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Chapitre 4 : Formes et visage de la Terre : initiation à la géodésie et à l’isostasie - Cours et Figures dans répertoire sur le BV : 2017-2018/Semestre1/UE Géosciences 1 - Cours en ligne également sur le site web du département « Géosciences » de l’Université de Poitiers dans le lien « Ressources pédagogiques ».

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Chapitre 4 : Formes et visage de la Terre : initiation à la géodésie et à

l’isostasie

- Cours et Figures dans répertoire sur le BV : 2017-2018/Semestre1/UE Géosciences 1

- Cours en ligne également sur le site web du département « Géosciences » de l’Université de Poitiers dans le lien « Ressources pédagogiques ».

Chap. 4: Formes et visage de la Terre : initiation à la géodésie et à l’isostasie

Questions choisies : - Quels sont les éléments structuraux des continents et des océans ?- Quelle est la différence entre la gravité et la pesanteur ?- Qu’est ce qu’est l’ellipsoïde de référence, et quelle est la différence avec le géoïde ?- Comment mesure t’on les anomalies de gravité ? Et à quoi ça sert ?

Plan : 4.1. Relief et forme de la Terre

4.1.1 Continents et océans : distribution et caractéristiques4.1.2 Gravité et forme de la Terre

4.2. Le géoïde : une visualisation des variations de la gravité terrestre (la répartition hétérogène de la matière à l’intérieur de la Terre)

4.2.1 Définitions4.2.2 Ondulations du géoïde4.2.3 Comment mesure t’on les anomalies de gravité4.2.4 Corrections des anomalies de gravité

4.3. Mouvements verticaux de la lithosphère4.3.1 Notion d’isostasie et modèles associés (TD n°4 – séance de TD n°5)4.3.2 Exemples d’anomalies importantes de gravité4.3.3 Compensation isostatique en cours : le rebond postglaciaire

Ce qu’il faut connaitre

4.1. Relief et forme de la Terre4.1.1 Continents et océans : distribution et caractéristiques

- Rappel sur la planète : les océans couvrent environ 71 % de la surface terrestre et les continents 29 %, avec unerépartition très inégale : 65 % des terres émergées sont situées dans l’hémisphère Nord.

Fig. 4.1 : Topographie et bathymétrie mondiale. Web : http://planet-terre.ens-lyon.fr

- Eléments structuraux des continents :

(a) Les boucliers : vastes régions plates constituéesd’affleurements de vieilles roches déformées (âges typiquesarchéenne et protérozoïque), stables, et formant l’ossature descontinents. Région de faible relief (quelques centaines de mètresau dessus du niveau de la mer). Exemple : bouclier précambriencanadien.

(b) Les plates formes stables : bouclier recouvert deséries sédimentaires au paléozoïque (entre 600 et 200 Ma)n’ayant subi aucune déformation importante. Exemple : plate-forme stable entre Appalaches et la Cordillère de l’Ouest.

(c) Les chaînes de montagnes et zones actives enexpansion :

- chaînes de montagnes (régions déformées non encoredémantelées par l’érosion). Exemples : Appalaches et Cordillèrede l’Ouest (les Rocheuses).

- zones actives en expansion sont des fossésd’effondrement ou « graben » : ce sont les rifts continentaux.Exemple : rift Est-Africain, graben du Rhin, rift de la mer Rouge(plus actif).

Fig. 4.2 : Exemple de structure d’un continent (Canada)(web : geologues-prospecteurs.fr)

- Eléments structuraux des océans :

Topographie très importante due à un volcanisme actif, avec unecroute océanique très différente de la croute continentale notammentcar constituées de roches toujours très jeunes (200 Ma maximum) etnon déformées.

(a) Dorsale océanique : chaîne de relief sous-marin de 1 000à 3 000 km de large sur quelque 60 000 km de long parcourant lebassin arctique, l’Atlantique, l’océan indien jusqu’au Pacifique Sud.Sommet le plus élevé à 3 000 m. Correspond à une frontièredivergente entre deux plaques lithosphériques avec une activitésismique et thermique intense.

(b) Plaine abyssale : entre la dorsale et le pied du taluscontinental. Profondeur moyenne de 4 000 m, généralement assezplate, sauf en cas de volcans sous marins dont certains peuvent êtreémergés (ex : Hawaï).

(c) Les fossés océaniques (cas des marges actives) : basseszones de la surface terrestre (ex : 11 000 m sous le niveau de la merdans le cas de la fosse des Mariannes) - adjacent aux chaînes demontagnes des bordures continentales (Andes : cas de la figure).

Dorsale océanique

Plaine abyssale

Fig. 4.3 : Cas d’une marge active (Ex : Andes –Pacifique)(web : geologues-prospecteurs.fr)

- Eléments structuraux des océans (suite) :

(d) La marge continentale : zone de transitionentre croute continentale et croute océanique.

Dans le cas d’une marge passive, la marge continentalecomporte :

- le plateau continental : partie du continentimmergé qui s’étend au large (20 à 40 km aularge).- le talus continental très abrupt: entre le plateaucontinental et le bassin océanique. Généralement,la limite entre la croute océanique et la croutecontinentale.- le glacis continental : limite entre talus et plaineabyssale.

Fig. 4.4 : Cas d’une marge passive (Ex : Atlantique –Bretagne)(Web : Source Planète-Terre / Pierre-André Bourque )

- Résumé des surfaces terrestres :

Deux grandes types de surfaces terrestres :- les océans avec une profondeur moyenne de 3 800 m- les continents avec une altitude moyenne de 840 m

Mais avec de larges variations :- Sommet le plus élevé sur les continents : 8 840 m par

rapport au niveau de la mer (Everest)- Océan le plus profond : 11 800 (fosse des Mariannes)

Fig. 4.5 : Répartition des reliefs terrestres(Eléments de géologie, Renard et al., Ed. Dunod)

4.1.2 Gravité et forme de la Terre

Définition : - La gravimétrie a pour objet la mesure de l’intensité de la pesanteur

On appelle pesanteur l’attraction de tout corps par la Terre. L’intensité de la pesanteur est notée g, et a les dimensionsd’une accélération (m/s2 ; souvenir du lycée!).La pesanteur est une force qui est la somme essentiellement de 2 composantes : la gravité dont la direction est lecentre de la Terre, corrigée de la composante radiale de la force centrifuge due à la rotation de la Terre (maiscontribution minime).

Fig. 4.6 : Gravité (A) : attraction de deuxmasses selon Newton – (B) La gravité (g) etla composante radiale de la force centrifugeen un point (0,3 % de la gravité).(Eléments de géologie, Renard et al., Ed. Dunod ;Géosciences, Robert et Bousquet, Ed. Belin)

Force centrifuge nulle au pôle

(pesanteur=gravité) et maximum à l’équateur

(pesanteur≠gravité)

A B

La Terre n’est pas une sphère parfaite due à sa rotation : c’est un ellipsoïde aplati avec un facteur d’aplatissement = 1/298.(Rayon au pôle = 6 356 km ; Rayon à l’équateur = 6 378 km ; la différence de rayon est d’environ 21 km).

Fig. 4.7 : Sphère et ellipsoïde de référence.(Géosciences, Robert et Bousquet, Ed. Belin)

- Etant donné que la Terre a une forme aplatie, la valeur théorique de la gravité (gl) sur l’ellipsoïde deréférence en rotation a été déterminée mathématiquement, et ne dépend que de la latitude l du lieu :

gl=ge(1+5,3024.10-3sin2(l) -5,87.10-6sin2(2l)

PAS A APPRENDRE PAR CŒUR!! avec ge la valeur de la gravité à l’équateur (9,780 m2/s ; vu aulycée).

4.2. Le géoïde : une visualisation des variations de la gravité terrestre (la répartition hétérogène de la matière à l’intérieurde la Terre)

4.2.1 Définitions

- La verticale est donnée en tout point du globe par la direction du fil à plomb (donc par la direction locale de lapesanteur). Les différentes verticales ne sont pas toutes parallèles car la topographie peut provoquer des déviations vers lerelief.

La déviation de la verticale par les reliefs. (Eléments de géologie, Renard et al., Ed. Dunod)

- Comme il est impossible de prendre comme référence la surface réelle de la Terre, trop complexe et irrégulière,on a été amené à introduire une surface fictive, appelé « géoïde », déduite de l’étude de la pesanteur.

Fig. 4.8 : Différences entre surface topographique, ellipsoïde et géoïde. (Eléments de géologie, Renard et al., Ed. Dunod)

- Définition du géoïde : surface équipotentielle de gravité (de même intensité de gravité) à un instant donnéet correspondant à la surface moyenne des océans au repos. C’est une surface perpendiculaire au champ de gravitéen tout point.

Comme il existe pour un même lieu une multitude de valeur de gravité différente (due à l’altitude), il existe uneinfinité de géoïdes. Le géoïde se mesure!!

- Toute différence entre le géoïde et l’ellipsoïde de référence détermine une ondulation du géoïde, et se nomme« anomalie gravimétrique ».

Principe : forme et amplitude théorique d’anomalie gravimétrique générée par des corps de densité faible (cavité, nappe d’hydrocarbures) ou élevée (amas métalliques) enfouies à divers niveaux dans la partie supérieure de la croûte. (Eléments de géologie, Renard et al., Ed. Dunod)

4.2.2 Ondulations du géoïde

masse faible

masse élevéemasse faible

masse élevée

différence entre gmesurée et

gthéorique sur

ellipsoïde

Fig. 4.9 : Géoïde terrestre. (Géosciences, Robert et Bousquet, Ed. Belin et Eléments de géologie, Renard et al.,

Ed. Dunod)

- Carte des mesures des ondulations du géoïde en gal (écarts positifs en rouge ; écarts négatifs en bleu).

Le gal est l’unité desanomalies gravimétriques (enl’honneur de Galilée); 1 gal =1 cm.s-2

Des ondulations du géoïde à

grande échelle (10 000 km)

sont dues à des

hétérogénéités s’étendant au

manteau inférieur, alors que

celles à plus petite échelle

(1000 km) sont dues à des

hétérogénéités dans la

lithosphère (croute +

manteau supérieur).

4.2.3 Comment mesure t’on les anomalies de gravité (la forme du géoïde)

Actuellement, on utilise des méthodes satellitaires couplées aux réseaux de balises terrestres.Par exemple, on utilise la modification des orbites des satellites à cause de l’action du champ de gravité.

Fig. 4.10 : Principe de l’altimétrie satellitaire.

La topographie dynamique des océans varie au cours dela journée en fonction du climat et des courants ; onpeut s’en affranchir en moyennant les mesureseffectuées au même point à chaque passage du satellite(web : www.legos.obs-mip.fr + Eléments de géologie,Renard et al., Ed. Dunod)

4.2.4 Corrections des anomalies de gravité (corrections de Bouguer)

- En tout point de la surface du globe, la gravité peut être mesurée (gM) (avec un satellite par exemple ; voir slideprécédente)

- Si la latitude est connue, la valeur théorique peut être calculée au niveau de l’ellipsoïde de référence (gTh)

- Mais la valeur de gM est forcément « entachée » d’erreurs, et des corrections doivent être apportées à sa valeur :

La correction à l’air libre : prend en compte la variation verticale de la pesanteur entre le point de mesure etl’ellipsoïde en considérant la Terre sphérique (pour faire simple : dépend de la variation d’altitude entre lasurface de l’ellipsoïde et le point considéré)

La correction de plateau : pour tenir compte de la densité des matériaux rencontrés entre l’ellipsoïde et lepoint de mesure (souvent on considère un matériau de densité homogène à 2,67)

La correction topographique : pour tenir compte des irrégularités de topographie de la surface (présence demontagne ou vallée)

Représentation schématique des différentes corrections gravimétriques. (Eléments de

géologie, Renard et al., Ed. Dunod)

- Les anomalies de bouguer (D(bouguer) (en mGal) sont donc définies comme :D(bouguer) = gM – gTh - dg(bouguer) avec dg(bouguer) la somme des corrections.

Généralement, les anomalies sont :- Faibles au niveau des plaines- Positives au niveau des océans (gravité mesurée > gravité théorique)- Négatives au niveau des montagnes (gravité mesurée < gravité théorique).

En général, l’application des corrections ne fait que augmenter l’écart entre gM et gTh !!

…. comme si en profondeur un excès (ou déficit) de matériaux compensait la présence en surface d’un relief (oud’une dépression).

Exemple : les calculs des anomalies de Bouguer très négatives au niveau de l’Himalaya révèlent des déficits de masse.Il semble donc que l’excès de masse dû au relief soit compensé, par une masse en profondeur estimée quasiéquivalente à la masse de la montagne elle-même.

…c’est comme la poussée d’Archimède : tout corps flottant (ici la montagne) déplace son propre poids, sous formed’une véritable racine, sur un corps plus dense (le manteau supérieur ou plus exactement l’asthénosphère).

4.3. Mouvements verticaux de la lithosphère4.3.1 Notion d’isostasie et modèles associés (TD n°4 – séance de TD n°5)

- L’isostasie est le principe basé sur le fait que la lithosphère (croute + manteau sup) rigide « flotte » sur unsubstratum plus dense, de consistance « molle » appelé asthénosphère.

- La profondeur à partir de laquelle les pressions exercées par les matériaux sus-jacents deviennent égaless’appelle la surface de compensation.

Par conséquent, une montagne en équilibre isostatique est alors compensée en profondeur par un déficit de masse(racine crustale de type « continentale » légère) alors qu’un bassin océanique est compensé par un excès de masseen profondeur (souvent le manteau inférieur qui est très proche de la surface).

Pression exercé par un bloc rocheux de hauteur h et masse volumique r :

P= rgh avec g l’accélération de la pesanteur

(TD n° 4)

- Deux modèles simples existent pour définir lesmasses en profondeur :

Modèle de Pratt :

la partie superficielle de la lithosphère estdécoupée en « colonnes » de masseséquivalentes (pour un même volume« rocheux », la masse volumique évolue).

Adapté pour décrire la distribution desmasses sous les dorsales océaniques(déduite d’études sismiques notamment).

Fig. 4.11 : Modèle de compensation gravimétrique de Pratt (1854).Adapté au cas de la lithosphère océanique dont la densité croit avec l’âge. (Eléments de géologie, Renard et al., Ed. Dunod)

manteau

Modèle d’Airy :

La croute est légère et de densité constante (2,67) etflotte sur du matériel plus dense : le manteaulithosphérique (d=3,27).

L’équilibre isostatique est obtenu en considérant lasuperposition d’épaisseurs variable de croûte et demanteau supérieur.

Il se traduit par la présence de racine de matérielléger sous les chaînes de montagne et de matérieldense sous les océans.

Adapté pour décrire la distribution des masses sousles montagnes (vue par la sismologie notamment).

Fig. 4.12 : Modèle de compensation gravimétrique d’Airy (1855).Adapté au cas des montagnes dont l’origine est la superposition tectoniques de croutes continentales de densités quasi identiques. (Eléments de géologie, Renard et al., Ed. Dunod)

4.3.2 Exemples d’anomalie importantes de gravité

En général, les anomalies sont négatives dans les zones montagneuses à croute continentale épaissie etpositives dans les régions océaniques à croute océanique amincie.

Fig. 4.13 : Les anomalies de Bouguer théoriques en domaines continental et océanique.(Robinson et Coruh, 1988 in Lowrie, 1997)

Exemple d’anomalie pour une dorsale océanique :

- anomalie fortement positive en domaine océanique mais plusfaible au niveau de la ride.

- il y a donc un déficit de masse au niveau de la ride dû à unmatériau léger (c’est la dilatation thermique en fait dumanteau, abaissant ainsi sa masse volumique)

Fig. 4.14: Anomalie de gravité et structure de la croûte sous la dorsale Atlantique (32°N).(D’après Talwanietal, 1965 et tiré de Géosciences, Robert et Bousquet, Ed. Belin)

Exemple d’anomalie pour une zone desubduction :

➢ anomalie très négative (-170 mGal) auniveau de la fosse de subduction (6 000 mde profondeur) due à l’eau et au remplissagesédimentaire léger.

Anomalie de gravité au dessus de l’arc du Vanuatu.(D’après Collot et Malahoff, 1980 et tiré de Géosciences, Robert et Bousquet, Ed. Belin)

4.3.3 Compensation isostatique en cours : le rebond postglaciaire

En Scandinavie ou dans le Nord du Canada, l’équilibre isostatique n’est pas encore atteint :

(a) lors du dernier âge glaciaire, il y a eu une calotte de glace de plus de 2 500 m d’épaisseur, ce qui a provoqué unesubsidence (affaissement de la lithosphère)

(b) depuis la fonte, la lithosphère remonte et depuis le siècle dernier la vitesse du mouvement vertical est environ de 9mm par an (déterminée par des mesures géodésiques)

Fig. 4.15 : Flexure de la lithosphère et rebond postglaciaire.(Géosciences, Robert et Bousquet, Ed. Belin)

L’érosion d’une montagne provoque le même effet (sansmouvements tectoniques additionnels)

Ceci explique qu’il est toujours assez aisé d’avoir desaffleurements de granite/gneiss (roches peu denses) dansles chaines anciennes (massif armoricain par exemple) et ladifficulté d’observer des roches de hautes pressions (rochesplus denses), telles que les éclogites, dans les chainesrécentes.

CE QU’IL FAUT RETENIR/SAVOIR : questions typiques :

- Connaitre les éléments structurants d’un océan et d’un continent.

- Savoir quelle est la forme théorique de la Terre si la répartition des masses dans le globe était homogène.

- Connaitre la définition du géoïde et quelles types de corrections on peut apporter pour faire coïncider les valeurs des gravité mesurées et théoriques.

- Expliquer ce qu’est la racine crustale sous une chaine de montagne, et pourquoi la croute océanique est généralement amincie.

- Savoir calculer la pression exercée par un bloc rocheux en fonction de sa masse volumique et sa hauteur (TD n°4)

- Expliquer pourquoi la Scandinavie se soulève actuellement .

PROCHAIN COURS:

Chapitre 5 : Initiation à la sismologie : tremblements de terre et structure interne du globe