bulletin de la société des sciences et des arts de l'Île de la réunion, 1884

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Imprimerie, Lahuppo frères & Drouhet fils

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1885

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LISTE DES MEMBRES-

DE LASOCIÉTÉDESSCIENCESETARTS

Au 1er janvier 1885

Membres protecteurs`r

MftfcDe Lokmel (C jjfs), ancien Gouverneur..Faron (C

&),commissaire général de la marine,

ancien Gouverneur.Cuinier (C %), conàmissaire général de fa manne,

Gouverneur de la Réunion.

membres honoraires

Mli. Louis CRIVELLI(|t), officier de l'Instrucl ion pu-blique, Inspecteur des Etudes en retraite,ancien Président de la Société et son repré-sentant à Paris.

`G. Imhaus(C #), receveurgénéral des Bouches7

dn-Rhone. <G. Codtorier (0 ^), ancien Gouverneur de la

Guadeloupe.

L. Mobel (^s), avocat, officier d'Académie, an-cien Président de la Société.

° Bureau

3IM. Lu Sineb (-^),prësideiit.Adolphe Le IIoy, \ice-président. ·

Pascal Crémazy, secrétaire.

Qmot, trésorier.

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BULL1ÎÏIX DE LA HOClÛtÛ

Hcmbrcs titulaires

MM. Azèïia (Mazat1)(j|), Officier de l'Instruction pu-· blique, docteur en médecine, président de laCommission du Muséum, conseiller municipalet conseiller général.

Bhidet (flïlaire) (Q ^), capitaine de frégate enretraite, directeur du la Banque de l'île de laRéunion.

Bdttié (Joseph), ingûinair colonial des Ponts et

Chaussées.Crjémazy(Pascal), a»ocat, pomeitler général.Dcjbujsson(Edouard), rédacteur en chef du Sport

colonial.Pocakd (Volily),greffier euclief  de la Cour d'appel.Gbec; îigrégé des .«ciencesmathématiques, profes-

seur au Lycée.Gkenard (Einile)udirccteur du Crédit agricole et

commercial. 1

Jacob DECordejioy (Bénétlict), secrétaire général.de la Direction de l'intérieur.Jacob de Cohdemoy(Camille), ingénieur, conseil-

1er général di>. Saint-Pierre.Lamadox, ancien professeur du Lycée de Saint-

Denis. •v Lastz (Jean-Auguste) (^), Officier d'Académie,

préparateur-conservateur du Muséum d'his-toire naturelle de Saint-Denis.

1 Lu Roy -(Adolphe), négociant, consul d'Italie.

Le Roy (Edouard), avocat, Officier d'Acddémie,conseiller municipal et conseiller général doSaint-Denis.

Lç Siner (Jfe), Officier d'x\cadémle, docteur enmédecine.

f Il

LourY (Jules), a^oué, conseiller général de Saint-André.

Mac-Aumffe (j&), docteur rn médecine.

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DES SCIENCESET ARTS

SIM. Maure, procureur de la République à Saint-Denis.Ménabd (Camille), comptable à Saint-Den's..Nicolas (Ernest), professeur de musique.Oriot, agrégé de l'Université, professeur de ma-

i thématiques au Lycée.Pajot (Elie), propriétaire.Rœqdebourg (Louis), secrétaire de la Chambre

de commerce. •

•ItiKUL(Albert), avocat.

Roussin (Antoine), professeur de dessin au Lycée.Sebs (Paul), avocat, conseiller prhé.Vinsok (Auguste), (%), docteur en médecine.'

VotiLABB(Ambroisc), ancien notaire.

Membres «orrespomlaiïts

MM. Audie», en France.

Alleaume, ex-juge à Nossi-Bé.

Barqcisseac (Jean-Baptiste), à Saint -Pierre.Redingfh.», à Maurice.Bellaigue DrsBughas (0 #), à Paris.

Bon (Etienne-Josepli) (ê), OlQcier de l'Instrue-tion publique, proviseur au Lycée de Nantes^Bottard (Léoace), à §aint-P<iuI.Brcnet (Dufour), procureur général à Pondit.éry.Châtelain (Louis-Charles), inspecteur "-en chef 

des services admiiistratifs et financiers de lamarine et des colonies.Càstelkau (le comte de) (#), au Cap.Cazamian (Firmiu), licencié ès-lettrcs, Officierd'Académie, en France.Cahmont (Aldric) (^), avocat au Havre.

Comte (A.-O.) (#), à Nantes.

DELTEIL,pharmacien principat, en Francè.

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1.. <

BULLETIN DE Là SOCIEfM

MM. Dostor (Georges), professeur en retraite, à Paris.FôOTAiNE,à Saint-Leu.Fopcaud (le comte de) (#), à Cayenne.Frappier (G.), à Maurice. “

Gayet, pharmacien de la marine en France.

Gerbieb, professeur en France.Gibaud, publiciste à Paris.GONTIER(M.), en France.Grandidier

(Alfred) (#), naturaliste voyageurà

• Paris.Hervé (Edouard; (%), publiciste à Paris.Hugo (SchuchaftuV, professeur à l'Université (le

Gratz (Autriche). >

HucoguN (%), pharmacien.principal à Toulon.Itier (ï.-O.) (#),' receveur municipal à Marseille.Jacob deCordemoy (Eugène), docteur en méde-

cine, à Saint-Benoît.

Jacquier, ingénieuren France.

JoLY(N.), professeur àJa Faculté dss Scienceset à l'Ecole de Médecine de Toulouse, membrecorrespondant de llnstiiut.

xJoly, professeur en retraite, à Toulouse.Lacaussade (A.) (i§0, à Paris.Lavollée (%), à Paris.

Lacour, en France.Lahdppe (Thomy)j juge-président du Tribunal de

Chaudoc (Gochinchïne).LE Boucher, gouverneur de la Nouvelle.Calédonie.Lecoste DE Lisle, à Paris.Lejeune (D. M.), à Maurice.Lepine, Grand Vicaire, au Cap.LuraWshy DEAlexandre, gentilhomme russe, à

Viarzaia. '<

DE Mahy, député de la Réunion, à Paris.

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2

MM. MUTINS,à Montpellier.Micbel (%), docteur on médecine, à Saint-Benoit.

Oudemans,directeur de l'Observatoire de Batavia.Pollen (François), naturaliste, voyageur hollan-

dais. ·

Raoul (&), pharmacien de la Marine, en France.Sénèqde (le docteur), à Maurice.Textor DERayisi ($0, à Boliaine (Aisne).Toprris

(L. de) (%),à Toulouse.

•TnocnoN (A.), Procureur de la République, àRouen..

DE Villèle (Auguste), à Saint-Paul. ii> Vivien (Placide), professeur en retraits à Paris.

Wiéhé (Ch.), à Maurice.

Ytieb, à Paris.r •

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Séance du i4 mars 1881

Présidence DE M. LE Siner

La séance est ouverte à 9 heures moins unquart.

Sont présentsMM. Le Siner, président,

A. Le Roy, vice-président,P. Crémazy*secrétaire,Oriot, trésorier,Dubuisson,V. Focard,Lamadon,Lantz,Madre,Nicolas,Vollard.

Sont excusés

MM.Emile Grenard, J. Buttié, B, Jacob de

Cordemoy.Lecture par le Secrétaire et adoption du

procès-verbal de la dernière séance du 30 no-vembre 1883.

Reddition par le Trésorier et approbationpar la Société du compte de gestion de l'an-née 1883.

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BULLETINDELA.SOCIISTIS

M. LEPRÉSIDENTdonne des explications ausujet de certaines lectures, que deux mem-bres de la société devaient faire à la séanced'aujourd'hui et qui sont renvoyées a la pro-chaine séance.

Un membre fait desobservations sur l'étatde la bibliothèque de la société elle seraitmieux placée dans un autre local et plus ac-

-cessible aux membres qui voudraient compul-ser scë ouvrages elle est. aussi devenue troppetite et ne peut plus contenir les volumesmensuellement adressés à la société par diver-ses sociétés savantes de la France et de l'é-trangei*. L'assemblée exprime le vœu que labibliothèque soit agrandie et transportée dansl'une des salles de la bibliothèque coloniale,à l'Hôtel de Ville/Elle espère que M.le Direc-

teur de l'intérieur voudra bien lui accorderune petite place dans ce local.

M. Nicolas donne des explications sur leprochain concours de musique vocale et ins-trumentale, pour lequel des prix ont été fon-dés par la société. Il annonce qu'il a fait venir,pour ce concours, divers morceaux pour pia-no, violon et chant et qu'il les tient à la dis-

position des candidats qui se feront inscrire jusqu'au 10 avril prochain. Il est arrêté quele concours public aura lieu au commence-ment de juillet.

M. DUBUISSONfournit des explications ausujet de deux dessins qu'il présente à sescollègues. L'un est la projection de l'hémis-phère céleste. que vient de parcourir la comè-

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DES SC1KNCKSET ARTS

te de Pons. Elle indique la marche de cettecomète dans le ciel, d'après ses propres ob-servations vérifiées chaque mois par les éphé-mérides de Bossert et Shuloif.

L'autre est le tracé de l'orbite parcourueparla comète à travers notre système solairedepuis le jour où elle fut aperçue pour lapremière fois

Ces explications sont écoutées avec intérêt

M. Dubuisson demande et obtient la no-mination, comme membre correspondant de'la société, de M. Léonce Bottard, propriétaireà Saint-Paul. M. Dubuissqn veut savoir s'ilest permis à un membre correspondant defaire lire, aux réunions de la société, ses tra-vaux

parun membre titulaire. Il offre

de faireen séance la lecture d'un travail da M. L.Bottard sur l'éducation et l'instruction desfemmes. La société déclare qne cette facultén'est pas interdite aux membres correspon-dants; et, admettant ce principe, prie M. Du-buisson de réserver pour la prochaine séancela lecture de l'oeuvre de M. L. Bottard

M. P. Gkémazy donne lecture d'une lettrequ'il a reçue en décembre dernier) du Secré-taire de la Société royale malacologlque deBelgique; cette lettre demande l'envoi desbulletins de 1870 1871 – 1872 – 1880 –1881 et 1882, à charge d'échange par l'en-voi de toutes les publications périodiques an-ciennes et nouvelles de cette société.

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BULLETIN DE LA SOCHh' DES SCIENCES ET ARTS

Le Secrétaire exprime le regret de n'avoirpu réunir tous les bulletins demandés, fauted'une bibliothèque où tous les volumes qu'ony place puissent être bien classés et gardés.La satisfaction qui sera donnée au voeu, quevient d'émettre la société, remédiera certai-nement à cet état de choses.

On procède à l'élection comme menbre ti-

tulaire de M. Jules.Loupy, régulièrement pré-senté son élection a lieu à l'unanimité desmembres présents.'

On procède ensuite au renouvellement duJailreau, pour 1884 le même bureau est réélu,le Président par 9 voix, le, Vice-président etle Secrétaire par 8 et le Trésorier par 7. Ledit bureau*reste donc composé pour 1884, de

MM. Le Siner, président,A. Le Roy, vice-président,P. Crémazy, secrétaire,Oriot, trésorter.

La séance est levée.à 10 h. 1/2.

Le Secrétaire,

P. Crémazy.

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Séance tin *§ mars £S84

Présidence DEM. LE Siner

Sont présentsMM. Le Siner, président, î  

P. Crémazy, secrétaire,`Bridet,

Dubuisson,Camille JaeoïTâe Cordemqy,Lamadon, TLantz, 1

Loupy,Madré,Roussin,

Absent excusé M. Nicolas.

M. LE PRÉSIDENToffre des compliments debienvenue à M. Jules Loupy, élu à la dernièreséance membre titulaire de la société. M. Lou-

py répond qu'il est heureux de la nominationdont il a été honoré et qu'il ne négligera rienpour s'en rendre digne,

M. LE,PRÉSIDENTremarque avec plaisir laprésence de M. Roussin, récemment de retourà la Réunion, après un long congé c'est unzélé confrère que toute notre société revoit'avec satisfaction.

t

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BULLETIN DE LA. SOCIÉTÉ'

M.LEPRÉSIDENTse fait l'interprète des sen-timents de tous ses confrères, en exprimantles regrets que leur cause la mort récente et

prématuréede M. C. Champon, membre

• dévoué et distingué de notre institution. Ilrappelle qu'il a été élu membre titulairede la société en 1879. Déjà M. C. Champonavait fait représenter, l'année précédente, surle théâtre de Saint-Denis, un épisode dra-

matique en un acte et en vers, Les Patrio-tes, qui obtint un légitime succès. Depuis,-ilfit insérer dans notre bulletin de 1879 une co-médie-vaudeville, en un acte et en prose, in-titulée Les quatre ^prétendants, qu'il avait lueà la société, et encore, dans notre bulletinde 1881, deux pièces de vers qu'il avait déjàfait publier dans le Sport colonial .» L'homme

d'affaireset Pauvre

filleAssurément il a moins livré à la publicitéqu'il n'a produit la maladie l'a paralysé aumoment où il mettait la dernière main à unouvrage sur Ghandernagor, ce pays où il acontracté le germe du mal qui l'enlève si jeune à son pays, à sa famille, au barreau où

son talent l'avait mis en relief, et h notreSociété qui garde de ce sympathique confrère

le meilleur souvenir.La Société décide que le discours nécro-

logique prononcé, le 25 mars 1884, aux funé-railles de M. C. Champon, par M. AlbertRieul, son confrère au barreau et dans notre

Société, sera reproduit dans le bulletin de1884 à la. suite du procès-verbal de la pré=sente réunion.

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DES SCIENCES ET A.ETS

3

Lecture par le secrétaire et adoption par laSociété du procès-verbal de la dernière séancedu 14 mars 1884.

La parole est donnée à M. Camille Ja-cob de Cordemoy qui fait la lecture d'untravail fort intéressant qu'il a écrit en1882 sur YInstnwtion primaire à la Réu-nion

Vu l'intérêt qu'offre cette étude, remarqua-ble par les utiles vérités qu'elle met en*lu-mière et par les réformes importantes qu'ellepropose,' la Société décide qu'elle sera im-primée dans le Bulletin de 1883 non encorecomposé. v~

M* Bridet donne ensuite lecture d'unenote

qu'ila

rédigéesur le

cyclone qu'aeu à combattre le Salazi^ vapeur de la;compagnie des Messageries maritimes, enroute pour l'Australie, du 9 au 10 février1884, et à 500 milles dans le S. E. 1/4 E.de Maurice.

Cette lecture est écoutée avec la plus gran-de attention, grâce surtout à un croquis dela route du navire et de la marche du cy-clone que M. Bridet avait remis à chacun deses confrères

Elle se termine par un épisode bienamené et fort émouvant de la vie do ma-rin de M. Bridet, quand il militait danslé corps des officiers de la marine fran-çaise.

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BULLETIN DE LA. SOCu!tÉ DES SCIENCES ETAKTS

L'heure tardive ne permet pas à MM. Du-buîsson et Crémazy de faire les lectures quiont été annoncées elles sont renvoyées à laprochaine réunion

La séance est levée à 11 heures 1/4,

Le Secrétaire,

P Ckêmazy.

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Séance du 16 uiaf 1884

Présidence DE M. LE Siner

La séance est ouvertepar

lalecture duprocès-verbal de la dernière séance du 28 mars

1884, qui est adopté.Sont présents :>MM. Le Siner, président,

P, Grémazy, secrétaire,(Mot, trésorier)

Dubuisson,

V. Foeard,Lamadon,Madré,Nicolas,Roussln,

i Absents excusés,:

MM. Bridet, Lantz, Vinson et Loupy

M. lePbésident annonoe que l'impressiondu bulletin de la Société, pour les années1883," 1884et 1885 a été mise en adjudication.Une circulaire, adressée à tous les impri-

meurs de Saint-Denis, a fait connaître lesclauses et conditions du marché. Trois im-primeurs seulement ont envoyé Ieurg soumis-

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BULLETIN.DE LASOCIETE

sionsqui,

successivementdépouillées,

ont eul'our résultat de faire adjuger ce travail à M.Théodore Drouhet fils pour trois années con-sécutives, d'après les charges de la circulaire.

t – Cette adjudication est constatée par un'procès-verbal, lu en séance et adopté par la

Société, signé le 15 mai 1884, par tous lesmembres du bureau.

M. LE PRÉSIDENTdépose

sur le bureau lesdivers ouvrages et brochures qui lui ont étéadressés pour la Société, depuis la dernièreséance ce sont deux livraisons* de la Revuemaritime et coloniale de 1884, etxin cataloguetrimestriel de la librairie Alphonse Picard,éditeur à Paris.

M. P. Crêmazy offre à la Société un exem-

plairede la Notice

bibliographique qu'ilvient

de publier sur Madagascar.Le même remet au Président l'ouvrage de

M. H. Magny fils, Maurice à vol d'oiseau eniS82, dont son auteur l'a chargé de fairehommage à la Société. Au nom de cette der-

-nière, le secrétaire est invité à adresser à M.Magny des remerciements pour ce gracieux

envoi. 1

M. LE PRÉSIDENT fait donner lecture detrois lettres, la première du ministère de l'Ins-truction publique et des beaux arts deman-dant, pour le dépôt de la Bibiothèque dessociétés savantes, les bulletins de la Sociétédes sciences et arts de la Réunion, pour lesannées 1857, 1858, 1859, 1860, 1861, 1862,-

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BES SCIENCES ET A&TS

1872, 1879 et 1881 la deuxième, de février1884, du Directeur du Musée Guimet, à Lyon,annonçant au Président Renvoià titre d'échan-ge, et au nom du Ministre de d'Instructionpublique, d'un paquet renfermant

Le catalogue du Musée Guimet.Le volume de 1878, du congrès provin-

cial des Orientalistes.

Le tome VI du Musée Guimet.La revue de l'histoire des religions.• La troisième lettre, du 1& février 4884

émane du même ministère. – Elle a pourbut d'annoncer au Président que la 22^ ré-

union des sociétés, savantes aura lieu à laSorbonnê en avril 1884, en congrès -présidé

par M. le Ministre lui-même. Elle invite éga-lement la Société des sciences et arts de Saint-Denis à nommer 5 ou 6 de ses membres,comme devant être sès représentants aux 4

séances de ce congrès. – En admettant qu'oneût pu déférer au vœu du Ministre de l'Ins-truction publique, à l'aide de certaines facili-tés pour déplacements et frais de circulationen France seulement, cette communicationn'a pas laissé que de paraitre tardive à notreSociété.

Enfin, le Président fait connaître une autredemande à lui transmise par M. le Directeurde l'intérieur, au nom du Ministre de la ma-rine et des colonies, pour obtenir deux exem-plaires du bulletin de 1881, de la Société dessciences et arts de Saint-Denis, lesquels man-quent aux collections de la Bibliothèque na-

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Bi'Lums DE LA société DES SCIENCES ET abîs 1

tioiiale et du Ministère de l'Instruction publi-que.M. LE PRÉSIDENTest prie de né pas négliger

de répondre sans retard à toutes ces commu-• nications et réclamations.

M Volsï FOCARDdonne lecture de la suiteet de la fin de son travail intitulé A propos

du patois créole. On écoute jusqu£à la fin, avecun intérêt

marqué)cette

analyse critique quiest aussi originale que judicieuse.M. P. Crémazy récite une satire en vers in-

titulée Pris au piège, qu'il a dédiée à_M.EmileBellier, à la suite* de la représentation sur lethéâtre de SaintrDenis, le 29 décembre 1883,de la comédie en vers, dont ce dernier estl'auteur et qui porte le même titre

M. E. Dubuisson fait part à la société da

résultat de ses observations recueillies le ma-tin même à Saint-Denis, au sujet d'une énor-me iaehe qu'il u constatée sur le disque dusoleil, un peu au-dessus du centre et dépas-sant de beaucoup les dimensions moyennes

des, tâches solaires. Il en montre le croquisfait par lui-même.

Vu l'heure avancée, M. Dubuisson ne peut

faire la lecture du travail que M. L. Bottardl'a chargé de présenter à la Société cette lec-ture est renvoyée à la prochaine réunion.

  j La séance est levée à 10 h. 1/2.

Le Président, Le Secrétaire,LESiner. P. Grémazy

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Séance tin 39 juin 4884

Présidence de M. LE Siner

Lapremière

séance,du 27 juin, n'apu

avoirlieu régulièrement, sept membresseulementétant présents:

MM.Le Siner, ]Y-Foeard;LamadoivMadré, r •Nicolas, f  •Roussin,

Pt.Sers.,Sans doute le mauvaistemps de cette soiréea empôehê lesmembres titulaires de se réuniren plus grand nombre.

.Néanmoins M..Ro'ussina fait donner lec-ture de la bidgraphie de M. PierrerMafîe La-huppe dont il a fait aussi le portrait pour sonAlbum de la Réunion.

LEPRÉSIDENTa renvoyé au 11 juillet sui-vant la .prochaineréunion

Le Président,

Le Siner,

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4

Séance du II  juillet 1884

Présidence DE M. LE Siner

La réunion, du 11 juillet 1884, se compo-sait de

MM. Le Siner, présidentP Grémazy, secrétaireOriot, trésorierBridet,Buttié,

Dubuisson,Lantz,Lamadon,Madré,Nicolas,Roussin, •

Lecture et adoption du procès-verbal de laséance du 16 mai 1884.

M. LE PRÉSIDENTfait savoir que le27 juinmalgré le petit nombre de membres présentson a écouté la lecture de la biographie deM. Pierre-Marie Lahuppe, faite par M. A.Roussi n.

M^ Dbbuisson lit, pour M. Léonce Bottardde Saint-Paul, une étude

quifait honneur à

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BULLETIN DE LA SOCIETE0

u'

l'imagination et à l'érudition de son auteur.Elle est intitulée Simple note sur la condi-tion et Tinstruction des femmes.

M. P. Crémazy donne-lecture d'une récentepièce de vers qui a pour titre Le Microbe

M. Nicolas présente des. observations surles démarches qu'il a faites pour assurer les

éléments du concours musical projeté et an-noncé par la Sociétés – Il s'est préoccupé de-réunir les membres du jury nécessaire pourentendre les candidats et se prononcer sur:leur mérite. Il espère qu'avant quelques joursson jury sera complet, aussi bien pour lesépreuves de chant que de piano. Il dit queles prix sont arrivés et qu'après Pexamen pré-paratoire, ils devront être offerts dans une

séance publique qu'il prie la Société de fixerdans le plus bref délai.

Plusieurs membres discutent à la fois etsur la fixation du jour du concours en petit

comité, et sur celle de la séance où les récom-penses seront distribuées publiquement.

M.LEPrésident dit qu'il n*apas encore reçu

de France les médailles demandées et quetant que le jury ne sera pas constitué, le con-cours d'épreuve et le concours public ne pour-ront avoir lieu. On lui répond, pour lesmédailles, qu'on doit craindre de n'avoir pasà les placer, faute d'un nombre suffisant deconcurrents dans les 2 parties du program-me pour le jury on lui répond que M, Nico-las a répété qu'il prendrmt soin de le coin-

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bKS SCIENCES ET ARTS

pléter convenablement et do suite sans le

refus de quelques musiciens compétent*, choi-sis suivant les Conventions, en dehors de tousles" professeurs des deux sexes, enseignant lamusique à Saint-Denis, la composition dece jury serait déjà faite. Des demandes etréponses sont échangées à ce sujet et, aprèsquelques propositions, la société arrête quele concours d'examen aura lieu dimanche 20

 juillet à 2 heures de l'après-midi, à l'hôtel'de

ville. Après cette réunion privée, a laquellene seront appelés que les membres titulairesde la société, en dehors des «personnes for-mant le jury et des concurrents assistés deleurs principaux parents, la société fixera lele jour et le programme de la séance publi-que, qui doit suivre.

La séance est levée à 10 heures 1/2,

Le Président, Le Secrétaire,

LE Siner P Crémazy

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Séance du i<" août 1881Présidence de M. LE Siner

Sont présents <MM.

Le Siner, présidentA Le Roy vice-président <\  P, Crémazy, secrétaireOriot, trésorierBridet,DubuissotijLamadon,Lantz,Madre,

Nicolas,Roussin,Vollard.

SL Camille Ménard, présenté par M.Dubuisson, assiste à la séance.

M. Auguste Vinson n'a pu venir à la ré-union de ce soir, pour y faire la lecture qu'ilavait annoncée."

Lecture par le Secrétaire et adoption duprocès-verbal de la séance du il juillet 1884.

Lecture par le Secrétaire d'une lettre du14- juin 1884, adiessée de Tours, à M. le Pré-sident par M Albert Trochon, ancien magis-

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M-'LLimX 1)K LA SOCIÉTÉ

trat, membre correspondant de la société.Cette lettre a pour but de demander à M. le

Président si la Société des Siences et Arts dede la Réunion consentirait à acheter' le cata-logue imprimé des manuscrits de la biblio-thèque municipale de Caen Ce cataloguerenferme une notice assez étendue sur la vieet les papiers politiques du général de divi-sion De Caen qui, comme l'on sait, gouvernales Etablissements français dans l'Inde de1803 à 1811. M. Trochon propose aussi

la photographie du même général, d'après leportrait légué par son fils à la viLle de Caen,avec tous les papiers de l'ancien général.La société adhère à cette double demande etcharge son président d'y répondre sans retarden adressant h M. Trochon le prix de l'envoiqu'il offre de faire.

M. LEPrésidentdépose

sur le bureau unrecueil de cartes dont M. L. P. Adam fait donà la société et qui a pour titre SynopHe Wea-ter charls of february 1867, préparée, andpubïished by the meterotagical Society of luauHUus, par le docteur Meldruni..

L'assemblée vote des remerciements à M.L'.vP. Adamet reçoit des explicalions de M.

Dubuisson, au sujet des communications opti-ques dont 'les essais ont été tout récemmentcouronnés de succès et dont, déjà, notre Co-

lonie a profité. Sur la proposition de M.Madré, M. le Président charge M Dubuissonde transmettre immédiatement, et par la mô-me voier les plus chaleureuses félicitations à

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DES SCIENCES ET AKTS

l'homme entreprenant et persévérant qui yvient de réaliser ce projet, aussi grandqu'imprévu, de la jonction des deux Iles parla .correspondance aérienne

La discussion est ouverte sur le jour et leprogramme de la fête musicale publique, an-noncée pour faire suite au concours privé

qui a eu lieu le 20 juillet dernier. Eu égardà certaines convenances qu'il faut observer1envers quelques exécutante qui veulent bien,prêter leur coopération à la société, le jourde-la réunion est fixé au 24 août courant,dans le grand salon de l'Hôtel de Ville, etdes invitations seront faites trois jours avant,par le Président et les membres de la Sociétéauxquels des cartes seront remises

Quant- au programme, M. Nicolas laisseprésumer qu'il sera composé de

4 ou 5 morceaux de piano1 morceau pour cor et piano4 morceau de chant par M'ic X1 duo, piano et violon, par M. et MUe

X. Y. h'2 morceaux de chant par MM Y. et Z.

Le Président,

LE Sixer.

Le Secrétaire,

P. Crémazv.

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«8

Séance du S décembre 188A

PRÉSIDENCEDEM. LE Siner

Sont présents iMM. Le ïsiner, président

P Grémazy secrtaire11 Oriot trésorier

MM. Biidet et Grenard se sGRt fait ac-cuser.

Lecture et adoption du prccès-verbaâdelaséance du 1er août 188't. Le seorétaife ditqu'on rendra compte, dans le bulletin âe Faa-née prései,te qui sera imprimé en 1885, 4e lamatinée musicale qui a eu lieu à l'Hôtel deVille, le 24 août, sous le patronage de lasociété, pour la distribution des récompen-ses du concours musical.

Dubuisson,V. Focard,Lama<jlon,)rLantz,

`

Loupy,Madré,Nicolas,Raussin,Vinson.

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BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ

M. Auouste Vïnson donne lecture d'uneétude sur le Lamarckisme et sur les travauxd'Hœèkel, professent* à l'Université d'Iéna.Cette lecture attachanté est suivie d'observa-tions échangées^sar ce sujet entre MM. Vin-son, Madré et Lamadon

M. E. Dubuisson fait la" lecture d'une no-te qu'il a rédigée sur la comète de Pons dont

il a fixé, avec autant d'exactitude que de pa-tience, les diverses positions' dàiïs notre hé-misphère – à l'appui, il présente des cartesoù sont consignées ses observations non,moins nombreuses qu'utiles et qui ont servi,en France, à la détermination générale de lamarche de la comète. Sur la proposition deM. Madré, la société adresse hM- Dubuissonles félicitations qu'il mérite pour ces travaux

qui lui font honneur.A ce propos, il est parlé de la nécessité de

restaurer l'ancien observatoire en lui restitu-ant les instruments qu'on a cru devoir renvo-yer en France. La société délègue M Bridet,ajn de; ses membres les plus compétents encette matière, pour lui faire un rapport surcette question Dès qu'il sera lu, la société

avisera au moyend'obtenir de l'Autorité

supé-rieure le rétablissement d'un observatoire àla Réunion, où il est certain qu'il rendra desservices à la science.a

M.LEPrésident fait à M.Rouswin des com-·

pliments, auxquels la société croit d'avoir s'as-socier,sur les succès de son fils Georges Rous-*»sin, à la récente exposition artistique de la

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DES SCIENCES LT ARTS

villrt de Rouen. La liste des récompenses qui

yont été décernées

mentionne,en faveur de

ce jeune peintre créole, une médaille de ver-meil offerte par la société des amis des arts.Son nom figure auprès de noms déjà célèbres

> dans la peinture, tels que ceux de MM. Bou-langer, Ph. Rousseau, Krug, Damas, etc. etc.,ce qui ne peut que rehausser la distinctiondont il a été l'objet de la part du Jury de l'ex-position des Beaux-Arts de Rouen ]

Il est ensuite procédé, suivant le règlement,à l'élection de M. Camille Ménard régulière-ment présenté M. C. Mônard est nommémembre titulaire de la société des sciences etarts.

La séance est leVée 5 10 heures 1/2.

Le secrétaire,P.. Crémazy.

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Séance du «« décembre 1M84

Présidence DE M. LE Siner

Sont présentsMM. Le Siner, président i

P Crémazy, secrétaireÔriot, trésorierDubuisson,Focard, {~Lant^, f Lamadon,

Madrç,Ménard, sNicolas,

MM.Bridet et Roussîn se sont "fait excuser.

Lecture par le gecrétair.e et adoption parla société du procès-verbal de la dernière,séance du 5 décembre 1884.

LE Président souhaite la bienvenue à M,Ménafd, nommé membre titulaire à la der-nière séance.

Lecture d'une lettre datée à Tours du.28 octobre 188ât de M. Albert Trochon, avo-cat, ancien magistrat à Tours Cette lettreannonce au président de notre société que

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BULLETIN DE LASOCIÉTÉ

M Trochon recherche un nouvelexemplairede la biographie du général De Caen publiée

en 1850 et qu'il se propose de l'envoyer à laRéunion; elle offre, en outre, d'échanger lebulletin annuel de la société de géographie,récemment fondée à Tours, contre celui de lasociété des sciences et arts de la Réunionon adhère à cette demande et le Présidentse charge de donner satisfaction à M. Tro-

chon. A ce propos, un membre déclare etrépète que la collection est loin d'être com-plète des bulletins déposés dans lés armoiresdela bibliothèque de la société, lesquelles sontplacées dans la. plus petite salle de la biblio-thèque de Saint-Denis

Le recueil de 1879 manquait, après les re-cherches du Président, ©ette lacune n'a puêtre comblée

Lecture d'une lettre du 13 octobre 1884du bibliothécaire de l'Académie des sciencesnaturelles de Philadelphie, qui sollicitel'échange de nos bulletins contre les Procee-dings de cette Académie. Le secrétaire est in-vité à répondre, en faisant bientôt l'envoidemandé par la voie de la poste.

Lecture d'une lettre, datée à Paris du 1er

novembre 1884, du Président de la sociéténationale des antiquaires de France Elle apour, but de prier notre compagnie de s'asso-cier à la demande de cette société auprès duministre de l'instruction publique et desbeaux arts, dans le dessein d'obtenir une ré-forme utile de la législation en matière demonuments historiques II s'agit d'un voeu

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DES SCIENCESET AKTS

dans lequel-doivent s'unir toutes les sociétés

littéraires, àrtistiques et savantes de la Fran-ce et,de ses colonies, pour solliciter l'initia-tive d'un projet de loi de la part du Gouver-nement auprès des Chambres. Cette loi seraitdestinée à assurer la préservation des monu-

ments anciens, aussi bien sur le territoire na-tional que dans les possessions françaises.

La société ne statue pas sur cette demanded'adhésion. La question est ainsi renvoyée

à notre prochaine réunion. 1 ttLecture d'une lettre datée de Bentré

(Cochinchine française) du 11 octobre. 1884,de M. Thomy Lahuppe, ancien secrétaire,membre correspondant de la société dessciences et arts de la Réunion M. Lahuppe seplaint d'une note explicative placée en têtedu bulletin de 1882j cette note, signée du pré-

sident et du secrétaire actuels, mentionne queM. Lahuppe, précédent secrétaire, n'a laisséaucune pièce permettant au secrétaire, qui luia succédé, de rédiger les procès-verbaux desséances du commencement de l'année 1882

 jusqu'au 5 mai. Cette déclaration a paru éveil-ler la susceptibilité de M Lahuppe qui y avu un reproche et même une accusation Lapensée du Président et du secrétaire n'était

pas assurément de froisser l'amour-propre denotre honorable membre correspondant; ona, simplement constaté l'absence des docu-ments-relatifs aux réunions des quatre pre-miers mois de 1882, sans en attribuer laresponsabilité à M. Lahuppe. Sur les expli-cations fournies par MM,Le Siner et Grémazy,

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BULLETIN DE LA SOCIKTK

la société décideque

toute satisfaction seradonnée à M. Lahuppe parleur insertion dansle présent compte-rendu.

M.P« Crèmazy fait savoir, que la Re-vue maritime et coloniale d'octobre 1884contient une étude fort intéressante de M.

-D^aur Brunet,membre correspondant de no-tre; société, sur l'instruction publique à l'ile

de la Réunion Il prie ses confrères de l'au-toriser à la publier dans le Bulletin de 1884.Ils souscriveat à cette demande, mais à lacondition que l'on obtienne, au préalable, leconsentement de l'auteur de ce travail.

LEPRÉSIDENTlit la nomenclature de tousles ouvrages qu'il a reçus tant du ministre del'înstruc'tion publique que,de diverses com-

pagnies savantes de la France et de l'étran-ger. Ces livres et brochures sont déposésdans la bibliothèque de. la société. La listeen est reproduite pUis bas.

M* ORIOT, trésorier, rend ses comptespour l'année 1884, qui sont approuvés.

^ï. Lamadon fait une proposition pour

que la société des sciences et arts -se décide àouvrir, sous son patronage et au début del'année 1886, fi ce n'est dans le eouiss de'1885, une grande exposition agricole, indus-trielle, scientifique, artistique et littéraire.Cette idée est appuyée favorablement parquelques membres et combattue par d'autrfsqui montrent, en l'état actuel surtout, les

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DESSCIENCESET ARTS

6

nombreuses difficultés de cetteentrepiîse,

Eaquestion est renvoyée à l'ordre du jour de la

prochaine séance.

– On procède régulièrement au scrutin«ecret, au renouvellement du bureau pourl'année 1885 réélection du même bureau,composé de MM. Le Siner, président A.' LeRoy, vice-président; P Crémazy, secrétaireChiot;

trésorier.La séance est levée à10 h: 1/2 »

IlLe Pfé&idûnt, Le Secrétaire,

Le Siner. r P. Grémazy.

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LISTE des ouvrages reçus par la Société des Sciences

et Arts de la Réunion, en décembre Î884.

1 Des documents inédits d'histoire de France (4 vol.in 4'.)

2 Annales du musée de Guimet.3 Journaux des savants de France.

4 Société de secours des amis des sciences (fondéepar M. Tîiênard. )

5 Journal asiatique.6 Mémoire de la société nationale d'Agriculture. des

Sciences et Arts d'Angers.7 Bulletin de la Société d'anthropologie de Paris;$ Bulletin hebdomadaire de l'association scientifique de

France.e l_

9 Bulletin de la sociêtê'de géographie de Paris.10 Revue des sociétés savantes de France.

11 Annales de la société météorologique de Belgique.12 Bulletin de la société industrielle d'Amiens13 Archives du musée Teyler (vol. II.)14 Bulletin archéologique et historique de la société

de Tarn-et-Garonne.15 Bulletin de la société académique ,de Brest. °

16 Bulletin de la société des archives historiques dela Saintonge et. de l'Aunis.

17 Société pour la défense et le développement des in-térêts

générauxde

R»>yan

`

18 Bulletin de la société de la Charente Inférieure.19 Bulletin de la société de Saint-Jean d'Angely.20 Recueil de chartes de l'Abbaye de Cluny.21 Bulletin de la société zoologique de France (nomen-

clature des êtres organisés,)Et autres publications périodiques. «

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LE CYCLONE DU « SALAZIE »

( FÉVRIER1884 ) 1

MESSIEURS,J'ai pensé qu'il vous serait agréable de sui-

vre avec moi les diverses manoeuvres exé-cutées^ par le commandant du Salazie, desMessageries maritimes, au moment où il s'esttrouvé aux prises avec un cyclone dans sonvoyage de Maurice à Melbourne.

Parti de Port-Louis le 8 février à 2 h. 30'

du matin, le Salazi® ne tarde pas à se trou-ver en pleine mer faisant route au S. 42» E.suivant la ligne de plus courte distance ducap Brabant à la ville de Melbourne..

La brise est forte du S. E., l'horizon estchargé, la mer grosse et le coucher du soleilcuivré sont des pronostics de fâcheux angure,que le baromètre ne confirme cependant pasencore, il reste- stationnaire.-

Le lendemain matin 9 février, le vent aug-mente de violence, la mer se creuse en hou-les profondes, le ciel se couvre, de nimbusnoirâtres, qui fuient avec rapidité, le baromè-tre, encore à 760, indique une tendance à labaisse, tout fait présager le voisinage d'uneperturbation atmosphérique contre laquelle lecommandant Macé prend toutes les précau-

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BCLLETIN DE LA SOCIÉTÉ

tionscommandées par l'approche

du dan-ger les tentes sont serrées, les perroquetsdégréés, les voiles rabantées, les canots reçoi-vent des doubles saisines toutes les ou-vertures sabords, hublots, panneaux, sonthermétiquement fermées, lés descentes sontcondamnées et les panneaux à ouragan misen place à midi le luxueux navire a prisson armure de combat,. il est prêt à faire tête

à Fennemi, et il n'y a plus qu'à se rendrecompte de la position et de la marche du cy-clone pour manoeuvrer en conséquence.

Le baromètre n'a encore baissé que de lm/mmais les vents ont halé le S. l/t S. :E. grandfrais, indiquant le centre dans l'E. i/i N. E.du navire, la mer est très grosse, néanmoinsle Salazie n'en souffre pas beaucoup.

A 4 heures du soir le baromètre est des-

cendu à 758, le vent hale le S. en fraîchis-sant. Le centre du cyclone est à l'E. du navireet il devient certain que, si l'on continue laroute au S. 62 E., le Salazie no peut manquerde couper la trajectoire au centre du météore,ce qui serait aller, tête baissée, se jeter au-devant d'une catastrophe.

Il faut donc mettre à la cape pour laisserpasser l'ouragan continuant sa course au

S. -O»et au S., ou bien s'élever au N. à con-trebord de-la route suivie par le cyclone pourse maintenir dans le demi cercle maniable etprofiter des vents de la partie de l'Ouest qu'ony rencontrera. 1

Mais ces deux manœuvres, retardent l'ar-rivée du navire et le commandant Màcécherche à perdre le moins de temps

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DESSCIENCES ET ARTS

possible pour continuer à justifier la répu-tation de vitesse qu'il a conquise en Aus-tralie. Il est à environ 200 milles du centre.Il peut courir encore en droite ligne, et ilannonce à ses passagers qu'il va continuerpendant six heures la route qu'il suit, pourreconnaître ce terrible centre de plus près. Illeur explique que les vents ne varieront, pro-bablement, pas plus que du Sud au S.-O. et àl'Ouest et qu'alors, étant à peu près à 100milles du centre, il le contournera à cette mê-me distance par le Nord, profitant des ventsd'Ouest pour rattraper le temps perdu et uti-liser ainsi les rafales de l'ouragan,, qui devien-

1 dra l'auxiliaire du navire au lieu d'en êtrel'ennemi redoutable

Ce programme si clairement exposé et dontchacun pouvait se rendre compte, en le sui-vant sur le diagramme présenté par le com-mandant Macé, a été accompli de point enpoint et, m'écrit un passager émerveillé dirSalazie, réalisé aux heures indiquées parl'habile commandant.

A 8 heures du soir, l'ouragan était très vio-lent du S. y, S.-O., le baromètre était à 756la reconnaissance du dangereux centre étaitcomplète et on l'estimait à 100 milles environ^le Salazïe avait fait assez

pour prouver qu'ilpouvait sans crainte affronter le danger, ilne fallait pas, cependant, compromettre la sé-curité des passagers et de l'équipage, au nom-bre de 289, qui suivaient avec anxiété la ma-noeuvre hardie du capitaine, mais qui,,voyantla tempête augmenter de fureur, se deman-daient si_on n'allait pas être victime d'une

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BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ

erreur d'appréciation et si cette loi des tem-

pêtes, qui leur était affirmée avec une foi ro-buste, pouvait permettre de se jouer ainsi deséléments.

A 8 heures donc, le commandant prendson parti. Il ne fallait pas mettre en péril sonnavire et le chargement d'une énorme valeur.Il était temps de remonter au Nord et mieuxencore au N.-E. pour gagner toujours unpeu dans l'Est le cap fut donc dirigé vers le

N.-E. vrai du monde, route que l'on suivit jusqu'à 2 heures du matin le 10 février.

Pendant ce temps, les rafales allaient tou- jours en augmentant de plus

en plus,la mer

redoublait ses fureurs sur le Salàzie, mais leslames le frappaient de l'arrière et augmen-taient encore la vitesse vertigineuse du na-vire. Une pluie torrentielle, des 'éclairs éblou-issants accompagnés de coups de tonnerre

formidables, aveuglent ceux que leur devoir.tient enchaînés sur le pont la foudre tombeà droite et à gauche du navire, le baromètrecontinue sa baisse lente et progressive va-t-

on poursuivre une route qui semble conduirele navire au-devant du danger ?

Le capitaine envisage avec sang-froid cespronostics de fâcheux augure. Il a prévu, lesdiverses

péripéties quiviennent

l'assaillir et,confiant dans cette admirable loi des tempê-tes, véritable palladium des navigateurs, ilcontinue la route indiquée à l'avance sans selaisser émouvoir par les craintes des passa-gers jusqu'à ce qu'enfin le baromètre, ayantatteint 749 m/maccuse une tendance à remon-ter. Il est 2 heures du matin le dimanche 10

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DESSCIENCESET ARTS

février. Les vents soufflent de FO.-S.-O. etla distance minimum du centre est d'environ75 milles.Deux heures de course au N.-E. accentuent

encore le mouvement de hausse du baromè-,tre qui remonte à 750 m/m. Tout danger a dé-sormais disparu, l'ennemi est en fuite versle S. -S. -0 et le Salazie, par un admirablemouvement tournant, a eu raison de ses fu-reurs impuissantes il est temps de repren-dre la

route quidoit conduire à

destination,le cap est mis au S. 48o E.Le Salazie a vaillamment reçu son baptême

d'ouragan pas la moindre avarie, pas un filde caret cassé Le beau navire bondit sur lalame encore affolée comme un noble coursiervainqueur dans un tournoi et, fier de sa vic-toire, il semble tout glorieux du triomphequ'il a remporté.

La loi des tempêtes a reçu la consécrationde l'expérience et prouve que l'étude et l'es-prit peuvent triompher de la force brutale etinconsciente,ce qui démontre une fois de plusque cos fléaux dévastateurs, si terribles autre-fois pour les navigateurs, sont soumis eux-mêmes à des règles fixes, invariables, qui per-mettent aux navires à vapeur, si puissants denos jours,de se jouer des terribles météores qui

sillonnent chaque année notre océan indien.Cette course au N.-E., a duré 6 heures,c'est en apparence un retard, mais les derniè-res rafales vont elles-mêmes y porter çemède,les vents soufflent, en effet, violemment duN.-O. et l'on peut les utiliser en faveur de laroute au S. 48« E.

`

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BCM.ETINDE LA SOCIÉT15

A. 8 heures du matin, le baromètre a re-

monté à 753 m/m, le temps s'embellit, la voi-lure est larguée pour augmenter encore lavitesse déjà considérable et l'on continue àcourir ainsi toute la journée.

Enfin, le 11 février, le temps a repris sasérénité habituelle, on ne ressent plus que lesdernières rafales de l'ouragan, qui soufflentgrand frais du Nord le baromètre est re-monté à son point normal et l'on constate

que, depuis la rencontre da cyclone, on n'aperdu que 55 milles pour l'éviter sur 040 mil-les parcourus, retard insignifiant puisqu'enrésumé,- malgré cela, 555 milles ont été faitsen route diredte.

Le commandant Macé, amoureux, fou deson navire comme le sont en général les vraishommes de mer, n'a pas d'expressions pouren constater les admirables. qualités mon

brave Sâlazie, s'écrie-t-il 5 ah,qu'on est fier demontrer sur les mers un pareil échantillondu savoir et de l'habileté de nos ingénieurs t

Si des langues envenimées, des esprits cha-grins proclament à chaque instant la déca-dence de notre chère patrie, la marine, dumoins, est toujours en progrès et chacuns'empressera de reconnaître que nos officierssont dignes de diriger les irréprochables ins-

truments confiés à leurs soins par nos puis-santes Compagnies maritimes.Je vous disais tout à l'heure, Messieurs, que

le commandant Macé poussait l'admiration deson navire jusqu'à l'enthousiasme, c'est qu'ila eu plusieurs fois déjà l'occasion d'en cons-tater les solides et brillantes qualités.

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DESSCIENCESETARTS

7

Il y a quelques mois, il s'est trouvé, par

hasard, appareiller de Melbourne en mêmetemps que la Clyde, grand vapeur apparte-nant à la compagnie Péninsulaire-et-Orien-tale, réputé comme le meilleur marcheur desdes navires de cette compagnie.

On partit à la même heure sous les yeuxd'une population immense, se livrant immé-diatement à des paris sans nombre, qui enfaveur de la Clyde, qui en faveur du Se~e~e

La réputation de ce premier navire était sibien établie à Melbourne qu'on tenait pourla Clyde à 3 contre 1 pour ie 'S~c~e.

Le commandant Macé aurait pu retarderson départ de quelques heures pour ne pass'exposer à une défaite qu'on lui représentaitcomme certaine, mais il avait confiance, il fitsa route pour sortir du poit de Melbourne

comme s'il n'avait pas à ses côtés un concur?rent redoutable. 1Il y avait 45 milles à parcourir jusqu'à la

bouée qui signale l'entrée de la rivière et ilse trouva que, sur ces 45 milles, il en avaitgagné 5 à la Clyde.

Jugez du bonheur du commandant Macéqui, à son voyage de retour, avait l'occasionde battre avec 14 heures d'avance, sur un

parcours de 576 milles, un grand steamer dela compagnie Orient-Line, le Chimboraço,allant de Sydney à Melbourne 1

Comprenez-vous maintenant l'admirationdu Capitaine pour son magnifique Salazie,mais vous n'avez pas idée, vous dont la pro-fession est de vivre à terre, de la part que les

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BULLETIN DE LA SOC.tETE

marins prennent aux succÈs ou. aux insuc-

cès de leurs navires.Pour eux, ces bâtiments qu'ils montent de-viennent, pour ainsi dire, des êtres animésqu'ils chérissent à l'égal d'une maîtresse ado-rée, dont ils surveillent avec un soin jalouxles moindres aventures, se réjouissant deleurs conquêtes~ malheureux de leurs défaites,de leurs infidélités à là victoire, c'est leur âmetout entière qu'ils défendent avec énergie con-

tre qui se permettrait une raillerie.Laissez-moi vous en offrir une preuve envous contant un des souvenirs de ma jeunesseauquel je ne songe jamais sans en ressentirrémotion bien vivante du premier jour.

C'était en 1840, j'étais embarqué comme as-pirant sur cette charmante corvette la Blonde,qui vint l'année suivante à la Réunion.

Notre mission était de surveiller la pêche

sur les côtes de Terre-Neuve, et nous passionsla plus grande partie de notre temps au mouil-lage d'une petite baie appelée le Croc.

La vie était bien monotone.Chaquejour l'aspirant de corvée partait à 3

heures du matin pour aller, sur le lieu de pè-che, recevoir les réclamations des pêcheurs etfaire la récolte des morues pour les repas del'équipage; ce n'était pas long car,-en trois

heures au plus, notre embarcation se trouvaitpleine

de ces énormes et excellents poissons,dont les échantillons séchés qui vous sont

i expédiés ici ne peuvent donner idée du goûtexquis qu'Us ont dans leur fraîcheur.

L'après-midi était consacré à la pêche~ àla chasse où nous trouvions des provisions

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DESSCIENCESET AMS.

abondantes notre ordinaire se composait de

saumons; langoustes, truites s-aumonées, per-drix, pintades, canards, sarcelles, courlieuxdont le célèbre et regrette Cùzard, alors notrecuisinier, confectionnait d'excellents pâtés defoie, qui faisaient pâlir les terrines de Stras-bourg c'était, sous le rapport culinaire, une

véritable vie de cocagne.Un jour le timonier signale une voile recon-

nue bientôt pour une corvette anglaise, qu'un

vent frais du large amenait rapidement aumouillage à une encablure de notre belleBlonde

`

Deux gracieux et superbes navires, on au-rait dit les deux sœurs

Le Commandant anglais vint rendre visiteà notre Commandant, le brave et intrépideofficier, dont les annales de la Réunion ontconservé le touchant souvenir alors qu'il se

 jetait à l'eau tout habillé pour sauver au boutdu pont l'un de ses volontaires, j'ai nommécelui qui fut depuis l'amiral Tréhouart.

On visite la corvette et le Commandant an-glais ne tarit pas en éloges sur sa bonne te-nue, sur l'ordre et la discipline qui .régnent& bord, puis il annonce son départ pour lelendemain.

La conversation l'amené à parler des qua-

lités de son navire et surtout de sa réputationde vitesse. Le commandant Tréhouart répondque la Blonde ne marche pas mal, mais pleinde conRance, au fond du cœur, dans les quali-tés du navire qu'il commande, il propose auCommandant anglais de -l'accompagner endehors de la passe, c'est accepté.

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BUUiETIN M LA SOCï~T~

Voilà donc le lendemain les deux navires

appareillant, à la même heure, ou plutôt à lamême minute tant les manoeuvres se font avecprécision de part et d'autre.

H vente jolie brise debout, la mer est ma-gnifique, ce sont d'excellentes conditions pourla lutte, mais il faut louvoyer dans un étroitgoulet les deux corvettes ont pris chacuneune bordée différente pour ne pas se gêneret, après cinq bordées, la Blonde atteint la

première la pleine mer, il en avait fallu sixà la corvette anglaise. C'était un vrai triom-phe dû à l'habileté de notre commandantqui était un manoeuvrier de premier ordre,et qui, à chaque virement de bord, terminaitsou évolution si près de terre que l'on pou-vait sauter sur le rivage. <

Le commandant anglais, connaissant sansdoute'moins bien les

côtes,ou

peut-êtremoins

hardi, n'avait pas osé se hasarder si près deterre et avait perdu un peu de temps.

Enfin nous voità dehors, les deux naviressont par le travers, là lutte est ouverte 1

Le silence le plus profond règne à bord dela J9t!&Mc!~comme toujours pendant la ma-nœuvre, mais, cette fois, une vive anxiétél'accompagne, les poitrines sont oppressées,

chacun interroge les impressions du Com-mandant qui, debout sur la dunette, suit lesmouvements de la corvette anglaise et la re-lève au compas.

J

La'distance semble toujours la même, lesdeux adversaires paraissent de même force,mais nous enrageons dpjà de ne pas voir

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DES SCIENCES ET ARTS

l'avantage se dessiner en notre faveur, hélas 1 ·nous n'aUions

pastarder à

voir s'évanouirnos illusions.La corvette anglaise restait toujours par

notre travers et ne nous gagnait pas en vi-tesse, mais peu à peu nous nous aperçûmesqu'elle s'élevait plus que nous au vent savoilure, mieux disposée que la nôtre, lui per-mettait de pincer le vent davantage et nousla voyions s'éloigner de nous par le travers

 jusqu'à ce qu'enfin à une encâblure de dis-tance, elle laissa porter d'un quart et nousdépassa d'une demi longueur.

En véritable gentleman, le Commandantanglais ne poussa pas plus loin ses avanta-ges, il mit en panne et vint à bord saluantle Commandant par ces mots élogieux jevous félicite. Commandant, d'avoir tenu têteà la première marcheuse d'Angleterre. Notre

brave Commandant accepta, en grimaçant,.ce trop gracieux emphémisme, nous avionsété battus quant à nous, rien ne peut vousdonner une idée de la rage sourde et de laconsternation de tout l'équipage nous au-rions volontiers engagé un plus terrible duelavec ce trop heureux anglais si notre Com-mandant avait fait faire le branle-bas de com-bat et je ne jurerais pas qu'il n'en eût bien

envie 1Nous quittâmes notre compagnon de route,honteux et confus de notre mésaventure etnous revînmes à notre mouillage où pendant

plusde huit jours, nous n'osâmes pas abor-

der notre excellent Commandant -dont lestraits énergiques semblaient tout attristés cte

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BULLETIN DE LA. SOCIÉTÉ

sa défaite. Ces souvenirs ineffaçables de ma

 jeunesse, vous donneront une idée de ratta-chement sans borne qu'on porte au bâtimentqui nous conduit au delà des mers. C'est unepartie essentielle de notre France, et nous lechérissons à l'égal de notre mère dont il faitrespecter partout et toujours le pavillon glo-rieux.

Pourquoi faut-il que ces souvenirs soientattristés par la mort de tous ceux sur l'af-

fection de qui j'étais sûr de compter a bordde la Blonde ? Commandant, officiers, aspi-rants, tous ont disparu tour a tour et je restele seul à

pouvoirvous conter. les émotions

de ce duel nautique C'est là carrière dumarin on vit côte à côte pendant des années,on se crée des amitiés ~bien vives et -qu'oncroit éternelles, puis on se quitte un jour pourne plus se'revoir que dans l'Eternité 1

Mais nous voilà bien loin du commandantMacé et de son admirable Sc~o~c, je ne doispas cependant terminer sans insister sur lamanœuvre habile qui lui a fait éviter un dan-ger au devant duquel pouvait courir un capi-taine moins, instruit, compromettant ainsil'existence des passagers et de l'équipage enmême temps que la sécurité de son navire.On dit

queles

passagers,en arrivant a Mel-

bourne~ lui ont remis une adresse de félicita-tions, je ne puis mieux faire, en me joignantà eux, que d'appliquer au .So~ct~e les conclu-sions auxquelles j'étais parvenu dès 1860,con-clusions que vous pourriez lir.j a la fin duchapitre V de l'étude sur les ouragans de no-tre hémisphère

Z)

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DES SCÏENCES ET ARTS

« Confiant dans la nxité des lois. qui les

régissent,familiarisé avec l'étude des diver-

ses phases qu'ils peuvent présenter, j'en suisarrivé à cette conviction qu'on. peut passerimpunément au milieu de ces phénomènes

terribles, sans s'exposer à de sérieuses ava-ries.

« Pour un bâtiment à vapeur, toujoursmaître de sa manœuvre par le moteur qui lui

permetde se placer là où le capita:ne'l'or-

donne, à un -moment donné, il n'est plusd'ouragan possible, comme ouragan bien en-tendu sans doute il peut être enveloppé dansle tourbillon et y rencontrer de violentesbourrasques, mais plus de ces ranàles terri-bles, plus de ces,sautes de vent qui exposentle bâtiment et le3 hommes qui le montent àune perte presque certaine 1

<cUn capitaine instruit se joue du centre

redoutable autour duquel il circule, s'en éear-tant ou s'en approchant selon que cela lui estutile. Par lui tout est prévu 1Il sait d'avancequelles variations le vent doit présenter,quelle sera la violence des raffales, et il estparfaitement sûr de ne jamais être fatalementexposé a ces désastres effroyables qui peuventamener la destruction de son navire.

« Non seulement le bâtiment à vapeur n'a

rien à craindre de ces ouragans jusqu'ici siredoutés, mais ils deviennent au contraire,pour lui, un auxiliaire puissant.

« Méprisant leur fureur, un capitaine peutaller chercher des vents favorables à sa route,et, s'il ne lui est pas possible d'anéantir lemétéore dévastateur qui le menace, du moins

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BM-LB-nN DB ïi SOCIÉTÉ DM jSCtBNCES ~T AtttS

péut-i1;en le contournant à

distance,en faire

servir la violence à le conduire au point dedestination qui lui est assigné.

Ne dirait-on pas que ces réûexions ont étéfâites pour le Salazie et par son habite capi-taine ?

`

N'est-ce pas de point en point le program-me annoncé et suivi et ne sommes-nouspoint en droit dé dire au commandant Macë

Bravo mon jeune camarade, vous avez bienmérité de la loi des tempêtes 1

Saint-Denis, le 28 mars 1884.

H. BRIDET.

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8

piSCOURS DE ]~. ~LBERT J~IEUL

Prononcéle 25 mars <884

8Mt LA TMMMBE ¥l

rDE If. CHRISTIANCHAtfPOIf 

'1Messieurs,

On chercherait vainement à maîtriser sesémotions en face de cette tombe si prématu-rément ouverté et qui va pour jamais englou-tir tant et de si nobles espérances. Champon

nous est enlevé dans toute la force de l'âge~et, quelque courte qu'ait été sa carrière, ilaura laissé parmi nous- une trace profonde etdurable. On se souviendra longtemps au Pa-lais de ces plaidoiries étincelantes de verveet d'esprit où le culte de la forme s'alliait avec

un si rare bonheur à la rigueur des déduc-tions juridiques. Avec quelle netteté se déga-

geaient ses pensées et comme il savait les

traduire dans cette langue élégante et sobredont il avait le secret 1 Champon était, Mes-sieurs, un délicat de l'esprit.

Ce n'est pas seulement dans les travauxprofessionnels qu'il donnait la mesure de sesqualités littéraires. Parfois il se sentait tour-menté du désir de parler une autre langue. ¡

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BULLETIN DE LA SOCIETE

Ses goûts artistiques se donnaient alors li-bre carrière et c'est, Messieurs, à ces heuresd'inspiration que nous devons toutes lespoésies qu'il nous a laissées, les unes simpleset touchantes, les autres pleines i le souffle, demouvement, des généreux élans de son pa-triotisme honnête et sincère.

La sincérité de l'accent, tel était bien, Mes-sieurs le trait dominant de toutes ses produc-

tions, et c'est ainsi que se réflétait jusquedans ses travaux la plus brillante qualitépeut-être de cette riche nature. Quel est, eneffet, celui qui, l'ayant approché d'assez près,ne s'est point immédiatement: aperçu de lafranchise de son caractère et de la sûreté deses relations ? Tous ici nous pourrions enrendre témoignage, nous surtout qui l'avonsconnu dans l'intimité et qui ajoutions tant de

prix à cette amitié pleine d'abandon et .decordialité.Aussi, Messieurs, n'est-ce pas sans tristesse

que nous apprîmes un jour que Champon al-ïait nous quitter. La Magistrature lui ouvraitses portes. Le poste de président était vacantà Chandernagor; on lui offrit d'en remplir lesfonctions. Il partit, non sans avoir longtempshésité à s'éloigner du pays, de ses parents, de

ses amis, de ce barreau enfin, témoin de sespremiers efforts, et qui avait applaudi sansréserve à ses premiers succès~ Son absencene fut pas cependant de longue durée.

Après quelques années, il revint au milieude nous mais il revint l'âme brisée par decruels malheurs et la santé profondément al-térée. On se disait que l'air du pays natal

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DESSCIENCESETARTS

restituerait bientôt à cette puissante organisa-tion toute la vitalité d'autrefois. Lui-même sele persuadait du reste, et, quand il se vit dansl'impossibilité de prolonger son congé, iln'hésita pas à donner sa démission de magis-trat pour rentrer au barreau. C'était, Mes-sieurs, toute une carrière à recommencer tCertes, il était bien armé pour la lutte et pou-vait se flatter de surmonter sans peine lespremiers obstacles. Mais les temps étaient dif-ficiles et le mal

qu'ilavait contracté sur les

bords de l'Hoogly continuait lentement sonœuvre.

Un jour, il quitta le Palais, frissonnant lafièvre, et depuis. ce ne fut qu'une lon-gue et cruelle agonie, qu'il supporta sans dé-faillance, ne se plaignant à personne desinjustices du sort, donnant ainsi l'exemple del'adversité soufferte sans aigreur, avec une

inaltérable sérénité.Aujourd'hui, voilà. Messieurs, tout ce quinous reste de notre cher confrère 1

Oh 1 non, je me trompe, Messieurs, toutn'a pas disparu avec le souffle vital. Cette in-telligence si vive et si.brillante ne s'est pointévanouie à jamais Elle revit dans ce mondemeilleur que Dieu réserve à ceux qui, pen-dant leur existence terrestre, ont pratiqué les

saintes lois du devoir. Puisse cette penséenous consoler au milieu de notre deuil et por-ter quelqu'allégement aux souffrances desêtres chéris qui prient en ce moment pourlui 1

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M.mnJPPE(MEME-MME)

pfÉ A SAÏNT-DENÏS (tLE BOURBON) LE 10 AYML 1796

PECÉDË A SA!KT-DEMS LE 20 AOUT 1875

La. seconde édition de l'Album de Réu-nion nous permet enfin de consacrer, danscette publication éminemment coloniale, laplace qu'elle mérite à l'une des personnalitésqui ont le plus'marqué dans notre petit pays.

Quelle mémoire, en effet, est plus digned'être recueillie dans cet ouvrage, que celle

de M. Lahuppe, qui fut le fondateur de l'Im".primerie dans notre île ? La Publicité remplitun strict devoir en protégeant contre l'oubliet en offrant, comme exemple aux générationsnouvelles, l'homme de bien qui a voué toutesa longue et noble existence au culte de laPresse et à la propagation des lumières, aussibien qu'à l'amélioration progressive et inces-sante des moyens mécaniques que la Science

a mis au service de la pensée humaine..Nous nous acquittons nous-méme d'unedette personnelle de reconnaissance, en retra-çant ici cette vie ei bien remplie, en payantun légitime tribut de notre affectueuse véné-ration-à celui qui fut notre doyen respecté,qui nous a ouvert la carrière où ses conseils

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BUM-KMN DB LA SOCÏ~

nous ont si longtemps guidé, au vaillant cré-

ole dont le nom a été mêlé, par tant de ser-vices rendus depuis le commencement dusiècle~ à l'histoire de la Réunion.

M. Lahappe (Pierre-Marie) est né à Saint-Denis, en l'an ÏV de la grtinde République(10 avril 1796). Son enfance fut bercée par lerécit des batailles et des victoires de la Répu-blique et, comme cela était naturel, sa jeu-nesse ardente s'enivra des légendes de Tépo-pée impériale.Hélas il était destiné à voir de près cetteguerre qui passionnait son cœur, dès les pre-mières années. Il était presque un homme,quand les Anglais s'emparèrent de l'Ile, end810. Le souvenir de ce douloureux événe-ment avait fait une telle impression sur sonesprit et surtout sur son âme de

patriote,

qu'il

en avait conservé le souvenir jusqu'auxmoindres détails. Il ~vait connu les héros decette époque et c'est, les larmes aux yeux etles sanglots dans la voix, qu'il racontait lecombat de la Redoute et la mort glorieusedes braves créoles tombés pour la patrie.

Dès ce moment M. Lahuppe affirme sa vi-rilité. Le Gouverneur anglais exige de tous lesFrançais habitant file d'opter entre le scr~ment

d'allégeanceou le

départde la colo-

nie. Malgré son amour ardent pour sa mère,Lahuppe refuse le serment. Il est comprisdans un cartel et il est envoyé en France surun bâtiment & voiles, en compagnie d'ungrand nombre de ses compatriotes qui, com-me lui, n'avaient pas voulu subir la domina-tion de l'étranger. a

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MMSCt<NCBSB'PAafS

Le jeune créole arrive à Paris au lendemain

de la campagne d'Espagne.Il se

prépare pourl'Ecole de médecine. Mais surviennent les dé-sastres de d8i2 le bruit des armes retentitd'un bout à l'autre de laFrance et de l'Europe.La campagne d'Allemagne va commencer Ce

sera peut-être la revanche de Moscou et dela Bérésina 1

Toute la jeunesse française est saisie d'unesorte de vertige belliqueux. Il y a à Paris une

douzaine de créoles de l'île Bourbon ils rê"vent, eux aussi, de courir au péril, afin d'êtreà la g~ire.

Lahuppe est un des plus jeunes. Il n'a pasencore dix-sept ans. Cependant il a déjâ~lataille d'un homme et il en a tout le courage. Ilest admis, à sa grande joie, dans le régimentdes Hussards de la garde.

Il fait ainsi la campagne d'Allemagne

(1813) où il assiste à la déroute de Leipsick, <puis la campagne de France (1814~.La capitulation de Paris et l'abdication de

l'Empereur venaient d'être signées, et descourriers ennemis allaient de tous côtés enporter la nouvelle. Lahuppe, alors maréchaldes logis, était aux avancées, en sentinelleperdue, lorsqu'un groupe de cinq Cosaquesarrive sur lui, II se défend vaillamment et

mérite d'être porté à l'ordre du jour de sonrégiment.

Après l'abdication de Napoléon, le jeunesoldat, navré des désastres de la patrie etdésabusé de la gloire militaire, ne songe plusqu'à rentrer dans son pays. Il donne sa dé-mission et prend passage sur un navire qui

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BULLETtNDELASOCIÉTÉ

met six mois pour se rendre à l'île Bourbon.Ce n'est qu'à son arrivée à rile natale queLahuppe apprend le Retour de l'île d'Elbe, lesCent jours et la catastrophe finale. de Wa-terloo.

C'est vers 1821 que M. Lahuppe fit la con-naissance de M. Boyer, qui venait de monterune imprimerie à Saint-Denis. La créationétait un peu primitive il fallait un homme

pour la faire vivre et prospérer. M. Lahuppeacheta, l'imprimerie naissante et sut InL don-ner une telle impulsion que le Gouverne-ment, qui avait une imprimerie à lui, pensaqu'il était préférable de traiter pour ses four-nitures et pour l'impression de son journalavec un industriel, dont les aptitudes spécia-les et la haute probité s'étaient affirmées dupremier coup.

L'imprimeur Lahuppo, qui faisait déjà unerude concurrence à l'imprimerie en régie, futsollicité d'acheter le matériel du Gouverne-ment et de traiter avec ce dernier pour lesfournitures typographiques, nécessaires auxdivers services. Mais on lui demandait tropcher. C'est alors que l'Administration, pourl'indemniser du coût réellement trop élevé deson matériel, consentit à M. Lahuppe, non

pas, comme on l'a cru, le privilège, maisla propriété à perpétuité des Annonces lé-gales.

Notons-le en passant, pour être juste, laconcurrence a crié bien haut contre ce mono-pole. Elle oubliait que le privilège des annon-ces judiciaires était une véritable propriété,acquise a titre onéreux, dont le légitime pro-

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DES SCIENCESET ARTS

9

priétairene

pouvaitêtre

dépossédé quemo-

yennant juste et préalable indemnité.Cependant, lorsque, en 1866, il plut au

Gouverneur amiral Dupré de dépouiller M.Lahuppe de la propriété des annonces légales,ce dernier ne fit pas entendre la moindreplainte contre l'arrêté du 17 décembre, quil'atteignait si profondément dans ses intérêtsindustriels.

Devenu seul imprimeur de la Colonie, M.Lahuppe employa toute son intelligence ettoute son activité aux progrès de sa profes-sion, nous pouvons dire plutôt de Fart auquelil devait vouer son existence entière.

La Gazette officielle de l'île jBot~&oMsetransforma bientôt et devint l'Indicateur Co-lonial, journal de grand format pour l'épo-

que. L'~tdMa~eMr avait Tme Po~e o/~tc~H~dans laquelle étaient publiés les actes et lesavis de l'Administration puis, une .PcN'~enon officielle, dont l'Editeur-propriétaire pou-vait disposer à son gré, soit pour traiter lesquestions locales et de politique générale, soitpour donner les nouvelles, publier des extraitsde journaux et les annonces légales et duCommerce.

A-côté de l'Indicateur, dont les allures, enraison de ses attaches officielles, ne pouvaientpas être libres et franches, M. Lahuppe fondala Feuille Hebdomadaire, journal hebdoma--daire comme I~dïca~M~ organe indépen-dant, tribune ouverte aux généreuses aspira-tions qui se faisaient jour de toutes parts etgalvanisaient ce coin de terre-perdu, où res-

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BULLETINDELASOCI~TË

prit public ne demandait qu'à avoir un inter-

prête pour s'affirmer et se discipliner.Grâce à une exquise urbanité, à.une loyauté'parfaite, à un tempérament foncièrementsympathique, M. Lahuppe ne tarda pas à ral-lier autour de son œuvre les esprits les meil-leurs, les plus délicats, les mieux cultivés dela Colonie. Lescolonnes de son journal étaienttoutes grandes ouvertes aux débutants, quis'honoraient de faire leurs premières armes

sous des maîtres dans l'art d'écrire commeles Chabanneau, les de Montmerqué, les de LaServe (père et fils), les Adrien Bellier, les frè-res Houpiart, les Chaniot, les Jugand, Geor-ges Azéma, Ernest Lahuppe et tant d'autres

Y

qui, pour avoir été au second rang de cettebrillante pléiade, n'en ont pas moins inscritleurs noms d'une façon indélébile dans lesannales de la presse locale (*)

En 1856, FjMMc~eMf Colonial et la Feuille~&~OMO[c!en~efusionnèrent et prirent le titrede Moniteur de la Réunion, paraissant deuxfois par semaine.

Le Moniteur resta journal officiel jusqu'end862. Acette époque, l'opinion publique com-mençait à s'agiter dans notre île, comme enFrance, et de courageux publicistes, à la~tete

desquels se trouvaient MM. A. Laserve, notreregretté sénateur, et Adrien Bellier, revendi-

(*) Nouscroyonspouvoirrappeler ici les noms deM. ThomyLahuppeet de Henride Guignequi, euxaassî,ont, tour à tour, faithonneur à larédactionduJM~MttcMret à la pressecoloniale.

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,DESSCIENCESETARTS

quaient hautement les libertés coloniales,confisquées par l'Empire. Malgré ses liens of-ficiels et en dépit de ses intérêts profession-

nels, la direction du Moniteur n'hésita pas as'associer à cette campagne patriotique. A lasuite de la publication d'un article de M.Adrien Bellier, le Mo~eMf  se vit enleverl'officialité, et un arrêté du 1er mai 1862 créaun Journal o/~c:e~ exclusivement chargé dela publication des actes officiels et des an-nonces

administratives.Le rôle que M. Lahuppe a joué dans la

presselocale est considérable. Pendant un

demi-siècle, il a inspiré aux rédacteurs, quiécrivaient sous sa paternelle direction, lesidées de patriotisme, de justice, de liberté, eten même temps, de modération, qui étaientle fond de son caractère. Il avait fait de laPresse une véritable puissance, non par la

violence,mais

parla

sagesseet le calme de

la discussion. Aux époques les plus troublées `de notre histoire, on ne le vit jamais se dé-partir de ce sang-froid correct et de cette im-partialité incorruptible qui lui donnaient unesi légitime autorité tant auprès du peuplequ'auprès de nos gouvernants.

Que,de fois la haute Administration n'a-t-elle pas eu recours au journal que M. La-

huppe dirigeait pour faire de la propagandeen faveur des questions vitales encore malcomprises, pour dissiper les malentendus fu-nestes à la paix publique, pour. prêcher et ob-tenir la paix et la,concorde t

La critique n'a pas épargné M. Lahuppecela était naturel c'est le sort commun ~à

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SCtLE'HNDBtA SOCï~fë

tous les hommes en évidence. On a dit sou-vent qu'il était trop l'homme de l'Administra-tion. Ceux qui ont été ses collaborateurs etqui l'ont connu dans l'intimité peuvent témoi-

,gner que c'était l'esprit le plus indépendantet le plus libéral et que, s'il professait un res-pect profond pour le principe d'autorité, ilsavait à un haut point concilier la légalitéavec la défense des droits de la pensée et des

intérêts sacrés de sonpays.La collection des journaux créés et dirigés

par M. Lahuppe, dans le cours d'une si lon-gue carrière, est là pour attester ce que nousdisons. Si le Pays a traversé sans désordrela révolution de~1848, certes, on' peut dire,~ans se tromper, que c'est aux sages exhor-tations de l'jNdM'ft~iM*co~oMMt!et de la FeuilleNeMo~M~etM'e qu'il doit devoir ~évité les ca-

tastrophes quiont

ensanglantéles Antilles à

la même époque.M. Lahuppe n'a pas seulement exercé une

inâuence prépondérante sur le développe-ment de l'esprit public dans notre pays. C'està lui que l'on doit tous les progrès accomplisdepuis cinquante ans dans l'art typographi-que colonial. Il avait une véritable passionpour sa profession et ne reculait devant aucun

sacrifice pour se mettre au courant des in-ventions de la science. Il fut le premier àfondre les rouleaux qui remplacèrent si avan-tageusement les tampons le premier, il in-troduisit dans la Colonie les merveilleusespresses mécaniques de Marinoni, et substi-tua, comme moteur de ces lourds engins, lavapeur au-travail si pénible de l'homme.

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DBSSCOBtCBSBTABTa

Pendant plus d~un demi-siècle qu'il fut lefournisseur de

l'Administration,celle-ci n'eut

 jamais même un prétexte de reproche à luiadresser. Il la servait plus que loyalement,on peut dire qu'il la servait avec générosité,car il ne faisait pas de métier, il faisait avanttout de l'art. Il préférait perdre parfois maisdonner du bon et du beau, plutôt que de ra-baisser sa profession à celle des vulgairescommerçants.

Aussi chercherait-on vainement l'ombred'une contestation survenue entre lui et l'Ad-ministration. Ses travaux de chaque jour, ad-mis à toutes les expositions universelles etlocales, ont toujours obtenu les hautes ré-compenses des jurys.

Quand de nouvelles imprimeries se fon-dèrent à côté de la sienne, M. Lahuppe, loinde penser un seul instant à combattre ses ri-

vaux naissants, s'empressa de les aider de ses,conseils, de son expérience, et souvent dequelque chose de plus. Ses magasins, toujourslargement approvisionnés, étaient à la dispo-sition de tous ses confrères, qui ne lui ont

 jamais demandé en vain un service. On peutdire à ce sujet, sans crainte d'être démenti,qu'après avoir été le fondateur de l'imprime-rie dans la Colonie, M. Lahuppe en fut le

plus énergique soutien et la protecteur leplus désintéressé.La situation m&uente que M.Lahuppe avait

prise dans la Presse le désignait naturelle-ment pour les honneurs de la vie publique.Pendant presque toute ~a durée .de l'Empire;il fut choisi par le Gouvernement comme con-

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BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ

seUler municipal de la ville de Saint-Denis,

avec les attributions de premier adjoint aumaire. 1

Il a occupé également, comme représentantdu canton de Saint-Denis, élu par le Conseilmunicipal, un siègg au Conseil général pen-dant plusieurs législatures de cette assembléeet jusqu'à la fin de i870.

Lorsque la Révolution du 4 septembreéclata comme un

coup de foudre, à la suitedu désastre de Sédan, M. Lahuppe fut chargépar mtérim de la mairie de Saint-Denis, enremplacement de M. Gibert des Molières, dé-missionnaire. C'est à lui qu'échut: la tûche dedresser les listes électorales de Saint-Denistâche lourde entre toutes, car, depuis 1851,le suffrage universel ne fonctionnait plus dansla Colonie, et plusieurs générations avaient

grandi dans l'ombre de l'ostracisme, loin desurnes. II fallait constituer en quelques jourscette armée d'électeurs avides d'exercer leursdroits, et la constituer en dépit de toutes leserreurs et de toutes les défectuosités de l'étatcivil.

M. Lahuppe se mit à l'œuvre avec un rarecourage malgré ses soixante-treize ans, ettout en administrant les affaires d'une impor-

tante commune, il termina son travail assez àtemps pour les élections qui eurent lieu le 20novembre 1870, et qui envoyèrent à l'Assem-blée nationale MM. A. Laserve et F. de Mahy.

Le suffrage universel ratifia le choix quele Gouvernement impérial avait fait de M:Lahuppe comme représentant de la corn"

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DES SCIENCESET AMS

munauté. Les électeurs de Saint-Denis lui ac-

cordèrent, en 1871, une double élection auConseil municipal.Nommé de nouveau par le Gouverneur, M.

de Lormel, premier adjoint au maire de Saint-Denis, M. Lahuppe refusa cet honneur. Nonpas qu'il eût une plus haute ambition cequi eût été d'ailleurs très naturel et très légi-time de sa part, n'étaient sa modestie et sondésintéressement mais parce qu'il

croyaitdéjà avoir suffisamment payé sa dette à sonpays, et surtout parce qu'il pensait qu'il ar-rive une heure fatale, où les anciens doiventlaisser la place et ouvrir la carrière aux jeu-nes.

Depuis 1860 M. Lahuppe faisait partie de laLégion-d'Honneur, en récompense du coura-geux dévouement dont il fit preuve pendant

l'épidémiede choléra en

1859,et l'on

peutdire que rarement l'Etoile fut mieux placéeque sur la poitrine de ce vétéran des arméesdu premier Empire, qui fut ensuite le vétérande la Presse et des Assemblées coloniales.

Il était egalement décoré de la médaille deSainte-Hélène.

M. Lahuppe avait épousé en 1825, M~eCa-therine-Gulnare Garien, fille d'un des pre-

miers instituteurs venns dans la Colonie, etqui fut pendant cinquante ans la digne com-pagne de sa belle et utile existence. MmeLa-huppe, que la société locale a perdue tout ré-cemment (23 décembre 1882), a marqué, elleaussi, une empreinte profonde dans ce pays.L'Orphelinat des jeunes filles de Saint-Denis,dont elle fut une des fondatrices en 1833, avec

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BUU-ETINDE;&ASOe~T~DES9CNSCESETARTS

MmeMarie Cuvillier, femme'du Gouverneurde l'époque, et qu'elle- a dirigé jusqu'à sa.mort comme vice-présidente, perpétuera dansnotre ville et dans la Colonie le souvenir deson nom et de sa charité.

M.'Lahuppe est mort à Saint-Denis le 20août 1875, dans sa quatre-vingtième année.

L'existence toute d'honneur, de patriotis-

me,de vertus civiques et privées de ce patriar-che est d'un grand exemple, et nous l'offronsà la méditation des générations nouvelles.

<tt't

` Â~ ROUSSIN.

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10

SIMPLEMOT1SUR

Il MXD!T~N ET SURL'NSTMMTMNDESFEMES

Un voyageur, qui a passé plusieurs annéesen Perse, dit que, dans ce pays-Ft, les~fem-mea jouissent de la plus grande liberté, et queleurs actes, comme ceux des enfants, ne tirentpas à conséquence, le jPropAë&Bayant reconnu tqu'il leur manque quelque chose dans l'en-tendement.Dirons-nous de même ? Non pas.

Pourexprimer

notreopinion

sur les fem-mes, nous ne pouvons mieux faire, que detranscrire celte phrase de Bernardin de Saint-Pierre, cet admirable écrivain, dont le stylenous rappelle & la fois Jcan~Jacqrtes Rous-seau et Fénélon

« Parler aux hommes de ce sexe, qui par-tage avec eux le poids des besoin~ de la vie

et porte seul celui de leur enfance de ce se-

xe, qu'ils auraient appelé du nom d'indus-trieux, de consolateur, de nourricier, s'ils nelui avaient donné par excellence celui deBeau de ce sexe qui, naissant en nombreégal au leur~ par toute la terre, parait le sc'ilbien que la Nature ait réparti a ch tenu d'euxen particulier c'est s~adresser il tout lo genrehumain, r

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BULLETIN DE !,Â. SOClEtë

Loin d'être inférieures aux hommes, sous

le rapport des facultés de l'esprit, il faut re-connaître, au contraire, que. les femmes ontces facultés plus fines, plus aiguisées, et quesouvent, elles ont mérité de conduire leshommes.

Lorsqu'Ulysse sort des Sots, nous dit Ho-mère, il est revêtu d'habits par la fille du roiAlcinoùs, la belle Nausicao, qu'il trouve, avecses femmes, lavant son linge à la rivière.

KInfortuné, lui dit-elle, allez à la ville,et quand vous serez au Palais, au lieu dechercher mon père, qui, assis devant son fo-yer, boit comme un des Immortels, embrassezd'abord les genoux de la sage Areté, ma mère,qui peut tout sur son esprit. »

« Cet enfant, disait Thémistocle, en mon-trant son fils, est le plus puissant des Grecs.En

effet,les Athéniens commandent aux

Grecs,moi je commande aux Athéniens, et cet enfanttgâté commande à sa mère, qui me'fait fairetout ce qu'elle veut. »

Tacite nous dit que les Germains trou-vaient, dans leurs femmes, « je ne sais quoide divin. »

Lorsqu'Annibal traversa la Gaule, il fut sitouché de réquito des femmes, qu'il décida

que si quelques plaintes s'élevaient contre deshommes de son armée, il prononcerait lui-même sur ces plaintes mais que si les Car-thaginois se plaignaient des Gaulois, les fem-mes en seraient les juges.

Jeanne d'Arc, que les Anglais brûlèrent,pour les avoir battus, et à qui les Grecs eus-

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DES SCIENCES ET ART&

sent élevé des autels, comme à une divinité

tutélaire de la Patrie, sauva la France.Que de prophétesses se sont fait écouterdes hommes ?. ce qui prouve, au moins,qu'elles leur étaient supérieures.

La liste en serait longue, Marie, sœur deMoïse – Déborah, qui tenait ses audiencessous un palmier et qui conduisait Israël à lavictoire Anne, qui reconnut le fils de Dieudans l'enfant de Marie – La Pythonisse

d'Endor, à qui Saül s'adressa pour voir l'om-bre de Samuel La Pythie de Delphes,dont le 'trépied était établi sur un gouffre,d'où venait une vapeur prophédque, qui lafaisait entrer en délire Les Sybilles, dontFrançois Rabelais porte le nombre à 10,sans y comprendre celle de Panxoust, dontPanurge vit l'antre, et qui prophétisait autemps de Gargantua et cette pauvre

Cassandre, aux oracles de laquelle personne <né voulait croire etc.

II

Tous les peuples civilisés environnent lafemme d'égards et de respect.

Mais si'nous remontons dans le passé, et àmesure que nous nous approchons dés tempsbarbares~ nous voyons que, presque partout,le sexe fort a plus ou moins opprimé le sexefaible.

Pour ne parler que de la France, dans toutle moyen-âge, la femme était encore consi-

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BULLETtNBE ÏA SOCï~T~i

dérée comme un être inférieur, disons pluscomme un

étr<~impur. Maudite,en souvenir

d'Eve qu'elle représente, l'Eglise lui jetait,comme une cruelle ironie, le mot de Saint-Augustin « 0~<mt<MtDt~&oH.?– Ce que

 je n'ose ajouter ici, on peut le lire dans leshistoriens qui ont le mieux étudié le moyen-âge, cette triste période de l'histoire de l'hu-manité, que l'un deux appelle « L'âge dudésespoir.

C~était, il est vrai, la belle époque de lachevalerie, des tournois, des grands exploitsen l'honneur des dames. C'était l'époquedes gais troubadours, chantant l'Amour etles Belles C'était aussi Fépoque des coursd'Amour, nit Eiéonorc de Guyenne rendaitcette décision, devenue classique en. cetemps« Nul amour possible dans le mariage.

Oui.

Mais qui voudrait se faire une idée de cettesociété, en regardant au travers du prisse dela chevalerie et des hommages rendus auxgrandes dames; héritières des fiefs, seraitétrangement abusé.

Dans les châteaux mêmes, il se passaitd'autres scènes, ainsi que nous le voyons pardeux contes de ce temps-là, qui sont de la

vraie histoire.Qui ne connaît ce conte touchant de Gri-se/M~, J humble, la douce, la patiente, etaussi la fidèle ?.

Etcelui de La Barbe JMcMe,qui tue sesfemmes, pour se donner le plaisir du chan-gement ?.

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DES SCIENCES ET ARTS

Qui ne se souvient de c~'scontre :)vec les-

quels notre enfance a été Lfrcée ? (J~i ne s'estattendri aux malheurs de ces tristes victimes,que l'imagination du jeune âge met.t.aitvhan-tes sous nos yeux ?

r.

Aujourd'hui, il n'en est plus ainsi.La femme est l'égale de l'homme, égaie, ai-

mée, estiméeet

respectée.Si la loi- lui a, jusqu'ici, refusé les droitspolitiques et si clic ne peut exercet aucunemagistrature, elle peut, du. moins, occupertoutes les positions qui sont compatibles avecsa nature, avec ses'aptitudes, avec ses devoirsd'épouse et de mère.' Elle peut être nomméeinterprète, recevoir la mis&ion d'expert, êtreinstitutrice communale, être directrice des

salles d'Asile, être inspectrice des prisons,être directrice de bureaux de poste, de bu-reaux de'tabac, de bureaux de papier timbie,être professeur au corservatoire de musique,,directrice d'école de dessin pour les jeunesfilles, etc. e!Ie peut être journaliste, roman-cière, poète, peintre, sculpteur, etc. on loiouvre des Ecoles secondaires, où elle peut ap-prendre le latin, le grec, les sciences f'tla phi-

losophie et depuis plusieurs années, la fa-culté de Droit et la faculté de Médecine leur.ont même ouvert leurs portes.

Quelle est donc Fambition de M" Muber-tine Auclert, de vouloir encore voter, et com-me conséquence, envoyer des femmes à laChambre des députés et au Sénat ?.

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1 MnAETINDELASOCÏETE

m

La nature n'a-t-elle pas mis, entre l'organi-sation de l'homme et celle de la femme, desditïërencss sensibles, comme pour marquerla dinêrence de leurs destinées ?

Consultons les physiologistes.Entre autres choses, ils nous disent que la

femme dinère de l'homme par ?a taille, qui

est moins élevée par ses os, quiprésententmoins d'aspérités, parce qu'ils n'ont pas be-soin, comme ceux de l'homme, de servir depoints d'appui à des muscles robustes parson larynx, plus étroit et moins saillant, pourlui donner la séduction d'une voix moin~grave et plus douce que. celle de l'hommeen&n, par la prédominance du système cellu-laire et du système lymphatique, qui, en ar-

rondissant ses formes et en donnant plus d~edélicatesse à son organisation, lui assurentles avantages de la grâce et de la béante.Ils remarquent aussi que le mouvement estbeaucoup moins nécessaire à sa nature, qu~celle de l'homme.

La femme est donc faite pour plaire, pouraimer et être aimée, pour garder la maison,pour élever les enfants. Voilà sa vraie voca'-

tion.AJe ne veux pas perdre l'occasion de remar-quer, en passant, que, de ce que la femme estfaite pour praire, vient le défaut qu'on fui'â0eplus souvent reproché cette coquetterie (pailui fait désirer de conqM~rir tous les (Me&rs~.On a dit qu'elle ressemble un peo:.â ccs<gB~"

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bB8 SCIENCES ET ANM

riers, qui ne se soucient pas dé faire le bon-

heur de tous les peuples dont ils font la con-quête. Mais un philosophe trouve que c'estpour le mieux, puisqu'elle obéit à ses ins-tincts. t

Après cette digression, je reprends.Le royaume de la femme est la maison. Sa

place est auprès du foyer domestique. Sondevoir, comme sa mission, c'est de rendreheureux tous ceux qui vivent auprès d'elle

son mari, ses enfants, ses serviteurs. Sa cou-ronne, c'est ses enfants, qu'elle doit éleverdans les sentiments du bien et de l'honnête.Son sceptre, c'est sa quenouille.

Vous auriez tort~d'ambitionner autre chose,mesdames.

Les amazones de l'antiquité, qui se brû-laient le sein droit, pour mieux manier l'arcet lancer le javelot celles du roi de Daho-

mey et du roi de Siam et aussi des femmesqui seraient magistrats des femmes députésdes femmes sénateurs des femmes juriscon-smtes des femmes médecins et chirurgiens

Tout cela, n'est-ce pas un contre-sens ?.Je veux dire un manquement aux vues etaux lois de la nature.

Cela me rappelle certaine satire~que Juvé-nal fit sur les femmes de son temps

« Quelle pudeur, dit le satirique latin,quelle pudeur peut rester a une femme quise coitTc d'un casque, qui, reniant son sexe.aspire la vigueur du n~tre ? Quel honneurpour toi, si l'on vient à mettre en vente lesetfets de ta femme, d'entendre crier son bau-drier, ses gants d'assaut, ses.aigrettes, san

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BULLETIN DE LA SOCoh'K

cuissard pour la jambe gauche 1 C'est pour-

tant là ce sexe délicat, qui ne-peut supporterle poids d'une, robe légère ce sont ces êtresfaibles, qui étouffent sous une tunique de soie.Regarde-la porter, en frémissant, les coupsqu'on lui enseigne contemple-la, chargéed'un casque pesant, bien campée sur ses jar-rets, bras et jambes liés dans des bandesépaisses. Puis, Ws~Mc~erm<Mc~ la voil~ quipose un instant ses armes, pour prendsun. ?»)

Je demande ici au lecteur la permission dem'arrêter, car il est convenu que le latin seu!,dans les ïpots, .a le droit de er braver l'hon-nêteté. »

Je viens de dire que c'est un manquement.aux vues dg la nature. Il me semble que c'estplus encore i c'est une maladresse.

Omphale 61e, et Hercule est à ses pieds f arieuse veut plus Il faut que Icredout.t.htc.héros, qui avait promené sur toute la terre sa

 justice, détruisant partout les monstres ettyrans, Clé aussi et Hercule, vêtu d hab~sde femme, risiblement grotesque, prend unfuseau.

IV

Voscharmants défauts, mesdames, voscharmants défauts, si fort exagérés, il est vrni,par l'éducation que le monde vous donne, jene voudrais pas même que vous les perdis-siez. 1.

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t)ESSCIENCESETiM~

«

Ces défauts sont dans votre nature, et votre

première mère, Eve, les avait dans le Paradis,si nous en croyons le récit de la Bible.Adamne voulait pas toucher a la pomme,

.parce que Dieu Pavait défendu. Mais Eve étaitdévorée du" désir de la posséder. Ah seule-ment la voir de près disait-elle. Seulementen aspirer le parfum Seulement la toucherElle en rêvait la nuit. Vous savez comme le

serpentfit le reste, et comme Eve se laissa

persuader. Ensuite, Adam fut induit en ten-tation par sa femme; et tous deux mangèrentle fruit de l'Arbre de la Science du Bien et duMal. Ce qui les perdit, rien n'étant proprea entretenir l'innocence, comme l'ignorance.

Nous voyons que, dans le Paradis, la fem-me était déjà curieuse, crédu!e, friande, im-patiente de la contrainte, cPimaginatton en-vieuse et

légère.Il me semble que c'est tout comme main-'tenant.

V

Suis-je l'ennemi de l'instruction des fem-mes ? Suis-je de ceux qui pensent que la

femme en sait toujours assez, quand elle peuttenir l'aiguille et conduire le ménage ?Je voudrais, au contraire, que la jeune fille

fût très instruite, parce que Finstruction dé-veloppe Finteltigerce, et surtout parce qu'euedoit être mère.

La. mère n'est-elle pas le premier institu-teur de Fenfatit ? Se rend-on bien compte de

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BULLETtNDELASOCNH~

l'immense influence qu'elle a sur lui ? Dans

cet âge tendre, où les facultés ne font que des'éveiller, sans avoir pris encore aucune di-rection définitive, la mère peut façonner l'en-fant à son gré, comme une cire molle ellepeut lui donner son âme, son esprit, ses pas-sions nobles ou mesquines, enfin tout son êtremoral. Aussi, a-t-on dit avec raison « Pas un

 j/rCtMd!homme, qui M'Ot~eu pOMr mère une~t'oM~e/~)KMM.?'>

Napoléon demandait un jour à madameCnmpan g Que manque-t-il, en France,Madame, pour que l'instruction ne laisse rien:*tdésirer? Sire, it y manque des mènes.

Vous avez "raison, Madame, -répondit Na-poléon, d'abord étonné de la profondeur decette réponse. Hé bien que les Françaisvous aient l'obligation ~d'élever des mèrespour leurs enfants 1

Que la femme soit donc savante, c'est pour!c mieux. Mais l'écueil est ici – elle en seramoins aimable..

Ma pensée se reporte encore, malgré moi,vers cette satire de Juvénal ce qui prouveque, si l'humanité se renouvelle, elle conservetoujours le même fonds de vices, de travers etde ridicules.

a Quelle peste, dit le satirique latin, qu'unefemme qui est toujours à ruminer le Manuelde Po~woM~ et  jamais ne manque aux règlesde la syntaxe, qui me cite des vers que je neconnais pas des curiosités d~érudit enfin,qui reprend sévèrement, dans le langaged'une amie peu lettrée, une faute que, deshommes ne remarqueraient pas ? C'est bien le

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NS ~6l~nMS~ Ël*' ~HS*

moins, qu'un mari puisse se permettre un

solécisme ?' î 

Quand on sait tant de choses, comment ré-sister an désir de prouver qu'on les sait- ?' La

 jeune fille qui, pendant plusieurs années depénibles études, aura employé toutes les for-ces de son intelligence à s'instruire, se ré-signera-t-elle à n'avoir appris l:t litté t'attiregrecque, les sciences et la philosophie, quepour développer {'intelligence des enfants

qu'elle aura ? En attendant, comment ne pasen tirer un peu vanité ? La pente est' glis-sante ;.il faut bien du tact ou un bien bonnaturel, pour se retenir et l'on tombe, plusou moins, dans la comédie <f d~s femmessctMHt~esa ou dans celle « des PrécisesWtMcM~S:?»

Les Philamintes de nos jours ne chasse-raient peut-être plus Martine, pc ur des man-

quements a la grammaire, « qui ~~e~e ~Ms-(~(es CMt;e~o~s. Peut-être aussi écouteraient-elles, avec moins de formules admiratives, lesvers de Trissotin, – quoique cet autre traitde la comédie me semble éternel, comme leridicule qu'il sert à nous peindre« On se- sent, à ce~ vers, jusques au fond, de t'âme,Couléfje~né sM~qad~ qui fait que l'on së'pânië.~.tt.t.t.t.

<Onn~enpeutplus. Onpâme. Onse meurtdepla!sir.De mille douxfrissonsvous voussentezsaisir.

Mais elles seraient; tout de Tnômc,'dépour-vues de cette simplicité, de cette candeur, decette modestie qui sont la grâce et le char-me d'une lëm'm~ `

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BULLETIN DB LA SOCBÉTÉ

A ces savantes, comme aux jprecMMs~ qui

font leur étude de s'éloigner du naturel, onpourrait appliquer le mot de l'auteur des Ca-ractères Ce n'est pas sans peine, qu'elles-plaisent moins. »

Un autre inconvénient est à signaler je lefais timidement. 1

Les hommes supérieurs seuls peuvent dési-

rer de sellier à des femmes supérieures, parl'esprit ou par la science. Or, il me sembleque ceux-là sont rares. Quant aux autres, l'ef-fet ordinaire de la- supériorité d'une femme,qui pourrait discuter leurs actès, apprécierleur mérite, trouver incomplète leur instruc-tion, d'une femme qui ne leur- vouerait pasl'obéissance passive et l'admiration sans ré-serve, est de les mettre en fuite. Les hommes

sont égoïstes, quelque peu despotes et tou- jours un peu vaniteux. Ces défauts sont dansisur nature, tout comme vos jolis défauts sontdans la vôtre, mesdames la main du Créa-

teur, seule, en refaisant son ouvrage, pourraitchanger les hommes il faut donc les pren-dre je parle pour le philosophe, il fautdonc les prendre ainsi, ou ne point les pren-

pre dutout.

Il me faut m'arrêter dans ces observations,qui sont déjà plus longues que je ne vou-lais, et c'est par cette remarque que je veux

finir.Je ne sais si je ne me trompe 4

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DESSCIENCESETAM3

Mais il me semblequ'il y

a certains motsde la langue scientiSque, qu'on ne pourraitentendre prononcer par une bouche du jeunefille, sans songer à cette belle demoiselle descontesdes fées, de la bouche de qui, toutes les

fois qu'elle parlait, il tombait des grenouil es.Ecoutez cette phrase, qu'il me serait facile,

certainement, de composer de mots plusdurs

<f DesPaléontologistes ont

nom'né à tortGlossopctres, les prenant pour des languesfossiles d'Ophidiens, des dents d'Icthyolithes,qui ont dû appartenir au genre des Squales,do la classe de Chondroptérygiens, de la fa-mille des Sélaciens de Cuvier, ou des Plagios-tomes de Dumeril, et qu'on trouve dans lacouche crétacée, ou dans la couche Paluothé-ricnnc des terrains sédimentaires. »

Faites tépéter cette phrase, par-telle bouche,qu'il, faudra, pour que l'illusion existe.Etmaintenant, dites-moi Avez-vous vu

les grenouilles ?`

L. BOTTARD.

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ÉTUDE SUR BMEC&EL

LE LA.MARCKISME

Pendant le mois de mai d884 alorsque j'étais enfermé aux Lazarets de la Grande

Chaloupe pour faire purger aux troupes etaux marins de notre division navale de Ma-dagascar, ainsi qu'aux autres passagers de laCorrèze, leur quarantaine d'observation, jereçus la commission suivante Votre honoréprésident, qui a à coeur les destinées de notreSociété des Sciences et des Arts, m'écrivît un

petitbillet

pour medemander de consacrer

mes loisirs Lazaréens à quelque sujet de cri-tique ou d'observation. Je cherchais un objetquand le hasard me Pon'rit. Ayant demandéà l'un des passagers un livre qui pût m'inté-resser, il mit en mes mains un volume dont

 je recherchais depuis longtemps la posses-sion je veux parler de l'~Rs~e de la créa-tion Me~M~eMëou Doctrine de fe~M~oM par

ERNESTïLECKEL,,professeur de zoologie àl'Université d'Iéna. Nulle bonne fortune litté-raire ne pouvait mieux combler l'es vœuxd~un amoureux ardent des magninques tra-vaux de Darwin sur la mémorable révolutionqu'il a opérée dans les sciences naturelles.

Ce sont les impressions que m'a fait éprou-ver ce livre que je viens vous communiquer.

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BULLETINDE LA SOCIÉTÉ

En plus d'un endroit je prendrai la liberté de

le citer textuellement et vous admirerez avecmoi, j'en suis sur, et sans réserve, toute l'in-dépendance d'un grand esprit. Ernest Haec-kel naquit le 16 février 1834 à Potsdam. Dèsl'âge le plus tendre sa vocation était tournéevers les sciences natur elles, la botanique et lazoologie. Il obtient en 1857 le titre de Doc-teur en médecine et en chirurgie, essaya unan de pratiquer à Berlin. Mais il se dégoutade cette voie, entraîné par l'irrésistible pas-sion de l'histoire naturelle, de l'anatomiecomparée et par un libéralisme qui n'était pasfait pour le faire réussir. Enfin après plu-sieurs excursions et voyages consacré: al'étude et dos travaux qui l'ont mis à un rangd'élite parmi les savants~ de l'Europe, ErnestHaeckel est aujourd'hui professeur à l'Uni-versité d'Iéna. C'est du haut de cette chaire

qu'il a développé pour ses compatriotes lesidées nouvelles de Charles Darwin.Avant de commencer, puisque l'occasion se

présente, permettez-moi de vous faire sur l'é-tude de l'histoire natu'elle une déclarationpersonnelle de principe qui détruit par !a ba-se la méthode classique aujourd'hui et de touttemps suivie. Par un sentiment d'égoïsmc

pur,on débute

toujoursdans la c!ass'ncation

et dans l'étude des êtres par l'étufle physiquede t'homme. C'est un anachronisme. C'estprécisément par l'homme qu'on devrait finirl'importante étude <!el'histoire des êtres. Demême, les classifications en histoire naturelledevraient commencer du plus petit au plusgrand, du moindre -au suprême. Car c'est

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DESSCIENCESBTARTS

ainsi que l'organisation du monde a procédé,en s'élevant, non en se dégradant.Les méthodes classiques suivent donc lecontre-pied de ce qu'elles devraient faireta géologie devrait précéder la botanique etla botanique précéder la zoologie. Dans lagéologie on devrait procéder comme l'a faitla formation du globe dans la botanique ondevrait commencer par les plantes les plussimples, par leur organisation et s'élever aux

plus compliquées par leur structure ou leurvocation enfin, dans la zoologie, il serait plusrationnel de commencer par les animaux lesplus inférieurs, pour arriver par degrés auxmammifères les plus perfectionnés et enfin àl'homme. Qu'en pensez-vous, Messieurs ?

Si une telle méthode avait été adoptée parles naturalistes, nous aurions suivi sans nousen douter celle de l'évolution, c'est-à-direcelle dont Lamarck, Goethe et Darwin ont étéles pères et qu'on a droit d'appeler la méthodenaturelle et qu'on a caractérisée, ainsi que ledit H&eeke!,du nom de méthode Darwinienneou Darwinisme.

Un français, Jean Lamarck, est le véritablefondateur de cette méthode nouvelle. Si ja-mais un-monument est élevé à Charles Dar-

win,écrit le

professeur Baillon,il

faudra pla-cer~ au faite la statue de Lamarck. » Cettegloire immortelle a été posthume pour ce gé-nie méconnu. Elle lui a été disputée et raviepar l'écrasante personnalité de Georges Cuvier,son fier compatriote et son collègue. Pour lafaire sortir de l'oubli, il a fallu le secours, lesefforts, l'impartiale justice des savants étran-

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MUE'HN DE LA SOOt~T~

gers, anglais et allemands. C'est d'abordCharles Darwin qui après, plus de soixanteans, en fait la base de ses principes nouveaux.C'est Ernest Haeckel qui place, en quelquesorte, par des preuves nombreuses, son livresous le patronage de notre compatriote, en luiassociant la glorieuse assistance du plus uni-versel génie de son pays, de Gœthe, qui, à lapoésie transcendante, joignit le secret d'inter-

préterles

mystèresde la nature.

<!t Bien.quecette théorie de révolution ait étédéjà mise en avant et défendue au commen-cement de ce siècle par divers grands natu-ralistes, notamment par Lamarck et Gœthe,pourtant, c'est seulement il y à dix-sept ansque Darwin Fa exposée dans son éntier, enlui assignant une base~étiologique et voilàpourquoi on ne désigne plus cette théorie que

par le nom quelque peu immérité de théorieDarwinienne, »On est atterré d'étonnement lorsque dés

~815, en pleine apogée de la célébrité de Cu-vier, on voit Lamarck dans sa Philosophie~oo~og~Meémettre des propositions de la forcede celles-ci<: Les divisions systématiques, classes, or-

dres, familles, genreset

espèces, ainsi queleurs dénominations, sont purement une œu-vre artificielle de l'homme.

Les espèces ne sont point toutes contem-poraines elles sont descendues les unes desautres et ne possèdent qu'une Ëxité relativeet temporaire les variétés engendrent lesespèces.

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M9 SGJBNCES ET A.RTS

a La diversité des conditions de la vie in-

flue, en les modifiant, sur l'organisation, laforme générale, les organes de ranimai; onen peut dire autant de l'usage et du déiautd'usage des organes.

Tout d'abord, les animaux et les plantesles plus simples ont seuls été produits, puisles êtres doués d'une organisation plus com-plexe. `,

« L'évolution géologique du globe et son

peuplement organique ont eu lieu d'une ma-nière soutenue et n~ont pas été interrompuespar des révolutions violentes. 1-

a La vie n'est qu'un phénomène physique.Tous les phénomènes surtout sont dus à descauses mécaniques, soit physiques, soit chi-miques, ayant leur raison d'être dans la cons-titution de la matière organique.

e Les animaux et les plantes les plus ru-

dimentaires, placés aux plus bas degrés del'échelle organique, sont nés et naissentencore aujourd'hui par génération spon-tanée.

« Tous les corps vivants ou organiquesde la nature sont soumis aux mêmes lois queles corps privés de vie ou inorganiques

« Les idées et les autres manifestations del'esprit sont de simples phénomènes de mou-

vement qui se produisent dans le systèmenerveux central.a Eu réalité, la volonté n'est jamais

libre.« La raison n'est qu'un plus haut degré

de développement et de comparaison des ju-gements. y

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BOU.BTïHDEÏA SOCïAr~

Chacune. despropositions que je

viens deciter peut donner lieu à un ou à plusieursvolumes.

<t Les vues exprimées par Lamarck, ditHaeckel, il y a plus de soixante ans dans sespropositions, sont étonnamment hardieselles sont larges, grandioses et ont été for-mulées à une époque où l'on ne pouvait en-trevoir même la possibilité lointaine de les

fonder, comme nous le pouvons aujourd'hui,sur des faits d'une évidence écrasante aC'est ce que Charles Darwin, c'est ce-que

Ernest HaeckeL Lyel! ont cherché à établirpar des faits jnultiples. Mais Darwin a ajoutéà la théorie -de la descendance de Lamarckle principe < de la sélection naturelle dans lalutte pour l'existence D~découvert cinquanteans plus tard par l'éminent naturaliste anglais.

Cuvior régnait en maître. ~Opulent, honoré  justement pour ses grands travaux paleonto-logiques, recherché, adulé, il écrasait par sonautorité omnipotente, le pauvre Jean La-marck, pauvre jusqu'à l'indigence et que con-solait, dans un intérieur intime où le néces-saire même faisait défaut, l'assistance tou-chante d'une fille dévouée. Il y a pour lesélus de l'humanité un martyre physique et

moral qui semble être le sceau de leur gloireet de leur génie.A côté de Lamarck combattait pour la mê-

me cause, mais avec quelque divergence devues, le premier des Gconroy Saint-Hilairc,un des précurseurs do Darwin, lui aussi.

L'un et l'autre furent écrasés dans la séan-ce de l'Académie des sciences du 19, à la veille

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DM sctBNCEa m AMa

de la Révolution de juillet 1830, par l'autori-taire Cuvier.Un vieux génie en Allemagne suivait, avec

anxiété, cette lutte mémorable, malgré ses 81ans, c'était Volfrang Gœthe, l'auteur immor-tel de Faust. Il avait ses bonnes raisons pourcela lui aussi il était partie dans la question.Il voulait sauver ses aigles, ou du moins, toutce qui touche à la vérité intéressait son grand

esprit. Un contemporain, Soret, raconte jus-qu'à quel point ce grand débat entre Lamarck,Geoffroy Saint-Hilaire et Cuvier intéressait leplus quoctogénaire poète

On y lit« Dimanche 2 août 1830. –Les journaux

nous ont annoncé aujourd'hui que la révolu-tion de juillet était commencée et ont toutmis en émoi. Dans l'après-midi

je

suis alléchez Gœthe. – < Eh bien B s'écria-t-il enm'apercevant, « que pensez-vous de ce'grandévénement ? Le volcan est en éruption toutest en flammes ce n'est plus ici un débat àhuis-clos. »

<tUn grave événement B, répliquai-je.< Mais, d'après ce que l'on sait des choses etavec un tel ministère, il faut s'attendre à ce

que cela Ënisse par l'expulsion de la familleroyale, »– « Nous ne paraissons pas nous enten-

dre, mon excellent ami, a répliqua Gœthe. Jene vous parle pas de ces gens. C'est d'unebien autre affaire qu'il s'agit pour moi. J'en-tends parler de l'éclat qui vient de se faire àl'Académie, du débat si important pour la

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BpU.E'HN DB LA SOCt~É

science,

survenu entre Cuvieret GeoffroySaint-Hilaire.

Cette sortie de Gcethe était si inattenduepour moi que je ne sus rien dire et, pendantquelques moments, mon trouble fut visible.

« L'affaire est de la plus haute impor-tance, » continua Goethe, < et vous ne pouvezpas vous figurer ce que j'ai éprouve, en lisantle compte-rendu de la séance du i9 juillet.Nous

avons maintenanten

GeoffroySa nt-Hi-

laire, un puissant allié, qui ne nous abandon-nera pas. Je vois quel grand mtérét le mondescientifique français porte à cette affaire caren dépit de la terrible animation politique,la salle des séances de l'Académie était comblele 19 juillet. Mais ce qu'il y a de plus impor-tant, c'est que la méthode synthétique ennis-toire naturelle que Geoffroy vient d'inaugu-

reren

France ne peut plus disparaitre. Parle fait d'une libre discussion à 1 Académie eten présence d'un nombreux auditoire l'af-faire est lancée dans le public impossible àprésent de s'en débarasser par une exclusionsecrète on ne pourra plus l'expédier eti'étouner à huis-clos. »

Quel aveu, messieurs, dans la bouche duplus grand des Allemands C'est donc réelle-

ment en France que le Darwinisme a prisnaissance c'est là qu'il a eu son berceau.Hoeckel l'appelle le Lamarkisme

L'autorité magistrale de Cuvior en a euraison un moment. Mais ce colossal édificedevait s'effondrer. Les nombreux progrèsaccomplis dans toutes les branches de lagéol<)gMet de la botanique devaient faire voir

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DESSCïBKTCBSETARTa

deplus

en-plus l'absolu défaut de fondementde l'hypothèse de Cuvier et la venté de lathéorie d'évolution naturelle formulée parLamarck la première, comme l'observeHo3ckel, devait continuer seule et longtempsencore à trouver crédit chez presque tous lesbiologistes, « Cet état de choses résultait,avant tout, dtt-41, de la grande autorité deCuvier, et cela montre d'une manière frap-

pantecombien est nuisible au

développementintellectuel de l'humanité, la croyance à uneautorité quelconque (Hoeckel). » Gœthe a ditexcellemment, de l'autorité « que toujours elleéternise ce qui devrait disparaître, mais abon-donne et laisse périr ce qu'il faudrait appu-yer, et que c'est particulièrement à elle qu~ilfaut attribuer l'état stationnaire de l'huma-nité. ))

Je recueille attentivement ces dernières pa-roles si libérales de la bouche d'un allemand.Je termine par cette citation cette premièreétude sur l'ouvrage d'Hœckel. J'espère pou-voir la continuer une autre fois et vous don-

ner une idée étendue et plus détaillée du sys-tème qui semble prévaloir en histoire natu-relle et qui *net entièrement d'accord la géo-logie, la paLéontologie, la zoologie et la botani-

que, c'est-à-dire toute l'histoire naturelle denotre globe depuis sa formation jusqu'à nos jours.

AUGUSTE VINSON.1~ août 1884.

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maimiant.~marciM'a.pparente~ansiecielJ&la.cornuedePonse'n.l883''l~M.

DkprèsDiesobservionsvmiieescM~e.moispar lesë~emeri~s d.e

SMoî etBossert.

~-D~;le30~s438~,

HÉMISPHÈRE CELESTE

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Planer.

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13

LACOMÈTEDEPONS4812-1883I

Messieurs,

Dans notre séance du 17 mars dernier,  j'eusl'honneur de vous présenter deux cartes ré-sumant mes observations personnelles sur lacomète de Pons ou de 1812, qu'il m'avait étédonné, grâce à une série de temps favora-bles, de pouvoir suivre sans interruption, du8 janvier 1884 jusqu'à l'heure même à la-quelle je me rendis en séance.

L'une de ces cartes, etje

vous les remetsici sous les yeux, représente la route que lacomète a suivie à nos yeux à travers les cons-'tellations, c'est-à-dire sa marche apparente(Planche I).

L'autre estun diagramme donnant, à l'é-chelle 'de 1 millimètre pour 1 million delieues, le tracé de l'ellipse qu'elle a décrite.à travers l'orbite terrestre (PI, II) et ses dis-,

positions astronomiques.Je complète ces cartes en vous mettantsous les yeux le tracé complet de son orbite,dont le grand axe mesure 85 millimètres,à l'échelle de 5 m/m pour un rayon de l'or-bite terrestre.

Les deux premières planches ont été adres-sées, par la malle du 15,jn1u$^ à^M. CamilleFlammarion, et, par celted'avril, je lui fis par-

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BULLETINDELASOCIÉTÉ

venir mes dernières observations, allant jus-qu'au 29 mars, date après laquelle il me futimpossible de retrouver la comète.

Je fus bientôt récompensé de la peine que•  j'avais prise pour surveiller la marche de cet

astre, car à partir du 4 février, sa déclinaisonaustrale atteignant 46 degrés ne permit plusaucune observation en Europe, et il se trouveque c'est moi qui ai l'honneur d'avoir fourni

la dernière observation faite dans l'hémis-phère austral.

Permettez-moi de transcrire ici le chapitreconsacré par le.journall'Astronomie, du 1«*

 juillet derniers aux divers observateurs surlesquels sa rédaction s'est appuyée pour dres-ser la marche de la comète sur la sphèrecéleste:

clLe mouvementapparent

de lacomète« pendant toute la durée de l'apparition a

« été dressée, d'après l'ensemble des obser-« vations de position qui sont parvenues à« notre connaissance. On sait que la comète« a été retrouvée le ter septembre 1883 à

« Phelps (Etats-Unis) par M. Brooks; la pre-« mière observation précise est celle de M.« Wendele à Cambridge,, le 3 septembre.

g,Le

lendemain 4,elle était

observéeà

Paris« par M.1Bigourdan, et, depuis cette époque« jusqu'au 4 février, elle a été suivie et ses«.coordonnées déterminées par MM. Péri-« jgaud Henry, Bigourdan à l'observatoire de« -Paris, Perrotin à Nice, Goggia et Borelly à« Marseille, Trépied et Rambaud à Alger,«, Rayet à Bordeauxj Mïsten à Bruxelles, Ter-« by à Louvain.

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DES SCIENCES ET ARTS

« A partir du 4 février, nous n'avons plus »« d'observations de position en Europe. Nous« avons utilisé une carte du mouvement de« la comète dressée jour par jour, d'après ses« observations personnelles, par M. E. Du-« buisson, qui, à l'Ile de la Réunion, a pu sui-« vre la comète, à l'aide d'une lunette de« 108 m/m jusqu'à sa complète disparition. Sa« dernière observation est du 29 mars. Pour

« cette dernière partie de l'apparition, où la« comète, descendue dans l'hémisphère aus-« tral, était devenue invisible dan» nos cli-« mats, nous avons encore les observations« de M. Atkinson, faites à Nelson (Nouvelle-« Zélande). »

A la suite, le même  journal publie un ta-bleau résumé, jour par jour, de toutes les ob-servations avec les dates, l'aspect du noyauet la longueur apparente de la queue, lesnoms des observateurs. r

Ce tableau ne relate pas moins de 25 demes observations, à partir du 8 janvier, dateà laquelle je, découvris la comète à 1° à l'Estde Zêta Pégase, jusqu'au 29 mars, jour oùelle disparut, dans la constellation de l'horlo-ge à 5° au S.-E. de l'étoile Phi Eridau, c'est-à-dire vers le 57e

degréde déclinaison, aus-

trale.

II..yt 4

La comète de 1812 fut découverte par Pons,concierge de l'observatoire de Marseille c'é-tait la 9meque trouvait ce concierge asfero-

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BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ

nome et ce ne fut pas la dernière, puisque ce

nombre s'est élevée à 25 en 1827. -Il fut àbeaucoup près le plus fécond chercheur decomètes et, cependant, il ne possédait aucuneconnaissance des mathématiques.

Les premiers éléments de l'orbite de la co-mète de 1812 furent calculés par Encke, qui

lui avait trouvé une période do 70 ans 68il est utile d'observer

qu'àcette

époqueles

limites du système solaire bien déterminées jusqu'à Saturne, étaient encore incertaines

en ce qui concernait Uranus, dont le rayonmoyen fut évalué exactement depuis, à 19,celui de l'orbite terrestre étant 1, c'est-à-direplus de 70 millions de lieues.

Plus tard, en 1846, quand ollustre Le Ver-rier eut découvert

Neptune parla seule

puis-sance des calculs, les limites de nôtre systè-me se trouvèrent transportées à la distance30, ou 1100 millions de lieues. Les astrono-mes n'eurent pas de doute alors, que si lacomète de Pons 1812 revenait à son périhéliedans le temps déterminé par Encke, cet astrea été conquis à notre système par la nouvelleplanète. Delà l'intérêt majeur qui s'attachait

à la constatation de ce retour et l'acharne-,ment qu'on a mis à la vérification des calculsde Encke.

MM. Schuloff et Bossert publièrent deséphémérides qui portaient à 73 ans 68 la pé-riode de la comète, déduisirent de ce chilfre544 jours '/s pour tenir compte des perturba-,

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DESSCIENCESET \UTS

tions produites par l'attraction des planètes,et annoncèrent le nouveau passage au péri-hélie pour le 3 septembre 1884.

La comète parut le ler septembre 1883 etpassa au périhélie le 25 janvier 1884, devan-çant de 7 mois le jour indiqué. Sept mois,sur plus de 72 ans, c'est peu, en vérité, eton ne saurait trop admirer la précision desemblables calculs, quand on songe qu'ilsn'avaient pour base que la portion compara-tivement si petite de cet immense parcours,portion que vous pouvez voir sur la plan-che II.

Il n'y a donc plus de doute c'est bien àNeptune que revient l'honneur d'avoir frappéau passage la comète de Pons, pour la laisserà tout jamais sous la dépendance du Soleilvous

voyez,en

effet,à la

planche III, queson

aphélie est située à une distance de l'orbite de ·Neptune à peine égale à 3 rayons de celle dela Terre, c'est-à-dire 110 millions de lieues,et nous sommes obligés de regarder ce chif-fre comme iusigriifiaiit, relativement.

C'est la seconde comète à si longue périodedont le retour s'opère exactement, affirmantainsi les immenses progrès de l'astronomie

moderne elle ne sera pas la dernière, car ily en a encore 7 dont les orbites calculées, va-rient de 28 à 35, et parmi elles, celle de 1815,qui viendra nous revoir en 1889. La premièreest celle de Halley, revue en 1835, après 76ans d'absence.

Voilà donc les astronomes fixés sur le rôlede Neptune dans la marche d'un certain

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BULLETINDELASOCIÉTÉ

nombre de comètes,et ils ont le

droit aujour-d'hui d'attendre à coup sûr celles dont les or-bites des comètes de 1862 (dist. 49) et cellede 1532, revenue en 1661 (dist. 48) ? Cettedernière, avec sa période de 128 ans, a dûrepasser en juillet 1789, mais on avait alorsd'autres préoccupations, et l'astre passa ina-perçu au milieu de la tourmente politiqueceux qui vivront encore vers 1917 pourront

-constater son 4e passage au périhélie.Par qui donc ont-elles été capturées, celles-

là, dont l'aphélie dépaeso 1775 millions deIjeues ? Le doute^n'est plus admis, sur cettequestion Il existe, au moins, une planèteau delà de Neptune .son orbite correspondau chiffre que nous "avons donné,, c'est-à-direà la distance 48, et elle décrit son cercle au-

tour du Soleil en 330 ans environ Cette pla-nète extrà Neptuntmne, les astronomes lacherchent et la trouveront, soyez-en certains,avant longtemps. Du reste la distance accu-sée par les comètes répond parfaitement auxexigences de la loi de gravitation planétaire,qui place bien à cette région, toute planèteextérieure à Neptune.

Nous pouvons donc attendre en toute con-fiance la confirmation du fait et former le vœuqu'un observatoire nous permette afors,à nousaussi à la Réunion, de voir de nos propresyeux la lointaine planète, dont l'aspect nedevra pas dépasser celui des étoiles de 11 àIc2egrandeur* e'êatriKlire accessibles seule-Tfflfëkaux. laeiUew^iastrameiits.

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t)ËS SCIENCESBI ARTS

niMessieurs,

Quelqu'honorable que soit pour moi la con-sécration donnée par M.Camille Flammarionau modeste travail que je vous avais soumissans prétention, croyez bien que ce n'est paspour en tirer vanité que je l'ai mis ici en re-

lief  mon but est toujours celui que j'ai tenuà déclarer dès la première fois que vous avezbien voulu écouter mes communications surl'astronomie ce but, est d'arriver à démon-trer que l'Etat fait tort à la science en ne do-tant pas Ilite de la Réunion d'un observatoire..

lies Anglais en ont placé, et de premier or-dre, au Cap de Bonne-Espérance, à Maurice,en Australie, en Nouvelle-Zélande quelle n'a

pas dû être l'abondance des observations'fournies à Greenwich au sujet de la Comète `de 1812 1

En France, on a été heureux de se raccro-cher aux notes d'un pauvre amateur qui n'a-vait à sa disposition aucun instrument de pré-cision, aucun observatoire tant soit peu com-mode. Toutes mes mesures de position ontété obtenues uniquement- et péniblement^ à

l'aidc d'une jumelle dont le champ m'est bienexactement connu, et pour toute carte céleste, je n'avais que la feuille qui se trouve à la findu traité de Garcet.

Ne trouvez-vcus pas urgent que toutes lesvoix influentes s'élèvent pour faire compren-dre l'importance de la création, à la Réunionild'un observatoire qui rendra d'immenses ser*

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(BULLETINDELASOCIÉTÉ

vices et rehaussera quelque peu aux yeux dumonde et surtout de nos orgueilleux voisins,l'infériorité dans laquelle la France semblese complaire dans ses colonies.

Parmi ces voix, la plus autorisée, Messieurs,est celle de la Société des Sciences et Arts etvous-penserez avec moi qu'il lui appartient deprendre l'initiative d'une démarche très ac-centuée auprès du ministère compétent. Elle

pourrait être transmise par Monsieur le Gou-verneur Guinier, dont nous connaissons la pas-sion pour le progrès et qui appuierait chaleu-reusement, sans doute, votre demande. D'au-tre part, nos représentants se chargeraientavec plaisir de la remise d'une pétition quiaurait encore, je puis l'affirmer, le puissantpatronage de M. Faye, c'est-à-dire -l'Académiedes Sciences et le Bureau des

Longitudes,de

M.Flammarion et de tous ceux, en un mot,qui sont à même d'apprécier les avantages decette création.

L'astronomie est la plus grandiose et la plusattrapante des Sciences. Partout -en Europeet surtout en Amérique, s'élèvent des obser-vatoires munis d'instruments perfectionnés

non-seulement les Gouvernements multiplient

cescentres

d'études, mais l'initiative privéecherche à dépasser les Gouvernements et desobservatoires particuliers s'inaugurent cha-que jour.s A Paris, le Trocadéro a été transforma enobservatoire populaire, et M. Léon Joubertqui en avait, pendant 15 ans, étudié l'écono-mie, l'a appelé l'Institut du Progrès et de lavulgarisation scientifique. Chacun peut aller

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DES SCIENCES ET ARTS-

14

là donner libre cours au besoin qui pousseles hommes à se rendre compte de ces mou-vements célestes qui charment et excitentl'esprit à l'étude des admirables lois de la na-ture. l

Ici, on n'a pas même songé à enrichir lecabinet de physique du Lycée d'une bonnelunette, au moyen de laquelle la cosmogra-phie, réputée science aride, deviendrait, pour

nos jeunes gens, la plus attrayante de toutes,dès qu'il leur serait donné de constater lesmouvements des planètes,.de leurs satellites,d'admirer les anneaux de Saturne, d'étudierla géographie de la lune et de fouiller les pro-fondeurs de l'espace jusqu'aux-étoiles de 12«grandeur, c'est-à-dire contempler tout ce quela faible portée de la vue humaine ne permetpas même de soupçonner.

Je recommande cette question à la sollici-tude de la Société, avec la conviction qu'elle aune très haute portée pour elle et que le suc-cès doit couronner les efforts qu'elle fera pourla faire, triompher.

Saint-Denis, 4 décembre 1834.

Ed. DuBuisson.

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1TABLEAURÉSUMÉDESOBSERVATIONSDELACOMÈTEDEPONS

 j A PARTIR DE: SON APPARITION AU-DESSUS DE L'HORIZON A LA RÉUNION

( Extrait du tableau général publié par la Revue d'Astronomie juillet 1884.)

IiONGBCR

DATES ÉCLAT REMARQUES de la OBSERVATIONSqueue

4°°janvier 5,0 Queaetoujoursfaiblemaisplus<"  janvier 5,0Queaelonguetoujoursfaiblemaisplus 3 Guillaume,Gonessiat,Terby.

2 – 4,8 La queue fuit en pointe. 3 ° d° d°3 '– 4,5 La queue devientplusbrillan-

te, deux enveloppessucces-sivesentourentle noyau. 3*° Niesten, Guillaume.

4 – • 4,4 Moinsbrillante que la veille,queue presque Invisible àcause de la Lune P. û. 3 • Guillaume,Boreliy.

6 4,0 Deux.noyauxinégaux, queue _i. yjënningâBristol,Gaillanme.invisible 3 DenningàBristol,Guillaume,

8 -*• 3,3 Eclat égale, Zêta; Pégase.3*·

DuBuimn A h Réunion,Borelly.

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ota-a..

I LONGUEURDATES ECLAT REMARQUES r de la OBSERVATIONS

queue

9 jamier 3,3 Apparence de queue à l'œil 3. .“

J

nu, gaînelumineuse. 3 • DuBuisson,Guillaume.,10 – 3,4 L$ qneue est plus longue au n “

sud qu'au nord. 3», 30 Guillaume,Borelly.'Gonessiat,Rayet.

«i – i 3,0 Noyaubrillant, queueen poin-1 te, éventail de lumière enavant 3 ° 30 DwJ?wJss<m,Guillaume,Terry.

12 – 3,0 Queue îmisible (P. L.) é\en- vtail de lumière en avanl 4 • Tremblay,Terby,Rayet.

» Courtois à Muges, Cruls àRioJaneiro.

43 – 2,5 Egale GammaPégase.vQb.an-gements remarquables ob- Tservesdans le noyau 4° hafflpsona Washington,La-

meyà Grignon,| Tremblay,UuBuisson.U – 2,5

Queuetrès faible et ondulée.

4*DuBuisson,Ginieis,Borelly.

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i

'1 LONGUEURDATES ÉCLAT REMARQUES de la OBSERVATIONS

queue

15  janvier 2,5 Noyau enveloppé d'une auréo-lé épaisse. ,i. 430 Faraut au Cambodge.

46 2,3 Queue mieux vrsble, plus d'é-ciat que ces jours derniers. 5*° Tremblay, Ginieis,

DuBuisson.47 2,3 La Comète se projette sur la

lumière Zodiac: 5"30 Tremblay.18–2,2 S'30 Tremblay, Borelly.

,19 2,0 Eclat égale Alpha, Pégase. 6°° Flammarion, Tremblay,Perrotin.

20 2,1 Commence à diminuer. 6*° Borelly.211 2,1 Queue brillante S ° Vimont, DuBuisson, Terby,

Borelly.22-24 – 2,1 Observations de position. 5 • Périgaud, Bigourdan.25 2,1 Queue bien visible, parait plus`

longue. r 5"° DuBuisson, Guillaume

f Borelly.

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e.

LONGUEURDATES ÉCLAT KEMABQUES • •< de la OBSERVATIONSv queue

26 janvier 2,5 La queue s'infléchit au NordPassage au périhélie" S» DuBuisson.

27 – 2,7 Queue large dans le voisinagedu noyau, s'effile ensuite.. x S*° DuBuisson. Bigourdan.

29 3,1 La CMn&të6,afflîbiît rapide'29

– 3,1La ment./ GomkesWMtrapide- 4°30 DuBuisson, Bigourdan.

,A" février 3,5 Observations de position. 4"° r DuBuisson, Boielly.2 – 3,6 Fainte, clair de lune. 4" 30 Bigourdan.3 –

3,7 Faible, clair de lune, encore  î visible àl'œil nu j .?. 4 • 30 DuBuisson.

4 – 3,8 Queues'infléchit \ers le Sud.dernière observatipn de po-sition 3 • Atkinson (N* Zélande), Du

Buisson,6 – 4,0 Visible à l'œil nu avec la

.$u~sson.

queue malgré lune Z' DuBuisson, Trépied à Alger.9 – 4,2 Visible comme Alpnade l'a le-lier du sculpteur, queuede-vinée plutôt que ue. 2 30 Atkinson..

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LONGUEURDATES ÉCLAT REMARQUES de la OBSERVATIONS

;cc queue

40février. 4,5 Queuemieux visible qu'hier. 2*° Atkinson.il – 5,0 VisibleàTœilnu, malgréP.L. 2° Atkinson, DtiBumon.42–5,0 – – 2.° Atkinson.43 –» 5,4 Unepetite étoile visibleà tra-

vers la queue 2°° DuBuisson,.16 – 5,33 Beau noyau. 1° 3 DuBuisson.18 – 5,55 • 0° 40 DuBuisson.24 – 5,8 Queue inusible à la jumelle,

visible dansune lunette dec

408»/ 0*15b DuBuisson.

26 5,9 Plus dequeue trace Tremblayà Gignac.27 – 6,0 Nébuleuse sans noyau. disparue Tremblay.28 – 6,1 l – Tremblay.

4" mars. 6,2 Encore \isible à l'œil nu ÀtMnson,Tremblay.2~ 6,3 Moinsbrillante queta veille. Tremblay,3, 6,5

Difficilementvisible à l'œil

Atkinson.nu Atkinson.

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] i^. LONGUEURDATES ÉCtATi k REMARQUES

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de la OBSERVATIONSqueuJ

5 mars.. 6,8 Invisible, à l'œil nu. Nébu-leuse sans noyau.. T DuBuisson. j'4 7,0 Invisible à !fœîl nu, visible

dans, jumelle Atkinsont5 7,0 Oiûa pu la revoir à Toeil nu,

après l'avoir déjà vu dans la jumelle.; Atkinson.

 j6 .– 7,0 Beau noyau. DuBuisson.i7 70 Même éclat qu'hier. Atkinsot:, DuBmsson.18-23^- 7,3 Atkinson. ·24 – 7,4 Visible la jumelle. Atkinson2S-27 7,4 Visible à la  jumelle.; Alkinson. >

28 7,5 Visible à la jamelfeï Kébulo-

29- – 7,5 site sans condensation.». tDuPvisson.

l'munpE Gêrint.

Astronome..

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13

I /INSTRUCTION PVBL.1QITK

-AA

L'ILE DE LA RÉUNION

APERÇUHISTORIQUE

1

Le premier acte qui ait réglementé l'ins-truction publique à l'île de la Réunion, au-

trefois connue sous le nom de Bourbon re-monte,,au 27 mars 4690.Cette île n'était alors habitée que par quel-

ques centaines1 de personnes, tant libres qu'es-claves, groupées autour de cinquante chefsde fami le environ. Déjà cependant elle ap-

.partenait, depuis près d'un demi-siècle, à laFrance, qui l'avait d'abord livrée, pour, dixannées, à la

Compagniede l'Orient,

puis

com-

I Cenom,qui luiavait été donné,en 1649,par Fla-courti l'un de»directeursdela Compagniede l'Orient,lui a été retiré par un décretde I79J, promulguéilanslacoloniel'annéesuivante.Elle l'a repris en 1810,pourle perdre Jèiiniliveniem'en 4848,après s'être appeléede sonnomactuel,.île de la Kèunio.i,de 1194 à 1806,puis île Bonapartede 1806à 18(0 “

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BULLETINDELASOCliïé

prise dans la concession perpétuelle faite, parl'édit d'août 1664, à la Compagnie des Indesorientales, de « toutes les terres, places et is-les qu'elle pourroit conquérir ou occuper. »Mais les débuts de la colonisation y avaientété pénibles, non-seulem »nt à cause de lalenteur et de la difficulté avec lesquelles sefaisaient les voyages au long cours il y a deuxcents ans, mais encore parce que la Compa-gnie avait laissé dans un abandon presquecomplet les habitants du pays. Aussi, ces der-niers s'étaient-ils décidés à écrire directementau roi de France, pour lui faire connaîtreleurs besoins spirituels et temporels et luidemander un gouverneur. Leur requête futaccueillie, A la fin de l'année 1689, ils virentarriver parmi eux Habert de Vauboulon,-por-teur de la

réponsede Louis XIV et aceoni-

pagné d'un capucin du nom de Hyacinthe.Investi de pouvoirs à peu près illimités,

Vauboulon aurait pu être utile à l'œuvre na's-sante dont la direction venait de lui être con-fiée, s'il avait cherché à se faire bienvenir descolons placés sous son autorité, au lieu de lespousser à la révolte par ses exactions et parsa tyrannie.

De toutes les mesures qu'il prit, et dontquelques-unes rendraient jaloux le despote le

 î  4 L'originalde celle lettre de Louis XIV n'existéplus mais onpeut enlirela copie,de lamaindu père

Hyacinthe,sur.l'undesregistresde l'étatenil deSaint-Paul (île de la Réunion)»-

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DES SCIENCES ET ARTS

plus accompli de l'Orient', une seule doitnous occuper, c'est l'ordonnance du 27 mars1698, relative à l'instruction de la jeunesse.Elle mérite d'être citée textuellement

a Ayant fait réflexion sur le peu de cas que« les habitants ont fait de l'affiche que nouss avons fait publier le 23 décembre dernier« et que, suivant la volonté du Roi et notre

« avis, ils n'ont point donné d'apprentis aux« ouvriers qu'il a plu à Sa Majesté envoyer« dans cette île,et ayant reconnu que les pè-« res, préférant leur intérêt particulier à î'é-« ducation de leurs enfants, aimaient mieux« les garder près d'eux pour les envoyer à la« chasse et à la pêche que de leur faire ap-« prendre un métier, à lire, à écrire, et, ce<cqui est le' plus cruel, non pas même les

«cprincipaux mystères de notre religion -ni« l'usage des sacrements nécessaires indis-« pensablement au salut nous, désirant en« ce, comme en toute autre chose, obéir aux« ordres que nous avons reçus du Roi, et te-« nirj la main que les habitants s'acquittent« envers leurs enfants du devoir que la na-

1 Vauboulon avait été jusqu'à décider, par deux or-donnances du 1S décembre 1689, que la peine de mortserait encourue 1° par tout habitant qui s'absente-rait de sa demeure pendant plus de quinze jours sans, lapermission écrite du gouverneur 2° par celui qui, té-moin d'un fait de cette nature, ne ramènerait pas le dé-serteur » moit ou vif. Quant à l'escla\e, il lui suffisaitd'une absence ;le plus de ingt quatre heures, sans lapermission écrite de son maître, pour être marqué,dela fleur de lysla première fois, et pendu, haut et court,la seconde.

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BULLETIN DB LA SOCIÉTÉ

« ture et l'honneur exigent d'eux, leur en-«  joignons, dans six semaines pour tout dé-« lai, de prendre des mesures pour l'exécu-a tion du contenu en ladite affiche, de s'adres-« ser au père Hyacinthe pour faire instruire« leurs enfants de nos principaux mystères et« de l'usage des sacrements et de prendre le« temps et la méthode qu'il voudra donner

« pour cet effet, à peine de trente livres d'a-«mende contre les contrevenants; et afin que« la jeunesse se porte d'elle-même à appren-« dre ce qui lui est nécessaire au salut et à« travailler, nous déclarons, à ladite jeunesse« de l'un et de l'autre sexe, que nous empê-« cherons de tout notre pouvoir qu'on ne leur« administre le sacrement de mariage qu'au-« paravant ils ne répondent, pendant-huit

« jours, sur les points principaux de notre« foi et que les garçons n'aient appris un mé-« tîer ou à lire et à écrire, et que les filles pa-« reillement ne sachant le devoir de chré-« tien, lire et écrire, travailler et faire cea qui est nécessaire dans leur ménage, que« même les uns et les autres n'aient de leurs« parents ou gagné de quoi se nourrir pen-« dant trois ans, qui est le temps suffisant

« poor mettre une habitation en état de four-«_nir des vivres et, en cas que les personnes« qui ont des enfants persistent dans leur« opiniâtreté et négligent le présent avis, nous« leurs déclarons que nous prendrons leurs

t enfants près de nous pour les faire élever« et apprendre à travailler à leurs dépens. »

Ce document fait voir que, sous l'ancien ré-

gime,on entendait

appliquer,

même dans les

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DES SCIENCES BT ABTS

colonies, le-principe de l'enseignement obli-gatoire au profit exclusif de la religion catho-lique Il prouve aussi que le grand Roi avaitsu trouver, dans son représentant, un inter-prète fidèle de ses volontés. Il existe, en effet,une parenté visible entre l'acte qui vient d'êtrecité et la déclaration destinée à la métropole,du 13 décembre 1689, enjoignant « à tous les«

pères,mères, tuteurs et autres

personnes« chargées de l'éducaâon des enfants et nom-« mément ceux dont les pères et mères ont« fait profession de la religion prétendue ré-4 formée, de les envoyer aux écoles et caté-« chismes jusqu'à l'âge de quatorze ans, si ce« n'est que ce sont des personnes de telle« condition qu'elles doivent se faire instruire« chez elles par des précepteurs instruits de« la

religionet bonnes

mœurs,ou les envo-

« yer aux collèges, à peine de condamnation« d'amende ou de plus grande-peine, suivant« l'exigence des cas. »

L'ordonnance de Vauboulon ne s'exécutapas longtemps. Fatigués de l'oppression à la-quelle ils étaient soumis, les habitants s'en-

1 Le principe de l'enseignementobligatoireavaiten ses partisans avoués, en France,des le seizièmesiècle,ainsi que le prouvelevœuémispar la nobless-eprotestante,aux Etats généraux d'Orleansde 1560,

 \œu reproduit,auxEtatsde Bloisde 4588,par le cler-gé,dont la convictions'était faite,sur ce point, le jouroùil avait reçummdatde présiderà notrepremieres-said'enseignementprimairegratuit.(Art. 8, 9 et 40det'ordonnanced'Orléans.Recueildesancienneslois fran-çaises,lotncXIV,p. 67.)

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BULLETINDELA.SOCIÉTÉ

tendirent bientôt pour se débarrasser de leurgouverneur. Le dimanche 26 novembre 1690'pendant la messe, sur un signal donné del'autel par ce même Hyacinthe qui avait étéchargé d'élever chrétiennement leurs enfants,ils s'emparèrent du chef de la colonie et le

 jetèrent dans un cachot où, après vingt-deuxmois de détention, il mourut empoisonné.

Un demi-siècle devait encore s'écouler avantque s'ouvrit le premier établissement scolaireque l'ile Bourbon ait possédé. Voici dansquelles circonstances il fut créé.

L'édit d'août 1664 avait imposé à la Com-pagnie des Indes* orientales l'obligation d'en-tretenir un certain nombre d'ecclésiastiquesdans les lieux où elle s'établirait, afin d'y as-surer l'exercice du culte. Pour se conformer

h cette prescription, la Compagnie s'était ad- joint les missionnaires de Saint-Lazare parun tFâité du 22 septembre 4742: « Dans ses« vues, dit M. Pierre Margry, l'instruction de-« vait suivre l'éducation religieuse. Ainsi, le« quatrième prêtre -devait tenir une espèce,« 4e petit collège, où les petits garçons se-« raient élevés dans la connaissance de la re-« ligion, l'étude des lettres et les principes

« des sciences. La Compagnie se proposait,« sur ce point, pour compléter son œuvre,« d'envoyer trois maîtres et trois maîtresses« d'école pour enseigner aux enfants à prier« Dieu, â lire et à écrire, et aux filles à tra-

4 Cettedaterésultede l'actededécèsde Vauboulon,qui existeàl'Elat civildela communede Saint-Pauf.

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&B9SCIENCESETARTS

« vailler en linge, en tapisserie, en habite de« femme, à tricoter, et à d'autres petits ©u-« vrages convenables à leur sexe ce que fai-« sait alors par dévouement et gratuitement« Louise Payet, femme du sieur François« Cauzan, qui pouvait être l'exemple des« femmes » »

Mais bientôt l'exécution du contrat de 1712donna lieu à de

graves difficultés, etce con-

trat fut rompu.Avisé du fait, le contrôleur des finances Or-

ry intervint. Des conférences s'établirent ec-tre les directeurs de la Compagnie et le su-périeur général de la congrégation. EUesaboutirent à un nouvel accord, signé & Parisle 27 juillet 1736.

L'une des clauses de ce dernier traité, écrit

dans un style qui rappelle beaucoup celui deVauboulon, portait qu'un collège, avec exter-nat gratuit, serait annexé au presbytère déSaint-Denis et confié à des lazaristes quechacun; des régents recevrait annuellement,sur les fonds de la colonie, quatre cent cin-quante livres fortes, et, sur ceux de la Com-pagnie trois cents livres, une barrique de vinet trente pois d'eau-de-vie enfin que la co-

lonie fournirait un terrain attenant au pres-bytére et se chargerait de la construction etde l'entretien des bâtiments scolaires, ainsique de la fourniture du mobilier.

4 Documentsinéditsde l'histoiredela Marine'etdesColonies(Revuemaritimeet coloniale,octobre18<>2,p. 337.)

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BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ

L'exécution de toute cette partie du contrat-de 1736 se fit attendre bien des années. °

En 1751, le missionnaire Teste, qui exer-çait à l'île Bourbon les fonctions de préfetapostolique, rappela au gouverneur LozierBouvet l'engagement pris au regard de sacommunauté. Bouvet s'empressa d'adresseraux habitants de l'île un appel qui fut écouté.

Chacun y aidant, on put commencer bientôtla construction du collège sur une partie duterrain curial de Saint-Denis, livrée en échan-ge d'un autre terrain situé au bois de NèflesCe bâtiment, composé d'un rez-de-chausséeet d'un étage,, ne fut terminé qu'en septem-bre 1759 C'est encore aujourd'hui l'un desédifices les plus importants de la ville deSaint-Denis. Après avomperdu' sa destination

première et servi longtemps de caserne, il-est maintenant affecté aux bureaux du com-inissariat'de la marine 3.

Le nouveau collège ne tarda pas à êtreconnu et fréquenté. Voici ce que nous ap-

1 Ce terra'n est à la base duBoisde Nèfles,au lieuditla Plaine.Il estconnusousle nomde« lerrain des

.prêtres».

2 "Noteshistoriquessur l'île BoHr&o»,par Da\elu.3 CebâUnent,quitouche à Id rue de Pariset s'ou-

vre sur la placede l'hôpital militaire,a été couronnéd'unsecondétage il y a quelquesannées.Onle voit J-

gurer. tel qu'ilexistaità l'origine,sur le plan joint auVoyagedatts les mers de l'Indede Legentil,4779.En<7t)3j^Duplcssis,gouverneur«lela colonie,proposad'yréunirtous les corpsconstituéset de logerles troupes

• ailleurs.(Lettresà l'assembléecoloniale,du13 sep-tembre.) •

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DES SCIENCESET ARTS

16

prend, à ce sujet, l'astronome Pingre, danssa Description de Vile Bourbon' « Il y a,« dans la paroisse de Saint-Denis, un curé,« un vie dre et, de plus, un clerc de la même« congrégation (Saint-Lazare) qui, conjointe-« ment avec le curé, le vicaire et quelques« autres personnes, travaillent à la desserte« d'un collège qui y est établi. En temps de«

paix, on envoieà

ce collège des époliers« non-seulement de l'ile de France, mais des« Indes. On y a même vu des élèves portu-« gais. La guerre l'avait rendu presque dé-« sept. )»

C'est en se rendant à Rodrigue, pour y ob-server le passage de la planète Vénus sur ledisque solaire, de 1761, que Pingré s'arrêtaà l'île Bourbon. Il parle donc ici de cette fu-

neste guerre de Sept ans, à laquelle le capriced'une favorite avait poussé le plus débauchéde nos rois, guerre qui engloutit tant d'hom-mes et d'argent, et entraîna J'effondrement dela puissance coloniale française.

Après le désastreux- traité de 1763, notrecollège ne put reprendre sa splendeur pre-mière. Mais comme la population des îles de

France et de Bourbon augmentait de jour en jour, il conservait encore une incontestableutilité» Son utilité ne devait pourtant pas lepréserver d'une destruction prochaine.

i Ceto jvragen'a jamaisété imprimé.Il est déposéà Parisà la bibfijlhèqueSainte-Geneviève.

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Jff^HfP j»5 M£©O$TÉ

En 1767, la Compagnie des Indes fit la re-mise des îles deFrance et de Bourbon au roi,représenté, dans l'une, par le gouverneur gé-néral Dumas et l'intendant général Poivre,dans l'autre, par le commandant Bellecombeet l'intendant Crémont. Cette rétrocession,

convenue dès 1764, avait été nécessitée parl'impuissance dont la Compagnie s'était vuefrappée à la suite de ses revers dans l'Inde.

Il semble que le passage de nos deux îles,des mains d'une société commerciale avide etdespote, aux mains de celui qui, personnifiant

alors l'Etat, se disant le seul représentant lé-gitime de la nation, aurait dû avoir pour con-séquence de provoquer» des mesures favora-

bles à leur unique établissement d'instruc-tion publique. Ce fut le contraire qui se pro-duisit. Le pouvoir royal transforma le collège

'.en caserne. Cette transformation eut lieu dansdes circonstances utiles à faire connaître,parce qu'elles ont donné naissance à une lé-gende que les lazaristes ont contribué à for-mer, et qui n'est pas entièrement conforme àce qui s'est passé. D'après cette légende, le

personnel de notre maison d'éducation, maî-très et élèves» aurait été l'objet d'une dépos-session brutale et tout à fait imprévue, le 10avril 1770. Pendant qu'ils entendaient l'officedu mercredi saint à l'église voisine, des trou-

 jpes, destinées à renforcer la garnison de l'île,auraient pris possession du collège en jetant,par les fenêtres, tous les livres, cahiers et pu-pitres. L

II

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CES SCIENCES ET ART9

« Qu'on se figure, dit un historien de cet« épisode, la stupéfaction des élèves, des pro-« fesseurs et surtout de M. Teste, quand, à la« fin de l'office, ils apprirent la scène de dé-« vastation, plus digne des Vandales que« d'une nation civilisée, qui venait d'avoir« lieu t Sans nul doute, il y a de grands mots« tout prêts pour les grandes circonstances.« On mit en avant

l'impérieusenécessité où

« l'on se trouvait de loger les défenseurs de la« patrie. Mais ce n'était là évidemment qu'uri« prétexte spécieux car enfin, chaque famille« de la ville n'eût- elle pas consenti à loger« chez elle, comme en France, deux ou trois« de ces soldats, en attendant qu'on leur trou-« vât un gite ?fEt les missionnaires eux-mé-« mes, pour sauver leur collège, pour lequel«

ils avaientfait tant

de sacrifices, pour le-« quel l'un d'eux, M. Caulier, curé de Saint-« Denis pendant près de 18 ans, n'avait pas*« dépensé moins de cinq à six mille francs*« de son patrimoine, n'eussent-ils pas Volon-« tiers offert le presbytère de Saint-Denis ? »

Voici la vérité, elle est assez triste et n'a*pas besoin d'être exagérée.

Au moment de la rétrocession des îlesr if 

avait été convenu que tous les bâtiments de làCompagnie des Indes seraient Mvrés au gou-vernement royal. Celui-ci avait immédiate-ment projeté de transformer le collège en ca-serne. On lit, en effet, ce qui suit dans unelettre adressée, le 16 juin 1868, par Cfêraçsttaux préposés de la Compagnie « Les travaux« de votre magasin vont nécessairement être;<csuspendus, et, par suite, la remise au coHè*

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BUU.ETINDELASOCIÉTÉ

• ge que vous devez nous faire pour nous ser-« vir de caserne. » Une année et demie plustard, la livraison n'ayant pas encore été faite,Crémont écrivit de nouveau « Vous deviez« remettre aux administrateurs du roi, dans« le courant de juillet dernier, le bâtiment« appelé le Collège nous voilà au mois de« décembre je ne vois pas que vous vous« pressiez beaucoup de faire la remise de ce

« bâtiment. Cependant nous en avons le« plus pressant besoin. Messieurs le gou-« verneur général et l'intendant, d'après l'as-« surance qui leur a été donnée par M. de« Bellecombe^ pensent qu'il a dû être livré« depuis plusieurs mois. Je me suis transpor-« té dans le nouveau magasin en pierres que« vous avez fait construire, et il m'a sembléque le travail intérieur pouvait être accé-« 1ère davantage en augmentant le nombrede vos ouvriers. Au reste, comme vous êtes« en état d'y faire transporter une partie des« marchandises que vous avez dans le collè-« ge, j'ai l'honneur de vous prévenir, Mes-« sieurs, que vous ne pouvez commencer trop« tôt cette opération, et qu'il est même indis-pensable qu'elle soit achevée à la fin du

« mois,ce bâtiment devant servir en

partie« de magasin à grains. «Enfin, le 5 avrilsuivant, les préposés de la Compagnie s'étantdéclarés prêts à remettre les clefs, Crémontles prie d'attendre le retour du commandant,qui est en cours de voyage à Saint-Paul.

Ces documents prouvent qu'il n'a pu yavoir,.le 10 avril 1770, un acte de surprise etde violence pour s'emparer du bâtiment seo-,

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DES SCIENCES ET ARTS

laire de Saint-Denis. Il faut ajouter que, à cettedate, le personnel enseignant n'existait plusen quelque sorte. Les lazaristes, pour la plu-part vieux et infirmes, étaient hors d'état de selivrer à un travail actif. Leur supérieur Testeressentait les premières atteintes du mal quidevait l'emporter à la fin de 1771 Caulier,frappé d'une affection nerveuse grave, nepouvait même

pluscélébrer la messe.

Le gouverneur général etle ministre avaientété mis au courant de cet état de choses parlettres du 31 août 1769 et du 8 février 1770.Quant à placer les troupes chez les particu-liers, il n'y fallait point songer. On lit, ,dansun rapport adressé au département de la ma-rine, le 10 février 1769 « Il n'a pas été possi-« ble aux officiers de la légion de se procurer

« un logement chez l'habitant, même en pa-« yant. La plupart des maisons du chef-lieu,« ne sont que, des cases en bois, fort peu côn-« sidérables, et qui ne peuvent qu'à grand'-«peine loger le propriétaire et sa famille. »

On le. voit* la situation était telle, qu'ellefournissait aux administrateurs des deux îlesun prétexte pour supprimer lecollège. Ce

prétexte, ils n'en avaient pas besoin. Le 15août 1768, le ministre leur avait écrit « Le« collège, qui n'est qu'une école, doit être dé-« frayé par les étudiants et, si la Colonie« n'est pas assez riche pour subvenir, par un« nombre suffisant d'écoliers, à l'entretien du« collège et des régents, il faudra s'en tenir« aux^coles particulières de chaque parois-« se. »

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BTOLKTÏK îfS tX SOCIÉTÉ

C'est pour se conformer à ces instructions,qui avaient déjà dû. leur être données orale-ment à leur départ de France, pour préparerune destruction convenue, que Bellecombe etCrémont avaient décidé, par une ordonnance

du 10 juillet 1768 que, dans chacun des huitquartiers de Me Bourbon une école seraitérigée et entretenue aux frais des habitants.

Cette ordonnance ne reçut un commence-ment d'exécution qu'au bout de vingt années.Ce n'est qu'en 1788 et'en 1789 que de petitesécoles primaires s'ouvrirent à Saint-Pierre, àSaint-Paul, à Saint-Benoit, à Saint-Louis et àSaint-André. Mais en 1770, où donc les ha-bitants" de'fîle auraient-ils trouvé des res-sources pour l'érection et l'entretien de huitmaisons d'éducation ? Où donc auraient-ils

pris le personnel enseignant nécessaire à cesdivers établissements f [ Si l'on veut apprécier leur situation à l'é-

poque dont j'è parle, il faut se souvenir queBourbon, n'ayant fait que décliner depuis ladépart de Labourdonnaîs, avait été laissé parla Compagnie dans une sorte d'anéantisse-mêttî  qu'aucun profit sérieux n'était encorerésulté de la liberté relative qui venait d'être

accordée à son commerce, et que la périodeprospère de la culture des arbres à épices s'ou-

t CodeÏHslateu, partie, n°170,p. 68.2 Ces huit quartiers étaient Saint-Denis,Sainte-

Marie,SïMe-Sazanne,Saint-André,Saint-Benoît,Saint-Pierre,Saint-Louiset Saint-Paul.

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DES SCIBSCES .ET 4$TS

vrait à peine pour elle. Il faut nde jphis savoirque, pendant les années qui suivirent la fer-meture de gon collège, elle fut constammentvisitée par de violents cyclones que, du 4décembre 1770 au 15 avril 1772, c'est-à-direen deux hivernages, elle fut frappée .cinq fois'que le dernier de ces ouragans et celui de1773 sont comptés parmi les plus terribles detout le siècle

Cependant les colons se seraient efforcés,sans doute, de conserver leur unique établis-sement d'instruction et ils y seraient parve-nus en le ramenant à des proportions modes-tes jusqu'au retour des jours heureux, si leGouvernement avait cherché à leur venir ,enaide.

Dira-t-on que la détresse des finances pu-bliques, fruit d'une folle dépravation, enlevait

au pouvoir royal la possibilité de les secou-rir ? Ne pouvait-il pas, au moins, leur enyo?yer les lazaristes que les administrateurs lo-caux lui avaient instamment demandés ? Nedevait-il pas surtout respecter leur bâtimentscolaire, ou bien, s'il en avait un besoin tem-poraire pressant, le rendre, au bout de quel-ques années, à sa destination primitive ? ïgû,o-rait-il donc que l'instruction est indispenga-

1 Correspondancedes administrateursde la colopieavecle ministre.

2 A Bourbon,lesvieillardsse rappellentl'ouragande 4751 enrevenantvers nous,on cite ceuxde 4772et de1786. (Billiard,Voyageaux coloniesorientales,<832.)

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BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ

blé, surtout dans les colonies lointaines, audéveloppement du sentiment national ? Pouréprouver avec vivacité ce sentiment, le colon,qui n'a jamais eu le bonheur de fouler le solde sa métropole, doit s'être rapproché d'ellepar la pensée, s'être nourri de son histoire etde sa littérature, avoir en quelque sorte vécudans son sein pendant de longs siècles, avoirpartagé ses souffrances et joui- de ses triom-

phes car il n'est pas uni à cette mère com-mune par l'amour instinctif  que l'hommeéprouve pour le lieu où il est né, où ila grandi et qui est peuplé de ses souve-nirs d'enfance. Il lui faut donc puiser, de bon-ne heure, aux sources fécondes de l'ènseigne-ment, et se mettre ainsi en état de participerà la communion qui, aux heures solennelles,réunit à travers l'espace, dans un même élan

et pour l'accomplissement d';un même devoir,des millions d'êtres nés sousdes ciels divers,mais également jaloux de concourir au salutde la patrie et à la grandeur nationale.-

Ces considérations n'étant point de natureà toucher le héros du Parc-aux-Cerfs et sonentourage, le collège de l'île Bourbon devait

disparaîtreet il

disparut.Pourtant les insti-

tutions utiles survivent d'ordinaire aux hom-mes qui les ont vues naître, et se perpétuentaussi longtemps qu'exigent les besoins qu'el-les sont appelées à satisfaire. Ici le contrairearriva. Teste eut la douleur, avant de fermerles yeux, de voir anéantir l'oeuvre dont il avaitété le principal créateur et le soutien infati-gable,

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DES SCIENCES Et ARTS

17

A partir de l'année 1770, les habitants deBourbon n'eurent d'autre ressource, pour fai-re instruire leurs enfants, que de les envoyeren France. Mais ce moyen, auquel avaient eurecours, même à l'époque où florissait lexsol-lège des lazaristes, les personnes riches et dé-lège des lazaristes, Personnes riches et dé-sireuses de donner une éducation soignée àleurs fils', n'était pas à la portée de tout lemonde. Du reste, s'il offrait des avantages à

ceux qui pouvaient en profiter, il avait, aupoint de vue de l'intérêt général, l'inconvé-nient grave d'entraver les progrès de la colo-nisation, de favoriser l'absentéisme dont les

  îles-sœurs souffraient déjà8. La meilleure par-tie de leur jeunesse masculine émigraifc3souvent même le départ du fils déterminaitcelui de toute la famille, qui quittait ces colo-nies pour ne plus y reparaître.

Quant aux enfants condamnés à grandir ùl'ile Bourbon, ils étaient presque tous voués.à l'ignorance. Parmi les habitants de ce pays,il y en avait alors bien peu qui fussent en

'–*

1 C'estain*ique Bertinet Parnyétaient partispourla France,l'un en 1761,l'autreen1763.

â Voiries vi\es objurgationsdePoivreaux colons,ausujetdeq l'absentéisme,dans le discoursqu'iladres-sa auxsyndics,députéset notableshabitants de l'îlede France, lors de soi arrivée dans cette coloniecommeintendantgénéral.(OEuvres.)

3 « Commel'attentiondes pèicsse porte'[rincipa-« lementsur les garçons,ils les fontpasseren France<id'où ils reviennentrarement.» (Bernardinde Saint-Pierre, lettredu21 tlccimbre4770,datéede Bourbon.QEtivres.) ,•

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BCLIiEKN DE Là SOCIÉTÉ

état de remplir le rôle de précepteur. Ceuxmême qui, plus favorisés que les autres,avaient passé la première partie de leur exis-tence en France, devaient avoir un bagagelittéraire et scientifique fort léger, par le dou-ble motif  que, au siècle dernier, l'instructionétait moins répandue qu'aujourd'hui, et que,depuis leur arrivée dans l'île, « où tout le« monde, dit l'astronome Legentil, menait

« une vie champêtre et simple, en cultivant« son champ et s'occupant à la chasse et à la« pêche »,ils avaient dû oublier une grandepartie de leur rudiment.

Dansun tel milieu, quel avenir eût été ré-servé à Lislef  Geoffroy si sori père n'avaitpas été capable de lui ouvrir la voie dans la-quelle il s'est distingué ? Combien d'autresnatures privilégiées ont *vaine'ment attendu,pour prendre leur essor, des conditions meil-leures que celles qui se rencontraient, à cetteépoque, soit à l'île de France, soit à l'île Bour-bon 1

« On ne se doute pas, dit Parny, dans une« lettre qu'il écrivait à Bertin en janvier 1775,« peu de temps après son retour dans leur« patrie commune, on ne se doute pas, dans« notre

'île,de ce

quec'est

quel'éducation.

« L'enfance est l'âge qui demande, de la part

Voyagédansles mersde l'Inde,t. II,p. 667.2 LisletGeoffroyest né à Saint-Pierre (Réunion),le23 août 1755*C'estpar erreurque, dans la notice"bio-

graphiquedece savant,AragoFa fait naître à l'île deFrance.

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DESSCIENCESETARTS

« des parents, le plus do prudence et le plus« de soin ici, l'on abandonne les enfants aux« mains des esclaves, ils prennent insensible-« ment le goût et les mœurs de ceux avec« qui ils vivent aussi, à la couleur près, très« souvent le maître ressemble parfaitement à« l'esclave. A sept ans, quelque soldat ivro-« gne leur apprend à lire et à écrire, et leur«

inculqueles

quatre premières règlesde l'a-

« rithmétique alors l'éducation est complè-te te »

Il y a certainement de l'exagération dansce tableau, tracé par un  jeune homme devingt-deux ans, sous l'empire de l'impressionpénible que lui avait fait éprouver le contactde l'esclavage après onze années d'absenceIl regardait d'un œil désenchanté son île na-

tale, qui n'était pointencore devenue

pourlui

le « paradis des amours » il aspirai avectoute l'ardeur d'une âme brûlante, à revoir"Paris, à se replonger dans cette société nour-rie de la moelle d'Athènes et de Rome, dansce grand foyer de lumière. Pourtant on nepeut nier qu'il existe un fond de vérité danssa triste peinture. Quel contraste, en effet, auseul point de vue qui doive nous préoccuper,

l'éducation de la jeunesse, entre ce que Pàrnyavait laissé derrière lui et ce qu'il retrouvait à

4 Œuvres de Parny.2 « Non, je nesauraismeplairedansun paysoùmes

« regardsne peuvent tomberque sur le spectaelede« la servitude,où le bruit du fouetet deschaînes as-« sourdit monoreilleet retentitdansmoncœur(même

« Lettre).»

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BULLETIN DE LA SOCIliTÉ

l'llé Bourbon Ici, le dénùment le plus com-

plet,au' moins à partir de la fatale année

770 là-bas, un mouvement généreux quel'expulsion des jésuites venait accentuer en-core., Ce mouvement, auquel participèrenttoutes les forces intellectuelles de la France,finit par se perdre dans le grand courant dela Révolution.

III

La Révolution française a été faite pourrestituer, aux classes asservies, l'usage desdroits qui font la force de l'homme et sa di-gnité, et pour en assurer à tous le respect. Dèslors, elle ne pouvait omettre de comprendre,dans ses projets de réforme, renseignement,

dont le rôle est de nous soustraire à la piredes servitudes, celle de l'ignorance, et qui estla plus sûre gardienne de la liberté. Mais, aumilieu de la tourmente soulevée par ceux quis'efforçaient d'entraver sa marche, il lui futimpossible d'achever l'œuvre derrénovationgénéral? qu'elle avait entreprise. Du moins,elle eut la gloire de poser les principes quiservent de base à la société moderne. C'est

ainsi que l'Assemblée constituante déclara« qu'il serait créé et organisé une instruction« publique commune à tous les citoyens, gra-« tuite à

l'égarddes parties d'enseignement

« indispensables pour tous les hommes' 4».

Constitutionde 179/. Titre 1" Dispositionston-«lamentâtesgarantiespar laConstitution.

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DES SCIENCES ET ARTS

La Convention fit de vains efforts pour réa-liser cette solennelle promesse et nous doterd'un immense enseignement primaire obliga-toire. Qui pourrait lui reprocher son insuccès,

quand, après un siècle bientôt, nous touchonsà peine au but qu'elle s'était proposé d'attein-dre ? Au reste, assez de créations durablestémoignent de sa sollicitude pour ce grandbesoin social l'éducation de la jeunesse. Mais

ce n'est point ici le lieu de rappeler, mêmeà grands traits, ce qui a été fondé en France,à cette époque* en faveur de l'instruction pu-blique. Il faut revenir à la colonie sur laquel-le doit se concentrer, notre attention.,

Lorsque la nouvelle des premiers événe-ments qui signalèrent la grande aurore de 89parvint à l'île Bourbon, de nombreuses mani-festations s'y produisirent. La plus éclatantede toutes fut la fête que la jeunesse du chef-lieu offrit au détachement du régiment de ·Pondichéry, alors en garnison à Saint-Denis.

L'un des organisateurs de cette fête étaitun jeune diacre, du nom de Louis Delsuc, quiavait professé au collége royal de Vitry-le-Frahçois. L'occasion s'offrait à lui d'appelerl'attention publique sur l'utilité d'une maison

d'éducationà Saint-Denis.

Illa saisit

et pré-senta un, projet. Ce projet méritait de rece-voir et reçut l'accueil le plus favorable de l'as-semblée générale des députés des quartiers.Malheureusement, cette assemblée eut uneexistence trop éphémère pour s'occuper d'unecréation qui nécessitait du temps et des res-sources de diverses natures. Elle fit place, enoctobre 1790, à une assemblée dite coloniale

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BULLETIN- DE LA SOCIÉTÉ

élue en vertu des décrets de la Constituanteautorisant chaque colonie à faire connaîtreses vœux sur la constitution, la législationet le régime administratif  qu'elle désiraitobtenir.

Rassemblée coloniale, ou plutôt une partiede ses membres se chargèrent de faire con-naître les besoins et les vœux du pays, et si-gnèrent, dans ce but, à la date du 21 avril1791, une longue pétition à la Constituante.Après avoir dit le sort infligé à l'île Bourbonpar la perte de son collège, les pétitionnairesfirent ressortir l'avantage qu'on trouverait àcultiver les dispositions naturelles de la jeu-nesse créole, qui déjà s'était rendue utile à lapatrie par son courage, et qui pourrait la ser-vir par ses talents, si les ^moyeûs de les déve-

lopperlui étaient fournis. Ils s'attachèrent à

démontrer que la création et l'entretien d'unétablissement d'instruction publique étaientaa-dessus des seules forces .des colons, et quela mère-patrie pouvait les aider sans un tropleard sacrifice. Pour atteindre ce résultat, di-saient-ils, il suffirait à la métropole de per-mettre â la colonie d'imposer la jouissancedes pas géométriques ou d'autoriser la vente

des biens curiaux, à la condition toutefois'que le produit de cette vente fût, avant touteschoses, employé à garantir aux desservants

4

i Onappellepas géométriques,àl'île de la Réunion,unezonede81 mètres environ,qui a été réservéeparle pouvoirconcédant,toutautourde l'Ile, et qui a étédéclaréeinaliénable.

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DESSCIENCESETARTS

des paroisses le service exact de leurs traite-ments et affecté, pour le surplus, à fonder età entretenir une école.

La Constituante venait de clore ses travauxlorsque cet acte parvint en France. Les dé-

putés de la colonie le remirent au ministre dela marine, en l'accompagnant d'une note des-tinée à appuyer la demande de la représen-tation localç.

La réponse à cette double requête fut ap-portée par Tirol, qu'un acte du 1er février 1792avait nommé commissaire civil à Bourbon.

Dès son arrivée à Saint-Denis, en septem-bre suivant, il se mit en rapport avec l'assem-blée coloniale, ou plutôt avec sa commissionintermédiaire (on dirait aujourd'hui sa com-mission de permanence). Il offrit, au nom del'État, de céder gratuitement le jardin de l'in-tendance et de coopérer à l'érection, sur ceterrain, d'un établissement d'instruction pu- •

blique. La commission intermédiaire acceptacette offre par un arrêté du 31 octobre 1792que le gouverneur approuva le 2 novembresuivant. `

Le. jardin de l'intendance, désigné depuissous le nom de jardin Floris1 convenait par-

faitement,il faut le

dire,à la destination

qu'onse proposait de lui donner. En effet,il est situédans les hauts de la ville au pied du Brûlé,

`

tout près de l'abondante source si connuepour la fraîcheur et- la pureté de son eau si-tuation inappréciable à une époque où l'onne songeait pas encore à établir le canal dedérivation qui arrose aujourd'hui le chef-lieude l'île.

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BULLETIN»B tA SOCIÉTÉ

Cependant la création projetée ne put avoirlieu. En juin 1792, un prêtre du nom de Bel-Ion avait fondé, à Saint-Denis, une école pourles garçons sur l'emplacement du lycée ac-tuel Dénué de ressources et ne pouvant par-

venir à payer l'immeuble sur lequel était ins-tallé son collège, Bellon s'adressa aux repré-sentants du pays qui demandèrent au ven-

-deur de reprendre sa chose, dont on n'avait

plus besoin depuis que la colonie pouvait dis-poser du jardin de l'intendance. Le vendeurrepoussa cette offre. Alors là commission in-termédiaire prit, à la date du 21 novembre1792, un arrêté où, « considérant que M. Bel-« Ion a dû compter sur le secours de la colo-

« nie pour son établissement d'une maison« d'éducation, et que le service qu'il a rendu« en cela mérite sa* gratitude », elle décida

1 On,plus exactement,sur la partieouestdu lycée.Bellonavait achetéce terrain de Martinquien étaitpropriétairedès 1777,ainsiqu'on peuts'en convaincre

en rapprochantle plandelavilledressépar Bancks,àcetteépoque,de la liste des concessionnaire-qui ac-compagneceplan. Surcespièces,le terrain Martinestcomprisdansl'îlot n°58 et portele n*444.

« J'ai l'honneurdevousadresser \à tableau-de la« positionducollège.Vousverrez,parcet aperçu,com-« bien ilest urgentquevouseuillez bienprendredes« mesurespour venirà son secours. Je l'ai soutenu,a jusqu'à

présent,par lemoyen du crédit que l'ona« bien, voulumefaire,etpar lessecoursqu'un de mes« collaborateurset uneautrepersonnelui ont fournis.«.Permettez,M. M.,que je voussollicitede memettre«à mêmede pouvoirles satisfaire.» (Lettrede Bellonà l'Assembléecoloniale,du2i octobre1792.)

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"ÛES SGfttNCÉS Eî AfeTS

18

que les dépenses faites par cet instituteur iseraient regardées comme dettes de la colo-nie et soldées à l'aide d'un emprunt rembour-sable sur le produit de la vente des biens na-tionaux, avec intérêt au taux commercial. Cetarrêté confiait au procureur général, syndicdu district du Vent et au maire de Saint-Denis la.surveillance de la maison d'éduca-

tion qui, provisoirement,- devait rester à lacharge de Bollon et donner ouverture, à. sonprofit, aux mêmes rétributions scolaires quepar le passé.

L'emprunt décrété n'ayant pu être réalisé,Tirol proposa de contracter, aunom de l'Etat,

l'engagement de payer l'arriéré et de faire lesavances nécessaires à la marche du collège,

 jusqu'au moment où la colonie pouirait pour-

voir à cette dépense par la rentrée de ses con-tributions. La proposition du commissaire ci-vil fut acceptée parmi acte du 28 mars, quiérigea l'établissement Bellon en collège natio-nal. 0uant au jardin de l'intendance, il futvendu.

La direction de ce collège ne tarda pas à-passer aux mains de Delsuc, qui dirigeait àce moment

l'imprimeriecoloniale et

qui, plus.tard, devait être appelé aux fonctions de « ju-ge au tribunal d'appel et criminel dé la co-

1 Cesdépendesimpayéess'étçvaientà 15,17-1livres.2 L'îledela Réunionest diviséeea deuxarrondisse-

ment du Ventet arrondissementsous\&Vent.Autrefoison disaitdistrictdu Ventet districtsousle ^Tent. ••

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BULLETIN DE LA. SOCI&li

Ioniet, puis de juge à la cour d'appel de l'ile

Maurice.Le nouveau principal, désireux de donnerun gage do sollicitude à ses élèves, leur com-posa un traité de morale, de politique et delégislation. Il n'est pas sans intérêt de rappe-ler que l'assemblée coloniale, a qui cet ouvra-ge fut soumis, décida, par un arrêté du 16

messidor an III 1° que Louis Delsuc avaitbien mérité de la

patrie2°

queson traité se-

rait imprimé à cinq cents exemplaires et dis-tribué aux habitants de l'ile et cie préférenceaux pères de famille 3o que chacun était in-vité. à faire parvenir ses observations criti-ques au comité d'utilité publique do l'assem-blée, afin que ce comité, de concert avec l'au-teur, pût « travailler à la réjiactioh définitivedes institutions élémentaires »

Cesdéclarations pompeuses, ;à

l'occasiond'un petit traité bien oublié depuis, peuvent

paraîtreétranges, aujourd'hui que les livres

d'étude et les publications de toute sorte des-tinées à l'enseignement ont été multipliés àl'infini. Elles prouvent du moins, aussi bienque le concours- qui avait été accoVdé à Bel-Ion trois ans plus tôt, que l'assemblée colo-niale de l'île Bourbon ne marchandait pas son

appui à ceux qu'elle voyait se dévouer à l'é-ducation de la jeunesse. Elle créait une tra-dition qui ne devait pas être perdue. Jamais

1 Par délibérationde l'assembléecolonialedu 8 iher-midoran VIII,enregistréeau tribunald'appelle 3fruc-tidor anVIII.

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DESSCIENCESET ARTS

fine mesure, favorable àu développement de

l'instruction publique, n'a été proposée à l'unedes assemblées délibérantes qui se sont suc-cédé dans notre colonie de la mer des Indes,sans éveiller sa sympathie et sans provoquerson assistance. Mais les évènements peuventparalyser les meilleures dispositions de l'hom-me. C'est ce qui arriva aux mandataires élusdu pays, mandataires dont les louables effortsdevaient finir par être frappés d'impuissance.

Le 28 brumaire an VI, le directoire localfut contraint d'ordonner la fermeture de l'é-tablissement scolaire dont je viens de racon-ter la création. Le principal et les professeursde ce collége, qui n'avaient pas reçu leurs ap-pointements depuis plusieurs mois, s'étaientdémis de leurs fonctions. La caisse colonialeétait absolument vide. Pour se procurer quel-ques ressources, J'assemblée venait, sans au-

cun succès, de frapper d'un droit de sortie lescafés, les cotons et les girofles, et d'un droitd'entrée les arracks, rhums, eaux-de-vie etautres liqueurs. File était à la veille de déckder que les fonctionnaires non payés de leursappointenents seraient cependant tenus depayer leurs impôts.'s

Jamais pareille crise n'avait encore sévi surla colonie: Il est vrai que, depuis plusieurs an-

nées, la métropole ne lui envoyait plus desecours pécuniaires. Comment la France eût-elle pu lui en adresser, alors qu'elle-même se

trouvait aux prises avec les embarras finan-ciers les plus graves ? Ces embarras, issus desdésordres et des dilapidations de l'ancien ré-gime, avaient été conjurés, un moment, par

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BUM.ETIKDELASOCIÉTÉ

l^a vente des biens nationaux. Ils étaient re-

yenùs, plus menaçants que jamais, à la suitede la longue lutte que la Révolution avait euà soutenir contre l'Europe coalisée et la Ven-dée soulevée, à la suite aussi des séditions etdes coupables excès produits, sous le règnede la Terreur, par l'ardente lutte des partis etl'explosion des colères populairès longtemps

contenues,Pendant le cours de ces événements, les iles

de France et de Bourbon durent se suffire àelles-mêmes. Qu'importait que la plus grandepartie des dépenses publiques continuât de fi-gurer comme charges du.gouvernement cen-tral et à être ordonnancées en son nom, puis-qu'on ne recevait pas d'argent pour les payer?Aussi, dès le 21 juillet 179^ l'assemblée -delllc.de la Réunion, constatant que l'on min-

quaitde fonds et

quela caisse nationale

pré-sentait un arriéré de sept cent millelivres,prit-elle-le parti d'ordonner 1° la rentrée immé-diate de tout ce qui était dû à la République2« la vente des biens meubles et immeublesqu'elle possédait dans l'île et'dont on n'avaitpas un besoin absolu 30 la réduction de tou-

tes les dépenses publiques 4° enfin la fixa-tion, sur de nouvelles bases, des appointe-

ments des fonctionnaires, « sans égard à la« valeur de la piastre qui ne pouvait plus« être considérée que comme marchandise ».

JSn menue temps, elle fit appel aux « riches« cultivateurs, commerçants et capitalistes,

•s et ^éciftlejTKient aux célibataires, les invi-« |an| à venir au secours de la République,

po$r payej ses,dépenses dans la coloriiç,par

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•PSS SCIENCES ET AttTS

« ledon patriotique d'une partie de leurs re*«

venus, soiten

argent comptant,soit en bons

44

ft payables dans les cinq derniers mois de« l'année, soit même en denrées. »

Bientôt cette détresse; déjà si grande, sac-centua encore davantage, par suite de la dé-préciation du papier-monnaie qu'on avaitémis pour remplacer le numéraire absent. En-fin la production des céréales se réduisitdans une proportion considérable, parce que

les cultivateurs se souciaient fort peu de fairedes produits pour les échanger contre du pa-pier sans valeur.

Ce papier, appelé billet Malartic, du nomdu gouverneur général qui l'avait signé, ins-pirait si peu de confiance, que les caisses pu-bliques elles-mêmes en étaient venues à luiattribuer une valeur six cents fois moins éle-vée que sa valeur nominale. Delsuc, payé, le

27 pluviôse an VI, de ce qui était dû à son per-sonnel enseignant et à lui-même pour lesmois de prairial et de messidor précédents,reçut un bon de un million six cent quarante-quatre mille vingt livres, savoir en billon,1,370 livres équivalant à 822,000 livres de pa-nier-monnaie, et, en papier-monnaie, 822,020livres

Quelques jours après, le 2 ventôse au VI,

l'assemblée coloniale autorisait le directoire à

1 Onraconteque Dt'lsuc,se,rendant à l'île ittaurjcequelquesannée?pinstard, prit soin, pour seréserverune tesgottrceattcasoùil tonibrraitaux mainsdes An-glais,de rempl,rer tousles boulonsde ses babils p»tlespiècesd'orrecouvertesd'étoffe..

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BULLETIN DE LA SOOIÉTÉ

louer l'immeuble ducollège

«moyennanttrois cents piastres par an ou l'équivalent en

café ». On lui demanda l'autorisation de levendre. Elle s'y refusa énergiquement. Elleprévoyait, avec raison, qu'un jour la situation

de la colonie et de la métropole finirait pars'améliorer et permettrait de rouvrir les por-tes du collège.

Vingt-deux longues années, pendant les-

quelles une cruelle épreuve était réservée àMe de la Réunion, devaient encore s'écouleravant que cette prévision se réalisât. Dumoins, pendant ce temps, une partie de la

 jeunesse du pays put aller chercher, dans lacolonie voisine les bienfaits de l'instructionpublique, que notre colonie n'était plus enmesure de lui offrir. La Réusnion devint, sousce rapport, tributaire de l'île de France. Plus

tard, elle devait prendre largement sa revan-che.

IV

En 1802, le général Decaen fut nommégou-verneur des îles-sœurs. Il se fixa à l'Ile dèFrance,, où ses principaux auxiliaires- furent

le commissaire de justice Crespin, qui-a laissé,.F

<l« Vers le moisde juin 1799s'ouvritun collège« colonialau Port-Nord-Ouest(Port-Louis)où éxis-

taient déjàdeuxpensionnatsassezflorissantsdirigésIl par MM.Michelet Boyer. » Souvenirsd'un vieuxcolonde Maurice(p. 179et 180, 1840,in-8%chez F.Boutet,à la Rochelle.)

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DESSCIENCESETARTS

des traces durables de son passage dans ce

pays, et le préfet colonial Léger..L'un des premiers soins de ce dernier futde préparer un règlement pour l'école cen-

trale, qui existait alors au Port-Nord-Ouest(Port-Louis) et qui "reçut le titre de lycée desiles de France et de la Réunion. « La localité,« dit ce règlement daté du 5 brumaire an« XII, ne permettant pas l'établissement d'é-« coles primaires ou secondaires à la charge« du Gouvernement et des communes, toutes« les parties de l'enseignement qui sont du« ressort de ces écoles seront professées au« lycée1. »

Si aucun effort ne fut fait, à cette époque,pour relever de ses ruines le collège de laRéunion, il ne faut pas en accuser le gouver-neur particulier de cette colonie car, auxtermes de l'arrêté organique du 13 pluviôsean XI, ce gouverneur n'était qu'un lieutenantchargé d'exécuter « les ordres et les instruc-tions qu'il recevait » et « devait se borner àrégler les détails du service courant ». Il n'é-tait pas armé de pouvoirs suffisants pour ré-sister aux tendances du général Decaen qui,à l'exemple de son maître lo premier Consul,

cherchait à tout centraliser autour de lui.

Aprèsla

prisede l'Ile de France

parles An-

glais, qui lui rendirent le nom de Mauricequ'elle avait originairement porté son lycée

1 Cerèglementcréait au lycéeun cours de languegrec etun coursde languepersane.

2 Nomdonnépar les Hollandaisavantl'occupationfrancaise,en souvenirde Mauricede Nassau.

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BUltETINDEtA SOCrérÉ

reçut, pa* un acte du 23 avril 1811,te titre decollège royal il fut placé soitë la directioncfon comité d'administration générale et les

• créoles de l'ile Bourbon continuèrent d'y êtreadmis. Cette dernière colonie était aussi tom-bée aux mains de l'Angleterre.

<

Alors, un certain nombre d'habitants deBourbon,jaloux de conserver intact et pur

chez leurs enfants le sentiment dè la nationa-lité, l'amour de la patrie, seul lien qai les rat-tachât à la France depuis qu'ils avaient Subila conquête, ne voulurent pas que ces enfantsfussent élevés, dans un établissement public

sur lequel flottait le drapeau de l'ennemi. Ilsse"préoccupèrent de leur procurer, à Saint-Denis même, les moyens de,' s'instraire, et

s'adressèrent, dans ce but, à un homme déjà

connu pour sa vertu et^on aptitude-à éleverla jeunesse. Je parle de Gallet qui, sous le titremodeste d'instituteur privé, devait reûikè <leréels services èkt colonie1.f.

Les portes de l'institution Grallets'ouvrirentle l^juin 1812. Mais, quels que fussent. leZèle et lé dévouement de son directeur, elle

ne pouvait évidemment suffire à des besoins

qui grandissaientsans cesse.

4 Dansun discours prononcéle- 22août 48S7,à ladistribution des prix du lycéede-la Réunion,M.Re-"nouâfd, professeurde\ seconde,a ^rappeléà grandstraits la vie de cet hommedebienqui,aprèsune labo-

rieuse carrière, est mort entouré'deja vénération"detous ceuxqui l'avaientapproché.

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DES SCIENCES ET ARTS

«-

V •

Avant de rappeler ce qui a été Mt â l'îleBourbon, dé 1815 à 1823, pour l'éducationpublique, il est nécessaire de dire dans' quellemesure on s'y était occupé des jeunes fillespendant la période qui vient d'être parcourue.

Leur instruction avait été singulièrementnégligée. Combien de temps, en effet, a régnéce préjugé funeste

Qu'unefemmeen sait toujoursassez,»Q.iandla capacité îlesonespritse hausseA connaîtreunpourpointd'avecun liaut-de-chausst1!

On commence à peine, en France, à fairedisparaître l'inégalité choquante avec laquelleles fonds consacrés à l'instruction publiquesont répartis entre les deux sexes.

Au siècle dernier, la jeunesse féminine était

complètement sacrifiée dans ce partage, Ce •qui se produisait, sous ce rapport, dans la mé-tropole, devait se reproduire à Bourbon, oùles difficultés qu'il avait fallu vaincre, lors-qu'il s'était agi de créer un établissementd'instruction pour les garçons, étaient peupropres à encourager ceux qui auraient étédisposés à s'occuper d'une fondation de mêmenature pour les filles.

Cependant, vers le milieu du XVIIIe siècle,une femme s'émut de cet abandon et cherchaà y porter remède: Elle n'est point parvenueà atteindre le but qu'elle s'était proposé, etle souvenir lui-même de sa louable tentatives'est effacée peu à peu. Le 14 août 1759, mou-rait à Saint-Denis une ancienne religieuse,

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BULLETINDELASOCUSTÉ

Mlle de Trévalou, laissant un testament oùelle exprimait la volonté que les biens qu'euepossédait dans le pays fussent employés àfonder une école pour les jeunes filles.

En instituant, pour l'un de ses exécuteurstestamentaires, le préfet apostolique Teste,qu'elle avait vu s'employer activement à lacréation du collège des lazaristes, elle dut

penser que son dernier vœu serait exaucé.Mais l'action de Teste fut paralysée par Fin-suffisance même des biens légués. Ils secomposaient de quelques hardes sans valeur,de cinq jeunes esclaves estimés six centspiastres (soft environ trois mille livres for-tes), enfin d'un emplacement bâti, dont laconcession avait été faite à la testatrice, parla Compagnie des Indes, le 3 janvier 1750.

Avec cet avoir.on ne pouvait entretenir unemaison d'éducation.llaurait'falluque la Com-pagnie ou la colonie y ajoutât un secours pé-cuniaire. Mais elles venaient d'édiner, à fraiscommuns, le collège dont nous avons parlé,6t ne se trouvaient pas en état de subvention-ner un second établissement de même nature.Onrésolut d'attendre. Les esclaves furent pla-cés sur ce qu'on appelait alors l'atelier du

roi ? et l'immeuble fut loué.Bientôt survinrent les événements qui ontété racontés plus haut la perte de notre puis-sance dans l'Inde, la rétrocession de l'île à laCouronne et la suppression de son collège.Les circonstances étant de moins en moinsfavorables à l'exécution du testament de M~de Trévalou, on attendit encore, après avoirconstitué, conformément au règlement du

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DES&C!BNCEaET ARTS

conseil supérieur du 11 mars 1768, un con-seil d'administration

composédu

vice-préfetapostolique, de l'ordonnateur, du procureurgénéral, d'un membre du conseil supérieur,et enfin d'un administrateur et caissier.

Il y avait vingt-trois ans que M~ode Tré-valou était morte ce conseil ne s'était encorearrêté à aucun parti définitif, lorsque, dansun rapport du 18 octobre 1782, l'administra-teur proposa de vendre les esclaves qui avaient

augmenté de valeur, d'en placer le prix ainsique l'argent en caisse, et enfin de louer, mêmeà bail emphytéotique et pour un prix modi-que, l'immeuble qui se dégradait chaque jour.

Ces conclusions furent adoptées en partie.On vendit l'un des esclaves, et, après quel-ques années d'attente, une occasion se pré-senta de se défaire de l'immeuble par voie d'é-change. Le coéchangiste s'engagea, moyen-

nant une soulte de sept mille livres environ,à bâtir une maison principale en bois et quatrepetits pavillons sur le terrain qu'il livrait. En-fin, le 5 avril 1790, l'école s'ouvrit. La dameLetort en eut la direction pendant trois an-nées. Au mois de septembre 1793, elle se reti-ra en disant que les élevés, d'abord nombreu-ses s'étaient éloignées peu à peu jusqu'à ladernière. Elle ajouta que son mari venait de

fonder une maison de commerce et avait be-soin de son aide. La dame Lepère prit la placede la dame Letort. Réussit-elle mieux quecelle-ci ? parvint-elle à faire prospérer l'éco-le ? que devint dans la suite le legs Trévalou ?Malgré les recherches que j'ai faites, je ne suispas en mesure de répondre à ces questions.

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BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ

VIL'insufnsance des ressources qu'offrait l'île

Bourbon pour l'éducation de la jeunesse, aumoment où cette île fut restituée par l'An-

gleterre à la France, en vertu du traite de Pa-ris du 30 mai 1814, ne pouvait manquer defrapper l'attention des administrateurs placésà sa tête, et du gouvernement métropolitain

lui-même.Cette colonie comprenait alors 68,300 âmes,groupées comme suit par les statistiques del'époque blancs, d4,48d libres, c'est-à-direanranchis et fils d'aSranchis, 4,459 esclaves,49,360 Pourtant, elle ne possédait aucunétablissement d'instruction publique entrete-nu par l'Etat, la colonie ou les ~communes.Les premières connaissances étaient données

aux garçons par quelques anciens sous-o~-plers et soldats et une cinquantaine de pri-vilégies trouvaient, chez Gallet, un program-me un peu plus étendu. Quant aux jeunesSIIes, elles étaient encore moins bien parta-gées, puisque, dans toute l'ile, il n'existaitpas une seule maison qui leur fût destinée.(fêtait un impérieux devoir que de remédier

a cet état dechoses.

J'ai déjà fait ressortir l'importance de l'ins-truction aux colonies pour développer le sen-timent national. Elle n'y est pas moins néces-saire pour combattre le funeste préjugé que

i Tb&tBa~S<a<Mtt~<~ Bourbon,tome pages<64,i84 et 2~i.

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MSS ~CIBNCBS BT AM8

l'esclavage a fait naître et qui, s'il a survécu

à cette institution odieuse, a été du moins àla Réunion, en s'affaiblissant peu à peu, grâceà la diffusion des lumières. Réunir des en-fants qui appartiennent à des classes socia-les différentes, les placer sur le pied de laplus complète égalité, les convier aux luttesfécondes de l'intelligence, les habituer à setraiter en camarades et à ne voir entre euxd'autre différence que celle qui est produitepar le mérite et le travail, c'est le moyen leplus simple et le plus efficace, de faire cesserl'ostracisme qui frappe, jusque dans leursdescendants, les malheureux auxquels le sortet l'injustice des hommes ont ravi la liberté.

Cependant, on n'ouvrit qu'à demi les por-tes de nos écoles à cette partie de la popula-tion, longtemps marquée du signe de la ser-vitude. Les fils et filles d'affranchis, les libres

comme on disait alors, y furent admis au ·même titre que les blancs mais jamais lesnls et filles d'esclaves n'y furent reçus. Il étaitréservé à la République de d848 de réparercette injustice. En abolissant l'esclavage, ellea fait asseoir sur les mêmes bancs, et côte àcôte, sans distinction d'origine, tous les en-fants qui grandissent aux colonies.

C'estle

3 avrild8i5 qu'eut

lieu lareprisede possession de l'île Bourbon, au nom du

roi de France, par le général commandantBouvet de Lozier et le chef d'administrationordonnateur Marchand.

Dès le mois suivant, Bouvet expose au mi-nistre que l'île n'a qu'une seule maison d'é-ducation, alors qu'elle aurait besoin d'une

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BULLETIN DE LA SOC!~TE

école dans chaque paroisse et d'un établisse-ment secondaire au chef-lieu. Il prie, pendantqu'il va faire réparer l'ancien collège, de s'oc-cuper de l'envoi du personnel enseignant, dessix frères des écoles chrétiennes qu'on lui apromis et des deux professeurs dont le choixest déjà fait. Il en faudrait encore quatre au-tres s.

Le 24 octobre de la même année, on fait

savoir au général qu'il recevra prochainementles professeurs. Le 13 février 1~16, on luiécrit que ses demandes pour la colonie ontété accueillies. Le 15 mai, il remercie le mi-nistre de la bonne nouvelle que lui a portéela dépêche du 24 octobre. Mais Bouvet n'eutpas la joie de présider lui-mômc à l'ouverturedes établissements scolaires dont la -fonda-tion l'avait préoccupé dès son entrée en fonc-

tions. Vers le milieu de 1815; son remplace-ment est décidé. On désigne, pour lui succé-der, le général Lafitte de Coorteil et l'on nom-me Desbassyns de Richement ordonnateur,à la place de De Lànux, que Bouvet, naturebouillante et royaliste convaincu, avait, de sonautorité privée, donné pour successeur aubonapartiste Marchand, après avoir destituéce

dernier, àcause de son attitude

pendantles Cent-Jours.A la même époque, deux ordonnances ro-

yales accordent aux créoles de l'île Bourbonneuf  bourses gratuites six pour les garçons,dans les collèges de la métropole, et trois

1

Dépêchedu 4 mai <8<5.

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DES SCIENCES ET ARTS

pour t les filles des membres des ordres ro-

yaux s, dans la maison de Saint-Denis et danssa succursale de Paris.On veut profiter du départ des nouveaux

administrateurs afin d'adresser à la coloniele personnel enseignant qu'elle attend. Pardépêches du 31 octobre, Richemont apprendque l'un des professeurs précédemment nom-més ne suivra point sa destination et que des« encouragements )) sont donnés à Rabany,

Albran et J~évi,qui avaient accepté de coopé-rer à la réouverture du collège secondaire dePile Bourbon. Ces jeunes gens s'embarquent,avec les futurs administrateurs de la colonie,sur la flûte de l'Etat l'jE~~pM~, qui part deRochefort en janvier 1817. A peine sord duport, le navire fait des avaries et relâche àPlymouth, où il séjourne près de deux mois.Peu encouragés par un tel début, plusieurspassagers renoncent au voyage et reviennenten France. Desbassyns de Richement écritau ministre qu'il n'a plus avec lui que deuxdes professeurs destines à l'enseignement se-condaire, et que cela ne suffit pas pour fon-der un collège. Enfin r.E'~p/Mm< reprend lamer et, le 28 juin 1817, il dépose à Saint-De-nis les administrateurs, les professeurs delettres Albran et

Rabany, six institutrices, dontdeux laïques et quatre soeurs de Saint-Josephde Cluny.

Ces personnes avaient été précédées parBernard, instituteur primaire suivant la mé-thode de Bel! et Lancaster, et par les frèresdes écoles chrétiennes, qui étaient arrivés, aunombre de six, un mois et demi plus tôt.

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BUH.BTINDE t~ SOCIÉTÉ

Dans te discours qu'il prononce au momentde son

installation,Richement annonce

que< des écoles primaires et gratuites vont être« formées successivement dans tous les quar-<[tiers, et qu'il va être créé, à Saint-Denis, un< établissement destiné à une instruction<tmoins élémentaire, où la jeunesse recevra« les premiers principes d'une éducation« qu'eUe pourra perfectionner dans la métro-< pole\ s Richemont a rempli, à moitié ce

programme, que ses successeurs se sont char-gés d'exécuter complètementTrois frères furent dirigés sur Saint-Paul

et logés à la cure on installa les autres àSaint-Denis, dans l'ancien collège colonial quise composait alora de trois corps de logis dis-tincts. Ces bâtiments, après avoir servi de lo-gement au commandant militaire, à l'ingé-nieur en chef et au capitaine de port étaient

tombés, pendant l'occupation anglaise, dansun-complet abandon. Un rapport de Fingé-nieur en chef des ponts et chaussées Partiot,daté du 1er octobre 1817, signala l'impérieusenécessité de les réparer et d'y ajouter quel-ques dépendances, moyennant quoi, disait-il,on aurait un établissement scolaire complet.Saint-Benoit eut en partage l'instituteur Ber-nard. Quant aux sœurs de Saint-Joseph de

Cluny, qui étaient fort jeunes, on ne jugea pas

< BM!!p<Mto/c~ de la R~MMtoM,2"édition,<omct,page 2M.

2 Voir le p!aHde la villede Samt-Denis,dresséen<8M,parrîngénMMrRH)et.fArctuves(te la comtTtaxcde Saint-Denis.)

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DBS SCIENCES ET ARTS

30

convenable de les séparer tout d'abord lesunes des autres. On les dirigea sur Saint-

Paul. Leur, présence dans ce centre impor-tant parut plus utile qu'à Saint-Denis, où lesdemoiselles Philibert venaient de fonder un

pensionnat de jeunes nlles.Ces faits furent portés à la connaissance

du pouvoir métropolitain par des dépêchesdu 5 septembre 1817. Elles nous apprennentque les deux maisons des frères étaient fré-quentées chacune par une cinquantaine d'é-

lèves, que tout le matériel scolaire dont onavait fait suivre le personnel enseignant s'é-tait perdu sur le navire l'A~OMe~c,enfin quela commune de Saint-Denis se préoccupaitd'acheter un immeuble pour y transférer sonécole.

`

Dans ce même mois de septembre, le mairede Saint-Denis se rendit adjudicataire, pourdix-huit mille francs, d'un vaste terrain d'em-placement compris entre les rues Saint-Denis,Saint-Joseph, Sainte-Anne et la Boucherie,sur lequel se trouvait une maison en pierresqui avait appartenu, parait-il, a la Compa-gnie des Indes'. L'école primaire y fut ins-tallée. On ne garda que deux frères à Saint-

,Denis et deux à Saint-Paul, afin de pouvoirfonder un établissement à Saint-Pierre.

L'existence de ces écoles naissantes fut uninstant menacée, par suite des exigences de

< Gonfler, ~Vo/tCë !<?Fh'n's desEco~sc&r~Mtt-tMJ!à la A<*MKto~(Bulletinde la Sociétédes~cte'tccset~rts, page~45).

Y

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BTJLLETM DH LA. SOCIHTË

ceux qui étaient chargés de les diriger. Ren-dant compte au ministre des dimcultés queles frères avaient soulevées, l'ordonnateur di-sait, dans une dépêche du 22 octobre 1817Vous aviez porté à mille francs leur traite-« ment qui, enFrance, est de six cents francs.« Le taux ordinaire de l'augmentation qu'é-« prouvent les traitements des entretenus« employés dans les colonies se trouvait donc

« dépassé. Cependant, le prix excessif des« choses nécessaires à la vie en ce pays, et la« nécessité d'assurer aux frères de la doctrine« chrétienne une existence qui les dédom-« mage de ce quêteurs fonctions ont de plus« pénible dans ce climat, nous ont fait pen-a ser qu'on aurait pu élever leur traitement à« quatorze cents francs pou? le supérieur et« à douze cents francs pour les frères. Mais

« cette fixation ne les satisfait point, et ils« exigent impérieusement quinze cents francs« pour chacun, menaçant de quitter la colo-« nie ou de se livrer à des éducations parti-a culicres si l'on n'acquiesce pas à leur de-« mande. Ils ont apporté la même exi-

e gence pour leur logement. Nous avions dé-« terminé la commune de Saint~Denis à ache-«

ter, pourcette

institution,une vaste maison

« composée d'une grande salle, de quatre au-« tres pièces au rez-de-chaussée et d'autres

< C'est frèresdesEcolescAr~MMMqu'il auraitfalludire. L'erreur que je relevé ici se trouve reproduitedansun grandnombrede documentsofficielsde ('épo-que et mêmeaujourd'hui elle est commiseà toutmoment.

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DES S01EHCBS ET ARTS

« logements dans le haut ils ne la trouvent

« suffisante que pour logerles deux frères

« qui y résideront, et ils ont demandé qu'on« élevât à côté des bâtiments pour les classes.« Enfin, Monseigneur, nous ne reconnaissons

<c pas en eux cette humilité et ce désintéres-« sement qui sont une des règles de leur ins-« titution. Les frères mêmes se plaignent de« Faigreur du caractère du supérieur depuis« trois semaines il a quitté Saint-Denis, sans

« autorisation, et parcourt File.Cette dépêche était suivie d'un post-scrip-tum daté du 1er novembre ainsi conçu « Les« frères viennent de gagner leur procès les« communes de Saint-Denis, Saint-Pierre et« Saint-Paul ont consenti à leur accorder una supplément de cinq cents francs par an, et« ils se sont décidés à recevoir le traitement<c que le roi leur alloue »

L'école de Saint-Pierre ne réussit pas et fut ·fermée quelques mois après son ouverture.Celles de Saint-Denis et de Saint-Paul parais-saient promettre plus de succès. Dans cettedernière commune, la maison ouverte aux

  jeunes filles prospérait et comptait déj~. desoixante-dix à quatre-vingts élèves. & Les

< Soiten tout quinze cents francs, et non dcax millefrancs, comme l'a dit à t~rt Gonthier, dans la noticeque j'ai citée, plus haut, noUce évidemment écritesous l'inspiration des Frères. Dans une note que cesderniers ont fait imprimer en <87t, pour répondre auxobservations faites par la Commission du budget duConseil général de t'ite de la Réunionà leur sujet, lamême erreur est reproduite (pageS).

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BULLETIN DE LA SOCIETJ!

a soeurs continuent, disait Richement, à don-« ner l'exemple de toutes les vertus. » Bien-tôt on appela deux d'entre elles au cheMieu,où fut établie une école gratuite qui, dès lespremiers jours, fut fréquentée par un assezgrand nombre déniants.

Une année ne s'était pas écoulée depuis l'ar-rivée de Lafitte de Courte!! et de Desbassynsde Richemont, que le pouvoir royal jugeait

utile de placer, aux mains d'un seul, l'admi-nistration supérieure de l'île, dont le dédou-blement avait eu de fâcheuses conséquences.Par le même acte, du 11 mars 1818, il nommale capitaine de ~vaisseau Milius &comman-dant et administrateur pour le roi à Bour-bon. ?»

Lorsque, en septembre suivant, la remisedu service eut lieu, Fécole secondaire, dont la

création avait préoccupé Bouvet dès 1815~n'avait pas encore été ouverte. Milius, dansl'allocution qu'il fit au moment où ses pou-

voirs furent enregistrés à la Cour d'appel, dé-ctara. que « l'instruction publique serait l'ob-

« jet de ses soins particuliers Il tint pa-role. Pendant l'exercice de ses hautes fonc-tions, il favorisa le développement des ins-titutions scolaires créées avant

lui,et eut le

mérite d'attacher son nom à la réouverturedu collège de Saint-Denis, qui était resté fer-mé près d'un quart de siècle. Il est vrai que,pour l'accomplissement de cette dernière par-

< BM~ttt officielde la Réunion..a*édition, tomet,page38'

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DES SCIENCES ET ARTS

tie de sa tâche, il fut singulièrement favorisé.

Il trouvait les matériaux déjà réunis et, deplus, il rencontrait un homma qui, depuisplusieurs années, nourrissait le projet de do-

ter le pays d'un établissement public d'ensei-gnement secondaire je veux parler du co-lonel Maingard. Celui-ci était disposé à se dé-vouer à la réussite de l'entreprise il avait &cœur de la mener à bonne fin, pourvu qu'onle laissât agir.

Après une honorable carrière parcouruedans l'Inde et à File de France, son pays na-tal, dont il s'éloigna le jour où les couleursnationales cessèrent d'y ilotter, Maingard futchargé de missions importantes à Saint-Malo,à Nantes, à Cherbourg, puis nommé directeurd'artillerie à Bourbon, au moment où notre41efut restituée à la France. La paix allait fairedes loisirs à cet officier, chez qui l'âge et la

vie des camps n'avaient pu affaiblir l'amourdes études littéraires. Aussi, en échange del'asile que lui offrait, pour ses vieux jours, l'îleBourbon, où l'attendaient des souvenirs etdes camarades de jeunesse, se promit-il de ladoter d'un établissement secondaire sembla-ble à celui qu'il avait fondé dans File voisine~quelques années auparavant, avec Rudelle,avec

Foisy,son ancien

condiscipledu

collègeMazarin.Maingard n'eut pas de peine à convertir à

ees idées Bouvet de Lozier. Mais le brusqueremplacement de Bouvet et diverses circons-tances firent subir un temps d'arrêt à l'exécu-tion de ses projets. Dès ses premiers rapportsavec Milius, il vit bien que ce dernier lui fa-

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BULLETIN DE LA SOCtëfë

ciliterait l'accomplissement delà mission qu'il

s'était imposée.Le 24 décembre 18d8, le Chef de la Colonierendit une ordonnance qui créait un collègeroyal dans la ville de Saint-Denis. Aux ter-mes de cette ordonnance, le t personneladmi-nistratif  et enseignant devait se composerd'un proviseur chargé, en même temps, del'économat de quatre professeurs, le.premierde mathématiques, le second de rhétorique et

les deux autr<s d'humanités d'un professeurde dessin, d'un professeur de lecture, d'unmaître d'écriture et d'un « surveillant desélèves Le proviseur et les quatre premiersprofesseurs devaient recevoir, chacun, dix-huit cents francs par an. Ils avaient droit,ainsi que le surveillant, au logement et à lanourriture. Les appointements annuels desdeux autres

professeurs,ainsi

quedu maître

d'écriture étaient, pour chacun, de douze centsfrancs, et ceux du surveillant général de seizecents francs. Tout le personnel était placésous les ordres d'un directeur, dont le man-dat consistait, notamment, à faire les règle-ments nécessaires sur « les objets d'enseigne-ment, sur les examens et distributions deprix », sauf  approbation du gouverneur, à

proposer les professeurs au choix de ce der-nier, et a lui rendre compte de tout ce quipouvait intéresser l'établissement confié à savigilance. Les fonctions de directeur étaient

gratuites et compatibles avec toutes autresfonctions. Quant aux rétributions scolaires,elles furent Sxées par mois, à quatre-vingt-quinze francs pour, les pensionnaires, a*soi-

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DES SCIENCES ET ARTS “

xante francs pour les demi-pensionnaires à

qui l'on fournissait le coucher sans la nour-riture, et à trente francs pour les externessurveilles. Les leçons de langues vivantes,

.d'escrime, de danse et de musique se payaientà part. Un prêtre, désigné par le préfet apos-tolique, était chargé de l'instruction religieu-se. Enfin le médecin en chef devait visiterla maison une fois par jour, et donner dessoins médicaux aux maîtres et aux élèves.

Un conseil d'administration arrêtait, chaquemois, les comptes des recettes et des dépen-ses présentés par le proviseur ce conseil,dont le surveillant des élèves était secrétaire,se composait du directeur, du proviseur et,en outre, de l'un des professeurs, qu'on appe-,lait à tour de rôle, pendant un semestre.

Le règlement déterminait la façon dont lescomptes devaient être reçus et vérinés parl'administration supérieure il précisait lesattributions du proviseur, des professeurs, dusurveillant et même du portier, indiquait lacomposition du trousseau des pensionnaires,fixait l'uniforme des élèves, la distribution dutravail, heure par heure, le nombre et la na-ture dos repas, et les différents genres de ré-compense et de punition. Il se terminait parl'article suivant « M.

Maingardest nommé

« directeur du collège royal de la colonie dea l'île Bourbon-, M. Duhau est nommé provi-a seur. M. Wetzell, professeur d'hydrogra-« phic, est nom~é professeur de mathémati-« ques, et, lorsqu'il fera les deux cours, il< jouira d'un supplément à raison de trois« cents francs par an. M. Albran est nommé

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BUJ.~RrH< DB LA S9(X&EE

<[professeur

derhétorique.

MM.Rabanyet< Jamin sont nommés professeurs d'humani-

c tés M. professeur de dessin M. Ray-a naud, maître de lecture M. maître« d'écriture, M. Vigneaux, surveillant des< élèves e

Quelques joursaprèsjel7 janvier 1819,rou-~ert~iredes cours eut lieu, avec solennité, dansle collège colonial fondé sous la Révolution.

Le corps de logis situé à l'Est n'existaitplus deux ailes latérales avaient été ajoutéesà celui du milieu, et un rez-de-chaussée étroitet long avait été construit à l'angle des ruesdu Barachois et de la Fontaine. Tout cela abien changé d'aspect depuis cettè époque.

Maingard prononça le discours d'inaugura-tion. Pour perpétuer le souvenir de la-jour-née, il fit placer, au-dessus de la principalo

porte de la salle d'étude, l'inscription sui-vante due à sa verve poétiqueUt~M<M~t F<t(rMBMMMt~alumnos,?<? o~ceMMMssacrent Miliusœdes3.

< B!<H~!Mc~eM .Re~oM, 2' édition, tomspage 43~

a C6!te inscriptit)n a disparu depuis longtemps, avec

le bâtiment lui-même. Je la cit" d'après M. ~ran~oisMoSet, l'un des témoins de la fête du n jan\ier <8i9(\0tr le  jaurnal ~n J)~t!~ du 16 août 4863). Thomas(Statistique de r~BoM~oM) a introttmt dans le premiervers une variante

Ut re~t et patrioe dignos Mf~ctre~alumnos,qui a été jeproduite par M. Renouard dans le disMorsm'énoncé, le ~2août 1857, a la distribut~n des prix dulycée.

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DESSCIENCESETABTS

a<

On commençait avec vingt-cinq élèves.

Un des hommes les plus distingués qu'aitproduits File Bourbon, Joseph Hubert, se dé-pouilla, au profit du collège, d'une collectionde minéralogie comprenant plus de cinq centséchantillons et d'un cabinet de physique qui,.pour l'époque, était suffisamment riche. Iltenait donner à notre établissement scolairece double gage de sa vive sollicitude. Ayantété privé, dans sa jeunesse, des bienfaits de

l'instruction, mieux qu'un autre il en compre-nait tout le prix car il avait eu à surmonterde grandes difficultés pour s'élever, seut etsans guide, jusqu'au point que lui assignaientses facultés et son amour da travail.

L'acte de générosité d'Hubert fut porté à laconnaissance du ministre qui fitremercier ledonateur. Milius rendit aussi compte de l'ou-verture du

collège.Puis il adressa au

pouvoirmétropolitain, sur Fêtât, de l'instruction pu-blique a Bourbon, un rapport très curieux àlire, où se trouve une appréciation du carac-tère créole qui aurait fait honneur à la saga-cité du commandant, s'il ne l'avait textuelle-ment puisée dans une lettre que Gallet luiavait écrite quelques jours auparavant

1 Cette cottcctinnavaitété faitj par i'académicienDesmare~s.

2 Lalettre adresséepar Galletà ~itius a été repro-duitepar M.Crhe)h,(Lmsuneejquis~csm't'iustruf~itmpubliqueà )a KouMi~)),hmà ta séancepubii)ue de laSociétédesScienceset Artsdu ):! jnin ~(i4 (Bull. e~.~8M,p. 56.)

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BULLETIN DE'LA SOCIÉTÉ

Il résulte de ce rapport que le collègecomptait, à la fin de mars 18d9, quarante-six-élèves, savoir onze pensionnaires, dont deuxboursiers, douze demi-pensionnaires et vingt-trois externes. Le nombre des élèves de Gal-let, ma'gré le mérite de cet instituteur, étaittombé à quinze. Les frères avaient, à Saint-Denis, quatre-vingt-quinze élèves (cinquante-cinq blancs et quarante libres), et, a Saint-Paul, quatre-vînt-dix élèves (soixante-douzeblancs et dix-huit libres). Ennn, & Saint-Benoit, l'école Bernard était fréquentée parquarante-trois élèves, dont vingt-sept blancs,ce qui portait la population scolaire mascu-line, pour toute la colonie, au chiffre trèsmodeste de deux cent qnatre-vingt-neuf 3.

La population scolaire,, féminine était en-core moins nombreuse. Elle ~était répartie

dans quatre écoles, dontdeux

publiqueset

gratuites, et deux payantes et .privées. Miliusparlait de celles-ci dans les termes suivants« Le pensionnat de Mlle Philibert est peua nombreux; les demoiselles qui le compo-« sent sont toutes filles de parents riches« leurs dispositions paraissent assez heureu-« ses mais comme on leur apprend, dans« cette maison, tous les arts d'agrément, on

<Lne peut encore rendre compte de leurs pro-« grès, en raison du peu de temps que la

3 Je vois,d:'ns ânelettre adressée par Jnsep!)Hubertà Milius,que !\)tnerLuM de nfts pr.'miet'f's ëcott's pri-maires fut d'abon) accm'iUmavec défaveur par lapopu-lation. Elle s'imaginaitque tousce.)xqm entraient dansles é~otesgratuites étaient destiné; au seruM militaire.

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DES SCIENCES ET ARTS

< pension est ouverte. Ces élèves sont aunombre de seize. Une autre maison d'édu-wcation, établie à l'instar de la précédente,« existait a Sainte-Sazanne, depuis 1817.

MmeVe Raoul, qui en est l'institutrice, m'ademandé à transférer son pensionnat à

a Saint-Denis. Je lui ait accordé cette fa-veur mais, comme elle est nouvelle, ellen'a pu me transmettre aucun rcnseigne-

« ment sur ses écolières. Il

Quant aux deux écoles publiques et gra-tuites confiées aux Sœurs de Saint-Joseph deCluny, elles comptaient celle de Saint-Paul;cent deux élèves et celle de Saint-Denis, qua-tre-vingt-qnatre, dont vingt-six blanches etcinquante-huit libres. Après avoir rendu unhommage spécial à la douceur et à la bontédes sœurs qui dirigeaient la maison du Chef-lieu, la dépêche faisait remarquer qu'il ré-

gnait « entre les libres et les blanches une« espèce de fierté qui ne permettait que ra-« rement les communications intimes, sur-« tout devant les parents. Il Cette réilexionne peut cLonn~r ceux qui savent que le pré-

 jugé de la couleur est beaucoup plus vif  etplus tenace chez la femme que chez l'homme,chez la jeune fille que chez le jeune garçon.

VII

Nous avons vu que, au XVIIIe siècle, lestentatives faites, à deux reprises, pour cons-tituer un enseignement secondaire public, à.l'île Bourbon, étaient venues échouer, à un

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BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ

moment donne, contre divers obstacles. Pen-

dant la période qui s'ouvre à la reprise denie, il n'en est plus de môme. Chaque effortproduit un résultat durable, et, les établisse-ments scolaires successivement créés abritentun peuple d'écoliers de plus en plus nom-breux. Ce n'est pas que des épreuves leuraient été épargnées, même au début. Mais ilsdevaient les surmonter, grâce surtout, il fautle dire, au talent et au dévouement de quel-ques hommes dont les noms ne peuvent êtreoubliés de ceux qui ont passé -leur enfancesur les bancs de ces maisons d'éducation.

J'ai déjà nommé celui qui était alors laprovidence du collège de Saint-D'enis, la têteet l'âme de son personnel enseignant per-sonnel d'élite, plein de savoir, mats à qui l'ex-périence et la maturité manquaient encore.

Maingard, à quil'on a contesté l'honneur d'a-

voir été le principal fondateur et le plus fermesoutien de cet établissement n'épargnaitrien pour assurer le succès de son oeuvre.

Voici dans quels termes s'exprimait sur soncompte, en d850, Wetzell, le dernier survi-vant de ses premiers collaborateurs «Eût-on« prié le ciel de réunir à souhait, dans un« même homme, et l'instruction littéraire

« telles que la donnent de fortes études fé-« condées par le goût et la possession des au-« teurs latins, assez sûre pour suppléer à« l'improviste un professeur malade, et l'ins-

1 Voirle journalla AfoHedu <6août 4863et lesSimplesretMe~HSM~M~sur ~0 Bourbonpar M.EUePajot, p. <66.

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DESSCMNCHSMTAKTS

« truction mathématique a laquelle un ofG-

e cierd'artillerie ne

peut,être

étranger,et

< surtout cet amour cordial de la jeunesse« qui fait d'un chef d'institution le pcrc d'une« nombreuse famille, le ciel n'eût pas donne

'« un autre homme que. le colonel Maingard.« Il n'est pas jusque sa bourse qui n'ait ai-

dé, plus d'une fois, celle du collège, à(ccette époque de débuts où, d'une part, beau-«coup de parents n'apportaient pas l'exac-

« titude voulue à payer les rétributions et« où, d'autre part, l'établissement ne pouvait< prendre un premier degré de consistance« et d'affermissement qu'à la condition d'une« certaine tolérance, au lieu d'exigences inex-« érables envers les familles. J'ajouterai« que la table du colonel Maingard fut enco-« re, presque continuellement, celle des pro-« fesseurs et de beaucoup d'élèves du collège,

« les premiers n'ayant qu'à gagner au con-« tact de son érudition, de son expérience et« de son urbanité toute française, les seconds« trouvant le mobile le plus énergique d'ému-« lation dans cette chaleur de cœur qui« électrise un autre cœur bien autrement que« le simple honneur d'une invitation ?

Cen'est point là un témoignag& isolé, et

  j'en pourrais citer bien d'autres, pour établir

que-la reconnaissance dos habitants de l'îlede la Réunion ne s'est pas égarée lorsque, en1863, vingt-cinq ans après la mort du colonel

<Lettre du 26 mars ~880.

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BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ

Maingard, le buste de cet homme de bien a

été érigé dans la cour d'honneur du lycéeIl serait injuste de ne pas associer à sonnom ceux de Wetzell, d'Albran, de Jamin etsurtout de Rabany, qui, moyennant un mai-gre salaire, n'hésitèrent pas à mettre au ser-vice du pays la science qu'ils avaient puiséedans les grandes écoles nationales. Cepen-dant on ne peut faire une part égale à ceuxdont je viens de citer les noms. T~neffet, les

uns ne tardèrent pas à s'éloigner de notrecollège, tandis que les autres lui restèrent n-dèles jusqu'au bout.

Le premier qui se retira fut Albran Dèsle 7 juin d819,'il partait pour explorer lescôtes Sud et Est de Madagascar avec le titred'agent commercial. Il allait contribuer à lareprise de possession du~fort 'Dauphin, de

Tintingue,

de Saint-Luce, de Sainte-Marie, et

chercher à rétablir l'influence française danscette île, vaste et riche, où de si cruellesblessures ont été faites à notre iierté natio-nale. Sa mission accomplie, il revint à Bour-

bon, en décembre de la même année, avec legerme de la fièvre paludéenne Il songeacrabord à rentrer en France, puis se décidaà repartir pour Madagascar. Il fit, en 1823,

un dernier voyage dans notre colonie, occupapendant quelque temps la chaire de mathé-matiques du collège, et retourna à File Sain-te-Marie où il mourut.

< Voir ie compte-rendu de cette cérémonie dan? le journal <eJMbMtteMrde !<t~s!tM!OH~du <â aQût <863.

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DES SCIENCES ET ARTS

A la fin de juillet 1819, Wetzell, dont la

santés'était

altérée, pritle

partid'aller se

retremper dans l'air natal. Il était à Bourbondepuis quatre ans, enseignant l'hydrographieet remplissant les fonctions d'examinateurpour le brevet de capitaine au long cours.Sans attendre l'ouverture des portes du col-lège, et dès le mois de décembre 1815, il avaitdonné à la jeunesse créole la mesure de sondévouement, en faisant, dans une des salles

du pensionnat Gallet, un cours yrc~M~ et pM-blie de mathématiques, de dpux heures par jour.

Wetzell ne disait pas adieu pour toujours àFile Bourbon. Il y est revenu après dix an-nées d'absence et y a passé le reste de sa vie.Il a rendu un service considérable à l'indus-trie sucrière il l'a dotée d'un appareil sim-ple et ingénieux, éminemment utile, connu

sous le nom de &<xssetempérature, dont lesfabricants do sucre de canne qui ne cuisentpas dans le vide font encore usage.

Wetzell fut remplacé, mais pour bien peude temps, par l'arpenteur Petit de la Rhodiè-re. Comme lui, ce dernier sortait de l'Ecole

polytechnique. Petit avait fait partie de cettepoignée de  jeunes braves qui, lors de l'atta-que de Paris parles alliés, en 1814, avait op-

posé une résistance héroïque, sur la chausséede Vincennes, à la colonne conduite par leprince de Wurtemberg.

Le collège n'avait pas une année d'existencelorsqu'éclata, sur Saint-Denis, en plein été,une épidémie de choléra. La peur, plus com-municative encore qu'aucune maladie, s'em-

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BULLETIN DE LA SOCt~TE

para de la population, et un grand nombre

d3 personnes quittèrent le chef-lieu. Au nom-bre des fuyards se trouvaient deux profes-seurs du collège, Rabany et Delahogue quicependant étaient des hommes de cœur etd'énergie. Trente-six élevés furent aussi em-menés par leurs parents.

Le premier mouvement de Milius, lorsqu'ilapprit le départ de Rabany et de Ucliboguc,fut d'écrire au colonel Maingard de les fairearrêter et conduire en prison. H voulait, parun exemple, prévenir le départ des'fonction-naires encore présents au chef-lieu. Maisbientôt il comprit qu'il avait été trop loin etne tint pas la main a l'exécution de cet ordrerigoureux.

C'est alors qu'une ordonnance 'vint défen-dre aux fonctionnaires pubfies dc~quitter leur

postesous

peined'être destitués et déclarés

incapables de servir le roi et la patrieLe collège avait été licencié. L'épidémie

passée, le commandant fit publier un ordredu jour, pour rappeler a leurs postes ceuxqui s'en étaient éloignés, disant qu'\  eu égard

aux services précédemment rendus par cesfonctionnaires, et aux sentiments naturelsqui avaient pu les agiter soit pour eux, soit

pour leurs familles, il se « désistait s, a leurégard, d'une sévérité devenue inutile 3. Lescours furent repris.

1 f)otnhog)]i!é:aitcha~6 dn coursdedfssin.2 Bull.< J!<;«HMH,2*mlHi~n,t. I!, p.J2.3 Or(h'ndu jour ')') )nu'<~J!0 ('JM<.o~ jR<'MMM~

2°MiL, L tt. p. :~).

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BES SCÏE!<CESEt ARTS

?

La direction du collège faillit, à ce mo-~

ment, changerde mains. Le

préfet apostoli-'¡

que. Paquiet, avait manifesté l'intention dese démettre de ses fonctions et de rentrer enFrance. Rien n'était de nature à justiûercette détermination, si ce n'est la tristesseet le découragement où il était tombé, sanscause apparente. Milius, cédant au désir dedonner une diversion aux idées sombres duprélat, lui écrivit dans les termes les plus

délicats et les plus pressante pour lui offrirla direction du collège. « Là vous pourriez,« lui disait-il, retrouver, dans la culture des« lettres et des sciences, un délassement qui« vous fut-toujours cher là votre sollicitude« viendrait se concentrer sur une jeunesse« intéressante, dont vous prendriez platsir ~<« former l'esprit et le cœur là enûn, vous« pourriez réaliser l'heureuse idée que vous

« avez eue d'ouvrir un cours de physique, et« ce nouvel emploi me permettrait de vous« allouer de nouveaux appointements. »

Pour lever les scrupules légitimes qu'auraitpu avoir le préfet apostolique d'accepter desfonctions qu'un autre remplissait si digne-ment, le chef de la colonie ajoutait « M.le co-« lônet Maingard n'ignore pas la démarche

« que jetais auprès de vous; cet estimable& officier ne s'est chargé de 1:1direction du<?collège que par intérim et jusqu'à ce qu'on« pût trouver quelqu'un qui convînt à cet« emptoi; il a d'autres occnpations et se« trouverait ûatté de remettre dans des« mains aussi dignes que les vôtres, le dépôt

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BUM.ETnt DE LA SOCIÉTÉ

<Lprécieux qui

lui avait été confié momenta-enément'. ?»

Paquiet repoussa ainsi l'offre qui lui étaitainsi faite et, moins de deux mois après, il sedonna la mort par strangulation

Vers la même époque, Duhau, dont l'inap-titude s'était révélée, fut remplacé, commeproviseur, par le curé de Sainte-Marie, l'abbéCottineau, qui ouvrit un cours d'anglais 3.

Les détails dans lesquels je viens d'entrersembleront peut-être minutieux; mais ils fontvoir par quelles singulières vicissitudes apassé le lycée de la Réunion à sa naissance.

L'enseignement primaire des garçons su-bissait des épreuves encore plus graves. Ilavait fallu, pour des motifs que la correspon-dance particulière du gouverneur faisait con-naître renvoyer en France deux des six frè-

res reçus en mai 1817. Un troisième, le frèreFlorent, dont la conduite avait été excellente,s'était rendu à Pondichéry pour y recevoirles ordres majeurs. Dès lors il était devenunécessaire de fermer l'école de Saint-Paul etde demander instamment au ministre d'au-tres frères. Je dois ajouter que ceux qui res-taient dans l'de, sous la direction du frère

1 Lettredu H avril <820.9 Lettre du gouverneurau ministre, du 13 juin

48M,n*200 Paqnicta été t.rnuv'3mortdanssa<hant-brCyS'eiantpendu« à la targetted'une porte ».

3 Voirtes numérosde h FeuilleA<'MoMM<~«<rcdu 28 juint't du ~juiuet ~<L ·

MpScbodu 44 avril 1819.

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DESSCIENCESETA&T8

Benezet, était loin d'offrir, en toutes circons-tances,

l'exemplede la soumission à l'auto-

ritéLes écoles destinées aux jeunes filles con-

tinuaient de prospérer.Milius, qui était à la veille de solliciter son

remplacement, voulut donner un complémenta cette organisation encore imparfaite. Parun arrêté du 1er  juillet 1820, il créa, sous laprésidence du colon 4 Maingard, une com-

mission d'instruction publique composée duprocureur général, du chef du service admi-nistratif, du préfet apostolique, de l'ingénieuren chef, du maire de Saint-Denis et du prin-cipal du collège. Elle fut chargée de surveil-ler tous h's établissements scolaires publicsou privés de la colonie, de prendre connais-sance des programmes d'enseignement etd'éducation proposés ou suivis dans ces mai-

sons, et, en outre, de déUvrer des diplômesaprès examen, sous la sanction du chef  de lacolonie, à ceux qui désiraient se livrer à l'en-seignement.

Cet acte décidait que nulle école ne ponr-rait être établie dans la colonie, ni continuerses exercices, sans une autorisation du com-mandant. Enfin, il frappait d'une peine de

police, et,en cas de

récidive,d'une

peinecorrectionnelle, toute personne reconnue cou-pable d'avoir tenu une école, même gratuite;

< Lettredu comaoaRdantau (tèreAdrien,du 7avrit<8<9.

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BULLETtN DE IA SOCIÉTÉ

sans s'être confoirnée aux prescriptions ci-

dessus1.Le mois suivant, Milius institua une so-ciété philotechnique ayant pour objet « de ré-« pandre, dans la colonie, le goût des arts et(les sciences, d'y propager les connaissan-« ces utiles, et d'y introduire les machines« qui économisent l'emploi des forces' de« l'homme ainsi que les procédés propres à« améliorer l'agriculture ». Maingard fut élu

vice-président, Hugot trésorier, et Gtbcrt desMoliércs, secrétaire perpétuel de cette sociététrop éphémère, dont la présidence fut réser-vée, par les statuts, au chef  de la colonie, quis'était fait inscrire au nombre des membresfondateurs

Un acte du 3 octobre 182?, additionnel aurèglement du 24 décembre i818, décida qu'au-cun élève ne serait admis au

collègesans une

autorisation du gouverneur; qu'en cas demaladie, le proviseur serait remplacé par leprofesseur le plus ancien; que les ordres dedépenses journalières pour la nourriture desélèves seraient soumis a l'approbation du co-lonel Maingard; et que a toutes les autres dé-penses un peu importantes ne pourraientse faire sans l'ordre du commandant.

Enfin, pour terminer le bilan de ce que iitMilius, dans l'ordre d'idées qui nous occupe, je dois rappeler que, par dépêche du 2i avrili8d9, il avait proposé la fondation d'une école

 j_

< Bull. 0~. Réunion,3' édit., t. If, p. 74.2 ~MM.off. B~HtoH.2'éJit., t. H, p. 81.

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DESbCïBNCESETAM8

de droit à Saint-Denis, « Les résultats pro-a duits par le collège, disait-il, seraient plus« sérieux si les élèves avaient la perspective

de recevoir une éducation plus complète« sans quitter le pays. » Il avait eu pourinspirateur, dans la circonstance, l'avocatLesueur, (lui exerçait alors près les tribunauxdu pays. Dans une lettre du 4 avril, le com-mandant remerciait le futur doyen de notre« école de jurisprudence)) » d'avoir fixé sesidées sur cet

objetd'intérêt

publicN.

L'un des premiers soins de Freycinet, quisuccéda au baron Milius, fut de refondre tesactes des 24 décembre 1818, 1er juillet et 3octobre 1820, de les réunir en un seul, en lescomplétant.

L'ordonnance qu'ii prit, à cet effet, le 28 juillet d821, se divise en six titres le pre-mier a trait à la composition et aux attribu-

tions de la commission d'instruction publi-que le deuxième, au collège royal le troi-sième, aux institutions particulières; le qua-trième, aux recettes et dépenses relatives àl'enseignement; le cinquième, aux contraven-tions et peines enfin, le sixième, aux re-couvrements des droits, aux instructions etpoursuites contre les débiteurs.

Sa promulgation amena le remaniement

de la commission d'instruction publique dontla présidence demeura confiée à Maingard4.Bientôt après, en considération des services

rendus à l'enseignement par Gallet, son pen-

< ~tK. off. Réunion,2' édit., t. II, p. 08 et 205.

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BiM.t.BTm M LA SOCÏËTN

donnât fut érigé en succursale du coltègeroyat. La conséquence de cette mesure était defaire admettre, a un même concours et à unedistribution des prix unique, à la fin de cha-que année scolaire, les élèves des deux éta-blissements

La dotation annuelle du collège, notoire-ment insuffisante, fut portée à huit millefrancs ce qui permit d'améliorer un peu letraitement du

personnel,dont Les services

avaient été jusque-là très imparfaitement ré-munérés.

Rabany, nommé proviseur, fut, en mêmetemps, chargé ,de la classe de seconde. Ilétait toujours assisté de Jamin. La chaire demathématiques était momentanément va-cante

VIÏI

Je termine jci ce récit. La suite est pres-que de l'histoire contemporaine; elle est con-nue, au moins do mes compatriotes de Filede la Réunion, et c'est surtout eux, je doisl'avouer, que j'ai pensé en écrivant les lignesqui précèdent, car des faits qui n'ont qu'une

< Ordonnancedu 5 octobre<82t (ML 0~ 2' édit.

t. Il, p. 209).3 Ordonnancesdu <5décembre18~ et dn 3<mars

<823.(Bull.off. jR~tMtom,2' édit., t. 11,p. 236et 328).3 Ordonnancedu 29décembrei83i. (Bull. o~ a*

édit., t. M, p. 240.s

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OES SCHMCSS BT AMCS

importancelocale attirent

peul'attention des

personnes étrangères aux lieux où ces faitsse sont déroulés. Mes compatriotes saventà quels hommes sont dus l'accroissement etla prospérité des établissements scolairesdont je viens de rappeler les modestes origi-nes, et qui abritent aujourd'hui plus de douzemille écoliers. Peut-être étaient-ils moinsbien renseignés sur la période que je viens de

parcourir et que deux motifs m'ont détermi-né à retracer.Le premier 'de ces motifs, c'est qu'on ne

doit jamais laisser dans l'oubli les noms deceux qui ont contribué à nous doter d'institu-tions .utiles. Le second, c'est que l'un desmeilleurs moyens de nous attacher à uneœuvre d'iatér~t public, est de nous montrerque, loin d'être le résultat d'un eiîort passa-

ger, elle est le produit de dévouements accu-mulés, de sacriiices persévérants. Or, il nefaut rien négliger pour éveiller la sympathiela plus vive autour de nos oeuvres scolaires,coloniales; ou métropolitaines. Cette sympa-thie fera mieux comprendre qu'il est néces-saire de les soutenir, et de leur donner, al'aide de transformations successives, une or-ganisation complètement en rapport avec les

besoins qu'elles doivent satisfaire, en harmo-nie avec tes principes sur lesquels reposent.nos institutions.

Malgré son isolement au milieu des mers,malgré l'exiguïté de son territoire et de sest essources, l'ile de la Réunion a pu se créerune place Jionorable parmi les pays qui con-sidèrent que le premier devoir de toute com-

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MJiJLBT!tt DE LA SOCIHT~

munautê sociale est de fournir à chacun desmembres qui la composent lés moyens de dé-velopper ses facultés naturelles. L'essentielest qu'elle se maintienne au rang où elle s'estélevée peu à. peu~et ne compromette point,par une dangereuse inertie, les résultats ob-tenus. Ne pas avancer, c'est reculer lorsquetout marche autour de soi. La science ajou-tant tous les jours à ses conquêtes, la somme

des connaissancesà

acquénrest de'

plusen

plus considérable, ce qui impose à chaque gé-nération le devoir de donner, à la générationqui la suit, une instruction de plus en plusétendue, ce qui nous oblige à oSrir,: &nos en-fants, un pain plus substantiel que celui quinous a nourris dans notre jeunesse.

Ce n'est pas tout. Aujourd'hui tés coloniesfrançaises participent intimement a la vie na-

-Monate.Chez elles, comme dans la métropole,les positions les plus élevées sont accessiblesà tous, et tous concourent, par le suffrage uni-versel, à l'organisation des pouvoirs publics.Il ~aut donc, aux colonies comme en France,qu'une éducation coloniale, établie sur delarges bases, vienne au secours de ceux quele hasard a fait naître dans les couches infé-rieures, et permette à chacun de s'élever jus"

qu'au rang que lur assigne son mérite il fautqu'elle prépare de bonne heure le jeune gar-çon à devenir un homme, dans la haute ac-

ceptiondu mot, un citoyen conscient de ses

devoirs et de ses droite et qui ne soit pas&ousl'influence des idées fausses- et des pré-

 jugés qu'engendre l'ignorance, le jour où ils~rendra au scrutin pour se prononcer sur la

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DES SCBBNCES ET ARTS

23

conduite de ses mandataires élus, pour con-

firmer ou redresser la politique de la repré-sentation nationale. Là-bas comme ici, il fautque cette éducation fasse de la jeune fille,'destinée à jouer le rôle d'épouse et de mère,une femme capable de partager la vie intel-lectuelle de Fhomme auquel son sort aura étéuni, capable d'être la première institutrice deses enfants et de leur donner des notions

 justes et saines des choses de la vie.

Ces résultats ne seront obtenus que parl'amélioration incessante de notre enseigne-ment public, aux colonies comme dans' lamétropole.

DUFOURBRUNET.

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DU PATOIS CRÉOLE

DEL'ILEBOURBON

L'Ile de la Réunion a eu plusieurs fois cette

heureuse fortune, au cours de son histoire,d'attirer sur elle l'attention publique;, aussibien dans la mère-patrie qu'à l'étranger,

En ces derniers temps surtout, et aujour-d'hui encore, ses communications devenuesrapides avec l'Europe, ses relations suiviesavec des pays qui, naguère, la connaissaientà peine, les voies ferrées ouvertes a traversses montagnes étonnées d'entendre siffler la

vapeur dans leurs entrailles de granit, lesdeux ports qui se creusent sur ses plagestourmentées et, enfin, le bruit du canon dela France qui retentit à côté d'elle et en par-tie pour elle, toutes ces choses d'autant plusgrandes qu'elle est petite, ont jeté un nouveléclat sur notre chère Colonie.

Il n'y a pas jusqu'à son patois créole quin'excite la curiosité des

gens du mondeet

cela, de Paris en Autriche.Voici qu'un savant professeur de l'Univer-

sité de Gratz, en Styrie, veut le faire entrerdans une monographie philologique dont ilprépare en ce moment même les éléments.

Puisqu'il en est ainsi, je ne veux pas laisseréchapper l'occasion de dire, moi aussi, monsentiment sur cet intéressant sujet.

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B~LLETtNM LA.SOCitM

Ma foi, je mettrai toute modestie de côté,et j'en parlerai avec l'autorité que me donnentma qualité de créole et le souvenir de mesdialogues d'enfant avec les petits noirs de lamaison paternelle.

Il est bon, d'ailleurs, que l'on cherche àfixer ce langage original, à nul autre pareil,qui va se perdant chaque jour, à mesure queles livrés de notre vieux Lhomond. pénètrentchez les plus infimes d'entre nous.Mais, est-ce un patois que le parler popu-laire de Bourbon ?

Oui, parce qu*il est un « langage particu-lier à une province qu'il est né de l'altéra-tion de l'idiome~.d'une nation H, pour écrirecomme les dictionnaires mais il diffère es-sentiellement des patois proprement ditstels, par exemple, que celui de la Bourgogne,de la Picardie, de la Provence, qui sont faitstout d'une pièce, avec des mots 'pour chaqaeobjet à désigner, pour chaque idée à émettre.

Il diSèr~ de ces patois, et, ceci est caracté-ristique, parce qu'il est composé exclusive-ment de mots français, les uns restés entiers,les autres seulement modifiés, d'autres, enfin,ou raccourcis ou allongés ou retournés (il

faudraitdire

contrariés),comme si leurs créa-

teurs s'étaient fait un jeu d'en déplacer leslettres, tout en conservant les traces de leurorigine et les signes de leur nationalité. Il estdonc loin de ressembler à ses grands parentsde France, notre patois créole.

Et, puisque je parle de son origine, c'est icile lieu de relever une opinion rapportée jus-que dans Iss livres à savoir que le « créole

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DES SCIENCES ET ARTS

est unfrançais altéré,

mêlé à une foule d'ex-pressions et de mots empruntés aux marins,cafres, malgaches, indiens, etc~p

Que le créole soit un français altéré, je leveux bien mais qu'il ait été créé avec desmots mêlés de cafre, de malgache et d'in-dien, je puis d'autant moins l'admettre que

 je ne trouve aucun de ces mots là dans saphraséologie générale.

Les mots cafres et malgaches les Indiensn'ont rien à faire ici, mots très rares, quetout le monde emploie aujourd'hui, ne s'yrencontrent que. dans les désignations delieux. Ils proviennent, évidemment; des an-ciens marrons, les noirs MOM~eema~commeon les appelait alors, qui, fuyant à l'inté-rieur de l'ile dès leur débarquement dans laColonie, ont baptisé de noms pris dans leur

dialecte respectif (plutôt malgache que cafrc)quelques-unes de nos montagnes, certains'sites de nos forets qui leur rappelaient lepays pour eux perdu et qui nous rappellent,à nous, au contraire, la découverte de notreIle.

Mais à induire de là que notre patois créoledescend des insulaires de la côte d'Afriqueet de Madagascar, il y a loin. `

Autant voudrait-on dire que la langue fran-çaise est mêlée de mots italiens et anglais,parce que nous avons pris à l'Italie et à l'An-gleterre, par fantaisie et par mode, quelquestermes techniques quand nous parlons « mu-sique et sport. »

Non, le langage- populaire de Bourbon, le

créole~ne doit rien aux dialectes dont se ser-

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BUMLETÏN DE LA SOCl~T~

vent MM. les Hovas et MM. les Macouas ilest tout français, français bizarre, excentri-que, mais fort doux et fort gracieux.

`

Il y a une autre particularité qui distinguele patois de Bourbon c'est qu'il n'est pointparlé absolument de la même manière parles diverses castes ou classes de notre popu-lation.

Ainsi ceux de nos compatriotes qu'on qua-Iine, à la fois, de créoles de 60~, de petitscréoles, qui descendent des premiers coloni-sateurs de l'ancienne Mascareigne, qui sesont retirés sur les hauteurs à mesure qu6 lelittoral se peuplait de nouveaux venus, em-portant avec eux'leurs mœurs, leurs habitu-des agrestes et l'indépendance, cette soeur aî-née de la Liberté, eh bien, ces' créoles-là ne

prononcent pastes

syllabestout à fait comme

les noirs indigènes, et ceux-ci, à leur tour,ne s'énoncent point comme Ips cafres et lesmalgaches que l'esclavage et l'immigrationont naturalises che~nous. Je laisse tou-

 jours de côté les indiens.Pour les créoles – les petits créoles ils

ont ce parler qu'on appelte vulgairement par-ler gras et, en même temps qui le croi-

rait ? très emphatique, agrémenté d'into-nations gutturales des plus marquées.-Ils abusent étrangement de l'accent grave;et ils emploient, en les rendant risibles, desexpressions relativement relevées, d'un fran-çais qui leur a été légué par leurs ancêtres,les « bons blancs », comme ils le font remar-quer avec une vanité qui remonte aux pre-miers âges de la Colonie.

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DESSCIENCESETANTS

Ainsi, supposonsune rencontre entre deux

descendants de ces < bons blancs. ? Ils s'a-bordent

– Ah!via Dessaline, quouq y dit, moncréole (crai-ole).

– Mafoi, pas grand çose, mon brave Mail-lott, inque tantine Zézette que la perde soncien, l'attrapé juin dM~stûM de mayoc

&OM~M.Dis pas, don, le pauve Cascavelle l'asuccombe (succombait.)– Voui, mon créole, c'été fin famé cien, inbon çassêre de tang.

Voulez-vous une pareille rencontre entredeux noirs indigènes?

Ah via Zean-Baptiss, qué nouvelle ?

Nouvelle n'a point.Zautt la dit malhère l'arrive la case tontantine, ma Phrasie.

N~apas rive malhère, inque le cien tan-tine Fa crévé

Tout de bon, son zoli ptit cien coton là?Voui, ça minme.Quoué ça que Favé ?L'avé

dijisjion mayocboui.

Voulez-vous entendre deux cafres s'entre-:tenir d'un même malheur: la mort d'un chienarrivé récemment ?

Bouzou quou qui di à vous ?Eh, eh, li là, ça va, ça va coume ça

minme.

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BULLETINDELASOCIETE

– Mai zou dilà,

vony

mace tout selaquou!éLacouti?(Langouti).

Ah! vou y conné pas?. Lacouti limot.

– Li mot! qui malade li cien la la gagné ?– Mayoc la fé mot à li, Fattape douzous-

soh. Li la fini là mainme.

Saisissez-vous, Messieurs, la diNérence, etremarquez-vous que plusieurs des. mots res-

tés français dans la bouche des petits créoleset des noirs indigènes ne se font plus enten-dre chez les cafres ?

Mais revenons aux c~o~ de bois, noscompatriotes, chasseurs de merles et de ca-bris marrons ils ne se contentent pas d'en-

 joliver la langue française, de la façon quevous savez, ils prétendent.encore de la doterde

qualificatifsdont certains, du

reste,ne dé-

plairaient peut-être pas à FAcademie.Certes, ils ne se sont jamais doutés qu'ils

avaient l'honneur, en cela, d'imiter Corneille,J.-J. Rousseau, Napoléon (~) ils ne s'imagi-nent pas que, depuis trente ans, il y a nombrede locutions nouvelles qui ont pris droit decité dans nos dictionnaires, maisils adorent lenéologisme, et, partant ils ont créé et ils créent

tous les jours des adverbes, des noms, despronoms, des adjectifs, surtout des adjectifs.Ainsi ils disent b~zardier, bazardièrè (de

bazar), pour désigner celui ou celle qui vend,qui colporte dans les rues des légumes budes fruits.

w

(t) Invaincu, investigation, idéologue.

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DESSCïEKCSSHT ABT&

~4

Ils ont inventé le mot e~6<tfa~e, ~M&6tf<t-

<cse,c'est-à-dire faiseur, faiseuse d'embarras.Ce mot là nous a paru si expressif quemême les plus lettrés d'entre nous l'emploientusuellement, en le francisant tout à fait, sanségard pour l's final de son étymologie.

Ainsi tout le monde dit ceci, un peu pardérision, il est vrai, un embarrateur.

Ils ont deviné le vieux substantif  ecgaceM~

(taquin, querelleur) oublié depuis longtempsdéjà, et ils l'ont rajeuni pour leur usage par-ticulier, en le prononçant e~c<~e.

Je dis qu'ils ont deviné ce substantif, s'ilsne l'ont pas hérité des agents de la Compa-gnie des Indes ('}.

Ils ont qualiné de eM~M~fe, eMt&~s~ lecauseur ou la causeuse qui, suivant l'un, deleurs

dictons,« n'a n'a de miel

dannla

bonce (qui a du miel dans la bouche, qui a,des paroles mielleuses).

Ne crpyez pas qu'il s'agisse ici d'unennu-yeux, de quélqu~un qui, selon l'expressionmalhonnête~ nous embête, mais d'un ehjo-'leur de celui; pour rester dans là trivialité,qui donne des colles.

Le baron de Craque,s'il a jamais existé, était

in e~&e~e. et la femme célèbre qui avait si-gné un bon billet à laCMtre.était~ e~6~~e.

(t) ~aceMr, s. m., ancien mot dont on se servaitau figuré pour désignercelui qui pique, qui irrite,qui taquinepar de; paro!<'s,etc. Cevieuxmotpour-rait être réintégré dansla langue moderne(Bescbe-rette).

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BULLETINDELA~SOCt~T~

Ils ont d'autres mots des plus pittoresques.On connaît leur c~Mï~ ça H~wc, qui veutdire bien plus encore que notre je ne sais~pOM~MO~.

Ce « comme ça même est une réponsepour toutes les questions auxquelles on ne,peut ou l'on ne veut pas répondre.

Ils ont aussi in &<w jp~ (un bon peu) pas

beaucoup,mais

phis quepeu, très

suffisam-ment, dans une mesure convenable.Veulent-ils déterminer la quantité de rhum

qu'il importe de verser dans un verre, pourun vrai co<~?de sec de créole, ils recomman-dent la mesure des ~Ma~e~o~s fanés.-

Vous voyez d'ici quel peut être ce cocp desec de ~MO~~û~s ~M~ les quatre doigts de

la main, ouverts, écartés, in~és, du verbe fa-

nev, (étaler le foin).II ne faut pas oublier, non plus, le mot e<

~M~dont nos emphatiques se servent commepour déprécier un terrain où il y a de grossesroches, des caps.

Remarquez que cette expression n'est ha-sardée qu'à demi, puisque nous en avons lescousins germains dans les mot p~?'eMa~ yo-

c~eM~ Mca~eiM' sol pierreux, montagnerocheuse, terre rocailleuse.

L'un de leurs plus jolis barbarismes est ce-lui qu'ils commentent avec le mot pM~~c,au moyen duquel ils désignent un terrain,piaf, par oppositit.n à un terrain capeux.

Dosimond m'~ du que tu la venu pro-priéteur que toué l'atrapû cent gaulettcs ja-

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DES SCIENCES Er ARTS

vec ton onc Zean-Zacques Pérott,et que ch'est·

in terre que lé bon? ch'cst pas juin teraincapcux ?

Aregarde Ch'est in platitude depis laroce à Zaquot zisque la caveurne de bras sec.(Aregardc: allons donc, tu n'y penses pas).

C'est ainsi qtra la personne qui nous. dituneénornnte, nous repétons par cette .excla-mation <rPar exemple s ou bien, <c vous

vous moquez. »Ainsi le p?'opWe<eMt'foncier qui possèdeune ~(~t~Kdp, n~a chez lui

« Aucun chemin montant, sablonneux, ma-laise. »

U y a, en outre le mot ~et'&a~)Ke/î~quenous avons à relever au profit de nos néolo-gistes créoles, et qui, dans leur parler ne veut

plus dire « de vive voix j~ mais carrément,sans ambages.Y m'a du toué ce fin faille créole je

l'ai nànqué juin Founé. =– Mâtin, tout d'in coup comme ça ?– Voui, je l'ai flanqué ça fo'&a&?e)M<

(Sur le champ, sans hésitation). =

Ce n'est pas tout ils ont d~ plus cette ma-

nie d'adopter, après les avoir entendu 'pro-noncer en bon français, les locutions dont lesconsonnances leur plaisent l'oreille et ce-la sans égard aux acceptions pour lesquelleselles ont été créées.

Vous venez de voir ce Qu'ils ont fait dumot~c~M<~e,

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SCULETïN DE LA SOCHETÉ

Eh -bieï~ demandez à un c~~ <~e&~s –nous tenons Àcette vieille désignation – de-mandez-lui s'il connaît tel individu.

Dans le cas où il'ne le connaîtrait qu~im-parMtemeat~ il vous répondra qu'il le coa-naît ~MMcA~a~ewe~.

Il est vrai que, cette fois, l'expression n'estpas malheureuse, puisque machinal vent dire&

sans Hitention et que connaître quelqu'unseulement pour l'avoir rencontré par hasard,Mms avoir recherché sa société, c'est; en eifet~le connaître machinalement.

C'est égal, ce mot destiné à caractériser deschoses – mouvement machinal;– a uneétrangeté comique, appliqué aux personnes.

Etque dites-vous du verbe corresp<md)"equi apparaît subrepticement dan~ la phrase

suivante vDeu~ créoles se prennent de dispute danstme case quelconque,~ l'un d'eux voulantterminer le diSerent par quelque chose com-me an pugilat, adresse cette apostrophe a sonadversaire ;<sort~ de/s, m~envé te co~~as-~oM~e.

Cela équivaut à cette menace vulgaireViens, je vais te dojoner ton compte; s

Nous sommes toujours n'est-ce pas, auxmots adoptés ? Eh bien, écoutez

Jpseph/Bidic avait été obligé de recourir àFant~rité paternelle du juge d~ Paix de sa lo-calité, pour rétablir l'ordr,e dans son ménage.Il rencontre, au Bras-Panon, D<M;~ma

  jp~ce~ (Do~itéfils de Fanchette) qui l'abor-de avec cette question

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DES SCIENCES ET ARTS

– Et que ta femme y acoute à toué à cet'hèrc?Ah voui, grâce à Dié, depis que Msié le

 jige de Pai la donne a li zin corruption. (cor-rection, admonestation) cé fin mouton; ytravaye comme m satyre.

Est-ce par ce que sa femme était devenuedouce comme un « mouton que Did~ccom-

paraîtle travail

qu'elle accomplissaità celui

d'un homme-&OMc?

Mais ce n'est pas dans ce langage préten-tieux, dans ce boursoufflàge sans règles despetits créoles, ni dans le baragouin des cafres,qu'il Ëmt chercher le véritable patois deBourbon. <

Il est chezles noirs indigènes, surtout chez

les négresses. C'est là qu'il se trouve danstoute sa verdeur et sa vivacité. Et, -encore,a-t-n changé quelque peu depuis l'émanci-pation des esclaves. qui a fait changer égale-ment, à leur désavantage, il faut bien l'avouer,les moeurs, les habitudes et le caractère deces mêmes esclaves.

y

Voilà comment, hélas! 1 les plus belles, lesplus grandes choses, comme ta."Liberté, parexemple, peuvent amener certains résultatslamentables.

Témoin cette superbe montagne de Salaziequi s'écruutait naguère, engloutissant sous sesdébris fbrmidaMes, ceux-là mêmes de seshabitants qui avaient été attirés à ses piedspar la fécondité de so~ sol et l'abri protecteurde. ses gigantesques remparts.

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BULLETINDELASOCIETE

Oui, ce sont les noirs et les négresses créo-les qui retiennent encore pour eux, et à grand'peine, ce  joli parler bourbonnais. Chc~ eux,

~1 est facile, expressif.Si la phrase paraît devoir être longue, elle

est raccourcie par le retranchement d'an mot,d'usé syllabe; si le récit d'un racontage ne

-semble pas courir assezvite,il lui est donné unautre tour, et cela avec la rapidité de la penséeet au moment même où celle-ci est exprimée.Entendez deux commères se dépotant aumilieu de la rue, parlant en -même temps età qui débitera avec le. plus de solubilité sesrllusions mal sonnantes, ses injures même.(?est merveilleux

Nous avons dit plus haut, que les-petitsaréoles abusaient de l'accent grave les noirs

indigènes, eux, abusent de l'accent aigu:– A cause li là ? ça (il a fait cela).– Ou queléj où ça qui lé ton papa (où est

ton papa, oit qu'il ~est).

Ils ont une prédilection tejlë~ pour le z'qu'ils lui font remplacer plusieurs lettres denotr& alphabet notamment le et le

Toujours moîu va ress ensembe mon

famé voui, ma garde à li (mOin va garde à!i) qu~amême ça que zautt va di.

(Je resterai toujours avec ma femme, quandmême, malgré ce qu'on va dire).y Sans doute de vilains propos pour l'éloi-)gner d'elle.

– Li la /e travaye à moin~li la garde monlardent.

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MS SCIENCES ET ABT6

– A. cause ti tappes mon zenfant, ti croisça zenfant crévére la f~im comme toué, bougde nanère. Ta l'hère m'appelle Zean Batisspour nanque à toué si la guéle.

Qui ça ? toué ? Va-t-en çace ton ZeanBatiss, mène à 11 ici, t'a voir, comme m'aranze à li.

(Amènes-le ici, tu vas voir comme je vaisl'arranger.) (')

– Mn'ami (mon ami) li la ~e ~e à li liapré ~a bime, bime à li.Il l'a injurié à plusieurs reprises

et il;a finipar lui donner des coups, il fa abimé (6êMe).

– 0 toué Marizeanne, où que ti viens.? De-pis ce matin mou y rode à touc. Ti crois moinla prend a tot~ô pour toué couraille partoutdann saincnis, pour aller cacaille, caille dànnla

rie..Toué la yi a moin couraille dann la rieEh bon. mou y vicn voir in aim~e & moin lémalade,~). J,

Co~f~ef, pour com'~ de côté et d'autre,raceuMe?' pour cailleter, babiller, allusion augtoussemeitt de la poule mère ou pondeuse.

Ma cere, voutt poule-la tardra pas r on-de, via li,commence cacaillé.

Si le est la lettre favorite des indigènes;par contre ils n'aiment pas assez la lettre l

(<) ~a~cH~ MM'e<Ht'a~aM~c,soitM!omv'ap-pcUp,<CM~t'tt M;rfa voir ça r<tM30jraccourcispou)'la11clll',toitévuloir et inoi)iva ran.-e,raccoul'~ispouI'1acircon~t~nc.'afind'aller\itc.

(2) Am:M,vo!iàun secondfémininan motami.

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MJÏABKN NUA ~Ctéf~

pour l'employéelà o& elle est

cependantdes-

~Hnée à être prononcée.Ainsi ils diront. ensembe pour ensemble,

capabe pour capable, parera pour pareilCe qui veut dire qu'ils tendent toujours~ et

partout, à rédture leurs mots en. moins desyllabes possibles.

Delà: /7'o~~ pour effronté, placement pouremplacement, Z~M~ pour Agénor, pour

arranger; etc.– Ou caque vou y ress & présent ?– Mou y re~sdann placement Me-sié Z~-

~oî\  II même l'a veni rode à moin pour f~K~son zardin.

Ils ~ont mëm~ jusqu'à dire ~K~ pour in-valide. 1

– 0& quelé vouft frère; n'a n'a' longtempsmoin n~

pasvi à IL

e 1

Comment, vcu y conné pas~ li la partitravayela <K Pointe », laTninela pète coté

la ca~se son bras, à via li la veni ~?~6

Souvent ils dirent Me pour avec, commeils dt§ent parfois ma pour moin, ta pour toué.

rIls ne pï ononcent jamais le eh. Aussi, en

parlant, proscrivent-ils la seconde de ces

deux lettres lorsqu'elle suit la première.Exempte

– 6~mtnlà, lé longue mn~ami.

– C~miné-lâ, le haut, va (').– Moin n~a n'a ~~rtn même, depis que

moin la perde mon famé.

(t) L? ca6'&d!Metmtn ? Ktondue,cna!ttelà Khaut.

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DBSëCIENOESETABTS

as

Quant auxgenres,

auxnombres,

il n'en est =tenu aucun compte dans notre langage po-pulaire. C'est-à-dire que le masculin est con-fondu avec le féminin, le singulier avec lepluriel.

DeIà:moM fame, pour ma femme, monsentant, aussi bien pour mon enfant que pourwes enfants.

Quant aux noms, prénoms, verbes; adver-

bes, adjectifs, ils donnent lieu à ce: qu'onpourrait appeler; avec un peu de boursouf-tlure, une perturbation grammaticale

Et pourtant, lorsqu'on entend le langagesi précis, si clair de nos indigènes, on" diraitqu'ils ont l'instinct du.s pouvoir d'un motmis en sa place. »

Ils ne conservent guère, d'ordinaire, lessyllabes finales pleines et sonores, ils les ou-

vrent, les éclairent pour ainsi parler.De Reur, ils feront fière; de menteur ~eM<-

~e de chasseur, pc~sere de -voleur, w~re;de taquin, <c~M~ére; de flaneur, ~e~e; denatteur, /~«er6

Ou bien, ils en changent la désinence. Ilsdiront MïeK~ne pour mensonge, jct~se~epour jalousie, ~Mc~e pour nanan (friandise).

~– Plère pas mon zenfant, ta l'hère man'man va donne à ,vous naname.(Ne pleure pas mon entaut, tout a l'heure

ta maman, moi, va te donner du nanan, (àmanger).

Cemot de naname me rf-ppelle celui deK<m~(MMC,qui. est cafre celui-là, et qui ex-

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BCÏ.LBTIN DE LA 60Cl~T~

prime quelque chose comme balbutier em-barras de s'expliquer sur un fait intéressantà un titre quelconque.

Mou-y pale à vous (c~est un cafre qui seplaint), vou y aponde pas ziss, vou y MaMte-Mam&(moi je parte à vous, vous ne répon-dez pas juste (ziss). Vous hésitez, vous tergi-versez et cela pourrait bien être à dessein,pour ne pas vous expliquer franchement sur

l'objet de la question qui vous est adressée.Que de gens qui souvent namenament sansy être obligés 1

Bien que ce soit incidemment- que je re-viens au cafre, il convient, toutefois, puisque

  j'ai rappelé la prédiclection du noir indigènepour la lettre de faire remarquer celle del'insulaire de la Qôte d'Afrique pour la syllabe

ou avec laquelle il remplace invariablementles syllabes au et on, en même temps qu'il in-terdit à la lettre r l'entrée des expressionsdont il entend se servir.

Exemples0 vous, pa Â~or, y timbe beaucoup la

plie la haut Brilé ?Ah n~a n~a boMcoupla poulie mainme.

Quoué ç&tapazezautt la fé dann fond

là,hier à sair ?Quou ça tapaze là ? tambou café ça,

(tambour caf?'e ça, tamtam).– Voutt garçon y fé pas rien don, mou y

voué a li maroe, marce dann la rie ?– Laquel, Joseph ? quoM ça li va fé, li

mace coumme ça mainme d~o~,diho (dehors,dehors) li paisse ça pitit MO!là.

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DESSCIENCESET ABTS

Vous voyez quelle horreur il a des au, desOMet des r, ce vieux macoua.

Je n'oublie pas que si nos noirs indigènesn'ont pas adopté tous les barbarismes quenos petits créoles emploient avec emphase,tels que, par exemple, cope~a?,p~~M~, cor-ruption, cr~o~, qui réclament une pronon-ciation particulière et nette, ils ne manquentpas, cependant, de s'emparer des mots crééspar leurs aines et qui entrent dans

!eurma-

nière de dire, dans leur diction.Exemples

Quoué ça ton papa y fé la basjsainti-zanne ? Lé touzours cocé li ? (il est toujourscocher ? )

Non va, li la rente bazardier à ce t~hère.

(Il est entré, il s'est fait bazardier, à cette heu-re, maintenant. )C'est comme si nous disions a quelqu'un

Qu'avez-vous fait de votre fils ? et qu'ilnous répondrait

Je l'ai fait entrer dans la Marine.

A bas, ress tranquil don, vec ton Zoson(Joson), cé fin em&cM'm~'e. e

– Ma cère, comment ti pé acoute ptit noirlà, ti conné pas cé tin em&e~re. Et que li lécapabe sogne à toué, qua même li va mariéavec toué ?

Ti croué li va embête a moin (ou v'em-bête à moin? ) Lé tard

Voilà encore une expression à noter.

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BtILtETiN DE tA SOBJÈ1Û

Létcfrd'li, c'est-à-dire il ne s'est pas levéassez matin pour cela il s'abuse, le pauvre

Cette sorte de défi parait avoir remplacécelui de navé hTeien pour nïrinse lfailt qui nese dit plus que fort rarement aujourd'hui, etqu'on entendait à chaque instant, il y a un«vingtaine d'années,

Pends gare à toué oui, si ti sa va soncase li va flanque à toué.

– Navé le cfen pour manze l'ail. (C'est çaqui n'est pas vrai, par exemple.)

A cause toué la fé ça, Guistine ?GoMme pamêma, manman. (Je n'eu sais

rien, je l'ai fait sans but, fans motif, tout na-turellement.)

Ceet comme ça même est une réponse àtoutes les questions auxquelles on ne peutou Poix ne;véiat pas répondre,

– Quandli la donne à toué maïs là, li ladonne à toué in sae entière 1

Li n'a pas donne à moin in sac, maili la donne à moin in bon pé.

Etcelui des deux interlocuteursqui a reçule maïs se tient pour satisfait.

Nous terminons ce paragraphe par deuxaphorismes fort employés par MM. les noirs

  j et mes dames les négresse. L'iin est à l'adres-so des présomptuenx,des inconséquents, desprétentieux.

«.Sa langue n'aipoimtlws.»

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DES.SCIENCESET ABTS

C'est-à-dire qu'elle est légère mobilequ'elle se remue aussi bien pour affirmer unechose raisonnable que pour avancer une énor-mitê. Et, ce n'est pas étonnant, rien ne lagêne dans ses mouvements elle n'apo nt d'os.

– Ti voué grand palmiss si piton, la ri-vière Bitorlà, mou y parié moin va sorte icidé zères

dmatin,mou-a arrive là haut à la

brine– Tou'é?lVoui moin. 1

– Y voué bien la langue n'a point faos.

L'autre aphorisme ou maxime, est destinéaux ingrats. •

v

« Vouy nourri lé cien, in jour Umordeà t'otts. »

(Vous nourrissez un chien, et un jour ilvous mord).

l'C'est ainsi qu'en semant le bien on récolte

le mal; que la bonté engendre l'ingratitude.Et c'est à propos de « l'ami de l'homme »

que les noirs rappellent cette désolante vérité

Messieurs, on a fait imprimer plusieurs fois,

dans la Colonm, des fables et des chansonsécrites en langage créole.Eh bien, on peut avancer en toute véritéque les auteurs de ces fables et de ces chan-sons ont peu réussi.

Ah 1 c'est qu'il est très difficile d'écrire leparler populaire de Bourbon, et surtout .del'écrire en vers c'est là où Boileau n'auraitpas fait obéir ia rime «omme « une esclaves,

Page 200: Bulletin de la Société des Sciences et des Arts de l'Île de la Réunion, 1884

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BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ

Nous allons chercher à justifier cette asser-tion par l'examen des documents qui nousviendront sous la main.Nous commencerons par les fables de

M. Héry, la première production littéraire,croyons-nous, qui ait été- publiée en notrepatois.

M«Héryétait un homme

d'esprit, instruit,plein de bonhomie, d'une aménité proverbialeet personne mieux que lui, parait-il, ne savait

Qu'un ami véritableest une doucecliase»

On comprend qu'avec de pareilles quali-tés et de tels sentiments il devait, par quel-que côté, ressembler au bon Lafontaine. Il adonné une preuve durable de eette heureuse

ressemblance, en cherchant à imiter notreclassique « bonhomme », c'est-à-dire en fai-sant parler des bêtes, et encore en les faisantparler malgré leur répugnance à s%xprimeren erêyole or eryols a n

Mais M. Héry? cet excellent homme, étaiteuropéen et s'il connaissait le français, lelatin et le grec, c'était qu'il avait appris legrec, le latin et le français tandis que lan-

gage payé Bourbon, c'était seulement depuisson arrivée dans la Colonie, remontant, il estvrai, à quelques années déjà, qu'il l'avait en-tendu employer autour de lui.

Pouvait-il ainsi rendre fidèlement sa penséeen cc même langaze, lui un lettré, qui ne de-vait se servir dans son style de professeur debelles lettres, que d'expressions justes et de

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bESSCIENCESETARTS

phrases, correctes? C'eût été tenter l'impossi-ble.Aussi, j'estime qu'il n'attachait pas grand

amour-propre à écrire ses fables elles meparaissent avoir été, pour lui, comme un purpasse temps.

Et cette appréciation qui est aussi celled'un de ses parents me sied d'autant plus,qu'elle lève les scrupules que je pouvais avoir

à l'idée de critiquer l'œuvre d'un homme dontle cœur et, l'esprit le rendaient des plus re-commandables. i I.

Et l'observation que je viens de faireJiMes-sieurs, à l'égard de M. Héry, en sa qualitéd'européen, je puis la renouveler pour noscompatriotes qui vont achever leurs étudesen France et qui à leur retour au milieu denous, veulent écrire langaze crêyole.

Ah ils nous reviennent, nos compatriotes,des hommes distingués, aimables, ayant desconnaissances variées ils nous reviennentayant gardé la mémoire du cœur à leurs pa-rents, a leurs amis, à leur pays, mais ils ontoublié le dialecte qu'ils parlaient dans leurenfance, ils n'en retrouvent plus les termesprécis, les prononciations exactes, les tour-nures de phrases, les nuances diverses quien colorent la forme. »r Et où. donc en auraient-ils conservé le sou-venir juvénile ? est-ce dans les lycées de Pa-ris, aux écoles de droit et de médecine, auQuartier Latin ? non assurément.

Nous l'allons montrer tout à l'heure.

Voyons les fables de M. Héry. Je n'en exa-minerai que deux ou trois, par cette double

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BULLETIN DE LA SOCIETE

et bonne raison qu'elles prêtent toutes auxmêmes redressements de langage et que, pourles analyser toutes, en votre compagnie, il mefaudrait trop demander, Messieurs, à votrecourtoisie habituelle

La première de ces fables est Intitulée laCigale et la Fourmi avec ce sous-titre Lafourmi ensembl' li grélé (grelet, grillon, cri-

cri ).Nous faisons remarquer tout d'abord quela fourmi est français, ensembl'"aussi, malgrél'apostrophe qui nous invite à ne pas pronon-cer l'e final.

Dans li grélê, il n'y a que grêlé qui soit ducréole

Quant au pronomlî, il figure là en intrus,attendu qu'il « s'est introduit en cet endroit

sans avoir qualité pour y être admis »Pourquoi ? parce que li ne veut pas dire le,mais il, luif  elle

Exemples Moin la vi à li, mais ? n'apas vi à moin (moi je Vai vu, mais lui ne m'a

pas vu) ou bien, li la vi h moin, moin n'apas vi à lîf (il m'a vu et je ne l'ai pas vu)

Moin la vi voutt lame, ce matin, quandli la passe ptit bazar.

Voui, li la di à moin ça.De sorte que M. Hory, alors qu'il entendaitécrire le grêlé, écrivait il grêlé ou lui grêlé

ou même elle grêléII résulte de cette simple remarque qu'il

n'y a que le nom de grélé qui appartienne aupatois créole, dans le sous-titre de la -fabledont nous nous occupons ici.

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DESSCIENCESET ARTS

2G

Il convient, dès lors, après avoir élagué •certains autres mots do ce même sous-titre,de le rétablir de cette manière a Fourmiensembegrêlé »

Arrivons à la fable elle-même.« Au bras sec dans l'pli haut d'Brilé. »Au bras sec est français, dans également

les mots l'pli haut d'Brilé,malgré

lesapos-trophes qui les décorent, n'ont pas davantagele parfum du terroir. 1

Ainsi il faut remplacer au bras sec,par làbas bras sec, dans par dann écarter fcpli et

 jeter dehors l'apostrophe du mot Brilé,Nous aurons alors le vers créole suivant« Là bas Bras sec dann haut Brilé »

Nous sommes au second vers« A proç fricé ma Véronique » 1Ah voilà la calvacade des apostrophes qui

a disparu, les h ont été mis de côté aussi lemot proche est écrit comme on le prononce,ou à peu près, soit proç. Peut-être convien-drait-il, toutefois, d'ajouter au ç cédille ilme semble que je fais un mot peut-être,dîs-je, conviendrait-il d'ajuster un e muet au

mot proçe," pour bien en fixer la prononcia-tion.Et pourquoi ce vers est-il couronné d'un

« a proce » (approche) au lieu de « proce »(proche). Cette voyelle a précédant ainsi lemot proce n'est pas plus créole que l'articlela devant fourmi, que le mot au mis devantBras-sec.

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BTOtETIS DE tA. SOCIETE

II est vrai que cet a enlevé, le vers nemarcherait plus sur les huit pieds dont il aété pourvu, Il n'en aurait plus que sept. Cequi veut dire qu'il convient, ainsi que je l'aiconseillé plus haut, d'accrocher un e au motproee pour le faire de deux syllabes.

Alors ce second vers de la première fablede M. Héry serait écrit de la façon suivante

« Proce fricé maVéronique, »Proce près, fricé défriché.) <

,Toutefois eôiê fricé serait mieux que procefricé.

Voici le troisième vers« Iïavait ein s'en mêler grêlé. »C'est Vavé qu'jl faut ef non l'avait, par les

m6tifs déjà déduits ci-dessus, au sujet ducons-tant emploi de l'accent aigu-' par nos indi-gènes.

•; •

Quant a l'adjectif  un, devenu in dans notrelangage populaire^nousnous demandons pourquel motif  on a paré son front d'un e muet ?]1nous semble, cependant, que in i, n, serapproche davantage de un u, n que etne, i, n.

– Il y a, en outre, une modification qu'il im-porte d'apporter dans l'orthographe de cemot. Je Veux dire que, bien qu'il reste tou-

 jours du genre masculin, il est cependant pro-noncé différemment, selon qu'il, se trouveplacé au commencement ou à la fin d'unephrase.

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DES SCIENCES ET ABTSr

Exemples 0 toué Guistîn; commentdann bataye là, zautt dé Moncéry la gagne lecoups ? (ou gaigne le coups)

– Eh ben, moin l'avé in baton; li l'avéirine, nous la tape à nous l'in à l'autt

Toué n'a n'a in zoli çapeau' là, Zean-Lui ?

Dédé n'a n'a inne pli zoli que lamienne.

Donc le mot in doit être écrit, avec un oudeux n, suivant les cas à moins dèll'écrireavec deux n ét deux e, enne, ce qui, l'éloi-gnerait, par trop, de son étymologie. |i

Du reste, dans les écrits de M. Héry, dontnous nous occupons ce soir, l'auteur, encertains endroits, s'est souvenu de cette dif-férence de son, et il a tenté d'en tenircompte. e'

l r

Restent léstrois

derniers mots du vers«rS'en mêler grêlé. »

Ne parlons pas de grélé, nous avons ditque ce nom était tracé en créole mais s'enmêler Un s'en mêler.Bavez-vous, Messieurs, ce que c'est que ces'en mêler grélé ?

C'est un s'enntélère et un s'enmélère est^un individu qui s'occupe d'une chose étran-gère à sa profession, à ses habitudes.

« C'est ainsi, dit Bescherelle, qu'il n'ap-« partient pas à un cordonnier de se mêler

« de peindre. »« Un poète ne doit pas- se mêler de com-

« bats, avoue Voltaire, »

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BULLETINDBLà SOCIÉTÉ

Cequi ne l'empêchait pas, ce grand scru-puleux, de se mêler « de tout et d'autres cho-ses encore. »

Remarquez que c'est par le rapprochementdu pronom personnel se et du verbe mêler

que Je substantif  s'enmêlère a été formé.Un s^enmélère désigne donc un individu

qui se mêlô d'un art ou d'un métier qu'il sefiguré savoir et qu'il ne sait pa£, ou qu'il jse

donne pour connaître et qu'il ne connaît pas.Demandez au bonhomme François, si Zean

Zacques qui ress côté li, dann fond Lata-niers, lé in bon zouvrier.

Il vous répondra iLi travaye de bois, voui, mai comme ça

môme,li s'en mêle, s'en môle..– Et son frère Lui Mkrie*!

– Ah bas, ce fin $utfcs4ennîélère.Jean Jacques et Louis Maria sont dès lorsclassés ce sont de médiocres charpentiers.

Boileau avait deviné le s'enmêlère de laRéunion lorsqu'il donnait' à ses contempo-rains ce judicieux conseil

Soye2plutôt maçonsi c'est votre tâieat.

Est-ce qu'il n'y aurait pas aussi, de par le-monde, des s'enmélères de sentiments ?

M. Héry n'a donc pas traduit sa pensée enécrivant le mot mêler d'après notre orthogra-phe. Il était tenu' d'y ajouter un r ou un emuet, de façon à produire le son mélerr, mè-lère.

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DES SCIENCES ET ABTS

Deplus,

ces mots « s'en mêler » donnentlieu à une véritable confusion de sons, euégard à l'expression de sang-mélé

Il importé, dès lors, de rectifier ainsi cetroisième vers.

« L'avai in s'enmélerr grêlé (ou lavéj. »En doublant l'r du verbe mêler, on obtient,

à la fois, la consonnance du mot et la mesure

du vers.Peut-être y a-t-il' par là quelque' jchosecomme un hiatus, mais il s'agit, ici, dejpatoiset le vers modifié de M. Héry ne serai pas,pour si peu, mis hors la loi de la

prosodiefrançaise.

C'est ici le lieu de faire remarquer à proposdu redoublement de la lettre r, opéré plushaut, l'avantage que présente cette manièred'écrire les mots1 du langaze créyole, d'après'leur prononciation même. Et j'ajoute, que jene crois pas qu'il soit possible de rencontrer,pour le, rendre fidèlement sur le papier, unprocédé plus'simple, plus ingénieux.

1Me voici, messieurs, au quatrième vers de

la fableque nous analysons

ensemble. Il estencore moins créole que les précédents. Voyezplutôt

« Qui çantait tout l'jour son misique. »Eh bien, le pronom qui se met devant les

substantifs et non avant les verbes ljui ça,pour qui celui-là qui zour, pour quel jour.Aussi n'est-il pas à sa place dans ce <juatriè^

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BULLETINDELA gOCIKÏlî 

me vers C'est un y qu'il faut att lieu du motqui, tout étonnant que cela puisse*'paraître.

Exemples Lavé (ou l'aval in vié eafe làtas la motagne, y zoué zoûé bobo la zournéeentière (et non pas qui zoué).

– Moin la trouve voutt maman y sa va larivière (et non qui sa va).

Çaiïtait, dont on a heureusement enlevéla lettre H, doit être ramené à Qmnté.Quant à tout Jtfaur, (il faut lire zonr),

d'ailleurs nos indigènes disent toute la Mur-née ou la zournée entière..

Remarquons encore qu'ils -ne connaissentni les superfëtations ni les redondances. Dès'l'instant qu'ils ont dit ^que le grelçt-chantait,ils jf ont pas à spécifier qu'if 

chantait

sa mu-

sique plutôt que celle de Rossini.Et surtout ils ne diront jamais musique

pour chanson, comme le leur a fait dire M.

Héry..xII n'y a donc pas un mot de notre patois

dans ce quatrième vers qui, certes, n'est pasfacile à créoliser.

Ainsi, voulez-vous, tout en le corrigeant à

peu près, y conserver le mot mislque'?Eh bien, je vais écrire y çanth y çanth de-pis lmatin zisqu'à soir la misique.

`

Voilà bien l'idée que le narrateur s'est pro-posé de traduire pour ses lecteurs, mais alorsvous aurez un vers égal, en longueur, à l'an-cienne mesure agraire dû la Colonie, la gau-lette de 15 pieds,

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DESSCIENCESET ARTS

Le,voulez-vous complètement rectifié, cevers malencontreux ? le voici tout à fait dans

le « langaze créyole. »«Y çanth y çanth tous 16zotfrs son canton. »

Hélas, lui aussi dépasse la mesure, et lacorrection lui a fait perdre sa rime pour maVéronique.

Je reviens au mot musique et je vous ,prle

de remarquer que, pour être entré dans lelangaze créyole, il n'a pas changé de genrepour cela, il est reste du féminin, aussi) e^t-cel'article' la qui commande invariablement cesubstantif.

Exemples Toué la di toué va veni zoué,ici à soir, toué ii'a n'a la misique ?

(As-tu des instruments de musique ?)– Quand ça ton sœr l'a marié 1i

– L'a marié zédi.– L'avé la misique ?– Ah l'avé même (ou l'avai).

Je n'ai jamais entendu dire son misique niton misique.

Comme Vjon'ai jamais entendu confondremisique avec çanson

– Hier à soir, l'avai la misiquala case ton-

ton Guistave nou la boire, la manzé, çacaincla tire son çansonÆoLa seconde fable est intitulée« L'âne et le petit chien. »Ici pas de sous titre.Disons qu'il s'agit de « Bourrique ensembe

ptit cien »

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BtflXETIN DE LA SOCI T^

Voici les premiers vers de cette fable î « Saint* Sizanne cez bonhomme Zozet. »II faut Saintizaime. On dit Sizanne, ma

Sizanne mais tizanne quand il s'agit de lacommune de Sainte-Suzanne.

Là bas Saîniizanne moin l'avé in cocondiss piass, dmonde la volé. (Un cochon dedix piastres.) )

La case doit remplacer cez `Les noirs ne disent pas être, ,ou aller chez

quelqu'un. C'est toujours mon case, son case.Mou y sa va la case manman.Le proverbe « il n'y a pas de petit-chez-

soi », n?a pas été fait pour euxEt pour Zozet, ils disent Zoseph ou Zouzé.« L'avait ein vié vié %ourriqust. »

Pour la vingtième fois, -l'avait doit êtreremplacé par l'avâ ou Vw&aï.

Il importe également de mettre le substan-tif masculin bourriquet au féminin et de direbourrique, qui est appliqué indistinctement àtous les descendants – > mâles et femelles –de maître Alrboron

Nos indigènes ont même un proverbe qui

consaer©cette

appel la'don>

Ainsi ils disent, sans pitié, en parlant desindividus qui naguère dans l'aisance sont au-

 jourd'hui dans la gêne « Son bourrique laerêyé. »

Je passe au vers suivanta Son dos l'était plein carapaiee.Lisez Pété plein.

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DESSCIENCESET ARTrf 

27

« JJètaît lourdcomme criole batate.

<> ·

Méme observation pour Vêtait.

Le mot lourd ne s'emploie pas en pareilcas, surtout lorsqu'il s'agit de creyoles debois et non crioles qui ne sont jamais lourds,étant des hommes fluets, secs, nerveux

Pour désigner le bourriquet de M. Héry,les noirs diraient in gros gros bourrique.

Etvoyez

labizarrerie en parlant do cer-tains autres animaux, ils n'emploient jamaisle féminin. Vous pouvez les mettre sur

la

voieen leur prononçant le mot propre, Vousper-drez vos paroles.

Dis donc Jules, à qui est cette bel'emule que tu conduisais hier au soir ?

Ça mile me-sié Fancin ça.M. Fanchin élève toujours des cabris ?

 je voudrais avoir une chèvre– Toutt son cabris la crévé, y ress àfli àcet'hère fin ,qu'in sève serment (rien quun

chèvre,seulement)La troisième fable La laitière, et le pot

au lait – n'a pas non plus de sous titre. Jlétait sans doute difficile de lui en donner un.Nous ne connaissons, dans la Colonie, en faitde

Perette, que « malbar y,vende de lai dannferblanc. »

Le premier vers do cette troisième fableest ainsi conçu

-<La vaç, mon cousin Nicolas. »'Non seulement cette tournure de phrase

n'est pas créole (par cette raison qui nous

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BULLETINDE LA SOCIÉTÉ

vient de M, de LaPalisse), qu'elle

estfrançaise,mais parce qu'il n'y a qu'un seul de ces mots,

le mot va& qui puisse être pris pour du pa-tois, encore faudrait-il l'accentuer davantage,en le terminant par un e vace.

Le second vers porte« Dan n'haut d'bilor (vous pé croire).^ »Le troisième 1

e Li mois passé l'était metë bas. »Je renouvelle les mêmes observations faites

plus haut, à l'égard de d?ans, d'bîtor, pê croi-re, li mois, Vêtait mett\ 4

Messieurs, je crois devoir m'arrêter ici,fai suffisamment démontré, ce me._sembîe,que M. Héry, dans ses fables'bourbomiaises,

avait laissé voir, d'une façon .frappante, qu'ilétait européen.Pour écrire langaze payé Bourbon

C'estpfiu d'être poète,41 faut Être. créole.

Mais l'honorable et bon M.Héry était des.anciens je vais passer maintenant aux mo-dernes, à ceux de nos compatriotes qui ontécrît^ eux aussi, en patois créole. Je me bor-

nerai, puisque déjà fai assez abusé de votrebienveillante attention, à relever simplementdans leurs fables et dans leurs chansons, lesmots qui me paraîtront ne pas rendre fidèle-ment leurs pensées.

Et pour que l'on ne croie pas que j'aie,choisi à plaisir, et pour cause, les plus défec-tueuses de ces productions, je vais prendre le

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DES SCIENCES ET ARTS

dernier bulletin de notre Société des Scienceset Arts, celui de 1882, où plusieurs d'entreelles ont été rapportées par un de nos distin-gués confrères et amis.

Ainsi je trouve écrit dans ce bulletin« Ça que voui connaît bien, ma ser. »Ehbien c'est conné qu'il faut dire et non

connait et vou y (vous) au lieu de voui (oui).Et, ce qui est plus sérieux, c'est que cer,dans la circonstance, s'écrit avec

un è'etnonavec un s.J |,

Exemple – 0 vous ma cère, n'a pas vousque l'a marié avec garçon pa Figaro ?

Non ma, cère, mon soer ça (ma sœur ça).C'est-à-dire que cère, au féminin, veut dire

chère et aumasculin,

sœur.Il est, dès lors logique d'écrire le motjpar

un c dans le premiercas, ma cère, et par uns dans le second cas, mon sœr

J'estime d'ailleurs qu'il est de rigueur, lors-que l'occasion s'en présente, de rappeler, au-tant que faire se peut, l'étymologie des déri-vés que nous employons.

A propos d'une sorte de chanson de né-nenne, nous avons également lu des motsécrits ainsi

« Dors mon zenfant.« Çat marron va manz' à vous. »Qui me dit que le t du mot çat (chat) doit

être prononcé ? Et il le doit. Pourquoi aussicette éternelle apostrophe à la syllabe finalede manz' ?

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BULLETINDELASOCIÉTÉ

Cettefois ce n'est pas dans la crainte devoir une voyelle « en son chemin heurtée. »Ecrivons donc« Dors mon zenfant, dors.« Çatt marron va niante à vous, »Çat avec deux t, çatt ou avec t, h; çath

ou"avec t, e, gâte, et manz' avec un e final,manze. Y

Ah il ify a pas à dire, il faut rendre laprononciation -du mot hors delà pas de fa-bles, pas de chansons, pas de contes à écrireen créole

Permettez4noij à propos dfe e&tte mème-prononciation, de rappelej? ici une historietteque la tradition a Conservée aw Palaisr-

Il s'agit d'un vieux lîôir, gardien, venant

déposer en police correctionnelle devant unhonorable magistrat européen.– Dites-neu% demande de magistrat à cetémoin, dans quelle circonstance vous avezarrêté le prévemrîei présent.

1 On traduit la question au vieux noir, quirépond .'noire qui

– Eh ben, moin l'amarre à li avec gatïrAh î ah s'écrie le président avec GatirfJ

)$ disais bien que le prévenu avait un com-piiee qu'il n'avait pu accomplir soûl le mé-fait qui lui est reproché, J'en étais sûr.

– Et quel est ce Gatir? ajouta-t-iL– Eh ben, répliqua le vieux gardien, ga-

tir laloua.– Comment, exelama de nouveau le ma-

gistrat, il connaissait la loi, et il a osé l'eft-

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• DES SCIENCES ET AUTO

freindre ? Par exemple c'est fort Et l'indi-gnation le gagnait.Mais, eh même temps, il voyait un certain

mouvement se produire dans l'auditoire, et leministère public, qui est toujours un peu ma-licieux, sourire sournoisement. Il s'en in-quiéta et ordonna le silence. Puis, s'adres-sant encore au témoin

Dites-nous donc où est Gatir. En quellieu il s'est réfugié ?,– Eh ben, avoua le vieux noir (cbmpre-nant par intuition), Gatir l'a ress

ensemblevolère-là même vl 'v

Ah il a caché son complice, il la dé-robé à la justice répressive de son pays. Ehbien, je vais renvoyer l'affaire à plus ampleinformé.

Ce quiproquo allait continuer, loisqufundes juges crépies siégeant» fit comprendre àson collègue' européen qu'il s'agissait, dansla circonstance, non pas d'un complice ap-pelé Gatir, mais d'une- ligature non pas dela loi mais de Valoès. En un mot, d'une liga-ture en aloès, qui avait servi à garotter levoleur. i

Le Président, qui avait de l'esprit; commebeaucoup de présidents, se mit à rire, et l'au-ditoire l'ayant imité, on eût à notre Palais de

» Justice, ce jour là, l'audience correctioniiellela plus gaie qui se soit jamais tenue aux deux

 îles-sœurs.On croit môme que, par suite, le prévenu

a été mis immédiatement en liberté.

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BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ

Indépendamment de l'impérieuse nécessitéd'écrire les mots de notre patois, selon leurprononciation propre j'en donne l'exemple

il importe également de n'y conserver desexpressions restées françaises .que cellesusitées et pour ainsi dire reconnues, consa-crées. <

Telles que faire, comment, voir, gagner

ou gaigner, hasar, .viens, à cauée, tête, voix*et cœtera.

Il y en a un certain nombre de ces expres-sions demeurées entières dans leur formeprimitive, mais il faut savoir s'en servird'après les règles d'ueage et surtout se garf-der d'y suppléer par d'autres mots qui reste-raient certainement imoempris

Et M. Hêry, pas^plus que nos compatriotesqui ont écrit après lui, ne se sont préoccupésde ce côté délicat du parler créole.

Je vais eiter^en les soulignant quelques-uns de ces mots – quelques-uns seulement,bien entendu qu'ils ont à tort employés

Ainsi hivernage, hardiment, côutïnuellç-ment, fourniment, appart&ment, v&au, mys-tère^ entasser, -emplettes, chagriner, froid etcœtera.

Combien y en a-t-il dans les fables et leschansons créoles imprimées, qui n'ont jamaisété prononcés par nos indigènes noirs. Voilàpourquoi ils ne comprennent pas ces mêmesfables et ces mêmes chansons. Chacun devous, Messieurs, peut en tenter l'épreuve

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DES SCIENCES ET ARTS

Quant à la fable – La truie et la cailleémaillée d'apostrophes, en voici les premiersvers

« Ein zour (ça l'été mimazine). »

Je ne parle plus du mot ein, mais il n'y apas moyen de laisser passer ça Vétém'ima-sine, et le pourquoi, c'est que le mot ça, estde trop, que mHmasine n'étant pas du créole,

doit être remplacé par mou y masineExemples

Comme ça vou-y fé vous l'a parti,parti même, vous l'ablyë à moin ?

– N'a point, moin n'a pas blye à vous,mou y masine à vous toujours (nwu y ma-smé) au lieu de mHmaâine.

Continuons

« Côté Quartier français proch' madam'Desrabinel» t,Côté quartier laisse un peu à désirer, si

'l'on se souvient que les noirs indigènes disenttoujours là bas

1

Là-bas Quartier français. Ils ne disentcôté que pour parler d'endroits rapprochés.

– Li ress côtë moin.– Là bas côté bord la mer: (près, de la

mer.)Quant à français, il doit être écrit comme

on le .prononce françai ou francé. De mêmede proch' qui fait proce en créole et qui pour-rait être avantageusement remplacé par côtémadam' Desrabine. Le mot côté se trouveraitalors à sa place.

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1BULLETINDE LA SOCtETM Il

L'auteur oublie la répugnance que mon-trent les noirs pour le eh.

Mais voici le troisième vers L« Ein truie -s'enva rod* son samL »Rien à dire pour rode son zmni (sauf  l'a-

postrophe inutile, superflue, mise au verberode) mais s'en va n'est pas du langage bour-bon. C'est sa va

qu'ilconvenait.d'écrire.

Voyons le quatrième vers v« Li p'Mt cailV Bourbon, ça soli »D'abord li doit être écarté, .puisqu'il tient t

lieu, nous l'avons vu plus haut, de il ou delui ou de ellë.

`

Exemples– Ça zozèau là, lé plit, mai li vol bien va

(il est petit, mais il vole bien).A guette négresse là, €.on, à cause f^léen lair, comme ça ? l

Je ne veux pas chicaner sur le substantif caille. Toutefois, il serait plus dans la pro-nonciation voulue,- s'il était écrit avec un ysoit caye, c'est-à-dire en lui coupant les lf sans jeu de mots, comme on le fait pour tra-

YCiye, bouTsayç (broussaille), mirage (mu-raille.)Pour le mot joli, par exemple, il doit être

invariablement écrit avec un ê.J'ai déjà fait remarquer que, dans notre

"patois, le z remplaçait le j et le g.

Nous voici au cinquième vers« Ma cer, comment dire manwn truie» »

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1>

DES SCIENCES ET ARTS

28

Il convient de changer dire en dit, et ma-man en tnanman.En outre, je ferai remarquer que Je mot

truie se prononce trouye

Poursuivons« Michant temps ta Vhèr ma vint »Il y a là un double oubli à l'égard du eh et

de l'e fermé.

Ce n'est donc pas michant temps qu'il fautécrire, c'est miçant temps.. 1Ce n'est pas va vini, qui sort du pajtois de

l'ile Maurice, c'est va veni. Et plus \o\ii^randdi l'eau, non, beaucoup dî  Veau If vmtt,non, lvent gros la pluie, non, beaucëup laplie. f 

Exemple

La rivière Sainnis n'a n'a beaucoup dePeau zourdi. iHier soir tvent l'a té fort bord la mer

la tombe beaucoup la plie dann la, rade.L-

Je lis encore dans la même fable« Aide â moi vié nxonâ?vot maman. »Eh bien, au lieu de aide il faut ide, au lieu

de moi il faut moin, au lieu de vot il faut

voutt (youte), et manman au lieu de maman,ainsi que je l'ai rappelé plus hautx Exemple

0 vous me n'ami, Toute bras l'est' plisfort que la mienne, ide à moin in pâ pourlève paqué linze là, m.xnman y aspère à moinla case.

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BULLETINDE LA SOCIETE

<_ À propos dumot moin

(moi),il

y a uneremarque à consigner ici> c'est que de mêmeque le mot int il se prononce différemmentsuivant la place qu'il occupe dans le discours.

ExempleTous les zours mou y voué à li, mai li

y voué pas moin.v – Ti dis moin ce t'in volère, mou y coné

qui ça la di à toué ça.– Ti coné ?– Voui, mou y conéCe moin èt ce mou y deviennent, aussi,

parfois, des .ma^ des im6) des mi et des moua(moi). De même que le toué (toi) devient, àl'occasion, ta et ti comme ci-dessus. Aussifaut-il beaucoup de discernement alors quevous devez employer #ces divers pronoms.

Allez dire, par exemple, au lieu de– Toué capabe fé ,ça, toûé ? (tu es capablede faire^ça, toi

Allez direTi capabe fé'ça UtOu bien tTa capabe fé ça ta..Et au lieu de moin la vi à li, dire me ou ma

la vi â li

Le premier petit noir venu se moquerait devous.Je suis convaincu, du roste3 que ces mots

ma, me, mi, mou, moua, ti, ta, toua, sont lerésultat d'une corruption, d'une altération dulangage Bourbon, dont la~responsabilité in-combe évidemment à ME nos concitoyens,natifs de la côte d'Afrique.

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DESSCIENCESETAlliS

Ainsi, au lieu deMoua dit à li ça.Ta voir ça que va rive à toué

Pour parler notre vrai créole Bourbon, ilfaudrait

Moin va di à li ça.– Toué va voir ça que va rive à toué (rive

pour arrive). ¡

Et au lieu deMi sa va bitation– Ti conné pas ça. j,

Dire i >

Mou y sa va bitation.– Toué y conné pas ça.

Remarquons, en passant, que dans le par-ler créole de l'.ancienne île de France, le moi,

que dans le créole de Bourbon nous pronon-çons moin, se fait entendre franchement m^i.-Mais il a, aussi- son pendant c'est-à-dire mo.Comme

nousavons moin et mou y

« – Moti guette li, li té guette moi. ?Ce motli que je viens d'écrire me fait pen-

,ser qu'il est employé par les indigènes de l'ile-sœur, à la fois comme pronom – lui, il – et

commearticle

le.Ainsi voyez ce joli. séga: ` `Mon mari mo ti contentli (contentlui).

BonDiéfine perendli (prend lui)..Moblizè pereudmalabar,Pour consolmon li cœr (lecœur).

Dans la chanson intitulée Li cœr w'a pasmagasin, insérée au mêmeBulletin, je tecon-

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BDU.ETIN DE LA. SOCIÉTÉ

nais que, par exception, il ya

beaucoupde

mots créolesAussi je regrette que l'auteur ait cru devoir

suivre trop ? auvent l'orthographe irréfléchiede sm devanciers.

Ainsi, pourquoi avoir, écrit Li cœr au lieude le cœur, Icœr Je ne saurait trop répéterque Ii veut dire il, lui, elle.

Pourquoi, encore, n'avoir pas terminé le

nom de Çouçout par un second. t ou par un hou par un e, afin de faire résonner la dernièresyllabe Çpaçoutt, Çouçou^i, Ço'uçoufe.

Je continue« A cam'wijir'f vijvf- é moin ? »

Il faut dire A cause %a y zîre,zire à moin

Exemple î Li êafie^^» à' moînr Li zùuè,ztruê vec maiiî. Li flatte, flatte à li (il flatte

lut).Par grâce* renonçons aiix apostrophes sinous voulons que nos lecteurs comprennentce que nous avons écrit pour eux en notrepatois..

Voieà Pautfe Wth c©«s vi dît mon plûtf  derrière ? »

Je crois que nos indigènes, et cela sans te-

nir compte de la césure, diraient ainsi ce vers:« A cause vou y dit mon place éParrière ? »Pour eux, je l'ai déjà fait observer, vi, veut

dire vu et non vous.Vous la vi à moin Baraçoîs ? Mentère.

Quant au vers suivant8 À catàs*arpousseâ moin dann* coin ? »

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DES SCIENCES EX ARTS

Il convient de le modifier de la sorte« A cause y arpousse à moin dann coin? »

De cette chanson « Li cœt n'a pas maga-sin », je retiens les quelques vers créoles quisuivent, après élagage des malencontreusesapostrophes qui les embarrassent.

« Ress tranquill, moin v'cmbrasse vot pic(voûte pié). »

« Gros comme la case y aime à moin »« Tout ça que voui vé m'a donne à,,vous.»»

A la bonne heure, voilà voui qui reqiplacevi, mais il importe de changer" son i ent^l Vouy, puisque nous savons que voui veut direoui. (

II est aussi question, dans ce même Bulle-tin, d'une autre chanson ayant pour titre

Nounoutte.L'auteur, qui est un de mes-amis, me l'avaitprésentée quelques heures après qu'il l'eûtmise au jour, et malgré les attraits de la nou-velle venue, je n'avais- pas caché au père lesdéfauts que je trouvais alors à sa fille.

Tout récemment encore, je lui en parlais,et lui annonçais mon intention d'écrire lesréflexions

que, naguère, jelui avais faites de

vive voix à ce sujet. Il les retrouvera dès lors,sans surprise, dans'ce modeste travail que jei4e propose de lui adresser par dessus lesmers, aujourd'hui que nous avons le regretde l'avoir loin de nous.

Voici un couplet de cette chanson de Nou-noutte.

°

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BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ

Premier vers« Nounoutte à caus' fa$ cômm* ça même «(à cause face comme ça même).

J'en demande pardon à mon ami l'auteur,mais ce doux reproche formulé de la sorte,pourrait bien être attribué à un immigrantindien. Aussi   je propose de lui donner unautre tour, celui-ci, par exemple

Nounoutte à cause vou y face comme ça 1(pourquoi vous fâchez-vous ainsi, sansraison.)Ou, bien:Nounoutte vou face comme ça même,

(vous vous fâchez pour rien.)Il me parait convenable, en effet, que le

solliciteur ayant à s'adresser à Nounoutte enpersonne, lui dise directement

« A cause vou y face ?»

Autrement Nounoutte pourrait répondre au« A cause face ?»» jToujours dans le patoi$ dé l'immigrant in-

dien « Qui ça face »Et l'auteur, bien certainement, n'a pas eu

en vue pareille réponse.Au sujet du pronom personnel uousf  qui se

change parfois en vouyt et qu'il ne faut pas

confondre avec l'adverbe vonî, je tiens à mon-trer une fois encore quelle est leur place dansla conversation

– Vaujf  vé moîn va donne à voUsbonbon,mon ptit hye (fille).

– Vouij papa » r »– O vous, bonhomme Azor, vou if  rode

rode darrière nottte placement là, pends gard

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DESSCIENCESET ARTS

vou va vole mongros poule çatigant l'aprésponde dann miraye là, voui.

– Ah 1 voui don, n'a pas moin même yvole toute poule ici Camp Ozoux. A que fairevou y parle comme ça même, vous la vi àmoin vole qui que çose à tous.

Deuxième vers

« Qu'o ça qu'lâ féplèr vont beaux ziês f »

Je ne rappellerai pas ce que j'ai dit pour levout (votre ou vos) dont la dernière lettre doitrésonner à Poreille/ 

`,,1'

Quant au quo ça, il. conviendrait de lechanger en quoué ça comme il conviendraitd'écarter le mot beaux, mis au devant, deziés nous ne l'avons jamais entendu emplo-yer, surtout en pareille occasion.

Les noirs ne se servent de cet article; quepour appeler l'attention de quelqu'un sur in

bel ce>jâl, in bel zenfant, mais pour les yeux,ils disent zolis ziés, comme ils disent zoliscevés (cheveux)

– Ah v'ia in bel ceval.

En outre, ils ne connaissent pas, du moins

comme nous la connaissons, nous, cette figurede rhétorique appelée la répétition, qui « don.ne plus d'énergie à la phrase », enseignent lesgrammairiens..

Nos créoles qui chanteraient la chanson deNounoutte ne diraient pas qvio ça quHà fé

flèr vout beaux ziés.

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BULLETIN DE LA. SOCIETE

Cette question, dictée par une tendre solli-citude, il l'adresserait tout simplement et decette façon:

« Quoué ça y fé plère à vous ?

Troisième vers

« Voùi conné bien vous mêrrf  qv? mouil'aime, p

Très bien pour l'oreille, mate il convien-drait d'effàfôer;l'apostropha de mârn', d'écar-ter le qu' et enfin de changer l'orthographedu mot voui (oui) mis pour vous, von y

G*e&tainsi que le vers, au lieu de dire r« Vous eâsmé bien.)?»Exprime Qui conné bien. Soit un barba-

risme. -i • –Je vais rappeler une*dernière fois les.mo-

difications que doivent subi? ces pronoms et< adverbes dans la formation* des -phrases» Ce.sera unenouvelle bGcasion,.lpoiir moi, d'écrire

certains autres, mots du patois qui nous oc-cupe.. >- >• î 

– Vou y di à moin, vous la vi mon fâmela Pointe ? 1

r- Tûuif  moin la vi à li.– Li n'a pas di à mus mou y aspère à li

ici ?– Non, moin' n'a pas cause ehsembe 1i.

Quatrième Vers

« Ares' tranquiW mouemùrass' vont ptés. »

JSerait bien, si après avoir ajouté un secondt au- mot vout. on enlevait- les apostrophes

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• DBSSCIENCESET ARTS

29

de aress' tranquilP et embrass' qui sont sansobjet.Aress tranquill mou embrass voutt piés

(ou m'embrass) cela se dit. Mais pour parlerle vrai créole de Bourbon, il faudrait diremoin va embrasse voute piés

J*ai fait cette remarque à propos de cemême vers

quise trouve dans -la

chansonprécédenteLi

cœr n'a pas

magasin.Le cinquième vers porte |« Vous l'é zalou? dia moin à cause »

Très bien., Il y a lieu, toutefois, de séparerles lettres du mot dia. Il convient égalementde bifîer l'apostrophe de jaloux qui fait sup-

poser qu'on a voulu écrire jalouse. Ce quiserait une autre- faute, cet adjectif  n'ayant pasde féminin dans notre langage populaire.ï

Exemple – Non va zamai moin n'a pasvidmonde comme ça son mari l'é zaloû, sonfamé l'é zalou.

Le vers resterait dès lors à peu près cequ'il est. "•

« Vous l'é zalou di à moi à cause ? 9 j)

Le .sixième vers est ainsi conçu« Qu'ouc moin la fé qu'çagrln à vous ? »

Pour rendre bien la pensée que l'autour avoulu exprimer dans ce vers, il- faudraitécrire

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BULLETINDELASOCIÉTÉ

« Quouque moin la fé (ou quoué ça moinla fé) pour fé la peine à vous on encore« Comment, que moîn la pis fé la peine àvous. »Mais le vers serait par trop allongé dans

sa mesure..

Dans le septième vers, il y a

« Viens l,rr~c~uav'enahrâss' vo~it p'tit gxcétrose. »

Au quatrième vers, il y avait mou eim-brms'Nous ne relèverons plus le mot vout.

Quant à petit guèle rosé, cela ne se dit pasen créole. –

On fera cette menace

Moin va flanque à toué si la guèle mais jamais celle plus tendre de r– Moin va embrasse ton |*uèle rose,,ou ton

guèle noire.

C'est ici le cas de chanter la chanson quicourait les rues l'année dernière

Zênfi zensmou y connèpas ça,Mouy conné pasça.

mou y connépas çaAmène,,amènea inoinLa case mon mànman

Enfin, nous sommés àù huitième et derniervers du premier couplet de la chanson

« If a pas de miel que lé plus doux'. »

Le chanteur n'en .sait absolument rien,puisqu'il est encore au futur.

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DES SC1KNC1SS ET AHTS

Et, d'ailleurs, il faudrait w'apointeau

lieu «de n'a pas: • »

Les noirs ne se servent pas indistincte-ment de ces deux adverbes de négation,comme le font la plupart du temps les Euro-péens.

Ainsi ils diront, par exemple, moin l'a tévoir à li, moin n'a pas trouve à li son case.

Tout de bon ton sœr la gagne irièbes

pour son mariaze ?(mêbes-meubles)Voui, li la gaigné, mai li n'a' pointl'ormoire (armoire) Il'

C'est-à-dire que, pour indiquer qu?unechose n'existe, pas, ils diront n'a point; etpour une chose seulement absente, ils dirontn'a pas.

Tout de bon volère l'a veni ton casé'?

Voui mn'ami, la rouve mon porte, labalié toute mou ravaze, mon case l'é vide»;n'a point serment in morceau cifon y traîneâ terre. (Ravaze; ustensils 'de ménage soc-ment, seulement cifon, chiffon).

D'autre part les mots que lé, sont de trop.Voilà pourquoi j'écrirais, moi, ce huitième

vers de la chanson de Nounoutte, de la ma-nière suivante Il 1

· « N'a point de miel plis doux. »Et mieux encore« De miel vert n'a, pas plis doux. »

Je crois devoir me borner à ces quelquesremarques, à l'occasion -de la chanson deNounoutte, bien qu'elle en comporterait beau-coup d'autres, à la condition, toutefois, de ne

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UVI.IKT1N DU L.V S0C1ÉT1Î

pas la laisser chanter par l'auteur autrement t

les contré-sens, les mats mal orthographiés enen raison de leur prononciation, les apostro-phes inutiles que j'ai relevées et qui sautent

t auxyeux à la lecture, ne seraient plus suf-fisamment appréciables, et alors, suivant

· le proverbe, ce serait « l'air qui ferait lachanson. ».

Chose particulière, il en est de même d'unconte de M: Héry, dans lequel Didier IVJaillott

rappelle un terrible accident qui l'a conduiten Cour d'assises.Nous connaissons tous, à la Réunion, cette

ancienne histoire do cinq ou six créoles debois, qui, un .beau. jour,- s'attrapant par lespieds;. l'un âvk suite dé l'antre; se suspendi-rent à un arbre penché sur un précipice, afinque le dernier de cette chaîne -humaine attei-gnit une ruche. pleine de miel, qui bourdon-

nait à l'un deg flancs du rempart.A peine êtaîent4ls sur l'abîme, que le créolequi formait le- premier anneau de la chaîne,celui qui avait saisi la branche. de l'arbre, seplaignit de ne pouvoir résister au poids atta-ché à ses pieds; que les mains' lui brûlaient

Eh berp,emee dann ton main, lui cria l'unde ceux que j'appellerai ses compagnons del'espace.

7 11 eut la naïveté fatale d'écouter ,ce déplora--ble conseil. Il lâcha la hranche' qu'il tenaitfort, pour cracher dans, ses mains, et toute lagrappe de créoles de bois, dit la tradition des.montagnes, la calbité dann fond de rempart.

I.Giest ce. vieux conte malicieux, inventé par« ç0ssère§ de miel et casseres de cabris » et

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DES bClSSCUS HT A.RTK

qui remonte peut-être au temps de Labour-donnais, que M. Héry a mis en un dialoguespirituel, mais écrit dans un patois des plusfantaisiste

Eh bien, si vous entendiez réciter ce conte,ainsi que je Fai entendu réciter a une distri-bution de prix de chez les chers Frères aSaint-Denis, vous croiriez entendre du vrai etbon patois de Bourbon

Et pourquoi ? parce que les petits créoles,élèves de l'Ecole

Chrétienne, chargésde'le dé-

biter au public, ne tiennent aucun compte del'orthographe de l'auteur, qu'ils rectifier toutnaturellement par leur bonne façon de | pro-noncer les mots employés et, enfin, qu'ils im-priment à ce même conte un mouvement quidoit être où qui doit se rapprocher de son al-lure originaire 1

De telle sorte que l'oreille est complète-ment

trompée.Mais

si, après avoir écouté,avec curiosité, sortir des petites bouches de,ces élèves des Frères, le patois transformé'deM. Héry, vous en lisiez le texte même, vousne le reconnaîtriez certainement pas.

Et vous pourriez répéter ce que j'ai entendudire, parfois, de certaines comédies, qui réus-sissent quand même au théâtre

« Ce n'est pas la pièce qui est bonne, ce

sont les acteurs qui sont excellents. »Ainsi donc, je me suis permis de rectifier,dans leurs expressions, les vers des trois pré-

.mières fables de M. Héry, et je n'ai pas crumanquer de la sorte au respect dû à la mé-moire de cet homme de mérite, de cet hom-me de bien.

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B0UUBT1N i)E LA SOCIÉTÉ

Je suis persuadé que, si nous avions l'avan-tage de l'avoir encore parmi nous, il me féli-citerait de ma témérité. Peut être même cor-rigerait-il ses fables qui resteraient alors pourla Colonie, une oeuvre originale

Quant à mes compatriotes dont les fableset les chansons ont donné lieu, de ma part, àl'examen critique à l'eau de rose – ? quevous venez d'entendre Messieurs, je ne doute

pas qu'ilne me

pardonnentde connaître

lattguze payé Bourbon un peu mieux qu'ilsne le connaissent. ILne me sera octroyé au-cun, brevet de capacité pour cet examen-lâ.

Du reste, j'ai eu soin de faire suivre mesobservations*»de termes de comparaison pro-pres à mettre le lecteur à même d'apprécierleur plus ou moins de justesse.

Je vais les compléter parla reproduction

de dèux chansons IÀmeest écrite en

vers,l'autre, pour n*être pas riméle, marche cepen-dant sur des pieds, afin de suivre, dans sesmaures, l'air qui lui a été donné.

La première a été composée en France^,la seconde a pris naissance ici même, â laRéunion

Il convient de faire observer que Fautejurn'avait pas à choisir les sujets de ces chan-

sons. Ils lui étaient imposés par l'usage, lésnoirs créoles n'ayant que deux cordes à leurguitare Fune résonne av^c « la plaintive élé-gie » pour exhaler leurs sentiments d'amour,et l'autre pour accompagner des paroles des-tinées à ridiculiser, notamment, MM. les In-diens et MM.les Chinois. G*«stlà qu'ils exer-cent, et avec entrain, leurs moqueries natives

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DES SCIENCES ET ARTS

lls composent d'ailleurs fort rarement,quand ils composent aussi s'emparent-ils denos romances et de nos chansons dont ilsdénaturent les paroles à ce point, qu'elles nesont plus comprises ni par. eux, ni par per-sonne. Mais, peu leur importe c'est aux airsqu'ils tiennent, qu'ils s'appliquent, et qu'ilsréussissent, dureste, à rendre-fort bien, ayantdes voix très justes, ainsi qu'on peut en jugerlorsqu'ils chantent en, choeur dans les rues.

Il est ici question des jeunes gens. Pourles hommes akm certain âge et particulière-ment ceux auxquels il reste encore des sou-venirs du temps de l'esclavage, ils cultiventvolontiers, sartput dans- nos campagnes, leschansons de table. presque toujours les mê-

mes, qu'ils répètent,on

peut dire, partradi-

tion ilsles appellent pansons cabarés. w1. 1

Nous la bien amiëé dimance, la caseGaspard nous la çante cabaré zisqu'à inhère dmatin

Voici des couplets de ces chansons de. ca-baret, qui doivent remonter, pour sûr, à la

Compagnie des Indes:1 Ils sont tout-à-faitincompréhensibles

La belle à la fenêteVoulant voir s'hâbiyé (bis).'Sir le bord du là Fran-an-feVoulant voir s'hâbiyé,1 Sir lé bord dé l'eau,

Sir le bord d'in vé-scan 1

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BULLETIN DE 1A SOCIÉTÉ

Deux autres.r

Trois navire êtranzés jÇarzê de la mareandise.La potence été dressée,• II y a di bois tout à l'entour.Cé pour brilé la belle

Sir lendemain, à la pointe di zour.

Fa mère courant aprèsComme ine fâme folleMe-siè de la jisticeHendez-moi ma belle enfant l

Pour de l'or, de Parzent,Vous m*aurezpas voûte.belle enfant.

Un mttre-'

La haut dans ces .bois,<

Ce fin zoli pâté.1Le plaisî  du la tabeCe pou/ nous régalé.

ttiîlHUtN

La bouce plehiô tout sorUlu bons \îns niistals

Ce pour nous- rend famie, ce pourinoinèd'embari'as.

Encore un autre.

Valet, valet, apporté mai mon fisi,Vouéla A'oéseau pret à voléSi z'ai le bonbère de tié l'oéçsauZ'aurat d'arzent pour mon YP-yaZf,

Et mon arrfré,

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DES SCIENCES ET ARTS

30

Est-cequelqu'un

descompagnons

d'AntoineTaureau que la maladie du pays faisait dési-rer de tié l'oéseau, afin d'avoir d'arzent pourpayer son vo-yaze de retour en France 1

Peut-être pourrait-on s'en assurer en de-mandant aux échos du vieux Saint-Paul etde la Possession, de répéter une fois encoreles chants qu'ils ont entendus, aux. dix-sep-tième siècle, sortir des fortes poitrines de nos

premiers colonisateurs.J'ai dit plus haut que nos noirs créoles necréaient pas plus de poésies qu'ils ne ccimpo-saient de musique. Ils trouvent cependantdes semblants de couplets faits de quelques

paroles peu clairs d'ailleurs, qu'ils adaptent àdes airs plus ou moins connus

Mais ces paroles chantées ne constituent nides chansons, ni des romances, ni des chan-

sonnettes, ainsi que le démontre le spécimenque je transcris ci-dessous l `

Ce qui n'empêche pas les fl®nère$ et lesmarmajjes de la bonne ville de Saint-Denisde crier ce même spécimen avec un entrainmarqué.

`

Ainsi que tout le monde, à l'heure qu'il est,peut entendre dans les rues

Moinl'a di à vous, madame Edouard, | •Ma Ranie faille, faille, jm'

In zour vou-a gagne malhère, jVou-a gagne malhère[ bis.Pour ce f?me là.

e)

La cloce l'a sonné, madame Edouard, { h!aÇaboaque rVpêtô • -j •*

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BULLETIN DE LA. SOCIÉTÉBULLETIN nE LA 90,0e'Tir

la zour vou-agagneraalhère,

1 “r Vou-agagnemalfière • i bis,Pour ce fame là. J'i- ¡.

Ils devraient ajouter « devine si tu peux».r Toutefois, il convient de faire remarquerici, qu^une chanson attribuée à un petitcréole malgache et très en vogue depuis l'an-

née dernière, est ornée de rimes plus oumoins riches.

Mais ce poète franco-hova ;ou sakalave,çoné lire-écrira,Il composerait même des airs pour ses he-

xamètres burlesques.Ce serait là, des lors, Une exception unique

dans les annales, poétiques do nos noirs. Ilsne se sont jamais doutés que le vers françaisétait fait de mots alignés sur mesures et ac-

couplés par des terminaison^ uniformes

Quoi qu'il en soit» voici la chanson en vo-gue. Elle est à l'adresse de.MM. les Cinoîs.

Cinois dann ljcomolivevec son pantalon larze,Dehors, guette son zencive, I j>Son lés dents lé coulère ciraze f 

Mou-y.di à vous compère°

Vou-ylé trop l'embarras,

Quand^voti-î  rente en premièreVttu-ycroit vous mazistrat.

Ginoisdann lacomotive,etc.

Suivent plusieurs couplets à TayenantQuant aux femmes, aux négresses, presque

toutes chanteuses, elles donnent lieu à uneremarque fort piquante résultant du con-

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DÈS SCIENCES ET AKTS `

traste qui existe entre- leur- prononciation et

celle des hommes, alors qu'il s'agit de répé-ter nos romances. Elles les chantent presqueen français, montrant par là "qu'elles les com-

prennent. 1

En voici la preuve dans les couplets de la

romance qui suit, laquelle, il y a quelquetemps, a eu un grand succès à la ville et à la

campagne.

Je vais en souligner les mots qui laissent àdésirer, eu égard à leur créolisme • 1

Partez, partez; Ernm, ze vous en prie, lMon ctèr et faibe, ze crains vote pouvoirZe vous aimai cé par coqwtteriUe,Z'ai trop longtemps mêconni mon devoirAvec vous ze pourrais être hérèse jDe mon bonhère vous vous montrez zaloux.Si vous m'aimez, laissez-moi vertièse, { t.-

Eloignez-vous, Erriess, éloigaëz-vous. J IS., jl

Vous le savez, mon mari vient d'apprenûfcIl'

Qu'il est trahi par moi qu'il aime tant.Au saint autel ah laissez-moi me rendu,Zé vê mourir oa çoîsir m cornent.Vole âme, Erness, ne sera point zalouseCar pour toitzours ze vê fuir mon époux.Eu \ous cmttlanf, ce Vie sel que

^épouse,Eloignez-vous, Erness, éloignoz-vous. jJ

Inmots

plis tari à la sainte capelle,Aux doux accords des cantiques pies,

> Sœr Amélie, aussi pâle que belle,Prenai le voil et prononçai ses vê$.Le même zowr, élendi sir la pierre,Erness mourai dans la méson des fous.11redisait en fermant la paupière  j b •

Eloignez-vôos Erness, éloignez-voust f 

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BULLETINDELA.SOCIÉTÉ

C'est ainsi que les négresses chantent nosromances vous voyez qu'elles les reprodui-sent d'une façon parfaitement compréhensible,

Il est vrai de dire qu'elles ont beaucoupplus d'intelligence que MM. les hommes,qu'elles ont même de l'esprit naturel, de lafinesse.

Maisil est temps d'arriver aux deux chan-sons annoncées plus haut, de façon à pouvoir

répondre, le cas échéant, à la classique apos-trophe

« Mais vous, pour en parler, vous y con-naisse&rvous ? p»

 /J 1.-La première de ces chansons se chante 3ur

l'air Depis longtemps ze vous udofe. Elleest intitulée

Malhère l'arrivé d moin.

Si moin l'a té capab bien «rire,Comme moin l'a te crire Bourbon,Moin l'aurai envô-ye à vous lireIn zoli ptît, ptit çanson;Mai moin n'a pis rien dann mon têlc,Mon cevés même y vient viës-viés.Mon seprit la veni betbête» w*Depis que moin la vi voutt ziès, j

t$.

L'autt soir, si moin l'avé la forceSaute gante tomme cabris,Qu'à mèm moin la-père zentorse,Moin l'aurai défonce zambrisMai Don, moin n'a pis gambegambe,Commemoin l'a té dann l'autcfois,Vous mêm qu la casse monzambe, I h-Ifepi? que moin l'a ufatt ^oott vçix, f.

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D86 SCIBNCB9ET ABTS

Mon corps, mon seprit, mon magnèrô,

Azourd'hi tout ça ra çanzé,Sai pas si vous n'a pas sourciére,Ptett vous l'aranz mon manzôMoin qu'étai in famé créyole,Que la vi de flamm dann volcan.A présent, ah que ça l'est drôle 1 IVia moin lé tout sai pas «omment. f  

La seconde chanson a pour titre s

Çansort pa Félis.

In zour vous l'a di à riiom,Viens voir à vous voutt case,Moin l'a té voir à vous,Mai vous l'arpousse à moin.A cethère» à cethère, à cethère, • jComment que' moinva faire.

Moinla

serttbitation,Moinla sauve mon famé,

bloin la quitt mon zenfants,Avec mon zanimaux.A cethère, à efethôre, à cethèré» j ft>'Comment que moin va faire. \uts*

Là-bas dann Saintizann,Nous déx la manze ensembeA vla, ici Sainnis,Via \ou y arbite à moin. `

A cethère, à cethère, à cethèra,   j hL.Comment que moïn va faire. f =

Mon ptit cien LangoutiY guette à moin y plère, 5

Dann son mazination,Li conné mon malhère.A cethêre, à cetftèrê, à cetWsr?,Comment que raoin va faire!1 |

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BULLBT1M DB LA, SOCIBÏ^

Ptett vou-y rode in rob`

Pour aller trainn la course,Mai mon dêx trois marquésMonfamé là serré.A celnère, à eeftière, h cèlnèf*,

 jiuComment que moin ira faire. j°

 jloin* n'a déx• MereêyumVec in roupi malpare,Mai toutes magasins

°If  arlisa mon rafzent,

A eettière, à cethèrp, à eethêre,Comment que moin m faire. |

Ç&qmoin la pi gagnéL'est là dann mon bretelle,In moreeap boucané"Vecin ptit-ptjl tandree»A «^tbére, a (rêthère, à cethêrê.

1 MComblent que moin va faire* }

Mou-y pè pis viv comme ç\,Moïn n'a n a trop misère, TMou-y ça va zett mon corpsDann rempart çateau d'eau..A cethète, â, cethère, à cethère,

i AtVComment que m^ta va faire (

Si vou-y promène in zonrEn bas la rivière,Dmonde \& montre à vous

Où«ila .ramasse à .main,

Acethèrje, à cethèrc, à ceihftrp, | h-Vou^a piôre pa Félis. WK'

Me voici, messieurs, à la fin de cette mo-deste étude, pour> laquelle, Dieu merci, jen'ai pas eu à remonter aux Grecs et aux

Romains, le langasepayé Bourbon descen-dant directement du français.

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DBS SCIENCES ET A.BTS

Mais en l'écrivant, j'ai eu la prétention,

peut-être vaine,de fixer

l'orthographe, jus-qu'ici indécise, incohérente, des mots quiservent à parler ce langage original et ausside le retenir, au moins dans le Bulletin denotre Société, alors que pai' les modificationsqu'il subit chaque jour, il e*t menacé den'être bientôt plus l'cconnai:sable au lieumême où il est né

Et je me suis figuré qu'il y avait là, dans

cette pensée, quelque chose qui touchait ànotre patriotisme créole et réveillerait ennous des souvenirs d'enfance auxquels^ com-me les coeurs généreux de tous le.j pays,Jnousrestons tendrement attachés.

C'est vous, Messieurs et chers confrères,qui direz si cette pensée était vraie et si j'aisu la réaliser quelque peu.

VOLCYFOGABD. J J

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31

CONCOURS MUSICAL

SOUS LE PATRONAGE DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCESET ARTS

( 20 juillet 1884. )

1.Le concours de musique, dont la Société

des Sciences et Arts a voté le programme etles conditions, a eu lieu le dimanche, 20 juil-let 1884, dans un salon de l'Hôtel de Ville.

C'était le concours préparatoire, préludantà la #tê musicale publique qui a été annon-cée pourra distribution des récompenses.

Il

n'y

a eu qu'une partie du programmeremplie, celle du concours pour piano per-sonne ne s'est présenté pour le cor, le violonet le chant, malgré la louable tentative denotre confrère, E. Nicolas, do soumettre au

 jury les épreuves d'exécutions variées surplusieurs instruments. •

Mais, sur ce champ, les quatre jeunes de-moiselles qui se sont disputé les prix n'ont

pasmontré moins de talent

qued'émulation

Une sonate -de Weber a été le premiermorceau du- concours, et l'on peut affirmerque les quatre pianistes qui l'ont jouée ontagréablement occupé l'attention des audi-teurs, pour la plupart compétents, qui en-touraient le jury. Doigté sûr autant qu'agile,irréprochable précision, sentiment délicat des

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BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ

successions mélodiques et des combinaisons

instrumentales de l'auteur, toutes les quali-tés des exécutants expérimentés ont été révé-lées par ces jeunes filles dont l'aptitude etl'étude ont fait déjà des virtuoses

Aussi n'est-ce pas sans embarras que le jury s'est décidé à décerner le ler prix àMlle Anna O'Toole, et le second à MlleFanélieJButtié, pendant que l'auditoire était partagé

d'opinions j maisl'honneur du, 1er

rangn'af-

faiblit en rien le mérite du second, lorsquele prestige, de l'art rend la calme au&si incer-taine entre dés rivales aussi distinguées. «u, ,k,. r · A '.l'

r ~4 <

C'est encore le piano qui a fourni la matièrede la 2e partie du pyogranime. Mlle AnnaO'Toole

déjà placéeen

première lignedans

le précédent concours, y a j'donné une nou-velle preuve de son habilité à côté de sasçeur airiée, MlleJulia; O'TsoIe,. Une compo-sition de Fumagallîj Un. ckfn(mol de plus,thème difficile à variations sur un aïr .connu,•àservi à mettre en relief  l'entrain et le briode la cadette, alors que par de plus, longuesétudes et une plus grande expérience du cla-

vier, MHeJulia a tenu les assistants sous; 1©charme d'un jeu mécanique plein de correc-tion, ce qui lui a valu le ler- prix, sans hési-tation. •Cette double -épreuve, en, petit comité, enprésence des membres du jury et des mem-bres de la Société,, témoigne du. développe-ment des études musicales dans le pays et du

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DES SCIENCES ET ARTS

zèle des excellents professeursqui y prési-dent. La Société se félicite de l'avoir ten-

tée elle ne peut que regretter la modicité deses ressources qui ne lui permettent pas d'af-firmer qu'assurément elle renouvellera cha-que année cet essai. Il à été incomplet, fautedes parties de cor, violonet violoncelle, sur lesquelles on croyait pouvoir compter; mais leurabsence a été rachetée par la supériorité desexécutions sur le

piano quenous avons eu la

bonne fortune d'écouter.Nul doute que notre Société n'avise aux

moyens, soit par elle-même, soit par l'appuiqu'elle devra solliciter des pouvoirs compé-tents, de rendre plus fréquentes ces luttes ar-tistiques. Elles seront positivement encou-rageantes pour la jeunesse studieuse de laColonie, et favorables à la production au

grand jourde

bien dés talents qui s'ignorentou que l'on dédaigne, que cache la modestieou que la jalousie méconnaît.

l,Le Secrétaire,

PASCAL Grémazy.

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MATINÉE MUSICALE

A L'HOTEL DE VILLE DE SAINT-DENIS

Le dimanche, 24 août 1884.

SOUSLE PATRONAGEDE LA SOCIÉTÉDES SCIENCESET ARTS

(Distribution des récompenses .du Concours musical)

[\ 

Après le concours musical privé, destinéa fixer l'opinion du jury sur le mérite desconcurrentes, la Société des Sciences et Arts

devait donner la fête musicale publique, des-tinée à la distribution des récompenses.Cette fête a^ eu lieu, le 24 adiit 1884, dans

le grand salon de l'Hôtel de Ville avec toutl'éclat $6 ces réunions, grâce au local où, surles invitations de M. le Président, s'était em-pressée une foule d'élite, et. grâce aussi à l'at-trayante composition du Concert.

Il a été ouvert par le discours de M. Le

Siner, président de la Société, et par celui deM. Ernest Nicolas dont le zèle actif ne sau-rait être trop loué et surtout imité, puisqu'ila réussi à vaincre l'indifférence générale, qui

'dans notre pays, est l'obstacle permanent à laréalisation des plus utiles entreprises. Denombreuses et charmantes musiciennes, desexécutants jouissant de. la légitime réputa-

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BUM.RnN DE LA i~OCïETË

tion d'artistes avaient répondu â Fappel dé laSociété. Le programme a été àccompli pour!s ptus grand agrément de l'auditoire dansdes deux parties qui étaient ainsi divisées

tPtenttè~e partie e

t° Concerto de Mozart à 2 pianos par M" Jntia etAnna O'Toole.

2' La Sentinelle perdue, romance chantée par W~Mar-

celin Donce.,<

3" Scherzo de Chopin, exécute par M~Fané!yButtM.Scène et air d'0phë!ie (PIamtet) chanté par M"' Ftap-

pifrdeAtonthenoit.S" Rondo Capricioso de Mendelsohu, exécuté par M"*

Hli~BarafU..

BteM~c'Me jMM~ie .1.

6° Fantatsic sur Bobert le Mjtbtc~exccutÉe par )F'*

Anna O'Toole. r7" Les OisRanx, ïnëditatMn de Lamartine, chantée par

'JM"°'AureiieNogaos.8° Huo de piano et ~lolon~'6'af te.~Dragons de Vit~rs,

MLécutsepar M'" Lafo~seeLM. E. Lauratet.9° Finale de la Sonate (clair de lune) de Beethoven,

exécutée par M'" Aurètie Nbgaes.<0" Solo de cor/ ave~ accompagaeinen~ de ptano, exe"

Mité par M. Mènard.

a~

Cette représentation, pour ne pas être thé--âtralG, n'en a pas moins ~tê des plus brillan-tes les applaudissements n'ont point étéépargnés à ces vaillantes  jeunes Slles qui,sons raidillon de Famour propre, ont Mt

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DESSCIENCESETARTS

assaut de grâce et d'habileté pour plaire à ce

public donateurs quelles ont su captiverles compliments que l'on adresserait particu-lièrement à l'une d'elles feraient tort aux au-tres, car textes en ont mérité & un titre égalet dansla plus large mesure.

Elles ont été du reste intelligemment se-condées, pour l'exécution de morceaux aussivariés que bien choisis, par M. Nicolas, l'orga-

nisateur de la fête, et MM. Marcelin Douce,Emile -Lauratet et Camille Ménard. )

Ces trois derniers ont beaucoup contribuéà la rehausser encore, M. Douce, par la ro-mance qu'il a chantée avec sa maëstria ordi-naire, M. Lauratet par la partie de violonqu'il a jouée avec expression, M"e Lafosse

tenant le piano, dans un ,duo sur les Dragons

de Vil lars,- et M.Ménard par son~solo de cor,qu'il a si bien étudié et qui a mis en relief ses progrès continus sur cet instrument dif-ficile.

Les prix distribués, chacun s'est retiré àregret, emportant de cette matinée musicalele plus agréable souvenir, et aussi, l'espéranced'en revoir une autre, plus belle encore s'il

se peut, en 1885 ou 1~86.Mais s'il ne, nous appartient pas de dire ce

c[ue notre Société fera l'année prochaine ouaprès, eu égard aux circonstances, à son bud-get et enfin aux subventions qu'elle poarrarecevoir, nous avons le droit d'avancer que

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BULLETINDE LA SOCOSTN

cette expérience relativement fort satisfai-

sante est d'un bon. augure pour l'accomplis-sement de ses vœux. Elle mentirait à son titresi elle ne mettait pas tout en œuvre afin d'en-

tretenîr le goût des arts dans notre Cotonicce n'est pas pour le fermer qu'elle a ouvertle livre d'honneur où elle vient d'inscrire lesnoms de ses premiers lauréats.

Le .Secf~Kr~

PASCAL CRÉMAZV.

Discoufs de M. Le Siner

Pr<~M~M<<~ So~

Monsieur te Gouverneur~

Mesdames et A!essieurs~

Il a quelques jours, vous rendissiez dans cesj'Qu, vous.y applaudissiez des talents e!t pleine ma-turité qai avaient fait le sacrijSce de tou' modestieot'Uiujtit'e pour soutager l'infortune.

J~ous nous trauvons tous aujourd'hui, htea décides

àuonorcfpar uotre présence et a cacouragerpai'nos applaudissements'de~tat~njs leur aurore. Aprèsle coeur, l'intelHg~nce. Après le rôle de la charité,celui des jettrcs, des scieNcos et des arts. C'est dansPordre et voire présence. ici.noMsproove quf, siYoassa\ez vous dé~OHer à la prennm'c, vous n~entcndexpas pour (eh diminuer ta part d~s auircs au nomde )a Sociétc <K'sSdcnces' et Aris, je vous en rc-mercM.

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bES SCIENCES ET A&TS

33

Notre Société, vous le savez, a été fondée en 4857par un de nos anciens gouverneurs, M. H. Hubert-Delisle. Depuis i860, un bulletin publié annuelle-ment prouve son activité et renferme les travaux, luschaque mois devant nos confrères travaux dont lavariété "~rme et dont le mérite séduit science,mèdeci beaux arts, géographie et histoire, poésie,ro.nan même, tout s'y trouve si notre île, qui n'apas d'histoire ancienne, n'offre pas aux esprits en-vieux des temps passés l'occasion de découverte sar-chéolagiques et préhistoriques ou de récits du moyen

âge, si fort à la mode aujourd'hui dans les sociétésscientifiques du continent, elle fournit, encore dansses deux siècles d'existence assez d'épisodes drama-tiques et plaisants pour que la mine n'en soit pasencore épuisée. Vous voyez que le champ ouvertdevant nous est vaste pour le fertiliser, pour mul-tiplier le nombre des ouvriers de bonne volonté, laSociété, à deux reprises, en 1864 et en <88~, a ins-titué deux expositions artistiques dont le succès arévèle des talents inconnus hors du cercle de la fa-mille. Vous vous rappelez, j'en suis sûr, ces merveil-

leux ouvrages de peintures, de sculpture, de dessin,de travaux à l'aiguille, broderies, dentelles, vannerie,qui ont été exposés dans cette salle.

Malheureusement, au lendemain de chaque exposi-tion, les' lauréats rentrent volontairement dans 1 om-bre et ces fêtes de l'intelligence ne peuvent serenouveler chaque année. Elles sont onéreuses et no-tre Société, millionnaire de bonne volonté, ne l'estguère que de cette façon. Dans les deux expositionsprécédentes, il existait une lacune regrettable, la mu-

sique n'avait pas été représentée. Sur l'initiative d'unde nos honorables confrères, M. Ernest Nicolas, laSociété a décidé de créer, chaque année, un concoursoù elle appellerait la jeunesse des deux sexes, diviséeen deux catégories selon Page. Jusqu'à 20 ans pour lapremière et jusqu'à 25 ans pour la seconde.

Cette décision prise, nous en avons hâté l'exécution etcette hâte n'a pas permis à quelques candidats de pren-dre part A la lutte. Aussi pour cette fois quatre de-OMiaeUesseulement se sort présentées pour le piano,

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r

BULLETIN DE LA. SOCIETE

une seule pour le chant, mais un deuil de famille l'a

empêchée de sejMre entendre.Nous n'avons pas en de concours de violon ce nesont pourtant pas les violonistes qui nous manquent, jen'aurais guère qu'a étendre la main pour en dés{gnerplusieurs.

Pas un jeune homme ne s'est, présenté ni pour leVMion, m pour le pi&ne, ni pour le chant. Est-cemodestie exagérée ? est-ce indifférence ? nous le re-gretterions.

Ne serait-ce pas plutôt par galanterie et nos jeunesartistes auraient'-Ns iroavè de mauvais goût d~ehtref 

en lutte avec des dames ?Galanterie bien mal placéealors, car personne ne poorra direj aujourd'hui, qu'àvamere sanis péril on triomphe sansgtoire.

t~ lutte a été vive, presqu'à armes- égales, un yrairégal d'amateurs et, ponr un premier essai, je puis ledéclarer, sans exagération, notre concours a donné, aupoint de vue de f exécution, lc~ plus Mmarquabtes.ré-salta~. Vo~ allez dans un instant vous eu convamcre,et pom' ne pas jetat'det'ptus longtemps votre lëgi~meïmpat~ice, je vais prier les detRoiseUes qui &nt parti-cipa à notre concours, apres avoir ééouté les paroles de

notre honorable ceaJMEe,?<. E. Nicolas, de v~nir rece-voir leurs récomBenses avant de..se faiM entendre.Puisse leur exemple encourager ies timides et pei'met-

tre à notre concours de 1&S5de compter de nombreuxcandidats 1 ·

Diséours de M. E. I~icotas

Mesdames, Messieurs, T

Mon but, en créant un concours musical, auquel jeconvia toute la jeunesse créole de la Réunion, étaitde donner à ceUe-ci un sSmutant dont elle avait man-iqtré jusqu'à présent. J'appelais les jeunes musiciens dela Colonie à participer à nue œu~'re sans précèdent, quidevait développer leur goût artistique, et réveiller parl'éamIatiaQ l'apatbie Mierente à notre ~Hmat.

~eaaeoa.p de jeunes personnes se secaient pent-étreprésentées A ce ~HicoBEs, des .motifs particuliers ne

i..

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DESSCIENCESET ARTS

les avaient arrêtées l'abstention a donc été presquegénérale. Les parents font de grands sacrifices pourl'éducation musicale des enfants maisfaute d'émula-tion les talents ne se développent pas. It était néces-saire de chercher un moyen qui pût, tout en excitaotle zèle des élèves, les faire arriver à un travail sérieuxde la musique celui que j'ai choisi était le seul sus-ceptible de réussir.

Le but que je me proposais n'a donc été qu'impar-faitement atteint mais il faut un commencement àtoute chose donc  j'espère qu'après les efforts sérieux

que j'aifaits

pourétablir dans mon

paysune institu-

tion nouvelle, d'autres plus heùreux que moi la sou-tiendront et la feront fructifier. Cette institution, jel'avais mise sous le patronage do la Société des Scien-ces et Arts dont je fais partie comme musicien j'aid& par conséquent assumer toutes les responsabilitésde la partie musicale, tandis que Monsieur le Président,ainsi que mes cottègues, me prêtaient un généreux ap-pui et s'occupaient de propager et d'encourager rosu-vre qui devait faire tant de bien, au point de vue durésultat que nous voulions obtenir.

A cette mêmesociété, je

laisse donc tous mespou-voirs désormais, avec mes règlements elle choisira

un musicien qui voudra bien continuer, modifier mê~-me au besoin, selon l'esprit du pays, ce que l'on auratrouvé de défectueux dans la première année de Fins-titution.

Avant la distribution des justes récompenses décer-nées aux tauréates, laissez-moi vous remercier, pèreset mères de famille, qui avez soutenu notre, œuvre ennous présentant vos jaunes filles.

A vous aussi, mes bien sincères .remerciements,

Monsieurle

Président, pour le bienveillant concoursque vous m'avez prêté et qui m'a fait triompher desdifficultés que j'ai eu à vaincre.

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PRIS AU PïËGE 1

DÊDÏÉ A M, EMtLE BELLÏEF<.

Le lendemain de la représentation sur le Théâtre

de Saint-Denis de sa comédie, en un acte,

et en vers, Pris au j~ ,r

Oh certe 1 on n'en a pas toujours pour son argent rl,l'

Au théâtre on s'ennuie, on y baille et souventLe plus doux des fauteuils d'un supplice est le siègeLe titre de ta pièce, en entrant, me fit peurMais personne, en sortant, n'a dit, s'il n'est menteur,

Qu'il avait été pris au piège 1

Ton art sait ennoblir même un commun sujetTon poème intéresse et brille d'un cachet  jQui d'auditeurs lettrés a charmé le collègeTon osuvro fait penser' elle ouvre un horizonSur ce monde pervers, foyer de trahisoUt

Ou'nous sommes tous pris au piège 1

Des exemples constants montrent l'iniquitéD'un siècle qui vieillit dans l'immoralitéA mille passions la ruse y fait cortègeL'ambition perfide et l'orgueil sont ses pairsDe la simple franchise elle usurpe les airs,Et nous voiiAtous pris au piège 1

Tartufe et Machiavel, se tenant par la main,Se glissent, affublés du ffao républicain,Dans la rue, aux salons, dans les conseils, que sais-je ?Leur bouche papelarde est tout ointée de mielNotre bien seul les touche ils   jurent par le ciel,

Comment n'être pas pris au piège 1

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BCH.RONDELASOCIÉTÉDESSCÏBNCESETA&M

Du vrai le Mite est mort. La mode est aux discours,Ballons des charlatans qui gouvernent toujoursLa tourbe des niais c'est comme un sortilège 1Un pygmée au pouvoir vi?e, sur ses tréteaux,Au pays il promet d'Hercule les travaux,

Et tons encor sont pris au piège i

L'amour de la patrie est un mot contenuQue l'intrigant exploite en gloire et revenuDevant la honte, aucun ne crie au sacrilègeL'honneur est persiSIë de la famille on ritLa phrase x M el6et nous sert un faux esprit,

Où presque tous sont pris au piège tLes caractères Sers gémissent abattus. ~r

Les vices souriants se drapent en vertus.Qu'un imposteur triomphe, il est blanc comme apigcDe la sainte amitié l'on à rompu les nœuds,Et son autel n'est plus qu'un abri dangereux,

Où nous sommes loo~prM an p~ge t

L'amour, divine avance, ineffable îayear,Qu'escompte tout mortel sur sa partie bonheur,

N'est qu'un jeu d'intérêts, un sensuel manègeLeandre et Roméo sont des noms dé romans,Et l'ingénu qN croit à la foi des serments,

Est hélas toa~ours pris au piège 1`

Les financiers sonit ro~ maitreâ da eapttalt~ veuves, d~orphetins jetés à l'hôpital,Des trésors de 1 épargne en massé Hs foaf  le sij&geLes lois coupent en vain leurs grijB~s~e vaotottrsL'actionnaire y tombe, enlacé dans leurs atours,

Et toujours reste pris au piège

Malgré ce tableau sombre, un avenir meilleur,Quand je lis les beaux chants des poètes de coMU~M'apparaît pour ~France. Ab que Dieu la protègeQn~Lleurs SMfSMtaM~N marche la nation,Qu~ tout entière ao <ë% brisant l'invasion,

Non, N6sera plus~prise au pîêge 1

PASCALCtUEMAZT.

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LE MICROBE

La dernièrestropheest<MdMjasx volontairescréoles

On nous parle en tous lieux d'infiniment petitsAux cellules des corps parasites b)otLs

Nul à leurs coups ne se dérobe

Monstre, auteur de nos maux, il fuit l'oeil et )e~mainsIl nage par milliards dans les tissus humains t;Les savants le nomment microbe 1 )

)'Le monde qui respire est l'esclave d'un ver jGrouillant dans notre sang, grouillant sous notre chair

Qu'il suce  jusqu'au moindre lobeEn vain le microscope éclaire cette nuit `

Où Pasteur veut saisir le secret qu'il poursuitNotre vrai maître est un- microbe

La nature extermine, en ses bras étouffants,De la vie en travail les germes renaissants “nans l'immense ovaire du globe

Et le foie éternel des -générationsEst le

charnieroù vit, rival des vibrions,

Ce Gargantua, le microbe

Qu'on s'élève des sens vers le monde moral,L'homme gémit broyé sous le poids de son mal

D'innocence il n'a plus la robeQuand il est vertueux, il ne l'est qu'à demi, `

Et son cœur est rongé par un hôte, ennemiPlus dangereux que le microbe 1

L'égotsme implacable à son  joug asservitLes plus nobles instincts sur toute âme il sévit

C'est pis que rage d'hydrophobeL'homme las, non repu, se ruant aux plaisirs,S'agite consumé d'invincibles désirs

Il.est comme en proie au microbe t

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BCLMTINNELASOÛÏ~ DB$SCtENCESBTAB~

Libre ilporte

desïers petit

dans sagrandeur,Il soufre dans sa joie et cherche le bonheur

Dont il ne ~erm jamais,l'aube iA son seul ÏMeo,la Force, il tnunole le droit,Pour ses vœux inquiets ruoivers est étroit,

Quand tM-îïïêmon'est qu~tmmicrobe 1

Pour vous,Cotons~chez qui toujours vibre en un coin,L'honneur, ce, feu sacfé que nourrit avec soin

Tout patriote ner et probe,Quand notre France appelle aux armes, la torpeurSerait

crimeen a~ant t du doute et :de la

peuf vous n'aurez jamais le microbe F1"" 4-PASG&t.CRÊM~M. `

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J~ABLÈ DES  j~ÎATIERES

r'

1- `

L~ t d b Id 1 S '~t' 1Page~

Liste des membres de la Soci&té au i~'  jan-ï*ag<!S

vier <88S.).. 8Liste des membres correspondants u. 7Séance du <4mars <884. U'.

28 mars<884. 0<6mai 1884. t9

– 27jui)t<884. J. 33– «jamet<884.– <"aoM<884. 29– 5 décembre 4884 33

– 36 dc<?embre<884. 37Liste des ouvrage~ reçus par la Société en décem- )bre i884. ?

Le cyclone du ~a~ lecture par M. Bridet~ 43Discours de M. Albert R!M~ sur la tombe de M. C.

Champon i. 57

Biographie de P~ -M~Lahuppe par M. Roussin <;)De la condition de l'instruction des femmes par M.

L. Bottardo" 73Etude sur Hœckel

(Le Lamarckisme) parM. A".

Vinson, 87La cornée de Pons (~81~-1883), par M. C. Du

Buisson a\pc si~ taMeaax d'ob~en'attons. 97L'instruction pubtique à rite de la Réunion par M.

D.Brunet. t<3Du patois créole de l'Ue JBourbonpar M. V. Focard. <79Concours musical sous te patronage de la Société~

20 juillet 1884 (Compte-rendu par M. P. Cré-mazy). t

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'iABLBDES MATIÈRES

MaMnée musicale du 2~ aont t884 f~o~s !cmême patronage – (Compte-rendu de M. P:Crëmazy M5

Discours de M. Le Sînpr, président: de la Soctété,prononcé dans cette cefëmonie.. .< 348

Mscottrs de M. E~Meot~ pronMtPCdans la mêmecérémMMe. 38&

Pr!s aa piège poésie par M. P. Cr~mazy. 353Le Mîcrobc, poëste par M. P. CréiBazy. 265

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FJRjRATTHM

Page 383. Au lieu de tout oM~c <NM~–<pHse trouve dans le vers de ja~4'.strophe de la piècePfMaM~~–lisez .~<M~.F~^isc~u~ge, == ~ed: