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CONFINEZ-VOUS, ON VOUS INFORME ! www.maroc-hebdo.com EDITION N°: 34 Du mardi 19 mai 2020 Retrouvez l’édition digitale de Maroc Hebdo sur votre smartphone ou tablette. Scannez le QR code pour se connecter à notre site web. /press.mhi LE DÉCONFINEMENT OFFICIELLEMENT PROLONGÉ JUSQU’AU 10 JUIN : LE SAUT DANS LE VIDE BALLOTÉS ENTRE LES BANQUES ET LA CCG : LE CRÉDIT OXYGÈNE ASPHYXIE LES ENTREPRISES INTERVIEW NABILA MOUNIB, SECRÉTAIRE GÉNÉRALE DU PARTI SOCIALISTE UNIFIÉ (PSU). “CE GOUVERNEMENT N’A DE LOGIQUE QUE CELLE D’ABDIQUER FACE AUX INSTITUTIONS FINANCIÈRES INTERNATIONALES”

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CONFINEZ-VOUS, ON VOUS INFORME !

www.maroc-hebdo.com

EDITION N°: 34Du mardi 19 mai 2020

Retrouvez l’édition digitalede Maroc Hebdo sur votresmartphone ou tablette.Scannez le QR code pourse connecter à notre site web./press.mhi

LE DÉCONFINEMENTOFFICIELLEMENT PROLONGÉ

JUSQU’AU 10 JUIN :

LE SAUT DANS LE VIDE

BALLOTÉS ENTRELES BANQUES ET LA CCG :

LE CRÉDIT OXYGÈNEASPHYXIE

LES ENTREPRISES

INTERVIEW NABILA MOUNIB,SECRÉTAIRE GÉNÉRALE DU PARTI

SOCIALISTE UNIFIÉ (PSU).

“CE GOUVERNEMENTN’A DE LOGIQUE QUE CELLE

D’ABDIQUER FACE AUXINSTITUTIONS FINANCIÈRES

INTERNATIONALES”

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Edition 34 - mardi 19 mai 2020

”“CE GOUVERNEMENT N’A DE LOGIQUE

QUE CELLE D’ABDIQUER FACE AUX INSTITUTIONS FINANCIÈRES

INTERNATIONALES

INTERVIEWNabila Mounib, Secrétaire générale du Parti socialiste unifié (PSU).

Nabila Mounib,Secrétaire généraledu Parti socialiste unifié (PSU), se livreà cœur ouvert à Maroc Hebdo. Gestion dela crise du Covid-19,détenus d’opinion,fragilité du gouverne-ment, hausse de la pauvreté, elle n’esquive aucun sujet.

Pensez-vous que la gestion de la crise du Covid-19 a été optimale? Il faut savoir que cette crise du Covid-19 reste une crise sans précédent qui a tou-ché plusieurs pays. Elle n’est pas seule-ment sanitaire, mais également écono-mique et humaine et pose des questions fondamentales quant à l’avenir de l’hu-main et de son environnement. C’est ainsi que les pays touchés par cette pandémie, quel que soit leur état de développement, se sont trouvés incapables de maîtriser la situation. Il est important de rappeler que les politiques néolibérales qui recom-mandent aux États de privatiser leurs services sociaux et de réduire les bud-gets alloués à la santé et à l’éducation publiques ont entraîné le recul du rôle de l’État et donc la dégradation du système éducatif et de santé publique et nous nous sommes donc retrouvés face à un système de santé publique défaillant, un manque en personnel soignant et moins de chercheurs et de médecins spécialisés. La Recherche scientifique mise au service de la santé des humains a été négligée,

tandis que l’industrie pharmaceutique a été orientée vers les produits de seconde nécessitée, qui génèrent d’importantes marges de profit, au lieu de produire les médicaments indispensables pour lutter contre les grandes pandémies surtout que celles-ci étaient annoncées par certains rapports. Depuis plusieurs années, on savait, selon des études scientifiques sé-rieuses, que le réchauffement climatique et la perturbation de l’écosystème, d’ori-gine humaine, allaient déclencher des pandémies auxquelles le monde devait se préparer.

Et pour le Maroc?Le Maroc, non plus, n’était pas prêt. Les choix opérés dans le système éducatif et de santé ont mis notre pays dans une si-tuation alarmante. Nous ne disposons pas d’un système de santé public capable de garantir l’accès aux soins pour la majorité des Marocains. Nous n’avons pas réalisé jusqu’à présent ce qu’on pourrait appeler une régionalisation de la santé. C’est-à-dire équiper toutes les régions de grands

Propos recueillis parAissa AMOURAG

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touchés avant nous. Le gouvernement a pris comme première mesure l’impo-sition du confinement assez tôt pour stopper la propagation rapide du Co-vid-19. Ce qui est positif. Par la suite, le gouvernement a voulu s’attaquer à d’autres problèmes qui se sont posés, mais sans que cela ne rentre dans une véritable stratégie, loin de l’improvisa-tion qui sévit encore. En premier lieu, comment espérer réussir ce confine-ment avec plus de 10 millions de Ma-rocains qui vivent sous le seuil de la pauvreté, autant de Marocains qui tra-vaillent dans le secteur informel et qui sont obligés de travailler au jour le jour pour gagner de quoi vivre? La mise en place d’un Fonds spécial pour apporter une aide financière aux familles les plus pauvres et à ceux qui ont perdu leur emploi pour les encourager à rester chez eux, a créé beaucoup d’attentes et de frustrations chez ceux qui n’ont pas pu en profiter, surtout au niveau des campagnes. On a certes recensé 4,3 millions de familles marocaines qui bénéficient de ces aides, ce qui veut dire que le Maroc compte plus de 20 millions de Marocains qui sont sous ou au niveau du seuil de la pauvreté, ce qui nécessite un Plan National de lutte contre la pauvreté et pour l’inclu-sion de celles et ceux qui vivent dans la précarité. Ceci constitue l’une des plus importantes problématiques à laquelle il faudrait trouver une solution après la fin de la pandémie, pour maintenir la cohésion sociale. Par la suite, le Maroc a fermé toutes ses frontières pour éviter de nouvelles vagues de contamination par le Covid-19. S’ajoute à cela la fer-meture des écoles et la mise en place de l’enseignement à distance ainsi que l’installation d’hôpitaux militaires dans certaines régions.

Que reprochez-vous au gouvernement dans la gestion de cette crise sanitaire? Ce qu’on pourrait lui reprocher, c’est que notre pays était dans un état qui ne le prédisposait pas à faire face à cette pandémie avec tous les moyens qu’il

hôpitaux, de centres hospitaliers uni-versitaires, de facultés de médecine et de centres de recherche. Le manque en personnel soignant est estimé à envi-ron 100.000 médecins, infirmiers, aides soignants... Donc, la première crainte, c’était de voir la pandémie se répandre rapidement, ce qui allait nous mener au

devant d’une crise sanitaire et humani-taire sans précédent.

Pensez-vous, alors, que la réaction du gouvernement à la pandémie a été ra-pide?Pour moi, le gouvernement a essayé de tirer les leçons des pays ayant été

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aurait fallu avoir mis en place. A savoir lutter contre les inégalités sociales et régionales, par le développement de services publics de qualité à savoir un système éducatif et de santé efficient dans toutes les régions au lieu d’en-courager la baisse des budgets alloués et la réduction des effectifs que se soit en personnel soignant ou administratif. Ainsi lorsqu’on a fermé les écoles, les enfants des pauvres ne pouvaient pas suivre l’enseignement à distance car ils n’étaient pas outillés: ni ordinateur à leur disposition, ni connexion, ni es-pace adéquat.. Dans ces conditions, fermer les écoles va accentuer davan-tage les inégalités sociales sachant que l’école demeure le moyen le plus sûr pour garantir une certaine égalité des chances. Par ailleurs, le retard pris pour assurer les équipements de base pour protéger le personnel soignant et assu-rer un environnement de travail correct a fait que malheureusement beaucoup de médecins et de soignants ont été contaminés et certains sont décédés, ce qui est fort regrettable. Il a été constaté que malgré l’aide apportée par l’État, beaucoup de gens continuaient à sortir, ce qui fait que le confinement n’était pas totalement respecté et nombreux sont ceux qui ont le RAMED, mais n’ont rien reçu aucune aide.Il est vrai que l’économie tourne au ra-lenti et annonce une grave crise à venir. Le Tourisme est à l’arrêt de même que les investissements directs étrangers ont reculé, ainsi que l’apport en devises des Marocains résidents à l’étranger, le commerce extérieur et l’arrêt de nom-breux secteurs d’activité, les petits com-merçants, les auto-entrepreneurs, les agriculteurs qui font en plus face à la sè-cheresse. Certes près de 900.000 travail-leurs déclarés à la CNSS ont obtenu une aide financière. Ils sont en arrêt tempo-raire d’activité, ne savent pas s’ils vont reprendre leur travail, avant ou après la fin de la pandémie ou jamais. Il est à noter que durant cette période il y a eu beaucoup de licenciements abusifs et que cette crise a provoqué l’arrêt de

62% des entreprises marocaines. Ce qui est très grave et nécessite la préparation de solutions à court et moyen termes pour préserver les emplois.

Mais, pour les autorités, la santé des Marocains passe avant l’économie…Oui, il est vrai que l’important, c’est de sauver l’humain, c’est de soigner les gens, circonscrire la pandémie et trou-ver les moyens pour la stopper. Mais il faut également penser à redémarrer l’économie et que cette dernière soit liée au souci de réduire les inégalités sociales, de créer des emplois pour les jeunes et de réfléchir à un nouveau rôle d‘État social capable de garantir la re-distribution des richesses, de rendre ef-fectif le droit à l’enseignement et à la

santé. Un État démocratique capable de garantir la dignité et l’égalité pour tous ses citoyens et toutes ses citoyennes au niveau de l’ensemble de ses régions Avec cette pandémie, le Maroc a connu une vague de solidarité de la part des marocains, qui ont voulu contribuer au Fonds dédié à la lutte contre les effets liés à la pandémie, qui se sont mis en ré-seaux pour parer au plus urgent vis-à-vis des voisins nécessiteux et des pauvres. Les enseignants ont fourni un important effort pour poursuivre leur enseigne-ment à distance. Tout un climat que l’on pourrait exploi-ter pour renforcer la confiance perdue entre la société et ses institutions, no-tamment le gouvernement. Mais, il y a un besoin urgent pour une ouverture

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politique et, pour la mettre en place, la solution nous la leur avons proposée, mais leur logique leur dicte exactement le contraire.

Qu’avez-vous demandé au gouverne-ment?Nous avons demandé, avec d’autres ac-teurs de la société civile, de libérer les prisonniers politiques et d’opinion, dont ceux du Rif, parce que les Marocains ne comprennent pas la situation de ces jeunes Rifains condamnés à 20 ans de prison pour le simple fait d’avoir récla-mé des hôpitaux et des écoles dont on a vraiment besoin aujourd’hui et qui nous font défaut. Il y a eu une grâce royale qui a libéré plus de 5.000 prisonniers délinquants alors que les détenus du Rif

et les prisonniers d’opinion n’ont pas bénéficié de cette grâce. Alors même que l’Observatoire mondial des prisons avait demandé de libérer les prisonniers mineurs vu l’état de promiscuité et l’in-salubrité dans les prisons marocaines afin d’éviter la propagation du Covid-19. Cela n’a pas été fait, ce qui nous a valu le rapport réalisé par la présidente de la haute instance onusienne des droits humains, Michelle Bachelet, qui cite le

Maroc parmi les pays invités par ce rap-port à ne pas se servir des dispositions prises contre la propagation de la pan-démie pour museler les opposants et restreindre les libertés publiques.

Le gouvernement a réagi à ce rapport en disant que les arrestations dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire se passent dans le respect de la dignité humaine… L’interpellation de milliers de Maro-cains n’ayant pas respecté le confi-nement a entraîné des interventions musclées qui n’avaient pas lieu d’être. En même temps, le dernier projet de loi 22-20 adopté «en douce» en conseil du gouvernement, le 19 mars 2020, a pu être révélé au grand public grâce aux réseaux sociaux allait occasion-ner un véritable démantèlement de la liberté d’expression et d’opinion. Les Marocains avaient réclamé des ba-vettes pour se protéger contre la pan-démie, ils ont failli se voir étouffer par ce fameux projet-loi, qui constitue un vraie muselière des libertés d’opinion et d’expression. Or, sans ces libertés, on ne peut pas espérer avancer vers la construction de l’État de droit garant des droits, des libertés et de l’égalité, alors même qu’un nouveau monde est

à reconstruire, tenant compte de toutes les leçons de cette pandémie mondiale, qui peut se reproduire. On pense tous à un autre monde plus juste où il y aurait moins d’inégalités, moins de pauvreté et plus de libertés. Mais ce gouverne-ment semble aller à contre-courant de cet espoir, et tous les partis politiques composant ce gouvernement ont une part de responsabilité.

JE DEMANDE À TOUS CEUX QUI ONT ACCUMULÉDES RICHESSES, GRÂCE À DES CHOIX QUI ONT ÉTÉ OPÉRÉS

DURANT DES DÉCENNIES (…) D’ÊTRE PLUS GÉNÉREUXET PLUS SOLIDAIRES ENVERS LEUR PAYS.

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Pensez-vous que ce texte sera retiré? Pour le moment, un simple report de son examen a été annoncé, mais je pense qu’il sera présenté sous une forme re-modelée avec toujours le même conte-nu liberticide pour protéger les grosses entreprises marocaines, leur permettre de s’enrichir et appauvrir encore plus les pauvres. Alors même que le monde connaît une vague de développement de l’intelligence artificielle, de progrès technologique et de moyens de commu-nication, le gouvernement veut inter-dire aux Marocains de communiquer et de s’exprimer librement sur les réseaux sociaux et sur les plateformes numé-riques mises aujourd’hui à leur disposi-tion. Comment pouvez-vous interpréter ceci? Sinon un retour de l’autoritarisme et un recul des acquis sur le plan des libertés notamment d’expression et d’opinion, et une résistance au change-ment et au développement des libertés dans notre pays?

Quels sont les autres reproches à faire au gouvernement? A mon sens, le gouvernement a essayé de protéger les siens parce qu’il y a des circulaires qui passent pour augmenter les salaires des hauts fonctionnaires. Il y a également une aide octroyée aux écoles privées, ce qui n’est pas normal en ces temps de crise où la priorité est aux malades et aux plus démunis. Nous estimons que les écoles privées ne sont pas la priorité. La priorité aujourd’hui est à donner à l’équipement des hôpi-taux, à la protection des soignants et à l’aide à apporter aux patients malades, aux pauvres et aux veuves. Il faut recen-ser tous ceux qui sont dans le besoin, les pauvres et les travailleurs du secteur informel, on aurait pu avoir des listes bien ficelées et apporter l’aide partout où elle est nécessaire. Or, les habitants des campagnes et montagnes n’ont reçu aucune aide alors qu’ils traversent une période de sécheresse très grave. Les Marocains doivent faire face à plu-sieurs crises: une crise agricole, une crise écologique et environnementale,

une crise pandémique et une récession économique, auxquelles s’ajoute l’ama-teurisme de ce gouvernement.

Pensez-vous que ce gouvernement a mal géré le dossier des Marocains blo-qués à l’étranger?C’est un problème très grave car beau-coup de nos compatriotes à l’étranger se sentent aujourd’hui orphelins. Tous les pays, y compris, la Mauritanie, l’Egypte, ont pu rapatrier leurs ressor-tissants sauf le nôtre. Un État se doit de protéger ses citoyens et de les valoriser. Or, le Maroc a délibérément lâché ses ci-toyens bloqués à l’étranger et l’aide oc-troyée n’a profité qu’à 25% d’entre eux. Par ailleurs, des milliers de Marocains possédant la double nationalité ou rési-dant à l’étranger sont restés bloqués au Maroc, séparés de leurs familles restées à l’étranger, alors que le gouvernement

devrait organiser leur retour et mettre fin à leur souffrance. Le cas des Maro-cains bloqués à la frontière de Sebta et Mellilia demeure le plus grave, car pour eux le retour paraissait plus simple, mais pas pour ce gouvernement.

Craignez-vous que les couches sociales défavorisées vont davantage payer les pots cassés de cette crise?On avait demandé à ce que le gouverne-ment distribue au moins 2.000 dirhams par famille et qu’il œuvre à toucher tous les démunis. L’aide de 800 ou 1.000 di-rhams reste faible pour des gens qui ga-gnaient beaucoup plus en tant que ven-deurs ambulants. Ces gens se trouvent dans une situation de survie et il faudrait penser à assurer un revenu minimum de manière continue pour préserver la paix sociale. La question relative à la re-cherche de fonds pour financer l’aide a

Nabila Mounib, Secrétaire générale duParti socialisteunifié (PSU).

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été vite trouvée par le gouvernement, qui s’est autorisé à effectuer des pré-lèvements sur les salaires sans concer-tation avec les fonctionnaires, qui par ailleurs se sont toujours montrés prêts à contribuer à l’effort de solidarité na-tionale. Le gouvernement a également bloqué l’avancement ou la promotion de plusieurs cadres, notamment dans l’enseignement. Les attentes sont aujourd’hui plus im-portantes que celles qui ont été expri-mées soit par le Hirak du Rif, par le Hi-rak de Jerada ou encore par le Hirak de Zagora et ce sont les couches les plus démunies qui payent et qui vont payer. Mais cette approche d’aller chercher le financement dans les poches des fonctionnaires, au lieu d’imposer les revenus élevés et les capitaux, risque de créer un climat de tension qui peut dégénérer. Il faut penser à tous ceux

à qui on a apporté de l’aide, il faut un plan d’urgence pour sortir ces 20 mil-lions de Marocains qui sont au seuil de la pauvreté de leur situation précaire, intégrer le secteur informel et créer des emplois, former les jeunes et les encou-rager à créer leurs propres entreprises. En mettant en place un système d’éga-lité des chances, dans le cadre d’une régionalisation solidaire et efficace qui mette en avant les jeunes élites locales en tant que vecteurs de développement et combattre toute sorte corruption qui gangrène le système.

Vous avez parlé plus haut des écoles pri-vées qui ont reçu des aides publiques. Pensez-vous que l’enquête parlemen-taire à laquelle vous avez appelé va aboutir?Pour avoir tous les éléments de cette histoire, il faut ouvrir une enquête par-lementaire. J’ai posé la question au Chef du gouvernement qui, pour justifier ces aides, m’a répondu que 90% des parents d’élèves n’avaient pas payé les frais de scolarité. Mais il a été contre-dit par certains responsables gouver-nementaux qui reconnaissent avoir relevé des abus dans les déclarations par ces écoles de leurs employés pour bénéficier de l’indemnité forfaitaire de la CNSS alors qu’elles ont perçu les frais de scolarité. L’octroi des aides publiques directes ou indirectes aux écoles privées ne devrait pas être la priorité du gouver-nement, la priorité devrait être celle de développer l’école publique, égalitaire et performante.

Avez-vous une idée chiffrée sur les pertes réelles de l’économie marocaine suite à la crise actuelle? Et pensez-vous que le gouvernement aurait pu en minimiser les effets? Le Maroc va vivre, bien sûr, une ré-cession économique colossale. Nous sommes un pays qui a une dette pu-blique considérable qui s’élevait, avant la pandémie, à 73% du PIB marocain. Je pense que, demain, avec un gouver-nement tel que le nôtre, ça va être en-

core le choix de l’endettement. L’endet-tement va augmenter et avec lui notre dépendance, alors qu’aujourd’hui, il y a un mouvement de par le monde pour demander l’annulation de la dette et dans lequel nous devons nous investir. Il faut également arrêter la politique de privatisation dont l’un des exemples emblématiques est celui de la raffinerie de la Samir qui est à l’arrêt depuis plu-sieurs années, or avec la baisse impor-tante des prix du pétrole sur le marché international, l’État aurait pu profiter des capacités de stockage de cette raffi-nerie pour emmagasiner des quantités importantes de pétrole et économiser ainsi plus de 1 milliard de dollars et re-nationaliser la Samir et garantir la sé-curité énergétique de notre pays. Ima-ginez qu’on puisse démarrer la période après Covid-19 avec du pétrole sous la main en plus d’épargner un milliard de dollars. Ce n’est pas rien pour une éco-nomie comme la nôtre. Mais ce gouver-nement n’a de logique que celle d’ab-diquer face aux institutions financières internationales.

Que demandez-vous aux riches de notre pays?Je demande à tous ceux qui ont accumu-lé des richesses, grâce à des choix qui ont été opérés durant des décennies, au système néo patrimonial, à la rente et aux monopoles, qu’ils demeurent aussi vulnérables face au Covid-19 que n’im-porte quel citoyen, et donc de tirer les leçons qui s’imposent, pendant cette période de crise, d’être plus généreux et plus solidaires envers leur pays. On ne peut pas demander toujours aux pauvres de payer les frais. Les riches qui ont profité des privilèges, ou même ceux qui ont travaillé dur doivent mettre la main à la poche et rendre la monnaie à leur pays en attendant le développe-ment d’un État de droit, un État social garantissant la dignité de ses citoyens et peut-être l’émanation d’une véritable bourgeoisie nationale qui accepte le partage l

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T rois autres semaines de confinement, voilà donc ce que devra encore subir le Maroc pour espérer freiner davantage la propagation

du SARS-CoV-2, le virus responsable de la pandémie de Covid-19, sur son territoire. Comme l’ont suivi les Marocains, Saâd Eddine El Othmani en a fait la proclama-tion officielle au cours de son très atten-du passage de ce 18 mai 2020 au parle-ment et qui avait été annoncée douze jours plus tôt par les deux chambres de l’institution législative, à savoir la Chambre des conseillers et celles des représentants, comme rendez-vous pour la présentation de la stratégie nationale de déconfinement. Le Chef du gouverne-ment a légitimé cette décision de son ca-binet, somme toute prévisible au regard des bruits qui couraient dans les jours précédents, par le fait que le taux de re-production, qui correspond au nombre de personnes contaminées en moyenne par un porteur du SARS-CoV-2, soit en-core par trop élevé. “Le taux de repro-duction doit être inférieur à 1 pendant deux semaines, avec une stabilité pen-dant deux mois,” a étayé M. El Othmani.

Bons indicateurs“De préférence, qu’il soit inférieur à 0,7. Aujourd’hui, le taux national est de 0,9.” Mais le deuxième personnage de l’Etat a en même temps souligné qu’en de-hors de cet indicateur, “tous les [autres étaient] bons”, eu égard au référentiel du ministère de la Santé: un taux de létalité et de cas graves ou critiques res-pectivement inférieurs à 3% et 10% et

LE SAUT DANS LE VIDELE DÉCONFINEMENT OFFICIELLEMENT PROLONGÉ JUSQU’AU 10 JUIN

En prolongeant le confinement jusqu’au 10 juin et ce sur tout le territoire national, le gouvernement El Othmani n’a sans doute pas pris sa décision la plus intelligente depuis son installation début avril 2017. Tant s’en faut.

un taux d’utilisation des moyens de réa-nimation inférieur à 30%. Ce qui ne peut, à cet égard, que poser la question quant au fondement de la prolongation du confinement: est-ce vraiment, in fine, la bonne chose à faire? Surtout que le taux de production incri-miné n’est pas le même partout, qu’il est même positif dans plus de la moitié des régions du Royaume -sept sur douze-, et que ce qui fait qu’il en soit encore à son niveau actuel c’est les foyers qui se sont déclarés dans certaines unités in-dustrielles en raison de conditions d’hy-giène qui ne sont souvent pas respectées à la lettre; tant s’en faut. Fallait-il donc, à partir de là, traiter l’ensemble du territoire national sur un même pied? A vrai dire, M. El Oth-mani semble le premier à ne pas en être convaincu, et d’ailleurs il a tenu à préciser dès le commencement de son speech devant les élus parlementaires qu’il s’agissait d’“une oeuvre collective”, refusant donc d’en assumer seul la pater-nité. Par ailleurs la veille, le secrétariat général du Parti de la justice et du déve-loppement (PJD), dont il est le secrétaire général et ce sous sa présidence même, s’était prononcé pour un déconfine-ment progressif, ce qui sur la base de sa

connaissance alors du contenu exact de son intervention du lendemain au par-lement sonne, a posteriori, comme une prise de distance qui ne dit pas son nom.

Entre la peste et le choléraEn fait le maintien du confinement est selon nos sources, et ce comme l’ont déjà signalé de nombreux médias nationaux, davantage du fait du ministère de la San-té, qui refuse de donner son feu vert au déconfinement et d’en assumer par voie de conséquence le risque sanitaire induit qui pourrait amener les hôpitaux natio-naux à être débordés, et c’est dans le même sens qu’il n’a pas encore daigné valider l’opération de rapatriement des Marocains bloqués à l’étranger mise en route par le ministère des Affaires étran-gères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, comme le responsable du département, Nasser Bourita, en avait fait la révélation dans plusieurs déclarations aux médias dans la journée le 12 mai 2020. Dans une in-terview accordée Al-Aoula et diffusée le 8 mai 2020 par la chaîne, le ministre de la Santé, Khalid Aït Taleb, avait d’ailleurs très clairement pris position contre un déconfinement à court terme, estimant que le Maroc n’était selon lui tout sim-

C’EST DANS LE MÊME SENS QU’IL N’A PAS ENCORE DAIGNÉ VALIDER L’OPÉRATION DE RAPATRIEMENT

DES MAROCAINS BLOQUÉS À L’ÉTRANGER.

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Wissam EL BOUZDAINI

LE DOUBLE DISCOURS DE SAÂD EDDINE EL OTHMANIVisiblement, Saâd Eddine El Othmani a un discours ambivalent voire contradictoire: en tant que Chef du gouvernement, il décide d’un prolongement de l’état d’urgence sanitaire pour trois semaines encore, et en tant que secrétaire général du PJD, il signe un communiqué de son parti, diffusé samedi 16 mai 2020, où il met en évidence la nécessité de procéder à la levée de l’état d’urgence sanitaire pour des raisons économiques, sociales et psychologiques. Ce communiqué est diffusé suite à une réunion du secrétariat général du PJD qui a eu lieu dans les locaux du parti, à Rabat, samedi dernier. Le communiqué avance que la levée de l’état d’urgence sanitaire doit néanmoins être accompagné par des mesures de précaution pour éviter une envolée des cas de contamination du Covid-19. Pour beaucoup, ce double discours révèle au grand jour le niveau de responsabilité de Saâd Eddine El Othmani dans la prise de décision en tant que Chef du gouvernement.

ETAT D’URGENCE SANITAIRE

ture (-3,2% de croissance) ou encore la Banque européenne de reconstruction et de développement (-2%) paraîtraient presque mirifiques.Naturellement, l’épée de Damoclès so-ciale pèse de plus en plus sur le Royaume, lui qui, déjà, n’a pas été exempt de mou-vements de protestation au cours de la décennie précédente, en commençant par le Mouvement du 20-Février dans la foulée du Printemps arabe suivi par les “Hiraks” de la province d’Al-Hoceima et de Jerada en 2016/2017, en sus de la campagne de boycott de plusieurs pro-duits de consommation en raison de leur cherté au cours du printemps 2018. Choi-sir entre la peste et le choléra, voilà bien ce à quoi en sont actuellement les auto-rités marocaines, sans toutefois donner l’impression d’être en capacité réelle de distinguer froidement entre les deux...l

plement “pas prêt” et reprenant surtout M. El Othmani, qui avait tenu des propos aux antipodes la veille même par la voie du même canal.En tout cas et selon une première esti-mation réalisée au niveau de la prima-ture selon une source gouvernementale jointe par Maroc Hebdo, le Maroc risque-rait de perdre, s’il en venait à demeurer confiné jusqu’au 30 juin 2020, quelque 20% de son produit intérieur brut (PIB), sans parler de ses pertes au niveau des recettes fiscales, qui coûteraient en moyenne chaque jour à l’Etat un milliard de dirhams.A côté, les projections récemment faites par le Centre marocain de conjonc-

FALLAIT-IL DONC, À PARTIR DE LÀ, TRAITER L’ENSEMBLE DU TERRITOIRE

NATIONAL SUR UN MÊME PIED?

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CIRCULATION :3 MORTS ET 576 BLESSÉS SUR NOS ROUTES EN UNE SEMAINE

La semaine allant du 11 au 17 mai 2020 a connu la mort de trois personnes et 576 autres blessées, dont 26 grièvement, dans 452 accidents de la circulation survenus en périmètre urbain, précise la Direction générale de la Sûreté nationale (DGSN). Ces accidents sont dus principalement au non respect de la priorité, à l’inadvertance des conducteurs, à l’excès de vitesse, au non respect de la distance de sécurité, à l’inadvertance des piétons, au changement de direction non-autorisé, à la perte de contrôle… Les services de la Sûreté ont enregistré 9.052 contraventions et rédigé 4.656 procès-verbaux qui ont été soumis au parquet général, alors que 4.396 amendes transactionnelles ont été recouvrées. Les sommes perçues ont atteint 858.600 dirhams, a ajouté la DGSN, faisant état de la mise en fourrière municipale de 3.074 véhicules, de la saisie de 1.502 documents et du retrait de la circulation de 80 véhicules.

Suite à l’annonce, lundi 18 mai 2020, par le Chef du gou-vernement de la prolongation de trois semaines de l’état d’urgence sanitaire et du confinement qui va avec, Samir Goudar, membre du bureau politique du PAM, a déclaré

à Maroc Hebdo que «cette décision de prolonger le confinement dans toutes les régions n’a aucun sens. Elle intervient au mo-ment où des pays européens qui connaissent des centaines de cas confirmés par jour ont commencé à alléger leur dispositif de confi-nement. Je dirais que le gouvernement opte pour des solutions de facilité.»Mais les pays européens ont peut-être plus de moyens de faire face à la pandémie? «Oui, mais cela ne change rien. Le Chef du gouvernement aurait dû présenter les véritables mesures à même de résorber la crise. En plus, tout le monde s’accorde à dire que l’on peut aisément procéder à un confinement par étape, par ré-gion et par secteur. Il y a des régions qui ne comptent plus de cas de contaminations, comme Laâyoune-Dakhla, Drâa-Tafilalet ou l’Oriental… pourquoi alors continuer à les soumettre au confi-nement?», précise-t-il.M. Goudar ajoute que le gouvernement a pris sa décision «sans prendre en compte des dizaines de milliers de Marocains qui sont sur le carreau, leur profession étant à l’arrêt. C’est le cas du bâ-timent, des salons de coiffure, des couturiers toutes catégories confondues, et d’autres métiers obligés de fermer… »Pour M. Goudar, qui avait présidé la commission préparatoire du 4è congrès du PAM tenu en février dernier, «il y a urgence de dé-confiner les régions où il n’y a pas de contaminations, comme il est urgent d’alléger le dispositif dans tout le reste du pays. Cela permettra aux forces de l’ordre de souffler et de récupérer des forces, comme il permettra aux citoyens de se débarrasser de ce lourd fardeau du confinement, tout cela en respectant les normes d’hygiène et de distanciation sociale» l

“PROLONGER LE CONFINEMENT N’A PAS DE SENS”

N. J.

SAMIR GOUDAR, MEMBRE DU BUREAU POLITIQUE DU PAM

FOOTBALL :ACHRAF HAKIMI DANS LE VISEUR DE L’INTER MILANL’Inter Milan a mis dans son viseur l’international marocain du Borussia Dortmund, Achraf Hakimi, alors qu’il est censé retourner au Real Madrid après son prêt à l’équipe allemande. Le conseil d’administration de l’Inter Milan travaille déjà avec son objectif fixé pour le prochain mercato. Bien que la saison en cours n’ait pas encore vécu son dernier tronçon, les dirigeants ont décidé de profiter de la pause actuelle pour façonner leur prochain projet. En ce sens, et selon Gazzetta dello Sport, il y a six signatures que l’entité a l’intention de fermer: deux joueurs latéraux, deux milieux de terrain et deux attaquants. Logiquement, il existe de nombreux noms que le club envisage actuellement. Parmi eux, Achraf Hakimi qui se démarque. Latéral polyvalent qui a brillé durant son prêt au Borussia Dortmund et qui devra retourner au Real Madrid cet été. Bien que l’on ne sache toujours pas si les Blancs lui feront de la place dans leur première équipe ou procéderont à un transfert au prix cher.

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Edition 34 - mardi 19 mai 2020

Par Mustapha SEHIMI

La tentation a été forte, avec le projet de loi N°22-20, du 19 mars, de restreindre le champ des droits et des libertés.

Les espaces des droits de l’Homme et des liber-tés à l’épreuve de l’état urgence! L’équation n’a pas qu’un intérêt acadé-

mique; bien au contraire, elle regarde la vie sociale et le quotidien de tout ci-toyen. Cette «affaire» d’un magistrat du parquet de Tanger malmené par un élément des forces de l’ordre lors d’un contrôle, voici quelques jours, a enflammé les réseaux sociaux. À juste titre. Comment de tels actes sont-ils possibles? Il y a là de quoi se préoccu-per de ce qui se passe, ici ou là.Quels sont les termes de référence à invoquer à cet égard? Pour commen-cer, ceci: L’Etat doit affirmer son auto-rité. Il doit d’autant plus le faire qu’il y a une situation d’urgence sanitaire déclarée le 20 mars 2020 et prolon-gée désormais jusqu’au 10 juin pro-chain, Oui, l’Etat! Parce que c’est sa mission régalienne; qu’il doit prendre en charge le sort d’une communauté nationale; qu’il doit y apporter les réponses appropriées; et qu’il y a au surplus une demande unanime d’Etat dans toutes les composantes de la société. Plus que cette mission sécuri-taire, c’est un Etat-providence qui est appelé ainsi à reprendre et à assumer la plénitude de ses attributions. Dans cette ligne-là, il sécurise, il protège, il rassure et s’emploie à mobiliser tous

les moyens disponibles pour mettre fin à la propagation de la pandémie. Il faut le redire encore: les citoyens ont, de ce fait, un nouveau regard sur l’Etat, sur ses départements de première ligne, en particulier ceux de l’Intérieur et de la Santé.Soit, mais en même temps, les es-

paces couvrant les droits de l’Homme et les libertés ne sont pas hors sol en ce sens qu’ils relèvent toujours d’ac-quis éligibles au Maroc de 2020, celui consacré par les grandes avancées de la Constitution de 2011 et les po-tentialités d’avenir qu’elle offre. Le retour en force de l’Etat ne saurait s’accompagner de reculs dans l’exer-cice des droits et libertés. S’il y a bien des contraintes inévitables pesant sur la régulation économique et so-

ciale, celles-ci n’épargnent pas la vie démocratique avec le lot de mesures particulières (confinement, autorisa-tion de déplacement, couvre-feu,...). La tentation a été forte, rappelons-le, avec le projet de loi N°22-20, du 19 mars, de restreindre le champ des droits et des libertés. Un projet avorté pour l’instant, reporté à une date ul-térieure, par suite d’une forte mobili-sation de réseaux sociaux, de milieux associatifs et de certains partis tant de la majorité que de l’opposition. Qu’il y ait nécessité d’une législa-tion spéciale pour l’encadrement des réseaux sociaux, personne ne le conteste, compte tenu des dérives que l’on y trouve et des fake news qui s’y véhiculent de manière prati-quement virale. Mais cela ne doit pas conduire à des débordements portant atteinte au capital des acquis. En la matière, le gouvernement n’a pas été à la hauteur de la situation. Dans la confusion et la précipitation, il a voulu légiférer, couplant le même jour deux projets de loi, l’un sur la dé-claration de l’état d’urgence et l’autre sur les réseaux sociaux. Ce faisant, il a omis cette vérité: il y une opinion publique, une citoyenneté démocra-tique en veille et même en alerte... Une forme de mobilisation dont il faut se féliciter! l

LA NÉCESSITÉ D’ENCADRER LES RÉSEAUX SOCIAUX NE

DOIT PAS PORTER ATTEINTEAU CAPITAL DES ACQUIS.

ETAT D’URGENCEET LIBERTES

CHRONIQUE

CONFINEMENT

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I l y a 64 jours, Ahmed Yaakoubd, 67 ans, et sa femme Laaziza n’auraient jamais pensé qu’ils allaient passer un aussi long séjour en France loin de leur pays.

Il est vrai que cela leur fait toujours plaisir de voir leur fille, étudiante en Master en Marke-ting digital à Paris, et qu’ils rêvent toujours de rester aussi longtemps que possible auprès d’elle, mais jamais en situation irrégulière.Homme fier, intellectuel, Ahmed avait un billet de retour Paris Orly-Rabat, le 14 mars à 13h40. Son visa Schengen était toujours valide. Il de-vait expirer le 2 avril 2020, soit au moins deux semaines après son retour. Il s’est enregistré et le ticket d’embarquement entre les mains, il apprend soudainement, à sa grande stupé-faction, que le vol est annulé. «L’assistante de la compagnie Transavia nous a priés de nous diriger directement à la porte d’embarque-ment. Or, A l’entrée de ladite porte, lors de la validation de nos cartes d’embarquement et à notre grande stupéfaction, la machine nous a affichés que notre vol vient d’être annulé. On nous réoriente donc à l’agence Transavia vers laquelle nous nous sommes dépêchés et où il y avait déjà une bien grande masse de voyageurs marocains similaires à notre cas qui s’entassaient», confie-t-il. Il quitte l’aéroport. Destination le Commissariat de police de l’aé-roport, qui se situe à 30 min à pied dans les alentours de l’aéroport. Une fois arrivé, on lui signifie que la décision a été prise par les au-torités marocaines de fermer les frontières et qu’on ne peut rien pour lui. Rebroussant che-min, il constate une foule énorme attroupée devant une agence RAM qui proposait des ta-

64 JOURS DE PEINE ET D’INDIFFÉRENCE

LE CALVAIRE INDESCRIPTIBLE DE AHMED YAAKOUBDET DE SA FEMME LAAZIZA, BLOQUÉS À PARIS

Pour Ahmed et son épouse, la seule véritable assistance dont ils avaient besoin, c’est de se voir accompagner par les autorités de leur pays pour

régulariser leur situation de séjour. Ils ont un peu moins souffert que d’autres, dont le cri de détresse est resté longtemps inaudible.

Marouane KABBAJ

rifs faramineux. La compagnie était la seule à organiser encore des vols. Il s’adresse à la compagnie Transavia qui lui fait part de son regret! Il prend son mal en patience. Le couple retourne à la maison de sa fille. Il a de la chance d’avoir un toit sous lequel il va pas-ser ses 64 jours de confinement forcé à Paris. Toutes les tentatives entreprises pour ré-soudre ce problème qui a perduré, sans cesse, jusqu’à 23h30 du dimanche 15 mars se sont avérées inutiles. Ahmed adresse alors le lendemain, le 15 mars, un courriel (dont Maroc Hebdo détient une copie) à toutes les représentations consulaires et diplomatiques françaises et marocaines –y compris l’ambassade du Maroc en France et l’ambassade de France au Maroc, les consu-lats de Colombes, de Villemomble…) où il leur explique, y joignant tous les documents et les justificatifs nécessaires, sa situation de séjour qui risquait de devenir irrégulière. Dans les deux jours qui suivent, il reçoit un appel du consulat général du Maroc à Orly qui le prie d’entrer en contact avec le consu-lat du Maroc à Villemomble. Ses appels s’avérèrent infructueux. «Samedi 9 mai 2020, après avoir répondu à un mail émanant de la cellule de crise du consulat général d’Orly qui me réclamait des copies des passeports et des visas, on m’ap-prend que c’est le consulat de Villemomble qui devait prendre en charge notre cas. Pourtant, cette représentation consulaire figure bien parmi les différents destinataires de mon mail du 15 mars 2020 et à laquelle

j’ai renvoyé ledit mail avec toutes les pièces re-quises. Jeudi 14 mai, l’interlocuteur consulaire m’appelle, en fin d’après-midi, pour m’assurer clairement que ses services ne peuvent m’être d’aucune utilité et que c’est à moi-même de me débrouiller avec les autorités françaises pour régulariser notre séjour... Le comble, on ne se gêne point de me proposer de me dépla-cer au consulat pour qu’on me remette un mo-dique bon d’achat de 50 euros», se désole-t-il. «Ma femme est diabétique et tous deux nous sommes hypertendus… Les médicaments de telles maladies chroniques ne sont délivrés que sur ordonnance… C’était un calvaire en plus. Mais dans mon cas, ce n’est pas de l’aide financière dont j’avais besoin», ajoute-t-il.Grâce à ses économies et au soutien de ses deux enfants établis aux Etats-Unis, Ahmed et sa femme ont pu bien se débrouiller finan-cièrement tandis que beaucoup de couples ont souffert le martyre pour joindre les deux bouts, bloqués au niveau des aéroports sans ressources et sans assistancel

“JE CHERCHAIS À ME SENTIR ENTOURÉ DES MIENS,

PROTÉGÉ PAR LES AUTORITÉS DE MON PAYS”

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Edition 34 - mardi 19 mai 2020

L a galère des petites et moyennes entreprises ayant subi de plein fouet les répercussions du Co-vid-19 et dont la trésorerie s’est

dégradée à cause de la baisse de leur activi-té, n’est pas finie. La solution taillée sur-me-sure pour elles, en l’occurrence, Damane Oxygène, s’est avérée être un calvaire de trop. Des va-et-vient interminables. «Il faut attendre encore un peu», souffle-t-on aux entrepreneurs au niveau des agences ban-caires. Un responsable faisant partie du ma-nagement d’une grande banque de la place nous apprend qu’un incident survenu il y a quelque temps a mis la puce aux oreilles de la CCG (Caisse centrale de garantie), deve-nue, depuis, très regardante pour l’octroi de son aval. Quelques entreprises ont pu obte-nir le Crédit Oxygène, qui bénéficie du pro-gramme Damane Oxygène, nouveau méca-nisme de garantie exceptionnel mis en place par la Caisse Centrale de Garantie dans le cadre de la mise en œuvre des mesures déci-dées par le Comité de veille économique. Le

LE CRÉDIT OXYGÈNEASPHYXIE LES ENTREPRISES

BALLOTÉS ENTRE LES BANQUES ET LA CCG

Ce qui était censé être une bouffée d’air frais pour les entreprises en difficulté pendant cette crise sanitaire s’est transformé en étau qui se resserre autour du cou des opérateurs. Qui bloque le crédit Oxygène? Les banques ou la CCG ?

Marouane KABBAJ

hic, c’est que ces entreprises ont obtenu le même crédit auprès de différentes banques. La conséquence, plusieurs dossiers de cré-dits sont bloqués. Du côté des banques, l’on insinue que la CCG est derrière ce blocage, même pour des dossiers de moins de 2 mil-lions de dirhams.

Retard de traitementDu côté de la CCG, l’on esquive même de répondre sur la véracité de cette histoire de deux entreprises. Toutefois, une précision change la donne: «Sachant que la garan-tie ne peut être utilisée qu’une seule fois par une entreprise, certaines banques pré-fèrent consulter la CCG avant de procéder au déblocage du crédit, pour s’assurer que d’autres banques ne nous ont pas informés de l’octroi de la garantie Damane oxygène à l’entreprise en question… Toutefois, les entreprises s’engagent, notamment dans le contrat de crédit qu’elles passent avec leur banque, à ne pas contracter un autre crédit garanti dans le cadre du produit Damane

Oxygène», nous confie Hicham Serghini Zanati, directeur général de la CCG.Cette explication nourrit une autre inquié-tude. C’est que les banques ne disposent pas d’une application centralisée leur permet-tant de vérifier si leur client a déjà demandé ou obtenu la garantie Oxygène. «Il faut tout d’abord préciser que l’octroi du crédit est du ressort de la banque. Aucun accord de ga-rantie n’est délivré à la banque pour les cré-dits ne dépassant pas 2 millions de dirhams puisque celle-ci est mandatée par la CCG pour octroyer la garantie du mécanisme Damane Oxygène. Conformément aux dispositions régissant ce mécanisme, l’octroi de la ga-rantie au titre des crédits ne dépassant pas 2 millions de dirhams est délégué à la banque. Pour les crédits dont la banque ne dispose pas de délégation pour l’octroi de la garantie, celle-ci doit formuler sa demande de garantie à la CCG. Le délai moyen de traitement des demandes complètes ne dépasse pas 4 jours. Aucun accord de la CCG n’est requis pour débloquer le crédit», explique M. Serghini Zanati. Dans la même veine, la CCG assure que «les délais de traitement et de l’instruction des crédits garantis par Damane Oxygène diffèrent d’une banque à l’autre, ce qui im-pacte les délais d’information de la CCG par les banques». C’est dire que le retard de trai-tement des dossiers se situe à la base au ni-veau de la banque du client. Mais comment peut-on admettre qu’une entreprise qui a eu l’accord préalable depuis un mois et demi at-tend toujours le déblocage de son crédit? Et puis, Damane Oxygène a vu le jour pour «réa-nimer» des entreprises qui s’en sortent mal, non pour les étouffer. Entre les banques et la CCG, le Crédit n’est pas garanti lHicham Serghini

Zanat.

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Edition 34 - mardi 19 mai 2020

L e réseau d’agences mobiles du Groupe Crédit Agricole du Maroc a démontré, au cours de la crise générée par la pandémie du Covid-19, son efficacité et son agilité pour atteindre les populations rurales les plus encla-

vées. Grâce à sa mobilisation, les aides distribuées par l’Etat ont pu être acheminées in situ vers des milliers de bénéficiaires qui ont ainsi pu y accéder de façon rapide et sécurisée. Fort de ce constat et fidèle à sa politique de soutien aux popu-lations rurales, le Groupe Crédit Agricole du Maroc a décidé de consolider et de renforcer sa politique de proximité en augmen-tant considérablement le nombre de ses agences mobiles (de 50 à 100 dans l’immédiat) et en organisant leurs actions au sein d’une Direction Centrale dédiée: la Direction Centrale Réseau Rural Mo-bile. La Direction Centrale Réseau Rural Mobile a ainsi pour mis-sion d’assurer une gestion centralisée et dynamique du parc des agences mobiles et de veiller à son développement continu ainsi qu’à son déploiement opérationnel grâce à une mutualisation des infrastructures pour le compte de l’ensemble des entités du Groupe: le CAM, Ardi, TEF, CAM Leasing… Initialement destinées à accompagner les activités hebdoma-daires des souks dans les zones rurales, les agences mobiles sont aujourd’hui déployées dans le cadre de l’opération de distribution

des aides de l’Etat et seront mobilisées pour des actions spéci-fiques en rapport avec l’inclusion financière, la digitalisation, l’accompagnement des TPE… Fruit d’une concertation avec le mi-nistère de l’Agriculture, de la Pêche Maritime, du Développement Rural et des Eaux et Forêts dans le cadre de l’implémentation de la stratégie «Génération Green», ce renforcement organisationnel acte la mobilisation continue du Groupe Crédit Agricole du Maroc en matière d’accompagnement des populations rurales et s’ins-crit pleinement dans sa mission de service public l

UNE NOUVELLE DIRECTION CENTRALE DU GROUPE CRÉDIT AGRICOLEDU MAROC POUR GÉRER LE PARC DES AGENCES MOBILES

OCP: ACT4COMMUNITY ACCOMPAGNE DES COOPÉRATIVES DE KHOURIBGA POUR FAIRE FACE AUX CONSÉQUENCES DU COVID-19Des solutions innovantes pour commercialiser les produits locaux en faveur des coopératives de la région et lancement d’une plateforme de commercialisation à distance. Voici deux initiatives toutes

récentes du programme du groupe OCP Act4Community Khouribga qui visent à apporter un soutien aux potentialités locales de Khouribga pour faire face aux

répercussions économiques du Covid-19. En collaboration avec les coopératives de la région, Act4Community a conçu un catalogue répertoriant les produits locaux commercialisés. Aujourd’hui ce catalogue rassemble une centaine de produits pour 28 coopératives. Cette initiative vise d’une part, à créer un pont de communication entre les coopératives et les clients pendant la période de confinement, et d’autre part, elle permet l’ouverture des coopératives à de nouveaux horizons, notamment au niveau régional, d’autant plus que ces dernières ont toujours rencontré des obstacles sur le plan marketing direct et électronique, malgré la qualité de leurs produits. Le catalogue est téléchargeable sur la page Facebook officielle d’Act4community Khouribga, où on retrouve également les modalités d’achat à distance, de livraison et de paiement,

ainsi que les mesures préventives adoptées pour la préservation et la sécurité des consommateurs. Dans la même lignée, des bénévoles de Act4Community Khouribga ont coordonné avec la coopérative ‘’Khayer Al Barchawiya’’ pour lancer une initiative d’e-marketing dans le but de commercialiser les produits de cette coopérative. Cette dernière est détenue par un groupe de jeunes agriculteurs de Aïn Kaïser, province de Khouribga. Cette initiative vise à atténuer les répercussions sociales et économiques de la pandémie sur ces jeunes agriculteurs, tout en respectant les règles de confinement et de prévention imposées par l’Etat. En effet, le client peut commander un panier de légumes et /ou de produits laitiers, des champs de Aïn Kaïser connu pour la qualité de leurs produits, ensuite la coopérative s’occupe de la livraison à domicile en peu de temps et à petit prix.

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Edition 34 - mardi 19 mai 2020

Dans le cadre de son cycle de conférences «Échanger pour mieux comprendre», la Fondation Attijariwafa bank

vient d’organiser, le vendredi 15 mai 2020, une conférence autour de la thématique «Covid-19: l’Enseignement virtuel avance ses pions».Cette troisième rencontre virtuelle a été animée par Pr Ilham Berrada, ensei-gnante chercheur à l’ENSIAS HERE et ex vice-présidente de l’Université Moham-med V de Rabat, Ilham Laaziz, directrice du programme GENIE au sein du minis-tère de l’Education nationale, et Hamza Debbarh, fondateur de la 3W Academy et administrateur de l’Institution Tahar Sebti. Sous la modération de Sanaa El Aji, Jour-naliste et écrivain, cette conférence a permis d’effectuer un tour d’horizon des mesures engagées par le ministère de-puis plus d’une décennie, pour introduire l’enseignement à distance dans les cursus scolaires et universitaires. «L’enseigne-ment virtuel n’est pas une nouveauté pour l’université, mais il s’agit à présent d’extraire les leçons de cette expérience vécue durant le Covid-19 pour en péren-niser les acquis», a relevé Pr Berrada qui prépare, avec un groupe d’experts, un Livre blanc qui sortira prochainement et qui portera sur des recommandations concrètes en matière d’enseignement di-gital à mettre en place à la sortie de la crise sanitaire. Abordant à son tour les cycles d’enseigne-ment primaire et secondaire, Ilham Laaziz

n’a pas manqué de souligner à son tour Hamza Debbarh. Et d’ajouter «les aspects techniques peuvent être réglés comme l’a démontré la forte mobilisation des opé-rateurs télécoms et autres partenaires publics et privés, au déclenchement de la crise. Mais, à présent, le plus crucial est de consolider cet élan de solidarité au-delà de la crise, pour améliorer notre performance éducative grâce à la digita-lisation». L’autre temps fort de cette rencontre vir-tuelle a porté sur la diffusion de témoi-gnages de terrain relatifs à la pratique de l’enseignement virtuel durant le Covid19. Témoignages évoquant les apports et difficultés de cette expérience au quoti-dien. Enfin, en clôture de la rencontre, ont été diffusées des œuvres artistiques traduisant la perception du Covid-19 par les enfants bénéficiaires du programme Académie des arts de la Fondation Attija-riwafa bank l

n’a pas manqué de préciser qu’à ces deux niveaux, le ministère a aussi fourni un effort soutenu depuis 2015 et ce, «pour mettre à disposition des enseignants et élèves, via une plateforme dédiée, des contenus pédagogiques et des forma-tions ciblées en faveur des enseignants». Plus que jamais, ajoute-t-elle, «le défi de l’Education nationale durant le Covid-19 a été de mettre à disposition plus de 6.000 cours en faveur de 8 millions d’élèves à travers le pays».

Transformation managérialeSelon les deux expertes de l’enseigne-ment, l’offre pédagogique est donc au-jourd’hui disponible, les classes virtuelles sont une réalité. Or, ce n’est qu’en mobilisant l’écosys-tème, qui réunit l’administration, les en-seignants, les élèves et les parents que le Maroc réussira cette transformation ma-nagériale, clé de la réforme pédagogique,

PÉRENNISER LES ACQUIS DE L’ENSEIGNEMENT À DISTANCE

LA FONDATION ATTIJARIWAFA BANK DÉCRYPTE L’EXPÉRIENCEDE L’ENSEIGNEMENT VIRTUEL DURANT LA CRISE SANITAIRE DU COVID-19

Tirer des leçons de cette expérience de l’enseignement virtuel qui n’est ni une nouveauté pour l’université ni pour l’ensemble du système éducatif national.

Seddik MOUAFFAK

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Edition 34 - mardi 19 mai 2020

Il y a quelques semaines de cela, Azedine Boulmakoul accordait à un journal électronique de la place des déclarations au sujet

d’une solution informatique que lui et trois de ses étudiants anciens et présents avaient mise au point pour suivre en temps réel les développe-ments dans une ville affectée par une épidémie de l’acabit du Covid-19. Et ce dont cet enseignant-chercheur actif depuis plus de 26 ans à la Faculté des sciences et techniques (FST) de Mo-hammédia se souvient le plus, c’est les commentaires au-dessous de l’article publié dans la foulée, élogieux quant à la solution informatique mais aussi et surtout eu égard à son investisse-ment personnel et celui de son équipe pour aider à lutter contre la pandémie. «Cela m’a, franchement, fait chaud au coeur,» confie-t-il, non sans une pointe d’émotion dans la voix. Pour autant, Pr Boulmakoul n’a jamais cherché à s’attirer la sympathie du public ni en-core moins les feux des projecteurs, bien que son pedigree l’y appellerait: en plus de trente ans de carrière, il a publié plus de 350 articles que ce soit dans des revues spécialisées ou dans le cadre de communications données à l’occasion de conférences, en sus d’une douzaine de brevets, ce qui en fait un des chercheurs les plus prolifiques du Royaume, toutes disciplines confon-dues. Et cette «prolificité», si l’on peut l’appeler ainsi, elle s’est donc notam-ment montrée au cours de la pandémie

blir des modèles de confinement/déconfinement. Et surtout, impor-tant pour les journalistes, il est aussi question de surveiller les «fake news». «Nous croyons fermement que l’arrêt de l’infodémie est un sujet de la même priorité que la recherche d’un remède ou d’un vaccin contre le virus,» souli-gnait, à cet égard, un communiqué en date du 16 mai de l’Université Hassan-II de Casablanca, de laquelle relève la FST de Mohammédia, annon-çant la finalisation de l’écosystème. Le brevet sanctionnant ce dernier a, lui, été déposé dès le 27 avril auprès de l’Office marocain de la propriété industrielle et commerciale (OMPIC), et à cet égard Pr Boulmakoul a tenu à nommer chacun de ses collaborateurs, à savoir Mohamed Nahri, Wadii Bas-mi, Soufiane Maguerra, Aziz Mabrouk et Ghyzlane Cherradi, en plus de l’as-sociation Innovative Open Spatial In-formation Systems (IOSIS), qu’il avait fondée en septembre 2011 et préside depuis lors et qui vise à promouvoir la recherche et le développement de systèmes d’information géographique innovants au Maroc. «Il s’agit, in fine, d’un travail d’équipe,» commente le professeur, dont par ailleurs une autre solution informatique, celle-ci intéres-sant le domaine de la sécurité routière et plus précisément le risque d’acci-dents piétons, vient de se voir octroyer ce 18 mai un financement de la part de l’Etat l

actuelle avec la solution informatique mentionnée plus haut et qui, en fait, avec trois autres solutions forme ce que Pr Boulmakoul appelle un «éco-système réactif holistique de pilotage et de monitoring de la propagation du Covid-19». «Ce sont des solutions com-plémentaires, qui, mises l’une avec l’autre, peuvent permettre aux autori-tés d’un pays, et en l’espèce celles du Maroc, de gérer plus efficacement une épidémie comme celle du Covid-19,» précise Pr Boulmakoul.

“Un travail d’équipe”Ainsi, l’écosystème prévoit également d’analyser la façon dont l’épidémie peut se diffuser et, à partir de là, éta-

QUAND L’INFORMATIQUEMAROCAINE DÉFIE LE COVID-19

DES SOLUTIONS MADE IN MAROC POUR GÉRER PLUS EFFICACEMENT LES ÉPIDÉMIES

Une équipe de recherche de la FST de Mohammédia a développé quatre solutionsinformatiques pour parer aux épidémies de l’acabit du Covid-19.

W. EL BOUZDAINI

AzedineBoulmakoul.

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Edition 34 - mardi 19 mai 2020

L e port de masque est au-jourd’hui obligatoire pour toute sortie hors du domicile au Ma-roc. Cette mesure, mise en

place depuis le 2 avril 2020 et maintenue jusqu’à nouvel ordre, a donné naissance à un nouveau commerce électronique, parti-culièrement rentable en cette période du Covid-19. Au coeur de cette nouvelle ten-dance: les masques personnalisés.Ces jeunes créateurs veulent réconcilier les Marocains avec cet accessoire austère. «La situation actuelle est particulière-ment dure pour tout le monde, avec nos masques, nous souhaitons apporter un peu de gaieté et de style à cet objet, qui est difficilement accepté sous sa forme médicale, et peut même faire peur», nous explique une confectionneuse de masques personnalisés. Certainement beaux et stylés, ces masques doivent tout de même respecter certaines

QUE VALENT LES MASQUES “FASHION”?

LUTTE CONTRE LE CORONAVIRUS

Faisant désormais partie du quotidien des Marocains, le masque de protection contre le coronavirus fait peau neuve. Coloré, à fleurs, ou à messages, cet objet

médical est dédramatisé par des stylistes qui souhaitent en faire un accessoire de mode. Jolis à porter, certes, mais qu’en est-il de leur efficacité?

Lamiae BELHAJ SOULAMI

LA LISTE DES ENTREPRISES CERTIFIÉES PAR IMANOR EST DISPONIBLE SUR LE

SITE OFFICIEL DE L’INSTITUT.

normes pour être efficaces contre l’inhala-tion du coronavirus. Dans le cadre du suivi de cette activité et pour assurer un maxi-mum de protection pour la population, l’Institut marocain de normalisation (Ima-nor), a mis en place un cahier de charges et un système de certification pour mieux contrôler ce travail.

Protection et tendancePour Abderrahim Taïbi, directeur de Ima-nor, les normes et caractéristiques des masques en tissu lavable et réutilisable répondent à une charte internationale, vo-tée et confirmée par toutes les parties pre-nantes, à savoir la santé et l’industrie. Un suivi minutieux est donc fait, du début à la fin, avant la délivrance d’un certificat de production et de vente en faveur d’une en-treprise. Ladite certification reste valable et renouvelable chaque mois, pour mieux cerner le sérieux des entreprises certifiées.

«Nous contrôlons absolument tout, du choix du tissu, jusqu’au stockage. Un échantillon des masques produits est pré-levé pour valider le respect des normes, notamment le choix du tissu des masques ainsi que les dimensions, avant la déli-

vrance du certificat”, nous explique Abder-rahim Taïbi. Ces masques doivent alors permettre une filtration optimale et assurer une bonne respirabilité. Les entreprises doivent éga-lement réaliser une notice, expliquant les détails de lavage de ces masques, pour bien les désinfecter et prévenir toute ré-action allergique. Les masques doivent supporter 7 lavages au minimum, selon la norme de Imanor. Les prix sont fixés selon les tissus utilisés et restent variables d’une entreprise à une autre. Si certaines entreprises et créateurs ont préféré passer par la voie légale en respec-tant les normes requises pour confection-ner et vendre des masques, d’autres ont choisi de pratiquer cette activité dans le noir total sans aucune certification. S’ins-pirant d’un document mis à disposition gratuitement en ligne par l’Afnor, associa-tion française de normalisation, pour faci-liter et accélérer la fabrication en série ou artisanale des masques barrières, ces créa-teurs jugent «inutiles l’obtention d’une certification pour une activité aussi res-treinte». La liste des entreprises certifiées par Imanor est disponible sur le site officiel de l’institut. Abderrahim Taïbi appelle les Marocains à vérifier la présence de l’entre-prise sur la liste officielle, avant l’achat de ces masques, afin de s’assurer de la qualité et de l’efficacité de cet accessoire indispen-sable en complément des gestes barrières pour faire face au Covid-19 l