aventure la mongolie la conquête de l’espace · il pratique le vtt de manière intensive et...

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Aventure La Mongolie La conquête de l’espace Il y a des coups de moto dont le souvenir s’évapore avec le temps. Et il y a ceux qui resteront à jamais gravés dans la mémoire. Notre balade en Mongolie s’inscrit sans l’ombre d’un doute dans cette deuxième catégorie. Peu accessible et donc totalement préservé, le grandiose pays des steppes sauvages et des prairies à perte de vue laisse le visiteur abasourdi par ses immensités. Attention : on ne sort pas indemne d’une telle aventure ! Texte et photos : Patrick Boisvert 80MAXIMOTO MAXIMOTO81

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AventureLa Mongolie La conquête

de l’espaceIl y a des coups de moto dont le souvenir s’évapore avec le temps. Et il y a ceux qui resteront à jamais gravés dans la mémoire. Notre balade en Mongolie s’inscrit sans l’ombre d’un doute dans cette deuxième catégorie. Peu accessible et donc totalement préservé, le grandiose pays des steppes sauvages et des prairies à perte de vue laisse le visiteur abasourdi par ses immensités. Attention : on ne sort pas indemne d’une telle aventure !Texte et photos : Patrick Boisvert

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aérogare 2 E. Je cherche du regard les inconnus avec qui je m’apprête à passer 10 jours. Un groupe attire mon attention mais vu que tout le monde est en costard, j’exclus très vite l’hypothèse, ça sent plutôt le séminaire Darty. Le troupeau en bermudas à fleurs agglutiné un peu plus loin, alors ? Trop de gros, ça le fait pas non plus… Et puis devant moi, juste là, une escouade met fin au suspense. Deux signes ne trompent pas : 1) tout le monde a le sourire aux lèvres ; 2) tout le monde a un casque à la main ! À vue de nez, la palette d’âge va de 25 ans à la cinquantaine bien conservée et, cerises sur le gâteau, il y a deux filles ! Rassuré, il est temps de rejoindre le groupe. Franck, le guide moto, est accompagné de sa moitié, Delphine ; Pascal voyage quant à lui avec son fils Julien et un ami de la famille, Loïc, les deux gamins du groupe. Et puis il y a Hélène. Ah, Hélène… pas banale comme femme. Cette jeune chef d’entreprise voyage seule et s’engage dans l’aventure alors qu’elle n’a jamais pratiqué le tout-terrain. Mieux, Hélène vient juste de reprendre la moto après 20 ans d’abstinence ! Respect.

Cool teamLes 9 heures de vol (plus 2 heures d’escale à Moscou) sont utilisées pour faire plus ample connaissance. Franck est infirmier dans la vraie vie et, par passion, guide moto pour l’agence Trail Rando. Il possède une grosse expérience des raids africains, moto et 4 x 4. Cet homme de terrain encadre pour la septième fois un groupe en Mongolie. Sa compagne Delphine est également infirmière, mais ne pratique pas la moto. Elle devra trouver refuge la plupart du temps dans un des 4 x 4 de l’assistance. Côté participants, Pascal est un dirigeant d’entreprise pour qui le sport fait office de soupape de sécurité. Il pratique le VTT de manière intensive et s’offre chaque année un grand raid dans une contrée exotique. La Mongolie, il y est d’ailleurs déjà venu en vélo, mais cette année, le trip, c’était de vivre l’aventure à moto et avec son fils ! Et comme Pascal ne fait jamais les choses à moitié, il s’est payé il y a quelques mois une Kawasaki KLX300R pour se faire un peu la main avant le grand saut dans l’inconnu. Le fiston Julien et le copain Loïc, tous deux jeunes permis, ont été conviés à ces séances d’entraînement… Et puis il y a Hélène, mais je vous en ai déjà parlé. Dans tous les cas, nous sommes en présence de non-spécialistes, et ce n’est pas un fait exceptionnel. « Les participants viennent de tous les horizons. Parfois, les sessions sont composées de néophytes comme aujourd’hui, parfois exclusivement d’enduristes confirmés. Mais c’est souvent avec ces derniers qu’on a le plus de pépins ! » me confie Franck, qui croise régulièrement des pseudo-champions du monde capables de se satelliser dès le premier jour !Nous touchons le sol mongol à Oulan-Bator, capitale du pays. Bruyante, poussiéreuse, dotée d’un réseau routier hors du temps et littéralement sclérosée par des encombrements monstrueux aux heures de pointe, cette grande ville conglomère un tiers de la population mongole. Oulan-Bator déborde de vie mais offre une entrée en matière diamétralement opposée à celle que notre imaginaire associe à la Mongolie ! C’est bien d’y passer une nuit, pour voir, puis de la quitter, vite. C’est ce que nous allons faire, non sans avoir pris possession de nos montures. Des Yamaha WR250R récentes et donc dans un état de santé satisfaisant. Confortable, fiable, robuste et peu gourmand, ce petit quatre-temps constitue l’outil idéal pour affronter les pistes mongoles. Sa légèreté et sa facilité de prise en main ont de quoi rassurer les débutants, sa partie-cycle sérieuse ne laisse pas sur leur faim ceux qui revendiquent un peu plus de métier. Pas d’angoisse non plus question assistance, Trail Rando a prévu large (voir encadré) avec deux 4 x 4 et pas moins de 5 personnes à notre service en plus de Franck !

Immersion dans le vertRapide contrôle de l’état des machines, montage des GPS et petit briefing sur quelques règles de sécurité de base : personne n’a envie de s’attarder sur les formalités, on est là pour voir du pays, du grand ! Mais pour l’heure,

Roissy,

il faut d’abord fuir Oulan-Bator et ses encombrements monstres. Ici, la loi du plus fort règne et c’est celui qui klaxonne qui passe. Les pièges sont partout : voitures folles, piétons pressés, bouches d’égout ouvertes, chaussée défoncée… Courage, fuyons !80 kilomètres de route poussiéreuse plus loin, la première pause est accueillie avec un certain soulagement. Elle permet de reprendre ses esprits après cette entrée en matière un peu flippante. Elle permet surtout de faire les dernières emplettes avant de quitter la « civilisation ». Car nous entrons maintenant dans le vif du sujet et les deux prochaines nuitées se feront en bivouac au milieu de rien. Mieux vaut donc prévoir quelques cartouches pour meubler nos soirées. Les jeunes se jettent sur les sucreries, les fumeurs sur les cigarettes. Pour ma part, ce sera un litre de vodka locale. De la Chinggis Gold, la meilleure selon Franck, qui a l’air d’en connaître un rayon sur le sujet…Direction plein ouest. Les kilomètres défilent à rythme prudent. Aux grandes pistes encombrées succèdent de petits sentiers zébrant la steppe qui s’étale devant nous à perte de vue. L’immersion dans le grand vert s’effectue par étapes. La circulation se raréfie d’abord, puis les pistes rétrécissent et bien vite l’horizon devient le seul repère visuel. Ça y est, on y est ! Quelques carcasses nettoyées par les charognards nous rappellent que le climat peut être dur dans le quartier. Cette province du Töv, située à l’ouest de la capitale, est celle qui enregistre les plus forts contrastes de température entre l’été chaud (court, l’été, de mi-juillet à mi-août) et l’hiver, où le mercure peut descendre jusqu’à –40° ! Nous sommes début juillet, à peu de chose près dans le créneau idéal donc, et la température ambiante se révèle effectivement très plaisante. En fait, c’est un peu comme chez nous en montagne : quand le soleil sort, il peut faire très chaud, mais si le ciel se charge de nuages, on supporte une petite laine.Le compteur journalier affiche 298 kilomètres, il est temps de se poser. Nous installons notre campement dans un lieu magique, sans aucune forme d’urbanisme à des kilomètres à la ronde, entouré de montagnes

Le prix de cette virée concoctée par Trail Rando est de 2 690 euros et comprend :• Transferts A/R aéroport/hôtel• Guide moto• Location moto• Carburant• Assistance 4 x 4• Hébergement (2 nuits en

bivouac, 2 nuits en hôtel, 4 nuits en yourte)

• Pension complète

Non compris :• Vols A/R (env. 1 200 €)• Les boissons alcoolisées• Le visa (env. 50 €)

Plus d’infos sur :www.trail-rando.com

Après l’effort, le réconfort. Une petite mousse, un bon ragoût, et zou, sous la tente !

Des yourtes et une vue à tomber sur les berges du fameux lac blanc : y a pire comme hébergement, non ?

Combien ça coûte ?

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et de quelques arbres dont les branchages alimenteront la flambée du soir. Pour la petite histoire, sachez que le feu est sacré dans la culture mongole. Il ne doit pas servir à brûler des objets impurs tels que les serviettes en papier, les mégots et autres déchets. La terre et l’eau bénéficient également du même statut et doivent être respectées. Il paraît qu’à l’époque de Gengis Khan, uriner dans un cours d’eau valait la peine de mort ! Rassurez-vous, les us et coutumes mongols se sont un peu modernisés avec le temps…C’est dans un silence d’une profondeur insondable et sous un ciel plus grand ici qu’ailleurs que prend fin cette première journée. Un petit verre de Chinggis Gold (ma foi pas mauvaise) et zou, au lit.

Steppe by steppe…Premier réveil, premières douleurs pour Loïc et Julien qui sont partis chacun à la faute la veille. Faut dire que les gamins ont vite trouvé leurs repères sur ces pistes faciles d’accès. Ils envoient même du gaz, les bougres ! Seulement voilà, le piège sur le très roulant, c’est le manque de concentration. Une pierre un peu planquée, un trou de marmotte plus gros que les autres ou une saignée vicieuse peuvent se payer cash ! Plus de peur que mal pour nos deux jeunes, mais à froid et après une nuit sur un matelas épais comme un sandwich SNCF, la mise en route semble un peu difficile ce matin. Mais il ne faut pas mollir car 240 km de pistes nous attendent aujourd’hui. Et dans ces paysages sans fin où on a parfois l’impression de rouler sans avancer, où la notion de temps devient abstraite, 240 km, c’est long.Le tapis vert qui défile sous nos roues est toujours aussi majestueux mais, au fil de la journée, ses plis deviennent de plus en plus prononcés. À l’attaque la région de l’Arkhangaï, on flirte régulièrement avec les 2 000 m d’altitude. Nous sommes ici dans le jardin de la Mongolie, oasis de verdure entre le désert de Gobi au sud et la taïga sibérienne au nord. Forêts paisibles et steppes vallonnées sculptent ce décor aux dimensions hors normes qui offre l’exceptionnel loisir de rouler au cap, à cinq de front,

séparés par plusieurs centaines de mètres. La sensation est unique, l’impression de liberté inconnue… Pour autant, ces immensités ne génèrent jamais la monotonie. D’abord parce que le paysage qui défile en Cinémascope est d’une beauté sauvage juste sidérante ; ensuite parce même au milieu de nulle part comme ici, il n’est pas rare de faire des rencontres. L’hospitalité du peuple mongol n’est d’ailleurs pas une légende. Arrêtez-vous devant une yourte pour – tenter de – demander votre chemin et on vous proposera aussitôt un vieux morceau de fromage sec, un verre de lait fermenté (les deux à éviter, poliment…) ou, pour les plus chanceux, une tasse de thé. Forcément, comme le dialogue n’est pas facile pour ne pas dire impossible, barrière de la langue oblige, vous risquez fort de ne pas récolter l’information souhaitée. Mais l’essentiel est ailleurs…Quelques ruisseaux traversés à gué – spécialité pour laquelle Pascal s’est découvert un certain talent au point de tous les franchir deux ou trois fois d’affilée – concluent ce deuxième jour. Le bivouac est mis sur pied avec l’efficacité d’un team du Dakar. Idem pour le repas, toujours excellent en dépit du peu de moyens mis à dispo de nos chefs. Là encore, le spot offre une vue à tomber mais ce soir, les mouches ont décidé de s’inviter par milliers à la fête. Aux grands maux les grands remèdes car, d’après nos chauffeurs mongols, il n’y a qu’une seule solution : faire brûler des crottes de yaks et se plonger dans la fumée dégagée par ce divin brasero. Je confirme, ça marche. Mais je me demande quand même si je ne préférais pas les mouches…

Yourte natureLa Mongolie est parfois qualifiée de pays au ciel bleu. Il paraît même qu’on enregistre ici une moyenne de 257 jours sans nuage par an ! Ouais, il paraît… Ce que je peux vous assurer, moi, c’est que cette nuit la pluie n’a pas cessé de tomber. Heureusement, au petit matin, les éléments se sont calmés et tout le monde a le sourire. Enfin presque, car quelques étourdis – au hasard : les jeunes – ont un peu un oublié de rentrer leurs affaires la veille. Ah, on ne dira jamais assez le bonheur que représente un départ dans la fraîcheur de la matinée avec, aux pieds, des bottes gorgées de flotte…Après une matinée littéralement illuminée par quelques kilomètres accomplis en compagnie de jeunes cavaliers s’entraînant pour le Naadam (la grande fête nationale), le ciel vire au noir. Puis décide fatalement de tout lâcher en début d’après-midi. Des trombes d’eau ininterrompues vont accompagner notre ascension dans les monts Khangaï. La visibilité est nulle et nous prive du spectacle offert par cette ligne de volcans

En Mongolie, mieux vaut aimer le lait de chèvre et la solitude. Sinon t’es mal !

Les moyens mis en place par l’organisation s’avèrent particulièrement réconfortants. Outre Franck, notre guide moto, deux véhicules 4 x 4 assurent le transport de nos bagages, de l’outillage, d’un peu de pièces de rechange et de quelques roues, du matériel nécessaire aux bivouacs (tentes, tables, chaises, réchauds…). L’équipe mongole est riche de 5 personnes dont une cuisinière, deux chauffeurs, un chef mécano et l’incontournable Ronda, interprète et femme-orchestre d’une efficacité redoutable.

Assistance VIP

Franck, à fond dans son job de guide, nous montre ce qu’il ne faut pas faire pour traverser un marécage…

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Certains chevauchent de vieilles et fumantes motos russes deux-temps, mais la plupart possèdent des 125 chinoises assez récentes. Des Shineray, Kenbo, Jialing et autres Dayun achetées environ 700 euros (on trouve grosso modo la même chose chez nous, mais pour trois fois plus cher !). Le Mongol utilise la moto comme moyen de locomotion au quotidien par presque tous les temps, une paire de bottes en cuir et une casaque constituant son unique mais efficace équipement. Avec nos accoutrements bariolés, pour le coup, c’est nous qui semblons déguisés !Les kilomètres défilent avec cette sensation toujours aussi étrange d’évoluer en terres vierges de toute empreinte humaine. La trace indiquée par nos GPS s’appuie sur les grandes pistes existantes, mais la plupart du temps nous roulons au cap, avec la montagne suivante comme objectif. Libre de mes mouvements, il m’arrive souvent de faire cavalier seul pendant de longs moments au lieu de suivre mes petits camarades. Les émotions n’en sont que plus fortes. Et il suffit de quelques minutes d’errance pour perdre tout contact visuel avec le reste de la troupe. Dans ce coin du monde où la densité d’habitants est une des plus faibles de la planète (0,3 Mongol au kilomètre carré !), mes nouveaux compagnons de route deviennent alors les marmottes – et leurs immenses terriers qui sont autant de pièges ! –, les écureuils, les troupeaux de yaks et de chèvres, les chevaux sauvages…La vie humaine, nous la retrouverons en traversant Tsetserleg, bourgade grouillante de 18 000 âmes nichée au creux des montagnes. Une cinquantaine de kilomètres nous séparent encore de notre point de chute, le camp de yourtes de Tsenkeriin, mais il nous faudra bien une heure et demie pour les effectuer. Car sur cette portion composée de pistes détrempées et ultra-glissantes, personne n’a été épargné : du

dont certains culminent à près de 3 000 mètres. Pas grave, d’autres récompenses nous attendent à la fin de cette étape, avec le retour du soleil et une descente sublime sur les berges du grand lac blanc, site incontournable du parc national de Khorgo-Terkhiin Tsagaan Nuur (un truc aussi difficile à prononcer qu’à écrire, c’est dire…). Ce final en beauté marque le retour vers le confort, sous la forme d’une douche chaude, de quelques bières fraîches, de prises électriques et d’un dîner dans un bâtiment « en dur ». C’est aussi et surtout notre première nuit en yourte. Simples tentes vues de l’extérieur, les yourtes sont bien plus sophistiquées qu’il n’y paraît avec leur armature en treillis et le mobilier qu’elles accueillent. Le tout est disposé autour d’un poêle central à bois qu’une jeune femme viendra allumer dès notre arrivée. Dans une heure, la température de ce petit nid douillet dépassera les 40 degrés !Rechargés à bloc et au sec (même un poil trop pour Franck dont les bottes ont littéralement fondu en stagnant un peu trop près du feu !), nous attaquons la seconde partie de ce voyage par une étape vertigineuse. Le grand bleu est au rendez-vous et le mercure entame une impressionnante progression. C’est bien simple, en une nuit, on est passé de l’hiver à l’été ! C’est une étape de montagne entrecoupée de nombreux passages de gués, dont certains relativement profonds. Du caviar pour Pascal, devenu spécialiste du franchissement, qui se porte systématiquement volontaire pour passer la moto d’Hélène… Au grand étonnement des Mongols que nous avons la chance de côtoyer assez régulièrement. Car même échoués en plein cœur d’un océan de prairies, nous faisons des rencontres. Des gardiens de troupeaux à cheval, parfois ; des familles entre deux villages au guidon de motos, souvent. Ces dernières ne résistent d’ailleurs pas à la curiosité de venir jeter un œil sur nos bien curieuses machines modernes.

débutant au plus expérimenté, tout le monde s’est mis au tas au moins une fois !Nous sommes à mi-parcours et une journée off est prévue le lendemain. Pour la révision des machines, mais aussi le repos des guerriers. Et comme Trail Rando sait bien faire les choses, le camp de Tsenkeriin, qui nous accueille pour les deux nuits à venir, propose quelques activités alléchantes. Il y a deux piscines alimentées par la source chaude qui passe à proximité. Comble du bonheur, ces dernières jouxtent un petit centre de massage ! Il y a également possibilité de faire une promenade à cheval ou de se rendre avec un des 4 x 4 d’assistance au marché de Tsetserleg… et ses boutiques improvisées dans des containers métalliques. Si vous souhaitez ramener quelques souvenirs authentiques et admirer un étal d’abats à l’air libre sur quelques dizaines de mètres, c’est the place to be…

Tout en un !Nous avons atteint le point le plus au sud de notre périple, la suite consiste en une douce remontée vers Oulan-Bator. La journée qui se profile est présentée comme celle offrant le plus de variété. Ce n’est pas de la publicité mensongère, car aux pistes dans les cailloux vont succéder de longues prairies multipliant les passages de gués et les forêts de mélèzes rappelant vaguement la Suisse… Nous laissons Karakorum, la capitale de la Mongolie quand Gengis Khan dominait le monde, pour mieux profiter de la pause déjeuner prévue dans la plus grande yourte du pays. Une pause salvatrice mais de courte durée car le programme est chargé aujourd’hui. Une soupe de nouilles au gras de mouton, une bière locale (de la Borgio) et c’est reparti, direction Erdene Zuu Khiid, premier monastère bouddhique de la Mongolie fondé en 1586 et cerné par 108 stûpas sacrés. À son apogée,

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Juste derrière ces montagnes et ces vertes prairies se trouve le petit Gobi, un erg de sable carrément surréaliste. C’est ça, la Mongolie !

jusqu’à mille moines vivaient entre ces murs aujourd’hui usés par le temps… et la purge communiste de 1937. Avec l’alcoolisme (véritable fléau en Mongolie), c’est l’un des grands « cadeaux » de la période russe.Le film à grand spectacle se poursuit sur fond de montagnes et se conclut dans une explosion de couleurs dignes d’un bouquet final de 14 Juillet. La lumière chaude du soir donne des airs artificiels à la végétation, aux massifs et aux multiples cours d’eau qui inondent désormais la toundra. Un marécage nous prend à froid mais le prix à payer est infime au regard de ce qui nous attend derrière : un sublime cordon de dunes s’étalant sur quelques petits hectares plantés là par je ne sais quel caprice de la nature. Cet erg surréaliste, appelé Petit Gobi (rien à voir avec le désert de Gobi, situé 1 000 km plus au sud !), est trop tentant pour ne pas goûter aux plaisirs du pilotage dans le sable. Non loin de là, quelques touristes passent nonchalamment à dos de chameau.C’est recouverts d’une croûte épaisse de boue, de sueur et de poussière que nous gagnons, fourbus mais aux anges, un camp protégé des éléments par le mont Ondor Shireet, avec yourtes 3 étoiles et douches très clean. Diantre, quelle journée !Ce soir-là, comme tous les autres d’ailleurs, nous nous repaîtrons d’un très bon repas. La cuisine mongole est simple et, à ce que j’en ai vu, toujours de qualité. Une petite remarque toutefois : nous sommes toujours restés dans le très basique – boulettes de mouton, légumes frais, soupes, nouilles maison… – mais en s’aventurant dans le plus typique, on trouve beaucoup

de plats à base d’abats bien moins ragoûtants. Et je ne vous parle pas du lait de jument fermenté, qui fait fureur ici (et dans votre estomac si vous tentez l’expérience !).

Le spleen du retourLes deux dernières journées n’ont rien à envier à celles que nous venons de vivre : la vallée de l’Orkhon avec ses failles vertigineuses, la traversée du parc national de Khustaïn (site de réhabilitation des chevaux de Przewalski), et bien sûr le retour de la steppe, infinie. Seulement voilà, ça sent le retour au bercail et forcément, ça ne fait plaisir à personne. Découpé en 8 étapes et totalisant près de 1 700 kilomètres, ce voyage hors normes fut une réussite totale. Quelques glissades sans gros bobos, des leviers tordus, des plastiques rayés et trois crevaisons (dont deux à mon actif !) furent les seuls incidents de parcours. Autant dire donc que tout a fonctionné comme sur des roulettes. Et c’est justement la raison pour laquelle, à l’aube de notre 9e et dernier jour de moto, personne n’avait vraiment envie de sortir du rêve. Monsieur et Madame Trail Rando, vous pourriez pas le faire un plus long, votre périple en Mongolie ? Allez, deux jours de mieux, histoire de rentabiliser encore un peu plus son investissement. Tenez, tant que vous y êtes, vous nous mettrez aussi une petite nuitée en bivouac de plus. Car voyez-vous, on a toutes les peines du monde à quitter ce pays. La Mongolie conserve une réputation de contrée inaccessible dont les secrets alimentent l’imagination. Mystérieux et à des années-lumière de nos propres repères, le pays fascine justement parce qu’on ne sait pas grand-chose de lui. Ce constat, je l’ai surtout fait à mon retour en France en remarquant que la simple évocation de cette contrée éveille la curiosité de tous, sans distinction d’âge. La Mongolie intrigue autant qu’elle fait rêver. J’ai été littéralement assailli de questions et il ne se passe pas une semaine sans qu’un ami, une connaissance m’invite aujourd’hui encore à lui faire découvrir un petit morceau de ma balade en terre inconnue. Cette histoire, mon histoire, je l’ai déjà racontée à vingt reprises. Je pouvais bien le faire une fois de plus… M

Les « païlotes » locaux se contentent de l’équipement minimum : des bottes de cavalier et un bon chapeau !

FLASHEZ, ET HOP, UNE VIDÉODE CETTE ÉPOPÉE !

On dirait pas, mais l’intérieur d’une yourte est spacieux. Et limite cosy…

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Mongolie pratique

Grand comme la moitié de l’Europe, ce pays ne compte que 3 millions d’habitants.

• Superficie : 1,5 million de km2

• Population : 3 millions d’habitants• Capitale : Oulan-Bator• Monnaie : tugrik (1 € = 1 700 t)•  Temps de vol : environ 9 heures  

(avec escale à Moscou)•  Décalage horaire : + 6 heures en été, 

+ 7 heures en hiver•  Climat : continental sec avec des contrastes saisissants en fonction des 

régions. L’été est très court (mi-juillet, mi-août)•  Formalités : aucun vaccin n’est exigé ; passeport en cours de validité et visa

En Mongolie aussi, on aime le tuning !

Instant magique : nous avons suivi pendant quelques instants un groupe de jeunes cavaliers s’entraînant pour le Naadam.