calcination des sédiments de dragage contamines....

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Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant 121 Chapitre 4 Calcination des sédiments phosphatés en four tournant

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Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

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Chapitre 4

Calcination des sédiments phosphatés en four tournant

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

122

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

123

IV. Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

IV.1 Introduction

La calcination en four à lit fixe de laboratoire nous a permis d’étudier les

comportements physico-chimiques du sédiment pendant le traitement thermique. On a pu

confirmer la stabilisation des métaux lourds, la dégradation des matières organiques et

mettre en évidence le frittage thermique de la matrice minérale pendant la calcination.

Les évolutions structurales du sédiment, notamment, la surface spécifique, la porosité, la

densité et la granulométrie, en fonction de la température de calcination ont été suivies.

Notre objectif est de montrer la variabilité de ces propriétés pour pouvoir les contrôler à

une échelle plus grande et proche des conditions et des réalités industrielles. Les

expériences de calcination des sédiments ont été réalisées dans un four tournant pilote à

chauffage électrique. Le pilote est équipé d’un système de post-combustion pour brûler

les gaz du procédé. Nous allons étudier l’influence des paramètres du procédé sur les

propriétés physico-chimiques des sédiments, pendant la calcination. L’objectif final est

de déterminer les conditions de fonctionnement optimales du procédé permettant de

contrôler les propriétés finales des sédiments calcinés. Le contrôle de ces propriétés nous

amène à proposer des produits variés prêts pour les différentes filières de valorisation.

Avant de détailler les essais de calcination, nous allons d’abord proposer un bref

rappel sur la technologie des fours tournants.

IV.2 Généralités sur la technologie des fours tournants industriels

IV.2-1 Principe global de fonctionnement des fours tournants

Les fours tournants constituent une technologie de choix dans des nombreux

procédés chimiques mais aussi métallurgiques, tels que le séchage dans l’industrie

agroalimentaire, la calcination dans les cimenteries, la calcination de coke de pétrole,..

La plupart des fours tournants sont conçus sur une base technologique très

simple ; un cylindre allongé est faiblement incliné par rapport à l’horizontale et entraîné

en rotation à l’aide d’un moteur.

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

124

Le solide à traiter est introduit par un système d’alimentation, puis sous l’action

combinée de la rotation et de l’inclinaison, il s’écoule à travers l’intérieur du tube.

Différents systèmes de chauffe permettent d’amener le produit à la température où

débuteront les processus physico-chimiques correspondant à l’application recherchée

(réactions chimiques, séchage, pyrolyse,…).

Le résidu solide est ensuite récupéré à la sortie du cylindre et peut être dirigé

vers divers systèmes de post-traitement. Les fumées sont également récupérées en sortie

du four et sont traitées pour répondre aux normes d’émissions en espèces polluantes.

IV.2-2 Les différents types de tube tournant

Les dimensions et la géométrie du tube rotatif sont des caractéristiques

techniques particulièrement importantes pour le dimensionnement des installations

industrielles. Ils conditionnent, avec les valeurs des paramètres opératoires, les

temps de séjour, les taux de remplissage mais aussi la gamme de débit que va pouvoir

traiter l’installation.

La majorité des fours industriels est constituée d’un tube cylindrique revêtu sur

sa paroi interne d’un matériau réfractaire.

Les fours sont souvent équipés de révélateurs placés à l’intérieur du tube pour

assurer le mélange et pour éviter le glissement du lit des produits.

La taille et la forme de ces révélateurs ont assez peu d’influence sur le temps de

séjour et sur les taux de remplissage du produit d’après Li et ses collègues [131].

Néanmoins, des diaphragmes de dimensions variables sont souvent utilisés pour

augmenter le temps de séjour du produit dans le four.

Dans plusieurs utilisations industrielles, les diaphragmes sont seulement placés

en entrée et/ou en sortie du tube. La géométrie des diaphragmes est assez variée, selon

leur utilisation : circulaire, conique, cylindrique, ou en créneau.

La géométrie du tube rotatif est généralement cylindrique, toutefois, dans

l’industrie, des tubes coniques sont également utilisés, ils favorisent l’écoulement du

produit dans le sens axial et de ce fait diminuent les temps de séjour.

Il existe également des fours de conception encore plus spécifique, certains

tubes sont par exemple conçus de manière à permettre l’injection de gaz sur toute la

longueur.

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

125

IV.2-3 Les différents systèmes de chauffage des fours tournants

On distingue principalement deux modes de chauffage, le chauffage direct et le

chauffage indirect.

Le chauffage direct consiste à envoyer des gaz chauds à co-courant ou à contre-

courant du sens de la progression du solide. Un ou plusieurs brûleurs sont donc placés à

l’entrée ou à la sortie du four et les gaz chauds qu’ils produisent parcourent l’intérieur du

tube afin de chauffer le solide. Sur des fours de très grandes longueurs, une série de

brûleurs est disposée tout au long du tube rotatif.

Le chauffage indirect consiste à chauffer les parois du tube rotatif. Dans

l’industrie, plusieurs moyens sont utilisés : des rampes de brûleurs pour chauffer la paroi

externe du tube, de l’air chaud qui circule au sein d’une double enveloppe, des

résistances électriques boudinés autour de la paroi. Cette dernière technologie est

particulièrement adaptée aux fours de petites dimensions. Le chauffage indirect a

l’avantage de permettre un meilleur contrôle du profil de température au sein du four.

IV.2-4 Etudes théoriques du transport du solide granulaire dans les fours tournants

L’étude de l’écoulement du solide granulaire à travers le cylindre rotatif revêt une

grande importance parce que le type de mouvement va fortement influencer le mélange,

ce qui conditionnera l’intensité des transferts de chaleur et de masse et finalement aura

un impact considérable sur le rendement de la calcination.

IV.2-4-1 Description qualitative du régime d’écoulement

Henein et ses collègues [132] suivis par Mellmann [133] ont étudié et identifié

qualitativement les différents modes de transport existants.

Ces différents mouvements peuvent être regroupés en trois grandes classes :

- Le slipping (glissement)

- Le cascading ( avalanche)

- Le cataracting (cataracte)

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

126

Tableau 21 : Les différents types d’écoulements dans un cylindre rotatif [134]

Le régime de glissement

Le « slipping » ou glissement comprend deux types de mouvement : le

« sliding » et le « surging ». Le « sliding » se produit quand la surface interne du tube est

trop lisse, la charge glisse en un seul bloc le long du four et n’opère aucun mouvement de

rotation. Avec l’augmentation du frottement entre la paroi et le solide, le « sliding »

devient le « surging » : la charge adhère à la paroi jusqu’à un certain angle de déflexion,

puis glisse en masse jusqu’à revenir à sa position initiale. Ces deux mouvements sont

caractérisés par un mauvais mélange de la charge.

Le régime d’avalanche

Quand on augmente de manière artificielle la rugosité de la paroi, par ajout de

releveur, par exemple, le mouvement de glissement peut être transformé en

« slumping » : lorsque la charge adhère sur la paroi et suit le tube dans son mouvement

de rotation jusqu’à ce qu’elle atteigne un certain angle (angle de repos dynamique ou

angle de talus), elle s’écoule alors à travers une couche (couche active) au-dessus de la

zone où les particules sont en mouvement de rotation (couche passive).

Quand on augmente la vitesse de rotation on passe au mouvement de

« rolling » : la vitesse aide à alimenter de manière continue la couche active, le

mouvement observé devient alors continu. Mais quand on augmente encore la vitesse de

rotation, les particules arrivant en haut du talus parviennent à décoller légèrement de la

couche active, à ce moment là, on passe du « rolling » au « cascading ».

Le régime d’avalanche est caractérisé par un mélange transversal important,

Lehmberg [134] l’a démontré à l’aide des traceurs colorés.

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

127

La plupart des procédés industriels fonctionnent dans ce régime d’écoulement.

Le régime de cataracte

Quand on augmente davantage la vitesse de rotation, certaines particules se

détachent du lit et sont projetées dans la phase gazeuse après leur passage dans la couche

passive sous l’effet de la rotation : le régime d’avalanche devient alors le « cataracting ».

Lorsque la vitesse est très élevée, il se produit le phénomène de « centrifuging »,

c’est le cas extrême : la charge est centrifugée sur la paroi du cylindre rotatif.

Ce type de régime est très peu utilisé en industrie.

IV.2-4-2 Description théorique du régime d’écoulement

Après la description qualitative, Mellmann [133] ainsi que Henein et ses

collègues [132] ont proposé des méthodes de calcul des transitions entre les différents

types de mouvement.

Pour Mellmann [133], l’utilisation des nombres sans dimension suivants s’est

avérée pertinente :

- Le nombre de Froude : il est basé sur la vitesse de rotation du tube

g

RnFr

2

= ( 17 )

n désigne la vitesse de rotation.

- Le taux de remplissage local :

)cossin(1 εεεπ

−=f ( 18 )

ε désigne le demi-angle de la section occupée par le lit, montré sur la figure 47.

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

128

Figure 47: Le demi-angle de la section occupée par le lit des particules dans un cylindre rotatif

A partir des calculs effectués entre les transitions de régimes, Mellmann [133] a

dressé plusieurs diagrammes indiquant les régimes d’écoulement, en fonction du nombre

de Froude et du taux de remplissage, obtenus pour différents produits. Le diagramme

suivant montre les différents régimes obtenus à partir de l’écoulement des gravillons

(3mm de diamètre) :

Figure 48: Diagramme de comportement du lit de particules de Mellmann

[133]

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

129

IV.2-4-3 Estimation théorique du temps de séjour

La littérature nous livre une quantité impressionnante de relations aussi bien

expérimentale que théorique, donnant accès à des grandeurs très importantes soit pour la

conduite du four en générale ou tout simplement pour la compréhension des phénomènes

qui se réalisent à l’intérieur, comme le temps de séjour, la vitesse axiale, le profil de

chargement, le taux de remplissage volumique et le débit volumique du four.

Nous regroupons dans le tableau 22 les relations permettant d’estimer

empiriquement ou semi-empiriqement le temps de séjour à partir d’autres paramètres de

fonctionnement du four [135].

Auteur Expression date

Sullivan et al [136]

θβτ

Rn

L

2

)(77.1 5.0

= 1927

Zablotny et al [137] 85.0))(²

( −=βθτ

nD

Lcste

1965

Hehl et al [138] 6075.0373.0 )( −−≈ vSQnτ 1978

Chatterjee et al [139] 1.1981.0

3054.1

3

)()()(1026.0D

L

nL

Q

Q

L vS

vS θ

βτ = 1983

Sai et al [140] 05.0875.0986.0

241.0)(4215.1

pvS

D

dQn

H

θτ =

1990

Nicole [141]

)tan(393.0

29.0

θτ

Rn

LX= 1995

Ang et al [142] 1

07.0.16.098.02.0 )2()(5.21 −

−−= RmnHL S

D θτ 1998

Tableau 22 : Relations empiriques ou semi-empirique reliant le temps de

séjour moyen à différents paramètres de fonctionnement du four [135]

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

130

IV.2-5 Les phénomènes physiques présents dans les fours tournants pendant la calcination

Pendant la calcination, plusieurs phénomènes physico-chimiques ont lieu

simultanément dans le tube cylindrique : le solide suit un mouvement dynamique

complexe pendant l’écoulement et des échanges de chaleurs se réalisent entre ces

particules en mouvement et la paroi du four à différents niveaux. L’écoulement du lit

conditionne directement l’efficacité des transferts de chaleur, ce qui influence

instantanément la calcination du solide pendant l’opération.

Les transferts de chaleur dans un four tournant s’effectuent par trois modes de

transmission de chaleur : la conduction, la convection et le rayonnement.

La chaleur est transférée au solide à traiter par le biais de deux surfaces :

l’interface entre le solide et le gaz et la surface du lit qui recouvre la paroi interne du

cylindre rotatif. Sur la face supérieure du lit, le solide reçoit ou perd de l’énergie par

rayonnement et convection tandis que sur la surface en contact avec la paroi, il échange

uniquement par un phénomène de conduction instationnaire.

Les flux radiatifs à l’intérieur du cylindre se décomposent en trois contributions.

La paroi peut rayonner sur elle-même ou le solide, tandis que le gaz peut absorber et

émettre une partie du flux radiatif en fonction de sa composition et de la quantité de

poussières présentes dans cette phase [143] .

Il faut également tenir compte des échanges thermiques et du couplage avec la

paroi du tube rotatif, cette dernière exerçant un effet « transfert de chaleur régénérateur ».

Durant la rotation, une portion de la paroi va successivement être en contact soit avec le

gaz soit avec le solide. Lorsqu ‘elle est en contact avec le gaz chaud, elle reçoit de

l’énergie. Cette énergie s’accumule alors (effet dynamique) et une partie est ensuite

cédée au solide quand la portion de paroi considérée se retrouve en contact avec le lit

granulaire plus froid.

L’échange avec le milieu extérieur peut se faire par rayonnement ou convection.

Le mode de chauffage (direct ou indirect) ne modifie pas les phénomènes mis en

jeu, il influence surtout le sens et l’intensité des différents transferts de chaleur au sein du

système.

Ce schéma représente les flux thermiques mis en jeux au niveau du système

paroi du tube rotatif/solide/gaz :

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

131

Figure 49 : Représentation selon une section transversale des flux thermiques

mis en jeu dans le four tournant [135]

La montée en température du produit se traduit par l’apparition de nombreuses

réactions chimiques hétérogènes qui dégradent une partie de la matière solide en gaz.

Un important transfert de masse s’en suit, et l’apparition de nouvelles espèces chimiques

dans la phase gazeuse s’accompagne de réactions qui peuvent être causées par des

phénomènes d’oxydation. La phase solide est aussi le siège de nombreux phénomènes de

transfert de chaleur et de masse, que ce soit entre particules, dans la porosité externe et

interne.

Il faut noter que la complexité et le nombre de phénomènes mis en jeu pendant

la calcination fait que le savoir-faire industriel en four tournant est essentiellement

empirique et difficilement accessible par l’expérience. Techniquement, la mise en place

des systèmes de mesures permettant la quantification et le contrôle de ces phénomènes

sont problématiques.

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

132

IV.3 Calcination en four tournant pilote IV.3-1 Description techniques du four

Le four tournant pilote de l’EMAC est constitué d’un cylindre rotatif et d’un

oxydateur thermique pour brûler le gaz de procédé.

Le cylindre rotatif a une dimension de 4m de longueur et 21 cm de diamètre. Il

est constitué d’un alliage nickel/chrome. Le cylindre peut être incliné de 0° jusqu’à 7°.

La rotation du cylindre est entraînée par un moteur électrique dont la vitesse de rotation

peut atteindre jusqu’à 21 tr/min.

Le système d’alimentation du cylindre rotatif est composé d’une trémie de 30

litres reliée par un tube cylindrique vertical et un tube cylindrique horizontal vibrants

donnant directement vers l’entrée du four. Ce système permet de doser et d’ajuster les

débits de solide introduits dans le tube.

Le cylindre rotatif est équipé d’un revêtement en maille métallique capable de

résister à la haute température dans le but d’augmenter l’adhérence du lit en mouvement

pendant l’opération.

Le four est équipé d’un panneau de contrôle de gaz permettant de réguler et de

mesurer le débit de la circulation des gaz de balayage en différents endroits du four.

Le four est piloté par un ordinateur permettant de commander et de contrôler les

différents paramètres pour le fonctionnement du four.

A la sortie du four, le produit passe dans une zone non chauffée, ce qui permet

d’abaisser la température du produit jusqu’à moins de 200°C.

Le produit traité est stocké dans un pot métallique. Le pot est changé à chaque

fois qu’on procède au prélèvement du solide calciné pour empêcher la fuite des gaz du

procédé.

Les fumées à la sortie du calcinateur passent vers un oxydateur thermique (post

combustion) afin de détruire les matières organiques qu’elles contiennent.

Les fumées ainsi épurées doivent être abaissées en température. Pour cela, de

l’air froid est acheminé vers la cheminée, permettant de diminuer la température jusqu’à

environ de 100°C. Le gaz est extrait par un ventilateur et mis à l’air à la sortie de la

cheminée.

Le four est représenté sur cette photo :

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

133

Figure 50: Four tournant pilote de l’EMAC

Les différentes parties du four sont schématiquement représentées sur cette

figure :

Figure 51: Schéma simplifié du four tournant pilote de l’EMAC

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

134

Le four est chauffé électriquement et la température maximale admissible est de

1000°C. On a la possibilité de chauffer le cylindre rotatif sur 5 zones distinctes suivant sa

longueur.

Le système de chauffage est constitué de fils métalliques boudinés et noyés dans

de la fibre d’alumine. Ces éléments chauffants sont englobés dans une épaisseur d’isolant

qui recouvre le cylindre rotatif.

Les thermocouples de régulation et de contrôle sont placés en deux points

écartés de 100° autour du cylindre et fournissent en temps réel une température dans le

gaz situé entre celle du tube rotatif et celle de la coquille chauffante. Ce dispositif est

reproduit cinq fois sur la longueur du four.

Le four est équipé de deux cannes introduites à l’intérieur du tube rotatif par

l’entrée et par la sortie ; cinq thermocouples type K passent à l’intérieur de ces cannes et

viennent plonger directement dans le produit à traiter en différentes positions suivant

l’axe du four. Les thermocouples sont placés de telle manière qu’ils plongent

approximativement au centre de chaque zone régulée. Ces valeurs sont acquises

instantanément par l’ordinateur de commande.

Ce schéma simplifié représente le système de chauffage et de régulation ainsi

que les thermocouples :

Figure 52: Schéma simplifié du système de chauffage et de régulation du four

rotatif

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

135

Figure 53: Schéma simplifié des cannes portant les thermocouples à l’entrée et à la sortie du four rotatif

IV.3-2 Description des expériences

IV.3-2-1 Les essais préliminaires avant la calcination

IV.3-2-1-1 Ecoulement de la charge

Avant les expériences de calcination, comme pour tout nouveau produit, des

essais à froid ont été réalisés afin d’étudier le comportement du solide pendant son

écoulement dans le four. Cette étape préliminaire consiste à vérifier l’écoulement du

solide dans le cylindre. L’objectif est de déterminer les différents paramètres de

fonctionnement du four pour se rapprocher de l’écoulement « rolling » selon le

diagramme de Mellmann [133] qu’on a détaillé précédemment.

Les paramètres du four pour l’obtention du mode d’écoulement sont le débit de

chargement, la vitesse de rotation et l’inclinaison du four.

En ce qui concerne le débit de chargement, la grandeur de contrôle n’est pas

directement le débit massique du produit introduit mais seulement le pourcentage de la

vibration du couloir vibrant d’alimentation. Un étalonnage du système vibrant est

nécessaire pour déterminer le débit réel. L’étalonnage consiste à associer directement le

couloir vibrant à une balance et à enregistrer en temps réel la masse pesée avec un

ordinateur relié à la balance. On en déduit alors le débit massique.

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

136

Des courbes d’étalonnages montrant le débit de chargement du sédiment en

fonction du taux d’amenage du système vibrant ont été dressées (figure 54). Des

étalonnages pour des sédiments humidifiés à 5% et 6% massique ont été aussi effectués.

L’humidification du sédiment est une solution pour limiter les émissions des poussières

lors de la manipulation. Cependant en ce qui concerne les sédiments traités lors de cette

étude, la coulabilité du sédiment humide ne permet pas d’obtenir un grand débit. Le débit

maximal pour le sédiment humidifié à 5% ne dépasse les 10kg/h à fréquence maximale et

seulement les 5kg/h pour l’humidification à 6%. Au-delà de 6%, le sédiment ne coule

plus dans le système d’amenage.

0

5

10

15

20

25

20 30 40 50 60 70 80 90 100 110

taux d'amenage (%)

debi

t (kg

/h)

SEC

HUM IDE 5%

HUM IDE 6%

Figure 54: Courbes d’étalonnage du couloir vibrant

Après plusieurs essais, les paramètres de fonctionnement afin d’obtenir un

écoulement du lit en mouvement du type « cascading-rolling » pour un sédiment sec

sont :

- Débit de chargement : entre 50% et 60% (3kg/h à 6,5 kg/h)

- Inclinaison du cylindre : 1,1°

- Vitesse de rotation : 2 tr/min

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

137

La hauteur du lit de solide est estimée à 6 cm à l’entrée du cylindre. Un

diaphragme a été installé à l’entrée du cylindre pour éviter le débordement des solides et

surtout pour garder la hauteur du lit en mouvement.

Les nombres sans dimensions permettant de définir le mode d’écoulement dans

le diagramme de Mellmann [133] sont :

- Nombre de Froude : Fr = 3,24 10-2

- Taux de remplissage : f = 0,21

Si on considère le diagramme de Mellmann [133] pour les gravillons,

l’écoulement trouvé se situe sur la frontière entre les zones « rolling » et « cascading ».

Figure 55: Diagramme de Mellmann [133] appliqué à l’écoulement du

sédiment phosphaté au four tournant

IV.3-2-1-2 Evaluation de l’émission des poussières

Les poussières restent un problème réel pour la manipulation des produits

pulvérulents en four tournant depuis son chargement dans la trémie, en passant par

l’écoulement des poussières dans le cylindre et surtout lors du déchargement.

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

138

La connaissance du taux de poussière est très importante dans le sens où les fines

particules sortant du four peuvent être contaminées en métaux lourds.

Le sédiment initial contient beaucoup de fines : la taille moyenne des particules

d50 est généralement située entre 28µm et 30µm.

Pour ces essais, un barboteur à l’eau permettant de piéger les fines a été installé

à la sortie du four.

A partir des paramètres opératoires du four obtenus précédemment lors de la

détermination du type de mouvement, les essais consistent à faire circuler le sédiment

dans le four en fixant le débit de chargement et le temps de séjour. La quantité initiale

introduite a été limitée à 10kg ; l’essai et le barbotage durent 90mn.

Plusieurs essais ont été réalisés à différents débits d’air de balayage à co-courant

(de 4m3/h jusqu’à 16 m3/h), ceci dans le but de vérifier si le débit d’air a une influence

sur le transport des fines.

A la fin des essais, la solution de barbotage a été filtrée et séchée. Après le

pesage du filtrat, les taux des fines sont calculés en faisant la différence entre la masse

initiale introduite et la masse des fines récupérées dans le pot de récupération.

Le taux de poussières à la sortie du four par rapport à la masse totale initiale

introduite, en fonction du débit d’air est présenté sur cette figure.

0,31

0,32

0,33

0,34

0,35

0,36

0,37

0,38

0,39

0,4

0,41

4 8 12 16

Debit d'air (m3/h)

Tau

x de

fine

s à

la s

ortie

du

four

(%

)

poussières

Figure 56 : Taux de poussières à la sortie du four

(pour 90min de fonctionnement)

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

139

D’après ces résultats, on constate que même si le sédiment est pulvérulent, le

taux de fines récupéré à la sortie ne dépasse pas 0.4% en masse quel que soit le débit

d’air de balayage. Ce taux de fines est très faible par rapport à la quantité normalement

évacuée dans les cyclones des fours tournants industriels ; pour le pilote de calcination

NOVOSOL par exemple, le taux massique des fines dépasse 10%.

IV.3-2-2 Calcination des sédiments phosphatés en four tournant pilote

Le sédiment à calciner, d’une granulométrie n’excédant pas 1cm de diamètre,

est d’abord séché pour éviter l’engorgement du système d’alimentation pendant l’essai.

Les paramètres de conduite du four permettant d’obtenir un mode d’écoulement

du solide de type « rolling » sont appliqués, à savoir, une inclinaison du cylindre fixée à

1,1° , et un débit de chargement entre 3kg/h et 6,5 kg/h.

L’ordinateur de commande et de contrôle permet de charger et de piloter les

différentes consignes pendant la calcination, notamment les températures sur les cinq

zones et le débit de chargement.

IV.3-2-2-1 Description des essais

Les essais réalisés ont pour objectif d’étudier les évolutions des propriétés

physico-chimiques du sédiment pendant la calcination en fonction des paramètres de

fonctionnement du four.

On a vu au chapitre précédent que pendant la calcination en four à lit fixe, les

propriétés physico-chimiques du sédiment dépendent de la température et du temps de

calcination. Dans le cas de la calcination en four tournant, nous allons faire varier ces

deux paramètres principaux et déterminer leurs influences sur les propriétés des

sédiments calcinés.

Dans un premier temps, la température de calcination sera modifiée en gardant

un temps de séjour fixe. Pour cela, les paramètres de fonctionnement comme le débit de

chargement, l’angle d’inclinaison, le débit d’air de balayage, la vitesse de rotation du

cylindre seront maintenus constants.

Les sédiments calcinés sont prélevés tout au long de la calcination (toutes les

heures après l’enfournement à raison de 4 prélèvements par essai) et ensuite analysés

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

140

suivant les normes décrites au paragraphe III.3 notamment pour les mesures de la surface

spécifique, la densité, la taille des particules, et le taux de carbone restant.

IV.3-2-2-2 Influence de la température sur la calcination en four tournant

Deux options de chauffage ont été choisies pour les expériences :

- Chauffage uniforme: le four est chauffé d’une manière constante et uniforme

sur toute sa longueur, ce choix de chauffage est généralement typique des fours tournants

électriques, où l’intérêt est de garder la même température sur toute la longueur du

cylindre.

- Chauffage non uniforme: le chauffage du four est différent sur la longueur du

four (on a la possibilité de chauffer différemment sur les 5 zones), deux évolutions de

températures ont été réalisées : d’abord, le four est chauffé d’une manière croissante sur

les 5 zones. Ce type de chauffage est semblable à la configuration chauffage « contre-

courant » fréquemment rencontrée en industrie, où le brûleur du four se situe à la sortie

du cylindre. Ensuite, le four est aussi chauffé d’une manière décroissante sur les 5

zones : la température est plus élevée à l’entré du four et progressivement réduite vers la

sortie. Ce choix de chauffage est typique des fours industriels chauffés en mode « co-

courant », dans ce cas, le brûleur est placé à l’entrée du cylindre. Le four de calcination

NOVOSOL est chauffé de cette manière.

Les caractéristiques physico-chimiques des sédiments avant la calcination sont

rappelés dans le tableau 23.

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

141

Caractérisation chimique

Type de sédiment Caractéristiques

SD BV

Humidité totale (%)

16,5

Dosage

des métaux lourds (en mg/kg de matière sèche)

As : 189,3 Cd : 15,3 Pb : 823 Zn : 2532

As : 278 Cd : 38

Pb : 1143 Zn : 5438

Carbone total (% massique)

4,5 17,5

Caractérisation physique

Type de sédiment

Caractéristiques SD SV

Surface spécifique (m²/g)

10,1

10,9

Masse volumique (g/cm3)

2,45

Distribution granulométrique d50 (en µm)

28

Tableau 23 : Caractéristiques physico-chimiques des sédiments avant la calcination en four tournant

Cas du chauffage uniforme

Les conditions de calcination pour les essais à température constante sont

groupées dans le tableau 24.

Températures de calcination (°C) 600°C – 700°C– 800°C

Vitesse de rotation (tr/min) 2

Dédit de chargement (kg/h) 10

Débit d’air de balayage (m3/h) 10

Inclinaison du cylindre 1,1

Tableau 24 : Conditions de calcination pour le chauffage uniforme

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

142

Cas du chauffage non uniforme

Pour ces expériences, le sédiment utilisé est seulement celui du Dampremy. Les

conditions de calcinations sont groupées dans le tableau 25.

Température de chauffe sur les 5 zones de chauffe(°C)

(T croissante)

800

zone 1

700

zone 2

700

zone 3

650

zone 4

650

zone 5

Température de consigne sur les 5 zones de chauffe (°C)

(T décroissante)

650

zone 1

650

zone 2

700

zone 3

700

zone 4

800

zone 5

Vitesse de rotation (tr/min) 2

Dédit de chargement (kg/h) 10

Débit d’air de balayage (m3/h) 10

Inclinaison du cylindre (°) 1,1

Tableau 25 : Conditions de calcination pour le chauffage non-uniforme

IV.3-2-2-3 Influence du temps de séjour sur la calcination en four tournant

Pour ces expériences, les sédiments sont calcinés à des temps de séjours

différents et les températures de calcination sont maintenues uniformes sur toute la

longueur du four. Les résidus calcinés sont ensuite prélevés pendant la calcination et

analysés. L’objectif est d’étudier les propriétés physico-chimiques des résidus calcinés en

fonction du temps de passage du solide dans le four pendant la calcination.

Le temps de séjour dépend de plusieurs paramètres : la vitesse de rotation, le

débit de chargement, et l’angle d’inclinaison. Dans notre cas, on n’intervient que sur la

vitesse de rotation, alors que le débit de chargement et l’angle d’inclinaison sont fixés. Le

choix de faire varier la vitesse est avant tout technique puisque son changement est

possible et précis, contrairement au débit. En effet, la précision sur le débit de

chargement est limitée car le four ne peut pas accepter un débit élevé à cause du

débordement des produits à l’entrée du cylindre. La contribution de la modification de

l’angle d’inclinaison est minime sur le temps de séjour.

Pour estimer un temps de séjour théorique, la relation de Sullivan et ses

collègues [136] a été utilisée :

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

143

θβτ

Rn

L

2

)(77.1 5.0

= ( 22 )

β , l’angle de repos dynamique du lit en régime de « rolling », a été estimé à 35°.

Les conditions de calcination sont groupées dans le tableau 26.

Vitesse de rotation (tr/min) sur les 5 zones pour le SD 1 2 3

Temps de séjours théorique (min) 167 83 55

Température de consigne sur les 5 zones (°C)

700 °C – 800°C

Dédit de chargement (kg/h) 10

Débit d’air de balayage (m3/h) 10

Inclinaison du cylindre (°) 1,1

Tableau 26 : Conditions de calcination en mode de vitesse croissante

IV.3-3 Résultats et discussion

IV.3-3-1 Influence de la température IV.3-3-1-1 Calcination par chauffage uniforme Evolution de la température du four

Les températures mesurées par les thermocouples placés en différents endroits le

long du four permettent de suivre le comportement thermique lors de la calcination du

sédiment. Les informations suivantes peuvent être obtenues : la différence entre la

température de consigne et la température réelle à l’intérieur du four, la durée de

l’opération de chauffage, les éventuelles surchauffes du four et la température instantanée

du solide en différents endroits.

On représente ici un exemple du comportement thermique lors de la calcination

du sédiment SV à 800°C.

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

144

0

100

200

300

400

500

600

700

800

900

0 50 100 150 200 250 300 350 400 450 500

Temps d'essai (mn)

Tem

péra

ture

(°C

)

Figure 57 : Comportement thermique du sédiment SV à 800°C

D’après ces thermogrammes, la vitesse de chauffe du four est de l’ordre de 4 à

5°C/min. Le temps nécessaire pour atteindre la température de consigne est de 130 min

pour la calcination à 800°C, 110 min pour 700°C et 90 min pour 600°C.

On remarque que pendant le chauffage du four, avant l’enfournement, les deux

thermocouples, placés approximativement au milieu du four, indiquent que la

température dans cette zone est de 50°C inférieure à la température de consigne. Cette

différence de température peut être due, d’une part, à la perte de chaleur entre les

résistances de chauffage et la paroi, et d’autre part, au refroidissement dû à la circulation

d’air de balayage.

Les deux autres thermocouples placés vers l’entrée du cylindre affichent des

valeurs très inférieures à la consigne, ils sont placés dans la partie non chauffée du

cylindre.

Pendant l’écoulement de la charge, on s’aperçoit qu’à partir de deux heures

d’enfournement, la température du solide dépasse la température de consigne du four.

Cette élévation de température du solide est provoquée par la combustion de la matière

T consigne T sédiment au milieu du four

T sédiment à la sortie du four

T sédiment à l’entrée du four

ENFOURNEMENT X

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

145

organique. Le même phénomène a été observé pour les calcinations des sédiments en

four à lit fixe (chapitre III).

Les écarts observés entre la température du solide dans le four et la température

de consigne pendant la calcination sont groupés dans le tableau 27.

Types de sédiment à calciner Température de consigne de calcination

Différence de température (Tsolide – Tconsigne )

600°C 24°C 700°C 32°C

SV

800°C 40°C 600°C 35°C 700°C 46°C

SD

800°C 55°C

Tableau 27: Différence entre la température du solide et la température de consigne pendant la calcination pour les essais à T constante

On remarque que la différence de température est beaucoup plus importante

pour le SD que le SV, cette différence est due au PCI du sédiment SD, deux fois plus

important que celui du SV. Ces résultats confirment ceux obtenus en four statique.

On note aussi la présence de quelques pics de température pendant l’essai. Ces

pics proviennent de la surchauffe générée par les flammes produites. Pour maintenir une

température constante, les flammes sont vite maîtrisées en réduisant le débit d’air de

balayage.

Les températures des sédiments au moment des prélèvements sont présentées

dans le tableau 28. Ces températures correspondent à celles mesurées avec le

thermocouple situé au milieu du four.

Temps de prélèvement Températures des sédiments au moment du

prélèvement (°C)

Types de sédiment à

calciner

Température de consigne

de calcination

1h 2h 3h 4h

600°C 608 607 608 606 700°C 716 712 719 719

SV

800°C 811 819 815 817 600°C 609 621 625 628 700°C 721 735 735 732

SD

800°C 810 835 828 831

Tableau 28 : Températures du solide au moment de chaque prélèvement

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

146

D’après ce tableau, on constate que les températures du solide au moment des

prélèvements sont légèrement supérieures aux températures de consigne.

Evolution du taux de carbone total

Le suivi du taux de carbone total pendant la calcination permet d’étudier la

décomposition des composés organiques.

Le graphe 58 représente les évolutions du taux de carbone total pour les

sédiments SV et SD calcinés à différentes températures.

La valeur initiale du taux de carbone total correspond aux sédiments non

calcinés. Les barres d’erreurs représentent l’écart type sur trois mesures.

On remarque que le taux du carbone total des deux sédiments diminuent avec la

durée de prélèvement. Cette diminution est beaucoup plus forte dans le cas du sédiment

SD du fait de sa forte concentration initiale en matières organiques. A 600°C, dans le cas

du sédiment SD, le taux de carbone résiduel est en moyenne supérieur à 5%. La

calcination à 700°C et à 800°C pour ce sédiment parvient à détruire la quasi-totalité des

composés organiques puisque les taux analysés ne dépassent plus 1%. On peut affirmer

que pour les deux sédiments, la destruction des composés organiques est totale à partir de

700°C. Il faut noter que dans le cas des expériences en lit fixe, la destruction totale des

matières organiques est obtenue à 400°C et à 500°C. Il y a donc un décalage important

dû probablement à l’effet d’échelle.

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

147

0

2

4

6

8

10

12

14

16

18

20

0 1 2 3 4 5

Temps de prélèvement (h)

Tau

x de

car

bone

tota

l (%

)

600°C - SV

700°C- SV

800°C - SV

600°C - SD

700°C - SD

800°C - SD

Figure 58: Taux de carbone total des sédiments SV et SD pendant la calcination

Evolution de la surface spécifique

Après analyse des résidus solides prélevés pendant la calcination, les évolutions

de la surface spécifique des sédiments SV et SD sont présentées sur la figure 59.

A 600°C, on ne constate pas de variation significative de la surface spécifique

pour le sédiment SV. A 700°C et à 800°C, on observe une réduction de surface

spécifique accentuée avec la température. Pour le sédiment SD, à 600°C, on remarque

une augmentation significative de la surface spécifique pour l’échantillon prélevé au bout

d’une heure. Par contre, pour les essais à 700°C, la surface spécifique augmente avec le

temps de prélèvement. A 800°C, au contraire, on constate une réduction de surface.

Pour mieux interpréter les résultats présentés sur la figure 59, la figure suivante

montre les valeurs moyennes de surface spécifique obtenue pendant la calcination en

fonction de la température.

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

148

2

6

10

14

18

22

0 1 2 3 4 5

Temps de prélèvement (h)

Sur

face

spé

cifiq

ue (

m²/

g)

600°C - SV

700°C - SV

800°C - SV

600°C - SD

700°C - SD

800°C - SD

Figure 59 : Surface spécifique des sédiments SV et SD en fonction de la température

0

5

10

15

20

25

500 600 700 800 900

Température de calcination (°C)

Sur

face

spé

cifiq

ue (

m²/

g)

SV

SD

Figure 60: Surfaces spécifiques moyennes des sédiments SV et SD en fonction de la température de calcination

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

149

L’augmentation de surface spécifique observée dans le cas du sédiment SD à

600°C est due à la décomposition de la matière organique qui provoque une

augmentation de la porosité du sédiment. Cette tendance a déjà été mise en évidence dans

le cadre du travail de thèse de Kribi [11].

La réduction de surface observée au-delà de 600°C pour les deux sédiments est

due à la réduction de porosité et au grossissement des grains de la matrice minérale. En

effet, les mesures effectuées au MEB entre 700°C et 800°C (figure 61), confirment le

grossissement de grains. C’est le phénomène de frittage bien connu dans la littérature

pour des mélanges métaux-phosphates à ces températures. Ce processus se traduit par

une formation de joints de grains entre les particules qui conduit à une augmentation de

la taille (figure 62), à une densification (figure 63) et donc à une réduction de surface.

Sédiment SD non calciné Sédiment SD calciné à 800°C

Figure 61 : Images MEB du sédiment SD montrant le frittage thermique

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

150

0

10

20

30

40

50

60

70

80

90

100

0 1 2 3 4 5

Temps de prélèvement (h)

Dia

mèt

re m

oyen

des

par

ticul

es d

50 (

µ)

600°C - SV

700°C - SV

800°C - SV

600°C - SD

700°C - SD

800°C - SD

Figure 62: Diamètre moyen des particules d50 des sédiments SV et SD en fonction de la température

1,6

1,8

2

2,2

2,4

2,6

2,8

3

3,2

0 1 2 3 4 5

Temps de calcination (min)

Mas

se v

olum

ique

(g/

cm3)

600°C - SV

700°C - SV

800°C - SV

600°C - SD

700°C - SD

800°C - SD

Figure 63: Masse volumique des sédiment SV et SD en fonction de la température

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

151

D’autre part, on remarque que le diamètre moyen des particules des sédiments

(d50 ) augmente progressivement pendant la calcination après une légère diminution au

premier prélèvement. Cette réduction au premier prélèvement est probablement due au

phénomène de ségrégation axiale : les fines particules s’écoulent plus rapidement que les

gros grains et les agglomérats. Le four n’étant pas équipé de diaphragme (rehausseur) à la

sortie du cylindre pour allonger le temps de séjour, les fines s’écoulent librement et

prématurément.

IV.3-3-1-2 Calcination par chauffage non uniforme

Dans ce paragraphe, nous présentons des résultats où les températures de

consigne des cinq zones du four ne sont pas identiques. Deux cas sont étudiés, un cas où

les températures sont croissantes et l’autre, où elles sont décroissantes. Ce choix de

chauffage est typique des fours industriels chauffés respectivement en mode « co-

courant » et « contre-courant ».

Un exemple d’histoire thermique de la calcination du sédiment SD à

température croissante sur les 5 zones du four est examiné : (Température de consigne

dans les 5 zones du four : 650 – 650 – 700 – 700 – 800) :

0

100

200

300

400

500

600

700

800

900

0 50 100 150 200 250 300 350 400 450

Temps d'essai (min)

Tem

péra

ture

'°C

)

Figure 64: Comportement thermique du sédiment SD ; cas d’un chauffage non uniforme

T zone 5= 800°C

T zone 4 et 3 = 700°C

T zone 1 et 2 = 650°C

T solide ENFOURNEMENT X

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

152

Evolution du taux de carbone total

La figure suivante montre l’évolution du taux de carbone des sédiments calcinés

suivant les deux possibilités de chauffage (température croissante et température

décroissante).

Le fait d’inverser le sens du chauffage ne modifie pas la quantité de carbone

décomposée pendant la calcination. L’évolution des taux de carbone est identique au cas

du chauffage uniforme (figure 61).

0

4

8

12

16

20

0 1 2 3 4 5

Temps de prélèvement (h)

Tau

x de

car

bone

tota

l (%

)

T CROISSANTE

TDECROISSANTE

Figure 65 : Taux de carbone total des sédiments SD

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

153

10

10,5

11

11,5

0 1 2 3 4 5

Temps de prélèvement (min)

Sur

face

spé

cifiq

ue (

m²/

g)

T CROISSANTE

T DECROISSANTE

Figure 66 : Evolutions de la surface spécifique des sédiments SD

Evolution de la surface spécifique

Les résultats de la figure 66 montrent que la surface spécifique n’est pas

sensible au profil de température imposé, elle reste quasi semblable dans les deux cas.

En comparant ce comportement avec ceux observés dans le cas d’un profil

isotherme (figure 63), il apparaît que l’évolution de la surface spécifique est

intermédiaire à celle obtenue pour les isothermes de 700°C et 800°C.

Evolution de la masse volumique et de la taille des particules

En ce qui concerne la masse volumique et la taille des particules, l’évolution

observée est indépendante du profil de température imposé et similaire à celle obtenue

pour un profil isotherme (figure 65 et figure 66). Ces résultats montrent que le processus

de frittage thermique se déroule de la même manière dans la zone de température étudiée,

et ce indépendamment du profil de température appliqué.

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

154

2,4

2,45

2,5

2,55

2,6

2,65

2,7

2,75

2,8

2,85

0 1 2 3 4 5

Temps de prélèvement (h)

Mas

se v

olum

ique

(g/

cm3)

T CROISSANTE

T DECROISSANTE

Figure 67: Masse volumique des sédiments SD calcinés

à température croissante

0

10

20

30

40

50

60

70

0 1 2 3 4 5

Temps de prélèvement (h)

Dia

mèt

re m

oyen

des

par

ticul

es d

50 (

µm

)

T CROISSANTE

T DECROISSANTE

Figure 68: Diamètre moyen des particules d50 pour les sédiments SD

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

155

IV.3-3-2 Influence du temps de séjour

Trois vitesses de rotation du four ont été fixées pour étudier l’influence du temps

de séjour. Le temps de séjour a été évalué de manière théorique.

Les températures du solide au moment de chaque prélèvement pendant la

calcination sont représentées dans ce tableau.

Températures du solide au moment du prélèvement Température de consigne de calcination

Vitesse de rotation du

four (tr/min)

Temps de séjour théorique (min)

1h 2h 3h 4h

1 t1 =167 726°C 734°C 738°C 717°C 2 t2 =83 719°C 731°C 735°C 724°C

700°C

3 t3 = 55 721°C 735°C 735°C 732°C 1 t1 =167 837°C 837°C 830°C 835°C 2 t2 = 83 810°C 835°C 828°C 831°C

800°C

3 t3 = 55 823°C 832°C 838°C 832°C

Tableau 29 : Paramètres de fonctionnement du four

Evolution du taux de carbone total

Le graphique 69 représente l’évolution du taux de carbone total à 700°C et

800°C pour différents temps de séjour.

Dans les conditions expérimentales étudiées (700°C et 800°C), la quantité de

matière organique éliminée est la même quel que soit le temps de séjour. Ces résultats

montrent que la durée requise pour l’élimination totale de la matière organique est

inférieure à 55 min.

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

156

0

4

8

12

16

20

0 55 110 165 220

Temps de séjour (min)

Tau

x de

car

bone

tota

l (%

)

700°C

800°C

Figure 69: Taux de carbone total en fonction du temps de séjour

Evolution de la surface spécifique

Sur la figure 70, on observe à 700°C et à 800°C une diminution de la surface

spécifique avec l’augmentation du temps de séjour. Elle est plus forte à 800°C en raison

du frittage thermique plus important à cette température comme cela a été confirmé par

les résultats obtenus au MEB (figure 64) et par les analyses granulométriques effectuées

(figure 71). Cette figure met en évidence un frittage avancé qui se traduit par une forte

augmentation de diamètre moyen de particules.

A 700°C, de fortes valeurs de surface spécifique (création de pores par

dégradation de la matière organique) sont mesurées car la cinétique du frittage est lente à

ce niveau de température ; tandis qu’à 800°C, la réduction de surface est beaucoup plus

forte et rapide à cause du frittage thermique.

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

157

0

4

8

12

16

20

0 55 110 165

Temps de séjour (min)

Sur

face

spé

cifiq

ue (

m²/

g)

700°C

800°C

Figure 70 : Surface spécifique en fonction du temps de séjour

Evolution de la masse volumique

L’évolution de la masse volumique, donc la densité est représentée sur la figure

72.

Les résultas obtenus ne permettent pas de conclure sur les processus mis en

oeuvre. On peut cependant noter une augmentation de densité à 700°C et 800°C pour des

temps de séjour inférieurs à 55 min. Cette augmentation est due à la décomposition de la

matière organique qui génère un résidu minéral plus dense.

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

158

0

10

20

30

40

50

60

70

80

90

100

0 55 110 165 220

Temps de séjour (min)

Dia

mèt

re m

oyen

des

pat

icul

es d

50 (

µm

)

700°C

800°C

Figure 71 : Diamètre moyen des particules d50 en fonction du temps de séjour

2,4

2,45

2,5

2,55

2,6

2,65

2,7

2,75

2,8

2,85

2,9

0 55 110 165 220

Temps de séjour (min)

Mas

se v

olum

ique

(g/

cm3)

700°C

800°C

Figure 72: Masse volumique en fonction du temps de séjour

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

159

IV.3-4 Conclusion

Les comportements physiques tels que la surface spécifique, la densité et la

taille des particules ont été étudiés en fonction des paramètres principaux du four, à

savoir la température et le temps de séjour.

D’une manière générale, la surface spécifique des deux sédiments diminue

quand on augmente la température de consigne. La réduction de surface observée est due

à la réduction de porosité, résultat de la dégradation de la matière organique, suivi du

frittage thermique, manifesté par le grossissement des grains et bien illustré par les

mesures granulométriques et les photos MEB prises sur des échantillons calcinés à partir

de 700°C. Le fait d’inverser le sens du chauffage ne modifie pas ni la quantité de carbone

décomposé pendant la calcination ni la surface spécifique. Ce mode de chauffage n’a pas

d’influence aussi bien pour la densité que pour la taille des particules : l’évolution

observée est indépendante du profil de température imposé.

En variant le temps de séjour, les résultats à partir de 700°C ont montré qu’il

suffit de 55 minutes de calcination pour dégrader la quasi-totalité des matières

organiques. On a remarqué que la surface spécifique diminue quand le temps de séjour

augmente. On a observé qu’à 700°C et à 800°C, la surface spécifique diminue avec

l’augmentation du temps de séjour. L’allongement du temps de séjour permet aussi le

grossissement des particules. La conjugaison de ces comportements nous permet

d’affirmer l’existence du phénomène du frittage thermique qui est bien confirmé par les

photos MEB pour les sédiments calcinés dans ces conditions.

Chapitre IV : Calcination du sédiment phosphaté en four tournant

160