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B e r n a r d L A N D A I S

L e M o n é t a r i s m e

ECONOMICA

49, rue Héricart, 75015 Paris

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© Ed. ÉCONOMICA, 1987

Tous droits de reproduction, de traduction, d'adaptation et d'exécution réservés pour tous les pays.

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Avant-propos

Ce livre est le prolongement d'un cours de macroéconomie, professé entre 1981 et 1985 aux étudiants de Sciences Économiques de l'Université de Bretagne Occidentale. Il s'adresse donc tout spécialement aux étu- diants et professeurs des deuxième et troisième cycles des Facultés de Sciences Économiques et des formations voisines.

J'ai souhaité faire apparaître combien la pensée de Friedman et de ses amis avait marqué l'histoire des idées économiques des dernières décennies, à tel point qu'elle constitue un acquis durable que se partagent des économistes contemporains de toutes tendances.

On peut en effet prétendre que la maturation de la pensée monéta- riste s'est poursuivie régulièrement jusqu'en 1975, en opposition, puis parallèlement à la pensée keynésienne orthodoxe, pour donner des répon- ses à deux séries de questions concernant d'une part la détermination du revenu nominal et d'autre part, la séparation des mouvements du revenu en variations des quantités et des prix. La première partie du programme s'achève vers 1970, la seconde quelques années plus tard. Sept premiers exposés y sont consacrés: • Les racines du monétarisme • Pour une théorie monétaire du revenu nominal • Politique monétaire ou politique budgétaire • Les mécanismes de transmission des impulsions monétaires • Monétarisme et inflation • Théorie du taux naturel de chômage • Monétarisme et politique économique

En cette première moitié des années quatre-vingt, six courants princi- paux alimentent les discussions qui portent sur les problèmues généraux des économies développées. A côté du monétarisme figurent les courants keynésiens, néo-classique, néo-autrichien, supply side et industrialiste. Si l'on met ce dernier à part, tous ont un ou des points de contact avec la pensée monétariste et recueillent une par t d'héritage.

La pensée keynésienne a été fécondée très tôt : depuis une ving- taine d'années elle a réévalué le rôle de la monnaie. Qui se souvient des

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présentations keynésiennes a-monétaires des années cinquante et soixante peut mesurer le chemin parcouru. De même, la notion de taux naturel de chômage est très largement acceptée par les auteurs keynésiens.

Les nouveaux classiques ajoutent un troisième « étage » à la cons- truction monétariste en s'appuyant sur l'hypothèse des anticipations rationnelles. Ils la rendent à la fois plus élégante et plus fragile.

Si la pensée autrichienne vient de loin, son renouveau actuel s'expli- que par la « victoire » d'un monétarisme dont elle prend le relai. Nonobs- tant la chronologie, elle s'analyse comme un dépassement du monétarisme, au plan politique comme au plan théorique.

Les « supply siders », souvent considérés comme des adversaires des monétaristes, ne remettent pas vraiment en cause leur théorie mais certai- nes politiques qui s'en inspirent. Rien ne permet de dire que la « cohabita- tion » ratée des années Reagan soit impossible à jamais.

Les trois derniers essais de l'ouvrage sont consacrés à la défense de ces points de vue assez controversés :

• Anticipations rationnelles et la nouvelle école classique • La théorie autrichienne des cycles et de l'inflation, dépassement du

monétarisme • L'économie de l'offre face au monétarisme

Ce cours laisse de côté les questions relatives aux aspects extérieurs du monétarisme et plus précisément sa généralisation en monétarisme mondial ainsi que l'approche monétaire des balances de paiements. Le travail de Jean-Pierre Laffargue, publié pa r « Économie et Prévision » sous le titre : « L'apport du monétarisme à l'analyse et à la politique éco- nomiques » peut fournir sur ce point une référence française solide.

Les débats suscités par l'avènement et le règne récent du monétarisme ont mis aux prises les meilleurs esprits du temps. Peu de sujets offrent l'occasion de côtoyer la pensée d'un si grand nombre de « vedettes » de notre profession. C'est pourquoi il est bien difficile de prétendre à l'origi- nalité. Si, au f i l du texte, le lecteur rencontre quelque opinion personnelle qu 'il sache qu 'elle ne s'exprime qu 'avec la prudence et la modestie qui con- viennent.

Lorient, juin 1986

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CHAPITRE 1

Les racines du monétarisme

En 1968, quand Karl Brunner inventa le nom de « monétarisme », nul n'aurait pu prévoir l'influence formidable de cette contre-révolution sur la théorie et la politique économiques de ces quinze dernières années.

De nos jours, les propositions monétaristes sont pourtant plus célè- bres que bien connues, à la fois parce qu'elles suscitent dans l'opinion publique des réactions qui relèvent plus de l'émotion que de la raison et qu'elles se présentent aux spécialistes en ensemble non systématique et toujours en mouvement.

Dans le débat qui l'oppose depuis près de trente ans à la pensée keyné- sienne, le monétarisme fait souvent figure de « Jean qui pleure ». La «Théorie Générale » avait donné aux gouvernants l'illusion de pouvoir maîtriser les fluctuations de l'activité et surtout de prévenir tout retour offensif du chômage. Le grand public appréciait cette médecine sympa- thique dont les prescriptions les plus sévères ont pour nom : « relance de la consommation », « baisse du taux d'intérêt », « grands travaux »... et applaudissait les médecins ! Au contraire, en période de crise, les monéta- ristes semblent n'avoir à offrir que « des souffrances et des larmes » pour extirper l'inflation. Autant dire que les idées monétaristes ne sont pas spontanément populaires.

Voici la définition que donne P.A. Samuelson de cette théorie :

« Le monétarisme s'appuie sur la croyance selon laquelle le déterminant premier de l'état de la demande globale macroécono- mique, qu'il s'agisse du chômage ou de l'inflation, est la monnaie, M1 ou M2 et de manière plus spécifique peut-être, ses différents taux de variation. »'

Cette définition pourrait éventuellement convenir si on en restait au message contenu dans les premiers travaux de l'École de Chicago au cours des années cinquante et soixante. Elle ne permet plus d'établir désormais la distinction entre les économistes monétaristes et les autres, notamment les keynésiens modérés tels que Tobin, Duesenberry ou Modigliani. Ce dernier ne dit-il pas en effet : « Je suis tout à fait préparé à retourner que "nous sommes tous monétaristes" si pa r monétarisme on entend le fait d'assigner à la masse monétaire un rôle majeur dans la détermination de la

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détermination de la production ou des prix » Ce serait donc plutôt au plan de la politique économique que les désaccords se maintiendraient entre les deux écoles dominantes, les monétaristes refusant de faire con- fiance aux politiques de stabilisation.

Ces discussions portant sur la définition plus ou moins appropriée du monétarisme n'ont guère d'importance dès lors qu'en sont connues les principales propositions, « racines » d'où l'ensemble tire substance et solidité. C'est une tâche aisée à accomplir en raison des travaux déjà réali- sés par Thomas Mayer David Laidler et Jérôme Stein.

Par ailleurs, la quête des « racines » du monétarisme passe par l'évo- cation de ses précédents historiques. Il n'est pas difficile de montrer qu'avant Keynes nombre d'économistes développaient des idées proches de celles de Friedman et de ses disciples.

Enfin, nous examinerons pourquoi, en dépit d 'un corps de doctrine solide, le courant monétariste prékeynésien a connu l'éclipse que l'on sait. La discussion engagée sur ce point à propos de la Grande Crise servira de cadre à une première confrontation entre les opinions keynésienne et monétariste.

L E S T R A I T S S A I L L A N T S D U M O N É T A R I S M E 4

Dans le petit monde des macroéconomistes, la recherche des caractè- res spécifiques du monétarisme a donné lieu à un de ces débats courtois dont le profane perçoit parfois mal l'importance. On en a quelques échos dans le livre : « The Structure of Monetarism » où Thomas Mayer ne recense pas moins de douze propositions résumant à peu près la doctrine monétariste. Dans un souci de surenchères qui n'échappera pas au lecteur, j'en présenterai pour ma part quatorze, groupées de la manière suivante :

— Principes théoriques fondamentaux — Attitudes face à la politique économique — Préférences méthodologiques — Préférences idéologiques

Principes théoriques fondamentaux

1. Selon les enseignements de la théorie quantitative, c'est l'offre de monnaie qui « explique » les variations du revenu nominal et principale- ment du niveau général des prix.

2. Il existe une fonction stable de demande de monnaie.

3. L'instabilité économique est presque exclusivement le résultat des fluctuations erratiques de l'offre de monnaie. L'économie «réelle» est foncièrement stable.

4. C'est la politique monétaire tâtonnante qui provoque les chocs de demande préjudiciables à la stabilité du système économique. C'est cette même politique monétaire de l'État qui est la cause ultime de l'inflation.

Ces quatre propositions qui se situent sur des plans différents doivent être lues dans leur complémentarité :

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Les États, juges et parties du contrôle monétaire, exercent mal les pouvoirs qu'ils détiennent, provoquant à la fois l'inflation et un surcroît d'instabilité économique. La responsabilité des variations de la masse monétaire n'est engagée et clairement perceptible que parce que l'on peut comprendre et prévoir dans de bonnes conditions le comportement des détenteurs d'encaisses.

La plupart des questions qu'entraîne cette position étant abordées dans la suite de l'ouvrage, je n'étudierai ici que celle qui concerne la stabi- lité de l'économie capitaliste. Parmi les causes présumées d'instabilité, les monétaristes, poursuivant la tradition néoclassique, réservent une place secondaire aux chocs d'origine réelle. Ceux-ci sont par exemple les fluc- tuations de l'investissement privé, liées aux innovations ou aux mouve- ments spéculatifs, les cycles de stocks ou les variations brutales de certains prix (exemple des produits pétroliers importés). En se plaçant d'abord d 'un strict point de vue empirique, les auteurs monétaristes considèrent ces événements comme de peu d'importance pratique, insuffisante en tous cas pour expliquer l'ampleur des fluctuations observées de l'activité ou des prix. De plus, le stock de monnaie existant et la stabilité du compor- tement des détenteurs d'encaisses neutralisent ces chocs au plan macroé- conomique, jouant le rôle de « stabilisateurs automatiques ». Ainsi, toute réorientation de la demande au profit d 'un certain type de dépenses se répercutera négativement sur d'autres dépenses et provoquera seulement un remaniement interne des prix relatifs. Enfin, les « relais d'instabilité » que sont le multiplicateur keynésien et l'effet d'accélération sont considé- rés comme peu puissants, dans la mesure où les décisions de dépenses dépendent moins des fluctuations instantanées du revenu ou des ventes que des évolutions « permanentes » de ces grandeurs. En conclusion, sans dénier toute instabilité à une économie capitaliste laissée à la loi du mar- ché, les monétaristes pensent que les fluctuations y seraient moins mar- quées en l'absence de chocs monétaires. Nous retrouverons cet argument en étudiant les causes de la Grande Crise.

Attitudes face à la politique économique

5. Une politique monétaire expansionniste ne peut réduire durable- ment ni le taux d'intérêt ni le taux de chômage. Il n'y a pas d'alternative durable inflation - chômage.

6. L'impact expansionniste d'une politique budgétaire pure sera lar- gement éliminé par les réductions causées à la demande privée et dues à la hausse des taux d'intérêt qu'exigent les emprunts d'État.

7. Les difficultés d'établir de manière appropriée le déroulement dans le temps des actions de politique économique conduisent à envisager le caractère « déstabilisant » des mesures de politique discrétionnaire. Ce risque est accentué par les rythmes propres à la vie politique nationale.

8. En conséquence, les monétaristes proposent l'adoption d'une règle de progression de la masse monétaire.

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La politique monétaire est donc inefficace à long terme et ne peut constituer un instrument de lutte contre le chômage. C'est un rejet de l'idée d'une courbe de Phillips stable. La politique budgétaire, quant à elle, s'avère inopérante en raison de l'effet d'éviction. Enfin, les efforts de « conduite à vue » de l'économie n'aboutissent qu'à accentuer l'insta- bilité du système. Cette conception de la politique de régulation économi- que, déjà passablement pessimiste, apparaît pourtant modérée en regard des extensions récentes dues à la Nouvelle École Classique des partisans des « anticipations rationnelles » ou aux tenants d'une courbe de Philipps croissante.

Préférences méthodologiques

Sous cet intitulé assez vague figurent certaines propositions monéta- ristes de moindre importance que ne retiennent d'ailleurs pas tous les auteurs.

9. Les monétaristes se satisfont souvent d'une approche très globa- liste des phénomènes économiques conjoncturels sans chercher à les analyser secteur par secteur et en supposant que le marché des fonds prê- tables est un marché parfait.

10. En conséquence, ils préfèrent généralement les petits modèles économétriques très agrégés aux grands modèles détaillés.

11. Ils portent plus d'intérêt au niveau des prix qu'aux prix particu- liers.

12. L'objectif approprié de politique monétaire est la Masse moné- taire.

En résumé on peut dire que les monétaristes ont une approche très globaliste des problèmes et qu'ils s'affirment ainsi, plus encore que les Keynésiens, comme des macroéconomistes purs et durs. Néanmoins, l'évolution récente des idées laisse apparaître quelques failles dans cette attitude. C'est ainsi qu'à propos des relations entre le niveau général des prix et les prix relatifs on admet plus volontiers que l'inflation affecte ces derniers à travers la dégradation du système d'information des agents. Il me semble également que le retour à l'actualité de la pensée autri- chienne, très hostile au globalisme, a permis d'infléchir quelque peu les positions des monétaristes.

Préférences idéologiques 13. Les économistes monétaristes sont sans doute plus préoccupés

par l'inflation que par le chômage. 14. Les monétaristes sont des libéraux, hostiles aux interventions de

l'État.

Si le second point ne fait guère de doute, on peut se montrer plus sceptique sur le caractère idéologique de l'intérêt primordial accordé au problème de l'inflation. Les monétaristes, qui ne croient pas à la possibi- lité de réduire le chômage par la politique de régulation conjoncturelle

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de la demande ne peuvent plus assigner à cette dernière qu'un objectif de lutte anti-inflationniste. Il s'agit d'une position essentiellement prag- matique, qui ne peut en aucun cas justifier les accusations de parti pris anti-social lancées parfois contre la doctrine monétariste.

Les précurseurs

L'arbre généalogique de la famille nous fait remonter au moins jusqu'à Jean Bodin, l'inventeur de la Théorie Quantitative de la monnaie. Pourtant je ne pense pas que Friedman et ses amis aient d'ancêtre plus représentatif que David Hume, dont la présentation nuancée de cette Théorie rejoint leurs analyses modernes :

... bien que le prix élevé des marchandises soit une conséquence nécessaire de l'augmentation de l'or et de l'argent, elle ne soit pas immédiatement une telle augmentation (...) Au début, aucun chan- gement n'est perçu ; progressivement, les prix monteront, d'abord d'une marchandise puis d'une autre ; jusqu'à ce que l'ensemble soit finalement proportionné à la nouvelle quantité d'espèces (...) Selon mon opinion, ce n'est que dans cet intervalle ou situation intermé- diaire, entre l'acquisition de monnaie et la hausse des prix, que la q u a n t i t é a c c r u e d ' o r e t d ' a r g e n t e s t f a v o r a b l e à l ' i n d u s t r i e . . . 5

Il n'est pas difficile de repérer dans ce texte les ressemblances avec les propositions monétaristes portant sur l'inflation et la courbe de Phil- lips à court terme.

La célèbre controverse entre la Banking School et la Currency School, au cours de la première moitié du X I X siècle en Angleterre, a permis d'évoquer dès cette époque nombre de thèmes remis d'actualité par l'essor récent du monétarisme. Celui-ci s'est produit sur des voies déjà empruntées par les partisans du Currency Principle tels que Ricardo, Lord Overstone ou Peel. Ardents quantitativistes, ces derniers préconisaient un contrôle strict de la quantité de billets afin que les fluctuations de l'offre de monnaie ne provoquent pas de crises de convertibilité externe ou interne, elles-mêmes génératrices de troubles économiques profonds. A l'opposé, les auteurs de la Banking School tels que Tooke, Fullarton ou Stuart Mill pensaient que l'origine de l'instabilité est à rechercher du côté de la demande de monnaie (ou de crédit) ou des mouvements spéculatifs, tandis que l'offre de monnaie réagit passivement à travers les réponses des banques. Se trouve ainsi posé, de façon très claire, le problème du sens de causalité de la relation qui unit le revenu nominal et l'activité au stock de monnaie. La première proposition des monétaristes s'accorde au point de vue exprimé par la Currency School en faisant de la Masse monétaire l'élément moteur de cette relation. Les analogies constatées entre les deux courants de pensée dépassent cet accord sur le principe quantitativiste pour recouvrir toute une série de questions comme, par exemple, la défini- tion de l'agrégat monétaire à contrôler. Ils préconisent une conception moyenne, opposée à la fois à la définition extensive retenue par la Banking School et à la notion moderne de « liquidité de l'économie » adoptée par le

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rapport Radcliffe. Ils partagent aussi leur méfiance à l'égard du compor- tement monétaire de l 'é tat Au total, la filiation est clairement établie !

LE MONÉTARISME EST-IL UNE RÉSURGENCE DE LA PENSÉE PRÉKEYNÉSIENNE

Cette thèse est clairement et éloquemment soutenue par Harry John- son et A.R. Nobay dans un article récent du Journal of Economie Litera- ture

Les auteurs observent que la plupart des problèmes abordés par l'École monétariste concernent l'impact des chocs monétaires sur l'état de l'équilibre macroéconomique. Cela nous ramène à des tentatives pré- keynésiennes et singulièrement à celles de Knut Wicksell.

Les néoclassiques étaient obnubilés par deux questions : en premier lieu, la défense de la pensée quantitativiste qui implique la neutralité à long terme de la monnaie. En second lieu, les conditions de sa neutralité à court terme et l'opportunité de la politique monétaire pour maintenir ou restaurer l'équilibre.

La première question ayant été abordée et réglée par l'« équation des échanges » d'Irving Fisher, c'est surtout Wicksell et Keynes (dans « Trea- tise on Money») qui ont étudié la deuxième. Ainsi Wicksell, tout en acceptant la Théorie Quantitative pour l'explication qu'elle donne de l'évolution du niveau général des prix en longue durée n'en recherche pas moins les causes des fluctuations réelles qui amènent l'offre et la demande de biens à diverger à court terme.

Wicksell s'intéresse à un système de crédit où les variations de la quantité de monnaie influence les taux d'intérêt qui, à leur tour, modifient les flux d'investissement et d'épargne et provoquent des déséquilibres. Wicksell reste cependant quantitativiste parce qu'il pense que la consé- quence finale de ces déséquilibres sera la modification du niveau général des prix tandis que la production et l'emploi ne seront pas durablement concernés. Ce point de vue était partagé par Keynes jusqu'en 1929, Keynes qui prévoyait lui aussi des effets réels sur l'emploi et la production à court terme, dans le cas notamment où les prix et les salaires ne seraient pas suffisamment flexibles.

Pour Robertson, autre auteur de Cambridge et initiateur avec Wick- sell de la théorie des « fonds prêtables », l'inégalité initiale entre l'investis- sement et l'épargne peut aussi provenir des changements dans la propension à thésauriser (ou encore dans la vitesse de circulation). Dans ce cas il conviendrait de mener une politique monétaire active pour com- penser les modifications erratiques du désir d'encaisses. C'est à partir d'un point de vue similaire que très récemment (1975) la Banque de France a cherché à « alimenter » la constitution (semble-t-il accélérée) d'encaisses oisives par les ménages français pour en contrer les effets négatifs sur l'activité. Cette mesure a d'ailleurs suscité une vive controverse dont la revue «Banque» s'est faite l'écho. Certains auteurs monétaristes tels

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Alphandery ont attribué la baisse constatée de la vitesse de circulation à un excès de création monétaire déjà effectuée, récusant ainsi l'opportu- nité d'une politique monétaire plus laxiste. Le point de vue de Robertson, axé sur l'instabilité de la demande de monnaie, diffère quand même nette- ment de celui des monétaristes.

Il faudrait également invoquer l'influence exercée par F.A. Hayek et von Mises selon les lignes de raisonnement proches de celles de Wicksell. Néanmoins, par son refus du globalisme quantitativiste, Hayek est beau- coup plus l'inspirateur des courants les plus récents (Économie de l'Offre, Nouvelle École Classique) que du renouveau friedmanien. Convaincu du caractère perturbateur du financement de l'expansion par le crédit, Hayek ne fait pas confiance à des politiques de soutien monétaire artificiel lors- que la conjoncture s'est retournée. Sa doctrine apparaît ainsi beaucoup plus radicale que celle de l'École de Chicago. Les « Autrichiens » parta- gent néanmoins avec cette dernière un grand nombre d'idées, notamment relatives à l'inflation et au rôle néfaste joué à cet égard par l'État.

Harry Johnson considère que le plus grand précurseur du monéta- risme est Irving Fisher. Il l'affirme d'un triple point de vue :

Fisher est le premier à avoir mis l'accent sur les anticipations de hausse des prix comme cause des déséquilibres conjoncturels. Le taux d'intérêt nominal incorpore généralement de manière insuffisante la hausse effective des prix, ce qui fait baisser le taux réel d'intérêt, et la dépense supplémentaire qui en résulte contribue à alimenter l'inflation.

Fisher est à l'origine de la clarification des relations qui s'établissent entre le capital et le revenu. Par sa théorie du revenu permanent, Milton Friedman portera à la théorie keynésienne un coup sérieux en utilisant les résultats de l'analyse fishérienne de l'épargne. Certains Keynésiens modernes tels que Leijonhufvud (pour sa notion du « corridor ») lui emboîteront le pas.

Enfin, la théorie du chômage et de l'inflation proposée par Irving Fisher annonce la thèse accélérationniste par l'accent mis sur les anticipa- tions et l'importance des erreurs d'appréciation en ce qui concerne la séparation entre effets prix et effets quantité. Fisher est le vrai père de la relation connue depuis 1957 sous le nom de courbe de Phillips.

Johnson et Nobay soulignent que la seule véritable différence entre les approches de Fisher et de Friedman concerne la demande de monnaie. La fonction proposée par Friedman poursuit les travaux de l'École de Cambridge et met l'accent sur les équilibres de stock plutôt que de flux. Elle rompt ainsi nettement avec l'Équation des Échanges Fishérienne.

Milton Friedman s'est souvent référé lui-même à la tradition de l'École de Chicago des années trente et quarante, sorte de « village d'Asté- rix » quantitativiste dans un univers devenu keynésien. Il invoque les noms d'Henry Simons et Frank Knight et déclare que ceux-ci avaient maintenu l'explication monétaire des cycles, en opposition directe au courant nou- veau issu de la « Théorie Générale ».

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Cette prétention a suscité une controverse entre Friedman et Don Patinkin, ce dernier rejetant l'idée d'une tradition quantitativiste conser- vée à Chicago. En opposition à Friedman, il observe que les anciens pro- fesseurs de cette université tenaient pour instable la vitesse de circulation de la monnaie, au point de préconiser une politique monétaire compensa- toire active afin de contrôler le produit MV. On retrouve ainsi la position non monétariste de Robertson et les pratiques récentes de la Banque de France déjà évoquées. Remarquons pourtant, afin de réduire la portée de cet argument, que l'instabilité de la vitesse de circulation n'était pas pré- sentée de façon identique par les auteurs de Chicago et les premiers Keyné- siens. Pour ces derniers, la vitesse de circulation est une grandeur passive, dépendant des parts relatives de monnaie active et oisive, c'est-à-dire à la fois de la masse monétaire et de l'activité. Pour les « anciens » de Chi- cago, tels Douglas ou J. Viner c'est surtout en relation avec les anticipa- tions de hausse des prix que se produisent les fluctuations de la demande d'encaisses, donc sur la base d'un comportement bien pris en compte dans les formulations monétaristes modernes. La gratitude « filiale » de Friedman n'est donc pas complètement imméritée !

LA CRISE DES ANNÉES TRENTE : DÉCLIN PUIS REGAIN DES IDÉES NÉOCLASSIQUES

La Grande Crise des années trente a sonné le glas des idées néoclassi- ques prékeynésiennes et de l'explication monétaire des cycles, emportant avec elle toute la confiance que l'on accordait jusqu'alors au système de libre entreprise. La question que l'on peut se poser, c'est de savoir pour- quoi les idées néoclassiques orthodoxes ou « autrichiennes », dont on voit la résurgence actuelle, ont été écartées à cette époque?

Johnson et Nobay rapportent en premier lieu le fait que la connais- sance économique était très inégalement partagée dans les milieux politi- ques américains d'alors et, en second lieu, que les auteurs appartenant aux deux courants néoclassiques (qui annonçaient clairement l'opposi- tion actuelle entre monétaristes et « autrichiens ») ne parvenaient pas à se mettre d'accord sur les solutions à apporter à la crise.

Ainsi, Robertson, proche de Keynes, pensait qu'une tendance auto- nome à la thésaurisation avait provoqué la dépression et que les autorités monétaires devaient compenser cette tendance. A Chicago, la même con- clusion s'imposait à tous ceux qui pensaient que la Réserve Fédérale n'avait pas mené au départ une politique suffisamment active. A l'opposé, les penseurs de la London School of Economies supportaient une politi- que monétaire assez restrictive tout en recommandant de laisser la crise aller son train. Ce point de vue, fortement inspiré des idées de Hayek, prenait aussi appui (au niveau de la Réserve Fédérale) sur l'ancienne thèse du « Banking principle » pour laquelle le volume de crédit et par conséquent de monnaie ne fait que suivre le mouvement des affaires, ce qui autorise la passivité du système bancaire et de la Banque Centrale.

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La crise de 29 est de nouveau l'objet d'études et de discussion depuis que la situation économique des années soixante-dix a conduit à envi- sager une dépression comparable pour les économies occidentales. L'intervention de l'État et son ampleur sont redevenues des questions d'actualité, cinquante ans après les événements qui semblaient les avoir justifiés

Les relations keynésiennes de la Grande Crise présentent parfois quelques différences entre elles. Le scénario le plus courant met en scène les investissements dont la soudaine faiblesse peut être expliquée à la fois par un sur-investissement antérieur, le Krach boursier et la vague de pessi- misme qui l'a suivi. L'effet de multiplication amplifie alors les consé- quences de cette faiblesse sur la production et l'emploi. En même temps, le pessimisme et la chute de l'investissement provoquent une augmenta- tion de la demande de liquidités, qui force les banques à vendre leurs actifs (prêts et titres). Certaines d'entre elles et de nombreuses entreprises sont acculées à la faillite par une série de (quatre) paniques bancaires. Prenant parfois des distances vis-à-vis de ce scénario type, les relectures récentes de Temin ou Kindleberger insistent sur des causes jugées plus importan- tes : diminution inexpliquée de la consommation, crise de la construction, baisse des exportations liée à la crise agricole mondiale ou aux tarifs douaniers progressivement érigés par les États, etc.

Ces interprétations keynésiennes s'accordent pourtant toutes à con- sidérer les facteurs monétaires et la politique de la Réserve Fédérale comme peu importants.

Pour les auteurs monétaristes au contraire, la responsabilité sinon de la crise, du moins de sa gravité, incombe au mauvais comportement de la Réserve Fédérale. De 1929 à 1933 la Masse monétaire a diminué de 33 %. Haberler en conclut que l'incapacité de la Réserve Fédérale à main- tenir ou augmenter l'Offre de monnaie a transformé ce qui n'aurait été qu'une petite contraction en une véritable catastrophe. Il en veut pour preuve le fait que les pays qui ont su mener la politique monétaire adé- quate (comprenant notamment une dévaluation et une expansion de M) se sont sortis d'affaire un à deux ans avant les États-Unis.

A partir d'arguments historico-politiques développés dans l'ouvrage « la Liberté du Choix » paru très récemment, Milton et Rose Friedman aboutissent à des conclusions semblables.

Alan Meltzer éclaire ce débat de façon décisive en présentant la pro- position 12. des monétaristes :

« Une des contributions principales de la théorie économique récente à la politique économique a été de renouveler l'accent mis sur la distinction entre les grandeurs réelles et nominales. La Réserve Fédérale ignorait cette distinction dans les années trente. La politique était jugée aisée quand les taux d'intérêt nominaux à cour terme étaient plus bas que les moyennes passées ».

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Il ajoute :

« Dans les années soixante, la Réserve Fédérale a fait la même erreur. Quand les taux nominaux s'accroissent au delà de leurs anciens maxima, la Réserve Fédérale regarde la politique monétaire comme restriction. La conséquence de cette erreur a été l'inflation des années 60 et 70 »

Ainsi, selon Meltzer, les erreurs de la Réserve Fédérale tenaient à une méconnaissance des idées de Fisher et à une confiance excessive dans le mécanisme keynésien de l'effet liquidité. En 1970, Gibson montrera que les taux d'intérêts nominaux ont tendance à décroître immédiatement (effet de liquidité) mais à s'accroître ensuite en réponse à une accélération de la croissance de la masse monétaire. Comme par ailleurs, les monéta- ristes croient qu'il est plus difficile de mesurer le taux d'intérêt pertinent (qui n'est ni le taux nominal ni le taux réel mais le taux réel anticipé) à partir des taux divers existants en pratique, il n'est pas étonnant qu'ils préconisent une politique monétaire centrée sur le contrôle de l'offre de monnaie.

LE RETOUR DU MONÉTARISME

Si notre intérêt se porte principalement sur l'École de Chicago et Mil- ton Friedman, on ne saurait oublier que d'autres groupes d'économistes contemporains méritent l'appellation de monétaristes. Parmi les plus anciens on doit citer tout particulièrement J.G. Koopmans et M.W. Hol- trop, leaders de l'« École Hollandaise » et inspirateurs de l'action de la Banque Centrale de Hollande. Cela confirme s'il en était besoin combien le monétarisme était « dans l'air » vers la fin des années cinquante. Les raisons de ce retour en force des idées néoclassiques ont été analysées par Milton Friedman lui-même" :

• L'échec de la théorie keynésienne de la consommation et des thèses stagnationnistes qui prévoyaient le retour des crises de surproduction dans l'immédiat après guerre, crises qui ne se sont pas produites.

• L'apparition de poussées d'inflation dans tous les pays qui ont adopté une politique d'aisance monétaire telle que la recommande la théorie keynésienne ainsi que l'impuissance des gouvernements à juguler une telle inflation sans mener des politiques monétaires restrictives. Les théories du « Public Choice » mettent aussi en évidence le biais inflation- niste des thèses keynésiennes appliquées à la politique économique, mon- trant que l'intérêt des politiciens coïncide presque toujours avec l'application de déficits budgétaires lors des périodes de ralentissement économique mais que cet intérêt ne les conduit que rarement, de façon symétrique, à préconiser des excédents en situation de surchauffe ou d'inflation.

• L'inflation théorique constitue la mise en évidence de l'effet d'encaisses réelles.

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• La constitution progressive d'un ensemble d'expériences concrètes mettant en relief les relations entre les variations de la masse monétaire et les grandeurs économiques réelles. A cela, on peut ajouter le fait que certaines expériences de politique économique font apparaître, selon Friedman, la suprématie des actions monétaires lorsqu'elles prennent le contrepied des politiques budgétaires et fiscales.

S'ajoutent à ces raisons le fait que la théorie macroéconomique key- nésienne avait été bien explorée et poussee jusqu'à ses conclusions dans les domaines les plus divers et que les économistes se sentaient prêts à s'enflammer pour des idées plus nouvelles. Que celles-ci aient été « por- tées » dès le début par des penseurs et des polémistes de grand talent (Friedman bien sûr mais aussi Don Patinkin pour la théorie quantitative) n'a pas peu fait pour leur donner rapidement une très large audience.

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Patinkin (Don) : 10, 13 Paunio (A.) : 123 Peel (R.) : 7 Pesando (J.) : 123 Phelps (E.): 77, 81, 85, 109, 113, 120 Phillips (A.) : 86 Pigou (A.) : 54 Poncet (P.) : 75 Prano (A.) : 36

R

Radcliffe (Lord) : 8 Rapping (L.) : 80, 113 Reynolds (A.) : 151 Ricardo (D.) : 7, 41, 52, 146 Robertson (D.) : 8, 9, 10 Robinson (J.) : 67

S

Samuelson (P.) : 3 Sargent (T.): 113, 124, 127 Say (J.B.) : 147 Scadding (J.) : 22 Schwartz (A.) : 15, 17, 20, 23, 25, 26, 41, 45, 52 Sedillot (R.) : 65 Selden (R.) : 20 Shaw (E.) : 55 Sheppard (D.) : 58 Simon (W.) : 149 Simons (H.) : 9, 100 Smith (A.) : 41, 147 Solow (R.) : 86, 87, 95

Stein (J.) : 4 Suvanto (A.) : 123

T

Taylor (J.) : 120, 129 Temin (P.) : 11 Thornton (H.) : 53 Tobin (J.) : 3, 57, 86, 119 Tooke (T.) : 7 Ture (N.) : 146 Turnovsky (S.) : 123

V

Viner (J.) : 10

W

Wachter (M.): 91, 123 Wallace (N.) : 113 Wicksell (K.) : 8, 53 White (L.) : 140

Y

Yeager (L.) : 151

Z

Zagame (P.) : 58

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