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ACADEMIE DE BOURGOGNE IUFM DE DIJON Concours de recrutement : professeur des écoles Comment mettre en place une pédagogie différenciée au sein d'une classe afin d'assurer les apprentissages auprès de chaque enfant ? Geneviève Chanay Directeur de mémoire : Olivier Renaut Dossier n° 05STA00730

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ACADEMIE DE BOURGOGNE

IUFM DE DIJON

Concours de recrutement : professeur des écoles

Comment mettre en place une pédagogie différenciée

au sein d'une classe

afin d'assurer les apprentissages

auprès de chaque enfant ?

Geneviève Chanay

Directeur de mémoire :

Olivier Renaut

Dossier n° 05STA00730

SOMMAIRE

INTRODUCTION.............................................................................1

I. ELEMENTS DE REFLEXION SUR LA PEDAGOGIE DIFFERENCIEE .........................4

A) ORIGINES DE LA DIFFERENCIATION...................................................................4

B) DEFINITIONS DE LA DIFFERENCIATION............................................................. 7

C) QUELLES DIFFERENCES RENCONTRE T-ON CHEZ LES ELEVES ?................8

1- DIFFERENCES DE PROFILS :...................................................................... 8

2- DIFFERENCES SOCIOCULTURELLES :..................................................... 11

D) QUE PEUT-ON DIFFERENCIER DANS UNE CLASSE ?....................................12

1- DIFFERENCIER LES OUTILS D’APPRENTISSAGE....................................12

2- DIFFERENCIER LES TÂCHES DES ELEVES..............................................13

3- DIFFERENCIER LES SITUATIONS D’APPRENTISSAGE........................... 14

a Les interactions entre maître et élèves :.................................................. 14

b Les interactions entre élèves :................................................................15

4- DIFFERENCIER L’ETAYAGE DES ELEVES................................................ 16

E) COMMENT DIFFERENCIER LA PEDAGOGIE ?.................................................. 16

1- DIFFERENCIATION SUCCESSIVE : ........................................................... 16

2- DIFFERENCIATION SIMULTANEE.............................................................. 17

II. QUELQUES ESSAIS DE PEDAGOGIE DIFFERENCIEE......................................... 20

A) LA PEDAGOGIE DIFFERENCIEE EN DEBUT DE CYCLE 3 ...............................20

1- Observation et commencement d'évaluation des élèves :.............................21

2- Le Tutorat.......................................................................................................24

3- Un exemple de différenciation successive : des entrées multiples pour un

même sujet ..............................................................................................................27

4- Un exemple de différenciation simultanée : les ateliers de lecture................29

a La segmentation de phrases.................................................................... 29

b La compréhension d'un texte................................................................... 31

c La prise d'indices...................................................................................... 32

d Analyse de la séance............................................................................... 33

5- BILAN ............................................................................................................34

B) PEDAGOGIE DIFFERENCIEE EN DEBUT DE CYCLE 2..................................... 35

1- DES ATELIERS CHEZ LES MOYENS/GRANDS..........................................35

2- ANALYSE...................................................................................................... 36

CONCLUSION.............................................................................. 38

BIBLIOGRAPHIE...........................................................................39

INTRODUCTION

Lors de la préparation du concours, j’ai été particulièrement intéressée, pour ne pas

dire intriguée, par ce qu’était la pédagogie différenciée : une pédagogie adaptée à

chaque individualité afin que les élèves apprennent le mieux possible. Je trouvais

cela tellement « normal » que, lors de mes six mois sur le terrain en tant que « liste

complémentaire », j’ai tenté de m’en souvenir…

Mais face à la découverte de ce métier, à la gestion de classe (un CP/CM2), à son

hétérogénéité, à la préparation des cours, cette pédagogie m’a été beaucoup moins

évidente à envisager. La prise en compte des différences de chaque élève au sein

d’une unité : la classe, n’est pas aisée pour une débutante. Comment reconnaître

ces différences ? Comment les analyser? Comment différencier ? Quels sont les

outils pour cela ?

Ainsi, parmi les CP, une petite fille, Chloé, se débrouillait déjà très bien en lecture et

n’avait aucun problème en mathématiques. Elle était avide d’aller toujours plus loin,

d’apprendre toujours plus. Lorsqu’il y avait des exercices, elle les terminait beaucoup

plus rapidement que les autres, il était évident aussi qu’elle comprenait les consignes

très vite. Au contraire, il y avait un petit garçon, Adem, qui lisait très bien mais qui

avait énormément de difficultés en mathématiques. En tant que nouvelle enseignante

j’ai d’abord été assez «perturbée» par ces différences entre les élèves. Comment

gérer la rapidité de l’une et les difficultés de l’autre tout en tenant compte des quatre

autres élèves ? Je n’osais à l’époque imaginer ce que serait la gestion d’un CP avec

une trentaine d’élèves !

A y réfléchir aujourd’hui, je pense avoir différencié la pédagogie sans en avoir eu

conscience. J’étais attentive, lors des préparations de séances et du choix des

exercices, à prévoir systématiquement quelques exercices supplémentaires pour

Chloé qui se détachait largement des autres. Lorsqu’elle finissait son travail je lui

donnais donc de nouveaux exercices : elle devait lire seule les consignes et

m’appeler si elle était en difficulté : j’essayais de la satisfaire dans sa soif

d’apprendre et de faire, tout en restant dans l'objectif de ma séance. Pendant les

séances, j’observais les autres et particulièrement Adem lorsque nous travaillions en

1

mathématiques. Ce petit garçon était suivi parallèlement par le RASED. J’essayais

de lui faire réinvestir les méthodes de travail qu’il avait découvertes lors de ses

séances avec le RASED, en particulier pour l’addition de deux nombres. Il m’est

souvent arrivé de rester près de lui quand je le voyais en difficulté pour le guider

dans sa démarche, l’encourager à reformuler ce qu’il devait faire, lui expliquer d’une

autre manière ce qui était attendu de lui … L’important pour moi était de ne pas le

laisser seul face à ses difficultés.

Mais ceci n’était pas toujours facile du fait du double niveau. Il m’est donc arrivé de

constater que malgré l’attention que je lui portais, il pouvait rester sans travailler

parce qu’il se « bloquait » sur une étape et ne demandait pas de l’aide. Etant dans

ces moments avec les CM2, je ne m’apercevais pas toujours de cela. Les limites de

la pédagogie différenciée en double niveau me sont donc apparues. Hormis la

différenciation du fait du double niveau, il ne m’était pas aisé d’envisager plus que ce

que j’ai déjà dit.

Cette expérience à l’échelle de six enfants, m’a fait réaliser combien il est important

de connaître les enfants, afin de pouvoir leur offrir un enseignement adapté à leur

« vitesse » d’apprentissage, leurs caractéristiques propres, leur histoire.

Cette façon d’envisager les choses était assez réductrice. Pour les CP, je crois avoir

été essentiellement attentive à la diversité des rythmes d’apprentissage et celle-ci

m’a incitée à individualiser les situations pour les enfants qui sortaient de la

« norme » ( penser à ce que pourrait faire Chloé pendant que les autres finiraient

leur travail, ou comment réagir face aux difficultés d’Adem). P. Meirieu dit

effectivement que la promotion exclusive de situations individualisées « ne peut

suffire aujourd’hui : il est possible en effet de constituer des petits groupes

d’apprenants aux rythmes proches ».

Au cours de ces mois en classe, j’ai pris conscience de l’importance mais aussi des

difficultés de la pédagogie différenciée, surtout dans une classe à double niveau

(même si la gestion d’un double niveau est, par nature, une différenciation de la

pédagogie).

Après différentes lectures, observations et conseils de professeurs des écoles, il me

semble envisageable de mettre en place ce type de pédagogie de façon plus

sereine.

Au travers de ce mémoire, je n'ai pas l'ambition d'avoir une démarche concluante sur

2

la pédagogie différenciée. Je souhaite comprendre certains moments pédagogiques,

comprendre à quelles difficultés l'enseignant peut se heurter, ce qu'implique

l'organisation de la différenciation.

Je me pose donc la question suivante : « comment mettre en place une pédagogie

différenciée au sein de l'unité classe afin d'assurer les apprentissages auprès de

chaque enfant ? »

3

I. ELEMENTS DE REFLEXION SUR LA PEDAGOGIE DIFFERENCIEE

A) ORIGINES DE LA DIFFERENCIATION

Depuis la fin du 19ème siècle, l'enseignement primaire assume la formation de

l'ensemble de la population. Les classes, constituées selon des critères d'âge et de

sexe des élèves, étaient considérées comme homogènes. Face à sa classe, le

maître de la 3ème République exposait magistralement son savoir, expliquait,

vérifiait les connaissances et faisait réviser. Les élèves quant à eux, étaient attentifs,

appliqués, dociles. P. Meirieu dit effectivement que «l’on a pu un temps s’imaginer

qu’un ensemble d’élèves alignés étaient susceptibles de recevoir en même temps les

mêmes connaissances, d’effectuer les mêmes opérations intellectuelles, sur les

mêmes supports, avec les mêmes rythmes».

On se trouvait alors face à ce que l'on appelle les méthodes traditionnelles, définies

dans le dictionnaire pédagogique comme un : «enseignement frontal (un maître face

à une classe en rangs alignés...), de l'enseignement collectif, du dialogue sous forme

d'interrogations - réponses entre maître et élèves (peu entre élèves), du silence, de

l'obéissance, de l'autorité magistrale...». L'homogénéité des élèves devait ainsi

permettre «une application studieuse de tout le groupe».

Mais, tout au long du 20ème siècle, le développement des écoles, la scolarisation

accrue, le constat de l'hétérogénéité des classes, les difficultés de certains enfants,

ont conduit à remettre en cause cette façon d'enseigner. Et même si cet

enseignement dit traditionnel est encore relativement répandu de nos jours, de

nombreuses recherches théoriques (chercheurs) et pratiques (pédagogues) ont

essayé de mieux comprendre et aider les enfants en difficultés.

Des chercheurs comme :

Claparède : psychologue, il montre que l’intelligence est une fonction active

d’adaptation aux situations nouvelles. Ainsi, «face à une situation inconnue, il pense

que l'élève procède à des tâtonnements qui l’orientent dans la recherche

d’hypothèses à vérifier.»

4

Piaget : Philosophe et psychologue suisse. Il travaille à Paris à l'élaboration de tests

d'intelligence puis cherche à reconstituer les phases de formation de l'intelligence. A

partir de l'observation des enfants, il réorganise totalement les concepts clés du

développement et les présente comme des stades allant de l'intelligence sensori-

motrice élémentaire du bébé jusqu'à l'intelligence abstraite caractéristique de

l'adolescence. Ses activités ont beaucoup influencé les pédagogues.

Decroly : Neuropsychiatre belge, il s'est inspiré de son expérience de praticien pour

élaborer une méthode éducative adaptée aux besoins et aux intérêts de l'enfant. Il

pense que l'enseignement doit répondre aux centres d'intérêt de l'enfant : les

connaissances à acquérir sont organisées thématiquement, au sein d'ateliers, et une

large place est réservée aux jeux éducatifs et aux activités manuelles. Cet

enseignement doit aussi prendre en compte l'environnement socio-culturel dans

lequel évolue l'enfant. Influencé par la psychologie de la forme, il a créé la méthode

d'apprentissage de la lecture dite «globale», pensant que l'enfant perçoit mieux des

ensembles organisés et signifiants (mots ou phrases) que des éléments sans

signification (lettres ou syllabes).

Des pédagogues comme :

Freinet : instituteur au début du siècle, blessé au poumon, avec peu de moyens

dans sa classe, il doit trouver de nouveaux moyens pour maintenir l'attention des

élèves en éveil : il fait travailler les enfants par petits groupes, autour d'un sujet qui

savait les mobiliser suffisamment de temps. Pour lui, l'enfant ne doit plus être une

machine qui apprend, mais un être qui réfléchit, «le centre de l'école n'est plus le

maître, mais l'enfant», grâce à l'imprimerie et la correspondance scolaire, il veut faire

des enfants des hommes autonomes et responsables.

Cousinet : instituteur puis inspecteur, il a expérimenté la méthode de travail libre en

groupe et est le fondateur de l'Ecole nouvelle. Il a observé que les enfants sont

persévérants, organisés quand ils font des activités qui leur plaisent, comme les jeux.

Il pensait que les enfants devraient avoir ces mêmes qualités dans une classe s'ils

choisissaient et conduisaient eux-mêmes les travaux. Le maître propose aux enfants

de former librement de petits groupes de travail en fonction d'objets, plantes,

animaux amenés en classe.

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En 1973 : Le terme de " pédagogie différenciée " apparaît sous la plume de Louis

Legrand : " L'idée d'une nécessaire différenciation rationnelle de la pédagogie pour

faire face à la diversité des publics présents dans les classes hétérogènes est le

produit d'un conflit devenu insupportable entre cette diversité et l'unité réalisée des

programmes et des méthodes ».

Avec la création du collège unique (réforme Haby 1975), les professeurs de collège

sont confrontés à l'hétérogénéité des classes et le terme «différenciation» apparaît

pour la première fois dans les instructions officielles du collège en 1979 : pendant les

heures de classe il est alors conseillé de diversifier les méthodes notamment en

différenciant la pédagogie.

Quant à l'enseignement primaire, la pédagogie différenciée est apparue comme un

moyen de faire face aux difficultés des premiers apprentissages.

En 1989, la loi d'orientation sur l'éducation précise : « La scolarité est organisée en

cycles pour lesquels sont définis des objectifs et des programmes nationaux de

formation comportant une progression annuelle ainsi que des critères

d'évaluation (...). Pour assurer l'égalité et la réussite des élèves, l'enseignement est

adapté à leur diversité par une continuité éducative au cours de chaque cycle et tout

au long de la scolarité ». Ainsi, les programmes sont désormais établis par cycle et

non plus par année. En fonction du rythme de chaque enfant, le cycle pourra être

plus court ou plus long. L'équipe des maîtres d'un cycle peut définir les progressions,

les modalités de suivi d'un élève, d'aide aux enfants en difficultés. Selon les cas, il

est possible qu'un élève soit dans un cycle pour certaines disciplines et dans un

autre pour les autres disciplines. Les enfants sortent de leur cycle lorsqu'ils ont

acquis les compétences suffisantes.

En remettant en cause l'ancien système de succession de classes, on essaie donc

de mettre plus résolument l'enfant au coeur du système éducatif et de permettre une

adaptation plus fine à chaque cas particulier. Dans les faits, ce système peut poser

des problèmes d'organisation relativement importants.

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B) DEFINITIONS DE LA DIFFERENCIATION

Dans le Littré, on trouve les définitions suivantes:

- Différenciation : action de différencier.

- Différencier : séparer par la différence.

- Différence : étymologiquement, la différence est ce qui est écarté, séparé. Elle

est relative à des objets que l’on compare.

- Pédagogie : science de l’éducation.

La différenciation pédagogique littéralement serait une éducation donnée à des

enfants d’une même classe, mais adaptée à leurs différences.

Dans son « dictionnaire des mathématiques », Stella Baruk précise concernant la

définition de Différence que « l'idée principale est donc celle d'un écart, d'une

distance, d'une chose séparée d'une autre par le temps (une intention et sa mise à

exécution) ou par des caractères dissemblables »

Il est difficile de trouver une définition. Toutefois, en se référant à celle donnée par

plusieurs auteurs, nous pourrons peut-être nous faire une idée plus précise de ce

qu'elle est.

Le terme de pédagogie différenciée veut désigner «un effort de diversification

méthodologique susceptible de répondre à la diversité des élèves». (Louis

LEGRAND)

"Différencier, c'est avoir le souci de la personne sans renoncer à celui de la

collectivité." (P. MEIRIEU)

"La pédagogie différenciée est une démarche qui consiste à mettre en œuvre un

ensemble diversifié de moyens et de procédures d'enseignement et d'apprentissage

pour permettre à des élèves d'âge, d'aptitudes, de compétences différents, aux

savoir-faire hétérogènes d'atteindre par des voies différentes des objectifs

communs." (AUZELOUX)

" Diversifier la pédagogie c'est s'interroger sur l'éventail des démarches

simultanément possibles. " (J.P. ASTOLFI)

« Différencier, c’est organiser les interactions et les activités de sorte que chaque

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élève soit constamment ou du moins très souvent confronté aux situations

didactiques les plus fécondes pour lui. » (Philippe Perrenoud).

Ainsi, pour résumer, je pourrais définir la différenciation pédagogique comme une

démarche de l'enseignant visant à emmener vers un même objectif, tous les élèves

d'une même classe, quel que soit leur diversité. C'est par des voies différentes et

adaptées aux particularités de chacun des élèves que l'enseignant arrivera à ces

fins. Cette démarche implique que le maître ait à sa disposition tout un panel d'outils

lui permettant sa mise en place.

Si la différenciation apparaît aujourd’hui comme indispensable, il peut être

intéressant de comprendre en quoi les élèves peuvent être différents.

C) QUELLES DIFFERENCES RENCONTRE T-ON CHEZ LES ELEVES ?

1- DIFFERENCES DE PROFILS :

Selon les auteurs, nous rencontrons plusieurs critères de différenciation de profils ; il

semble important de les connaître pour la mise en place d’une différenciation.

Certains ont été recensés par Gérard de Vecchi dans «Aider les élèves à apprendre.

Nouvelles approches pédagogiques pour demain » 1994. En voici quelques

exemples :

• auditifs ou visuels pour A. de la Garanderie,

• besoin de guidage ou d'indépendance

• dépendants ou indépendants du contexte psycho-affectif

• synthétique ou analytique

• producteur ou consommateur

• réflexif / impulsif

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Auditifs ou visuels :

Antoine de la Garanderie a défini ces profils pédagogiques précisant que les

personnes dites visuelles mémorisent plus facilement ce qu’elles voient et le

visualisent dans leur tête. Ainsi, par exemple, elles s'approprient rapidement un

schéma.

Les personnes auditives quant à elles intègrent plutôt ce qu’elles entendent. Pour

mémoriser, elles font appel à la chronologie, au déroulement des choses.

Mais, nous pouvons nous interroger sur cette distinction. Est-on vraiment l'un ou

l'autre ? N'y a t-il pas des enfants qui ne sont ni vraiment l'un, ni vraiment l'autre? Au

cours de ma formation de professeur des écoles, on m'a souvent conseillé de faire

manipuler les élèves le plus souvent possible. Cela implique probablement que pour

certains élèves, entendre ou voir ne leur suffit pas, et qu'il leur est nécessaire de

toucher, de manipuler pour s'approprier les apprentissages.

Besoin de guidage ou d’indépendance :

Les enfants qui ont besoin de guidage sont souvent mal à l’aise dans les situations

de recherche. Par contre, ils comprennent rapidement les consignes lorsque celles-ci

sont assez directives. Ils ont besoin d’être souvent rassurés dans leur démarche.

En revanche, d’autres préfèrent plus de liberté et s’éloignent facilement des

consignes pour suivre une démarche qui leur semble plus adaptée. Les interventions

de l’enseignant peuvent les perturber si celui-ci tente de les faire passer par une voie

qu’ils n’auraient pas forcément choisie.

Cette dernière assertion est sans doute valable pour les élèves qui ont déjà compris

où l'enseignant voulait les amener, lorsqu'ils ont dépassé la zone proximale de

développement. Mais avant cette phase, il me semble que pour la majorité des

enfants en apprentissage le guidage du professeur est très important.

Dépendants ou indépendants du contexte psycho affectif

Certains enfants ont un comportement plus ou moins dépendant du contexte

psycho affectif dans lequel ils se trouvent. Ainsi, des élèves peuvent ne pas être

totalement réceptifs s’ils ne sont pas à l’aise dans leur classe, dans leur relation avec

l’enseignant. Leurs résultats peuvent alors être irréguliers et reflettent leurs relations.

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Alors que d’autres seront plus indifférents à cela. Quel que soit l'enseignant, ils

retiennent ce qui est intéressant dans ce qui leur est proposé. Leurs résultats sont

relativement réguliers.

Il me semble important que les élèves se sentent bien dans leur classe, ils y restent

six heures par jour et l'enseignant doit être soucieux de cet aspect, et être vigilant

quant à sa façon d'être avec chacun des enfants et ce, quel que soit son profil.

Synthétique ou analytique :

Les enfants à l’esprit synthétique se font rapidement une idée générale de ce qui est

étudié. Ceux qui ont un esprit analytique, étudient minutieusement les différents

paramètres qui interviennent et sont plutôt lents pour aboutir à une idée générale.

Producteur ou consommateur :

Certains enfants apprennent en construisant activement, sont à l’aise dans l’action,

la production. D’autres, apprennent en observant, rentrent facilement dans les

projets des autres, attendent que les autres répondent.

Ces profils pourraient peut-être être rapprochés de ceux des enfants qui ont besoin

de guidage ou d'indépendance. En effet, un élève qui a besoin de guidage n'est il

pas quelque part consommateur et celui qui a besoin d'indépendance, n'est il pas un

élève qui prend des initiatives ?

Impulsif ou réflexif :

Les enfants impulsifs prennent facilement la parole, répondent rapidement à une

question même si cela les conduit à faire une erreur.

Les enfants plutôt réflexifs, au contraire, hésitent à prendre la parole et ne la

prennent que lorsqu’ils sont certains de dire quelque chose de juste et d’intelligent.

On entend aussi très souvent une catégorisation d'enfants dits « bons, moyens ou

faibles », ou alors d'enfants « lents » ou « rapides ».

Toutes ces catégories de profils si différentes sont intéressantes à connaître pour

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éventuellement aider l'enseignant à mieux comprendre certains élèves et leurs

difficultés. Mais, il semble très difficile au sein d'une classe d'analyser les profils de

chaque élève. Tous ne relèvent certainement pas d'un seul type de profil mais de

plusieurs.

Toutefois, ce petit recensement des différences entre les élèves nous fait mieux

comprendre la diversité d’individus qui peut être rencontrée au sein d’une classe. Et

encore, celui-ci ne tient pas compte d’une hétérogénéité issue des différences

socioculturelles. Ainsi, il semblerait difficile d’envisager d’enseigner dans sa classe

comme si tous les élèves comprenaient et apprenaient de la même manière.

2- DIFFERENCES SOCIOCULTURELLES :

Tous les élèves de l'école primaire n'arrivent pas avec le même « bagage »

socio culturel. Ils viennent de toutes origines sociales, de différentes origines

culturelles : ainsi dans l'école nous serons tous amenés à enseigner autant à des

enfants d'ouvriers qu'a des enfants de cadres supérieurs, à des enfants de culture

française que de culture étrangère (arabe, indienne, africaine, anglo-saxon...). Ces

différences peuvent bien évidemment augmenter les écarts, les inégalités entre les

élèves si l'enseignant n'y prend pas garde.

En effet, un enfant qui ne parle pas ou très peu le français chez lui aura plus de

difficultés à être à l'aise dans un apprentissage en français, de même un enfant dont

les parents ont subi des échecs à l'école ne seront peut-être pas encouragés à

travailler autant que les autres....

Au contraire, les enfants nés dans les milieux dits favorisés trouveront plus de sens

aux apprentissages dispensés à l'école que ceux pour lesquels ce qui est appris à

l'école est très loin de ce qu'ils vivent au quotidien.

Il faut ainsi être attentif à toutes ces différences pour mener à bien un apprentissage

auprès de tous les élèves quelle que soit son origine socioculturelle.

Ce qui me semble important c'est que, quel qu'il soit, chaque enfant dans une classe

doit et peut apprendre. L'enseignant doit lui faciliter l'accès à l'apprentissage et se

poser alors la question de ce qui peut être différencié dans une classe.

11

D) QUE PEUT-ON DIFFERENCIER DANS UNE CLASSE ?

Afin que chaque élève soit confronté le plus souvent possible aux situations les plus

propices pour lui en terme d’apprentissage, il apparaît important d'adapter un

enseignement au plus proche des élèves. L'observation de leur comportement,

l'analyse des questions qu'ils posent, de leurs erreurs, des demandes d'aide qu'ils

formulent, constituent des indices sur la façon d'envisager de différencier la

pédagogie et d'agir sur les outils d’apprentissage, les tâches des élèves, les

situations d’apprentissage, l’étayage de l’enseignant. Cette liste n'est certainement

pas exhaustive mais me semble représentative de ce qui peut être envisagé dans

une classe.

Pour terminer, il peut être important que la stratégie choisie par l'enseignant soit

conforme ou contraire à celle que l'élève privilégierait spontanément : cela dépend

de l'objectif que l'enseignant se fixe à un moment donné.

1- DIFFERENCIER LES OUTILS D’APPRENTISSAGE

Les outils d’apprentissage c’est ce que P. Meirieu appelle « l’ensemble des

médiations utilisées par le maître ». Ce peut être à la fois « la parole, le geste, le

tableau noir, la fiche individuelle de travail, le livre ou le document, la diapositive, le

film …. En principe, ce sont tous les outils disponibles à l’école. » Il apparaît ainsi

important de varier ces outils dans la classe et de ne pas les cantonner dans des

domaines très étroits. Ils vont pouvoir servir à la structuration des connaissances, à

une aide à la mémoire, une mise à la disposition des élèves les informations

nécessaires sur un thème déjà abordé…

Pour une meilleure mémorisation, on peut ainsi penser aux outils créés

collectivement en classe : tableau récapitulant personnages, lieux, moments forts

d’une œuvre, table de Pythagore, aides à la production d’écrit ou à la réécriture,

panneaux de conjugaison ... Ces outils seront utilisés par les élèves spontanément,

au moment où ils en auront besoin pour s ‘approprier les informations jusqu’à les

intérioriser.

12

Ces outils peuvent aussi être les documents mis à la disposition des élèves : sur

papier (dictionnaire, encyclopédie, manuels…), sur informatique. Ils seront ainsi

utilisés par chacun selon son rythme de travail, sa phase de recherche…

2- DIFFERENCIER LES TÂCHES DES ELEVES

Lors de la préparation des séances, le maître va chercher à obtenir la réussite de

tous et donc envisager la différenciation en fonction de la tâche demandée aux

élèves.

Tout en conservant un objectif commun, il est possible de différencier la tâche

donnée à chacun au regard de :

- la quantité donnée : selon les enfants, le maître pourra donner plus ou moins

d’exercices, ou des exercices plus ou moins longs.

- son exécution : selon les enfants, le maître pourra plus ou moins aider les

enfants. Il n’est pas impossible de donner une partie de la réponse ou de faire

avec des élèves les plus en difficulté une partie de la tâche.

- La consigne : elle pourra être plus ou moins explicite, abstraite, détaillée.

- Son entrée : il est possible de varier les supports de travail pour entrer dans la

tâche. Ainsi, il peut être envisageable de présenter un texte de différentes

manières ( plus ou moins décontextualisé, un problème plus ou moins illustré… ).

Mais quel choix faire au quotidien ? Par exemple, l'enseignant devra t-il faire

apprendre visuellement les tables de multiplication à un élève dit « visuel » et

auditivement à un élève dit « auditif » ? Si cette méthode semble intéressante, il ne

faut pourtant pas oublier de faire connaître d'autres démarches d'apprentissage aux

élèves afin de compléter le naturel et de créer des attitudes que les élèves n'ont pas,

c'est ce qui s'appelle la pédagogie de la compensation. Cette démarche est

importante pour éviter de renforcer les différences entre les élèves. En effet,

l'enseignant doit être attentif à ne pas accroître les écarts entre les élèves.

La différenciation va aussi pouvoir être envisagée selon les situations

d’apprentissage présentées aux enfants.

13

3- DIFFERENCIER LES SITUATIONS D’APPRENTISSAGE

Les situations d'apprentissage sont les conditions, les circonstances permettant aux

élèves de construire leurs connaissances. L'enseignant doit ainsi mettre en oeuvre

les conditions optimales afin que chaque élève puisse apprendre.

Ainsi, les élèves peuvent être mis en situation de travail en groupe classe, par

groupes d'élèves ou individuellement. En fonction des objectifs de l’enseignant, celui

ci pourra varier les interactions (échanges finalisés par un apprentissage) dans la

classe en choisissant des situations d’apprentissage différentes. P. Meirieu a

caractérisé trois types de situations d’apprentissage : la situation impositive

collective, la situation individualisée et la situation interactive.

Selon ces situations, les interactions peuvent être de deux sortes :

– interactions entre maître et élèves

– interactions entre élèves.

a Les interactions entre maître et élèves :

« La situation impositive collective », selon P. Meirieu, apparaît comme la situation

la plus courante : celle dans laquelle l’enseignant présente au groupe « classe » des

connaissances que chaque élève devra s'approprier individuellement par un travail

intellectuel autonome. Ce travail en groupe « classe » est utile à la cohésion du

groupe. Il peut être particulièrement intéressant pour lancer les activités en phase

initiale d’apprentissage ou dans les phases de mise en commun des activités au

cours desquelles on formalise ce qui a été découvert et appris. Une certaine mise en

forme institutionnelle me semble d'ailleurs primordiale pour que les connaissances

soient mémorisées, enregistrées. C'est le moment où l'on va verbaliser, écrire au

tableau, faire une trace écrite, un affichage qui restera à la vue des élèves ...

« La situation individualisée », permet à chaque élève d’avancer à son rythme vers

l’objectif que l’enseignant veut lui faire atteindre grâce à un programme de travail qui

lui est propre, qui le guide. Selon P. Meirieu, ce dernier peut être présenté sous

forme de « fiche de travail personnelle, de programme informatisé, de bande

14

magnétique ».

Le travail individuel apparaît comme fondamental, c’est un moment pendant lequel

l’enfant apprend pour lui même.

Selon Vygostski, psychologue russe, l’organisation des groupements dans la classe

peut tendre à prendre en compte la zone proximale de développement : c'est la

période pendant laquelle un enfant est incapable de résoudre seul un problème

mais, par contre, s’en montre capable lorsqu’il est guidé soit par le maître soit par un

autre élève.

b Les interactions entre élèves :

« La situation interactive » apparaît comme la moins répandue. Pour P. Meirieu, la

« véritable interaction requiert que l’on étudie et mette en place les conditions d’un

conflit « socio-cognitif » dans lequel chaque membre (...) puisse confronter

réellement ses représentations avec celles de ses pairs et parvenir ainsi à une

représentation plus « juste » de la connaissance. » L'objectif n'est pas un objectif de

production, mais un objectif d'apprentissage.

Pour mettre en place une réelle situation interactive, toujours selon P. Meirieu,

l’enseignant doit la maîtriser, c’est à dire qu’il doit être sûr que les élèves puissent

réellement communiquer : les élèves doivent donc avoir pris connaissance des

mêmes informations (avant la mise en groupe), que chaque membre du groupe soit

en mesure de participer et d’apprendre individuellement.

C’est en confrontant leurs représentations que les élèves construisent leur savoir.

Le travail de groupe est intéressant si le nombre de participants, leur diversité, leur

niveau est choisi à bon escient en fonction des objectifs et des consignes. Il peut

donc y avoir des groupes de niveaux ou des groupes hétérogènes en fonction de ce

que l’enseignant veut faire passer.

L’enseignant peut aussi envisager de mettre en place des binômes, tutorats dans

lesquels dans lesquels un des deux enfants prend la place de l’enseignant, explique

sa démarche.

15

4- DIFFERENCIER L’ETAYAGE DES ELEVES

L'étayage est la manière dont on soutient ou stimule l'enfant pour l'aider à

comprendre le but à atteindre et les moyens de l'atteindre.

L’enseignant peut différencier son étayage en fonction des élèves et de leurs

difficultés à gérer une tâche.

Ainsi, sur le plan cognitif, l’enseignant peut recadrer les buts, récapituler les acquis,

ordonner les étapes, simplifier la tâche en réduisant le nombre d'actes nécessaires

pour atteindre l'objectif ( ex : puzzle : pour y arriver l'enseignant pourra préciser à

l'enfant de rechercher les bords droits pour faire le tour) … Mais aussi, il est possible

que les enfants manquent de confiance en eux, l’enseignant devra alors les

sécuriser, les encourager pour qu’ils puissent se lancer dans la tâche. Enfin, il arrive

que l’enseignant ou un autre élève soit amené à reformuler, montrer ou même

réaliser une partie de la tâche pour lancer l’élève en difficulté.

E) COMMENT DIFFERENCIER LA PEDAGOGIE ?

Face à toutes ces différences, à l’hétérogénéité de sa classe, l’enseignant doit arriver

à emmener tous ses élèves vers un même objectif. Par nature, la différenciation ne

peut concerner tous les instants pédagogiques. Mais il semble important de proposer

des moments de différenciation au cours de certaines activités et ce, au regard des

particularités, difficultés d'élèves afin de leur permettre de poursuivre leurs

apprentissages en fonction de ce qui leur convient le mieux .

De Vecchi précise qu’il est possible de différencier son enseignement dans le temps

et l’espace. C’est ce que Meirieu appelle les différenciations successives et

différenciations simultanées.

1- DIFFERENCIATION SUCCESSIVE :

C’est une différenciation qui peut être simple à envisager et organiser. Elle semble

peu « mangeuse » de temps pour l’enseignant, P. Meirieu dit qu’elle « ne soulève

pas des montagnes ».

16

La différenciation successive précise De Vecchi « porte sur l’utilisation, les uns après

les autres, de différents outils, supports ou situations d’apprentissage. »

Pour P. Meirieu, « on peut la mettre en place à un premier niveau en conservant le

fonctionnement habituel de la classe, mais en ayant le souci, dans le déroulement

même du cours, d’alterner différents outils et différentes situations d’apprentissage».

Par exemple, l’utilisation d’outils très variés est constitutif de pédagogie différenciée

successive : j’ai assisté à une séance dans laquelle l’enseignant de CM1 a

commencé sa séance en ayant écrit seulement le titre d’un texte au tableau, et en

demandant à ses élèves d’émettre des hypothèses sur ce qui allait être étudié.

Ensuite, elle l’a fait découvrir aux élèves en le lisant à haute voix, puis en leur

donnant une copie à chacun tout en le projetant sur écran avec un rétro projecteur.

Cette enseignante a utilisé plusieurs outils d’apprentissage afin de donner aux

enfants diverses possibilités d’entrer dans l’exercice de compréhension, découverte

et appropriation du texte. Sa classe était d’ailleurs très calme à ce moment, tous les

enfants avaient l’air d’être très présents, très participants malgré la difficulté du

texte : « le galet » de Elie Vine.

Le souci pour l’enseignant d’alterner les phases de travail collectif / oral avec des

phases de travail individuelles / écrites est aussi une façon d’envisager la

différenciation successive.

Pour P.Meirieu, alterner « les temps d’information collective avec des temps de

travail personnel et de mise en groupe permettra à chacun de trouver une situation

où il pourra s’approprier le savoir proposé ».

2- DIFFERENCIATION SIMULTANEE

De Vecchi précise que cette différenciation « concerne des tâches ou des

démarches variées que l’on propose simultanément aux élèves et qui doivent

permettre d’atteindre un objectif commun ou complémentaire. »

P. Meirieu, quant à lui, annonce que, dans la mise en place d’une telle

différenciation, « les difficultés sont incontestablement plus grandes ».

17

En effet, donner différentes activités aux élèves, à un même moment, dans une

même classe et ce, en fonction des besoins et des capacités de chacun est quelque

chose qui réclame beaucoup de moyens.

Il sera ainsi possible de donner du travail aux enfants en fonction de leur profil

cognitif : chaque élève ou groupe d’élèves aura un travail correspondant

précisément à chacun de leurs profils.

Pour De Vecchi il est possible de donner :

– des textes avec enchaînements logiques pour les auditifs,

– un ou plusieurs schémas, tableaux pour les visuels,

– pour les synthétiques, un document leur permettant de se faire tout de suite une

idée générale du sujet étudié, puis des éléments pour vérifier cette idée.

– enfin, pour les analytiques, il faudrait leur donner des documents leur permettant

d’aller plus progressivement vers une idée générale.

La difficulté d'une telle différenciation m’apparaît ici importante. En effet, il faut bien

connaître le profil des élèves en leur faisant passer une série de tests. Ensuite, il faut

trouver ou concevoir les documents adaptés à chaque profil d’ élève. Si cela est

certainement un grand investissement, il apparaît primordial à l’avancée de chaque

élève dans la construction de ses connaissances.

Un autre exemple de différenciation simultanée donnée par De Vecchi est le partage

des tâches, des questions sur un même sujet en fonction des compétences des

élèves, de leurs manques ou de leurs intérêts. En fin de séance, chaque groupe

présente son travail au groupe classe pour en arriver à une synthèse générale.

Ce type de différenciation semble pouvoir être mise en œuvre assez rapidement par

un enseignant, quand il connaît bien ses élèves et que la classe se retrouve, lors

d’une séance, face à une série de questions sur un sujet bien déterminé.

A côté de ce travail de groupe, il existe aussi :

– le travail en équipe dans lequel chaque enfant aura un rôle bien spécifique. Cette

18

différenciation simultanée semble aussi pouvoir être mise en oeuvre assez

aisément. Le jeu du message en CP peut en être un exemple : une équipe doit

communiquer à une autre des informations géométriques sur un objet pour le

faire trouver : l'un des élèves pourra manipuler l'objet, un autre écrire leur

description, le dernier prendra la parole pour le décrire à l'autre équipe.

– le travail en ateliers qui est souvent issu des nécessités matérielles par exemple

en maternelle.

Il sera aussi intéressant de mettre en place des groupes de niveau. A partir d’un

sujet, l’enseignant peut faire passer des petits tests pour connaître la nature de

connaissances. En fonction des résultats, il déterminera des groupes dans lesquels

les élèves reverront de manière plus ou moins poussée les bases ou approfondiront

leurs acquisitions.

Pour exemple, en arrivant au CP, les enfants ont très souvent besoin de

contextualiser, ils arrivent à compter avec des objets mais pas dans l'abstrait. Il peut

alors être intéressant de mettre dans un groupe les enfants qui savent compter avec

des objets amovibles et dans un autre groupe ceux qui ne savent compter qu'avec

des objets bien rangés.

Lors de séances de sciences, l’enseignant peut aussi organiser de la différenciation

simultanée. Après avoir fait émerger les représentations des enfants, il peut

organiser des ateliers de recherche, d’expérimentation …

Les ateliers seront organisés en fonction des obstacles auxquels les enfants devront

être confrontés. La préparation de telles séances peut être importante en terme de

temps investi.

19

II. QUELQUES ESSAIS DE PEDAGOGIE DIFFERENCIEE

La différenciation pédagogique dans une classe est un terme qui fait « peur », dans

le sens où elle entraîne bien des remises en question, notamment en ce qui

concerne l’organisation du travail. Du point de vue des enseignants, cette méthode

peut parfois sembler impraticable en raison du surplus de travail qu’elle suppose

dans un emploi du temps déjà bien rempli. Lorsque j’ai commencé à m'interroger sur

la pédagogie différenciée, j’en ai parlé à un certain nombre de professeurs des

écoles, faisant valoir que je recherchais un maximum de pistes pour envisager le

plus sereinement possible une différenciation pédagogique dans une classe. Et

effectivement, beaucoup d'entre eux m'ont répondu qu’ils étaient intéressés si je

trouvais « la recette miracle ». J’en concluais donc que si des enseignants

expérimentés réagissaient de la sorte, c’est que la mise en place d’une

différenciation pédagogique n’est pas quelque chose d’évident et que ma tâche allait

être beaucoup plus difficile que je ne l’imaginais.

Je parlerais donc ici des quelques modestes expériences tentées lors de mes

stages dans les classes.

A) LA PEDAGOGIE DIFFERENCIEE EN DEBUT DE CYCLE 3

Ainsi, lors de mon stage en CE2 en tant que professeur des écoles stagiaire,

j’envisageais de « faire » la classe en ayant particulièrement à l’esprit de mettre en

place, quand cela me semblait nécessaire, une différenciation de la pédagogie.

A ces fins, je me suis renseignée, avant de prendre la classe, auprès du professeur

des écoles titulaire du poste, pour avoir une vision globale de sa classe et des

éventuelles difficultés des uns et des autres.

En règle générale, les enfants de ce CE2 avaient un niveau assez homogène.

Pourtant quelques enfants étaient en difficulté dont un particulièrement car il n’était

20

pas encore réellement lecteur.

Par ailleurs, l’organisation de l’école faisait que des élèves de la CLIS intégraient la

classe du CE2 tous les jours à des heures précises pour les séances de

mathématiques, de français, de géographie, d'anglais. Et selon les matières, ce

n'était pas les mêmes élèves. Ceci était très formateur car j'étais tenue à une

certaine rigueur quant au respect de l'emploi du temps, et très intéressant du point

de vue de la différenciation. Toutefois cette rigueur de l'emploi du temps impliquait

que les séances de différenciation menées en mathématiques ou en français aient

lieu dans les plages horaires imparties. C'est ainsi que je n'ai pu mettre en place une

des séances que j'avais prévue.

Il est apparu que le fait de ne pas connaître les élèves était un frein à une mise en

place d’une pédagogie différenciée. P. Meirieu disait qu’il fallait un trimestre pour

évaluer les élèves, les connaître avant de pouvoir envisager une différenciation

efficace. En trois semaines, la tâche était donc délicate et bien ambitieuse. Mais ce

stage fut pour moi une occasion de mettre en application plusieurs façons de

différencier la pédagogie.

Mon objectif, à ce niveau de réflexion était d’évaluer les élèves au travers des

mathématiques. Mon directeur de mémoire, Monsieur Renaut, professeur de

mathématiques, me donna donc quelques pistes afin de m’aider à faire ces

évaluations.

1- Observation et commencement d'évaluation des élèves :

Je devais évaluer leur niveau au regard de la numération. Ainsi, les élèves, à partir

d’une droite numérique de 1 à 50, devaient trouver les nombres juste avant ou juste

après une case que je montrais. Les élèves réagissaient vite et ont montré à ce

moment une connaissance des nombres assez précise.

Mais l’organisation de l’école (deux élèves de la CLIS intégraient la classe du CE2 à

heures fixes) ne me permit pas de poursuivre cette évaluation.

21

Lors de la séquence « construction de la table de Pythagore », je devais observer les

élèves et trouver ceux qui avaient un esprit numérique et ceux qui ne l’avaient pas.

Ainsi, lors de la deuxième séance, les élèves avaient en main une enveloppe

comprenant 9 rectangles de tailles différentes (de 1 cm² à 10 cm²). L’intérieur de ces

rectangles était quadrillé et composé de carrés de un cm de côté. Les élèves avaient

été répartis en groupes de deux.

La consigne était la suivante : « Dans l’enveloppe, tu trouveras plusieurs rectangles.

Classe les comme tu le veux ». Les élèves devaient commencer à chercher un

classement individuellement, puis, après 5 minutes, mettaient en commun leurs

propositions, échangeaient leurs points de vue et choisissaient le ou les classements

qui leur semblai(en)t le(s) plus approprié(s).

A ce niveau, j'ai pu observer plusieurs types d’élèves :

➢ l es élèves qui n’ont absolument pas utilisé la démarche de comptage

• ceux qui mettaient les rectangles côte à côte et classaient ensemble les

rectangles de longueurs identiques : Caroline, Anthony, Nicolas, Michael,

Corentin

• un enfant a mis côte à côte des rectangles « pour que ça fasse plus

long » : Nicolas

• Un élève, Lakdar (élève de la CLIS) a été en difficulté pour trouver un

classement. J’ai donc décidé de lui répéter les consignes à l’oral, dans

d’autres termes : « Dans cette enveloppe, il y a des rectangles de

différentes tailles, il faut que tu les ranges. C'est toi qui décides de la

façon de les ranger ». Il n’avait pas saisi le sens de « classement ».

Après cette nouvelle façon de lui présenter les choses, il a trouvé

rapidement un classement : accoler des rectangles et classer ensemble

ceux qui avaient des cotés égaux.

➢ Les élèves qui ont compté les carrés représentés dans les rectangles :

• certains élèves ont compté tous les carrés à l’intérieur de chaque

rectangle : Margot, Florent, Marion. (annexe 1)

• d’autres ont compté le nombre de carrés sur une ligne à l’intérieur des

rectangles et ont assemblé ceux qui avaient le même nombre de carrés

22

dans une ligne : Léa, Fayrouz, Candice, Axel, Thibault, Maxime, Océane,

Malorie, Lucas, Adeline.

De ce constat, il est ressorti que certains élèves avaient un esprit plus numérique

que les autres : ceux qui ont compté les carrés sur les lignes ou les colonnes pour

pouvoir opérer un classement.

Aucun élève n’avait pris en compte simultanément deux caractères : nombre de

carrés dans une ligne et nombre de carrés dans une colonne.

A ce niveau, il aurait été possible d'envisager une différenciation en faisant travailler

d’un côté certains enfants pour essayer de développer un esprit numérique, les

familiariser avec les nombres par des jeux, des manipulations. Et d’un autre côté

mettre les autres élèves en autonomie sur un jeu.

Par exemple, avec Monsieur Renaut, nous avions envisagé pour développer un

esprit plus numérique de les faire manipuler :

– montrer des dominos et leur faire dire le plus vite possible le nombre représenté,

– les faire réagir quasiment instantanément devant des cartons de différentes

constellations (de 1 à 4),

– à partir d’un tas de carrés en carton plume, les faire compter rapidement : deux

par deux, puis faire des tas de dix, trouver rapidement le nombre de carrés

montrés par l'enseignante.

J’aurais fait faire ce type d’exercices à des enfants comme Lakdar, Nicolas, Anthony,

Michael, Caroline.

Pour les autres, je les aurais certainement fait jouer au jeu des « multifamilles » afin

de leur faire réaliser qu’il est possible de mettre en valeur deux critères pour les

classements.

Si je n’ai pu mettre en place une telle différenciation, pour les raisons d'emploi du

temps exposées ci dessus, j’ai pourtant pris un moment de mise en commun

pendant lequel plusieurs binômes ont présenté leurs propositions de classement.

Chaque binôme faisait part de ses critères de classement, avec ou sans comptage

des carrés.

Après cela, une discussion a eu lieu pour établir comment il serait possible d’écrire

ces classements en termes mathématiques.

23

+

+

=

3 + 3 + 3 + 3 + 3 = 15

5

5

5

Avec une représentation au tableau des différentes formes de présentation :

. On compte un à un les carrés sur une ligne et sur une colonne,

. On écrit à côté de chaque ligne et colonne le nombre de carrés qu'elles

contiennent.

. Avec une flèche devant chaque ligne ou colonne de carrés, on montre combien il y

en a, et on écrit les nombres en ajoutant un plus entre chacun : écriture additive.

. On écrit avec le signe multiplié dans le tableau comme ci dessous :

3 x 5 = 15

Cette manière de procéder : présenter une écriture mathématique sous des formes

différentes est une démarche au travers de laquelle on essaie d'exposer aux élèves

plusieurs représentations afin qu’il trouve dans l’une d’elle celle qui lui parle, qui lui

permettra alors de mieux comprendre, assimiler et ainsi de se donner les possibilités

de s'en resservir à bon escient.

2- Le Tutorat

Lors du stage avec les CE2, j’ai préparé une séance de numération dans laquelle

j’avais pour objectif que les élèves soient capables de nommer les différents chiffres

des nombres supérieurs à 1 000 et inférieurs à 1 000 000.

Pendant la première séance, la classe a découvert et construit le tableau des classes

de mille et classes des unités, ensuite nous avons travaillé sur ardoise pour

manipuler les noms des différents chiffres, les mettre en mémoire.

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CLASSE DES MILLE CLASSE DES UNITESCentaines Dizaines Unités Centaines Dizaines Unités

5 2 1 4 6 3

Après avoir inscrit le nombre 521 463 dans le tableau, j'ai demandé aux élèves

d’écrire sur leur ardoise le chiffre des unités de mille, des centaines, des centaines

de mille, des unités… et ce, pour tous les chiffres de ce nombre.

Dans un deuxième temps, je leur ai demandé de reconstituer un nombre en leur

dictant et nommant chaque chiffre. Par exemple : « Vous écrivez dans la colonne

des dizaines de mille : 3, dans la colonne des centaines : 5, dans la colonne des

unités : 4, dans la colonne des centaines de mille : 1 ... Chaque élève devait ensuite

montrer son ardoise avec le nombre à six chiffres reconstitué. A ce stade, les élèves

ont globalement réussi. Nous avons recommencé le même style d'exercice sur

l'ardoise deux fois pour m'assurer qu'ils avaient tous bien compris.

Ensuite, je leur ai donné à chacun un exercice individuel à faire par écrit, dans lequel

ils devaient entourer le chiffre demandé :

Lors de la correction de cet exercice, je me suis rendu compte que près de la moitié

de la classe avait eu des difficultés à réussir. J’ai donc décidé de faire une séance

supplémentaire sur cet objectif en mettant en œuvre une différenciation : le tutorat.

Je voulais que les enfants, devant les mêmes exercices, soient en situation de

réussite. J’ai donc essayé de faire en sorte qu’ils vivent une situation différente

devant ces exercices. Pour cela, je les ai mis en binôme : avec un enfant qui n’avait

aucun souci devant l’exercice et un enfant qui se sentait en difficultés.

25

Les consignes étaient les suivantes : « Je vais vous donner les mêmes exercices

qu’hier. Celui qui a le moins de difficultés va aider l’autre sans JAMAIS donner la

réponse. Pour cela, il va expliquer comment il arrive à trouver le nom des chiffres

dans les nombres. » Cette situation dans laquelle un élève prend plus ou moins le

rôle du maître est ce que l'on appelle le tutorat.

J’ai vraiment insisté pour que les réponses ne soient pas données par les plus

« forts » en leur faisant comprendre que ça n’aiderait pas les autres, qu’au contraire

ça ne leur apprendrait rien. Par ailleurs, j’ai indiqué aux tuteurs que le fait d’arriver à

expliquer leur démarche était un travail très important pour eux parce qu’il est difficile

de le faire.

Ce type d’exercice était nouveau pour eux, mais ils ont bien compris le sens de la

démarche et ont tous « joué » le jeu très sérieusement. Pendant que les enfants

étaient en binôme (annexe 2), je passais auprès de chacun d’eux en leur demandant

comment cela se passait, si l’élève « fort » arrivait à expliquer sa démarche et si celui

qui avait des difficultés entrevoyait une nouvelle façon de réussir l’exercice. Dans

tous les cas, je faisais une mini évaluation pour vérifier l’évolution de l’élève, et si

besoin je complétais les explications ou demandais aux binômes de continuer dans

le même sens.

Pour la constitution des binômes, j’avais demandé aux enfants quels étaient ceux qui

pensaient avoir besoin de nouvelles explications. En général, ceux que j’avais

diagnostiqué comme tels ressentaient ce besoin. Ils ont dans ce cas levé la main

pour demander une nouvelle aide. Toutefois, un enfant, Lucas, pensait avoir très

bien réussi son exercice et a été étonné que je lui dise le contraire. Et une élève, Léa

que je ne pensais pas en difficulté a demandé une aide.

A la fin de cette séance, l’ensemble des élèves en difficulté avait réussi. Je leur ai

donné un exercice similaire : j'écrivais un nombre au tableau, ils devaient le recopier

et entourer le chiffre que je leur nommais : sur treize nombres, cinq élèves n'ont fait

aucune erreur ou une seule, un enfant en a fait trois sur treize, quatre autres : deux

sur treize.

Cette séance de numération présentée sous un angle nouveau a, je l’espère, permis

aux élèves en difficulté d’être confrontés à une démarche différente de la leur. Les

limites des essais de différenciation pédagogique en stage se font sentir puisqu'il

aurait évidemment été important de voir les effets à long terme de cette démarche.

26

3- Un exemple de différenciation successive : des entrées multiples pour un même sujet

La différenciation peut aussi et surtout être envisagée lors de l’entrée dans une

matière : présenter de différentes façons un même sujet.

J’ai essayé de faire cela lors d’une séance consacrée aux problèmes. J’avais

souhaité faire prendre conscience aux élèves que la schématisation pouvait être une

aide à la résolution de problème.

Pour cela, je me suis inspirée du « Brissiaud » CE2. J’ai écrit au tableau un énoncé

de problème : « Madame Dupont achète quatre boîtes de douze crayons. Combien

y a t-il de crayons au total ? » A côté, j’avais affiché les réponses de trois enfants

fictifs, en indiquant à la classe : que pensez vous des réponses de chacun de ces

élèves ?

Les élèves devaient alors observer trois démarches différentes de résolution du

problème et les analyser collectivement. Certains enfants ont réagi à la solution de

Sébastien et ont trouvé tout de suite qu’elle était erronée, d’autres ont reconnu dans

le schéma de Cécile les crayons, d’autres encore ont reconnu dans le schéma de

Mélanie les boîtes et les crayons.

La suite de la séance a été consacrée à identifier l’intérêt de faire un schéma et

surtout un schéma qui reproduit l’essentiel des informations sans représenter les

détails inutiles.

Cette entrée dans la séance a été intéressante car elle a permis de découvrir

plusieurs démarches et de constater les avantages et les inconvénients de chacune

d’elles. J'ai alors donné des execices d'application qui étaient les suivants :

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– La salle de théatre a 86 places (80 places assises et 6 strapontins). Le théâtre a

vendu 59 billets pour la représentation de ce soir. Combien reste t-il de places

vides ?

– Dans le parking, il y a 5 rangées de 12 places de voitures. 43 voitures sont déjà

garées. Combien reste t-il de places vides ?

Ainsi, lors de ces exercices, les élèves ont réussi à faire un schéma dont l'intérêt n'a

pas été compris par tous de la même manière :

> pour certains, il ne leur a servi à rien pour trouver la réponse, ils l'ont fait parce qu'il

fallait le faire,

> pour d'autres, il leur a permis de vérifier leur réponse,

> pour d'autres encore, il les a perturbés : ils n'arrivaient pas à prendre de recul et se

sont embrouillés dans la représentation des problèmes.

En général, tous avaient compris qu'un schéma ne doit pas représenter des

informations inutiles (aucun n’a dessiné des voitures ou de places de théâtre), mais

certains avaient encore du mal à en réaliser un qui les aide à trouver la réponse.

Au final, seuls deux élèves (Mélissa et Thibault) ont tiré profit d'un schéma pour

trouver la solution ou s'assurer de la bonne réponse. Pour ces deux élèves, cette

séance a été certainement fructueuse, et si j'étais restée dans la classe, je pense

qu'il aurait été intéressant de leur en faire faire par la suite. Pour les autres, cette

séance n'a pas été utile, ils n'ont pas compris l'intérêt de faire un schéma.

En règle générale, pour les enfants de cet âge, le schéma, cette représentation

« abstraite » d'un problème, semble ne pas être encore chose facile ; toutefois,

certains enfants raisonnent mieux avec et il semble important qu'ils aient été mis en

présence. En terme de différenciation, il serait intéressant de pouvoir comprendre

pourquoi certains enfants savent tirer parti d'un schéma et d'autres non. Qu'est-ce

qui peut faire la différence entre les deux ? Serait-ce que certains ont un profil

essentiellement visuel comme le disait A. de la Garanderie et pas les autres ? La

réponse à cette question semble encore assez floue mais, la différenciation peut se

faire dans le fait de proposer ou non un schéma.

28

4- Un exemple de différenciation simultanée : les ateliers de lecture

Lors de mon stage en CE2, j’ai constaté que certains élèves avaient du mal à

comprendre les consignes, d’autres du mal à lire et à comprendre un texte.

J’ai donc décidé d’organiser des ateliers de lecture. Ces ateliers avaient trois

objectifs : être capable de segmenter correctement une phrase, de développer la

compréhension de texte, de trouver des d’indices qui permettent de développer

l’attention et l’anticipation.

Ne connaissant pas encore parfaitement le niveau de tous les élèves, je décidai de

donner un premier exercice identique pour tous : la segmentation d’une phrase et de

donner deux autres exercices sur le même thème mais progressivement plus

difficiles aux enfants qui réussissaient les premiers.

a La segmentation de phrases

1er exercice :

2 ème exercice :

29

3ème exercice :

Pour les élèves en difficulté, j'avais pour objectif de les regrouper pour les guider

dans l’exercice qui leur posait problème.

30

Ainsi, pour la segmentation d’une phrase, seul Axel, un enfant qui a encore du mal à

déchiffrer n’a pu faire les trois exercices et a demandé de l’aide. Je me suis donc

installée à côté de lui et lui ai fait répéter la consigne et préciser ce que voulait dire

«découper une phrase en mots ». Puis, je lui ai demandé de me rappeler ce qu'était

une phrase et de quoi une phrase était constituée. Ce à quoi il a répondu : « une

phrase est une suite de mots qui a un sens, elle commence par une majuscule et finit

par un point ». Puis, je lui ai demandé si ce qu'il avait sous les yeux ressemblait à

une phrase comme il avait l'habitude d'en voir. Axel, après observation de l'exercice

m'a répondu : « non ». Je lui ai alors demandé ce qu'il faudrait pour que ça devienne

une phrase, il m'a dit : « il faut trouver les mots ». Il a cherché le premier mot de la

phrase et l'a trouvé facilement, je lui ai demandé de faire un trait de séparation après

« la » et l'ai encouragé à poursuivre seul, ce qu'il a fait. Il a ensuite fait le deuxième

exercice et même s'il n'a pas réussi à séparer exactement tous les mots de la

phrase, il a pu avancer à son rythme sans être en échec.

b La compréhension d'un texte

Ensuite, deux élèves ne sont pas arrivés à comprendre ce qui était attendu d’eux

dans l’exercice « des mots intrus » :

31

Les élèves devaient remplacer les mots intrus par les « bons » mots, deux ont été en

difficultés : Océane et Axel. Le fait qu’Océane n’ait pas réussi de prime abord cet

exercice n’a pas été étonnant. En effet, elle faisait partie des enfants qui

régulièrement « bloquaient » sur les consignes. J’ai donc réuni ces deux élèves

autour d’une table et nous avons revu ensemble les consignes, reformulé et pris des

exemples très concrets et relu ensemble le début du texte à haute voix. Océane a

alors réussi rapidement son travail, pendant qu’Axel était plus long car gêné par ses

difficultés de lecture. Je lui ai donc lu à haute voix tout le texte pour qu’il s’en

imprègne.

On peut donc remarquer que les échecs de certains enfants devant certains

exercices sont souvent dus davantage à des incompréhensions de ce qu'on attend

d'eux, plutôt qu'à des déficiences notionnelles ou intellectuelles. Ainsi, la consigne

qui a, en principe, pour but d'être claire peut avoir pour effet d'obscurcir une tâche.

En tant que professeur des écoles, il faut donc être vigilant à ne pas risquer de faire

échouer des enfants en cachant une tâche simple par une consigne compliquée.

32

c La prise d'indices

Pendant ce temps, les autres continuaient les exercices à leur rythme. Mais

concernant la remise en ordre d’un texte dont les lignes avaient été mélangées, six

élèves se sont trouvés devant un obstacle. Voici ce texte :

J'ai regroupé ces élèves et nous avons reformulé ensemble ce qui devait être fait,

ceci ne leur posait pas de problème. En revanche ils avaient de grandes difficultés à

prendre du recul par rapport au texte et à trouver une démarche efficace pour s’en

sortir. Au cours de la discussion, un élève a découvert les deux premières phrases :

« 1 - un jour le prince de Motordu, 2 - dit à son fils : ».

Il a expliqué : « c'est parce qu'une histoire peut commencer par « un jour » et le père

s'adresse à son fils ».

Sa proposition était juste mais il n’avait pas convaincu les autres.

Nous avons alors essayé de découvrir ensemble les indices qui pouvaient nous

assurer qu’il avait raison. Pour les aider, je leur ai posé quelques questions : « Par

quoi commence toujours une phrase ? Combien de phrases commencent par une

majuscule dans ce texte ? Les trois phrases qui commencent par une majuscule

donnent-elles toutes les informations nécessaires pour que l'on sache de qui on

parle ? Nous avons ensuite tenté de mettre en première phrase du texte la n°3, puis

la n°10 et à chaque fois, nous nous sommes interrogés sur le sens que pouvait avoir

un texte qui commençait avec elles.

Les enfants en ont vite conclu que dans les phrases n°3 et n°10, « le » et « te » ne

désignaient personne de connu. Ils sont alors tombés d'accord pour dire que la

33

phrase n°1 était la première du texte.

Ensuite, je leur ai lu à haute voix la première phrase suivie de la deuxième et leur ai

demandé : « est-ce que ça veut dire quelque chose ? », ils ont ri et répondu « non ».

Je leur ai donc suggéré de faire la même chose avec toutes les phrases en insistant

sur le fait que la phrase devait avoir un sens, ils ont fait cela collectivement et en ont

conclu que seule la n° 4 pouvait convenir.

La phase suivante a été de leur faire dire qu'au regard de la ponctuation en fin de

phrase 4, il était fort probable que la phrase suivante commence par un tiret

(dialogue).

Je les ai alors laissés afin qu’ils continuent ensemble la démarche de recherche

d'indices.

Mais ceci est resté difficile pour eux et d'autant plus difficile que le texte n'était pas

simple en soi avec ses mots « tordus ». Ceci a certainement été un obstacle pour

certains élèves, il aurait été intéressant que je recommence un exercice du même

style sans ces fameux mots !.

Lors d’une deuxième séance, nous avons corrigé ensemble les différents exercices

et mis en avant les démarches des uns et des autres.

d Analyse de la séance

Au regard de cette séance, je pense avoir laissé trop longtemps les enfants évoluer à

leur rythme. Il aurait peut être été plus approprié en terme de différenciation et

d'intérêt pour eux, de revenir sur chacun des exercices au cours de cette même

séance, afin d'échanger sur les procédures utilisées par les uns et des autres.

Entendre comment les autres ont procédé peut donner des pistes de travail, de

nouvelles démarches à ceux qui sont éventuellement en difficultés. Par ailleurs, ma

démarche était de ne pas leur donner de début de réponse mais de les mettre sur la

voie, cela en a peut-être pénalisé certains. Lors de cette séance d'ateliers de lecture,

j'ai pu être proche des enfants qui avaient des difficultés à des moments précis et

essayer de mettre en place un étayage adapté pour les faire avancer.

34

5- BILAN

Ces moments de différenciation pédagogique en CE2 ont été très intéressants pour

moi en tant que professeur stagiaire (j'ai pu toucher du doigt ce que peut être la

pédagogie différenciée), mais aussi pour les enfants qui se trouvent dans des

situations de classe différentes et apprécient le changement de rythme.

Après les séances décrites ci-dessus, j'ai le sentiment d'avoir mis en oeuvre des

moyens qui me permettent d'être attentive à ce que tous les enfants soient en

situation d'apprentissage, à ne pas en laisser « sur le côté ». Si certains élèves ont

pu bénéficier de cette pédagogie, il est difficile de se rendre compte qui en a

réellement profité à long terme du fait de la durée du stage. Mais l'implication des

élèves, le sérieux dont ils ont fait preuve lors de ces moments me laissent penser

qu'il n'est pas vain de les organiser, au contraire, même si je n'ai pu me rendre

compte à long terme de leurs effets.

Par ailleurs, j'ai réalisé la difficulté à bien noter les réactions des élèves, leurs

facilités ou leurs difficultés lorsque nous sommes dans des moments collectifs à

l'oral. Je pense particulièrement au début de la séance « problème », moment dans

lequel je n'ai certainement pas été assez attentive à leurs réactions face aux trois

propositions du tableau. En effet, il aurait été intéressant de noter comment chacun

réagissait devant les trois propositions afin de mieux adapter la suite de la séance.

B) PEDAGOGIE DIFFERENCIEE EN DEBUT DE CYCLE 2

A mon arrivée dans la classe maternelle de moyenne section / grande section, j'ai

tenté aussi de mettre en place des moments de différenciation pédagogique.

Dans cette classe, les 6 enfants de moyenne section étaient relativement autonomes

et de bon niveau et parmi les 20 « grands », 2 élèves étaient en difficultés et deux

autres particulièrement lents à démarrer tout travail.

Ainsi, lors d'une séance de littérature : « la belle au bois dormant » de Charles

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Perrault, j'ai décidé de mettre en place des séances communes aux deux niveaux

pour ce qui est de la lecture et de la découverte du conte et de différencier la

pédagogie lors des ateliers en adaptant les objectifs de travail entre les « moyens »

et les « grands ». J'allais donc mettre en place des moments de différenciation

simultanée.

J'ai choisi de différencier de la sorte, toutefois, cette différenciation n'était pas la

seule possible. En effet, il aurait été envisageable de différencier au regard des

capacités des enfants. La classe de grande section est à cheval sur deux cycles, et

c'est en cours d'année que les élèves « entrent » progressivement dans le cycle 2.

Ainsi, les enfants de grande section qui avaient le plus de difficultés auraient pu être

intégrés à certains ateliers de moyens. De même, il aurait été possible d'associer

certains moyens aux travaux des grands.

1- DES ATELIERS CHEZ LES MOYENS/GRANDS

Après avoir découvert en séance collective la couverture de l'album et travaillé sur

les mots du titre, les ateliers mis en place étaient :

– 1er : Puzzle : reconstituer la couverture de l'album et le titre.

Pour les « grands », la couverture de l'album avait été découpée en 5

morceaux avec des lignes courbes (Cf annexe 3) ; alors que pour les

moyens, il n'y avait que 4 morceaux coupés en lignes droites. (Cf

annexe4)

Pour reconstituer le titre, les grands avaient des étiquettes à découper et à

remettre en ordre avec le modèle au tableau, (Cf annexe 5) alors que les

moyens avaient aussi des étiquettes à remettre en ordre mais ils avaient,

eux, le modèle sous les yeux. (Cf annexe 6)

A ce niveau, la différenciation choisie n'était pas la seule envisageable. En

effet, la différenciation pour un puzzle peut se pratiquer sur le nombre et

les formes des morceaux, mais aussi, sur l'utilisation ou non de l'image de

la couverture, la présence ou non du modèle, etc.

– 2ème : Graphisme : je n'ai pas différencié cet atelier. Les grands et les

moyens avaient les mêmes tracés à reproduire : des ponts, des vagues,

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des ronds, des étoiles, des traits. (Cf annexe 7)

– 3ème : grande section : discriminer le mot « belle ». Ils devaient l'entourer

quand ils le retrouvaient dans un extrait du texte puis ils devaient

l'écrire.(Cf annexe 8)

– 4ème : moyenne section : compléter un mot lacunaire : « DORMANT » par

les lettres manquantes. (Cf annexe 9)

Pour cette séance, j'avais prévu d'être particulièrement présente avec les 4 enfants

les plus en difficulté ou lents (grande section), dans l'atelier de recherche et d'écriture

du mot « belle ». C'est ainsi que je leur ai demandé quelle était la première lettre du

mot belle et ensuite quelles lettres il y avait dans ce mot. Après cela, je restais à côté

d'eux pour les encourager à retrouver ce mot puis à l'écrire. Seul Kenny a eu

quelques problèmes de reconnaissance visuelle. Peut-être aurait-il mieux valu qu'il

commençât l'exercice par l'écriture du mot afin de bien mémoriser chacune des

lettres, avant de le rechercher visuellement ? Lorsque j'ai estimé que ces élèves

étaient sur la bonne voie, je me suis déplacée vers les autres ateliers afin de réguler

éventuellement ceux qui avaient des difficultés.

2- ANALYSE

L'atelier puzzle ne leur a pas posé de problème particulier. Au vu de ce que faisaient

les enfants, je pense qu'ils ont tous essayé de reconstituer la couverture grâce au

modèle qu'ils avaient sous les yeux (pour les moyens) ou au tableau (pour les

grands). Quant à l'atelier graphisme, certains enfants ont été en difficultés : Zoé chez

les moyens n'arrivait pas à faire les vagues, Gabriel (un grand) avait du mal à faire

les étoiles dans les cercles. Je leur ai donné les moyens d'y parvenir en leur

montrant le geste, en leur faisant faire, d'abord avec moi puis seuls et pour Zoé

particulièrement, en faisant le geste sur une feuille à part et en plus grand format.

Il me semble aujourd'hui que les moyens et certains «grands» n'ont pas réussi par

manque de guidage de ma part : lors de la présentation des ateliers, je n'ai pas

assez explicité et démontré comment ils devaient faire les gestes pour réussir, de

plus, j'aurais peut-être du différencier entre les moyens et les grands et agrandir les

tracés pour les moyens.

La différenciation simultanée est souvent mise en place en maternelle avec les

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ateliers. Pendant ce stage, je me suis rendu compte de son intérêt et des difficultés à

la mettre en oeuvre avec des enfants de ces niveaux. En effet, en maternelle, les

enfants ne sont pas totalement autonomes, il est donc nécessaire d'organiser des

ateliers qui permettent à l'enseignant d'être avec un groupe d'enfants (selon les

difficultés ou les objectifs de la séance) pendant que les autres travaillent seuls.

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CONCLUSION

Lors de toutes ces expériences de pédagogie différenciée, je ne sais pas si j'ai

réellement été efficace auprès des élèves, trois semaines de stage ne permettent

pas d'avoir le recul nécessaire pour constater leur évolution en termes

d'apprentissages. En effet, le temps d'un stage est très court pour bien connaître les

élèves, prendre ses marques tant pour eux que pour le professeur des écoles

stagiaire que j'étais, et c'est encore plus court pour mettre en place des moments de

différenciation et se rendre compte de leurs effets sur le long terme. Toutefois, ces

moments de différenciation m'ont permis de confirmer ce que je ressentais

auparavant : la différenciation est nécessaire. Elle est d'ailleurs régulièrement mise

en place sans que l'on s'en rende compte : alternance de moments collectifs,

individuels, manipulation, recherches... c'est la différenciation successive. Toutes ces

expériences m'ont fait entrevoir qu'il ne faut pas craindre d'utiliser les outils à notre

disposition pour aider les élèves et la pédagogie différenciée en fait partie.

Si certains moments de différenciation semblent plus lourds à préparer, organiser,

mettre en place, je pense à la différenciation simultanée, il ne faut pas hésiter à faire

des essais, à prendre des risques, à se lancer afin d'être plus à l'écoute, à la

disposition des élèves, quitte éventuellement à se rendre compte des erreurs : pour

alors y remédier. A ce stade, je me rends compte encore du chemin qu'il me reste à

parcourir pour être à l'aise dans l'évaluation des élèves afin de mieux les connaître et

adapter la différenciation à leurs besoins.

Mes stages m'ont permis de commencer à faire des essais et m'ont donné envie de

continuer dans cette voie afin que les élèves puissent apprendre dans les meilleures

conditions possibles, développent au maximum leurs capacités afin d'avancer vers

un même but : devenir les adultes responsables de demain.

39

BIBLIOGRAPHIE

Dictionnaire de la pédagogie, Larousse, Bordas, Paris

Philippe MEIRIEU, L'école, mode d'emploi. « des méthodes actives à la pédagogie

différenciée » , 1995, ESF éditeur, Pédagogie

Michel, PERRAUDEAU, les cycles et la différenciation pédagogique, 1994, Colin,

Pratique pédagogique

Gérard, De VECCHI, Aider les élèves à apprendre, les nouvelles approches

pédagogique pour demain, 1992, Hachette, Pédagogie pour demain

40

A N N E X E S

ANNEXE 1

ANNEXE 2

ANNEXE 3

ANNEXE 4

ANNEXE 5

ANNEXE 6

ANNEXE 7

ANNEXE 8

ANNEXE 9

Ecris

Comment mettre en place une pédagogie différenciée

au sein d'une classe

afin d'assurer les apprentissages

auprès de chaque enfant ?

Résumé :

Les difficultés de gestion d'une classe et la diversité des élèves ne doivent

pas faire oublier chaque enfant quel qu'il soit.

En mettant en place des moments de différenciation pédagogique lors de

mes stages, j'ai souhaité étayer ma réflexion sur ce qu'est la pédagogie

différenciée et ce qu'elle implique au quotidien.

Mots clés :

– pédagogie différenciée

– évaluation

– différenciation simultanée

– différenciation successive

– tutorat