brochure d'impact 2009
DESCRIPTION
Voici la brochure d'impact de Max Havelaar, intitulée "Choisir sa voie de développement"TRANSCRIPT
Organisations de petits producteurs / 2008-2009
Bilan annuel de l’impact du commerce équitable
Choisirsa voie de développement
Banelino subventionne des repas chauds pour les enfants de cette crêche à Monte Cristi (République Dominicaine).
Nous remercions chaleureusement les producteurs et professionnels des six coopératives qui ont donné de leur temps pour la réalisation des études d’impact et des reportages qui les illustrent : Banelino (Rép. Dominicaine) ;
Conacado (Rép. Dominicaine) ; Fapecafés (Equateur) ; Apromalpi (Pérou) ; Cocla (Pérou) ; Fecafeb (Bolivie).
Crédits photos :Bruno Fert (Yungas, Bolivie)
Pierre-Yves Brunaud (Cenfrocafe, Pérou)Luc Boegly (Apromalpi, Pérou)
Didier Gentilhomme (Fapecafes, Equateur)Nicolas Gauthy (Banelino et Conacado, République Dominicaine).
A qui profite le Fairtrade ?Mesurer et comprendre comment le commerce équitable change la donne
Dans quelle mesure le label international Fairtrade / Max Havelaar contribue-t-il aujourd’hui à la
lutte contre la pauvreté? Quel est son impact sur la situation des paysans, de leurs familles, des
coopératives dont ils sont membres et de leur environnement ? Autant de questions abordées
dans cette brochure.
Le développement de critères internationaux pour chaque produit pouvant être cultivé, fabriqué et
commercialisé aux conditions du commerce équitable constitue une pierre angulaire capitale du
système Fairtrade. Ces critères garantissent en effet le paiement d’un prix équitable et d’une prime
ainsi qu’un mode de production écologiquement et socialement responsable.
Il est bien sûr essentiel de contrôler le bon respect des critères du système Fairtrade en soi. Mais
il est tout aussi important d’évaluer dans quelle mesure le commerce équitable améliore la vie des
producteurs du Sud. Car cette amélioration est déterminante pour le bilan positif de notre travail.
C’est dans cette optique que nous avons fait réaliser de nombreuses études d’impact ces der-
nières années, auprès d’un grand nombre d’organisations de cultivateurs actives dans le système
Fairtrade. L’occasion aussi de poser des questions telles que ‘Sommes-nous sur la bonne voie ?’
ou ‘Comment améliorer encore le système ?’
Nous vous présentons ici, en guise d’exemple, une synthèse de six études d’impact parmi plus
de quarante analyses disponibles. Les conclusions en sont positives : les producteurs bénéficient
d’une sécurité économique grâce au commerce équitable labellisé. Celle-ci leur permet de renfor-
cer leur position économique sur le marché et au sein de leur communauté de façon à pouvoir eux-
mêmes s’extraire de la misère. Certains points sont également encore susceptibles d’amélioration
: plus que jamais, il faut remettre aux organisations la clef de leur propre développement, et à cet
effet, la collaboration avec le réseau d’organisation non-gouvernementales doit être approfondie.
Mais une chose est certaine: la perception d’un revenu décent est essentielle et reste une des
conditions indispensables pour un développement durable. Il est possible d’imposer des critères
écologiques et sociaux aux producteurs du Sud, mais ces exigences
doivent absolument s’assortir d’un ‘return’ financier. Le commerce
équitable labellisé le garantit et parvient ainsi à offrir une réponse à
la pauvreté. En Belgique, nous collaborons avec toujours plus d’en-
treprises, d’organisations, de Communes du commerce équitable,
d’ONG, de magasins et de consommateurs avec, pour conséquen-
ce, que de plus en plus de producteurs en profitent dans le Sud. Le
commerce équitable se met en ordre de bataille afin d’aller toujours
plus loin dans sa mission de lutter durablement contre la pauvreté.
Un merci tout particulier à l’équipe de Max Havelaar France, pour leur travail
de coordination et pour la réalisation de cette synthèse
Lily Deforce, Bruxelles, 1er septembre 2009
Impact structurel Finalité politique
Effets sur le terrain à moyen terme3
‡‡
Standards Appui
Fonctionnement du commerce équitable labellisé2
Pourquoi faut-il un commerce équitable ?1‡
Le système international du commerce équitable labellisé
Impact structurel Finalité politique
Effets sur le terrain à moyen terme3
‡‡
Standards Appui
Fonctionnement du commerce équitable labellisé2
Pourquoi faut-il un commerce équitable ?1
‡
L’impact, ou comment le commerce équitable change le quotidien des familles agricoles
les résultats
définition
mesure
exemple
les effets l’impact
Ce sont les conséquences directes de l’application des standards.
L’organisation de producteurs reçoit un prix donné, une prime de déve-loppement. Elle tient une assemblée générale et sa gestion est transpa-rente. Les producteurs n’utilisent pas les intrants interdits...
Les inspections annuelles de FLO-Cert vérifient des points de contrôle précis. Le comité de certification décide de l’entrée ou du renouvelle-ment de l’organisation de produc-teurs.
Ce sont les conséquences indirectes de l’application des standards.
Au Mali, une organisation de pro-ducteurs a financé la construction d’un puits. Les producteurs ont pu s’acheter des charrettes et des animaux grâce à un meilleur prix...
Un système de suivi-évaluation systématique est en train d’être défini en concertation avec les organisations de producteurs.
Ce sont les changements significatifs et durables générés par l’interaction entre le commerce équitable et l’en-vironnement socio-économique, ins-titutionnel, naturel des producteurs.
L’organisation de producteurs a acquis une capacité de négociation auprès des pouvoirs publics. Les producteurs développent des stratégies de diver-sification... Voir pages suivantes.
Un dispositif d’évaluation de l’impact du commerce équitable labellisé sur la base de plusieurs études de cas particuliers.
« La manière la plus simple de vendre l’impact en 5
secondes serait de dire aux consommateurs : « re-
garde nous avons fait une école ». Mais on passerait à
côté des impacts structurels et forts qui font partie de
la vie de la communauté. Je citerais des impacts colla-
téraux comme l’accès au crédit, l’accès à l’information,
l’accès aux échanges d’expérience entre les organisa-
tions qui au final aident à consolider les organisations.
Enfin, le fait d’avoir une organisation de producteurs
plus forte doit être considéré comme l’un des impacts
les plus importants. »
Raùl del AguilaRaùl del Aguila, président de la CLAC, le réseau des pro-ducteurs certifiés d’Amérique du Sud.
« Ne passons pas à côté des impacts structurels qui sont
les plus forts. »
Un outil harmonisé pour mesurer l’impact
Evaluer l’impact permettra d’améliorer l’action du commerce équitable.
Pour y parvenir, il a d’abord fallu se mettre d’accord sur la méthodologie.
La réflexion autour de l’impact du commerce équi-table sur les producteurs a été initiée en 2005 au
sein de la fédération internationale FLO. En effet, jusque là, le label avait beaucoup investi sur la garantie des moyens mis en œuvre : les standards, les prix, etc. La certification permet de vérifier le respect des standards : paiement des prix ou procédures démocratiques des organisations. Cependant, cette vision reste partielle. L’ambition du commerce équitable est de changer du-rablement la donne pour les producteurs en agissant sur les conditions de leur développement, et en provoquant des changements sur la durée. C’est ce que cherchent à mesurer les études d’impact. Elles permettront au label Fairtrade / Max Havelaar de mieux connaître les effets de l’action du commerce équitable et d’améliorer son fonctionnement au service des producteurs.
Faire le triPour comparer ce qui est comparable, il a d’abord fallu se doter d’un cadre méthodologique commun. Pour cela, la fédération FLO s’est adjoint les services de consultants spécialistes du commerce équitable ou de la mesure d’impact.
Un grand nombre d’études d’impact du commerce équitable existent déjà, mais le tri s’est avéré difficile : « Nombre d’entre elles se focalisent sur certains as-pects particuliers ou utilisent des approches tellement différentes que les comparaisons entre elles sont qua-siment impossibles », explique Karine Laroche, respon-sable filières chez Max Havelaar France.Tout en restant souple, une méthode unifiée définit donc clairement l’ensemble des aires possibles de change-
ment avec l’action du commerce équitable pour per-mettre les rapprochements. « Ceci permettra aussi de s’assurer que si tel changement attendu n’était pas mentionné, cela est bien dû au fait qu’il n’a pas été constaté, et non pas qu’il n’ait pas été traité », explique Karine Laroche.
Six études de casLa méthode retenue : une série d’études de cas repré-sentatifs de l’ensemble du commerce équitable label-lisé. Les organisations de producteurs concernées ont participé à l’étude. « Elles nous ont aidé à déterminer ce qui était dû au commerce équitable et ce qui venait des organisations elles-mêmes, explique Karine Laro-che. Cela a aussi permis d’éviter que l’étude devienne un audit d’organisation, ce qui est à l’inverse du but re-cherché. »
Des experts externes ont apporté un regard neuf, un savoir-faire de la mesure d’impact : l’ONG d’appui au développement Agronomes et vétérinaires sans frontiè-res (AVSF), l’Institute of development studies, le cabinet de consultants Oréade-Brèche. Des experts internes au label ont apporté leur connaissance du fonctionnement du commerce équitable, de l’historique des organi-sations, des dynamiques territoriales et des marchés concernés, etc.
L’évaluation
de l’impact
porte sur quatre
niveaux : la famille,
l’organisation de
producteurs,
le développement
local et
l’environnement.
L’Amérique Latine, continent historique du commerce équitable
Mexique
Colombie
Equateur
Pérou
Bolivie
GhanaCôted'Ivoire
Ethiopie
Tanzanie
Timor Oriental
Indonésie
République Dominicaine
TROIS PRODUITS EMBLÉMATIQUESDU COMMERCE ÉQUITABLE DANS LE MONDE
* Organisation de Petits Producteurs
** Commerce Équitable
Café
Nb d'O.P.P.* Nb. plantations certifiéescertifiées
Année lancementde la filière en CE**
Cacao
Banane
290 1988
1993
1999
43
29
0
0
36
Café 240
27
Nb d'O.P.P.*certifiées
Nb. plantations certifiées
Cacao
Banane
Café 35
10 50 %
17,5 %
1 %1
Nb d'O.P.P.*certifiées
% des volumesmondiaux CE**
Cacao
Banane
Café 15
6 _
2,5 %
__
Nb d'O.P.P.*certifiées
% des volumesmondiaux CE**
Cacao
Banane
50 %
80 %
99 %
0
0
3529
% des volumesmondiaux CE**
L’Amérique Latine, continent historique du commerce équitable
Mexique
Colombie
Equateur
Pérou
Bolivie
GhanaCôted'Ivoire
Ethiopie
Tanzanie
Timor Oriental
Indonésie
République Dominicaine
TROIS PRODUITS EMBLÉMATIQUESDU COMMERCE ÉQUITABLE DANS LE MONDE
* Organisation de Petits Producteurs
** Commerce Équitable
Café
Nb d'O.P.P.* Nb. plantations certifiéescertifiées
Année lancementde la filière en CE**
Cacao
Banane
290 1988
1993
1999
43
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Café 240
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Nb d'O.P.P.*certifiées
Nb. plantations certifiées
Cacao
Banane
Café 35
10 50 %
17,5 %
1 %1
Nb d'O.P.P.*certifiées
% des volumesmondiaux CE**
Cacao
Banane
Café 15
6 _
2,5 %
__
Nb d'O.P.P.*certifiées
% des volumesmondiaux CE**
Cacao
Banane
50 %
80 %
99 %
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3529
% des volumesmondiaux CE**
Pour réaliser cette première série d’études, il fallait retenir six organisations qui exportent plus de 30 % en commerce équitable et qui avaient une ancienneté suffisante pour analyser l’impact. C’est pourquoi le choix s’est porté sur des coopératives situées en Amérique du Sud. Dans ces conditions, elles ont été retenues en raison de leur représentativité. Les prochaines éditions de ce bilan se pencheront sur d’autres bénéficiaires comme les salariés agricoles ou sur d’autres régions du monde comme l’Afrique ou l’Asie.
APROMALPI 1 (Pérou) est une organisation de 170 membres constituée en 1996 à l’initiative d’un groupe de quarante producteurs de mangue. Ceux-ci cherchaient à améliorer leurs revenus et à échapper aux prix imposés par les intermédiaires. Après un an d’ex-portation, Apromalpi a pu obtenir la certification com-merce équitable dès 2003. Elle produit sur 340 hectares, soit environ 2 hectares en moyenne par exploitation.
Étude réalisée par l’ONG Agronomes et Vétérinaires sans frontières.
BANELINO 2 (République Dominicaine) a été fondée et certifiée en 2000 par trois groupes d’agriculteurs qui vendaient déjà en équitable. Elle ex-porte aujourd’hui 8 à 10 % des bananes de République Dominicaine. Elle regroupe 260 producteurs indépen-dants, soit le quart des producteurs de banane du pays. Possédant en moyenne 3 hectares, ils emploient tous chacun un à deux ouvriers permanents, à 80 % des mi-grants haïtiens.
Étude réalisée par le cabinet Oréade-Brèche.
COCLA 3 (Pérou) est une fédération de 22 coopé-ratives de café situées dans le département de Cuzco. Elle a été fondée en 1967 dans le but d’améliorer les conditions de mise sur le marché du café de ses mem-bres. Elle compte 6 800 producteurs membres, géné-ralement des petits producteurs familiaux qui possè-dent une douzaine d’hectares de surface agricole, dont 3,5 hectares de café en moyenne, des surfaces très modestes pour la région. Le café représente 80 % de leurs recettes monétaires.
Étude réalisée par le cabinet Oréade-Brèche.
CONACADO 4 (République Dominicaine) fut la première organisation de producteurs de son pays à être certifiée en commerce équitable, dès 1996. Elle fut créée en 1988 pour répondre à la demande des associations de petits cacaoculteurs des zones rura-les pauvres pour exporter directement leur cacao afin d’améliorer leurs revenus. Vingt ans plus tard, elle concerne 13 000 familles productrices qui cultivent des exploitations familiales de petites tailles. 77 % possè-dent moins de 5 hectares. Peu équipés, ces producteurs emploient peu de main d’œuvre extérieure, hormis en périodes de pointe de travail. Jusqu’en 2004, elle com-mercialisait moins de 10 % de son cacao en commerce équitable ; aujourd’hui, elle en est à 47 %.
Étude réalisée par le cabinet Oréade-Brèche.
FAPECAFES 5 (Équateur) est une fédération qui regroupe quatre organisations de producteurs du Sud du pays. Environ 1 300 familles exportent du café certi-fié Fairtrade / Max Havelaar depuis 2003. Ils possèdent entre 3 et 6 hectares de café et 1 hectare en fermage pour la production de riz et maïs. Ayant peu de terres, ils doivent en plus aller se faire employer trois mois par an dans les bananeraies et les élevages de crevettes de la côte équatorienne. Certains peuvent avoir jusqu’à 10 hectares de pâturage pour quelques bovins.
Étude réalisée par Agronomes et Vétérinaires sans fron-tières.
FECAFEB 6 (Bolivie) est une fédération qui re-groupe 24 organisations, dont 20 certifiées Fairtrade / Max Havelaar depuis plus de 10 ans. Ces organisations comptent environ 4 000 membres, des Aymaras de l’Al-tiplano qui se sont vu attribuer des terres par une réfor-me agraire. Ils possèdent entre 0,5 à 2 hectares de café pour les zones les plus anciennes et en moyenne 6 hec-tares de café dans la zone de colonisation récente.
Études réalisées par Agronomes et Vétérinaires sans frontières.
Les six organisations étudiées
1 2
46
5
3
Grâce à ses investissements, la Conacado peut exporter du cacao séché de qualité supérieure.
L’effet prix
Des familles économiquement plus stablesC’est avant tout la stabilité du revenu qui met les producteurs à l’abri des aléas et leur
permet d’investir. Leurs petites exploitations familiales sont viables. Le commerce équitable
permet aussi d’augmenter le revenu plus ou moins fortement.
Trois types de gains économiques figurent dans les standards internationaux du commerce équitable. D’abord, le prix minimum garanti est une garantie de stabilité et apporte un supplément en période de cours bas. A cela s’ajoute, le cas échéant, un différentiel de prix biologique. Enfin, la prime de développement re-vient à la coopérative pour des investissements com-munautaires.
A l’abri des aléas
Si l’on devait retenir un effet économique majeur du commerce équitable, ce serait la protection face au ris-que de variation de prix et la stabilisation des revenus des familles. En temps normal, ces fluctuations les obli-gent périodiquement à chercher du travail à l’extérieur, ou à vendre leur petit cheptel bovin pour faire face à des besoins imprévus.
De plus, quand la conjoncture économique est mau-vaise, le commerce équitable évite aux producteurs d’avoir à vendre les biens qui leur servent à produire, voire d’abandonner des exploitations. Au contraire, cette stabilité permet d’investir pour mieux produire.
Un supplément de revenu ?
Le prix minimum garanti induit donc une certaine sécu-rité économique. Selon les contextes et les périodes, il permet aussi des gains directs pour les petits produc-teurs, mais ce n’est pas toujours le cas. Il existe d’autres mécanismes, plus indirects, qui apportent des bénéfices aux familles.
La production plus rentable
Par exemple, le fait même d’accéder aux marchés spé-cifiques du commerce équitable a fortement contribué à rendre la production plus rentable pour les familles. La plupart du temps, elle a aussi imposé de nouvelles exigences : suivi des cultures, qualité, investissement.
La répartition des bénéfices n’est donc pas systéma-tiquement la même pour tout le monde. Le soutien aux producteurs varie selon les quantités produites, les vo-lumes vendus, ou selon la capacité à améliorer la qualité.
Valentin Chinchay, président de Fapecafes, ré-
colte le café dans sa parcelle de 4 hectares. En
1999, une crise économique a sévi en Equateur. Les
petits producteurs du pays ont été particulièrement
affectés. Dans le café, certains ont abandonné dé-
finitivement leurs terres. Le commerce équitable a
permis à de nombreuses familles de maintenir une
activité durable et même d’investir pour l’avenir.
Investir malgré la crise
A Antofagasta, petite communauté des
Yungas en Bolivie, Policarpio Mamani
Yana supervise l’avancée des fondations de
sa maison. Trois maçons coulent du ciment.
Des palettes de briques creuses attendent
leur heure.
Maison de planches
Policarpio reçoit encore dans son ancienne
habitation, un espace commun clos par
une palissade de planches juxtaposées. Une
paillasse matérialise la chambre. À côté,
dans un réduit, son épouse fait mijoter une
marmite en aluminium au-dessus d’un petit
brasier. « Ce n’est pas très confortable, mi-
nimise-t-il. Quand il pleut, l’eau passe à tra-
vers les planches. »
Confort de base
Sa nouvelle maison, elle, disposera de tout
ce qu’on peut considérer comme le confort
de base : « Elle fera 48 mètres carrés, avec
l’eau courante, l’électricité, une cuisine, une
chambre séparée pour les enfants… »
Pour le financement, Policarpio n’a pas em-
prunté un seul peso boliviano. Il a simple-
ment mis de l’argent de côté durant trois
récoltes successives. Pour lui, plus question
de survivre au jour le jour : le temps est venu
d’investir. Le prix minimum garanti du com-
merce équitable contribue à lui assurer un
revenu stable.
Des revenus quintuplés
En 2005, les revenus des producteurs cer-
tifiés des Yungas étaient situés entre 1 600
et 2 700 €. Ceux qui vendaient leur café sur
le marché local oscillent plutôt entre 320 et
595 €. Une famille de cette région avec deux
enfants a besoin de 675 € par an pour sur-
vivre. Survivre, c’est pouvoir acheter des
aliments et des produits de base au marché.
Avoir une vie « digne et durable », c’est pou-
voir en plus financer les études des enfants et
en général investir pour l’avenir. 1 430 € sont
nécessaires pour cela.
Chez les producteurs de Cocla au Pérou, les résultats économiques du commerce équitable ont un effet direct sur les ni-veaux de revenu des membres. Le café est une marchandise cotée en bourse qui fluctue beaucoup. Sur cette filière, le prix minimum garanti prend tout son sens. Fixe en période de cours bas, il a contribué à l’amélioration des revenus des familles productrices de Cocla. Entre 2000 et 2006, il a été en moyenne 68 % supérieur aux prix fluctuants du marché convention-nel. Cette stabilité permet aux producteurs d’éviter de devoir aller chercher un travail complémentaire ailleurs.
Écart en valeur entre les prix du café vert export en commerce équitable chez Cocla et les prix export sur le marché conventionnel (US$/Quintal = 46 kg)
Prix moyen café CE Bio
Prix moyen café CEPrix moyen café BioPrix moyen café conventionnel (SHG)
175
150
125
100
75
50
25
02000 20022001 2003 2004 2005 2006
Quatre murs en dur pour Policarpio
Un meilleur revenu
permet d’améliorer les
conditions de vie.
Policarpio Mamani et
son épouse Trigida
peuvent enfin se faire
construire une vraie
maison.
Les effets conjugués du prix et du marché
Investir collectivement dans la qualitéGrâce à des débouchés plus stables, les producteurs décident collectivement d’améliorer la
qualité et d’investir dans la production.
Dans les différentes études de cas, on constate que les outils du commerce équitable confèrent une vraie capacité d’investissement aux producteurs et à leurs organisations. En effet, les producteurs accèdent à des marchés avec des garanties de stabilité. Or, c’est cette stabilité qui permet d’investir. Dans un premier temps, ces investissements portent sur l’amélioration de la productivité des exploitations et sur le choix de vendre sur des marchés de qualité. La qualité étant mieux rémunérée, les producteurs entrent dans une spirale vertueuse.
Le cacao dominicain a eu longtemps une
mauvaise réputation sur le marché inter-
national. Les prix moyens de ce cacao « San-
chez » sont inférieurs aux cours mondiaux.
Non fermenté, mal séché et conditionné, le
Sanchez est un cacao de second choix.
Une fermentation sous contrôle
Pour tirer plus de leur récolte, les produc-
teurs de la Conacado ont donc décidé de
s’orienter vers le cacao fermenté, dit « His-
pañola » qui permet de faire des chocolats
aux arômes subtils. Dans chacune de leurs
coopératives régionales, ils ont donc installé
des bacs disposés en cascade où des spécia-
listes contrôlent la fermentation : 24 heures
dans le premier, 48 heures dans le second...
Après cinq jours de fermentation, le cacao
est séché dans de grandes serres.
Ces lourds investissements ont été financés
en grande partie par la prime de développe-
ment du commerce équitable. « La qualité,
et le prix qui va avec, nous ont permis, au
fil des ans, d’accéder à des marchés stables,
donc d’avoir un revenu stable, explique Os-
terman Ramirez, responsable qualité à la
Conacado. Pour nous, qualité et stabilité vont
de pair. Cela a permis d’améliorer la qualité
de vie de notre communauté. »
Liqueur et couverture
Progressivement, Conacado passe même à
l’étape suivante. Les fèves sèches peuvent
être directement exportées, mais elles peu-
vent aussi être transformées en poudre, en
beurre de cacao ou en « liqueur » utilisés par
les chocolatiers. Sous cette forme, la vente est
évidemment bien plus rémunératrice, par-
ticulièrement sur les marchés du commerce
équitable. 23 % de ces produits sont en com-
merce équitable.
La Conacado transforme le cacao
Evolution des prix de vente du cacao en grain de la Conacado comparés au marché conventionnel.
Les fèves sont mises à sécher dans de grandes serres.
2002/03 2003/04 2004/05 2005/06 2006/07
3 000
2 500
2 000
1 500
1 000
Prix
(en
USD/
T)
Prix moyen Hispañola commerce équitablePrix moyen SanchezPrix moyen Hispañola standard (national)
Le choix de l’autonomie
Les producteurs s’engagent dans leur propre voie de développementLa stabilisation des revenus et la meilleure rentabilité des activités agricoles favorisent la mise en œuvre de stratégies d’autonomie. La sécurité alimentaire est maintenue. Elle dépend de stratégies choisies par les familles.
Jusqu’en 2005, Apromalpi ne commercialisait que des mangues
fraîches « Kent », les seules à avoir une valeur pour l’exportation.
Or, ses adhérents ne cultivaient que 20 à 30 % de manguiers de cette
variété. Les bénéfices étaient donc limités, et les producteurs risquaient
d’être contraints de reconvertir leurs plantations pour tout replanter
en « Kent ».
En 2006, ayant établi une relation de confiance avec ses importateurs,
Apromalpi a pu s’orienter vers l’exportation de pulpe de mangue, ce
qui lui a permis de valoriser les autres variétés de mangue cultivées par
les producteurs, « Edward » et « Créole ».
Par ailleurs, en se diversifiant, Apromalpi est devenu le fournisseur
principal de mangues, de citrons verts, de papayes et de fruits de la
passion pour une unité de production de confitures tropicales qui ap-
partient à une autre coopérative. Ainsi, les producteurs ont pu valoriser
la diversité de leurs arbres fruitiers.
Comment Apromalpivalorise ses fruits délaissés
Dans un premier temps, le commerce équitable ren-force la spécialisation des producteurs vers les produc-tions de rente, vendues à l’exportation sur les marchés du commerce équitable. Tout en se spécialisant, ils pri-vilégient de bonnes pratiques agricoles et passent plus facilement au bio, avec l’accompagnement technique de leurs organisations.
Capacité d’initiative
Dans un second temps, grâce à la stabilisation du prix, le commerce équitable redonne des capacités d’initia-tive qui font que les producteurs choisissent de se di-versifier. D’une part, ils peuvent entretenir des cultures de subsistance afin d’assurer leur sécurité alimentaire. D’autre part, certains se créent de nouvelles sources de
revenus : élevage, autres produits destinés à l’exporta-tion, production pour le marché local, etc. C’est donc individuellement que chaque producteur assure son autonomie alimentaire au travers de stratégies diverses.
Marché local ?
L’ensemble des organisations concentre donc la ma-jeure partie de ses efforts sur les marchés d’export. Les marchés nationaux ne sont pas encore la cible priori-taire des ventes des organisations de producteurs. Toute une démarche de valorisation et de diversification des produits sur ces marchés reste à construire.
Apromalpi vend certains de ses fruits à une autre coopérative qui les exporte sous forme de confitures.
L’effet régulateur
Les prix sur le marché local sont tirés à la hausseLe commerce équitable labellisé bénéficie aussi par ricochet aux producteurs de la région.
Pour revendre aux importateurs du commerce équitable, les organisations de producteurs achètent les récoltes de leurs membres à des prix relativement élevés. Comme elles représentent souvent une part conséquente des produc-teurs de leur territoire, les acheteurs privés, par le jeu de la concurrence, doivent eux aussi payer un meilleur prix, voire fournir des services comme de l’appui technique.
Ainsi, le commerce équitable labellisé contribue indirectement à une restructuration du marché local, voire national, ce qui a des effets sur le développement socio-économique du territoire.
Dans les Yungas de Bolivie, les coopératives de
base de Fecafeb font concurrence aux acheteurs
privés du marché local du café. Les ventes réalisées
par les organisations de producteurs du commerce
équitable représentent 25 % du volume total. Comme
elles achètent à des tarifs privilégiés le café équitable
ou biologique, les intermédiaires doivent s’aligner
s’ils veulent préserver leur approvisionnement. Ainsi,
l’impact du prix du commerce équitable s’étend in-
directement à toutes les familles vivant du café dans
les Yungas.
Le prix du commerce équitable a un « effet régulateur » sur toute la filière café de la région de Caranavi (Bolivie).
Un négociantlocal à Caranavi.
120
02001 2002 2003 2004
600
80
100
40
20
US$ / Quintal
Prix moyen sur le marché local de Caranavi.Prix moyen de l'arabica à la boursede New York.Prix moyen d'export des organisations affiliées à la Fecafeb.
Bolivie :les intermédiaires du marché conventionnel s’alignent
L’effet d’entraînement
Une économie locale plus dynamiqueLe commerce équitable labellisé contribue à créer
des emplois agricoles et de nouvelles activités.
Au fur et à mesure de leur croissance, toutes les organisations de producteurs étudiées ont besoin de plus en plus de main-d’œuvre. Il faut cueillir les fruits, contrôler le séchage du café, charger les camions, gérer les commandes... De plus, leurs activités contribuent à renforcer le tissu économique local, et dans certains cas, à améliorer les salaires locaux.
Les productrices de cacao de La Guardia, en Ré-
publique Dominicaine, confectionnent des pro-
duits qu’elles sur le mar-ché local : confitures, vin de cacao, chocolat artisa-
nal... De cette manière, la Conacado soutient des projets de diversification sous forme de micro-en-
treprises féminines.
C’est le nombre estimé des emplois directs et indi-
rects générés par le réseau de Cocla (Pérou) et ses
6 800 producteurs. La fédération génère une activité
pour 18 % de la population en âge de travailler de la ré-
gion de la Convencion et de Yanatile. Elle génère aussi
un dynamisme économique local essentiel pour cette
région rurale enclavée.
19 700
L’effet organisation
Plus fortes, les coopératives gagnent en légitimitéLes débouchés du commerce équitable labellisé ont contribué à structurer les organisations
et à les rendre plus fortes. Les effectifs grandissent. Elles se retrouvent plus souvent en po-
sition de force pour négocier. En réponse aux besoins des producteurs, elles proposent des
services de formation, d’assistance technique et de crédit.
L’organisation de producteurs est l’épine dorsale du commerce équitable. Comme elle peut offrir de meilleu-res conditions commerciales, elle devient plus légitime face aux producteurs eux-mêmes. Plus confiants, ils sont plus nombreux à vouloir adhérer. Avec plus de membres, la coopérative peut proposer plus de volumes à ses clients, et améliorer son capital.
Être représentatifs
L’organisation est porteuse de la voix de ses adhérents. Elle promeut leurs intérêts à l’extérieur, par exemple auprès des autorités locales ou des acteurs écono-miques influents. Son avis est plus volontiers pris en compte. Elle devient plus représentative au sein du monde rural paysan et prend une véritable dimension politique. Elle obtient des appuis qui contribuent à ren-forcer ses capacités de production, son assise com-merciale et sa stratégie de durabilité.
Commerce équitable et coopération
Certaines organisations reçoivent une assistance tech-nique de la part de projets de coopération d’ONG ou de partenaires économiques. Ces programmes sont complémentaires du commerce équitable. Par des for-mations, ils encouragent une gestion saine et profes-sionnelle. Les standards et les contrôles du commerce équitable labellisé vont aussi dans ce sens. Chez les plus grandes et les plus anciennes coopérati-ves, le développement est avant tout le résultat de leurs efforts et de leur capacité à s’organiser. Le commer-ce équitable apparaît alors comme un des leviers qui contribue à la diversification de l’offre, à l’amélioration de la qualité, à la diversification de la clientèle. Tout cela fait une organisation plus forte.
Capital et trésorerie
Les organisations de producteurs deviennent des ins-titutions de référence sur leur territoire. Avec l’appui du commerce équitable, elles acquièrent un capital avec lequel elles dispensent des formations, du crédit, de l’encadrement pour le passage au bio...Le préfinancement des récoltes est déterminant. Il donne la trésorerie nécessaire à l’activité commerciale des organisations de producteurs. Il contribue aussi à améliorer la rentabilité pour les producteurs. Cependant les mécanismes actuels sont insuffisants. La fédération FLO développe de nouveaux outils financiers et écono-miques d’appui aux organisations de producteurs.
Pesée en commun des sacs de café apportés par les producteurs avant l’expédition dans les Yungas en Bolivie.
font évoluer les coopératives vers des struc-
tures plus commerciales et plus efficaces,
mais toujours dans un esprit mutualiste.
Ainsi, les trois quarts des organisations de
producteurs certifiées Fairtrade / Max Have-
laar ont réformé leurs statuts. « Autrefois, à
la coopérative Mejillones, la direction était
empirique, se souvient Nelly. Il était courant
qu’il y ait trois comptabilités : une pour soi,
une pour les membres et une pour le fisc. »
Organigramme
Aujourd’hui, quand on arrive à Mejillones,
au mur de la salle commune de la coopérative
s’étale un grand organigramme : conseil d’ad-
ministration, comité de surveillance, dépar-
tement qualité… Au moment de repartir, au
terme d’une après-midi passée en compagnie
des producteurs, on signe un compte-rendu
d’une page, soigneusement manuscrit.
Autre facteur motivant pour tenir les regis-
tres à jour : les visites de FLO-Cert, la société
qui contrôle les standards de Max Havelaar.
« Sans FLO-Cert, les formations n’auraient
pas eu le même impact, estime Nelly. Les
contrôles leur ont permis de réaliser qu’ils
n’avaient pas de procédures. Ils se sont ainsi
professionnalisés. »
Grâce à un programme de formations et
aux inspections de FLO-Cert, les coopé-
ratives caféïères des Yungas, en Bolivie, sont
de mieux en mieux gérées.
La coopérative, c’est l’outil qui permet aux
producteurs de ne pas rester isolés face au
marché. Pourtant, les plus anciens s’en mé-
fient encore. Ils ont trop d’exemples de pré-
sidents à vie, d’intendance douteuse et d’es-
croqueries.
Mais peu à peu émerge une nouvelle généra-
tion. Ce sont les becarios, les lauréats d’une
formation de 19 mois à l’administration, la
gestion des organisations, la commercialisa-
tion et à la comptabilité avec l’appui de l’ONG
AVSF. « Je me vois comme un chef d’entre-
prise, mais toujours au sein d’un collectif,
explique un jeune becario. Nous devons ac-
quérir des compétences en tant que groupe.
Si nous ne sommes pas unis, nous risquons
d’échouer. »
Bonne gestion
« Au début de la mise en place du commerce
équitable, les premiers becarios à être for-
més à la bonne gestion ont pris la place de
ceux qui monopolisaient le pouvoir », expli-
que Nelly Usnayo, formatrice. Les becarios
Comment a évolué votre
organisation à travers le
commerce équitable ?
Au Pérou, dans les années 1990, il y avait
seulement quatre organisations de produc-
teurs dans le café, et ces quatre organisa-
tions ont commencé par pure coïncidence à
travailler dans le commerce équitable. Elles
ont commencé à retisser le tissu social perdu.
Dix-huit ans après, nous avons un réseau
de quarante organisations de producteurs,
toutes dans le commerce équitable. Alors
que durant la période critique, les organi-
sations de café exportaient de manière com-
mune l’équivalent de 2 % de la production
nationale, aujourd’hui, l’exportation de café
équitable touche près de 30 % de la produc-
tion nationale. Cela montre bien une chose
importante pour le commerce équitable qui
est le renforcement de l’organisation.
Quel est l’intérêt d’avoir une
organisation forte ?
Notre objectif n’est pas seulement de vendre.
Nous cherchons aussi à avoir des répercus-
sions publiques dans la région afin d’amé-
liorer les services de base. Si l’on pense que
les prix ou la prime du commerce équitable
résoudront seuls les problèmes de base, je
pense que nous nous trompons. Bien sûr, ils
y contribuent... Mais l’effet le plus important
est l’effet levier que crée le commerce équita-
ble afin que les organisations puissent s’in-
sérer dans le système financier, et ainsi être
reconnu comme un acteur économique. Dans
les années 1990, les banques nous refusaient
les financements. Depuis, ayant accès aux
marchés du commerce équitable, nous avons
réussi à obtenir des crédits en nous connec-
tant au système financier local. Ça a été
fondamental pour toutes ces organisations
qui sont du coup devenues des acteurs éco-
nomiques. Nous avons pu faire respecter nos
droits et influencer les politiques publiques.
Une nouvelle génération : l’entreprise paysanne
« Un effet de levier pour être reconnu
comme acteur économique »
Raul del Aguila
dirigeant de Cocla (Pérou) et membre du conseil d’administration de FLO
« Noustravaillonstous unis
dans une même organisation. »
Abel Fernandez Responsable export à la Conacado
(République Dominicaine)
L’effet marché
De nouveaux débouchés pour les petits producteursLe commerce équitable labellisé ouvre de nouveaux champs commerciaux et contribue à
renforcer la légitimité des organisations de producteurs.
Dans les différents cas étudiés, le commerce équitable labellisé a permis aux organisations de producteurs d’acquérir une plus forte crédibilité commerciale. Elles ont accédé à de nouveaux marchés spéciaux comme le bio ou les cafés d’origine. Exportant ainsi pour la première fois, elles acquièrent un pouvoir de négociation jusque là inenvisageable. Elles établissent des partenariats commerciaux, dont certains sont assortis d’avantages financiers comme des avances à crédit ou des contrats servant de garantie pour des prêts. L’accès à ces marchés contribue à ce que les organisations de producteurs soient reconnues comme acteur économique fort du secteur. Cela leur confère alors une dimension plus politique.
Conacado : Les producteurs unis créent des alliances
Dans son bureau de Saint-Domingue,
Abel Fernandez est un homme occupé.
Plusieurs téléphones greffés à l’oreille, il gère
les exportations de plus de 10 000 petits pro-
ducteurs. Depuis plus de quinze ans, la Co-
nacado vend du cacao bio à Barry Callebaut.
« Quand Barry a acheté dans les conditions
du commerce équitable, notre relation s’est
encore renforcée. » Au-delà des critères du
commerce équitable, les deux partenaires ont
conclu un accord suivant un « partenariat
public-privé » : la Conacado fournit un cacao
haut de gamme et Barry Callebaut apporte un
appui technique.
Abel Fernandez fouille dans ses archives et en
tire une revue de presse. On y explique que
Conacado a fait face au gouvernement qui
avait créé un impôt prélevé de manière par-
ticulièrement inégalitaire sur les ventes des
petits producteurs. « Grâce à la force de no-
tre organisation et au lien très fort que nous
entretenons avec des organisations telles que
Equal Exchange, on a pu mettre la pression
sur les autorités locales afin que cet impôt
cesse d’être appliqué. »
Sur ce principe, la Conacado ne compte plus
ses alliances avec des entreprises et des insti-
tutions internationales. « C’est aussi un outil
de pression pour le cas où les acheteurs refu-
seraient de payer ou prendraient du retard.
Ce sont les avantages d’être affiliés à un systè-
me de commerce équitable : nous travaillons
tous unis dans une même organisation. »
Evolution des volumes totaux et commerce équitable exportés par Conacado (Rép. Dom.).
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
0
8 000
12 000
4 000
Tonnes
Exports totauxExports en commerce équitable
Les producteurs gagnent en influence politiqueFortes de leur accès aux marchés d’exportations, les organisations se retrouvent plus
crédibles au moment de négocier avec les institutions.
Eugenio Villca Maldonado prend la
parole lors d’une réu-nion de la Fecafeb.
La fédération des producteurs de café
boliviens a pu négocier une loi
sectorielle sur le café avec le gouvernement. Une grande première pour les producteurs
de la région.
Plus reconnues, les organisations de producteurs se font une place dans les espaces nationaux et internationaux pour défendre les intérêts des pro-ducteurs. Elles contribuent ainsi à définir ou à ren-forcer les politiques sectorielles.Trop souvent, la catégorie des petits producteurs est écartée des décisions politiques la concernant et non considérée parmi les acteurs économiques d’importance. Au sein des organisations étudiées, ils se retrouvent en position renforcée, parfois de leader, sur les marchés d’exportation. Ils font usage d’un nouveau pouvoir d’influence à des niveaux de décisions politiques. C’est un changement signi-ficatif dans les rapports de force au niveau local, régional et national que les producteurs valorisent tout particulièrement. On peut parler d’une forme de démocratie dans le marché.
Solidarité
La fierté de travailler ensembleLes producteurs s’identifient à un collectif et se reconnaissent
dans des représentants légitimes.
L’accompagnement au renforcement des capacités de gestion des organisations de producteurs est un ingré-dient nécessaire à la constitution des valeurs de démo-cratie, transparence des organisations de producteurs et à leur professionnalisation. Dans toutes les organisations étudiées, les producteurs ont exprimé une satisfaction liée à l’évolution de leur situation. Le commerce équita-ble labellisé est perçu comme un « levier » essentiel de développement de l’organisation par ses membres qui va jusqu’à apporter une revalorisation de l’estime de soi.
Au Pérou, les producteurs de Cenfrocafé construisent ensemble une nouvelle unité de séchage du café. Pour eux, « travailler dans l’unité » est plus qu’un slogan, c’est un mode de vie et une identité.
Très militant, Santiago Ma-mani Guaranca se considère
comme « un chef d’entreprise, mais toujours au sein d’un
collectif » constitué par son association Villa Oriente,
dans les Yungas en Bolivie.
Des biens publics et des services collectifs pour tousLe commerce équitable labellisé bénéficie à la communauté grâce à des projets sociaux ou
environnementaux.
Le commerce équitable labellisé intervient dans des zones où les services publics et les infrastruc-tures sont faibles, voire inexistants. C’est pourquoi les organisations de producteurs décident souvent de mettre en place des projets communautaires. Ces projets bénéficient non seulement aux pro-ducteurs, mais aussi, le plus souvent, aux autres personnes des communautés environnantes, par-fois les plus défavorisées. La prime de dévelop-pement est souvent associée au développement de projets communautaires. Des fonds propres aux organisations de producteurs peuvent aussi y contribuer.
Parfois, au contraire, l’essentiel des investisse-ments sert à améliorer les outils de production. Des équipements plus modernes contribuent à di-minuer la pénibilité du travail, même si la majorité des producteurs continuent de cultiver à la main.
Enfin, certaines des études relèvent que le salaire des travailleurs saisonniers employés dans les parcelles est en augmentation. Ce n’est cependant pas encore le cas partout.
La région de Monte Cristi figure parmi
les plus pauvres de République Domi-
nicaine. Au bout de kilomètres de chemins
poussiéreux, on rejoint un petit village, ou
plutôt une communauté vivant sur ce qui res-
te des logements ouvriers d’une compagnie
bananière ayant déserté les lieux il y a près
de cinquante ans. On y vit sans eau courante
ni électricité. La notion de service public est
inexistante. En grande partie au chômage, les
adultes errent, désœuvrés.
C’est dans cette zone que Banelino a choisi
de concentrer la plus grande partie de ses in-
vestissements sociaux. Ceux-ci profitent aux
producteurs, aux travailleurs qui les aident,
mais aussi à tous les habitants. « Le commer-
ce équitable ne bénéficie pas seulement au
petit producteur mais à toute la communau-
té, car le producteur fait partie intégrante de
la communauté », estime Marike de Peña, di-
rectrice exécutive de Banelino.
Huit écoles
Le seul médecin qui passe dans la zone porte
sur sa chemise le sigle de Banelino. Il donne
des consultations publiques gratuites dans
une salle de classe. La crèche et l’école du voi-
sinage sont également financées en grande
partie par la coopérative : rénovation des lo-
caux, frais de scolarité, fournitures, salaires
du personnel... Au total, Banelino a choisi de
financer huit écoles, ce qui n’est pas le fruit du
hasard. « Les producteurs et les travailleurs
de Banelino sont conscients que le progrès
passe par l’éducation, souligne Susana Ro-
driguez, responsable des projets sociaux de
Banelino. Pour eux, c’est très important. »
Banelino donne la priorité à l’éducation
Dans le cas de l’agriculture familiale, le commerce équitable labellisé encourage un mode d’agriculture qui est à l’origine manuelle et à faible niveau d’intrants, le plus souvent diversifiée. Ainsi, le café sous ombrage fa-vorise la biodiversité. Un désherbage minimum permet de conserver la vie du sol. L’impact de ce modèle sur l’environnement est relativement limité.
Franchir le pas du bio
Le commerce équitable labellisé a permis de généraliser certaines bonnes pratiques agro écologiques comme les engrais organiques. Il a incité les producteurs à aller plus loin dans la gestion des ressources naturelles. Les études n’ont cependant pas eu le recul nécessaire pour prendre en compte l’application de la nouvelle version des standards environnementaux, mise en place à partir de 2007.
Dans ces conditions, les effets environnementaux du commerce équitable sur la gestion des ressources na-turelles restent donc très liés à la certification bio. Le commerce équitable labellisé permet de franchir le pas en valorisant économiquement la production bio grâce à un supplément au prix minimum garanti. Cela s’explique par des contraintes supplémentaires pour le cultivateur. Elle permet de minimiser encore l’impact sur l’environ-nement, notamment l’érosion des sols.
Prise de conscience
Sur cette lancée, les organisations de producteurs et leurs membres ont pris conscience de la nécessité de préserver la biodiversité et de produire de manière du-rable. Ponctuellement, elles cherchent à sensibiliser plus largement la population à ces questions.
L’effet bio
Une empreinte environnementale faibleLe commerce équitable labellisé contribue à pérenniser une agriculture à petite échelle et
respectueuse de l’environnement en normalisant les bonnes pratiques. Aussi, il optimise ce
modèle d’agriculture en incitant au passage au bio. Cela s’accompagne d’une véritable prise
de conscience au sein des organisations.
À la coopéra-tive Cepicafé, les producteurs ont mis en place une pépinière afin de reboiser leur territoire.
« La production bio, c’est
bon pour la santé, et ça
permet de récupérer les sols
qui ont été abîmés avec des
engrais chimiques. Ca per-
met aussi de produire une
alimentation saine pour la
famille et pour les consom-
mateurs. C’est un mode de
production de nos ancêtres
qui s’est perdu. »
Segundo Chero Moralesmembre d’Apromalpi (Pérou) depuis 2000,
administrateur depuis 2 ans.
Bananiers
La production biologique et ladiversification des plantations
permettent de préserver la vie du sol.
Manguiers Citronniers
Couverture végétale
Petit élevage
Max Havelaar Belgique rue d’Edimbourg 26 1050 Bruxelles Tél. : 02 894.46.20 Fax : 02 894.46.21
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