accès, les sites de jeux de stratégie ou de rôle à épisodes, etc.

Les recruteurs quant à eux, s’inscrivent sur les réseaux sociaux et peuvent exploiter de

nouvelles fonctionnalités sur leurs sites corporate : le mot d’ordre des nouvelles tendances

pour les sites RH est l’interactivité48 afin d’attirer et de développer une relation avec les

candidats-internautes. Voici quelques exemples de services qui peuvent être proposés aux

candidats, disponibles depuis la zone emploi du site Web de l’entreprise : « focus métier »

hebdomadaire ou bi-mensuel, présentation de la politique RH et des avantages sociaux de

l’entreprise, organisation des offres par source de candidatures (par exemple : les offres

informatiques, les offres marketing, etc.), moteur de recherche des offres fondé sur les

compétences requises, possibilité de déposer sa candidature en ligne une seule fois et

d’effectuer des « multi-candidatures » sur un nombre illimité d’offres, sans avoir à renouveler

le dépôt du CV sur chaque offre, tableau de bord de suivi des candidatures pour chaque

candidat avec gestion de l’historique des réponses des recruteur, prise en compte du projet

professionnel ce qui permet de faire du « push » d’offres ciblées vers chaque candidat ;

« news letters » par type de profil de candidat… En outre, en étant présentes sur des réseaux

tels que Facebook ou MySpace, de nombreuses entreprises ont la possibilité de se faire

connaître en misant à fond sur la logique réseau du Web. C’est là toute la subtilité du

marketing viral : ce sont les internautes qui font la publicité de l’entreprise en en vantant les

mérites aux autres internautes. Les entreprises doivent par conséquent entrer en relation avec

les candidats en identifiant leurs centres d’intérêt et en s’y focalisant. Dès que le contact est

établi, elles leur apportent des informations, des services et un suivi uniquement accessible

depuis leur site, et ainsi les faire revenir sur leur site pour qu’ils continuent à bénéficier de ces

services et de ce suivi. C’est ainsi qu’elles peuvent fidéliser les candidats qui les intéressent :

c’est le concept même de communauté, qui réunit sur un site des individus aux intérêts

convergents. Les entreprises sont alors en mesure de proposer aux candidats des offres

d’emploi en « juste à temps » qui correspondent à leur projet professionnel, dès que le besoin

s’en fait sentir.

48 L'interactivité est une activité nécessitant la coopération de plusieurs êtres ou systèmes, naturels ou artificiels qui agissent en ajustant leur comportement. L'interactivité est souvent associée aux technologies permettant des échanges homme-machine. Toutefois elle est présente dans toutes les formes de communication et d'échange où la conduite et le déroulement de la situation sont liées à des processus de rétroaction, de collaboration, de coopération entre les acteurs qui produisent ainsi un contenu, réalisent un objectif, ou plus simplement modifient et adaptent leur comportement. Source Wikipedia.

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ROZEL Claire-Marie - 44 -

Quand toutes les caractéristiques du Web 2.0 sont regroupées sur un site emploi, on

peut parler de « recrutement 2.0 ». Ces spécificités sont ; une fonction permettant de partager

une offre avec ses amis, la possibilité pour l’internaute de moduler les pages et les structures

du site suivant ses besoins, la possibilité de récupérer des flux RSS d’offres d’emplois et de

stages adaptés à ses besoins, et des outils permettant le partage de connaissance avec d’autres

internautes.

Ainsi, pour bien comprendre ce qu’est le recrutement 2.0, il suffit de saisir l’évolution

des sites emplois:

La première génération de sites est constituée de sites emploi corporate. Les personnes

en recherche d’emploi ont la possibilité de déposer leur CV sur le site Internet et le recruteur

les imprime.

La deuxième génération permet toujours le dépôt des CV, cependant apparaissent les

premières bases de données avec des systèmes de reconnaissance de caractères. Chacun des

mots contenus dans un CV devient une requête (recherche par mot clé) possible. La base de

données est hébergée chez le recruteur.

La troisième génération donne la possibilité au chercheur d’emploi de déposer son CV

mais lui propose également des formulaires de candidature en ligne qui contiennent des

champs obligatoires. Ces formulaires permettent de poser des questions fermées et d’accélérer

la pré sélection de candidatures. La base de données reste encore hébergée chez le recruteur.

La quatrième génération assiste à la mise en place d’un système davantage axé sur le

profil du candidat : le site lui demande de se positionner sur un certain nombre de questions.

Celui-ci a la possibilité de créer un espace personnel, qu’il pourra mettre à jour régulièrement.

Les technologies ASP (Application Service Provider) constituent la grande nouveauté de cette

nouvelle génération : le recruteur peut externaliser le stockage et le traitement des données, ce

qui lui donne accès à des moteurs de recherche plus efficaces permettant de cibler des champs

de compétences.

La cinquième génération de sites propose au chercheur d’emploi le self-service « pre-

screening »49. Le site lui fournit une liste de postes qui seraient susceptibles de lui être

proposés en rapport avec son profil. Le site lui demande de se prononcer sur ces offres. Ces

éléments permettent au recruteur de faire un classement des adéquations poste-candidat. Ce

49 Présélection, en français.

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ROZEL Claire-Marie - 45 -

système est l’une des plus grandes révolutions du Web 2.0 car il capitalise l’information tout

en laissant le candidat arbitrer.

La dernière génération de sites consacre une certaine dématérialisation de la relation

entre les candidats et le recruteur. Les bases de données ASP sont équipées d’un traitement fin

et poussé de l’information qui permet de mettre en relation un chercheur d’emploi et un

recruteur, en temps réel. Le recruteur est immédiatement informé si un candidat au profil

adapté est en train de se positionner sur un poste. L’extension de cette technologie est la

capacité de mettre directement en relation via une « Webcam », le chercheur d’emploi et le

recruteur.

Ainsi, les nouvelles fonctionnalités offertes par le Web 2.0 sont susceptibles de modifier

certaines étapes du processus de e-recrutement telles que le sourcing ou le tri des

candidatures : le monopole des grands sites emplois laisse progressivement la place aux

communautés virtuelles, et ces bases de CV fermées et payantes sont contournées par la mise

en ligne de CV libres, de blogs emplois etc. simplement identifiés et accessibles par les

moteurs de recherche tels que Google ou Yahoo!. En ce qui concerne le tri de candidatures,

certaines entreprises se retrouvent à faire face à des centaines de milliers de candidatures par

an. Pour faire face à ce défi du traitement industriel du volume de CV, la majorité des grandes

entreprises peut se doter d’un outil de gestion électronique des candidatures (ATS ou

« Applicants Tracking System ») qui assure un suivi administratif performant et fluidifie la

diffusion de l’information entre les acteurs du processus de recrutement (le traitement des

candidatures standardisé permet d’opérer une pré sélection des candidatures et de déclencher

des réponses automatisées aux candidats). Ainsi, l’analyse de la pertinence des candidatures

est matérialisée par des outils et des systèmes qui permettent de gérer la réception, le

traitement et le stockage de ces données. En investissant dans ces systèmes, une entreprise

peut réinventer son circuit d’information interne ou « work-flow » et bénéficier de traitements

statistiques extrêmement fins.

Malgré cela, les dispositifs en place sont insuffisants pour répondre à tous les enjeux

du recrutement : ces systèmes ne savent pas assister l’entreprise à présélectionner tous les

candidats alors que cette étape représente plus de 95% des décisions du processus de

recrutement.

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Pour conclure, à la question « Pourquoi utiliser aujourd’hui Internet pour recruter ou

pour rechercher un emploi plutôt que de se servir de canaux d’information plus

traditionnels? », la réponse, qui vaudrait symétriquement pour les recruteurs et pour les

candidats, est double : la diffusion d’une annonce d’offre d’emploi par Internet réduit

drastiquement le coût et la durée moyenne d’un recrutement en accélérant la rencontre. La

mise en ligne de l’offre immédiate, combinée au courrier électronique, peut en effet permettre

une mise en relation très rapide du recruteur et des candidats.

Mais plus avant, il semblerait qu’avec les supports du Web 2.0, l’entreprise dispose de

moyens susceptibles de transformer en profondeur ses pratiques en matière de ressources

humaines : les nombreuses innovations fonctionnelles permettent au responsable des

ressources humaines de faire le tour du marché et de traiter les candidatures grâce à une

meilleure gestion des flux d’information, d’intégrer les gestions interne et externe du

personnel grâce à des progiciels performants, et surtout de concilier les logiques de

communication et de recrutement, grâce au multimédia. On peut alors se demander Dans

quelle mesure le recrutement 2.0 se limite-t-il à l’utilisation de nouveaux moyens de mise en

relation entre recruteurs et candidats ou consiste-t-il en l’exploitation de nouveaux supports

de communication pour faire la promotion de l’entreprise employeur ?

Par ailleurs, depuis l’avènement du e-recrutement, le chercheur d’emploi peut

aisément accéder depuis un poste informatique connecté à Internet, aux offres mises en lignes

par les sites emploi. Il est aidé dans sa démarche par des sites agrégateurs lui donnant accès

depuis un portail unique, à des offres référencées sur de multiples sites. Parallèlement, le

candidat peut gérer sa recherche de façon optimale, selon qu’elle soit «passive», ou «active».

Pour le salarié en poste, il est possible de maintenir un pied sur le marché en déposant son

curriculum vitae sur un site, en s’abonnant à une « alerte e-mail », de façon à être informé des

opportunités d’emploi améliorant sa situation ou en s’inscrivant sur un réseau social. Pour le

chercheur « actif », le Web 2.0 vient en complément des méthodes traditionnelles de

recherche, ajouter une corde à son arc : il a l’opportunité de se distinguer des autres candidats

en mettant en ligne une vidéo, de présenter son parcours d’expérience sur différents supports

interactifs, de donner son avis sur ses problématiques métiers, de questionner les internautes

sur telle entreprise etc. dans le but d’attirer l’attention des recruteurs ou de mieux cibler ses

candidatures. Mais s’agit-il pour les chercheurs d’emploi de s’approprier les supports du

Web 2.0 pour candidater plus efficacement, ou bien de s’assurer une réelle auto promotion

sur le Net ?

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En effet, l’émergence de nouveaux supports sur Internet augmenterait a priori la

qualité des appariements, tout en servant symétriquement les intérêts des entreprises et des

candidats. Mais dans quelle mesure et à quelles fins, candidats et recruteurs exploitent-ils les

apports du Web 2.0 pour améliorer leur présentation de soi ? Et surtout quelles stratégies

développent-ils pour construire une relation « gagnant - gagnant » dans la situation de

recrutement?

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ROZEL Claire-Marie - 48 -

Chapitre 2 : Méthodologie

I- Fondements de l’étude

A) Rappel de la problématique

Nous avons vu que les acteurs « candidats » et « recruteurs » peuvent utiliser et

s’approprier les services du Web 2.0 pour tenter de se rencontrer en répondant au mieux à

leurs besoins : trouver le collaborateur correspondant au profil recherché par le recruteur et

rencontrer la structure professionnelle répondant aux attentes du chercheur d’emploi.

Rappelons que les questions centrales soulevées lors de l’introduction à notre étude

étaient :

Comment et à quelles fins les candidats présumés exploitent-ils les outils du Web 2.0

pour être recrutés ? Pourquoi, comment et à quelles fins, les recruteurs mandatés (cabinets

de recrutement et agences de communication) s’approprient-ils aussi ses services ? Quels

intérêts les outils et services du Web 2.0 présentent-ils dans une démarche de recrutement ou

de recherche d’emploi ? Quels peuvent être leurs effets sur la relation candidat / recruteur ?

Ces outils constituent-ils un simple dispositif de rencontre entre candidat et recruteur ou

modifient-ils le processus de recrutement en lui-même?

En effet, la situation de recrutement comportant un certain nombre d’enjeux qui

peuvent avoir des répercussions sur la sélection opérée et notamment la volonté pour le

candidat comme pour le futur employeur de donner une image positive d’eux-mêmes, nous

nous demandons en quoi l’utilisation des outils offerts par le Web 2.0 offre des possibilités

inédites de présentation de soi ? En d’autres termes, quelles peuvent-être les stratégies

d’usages des outils exploités par les acteurs concernés par la situation de recrutement et leur

impact sur la relation candidat / recruteur?

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Il s’agit alors, par notre étude, de tenter de répondre à ces trois sous questions :

A quelles fins et selon quels moyens les candidats présumés s’approprient-ils les outils

et supports du Web 2.0 ? Et pourquoi et comment les annonceurs s’approprient-ils à leur tour

ces outils ? Quelles stratégies les candidats et les recruteurs adoptent-ils pour construire une

relation gagnant-gagnant ?

Lors du précédent chapitre, nous avons tenté de découvrir chacun des types d’acteurs

concernés par la situation de recrutement et de présenter leurs rôles dans ce système. A noter

que nous avons tendance pour notre analyse, à positionner les cabinets de recrutement du

même côté que les agences de communication RH, dans une optique « annonceurs », bien que

les agences de communication soient les prestataires externes des cabinets comme des

entreprises.

Nous avons vu qu’a priori, les utilisateurs d’Internet en recherche d’emploi visent à

trouver un poste correspondant aux critères qu’ils se sont préalablement fixés. Quant aux

consultants en recrutement, ils espèrent trouver pour leurs clients, des collaborateurs

conformes à leurs attentes et s’intégrant bien aux équipes déjà en poste. En tant que

médiateurs entre entreprises et candidats potentiels, il s’agit pour eux de satisfaire les besoins

de chacun tout en respectant leurs intérêts. Enfin, les agences de communication RH ont pour

objectif d’améliorer la qualité de l’image employeur des entreprises clientes et donc de créer

des sites attractifs tant du point de vue de la forme que du contenu. Leur intervention est plus

technique que celle des recruteurs et ils constituent à ce titre, des facilitateurs de la relation

candidat / recruteur. (Il en va de même en ce qui concerne les concepteurs de jobboards et

autres logiciels RH). Nous allons voir dans le chapitre suivant, si nos rencontres avec les

acteurs concernés confirment cette première vision des objectifs et pratiques de chacun.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 50 -

B) Concepts clés et cadre de référence50

La notion de Soi occupe une place importante en psychologie sociale et en

psychologie de la personnalité. Il suffit de constater l’importance de la liste d’études où le

terme « self » (Soi en anglais) apparaît comme préfixe : self-concept (concept de Soi), self-

consciousness (conscience de Soi), self-control ( contrôle de Soi), self-esteem (estime de Soi),

self-efficacy (auto-efficacité) self-image (image de Soi), self-monitoring (contrôle de l’image

de Soi), self-perception (auto-perception), self-presentation (auto-présentation), et self-

marketing (auto-promotion)… Mais quelle définition du Soi recouvre cette richesse de

notions qui lui sont liées ? Ainsi, pour tenter de rendre plus compréhensible cette notion de

«Soi», les théoriciens du Soi et de l’identité paraissent-ils s’accorder sur le fait que le Soi

contiendrait une variété de représentations. Les représentations de Soi seraient cognitives

et/ou affectives – ces dernières correspondent aux auto-évaluations positives et négatives, de

formes verbales, neuronales ou sensori-motrices, ou sous forme d’images. Elles

représenteraient le Soi dans le passé et le futur aussi bien que dans l’ici et maintenant ; elles

seraient ainsi des représentations du Soi actuel et du Soi possible. Certaines seraient

organisées dans des structures contenant à la fois, une base de connaissances bien élaborées et

des règles de production, pour savoir comment se comporter dans certains types de situations.

D’une manière générale, le soi peut être étudié selon trois aspects : une composante

cognitive (concept de soi ou comment les individus arrivent à se comprendre eux-mêmes),

une composante affective (l’estime de soi) et une composante stratégique (la présentation de

soi).

Dans un dispositif de jugement nécessairement induit par une situation de recrutement

(en tant que processus de sélection et d’appariement), les représentations sociales sont

prescriptives de comportements ou de pratiques obligés dans le contexte donné. Ainsi, on peut

raisonnablement penser que les candidats qui participent à des épreuves de sélection pour un

emploi sont soucieux de leur présentation et cherchent à donner une bonne image d’eux

mêmes au recruteur. Il est ainsi logique de se demander non seulement comment les candidats

se voient-ils mais surtout comment veulent-ils qu’on les voient ? Nous verrons dans ce 50 Paragraphe inspiré de l’article « Le soi et Rôle professionnel » écrit par Jean-Gilles Boula Chargé de cours en Sciences Humaines, Webster University, Genève. Article consultable à cette adresse : http://www.gfmer.ch/Presentations_Fr/Soi_role_professionnel.htm

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 51 -

chapitre que lorsqu’ils ne tentent pas d’affirmer leur différence par rapport aux autres, ils

cherchent à se mettre en scène ou à adopter un comportement censé influencer le recruteur et

le convaincre. Reste ensuite à comprendre quels moyens mettent-ils en œuvre dans ce but?

▫ Les représentations sociales51:

La représentation sociale est une forme de connaissance courante (pensée naïve du

sens commun), qui permet à l’individu ou au groupe de donner un sens à ses conduites et de

comprendre la réalité à travers son propre système de références, donc de s’y adapter, de s’y

définir une place. En tant que système d’interprétation de la réalité qui régit les relations des

individus à leur environnement physique et social, la représentation sociale va déterminer

leurs comportements ou leurs pratiques. C’est un guide pour l’action et un système de pré-

codage de la réalité car elle détermine un ensemble d’anticipations et d’attentes.

La signification de la représentation est ainsi déterminée par des effets de contexte et

notamment par le contexte social. Pour comprendre le contenu et la dynamique d’une

représentation, il est nécessaire de faire référence au contexte, en l’occurrence, la situation de

recrutement. Selon Flament52, les représentations permettent l’élaboration d’une identité

sociale personnelle et gratifiante, c’est à dire « compatible avec des systèmes de normes et de

valeurs socialement et historiquement déterminées ». Cette fonction identitaire des

représentations leur donne une place primordiale dans les processus de comparaison sociale.

Dans notre étude, la construction de la représentation sociale ne porte pas sur un objet

extérieur au sujet mais sur le sujet lui-même puisqu’il s’agit de saisir la représentation qu’un

candidat se fait de lui en situation d’évaluation.

▫ L’image de soi53 :

Cette représentation de soi, ou image de soi, est construite sur la base d’expériences

passées, de tous ordres. Cette élaboration ne s’interrompt jamais tout au long de la vie mais

c’est l’image actuelle qui détermine à chaque instant, la manière dont de nouvelles

expériences et de nouvelles informations sont intégrées dans le contexte de structures

51 Paragraphe inspiré de l’ouvrage de JODELET, D. (1991). Les représentations sociales, Paris, PUF. 52 FLAMENT, C. (1991), in « Les représentations sociales », sous la direction de Denise JODELET, Paris, PUF. 53 Paragraphe inspiré des propos de L’ECUYER, R. (1978). « Le concept de soi ». Tiré de l’ouvrage de FRAISSE, P. (1990). Stratégies identitaires, Paris, PUF.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 52 -

cognitives existantes ainsi que la manière dont ses structures vont, à leur tour, se modifier et

se différencier pour absorber ces nouvelles données.

L’image de soi a de multiples facettes et de multiples fonctions :

L’une des fonctions de l’image de soi est de donner à chacun une identité qu’il essaie

de faire comprendre et accepter par les autres. Ce qui veut dire qu’au cours des interactions

sociales, chacun utilise une variété de stratégie et de tactiques pour communiquer aux autres

une certaine image de lui-même : nous essayons de montrer aux autres, différentes identités

ou différents soi, dans des situations différentes, selon que l’on soit en famille, au travail, avec

des amis…). C’est dans son ouvrage « L’esprit, le soi et la société » que Mead54 entend par

soi le rôle que chacun est amené à jouer en situation sociale. Par exemple, lorsqu’un client

arrive à la caisse d’un magasin, il s’attend à ce que la caissière adopte une certaine attitude et

réalise un certain nombre d’opérations (soi de caissière) de la même façon qu’elle s’attend à

ce que le client adopte lui-même une certaine attitude (soi de client). Ces soi sont

éminemment sociaux en ce sens que les personnes témoins de la scène s’attendent à ce que

l’une joue son rôle de caissière et à ce que l’autre tienne son rôle de client : ce que Mead

appelle l’autrui généralisé est su et attendu par l’ensemble des protagonistes. Chacun agit

certes de son propre concert, mais ce faisant, en appelle à l’autrui généralisé qu’il a intériorisé

au point où, la plupart du temps, celui-ci demeure inconscient. Au regard de ces différents soi,

le moi est décrit par Mead comme le produit de l’organisation interne des différents rôles

sociaux (soi) d’un individu.

L’autre fonction de l’image de soi est ainsi d’apporter à l’individu lui-même, le sens

de la continuité, en lui permettant de se percevoir comme ayant des comportements, des

attitudes, des goûts…qui se manifestent de manière cohérentes à travers l’ensemble des

situations qu’il rencontre.

Enfin, l’image de soi est variée, en ce sens qu’elle est composée d’une variété de

représentations qui sont de nature différentes : cognitives ou affectives, concernant le moi

passé, le moi actuel et les moi futurs, jugés possibles, et en ce sens qu’elle est faite d’images

visuelles ou de données verbales, voire sensori-motrices. A tout moment, un de ces aspects est

activé et influence nos comportements et nos motivations. La dimension affective et

évaluative de la représentation de soi constitue le fondement de cet aspect important qu’est

l’estime de soi. Une estime de soi élevée entraîne satisfaction et bien-être psychologique ainsi

qu’un sentiment général de compétence qui fait anticiper des succès à venir. En revanche, une

54 MEAD, G. H. (1963), L’esprit, le soi et la société. Paris, PUF.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

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estime de soi faible entraîne une insatisfaction générale et un manque de confiance en soi

pouvant être démotivant. Ainsi, le développement professionnel se fait aussi à travers

l’évolution d’une image de soi nourrie des nombreuses évaluations faisant partie de l’activité

professionnelle, composée des essais de rôles divers qui la jalonnent.

Autre point sur lequel l’image de soi joue un rôle dans la vie sociale : la manière dont

nous tentons de donner aux autres une certaine image de nous-même55 : l'identité est l'image

de nous-même que nous construisons et vivons avec une audience spécifique. Elle est donc

fonction de notre image, fonction des caractéristiques de l’audience mais surtout fonction de

la relation interpersonnelle que nous souhaitons établir avec nos interlocuteurs : approbation,

influence, autorité, etc. Ces mécanismes sociaux sont implicites et les stratégies utilisées pour

arriver à ces différents objectifs ne sont pas toujours l’objet d’un choix délibéré mais n’en

sont pas moins importants.

▫ Le rôle de l’image de soi :

Mobiliser ses ressources, cela suppose avoir confiance dans sa capacité à les utiliser

efficacement et dans leur potentiel d’évolution. Face aux situations inédites ou aux

incertitudes, le sujet doit être capable de prendre des risques, d’accepter des missions

nouvelles, de tolérer des procédures de tâtonnements…Il lui faut une certaine audace pour

être compétent. Ainsi, dans la vie professionnelle, le rôle de l’image de soi est

particulièrement clair au moment de l’entrée dans la vie active et ensuite dans les choix à faire

à tous les carrefours d’une carrière. Une image de soi positive et évolutive constitue un pré-

requis ) à la production des pratiques professionnelles adaptées aux problèmes à résoudre ou

aux projets à réaliser. Il n’y a engagement pertinent dans l’activité qui si le sujet a une relation

positive avec lui-même. Il faut savoir accepter ses déficiences tout comme apprécier ses

performances : chaque sujet détermine sa conduite en fonction de ce qui lui paraît accessible

ou inaccessible. C’est l’auto estimation par le sujet de ce qui relève ou non de sa compétence.

Selon Lévy-Leboyer56, l’image de soi (ou self concept) est ainsi « une synthèse des

expériences passées est structurée en fonction du système de valeur de l’individu et de son

55 MARKUS, H. R. ; WURF, E. (1987). « The dynamic self concept: a social psychological perspective ». Annual Review of Psychology, 42, p. 38-50.

56 LEVY LEBOYER, C. (1998). La motivation dans l’entreprise: modèles et stratégies. Paris, Editions d’Organisation.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 54 -

milieu d’appartenance. Elle est dynamique car elle se modifie sur la base des situations

rencontrées. C’est sur la base de cette représentation de ses propres compétences que

l’individu aboutira à ce jugement qu’est l’estime de soi ».

▫ Le monitorage de soi57:

Certaines personnes semblent ainsi conduire leurs relations de façon efficace et

contrôler leur image d’elles-mêmes, alors que d’autres semblent incapables de le faire. L’une

des raisons de ces différences peut être les variations existantes dans l’habileté des gens à lire

« les indices des autres ». On appelle cela le monitorage de soi ou « self monitoring ».

Cette notion dépend de trois aspects :

- Le fait de prêter attention aux autres en tant que sources d’actions appropriées. Les gens

efficaces rechercheraient chez les autres des indices leur permettant de savoir comment

agir dans des situations d’incertitude.

- L’habileté à contrôler et à modifier sa présentation de soi. Les gens efficaces seraient

capables de faire des discours spontanés ou de mentir sans broncher lorsque c’est

nécessaire.

- La volonté ou le désir d’ajuster ses propres actions à la situation sociale. Les gens

efficaces seraient capables de se décrire comme ayant peu de difficultés à modifier leur

comportement pour s’adapter à différentes personnes.

Les gens qui se décrivent comme possédant ces trois habiletés ont un degré de

monitorage de soi élevé et tendent à se distinguer de ceux dont le degré de contrôle de l’image

de soi est plus faible.

▫ Stratégies et présentation de soi :

Pour notre étude, nous développons le concept de présentation de soi, concept

principalement à l’œuvre dans le dispositif d’évaluation induit par le processus de

recrutement. Concrètement, lors de ce processus, les individus se dévoilent d’après ce qu’ils

pensent que l’on attend d’eux (au regard de la description de poste, du secteur d’activité

recherché…) et s’appuient pour cela sur certains registres : le registre cognitif (ils font

57 MONTEIL, J-M. (1994). « Soi et autrui, la comparaison sociale ». In VERGNAUD, Gérard (Coord.) Apprentissages et didactiques, où en est-on ?.Paris, Hachette.

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ROZEL Claire-Marie - 55 -

ressortir leurs savoirs, savoir-faire et savoirs être, ce qui les pose comme une structure

cognitive), le registre stratégique (qui pose l’individu comme une unité de traitement

stratégique de l’information, d’après ce qu’il aurait mémorisé, intériorisé), et enfin le registre

culturel constitué du milieu social, de l’âge, des références liées à sa culture…

D’un point de vue théorique, Fenigstein, Schreirr et Buss58 en 1975 ont établi dans la

conscience de soi une distinction entre deux niveaux essentiels, très utiles à la compréhension

du comportement des candidats en situation de recrutement, notamment sur Internet : la

conscience du soi intime qui se manifeste dans le sentiment que l’on a de soi-même

(indépendamment des situations sociales dans lesquelles on se trouve) et la conscience de soi

publique, liée à l’extériorisation des éléments du soi vis à vis d’autrui, et considérée comme

objet social. Cette conscience publique du soi s’exprime principalement dans la présentation

de soi.

La conscience de soi publique peut se manifester selon plusieurs modalités distinctes :

L’une des modalités consiste à affirmer sa distinction par rapports aux autres

individus. En ce sens, la présentation de soi fonctionne comme un mécanisme de

différenciation ayant pour but de mettre en évidence un ou plusieurs traits distinctifs de soi,

par rapport aux autres.

La seconde renvoie à la création d’une impression relative à une situation donnée. La

présentation de soi est alors un objet relationnel déterminé par les circonstances. La

présentation de soi fait alors intervenir la tendance à exercer une impression favorable sur

autrui de manière plus ou moins explicite.

La troisième modalité présentée par Goffman59 dans son livre « La mise en scène de la

vie quotidienne », donne à la présentation de soi une interprétation spécifique : les interactions

sociales créent une mise en scène à travers laquelle les individus déploient un arsenal

symbolique qui leur permet de tenir des rôles acceptables aux yeux des autres dans le but

d’obtenir des échanges satisfaisants. Ainsi, les actions et les positions de quelqu’un façonnent

les comportements d’autrui parce que les gens ont des attentes quant aux séquences de

comportements appropriées dans différentes situations.

58 FENIGSTEIN, A ; SCHEIER, M.F ; BUSS, A.H. (1975), Public and private self consciousness Assessment and theory, Journal of Consulting and clinical psychology, N°. 43, p.522-527. 59 GOFFMAN E. (1973), La mise en scène de vie quotidienne - La présentation de soi, Editions de Minuit, 248 p, Paris.

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ROZEL Claire-Marie - 56 -

Enfin, selon Crozier60 l’individu peut adopter un comportement stratégique. Il s’agit

pour la personne de développer des stratégies dans le cadre de la présentation de soi, pour

rendre son comportement incertain aux yeux de l’autre. Dans un contexte d’évaluation ou de

recrutement, ce comportement se définit comme un jeu pour tenter de préserver une marge de

sécurité dans la relation interpersonnelle. La présentation de soi devient alors « un système de

négociation où chacun confère par son comportement stratégique, un certain prix à sa relation

avec autrui », car toutes les relations sont des relations de pouvoir.

▫ Les conséquences de la présentation de soi dans une situation de recrutement :

Le soi est la part de l’investissement social de l’identité. Il représente ainsi un certain

nombre d’enjeux ayant des répercussions variées. Deux types de conséquences peuvent être

relevés : les dysfonctions entre l’intention de donner une image positive de soi (identité

voulue) et le niveau de l’identité réelle (image ressentie par les autres), et l’impact du soi

comme facteur d’évaluation personnelle. En situation de recrutement, un candidat fait des

efforts importants pour contrôler l’impression qu’il donne. Ces efforts correspondent à une

activité d’auto présentation : le but fondamental de la présentation de soi est de structurer

notre interaction afin d’obtenir le résultat voulu. Pour un candidat, l’objectif est d’obtenir le

poste proposé. Il va alors vouloir être perçu positivement, comme une personnes intéressante,

amicale, compétente…L’auto présentation est alors une activité délibérée : par exemple, lors

d’un entretien de recrutement, le candidat est conscient de son désir de se présenter comme

un travailleur acharné ou une personne compétente pour le poste. Une présentation de soi

réussie renforce l’image positive que les sélectionneurs ont de la personne mais aussi celle

que le candidat à de lui-même. En revanche, dans des situations familières, les activités auto-

présentationnelles peuvent devenir automatiques et donc inconscientes.

La seconde conséquence de l’expression de soi est liée au fait que celui-ci intervient

toujours dans un contexte social. Le soi constitue ainsi un miroir à travers lequel les individus

peuvent faire leur évaluation personnelle et qui les révèle à eux-mêmes. On focalise sur un

certain nombre de caractéristiques de l’identité qui déclenche une évaluation, positive ou

négative, pouvant inhiber ou raffermir la compétence sociale d’un individu, compétence

déterminante dans un processus de comparaison sociale.

60 CROZIER, M. (1977), L'Acteur et le système (en collaboration avec Erhard Friedberg), Paris : Le Seuil.

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ROZEL Claire-Marie - 57 -

▫ Vers la promotion de soi sur Internet :

Liger61

a présenté le marketing en tant qu’ « ensemble des méthodes et des moyens dont

dispose une organisation pour promouvoir, dans les publics auxquels elle s’intéresse, des

comportements favorables à la réalisation de ses propres objectifs ». Or, avec l’avènement du

Web 2.0, c’est a priori la notion de promotion de soi qui s’est développée, chacun détenant

par sa présence virtuelle, ses actes, ses écrits ses productions diverses, la possibilité d'être son

propre ambassadeur, acteur de sa propre vie en maîtrisant ses discours, ses promesses (mon

identité, mes compétences et savoirs faire, mes ressources, mes liens, mes contacts...).

Nombreux étant en effet, les outils et plate-formes permettant de gérer son identité, sa

présence numérique, ses données, sa réputation et d'être sa propre marque (il s’agit de se créer

sa « personal branding » ou marque personnelle). D’habiles stratégies de communication

personnelles semblent devenues possibles pour faire savoir son savoir-faire et savoir-être et

sont autant de façon de se positionner, de s’inventer voire se ré-inventer sur Internet et donc

d’affirmer sa compétence sociale. Selon Béatrice Cuvelier62

, « le personal branding

représente le fait de savoir utiliser ses points forts pour être différencié et intéressant aux

yeux d’un éventuel employeur voire d’un client ». Ce terme évoque l’univers du marketing,

qui, dans le langage commun, implique une construction artificielle voire superficielle.

Concrètement, le personal branding permet de construire et promouvoir sa marque

personnelle. Elle doit permettre de gérer sa carrière et de mieux réfléchir à la stratégie à

mettre en œuvre pour réaliser ses projets. Avant, il fallait un article dans la presse pour être

connu. Avec Internet, il n’y a plus d’inconnus. Internet devient une place publique mondiale

sur laquelle va se construire son image de marque.

61 LIGER, P. (2004), Le marketing des Ressources Humaines, Paris, Dunod 62 Fondatrice de mybranding®, master coach et personal branding strategist certifiée. Elle a exercé pendant 20 années des fonctions de management dans les métiers de la communication et des nouvelles technologies, notamment dans l'univers Apple*. Ex-directrice de la publicité et du commerce électronique d'AOL, puis DG d'AltaVista France, elle a fait partie des pionniers de l'Internet français. Voir son site : http://www.mybranding.fr

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ROZEL Claire-Marie - 58 -

II- Choix méthodologiques et recueil des données

A) Positionnement méthodologique : une approche qualitative

L’approche qualitative semble la plus pertinente et la plus appropriée lorsque nous

voulons recueillir des données d’ordre personnel, capter des ressentis propre à l’individu.

Nous souhaitons en effet que l’individu puisse nous faire part de la façon dont il vit la

situation de recrutement ou s’approprie les technologies du Web 2.0 pour atteindre un but

plus ou moins prédéfini.

En questionnant les représentations et les pratiques des candidats potentiels comme

des recruteurs, nous savons que ces données ne sont pas mesurables ni quantifiables. Comme

le souligne Mucchielli, « les méthodes qualitatives sont des méthodes des sciences humaines

qui cherchent, explicitent, analysent des phénomènes […] » qui « par essence, ne sont pas

mesurables, […] elles ont les caractéristiques spécifiques des "faits humains" »63.

Nous avons donc choisi la méthode qualitative qui nous permet de laisser libre court à

l’expression de l’individu. L’objectif est de pouvoir tirer le maximum d’informations sur des

comparaisons effectuées à la suite de nos entretiens. C’est dans la diversité des perceptions et

des interprétations que chaque sujet porte sur un même phénomène, en l’occurrence

l’utilisation du Web 2.0 dans la démarche de recrutement, que pourra s’effectuer notre travail

d’analyse et d’interprétation. L’objectif est ainsi de construire des lignes directrices, des axes

ou des faits communs qui émergent de l’analyse.

B) Choix de la population interrogée

Pour répondre à la problématique de cette recherche, j’ai interrogé quatre

intermédiaires « marchands » (non institutionnels) du marché du travail, c’est à dire des

recruteurs issus de cabinets de recrutement (chasseur de tête et généraliste), un consultant en

agence de communication RH et un responsable de pôle « développement » de logiciels de

gestion RH et de sites emploi. En effet, l’ensemble de ces acteurs ont été particulièrement

perturbés dans leurs rôles et places avec l’arrivée d’Internet. Par exemple, les agences de

communication RH ont, pour maintenir leur activité média de recrutement, participé à

l’inévitable mouvement de basculement des annonces emploi du support papier vers Internet.

63 MUCCHIELLI, A. (1991). Les méthodes qualitatives. PUF, Paris.

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ROZEL Claire-Marie - 59 -

Elles structurent aujourd’hui le recrutement en ligne et « couvrent à la fois la communication

directe d’offres d’emploi aux candidats potentiels et les actions de communication destinées

plus globalement à valoriser l’entreprise en tant qu’employeur »64. En ce qui concerne les

cabinets de recrutement, Internet les a poussé à élargir leurs missions vers les activités situées

en amont et en aval du recrutement, telles que nous les avons évoquées dans le premier

chapitre.

En parallèle, je me suis entretenue avec quatre personnes qui utilisent les outils du

Web 2.0 dans leur recherche d’emploi ou bien qui ont récemment trouvé un emploi grâce à

l’utilisation de l’un de ces outils (blog emploi, réseau social professionnel, CV vidéo, e-

portfolio). Nous avons d’ailleurs pris ici le parti de partir des candidats ou chercheurs

d’emploi, pour tenter de mieux comprendre les usages du Web 2.0 dans une situation de

recrutement. Nous avons donc construit notre réflexion à partir de la réalité de pratiques, afin

de privilégier le recueil d’informations et de confronter ces données aux théories préexistantes

ou émergentes.

C) Méthode de recueil des données : les entretiens semi-directifs

La méthode de l’entretien, à visée qualitative, permet en effet, la « mise en œuvre de

processus fondamentaux de communication et d’interaction humaine »65 et permet à

l’interrogé lorsqu’il est semi-directif, d’exprimer ses perceptions d’un événement ou d’une

situation, ses interprétations ou ses expériences.

Le but de cette méthode est de permettre aux personnes interrogées de se livrer

librement à l’enquêteur sur des thèmes qui sont préalablement fixés en rapport aux hypothèses

de recherche. La personne interrogée n’est donc pas guidée par des questions mais par des

thèmes, la laissant plus libre dans ses réponses. Le second avantage que présente cette

méthode est qu’elle permet d’aborder des thèmes que le chercheur n’aurait pas prévu,

enrichissant le recueil de données et leur analyse. L’intérêt de l’entretien semi-directif réside

dans le fait qu’il permet d’obtenir des propos convergents ou divergents sur un même sujet,

reflétant des manières différentes de vivre des situations et de prendre chaque personne

interrogée dans son individualité.

64 FONDEUR, Y. (2005). Internet et les intermédiaires du marché du travail. Rapport de l’IRES. 65 QUIVY, R.; VAN CAMPENHOUDT, L.(1998), Manuel de recherche en sciences sociales. Ed. Dunod, Paris.

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ROZEL Claire-Marie - 60 -

Nous avons réalisé deux grilles d’entretiens pour le recueil des données parce que

nous souhaitons cloisonner les thèmes relatifs au point de vue et aux pratiques des annonceurs

et ceux relatifs au point de vue et aux pratiques des chercheurs d’emploi ou des candidats.

Pour les deux types de population interrogée, les entretiens individuels ont duré une heure

environ et ont été enregistrés (avec l’accord des protagonistes) pour être retranscrits de

manière à ne déformer aucun propos. Néanmoins, ils ne sont pas intégralement retranscris

dans notre étude, mais seulement présentés au travers de thèmes et de sous-thèmes d’analyse

dans le but de mettre en évidence les jugements, valeurs, et représentations des locuteurs face

aux usages du Web 2.0 dans leur environnement professionnel. Des morceaux choisis

viendront ainsi illustrer l’analyse dans la troisième partie de cette étude.

D) Méthodologie d’analyse des données

Dans cette recherche, nous accordons une place importante à la parole de nos

interlocuteurs. En effet, la parole permet à elle seule d’exprimer l’ensemble de leurs pratiques

sociales comme professionnelles.

Nos entrevues sont transcrites, codées puis analysées. Les données recueillies seront

analysées à l’aide d’une grille approfondie :

La grille d’analyse est élaborée en fonction de thèmes généraux66 dérivés des sous-

questions et de la problématique. A partir de chaque thème évoqué par nos sujets, nous aurons

établi des caractéristiques propres à chacun. L’analyse thématique consiste à dégager des

grands thèmes de discours abordés par rapport aux questions posées. Une fois ces

informations recueillies, il s’agit de comparer entre elles les pratiques et les opinions des

sujets, en les « classant » de façon à dégager des axes, des points communs et des

divergences, non seulement dans les pratiques mais aussi par rapport à la vision qu’ont

chacun des sujets de leur activité et du Web 2.0. Une analyse du discours permet ensuite de

donner du sens aux pratiques de chacun.

66 Thèmes présentés page suivante, au paragraphe E.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

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E) Les différents thèmes d’analyse

- Point de vue des candidats et chercheurs d’emploi :

La consigne générale donnée aux chercheurs d’emploi interrogés sera la suivante : « Après

vous être succinctement présenté, parlez-moi du pourquoi et comment vous avez utilisé

Internet et les supports du Web 2.0, dans votre recherche d’emploi ? »

Thème 1 : Web 2.0 et recherche d’emploi

▪ Sous thème 1.A : L’utilisation du Web 2.0 dans la recherche d’emploi

Pourquoi utiliser Internet dans votre recherche d’emploi ?

Quels types de sites et de services du Web connaissez vous et utilisez vous en complément de

votre CV vidéo (ou blog…) pour rechercher un emploi?

▪ Sous thème 1.B : Choix et définition du support utilisé

Pourriez-vous définir ce qu’est pour vous un CV vidéo, un e-portfolio, un blog… ?

Pourquoi avoir choisi de faire un CV vidéo, un e-portfolio…. ? D’un point de vue technique

et professionnel.

Thème 2 : Stratégies d’usages du Web 2.0

▪ Sous thème 2.A : Web 2.0 et présentation de soi

Selon vous, en quoi le fait d’utiliser cet outil vous distingue-il des autres candidats ?

Que vous apporte cet outil Web 2 par rapport à d’autres outils ?

De votre point de vue, quels sont les avantages et la valeur ajoutée de votre outil « on line »

par rapport à un simple dépôt de CV sur un site emploi ?

▪ Sous thème 2.B : Objectifs d’utilisation du Web 2.0

Quelles sont vos attentes par rapport à cet outil ?

Cela relève-t-il d’une stratégie particulière de présentation de soi? Si oui laquelle? (Stratégie

de rencontre, de recommandation, de valorisation des compétences ou de l’expérience ?)

Pensez-vous être mieux évalué grâce à l’utilisation de cet outil ?

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ROZEL Claire-Marie - 62 -

▪ Sous thème 2.C : La rencontre avec les recruteurs

Comment utilisez-vous l’outil pour entrer en relation avec un recruteur ?

Comment utilisez-vous l’outil pour obtenir un entretien ? Le préparer ? Pendant ou après

l’entretien ?

Comment utilisez-vous l’outil pour savoir qui s’intéresse à vous ?

Thème 3: Représentations vis à vis du recrutement

▪ Sous-thème 3.A : Perception des annonceurs

Quelle perception avez-vous des annonceurs ?

Comment pensez-vous qu’ils utilisent et exploitent les services du Web 2.0 ?

A votre avis, quels avantages peut en retirer un recruteur ?

Quels en sont les limites ?

▪ Sous thème 3.B : Impacts des supports du Web 2.0 sur le recrutement

Selon vous, qu’est ce que les services du Web 2.0 impactent au niveau du recrutement ?

Quelles étapes du processus ?

Selon vous, quels sont les impacts de l’usage de cet outil, sur la relation candidat / recruteur ?

▪ Sous thème 3.C : Indicateurs de réussite et perspectives d’évolution du recrutement 2.0

Comment savez-vous si cet outil est efficace, quels sont vos indicateurs pour cela ?

Perspectives d’évolution de cet outil ?

Envisagez-vous d’évoluer, de changer d’outil prochainement ? Vers le lequel ?

Finalement, diriez-vous que les outils du Web 2.0 renforcent la relation candidat/recruteur

durant le processus de recrutement ?

- Point de vue des annonceurs :

En ce qui concerne les annonceurs, il n’existait pas pour eux de consigne spécifique : ils

sont habitués à présenter leur activité, leurs services et leurs enjeux ; ils exploitent les outils

du Web 2.0 dans leur pratique professionnelle et sont reconnus dans leur domaine

professionnel.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 63 -

Thème 1 : Web 2.0 et recrutement

▪ Sous thème 1.A : Définition du Web 2.0

Qu’est ce que le Web 2.0 ? Le recrutement 2.0 ?

▪ Sous thème 1.B : Web 2.0 et pratique professionnelle

Quels services ou supports du Web 2.0 utilisez vous dans votre activité professionnelle ?

Depuis combien de temps utilisez vous les supports du Web 2.0 dans votre activité ? Et

lesquels utilisez vous ?

Comment avez vous décidé de faire du Web 2.0 un support pour votre activité, pour votre

société ou celle de votre employeur ?

Comment se fait le choix d’utiliser les services du Web 2.0 pour recruter par rapport aux sites

traditionnels?

Avez vous des outils Web 2.0 de prédilection ?

▪ Sous thème 1. C : Evolution du e-recrutement (avantages et nouveaux inconvénients)

Selon vous, quels sont les avantages et la valeur ajoutée du recrutement 2.0 par rapport au e-

recrutement traditionnel ?

Quels en sont les aspects négatifs ?

Thème 2 : Stratégies d’usages du Web 2.0

▪ Sous thème 2.A : Web 2.0, stratégies de rencontre et stratégies de présentation de soi

Quelles sont les façons de procéder pour attirer l’attention des candidats ? Comment

exploitez-vous les outils du Web 2.0? Dans quels buts ?

Comment utilisez-vous l’outil pour entrer en relation avec un candidat ?

Comment utilisez-vous l’outil pour proposer un entretien ? Le préparer ? Pendant ou après

l’entretien ?

▪ Sous thème 2.B : Web 2.0 et efficacité du recrutement

Comment utilisez-vous l’outil pour savoir qui s’intéresse à vous, à votre entreprise ?

Est-il possible d’évaluer les candidatures obtenues par ce support ?

En tous cas, quels sont les impacts concrets du Web 2.0 dans le processus de recrutement ?

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 64 -

Thème 3 : Représentations vis à vis des candidats et du Web 2.0

▪ Sous thème 3. A: Positionnement des candidats vis à vis de la recherche d’emploi

Selon vous, quelles sont les attentes des chercheurs d’emploi par rapport aux services

proposés ?

Que pensez vous que les candidats cherchent à faire en utilisant tel ou tel outil du Web 2.0 ?

▪ Sous thème 3.B : L’évolution de la relation candidat / recruteur

Selon vous, quels en sont les impacts sur la relation candidat / recruteur ?

Pensez vous que le Web 2.0 permette un relatif « rééquilibrage » de la relation de

recrutement ? Si oui en quoi ?

Finalement, diriez-vous que les outils du Web 2.0 renforce la relation candidat/recruteur

durant le processus de recrutement ? En cela, améliorent-ils l’efficacité du recrutement ? et

pourquoi ?

F) Présentation des entretiens

- Entretiens avec les chercheurs d’emploi / candidats :

J’ai d’abord interrogé 4 chercheurs d’emploi (ou ayant trouvé un poste en utilisant au

moins l’un des outils du Web 2.0), hommes et femmes, âgés de 22 à 29 ans, exerçant dans des

secteurs d’activité différents et originaires de différentes régions françaises. Il ne s’agissait en

aucun cas de recueillir des données généralisables à toute la population française concernée,

c’est pourquoi nous ne nous préoccupons pas de la représentativité de l’échantillon, (quoi

qu’il ne soit pas surprenant de ne trouver dans ce groupe, que des personnes de moins de 30

ans provenant notamment du secteur de l’informatique, de la publicité et des Ressources

Humaines). La recherche d’emploi concerne en effet majoritairement les jeunes, d’autant plus

lorsqu’il s’agit d’utiliser une version récente d’Internet, présentant de nouvelles

fonctionnalités. L’échantillon interrogé semble donc révélateur des estimations de profils

utilisateurs du Web 2.0.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 65 -

S. L (entretien réalisé à Paris)

29ans, originaire de la région parisienne. Titulaire d’un bac + 5 en école de commerce. Sur le

marché du travail depuis 5 ans, elle travaille actuellement dans le secteur du marketing, en

tant que responsable projet.

A. L (entretien réalisé en Mayenne)

23 ans, originaire de Rennes, en Bretagne. Titulaire d’un Bac + 3 en e-commerce. Récemment

diplômé, il vient juste de trouver un emploi en tant que référenceur.

M. B (entretien réalisé à Paris)

23 ans, originaire de Laval en Mayenne. Titulaire d’un bac + 5 en communication. Elle

travaille depuis un an au sein d’une agence Marketing en tant que concepteur-rédacteur.

G. B (entretien réalisé à Angers)

35 ans, française originaire du Pérou, installée dans le Maine et Loire. Titulaire d’un bac + 5

en Ingénierie des RH. En recherche d’emploi dans le développement et la veille RH.

- Entretiens avec les recruteurs et annonceurs :

J’ai souhaité interroger des recruteurs et annonceurs, tous connus dans la blogosphère

et reconnus en tant que spécialistes du Web 2.0. Certains sont des consultants en recrutement

issus de cabinets soit généraliste soit de chasseurs de tête. Les deux autres interlocuteurs sont

consultant en agence de communication RH et directeur général France d’un site emploi,

leader européen des portails de carrière et de recrutement. Il m’a en effet semblé intéressant

d’aborder tous les points de vue des professionnels du e-recrutement pour appréhender

l’ensemble des problématiques existantes sur le sujet.

M.D.L (entretien réalisé en région parisienne)

38 ans, depuis toujours en région parisienne. Diplômée de Dauphine en Marketing, elle a

fondé en 2004, un cabinet de recrutement généraliste Alter Ego Solutions, après avoir été

RRH chez Pechiney pendant plusieurs années et avoir travaillé chez TMP Wordlwide (Ex-

Monster).

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 66 -

C.R (entretien réalisé à Paris)

42 ans, diplômée en communication, a passé près de vingt ans dans le secteur de la

communication. Dans le cadre de son travail (aussi bien en agence que chez l'annonceur), elle

a encadré jusqu'à une vingtaine de personnes. Attirée par le recrutement et la formation, elle

crée en 2001 Accile, un cabinet de recrutement spécialisé dans les métiers de la

communication. Son nouveau projet, Elaee Recrutement, est un cabinet de recrutement par

approche directe concentré sur les métiers de la création, du marketing, du Web et de la

communication.

E.G (entretien réalisé à Paris)

47 ans, Directeur général de Stepstone Solutions depuis peu. Diplômé d’école de commerce,

il a d’abord travaillé 7 ans chez Oracle avant de rejoindre Stepstone en tant que responsable

du développement de solutions logicielles IT : ces services ne sont pas simplement conçus

pour insérer des offres d'emploi selon une base ad hoc, mais aussi pour aider les employeurs à

construire une stratégie cohérente de recrutement en ligne qui leur permettra de bénéficier de

tous les avantages du Web. Stepstone offre des sites Web d'entreprise, des systèmes de

gestion de candidature, l'accès à une base de données de CV et fournit le transfert automatique

de données.

T.D (entretien réalisé en région parisienne)

30 ans, responsable de l’équipe Web au sein de l’agence de communication RH, TMP Néo.

TMP Néo, est la filiale Française du groupe TMP Worldwide, qui est un réseau international

d’agences de communication de recrutement. En tant que responsable de l’équipe Web, il a

trois activités: une liée aux médias (média planning, optimisations, reporting, statistiques…),

une partie liée à la construction de sites et une qui concerne « le produit » : il s’agit d’apporter

une réponse technologique à un problème transverse à tous les clients.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 67 -

Avant d’aborder l’analyse et l’interprétation de nos résultats dans le chapitre suivant, il

nous faut revenir sur les éléments sur lesquels notre enquête va se fonder. Il est alors

nécessaire de préciser que nous avons posé comme hypothèses provisoires que, dans le cadre

de leur socialisation sur le marché du travail;

- Les candidats et annonceurs exploitent des outils et services du Web 2.0 pour la valeur

ajoutée qu’ils lui attribuent en situation d’évaluation.

- Les candidats et annonceurs développent avec les ressources du Web 2.0, des

stratégies de présentation de soi leur permettant d’assurer leur auto promotion.

- Les candidats et annonceurs, par le biais de l’utilisation de supports Web 2.0,

modifient la nature de leur relation en la rééquilibrant.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 68 -

Chapitre 3 : Analyse des données et interprétation des résultats

Pour l’analyse thématique, nous allons effectuer une relecture des entretiens menés

avec les candidats et avec les annonceurs, et en sélectionner des morceaux choisis. L’analyse

est ainsi découpée selon trois thèmes d’étude, communs aux candidats et aux recruteurs, et

définis précédemment :

Thème 1 : Web 2.0 et marché du travail

Thème 2 : Stratégies d’usages du Web 2.0

Thème 3 : Représentations / Perceptions sur l’évolution du marché du travail et de ses acteurs

Dans une première partie, il s’agira pour chaque thème, d’exposer le point de vue des

candidats ou chercheurs d’emploi puis dans une seconde partie, de présenter celui des

recruteurs. Ensuite, nous confronterons ces points de vue en essayant de confirmer ou

d’infirmer les hypothèses présentées à la fin du chapitre 2.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 69 -

I- Point de vue des candidats / chercheurs d’emploi

A) Thème 1 : Le Web 2.0 et le marché du travail

Sous thème A) et B) Origine et type de sites connus

D’une manière générale, c’est dans le cadre d’une première recherche d’emploi que

les candidats interrogés ont commencé à exploiter les supports du Web 2.0. En revanche, ils

avaient déjà utilisé Internet lors de recherche de stages de fin d’études notamment.

A.L a commencé à utiliser Internet car il travaille dans le secteur du Web 2.0 : il est

référenceur. Il était évident qu’il devait « être présent sur le Net ». En complément de son

blog, il s’est abonné à des « newsletters d’emploi telles que le site Ouest France », et à mis en

ligne son CV « sur Monster » et sur des « sites spécialisés » dans son secteur d’activité tels

que « Innoveum ou 1000CV ». Il procède à la « lecture d’annonces, envoi de mails, création

de mon blog CV, dépôt de CV sur sites emplois et sites corporate. En revanche, [il] n’a pas

cherché par le biais de l’ANPE, qui considère [son] emploi de « référenceur » comme

« développeur web ». L’ANPE n’est pas adapté à [son] secteur ». « [Il] reste persuadé que le

Web, lorsque l’on veut travailler dedans, est sûrement le canal principal. Mais le traditionnel

envoi de mail ou de lettres avec son CV joint [lui] semble obligatoire tout de même, les

forums emplois sont très intéressants et les associations d’anciens sont à exploiter ».

En ce qui concerne G.B, c’est d’abord parce qu’elle a évolué dans un secteur

d’activité concerné par la révolution Internet qu’elle s’est tournée vers le Web 2.0. «Je

voulais travailler dans le recrutement », « j’ai fait mon stage en agence d’Intérim et suite à

une reprise d’études en RH, j’ai touché à la communication interne et externe… ». « On ne

peut pas se passer d’Internet […] et on ne peut pas ne pas se créer d’identité numérique ».

Concrètement, elle a utilisé les « plate-formes de mise en relation » telles que « Viadeo et

LinkedIn sur lesquelles [elle est] inscrite […]». Néanmoins, elle considère qu’il ne faut

pas « négliger la partie classique de la recherche d’emploi comme les candidatures

spontanées, les réponses à annonces presse… ».

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 70 -

S.L quant à elle, a bénéficié des conseils de ses collègues recruteurs, bien qu’elle

travaille elle-même dans le marketing. C’est « un secteur qui nécessite qu’on soit au courant

des nouvelles technologies ». Elle considère qu’Internet et le Web 2.0 est indispensable pour

la « recherche d’informations sur les entreprises et les candidats » et « la prise de

contacts ». Elle n’utilise pas d’autres supports qu’Internet pour rechercher un emploi. Elle est

inscrite sur « Viadeo », utilise « les jobboards », «google pour essayer de trouver des

annonces éventuellement diffusées sur les sites des entreprises », « des moteurs de recherche

spécialisés tels que « moovement », « les forums de discussion systématiquement avant un

entretien » et « les sites de notation des entreprises ».

Enfin, M.B, diplômée de communication et « sans expériences valables », c’est parce

qu’elle travaille dans le secteur de la publicité qu’elle a pensé a réaliser un CV vidéo.

Néanmoins, elle considère qu’ « on ne peut pas l’utiliser dans tous les secteurs et dans tous

les métiers ». Pour elle, c’était facile, car elle « fait un métier créatif ». Par ailleurs, elle a

utilisé les sites emploi traditionnels tels que « Cadremploi.fr, Stratégies.fr, Cadresonline,

Monster et Ball, dans mon secteur ». « J’ai aussi pensé à utiliser Google » ; « tout de suite il

y a les premiers sites (avec offres d’emploi) qui tombent selon leur référencement sur

Internet ».

En résumé, ces chercheurs d’emploi sont venus aux supports du Web 2.0, parce que

les nouvelles technologies sont incontournables dans leur secteur d’activité. Ils ne les ont

ainsi exploités presque exclusivement dans le cadre de leur recherche d’emploi. Néanmoins,

si l’utilisation d’Internet est quasiment la seule source exploitée par les candidats, les supports

du Web 2.0, eux, ne sont utilisés que comme des sources complémentaires à leur démarche

de recherche d’emploi. En ce qui concerne les sites et supports exploités, chacun recherche

de la même manière, (excepté G.B qui passe encore par les annonces presse et ignore les sites

emploi « classiques » à cause de son parcours atypique) : utilisation des jobboards

généralistes (type Monster, Cadremploi…) et spécialisés selon leur secteur d’activité (ou leurs

souhaits de mobilité géographique). A l’exception de S.L et A. L qui consultent aussi les sites

corporate et participent à des forums de discussion, les candidats passent tous par « google »

pour trouver les sites emplois qui leur correspondent. A noter qu’aucun des candidats

rencontré n’utilise les sites de cabinets de recrutement, et que seule S.L consulte les sites tels

que moovment.fr (qui recensent l’ensemble des offres du secteur d’activité recherché).

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 71 -

Sous thème C) Choix du support Web 2.0 utilisé dans la recherche d’emploi

Différentes raisons peuvent inciter les utilisateurs du Web à choisir tel ou tel support

pour assurer leur recherche d’emploi. Les quatre supports sélectionnés en ce sens par nos

internautes sont le blog emploi, l’e- portfolio, les réseaux sociaux et professionnels (viadéo

notamment) et enfin, le CV vidéo.

Ayant une formation en informatique, A.L a crée son blog CV dans le but de « se

présenter » ainsi que de présenter son métier : « Un blog est un journal personnel dans lequel

on aborde une thématique précise (…) Un blog tel que le mien parle d’actualités Web (…)

afin de faire en sorte qu’il ne soit qu’un complément de mon CV dans lequel les futurs

employeurs [peuvent] apprendre à me connaître et à me juger ». La réalisation de son blog

lui a « permis de mettre en pratique [ses] compétences en référencement » qui sont

importantes pour son travail, puisqu’il recherchait un poste de référenceur. C’est un « support

pour présenter [son] savoir faire technique ». Enfin, il précise que par rapport à d’autres

outils Web 2.0, le « blog [lui] a permis d’apporter des pages fixes pour les traditionnelles

informations d’un CV mais aussi d’apporter du concret » tel que « la mise en place d’un site,

[l’]achat [d’]un nom de domaine ainsi qu’un hébergement » (…) et montrer qu’[il] peu[t]

tenir un blog précis, clair, accessible, facile d’utilisation, avec quelques widgets mais pas

surchargé ».

En ce qui concerne G.B, elle s’est d’abord inscrite sur Viadéo et LinkedIn pour

« trouver du travail par des relations ». « C’est une façon de faire connaître son besoin :

peut-être il y aura-t-il un employeur potentiel qui sera intéressé par ton profil (…) et qu’il va

te proposer quelque chose? ». En parallèle, elle a souhaité trouver le « meilleur support

possible » pour son « e-portfolio » qu’elle qualifie de « portefeuille de compétences

numérique », qui est « un outil qui permet à l’individu de bien se vendre vis à vis

d’employeurs » et « un moyen de mettre en valeur [ses] acquis » dans différents secteurs

d’activité. Il est selon elle, « très utile pour éveiller la curiosité des recruteurs qui peut

choisir de développer des points particuliers de ton profil ».

D’un point de vue technique, elle a comparé pendant deux jours les plate-formes pour

trouver ce qu’elle voulait d’un « point de vue visuel, et de par sa simplicité d’utilisation ».

Les « open source ne [lui] convenaient pas » car « quitte à vendre son identité numérique,

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ROZEL Claire-Marie - 72 -

autant le faire avec un bon outil, sinon ça démérite un peu ton image ». C’est une plate-forme

du Minnesota qui a retenu son attention : « elle présente un système très facile (…) la

personne peut elle-même concevoir toute sa présentation ». Déjà, il lui a fallu « tout traduire

en français », « choisir l’image la plus adaptée à la partie présentée dans l’e-portfolio, de

façon à mettre en valeur le discours derrière ». Elle a ainsi pu « choisir et insérer les images

et les couleurs ».

S.L s’est inscrite sur Viadéo dans le cadre de sa recherche d’emploi au Maroc

notamment. Elle considère que ce site « permet de créer une fiche de présentation de soi pour

entrer en contact avec d’autres personnes », recruteurs ou non. « C’est un guide

professionnel »,« pour identifier des contacts avec des coordonnées ». « Il faut faire la

démarche de se positionner sur le site (…), de créer son profil ». (« c’est pas vraiment un CV

parce que tu n’es pas obligé de détailler tout ton parcours » mais « tu peux seulement donner

des indications sur ton poste actuel »). L’intérêt majeur de cette « formule » réside dans le fait

que l’internaute peut insister sur certains points de son parcours : « la présentation Viadéo

laisse plus de liberté » au candidat qui peut « orienter [sa] présentation » et sélectionner ses

contacts (il faut des autorisation d’accès au profil). Elle précise que la « mise en relation est

moins formelle » et qu’elle lui laisse « plus de liberté qu’un jobboard dans la manière de se

présenter ». De même, elle « laisse la liberté [au recruteur] d’avoir ou non plus

d’informations sur toi ». « Tu as la possibilité de te présenter et de te mettre en avant comme

sur une mini-lettre de motivation ou une lettre de présentation (…) tu donnes tout de suite les

informations qui te semblent essentielles ».

Pour sa part, M.B a réalisé son CV vidéo pour « se démarquer » dans un « secteur

très concurrentiel » dans lequel « on [lui] demande de la créativité ». En quête de

crédibilité, elle tente de « faire [ses] preuves en [se] mettant [elle] même en

campagne » : « l’idée est de montrer par ce film l’éventuel potentiel créatif susceptible

d’intéresser les recruteurs ». Elle précise qu’elle souhaitait avant tout dire « voilà ce que je

suis capable de faire, donnez moi une chance ». Elle l’exprime ainsi « il me fallait pallier à

mon inexpérience ». Elle insiste aussi sur le fait que le CV vidéo rend plus libre dans sa

manière de se présenter : « t’es pas enfermé dans un cadre, [le CV vidéo] est libre et volatile

(…) il peut être partout sur le Net et sous n’importe quelle forme, on peut tomber dessus

n’importe quand et n’importe comment ».

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 73 -

« D’autant plus que Dailymotion, site sur lequel [elle a] diffusé [son] CV vidéo, permet plus

de liberté dans la conception que les CV vidéo proposés aujourd’hui par L’APEC dans

lesquels le recruteur est présent et le candidat filmé en plan fixe ». Avec le recul, elle qualifie

son CV vidéo de « belle vitrine » qui lui a permis de mettre en avant « des qualités et des

compétences telles que la créativité, la mise en scène d’idées, la conceptualisation, la rigueur

et la synthèse », indispensables dans le « milieu de la pub ».

D’un point de vue technique, elle a crée son CV vidéo avec un ami : « c’est lui qui m’a

filmée ». Elle qualifie son CV d’ « artisanal, car la qualité d’image est nécessairement

compressée pour aller sur Internet et le son n’est pas très homogène ».

En résumé, l’atout majeur des supports Web 2.0 choisis par les internautes en recherche

d’emploi est la liberté de conception comme d’utilisation qu’ils offrent. Ces supports sont

utilisés comme des compléments au CV, et perçus comme des vitrines personnelles : les

candidats parlent de profil ou de supports leur permettant de mettre en avant et de manière

personnelle, leurs compétences, qu’elles soient techniques ou personnelles (qualités), ou leur

potentiel.

B) Thème 2 : Stratégies d’usages du Web 2.0

Il s’agit dans cette thématique d’aborder les différentes logiques d’action des candidats

/ chercheurs d’emploi vis à vis de l’outil Web 2.0 qu’ils ont choisi d’utiliser dans leurs

recherches.

Sous thème A) Valeur ajoutée du support Web 2.0 sur la présentation de soi

A.L souligne l’aspect original et contraignant de son blog emploi : « Peut-être est-ce

l’originalité et la persévérance qui paieront ?». Il précise que « la modernité et la créativité

sont importantes dans son métier » et espère que son « blog reflète ce [qu’il est], [son]métier

et [sa] motivation ! » car « il faut y passer du temps, l’alimenter sérieusement, réaliser des

billets intéressants et qui ne sont pas truffés de fautes d’orthographe ». «[Sa] meilleure

publicité reste la rédaction d’articles en relation avec [son] métier, c’est réellement

stratégique (…)». Son but est ensuite « d’amener les personnes à s’intéresser à la personne

qui écrit ces articles ». Plus concrètement, il considère que son blog lui « permet plus

facilement d’obtenir des contacts, d’être reconnu ». Il lui sert de « point d’entrée (…) et lui

permet d’être au point sur l’actualité du métier ». « C’est finalement devenu un blog CV

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ROZEL Claire-Marie - 74 -

puisque j’y ai inséré mes expériences professionnelles et bénévoles ou encore mon CV

classique ». La réelle valeur ajoutée du blog « c’est qu’il s’agit là d’un complément au CV, où

l’on peut sans cesse apporter des informations nous concernant, la preuve de notre recherche

d’infos ou de nos compétences sur Internet » : « le blog permet l’interactivité contrairement

au simple dépôt de CV, car d’autres personnes lisent vos articles, parlent de vous, on

rencontre d’autres bloggeurs qui vous apportent alors des informations supplémentaires

voire vous aident dans votre recherche d’emploi ».

G.B considère que contrairement aux CV classiques, avec l’e-portfolio, il est « facile

de vendre ses compétences de façon détaillée ». Elle pense que la curiosité des recruteurs est

éveillée parce que sa manière de se présenter est différente des autres candidats, et que le

support qu’elle a choisi permet essentiellement de valoriser ses compétences à défaut d’autre

chose. D’une part, « le recruteur ne peut pas se lasser puisqu’il choisit de consulter ce qui

l’intéresse » et d’autre part, « à compétences égales, les recruteurs vont peut être [la] choisir

car [elle] leur a montré [sa] créativité : Qui présente mieux ? Qui à l’air davantage force de

proposition ? ». Par ailleurs, n’étant pas française d’origine, il lui était indispensable de

trouver un outil lui permettant de montrer facilement à quoi correspond, en terme de

compétences, telle ou telle expérience à l’étranger, l’occupation de tel poste.

S.L pense que le fait d’utiliser Viadéo permet au recruteur « qu’il prenne le temps de

te contacter ou de te rencontrer pour en savoir plus, pas uniquement par rapport à un CV » .

En fait, « tout en restant dans un cadre délibérément professionnel, tu montres un peu plus ta

personnalité », déjà parce que « on n’est pas obligé d’être exhaustif (…) et que tu fais la

démarche de te positionner, de créer ton e-portfolio, ton CV». Selon elle, cela peut montrer

aux recruteurs qu’elle est « plus active », qu’elle est « en recherche active et qu’[elle] est

partout où il peut y avoir des recruteurs potentiels ». L’intérêt de sites sociaux c’est qu’ils

offrent « la possibilité de se montrer, de se présenter autrement et d’identifier des personnes

susceptibles d’être intéressées par [son] profil (…) et systématiquement d’entrer en contact

avec les recruteurs qui [l’]intéresse». Le dernier avantage de ce type de plate-forme est la

« traçabilité » : « comme on a la possibilité de savoir qui a consulté ton profil, on peut

orienter sa présentation ». Par exemple, « si en tant qu’ingénieur, on se rend compte que l’on

plait aux SSII et que ce n’est pas là qu’on a envie d’aller, on va modifier sa fiche profil et

insister sur nos expériences et sur notre volonté d’être en corporate ».

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ROZEL Claire-Marie - 75 -

M.B quant à elle, pense que le « CV vidéo est un outil qui doit faciliter le recrutement

(…) cela doit être une sorte de détente pour le recruteur qui doit se laisser guider par une

vidéo courte ». Elle précise qu’elle ne « voit pas l’intérêt de dire à haute voix et devant une

caméra ce qu’il y a d’écrit sur ton CV papier ». Par ailleurs, elle considère que le CV vidéo

est plus « impactant » car il « est une mise en mouvement de tes capacités » : « rien ne vaut

la rencontre physique, l’image, le coup de fil ou le fait de se déplacer », cela « limite le côté

statique et impersonnel ». L’énorme avantage de cet outil, c’est que « pendant 30 secondes,

c’est le candidat qui te mène un peu là où il veut t’emmener (…). Le recruteur n’est plus

maître de ce qu’il va faire ».

Pour résumer, la valeur ajoutée des supports Web 2.0 est qu’ils permettent au candidat

d’orienter leur présentation en axant sur tel ou tel aspect de leur parcours, de leur

compétence ou de leur personnalité, ce qui leur permet, outre le fait de se différencier des

autres candidats, de maîtriser davantage leur image vis à vis des recruteurs. C’est

notamment grâce à l’interactivité et à la traçabilité que les candidats modifient leur

présentation.

Sous thème B) Objectifs d’utilisation du Web 2.0

Plusieurs raisons peuvent inciter les internautes interrogés à choisir tel support Web

2.0 par rapport à tel autre. Certains candidats souhaitent exploiter un outil leur permettant de

mettre en avant leur potentiel, d’autres leur expérience, d’autres encore les utilisent pour

chercher de l’information.

Outre le fait de vouloir «gagner en visibilité » (« il faut être partout où [les

recruteurs] peuvent [nous] trouver, car eux sont partout »), A.L explique qu’à l’origine de

ce blog se situe « la volonté d’auto promotion », de mise en avant de son savoir-faire

technique, et de « maîtrise de [son] identité numérique et être sûr que lorsque l’on cherche

mon nom et mon prénom on arrive sur mon site » : l’un de ses objectifs était en effet, de se

faire connaître et reconnaître en facilitant la recherche de ses articles sur Google (« je voulais

me positionner dans Google sur des expressions que pourraient éventuellement rechercher de

potentiels recruteurs »). Son objectif principal était « d’obtenir un premier contact de la part

d’un recruteur potentiel ». Pour cela, il voulait « attirer les recruteurs sur [son] CV par le

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

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biais de [ses] articles » : «[sa] meilleure publicité reste la rédaction d’articles en relation

avec [son] métier (…) C’est pour [lui] réellement stratégique ».

A.L pense que son blog lui permet d’être mieux évalué « puisqu’il porte sur des

éléments caractéristiques de [son] métier : veille, utilisation des technos utiles au

référencement, écriture d’articles ». Il évoque ainsi une certaine prise de risque liée à son

initiative : « avec Internet, les recruteurs ont aujourd’hui accès à de nombreuses infos sur

[nous] et même si [il voulait] être repéré et reconnu sur le Net, [il] pense aussi que c’est un

risque vis-à-vis de certains recruteurs qui jugent rapidement les gens, qui les jugent

hâtivement sans les connaître s’ils s’arrêtent uniquement à des critères de la vie privé d’une

personne ».

G.B en s’inscrivant sur Viadéo a voulu utiliser Internet « pour élargir [son] réseau »

et « trouver du travail par des relations ». Quand elle a décidé de faire son e-portfolio, « non

pas dans le but premier de décrocher un entretien mais avant tout dans le but de [se] faire

connaître ». Puis elle a pensé que cela lui permettrait de « se créer une identité numérique,

car on ne peut pas s’en passer (…) L’idée c’est que quand on tape ton nom dans Google, ton

profil apparaisse, avec tes expériences…». Pour elle, le meilleur outil « qui retrace de

manière claire et détaillée ton parcours » c’est le e-portfolio : « un super outil de marketing

de soi, de self marketing » car « soi-même est un sorte d’outil qu’il faut vendre », « vendre sa

valeur ajoutée par rapport à son parcours ». Pour cela, il lui fallait « soigner son image ».

G.B pense ainsi être mieux évaluée grâce à son e-portfolio : « l’employeur a une

meilleure vision de ce que la personne a fait mais aussi pourra faire ». « Et comme le

recruteur, grâce à l’e-portfolio, a accès à une grande quantité d’information, l’outil pourra

lui permettre (…) d’élaborer des tests de façon à ce qu’il puisse mieux vérifier l’existence

des compétences présentées par le candidat dans l’e-portfolio ». Ainsi, « il devient aussi plus

facile au recruteur de te piéger ».

S.L a choisi de s’inscrire sur Viadéo parce que c’était « la mode ». L’idée était de « se

montrer ! D’être présente ! On se dit que s’il y a un recruteur qui passe par là, au moins, moi

aussi je serais là ». Elle précise que son second objectif en ce qui concerne son inscription sur

Face Book notamment, est de « visiter les groupes car les entreprises et cabinets de

recrutement créent leurs groupes, mettent leurs postes à pourvoir ». Selon elle, lors que tu as

consulté le profil de tes interlocuteurs sur les réseaux sociaux, tu peux plus facilement « sortir

du lot ou de l’outil de gestion des candidatures où il y a cinquante nouveau CV aujourd’hui »

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

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car tu sais « à qui tu as à faire ». Cela l’aide « à se positionner, à prendre une certaine

posture, plus adaptée à l’image que l’on veut donner ».

Néanmoins, elle ne pense pas être mieux évaluée grâce à son profil viadéo car elle

reste traditionnelle : « si [elle] participait à une tonne de hubs et donnait son avis sur

différents sujets, oui. Mais il faut que le candidat en fasse plus que le simple fait de remplir sa

fiche ». Encore une fois, « tout dépend de ce qu’on a donné à voir ». Ainsi, elle aussi évoque

un risque dans le fait de s’inscrire sur des réseaux sociaux : « clairement, je restreins mon

profil en ne laissant voir que ce qui ne me portera pas préjudice ».

Enfin, M.B précise que le CV Vidéo était son « dernier recours ». Selon elle, c’est un

outil qui doit apporter une « valeur ajoutée au CV traditionnel, axé logique marketing». Elle

ne « voit pas l’intérêt de dire à haute voix et devant une caméra, ce qu’il y a d’écrit sur ton

CV » et le recruteur doit selon elle, « passer moins de temps à lire ton CV en Z plutôt qu’a

regarder ton CV Vidéo qui, lui, doit être impactant, doit être une mise en mouvement de tes

capacités ». A l’origine, en mettant en ligne son CV Vidéo, « l’idée était seulement de [se]

faire une place sur le marché et pas forcément de rentrer en relation avec des recruteurs ».

Elle pensait avant tout « a être vue ». Il lui fallait « attiser la curiosité ». Elle précise que

c’était pour elle « une porte d’entrée et même si ça ne débouche pas sur un entretien », elle se

faisait « connaître dans le milieu ». Elle considère que « le CV vidéo [lui] a permis d’être

mieux évaluée, d’être enfin perçue à [sa] juste valeur alors que par le CV classique, [elle] ne

pouvais pas mettre en avant tout [son] potentiel ».

Néanmoins, elle ne s’était « pas du tout doutée de l’impact de [s]on CV vidéo, mais

c’est l’énorme avantage du Web, la possibilité de créer du buzz très rapidement. (…) C’est

très dangereux d’ailleurs, [elle a] vu des CV vidéo qui ont eu un impact très négatif : il y en

a un qui s’est fait allumer sur tout le Web, un autre buzz énorme ».

En résumé, les quatre candidats rencontrés ont d’abord eu comme objectif de se

montrer, de se démarquer en étant visible sur Internet, sans pour autant avoir à passer sur des

sites spécifiques ou des jobboards. Il en est ainsi notamment pour G.B et A.L qui parlent de

référencement sur Internet ou d’identité numérique, ce que M.B qualifie en terme marketing

de « buzz » : générer du flux sur Internet, faire parler de soi. Presque tous les candidats ont

exprimé une certaine prise de risque dans le fait de s’exposer sur la toile. Les candidats

semblent néanmoins prêts à prendre ce risque, peut être parce qu’ils se sentent globalement

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

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mieux évalués grâce au Web 2.0 (exceptée S.L qui reconnaît ne pas assez exploiter son

profil).

Sous thème C) La rencontre avec les recruteurs

A.L considère que son blog lui « permet plus facilement d’obtenir des contacts, d’être

reconnu ». Et même « s’il n'y a peut-être pas énormément de recruteurs [l’ayant] contactés

par le biais du blog (…) ces contacts ont été des plus sérieux ». Finalement, « en 4 mois

d'existence du blog [il a eu] beaucoup de contacts intéressants, [il a] pris de nombreuses

informations, presque autant qu'en 9 mois de longues et fatigantes recherches! ». Son blog lui

a aussi permis de prendre contact « avec d’autres personnes de la même profession et ainsi en

apprendre davantage sur les entreprises, les postes…de par leur partage ». Néanmoins, « en

aucun cas », il n’utilise son blog « ni ne le vend en entretien ». Il lui permet pourtant d’« être

au point sur l’actualité du métier et en ce sens, [cela] peut [le] préparer aux entretiens ».

Pour savoir qui s’intéresse à lui et de quelle manière, il suffit qu’une « personne tape

[son] Nom et Prénom dans Google et par [ses] statistiques », il sait « que le mois dernier 37

personnes sont arrivées sur [son] blog en recherchant [son] identité, et 416 depuis le

lancement de [son] blog ». Pour « mesurer l’efficacité de [son] blog CV, [il] utilise un outil

de statistique et de mesure d’audience, mais aussi des « gadgets web2 », le tout « permettant

de connaître le nombre exacte de visiteurs et leur comportement ainsi que de connaître quels

sont ces visiteurs ». Il explique qu’il peut ainsi orienter le contenu de son blog en fonction des

attentes qu’il croit percevoir et qu’il peut à « [son] tour visiter les blogs ou trouver leurs

propres profils sur la toile ».

Pour rester en relation durant une certaine période avec un recruteur potentiel, lors

d’une prise de contact, « [il] laisse l’url de mon blog en signature de [son] mail » (autant que

le recruteur aie directement l’adresse plutôt qu’il ait à la rechercher). Concrètement, « entre

[sa] prise de contact avec la société qui [l’]emploi, lors d’un forum E-marketing à Paris, et

la signature de [son] contrat, [il a] tout de même rédigé plusieurs articles (sur son blog) en

relation avec ce salon afin de montrer à un potentiel employeur [son] envie de synthétiser ce

qu’[il] avait vu ».

G.B a eu « des retours de RRH et de DRH » puis « des retours de recruteurs ». Elle a

reçu leurs messages via son e-portfolio et non par l’intermédiaire de Viadéo, même si c’est ce

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dernier support qui « a servi de mise en relation ». Ainsi, « pour rentrer en contact avec les

recruteurs, [elle] a d’abord fait son e-portfolio et ensuite [distribué sa] carte ».

Lorsque qu’elle « rencontre des gens en entretien, [elle] n’hésite pas à laisser une

carte de visite sur laquelle se trouve [son] adresse d’e-portfolio ». Elle trouve cela beaucoup

plus simple de laisser ce type de carte : « on est pas obligé de sortir un CV lors d’une

rencontre ». Elle considère qu’il lui « faut seulement amener [les recruteurs] à consulter

[son] e-portfolio pour que cela débouche sur un entretien potentiel, pour qu’ils [lui]

proposent un rendez vous ». D’ailleurs, G.B considère qu’avec un portfolio, « tu es plus

opérationnelle en entretien car tu es préparée à mieux te vendre oralement ». « Au moment

des entretiens, je ne vais rien rater car j’ai réfléchi lors de [la] conception de l’e-portfolio ».

Pour mesurer l’efficacité de son e-portfolio, elle considère le nombre de retours

qu’elle a eu : « j’ai eu des réactions de beaucoup de gens, de différents pays, horizons,

secteurs. J’ai eu une centaine de retours comme cela ». Le second indicateur ont été « les

propositions d’entretiens avec des recruteurs et employeurs potentiels ainsi que les

propositions d’emploi qu’[elle] a reçu directement ». Le troisième indicateur c’est le nombre

de lectures de l’e-portfolio : « environ deux cents à trois cents visites par jour ». Elle précise

que par Viadéo, « [on] peut voir qui consulte ton profil et clique sur tes liens », et qu’en plus,

« c’est mesuré par la plate forme américaine en elle même qui mesure, par jour le nombre de

visite : il y a un traitement statistique énorme ».

S.L n’a pas eu beaucoup de contact a proprement parler avec des recruteurs mais

davantage avec des DRH Marocains. « Au Maroc, 80% des personnes qu’[elle] a approché

avec cette phrase : bonjour, je recherche un poste au Maroc, pourriez vous me renseigner, je

suis française, je n’y connais rien, 80% des personnes - [lui] ont répondu ». Autrement dit,

Viadéo c’est « payant pour pouvoir approcher des profils ». Elle précise que « si [elle]

n’avais pas eu de contacts, [elle] aurait fait la démarche d’investir dans un pack pour

pouvoir approcher les recruteurs et systématiquement entrer en contact avec ceux qui

[l’]intéressaient ». En ce qui concerne sa recherche d’emploi en France, elle considère que

les sites emplois sont plus efficaces que Viadéo. Elle a eu « 280 visites sur son CV » sur

Cadremploi et beaucoup moins sur Viadéo.

Pour entrer en contact avec un recruteur sur Viadéo, il faut utiliser « un moteur de

recherche ». S.L explique qu’il s’agit alors d’identifier « les secteurs et les fonctions qui nous

intéressent et à partir de là on a une liste de contacts qui s’affiche, on a la possibilité de

consulter les fiches et d’entrer en contact avec les recruteurs qui nous intéressent ».

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Pour savoir qui s’intéresse à elle, elle explique qu’elle a la « possibilité de voir le

nombre de personnes ainsi que leur nom, qui ont consulté ton profil ». Néanmoins, elle

précise que bien que les relations avec les recruteurs soient « de courtes durées, voire

instantanées, notamment avec les réseaux sociaux ou les CV vidéo et interactifs », elle pense

qu’elle « pourrait être amenée à solliciter d’ici deux ans, un contact sur Facebook ou Viadéo,

par opportunité ».

Pour obtenir un entretien, si elle « voit une annonce (…) et qu’[elle] sait que ce

contact est identifié sur Facebook ou Viadéo », elle n’hésite pas à « envoyer un petit mail en

plus de [sa] candidature, pour montrer que [sa] motivation est plus forte ou plus explicite car

orientée vers l’entreprise et donc plus personnalisée ». Elle pense même que les réseaux

sociaux soient utiles pour préparer l’entretien de recrutement : « je m’en sers avant d’aller en

entreprise ou en cabinet, rencontrer les recruteurs ». Cela lui permet de « savoir à qui [elle]

a à faire, si c’est un recruteur junior, expérimenté, quelqu’un qui a fait de l’opérationnel en

corporate ou bien un consultant lambda (…) ».

M.B explique que « l’impact de son CV vidéo a été très positif » bien que « quasiment

impossible à anticiper ». Par ce biais, elle a pu « décrocher un maximum d’entretiens auprès

de recruteurs (…) alors que les choses étaient très statiques par rapport à [son] dépôt de CV

sur les sites emplois ». Elle dit bien qu’elle a été « contactée grâce à [son] CV vidéo » mais

qu’elle a du « changer de stratégie et garder [son] CV vidéo pour la fin de l’entretien de

recrutement, pour rester sur une note positive». A nouveau en recherche d’emploi, elle

l’utilise aujourd’hui plutôt « comme un book (…) dans le sens où il me permet de

convaincre ». Elle est ainsi passée à une autre logique : « on va valoriser mes compétences et

mon expérience professionnelle » et non plus à « il faut attiser la curiosité ». Pourtant, à

l’origine, elle comptait « l’envoyer sur un support CD en complément de [ses] CV papiers »

pour avoir « le buzz et le ciblage » et n’avait pas pensé à le mettre sur YouJob. Elle précise

que « concrètement, après [lui] avoir ouvert des portes (…), cela [lui] permet aujourd’hui de

durer dans le processus de recrutement en décrochant un second entretien ».

Pour conclure, les candidats rencontrés sont dans deux logiques différentes mais

complémentaires : certains, comme A.L (blog) et S.L (Viadéo), utilisent leur outil pour

prendre contact (entrer en relation) avec les recruteurs ou d’autres internautes en recherche

d’informations, tandis que G.B et M.B se sont davantage montrées en attente, en souhaitant

avant tout obtenir des contacts.

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En ce qui concerne l’utilisation de leur outil avant ou pendant la rencontre avec les

recruteurs, les attitudes divergent également selon l’outil exploité : le blog emploi permet

d’intéresser le recruteur mais ne semble pas impacter directement le déroulement de

l’entretien de recrutement. En ce qui concerne le CV Vidéo et l’e-portfolio, ces deux outils

servent aujourd’hui de carte de visite ou de book auprès des recruteurs que les candidats ont

déjà rencontrés, tandis que les utilisateurs du blog emploi et de Viadéo considèrent plutôt

leurs outils comme des points d’entrée vis à vis des recruteurs (supports de mise en relation).

Ainsi, pour rester en contact plus longtemps avec les recruteurs, la participation à un réseau

social semble être l’outil le moins efficace.

Pour ce qui est de la préparation aux entretiens de recrutement, des outils tels que l’e-

portfolio et le blog emploi permettent aux candidats de mieux se présenter vis à vis du

recruteur (meilleure connaissance de leur parcours et de leur métier qui permet de mieux se

vendre) tandis que les visites sur les réseaux sociaux permettent de mieux savoir à quel

recruteur on va avoir à faire et d’adapter sa présentation en conséquence. Le CV vidéo

quant à lui, permet surtout de se faire remarquer, d’attirer l’attention du recruteur qui

cherche un potentiel.

Le point commun de ses outils se situe dans le fait qu’il est très aisé pour chacun de

mesurer l’impact de leur outil. Les supports Web 2.0, outre des traitements statistiques

poussés, offrent aux internautes la possibilité de savoir précisément qui s’intéresse à eux.

C) Thème 3: Représentations vis à vis du recrutement

Sous-thème A) et B) Perception des annonceurs et du recrutement et impacts des supports

Web 2.0

A.L considère que « tous les recruteurs ne travaillent pas de la même manière et

utilisent les services du Web 2.0 selon le secteur d’activité recherché et leur type d’activité à

eux ». Ainsi, selon lui les grandes entreprises, les PME et les cabinets voir l’ANPE ne

travaillent pas de la même manière avec le Web 2.0 : « Sur les sites des entreprises certains

proposent une partie emploi afin de proposer leurs annonces directement et viser les

personnes qui s’intéressent déjà à leur entreprise ». Les cabinets de recrutement « passent

uniquement sur des sites d’annonces généralistes, Ouest France emploi ou Monster ».

« Certaines PME, principalement dans le Web, passent par Google en recherchant

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« métier+localisation » ». Pour terminer, les réseaux professionnels, « sont utilisés

régulièrement par des « chasseurs de têtes » ». En ce qui concerne l’ANPE et certains

recruteurs, il souffre du fait qu’ils méconnaissent son travail, c’est pourquoi, il pense que le

fait de recourir à un outil Web 2.0 tel que le blog peut permettre au recruteur de « se sentir

plus proche/à l’aise en lisant les différents articles métier d’un candidat ». Concrètement,

« avec [son] blog, le recruteur peut en apprendre plus à [son] sujet et au sujet de [ses]

connaissances Web et cela peut avoir un impact positif si les sujets intéressent ». A.L

explique que le blog emploi « permet déjà une proximité de dialogue et donc parfois casser

les « tensions » des premiers contacts entre recruteur et candidat, (…) il peut les rendre plus

simples ».

D’une manière générale, A.L pense que les services Web 2.0 « peuvent impacter sur le

recrutement lors de la recherche par le recruteur (…) désormais beaucoup de personnes

« Googlelisent» les noms et prénoms des personnes après avoir réceptionné un CV ou

rencontré un candidat (…). C’est pour en apprendre davantage sur le candidat que les

services du Web 2.0 sont très utiles ». Il pense néanmoins que ces outils « ne renforcent pas

la relation et ne rendent pas plus efficace le recrutement». Il précise que « plus

d’informations ne veut pas dire plus efficace, il suffit qu’un recruteur s’arrête sur un point de

ma vie privée trouvé sur Facebook par exemple (…) avant le Web 2.0 il n’aurait jamais

trouvé ces informations ». C’est donc aussi « plus long pour lui ». Néanmoins, comme « il est

possible d’en apprendre plus sur les compétences, les connaissances liées à la profession du

candidat si celui-ci est dans une démarche d’auto promotion. C’est donc bénéfique pour le

candidat qui fera attention ».

S.L pense que les recruteurs « peuvent approcher un candidat sans CV classique et

grâce au Web 2.0, mais (…) qu’aucun entretien ne se fait sans CV ». Ils ont besoin d’avoir

« des infos rapidement, ils ont envie d’aller vite et bien ». Selon elle, les recruteurs « aiment

bien pouvoir retracer l’ensemble d’un parcours, peut être pour cerner le potentiel

d’évolution ? Mais il ne faut pas croire que les outils du Web 2.0 et un CV classique

remplaceront un entretien face-face (…) le feeling c’est très important » car elle considère

qu’il y a « des gens qui mentent, qui « trafiquent » leur image et ont justement des super

présentations sur le Web ou sur papier, et qui en fait, se révèlent tout autre en entretien,

qu’ils soient candidats ou recruteurs ». En un mot, elle ne pense pas que le Web 2.0

révolutionne le recrutement : elle trouve que « c’est un effet de mode, les chat emploi ça te

permet d’en connaître un peu plus sur le processus de recrutement de l’entreprise, sur ses

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valeurs, mais de là à dire que ça va te permettre de décrocher un emploi, non, je trouve

qu’on n’est pas prêt ».

S.L explique que « c’est fini l’époque où les candidats se mettent à genoux . On est

des consommateurs avant tout et l’entreprise est devenu un produit de consommation à part

entière. On est tellement habitués avec la pub à ce que l’on nous donne envie ». Du côté des

candidats, « il y a longtemps que c’est le cas, qu’il faut donner envie au recruteur ». Tandis

qu’aujourd’hui avec les difficultés de recrutement de certaines entreprises, « il faut pas

qu’elles hésitent à se vendre (…) et cela passe par les supports du Web 2.0. il ne faut pas se

limiter à une annonce du type, X recrute ».

G.B dit que « les recruteurs sont de plus en plus exigeants (…) et présents sur le Net,

car ils sont sur Viadéo, ils sont sur les jobboards sur lesquels ils mettent en ligne leurs offres

d’emploi, ils sont dans des entreprises qui ont leurs propres sites avec leurs jobs

corners…Les recruteurs sont dans cette nouvelle technologie. Elle considère que cela est

« incontournable pour entrer en contact avec les candidats ».

En ce qui concerne l’impact du Web 2.0 sur le processus de recrutement, elle

considère que les recruteurs sont sur Internet « pour le sourcing » mais « pas tellement pour

eux aussi promouvoir une certaine image de leur entreprise ». Ils sont seulement présents

sur Internet pour ne pas donner l’impression d’être une entreprise obsolète : « cela démontre

la modernité des entreprises ». Les recruteurs peuvent aussi « utiliser Internet pour pré-

sélectionner (…) puisqu’un candidat avec des compétences, un parcours, un niveau de

formation équivalente…(…) il faut se décider et l’outil Web 2.0 peut être un petit plus, en

renseignant davantage sur la personnalité ».

Selon elle, « la réelle plus value du Web 2.0 » se situe « en cas d’hésitation » : le

recruteur peut se dire, « tiens cette candidate pourrait vraiment correspondre au poste, on va

la contacter, la rencontrer et on a les moyens de mieux l’évaluer grâce à son e-portfolio ».

Mais « cela incite le recruteur à s’investir davantage vis à vis du candidat ». « Avec l’e-

portfolio, il devient plus facile de te piéger pour le recruteur ». Là, on touche aussi une des

limites de l’outil : « le temps que le recruteur y passe (…) un CV classique, c’est une ou trois

minutes maximum, tandis que l’e-portfolio, si le recruteur est d’emblée intéressé par le profil

(formation…), peut y passer au moins dix minutes ».

Au niveau de la relation candidat / recruteur GB considère simplement qu’« avec un

outil tel que l’e-portfolio, quand il est bien exploité, bien mis en forme et bien vendu, la

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relation candidat / recruteur devient claire » : les recruteurs ont « l’impression de mieux

cerner une personnalité, de connaître la personne en elle-même ».

M.B pense qu’en tant que recruteur, « le CV vidéo peut être un gain de temps dans le

sens où cela permet de mieux cerner le profil et la personnalité des candidats ». Il permet de

« sortir des informations qu’il est nécessaire de connaître telle que la formation, l’école, les

stages…pour faire émerger le potentiel ». Donc pour elle, « cela peut limiter les erreurs de

recrutement, cela permet d’être plus juste ». Mais cela peut aussi être « une perte de temps »

car contrairement à un CV traditionnel au sein duquel le recruteur « sait tout de suite où aller,

et comment se repérer », avec le CV vidéo, c’est le candidat qui « [le] mène un peu là où il

veut [l’]emmener ».

En ce qui concerne la relation candidat / recruteur, elle précise « que grâce au Web 2.0

et à certains des services qu’il offre comme les réseaux sociaux ou le CV vidéo, il y a une

espèce de rencontre à mi-chemin qui se fait, la démarche est plus naturelle, cela rééquilibre

un peu les forces entre le recruteur et le candidat » car « pour être recruté, il faut connaître

des gens, les milieux professionnels sont très petits, donc il faut sortir du lot, se faire

remarquer et les recruteurs aussi utilisent les réseaux sociaux, les forums de discussion de

manière à faire leur pub et puis c’est une manière rapide pour eux de recruter, car ils peuvent

avoir accès au réseau du candidat visé, et le mesurer et ils peuvent aborder les jeunes de

manière beaucoup moins conventionnelle, formelle ». « On est sur le même réseau, on a des

« potes » en commun, on parle sur les mêmes sujets, on est proches. La relation candidat /

recruteur semble simplifiée : les recruteurs veulent dire « on parle le même langage » ».

MB conclut, « le Web 2.0, c’est surtout du repérage mutuel entre candidat et

recruteur ». Or, elle est repérée. Elle pense que « ce qui compte c’est la prise de contact, ça

permet de travailler l’approche du candidat, mais cela reste de la forme, du superficiel. Ça

ne rendra pas le processus de recrutement plus efficace, au sens que ça n’augmente pas le

nombre de recrutement. Ça permet seulement un meilleur ciblage ».

En résumé, tous les candidats partagent le même avis: les supports Web 2.0 permettent

un certain rééquilibrage de la relation candidat / recruteur. Cette relation, simplifiée,

semble plus transparente et moins formelle. Les recruteurs semblent se rapprocher des

candidats en étant là où ils se trouvent et en « parlant le même langage ». Au niveau du

processus de recrutement, même si les candidats pensent que les recruteurs passent plus de

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temps à sourcer les candidatures et à les qualifier (pré-sélection), l’efficacité des ses

supports est fortement remise en cause, notamment parce qu’elle est difficile à mesurer.

II- Point de vue des recruteurs / annonceurs A) Thème 1 : Web 2.0 et recrutement

Sous thème A) Définition du Web 2.0 et du recrutement 2.0

Pour M.D.L, directrice d’un cabinet de recrutement généraliste, le Web 2.0 c’est « le

Web collaboratif et interactif. C’est non seulement la capacité à réagir par rapport à du

contenu en ligne mais aussi interagir avec celui qui a posté le contenu ». En ce qui concerne

le recrutement 2.0, pour elle, cela ne veut pas dire grand chose : « les outils 2.0 (…)

permettent de faciliter le sourcing de candidats pour le recruteur et pour le candidat de

trouver de l’info qu’il ne trouve pas sur des sites corporate figés. En gros, côté recruteur ; la

nouveauté c’est au niveau du sourcing et de l’identification ».

Selon CR, chasseur de tête, « le Web 2.0 est un terme utilisé pour désigner une

nouvelle génération de sites Internet, passant de sites web passifs (l'internaute ne fait que

lire) à des sites Web interactifs (l'internaute interagit) et collaboratifs (l'internaute partage

ses expériences, ses connaissances) ».

Pour TD, consultant en agence de communication RH, « le mot clé du Web 2.0, c’est

partage et tout ce qui va autour, contribution, commentaires, évaluation, recommandation ».

Il explique que la différence entre le Web 1.0 et le Web 2.0, « c’est qu’il y a quelques années,

il y avait très peu d’émetteurs de contenu qui parlaient à la très grande majorité de la

population. Or, aujourd’hui, on a énormément d’émetteurs, on est tous potentiellement

émetteur, voire producteur d’un contenu et contributeur ». La deuxième différence avec le

Web 1.0, « c’est la recherche via Google : c’est à dire que si tout le monde peut raconter son

histoire mais que personne n’a les moyens de la trouver, c’est comme si elle avait pas

existé ». En ce qui concerne [sa] définition du recrutement 2.0, il « préfère dire qu’il [se] sent

plutôt à l’aise avec l’idée de communication RH 2.0 ». Il explique que les individus « ont les

moyens de partager de l’information (…) et les candidats sont davantage en mesure d’évaluer

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les entreprises ». Selon lui, l’enjeu pour les entreprises c’est ainsi « d’organiser des

remontées d’infos, de raconter ce qu’elles vivent, de dire c’est pas forcément tout rose, mais

c’est plutôt rose (…) et là, il y a vraiment communication RH 2.0 ».

EG, directeur de Stepstone (jobboards et solutions RH), croit « beaucoup à tout ce qui

est abonnement, flux RSS, et tous les services que l’on va pouvoir offrir aux candidats ». Le

Web 2.0, pour lui, « c’est pas le partage, le côté collaboratif. C’est plutôt le côté réseau

social (comment je fais référence à mon entreprise ? comment je contrôle ce qui se dit et

comment j’informe les réseaux ? comment je recrute sur ces réseaux ? Et côté candidat,

comment je m’abonne à des flux RSS sur des sites entreprise qui m’intéressent, sur des

annonces, des services…Ou comment je gère et m’approprie les espaces candidats ?) et le

côté abonnement à des services ». Selon lui, le Web 2.0 « a deux aspects : le côté passif et le

côté actif ». Du côté passif : « je suis abonné à plein de blogs, je reçois plein d’infos, j’ai des

flux RSS, j’ai un portail avec de l’info de mes concurrents. J’ai le réflexe « agrégateur » et

j’utilise le Web 2.0 pour capter de l’info mais je n’alimente pas de communauté, je ne poste

pas de billets, ne donne pas mon point de vue ni ne poste de billets. Je suis pas sur Facebook,

j’ai pas de blog perso…ce que les jeunes de la génération Y font ! ».

Pour lui, le recrutement 2.0 c’est « communiquer autant que recruter » : « dans les

entreprises, les canaux Web 2.0 sont confiés à la communication et pas au recrutement. Les

sites Web ne sont pas les outils des recruteurs mais ceux de la communication ». Il précise

que le recrutement 2.0. « c’est à la fois, permettre au client d’avoir les outils pour trier, filtrer

par rapport à du scoring, par rapport à des critères pointus, fins et d’avoir des outils qui en

quelques secondes leur délivre les bons CV et d’un autre côté, la possibilité de se faire

référencer, par les recommandations, le réseautage… ».

Globalement, les professionnels du recrutement ont la même définition du Web 2.0 :

ils en soulignent l’aspect collaboratif et interactif. Cependant, certains comme TD et EG

appuient sur l’aspect partage et le côté réseau (qui évalue, recommande, référence) et

seulement une personne fait référence à la technologie 2.0 en tant que telle en abordant la

notion d’abonnement à des services. En ce qui concerne le recrutement 2.0, ils en donnent

deux définitions : recrutement 2.0 = communication RH ou le fait de transformer le

sourcing, le tri, le filtrage et la sélection des profils.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 87 -

Sous thème B) Web 2.0 et pratique professionnelle

M.D.L a commencé à utiliser les outils du Web 2.0 dans son activité, par « nécessité

d’élargir les moyens de sourcing, sachant que tous les entreprises et les recruteurs sont sur

les mêmes sites Internet devenus classiques et incontournables ». Et aussi le fait de « se dire

que la majorité des candidats actifs en recherche sont sur ces sites là et pour élargir le vivier

et toucher les personnes en veille et même celles qui ne sont pas en recherche du tout ».

Pour elle, les supports du Web 2.0 « sont utiles parce qu’on peut identifier les profils qui ont

les bonnes compétences et anticiper la mise sur le marché de ces profils (…) car une fois

qu’ils sont sur Cadremploi ou sur Monster, tout le monde va les voir, les « avoir » ». Le

dernier intérêt qu’elle voit à l’utilisation du Web 2.0, « c’est au niveau du marketing viral : si

tu vas sur les sites de réseaux, ou sur un forum de discussion ou sur un blog d’un type qui est

expert dans un domaine, tu peux espérer qu’il relaie l’information auprès des personnes

susceptibles d’être intéressées. Ainsi, les contacts sont donc déjà qualifiés et il suffit d’un

contact qui marche pour que cela suffise à rentabiliser le temps que l’on va passer à cela. Le

taux de conversion « nombre de contact / contact utile » est bien supérieur ».

La première fois qu’elle a utilisé le Web 2.0 dans son activité, « c’est il y a trois ans,

avec l’avènement de viadéo à titre professionnel, et en parallèle Wikipédia d’un point de vue

personnel ». Et « concrètement, lorsqu’on a collaboré avec TMP Néo pour le site Inside Air

France (…) qui est portail externe dont le contenu est alimenté par des collaborateurs

internes qui s’expriment sur leur métier, à qui l’on peut poser des questions… ».

En ce qui concerne l’utilisation de supports Web 2.0, elle pense que par rapport à ses

concurrents « qui mettent souvent en avant la valeur ajoutée de leur propre base de candidats

», sa base de candidatures à elle « est infinie parce que c’est le Web en général et surtout très

à jour par rapport à un cabinet classique qui finalement à un vivier moins à jour et plus

étroit ». En gros, elle explique qu’en tant que recruteur , « on va multiplier les axes de

recherche et susciter des candidatures qu’on n’aurait jamais eues sans ces outils ». Elle

précise que « les clients veulent que ce soit dur ! Et ils ne se rendent pas compte du temps que

l’on doit passer sur Internet, parce qu’il n’y a plus que Monster et Cadremploi maintenant !Il

y a Google avec tous les CV vidéo, CV libres, interactifs, les blogs…Et puis, on a déjà été

contacté, par des candidats, disant « je vous ai vu sur Facebook, Viadéo, etc.…et je trouve

cela bien ».

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

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CR explique qu’elle a « rapidement décidé de faire du Web 2.0, un support pour [son]

activité, en étant présents sur les réseaux sociaux professionnels spécialisés et en développant

des sites cabinets interactifs, mais surtout en participant aux forums de discussion et en

alimentant des blogs ». Le cabinet de CR exploite les outils Web 2.0 « depuis 4 ans ».

Personnellement, elle a commencé à utiliser « les réseaux sociaux professionnels en mai 2004

(au commencement de Viadéo) puis la blogosphère en hiver 2004 par l’ouverture de [son]

propre blog ». Dès lors, elle utilise « traditionnellement les réseaux sociaux et les réseaux

professionnels (Viadéo, Xing, LinkedIn, 6nergies, Facebook, etc.), la blogosphère et Twitter

pour diffuser des offres, identifier des talents, consulter le profil de candidats. Et plus

largement, les plates formes qui permettent aux candidats de faire leur self marketing

(personal branding) en alimentant des « Univers » (profils Web complets) gérant l’identité

numérique, l’audience et la réputation (…) tous les outils Web 2.0 valorisant l’expression, les

publications, le partage (billet, vidéo, musique, achats) et le réseautage, comme Ziki, Wikio,

MyBlogLog, Technorati, Amazon, Agoravox, Jobmeeters, Dailymotion, Youtube »…

Selon CR, « tous les recruteurs n’ont pas encore systématisé la veille Internet pour en

savoir plus sur les candidats qui les contactent » mais chez Elaee, « c’est une obligation »,

car « une recherche sur le Net vient compléter les informations fournies par le CV ». Elle

précise que « cette recherche fournit des informations de différents types » comme celles,

« relatives au candidat et à ses contributions spécifiques » et d’autre part, « les informations

relatives aux environnements dans lesquels le candidat a évolué, les formations suivies, les

entreprises pour lesquelles il a travaillé, éventuellement sa position dans l’organigramme »…

TD explique que son agence de communication RH faisait partie « de l’accélération

du Web 2.0 » car « on n’a plus le choix : les clients ne viennent vers nous que parce que

l’on sait faire des choses que eux ne savent pas faire ». Les agences de communication ont

besoin de justifier leur raison d’être, « on est censé mieux connaître que nos clients l’univers

dans lequel ils vivent. Si on fait pas de Web 2.0, on ne fait pas de web du tout ». Au niveau

des outils utilisés par TD dans le cadre de son activité professionnelle, « tout passe

aujourd’hui par le contributif (…) ; l’idée est de faire participer les employés sur les sites de

leurs entreprises », comme cela a été le cas pour la création du site Inside Air France. Sinon,

il « pense aussi à second life ou à n’importe quel autre monde virtuel (…) ; l’idée c’est de les

utiliser comme point de rencontre et pas comme média d’où l’organisation de sessions de

recrutement sur ce site ». L’objectif de ce type d’événement est de faire « une action de

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

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communication de recrutement ». Il s’agit « de dire « j’existe », « regardez, j’utilise des

moyens innovants donc je ne suis pas dépassé et je me donne une occasion de me

différencier ». L’intérêt est double car « ce n’est pas forcément qu’auprès des gens qui vont

venir qu’on communique mais aussi auprès de ceux qui ne viennent pas mais disent à untel

que telle session de recrutement à lieu sur second life ». Enfin, outre la création de mini-site

de recrutement, il organise des « chats de recrutement », dont l’objectif « n’est pas purement

de recruter, mais de faire passer une info, d’annoncer un truc ».

EG explique qu’ « aujourd’hui, tout va de plus en plus vite et la concurrence est rude.

Le recruteur qui répond le mieux et le plus vite aux candidats à plus de chances de le

recruter. Donc il est obligé de se mettre aux nouvelles technologies : en fonction de ses

cibles de jeunes diplômés par exemple, une entreprise peut les convoquer de façon fun et

sympa par SMS alors qu’il y a trois ans, c’était choquant ». Selon lui, les recruteurs ont du se

mettre au Web 2.0 car les « bons profils sont plus rares et quand il y a un an et demi, on

recevait 100 CV pour un poste à pourvoir, aujourd’hui, on en a 50. Sur la région parisienne,

on est en dessous du seuil du plein emploi. On est mieux que le « plein emploi » sur la

population cadre (…) donc les entreprises cherchent de plus en plus à faire des propositions

d’embauche à des promotions entières d’ingénieurs ».

Par ailleurs, il précise qu’en terme de pratiques, « ce qu’attendent à la fois les

candidats et les entreprises, il y a deux aspects : l’aspect front office (espace candidat) et

l’aspect back office (services aux recruteurs) ». Sur la partie candidat, « il y a le fait de

proposer des services de tri. Par exemple, élargir les recherches par mots clés, par métiers,

par postes…et maintenant on va proposer la recherche par code postal, l’approche

géographique liée à des critères kilométriques ». Côté recruteur, grâce au Web 2.0, on est en

mesure de proposer « des solutions variées qui permettent d’attirer les candidats, filtrer,

sélectionner, gérer l’embauche, les work-flow (outils de reporting GRH), le management de

la performance et la rémunération ».

Sous thème C ) Evolution du e-recrutement

M.D.L explique que « par rapport à [ses] concurrents, [elle] se démarque vis à vis de

[ses] clients qui ont de plus en plus de difficulté à recruter », car « plus on paraît innovant,

plus on est en avance, plus cela leur plait ». Elle précise que le fait d’utiliser les supports

Web 2.0 « sont des choses gratuites ; il n’y a pas d’achats majeurs à faire (excepté viadéo), il

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

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n’y a que cette notion de temps à passer…donc les clients sont bien content qu’on le fasse à

leur place ».

L’intérêt du Web 2.0 pour les chercheurs d’emploi selon elle, « c’est avant tout

l’interactivité ». Le candidat est « plus actif, [a] la possibilité de faire [son] identification :

trouver des contacts, trouver des entreprises, [se faire] sa propre identité numérique

(identité constituée par tous les éléments disponibles sur moi, sur Internet) ». Néanmoins,

c’est une « infime proportion qui se dit « je peux me faire référencer sur google » . Elle

précise que les supports Web 2.0 modifient aussi la « façon d’interpeller les gens : ça peut

rendre les gens plus réceptifs et les interpeller ».

L’inconvénient du Web 2.0 c’est « ce trop plein d’infos qui fait que tu peux perdre

beaucoup de temps, et aussi le fait que ça donne l’impression aux candidats qu’ils ont fait « le

boulot » en étant visible sur les réseaux, visibles sur google… ».

Selon CR, l’avantage du Web 2.0 est « sans conteste, la diffusion rapide à un grand

nombre, la visibilité immédiate et l'accessibilité instantanée via mots clefs (tags) grâce à la

recherche intuitive des moteurs de recherche et la richesse des profils web (vidéos, photos,

recommandation) ». La valeur ajoutée de ces nouvelles manières de recruter, par rapport à des

sites emplois traditionnels, c’est principalement, « l’évolution des critères de recrutement par

la richesse, la diversité, l’ouverture car orientées sur la création de valeur, l’expression des

émotions et le développement du capital relationnel ».

Néanmoins, en terme d’inconvénients, « il ne faut pas oublier que tout est

« repérable » sur le net et on n’enlève pas les traces écrites comme on le désire (…) et

apparaissent maintenant des agrégateurs de contenus qui récupèrent des infos nominatives

sans vous demander votre avis ! ». Pour elle, un autre inconvénient du Web 2.0 est que « le

Net est une source d’information additionnelle qui demande toujours à être vérifiée ou

complétée. Il serait impensable de procéder à une évaluation du candidat sur la seule base

des infos remontées par le net ».

En ce qui concerne TD, il considère que « le Web 2.0 propose des choses qui sont plus

impliquantes ». Il explique « que quand [on interagit] avec un site et quand [on voit] des

gens qui [nous] ressemblent, [on se sent] tout de suite plus touché par l’entreprise, plus

impliqué que quand [on ne fait ] que lire une brochure en ligne. Et le côté impliquant rend

plus efficace l’approche candidat ». Par ailleurs, il précise qu’ « on a trop souvent pensé les

RH Web, comme si les candidats ne connaissaient rien d’autre. Or, le problème c’est que le

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candidat d’aujourd’hui, grâce au Web 2.0, il connaît Amazon.fr , il connaît Youtube, il

connaît Google…Donc quand il voit un site corporate dans lequel il ne peut pas interagir, il

se dit qu’il a à faire à une entreprise préhistorique et peu attractive de ce fait ».

TD explique que « l’avènement du Web 2.0 devrait ainsi en toute logique amener des

candidatures plus qualitatives, mais on n’est pas encore en mesure d’en juger ». Ainsi,

« plus on multiplie les sources, plus on peut aller vers des sources ciblées où j’ai moins de

chance de parler à des gens qui ne sont pas intéressés par ce que je leur raconte et qui ne

m’intéressent pas ». Le ciblage est donc nettement meilleur avec le Web 2.0.

Néanmoins, « au niveau économique, il va falloir en tant que prestataire externe,

comme en interne, employer davantage de personnes pour exploiter ces sources, les

identifier, parler aux communautés…C’est beaucoup plus de temps, d’implication et

probablement plus de compétences d’évaluation, qui sont trop souvent encore sous

représentées ».

En terme d’évolution dans le e-recrutement, EG explique « qu’un candidat peut

déposer son dossier et peut se mettre des alertes mail ou SMS et dès qu’un poste de

comptable parlant japonais agrée aux normes trucs, le candidat le reçoit (…) il peut aussi

avoir l’opportunité de déposer son dossier ou pas sur un site corporate : maintenant, le

candidat il donne son prénom, son nom, son mail et son CV en pièce jointe et c’est tout ». Il

précise que « ce type de formule, ça rassure les entreprises car elles aiment avoir un volume

important de CV même si c’est n’importe quoi (…) beaucoup de recruteurs raisonnent encore

en volumétrie ».

EG trouve différents avantages au Web 2.0 dans une démarche de recrutement ou de

recherche d’emploi : « Avec le Web 2.0, on est en mesure de mieux qualifier une candidature

puisque le candidat multiplie les risques de se faire démasquer. Il suffit d’aller sur Google

pour trouver l’historique de ce qu’un candidat a fait ». Il évoque les différents services

rendus par le Web 2.0, « à la fois pour le candidat, de s’inscrire à des évènements, de donner

des plans d’accès, de s’inscrire à des RDV, de gérer des calendriers, des plans

d’entretiens… et pour le recruteur de faire du marketing RH, définir des cibles, envoyer des

campagnes de mailing, de suivre et tracer des candidatures (relances)… ».

En terme d’inconvénients, il explique « qu’à vouloir faire trop simple, en quelques

minutes ou une heure, je peux m’inscrire en tant que candidat sur 150 sites et postuler. Avec

google vous avez le remplissage automatique, vous avez le principe de parcing donc à partir

d’un CV électronique, ça remplit automatiquement tous les champs…Et vous ne savez même

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pas chez qui vous avez postulé. Et cela revient à faire du spam de candidatures que le e-

recrutement classique limitait, parce qu’il fallait remplir des champs, qualifier sa

candidature, se créer son espace candidat ». Comme ses confrères, il précise que

« l’électronique présente l’avantage et l’inconvénient de tracer exhaustivement et pour

toujours (…) d’autant plus avec le Web 2.0 on peut commenter, tagger…Alors comment les

gens font leur tri ? Comment ils gèrent ce flux d’information ? ».

B) Thème 2 : Stratégies d’usages du Web 2.0

Sous thème A ) Web 2.0, stratégies de rencontre et stratégies de présentation de soi

M.D.L explique que « pour attirer l’attention des candidats, on est obligé d’être

présents sur les nouveaux supports du Web 2.0 comme Facebook…. Actuellement, on fait

une étude sur le Web 2.0 et c’est pour dire à nos clients, on est sur ces sujets là, qui font

couler de l’encre en ce moment ».

Néanmoins, le Web 2.0 « c’est juste plus de temps passé pour une meilleure

identification des candidatures. Et une multiplication des sources de recrutement (…) qui

permettent d’élargir notre pipeline de candidatures ». Elle précise que « ce n’est pas une

révolution technologique mais (…) une ouverture vers plus de fonctionnalités. C’est un

enrichissement des pratiques ». Et en tant que recruteur comme en tant que candidat, elle

considère que « ça permet de préparer différemment les entretiens » : « un type qui était

bluffé parce qu’ [elle] avait vu qu’en dehors de son activité pro, il était président de tel

groupe de chasse ».

Pour CR, l’important « c’est de communiquer sur [son]secteur d’activité, en

montrant que [son cabinet] est à la pointe de l’actualité sur les métiers de la communication

et leurs évolutions ». Il s’agit selon elle de « s’adapter aux pratiques des nouveaux candidats

(afin de mieux répondre aux demandes des clients) mais aussi de [leur] montrer (aux clients

comme aux candidats) qu’on les connaît, qu’on connaît leurs métiers et donc leurs besoins ».

En fait, elle utilise les outils du Web 2.0 pour différentes actions : « soit pour des

recrutements ou de la chasse de têtes suite à une commande client, soit pour identifier des

talents et des connecteurs pour constituer le vivier de compétences du cabinet, soit pour

réaliser des recommandations ou des connexions entre recruteurs – candidats –connecteurs,

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

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ou pour faire diffuser des annonces d’emploi ou de mission ou encore pour mieux connaître

les candidats ».

Selon TD, le Web 2.0 pour l’entreprise, « c’est un signe de modernité, et surtout une

quête de crédibilité ». Il précise que ce n’est « pas tant une histoire de promotion de soi pour

les recruteurs qui doivent maîtriser leur présentation d’elles mêmes, qu’une quête de

crédibilité ». Il précise qu’attirer l’attention du candidat, « c’est aller jouer sur ses terres, lui

montrer qu’on sait ce qu’il pratique et qu’on est capable de faire comme lui, qu’on connaît

son environnement ». Il pense qu’ il y a vraiment communication RH 2.0 lorsque l’entreprise

dit « je tiens compte de mon univers, j’essaie de vivre dedans, j’essaie de m’insérer dans ce

système là, je peux moi aussi aller jouer avec les autres à mettre des vidéos sur Youtube ».

Il pense que cette attitude « raisonne avec un vrai besoin », parce qu’il considère que

« tous les jeunes vont essayer, à un moment dans leur recherche d’emploi, de trouver un

feedback de quelqu’un qui connaît, ou qui a été en contact avec l’entreprise, qui y a passé un

entretien…qui va pouvoir [lui] donner des éléments concernant la préparation à l’entretien

d’embauche, la présentation de la boite, ou la présentation de son métier…Il ne s’agit pas

forcément de savoir si la boite est bonne ou mauvaise mais de savoir comment elle est ,

pour aider à faire le bon choix ». L’objectif pour le recruteur est alors « de faire une

remontée positive sur l’entreprise. D’organiser une remontée d’info positive » notamment

par le biais de certaines actions de communication telle que la création de sites de recrutement

contributifs, l’organisation d’évènements sur le Net ou la participation à des chats...

EG explique que les recruteurs se servent des réponses des candidats ayant participé à

des événements recrutement ou qui se sont inscrits sur les sites RH et se sont abonnés à des

flux RSS, « les recruteurs vont faire ensuite du marketing RH avec des campagnes d’e-

mailing comme si c’étaient des prospects ». En effet, les recruteurs « cherchent à

communiquer (…) celles qui ont du mal à recruter justement ». Quant aux candidats, « il y a

ce phénomène de promotion de soi et de son image et de son profil. Et très clairement,

quand on fait cela, on se vend comme un produit ».

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Sous thème B) Web 2.0 et efficacité du recrutement

Pour savoir qui s’intéresse à son entreprise, MDL « analyse tous les mois la

consultation de [son] site : le nombre de candidats, les chemins empruntés, le temps

passé…pour savoir quel contenu intéresse les candidats. Je le fais aussi pour les clients ».

Pour cela, elle utilise notamment « Google analytics ». Et comme cela, elle sait que « les

témoignages sur le site, personne ne va les regarder ».

En ce qui concerne l’impact du Web 2.0 sur le processus de recrutement, elle pense

que « les supports du Web 2.0 ne sont que des sources d’informations supplémentaires et des

compléments au processus de recrutement ». Concrètement, elle explique « que le processus

n’évolue pas, il comporte toujours les mêmes étapes ». Elle précise que « les outils tels que

le CV vidéo, le blog, le réseau social professionnel, le e-portfolio…n’apportent que des

compléments sur certaines étapes du processus. Par exemple, le blog va permettre d’affiner

la personnalité du candidat (donc approfondissement lors de l’entretien), le e-portfolio

permet de mieux saisir les potentialités du candidats dans différents environnements

professionnels (donc question précises et tests sur le parcours lors de l’entretien), le CV vidéo

va aider à appréhender le relationnel du candidat et la présence sur un réseau social ne va

apporter quelque chose que si le candidat s’y dévoile ; qui sont ses amis, ses goûts »…Mais

pour elle, ces outils « n’influent en rien sur le processus en tant que tel. C’est juste plus de

temps passé pour une meilleure identification des candidatures ». En ce qui concerne

l’évaluation des candidats, elle estime qu’« est plus compliquée avec le Web 2.0 car les

candidats prennent plus de risques et risquent justement d’être évalués sur des critères

moins objectifs qu’avant et davantage sur leur personnalité…Donc il faut qu’ils maîtrisent

les risques ». Elle considère que « comme quand tu lances un produit, il faut faire ta propre

étude marketing ».

En terme d’efficacité du recrutement, CR explique que « plus le profil recherché est

atypique, et pointu, nécessitant la combinaison de compétences, plus le pourcentage est

élevé ». Néanmoins, elle n’a « malheureusement pas le taux exact des résultats issus de [ses]

actions de mise en relation, cependant il doit culminer entre 30 et 40% ».

En ce qui concerne l’impact du Web 2.0 sur le processus de recrutement, CR explique

que la pratique à priori la plus utilisée est celle qui permet de « vérifier l'identité, la véracité

des références, la réputation des candidats et la mise en relation ». Elle précise que « lors

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d’un constat d’échec en recrutement par la rareté des compétences attendues ou de la

spécificité de la recherche, cette pratique du Web 2.0 devient plus évidente ». Néanmoins,

« l'apprentissage à la quête sur Internet est une préoccupation récente et la gestion

numérique des candidatures est un processus sous optimisé ».

Au-delà du recrutement pur, les supports 2.0 peuvent impacter le processus « dans la

phase d'intégration ou de mobilité » car « les collaborateurs effectuent aussi des recherches

pour évaluer le potentiel et l'adéquation de l'identité d'un individu aux valeurs de

l'entreprise et de l'équipe ». La valorisation d'un réseau, d'une visibilité et d'une productivité

immatérielle sur son expertise…peuvent « devenir de véritables « armes de séduction » en

recrutement (…) et la valeur d'un carnet d'adresses n'est plus de la seule prérogative des

agents de presse ou de commerciaux ! De plus, être inexistant sur Internet peut être perçu

comme un élément suspect: cache-t-il quelque chose ? N'a-t-il pas d'activité sociale ? ».

TD, en tant que consultant en communication RH, explique que derrière la réalisation

de site recrutement, « la question numéro 1, c’est est-ce que le candidat postule ? ». Il est

donc amené à analyser les retombées de la diffusion de ses messages. Pour le message A, il

obtient « un taux de clic de 2% ce qui est énorme ». Pour le B, il a « un taux de clic de

0,8% ». Ainsi, les candidats sont plus ou moins allés consulter son site. Si dans le cas A, le

« nombre de candidats qui postulent tombe à 0,3% et dans le cas B à 0, 4% ; deux

interprétations sont possibles : soit la bannière A est meilleure parce qu’elle clique mieux,

soit c’est la B parce qu’elle transforme mieux. Une amène plus de trafic et l’autre, plus de

CV. Tout dépend de l’objectif client ». On doit être en mesure de dire au client, « tant de

candidats se sont abonnés à une newsletter, à un flux RSS donc on a quand même capté

quelque chose même s’ils n’ont pas postulé ».

Ainsi, il pense que « la proportion des embauches réalisées par les entreprises

aujourd’hui, grâce aux services du web 2.0, est pas forcément dominante tandis que le

nombre de candidatures qui transitent par le Web est lui, dominant par rapport aux autres

canaux ». Il est en effet, difficile d’évaluer « le nombre d’achat de cafetière suite à la pub

avec Georges Clooney dans la minute, par contre, ceux qui à Noël vont se dire « tiens, si je

dois acheter une cafetière, je prendrais celle de Clooney » sont nombreux ». « Le taux de clic

sur une pub télé ou radio, il est de zéro et pourtant, on continue à en faire des publicités via

ces médias ! » .

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

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E.G « pense que le Web 2.0 étend à la fois les possibilités de recherche (par

réseautage, cooptation…) et en même temps, permet de mieux faire matcher un besoin avec

une réponse, un profil à un poste ». Par exemple, selon lui, « on peut faire des requêtes pour

chercher un candidat et imaginer lancer cela et avoir 5 CV qui arrivent ; un qui arrive par

Facebook, l’autre qui arrive par mon cousin qui m’a fait une recommandation de ce profil, le

troisième…avec des sources hyper variées en fait ». Le Web 2.0 permet donc de trouver de

l’information fine avec sources parce qu’il y a des liens, des passerelles, des relais…Donc « il

y a une vraie valeur ajoutée pour le candidat qui va trouver plus vite et mieux ses infos et

pour le recruteur pour trouver son « mouton à cinq pattes » ».

C) Thème 3 : Représentations vis à vis des candidats et du Web 2.0

Sous thème A) Positionnement des candidats vis à vis de la recherche d’emploi

MDL considère « qu’[une] personne qui fait un CV vidéo cherche à faire sa

publicité: c’est une sorte de marketing de soi ». Alors que « quelqu’un qui va s’inscrire sur

Viadéo, sa démarche est moins dynamique, c’est peu engageant ». Et en même temps, elle

reste persuadée qu’ « un bon candidat n’a pas besoin de plus que son CV : un candidat qui

fait plus que cela, plus que se mettre sur Viadéo, c’est pas forcément un bon candidat, ça fait

un peu désespoir de cause ». En revanche, une personne qui « fait un blog, l’effort est

beaucoup plus important, c’est quelqu’un qui doit avoir quelque chose à dire, quelqu’un qui

rédige bien, qui a besoin de s’exprimer sur un sujet ». Mais « c’est un peu en désespoir de

cause car c’est des gens qui ont du temps aussi ».

Pour CR, « le blogging et le microblogging professionnels permettent aux entreprises

de véhiculer des valeurs, des pensées, des talents et sont également la manifestation d'une

pro-activité factuelle ». Ils suscitent selon elle, « l'envie de s’associer à la réussite d’un

projet. C'est également un puissant outil de visibilité et de partage d'infos » Elle précise que

« le blog emploi a de multiples avantages : celui de réfléchir sur sa situation professionnelle

(…) ; c’est une façon active de chercher du travail et rien n’est plus motivant pour un futur

employeur que de voir un candidat qui fait preuve d’initiative. Enfin, c’est le moyen de se

différencier, si tant est que les billets publiés respectent certaines exigences : présentation,

qualité rédactionnelle (attention à l’orthographe), intérêt des propos, etc. ». Selon elle, « une

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 97 -

présence sur le Net est souhaitable dans la mesure où elle démontre la pro-activité du

candidat, son souci de gérer activement sa carrière, de se faire connaître dans

l’environnement concurrentiel. Mais aussi sa visibilité, sa présence et sa cote sur le marché,

ses contributions reconnues par ses pairs ou les médias, sa progression ».

Pour TD, les candidats qui créent leur CV vidéo, leur CV interactif ou s’inscrire sur

des réseaux sociaux « croient que par cela, il vont trouver un job ». Et au début, il explique

qu’il allait sur « YouJob qui est une plate-forme de CV vidéos, pour [se] marrer » mais que

maintenant, ces CV vidéo « sont mieux et c’est vrai que cela peut faire la différence entre

deux candidats (…) notamment un outil comme le blog car on capte mieux la personnalité et

les capacités d’écriture…c’est un bon complément car cela montre la compréhension qu’à le

candidat de son métier et de son secteur ».

Globalement, il considère que pour certains, cela « est vraiment une tentative

désespérée et peu réfléchie, du type, « j’ai lu dans tel revue qu’il fallait le faire » ».

Néanmoins, il reconnaît que pour une minorité de candidats, « le CV c’est contraignant

comme cadre, comme format ». Ainsi certains ont « autre chose à dire : je veux échanger,

être reconnu, donner mon avis ». Pour lui, ces démarches ne relèvent pas du « Self

Marketing » : même si le côté « je me mets en scène et me considère comme un produit,

dépasse complètement la sphère du recrutement : on est tous un peu voyeurs ou

exhibitionnistes dans d’autres domaines et le succès de Facebook, pris dans son utilisation

première, en témoigne ».

EG explique que « la génération Y est attirée par la technologie et que les jeunes qui

font leur CV vidéo, leur blog emploi, ou sont sur les réseaux sociaux ; ils ne voient pas

d’autres possibilités car ils n’ont pas de réseau, pas d’expérience donc pas de réseau

pro…les recrutements aujourd’hui, c’est quand même 50% par réseau qu’il soit réel ou

virtuel ». En réponse à la question « quelles sont vos stratégies de recherche d’emploi ? », il

dit que souvent les candidats « se inscrits sur 2-3 jobboards et ont mis deux trois alertes mais

que rarement ils se sont construits un portail perso sur Internet avec un agrégateur de tous

les flux de tous leurs abonnements RSS par rapport à des portails d’entreprises. Or, cela je

pense que ça à de l’avenir et un vrai plus du Web 2.0 ». Selon lui, « dans la stratégie de

recherche d’emploi d’un candidat, il doit maîtriser l’ensemble des technologies du Web 2.0.

Seule la génération Y, les jeunes savent et maîtrisent cela ».

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 98 -

Il précise que « le Web 2.0, c’est un terme à la mode. Avant on parlait

d’ « employabilité » et maintenant on parle de « marketer» son image et son nom. Il y a ce

phénomène de promotion de soi et de son image et de son profil. Et très clairement, quand on

fait cela, on se vend comme un produit. Et la réciproque est vraie pour les recruteurs ».

Néanmoins, il précise qu’ « avec les nouvelles tendances Web 2.0 dans lesquelles les

candidats rivalisent d’ingéniosité pour se mettre en avant sur Internet., le recruteur ne met

pas à profit le e-recrutement, plus encore que le Web 2.0 : moins il qualifie et moins il utilise

les outils pour qualifier une candidature, et plus il revient sur un modèle papier». Il continue,

« Si vous saviez le nombre de recruteurs qui cherchent avant tout à imprimer les CV papiers

et adorent les candidatures spontanées sur papier ».

Sous thème B) L’évolution de la relation candidat / recruteur

MDL parle de « rééquilibrage des forces entre candidats / recruteurs » car « le

candidat peut aussi avoir accès à des quantités d’informations moins « ligne du parti »

qu’avant, consulter les commentaires sur les sites de notation, demander l’opinion des

anciens…il y a moins de tricherie possible pour les recruteurs ». Mais cela « concerne

surtout les bons candidats, ceux qui vont avoir le choix ». Elle précise qu’au « niveau de la

mise en relation (…) la rencontre est plus qualifiée » car la prise de contact est plus

transparente. L’impact se situe donc au niveau du ratio « nombre d’entretiens vus / nombre

de candidats recrutés » donc « il ne faut pas s’en priver : gain de temps, plus de

candidats… ».

CR a une vision précise de l’avenir du Web 2.0 vis à vis de la relation candidat /

recruteur et du processus recrutement. Selon elle, une véritable évolution est envisageable : en

témoigne « le puissant site de réseau social Facebook, qui devrait atteindre les 220 millions

de membres actifs dans moins d’un an, et qui est d’ores et déjà « The place to be » pour des

challengers tels que Jobmeeters (site de recrutement par cooptation) ou Moovement ». Par

ailleurs, elle explique que « des milliers de vidéos ou de forums pullulent à proximité des

grands jobboards et quand on sait tout le mal qu’un blog perso peut faire à une marque, un

site d’évaluation des stages en entreprise comme stagescritics.com a de quoi faire frissonner

les services RH ». Le nouveau rapport de forces « créé par la technologie et l’appétence des

utilisateurs ne semble plus dépendre du marché de l’emploi : que celui-ci soit favorable ou

non, les candidats ont aujourd’hui entre les mains les ressources nécessaires pour faire et

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

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défaire la réputation d’une « marque recruteur » : voilà le gros enjeu pour les recruteurs,

maintenir voire restaurer leur propre image de marque pour asseoir leur légitimité et rester

pérennes ». Selon CR, « les entreprises doivent suivre l’évolution des technologies et

multiplier les canaux de communication car même si le nombre d’annonces publiées n’a

jamais été aussi important, en quelques mois à peine la CVthèque lambda a pris un sacré

coup de vieux face à des sites communautaires spécialisés ultra-performants (tel que

Techcrunch.com, LE blog du 2.0) ou des réseaux sociaux à la Viadéo qui assurent des mises

en contact rapides et ciblées. Ajoutez à cela l’arrivée du CV vidéo, qui invente une façon

nouvelle de se présenter, et vous avez en main les grandes lignes du « scénario catastrophe »

pour les networks de l’emploi ». Néanmoins, « pour vivre et circuler aisément tel un

caméléon il est nécessaire de jouer sur tous les tableaux : CV papier et numérique. Dans le

numérique, [elle] englobe le CV dynamique (avec des liens), l'e-portfolio dans lequel une

vidéo peut être publiée…Le CV reste inévitable : les bases de données des sites employeurs

exigent souvent un CV, les employeurs peu enclin à la lecture Web également ».

Elle explique qu’il faut que les recruteurs intègrent les principes du Web 2.0 dans

l'entreprise « comme la cooptation » (recommandation), et « qu’ils considèrent que le rôle des

connecteurs dans l'entreprise n'est pas synonyme de « piston » mais d'une participation pro-

active pour le développement de l'entreprise. Il leur faut aussi la rémunérer ! Enfin, il faut

considérer aussi que la créativité et l’expertise prouvée (billets, vidéos…) peuvent

supplanter l’expérience stricto professionnelle ou la formation initiale ».

TD conclut, « il y a beaucoup plus de gens qui ont voulu croire que ces supports Web

2.0 révolutionnaient le recrutement ». En plus, « c’était un peu déstabilisent pour le

recruteur parce qu’il a l’habitude d’appeler le candidat ou de le recevoir en position de

supériorité et là, c’est totalement différent. Ce cadre là donne même plutôt l’avantage au

candidat. D’une manière générale, le Web 2.0 rapproche un peu les candidats et les

recruteurs ».

EG pense que « côté recruteur comme côté candidat, la démarche recrutement reste

encore classique : on passe des entretiens, on répond à des annonces…Le processus n’a pas

vraiment évolué. Les recruteurs ne vérifient pas encore les dires et les expériences des

candidats (on fait peu de prise de référence encore)…Avec le Web 2.0 ça va devenir

différent ». Néanmoins, il évoque « la véritable diversification des sources de candidatures

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 100 -

et un gain de temps conséquent grâce à des solutions logicielles qui vous permettent de faire

vivre un vivier, d’assurer le matching en quelques minutes ».

Il pense par ailleurs que la « relation candidat / recruteur a changé et change » et

qu’il y a « rééquilibrage de la relation lors de l’entretien car il y a une meilleure adéquation

profil-poste et parce que chacun a plus d’informations sur l’autre ». Néanmoins, cette

évolution n’est pas que technologique. Elle est aussi contextuelle « car le marché se tend

aussi : les gens ont moins de pression par rapport à l’emploi d’une manière générale. Il y a

un retour de flammes des salariés qui sont désabusés ».

Compte tenu de la densité des apports de notre enquête, il semble dès lors nécessaire

de les reprendre de manière synthétique (sous forme de tableau) et de les confronter à nos

trois sous-questions initiales, à savoir ;

A quelles fins et selon quels moyens les candidats présumés s’approprient-ils les outils

et supports du Web 2.0 ?

Pourquoi et comment les annonceurs s’approprient-ils à leur tour ces outils ?

Quelles stratégies les candidats et les recruteurs adoptent-ils pour construire une

relation gagnant-gagnant ?

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 101 -

Chapitre 4 : Discussion

Nos résultats commentés et synthétisés, nous faisons maintenant un retour aux hypothèses

et référents initiaux de notre étude qui supposent que, dans le cadre de leur socialisation sur le

marché du travail ;

- Les candidats et annonceurs exploitent des outils et services du Web 2.0 pour la valeur

ajoutée qu’ils lui attribuent en situation d’évaluation,

- Les candidats et annonceurs développent avec les ressources du Web 2.0, des

stratégies de présentation de soi leur permettant d’assurer leur auto promotion,

- Les candidats et annonceurs, par le biais de l’utilisation de supports Web 2.0,

modifient la nature de leur relation en la rééquilibrant.

Il est ici primordial de pouvoir distinguer les éléments de l’ordre du mythe et ceux de

la réalité, en ce qui concerne les enjeux relatifs aux évolutions technologiques 2.0. Est-il

absolument nécessaire d’utiliser les supports 2.0 lorsque l’on est recruteur / annonceur?

Lorsque l’on est candidat ? Cela concerne-t-il tous les secteurs d’activité et tous les types de

postes ? Comment est-on perçu par les autres utilisateurs lorsque l’on exploite pas ces

nouveaux supports ? L’importance de ce phénomène dépend encore beaucoup du secteur

d’activité dans lequel on exerce, ainsi que le niveau de poste (souvent niveau « cadre »), la

zone géographique (région parisienne) et la taille de la société…De même, les « cyber-

candidats » sont-ils différents de leurs prédécesseurs ou ont-ils simplement décidé d’ajouter

« une corde à leur arc » dans leur recherche d’emploi ? Et enfin, où en sont les entreprises et

les cabinets et quelles sont les perspectives d’avenir du e-recrutement?

Il n’est pas notre propos de revenir dans cette partie, sur les modalités techniques des

supports Web 2.0, déjà largement exposées dans les premiers chapitres. Il s’agit plutôt de

revenir sur les objectifs et pratiques des différents acteurs interrogés, bien que divergents,

pour expliciter la tentative de ré-appropriation collective du dispositif de recrutement en ligne,

en lien avec le développement des technologies 2.0. Il est en effet très intéressant de constater

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 102 -

la variété des représentations des uns et des autres, les jugements de valeur assez

individualisés sur le sujet, même si des grandes lignes se dessinent.

▫ La valeur ajoutée du Web 2.0 pour les candidats comme les recruteurs : de nouvelles

possibilités de présentation de soi

Candidats comme annonceurs admettent en premier lieu, qu’ils ne peuvent ignorer les

services rendus par les supports Web 2.0 dans leur activité. Tous en soulignent l’aspect

incontournable dans une situation de recrutement, notamment en terme d’image à

donner : candidats et recruteurs ont une possibilité inédite de personnalisation de leur

présentation, et peuvent ainsi orienter leur discours en fonction de leurs objectifs respectifs.

La recherche d’informations et la notion de feedback nourrissent alors le dispositif de

jugement mutuel que constitue la situation de recrutement et le sentiment d’une meilleure

évaluation réciproque est dominant. Chacun des acteurs considère en effet, qu’il a davantage

la possibilité de venir à la rencontre de l’autre. Le recruteur est plus visible (présent sur

les réseaux et diffusant de l’information), échange avec les candidats, tandis que le candidat

est davantage acteur de sa recherche d’emploi : il se crée une vitrine personnelle (plus de

liberté dans sa présentation), initie et développe son réseau et par là, peut « remonter » vers

les recruteurs et professionnels cibles de son secteur d’activité. Avec les apports des

technologies 2.0, le processus de recrutement est ainsi modifié d’un point de vue

qualitatif (meilleur ciblage, meilleur appariement, et plus grande transparence entre les

acteurs).

On peut dès lors percevoir une même logique d’adhésion chez candidats et recruteurs

vis à vis des usages du Web 2.0 : ses nouvelles fonctionnalités, en permettant à chacun des

acteurs d’accéder à davantage d’informations sur l’autre, renforceraient leur rapport de

séduction mutuel : face aux entreprises qui s’ingénient à convaincre certains candidats de

venir les rencontrer en décrivant les avantages liés à leur organisation et au poste proposé, les

candidats mettent tout en œuvre pour obtenir un entretien, ou même un simple retour sur leur

profil de la part d’un recruteur. De même, pour l’ensemble des acteurs rencontrés, le pire qui

puisse arriver serait qu’on ne trouve aucune trace d’eux sur le Net, ce qui serait considéré

comme une non maîtrise des outils actuels de communication et synonyme d’obsolescence.

L'attractivité de l’entreprise comme du candidat résulte en effet, de son image sociale, de sa

notoriété et de ses performances.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 103 -

▫ La mise en œuvre de stratégies auto-promotionnelles:

Les stratégies d’utilisation du Web 2.0 pour les candidats et les recruteurs sont bien

distinctes: bien qu’ils soient amenés a parler un langage commun et à se partager un espace

virtuel, ils n’en ont apparemment pas le même usage et exploitent des supports bien

différents:

On a pu constater en effet, que du point de vue des candidats, il ressort plus

d’avantages que de limites dans l’exploitation du Web 2.0. En effet, ces derniers peuvent

aujourd’hui se permettre de choisir l’entreprise dans laquelle ils souhaitent travailler et de

quelle façon ils veulent être recrutés. Ce sont en partie leurs attentes (repérées par les

concepteurs de sites et de logiciels), de plus en plus comblées, qui font évoluer le e-

recrutement. En effet, si les candidats ont tendance à penser que le Web 2.0 permet une

meilleure connaissance mutuelle et une meilleure qualification de leurs candidatures

(personnalité et potentiel pris en considération et susceptibles de palier au manque

d’expérience), les recruteurs semblent davantage préoccupés par l’élargissement de leur

moyens de sourcing et la pérennité de leur activité (gain de temps, d’argent etc.). On serait

tenté de croire que les annonceurs ont été dans l’obligation de s’adapter aux pratiques induites

par les technologies 2.0 (« no Web, no business »), alors que les candidats auraient pour leur

part, souhaité l’avènement de ces nouvelles pratiques.

Pourtant, les candidats essaient de gagner en visibilité et de se faire une place sur le

marché du travail, en se créant une identité numérique, et les recruteurs sont surtout

préoccupés par le contrôle de leur image de marque et par le fait de gagner en crédibilité vis

à vis des autres acteurs du marché (clients notamment). Ainsi, quand les premiers semblent

chercher à « prouver leur employabilité » pour exister sur le marché du travail, les seconds

cherchent à rester concurrentiels dans un environnement où leur savoir-faire est régulièrement

remis en question. On se demande alors si chacun des acteurs de la situation de recrutement

n’est avant tout préoccupé et « gêné » par la concurrence qui sévit au sein même de sa propre

« communauté » ? Il est à ce sujet, intéressant de relever le fait qu’aucun des acteurs

rencontrés n’a envisagé la disparition du e-recrutement lié aux technologies 2.0, malgré ses

imperfections et le fait que rien ne prouve encore ses effets vis à vis d’une quelconque

augmentation du nombre de recrutement voire même de productivité. On observe ainsi une

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ROZEL Claire-Marie - 104 -

certaine opposition, pour les candidats comme les annonceurs, entre la logique d’adhésion et

la logique d’usage.

▫ Une relation inévitablement déséquilibrée :

Avec la prolifération des blogs et wikis67, la multiplication des réseaux sociaux et

l’explosion du trafic sur les plate-formes d’échanges, les contenus générés par les utilisateurs

ont pris une place importante dans la situation de recrutement. Or, tous ces contenus laissent

des traces sur les sites qui les hébergent et dans les index des moteurs de recherche, et sont

systématiquement rattachés à un auteur : l’identité numérique professionnelle d’un individu

est composée de données formelles (coordonnées, certificats…) et informelles (commentaires,

notes, billets, photos…). Toutes ces bribes d’informations composent une identité numérique

plus globale qui caractérise un individu (sa personnalité, son entourage et ses habitudes) et qui

permet aux acteurs du marché de se juger mutuellement, sans s’épargner, sur les adaptations

de l’autre aux nouvelles technologies et d’évaluer ainsi la crédibilité de son interlocuteur.

Nous avons vu que pour leur part, les candidats se sont peu à peu engagés dans la

professionnalisation de leur recherche d’emploi. Ils sont de plus en plus nombreux à

s’informer voire à se former sur les nouvelles technologies et sont de plus en plus exigeants

face aux autres acteurs de la relation, avec qui ils semblent presque à égalité à présent, dans

le rapport de force. Pourtant, si l’exploitation des supports Web 2.0 exige la maîtrise de

techniques et d’un « jargon » particuliers (que de nombreux chercheurs d’emploi et recruteurs

semblent encore loin de maîtriser), elle nécessite surtout un apprentissage pour justement

surmonter les effets qu’elle provoque, tels que la « sur-information », ou la mauvaise gestion

de sa réputation en ligne, effets qui contrarient fortement les tentatives d’auto promotion des

candidats. Vinck, dans son article « Les objets intermédiaires dans les réseaux de coopération

scientifique » explique bien qu’Internet, en tant qu’objet intermédiaire (dans la situation de

recrutement), « véhicule plus que ce que les acteurs y inscrivent : ils induisent des actions qui

n’étaient pas anticipées »68. En résumé, on peut penser que les supports du Web 2.0, en

permettant l’essor de la cooptation, de la recommandation, du référencement etc.,

favoriseraient en même temps la méfiance des recruteurs vis à vis des candidats. En effet,

67 Un wiki est un système de gestion de contenu de sites Web rendant ses pages Web librement modifiables par tous les visiteurs y étant autorisés. Les wikis sont utilisés pour faciliter l'écriture collaborative de documents avec un minimum de contraintes. 68 VINCK, D. (1999). « Les objets intermédiaires dans les réseaux de coopération scientifique : contribution à la prise en compte des objets dans les dynamiques sociales », Revue française de sociologie, n°2, p.385-414.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 105 -

même si nombre de recruteurs ont mis en place de nouvelles méthodologies (humaines et

techniques) de traitement et de gestion des informations et des candidatures en provenance

d’Internet, les personnes interrogées dans notre étude mettent en doute la véritable utilité de

certains supports 2.0 en les considérant comme des « tentatives désespérées » d’auto

promotion de la part des candidats dans leur recherche d’emploi.

De même, les candidats et recruteurs considèrent que le processus de recrutement en

tant que tel est resté inchangé : il comporte les mêmes étapes, reste très encadré, formel. Il ne

saurait encore être question de se séparer du CV traditionnel, sur support papier, ni de se

passer de l’entretien physique, véritable pivot de la rencontre candidat / recruteur. Le maintien

de l’utilisation des supports et outils traditionnels d’évaluation des candidatures, ne serait-il

pas, de la part des recruteurs, une ultime tentative pour garder le contrôle de la situation de

recrutement ? Cette réalité de pratique démontre l’importance de l’appropriation des

évolutions technologiques par les acteurs : chacun prend dans les apports du Web 2.0 ce qui

l’intéresse et l’analyse à sa façon, ce qui signifie malgré tout que des besoins très différents

trouvent une réponse sur le Net.

En conclusion, nous pouvons dire qu’une relation gagnant-gagnant entre candidats et

recruteurs est de l’ordre du mythe, d’autant plus dans une situation de e-recrutement, situation

dans laquelle la rencontre candidat / recruteur est en elle-même médiatisée. En effet, même si

la rencontre la plus visible est bien celle des recruteurs avec les candidats, qui avant un

entretien physique, échangent sur Internet et se « pre-sélectionnent » par ce biais, il est

important de revenir sur le fait que les recruteurs sont souvent les prescripteurs des

concepteurs de sites (agences de communication) et de logiciels de gestion RH et de

jobboards (tels que Stepstone), à qui ils commandent des outils de communication ou de

recrutement spécifiques. De même, les candidats et ces annonceurs sont en relation par la

réalisation d’études de marché, d’analyse de besoins des candidats, d’études…etc. Il en va

aussi ainsi pour les recruteurs qui commentent les logiciels de gestion RH et autres sites

emploi imaginés pour eux. A la lumière de ces constats, il est évident que des décalages se

créent et déséquilibrent la relation, soit disant plus égalitaire avec le développement des

technologies 2.0, entre candidats / recruteurs. La relation marchande vient d’emblée perturber

la relation professionnelle entre candidat et recruteur médiatisée par les supports 2.0

(développés par des concepteurs de sites et logiciels). Ainsi, l’offre de services quelle quelle

soit, se trouve toujours réappropriée par l’Utilisateur qui vise son propre intérêt : nous

n’utilisons pas forcément un dispositif tel qu’il a été conçu, mais observons en permanence

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ROZEL Claire-Marie - 106 -

des écarts, des dysfonctionnements…Le point de rencontre virtuel entre candidats et

recruteurs est techniquement un logiciel ou une application d’Internet. Ce support de relation,

immature, est encore susceptible d’évoluer tant sur un plan technique qu’au niveau des

systèmes de représentations des acteurs (Web 3.0). En effet, il faut bien comprendre

qu’Internet et ses évolutions telles que le Web 2.0, sont à l’origine du dispositif de

recrutement en ligne auquel chaque catégorie d’acteur doit en permanence s’adapter, s’ajuster

au comportement des autres afin que la rencontre, thème central du dispositif, reste toujours

possible.

On peut finalement se demander si sans objet technique intermédiaire69 (tel que

l’Internet et ses évolutions), le marché de l’emploi ne serait pas plus égalitaire, car il

n’implique alors qu’un seul processus d’intermédiation entre offre et demande, et donc entre

recruteur et candidat? Ainsi, on peut remettre en question le fait de chercher des solutions

techniques à des problèmes non techniques. En effet, les résultats de notre étude nous

amènent à repenser le fait que « les Nouvelles Technologies de l’Information et de la

Communication (dont font partie l’Internet et ses nouvelles applications), peuvent renforcer

cinq caractéristiques dont on aperçoit bien les effets indésirables »70, tels que :

- L’individualisation (à défaut d’auto promotion ?)

- L’inflation des techniques,

- L’intellectualisation et la fragmentation des activités (qui accentuent les inégalités

entre individus « qui maîtrisent » et ceux « qui ne savent pas », dans une situation

d’emblée déséquilibrée ?)

- La médiatisation et les écrans (qui estompent un peu plus les contours de la

réalité d’un marché ?)

- La simulation.

« Ainsi, à l’utopie d’un progrès scientifique développant de façon linéaire un avenir soit

disant meilleur pour tous, se substitue une réalité pluridimensionnelle : les stratégies

antagonistes d’une multiplicité d’acteurs ».

69 La notion d’objet technique intermédiaire, définissant l’Internet est développée par AKRICH, M. (1987) dans Comment décrire les objets techniques ? Technique et culture, n°9, p.49-64. 70 SCARDIGLI, V. (1992). Cinq transformations culturelles. In Les sens de la technique. Paris : PUF, p.265.

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

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Conclusion

Lors de mon stage de fin d’études dans un cabinet de recrutement, j’ai été amenée à

explorer toutes les nouvelles potentialités de l’Internet pour élargir les sources de candidatures

et renouveler les manières d’approcher les Internautes. Interpellée par les retours et la

pertinence des candidatures consultées par l’intermédiaire de blogs emploi, d’e-portfolios, de

CV vidéos ou interactifs, etc. j’ai souhaité mieux connaître les chercheurs d’emploi qui

utilisent ces supports du Web 2.0 : quelles sont leurs stratégies et leurs attentes ? Dans un

second temps, j’ai voulu confronter leurs propos à ceux de consultants en cabinet de

recrutement et en agence de communication RH, très sensibles à la notion de « marque

personnelle ». Il s’agissait d’une part, de mettre à jour les enjeux issus de l’appropriation du

Web 2.0 par les candidats et les recruteurs et d’autre part, de les expliciter. En effet, outre le

fait que les applications 2.0 soient très récentes et difficiles à appréhender (du fait de leur

technicité), j’ai souhaité faire émerger les représentations de chacun des acteurs de la situation

de e-recrutement, pour comprendre ce qui était réellement en jeu dans leurs pratiques. Peut-

on réellement considérer, comme certains professionnels l’affirment, que le Web 2.0 est le

support d’une nouvelle révolution (comme l’Internet à ses débuts) dans le domaine du

recrutement ? Ou bien doit-on considérer les applications 2.0 comme de simples supports de

communication? En un mot, je me suis demandé dans quelle mesure les supports du Web 2.0

participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ? Et quelles

stratégies les candidats et les recruteurs peuvent-ils adopter pour construire une relation

gagnant-gagnant ?

A la lumière de notre enquête, il semble que nous devons considérer le Web 2.0

comme une possibilité inédite de présentation de soi, comme un nouveau support de

communication aux multiples potentialités : candidats et recruteurs exploitent ces outils et

services dans le but d’assurer leur auto promotion (par la mise en valeur de leur image

personnelle). Indépendamment du dispositif de jugement mutuel induit par la situation de

recrutement, nous avons compris que chaque acteur du Web 2.0 donne son propre sens aux

nouvelles technologies et les exploite selon des objectifs particuliers.

Enfin, avant d’entamer cette étude, j’avais présupposé que les supports du Web 2.0

permettaient aux candidats de rééquilibrer leur relation avec les recruteurs en leur offrant la

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

ROZEL Claire-Marie - 108 -

possibilité de se démarquer, de se présenter de manière plus personnalisée et de partager leur

« terrain de chasse ». J’avais sous estimé l’impact du contexte (inversion du marché du

travail), l’immaturité des acteurs vis à vis de l’appropriation des technologies et la méfiance

des recruteurs, qui semblent chercher à garder le contrôle de la situation de recrutement en

conservant la maîtrise du processus, à défaut de pouvoir conserver la totale maîtrise de la

relation (en terme d’approche, de prise de contact, de langage…). Ainsi, on pourrait penser

que depuis le Web 2.0, chacun des acteurs croit qu’il domine l’autre dans la situation de

recrutement : le candidat vis à vis de la relation avec le recruteur, et le recruteur vis à vis de la

gestion du processus.

Au cours de cette recherche, certains biais sont apparus, ce qui nous amène maintenant

à nuancer nos propos. Notre étude étant de type exploratoire, nous ne prétendons à aucune

vérité mais avons seulement voulu comprendre puis expliciter une réalité de pratiques à

travers les interprétations qu’en font les acteurs. Pourtant ;

- J’ai débuté ce travail en ayant une vision trop restreinte des Web services 2.0, ce qui

m’a fait manquer d’objectivité. Ma posture enthousiaste vis à vis des technologies 2.0

et de leur appropriation par les candidats a perturbé mon travail « d’enquêteur », lors

du recueil de données auprès des annonceurs. Je me rends compte avec le recul, que je

me suis lancée dans ce travail en considérant d’emblée que le Web 2.0 était un atout

indispensable pour les candidats, et en sous estimant les bouleversements qu’il pouvait

induire dans les pratiques des recruteurs. J’ai ainsi été mise en difficulté par le fait de

ne pouvoir aborder les mêmes thèmes d’entretiens auprès des candidats et des

recruteurs, ce qui a rendu plus difficile la comparaison de leurs représentations. - Vis à vis de ma population d’enquête, j’ai été confrontée à deux limites majeures :

D’une part, je n’ai rencontré que deux recruteurs et deux « annonceurs », ce qui

nuance indéniablement la représentativité de nos résultats. D’ailleurs, recruteurs et

annonceurs ont des visions différentes de la situation de e-recrutement et ont une

relation marchande les uns vis à vis des autres. D’autre part, je n’ai interviewé qu’un

seul concepteur de site en tant que tel, ce qui limite la portée de ma recherche : ainsi

que je l’ai évoqué dans la discussion, la situation de e-recrutement comporte

finalement trois acteurs majeurs qui sont ; le recruteur, le candidat et le Webmaster

(concepteur de site). Il s’agit en effet d’une relation triangulaire, Internet étant l’objet

technique de l’intermédiation entre candidat et recruteur. Enfin, je n’ai recueilli les

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Dans quelle mesure les supports Web 2.0 participent-ils à la promotion de soi lors de la situation de e-recrutement ?

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propos que d’un seul consultant en agence de communication RH et de deux

recruteurs ayant eux-mêmes des pratiques professionnelles différentes, l’un étant issu

d’un cabinet généraliste et l’autre étant chasseur de tête spécialisé dans un secteur

d’activité. Ainsi, la représentativité de mes interlocuteurs est compromise, même si

notre recherche présente l’intérêt indéniable de couvrir un large panel de points de vue

et de survoler l’ensemble des problématiques induites par la situation.

Pour conclure, on peut d’ores et déjà s'interroger sur la capacité des acteurs à

s'approprier le potentiel troisième « choc » du Web 3.0, alors même que l'assimilation de

l’Internet 2.0 n'est pas encore acquise par l'ensemble des acteurs du recrutement et toutes les

« catégories » de candidats. Ce constat pose clairement la question de l’existence d’une

« fracture numérique » qui annoncerait une fracture des pratiques du recrutement et de

recherche d’emploi ? A ce sujet, il serait utile de commencer à réfléchir sur la manière de

renforcer la collaboration entre professionnels de l’accompagnement et professionnels du

recrutement, (acteurs du privé et du public) afin de construire du sens autour des technologies

et réseaux numériques et de créer des ponts entre ces différents acteurs. Une recherche plus

large, confrontant les pratiques, postures et représentations des intermédiaires institutionnels

du marché du travail à celles de nos populations d’enquête, pourrait à ce titre, se révéler fort

enrichissante. Dominique Wolton71 explique en effet dans l’un de ces articles sur la fracture

numérique, que la formule « Internet pour tous » relève davantage d’un projet industriel que

d’un projet politique. Il faut ainsi veiller à ce qu’un diktat technologique ne s’impose pas. Les

personnes ne pouvant ou ne souhaitant tout simplement pas s’approprier les technologies

numériques doivent pouvoir accéder aux mêmes services que les populations connectées.

A titre personnel, ce mémoire présente un double intérêt : il m’a offert la possibilité de

me questionner sur ma pratique professionnelle et de me positionner vis à vis d’Internet et de

ses nouvelles applications en tant que futur recruteur (je souhaite poursuivre mon expérience

professionnelle dans ce domaine). D’autre part, il me permet dès aujourd’hui, et dans le

prolongement de l’enseignement reçu en Master 2, de réfléchir à ma future stratégie de

recherche d’emploi et à la manière de candidater auprès d’entreprises cibles. En effet,

confrontée dans quelques mois à la réalité du marché du travail, je me sens plus sereine pour

aborder cette grande étape et gérer ma « marque personnelle » sur Internet. 71 WOLTON, D. (2002). Fracture numérique ou fracture numérique ?, In Francis Jauréguiberry et Serge Proulx (sld), Internet, nouvel espace citoyen ?. Paris ; L’Harmattan. (p. 34)

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