Des prosélytes connectés ? Le cas

des combattants étrangers en Syrie

Le prosélytisme, enjeux, débats et controverses en Méditerranée Aix-en-Provence, 22 mai 2014

Loïc Le Pape (IDEMEC, CNRS – AMU)

En guise d’introduction Un travail exploratoire sur des

pratiques numériques Éléments de contexte

Guerre en Syrie depuis 2011 Oppose l’armée régulière à des

groupes rebelles combattants L’Armée Syrienne Libre Le Front Islamique Jabhat al-Nusra État Islamique de l’Irak et du

Levant (EIIL, ISIS en anglais) Observer les pratiques

numériques des jihadistes étrangers sur les réseaux sociaux

Source : Wikipédia – Absalao777 (carte)

1. Observer le Jihad. Enjeux méthodologiques

Corpus : +/- 30 comptes Facebook et +/- 50 comptes twitter

Corpus instable et mouvant L’obligation d’écarts à la méthodologie

canonique Travail sur des comptes anonymes

(véracité des propos, identité des acteurs)

Autorisations et droit à l’image… Prosélytisme: « effort déployé en vue

de susciter l’adhésion de nouveaux adeptes à sa foi »

Hypothèse: Ce ne sont pas les témoignages des jihadistes qui sont prosélytes (c’est une publicisation de soi), ce sont les usages qui en sont fait qui créent le prosélytisme.

2. Quelles pratiques numériques des combattants radicaux ?

leur façon d’utiliser les réseaux sociaux n'est pas prioritairement fait dans un but de prosélytisme.

Il correspond plutôt à une « habitude d'usage » des réseaux sociaux

Avec un choix dans ce qu’ils disent et la façon dont ils se racontent.

Quels réseaux sociaux ? Facebook et Twitter (privilégiés ici) Ask.fm Tumblr Instagram

2.1. Trois types d’usages 1. La communication avec les

proches (nous échappe en partie) Téléphone et SMS / Chat (logiciels ou

forums) / Skype / FB et Twitter 2. Le témoignage – la publicisation

de soi Facebook et twitter Parler de « sa vie », de son

quotidien, images « insolites » Finalité : dire la vie

3. L’inscription dans une dimension plus vaste – l’islamismité

Niveau local: échange d’informations sur les combats, les amis, les morts

Niveau général: photos, animations, photomontages (l’internationale islamiste)

“ No time for fancy photoshoots when barrel bombs are being dropped.Still alive, still fighting. Alhamdulillah.Greetings from Syria, Aleppo”.

Jalil Joumane « Pas en Suède, en Syrie… »

Abou Abdallah Guitone, la mise en scène de soi

2.2. Trois façons de (se) mettre en scène A chacun des usages

précédents correspond une façon de se mettre en scène « du selfie au chevalier » Plus on est dans l’islamismité,

moins l’individu se représente 1. Témoigner de soi: le corps

(manger / boire / 2. Mise en scène du « autour

de soi » (paysages, armes, enfants, chats)

3. L’islamismité: l’anonymat (esthétisme, bannières et photos)

« Smile. Its Sunnah. #syria #ak47 #repost »

Far from home, close to Jannah. Hollands Finest. Syria, Reef Aleppo 2014

3. Du témoignage au prosélytisme Hypothèse: ce sont les usages

qui sont faits de ces pratiques numériques qui en révèlent la dimension prosélyte

Qui utilise ces pratiques numériques? Chercheurs (s’informer au plus

près du terrain) Journalistes (source

d’information vs. logique du scoop / montrer la guerre différemment /

« frères d’armes » La « com’ institutionnelle » des

groupes combattants Le Jihad à distance (de France)

Conclusion et ouvertures Qu’est-ce que cela dit des

jihadistes?

Quels enjeux pour la discussion collective autour du prosélytisme? L’importance des réseaux

sociaux (y compris dans les zones en guerre)

L’intentionnalité (réutilisation à dessein, probablement assez efficace)

L’efficacité d’un « prosélytisme non prosélyte » ? (donner une dimension prosélyte à des choses qui n’en ont pas, ou peu)

Merci pour votre attention !

Loïc Le Pape (IDEMEC, CNRS – AMU)

Carnet de recherches: http://politicsofreligion.hypotheses.org

Twitter : @llepape

Half of Jihad is Media