blainville : mutation de l’économie locale et de l’offre de service · 2013. 9. 26. ·...

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47 Blainville : Mutation de l’économie locale et de l’offre de service Une économie résidentielle dynamique Une relation forte entre le commerçant et l’habitant Les commerces et les services publics constituent des éléments importants de la vie économique. En effet, la vie locale est rythmée par la fréquentation des commerces et des services. À Blainville-sur-Orne, leur utilisation est importante car selon notre enquête, seuls 19 personnes sur 253, ne se rendent pas dans les commerces et services publics de Blainville alors que 80 d’entre eux les utilisent quotidiennement. Cette fréquentation est représentative d’une satisfaction générale. Selon les propos recueillis, le rapport entre habitants et commerçants est cordial, voire convivial grâce à la proximité et à l’amabilité de ces derniers. De plus, l’offre proposée permet d’avoir accès à tous les produits de première nécessité. Le lieu privilégié pour effectuer le plus gros des achats reste pourtant le centre commercial d’Hérouville. Cependant, ce sont les commerces et services de Blainville qui sont les plus appréciés car ils sont représentatifs de l’idée de commerce comme « lieu de rencontre ». Figure n°1 : la Médiathèque et l’Express U du centre-ville Source: photo MUD oct-nov 2012

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Blainville : Mutation de l’économie

locale et de l’offre de service

Une économie résidentielle dynamique

Une relation forte entre le commerçant et l’habitant

Les commerces et les services publics constituent des éléments importants de la vie

économique. En effet, la vie locale est rythmée par la fréquentation des commerces et des

services. À Blainville-sur-Orne, leur utilisation est importante car selon notre enquête, seuls

19 personnes sur 253, ne se rendent pas dans les commerces et services publics de Blainville

alors que 80 d’entre eux les utilisent quotidiennement.

Cette fréquentation est représentative d’une satisfaction générale. Selon les propos

recueillis, le rapport entre habitants et commerçants est cordial, voire convivial grâce à la

proximité et à l’amabilité de ces derniers. De plus, l’offre proposée permet d’avoir accès à

tous les produits de première nécessité. Le lieu privilégié pour effectuer le plus gros des

achats reste pourtant le centre commercial d’Hérouville. Cependant, ce sont les commerces et

services de Blainville qui sont les plus appréciés car ils sont représentatifs de l’idée de

commerce comme « lieu de rencontre ».

Figure n°1 : la Médiathèque et l’Express U du centre-ville

Source: photo MUD oct-nov 2012

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Les services publics (administratifs, enseignement, santé) ont aussi un rôle important

dans la commune. Les administrés sont satisfaits des services de la mairie et du centre

communal d’action sociale (CCAS), notamment son implication pour les personnes âgées.

La police municipale, très visible, semble jouer un rôle dans les bonnes relations entre

les habitants. Par exemple, leur travail au moment de la sortie des écoles semble très apprécié.

Les enseignements dispensés en maternelle, primaire et collège sont réputés mais des

problèmes disciplinaires sont souvent évoqués, ce qui semble être néfaste. Par exemple, un

jeune homme de vingt trois ans nous a dit subir des réflexions lorsqu’il fait son jogging

devant le collège.

Figure n°2 : les commerces de la place de l’Eglise

Source: photo MUD oct-nov 2012

Figure n°3 : Mairie de Blainville-sur-Orne

Source : photo google image

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Une offre de service à nouveau satisfaisante

Notre sondage a révélé que les habitants ont vu une amélioration de l’offre de

commerces et de services dans la commune à hauteur de 58,4 %. Il faut pourtant nuancer ce

constat car nos entretiens ont révélé des divergences de points de vue. La fermeture de petits

commerces comme les cafés, le changement du « Mutant » en « Express U » ont laissé un

goût d’amertume pour de nombreux habitants. En effet, les prix étaient moins élevés, il y

avait un meilleur rapport humain avec les commerçants puisque la taille des magasins était

plus petite. L’offre de commerce semble s’être diversifiée et sa qualité s’être améliorée

(ouverture d’une banque, d’un supermarché) mais elle ne semble pas faire l’unanimité car elle

n’est plus adaptée aux budgets les plus modestes.

De plus, l’accessibilité à ces lieux est différenciée selon le lieu d’habitation. Certaines

parties de la commune, spécialement les logements pavillonnaires au nord, sont désavantagées

car les transports publics y sont moins présents. Au contraire, pour les logements récents du

centre-ville (résidence Colbert, les Brandons…) le temps moyen pour accéder aux commerces

est d’environ cinq minutes à pied. Ceci a des effets sur les modes de consommation des

habitants du nord de la commune, qui utilisent plus fréquemment les commerces et les

services d’Hérouville.

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Figure n°4 : Temps d’accès aux commerces

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Via les entretiens, nous avons pris connaissance de souhaits individuels. Aux yeux des

habitants, ce qui manque le plus ce sont des magasins de vêtements, d’électroménager ainsi

qu’un laboratoire afin d’éviter d’aller systématiquement dans les communes voisines. De

même des lieux de rencontres comme une salle des fêtes, un café, un parc ont été demandés.

Même si divers souhaits ont été exprimés, il n’en demeure pas moins que l’offre existante est

satisfaisante pour la majeure partie de la population, comme l’illustre les 60 % de réponses

positives.

L’offre existante est de plus en plus tournée vers les services à la personne. C’est ce

qu’on appelle l’économie résidentielle. Ce type d’économie est satisfaisant pour les personnes

enquêtées. Un phénomène identique est-il visible pour l’offre associative ?

149

96

Oui Non

0

20

40

60

80

100

120

140

160

Trouvez-vous les commerces et services suffisants à

Blainville-sur-Orne

Figure n°5 : La qualité des commerces et services dans la commune. Panel 245personne

Source : enquête MUD oct-nov 2012

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De nombreuses associations pour un succès

relatif

Un riche tissu associatif

La commune de Blainville compte 37 associations qui portent sur des thèmes aussi

variés que le sport, la culture, les loisirs ou la solidarité. Cette diversité est illustrée par

l'USMB (Union Sportive Municipale Blainvillaise) qui compte aujourd'hui 16 sections allant

du football, au judo en passant par l'escalade. Récemment, une section hockey sur gazon

vient de rejoindre l’union. Lorsque nous avons demandé aux personnes interrogées si elles

connaissaient des associations, plus de la moitié ont répondu positivement.

Si les associations sont connues des habitants, une faible proportion d’entre eux en

sont membres. Sur l'échantillon des personnes interrogées, seulement 4 personnes sur 10 ont

déclaré en faire partie.

154 98

Connaissez-vous une association à

Blainville?

Oui

Non

Figure n°6 : La connaissance du milieu associatif par les

Blainvillais. Panel de 245 personnes

Source : questionnaire MUD

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Cette absence d'engagement suit une tendance nationale. Les chercheuses Edith

Archambault et Viviane Tchernonog du Centre d’économie de la Sorbonne CES-CNRS, ont

réalisé une publication rassemblant des chiffres issus de sources diverses D’après leur étude

près de 45 % des plus de 18 ans sont membres d’une association. La faible fréquentation ou le

faible engagement dans les associations ne caractérise pas spécifiquement le territoire

communal blainvillais. Cependant, nous avons essayé de comprendre les caractéristiques de

l’engagement associatif.

Un engagement relatif

D’après les entretiens, un clivage s'établit entre les attentes des personnes âgées

et celles des plus jeunes. Lors d’une rencontre avec plusieurs personnes à la retraite, celles-ci

nous ont avoué être relativement déçus par la faible implication des nouveaux arrivants. L'une

d'entre elles nous a même donné un exemple.

Encadré n°1

« Pour une manifestation nous avons envoyé 750 courriers d'invitation aux familles. Nous

n'avons reçu qu'une trentaine de réponses..., c'est décourageant… »

Source : entretien MUD oct-nov 2012

71

181

Êtes-vous membre de l'une

d'entre elle?

Oui

Non

Figure n°7 : L’engagement des blainvillais dans le

tissu associatif local. Panel de245personnes

Source : enquête MUD oct-nov 2012

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Encadré n°2

« Si on ne fait partie de rien ici, on perd les gens de vue, mais on a besoin de se connaître, de

voir du monde, c'est plus sympa de voir du monde! Certains de mes anciens collègues ne font

plus rien et ne voient plus personne ».

Source : entretien MUD oct-nov 2012

Ils se félicitent d'ailleurs de l'engagement très fort pour certaines associations telle

l'ARPA, association des retraités et de personnes âgées. La commune de Blainville dénombre

selon eux plus de 750 personnes de plus de 60 ans. Il ne faudrait pas oublier cette tranche de

population qui a un réel besoin de s'investir. Ils regrettent cependant que les générations plus

jeunes adoptent un comportement de consommation.

Encadré n°3

« Ils profitent des associations mais ne les font pas vivre, ils viennent aux repas mais ne

participent pas aux activités. Beaucoup de gens sont inscrits dans plusieurs associations, et

nulle-part en même temps. Ils ne s'investissent pas vraiment ».

Source : entretien MUD oct-nov 2012

Encadré n°4

« Le grand nombre d'associations renforcent peut-être l'identité, mais les associations

tournent autour d'un centre d'intérêt, il n'y a pas d'associations autour des gens, des relations

humain .Il n'y a pas d'ouvertures ».

Source : entretien MUD oct-nov 2012

Pour les jeunes, il existe de nombreuses activités sportives liées aux différents

équipements d’accueil, le local jeune par exemple, qui est réservé au moins de 14 ans. Le fait

qu’il soit réservé à cette tranche d’âge pose un problème à certains habitants qui ont noté que

les plus de 14 ans ne possèdent pas de lieux de rencontres.

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Un soutien communal fort

Dans le but de faciliter l’accès des plus jeunes aux associations, plusieurs partenariats

existent entre les écoles et les associations. C'est le cas par exemple avec la Médiathèque, qui

permet aux enfants de pouvoir emprunter des livres sur le temps scolaire. Les associations

sont soutenues par la Mairie qui leur met à disposition des locaux. Dans les rues de Blainville,

on remarque en outre plusieurs panneaux lumineux d’informations. Les associations qui le

souhaitent peuvent ainsi communiquer sur leurs activités.

Les infrastructures relativement récentes qui ont été créé à l’initiative de la Municipalité

contribuent aussi au bon fonctionnement et à la qualité du milieu associatif.

Encadré n°5

« La Mairie est à l'écoute et essaie d'agir. Ce n'est donc pas un hasard de retrouver beaucoup

d'associations ».

Source : entretiens MUD oct-nov 2012

Figure n°8: le panneau d’information de Blainville-sur-

Orne

Source photo MUD oct-nov 2012

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Le tissu associatif local est riche en dépit d’un engagement relatif des Blainvillais. Ce

dernier est parfois expliqué par l’apport de nouvelles populations qui sont faiblement

impliqué dans la vie associative. Ces nouveaux habitants amènent aussi des changements dans

l’économie locale. Quels sont-ils ?

D’une économie locale industrielle à une

économie résidentielle

Cette citation illustre l'héritage industrialo-portuaire qui subsiste dans les mémoires

des Blainvillais. Celui-ci résulte de deux entreprises emblématiques que sont les Chantiers

navals Caennais et Renault Véhicules Industriels (RVI) devenu Renault Trucks. Néanmoins,

des changements économiques apparaissent : la tertiarisation qui s’accompagne d’une

expansion du marché local.

Encadré n°6

« Avant il y avait une réputation de ville ouvrière, aujourd’hui on le perd petit à petit. je suis fière

D’être Blainvillaise, je n’ai pas honte »

Source : entretien MUD oct-nov 2012

Figure n9: Gymnase de la commune

Source: photo MUD oct-nov 2012

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RVI, chantiers navals : un héritage industrialo-portuaire

Après la seconde guerre mondiale, un grand nombre de navires de commerces

disparaissent. Dès 1917, le gouvernement français souhaite palier cette perte. C'est ainsi que

Blainville-sur-Orne accueille les Chantiers navals Caennais. L'activité de construction de

cargo cesse en 1954.

Peu de temps après, la Société Anonyme de Véhicules Industriels et d'Équipements

Mécaniques (SAVIEM) lance sa production sur l’ancien site des chantiers navals. La

SAVIEM devient Renault Véhicules Industriels (RVI) en 1980. En 2002, RVI prend la

dénomination Renault Trucks. Blainville-sur-Orne a été porté tout au long du vingtième siècle

par ces deux sociétés à tel point qu’il constitue une bonne part de l'image de la commune. Ces

deux entreprises, au delà de l'aspect historique, offrent une manne fiscale importante. Celle-ci

permet de subvenir aux besoins de la population via de nombreux équipements, des services

publics et de financements associatifs. Les Blainvillais sont conscients de ces avantages. Les

nuisances occasionnés par les activités provenant de la zone industrialo-portuaire leur

semblent donc marginales au regard des avantages procurés.

Cette citation met en lumière la particularité de Blainville-sur-Orne. La césure crée par

le canal, isole la zone industrialo-portuaire de la zone de logements et de commerces. Par

conséquent, la perception des pollutions semble minime.

Encadré n°8 :

« Le déchargement de céréales génère des poussières ; le recyclage des ferrailles est

bruyant... Mais je défends le fait que l'on peut trouver des points qui réconcilient l'activité

économique et les citoyens. »

Source : discours de Daniel Françoise, maire de Blainville-sur-Orne, Ouest France,

25/10/2012.

De fait, RVI et les chantiers navals nourrissent une conscience collective. Cependant, selon

les « anciens », celle-ci semble décliner au fur et à mesure que la population se renouvelle.

Encadré n°7

« Carpiquet est plus aisé encore, mais on n’est pas mal. »

« Grace à Renault Trucks, on paye moins d’impôts [...] On a les avantages sans les

inconvénients de la zone industrielle »

Source : entretien MUD 2012

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Encadré n°9 :

« Les grosses entreprises font la fierté de Blainville. »

« Aujourd'hui, les gens sont trop étrangers à la commune, ils ne connaissent pas son

histoire. »

« Il y a de moins en moins d'ouvriers, de plus en plus de techniciens supérieurs, l'identité

ouvrière meurt. »

« Les entreprises sont de l'autre côté du canal, on a l'impression que c'est à Colombelles,

mais ça appartient bien à Blainville. La zone industrielle nous appartient même si elle est

délocalisée. »

Source : entretien oct-nov 2012

Depuis l'arrivée des nouvelles populations, les catégories socioprofessionnelles des

Blainvillais évoluent considérablement. Ainsi, les pratiques, les usages et les besoins de la

population changent. D’où une tertiarisation de l’économie.

Processus de tertiarisation et tissu économique hétérogène :

entreprise d'économie résidentielle et globale

Les demandes des nouveaux arrivants ont engendré une nouvelle offre économique.

Cette expansion démographique récente entraîne un regain de l'économie résidentielle après

une période de fermeture des commerces. À titre d'exemples, les services de santé se sont

développés, un nouveau supermarché Leclerc est également en cours. Le phénomène est

double. D'une part, il touche les entreprises, d'autre part il affecte l’emploi des Blainvillais,

qui appartiennent majoritairement à l'administration publique et au tertiaire privé.

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Encadré n°10 :

« A une époque, RVI embauchait 7500 salarié. Aujourd'hui, RVI n'embauche plus » « Avant,

tout le monde travaillait là bas, dans la zone. » « Les jeunes aujourd'hui de la commune

travaillent plus à l'extérieur. »

« Encore beaucoup de gens travaillent à RVI »

Source : entretien MUD oct-nov 2012

Commentaire :

Le secteur industriel décroit mais conserve toujours une place dans la vie économique de

Blainville.

Malgré la tertiarisation, la commune reste industrielle avec la présence de Renault

Trucks. Ce phénomène est accompagné d’un développement des petites et des moyennes

entreprises telles que : Caen auto négoce, Caennaise des bois, Carrière de la roche Blain,

CEMEX béton, etc. Les secteurs d'activités sont variés, les principaux étant le bois,

l'exportation de céréales, le bâtiment et les travaux publics. Le port de Caen-Ouistreham dans

lequel est intégré le site de Blainville est ainsi le quatrième de France pour l’importation des

bois exotiques provenant notamment du Golfe de Guinée.

Encadré n°11 :

« Le port n'est pas mort, il se développe, mais l'usine RVI se casse la figure.»

« A terme, il y aura surtout des petites entreprises sur le port. »

« La plupart des employés sont des Blainvillais, les patrons sont souvent aussi des

Blainvillais. »

Source : entretien MUD oct-nov 2012

14 1

50

58

6

Dans quel secteur travaillez-vous ?

Industrie BTP

Agricole

Administration Pub

Tertiaire Privé

Autre

Figure n°10 : Le secteur d’activité dans lequel travaillent les Blainvillais. Panel de 129

personnes.

Source : enquête MUD oct-nov 2012

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Blainville-sur-Orne est partagée entre le secteur tertiaire et le secteur industriel.

Résulte de cette bipolarisation un questionnement sur les choix économiques futurs.

Perspectives économiques Après avoir analysé les caractéristiques des entreprises blainvillaises, une question

subsiste. À quel modèle économique peut être rattaché Blainville-sur-Orne ? Différents

projets sont à l'étude ou prêt à être mis en place. Ceux-ci vont cependant dans des voies

différentes. Si la municipalité et son maire ont récemment accueilli le terminal des conteneurs

et prévoient une extension du port, un centre commercial est également prévu. Pour mieux

comprendre les perspectives qui s’ouvrent pour la commune. Nous allons la comparer avec

Colombelles. Ce choix nous sommes pertinent car celle-ci fut également une ville industrielle

avant sa reconversion.

Vers un développement accru du port

La zone industrialo-portuaire a un rôle important, que ce soit dans la mémoire des

Blainvillais, financièrement ou encore économiquement. D'abord prévu sur le bassin de Calix,

un projet de terminal de conteneurs d'un montant de trois millions d'euros sera lancé en mars

2013. Celui-ci consiste en l'accueil de deux ou trois navettes par semaine. Entre dix mille et

quinze-mille conteneurs par an seront ainsi transportés, soit autant de camions faisant escale à

Blainville-sur-Orne. À terme, les Ports Normands Associés (PNA) qui ont envisagé ce projet

avec la Région, espèrent jusqu'à soixante-dix-mille conteneurs par an. Une douzaine

d'emplois directs ainsi qu'une quarantaine d'emplois indirects seront créés. Cette nouvelle

activité ne devrait pas générer d’encombrement sur les quais selon le maire. Une extension

jusqu'à la limite communale de Bénouville est également à l'étude. Il semble donc que des

idées émergent, allant vers un futur marqué par un développement de cette zone industrialo-

portuaire.

Le port de Blainville est installé sur un bras de terre reliant Caen à la mer. Cette particularité

est à préserver selon le maire. Sur une rive, le développement de l'habitat est une priorité alors

que sur l'autre, le but est de maintenir l'activité économique.

Colombelles et sa reconversion économique : un élément de

comparaison

Au sein de l'agglomération caennaise, plusieurs communes ont les mêmes

caractéristiques économiques que Blainville-sur-Orne. C'est le cas de Colombelles. Son passé

est marqué par une entreprise. Si pour Blainville-sur-Orne il s'agit des constructions navals et

de la SAVIEM, en ce qui concerne Colombelles c'est la Société métallurgique de Normandie

(SMN).

La SMN, lancée en 1917, exploitait le minerais de fer. Elle ferme ses portes en 1993, qui fut

vécue comme un chaos économique et social par la population car le chômage de masse et des

friches industrielles se développèrent sur le territoire communal. La commune a donc du se

reconvertir. Le secteur industriel a laissé la place aux nouvelles technologies avec

l'implantation du campus Effiscience lancé en 2005 ainsi qu'à l'agro-alimentaire avec

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Normandial. Ces nouveaux aménagements ont été réalisés au même endroit que les anciens

locaux de la SMN.

Lors des entretiens, une question quant à l'avenir de Blainville a permis d’exprimer des

souhaits mais aussi des inquiétudes. Un habitant de plus de soixante ans redoute de voir

Renault Trucks fermer ses portes. Si cela arrivait, il ne sait comment Blainville-sur-Orne s'en

relèverait. Pour une autre personne, le secteur industriel n’est plus le secteur créateur

d’emploi.

Encadré n°12 :

« Il faudrait surement chercher dans les technologies nouvelles »

Source : entretien MUD oct-nov 2012

Cependant, si l'histoire des deux communes a des points communs, le souvenir de la

SMN dans les mémoires paraît plus fort à Colombelles. Où il existe une identité construite

autour de la SMN. A l'inverse, parler d'identité à Blainville-sur-Orne est sans doute une

exagération. Il existe une conscience collective lié au passé ouvrier qui reste de mise chez les

plus anciens habitants. Une hypothèse pour comprendre cette différence tient au fait que

l’industrie est toujours présente à Blainville-sur-Orne. Une mémoire collective ne peut donc

se développer dans ces conditions. Il n’est en outre pas possible de développer un marketing

territorial autour de cette idée comme le fait la mairie de Colombelles.

Quoi qu'il en soit, la dynamique de la commune de Blainville est indéniable, le

terminal de conteneurs ainsi que le développement du port le prouvent. Elle est renforcée par

le développement du secteur tertiaire. Ainsi, un centre commercial doit s'implanter dans les

mois qui viennent.

Un projet controversé

Un projet de centre commercial a été mis à l'étude et a obtenu une autorisation à la fin

du mois de juin 2011. Cet établissement, à savoir un centre E.Leclerc, doit s'implanter le long

de la quatre-voies allant de Caen à Ouistreham, dans la zone d’activité « Terre d'avenir ». Le

bâtiment, d'une superficie de 4 380 mètres carrés, sera constitué d’un magasin E.Leclerc et

d'une galerie marchande de 580 mètres carrés. Le projet, implanté sur cinq hectares, prévoit

Figure n°11 : Image du futur centre E.Leclerc.

Source : Ouest France, 16/11/12

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de créer une centaine d'emplois directs. Cependant, celui-ci connaît plusieurs freins juridiques

à son aboutissement. Du côté des habitants les avis divergent quand à l’opportunité d’une telle

réalisation.

Une procédure d'acceptation semée d'embuches

Plusieurs enseignes issues du même secteur d'activité ont posé un recours devant le

Conseil d'Etat au mois d'août 2012. Les requérants sont notamment le Simply Market de

Bénouville, le Super U d'Hérouville-Saint-Clair ou d'autres commerçants de Bénouville. Le

Conseil d'Etat dispose d'un délai de dix-huit mois pour rendre sa décision. Si, selon le maire

de la commune, aucun Blainvillais n'a porté de recours contre le Leclerc, le porteur du projet,

Frédéric Laisney, a reconnu qu'une dizaine de commerçants blainvillais l'avaient initialement

fait avant d’abandonner la procédure.

Auparavant, le projet a connu d'autres difficultés qui ont retardés les travaux. À

l'origine, la zone commerciale devait être complétée par un magasin de sport et par un autre

vendant des produits biologiques. Cependant, ce projet initial a été refusé par la commission

départementale d'aménagement commercial (CDAC) au mois de septembre 2010, Bénouville,

commune limitrophe avec Blainville-sur-Orne, possédant déjà une zone commerciale. Le

projet a donc dû être redéfini pour obtenir l’autorisation.

L'avis des habitants : entre espoir et craintes

De nombreuses personnes ont signalé le projet du E.Leclerc lors du passage des

questionnaires. Nous avons donc voulu connaître le ressenti de la population au travers

d’entretiens.

Encadré n°13 :

« On sait bien qu'il y a une guéguerre entre les communes » « Le Leclerc, c'est pas encore

fait ».

Source : entretiens MUD oct-nov 2012

Les Blainvillais semblent majoritairement enthousiastes quant à l'implantation d'une

telle enseigne. Nombreux sont ceux qui y voient un avantage de proximité qui permettra

d'éviter de prendre la voiture pour se rendre au Carrefour d'Hérouville-Saint-Clair ou au

Simply Market de Bénouville. Les termes « espoir » et « attente » ont souvent été repris par

les habitants interrogés. De plus, un avantage financier significatif apparaît, une grande

surface étant moins cher qu'un épicier.

Encadré n°14 :

« Le Leclerc va permettre d'éviter de prendre la voiture. Et pour les gens qui ont une petite

retraite qui n'ont pas les moyens de se payer deux steaks, c'est important de ne pas avoir

seulement un charcutier car ça coûte cher, chez le charcutier ». « Il faut penser aux petits

budgets »

Source : entretien MUD oct-nov 2012

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Mais des inconvénients ont été évoqués. Les commerçants blainvillais du centre ainsi

que l’Express U pourraient être affectés par le futur Leclerc. Le porteur du nouveau projet

répond à ce problème en donnant la priorité à ces commerçants pour s'installer dans la galerie

marchande. Selon une personne avec laquelle nous nous sommes entretenus, la municipalité

aurait le projet de construire des logements à proximité du futur centre commercial. Cela suit

l'objectif des dix mille habitants avancé par le maire de la commune. Or, cet afflux de

population fait peur à certains Blainvillais car la proximité entre les gens ainsi que la

conscience collective risque de disparaître progressivement.

Encadré n°15 :

« Le Leclerc, ça va faire mal au Super U, et les petits commerces, ils vont mourir. »

« Le Leclerc, ça va faire venir des gens. » « Le maire, il veut dix mille habitants mais c'est pas

ce qu'on veut. On se connaît tous, on veut que ça reste comme ça. On va se perdre de vue. Il y

a déjà des nouveaux arrivants, on les connaît même pas, ils partent le matin et ils reviennent

le soir. »

Source : entretien MUD oct-nov 2012

Nous pourrions dire que, concernant les perspectives économiques, Blainville-sur-

Orne vise plusieurs axes de développement. D'une part, renforcer son rôle de lien entre Caen

et la Mer par le développement du port. D'autre part, développer l’économie résidentielle pour

capter le pouvoir d’achat des nouveaux habitants. Le projet du Leclerc et sa centaine

d'emplois illustre cette deuxième option.