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COMMISSION EUROPÉENNE Bruxelles, le 04.12.2013 C(2013) 8447 final Dans la version publique de cette décision, des informations ont été supprimées conformément aux articles 24 et 25 du règlement du Conseil (CE) n° 659/1999 concernant la non-divulgation des informations couvertes par le secret professionnel. Les omissions sont donc indiquées par […]. VERSION PUBLIQUE Ce document est publié uniquement pour information. Objet : Aide d'État SA.35861 (2013/N) – France Aide de l'Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie à SOITEC pour le projet « GUÉPARD » Monsieur le Ministre, 1. PROCÉDURE (1) Par lettre du 17 juin 2013, enregistrée le même jour, les autorités françaises ont notifié à la Commission l'intention de l'Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ci-après l' « ADEME ») d'octroyer une aide à SOITEC pour la réalisation du projet de R&D « GUÉPARD ». (2) Le 9 août 2013, la Commission a demandé aux autorités françaises de bien vouloir lui transmettre un certain nombre d'informations complémentaires, nécessaires à l'examen du dossier. Ces dernières ont apporté les précisions demandées par courrier du 13 septembre 2013. À cette occasion, elles ont informé la Commission de modifications substantielles du projet notifié (suppression et refonte de certains lots de recherche) en raison de l'annonce par l'un des partenaires initialement sélectionnés de son intention de se retirer du consortium de recherche. (3) En raison de cette modification du périmètre de l'aide notifiée, la Commission a invité les autorités françaises, le 2 octobre 2010, à lui fournir des informations actualisées sur le dossier. Ces renseignements lui sont parvenus par courrier du 18 octobre 2013. À cette date, la Commission disposait donc de l'ensemble des informations nécessaires pour définir sa position sur la mesure notifiée. Son Excellence Monsieur Laurent FABIUS Ministre des Affaires étrangères 37, Quai d'Orsay F - 75351 – PARIS Commission européenne, B-1049 Bruxelles Europese Commissie, B-1049 Brussel – Belgium Telephone: 00- 32 (0) 2 299.11.11.

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COMMISSION EUROPÉENNE

Bruxelles, le 04.12.2013 C(2013) 8447 final

Dans la version publique de cette décision, des informations ont été supprimées conformément aux articles 24 et 25 du règlement du Conseil (CE) n° 659/1999 concernant la non-divulgation des informations couvertes par le secret professionnel. Les omissions sont donc indiquées par […].

VERSION PUBLIQUE

Ce document est publié uniquement pour information.

Objet : Aide d'État SA.35861 (2013/N) – France

Aide de l'Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie à SOITEC pour le projet « GUÉPARD »

Monsieur le Ministre,

1. PROCÉDURE

(1) Par lettre du 17 juin 2013, enregistrée le même jour, les autorités françaises ont notifié à la Commission l'intention de l'Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ci-après l' « ADEME ») d'octroyer une aide à SOITEC pour la réalisation du projet de R&D « GUÉPARD ».

(2) Le 9 août 2013, la Commission a demandé aux autorités françaises de bien vouloir lui transmettre un certain nombre d'informations complémentaires, nécessaires à l'examen du dossier. Ces dernières ont apporté les précisions demandées par courrier du 13 septembre 2013. À cette occasion, elles ont informé la Commission de modifications substantielles du projet notifié (suppression et refonte de certains lots de recherche) en raison de l'annonce par l'un des partenaires initialement sélectionnés de son intention de se retirer du consortium de recherche.

(3) En raison de cette modification du périmètre de l'aide notifiée, la Commission a invité les autorités françaises, le 2 octobre 2010, à lui fournir des informations actualisées sur le dossier. Ces renseignements lui sont parvenus par courrier du 18 octobre 2013. À cette date, la Commission disposait donc de l'ensemble des informations nécessaires pour définir sa position sur la mesure notifiée.

Son Excellence Monsieur Laurent FABIUS Ministre des Affaires étrangères 37, Quai d'Orsay F - 75351 – PARIS Commission européenne, B-1049 Bruxelles Europese Commissie, B-1049 Brussel – Belgium Telephone: 00- 32 (0) 2 299.11.11.

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2. DESCRIPTION

2.1. Le contexte du projet GUÉPARD

(4) Compte tenu de l'accroissement prévisible de la demande mondiale en énergie1 et de la nécessité environnementale de limiter les émissions de CO2

2, les autorités françaises jugent souhaitable d'accroître à l'avenir la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique. L'énergie solaire est considérée comme la plus prometteuse, ses réserves accessibles étant quasi-inépuisables par rapport aux autres ressources renouvelables3.

(5) À l'heure actuelle, l'exploitation de l'énergie solaire mobilise différentes « familles » de technologies :

(a) La première est la famille photovoltaïque (ci-après « PV »). C'est aujourd'hui la plus répandue. Elle repose sur trois filières principales4 :

– La filière « traditionnelle » du silicium cristallin (mono ou poly-cristallin) (prédominante : 85%) ;

– La filière des technologies de couches minces photovoltaïques5 (complémentaire) ;

– La filière du photovoltaïque à concentration (ci-après « CPV » pour « Concentrated PhotoVoltaics ») fondée sur l'utilisation de cellules multi-jonctions à fort rendement (émergente).

(b) La seconde est la famille solaire thermodynamique, qui repose également sur une technologie à concentration6, le « Concentrated Solar Power » (ci-après « CSP »), permettant d'utiliser le rayonnement solaire pour chauffer un fluide à haute température afin de produire de l’électricité.

(6) Chacune de ces technologies solaires offre un couple rendement/coût spécifique permettant de répondre à des besoins particuliers.

(a) Malgré une évolution positive au cours des trente dernières années, l'efficacité énergétique des technologies classiques (silicium, couches minces,…) est aujourd'hui limitée à des niveaux compris entre 20 et 30 % du maximum théorique. Ces technologies matures et sans différenciation ne pourraient plus connaître, à ce stade, que des améliorations incrémentales. En 2010, le rapport Charpin7 a conclu à l'absence d'opportunité de marché pour la technologie PV

1 Source citée : Agence Internationale de l’Énergie, Rapport « World Energy Outlook », 2008. 2 À l’horizon 2030, l' « objectif 450 » viserait par exemple à limiter la concentration en CO2 à 450

ppm (parts par million). Source citée : Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’évolution du Climat (GIEC), 2007.

3 À l'échelle mondiale, 2 à 4 TW seraient extractibles sous forme d'énergie éolienne, environ 4,6 TW sous forme d'hydroélectricité, environ 2 TW sous forme d'énergie hydrolienne (c'est-à-dire tirée de la force de courants marins), environ 9,7 TW sous forme géothermique, entre 5 et 7 TW par l'exploitation de la biomasse, alors que l'exploitation à la surface de la terre de l'énergie solaire pourrait représenter jusqu'à 120 000 TW. Source citée : Département Américain de l’Énergie (Argonne National Laboratory).

4 Source citée : étude JRC datant de 2011. 5 Exemple cité : le tellure de Cadmium (CdTe). 6 Cette famille se subdivise en quatre technologies, mais le CSP parabolique est le plus développé

avec 90 % des centrales solaires actuellement développées. Source citée : CSP today, 2011. 7 Charpin (2010), Mission relative à la régulation et au développement de la filière photovoltaïque en

France ; rapport final ; Inspection Générale des Finances, 2010 ; http://www.cgeiet.economie.gouv.fr/Rapports/2010_07_31_1_Rapport_Regulation_et_developpement_filiere_photovoltaique_en_france.pdf.

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silicium au regard de « […] l’avance technique et l’avantage comparatif des pays asiatiques ».

(b) Au contraire, l'efficacité des cellules de la technologie à concentration utilisant des multi-jonctions à base de matériaux III-V8 (« Multijonction Concentrated ») est deux fois supérieure à celle des technologies solaires classiques, et jouit du potentiel d’efficacité le plus important. Leur performance n’a cessé de croître au cours des dix dernières années (de 32 % en 2000 à 40 % en 2010) et n'a pas encore atteint son maximum théorique.

(7) Entre le 11 janvier 2011 et le 2 mai 2011, l'ADEME a lancé un Appel à Manifestations d’Intérêt (ci-après « AMI ») « Solaire » pour sélectionner des projets de R&D visant à minimiser le coût de l’énergie délivrée (ou de la puissance garantie) par des systèmes de production d'énergie solaire, pour des gammes de puissance allant de quelques kilowatts (« kW ») à une dizaine de mégawatts (« MW»). Cet AMI était structuré autour de trois thématiques : 1) le solaire thermodynamique, 2) le solaire thermique et 3) le solaire photovoltaïque à concentration. Le projet GUÉPARD a été sélectionné par l'ADEME au titre de cette dernière thématique.

2.2. Les objectifs du projet

(8) Initialement développée à l’institut Fraunhofer ISE, la technologie CPV a été primée par de nombreux prix scientifiques internationaux9. Elle repose sur le principe d'une concentration (à travers une lentille de Fresnel) de la lumière du soleil sur une cellule photovoltaïque à « haute efficacité » (près de 500 fois) qui la convertit alors en énergie électrique. Cette technologie permettrait de générer environ deux fois plus d’énergie par mètre carré de module classique.

(9) Le système CPV complet se compose de modules (lentilles de concentration et cellules à forte efficacité) installés sur deux axes qui permettent de suivre la course du soleil tout au long de la journée : le « tracker ». Ces modules sont alors reliés à un système de conversion électrique pour assurer la connexion au réseau électrique. La technologie CPV présenterait trois avantages par rapport à ses rivales :

(a) Un fort potentiel d’amélioration en termes de compétitivité10, notamment dans les régions à fort ensoleillement, comme en témoignent des études de Lahmeyer International11 et de Greentech12.

(b) Une meilleure adaptation13 aux régions désertiques, en raison notamment d'une moindre dégradation des performances en température de la technologie des cellules basée sur des matériaux III-V, d'une consommation réduite d'eau, et d'une production constante tout au long de la journée grâce à l’utilisation d’un système de suivi du soleil (tracking : gain en énergie estimé à +30%).

8 Il s'agit de matériaux composés d’atomes des colonnes III et V du tableau périodique des éléments. Ces composites sont fabriqués à partir d'un ou plusieurs éléments de la colonne III du tableau périodique des éléments (bore, aluminium, gallium, indium, ...), et d'un ou plusieurs éléments de la colonne V ou pnictogènes (azote, phosphore, arsenic, antimoine, ...).

9 Source citée : Dimroth, 2010. 10 Mesurée par le coût moyen de l'énergie ou LCOE (« Levelized Cost of Energy »). 11 La société Lahmeyer International (Bad Vilbel, Allemagne) est spécialisée dans les services

d'ingénierie. Ses équipes interviennent en tant que consultants, experts techniques et responsables de projets dans le domaine des infrastructures, notamment dans les secteurs de l'énergie et de l'eau.

12 La société Greentech Media (Boston, États-Unis) réalise des analyses de marché dans le secteur des énergies vertes (rapports de recherche, services de données, services de consultance et de conseils en stratégie.

13 Source citée : étude Soitec de la perte d'efficacité des différentes technologies solaires en fonction de la température.

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(c) Un plus grand respect de l'environnement, grâce notamment à l'absence de zone d’ombre fixe permise par le tracking qui rend cette technologie compatible avec un double usage du terrain (énergie et agriculture), à un meilleur retour énergétique (un peu plus de 9 mois contre 18 mois pour le silicium cristallin), une empreinte carbone faible, et un recyclage aisé et non-polluant.

(10) Selon la France, la course technologique à la réduction du coût de l’énergie serait extrêmement serrée. Le rapport de l’Institut de l’Énergie de la Commission Européenne sur le Photovoltaïque de 201114 montrerait que le CPV aurait seulement entamé sa courbe d’apprentissage industrielle, et qu’il disposerait d’un potentiel considérable d’amélioration technique et de réduction des coûts. L'amélioration de la rentabilité de cette technologie serait cependant conditionnée à l'impact combiné de deux effets :

(a) Un effet-volume lié à une production de masse, qui n'est envisageable que si la technologie atteint un niveau de maturité compatible avec un déploiement à grande échelle et une baisse des coûts unitaires (sous réserve également que l’intégration au réseau des volumes produits ne se heurte pas aux verrous principaux liés aux solutions de lissage) ;

(b) Une augmentation d’efficacité (c'est-à-dire une double réduction du coût de production de la centrale solaire15 et du coût moyen actualisé16 de l'énergie (« Levelized Cost of Energy » ou « LCOE »17), qui peut notamment passer par le franchissement de quelques étapes technologiques sur différents composants, tels que la cellule solaire18, les systèmes optiques et électroniques, et/ou sur l’architecture centralisée.

(11) Dans cette perspective, la cellule joue un rôle central : selon les estimations de SOITEC, un accroissement de son rendement de […]*% à 50 % (+[...] points) permettrait d’accroître l’efficacité globale du système CPV de […]% à [...]% (+[...] points). Or les cellules multi-jonctions auraient, selon les autorités françaises, un potentiel de croissance allant au-delà de […] % d’efficacité.

(12) Techniquement, l'efficacité énergétique d’une cellule CPV pourrait être notablement accrue par la réalisation d’un empilement de matériaux (dits « multi-jonctions ») : comme l'illustre la Figure 1 ci-dessous, une cellule multi-jonctions III-V permet un découpage du spectre solaire19. Contrairement à une cellule unique d’énergie moyenne20, une cellule multi-jonctions permet ainsi de capter l'énergie de façon optimale à plusieurs niveaux du spectre. Aussi, chaque jonction peut capter de manière très efficace une certaine plage du spectre solaire (suivant son énergie d’absorption).

14 Source citée : JRC, 2011. 15 À quantité d’électricité produite constante, une amélioration significative de l’efficacité permet de

réduire le nombre de systèmes et donc de matériau nécessaire à la construction de la centrale. 16 Cet indicateur estime le coût unitaire (en €/KWh) de production de l'énergie en valeur actualisée. Il

permet donc de comparer des systèmes de production d'énergie dont les flux financiers, ainsi que la répartition des coûts fixes et variables sont très différents.

17 De façon à augmenter la quantité d’électricité produite sur la durée de vie de la centrale à capital constant.

18 En termes de coûts, un gain d’efficacité de [...]% à [...]% (+[...] points) sur la cellule à l’horizon 2015 permettrait de réduire le LCOE du système de [...] €/KWh à [...] €/KWh (gain de [...]%).

* Secret professionnel. 19 Sur la Figure 1, la structure de gauche représente le standard actuel en production, alors que les

deux structures de droite sont des exemples de tendances d’évolutions pour les générations à venir : vers plus de jonctions (3-4-5 etc.), ou vers un rééquilibrage des valeurs d’énergie d’absorption.

20 Cette dernière ne capte de manière optimale que la partie du spectre proche de cette moyenne. Dès lors, les photons de plus faible énergie ne sont pas captés et les photons de plus forte énergie sont captés avec un rendement trop peu adapté. Une partie non-négligeable de l’énergie collectée est donc dissipée sous forme de chaleur, et non d’électricité.

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Figure 1 : Augmentation de l'efficacité de conversion avec des cellules solaires à multi-jonctions

(13) Par conséquent, les solutions pour réaliser une cellule PV ultra performante couvrant tout le spectre solaire s’orienteraient vers l’utilisation de matériaux III-V ; l’empilement de multi-jonctions ; l’optimisation des combinaisons d’énergie d’absorption des matériaux sélectionnés pour ces multi-jonctions pour couvrir l’ensemble du spectre ; et le choix de matériaux offrant plus de flexibilité.

(14) Cependant, la réalisation d’une telle cellule se heurte à de nombreux verrous technologiques : la cherté et la rareté des matériaux III-V ou substrats ; la faible flexibilité sur les faibles énergies ; l'impossibilité d'élaborer certains matériaux sur le même support ; la limitation des combinaisons accessibles par les techniques d’épitaxie en raison des différences de paramètre de maille et d’expansion thermique (la défectivité est élevée et l’efficacité de la cellule reste réduite) ; la complexité/coût des solutions d’assemblage et de retournement des structures inversées pour élaborer des multiples jonctions ; la maturité et la taille de substrats.

(15) Au niveau des cellules photovoltaïques, les limites affectant notamment les rendements de conversion sont liées en grande partie à la relative rigidité de l’épitaxie en tant que brique technologique unique. Un tel enjeu sur la cellule requiert une rupture technologique sur le mode d’élaboration de l’empilement multi-jonctions de matériaux III-V : c’est ce que vise le projet GUÉPARD.

2.3. Le contenu du projet

(16) Le projet GUÉPARD vise le développement d’une cellule solaire « Smart Cell » multi-jonctions à très haute efficacité, moyennant la mise au point, sur une durée de cinq ans, des briques technologiques pour réaliser des empilements complexes :

(a) Accessibilité à des substrats de phosphure d'indium (« InP ») à un coût compétitif : optimisation des procédés d’élaboration, mise en adéquation avec les exigences des procédés de transfert de film (état surface, défectivité,…) et mise au point d’un procédé de recyclage21.

(b) Développement d’une nouvelle famille de substrats composites (baptisée « XOS ») ayant la particularité d’avoir en leur face avant une couche de germanium (« Ge »), d'arséniure de gallium (« GaAs ») ou de phosphure d'indium (« InP »), notamment pour permettre l’épitaxie en accord de maille de jonctions adaptées aux différentes gammes de longueurs d’onde visées. Ces couches seront reportées sur des substrats support différents, via des couches de collage appropriées, en vue de répondre au cas par cas aux verrous à lever.

(c) Développement d’empilement multi-jonctions : plusieurs générations de collage permettront d’insérer des structures intermédiaires au cœur même des cellules, ouvrant ainsi accès à des architectures de cellule plus évoluées.

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21 Une partie du travail concerne l’évolution vers le diamètre 150mm, ce qui implique le recours à de nouveaux équipements, la mise au point du procédé, et la réalisation de substrats de grand diamètre.

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(d) Développement de la technologie d’assemblage sur récepteur, pour garantir le bon fonctionnement électrique et thermique de la cellule.

(e) Exploration de solutions disruptives (à l’état de concept aujourd’hui) pour apporter un saut technologique sur la 2ème génération « Smart Cell ».

(17) Le projet GUÉPARD sera organisé en deux lots (ou « workpackages », ci-après « WP »).

(a) Un premier volet visera le développement de la cellule « Smart Cell », ce qui nécessitera à la fois des innovations sur les briques technologies (travail commun entre Soitec, InPact et le CEA-LETI), la mise en œuvre d’équipements sur le site de Bernin, et le développement de deux générations de cellules intégrant les innovations successives. En définitive, le lot n°1 (WP1) de développement de la cellule « Smart Cell », vise une amélioration du rendement de la cellule de [...] à [...]% de façon à accroître l’efficacité du système CPV de [...] à [...]%, grâce à un empilement astucieux des matériaux III-V multi-jonctions captant l’énergie lumineuse. Le contenu de ce lot a été défini par SOITEC et le CEA-LETI, en collaboration avec InPact.

(b) Un second volet de démonstration aura pour objectif de valider les technologies : test et monitoring sur les développements de la « Smart Cell » et étude de la gestion du productible produit par les systèmes de test. Cette étape inclut aussi un démonstrateur de [...] kW afin d’évaluer les performances en conditions réelles de fonctionnement à une échelle de puissance intermédiaire, lequel ne générera cependant aucune recette commerciale. En définitive, le lot n°2 (WP2) permettra une phase de test à échelle réduite, avant la mise en œuvre ultérieure du démonstrateur en grandeur réelle, pour s'assurer de l'amélioration des performances de fonctionnement des systèmes PV apportée par le projet GUÉPARD (en termes de gain sur la production électrique et de fiabilité au fil du temps). Ce lot a été défini par SOITEC et le CEA-LETI, et sera réalisé par SOITEC seul.

(18) En résumé, les différents lots du projet GUÉPARD permettront de lever les deux verrous technologiques présentés dans le Tableau 1 ci-dessous :

Lot Verrous Solutions proposées

Lot n°1

Développement de la « Smart Cell » à haut rendement

1.1 Matériaux

Pour les matériaux faibles gaps, les contraintes matériaux font qu’avec les technologies actuelles, la bande d’absorption lumineuse accessible est réduite et difficilement optimisable.

Développement d’empilement de matériaux les plus performants

Architectures de cellule plus évoluées et des bandes d’absorption optimisées. Développement de plusieurs générations de cellules (Gen1, Gen2).

1.2 Technologies

Les techniques d’épitaxie limitent les combinaisons accessibles sur un même support pour des raisons de différence de paramètre de maille et d’expansion thermique. En s’écartant du paramètre de maille, le taux de défaut devient élevé et l’efficacité de la cellule est réduite. Pour l’élaboration des multi-jonctions : complexité des solutions d’assemblage et de retournement des structures inversées.

Développement d’une nouvelle famille de substrats composites

Report des couches actives sur des substrats support différents, via des couches de collage appropriées permettant la réduction du coût, une simplification du retournement, ….

Développement des multi-jonctions

Application des procédés Smart-Cut™ et Smart-Stacking™, déjà été développées pour la technologie silicium, aux technologies III-V (utilisation d’équipements micro-électronique

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III-V). La cellule visée comporte 4 jonctions.

1.3 Coûts

Les matériaux III-V ou substrats sont chers et rares, notamment l’InP massif a un coût et une immaturité prohibitifs. L’assemblage des solutions multi-jonctions ont des coûts importants.

Accessibilité à des substrats d’InP à un coût compétitif

Optimisation des procédés d’élaboration, mise en adéquation avec les exigences des procédés de transfert de film (état surface, défectivité,…), mise au point d’un procédé de recyclage, évolution vers le diamètre 150mm

Lot n°2 La caractérisation permettra de valider les solutions qui auront été adoptées en quantifiant les bénéfices procurés.

Tableau 1 : Principaux points de rupture technologique du projet GUÉPARD

2.4. L'organisation du projet

2.4.1. Les partenaires du projet GUÉPARD

(19) SOITEC, chef de file du projet, est un groupe international spécialisé dans la production de matériaux semi-conducteurs destinés aux secteurs de l’électronique et de l’énergie. Implantée à Bernin (France), elle a réalisé en 2011-2012 un chiffre d'affaires consolidé de 323,4 millions d'euros, pour un effectif employé de 1 557 collaborateurs fin 2012. Elle dispose d'unités de production et d'installations de R&D à Bernin, son outil industriel étant complété par des filiales implantées en France (au sud de Paris), en Allemagne, à Singapour, et aux États-Unis. Dans le domaine solaire, sa filiale « Soitec Solar GmbH » est issue du rachat, fin 2009, de l'entreprise spécialisée dans les technologies de concentration optique Concentrix.

(20) InPact est une PME installée à Moutiers (France), spécialisée dans la fabrication de substrats InP22. En 2009, elle a réalisé un chiffre d'affaires de 2 millions d’euros, pour un effectif employé d'environ 25 personnes. Dans le cadre du projet GUÉPARD, InPact fera bénéficier le partenariat de sa maîtrise des problématiques substrat-épitaxie, en particulier lorsqu’il s’agira de faire pousser les couches actives d'arséniure-phospure d'indium-gallium (« InGaAsP ») et d'arséniure d'indium-gallium (« InGaAs ») et les jonctions tunnels associées.

(21) Le CEA-LETI est le Laboratoire d’Électronique et de Technologie de l’Information (ci-après « LETI ») rattaché à la Direction de la Recherche Technologique (ci-après « DRT ») du Commissariat à l’Énergie Atomique et aux Énergies Alternatives (ci-après « CEA ») (établissement public de recherche à caractère scientifique, technique et industriel). Son budget annuel est de l’ordre de 240 millions d'euros, pour un effectif employé d'environ 1 700 personnes. Ses domaines d’activité se concentrent sur les micro-nanotechnologies et leur intégration dans des systèmes dans les domaines des télécommunications et de l’internet des objets, de la biologie et de la santé, de la photonique, et de l’énergie. Les recherches du CEA-LETI, dont 75 % sont menées en coopération avec des acteurs industriels de la microélectronique, portent sur de nouveaux procédés technologiques, leur intégration dans un enchaînement technologique complexe et les architectures de composants innovantes. Dans ce contexte, le CEA-LETI réalise également des transferts de technologies : une politique

22 Selon les autorités françaises, InPACT serait le plus ancien industriel d’InP (avec Sumitomo

Electric) et le seul « pure player » dans ce domaine. Elle serait aujourd'hui le 3ème producteur mondial de tranches d’InP (derrière deux entreprises japonaises) et le 2ème fournisseur de tranches 100mm.

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volontariste de protection de la propriété intellectuelle des résultats de ses recherches a permis de constituer un portefeuille de près de 1 700 familles de brevets, dont plus de 40 % font l'objet de licences. Le CEA-LETI a notamment une longue expérience23 en matière de technologies de transfert de couches minces, (substrats avancés et filières de composants associées). En 2011, 273 nouveaux brevets ont été déposés.

2.4.2. L'organisation du partenariat

(22) Juridiquement, un accord de consortium règlera l'organisation du partenariat. S'il n’a pas encore été conclu à ce jour, certains grands principes ont d'ores et déjà été fixés, notamment en ce qui concerne la répartition des responsabilités (2.4.2.1) et la gestion/exploitation de la propriété intellectuelle (2.4.2.2). Les autorités françaises ont transmis le projet d’accord de consortium en cours de signature entre SOITEC, le CEA et InPact, et ont pris « l’engagement de communiquer une copie de l’accord définitif une fois signé par les trois partenaires ».

2.4.2.1. Répartition des responsabilités entre partenaires

(23) Le contenu des différents lots du projet GUÉPARD a été défini en étroite collaboration entre les partenaires. Les activités de recherche seront partagées de la façon suivante :

(a) Le CEA-LETI mènera des études sur le développement de briques technologiques [...] et de la compréhension des mécanismes physiques et chimiques sur les [...].

(b) SOITEC mènera des études sur le développement des cellules à haute performance par des technologies de transfert de film et des procédés [...].

(c) InPact mènera des études sur le développement de substrats InP innovants, et leur adaptation aux besoins de la « Smart Cell ». Pour ce faire, InPact s’appuiera sur la collaboration SOITEC/CEA et leur expertise des [...].

(24) La gouvernance du projet sera assurée par un comité de pilotage paritaire, qui sera responsable du suivi de l’accord de consortium, et notamment de la contribution de chacun des participants aux résultats du projet.

2.4.2.2. Propriété intellectuelle

(25) Tant en ce qui concerne la dévolution des droits de propriété intellectuelle (ci-après « DPI ») entre les partenaires, que leur exploitation par les partenaires, l'accord de consortium prévoira :

(a) des règles applicables sauf stipulations contraires (ci-après les « Principes Généraux »),

(b) des règles exorbitantes,

– en matière de dévolution, pour la collaboration bilatérale entre SOITEC et InPact (ci-après le « Cas Particulier SOITEC/InPact »),

– en matière d'exploitation, pour la collaboration bilatérale entre SOITEC et le CEA-LETI (ci-après le « Cas Particulier SOITEC/CEA »).

23 Les autorités françaises rappellent que deux PME industrielles sont issues des travaux du CEA-LETI : Soitec en 1992 et TraciT en 2002, reprise depuis par Soitec. Le brevet de base de la technologie Smart Cut™, exploité par Soitec, est la propriété du CEA-LETI, qui n'a pourtant pas de participation au capital de Soitec.

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i. Dévolution des DPI :

(26) Les Principes Généraux (applicables par défaut) en matière de dévolution de propriété intellectuelle sont que les résultats issus du projet, tout comme les connaissances développées par un partenaire antérieurement au projet ou en parallèle de celui-ci, appartiennent à « l’employeur de l’inventeur », qui décidera de l’opportunité et de la nature des mesures de protection à prendre et engagera les procédures nécessaires à son nom et à ses frais. Dans le cas où, en toute bonne foi, des connaissances nouvelles seraient générées par un ou plusieurs salariés de plusieurs partenaires, elles seront réputées être la propriété commune à parts égales desdits partenaires, et le cas échéant toute demande de brevet nouveau en découlant sera déposée à leurs noms conjoints.

(27) Dans le Cas Particulier SOITEC/InPact, des règles de dévolution exorbitantes sont envisagées en ce qui concerne les [...], et les [...] développées conjointement par SOITEC et InPact, dans la mesure où [...]. Selon les autorités françaises, ces domaines correspondraient au cœur de métier de chacune des deux entreprises :

(a) Pour SOITEC, le domaine identifié est celui des [...], ainsi que les [...].

(b) Pour InPact, le domaine identifié couvre […].

ii. Exploitation des DPI

(28) Les Principes Généraux (applicables par défaut) envisagent les règles suivantes en matière d’exploitation des résultats issus du projet :

(a) À chaque partenaire industriel est associé un domaine d’exploitation correspondant à [...], envisagés à ce jour24 de la façon suivante :

– Pour SOITEC : l’ensemble des [...]25 [...].

– Pour InPact : l’ensemble des [...].

(b) Chaque partenaire industriel peut, dans son domaine d’exploitation, s’il en fait la demande, et sous réserve des droits préexistants de tiers, se voir concéder par les autres partenaires, une licence [...], des exclusivités d’exploitation pourront être accordées au cas par cas.

(c) Toutes les licences seront concédées à des conditions de marché. [...]. En cas de désaccord sur le taux de redevances, les partenaires concernés pourront avoir recours à un tiers expert désigné par les tribunaux compétents de Grenoble pour fixer la valeur de marché de la licence en cause.

(29) Conformément à la faculté prévue à l’article L.613-32 du Code de la Propriété Intellectuelle, les partenaires envisagent de s’écarter du régime de copropriété codifié aux articles L.613-29 et suivants dudit Code, en établissant un règlement de copropriété. Il y aura une liberté d’exploitation des connaissances nouvelles conjointes par chacun des copropriétaires, en non-exclusivité, [...].

(30) Dans le Cas Particulier SOITEC/CEA, des règles d'exploitation exorbitantes sont prévues en ce qui concerne l’exploitation par SOITEC :

(a) des connaissances nouvelles propres et/ou brevets nouveaux propres du CEA,

24 Voir le point (22) ci-dessus. 25 [...]

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(b) des connaissances nouvelles conjointes et/ou des brevets nouveaux conjoints détenus en copropriété uniquement entre SOITEC et le CEA.

(31) D'une façon générale :

(a) Toutes les licences accordées par le CEA le seront à des conditions de marché. En cas de désaccord sur le taux de redevances, lequel sera négocié au cas par cas, les partenaires concernés pourront avoir recours à un tiers expert désigné par les tribunaux compétents de Grenoble pour fixer la valeur de marché de la licence en cause.

(b) En dehors du cas visé aux points (32) et (33) ci-dessous, il y aura une liberté d’exploitation des connaissances nouvelles conjointes par chacun des copropriétaires, en non exclusivité, sans avoir à en informer l’autre copropriétaire, ni l’indemniser.

(32) De façon spécifique, le CEA donnera des droits d’accès sur les [...] nécessaires pour […].

(33) Les droits concédés sont les suivants : le CEA accorde à SOITEC une licence [...]26, […]:

(a) non exclusive sur [...],

(b) exclusive sous réserve de droits de tiers, sur [...].

(c) exclusive sur [...].

(34) S'agissant des « conditions de marché » mentionnées aux points (28)(c) et (31)(a) ci-dessus, les autorités françaises ont rappelé la « difficulté inhérente à l’établissement objectif du prix de marché des droits de propriété intellectuelle » reconnue par l'Encadrement R&D&I27. En raison de l'hétérogénéité des DPI échangés28, le secteur de la micro-nanoélectronique n'est pas épargné par cette difficulté, notamment pour les applications solaires (domaine récent pour les partenaires), qui est encore accrue sur un marché « principalement de gré à gré » où les conditions des transactions comparables demeurent le plus souvent inconnues.

(35) Concrètement, la méthodologie généralement utilisée par le CEA pour déterminer le prix des licences tient compte de la qualité de la propriété intellectuelle développée, d'une analyse des plans d’affaires de l’entreprise licenciée, et des transactions comparables éventuellement connues (celles réalisées avec les presque [...] partenaires industriels du CEA, dont SOITEC, ou évoquées par des études de marché29). En cas de désaccord, une expertise indépendante30 peut être sollicitée à titre d’arbitrage. L'objectif du CEA est

26 [...] 27 Voir la note de bas de page 29, p. 19. 28 Les DPI peuvent porter sur des briques relevant de domaines technologiques très différents, être

plus ou moins proches du marché, faire l’objet de transactions isolées ou par blocs, etc. La valorisation présente en outre une grande variance : selon la France, les statistiques sur les portefeuilles de brevets indiquent que, pour près de la moitié d'entre eux, les brevets ne génèrent aucun revenu, tandis qu’un brevet particulièrement rentable génère à lui seul plusieurs dizaines de pourcents des revenus du portefeuille.

29 Source citée : « Intellectual Ventures », présenté comme un spécialiste de la valorisation des brevets.

30 Bien que l'accord de consortium ne prévoie la faculté de recours à un expert indépendant qu'en cas de contestation de la valeur de marché les licences entre les parties, les autorités françaises ont précisé qu'en cas de « contestation de la valeur de la licence par un tiers […] le CEA et SOITEC se

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donc de parvenir à un accord « qui soit juste et équilibré et qui aboutisse à une rémunération qui soit en adéquation avec la réalité économique du marché ciblé par le licencié ».

(36) Selon les autorités françaises, dans le cas de GUÉPARD, il ne serait pas possible d'établir dès à présent le taux de redevance des futures licences, car contrairement au domaine traditionnel des substrats pour la microélectronique, les partenaires ne disposent pas encore des informations pertinentes pour tarifer les applications solaires (absence de « comparable »). Les autorités françaises précisent que l'évaluation du prix de la licence sera réalisée « à un stade ultérieur de la progression du projet », qui interviendra, en tout état de cause, « avant le démarrage de l’exploitation commerciale ». Elle sera fondée sur un plan d’affaires de SOITEC actualisé, ainsi que sur un bilan factuel et documenté des connaissances et brevets générés par l'organisme de recherche au cours de la collaboration. Le caractère [...] évoqué au point (33) ci-dessus sera également pris en compte, de façon globale, dans la négociation du prix de la licence. Les exclusivités, en fonction de leur domaine, feront l’objet d’une rémunération supplémentaire par rapport à une licence non-exclusive31 et, pour être conservées, du versement de montants minimaux annuels. Enfin, la valeur de la licence tiendra compte de la participation de l’industriel aux coûts de développements de l’organisme de recherche partenaire. S'agissant du projet GUÉPARD, les autorités françaises rappellent que SOITEC contribuera aux efforts de recherche du CEA32 à hauteur d'environ [...]%. Selon la France, au regard de la pratique de l’industrie, le taux de redevances devrait correspondre à la part relative de la propriété intellectuelle apportée par le CEA dans l’innovation globale du produit, ramenée à une part de la marge brute (typiquement [...]%).

2.5. La mesure d'aide d'État

2.5.1. Chronologie d'octroi

(37) Le dossier de demande d’aide pour le projet GUÉPARD a été déposé le 2 mai 2011. À cette date, les activités de R&D de SOITEC dans le cadre de ce projet n’avaient pas encore démarré. En tout état de cause, la mise en œuvre effective de l’aide d'État au projet GUÉPARD reste conditionnée à l’approbation préalable de la Commission.

2.5.2. Les coûts éligibles

(38) Les autorités françaises ont indiqué que le projet GUÉPARD serait constitué de recherche industrielle (44,16 %) et de développement expérimental (55,84 %). La répartition des coûts entre partenaires et catégories de recherche est la suivante :

Partenaires Recherche industrielle

Développement expérimental

Total

SOITEC 14 848 852 38 436 146 53 284 998

INPACT 7 246 031 0 7 246 031

rapprocheraient afin de déterminer ensemble les actions à mener pour justifier de la valeur de la licence, et ce éventuellement à l’aide d’un expert indépendant ».

31 Les autorités françaises évoquent un « [...] du taux pour la licence exclusive par rapport à la licence non exclusive » comme base de négociation.

32 Cette contribution de SOITEC aux efforts du CEA se retrouve dans les plans d’affaires [...]: sur 8.3 millions d'euros de coûts de recherche du CEA, SOITEC couvrira [...] millions d'euros sur [...] ans (soit [...]%), le reste étant couvert par la subvention accordée (3,3 millions d'euros) et l'autofinancement du CEA ([...] million d'euros).

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CEA-LETI 8 304 330 0 8 304 330

Total 30 399 213 38 436 146 68 835 359

Pourcentage 44,16 % 55,84 % 100,00 %

Tableau 2 : Coûts du projet par partenaire (en euros)

(39) Les coûts éligibles du projet GUÉPARD se répartissent de la manière suivante selon la typologie du point 5.1.4 de l'Encadrement communautaire des aides d'État à la Recherche, au Développement et à l'Innovation (ci-après « Encadrement R&D&I »)33:

Coûts éligibles exprimés en euros SOITEC INPACT CEA-LETI TOTAL

Dépenses de personnel [...] [...] [...] [...]

Coût des instruments et matériel [...] [...] [...] [...]

Coût de la recherche contractuelle, des connaissances techniques et des brevets achetés ou faisant objet de licences auprès de sources extérieures au prix de marché

[...] [...] [...] [...]

Frais généraux additionnels supportés directement du fait du projet de recherche

[...] [...] [...] [...]

Autres frais d'exploitation [...] [...] [...] [...]

TOTAL 53 284 998 7 246 031 8 304 330 68 835 359

Tableau 3 : Coûts éligibles du projet par nature des dépenses (en euros)

2.5.3. Montant et intensité de l'aide

(40) Pour le projet GUÉPARD, les partenaires vont recevoir les aides suivantes :

Partenaires Subventions Avances

récupérables Total des aides

d'État

SOITEC 5 939 541 15 374 458 21 313 999

INPACT 1 449 206 1 449 206 2 898 412

CEA-LETI 3 321 732 0 3 321 732

TOTAL 10 710 479 16 823 664 27 534 143

Tableau 4 : Montants octroyés par instrument d'aides et par partenaire (en euros)

(41) Tant pour la recherche industrielle que le développement expérimental, les coûts éligibles des trois partenaires seront couverts à hauteur de 40 % par les subventions et avances récupérables.

2.5.4. Avances récupérables

(42) Les avances récupérables seront remboursées selon les modalités suivantes :

33 JO C 323, 30.12.2006, p.1

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(a) Taux d'actualisation : égal au taux de référence en vigueur le 10 février 2012, date de décision de principe d’octroi de l’aide (validation du projet par le Comité de Pilotage du programme des « investissements d’avenir »), soit 3,07% pour la France.

(b) Montants : SOITEC remboursera à l’ADEME [...] € par million d'euros de chiffre d’affaires réalisé sur les systèmes solaires CPV équipés de cellules « Smart Cell », jusqu’au complet remboursement34 du montant de l’avance actualisée. Ce seuil une fois atteint, un mécanisme d'intéressement de l’État s'enclenchera pour 2 années supplémentaires, pendant lesquelles SOITEC procèdera à des versements complémentaires d’un montant égal à ceux réalisés précédemment (soit [...] € par million d'euros de chiffre d’affaires).

(43) Les autorités françaises précisent qu'en cas d’échec partiel du projet (donnant lieu tout de même à une industrialisation de la « Smart Cell »), les remboursements seront proportionnels au chiffre d’affaires réalisé. En tout état de cause, une date limite au-delà de laquelle l’ADEME ne pourra plus exiger de remboursements sera indiquée dans le contrat entre l’ADEME et SOITEC, à savoir la présentation du chiffre d’affaire généré par l’exercice se clôturant le 30 avril [...].

2.5.5. Versements des aides en fonction de l'avancement du projet

(44) Le suivi du projet GUÉPARD sera assuré par l'ADEME grâce à la remise régulière (et obligatoire) par SOITEC de rapports d’avancement et d’état récapitulatifs des dépenses. Les comités de pilotage assureront en outre des revues régulières, calées sur les étapes clés du projet. Dans tous les cas, l’évaluation des paramètres techniques sera effectuée par l’équipe projet. Si nécessaire, une validation externe par un expert indépendant pourra également avoir lieu. Enfin, des jalons décisionnels permettront de suivre et, le cas échéant, de réorienter le projet (voire de l'arrêter).

(45) Enfin, les autorités françaises ont rappelé que les montants d'aide évoqués constituent des montants maximaux : si les dépenses réalisées par le bénéficiaire sont inférieures aux dépenses prévisionnelles, l’aide sera revue à la baisse. Dans le cas inverse de dépenses réellement encourues supérieures aux dépenses prévisionnelles, l’aide ne sera, en revanche, pas revue à la hausse.

3. ÉVALUATION

(46) Les autorités françaises ont notifié cette aide en tant que mesure d'application du régime d’aide d'État SA.32466 (2011/X) « Régime d’aides de l’ADEME exempté de notification relatif aux aides à la RDI et en faveur de la protection de l’environnement dans le cadre des Investissements d’Avenir ».

(47) S'agissant de sa base juridique en droit national, cette aide individuelle est octroyée par l’État via l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ADEME), établissement public régi par les articles L.131-3 à L.131-7 et R.131-1 à R.131-26 du Code de l'environnement. Il convient de préciser que l'ADEME est opérateur pour le compte de l’État pour la mise en œuvre de différents programmes des Investissements d’Avenir (voir en particulier l’article 8 de la loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010), notamment du programme « démonstrateurs et plateformes technologiques en énergies renouvelables et décarbonées et chimie verte », qui inclut une action « Démonstrateurs en énergies renouvelables et chimie verte » (voir en

34 Selon les autorités françaises, dans un scénario nominal raisonnable, ce remboursement du montant actualisé devrait intervenir sous [...] ans.

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particulier la convention signée le 3 août 2010 entre l’État et l’ADEME relative à cette action).

(48) Compte tenu du montant en jeu – supérieur à 7,5 millions d'euros pour un projet de R&D majoritairement composé de développement expérimental – l'aide octroyée à SOITEC est soumise à un examen approfondi en vertu du chapitre 7 de l'Encadrement R&D&I.

3.1. Existence d'une aide d'État

3.1.1. Présence d'aide d'État directe

(49) Les subventions et avances récupérables octroyées à SOITEC proviennent de la dotation budgétaire versée par l'État à l'ADEME ; il s'agit donc de ressources d'État.

(50) Seule SOITEC bénéficie des soutiens financiers sous examen approfondi ; la mesure est donc sélective.

(51) En contribuant à ses dépenses de R&D, la mesure procure à SOITEC un avantage économique.

(52) Le secteur des technologies et des centrales solaires au sol dans lequel SOITEC opère est ouvert au commerce intra-européen ; la mesure est donc susceptible d'affecter les échanges commerciaux entre les États membres.

(53) L'avantage conféré à SOITEC étant susceptible de renforcer sa position de marché par rapport à ses concurrents, la mesure est également susceptible de fausser la concurrence entre les entreprises opérant sur le marché intérieur.

(54) Aussi la Commission est-elle en mesure de conclure que le soutien financier octroyé par la France à SOITEC pour la réalisation du projet GUÉPARD constitue bien une aide d'État au sens de l'article 107, paragraphe 1 du TFUE.

3.1.2. Absence d'aide indirecte liée aux activités de R&D en collaboration avec l'organisme de recherche

(55) En dehors de ces aides directes, la Commission n'a pas détecté d'aides indirectes dont bénéficierait SOITEC en raison de ses activités en lien avec des structures publiquement financées.

(56) La Commission note en effet que le CEA-LETI a pour but premier d'exercer des activités de recherche et de diffuser leurs résultats par l'enseignement, la publication ou le transfert de technologie, et que les revenus générés par la valorisation de sa propriété intellectuelle35 sont réinvestis dans son activité principale de recherche publique indépendante. Le CEA-LETI répond à la définition d'organisme de recherche au sens du point 2.2 d) de l'Encadrement R&D&I.

(57) Les autorités françaises ont clairement indiqué que tous les résultats tirés du projet GUÉPARD ne donnant pas lieu à des DPI pourraient être largement diffusés par cet organisme (voir en particulier les points (91), (93), et (104) ci-dessous).

(58) Pour le reste (c'est-à-dire les DPI résultant de l'activité de R&D du CEA) :

35 Cette dernière est réalisée au niveau interne par la « Direction de la Valorisation », dont les autorités françaises ont transmis un extrait de la lettre de mission du 4 janvier 2010.

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(a) S'agissant des DPI non-transférés à SOITEC, le CEA en sera bien « titulaire » au sens de la deuxième condition prévue au point 3.2.2 (tel qu'éclairée par la note de bas de page n°28) de l'Encadrement R&D&I : l'organisme jouira de l'ensemble des avantages économiques liés à ces droits, notamment le droit de (co-)propriété et le droit de licence.

(b) S'agissant des DPI (dans les domaines limitativement énumérés au point (32) ci-dessus) pour lesquels l'organisme de recherche a décidé de conclure avec SOITEC un contrat de licence d'exploitation (dans le cadre de l'accord de consortium, tel que résumé aux points (30) à (33) ci-dessus) :

– Avec des exclusivités : il est précisé au point (36) ci-dessus que les licences prévoiront un montant forfaitaire annuel minimal de redevances à verser pour pouvoir maintenir l’exclusivité36, de sorte que le CEA aura la garantie d’une exploitation effective dans des délais raisonnables de la propriété intellectuelle concédée ;

– En dehors des exclusivités, il ressort du point (29) ci-dessus que le CEA sera libre d’exploiter et de faire exploiter les connaissances et brevets qu’il détient en copropriété avec un ou plusieurs partenaires, en non-exclusivité, sans avoir à informer ni indemniser le ou les autres copropriétaires concernés37, de sorte que l'organisme de recherche sera « tout à fait libre de valoriser à son seul profit » 38 les DPI détenus en copropriété.

Dans tous les cas, le mécanisme décrit aux points (34) à (36) ci-dessus de détermination du prix de ces licences concédées à SOITEC est de nature à garantir que la rémunération perçue par le CEA sera équivalente à un prix de marché, étant entendu que la contribution de SOITEC aux frais du CEA sera déduite de ladite rémunération, conformément à la troisième condition prévue au point 3.2.2 (tel qu'éclairée par la note de bas de page n°29) de l'Encadrement R&D&I.

(59) À titre surabondant, la Commission note que les clauses de partage des DPI générés par GUÉPARD mentionnées au point (26) ci-dessus prévoient que le CEA soit propriétaire exclusif des DPI issus de ses résultats propres, et copropriétaire de ceux résultant des activités réalisées en commun avec ses partenaires. En pratique, les autorités françaises ont précisé qu'au vu des travaux de développement à réaliser, ce second cas de figure devrait essentiellement concerner SOITEC (et non pas InPact). Par ailleurs, les apports intellectuels39 respectifs des partenaires seront « équilibrés », Dans ces conditions, les règles d'attribution des DPI résultant du projet GUÉPARD reflètent adéquatement les intérêts du CEA, l'importance de sa participation aux travaux et ses contributions (notamment financières), de sorte que, dans l'hypothèse où la deuxième condition ne

36 Les autorités françaises ont précisé qu'en cas de non-exploitation sérieuse par le licencié pendant une période de temps fixé dans le contrat de licence (de un à trois ans selon la difficulté de mise sur le marché), le CEA prévoit généralement de pouvoir convertir une licence exclusive en licence non-exclusive (et ce même si le licencié a payé le montant minimal de redevance).

37 Voir également le point (31)(b) ci-dessus. 38 Les autorités françaises précisent : « les quotes-parts de copropriété sur un résultat ne fixent pas le

partage entre les copropriétaires des revenus obtenus en cas d’exploitation non exclusive du DPI ; celui qui exploite la copropriété le fait à son seul profit. »

39 SOITEC apporte son portefeuille de [...] brevets, une maturité dans le développement de produits industriels innovants par les technologies de transfert de film et les connaissances de sa division solaire sur les technologies solaires. Le CEA apporte une expertise scientifique, des connaissances en amont des développements, une agilité vers d’autres domaines applicatifs (photonique, autres domaines photovoltaiques,…) et donc une capacité à mener des recherche plus exploratoires et à proposer des solutions en forte rupture technologique. Son portefeuille de brevets est [...].

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serait pas satisfaite, quod non, la condition prévue au dernier alinéa du point 3.2.2 de l'Encadrement R&D&I serait le cas échéant remplie.

(60) Au vu de ce qui précède, la Commission est d'avis que les conditions du point 3.2.2 de l'Encadrement R&D&I seront respectées, de sorte qu'elle peut conclure que la collaboration entre entreprises et organismes de recherche menée dans le cadre de GUÉPARD n'emporte l'octroi d'aucune aide d'État indirecte en faveur de SOITEC.

3.1.3. Absence d'aide d'État en faveur du CEA-LETI

(61) Si la recherche menée par le CEA-LETI (y compris en collaboration) est constituée d' « activités de R&D indépendantes en vue de connaissances plus étendues et d'une meilleure compréhension » au sens du point 3.1.1 de l'Encadrement R&D&I, alors la dotation versée par l'État à cet organisme de recherche participe d'un financement public d'activités non-économiques et est, à ce titre, exempte d'aide d'État.

(62) Cette condition d'indépendance est clairement remplie au cas d'espèce : les autorités françaises ont indiqué qu'un Haut-Commissaire est garant de la politique scientifique du CEA, de la qualité des recherches menées et des orientations choisies pour les futurs thèmes de recherche. Dans ce contexte, les feuilles de route scientifiques sont structurantes pour la définition de ses projets de recherche. En ce qui concerne le projet GUÉPARD, sa thématique est conforme au contrat d’objectifs liant l'État et le CEA en matière d'énergies alternatives, et s'inscrit dans le cadre d'une stratégie de diversification des micro- et nano-technologies aux technologies solaires CPV, qui lui permettra d'attirer de jeunes talents (thèses doctorales et postdoctorales) et de bénéficier de moyens renforcés pour la formation de jeunes chercheurs. Ses connaissances sur les matériaux semi-conducteurs seront étendues, au bénéfice d'autres domaines de recherche, tels que la photonique ou les télécommunications. Enfin, la Commission a vérifié que les exclusivités concédées à SOITEC sur certains des DPI issus du projet GUÉPARD n'entraveraient pas la liberté d'innovation de l'organisme de recherche : elles ne portent pas sur les résultats de nature générique, mais, comme indiqué au point (32) ci-dessus, sur une technologie de fabrication particulière établie à partir de « technologies génériques clés », de sorte que le champ des futures recherches ne sera pas réduit aux produits listés dans l’accord de consortium, mais pourra être étendu à d'autres domaines40.

(63) Enfin, les conditions du point 3.1.1 de l'Encadrement R&D&I sont remplies : comme déjà indiqué au point (56) ci-dessus, les cessions de licence seront effectuées « au niveau interne » et les recettes générées seront réinvesties dans les activités principales de recherche publique indépendante. Le transfert de technologies issues de cette R&D en collaboration constituera donc bien une activité non-économique au sens de l'Encadrement R&D&I.

3.2. Légalité de l'aide – clause de suspension

(64) La mesure a été notifiée individuellement le 17 juin 2013, en application des dispositions de l'Encadrement R&D&I.

(65) Comme indiqué au point (37) ci-dessus et conformément à l'article 108, paragraphe 3 du TFUE, la mise en œuvre effective de cette aide d'État par les autorités françaises est conditionnée à l'approbation préalable de la Commission.

40 Exemples cités : fabrication de cellules solaires pour des applications spatiales, applications PV ou CPV à faible concentration (< 300 soleils) ; En dehors du domaine du photovoltaïques : recherche future dans le domaine des LED ou des émetteurs lasers.

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3.3. Base de l'analyse de la compatibilité de l'aide

(66) Au vu des objectifs de la mesure et de la nature des activités soutenues, la Commission a procédé à l'analyse de la compatibilité de l'aide au regard des dispositions de l'Encadrement R&D&I. Cet encadrement distingue deux niveaux d'analyse de la compatibilité pour les projets de R&D :

(a) Les chapitres 5, 6 et 8 décrivent les conditions formelles de la compatibilité des projets de R&D. Celles-ci correspondent au premier niveau d'analyse.

(b) Le point 7.1 de l'Encadrement R&D&I indique que si le projet de R&D consiste à titre principal en du développement expérimental et le montant d'aide excède 7,5 millions d'euros par entreprise, la mesure d'aide doit faire l'objet d'un examen approfondi. Celui-ci doit garantir que les montants élevés d'aides à la R&D ne faussent pas la concurrence dans une mesure contraire à l'intérêt commun, mais qu'elles contribuent bien à ce dernier. La Commission procède à l'examen approfondi de l'aide suivant les éléments positifs et négatifs décrits respectivement dans les sections 7.3 et 7.4 de l'Encadrement R&D&I. Ceux-ci correspondent au second niveau d'analyse.

(67) L'aide d'État à SOITEC pour la réalisation de GUÉPARD étant de 21,3 millions d'euros, soit largement plus que le seuil de 7,5 millions d'euros par entreprise et par projet, et les coûts éligibles du projet étant composés à 55,84 % de développement expérimental, la présente mesure doit faire l'objet d'un examen aux deux niveaux d'analyse susmentionnés.

3.4. Remarque liminaire sur l'existence d'interventions publiques (européennes et extra-européennes) en faveur d'entreprises du secteur

3.4.1. Arguments avancés par les autorités françaises

(68) Dans leur dossier de notification, les autorités françaises ont souligné que la demande d’aide au projet GUÉPARD a été déposée par les partenaires en mai 2011, soit quelques mois seulement avant que la Commission n'ouvre, le 6 septembre 2012, une procédure antidumping à l'encontre des importations de cellules, wafers et modules photovoltaïques en silicium cristallin originaires de Chine, en réponse à une plainte déposée par le groupe d'industriels du secteur photovoltaïque européen EU ProSun. Une plainte similaire avait également conduit le gouvernement des États-Unis à imposer, en mai 2012, des droits de douane allant de 31 % à 250 % sur les panneaux solaires chinois.

(69) Par ailleurs, les autorités françaises ont allégué de l'existence d'aides publiques au secteur de l'industrie solaire, octroyées non seulement dans l'Union européenne, mais aussi par des États tiers, de sorte que certains des concurrents de SOITEC bénéficieraient déjà de soutiens publics à l’innovation. Ce serait notamment le cas pour la société espagnole Abengoa, quatrième producteur de technologies solaires au niveau mondial, qui, selon des informations publiques41, mènerait des travaux de recherche sur le photovoltaïque classique, le solaire thermodynamique et le solaire à concentration, en

41 Selon la France, Abengoa étudierait en particulier des technologies de fours à concentration très originales et différentes de la technologie Soitec. Source citée : http://www.abengoasolar.com/export/sites/abengoasolar/resources/pdf/IA_Actividades_2011_Ing.pdf. Il ressort notamment de ce document que : « Abengoa Solar is participating in subsidized programs for R&D projects promoted by public and private organizations and institutions. In recent years, the company has been granted seven subsidies for different projects with the US Department of Energy (DOE); a project in the 7th Framework Program of the EU; and other projects to develop new technologies subsidised by the Center for the Development of Industrial Technology (CDTI) and the regional government of Andalusia, among other entities. » (p. 15).

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engageant des dépenses de R&D considérables. Les autorités françaises en concluent qu’Abengoa aurait bénéficié, depuis 2010, « de soutiens publics massifs », notamment de la part des États-Unis, « non seulement pour des activités de R&D mais aussi pour la construction de fermes solaires ».

(70) Enfin, les autorités françaises considèrent que les États-Unis et la Chine soutiendraient leurs « champions » sur le marché du photovoltaïque :

(a) Aux États-Unis, l'entreprise First Solar aurait reçu début 2011, par exemple, 1,4 milliard de dollars (USD) de garantie de prêt du département américain de l'énergie (ci-après « Department of Energy » ou « DoE »)42 ; le département américain de la défense (ci-après « Department of Defense » ou « DoD ») aurait annoncé 66,9 millions de dollars (USD) d’investissements dans les technologies solaires innovantes43 ; un effort d'un montant total de 150 millions de dollars (USD), commun au DoE et au gouvernement chinois, aurait été annoncé en 2010 pour la création du centre pour les énergies propres (« Clean Energy Research Center » ou « CERC »)44 ; enfin, le DoE aurait annoncé en 2011 l'allocation de 90,6 millions de dollars (USD) de garanties de prêt à la société Congentrix (développeur de CSP) pour un projet de 30 MW dans le Colorado45.

(b) En Chine, l'entreprise Suntech aurait obtenu en 2010 un prêt de 7,33 milliards de dollars (USD) de la Banque de Chine à des conditions que les autorités françaises qualifient de « plus qu’avantageu[ses] » ; l'entreprise Suncore PhotovoltaicTechnology Co.Ltd aurait inauguré en 2012, une usine de modules CPV d’une capacité annuelle de 200 MW ; l'entreprise commune (ci-après « Joint-Venture » ou « JV ») entre EmcoreCorp (États-Unis) et SananOptoelectronicsCo. Ltd (Chine) aurait reçu une aide gouvernement régional chinois pour lui permettre de réduire son coût de production à 0,15 €/W (octroi d'un terrain gratuit, réductions fiscales, et subvention de 56 millions d'euros)46.

3.4.2. Analyse de la Commission

(71) La Commission considère qu'il convient de procéder à une analyse séparée des différents arguments avancés par la France :

(a) Il appartient à la Commission de contrôler la compatibilité avec le marché intérieur des aides d'État octroyées au sein de l'Union européenne au titre des compétences exclusives que le Traité lui a conférées ; des règles analogues

42 Source citée : First solar, “Annual Report 2011ˮ: http://investor.firstsolar.com/ 43 Source citée : ITIF 2012 44 Source citée : CERC (2010): http://www.renewableenergyfocus.com/view/8604/us-chinese-clean-

andrenewable-energy-research-centre/ 45 Source : US Department of Energy, Loan Programs Office: http://lpo.energy.gov/projects/cogentrix-

of-alamosa-llc/ 46 Les autorités françaises ne mentionnent pas la source. Il ressort néanmoins d'informations publiques

que le PDG de l'entreprise Suncore a publiquement reconnu avoir reçu le soutien du gouvernement de la Province chinoise concernée pour la construction de cette usine. Voir en particulier le communiqué de presse du groupe Emcore, du 01/03/2012, intitulé « EMCORE's Concentrating Photovoltaic Joint Venture in China Commences Production », 5ème paragraphe : « “With the strong support from […] the local regional government, Suncore completed the facility construction and commenced production at its new state-of-the-art manufacturing facility in one yearˮ added Dr. Charlie Wang, President and CEO of Suncore Photovoltaics » ; (http://investor.emcore.com/releasedetail.cfm?ReleaseID=653241).

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s'appliquent, mutatis mutandis, aux soutiens publics à la R&D octroyés sur fonds européens47 (3.4.2.1) ;

(b) Les soutiens publics émanant d'État tiers relèvent quant à eux, le cas échéant, du Droit commercial international, et notamment de l'accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (ci-après le « GATT 1994 »), l'Accord sur la mise en œuvre de l'article VI du GATT 1994 (ci-après l' « accord antidumping de 1994 »), l'Accord relatif aux subventions et aux mesures compensatoires (ci-après l' « accord sur les subventions »), dans le cadre de l'annexe dans l'accord instituant l'Organisation Mondiale du Commerce (ci-après l' « accord sur l'OMC »), ainsi que des textes visant à transposer ces accords dans l'ordre juridique de l'Union48 (3.4.2.2).

3.4.2.1. Aides d'État et subventions à la R&D de l'Union européenne

(72) Comme exposé au point (69) ci-dessus, les autorités françaises se sont interrogées sur les aides d'État dont aurait bénéficié Abengoa sur fonds régionaux et nationaux en Espagne. Sur ce point, la Commission tient à souligner que les autorités espagnoles l'ont informée, respectivement le 29.02.2008 pour l'année 200849, les 26.03.2009 et 30.04.2009 pour l'année 200950, et le 18.12.2009 pour l'année 201051, de l'octroi d'aides d'État à la R&D&I à cette entreprise dans le cadre de différents régimes d'aide approuvés ou exemptés. Conformément au point 10.1.3 de l'Encadrement R&D&I, des aides excédant trois millions d'euros (mais non-soumises à obligation de notification individuelle) ont ainsi fait l'objet d'un résumé publié sur le site internet de la Commission.

(73) Concernant ces aides d'État, la Commission rappelle aux autorités françaises que leur octroi ne saurait justifier, en soi, d'accorder une aide à SOITEC pour réaliser le projet GUÉPARD. Dans l'Union européenne, il ne saurait exister de droit à « compensation » dont les entreprises pourraient se prévaloir en réponse aux aides d'État dont leurs concurrents auraient, le cas échéant, bénéficié par le passé. Au contraire, la justification du caractère nécessaire et proportionné des interventions publiques en faveur de la R&D doit être apportée au cas par cas par les États membres, et appréciée par la Commission. Sur ce point, la Commission souhaite rappeler qu'il en va de la justification même du contrôle des aides d'État, dont l'un des objectifs est précisément d'éviter que les États membres ne se lancent dans une « course aux subventions » aux dépens les uns des autres et, au final, au détriment de l'intérêt général européen.

47 S'agissant des financements entrant dans le cadre du 7ème programme-cadre, voir la Décision n°1982/2006/CE du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2006, relative au septième programme-cadre de la Communauté européenne pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration (2007-2013) (JO L 412, 30.12.2006, p. 1), spéc. « Annexe III – Régimes de financement », p. 41, alinéa 3. S'agissant des financements par les fonds structurels, voir le Règlement (CE) n°1083/2006 du Conseil du 11 juillet 2006 portant dispositions générales sur le Fonds européen de développement régional, le Fonds social européen et le Fonds de cohésion, et abrogeant le règlement (CE) n°1260/1999 (JO L 210, 31.7.2006, p. 25), et en particulier l'article 9, paragraphe 5 et l'article 60, lettre a) sur le principe général de respect du droit de l'Union, en ce compris le Droit des aides d'État.

48 Voir notamment : Règlement (CE) n° 1225/2009 du Conseil du 30 novembre 2009 relatif à la défense contre les importations qui font l'objet d'un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne, JO L 343, 22.12.2009, p. 51 ; Règlement (CE) n° 597/2009 du Conseil du 11 juin 2009 relatif à la défense contre les importations qui font l’objet de subventions de la part de pays non membres de la Communauté européenne (version codifiée), JO L 188, 18.7.2009, p. 93.

49 Référence : http://ec.europa.eu/competition/state_aid/register/transparency_table_2008.pdf. 50 Référence : http://ec.europa.eu/competition/state_aid/register/transparency_table_2009.pdf 51 Référence : http://ec.europa.eu/competition/state_aid/register/transparency_table_2010.pdf

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(74) Le même raisonnement est transposable, mutatis mutandis, aux soutiens européens à la recherche, l'octroi de ces derniers étant soumis au respect des dispositions en vigueur du Droit de l'Union européenne en général, et du Droit des aides d'État en particulier.

3.4.2.2. Aides publiques et dumping dans les États tiers

(75) S'agissant des interventions de gouvernements d'États tiers qui auraient favorisé (ou favoriseraient encore) certaines entreprises actives dans le secteur des technologies solaires par l'octroi de subventions ou la mise en place d'un dumping, la législation de l'Union européenne dispose que :

(a) Tout produit faisant l'objet d'un dumping (c'est-à-dire lorsque son prix à l'exportation vers l'Union européenne est inférieur au prix comparable, pratiqué au cours d'opérations commerciales normales, pour le produit similaire dans le pays exportateur), peut être soumis à un droit antidumping lorsque sa mise en libre pratique cause un préjudice à l'industrie de l'Union.

– À ce sujet, il convient de rappeler qu'après neuf mois d'enquête approfondie, l'Union européenne a décidé le 4 juin 2013 d'instituer52 des droits antidumping provisoires sur les importations de panneaux solaires, de cellules et de wafers en provenance de la Chine53. La Commission a notamment constaté que certaines sociétés chinoises vendaient des panneaux solaires en Europe à des prix nettement inférieurs à leur valeur marchande normale, au détriment des fabricants de panneaux solaires de l’Union européenne. En raison de cette concurrence déloyale, la Commission a reconnu que des entreprises innovantes de l’Union étaient exposées à un risque de faillite, ou d'être découragées à concevoir des technologies de pointe dans le secteur des sources d’énergie renouvelables.

– À l'issue de discussions intensives, la Commission a annoncé, le 27 juillet 2013, avoir négocié une solution amiable alternative aux prélèvements à l'exportation, prenant la forme d' « engagements de prix » des exportateurs chinois54. Ces derniers ont pris l'engagement (soumis au contrôle de la Commission) de respecter les prix minimaux à l'importation de façon à éliminer les effets du dumping préjudiciable pour rétablir, au bénéfice de l’industrie européenne des sources d’énergie renouvelables, des conditions de concurrence équitables sur le marché. Dans leur courrier du 13 septembre 2013, les autorités françaises ont souligné que de telles mesures n'avaient vocation à s'appliquer qu'aux prix et quantités de panneaux importés dans l'Union européenne. En conséquence, elles considèrent qu'elles devraient n'avoir qu'un effet partiel sur le marché mondial des centrales solaires au sol, marché d'exportation pour les entreprises européennes, dont les incitations à investir dans de nouvelles technologies ne seraient pas

52 Voir le communiqué de presse de la Commission européenne : http://europa.eu/rapid/press-release_IP-13-501_fr.htm.

53 Règlement (UE) n°513/2013 de la Commission du 4 juin 2013 instituant un droit antidumping provisoire sur les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules et wafers) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine et modifiant le Règlement (UE) n°182/2013 soumettant à enregistrement ces importations originaires ou en provenance de la République populaire de Chine.

54 Voir les communiqués de presse de la Commission européenne : http://europa.eu/rapid/press-release_MEMO-13-729_en.htm et http://europa.eu/rapid/press-release_MEMO-13-730_en.htm.

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suffisamment restaurées à un horizon de temps compatible avec la réalisation du projet GUÉPARD.

(b) Les subventions octroyées par des pays non-membres pour soutenir la fabrication, la production ou l'exportation de produits dont la mise en libre pratique est susceptible de causer un préjudice à l'industrie de l'Union européenne sont passibles de mesures compensatoires dans certaines conditions. Une enquête antisubventions parallèle, ouverte le 8 novembre 2012, est en cours sur le même produit, à la suite de la plainte déposée par le même intervenant. Le 7 août 2013, la Commission a annoncé55 poursuivre son investigation.

– S'agissant plus spécifiquement de subventions à la R&D, une clause d'alignement est prévue au point 5.1.7 de l'Encadrement R&D&I, qui permet de mettre en œuvre un dispositif de compensation spécifique pour les « distorsions actuelles ou potentielles, directes ou indirectes, induites par le commerce international ». Elle permet notamment d'accorder des « intensités plus élevées que celles qui sont généralement autorisées […] si, directement ou indirectement, des concurrents de pays tiers ont reçu (au cours des trois années56 précédentes) ou vont recevoir des aides d'une intensité équivalente pour des projets, des programmes, de la recherche, du développement ou des technologies similaires ». Au cas d'espèce, les autorités françaises n'ont ni revendiqué l'application de la clause d'alignement ni épuisé l'intensité d'aide maximale permise par l'Encadrement R&D&I, les 40 % envisagés par la France restant inférieurs au maxima prévus pour les subventions comme les avances récupérables57.

(76) En définitive, les arguments avancés par la France ne sont pas, en soi, suffisants pour justifier l'existence de défaillances de marché qui justifieraient l'octroi d'une aide à SOITEC pour la réalisation du projet GUÉPARD. Les informations transmises par la France sont néanmoins susceptibles d'apporter un éclairage utile pour apprécier certaines des spécificités du domaine technologique en cause :

(a) Comme précisé au dernier alinéa du point (75)(a) ci-dessus, les incitations des producteurs à investir dans de nouvelles technologies solaires peuvent être altérées à court/moyen terme en raison du décalage temporel entre l'adoption de mesures antidumping par les autorités européennes et américaines, et le rétablissement de conditions normales sur le marché des cellules photovoltaïques, wafers et panneaux solaires. Il conviendra d'en tenir compte dans l'analyse des défaillances de marché auxquelles le projet GUÉPARD est confronté et dans l'appréciation de l'effet incitatif de l'aide ;

(b) L'existence d'aides publiques extra-européennes à certaines entreprises du secteur est de nature à modifier les conditions normales de concurrence sur le marché des centrales solaires au sol. Ces éléments seront pris en compte par la Commission au stade de l'analyse concurrentielle.

(77) Pour le reste, il convient de réaliser une analyse complète des justifications avancées par la France pour démontrer le caractère nécessaire et proportionné de l'aide au projet

55 Voir le communiqué de presse de la Commission européenne : http://europa.eu/rapid/press-release_IP-13-769_en.htm.

56 Cette période de référence peut être allongée lorsque des distorsions induites par le commerce international sont susceptibles de se produire après une période de plus de trois ans (notamment en raison de la nature du secteur en cause).

57 Sur cette question, voir en particulier le point (155).

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GUÉPARD de SOITEC (section 3.5), d'apprécier les risques de distorsion de la concurrence que l'octroi de cette aide est susceptible d'emporter (section 3.6), et enfin de procéder au bilan des différents effets de l'aide pour vérifier si son octroi peut être compatible avec le marché intérieur (section 3.7).

3.5. Effets positifs

3.5.1. Existence d'une défaillance de marché

(78) Le point 7.3.1 de l'Encadrement R&D&I indique que le résultat spontané du marché conduit parfois à un résultat sous-optimal en termes d'effort de R&D des entreprises. Il convient donc d'identifier le plus précisément possible les défaillances de marché spécifiques auxquelles le bénéficiaire devra faire face, en tenant compte du contexte concurrentiel dans lequel ce denier opère.

3.5.1.1. Défaillance « générale » du marché

(79) Selon les autorités françaises, les technologies existantes ne permettraient pas de satisfaire la variété des besoins58, de s'adapter aux zones à fort ensoleillement, de respecter l’environnement, ou de répondre à la pénurie de certains matériaux (silicium). Pourtant, le marché solaire serait « saturé par des technologies matures ». En effet, bien qu'en pleine croissance, le fonctionnement actuel du marché serait altéré par une baisse anormale59 des prix qui dissuaderait les investisseurs de réaliser la R&D nécessaire au développement de technologies de rupture, comme le CPV, dont l'introduction se heurterait à plusieurs obstacles :

(a) Effet d'échelle : les technologies matures jouiraient aujourd'hui d'un avantage tarifaire leur permettant d'être mieux placées pour répondre aux appels d’offres internationaux60. Les producteurs chinois de technologies PV matures bénéficieraient d'un « effet d'échelle » (absence de barrières à l'entrée61), ainsi que de faibles coûts de production (financement, main d’œuvre, énergie). À l'inverse, les technologies innovantes seraient désavantagées par la faiblesse de la chaîne d’approvisionnement, à l'instar des cellules de matériaux III-V, composants aujourd'hui essentiellement destinés au marché spatial, dont les volumes de production sont faibles et les coûts unitaires de production élevés.

(b) Nouvelles entreprises : le marché serait d’autant moins propice à l’émergence de technologies innovantes qu’elles émaneraient de « nouvelles entreprises » confrontées à des barrières à l’entrée importantes (investissements initiaux dans la

58 Étude JRC de 2011 : « The existing photovoltaic technology mix is a solid foundation for future growth of the sector as a whole. No single technology can satisfy all the different consumer needs, ranging from mobile and consumer applications, with the need for a few watts to multi MW utility-scale power plants. The variety of technologies is an insurance against a roadblock for the implementation of solar photovoltaic electricity if material limitations or technical obstacles restrict the further growth or development of a single technology pathway. »

59 Durant les années 2006 à 2010, des mécanismes incitatifs très avantageux en Europe (« Green Stimulus ») ont permis le développement de filières solaires conventionnelles (silicium et couches minces). Les acteurs asiatiques ont augmenté leur capacité de production dans ces technologies (aujourd'hui matures). Avec la diminution des politiques publiques de soutien de la demande, le marché solaire, inondé par l'offre à bas coût (voire à perte) de modules PV asiatiques, connaît actuellement une forte baisse des prix.

60 Étude JRC de 2011 : « However, it should be pointed out that CPV is just at the beginning of an industry learning curve, with a considerable potential for technical and cost improvements. The most challenging task is to become cost-competitive with other PV technologies quickly enough, in order to use the window of opportunities for growth. »

61 Selon les autorités françaises, un industriel pourrait acheter une usine « clé en main » et offrir en moins d’un an des produits au niveau de maturité du marché.

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capacité de production). Or, l'environnement de marché actuel ne permettrait pas aux « start-up » d'accéder aisément au capital.

(c) Entrave à la R&D et à l'innovation : les acteurs maîtrisant les technologies matures seraient moins portés sur l'innovation. Afin de rassurer les investisseurs, ils se contenteraient d'évolutions technologiques minimales, au mieux incrémentales, et renonceraient à toute percée disruptive. Alors que la technologie CSP la plus développée se contenterait de rassembler des technologies existantes, le CPV, en revanche, constituerait une « révolution technologique », de sorte que GUÉPARD serait un « réel projet de rupture technologique ».

(80) Sur l'existence d'une défaillance « générale » du marché des technologies solaires, la Commission note que les difficultés alléguées pour stimuler l'innovation s'expliquent en grande partie par la mise en œuvre de politiques publiques, qui auraient, selon les autorités françaises, déstabilisé les fondamentaux du marché. À l'instar du dumping sur les cellules PV, wafers et panneaux solaires décrit au point (75)(a) ci-dessus, certaines de ces interventions sont imputables à des États tiers. D'autres relèvent en revanche de choix stratégiques de certains États membres de l'Union européenne : tel est le cas de l'instauration d'un « Green Stimulus », puis de sa remise en cause sur une période très courte, ce qui, selon les autorités françaises, aurait généré de l'instabilité dans les modes de régulation du secteur, les tarifs de rachat d'électricité solaire et les mécanismes fiscaux en faveur des installations photovoltaïques, au risque de fortement déstabiliser la demande, et de limiter la visibilité de l'offre sur les perspectives qu'offre réellement le marché.

(81) Aussi, il ne semble pas pertinent à la Commission d'expliquer ces obstacles généraux rencontrés par les acteurs du marché solaire pour investir dans l'innovation en tant que « défaillance du marché », dans la mesure où ce type de défaillance, comme l'indique l'Encadrement R&D&I, se produit lorsque « le marché, livré à lui-même, ne donne pas un résultat économiquement efficient »62. Or, force est de reconnaître que l'industrie des technologies solaires est loin d'avoir été « livrée à elle-même » ces dernières années et qu'elle s'est plutôt caractérisée par l'abondance, voire la surabondance, des interventions publiques.

(82) Au regard de ce qui précède, la Commission est d'avis qu'il convient d'écarter l'argument de l'existence d'une « défaillance générale du marché » et souhaite concentrer son analyse sur le contexte dans lequel s'inscrit le projet GUÉPARD :

(a) D'éventuels problèmes de coordination entre les partenaires sont-ils susceptibles de freiner la réalisation des activités de R&D ? (3.5.1.2),

(b) Une imperfection et/ou une asymétrie de l'information, sur les marchés financiers ou entre les acteurs de la chaîne de valeur, pourraient-elles handicaper le financement des activités de R&D ? (3.5.1.3),

(c) L'existence d'externalités positives, que les promoteurs du projet ne pourraient pas forcément s'approprier de manière suffisante, pourrait-elle les dissuader de réaliser le projet GUÉPARD ? (3.5.1.4).

3.5.1.2. Problèmes de coordination

(83) Dans leur notification, les autorités françaises ont qualifié de problèmes de « coordination » i) les divergences d'intérêt entre la recherche publique et la recherche

62 Section 1.1, 3ème paragraphe, note de bas de page n°4 (caractères en gras ajoutés).

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privée, ii) la méconnaissance par les acteurs de la chaîne de valeur des potentialités de la technologie CPV, et iii) le paradoxe dit « de l'œuf et de la poule »63.

(84) La Commission est d'avis que ces deuxième et troisième éléments relèvent plutôt d'une question d'asymétrie et/ou d'incomplétude de l'information dont pourraient souffrir les acteurs de la chaîne de valeur. Par conséquent, elle renvoie à la section 3.5.1.3 ci-dessous où elle procède à l'analyse de ces arguments. Ne seront donc abordées ici que les difficultés alléguées de coordination des activités des différents partenaires du projet GUÉPARD.

(85) Selon les autorités françaises, les divergences dans les modes de valorisation des résultats entre les laboratoires publics et le monde industriel constitueraient une « défaillance du marché ». La recherche publique n'aborderait pas spontanément des thématiques à vocation industrielle, mais se concentrerait sur « des problématiques éloignées » des préoccupations de l'industrie. Il serait par conséquent difficile de synchroniser les efforts de recherche publics et privés autour d’une feuille de route technologique commune. Les autorités françaises ajoutent que l’existence de problèmes de coordination entre entreprises et organismes publics de recherche en France aurait été reconnue par la Commission dans la décision relative à l’Agence de l’Innovation Industrielle64.

(86) S'il est vrai que de tels problèmes peuvent exister dans le cadre de partenariats de recherche associant entreprises et organismes de recherche, en ce qui concerne spécifiquement GUÉPARD, la Commission relève qu'il constitue certes un projet collaboratif, mais note cependant que deux des principaux protagonistes, en l'espèce SOITEC (entreprise) et le CEA-LETI (organisme de recherche), ont déjà une longue histoire de collaboration dans le domaine de la nanoélectronique. Cette coopération historique s'illustre, par exemple, par le fait que « SOITEC, bien qu’elle ne soit qu’une ETI (Entreprise de Taille Intermédiaire) d’une vingtaine d’années, est le 2ème Contributeur du CEA-LETI en matière de redevances […] »65. Même si les spécifications techniques du projet GUÉPARD sortent du cadre « habituel » de la collaboration entre SOITEC et le CEA-LETI, qui porte généralement sur des applications microélectroniques et non pas des applications solaires, [...], la Commission est d'avis que les spécificités du projet ne sont pas de nature à engendrer des difficultés de coordination telles entre le CEA-LETI et SOITEC qu'ils ne seraient désormais plus capables de faire converger leurs intérêts particuliers vers un optimum commun.

(87) En revanche, dans la mesure où, tel qu'il ressort de la section 2.4.1 ci-dessus, en plus du CEA-LETI et de SOITEC, le projet GUÉPARD associera InPact (une PME), et au vu de la répartition des tâches entre ces différents partenaires, décrite à la section 2.4.2.1 ci-dessus, il sera nécessaire de mener en parallèle et de façon cohérente les différents travaux de R&D, qui devront être intégrés dans une approche globale pour former un système CPV. Pour ce faire, l’accord de consortium prévoit qu'un comité de pilotage paritaire assurera la gouvernance du projet. De tels éléments sont de nature à engendrer des coûts de coordination que l'aide permettra d'atténuer. Enfin, l'exemple récent du retrait d'un des partenaires initiaux du projet prouve les difficultés à pérenniser la convergence des intérêts des partenaires lorsqu'ils n'ont pas l'habitude de travailler ensemble.

63 La montée en puissance d'une technologie émergente requerrait la démonstration préalable d'un certain niveau de rentabilité technico-économique (« tracks records »), laquelle ne pourrait être établie qu'après avoir réalisé un certain volume de ventes.

64 Commission européenne, 19.7.2006, Aide d'État N 121/2006 – France – Soutien de l’Agence de l’innovation industrielle en faveur des programmes mobilisateurs pour l’innovation industrielle, JO C 218, 9.9.2006, p. 9.

65 Courrier des autorités françaises du 13 septembre 2013.

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3.5.1.3. Information imparfaite et asymétrique

(88) D'une façon générale, selon les autorités françaises, les technologies émergentes connaîtraient des difficultés de financement liées à la propension des investisseurs à sélectionner des technologies classiques, dont la faisabilité technico-économique a été démontrée et dont le retour sur investissement est prévisible66, de façon à limiter les risques. Ce phénomène, valable pour le CSP67, toucherait encore plus durement le CPV, qui est plus récent, dans la mesure où les différents acteurs de la chaîne de valeur (installateurs, investisseurs, assureurs, énergéticiens) méconnaîtraient cette technologie, et préfèreraient travailler sur des solutions moins onéreuses, présentant moins de risques, et surtout, déjà maîtrisées. Ceci étant, les autorités françaises ont souligné que les investisseurs attachent aux retours financiers des projets de centrales solaires une importance primordiale et, sauf pour quelques rares entreprises68 présentant des garanties élevées, réclament des taux de retour sur investissement (ci-après « TRI ») trop élevés, généralement largement supérieurs au coût moyen pondéré du capital (ci-après « WACC » pour « Weighted Average Cost of Capital »).

(89) Dans cette perspective, alors que l'ambition de SOITEC est précisément d’améliorer la performance des cellules photovoltaïques, le projet GUÉPARD souffrirait de difficultés de financement encore aggravées par des facteurs de risques spécifiques au solaire, qui rendent la prédictibilité des indicateurs financiers plus délicate, mais aussi les résultats des appels d’offres plus risqués. Pour atténuer le risque perçu par les financiers, limiter leurs demandes de garantie excessives, et déclencher l’installation de premières centrales, SOITEC tente de s’appuyer sur la qualité des contrats d’achat d’électricité signés ou en cours d’obtention69. En cas de succès du projet, la cellule à haut rendement de SOITEC pourrait en outre permettre d'améliorer la performance des centrales, et donc de réduire le coût du capital nécessaire à leur financement.

(90) En conclusion de ce qui précède, la Commission reconnaît que, d'une façon générale, les pourvoyeurs de fonds traditionnels n'appréhendent pas correctement les potentialités commerciales et les risques attachées aux technologies solaires innovantes, notamment le CPV (pour le projet GUÉPARD). Au cas d'espèce, la Commission considère que les ruptures technologiques visées par SOITEC et ses partenaires présentent des niveaux d'ambition, de coût et de risque susceptibles de décourager les acteurs de la chaîne de valeur. En l'absence de toute expertise technologique et/ou industrielle, cette asymétrie d'information apparaît encore plus forte pour les acteurs purement financiers.

3.5.1.4. Externalités positives

i. Diffusion des connaissances

(91) Publications : selon les autorités françaises, le projet GUÉPARD amplifiera la collaboration entre deux organismes de recherche publique associés au projet, le CEA,

66 Extrait de l'étude JRC de 2011 : “About 80% of the current production uses wafer-based crystalline silicon technology. A major advantage of this technology is that complete production lines can be bought, installed and be up and producing within a relatively short time-frame. This predictable production start-up scenario constitutes a low-risk placement with calculable return on investments.”

67 Citation CSP Today : “Their lack of track records causes these technologies to be considered less mature and riskier from an investor’s point of view”.

68 Les autorités françaises citent l'exemple de « grosses sociétés » ou d'entreprises « adossées à un très gros groupe » qui seraient capables de lever des fonds avec un niveau de TRI exigé assez faible, voire inférieur à leur WACC.

69 Exemples cités : contrats de 150 MW aux États-Unis et de 50 MW en Afrique du Sud.

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en tant que partenaire, et Fraunhofer ISE, en tant que sous-traitant, qui diffuseront les connaissances générées par voie de publications70.

(92) Par ailleurs, les interactions entre le CEA-LETI et d’autres industriels de la microélectronique seraient susceptibles de permettre à ces derniers de bénéficier indirectement des connaissances développées dans le cadre de GUÉPARD sur la compréhension des matériaux III-V ou des mécanismes de transfert de couches.

(93) Fertilisations croisées entre les secteurs microélectronique et solaire : le projet GUÉPARD permettra de diffuser à la recherche industrielle solaire des connaissances issues de la recherche publique dans le domaine des semi-conducteurs. En particulier, il ressort du point (62) ci-dessus que les éléments issus de la collaboration entre le CEA-LETI et SOITEC pourraient servir dans d’autres thématiques71. Les autorités françaises anticipent également un effet « démultiplicateur » pour le CEA-LETI sur des thématiques spécifiques (comme l’InP, dans des secteurs de la télécommunication ou la photonique). De même, l'institut Fraunhofer pourrait utiliser le savoir acquis dans le projet GUÉPARD en matière de [...]72 dans des travaux de recherche et/ou développements avec d’autres partenaires. Enfin, les recherches communes73 développées avec SOITEC pourraient bénéficier à InPact et à ses partenaires éventuels dans d’autres domaines d’applications, par exemple les télécommunications.

(94) Résultats protégés et transferts gratuits d’information : selon les autorités françaises, il serait difficile de quantifier les proportions respectives des résultats du projet GUÉPARD protégés par des droits de propriété intellectuelle (brevets) et faisant l’objet de transferts gratuits (publications). Sur la base d'une comparaison avec le projet NanoSmart74, elles estiment qu'environ cinquante brevets pourraient être déposés par SOITEC dans le cadre du projet GUÉPARD, et 50 à 70 publications scientifiques produites sous l’impulsion du CEA et de Fraunhofer.

ii. Autres bénéfices externes

(95) Consommateurs : en développant de nouvelles technologies, le projet GUÉPARD permettra de mieux répondre aux besoins du marché75 non couverts par les technologies existantes.

(96) Effet pionnier : depuis le rachat de Concentrix par SOITEC, de nombreux acteurs sont entrés dans le domaine du CPV. Les autorités françaises anticipent que le projet GUÉPARD aura un effet d’entraînement des autres acteurs du solaire sur la technologie CPV, en en renforçant la crédibilité et en facilitant l'adoption.

70 À ce titre, les collaborations passées entre SOITEC et le CEA sur les projets NanoSmart et Bernin 2010 auraient donné lieu à environ 150 publications scientifiques.

71 Les domaines accessibles à des tiers par l’intermédiaire du CEA-LETI sont tous ceux pour lesquels le CEA n’a pas concédé de licence exclusive à SOITEC (c’est-à-dire tous les domaines qui ne relèvent pas de l’exploitation des produits définis à la section 2.4.2.2, lettre ii).

72 Les technologies de [...] sont actuellement également utilisées par le CEA-LETI sur des développements de [...]. Dans le cadre des travaux sous-traités à l'institut Fraunhofer, ce dernier va [...]

73 [...] 74 Commission européenne, 12.9.2007, Aide d’État N 185/2007 – France – Soutien de l’Agence de

l’innovation industrielle en faveur du programme NanoSmart, JO C 284, 27.11.2007, p. 3. 75 Adaptation aux zones à fort ensoleillement (efficacité, température, aridité, …), meilleur étalement

des productions sur la journée, réalisation de centrales modulables et de mise en œuvre rapide, dans des terrains non plats et compatibles avec un usage agricole, répondant aux exigences environnementales.

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(97) Effet positif sur d’autres technologies et d’autres marchés : le projet GUÉPARD stimulera non seulement la recherche sur les nouvelles technologies à concentration, mais également sur les matériaux III-V. Les connaissances développées sur ces matériaux pourront bénéficier aux études de substrats ou composants dans des domaines électroniques tels que la puissance, l’éclairage, la radiofréquence, la télécommunication. Enfin, les marchés « off-grid » ou solaire mobile pourront également bénéficier des résultats du projet dans la mesure où la « Smart Cell » renforcera l’émergence de nouvelles solutions comme le « Plug and Sun », systèmes CPV pour la production d’électricité en site isolé, ou des centrales hybrides.

(98) Entraînement d’écosystèmes : la réussite du projet et l’adaptation du CPV entraîneront le succès de la filière, des fabricants de composants européens associés (substrats, verre, cellules, trackers) mais aussi dans les pays à fort ensoleillement (sous-traitants locaux, formation de personnel de maintenance, collaboration avec des unités de recherche du pays). De même, les marchés de l’optoélectronique et des télécommunications bénéficieront des résultats obtenus dans le projet GUÉPARD sur les substrats InP.

(99) Contribution au développement des énergies renouvelables : en contribuant à réduire les émissions de gaz à effet de serre, le projet GUÉPARD aura un impact positif en termes de réduction de la consommation d'énergie d’origine fossile, de limitation de la pollution environnementale, et d'atténuation de la dépendance de l'Union européenne aux importations d'hydrocarbures. Les centrales photovoltaïques à concentration permettront de pérenniser des filières solaires actuellement à l’état de démonstrateurs. Les efforts d’amélioration de la sécurité des installations actuelles face aux risques majeurs (séismes, cyclones, glissements de terrain, inondation, volcanisme) amélioreront également l’efficacité de la production d'énergie solaire.

(100) Réduction des quantités de matériaux semi-conducteurs : selon les autorités françaises, la technologie développée par le projet GUÉPARD sera plus économe en matériaux semi-conducteurs. Alors que 6 000 m² de surface de silicium sont nécessaires pour produire 1 MW d’énergie photovoltaïque avec une technologie PV classique, seuls 5 m² de cellules en matériaux III-V seraient nécessaires avec le CPV (grâce aux technologies de transfert de film, qui n’utilisent qu’une fine couche de matériau d’un substrat source, qui peut être recyclé plusieurs fois).

(101) Efficience environnementale : les autorités françaises expliquent également que, dans la mesure où la filière CPV concentre les rayons du soleil 500 fois, la taille de la cellule peut être réduite dans les mêmes proportions par rapport à un système classique, de sorte que la quantité de cellules à fabriquer est réduite. La fabrication étant très consommatrice d’énergie, le temps de retour énergétique (« energy payback »), c'est-à-dire le temps nécessaire pour qu'un système CPV produise une quantité d'énergie égale à celle qui a été utilisée pour le fabriquer, a été évalué à neuf mois, soit significativement moins que les technologies photovoltaïques concurrentes. Pour les mêmes raisons, à 18 g CO2-eq/kWh, l’empreinte carbone du système CPV serait 4 à 8 fois plus faible que celle des autres technologies photovoltaïques76.

(102) De même, la comparaison des empreintes carbones des centrales photovoltaïques complètes (y compris les équipements électriques et les supports mécaniques) est intéressante : en tenant compte des « trackers »77, qui représenteront 67 % de l’impact carbone, les centrales SOITEC auraient un impact carbone environ 2 fois plus faible

76 Les autorités françaises indiquent avoir compilé un certain nombre d’études sur l’empreinte carbone de panneaux solaires photovoltaïques : Wild-Scholten, 2010 ; Bath, 2008 ; Hespul, 2009 ; Alsema, 2006 ; Wild-Scholten, 2006.

77 Pour mémoire, les modules de SOITEC sont installés sur des « trackers » de façon à ce que leur surface soit positionnée face au soleil tout au long de la journée.

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qu’une centrale utilisant une technologie multi-cristalline78. En outre, la technologie SOITEC présenterait l'avantage du rendement de ses modules, qui permet de réduire l'encombrement au sol par rapport aux autres technologies, et nécessite une consommation d’eau très faible79, alors que le terrain utilisé peut également servir à des fins d’élevage ou d’agriculture. Ces atouts écologiques de la filière CPV ont été reconnus par l'étude menée par la société LCA (Lameyer) et récemment présentée à la Conférence Photovoltaïque de Valence. Par ailleurs, la technologie CPV de SOITEC a gagné le prix « Entreprise et Environnement 2010 ; Catégorie Innovation dans les écotechnologies ».

(103) Biocompatibilité : les autorités françaises rappellent les difficultés « sociétales » auxquelles pourrait être confronté le développement du marché des centrales solaires. L’apparition de conflits d’usage des sols pourrait remettre en cause localement certains projets de grandes centrales sur des surfaces agricoles ou naturelles. La pénurie de terrains « solarisables » et les capacités limitées de raccordement au réseau pourraient constituer des freins au développement de la filière. Dans cette perspective, la technologie CPV serait théoriquement compatible avec un double usage du terrain (production d’électricité et production agricole), et serait la plus « dense »80 des technologies photovoltaïques (rapport entre l’énergie produite et une surface de terrain donnée, ou « Land use », mesuré en MWh/hectare)81 :

iii. Conclusion sur les externalités

(104) En ce qui concerne la diffusion de connaissances, la Commission considère que la non-réalisation du projet GUÉPARD entraînerait une réduction des externalités positives pour la collectivité : pas ou peu de publications (en l’absence de participation d’organismes de recherche) ; pas de retombées pour d’autres secteurs et d’autres domaines de recherche, en l’absence de travaux sur les matériaux III-V et d’application à ces matériaux des technologies de transfert de film et d’empilements multicouches. En particulier, la Commission reconnaît que le projet GUÉPARD permettra aux organismes de recherche impliqués en France et en Allemagne de diffuser librement et largement certaines des connaissances développées par voie de publications scientifiques. Cette dissémination se fera au bénéfice de l'ensemble de la communauté scientifique et technologique de l'Union européenne. Par ailleurs, comme la Commission a déjà pu l'indiquer dans une décision récente82, « [d]'un point de vue statistique, il n'est possible d’obtenir davantage de brevets sans accroître proportionnellement le nombre de publications scientifiques, en respectant un ratio […] » que les autorités françaises estiment, au cas d'espèce, de l'ordre de 1 à 1,4 publication par brevet (cf. point (94) ci-dessus).

78 Source: étude Alsema. Cette étude conclut que le temps de retour énergétique d’une centrale SOITEC serait 2,5 fois plus faible que celui d’une centrale classique au silicium, et que le facteur d’émission du kWh d’électricité produite serait 1,4 fois plus faible pour une centrale SOITEC que pour une centrale au silicium.

79 Estimation fournie : [...] ℓ/KWh, pour le nettoyage uniquement. 80 La production d’énergie par hectare est une combinaison de différents paramètres : d'une part, la

couverture au sol (c'est-à-dire le rapport entre la surface des modules et la surface du terrain), qui est d’environ 17% dans le cas du CPV contre 35 à 40% pour les modules photovoltaïques fixes ; d'autre part, l’efficacité de conversion (c'est-à-dire la puissance installée par mètre carré de module) ; et enfin, la production d’énergie (kWh par Watt installée).

81 Il s'agit des quatre technologies suivantes : panneaux photovoltaïques de type Thin Film installés sur une structure fixe ; panneaux photovoltaïques en Silicium montés sur une structure fixe ; panneaux photovoltaïques en Silicium installés sur un « tracker »; et modules CPV de Soitec.

82 Commission européenne, 15.5.2013, Aide d'État SA.34876 (2012/N) – France – Aide de l'Agence Nationale de la Recherche au projet « GENESYS » de l'Institut d'Excellence en Énergies Décarbonnées « PIVERT », JO C 214, 27.7.2013, p. 5.

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(105) En ce qui concerne les autres externalités, notamment environnementales, la Commission note que certains des résultats du projet GUÉPARD pourront être valorisés commercialement83. En revanche, d'autres ne présenteront qu'un intérêt commercial84 limité, dans la mesure où le fonctionnement actuel du marché ne permettrait pas85 de mettre suffisamment en valeur la réduction de l’empreinte carbone. À cet égard, la Commission considère que la rentabilisation économique de certains bénéfices indirects du projet pourrait donc ne pas être suffisante pour compenser le coût des transferts gratuits, en raison notamment du décalage temporel entre les flux de trésorerie appropriables, qui interviendront dans un avenir éloigné86, et les transferts gratuits au bénéfice de la collectivité, qui seront réalisés dès la phase de R&D87.

(106) Au vu de ce qui précède, la Commission considère que le projet GUÉPARD est affecté par des défaillances de marché au sens du point 7.3.1 de l'Encadrement R&D&I, et qu'en conséquence, il ne serait probablement pas réalisé en l'absence d'aide d'État.

3.5.2. Moyen d'action adapté

(107) Les autorités françaises estiment que l'aide d'État notifiée constitue un moyen d'action adapté pour permettre la réalisation du projet GUÉPARD et remédier aux défaillances de marché identifiées. Elles considèrent qu'il n'existerait pas d'autre type d'intervention publique qui permette également d'inciter SOITEC à mener ce projet de R&D, tout en induisant un effet de distorsion de la concurrence et des échanges moins important.

(108) Le recours à la réglementation ne répondrait pas adéquatement à la finalité poursuivie : la voie réglementaire ne permettrait pas à l'État d'imposer aux entreprises et/ou aux organismes de recherche compétents de réaliser les activités de R&D nécessaires au développement des innovations envisagées dans GUÉPARD, notamment en raison des incertitudes pesant sur les technologies à développer. À supposer qu'une telle solution soit possible, le choix technologique imposé par la puissance publique aurait de grandes chances d'être moins pertinent que celui émanant de la collaboration d'acteurs spécialisés du domaine.

(109) En ce qui concerne les politiques de soutien de la demande, les autorités françaises indiquent que :

83 Les autorités françaises classent ces arguments commerciaux par ordre d'importance décroissante : i) meilleur rendement des modules ; ii) montée en cadence plus rapide ; iii) amélioration de la sécurité des installations ; iv) adaptation aux hautes températures (valable dans certains pays arides uniquement) ; v) consommation d’eau plus faible (valable dans certains pays arides uniquement) ; vi) adaptation aux terrains accidentés.

84 Par ordre décroissant : i) meilleure empreinte carbone ; ii) meilleur « energy payback » ; iii) réduction des quantités de matériaux semi-conducteurs utilisés (et donc des déchets et du recyclage pour la société) ; iv) étalement de la production électrique sur toute la journée ; v) couverture au sol plus faible.

85 Compte tenu de l'intensité de la concurrence, les clients n’accorderaient qu'une importance relative aux arguments environnementaux, qui s'effaceraient « complètement » devant les arguments économiques. Pour preuve, les autorités françaises que les technologies asiatiques disposent aujourd'hui d'un quasi-monopole des ventes de modules solaires alors que leurs panneaux sont produits à base d’énergie fossile (charbon). De façon analogue, l’argument de l’étalement de la production ne convaincrait pas les énergéticiens, qui ne pourraient, contrairement aux gestionnaires de réseau, en tirer profit.

86 Le premier flux net positif (« net cash flow ») intervient en année [...], le retour sur investissement (« payback ») au bout de [...] ans.

87 Présentation des résultats du projet dans les publications ou lors de conférences, ou encore à l’occasion de la réutilisation des certains résultats du projet pour la recherche dans des domaines électroniques tels que la puissance, l’éclairage, la radiofréquence, la télécommunication.

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(a) Les règlementations européennes en matière d'émissions de CO2, de même que les quotas d'émissions mis en place depuis 2005, ont peu d'effet sur les incitations des entreprises à investir en R&D pour développer des technologies destinées à être commercialisées essentiellement en dehors du territoire de l'Union. Or, la technologie visée par GUÉPARD vise en premier lieu les zones à fort ensoleillement, qui ne recouvrent que « très marginalement » le territoire de l'Union (Portugal, Espagne, Sud de l'Italie, Grèce) et concernent principalement d'autres régions du monde.

(b) Les mesures fiscales prenant la forme, par exemple, de tarifs de rachat régulés et de crédits d’impôts pour l’électricité produite à partir de technologies solaires pourraient inciter les entreprises à développer des technologies innovantes. Cependant, cet instrument présente l'inconvénient d'être imprévisible et fluctuant. Pour preuve, la France constate que les tarifs de rachat incitatifs mis en place dans de nombreux États membres de l’UE ont été progressivement remis en cause depuis quelques années. Les entreprises du secteur solaire ne sont pas en mesure d'anticiper correctement ces évolutions, à tout le moins à un horizon de temps compatible avec le développement et la commercialisation de nouveaux systèmes (5 à 10 ans). En outre, l'instrument fiscal reste entre les mains d'autorités nationales, alors que le marché visé concerne de nombreux pays à travers le monde, dont les politiques d'incitations ne sont pas forcément coordonnées.

(110) Enfin, un meilleur financement des activités de recherche, publiques ou privées, ne serait pas plus adapté qu'une aide d'État :

(a) Un meilleur financement pourrait sans doute accroître la portée de la recherche publique indépendante des organismes de recherche. Pour autant, il ne permettrait pas d’obtenir une meilleure coordination des activités respectives du (ou des) organisme(s) de recherche (qui apporte(nt) ses (ou leurs) compétences scientifiques) et des industriels (qui apportent leur connaissance des marchés et des outils industriels).

(b) Selon la même logique, une mesure fiscale de portée générale en faveur des activités de R&D des entreprises, bien qu'ayant un effet positif en termes d'effort de recherche privée, s'avèrerait inefficace pour modifier le comportement des organismes de recherche publiquement financés, notamment lorsqu'il s'agit de les inciter à une logique de collaboration avec des entreprises.

(111) Compte tenu de ce qui précède, la Commission estime, elle aussi, que le recours à une aide d'État constitue un moyen d'action adapté pour inciter SOITEC (et ses partenaires) à réaliser le projet GUÉPARD.

3.5.3. Effet d'incitation et nécessité de l'aide

(112) Les aides d'État doivent avoir un effet d'incitation, c'est-à-dire déclencher chez les bénéficiaires un changement de comportement les amenant à intensifier leurs activités de R&D.

(113) Le chapitre 6 de l'Encadrement R&D&I prévoit des conditions formelles démontrant l'effet d'incitation des aides aux activités consistant principalement en du développement expérimental inférieures à 7,5 millions d'euros. Ce premier niveau d'analyse est inséré dans le raisonnement de la façon suivante : le respect de la condition relative à la date de démarrage du projet est analysé à la partie 3.5.3.1 ci-dessous, alors que l'évaluation ex ante de l'augmentation de l'activité de R&D associée à cette aide individuelle sur la base des critères d'analyse posés par le chapitre 6 de l'Encadrement R&D&I (augmentation de

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la taille, de la portée ou du rythme du projet ou du montant total affecté à la R&D&I) est réalisée à la partie 3.5.3.2 ci-dessous, section (ii), au point (122) ci-dessous.

3.5.3.1. Date de démarrage du projet

(114) Le chapitre 6 de l'Encadrement R&D&I indique que l'aide est réputée dépourvue d'effet d'incitation lorsque les activités de R&D ont démarré avant la demande d'aide adressée par le bénéficiaire aux autorités nationales. Il ressort du point (37) ci-dessus que cette condition formelle a bien été respectée : l'effet incitatif de l'aide en cause ne peut donc être réputé nul.

3.5.3.2. Effet d'incitation de l'aide

(115) L'Encadrement R&D&I précise que les indicateurs de son chapitre 6 (augmentation du montant total affecté à la RDI, de la taille, de la portée ou du rythme du projet, analysés à la lettre (ii) ci-dessous) peuvent être insuffisants pour démontrer l'effet d'incitation des aides supérieures à 7,5 millions d'euros à des activités de R&D principalement composées de développement expérimental, comme au cas d'espèce.

(116) Les autorités françaises ont soumis les renseignements supplémentaires requis en vertu du point 7.3.3 de l'Encadrement R&D&I. La Commission analyse donc l'effet d'incitation des aides accordées à SOITEC conformément aux critères additionnels suivants : analyse contradictoire (au (i) ci-dessous), précision du changement visé (au (ii) ci-dessous), niveau de rentabilité (au (iii) ci-dessous), montant des investissements et calendrier des flux de trésorerie (au (iv) ci-dessous), niveau de risque (au (v) ci-dessous) et évaluation continue (au (vi) ci-dessous).

i. Analyse contradictoire

(117) Selon les autorités françaises, sans le soutien de l'État, le projet GUÉPARD n'aurait pas vu le jour, mais SOITEC aurait mené un projet dit « contrefactuel », dans lequel l'entreprise n'aurait pas réalisé de nouvelle activité R&D sur la cellule, et n'aurait pas collaboré avec des entreprises ou des organismes de recherche spécialisés, mais se serait contentée de poursuivre ses activités existantes dans le domaine solaire.

(118) Éléments de contexte : Les autorités françaises rappellent que SOITEC a acquis la société Concentrix (aujourd'hui Soitec Solar GmbH) en 2009 avec pour objectif de devenir un acteur du secteur de l’énergie solaire. Elle souhaitait notamment développer la filière CPV en apportant une rupture technologique sur la cellule grâce à ses technologies clés de transfert de film. De 2009 à 2011, tout en développant la force commerciale, les capacités de production, et les efforts de R&D de sa filiale, SOITEC a lancé un programme exploratoire, « MAGELLAN88 », dont les possibles débouchés étaient alors perçus comme « importants ». Cependant, la concurrence asiatique accrue sur le marché du photovoltaïque depuis 2009, et la chute drastique des prix qu'elle a entrainée, ont amené l'entreprise à revoir ses prévisions de pénétration de la technologie CPV à l’horizon 2015 : outre une baisse des prix, elle envisage une dégradation des volumes sur le marché. Selon la France, les perspectives de pénétration de la technologie CPV à l’horizon 2015 auraient été divisées par 3 depuis 2009 : alors qu'elles étaient de 1,8 GW89 en 2009 (tous acteurs confondus), elles seraient de seulement 600 MW90

88 Les autorités françaises expliquent que l’objectif était de mener des travaux préliminaires et exploratoires sur l’intérêt des technologies de transfert de film pour concevoir une cellule haute performance. Les principaux résultats obtenus ont été la démonstration de faisabilité de substrats, à base de Germanium, d’Arsénure de Gallium, et de Phosphure d’Indium, pour la réalisation de cellules solaires.

89 Source citée : CPV Consortium.

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aujourd'hui. Les moindres perspectives de rentabilité auraient obligé SOITEC à revoir ses plans d’investissement, et ce d'autant plus que son activité microélectronique génère moins de revenus [...].

(119) Hypothèses retenues : bien que SOITEC reste convaincue de l'intérêt technologique du CPV, l’ampleur des investissements nécessaires l'obligeraient à reconsidérer la mise en œuvre de GUÉPARD dans un contexte économique morose. L'arbitrage avec le projet contrefactuel se fonde, notamment, sur les éléments financiers et stratégiques suivants :

(a) GUÉPARD : avec la « Smart Cell », le projet de R&D aura un effet de levier sur la compétitivité de SOITEC, notamment sur le coût de production91 des centrales solaires CPV et sur le coût de l’électricité vendue (LCOE92). Selon les estimations fournies, il serait possible de commercialiser 22 % de MW de plus sur la période 2015-2022.

(b) Contrefactuel : les efforts de R&D (d’une ampleur, d’un niveau ambition et de risque considérablement réduits) seraient concentrés au niveau de Soitec Solar GmbH. Le développement de la « Smart Cell », trop lourd et risqué, ne serait pas réalisé. Les cellules seraient achetées auprès d’un fournisseur spécialisé. Il n’y aurait pas de création d’activités sur la cellule, ni sur les substrats, SOITEC se contentant d'accompagner le fournisseur pour accroître les performances de sa cellule. Le budget global serait plus limité : environ [...] millions d'euros en R&D sur les [...] premières années.

(120) Analyse comparative : en termes de positionnement stratégique, le projet contrefactuel ne permettrait pas à SOITEC d'atteindre le même niveau d'ambition que GUÉPARD. Pour assurer le développement de la technologie CPV, il serait nécessaire de « creuser l’écart » avec la technologie PV classique93 en termes d’efficacité. Or, en dehors de celle envisagée par SOITEC, les technologies CPV actuellement disponibles ne disposeraient que de marges d’amélioration limitées en termes de rendements. En effet, selon une étude comparative94, les technologies de cellules trois jonctions (3J) sont actuellement limitées en efficacité autour de [...]% et auraient une dynamique d’amélioration de l’efficacité trop lente ([...]% par an) pour répondre aux besoins du marché dans les délais voulus. Conscients de cette limitation, les entreprises et les laboratoires orienteraient leurs travaux vers des cellules quatre jonctions (4J), voire cinq jonctions (5J). Cependant, les technologies étudiées (notamment métamorphiques) seraient également longues à mettre au point. En définitive, seules les technologies de transfert de film auraient le potentiel pour atteindre à plus courte échéance une rupture en termes d’efficacité de cellule alors que, dans le scenario contrefactuel, le fournisseur [...] ne disposerait ni des technologies95 Smart CutTM, ni des technologies de transfert de

90 Source citée : Navigant. 91 Selon les autorités françaises, un gain sur l’efficacité de la cellule se traduit par une réduction du

BOM (« Bill Of Material »), c'est-à-dire de la matière nécessaire pour réaliser la centrale solaire. 92 Les autorités françaises rappellent que le LCOE décroît d’environ [...]% pour un gain de [...]% de

l’efficacité « Smart Cell ». 93 Actuellement [...]% de rendement au niveau de la cellule et de [...]% de rendement au niveau du

système. 94 SOITEC, 12.3.2013, « Smart Cell Technology Competitive Landscape CPV cells ». 95 Sur ce dernier point, la Commission s'est interrogée sur les conséquences possibles de la fin de

l’exclusivité sur le brevet initial Smart CutTM. Cependant, le projet GUEPARD ne repose pas uniquement sur ce brevet initial, mais sur un ensemble de technologies regroupées dans un portefeuille d'environ [...] brevets : brevets existants (sur des technologies de collage, de transfert Smart StackingTM, d’épitaxies, ou de recyclage des substrats) ou projets de brevets en cours (sur la structure de la cellule 4J). Au regard de ces éléments, la Commission est d'avis il n'est en effet pas possible que des tiers puissent réaliser, dans un délai similaire, des développements comparables à

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films, ni des moyens de mener des développements de l’ampleur requise. Aussi le rendement obtenu pour les cellules devrait-il être modeste : au mieux 45%, avec un retard de deux à trois ans par rapport au projet GUÉPARD. En d'autres termes, si le développement de la « Smart Cell » (envisagé seulement dans GUÉPARD) ne peut être réalisé, le scenario contrefactuel aboutirait à une amélioration limitée de l’efficacité de la cellule, une technologie présentant peu de perspectives de rupture, et un décalage de 2 voire 3 ans en termes d'amélioration de l’efficacité.

(121) Au vu des explications fournies par la France, la Commission reconnaît que le scénario contrefactuel proposé repose sur des hypothèses raisonnables : en particulier, il est vraisemblable qu'en l'absence d'aide d'État, le renoncement au projet GUÉPARD aurait un impact très négatif sur la compétitivité de la solution CPV, de sorte que des doutes subsisteraient sur le financement des projets de centrales solaires, et que, comme indiqué au point (119)(a) ci-dessus, le volume d'affaires devrait être inférieur de 22 % sur la période des plans d’affaires.

ii. Augmentation de l'activité de R&D liée à l'aide et précision du changement visé

(122) Il ressort de l'analyse de la Commission des différents indicateurs économiques communiqués par la France que l'aide d'État permet à la fois :

(a) Une augmentation de la taille du projet, y compris en ce qui concerne le montant total et les effectifs affectés à la R&D : l’aide va permettre d’augmenter l’effort de R&D de SOITEC sur la thématique des cellules CPV de [...] millions d'euros sur les cinq années du projet96 (+[...] millions d'euros par an), et de [...] millions d'euros sur dix ans97 (+[...] millions d'euros par an). Cette augmentation de la taille du projet permettra la création d’une [...] d’emplois d’ingénieurs et techniciens R&D chez SOITEC, étant précisé qu'autant d’emplois seront nécessaires pour la mise en œuvre des équipements. Selon la France, le projet GUÉPARD permettrait également la création de [...] emplois chez InPact ;

(a) Une augmentation de la portée du projet : comme expliqué au point (119)(b) ci-dessus, les développements solaires à partir de technologies microélectroniques ne seraient pas réalisés dans le projet contrefactuel, limitant fortement la probabilité d'une rupture technologique sur la cellule. Dans le contrefactuel, SOITEC et son fournisseur n'envisageraient que des innovations incrémentales, pour un gain d'efficacité de la cellule limité, de sorte que les doutes quant à la compétitivité du CPV par rapport aux technologies existantes ne seraient pas levées. Par ailleurs, en l'absence de partenariat avec des organismes publics de recherche, la diffusion des résultats et l'émulation de la communauté scientifique seraient plus limitées. Les moyens de recherche en microélectronique (dans l'optique d'une transition à la dimension 150 mm) ne seraient pas apportés, et les résultats attendus du projet GUÉPARD en matière de création de propriété industrielle (brevets) ou d'emplois (directs et indirects)98 ne seraient pas obtenus.

ceux de GUEPARD sur la seule base du brevet initial Smart CutTM (tombé dans le domaine public en 2012).

96 En l'absence d'aide, SOITEC dépenserait dans le contrefactuel [...] millions d'euros pendant les [...] premières années sur la thématique des cellules CPV, et [...] millions d'euros sur [...] ans. A titre de comparaison, le développement de la « Smart Cell » dans le cadre du projet GUEPARD mobilisera [...] millions d'euros pendant les [...] premières années, et [...] millions d'euros sur [...] ans.

97 Soit sur [...] ans : [...] millions d'euros pour GUEPARD, contre [...] millions d'euros pour le projet contrefactuel.

98 Créations attendues en lien avec la réussite du projet : [...] chez Soitec et [...] chez InPact.

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(b) Une augmentation du rythme du projet : comme indiqué au point (120) ci-dessus, sans l’aide, les travaux aboutiraient avec un retard de deux à trois ans par rapport à GUÉPARD (avec un moins bon rendement) ;

(123) Ces effets sont significatifs, et constituent des indicateurs pertinents pour démontrer que l'aide envisagée a un effet incitatif sur le comportement de SOITEC. Cependant, dans la mesure où la Commission doit réaliser un examen approfondi de cette mesure individuelle, il convient de procéder à une analyse supplémentaire sur la base du point 7.3.3 de l'Encadrement R&D&I, en analysant plusieurs indicateurs complémentaires, notamment le processus de décision du bénéficiaire, le niveau de rentabilité, le montant des investissements et le calendrier des flux de trésorerie, et niveau de risque du projet.

iii. Processus de décision du bénéficiaire

(124) Le groupe SOITEC est organisé en trois Unités Génératrice de Trésorerie (ci-après « UGT »), qui disposent, chacune en ce qui la concerne, de ses propres objectifs de résultats :

(a) Division Électronique : cette UGT, subdivisée en trois unités de gestion ou « Business Units » qui regroupent l’ensemble des activités de SOITEC dans les matériaux composés et les applications de Smart Cut™ ainsi que les activités basées sur les technologies de transfert de circuits et les applications de Smart Stacking™, est active sur les marchés de l’informatique, des télécommunications, de l’électronique grand public, et de l’électronique automobile et industrielle.

(b) Division Solaire : cette UGT, créée à la suite de l’acquisition de Concentrix, regroupe l’unité de production de Soitec Solar GmbH et les efforts de R&D menés par d’autres unités de gestion pour améliorer l’efficacité des cellules solaires, vise le marché de l’énergie solaire et commercialise des systèmes solaires à concentration (CPV).

(c) Division Lighting : créée en 2012, cette UGT est responsable d'un programme de développement de matériaux destinés à la fabrication de diodes électroluminescentes.

(125) Selon les autorités françaises, même s’il peut exister des synergies fortes entre ces trois UGT, chaque activité se développe selon sa propre logique, de sorte qu'aucune d'entre elles ne pourrait « à ce stade financer les autres activités sans mettre en péril sa propre capacité d’innovation indispensable à sa croissance ».

(126) Plan stratégique pluriannuel : ce plan vise à positionner chacune des UGT sur des marchés « porteurs de croissance ». En micro-nanoélectronique, SOITEC poursuit sur la filière SOI et substrats avancés pour les applications basse consommation, puissance et CMOS avancé « More-Moore » ; dans le domaine de l’éclairage, SOITEC s’engage sur le marché de l’éclairage général (industriel, domestique, public,…) avec une filière française de matériaux et de LED à très haut rendement utilisant des matériaux composés à base de nitrure de gallium ; et dans le domaine de l’énergie renouvelable, SOITEC développe une offre CPV. En termes de capacités industrielles, la stratégie prévoit un plan d’investissement multi-annuel de 250 millions d'euros pour accroître les capacités de l’activité SOI, soutenir la croissance de la division solaire, et développer la capacité LED et substrats pour la puissance. Pour le financer, SOITEC a réalisé une levée de capitaux de 150 millions d'euros. L'entreprise se doit toutefois de garder un volant de flexibilité financière pour capturer les opportunités de marché et conserver sa liberté.

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(127) En ce qui concerne la R&D, SOITEC alloue des ressources à ses UGT sur la base d’un ratio du CA. Selon la France, l'entreprise ne disposerait d’aucune ressource excédentaire au-delà. Les UGT ayant leurs propres objectifs de résultats et de rentabilité financière, elles doivent trouver les ressources complémentaires pour pouvoir engager leurs projets, le cas échéant, en étant autorisées à accroître le ratio R&D/CA ou l’enveloppe allouée.

(128) S'agissant plus précisément de la division solaire, l’enveloppe R&D serait définie chaque année car le CA n’est pas (encore) stabilisé. Depuis 2010, les budgets alloués ont été les suivants : [...] millions d'euros sur l'exercice 2010-2011 (pour un CA de [...] millions d'euros) et [...] millions d'euros sur l'exercice 2011-2012 (pour un CA de [...] millions d'euros). La division solaire alloue alors les financements aux projets jugés prioritaires, par ordre de priorité décroissant, en finançant en propre les développements incrémentaux visant à l’amélioration des procédés de fabrications des modules CPV.

(129) En ce qui concerne les critères d’arbitrage retenus par la Direction Générale du groupe SOITEC pour définir les priorités d'investissements entre ses trois divisions, les autorités françaises indiquent que la maison-mère a la responsabilité directe du financement des activités opérationnelles, et qu'elle est la « seule habilitée à contracter de la dette financière ou à faire appel au marché ». Dans le cadre du plan stratégique, elle fixe donc des « objectifs généraux » à ses divisions, qui se traduisent en un plan d’affaires à [...] ans présenté, pour validation, à la Direction Générale, et au moins [...] fois par [...] au Conseil d’Administration pour la clôture des comptes annuels. Avant d'être visés par le Conseil d’Administration, ces plans d’affaires font l'objet d'un processus itératif :

(a) Ils sont consolidés par la Direction Financière, qui évalue les besoins en ressources (à partir des données transmises par les divisions) et les confronte à la capacité de financement du groupe.

(b) La Direction Générale peut alors demander au management des divisions de modifier leurs plans d’affaires, de façon par exemple à [...], ou de façon à assurer la compatibilité du compte de résultat consolidé avec les grands équilibres visés par le groupe.

(130) Alors que, dans certains cas, le Conseil d’Administration peut « être attentif à l’impact que peut avoir un programme subventionné sur l’équilibre financier d’une Division »99, en définitive ce seraient des indicateurs financiers « macroscopiques » qui seraient analysés par la Direction Générale « aux bornes de chaque division ». Les autorités françaises précisent que « [s]i la Direction Générale est amenée à réaliser des arbitrages, elle le fait sur la base des indicateurs globaux, dans le but d’assurer une répartition optimale des capitaux employés entre les trois divisions », et en concluent qu'au niveau de la Direction Générale du groupe SOITEC, les projets menés par chaque UGT « ne [seraient] pas concurrents puisqu’ils sont conduits chacun dans une division différente ».

(131) En résumé, chaque division est autonome dans la sélection de ses projets de R&D. Le résultat opérationnel et les flux de trésorerie générés par les activités d’exploitation et d’investissement relevant de la responsabilité des différents gestionnaires de chacune des trois divisions, ces derniers sont donc amenés, le cas échéant, à solliciter des aides publiques pour réduire les coûts opérationnels de certains projets de R&D. En ce qui concerne la Division Solaire, qui est directement concernée au cas d'espèce, les autorités françaises indiquent que le plan d’affaires a été évoqué au Comité Stratégique du Conseil d’Administration du [...].

99 Les autorités françaises renvoient à l'extrait du procès-verbal de la réunion du Conseil d'administration du [...].

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(132) Processus de décision : les autorités françaises rappellent que SOITEC évolue dans un secteur, la microélectronique, qui se caractérise par une forte volatilité (récemment accrue par la crise économique et financière de 2008), et que le chiffre d’affaires et les principaux ratios financiers de l'entreprise sont impactés par cette instabilité. L’entreprise a donc mis en place un processus de décision fondé sur l'utilisation d'indicateurs cibles, servant à SOITEC de « lignes directrices pour évaluer les projets, établir les critères de retour sur investissement et prendre les décisions d’investissement ». Des nuances existent entre les activités historiques de l'entreprise (microélectronique) et ses activités émergentes (solaire), pour lesquelles « des procédures spécifiques » seraient en cours de construction. En ce qui concerne la microélectronique, les procédures applicables sont déjà documentées. La procédure de contrôle interne d’autorisation des investissements (« [...] policy »)100 précise, par exemple, qu’un projet [...] doit respecter un taux d’actualisation minimum de [...]% et une durée de payback de [...] ans. Le règlement intérieur prévoit aussi une intervention du Conseil d’Administration101 pour les décisions d’investissements élevés. S'agissant en revanche du solaire, et de GUÉPARD en particulier, le Conseil d’Administration de SOITEC a été régulièrement tenu informé de la procédure de contrôle des aides d'État en cours devant la Commission102. Lors d'une réunion du [...]103, ses membres ont suggéré, compte tenu de l'impact du projet sur l’équilibre financier de la division Solaire et du niveau de risque pris, que le projet soit abandonné si l’aide n’était pas autorisée.

(133) De façon plus précise, les cibles financières principales visées par SOITEC dans ses choix d'investissement sont les suivantes :

(a) Une marge brute opérationnelle de [...]% du chiffre d’affaires : cet objectif est corroboré par les états financiers de l’entreprise sur les exercices 2006 et 2007 (haut de cycle), où la marge brute était respectivement de 26,6 % et 29,1 %. Par la suite, de 2008 à 2010, des raisons conjoncturelles liées à la crise économique expliquent que SOITEC n’a pas été en mesure d'atteindre cet objectif de [...]%. Cependant, il ressort d’un extrait de la présentation au Conseil d’Administration de [...]104 que SOITEC a effectivement pour objectif de revenir à cette cible et de stabiliser l'indicateur.

(b) Un taux de retour sur capitaux employés (ci-après « ROCE ») de l’ordre de [...] %, qui se traduit par un résultat opérationnel courant (ci-après « EBIT ») de [...] % du chiffre d’affaires. Cet objectif est fixé par l'entreprise au niveau de chacune de ses divisions :

– ROCE : D'après les publications des analystes financiers105, le WACC de SOITEC après impôts était, jusqu’à son entrée dans le secteur de l’énergie solaire, de l'ordre de 12 %, de sorte qu'un objectif de ROCE de [...]% est seulement [...] points de pourcentage supérieur à ce WACC. Par ailleurs, une prime de risque sectorielle de [...]% est

100 Les autorités françaises ont fourni un document du [...] sur papier à en-tête de la société SOITEC, intitulé « [...]» et référencé n°[...] relatif à cette procédure « Investment Authorization Request (IAR) ».

101 Source citée : rapport annuel 2011-2012, page 39, partie sur les « Limitations aux pouvoirs du Président Directeur Général »

102 Source citée : présentation du [...] de Soitec aux réunions du [...] et du [...]. 103 Source citée : extrait du procès-verbal du [...], et notamment le point 4 relatif à la situation des

subventions liées aux projets de R&D, qui se conclut en ces termes : « Après discussion, les membres du Conseil d'administration suggèrent d'abandonner le programme concerné, si l'aide attendue n'est pas obtenue intégralement […] »

104 Les autorités françaises ont fourni un document intitulé « [...]» 105 Source citée : Exane BNP Paris, note d'analyse financière « Soitec » du 17.04.2012, intitulée « Q4

broadly in-line; light guidance on H1 sales ».

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rajoutée pour l'activité solaire, pour tenir compte de la phase de montée en puissance de l’activité106 et du fait que SOITEC est un nouvel entrant dans ce secteur, de sorte que le taux d’actualisation appliqué aux activités solaire est de [...]%. Au-delà, les projets R&D à haut risque107 se voient appliquer une prime additionnelle de l’ordre de [...]%, de sorte que les autorités françaises évaluent à [...]% le taux de retour minimal (« hurdle rate ») dans le domaine solaire.

– EBIT : Le lien entre le ROCE et l’EBIT est déterminé par le ratio des ventes sur capitaux employés. Or, SOITEC évolue dans un secteur d’activité fortement capitalistique, de sorte que pour générer 1 € de chiffre d’affaires environ [...] € de capitaux doivent être mobilisés (ratio « sales/capital employed » égal à [...])108. Par conséquent, pour garantir un ROCE de [...]%, il est également nécessaire de fixer un ratio cible pour l’EBIT à [...]% du chiffre d'affaires.

(c) Une capacité d’autofinancement de l'ordre de [...]% du chiffre d’affaires, divisée pour moitié entre les dépenses de frais généraux (incluant les investissements de maintenance) et les frais de R&D. La cible de R&D autofinancée serait donc comprise entre [...] et [...] % du chiffre d’affaires. Selon les autorités françaises, ce ratio permettrait à SOITEC de financer la R&D incrémentale et les leviers de croissance à court et moyen terme de l’entreprise, ainsi que quelques projets de rupture technologique pour « maintenir ses activités cœur de métier » et y rester compétitif. Compte tenu de l'étroitesse de cette cible, certains développements de ruptures sont ainsi régulièrement abandonnés par manque de fonds propres109. Par ailleurs, cette capacité d'autofinancement est insuffisante pour les grands projets de recherche avec de forts niveaux d’ambition, de risques, d’impact environnemental et de diffusion de connaissances, tels que Nano Smart, Bernin 2010, ou GUÉPARD pour lesquels une aide d'État serait nécessaire pour permettre à SOITEC d’accroître son effort de R&D autofinancé au-delà de la cible des [...]%.

(134) Le dépassement de ces cibles ne permettrait pas à SOITEC, compte tenu de la grande cyclicité sectorielle en microélectronique, de conserver une position financière à [...] ans suffisamment excédentaire pour être capable de faire face à tout retournement brutal de ses marchés et, au regard du taux de flottant élevé, de répondre aux attentes des marchés financiers. Dégrader ces indicateurs placerait l'entreprise dans une situation délicate, la compensation apportée par ses perspectives de revenus futurs n'étant pas suffisante, et l'accès aux financements de long terme étant réservé à sa capacité de production. En effet, SOITEC fait prioritairement appel à des levées de capitaux (fonds propres ou quasi fonds propres) pour financer la création de nouvelles unités de production (électronique ou solaire), aux financements bancaires pour assurer son besoin en fonds de roulement et financer l’acquisition d’outils de production standards, et à l’autofinancement (dans la marge des [...]%) du progrès continu et la maintenance (R&D en continuité).

106 Source citée : Rapport annuel 2012, passage sur la dépréciation des actifs non courants, page 82 paragraphe 3.5 : « Le taux d'actualisation retenu s'établit à 15 % après impôt, incluant une prime représentative du risque liée à la phase de montée en puissance de l'activité pour le Groupe. Le Groupe révisera à chaque clôture le niveau adapté de prime de risque à rajouter au taux d'actualisation […]. »

107 Les autorités françaises ont donné l'exemple du projet [...] pour lequel une telle prime avait été appliquée.

108 Il ressort des états financiers publiés que ce ratio est effectivement proche de [...]% ([...]% en 2007, [...]% en 2011, et [...]% en 2012) en dehors des périodes de bas de cycle, qui se traduisent par une forte sous-utilisation des capacités disponibles : [...]% en 2008, [...]% en 2009, [...]% en 2010.

109 Exemples cités : 1) pour la division électronique : [...] ; 2) pour la division solaire: [...].

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(135) Pour les projets les plus ambitieux, SOITEC peut par conséquent être amenée à solliciter une aide publique pour cofinancer les stades amont de la R&D de rupture, et ce d'autant plus que l'investissement industriel qui s'ensuit est généralement substantiel. Dans le cas du CPV, il se montera à près de [...] millions d’euros sur moins de quatre ans, auxquels il sera nécessaire d’ajouter plus de [...] millions d’euros au titre du développement de projets solaires.

iv. Niveau de rentabilité

(136) Pour vérifier l'impact de l'aide sur le niveau de rentabilité, il est possible d'évaluer la valeur actuelle nette (ci-après « VAN ») et/ou le taux de rendement interne (ci-après « TRI ») du projet. L'Encadrement R&D&I précise également que « peuvent servir d'éléments d'appréciation des états financiers et des plans d'entreprise concernant des informations sur les prévisions de demande, des prévisions de coûts, des prévisions financières, des documents présentés à un comité d'investissement développant divers scénarios d'investissement ou des documents fournis aux marchés financiers ». Les autorités françaises ont fourni les critères standards de décision d'investissement (VAN, TRI, délai de récupération du capital, exposition financière maximale) à la Commission dans les situations suivantes :

(a) Un premier scénario « GUÉPARD avec aide » (ou « Scénario A ») : scénario nominal, sur la base du projet complet, bénéficiant de l’aide prévue. Les hypothèses sont que le projet soit réalisé et aboutisse au succès de la « Smart Cell », et que la compétitivité ainsi obtenue du CPV permette de percer sur le marché et d’accroître le chiffre d’affaires ;

(b) Un second scénario « GUÉPARD sans aide » (ou « Scénario B ») : scénario hypothétique dans lequel SOITEC réaliserait sa part du projet complet sans aide. Il s'agit d'un scénario fictif qui vise seulement à illustrer l'impact de l'aide sur les critères de décisions d'investissement, et dans lequel SOITEC « serait amené à contribuer plus fortement aux dépenses de R&D du CEA pour compenser l’absence de financement public ».

(c) Scénario « contrefactuel » (ou « Scénario C ») : scénario reflétant le plan de repli que suivrait SOITEC en absence d’aide, c'est-à-dire la réalisation du projet d’ampleur, de niveau ambition et de risque réduits décrit au point (119)(b) ci-dessus. Comparé au plan d’affaires du Scénario A, le Scénario C conduit à un décalage de l’entrée sur le marché d'environ deux ans à un niveau de vente inférieure (moins de revenus), mais également une réduction des investissements correspondant (moins de charges).

(137) Les plans d'affaires sont construits sur une période de 12 ans, qui correspond à la durée totale du projet, du remboursement des avances et une année supplémentaire après les remboursements. Le taux d'actualisation utilisé dans ces plans d'affaires correspond au coût moyen pondéré du capital (Weighted Average Cost Of Capital ou « WACC ») estimé à [...]% pour SOITEC pour les activités solaires comme précédemment décrit au point (133)(b) ci-dessus.

(138) Comme le montre le Tableau 5 ci-dessous, en cas de réalisation du projet GUÉPARD, le TRI est peu différent que SOITEC reçoive ([...]%) ou ne reçoive pas ([...]%) l'aide d'État. Ce résultat s'explique par la prépondérance des avances récupérables en tant qu'instrument d'aide : en valeur actualisée, les remboursements couvriront non seulement le montant actualisé de l’avance, mais également le montant de la subvention versée par ailleurs. Par ailleurs, la différence de TRI entre les scenarios B et C est nulle : [...]% dans les deux cas. En revanche, l'impact principal de l'aide réside dans

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l'atténuation du risque endossé par SOITEC. En l'absence d'aide, la prise de risque financière serait bien plus importante : l'exposition financière présente un écart de [...] millions d'euros entre les scenarios B et A et de [...] millions d'euros entre les scenarios B et C. En d'autres termes, la réalisation de GUÉPARD sans aide exposerait financièrement SOITEC à hauteur de [...] millions d'euros, possibilité que son Conseil d’Administration rejetterait selon toute vraisemblance. L'entreprise déciderait donc vraisemblablement de privilégier le projet contrefactuel pour ramener son exposition à [...] millions d'euros, niveau plus acceptable. En réduisant substantiellement (de [...] millions d'euros) l'exposition maximale, l'aide octroyée rend donc possible la réalisation de GUÉPARD.

Projet GUÉPARD

Projet contrefactuel

Scenario A (avec aide)

Scenario B (sans aide)

Scenario C

VAN [...]

millions d'euros [...]

millions d'euros [...]

millions d'euros

TRI [...] % [...] % [...] %

Durée de retour sur investissement

[...] ans [...] ans [...] ans

Exposition maximale [...]

millions d'euros [...]

millions d'euros [...]

millions d'euros

Tableau 5 : Indicateurs financiers du projet GUÉPARD

(139) De surcroît, il convient de relever que l'aide d'État permettra à SOITEC d'assumer les coûts de R&D supplémentaires du projet GUÉPARD par rapport à ceux du scénario contrefactuel. Comme précisé au point (122)(a) ci-dessus, il s'agit d'un effort de R&D de 72 millions d'euros sur la durée du projet (soit 14,4 millions d'euros par an). Or, il ressort du processus interne de décision du groupe SOITEC (résumé aux points (132) et suivants ci-dessus) que SOITEC tente de maintenir un ratio d'EBIT sur chiffre d’affaires de l’ordre de [...] à [...]%110, ce qui serait en particulier nécessaire pour que l'entreprise soit en mesure de lever des fonds pour sa capacité de production (FD SOI, modules CPV de génération V) dans les deux à trois ans.

(140) En conclusion, en permettant de maintenir le ratio de ses activités de R&D rapporté à son chiffre d'affaires à un niveau acceptable ([...] à [...] %), et en réduisant sensiblement l'exposition financière du projet, l'aide d'État permettrait à SOITEC de réaliser le projet GUÉPARD.

v. Analyse financière, montant des investissements et flux de trésorerie

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(141) Sur les cinq premières années du plan d’affaires, SOITEC dépensera 72,1 millions d'euros en R&D et [...] millions d'euros en investissements de capacité et fonds de roulement pour le projet GUÉPARD. En cas de succès, l'équilibre des recettes par rapport aux dépenses ne devrait être atteint qu'au cours de la [...]ème année : les flux nets

110 Malgré un léger redressement à partir de 2010, la dégradation des indicateurs financiers de la division électronique entre 2008 et 2009 et l'absence de revenus significatifs des nouvelles divisions font que cet indicateur est demeuré en-deçà de sa cible de 2010 à 2012.

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de trésorerie (« cash-flows ») annuels actualisés deviendront alors positifs. La phase d'exposition financière du projet GUÉPARD sera donc longue : il faudra attendre la [...]ème année pour atteindre le retour sur investissement (« payback »).

(142) La Commission considère l'investissement de départ élevé, le faible niveau de flux de trésorerie appropriables et le fait qu'une partie importante des flux de trésorerie ne seront générés que dans un avenir éloigné comme des éléments positifs de l'appréciation de l'effet d'incitation au cas d'espèce.

vi. Niveau de risque

(143) De façon générale, plus la technicité d'un projet de R&D est grande, plus la probabilité d'échec augmente. En l'espèce, compte tenu de l'ambition technologique et de la durée du projet GUÉPARD, les risques attachés sont particulièrement importants.

(144) Risque technologique : le risque d’échec ou de non viabilité technique est d'autant plus important que les technologies en cause visent de réelles ruptures. En l'espèce, le développement de la cellule « Smart Cell » est ambitieux, complexe et coûteux.

(145) Risque commercial : sur le marché des technologies solaires, la concurrence est féroce, notamment celle exercée par les entreprises asiatiques, qui disposent d'un avantage comparatif en ce qui concerne le photovoltaïque de première génération. En termes de compétitivité, la technologie visée par GUÉPARD devra combler un écart important, alors que les activités de R&D sur le système et l’architecture sont très onéreuses. Enfin, la fenêtre d'opportunité pour la commercialisation est relativement étroite et dépend en grande partie des appels d'offres organisés par différents États à compter de 2012 dans le cadre de leurs plans solaires nationaux.

(146) Risque industriel : pour amorcer un cercle vertueux, le projet GUÉPARD devra offrir à la filière intégrée les moyens d'atteindre le plein potentiel, et donc garantir l'efficacité, la conception, la fabrication, les protocoles d’installation et d'optimisation du productible pour la technologie concernée.

(147) Risque financier : les montants investis et les efforts de recherche sont importants par rapport aux capacités de l’entreprise, qui est de surcroît un nouvel entrant dans le domaine des technologies solaires.

(148) La Commission en conclut que le projet GUÉPARD présente un niveau de risque important.

vii. Évaluation continue

(149) Comme précisé au point (44) ci-dessus, le projet GUÉPARD fera l'objet d'un suivi avec des échéances bien définies pour réorienter ou interrompre le projet en fonction des difficultés rencontrées. La Commission considère qu'il s'agit d'un élément positif dans la démonstration de l'effet d'incitation de l'aide, comme indiqué au dernier alinéa du point 7.3.3 de l'Encadrement R&D&I.

viii. Conclusion sur l'effet d'incitation

(150) Au regard de tout ce qui précède, la Commission est en mesure de conclure que SOITEC n'entreprendrait pas le projet GUÉPARD si une aide d'État ne lui était pas octroyée.

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3.5.4. Proportionnalité de l'aide

(151) L'analyse de la proportionnalité des aides d'État à la R&D est réalisée tout d'abord au moyen des conditions formelles prévues par la section 5.1 de l'Encadrement R&D&I. Le respect de ces conditions est analysé à la partie 3.5.4.1 ci-dessous, en ce qui concerne les catégories de recherche et les coûts éligibles, à la partie 3.5.4.2 ci-dessous, en ce qui concerne les intensités d'aide.

(152) L'Encadrement R&D&I précise qu'indépendamment des critères visés au chapitre 5, des informations complémentaires sont nécessaires pour démontrer la proportionnalité des aides supérieures à 7,5 millions d'euros à des projets majoritairement composés de développement expérimental. En conformité avec le point 7.3.4 de l'Encadrement R&D&I, la Commission analyse donc à la partie 3.5.4.5 ci-dessous dans quelle mesure l'aide accordée à SOITEC est proportionnelle et limitée au minimum nécessaire. Enfin, le respect des règles de cumul précisées au chapitre 8 de l'Encadrement R&D&I est vérifié à la partie 3.5.4.3 ci-dessous.

3.5.4.1. Catégories de recherche et coûts éligibles

(153) Conformément au point 5.1.1 de l'Encadrement R&D&I, la Commission s'est référée à sa propre pratique pour vérifier la qualification des activités de R&D en tant qu'activités de recherche industrielle et de développement expérimental. Il ressort du point (38) ci-dessus que :

(a) Une partie minoritaire (44,16 %) des travaux réalisés dans le cadre du projet GUÉPARD consistera en des travaux répondant à la définition de « recherche industrielle» au sens du point 2.2. f) de l'Encadrement R&D&I.

(b) Une partie majoritaire (55,84 %) des travaux réalisés dans le cadre du projet GUÉPARD consistera en des travaux répondant à la définition de « recherche industrielle » au sens du point 2.2. g) de l'Encadrement R&D&I.

(154) Enfin, la Commission a vérifié que les coûts éligibles décrits dans le Tableau 3 du point (39) ci-dessus sont bien conformes aux coûts identifiés par le point 5.1.4 de l'Encadrement R&D&I :

(a) Les dépenses de personnel correspondent aux chercheurs, techniciens et autres personnels d’appui dans la mesure où ils sont employés pour le projet de recherche ;

(b) Le coût des instruments et du matériel est retenu dans la mesure où et aussi longtemps qu’il est utilisé pour le projet de recherche ;

(c) Les coûts de la recherche contractuelle et de services équivalents couvrent les coûts utilisés exclusivement pour le projet de recherche ;

(d) Les frais généraux se limitent aux frais généraux additionnels supportés directement du fait du projet de recherche ;

(e) Les autres frais d’exploitation sont retenus dans la mesure où ils sont supportés uniquement du fait de l’activité de recherche.

3.5.4.2. Intensité des aides en faveur des projets de R&D

(155) Comme indiqué au point (41) ci-dessus :

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(a) Recherche industrielle : l’aide est versée sous la forme de subvention et limitée à 40% des coûts éligibles, soit moins que le maximum permis par la section 5.1.3 de l’Encadrement R&D&I pour des projets menés en collaboration (65%).

(b) Développement expérimental : l’aide est versée sous la forme d’avance récupérable limitée à 40% des coûts éligibles, soit moins que le maximum permis par la section 5.1.5 de l’Encadrement R&D&I pour des projets menés en collaboration (55%).

(156) La Commission peut donc conclure que le taux d'intensité des subventions et le taux de couverture des coûts éligibles par les avances récupérables respectent les maxima fixés par la section 5.1. de l’Encadrement R&D&I.

3.5.4.3. Remboursement des avances récupérables

(157) L'assiette de remboursement retenue par les autorités françaises repose sur le chiffre d'affaires réalisé par SOITEC sur les systèmes solaires CPV équipés de cellules « Smart Cell ». L'échéancier de remboursement de l'avance est construit à partir des prévisions de SOITEC quant à l'évolution du marché des centrales solaires au sol, pour lesquelles l'entreprise s'est appuyée sur des études sectorielles spécialisées (CPV Consortium ou Navigant par exemple). Il tient également compte des hypothèses de développement industriel et commercial de la « Smart Cell » dans le cadre d'une offre complète déployée sur l’ensemble des pays et régions où la technologie CPV peut être compétitive (zones à forte irradiation directe). Il est notamment prévu que SOITEC introduise la « Smart Cell » de façon systématique dans la production des modules à compter de [...] et tire des revenus principalement de la vente des systèmes, et dans certains cas, d'un service complémentaire d’installation des centrales solaires au sol. Les prévisions de puissance à installer par SOITEC sont fondées, pour les deux premières années, sur le portefeuille de projets en cours (au Maroc, en France, en Italie et dans d’autres pays de la « Sun Belt ») et les contrats récemment engagés en Afrique du Sud (50MW) et aux États-Unis (deux fois 150 MW). En ce qui concerne les prix, le plan d’affaires est construit à partir de la feuille de route de l’industrie CPV, l'objectif de SOITEC étant de vendre ses systèmes [...] (pour une efficacité supérieure d’au moins [...]%). Par ailleurs, il ressort du point (118) ci-dessus que SOITEC procède à des actualisations de ses prévisions pour tenir compte des évolutions récentes constatées sur le marché. En outre, les différents scénarios prévisionnels de chiffre d’affaires 2013 – 2024 sur le marché des centrales solaires au sol ont été confrontés à une approche « bottom-up » pour les années 2013-2016 et à une analyse des parts de marchés visés pour les années ultérieures. Cette méthode de prévision, qui a par exemple conduit l'entreprise à diviser par 3, depuis 2009, les perspectives de ventes du marché, apparaît de nature à garantir le caractère « prudent et raisonnable » des hypothèses retenues pour l'échéancier de remboursement.

(158) Par ailleurs, il ressort du point (42) ci-dessus que les modalités prévues entre SOITEC et l'ADEME conduisent, dans un scénario d’issue favorable du projet, à un remboursement supérieur, en valeur actualisée, aux avances versées, et sinon, à un remboursement proportionnel au degré de réussite du projet. En cas de réussite du projet GUÉPARD supérieure aux attentes, un système d'intéressement de l'État est également prévu en plus du remboursement proprement dit de l'avance actualisée.

(159) Au vu de ce qui précède, la Commission peut donc conclure que les conditions de remboursement des avances récupérables sont conformes aux dispositions du point 5.1.5 de l'Encadrement R&D&I.

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3.5.4.4. Cumul

(160) Les autorités françaises ont confirmé que, concernant les coûts admissibles du projet, SOITEC ne bénéficierait d'aucune autre aide d'État.

(161) Par conséquent, la Commission est en mesure de conclure que les règles de cumul définies au chapitre 8 de l'Encadrement R&D&I sont bien respectées.

3.5.4.5. Aide limitée au minimum

(162) Conformément au point 7.3.4 de l'Encadrement R&D&I, il convient de vérifier que l'aide à SOITEC est limitée au minimum nécessaire pour permettre la réalisation du projet GUÉPARD.

(163) Tel que mentionné au point (155) ci-dessus , l'intensité des subventions et le taux de couverture des avances récupérables, en pourcentage des coûts admissibles, sont largement inférieurs aux plafonds prévus par l'Encadrement R&D&I.

(164) En outre, l'impact principal des avances récupérables en tant qu'instrument d'aide réside dans la possibilité d'un partage de risque entre les entreprises bénéficiaires et l'État111. D'une façon générale, il convient donc de relativiser l'importance du montant nominal de l'aide, qui sera, en cas de succès, remboursé intégralement (au taux d'actualisation en vigueur). De plus, comme rappelé aux points (42)(b) puis (158) ci-dessus, si le projet se déroule conformément aux prévisions initiales, l'État percevra, au-delà du remboursement de l'avance actualisée, une redevance assise sur le chiffre d'affaires réalisé par l'entreprise.

(165) Enfin, tel qu'il a été démontré lors de l'analyse de la rentabilité du projet, une aide de moindre importance ne permettrait pas à SOITEC de réduire suffisamment son exposition maximale au risque, ni de maintenir son budget de R&D à niveau supportable au regard de son chiffre d'affaires, de sorte que l'entreprise ne mènerait vraisemblablement pas le projet GUÉPARD.

(166) Compte tenu de ce qui précède, la Commission considère que l'aide versée à SOITEC est limitée au minimum nécessaire.

3.5.4.6. Conclusion sur la proportionnalité de l'aide

(167) En conclusion, pour l'ensemble des raisons évoquées ci-avant, la Commission estime que l'aide accordée à SOITEC est proportionnée.

3.6. Distorsion de la concurrence et des échanges

(168) Le point 7.1 de l'Encadrement R&D&I précise que l'examen approfondi des aides d'un montant élevé a pour objet de garantir qu'elles ne faussent pas la concurrence dans une mesure contraire à l'intérêt commun, mais qu'elles contribuent bien à ce dernier.

3.6.1. Identification du marché pertinent

(169) À l'issue du projet GUÉPARD, SOITEC souhaite commercialiser des systèmes CPV utilisant une cellule à très haute efficacité (« Smart Cell ») qui seront principalement utilisés dans des centrales au sol112 installées dans des zones de forte demande

111 Par conséquent, en cas d'échec ou de succès partiel du projet, l'avance ne sera pas intégralement remboursée, mais un remboursement proportionnel au degré de réussite du projet sera opéré.

112 Il s'agit d'installations de production d’énergie électrique de taille industrielle totalisant une puissance installée de plusieurs MW.

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d’électricité et jouissant d'un fort ensoleillement. Ces systèmes CPV complets se composeront d’un « tracker » (c'est-à-dire deux axes permettant de suivre la course du soleil tout au long de la journée) sur lequel seront installés des modules comportant les lentilles de concentration et les cellules à forte efficacité. Les panneaux seront reliés à un système de conversion électrique pour la connexion au réseau électrique. Les régions d'implantation privilégiée de ces systèmes CPV seront le pourtour méditerranéen (Europe du Sud, Maghreb, Moyen-Orient), les États-Unis (en particulier le sud-ouest, les États de Californie, Nevada, Arizona, Nouveau Mexique, Colorado), l'Amérique du sud (en particulier le Chili), l’Afrique subsaharienne (en particulier l’est et le sud), la Chine, l’Inde, et l’Australie.

3.6.1.1. Définition du marché de produits

(170) Selon les autorités françaises, le marché des systèmes de production d'énergie électrique d'origine solaire doit être segmenté en :

(a) Un marché d’installations en toitures (résidentiel ou commercial) faisant appel aux technologies PV Silicium et PV couches minces. Selon les autorités françaises, l’industrie chinoise y serait prédominante et il s'agirait d'un marché saturé. Par ailleurs, la technologie CPV n’étant pas compétitive (par rapport aux technologies rivales PV Silicium et PV couches minces) pour ce type d'installations, SOITEC n’envisage pas de commercialiser sa technologie sur ce marché.

(b) Un marché de centrales solaires au sol faisant appel aux technologies CPV, CSP, PV silicium et PV couches minces pour des installations de production d’énergie électrique de taille industrielle d'une puissance installée de plusieurs MW. Selon les autorités françaises, il s'agirait d'un marché en forte croissance.

3.6.1.2. Définition du marché géographique

(171) Selon les autorités françaises, le marché pertinent des centrales solaires au sol est de dimension mondiale, dans la mesure où aucune norme technique ou réglementation nationale n’est susceptible de créer des barrières à l’entrée dans un pays donné. Les équipements fonctionnent selon les standards du secteur, définis dans le cadre d'instances internationales de normalisation. Par ailleurs, le fonctionnement du marché par grands appels d’offres internationaux, publics ou privés, stimulerait la concurrence au niveau mondial.

(172) Sur ce marché mondial, la demande devrait cependant provenir majoritairement de régions à fort ensoleillement. Techniquement, il s'agit de zones présentant un ensoleillement direct (ou « DNI » pour « Direct Normal Irradiation ») supérieur à 1800 kWh/m².an. Par conséquent, ce marché concernerait principalement les pays enserrés par cette « ceinture du soleil » (« Sunbelt »), « […] où l’électricité traditionnelle est chère et l’ensoleillement fort et où le photovoltaïque deviendra économiquement le plus pertinent le plus tôt »113.

3.6.2. Fonctionnement du marché

(173) Selon les autorités françaises, le marché des centrales solaires au sol est en pleine expansion. En pourcentage du marché solaire, l’activité y sera multipliée par 5 entre 2009 et 2015114 : dès 2015115, le marché des centrales solaires au sol représentera donc 40 à 50% du marché du solaire. En valeur absolue, la croissance du secteur sera aussi

113 Source citée : Rapport Charpin sur le secteur photovoltaïque. 114 Source citée : Étude GTM, 2011. 115 Source citée : Étude GTM, 2012.

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importante : alors que les capacités photovoltaïques installées en 2011 étaient de 27 GW sur le PV total, elles seront de plus de 60 GW en 2016. Pour les centrales PV au sol, les capacités passeront de 8 GW en 2011 à environ 30 GW en 2016.

(174) La chaîne de valeur des centrales solaires au sol peut être représentée synthétiquement de la façon suivante, en descendant de l'amont vers l'aval :

(a) Au niveau des systèmes, les fournisseurs d'équipements fabriquent les cellules et modules photovoltaïques, les systèmes de suivis du soleil, et/ou les onduleurs qui seront ensuite utilisés dans les projets de développement de centrales au sol. C'est à ce niveau qu'interviendra SOITEC.

(b) Au niveau de l'ingénierie, le projet de réalisation d'une centrale est généralement de la responsabilité d’un développeur ou d’un EPC (« Engineering, Procurement & Construction »). Son rôle est de réaliser l’ensemble des démarches administratives et des études techniques qui permettent de vérifier la faisabilité du projet, puis de construire la centrale solaire au sol (génie civil et installation électrique). Les développeurs et EPC doivent garantir aux investisseurs l'achèvement et le bon fonctionnement de la centrale, et présenter par conséquent des garanties financières importantes pour les rassurer ;

(c) Au niveau de la production d’énergie, l'acquisition puis l'exploitation de la centrale solaire au sol sont assurées par des énergéticiens publics (appelés « Utility ») ou privés (« IPP » pour « Independant Power Producer »), qui s'appuient le cas échéant sur des investisseurs financiers ;

(d) Au niveau du réseau électrique, l’électricité produite par les centrales solaires au sol est vendue à des opérateurs électriques. Selon les autorités françaises, il y aurait une concurrence à ce niveau avec l'électricité conventionnelle. L’objectif des centrales solaires au sol serait donc d’atteindre la « parité réseau » : le coût de production de l’électricité solaire tendrait à égaler le prix de vente de l’électricité conventionnelle (c'est-à-dire le prix moyen auquel est vendue l’électricité dans un pays donné). Actuellement, l’écart à la parité réseau est défavorable à l’émergence de nouvelles technologies PV, et ce d'autant plus que l’électricité conventionnelle serait subventionnée par des fonds souverains de certains pays pour faciliter d'accès à l'électricité d'une majorité de la population. À plus long terme, cependant, le prix de l'électricité conventionnelle devrait augmenter avec la rareté des énergies fossiles, alors que les progrès technologiques devraient entraîner une baisse du coût de production de l'électricité solaire.

(175) En définitive, pour la construction des centrales solaires au sol, le marché peut parfois fonctionner « de gré à gré ». Mais la tendance semble plutôt évoluer vers de grands appels d’offres, qui peuvent être publics ou privés, pour lesquels les États ou les énergéticiens concernés rédigent un cahier des charges116.

(176) En général, les appels d’offres sont compartimentés par grande familles d’énergies renouvelables (éolien, biomasse, solaire). S'agissant du solaire, les appels d’offres sont majoritairement ouverts à toutes les technologies solaires confondues, de sorte que, selon les autorités françaises, PV traditionnel, CSP et CPV entreraient en concurrence

116 Selon les autorités françaises, certains États imposeraient des obligations dans ces appels d'offres pour favoriser certains industriels locaux ou forcer l’implantation locale (« local content »), de façon à promouvoir la création d’emploi local ou d'emplois réservés aux minorités locales (indien à San Diego), d'impliquer des financeurs locaux (« black empowerment » en Afrique du Sud), d'assurer localement certaines formations, ou de solliciter la sous-traitance locale, ce qui constitueraient de freins à l’exportation pour les entreprises européennes

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sur le marché des centrales au sol, même si les technologies matures (silicium cristallin117 et couches minces) jouiraient actuellement d'un avantage en termes de puissance installée par rapport aux technologies émergentes (CSP et CPV). En effet, ces dernières rencontreraient des difficultés pour convaincre les investisseurs, liées à leur manque d’antécédents (absence de « track records »), à leur coût plus important et à une difficulté accrue d'évaluation de leur risque technico-commercial, ce qui entraîne une surenchère sur les taux de rémunération et les garanties demandées.

(177) Parmi les technologies émergentes, il arrive que le CSP soit classé à part, en tant que technologie « non intermittente » (puisque comportant du stockage). Force est toutefois de constater que CSP et CPV ciblent la même zone géographique et présentent de grandes similarités : technologies « à concentration », taille réduite des promoteurs par rapport aux clients (gros énergéticiens), faibles retours d’expérience118. En définitive, les difficultés auxquelles sont confrontées le CSP et le CPV pour se développer face au PV traditionnel sont illustrées dans le Tableau 6 ci-dessous, qui récapitule les estimations (pour 2011) et les prévisions (pour 2016) des parts de marché des technologies solaires119 :

Technologie Capacité installée en 2011120 (GW)

Part de marché en 2011

Prévision de capacité annuelle en 2016 (GW/an)

Prévision de part de marché en 2016

PV traditionnel

8 88 % 30 90 %

CSP 1 11 % 2 6 %

CPV 0,09 1 % 0,8 à 1,8 2 à 5 %

Total 9 100 % 34 100 %

Tableau 6 : Parts de marché des technologies solaires

3.6.3. Structure du marché

3.6.3.1. La demande en capacités solaires

(178) Au niveau de la demande, il ressort de la Figure 2 ci-dessous que les capacités solaires installées dans le monde ont connu une progression exponentielle sur les dix dernières années. À compter de 2010, il convient également de noter l’entrée de la Chine parmi les régions d'installation.

117 Les technologies silicium cristallin sont perçues comme un placement à faible risque avec un retour

sur investissement aisément calculable. De plus, les lignes de production peuvent être achetées, installées mises en production dans un temps très court. Source citée : CSP today, 2011.

118 Le volume total de CPV installé dans le monde représente nettement moins de 0,5% (91 MW) du parc photovoltaïque en opération à fin 2011. Par ailleurs, la plupart des centrales au sol sont des démonstrateurs. Source citée : Navigant Consulting. De même, bien qu'ayant déjà plusieurs années d’expérience et des installations validées, l'étendue de CSP reste limitée : sa capacité installée cumulée, d’environ 1 GW serait faible par rapport aux 20 GW de capacité totale cumulée des centrales au sol de filière traditionnelle. Source citée : GTM, 2011.

119 À l’horizon 2020-2025, la capacité du marché solaire est estimée par la France autour de 100 GW installés, alors qu'en 2010 elle n'était que d’une vingtaine de GW. Le taux de croissance annuelle moyen serait donc de l'ordre de 20 à 25% sur cette période. Compte tenu de l'obsolescence rapide des prévisions, les analystes tableraient cependant plutôt sur des projections de marché chiffrées à 3-4 ans.

120 La « capacité installée en 2011 » correspond aux installations solaires mises en service au cours de l'année 2011, soit 9 GW. Il convient de ne pas la confondre avec la « capacité totale cumulée en 2011 » évoquée en note de bas de page 118 ci-dessus, qui correspond au cumul de toutes les capacités mises en service au cours des années précédant 2011, soit 20 GW.

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Figure 2 – Évolution121 des capacités solaires cumulées entre 2000 et 2011.

(179) Le marché mondial du photovoltaïque serait concentré dans certains pays. Actuellement dominé par l’Europe en termes de capacités installées, le marché devrait à moyen terme être tiré par les demandes chinoises, américaines, et issues des régions fortement ensoleillées comme l’Afrique et le Moyen Orient : de 80 % en 2010, les installations en Europe devraient en représenter moins de 40 % d'ici 2016. Les deux principaux marchés européens en 2010, le marché allemand et le marché italien, seraient même appelés à connaître une décroissance jusqu’en 2014122.

3.6.3.2. L'offre de capacités solaires

(180) Au niveau de l'offre, la compétitivité de la production est centrale, dans un contexte de restructuration sectorielle au niveau mondial.

(181) Le marché actuel du photovoltaïque est aujourd’hui dominé par des fournisseurs asiatiques (notamment Chinois, Taïwanais, et Coréens) qui proposent des technologies classiques matures. Leur apprentissage est court : un industriel peut acheter une usine clé en main et offrir en moins d’un an des produits au niveau de maturité du marché. Ces entreprises bénéficient de plusieurs avantages compétitifs permettant la production à bas coût : financement facilité pendant la phase d’investissement, coût de main d’œuvre deux à trois fois plus bas qu’en Europe et accès à l’énergie à très bas coût. La production de masse permet des gains de productivité supplémentaires grâce à l’effet d’échelle.

(182) Depuis 2009, le prix moyen des modules a été divisé par trois123. Selon la France, cette baisse moyenne devrait encore continuer car les entreprises asiatiques « influenceraient actuellement le cours du marché ». Cette baisse de prix des modules, aurait permis aux principaux producteurs chinois (« Tier 1 ») de dominer progressivement sur les filières traditionnelles du photovoltaïque (à base de silicium ou de couches minces) : leur part de marché serait passée, selon la France, de 35 à 60% entre 2008 et 2011. Elle serait appelée à continuer à légèrement s’accroître.

(183) Les modules importés d’Asie auraient envahi le marché européen car ils représentent la plupart de la valeur d’un système PV. Pour rester compétitifs, les différents maillons de la chaîne de valeur ont adapté leur prix au fur et à mesure. La baisse généralisée des soutiens tarifaires au secteur solaire en Europe a par ailleurs entraîné une chute de la demande en Europe laquelle, combinée aux surproductions chinoises de PV traditionnel, a fait chuter le prix des panneaux solaires de 43% en 2011.

121 Source citée : EPIA, 2012. 122 Source citée : GTM, 2012. 123 Source citée : GTM, 2012.

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(184) Comme indiqué au point (76)(b) ci-dessus, la Commission reconnaît que les stratégies menées par certains États tiers (décrites par la France à la section 3.4.1 ci-dessus) ne sont pas étrangères aux évolutions récemment constatées dans l'industrie photovoltaïque : la combinaison d'un effet-prix et d'un effet-volume défavorables s'est traduite par la disparition d’un nombre important d’entreprises au cours des années 2010/2011, notamment les leaders et pionniers historiques européens du photovoltaïque, qui ont progressivement fait face à des difficultés concurrentielles, puis déposé leur bilan, comme en témoigne la Figure 3 ci-dessous.

Figure 3 – Entreprises solaires en faillite124

(185) Compte tenu de cette évolution récente, à l’exception des américains First Solar et Sunpower (Groupe Total) et du japonais Sharp, les principaux fabricants de modules photovoltaïques, listés sur la Figure 4 ci-dessous par capacité de production en 2011, sont tous asiatiques. En définitive, une vingtaine de fabricants détiennent la moitié de la capacité de production mondiale et produisent entre 0,5 et 2 GW annuels chacun.

Figure 4 – Principaux acteurs du photovoltaïque en 2011125

(186) En résumé, l'offre sur ce marché émane :

(a) des fabricants de systèmes PV (modules et structures) : Sunpower, First Solar, Solon, Sharp, Recurrent Energy, MEMC, OCI Cornerstone, LDK, Solar Power,

124 Source citée : Merryll Lynch. 125 Source citée : www.solarbuzz.com

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Hanwe Solar One, Solar Monkey, GCL Solar, Trinasolar, CanadianSolar, Q.Cells, Astroenergy, UTECH Solar126, entre autres. Ces acteurs sont des « systémiers » et produisent des systèmes intégrés verticalement, mais fabriquent et vendent également des modules indépendamment des centrales au sol : environ 30 à 40 % de leur production est dédiée aux centrales solaires au sol. Selon les autorités françaises, leurs capacités de production sont de l'ordre du GW.

(b) des producteurs de technologie CSP : BrightSourceEnergy, Solar Millennium, Penglai Electric, Renovalia, Abengoa Solar, Nextera Energy, Tessera Solar, Siemens, ACS, NRG, Aries, AlbiasaSolar, Solarreserve127, entre autres. Ils sont uniquement présents sur le marché des centrales au sol (majoritairement dans les pays à forte irradiation). Selon les autorités françaises, la plupart de ces acteurs auraient chacun en développement des capacités de production entre 0,5 et 2,5 GW128. Certains de ces acteurs appartiennent en outre à des grands groupes (notamment Siemens, Schott, et Toshiba) qui ont des capacités financières pour l’innovation importantes.

(c) des acteurs du CPV (environ une cinquantaine), dont les principaux seraient : Amonix, Emcore, et Solfocus (États-Unis), Arima Ecoenergy (Taiwan), Daido Steel (Japon), Suntrix (Chine), Isofoton (Espagne), Soitec (France), Abengoa Solar (Espagne). Les parts de marché de ces acteurs seraient difficiles à évaluer, car les installations sont encore aujourd’hui majoritairement des démonstrateurs. En 2011, environ 60 MW de centrales CPV ont été installés.

(187) Les informations disponibles relatives aux capacités de production actuelles et projets futurs par technologie peuvent être récapitulées comme suit :

Technologie129 Capacité de production annuelle de systèmes par acteurs en 2011 (GW)

Taille des projets existants par acteurs en 2011 (GW)

Prévision des projets par acteurs vers 2016 (GW/an)

Acteurs principaux du PV traditionnel : SunPower, First Solar, etc.

0,5 à 2 GW 0-150 MW 0-1 GW

Acteurs principaux du CSP : Solar Millenium, Abengoa, Solel, etc.

30 à 150 MW 1 à 2,5 GW

Acteurs principaux du CPV : Amonix, Solfocus, Semprius, etc.

10 à 100 MW 0-2 MW 0-200 MW

Soitec 35 MW <1,5 MW 50-200 MW

Tableau 7 : Comparaison des capacités de production et de taille de projets des acteurs par technologie

(188) Il en ressort que SOITEC est un acteur de taille modeste sur le marché des centrales au sol : en 2011, sa capacité annuelle de production était de 35 MW, et il n'avait qu'une expérience de démonstrateurs de centrales solaires sur le site de Questas (États-Unis) pour une capacité installée de 1,5 MW. SOITEC possède donc une faible part de marché. Son objectif est d'atteindre environ 1 à 2 % du marché des centrales solaires au sol à l’horizon 2016.

126 Source citée : GTM, 2012. 127 Source citée : GTM, 2011. 128 Source citée : CSP today, 2011. 129 Source citée : SOITEC.

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3.6.4. Impact sur le marché

(189) Conformément au point 7.4 de l'encadrement R&D&I, les aides à la R&D peuvent fausser la concurrence de trois manières distinctes :

(a) Elles peuvent fausser les incitants dynamiques des opérateurs à investir ;

(b) Elles peuvent créer ou maintenir des positions de pouvoir de marché ;

(c) Elles peuvent perpétuer une structure de marché inefficace.

3.6.4.1. Distorsion des incitants dynamiques

(190) L'Encadrement R&D&I indique que la principale préoccupation que soulèvent les aides à la R&D concerne le risque qu'elles faussent les incitants dynamiques des entreprises concurrentes à investir. En effet, la probabilité de succès des activités de R&D augmentant avec l'octroi d'une aide, l'entreprise bénéficiaire pourrait accroître sa présence sur le marché visé et, de ce fait, mener les concurrents à réduire leurs plans d'investissements initiaux sur ce marché (« effet d'assèchement »). Le point 7.4.1 de l'Encadrement R&D&I prévoit plusieurs indicateurs susceptibles d'atténuer la distorsion des incitants dynamiques. Les indicateurs les plus pertinents, au regard des caractéristiques du projet, sont présentés ci-dessous.

(191) Montant d'aide : en 2016, date à laquelle les produits doivent sortir sur le marché, le niveau de R&D annuel pour le secteur des centrales solaires au sol est estimé130 par les autorités françaises à environ 1,5 milliard de dollars (USD). Au regard de ce chiffre, le montant d'aide apparaît très limité (21,3 millions d'euros au total) et semble insusceptible d'entraîner un effet d’assèchement important. Aussi, l'aide à SOITEC pour la réalisation du projet GUÉPARD est-elle également limitée au regard des dépenses de R&D des producteurs de centrales solaires au sol.

(192) Éloignement du marché : il convient de noter que 36 % des coûts éligibles encourus par SOITEC concerneront des activités de recherche industrielle, activités situées plus en amont des marchés ciblés que les activités de développement expérimental (lesquelles seront, au demeurant, soutenues par des avances récupérables, appelées à être remboursées en grande partie à l'État). Il convient aussi de noter que, pour achever le développement et l’industrialisation des produits issus du projet de R&D, SOITEC devra consentir des dépenses additionnelles d'une centaine de millions d’euros (qualification des innovations et mise en production), puis réaliser un investissement industriel de près de 200 millions d’euros sur quatre ans. L'importance de ces coûts et de ces délais confirme que les activités soutenues conservent une distance au marché relativement importante.

(193) Procédure de sélection ouverte : comme indiqué au point (7) ci-dessus, le projet GUÉPARD a été sélectionné dans le cadre d’un AMI concurrentiel organisé sur la base d’une procédure ouverte et transparente, mobilisant des critères objectifs et non discriminatoires. Les propositions de projets ont été recueillies par l'ADEME, examinées sur base d’un canevas de référence et ont fait l’objet d’expertises indépendantes.

(194) Barrières à la sortie : les investissements consentis par les acteurs de la filière PV classique pour développer des outils et des méthodes de R&D propres à leurs choix scientifiques constituent autant de barrières à la sortie. Les sommes engagées étant à la fois importantes et largement irrécouvrables, un abandon des développements technologiques ne permettrait de récupérer qu'une faible valeur résiduelle des projets en

130 Sur la base d'une hypothèse de ratio R&D/CA de 5 %.

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cours. La Commission estime par conséquent qu'il est très peu probable que les concurrents de SOITEC choisissent de réduire ou d'abandonner leurs efforts de R&D en raison de l'octroi d'une aide au projet GUÉPARD.

(195) Incitations à se disputer un marché futur : dans un contexte d'augmentation de demande d'énergie mondiale et de préoccupations croissantes pour l'environnement, le marché des centrales solaires au sol devrait constituer un secteur en expansion dans les années à venir. Les acteurs du secteur conserveront des incitations fortes à se disputer ce marché et à continuer d'investir dans l'amélioration des technologies photovoltaïques. Comme expliqué à la section 3.6.4.2 ci-dessous, les positions modestes détenues par SOITEC à l’horizon 2016 devraient en outre laisser à ses concurrents actuels et potentiels des marges de développement sur ce marché.

(196) Différenciation des produits et intensité de la concurrence : le projet GUÉPARD vise précisément à mettre au point un produit différencié par rapport aux technologies photovoltaïques existantes, en termes de rendement de conversion de l’énergie lumineuse en électricité, d’amélioration du LCOE pour les régions à fort ensoleillement, d'adaptation aux régions désertiques, de conciliation avec d'autres usages du foncier, de retour énergétique, d'empreinte carbone, et de recyclage non polluant. Il ressort du point (186) ci-dessus que le secteur solaire compte des concurrents efficaces disposant d'une taille et d'une capacité d'innovation au moins équivalente à SOITEC. Par ailleurs, la Commission note la présence dans le secteur de jeunes pousses (« start-up ») actives dans le CPV, à l'instar d'Heliotrop, qui malgré une capacité installée limitée (0,08 MW selon les autorités françaises) et son absence du marché des centrales solaires au sol, n'en explore pas moins une voie technologique pour le CPV différente de celle envisagée par SOITEC131. Il semble donc que les acteurs de la filière soient en mesure de poursuivre le développement d’innovations et de se différencier les uns des autres sur les technologies solaires.

(197) Au vu de ce qui précède, la Commission considère que l'aide ne présente pas de risques importants de distorsion des incitants dynamiques.

3.6.4.2. Création ou renforcement d'un pouvoir de marché

(198) Les aides à la R&D peuvent avoir un effet de distorsion en renforçant ou en entretenant le degré de pouvoir de marché d'un opérateur. Ce pouvoir de marché peut se traduire par une capacité à influencer les prix, la production, la variété ou la qualité des biens pendant une période significative au détriment des consommateurs. Le point 7.4.2 de l'Encadrement R&D&I prévoit plusieurs indicateurs susceptibles d'atténuer la création de pouvoir de marché. La Commission a analysé les indicateurs les plus pertinents.

(199) En ce qui concerne le pouvoir de marché du bénéficiaire de l'aide et la structure du marché, alors que le marché des centrales solaire au sol est en pleine expansion, SOITEC ne possède actuellement qu’une très faible part de marché (0,05 %) et ne devrait pas dépasser 2 % à la fin du projet GUÉPARD. Il convient de comparer ces chiffres avec les parts de marché des trois principaux acteurs du secteur que sont First Solar, Sunpower et Suntech. Rien qu'aux États-Unis132, ces trois entreprises représentent à eux seuls plus de 60 % des parts de marché pour l’installation de centrales solaires au

131 Selon la France, Heliotrop mènerait des travaux de R&D en matière d’électronique, de dissipation thermique, de performances optiques et mécaniques, de fiabilité et de vieillissement des composants et des systèmes, mais pas sur les cellules à haute efficacité.

132 Les autorités françaises précisent que le marché américain est actuellement (et sera dans les prochaines années) l'un des plus gros marchés pour les centrales au sol, alors que le marché européen devrait rester essentiellement tourné vers des installations en toiture.

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sol au 1er trimestre 2012. L’aide octroyée à SOITEC n'est donc pas de nature à réduire significativement la pression concurrentielle sur le marché des centrales solaires au sol.

(200) Compte tenu de ce qui précède, la Commission peut écarter tout risque lié à un éventuel pouvoir de marché de SOITEC sur les centrales solaires au sol.

3.6.4.3. Maintien de structures de marché inefficaces

(201) Le marché des centrales solaires au sol est pleine croissance. Les technologies émergentes, comme le CPV, ne souffrent d'aucune surcapacité de production.

(202) Par ailleurs, SOITEC est une entreprise performante : en l'espace de 20 ans, elle a atteint une dimension mondiale en se positionnant sur des marchés à fort potentiel et forte valeur ajoutée. Malgré la cyclicité du secteur de la microélectronique, l'entreprise a réalisé en 2012 un chiffre d’affaires total consolidé en forte croissance133, avec un effectif également en hausse sur les six dernières années (1 557 personnes contre 1 030 personnes en 2006). En outre, SOITEC consacre [...]% de son chiffre d'affaires à l’autofinancement de sa R&D.

(203) Compte tenu de ce qui précède, la Commission est d'avis que l’aide à SOITEC pour la réalisation du projet GUÉPARD ne présente aucun risque de soutenir une entreprise non performante ni de maintenir une structure de marché inefficace.

3.6.5. Conclusion

(204) En conséquence, la Commission considère que l'aide au projet GUÉPARD n'est pas de nature à perturber le fonctionnement concurrentiel des marchés visés dans une proportion contraire à l'intérêt commun.

3.7. Mise en balance

(205) L'aide d'un montant supérieur à 7,5 millions d'euros accordée à SOITEC pour réaliser un projet de R&D majoritairement composé de développement expérimental vérifie les critères des chapitres 5, 6 et 8 de l'Encadrement R&D&I. Au surplus, au regard du montant de l'aide, il a été procédé à un examen approfondi en vertu du chapitre 7 de l'Encadrement R&D&I.

(206) Cette aide respecte les critères de l'Encadrement R&D&I. En particulier, à l'issue de son examen approfondi, la Commission estime que :

(a) L'aide vise à remédier à une défaillance de marché;

(b) L'aide constitue un moyen d'action adapté ;

(c) L'aide a un effet d'incitation ;

(d) L'aide est proportionnée ;

(e) L'aide n'est pas de nature à perturber le fonctionnement concurrentiel des marchés visés dans une mesure contraire à l'intérêt commun.

133 Entre l'exercice fiscal 2010-2011 et l'exercice fiscal 2011-2012, le chiffre d'affaires du groupe SOITEC est passé de 281,0 millions d’euros à 323,4 millions d’euro, soit +15.1% d'augmentation.

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(207) Au regard de ces éléments, la Commission considère que les effets positifs de l'aide consentie à SOITEC pour la réalisation du projet GUÉPARD l'emportent sur ses effets négatifs en conformité avec les critères du chapitre 7 de l'Encadrement R&D&I.

4. DÉCISION

(208) La Commission a décidé de considérer l'aide comme compatible avec le TFUE en application de son article 107, paragraphe 3, point c) et de ne pas soulever d'objection à l'encontre de la mesure notifiée.

(209) Cette appréciation positive comporte néanmoins l'obligation de notifier à la Commission un rapport annuel sur l'application de l'aide et de lui notifier les changements éventuels du projet.

Dans le cas où cette lettre contiendrait des éléments confidentiels qui ne doivent pas être divulgués à des tiers, les autorités françaises sont invitées à en informer la Commission, dans un délai de quinze jours ouvrables à compter de la date de réception de la présente. Si la Commission ne reçoit pas une demande motivée à cet effet dans le délai prescrit, elle considérera que les autorités françaises sont d'accord avec la communication à des tiers et avec la publication du texte intégral de la lettre, dans la langue faisant foi, sur le site Internet : http://ec.europa.eu/competition/elojade/isef/index.cfm.

Cette demande devra être envoyée par lettre recommandée ou par télécopie à :

Commission européenne Direction générale de la Concurrence Greffe Aides d'État B-1049 BRUXELLES Belgique Fax : + 32 (0)2.29.61.242

Veuillez croire, Monsieur le Ministre, à l'assurance de ma haute considération.

Par la Commission

Joaquín ALMUNIA

Vice-président

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Annexe 1 – Plan de la décision

1. PROCÉDURE ............................................................................................................. 1

2. DESCRIPTION ........................................................................................................... 2

2.1. Le contexte du projet GUÉPARD ..................................................................... 2

2.2. Les objectifs du projet ....................................................................................... 3

2.3. Le contenu du projet .......................................................................................... 5

2.4. L'organisation du projet ..................................................................................... 7

2.4.1. Les partenaires du projet GUÉPARD .................................................. 7

2.4.2. L'organisation du partenariat ............................................................... 8

2.5. La mesure d'aide d'État .................................................................................... 11

2.5.1. Chronologie d'octroi .......................................................................... 11

2.5.2. Les coûts éligibles ............................................................................. 11

2.5.3. Montant et intensité de l'aide ............................................................. 12

2.5.4. Avances récupérables ........................................................................ 12

2.5.5. Versements des aides en fonction de l'avancement du projet ............ 13

3. ÉVALUATION ......................................................................................................... 13

3.1. Existence d'une aide d'État .............................................................................. 14

3.1.1. Présence d'aide d'État directe ............................................................ 14

3.1.2. Absence d'aide indirecte liée aux activités de R&D en collaboration avec l'organisme de recherche ..................................... 14

3.1.3. Absence d'aide d'État en faveur du CEA-LETI ................................. 16

3.2. Légalité de l'aide – clause de suspension ........................................................ 16

3.3. Base de l'analyse de la compatibilité de l'aide ................................................. 17

3.4. Remarque liminaire sur l'existence d'interventions publiques (européennes et extra-européennes) en faveur d'entreprises du secteur .......... 17

3.4.1. Arguments avancés par les autorités françaises ................................ 17

3.4.2. Analyse de la Commission ................................................................ 18

3.5. Effets positifs ................................................................................................... 22

3.5.1. Existence d'une défaillance de marché .............................................. 22

3.5.2. Moyen d'action adapté ....................................................................... 29

3.5.3. Effet d'incitation et nécessité de l'aide ............................................... 30

3.5.4. Proportionnalité de l'aide ................................................................... 41

3.6. Distorsion de la concurrence et des échanges ................................................. 43

3.6.1. Identification du marché pertinent ..................................................... 43

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3.6.2. Fonctionnement du marché ............................................................... 44

3.6.3. Structure du marché ........................................................................... 46

3.6.4. Impact sur le marché ......................................................................... 50

3.6.5. Conclusion ......................................................................................... 52

3.7. Mise en balance ............................................................................................... 52

4. DÉCISION ................................................................................................................ 53