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Introduction Ce « Panorama de jurisprudence » rassemble les principales décisions (plus de 50) ayant retenu notre attention au titre de l’année 2015, en droit de la propriété intellectuelle et qui ont fait l’objet de commentaires dans nos publications régulières. Il s’agit d’une sélection subjective qui, bien entendu, ne recence pas l’ensemble des décisions rendues mais une partie seulement tant la matière, riche et vivante, donne lieu à de multiples cas de jurisprudence. Ces décisions ont été sélectionnées au fur et à mesure de l’année à partir de différents critères : leur intérêt pratique, leur valeur de principe, leur valeur d’exemple et l’éclairage qu’elles donnent sur certaines questions en particulier celles que nous rencontrons fréquemment dans notre pratique. Il s’inscrit dans la continuité des panoramas de jurisprudence que nous publions régulièrement dans d’autres domaines du droit en particulier en droit de la distribution. Premier hors-série sur la Propriété Intellectuelle, il a vocation à être publié tous les ans pour offrir à nos lecteurs une compilation des décisions significatives rendues l’année écoulée. Nos commentaires s’articulent en trois rubriques : « Ce qu’il faut retenir », pour résumer le sens de la solution dégagée ; «Pour approfondir », pour mettre en évidence les motifs de la décision ; «A rapprocher», qui renvoie à une décision antérieure ou un texte. L’ensemble s’articule autour de trois thèmes : marques et signes distinctifs, propriété littéraire et artistique, Concurrence déloyale et parasitisme. Excellente lecture. SIMON Associés PARIS NANTES MONTPELLIER GRENOBLE LYON FORT-DE-FRANCE BORDEAUX* CHAMBÉRY* CLERMONT-FERRAND* GRENOBLE* LE HAVRE* POITIERS* ROUEN* STRASBOURG* TOULOUSE* ALGÉRIE** BELGIQUE** BRÉSIL** CAMEROUN** CHINE** CHYPRE** CÔTE D’IVOIRE** CORÉE DU SUD** ÉTATS-UNIS** INDONESIE** LUXEMBOURG** MAROC** RD CONGO** SENEGAL** TUNISIE** *Réseau SIMON Avocats **Convention Organique Internationale www.simonassocies.com

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Introduction Ce « Panorama de jurisprudence » rassemble les principales décisions (plus de 50) ayant retenu notre attention au titre de l’année 2015, en droit de la propriété intellectuelle et qui ont fait l’objet de commentaires dans nos publications régulières. Il s’agit d’une sélection subjective qui, bien entendu, ne recence pas l’ensemble des décisions rendues mais une partie seulement tant la matière, riche et vivante, donne lieu à de multiples cas de jurisprudence. Ces décisions ont été sélectionnées au fur et à mesure de l’année à partir de différents critères : leur intérêt pratique, leur valeur de principe, leur valeur d’exemple et l’éclairage qu’elles donnent sur certaines questions en particulier celles que nous rencontrons fréquemment dans notre pratique. Il s’inscrit dans la continuité des panoramas de jurisprudence que nous publions

régulièrement dans d’autres domaines du droit en particulier en droit de la distribution. Premier hors-série sur la Propriété Intellectuelle, il a vocation à être publié tous les ans pour offrir à nos lecteurs une compilation des décisions significatives rendues l’année écoulée. Nos commentaires s’articulent en trois rubriques : « Ce qu’il faut retenir », pour résumer le sens de la solution dégagée ; «Pour approfondir », pour mettre en évidence les motifs de la décision ; «A rapprocher», qui renvoie à une décision antérieure ou un texte. L’ensemble s’articule autour de trois thèmes : marques et signes distinctifs, propriété littéraire et artistique, Concurrence déloyale et parasitisme. Excellente lecture.

SIMON Associés

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SOMMAIRE

I. MARQUES ET SIGNES DISTINCTIFS p. 4

PROTECTION p. 4 La vocation décorative du signe empêche son appropriation à titre de marque Cass. com., 6 janvier 2015, pourvoi n°13-17.108

p. 4

Bateaux Mouches : considérations sur un dépôt malencontreux Cass. com., 3 février 2015, pourvoi n°13-18.025

p. 4

Les cigarettes électroniques se frottent aux marques TGI Paris, 19 mars 2015, RG n°13/16958

p. 5

Revirement sur vente-privee.com : la marque est distinctive selon la Cour d’appel de Paris CA Paris, 31 mars 2015, RG n°13/23127

p. 6

Distinctivité de justesse de l’Argus CA Paris, 12 mai 2015, RG n°13/23675

p. 7

Quand la partie graphique d’un signe donne sa distinctivité à la marque CA Paris, 5 juin 2015, RG n°14/10898

p. 8

Caractère distinctif et incidence de l’usage TGI Paris, 13 novembre 2015, RG n°13/15560

p. 8

EXPLOITATION p. 9 Usage de la marque sous une forme modifiée et risque de déchéance Cass. com., 3 mars 2015, pourvoi n°13-22.900 p. 9

Sortie de réseau et cessation d’usage des signes distinctifs CA Douai, 8 avril 2015, RG n°14/02671 p. 9

L’usage d’un mot dans son sens courant n’est pas un usage à titre de marque CA Paris, 12 mai 2015, RG n°14/04246 p. 10

Usage de la marque sous une forme modifiée et absence de déchéance Cass. com., 12 mai 2015, pourvoi n°14-14648

p. 11

Quand l’interprétation d’un accord de coexistence nécessite encore une interprétation CA Angers, 2 juin 2015, RG n°15/01113 p. 11

Les formalités auprès de l’INPI liées à la cession d’une marque sont essentielles CA Paris, 30 juin 2015, RG n°14/03937 p. 12

La preuve de l’usage sérieux de la marque pour éviter la déchéance Cass. com., 15 septembre 2015, pourvoi n°14-19.497 p. 13

Déchéance de la marque et évolution du signe CA Paris, 20 octobre 2015, RG n°14/14554 p. 13

La transaction doit être exécutée de bonne foi CA Paris, 30 octobre 2015, RG n°14/23955

p. 15

Précisions sur les obligations de la tête de réseau française en cas de crise de la marque CA Paris, 16 décembre 2015, RG n°13/14048

p. 16

CONTREFACON p. 17 Illustration de la force obligatoire d’un accord de coexistence CA Angers, 6 janvier 2015, RG n°12/02447 p. 17

Marque renommée et forclusion par tolérance Cass. com., 6 janvier 2015, pourvoi n°13-21940

p. 17

La violation d’un accord de coexistence constitue une contrefaçon Cass. com., 10 février 2015, pourvoi n°13-24.979

p. 18

Incidence de la renommée de la marque sur l’appréciation du risque de confusion CA Paris, 17 février 2015, RG n°12/22312

p. 19

L’usage de la marque d’autrui à titre de mots-clés, application des principes TGI Paris, 5 mars 2015, RG n°13/13092

p. 20

La forclusion par tolérance n’est opposable qu’à l’action dirigée contre une marque postérieure CA Paris, 10 mars 2015, RG n°13/21370 p. 20

Contrefaçon et usage du signe d’autrui en tant qu’identifiant commercial Cass. com., 31 mars 2015, pourvois n°13-21.300 et 13-21.345

p. 21

Contrefaçon et impression d’ensemble produite par les signes Cass. com., 12 mai 2015, pourvoi n°14-14.774

p. 21

L’appréciation de la contrefaçon est indépendante des conditions d’exploitation de la marque Cass. com., 23 juin 2015, pourvoi n°14-13.011

p. 22

Les particularités procédurales du référé-contrefaçon CA Douai, 17 septembre 2015, RG n°14/02031

p. 23

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II. PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE p. 23

OBJET ET PROTECTION p. 23 La personne morale ne peut être « auteur » au sens du Code de la propriété intellectuelle Cass. civ. 1ère, 15 janvier 2015, pourvoi n°13-23.566

p. 23

Base de données : comment restreindre l’utilisation des données par des tiers ? CJUE, 15 janvier 2015, aff. C-30/14

p. 24

Appréciation de « l’investissement substantiel » nécessaire à la protection des bases de données Cass. com., 10 février 2015, pourvoi n°12-26.023

p. 25

Œuvre collective : illustration CA Paris, 22 mai 2015, RG n°11/19595

p. 25

L’originalité doit se prouver CA Paris, 29 mai 2015, RG n°13/18038

p. 26

Le droit d’auteur appliqué aux imprimés : illustration des enjeux pour la mode CA Paris, 2 juin 2015, RG n°14/01233

p. 27

Stand de salon professionnel et droit d’auteur CA Paris, 30 juin 2015, RG n°14/05098

p. 28

Les créations utilitaires et le droit d’auteur CA Douai, 17 septembre 2015, RG n°13/05073

p. 28

L’œuvre collective, le salarié et la liberté de création Cass. soc, 22 septembre 2015, pourvoi n°13-18.803

p. 29

Base de données et droits du producteur Cass. civ. 1ère, 12 novembre 2015, pourvoi n°14-14.501

p. 30

EXPLOITATION ET DEFENSE p. 30 L’exception de parodie : oui lorsqu’il s’agit d’humour TGI Paris, 15 janvier 2015, RG n°14/13168

p. 30

Contrefaçon de droit d’auteur et usage publicitaire non autorisé d’une photographie CA Paris, 7 avril 2015, RG n° 13/21690

p. 31

L’assignation en contrefaçon doit être précise CA Paris, 7 avril 2015, RG n°14/20358

p. 32

Exceptions au droit d’auteur et balance des intérêts Cass. civ. 1ère, 15 mai 2015, pourvoi n°13-27.391

p. 32

Contrefaçon de droit d’auteur : le risque de confusion n’est pas un facteur pertinent Cass. com., 15 mai 2015, pourvoi n°13-28116

p. 33

La contrefaçon s’apprécie d’après les ressemblances Cass. civ. 1ère, 30 septembre 2015, pourvoi n°14-19105

p. 34

III. CONCURRENCE DELOYALE ET PARASITISME p. 34 La preuve d’investissements est une condition de l’action en parasitisme Cass. com., 10 février 2015, pourvoi n°13-24399

p. 34

La reprise d’un concept bancaire : la banque sanctionnée Cass. com., 31 mars 2015, pourvoi n°14-12391

p. 35

Concurrence déloyale et contrefaçon Cass. civ. 1ère, 9 avril 2015, pourvoi n°14-11853

p. 36

Interdiction d’utiliser les couleurs liées aux signes distinctifs d’un réseau : distinction responsabilité contractuelle et délictuelle CA Colmar, 20 mai 2015, RG n°14/00639 et CA Colmar, 3 juin 2015, RG n°14/03031

p. 36

Concurrence parasitaire et reprise du slogan d’un concurrent Cass. com., 9 juin 2015, pourvoi n°14-11.242

p. 37

Signes distinctifs d’un réseau et concurrence déloyale CA Lyon, 25 juin 2015, RG n°13/04365

p. 38

Copie d’un site web et parasitisme CA Paris, 7 octobre 2015, RG N°11/03744

p. 38

Quand deux géants du luxe s’affrontent quant à leur communication sur fond de parasitisme CA Paris, 21 octobre 2015, RG n° 13/08861

p. 39

Idée publicitaire et concurrence déloyale Cass. com., 24 novembre 2015, pourvoi n°14-16806

p. 41

Internet et pratiques commerciales trompeuses : illustration TGI Paris, 4 décembre 2015, inédit

p. 41

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I. MARQUES ET SIGNES DISTINCTIFS

PROTECTION

La vocation décorative du signe empêche son

appropriation à titre de marque Cass. com., 6 janvier 2015, pourvoi n°13-17.108

Ce qu’il faut retenir : Un signe apposé sur des produits uniquement à des fins décoratives ne peut être approprié en tant que marque. Pour approfondir : La question de la distinctivité du signe est, de façon récurrente, au cœur du contentieux en matière de marque. Dans cette affaire, la validité des marques

I♥Paris et J♥PARIS était contestée en raison d’une absence prétendue de distinctivité. C’est d’ailleurs la position retenue par la Cour d’appel de Paris qui avait annulé les marques. Par arrêt du 6 janvier 2015, la Cour de cassation va rappeler le principe selon lequel : « la marque est un signe servant à distinguer des produits ou services et que le caractère distinctif d’un signe de nature à constituer une marque s’apprécie à l’égard des produits ou services désignés et par rapport à la perception qu’en a le public auquel cette marque est destinée ». La Cour prend également soin de rappeler que la condition de distinctivité est une condition autonome de telle sorte qu’un signe qui n’est ni générique, ni usuel, ni descriptif, ni déceptif peut échouer à cette condition. En effet, bien que l’article L.711-2 du Code de la propriété intellectuelle définisse le caractère distinctif du signe par opposition à ce qu’il ne doit pas être, à savoir nécessaire, générique, usuel dans le langage courant ou professionnel, descriptif ou déceptif, la jurisprudence française a érigé la distinctivité en condition autonome supplémentaire. La distinctivité s’apprécie en relation avec les produits et services désignés dans l’acte d’enregistrement, toutefois la Cour d’appel a pu justement retenir que les produits en cause (pour l’essentiel des tee-shirts reproduisant les marques en cause vendus sur des lieux touristiques) ressortent, dans le domaine d’activité du titulaire, du commerce touristique. Or, le public pertinent - à savoir le touriste d’attention moyenne - sera amené à percevoir le signe comme un attachement à la ville de Paris et un signe décoratif plutôt que comme une indication de sa provenance.

Cette décision est l’occasion d’attirer l’attention de nos lecteurs sur le fait que tout signe utilisé par une entreprise ne doit donc pas nécessairement être déposé à titre de marque. Une réflexion en amont, en fonction de la nature du signe et des conditions d’exploitation envisagées permettra de déterminer l’opportunité d’un dépôt pour éviter les titres trop fragiles et donc potentiellement annulables. A rapprocher : article L.711-2 du Code de la propriété intellectuelle - CA Paris, 12 juin 2013, RG n°11/05520

Bateaux Mouches : considérations sur un dépôt malencontreux

Cass. com., 3 février 2015, pourvoi n°13-18.025 Ce qu’il faut retenir : Pour apprécier le caractère frauduleux d’un dépôt, les juges peuvent tenir compte d’éléments postérieurs à celui-ci pour établir l’intention maligne. Pour approfondir : Pour être utilement réservée, la marque ne doit pas porter atteinte à des droits antérieurs. Pas davantage, le déposant ne doit-il être animé par une intention frauduleuse. C’est sur ces deux points que revient la Cour de cassation à l’occasion de cet arrêt. Les exploitants d’une boutique de vente de souvenirs et accessoires divers durant la période de 1985 à 1993 dans l’enceinte de la société dénommée Compagnie des bateaux mouches exploitant les embarcations du même nom, étaient titulaires des marques verbale Bateaux Mouches et semi-figurative. Après avoir omis de renouveler leurs titres en temps utiles, ils procédèrent à de nouveaux dépôts en 2003. La société assigna alors les exploitants en faisant valoir, d’une part, la nullité des marques pour atteinte à ses droits antérieurs sur sa dénomination sociale et son nom commercial, et, d’autre part, en revendication pour dépôt frauduleux. La demande en nullité pour atteinte à des droits antérieurs sur la dénomination sociale, le nom commercial et l’enseigne avait été rejetée par les juges du fond, approuvés par la Haute Cour. Pour refuser d’y voir une antériorité, les juges ont utilement considéré que l’expression « bateaux mouches » pour désigner une activité de transport de voyageurs sur la Seine, a été couramment utilisé depuis le milieu du 19è siècle et acquis un caractère quasi générique pour désigner une

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activité de même nature sur d’autres cours d’eau. Le public concerné n’est en conséquence pas conduit à rattacher exclusivement cette dénomination à l’entreprise qui l’utilise comme dénomination sociale et enseigne, toute acquisition de caractère distinctif par l’usage étant, de ce fait, exclu. Au surplus, les activités couvertes par le dépôt des marques critiquées et celles exercées par la société ne sont ni identiques ni similaires (souvenirs/ transport de personnes). Dans ces conditions, aucune antériorité ne pouvait être opposée en raison du caractère générique de la dénomination Bateaux Mouches. La Haute Cour ne va pas suivre les juges du fond sur leur appréciation de l’existence d’une fraude. En effet, l’arrêt critiqué avait également rejeté la demande de revendication des marques fondée sur l’article L712-6 du CPI (« Si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d'un tiers, soit en violation d'une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice ») faute de preuve de la mauvaise foi du déposant. La Cour condamne l’appréciation portée par les juges du fond qui n’avaient tenu compte que des éléments antérieurs ou contemporains aux dépôts critiqués. Elle indique en effet que « … en statuant ainsi alors que l’intention du déposant au moment du dépôt des demandes d’enregistrement est un élément subjectif qui doit être déterminé par référence à l’ensemble des facteurs pertinents propres au cas d’espèce, lesquels peuvent être postérieurs au dépôt ». En l’espèce, un élément essentiel d’appréciation résidait dans le fait que les déposants n’avaient jamais fait usage des marques dont s’agit postérieurement à leur dépôt ce qui conduit la Cour à mentionner « qu’en se déterminant ainsi sans rechercher si, déposant les marques composées de l’expression « bateaux mouches » dont il n’a jamais été fait usage, M. X qui avait antérieurement été autorisé à exploiter une activité de vente d’articles de souvenirs et de bimbeloterie dans les locaux de la société, n’avait pas entendu faire obstacle au développement d’une telle activité par celle-ci, dont la dénomination sociale et le nom commercial comportaient la même expression ». Précisément parce que l’intention frauduleuse peut résider dans la volonté d’empêcher une diversification, la Cour fait encore grief aux juges du fond de s’être arrêtés sur le caractère générique de l’expression pour désigner des activités de transports de personnes sur l’eau pour dénuer aux dépôts tout caractère frauduleux « alors qu’une telle circonstance n’était pas de nature, en l’absence de contestation du caractère distinctif du signe « bateaux mouches » pour désigner des articles de souvenirs et de bimbeloterie, à exclure qu’il ait été procédé au dépôt des marques litigieuse avec l’intention de faire obstacle au

développement par la société d’une activité de vente de tels articles sous ce signe ». L’appréciation du caractère frauduleux d’un dépôt peut tenir compte d’éléments postérieurs qui éclairent sur l’intention maligne du déposant au moment du dépôt. A rapprocher : article 711-4 du Code de la propriété intellectuelle - article L.712-6 du Code de la propriété intellectuelle Les cigarettes électroniques se frottent aux marques

TGI Paris, 19 mars 2015, RG n°13/16958 Ce qu’il faut retenir : La présence du radical commun « clope » dans des dénominations destinées à désigner des cigarettes électroniques ne permet pas de retenir leur similarité. Pour approfondir : Le titulaire de la marque CLOPINETTE, exploitée pour le commerce de cigarettes électroniques à travers un réseau de franchise, entendait faire cesser l’usage d’une dénomination qu’il estimait contrefaisante « CLOPICLOPE » par l’un de ses concurrents à titre de nom de domaine, nom commercial, compte Facebook et marque. La mise en demeure adressée n’ayant pas conduit à la cessation de l’usage de la dénomination litigieuse, elle engagea alors une action en contrefaçon et concurrence déloyale. La demanderesse exposait que, selon elle, les signes en présence présentaient des similarités du fait de l’élément commun « clopi » de nature à entraîner un risque de confusion. La défenderesse lui opposait que l’élément commun « clopi » est banal, les signes présentent des différences exclusives de tout risque de confusion. Le Tribunal va rejeter l’action en contrefaçon sans avoir mené un véritable examen des signes en présence en reprochant à la demanderesse de n’avoir pas mené une telle analyse et de n’avoir pas versé aux débats la copie de la marque contestée l’empêchant ainsi de procéder à l’appréciation de l’existence d’une contrefaçon. C’est l’occasion de rappeler que les affaires de contrefaçon sont toujours des affaires d’espèce nécessitant de mener une analyse précise des faits et un examen circonstancié des pièces et des faits critiqués. Le fondement de la concurrence déloyale et du parasitisme ne va pas davantage prospérer. Sur ce

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fondement, c’est l’atteinte aux droits antérieurs sur le nom de domaine, le nom commercial et l’enseigne qui était soulevé. Sur ce point, les juges rappellent que, indépendamment des formalités relatives à leur publicité ou leur enregistrement, c’est à compter de leur exploitation effective qu’ils peuvent fonder une action en responsabilité. Or, en l’espèce, cette date n’est pas établie avec certitude pour justifier de l’antériorité. Au surplus, le terme clopinette est, selon les juges, banal pour désigner la vente de cigarettes électroniques le mot étant un dérivé du terme « clope » signifiant cigarettes en termes argotiques. La société poursuivie a, selon le tribunal, utilisé un terme tout aussi banal et descriptif dont seul le radical usuel « clope » est repris dans un signe visuellement différent. Dans ces conditions, l’action en concurrence déloyale est rejetée tout comme l’action fondée sur le parasitisme faute de preuve d’investissements dont la captation serait reprochée. A rapprocher : article L.713-3 du Code de la propriété intellectuelle

Revirement sur vente-privee.com : la marque est distinctive selon la Cour d’appel de Paris CA Paris, 31 mars 2015, RG n°13/23127

Ce qu’il faut retenir : La marque peut acquérir son caractère distinctif par l’usage qui en fait postérieurement au dépôt. Pour approfondir : La marque « vente-privee.com » a fait l’objet de décisions qui ont déjà défrayé la chronique judiciaire. La Cour d’appel de Paris vient de se prononcer sur la validité de la marque « vente-privee.com » suite à l’appel formé à l’encontre du jugement rendu par le Tribunal de Grande instance de Paris le 28 novembre 2013 qui avait jugé que ladite marque ne présentait pas de caractère distinctif et avait en conséquence prononcé sa nullité. Rappelons que, dans cette affaire, la société VENTE PRIVEE.COM était assignée par l’un de ses concurrents, la société SHOWROOMPRIVEE en annulation de sa marque vente-privee.com pour défaut prétendu de distinctivité, condition de validité de toute marque posée par l’article L.711-2 du code de la propriété intellectuelle. Les juges vont en premier lieu examiner la distinctivité ab initio du signe et, en second lieu, l’acquisition de ce caractère par l’usage puisque l’on

sait que l’exploitation peut permettre à un signe d’acquérir ce caractère qui fait défaut à l’origine (article L. 711-2 dernier alinéa du code de la propriété intellectuelle). Pour conclure à l’absence de distinctivité au moment du dépôt de la marque contestée, les juges relèvent d’abord que les termes « vente privée » sont connus comme désignant des ventes ponctuelles proposées à un cercle déterminé d’acheteurs potentiels, ou à des personnes appartenant à un groupe peu important qu’elles soient en nombre élevé, et que ce concept a été adapté au web. En l’espèce, s’il n’est pas prouvé que ce concept ait été développé avant son introduction en 2001 par la société vente-privée, l’expression est désormais utilisée par d’autres personnes pour des ventes privées en ligne. En dépit de la présence d’un tiret et de l’absence d’accent qui donnent à l’expression un caractère incorrect en langue française, la marque qui présente la forme d’un nom de domaine renvoie implicitement à un service de ventes privées en ligne. Aussi, le signe est usuel et descriptif pour désigner les « services de promotion des ventes pour le compte des tiers, de présentation de produits sur tout moyen de communication pour la vente au détail et des services de regroupement pour le compte de tiers de produits et de services ». La marque étant dépourvue de distinctivité ab initio, la Cour examine en second lieu si ce caractère a été acquis par l’usage au regard des critères dégagés par la jurisprudence communautaire dans l’affaire Windsurfing Chemsee (CJUE, 4 mai 1999, aff.C-109/97) à savoir un usage continu, intense, de longue durée, à titre de marque pour identifier les produits et services concernés comme provenant d’une entreprise déterminée, usage caractérisé notamment par : la part de marché détenue, l’intensité, l’étendue géographique, la durée de l’usage, l’importance des investissements. En l’espèce, divers éléments ont permis de conclure que ces critères étaient remplis, à savoir notamment : l’apposition de mention « prix vente-privee.com » aux côtés des millions de produits proposés à la vente sur le site, l’utilisation dans les courriers électroniques adressés quotidiennement à 20 millions de membres, dans la présentation des services dans la presse écrite et dans la presse en ligne, dans sa citation orale dans les médias, par des journalistes ou dans la presse écrite, par l’usage de marques complexes incluant la dénomination litigieuse dont le signe constitue la partie verbale.

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Au surplus, les juges relèvent que la société vente-privée détient 90% du marché des ventes événementielles, que l’importance de son chiffre d’affaires et l’audience de son site internet témoignent de l’intensité de son activité et donc de l’exploitation du site et qu’elle justifie en outre d’investissements considérables pour des actions de promotion et de publicité, la notoriété du signé étant en outre établie par des sondages. Tous ces éléments établissent que le public perçoit « VENTE PRIVEE.COM » comme identifiant les services de vente au détail de produits ou services d’origines diverses désignés par elle comme provenant d’une entreprise déterminée. Elément notable dans cette affaire, la Cour se fonde sur des éléments postérieurs au dépôt, ce qui n’allait pas de soi. En effet, l’article L711-2 CPI prévoit que la distinctivité peut s’acquérir par l’usage sans préciser si cet usage doit être antérieur ou postérieur au dépôt. La Cour en déduit que l’imprécision du texte permet de tenir compte de l’usage qui a été fait du signe postérieurement à son dépôt. La Cour d’appel de Paris conclu ainsi à l’acquisition du caractère distinctif acquis par l’usage et infirme en conséquence le jugement. Elle rejette la demande de nullité de la marque VENTE PRIVEE.COM qui est donc reconnue valable. A rapprocher : article L711-2 du Code de la propriété intellectuelle

Distinctivité de justesse de l’Argus CA Paris, 12 mai 2015, RG n°13/23675

Ce qu’il faut retenir : Lorsqu’un signe ne présente que peu d’arbitraire par rapport aux produits et services désignés dans le dépôt de la marque, la distinctivité de celui-ci, condition de protection, n’est pas évidente et dépend d’une certaine subjectivité dans l’appréciation des juges. Pour approfondir : Dans cette affaire, le titulaire des marques Argus Auto, Cote Argus, l’Argus et Valeur Argus agissait en contrefaçon à l’encontre du réservataire des noms de domaine www.la-cote-argus.com et la-cote-argus.net.

La distinctivité ab initio, et donc la validité des marques, était contestée au motif qu’elles ne seraient pas aptes à remplir leur fonction d’identifiant commercial. La Cour va retenir la distinctivité des marques, ce qui n’allait pas de soi. Les juges rappellent que l’examen de la distinctivité des marques doit porter sur l’ensemble du signe constituant la marque cette exigence consistant à examiner si le signe est intrinsèquement capable de remplir sa fonction (écho est fait à la jurisprudence communautaire qui érige la distinctivité en condition autonome distincte de l’absence de caractère descriptif ou nécessaire du signe). Cette condition doit s’apprécier par rapport à la perception du public pertinent, en l’espèce le consommateur d’attention moyenne des services visés au dépôt de la marque à savoir le grand public souhaitant vendre ou acheter au meilleur prix un véhicule automobile d’occasion et en connaître la valeur commerciale. Les juges vont relever :

- que dans les 4 marques en cause les termes auto, valeur et cote sont descriptifs des services concernés,

- le terme argus, serait-il issu du langage courant, n’est pas la désignation nécessaire, générique ou usuelle et ne sert pas à en désigner les caractéristiques. A cet égard les juges considèrent que si le mot argus figure dans les dictionnaires, il désigne dans son acception courante une publication qui fournit des informations dans des domaines particuliers tels que l’assurance, l’immobilier ou l’automobile et n’est pas synonyme de cote (mot qui selon les dictionnaires signifie un tableau officieux des cours de divers marchandises).

Aussi, selon la Cour le mot argus ne désigne pas usuellement une cotation de véhicules d’occasion et les 4 marques en cause présentent un caractère évocateur mais suffisamment arbitraire par rapport aux services qu’elles désignent. Après avoir admis la validité des marques, la Cour va considérer que la réservation et l’exploitation des noms de domaine www.la-cote-argus.com et la-cote-argus.net sont constitutifs d’actes de contrefaçon. A rapprocher : article L.711-2 du Code de la propriété intellectuelle

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Quand la partie graphique d’un signe donne sa distinctivité à la marque

CA Paris, 5 juin 2015, RG n°14/10898 Ce qu’il faut retenir : La combinaison d’un élément verbal descriptif à une partie graphique peut conférer à l’ensemble un caractère distinctif. Pour approfondir : La société exploitant la marque « L’Onglerie » entendait faire respecter son monopole sur ce terme et assigna en contrefaçon une société qui avait cru pouvoir mentionner ce mot dans une publicité. La validité de la marque était remise en cause aux motifs que ce terme serait prétendument dépourvu de caractère distinctif, ou aurait perdu ce caractère. Ainsi, selon la société poursuivie, le caractère distinctif de la marque ferait défaut, dans la mesure où ce terme désignerait, soit le lieu dans lequel s’exerce l’activité, soit le service dédié au soin des ongles, expression par ailleurs largement utilisée dans la langue française. Tout d’abord, les juges du fond vont se placer à la date du dépôt de la marque pour apprécier la distinctivité. C’est en effet à cette date que la vérification des conditions de validité de la marque doit être opérée. En l’espèce, les juges retiennent que le suffixe –erie, donne en s’ajoutant à des adjectifs, noms ou verbes, un grand nombre de mots indiquant une qualité, une action, le résultat de cette action, le lieu où elle s’exerce, une collection, une industrie (fourberie, causerie, brasserie, biscuiterie). Le terme « onglerie » est donc un terme dérivé du mot ongle, auquel a été ajouté le suffixe –rie, pour former le nom du lieu où s’exerce une activité professionnelle destinée aux soins et à la beauté des mains, des ongles et des pieds. Si ce terme n’est pas en lui-même apte à remplir la fonction d’identification de l’origine des produits et services (et donc constituer une marque valable), en l’espèce la marque contestée est une marque semi-figurative, déposée en couleur dans une typologie particulière. Ces éléments permettent de conférer au signe un caractère distinctif. La marque est donc, grâce à ces éléments graphiques, valable dans son ensemble. La déchéance pour dégénérescence (qui vise l’hypothèse dans laquelle la marque perd son caractère distinctif) est également rejetée par la Cour dans la mesure où la marque en cause est précisément une marque semi-figurative, alors que l’ensemble des usages relevés pour tenter d’établir la dégénérescence, ne concernent que

le seul usage de la partie verbale de la marque, à savoir la dénomination « onglerie ». La validité de la marque étant vérifiée, la Cour s’attache ensuite à vérifier l’existence d’une contrefaçon. Or, elle va écarter ce grief dans la mesure où les usages reprochés de l’expression l’ «onglerie» sont utilisés dans leur acception courante pour désigner un service de soins des ongles, sans pour autant que les éléments graphiques de la marque ne soient associés. Dans ces conditions, les juges rejettent toute contrefaçon car l’usage reproché de l’expression l’ «onglerie » n’est pas un usage dit à titre de marque, c’est-à-dire pour désigner l’origine des produits et services, mais uniquement dans son sens usuel, ce qui ne relève pas du monopole. Cette décision est l’occasion de rappeler tout l’importance qui s’attache au choix pertinent de la forme dans laquelle un signe est déposé à titre de marque. Ainsi, une dénomination non distinctive peut, associée à un graphisme spécifique, devenir distinctive. A rapprocher : article L.711-2 du Code de la propriété intellectuelle.

Caractère distinctif et incidence de l’usage TGI Paris, 13 novembre 2015, RG n°13/15560

Ce qu’il faut retenir : Le caractère distinctif d’une marque peut, dans certaines circonstances, s’acquérir par l’usage ce qu’il incombe au titulaire de ladite marque d’établir. Pour approfondir : Le caractère distinctif d’un signe est une condition de sa protection à titre de marque. Un signe, qui ne présente pas ce caractère peut toutefois l’acquérir par l’usage qui en est fait. Tel est le cas de la marque « vente-privee.com » dont le caractère distinctif est reconnu par le Tribunal de grande instance de Paris dans son jugement du 13 novembre 2015, tout comme il l’avait déjà été à l’occasion d’une précédente affaire (CA Paris, 31 mars 2015, RG n° 13/23127). A l’occasion de l’action en contrefaçon et pour exploitation injustifiée de marques notoires engagée par la société vente-privee.com à l’encontre de l’exploitant du site revente-privee.eu, le Tribunal de

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grande instance de Paris, saisi d’une demande reconventionnelle en nullité des marques verbales et semi-figurative « vente-privee.com », a confirmé la validité desdites marques. Le Tribunal se réfère à la jurisprudence communautaire qui a dégagé les critères pour apprécier l’acquisition du caractère distinctif par l’usage : la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de l’usage, l’importance des investissements faits par l’entreprise pour promouvoir la marque, la proportion des milieux intéressés qui identifie le produit comme provenant d’une entreprise déterminée grâce à la marque. Les juges vont relever : l’évolution du chiffre d’affaires résultant de ventes directes sur internet, le classement du site parmi ceux vendant le plus de vêtements, des articles de presse, des baromètres d’audience, des sondages. L’ensemble de ces éléments permet, selon le jugement, d’établir l’importance croissante du chiffre d’affaires de la société vente-privee.com, sa position sur le marché des ventes événementielles, sa connaissance par un large public et l’importance de ces investissements publicitaires permettant de justifier que la dénomination « vente-privee.com » permet à une large fraction du public concerné d’identifier l’origine des services distribués sous la marque. Le caractère distinctif des marques est ainsi reconnu par le Tribunal, qui, dans la foulée, examine la contrefaçon des signes et la retient. A rapprocher : article L.711-2 du Code de la propriété intellectuelle

EXPLOITATION

Usage de la marque sous une forme modifiée et risque de déchéance

Cass. com., 3 mars 2015, pourvoi n°13-22.900 Ce qu’il faut retenir : La preuve de l’usage d’une marque, dans forme d’origine ou sous une forme modifiée, ne peut être rapportée uniquement par le relevé des ventes de produits. Pour approfondir : Dans cette affaire, une société avait engagé une action en déchéance d’une marque antérieure identique à celle qu’elle avait ultérieurement déposée.

La Cour d’appel ayant rejeté son action, un pourvoi a été formé faisant grief à l’arrêt de ne pas avoir caractérisé l’usage sérieux de la marque de nature à empêcher la déchéance. L’arrêt est rendu au visa de l’article L.714-5 du Code de la propriété intellectuelle selon lequel : « Encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n'en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l'enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans. Est assimilé à un tel usage : b) L'usage de la marque sous une forme modifiée n'en altérant pas le caractère distinctif ». La Cour fait grief aux juges d’appel d’avoir rejeté l’action en déchéance sur la base de motifs ne permettant pas de caractériser un usage sérieux de la marque, y compris sous sa forme modifiée n’en altérant pas le caractère distinctif, pendant une période de cinq ans précédant la date depuis laquelle la déchéance est demandée. En effet, les juges d’appel avaient retenu que les documents produits par le titulaire de la marque dont la déchéance était sollicitée établissaient un certain chiffre d’affaires ce qui ne suffisait pas à établir l’usage sérieux. En effet, il convient de caractériser en particulier l’usage du signe en tant que marque. Surtout, le chiffre d’affaires retenu visait la vente de produits sous une dénomination ainsi que sous une seconde dénomination assimilable à l’usage sous une forme modifiée pour autant que cela soit caractérisé ce qui n’était pas le cas dans l’arrêt infirmé. A rapprocher : article L.714-5 du Code de la propriété intellectuelle

Sortie de réseau et cessation d’usage des signes distinctifs

CA Douai, 8 avril 2015, RG n°14/02671 Ce qu’il faut retenir : L’usage d’une marque postérieurement à la cessation du contrat de licence est constitutif de contrefaçon. Pour approfondir : L’appartenance à un réseau de distribution permet à ses membres de bénéficier de l’usage des signes

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distinctifs en particulier de la marque pendant toute la durée du contrat. Dès sa sortie, l’ancien membre doit cesser tout usage de la marque à défaut de quoi il commet des actes de contrefaçon ainsi que l’illustre l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Douai le 8 avril 2015. Cette affaire opposait la société exploitant un réseau sous forme de coopérative intervenant dans le secteur de la vente et de l’installation de stores à l’un de ses ancien adhérent lequel avait poursuivi l’usage de la marque du réseau après sa sortie. Afin de faire cesser cet usage et obtenir réparation de son préjudice, la tête de réseau engagea une action en contrefaçon accueillie par la Cour d’appel dans l’arrêt commenté. La Cour d’appel reconnaît en premier lieu l’existence d’actes de contrefaçon du fait du maintien de la marque sur les locaux et le véhicule commercial postérieurement à la sortie du réseau de la société poursuivie. Au surplus, les difficultés techniques invoquées relativement aux difficultés pour enlever la marque sur la façade de l’immeuble et la voiture et pour faire modifier le site sont inopérantes. La contrefaçon est donc caractérisée. Pour déterminer les modalités de la réparation du préjudice subi du fait de la contrefaçon, la Cour d’appel, rappelant les dispositions de l’article L.716-14 du Code de la propriété intellectuelle, va prendre en considération le fait que la société poursuivie a modifié ses documents commerciaux dans les semaines suivants sa sortie du réseau puis, du fait de son déménagement, a cessé ses actes de contrefaçon à une date déterminée. Elle confirme le montant de l’indemnisation allouée en première instance (2000 euros). En revanche, la Cour va considérer que l’impossibilité de mettre en place un nouvel adhérent sur le secteur de l’ancien membre du fait de la poursuite de l’usage de la marque ne constitue pas, au cas d’espèce, un préjudice réparable dans la mesure où le lien causal avec les faits de contrefaçon n’est pas justifié. L’utilisation de la marque d’autrui, au-delà de la durée de l’autorisation conférée, est susceptible de constituer une contrefaçon notamment lorsqu’il s’agit de l’ancien membre d’un réseau qui, en dépit de sa sortie, persiste à utiliser les signes distinctifs du réseau dont il n’est plus membre. A rapprocher : L714-1 du Code de la propriété intellectuelle

L’usage d’un mot dans son sens courant n’est pas un usage à titre de marque

CA Paris, 12 mai 2015, RG n°14/04246 Ce qu’il faut retenir : La contrefaçon de la marque est exclue lorsqu’un tiers fait usage de la dénomination dans son sens commun et non à titre de marque. Pour approfondir : Une société exploitant sa marque dans le cadre de l’exploitation d’un restaurant japonais, a constaté sa reproduction par un concurrent sur les pages de son site internet. Elle a alors engagé une action en contrefaçon pour faire cesser cette reproduction non autorisée. Son action va échouer, tant en première instance qu’en appel. On le sait, la contrefaçon nécessite d’établir en premier lieu que le tiers poursuivi fait usage du signe à titre de marque pour établir l’atteinte à la fonction essentielle de la marque de garantir l’identité d’origine des produits et services. C’est précisément cette condition qui faisait défaut en l’espèce. En l’espèce, la marque en cause était un terme japonais « Kaiten » qui, bien que n’étant pas largement compris par le public français amateur de cuisine japonaise, a une signification puisqu’il désigne le plateau tournant sur lequel défilent les plats. En l’espèce, si ce mot était effectivement reproduit sur les pages du site internet de la société poursuivie, les juges relèvent que sur le site en cause figurait aussi en caractères très apparents la propre marque de cette société et que la marque prétendument contrefaite n’était en définitive utilisée que pour faire référence à un service de tradition japonaise, à titre d’information. Dans ces conditions, les juges vont conclure au fait qu’il ne s’agissait pas d’un usage à titre de marque et que son usage n’avait pas pour finalité d’identifier les produits et services proposés pour exclure toute contrefaçon. La solution n’est pas, dans son principe, surprenante. Elle s’inscrit dans la continuité des solutions dégagées selon lesquelles la contrefaçon nécessite en premier lieu de vérifier qu’il est porté atteinte à la fonction essentielle de la marque de garantir l’identité d’origine des produits et services ce qui implique sue le tiers en fasse un usage à titre de marque. Un doute pouvait toutefois naître en raison du fait que le signe en cause n’étant pas connu du public français car il s’agissait d’un

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mot japonais, l’usage dans son sens courant aurait pu être exclu. Telle n’est pas la solution retenue par la Cour. A rapprocher : article L.713-3 du Code de la propriété intellectuelle.

Usage de la marque sous une forme modifiée et absence de déchéance

Cass. com., 12 mai 2015, pourvoi n°14-14648 Ce qu’il faut retenir : L’usage d’une marque peut être établi par l’usage de la marque sous une forme modifiée, quand bien même cette forme modifiée serait également déposée comme marque. Pour approfondir : Après avoir déposé la marque « Saintem », son titulaire engagea une action en déchéance pour non-usage à l’encontre du titulaire de la marque antérieure « Saintem ». Ce dernier s’opposait à la déchéance et, à cette fin, faisait état de l’usage du signe Saintayme constituant selon lui une forme modifiée de la marque dont la déchéance était recherchée n’en altérant pas le caractère distinctif. L’article L714-5 prévoit en effet : « Encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n'en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l'enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans. Est assimilé à un tel usage : b) L'usage de la marque sous une forme modifiée n'en altérant pas le caractère distinctif ». Cette affaire avait déjà donné lieu à un arrêt rendu par la Cour de cassation (Cass.com., 12 juin 2012, pourvoi n° 11-217723) qui, à l’époque et conformément à la jurisprudence alors applicable, avait considéré que « le titulaire d'une marque enregistrée ne peut se soustraire à l'obligation qui lui incombe de faire usage de cette marque en invoquant à son bénéfice l'utilisation d'une marque similaire faisant l'objet d'un enregistrement distinct ». A l’époque en effet, lorsque la « forme modifiée » faisait elle-même l’objet d’un dépôt de marque, les juges refusaient de considérer que l’usage de cette marque pouvait être avancé pour sauver une autre marque. Depuis, la CJUE, dans son arrêt Rintish (CJUE, 25 octobre 2012, aff.C-553/11), a précisé qu’il est indifférent que cette « forme modifiée » fasse ou non l’objet d’un dépôt de marque.

Suite au premier arrêt de cassation, la cour d’appel de renvoi avait de nouveau considéré que la marque « Saintem » encourait la déchéance et avait en particulier justifié sa décision par le fait que l’utilisation exclusive du signe Saintayme de préférence à celle de la marque Saintem n’était pas justifié par une nécessaire adaptation aux exigences du marché. Cet arrêt est de nouveau cassé dans l’arrêt commenté au visa suivant : « Vu les articles 10 paragraphe 2 a) de la directive n° 89/104 du 21 décembre 1988 et L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle. Attendu que la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit (C-553/11, Rintisch, 25 octobre 2012) que l'article 10, paragraphe 2, sous a), de la directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des Etats membres sur les marques, doit être interprété en ce sens qu'il ne s'oppose pas à ce que le titulaire d'une marque enregistrée puisse, aux fins d'établir l'usage de celle-ci au sens de cette disposition, se prévaloir de son utilisation dans une forme qui diffère de celle sous laquelle cette marque a été enregistrée sans que les différences entre ces deux formes altèrent le caractère distinctif de cette marque, et ce, nonobstant le fait que cette forme différente est elle-même enregistrée en tant que marque ». La Cour fait grief aux juges du fond de ne pas s’être « contentés » d’apprécier si l'utilisation de la marque sous une forme simplifiée en altérait le caractère distinctif. Cette seule vérification s’imposent en effet aux juges chargés d’examiner l’usage sérieux d’une marque sous une forme modifiée sans avoir à rechercher, comme avait cru pouvoir le faire l’arrêt attaqué, si cette évolution était justifiée ou non par une adaptation aux exigences du marché (ce qui reviendrait, en définitive, à rajouter une condition). A rapprocher : L714-5 du Code de la propriété intellectuelle - Cass.com., 3 juin 2014, pourvoi n°13-17769

Quand l’interprétation d’un accord de coexistence nécessite encore une interprétation

CA Angers, 2 juin 2015, RG n°15/01113 Ce qu’il faut retenir : L’accord de coexistence de marques doit être suffisamment précis pour permettre de délimiter les

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droits et obligations de chacune des parties. Pour approfondir : L’accord de coexistence est l’outil contractuel qui permet de régler le différend entre des titulaires de marques et d’organiser les modalités de la coexistence entre des signes identiques ou similaires. La liberté contractuelle permet aux parties d’envisager toutes les modalités d’usage de leurs signes respectifs en fonction du risque de confusion que les parties ont déterminé, plutôt que de s’en remettre au juge. Il y a quelques mois, la Cour d’appel d’Angers, dans une décision en date du 6 janvier 2015, rendait un arrêt sanctionnant la partie à un accord de coexistence qui n’en avait pas respecté les termes du fait des modalités d’évolution de ses signes distinctifs. Le signataire du protocole saisit donc la justice afin de faire respecter les termes du contrat. Cet accord prévoyait la faculté pour chacune des parties d’utiliser une même dénomination mais de se distinguer sur la partie figurative : l’une des sociétés s’engageait à maintenir les éléments figuratifs distinctifs de ses signes, y compris en cas d’évolution des marques (déposées ou non), l’autre partie s’interdisant, réciproquement, de faire usage de ces éléments figuratifs. La décision de la Cour avait fait injonction à la société poursuivie : « de n’utiliser le terme oceanet, à quelque titre que ce soit, qu’avec les éléments figuratifs composant et distinguant les marques n°x et n°y ». Dans cette nouvelle décision, la Cour précise la portée de l’injonction ainsi faite à la société poursuivie qui soulevait de prétendues difficultés d’interprétation. Tout d’abord, elle précise que cette injonction n’interdit pas l’adjonction au terme oceanet d’éléments nouveaux sous réserve que les éléments figuratifs composant et distinguant les marques n°x et n°y restent présents. D’autre part, elle ajoute que cette injonction n’interdit pas de faire évoluer le logo autour des éléments figuratifs composant et distinguant les marques n°x et n°y. L’accord de coexistence étant un outil permettant d’organiser leurs marques, selon des modalités décidées par les parties, cet acte doit être rédigé avec précaution et soin pour lever par avance toute difficulté d’interprétation. A défaut, le juge judiciaire devra lui-même rechercher l’intention commune des parties et interpréter l’acte

obscur au risque, comme en l’espèce, de se voir contraint ensuite de préciser la portée de sa décision. A rapprocher : CA Angers, 6 janvier 2015, RG n°12/02447 Les formalités auprès de l’INPI liées à la cession d’une

marque sont essentielles CA Paris, 30 juin 2015, RG n°14/03937

Ce qu’il faut retenir : De l’enjeu des formalités post-cession de marque : être titulaire d’une marque est une chose, pouvoir s’en prévaloir une autre. Pour approfondir : Dans cette affaire, une société a vu son action en contrefaçon échouer (plus spécifiquement être déclarée irrecevable) faute de pouvoir justifier de ses droits sur celle-ci. Elle prétendait en effet être devenue titulaire de la marque suite à deux cessions successives ; en particulier, elle indiquait que la marque avait fait l’objet d’un premier contrat de cession en faveur de la personne qui, dans un second temps, la lui aurait transmis aux termes du second acte de cession. Ces actes furent ensuite inscrits auprès du registre national des marques tenu par l’INPI. Cette formalité vise, on le rappelle, à rendre la cession opposable aux tiers à compter de son accomplissement et, en conséquence, à porter à la connaissance des tiers le changement de titulaire. En l’espèce, aucun desdits actes de cession n’était daté de telle sorte qu’il convenait de se référer à la date des publications à l’INPI des cessions qui seules pouvaient leur donner date certaine. Or, cette formalité est intervenue postérieurement à la liquidation judiciaire et la radiation de la société titulaire d’origine, en conséquence la Cour constate qu’à la date de la publication de la première cession, cette dernière n’avait pas la capacité à céder ses droits sur la marque, ce qui bien entendu rejaillit sur la seconde cession qui n’avait pu, juridiquement, intervenir. Aussi, la Cour constate que la société agissant en contrefaçon ne justifie pas de la titularité de ses droits, son action est donc déclarée irrecevable. La "morale de l’histoire" est donc que l’acte de cession mal rédigé (en particulier non daté) suivi de formalités post-cession auprès de l’INPI effectuées au mauvais moment empêche celui qui se croit légitime titulaire de

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se prévaloir de ses droits ce qui revient à ne pas disposer de droits. Un acquéreur avisé en valant deux, on ne saurait trop recommander de porter une attention particulière à la rédaction des actes de cession de marque et le suivi des formalités suivant celle-ci pour éviter de graves déconvenues. A rapprocher : article L.714-7 du Code de la propriété intellectuelle La preuve de l’usage sérieux de la marque pour éviter

la déchéance Cass. com., 15 septembre 2015, pourvoi n°14-19.497

Ce qu’il faut retenir : Pour rapporter la preuve d’un usage sérieux de la marque permettant d’éviter le prononcé de la déchéance, il faut rassembler des éléments tangibles sur ses conditions d’exploitation et le contact avec la clientèle. Pour approfondir : Pour échapper au prononcé de la déchéance des droits sur la marque qui sanctionne le défaut d’usage sérieux pendant une période de cinq années, le titulaire de la marque doit être en mesure de rapporter la preuve d’un tel usage sérieux. De la qualité des pièces versées aux débats va dépendre le maintien de ses droits ainsi que l’illustre la décision commentée. Dans cette affaire, le titulaire d’une marque semi-figurative composée du chiffre romain VII entouré d’un cercle agissait en contrefaçon à l’encontre d’une société qui lui opposa, en défense, la déchéance de ses droits faute d’exploitation. La Cour d’appel a prononcé la déchéance, approuvée en cela par la Cour de cassation. Les juges ont en effet pu considérer, pour retenir que la preuve d’un usage sérieux n’était pas rapportée, que la production de trois factures, établissant la vente de huit parfums, qui n’étaient pas accompagnées de bons de commande, de catalogues, d’échantillons du produit ou même de photographies se présentait donc comme un simple référencement, ce qui ne permettait pas d’établir une exploitation en relation avec la clientèle. En outre, l’exploitation du signe déposé faisait l’objet d’une exploitation modifiée en altérant le caractère distinctif puisqu’en réalité, le signe était inclus dans une formule plus large, alors que l’exploitation d’un signe

sous une forme différente de celle mentionnée dans le dépôt ne peut être retenue que s’il s’agit d’une forme n’altérant pas le caractère distinctif de la marque. L’usage de la marque permettant de maintenir ses droits sur celle-ci implique un usage à titre d’identifiant commercial en relation avec la clientèle ; les preuves soumises aux juges doivent établir cet usage et son caractère sérieux. A rapprocher : article L.714-5 du Code de la propriété intellectuelle

Déchéance de la marque et évolution du signe CA Paris, 20 octobre 2015, RG n°14/14554

Ce qu’il faut retenir : Constitue un usage faisant obstacle à l’action en déchéance, l'usage de la marque sous une forme modifiée n'altérant pas le caractère distinctif dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée, peu important par ailleurs que la marque modifiée ait été elle-même enregistrée. Pour approfondir : Cette affaire constitue l’épilogue judiciaire du litige ayant opposé, d’un côté, les sociétés Cofra et C&A France, respectivement titulaire et licenciée des marques « RODEO » et, de l’autre, la société Dolce & Gabbana, poursuivie pour contrefaçon de marques. Il faut tout d’abord rappeler qu’en l’espèce la société Cofra était titulaire de deux marques :

marque internationale verbale « RODEO » désignant la France, déposée le 06 octobre 1986 et enregistrée sous le numéro 507 294, renouvelée le 06 octobre 2006, pour désigner des produits des classes 9, 25 et 28, notamment les vêtements, chaussures, chapellerie,

marque communautaire verbale « RODEO », déposée le 01 avril 1996 et enregistrée sous le numéro 000 106 252 le 12 mai 1998 pour désigner des produits des classes 18, 25 et 28, notamment les vêtements, chaussures, chapellerie.

Ces marques étaient exploitées en France par la société C&A France en vertu d'un contrat de licence inscrit au Registre des marques internationales et au Registre des marques communautaires puis publié à la gazette de l'OMPI.

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Ayant constaté la mise en ligne, par Dolce & Gabbana France, sur la partie française de son site Internet, de photographies du défilé de mode printemps-été 2010 où des mannequins portaient des vêtements sur lesquels figurait le signe RODEO et leur reprise sur les sites Internet français des magazines Elle et Marie-Claire, outre la diffusion du film de ce défilé sur d'autres sites Internet, les sociétés Cofra et C&A France ont fait procéder, le 07 avril 2010, à un procès-verbal de constat de l'existence de ces photographies et film ; suite à une mise en demeure de cesser la commercialisation des produits comportant le signe RODEO en date du 07 mai 2010, restée infructueuse, les sociétés Cofra et C&A France ont fait assigner devant le tribunal de grande instance la SARL Dolce & Gabbana en contrefaçon de marques ; reconventionnellement, la SARL Dolce & Gabbana a sollicité la déchéance desdites marques sur une partie des produits désignés. En première instance, le tribunal de grande instance avait prononcé la déchéance de la partie française de la marque internationale « RODEO » dont la société Cofra est titulaire, déposée le 06 octobre 1986 et enregistrée sous le numéro 507 294 pour désigner des produits des classes 9, 25 et 28 avec effet au 28 décembre 1996 et de la marque communautaire « RODEO » dont la société Cofra est titulaire, déposée le 01 avril 1996 et enregistrée sous le numéro 000 106 252 pour désigner des produits des classes 18, 25 et 28 avec effet à compter du 12 mai 2003. Statuant sur l’appel des sociétés Cofra et C&A France, la Cour d'appel de Paris (CA, Paris, pôle 5, chambre 2, 1er mars 2013) a :

infirmé le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la déchéance de la partie française de la marque internationale « RODEO » dont la société Cofra est titulaire, déposée le 06 octobre 1986 et enregistrée sous le numéro 507 294 pour désigner des produits des classes 9, 25 et 28 avec effet au 28 décembre 1996 d'une part et de la marque communautaire « RODEO » dont la société Cofra est titulaire, déposée le 01 avril 1996 et enregistrée sous le numéro 000 106 252 pour désigner des produits des classes 18, 25 et 28 avec effet à compter du 12 mai 2003,

confirmé le jugement pour le surplus,

prononcé en conséquence la déchéance de la partie française de la marque internationale « RODEO » dont la société Cofra est titulaire, déposée le 06 octobre 1986 et enregistrée sous le numéro 507 294 pour désigner des produits de la classe 25 avec effet au 28 décembre 1996,

et de la marque communautaire « RODEO » dont la société Cofra est titulaire, déposée le 01 avril 1996 et enregistrée sous le numéro 000 106 252 pour

désigner des produits de la classe 25 avec effet à compter du 12 mai 2003,

débouté les sociétés appelantes de l'ensemble de leurs demandes.

Sur pourvoi des sociétés Cofra et C&A France, la Cour de cassation (Cass. com., 3 juin 2014, n°13-17.769, Publié au Bulletin, et notre commentaire de cette décision) a cassé l’arrêt rendu par la Cour d’appel en toutes ses dispositions, au visa des articles 15 du Règlement CE du 26 février 2009 et de l’article L.714-5 du CPI, au motif que la CJUE a dit pour droit son arrêt Rintisch (25 octobre 2012), que les textes précités ne s’opposent pas « à ce que le titulaire d’une marque enregistrée puisse, aux fins d’établir l’usage de celle-ci au sens de cette disposition, se prévaloir de son utilisation dans une forme qui diffère de celle sous laquelle cette marque a été enregistrée sans que les différences entre ces deux formes altèrent le caractère distinctif de cette marque et ce, nonobstant le fait que cette forme différente est elle-même enregistrée en tant que marque ». Ainsi, la Cour de cassation a cassé l’arrêt rendu par la Cour d’appel qui avait, au contraire, jugé qu’en déposant plusieurs marques, la société avait entendu les distinguer de telle sorte que l’usage de l’une ne pouvait pas servir à établir l’usage d’une autre pour échapper à la déchéance. Statuant sur renvoi après cassation, la Cour d’appel de Paris retient en substance qu'il ressort des documents versés aux débats (Attestation des CAC sur les volumes de vente de produits de la classe 25 sous la marque « RODEO », attestations quant à la commercialisation en France par la société C&A France depuis au moins 1991, d'articles vestimentaires et accessoires sous ladite marque, catalogues, copies d'écran des sites de C&A et procès-verbaux établis par huissier) que les marques verbales « RODEO » sont notamment exploitées sous une forme modifiée correspondant à une marque semi-figurative, également déposée par la société Cofra le 03 avril 1998, elle-même présentée dans une configuration nouvelle, à savoir le signe « RODEO » dans une police de caractères particulière traversée à l'horizontale en son milieu par un trait de couleur, placé à l'intérieur d'un rectangle sur fond marron, l'initiale « R » étant de couleur orange. La Cour d’appel de Paris rappelle que, d’une part, selon les articles L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle et 15 du règlement (UE) n° 207/209 du 26 février 2009, est considéré comme « usage » au sens de ces textes, l'usage de la marque sous une forme modifiée n'altérant pas le caractère distinctif dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée et que, d’autre part, ces textes doivent être interprétés à la lumière de la directive (CE) n° 89/104 du 21 décembre

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1988 (codifiée par la directive n° 2008/95 du 22 octobre 2008), rapprochant les législations des États membres sur les marques. Ce faisant, la Cour d’appel de Paris retient :

que la CJUE a dit pour droit dans son arrêt Rintisch du 25 octobre 2012 que l'article 10, § 2, sous a) de la directive (CE) n° 89/104 du 21 décembre 1988 « doit être interprété en ce sens qu'il ne s'oppose pas à ce que le titulaire d'une marque enregistrée puisse, aux fins d'établir l'usage de celle-ci au sens de cette disposition, se prévaloir de son utilisation dans une forme qui diffère de celle sous laquelle cette marque a été enregistrée sans que les différences entre ces deux formes altèrent le caractère distinctif de cette marque, et ce nonobstant le fait que cette forme différente est elle-même enregistrée en tant que marque » ;

dans une marque semi-figurative, le consommateur d'attention moyenne attachera plus d'importance à l'élément verbal, en l'espèce le signe « RODEO » aisément lisible nonobstant sa police de caractère et la mise en couleurs de son initiale ;

que le choix d'exploiter les marques verbales « RODEO » sous cette forme correspond à une modification revendiquée par la société Cofra de retravailler tous ses logos en vue de créer un concept visuel nouveau tout en gardant un lien avec l'ancien logo en vue de s'adapter à des groupes de clients ciblés, et qu’ainsi cette forme stylisée n'altère pas le caractère distinctif des marques verbales « RODEO » constitué par le signe Rodéo puisque celui-ci est toujours mis en valeur et est aisément identifiable dans l'exploitation qui en est faite par les sociétés Cofra et C&A France ;

qu'il importe peu par ailleurs que la marque ainsi modifiée ait été elle-même enregistrée ;

en conséquence que les sociétés Cofra et C&A France justifient de l'usage sérieux des marques verbales « RODEO » pendant une période ininterrompue de cinq ans.

A rapprocher : Cass. com., 3 juin 2014, pourvoi n°13-17769

La transaction doit être exécutée de bonne foi CA Paris, 30 octobre 2015, RG n°14/23955

Ce qu’il faut retenir : La transaction, comme tout contrat, doit être exécutée de bonne foi ce que nous rappelle la Cour d’appel à l’occasion de cet arrêt. Pour approfondir : Dans cette affaire, une grande maison de joaillerie avait assigné en contrefaçon de modèles et de droit d’auteur une société qui commercialisait des bagues constituant la contrefaçon de certains de ses modèles. Suite au jugement de première instance qui avait retenu la contrefaçon, et afin de mettre un terme au litige, les parties ont conclu un protocole transactionnel aux termes duquel, notamment, la société condamnée s’était engagée à cesser la commercialisation des bijoux litigieux. Postérieurement à la signature de ce protocole, la société Chaumet engagea une nouvelle action en raison de la commercialisation de modèles qui étaient la copie servile des modèles objets de la transaction. Elle faisait ainsi valoir l’exécution de mauvaise foi du protocole transactionnel aux termes duquel il était prévu de cesser la commercialisation des modèles litigieux. En défense, la partie adverse faisait valoir que la transaction ne portait que sur les modèles objets de la condamnation et non sur le modèle objet de la nouvelle procédure dont les différences étaient mises en exergue pour justifier du fait qu’ils ne pouvaient pas relever de l’objet de la transaction. La Cour d’appel après un examen attentif des bagues en cause conclut que la commercialisation de bagues quasiment identiques à celles visées dans la transaction caractérise un manquement à la bonne foi exigée par l’article 1134 du Code civil dans l’exécution des conventions. La Cour d’appel prononce une condamnation au paiement de la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts ; en revanche, aucune demande en résolution du protocole transactionnel n’ayant été formée celui-ci est maintenu en dépit du manquement fautif.

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Si la transaction est un moyen largement utilisé pour prévenir un différend avant l’introduction d’une action en contrefaçon, ou mettre un terme au litige lorsqu’une telle action a été engagée, il ne faut pas perdre de vue que, comme tout contrat, la transaction doit être exécutée de bonne foi. A rapprocher : article 1134 du Code civil

Précisions sur les obligations de la tête de réseau française en cas de crise de la marque

CA Paris, 16 décembre 2015, RG n°13/14048 Ce qu’il faut retenir : La filiale française d’un groupe international n’engage pas sa responsabilité auprès de ses distributeurs lorsque, en période délicate, son comportement est conforme aux solutions espérées. Pour approfondir : La société française, filiale d’un groupe international, contractuellement liée à des distributeurs, se trouve dans une situation délicate lorsque la marque objet de la distribution traverse une crise et que les solutions adoptées par le groupe, au niveau international, impactent ses distributeurs. La Cour d’appel de Paris, au sein de la décision commentée, a tenu compte de cette situation afin de préciser les obligations pesant sur la filiale française dans ce type de situation. Les faits ayant donné lieu à cette décision étaient schématiquement les suivants. La société mère d’un groupe international de distribution automobile avait contrôlé pendant 8 ans une société fabriquant des automobiles sous sa marque. La filiale française du groupe international, importateur en France des produits de ladite marque, était liée à plusieurs distributeurs sélectifs habilités à distribuer ces produits. Au milieu de l’année 2008, le groupe international avait connu de grandes difficultés de trésorerie qui l’avaient conduit à céder la branche d’activité relative aux produits précités. Les distributeurs de la filiale française recherchaient la responsabilité de cette dernière sur plusieurs points. En premier lieu, les distributeurs cherchaient à imputer à la filiale française les fautes de sa société mère, en se fondant sur l’absence d’indépendance de la filiale et

son indissociabilité de la société mère. Sur ce point, la Cour rappelle que la filiale ne saurait répondre que des fautes qu’elle a commises et qu’elle ne saurait réparer que le préjudice causé par ses fautes. L’argumentation des distributeurs à ce titre est entièrement écartée. En second lieu, les distributeurs reprochaient à la filiale un manque de loyauté dans la communication, soutenant qu’elle les avait entretenus dans de faux espoirs sur l’avenir de la marque. Ce grief est néanmoins également écarté, pour deux raisons essentielles :

les courriers mentionnés ne comprenaient aucun mensonge et seulement de l’enthousiasme et de l’espoir, jugés par la Cour indispensables dans le contexte délicat ;

le professionnalisme et l’expérience des distributeurs les mettaient nécessairement en mesure d’apprécier la juste valeur de ces propos.

En troisième lieu, les distributeurs reprochaient à la filiale de leur avoir fait espérer en vain, lors de l’information précontractuelle, une progression significative des ventes. Ce grief, formulé après plusieurs années d’exécution des contrats, est écarté dans la mesure où, d’une part, aucun engagement n’avait été pris par la tête de réseau (seuls des « objectifs » voire des « rêves » avaient été mentionnés) et où, d’autre part, la filiale française, importateur, ne pouvait garantir de niveaux de vente, dans la mesure où elle ne maitrisait pas la sortie de nouveaux modèles. En quatrième lieu et enfin, les distributeurs reprochaient à la filiale française de ne pas leur avoir proposé, compte tenu des circonstances, de quitter le réseau avec un préavis de deux ans. A ce titre, la Cour, rappelant à nouveau le statut de commerçants indépendants et responsables des distributeurs, relève que la filiale française n’avait pas à leur proposer une telle solution alors que des moyens de pérenniser la marque étaient précisément recherchés et susceptibles d’être trouvés à l’époque. La Cour ajoute que la filiale française, une fois la cession de la branche d’activité décidée par sa société mère, n’avait pu que proposer à ses distributeurs la cession des contrats au cessionnaire de la branche d’activité, cession que les distributeurs ont refusé. Ce dernier grief est donc également écarté. A rapprocher : CA Paris, 4 septembre 2013, RG n°11/14609

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CONTREFACON

Illustration de la force obligatoire d’un accord de coexistence

CA Angers, 6 janvier 2015, RG n°12/02447 Ce qu’il faut retenir : L’accord de coexistence de marques a force obligatoire entre les parties qui doivent en respecter les termes. Pour approfondir : L’accord de coexistence est l’outil contractuel qui permet de régler le différend entre des titulaires de marques et d’organiser les modalités de la coexistence entre des signes identiques ou similaires. La liberté contractuelle permet aux parties d’envisager toutes les modalités d’usage de leurs signes respectifs en fonction du risque de confusion que les parties ont déterminé, plutôt que de s’en remettre au juge. En l’espèce, les parties au litige avaient conclu plusieurs années auparavant un protocole pour régler amiablement leur différend relatif à l’usage de leurs marques respectives. Cet accord prévoyait la faculté pour chacune des parties d’utiliser une même dénomination mais de se distinguer sur la partie figurative en prévoyant : d’une part, que l’une des sociétés s’engageait à maintenir les éléments figuratifs distinctifs de ses signes, y compris en cas d’évolution des marques (déposées ou non), l’autre partie s’interdisant, réciproquement, de faire usage de ces éléments figuratifs. Considérant que les termes de ce protocole n’avaient pas été respectés du fait des modalités d’évolution des signes distinctifs, le signataire du protocole saisit donc la justice afin de faire respecter les termes du contrat. Les parties se disputaient sur la portée des stipulations prévoyant « X s’engage à utiliser ses deux marques semi figuratives ainsi que ses éventuelles marques déclinées avec tous les éléments figuratifs qui les composent et les distinguent ». Selon les juges d’appel « Alors que chacune se reconnaissait le droit d’exploiter des marques comportant la dénomination “…” , Il ressort des termes du protocole que, pour garantir la coexistence paisible des marques litigieuses, les parties se sont accordées pour faire de l’association des éléments figuratifs des marques n° A et B, tels que plus haut rappelés, le critère discriminant de leurs marques respectives y compris pour leurs déclinaisons futures ». La preuve étant rapportée que les signes contestés ne reprenaient pas les éléments graphiques distinctifs

mentionnés au contrat, la Cour en tire les conséquences en faisant injonction de cesser l’usage des signes dans leur forme actuelle, interdiction assortie d’une astreinte. Cette décision est l’occasion de rappeler l’intérêt des accords de coexistence qui permettent aux parties d’organiser pour l’avenir la coexistence entre des marques, ces accords devant, comme tout contrat, être respectés par les parties faute de quoi leur violation sera judiciairement sanctionnée. A rapprocher : CA Angers, 2 juin 2015, RG n°15/01113

Marque renommée et forclusion par tolérance Cass. com., 6 janvier 2015, pourvoi n°13-21940

Ce qu’il faut retenir : La forclusion par tolérance peut être opposée au titulaire d’une marque renommée qui agit sur le fondement de l’article L713-5 du code de la propriété intellectuelle et non sur le fondement de la contrefaçon. Pour approfondir : La forclusion est la sanction couperet qui tombe à l’encontre de celui qui, pendant un délai de cinq ans, a toléré l’usage d’un signe contrefaisant : la forclusion par tolérance constitue une fin de non-recevoir à l’action en contrefaçon. Elle est prévue à l’article L716-5 alinéa 4 du code de la propriété intellectuelle qui dispose : « Est irrecevable toute action en contrefaçon d'une marque postérieure enregistrée dont l'usage a été toléré pendant cinq ans, à moins que son dépôt n'ait été effectué de mauvaise foi. Toutefois, l'irrecevabilité est limitée aux seuls produits et services pour lesquels l'usage a été toléré ». Dans cette affaire, le titulaire des marques « Match » et « Paris Match », agissait à l’encontre du titulaire de la marque « Match.com » déposée pour désigner « services d'information et de conseils concernant et sous la forme de présentation et d'agence matrimoniale en ligne » et exploitée pour un site internet de rencontres amoureuses. L’action était fondée sur l’article L713-5 du code de la propriété intellectuelle instituant un régime spécifique pour les marques renommées. Devant la Cour, il était fait grief aux juges d’appel d’avoir déclaré l’action irrecevable, les sociétés poursuivantes ayant toléré

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l'usage de la marque communautaire « Match.com » déposée le 1er avril 1996 durant plus de cinq ans sur le territoire français. Or, selon le pourvoi, l’action fondée sur l’article L713-5 du code de la propriété intellectuelle n’est pas une action en contrefaçon mais une action en responsabilité de telle sorte que cette action ne pourrait se voir opposer la forclusion par tolérance. Il est vrai que le texte de l’article L716-5 du code de la propriété intellectuelle vise l’ « action en contrefaçon » ce qui soulève donc la question posée dans le pourvoi bien que soit applicable en l’espèce l’article 54 § 2 du Règlement CE 207/2009 du 26 février 2009 car il s’agissait de contester une marque communautaire. Ce texte est ainsi rédigé « le titulaire d'une marque nationale antérieure visée à l'article 8 § 2 ou d'un autre signe antérieur visé à l'article 8 § 4 qui a toléré pendant cinq années consécutives l'usage d'une marque communautaire postérieure dans l'Etat membre où cette marque antérieure ou l'autre signe antérieur est protégé, en connaissance de cet usage, ne peut plus demander la nullité ni s'opposer à l'usage de la marque postérieure sur la base de la marque antérieure ou de l'autre signe antérieur pour le produit ou les services pour lesquels la marque postérieure a été utilisée à moins que le dépôt de la marque communautaire postérieure n'ait été effectué de mauvaise foi ». La Cour de cassation va répondre à l’argument du pourvoi de façon assez lapidaire : « ayant retenu que la forclusion par tolérance pouvait être opposée à tout titulaire d'une antériorité et non pas seulement aux titulaires d'une marque ou d'un signe exploité dans la même spécialité, la cour d'appel a répondu au moyen par lequel il était soutenu que cette fin de non-recevoir ne s'appliquait pas à l'action en responsabilité pour atteinte aux marques jouissant d'une renommée ou notoirement connues ». Elle affirme en conséquence que la forclusion peut être opposée pour tenir en échec une action fondée sur le régime spécial des marques renommées.

La Cour précise également que la mauvaise foi du déposant (qui paralyse le jeu de la forclusion par tolérance), qui doit s’apprécier au jour du dépôt, ne réside pas dans la simple connaissance de la marque antérieure. En l’espèce, le dépôt au niveau communautaire avait été effectué après que la société ait, des années auparavant, exploité le signe aux Etats-Unis, ce dont il résultait qu’il avait été effectué dans le cadre de démarches de protection à l’occasion du développement des activités de la société en Europe.

A rapprocher : article L713-5 du Code de la propriété intellectuelle - article L716-5 alinéa 4 du Code de la propriété intellectuelle La violation d’un accord de coexistence constitue une

contrefaçon Cass. com., 10 février 2015, pourvoi n°13-24.979

Ce qu’il faut retenir : La méconnaissance des termes d’un accord de coexistence portant atteinte aux droits de l’autre partie sur sa marque est constitutive d’une contrefaçon. Pour approfondir : Dans cette affaire, deux sociétés avaient conclu un accord de coexistence afin de mettre un terme à leur différend. Celui-ci était né suite à la contestation formulée par le titulaire d’une marque en raison du dépôt d’une seconde marque estimée trop ressemblante. Les parties avaient donc transigé et conclu un accord de coexistence aux termes duquel des engagements avaient été pris concernant les conditions d’usage des signes en cause de façon à permettre leur coexistence paisible. Or, après avoir constaté le non-respect des conditions d’usage des marques prévues dans l’accord, le titulaire de la première marque a engagé une action en contrefaçon et concurrence déloyale à l’encontre de l’autre partie. La Cour d’appel, après avoir relevé que des mesures avaient été prises pour se conformer à l’accord de coexistence a considéré que les manquements persistants n’étaient pas d’une gravité suffisante pour constituer des actes de contrefaçon. La Haute Cour casse l’arrêt au visa de l’article L.713-3 du code de la propriété intellectuelle (lequel prévoit que « Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public : a) La reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l'enregistrement ; b) L'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement ») et de l’article 9 §1 du règlement CE n°207/2009 du 26 février 2009 sur la

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marque communautaire qui comporte des dispositions similaires. L’arrêt considère en effet que les juges du second degré auraient dû rechercher si, en raison de la similitude des marques en présence et des produits désignés à l’enregistrement, le non-respect des engagements contractuels constaté n’était pas de nature à engendrer un risque de confusion dans l’esprit du public. Aussi, la Cour de cassation invite les juges à ne pas se contenter de porter une appréciation sur la plus ou moins grande gravité des fautes contractuelles. Dès lors qu’un manquement est constaté, ils doivent rechercher si les conditions de la contrefaçon sont réunies puisque la violation d’un tel accord est susceptible de constituer une atteinte aux droits sur la marque. A rapprocher : article L.713-3 du Code de la propriété intellectuelle

Incidence de la renommée de la marque sur l’appréciation du risque de confusion

CA Paris, 17 février 2015, RG n°12/22312 Ce qu’il faut retenir : La renommée d’une marque est de nature à aggraver le risque de confusion entre des signes. Pour approfondir : Les décisions reconnaissant la renommée d’une marque sont suffisamment rares pour que l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris le 17 février 2015 reconnaissant un tel caractère à la marque POCKET soit commenté. Dans cette affaire, l’éditeur titulaire de la marque POCKET entendait défendre ses droits sur celle-ci à l’encontre de l’éditeur de bandes dessinées ayant déposé et exploitant la marque HUMANO POCKET. Nous ne reviendrons pas sur le prononcé de la déchéance partielle pour un certain nombre de produits et services pour nous arrêter uniquement sur la question de la contrefaçon. Pour apprécier l’existence d’une contrefaçon, la Cour va procéder à la classique comparaison entre, en

premier lieu, les produits et services désignés par les marques en présence et, en second lieu, les signes. La Cour va tout d’abord déterminer les produits et services similaires et considérer qu’une partie de ceux visés par la marque critiquée ne sont pas similaires ce qui exclut pour ceux-ci toute contrefaçon. Dans un deuxième temps, les juges d’appel vont procéder à la comparaison des signes en présence : POCKET / HUMANO POCKET et considérer que : visuellement, les signes ont en commun les couleurs de cartouche et des lettres et le terme « pocket », phonétiquement ils ont deux syllabes en commun, conceptuellement dans la marque Humano Pocket, le terme pocket, à défaut d’en constituer l’élément dominant conserve une fonction distinctive autonome ce qui exclut donc qu’il soit utilisé dans son sens courant. Après avoir mis en évidence la similarité entre les signes, la Cour va apprécier la renommée de la marque POCKET. En effet, dans cette affaire, la renommée n’était pas invoquée pour justifier la protection spéciale de l’article L.713-5 du code de la propriété intellectuelle mais comme facteur aggravant du risque de confusion. La Cour va conclure à la renommée de la marque au vu des éléments suivants : nombre de produits vendus (14 des 25 livres de poches les plus vendus comportent la marque POCKET), l’exploitation sur le territoire national dans les grandes enseignes spécialisées et sur internet, la taux de consultation du site éponyme, le montant brut des investissements consacrés à la promotion de la marque (6 millions d’euros), deux études Ipsos et GFK attribuant à la marque des taux de notoriété spontanée et suggérée conséquents. La renommée de la marque favorise en conséquence le risque de confusion pour le consommateur qui sera amené à croire que la marque Humano Pocket constitue une déclinaison de la marque Pocket ou, à tout le moins, qu’il existe résulte d’un partenariat. En conséquence, la contrefaçon de la marque POCKET est établie et justifie le prononcé de la nullité de la marque postérieure outre les mesures de cessation d’usage et l’allocation de dommages-intérêts. A rapprocher : article L.713-3 du Code de la propriété intellectuelle

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L’usage de la marque d’autrui à titre de mots-clés, application des principes

TGI Paris, 5 mars 2015, RG n°13/13092 Ce qu’il faut retenir : L’usage de la marque d’autrui à titre de mot-clé pour générer une annonce sur Google ne constitue une contrefaçon que si l’annonce induit le consommateur en erreur sur l’origine des produits et services. Pour approfondir : Dans cette affaire, la société InterFlora entendait s’opposer à l’usage de ses marques par l’un de ses concurrents, la société FLORAJET, à titre de mots-clés pour générer des annonces publicitaires sur Google. Le Tribunal va rejeter l’action sur la base de trois séries de motifs. En premier lieu, le Tribunal va relever que la demanderesse ne justifie pas de sa qualité pour agir et, en particulier, ne verse aux débats aucun élément justifiant de sa qualité de licencié dûment inscrit au registre des marques. Le tribunal conclu donc à l’irrecevabilité de l’ensemble des demandes en contrefaçon des marques dont elle affirme être licenciée. C’est donc à titre superfétatoire que les juges vont prendre soin de développer leur motivation quant au mal-fondé des demandes. En deuxième lieu, le tribunal va considérer que la renommée de chacune des marques sur lesquelles l’action est fondée n’est pas établie. Ainsi, le tribunal relève que la société InterFlora ne démontre pas la densité de son réseau de distribution, le nombre de distributeurs et leur pouvoir de chalandise, son chiffre d’affaires et son augmentation, l’ampleur du budget publicitaire et les modalités de promotion. Aussi, les juges vont considérer que la renommée des signes n’est pas établie faute de preuve de l’intensité de l’usage et du maintien des parts de marché. En troisième lieu, le tribunal va prendre le soin d’expliciter les raisons pour lesquelles l’usage critiqué n’est pas répréhensible. A cette fin, il rappelle que la CJUE dans ses arrêts Google (CJUE, 23 mars 2010, aff. C-236/08 à 238/08) et InterFlora (CJUE, 22 septembre 2011, aff. C-323/09) a indiqué que l’usage de la marque d’autrui à titre de mot-clé est licite pour autant qu’il n’y ait pas d’atteinte à sa fonction de garantie d’indication d‘origine laquelle

survient lorsque l’annonce ne permet pas ou permet seulement difficilement à l’internaute normalement informé et raisonnablement attentif de savoir si les produits ou les services visés par l’annonce proviennent de la même entreprise. Or, en l’espèce, la demanderesse ne rapporte pas une telle preuve au regard du message publicitaire apparaissant lorsque, au contraire, Florajet établi que l’annonce ne permet pas de confusion entre les deux acteurs économiques. Le tribunal conclu que les conditions d’usage de la marque à titre de mot-clé sont conformes aux critères établis par la jurisprudence de la CJUE et ne peuvent constituer une atteinte à la marque renommée de la marque Interflora. A rapprocher : CJUE, 22 septembre 2011, aff. C-323/09 - Cass. com., 25 sept. 2012, pourvoi n°11-18.110

La forclusion par tolérance n’est opposable qu’à l’action dirigée contre une marque postérieure

CA Paris, 10 mars 2015, RG n°13/21370 Ce qu’il faut retenir : La forclusion par tolérance n’est opposable qu’à l’action dirigée contre une marque postérieure et ne trouve pas d’application à l’action dirigée contre une dénomination sociale ou un nom commercial. Pour approfondir : La forclusion par tolérance, cause d’irrecevabilité de l’action en contrefaçon, est prévue à l’article L716-5 alinéa 4 du code de la propriété intellectuelle qui dispose : « Est irrecevable toute action en contrefaçon d'une marque postérieure enregistrée dont l'usage a été toléré pendant cinq ans, à moins que son dépôt n'ait été effectué de mauvaise foi. Toutefois, l'irrecevabilité est limitée aux seuls produits et services pour lesquels l'usage a été toléré ».

Par cet arrêt, la Cour rappelle que cette cause d’irrecevabilité ne saurait être opposée qu’à l’action dirigée contre une marque postérieure enregistrée : « Considérant que la forclusion par tolérance instituée par l'article L716-5 du code de la propriété intellectuelle ne peut être opposée à une action en contrefaçon de marque dirigée, comme en l'espèce, contre une dénomination sociale ou un nom commercial ».

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A rapprocher : article L716-5 alinéa 4 du Code de la propriété intellectuelle - Cass. com., 7 janvier 2014, pourvoi n°12-28041

Contrefaçon et usage du signe d’autrui en tant qu’identifiant commercial

Cass. com., 31 mars 2015, pourvois n°13-21.300 et 13-21.345

Ce qu’il faut retenir : La caractérisation de la contrefaçon de marque nécessite que le tiers poursuivi utilise le signe pour désigner ses produits. Pour approfondir : La société MOULIN ROUGE est titulaire de la marque MOULIN ROUGE pour désigner une série de produits dont la papeterie, les articles de bureau et la verrerie, produits pour la commercialisation desquels elle a concédé une licence exclusive à la société BAL DU MOULIN ROUGE qui exploite à Paris le Cabaret du même nom. Après avoir eu connaissance de la commercialisation de trousses d’écolier, tapis de souris et dessous de verre sur lesquels était reproduite la marque MOULIN ROUGE, accompagnée d’une photographie de la façade du cabaret, les sociétés respectivement titulaire et licenciée de la marque ont engagé une action en contrefaçon et en concurrence déloyale. La Cour d’appel a écarté l’existence d’actes de contrefaçon, de parasitisme et de concurrence déloyale. Un pourvoi a donc été formé que la Cour de cassation va également rejeter. Au cœur de cet arrêt, on retrouve la notion d’usage à titre de marque qui conditionne l’application de la sanction de la contrefaçon. Le signe en cause doit en effet être utilisé à titre de marque c’est-à-dire comme identifiant de l’origine des produits. La Haute Cour va en l’espèce approuver l’analyse des juges du fond qui ont considéré que l’usage des termes MOULIN ROUGE servait seulement à désigner le bâtiment dont la façade était reproduite dans le but d’identifier le cabaret qui fait partie du patrimoine touristique et culturel de Paris. Le pourvoi faisait grief à cette analyse de ne pas prendre en considération le fait que l’intérêt du bâtiment résidait dans les dîners spectacles, de sorte que l’identification de ce lieu revenait à identifier les produits et services exploités sous la marque MOULIN ROUGE. Le pourvoi faisait également état du fait que la

marque n’a pas pour seule fonction d’identifier l’origine des produits mais constitue également un instrument de stratégie commerciale employé en particulier à des fins publicitaires ce qui justifie que son titulaire soit habilité à interdire à un concurrent de reproduire celle-ci sur tous produits identiques ou similaires aux produits dérivés que lui-même exploite afin d‘assurer sa promotion et tirer profit de sa notoriété. La Cour de cassation va approuver l’arrêt qui a considéré que l’usage du signe ne constitue pas un usage à titre de marque, faute de remplir la fonction distinctive. A cette fin, elle relève que la société poursuivie utilisait la dénomination MOULIN ROUGE, non pas de façon isolée pour désigner ses produits, mais en association avec l’image stylisée du moulin qui abrite le cabaret ou reproduisait l’affiche de Toulouse Lautrec réalisée pour la publicité de la revue menée par La Goulue, dans le but d’identifier le cabaret de façon indissociable du bâtiment. Aussi, la dénomination est utilisée à des fins descriptives d’un site touristique sans affecter la garantie d’origine des produits sur lesquels elle est apposée. Le grief de parasitisme avait également été rejeté par la Cour d’appel qui est approuvée par la Cour de cassation dans cet arrêt aux motifs que la société poursuivie qui reproduit sur ses produits les principaux monuments et lieux touristiques de Paris, en les désignant par leur nom et en ce qui concerne MOULIN ROUGE sans faire référence à l’activité commerciale de cet établissement. Ainsi, selon les juges du fond, cela établit qu’elle n’a pas cherché à se placer dans le sillage de la société Le Moulin Rouge, ni à tirer profit de sa notoriété. De même, l’arrêt commenté approuve les juges du fond qui ont écarté toute concurrence déloyale aux motifs que l’absence de référence à l’activité commerciale de l’établissement MOULIN ROUGE exclut tout risque de confusion entre les activités exercées par les parties. A rapprocher : Cass. com., 12 juillet 2011, pourvoi n°10-22739 Contrefaçon et impression d’ensemble produite par

les signes Cass. com., 12 mai 2015, pourvoi n°14-14.774

Ce qu’il faut retenir : La Cour rappelle que la contrefaçon s’apprécie selon une appréciation globale fondée sur l’impression d’ensemble produite par les signes.

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Pour approfondir : L’affaire a débuté par une procédure d’opposition à l’enregistrement de la marque Les Voiles de Cassis par la commune de Saint-Tropez titulaire de la marque Les Voiles de Saint-Tropez qui faisait valoir l’existence d’une atteinte à ses droits antérieurs. Tandis que l’INPI avait accueilli l’opposition, sa décision fut contestée devant la Cour d’appel de Paris qui annula la décision. Les juges d’appel ont, pour leur part, considéré que les deux signes pouvaient coexister. La Cour considère que le terme « Les Voiles » est arbitraire pour désigner une partie des produits et services concernés par le libellé des marques, lesquelles ne présentent pas d’originalité au niveau de leur graphisme. Sur le plan conceptuel, l’expression « les voiles de » a une connotation marine pour le consommateur d’attention moyenne et le terme « Saint Tropez » est l’élément dominant, or si la commune du même nom est connue sur le plan national et international, il n’en va pas de même pour la commune de Cassis. Les communes n’ayant pas le même nom, et la marque « Les Voiles de Saint Tropez » n’ayant pas de notoriété démontrée, l’opposition à l’enregistrement de la marque seconde doit être rejetée. La Cour de cassation sanctionne l’appréciation portée par les juges d’appel qui ont statué sur la seule base des différences relevées entre les noms de commune et au vu de la faible notoriété de la marque Les Voiles de Saint-Tropez, sans procéder à une appréciation globale fondée sur l’impression d’ensemble produite par les signes. La Haute Cour invite la Cour d’appel de renvoi à rechercher si, d’un côté, en raison de son caractère arbitraire le terme « les voiles de » ne conférait pas à la marque antérieure une forte distinctivité par rapport aux produits de la même catégorie et si, de l’autre côté, les ressemblances existantes ne créaient pas un risque de confusion pour le consommateur d’attention moyenne et, enfin, si la faible similitude entre les signes n’étaient pas compensée par l’identité et la similarité des produits concernés. Les juges d’appel devant lesquels l’affaire est renvoyée devront mener cette analyse basée sur la recherche de l’impression d’ensemble produite par les marques. A rapprocher : article L.713-3 du Code de la propriété intellectuelle

L’appréciation de la contrefaçon est indépendante des conditions d’exploitation de la marque

Cass. com., 23 juin 2015, pourvoi n°14-13.011 Ce qu’il faut retenir : Pour apprécier l’existence de la contrefaçon d’une marque par une marque seconde, le juge doit comparer les signes désignés dans l’enregistrement de la marque. Pour approfondir : Dans cette affaire, la société titulaire de la marque verbale et figurative Min’ours agissait en contrefaçon de marque à l’encontre de la société titulaire de la marque Kid’ours. Pour apprécier l’existence de la contrefaçon, la Cour d’appel s’était penchée sur l’examen des ressemblances entre les signes. Or, pour conclure à l’absence de risque de confusion, et donc de contrefaçon, les juges avaient relevé que la similitude entre les signes était atténuée par les différences entre les modes de conditionnement des produits ainsi que la présentation des marques sur ces derniers. Le pourvoi faisait grief à l’arrêt rendu par la Cour d’appel de ne pas s’être contenté de comparer les signes en présence et d’avoir intégré dans son appréciation les conditions effectives dans lesquelles les signes étaient exploités. Par cet arrêt de principe, au visa des articles L713-3 et L.716-1 du code de la propriété intellectuelle, la Cour de cassation va censurer l’arrêt qui lui est soumis. Elle rappelle en premier lieu que « … le risque de confusion doit s’apprécier globalement, par référence au contenu des enregistrements des marques, vis-à-vis du consommateur des produits tels que désignés par ces enregistrements et sans tenir compte des conditions d’exploitation des marques ou des conditions de commercialisation des produits ». Ce principe d’appréciation de l’existence d’une contrefaçon étant rappelé, la Cour casse l’arrêt en lui reprochant d’avoir statué au vu de l’exploitation des marques pour la commercialisation de produits vitaminés destinés aux enfants et de la comparaison des modes de conditionnement de ces produits, alors qu’elle devait se référer, en ce qui concerne l’impression d’ensemble sur les plans visuel, phonétique ou conceptuel à l’enregistrement des marques en cause.

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En conclusion, on retiendra que les conditions de commercialisation des produits sous la marque et, plus largement, d’exploitation des marques sont indifférentes à l’appréciation de la contrefaçon qui réside dans la seule comparaison des signes sans tenir compte de facteurs extérieurs. Cela est l’occasion de rappeler l’importance de l’acte de dépôt de marque et l’intérêt de s’entourer de professionnels puisque cet acte défini les contours de la protection. A rapprocher : articles L.713-3 et L.716-1 du Code de la propriété intellectuelle Les particularités procédurales du référé-contrefaçon

CA Douai, 17 septembre 2015, RG n°14/02031 Ce qu’il faut retenir : Le référé-contrefaçon présente une particularité procédurale organisée par le Code de la propriété intellectuelle qui impose d’engager une action au fond dans un court délai suivant l’ordonnance de référé à défaut de quoi les mesures ordonnées en référé risquent d’être annulées. Pour approfondir : En cas de contrefaçon de marque, le Code de la propriété intellectuelle offre la possibilité d’agir en référé ce qui permet d’obtenir des mesures provisoires rapidement. Ainsi, dans le cadre d’une telle procédure, le juge saisi en référé peut ordonner toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente ou empêcher la poursuite d’actes argués de contrefaçon et accorder une provision lorsque l’existence du préjudice n’est pas sérieusement contestable. Les mesures ordonnées par le juge des référés ayant un caractère provisoire, il convient d’engager une action dite au fond, ce que prévoit expressément l’article L716-6 alinéa 5 du Code de la propriété intellectuelle en ces termes : « Lorsque les mesures prises pour faire cesser une atteinte aux droits sont ordonnées avant l'engagement d'une action au fond, le demandeur doit, dans un délai fixé par voie réglementaire, soit se pourvoir par la voie civile ou pénale, soit déposer une plainte auprès du procureur de la République. A défaut, sur demande du défendeur et sans que celui-ci ait à motiver sa demande, les mesures ordonnées sont annulées, sans préjudice des dommages et intérêts qui peuvent être réclamés ». L’article R.716-6 fixe le délai

pour engager une telle action : il est de 20 jours ouvrables à compter de l’ordonnance (et de 31 jours lorsque le délai de distance est applicable). A défaut, la sanction est radicale et consiste en la nullité des mesures ordonnées, le demandeur n’ayant pas à justifier de sa demande mais simplement à faire état de ce retard ou de l’absence pure et simple d’action au fond. C’est précisément la sanction ordonnée par la Cour d’appel de Douai dans son arrêt du 17 septembre 2015 et subie par la société qui, après avoir engagé une action en référé, n’avait cru devoir engager une action au fond dans le délai prescrit par l’article R.716-1. La société objet des mesures ordonnées par le juge des référés avait formé appel à l’encontre de cette ordonnance et soulevé ladite nullité. La Cour, constatant l’absence de procédure au fond suite à l’ordonnance de référé, prononce logiquement la nullité des mesures. L’action en référé-contrefaçon est donc une étape nécessaire pour obtenir des mesures rapides à l’encontre d’un contrefacteur, elle ne saurait pourtant constituer l’unique étape, même lorsque l’ordonnance de référé prononce les mesures recherchées. En effet, le référé doit nécessairement se prolonger par une action au fond engagée très rapidement. A défaut de quoi, l’ensemble des mesures provisoires seront annulées avec, en sus, le risque de se voir condamné au paiement de dommages-intérêts. A rapprocher : article L.716-6 du Code de la propriété intellectuelle ; article R.716-1 du Code de la propriété intellectuelle

II. PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE

OBJET ET PROTECTION La personne morale ne peut être « auteur » au sens

du Code de la propriété intellectuelle Cass. civ. 1ère, 15 janvier 2015, pourvoi n°13-23.566

Ce qu’il faut retenir : Une personne morale ne peut revendiquer la qualité d’auteur d’une œuvre objet de droits d’auteur. Pour approfondir : La Cour de cassation vient de rappeler avec force que la personne morale ne peut, au sens du Code de la

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propriété intellectuelle, revendiquer la qualité d’auteur d’une œuvre protégeable par le droit d’auteur. En l’espèce, un professeur de médecine et un informaticien ont, au sein de la société qu’ils ont constituée en commun en qualité d’associés, collaboré à la conception, la réalisation, le développement et la réalisation d’un logiciel d’analyse céphalométrique. A la suite d’un différend intervenu entre les deux associés sur l’attribution des droits issus de la création et du développement du logiciel, le professeur de médecine, devenu gérant de la société constituée en commun, a pris l’initiative d’assigner pour le compte de cette dernière devant le Tribunal de grande instance les sociétés constituées par l’informaticien. La société demanderesse, par la voie de son gérant, sollicitait que le logiciel objet du litige soit qualifié d’œuvre collective et se faire reconnaitre seule titulaire des droits d’auteur sur « l’œuvre » au sens du Code de propriété intellectuelle. Les juges du fond ont fait droit à cette demande en considérant que les associés ayant collaboré au sein et pour le compte de la société créée en commun pour la création du logiciel, cette société devait être considérée comme titulaire de ces droits. Au visa de l’article L.113-1 du Code de la propriété intellectuelle aux termes duquel « La qualité d'auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l'œuvre est divulguée », casse l’arrêt d’appel en réaffirmant « qu’une personne morale ne peut avoir la qualité d’auteur ». A rapprocher : article L113-1 du Code de la propriété intellectuelle Base de données : comment restreindre l’utilisation

des données par des tiers ? CJUE, 15 janvier 2015, aff. C-30/14

Ce qu’il faut retenir : Lorsqu’une base ne bénéficie pas de la protection spécifique prévue par la loi nationale pour les bases de données, les dispositions impératives relatives aux droits des utilisateurs ne s’appliquent pas. Pour approfondir : Les bases de données font l’objet d’une protection spécifique prévue au niveau communautaire par la

directive 96/9 transposée en droit français aux articles L.341-1 et s. du Code de la propriété intellectuelle. La loi confère deux formes de protection : l’une réside dans le droit d’auteur sur la base de données qui, par le choix ou la disposition des matières, constitue une création intellectuelle, l’autre consiste dans le droit sui generis du producteur de la base dont l’obtention, la vérification, la présentation notamment attestent d’un investissement substantiel. Le texte prévoit également les actes que l’utilisateur d’une telle base peut effectuer sans autorisation spécifique lorsque la base fait l’objet de droit d’auteur et/ou sui generis et interdit toute disposition contractuelle contraire (en droit français, cf. article L.342-3 du Code de la propriété intellectuelle). L’affaire ayant conduit à l’arrêt commenté opposait une compagnie aérienne à un comparateur de prix à qui était reproché l’utilisation de données provenant du site internet de la compagnie, laquelle se prévalait des stipulations figurant dans les conditions générales d’utilisation de son site internet prévoyant, notamment, l’interdiction d’utilisation de tout système automatisé pour extraire les données du site à des fins commerciales. La juridiction néerlandaise saisie de cette affaire sollicita donc la CJUE pour l’interprétation des dispositions relatives aux bases de données. La question préjudicielle consistait à interroger la CJUE sur le point de savoir si, une base de données qui n’est protégée ni par le droit d’auteur ni par le droit sui generis, peut voir son utilisation limitée contractuellement ? La Cour répond en ces termes : « La directive 96/9/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mars 1196, concernant la protection juridique des bases de données, doit être interprétée en ce sens qu’elle n’est pas applicable à une base de données qui n’est protégée ni par le droit d’auteur ni par le droit sui generis en vertu de cette directive, si bien que les articles 6, paragraphe 1,8 et 15 de ladite directive ne font pas obstacle à ce que le créateur d’une telle base de données établisse des limitations contractuelles à l’utilisation de celle-ci par des tiers, sans préjudice du droit national applicable ». Aussi, lorsqu’une base ne bénéficie pas de la protection spécifique prévue par la loi nationale pour les bases de données, les dispositions impératives relatives aux droits des utilisateurs ne sont pas applicables et il est possible d’organiser librement contractuellement (par exemple dans les CGU d’un site internet) les restrictions à l’usage des données.

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Appréciation de « l’investissement substantiel » nécessaire à la protection des bases de données Cass. com., 10 février 2015, pourvoi n°12-26.023

Ce qu’il faut retenir : Le producteur de base de données peut, au sens de l’article 341-1 du Code de la propriété intellectuelle, revendiquer la protection de sa base de données au regard de « l’investissement substantiel » exigé par le texte. Pour approfondir : La Cour de cassation vient de rappeler les conditions dans lesquelles le producteur de base de données peut, au sens de l’article 341-1 du Code de la propriété intellectuelle, revendiquer la protection de sa base de données au regard de « l’investissement substantiel » exigé par le texte. En effet, aux termes de l’article 341-1 du Code de la propriété intellectuelle, « le producteur d'une base de données, entendu comme la personne qui prend l'initiative et le risque des investissements correspondants, bénéficie d'une protection du contenu de la base lorsque la constitution, la vérification ou la présentation de celui-ci atteste d'un investissement financier, matériel ou humain substantiel. Cette protection est indépendante et s'exerce sans préjudice de celles résultant du droit d'auteur ou d'un autre droit sur la base de données ou un de ses éléments constitutifs ». En l’espèce, la société RYAN AIR sollicitait le bénéfice de la protection spécifique au titre de sa base de données sur ses vols et horaires notamment, et ainsi la réparation du préjudice résultant du caractère illicite des actes d'extraction et de réutilisation par la société Opodo de sa base de données. La Cour de cassation valide la démarche de la Cour d’appel ayant rejeté cette demande puisque, après avoir qualifié de « base de données » les informations relatives aux vols, horaires, disponibilités et tarifs réunies par la société Ryanair « en un ensemble de données organisées et structurées de manière à pouvoir être facilement consultées et utilisées par les internautes », et après avoir justement retenu qu'il importait peu que cette base fût dédiée à son activité principale, la Cour d'appel a exclu du champ de l'investissement entrant dans la constitution, la vérification ou la présentation du contenu de ladite base, tant le coût des logiciels destinés à assurer le fonctionnement du système de gestion commerciale que les dépenses relatives à l'application informatique

de la billetterie ; en conséquence, et eu égard aux autres éléments invoqués par la société Ryanair au titre de « l'investissement » consenti pour la production de la base de données, la Cour d’appel a pu souverainement estimer que cet investissement ne revêtait pas un caractère « substantiel » au sens de l’article L341-1 du Code de la propriété intellectuelle. A rapprocher : article L341-1 du Code de la propriété intellectuelle

Œuvre collective : illustration CA Paris, 22 mai 2015, RG n°11/19595

Ce qu’il faut retenir : La qualification d’œuvre collective suppose de rapporter la preuve de l’intervention de plusieurs contributeurs intervenant sous la houlette d’une personne morale. Pour approfondir : L’œuvre collective est l’hypothèse unique en droit d’auteur dans laquelle les droits naissent, ab initio, sur la tête d’une personne morale qui n’a donc pas à établir de cession de droits d’auteur à son profit. C’est là l’un des principaux intérêts de cette qualification. L’œuvre collective est spécialement visée à l’article L.113-2 alinéa 3 du CPI lequel prévoit « Est dite collective l’œuvre créée sur l’initiative d’une personne physique ou morale qui l’édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l’ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu’il soit possible d’attribuer à chacun d’eux un droit distinct sur l’ensemble réalisé. Dans cette affaire, la Cour va retenir cette qualification à propos d’un véhicule sur lequel un ancien salarié revendiquait des droits. A cette fin les juges relèvent : «… la réalisation de l'automobile Porsche 356 Speedster est le fruit dans le cadre d'un contexte très artisanal, de la contribution de plusieurs personnes formant une équipe au sein de l'entreprise P., de cette automobile, monsieur K. responsable du département carrosserie, monsieur Leopold S., monsieur Karl R., monsieur Frantz R. et Ernst F. même si le rôle dans le dessin de la carrosserie de monsieur K. apparaît prépondérant, la réalisation de cette automobile est le fruit de l'apport de chacun de ces intervenants y compris

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le fils du créateur de la société. D'ailleurs les plans de ce véhicule comportaient le cartouche Porsche manifestant la réalité du contrôle de l'entreprise sur cette réalisation. Les intimés établissent que pour la première Porsche la partie extérieure a été réalisée par messieurs Max S., Friedrich W. et S. ce qui confirme le travail collectif usuel dans la réalisation, à cette époque, des automobiles ». On y retrouve les éléments classiques retenus par la jurisprudence pour caractériser une œuvre collective : l’intervention de plusieurs contributeurs intervenant sous la houlette d’une personne morale. Cette caractérisation étant faîte, la Cour énonce : « Il s'agit en conséquence d'une œuvre collective dans la mesure où la contribution personnelle des différents intervenants dans l'élaboration de ce véhicule automobile, dont celle de monsieur K., se fond dans un ensemble en vue duquel il a été conçu en tant que véhicule finalisé sous la mise au point et le contrôle de l'entreprise sans qu'il soit possible d'attribuer à chacun des intervenants un droit distinct sur ce véhicule ». A rapprocher : article L.113-2 alinéa 3 du Code de la propriété intellectuelle

L’originalité doit se prouver CA Paris, 29 mai 2015, RG n°13/18038

Ce qu’il faut retenir : Celui qui se prétend auteur d’une œuvre originale objet de droits d’auteur doit prouver son originalité lorsqu’elle est contestée. Pour approfondir : L’auteur d’un ouvrage intitulé « Le Guide du Tarot » avait engagé une action en contrefaçon après avoir eu connaissance de la mise en ligne non autorisée sur internet de contenus issus de son ouvrage. L’originalité, condition sine qua non de la protection par le droit d’auteur, était discutée devant la Cour. L’appelant faisait grief au TGI d’avoir dénué toute protection à son ouvrage et, ce faisant, d’avoir créé « un objet de droit non identifié, à savoir un livre de 400 pages sans auteur » (sic) et reprochait également au juges de première instance d’avoir mis à sa charge la preuve de l’originalité de son œuvre alors que toute

reproduction faite sans le consentement de l’auteur est illicite et que l’auteur doit se contenter de prouver qu’il a écrit le livre aucune loi ne lui imposant d’en prouver l’originalité. Mélangeant les genres, il faisait état ensuite de la notion de distinctivité de phrases pour en déduire l’originalité, et de nouveauté en mentionnant que le plan de son étude ne se retrouve dans aucun autre livre et qu’aucune phrase ne se retrouve dans les ouvrages antérieurs.

Une remise en ordre des choses s’imposait. La Cour rappelle tout d’abord l’exigence d’originalité qu’il incombe à celui qui se prétend auteur de prouver : « Que se prévalant du monopole accordé à l'auteur, il lui appartient, en effet, de démontrer que son étude sur le tarot de Marseille dont l'originalité est contestée exprime sa personnalité par sa composition, par le plan qu'elle a adopté ou encore par le style qui lui est propre ». Conformément aux règles du droit de la preuve c’est à l’auteur prétendu qu’il incombe de rapporter cette preuve spécialement lorsque l’originalité est contestée sans pouvoir se contenter de simples affirmations : « Que force est de considérer qu'elle procède par simples affirmations quant à la composition et au style de son œuvre, se prévalant incidemment de leur « distinctivité », de « phrases originales avec une forme précise », évoquant « ses choix et sensibilités » ou reproduisant les réactions laudatives de ses lecteurs sans pour autant caractériser de quelle manière se manifeste sa personnalité à travers des choix qui lui sont propres ou préciser en quoi cette œuvre révèle, selon les enseignements de la juridiction communautaire, sa « touche personnelle ». La Cour va ainsi relever que peu important que le plan de l’étude ne se retrouve dans aucun ouvrage antérieur car ce n’est pas parce que différents plans sont envisageables qu’il y a nécessairement activité créatrice. En l’espèce, l’appelante ne démontre pas en quoi ce plan se caractériserait par un apport qui lui serait personnel.

Cet arrêt est donc l’occasion pour la Cour de rappeler que la charge de la preuve de l’originalité incombe à celui qui se prétend auteur d’une création objet de droits d’auteur, et de rapporter la preuve de cette originalité qui doit manifester l’empreinte de la personnalité de son auteur, l’originalité ne pouvant être assimilé à la distinctivité ou la nouveauté. A rapprocher : article L.111-1 du Code de la propriété intellectuelle

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Le droit d’auteur appliqué aux imprimés : illustration des enjeux pour la mode

CA Paris, 2 juin 2015, RG n°14/01233 Ce qu’il faut retenir : Une personne morale peut bénéficier de la présomption de titularité des droits d’auteur à l’encontre du contrefacteur même si l’auteur est identifié. Pour approfondir : En 2000, la maison Louis Vuitton a sollicité un célèbre créateur américain pour la création d’un imprimé revisitant le motif dit léopard. Le modèle ainsi crée a fait l’objet d’un dépôt à l’INPI, il apparaîtra quelques années plus tard sur des articles de mode à l’occasion d’un défilé. Dans le courant de l’année 2012, Louis Vuitton a constaté la commercialisation d’étoles dans les magasins sous enseignes Jennyfer reproduisant les caractéristiques de son imprimé. C’est dans ces conditions qu’elle fit procéder à une saisie contrefaçon au cours de laquelle il a pu être établi que les étoles avaient été vendues par une société tierce également visée par une saisie contrefaçon. Au vu de ces éléments, la société Louis Vuitton assigna donc les deux sociétés en contrefaçon avant de transiger avec la société Jennyfer. C’est donc uniquement à l’encontre du fournisseur que la procédure a été suivie devant le TGI de Paris puis devant la Cour d’appel de Paris. Classiquement et pour contester la recevabilité de l’action, la titularité des droits était contestée aux motifs que l’auteur du modèle était identifié et que le contrat fourni ne comportait pas la preuve de la cession des droits. Or, en l’espèce, Louis Vuitton se prévalait de la présomption de titularité des droits d’origine prétorienne permettant à une personne morale d’être présumée titulaire des droits à l’encontre du prétendu contrefacteur, même dans les cas où l’auteur est identifié, à condition que l’œuvre soit clairement identifiée et de justifier de la date à laquelle elle a commencé à en assurer la commercialisation. En l’espèce, la Cour retient que l’enregistrement à l’INPI ainsi que les éléments versés aux débats (revues de presse, défilés de mode, visuels publicitaires, extraits de look book notamment) justifient de la commercialisation sous son nom et de façon non équivoque par la société Louis Vuitton du modèle revendiqué. L’originalité – condition à laquelle une création fait

l’objet de droits d’auteur – était également contestée. La Cour justifie dans cet arrêt les motifs pour lesquels elle retient l’originalité de l’imprimé. Les juges mettent tout d’abord en exergue les éléments caractéristiques, à savoir : un fond uni et contrastant sur lequel s’inscrivent des motifs répartis de manière assez irrégulière mais dense dont certains ont la forme de lettres ou de points, présentant la particularité d’être bicolores en ce qu’ils combinent systématiquement une couleur sombre et une couleur claire, cette réalisation créant un effet d’ombre porté en raison du contracte et de l’agencement des couleurs. La Cour relève également que si le modèle léopard classique qui reproduit une peau de léopard est devenu banal et courant, l’imprimé léopard stylisé s’en démarque largement. La Cour conclu donc au fait que l’imprimé est original au sens du droit d’auteur. La titularité des droits et l’originalité de la création étant vérifiées, la Cour s’attache ensuite à caractériser la contrefaçon. La Cour rappelle en premier lieu la méthode d’appréciation de la contrefaçon au vu des ressemblances et non des différences, puis établit que les produits litigieux reproduisent dans la même combinaison l’imprimé léopard stylisé dont elles reprennent les motifs en forme de lettres ou de points répartis de manière relativement dense présentant la particularité d’être bicolores de nature à créer un effet de relief du motif sur un fond uni et contrastant décliné en quatre coloris, la seule différence tenant au caractère moins dense de la répartition des motifs qui n’est qu’une différence de détails non significative. Outre les mesures d’interdiction, de confiscation et de destruction des stocks, l’indemnisation est évaluée, par application de l’article L.331-1-3 du code de la propriété intellectuelle selon lequel il convient de tenir compte des conséquences économiques négatives de l’atteinte aux droits, des bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte et le préjudice moral causé. La cour relève que le préjudice au titre du gain manqué a déjà a été réparé dans le cadre de la transaction intervenue avec la société ayant vendue une partie des produits fournies. Néanmoins, cette transaction n’ayant pas pris en compte les bénéfices réalisés par le fournisseur (lequel était seul poursuivi), la Cour alloue une indemnité à ce titre calculé sur la base de la marge brute réalisée. En outre, elle répare également le préjudice moral résultant de la banalisation, la dévalorisation et la vulgarisation de l’imprimé. A rapprocher : article L.331-1-3 du Code de la propriété intellectuelle

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Stand de salon professionnel et droit d’auteur CA Paris, 30 juin 2015, RG n°14/05098

Ce qu’il faut retenir : Un stand peut faire l’objet de droits d’auteur, permettant ainsi de s’opposer à sa reproduction. Pour approfondir : Le droit d’auteur appréhende des créations de natures diverses, l’article L.112-1 CPI dispose en effet « Les dispositions du présent code protègent les droits des auteurs sur toutes les œuvres de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination » et l’article L.112-2 CPI dresse une liste d’œuvres qui n’est pas exhaustive. Si les bâtiments donnent prise au droit d’auteur, tout comme l’architecture intérieure, les stands également comme l’illustre la décision commentée. Dans cette affaire, une agence spécialisée dans la création, la fabrication et la commercialisation de stands et l'aménagement d'espaces intérieurs avait réalisé un stand de salon pour l’un de ses clients. Considérant que, l’année suivant la cessation de leur relation, le stand de son ancienne cliente présenté à l’occasion d’un salon professionnel reproduisait le sien, elle engagea une action en contrefaçon. La Cour d’appel énonce clairement les éléments qui permettent, selon elle, de caractériser une création originale objet de droits d’auteur :

- la circonstance que la société soit tenue de respecter, non seulement un cahier des charges, mais le règlement édicté par l'organisateur du salon et l'image de la société cliente ne saurait exclure en soi tout effort créatif de sa part ; en d’autres termes, le fait de devoir respecter certaines contraintes, n’exclut pas, de ce seul fait, toute originalité ;

- si l'existence d'une fonction utilitaire de chacun des éléments susvisés (ie, ouvertures sur les façades, présence de réserves, décoration intérieure, forme des colonnes), n'est ni contestable, ni contestée, il n'en demeure pas moins que leurs formes et leurs dispositions ne sont nullement asservies à cette fonction.

Aussi, les juges en concluent que les choix opérés dans la composition et la combinaison de ces éléments confèrent à cette dernière une physionomie propre

traduisant un parti pris esthétique qui porte l'empreinte de la personnalité de son auteur. Le stand est donc original et, partant, éligible à la protection au titre du droit d'auteur. A rapprocher : article L.112-1 du Code de la propriété intellectuelle - article L.112-2 du Code de la propriété intellectuelle

Les créations utilitaires et le droit d’auteur CA Douai, 17 septembre 2015, RG n°13/05073

Ce qu’il faut retenir : Si les créations utilitaires peuvent faire l’objet de droits d’auteur c’est à la condition qu’elles remplissent la condition d’originalité, ce qui exclut en conséquence que les choix soient uniquement dictés par la fonction de l’objet ou des contraintes techniques. Pour approfondir : L’affaire jugée par la Cour d’appel de Douai dans son arrêt du 17 septembre dernier opposait différents acteurs du monde de l’automobile et, en particulier une société fabriquant des poches souples pour le domaine de l’automobile à un équipementier d’un constructeur automobile célèbre. S’estimant victime d’actes de contrefaçon, le fabricant de poches engageait une action en contrefaçon de ses droits d’auteur prétendus. La Cour pose en premier lieu que « La protection conférée par le droit d’auteur ne peut s’appliquer ni à une technique, ni à une méthode, ni à un procédé, ni à un système, mais seulement à une création de l’esprit au sens de la loi sur la propriété littéraire et artistique, à condition qu’elle soit indépendante de l’obtention d’un résultat industriel. Un objet n’est protégeable par le droit d’auteur que s’il présente des caractéristiques ornementales et esthétiques séparables de son caractère fonctionnel ». Voici pour le rappel, les créations utilitaires peuvent être l’objet de droit d’auteur, lequel ne saurait concerner les aspects techniques et fonctionnels de la création en cause. La Cour poursuit sur la condition que doit remplir toute création pour faire l’objet de droit d’auteur : « L’exigence d’originalité qui en découle, qui recouvre la

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notion de création intellectuelle propre à son auteur lorsque celui-ci a pu exprimer son esprit créateur de manière originale (jurisprudence unifiée de la CJUE) impose que soit visible et caractérisé le reflet de la personnalité du créateur. S’agissant d’œuvres à caractère utilitaire, l’originalité s’entend de l’existence d’un apport intellectuel propre à son auteur, qui peut en effet résulter de la combinaison des éléments caractéristiques, mais à la condition que la création porte la trace d’un effort personnel de création et de recherche esthétique dans cette combinaison ». L’originalité arguée résidait, selon le demandeur, dans : la connectique, la forme ou géométrie, l’étiquetage et traçabilité. La Cour a toutefois considéré qu’aucun élément n’était probant pour conclure à l’absence d’originalité, et donc de droit d’auteur, au terme d’une motivation circonstanciée. Tout d’abord, les juges considèrent qu’en l’espèce, la forme et la géométrie des poches résultent du cahier des charges et des plans fournis, la forme est donc entièrement dictée par la fonction. C’est en application d’un cahier des charges précis que le choix des matériaux a été effectué. En définitive, les juges concluent que les poches en cause ne peuvent être considérées comme des œuvres originales, leur réalisation, qui résulte de choix dictés par la fonction à remplir, n’impliquant aucun effort créatif traduisant la personnalité de leur auteur, séparable du caractère fonctionnel. A rapprocher : article L.111-1 du Code de la propriété intellectuelle L’œuvre collective, le salarié et la liberté de création Cass. soc, 22 septembre 2015, pourvoi n°13-18.803

Ce qu’il faut retenir : L’absence de liberté de création s’oppose à la reconnaissance de droits d’auteur à une personne physique au profit de la qualification d’œuvre collective au bénéfice de la personne morale à l’initiative de la création qui en supervise la réalisation et en assure la diffusion. Pour approfondir : Le conflit opposant l’ancien salarié à son employeur est l’un des terrains privilégiés de développement de la notion d’œuvre collective. Ce type d’œuvre est envisagé par l’article L 113-2 du CPI lequel la définit ainsi à l’alinéa 3 : « Est dite collective l'œuvre créée sur l'initiative d'une personne physique ou morale qui

l'édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l'ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu'il soit possible d'attribuer à chacun d'eux un droit distinct sur l'ensemble réalisé ». En présence d’une œuvre dite collective, les droits d’auteur naissent sur la tête de la personne morale qui a initié la création, en a supervisé la réalisation et l’a diffusé publiquement, sans qu’il soit besoin d’établir la cession des droits d’auteur à son bénéfice. C’est tout l’enjeu d’une telle qualification. Dans cette affaire, une ancienne salariée de Lalique successivement styliste, chef du service création, puis directrice artistique revendiquait la qualité d’auteur et la titularité des droits sur un certain nombre d’œuvres et assigna en contrefaçon son ancien employeur. La Cour d’appel, approuvée par la Haute Cour, a qualifié l’ensemble des œuvres revendiquées d’œuvres collectives sur lesquelles l’ancienne salariée ne pouvait donc revendiquer des droits d’auteur la rendant, par conséquent, irrecevable en son action en contrefaçon. La Haute Cour retient que cette qualification avait justement été retenue par les juges du fond lesquels avaient établi que le Président de la société avait l’initiative des recherches de nouveaux produits et assurait la direction des études esthétiques, industrielles ou commerciales ; que son successeur précisera ensuite à la salariée qu’elle devait créer des produits dans le respect de l’image et de la stratégie définies par la direction générale. En outre, une autre salariée dessinait les pièces maîtresse des collections et en fixait les thèmes à partir de ses carnets de voyages et dont le bureau de créations s’inspirait pour compléter les collections, chaque dessin étant soumis à l’approbation de la direction générale. Elle recevait également de la direction générale des instructions esthétiques. Enfin, les œuvres en cause qui consistaient en des modèles en trois dimensions, ont été conçues par différentes personnes et en particulier avec la participation de différents corps de métier dont l’intervention allait au-delà de la simple exécution. Aussi, l’ancienne salariée n’a pas été en mesure d’établir qu’elle disposait de droits d’auteur dès lors qu’elle ne définissait pas les choix esthétiques de l’entreprise et ne jouissait pas d’une liberté de création. On retiendra que la liberté de création est l’un des critères déterminant pour retenir la qualification d’œuvre collective.

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A rapprocher : article L.113-2 du Code de la propriété intellectuelle

Base de données et droits du producteur Cass. civ. 1ère, 12 novembre 2015, pourvoi n°14-14.501 Ce qu’il faut retenir : La protection conférée au producteur d’une base de données par l’article L.341-1 du Code de la propriété intellectuelle suppose de rapporter la preuve d’investissements spécifiques liés à la création de la base. Pour approfondir : L’article L.341-1 du Code de la propriété intellectuelle (CPI) confère au producteur d’une base de données une protection spécifique prévue en ces termes : « Le producteur d'une base de données, entendu comme la personne qui prend l'initiative et le risque des investissements correspondants, bénéficie d'une protection du contenu de la base lorsque la constitution, la vérification ou la présentation de celui-ci atteste d'un investissement financier, matériel ou humain substantiel. Cette protection est indépendante et s'exerce sans préjudice de celles résultant du droit d'auteur ou d'un autre droit sur la base de données ou un de ses éléments constitutifs ». Forme de consécration législative du parasitisme, le droit propre conféré au producteur suppose que ce dernier ait engagé des investissements qui méritent d’être « protégés » par la reconnaissance d’un droit privatif. Dans cette affaire, la société exploitant le site internet « seloger.com » reprochait à une société de procéder à l’extraction de la totalité de sa base de données constituée d’annonces immobilières pour alimenter sa propre base. Son action était fondée sur l’atteinte portée à ses droits de producteur et sur la concurrence parasitaire. Sur le fondement du parasitisme économique, il était fait grief à l’exploitant d’un moteur de recherche dédié de détourner l’activité d’un service en ligne présentant des annonces immobilières en mettant à la disposition des internautes le contenu de ces annonces immobilières et en leur offrant la possibilité de les explorer en temps réel ce qui lui permet de capter les revenus liés à l’activité de l’opérateur de ce service.

La Cour d’appel a écarté le grief de parasitisme ; selon les juges la faute n’était pas caractérisée dans la mesure où le moteur de recherche ne faisait pas apparaître les coordonnées du vendeur ou de son mandataire sur la page de résultats, les internautes étant dirigés sur le site « seloger.com ». Sur le fondement de la violation des droits du producteur d’une base de données de l’article L.341-1 du CPI, la Cour de cassation casse l’arrêt qui, selon elle, ne comporte pas une motivation satisfaisante. En effet, les juges du droit reprochent à la Cour d’appel d’avoir statué comme elle l’a fait par un motif qui ne permet pas de définir si : (i) les investissements liés à la collecte des données et à leur diffusion, telles que recueillies, relevaient de la création des éléments constitutifs du contenu de la base et ne devaient donc pas être pris en considération, ou (ii) s’ils faisaient partie des investissements « spécifiques » dont il fallait rapporter la preuve pour justifier de la protection. A rapprocher : article L.341-1 du Code de la propriété intellectuelle

EXPLOITATION ET DEFENSE L’exception de parodie : oui lorsqu’il s’agit d’humour

TGI Paris, 15 janvier 2015, RG n°14/13168 Ce qu’il faut retenir : L’exception de parodie ne peut bénéficier qu’à ceux qui ont une intention humoristique. Pour approfondir : Le droit d’auteur connaît des exceptions au rang desquelles figure l’exception dite de parodie prévue à l’article L.122-5-4°CPI : « Lorsque l’œuvre a été divulguée, l’auteur ne peut interdire (…): 4° la parodie, le pastiche et la caricature, compte tenu des lois du genre ». C’est derrière cette exception que tentait de se retrancher Dieudonné M’Bala M’Bala, poursuivi en contrefaçon par le frère de la chanteuse Barbara. Ce dernier avait pris connaissance du clip d’une chanson intitulée le Rat noir, reprenant le rythme et les strophes de l’originale intitulée l’Aigle Noir, dont les paroles avaient été modifiées et entrecoupées de commentaires sur l’enfance juive de Barbara et de commentaires sur l’artiste dont il est inutile de rapporter la teneur.

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L’action en contrefaçon visait à faire sanctionner l’atteinte au droit moral de l’artiste. Le Tribunal va, sans surprise, retenir l’atteinte à l’œuvre, et rejeter le bénéfice de l’exception de parodie. Celle-ci suppose en effet la réunion de 2 conditions : l’absence de risque de confusion avec l’œuvre parodiée et un but humoriste exclusif de toute intention de nuire. Or, sur ce point, les juges relèvent « … ce faisant, il ne peut s’agir des exceptions de parodie, pastiche et caricature prévues à l’article L.122-5 du CPI mais de la seule volonté de salir une artiste reconnue en dénaturant son texte et en y ajoutant des commentaires nauséabonds. Ces commentaires qui évoquent un épisode douloureux de l’histoire personnelle de Barbara qu’elle a sublimé dans la chanson l’Aigle Noir constituent indubitablement une atteinte caractérisée au droit moral de l’auteur. L’intention de Dieudonné tant dans la chanson que dans les commentaires n’est pas de rechercher un effet humoristique que l’on cherche vainement en écoutant la chanson ou en visionnant le clip mais manifeste une intention de nuire en transformant une chanson poignante sur l’inceste en une grivoiserie vulgaire et attentatoire au respect dû aux morts et à leur honneur ». L’exception de parodie, pastiche et caricature est donc réservée à ceux qui cherchent à faire rire et ne permet pas de justifier une atteinte aux droits de l’auteur motivée pas d’autres buts. A rapprocher : article L.122-5-4 du Code de la propriété intellectuelle

Contrefaçon de droit d’auteur et usage publicitaire non autorisé d’une photographie

CA Paris, 7 avril 2015, RG n° 13/21690 Ce qu’il faut retenir : Le dépassement des termes de l’autorisation d’exploitation de droits d’auteur est constitutif de contrefaçon. Pour approfondir : Une société intervenant dans le secteur des cosmétiques et de la parfumerie a eu recours à une agence de communication pour l’élaboration d’une image destinée à illustrer la campagne de publicité d’un nouveau produit de soin. Pour la réalisation de la photographie, l’agence sollicita elle-même un photographe qui a établi un devis faisant notamment état de droits d’utilisation pour les territoires « USA,

Europe, Middle East » et pour les supports « PLV, Edition, Presse féminine et professionnelle, Internet » pour une durée d’une année. Suite aux prises de vue, différentes retouches furent apportées pour aboutir à la version finale de l’image qui sera utilisée pour la commercialisation du produit. Considérant que la photographie était utilisée au-delà des termes de l’autorisation d’exploitation, le photographe a fait procéder à des saisies-contrefaçons avant d’engager une action en contrefaçon tant à l’encontre de la société exploitant l’image que de l’agence de communication. Dans le cadre de l’action en contrefaçon, les défenderesses contestaient l’originalité de la photographie – condition de protection posée par le code de la propriété intellectuelle –, et donc l’existence de droits d’auteur sur celle-ci. Cet argument reposait sur l’idée que, d’une part, la maquette avait été réalisée pour répondre à une commande sur la base de briefs communiqués par le client et que, d’autre part, le directeur de création de l’agence avait participé aux différentes étapes de création, ce qui priverait le photographe de toute liberté de création. Les juges d’appel ne vont pas suivre l’argument et reconnaître au contraire l’originalité de la photographie. Après avoir établi que la photographie finale se différenciait de la maquette reproduisant les instructions du client, les juges vont relever que la photographie faisait ressortir les caractéristiques de son travail artistique (par référence à ses précédents travaux). Enfin, les retouches apportées relevaient du simple nettoyage afin d’éclaircir quelques couleurs, affiner le grain de peau du mannequin, ce qui n’était pas de nature à affecter le travail du photographe. La photographie étant objet de droits d’auteur, il convenait alors de déterminer dans quelle mesure les sociétés poursuivies avaient commis des actes de contrefaçon ce qui nécessitait de vérifier les termes de l’autorisation d’exploitation consentie dans le devis initial du photographe. A cet égard, les juges vont s’appuyer sur les mentions figurant dans le devis établissant qu’en contrepartie de la somme de 1.000 euros, l’autorisation était territorialement et temporellement limitée. Or, le photographe a pu rapporter la preuve de la poursuite de l’exploitation au-delà de la durée d’un an et sur un territoire non visé par l’autorisation et des supports non prévus. La Cour va condamner in solidum les défenderesses au paiement de dommages-intérêts du fait des actes de contrefaçon. Il est notable de relever que, dans cette affaire, les juges prennent soin de justifier le montant de la

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réparation allouée en procédant à un calcul sur la base des tarifs habituellement pratiqués par le photographe, du prix de l’autorisation concédée en l’espèce (et dont les termes ont été méconnus) et du chiffre d’affaires réalisé avec le produit pour la promotion duquel l’image litigieuse a été utilisée. A rapprocher : article L131-3 du Code de la propriété intellectuelle

L’assignation en contrefaçon doit être précise CA Paris, 7 avril 2015, RG n°14/20358

Ce qu’il faut retenir : L’assignation en contrefaçon doit décrire précisément les œuvres revendiquées et les actes contrefaisants, à défaut elle encourt la nullité. Pour approfondir : L’article 56-2° du CPC dispose « L'assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier de justice : (…) 2° L'objet de la demande avec un exposé des moyens en fait et en droit ». C’est sur le fondement de ce texte que la Cour d’appel confirme l’ordonnance ayant déclaré l’assignation en contrefaçon nulle exposant ainsi « Considérant que la validité de l’assignation doit être appréciée au regard de l’objet du litige et que si dans le cas d’une action en contrefaçon de droits d’auteur il ne saurait être exigé à ce stade de la procédure que le demandeur fasse la démonstration de l’originalité de l’œuvre revendiquée, il n’en reste pas moins qu’une telle action implique que le demandeur, dans son assignation, caractérise la contrefaçon, notamment en définissant précisément la ou les œuvres de l’esprit dont il se prévaut et qui font l’objet de la contrefaçon et en expliquant en quoi les éléments incriminés sont contrefaisants ». Dans cette affaire, qui opposait des architectes intervenus pour la réalisation d’un showroom aux sociétés KARL LAGERFELD à qui il était reproché d’avoir repris pour une boutique des éléments du showroom, l’assignation est annulée faute :

- d’identifier précisément les œuvres revendiquées : les juges relèvent à cet égard que « l’assignation regroupe sous le terme générique “Les Créations” (page 5, paragraphe

9) pas moins de trois travaux préparatoires (plans et visuels) différents portant sur des projets d’aménagement de deux boutiques distinct » ;

- d’identifier précisément les actes prétendument contrefaisants : « En ce qui concerne les actes argués de contrefaçon, leur identification pèche par la même imprécision puisque l’assignation se contente d’énoncer en page 6 (paragraphe 15) que les sociétés Karl Lagerfeld auraient violé les droits d’auteur dont ils sont titulaires sur l’ensemble constituant “les Créations ”en reproduisant au sein de la boutique du boulevard Saint-Germain de “ multiples éléments ” figurant dans les “versions 1 et 2" du Showroom et la “version MAKE” de la boutique ».

Aussi, dès le stade de l’assignation il convient d’être précis, la nullité de l’assignation pourra être prononcé comme le juge la Cour dans cette affaire : « Considérant que ces imprécisions quant à l’identification et à l’originalité de l’oeuvre (ou des oeuvres) revendiquée(s) d’une part et quant à l’identification des éléments incriminés comme contrefaisants d’autre part, ne permettent pas au juge de connaître les termes exacts du litige qui le lient au sens de l’article 4 du code de procédure civile ; qu’il s’agit d’une nullité de forme causant un grief aux défendeurs qui se trouvent en l’impossibilité d’organiser utilement leur défense ». A rapprocher : article 56 du Code de procédure civile Exceptions au droit d’auteur et balance des intérêts

Cass. civ. 1ère, 15 mai 2015, pourvoi n°13-27.391 Ce qu’il faut retenir : Lorsque deux droits fondamentaux s’opposent, il convient de rechercher de l’équilibre des droits en présence pour déterminer la prévalence d’un droit sur l’autre. Pour approfondir : Un photographe, après avoir découvert que certaines de ses photographies avaient été reproduites et intégrées dans plusieurs œuvres d’un artiste peinte, assigna ce dernier en contrefaçon. La Cour d’appel avait retenu le grief de contrefaçon et condamné en conséquence l’artiste peintre de ce chef.

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Un pourvoi fût formé dont les deux moyens consistaient, d’une part, à faire grief à la Cour d’appel d’avoir retenu l’originalité des œuvres photographiques et, d’autre part, à avoir porté atteinte à la liberté d’expression artistique. Sur la question de l’originalité, la Cour de cassation approuve l’analyse menée par les juges d’appel qui, après avoir mis en exergue les éléments caractéristiques des photographies en cause ont déduit que les choix opérés par le photographe traduisaient une démarche propre de l’auteur qui portait l’empreinte de la personnalité de celui-ci allant au-delà du savoir-faire d’un professionnel de la photographie. Le second moyen faisait grief à la Cour d’appel d’avoir porté atteinte à la liberté d’expression artistique de l’artiste en retenant que les droits sur les œuvres arguées de contrefaçon ne sauraient, faute d’intérêt supérieur, l’emporter sur ceux des œuvres dont celles-ci sont dérivées sans méconnaître le droit à la protection des droits d’autrui en matière de création artistique. Au visa de l’article 10§2 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales la Haute Cour casse l’arrêt aux motifs : « Qu'en se déterminant ainsi, sans expliquer de façon concrète en quoi la recherche d'un juste équilibre entre les droits en présence commandait la condamnation qu'elle prononçait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ». Par cet arrêt, la Haute Cour introduit donc la recherche de la balance des droits en présence lorsque, comme en l’espèce, au droit de propriété littéraire et artistique est opposé le principe de la liberté d’expression. Voici donc un arrêt essentiel qui introduit donc la recherche de l’équilibre des droits en présence pour déterminer la prévalence d’un droit sur l’autre lorsque s’opposent deux droits fondamentaux. A rapprocher : article 10§2 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales

Contrefaçon de droit d’auteur : le risque de confusion n’est pas un facteur pertinent

Cass. com., 15 mai 2015, pourvoi n°13-28116 Ce qu’il faut retenir : Le risque de confusion n’est pas un facteur pertinent pour caractériser la contrefaçon de droit d’auteur. Pour approfondir : L’affaire ayant donné lieu à cet arrêt concernait une contrefaçon prétendue de modèle de sacs. L’arrêt ayant rejeté les demandes au titre de la contrefaçon est cassé par la Haute Cour pour des motifs sur lesquels il est intéressant de revenir. Les juges du fond avaient tout d’abord retenu que les éléments dominants de la combinaison qui confèrent au sac son originalité, à savoir « la forme spécifique du rabat soulignée par l'épaisse couture surpiquée, le bouton doré, les surpiqûres très apparentes sur toutes les parties en cuir, l'alliance du cuir fauve surpiqué avec d'autres matériaux et couleurs, les proportions spécifiques ». La Haute cour reproche à l’arrêt d’avoir fait référence à ces éléments alors qu’ils n’étaient pas au nombre de ceux visés pour asseoir l’originalité du sac. Ce n’est donc pas un problème de méthode qui est ici visé mais un problème d’appréciation. En effet, on sait que la contrefaçon s’apprécie d’après les ressemblances et non les différences et que la jurisprudence tend à rechercher si les caractéristiques essentielles de l’œuvre première, celles qui lui confèrent son originalité, sont reprises. Or, si la Cour d’appel avait feint de reprendre cette méthode, ce ne sont pas les éléments qui lui ont permis de déterminer l’originalité de l’œuvre qu’elle vise à l’appui de son appréciation sur la reprise des caractéristiques essentielles. En second lieu, les juges avaient également rejeté la contrefaçon aux motifs que l’impression d’ensemble entre les sacs excluait tout risque de confusion. C’est sur ce point que la cassation est la plus intéressante, la Cour rappelle en effet que « l'existence d'un risque de confusion est indifférente à la caractérisation de la contrefaçon en droit d'auteur ».

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Voilà donc un rappel utile sur le fait que le risque de confusion est une notion étrangère au droit d’auteur (à la différence de la contrefaçon de marque). A rapprocher : article L. 122-4 du code de la propriété intellectuelle - Cass. com., 8 avril 2014, pourvoi n°13-10689 La contrefaçon s’apprécie d’après les ressemblances

Cass. civ. 1ère, 30 septembre 2015, pourvoi n°14-19105 Ce qu’il faut retenir : La contrefaçon s’apprécie d’après les ressemblances et non les différences. Pour approfondir : L’arrêt ne présente pas une grande originalité mais mérite que l’on s’y arrête pour le rappel que la Cour a du devoir faire à des juges du fond ayant méconnu les règles d’appréciation de la contrefaçon pourtant classiques. L’action en contrefaçon visait à faire sanctionner la reprise de slogans et logos proposés par un candidat un candidat malheureux en réponse à l’appel d’offre d’une commune qui avait finalement retenu une autre société pour le projet. Pour justifier le débouté, la cour d’appel avait relevé qu’en l’espèce « les courbes décalées du logo adopté par la société R. ne ressemblent pas à celles plus traditionnelles choisies par Mme X. et qu’il en est de même de l’élément graphique surmontant le ventricule droit du cœur figuré sur les œuvres en présence ». Les juges ne s’étaient arrêtés qu’aux différences entre les œuvres pour conclure à l’absence de contrefaçon. La cassation est logiquement encourue. Au visa de l’article L122-4 du CPI (« Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l'adaptation ou la transformation, l'arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque »), la Cour fait grief à l’arrêt de s’être déterminé « au vu des différences, sans se prononcer sur la portée des ressemblances retenues par les premiers juges et incriminés par Mme X. tenant au choix d’un graphisme épuré, à celui de deux couleurs différentes pour figurer chacun des ventricules ». Le Cour d’appel de renvoi devra donc apprécier la

contrefaçon au vu des ressemblances entre les œuvres en présence, selon la méthode traditionnelle d’appréciation. A rapprocher : article L122-4 du Code de la propriété intellectuelle

III. CONCURRENCE DELOYALE ET PARASITIME

La preuve d’investissements est une condition de l’action en parasitisme

Cass. com., 10 février 2015, pourvoi n°13-24399 Ce qu’il faut retenir : L’action pour parasitisme nécessite que le demandeur rapporte la preuve des investissements qu’il a engagés dont profiterait indument un tiers. Pour approfondir : Dans le cadre de l’action initiée par une société à l’encontre d’une de ses concurrentes, des actes de parasitisme étaient reprochés consistant, selon la société agissant sur ce fondement, en la reprise de ses documents contractuels. Les juges d’appel avaient rejeté le grief de concurrence parasitaire. Le pourvoi reprochait à la cour d’appel d’avoir ainsi statué sans rechercher si, en imitant les documents contractuels de la société S. plutôt que de créer les siens, la société P. n'avait pas profité sans bourse délier de l'expérience de sa concurrente dans ce domaine, des investissements qu'elle avait dû fournir en recourant à un service juridique pour les élaborer, de ses efforts et du temps passé pour conceptualiser leur mise en page, ce qui lui avait permis de proposer un contrat de vente à domicile éprouvé pendant des années auprès de sa clientèle. La Cour de cassation va rejeter le pourvoi en ces termes : « Mais attendu que le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'une entreprise en profitant indûment de la notoriété acquise ou des investissements consentis ; que la société P, qui se bornait dans ses conclusions à invoquer la copie de documents contractuels, sans prétendre avoir consenti un quelconque investissement à ce titre, ne peut utilement reprocher à la cour d'appel d'avoir rejeté sa demande ; que le moyen ne peut être accueilli ».

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La solution se comprend aisément. En effet, puisque la concurrence parasitaire tend à profiter des investissements d’autrui, encore faut-il que la société qui agit sur ce fondement démontre avoir engagé de tels investissement dont, précisément, elle fait grief à une concurrente d’avoir indument profité. A rapprocher : article 1382 du Code civil

La reprise d’un concept bancaire : la banque sanctionnée

Cass. com., 31 mars 2015, pourvoi n°14-12391 Ce qu’il faut retenir : Le parasitisme peut sanctionner la reprise du concept novateur établi par autrui peu important que son auteur ne l’ait pas exploité, lorsque les agissements fautifs ont précisément empêché sa valorisation. Pour approfondir : Un étudiant fort brillant avait présenté dans le cadre de son mémoire de fin d’étude un système baptisé « transcompte » destiné à faciliter les transferts de fonds des étrangers, résidents en France, vers leur pays d’origine. Ce projet avait été présenté à la Société Générale à qui l’étudiant faisait grief d’avait copié toutes les composantes de son concept. Condamnée par la Cour d’appel, la banque forma un pourvoi en cassation à l’encontre de l’arrêt dans lequel elle développait les arguments suivants :

- seule la reprise servile d'une idée innovante peut être sanctionnée au titre du parasitisme économique : à cet égard, la banque faisait grief à la Cour d’avoir qualifié d’innovante l’idée évoquée dans le mémoire de master consistant à proposer à la clientèle immigrée la création d'un compte en France et à l'étranger afin, notamment, de faciliter le transfert d'argent au bénéfice de destinataires préalablement désignés. Les juges du fond avaient considéré que la société générale ne mettait pas en avant cet avantage et n’en facilitait pas l’usage car dans l’offre de la banque le titulaire devait avoir déjà un compte à l’étranger. Selon la banque, bien que son produit soit différent, l’idée du double compte était déjà contenue dans ses services et ne pouvait donc être qualifiée de nouvelle ;

- le caractère innovant était également contesté s’agissant de la stratégie de proximité à destination de la clientèle immigrée par la création d’agences bancaires dédiées alors que la Société Générale disposait déjà d’agences de représentation chargées de faire la promotion des produits de la banque (sans fournir de services bancaires) ;

- les idées sont de libre parcours ce qui implique, selon la Société Générale, que la seule mise en pratique d'une idée générique de stratégie commerciale ou de service bancaire ne peut être fautive ;

- l'action en parasitisme économique a pour objet de sanctionner les procédés déloyaux auxquels peuvent avoir recours les opérateurs économiques entre eux de sorte que n'est pas fondé à agir en parasitisme celui qui se borne à émettre une idée mais qui n'en fait aucun usage commercial. La Cour ne pouvait sanctionner la banque d'avoir mis en pratique deux idées, génériques, de service et de stratégie commerciale émises par M. X tout en constatant que l'intéressé avait fait état de ces deux idées dans le cadre d'une demande de stage, qu'il n'avait pas fait commerce ou usage de celles-ci en créant une société ou un partenariat avec d'autres banques.

La Cour de cassation ne va pas retenir les arguments ainsi développés et va en conséquence confirmer l’arrêt de la Cour d’appel qui a condamné la Société Générale au paiement de la somme de 80.000 euros à titre de dommages-intérêts.

Tout d’abord, elle va approuver les juges du fond d’avoir reconnu le caractère novateur du concept du « double compte » contenu dans le projet de M. X par rapport au service existent de « I transfert » proposé par la banque. La comparaison entre les produits permet de mettre en évidence le fait que le concept imaginé par l’étudiant se distinguait de l’offre existante de la banque. Ensuite, la Cour va également approuver les juges du fond d’avoir reconnu ce caractère novateur du fait que le projet de M. X... prévoyait la création d'agences dédiées aux communautés étrangères avec des interlocuteurs maîtrisant la langue et la culture du pays, la banque ne disposait pas, avant la présentation de ce projet, de telles agences et que l'ouverture en France d'une agence de la filiale Société générale du Sénégal était une initiative différente de la création d'agences dédiées, s'agissant pour la filiale de promouvoir directement ses services. Dans ces conditions, il est établi qu’après la présentation du concept, à leur demande, aux

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responsables de la direction de la stratégie et du marketing de la Société générale, la banque avait repris et intégré, dans son offre de services aux étrangers, deux éléments innovants de ce concept, la création d'un « double compte » et celle d'agences dédiées et que la valeur économique de l'emprunt de ces éléments par la banque est établie. Aussi M. X., qui n'avait tiré aucun profit du produit de ses recherches, dont l'intérêt économique était réel et qu'il ne pouvait plus valoriser, avait subi un préjudice dont il devait être indemnisé. Cet arrêt nous offre une belle illustration de l’application du parasitisme à l’hypothèse de la reprise du concept d’autrui.

A rapprocher : article 1382 du Code civil

Concurrence déloyale et contrefaçon Cass. civ. 1ère, 9 avril 2015, pourvoi n°14-11853

Ce qu’il faut retenir : La copie servile d’un produit de nature à créer une confusion dans l’esprit de la clientèle est susceptible de constituer un acte de concurrence déloyale. Pour approfondir : L’arrêt rendu le 9 avril 2015 par la première chambre civile de la Cour de cassation revient sur l’articulation entre la concurrence déloyale et la contrefaçon à l’occasion de cette affaire qui opposait des concurrents dans le secteur des portails. Une société avait engagé une action en contrefaçon et concurrence déloyale à l’encontre de sa concurrente à qui elle reprochait d’avoir repris les caractéristiques de deux modèles. La Cour d’appel avait débouté la société de ses demandes au titre de la concurrence déloyale en considérant que le seul fait de vendre des produits qui ne sont pas l’objet de droits d’auteur ne constitue pas une faute. Cette approche va être censurée par la Cour de cassation dans les termes suivants : « … constitue un acte de concurrence déloyale la copie servile d’un produit commercialisé par une entreprise susceptible de créer un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle, de sorte qu’il lui incombait de rechercher s’il n’existait pas un tel risque de confusion entre les profilés commercialisés par la société P. et ceux vendus par la société A. et fabriqués par la société S. »

On retiendra que la copie servile d’un produit qui ne fait pas l’objet de droits d’auteur ne saurait être considérée, en soi, comme fautive. Toutefois, cette copie servile peut être de nature à créer un risque de confusion que les juges du fond se doivent donc de rechercher car, précisément, ce risque de confusion du fait de la copie servile est quant à lui susceptible de constituer un acte de concurrence déloyale. A rapprocher : article 1382 du Code civil

Interdiction d’utiliser les couleurs liées aux signes distinctifs d’un réseau : distinction responsabilité

contractuelle et délictuelle CA Colmar, 20 mai 2015, RG n°14/00639 et CA Colmar,

3 juin 2015, RG n°14/03031 Ce qu’il faut retenir : Le contrat de franchise peut organiser les conditions de cessation d’usage des signes distinctifs du réseau, la rédaction de ces clauses mérite la plus grande attention. Pour approfondir : Dans la première affaire (CA Colmar, 20 mai 2015, RG n°14/00639), le franchiseur Eléphant Bleu agissait à l’encontre d’un ancien franchisé qui poursuivait l’usage des signes distinctifs du réseau. Il avait saisi le tribunal visé par la clause attributive de juridiction stipulée dans le contrat de franchise. La compétence du tribunal saisi était contestée aux motifs que l’action exercée par le franchiseur était une action en concurrence déloyale de sorte que la clause attributive de juridiction stipulée dans le contrat résilié n’avait pas vocation à jouer. La Cour va justement rejeter l’argumentation de l’ancien franchisé. En effet, le contrat comportait une clause dénommée « Obligations à la cessation du contrat » qui, précisément, avait pour objet de prévoir les obligations post-contractuelles de l’ancien franchisé. Cette clause avait donc nécessairement survécu à la cessation du contrat. Dans ces conditions, l’action tendant à faire respecter les engagements souscrits par le franchisé est nécessairement de nature contractuelle et il ne saurait s’agir d’une action en concurrence déloyale de nature délictuelle. A l’occasion de la décision rendue quelques semaines plus tard, la Cour se prononce sur la nature de l’engagement du franchisé à la cessation du contrat. Ainsi, dans la seconde affaire (CA Colmar, 3 juin

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2015, RG n°14/03031) après la cessation de son contrat de franchise « Eléphant bleu », un ancien franchisé avait l’obligation, prévue audit contrat, de ne plus utiliser les signes distinctifs du réseau et de ce fait de repeindre notamment sa station de lavage automobile avec d’autres couleurs que le bleu et blanc (dont on sait qu’elles rappellent l’enseigne de lavage). L’ancien franchisé ne respectant pas son engagement post-contractuel, le franchiseur a été contraint d’engager une première action aux fins de forcer le fautif à modifier l’aspect extérieur de la façade de sa station de lavage, puis, une seconde action (notre affaire) dans l’objectif d’obtenir réparation du préjudice subi par l’utilisation des signes distinctifs pendant la période post-contractuelle. Les premiers juges ont rejeté les demandes indemnitaires du franchiseur. Pour autant, la Cour d’appel de Colmar a infirmé le premier jugement et condamné l’ancien franchisé au paiement de la somme de 50.000 euros. De son côté, l’ancien franchisé soutenait que l’interdiction qui lui était faite de ne plus utiliser les couleurs bleu et blanche après la cessation de son contrat devait être analysée comme constituant une obligation perpétuelle, et en cela une obligation prohibée. La Cour n’a pas suivi cette argumentation en retenant au contraire que l’obligation d’enlever les signes distinctifs d’un réseau quitté constitue une obligation ponctuelle découlant de la rupture du contrat de franchise. La distinction est ténue mais finalement évidente : la clause en cause stipulait que l’ancien membre du réseau avait l’obligation de

repeindre, sous 6 mois à compter de la cessation du contrat, son centre dans d’autres couleurs que le bleu et le blanc propres à l’enseigne ; l’ancien franchisé n’avait à exécuter son obligation qu’une seule et unique fois. Outre cette décision logique des juges d’appel, il faut retenir que la rédaction des clauses encadrant la phase post-contractuelle, dont les effets ne sont pas limités dans le temps, doit être réalisée avec attention et soin de façon à éviter une contestation fondée sur l’interdiction de perpétuité.

Concurrence parasitaire et reprise du slogan d’un concurrent

Cass. com., 9 juin 2015, pourvoi n°14-11.242 Ce qu’il faut retenir : L’action fondée sur le parasitisme nécessite d’établir que la valeur concurrentielle reprise est le fruit d’efforts intellectuels et/ ou d’investissements. Tel peut être le cas d’un slogan. Pour approfondir : L’affaire opposait deux grands acteurs du secteur de la grande distribution : la société Cora, qui exploite depuis de nombreuses années le slogan « gros volume = petits prix » reprochait à la société Auchan l’utilisation de slogans : « prix mini sur gros volumes », « gros volumes à prix mini », « gros volumes grosses économies ». Au vu des circonstances de l’affaire, la Cour d’appel a retenu le grief de concurrence parasitaire, ce que contestait le pourvoi. Dans cet arrêt, la Cour rappelle la définition du parasitisme déjà connue : « le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d’une entreprise en profitant indument de sa notoriété ou de ses investissements, indépendamment de tout risque de confusion » : rien de nouveau, le grief du parasitisme ne nécessite en effet pas la démonstration d’un risque de confusion propre à la concurrence déloyale, le fait fautif réside dans la captation des efforts et des investissements d’autrui. Dans un deuxième temps, la Cour va approuver la décision de condamnation en relevant en premier lieu, que l’association de deux groupes de mots de trois syllabes : « gros volume = petits prix » est distinctive de la société Cora car il est démontré que ce slogan est associé par le public et les professionnels de la grande distribution à l’enseigne et, en second lieu, que cette formule a fait l’objet d’efforts de promotion et d’investissements grâce à de nombreuses opérations publicitaires qui ont contribué à son lancement et sa réputation. Ce préalable pour établir le parasitisme étant établi, la Cour approuve les juges d’appel d’avoir condamné la concurrence parasitaire dès lors qu’il était démontré

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l’utilisation d’une formule identique variant simplement par le remplacement du signe = par une virgule et que les formules « prix mini sur gros volumes » et « gros volumes à prix mini » ont une consonance et une résonnance équivalente (le slogan « gros volumes grosses économies » n’étant pas retenu car trop différent). Surtout, la reprise du slogan n’était pas nécessaire puisque la même idée pouvait être reprise de façon différente. On retient donc que le parasitisme nécessite en premier lieu d’établir que la valeur concurrentielle reprise est le fruit d’efforts intellectuels et/ ou d’investissements. Ce point établi, il convient ensuite de justifier de la reprise de cette valeur qui va consister en un acte de parasitisme. A rapprocher : TGI Paris, 3e ch., 8 janvier 2002, RG n° 00/16345 Signes distinctifs d’un réseau et concurrence déloyale

CA Lyon, 25 juin 2015, RG n°13/04365 Ce qu’il faut retenir : La reprise des codes graphiques et couleurs d’un réseau concurrent peut être sanctionnée au titre de la concurrence déloyale. Pour approfondir : L’affaire opposait une tête de réseau d’environ 80 magasins d’ameublement et l’un des membres de son réseau d’une part, aux sociétés exploitant un réseau concurrent et l’un de ses membres en raison de l’utilisation de codes couleurs similaires sur la façade d’un magasin. Un litige de même nature avait été réglé amiablement quelques années avant entre les parties qui avaient alors conclu un protocole d’accord aux termes duquel les sociétés exploitant le réseau imitant s’étaient engagées à effectuer toutes les démarches afin d’empêcher toute confusion/association entre les sociétés et s’étaient portées fort de l’engagement de l’ensemble des magasins de son réseau à modifier les façades de leurs magasins. Deux types de demandes étaient formulées :

- en premier lieu, une action en responsabilité délictuelle, pour concurrence déloyale était engagée à l’encontre du membre du réseau concurrent auquel il était fait grief, lors de la réfection de sa façade, d’avoir imité les codes graphiques de son réseau, en adoptant une même combinaison de couleurs et une enseigne rapprochant. La cour va caractériser la concurrence déloyale en constatant que la société franchisée du réseau concurrent a repris incontestablement les codes graphiques et couleurs de la société, la combinaison de l’enseigne à fond rouge et lettres blanches ainsi que la façade grise.

- en second lieu, une action en responsabilité

contractuelle à l’encontre des sociétés qui avaient conclu le protocole d’accord. Cette action était engagée en raison de l’engagement de porte-fort prévu au contrat. La Cour va rejeter la demande, en effet en l’espèce, les sociétés n’avaient pas pris le soin d’informer les sociétés porte-fort des actes de concurrence déloyale. Or, ainsi que les juges vont le relever, les sociétés appelantes agissant sur le fondement de la responsabilité contractuelle fondée sur l’inexécution provoquée par un tiers au contrat, la connaissance d’une telle inexécution est consubstantielle à la mise en œuvre d’une responsabilité.

A rapprocher : CA Colmar, 20 mai 2015, RG n°14/00639

Copie d’un site web et parasitisme CA Paris, 7 octobre 2015, RG N°11/03744

Ce qu’il faut retenir : La reprise systématique des éléments composant un site internet peut constituer une concurrence parasitaire. Pour approfondir : Cette affaire opposait une société exploitant un site de sorties et de rencontres amicales à l’éditeur d’un site internet proposant les mêmes services à qui elle reprochait de s'être livré au pillage de son travail et de son savoir-faire en reproduisant intégralement sur son site le plan, la structure, les fonctionnalités,

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l'agencement des rubriques et le contenu de son site. En défense, il était fait état des différences entre les pages d'accueil des sites, entre les formulaires de connexion et d'inscription, entre les pages correspondant à une ville, il était également exposé que les éventuelles ressemblances entre les sites résultent uniquement d'éléments fonctionnels, présents dans de nombreux sites concurrents et que les termes ou fonctions revendiqués par l'appelante, qui sont banals, sont inhérents au fonctionnement d'un site de sorties. La Cour va considérer que la copie du site internet constitue des agissements parasitaires dont elle rappelle la définition « Mais considérant que le parasitisme consiste pour un agent économique à s'immiscer dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de la notoriété acquise ou des investissements consentis ; que le parasitisme résulte d'un ensemble d'éléments appréhendés dans leur globalité, indépendamment de tout risque de confusion ». Les juges vont s’appuyer sur les éléments suivants :

- le site copié a développé un concept original puisque c'est un site de rencontre sur Internet et un réseau social qui permet aux membres du site de proposer des sorties à réaliser à plusieurs ;

- selon le classement ALEXA de juillet 2010, le site était le 250ème site français le plus visité, avant celui d'EBAY et d'AMAZON ; le succès remporté depuis sa création par ce site est confirmé par les deux articles de presse produits aux débats ; la notoriété du site et son antériorité par rapport au site critiqué, créé entre mars et juin 2009, sont démontrées ;

- il résulte des copies d'écran versées aux débats par les parties que les pages d'accueil des deux sites sont quasiment similaires et que le plan, le contenu, le nom et l'agencement des rubriques sont quasiment identiques sur les deux sites ; qu'ainsi les fonctionnalités 'Mon journal' et ' Marquer la sortie à suivre' ont été reprises ;

- si des éléments rappelant le site en cause se retrouvent sur des sites concurrents, aucun de ces sites ne reprend quasiment à l'identique la présentation, le plan, les fonctionnalités et le contenu de ce site, comme le fait le site critiqué.

On relèvera que, dans cette décision, les juges ont pris le soin, de déterminer la valeur du site dont ils mettent en avant qu’il avait développé un concept original connaissant un grand succès. De ce fait, la reprise systématique des éléments composant le site a pu être

jugé fautive puisque, ce faisant, le « parasite » avait profité des investissements d’autrui pour se placer dans son sillage. Le fondement du parasitisme était donc le choix opportun pour agir à l’encontre du tiers malveillant, il n’est pas sûr en effet que le site ait pu faire l’objet de droit d’auteur, si la condition d’originalité n’était pas remplie. A rapprocher : article 1382 du Code civil Quand deux géants du luxe s’affrontent quant à leur

communication sur fond de parasitisme CA Paris, 21 octobre 2015, RG n° 13/08861

Ce qu’il faut retenir : La diffusion d’une campagne publicitaire reprenant les codes de communication d’un concurrent s’analyse en un agissement parasitaire ouvrant droit à réparation. Pour approfondir : L’arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris le 21 octobre 2015, particulièrement bien motivé, revient sur les éléments caractérisant le parasitisme à l’occasion de cette affaire opposant deux géants du luxe dont l’un reprochait à son concurrent d’avoir repris ses codes de communication. Le litige était né suite à la diffusion d’un film publicitaire pour promouvoir le parfum Opium d’Yves Saint-Laurent dans lequel une panthère était mise en scène, dans un environnement chromatique or et rouge ce qui suscita la réaction judiciaire de la société Cartier qui y voyait une reprise indue de ses codes de communication qu’elle qualifiait d’agissements parasitaires. Le tribunal de commerce sanctionna fortement puisqu’une condamnation au paiement de dommages-intérêts à hauteur de 1 million d’euros était prononcée. Devant la Cour, deux séries d’arguments étaient soulevées pour contester le jugement :

- le premier argument faisait grief aux juges du fond d’avoir constitué un monopole sur l'usage de la panthère vivante en publicité, accordant ainsi à la théorie du parasitisme une fonction de substitut de la propriété intellectuelle alors que la liberté fondamentale du commerce et de l'industrie s'oppose à la reconstitution d'un monopole ou

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d'une exclusivité sur le fondement d'une simple action en responsabilité extra-contractuelle, alors qu'une telle protection serait refusée par le droit d'auteur ou par tout autre droit de propriété intellectuelle. Il faisait aussi référence à la liberté d'expression, en ce compris la liberté d'expression publicitaire, qui ne peut être limitée que par un texte spécial, respectant les principes de prévisibilité et de proportionnalité. La cour d’appel va contredire l’argument en ces termes : « … l'action des sociétés CARTIER ne tend pas à obtenir un monopole sur l'usage de la panthère vivante en publicité, mais à s'opposer à la diffusion d'un film et d'un visuel publicitaire, reprenant une combinaison d'éléments constitutifs de l'identité visuelle de la Maison CARTIER ».

- le second argument contestait la réunion des

conditions du parasitisme en l’espèce à savoir : une valeur économique individualisée résultant d'un savoir-faire ou d'investissements, c'est la condition préalable, la copie, la captation, l'appropriation "injustifiée" de cette valeur économique, c'est l'acte positif fautif, pour s'immiscer dans le sillage d'autrui et une intention, une volonté caractérisée de piller les efforts d'autrui, c'est l'élément intentionnel.

La Cour d’appel va en premier lieu rappeler les principes suivants qui méritent d’être rapportés : « Considérant que le parasitisme, qui consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'un autre en profitant indûment de la notoriété acquise ou des investissements consentis, résulte, à la différence de la concurrence déloyale, qui ne saurait résulter d'un faisceau de présomptions, d'un ensemble d'éléments appréhendés dans leur globalité, indépendamment de tout risque de confusion ; que l'exercice de l'action pour parasitisme est uniquement subordonné à l'existence de faits fautifs générateurs d'un préjudice et non à l'existence d'une situation de concurrence entre les parties ; que cette action fondée sur les dispositions des articles 1382 et 1383 du code civil ne sanctionne pas exclusivement les fautes intentionnelles, mais tout comportement fautif même involontaire, telles les fautes de négligence ou d'imprudence ». « Considérant que la liberté du commerce et de l'industrie, qui a pour corollaire le principe de la libre concurrence, comme la liberté d'expression ne sont pas absolues et leur mise en œuvre fautive peut être

sanctionnée sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil, à charge pour celui qui se prétend victime de démontrer l'existence d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre la faute et le préjudice ; qu'en application des articles précités, il est de jurisprudence constante qu'est contraire aux usages loyaux du commerce et donc fautif le fait de se placer dans le sillage d'un opérateur économique en cherchant à tirer indûment profit de la notoriété de ses produits, même si ceux-ci ne sont pas protégés par un droit de propriété intellectuelle.. …. que les règles régissant le parasitisme, prévues par le code civil et explicitées par la jurisprudence, qui sont tournées vers un but légitime au regard de l'article 10 précité et étaient connues de l'appelante avant l'année 2011, ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit de diffuser des publicités à caractère commerciale ». Au vu de l’ensemble des pièces versées aux débats, les juges vont tout d’abord retenir que la panthère vivante tachetée est l'emblème de la Maison CARTIER depuis de nombreuses années (1914) et que depuis 2008 elle incarne, dans ses publicités, le rôle de gardien de cette maison et de ses créations. Pour sa part, la société poursuivie ne rapporte la preuve ni que l'utilisation d'une panthère tachetée vivante soit banale en publicité, ni que la panthère tachetée vivante fasse partie de son identité visuelle. Les juges relèvent en particulier que la campagne publicitaire incriminée faisant apparaître pour la première fois une panthère tachetée vivante est en rupture avec la communication transgressive utilisée précédemment pour ce parfum.

Selon les juges d’appel, la mise en scène du film publicitaire fait référence dès le début à l’univers de la Maison CARTIER en montrant des bijoux afin d'orienter le spectateur vers l'univers de la joaillerie, ainsi qu'une panthère tachetée vivante le tout dans un environnement chromatique rouge et or, le parfum n'apparaissant à l'écran qu'après les bijoux et la panthère. Aussi, les juges concluent que le film publicitaire pour le parfum reprend les codes visuels et esthétiques de la Maison CARTIER et joue quasiment jusqu'à la fin sur l'ambiguïté afin de placer le parfum OPIUM dans l'univers de la haute joaillerie, dont la Maison CARTIER est une des représentantes les plus connues du grand public. En définitive, la combinaison de la présence d'une panthère tachetée vivante et des couleurs rouge et or rappelant les écrins CARTIER constituent une reprise des codes visuels utilisés par la Maison CARTIER pour sa communication. La diffusion de la campagne litigieuse s’analyse donc, selon les juges du fond, comme un agissement parasitaire.

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Enfin, pour approuver le montant de la condamnation prononcée pour réparer les préjudices subis du fait des agissements parasitaires, la Cour va tenir compte des coûts de communication, du préjudice moral et du trouble commercial subi. A rapprocher : article 1382 du Code civil - Cass.com., 24 novembre 2015, pourvoi n°14-16806

Idée publicitaire et concurrence déloyale Cass. com., 24 novembre 2015, pourvoi n°14-16806

Ce qu’il faut retenir : La reprise de l’idée publicitaire d’un concurrent est constitutive de concurrence déloyale lorsqu’elle suscite un risque de confusion pour le consommateur, risque que les juges doivent caractériser. Pour approfondir : Si la seule idée publicitaire ne peut faire l’objet de droit d’auteur lequel ne s’intéresse qu’à la forme dans laquelle l’idée s’incarne, cette idée a une véritable valeur concurrentielle. Si cette idée ne peut être appropriée, la reprise de celle-ci par un concurrent peut excéder les limites de la liberté lorsque cette reprise génère un risque de confusion pour le consommateur. Depuis 1988, la société Andros assure la promotion des desserts fruitiers et jus de fruits qu’elle produit au moyen d’un visuel publicitaire représentant un fruit en gros plan sur laquelle est apposée une étiquette comportant sa marque. Elle reprochait à la société Pepsico des actes de concurrence déloyale consistant, selon elle, en la diffusion d’un film publicitaire dont le dernier plan montrait une orange sur laquelle était apposée sa marque Tropicana. La Cour d’appel avait sanctionné la société qui s’était trop « inspirée » considérant que la reprise de l’idée publicitaire consistant à promouvoir un produit à base de fruits en apposant la marque sur un fruit constitue un acte de concurrence déloyale. Le pourvoi lui faisait grief d’avoir méconnu le principe selon lequel les idées sont de libre parcours et que seule la forme dans laquelle s’incarne l’idée peut être protégée ce qui exclut en conséquence tout agissement fautif quand les actes reprochés ne résident que dans le fait de reprendre l’idée sans reprendre la forme de celle-ci. La Cour de cassation va approuver l’analyse des juges du fond ayant retenu que la reprise de l’idée

publicitaire par un concurrent constituait, en l’espèce, un acte de concurrence déloyale. Les juges d’appel avaient en effet caractérisé : - d’une part que l’idée publicitaire d'associer un fruit et la marque d'un fabricant du produit fini pour désigner des jus de fruit ou des desserts fruitiers n'est pas usuelle mais distinctive des produits de cette société par son usage ininterrompu depuis 1988, - d’autre part, que le film publicitaire incriminé s'achève par un gros plan sur une orange sur laquelle est pareillement apposée une étiquette comportant la marque Tropicana exploitée par la société Pepsico et que, mise en œuvre à la fin du film, cette idée d'associer le fruit et la marque a la même évocation et joue un rôle de signature que le public gardera en mémoire. De ces constations, les juges concluent que les ressemblances entre les visuels en présence engendrent, dans l'esprit du consommateur raisonnablement attentif et avisé, un risque de confusion, que la différence des marques apposées n'atténue pas. Ce qui emporte la conviction de la Haute Cour c’est l’analyse menée par les juges du fond qui ne se sont pas contentés, en l’espèce, de constater la reprise de l’idée publicitaire, mais ont mené une analyse sur l’existence d’un risque de confusion – critère de la déloyauté – pour caractériser les agissements fautifs. A rapprocher : CA Paris, 21 octobre 2015, RG n° 13/08861

Internet et pratiques commerciales trompeuses : illustration

TGI Paris, 4 décembre 2015, inédit Ce qu’il faut retenir : Le site internet qui mentionne que les annonces mises en ligne sont relues et sont susceptibles de ne pas être mis en ligne ou d’être retirées lorsqu’elles comportent un contenu illicite commet une pratique commerciale trompeuse s’il ne procède pas au retrait d’une annonce dont le contenu illicite lui a été signifié. Pour approfondir : Cette affaire opposait un malletier de luxe au site leboncoin.fr en raison de la mise en ligne de petites

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annonces proposant la vente de produits présentés comme des imitations. Afin de faire procéder au retrait des petites annonces en cause, il adressa deux mises en demeure, restées sans effet, et utilisa le service de signalement des contenus illicites. Le site refusant de procéder au retrait des annonces, il saisit le TGI de Paris pour pratiques commerciales trompeuses, contrefaçon et atteinte à ses dénominations sociales et nom de domaine et en négligence fautive. 1/ Sur les demandes au titre des pratiques commerciales trompeuses Le demandeur faisait valoir que le site, en ne procédant pas à la relecture des annonces pour veiller à la licéité des contenus comme il s’y était engagé, commettait une pratique trompeuse. Le tribunal va retenir l’existence d’une pratique commerciale trompeuse au sens de l’article L.121-1 du code de la consommation qui prévoit : « Une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l’une des circonstances suivantes : (…) 2° lorsqu’elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l’un des éléments suivants (…) e) la portée des engagements de l’annonceur, la nature le procédé ou le motif de la vente ou de la prestation de services, g) le traitement des réclamations et les droits du consommateur ». A cet égard, les juges retiennent qu’un certain nombre de mentions sur le site laissent entendre au consommateur que toutes les annonces sont relues avant mise en ligne et qu’est refusée toute annonce contraire aux dispositions légales. Ainsi et notamment la rubrique « Qui sommes-nous » mentionne : « … toutes les annonces sont revues avant mise en ligne afin de s’assurer de leur qualité et du respect des règles de diffusion », les « règles générales de diffusion » mentionnent : « Toute annonce contenant des éléments de texte (mots, expressions, phrases … etc), qui semblerait contraire aux dispositions légales ou règlementaires, aux bonnes mœurs, à l’esprit de la publication, ou susceptible de troubler ou choquer les lecteurs sera refusée par leboncoin.fr sans que cela ne fasse naître au profit de l’annonceur un quelconque droit à indemnité. Seule la diffusion d’annonce proposant la vente de produits originaux est autorisée (appareils électroniques, DVD, CD, jeux vidéo, logiciels informatiques, carte pour télévision payant, vêtements de marque et accessoires de marque, montres …). Nous

vous rappelons que la vente de copie est considérée par les tribunaux comme de la contrefaçon qui peut être sanctionnée selon l’article L.335-2 alinéa 2 du code de la propriété intellectuelle par deux ans d’emprisonnement et 300.000 euros d’amende », les « conditions générales d’utilisation du service leboncoin » énoncent : « en déposant toute annonce, chaque annonceur reconnaît et accepte que LBC France puisse supprimer, à tout moment, sans indemnité ni droit à remboursement (…) une annonce qui serait contraire notamment à la loi française e/ou aux règles de diffusion d’annonce fixées par LBC France et accessibles ici » et « … se réserve le droit de supprimer, sans préavis ni indemnité ni droit à remboursement, toute annonce qui ne serait pas conforme aux règles de diffusion du service leboncoin et/ou qui serait susceptible de porter atteinte aux droits d’un tiers ». En définitive, les mentions explicitant les engagements du site relativement au traitement des annonces laissaient légitimement à penser que les annonces relatives à des produits contrefaisants ne pouvaient être diffusées ou devaient être supprimées, alors qu’informé de l’existence de telles annonces il n’a pas agi, ce qui établit la pratique commerciale trompeuse. 2/ Sur le statut et la responsabilité du site Le demandeur demandait également l’application du régime des éditeurs de site prévu par la loi LCEN (loi pour la confiance dans l’économie numérique) plus lourd que celui prévu pour les hébergeurs qui bénéficient d’un régime de responsabilité dit allégé. En effet, selon l’article 6-I-2 de cette loi, les hébergeurs ne peuvent voir leur responsabilité engagée pour les informations stockées s’ils n’ont pas effectivement connaissance de leur caractère illicite ou si, dès le moment où ils en ont eu connaissance, ils ont agi promptement pour les retirer ou en rendre l’accès impossible. Le Tribunal considère que le site en cause doit bénéficier du statut d’hébergeur dans la mesure où il n’a pas de rôle éditorial en dépit du dispositif automatique mis en place pour détecter les contenus illicites et des options payantes proposées pour étoffer les annonces. En outre, il va considérer que la notification qui lui a été adressée par le demandeur ne répondait pas aux conditions prévues par l’article 6-I-5 de la loi LCEN qui prévoit un certain nombre de mentions à faire figurer dans cette notification lesquelles n’étaient pas reproduites dans celle adressée. Aussi, les juges vont considérer qu’il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir agi promptement. Dans ces conditions, sa responsabilité ne saurait être engagée au titre d’actes de contrefaçon

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et d’atteintes à la dénomination sociale et nom de domaine ou de la négligence fautive. A rapprocher : L.121-1 du code de la consommation - Loi n°2004-575 du 21 juin 2004 dite LCEN

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